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vendredi, 03 octobre 2025

La Dictature de la Société Ouverte - De la démocratie suspendue à la guerre culturelle

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La Dictature de la Société Ouverte

De la démocratie suspendue à la guerre culturelle

Alexander Douguine

Alexander Douguine déclare que les élections en Moldavie dévoilent la main de fer de la dictature libérale-globaliste, un régime qui intensifie la répression alors que la Russie fait face à une épreuve décisive de volonté.

Animateur : Aujourd’hui, nous allons évidemment commencer par les élections en Moldavie: comment elles se sont déroulées, ce qu’elles ont produit, quels sont les résultats et ce que cela signifie pour la Moldavie elle-même et, naturellement, pour la Russie. Selon la CEC du pays, après le dépouillement de 99% des bulletins, le parti « Action et Solidarité » a perdu 10 sièges au parlement. Les résultats préliminaires montrent la répartition suivante des forces: le PAS a reçu 49% des voix, ce qui lui a donné 53 mandats ; le Bloc Patriotique — 24%, soit 27 mandats ; le Bloc Alternatif — 8%, soit 9 sièges ; « Notre Parti » — 6% et 6 sièges ; le parti « Démocratie à la Maison » — 5% et également 6 sièges. Quel tableau se dessine ? Les partis d’opposition ont néanmoins réussi à surpasser le parti au pouvoir, lui refusant une majorité absolue. Cependant, le PAS a conservé un soutien important, obtenant un nombre impressionnant de voix. Pouvez-vous nous dire ce que signifient ces résultats pour la Moldavie et pour la Russie, surtout compte tenu du fait que la rhétorique à notre égard pourrait changer?

Alexander Douguine : Nous assistons à la façon dont le globalisme libéral, vaincu dans la plupart des pays du monde — y compris les États-Unis — tente désespérément de s’accrocher à l’Europe. Là où les régimes libéraux et globalistes subsistent — comme ceux qui prédominaient en Amérique avant Trump — ils ont choisi une nouvelle voie: la dictature libérale directe.

Les procédures démocratiques sont suspendues ou complètement abolies, du moins temporairement. C’est la fameuse « démocratie suspendue » — une suspension partielle et sectorielle qui crée des conditions exceptionnelles pour l’ascension de dirigeants et de partis servant la stratégie globaliste. À cette fin, ils commettent des violations : ils emprisonnent des candidats gênants, comme Evghenia Guțul (photo, ci-dessous), chef de l’autonomie gagaouze, qui est en détention ; ils interdisent des partis, comme « Grande Moldavie ». Les procédures de vote portent atteinte aux droits: sur une diaspora moldave forte de 400.000 personnes en Russie, seules 10.000 ont été autorisées à voter. Il s’agit d’une suppression délibérée visant à préserver l’apparence d’élections tout en garantissant le pouvoir total aux libéraux.

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Nous avons vu cela en Roumanie, où un candidat populiste a remporté le premier tour mais a été écarté et les résultats annulés. Une tactique similaire a été utilisée en France contre Marine Le Pen, qui est poursuivie sur des prétextes fabriqués et privée du droit de se présenter. Qu’est-ce que cela signifie? Là où les libéraux conservent le pouvoir, comme en Moldavie, ils ne l’abandonneront pas même si leur mandat prend fin. Maia Sandu fait partie du système Soros. Soros s’oppose aux États-Unis; Trump s’oppose à Soros; mais en Europe, Soros contrôle de nombreux actifs politiques et géopolitiques. À l’exception de la Slovaquie et de la Hongrie, l’Europe est sous son influence. Aux États-Unis, des poursuites pénales en vertu de la loi RICO ont commencé contre lui, mais son empire globaliste continue de dominer.

En Moldavie, en Roumanie, en Allemagne, en France — partout où ils peuvent agir — ils avancent vers une dictature libérale explicite. Nous l’avons compris trop tard. Maintenant, il y a un réel risque de guerre civile généralisée. Donald Trump, ayant compris à quoi il était confronté, a radicalement changé les règles de vote en Amérique: désormais, on ne peut voter qu’en personne, avec une pièce d’identité, pas par courrier et pas tout le monde, y compris les migrants illégaux, comme le voulaient les démocrates. Les républicains, ayant pris le pouvoir, le conserveront à tout prix ou ils seront finis — il n’y aura pas de prochaine élection. C’est une confrontation entre deux forces: les élites globalistes de Soros et les mouvements populaires disparates. Les mouvements populaires n’ont pas de plateforme ni d’idéologie unifiée.

En Moldavie, les gens votent contre l’usurpation du pouvoir, guidés par le bon sens, mais ils ne sont pas unis. Il y a de nombreux partis dont les dirigeants ne trouvent pas de dénominateur commun. Les régimes de Voronine et Dodon ont laissé passer leur chance, n’ayant pas reconnu la menace des structures de Soros, fondamentalement totalitaires, extrémistes et, dans la pratique, terroristes.

Animateur : Dites-vous que le pouvoir en Moldavie est déjà perdu pour l’opposition?

Alexandre Douguine : Oui, je pense qu’il est perdu, car il ne s’agit plus de démocratie. Celui qui détient le pouvoir décide de ce qui se passera ensuite. Si le pouvoir n’est pas pris et établi comme force dominante, comme les populistes européens veulent le faire — ce qui n’est pas acquis, cela peut mener à la guerre civile — rien ne changera. Les populistes américains, malgré leurs hésitations, ont gagné avec Trump. Celui qui prendra le pouvoir — élites globalistes ou forces populaires disparates — ne devra pas le rendre. Dans notre situation — jamais. Il existe de nombreuses façons de réprimer une opposition fragmentée. Le PAS a perdu 10% [note: plus haut il est dit « 10 sièges » ; ici Douguine semble parler de pourcentage ou de sièges — je reste fidèle au texte qui m'a été soumis pour traduction], mais ils ont le président et la majorité. Ils imposeront leur programme: ils entraîneront la Moldavie dans une guerre contre nous, l’annexeront à la Roumanie ou lanceront une opération en Transnistrie.

Animateur : Et concernant la persécution de l’opposition en cas d’une telle victoire — sera-ce possible?

Alexandre Douguine : Absolument. Ils ne libéreront pas Evghenia Guțul. Il s’agit d’un système totalitaire pour lequel il n’existe pas de lois. Ils savent parfaitement que deux forces opposées existent, et l’antagonisme entre elles grandit chaque jour. Celui qui détient le pouvoir devra s’y accrocher à tout prix. Nous avons sous-estimé l’ampleur de la menace.

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Lorsque la Moldavie avait un président amical et rationnel, Igor Dodon (photo), que je connais personnellement, nous avions l’opportunité de changer la situation. Mais nos illusions sur la démocratie occidentale se sont avérées plus fortes que celles de ses propres adeptes. Aujourd’hui, les derniers à croire encore à la démocratie occidentale, c’est nous, ici à Moscou. En Occident, plus personne n'y croit depuis longtemps. Seules subsistent les forces de la tradition — conservateurs, populistes. Nous sommes fragmentés, sans idéologie unifiée, mais il y a en nous une force, celle du peuple qui s’oppose aux élites.

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Souvenez-vous du parti de Huey Long (photo, ci-dessus), en Amérique au 19ème siècle, qui a essayé de donner une forme politique aux idées du peuple contre les élites. L’actuelle vague de populisme pourrait se cristalliser en une vision du monde conservatrice et multipolaire. Nous y travaillons, mais nous avons un retard catastrophique. Nous faisons face à des régimes libéraux-nazis qu’il faut renverser et déclarer illégaux. Nous avons réussi à le faire en Russie, grâce à Vladimir Poutine — ils ont été déclarés illégaux. Mais les réseaux d’influence subsistent, surtout dans l’éducation.

Partout, je rencontre le réseau ramifié des structures Soros qui imprègnent notre enseignement supérieur: bourses, critères de scientificité — tout suit leurs modèles. Nous essayons de créer une liste blanche de revues académiques exemptes d’influence globaliste, mais les structures toxiques sont partout.

En Moldavie, ils sont impuissants face à eux. Là-bas, le peuple est admirable: culture orthodoxe, gens sensés, mais ils sont divisés. Le parti Shor, le parti de Dodon, les communistes — ils sont tous différents, sans plateforme commune. Le bon sens est là, mais il est insuffisant dans la lutte contre l’idéologie de l'ennemi. Obsédés par le mythe de la démocratie libérale, nous avons raté le moment où nos forces étaient au pouvoir en Moldavie — elles n'étaient pas pro-russes, mais pro-moldaves, non sorosisées, elles étaient souverainistes. Voronine en était. Si nous avions gardé nos positions alors, en comprenant que le prochain gouvernement serait antidémocratique, truqué, avec une persécution totalitaire de la dissidence, il fallait agir de manière décisive, exclure du pouvoir les forces toxiques et extrémistes. Sinon, la guerre civile ou non-civile nous attend. Si, comme en Ukraine, ils prennent le contrôle de toute la société, cela deviendra une guerre contre le pôle qui incarne l’alternative au libéralisme.

Animateur : Vous avez dit « si ». Réussiront-ils ?

Alexandre Douguine : Ils ont déjà réussi. La Moldavie est sous leur contrôle. L’opposition existe, mais elle sera réprimée, achetée, détruite ou emprisonnée sous n’importe quel prétexte. Ils possèdent la Moldavie, et leurs actions futures, hélas, ne dépendent pas de nous. Nous avons perdu toute possibilité de contre-action, pour l'essentiel. L’espace post-soviétique nous échappe, sous nos yeux. Je ne sais pas qui en est responsable — tout cela demeure opaque ici, à Moscou.

Le président agit de manière irréprochable, mais ceux chargés de l’espace post-soviétique ont échoué. Ce n’est pas seulement mon avis. Je ne connais pas leurs noms, je n’ai pas enquêté, et il ne serait pas approprié de les nommer. Mais toute l’arc du monde post-soviétique s’est effondré. Dès qu'une fenêtre d’opportunité s’ouvre — nous la manquons. Des forces souveraines, et non globalistes, arrivent au pouvoir — nous les soutenons, certes, mais très faiblement. Quand l’Occident les harcèle, nous n’apportons pas d’aide dans les moments décisifs. Pas à pas, nous ne comprenons pas la gravité de ce qui se passe. Dans l’espace post-soviétique — en Moldavie, en Ukraine, en Biélorussie — la polarisation règne. Les globalistes soutiennent leurs gens, leur donnant carte blanche pour commettre de la violence, des agressions, pour promouvoir des idéologies nationalistes et néonazies. Ils interdisent ces idéologies chez eux, mais ici, le long de cette ceinture territoriale ex-soviétique, ils les cultivent, leur apportant un soutien politique, médiatique, militaire et économique, les utilisant pour rompre nos liens à des fins subversives.

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La Moldavie risque de devenir un nouveau front de guerre. Tout a changé de niveau. Il y a trente ans, nous avons laissé partir l’Ukraine — c’était un crime. Nous ne la récupérerons pas sans guerre, même pour un statut de neutralité. Il en va de même pour tous les pays de l’espace post-soviétique. Si nous n’avons pas assuré le contrôle de leur neutralité, ils deviennent un nouveau front de guerre. Nous savons que les Ukrainiens, de connivence avec Maia Sandu (photo, ci-dessus), prévoient une intervention militaire en Transnistrie pour couper cette enclave prorusse, la priver de tout rôle stratégique et préserver Odessa pour notre offensive du Sud. Du point de vue de la guerre, ils agissent rationnellement — ils prennent ce qu’ils peuvent. Ils font la guerre contre nous, installent des régimes dictatoriaux, falsifient les élections, piétinent les procédures démocratiques. Et nous, nous clamons que cela est antidémocratique, nous envoyons des notes à l’ONU, aux tribunaux des droits de l’homme. Cela ne sert à rien. Quel était l’intérêt de dire qu’Hitler violait les droits de l’homme? Cela lui était égal. Il était assez fort pour imposer sa politique en Allemagne et dans l’Europe occupée. Il en est de même avec le libéralisme.

Les libéraux ont pris le pouvoir dans l'Occident collectif. Avant Trump, ils contrôlaient totalement l’Amérique. Mais il y a eu une percée des forces populistes — sous les balles, comme pour Charlie Kirk, sous les tentatives d’assassinat comme contre Trump. C’est une guerre entre deux blocs: les élites libérales de Soros et leurs agents, y compris ceux qui agissent en Russie. Chez nous, ils ont été écartés de la politique — grâce à Vladimir Poutine — mais dans les domaines de la culture, de l’éducation, de la société civile, ils sont bien enracinés. Ce n’est que maintenant que la libération commence.

Je les rencontre partout — non seulement achetés par Soros, mais idéologiquement transformés en porteurs de la vision du monde libérale-globaliste, profondément enrôlés. Des peuples entiers, comme l’Ukraine sous un régime nazi, leur sont soumis. Une partie des Moldaves vote pour Sandu — oui, les élections sont truquées, les conditions inégales, mais il y a des gens qui votent quand même. Ils ont capturé une partie de notre peuple frère, orthodoxe et admirable, pénétrant les consciences, manipulant les âmes. C’est une véritable zombification, une propagande du globalisme et du libéralisme. Notre riposte, elle, n'est que sporadique.

Les Moldaves votent pour les partis d’opposition, veulent la paix, l’équilibre avec l’Europe et la Russie, rejettent l’usurpation, les gay prides, la perte de souveraineté. Mais ils sont impuissants tant qu’ils ne s’unissent pas. Il faut une idéologie, une politique décisive et proactive dans l’espace post-soviétique. La prochaine étape, c’est la guerre. Vous ne voulez pas de guerre? — alors il faut des transformations politiques radicales en Moldavie, en Arménie, en Azerbaïdjan, au Kazakhstan. Sinon, la guerre est inévitable — sous une autre forme.

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Animateur : Donc il y a encore des options en Moldavie ? Ou bien ne nous reste-t-il qu’à regarder et attendre que la Moldavie devienne l’Ukraine d’aujourd’hui ?

Alexandre Douguine : Si nous ne voulons pas la guerre ou une participation active à la vie politique de l’espace post-soviétique, nous n’avons pas le choix — d’autres prendront les décisions. Si Soros décide que la guerre est nécessaire, ils la déclencheront. Nous pouvons nous y opposer, mais ils provoqueront le conflit. Si nous n’intervenons pas de façon décisive dans les processus politiques de ces pays, ils le feront pour nous, supprimant les dirigeants souverainistes, en les tuant, en les emprisonnant, en les expulsant et en leur retirant leurs droits — cela se produit partout dans l’espace post-soviétique.

Soit nous nous engageons activement dans la politique de ces pays pour éviter la guerre, soit nous laissons tout à leur discrétion — alors il faudra se battre, et se battre jusqu’à la victoire, en s’emparant de territoires. Nous sommes dans une situation difficile, comme endormis, plongés dans les douleurs fantômes d’un monde qui n’existe plus.

Maia Sandu incarne un régime dictatorial totalitaire. Elle impose ses candidats tout en se cachant derrière l’image d’une petite demoiselle innocente. Soros dispose d’une nouvelle génération — les générations Erasmus, des figures stéréotypées, identiques, sans volonté, qui paraissent impuissantes et superficielles. Mais ce ne sont pas eux qui gouvernent; c’est un système dur de contrôle global, terroriste et radical-libéral qui règne.

Animateur : Il y a des informations complémentaires à vos propos : Moscou affirme que des centaines de milliers de Moldaves ont été privés de la possibilité de voter sur le territoire de la Russie, comme l’a déclaré Peskov au sujet des élections parlementaires dans la république.

Nous avons pour l’instant couvert la question moldave. Je propose de discuter des événements aux États-Unis. J’aimerais entendre vos commentaires sur les déclarations de Donald Trump et la situation qui s’est produite là-bas. Que s’est-il exactement passé ? Je vais le raconter à nos auditeurs. Dimanche dernier, dans l’Église de Jésus-Christ des Saints des Derniers Jours au Michigan, pendant l’office, une fusillade a eu lieu. Un homme de 40 ans, armé, a ouvert le feu sur les fidèles puis a mis le feu à l’église. Plus tard, l’assaillant a été neutralisé et l’incendie maîtrisé. Initialement, un mort et neuf blessés avaient été signalés, mais par la suite, on a appris qu’il y avait quatre victimes. Donald Trump a commenté cette tragédie en déclarant : « Cette épidémie de violence dans notre pays doit cesser immédiatement. » Il a écrit cela dimanche sur le réseau social Truth Social. Et voici ce qui m’intéresse: comment Donald Trump compte-t-il lutter contre cette épidémie de violence ?

Alexandre Douguine : Lorsque nous avons discuté de la Moldavie et de l’espace post-soviétique dans la première partie de l’émission, nous avons en réalité touché à la question essentielle. Le monde dans lequel nous vivons est un monde où la violence devient la force déterminante. Si vous ne l’exercez pas contre vos adversaires, eux l’exerceront contre vous. On aimerait trouver un moyen d’éviter ce dilemme, mais c’est impossible.

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Les principes libéraux, exposés dans la « Bible des libéraux » — La Société ouverte et ses ennemis de Karl Popper —, précisent clairement: il existe des ennemis de la société ouverte à gauche et à droite — des conservateurs à droite, des socialistes et des communistes à gauche. Pour que la société ouverte survive, elle doit frapper la première contre ces ennemis. Que signifie « frapper » ? Détruire, supprimer, neutraliser, décapiter, réprimer, appliquer la violence. Les libéraux considèrent cette violence comme nécessaire afin que les ennemis de la société ouverte ne frappent pas les premiers. Point. Nos aspirations bien intentionnées au dialogue, à la négociation, à la persuasion n’ont pas leur place dans ce modèle. Si nous n’attaquons pas, ils frapperont les premiers et nous détruiront pour construire leur "société".

La Russie est devenue un obstacle à leur État global et à leurs plans libéraux, alors ils ont provoqué cette guerre. Nous pouvons crier paix, amitié, démocratie et négociations jusqu’à l’épuisement — la guerre est inévitable. C’est la loi d’aujourd’hui. Cela s’applique aussi à nous. Si nous ne faisons pas preuve de fermeté, si nous n’utilisons pas la violence contre les partisans de la société ouverte, eux — théoriquement, pratiquement, infrastructurellement, idéologiquement — sont prêts à nous frapper. La question est de savoir qui détient le pouvoir d’exercer cette violence.

Je parle de la violence au sens large — pas seulement des meurtres, mais aussi des restrictions. Comment restreindre les terroristes? Comment restreindre les agents étrangers? C’est la pression de l’État. Celui qui est au pouvoir peut prendre l’initiative. Il se passe la même chose en Amérique.

L’arrivée au pouvoir de MAGA et de Trump est une révolution conservatrice affirmant des principes diamétralement opposés à ceux de Soros et de sa "société ouverte". La société ouverte prône la multiplicité des genres, l’importation de migrants illégaux, la dilution de l’identité nationale, la répression des religions traditionnelles, surtout le christianisme, et la négation du patriotisme de la majorité américaine qui a créé l’État, au profit des récits libéraux. Avant Trump, sous Obama et Biden, des forces étaient au pouvoir qui détruisaient l’identité américaine, promouvaient la multiplicité des genres, détruisaient tout. Les chrétiens — évangéliques, mormons, catholiques — sont devenus des cibles de violence et de persécution.

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Charlie Kirk, membre actif du mouvement MAGA et chrétien, a récemment été tué pour sa foi, son conservatisme et son attachement aux valeurs traditionnelles — à leurs yeux, il était un ennemi de la société ouverte.

Pour revenir à Popper: les libéraux disent — tuez l’ennemi de la société ouverte avant qu’il ne vous tue. Ils qualifient tout le monde de fasciste, de communiste, d'agent de Poutine, de nouveau raciste — n’importe quelle étiquette. C’est ainsi qu’ils procèdent. L’assassinat de Charlie Kirk a consolidé les forces populistes MAGA, mais en face il a aussi consolidé les libéraux. Leur réaction a été monstrueuse: ils ont jubilé. C’est comme les Ukrainiens qui célèbrent tout attentat contre le pont de Crimée ou leurs succès terroristes. Une personne innocente est tuée — et toute l’Ukraine exulte. Telle est leur essence. Ils ont le pouvoir, les médias, l’influence sur l’éducation. En Amérique, les blogueurs libéraux n’ont pas pu cacher leur joie: ils ont poussé des cris, ri, sauté, crié « Hourra ! Hourra ! » — un chrétien a été tué. Une telle attitude, présente dans une partie significative de la société américaine, est une incitation au terrorisme. Toutes les cibles deviennent des ennemis de la société ouverte, y compris les chrétiens.

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Animateur : Dois-je comprendre que, pour les démocrates, l’assassinat de Charlie Kirk est devenu la manifestation d’utiliser potentiellement la violence?

Alexandre Douguine : Exactement. Ils ont compris que c’est tout à fait possible, désormais, de faire usage de la violence. La presse démocrate, en particulier Jimmy Kimmel (photo), le célèbre animateur télé, l’a ouvertement soutenu. Trump a renvoyé Kimmel, mais il a été immédiatement réintégré sur ABC — et tout continue. Donc, de fait, c’est possible. Donc — il faut détruire l’ennemi. Trump fait un geste habile: réalisant que le pays s’enfonce dans une spirale de violences croissantes, il rétablit les cliniques psychiatriques. Les démocrates les avaient fermées, déclarant que les troubles mentaux étaient un choix libre, juste une « différence ». Du point de vue des principes DEI — diversité, équité, inclusion — les malades mentaux étaient assimilés aux bien-portants, et les institutions psychiatriques supprimées. Imaginez des millions de malades mentaux errant aux États-Unis? Ils ne sont pas enregistrés, on leur vend des armes, on leur donne des calmants et des drogues qui circulent presque sans contrôle. Les démocrates pratiquent des expériences monstrueuses sur les enfants, leur permettant de changer de sexe ou d'espèce dès le plus jeune âge: un enfant dit « je suis un chat » — et, poussé par des parents démocrates détraqués, on lui coud une queue, sans aucun contrôle médical.

Je suppose que Trump prend une mesure stratégique, en restaurant les cliniques psychiatriques pour assainir une société qui, sous les démocrates, a perdu la notion de normalité. C’est pour cela qu’ils tuent les chrétiens, les conservateurs, en criant « frappez le fasciste ! », ils attaquent quiconque ose ne serait-ce que critiquer modérément l’ordre existant. C’est une guerre civile psychiatrique, où des libéraux et démocrates devenus fous, élevés à la cancel culture, à la persécution et à la diabolisation des adversaires, agissent avec une extrême imprudence.

Des données récemment publiées montrent que 73% des sénateurs et représentants démocrates considèrent Trump comme un fasciste. S’il est fasciste, il est illégitime. Leur culture dit: tout fasciste, réel ou imaginaire, doit être détruit, ses partisans détruits à leur tour, les chrétiens détruits, les ennemis de la société ouverte détruits. Après 2020, dans les États contrôlés par les démocrates, il arrivait que des partisans républicains soient refusés à l’embarquement dans les avions.

Dans une telle réalité — avec les cliniques psychiatriques supprimées, l’accès libre aux armes, une campagne de haine contre des « fascistes » qui n’ont rien à voir avec le fascisme — on vous traitera de fasciste, pour un oui ou un non. Vous dites : « Je ne suis pas fasciste », mais leur logique est: vous êtes un crypto-fasciste et pouvez, en cette qualité, être tué. C’est ainsi qu’ils agissent, en qualifiant tous les ennemis de la société ouverte de fascistes. Les Ukrainiens, qui sont ouvertement nazis, font le sale boulot pour eux, tuant des Russes, et sont dès lors épargnés de l’étiquette de nazisme — ce sont des « enfants ». Leurs opposants, non liés au nazisme, sont déclarés fascistes — sur Wikipédia, ce qui ne peut pas être corrigé.

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Même Elon Musk a constaté que les mensonges, les calomnies et les insultes contre les adversaires idéologiques pullulent sur Wikipédia. Il a proposé des sommes énormes pour la renommer « crappypedia », car tout y est faux, mais les gens y croient. Essayez de la corriger — des censeurs libéraux remplacent l’information neutre par l’inverse si cela jette une ombre sur leur idéologie ou réhabilite des ennemis de la société ouverte. C’est cela, la dictature.

Comment arrêter cette violence? Trump a menacé d’engager une contre-violence dès le premier jour, mais il ne l'a pas lancée. Prenez James Comey, ancien directeur du FBI, qui a été convoqué sous mandat d’arrêt, mais qui peut, en utilisant la loi, ne pas se présenter pendant neuf jours — et il ne se présente pas, puis devient introuvable. Les partisans de MAGA disent: «Trump, tu as le pouvoir plein et entier». Aux États-Unis, le pouvoir présidentiel est légalement immense, malgré certaines limites. Il existe des moyens d’exercer ce pouvoir, d’arracher les racines du réseau libéral terroriste. Emprisonner George Soros, son fils Alexander Soros, qui a amené Maia Sandu au pouvoir — avec la secte anti-moldave, fondamentalement totalitaire, en Moldavie — le mettre en prison, et les résultats seraient différents. Mais Trump hésite. C’est une force puissante, et il comprend qu’il ne pourra peut-être pas y faire face. L’escalade de la violence aux États-Unis, qui augmente chaque jour, pourrait pousser les autorités à agir de façon décisive.

Nous, dans notre foi sacrée en la démocratie, nous nous trompons profondément. C’est le témoignage de notre naïveté, l’illusion que nous vivons dans un monde soviétique bienveillant où tout se décide par des accords et des procédures. Cela nous rend vulnérables, nous transforme en victimes. Ils nous tuent puis nous accusent de notre propre disparition, disant que nous l’avons mérité, et — la roue tourne.

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Trump sous-estime probablement la menace de la démocratie libérale. En Amérique, tout le monde croit à la démocratie, mais elle a cessé de fonctionner depuis longtemps. L’État profond, les élites libérales, en ont usurpé les instruments, les ont accaparés et ont privé le peuple de la capacité de s’en servir. C’est là la dictature idéologique des libéraux. Soit on applique des mesures sévères comme Trump le menace avec la loi RICO contre Soros. RICO est une loi contre la corruption profonde, introduite il y a des décennies, qui permet des mesures extraordinaires: arrestations, perquisitions, interrogatoires sans formalités, car la mafia et le racket avaient tellement pénétré le système que les méthodes ordinaires ne fonctionnaient plus. Trump menace d’utiliser RICO contre Soros et les globalistes, mais pour l’instant il ne fait que brandir le poing. Les documents, j’imagine, sont déjà en train de disparaître. Ils les changent d’endroit, effacent les données des ordinateurs, des disques, des téléphones — ils ne sont pas stupides.

La révolution conservatrice de MAGA est la seule façon de sauver l’Amérique de la guerre civile. La victoire de Trump n’est pas garantie. S’il perd, la violence s’intensifiera et le pays sera déchiré — non pas en deux Amériques, mais en dix ou vingt, comme pendant la guerre de Sécession. Les États-Unis cesseront d’exister. Si Trump gagne, il devra agir avec dureté, sans compromis, en tant que chef de la droite. Dans cette nouvelle guerre civile, la question sera de savoir si Trump et MAGA peuvent rassembler la majorité, ou si la minorité libérale, s’appuyant sur la terreur, pourra écraser la majorité conservatrice.

Nous assistons à une guerre civile mondiale. En Moldavie, l’illusion de la démocratie est utilisée pour détruire la démocratie. Nous devons comprendre que l’ordre mondial s’effondre et que la violence devient la norme, comme au 20ème siècle. Soit vous détruisez l’ennemi, soit il vous détruit. Tous les moyens sont bons. Les libéraux — au nom de la société ouverte — sont prêts à tuer, emprisonner, réprimer et détruire leurs adversaires. Ce n’est pas une métaphore, mais la réalité.

Animateur : Alexandre Guelievitch, merci pour vos réponses détaillées.

Alexandre Douguine : Merci à vous, meilleurs voeux de prospérité.

Conflit et transformation systémique avec risques de guerre mondiale

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Conflit et transformation systémique avec risques de guerre mondiale

Wellington Calasans

Source: https://jornalpurosangue.net/2025/09/24/conflito-e-transf...

Des analystes indépendants avertissent que le monde s’achemine vers une période d’instabilité sans précédent, stimulée par la fragmentation de l’ordre unipolaire et l’émergence d’une compétition stratégique multipolaire.

Le Rapport sur les Risques Globaux 2025 souligne que les conflits armés, les guerres commerciales et la polarisation technologique constituent les principaux risques à court et moyen terme, avec le Moyen-Orient comme épicentre de tensions potentiellement explosives.

Des régions comme le Moyen-Orient et l’Afrique du Nord affichent le plus faible indice de paix mondiale depuis 16 ans, abritant quatre des dix pays les plus conflictuels du monde.

Cette réalité exige non seulement de se livrer à une analyse précise, mais aussi de lancer une alerte urgente: la transition vers un monde multipolaire, sans mécanismes efficaces de gestion des crises, peut déboucher sur une guerre mondiale aux proportions catastrophiques.

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- La Restructuration du Système Financier Mondial: une Chaîne d’Acier pour le Nouvel Ordre

La dédollarisation n’est plus une théorie: c’est une stratégie concrète, portée par des partenariats stratégiques qui menacent l’hégémonie du dollar.

– Yuan adossé à l’or et le Petroyuan:

L’Arabie Saoudite et la Chine progressent dans la création d’un système où le pétrole est négocié en yuans, convertis directement en or physique à la Bourse Internationale de l’Or de Shanghai (SGEI), avec la confirmation que la SGEI établira un coffre-fort en territoire saoudien.

En 2023, le commerce bilatéral entre les deux pays a atteint 87 milliards de dollars, renforçant la viabilité du yuan comme monnaie de règlement énergétique. De plus, un accord de swap de devises de 7 milliards de dollars entre la Chine et l’Arabie Saoudite signale l’accélération de la dédollarisation.

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– Infrastructure financière alternative:

Les BRICS développent un système de règlement transfrontalier appelé “BRICS Clear”, conçu pour fonctionner sans le dollar, consolidant une architecture financière parallèle. À ce jour, la Nouvelle Banque de Développement des BRICS a déjà approuvé plus de 32,8 milliards de dollars de financement pour des projets dans les pays membres, créant ainsi un réseau financier autonome.

– Accumulation mondiale d’or:

Les banques centrales ont acheté 1037 tonnes d’or en 2023, un record historique, portant les réserves mondiales à 36.700 tonnes en fin d’année. Cette ruée vers l’or n’est pas qu’une diversification: c’est un signe clair de la perte de confiance dans la stabilité du dollar et la gouvernance financière occidentale.

- Géopolitique et réalignements stratégiques: le fil qui lie l’économie à la guerre

Les changements financiers sont indissociables des alliances militaires et énergétiques qui redéfinissent les cartes du pouvoir.

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– Le partenariat sino-russe - l’énergie comme arme stratégique:

Le gazoduc Power of Siberia 2 n’est pas qu’un projet énergétique: c’est un acte géopolitique qui réduira le rôle du GNL américain sur le marché mondial et consolidera la dépendance russe à la Chine. Ce projet met à l’épreuve la résilience des relations sino-russes, la Russie jouant un rôle clairement subordonné dans le partenariat.

– Le Moyen-Orient - Du pacte États-Unis–Arabie Saoudite à l’axe Pékin-Moscou-Téhéran :

Alors que les États-Unis cherchent un pacte de défense avec l’Arabie Saoudite, Riyad a déjà approuvé son entrée dans un bloc de sécurité dirigé par la Chine, s’éloignant ainsi de Washington. La médiation chinoise dans l’accord de normalisation entre l’Arabie Saoudite et l’Iran en 2023, ainsi que les exercices navals conjoints entre la Chine, la Russie et l’Iran dans le golfe d’Oman, montrent comment Pékin occupe le vide laissé par le retrait stratégique des États-Unis.

- Conséquences systémiques: l’abîme de la guerre sans règles

La transition vers la multipolarité n’est pas neutre: elle crée un vide de gouvernance où des erreurs de calcul peuvent déclencher des conflits mondiaux.

– Dédollarisation et fragmentation économique:

La ruée vers l’or et la création de systèmes financiers parallèles ne sont pas de simples ajustements techniques. Elles traduisent une perte irréversible de confiance dans la capacité des États-Unis à garantir la stabilité globale, augmentant le risque de sanctions économiques susceptibles de déclencher des réponses militaires.

– Instabilité structurelle en Occident:

Avec les États-Unis réorientant leur attention vers la compétition avec la Chine et la Russie, leur influence au Moyen-Orient décline, créant un scénario de “course aux armements” régionale incontrôlée. La fragmentation de l’ordre libéral, conjuguée à l’essor de blocs régionaux armés, élimine les mécanismes de médiation qui ont empêché de grandes guerres depuis 1945.

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Alerte rouge pour une guerre sans précédent

Comme on l’a vu, la transition vers un ordre multipolaire n’est pas un processus fluide : c’est une zone de turbulences où l’absence de règles claires et la compétition pour les sphères d’influence créent des risques existentiels.

Le Moyen-Orient, déjà épicentre de l’insécurité mondiale, est devenu un champ de bataille indirect entre puissances, où même les accords énergétiques sont des armes stratégiques.

Le Power of Siberia 2, les coffres saoudiens d’or et les systèmes de règlement des BRICS ne sont pas de simples projets économiques — ce sont des infrastructures de guerre financière qui, mal gérées, pourraient conduire à des affrontements militaires directs.

L’histoire montre que les transitions de pouvoir mondial s’accompagnent rarement de paix. Avec la dissolution de l’ordre post-Guerre froide, l’absence de canaux de dialogue entre les blocs émergents et la course aux armements en Asie et au Moyen-Orient créent un scénario où un seul incident — une cyberattaque, une catastrophe diplomatique ou une erreur de calcul — peut déclencher une guerre mondiale sans précédent.

L’humanité ne peut se permettre l’arrogance de croire que les “guerres mondiales” appartiennent au passé. Le temps de construire des sauvegardes, c’est maintenant — avant que la logique occidentale voulant que la multipolarité soit une ère sans règles ne nous entraîne vers l’abîme.

Le nouvel ordre financier mondial: défis à l’hégémonie du dollar

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Le nouvel ordre financier mondial: défis à l’hégémonie du dollar

Wellington Calasans

Source: https://jornalpurosangue.net/2025/09/19/a-nova-ordem-fina...

Le paysage financier international subit de profondes transformations qui menacent l’hégémonie historique du dollar américain.

Alors que les États-Unis maintiennent le dollar en tant que monnaie de réserve mondiale depuis des décennies, l’influence économique croissante de la Chine et ses initiatives stratégiques sont en train de remodeler les relations monétaires internationales.

Cette transition ne se produit pas dans un vide, mais dans un contexte de tensions géopolitiques croissantes, où la dépendance excessive au système financier occidental s’est révélée vulnérable, comme l’a montré l’exclusion des banques russes du système SWIFT pendant la guerre en Ukraine.

La Chine, profitant de ces faiblesses, a développé des alternatives susceptibles de réduire progressivement la dépendance mondiale au dollar, créant ainsi un système financier plus multipolaire.

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Hong Kong se trouve au cœur de cette transformation et prévoit d’établir le premier centre numérique mondial de règlement en or, une initiative visant à contourner le système de paiements dominé par l’Occident.

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Selon le South China Morning Post, le directeur général John Lee Ka-Chiu devrait détailler cette stratégie dans son prochain discours politique, des conseillers proposant une structure pour le commerce de l’or tokenisé qui renforcerait la position de Hong Kong en tant que centre financier international.

Cette mesure ne stimulerait pas seulement le commerce de l’or en Asie, mais constituerait également une protection stratégique contre les sanctions occidentales, en permettant des transactions sans dépendre du système SWIFT. L’or tokenisé apparaît comme un actif neutre qui pourrait faciliter le commerce international sans conversion en dollars.

Les implications géopolitiques de ces changements sont profondes, car elles réduisent l’efficacité des sanctions économiques comme outil de politique étrangère des États-Unis.

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Alors que le récent effondrement de Tricolor Holdings expose les faiblesses du système financier occidental fondé sur le crédit subprime, la Chine avance avec des solutions plus concrètes pour la stabilité monétaire.

Le cas Tricolor montre que l’excès de confiance dans le « consommateur fort » américain masque une économie en forme de K, où les plus pauvres font face à des difficultés croissantes.

Pendant ce temps, l’initiative chinoise de l’or tokenisé propose une alternative basée sur des actifs tangibles, capitalisant sur la perception selon laquelle l’or, tout comme le pétrole, reste indispensable dans tout scénario géopolitique.

La transition énergétique joue également un rôle crucial dans cette reconfiguration, contredisant les récits simplistes sur la fin imminente des combustibles fossiles.

International-Energy-Agency-280x210-2208229678.jpgSelon l’Agence internationale de l’énergie, le monde devra dépenser 540 milliards de dollars par an rien que pour maintenir la production pétrolière actuelle jusqu’en 2050, en raison de l’accélération du déclin des champs existants.

Comme l’a souligné Fatih Birol, directeur exécutif de l’AIE, l’industrie pétrolière et gazière « doit aller beaucoup plus vite simplement pour rester au même niveau ».

Cette réalité renforce l’importance stratégique des ressources naturelles et montre que leur contrôle restera fondamental pour la sécurité économique, offrant à des pays comme la Chine l’opportunité d’établir de nouvelles routes commerciales énergétiques contournant le dollar.

La combinaison de ces tendances indique une reconfiguration structurelle du système financier mondial, où l’hégémonie incontestée du dollar cède la place à un système plus fragmenté et multipolaire.

Alors que les États-Unis continuent de faire face à des défis internes, tels que la hausse des défauts de paiement dans le secteur du crédit subprime et la nécessité de réformer leur propre système financier, la Chine progresse avec des projets concrets offrant des alternatives viables.

L’or tokenisé de Hong Kong, associé à l’émergence de réseaux de commerce énergétique, représente non seulement une menace pour la suprématie du dollar, mais aussi une redéfinition fondamentale de la manière dont le commerce international peut s’effectuer sans dépendre des institutions financières occidentales traditionnelles.

Le résultat final pourrait être une nouvelle architecture financière mondiale, où le pouvoir monétaire est plus réparti, reflétant davantage la réalité économique du 21ème siècle.

Deux lectures douguiniennes de la Révolution conservatrice

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Deux lectures douguiniennes de la Révolution conservatrice

Raphael Machado

Source: https://novaresistencia.org/2025/09/27/duas-leituras-dugi...

Parmi les phénomènes politico-philosophiques les plus intéressants du 20ème siècle, notamment pour les critiques non marxistes du libéralisme, la Révolution conservatrice allemande occupe certainement une place de choix.

Sans avoir réellement été un « mouvement » organisé, la Révolution conservatrice – telle qu’elle a été aboprdée dans l’étude thématique d’Armin Mohler, ancien secrétaire d’Ernst Jünger – représente une constellation d’auteurs, de revues et de cercles qui ont fleuri en Allemagne entre 1917 et 1933.

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Des figures aussi diverses qu'Ernst Jünger, déjà cité, que Carl Schmitt, Martin Heidegger, Arthur Moeller van den Bruck, Ernst Niekisch, Othmar Spann, Oswald Spengler et des dizaines d’autres cherchaient – avec, naturellement, une immense variété de projets et de perceptions – dans un certain décisionnisme révolutionnaire, enraciné dans des principes antérieurs aux Lumières, une voie de sortie face à la décadence de la République de Weimar.

Ce qui les distinguait des conservateurs réactionnaires, c’est qu’ils ne souhaitaient pas revenir au passé et restaurer d’anciennes institutions, mais renouveler la nation. Les références au passé sont d’un ordre plus mythique et poétique qu’effectivement pratique. De plus, si les conservateurs réactionnaires acceptaient le capitalisme et étaient liés à la bourgeoisie, les conservateurs révolutionnaires étaient antibourgeois et anticapitalistes.

Mais ils n’étaient pas non plus marxistes, et se méfiaient autant de l’internationalisme cosmopolite que du prétendu rôle moteur d’un prolétariat déraciné, sans parler de la place centrale du matérialisme comme vision du monde et outil analytique.

Comme on le sait également, le sort des figures liées à la Révolution conservatrice sous la dictature nationale-socialiste de Hitler fut varié: certains embrassèrent le régime avec enthousiasme et furent absorbés par le système, d’autres tentèrent de collaborer mais finirent marginalisés, d’autres encore partirent en exil, et certains rejoignirent la résistance et furent persécutés ou même tués.

Après la Seconde Guerre mondiale, la plupart de ces auteurs tombèrent dans l’oubli, à l’exception évidente de Heidegger, et c’est seulement avec l’activisme intellectuel inlassable de la Nouvelle Droite en France et en Allemagne à partir des années 1970 que nombre de ces figures ont pu retrouver, chez les chercheurs et dans le public, une attention intellectuelle.

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L’un des penseurs qui s’est penché sur la Révolution conservatrice en tant que phénomène historico-politique est le philosophe russe Alexandre Douguine, qui n’est pas seulement le principal interprète russe de Heidegger, mais véritablement l’auteur russe le plus influencé de façon générale par la Révolution conservatrice dans ses écrits.

Auteur prolifique écrivant depuis le début des années 1990, Douguine a donc abordé à de nombreuses reprises la Révolution conservatrice au fil des ans, mais il est intéressant de remarquer quelques différences importantes entre ses approches successives du sujet.

J’indiquerai ici principalement comme références l’ouvrage « Révolution conservatrice », publié en 1994 (mais comportant des textes rédigés depuis 1991), et « La Quatrième Théorie Politique », publié en 2009.

Dans l’ouvrage éponyme, Douguine aborde la Révolution conservatrice non seulement comme synonyme de "Troisième Position", mais comme l’essence même de la "Troisième Position". La Révolution conservatrice y prend un caractère universel, constituant le fondement intellectuel (Urgrund) à partir duquel émergent les divers mouvements politiques fascistes en Europe et dans le Tiers Monde, des années 1920 aux années 1970.

On peut donc, dans ce sens, parler d’une « Révolution conservatrice » espagnole, qui trouve dans le phalangisme son expression politique; d’une « Révolution conservatrice » roumaine, qui trouve dans le légionnarisme son expression politique. Julius Evola apparaît ici comme un penseur de la Révolution conservatrice italienne.

Techniquement, le terme devient synonyme de "Troisième Position", un descriptif de l’essence de la "Troisième Position" comme synthèse transcendante des positions typiques de la droite et de la gauche.

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Quinze ans plus tard, Douguine aborde la Révolution conservatrice d’une manière sensiblement différente, fruit de sa propre évolution intellectuelle.

La principale différence est que la Révolution conservatrice cesse d’être l’essence, ou même le synonyme, de la "Troisième Position" (désormais "Quatrième Théorie Politique") et appartient désormais au domaine de l’hétérodoxie tercériste.

Dans la mesure où Douguine conclut au caractère fondamentalement moderne du fascisme, la formule particulière de la Révolution conservatrice, plus radicale que le fascisme, cesse d’être facilement compatible avec les courants dominants de la Quatrième Théorie Politique.

De même que, dans la pratique, les principaux auteurs de la Révolution conservatrice furent marginalisés, sur le plan théorique, les idées-forces de la Révolution conservatrice apparaissent comme essentiellement marginales, voire impuissantes face à la marche en avant du fascisme.

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La Révolution conservatrice, dans cette nouvelle perspective, en raison même de son hétérodoxie, devient une préfiguration de la Quatrième Théorie Politique. Elle émerge du même creuset culturel et philosophique que le fascisme et, dans une certaine mesure, fait partie de la construction de l’atmosphère politico-culturelle qui a permis la manifestation historique du fascisme, mais demeure à l’écart, un courant étranger au flux historique dominant.

Et c’est précisément là que la Révolution conservatrice devient plus intéressante. Dans la mesure où les théories politiques passées sont modernes et convergent dans la Modernité, ce qui importe en elles, ce sont précisément les hérésies et les hétérodoxies, car c’est précisément dans les « écarts » et « aberrations » que l’on peut dévoiler la réminiscence d’éléments prémodernes ou antimodernes.

En conclusion, il est évident que le changement dans la lecture de la Révolution conservatrice découle du changement de position de l’auteur, passé d’une position tercériste au début des années 1990 à une position quarto-théoricienne à la fin de la première décennie du nouveau millénaire.

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De plus, il est indéniable qu’il est possible d’extrapoler la Révolution conservatrice du contexte allemand à un contexte international, la position de ce phénomène variant selon les pays. En Russie même, la Révolution conservatrice fut totalement étrangère tant au fascisme russe qu’à l’État, mais à partir de Staline, certains aspects de l’eurasisme furent absorbés par le système. En Roumanie, en revanche, Nae Ionesco, Mircea Eliade, Emil Cioran et Constantin Noica (photo) – figures citées par Claudio Mutti comme représentants d’un conservatisme révolutionnaire autochtone – furent intimement liés au fascisme roumain.

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Au Brésil, je crois que l’on peut aussi parler d’une Révolution conservatrice, dont les contours restent encore diffus. Ont certainement fait partie de ce phénomène des figures comme Oliveira Vianna, Francisco Campos, Azevedo Amaral (photo), Otávio de Faria, et d’autres encore, certains plus proches de l’État nouveau, d’autres moins, certains nouant un dialogue avec l’intégralisme, d’autres non.

jeudi, 02 octobre 2025

«De la Méditerranée au Nord Olympien»: entre articles et conférences, l’héritage hyperbolique de Julius Evola

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«De la Méditerranée au Nord Olympien»: entre articles et conférences, l’héritage hyperbolique de Julius Evola

Une nouvelle anthologie de textes de l’écrivain traditionaliste qui situe sa production de 1920 à 1945

par Giovanni Sessa

Source: https://www.barbadillo.it/124930-dal-mediterraneo-al-nord...

Evola-350x494.jpgDal Mediterraneo al Nord olimpico, de Julius Evola

Julius Evola fut un penseur à la production extrêmement vaste. Au cours de son existence, notamment à partir des années vingt du siècle dernier, il entretint de nombreuses relations avec des personnalités éminentes du monde politique et, surtout, culturel, qu'il ait été italien ou européen. Il voyagea beaucoup en Europe centrale, se rendant à plusieurs reprises en Autriche, en Allemagne, en Hongrie, en Roumanie. Vient de paraître en librairie une anthologie précieuse d’articles et de conférences du penseur traditionaliste, qui permet de faire la lumière sur ses vastes relations internationales autant que sur ses intentions politiques et métapolitiques, lors des années décisives de 1920 à 1945. Il s’agit de Julius Evola, Del Mediterraneo al Nord olimpico; Articoli e conferenze nella Mitteleuropa (1920-1945), paru dans le catalogue des Éditions Mediterranee (pour commander: ordinipv@edizinimediterranee.net, ++39-6/3235433).

Les nouveautés dans ce livre

Les traductions des textes et la direction de l’ouvrage sont dues à Emanuele La Rosa, collaborateur de la Fondation Evola, qui a retrouvé dans les archives et bibliothèques allemandes des articles jusqu’ici inconnus ou jamais traduits en italien.

La Rosa et Nuccio D’Anna, spécialiste de l’histoire des religions et du symbolisme, signent deux essais introductifs, propédeutiques à la compréhension de l’action dite d’« interventionnisme traditionnel » menée par Evola en Europe centre-orientale. Le livre se distingue également par sa troisième partie, qui rassemble des articles consacrés à Evola par la presse germanophone de l’époque, dont beaucoup restent inédits en italien, et par son appendice composée d’une revue de presse dédiée à Evola peintre.

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Les voyages, les écrits et les conférences du traditionaliste visaient à la constitution d’un front commun paneuropéen, révolutionnaire et conservateur, destiné, d’une part, à « rectifier » les limites théoriques et pratiques du fascisme et du national-socialisme, et d’autre part, à donner une réponse forte et convaincante à la prégnance du moderne dans tous les domaines de la vie. D’Anna note : « Dans ses interventions, il n’omettait pas d’indiquer des comportements “exemplaires”, des formes de coutume et des modèles existentiels considérés comme importants dans une société qui, à la suite du lourd krach économique de 1929, avait sombré dans une profonde crise d’identité » (p. 9).

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À l’avis de l’auteur, la revue la plus prestigieuse dans laquelle écrivit Evola fut la Europäische Revue du prince Rohan (photo). Parmi ses collaborateurs figuraient, entre autres, W. F. Otto, Heidegger, Schmitt, Sombart, C. G. Jung et notre compatriote Ernesto Grassi.

Dans tous les cas, même dans d’autres périodiques: « Evola continuera à avancer […] dans une seule direction dont les caractéristiques fondamentales apparaissent ordonnées autour de traditions sacrées […] symboles et formes du prépolitique qui trouvent sur le plan métahistorique leur véritable raison d’être » (p. 11).

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Pour Evola, en effet, l’organisation de l’État de la Tradition était caractérisée par la synthèse de deux puissances, la temporelle et la spirituelle (Melchisédek), que le Moyen Âge gibelin tenta de réintroduire dans l’histoire (cycle du Graal). À la lumière de telles positions, le traditionaliste œuvra à renforcer, dans des termes non seulement politiques, l’alliance italo-allemande. Dans cette anthologie figurent également des écrits dans lesquels Evola critique la version purement biologique du racisme alors prédominante en Allemagne, au nom d’une race de l’esprit, traditionnelle, consciente de la tripartition humaine en esprit, âme et corps.

200px-Julius-Evola_Heidnischer-Imperialismus-1910224839.jpgImpérialisme païen en Italie et en Allemagne

De certains des textes d’Evola, comme l’observe La Rosa, on relève d’importantes différences entre la version italienne de Impérialisme païen et sa traduction allemande de 1933: dans la première, le penseur « oppose au “danger euro-chrétien” la fonction positive d’une reprise de la tradition méditerranéenne, tandis que dans la version allemande il se fait porte-parole de la tradition nordique-germanique » (p. 31).

Ce changement de perspective s’explique par des raisons biographiques (la rupture avec Reghini, néo-pythagoricien et partisan de la très ancienne sapientia italique de Vico, ayant fini devant les tribunaux) et par des motivations idéales. Certes, comme il ressort de l’essai du directeur de la publication, il y eut chez Evola un choix stratégique, de type « machiavélique », visant à déplacer son influence théorique vers les pays d’Europe centrale, ce qui permet d’interpréter les deux versions d'Impérialisme païen « comme deux programmes politiques différents par leur forme et leur contenu […] comme une proposition (méta)politique offerte tantôt au gouvernement fasciste, tantôt au gouvernement national-socialiste naissant » (p. 32).

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Le changement théorique s’explique aussi par des raisons idéales: après la rencontre avec Guénon, Evola changea de perspective sur la civilisation méditerranéenne et porta un autre regard sur la Renaissance italienne. Alors que dans Impérialisme païen, Giordano Bruno et la philosophie de la Renaissance (comme dans ses œuvres philosophiques) jouent un certain rôle, dès le début des années trente, le philosophe de la vicissitude universelle et les néoplatoniciens du Quattrocento ne sont plus cités, sauf négativement. Dans Révolte, le traditionaliste en viendra à affirmer : « La véritable Renaissance (de la Tradition), c’est le Moyen Âge ».

Evola « transpose dans l’idée impériale celle de la réalisation de l’individu […] dont la règle fondamentale est le principe de solidarité entre les éléments d’un organisme » (p. 33). L’Empire devient le modèle métapolitique du philosophe, réponse autant à l’internationalisme marxiste qu’à la ploutocratie américaine. La même inflexion “nordique” se manifeste également au niveau des symboles: du faisceau liturgique on passe à l’aigle impérial. « Evola doit agir “machiavéliquement” en activant des forces motrices, des symboles et des mythes […] capables de fasciner […] le public auquel il s’adresse » (p. 35).

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La dimension cruciale de la pensée d’Evola

Cet interventionnisme traditionnel ne produisit ni en Italie, ni en Allemagne, les résultats espérés. Il ressort pourtant, même de ce recueil, le legs hyperbolique du penseur. Sur le plan individuel, il est symbolisé par l’individu absolu, « délié » au sens latin, libéré, même de lui-même, tendu dans la tension existentielle induite par l’incipit vita nova. Son existence est déjà, en soi, exemplaire, elle renvoie, métapolitiquement, au dépassement sublime des organisations politiques contemporaines. Son arbitraire ne saurait être compris par l’œil moderne, éduqué aux distinctions exclusives induites par le logocentrisme.

Del Meditarraneo al Nord olimpico est une œuvre qui apporte une lumière supplémentaire sur la pensée abyssale de Julius Evola, à lire et méditer avec un regard non représentatif, absolu, au-delà de la dichotomie sujet-objet, car pour Evola, phénomène et noumène disent la même chose…

Julius Evola, Del Mediterraneo al Nord olimpico. Articoli e conferenze nella Mitteleuropa (1920-1945), sous la direction d’Emanuele La Rosa, Éditions Mediterranee, 331 pages, 31,50 euros.

La lutte pour l’âme et l’espace

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La lutte pour l’âme et l’espace

Sid Lukkassen

Source: https://denieuwezuil.nl/de-strijd-om-de-ziel-en-de-ruimte/

71vPORUO1nL._SL1300_-2292945501.jpgL’un des concepts clés pour comprendre le monde politique d’aujourd’hui est celui du « conatus ». Ce terme a été utilisé par le célèbre philosophe Spinoza, et je l'ai récemment mis au centre d’un article sur les menaces que fait peser l’immigration de masse. Ce concept apparaît désormais aussi dans un ouvrage controversé sur lequel des penseurs conservateurs de droite se sont déjà exprimés de manière tranchée : le livre Bronze Age Mindset, de l’auteur polémique « Bronze Age Pervert », qui agit sur « X » (anciennement Twitter) comme une sorte de roi-prêtre.

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Avant d’entrer plus avant dans Bronze Age Mindset, commençons par une explication pour mieux comprendre la notion de « conatus ». Prenons ce débat à la télévision néerlandaise. Face à un public, le philosophe Cornelius Rietdijk tente, d’un point de vue philosophique, de briser un tabou: celui d’avorter des enfants handicapés. Il construit ses arguments calmement, rationnellement et de manière équilibrée, puis se heurte à un mur d’indignation morale. On voit clairement que trois éthiques différentes sont à l’œuvre.

Trois types d’éthique

Le public semble adopter une éthique du devoir. Leur raisonnement est le suivant: l’on reçoit un enfant handicapé par le hasard du destin. Il faut l’assumer. Il s’agit alors, en toute conscience, intégrité et honnêteté, de faire au mieux – c’est là votre devoir d’être humain.

Le médecin qui s’oppose à Rietdijk raisonne différemment. Il met l’accent sur le poids de la souffrance. Si la souffrance des parents est trop grande, ou si l’enfant handicapé souffre de façon insupportable, l’avortement ou l’euthanasie peuvent être envisagés. Il s’agit ici d’une éthique utilitariste: le plaisir est le bien suprême, la souffrance le mal suprême. Une action est moralement défendable si elle permet effectivement de minimiser la souffrance et de maximiser le plaisir.

Rietdijk lui-même défend une forme d’éthique de la vertu (à ne pas confondre avec la « vertu » au sens politiquement correct du terme). La vie humaine ne peut être considérée comme telle que si elle peut s’épanouir, et pour cela « un cadre de vie adéquat » est nécessaire. Beaucoup de gens partagent cette intuition: ils disent par exemple « Si un jour je dois finir comme une plante verte, alors ce n’est plus la peine, qu’on me débranche. » La qualité avant la quantité.

Le choix d’une éthique

Le caractère abyssal de la question réside dans le fait qu’on ne peut, sur la base d’arguments empiriques ou pragmatiques, privilégier l’une de ces trois éthiques par rapport aux deux autres. Car la façon dont on évalue les faits pragmatiques et empiriques dépend précisément de l’éthique avec laquelle on aborde la vie.

C’est comme si l’on était debout sur une plaque tectonique, au-dessus d’une faille abyssale. La raison et l’expérience n’offrent aucune donnée qui rendrait le passage vers une autre plaque moralement obligatoire. Ce saut doit donc venir du plus profond de soi: choisir entre des éthiques qui s’excluent mutuellement est, par définition, un saut dans l’abîme.

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Conatus

Vous me suivez jusqu’ici? Très bien, car mon travail est alors presque accompli. Tout dépend donc de l’éthique qui vous interpelle. Et cela dépend des valeurs qui animent votre noyau intérieur: votre âme, votre personnalité, votre caractère. Ce principe fondamental, c’est ce que Spinoza appelle le «conatus». Ce conatus cherche à se perfectionner lui-même, et filtre tous les faits du monde en fonction de ce qui renforce ce noyau primitif. Le processus du conatus, c’est le durcissement du « soi » au sein d’un monde extérieur.

Le noyau, le principe organisateur qui réside dans l’âme même, est donc existentiel et jamais empirique – la logique et l’expérience sont toujours secondaires. Voilà ce qu’est le conatus.

Bronze Age Mindset : la maîtrise de l’espace

Maintenant que ceci est clarifié, nous sommes prêts à aborder le livre de Bronze Age Pervert (BAP). Selon lui, tout ce qui vit cherche à occuper de l’espace. Il s’agit généralement de posséder, de contrôler ou de conquérir l’espace. Songez à un lion juché au sommet d’une montagne, surveillant la vallée à la recherche de proies. Ou à un aigle planant encore plus haut dans le ciel.

Selon BAP, le fait de s’approprier l’espace avec succès conduit au développement des qualités innées de l’organisme. Ce développement permet à son tour de conquérir encore plus de matière, de dévorer les organismes inférieurs qui sont alors absorbés par l’organisme supérieur. Il le décrit ainsi : « It is mobilization of matter to develop the inborn character or idea or fate. » ("C'est la mobilisation de la matière dans le but de développer le caractère, l'idée ou le destin innés"). Il s’agit donc de quelque chose de plus abstrait que la simple assimilation de biomasse : il s’agit aussi d’un principe. Il s’agit ici, en fait, du conatus.

Application à la politique

« Organism seeks mastery of space, environment, to master matter in ways particular to its own abilities. […] The higher and more organized the form of life, the more complex its need for development are » ("L'organisme cherche la maîtrise de l'espace, de l'environnement, à maîtriser la matière en des façons particulières selon ses propre capacités").

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Dans l’exemple des lions et des aigles, nous comprenons instinctivement ce que cela signifie, mais si on applique cela à la société humaine, il en va de même en politique. Pourquoi, par exemple, quelqu’un se sent-il attiré par le plan de Frans Timmermans d’augmenter les allocations et les primes sociales?

Parce que cette personne sent qu’elle veut être couverte contre les risques, et que cela lui convient. La protection du groupe. Un autre, au contraire, préfère payer moins de cotisations et prendre plus de risques lui-même. Parce que cela fait partie de sa personnalité: individualisme, volonté de fonctionner par ses propres moyens et d’être indépendant du groupe. Vouloir façonner son propre destin et en assumer soi-même les conséquences. Votre conatus détermine donc les arguments politiques auxquels vous êtes réceptif.

Une question existentielle

« Gauche » et « droite » ne sont donc pas des « inventions » – pas des « constructions » qui ne prennent sens que dans un système particulier, une configuration économique et sociale donnée. « Gauche » et « droite » sont des grandeurs existentielles, propres à l’âme de chaque individu – à son conatus. Elles précèdent toute factualité empirique.

Revenons un instant à Bronze Age Mindset. Le livre affirme : « As a result of this mastery of matter there is development of its body, its senses, and all of its faculties, and the unfolding of its inborn destined form or nature » ("Résultat de cette maîtrise de la matière: le développement de son corps, de ses sens et de toutes ses facultés, et le déploiement de sa forme ou nature innée et destinale"). On comprend alors que, même si BAP n’utilise pas le terme « conatus », il s’agit bien de cela. Le conatus est le principe fondamental dans lequel tout ce que l’organisme, la chose, le concept deviendront un jour, est déjà en germe – dès lors qu’ils s’expriment, se déploient dans la réalité.

Bien et mal = force et faiblesse

« It seeks to become strong, skillful, to master problems and feel the expansion of its power » ("Cela cherche à devenir fort, talentueux, à maîtriser des problèmes et à ressentir l'expansion de sa puissance"). Nous touchons ici au vrai sens de l’éthique, tel que Nietzsche l’écrit – et tel qu’il l’a directement emprunté à Spinoza: est bon tout ce qui renforce notre force vitale; est mauvais tout ce qui la diminue.

Dans cette optique, on constate qu’il existe différentes formes d’éthique, mais ce qui finit par l’emporter, c’est qu’une personne devient le chef d’un groupe, et son éthique devient alors dominante – parce que l’espace est limité, parce que les ressources sont limitées.

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En somme : il s’agit d’une lutte à mort entre des éthiques qui s’excluent mutuellement. Ce ne sont pas les arguments moraux qui déterminent l’issue, mais la force des parties en présence qui décide quelle morale deviendra la morale valide, normalisée, légitime.

Réflexions complémentaires

Il faut souligner qu’il existe ici une sorte de « processus de puissance ». Un jeune homme doit gravir une montagne, capturer un aigle. Et quand il revient au village avec cet aigle, il est désormais membre à part entière du groupe et peut participer au conseil de la tribu. Au fond, il s’agit de « parvenir à maturité », de s’épanouir. Ressentir comment, par sa propre force, on acquiert une forme de maîtrise.

Dans la société actuelle, ce processus naturel est entièrement affaibli, atténué, canalisé par toutes sortes d’institutions. Avec la ritaline et d’autres médicaments, il est même médicalisé, supprimé. Au final, on ne peut plus ressentir de telles émotions qu’en réalité virtuelle, comme dans le Metaverse de Mark Zuckerberg.

La postmodernité est condamnée

Dans la société ouest-européenne actuelle, numérisée et évitant tout conflit, les hommes ne peuvent plus développer naturellement leur confiance en eux. Les actes qui, en situation naturelle, les rendraient attirants aux yeux des femmes – chasser, se battre, construire – sont désormais impossibles dans ce contexte surréglementé. Les jeux vidéo, où l’on construit des villes et mène des batailles, peuvent encore donner une vague impression de ces sensations.

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En résumé : la société postmoderne est totalement coupée de la croissance et du développement naturels. D’où la multiplication des «stages de virilité». Tout est déjà limité, et au final, il faut se libérer comme un loup solitaire de la société sursocialisée si l’on veut encore réaliser quelque chose de créatif.

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Déplier le mystère du beau, avec Christine Sourgins

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Déplier le mystère du beau, avec Christine Sourgins

Propos recueillis par Frédéric Andreu

Historienne d’art et blogueuse, https://www.sourgins.fr, Christine Sourgins publie aux éditions Boleine Anatomie de la Beauté. Si son blog affirme que « Sans l’art, la vie serait une erreur », son livre semble inverser la proposition: « Sans la beauté, l’art serait une erreur »… Pour mieux comprendre son approche du beau, nous l’avons interrogée à travers cinq questions essentielles.

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- Une couverture qui interroge. Dès la couverture, une image intrigue : une muse antique, hiératique, tenant dans ses mains un objet énigmatique. Quelle est la signification de cette figure, et quel rôle joue-t-elle dans l’économie symbolique du livre ?

La couverture reprend une fresque de Pompéi: la figure ailée porte un trépied utilisé dans le culte antique, ce qui fait de cette “Victoire” une figure moins guerrière qu’une servante du divin, rôle que la beauté a longtemps endossé ! Oui, la beauté est mystérieuse mais il ne faut pas en user pour se défausser: ce n’est pas un mystère dont on ne peut rien dire mais un mystère (comme ceux de la théologie) que l’on n’a jamais fini d’approfondir…

- Anatomie de la Beauté : un titre doublement parlant. En effet, le titre met déjà en tension deux registres, le scientifique et le poétique. Comment ces mots s’articulent-ils pour former la clef de lecture de l’ouvrage?

« “Anatomie” est aujourd’hui utilisé pour signifier une analyse, ce qui est le cas. Ce terme est en usage à la fois dans le monde médical et artistique, en particulier dans la représentation des nus. Dans les deux cas, il y a allusion à la présence d’un corps, et c’est bien ce que j’entends restituer, l’aspect organique d’une notion constamment attaquée et déconstruite depuis 50 ans. Certains en ont fait un empilement de concepts desséchés ou d’oukases mortifères d’un autre âge (les fameux “canons artistiques”) mais le livre décrit au contraire une physiologie du beau, son métabolisme, sa vitalité. »

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- Qu’est-ce que le beau ? Une question philosophique. Le sous-titre de l’ouvrage pose la question de façon frontale. L’auteure se rattache-t-elle à un courant précis ou navigue-t-elle entre traditions philosophiques ?

« La philosophie s’est intéressée au beau dès Platon et régulièrement nombre de philosophes l’ont embarqué dans leur système, mais la beauté est toujours singulière et les concepts philosophiques, eux, visent des généralités d’où beaucoup de quiproquos. Je fais donc à la philosophie, comme à la sociologie, une place, certes, mais prudente.

Je distingue d’emblée l’Idée de Beauté (avec majuscule), abstraction intellectuelle, de la beauté artistique, celle que l’on peut appréhender avec ses sens, et qui est une expérience sensible et existentielle.

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Le sous-titre est plus pratique que vous ne le pensez car beaucoup de nos contemporains ont perdu le beau comme d’autres le Nord: le beau est refusé car restreint à une dogmatique ou alors toléré mais réduit cette fois au grand n’importe quoi “des goûts et des couleurs dont on ne discute pas”. Mensonge, on en a toujours discuté car s’il y a une part de subjectivité dans la beauté, et c’est heureux, si elle est un mystère, elle n’est pas non plus un délire ! »

- La beauté et la dimension sacrée. La beauté n’est-elle pas aussi porteuse d’une dimension sacrée ? Peut-on parler d’une expérience « eucharistique » comme le suggère Aude de Kerros ?

« Il y a effectivement des voies spirituelles du beau, j’aborderai cet aspect dans un troisième livre sur Les bienfaits du beau. Anatomie de la beauté, le premier livre, c’est en quelque sorte la reconstruction des “murs porteurs”, sera suivi, au mois d’octobre, par une Géographie du beau qui détaille les climats et terroirs où la beauté peut s’épanouir ou pas: l’harmonieux, le sublime, le joli, l’étrange, etc. Puis viendra, en 2026, Les bienfaits du beau, “les beautés singulières” (celles qui posent problème, comme la beauté des nus ou la beauté du mal, etc.) et enfin Guerre à la beauté! expliquera pourquoi et comment on a mené bataille contre le beau. »

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- Une rencontre marquante avec la beauté. Parmi toutes les œuvres que vous avez contemplées, si vous deviez en retenir une seule, laquelle vous a bouleversée ?

« Beaucoup d’exemples sont donnés dans ce livre, j’aborde principalement la beauté artistique car c’est la plus attaquée (sans se priver d’allusions à la beauté de la nature, les deux étant souvent liées). Les exemples tirés de la Peinture, ceux que j’utilise le plus souvent, ont l’avantage, grâce à Internet, d’être faciles à retrouver et le lecteur peut alors vérifier par lui-même. Cela permet d’avoir un livre à petit prix, ce qui ne serait pas le cas s’il fallait financer les droits à l’image. »

Anatomie de la beauté aux Éditions Boleine : https://editions-boleine.fr/catalogue/105-anatomie-de-la-beaute.html

Conférence-dédicace de l'auteur:

L’auteur donnera une conférence-dédicace, illustrée de projections, le mercredi 8 octobre à 17h30. Gratuite mais sur réservation. Réserver votre place par mail à cap-aristee@orange.fr

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Affaire Sarkozy: la France n’a que les représentants qu’elle mérite

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Affaire Sarkozy: la France n’a que les représentants qu’elle mérite

Par Pierre-Emile Blairon

Donc, Nicolas Sarkozy a été condamné ce 25 septembre 2025 à cinq ans de prison dans l’affaire du financement libyen de sa campagne présidentielle de 2007 pour « association de malfaiteurs ». Il est convoqué le 13 octobre par le Parquet national financier pour connaître la date de son incarcération. Il sera le premier ex-président de la République (il a été président de la République française de 2007 à 2012) à effectuer un séjour en prison.

Ce jugement est le dénouement (provisoire) de l’une des nombreuses affaires dans lesquelles Sarkozy est incriminé.

Je répugne à parler à nouveau de cette crapule (dictionnaire de l’Académie française: Individu vil et malhonnête, capable des pires actions. Larousse : Individu sans moralité, capable des pires bassesses; canaille) mais je dois le faire pour compenser l’arrogance avec laquelle ce grossier personnage ose se poser en victime d’une machination de la justice et des médias alors que toute son action a visé, depuis son accession au pouvoir en 2007, à ruiner sciemment la France et les Français au profit d’intérêts étrangers (en l’occurrence, américains, Sarkozy ne s’en cachait même pas) comme le feront à sa suite Hollande et Macron élargissant le cercle des profiteurs et vendant la France à la découpe à qui veut bien l’acheter.

J’ai signé ici un article le 18 janvier 2025, titré: "Haute trahison : Sarkozy l’Américain" qui récapitule tous ses méfaits (tout au moins connus) dont la liste est longue (cf. http://euro-synergies.hautetfort.com/archive/2025/01/18/sarkozy-l-americain-6531523.html ).

Je disais dans cet article que « l’affaire Woerth-Bettencourt, l’affaire Bismuth, l’affaire des sondages de l’Élysée, l’affaire Bygmalion, ne constituent que des magouilles politicardes sans grand intérêt, car elles ne concernent que son intérêt personnel, et sa petite personne n’a que peu d’intérêt ».

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L’affaire du financement libyen

Sarkozy est finalement tombé à cause de l’affaire du financement libyen de sa campagne présidentielle de 2007.

Pour préserver ses intérêts personnels dans cette rocambolesque histoire, Sarkozy n’a pas hésité à abattre les digues qui contenaient l’invasion africaine de la France et de l’Europe à partir de la Libye, faisant éliminer Kadhafi qui représentait le dernier rempart contre ce déferlement. Cette seule vilénie mériterait la peine de mort dans une société traditionnelle normale car cet homme est en cela responsable de la disparition quotidienne de Français tués par ces barbares entrés illégalement en France.

Mais il n’en est pas resté là dans le domaine de l’immigration sauvage, parce qu’il s’est débrouillé pour faire en sorte que ceux qu’il a fait ainsi rentrer en France par millions ne repartent plus car, comme le faisait remarquer un internaute: « Si vous avez des potes de droite qui soutiennent Sarko, rappelez-leur que c'est bien Sarko qui a fait supprimer la double peine qui permettait de renvoyer chez eux les délinquants étrangers. Et que donc chaque fois qu'un migrant clando qui cumule une ou plusieurs OQTF non exécutées, viole ou tue un Français, il y a littéralement l'ombre de Nicolas Sarkozy derrière ce drame » (Samir Mouhssine).

Et, bien sûr, les juges politisés qui refusent d’appliquer les lois françaises - parce que les lois existent, il n’est pas besoin d’en ajouter d’autres - sont également responsables de ces intrusions illégales sur le sol français.

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« Ziad Takieddine (photo), personnage clé des affaires libyennes, est mort », titre Le Point du 23 septembre 2023, « des suites d’une longue maladie » comme on dit, longue maladie opportunément interrompue par sa mort deux jours avant le procès dit «du financement libyen de la campagne de Sarkozy».

Je n’ai pour l’instant pas entendu un seul journaliste poser une question sur les causes exactes de ce décès, si ce n’est, dans l’article du Point qui suit, cette petite phrase sibylline: «dans des circonstances qui restent à préciser».

« L’intermédiaire libanais s’est éteint mardi matin à Beyrouth, emportant définitivement avec lui des informations clés sur les relations réelles de Nicolas Sarkozy avec le clan Kadhafi.

L'information a été confirmée au Point par plusieurs sources, dont son ex-avocate Me Élise Arfi: Ziad Takieddine, 75 ans, est décédé mardi 23 septembre 2025 au matin à Beyrouth, où il résidait depuis plusieurs années, dans des circonstances qui restent à préciser. Cet intermédiaire franco-libanais était au cœur du procès des affaires libyennes de Nicolas Sarkozy. Poursuivi en France, condamné dans le volet financier de l'affaire dite de Karachi à cinq ans de prison ferme avec mandat de dépôt, il s'était enfui au Liban en juin 2020, pays qui n'extrade pas ses ressortissants» (Le Point, Erwan Seznec).

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La liste des méfaits du délinquant Sarkozy

Pour le reste, je vais laisser la parole à l’amiral Claude Gaucherand (photo) qui a énuméré les mauvaises actions du personnage, en tout cas, les plus choquantes, dans un texte récent du 25 septembre .

Politique intérieure

- Le Traité de Lisbonne: Refusé par référendum en 2005, le traité constitutionnel européen a été ressuscité sous forme de traité de Lisbonne, ratifié par voie parlementaire en 2008 sans consultation populaire. Sarkozy, alors président, a justifié cette manœuvre comme une “simplification institutionnelle”.

- Ruine d’EDF avec la loi NOME: Adoptée en 2010 sous l’impulsion de François Fillon et Nicolas Sarkozy, la loi sur la Nouvelle Organisation du Marché de l’Électricité (NOME) a imposé à EDF de vendre son électricité nucléaire à bas prix à ses concurrents via l’Arenh (Accès Régulé à l’Électricité Nucléaire Historique). Ce mécanisme, censé ouvrir le marché à la concurrence européenne, a été critiqué comme une “vente à perte” qui a endetté EDF de milliards d’euros et fragilisé la filière nucléaire française.

- Immigration choisie : Sous Sarkozy, l’immigration légale a atteint un pic de 250.000 titres de séjour annuels, malgré sa rhétorique de fermeté. Sa loi de 2006 sur “l’immigration choisie” a été un échec, avec seulement 14% d’immigration professionnelle contre un objectif de 50%.

- Discrimination positive : Plus provocateur, son discours de 2008 sur le “défi du métissage” – “Ce n’est pas un choix, c’est une obligation” – a annoncé la politique de quotas d’immigrés non-européens dans toutes les sphères de l’État et de la société, expression du multiculturalisme anglo-américain qu’il a voulu imposer en France.

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- Mayotte départementalisée : En 2009, Sarkozy a impulsé la départementalisation de Mayotte, effective en 2011, malgré les avertissements sur l’immigration clandestine massive. Résultat: une explosion démographique et des tensions sociales, des critiques qualifiant cela d'”erreur historique”.

- Théorie du genre à l’Éducation Nationale: En 2011, sous son mandat, des manuels scolaires de SVT ont intégré des chapitres sur le genre, expliquant que l’identité sexuelle est socio-culturelle autant que biologique.

- Fin de la double peine et politique du chiffre à la police: La réforme de 2003, impulsée par Sarkozy comme ministre de l’Intérieur, a limité les expulsions automatiques d’étrangers délinquants, vue comme un laxisme pénal. Parallèlement, sa “politique du chiffre” a poussé les forces de l’ordre à privilégier les statistiques (PV, interpellations) au détriment de la prévention, générant des dysfonctionnements persistants.

- Saccage de l’Hôpital public : Les réformes hospitalières de 2009 (loi HPST) ont renforcé les pouvoirs des directeurs et favorisé les partenariats public-privé, au détriment des soignants. Budgets rognés et fermetures de lits ont été dénoncés comme un “démantèlement” du service public, aggravé par la crise Covid.

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- Vente de 20% des réserves d’or de la France: Une perte de 40 milliards: En 2004, comme ministre, Sarkozy a vendu 589 tonnes d’or de la Banque de France pour 4,67 milliards d’euros. Avec la flambée du cours de l’or, cette opération a coûté à l’État environ 40 milliards d’euros en valeur actuelle.

- Ouverture à gauche : Sitôt élu sur une ligne de droite dure, Sarközy a ouvert son gouvernement à des figures historiques de gauche (le néo-conservateur Bernard Kouchner aux Affaires étrangères, le socialiste libanais Éric Besson à la Prospective) et à des personnalités non blanches ou d’origine immigrée, comme Rachida Dati (Justice), Fadela Amara (politique de subventions des quartiers ethniques), ou Ramatoulaye Wade. Il s’agit d’accélérer le multiculturalisme et la discrimination positive.

- Suppression du crime de haute trahison: La révision constitutionnelle de 2007, sous son impulsion, a remplacé la “haute trahison” par un vague “manquement aux devoirs”, supprimant une protection contre les abus présidentiels et protégeant potentiellement Sarkozy lui-même.

- Déclarations de Carla Bruni sur le “sang pourri” des Français: En 2010, Carla Bruni, épouse de Sarkozy, évoque “le vieux sang pourri” qui coule dans les veines des Français, en référence à leur supposée frilosité face à l’immigration et à la diversité raciale.

- Maintien des Accords d’Évian: Sarkozy a préservé les facilités d’immigration issues des accords de 1962, malgré les appels à leur renégociation, favorisant selon les détracteurs un flux migratoire incontrôlé.

- Enterrement du rapport sur le financement des syndicats de gauche: En novembre 2011, sous son mandat, un rapport parlementaire explosif sur les financements opaques des syndicats (plus de 5 milliards d’euros annuels, avec des abus via les comités d’entreprise et des publicités suspectes) a été rejeté et “enterré” par l’Assemblée, malgré six mois de travail et 45 auditions. Cette décision, prise à la veille des élections présidentielles de 2012, visait à se concilier la gauche syndicale en vue de la réélection de Sarközy.

- Constructions de mosquées: En 2006, le rapport Machelon, commandé par Sarkozy, ministre de l’Intérieur, a autorisé les subventions communales aux lieux de culte, contournant la loi de 1905. Cela a accéléré la construction de mosquées (près de 2500 en 2012), souvent financées par des fonds qataris, via des baux emphytéotiques à 1 euro/an.

Politique étrangère

Néoconservatisme et soumission à l’OTAN: Sarkozy s’est distingué par un atlantisme fanatique, rompant avec la tradition d’indépendance française.

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Destruction de la Libye: Après avoir permis à Mouammar Kadhafi de poser sa tente à l’Élysée, Sarkozy, en 2011, a initié l’intervention de l’OTAN en Libye pour abattre un État jugé hostile à “Israël”. Soutenu par BHL, il a contribué à la chute de Kadhafi grâce à des milices djihadistes, laissant un chaos de grande ampleur s’installer, ouvrant un corridor migratoire béant qui n’a toujours pas été refermé. Cette guerre a entraîné la percée djihadiste dans le Sahel, notamment au Mali, qui a culminé avec le retrait en catastrophe des troupes françaises de toute l’Afrique de l’Ouest.

Revirements en Syrie: Après avoir réhabilité Bachar al-Assad en 2008 (invité au 14 juillet), Sarkozy a pivoté en 2011, appelant à une intervention militaire en 2012, sans aval de l’ONU.

Alignement sur “Israël” : Son discours à la Knesset en 2008 et ses condamnations de l’Iran ont marqué un soutien inconditionnel à l’entité sioniste, rompant avec l’équilibre traditionnel français au Proche-Orient.

Réintégration dans l’OTAN : En 2009, Sarkozy a ramené la France dans le commandement intégré de l’OTAN, abandonnant 43 ans d’exception gaulliste, le mouvement politique dont il provient.  Pro-guerre et pro-OTAN, il a aligné Paris sur Washington, au détriment d’une défense française et européenne autonome.

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Corruption qatarie : Sarkozy a favorisé l’influence islamo-qatarie en France via des investissements (PSG, Rafale) et une convention fiscale de 2008 exonérant les capitaux qataris. En contrepartie, le Qatar a financé son divorce d’avec Cécilia Cziganer Albeniz, mère de Louis Cziganer Albeniz Sarközy (3 millions d’euros via une rançon augmentée d’autant pour les infirmières bulgares en 2007).

Les enquêtes sur le Mondial 2022, attribué au Qatar, pointent un “pacte de corruption” lors d’un déjeuner élyséen en 2010, impliquant Sarkozy, Platini et l’émir du Qatar. Cette collusion culmine avec la guerre en Syrie, le Qatar voulant renverser Bachar Al Assad pour installer un pouvoir islamiste à Damas et faire transiter son gaz par le territoire syrien conquis avec l’aide de l’OTAN et de la France.

Ces éléments, d’une gravité rare, doivent être rappelés à tous ceux qui seraient prompts à se laisser influencer par la propagande de CNews (Bolloré) ou de TF1 (Bouygues), outils de désinformation aux ordres de la bourgeoisie dont Sarközy est l’ignoble masque.

Dans un État normal, Sarközy aurait été jugé par un tribunal populaire pour haute trahison, condamné à mort et fusillé. Et pas à cinq ans de prison dont tout le monde sait qu’il ne purgera que le dixième ».

Existe-t-il encore un peuple français ?

La question se pose pleinement quand on constate le déferlement de soutiens à Sarkozy qu’a suscitée sa condamnation.

- Soutien, bien sûr, de la classe politique (celle qui siège au Parlement et au Sénat) pour la simple raison que chacun de ces élus se sent concerné par la condamnation de Sarkozy puisqu’ils sont tous corrompus à des degrés divers et qu’ils risquent tous de subir le même sort un jour ou l’autre étant donné qu’ils n’ont pas plus de morale politique ou de morale tout court que Sarkozy: solidarité de caste, mais nous souhaiterions voir advenir une solidarité de destin.

En tête du peloton, l’inénarrable Marine Le Pen dont l’obstination à défendre les turpitudes du Système contre l’avis de 80% de ses propres électeurs devient un gag.

La lettre L’éclaireur  écrit avec pertinence: « Nous n’allons pas pleurer sur le sort de Nicolas Sarkozy, homme vénal, grossier, corrompu, héritier sans intelligence de certains réseaux des Hauts-de-Seine montés par un ancien vendeur de pastis qui, lui, même s’il était un personnage inquiétant, n’avait que la France en tête. Sarkozy, comme tous ceux de sa génération et des suivantes, n’a jamais pensé qu’à lui-même. Sarkozy, c’est tout de même le retour de la France dans le commandement intégré de l’OTAN et la forfaiture du traité de Lisbonne – ce pour quoi ceux qui l’ont fait élire l’avaient fait élire» et pointe du doigt quelques affirmations péremptoires et commentaires hasardeux de ces politicards sans conviction, mais aussi sans compétence, hormis celles de défendre à tout prix l’accès à leurs prébendes et à leurs fauteuils, tels l’eurodéputé F.-X. Bellamy, Jean-Philippe Tanguy du RN ou François Ruffin que cette bonne feuille donne en exemple; Marine Le Pen, dont c’est la profession initiale de connaître quelques rudiments de droit (elle n’a peut-être pas été assez attentive à ses cours?), aurait mieux fait de se taire: « Mme Le Pen s’inquiète pour son propre sort, pour son appel à venir début 2026. Elle commet un gros péché d’orgueil. Elle est bien la victime d’une exécution provisoire de la peine complémentaire d’inéligibilité, exécution provisoire sans fondement et contraire à une décision du Conseil constitutionnel ».

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- Solidarité sans faille aussi de la presse de grand chemin (comme les bandits) et de la dizaine de milliardaires qui emploient et payent grassement ces « pressetitués ».

J’avais relevé ce commentaire hallucinant sur Internet d’un quidam qui se dit journaliste à France Inter, hallucinant parce que chaque mot, ou presque, est une contre-vérité:

«La lourdeur de la condamnation par le tribunal correctionnel, alors qu’on a jugé une intention qui ne s’est pas concrétisée est insupportable. Les Français lui reconnaissent une volonté, un dynamisme dans l’action, je pense à la médiation en Géorgie face à Poutine, au sauvetage et rapatriement de nombreux otages, à la crise financière… Il n’a jamais démérité, à aucun moment quand on sait à quel point son mandat n’a pas été de tout repos. Il n’a pas mis non plus la démocratie entre parenthèses et en lambeaux, avec des états d’urgence à répétition, comme ses deux successeurs. Soyez rassurés, il n'y aura pas de piètre chantage, voire un aveu de faiblesse politique de la part de Nicolas Sarkozy...».

- Enfin, et c’était plus inattendu, soutien d’un certain nombre de Français qui sont allés jusqu’à créer des cagnottes pour « aider » financièrement leur idole comme si Sarkozy était dans le dénuement le plus complet (en comparaison, souvenez-vous que les autorités interdisaient aux Gilets jaunes d’aider par ce moyen les familles de ceux qui avaient été emprisonnés ou blessés par la police).

Paul-Eric Blanrue a eu ce bon mot : « La France est le seul pays au monde où les gueux soutiennent ceux qui les ont ruinés ».

Reconnaissons que le peuple français a disparu, corps et biens, dès les premiers mois de cette funeste décennie 2020, noyé dans les miasmes délétères d’une fausse pandémie « soignée » par de faux vaccins. Disparus l’esprit critique, le bon sens, le ton posé, sage et réfléchi, le goût des nuances et des subtilités, l’empathie, la bienveillance, la courtoisie. Les cerveaux furent vidés, siphonnés, retournés, les visages masqués, les accolades interdites (les gens se présentaient le poing en avant comme s’ils voulaient tuer leur interlocuteur), ce fut le déchaînement des comportements absurdes, agressifs, vulgaires, des jugements à l’emporte-pièce, sommaires, le triomphe de l’emprise du Système… et de la loi de la jungle.

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Comment cela a-t-il été possible ? Par un conditionnement vieux de plusieurs décennies par l’entremise de la petite lucarne.

Les plus touchés par la propagande, ce qu’on appelle de nos jours l’ingénierie sociale, ont été les vieux et les classes aisées, en bref, les bourgeois, ceux qui pour rien au monde ne renonceraient à leur zone de confort.

Exactement les crétins incultes qui, de soixante-huitards qu’ils étaient, toujours émus par leur révolution de pacotille, ont changé de camp (enfin, croient-ils) et sont devenus des droitards, voire des droitardés (contraction de droitards et d’attardés). Des gens qui ne réagissent que par instinct, qui ont partagé le monde en deux parties, celle que guident leurs pulsions primaires, leur manichéisme et leur dogmatisme, d’un côté, et de l’autre, tous ceux dont ils ne savent rien et n'en veulent rien savoir.

C’est ainsi que si vous condamnez le génocide en cours à Gaza, ces imbéciles vous mettront dans la catégorie des gueulards LFI qui détestent la France, si vous pensez que la peine qui a été infligée à Sarkozy est loin d’être suffisante, ils vous diront que vous approuvez le « mur des cons » érigé par le Syndicat de la Magistrature et si vous critiquez les retournements de veste destinés à préserver les médiocres intérêts d’une Marine Le Pen, ils vous diront que vous ne comprenez rien à sa subtile stratégie.

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Moi, je constate que les Français ne constituent plus un peuple, d’abord parce que la mémoire des individus appelés Français a été complètement vidée, méthodiquement, jusqu’à ce que ces individus n’aient plus conscience d’appartenir à un même groupe issu d’un lointain passé, ayant une histoire commune, un ensemble d'êtres humains qui ont pu, tout au long des siècles, créer, sur un même territoire, une identité résultant de la formation d’une culture commune, de principes communs, de mœurs similaires, de valeurs identiques que tous reconnaissent comme faisant partie intégrante de leur propre vie, permettant de la structurer et de la guider. Voilà ce qui forme une communauté de vie et de destin à nulle autre pareille et qui permet d’enrichir le monde de sa spécificité.

Je terminerai en citant les propos d’un écrivain, Jonathan Sturel, qui rapporte lui-même le témoignage de Patrick Buisson, qui avait bien connu Nicolas Sarkozy puisqu’il en était l’un des principaux conseillers.

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« Dans son livre ʺLa cause du peupleʺ publié en 2016, Patrick Buisson rapporte un certain nombre de propos surréalistes et littéralement anti-blancs tenus par Carla Bruni, en présence notamment de Bernard Kouchner, de Christine Ockrent, de l'acteur Jean Reno et bien sûr du président Sarkozy lui-même.

Carla Bruni, se moquant apparemment des gueux tels qu'ils étaient caricaturalement montrés dans le film ʺBienvenue chez les chtisʺ, se lance ensuite dans une fine analyse raciale et eugéniste qui ne souffre, d'après Buisson, aucune contestation de la part des témoins. Elle accuse les Français d'être frileux et de se satisfaire de l'entre-soi, et leur reproche de ne pas assez ʺrenouveler leur vieux sang pourriʺ, c'est-à-dire de ne pas se mélanger avec le magnifique sang neuf des populations immigrées.

Puis elle vante le Brésil, à ses yeux un modèle de réussite métissée qui devrait inspirer la France.

Puis loin dans la même discussion, elle explique que les Noirs sont plus musclés que les Blancs et moins gras, ce qui explique leurs exceptionnelles performances sportives dans tant de sports, ʺsauf la natationʺ qui est une discipline où, d'après elle, une masse musculaire trop importante serait un handicap, ce qui expliquerait que les Blancs, pour une fois, s'en sortent mieux que les Noirs. Kouchner riposte et déclare que si les Noirs ne remportent pas les médailles d'or en natation, c'est tout simplement parce qu'il n'y a pas beaucoup de piscines en Afrique, sans quoi, évidemment, ils écraseraient les Blancs dans cette discipline-là aussi.

Ces échanges ont eu lieu en présence de Nicolas Sarkozy le 26 avril 2008. Quelques mois plus tard, il fera le discours de Palaiseau sur le ʺdéfi du métissageʺ.

Voilà le niveau des discussions et des préoccupations au plus haut sommet de l'État lorsque Nicolas Sarkozy en était le chef. Voilà ce qui se disait sur nous, devant lui, avec lui, voilà comment nous autres, les Français, étions considérés par ce clan malfaisant et malsain.

Ces gens nous haïssent à des niveaux que l'on peine à pouvoir seulement s'imaginer. Jamais nous ne devrons verser une larme pour ces ordures. »

Notes:

(1) https://x.com/sergiodde/status/1971802452593635728

(2) https://www.eclaireur.eu/p/edito-sarkozy-le-vrai-scandale

mercredi, 01 octobre 2025

Von der Leyen: téléphone portable ou démission

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Von der Leyen: téléphone portable ou démission

Harald Vilimsky

Source: https://www.fpoe.eu/von-der-leyen-handy-oder-ruecktritt/

La manière dont Ursula von der Leyen gère ses communications par téléphone portable n'est pas le fruit du hasard, mais bien une habitude – qui remet en question la crédibilité des dirigeants de l'UE.

Ursula von der Leyen affiche un comportement qui se répète systématiquement: lorsque la situation devient délicate, les messages disparaissent.

Alors qu'elle était ministre allemande de la Défense, ses téléphones portables professionnels se sont soudainement retrouvés vides lors de l'affaire des consultants, juste au moment où une commission d'enquête demandait à les consulter.

Dans le cadre de l'accord sur les vaccins avec Pfizer, elle s'est elle-même vantée d'avoir négocié par SMS avec le PDG de l'entreprise. Mais lorsque les journalistes et les tribunaux ont voulu consulter ces communications, les messages étaient « introuvables ».

Et maintenant, l'accord avec le Mercosur: Emmanuel Macron lui a écrit personnellement via Signal pour lui faire part des préoccupations des agriculteurs français. Ce message s'est lui aussi évaporé dans les airs, grâce à la fonction d'autodestruction activée (l'ombudsman de l'UE mène actuellement une enquête).

Ce n'est pas un hasard, mais une méthode. Von der Leyen définit sans autre forme de procès ce qui est un document et ce qui ne l'est pas. Elle décide seule de ce qui est archivé et de ce qui disparaît dans les limbes numériques. Ce faisant, elle bafoue des principes fondamentaux: transparence, responsabilité, contrôle démocratique. Quiconque met sans cesse le Parlement, les tribunaux et les médiateurs devant le fait accompli n'a pas sa place à la tête de la Commission européenne.

Le problème ne réside pas dans un seul message supprimé. Il s'agit d'une tendance systématique à dissimuler des informations qui devraient être rendues publiques. Ursula von der Leyen doit donc soit rendre enfin ses communications publiques, soit démissionner de ses fonctions.

Les sanctions et les droits de douane sont utiles. À ceux qui les ignorent

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Les sanctions et les droits de douane sont utiles. À ceux qui les ignorent

Enrico Toselli

Source: https://electomagazine.it/le-sanzioni-e-i-dazi-servono-a-...

Les sanctions sont sans aucun doute utiles. Elles renforcent ceux qui ne les imposent pas. Tout comme les droits de douane. Les exportations de viande bovine américaine vers la Chine ont atteint une valeur de 8,1 millions de dollars en juillet et de 9,5 millions en août. L'année dernière, leur valeur était respectivement de 118 et 125 millions de dollars.

Les Chinois sont-ils devenus végétariens ? Non, les exportations de viande bovine australienne ont atteint 221 millions de dollars en juillet et 226 millions en août. Soit une augmentation d'environ 80 millions par mois par rapport à l'année dernière. Les exportations de viande brésilienne vers la Chine ont également augmenté.

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Le problème pour les États-Unis est que la viande australienne coûte moins cher que la viande américaine et que les consommateurs chinois risquent de continuer à préférer la viande australienne même après un éventuel accord sur les droits de douane entre Washington et Pékin.

Cela vaut pour la viande bovine en Chine, mais aussi pour tout autre produit partout ailleurs dans le monde. Si les consommateurs russes s'habituent à des fromages « faux italiens » qui coûtent moins cher que les originaux, ils pourraient continuer à les acheter même après la fin des sanctions.

C'est pourquoi les sanctions sont contre-productives pour ceux qui les appliquent. Et seuls des idiots finis, ou de mauvaise foi, peuvent ne pas comprendre l'absurdité du chantage de Trump à l'Europe: les États-Unis imposeront des sanctions très sévères à Moscou si l'Europe cesse d'acheter du gaz et du pétrole à la Russie.

Et où l'Europe devra-t-elle s'approvisionner? Chez son allié américain, bien sûr. Au même prix? Bien sûr que non. Un peu plus cher. Seulement quatre ou cinq fois plus cher.

Ainsi, après avoir perdu le marché russe, l'Europe devra perdre encore plus de compétitivité sur la scène mondiale. Et les europhiles, bien sûr, ont dit OUI.

Gianfranco La Grassa, père de la théorie du "Conflit Stratégique" est décédé: un génie de la philosophie politique nous a quittés

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Gianfranco La Grassa, père de la théorie du "Conflit Stratégique" est décédé: un génie de la philosophie politique nous a quittés

Entrevue avec Gianni Petrosillo

propos recueillis par Carlos X. Blanco

Le 25 septembre 2025 dernier, l’éminent économiste et penseur italien Gianfranco La Grassa est décédé. Né en 1935, La Grassa laisse derrière lui, par sa longue vie et son intense labeur, une œuvre immense, insuffisamment connue, surtout dans mon pays, l'Espagne, où tout semble désormais inconnu de tous. Lié au marxisme dès sa jeunesse, il a fini par développer sa propre pensée, la "théorie du Conflit Stratégique" que, hélas, je dois avouer n’avoir découverte que relativement récemment. Dès le début, j’ai compris son importance et me suis immédiatement mis au travail. Il me paraissait urgent de traduire ses articles et livres (certains déjà disponibles en espagnol, d’autres en cours de traduction), et de collaborer – dans la mesure de mes modestes moyens et malgré ma “cancellation” académique – avec son disciple, mon ami Gianni Petrosillo. À l’occasion de son décès tout récent, il était de mon devoir de rendre hommage au Maître disparu. J’ai décidé, en accord avec Gianni, à qui je suis très reconnaissant, de commencer cet hommage à La Grassa par un entretien avec son disciple, quelques questions posées à celui qui connaît si bien le penseur et son œuvre. Un penseur ne meurt jamais totalement si son œuvre est étudiée et prise en compte.

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– Qui était Gianfranco La Grassa ? Que représente sa perte ?

Avant tout, permets-moi de te remercier, Carlos, pour le travail que tu accomplis. Gianfranco La Grassa a été très heureux d’apprendre que tu avais traduit un de ses derniers textes en espagnol, une langue qu’il chérissait beaucoup car certaines de ses œuvres ont été publiées dans le passé dans des pays d’Amérique latine hispanophones.

Gianfranco La Grassa fut l’un des plus grands interprètes de la pensée de Marx en Italie et hors d’Italie. Il était un marxiste rigoureux qui ne s’est jamais éloigné de la lettre de Marx, c’est-à-dire qu’il ne lui a jamais attribué de théorisations ni de développements de pensée qui ne se trouvaient pas dans ses écrits “terminés”, contrairement à beaucoup d’autres qui ont utilisé Marx pour lui faire dire des choses qu’il n’a jamais pensées, en les tirant d’œuvres inachevées ou même de notes (ce qu’il appelait les grundrissistes).

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Pour La Grassa, Marx était un scientifique et non un philosophe, et il l’a traité comme tel lorsqu’il s’est rendu compte que sa théorie ne menait pas aux résultats objectifs dont Marx lui-même parlait. Évidemment, l’interprétation de Marx par La Grassa a également varié selon les différentes époques, mettant en avant certains aspects plutôt que d’autres, mais il s’agissait toujours de Marx et non de fantaisies que certains intellectuels lui ont prêtées, réduisant Marx à un philosophe ou à un économiste embrouillé (comme dans la question de la baisse tendancielle du taux de profit ou de la transformation et, par conséquent, de la stricte correspondance entre valeur et prix de production).

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Marx n’était ni un philosophe ni un économiste. Il a fondé une nouvelle science, la critique des modes de production (l’enveloppe qui contient les forces productives et les rapports de production entre ces forces), et donc les rapports sociaux étaient son objet d’étude (Le Capital est une relation sociale, affirme Marx). Althusser appelait cela l’ouverture à la science du “continent histoire” et, comme disait Engels, la présentation d’une nouvelle science impliquait une révolution dans la terminologie spécifique de cette même science.

Or, La Grassa, à partir de Marx, découvre ou redécouvre le “continent politique” que Marx avait laissé au second plan (du fait qu’à son époque, la science économique, tout juste formalisée, était devenue la discipline à laquelle il fallait se confronter). Et le concept de lutte des classes (entre propriétaires des moyens de production et détenteurs de la force de travail), principal moteur de l’histoire, il le remplace par celui de "conflit stratégique" entre agents dominants qui n’agissent pas seulement dans la sphère économique mais dans toutes les sphères sociales, avec, en dernière analyse, une prévalence de la sphère politique.

Parce que la Politique n’est pas seulement un domaine humain, mais un flux d’action (en tant que série de coups stratégiques pour s’imposer), c’est-à-dire l’élément que l’on retrouve dans toutes les sphères. L’entrepreneur qui veut s’imposer sur le marché, l’idéologue qui cherche à se distinguer dans la sphère culturelle, le politique qui veut prendre le pouvoir, tous font de la politique en ce sens.

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En utilisant un langage classique, avec La Grassa, l’économie cesse d’être la détermination en dernière instance de nos systèmes et c’est la politique qui le devient, non pas comprise comme sphère sociale, mais comme une série de coups stratégiques pour s’imposer dans chaque domaine.

Ainsi, La Grassa s’est éloigné de Marx, mais à partir de Marx, et a assumé la responsabilité de cette étape sans l’attribuer au penseur allemand.

Si l’on veut situer Gianfranco, il faut le placer parmi les continuateurs de la soi-disant école réaliste italienne, celle qui met la politique au premier plan dans son sens le plus cru et réaliste, de Machiavel à Michels, Mosca et Pareto, mais toujours avec une originalité propre. C’est avec Machiavel que la politique devient science, et Gianfranco ajoute quelque chose de nouveau et de différent à toute cette grande école italienne.

– Pour toi, personnellement, en tant que disciple et collaborateur durant de nombreuses années, que représentait cet homme?

Ce n'est pas facile pour moi, en ce moment, de parler de ma relation avec Gianfranco, si peu de jours après sa mort. J'étais beaucoup plus jeune lorsque nous nous sommes connus, et nous avons collaboré jusqu'à tout récemment. Pendant vingt ans, nous nous sommes vus (au moins une fois par an, car il vivait dans le nord de l’Italie et moi dans le sud) et nous nous parlions tous les jours. Pour moi, il a été un maître en tout. Un de ces maîtres tellement supérieurs que la règle du disciple qui dépasse le maître ne s'applique pas. Comme le disait Engels de Marx, c’était un génie. Eh bien, La Grassa fut, mutatis mutandis, un penseur de ceux qui ne naissent que très rarement. Évidemment, il n’a pas reçu de son vivant tous les mérites qu’il aurait dû, car il était peu enclin à se mettre en avant, comme seuls les plus grands savent l’être. Sa pensée passait avant son individualisme et, de ce fait, la société ne se rend souvent pas compte de ce qu’elle a perdu. En effet, il a écrit énormément d’essais, mais je ne me souviens d’aucune présentation publique; il préférait s’adresser à peu de gens, mais à ceux qui étaient vraiment intéressés à construire quelque chose de sérieux.

– En quoi consiste sa théorie du Conflit Stratégique ?

Marx, en décrivant la dynamique de la société capitaliste, place au centre la sphère productive, bien qu’elle ne soit pas strictement économique (la réflexion sur les rapports sociaux et sur le Capital comme relation sociale que nous avons esquissée dans la première réponse), la considérant, sinon comme la sphère dominante par rapport à la politique et à l’idéologie-culture, du moins comme la déterminante “en dernière instance”.

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Selon lui, la concurrence entre capitalistes guide l’expansion de la production et l’augmentation du taux d’exploitation de la force de travail, menant, en raison de contradictions internes, à la formation du travailleur collectif coopératif (union de cadres et de journaliers), la nouvelle classe sociale qui, formée dans ce processus, aurait renversé le capitalisme, puisque les capitalistes eux-mêmes, déjà désintéressés par la production et réduits à un noyau restreint, se seraient transformés en simples actionnaires et spéculateurs financiers. Cependant, Marx concentre principalement son analyse sur l’innovation des processus et sur la plus-value relative, négligeant totalement l’innovation des produits et les dynamiques stratégiques entre capitalistes, ainsi que la nécessité d’interagir avec des acteurs sociaux non strictement économiques. Ainsi, sa prévision du développement capitaliste reste liée à une vision téléologique, presque inévitable, de l’histoire: les contradictions internes auraient automatiquement créé les conditions de la révolution.

La Grassa, à partir d’une critique de ces limites, propose une approche alternative fondée sur le concept de “conflit stratégique”. Ce conflit n’est pas simplement un antagonisme entre capitalistes ou entre classes, mais un processus continu de désagrégation et de ré-assemblage des forces sociales, entraînées par le flux constant du réel et s’affrontant en raison d’une force objective qui traverse la société humaine elle-même. Les acteurs sociaux (politiques, économiques, culturels) créent des alliances temporaires pour prévaloir, innovent dans les produits et les processus, se restructurent et s’adaptent en réponse aux pressions concurrentielles, générant des dynamiques imprévisibles qui façonnent la société de manière non linéaire ni déterministe. Le conflit stratégique devient ainsi le moteur principal des transformations sociales, remplaçant l’idée marxiste d’un chemin historique prédéterminé.

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Cette approche permet de comprendre comment la société capitaliste contemporaine évolue à travers la négociation continue du pouvoir, des ressources et des capacités entre différents acteurs. Il n’existe plus de sujet révolutionnaire unique, comme le travailleur collectif décrit par Marx; au contraire, les possibilités de transformation émergent des interactions stratégiques entre groupes et individus, des innovations et de la compétition constante qui caractérisent non seulement l’économie moderne, mais toute l’agrégation humaine. La Grassa met ainsi en évidence que la clé pour comprendre le capitalisme contemporain ne réside pas tant dans l’analyse de la seule exploitation de la force de travail, mais dans la lecture du conflit stratégique comme dynamique fondamentale et moteur du changement social.

En synthèse, alors que Marx voyait le capitalisme comme un système dont les contradictions internes mèneraient inévitablement à une transformation révolutionnaire, La Grassa interprète la réalité moderne comme un ensemble complexe de conflits stratégiques, où la nécessité de prévaloir, qui peut se manifester de diverses manières — concurrence, affrontement direct ou dissimulé —, façonne continuellement les possibilités de développement, de restructuration et de changement de la société. Ce sont surtout les groupes dominants et ceux qui les défient qui déterminent ces conflits, au niveau étatique et international, mais aussi dans d’autres sphères. Cela réduit donc le conflit de classe à un aspect secondaire, qui peut cependant émerger avec plus de force dans certaines circonstances historiques, lorsque, par exemple, les classes exploitées sont de nouveau entraînées dans l’histoire par certains groupes qui ont besoin de leur apport pour modifier les rapports de force. Mais les revendications de la classe ouvrière, comme le disait Lénine, sont toujours syndicalistes, jamais révolutionnaires; les bolcheviques, par exemple, en tant que groupe d’avant-garde l’étaient, mais leur arrivée au pouvoir n’a pas signifié que la classe ouvrière ait réellement pris le contrôle de la société. Évidemment, la question est plus longue et complexe, et pour la définir, il faudrait lire les livres de Gianfranco, auxquels je dois évidemment renvoyer pour plus de précision.

– Maintenant que nous sommes peut-être aux portes d’un conflit mondial, peut-être la Troisième Guerre mondiale, la géopolitique suscite un intérêt croissant. La théorie du Conflit Stratégique ne s’insère-t-elle pas parfaitement dans cette discipline? La géopolitique est-elle la grande absente chez les auteurs marxistes?

Tout d’abord, je voudrais préciser ce que je considère comme étant la géopolitique dans l’enseignement de La Grassa. Je la comprends comme l’ensemble des flux politiques, économiques et militaires qui traversent les espaces et les aires géographiques. Ces mêmes flux, en se pénétrant et en s’entrecroisant, influencent les structures des différentes formations sociales, comprises comme des pays individuels (dans leur totalité) ou comme des aires homogènes regroupant plusieurs pays. Ces faisceaux de flux ne peuvent être interprétés de façon aseptique, car ils sont le résultat d’une direction spécifique qui porte en elle la propension hégémonique des différents acteurs en jeu.

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La géopolitique s’apparente donc beaucoup à une partie d’échecs, où l’enjeu est le contrôle des structures politiques, économiques, énergétiques et militaires de régions géographiques entières. Comme tout bon joueur le sait, il ne faut pas toujours affronter l’adversaire de front, mais le pousser à se découvrir afin de pouvoir le mettre en échec. Les manœuvres d’irritation de l’ennemi deviennent alors fondamentales: il doit être continuellement provoqué d’un côté pour être capturé de l’autre. Dans ce développement de multiples tactiques liées à un dessein stratégique plus ou moins défini (car dans la poursuite graduelle des objectifs intermédiaires, la stratégie générale se modifie aussi, sans pour autant perdre son essence), l’utilisation d’instruments de soft power et de hard power est implicite.

Nous n’avons jamais négligé la géopolitique; beaucoup d’autres marxistes, en revanche, l’ont fait, aveuglés par un internationalisme ouvrier inexistant. Nous l’avons cependant intégrée dans une analyse théorique plus large qui part justement du conflit stratégique, dont l’expression maximale est l’affrontement entre groupes dominants de différents États pour la suprématie mondiale. Nous nous approchons d’une période de guerres — même s’il est difficile de dire dans quelle mesure elles ressembleront aux guerres mondiales du passé —, car le pays unipolaire, les États-Unis, est en relatif déclin et se trouve défié par de nouvelles puissances. Quant aux résultats de ce conflit, qui naturellement deviendra de plus en plus direct, il est encore difficile de faire des prévisions sûres.

Face à la Russie de Poutine, aujourd’hui premier adversaire, avec la Chine, des États-Unis, les Américains ont alterné le hard power (intervention militaire en Serbie, considérée comme une zone de fraternité pro-russe; puis, après la Serbie et d’autres manœuvres déstabilisatrices, la guerre par puissance interposée en Ukraine) et le soft power (la promotion des “révolutions de couleur” dans les anciennes républiques soviétiques d’Europe centrale et de l’Est), cherchant à enclencher une manœuvre d’encerclement du géant russe et en se concentrant, de plus, sur la possibilité de déstabiliser les pays traditionnellement sous l’hégémonie de Moscou. Certes, les Américains ne sont pas encore prêts à affronter directement une puissance nucléaire comme la Russie (frapper les premiers et annihiler sa possible riposte nucléaire), mais ils conspirent pour limiter ses zones d’influence et l’isoler de ses alliés potentiels.

Cependant, je ne pense pas qu’il y ait déjà une Troisième Guerre mondiale ; il faudra encore des années et il n’est pas certain qu’elle puisse être comparée aux précédentes, qui elles-mêmes n’étaient pas comparables entre elles ni à celles qui les ont précédées.

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– Le concept de « démocratie libérale » nous est présenté comme une grande tromperie, une farce. Chez La Grassa, retrouve-t-on davantage Lénine ou Schmitt ? Qu’en penses-tu ?

Sous des formes différentes, Lénine et Schmitt sont deux grands penseurs, et Schmitt s’est sans aucun doute confronté à la figure de Lénine, qui réunit en lui la capacité de théorisation et la force révolutionnaire sur le terrain, comme cela s’est rarement produit dans l’histoire. Aujourd’hui, ayant définitivement dépassé les stigmates idéologiques, du moins en ce qui nous concerne, nous pouvons puiser librement chez tous, dans tout ce qui peut nous aider à comprendre le monde et, si possible, à le transformer.

Nous n’avons pas de « recettes pour les auberges du futur » ni même de système social à construire, mais nous savons que la démocratie libérale et le pays qui l’a utilisée en adaptant son concept à son image et à sa ressemblance est notre ennemi; qu’on soit clair, je ne parle pas d’un ennemi culturel, je ne suis pas anti-américain par préjugé, mais par choix politique. Trop de pouvoir concentré dans un seul pays aggrave les problèmes et tout devient démesuré: trop de massacres, trop d’injustices, trop de guerres. Nous n’éliminerons jamais ces choses du monde et il n’y aura jamais d’équilibre parfait des forces, mais il faut veiller à ce qu’un seul gendarme ne décide pas de ce qui est juste ou non.

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La démocratie a toujours été l’emballage d’une certaine dictature, celle du modèle américain qui s’est imposé au monde, avec ses récits individualistes et libertaires, mais même la liberté, de cette façon, n’est qu’une cage dorée. Comme se demandait Lénine: liberté pour qui et pour faire quoi? Aujourd’hui, je suis libre d’exprimer ma pensée — à vrai dire, de moins en moins — et avec le risque d’être traduit devant les tribunaux, ou devant le tribunal de la pensée politiquement correcte qui juge sans même qu’il y ait procès.

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Mais la démocratie a toujours recouru à de nombreux systèmes pour réprimer ou rendre insignifiants ses adversaires, de façon légère ou sévère selon les situations. Même le droit de vote, aujourd’hui, est complètement inutile, et l’a peut-être toujours été. Je ne peux voter que pour ceux qui se présentent, aujourd’hui ils sont de plus en plus inacceptables, et d’ailleurs, les gens ont cessé de voter, mais eux n’ont pas cessé de décider du destin des pays; je dis «eux» parce qu’ils sont tous pareils.

Je pense maintenant à l’Italie, où il y a un gouvernement de centre-droit, dirigé par Meloni. Quand Meloni n’était pas au pouvoir et était dans l’opposition, elle parlait de souveraineté nationale, de ne pas s’opposer à la Russie, de reconnaître la Palestine. Devenue Première ministre, elle a renié toutes ces positions, adoptant l’inverse, car en Italie, peu importe qui gagne, ce sont les Américains qui décident de ce qui peut ou non être fait. Nous sommes un pays où il y a des centaines d’installations militaires américaines, nos services secrets sont infiltrés par les États-Unis, nous sommes occupés depuis la Seconde Guerre mondiale, de quelle liberté nous parle-t-on?

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Comme le disait Albert Caraco, « Pour un pays qui fait l’Histoire, il y en a plus de vingt qui la subissent, et dans ces vingt, chaque parti, quel qu’il soit, est le parti de l’étranger, même s’il se proclame nationaliste. » Je suis un peu l’actualité en Espagne et, même s’il y a quelques différences, il me semble qu’il n’en va pas très différemment là-bas, car toute l’Europe est une extension des États-Unis, mais le monde change, et cette subordination qui nous avait garanti une longue période de tranquillité est en train de devenir, dans le nouveau contexte historique, ce qui nous ruinera.

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– Comment comptes-tu travailler désormais sur le plan intellectuel ? Que feras-tu de l’immense héritage de ce Maître? Le site Conflitti e Strategie (http://www.conflittiestrategie.it/) est-il un instrument pour cela?

Je maintiendrai assurément la pensée de La Grassa vivante et, comme il l’aurait souhaité, nous veillerons à ce qu’elle soit actualisée et, si nécessaire, dépassée, car son approche était scientifique. Gianfranco répétait toujours une phrase de Max Weber: « Chacun de nous sait que, dans la science, son propre travail, après dix, vingt, cinquante ans, aura vieilli. Tel est le destin, ou mieux dit, telle est la signification du travail scientifique, lequel, par rapport à tous les autres éléments de la culture pour lesquels on peut en dire autant, y est subordonné et s’y confie dans un sens absolument spécifique: tout travail scientifique “achevé” entraîne de nouveaux “problèmes” et désire vieillir et être “dépassé”. Celui qui veut servir la science doit s’y résigner. »

Le site continuera d’être un outil pour réaliser ce travail, mais nous espérons que d’autres naîtront, de partout. Ensuite, il y a toutes ses lettres et documents à organiser, un penseur laisse toujours beaucoup.

– Quels auteurs, vivants ou disparus, sont les plus proches de l’héritage de La Grassa ?

Je ne saurais te dire quel penseur est le plus proche de La Grassa, sa pensée est très originale, mais on peut retrouver des idées chez de nombreux grands du passé. Aujourd’hui, je vois peu de disposition à innover et à penser vraiment. L’époque n’aide pas, et c’est l’histoire qui fait les grands hommes, dans tous les domaines, jamais l’inverse. Ici aussi, Gianfranco disait : « Essayez d’imaginer Marx sans la Révolution industrielle (première et seconde phase) et sans 1848, il n’aurait probablement pas pu théoriser ce qu’il a ensuite fait. »

– Penses-tu que le “gauchisme” est une maladie infantile (Lénine) et même un soutien stratégique du Capital?

Cette question est importante pour clarifier ce qu’a toujours été la gauche dans l’histoire, pas seulement aujourd’hui. Comme le disait Lénine, c’était le lieu de la trahison des dominés. La gauche a toujours trahi les exploités. Aujourd’hui, elle le fait même ouvertement. Depuis que la gauche s’est détachée du marxisme et des idées communistes, elle a montré son vrai visage. C’est l’idéologie des classes aisées qui ont honte de l’être, mais pas de profiter de leurs privilèges, qu’elles exhibent sous des formes raffinées. La gauche, disait Gianfranco, est le cancer de la société et la droite un faux remède homéopathique. Tout cela reste à réinterpréter et à construire.

– Merci beaucoup Gianni. Étudions l’œuvre de La Grassa, c’est notre meilleur hommage, comme tu le sais bien.

Politique française: état du vide

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Politique française: état du vide

Claude Bourrinet

Moins de deux ans avant les élections présidentielles, l'affaire semble être pliée. Le bloc néolibéral atlantiste et sioniste l'emportera, quel que soit le lauréat. Ce sera sans doute Bardella. Il n'imitera même pas Meloni qui, bien qu'inféodée aux Américains et à Israël, est quand même italienne, donc intelligente, et sait louvoyer entre les écueils, en chopant au passage son bout de gras.

Bardella, comme tout bon petit soldat, saura exécuter, droit dans ses bottes, les injonctions de Bruxelles, de Washington, et de Tel Aviv. Pas d'espérance de ce côté-là ! Le problème, avec le bonapartisme, ou le gaullisme, c'est que le peuple n'est, avec lui, respecté et défendu, que quand il y a un Napoléon (authentique), ou un De Gaulle. La plupart des fois, les veaux qui sortent de cette étable sont dociles comme des chiens dressés, et on ne les emploie que pour taper à crocs rallongés sur les protestataires, les mauvais couchants. Le RN, comme LR-UMP-RPR, ne sera qu'une gendarmerie sans trop de vergogne, un peu plus brutale que Retailleau.

a262c9087d1a07aa84c5e8f5671c9b02.jpgLa gauche n'est plus dans la gauche, depuis Mitterrand, qui n'a jamais été de gauche, et qui n'était qu'un pétainiste vêtu d'une peau de mouton rose (et cette or***ure d'Yves Montand !). Il a eu l'adresse de faire abandonner, de concert d'ailleurs avec le PC et les gauchistes, l'idée traditionnelle de lutte des classes, pour le substituer par le combat « antiraciste » (il suffit de voir où se situent maintenant les Julien Dray, les Cohn-Bendit etc.!), ainsi que par le féminisme délirant et l'idéologie LBGT made in USA.

On peut dire que ce fut dans les années 80 que l'ensemble de la classe médiatico-politique fut complètement américanisée, soit dans la vie même, charnelle, existentielle, intime, de ces gens-là, soit idéologiquement. On a eu d'un côté des néolibéraux qui furent un temps reaganiens, ou proches des Démocrates yankees, de l'autre ce qu'on allait appeler des wokistes. Mais l'identité française (je parle sur ce point de celle de gauche: la Commune, les luttes ouvrières, le syndicalisme révolutionnaire, les grandes grèves insurrectionnelles, le drapeau rouge, etc.) fut bafouée (par un Coluche, par exemple), ridiculisée, dans le même temps où la classe ouvrière se dissolvait dans la masse atomisée de la nouvelle société libérale.

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On sait que l'industrie française, contrairement à celle d'une Allemagne surpuissante, et d'une Italie moins bête que nous, a disparu, parce qu'on a pensé, en haut lieu, qu'il valait mieux être trader, informaticien, ou torcher le cul des vieux, que d'être ouvrier dans une usine sidérurgique. Le « peuple » « français » ne réagit presque pas (sauf électoralement, en étant battu de très peu lors du référendum de 1992 – et après une filouterie de Mitterrand -  et lors du référendum de 2005, qui fut bafoué par Sarkozy et la caste médiatico-politique). Ces réactions de rejet furent, du reste, le sursaut d'un agonisant.

Le plus étrange est l'assentiment du « peuple » à sa propre servitude. Je ne veux pas parler que de la ruée vers les gadgets électroniques, l'adulation de la voiture bourrée d'options, la téléphonie, les écrans, la bouffe de merde, Netflix, Walt Disney, les modes grotesques, la « music » de boîte, la country etc., mais de la volonté à peine imaginable de rester dans l'Europe, dans l'UE, quand il est prouvé que la bureaucratie bruxelloise et la monnaie forte (le Mark, en vérité) nous ont étranglés, nous ont tués. Évidemment, nous n'avons pas la puissance économique pour rééquilibrer cette ânerie (le peuple est bête par essence), et les journalistes, les politicards, toutes "sensibilités" confondues, tiennent le même discours, défendent la même pensée unique depuis plus de trente ans, avec moins d'enthousiasme, il est vrai.

fcf284cc861baf5b4cca2aee37b4d1a9.jpgUn semblable constat s'impose à l'égard de la politique étrangère. Dans les années 60, la France a pu occuper, dans le concert mondial, une situation de relative indépendance, ce qui a suscité l'admiration et la gratitude de nombreux pays du bloc communiste et du Tiers-Monde. Mais il y avait un de Gaulle, une fraction de la classe politique issue de la Résistance, et un Parti communiste fort. Rien de tout cela n'existe plus, maintenant, et il est inutile de passer en revue le champ de ruines actuel, sans compter le piteux étiage moral et humain qui caractérise une élite corrompue, inculte, vulgaire, traître, et sans aucune conviction autre que des plaisirs de caniveau ou la volonté d'enfumer.

Progressivement, ceux qui ont un certain âge ont vu, en concomitance de l'effondrement scolaire et de l'abrutissement des élèves, une chute spectaculaire de l'intelligence, de la mémoire, de la réflexion politique complexe dans toutes les couches de la population. On a par exemple remplacer l'analyse réaliste, dialectique, sociale, propre au marxisme, par une logorrhée (la diarrhée du verbe) binaire, moralisatrice, manichéenne, chouineuse, qui a fait le lit de la propagande, laquelle se nourrit d'émotion et de gros slogans aussi évidents qu'une vache dans un couloir.

Le « peuple » français (pourquoi des guillemets ? Nous parlons d'un agglomérat d'individus perdus et sans aucun lien d'intérêt avec les semblables) est devenu, donc, en trente ou quarante ans, poreux extrêmement à l'endoctrinement, aux stimuli médiatiques qui produisent de l'adrénaline (surtout quand on cherche à effrayer) et oriente les comportements. C'est ainsi que l'Ukraine est devenue le parangon du Bien, que l'ogre russe est le diable, que Poutine est un tyran, et qu'on laisse ceux qui protestent contre un évident génocide se faire réprimer sauvagement.

6895828-portrait-de-raphael-glucksmann-a-paris-l-1200x0-2-498914417.jpgCertes, on a parfois de brusques flambées de révolte, mais qui ne débouchent sur rien. Pourquoi ? Parce qu'il n'y a plus de gauche. Ne parlons pas du PS , des Verts, de Glucksmann (photo), de Hollande etc. Il n'y a entre eux et le RN que la minceur de quelques coups de menton rhétoriques (mais le problème est que, in fine, LFI appellera à voter Glucksmann).

Les macronistes ont l'air de passer en grande partie du côté de l'atlantiste sioniste Glucksmann. Quant à LFI, il mobilise sans doute quelques restes des classes populaires (dont l'ensemble est passé du côté du RN, et il faudrait se demander pourquoi), beaucoup de populations issues de l'immigration (mais en regard de la totalité, bien peu, sauf pour défendre -avec raison et honneur – le peuple palestinien), et, pour la plupart, des classes moyennes « diplômées », souvent plus sensibles aux revendications sociétales (y compris le droit de fumer de l'herbe) que des luttes sociales. Mais même parmi ces couches « diplômées » (qui constituent près de 50% du corps social, son ventre mou), se trouvent une majorité d'indifférents, qui ne voient que leur nombril et leurs plaisirs de consommateurs, et une partie non négligeable qui vote RN, par racisme.

SIPA_01127227_000007-1-157578861.jpgMais que Mélenchon se console. Le jeu n'en vaut pas la chandelle. Les élections nationales, sauf peut-être dans un pays aussi dominant que l'Allemagne, ou l'AfD est un vrai parti d'opposition, qui peut faire basculer l'Europe, ne sont que le choix du président du club de belote dans l'Ehpad d'une petite ville d'Auvergne. Plus de 60% des lois nationales sont des directives de la Commission européenne, seuls 18% des décisions sont prises par le parlement français, le reste étant des décrets. Nous n'avons plus aucun pouvoir, et les élections sont une farce. Lorsque, par aventure, elles tournent mal pour l'oligarchie occidentale, on s'empresse vite de les casser, de les bafouer, quand elles ne sont pas, de toute façon, manipulées. On l'a vu dans des élections récentes en Europe centrale. Et s'il s'agit de choisir entre des camps qui partagent les mêmes trahisons, est-ce la peine de se déranger ?

Car, dans le fond, hormis, je le répète, dans le cas palestinien, qui n'imposait qu'un seul choix, pour un Français digne de ce nom, celui de l'honneur de défendre la dignité humaine, la classe politique est sur la même ligne de politique étrangère, soit par bêtise, inculture, absence de réalisme, soit par veulerie, de peur de se faire ostraciser. Il est évident, par exemple, que la guerre d'Ukraine est, depuis le début, qui a commencé il y a plus de vingt ans, quand l'Otan a avancé méthodiquement vers l'Est, afin d'atteindre les frontières russes, que le conflit opposant la Russie à l'Occident, à l'Otan, à l'empire anglo-américain (et je me demande ce que la France gagne à être dans cette galère).

L'objectif de l'oligarchie occidentale sous obédience américaine a toujours été, depuis deux ans ans, de briser l'empire russe, de le démanteler, de le piller, et d'atteindre l'Asie centrale, bastion d'où l'on domine le monde, et qui permettrait, maintenant, de prendre la Chine et l'Iran à revers. Il est évident que c'est l'intérêt aussi d'Israël. Cependant, comme chacun sait, les BRICS sont là, et la Russie, la Chine, l'Inde, l'Iran, le Brésil etc. affrontent un empire américain sur le déclin.

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Quand Mélenchon a soutenu, en 2010, Sarkozy, BHL, Kouchner, Hillary Clinton etc., dans leur entreprise de destruction de la Libye, avec tous les effets indésirables qu'on connaît, dont le terrorisme, c'était un mauvais signe. La « gauche morale » ne sait pas penser, parce que la morale n'est pas une pensée. L'avenir s'annonce sombre. Tant que la gauche s'en tiendra à des positions aussi stupides, qu'elle soutiendra une immigration de masse sans limites, des projets sociétaux ineptes, et qu'elle s'en tiendra à des slogans creux, elle échouera toujours.

Cela étant dit, il n'y a peut-être plus d'espoir, car il n'existe plus de peuple français, dont les éléments émiettés tournent leurs pauvres cerveaux et leurs cœurs pervertis vers l'Oncle Sam et Miami. Je ne voudrais pas être prophète de malheur, mais peut-être un gros malheur remettrait ces organes vitaux en place, en les recentrant sur la Terre de France. En tout cas, l’avenir, c'est la Chine, la Russie, l'Inde, le Brésil, et s'attacher à l'Amérique, c'est se ligoter à un noyé.

Haaretz et le projet de Tony Blair pour Gaza

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Haaretz et le projet de Tony Blair pour Gaza

Haaretz a révélé les grandes lignes du projet avancé par Tony Blair, ancien Premier ministre britannique, visant à gérer la bande de Gaza après un éventuel cessez-le-feu.

"Le quotidien israélien Haaretz a révélé les grandes lignes du projet porté par Tony Blair, ancien Premier ministre britannique, visant à gérer la bande de Gaza après un éventuel cessez-le-feu. Cette initiative, soutenue par Washington, prévoit la mise en place d’une structure transitoire baptisée "Autorité internationale intérimaire pour Gaza" (GITA), dotée d’un budget initial de 387,5 millions de dollars sur trois ans.

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Le projet de Blair repose sur une architecture institutionnelle hiérarchisée. À son sommet, un conseil international composé de diplomates, d’investisseurs et de figures influentes issues du monde arabe et occidental. Ce conseil serait dirigé par Tony Blair en tant que plus haute autorité politique de l'entité. L'administration opérationnelle sur le terrain serait quant à elle assurée par des technocrates palestiniens, indépendants de toute affiliation partisane (ni Hamas, ni Fatah).

La mission de cette instance comprendrait la coordination sécuritaire, la rédaction de lois, la reconstruction et la gestion des affaires courantes. Trois structures sécuritaires distinctes seraient créées : une unité de protection rapprochée, une police civile neutre, et surtout une force internationale de stabilisation, chargée de la sécurité aux frontières, de la lutte contre le terrorisme et du contrôle des flux d’armes.

Les membres potentiels du conseil incluraient la diplomate onusienne Sigrid Kaag, l’homme d’affaires américain Marc Rowan, le milliardaire égyptien Naguib Sawiris, et AriyehLightstone, lié aux Accords d’Abraham. L’objectif affiché est de garantir ensuite une légitimité régionale par une représentation musulmane crédible, politiquement soutenue et économiquement influente.

La mise en œuvre de cette initiative se ferait en plusieurs étapes : d’abord depuis l’étranger (Al-Arich, Le Caire, Amman), puis avec une présence progressive à Gaza, à partir de la deuxième année. L'administration serait distincte de l’Autorité palestinienne (AP) mais travaillerait partiellement en concert avec elle. La transmission complète à l’AP est envisagée, mais aucun calendrier précis n’est avancé.

Toutefois, cette initiative se heurte à une forte opposition. Hamas a fermement rejeté toute implication de Tony Blair, qualifié de "personnalité indésirable", dénonçant son rôle historique dans la guerre en Irak et son absence totale de légitimité dans le contexte palestinien. Aucun canal officiel n’a, à ce jour, confirmé une proposition de cessez-le-feu impliquant ce plan.

La faisabilité d’un tel projet reste donc incertaine, tant en raison des tensions politiques que de la complexité sécuritaire sur le terrain. Si l’idée d’un mécanisme international de gestion peut répondre à des urgences humanitaires, sa légitimité et sa viabilité dépendent de son acceptation par les acteurs palestiniens eux-mêmes."

Analyses d' O. El Kachtoul, diplomate.

Lien https://www.linkedin.com/posts/othman-el-kachtoul-24b4743...

En savoir plus

Lien https://www.theguardian.com/world/2025/sep/25/washington-...  " Washington soutient le projet de Tony Blair de diriger l'autorité de transition de Gaza"

Lien : https://img.haarets.co.il/bs/00000199-91d1-dc12-a5df-99db... - Haaretz publie un organigramme et décrit les fonctions projetées : conseil international, secrétariat exécutif, commissaires de supervision, etc. Ce schéma mentionne aussi des entités comme une autorité d’investissement (GIPEDA), une unité judiciaire, une police civile, etc..

https://t.me/dynamiquesdeconflit

mardi, 30 septembre 2025

Pour la fête de l’archange Michel

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Pour la fête de l’archange Michel

Karl Richter

Aujourd’hui, 29 septembre, c’est le jour de l’archange Michel. Il est vénéré non seulement comme guide des âmes et prince des anges, mais aussi comme le saint patron des Allemands. Sous la bannière de l’archange Michel, une armée composée de tribus germaniques sous Otton le Grand remporta, en août 955, une victoire écrasante sur les Hongrois lors de la célèbre bataille du Lechfeld – un symbole marquant du fait que le mal doit, si nécessaire, être combattu par la force brute. Ici-bas, sur terre, c’est malheureusement ainsi.

On devrait se rappeler l’ancienne prière de protection adressée à l’archange:

"Saint Michel archange, défends-nous dans le combat ! Sois notre protection contre la malice et les embûches du démon ! Que Dieu lui commande, nous t’en supplions humblement; et toi, prince de la milice céleste, précipite en enfer, par la puissance de Dieu, Satan et les autres esprits mauvais qui parcourent le monde pour la perte des âmes ! Amen".

L’Allemagne a aujourd’hui besoin de l’archange et de son soutien d’une manière toute particulière. Il est profondément significatif que ce soit précisément l’archange Michel, guerrier, qui ait été attribué aux Allemands. Il n’y aura pas de salut sans combat. Je me souviens d’une réflexion profondément sage de l’ancien pape Jean-Paul II lors de sa visite à Munich en 1987. Il déclara alors que l’un des plus grands triomphes du diable était d’avoir fait croire qu’il n’existait pas. Mais il existe. Bien sûr qu’il existe. Il suffit de sortir de chez soi ou d’allumer la télévision, et de regarder les objectifs que se fixe la politique. Il faut prendre conscience de l’aveuglement inimaginable de la majorité des gens en Occident, de leur hédonisme, de leur obscurcissement qui mène à la mort et porte la mort en lui. Tout cela est satanique. Il faut affronter le mal. Et il ne faut pas avoir honte de demander dans ce combat l’aide et la force de l’archange Michel.

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Les Foules de Lourdes, le testament antimoderne de Huysmans

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Les Foules de Lourdes, le testament antimoderne de Huysmans

Claude Bourrinet

Je veux qu’on y vienne en procession.

La Vierge

L’homme est un animal adorateur. Adorer, c’est se sacrifier et se prostituer.

Baudelaire ; Mon cœur mis à nu.

De la vaporisation et de la centralisation du moi. Tout est là.

Baudelaire ; Mon cœur mis à nu.

Une mystique naturaliste

Il restera toujours un fond naturaliste, chez Huysmans, qui, jusqu'à sa dernière heure où, vêtu de la robe noire et du capuchon des moines de Saint Benoît, il rendit l'âme, éprouvera, comme la présence lancinante d'une basse continue, le souci angoissé de trouver les signes tangible, matériels, du surnaturel, dans un monde livré à la banalité de la décadence, et encore davantage de sa propre existence d'homme souffrant en quête de salut (1).

OIP-1237687411.jpgIl appela cette approche épistémique « naturalisme spiritualiste », ou « naturalisme mystique », qui trouvera son acmé atroce et sublime dans son hagiographie, publiée en 1901, de Sainte Lydwine de Schiedam, dont le corps pourri, gangrené, broyé par le pilon de Dieu, à l’image du Christ peint par le « primitif » Grünewald, tableau qui l'a tant impressionné à Cassel, assure la substitution mystique destinée, par la souffrance, à sauver l'humanité (2). Il s'agit alors de restaurer un symbole (l’âme unie au corps), à l'opposé du scientisme de la Salpêtrière, qui réduit l'âme au corps.

Une comparaison avec Les Confessions de Saint-Augustin suffit à mesurer l'écart qui sépare ces deux convertis sur le tard. Chez l'évêque d'Hippone, on se laisse emporter par des élans lyriques de mysticité, par des considérations théologiques et philosophiques de grande portée, qui irrigueront la pensée médiévale, et au-delà. En revanche, chez Huysmans, on suit pas à pas un itinéraire quasi clinique, déroulant les méandres, les avancées et les retours en arrière d'une âme qui est loin de déboucher rapidement sur la voie royale, si tant est qu'elle y soit un jour parvenue, la foi n'étant jamais vraiment acquise. Huysmans était trop écrivain pour s'abandonner, trop écrivain moderne, c'est-à-dire héritier de la littérature qui débuta avec le romantisme, et transféra le souci du monde, la sociabilité innée des écrivains dits « classiques », oublieux de soi et refoulant l' « amour-propre », dans l'univers narcissique et obscur du poète créant sa propre centralité de prophète et Prêtre du moi, sinon du monde, et toujours en quête de vérité.

9789176377567-1280x1920-1095187269.jpg« Car il n’avait pas changé au fond, confirme Lucien Descaves dans ses souvenirs Des dernières années de J-K. Huysmans, parus en 1941. Il disait bien, un jour, à René Dumesnil : « La conversion, c’est un aiguillage ; l’homme est toujours le même. » Il demeurait fidèle à une vie casanière de célibataire et de bureaucrate, mais plus rétif encore à tout empiétement sur son indépendance d’écrivain, aussi bien dans l’esprit que dans la forme. Il était incapable de transiger là-dessus ; autrement dit, de soumettre un de ses manuscrits à l’agrément d’un directeur spirituel investi du droit de regard et de censure. L’écrivain ne l’eût pas toléré. »

Il est vrai néanmoins que son écriture, sa création littéraire, passent nécessairement par la révolution existentielle, violente et profonde, qu'il a vécue. (3) Les deux dimensions sont liées, et, contrairement à beaucoup de symbolistes, qui contrecarrent le pessimisme et la décadence par le culte de l'esthétisme, de l'art, du rêve, il unit intimement la douleur angoissée de la recherche religieuse à sa traduction sur la page blanche. La lecture de ses œuvres, à partir de Là-bas, pour ne pas parler d'En Route, impose à n'importe quel lecteur le sentiment d'être confronté à une expérience vécue.

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Les étapes douloureuses (doloristes?) de sa conversion, il les a annotées, comme un carnet de route, dans son œuvre: partant du satanisme dans son « Livre noir », Là-Bas (1891) (qui montre, somme toute, un monde surnaturel, un christianisme à rebours, opposé au naturalisme avec lequel il vient de rompre avec fracas avec A rebours (1884)), il saute le pas métaphysique, se convertit.

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Barbey d'Aurevilly avait eu, dès la parution d'A rebours, la prémonition de ce plongeon religieux: il avait prédit, dans un article du Constitutionnel du 28 juillet 1884, que Huysmans aurait un jour à choisir entre « la bouche d’un pistolet ou les pieds de la croix ». Ce chemin de croix (le Cycle de Durtal) est jalonné d’œuvres comme En route (1895) – il mit quand même trois ans avant de traduire littérairement sa conversion de 1892, à la Trappe d’Igny, où il reçoit les sacrements -, La Cathédrale (1898), L'Oblat (1903).

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Le dernier livre est la relation de sa tentative de se lier, en 1901, à l'abbaye de Ligugé (photo), dans le Poitou, aventure spirituelle interrompue par l'expulsion de la communauté monastique de Saint Martin, à la suite des lois anti-religieuses de la République franc-maçonne du Petit Père Combe, déclinaison locale – avec le Portugal, en 1911, d'une persécution plus vaste (ou de tentatives, comme en Belgique et en Allemagne), dont font l'objet, sous les pontificats de Léon XIII (1878 – 1903), et Pie X (1903 – 1914), les catholiques européens, y compris en Italie ou en Espagne.

Paradoxalement, cette époque fut aussi, contre un nihilisme de plus en plus rongeur et dissolvant, celle du grand mouvement de conversions littéraires que vont connaître les Lettres françaises au début du XXe siècle avec des auteurs comme Paul Bourget, Péguy, Brunetière, Claudel, Maritain, Jacques Rivière, Psichari, Massignon, Massis, Léon Bloy – qui fut très proche de Huysmans, et se brouilla violemment avec lui -, et d'autres, notamment à la faveur de l'influence d'un abbé très intégré dans les cercles mondains et artistique, l'abbé Mugnier (protrait, ci-dessous), lequel apparaît dans En route, sous les traits de l'abbé Gévresin, mais surtout de celle de l’abbé Gabriel Ferret, mort en 1897, à quarante-cinq ans, à qui Huysmans dédia La Cathédrale (1898).

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Le fil conducteur des livres de Huysmans, y compris les premiers, qui étaient naturalistes, sont marqués par une hostilité constante à la modernité, à l'américanisme, à la médiocrité contemporaine, à la bêtise triomphante et à la laideur qui l'accompagne, et fortement imprégnés de pessimisme schopenhauerien, considéré en cette fin de siècle décadente comme si « français » (« Nietzsche déclarait préférer lire Schopenhauer dans sa traduction française plutôt que dans sa version originale », rappelle Clément Rosset). Cette philosophie, à tonalité antimoderne, si tardivement connue, était assez répandue et partagée, explicitement ou implicitement, dans les milieux intellectuels d'alors, et le fut encore davantage au XXe siècle, par exemple par Proust, Céline, Beckett etc., pour n'évoquer que des écrivains français – ou de langue française. Tendance intellectuelle, voire existentielle, violemment contraire à la Weltanschauung chrétienne, mue par l'espérance. Encore faudrait-il tempérer cette opposition, si l'on prend en compte le dogme du péché originel, et un jansénisme qui a beaucoup imprégné la mentalité française, sans oublier un Baudelaire, l'un des maîtres à penser de Huysmans, qui se réclamait de Joseph de Maistre.

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Les foules de Lourdes

Les Foules de Lourdes est le dernier ouvrage de Huysmans, une sorte d'enquête à portée autobiographique, parue un an avant sa mort, le 1er octobre 1906, et relatant un pèlerinage dans la cité mariale, qui dura cinq jours, durant l'été 1904, dont l'écriture est si dense qu'on a l'impression d'un mois de séjour. Il y fut hébergé à la Villa Saint-Antoine par un couple, les Leclaire, qu'il connaissait bien, puisqu'il avait fait construire avec eux une grande demeure, la villa Notre-dame, destinée à accueillir un cercle chrétien d'artistes, non loin de l'abbaye de Ligugé, avant qu'il ne fît profession d'oblat, et quittât les lieux, désertés à la suite de l'expulsion de France des ordres religieux.

Voilà comment Lucien Descaves présente la naissance du projet d'écrire cet opera ultimate: « Vers la fin du mois d’août [1900], il avait été voir passer, en gare de Poitiers, les trains remplis de malheureux qui allaient chercher à Lourdes une guérison miraculeuse. Songeait-il déjà, ayant terminé enfin Sainte-Lydwine, qu’il était en train de raboter, songeait-il à une vision plus directe des souffrances humaines? Je le crois; mais il était sans doute momentanément refroidi par la lecture du roman de Zola. Il revint allégé de cette appréhension. Certes, les descriptions de Zola étaient « justes et admirables »; mais cette revue affreuse des suppliciés conduits vers une guérison hasardeuse par des gens du monde en gants frais et culottes de cyclistes, cela laissait tout de même à l’observateur quelque chose à dire. »

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Ce fut du reste à Poitiers que le mal, qui devait l'emporter, commença à être virulent. Lors de son séjour à Lourdes, le cancer à la mâchoire était bien avancé, mais il n'en touche pas un mot. La fin de l’année 1903 et le début de 1904 n’apportèrent à ses maux aucun soulagement.

J'espère montrer que ce récit, qui pourrait tout aussi bien être un roman qu'un reportage, est, selon moi, le chef-d’œuvre de Huysmans. Il mêle en effet, à la manière du romancier, une « intrigue », qui n'est pas rectiligne, mais circulaire, puisqu'il déambule sinueusement entre des points « stratégiques », comme la grotte, le cabinet des médecins qui constatent les miracles, la basilique, oscille de manière itérative, entre la foule et des réduits plus ou moins protégés, entre des personnes bien caractérisées, et l'anonymat des fidèles...

Dans le même temps, il se livre, s'insérant entre des descriptions d'une intensité pathétique et parfois grotesque, à de profondes réflexions religieuses, théologiques, tout en ressassant des griefs (la laideur de l'architecture, la médiocrité des spécimens d'humanité qui arrivent par wagons, les comportements grégaires). Il confronte son écœurement à des justifications, des objections spirituels, toujours hanté par la crainte d'être enferré dans le rets perfides du Malin à l'affût, dont on sent la présence pérenne, même en ces lieux inspirés par la Vierge, et surtout en ces montagnes mélancoliques des Pyrénées, si chargées de mémoire païenne.

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Nous verrons que ce que vit alors Huysmans ne concerne pas uniquement le chrétien, le catholique, mais aussi tout homme libre à l'ère des foules. De même, la filiation du monde lourdesque que Huysmans nous livre avec tout le talent de prosateur poétique qui est le sien n'est pas sans une parenté évidente avec l'univers dantesque. La filiation s'incarne par exemple au fil des cercles de souffrances, qui semblent s'aggraver à mesure que le regard aigu du narrateur inscrit dans notre imagination les symptômes monstrueux, à peine supportables, des maux qui tordent ou abattent, transforment en chair palpitante de douleur, en matière souffrante, des âmes qui ont parcouru des centaines de kilomètres dans des wagons cahotants.

Cette tératologie que Huysmans dévide comme une fresque infernale avec des mots puissants, des vocables parfois recherchés dont les sonorités et les couleurs nous font voir et sentir, au point que, tout en étant fascinés, nous sommes terrifiés, saisis de répugnance, sont, comme chez le poète florentin évoluant de bolgia en bolgia, évidemment des symboles: manifestation du péché, même parmi les innocents, les enfants – mais pour l'auteur de Là-bas, il n'y a pas d’innocence, nous sommes tous coupables, et la purulence de la chair est l'image, en vérité, d'une condition frappée par un mal profond, indéracinable. En même temps, comme dans la Divine comédie, nous sommes souvent émus, pris de compassion, d'une pitié irrépressible pour ces êtres touchés par la maladie, non seulement parce que ce sont des humains, comme nous, mais aussi, comme dit Homère, et toute l'Antiquité avec lui, parce que ce sont des mortels. Huysmans nous renvoie à ce que nous sommes, des créatures pathétiques, vaines, chétives, faites pour peiner, et c'est le sceau d'Adam et d'Eve.

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Il ne se livre d'ailleurs pas à une taxinomie des pèlerins en fonction de leurs talents. Le savoir, le génie même, n'apparaissent pas dans les critères qui président à ses descriptions. Malgré tout, il établit une hiérarchie: plus on est riche, plus on se livre à la représentation, à la commedia, au théâtre narcissique, et plus on cache sa misère dans les plis compliqués de sa vêture sociale, qui doit se voir; en revanche, quelques êtres simples, naïfs, aussi primitifs que la peinture médiévale qu'il prise tant, qu'ils soient âgés ou enfants, accompagnateurs ou patients, nonnes ou prêtres, trouvent grâce à ses yeux. Mais ils sont peu nombreux. Ils se singularisent par une présence sans arrière-pensée d'amour-propre, comme la rose qui est parce qu'elle est, ou par un sens du devoir plein, total, par cette noblesse de l'action qui, lorsqu'elle est orientée vers le bien, l'amour du prochain, élève jusqu'à la sérénité, et parfois l'extase. Combien d'infirmières, de soignantes, de brancardiers admirables se donnent ainsi à corps perdu ? Ils sont la prémonition du Paradis, que l'on n'entrevoit guère, et auquel on n'a pas accès, hormis dans ces espèces de songes ritualisés et concentrés que sont les prières vécues (toutefois, la majeure partie des malades les débitent à la chaîne, comme des formules magiques).

Et il y a l'espoir. Il fait vivre, en tout cas survivre, et, du moins le croit-on, guérit. Peu. Car à Lourdes, on s'arrête surtout à l'Enfer. Le purgatoire, la santé, qui est le salut sécularisé, pour ainsi dire, ne touche qu'une minorité. Des élus, en somme. Et gratuitement. Pourquoi celle-ci, et pas celui-là, qui aurait mérité autant qu'elle d'être sauvé ?

Il est, dans cette immense circonférence où le centre est dans chaque souffrance incommensurable, un petit cercle avec lequel Huysmans sympathise, dont les membres sont tacitement des complices, ou des happy few maîtrisant les afflux brutaux de vagues sensorielles qui renverseraient celui qui n'a aucun intérêt vital à se retrouver en ces lieux. Le petit groupe avec lequel il lui est possible d'entretenir sereinement des propos abstraits, en tout cas d'ordre rationnel, ou anecdotique, qui comprend, comme on l'a vu, des âmes simples, d'élite, si l'on veut, authentiques, proches sans doute de l’Évangile de Jésus, est constitué de quelques personnages importants dont la tâche à Lourdes implique une mise à distance. Ce retrait se traduit par une capacité à examiner, à penser la situation. Il y a quelques prêtres cultivés, mais qui ont leurs limites (notamment dans leur rapport avec la beauté), et des scientifiques, des hommes de métier, des médecins, dont le réflexe premier, professionnel, est de se montrer sceptique face aux présupposés « miracles ».

51dDX5g9KxL._SX210_-2409141416.jpgL'une des raisons sous-jacentes de l'écriture des Foules de Lourdes a été de répondre au meilleur ennemi de Huysmans, Zola, qui a mené, lui aussi, deux ans auparavant, son enquête. A vrai dire, tout n'est pas mauvais dans ce qu'il rapporte, et il avait semblé même, aux yeux de Huysmans, que l'hostilité du maître du naturalisme en fût ébranlée, car il est difficile, face à la souffrance, et face à l'espérance désespérée, de rester impassible. Toutefois, la prudence de ces praticiens renforçant leur argumentation, et des cas de guérisons inexpliquées étant mis à la question sous tous leurs aspects, la contestation de la thèse de l'illusion, de l'auto-suggestion, de l'effet psychosomatique, qu'avance le milieu de la psychologie incarné par Charcot, et partagé par Zola, est pesamment déployée, et, il faut l'avouer, assez convaincante.

1-jean-martin-charcot-french-neurologist-humanities-social-sciences-librarynew-york-public-library-4201815329.jpgJean-Martin Charcot (portrait) en effet, soutenait que les saints, les martyrs et les miraculés relevaient de mécanismes psychopathologiques et que les guérisons « miraculeuses » s'expliquaient par l'hystérie. Ces débats ont perdu de leur acuité, en ce premier quart du XXIe siècle, le christianisme ayant presque disparu de l'horizon médiatique, philosophique, ou scientifique, pour se retrancher dans les alcôves de la délinquance sexuelle.

Il n'est pas sûr non plus que de nombreux prêtres d'aujourd'hui ne partagent les analyses du neurologue. Nonobstant, l'impression que ce petit cercle échappe à la pression environnante demeure, et le cabinet où les « miraculés » viennent se faire estampiller, ressemble à une redoute au milieu d'un champ de bataille. Pour autant que Huysmans soit un homme sanguin, violent, emporté, submergé par la répulsion (souvent) ou soulevé par l'admiration (rarement), il demeure un être de raison. La meilleure des morales est de savoir penser, dit Pascal.

L'une des questions vitales pour lui, à tel point qu'on se demande si ce n'est pas là le cœur même de sa conversion, est celle de la beauté, de l'esthétique. Il constate amèrement le vandalisme auquel a été soumis la petite cité de Lourdes, la destruction de l'ancienne petite église romane, et l'incroyable vulgarité, grossièreté, des ouvrages édifiés, qu'ils fussent des bâtiments religieux, ou des statues. Huysmans s'attarde beaucoup à ce sujet, et a toujours à l'esprit le phénomène saint sulpicien et son esthétique pompière, inauthentique, plébéienne et démagogique, réplique fidèle, dans le contexte artistique du XIXe siècle, d'un siècle industriel de parvenus, siècle bourgeois, béotien, où les créateurs véritables, écrivains, peintres, sculpteurs, ont eu toutes les peines à se faire entendre, voire à survivre.

L'architecture fut sans doute l’un des point névralgiques de cette maladie de la laideur. Huysmans aurait pu utiliser le vocable kitsch, s'il n'était entré dans la langue française qu'en 1962. La basilique du sacré-cœur de Montmartre en est exemple parfait, un beau furoncle sur une colline, triomphant, qui se voit de loin, et qui domine de sa superbe un Paris livré au diable. Huysmans est sans doute l'écrivain de fin de siècle le plus baudelairien qui fût. Rimbaud le fut aussi à sa manière, mais contrairement à son idole, il aimait la nature, transfigurée, il est vrai. Baudelaire comme Huysmans la détestent. Ils s'y ennuient. En revanche, l'esprit, l'âme, se lisent fidèlement dans la création humaine, dans l'artifice, au sens littéral du terme, c'est-à-dire produit de l'artifex.

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Pour Huysmans, une petite église romane, une statue gracile, gothique, par exemple (et non néogothique!) de la Vierge, sont des signes de la présence divine (il s'en est expliqué dans son beau livre, qui a achevé de le rendre célèbre, et lui a octroyé une coquette somme, La Cathédrale). Or, l’Église de son temps partage les goûts de la bourgeoisie décadente de l'époque. Elle s'est empressée de détruire, de vendre, ou d'achever de ruiner des héritages sublimes d'un moyen âge qui, malgré le romantisme, n'était pas encore reconnu comme l'un des sommets de la civilisation européenne (et ce déni durera).

Huysmans est stupéfait de s'apercevoir que le clergé, celui d'en bas comme celui d'en haut, est complètement indifférent à ces questions. L'essentiel, pour la hiérarchie sacerdotale, relève de la mission. Il s'agit de répandre la Bonne parole, d'amener à soi le troupeau, et de l'encadrer. En cela, il est fidèle à ce que l’Église a toujours fait depuis les temps premiers de sa naissance, et surtout de sa prise de pouvoir, au IVe siècle. Que ses œuvres matérielles aient été, de surcroît, souvent belles, appartient à un autre ordre que celui de la simple propagation de la foi.

Or, dès la Contre-Réforme, on entre dans l'ère de l'efficacité et des foules urbanisées. Il est nécessaire de promouvoir une esthétique qui relève du fonctionnement social, et qui touche affectivement. Les prêtres rétorquent à Huysmans qu'il s'agit de se mettre à portée du peuple. A cela, il répond que, de tout temps, les choix artistiques et esthétiques ont été imposés, et la foule des fidèles s'est pliée volontiers à ce geste impératif, d'assigner à des cerveaux souvent incultes l'éclat transcendant d'une beauté, qui est le signe du divin. C'est cela, cette ambition que l'on veut bien croire démesurée, qui est rompue, avec la modernité. En revanche, parallèlement au sentimentalisme de loge du concierge, on mise sur le gigantesque, l'Hénaurme, comme aurait écrit Flaubert. Ce qui est grand, gros, puissant et écrasant, impressionne immanquablement le béotien, avec, il est vrai, un autre patron: il faut que ce soit comme dans la réalité.

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Tout est cyclopéen, éléphantesque, à Lourdes, et on peut y voir une prémonition de l'esthétique totalitaire, communiste, mussolinienne, nazie, américaine, sous sa forme new-yorkaise, ou disneyienne. Lourdes, c'est le prototype, dans le style néogothique ou néobyzantin, de Disneyland, et les mêmes questions d'encadrement du « tourisme » se pose.

La procession, allégorie de la modernité en marche

On peut s'interroger sur les raisons véritables de la « conversion » de Huysmans. Il ne s'est rendu à Lourdes qu'en traînant avec réticence son carnet de notes dans ses bagages. Du reste, il nous prévient : « […] je n’aime pas les foules qui processionnent, en bramant des cantiques. »

Pourtant, le récit qu'il fait de son pèlerinage, même si le champ dans lequel il évolue paraît clos, et sent l'enfermé, suit tout de même une ligne, du moins jusqu'à l'approche de la fin, la queue s'éteignant peu à peu, comme un cierge mélancolique et fatigué à bout de flamme. Se dessine en effet, au fil de la narration, un crescendo, dont l'achèvement paroxystique est une « formidable procession » composée de « tout un corps d’armée, trente mille hommes », « un cierge à la main, de la grotte au Rosaire, en passant par les lacets en forme d’M couché qui grimpent sur la colline, derrière la basilique, et, après avoir descendu et remonté les rampes, […] sur l’esplanade pour finalement se fondre, en un seul groupe, dans le cirque immense du Rosaire».

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Pour jouir de ce spectacle exceptionnel, Huysmans s'assied « auprès de quelques prêtres, sur les marches de la chapelle. De là, [il] domine, au-dessus du Gave, la basilique, la rampe, l’esplanade, le Rosaire, vus de profil; c’est l’endroit le mieux situé pour assister au gala de la féerie du feu».

Cette procession est en effet placé sous le signe de la lumière. Or, la lumière est le symbole du Divin, son éclat, le signe de sa présence, et c'est pourquoi les églises dites « gothiques », avec leurs vitraux, ont, à partir de l’Évêque de Saint-Denis Suger, pris le pas sur les sombres églises dites « romanes ». Mais la lumière est aussi très présente, en enfer, par la vertu des flammes.

Le choix de l'incendie comme métaphore filée s'est imposé pour décrire cette coulée humaine où tout semble se fondre. « Dans la nuit, la grotte, creusée sous la basilique, flamboie comme une fournaise; c’est de là que part l’incendie propagé par les cierges des pèlerins que l’on ne voit pas ; il semble que des étincelles sautées du fond d’un four ouvert et portées par le vent voltigent dans les lacets de la colline, qui, lentement, s’embrasent ; et les bluettes gagnent du terrain, pétillent déjà dans les arbres derrière l’abside de la basilique et atteignent, peu à peu, en tournant, le parvis, avant de descendre sur la rampe de droite, dans une indescriptible cacophonie de Laudate Mariam, de «Au ciel, au ciel! », mêlés à des cantiques de langues étrangères, tous écrasés, pourtant, par la masse pesante des Ave.

Et voici la basilique qui s’illumine du haut en bas, qui se découpe en des lignes tricolores dans l’ombre et elle paraît plus étriquée, plus chétive encore, sur le fond de ces montagnes que les ténèbres, déchirées par les coups de lumière, agrandissent. La chaufferette ronde, à couvercle, le gueux posé sous ses pieds, le toit du Rosaire, brasille avec la ferblanterie de son dôme et ses oculi rouges. Maintenant, les deux rampes sont en pleine combustion; l’on monte sur l’une et l’on descend sur l’autre; l’on dirait d’une roue de feu, couchée sur le flanc, à demi soulevée du sol, qui tourne, en crépitant, lançant, dans son mouvement giratoire, des gerbes d’étincelles. Les cierges qui grimpent se hâtent, semblent marcher, en poussant des cris de victoire, à l’assaut de la basilique ; et subitement, dans le sillage scintillant, de grands trous se font; le vent a éteint des cierges et des mouches de feu volent pour les rallumer et les trous noirs disparaissent, bouchés par des paquets de flammes !

Et cela tourne, tourne, sans arrêt, dans un vacarme d’Ave soutenu par les cuivres de la fanfare ; au loin, l’esplanade qui déborde, fait songer à une plaine dont la récolte se carbonise, à des champs d’épis en ignition; et les tiges de cette moisson qui brûle projettent un éclairage de théâtre sur les arbres des alentours dont le vert s’albumine et se décolore. »

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La description se poursuit, magnifiquement, superbement, et le lecteur est aussi fasciné que le spectateur.

Le XXe siècle en a vu, des processions aux flambeaux ! Ce n'est pas ce qui a manqué dans cet âge de fer et de feu !

Au demeurant, les manifestations collectives de foi ardente, où l'individu se perd et communie avec ses proches par la famille, la résidence, ou la religion, sont très communes dans l'Histoire humaine. C'était, et c'est encore le cas dans les rites chamaniques, ou chez les aborigènes. Jünger, dans un récit de voyage au Japon dédié à Julien Gracq, a décrit ce qu'il a vu à Kiyo-Také, une ville de province, dans les environs de Nikko : « Cette danse, à laquelle n'importe qui pouvait prendre part, se mouvait dans un vaste rond-point, autour d'une chapelle en forme de tour, haute et étroite. Les musiciens qui y jouaient répétaient, des heures et des heures durant, sur des tambours voilés et un instrument au son clair, une cloche, je suppose, un simple motif de quatre notes:

ti-tin...ta-tàm.

Les danseurs et danseuses portaient des kimonos d'été à dessins en damiers et tenaient dans la main de larges chapeaux de paille tressés. Ils tournaient lentement, en mesure, chacun pour soi, brandissant parfois leur chapeau, l'ouverture tournée vers le ciel. Il pleuvait: nous nous trouvions parmi les rangs serrés des spectateurs, sous des parapluies plats de papier.

Ici, les visages, et surtout ceux des jeunes filles, se simplifiaient encore, à mesure qu'ils se rapprochaient de l'extase... »

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Songeons aussi au Tatbir (photo), rituel chiite, où, dans une procession fiévreuse, à grands geste, certains exaltés se font saigner le crâne en commémoration de la mort du jeune petit-fils de Mahomet, l'imam Hussein ibn Ali, qui a été tué à la bataille de Kerbala. Les exemples sont légions. Mais ces cas supposent une divinité, ou plusieurs, des croyances, la certitude qu'un monde supra-humain existe vraiment.

Or, la fin du XIXe siècle est cette époque où Nietzsche a annoncé la mort de Dieu. C'est l'âge du nihilisme.

On peut aborder le phénomène de transe collective d'usage à Lourdes, lors des pèlerinage, de deux façons: ou l'on survalorise l'état de fusion «mystique» qui absorbe les fidèles, parfois pour leur bien (Huysmans note que certains paraissent transfigurés, et portent à leur prochain une considération qu'ils ne manifestaient sans doute pas avant de venir en ces lieux saints, et qu'ils abandonneront peut-être, sans doute, en s'en éloignant); ou l'on se concentre sur les réactions individuelles d'un personnage tel que J-K. Huysmans, d'un caractère de chien, jaloux de sa liberté comme un ermite, soucieux jusqu'à la folie de l'authenticité de l'existence, et des relations avec le monde et la vérité.

Huysmans n'a pas reçu la grâce, comme un Pascal. Il n'y a pas vraiment eu, chez lui, de nuit mystique, de Mémorial. Sa « conversion » est un long cheminement, ouvrage de sa volonté. Je ne prétends pas qu'il n'était pas «croyant»: il pensait, manifestement, que Jésus existait vraiment, comme la sainte Vierge, et que les saints, comme Sainte Lydwine de Schiedam, étaient des créatures élues de Dieu, dotées de vertus charismatiques. Mais il n'est pas un mystique, comme Saint Jean de la Croix.

Il semble plutôt avoir réagi comme un être sur la défensive, qui entend préserver une intégrité toujours mise en péril par l'action ubiquiste et dissolvante d'une modernité agressive, stupide, et obscène. De là son retranchement dans l'art (il est poète, c'est-à-dire, au sens où l'entend Roman Jakobson, soucieux au plus au point de la chair et de la peau des mots, de la phrase, du rythme, de la préciosité de la langue), dans la hantise de la beauté, dans les souvenirs éblouis du moyen-âge, de siècles où il était naturel d'être chrétien, de porter en soi un sens, qui est aussi celui, partagé, par la société, par les pouvoirs religieux et politiques. Ce sens, au moment où science et républicanisme communient dans le même culte de l'homme vernaculaire, commun, dans le dernier homme nietzschéen, il faut se le donner, le conquérir, l'arracher à un grand corps, celui de l’Église, qui vit encore quelque peu, mais dont l'on sent bien qu'il est près de l'agonie. Seule l'écriture permet de garder la tête hors de l'eau, et de pouvoir respirer. Tant bien que mal, et souvent mal.

L'un des contemporains de Huysmans, Gustave Le Bon, a écrit, en 1895, un ouvrage célèbre, La psychologie des foules, où il revient, au détour de la description du phénomène holiste de la communauté soudée en acte, sur le sujet de la préservation de l'être singulier dans un milieu oppressant où le collectif l'emporte. Il serait trop long de suivre toutes les étapes de son argumentation. Mais on peut retenir cette phrase, qui s'applique bien à Huysmans : « Les individualités qui, dans la foule, posséderaient une personnalité assez forte pour résister à la suggestion, sont en nombre trop faible pour lutter contre le courant. » Cette vérité s'applique autant à celui qui se fond dans une collectivité fusionnelle ayant pour centre une croyance forte, et comme manifestation des gestes et des sons ritualisés, que pour ce que Jünger nomme Le Rebelle, tentant d'échapper à l'effacement de son existence par l'empire du vide.

Notes:

(1) « Il faudrait, se disait-il [Durtal], garder la véracité du document, la précision du détail, la langue étoffée et nerveuse du réalisme, mais il faudrait se faire aussi puisatier d’âme et ne pas vouloir expliquer le mystère par les maladies des sens ; le roman, si cela se pouvait, devrait se diviser de lui-même en deux parts, néanmoins soudées ou plutôt confondues, comme elles le sont dans la vie, celle de l’âme, celle du corps, et s’occuper de leurs réactifs, de leurs conflits, de leur entente. Il faudrait, en un mot, suivre la grande voie si profondément creusée par Zola, mais il serait nécessaire aussi de tracer en l’air un chemin parallèle, une autre route, d’atteindre les en deçà et les après, de faire en un mot, un naturalisme spiritualiste : ce serait autrement fier, autrement complet, autrement fort ! » (ex: Là-bas. Gallimard. Folio classique, p. 30-81).

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(2) « Bienheureuse Lydwine, elle obtient du Ciel la permission de souffrir pour les autres, d’alléger les malades en prenant leurs maux. »

(3) « Que de pressentiments et de signes envoyés déjà par Dieu, qu’il est grandement temps d’agir, de considérer la minute présente comme la plus importante des minutes, et de faire ma perpétuelle volupté de mon tourment ordinaire, c’est-à-dire du Travail ! » Baudelaire ; Mon cœur mis à nu.

La question de Staline en Russie aujourd'hui - Empire, mythe et héritage du pouvoir soviétique

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La question de Staline en Russie aujourd'hui 

Empire, mythe et héritage du pouvoir soviétique

Alexander Douguine

Alexander Douguine retrace comment une figure, celle de Staline, est devenue, dans l’imaginaire russe, à la fois empereur, bourreau et légende.

L’immense popularité de Staline dans la Russie contemporaine est un phénomène complexe.

L’évaluation positive de Staline par la majorité du peuple est liée à plusieurs facteurs :

- Les succès évidents de l’URSS sous sa direction: essor économique, égalité matérielle, victoire dans la guerre, acquisitions territoriales et attitude ferme et impitoyable envers les élites dirigeantes (que le peuple a toujours détestées).

- La comparaison avec d’autres dirigeants de l’URSS — le chaos et la violence de la Révolution et de la guerre civile, où le romantisme héroïque s’était grandement estompé, rendant Lénine bien moins univoque; la propension à susciter des querelles et la bêtise chez Khrouchtchev; la stagnation et la sénile dégradation progressive de Brejnev. Sur ce fond, Staline apparaît éclatant. Un véritable Empereur.

- Le fait que Staline a été attaqué avec le plus de virulence par les libéraux de la perestroïka et des années 1990, libéraux qui étaient absolument répugnants aux yeux du peuple — ils étaient mesquins, russophobes et corrompus. Comparé à ces petits homoncules nuisibles qui n’ont fait que détruire, trahir, vendre et ridiculiser, Staline apparaissait comme divin. La bassesse de ces critiques libérales a contribué à élever la figure de Staline dans l'imaginaire du peuple.

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Dans ce contexte, d’autres aspects de Staline ont été presque totalement oubliés: l’inhumaine cruauté de ses méthodes de prise et de conservation du pouvoir, un machiavélisme hypertrophié, la destruction effective de la paysannerie lors de l’industrialisation et de l’urbanisation, l’imposition d’une idéologie antichrétienne grossière et artificielle, les répressions contre les coupables comme contre les innocents, y compris les enfants, et bien d’autres choses encore.

La position des patriotes russes et de l’Église à l’égard de Staline a été divisée. Sous l’influence des points 1 à 3, et surtout à cause de la haine générale envers les libéraux, non seulement la gauche, mais aussi la droite et même les orthodoxes en sont venus à voir Staline d'un oeil favorable. Ce Staline impérial et mythique a complètement évincé la réalité.

Une minorité de patriotes et de membres de l’Église, cependant, a vu en Staline le bourreau du peuple russe et le persécuteur de l’orthodoxie. Mais précisément à cause de l’anti-stalinisme des libéraux, qui suscitent une répulsion insurmontable chez le peuple, cette position est devenue non seulement impopulaire, mais aussi dangereuse. Quiconque l’exprimait pouvait être accusé de libéralisme, ce qui est la pire des disqualifications pour un Russe — et à juste titre.

Aujourd’hui, le temps d’une évaluation plus équilibrée de Staline n’est toujours pas venu; des mythes idéologiques opposés restent à l’œuvre. Mais ce temps viendra nécessairement. De façon générale, l’histoire russe et notre peuple doivent évaluer sobrement et de façon responsable, dialectique et spirituelle, la période soviétique — ses significations, ses paradoxes, sa place dans la structure russe globale, ainsi que ses chefs et ses personnalités les plus marquantes.

L’obstacle évident à cela est la simple existence des libéraux. Tant qu’ils existent, toute perspective est biaisée et déformée, et aucune analyse sérieuse n’est possible. Ce n’est que lorsqu’ils auront entièrement disparu de notre société que les Russes, libérés de cette infection, pourront se demander: qu’était-ce donc tout cela? Un obscurcissement de la conscience, un effondrement ou une ascension?

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Peut-être est-il temps de commencer à discuter de ce sujet non pas en public (en évitant la rhétorique et la polémique à tout prix), mais dans des cercles russes fermés ? Aujourd’hui, tout finit immédiatement sur les réseaux, dans un flux continu, dans le monde extérieur. Pourtant, les questions subtiles et non évidentes exigent une toute autre atmosphère.

Nous avons besoin de cercles russes fermés, de communautés organiques de gens de notre terre et de notre histoire. C’est en leur sein que les significations profondes peuvent être clarifiées. Les Russes doivent apprendre à écouter les Russes et à parler sur un tout autre ton. Trop longtemps, d’autres ont parlé en notre nom, déformant, consciemment ou non, les structures de notre pensée. Cela est devenu une habitude.

La cristallisation de la pensée requiert des conditions particulières. Viktor Kolesov montre que le mot russe dumat’ (« penser ») est formé de la racine um (« esprit ») et d’un préfixe généralisant très ancien d, qui s’est depuis longtemps fondu avec la racine. Ainsi, « penser » (dumat’) veut toujours dire penser ensemble, en cercle. On peut réfléchir (myslit’) seul, mais on ne peut penser (dumat’) qu’avec tous. D’où le nom même de Douma des boyards. Les boyards [l'aristocratie terrienne] se réunissent et pensent ensemble. C’est un cercle russe institutionnalisé.

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Sarkozy, Kadhafi et la Chute de la Libye

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Sarkozy, Kadhafi et la Chute de la Libye

par Nicholas Reed

Nicholas Reed affirme que la condamnation à cinq ans de prison de Sarkozy met en lumière le système libyen d’achat d’influence en 2007, la précipitation de la France à briser le projet panafricain de Kadhafi en 2011, et un calcul néocolonial qui a détruit la Libye.

L’affaire pénale concernant l’ancien président français Sarkozy touche aux tensions historiques entre la Libye de Mouammar Kadhafi et les puissances occidentales, en particulier la France. Récemment, un tribunal de Paris a condamné Sarkozy à cinq ans de prison pour association de malfaiteurs, une condamnation historique pour un ancien président français.

Les accusations ? Il s’agit d’allégations selon lesquelles le gouvernement libyen aurait détourné des millions d’euros (les estimations vont de 5 à 50 millions d’euros) vers la campagne présidentielle de Sarkozy en 2007 afin de faciliter le rapprochement de la Libye avec l’Occident. Le rôle moteur de la France dans la destruction de la Libye fut ensuite motivé à la fois par la crainte géopolitique d’une Afrique renforcée et par la nécessité pour Sarkozy de dissimuler sa propre corruption. Lors de son procès du 25 septembre 2025, Sarkozy a déclaré aux journalistes qu’il était innocent. « Je ne m’excuserai pas pour quelque chose que je n’ai pas fait. » La peine de prison est immédiatement exécutoire; le juge a précisé que Sarkozy aurait peu de temps pour organiser ses affaires avant que le procureur ne l’invite à se rendre en prison. Les médias français ont indiqué que Sarkozy serait convoqué le 13 octobre pour être informé de la date de son incarcération. Ironie du sort, ce sera sept jours avant l’anniversaire de la mort de Kadhafi, qui eut lieu le 20 octobre 2011, alors que des avions de chasse français et des agents au sol furent directement complices de l’assassinat d’un chef d’État étranger.

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La Libye, pays d’Afrique du Nord, fut jadis un leader continental. Elle a conduit le continent à former l’Union africaine en septembre 1999, initiative connue sous le nom de "Déclaration de Syrte". Des délégations de tout le continent affluèrent vers la ville côtière pour bâtir un nouvel avenir africain.

Au nord, la France regardait tout cela d’un œil envieux. Depuis 1969, la Libye était une épine dans le pied des puissances coloniales européennes. La Libye soutenait des mouvements de libération sur le continent africain et au-delà. Le renversement du gouvernement révolutionnaire de Mouammar Kadhafi était un rêve de longue date des puissances occidentales. Le « Guide » Mouammar Kadhafi n’a cessé de mettre le doigt sur les plaies de l’Occident colonial, que ce soit en soutenant des groupes tels que l’Armée républicaine irlandaise ou en s’opposant à l’apartheid à Gaza et en Afrique du Sud. Nelson Mandela a salué la Libye comme un pays-leader panafricain, expliquant que son soutien avait été crucial pour la réussite du mouvement anti-apartheid sud-africain. De nombreux pays africains voyaient en la Libye non seulement un leader, mais aussi une force stabilisatrice, y compris dans l’Afrique dite francophone.

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Lorsque la Libye connut sa Révolution d’Al-Fateh en 1969, connue comme le coup d’État sans effusion de sang de Kadhafi, elle était l’un des pays les plus pauvres du monde. En peu de temps, le gouvernement révolutionnaire de Kadhafi fit du pays une oasis, grâce notamment à d’importantes réserves pétrolières nationales et à la politique avisée de son leader. La Libye fut en effet le premier pays au monde à détenir une participation majoritaire dans sa propre production pétrolière, ce qui inquiétait les puissances coloniales. Au 20ème siècle, les ambitions révolutionnaires de la Libye furent largement protégées grâce à diverses amitiés internationales, notamment avec l’URSS, la Chine de Mao et plusieurs pays du tiers-monde. Cependant, après l’effondrement de l’URSS, de nombreux pays durent s’adapter à la nouvelle ère unipolaire.

La Jamahiriya de Kadhafi, ou État des masses, ne fit pas exception. Après des décennies de sanctions, la Libye aspirait à rejoindre la nouvelle « communauté internationale ». Elle abandonna en 2003 son programme d’armes de destruction massive, cédant aussi à la pression pour régler la tristement célèbre affaire de Lockerbie. De plus, Kadhafi accepta de commencer à faire passer l’économie planifiée de la Libye à une économie de marché. Mais il devint rapidement évident pour tous que ces changements n’étaient qu’un vernis et que le colonel Kadhafi n’avait pas oublié son anticolonialisme. Sa tactique changea seulement: au lieu de financer des mouvements de libération, Kadhafi investit massivement dans le continent, finançant par exemple le premier satellite africain en 2008, ce qui permit au continent d’économiser un total de 500 millions de dollars par an, une somme qui jusqu’alors allait aux compagnies de télécommunications européennes.

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Kadhafi voulait renforcer l’Afrique en utilisant la toute nouvelle Union africaine (UA) comme moteur de projets d’intégration. Ces projets de libération étaient vus d’un bon œil en Europe – jusqu’à ce que l’UA commence à réussir. Le plus connu fut bien sûr la monnaie unique continentale prévue, le dinar africain adossé à l’or, un projet que la France surveillait de près, craignant que ses territoires néocoloniaux d’Afrique de l’Ouest ne lui échappent. Cela fut révélé par WikiLeaks dans les célèbres e-mails de Clinton. Le président français de l’époque, Nicolas Sarkozy, s’est dit enthousiaste à l’idée de détruire la Libye, affirmant que les plans de Kadhafi pour l’Union africaine étaient une menace directe pour les intérêts français et américains. La France craignait notamment que la Libye supplante la France comme puissance dominante en Afrique du Nord, alors qu’elle finançait déjà des infrastructures, jouait un rôle dans les conflits armés et entretenait des liens bilatéraux fructueux. Toutefois, la question demeure: pourquoi le gouvernement libyen a-t-il financé la campagne présidentielle de Nicolas Sarkozy en 2007 ?

La question de l’ingérence électorale reste un sujet polémique, quelle que soit la position que l'on adopte. Dans le cas de Sarkozy, cependant, les allégations paraissent fondées. Depuis près de vingt ans, Sarkozy fait face à des accusations et à des procès à ce sujet. L’affaire de septembre 2025 est la dernière en date, où il a officiellement écopé de cinq ans de prison. Sarkozy est accusé d’avoir accepté des millions d’euros du gouvernement libyen — un montant non précisé, entre 5 et 50 millions d’euros. L’accusation suggère que ce financement visait à inciter la France à aider la Libye à se rapprocher de l’Occident. Mais selon le fils de Mouammar Kadhafi, Saïf al-Islam, les raisons sont bien plus profondes.

Saïf al-Islam Kadhafi n’a jamais caché sa déception envers Nicolas Sarkozy. Au début des bombardements de l’OTAN en 2011, Saïf Kadhafi avait accordé une interview à Euronews où il déclara ironiquement que « ce clown devait rendre l’argent au peuple libyen ». Saïf Kadhafi affirma qu’il avait personnellement surveillé certaines des valises remises aux responsables français. Lors du procès, Saïf Kadhafi était prêt à fournir des preuves audio et des témoins. Plus tard, en 2018, il a rédigé un témoignage sous serment à destination des enquêteurs français. Dans une interview exclusive à RIF en 2025, Saïf Kadhafi a confirmé une nouvelle fois les faits. Il a déclaré que Sarkozy avait tenté de faire pression sur lui au sujet de ces preuves. La première tentative aurait eu lieu en 2021 par l’intermédiaire de la consultante parisienne Souha al-Bedri, qui lui aurait demandé de nier tout soutien libyen à la campagne de Sarkozy en échange d’une aide pour résoudre son dossier devant la CPI, où il est toujours recherché. L’accord en coulisses entre les gouvernements libyen et français demeure mystérieux. Cependant, les actions des deux parties témoignent d’un rapprochement avec l’Occident. Était-ce de la naïveté ? Ou un pragmatisme désespéré ?

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Moussa Ibrahim (photo), ancien porte-parole du gouvernement libyen, s’est exprimé à de nombreuses reprises sur Russia Today (RT) concernant la Libye. Dans une interview à Going Underground en 2019, Moussa déclara que le gouvernement Kadhafi souhaitait maintenir le front occidental calme afin de pouvoir se concentrer sur le continent africain. Le financement de Sarkozy par la Libye était-il l’un de ces coups d’échecs énigmatiques ? Une tentative de pacification ? En effet, après l’élection de Sarkozy, il a assoupli plusieurs procédures judiciaires visant des responsables libyens accusés de soutenir le terrorisme d’État. De plus, les sanctions ont été levées et de nouveaux liens bilatéraux ont été établis. Ce climat de pacification a donné à Kadhafi l’espace nécessaire pour développer ses projets de libération. Dans son interview à Going Underground, Ibrahim confia avec amertume :

Nous n’avons pas eu assez de temps pour renforcer nos capacités. Si la conspiration de 2011 avait été retardée… ne serait-ce que de cinq ans… nous aurions été bien plus forts. Nous aurions eu de solides alliances, une économie robuste et nos frères africains derrière nous. Mais l’Occident a compris nos faiblesses. Voilà pourquoi ils sont intervenus à ce moment-là [en 2011].

Kadhafi avait temporairement apprivoisé le coq français, mais la laisse était trop fine. La réputation de la France en Afrique demeure exécrable à ce jour. Sarkozy a enfin été condamné cette année, mais pas pour son véritable crime. Le vrai crime dont Sarkozy n’a pas eu à répondre est la destruction de la Libye. La France fut le premier pays à envoyer des avions de chasse en Afrique du Nord. Était-ce pour couvrir la corruption personnelle de Sarkozy ? De fait, Sarkozy avait un intérêt personnel dans cette guerre contre la Libye. Pourtant, les intérêts géopolitiques de la France étaient majeurs. Tout le monde savait que la puissance croissante de la Libye en Afrique était une étincelle qui pouvait s’étendre rapidement. Sarkozy ne paiera peut-être pas pour ses crimes en prison, mais il restera une note de bas de page, une note sanglante et insignifiante.

La Libye n’oubliera pas.

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lundi, 29 septembre 2025

Le Japon comme colonie américaine

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Le Japon comme colonie américaine

par Kazuhiro Hayashida

Kazuhiro Hayashida soutient que le Japon contemporain se méprend sur la Chine, confond amis et ennemis, et demeure une colonie américaine.

Depuis quelque temps, je parle d’une inversion particulière dans l’interprétation que le Japon se donne de lui-même. Normalement, il devrait être simple de comprendre la distinction entre ami et ennemi. Pourtant, de façon étrange, de nombreux Japonais semblent incapables de reconnaître cette distinction fondamentale.

Le terme « État profond » est récemment devenu courant au Japon, mais peu reconnaissent que son quartier général se trouve aux États-Unis.

Trump a, par moments, affronté l’État profond, mais sa lutte contre lui est restée limitée. Il ne l’a pas complètement soumis. À la place, en négociant des accords, il semble affaiblir son influence intérieure tout en exécutant à l’étranger les actions mêmes souhaitées par l’État profond.

Ayant été chassé d’Amérique, l’État profond semble avoir déplacé ses opérations vers le Japon. Ici, ses forces résiduelles trouvent un terrain fertile. Le gouvernement japonais adopte désormais des politiques qui ignorent la volonté de ses propres citoyens, tandis qu’en politique étrangère il prend des décisions contraires au bon sens.

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Dans le monde entier, l’équation « anti-État profond = Russie » est considérée comme allant de soi. La particularité du Japon est que cette vérité ne s’applique pas chez lui. Parce que les attentes japonaises envers Trump en tant que figure anti-État profond étaient exagérément gonflées, son incapacité à y répondre a engendré une désillusion qui s’est rapidement muée en désespoir.

Historiquement, le Japon était gouverné selon une structure duale: l’Empereur et le shogunat. Le shogunat exerçait le pouvoir effectif. Aujourd’hui, l’Amérique agit au Japon comme un nouveau shogunat.

À la fin de la Grande Guerre en Asie orientale, l’Amérique a démantelé les institutions politiques japonaises, remplacé le gouvernement japonais et imposé un régime d’occupation. En réalité, cela équivalait à un changement de shogunat. L’Amérique avait instauré le sien.

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Ainsi, le gouvernement japonais fonctionne aujourd’hui comme un régime fantoche, militaire, modéré, administré par le shogunat américain, gouvernant une nation désarmée. C’est précisément cet arrangement — né de la défaite du Japon, de son occupation et de sa subordination ultérieure à la puissance américaine — qui a produit le cadre idéologique dans lequel les bombardements atomiques et la destruction indiscriminée des grandes villes japonaises sont défendus comme des actes de guerre légitimes. Parce que le régime d’après-guerre doit son existence même aux États-Unis, il hérite et perpétue le récit selon lequel la violence américaine était juste, même lorsqu’elle signifiait le massacre de civils en masse.

De telles justifications provoquent une réaction corrosive chaque fois que les nations asiatiques condamnent le Japon pour son rôle d’avant-guerre dans la domination régionale.

Le raisonnement japonais se formule ainsi:

Le Japon était une menace pour l’Asie ; par conséquent, la libération par l’Amérique était nécessaire. Si l’intervention militaire américaine était juste, alors les bombardements atomiques et les bombardements aveugles des villes nippones l’étaient aussi.

L’Amérique a libéré le Japon. En libérant le Japon, elle a aussi libéré l’Asie. Si cette libération est reconnue mondialement comme juste, alors les politiques américaines le sont aussi — et de façon absolue.

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Ce récit a été imprimé à maintes reprises au Japon durant la Guerre froide. Puis vinrent l’éclatement de la bulle économique, l’effondrement de l’Union soviétique et l’ascension de George Soros. « La société ouverte » de Karl Popper fut soudain appliquée au Japon lui-même. Les structures politiques traditionnelles furent effacées, la mémoire historique des relations régionales gommée, et la perception de la Russie et de la Chine comme ennemis solidement ancrée.

Les conservateurs japonais font face à un argument auquel ils ne peuvent répondre. Cet argument dit: la Chine est peut-être communiste, mais si on l’évalue du point de vue de la résistance à la domination américaine, alors, comparées à l’acte du Premier ministre Kishida de vendre le Japon à Washington, les actions de la Chine envers le Japon paraissent plus justes.

Les Japonais vivent sous l’illusion qu’ils gouvernent un État indépendant. Leur situation reflète celle de l’Ukraine. Privé de véritables droits politiques, le peuple japonais n’a aucun moyen direct de résister à la campagne discrète de Soros visant à racheter le Japon.

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En pratique, cela signifie que le Japon est incapable de contrer le récit, exprimé par Soros à l’Asia Society, d’une guerre imminente entre le Japon et la Chine.

D’un point de vue géopolitique, la ligne en neuf traits de la Chine — sa revendication de souveraineté sur la majeure partie de la mer de Chine méridionale — chevauche la « ligne de défense absolue » autrefois proclamée par l’Empire du Japon, cette frontière de guerre que Tokyo s’était juré de tenir à tout prix. De ce point de vue, quand la Chine regarde le Japon, elle voit l’Amérique — car le Japon d’aujourd’hui est une colonie américaine.

Ce dont le Japon a surtout besoin, c’est de reconnaître que l’Amérique est l’ennemi, et que le libéralisme doit être abandonné. Je me sens obligé de rappeler sans cesse que le « libéralisme » n’est pas synonyme de démocratie.

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Ursula von der Leyen, la dame qui perd toujours ses textos

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Ursula von der Leyen, la dame qui perd toujours ses textos

Elena Fritz

Source: https://www.facebook.com/elena.fritz.10

Ursula von der Leyen possède un talent étonnant : chaque fois que la situation devient délicate, ses messages disparaissent soudainement.

Actuellement, il s’agit d’un message envoyé via l’application SIGNAL par le président français Macron, dans lequel il exprimait ses grandes réserves face à l’accord du Mercosur. Mais la Commission explique : il a été supprimé automatiquement. Le journaliste Alexander Fanta a voulu y avoir accès – il n'a eu aucune chance.

Et ce n’est pas un cas isolé, c'est déjà le troisième grand scandale impliquant des SMS :

2019 : Ministère de la Défense – messagers téléphoniques effacés en plein scandale des consultants (McKinsey & Co.).

2021/22 : « Pfizergate » – Accord de vaccins pour des dizaines de milliards, les SMS échangés avec le PDG de Pfizer, Bourla, ont disparu.

2024/25 : Message de Macron sur Signal concernant l’accord Mercosur – à nouveau supprimé.

L’excuse officielle est, cette fois-ci, la suivante: « Sinon, le téléphone prendrait feu. » (On n’aurait pas pu l’inventer!).

Conclusion : Qu’il s’agisse de vaccins, de consultants ou d’accords commerciaux – là où Ursula von der Leyen intervient, les preuves disparaissent plus vite qu’un enquêteur ne peut se lever de sa chaise.

Commentaire vidéo d’Elena Fritz (https://t.me/MeineDNEWS/42336):

Elena Fritz (AfD), juriste et Allemande d’origine russe, est une experte en politique étrangère spécialisée dans la défense des intérêts stratégiques et l’analyse du pouvoir dans les relations internationales. Elle a réalisé pour le magazine russe « Iswestia » un commentaire vidéo sur l’affaire, qu’elle a mis à la disposition exclusive de D-NEWS.

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Quelques lignes personnelles d’Elena Fritz à propos d’Iswestia :

Iswestia est l’un des journaux les plus anciens de Russie, fondé en 1917, et reste aujourd’hui l’un des médias les plus influents du pays. Ce qui m’intéresse, c’est qu’on peut y découvrir directement comment les questions politiques sont vues du point de vue russe – sans le filtre de nos médias occidentaux. Et je pense que c’est précisément pour cela qu’on me demande régulièrement des commentaires vidéo: parce qu’en tant que personnalité politique allemande, j’ai une position claire, mais aussi factuelle et analytique, sur les développements dans l’UE, en Allemagne et en géopolitique. Ceux qui connaissent mes contributions, que ce soit dans Compact, Junge Freiheit ou sur mon blog, savent que je suis rarement partisane – et si jamais je le suis, c’est uniquement dans l’intérêt de l’Allemagne. Cette indépendance et cette focalisation sur l’intérêt national rendent aussi ma perspective intéressante pour un public russe.

Chaîne Telegram d’Elena Fritz: https://t.me/global_affairs_byelena

L'intelligence est-elle soluble dans la modernité vagissante?

 

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L'intelligence est-elle soluble dans la modernité vagissante?
 
Claude Bourrinet
 
Source: https://www.facebook.com/profile.php?id=100002364487528
 
Plus personne ne lit. Je veux parler, évidemment, de livres véritables. Car l’industrie du livre, en tant que produit commercial, ne s'est jamais si bien porté. Il va de Marc Lévy aux coqueluches de la Rive gauche estampillées à l'Université.
 
La littérature, prise dans son sens le plus général, c'est-à-dire comme recherche intérieure par les Lettres, par la langue – la facture de celle-ci étant prise aussi dans le remous du sens -, n'a jamais été autant méprisée, pour autant qu'on sache qu'elle existe, ce qui est de moins en moins fréquent. Inconsciemment, l'époque vomit – au sens concret – l'idée d'otium cum litteris. Vomit le loisir, d'abord, parce qu'il contredit le culte américanisé, protestantisé, du Travail, de l'aliénation consentie à la débauche musculaire et neuronale (on « travaille » même à devenir spirituelle, afin d'être « bien dans sa peau », on « travaille » à bien faire l'amour), et les Lettres, comme on l'a vu, parce qu'elles donnent, par une étude des émotions, des situations humaines, des angoisses et des joies du monde, et au-delà, une vision de notre condition (ce dont on se contrefout, car l'essentiel, ici-bas, est de « réussir »), et qu'elles offrent, par la recherche historique, à condition qu'elle soit sérieuse, des « exempla » de ce que l'humanité réalise depuis l'émergence de l'humain (et c'est pourquoi j'ai toujours eu un penchant sentimental pour l'étude de la préhistoire).
 
Les idiots les plus accomplis sont sans doute ceux qui fanfaronnent en brandissant leurs diplômes. Que d'imbéciles, parmi les Normaliens ! Les turpitudes des cent dernières années de vie politique de notre pauvre pays pullulent, dans ce milieu des premiers de la classe. Et maintenant, depuis la révolution numérique, c'est parmi les techniciens de toutes obédiences qu'on trouve le plus de lobotomisés. La technique ne pense pas. La maîtrise d'une science, pour autant qu'elle octroie une méthode dans le domaine particulier où elle s'exerce, ne garantit pas l'extension de la rigueur et de la lucidité au-delà de ses frontières. Si les savants – ou, comme disait Pascal, les habiles, ou demi-habiles – possédaient une ombre-même de vérité des choses et de l'homme, on le saurait depuis longtemps. Et on a affaire sans aucun doute à une usurpation d'autorité quand un « déblatéreur » (je crée le néologisme) de concepts, comme Onfray, s'avise de prendre de l'ascendant sur le pecus vulgus. C'est aussi vrai des « ingénieurs » de toutes espèces », qui peuvent manipuler l'homme (car l'homme-machine appartient aussi à notre être), mais ne nous sauveront ni de la bêtise, ni de l'enfer, ni du néant.

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Les racines profondes de la géopolitique actuelle

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Les racines profondes de la géopolitique actuelle

Peter Turchin

Source: https://geoestrategia.eu/noticia/45185/geoestrategia/las-...

Chine, Russie et Iran : quel est leur dénominateur commun ? Le plus évident est qu’ils sont aujourd’hui les principaux rivaux géopolitiques des États-Unis. Comme l’a récemment écrit Ross Douthat dans une tribune du NYT, intitulée "Qui est en train de gagner la guerre mondiale ?", « il est utile que les Américains considèrent notre situation à l’échelle globale, avec la Russie, l’Iran et la Chine formant une alliance révisionniste qui met à l’épreuve notre puissance impériale » (voir: https://www.nytimes.com/2025/07/12/opinion/trump-russia-c... ).

La publication d’aujourd’hui porte sur une similitude beaucoup moins reconnue entre ces trois puissances challengeuses, liée à l’histoire profonde de ces empires eurasiens.

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Comme je l’ai soutenu dans une série de publications au cours des vingt dernières années, et que je soutiendrai de manière plus détaillée dans mon prochain livre, le principal moteur de « l’impériogenèse » (les processus sous-jacents à l’essor des empires) est la compétition interétatique. L’intensité de cette compétition est, à son tour, amplifiée par les avancées dans les technologies militaires. Chaque révolution militaire génère ainsi une série de méga-empires. Nous vivons aujourd’hui encore à l’ombre de deux anciennes révolutions militaires majeures.

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La révolution de la cavalerie bardée de fer remonte à environ 1000 av. J.-C. Bien que l’équitation et la fonte du fer aient été inventées indépendamment (et dans des régions différentes, voir l’infographie ci-dessous), vers 500 av. J.-C., elles se diffusaient conjointement (pour voir les cartes d’expansion, voir les figures 2 et 3 de notre article « L’essor des machines de guerre ») (ici: https://journals.plos.org/plosone/article?id=10.1371/jour...). L’histoire détaillée de cette révolution militaire et de ses effets profonds sur l’histoire mondiale se trouve dans mon livre Ultrasociety.

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En résumé, la révolution de la cavalerie bardée de fer a transformé la Grande Steppe eurasienne en une zone motrice d’impériogenèse. Ce cœur continental était le foyer de pasteurs nomades, dont la principale force militaire reposait sur des archers montés à cheval. La plupart des méga-empires prémodernes se trouvaient sur les « rives » de cette « mer d’herbe » (voir la seconde infographie ci-dessous).

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L’un de ces ensembles impériaux, le nord de la Chine, bordait la région steppique orientale (Grande Mongolie). Un autre, l’Iran, faisait face à la steppe centrale (Turkestan). Le troisième, la Russie, s’est développé sous l’influence de la steppe occidentale (région pontique-caspienne). Le nord-est de l’Europe a été intégré un peu tardivement, ses régions forestières n’ayant adopté l’agriculture que vers la fin du premier millénaire de notre ère. Mais ce qui unit ces trois régions impériales – Chine, Iran et Russie – c’est leur développement en interaction étroite avec l’Asie intérieure.

L’autre révolution déterminante fut, bien sûr, celle qui a pris naissance en Europe occidentale autour de 1400 apr. J.-C. Ses deux composantes furent les armes à poudre et les navires transocéaniques. C’est pourquoi je l’appelle la « Révolution des canonnières ». Les parallèles entre ces deux révolutions sont frappants. Les Asiatiques de l’intérieur montaient à cheval et tiraient des flèches, tandis que les Européens naviguaient et tiraient des boulets de canon. L’océan mondial a joué le même rôle que la « mer d’herbe ». Les historiens ont noté ces similitudes. Par exemple, l’historien du Sud-Est asiatique Victor Lieberman a qualifié les Européens d' « Asiatiques de l’intérieur de race blanche ».

Les lecteurs familiers des théories géopolitiques de Mackinder, Mahan, Spykman et autres (sinon, consultez cet article Wikipédia: https://en.wikipedia.org/wiki/Geopolitics) reconnaîtront immédiatement les similitudes entre ce que j’aborde ici et plusieurs concepts géographiques centraux de ces théories (le Heartland, le Rimland, les îles…). Mon analyse historique montre que le conflit entre l’Empire américain et la Chine, la Russie et l’Iran a été marqué par les deux grandes révolutions militaires, ce qui éclaire et affine les théories géopolitiques traditionnelles.

Ainsi, la Grande Steppe (considérée comme une région cruciale par diverses théories géopolitiques) n’a aujourd’hui que peu d’importance, sauf par son impact historique. Vers 1900, la Russie et la Chine l’avaient complètement dominée. Aujourd’hui, elle abrite un groupe d’États faibles et insignifiants sur le plan géopolitique, comme la Mongolie et les « -stans ». Les successeurs des anciens méga-empires qui se sont formés aux frontières de la steppe sont aujourd’hui les véritables détenteurs du pouvoir eurasiatique.

Le second pôle de pouvoir est l’Océanie, qui est né sur les côtes occidentales de l’Eurasie au 16ème siècle (Portugal, Espagne, Pays-Bas et îles Britanniques), puis s’est étendu à travers l’Atlantique pour devenir aujourd’hui un empire global, gouverné depuis Washington, avec Bruxelles comme capitale secondaire (même si des fissures existent entre ces deux centres de pouvoir à cause des politiques de Donald Trump). Une bonne façon de visualiser cette entité géopolitique est une carte des bases militaires américaines.

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Autres cartes: https://www.basenation.us/maps.html

La logique géopolitique de l’Océanie — l’encerclement des empires eurasiatiques — est évidente.

Comme je l’ai mentionné précédemment, l’unité de cette Océanie a été en partie sapée par les politiques de Donald Trump. Mais il ne faut pas non plus surestimer l’unité de la ceinture impériale eurasienne. La principale raison de l’alliance étroite actuelle entre la Chine et la Russie est la pression géopolitique exercée par les États-Unis et leurs alliés. L’Iran est le membre le plus faible de cette triade et le moins intégré avec les deux autres (même s’il est probable que cela change à l’avenir, car il subit une forte pression du tandem Israël/États-Unis).

Cela m’amène à une dernière observation. Contrairement aux puissances terrestres impériales, les puissances maritimes ploutocratiques sont traditionnellement réticentes à utiliser leurs propres citoyens comme chair à canon. Ainsi, les républiques marchandes italiennes faisaient appel à des mercenaires. L’Empire britannique préférait employer des troupes indigènes, comme les fameux Gurkhas. Aujourd’hui, l’Empire américain hésite à engager des soldats américains dans des guerres ouvertes et tend donc à recourir à des États clients : Taïwan contre la Chine, l’Ukraine contre la Russie et Israël contre l’Iran.

dimanche, 28 septembre 2025

Le « tigre de papier » imaginaire de Trump Le réveil de la Russie, du simulacre à la réalité

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Le « tigre de papier » imaginaire de Trump

Le réveil de la Russie, du simulacre à la réalité

Alexander Douguine

Alexander Douguine affirme que l’insulte qualifiant la Russie de « tigre de papier », proférée par Trump, est fausse, mais qu’elle révèle les illusions d’autrefois de la Russie, alors qu’elle s’éveille à la véritable puissance et à la Victoire.

L’observation de Trump qualifiant la Russie de « tigre de papier » est insultante, cela va de soi. Et, bien sûr, elle est fausse.

Pourtant, il a touché un point sensible. Au début de l’Opération Militaire Spéciale, bien trop de choses en Russie étaient devenues des simulacres. Ce n’est qu’en étant confrontés à une guerre réelle et brutale que nous avons commencé, peu à peu, à comprendre à quel point tout avait été négligé — surtout dans le domaine militaire, et en particulier au niveau du commandement. Les exemples sont nombreux et évidents.

Cela ne vient pas de Trump — qu’il s’occupe d’abord de la dégénérescence complète de sa propre société, où la situation est bien pire — mais, à nos propres yeux russes, les mots « tigre de papier » ne sont pas totalement faux ni de simples éléments de propagande. Nous avons, de manière critique, trop imité autrui ; nous paraissions être ce que nous n’étions pas. Découvrir cela fut périlleux. Pourtant, cela s’est finalement révélé.

Avec le recul, et sous certaines réserves, il y a dans un jugement aussi tranchant quelque chose qui ne peut être rejeté d’un revers de main par la phrase « il n’y a pas d’ours de papier ». On peut découper n’importe quelle figure dans du papier. Les possibilités du simulacre sont immenses.

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Pourtant, je tirerais une autre conclusion de cette accusation hostile. Si, dans une certaine mesure, nous étions un « tigre de papier » au début de l’Opération Militaire Spéciale (mais pas totalement, pour sûr), alors à présent, nous ne le sommes très certainement plus du tout. Même alors, nous ne l’étions pas entièrement. Nous étions un ours vivant, réel, mais endormi. Sur son sommeil flottait un dessin animé grossier — c’était le simulacre. Les élites hésitaient à réveiller l’ours, estimant cela trop risqué et pensant pouvoir se contenter du dessin animé.

Il est désormais évident que sans véritablement réveiller l’ours, nous ne pouvons pas gagner cette guerre. Les moyens purement techniques ne suffiront pas. Nous avons essayé, et cela a échoué. Ainsi, précisément maintenant, une voie a été tracée pour passer du simulacre à la réalité ; une opération visant à réveiller le peuple est en cours.

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Les deux grands défis — la Victoire et la démographie — ne peuvent être relevés que par un réveil, par le passage de l’imitation à la réalité. Tel fut le message d’Andreï Belousov (photo) lorsqu’il a pris ses fonctions de ministre de la Défense : on peut commettre des erreurs, mais on ne peut pas mentir.

Nous ne sommes pas un tigre de papier. Plus maintenant.

Mais cela exige encore une preuve historique solide.

Je crois que l’Occident, qui a provoqué cette guerre, a recueilli par ses services de renseignement et ses réseaux certaines informations secrètes selon lesquelles le « tigre » était « de papier ». Ce n’était pas tout à fait vrai, mais pas totalement faux non plus. L’authenticité oscillait à la limite de la supercherie. La différence résidait dans la nuance, dans quelques points de pourcentage.

Nous avons enduré le moment le plus difficile, quand le bluff s’est effondré, et maintenant nous nous imposons clairement — sur le champ de bataille et chez nous, en diplomatie et dans la construction d’un monde multipolaire — comme quelque chose de réel, de sérieux et de puissant.

Pourtant, il subsiste des traces de « papier ». Pas de manière catastrophique, comme auparavant, mais elles subsistent.

Si, en qualifiant la Russie de « tigre de papier », Trump indique en réalité un retrait du soutien direct à l’Ukraine, les choses deviendront quelque peu plus faciles pour nous. Mais nous devons obtenir la Victoire en toutes circonstances — même si cela ne devient pas plus facile, même si cela devient plus difficile.

Nous vivons un moment charnière dans l’histoire. Nous sommes en train de la briser — et elle tente de nous briser. La balance de la Victoire oscille.

Il est aujourd’hui vital de se tourner vers la science et l’éducation. Et vers la philosophie. Là résident les clés de l’authenticité.

Hegel disait que toute grande puissance devait avoir une grande philosophie. Sans cela, la puissance elle-même devient un simulacre — un « tigre de papier ». L’éveil signifie l’éveil de l’esprit.

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Contradictions républicaines

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Contradictions républicaines

par Georges Feltin-Tracol 

Maire Les Républicains de L’Haÿ-les-Roses dans le Val-de-Marne de 2014 à 2024, Vincent Jeanbrun rencontre une notoriété nationale pendant les émeutes de la fin juin 2023. Des racailles tentent alors d’incendier son domicile privé. La dissolution inopinée du 9 juin 2024 incite ce proche de la présidente du conseil régional d’Île-de-France, Valérie Pécresse alias « Madame 4,78 % », à se présenter dans la septième circonscription de son département. Il bat de justesse (545 voix !) au second tour la députée sortante insoumise Rachel Keke, gouvernante d’hôtel de son état.

39644740-528254444.jpgInvisible durant les premiers mois de la XVIIe législature, Vincent Jeanbrun (photo) se fait remarquer par une proposition de loi effarante. Signé par plusieurs caciques du groupe La Droite républicaine dont son président, Laurent Wauquiez, et déposé le 10 juin dernier sur le bureau de l’Assemblée nationale, ce texte prévoit l’interdiction et la condamnation des contenus et des discours dits « anti-républicains ». Ce texte aberrant voudrait pénaliser toute remise en cause du modèle français « fondé sur l’universalisme républicain ». Elle souhaiterait aussi défendre le caractère démocratique, laïque et indivisible de la République. Ce projet totalitaire propose trois ans d’emprisonnement et 45.000 € d’amende à tout esprit critique. La peine s’élève jusqu’à cinq ans de détention et 75.000 € d’amende si les propos litigieux condamnés sont tenus sur Internet ou par un élu…

Certes, l’exposé des motifs cible explicitement la confrérie des Frères musulmans. Mais ne nous faisons aucune illusion ! À l’instar de la pitoyable loi contre le séparatisme votée en 2021, tout mouvement identitaire, royaliste, catholique, nationaliste-révolutionnaire ou même régionaliste serait de fait visé sans omettre les membres des Maisons de France royale et impériale qui verraient leur liberté d’expression entravée, voire bafouée. Unique candidat royaliste à une élection présidentielle sous la Ve République, Bertrand Renouvin n’aurait pas pu se présenter si cette ineptie funeste avait été en vigueur en 1974.

academia-christiana-539144787.pngCharlie Hebdo du 27 août 2025 et Libération du lendemain ont publié des articles fielleux à souhait contre le succès incontestable des universités d’été d’Academia Christiana organisées en Provence et dans l’Ouest. Les trois plumitifs de ces deux titres super-subventionnés ne se remettent toujours de sa non-dissolution en 2023 ! L’ignoble proposition de Vincent Jeanbrun permettrait d’étouffer les saines aspirations d’une jeunesse qui récuse « ce monde vétuste et sans joie ». L’ancien édile imposerait ainsi le délit de blasphème politique.

Il ignore sûrement qu’au cours des débats parlementaires en 1881 portant sur la liberté de la presse, certains républicains déposèrent un amendement impliquant un délit d’outrage à la République. Républicain incontestable, Georges Clemenceau tonna contre… Avec raison !

Remarquons toutefois que si ce texte liberticide était entériné, il ne pourrait qu’éclairer d’une lumière crue les contradictions inhérentes d’une république obligée dans les faits de s’adapter aux contraintes du réel. En effet, la fameuse « République une et indivisible » est un mythe idéologique; c’est une fumisterie qui relève principalement de la croyance politique la plus fantasmatique.

La loi de séparation entre l’État et l’Église catholique qui instaure la laïcité ne concerne pas tout le territoire français. Les deux départements alsaciens et celui de la Moselle, allemands en 1905, vivent toujours sous le régime concordataire de 1801. Quand les républicains du Cartel des gauches en 1924 cherchèrent à imposer la règle commune, ils firent face à une véritable insurrection pacifique de la part des Alsaciens et des Lorrains. Le gouvernement laïcard recula bientôt. Outre le cas alsacien – lorrain, la laïcité ne s’applique pas partout en France, à savoir l’archipel de Saint-Pierre-et-Miquelon au large du Canada, la Guyane, Mayotte, la Nouvelle-Calédonie, Wallis-et-Futuna et la Polynésie française. Quant à l’île de La Réunion, sa mise en œuvre se révèle fort problématique du fait de la structure créolisée de la société insulaire.

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v38pq25g5et41-3369759162.jpgPar ailleurs, en matière douanière, sait-on qu’il existe près de la frontière suisse dans le département de l’Ain une zone franche dans le pays de Gex ? Cet espace de libre-échange avec le voisin helvète procède du traité du Congrès de Vienne en 1815. À l’origine d’une grande superficie, cette zone franche s’est réduite dans la première moitié du XXe siècle. Enfin, dans l’océan Pacifique, Paris nomme sur l’archipel de Wallis-et-Futuna un administrateur supérieur, l’équivalent océanien du préfet. Ce haut-fonctionnaire doit en permanence prendre en compte l’action au quotidien des rois coutumiers d’Uvea (photo), d’Alo et de Sigave. La République française s’incline donc devant le fait royal local.

L’unité et l’indivisibilité de la République française persistent-elles encore quand le conseil des ministres du 30 juillet 2025 adopte un projet de loi sur une plus large autonomie de la collectivité territoriale de Corse ? Le Conseil d’État avait largement contesté ce projet et émis des modifications substantielles. Mais le gouvernement de François Bayrou les a toutes rejetées avec le risque d’une censure à venir de la part du Conseil constitutionnel si les parlementaires approuvaient ce texte. Dans le même temps, la Guyane, la Martinique et la Guadeloupe négocient toujours sur une évolution de leur statut en faveur d’une plus grande autonomie. Le summum est néanmoins atteint avec l’accord de Bougival sur la Nouvelle-Calédonie qui administre un coup de grâce bienvenu à l’unité républicaine. Si le projet dément de Vincent Jeanbrun était adopté, tous les responsables politiques favorables à l’autonomie de leur territoire risqueraient-ils amendes et peine de prison ? Cette proposition de loi va à l’encontre des mutations actuelles françaises.

La création d’un « État de Nouvelle-Calédonie » déchire en effet la fiction grotesque d’une entité politique une et indivisible. Mais plutôt que de réserver cette disposition institutionnelle unique au seul « Caillou », pourquoi ne pas la reproduire pour d’autres collectivités françaises ? Certes, les indépendantistes de diverses contrées ultra-marines restent sceptiques face à cette innovation juridique. N’empêche ! Oui à un État de Nouvelle-Calédonie ! Mais aussi oui à un État de Polynésie française ! Oui encore à un État de Wallis-et-Futuna, à un État de La Réunion, à un État de Mayotte, à un État de la Guyane, à un État de la Martinique, à un État de la Guadeloupe, à un État de Saint-Pierre-et-Miquelon ! Et pourquoi ne pas implanter cette disposition à la Métropole ? Soyons cohérents et exigeons la reconnaissance d’un État de Corse, d’un État de Bretagne réunifiée, d’un État de Normandie, d’un État d’Alsace, d’un État de Lorraine – Champagne, d’un État d’Occitanie, d’un État de Catalogne, d’un État de Provence, d’un État de Nice, d’un État de Savoie, d’un État de Bourgogne – Franche-Comté, voire d’un État du Massif Central, etc.

N’en déplaise par conséquent à Vincent Jeanbrun, amoureux transi de Marianne au bonnet phrygien, que mille États subsidiaires fleurissent au sein d’une nouvelle république nationale et populaire, la République différenciée des peuples enracinés de France ! 

GF-T

  • « Vigie d’un monde en ébullition », n° 167, mise en ligne le 24 septembre 2025 sur Radio Méridien Zéro.

Accords en Égypte favorables à la Russie “isolée” selon les médias italiens et occidentaux

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Accords en Égypte favorables à la Russie “isolée” selon les médias italiens et occidentaux

Enrico Toselli

Source: https://electomagazine.it/accordi-in-egitto-per-la-russia...

Eh oui, les journalistes italiens politiquement corrects ont vraiment raison lorsqu’ils nous expliquent, un jour sur deux, que Poutine a désormais perdu la guerre et que la Russie est totalement isolée. Mais comme à Moscou ils ne semblent pas en être conscients, ils continuent à conclure des accords avec d’autres pays qui n’ont pas compris en quoi consiste cet isolement russe. Ainsi, Poutine et l’Égyptien al-Sissi ont signé un accord pour renforcer la zone industrielle russe au sein de la Zone Économique du Canal de Suez.

Les entreprises moscovites bénéficieront d’avantages fiscaux et douaniers pendant 49 ans. Une initiative russo-égyptienne qui stimulera la production locale et augmentera les échanges commerciaux entre les deux pays. Mais Moscou entend également utiliser la zone comme un hub pour les échanges avec tout le Moyen-Orient et l’Afrique.

Dans la zone du canal, la Russie n’est pas seule. Des investissements chinois sont arrivés dans le cadre du projet de la Nouvelle Route de la Soie (celui que Giorgia Meloni a si intelligemment annulé), ainsi que ceux des Émirats et de l’Arabie Saoudite pour renforcer les ports et la logistique.

Le projet devrait, entre autres, favoriser l’intégration de l’économie égyptienne à celle des BRICS. Et bien sûr, il vise aussi à accroître encore davantage les échanges entre la Russie et l’Égypte. Au premier semestre de cette année, les exportations russes vers le pays méditerranéen ont augmenté de 21 % et les importations de produits égyptiens de 30%. Pour la Russie, opérer dans la zone industrielle signifie avoir accès à plus de 70 marchés grâce aux accords de libre-échange égyptiens. Pas mal pour un pays “isolé”...

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Frontières et autres fables

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Frontières et autres fables

Andrea Marcigliano

Source: https://electomagazine.it/confini-e-altre-fole/

L’Estonie accuse la Russie d’avoir violé ses frontières par le survol d'avions militaires et demande l’intervention de l’OTAN.

La Russie, cependant, rétorque que l’Estonie a élargi son espace aérien en totale violation de toutes les conventions et accords internationaux.

L’affaire, en soi, pourrait prêter à sourire.

Le nain qui accuse le géant de lui faire de l’ombre. Et qui menace un cuirassé avec un caillou.

Car l’Estonie n’a pas de flotte aérienne. Quatre vieilles carcasses, tout au plus bonnes à mener une mission de reconnaissance.

Le problème, cependant, c’est que Tallinn fait partie de l’OTAN. Et exige à grands cris l’intervention des alliés. À tel point que, pour couvrir le territoire estonien, des chasseurs italiens auraient – conditionnel obligatoire – décollé.

Que ces derniers aient ensuite abattu des avions russes relève de la science-fiction quotidienne de notre belle "presse". En réalité, les avions italiens se seraient limités à surveiller le vol des Russes, selon les protocoles habituels.

Mais le vrai problème est ailleurs. Et il demeure grave. L’Estonie a étendu démesurément, et en violation de toutes les conventions internationales, son espace aérien. Et, de plus, elle utilise cet abus pour tenter de provoquer un conflit avec la Russie.

Entre l’OTAN et la Russie, bien sûr, car si cela ne dépendait que d’elle et de Moscou, l'affaire ne durerait guère plus que quelques heures. Et l’Estonie, arrogante, qui a privé 30% de sa population de tout droit parce qu’ils sont russes ou russophones, disparaîtrait définitivement des cartes.

Mais le problème subsiste. Et il n’est qu’un des nombreux signaux qui nous permettent de comprendre la situation internationale.

Situation loin d’être sereine, malheureusement.

Parce qu’il existe des forces qui souhaitent l’explosion d’un conflit général entre l’OTAN et la Russie. Ces forces n'émanent pas de Moscou, pas davantage de Washington. Mais des forces influentes au sein des dites élites dirigeantes européennes.

Capables, surtout, d’utiliser des idiots utiles – une autre expression ne me semble malheureusement pas adaptée – pour mettre le feu à la scène internationale. Et nous amener à ce conflit global au bord duquel nous nous trouvons depuis un certain temps déjà.

Un troupeau de moutons aveugles marchant vers le précipice.