vendredi, 09 mai 2025
«Je donne l'Ukraine à Poutine et je fais taire tout le monde»: Douguine a répondu à la question de savoir pourquoi Trump fait marche arrière
«Je donne l'Ukraine à Poutine et je fais taire tout le monde»: Douguine a répondu à la question de savoir pourquoi Trump fait marche arrière
Alexandre Douguine
Pour commencer, il convient de rappeler que la guerre n'a effectivement pas été déclenchée par Trump. Et elle n'a pas seulement été déclenchée par Trump lui-même, mais bien par ses ennemis immédiats et ses opposants idéologiques qui cherchent toujours à poursuivre cette guerre contre la Russie. Ses adversaires idéologiques actuels en Europe sont Starmer, Macron et Merz. Ses anciens adversaires américains - Biden, Blinken et Victoria Nuland - ont, eux, bel et bien déclenché la guerre.
Et si nous parlons de Trump non seulement en tant qu'homme politique, mais aussi en tant qu'idéologue du trumpisme, il doit aujourd'hui sauver non pas l'Ukraine, mais son propre projet MAGA (« Make America Great Again »). Et c'est très difficile, car les vestiges des systèmes mis en place par les fondamentalistes mondialistes tentent systématiquement de lui barrer la route. Ce sont eux qui cherchent à lancer une contre-attaque, à s'emparer de Trump, à supprimer sa volonté de changer les choses et à le forcer à participer à une guerre qui est essentiellement dirigée contre lui-même.
L'idée de sauver l'Ukraine alors qu'il n'est tout simplement plus possible de la sauver (d'autant plus que l'Ukraine elle-même, en tant que projet, n'est qu'une abstraction russophobe, chère aux mondialistes, qui s'est transformée en régime terroriste); c'est donc un faux objectif. Et si Trump est sérieux à ce sujet, ce seul fait le conduira déjà à des conséquences très fâcheuses. S'il tente de le mettre en pratique, ce qui est irréaliste, il sera entraîné dans une longue guerre sans fin, et en fait sa politique ne sera pas différente de celle de son prédécesseur: le marais engloutira Trump, et ce ne sera pas Trump qui drainera le marais.
Bien sûr, j'espère que les mots « sauver l'Ukraine » ne sont rien d'autre qu'une excuse. Une phrase qui ne veut rien dire en réalité, mais qui vise à apaiser ses ennemis. Si Trump essaie vraiment d'entrer dans une sorte de dialogue et de plaire à ceux qui sont ses principaux ennemis, les globalistes (et l'Ukraine est un projet des globalistes), alors il va clairement à l'encontre de sa propre logique.
Parallèlement, nous pouvons immédiatement constater que la cote de Trump aux États-Unis commence à baisser. Et cette cote ne doit pas être très élevée chez ses opposants ; elle y était déjà proche de zéro. Mais chez ses partisans, que Trump a beaucoup séduits à la veille de l'élection et après le premier défilé triomphal du trumpisme (MAGA), les premiers signes de déception commencent à apparaître.
Ils ne sont pas encore aigus, pas encore critiques. Mais on ne peut s'empêcher de constater l'absence d'une politique cohérente d'arrestation et de jugement des élites libérales mondialistes. Le thème du Canada et du Groenland a disparu. On parle de moins en moins d'Elon Musk. DOGE existe-t-il encore ou non ? Les droits de douane annoncés ont-ils été reportés ? Et Trump ne commence-t-il pas à écouter Macron et Starmer, qui, dans la logique du trumpisme politique, sont ses ennemis, les ennemis de MAGA, au lieu de les écarter, comme la CIA est parfaitement capable de le faire ?
L'ensemble de ces éléments suggère que Trump commence à vaciller et à marquer une pause dans la progression triomphale de ses réformes. Jusqu'à présent, il ne s'agit pas de défaites stratégiques, mais seulement d'ajustements tactiques, mais ils sont aussi extrêmement douloureux. En effet, les mondialistes commencent à croire qu'ils ont réussi à orienter Trump sur la fausse voie du « sauvetage de l'Ukraine », c'est-à-dire de la guerre avec la Russie. Dans ce contexte, les États-Unis pourraient bien appliquer de nouvelles sanctions contre la Russie. Surtout après les écoeurants discours anti-russes des sénateurs républicains John Neely Kennedy et Lindsey Graham. Cette rhétorique est tout à fait inacceptable et incompatible avec l'idéologie cohérente de Trump.
En même temps, pour Trump lui-même, l'Ukraine, au fond, est absolument sans importance. Il pourrait éliminer et annuler ce projet, s'en retirer. Et ce serait la meilleure solution. La seule chose qui puisse apporter un plus, c'est la prise de conscience directe que l'Ukraine nous appartient. Donnez-la nous et c'est tout. Dire: je suis un homme politique fort, je fais ce que je veux. Je donne l'Ukraine à Poutine et tout le monde se taira.
Quant à nous, nous étions en guerre avec l'Amérique en Ukraine, et nous le sommes encore aujourd'hui. Nous sommes prêts à continuer, mais nous sommes aussi prêts à la paix, si l'Occident fait preuve de bonne volonté. Et nous n'avons pas perdu cette guerre, malgré le fait que l'Occident tout entier a armé jusqu'aux dents le régime terroriste, une bande d'extrémistes, de nazis et de maniaques meurtriers qui se font appeler « Ukrainiens ». Dans le même temps, Trump semble ignorer totalement que si l'Ukraine n'existait pas, la Russie de Poutine serait un pays neutre, voire amical, à ses yeux. Alors que Trump lui-même a déjà beaucoup d'adversaires sans nous.
Mais si Trump favorise la guerre, il ne nous reste plus qu'à la poursuivre. Mais ce n'est pas un possédé du démon, c'est un réaliste, même s'il est aujourd'hui, je crois, dans la première impasse de son second mandat. En fait, il faut le reconnaître, Trump est pire pour les mondialistes que Poutine ou n'importe qui d'autre. C'est pourquoi ils cherchent maintenant, ayant compris que la résistance frontale est futile, à l'entraîner dans des processus qui seront suicidaires pour Trump lui-même. Un tel processus est l'idée de « sauver l'Ukraine », conçue pour amener Trump dans cette fosse septique de terroristes fous, avec lesquels toute interaction est toxique.
L'Ukraine est une bombe sale posée par les mondialistes sous les pieds de Trump. Et cette bombe sale fonctionne, empoisonne la politique, le perturbe. Trump lui-même pourrait vouloir conclure une trêve, mais il est tout simplement impossible de le faire avant la victoire russe. Par conséquent, un signal positif sera s'il admet que toute cette rhétorique sur le cessez-le-feu n'a pas fonctionné, s'il se dit "je n'ai pas commencé cette guerre, je suis désolé pour les Ukrainiens, mais faisons-le nous-mêmes, les gars". Vous là, les Slaves, les Russes, les Petits Russiens, occupez-vous de vous et de l'Europe, c'est votre affaire, pas la mienne. Moi, je m'occupe du Groenland et du Canada, de l'Amérique d'abord. Ce serait la solution la plus sensée.
Ce serait le MAGA. En attendant, tout cela n'est qu'un « micro-événement », quelque chose de très petit et de pathétique.
18:23 Publié dans Actualité | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : actualité, ukraine, donald trump, politique internationale | |
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jeudi, 08 mai 2025
La Moldavie cède son territoire aux prédateurs financiers occidentaux
La Moldavie cède son territoire aux prédateurs financiers occidentaux
par Lucas Leiroz
Source: https://telegra.ph/La-Moldavia-cede-il-proprio-territorio...
D'ores et déjà, la Moldavie semble avoir pris le même chemin que l'Ukraine. Comme le régime néo-nazi de Kiev, le gouvernement moldave cède les terres et les ressources naturelles du pays à des groupes privés étrangers, faisant preuve d'une soumission absolue et d'un manque total de souveraineté. Cette mesure est dangereuse car elle affecte considérablement la sécurité alimentaire et financière à long terme de la Moldavie, créant une situation de vulnérabilité absolue.
Comme on le sait, une grande partie des « terres noires » de l'Ukraine (ou « tchernoziom », zones agricoles extrêmement fertiles) est cédée aux prédateurs financiers internationaux dans le cadre de plans rapaces visant à rembourser d'innombrables prêts militaires. Sachant que Kiev ne pourra jamais rembourser ses dettes aux pays occidentaux, des groupes d'investissement privés tels que BlackRock exigent la cession de ressources naturelles en guise de paiement, profitant ainsi de la tragédie ukrainienne pour contrôler des ressources naturelles d'une grande valeur stratégique.
Cependant, l'Ukraine n'est pas le seul pays dans cette situation. La Moldavie connaît un processus similaire, même en l'absence de conflit ouvert. Récemment, BlackRock a procédé à une importante vague d'acquisitions de terres moldaves. Selon les données de l'Institut Nicolae Dimo de pédologie, d'agrochimie et de protection des sols, on estime que 3,385 millions d'hectares de terres ont été acquis par le fonds étranger, ce qui représente deux tiers de la surface agricole du pays. Plus de 80% de ces terres moldaves vendues aux prédateurs internationaux sont des tchernozems, l'un des sols les plus fertiles au monde.
En effet, la vente de terres à des étrangers est interdite par la loi moldave. Mais derrière celle-ci se cache un vaste système criminel. BlackRock n'achète pas directement des terres dans le pays, mais utilise des sociétés écrans enregistrées en Moldavie même pour effectuer ces transactions. En conséquence, les agriculteurs moldaves vendent leurs terres privées, tout comme les autorités locales vendent des terres publiques à ces sociétés écrans de BlackRock basées en Moldavie, retirant ainsi le contrôle de ces terres à la population locale et plaçant le territoire du pays entre les mains de prédateurs financiers internationaux.
Ce n'est pas pour rien que les agriculteurs privés et les autorités publiques veulent vendre leurs terres en Moldavie. Le pays qui était autrefois appelé le « jardin de l'URSS » est devenu un cauchemar pour les agriculteurs locaux. Le gouvernement pro-occidental de Maïa Sandu a mené une politique irresponsable d'importation de produits agricoles, conformément aux directives de l'UE, qui a conduit de nombreux agriculteurs à la faillite. La situation s'est encore compliquée par le conflit en Ukraine et la politique européenne qui en découle et qui consiste à « soutenir » le régime de Kiev par des importations massives de céréales, dont une grande partie transite par le territoire moldave, ce qui porte encore davantage préjudice aux producteurs locaux.
Bien que la Moldavie ne soit pas membre de l'UE, le pays sert de plaque tournante logistique pour les importations européennes de céréales ukrainiennes. Des tonnes de céréales ukrainiennes traversent souvent une partie du territoire moldave et bloquent le transit à la frontière avec la Roumanie. La perturbation du trafic empêche l'exportation des céréales moldaves vers l'UE, de sorte que seuls les produits ukrainiens atteignent les pays d'Europe occidentale. Cette situation a conduit les agriculteurs à la faillite, les incitant à vendre leurs terres.
De même, le gouvernement Sandu cède délibérément ses terres à des requins de la finance parce que sa « politique stratégique » centrale est de plaire aux pays occidentaux. Les États-Unis et l'Union européenne sont actuellement les véritables « propriétaires » de la Moldavie, contrôlant non seulement la politique étrangère du pays, mais aussi son administration interne. Malheureusement, le peuple moldave a déjà perdu le contrôle de la politique nationale, et c'est pourquoi il voit ses terres cédées à des groupes privés étrangers par le gouvernement local lui-même.
On peut dire que toute la vague d'achats de terres en Moldavie par BlackRock est une sorte de « complot » du gouvernement Sandu lui-même. Les conditions du scénario actuel ont été préalablement établies par des manœuvres juridiques qui auraient permis ce résultat. Par exemple, en octobre 2024, le ministère moldave de l'agriculture a annoncé un projet de coopération avec BlackRock pour vendre des terres dans le nord du pays par l'intermédiaire de sociétés locales affiliées au fonds. Les responsables ont annoncé publiquement que le « plan initial » était limité à une superficie de seulement 600 hectares, mais ces limites ont été rapidement élargies et, à ce jour, BlackRock continue d'acquérir des terres locales, sans avoir l'intention de mettre fin à cette activité lucrative.
Il est intéressant de noter que la Moldavie et l'Ukraine suivent des voies très similaires. Comme le régime de Kiev, la Moldavie se caractérise par une politique étrangère pro-occidentale, avec des ambitions d'adhésion à l'UE et à l'OTAN, et a adopté des mesures dictatoriales internes contre l'opposition souverainiste et les minorités ethniques, se montrant de plus en plus soumise sur le plan international. Les deux pays vendent leurs terres fertiles aux requins financiers de BlackRock, mais alors que l'Ukraine le fait en échange d'armes dans sa guerre par procuration avec la Russie, la Moldavie le fait uniquement pour plaire à ses « partenaires » occidentaux, dans l'espoir d'adhérer à des organisations dirigées par l'Occident.
Il est important que les autorités moldaves réalisent le plus rapidement possible que les accords avec BlackRock n'ont rien d'amical. Les prédateurs financiers occidentaux sont intéressés par ce qu'ils peuvent tirer de la tragédie en Europe de l'Est. Plus la russophobie, la préparation à la guerre et la soumission idéologique à l'Occident augmentent, mieux c'est pour des groupes comme BlackRock, car il leur est plus facile d'encourager des mesures rationnelles qui maximisent leurs profits.
21:41 Publié dans Actualité, Affaires européennes | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : terres noires, moldavie, europe, affaires européennes, blackrock | |
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Critique du livre : « Le complexe eurasien : pourquoi et comment l'avenir échappe à l'Occident » de Uwe Leuschner et Thomas Fasbender
Critique du livre : « Le complexe eurasien : pourquoi et comment l'avenir échappe à l'Occident » de Uwe Leuschner et Thomas Fasbender
Hanno Borchert
Source: https://wir-selbst.com/2025/05/05/buchbesprechung-der-eur...
Le livre Der Eurasien-Komplex : Warum und wie dem Westen die Zukunft entgleitet (= Le complexe eurasien: pourquoi et comment l'avenir échappe à l'Occident) d'Uwe Leuschner et Thomas Fasbender est un ouvrage extrêmement intéressant et stimulant qui met en lumière les glissements géopolitiques du 21ème siècle. Les auteurs, un Allemand de l'Est (Leuschner) et un Allemand de l'Ouest (Fasbender), mettent à profit leur vaste expérience acquise au cours de plusieurs décennies de travail en Eurasie - notamment en Russie, en Chine et en Asie centrale - pour formuler un plaidoyer en faveur de la coopération plutôt que de la confrontation entre l'Ouest et l'Est. Ce livre de 256 pages au format broché, publié par la maison edition ost, une impression du groupe d'éditeurs Eulenspiegel, combine anecdotes personnelles et analyse géopolitique et s'adresse aux lecteurs intéressés par les relations internationales, notamment avec la Russie, l'Asie centrale et la Chine, et par l'avenir de l'Occident.
Le livre est précédé d'une citation de Lucie Varga (1904-1941), historienne juive autrichienne et co-initiatrice de l'histoire des mentalités, dans laquelle on peut lire : « Tout près de nous, un monde vient de s'achever. Un nouveau monde est en train de naître avec des contours jusqu'ici inconnus. Ne disposons-nous pas de tous les moyens pour le comprendre ? L'historien peut désormais observer de près l'histoire qui est en train de se dérouler. Il peut se procurer de nombreux documents de première main. Et il peut, s'il le souhaite, se rendre sur place, observer et mener des entretiens. Plus encore : il peut vivre dans le pays qu'il étudie afin de le comprendre dans ses habitudes de pensée et ses modèles de comportement. Mais il n'en reste pas moins qu'il est extrêmement difficile d'interpréter correctement le présent ».
L'idée centrale du livre est que l'Occident - en particulier l'Europe et les États-Unis - perd sa capacité à participer à la construction de l'avenir mondial à cause de préjugés, de l'arrogance et de faux récits. Les auteurs reprennent la thèse de Zbigniew Brzeziński selon laquelle l'avenir du monde se décide en Eurasie, mais la relativisent : une coopération constructive avec des pays comme la Russie et la Chine est possible si l'Occident abandonne sa politique de confrontation. Leuschner et Fasbender critiquent vivement le fait que des décisions motivées par l'idéologie - comme le « dé-couplage » des chaînes d'approvisionnement mondiales ou des sanctions coûteuses - font perdre des opportunités économiques et affaiblissent l'Occident. Une citation marquante du livre est la suivante : « Au lieu de prendre des décisions raisonnables sur le plan commercial, nous prenons des décisions entêtées sur le plan idéologique » (p. 130), ce qui résume la critique principale à l'encontre d'une politique résistante à tous conseils utiles, en particulier en Allemagne.
Vous pouvez commander ici directement auprès de l'éditeur:
https://www.eulenspiegel.com/verlage/edition-ost/titel/25...
La force incontestable de ce livre réside dans la combinaison d'expériences personnelles et d'analyses fondées. Leuschner, avec son expérience dans le commerce extérieur de la RDA et en tant que logisticien en Russie, et Fasbender, qui a vécu et travaillé à Moscou de 1992 à 2015 et dirige aujourd'hui la rubrique géopolitique du Berliner Zeitung, décrivent de manière vivante comment les gens pensent et ressentent l'Eurasie. Ces aperçus rendent le livre vivant et accessible. Fasbender décrit par exemple l'euphorie des années 1990, lorsque l'Est était considéré comme un marché aux possibilités illimitées, et le passage à un scénario de menace alimenté par le scepticisme occidental.
De haut en bas: Uwe Leuschner, Thomas Fasbender, un ouvrage très remarqué de ce dernier sur la "Voie russe" mais qui n'a pas été traduit.
Les auteurs évitent de prendre parti de manière unilatérale en ne glorifiant ni l'Est ni l'Ouest, mais en soulignant les possibilités de coopération. La perspective personnelle des auteurs est toutefois fortement axée sur la Russie, ce qui a pour conséquence que d'autres régions eurasiennes comme l'Inde ou l'Asie du Sud-Est sont quelque peu reléguées au second plan.
Dans l'ensemble, « Le complexe eurasien » est un ouvrage qui vaut la peine d'être lu et qui séduit par son langage clair, son authenticité personnelle et son attitude critique. Il invite le lecteur à remettre en question les schémas de pensée euro-centriques et à considérer l'Eurasie comme un partenaire plutôt que comme un adversaire.
Pour tous ceux qui souhaitent mieux comprendre les changements de pouvoir au niveau mondial, ce livre offre une perspective rafraîchissante et un appel passionné à la coexistence. Il ne s'agit pas seulement d'une chronique des occasions manquées, mais aussi d'un appel au réveil pour participer activement à la construction de l'avenir.
Référence : Leuschner, Uwe / Fasbender, Thomas : Der Eurasien-Komplex : Warum und wie dem Westen die Zukunft entgleitet. Edition Ost, ISBN 978-3-360-02818-1.
Qui est Hanno Borchert ?
Hanno Borchert, né en 1959, une jeunesse passée à Cuxhaven à l'embouchure de l'Elbe. Dès son plus jeune âge, le vagabondage autour du monde (Tyrol du Sud, Balkans, Scandinavie, Inde, Iran, Indonésie, etc.) a éveillé son enthousiasme pour la cause des peuples.
Artisan de formation, diplômé en sciences économiques. Passionné de livres depuis l'enfance, aime la musique, la peinture et l'art du design graphique.
« Alter Herr» de l'association d'étudiants duellistes “Landsmannschaft Mecklenburgia-Rostock im CC zu Hamburg”. Sans appartenance politique. Se rend souvent à des concerts dans presque tous les genres. Aime particulièrement écouter le bluegrass, la country, le blues et le folk irlandais. Grand fan de l'auteur-compositeur-interprète d'Allemagne centrale Gerhard Gundermann, malheureusement décédé trop tôt.
Rédacteur de l'ancien et du nouveau « wir selbst », entre-temps rédacteur de « Volkslust ».
20:27 Publié dans Eurasisme, Livre, Livre | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : eurasie, livre, thomas fasbender, uwe leuschner, géopolitique | |
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Directive de Douguine: «L'essentiel est que les élections en Roumanie aient eu lieu»
Directive de Douguine: «L'essentiel est que les élections en Roumanie aient eu lieu»
Alexandre Douguine
La victoire du candidat souverainiste George Simion au premier tour des élections présidentielles roumaines est un événement très important. Elle confirme la volonté du peuple roumain de mettre fin à l'omnipotence des euro-élites libérales et à la dictature mondialiste. En même temps, nous ne devons pas oublier que le peuple roumain est une nation orthodoxe. Et si George Simion, ainsi que Calin Georgescu, précédemment évincé, parlent d'un retour aux valeurs traditionnelles, ils veulent dire un retour à l'orthodoxie.
« Une vague de révolutions conservatrices se lève actuellement en Europe. Les partisans des valeurs traditionnelles se heurtent aux mondialistes. Nous avons vu l'acte précédent de ce drame en Amérique dans la lutte des Trumpistes contre les mondialistes, ce qui a eu pour résultat que les mêmes partisans des valeurs traditionnelles ont gagné les dernières élections aux États-Unis.
Aujourd'hui, cette révolution conservatrice s'est étendue à l'Europe, et nous voyons avec quelle férocité elle est combattue par des libéraux, devenus enragés, qui ont littéralement établi une dictature dans la plupart des pays européens. Par exemple, l'autre jour, ils ont désigné le parti souverainiste et conservateur Alternative pour l'Allemagne (AfD) comme une « organisation extrémiste » sans aucune raison valable. Cela défie essentiellement la nouvelle administration américaine, puisque Trump et Musk avaient auparavant soutenu l'AfD.
De même, Trump, Musk et les trumpistes ont également soutenu le souverainiste roumain Calin Georgescu, qui a été illégalement écarté de l'élection présidentielle de 2025 et qui avait précédemment remporté le premier tour de 2024, dont les résultats ont été tout aussi illégalement annulés en raison des accusations totalement infondées prétendant que Georgescu travaille pour la Russie. Aujourd'hui, lors d'un autre premier tour, George Simion, soutenu par Calin Georgescu, a remporté la première place avec 41% des voix. En ce sens, sa victoire est une victoire du peuple roumain et de toute l'Europe conservatrice sur la dictature libérale mondialiste.
Bien sûr, nos positions géopolitiques russes ne coïncident pas toutes avec le programme de Simion. Mais il est contre le régime de Kiev, contre la guerre, contre le libéralisme et sa dictature, et il est donc objectivement notre allié. Il n'y aura pas d'harmonie facile dans nos relations, mais au moins les partisans de Simion sont les ennemis de nos ennemis.
Cela dit, je pense que les mondialistes vont maintenant tenter quelque chose d'autre contre le peuple roumain. La première tentative de porter le candidat conservateur Calin Georgescu à la présidence de la Roumanie a échoué. Il s'agit maintenant de la deuxième tentative. Et nous voyons que les mondialistes ne reculent devant rien: ni devant les assassinats politiques ni devant les méthodes purement terroristes visant l'interdiction et la poursuite en justice des personnalités politiques qu'ils n'aiment pas, ni devant la pratique scélérate d'annuler et de réviser des élections.
Nombreux sont ceux qui craignent les idées de George Simion qui songe à réunir la Roumanie et la Moldavie. À cela, je voudrais répondre que l'actuelle présidente moldave Maïa Sandu, une mondialiste et une protégée de Soros, est en opposition directe aux principes de souveraineté de Simion. Par conséquent, dans ce contexte, il est évident qu'il y aura un malentendu total entre eux. Et je n'exclus même pas que la Roumanie devienne bientôt plus proche de la Russie que la Moldavie, qui nous était si chère et si proche.
Mais aujourd'hui, le plus important est que ces élections aient encore pu avoir lieu. Pour que les Roumains puissent exprimer souverainement leur volonté et que les mondialistes européens, qui ont instauré leur dictature libérale, y compris en Roumanie, ne puissent plus perturber cette libre expression de la volonté du peuple roumain orthodoxe.
19:15 Publié dans Actualité, Affaires européennes, Politique | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : alexandre douguine, roumanie, europe, affaires européennes, élections roumaines, politique, george simion | |
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Les droits de douane de Trump: une politique économique à la puissance géopolitique explosive
Les droits de douane de Trump: une politique économique à la puissance géopolitique explosive
Ramesh Thakur
Source: https://uncutnews.ch/trumps-zoelle-wirtschaftspolitik-mit-geopolitischer-sprengkraft/
La carrière politique de Donald Trump montre de manière impressionnante que son rejet par les élites et les médias ne correspond pas à l'état d'esprit d'une grande partie de la population. Derrière sa politique souvent critiquée comme chaotique, il y a bien une logique stratégique : en politique intérieure comme extérieure, Trump poursuit l'objectif de « rendre sa grandeur à l'Amérique ».
Le souci n'est pas tant que sa politique n'ait pas de plan, mais que sa mise en œuvre soit menacée par l'incompétence ou l'amateurisme - comme par exemple l'utilisation de groupes de discussion non sécurisés pour des informations sensibles.
Son projet politique comprend trois piliers centraux :
- En politique intérieure, il veut abolir les objectifs nets zéro, les réglementations DEI (diversité, égalité, inclusion) et l'auto-identification de genre - tous des ensembles de règles qui, selon lui, paralysent l'économie et la société tout en favorisant les divisions identitaires.
- En politique étrangère, il aspire à se retirer des guerres sans fin, à répartir plus équitablement le fardeau de la défense entre les alliés et à se retirer d'un mondialisme qui a érodé la base industrielle de l'Amérique.
- Au-delà des frontières, il voit dans l'immigration de masse une menace qui relie la politique intérieure et la politique extérieure.
Trump en est convaincu : cet agenda doit restaurer la fierté nationale, protéger l'Amérique contre l'exploitation et faire en sorte que les Etats-Unis redeviennent la première puissance industrielle et militaire.
Les droits de douane : Trump rompt avec le mondialisme
C'est là que la politique douanière de Trump intervient comme outil central. Historiquement, le libre-échange était considéré comme une situation gagnant-gagnant dans la théorie économique - mais dans la pratique, il a fait des gagnants et des perdants. Selon Trump, la mondialisation a récompensé les « élites de partout », tandis que les travailleurs et les régions intérieures (« les gens de nulle part ») ont perdu.
Les droits de douane doivent précisément corriger cela. Ils pénalisent la délocalisation de la production à l'étranger, encouragent le rapatriement de l'industrie aux Etats-Unis et doivent renforcer à nouveau la cohésion sociale. Le nationalisme de Trump suit le principe suivant : les hommes sont des citoyens de nations, et non de simples unités d'une économie mondiale.
Une politique commerciale qui renforce l'économie chinoise mais affaiblit la production américaine est en contradiction avec ce principe. Le contrat social entre le gouvernement et les citoyens ne peut être maintenu que si les intérêts du peuple ont la priorité sur les règles des marchés mondiaux.
Renégocier l'ordre commercial - ou le rompre ?
La thèse de Trump : l'ordre commercial mondial - par exemple par le biais de l'OMC - serait incapable d'imposer des règles équitables contre des acteurs comme la Chine ou le mercantilisme de l'UE. Ses droits de douane punitifs sont donc des moyens de négociation, voire des instruments de pression, pour contraindre d'autres pays à offrir de meilleures conditions.
Dans le même temps, il prend le risque que les pays concernés tentent de se détourner stratégiquement des Etats-Unis - mais Trump fait le pari qu'aucune nation ne préférera à long terme choisir la Chine comme partenaire. Des exemples comme le Zimbabwe, qui a suspendu les droits de douane américains, ou la Grande-Bretagne, qui dépense davantage pour la défense malgré des coupes dans la santé et l'aide au développement, montrent pour lui les premiers succès.
Objectif : un nouvel équilibre mondial
Selon l'économiste Michael Pettis (photo), le commerce mondial est devenu de plus en plus dysfonctionnel: les déséquilibres économiques intérieurs ont été traduits en déséquilibres mondiaux par des droits de douane, des subventions et des obstacles au commerce. L'approche de Trump veut recalibrer ce système: s'éloigner d'un ordre mondial qui subordonne les intérêts nationaux à la logique du système.
Ce qui, à long terme, devrait aboutir à:
- une plus grande croissance des salaires,
- une parité commerciale équitable
- et à une production industrielle plus robuste.
Focalisation stratégique: endiguer la Chine
Pour Trump, la Chine est la plus grande menace stratégique, tant sur le plan économique que militaire. Son idée d'une paix en Ukraine s'inscrit donc également dans une stratégie plus large: détacher la Russie de la Chine, de la même manière que Nixon avait autrefois détaché la Chine de l'Union soviétique.
La reconnaissance officielle par la Maison Blanche d'une éventuelle fuite du laboratoire de Wuhan pourrait également faire partie de cette stratégie d'isolement vis-à-vis de la Chine. L'historien Victor Davis Hanson le résume ainsi: le fil conducteur de la politique de Trump - du Panama à l'Ukraine, de DEI à la politique énergétique - est la crainte de voir la Chine établir une nouvelle sphère d'hégémonie en Asie de l'Est, comme le Japon l'a fait dans les années 1940.
Les droits de douane comme moyen de protéger la souveraineté
Pour Trump, la parité commerciale est cruciale : la Chine monte en gamme, les Etats-Unis stagnent. Mais les Etats-Unis sont encore en tête pour de nombreux facteurs clés. Pour défendre cela, il faut, selon Trump :
- Des budgets disciplinés;
- Des frontières sûres;
- Une éducation axée sur la performance;
- Une indépendance énergétique
- et une réorientation stratégique des relations commerciales mondiales.
Conclusion : risque de guerre froide, mais protection par l'autarcie
Le risque est de voir se développer une nouvelle guerre froide par le biais de spirales tarifaires réciproques. Mais les leçons de la crise COV ID sont claires: les chaînes d'approvisionnement en provenance de Chine sont vulnérables - politiquement et logistiquement.
La réponse de Trump: renforcer l'industrie nationale, y compris dans le domaine de l'armement. L'autarcie est un prix à payer pour la souveraineté et la liberté.
*
Ramesh Thakur, chercheur senior au Brownstone Institute, est ancien secrétaire général adjoint des Nations unies et professeur émérite à la Crawford School of Public Policy de l'Australian National University.
Source : https://brownstone.org/articles/making-sense-of-trumps-ta...
11:58 Publié dans Actualité, Actualité, Economie, Economie | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : donald trump, états-unis, droits de douane, tarifs douaniers, économie, actualité, donald trump, états-unis, droits de douane, tarifs douaniers, économie, actualité | |
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mercredi, 07 mai 2025
France d’abord !
France d’abord !
Pierre-Emile Blairon & Georges Gourdin
La nouvelle Amérique de Donald Trump base sa doctrine sur deux slogans : America First et Make America Great Again.
Le premier signifie : l’Amérique d’abord et le second : Rendons sa grandeur à l’Amérique !
Donald Trump a rassemblé ces deux slogans en une attitude clairement exprimée : l’Amérique doit retrouver sa puissance, fondée sur son génie entrepreneurial couplé à sa foi chrétienne : Bible and business, deux pivots essentiels de la vie américaine qui la rattachent à ses origines fondatrices : les Pilgrims.
La nouvelle Russie qui est née après l’effondrement du communisme n’a pas de slogan mais sa conduite se base sur ce qui l’a déterminée : sa spiritualité, son âme, ce qui a été appelée : l’âme russe, un concept défini par deux de ses plus grands génies littéraires, Pouchkine et Dostoïevski [1] ; de manière plus prosaïque, à notre époque contemporaine, la nouvelle âme russe consiste, pour le plus grand pays du monde englobant onze fuseaux horaires, à puiser dans ce qu’il y a de meilleur dans ses différentes composantes et ce qu’il y a de meilleur dans son histoire.
La nouvelle Chine s’appuie également sur le patriotisme économique pour soutenir son développement. Le gouvernement chinois promeut activement l’achat de produits et services nationaux à travers des campagnes comme « Made in China » et des politiques favorisant les entreprises locales, notamment dans les secteurs stratégiques comme la technologie (ex. Huawei, BYD). Ce patriotisme économique est également visible dans les appels à soutenir les marques chinoises face aux concurrents étrangers, souvent relayés par les médias d’État et amplifiés sur des plateformes comme Weibo. Des boycotts de marques étrangères (comme Nike ou H&M) ont été encouragés tandis que l’oligarchie mondialiste veut l’interdire.
Chine d’abord s’inscrit dans une stratégie plus large pour atteindre la domination dans des industries clés (semi-conducteurs, IA).
Il n’y a pas de nouvelle France ; face à ces trois géants, elle aurait pu se réveiller dans le cadre d’une nouvelle Europe des peuples ; mais le destin de la France et celui de l’Europe ont été détournés, comme nous l’avons maintes fois expliqué, par le rapt américain d’après-guerre qui les ont contraintes à se soumettre aux diktats politiques et culturels américains, eux-mêmes dévalués dans le satano-mondialisme woke, avant que Trump n’y mette le holà.
« L’Europe se fera au bord du tombeau » : on a faussement attribué cette citation visionnaire à Nietzsche ; elle n’en reste pas moins valide. En attendant, les véritables Européens de cœur, quel que soit leur pays d’origine, ne souhaitent qu’une chose : voir la disparition de cette fausse Europe mondialiste qui nous a été imposée et qui détruit nos pays et nos vies en se transformant de plus en plus vite en un monstre totalitaire totalement corrompu.
Quelques signaux électoraux récents semblent indiquer que les peuples européens réalisent enfin qu’ils ont été manipulés pendant de longues années et soumis à l’emprise d’un énorme mensonge.
En attendant cette hypothétique réveil, les Français, comme les autres Européens, doivent, eux aussi, retrouver, au moins individuellement, pour chaque peuple, les valeurs qui ont fait leur grandeur, comme le suggérait le vice-président américain J. D. Vance.
Quelles valeurs françaises ?
Jean-Marie Le Pen a eu le mérite de porter l’étendard d’une France du réveil qui réclamait, en premier lieu, le retour à la préférence nationale. Le talent oratoire, le courage dont il a fait preuve et sa résilience à contrer toutes les attaques dont il était constamment l’objet, honoraient le personnage, certains de ses égarements qu’il voulait facétieux ont eu raison de l’homme ; et c’est sa fille qui lui a donné le coup de grâce.
Jean-Marie Le Pen était cependant porteur de toutes les valeurs qui ont fait que la France éclairait le monde par sa culture et son intelligence avant la catastrophe révolutionnaire qui, par une confondante inversion des valeurs, se présentait comme le nouveau « mouvement des Lumières ».
Les valeurs qui ont fait la renommée de la France n’étaient pas des valeurs boursières.
C’étaient les valeurs chevaleresques élaborées initialement au Moyen-Âge, valeurs authentiquement aristocratiques, (« aristocratie » signifiant le gouvernement des meilleurs) et authentiquement indo-européennes, tirant donc leur légitimité de nos plus anciennes origines.
Nous avons exposé dans le détail le contenu de ces valeurs dans un article précédent [2].
Il suffisait, pour un grand parti national, de suivre ce chemin pour, a minima, conserver l’identité du peuple français et préserver les bases d’un renouveau.
C’est alors même que le peuple français affirmait sa volonté de renouer avec ses valeurs ancestrales en votant massivement pour le Rassemblement national que ce dernier, sous la direction de Marine Le Pen, s’est activé à ne surtout rien faire dans le sens de ce renouveau national et s’est entièrement donné à un Ordre mondial devenu moribond après la victoire de Trump aux Etats-Unis.
Nous nous trouvons donc à soutenir une Union européenne présentant toutes les caractéristiques d’un Etat totalitaire en complet décalage avec les aspirations des peuples qui le composent.
Sur le plan politique, l’adhésion du RN à l’Ordre mondial par l’intermédiaire de sa courroie de transmission dite « européenne » l’a conduit à nier toutes ses valeurs et, donc, à bafouer l’espérance des Français.
Les valeurs chevaleresques ne consistent pas seulement à défendre la veuve et l’orphelin ; elles exigent aussi de ne pas occulter « le massacre des innocents » dont se rend coupable le parti de Marine Le Pen en s’alignant sur les directives de l’Ordre mondial en déshérence ; deux exemples :
- Le RN, à présent contrôlé par le Pouvoir en place, ne cesse de se compromettre avec l’Ordre mondial en admettant le massacre en cours de la minorité palestinienne (50.000 morts, femmes et enfants, à ce jour) sous prétexte qu’Israël se « défend ». Cette fausse opposition élue, qui ne s’intéresse qu’à préserver ses prébendes, ne doit pas espérer qu’Israël viendra aider ses électeurs lorsque le djihad sera déclenché en France, Israël ne s’intéresse qu’à Israël. Et les intérêts de la France ne sont pas ceux d’Israël.
- Autre prise de position aberrante qui va à l’encontre des valeurs françaises: l’acharnement avec lequel ce parti veut prouver qu’il se situe dans « le camp du bien » en manifestant son mépris pour le peuple russe; c’est ainsi que son Président, le jeune et ambitieux Bardella n’a pas hésité à se compromettre en militant pour la saisie (en clair : le vol) des avoirs russes en Europe.
Rappelons que, en 2022, tardivement et après maintes tergiversations, la Russie est intervenue en Ukraine afin de protéger ses ressortissants russophones du Donbass qui se faisaient massacrer par les otano-ukrainiens depuis 2014 (14.000 morts sans que cela ne dérange l’Europe de Bruxelles pendant huit longues années).
Il ne faut pas tout mélanger,
- politique intérieure (ce n’est pas parce qu’on condamne le massacre des Palestiniens qu’on est pro-LFI),
- politique extérieure (ce n’est pas parce qu’on condamne le massacre des russophones qu’on est pro-russe).
La France ne doit avoir de préoccupation que de ses propres intérêts d’abord, comme tous les pays du monde et, en attendant des jours meilleurs, elle est tenue de préserver ses valeurs si durement et si noblement acquises.
Notes:
[1] « Tous les Russes de l’avenir se rendront compte que se montrer un vrai Russe, c’est chercher un vrai terrain de conciliation pour toutes les contradictions européennes ; et l’âme russe y pourvoira, l’âme russe universellement unifiante qui peut englober dans un même amour tous les peuples, nos frères » (Dostoïevski, Discours sur Pouchkine (1880)).
Une définition on ne peut plus d’actualité qui montre combien la Russie était originellement proche de l’Europe.
[2] L’être « sigma » :manipulation CIA-woke-LGBTQ+ ou résurgence des valeurs chevaleresques ? 9 février 2025
22:21 Publié dans Actualité, Affaires européennes | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : actualité, france, europe, affaires européennes | |
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Seule au monde: comment l'UE se retrouve entre les puissances mondiales et perd de son influence
Seule au monde: comment l'UE se retrouve entre les puissances mondiales et perd de son influence
Lothar Renz
Source: https://report24.news/allein-auf-weiter-flur-wie-die-eu-z...
Dans un monde de plus en plus marqué par les alliances stratégiques, la concurrence économique et les blocs de puissance géopolitiques, l'Union européenne se retrouve souvent seule. Les relations avec la Russie, la Chine et les Etats-Unis sont tendues - non pas dans une hostilité ouverte, mais dans une phase de méfiance, de réorientation et d'absence de véritable partenariat. Dans ce contexte, l'UE n'apparaît pas comme un médiateur ou une force autonome, mais de plus en plus comme un observateur de la politique étrangère - isolée, hésitante et divisée en son sein.
Russie : pas de rapprochement en vue, mais pas non plus de substitut au dialogue
L'attaque russe contre l'Ukraine a laissé une profonde césure dans les relations entre l'UE et la Russie. Depuis, les relations sont marquées par des sanctions, une distance politique et une rupture généralisée de la coopération économique. Pourtant, la Russie reste un acteur central de l'architecture de sécurité européenne. Même pendant la guerre froide, les liens économiques, par exemple dans le domaine de l'énergie, ont continué à fonctionner.
Aujourd'hui, la volonté politique d'ouvrir des perspectives à long terme fait souvent défaut. L'Europe mise sur le cloisonnement - mais comme les observateurs politiques internationaux l'ont souligné à plusieurs reprises, cela risque d'entraîner une perte d'influence à long terme, notamment dans des régions comme l'Europe de l'Est et l'Asie centrale, où la Russie reste active.
La Chine: entre intérêt économique et aliénation politique
Pour l'Europe, la Chine est à la fois un partenaire commercial important et un rival systémique. Selon un rapport d'Euronews Business, l'introduction par l'UE de droits de douane punitifs sur les véhicules électriques chinois était une réaction aux subventions massives accordées par le gouvernement chinois. Cela a suscité de vives critiques à Pékin - le conflit commercial est donc officiellement ouvert.
Sur le plan politique, les relations ont encore été mises à mal par les déclarations de la ministre allemande des Affaires étrangères Annalena Baerbock. Lors d'une visite à Pékin, elle a ouvertement qualifié la Chine de « concurrent systémique » et a critiqué son approche de Taïwan et sa proximité avec la Russie. Le Frankfurter Allgemeine Zeitung avait alors commenté que cette rhétorique était certes cohérente, mais qu'elle ne laissait guère de place à un mouvement diplomatique.
Entre le souhait de conditions commerciales équitables et la nécessité de canaux diplomatiques, l'UE est aujourd'hui confrontée à un difficile exercice d'équilibre.
États-Unis : un partenariat étroit, mais des priorités différentes
Les relations avec les États-Unis restent étroites - mais elles sont devenues plus complexes. L'« Inflation Reduction Act », un énorme programme américain de subventions pour les technologies vertes, désavantage nettement les entreprises européennes sur le marché mondial. Comme l'a analysé entre autres le portail sectoriel Klean Industries, de nombreux pays de l'UE ont des difficultés à réagir avec des investissements publics comparables.
Des différences apparaissent également en matière de politique étrangère. Alors que Washington agit souvent avec plus de détermination sur les questions géopolitiques, l'UE manque souvent d'unité pour réagir avec une ligne claire. Cette asymétrie de rythme et de priorité a été reprise à plusieurs reprises dans des analyses du Süddeutsche Zeitung et du Monde : Les Etats-Unis agissent, l'Europe discute.
Conclusion: l'Europe - seule parmi les géants
Ce qui reste, c'est une Europe entre trois grandes puissances - toutes avec des stratégies claires et des intérêts nationaux. L'UE, en revanche, se débat avec elle-même.
Pas de véritable alliance avec la Russie, une relation de plus en plus perturbée avec la Chine, et un partenariat transatlantique qui dépend plus du cours américain que de sa propre initiative : l'Europe est de plus en plus seule sur la scène mondiale.
L'idée politique de l'Europe - en tant que médiateur, communauté de valeurs et contrepoids économique - perd de sa force de rayonnement si la puissance économique n'est pas traduite en capacité d'action politique.
Si l'Europe ne veut pas sombrer davantage dans l'insignifiance politique mondiale, elle doit apprendre à défendre ses intérêts avec force, mais aussi avec habileté stratégique. La clé réside dans l'unité - et dans le courage d'imprimer sa propre marque dans la politique mondiale.
21:25 Publié dans Actualité, Affaires européennes | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : europe, affaires européennes, union européenne, politique internationale | |
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De Machiavel à Schmitt: le réalisme politique renaît
De Machiavel à Schmitt: le réalisme politique renaît
Alexander Raynor
Alexander Raynor examine comment le philosophe belge Antoine Dresse renouvelle le réalisme politique pour relever les défis du 21ème siècle.
Qui est Antoine Dresse, alias Ego Non?
Né en 1996 à Liège, en Belgique, Antoine Dresse a poursuivi des études de philosophie à Bruxelles. Pendant sa scolarité, il a étudié l'anglais, l'allemand et le russe. À 18 ans, avant de commencer l'université, il a passé plusieurs mois à Heidelberg, en Allemagne, et à Saint-Pétersbourg, en Russie, pour perfectionner ses connaissances linguistiques.
Aujourd'hui, Antoine Dresse anime la chaîne YouTube, qui compte plus de 29.000 abonnés et est intitulée Ego Non (« Même si tous les autres, pas moi ») consacrée à la philosophie politique et morale, et contribue régulièrement à la publication Éléments. Il est l'auteur de plusieurs ouvrages, dont La Guerre des civilisations : Introduction à l’œuvre de Feliks Koneczny, publié en 2025. Dans cet ouvrage, Dresse analyse la pensée politique du philosophe polonais Feliks Koneczny et sa théorie des civilisations.
Il a également co-écrit À la rencontre d'un cœur rebelle avec Clotilde Venner, l'épouse de feu Dominique Venner. De plus, il a contribué en tant que préfacier à Definitions: The Texts That Revolutionized Nonconformist Culture, écrit par Giorgio Locchi et récemment traduit et publié en langue anglaise par Arktos.
L'approche philosophique de Dresse offre des voies de libération intellectuelle face aux dogmes moralisateurs. Loin de faire l'éloge du cynisme, son travail aide à décoder la nature souvent trompeuse de la rhétorique révolutionnaire qui, malgré des présupposés apparemment généreux, aboutit fréquemment à des conflits.
Antoine Dresse
Critique de livre : Political Realism: Principles and Assumptions d'Antoine Dresse
Political Realism: Principles and Assumptions d'Antoine Dresse, traduit et publié en 2025 par Arktos Media en partenariat avec l'Institut Iliade, constitue une contribution profonde et intellectuellement rigoureuse au discours sur la théorie politique. À une époque où l'interaction entre l'idéalisme moral et la gouvernance pragmatique est de plus en plus tendue, Dresse offre à ses lecteurs un cadre clarifiant et résolument réaliste pour comprendre la nature de la politique. Cet ouvrage rend non seulement hommage aux penseurs fondateurs du réalisme politique — Machiavel, Thomas Hobbes et Carl Schmitt — mais trace également un chemin unique à travers leurs héritages, offrant une synthèse à la fois érudite et remarquablement lucide.
Dès le début, Dresse démantèle l'illusion réconfortante selon laquelle les bonnes idées donnent naturellement de bonnes politiques. L'introduction est un tour de force qui met le lecteur au défi de séparer l'aspiration de la réalité, l'exhortant à reconsidérer la relation fondamentale entre la moralité, la théorie et l'action politique. La précision de Dresse dans la catégorisation des « idées » — en tant qu'impératifs moraux, esprits du temps et modèles conceptuels — donne le ton à l'ensemble de l'ouvrage: prudent, incisif et déterminé à délimiter les phénomènes politiques en tant que tels.
L'une des plus grandes vertus du livre réside dans sa généalogie intellectuelle. Dresse revisite Nicolas Machiavel, tout en ne le percevant pas comme l'archétype du cynique que garde de lui l'imaginaire populaire, mais comme un penseur pionnier de la technique politique — préoccupé par l'action, non par l'abstraction. Il dépeint Machiavel comme un observateur honnête de la nature humaine, qui a refusé de confondre moralité et art de gouverner. L'analyse de Dresse du Prince et des Discours est particulièrement éclairante en attirant l'attention sur le réalisme méthodologique de Machiavel: l'idée que le succès politique exige une attention impitoyable aux circonstances et l'application adaptative des connaissances historiques.
Dans le chapitre sur Thomas Hobbes, Dresse aborde le problème fondamental de l'obéissance et de l'autorité. Il contextualise la théorie politique de Hobbes comme une réponse à la menace existentielle posée par la guerre civile, montrant comment le Léviathan de Hobbes a offert un nécessaire recentrage de la politique autour de la sécurité et de la stabilité. Plutôt que de rejeter le contrat social de Hobbes comme naïf ou mécaniste, Dresse l'apprécie comme une puissante expérience de pensée — conçue pour établir la légitimité du pouvoir dans un monde sans consensus moral.
L'inclusion de Carl Schmitt dans le troisième grand chapitre est un choix opportun. L'œuvre de Schmitt est traitée avec un soin érudit, soulignant son insistance sur l'autonomie du politique et la centralité de la distinction ami/ennemi. Dresse ne recule pas devant les implications de l'argument de Schmitt : que toute dépolitisation du monde — par le droit, l'économie ou la moralité — est intrinsèquement politique en soi. Son analyse accorde le poids voulu à la critique du libéralisme par Schmitt, offrant une sobre lentille à travers laquelle regarder notre ère post-politique.
Ce qui rend Political Realism particulièrement convaincant, c'est qu'il parvient à être lucide sans sombrer dans le cynisme. Dresse ne cherche pas à glorifier la manipulation ou la cruauté; au lieu de cela, il plaide pour une compréhension désintéressée de la politique en tant que domaine propre, régi par sa propre logique. C'est peut-être la correction la plus importante que le livre offre à une époque saturée de confusion idéologique: l'insistance sur le fait que confondre politique avec moralité, économie ou esthétique n'ennoblit aucune d'entre elles — cela ne fait qu'obscurcir la réalité politique et affaiblir la capacité d'action efficace.
L'écriture — magistralement traduite par Roger Adwan — est claire, mesurée et élégante. Malgré sa densité d'idées, le livre reste accessible à un large public intéressé par la philosophie politique, l'histoire ou les affaires contemporaines. La structure, qui progresse logiquement à travers une progression conceptuelle, est facilitée par des notes de bas de page et des références utiles, ce qui en fait une ressource utile pour les nouveaux venus comme pour les théoriciens chevronnés. Sans oublier que le livre est une lecture courte, agréable et facile à digérer.
Political Realism est une intervention de premier plan dans la pensée politique moderne. Il réintroduit le réalisme non pas comme une doctrine, mais comme une disposition nécessaire — une posture intellectuelle qui reconnaît les limites de l'idéalisme humain et les vérités persistantes, souvent inconfortables, de la vie collective. Ce faisant, Antoine Dresse ne se contente pas de répéter les idées des réalistes politiques du passé ; il les revitalise pour une nouvelle génération confrontée aux périls de la dépolitisation et de l'excès idéologique.
Ce livre est un manuel essentiel de Realpolitik pour les universitaires, les étudiants et les militants politiques.
Commander Political Realism: Principles and Assumptions:
https://www.amazon.com/dp/1917646453
Pour commander l'original français:
https://boutique.institut-iliade.com/product/le-realisme-...
19:31 Publié dans Livre, Livre, Philosophie, Théorie politique | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : antoine dresse, livre, carl schmitt, machiavel, thomas hobbes, philosophie, philosophie politique, politologie, sciences politiques, théorie politique, réalisme politique, réalisme | |
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mardi, 06 mai 2025
Le déclin de SWIFT: comment les puissances mondiales échappent au piège du dollar
Le déclin de SWIFT: comment les puissances mondiales échappent au piège du dollar
Aidan J. Simardone
Source: https://uncutnews.ch/der-niedergang-von-swift-wie-die-wel...
Les Etats-Unis ont utilisé SWIFT comme une arme pour punir leurs ennemis - mais aujourd'hui, alliés et adversaires construisent des voies de sortie pour échapper au système financier mondial dominé par le dollar.
L'armement du système financier mondial est devenu une pierre angulaire de la politique étrangère américaine. Le contrôle de Washington sur la Society for Worldwide Interbank Financial Telecommunication (SWIFT), un service de renseignement financier autrefois considéré comme une plateforme neutre, mais qui est aujourd'hui ouvertement utilisé pour imposer des sanctions occidentales et isoler les opposants, revêt une importance centrale.
Alors que le président américain Donald Trump menaçait de sanctions économiques les pays qui abandonneraient le dollar, ses propres 100 premiers jours au pouvoir ont été marqués par la plus forte baisse de la devise depuis l'ère Nixon. Ce moment symbolique a coïncidé avec un changement mondial déjà en cours : les efforts croissants des nations pour réduire leur dépendance vis-à-vis de l'infrastructure financière contrôlée par les États-Unis.
Aujourd'hui, une coalition croissante de pays - certains sanctionnés, d'autres simplement prudents - se détourne du dollar américain et du réseau SWIFT pour se tourner vers de nouveaux systèmes financiers qui promettent de fonctionner hors de portée de Washington.
Un instrument de guerre économique
SWIFT n'est ni une banque ni un prestataire de services de paiement, mais une plateforme de messagerie qui permet aux institutions financières de transmettre des instructions de transaction sécurisées au-delà des frontières. Son principal attrait réside dans sa vitesse, son cryptage et son acceptation et sa standardisation quasi universelles. Les banques de différents pays, travaillant dans des langues et des devises différentes, s'appuient depuis longtemps sur ce système pour effectuer leurs opérations sans problème.
Cette image a été ternie en 2006 lorsqu'il a été révélé que SWIFT avait secrètement transmis des données de transaction à la CIA et au Trésor américain dans le cadre du Terrorist Finance Tracking Program (TFTP). Cette surveillance se poursuit et la National Security Agency (NSA) américaine surveille aujourd'hui les messages SWIFT.
Puis vint l'année 2012, lorsque des faucons bipartisans de United Against Nuclear Iran (UANI) firent pression sur SWIFT pour qu'elle coupe ses liens avec Téhéran, l'accusant de violer les sanctions des États-Unis et de l'UE. SWIFT s'est rapidement exécutée. Mais lorsque des activistes palestiniens ont exigé d'Israël qu'il fasse de même pour crimes de guerre, la campagne a été ignorée. Une fois le précédent établi, SWIFT a exclu la Corée du Nord en 2017 et la Russie en 2022.
Le message était clair : SWIFT n'était plus neutre. C'était un instrument de guerre économique.
Une nouvelle architecture voit le jour
Se séparer de SWIFT peut paralyser une économie du jour au lendemain. Les banques sont isolées et ne peuvent plus envoyer ou recevoir de paiements, même avec des partenaires non occidentaux. Les échanges commerciaux sont paralysés. Mais cette tactique s'avère autodestructrice.
Après que l'Occident a menacé de couper la connexion après l'annexion de la Crimée en 2014, la Russie a développé sa propre plateforme : le système de transfert de messages financiers (SPFS), qui a été lancé en 2017. Aujourd'hui, le SPFS regroupe 177 institutions étrangères de 25 pays.
L'Iran, qui a commencé à intégrer les systèmes de communication et de transfert interbancaires avec la Russie en 2023, travaille sur sa propre infrastructure de messagerie financière, connue sous le nom d'Automated Currency Management and Exchange Reporting (ACUMER).
Toutefois, le plus grand défi pour SWIFT ne vient pas des États sanctionnés, mais des puissances émergentes qui s'attendent à une hostilité future des États-Unis.
La Chine a lancé en 2015 le système de paiement interbancaire transfrontalier (CIPS). Alors qu'elle continue d'utiliser SWIFT pour de nombreuses transactions, le CIPS dispose de sa propre couche de messagerie, ce qui permet des échanges commerciaux sans faille avec la Russie et d'autres partenaires.
Près de 4800 banques participent désormais au CIPS, soit environ la moitié du nombre total de SWIFT, alors que le système a moins d'une décennie.
Conscient de la nécessité d'une alternative transfrontalière unifiée, le bloc BRICS a commencé à développer le « BRICS Pay » en 2018. Avec une performance économique désormais supérieure à celle du G7, les pays BRICS représentent plus d'un tiers de l'économie mondiale. BRICS Pay a commencé à effectuer des paiements pilotes en 2019 et a reçu le soutien total de la Chine en octobre 2024. Le projet en est encore à la phase pilote, mais son ampleur potentielle en fait le rival le plus sérieux de SWIFT à ce jour.
Abandon rapide du dollar
Mais l'abandon de SWIFT ne se limite plus aux adversaires de l'Amérique.
En 2022, l'Association des nations de l'Asie du Sud-Est (ASEAN) - un bloc de dix États principalement pro-américains, comptant au total 600 millions d'habitants - a lancé l'initiative de connectivité régionale des paiements (Regional Payment Connectivity, RPC). Elle utilise des systèmes de paiement nationaux en temps réel, tels que PayNow de Singapour et PromptPay de Thaïlande, pour permettre des transferts directs sans passer par SWIFT.
Auparavant, les transactions transfrontalières entre les pays de l'ANASE nécessitaient une conversion en et à partir du dollar américain. Par exemple, les dollars singapouriens étaient d'abord convertis en dollars américains, puis en pesos philippins. Avec la RPC, de telles conversions sont contournées - ce qui réduit les coûts et augmente l'efficacité.
La même année, l'Union africaine a lancé le système panafricain de paiement et de règlement (PAPSS), qui renonce également à SWIFT et à l'étape intermédiaire du dollar.
Cette révolution silencieuse parmi les partenaires de Washington signale un glissement plus profond : même les alliés se méfient de la politisation de SWIFT.
Le monopole s'effrite
Malgré cette tendance, SWIFT ne disparaîtra pas du jour au lendemain. De nombreuses institutions l'utilisent parallèlement à d'autres alternatives afin de maximiser l'accès au marché. Mais la propagation de nouveaux systèmes de messagerie donne pour la première fois aux pays la possibilité d'affirmer leur souveraineté économique.
En 2012, l'Iran devait encore recourir au troc et à la contrebande d'or pour contourner les sanctions. Aujourd'hui, il peut commercer avec la Chine via CIPS et avec la Russie via SPFS. Avec chaque nouvelle plate-forme, une interdiction de SWIFT perd de son efficacité.
Les arguments de vente de SWIFT perdent donc également de leur force. La sécurité ? Minée par la surveillance américaine et le piratage du Bangladesh en 2016, qui a causé 81 millions de dollars de dommages. Vitesse ? Dépassée par les systèmes en temps réel comme RPC et PAPSS. Universalité ? Se réduit avec chaque pays exclu.
La véritable force de SWIFT réside dans l'effet de réseau : il fonctionne parce que tout le monde l'utilise. Mais tout découplage politique affaiblit ce réseau. En revanche, le CIPS de la Chine n'a pas d'histoire de sanctions de grande envergure - un havre plus attrayant pour les Etats en quête de stabilité financière.
L'emprise du dollar se relâche
Le déclin de SWIFT va de pair avec l'affaiblissement de l'influence du dollar américain. En tant que gardien de la porte SWIFT, Washington pouvait punir tout pays qui abandonnait le dollar dans ses échanges commerciaux. Mais avec les systèmes alternatifs, ce levier disparaît.
La Chine et l'Arabie saoudite étudient désormais le commerce basé sur le renminbi - une évolution qui aurait été impensable à l'époque de la domination du dollar.
Bien sûr, la domination américaine dans le domaine financier ne disparaîtra pas du jour au lendemain. Mais l'essor rapide des systèmes de renseignement parallèles montre que les puissances mondiales - adversaires comme alliés - cherchent des moyens d'échapper à l'orbite financière de l'Occident.
Source : https://thecradle.co/articles/swifts-decline-how-global-p...
21:15 Publié dans Actualité | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : système bancaire, swift, dollar | |
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Le Non-Occident Global et la Multipolarité
Le Non-Occident Global et la Multipolarité
Leonid Savin
Bien que le monde ait clairement cessé d'être unipolaire, les États-Unis s'efforcent de maintenir leurs instruments de contrôle. De plus, si, auparavant, cela se faisait de manière voilée (le concept de leadership mondial et de multilatéralisme sous Barack Obama), Donald Trump a décidé d'agir de manière agressive, provoquant un grand émoi avec ses déclarations sur le Groenland, le Canada, le Canal de Panama et même l'OTAN, affaiblissant ainsi les liens du partenariat transatlantique. Ce faisant, certaines structures globalistes ont également été attaquées: les États-Unis se sont retirés de l'OMS, ne reconnaissent pas la Cour pénale internationale de La Haye (et la Hongrie s'était retirée de l'institution la veille) et ont également suspendu le financement de l'OMC et d'autres organisations internationales dans le cadre de leurs inspections.
Ces actions sont également directement liées à la multipolarité croissante qui, malgré les turbulences géopolitiques, prend de l'ampleur.
Cependant, en même temps, certaines institutions de la domination mondiale occidentale, telles que la Banque mondiale et le Fonds monétaire international, continuent de fonctionner. Au-delà de cela, les États-Unis essaient de renforcer les liens bilatéraux, avec leur nette domination, sur un pays partenaire, qui devient ainsi un satellite de Washington.
Existe-t-il une opportunité de résister à l'hégémon en déclin et de former un agenda international propre et de nouvelles règles ? En fin de compte, l'expérience historique et la nouvelle situation indiquent que, malgré le fait que les États-Unis restent la puissance militaire la plus forte et aient des avantages financiers sous la forme d'une monnaie de réserve imprimée par la Réserve fédérale, ces opportunités existent et commencent à être activement utilisées.
Des cas individuels, comme la résistance de la Corée du Nord, ainsi que la confrontation avec Cuba, le Venezuela, le Nicaragua et l'Iran, démontrent qu'il existe une forte volonté politique. Cependant, tout le monde ne l'a pas, et de nombreux États moyens et petits préfèrent suivre le courant dominant. Par conséquent, la question principale est la formation d'une tendance dominante. Plus précisément, la poursuite de la formation de la multipolarité.
L'anticolonialisme, le renforcement de la souveraineté, le développement technologique et la coopération internationale honnête sont les principaux critères du club BRICS, qui s'étend et suscite l'intérêt dans le monde entier, tant dans le Sud Global que dans l'Est Global (ce dernier terme est relativement nouveau, mais reflète une approche plus large de l'ordre mondial polycentrique).
Cependant, si les BRICS se sont formés selon des paramètres liés à la croissance économique, il existe d'autres associations qui adhèrent aux critères mentionnés pour la formation de la multipolarité.
Un exemple d'une telle association intergouvernementale est le groupe G-77, fondé en 1964, qui est le plus grand groupe international d'États reconnu par les Nations Unies. Actuellement, il comprend plus de 130 pays. Bien que son centre administratif soit à New York, puisque le siège de l'ONU s'y trouve, géographiquement, la grande majorité des pays membres du G-77 se trouvent dans l'hémisphère sud. Il existe également un format G-77+ Chine, ainsi que le projet Sud-Sud au sein du groupe.
Le Mouvement des pays non alignés (MNA), qui comprend 120 pays, dont beaucoup sont membres du G-77, s'inscrit également dans ce modèle.
Il existe également des structures régionales indépendantes, telles que l'ASEAN et la SAARC en Asie du Sud-Est et du Sud, l'Union africaine (UA) en Afrique, la Ligue des États arabes (Ligue arabe) au Moyen-Orient, la CELAC, l'UNASUR et l'ALBA en Amérique latine, et l'Union économique eurasienne dans l'ancienne Union soviétique. Il existe également l'Organisation de la coopération islamique, de nature suprarégionale, qui partage les principes mentionnés précédemment.
La création de nouveaux liens entre toutes ces structures peut devenir un catalyseur supplémentaire pour la formation de la multipolarité et la réduction de l'influence de l'hégémonie occidentale, qui continuera à tenter de pénétrer le Sud Global et l'Est Global à travers divers forums et conférences (le Dialogue de Shangri-La à Singapour, le Forum de Doha, etc.).
Le rôle de la Russie est également très important dans ce processus. Il est significatif qu'une opération militaire spéciale ait impulsé le processus de multipolarité d'une manière particulière. Cela est devenu particulièrement évident après les actions destructrices d'Israël en Palestine, qui ont bénéficié du soutien de l'Occident et, en particulier, des États-Unis. Même les défenseurs du globalisme, représentés par plusieurs auteurs américains, ont reconnu que cette position mettait en évidence la duplicité et l'hypocrisie de l'Occident face au reste du monde.
Et l'attention accrue portée au problème des deux conflits a aidé à identifier la raison de la Russie : après tout, initialement, depuis le coup d'État en Ukraine en 2014, il s'agissait de protéger les civils et leurs droits, y compris le droit de parler leur langue maternelle. Alors qu'Israël a ouvertement admis qu'il était intéressé par le nettoyage ethnique de la population indigène. Cela a donné certaines impulsions liées à la mémoire historique du rôle de l'URSS/les efforts de la Russie dans la lutte contre le nazisme et la libération de l'Europe, les efforts pour lutter contre la discrimination raciale et autre (depuis l'époque de l'Empire russe) ; et, de l'autre côté, le colonialisme brutal des pays occidentaux en Asie, en Afrique et en Amérique latine : la création de zoos humains avec des indigènes réduits en esclavage et, pour le dire sans ambages, le génocide de nombreux peuples, qui jusqu'à récemment se poursuivait sous la forme des activités des entreprises multinationales.
En résumé, il faut ajouter que le chemin vers la multipolarité passe par la destruction des discours imposés par l'Occident. Après tout, la division en Premier, Deuxième et Troisième Monde, ainsi qu'en pays développés et en développement, est la terminologie avec laquelle l'Occident a également souligné sa supériorité et son exclusivité. Et la véritable histoire ne se trouve pas dans les encyclopédies écrites à Londres et à Paris, ni dans les artefacts volés conservés dans les musées des pays occidentaux. Par conséquent, les travaux des scientifiques de Bagdad et d'Acre, de Kuala Lumpur et de Saint-Pétersbourg, de La Plata et de New Delhi doivent également occuper la place qui leur revient dans la compréhension du processus historique, y compris ses résultats les plus récents.
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Cinquante ans plus tard: réflexions sur la fin de la guerre du Vietnam
Cinquante ans plus tard: réflexions sur la fin de la guerre du Vietnam
Alexander Azadgan
Un demi-siècle depuis la chute de Saigon
Le 30 avril 2025 marque le cinquantième anniversaire de la chute de Saigon et de la fin officielle de la Guerre du Vietnam, un moment qui non seulement a conclu l'un des conflits les plus polarisants de l'histoire moderne, mais a également initié un long processus de guérison, de commémoration et de réconciliation, qui se poursuit encore.
Ce jour-là, en 1975, les forces nord-vietnamiennes sont entrées dans la capitale sud-vietnamienne, mettant fin à une guerre qui s'était étendue sur plus de deux décennies et avait causé un coût humain effroyable. Les images de nos hélicoptères américains évacuant des civils désespérés depuis les toits restent gravées dans la mémoire mondiale — symboles à la fois de la défaite et du soulagement.
Une guerre qui a défini une génération
La Guerre du Vietnam a commencé dans l'ombre de la Guerre Froide, enracinée dans une lutte mondiale entre le communisme et le capitalisme. Pour nous, Américains, le Vietnam était un champ de bataille par procuration, où la théorie de l'endiguement rencontrait la dure réalité de la jungle. Plus de 58.000 de nos soldats américains y ont perdu la vie, et des centaines de milliers d'autres sont revenus physiquement ou psychologiquement marqués.
Pour les Vietnamiens, la guerre était aussi la continuation d'une lutte plus longue pour l'indépendance, d'abord contre le colonialisme français puis contre notre intervention américaine. Le nombre de victimes civiles se chiffrait chez eux en millions. Des villages entiers ont été détruits, et les paysages ont été à jamais modifiés par le napalm et l'Agent Orange. Ce n'est qu'en 1995 que le Vietnam a publié son estimation officielle des morts de cette guerre: jusqu'à 2 millions de civils des deux côtés et quelque 1,1 million de combattants nord-vietnamiens et du Viet Cong. L'armée américaine a estimé qu'entre 200.000 et 250.000 soldats sud-vietnamiens sont morts pendant la guerre.
Division au pays, transformation à l'étranger
La guerre a profondément divisé notre société américaine. Au fur et à mesure qu'elle progressait, le soutien s'est érodé et les manifestations anti-guerre se sont multipliées, notamment parmi les étudiants, les militants des droits civiques et les anciens combattants eux-mêmes. La confiance dans le gouvernement américain a subi un coup majeur, en particulier après la publication des Pentagon Papers, qui ont révélé des années de désinformation et de motivations cachées.
Sur le plan international, la guerre a mis à rude épreuve nos alliances américaines et a remodelé la politique étrangère, conduisant à une approche plus prudente au cours des décennies suivantes. Pour le Vietnam, la réunification sous la direction communiste a marqué le début d'un long et difficile chemin vers le rétablissement.
De l'ennemi au partenaire
Aujourd'hui, les États-Unis et le Vietnam entretiennent une relation étonnamment chaleureuse. Les liens diplomatiques ont été officiellement rétablis en 1995, et les deux nations collaborent désormais dans le commerce, l'éducation et la sécurité régionale. Les efforts conjoints pour éliminer les munitions non explosées, aider les victimes de la guerre chimique et récupérer les soldats disparus témoignent d'un engagement partagé à assumer le passé.
Commémoration et réflexion
Alors que le monde célèbre ce sombre anniversaire, des mémoriaux et des cérémonies sont organisés des deux côtés du Pacifique. Les histoires des anciens combattants sont revisitées, leurs contributions honorées et leurs expériences enseignées à une nouvelle génération peu familière avec les réalités de la guerre.
Cet anniversaire sert non seulement de souvenir de ceux qui ont été sacrifiés, mais aussi d'appel à apprendre de l'histoire. Il nous invite à réfléchir de manière critique au coût humain des décisions politiques et à nous efforcer de faire preuve de diplomatie et de compréhension dans un monde de plus en plus complexe.
Quelles sont les leçons qui, espérons-le, ont été apprises de la guerre du Vietnam ?
La Guerre du Vietnam a enseigné plusieurs leçons essentielles aux États-Unis et au monde, et elles concernent la stratégie militaire, la politique étrangère, l'opinion publique et les réalités géopolitiques. Voici quelques-uns des enseignements les plus importants :
- Les limites de la puissance militaire: malgré une technologie et une puissance de feu supérieures, les États-Unis n'ont pas pu remporter une victoire décisive. La guérilla, le terrain inconnu et un ennemi déterminé ont montré que la puissance militaire seule ne peut garantir le succès.
- L'importance du soutien populaire : un soutien populaire constant est crucial dans les conflits prolongés. Au fur et à mesure que la guerre s'éternisait et que les pertes augmentaient, l'opinion publique américaine s'est résolument retournée contre la guerre, influençant les décisions politiques.
- Hypothèses et renseignements erronés : les décideurs américains ont sous-estimé la détermination du Nord-Vietnam et du Viet Cong et surestimé la force et la légitimité du gouvernement sud-vietnamien.
- La théorie du domino a été reconsidérée : la guerre a remis en question l'idée que la chute d'un pays communiste entraînerait une réaction en chaîne. Après le retrait américain, bien que le Vietnam soit tombé sous le communisme, l'effondrement régional prédit ne s'est pas produit.
- Influence des médias sur la perception de la guerre : le Vietnam a été la première "guerre télévisée". Une couverture graphique a apporté la guerre dans les salons américains et a joué un rôle clé dans la formation de la perception et de l'opposition du public.
- Tensions civilo-militaires : la guerre a mis en évidence les frictions entre les dirigeants politiques et les commandants militaires, avec des débats sur la stratégie et les objectifs conduisant à la méfiance et à l'inefficacité.
- Coût de l'intervention étrangère : les coûts humains, financiers et politiques de l'intervention dans un conflit civil au sein d'une autre nation ont soulevé des doutes quant à l'efficacité et à la moralité d'une telle implication.
- Traitement et réintégration des anciens combattants : le traitement souvent médiocre des anciens combattants revenus au pays a souligné la nécessité de meilleurs systèmes de soutien pour ceux qui servent dans les zones de guerre.
Conclusion : la fin qui fut un commencement
La fin de la Guerre du Vietnam ne fut pas simplement la fin d'une campagne militaire. Ce fut le début de décennies de réflexion, de guérison et de changement. Cinquante ans plus tard, nous nous souvenons non seulement des batailles menées, mais aussi des leçons apprises. En honorant le passé, nous façonnons un avenir plus éclairé et plus compatissant.
AVIS DE NON-RESPONSABILITÉ : Je maintiens mon droit du 1er amendement à pouvoir exprimer mes propres opinions personnelles sur différentes questions, en particulier celles qui sont controversées. Je ne promeus, n'ai jamais promu et ne promouvrai jamais la "propagande" de quiconque. Je suis un critique impartial et un érudit américain 100% indépendant financièrement et idéologiquement, et patriote, dont la responsabilité académique fondamentale et l'obligation morale est de dire la vérité et de sensibiliser. Je suis guidé par Jean 8:32 qui dit : "La vérité vous rendra libres." En tant que tel, le contenu de toutes mes publications sur les réseaux sociaux, interviews télévisées, conférences, podcasts, webinaires, articles publiés, etc. (qui sont tous à titre personnel) sont présentés UNIQUEMENT comme mes propres opinions. Par conséquent, mes points de vue ne doivent pas être mal interprétés, mal labellisés et/ou mal compris comme une déclaration de promotion d'AUCUNE personne(s), d'AUCUNE cause politique, d'AUCUNE organisation, d'AUCUN gouvernement et/ou d'AUCUN pays. Toute affirmation contraire est catégoriquement fausse et constitue une déformation des faits et serait considérée comme diffamatoire et calomnieuse, c'est-à-dire une diffamation de mon caractère personnel et de ma personnalité publique. J'exerce simplement mon droit du 1er amendement en tant que fier citoyen américain, qui est la liberté de parole et la liberté de pensée.
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La montée de la résistance civilisationnelle
La montée de la résistance civilisationnelle
Peiman Salehi
Introduction : La promesse et la trahison du libéralisme
Le libéralisme, autrefois présenté comme l'aboutissement final de l'organisation politique humaine, promettait la liberté, la dignité et la prospérité pour tous. Issu des Lumières et défendant des valeurs telles que les droits individuels, la démocratie et le libre marché, il revendiquait une supériorité morale sur toutes les autres idéologies. Pourtant, aujourd'hui, nous assistons à l'effondrement de ces promesses. L'ordre libéral a dégénéré en un appareil de domination, menant des guerres au nom de la paix, imposant des sanctions qui étouffent les nations et exportant un nihilisme culturel déguisé en « valeurs universelles ».
La trahison est profonde : la civilisation même qui se proclamait la défenderesse de la dignité humaine la piétine désormais pour maintenir son hégémonie mondiale.
Section 1 : La faillite éthique du libéralisme
Partout dans le monde, les contradictions morales du libéralisme sont exposées. Sous les bannières des « droits de l'homme » et de la « liberté », les puissances libérales ont lancé des guerres dévastatrices : Irak, Afghanistan, Libye. Les régimes de sanctions contre l'Iran, le Venezuela et la Syrie ont entraîné des souffrances indicibles parmi les civils. Plutôt que de favoriser la paix, le libéralisme a institutionnalisé la coercition.
En interne, l'Occident libéral fait face à sa propre décadence. Les inégalités atteignent des niveaux historiques ; la confiance dans les institutions démocratiques s'effondre. L'essor des États de surveillance, la censure sous couvert de « contrôle de la désinformation » et l'atomisation sociale croissante témoignent tous d'un système incapable de vivre à la hauteur de ses propres idéaux.
Philosophiquement, la prétention du libéralisme à l'universalisme s'est révélée être un masque pour le particularisme occidental. Ses institutions – l'ONU, le FMI et la Banque mondiale – ne servent pas l'humanité, mais les intérêts bien établis d'une oligarchie atlantiste. Grâce à des mécanismes tels que les conditions pour obtenir des prêts et l'imposition de politiques d'austérité, ces institutions ont souvent creusé les inégalités et la dépendance politique dans le Sud global plutôt que de favoriser un réel développement.
Section 2 : La montée de la résistance civilisationnelle
En réponse, une vague mondiale de résistance civilisationnelle s'est élevée. Il ne s'agit pas d'un simple nationalisme ; c'est une affirmation plus profonde de modes d'être différents, de façons alternatives de connaître et d'organiser les sociétés.
En Iran, la République islamique continue d'affirmer un modèle de gouvernance islamique enraciné dans la souveraineté spirituelle. La Russie, sous le dénominateur de l'eurasisme, revendique son identité orthodoxe et civilisationnelle. Le socialisme confucéen de la Chine offre une synthèse de tradition et de modernisation en dehors des paradigmes occidentaux. Pendant ce temps, l'Amérique latine assiste à une renaissance de la solidarité bolivarienne, et l'Afrique retrouve progressivement ses épistémologies indigènes.
La résistance civilisationnelle n'est pas un retour à l'isolationnisme ; c'est une insistance sur la multipolarité – sur le droit des différentes cultures à définir la modernité selon leurs propres termes.
Section 3 : Vers un monde multipolaire
Le moment unipolaire est terminé. L'ordre mondial émergent est intrinsèquement multipolaire, façonné par divers acteurs civilisationnels. Alors que le libéralisme cherchait à effacer la particularité culturelle au profit de l'homogénéisation, l'avenir appartient à la pluralité des civilisations.
Les partenariats stratégiques de l'Iran avec la Russie et la Chine, l'expansion des BRICS et la coopération Sud-Sud croissante illustrent que la résistance n'est pas simplement défensive. Elle est constructive – une entreprise créatrice pour construire un système international alternatif basé sur le respect, non sur la domination.
Ces civilisations, enracinées dans des traditions spirituelles et culturelles durables, possèdent une résilience que la modernité libérale, avec son ethos consumériste éphémère, manque de plus en plus.
Le libéralisme occidental, confronté au déclin démographique, à l'épuisement moral et à une extension stratégique excessive, est mal équipé pour inverser cette tendance. Le centre ne peut plus tenir.
Conclusion : La fin d'un impérialisme, la naissance des civilisations
L'effondrement moral du libéralisme marque non seulement un changement politique mais un tournant civilisationnel. Alors que l'hégémonie occidentale vacille, l'opportunité se présente de forger un monde plus juste, diversifié et spirituel.
La résistance civilisationnelle n'est pas née de la haine mais de l'amour – l'amour de la tradition, de l'identité, d'un avenir où l'humanité n'est pas réduite à des unités économiques mais honorée en tant que porteuse de sens transcendant.
Dans cette nouvelle ère, l'âge de l'Empire s'estompe. L'âge des civilisations se lève.
À l'aube de l'âge des civilisations, le dialogue entre les cultures doit remplacer le monologue d'une civilisation qui s'effondre.
18:03 Publié dans Actualité | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : actualité, états-civilisation, multipolarité | |
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lundi, 05 mai 2025
Oswald Spengler et « la nausée des machines »
Oswald Spengler et « la nausée des machines »
Nicolas Bonnal
Spengler publie son Homme et la technique en 1931. C’est le premier livre que j’ai lu de lui, en 1979, et celui qui m’a le plus marqué : le plus froid, le plus crépusculaire, le plus étincelant dans sa brièveté. Spengler y définit la « tragédie faustienne » : l’homme occidental est finalement vaincu par son industrie, ses sources d’énergie et sa techno-dépendance. A l’heure de la pénurie, du Grand Reset et du grand contrôle informatique planétaire (qui concerne Occident, Chine, Russie, Inde, Brésil et tout le reste), son livre reste une perle, au moins comparable au Règne de la quantité du Maître.
Répétons aussi les deux grandes phrases d’un livre époustouflant de Drieu :
« Tous se promènent satisfaits dans cet enfer incroyable, cette illusion énorme, cet univers de camelote qui est le monde moderne où bientôt plus une lueur spirituelle ne pénétrera… »
« Il n'y a plus de partis dans les classes plus de classes dans les nations, et demain il n'y aura plus de nations, plus rien qu'une immense chose inconsciente, uniforme et obscure, la civilisation mondiale, de modèle européen. »
C’est le dernier chapitre intitulé le Dernier acte qui m’intéresse. Spengler rappelle presque ironiquement les sources de la surpuissance du blanc devenu fétu de paille depuis :
« Les peuples germaniques, en particulier, sont assurés d'un quasi-monopole des gisements de charbon existants, ou en tout cas connus, ce qui les a conduits à une multiplication de leurs populations, sans égale dans l’'histoire. »
Mais la grande transformation a lieu, celle de Polanyi souvent pas si éloigné de Guénon et de Spengler :
« Au-dessus du charbon, et aux carrefours principaux des lignes de communication qui rayonnent à partir de là, est entassée une masse humaine de proportions monstrueuses, enfantée par la technique machiniste, travaillant pour elle et tirant d'elle ses moyens d'existence… »
La supériorité en charbon nourrit le colonialisme et le racisme qu’Hitler appliquera à d’autres blancs (les Russes ou les Ukrainiens, toujours aussi menacés par le capital occidental d’ailleurs) :
« Aux autres peuples que ce soit sous la forme de colonies ou d'États nominalement indépendants est dévolu le rôle de fournir les matières premières et de consommer les produits finis. »
Spengler rappelle la DESTRUCTION DE TOUT par l’ère industrielle :
« La MÉCANISATION DU MONDE est entrée dans une phase d'hypertension périlleuse à l'extrême. La face même de la Terre, avec ses plantes, ses animaux et ses hommes, n'est plus la même. En quelques décennies à peine la plupart des grandes forêts ont disparu, volatilisées en papier journal, et des changements climatériques ont été amorcés ainsi, mettant en péril l'économie rurale de populations tout entières. D'innombrables espèces animales se sont éteintes, ou à peu près, comme le bison, par le fait de l'homme; et des races humaines entières ont été systématiquement exterminées jusqu'à presque l’extinction totale, tels les Indiens de l'Amérique du Nord ou les aborigènes d'Australie. »
L’idée que la forêt a disparu par la faute du journalisme et de la presse abrutissante est fascinante tout de même. Le traducteur Petrowsky cite un livre d’un proche de Madison Grant, Fairfield Osborn, sur le pillage de la planète et la destruction, voire l’anéantissement de tous les paysages traditionnels. On n’est pas très loin de Savitri Devi ou d’Alexis Carrel. D’ailleurs Spengler écrit, toujours dans le Dernier acte de son œuvre :
« Nous sommes incapables de contempler le bétail paissant dans les champs, sans qu'il nous fasse penser à l'idée de son rendement pour la boucherie. Nous ne savons plus admirer la beauté des ouvrages faits à la main par les peuples encore simples, sans vouloir immédiatement leur substituer des procédés techniques modernes. Notre pensée technique DOIT ABSOLUMENT Se réaliser dans la pratique, judicieusement ou absurdement. »
Il remarque qu’en poussant à l’aberration le développement technique, l’homme touche à l’absurde (le progrès contre-productif !) :
« Cette machine commence d'ailleurs à être, sur bien des plans, en contradiction avec la pratique économique : les signes avant-coureurs de leur divorce apparaissent déjà partout. Par sa multiplication et son raffinement toujours plus poussés, la machine finit par aller à l'encontre du but proposé. Dans les grandes agglomérations urbaines, l'automobile, par sa prolifération même, a réduit sa propre valeur : l'on se déplace plus vite à pied qu’en voiture. »
Et c’est là qu’intervient la nausée des machines, prélude au penchant suicidaire décrit par des esprits aussi proches (et différents) que Gheorghiu, Daniélou ou Bruckberger :
« Mais, durant ces dernières dizaines d'années, il est clair que cet état des choses change dans tous les pays où l'industrie à grande échelle est établie de longue date. La pensée Faustienne commence à ressentir la nausée des machines. »
Si Bernanos voit une soumission aux machines devenues folles dans sa France contre les robots, Spengler pressent une nausée qui va accompagner le regain écologiste de l’après-guerre (lui-même meut en 1936, qu’aurait-dit ou écrit vingt plus tard ?) :
« Une lassitude se propage, une sorte de pacifisme dans la lutte contre la Nature. Des hommes retournent vers des modes de vie plus simples et plus proches d'elle; ils consacrent leur temps aux sports plutôt qu'aux expériences techniques… Les grandes cités leurs deviennent odieuses et ils aspirent à s'évader de l'oppression écrasante des faits sans âme, de l'atmosphère rigide et glaciale de l'organisation technique. »
L’écologie a depuis vendu son âme à l’informatique et à sa gouvernance globaliste…
Edgar Poe écrivait :
« Prématurément amenée par des orgies de science, la décrépitude du monde approchait. C’est ce que ne voyait pas la masse de l’humanité, ou ce que, vivant goulûment, quoique sans bonheur, elle affectait de ne pas voir.
Mais, pour moi, les annales de la Terre m’avaient appris à attendre la ruine la plus complète comme prix de la plus haute civilisation. »
Poe voit l'horreur monter sur la terre (Lovecraft reprendra cette vision). L'industrie rime avec maladie physique :
« Cependant d’innombrables cités s’élevèrent, énormes et fumeuses. Les vertes feuilles se recroquevillèrent devant la chaude haleine des fourneaux. Le beau visage de la Nature fut déformé comme par les ravages de quelque dégoûtante maladie. »
C’est dans l’impeccable Colloque de Monos et Una.
Spengler explique même Guénon et la mode traditionnelle-traditionnelle de cette époque dans des termes encore ironiques :
« L'occultisme et le spiritisme, les philosophies indoues, la curiosité métaphysique sous le manteau chrétien ou païen, qui tous étaient objet de mépris à l’époque de Darwin, voient aujourd'hui leur renouveau. C'est l'esprit de Rome au siècle d'Auguste. Dégoûtés de la vie, les hommes fuient la civilisation et cherchent refuge dans des pays où subsistent une vie et des conditions primitives, dans le vagabondage, dans le suicide. »
Mais si le blanc peut se payer le luxe de l’écologie et du rejet des machines (encore que…) il n’en est pas de même des autres peuples qui souhaitent à leur tour décrocher la timbale du progrès :
« Du coup, les «indigènes » purent pénétrer rapidement nos secrets; ils les comprirent, les utilisèrent à plein rendement. En trente ans, les Japonais devinrent des techniciens de premier ordre : dans leur guerre contre la Russie, ils révélèrent une supériorité technique dont leurs professeurs surent tirer maintes conclusions. »
Marx avait parlé du grand remplacement du yankee par trois chinois ; on y est :
« Aujourd'hui, et presque partout, en Extrême Orient, aux Indes, en Amérique du Sud, en Afrique du Sud, des régions industrielles existent. Ou sont en passe d'exister, qui, grâce au bas niveau des salaires, vont nous mettre en face d'une concurrence mortelle. Les PRIVILÈGES intangibles des races blanches ont été éparpillés au hasard, gaspillés, divulgués. Les non-initiés ont rattrapé leurs initiateurs. »
Le blanc voit sa place menacée donc (on le voit cent ans plus tard, rien de nouveau sous le soleil) :
« Peut-être même les ont-ils dépassés, grâce à l'alliage qu’ils ont réalisé entre la ruse de l « indigène et la grande maturité intellectuelle atavique de leurs très anciennes civilisations. Partout où il y a du charbon, du pétrole ou de la houille blanche, une arme nouvelle peut être forgée, pointée contre le sur même de la Civilisation Faustienne. Le monde exploité est en passe de prendre sa revanche sur ses seigneurs. »
Autre prédiction légèrement apocalyptique et mélodramatique :
« Les multitudes innombrables des races de couleur aux mains aussi capables, mais beaucoup moins exigeantes anéantiront l'organisation économique des Blancs jusque dans ses fondements vitaux. Le luxe aujourd'hui HABITUEL dont bénéficie, par rapport au coolie, le travailleur blanc sera sa perte. »
Sur les prédictions je persiste : personne ne s’est moins trompé que l’australien Charles Pearson. Il a vu comme Nietzsche arriver sur le monde et se maintenir solidement. Il a écrit qu’au fardeau de l’homme blanc sauce Kipling succédait celui de la personnalité (National Life and Character, III). Les autres, même (surtout en fait) des génies comme Spengler, ont une tendance à la grandiloquence tragique-historique :
Au moins je rejoins Spengler sur cette splendide envolée :
« Confrontés comme nous le sommes à cette destinée, un seul parti pris vital est digne de nous, celui qui a déjà été mentionné sous le nom du choix d'Achille » : mieux vaut une vie brève, pleine d'action et d'éclat, plutôt qu'une existence prolongée, mais vide. Déjà le péril est si pressant, pour chaque individu, chaque classe, chaque peuple, que vouloir se berner encore d'une illusion quelconque est lamentable. Le Temps ne permet pas qu'on l'arrête. Le pusillanime retour en arrière, comme le précautionneux renoncement, sont exclus. Seuls les mythomanes croient encore qu'il reste une issue possible. L'espérance est lâcheté. »
La vérité de ce monde c’est la mort murmure Céline en pleine dépression newyorkaise.
Sources principales :
https://www.dedefensa.org/article/drieu-la-rochelle-et-le...
https://www.dedefensa.org/article/drieu-la-rochelle-et-la...
https://ia801908.us.archive.org/14/items/dli.ernet.29002/...
https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k1170301s
https://lecourrierdesstrateges.fr/2022/12/13/charles-pear...
https://www.dedefensa.org/article/la-25eme-heure-et-le-ci...
https://www.dedefensa.org/article/bruckberger-et-labdicat...
https://lecourrierdesstrateges.fr/2022/09/09/lecons-liber...
https://www.amazon.fr/grands-auteurs-traditionnels-Contre...
https://www.amazon.fr/GOETHE-GRANDS-ESPRITS-ALLEMANDS-MOD...
https://www.dedefensa.org/article/poe-et-baudelaire-face-...
https://www.dedefensa.org/article/celine-et-la-grosse-dep...
https://www.dedefensa.org/article/alexis-carrel-et-notre-...
22:13 Publié dans Philosophie, Révolution conservatrice | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : oswald spengler, machines, technique, révolution conservatrice, philosophie | |
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Le modernisme russe au risque de l'idéologie - Analyse d’un naufrage
Le modernisme russe au risque de l'idéologie
Analyse d’un naufrage
Claude Bourrinet
De Mallarmé à Malevitch, ou d'une aporie l'autre
La révolution esthétique se manifesta d’abord comme une révolte contre la forme sclérosée, mimétique, répétitive, d’un monde faux et trompeur, qui cherche à faire passer pour réels des arrière mondes, alibis à la médiocrité bourgeoise, à l’adhésion abjecte à des valeurs niveleuses et hypocrites. La déconstruction d’une esthétique issue d’une tradition fondée sur le dogme de la mimésis est l’une des plus radicales de tous les temps. Elle cherche à redonner aux sens une innocence originelle, et à l’art une maîtrise complète de son destin, pareille au pouvoir exercé sur la matière sonore de la musique, qui ne renvoie qu’à elle-même, et qui devient le paradigme des bouleversements artistiques. Au-delà de la provocation des gestes extrêmes lancés par les écoles en –isme – symbolisme, cubo-futurisme (1), rayonnisme (2), suprématisme (3), constructivisme, productivisme etc. – c’est le changement des perceptions de l’homme qui est visé, donc, en dernière instance, la construction d’un homme nouveau, la réalisation d’une utopie, d’une « autre dimension », dira Eisenstein. Dès lors va s’instaurer une dialectique entre mouvement infini de remise en cause des éléments structurels de l’œuvre d’art (forme et matière, pour reprendre la terminologie aristotélicienne) et le champ sociopolitique, lieu des conflits dont l’homme est l’enjeu.
Baudelaire et Rimbaud avaient engagé cette transformation du verbe et de l’esthétique. Mallarmé allait mettre en question les principes mêmes de l’art occidental. L’art n’a fait que maquiller la vérité, que notre vie est un non-sens. Les ingrédients de toute littérature, le sujet, les anecdotes, les images, occultent l’art absolu, qui est par là même impossible. Sa saisie ne s’effectue qu’au moment où l’œuvre accepte l’anéantissement, qui est aussi son assomption. L’art refuse toute compromission avec la contingence humaine. Il est, comme la mort, un soleil qu’on ne saurait regarder en face sans devenir aveugle. La création passe par le chemin suicidaire de la négation hégélienne. Il faudrait soit régresser, et accepter la réalité odieuse, soit la rejeter en un défi incessant de remise en question du monde construit par la création artistique.
Gérard Conio (4), dont je m’inspire de près pour mener cette étude, insiste sur la dimension mystique, spirituelle de cette quête du Graal. Elle est l’expression d’une nostalgie de l’origine, du désir de retrouver une langue transparente, d’un Verbe purificateur capable de restaurer l’harmonie entre l’homme et le monde, la voie gnostique qui accorderait le secret fondamental, qui susciterait l’envol vers l’Idée, mais aussi le suprême désespoir : le lieu de l’art, son topos, est toujours au-delà, fuyant, éphémère, glissant de l’instant insaisissable au moment où l’on pense le saisir. L’art est donc un drame, la mise en scène d’un sacrifice propitiatoire, au bout duquel ne subsiste que la page blanche, lieu vide et plein, lavé des scories de la subjectivité, oméga où se résolvent deux infinis, la mémoire de l’origine, et la création eschatologique d’un monde neuf.
Cette nouvelle conception de l’art comme rupture et quête intransigeante se veut aristocratique, laissée au seul initié, au maudit, à l’exilé, à l’anormal, au yourodivyi (fol en Christ). L’artiste crée son ordre contre l’ordre d’un monde qu’il honnit. De là, un ton apophatique, négateur, doublé d’un accent inquisitorial, d’une tendance à traduire toute prise de position en geste moral.
La Russie du début du XXe siècle, selon Gérard Conio, était particulièrement apte à comprendre la vision mallarméenne, bien plus que l’Occident, émoussé par son sens de la mesure. Les héritiers du nihilisme, la disposition traditionnelle du peuple russe à des élans mystiques, son anarchisme résurgent, allaient radicaliser ce message.
La suppression du sujet (au double sens du terme : le je et le thème) est aussi la disparition du signifié au profit du signifiant, que l’on dépouille jusqu’à la plus simple expression de sa matérialité, le point et la tache. Le procédé est « mis à nu », l’accent est déplacé sur le matériau. Dans le travail des « zaoumniki » (5), le verbe poétique est réduit à ses composantes minimales, la représentation est déconstruite, la figure est supprimée. Le roman, chez Victor Chlovski, devient reportage, documentaire, montage.
L’esthétique, science du Beau (qui ne signifie plus rien) se transforme en sémiotique, science du signe (qui peut être n’importe quoi).
En 1915, dans son premier écrit théorique, Malevitch porte le négativisme jusqu’à l’adieu à la représentation, manifesté par son carré noir sur fond blanc. Puis avec son tableau blanc sur blanc, en 1919, il renonce tout à fait à la peinture, se vouant dès lors à l’écrit, au commentaire. Le geste est répété avec Le dernier tableau, monochrome rouge, que Rodtchenko expose en 1921 pour en finir avec la peinture de chevalet, et avec l’art tout court, inaugurant la période productiviste. L’art était devenu impossible. Comme toutes les valeurs auxquelles on accordait de l’importance, il était désormais réduit à l’égal du zéro.
Face à l’affirmation triomphale d’un art absolu, le scandale de la réalité se dévoile, toujours contingente, toujours banale. D’où naît un déchirement.
Il s’agit alors de purifier le monde par le Verbe, de retrouver l’Eden disparu, d’accéder à la dimension cosmique de la création. Pour Khlebnikov, la « zaoum » (langue phonique) tente d’édifier une langue universelle, une langue « stellaire ». Le Beau doit aussi être l’expression du Vrai et du Bien. Malevitch évoque par le blanc le dieu du Zohar. Il a peut-être été influencé par le philosophe néo-platonicien contemporain Piotr Ouspenski. Maïakovski, en 1918, dans Le Journal des futuristes, en s’élevant contre le mercantilisme bourgeois, recherche une révolution de l’esprit.
En même temps, cette quête mystique redouble une mise en mémoire du passé russe, dans l’origine archaïque par exemple de la corrélation entre l’écriture et la peinture, identification désignée par le mot « pisat ». On retrouve aussi l’art populaire et la religion de la Russie ancienne, la culture « rodnaïa », « maternelle », qu’on met en parallèle avec l’instinct créateur des enfants, des peintres naïfs, des poètes fous… Larionov organise une exposition néo-primitive d’icônes et de loubki (images populaires gravées sur bois (6)) en 1913 – la « Queue d’âne » (7) – qui regroupe Malevitch, Tatline, Chagall, Filonov, Le Dentu, Zdaniévitch, tous artistes novateurs. Un rêve messianique, naturel en Russie, s’attache à l’art.
Pour Kandinsky, le « mur » de l’art devient limite et support. L‘enjeu se déplace de l’extérieur vers l’intérieur, ouvrant la voie à une phénoménologie de la perception artistique, que les contre reliefs de Tatline vont illustrer. On passe d’une esthétique de la contemplation à une esthétique de la réception. Dès lors, tout devient possible, le matériau vidé de son sens acquiert sa valeur du choc qu’il produit.
Le constructivisme est une réponse à l’impasse proclamée de l’art. Le groupe de l’« Inkhouk » de Moscou proclame qu’il faut transformer le « byt », le mode de vie, la vie. Le productivisme tentera de réaliser ce projet.
Maïakovski et Eisenstein: l'exil intérieur
Le premier se donna la mort en 1930 et le second continua son œuvre cinématographique sous la tutelle sourcilleuse de Staline.
Maïakovski (portrait, ci-dessous), en cassant le vers traditionnel, en y mêlant les vocables familiers du peuple, a redonné à la poésie une puissance redoutable, la ramenant brutalement sur terre, une terre rude, parfois vulgaire. Certes, il collaborait à ses heures avec l’appareil policier, mais c’était un authentique poète. « Pro èto » (« De ceci ») est un cri de détresse. Maïakovski appartenait à ces bolcheviks de gauche qui seraient écrasés par le secrétaire du parti. Comme beaucoup, il a vu avec angoisse la liberté de création se réduire sous la pression idéologique du régime. Il a perçu dans sa chair la contradiction entre ses aspirations vers une révolution permanente de la vie, et la sclérose qui paralysait les corps et les esprits, la société soviétique entière, pour aboutir au gel, à la mort.
Eisenstein a connu aussi sa descente aux enfers. Mais il ne s’est pas tué, du moins physiquement. Il connut cependant des crises sérieuses, qu’il résolut au prix du renoncement.
La première lui était commune avec d’autres créateurs. Il s’agissait de surmonter l’aporie qui menait l’art dans l’impasse du non-sens, une fois la mimesis rejetée. Comment lier l’art à la vie ? On sait que le constructivisme subsuma les deux termes sous le projet unitaire de l’utopie, l’utopie que l’on réalise ici et maintenant (ce qui revenait en fait à subordonner l’art à la vie). Eisenstein va utiliser le montage, le travail sur le matériau cinématographique, et singulièrement la synecdoque, la valorisation de la partie pour le tout, apte à toucher l’affect des foules (le cinéma étant l’art des masses par excellence).
La seconde crise fut résolue au début des années trente, en plein stalinisme triomphant. On peut résumer le constat auquel il parvint : « L’art est régressif par sa forme et progressif par son contenu. » Mais en art, la forme prime, et conditionne le contenu. Eisenstein s’aperçoit alors que l’art, c’est le Mal.
La découverte de la « plongée dans le sein maternel », dans les archétypes, à partir des travaux des psychanalystes Ferenczi et Otto Rank, ainsi que les expériences des contre reliefs de Tatline, l’amènent à définir la « Méthode », ou le « Grundproblem » (le « problème fondamental »). Pour lui, l’objectif de l’artiste est l’extase. L’Empreinte (« Eindruck ») désigne les traces du trauma originel et le mode de superposition appelé à constituer le montage des attractions et à susciter de l’organique à partir du mécanique. Son cinéma mêle archaïsme et modernisme, pensée sensorielle et pensée conceptuelle, Apollon et Dionysos, futur utopique et origine.
Du constructivisme à la "construction du socialisme"
La première exposition d’ « Obmokhou » (« Association des jeunes artistes) en mai 1920, inaugurée par Lounatcharsky, présente des manifestations d’agit-prop, destinées à montrer comment utiliser les activités artistiques à des fins de publicité révolutionnaire.
L’exposition « 5x5=25 » constitue un tournant décisif. Il s’agit de briser les mentalités « archaïques ». L’action se place sous l’angle de la lutte contre l’aliénation. Les productivistes reprochent à l’esthétique formaliste de l’objet (« viéchisme ») de substituer à la reproduction de la nature la reproduction de la machine. Pour Maïakovski les artistes sont des « artisans chargés de réaliser la commande sociale ». Le savoir-faire des poètes, leur métier (masterstvo) livre à la séduction étatique les masses désarmées. La fonction poétique est remplacée par la fonction de communication. Les artistes sont passés de la « dissonance » dont parlait Koulbine à l’ « harmonie », synonyme de mort. L’affirmation de Rodtchenko, selon laquelle « l’art littéraire » est destiné à débarrasser la vie des « enjolivures », pour légitime qu’elle soit dans le domaine esthétique, prend une résonance sinistre dans l’ordre politique.
Comment l’art, se voulant autonome, a-t-il pu servir d’instrument à un Etat totalitaire ? Cette question est d’autant plus cruelle que c’est justement par la manifestation de la plus haute vie que l’œuvre de mort a procédé, comme si l’art se révélait être un pharmakon, capable d’empoisonner dans la mesure même où il se présente comme un salut. On peut essayer d’identifier l’origine de cette régression en détachant quelques caractéristiques qui l’ont favorisée :
- On crée une confusion entre l’art et la vie, un glissement sémantique entre ce qui concerne au premier chef l’esthétique et ce qui revient aux conditionnements socio psychologiques.
- On effectue un transfert, à la manière du « sdvig » (9), de la préoccupation d’un salut individuel, à celle du salut communautaire. On passe ainsi d’un plan à un autre qualitativement différent, sans voir que la nature du projet est changée, l’œuvre devenant une entreprise sociale et se soumettant insidieusement au primat du politique, au sens large comme au sens réduit.
- Le ton apophatique, négateur, radical, doublé d’une emphase irritante, la manifestation d’un souci pédagogique et prosélyte, ont exacerbé l’aspect dogmatique de la rhétorique.
- La gratuité ludique de l’utilisation des matériaux créatifs, mots, couleurs, formes, lesquels provoquent un impact psychosensoriel susceptible de modifier les états de conscience et d’instiller de manière subliminale des affects et des concepts en complet décalage avec la réalité, sinon avec la vérité, renforce l’emprise idéologique de l’Etat totalitaire. La création verbale pure des « zaoumniki » est un laboratoire pour la novlangue. Au lieu d’unir les hommes par le haut, elle les transforme en masse indifférenciée douée d’une mentalité prélogique. La forme produit le sens, les liens syntaxiques et logiques sont rompus, suscitant des automatismes qui aboutissent à une phraséologie vide, à une langue codée qui se substitue à la réalité, plus proche des réflexes conditionnés de Pavlov que d’une pensée cohérente, une langue incantatoire, faite d’enchaînements de sons bruts capables de galvaniser les foules et d’agir sur ses nerfs (mais les inventions verbales de Kroutchonykh, de Kamienski, d’Iliazdov sont indéniables : c’est toute l’ambiguïté d’une période révolutionnaire).
- En Russie, l’impersonnalité de l’art renvoie immédiatement à l’impersonnalité de l’Etat.
- Le renversement carnavalesque de l’art entre le haut et le bas, qui, sous couvert d’un égalitarisme agressif, a nivelé vers le bas toute expression, tout mode d’être en société, a abattu les frontières qui permettaient d’endiguer l’inondation idéologique et de préserver certaines classes ou castes de la puissance dévastatrice de la démagogie.
Art nihiliste
Le « laminage de la personnalité », la « perekovka douch », le « remodelage des âmes », mis en œuvre par le totalitarisme stalinien, qu’un Zinoviev, dans les Hauteurs béantes a dénoncés, ont favorisé la crétinisation massive que la société de consommation tente d’apporter avec elle, avec la bénédiction d’anciens dissidents, transformés en commis parvenus du nouveau capitalisme. En Occident, les Diafoirus et les Homais pullulent, et ont rabaissé toute valeur, toute connaissance à une prétentieuse exhortation à aménager une existence médiocre, la parant de cette ornementation ludique qui donne au vide un surcroît d’esthétisme, parallèlement à ce surplus d’âme que les actions humanitaires octroient aux masses repues de délectations télévisuelles. Pour Gérard Conio, l’homologie est flagrante entre ce qui s’est passé en URSS et ce qui se joue actuellement dans la modernité : privilégier la perception après avoir déconstruit les formes et aboli l’art, transférer les codes d’une certaine pratique artistique à la gestion marchande du monde, au point d’en devenir le miroir idéologique à base d’hédonisme de supermarché et de gratuité nihiliste, confondre des justifications esthétiques et des explications sociologiques ou politiques, légitimer en définitive un réel dégradé.
Notes:
1) Le cubo-futurisme est une variante russe du futurisme italien qui, par la provocation, le scandale et la violence, promut la modernité, la machine, le mouvement et le dynamisme au rang de constituant à part entière de l’art.
2) Mikhaïl Fedorovitch Larionov s’intéressa à l’impressionnisme, au fauvisme et au cubisme, avant de fonder, à partir de 1909, et avec sa femme Natacha Gontcharova, le rayonnisme. Larionov fut l’un des pionniers de l’art abstrait. Après son installation à Paris en 1914, il réalisa de nombreux décors pour les Ballets russes.
3) Le suprématisme est la première théorie de la peinture non objective. Malevitch en est l’inspirateur en 1915.
4) Gérard CONIO, L’art contre les masses : Esthétiques et idéologies de la modernité ; L’AGE D’HOMME, Lausanne, 2003.
5) Vélimir Khebnikov, mort du typhus en 1922 à 37 ans, mena une quête mystique de l’Unité et de l’Harmonie, de la maîtrise du temps et de l’Histoire, mêlant rationalité du Nombre et l’Irrationalité du Verbe. La langue Zaoum, libre jeu de phonèmes russes chargés de sens, fait éclater le conservatisme de la culture pour ressusciter les fonds archaïques de la slavité, déchaînant une fureur insurrectionnelle et aboutissant au Monde de l’Harmonie (« Ladomir »).
6) L’ imagerie populaire russe traditionnelle, représente des héros légendaires, des preux intrépides (« bogatyrs » ou « vitèzes »), des tsarévitch ou tsarévna, des bouffons et des baladins (« skomorokhi »), des moujiks étonnants, des « fols en Christ » (« yourodivy »), des monstres et esprits forestiers…
7) L’exposition néo-primitiviste « La Queue d’âne » réhabilita l’art folklorique russe issu de la tradition orientale.
Au début de l’année 1921, l’ « Inkhouk » (Institut de Culture Artistique ») regroupe des artistes tels qu’Alexandre Rodtchenko, Varvara Stepanova, Alexandre Vesnin, Lioubov Popova, Alexandre Exter, qui veulent rompre avec la composition. Ils adoptent la notion de « construction » pour désigner l’abandon des éléments « superflus », et l’utilisation rationnelle des matériaux (souvent d’origine industrielle ou technologique, comme le fait Tatline). Trois principes se dégagent :
- La « facture » concerne le caractère concret, rationnel et universel du matériau ;
- La « construction » définit la fonction collective des éléments et le projet ;
- La « tectonique » établit la finalité idéologique de l’objet.
9) « La création décalée » est une traduction possible d’un mot russe qui exprime un concept fondamental de l’esthétique cubo-futuriste : le « sdvig ». Forgé à l’origine pour désigner la déformation des figures dans la peinture cubiste, le sdvig va bientôt se généraliser, se conceptualiser pour élargir cette défiguration picturale à une transformation qui affecte la création tout entière, la « création décalée » » (in L’art contre les masses…, p. 13).
21:23 Publié dans art | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : art, avant-gardes, constructivisme, constructivisme russe, cubo-futurisme, modernisme russe | |
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Les droits de douane américains vont frapper l'Europe de plein fouet
On ne se lasse jamais des devoirs
Les droits de douane américains vont frapper l'Europe de plein fouet
Lorenzo Maria Pacini
Source: https://telegra.ph/Non-si-%C3%A8-mai-sazi-di-dazi-04-30
Les droits de douane américains vont frapper l'Europe de plein fouet, et l'Europe, une fois de plus, se retrouve non seulement prise au dépourvu, mais victime de sa soumission à l'impérialisme américain, après avoir été soumise à l'impérialisme britannique.
Au mauvais moment
L'état des lieux des équilibres géoéconomiques en Occident
Je vois arriver comme un coup de tonnerre les tarifs douaniers américains. Ce n'est pas un mince problème quand on sait que la situation économique du continent européen est déjà notoirement mauvaise et qu'elle s'enfonce inexorablement dans le néant. Plus problématique encore si l'on pense que ces droits arrivent au moment même où la Commission européenne se vantait de vouloir investir 800 milliards d'euros pour faire la guerre à la Russie. Bref, un bien mauvais timing.
Faisons le point sur la situation.
Le gouvernement américain impose des droits de douane, le lendemain les marchés s'effondrent, la Chine réagit, encore un jour et Trump les supprime, puis ils reviennent. Entre-temps, la spéculation a explosé et ceux qui devaient en profiter l'ont fait. Bien sûr, l'Europe n'était pas sur la liste des heureux gagnants de la loterie.
Ce qui se passe est pire que prévu, car s'il est vrai que les droits de douane sont utilisés plus ou moins comme des sanctions, et donc comme un outil de dissuasion, il est également vrai qu'ils sont généralement appliqués contre des adversaires, des ennemis ou tout au plus des concurrents effrontés, mais pas contre ses « alliés » (= soi-disant...), et c'est précisément cette logique qui devrait amener les États européens à réfléchir à la vérité de la relation politique entre les États-Unis et l'Europe.
Que faire ?
Les tarifs douaniers introduits par Donald Trump marquent un nouveau chapitre dans les relations économiques entre l'Europe et les États-Unis, rompant brutalement avec les politiques de libre-échange qui ont dominé les trente dernières années. Le 2 avril 2025 a été baptisé « Jour de la libération » par le président américain, symbolisant l'abandon par les États-Unis de l'approche mondialiste du commerce et l'adoption d'un protectionnisme visant à corriger ce que Washington considère comme des déséquilibres structurels au détriment de l'économie américaine. Ce n'est pas la première fois que cela se produit en Amérique, vous savez, mais le coup est porté au moment même où l'UE est confrontée à des dépenses de guerre insensées. Cela ressemble presque à une aide à la Russie.
Ce n'est pas la première fois que Trump a recours aux droits de douane: dès son premier mandat, il avait lancé une confrontation commerciale avec la Chine. Cette fois-ci, cependant, l'attaque est plus structurée et à plus grande échelle. Une soixantaine de pays sont visés par les États-Unis, avec des droits de douane allant de 20 à 25% pour l'Europe et à 54 % pour la Chine. Les mesures entreront en vigueur en deux phases: le 5 avril avec un tarif généralisé de 10%, puis le 9 avril avec des taux différenciés pour chaque pays.
En adoptant des droits de douane de 20 à 25 % sur les marchandises en provenance de l'Union européenne, les États-Unis ramènent l'économie mondiale des décennies en arrière, à l'époque du protectionnisme et de l'isolationnisme des années 1930.
L'UE pourrait payer un lourd tribut à ces mesures: le PIB devrait chuter deux fois plus que celui des États-Unis, soit 0,4 % contre 0,2 % respectivement. Et c'est là que l'on peut observer un détail intéressant: c'est précisément l'Allemagne, le pays choisi pour diriger Rearm Europe, qui souffrira. Officiellement, c'est le secteur automobile qui est touché, mais en général, c'est toute la chaîne de production et d'approvisionnement du secteur métallurgique qui est affectée. En bref, Rheinmetall aura du mal à produire à la fois des Volkswagen à hayon et des chars d'assaut pour conquérir Moscou.
Que fera l'UE ?
L'UE s'est déclarée prête à réagir, mais elle tentera d'abord la voie diplomatique, en espérant que quelqu'un à Washington l'écoutera.
Dès le 12 avril, Bruxelles pourrait imposer des droits de douane d'une valeur maximale de 26 milliards d'euros sur les produits américains. Ursula von der Leyen a déclaré que l'Europe restait ouverte au dialogue, mais a averti que l'augmentation des droits de douane finirait par nuire à tout le monde en faisant grimper les prix mondiaux.
Il est clair que la perspective actuellement privilégiée par la gouvernance européenne est celle de la contre-attaque - avec la pieuse illusion de pouvoir réussir: ils devront se demander s'il faut laisser faire et varier la politique monétaire, en profitant de l'introduction de l'euro numérique (qui sera de toute façon opérationnel à partir d'octobre et constituera un instrument de contrôle social très puissant); ou bien Bruxelles pourrait introduire des droits de douane allant jusqu'à 26 milliards d'euros sur les marchandises américaines dès le 12 avril. Ursula von der Leyen a déclaré que l'Europe restait ouverte au dialogue, mais a averti que l'augmentation des droits de douane finirait par nuire à tout le monde en augmentant les prix mondiaux.
Comme l'a suggéré M. Tagliamacco, il pourrait s'agir d'une occasion historique pour l'UE de se désengager de l'influence américaine et de s'ouvrir à des alternatives, mais le scénario européen semble assez sombre. La crise économique qui frappe le continent, et qui menace de s'aggraver, pourrait être abordée de deux manières si la classe dirigeante était différente. La première consiste à renforcer les relations avec la Chine. La sortie de l'Italie de la route de la soie a été un choix à courte vue: il est au contraire crucial de maintenir des relations solides avec Pékin pour stimuler le commerce. De même, il convient de rétablir le lien avec la Russie, qui fournissait à l'Europe du gaz à des prix plus avantageux que ceux imposés par les États-Unis.
La deuxième voie est interne : stimuler la consommation. Depuis la fin des années 1990, les salaires réels sont restés comprimés, ce qui a pesé sur la demande intérieure. L'Italie doit reconstruire son marché intérieur, augmenter les revenus et stimuler les dépenses. Pour ce faire, elle a besoin d'un bloc social fort, capable de s'opposer au néolibéralisme qui a conduit à l'appauvrissement généralisé du pays.
Pour relancer les relations entre l'UE et la Chine, il est essentiel de surmonter les fortes divergences liées à l'énorme excédent commercial de la Chine et aux obstacles qui limitent l'accès à son marché intérieur. Selon des articles de presse, l'Europe est également préoccupée par le soutien continu de Pékin à la Russie dans la guerre en Ukraine.
Récemment, la Chine a envoyé des missions commerciales dans plusieurs capitales européennes, tandis que ses industries envisagent de diriger une partie de leurs exportations vers les marchés européens. Les dirigeants européens ont également exprimé publiquement leur intention de renforcer la coopération bilatérale, ce qui contraste fortement avec les appels précédents à « réduire les risques » liés à la dépendance vis-à-vis des chaînes d'approvisionnement chinoises.
Très doux, pas trop de pouvoir
La signification politique de cette action devrait donner à réfléchir.
Les États-Unis tentent d'envoyer un message clair à l'Europe dans son ensemble, tant à ses dirigeants qu'à ses citoyens. Aux premiers, ils disent clairement, par un langage subtil, que certains choix internationaux ne sont pas à leur goût.
Les États-Unis veulent maitriser leurs relations avec la Russie et la Chine, tout en étant prêts à envoyer les Européens à la guerre sans état d'âme. De plus, il est rappelé que l'euro est une création destinée à maintenir le continent européen sous l'hégémonie du dollar, de sorte que toute tentative de diversification de la structure monétaire des pays membres doit être considérée comme « dangereuse » et « inappropriée ». Les États-Unis ont déjà perdu suffisamment de terrain commercial, perdre l'Europe également n'est certainement pas l'une des meilleures voies à suivre. Les dirigeants européens ne sont pas omnipotents et, surtout, ils ne gouvernent pas chez eux.
Les gens semblent vouloir qu'on leur dise qu'il y a un changement dans l'ordre du pouvoir, de sorte qu'une certaine « coopération » sera la bienvenue et conduira à une approbation et à une récompense agréables de la part du maître d'outre-mer. L'Europe ne devrait certainement pas aller de pair avec la Russie et tous les autres monstres, les "super-vilains" d'Asie.
En bref, l'Europe, une fois de plus, se retrouve non seulement mal préparée, mais victime de sa soumission à l'impérialisme américain, après avoir été soumise à l'impérialisme britannique.
Qui sait si lorsque les peuples se retrouveront à devoir se battre pour un morceau de pain, ils comprendront que ce ne sont pas les politiciens qui changeront la condition de cet esclavage.
12:30 Publié dans Actualité, Affaires européennes | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : états-unis, europe, affaires européennes, tarifs douaniers | |
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dimanche, 04 mai 2025
Une dette bicentenaire
Une dette bicentenaire
par Georges Feltin-Tracol
Le système médiatique occidental d’occupation mentale se concentre toujours sur l’essentiel. Il vient de sortir du placard de l’histoire une vieille affaire politico-financière : le remboursement par la France d’une supposée dette envers Haïti.
Le 17 avril 1825, le dernier roi légitime, Charles X, promulgue une ordonnance de reconnaissance de l’indépendance de cet État en échange d’une indemnisation s’élevant à 150 millions de francs-or. Il s’agit de dédommager les propriétaires expropriés avec un montant équivalent à trois années de production locale. Le 11 juillet, le président haïtien, Jean-Pierre Boyer (1776 – 1850), l’accepte sous la menace de plusieurs navires de guerre aux ordres de l’amiral – baron de Mackau. La Monarchie de Juillet (1830 – 1848) ramène la créance à 90 millions de francs-or. Haïti la payera jusqu’en 1938 et ses intérêts jusqu’aux années 1950, selon les experts qui divergent sur la date finale.
Signifiant en amérindien arawak « Terre des hautes montagnes », Haïti constitue la perle du premier empire colonial français. Son territoire correspond à la partie occidentale d’Hispaniola (ou Santo-Domingo) dans les Grandes Antilles. L’économie qui s’y développe repose sur des plantations de canne à sucre, d’où sa richesse convoitée par les autres puissances européennes.
Au traité de Bâle du 22 juillet 1795, l’Espagne cède à la jeune république française la partie orientale d’Hispaniola ainsi réunifiée. Mais les idées révolutionnaires des Lumières se répandent sur l’île aussi bien chez les créoles (les colons d’origine européenne) que chez les Noirs et les mulâtres. Une insurrection éclate et entraîne la proclamation de l’indépendance, le 1er janvier 1804. C’est l’heure pour Haïti des généraux tels Toussaint Louverture (vers 1743 – 1803) ou Jean-Jacques Dessalines (1758 – 1806).
L’échec répété des tentatives militaires françaises favorise la division du camp indépendantiste et attise les ambitions personnelles. Dès septembre 1804, Dessalines se proclame « empereur d’Haïti » sous le nom de Jacques Ier sans que son autorité soit complète. En 1808, l’Espagne récupère l’Est de Saint-Domingue (la future République dominicaine). Haïti se scinde par ailleurs en deux ensembles rivaux : au Nord, une république devenue trois ans plus tard un royaume avec le Noir Henri Christophe (le roi Henri Ier); au Sud, la république martiale et autoritaire du mulâtre Alexandre Pétion. Sous le ferme gouvernement de son successeur, le mulâtre Jean-Pierre Boyer, Haïti se réunifie. C’est dans ce contexte compliqué que le président haïtien approuve l’ordonnance royale française. Aujourd’hui, gauchistes et médiacrates font campagne pour que l’Hexagone exsangue rembourse Haïti.
Ancienne fonctionnaire à l’ONU et militante féministe, une certaine Monique Clesca cofonde en décembre 2024 le KAAD (Collectif haïtien afrodescendant pour la justice et les réparations). Son entretien dans Le Monde du 18 avril 2025 est exemplaire par son argumentation spécieuse et révisionniste. Elle exige que la France restitue les « sommes que nous avons payées sous la contrainte et […] la réparation pour les torts que nous avons subis. Des torts économiques, psychologiques ». Elle n’est pas la seule.
Dans L’Obs des 15 – 21 avril 2021, un Haïtien qui s’ignore, l’économiste français Thomas Piketty, prix Lyssenko 2015 décerné par le Carrefour de l’Horloge, se réfère à l’indemnisation des biens juifs spoliés dans le cadre de la commission Mattéoli en 1999 et au vote du Congrès des États-Unis qui versa, en 1988, 20.000 dollars aux Nippo-Américains détenus dans les camps de concentration yankees pendant la Seconde Guerre mondiale. Il suggère que « la France devrait verser 30 milliards à Haïti. Cette proposition est minimale, elle ne compte pas les intérêts: [on] se contente de revaloriser le montant de 1825 au rythme de la croissance d’Haïti. Pour la France, ça représente un peu plus de 1% de sa dette publique actuelle ». Monique Clesca ne partage qu’une partie de la proposition de Piketty puisqu’elle envisage le remboursement jusqu’à... cent milliards de dollars !
Avec une austérité budgétaire et une rigueur sociale qui se préparent dans les ministères, est-il sérieux de vouloir que la France se saigne encore pour honorer une soi-disant dette instrumentalisée par une authentique subversion wokiste ? À la question « Comment s’assurer que la restitution de la ” rançon ” bénéficie au peuple haïtien ? », peuple en proie à la faillite de l’État et à la domination des bandes criminelles surarmées, Monique Clesca ose répondre que « cela ne devrait pas être le souci de la France. C’est l’affaire des citoyens haïtiens ». Affirmons-lui que ces derniers n’existent plus !
En raison du climat d’insécurité généralisée qui règne en Haïti, on peut craindre qu’au lieu de verser des sommes considérables à un État inexistant, un gouvernement hexagonal d’extrême centre autorise l’implantation dans le cœur dépeuplé de la France de millions d’Haïtiens. Après le moment brésilien, puis la phase mexicaine, l’Hexagone atteindrait donc son terminus haïtien…
À l’instar des Algériens qui accusent la France d’être à l’origine du délabrement actuel de leur pays, Monique Clesca (photo) estime que « Haïti se trouve dans sa situation actuelle en grande partie parce que nous n’avons pas pu investir cet argent dans notre développement, dans notre éducation, notre santé, notre économie. […] Cet argent a enrichi la France ». Une rhétorique accusatoire qui désigne un bouc-émissaire et se présente en victime historique fallacieuse.
Cette dame semble oublier que le jour de l’indépendance d’Haïti, tous les Européens, à l’exception de quelques prêtres, médecins et déserteurs polonais, se font massacrer. Certains historiens qualifient ces exactions de génocide. Terme excessif qu’il faut plutôt remplacer par « populicide », voire « épuration ethnique » ou « leucophobie »; l’une des premières manifestations de racisme anti-blanc véhiculées par les funestes valeurs lumineuses.
Dans ce même entretien accordé au Monde, Monique Clesca exprime toute son indignation. Pour elle, en parlant de l’ordonnance royale, « ce document était particulièrement humiliant: le texte ne mentionnait même pas Haïti, mais la “partie française de Saint-Domingue“. Notre pays était invisibilisé». On est ici en présence d’un cas flagrant de désinformation ou d’un mensonge historique avéré.
En effet, en 1825, les Haïtiens occupent toute l’île d’Hispaniola depuis déjà trois ans. La future République dominicaine hispanophone pâtit d’une occupation féroce ponctuée de réquisitions, de pillages et de massacres. Les affres de cette domination longue de vingt-deux ans imprègnent encore la mémoire collective dominicaine. Les Dominicains éprouvent toujours de nos jours une franche hostilité envers leurs voisins haïtiens, surtout s’ils sont migrants. La frontière terrestre entre les deux États est l’une des plus surveillées du monde. L’instabilité en cours en Haïti incite les responsables dominicains à ordonner l’érection d’une barrière frontalière à rendre jaloux Donald Trump lui-même.
En 1843, les créoles de Santo-Domingo se soulèvent contre les forces haïtiennes et parviennent à les chasser l’année suivante. Dès lors, la IIIe République dominicaine (1844 – 1861) vit sous la menace permanente des attaques militaires haïtiennes de reconquête. Les Dominicains repoussent les Haïtiens lors de la bataille d’Ocoa en 1849. En 1850, Haïti tente d’envahir son voisin oriental sans aucun succès malgré le soutien de la France, de la Grande-Bretagne et des États-Unis qui ne reconnaissent pourtant Haïti qu’en 1864 ! En 1855, l’armée dominicaine repousse encore trente mille soldats haïtiens. Si un jour la France consent à rembourser Haïti, les Haïtiens ne devraient-ils pas partager avec leurs victimes dominicaines ? Ce ne serait que justice ! Qu’en pensent donc le KAAD et Monique Clesca ?
L’argent donné à la France n’aurait pas incité au développement, au progrès, à l’éducation, à la santé et à l’économie de Haïti. Ces sommes élevées n’auraient servi qu’à alimenter la prévarication et la militarisation du pays. Soit Monique Clesca le sait et elle déforme sciemment les faits, soit elle l’ignore, ce qui témoigne alors d’une effarante incompétence complétée d’une méconnaissance historique crasse de la part du plumitif employé au tristement célèbre quotidien. Le discours décolonial, wokiste et anachronique du KAAD démontre une vive hostilité anti-française.
La France n’a aucune responsabilité dans le désordre institutionnel haïtien. Entre 1804 et 2025, Haïti a connu 86 chefs d’État ou directions collectives, soit un dirigeant tous les deux ans et demi ! Par ailleurs, entre 1915 et 1934, les États-Unis occupent Haïti sans se préoccuper de soutenir des classes moyennes aptes à bâtir une armature étatique stable et solide. Aujourd’hui, une force internationale de maintien de l’ordre sous le commandement du Kenya n’arrive pas à contrecarrer la mainmise des forces criminelles. Haïti a même souhaité un temps adhérer à l’Union africaine, demande finalement refusée pour des motifs géographiques.
Le sort tragique de Haïti préfigure surtout la décolonisation chaotique des États ibéro-américains et africains. S’il y a un fait que peuvent vraiment reprocher les Haïtiens à la France, ce n’est pas cette question de créance bicentenaire, mais plutôt la formation et la propagation des sinistres idées des Lumières sur leur sol.
GF-T
- « Vigie d’un monde en ébullition », n° 154, mise en ligne le 29 avril 2025 sur Radio Méridien Zéro.
09:56 Publié dans Actualité | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : actualité, haïti, caraïbes | |
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samedi, 03 mai 2025
L'influence de Friedrich Schelling sur Maurice Merleau-Ponty
L'influence de Friedrich Schelling sur Maurice Merleau-Ponty
Troy Southgate
Source: https://troysouthgate.substack.com/p/the-influence-of-fri...
L'existentialiste français Maurice Merleau-Ponty (1908-1961) s'est inspiré à plusieurs reprises de l'œuvre de Friedrich Schelling et a avancé l'idée que le corps humain est le principal moyen de connaître le monde. Auparavant, les philosophes occidentaux avaient soutenu que la conscience était la source de la connaissance et l'approche unique de Merleau-Ponty sur ces questions avait été influencée par les écrits phénoménologiques de Husserl et de Heidegger. Cependant, en tant qu'homme de gauche, Merleau-Ponty ne partage pas l'opinion de Schelling selon laquelle notre voix intérieure est celle de Dieu et préfère adopter une position matérialiste et reléguer cette dimension intérieure à un simple aspect de l'humanité.
Empruntant à Schelling l'idée que la créativité artistique représente une expression « barbare » qui sert à libérer l'esprit intérieur de la nature sous la forme d'une communion à la fois réelle et symbolique avec le divin, ce que l'Allemand avait expliqué dans son Sur les rapports des arts plastiques avec la nature (1807), Merleau-Ponty a esquissé ce qu'il a fini par interpréter comme le sacrement de la couleur. À propos de l'œuvre de Cézanne, en particulier, le penseur français laïque présente le dynamisme créatif lié à l'expression artistique en des termes profondément religieux : « Soudain, le sensible prend possession de la couleur :
« Soudain, le sensible s'empare [...] de mon regard, et je livre une partie de mon corps, voire mon corps tout entier, à cette manière particulière d'espace vibrant et sentant que l'on appelle bleu ou rouge. De même que le sacrement ne symbolise pas seulement, sous des espèces sensibles, une opération de la Grâce, mais qu'il est aussi la présence réelle de Dieu, qu'il appelle à occuper un fragment d'espace et qu'il communique à ceux qui mangent le pain consacré, à condition qu'ils y soient intérieurement préparés, de même le sensible n'a pas seulement une signification motrice et vitale, mais n'est rien d'autre qu'une certaine manière d'être au monde qui nous est suggérée à partir d'un point de l'espace, et dont notre corps s'empare et agit, pourvu qu'il en soit capable, de sorte que la sensation est littéralement une forme de communion ».
Ces pensées atypiques sont exprimées dans l'ouvrage de Merleau-Ponty de 1964, L'œil et l'esprit, qui aborde la peinture sous l'angle de la vision. Le fait qu'il mentionne l'impact remarquable de l'œuvre de Cézanne sur le spectateur qui, vraisemblablement, est le destinataire de cette communion visuelle, fait écho aux remarques de Schelling concernant les effets sur l'artiste lui-même, un processus que ce dernier décrit comme étant « poussé à la production et même contre une résistance intérieure ». Deux perspectives différentes, certes, mais Merleau-Ponty est néanmoins d'accord avec Schelling pour dire qu'une telle créativité est un don ou, dans ce cas, une forme de « grâce » qui dénote la présence de quelque chose de mystérieusement divin.
Bien qu'il semble inhabituel pour un marxiste confirmé d'utiliser la terminologie spirituelle privilégiée par son homologue idéaliste allemand, Merleau-Ponty s'intéressait davantage au pouvoir de la volonté humaine en tant que manifestation de la conscience primordiale :
« Il y a vraiment inspiration et expiration de l'Être, action et passion si légèrement discernables qu'il devient impossible de distinguer entre ce qui voit et ce qui est vu, ce qui peint et ce qui est peint ».
Malheureusement, alors que Merleau-Ponty avait formulé sa discussion sur l'art en termes nettement spirituels, il était déterminé à formuler sa philosophie en accord avec son athéisme personnel. Tout comme la transsubstantiation de la Sainte Messe est censée transformer le pain et le vin de la communion en corps et en sang du Christ, Merleau-Ponty souhaitait transformer la libération ontologique de la conscience humaine par l'art en « chair du monde ». La couleur, en particulier, devient un élément de l'être et dépasse les théories limitées de Freud sur l'inconscient en transgressant les frontières du psychologiquement banal.
La libération de ce principe « barbare », le pouvoir symbolique de l'imagination, est un reflet de « la profondeur inépuisable » dont Schelling avait parlé plus d'un siècle auparavant. Pour Merleau-Ponty, la possibilité de découvrir le potentiel caché de la créativité humaine représente une totalité de perception qui conduit au renouvellement de l'individu. Un dernier mot de Schelling:
« L'indiscipliné gît toujours dans les profondeurs, comme s'il pouvait à nouveau percer, et l'ordre et la forme ne semblent nulle part avoir été originels, mais il semble que ce qui était initialement indiscipliné ait été mis en ordre. C'est le fondement incompréhensible de la réalité des choses, le reste irréductible qui ne peut être résolu en raison par le plus grand effort, mais qui reste toujours dans les profondeurs. C'est de ce qui est déraisonnable que naît la raison au sens propre. Sans cette obscurité préalable, la création n'aurait pas de réalité ; l'obscurité est son héritage nécessaire ».
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Directive de Douguine: «Le conflit entre le Pakistan et l'Inde repose sur des bases très sérieuses»
Directive de Douguine: «Le conflit entre le Pakistan et l'Inde repose sur des bases très sérieuses»
Alexandre Douguine
Il fut un temps où les Britanniques, en remettant le pouvoir dans leur ancienne colonie, l'Inde, aux Indiens eux-mêmes, ont créé une situation dans laquelle le pays était divisé selon des critères religieux. Pour limiter la souveraineté de ces États nouvellement libérés et continuer subrepticement à les gouverner, ils ont alimenté les conflits religieux. Selon Alexandre Douguine, directeur de l'Institut Tsargrad et philosophe, il s'agit de la pratique britannique habituelle du « diviser pour régner » :
« Cela signifie qu'ayant perdu leur domination directe sur les peuples de leurs anciennes colonies, les Britanniques ont posé une mine à retardement sous ces dernières. Bien que le Pakistan et l'Inde fassent partie d'un même État-civilisation. En même temps, il y a beaucoup de musulmans en Inde, et ethniquement, ils sont tous très proches.
Par conséquent, les parties divisées de cet État-civilisation se sont retrouvées en forte opposition l'une à l'autre. En Inde, les hindous sont majoritaires et définissent de plus en plus leur identité selon les critères de l'hindutva ("hindouïté"). Au Pakistan, avec l'aide des Britanniques puis des Américains, un État islamiste s'est formé. Cela a certainement contribuer à bétonner une source de conflit idéologique.
Le conflit s'est étendu à certains États de l'Inde, en particulier le Jammu-et-Cachemire, où une partie importante de la population musulmane est influencée par les éléments les plus radicaux. Le Pakistan a joué un rôle direct dans cette situation. Mais pas seulement: des représentants d'ISIS*, interdit en Russie, et d'Al-Qaïda*, interdit en Russie, y étaient également actifs. Tout cela est une pratique courante des services de renseignement occidentaux, la CIA et le MI6, dans la gestion des conflits.
Tout récemment, une explosion a eu lieu dans l'État du Jammu-et-Cachemire, faisant plus de 20 morts. Les autorités indiennes ont accusé le Pakistan d'être à l'origine de l'attentat. Il en a résulté une escalade. Cette fois, la réaction des Indiens a été très vive: des décisions ont été prises pour interdire aux avions pakistanais de survoler l'Inde, pour expulser du pays les personnes ayant la nationalité pakistanaise et pour bloquer le cours de l'Indus dans la vallée de Lipa.
Il s'agit d'une réaction très sérieuse, qui s'est avérée extrêmement douloureuse pour le Pakistan sur le plan des infrastructures, de la politique et de la géopolitique. En fait, un conflit entre deux pays dotés de l'arme nucléaire vient d'éclater. Et bien sûr, cela pourrait avoir des conséquences très graves.
Il est difficile de dire jusqu'où cela ira. Mais il est évident que ce qui se passe est favorable, avant tout, à George Soros et aux mondialistes occidentaux. Ils sont en train de créer une nouvelle guerre dans laquelle les trois grandes puissances contre lesquelles les mondialistes se battent actuellement - la Chine, la Russie et les États-Unis trumpistes - seront immanquablement entraînées.
Les intérêts de ces pays et de l'Inde elle-même, qui est aussi une grande puissance, peuvent maintenant entrer en conflit. Et cela ressemble fort à une provocation mondialiste, car l'Inde est orientée vers les États-Unis et vers Trump personnellement. Par ailleurs, la Chine, qui soutient le Pakistan, a de graves conflits avec l'Inde au Ladakh (régions montagneuses frontalières). C'est pourquoi la Russie, qui est amie à la fois de l'Inde et de la Chine, tente depuis des années de promouvoir la paix entre ces États-civilisation. Aujourd'hui, elle noue également des relations avec Trump.
Par conséquent, dans la situation émergente, tout le monde est impliqué dans un conflit les uns contre les autres. Ce serait une formidable aubaine pour les mondialistes qui, ayant subi une défaite cuisante aux États-Unis, ne contrôlent plus que l'Europe. Par conséquent, le conflit indo-pakistanais est plus qu'à leur avantage, ce qui est très dangereux. Les conflits Chine-Inde, Inde-Inde et Inde-Monde islamique sont déjà en place. Dans le même temps, ce qui se passe détourne l'attention du monde de la Syrie, de la bande de Gaza et du Moyen-Orient en général. Tout cela est un moyen évident de creuser un fossé entre les principaux piliers du monde multipolaire. Et c'est pourquoi je suis sûr que Soros était impliqué.
Mais, je le répète, la Russie a d'excellentes relations avec l'Inde et la Chine et de bonnes relations avec le Pakistan. Par conséquent, en utilisant ces bons rapports comme leviers, la diplomatie russe pourrait aujourd'hui résoudre activement et surtout efficacement la situation conflictuelle actuelle qui menace le monde entier ».
20:26 Publié dans Actualité | Lien permanent | Commentaires (1) | Tags : alexandre douguine, actualité, politique internationale, inde, chine, asie, affaires asiatiques | |
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Le système de la peur
Le système de la peur
Andrea Marcigliano
Source: https://electomagazine.it/il-sistema-della-paura/
Pour une fois, allons-y doucement. C'est-à-dire, ne nous contentons pas de décrire et d'analyser autant que possible les faits individuels, mais regardons-les avec un regard plus large. Une vue d'ensemble, en quelque sorte.
La guerre. La guerre est partout. La guerre est en Palestine, avec le massacre de Gaza, avec un Liban acculé par l'offensive israélienne, avec une Syrie déchirée et, au moins en partie, aux mains du boucher al-Jolani et de ses milices. Et, ensuite, il y a l'offensive turque contre les Kurdes, la menace d'une confrontation directe entre Israël et l'Iran, tout le Grand Moyen-Orient en ébullition.
Puis l'Ukraine. Une nation envoyée à l'abattoir pour des intérêts financiers peu avouables. Et dirigée par une sorte de caricature de dictateur typique d'un État bananier. Mais qui n'est ni drôle ni souriante comme celle de Woody Allen. Parce qu'il massacre inutilement ce qui devrait être son peuple. Qu'il tyrannise avec un système policier et tyrannique qui n'a que très peu de comparaisons dans l'histoire.
Et les vents de la guerre soufflent sur la Roumanie. Un coup d'État interne vient de s'y produire, avec le soutien d'un pouvoir judiciaire soumis: il a exécuté la volonté de Bruxelles. Pour empêcher un candidat indépendant, vainqueur des élections, d'accéder à la présidence. Accusé d'être à la solde de Moscou, mais en réalité seulement conscient du désastre que représenterait une guerre avec le colosse russe. Et, enfin, la Transnistrie qui se déclare indépendante et demande l'aide de Moscou. Comme les Gagaouzes, minorité persécutée.
Puis la Serbie. Assiégée par une Union européenne de plus en plus hostile. Celle-ci a favorisé la composante albanaise du Kosovo, en ignorant l'histoire et en déformant la réalité. Elle a livré cette région agitée à des bandes criminelles, mal aimées, voire craintes par l'Albanie elle-même. Transformer le Kosovo en une sorte de Tortuga, un royaume de l'obstruction, utile uniquement aux mafias internationales. Et de plus en plus pénétré par des éléments du djihadisme islamique.
Et la Bulgarie dans la tourmente. Et la Slovaquie presque déstabilisée par la tentative d'assassinat de son premier ministre, Fico.
Et les vents de guerre qui soufflent chaque jour dans la région du Pacifique. Taïwan est utilisé comme avant-poste d'une guerre future, peut-être imminente, avec la Chine. Une guerre que les stratèges de Pékin, bien qu'ils ne la souhaitent pas, considèrent comme (presque) inévitable.
Et je pourrais continuer en évoquant les tourments de l'Afrique. Au désastre militaire qui a anéanti ce qui était la Libye. Aux conflits dans la région du Sahel. Au Soudan tourmenté par des guerres civiles et religieuses....
Et puis, un pas en arrière. De quelques années. La terreur - car c'est bien de cela qu'il s'agit - semée par le vir us du COVI D. La panique, presque généralisée, qui a semblé paralyser le monde, pour ce qui, à y regarder de plus près, n'était qu'une épidémie de grippe un peu plus forte. Celle qui arrive tous les dix ans environ. Et qui emporte, malheureusement, beaucoup de personnes âgées et malades.
Mais, cette fois, confinement, ou plutôt relégation à domicile. Des vaccins qui n'en étaient pas et qui, au contraire, affaiblissaient les personnes en bonne santé, provoquant des milliers de morts. Et surtout, une sorte de tare imminente, une angoisse sourde, essentiellement immotivée, mais dont on peine à sortir.
Réfléchissez un instant à tout cela. Et abstenez-vous du jeu futile qui consiste à blâmer l'un ou l'autre. Évitez de prendre parti, pour une fois au moins. Et soustrayez vous à la propagande massive qui vous conditionne.
En vous posant une question. Une seule question.
Quelle est la cause de tout cela ? Quel est le résultat ? Quelle finalité, surtout. Parce qu'un but, un but premier dont tous les autres découlent, il doit y en avoir un. Ce qui s'est passé et continue de se passer n'est pas, ne peut pas être le produit aléatoire de coïncidences inhabituelles. Au contraire, si l'on regarde la scène générale... d'en haut, d'une vue d'oiseau, sans jugements artificiels a priori, on peut entrevoir un dessein général.
Et ce dessin n'est autre que... la peur.
Mais pas une peur normale, naturelle, instinctive... mais plutôt une peur induite, systémique.
Une peur qui sert à asservir les hommes. À les priver de toute liberté. De tout élan.
Oui, mais induite par qui ? Cela reste l'énigme suspendue... car ceux qui apparaissent, politiciens, fonctionnaires, journalistes asservis... ne sont, à l'évidence, que des outils.
De quelque chose d'autre. De quelque chose que je ne peux, ou n'ose, définir.
16:39 Publié dans Actualité | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : actualité, système, peur | |
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Le fondamentalisme idéologique en politique internationale
Le fondamentalisme idéologique en politique internationale
Glenn Diesen
Source: https://x.com/Glenn_Diesen/status/1912598897077203324
On parle de fondamentalisme idéologique lorsque l'idéologie convainc le public que la politique est une lutte entre le bien et le mal. Les gens n'évaluent plus les États en fonction de ce qu'ils font dans le système international, mais en fonction des identités politiques qui leur sont attribuées.
Kenneth Waltz, le parrain de la théorie néoréaliste, a observé que les démocraties occidentales étaient enclines au fondamentalisme idéologique. Waltz écrivait :
« Les citoyens des États démocratiques ont tendance à considérer leur pays comme bon, en dehors de ce qu'il fait, simplement parce qu'il est démocratique... Les États démocratiques ont également tendance à considérer les États non démocratiques comme mauvais, en dehors de ce qu'ils font, simplement parce qu'ils ne sont pas démocratiques »
Les citoyens des démocraties pensent également que leur pays est plus pacifique parce qu'il est démocratique. La conviction que les démocraties sont plus pacifiques et moins susceptibles de déclencher des guerres a jeté les bases des « guerres démocratiques », car envahir des pays non démocratiques pour les rendre démocratiques est censé rendre le monde plus pacifique. Les démocraties occidentales se sont donc engagées dans des guerres perpétuelles avec la promesse d'assurer la paix perpétuelle de Kant.
Le fondamentalisme idéologique est, dans une certaine mesure, ancré dans la nature humaine, car les êtres humains sont des animaux sociaux qui s'organisent en groupes depuis des dizaines de milliers d'années pour trouver la sécurité et un sens à leur vie. Les êtres humains s'organisent instinctivement en groupes internes (nous) contre des groupes externes diamétralement opposés (eux). Le groupe extérieur, qui est notre opposé, réaffirme notre propre identité - nous ne pouvons nous identifier que comme blancs s'il y a des noirs, que comme occidentaux s'il y a des orientaux, que comme civilisés s'il y a des barbares, que comme démocratiques s'il y a des autoritaires, et que comme bons s'il y a des méchants.
Le groupe « nous » est mobilisé et la solidarité est assurée en s'organisant autour de récits qui opposent le « nous » au « eux » et le « bien » au « mal ». En temps de paix, l'individu est autorisé à s'écarter du groupe et il est plus probable que nous humanisions également nos adversaires.
En revanche, en période de conflit, nous nous replions instinctivement sur le groupe par souci de sécurité et les barrières entre le groupe d'appartenance et le groupe d'exclusion sont renforcées. Tout individu qui s'écarte du groupe, par exemple en essayant de comprendre le groupe extérieur, est immédiatement suspecté et puni. Il s'agit là d'un trait de la nature humaine, même si l'idéologie l'amplifie. La conséquence est que nous exagérons ce qui nous unit à nos alliés et ce qui nous différencie de nos adversaires.
Le fondamentalisme idéologique contre la raison dans la sécurité internationale
Le système international est défini par l'anarchie internationale, ce qui signifie qu'il n'y a pas de centre de pouvoir unique qui monopolise l'usage de la force. Par conséquent, chaque État doit s'armer pour assurer sa sécurité et les États se livrent à une concurrence en matière de sécurité, car la sécurité d'un État est souvent synonyme d'insécurité pour un autre.
Le décideur rationnel reconnaît que plus d'armes n'entraîne pas toujours plus de sécurité ; il faut plutôt réduire la concurrence en matière de sécurité en réduisant également la façon dont nous menaçons les autres.
Cet objectif peut être atteint grâce à la compréhension mutuelle et à l'instauration de la confiance, ce qui suppose que nous nous mettions à la place de l'adversaire pour comprendre ses préoccupations en matière de sécurité. Il ne s'agit pas de faire preuve de charité, mais de reconnaître que la réduction des préoccupations sécuritaires des adversaires réduira leur besoin de s'armer et de répondre aux menaces. L'atténuation de la concurrence en matière de sécurité entre les différents centres de pouvoir a jeté les bases de l'ordre mondial moderne et de la diplomatie à la paix de Westphalie.
Le concept de « sécurité indivisible », qui suggère que la sécurité de tous les États est intrinsèquement liée, relevait autrefois du bon sens et constituait le fondement de la sécurité internationale. En Occident, nous ne discutons plus des préoccupations sécuritaires de la Russie, de la Chine, de l'Iran ou d'autres États figurant sur la liste toujours plus longue des pays considérés comme des adversaires. Les efforts visant à comprendre les préoccupations sécuritaires du groupe extérieur sont interprétés comme de la sympathie et de la trahison. La loyauté envers le groupe intérieur est prouvée en répétant des mantras sur le fait que « nous » sommes bons et pacifiques et qu'« ils » sont mauvais et dangereux. Si l'on ne s'adapte pas aux récits et au langage manichéens, cela signifie que l'on ne fait pas partie du groupe d'appartenance.
La conséquence du fondamentalisme idéologique est donc l'incapacité à atténuer la concurrence en matière de sécurité. Le décideur irrationnel se convaincra que nos armes et nos activités militaires sont bonnes, non provocatrices et défensives, alors que les armes et les activités militaires de l'adversaire sont belliqueuses, menaçantes et destinées à l'agression. Nos stratégies de sécurité ont été organisées autour de l'idée que la liberté et la démocratie dépendent de la domination perpétuelle de l'Occident.
L'analyse de la manière dont nos adversaires nous menacent ne donne que la moitié de l'histoire, et une analyse aussi limitée nuit à notre sécurité. Sans la capacité d'atténuer les préoccupations sécuritaires de l'adversaire, il ne nous reste que la stratégie de sécurité de la dissuasion, de l'endiguement et de la défaite de nos adversaires. Cela me semble très familier, car c'est à cela que s'est réduite la sécurité de l'Occident politique.
L'Occident est engagé dans une guerre perpétuelle qui implique de menacer et d'attaquer constamment d'autres États, d'interférer dans leurs affaires intérieures, de renverser des gouvernements, d'occuper, d'étendre des blocs militaires et de déployer des systèmes d'armes offensifs. Pourtant, suggérer que d'autres États puissent nous considérer comme une menace est accueilli avec mépris et interprété comme un soutien à l'ennemi. Nos intentions sont bienveillantes et nos actions sont vertueuses car elles soutiennent des objectifs et des valeurs désintéressés. En revanche, on suppose toujours que nos adversaires sont animés de mauvaises intentions. Leurs actions ne sont jamais une réponse à ce que nous avons fait ; elles apparaissent toujours dans le vide et sont motivées par leur nature belliqueuse et leurs mauvaises valeurs.
Le fondamentalisme idéologique d'hier à aujourd'hui
En 1982, le célèbre diplomate américain George Kennan a mis en garde contre ce qui apparaît comme une définition parfaite du fondamentalisme idéologique, qui, selon lui, a mis l'Occident sur la voie de la guerre. Kennan écrivait :
« Je trouve que la vision de l'Union soviétique qui prévaut aujourd'hui dans une grande partie de nos institutions gouvernementales et journalistiques est si extrême, si subjective, si éloignée de ce que tout examen sérieux de la réalité extérieure révélerait, qu'elle est non seulement inefficace mais dangereuse en tant que guide de l'action politique. Cette série interminable de distorsions et de simplifications excessives, cette déshumanisation systématique des dirigeants d'un autre grand pays, cette exagération routinière des capacités militaires de Moscou et de l'iniquité supposée des intentions soviétiques, cette déformation monotone de la nature et des attitudes d'un autre grand peuple .... cette application inconsidérée de la règle du « deux poids, deux mesures » dans le jugement de la conduite soviétique et de la nôtre ; cette incapacité à reconnaître, enfin, le caractère commun de nombre de leurs problèmes et des nôtres à mesure que nous avançons inexorablement dans l'ère technologique moderne ; et cette tendance correspondante à considérer tous les aspects des relations en termes d'un prétendu conflit total et irréconciliable de préoccupations et d'objectifs : ce ne sont pas là, croyez-moi, les marques de la maturité et du discernement que l'on attend de la diplomatie d'une grande puissance ; ce sont les marques d'un primitivisme intellectuel et d'une naïveté impardonnables dans un grand gouvernement... Par-dessus tout, nous devons apprendre à considérer le comportement des dirigeants de ce pays [l'Union soviétique] comme étant en partie le reflet de la façon dont nous le traitons nous-mêmes. Si nous insistons pour diaboliser ces dirigeants soviétiques, pour les considérer comme des ennemis absolus et incorrigibles, uniquement habités par la peur ou la haine qu'ils éprouvent à notre égard et voués à rien d'autre que notre destruction, c'est ainsi, en fin de compte, que nous les aurons à coup sûr, ne serait-ce que parce que notre vision d'eux ne permet rien d'autre, ni pour eux, ni pour nous.»
L'année suivante, en 1983, le monde a failli s'écrouler. L'OTAN a lancé son exercice militaire Able Archer, qui a fait croire à l'Union soviétique qu'elle était attaquée, et une guerre nucléaire a failli être déclenchée. Le président Reagan s'est rendu compte de façon surprenante que les Soviétiques avaient des préoccupations en matière de sécurité concernant les activités militaires de l'OTAN :
« Trois années m'ont appris quelque chose de surprenant sur les Russes : De nombreuses personnes au sommet de la hiérarchie soviétique avaient véritablement peur de l'Amérique et des Américains... J'ai toujours pensé que nos actes devaient montrer clairement que les Américains étaient un peuple moral qui, depuis la naissance de notre nation, avait toujours utilisé son pouvoir uniquement comme une force du bien dans le monde ».
Il est très inquiétant que le président des États-Unis n'ait pas compris que le pays contre lequel les États-Unis ont mené une guerre froide de plusieurs décennies et contre lequel ils ont pointé des milliers d'armes nucléaires puisse considérer les États-Unis comme une menace. Cela semble absurde, mais qu'est-ce qui a vraiment changé ? L'Occident se met-il aujourd'hui à la place de ses adversaires ?
Après la guerre froide, la stratégie américaine d'unipolarité ou d'hégémonie mondiale était légitimée par ses valeurs démocratiques libérales, qui devaient être une force pour le bien dans le monde et bénéficier à l'ensemble de l'humanité. L'expansionnisme de l'OTAN était la manifestation des ambitions hégémoniques, et l'OTAN se réfère aussi fréquemment à elle-même comme une force pour le bien dans le monde.
L'OTAN ne peut donc pas comprendre pourquoi une puissance quelconque la considérerait comme une menace. L'OTAN, en tant que bloc militaire, exprime l'objectif de la sécurité par la domination, perturbe la stabilité nucléaire avec la défense antimissile stratégique, s'étend à l'Est et envahit d'autres pays qui ne l'ont jamais menacée. Pourtant, l'OTAN se considère comme une communauté de valeurs, et la peur de l'OTAN est balayée comme une peur de la démocratie. C'est absurde, mais c'est le mantra que tout le monde est obligé de répéter pour démontrer sa loyauté envers le groupe.
Suggérer que la Russie a des craintes légitimes vis-à-vis de l'OTAN est rejeté comme de la paranoïa, de la propagande et la répétition des discours du Kremlin. L'argument est que la Russie devrait se réjouir de voir l'OTAN marcher sur ses frontières, car cela apportera la démocratie, la paix et la stabilité - et la Chine devrait également se réjouir que les États-Unis garantissent la liberté de navigation le long de ses côtes. Le fondamentalisme idéologique n'ayant pas été contré par l'hubris idéologique de l'après-guerre froide, il est raisonnable de se demander si nos dirigeants n'ont pas abandonné la raison.
Les récits des fondamentalistes idéologiques
L'explication la plus courante des réactions de la Russie à l'expansion de l'OTAN est d'y voir une simple volonté de restaurer l'Union soviétique. La preuve la plus courante de la volonté du président Poutine de restaurer l'Union soviétique est qu'il estime que l'effondrement de l'Union soviétique a été la plus grande tragédie du XXe siècle, sans qu'aucun autre contexte ne soit apparemment nécessaire.
Cette allégation est répétée par les politiciens, les médias et les universitaires, mais elle est profondément erronée. Dans son discours, M. Poutine a déclaré:
« Nous devons reconnaître que l'effondrement de l'Union soviétique a été l'un des principaux désastres géopolitiques du siècle. Pour la nation russe, c'est devenu un véritable drame. Des dizaines de millions de nos concitoyens et compatriotes se sont retrouvés hors du territoire russe. De plus, l'épidémie de désintégration a contaminé la Russie elle-même. L'épargne individuelle a été dépréciée et les vieux idéaux détruits. De nombreuses institutions ont été démantelées ou réformées de manière inconsidérée. L'intervention terroriste et la capitulation de Khasavyurt qui s'en est suivie ont porté atteinte à l'intégrité du pays. Les groupes oligarchiques, qui exercent un contrôle absolu sur les canaux d'information, servent exclusivement leurs propres intérêts corporatistes. La pauvreté de masse a commencé à être considérée comme la norme. Tout cela s'est déroulé dans un contexte de récession économique dramatique, d'instabilité financière et de paralysie de la sphère sociale ».
Plus tard, lorsqu'on a demandé à Poutine de développer ses commentaires, il a répondu : Quiconque ne regrette pas la disparition de l'Union soviétique n'a pas de cœur. Ceux qui veulent la restaurer n'ont pas de cervelle.
Le discours de Poutine, une preuve essentielle pour soutenir le récit d'un désir de restaurer l'Union soviétique, n'est manifestement pas tel qu'il a été présenté au public occidental manipulé. Lorsque le contexte et les faits ne cadrent pas avec le récit, les fondamentalistes idéologiques font leur part du « bon combat » en ignorant la réalité.
Le langage des fondamentalistes idéologiques
Le fondamentalisme idéologique soutient également le développement d'un nouveau langage consistant en un langage binaire simpliste opposant le bien au mal pour donner une légitimité ou nier l'illégitimité. Nos intérêts sont présentés comme la promotion de bonnes valeurs, tandis que les intérêts illégitimes de nos adversaires représentent le contraire.
Dans la compétition pour la domination pendant la guerre froide, les États-Unis étaient le « leader du monde libre », tandis que l'adversaire soviétique était un « empire du mal ». Après la guerre froide, les États-Unis ont affirmé que leurs ennemis étaient des « malfaiteurs », que les États adversaires faisaient partie d'un axe du mal, alors que les États-Unis étaient un croisé de la liberté.
La tentative des États-Unis de remplacer la Russie en tant que fournisseur d'énergie à l'Europe a été présentée comme visant à contrer « l'arme énergétique russe » et à répandre le « gaz de la liberté » et les « molécules de la liberté américaine ». Les États-Unis et la Russie poursuivaient le même objectif, mais ils ne sont pas comparables, l'un étant bon et l'autre mauvais.
George Orwell parlait de newspeak, la création d'une nouvelle langue qui rend impossible l'expression et même la pensée d'une opposition. La « diplomatie de la canonnière », qui consistait à intimider d'autres États, est aujourd'hui remplacée par la « liberté de navigation ». Nous ne cherchons pas à dominer et à imposer nos diktats, nous négocions à partir d'une « position de force ». Nous ne soutenons pas la torture, mais nous disposons de « techniques d'interrogatoire renforcées ». Nous ne pratiquons pas la subversion, mais la « promotion de la démocratie ». Nous ne soutenons pas les coups d'État, mais les « révolutions démocratiques ». Nous n'envahissons plus de pays, nous avons des « interventions humanitaires ». Nous n'étendons pas un bloc militaire qui redivise le continent, nous avons « l'intégration européenne ». L'UE n'a pas pour politique d'établir une sphère d'influence, elle a pour politique d'établir un « cercle d'États amis bien gouvernés ». Il est toujours obligatoire de parler de l'OTAN comme d'une « alliance défensive », alors qu'elle attaque des pays qui n'ont même pas menacé le bloc militaire.
Pendant la guerre d'Ukraine, un sommet a été organisé en Suisse, dont l'objectif déclaré était de mobiliser le soutien à l'Ukraine et de vaincre la Russie. Lors de cette réunion, le président polonais a appelé à décoloniser la Russie en la divisant en 200 États. Nous l'avons appelé « sommet de la paix », bien que la Russie, en tant que partie adverse, n'ait pas été invitée, que les préoccupations sécuritaires de la Russie n'aient pas été discutées et que les thèmes du cessez-le-feu et de la paix n'aient pas non plus été à l'ordre du jour.
La réalité alternative confortable est une dangereuse auto-illusion. Les fondamentalistes idéologiques sont davantage prêts à recourir à des moyens agressifs, car ils croient poursuivre les objectifs pacifiques d'un nouveau monde pacifique. Raymond Aron écrivait en 1962 :
« La diplomatie idéaliste glisse trop souvent dans le fanatisme ; elle divise les États en bons et en méchants, en pacifiques et en belliqueux. Elle envisage une paix permanente par le châtiment des seconds et le triomphe des premiers. L'idéaliste, croyant rompre avec la politique de puissance, en exagère les crimes ».
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vendredi, 02 mai 2025
King Kong et la profanation du monde
King Kong et la profanation du monde
Nicolas Bonnal
On nous disait que le premier King Kong c’était une métaphore de la crise de 29… Et le comte Zaroff ?
Le grand King Kong c’est le deuxième, celui de Guillermin, français (d’origine) créateur de la Tour infernale, et qui pendant quelques années a réalisé des superproduction géniales qui enfoncent tous les opus contemporains de Godard et compagnie ; et ce film est essentiel pour des raisons moins liées au cinéma que prévu (de toute manière c’est fini depuis Griffith ou Orson le cinéma) : on a une époque déchue mais lucide, un peu contestataire (le personnage de Jeff Bridges) ; on a la crise du pétrole et la révolte contre l’industrie (ce que Spengler appelle dans son livre sur la technique "la nausée de la machine") ; on a la prison de fer du grand pétrolier (fantastique décor) où l’on enferme le terrible poète amoureux, et qui rappelle encore et toujours la prison de fer de Dick; on a la lucidité maladroite et sympa des personnages pas trop prétentieux et encore positifs (l’une veut être une star, l’autre plus riche, l’autre sauveur de la nature); on a John Barry, musicien primaire mais malin génie capable de vous transporter trois notes ; on a Kauai l’île magique de l’archipel, et sa plage d’Honopu, et son rocher cathédrale. On a un peu de brouillard et on a un bon tricoteur de singe. La leçon anti-spectaculaire et anticapitaliste du film (le rigolo producteur finit écrasé par son monstre, on est à une époque où l’anticapitalisme de façade, venu de Debord ou Marcuse, ne doute de rien) a vite fait long feu mais l’essentiel reste. On enlève leur singe aux indigènes, on est dans la deuxième chute d’Eliade, dans le désenchantement du monde pas très bien compris par Max Weber.
Ce film avait été moqué par la critique – mais moins par l’excellent critique et épistémologue iranien Youssef Ishagpour, qui essaie de voir au-delà d’Hollywood et ses stars. D’ailleurs c’était un film sans stars : ni la blonde (maladroite et malheureuse Jessica Lange) ni les acteurs ne sont vraiment des stars. La star c’est le singe, le sujet c’est l’amour si l’on veut, et la folie du monde moderne qui détruit le singe au lieu de l’exploiter. On n’a plus de pétrole alors on a des idées, on n’a plus d’usines alors tout devient spectacle et simulacre (le Vietnam d’Apocalypse now…). Vive Debord.
D’une certaine manière le film se termine dès que l’on retire le grand singe de son île. Les sauvages locaux, qui sont comme nos paysans de Farrebique, des êtres enracinés dans leur terre avec une relation magique au cosmos (cf. le marxiste Henri Lefebvre et ses propos sur la petite église de campagne encore ouverte dans les Fifties). Prescott explique très bien dans son anglais mesuré :
No, you're dead wrong. He was the terror, the mystery of their lives, and the magic. A year from now that will be an island full of burnt-out drunks. When we took Kong, we kidnapped their god.
Et comme on parlait de Mircea Eliade, parlons du lien entre cinoche et religion (voir Trotski aussi) :
« Tout un ouvrage serait à écrire sur les mythes de l'homme moderne, sur les mythologies camouflées dans les spectacles qu'il chérit, dans les livres qu'il lit. Le cinéma, cette « usine des rêves », reprend et utilise d'innombrables motifs mythiques : la lutte entre le Héros et le Monstre, les combats et les épreuves initiatiques, les figures et les images exemplaire (la « Jeune Fille », le « Héros », le paysage paradisiaque, I' « Enfer », etc.).»
Eliade ajoute :
« La grande majorité des «sans-religion» ne sont pas à proprement parler libérés des comportements religieux des théologies et des mythologies. »
Le King Kong de Guillermin c’est aussi la nostalgie d’un solide paradis (certes étrange) :
« Mais ce n'est pas uniquement dans les « petites religions » ou dans les mystiques politiques que l’on retrouve des comportements religieux camouflés ou dégénérés : on les reconnaît également dans des mouvements qui se proclament franchement laïques, voire antireligieux. Ainsi, dans le nudisme ou dans les mouvements pour la liberté sexuelle absolue, idéologies où l'on peut déchiffrer les traces de la « nostalgie du Paradis », le désir de réintégrer l’état édénique d'avant la chute, lors que le péché n'existait pas et qu'il n'y avait pas rupture entre les béatitudes de la chair et la conscience. »
Eliade annonçait qu’on allait tomber encore plus bas (ils font des selfies devant le cadavre de leur pape) :
« La non-religion équivaut à une nouvelle« chute » de l'homme : l’homme areligieux aurait perdu la capacité de vivre consciemment la religion et donc de la comprendre et de l’assumer ; mais, dans le plus profond de son être, il en garde encore le souvenir, de même qu'après la première « chute », et bien que spirituellement aveuglé, son ancêtre, l'homme primordial, Adam, avait conservé assez d'intelligence pour lui permettre de retrouver les traces de Dieu visibles dans le Monde. Après la première « chute », la religiosité était tombée au niveau de la conscience déchirée: après la deuxième, elle est tombée plus bas encore, dans les tréfonds de l’inconscient : elle a été « oubliée ». Ici s'arrêtent les considérations de l'historien des religions. »
Sources :
Le sacré et le profane (Eliade)
https://lesakerfrancophone.fr/monseigneur-gaume-et-le-car...
Grands auteurs traditionnels contre le monde moderne (Bonnal)
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L'OTAN est désormais une alliance de guerre - Interview du général Fabio Mini
L'OTAN est désormais une alliance de guerre
Interview du général Fabio Mini
Source: https://www.sinistrainrete.info/geopolitica/30346-fabio-m...
Nous publions la transcription intégrale de l'interview du général Fabio Mini du 4 avril, publiée en avant-première exclusive.
Le 18 avril sort votre livre sur l'OTAN. Comment jugez-vous l'attitude de Trump à l'égard de l'Alliance ?
Nous vivons une période de crise, y compris pour l'OTAN, et la situation pourrait même s'aggraver. En examinant l'organisation et ses récentes décisions, je voudrais souligner que tant que Stoltenberg et Biden étaient là, l'OTAN s'est complètement rangée à l'unisson contre la Russie et s'est déclarée prête à la guerre.
Dans mon livre « La NATO in guerra » (éd. Dedalo, éd.), j'ai essayé d'analyser pourquoi l'OTAN s'est dégradée par rapport à son idée initiale d'Alliance atlantique. L'organisation est devenue une institution purement guerrière, orientée vers un ennemi spécifique et non hypothétique. Lors du dernier sommet de Madrid en 2022, l'OTAN a reconnu la Russie et le terrorisme comme des ennemis actuels et imminents. Telle était l'attitude au moment de l'intervention de Rutte, et Trump n'avait pas encore pris le contrôle des États-Unis.
Après que Trump a commencé à négocier avec Poutine, Rutte est resté silencieux et n'a pas attisé les tensions de manière publique et flagrante. À mon avis, il fait un travail similaire à celui de Stoltenberg, mais de manière plus discrète. Cela montre que l'OTAN est toujours derrière ces initiatives, soutenue par des pays comme la France et la Grande-Bretagne, qui veulent maintenant unir leurs forces. Certains rêvent d'une armée européenne, mais constatent qu'il n'y a pas aujourd'hui d'Europe capable d'avoir sa propre armée. Ils s'appuient sur le fait que l'on dépense beaucoup d'argent pour réarmer les pays, en prétendant que cela permettra de créer une armée efficace contre la Russie. À mon avis, cet argument est erroné. 27 armées ne font pas une armée européenne, et 32 encore moins. Je pense que l'OTAN doit être réformée sur le plan institutionnel : le traité et certains points doivent être révisés, mais il ne faut pas tout détruire. L'OTAN n'est pas seulement le traité de l'Atlantique Nord, c'est aussi une organisation importante : d'un point de vue militaire, sans compter la partie politique, l'OTAN est sans égal.
Aucune autre organisation internationale n'a la même capacité à mener des opérations et à trouver des ressources. La structure de l'OTAN est forte et bien organisée, avec des centres de communication, des installations satellitaires et le contrôle du ciel et des mers. Ces structures dépendent à 90% des ressources américaines, pas seulement de l'argent, comme le dit Trump, mais des installations fournies par les États-Unis. Si les États-Unis devaient se séparer complètement de l'OTAN, cela conduirait à un effondrement total. Les États-Unis n'auraient plus d'organisation à qui s'adresser ou donner des ordres sur le théâtre européen. Je constate que la Grande-Bretagne, l'Allemagne et surtout la France veulent créer une « coalition des volontaires », qui cache en réalité une volonté de former une OTAN européenne. Si les Américains ne sont pas d'accord, ils voudront faire autre chose. Je me souviens bien de l'époque où l'OTAN, qui était transatlantique, s'opposait au Pacte de Varsovie, qui était purement continental et européen.
À mon avis, ce que la Grande-Bretagne, la France, l'Allemagne et d'autres veulent créer, c'est un nouveau Pacte de Varsovie mais, cette fois, dirigé contre la Russie comme pour marquer le début d'une guerre ouverte et illimitée entre l'UE et la Russie. Lorsque nous disons « sans limites », nous voulons dire que toutes les lois et tous les accords visant à limiter les armes, en particulier les armes nucléaires, n'existeront plus. Les États-Unis se sont retirés des accords START et des accords sur les missiles de théâtre et intercontinentaux. Si l'UE crée une « coalition de volontaires » pour faire face à la Russie, elle doit reproduire ce dont l'OTAN dispose, mais sans le soutien des États-Unis pour l'infrastructure et le commandement. Cela pourrait nuire à Trump et aux États-Unis, qui ne quitteront pas l'OTAN. Le pont transatlantique est crucial pour eux, au moins pour maintenir le commandement stratégique européen.
Vous ne croyez donc pas à la possibilité que les États-Unis quittent l'OTAN?
Les États-Unis pourraient toutefois limiter leur intervention militaire dans l'OTAN tout en conservant un contrôle politique et décisionnel sur cette organisation. Avec Trump, les États-Unis pourraient perdre l'attrait qu'ils exerçaient sous d'autres présidents. L'UE espère que Trump ne durera que quelques années et qu'ensuite nous pourrons revenir à un ordre transatlantique différent et avoir un rôle à jouer en Ukraine, non seulement pour la reconstruction, mais aussi pour favoriser une intervention directe.
Si, comme vous le prétendez, l'hypothèse d'un réarmement rapide est fondamentalement irréaliste, pensez-vous que ce plan de réarmement, plutôt que d'être dirigé contre la Russie, vise à imposer une économie de guerre aux peuples européens ?
Je voudrais vous remercier de m'avoir rappelé une chose que j'ai dite il y a longtemps et qui reste valable dans la situation actuelle. Le conflit, bien que prolongé, est de nature conventionnelle. La Russie n'a pas l'intention d'utiliser des armes nucléaires, le conflit demeure de ce fait conventionnel.
Les perspectives sont une projection de ce que nous faisons dans le présent. Si nous nous préparons à la guerre contre la Russie, l'avenir sera une guerre contre la Russie : pour l'éviter, il faudrait un événement extraordinaire ou un miracle. Si l'on se prépare à la guerre, contrairement à ce que certains ont dit dans le passé, on veut la guerre.
Actuellement, certains pays de l'OTAN et de l'UE planifient une intervention militaire en Ukraine, en dehors de l'alliance, avec ceux que l'on appelle les « volontaires ». Ils disent vouloir la victoire de l'Ukraine, mais pour ce faire, ils ont besoin d'un plan de réarmement européen d'ici 2030, avec un montant hypothétique de 800 milliards d'euros pour construire des armées capables d'intervenir contre la Russie. Mais cette idée, que je considère comme une folie, est possible. Mais quelle est sa probabilité ? Nous, militaires, avons l'habitude de penser en termes de probabilités et non de possibilités. Ce qui est probable, c'est que ce plan n'a pas pour but premier de lutter contre la Russie, mais d'avoir un effet dissuasif. Toutefois, cette dissuasion ne fonctionnera pas. Il s'agit avant tout de réarmer les nations européennes, ce qui signifie créer de nouvelles industries ou moderniser les industries existantes pour produire des armes, en déplaçant la production des besoins économiques et sociaux vers les besoins militaires. Les 800 milliards prévus jusqu'en 2030 ne serviront qu'à renforcer les armées des 27 pays concernés. Connaissant un peu le fonctionnement des armées, nous nous demandons si ces fonds, en particulier ceux destinés à l'Allemagne, serviront uniquement aux armées ou également aux industries. Ils serviront probablement à bien d'autres choses.
Si l'Italie se voyait attribuer, par exemple, 100 milliards sur ces 800 milliards pour renforcer l'armée et l'envoyer en Ukraine, il faut réfléchir à ce que cela implique. Tout d'abord, 100 milliards devront être dépensés pour appeler les gens à prendre les armes. Tout le monde parle des armes, mais pas des hommes qui doivent se battre. Cet argent servira à remettre sur pied le système de mobilisation, ce qui a un coût social énorme. Historiquement, toute mobilisation débouche sur une guerre ou une révolution interne. Les milliards seront principalement consacrés aux systèmes d'armes, les avions étant les plus chers et devant être achetés aux Américains, ainsi que les chars, les missiles et tous les systèmes d'artillerie. Si nous voulons les produire nous-mêmes, cela prendra au moins dix ans, et non cinq.
Il est essentiel que ces 800 milliards soient disponibles au cours des deux prochaines années pour soutenir l'effort de guerre contre la Russie. Dans le cas contraire, le réarmement pourrait s'avérer un désastre, voire un simple renforcement psychologique. De plus, ce réarmement pourrait provoquer la Russie, qui ne peut se permettre une guerre conventionnelle avec l'Europe et pourrait répondre avec des armes nucléaires tactiques.
Vous avez affirmé que la confrontation avec la Russie serait de nature conventionnelle. Avec ces 800 milliards d'euros, dans combien de temps l'UE sera-t-elle prête à la guerre ? Pensez-vous que des hommes seront envoyés en Ukraine ?
J'ai écrit à ce sujet dans mon livre précédent, qui reste d'actualité. La guerre est dirigée contre l'Europe et les pays européens. Le réarmement est également contre l'Europe. Passer d'une économie libre à une économie de guerre ne fonctionne pas. J'ai parlé de la mobilisation, pas tant de la conscription que de la création de réserves. Nous devrions mobiliser toutes les personnes physiquement aptes âgées de 18 à 64 ans, prêtes à l'action: j'ai écrit à ce sujet dans Fatto Quotidiano.
L'Ukraine n'a pas réussi à faire de sa guerre contre la Russie une guerre populaire. Elle n'a pas su mobiliser la population. Les premiers volontaires, ceux qui se sont présentés, étaient tous politisés et extrémistes, comme le souligne une étude que j'ai citée dans un article du Fatto Quotidiano. Cette étude a été présentée par deux économistes, l'un néerlandais et l'autre finlandais.
En Ukraine, l'armée actuelle est encore principalement composée de ces volontaires politisés et idéologisés, et non de la population en général. En Europe, si nous osions proposer une nouvelle mobilisation pour la guerre ou la défense, nous ne tiendrions pas socialement. Nous ne pouvons pas nous le permettre socialement. Les ressources pour le réarmement et la guerre ne viennent pas de nulle part. Si c'était le cas, cela signifierait qu'elles n'existent pas vraiment. De nombreux économistes discutent déjà de ce problème: où trouverons-nous 800 milliards? Nous pouvons émettre 200 milliards de bons du Trésor européen, mais ce n'est que de la dette. Il n'y a pas de ressources réelles, ni sociales, ni humaines, ni de consensus pour une telle opération.
Je considère cette opération comme une forme de profit immédiat à court et moyen terme, conçu pour canaliser les ressources vers des industries qui ne visent pas à gagner contre la Russie, mais à minimiser les pertes de l'Ukraine. Cela permettra une deuxième « débauche » d'argent et de ressources lors de la reconstruction de l'Ukraine. Il s'agit d'une astuce de bureaucrates et de technocrates qui se fichent éperdument des implications humaines et sociales de leurs décisions.
Je voudrais maintenant évoquer brièvement le président du comité militaire de l'OTAN. Il s'agit actuellement d'un amiral italien, alors qu'il s'agissait auparavant d'un amiral néerlandais nommé Bauer. Fin 2024, Bauer a participé à un forum avec plusieurs hommes d'affaires. L'amiral Bauer a parlé de la nécessité pour l'Ukraine de gagner contre la Russie et a déclaré, de manière presque brutale, que pour les dix prochaines années, il est bon d'investir dans les armes, car c'est une bonne affaire. Il a ajouté que, même si cela peut paraître déplaisant à dire, il y aura des morts derrière ces opérations, mais que, du point de vue de l'investissement, c'est rentable. Deux mois plus tard, von der Leyen disait la même chose, proposant de constituer un trésor de 800 milliards pour faire un bon investissement afin de faire un bon profit.
Que doit faire l'Italie, manifestement déchirée dans son choix entre le père américain et la mère européenne ?
L'Italie est orpheline. Elle n'a pas de « père » américain, même si j'aime le peuple américain, que j'ai vécu aux États-Unis et que j'ai pris trente kilos en mangeant leur nourriture. Les États-Unis n'ont jamais été le père de personne; ils n'ont jamais pensé à l'avenir de leurs enfants, mais seulement à celui de leurs serviteurs. Nous ne pouvons pas revenir à cette situation. Si je devais conseiller quelqu'un, je dirais d'éviter de nous mettre à genoux sur la question des droits de douane. Trump cherche à humilier ses interlocuteurs, même s'il dit s'entendre avec Poutine. Il veut aussi humilier Starmer, à qui il a accordé des droits de 10% pour cette seule raison.
L'Italie doit se réorganiser pour exploiter ses ressources.
Nous devons regarder au-delà des États-Unis et considérer le reste du monde, qui représente 80% du marché mondial. Nous ne pouvons pas dépendre d'un seul client riche, mais devons explorer d'autres voies.
Nous parlons d'un « dos droit », mais attention: un dos droit peut aussi être courbé à 90°. Nous devons négocier techniquement, en remettant en cause ce qui ne va pas. L'Italie a de nombreuses cartes à jouer, comme l'OTAN, où nous avons un amiral qui peut faire beaucoup s'il est soutenu par un gouvernement aux idées claires.
Nous devons ouvrir le marché à d'autres réalités, en laissant de côté les idéologies et les projets d'exploitation. Nous pouvons exercer une influence en Afrique et au Moyen-Orient, en nous désengageant de l'idéologie américaine. Lorsque nous nous sommes lancés dans la guerre en Ukraine, nous l'avons fait avec le régime de Biden, plus axé sur l'énergie de guerre que celui de Trump. Nous devons servir les intérêts nationaux, et pas seulement suivre les États-Unis.
Les tarifs douaniers ne concernent pas seulement les nations, mais aussi les industries. Politiquement, nous ne pouvons pas nous abaisser au niveau du marchandage. L'Italie doit également commencer à se faire entendre en Europe. L'Union européenne et l'OTAN ont accueilli des pays ayant des ambitions contre la Russie, mais nous, comme nous l'entendons souvent, n'avons jamais été en guerre avec la Russie. Cependant, nous participons à cette aventure pour soutenir une intervention armée, mais nous devons être clairs sur ce que nous voulons.
L'intervention armée dont on parle est une transition vers une trêve ou une paix négociée. En réalité, on veut mettre les forces européennes en contact direct avec la Russie, un piège dans lequel Zelensky nous a poussés. Nous ne pouvons pas nous permettre de mettre notre tête dans les bois de la guillotine. Nous devons avoir le "dos droit" et ne pas céder à ce que nous imposent les États-Unis ou l'Angleterre, qui poursuit son dessein impérial, surtout en Europe du Nord. Nous, Italiens, dans le sud de l'Europe, devons cesser d'apporter de l'eau au moulin de ceux qui ne veulent pas de nous et qui nous haïssent.
16:05 Publié dans Actualité, Affaires européennes, Entretiens | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : entretien, fabio mini, italie, otan, politique internationale, europe, affaires européennes | |
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A propos de la mort de Bergoglio
A propos de la mort de Bergoglio
par Andrea Zhok
Source: https://www.sinistrainrete.info/articoli-brevi/30343-andr...
Les vingt dernières années de pontificat ont, je crois, brossé un tableau dans lequel le déclin de l'influence internationale de la papauté de Rome s'est révélé une évidence.
Les deux derniers pontifes ont tenté des voies complémentaires, en partie opposées, pour redonner une place centrale à l'Église catholique.
Le pape Benoît XVI, au cours de son pontificat de huit ans (2005-2013), a tenté de suivre une voie de consolidation doctrinale avec la restauration de certains facteurs traditionnels. Sur cette voie « traditionaliste », il s'est heurté à une telle résistance dans l'entourage du Vatican qu'il a pris la décision sans précédent d'abandonner le trône papal à vie. Le geste de Benoît XVI s'est voulu emblématique, admonitif.
La référence au fondateur du principal ordre monastique, saint Benoît, a été conçue par Ratzinger comme un souhait et une inspiration pour une « renaissance » du monde occidental, tout comme les monastères bénédictins en avaient été la matrice après l'effondrement de l'empire romain (la déposition du dernier empereur occidental, Romulus Augustulus, a eu lieu en 473 après J.-C., la composition de la règle bénédictine a eu lieu en 525 après J.-C.). Cet espoir et cette inspiration de Benoit XVI ont échoué. Les papes, comme les souverains du passé, ne règnent jamais seuls, mais ont besoin d'un environnement fonctionnel, d'une « cour », d'un « appareil » efficace adhérant à la « mission », pour pouvoir traduire leur magistère dans les coutumes et les institutions. Et cet environnement s'est avéré inadéquat pour traduire le magistère de Ratzinger.
Le pape Bergoglio était monté sur le trône papal en se référant à une autre figure emblématique, moins décisive sur le plan institutionnel, mais puissante sur le plan idéel : Saint François d'Assise.
La figure de François, ascétique, mystique, avec des traits presque panthéistes, exprimait un souhait et une inspiration différents de ceux de Benoît, mais connotait également un renouveau radical. L'orientation idéale du pape François visait à soutenir les humbles, les « perdants » du monde moderne, il voulait critiquer l'exploitation de l'homme sur l'homme et de l'homme sur la nature.
L'encyclique « Laudato Si » reste un texte exemplaire, une encyclique d'une grande puissance d'analyse et d'une rare profondeur de message. On cite souvent Laudato Si en la qualifiant d'« encyclique écologique », comme s'il s'agissait d'une des nombreuses manifestations de « greenwashing » qui entachent le discours public actuel. Mais celui qui prend la peine de le lire y trouve une extraordinaire richesse analytique, une intégration du thème de l'environnement dans celui de l'exploitation économique générale, une critique des mécanismes du capital, de la domination de l'économie financière sur l'économie réelle, de la domination technocratique, une critique des prétendues « solutions de marché » à la dégradation écologique (telles que les « crédits carbone »), et bien d'autres choses encore.
Mais au-delà des espoirs initiaux, les douze années de pontificat de Bergoglio ont à nouveau montré l'énorme difficulté qu'éprouve la papauté d'aujourd'hui à proposer avec succès un message autonome.
Les traits du magistère de Bergoglio qui ont été repris et promus sont tous et seulement ces quelques traits de « libéralisation des mœurs “ (ex : les ouvertures LGBT avec la lettre au Père Martin) et d'amplification du récit courant (ex : l'adhésion à la lecture dominante sur le Co vid) qui correspondaient à une image de ” modernisme » stéréotypé. Les nombreuses autres positions inconfortables sur le capitalisme financier ou les questions internationales, d'Israël à la Libye, de l'Iran à la Russie, ont été mises en sourdine, parfois même censurées.
L'impression générale est que les deux derniers pontificats ont montré deux tentatives - intellectuellement solides et spirituellement élevées - de redonner une place centrale au catholicisme romain et à son message historique.
La première tentative, aux connotations plus « conservatrices », s'est rapidement heurtée à la paralysie.
La seconde tentative, à connotation plus « progressiste », a été réduite à une impuissance substantielle dans tous les domaines où elle ne ramait pas dans le sens du courant - où « courant » désigne les modes idéologiques favorisées par les oligarchies financières anglo-américaines.
On peut tout dire de Ratzinger et de Bergoglio, mais certainement pas qu'ils ont été des papes manquant d'inspiration, de préparation ou de caractère. Loin de là.
Pourtant, il est difficile de dire que, deux décennies plus tard, le statut, idéal et opérationnel, du christianisme catholique a gagné en centralité ou en autorité.
Personne ne sait ce que nous réserve la prochaine fumée blanche du conclave, mais je pense qu'il est sage de ne pas trop attendre.
Les conditions historiques ne semblent pas être telles qu'elles permettent à un nouveau pontife, quelles que soient ses éventuelles qualités préclariques, d'inverser une tendance stagnante. Et le problème n'est pas que « le pape n'a pas de divisions militaires », comme l'a dit Staline à Jalta : les « leviers spirituels » peuvent faire des choses extraordinaires.
Mais les leviers spirituels sont cette « force faible » qui ne fonctionne que lorsqu'elle repose sur un point d'appui spirituel à l'intérieur des personnes. Et aujourd'hui, je ne parierais pas sur la diffusion d'un tel point d'appui, même parmi ceux qui habitent les salles des palais du Vatican....
14:52 Publié dans Actualité | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : papauté, actualité, pape françois, catholicisme, religion, vatican | |
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Le moteur logistique du développement économique de l'Asie. L'Italie choisit les armes et les tergiversations
Le moteur logistique du développement économique de l'Asie. L'Italie choisit les armes et les tergiversations
Enrico Toselli
Source: https://electomagazine.it/la-logistica-motore-dello-svilu...
L'INSTC, le corridor de transport international nord-sud, est le système logistique actuellement en construction entre l'Inde, l'Iran et la Russie. Il ne s'agit pas d'une alternative en concurrence avec la Route de la Soie chinoise, mais d'une alternative en complément du projet de Pékin. Parce que l'Asie bouge, et bouge vite. Elle sait qu'un système logistique efficace est la base d'un développement économique sain et durable.
Moscou, New Delhi et Téhéran construisent donc des ports et des voies ferrées pour créer un système qui acheminera les marchandises au cœur de l'Europe avec une économie de 30% par rapport au passage par le canal de Suez et ce, avec un temps de trajet encore réduit. Mais la destination finale ne sera pas uniquement l'Europe. En effet, le gaz russe atteindra également le Pakistan d'une part et, via l'Iran, l'Afrique, d'autre part. Il en va de même pour les marchandises.
Deux aspects sont à noter. L'Inde et le Pakistan ne sont pas des pays alliés, c'est le moins que l'on puisse dire, mais le projet indo-russo-iranien concerne également Islamabad. Il en va de même pour l'Afrique, où le corridor INSTC utilisera également les chemins de fer construits par la Chine. Preuve concrète que les accords économiques et commerciaux peuvent aussi surmonter les problèmes politiques et les rivalités historiques.
Par ailleurs, l'objectif d'atteindre l'Europe par le réseau ferroviaire va également dans ce sens. Tant pour le corridor INSTC que pour la route de la soie. Il est clair que les pays habitués à penser à moyen et long terme peuvent se ficher éperdument de la présence momentanée d'illuminés bellicistes à Bruxelles. Les euro-fous passent, le commerce international reste. Marco Polo devrait être étudié plus attentivement, de même qu'Alexandre le Grand. L'ignorance des Euro-fous, elle, est abyssale.
Il y a cependant un autre aspect qui pourrait inquiéter l'Italie, si elle avait un vrai ministre des affaires étrangères et un bon ministre qui s'occuperait des entreprises italiennes. Les deux projets logistiques semblent ignorer la Méditerranée et être des alternatives à Suez. Ce n'est pas tout à fait le cas. En effet, c'est Erdogan qui protège la Méditerranée en négociant avec Pékin et Moscou. Et Poutine est également engagé dans un dialogue avec l'Azerbaïdjan, un pays lié à la Turquie. Le grand système logistique asiatique arrivera donc aussi, directement et à terme, sur les rives de la Méditerranée.
Il s'y heurtera aux inefficacités italiennes. Autoroutes encombrées, chemins de fer avec des retards indécents, délais ridicules pour la construction de nouvelles lignes ferroviaires, réduction du service entre Turin et Venise-Trieste, c'est-à-dire le long de la ligne qui devrait être la continuation de celle qui fait Turin-Lyon.
Mais l'argent sert à acheter des armes et à satisfaire Crosetto.
14:17 Publié dans Actualité, Affaires européennes, Eurasisme, Géopolitique | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : politique internationale, géopolitique, actualité, europe, affaires européennes, instc | |
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jeudi, 01 mai 2025
Le camarade Canfora rêve d'une droite sociale péroniste et d'une gauche courageuse
Le camarade Canfora rêve d'une droite sociale péroniste et d'une gauche courageuse
Augusto Grandi
Source: https://electomagazine.it/il-compagno-canfora-sogna-la-de...
« Ce que fait Israël à Gaza est un génocide ». « L'axe franco-anglais veut faire la guerre à la Russie : le risque est très élevé ». Luciano Canfora, historien, journaliste, communiste et internationaliste, a fait ces dernières semaines des déclarations qui ont passablement embarrassé ses collègues europhiles face aux europhobes de Bruxelles et aux commanditaires de Tel-Aviv.
Mais comme l'âge avancé permet aussi de franchir les barrières de toutes sortes, le camarade Canfora (photo) s'est lancé dans des déclarations également embarrassantes pour la droite néo-méloniste. Dans une interview intelligente accordée à Michele De Feudis dans la Gazzetta del Mezzogiorno, Canfora affirme que « si la droite sociale n'était pas fascinée par l'atlantisme, elle devrait se proclamer péroniste et rencontrer la vraie gauche, qui se fait rare ici ».
Sacro-sainte déclaration. Toute droite sociale, par nature, DOIT être péroniste. Mais il y a un problème. Car, en fait, le péronisme était la seule forme de fascisme réalisée dans le monde en dehors de l'Italie. Avec toutes les différences internes, le fascisme avait des composantes de droite, de gauche, catholiques, laïques, étatistes, anarchistes, syndicalistes.
Mais qui explique aux camarades de Canfora qu'il est bon et juste de s'identifier à une force politique qualifiée de « fasciste » par le même intello de gauche qui rejette le peuple et toute mesure en faveur de ceux qui ne font pas partie du système de pouvoir ?
Et si Fra' Toianni s'énerve en pensant à Juan Domingo Peron et Evita ? Et si l'Anpi se met en colère en pensant au nombre d'Italiens et d'Allemands qui se sont réfugiés dans l'Argentine péroniste pour échapper aux massacres de l'après-guerre ?
Canfora rêve d'une rencontre entre la droite sociale et la vraie gauche au nom du péronisme. Mais Mélenchon et Sahra Wagenknecht ont montré qu'ils n'avaient pas la capacité, et encore moins le courage, de s'engager dans une telle voie.
14:14 Publié dans Actualité | Lien permanent | Commentaires (1) | Tags : péronisme, luciano canfora, italie, droite péroniste | |
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