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samedi, 13 décembre 2025

La logique cynique de la stratégie de sécurité des États-Unis – L'Europe paie la facture

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La logique cynique de la stratégie de sécurité des États-Unis – L'Europe paie la facture

Markku Siira

Source: https://geopolarium.com/2025/12/09/yhdysvaltojen-turvalli...

La nouvelle stratégie nationale de sécurité des États-Unis (National Security Strategy, novembre 2025) ne modifie pas les grandes lignes de la politique étrangère et de sécurité, mais elle abandonne leur déguisement idéalisé et exprime les choses de manière exceptionnellement directe. La rhétorique précédente, qui prônait la diffusion mondiale de la démocratie et les interventions, a été remplacée par une politique réaliste froide, qui place la souveraineté, la puissance économique et les intérêts américains au centre.

Le message principal est simple: sous Trump, les États-Unis se concentrent principalement sur le renforcement de leur puissance, de leur économie et consolident leur contrôle sur les régions voisines, révélant ainsi une version moderne de la doctrine Monroe. L’ordre mondial ne sert Washington que dans la mesure où il soutient ces priorités internes. La stratégie décrit le monde comme un jeu de somme zéro, quoique compétitif, dans lequel les alliés ne sont utiles que s’ils prennent leur part — de préférence celle que les États-Unis eux-mêmes ont fixée.

La menace principale, et en même temps le défi, se trouve dans la région indo-pacifique. La Chine est clairement désignée comme le principal adversaire, dont la montée économique et militaire menace la position de leader mondial de l’Amérique. Selon la stratégie, la réponse n’est pas une confrontation militaire directe, mais une dissuasion systématique: strangulation technologique, restrictions à l’exportation, renforcement du réseau d’alliés et rapatriement des chaînes de valeur critiques.

Par ailleurs, la stratégie met en garde contre la propagation de l’influence chinoise en Amérique du Nord, en Afrique, et justifie un contrôle plus strict de l’Amérique sur son propre continent. La sécurité aux frontières, les cartels de drogue et l’ingérence étrangère sont considérés comme des questions fondamentales relevant de la sécurité nationale. Tout cela signifie un déplacement clair des ressources vers le Pacifique et vers l'arrière-cour des États-Unis, hors d’Europe et du Moyen-Orient.

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L’Europe est traitée de manière ferme mais calculée. Le continent est décrit comme souffrant d’une démographie déclinante, d’une immigration incontrôlable, de divisions internes et de dépenses de défense chroniquement faibles. Le document insiste sur le fait que l’Europe doit désormais assumer la principale responsabilité de sa propre sécurité. Cela implique la réalisation de l’objectif de dépenses militaires de 5% du PIB d’ici 2035, ainsi que la prise en charge principale du financement et des garanties de sécurité pour la guerre en Ukraine.

Voici le cœur cynique de la stratégie: les États-Unis créent délibérément une atmosphère d’incertitude pour amener l’Europe à accepter ce fardeau économique historique. La menace de réduire le soutien de l’OTAN et de souligner la faiblesse européenne obligent les Européens à réduire leurs services publics pour financer un conflit qui sert la grande stratégie des États-Unis. Une contradiction flagrante renforce cette manipulation: les actions américaines, telles que le rapatriement des chaînes de valeur et la compétition énergétique, sape en même temps l’économie européenne, qui doit supporter ces énormes dépenses militaires.

Les États-Unis proposent donc à l’Europe une position encore plus subordonnée qu'auparavant dans le système d’alliances. L’objectif est de geler le conflit ukrainien et de clouer la Russie à la frontière, faisant de l’Europe une zone tampon géostratégique. Parallèlement, les Etats-Unis concentreront leurs ressources militaires et économiques principalement sur la Chine, laissant aux alliés une simple protection nucléaire formelle. Les coûts réels de la gestion du conflit et de la défense européenne sont transférés entièrement à Bruxelles, Berlin et Paris.

Le plus grand point faible de cette nouvelle stratégie est sa myopie et ses contradictions. L’Amérique de Trump veut se retirer du rôle de policier mondial, tout en conservant le droit de fixer les règles. Cette attitude de leadership sans responsabilité, cette vision transactionnelle des alliés et cette mentalité de somme zéro affaiblissent à long terme les réseaux d’alliances sur lesquels repose l’influence américaine. Si la coopération se réduit à un accord de partage des coûts, la loyauté s’évanouit. Une realpolitik trop froide peut se retourner contre elle: elle engendre rancune et éloignement stratégique, affaiblissant ainsi la position des États-Unis.

Les dirigeants et citoyens européens peuvent-ils voir au-delà de la rhétorique superficielle de l’administration Trump? Le but est que l’Europe supporte les coûts de cette mise en scène géopolitique contre la Russie, alors que Washington se concentre principalement sur son principal adversaire, la Chine. Si cela n’est pas compris et si cela n’est pas abordé politiquement, l’Europe pourrait se réveiller dans les années 2030 dans une situation où elle aurait sacrifié son économie, son avenir et ses réserves énergétiques à un conflit qui n’a jamais été dans ses intérêts. À ce moment-là, ceux qui paieront la facture constateront que le mantra « America First » signifiait en réalité « Europe Last ».

vendredi, 12 décembre 2025

Russie et Inde: partenariat stratégique malgré la pression de l’Occident

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Russie et Inde: partenariat stratégique malgré la pression de l’Occident

Milana Gumba 

Du 4 au 5 décembre, le président russe Vladimir Poutine s’est rendu en Inde pour une visite officielle. La dernière visite d’un chef d’État en Inde remonte à une période précédant le début de l’opération spéciale, ce qui donne à cette visite actuelle une dimension historique. Des diplomates des pays de l’OTAN ont accusé la Russie de violation du droit international et ont formulé de nombreuses critiques à l’encontre du Kremlin. La visite du président russe Vladimir Poutine en Inde a secoué certains pays occidentaux — cela leur a envoyé un signal sur la fin de l’ère du monde unipolaire. L’éminent homme politique indien Ram Madhav a, quant à lui, décrit Vladimir Poutine par la phrase suivante: «on peut l’aimer ou le détester, mais on ne peut l’ignorer». Il l’a également qualifié de «chef d’État inébranlable». 

Les relations russo-indiennes sont traditionnellement caractérisées comme un partenariat stratégique privilégié, et les visites de haut niveau, notamment celle du président russe en Inde, revêtent toujours une grande importance pour les deux pays. 

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Aperçu des axes de coopération et des projets prospectifs: 

Coopération militaire:

L’Inde demeure le plus grand acheteur d’armements et de matériel militaire russes. La coopération inclut la livraison, la production conjointe (par exemple, les missiles Brahmos - photo), le transfert de technologies, ainsi que la formation des militaires indiens. De nouveaux contrats pour la fourniture et la production sous licence sont en discussion.

L’approfondissement de la localisation de la production en Inde dans le cadre du programme « Made in India », le développement de nouveaux systèmes d’armement, et l’expansion de la coopération militaro-technique dans la maintenance et la modernisation du matériel existant. 

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Énergie :

La Russie est l’un des plus importants fournisseurs de pétrole et de produits pétroliers pour l’Inde. Le secteur nucléaire connaît un développement actif — la technologie russe et la participation à la construction de la centrale de Kudankulam (photo) en sont un exemple marquant.

Perspectives : augmentation des volumes d’exportation de pétrole et de gaz, développement de la coopération dans le domaine de l’énergie nucléaire civile (construction de nouvelles unités), développement de projets dans les énergies renouvelables, ainsi qu’un approfondissement de la collaboration dans l’exploration d’hydrocarbures. 

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Commerce et économie :

Le volume des échanges bilatéraux ne cesse de croître, bien qu’un déséquilibre persiste. On travaille activement à la transition vers des monnaies nationales (roupie et rouble) dans les règlements pour réduire la dépendance au dollar.

Diversification de la gamme des produits, augmentation des investissements mutuels, création d’entreprises communes dans des secteurs clés, développement du commerce électronique, simplification des procédures douanières. 

Transport et logistique :

Promotion active du corridor de transport international « Nord-Sud » (ICT Nord-Sud), qui réduira considérablement le temps et le coût de livraison des marchandises entre la Russie, l’Inde, l’Iran et d’autres pays de la région.

Achèvement et modernisation des infrastructures du corridor, développement de lignes maritimes directes, optimisation des chaînes logistiques. 

Coopération dans les formats multilatéraux :

La Russie et l’Inde collaborent activement dans des organisations telles que BRICS, SCO, G20, ce qui favorise la coordination de leurs positions sur les questions internationales actuelles.

Perspectives : renforcer le rôle de ces organisations, coopérer pour façonner un ordre mondial multipolaire, collaborer sur la sécurité et la stabilité régionales. 

Comme l’a conclu Madhav, le voyage de Poutine à New Delhi restera dans les mémoires comme un message puissant au monde sur la fin de l’ère mono-hégémonique. Une telle démarche du président russe montre que l’ère de la multipolarité authentique commence. De plus, cette visite en Inde a été un signe de l’intolérance de Poutine et de la Russie envers les doubles standards dans les relations internationales. 

Les visites du leader russe en Inde visent toujours à renforcer davantage le partenariat stratégique, à diversifier la coopération et à parvenir à des accords concrets. Malgré les défis mondiaux, les deux pays montrent leur engagement à approfondir leurs liens, ce qui se traduit par une stabilité dans les contacts au plus haut niveau et par le développement dynamique de projets dans de nombreux secteurs clés. Les perspectives de coopération restent vastes, et ses résultats contribuent au développement des économies des deux pays ainsi qu’au renforcement de leur position sur la scène internationale. 

Contexte général de la critique occidentale: 

La coopération russo-indienne se déroule dans un contexte de critique accrue de la part des pays occidentaux, en particulier les États-Unis et l’UE, surtout depuis le début du conflit en Ukraine. 

Position de l’Occident:

Accusations de soutien à la Russie: les pays occidentaux considèrent la poursuite de la coopération économique et militaro-technique de l’Inde avec la Russie comme un soutien indirect à l’économie russe, et par conséquent à ses actions militaires.

Régime de sanctions: on invite l’Inde à rejoindre les sanctions occidentales contre la Russie et à réduire ses échanges commerciaux, notamment dans les secteurs de l’énergie et de la défense. On mentionne le risque de «sanctions secondaires» pour les entreprises travaillant avec des structures russes sous sanctions. 

Arguments éthiques et de valeurs: l’Occident fait aussi appel aux «valeurs démocratiques» et au droit international, en exhortant l’Inde à adopter une position plus ferme envers la Russie. 

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Position de l’Inde:

L’Inde maintient une politique de non-alignement et d’autonomie stratégique. Sa politique étrangère repose sur la défense des intérêts nationaux.

Pour l’Inde, en tant que grande économie en développement, assurer la sécurité énergétique est une priorité. Le pétrole russe est proposé à des prix compétitifs, ce qui est crucial pour les consommateurs et l’industrie indiens. 

L’Inde a d’importants besoins en défense, notamment face à la tension avec le Pakistan et la Chine. La Russie est un fournisseur éprouvé et fiable d’armements, ainsi qu’un partenaire dans le développement de nouveaux systèmes, ce qui est essentiel pour la sécurité indienne. Passer à de nouveaux fournisseurs serait extrêmement difficile, coûteux et long. 

L’Inde partage avec la Russie la vision d’un ordre mondial multipolaire, sans domination d’une ou plusieurs puissances. 

L’Inde cherche à maintenir le dialogue avec toutes les parties, y compris l’Occident. Elle participe à des initiatives occidentales telles que le Quad (dialogue quadripartite sur la sécurité), tout en approfondissant ses liens avec la Russie. 

Position de la Russie:

«Le pivot vers l’Est»: dans un contexte de sanctions occidentales et de confrontation, la Russie réoriente activement sa politique extérieure et ses relations économiques vers les pays asiatiques, en premier lieu la Chine et l’Inde.

L’Inde est considérée comme un partenaire clé dans la construction d’un nouvel ordre mondial plus multipolaire, moins soumis à la dictature de l’Occident. 

En somme, malgré la pression occidentale, la Russie et l’Inde continuent de renforcer leurs liens, en se fondant sur leurs intérêts stratégiques mutuels et la perspective à long terme de la création d’un nouvel ordre mondial. L’Inde jongle habilement entre ses liens traditionnels avec la Russie et ses relations en développement avec l’Occident.

Une “Nouvelle” Doctrine de Sécurité Nationale des États-Unis

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Une “Nouvelle” Doctrine de Sécurité Nationale des États-Unis

Raphael Machado

Source: https://www.facebook.com/profile.php?id=100069794930562

Début décembre 2025, la Maison Blanche a publié une nouvelle « Stratégie de Sécurité Nationale », un document dans lequel le gouvernement américain présente ses orientations concernant la sécurité nationale. Dans d’autres contextes, nous avons déjà souligné que la conception américaine de la « sécurité nationale » est unique au monde, étant la seule à englober des événements et des situations qui se déroulent à des milliers de kilomètres de distance.

En général, les conceptions de la sécurité nationale concernent essentiellement les potentiels internes et les risques représentés par l’environnement de chaque pays, incluant au maximum l’accès aux ressources importées considérées comme vitales pour l’économie et la défense.

Traditionnellement, ce n’est pas ainsi que la « sécurité nationale » des États-Unis se définit. Celle-ci est vue comme ayant une portée planétaire, de sorte que des événements dans les recoins de l’Afrique, de l’Asie du Sud-Est ou de l’Asie centrale ont toujours pu être réinterprétés comme affectant la « sécurité nationale » des États-Unis – du moins depuis la fin de la Deuxième Guerre mondiale jusqu’à récemment.

Cette nouvelle doctrine de sécurité nationale apporte une différence significative: l’ampleur de la sécurité nationale des États-Unis est «réduite» à l'«hémisphère occidental», en particulier aux Amériques — même si certains intérêts sont maintenus dans des régions du monde où il y a des ressources stratégiques.

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Bonne nouvelle pour la majorité du reste du monde, mauvaise nouvelle pour les pays ibéro-américains.

Ici, on pourrait dire que le document fait une allusion indirecte ou métaphorique à la Doctrine Monroe. Non. Le document a la vertu d’annoncer honnêtement et ouvertement la reprise de la Doctrine Monroe, avec l’ajout d’un corollaire de Trump. Si la version originale de la Doctrine Monroe était principalement dirigée contre la présence espagnole dans les Amériques, et dans une moindre mesure contre la présence d’autres pays européens, sa mise à jour est clairement orientée contre les alliances et investissements russo-chinois dans la région.

Le document admet l’impossibilité de forcer la rupture de toutes ces connexions, en particulier dans le cas de pays qui ont déjà établi des relations profondes et sont hostiles aux États-Unis, mais Washington pense qu’il est possible de convaincre tous les autres pays des Amériques que les accords avec ces partenaires, même s’ils sont moins coûteux, impliqueraient des «coûts cachés» tels que l’espionnage, la dette, etc.

Le problème avec ce genre de narration est que beaucoup de pays de la région sont conscients que les «coûts cachés», lors de relations avec les États-Unis, sont, au mieux, les mêmes. Les scandales d’«écoutes» dirigées contre des cabinets présidentiels ibéro-américains restent encore frais dans la mémoire régionale, tout comme l’historique d’endettement des pays de la région avec le FMI, majoritairement dominé et influencé par les États-Unis.

Il est maintenant clair que les États-Unis utiliseront un ensemble de narrations à la légitimité douteuse pour faire pression en faveur d’une «contribution» à la «lutte contre le narcoterrorisme», par exemple, mais leur véritable objectif sera de garantir l’alignement géopolitique et la reconnaissance de l’hégémonie hémisphérique des États-Unis.

Tout cela n’est pas une nouveauté, puisque dans de nombreux autres articles précédents, j’ai déjà abordé ce sujet.

Dans un article de novembre 2024, où je commente l’initiative Belt & Road en Amérique du Sud, je notais ce qui suit:

« La Doctrine Monroe, qui a fêté ses 200 ans en 2023, était cette directive idéologique qui poussait les États-Unis à éloigner l’Europe de l’Amérique ibérique, afin d’être la seule grande puissance à monopoliser et exercer une influence sur la région. Mais aujourd’hui, la “menace” ressentie par Washington ne provient pas forcément de Paris, Berlin ou Madrid, ou même de Londres, mais de Moscou et Pékin.

C’est autant en raison du renforcement des relations russo-chinoises sur le continent qu’en raison de l’affaiblissement de l’hégémonie unipolaire des États-Unis — plus ressentie en Eurasie, au Moyen-Orient et en Afrique — que les États-Unis entendent se déployer dans une nouvelle impulsion à la Monroe en Amérique centrale et du Sud. Il s’agit d’essayer d’expulser l’«influence» russo-chinoise tout en s’assurant que la seule puissance américaine sera les États-Unis eux-mêmes — pas de puissances extraterritoriales, ni l’ascension d’un quelconque pays américain en tant que puissance. »

En réalité, cela était déjà évident avant le début du nouveau mandat de Donald Trump. Celui-ci, notamment à travers ce document de la Stratégie de Sécurité Nationale, se contente d’expliciter ce qui était implicite depuis 10 ans, puisque depuis le mandat de Barack Obama, on peut identifier une reprise d’un intérêt plus attentif de Washington à l’égard de l’Amérique ibérique. C’est à partir du gouvernement Obama que se multiplient rapidement les cas d’ingérence des États-Unis dans la région (alors que, en contrepartie, le gouvernement Bush se caractérisait par sa focalisation sur le Moyen-Orient et l’expansion rapide de l’OTAN).

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Maintenant, j’ai mentionné plus tôt dans ce texte que tout cela était une «bonne nouvelle pour le reste du monde», même si ce ne l’était pas pour les pays ibéro-américains. «Bonne nouvelle», car le texte de la Maison Blanche indique une reconnaissance de l’inévitabilité de la multipolarité. La nouvelle doctrine américaine critique le caractère géographiquement illimité et indéterminé des intérêts extérieurs dits «stratégiques» des États-Unis. Elle met en évidence un gaspillage de ressources et un manque de concentration, qui ne feraient que nuire à l’atteinte d’objectifs réalistes pour Washington.

En ce sens, implicitement, même si les États-Unis insistent sur une prétention à «aider l’Europe», à «garantir l’accès au pétrole au Moyen-Orient» et à stabiliser la «question taïwanaise», ils reconnaissent, au moins de façon liminaire, l’existence de « zones d’influence » d’autres puissances — mais pas dans les Amériques.

Une répartition du monde selon des lignes multipolaires — un nouveau Yalta — dirigée par les États-Unis ne représenterait qu’une multipolarité incomplète — plus une «tripolarité» sino-russe-américaine qu’autre chose. Le texte est explicite en situant les Amériques dans leur globalité comme subordonnées aux États-Unis, l’Europe comme un «partenaire junior» de fiabilité douteuse, le Moyen-Orient décentralisé au maximum pour le bénéfice d’Israël, et l’Afrique subsaharienne comme un espace de compétition pour les investissements.

Il ne s’agit pas seulement de la Chine et de la Russie en Amérique ibérique, mais aussi d’une interdiction de l’émergence d’une puissance rivale des États-Unis «au sud du Río Grande». D’où aussi l’insistance à garantir l’alignement du Brésil, principal candidat ibéro-américain à devenir un pôle géopolitique autonome.

L'élite transatlantique et l'Europe sous influence américaine: Nature du pouvoir et mécanismes de l'assujettissement

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L'élite transatlantique et l'Europe sous influence américaine: Nature du pouvoir et mécanismes de l'assujettissement

Markku Siira

Source: https://geopolarium.com/2025/12/10/transatlanttinen-eliit...

Selon la théorie classique de l’élite, aucune société n’a jamais changé de classe dirigeante par l’initiative des masses. Vilfredo Pareto, Gaetano Mosca et Robert Michels ont démontré, il y a plus d’un siècle, que le pouvoir reste toujours entre les mains d’une minorité organisée, et que le renouvellement de l’élite se produit soit par déclin et corruption, soit par la montée au pouvoir d’une élite concurrente — jamais par un mouvement populaire spontané.

Ce fait brut est particulièrement révélateur lorsqu’on considère la position géopolitique actuelle de l’Union européenne: le continent est pratiquement un vassal des États-Unis, avec une élite politique, économique et militaire presque entièrement orientée vers le "transatlantisme".

L’élite politique européenne — commissaires, présidents, premiers ministres, ministres des Affaires étrangères et de la Défense — est formée et mise en réseau dans un environnement transatlantique (atlantiste). La majorité d’entre eux ont étudié dans des universités de premier plan aux États-Unis ou en Grande-Bretagne, ont participé à des événements de l'Atlantic Council, de Chatham House, du German Marshall Fund ou de l’Aspen Institute, et ont reçu un impulsion décisive pour leur carrière par le biais de fondations et think tanks américains et britanniques. Londres sert de nœud européen dans ce réseau, avec Washington comme cœur stratégique.

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L’élite économique — dirigeants des grandes banques, PDG de multinationales et fonds d’investissement — est encore plus étroitement liée à Wall Street: les entreprises européennes recherchent des cotations à New York, les fonds de pension investissent dans les actions et obligations américaines, et les banques centrales détiennent des réserves en dollars. Les véritables maîtres du jeu — grands investisseurs comme BlackRock, Vanguard et State Street — détiennent des parts cruciales dans les sociétés cotées en Europe et aux États-Unis, ce qui lie étroitement le destin économique des deux continents.

Cette soumission se manifeste de façon encore plus évidente dans le domaine de la sécurité. Les budgets de défense des principales nations européennes dépendent des plans de l’OTAN, dont la chaîne de commandement passe par Washington. Depuis 2022, l’Europe a pratiquement abandonné sa capacité de décision stratégique concernant la guerre en Ukraine au profit de l’axe formé par les États-Unis et la Grande-Bretagne.

Le Royaume-Uni, qui n’est plus membre de l’UE, a conservé et renforcé son influence sur le continent européen via le lien transatlantique: la City de Londres est la sentinelle financière européenne du système de financement occidental, et les services de renseignement et militaires britanniques opèrent en parfaite synergie avec la CIA et le Pentagone. Lorsqu’il s’agit de la Pologne, des pays baltes ou de la Scandinavie qui réclament la victoire et une livraison d’armes sans fin plutôt que la paix, ce ne sont pas Varsovie ou Tallinn qui dictent le ton, mais Londres et Washington — et les dirigeants européens répètent docilement ce qu’ils entendent.

Ce dispositif n’est pas le fruit du hasard. L’élite transatlantique a réussi à éliminer ou marginaliser toutes les autres options. La tradition gaullienne française est morte avec Macron (et, avant lui, avec Sarközy, ndt), l’Ostpolitik allemande s’est effondrée après les explosions qui ont détruit les gazoducs Nord Stream, et la politique méditerranéenne italienne s’est soumise à la domination du bloc sud de l’OTAN. Même la Hongrie et la Slovaquie, qui tentent de suivre une ligne plus indépendante, restent isolées, faute d’élite économique et militaire nationale capable de concurrencer le bloc européen dominant.

Depuis 2014, Washington et Londres construisent systématiquement un récit pour les élites européennes selon lequel la Russie représente une menace existentielle pour tout l’ordre occidental. Ce récit est efficace car il est directement lié à la survie même de l’élite: une victoire ou un succès russe détruirait la légitimité de l’ordre transatlantique, la légitimité de l’existence de l’OTAN, et la position de leadership des États-Unis en Europe.

C’est pourquoi la posture anti-russe a été acceptée à l’unanimité, même avant l’opération militaire de 2022: c’était une manière moins coûteuse d’afficher sa loyauté envers Washington que de renforcer sa propre défense. Par ailleurs, l’élite économique a bénéficié de la substitution du gaz russe par du GNL américain et de nouveaux contrats d’armement.

La Russie n’a pas réussi à inverser cette tendance par la guerre de l’information ou la guerre hybride, car elle ne peut offrir aux élites européennes aucune alternative stratégique ou financière. Elle peut financer certains partis ou médias, mais n’a pas accès à Wall Street, à la chaîne de commandement de l’OTAN ou aux marchés financiers mondiaux.

Lorsque montent au pouvoir des partis populistes nationalistes, leurs dirigeants découvrent rapidement que le véritable pouvoir ne réside pas dans les parlements nationaux, mais à Bruxelles, dans la BCE, au siège de l’OTAN ou dans la City de Londres — et on ne peut y accéder qu’en acceptant les règles du jeu transatlantique.

Giorgia Meloni, Viktor Orbán et le PiS polonais ont tous fini par céder à cette logique : le nationalisme peut s’exprimer dans la rhétorique intérieure, mais en matière de politique étrangère et de sécurité, l’atlantisme est incontournable. Malgré leurs victoires électorales, ni l’AfD, ni le RN, ni Vox, ni Fratelli d’Italia, ni le Perussuomalaiset finlandais ne menacent l’ordre transatlantique, car ils manquent d’idéologie propre, de base économique, de réseau diplomatique ou de pouvoir institutionnel.

Selon la théorie de l’élite, le changement pourrait se produire de deux façons. La première serait par le déclin progressif de l’élite transatlantique actuelle: si la puissance économique et militaire des États-Unis s’affaiblit considérablement, les acteurs européens perdraient confiance en Washington et chercheraient de nouveaux alliés — peut-être la Chine, l’Inde ou même la Russie.

La seconde voie serait la montée d’une élite concurrente. Ce groupe pourrait émerger, par exemple, de la classe moyenne possédant des industries dans les pays industrialisés (le Mittelstand allemand, les PME françaises et italiennes), qui souffre le plus de la transition écologique et de la désindustrialisation, ou de nouveaux réseaux de sécurité qui se forment entre Paris, Berlin et Rome, sans médiation anglo-américaine. Pour l’instant, une telle élite n’est pas visible.

L’Europe constitue donc un exemple parfait de la théorie classique de l’élite: le continent est fermé au cercle d’influence américain car son élite locale est totalement intégrée à l’élite hégémonique. Le changement ne surviendra que lorsque la capacité des États-Unis à maintenir leur ordre mondial s’effondrera ou qu’une nouvelle élite européenne pourra prendre sa place sans l’approbation de Washington. D’ici là, l’Europe restera un vassal transatlantique — non pas par volonté populaire, mais selon les intérêts des groupes au pouvoir. Et les élites changent uniquement entre elles.

La guerre hybride permanente

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La guerre hybride permanente

par Andrea Zhok

Source: https://www.sinistrainrete.info/articoli-brevi/31833-andr...

Aujourd’hui, la nouvelle de la prise de Pokrovsk par l’armée russe a été officialisée, parallèlement à la conquête de Volkhansk.

Au cours du dernier mois, l’armée russe a conquis 505 km² de territoire, ce qui pour un pays aussi grand que l’Ukraine reste encore peu, mais indique une progression claire par rapport à la période précédente.

L’omniprésence des drones rend impossibles les avancées rapides avec des chars et des véhicules blindés, mais cela renforce aussi la résistance des conquêtes face à d’éventuelles contre-offensives.

Les signes d’un déclin des capacités opérationnelles des forces ukrainiennes au front sont évidents, et cependant, les indices d’une fin rapide du conflit restent controversés.

Depuis le front, certains commandants ukrainiens ont envoyé à Zelenski un message indiquant qu’ils n’obéiront pas en cas de signature d’un accord impliquant le retrait du Donbass.

Bien sûr, dans une guerre moderne, cela relève davantage d’un geste que d’une véritable perspective de résistance inconditionnelle: si, par décision centrale, l’approvisionnement venait à être coupé, le front s’effondrerait en quelques semaines.

De même, il s’effondrerait si les États-Unis, comme ils l’ont menacé à plusieurs reprises, suspendaient le renseignement satellitaire et l’intelligence.

En somme, à l’exception des éléments nationalistes les plus radicaux présents dans les forces armées ukrainiennes, la décision de continuer la guerre ou d’accepter une défaite encore honorable reste entièrement entre les mains des décideurs politiques.

Tout indique que le conflit russo-ukrainien est à ses dernières étapes; probablement, entre le printemps et l’été, nous assisterons à sa conclusion officielle.

Mais cette conclusion, et c’est le grand problème que nous devrons affronter, ne sera pas vraiment un arrêt total des combats.

Ce qui se profile, c’est l’alliance structurelle à long terme entre le reliquat des forces armées ukrainiennes radicalisées et le bellicisme européen.

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En Ukraine, les éléments nationalistes radicalisés percevront tout traité de paix comme leur propre version de la légende du "coup de poignard dans le dos" (Dolchstosslegende) qui a animé les soldats allemands après la Première Guerre mondiale. La narration selon laquelle la guerre n’a pas été perdue sur le champ de bataille, mais par la trahison de la politique à l'arrière du front, a été à l’origine de ces mouvements paramilitaires en Allemagne dans les années vingt, qui ont abouti aux Sturmabteilungen et alimenté la montée du parti nazi.

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Par ailleurs, les dirigeants européens, d’un côté, savent qu’ils ne sont pas en mesure concrète d’affronter directement Moscou, mais ne peuvent pas, pour autant, envisager la paix comme une bonne option. La devise selon von der Leyen et Kallas est "Tant qu’il y a la guerre, il y a de l’espoir", comme le titrait un célèbre film d’Alberto Sordi. Tant que la narration absurde subsiste, qui dit: "il y a un agresseur et un agressé, nous n’avions pas le choix", toute la conduite catastrophique des élites européennes peut aboutir à une confrontation ultime.

C’est pourquoi la perspective qui nous attend est celle d’une guerre hybride permanente, où les paramilitaires ukrainiens fourniront une partie de la main-d’œuvre, et l’Europe fournira les moyens technologiques et économiques. Donc nous assisterons à des sabotages, à des actes terroristes, à une guerre informatique, etc. — autant d'actes soumis à la "négation plausible", souvent indiscernables, avec l'apparence de dysfonctionnements accidentels, qui nous entraîneront dans une période de guerre sans bombardements, mais de longue durée. Évidemment, j’espère que personne ne se leurre en pensant que ce sera seulement l’Europe qui lacèrera la Russie par le truchement de l’Ukraine, tout en restant en sécurité sans recevoir de réponse.

Ce sera, à mon avis, le point de chute naturel de la situation actuelle, avec une poussée supplémentaire vers la confiscation des ressources publiques pour financer les industries parasitaires des amis des amis, et une nouvelle compression de toutes les libertés d'expression restantes, de liberté de penser et de parole sur le sol européen.

La menace russe deviendra un refrain permanent, et au nom des instances suprêmes de la défense, le rêve humide du néolibéralisme se réalisera dans sa pureté: une société d’esclaves, militarisés dans la tête et dans le portefeuille, au profit des nouveaux féodaux de la finance.

L’histoire n’est jamais écrite, mais elle possède des tendances inertielles.

Si nous ne résistons pas frontalement, ces tendances nous seront fatales dans un avenir proche.

12:28 Publié dans Actualité | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : actualité, polémologie, guerre hybride | |  del.icio.us | | Digg! Digg |  Facebook

jeudi, 11 décembre 2025

La Maison Blanche a publié ce que Bruxelles a passé une décennie à censurer

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La Maison Blanche a publié ce que Bruxelles a passé une décennie à censurer

Christian Raven

Source: https://www.facebook.com/profile.php?id=61572237515718

La Maison Blanche a publié ce que Bruxelles a passé une décennie à censurer: l'Europe est passée de 25% du PIB mondial à 14%, elle dérive vers une «effacement civilisationnel», et dans sa trajectoire actuelle «sera méconnaissable dans 20 ans».

Ce ne sont pas les renseignements russes.

Ce ne sont pas des analystes dissidents. Washington, dans sa propre stratégie nationale, marque l'heure de la mort.

La tragédie de l'Europe n'est pas d'avoir été vaincue par une force extérieure. Sa tragédie est qu'elle s'est volontairement engagée dans l'effondrement, confondant vanité morale et stratégie, auto-dommage et principe, applaudissements néoconservateurs et souveraineté.

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19 séries de sanctions destinées à paralyser la Russie ont plutôt explosé dans la propre cage thoracique de l'Europe ; industries en fuite, énergie vidée, frontières déracinées, agriculteurs en révolte, salaires en érosion, dissidence criminalisée sous des « valeurs » élaborées par des technocrates qui n'ont jamais exercé un vrai métier, avec un mépris total pour les Européens.

Et pendant que l'Europe récitait des slogans, la Russie construisait du concret, bâtissait un mastodonte économique.

La « station-service avec des armes nucléaires » qu'ils raillaient est désormais la 4ème plus grande économie de la Terre en parité de pouvoir d'achat, croissant plus vite que l'ensemble de l'Union européenne depuis le début de l'opération militaire spéciale, réindustrialisant, réorientant, reconfigurant l'Eurasie.

La cible de la croisade européenne s'est renforcée, les croisés se sont appauvris.

Ce n'était pas de l'ironie.

C'était une fatalité.

Voici maintenant la ligne la plus brutale de la stratégie américaine: l'avertissement que certains États européens «pourraient bientôt ne plus être assez forts pour rester des alliés fiables».

C'est Washington qui recule d'une maison en flammes avec le calme d'un incendiaire rédigeant le rapport d'incident. Le même protecteur qui a poussé l'Europe à la confrontation, bien avant Trump, rédige maintenant son alibi, présentant l'effondrement de l'Europe comme un accident malheureux plutôt que la conséquence prévisible de politiques encouragées par son État profond et appliquées avec zèle missionnaire par Bruxelles.

L'UE ne reconnaîtra pas le transfert de l'humiliation, car elle est arrivée déguisée en loyauté, et parce que le scénario utilisé pour abandonner le continent est le même que celui que l'Europe insiste encore à jouer.

Un continent qui a autrefois donné naissance à la civilisation occidentale poursuit maintenant ses citoyens pour leurs paroles, écrase ses propres agriculteurs sous des boucliers anti-émeute, brûle son industrie au nom d'une doctrine écologique, et vend tout ce spectacle comme un éclaircissement.

Il a abandonné son énergie à l'idéologie, son industrie aux hallucinations de Davos, sa sécurité aux caprices de l'Amérique, et son avenir aux intérêts composés. Une civilisation ne peut pas vivre d'abstractions, mais ses élites le peuvent, car elles ont conçu un système où les coûts retombent sur le peuple et les profits remontent à ceux qui ne subissent jamais les conséquences.

Le NSS n'est pas une stratégie. C'est une confession à ciel ouvert; la Russie a absorbé le choc, recalibré, et s'est relevée; l'Europe s'est dissoute dans les illusions qu'elle prenait pour de la force, tandis que Washington, déjà en train de préparer le chapitre suivant, se lave discrètement les mains des conséquences.

L'Europe continentale détenait autrefois 25% du PIB mondial. Aujourd'hui, elle s'accroche à 14%, près de la moitié de son poids mondial effacé en une seule génération.

Pas par invasion.

Pas par Poutine.

Par des décisions que ses propres élites ont prises librement.

L'Europe n'était pas prisonnière.

Elle n'a pas été entraînée dans cela.

Elle a choisi l'idéologie plutôt que la sécurité énergétique, la fantaisie plutôt que l'industrie, l'obéissance plutôt que la souveraineté.

Elle avait le pouvoir d'agir en civilisation, et a agi comme une vassale capricieuse et arrogante.

La nouvelle donne.

Julien Gracq et la tentation élitiste

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Julien Gracq et la tentation élitiste

Claude Bourrinet

Contrairement à André Breton ou à Sartre, Gracq s'est toujours bien gardé d'être entouré, a fortiori de prendre la tête d'un mouvement, ou de s'intégrer à l'une de ces « avant-gardes », ou à l'un de ces courants littéraires, qui ont caractérisé le XXe siècle, surtout français, du moins jusqu'à ce que ces rivières – ou ces ruisseaux – se perdent dans les sables du marais stérile de la fin du millénaire. Il a semblé se retrancher dans une tour solitaire, idée qui ne lui aurait du reste pas répugné. "Je peux me plaire (ô combien!), dit-il, dans un pays vide. Non dans un pays peuplé de figurants." Ces comédiens, qui servent de décor, pullulent dans le milieu intellectuel, où les effets valent plus que le fond, où les combinaisons remplacent la voie étroite, ou règne la formule hugolienne ; « Ad augusta per angusta ». Il l'affronte d'ailleurs ouvertement au début des années 50, mais se retire rapidement. Jeu de mains (à plume), jeu de vilains. Ses années seront ponctuées, dorénavant, entre deux années scolaires, par le retour studieux et estival dans la maison familiale, à Saint-Florent, et, imperturbablement, chaque mois de septembre, par une expédition en Deux-chevaux sur les « Grands chemins », souvent de France.

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L'explication de cette tentation semi-érémétique était, aux yeux des professionnels du livre et de ses consommateurs, une affaire d'orgueil, ou de tactique. Peut-être les deux. Comme on répliqua, selon Sainte-Beuve, à quelqu'un qui annonçait le vœu de Chateaubriand de se retirer dans un ermitage:  «M. de Chateaubriand veut une cellule, mais c'est une cellule sur un théâtre», on voyait dans le snobisme de Gracq une posture, dont le silence pouvait faire du bruit et intéresser ses ventes. Cette accusation eut cours surtout au moment de son refus du prix Goncourt. Mais au fond, on lui en voulut toujours de ne pas être de la maison.

Certes, sa promotion à l'Ecole Normale Supérieure avait été l'aboutissement royal d'un cursus qui était celui de l'élite «des enfances bourgeoises, et même petites-bourgeoises», solution de continuité sociale et culturelle, qui fut, jusque dans les années soixante, moment où l'Ecole de masse tendit à s'imposer, une situation «normale» et acceptée. En Hypokhâgne, durant l'année 1928, au lycée Henri IV, il porte monocle et cravate blanche. Rue d'Ulm, ils étaient «vingt-huit à trente pour la section Lettres, et nous nous connaissions exactement». Les meilleurs élèves de France, le gratin. «Une – ou deux – ou trois figures de proue que distinguaient la singularité de l'esprit, le brio intellectuel parfois presque inquiétant, l'évidence des aptitudes extra-universitaires. […] Une demi-douzaine d'hommes spéciaux, comme on aurait dit au temps de Robespierre, qui avaient repéré et choisi de bonne heure leur créneau, étroit et peu fréquenté, et qui, larguant tout autre souci, marchaient déjà d'un pas assuré vers une direction des Hautes Etudes ou une chaire au Collège de France. Un ou deux égarés, étrangers au moule universitaire, qui semblaient être entrés là par distraction: souvent les plus amusants de tous. […]. Le reste destiné à peupler, sans nouveauté, les khâgnes et les universités de province. Mais aucune bille n'avait encore été capturée par sa case ; les jeux roulaient toujours ; le champ des possibles, pour les carrières, débordait de beaucoup celui des probabilités – pour quatre ans encore chacun portait dans sa giberne le bâton de maréchal de Jaurès ou de Péguy, de Bergson ou de Giraudoux, et guettait du coin de l'oeil, dans l'oeil du camarade, l'étincelle naissante de hautes aptitudes ou de la haute ambition. »

Passons sur l'idée fugace, qu'il se vît tenir rang dans la dernière brigade. Somme toute, son métier de professeur de géographie et d'histoire n'était qu'un gagne-pain, fort agréable, et pourvoyeur de temps libre appréciable. L'enseignement n'était pas, pour lui, une vocation, même si ses élèves le jugèrent comme excellent pédagogue.

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Durant toute sa vie d'écrivain, il regretta son isolement, dans un monde littéraire de plus en plus agité par les sollicitations médiatiques. Au début du mois de février 2000, Le Monde titrait, à son sujet, une de ses déclarations désabusée, qu'on jugea provocatrice: «En littérature, je n'ai plus de confrères». On vit, dans cette déclaration, de la superbe. Le dernier à avoir été du niveau exigeant où il tentait de se tenir avait été André Breton (photo). Après 1966, il n'y a plus rien. Or, un écrivain veut toujours savoir ce que ses écrits valent. Il y a les lecteurs, certes: il rassembla des amoureux – peu nombreux en regard des admirateurs de l'émission de Bernard Pivot, Apostrophes -  de son œuvre, et qui n'étaient pas loin de se considérer comme des initiés. Mais le véritable jugement ne peut venir que d'un égal. Non dans un sens hiérarchique, déplacé à ce propos, mais qui ait la même vision de l'écriture, qui appartienne au même monde que lui.

81v3fOZZtEL._SL1500_-3163583443.jpgEn 1965, il revient sur l'instant décisif qui le projeta dans ce monde-là. Il avait, certes, publié son roman initiatique et inspiré, Au château d'Argol, aboutissement d'une lente gestation au sein des mystères éclatants d'un surréalisme dont il avait rencontré le «pape», André Breton, au mois d'août de 1939, et nous verrons que l'élan que ce courant prodiguait portait plus haut que la simple vocation littéraire. Ce moment extatique eut lieu le 18 décembre de cette même année, en gare d'Angers, où il tuait trois heures. A la bibliothèque de la gare, une couverture l'attira: «le titre seul de certains livres émet en direction du public qu'ils choisissent des signaux de reconnaissance assez mystérieux». Retenons ces termes: «signaux de reconnaissance»; «mystérieux». Nous nous trouvons dans l'univers trouble et enchanté de Poe, ou de Wagner, ou de la «matière de Bretagne», sur une terre énigmatique mais non dépourvue de sens où des correspondances tissent des liens entre élus. Il s'agissait du roman d'Ernst Jünger, qui venait juste d'être publié, Sur les Falaises de marbre. L'effet sur lui fut galvanisant. Outre l'expression d'un sentiment de liberté inouïe, « au travers des pires interdits du moment », afin de restituer l'intensité de cette rencontre, il doit employer des mots et des images religieuses, païens et bibliques : « D'un abord assez hautain, protégée dès son seuil contre le coudoiement par quelques-unes de ces figures emblématiques et magiques que Jünger affectionne, comme les anciens en incrustaient parfois devant leur porte, par l'interposition aussi d'on ne sait quelle distance assez glaciale, j'aime parfois à me la figurer comme une arche fermée, naviguant sur les eaux de notre déluge résolument à contre-courant, mais porteuse, pour les rivages où elle abordera, de quelques-unes des valeurs essentielles dont le monde de demain aura à se réensemencer. »

sur_les_falaises_de_marbre-3917498920.jpgLe lecteur de Jünger, un initié, membre d'un «public restreint», s'«enferm[e] dans son goût solitaire pour une œuvre comme dans une petite forteresse qui ne se rendra jamais», «une œuvre castée» rejetant la littérature au «grain grisâtre et indifférencié du béton armé, où la prose donne l'impression de couler en vrac dans des coffrages». Et il ne s'agit pas de la sélection que l'exploit sportif génère, de ces ascensions de rochers des singes, où les «Bandar-log» grouillent, mais des sommets où l'air est raréfié, «où le mal des montagnes commence à se faire sentir». Le livre est assurément, «dans cette époque qui a basé son efficacité sur la culture des passions de masse», « l'appel à une aristocratie encore désincarnée, qui porterait désormais les valeurs comme l'ancienne a porté les armes». Et la cible est haute, la plus élevée. On songe aux paroles de Baudelaire, dans Mon cœur mis à nu : Il n'existe que trois êtres respectables: le prêtre, le guerrier, le poète. Savoir, tuer, créer. Les autres hommes sont taillables et corvéables, faits pour l'écurie, c'est-à-dire pour exercer ce qu'on appelle des professions.

La référence au Graal n'est pas loin. Gracq conte qu'à 18 ans, il cessa, sans drame, de se rendre à la messe. Ce qui ne signifie pas qu'il n'ait gardé, au plus profond de lui, un sens mystique tendu. Il rappelle les sensations tenaces de son enfance, qui allaient dans cette direction: «J'ai été élevé dans le catholicisme, dans un pays qui est très croyant, Saint-Florent, et une chose me frappait: une colline, avec, au sommet une église abbatiale, une abbaye très importante, une espèce de bulle sacramentelle. Plus que le sacré, me frappait et me séduisait la confrérie des gardiens du sacré. Cela apparaît avec les chevaliers.»

Cette tonalité religieuse, mystique, rejaillit aussi quand, dans son essai sur Breton, il interprète le surgissement et le destin du surréalisme. Là aussi transparaît la tentation élitiste. Et bien qu'il n'acceptât jamais de se couler dans le groupe surréaliste, il reprend à son compte, en 1948, la destinée manifeste d'un cercle semi-clandestin, de « vrais fidèles » d'un medium, Breton, « traversé » par les esprits de Sade, de Nerval, de Baudelaire,de Rimbaud, de Lautréamont, de Nouveau, de Jarry, de Vaché, de Rigaut, de Desnos, de Dali, «phénomène de transsubstantation» étonnant, qui l'investit d'un pouvoir charismatique. Il est traversé littéralement par le meilleur de leur esprit, il est le conducteur élu du fluide. «Aucune opération intellectuelle précise n’élucide ce contact miraculeux.» On a l'impression d'être «report[é]" à l’époque où l’«Esprit» visitait familièrement les hommes et à travers eux prophétisait en liberté».

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Gracq s'est beaucoup inspiré de son ami Monnerot, condisciple à l'Ecole Normale, sociologue du socialisme et ayant médité sur les rapports entre la poésie et le sacré, notamment dans les cercles surréalistes. Il ne s'agit pas de trop porter attention, aux «germes de socialisation» qui ponctuent la trajectoire du cercle, que Monnerot appelle le «set», groupé autour de Breton entre les deux guerres, «café qu’on hante, habitude des réunions périodiques, promenades en commun, fréquentation de lieux «électifs», jeux d’esprit pratiqués, rites sommaires». Autre chose était la «puissance d’éveil» que le surréalisme recelait, «l’attente galvanisante d’une espèce d’an mil qui littéralement jetait les esprits en avant d’eux-mêmes, les exorbitait», «l’«esprit» qui aiguillonnait le groupe[...] avec la vigueur hallucinatoire d’une terre promise».

Monnerot parle d'«aristocratie du miracle» «ordonné autour d’une «révélation générale» et par là ne se différenciant pas par essence de telle ou telle communauté d’ «élus» à ses débuts».

Le groupe suggère « l’idée d’un ordre clos et séparé, d’un compagnonnage exclusif, d’un phalanstère que tendent à enclore on ne sait trop quelles murailles magiques (l’idée significative de « château » rôde aux alentours) qui paraît s’imposer dès le début à Breton », « beaucoup plus proche, par ses contours surtout exclusifs, de la Table ronde ou de la chevalerie en quête du Graal que de la communauté chrétienne initiale ». On a là une « appartenance, qui nous renvoie à la source même du sentiment religieux et qu’on ne peut se refuser plus longtemps – que cela plaise ou non – à qualifier de mystique ». On sait que cette « mystique » s'est nourrie en partie de doctrines satanistes, sadienne, par provocation, dans un désir de blasphémer, de profaner un christianisme abhorré. Mais une mystique tout de même, qui ne demandait, selon Gracq, qu'à être retournée positivement.

262E5C02-CA36-4F5F-909D-932EB9E5A329_1_201_a-scaled-2235325726.jpegSans en avoir tout à fait conscience, le surréalisme a été l'expression, dans une civilisation atone, de la «recharg[er] d'un influx spirituel". Mais les «religions universelles» sont mortes, «cette ère semble définitivement close pour une société qui n’est aujourd’hui que trop matériellement distendue à l’échelle planétaire – où la « mesure de l’homme » se perd à tous les échelons dans un ensemble social trop grand pour nous». «Le surréalisme (il n’est qu’un symptôme) a présidé sous une ébauche de forme religieuse à un phénomène de ségrégation sociale spontanée et de recomposition embryonnaire à l’échelle d’homme».

Bien qu'en situation d'échec en 1948 (et comme le faisait remarquer Breton, entre le surréalisme d'avant-guerre et ce qu'il en reste à la Libération, il y a Buchenwald et la Bombe), Gracq voit dans l'émergence de petits groupes, de happy few portés par une flamme mystique authentique, se traduisant par ce qu'il appelle le Grand Oui (au monde), à l'opposé du projet existentialiste qui mise sur le collectif, et songe à subvertir le réel par la volonté sociale et politique, une alternative à la sclérose civilisationnelle de l'Occident – selon un schéma que lui a légué Oswald Spengler. Ces fraternités chevaleresques, il ne les trouvera jamais.

Macron, le Don Quichotte du commerce mondial

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Macron, le Don Quichotte du commerce mondial

Par @BPartisans

Emmanuel Macron repart en croisade. Après avoir sauvé — selon lui — l’Europe, l’Ukraine, le climat, la démocratie, la culture, la planète, les dauphins et la dignité humaine, voilà qu’il prétend désormais sauver… le commerce mondial. Comment ? En menaçant la Chine de droits de douane « dans les tout prochains mois ». Une réplique miniature des sanctions américaines, mais servie avec le panache fané de la diplomatie macronienne.

La mise en scène est parfaite : visage grave, ton solennel, posture de chef d’État debout contre les éléments. Mais derrière, c’est le vide. Un vide qu’il faut combler par des annonces tonitruantes. Macron parle non pour agir, mais pour exister. Encore. Toujours.

Le président jure qu’il veut « corriger les déséquilibres massifs » du commerce mondial. Pourtant, il y a quelques mois encore, il qualifiait les droits de douane imposés par les États-Unis de « méthode de chantage des plus forts » qui détruit le libre-échange. (Déclaration officielle, juin 2025.) On appréciera la cohérence : hier, c’était du chantage ; aujourd’hui, c’est du courage.

Même refrain lorsqu’il implore Pékin de « rééquilibrer les échanges et investir durablement » — formulation reprise par plusieurs sources diplomatiques — comme si le simple fait d’appuyer sur la table pouvait redessiner l’économie chinoise. La Chine, rappelons-le, détient plus de 55 % du déficit commercial français hors énergie. Depuis dix ans, la France ne cesse d’importer, tandis que son industrie se délite. Les menaces douanières ressemblent donc moins à une stratégie qu’à une incantation.

Le Financial Times, dans une analyse récente, souligne qu’aucune des démarches européennes n’a fait fléchir Pékin sur sa politique industrielle, massive et assumée. Autrement dit: l’Europe parle, la Chine produit. L’Europe se plaint, la Chine exporte. L’Europe promet des taxes, la Chine hausse un sourcil — et continue.

Mais Macron, lui, a besoin d’exister dans ce théâtre géopolitique où tout le monde l’a dépassé. Washington se concentre sur l’Asie, Londres joue les équilibristes, Berlin tente de sauver son économie… et Paris, faute de leviers réels, menace de sanctions qu’elle n’a même pas les moyens d’appliquer sans se tirer une balle dans le pied industriel.

Car c’est là que sonne le glas : la France dépend massivement des importations chinoises, notamment dans l’électronique, l’automobile électrique, les composants industriels. Chaque droit de douane se traduirait par une hausse des prix, une perte de compétitivité et un coup de massue pour les consommateurs. Derrière la posture martiale, ce sont les entreprises françaises qui paieraient l’addition.

Mais Macron ne calcule plus vraiment : il performe. Tout est devenu spectacle. Diplomatie Twitter, économie PowerPoint, souveraineté TikTok. Il brandit la menace comme un rideau de fumée, espérant masquer le fait que la France n’a plus les moyens de son ambition, ni économique, ni industrielle, ni diplomatique.

Et à force de vouloir exister par l’éclat, Macron pourrait bien provoquer l’inverse : rendre la France inaudible, isolée, et surtout… économiquement vulnérable. Le pire paradoxe d’un président qui confond toujours la scène internationale avec un plateau de théâtre.

Source : https://www.bfmtv.com/economie/international/prenant-l-ex...

@BPARTISANS

L'“Ère des troubles” de Toynbee dans une ère d'effondrement civilisationnel

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L'“Ère des troubles” de Toynbee dans une ère d'effondrement civilisationnel

Troy Southgate

Bron: https://troysouthgate.substack.com/p/toynbees-time-of-tro...  

Selon le célèbre philosophe et historien anglais Arnold J. Toynbee (1889-1975), qui était également un anti-sioniste convaincu: «L’homme parvient à la civilisation, non pas en raison d’un don biologique supérieur ou d’un environnement géographique, mais en réponse à un défi dans une situation de difficulté particulière qui l’incite à faire un effort sans précédent jusqu’alors».

Dans son œuvre monumentale de 1934, A Study of History, Toynbee examine pas moins de vingt-six civilisations passées et conclut que leur effondrement dérive toujours de facteurs internes plutôt qu’externes. Une fois que les dirigeants d’une civilisation cessent d’agir de manière créative, en utilisant les forces dynamiques qui la portent en avant et vers le haut, la société descend peu à peu dans le nationalisme réactif, le militarisme et, finalement, arrive à l’extinction.

Contrairement à Oswald Spengler (1880-1936), qui croyait que « l’optimisme est lâcheté », Toynbee pensait que – dans la plupart des cas – le fait de relever les défis auxquels nous sommes confrontés fera ressortir le meilleur des gens. Cela est correct, du moins dans une certaine mesure, mais la limite de l’analyse de Toynbee est qu’il voit la civilisation comme la marque même du progrès humain et que nous devons être jugés en fonction de notre potentiel à résister aux facteurs qui cherchent à la déstabiliser. Toynbee qualifiait ce phénomène cyclique de « temps de troubles ».

Une analyse plus réaliste, à mon avis, impliquerait la capacité des gens à survivre au sein même de l’effondrement de la civilisation. En effet, Toynbee – qui était influencé par le philosophe français Henri Bergson (1859-1941) – croyait même qu’une « minorité créative » d’outsiders devait se retirer dans la nature sauvage pour régénérer leurs forces vitales et, une fois sortis de leur isolement volontaire, diffuser un message d’espoir à leurs compatriotes. Le salut adviendrait alors, si l'on veut, sous la contrainte. Ce retrait temporaire ressemble plutôt à l’idée chinoise antique de « chevaucher le tigre », et Toynbee était convaincu qu’une telle élite devait « s’accrocher et attendre » dans l’espoir que la civilisation puisse être sauvée.

Alors que certains, comme Julius Evola (1898-1974), nous ont proposé de vivre au milieu de la dégénérescence en tant qu’esprits libres et de maintenir notre dignité face au déclin, il est clair qu’il doit arriver un moment où une civilisation devient totalement irrécupérable, et que la soutenir comme on soutient un homme mourant n’est qu’une tentative futile de retarder sa fin inévitable. Je crois que nous avons beaucoup à apprendre de Toynbee, mais seulement si nous transférons ses pensées sur la civilisation à notre quête plus large de survivre à sa destruction ultime.

mercredi, 10 décembre 2025

Nouvelle stratégie de sécurité américaine – le message clé pour l’Europe

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Nouvelle stratégie de sécurité américaine – le message clé pour l’Europe

Elena Fritz

Source: https://t.me/global_affairs_byelena

Les États-Unis ont réécrit leur cadre stratégique. Le point le plus important, pour nous en Europe, est :

  • Les États-Unis quittent l’ère atlantique et orientent toute leur structure vers l’Indo-Pacifique.
  • L’Europe n’est plus le centre stratégique, mais une zone périphérique administrée.

Ce que cela implique pour nous:

L’Europe n’est plus dirigée, mais simplement stabilisée.

Washington considère le continent comme affaibli sur le plan civilisationnel et comme une source potentielle d’instabilité future – non comme un partenaire géostratégique.

La Russie est acceptée comme un pôle de pouvoir nécessaire.

Les États-Unis recherchent une stabilité stratégique, pas de changement de régime ni une nouvelle extension de l’OTAN vers l’Est.

Une guerre longue en Ukraine va à l’encontre de la nouvelle stratégie américaine.

L’OTAN perd son caractère expansionniste.

Les États-Unis déclarent pour la première fois ouvertement: l’Europe doit assurer sa propre défense, l’alliance ne peut pas continuer à s’élargir indéfiniment.

L’Indo-Pacifique devient le nouveau centre de la politique mondiale.

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Washington déplace ses ressources militaires, industrielles et diplomatiques vers l’Asie.

L’Europe tombe dans la catégorie des “espaces de stabilité secondaires”.

America First 2.0 signifie un retrait des engagements impériaux

Les États-Unis ne seront plus un acteur de l’ordre mondial. Les partenaires deviennent des responsables – ou des régions aux intérêts limités.

L’Europe devient un simple objet sur l'échiquier géopolitique.

Les États-Unis annoncent qu’ils influenceront activement le développement intérieur de l’Europe, en soutenant les forces qui, selon eux Américains, permettent une “renaissance civilisationnelle”.

Le cœur stratégique pour l’Allemagne:

L’Allemagne a été pendant 80 ans politiquement et sécuritairement intégrée dans un cadre américain. Ce cadre s’effondre actuellement en raison d’un changement de priorités.

  • Sans leadership américain et sans cohérence stratégique européenne, un vide de pouvoir apparaît, que ni Bruxelles ni Berlin ne peuvent combler.
  • La question n’est plus “Comment associer les États-Unis à l’Europe ?”, mais : “Quelle identité géopolitique l’Allemagne a-t-elle encore sans les États-Unis?”

En résumé :

  • Les États-Unis se tournent vers l’Asie.
  • La Russie devient un pôle de coexistence.
  • L’Europe reste à l’arrière – comme un espace à maintenir stable, mais non plus façonné.

Pour l’Allemagne, commence une période de redéfinition stratégique existentielle.

#géopolitique@global_affairs_byelena

La communauté de valeurs occidentale se désintègre – l'Europe perd son ancrage stratégique

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La communauté de valeurs occidentale se désintègre – l'Europe perd son ancrage stratégique

par Elena Fritz

Source: https://t.me/global_affairs_byelena

La décision du Département d'État américain de ne plus accorder l'accès aux États-Unis aux personnes impliquées dans des activités telles que la vérification des faits ou la modération algorithmique de contenus peut, à première vue, sembler un détail de politique intérieure. En réalité, elle signale une rupture structurelle au sein de cet ordre que l'on qualifiait depuis des décennies de «communauté occidentale des valeurs».

Une communauté de valeurs qui n'en est plus une

Depuis la présidence de Trump, les États-Unis se sont nettement éloignés de la ligne de l'UE sur les questions normatives clés. Aujourd'hui, deux modèles politiques coexistent au sein de cette même communauté de valeurs:

- Le modèle européen, marqué par la régulation, les structures supranationales et une conception normative de la politique visant à organiser la communication sociétale de manière de plus en plus administrative.

- Le modèle américain, qui – du moins sous la direction républicaine – cherche un retour radical à la souveraineté nationale, à la liberté d'expression et à la déréglementation.

La nouvelle directive sur les visas est un symptôme de cette divergence. Elle montre que Washington évalue de manière critique les instruments soutenus par l'État et la société civile en Europe – et n'est plus disposé à les accepter comme expressions de « valeurs occidentales » communes.

Un Occident élargi en distance

Les États de la zone de sécurité indo-pacifique, traditionnellement considérés comme faisant partie de l'alliance occidentale – le Japon, la Corée du Sud, l'Australie, la Nouvelle-Zélande – s'éloignent également de la logique européenne. Ils s'orientent désormais principalement vers la rivalité géopolitique entre les États-Unis et la Chine, évitant délibérément de se laisser entraîner dans les conflits européens sur la liberté d'expression, la régulation numérique ou l'identité normative. Ainsi, pour la première fois depuis la fin de la Guerre froide, un Occident pluraliste apparaît, dont la cohésion n'est plus évidente.

L'Europe entre les axes – sans centre de pouvoir propre

Le constat géopolitique plus profond est le suivant:

L'Europe perd son orientation car elle n'est plus un centre stratégique de pouvoir.

- Les États-Unis redéfinissent leurs priorités, devenant plus nationaux et moins multilatéraux.

- L'UE tente de stabiliser son identité politique à travers des projets de régulation et des concepts de sécurité.

- Les partenaires indo-pacifiques privilégient la sécurité régionale plutôt que les normes transatlantiques.

L'Europe, entre ces axes, n'y est pas en tant que créateur, mais en tant qu'espace traversé par des intérêts divergents.

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Le point crucial

Ce qu'on appelle la communauté de valeurs occidentale ne fonctionne plus comme un projet stratégique homogène.

Elle est devenue un champ complexe où se juxtaposent différentes visions d'ordre – des visions économiques, politiques et normatives.

Cela a des conséquences:

- Sur le rôle de l'Europe dans la politique mondiale.

- Sur la capacité de l'UE à définir ses intérêts de manière indépendante.

- Et sur chaque débat concernant la souveraineté, la sécurité et la légitimité démocratique.

#géopolitique@global_affairs_byelena

Le moment messianique de 1666: Sabbatai Tsevi, le millénarisme de la „Cinquième Monarchie“ et les origines de la Rénovation radicale

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Le moment messianique de 1666: Sabbatai Tsevi, le millénarisme de la „Cinquième Monarchie“ et les origines de la Rénovation radicale

Introduction : Crise des attentes eschatologiques

1666 entre dans l’histoire intellectuelle de l’Europe non seulement comme la date marquée par la Grande Peste et le Grand Incendie de Londres, mais aussi comme le point culminant des attentes messianiques centrées sur la figure de Sabbatai Tsevi. L'historiographie traditionnelle a longtemps ignoré le sabbatianisme, le considérant uniquement comme une crise interne du judaïsme. Cependant, les travaux de Richard Popkin et les études monumentales de Jonathan Israel ont démontré de façon convaincante que ce phénomène était profondément intégré dans le contexte européen. À travers un réseau de dissidents (de non-conformistes) en Angleterre et aux Pays-Bas, la figure du faux messie juif est devenue un catalyseur de débats allant bien au-delà de la théologie, préparant paradoxalement le terrain pour un cosmopolitisme séculier.

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Cadre théorique et „Troisième force“

Richard Popkin a avancé la thèse de l’existence, au XVIIe siècle, d’une „troisième force“ — un groupe intellectuel qui n’appartenait ni à la scolastique orthodoxe ni au rationalisme cartésien strict. Ce furent des penseurs combinant scepticisme scientifique et intérêt profond pour les prophéties bibliques. Jonathan Israel souligne qu’Amsterdam était un «creuset» unique où les frontières entre confessions s’effaçaient. C’est ici que les nouvelles concernant Sabbatai Tsevi n’étaient pas perçues comme une hérésie, mais comme une possible réalisation des prophéties communes aux religions abrahamiques.

Le lien central dans ce processus était Pierre Serrarius — un théologien hollandais et un millénariste. En tant que nœud d’information entre la communauté juive d’Amsterdam et les intellectuels londoniens, Serrarius a contribué à créer une atmosphère où les protestants voyaient en Sabbatai Tsevi un instrument de la Providence divine. Pour beaucoup de chrétiens de l’époque, le retour des Juifs en Palestine était une étape nécessaire avant la Deuxième Venue du Christ, ce qui rendait les succès de Tsevi théologiquement légitimes aux yeux des protestants radicaux.

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Radicalisme politique : Sabbatianisme et la „Cinquième Monarchie“

Le phénomène Sabbatai Tsevi reçut une attention particulière en Angleterre grâce au contexte idéologique préparé par le mouvement des „Hommes de la Cinquième Monarchie“. Cette secte puritaine radicale, active durant la Révolution anglaise et le protectorat de Cromwell, croyait en une doctrine basée sur le livre du prophète Daniel. Ils pensaient qu’après la chute des quatre monarchies terrestres (babylonienne, perse, grecque et romaine), la Cinquième viendrait — avec le royaume du Christ sur la terre.

Après la restauration des Stuart en 1660, les espoirs politiques des „monarchistes“ s’effondrèrent, et le mouvement entra dans la clandestinité, en état de profonde frustration. L’apparition de Sabbatai Tsevi en 1665–1666 fut perçue comme le signal extérieur tant attendu — comme un „Deus ex machina“, qui détruirait l’ancien ordre mondial, y compris la monarchie des Stuarts et le trône pontifical. Selon leur interprétation, le messie juif devait anéantir l’Empire ottoman, déclenchant une série d’événements menant à la domination mondiale des saints. Ainsi, l’intérêt des radicaux anglais pour Tsevi était moins philo-sémite que révolutionnaire-politique: le mysticisme juif devenait le carburant du républicanisme anglais.

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Baruch Spinoza : l’alternative rationnelle à l’extase mystique

Au cœur de l’hystérie messianique, la figure de Baruch Spinoza, expulsé de la communauté juive d’Amsterdam une décennie avant l'avènement de Tsevi, acquiert une signification particulière. Jonathan Israel insiste sur le fait que le spinozisme et le sabbatianisme se sont développés dans le même contexte socio-culturel, représentant deux réponses diamétralement opposées à la crise du judaïsme traditionnel et à la conscience européenne en général.

Alors que le sabbatianisme proposait une sortie irrationnelle et mystique par le miracle et par l'action et la présence d'un leader charismatique, Spinoza prônait la raison et le monisme philosophique. La chute du mouvement Tsevi (son apostasie et sa conversion à l’islam) porta un coup dur à l’autorité de la tradition rabbinique et à la croyance dans les prophéties en tant que telles. Ce vide, selon Israel, créa les conditions idéales pour l’acceptation des idées de Spinoza. « Le traité théologico-politique » (1670), publié peu après la chute du sabbatianisme, fut lu par de nombreux intellectuels désillusionnés comme le manifeste d’une ère nouvelle où la place des prophètes est prise par celle des philosophes, et les miracles par les lois de la nature. Ainsi, l’échec du sabbatianisme a paradoxalement ouvert la voie à la Rénovation radicale.

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Henri Oldenburg et les réseaux proto-masoniques

Un aspect clé de la réception du sabbatianisme est le rôle de la communication scientifique. Henri Oldenburg, secrétaire de la Royal Society de Londres, entretenait une correspondance étendue avec Spinoza, Boyle et Serrarius, demandant régulièrement des nouvelles du „Messie juif“. Le fait que le secrétaire de la principale institution scientifique d’Europe s’intéressait au messie kabbalistique contredit le mythe populaire d’une séparation stricte entre science et mysticisme au XVIIe siècle.

Bien qu’Oldenburg soit décédé en 1677 et n’ait pas pu participer à la fondation de la première Grande Loge en 1717, son activité incessante a posé les bases de cet événement. Oldenburg fut l’architecte de ce que Robert Boyle appelait « l’Université Invisible » — un réseau de penseurs cherchant la vérité en dehors des dogmes confessionnels. Les chercheurs en ésotérisme (notamment dans les œuvres analysées par Popkin) notent que la structure de la Royal Society et les réseaux de correspondance d’Oldenburg ont intégré des éléments de l’idéal rosicrucien de « réforme universelle ». Ces cénacles intellectuels, où la discussion de la physique comme de l’eschatologie était permise, devinrent le prototype des loges spéculatives maçonniques. La transition de la « maçonnerie opérative » à la « maçonnerie spéculative », achevée en 1717, reposait précisément sur cette culture de tolérance, de curiosité scientifique et de dissidence secrète, cultivée par le cercle d’Oldenburg, influencé aussi par les attentes philo-sémites de l’époque de Sabbatai Tsevi.

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Conclusion

Le lien entre les protestants anglais et néerlandais et le mouvement de Sabbatai Tsevi constitue un point critique dans l’histoire intellectuelle du début de la Renaissance moderne. L’interaction entre le protestantisme radical (« Fifth Monarchy »), le messianisme juif et la naissance de la nouvelle science (avec le cercle d’Oldenburg) a créé un terreau unique. L’échec des espoirs sabbatianistes a discrédité la connaissance eschatologique du monde, obligeant les penseurs européens à chercher de nouvelles bases. Dans ce contexte, le rationalisme de Spinoza et les structures organisationnelles qui ont précédé la franc-maçonnerie ont offert une alternative: construire la „Nouvelle Jérusalem“ non par le miracle, mais par la raison et la construction/ingénierie sociale.

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Jean-Gilles Malliarakis, trois témoignages

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Jean-Gilles Malliarakis, trois témoignages

Source: https://www.voxnr.fr/7114-2

Jean-Gilles Malliarakis vient de nous quitter

Lucas de Méan

C’est avec tristesse que je viens d’apprendre le décès de Jean-Gilles Malliarakis.

Figure majeure du nationalisme-révolutionnaire francophone.

Pour celles et ceux qui connaissent l’histoire de notre courant, c’est une perte immense, un nom qui ne dira peut-être rien au grand public, mais qui résonne profondément chez tous ceux qui s’intéressent à la pensée solidariste, à la troisième voie, à l’idée d’un nationalisme social, révolutionnaire, organique.

Il n’est pas le premier théoricien du nationalisme-révolutionnaire, d’autres, avant lui, avaient tracé les sillons doctrinaux.

Mais il fut sans conteste l’un de ceux qui ont structuré ce courant dans la France post-70, en lui donnant une forme militante, un vocabulaire, une doctrine reconnaissable, et surtout une stratégie autonome, distincte à la fois de la droite classique et des formations électorales de l’extrême-droite traditionnelle.

Avec lui, le NR cesse d’être seulement une théorie marginale et devient un projet politique cohérent :

- ni libéralisme capitaliste, ni marxisme collectiviste;

- une voie européenne, enracinée et sociale;

- une critique du mondialisme et du condominium USA/URSS;

- une défense de l’identité, des peuples, des corps sociaux;

- une vision dynamique, non passéiste, de la Nation.

Il inspira, structura, forma.

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À travers le MNR puis Troisième Voie, il fut un organisateur, un cadre, un faiseur de doctrine. Il chercha à dépasser les querelles de chapelles, à réconcilier l’idée nationale avec la justice sociale, à sortir les milieux identitaires de l’horizon électoraliste pour les pousser vers une pensée de long terme.

On ne peut pas nier son rôle historique: sans lui, le NR francophone n’aurait sans doute pas le visage qu’il a eu dans les années 80-90, et nombre d’idées qui nous paraissent aujourd’hui acquises seraient restées à l’état de notes dans des marges.

Jean-Gilles Miliarakis s’en va.

Son œuvre, elle, demeure.

À nous, désormais, de la transmettre, de l’enrichir, de la prolonger, non dans la nostalgie, mais dans l’action et la pensée vivantes.

Qu’il repose en paix.

Mémoire et honneur.

Europe, jeunesse, révolution !

Lucas de Méan.

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Jean-Gilles Malliarakis, militant historique de la cause nationaliste, vient de nous quitter

Roland Hélie

Je viens d’apprendre avec une immense tristesse le décès, à l’âge de 81 ans, de Jean-Gilles Malliarakis.

Editeur, militant infatigable du combat nationaliste depuis les années 1960, Jean-Gilles était un personnage incontournable et marquant pour quiconque à fréquenté la droite nationaliste ces soixante dernières années.

Il fut le fondateur en 1979 du Mouvement nationaliste révolutionnaire, qui deviendra plus tard Troisième voie, et du journal Jeune nation solidariste. Plus tard, il s’engagera dans la défense des petites entreprises françaises. Ces dernières années, il animait le site L’Insolent.

Il a, à de nombreuses reprises, participé aux activités de Synthèse nationale. Il y a trois ans, il prenait la parole lors de notre Rendez-vous Bleu Blanc Rouge de 2022. Personne n’oubliera l’orateur exceptionnel qu’il était.

Nous reviendrons très vite sur cette pénible disparition.

À Isabelle, son épouse, à sa famille, toute la rédaction de Synthèse nationale présente ses condoléances.

Roland Hélie

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Ma jeunesse se souvient!

Pierre Robin

J’étais entré, plein de curiosité, dans son univers un peu à part en ce milieu des années 80 où tout se mettait en place, la gauche libérale et le gauchisme culturel, les  » devoirs de mémoire  » et les quartiers  » difficiles « , le lepénisme sonore et l’antiracisme fashionable. JGM était fort d’une réputation de radicalité nationaliste-révolutionnaire – ou, pour les branchés,  » solidariste  » -, d’une certaine verve polémique, d’une crédibilité physique certaine, de solides connaissances historiques (et économiques). Et de sa Librairie Française bien située et où ne passaient pas que des amateurs de livres anciens. Et encore de son mouvement à lui dont le nom – Troisième Voie – renvoyait en trois syllabes dos à dos la gauche et la droite, le communisme et le capitalisme, l’OTAN et le Pacte de Varsovie. C’était un groupuscule si l’on veut, mais remuant, juvénile et inspiré comme son chef, et dont une partie du charme étrange résidait dans une esthétique forte autant que rétro. Et il y avait aussi son journal Révolution européenne, à la maquette rouge et noire soignée et aux mots d’ordre peu consensuels. On peut dire que TV, dans cette deuxième moitié des années 80, disputait le marché de la jeunesse radicale  » de droite  » (pardon d’ex. dr.) aux lepénistes et aux royalistes.

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Tout ça a donné quelques animations de rue intéressantes, telle cette manifestation réunie vers Saint-Germain-des-Prés sur un thème – Nous ne serons pas les Palestiniens d’Europe ! – qui ferait frémir aujourd’hui la droite niaiseuse. Tels encore ces dépôts de gerbe au mur des Fédérés du Père Lachaise (encore un positionnement propre à scandaliser rétrospectivement une Sarah K ou une Marion M). Sans oublier un défilé de Jeanne d’Arc où Jeanne était à cheval mais portait un flight jacket et non une armure du XVème siècle, et brandissait non une oriflamme dédiée au Christ et à la Vierge Marie mais un étendard noir avec un trident blanc. Et cet activisme drainait donc un public jeune, étudiants en droit et skinheads en blousons (noirs). Aux marges de la politique, et notamment du lepénisme, dont Malliarakis appréciait sans doute plus le leader que le parti, étant du genre tribun cultivé lui aussi, l’aventure a duré 4, 5 ans. Et puis JGM a changé son fusil d’épaule et de fréquentations politiques, sans doute las de labourer un ghetto. Cela peut humainement se comprendre. Il a continué d' » évoluer  » pour employer un mot démoralisant, et là disons que ça m’intéressait moins.

Mais quelle importance ce soir les divergences sur ceci ou cela ? Elles ne m’empêchent pas de me souvenir que Jean-Gilles Malliarakis fut une figure souvent inspirée, un type courageux, plein d’idées et non dénué d’humour (et ça c’est toujours mieux en politique, même extrémiste). Et je me félicite rétrospectivement que notre ultime rencontre fortuite, à 5 minutes de l’Etoile et de son Arc de Triomphe français, se soit passée dans la bonne humeur, et même avec un minimum de connivence…

Pierre Robin.

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lundi, 08 décembre 2025

Pour une préhistoire de la poudrière ukrainienne

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Pour une préhistoire de la poudrière ukrainienne

Peter Backfisch

Source: https://opposition24.com/politik/pulverfass-ukraine-die-v...

i-putin-gestern-heute-und-morgen-nikiforov-oleg-2706441491.jpgL’éditeur „Wörner-Medien“ publie avec le livre Pulverfass Ukraine - Die Vorgeschichte (= "La poudrière ukrainienne - la préhistoire") un ouvrage précieux sur les événements qui ont suivi l’effondrement de l’Union soviétique. Les auteurs Roland Fritzsche et Oleg Nikiforov, ce dernier ayant déjà abordé cette thématique en 2021 dans le livre „Poutine – hier, aujourd’hui et demain – La Russie en route vers les grandes nations du monde“, publié chez Gerhard Hess Verlag (v. ci-contre), donnent dans ce livre de près de 300 pages une analyse détaillée des raisons de l’«opération militaire spéciale» de la Russie.

Celle-ci est devenue un conflit sans issue, semblant ne pas pouvoir mener à une paix durable. Pour comprendre comment cela a pu arriver, il ne suffit pas de décrire le déroulement de la guerre; un regard sur le passé est indispensable. C’est précisément ce que font les auteurs, avec une grande expertise quant aux contextes historiques.

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Origines historiques

Pour comprendre le présent, Fritzsche et Nikiforov remontent jusqu’aux 10ème et 12ème siècles de l’histoire russe, non pas pour légitimer par des concepts tels «Monde russe» ou «Monde ukrainien» leur existence, approfondir la division actuelle ou opposer les peuples, mais pour souligner qu’en connaissant l’histoire commune de la Russie ancienne, on peut également poser des jalons conduisant à l’unité et à la coexistence. Les auteurs placent en centre de leur analyse les événements des 110 dernières années. Ils se concentrent donc sur les bouleversements après la dissolution de l’URSS; en fin de compte, l’Ukraine n’est devenue un État stable que dans le cadre de l’URSS, ses frontières étant floues et soumises à diverses influences politiques.

Histoire oubliée

Avec les bouleversements historiques de 1990/1991, l’adhésion de l’Ukraine à l’OTAN est intensément discutée en Occident comme étant une „garantie de sécurité“ nécessaire. C’est pourquoi, en plus des développements bilatéraux entre ces deux États, le rôle de l’OTAN de l’époque doit aussi faire l’objet d’une analyse approfondie. Les auteurs s’y emploient avec compétence, avec une vision objective nécessaire, en essayant, dans leur analyse approfondie et professionnelle, de comprendre les deux parties.

51CI6fDGg8L._SL500_-3838806826.jpgDans les prédictions du politologue américain Zbigniew Brzezinski, „La seule superpuissance mondiale“, publié en 1997, ils perçoivent parfaitement le plan imaginé par l’Occident d’intégrer durablement et pour toujours l’Ukraine dans sa sphère d’influence. „Sans l’Ukraine en tant qu’allié ou partie intégrante de la Russie, Moscou perdrait son statut de grande puissance européenne“, écrit Brzezinski. Il plaidait pour une adhésion rapide de Kiev à l’UE et à l’OTAN. En même temps, il décrit le retour de l’Ukraine sous contrôle russe comme une menace pour l’Occident. Cette vision est rejetée par les auteurs, qui la considèrent comme la cause de l’escalade.

Ils abordent la situation à la veille de la guerre. Le manque d’instruments pour préserver la paix a finalement conduit à la guerre et a des conséquences graves pour la société russe et ukrainienne à ce jour.

Les accords contractuels, traités, y compris les résolutions de l’ONU, sont analysés en détail. Que s’est-il passé en 2014? Comment Yanoukovitch est-il arrivé au pouvoir, pourquoi et comment a-t-il été renversé? Quel rôle ont joué les différentes forces à Kiev? Les événements de Maidan et de la Crimée sont décrits en détail. L’influence occidentale a alimenté la conflit de manière durable. Dans leurs analyses, les auteurs critiquent aussi à plusieurs reprises la politique de la Russie, notamment concernant le déroulement de „l’opération spéciale militaire“, comme „le verdict général est que l’objectif principal de l’opération spéciale n’a pas été atteint et que la guerre s’éternise.“ Aujourd’hui, une situation est survenue qui ne peut probablement pas être résolue par des moyens militaires et qui possède un potentiel pour une guerre mondiale. Malgré cette impasse apparente, les auteurs proposent un scénario: „comment pourrait se présenter une voie vers la paix“, en insistant toutefois sur la nécessité de prendre en compte les propositions de la Russie.

Pour commander le livre:  https://woerner-medien.de/pulverfass-ukraine-die-vorgesch...           

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Qui est Peter Backfisch?

Peter Backfisch, né en 1954, est pédagogue diplômé et a travaillé 40 ans dans une organisation (ONG) du secteur social. Il a notamment été conseiller auprès du conseil d’administration pour la politique internationale. De plus, jusqu’en 2004, il a travaillé en Afrique du Nord, au Moyen-Orient et dans les États de la CEI en tant que collaborateur indépendant pour diverses organisations internationales. Depuis 2019, il écrit en tant qu’auteur indépendant, notamment pour Junge Freiheit, Abendland, Wochenblick, Attersee Report et Tumult en ligne.

Trump veut-il vraiment en finir avec la guerre en Ukraine?

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Trump veut-il vraiment en finir avec la guerre en Ukraine?

Pierre-Emile Blairon

« Ils ne parlent de « paix » que parce que les lignes ukrainiennes s'effondrent et qu'ils ont besoin de temps et d'espace pour réajuster leur quête de suprématie mondiale, qui dure depuis des décennies, et plus particulièrement leur encerclement et leur endiguement de la Russie et de la Chine. »

Brian Berletic

Psychologie de Trump : un esprit « mercuriel » influencé par le « biblisme »

Il s'agit avant tout de comprendre la psychologie de l’homme occidental contemporain, perturbé, décadent, inconstant et inconsistant, dont Donald Trump constitue un bel échantillon.

Trump, derrière ses emportements souvent agressifs à l’encontre de la planète entière, ses moqueries, ses pirouettes grotesques et ses lourdes blagues est mu par un unique but, il a sa « ligne bleue des Vosges » (on a la ligne qu’on peut, d’autres chefs d’Etat, notamment européens, préfèrent les lignes de coke), son obsession: c’est la suprématie du dollar, qui est pour lui beaucoup plus qu'un simple bout de papier avec lequel "on peut faire des affaires"! C'est, pour le locataire de la Maison blanche, même plus qu'un symbole: c’est sa raison de vivre.

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C’est aussi l’horizon et le destin de la plupart des Américains depuis leur rupture avec l'Europe lorsque, le 21 décembre 1620, débarquent du Mayflower, à Cap Cod, 102 colons biblistes, tout imprégnés de l'histoire fantasmée d'Israël, qu’ils assimilent à leur seconde patrie, si ce n’est la première, puisque la première n’existe plus.

Ces Puritains fanatiques fondent la colonie de Plymouth, première ville du Massachusetts; rejetés par leur pays d’origine, l’Angleterre; ils vont prendre leur revanche sur l’Europe tout entière en fondant «le Nouveau Monde», qui est leur «Terre promise», calquée sur celle des Juifs (1). Ils vont donc se donner une philosophie issue de cette croyance et créer un «American Way of Life » qui va se résumer dans une formule en trois mots: Bible and Business.

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Un éminent conseiller de la présidence américaine, qui a présenté quotidiennement les rapports de la CIA pendant 27 ans aux différents présidents des Etats-Unis alors en exercice, Ray Mac Govern, reçu dans son émission par le professeur Glenn Diesen (2), définit le caractère de Trump comme de type «mercuriel», «c’est le mot qui décrit Trump», dit-il, «Mercure était le patron des escrocs, des voleurs, des tricheurs (3). […] Trump a un tempérament changeant, délirant, narcissique.»

En clair, Trump présente, comme presque tous les dirigeants occidentaux, des troubles du comportement dont la gravité reste à déterminer, si tant est qu’un président des Etats-Unis soit soumis régulièrement, ou plutôt, règlementairement, à un contrôle médical et à la rédaction d’un bulletin de santé. Et encore faut-il que ce contrôle soit effectué dans des conditions qui ne permettent pas de tricher. Cette remarque est valable pour tous les présidents occidentaux en exercice.

L’agression des Etats-Unis et des otano-ukrainiens n’a toujours visé qu’à affaiblir la Russie, et la Chine par ricochet

Depuis l’offensive des Otano-ukrainiens en 2014 contre les populations russophones du Donbass (15.000 morts dont plus de la moitié étaient des civils), les «Européens» n’ont de cesse de falsifier l’histoire.

Luc Ferry, ministre de l’Education nationale de 2002 à 2004, interrogé sur LCI par une «journaliste» agressive et de mauvaise foi, a rétabli magistralement en quelques minutes les vérités concernant l’Ukraine; l’intervention de Luc Ferry nous permet de résumer la situation et les véritables sources du conflit (4).

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Brian Berletic (photo) est un ancien Marine américain, auteur, expert en relations internationales et animateur de The New Atlas; selon cet analyste, il apparaît évident que l’Occident (les Américains, la CIA, l'Otan, et leurs satellites: l'Union européenne, l'Israël sioniste, le Mossad), ne veut pas la paix en Ukraine, il cherche juste à faire durer cette guerre le plus longtemps possible afin d’affaiblir par attrition, par usure, les forces russes comme ce fut le cas avec les accords de Minsk sabotés par Boris Johnson, par Hollande, par Merkel.

Le but final de l’Occident est de créer des conflits sur l’ensemble de la planète afin de conserver le leadership économique mondial ainsi que la prédominance du dollar. La Russie et la Chine sont les principaux ennemis de l’Occident global, suivis par les Etats réunis au sein des BRICS.

Les exemples où les Etats-Unis ont agressé des nations souveraines en invoquant des motifs qui relèvent du mensonge d’Etat sont nombreux: Irak, Syrie, Libye, Serbie… Plus récemment l’Iran (5).

Trump n’a fait, sur ce point, que suivre la doctrine américaine mise en place depuis des décennies, qui consiste à entretenir partout et tout le temps des conflits afin, d’une part, de faire travailler le complexe militaro-industriel, d’autre part de contrôler en permanence, et de punir éventuellement, les Etats qui tenteraient d’échapper à l’hégémonie américaine.

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Il suffit par exemple, d’évoquer ce qui s'est passé avec le prétendu "cessez-le-feu" de Gaza qui n'a pas été respecté plus de 24 heures par les sionistes; Trump a même osé féliciter Netoyonthou, pardon, Netanyahou d’avoir fait du bon boulot (6) en rasant Gaza et en massacrant des dizaines de milliers, voire des centaines de milliers (nous le découvrirons plus tard) d'enfants, de femmes, de vieillards en toute impunité… et ça continue.

Trump ne changera pas, il a dans son ADN la poursuite du rêve d'hégémonie américaine sur la planète et n'acceptera jamais de voir les Etats-Unis d’Amérique relégués derrière les BRICS.

Trump suit exactement son modèle biblique: c’est le rêve sioniste (7) étendu à l’échelle de la planète: finalement, le « peuple élu », ce n’est pas l’Israël sioniste, ce sont les Américains du «Nouveau Monde»!

L’article que Brian Berletic a publié en fin de semaine dernière, le 21 ou 22 novembre 2025, est riche en informations; en voici un extrait: «L'objectif premier de Washington est en fin de compte de contenir la Chine, ce qui nécessite de coopter ou d'affaiblir la Russie pour avoir une chance d'y parvenir - c'est pourquoi il n'acceptera jamais une paix et une stabilité réelles pour la Russie - il se contentera d'offrir l'illusion de la paix pour obtenir un cessez-le-feu, gagner le temps nécessaire pour sauver et réinitialiser ses mandataires ukrainiens, et continuer comme il l'a fait à plusieurs reprises dans le passé (voir : Minsk 1 & Minsk 2 pour plus d'informations).

Les jeux dans lesquels les États-Unis et leurs mandataires totalement sous leur coupe, y compris l'Ukraine et l'Union européenne, font semblant d'être en désaccord sur l'accord, ou même le faux théâtre gauche/droite qui se joue au sein de la politique américaine, offrent simplement aux États-Unis de multiples options pour se sortir de tout accord que la Russie serait assez stupide pour accepter».

Que pensent les Ukrainiens de la proposition de plan de paix établi par l’administration Trump ?

C’est le président de la Verkhovna Rada (le parlement unicaméral d’Ukraine), Rouslan Stefanchuk, probablement «influencé» par Zelensky et les chefs d’Etat européens, qui a été chargé d'annoncer les « lignes rouges » ukrainiennes à ne pas franchir dans les négociations basées sur le plan Trump et ses 28 propositions:

- Aucune reconnaissance juridique de «l'occupation russe» des territoires ukrainiens.

- Aucune restriction sur les forces de défense ukrainiennes.

- Aucun veto sur le droit de l'Ukraine à choisir ses futures alliances.

- Rien sur l'Ukraine sans l'Ukraine, rien sur l'Europe sans l'Europe.

- L'Ukraine n'abandonnera jamais sa langue, sa foi et son identité nationale.

Il est bien évident que la Russie n’acceptera jamais de travailler sur ces revendications, dont certaines sont carrément loufoques, et les autres de purs slogans n’ayant aucun lien avec la réalité ni même avec l’histoire du pays.

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La députée ukrainienne Julia Mendel (photo), également journaliste et actrice, ancienne attachée de presse de Zelensky, a répondu, le 22 novembre 2025, à Stefanchuk et à ce qui apparaît comme un refus préalable de toute négociation; l’intervention de Julia Mendel démolit la propagande frénétique de nos médias conformistes qui prétendent que la Russie «est à bout de souffle», car elle révèle la réalité brute, c’est-à-dire l’ampleur du désastre auquel se trouve confrontée l’Ukraine, mais aussi tous les gouvernements, essentiellement européens, qui ont soutenu l’agression otano-kiévienne contre les populations de Donbass (15.000 morts):

«En quoi cela diffère-t-il de l'ordre donné par l'ancien Premier ministre britannique Boris Johnson ?

«Nous ne signerons rien avec eux, nous continuons simplement à nous battre»? Cela n'est pas clair?

Chaque accord ultérieur avec l’Ukraine ne fera qu’empirer les choses car nous sommes en train de perdre, nous perdons des hommes, du territoire, et notre économie.

L’U.E. qui, soit dit en passant, a versé à la Russie plus de 311 milliards d’euros d’énergie et de biens depuis février 2022, n’a pas de véritable stratégie, aucun moyen de cesser d’alimenter le budget russe ou de soutenir suffisamment l’Ukraine pour qu’elle gagne, aucun dialogue direct avec Moscou et aucun levier significatif sur le Kremlin ou Washington.

L’argument selon lequel la Russie a «gagné si peu de territoire» paraît presque puéril au regard du coût humain. Nous avons perdu plus d’êtres humains en trois ans que certaines nations européennes n’en ont perdu au total. Mon pays est en train de se vider de son sang.

Nombreux sont ceux qui s’opposent systématiquement à toute proposition de paix, persuadés de défendre l’Ukraine en toute honnêteté. C’est la preuve la plus flagrante qu’ils ignorent tout de la situation réelle sur le terrain et à l'intérieur du pays. La guerre n’est pas un film hollywoodien !

Je n’abandonnerai jamais les valeurs que Dieu et la démocratie placent au fondement même de l’existence humaine; la vie humaine est le bien suprême et ce sont les êtres humains - des êtres vivants- qu’il faut sauver».

N’a-t-on jamais vu, dans l’histoire de la guerre, un pays vainqueur sommé d’accepter les conditions du vaincu ?

Je suis bien obligé de répondre à cette question que je me suis moi-même posée (que les mânes de Clausewitz et Sun-Tzu me pardonnent !): oui. Et par deux fois.

  • Oui, parce que c’est exactement ce qui s’est passé avec les troupes françaises qui avaient eu raison de la subversion islamiste en Algérie et qui ont été contraintes de capituler.

Je l’affirme et j’ai la légitimité de l’affirmer parce que j’en ai été témoin et victime: les soldats français qui avaient battu le FLN (les rebelles islamistes) à plate couture en Algérie ont été dépossédés de leur victoire par le général De Gaulle, par leur propre gouvernement, les Français étant obligés de signer les infamants «accords d’Evian» qui, bien sûr, n’ont jamais été respectés par «l’Algérie» dans les rares articles du traité où cette dernière pouvait y voir des effets contraignants.

  • Oui, une deuxième fois, et nous revenons à notre époque précisément, car c’est l’Europe d’après-guerre, celle qui est censée avoir gagné la deuxième guerre mondiale qui se retrouve actuellement dirigée par des psychopathes, ce qu’on appelle «l’Europe de Bruxelles», psychopathes qui sont les héritiers d’anciens dignitaires nationaux-socialistes qui, financés par de grandes entreprises américaines lors de la prise du pouvoir d’Hitler, ont été mis en place à la tête des nouvelles structures européennes par les Américains à la fin de la guerre, lors de la création de l’Otan et du Conseil de l’Europe en 1949, de la Communauté européenne du Charbon et de l’Acier en 1951, des Traités de Rome en 1957 (Communauté économique européenne), du Parlement européen en 1958 (8)… Les Ukrainiens qui ont tué de 14.000 à 15.000 habitants du Donbass en 2014 parce qu’ils étaient russophones (ce qui a déclenché l’intervention russe afin d’arrêter le massacre), sont les héritiers du mouvement banderiste, la Légion ukrainienne, fondée par Stepan Bandera qui collaborait avec l’Allemagne nationale-socialiste, les banderistes actuels combattants dans l’armée ukrainienne contre la Russie, l’Ukraine actuelle étant dirigée… par un juif, Volodymyr Zelensky.

Dans cette configuration peu banale, c’est la Russie qui a gagné la guerre contre les Otano-Ukrainiens et c’est l’Occident qui l’a perdue, l’Occident global tel que je l’ai défini plus haut, constitué de plusieurs entités.

Le chef de file occidental étant l’Amérique du Nord, il est bien évident que les Etats-Unis d’Amérique ne reconnaîtront jamais leur défaite (comme dans toutes les guerres qu’ils ont systématiquement perdues), le scénario le plus probable étant que l’administration Trump se défausse sur l’un ou plusieurs de ses satellites ou alliés.

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Emmanuel Leroy l’écrit justement: «Il ne s’agissait pas d’une guerre entre l’Ukraine et la Russie, mais du préambule de la guerre entre la Russie et l’OTAN, dans laquelle cette dernière a montré ses limites et, au final, sera contrainte de reconnaître sa défaite. Tout l’art de la diplomatie russe sera de faire avaler cette couleuvre à l’Occident sans trop l’humilier, sachant bien évidemment que tant que ce dernier n’aura pas été vaincu, nous en serons quittes pour attendre la prochaine guerre qui enflammera alors toute l’Europe ou ce qui en restera».

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L’analyste Karine Bechet-Golovko (photo), docteur en droit, professeur invité à l’Université d’Etat de Moscou, présidente de l’association franco-russe de juristes Comitas Gentium France-Russie, a, sur la chaîne RT, clairement appuyé là où ça fait mal: «Trump a donné à Zelensky jusqu’au 27 novembre, c’est-à-dire jusqu’à la fête de Thanksgiving, pour accepter son plan de paix. D’un côté, il menace pour la énième fois de peut-être suspendre l’aide militaire à l’Ukraine (qui en réalité n’a jamais été suspendue), d’un autre côté, il affirme ne pas avoir l’intention de lever les sanctions adoptées contre les entreprises russes Lukoil et Rosneft.

De son côté, Vance renforce le discours trumpien visant à faire de la guerre sur le front ukrainien un conflit strictement délimité entre la Russie et l’Ukraine, permettant ainsi de dédouaner les États-Unis, les pays européens, l’Union européenne et évidemment l’OTAN. Il parle bien d’un ʺplan de paix ukraino-russeʺ, qui est censé mettre définitivement fin à la guerre entre ces deux pays – comme si réellement il s’agissait d’une guerre entre deux pays (alors que l’Ukraine, comme État, n’existe plus) et non pas d’une guerre en Ukraine conduite par les élites globalistes.

De son côté, la Russie se dit toujours prête à négocier la paix, sans exclure de continuer à avancer militairement en cas d’échec. Le président russe souligne à ce sujet plusieurs éléments importants.

Tout d’abord, que le régime de Kiev est illégitime, au minimum parce que le mandat de Zelensky a formellement expiré. Ce qui pose la première question: avec qui signer, si jamais il y a quelque chose à signer? D’où la seconde question: quelle serait alors la valeur de la signature de Zelensky? Or, Trump insiste pour que l’accord soit signé strictement entre l’Ukraine et la Russie».

Je ne donnerai qu’un exemple puisé dans la proposition de l’administration Trump d’un plan de paix en 28 points, un point qui me paraît particulièrement aberrant, défiant toute l’histoire des relations internationales en cas de conflit: le groupe belge Euroclear, institution financière, se considérant comme «le notaire du monde financier», détient 183 milliards d’euros appartenant à la Russie; ces fonds sont bloqués momentanément jusqu’à la fin du conflit entre la Russie et l’Ukraine. Les «Européens» voudraient utiliser ces fonds à la poursuite de la guerre contre la Russie, alors que les Etats-Unis les consacreraient à la reconstruction de l’Ukraine (par des entreprises américaines, bien sûr).

Il va sans dire que ni les Américains ni les Européens ne sont en droit de s’approprier ces biens qui restent la propriété intégrale de la Russie, il s’agirait purement et simplement d’un vol qui serait condamné par toutes les instances internationales, raison pour laquelle Euroclear refuse obstinément de les mettre à disposition des uns et des autres car cette société reste responsable de leur utilisation, respectant les règles internationales établies dans ce cadre.

Que va-t-il se passer ?

Pour conclure, pouvons-nous envisager deux aspects de la situation future?

- La Russie continuera son avancée, vraisemblablement jusqu’à récupérer Odessa, ce n’était pas son intention première qui, à l’origine, consistait en une « opération spéciale » visant à protéger les russophones du Donbass et à stopper la folie meurtrière des Otano-Ukrainiens sur d’innocents civils qui n’avaient pour seul tort de ne savoir parler que le russe; mais, en attendant que ses interlocuteurs veuillent bien formuler des propositions raisonnables sur la fin d’une guerre qu’elle a déjà gagnée, l’armée russe continuera à avancer et à se réapproprier les territoires de l’ancienne «Rus de Kiev», ce qui serait la moindre des compensations après avoir subi une telle agression des globalistes.

- Quant à l’Amérique, son intérêt consistant à maintenir l’état de guerre permanent sur l’ensemble de la planète, on ne voit pas pourquoi elle appuierait toute avancée en faveur de la paix. Elle se contentera vraisemblablement de se désintéresser de cette partie du monde. D’autres guerres l’attendent, comme l’invasion du Venezuela, par exemple.

Notes :

  • (1) Voir mon article du 6 avril 2025 : L’Europe est morte ! Vive l’Europe !
  • (2) Le dilemme de Zelensky : paix bancale ou défaite totale ? https://www.youtube.com/watch?v=EMtpZi4FMrQ
  • (3) Nous ne serons pas étonnés d’apprendre que Mercure, ou Hermès chez les Grecs, est aussi le dieu du commerce et des voyages, que ses attributs sont une bourse (!) qu’il tient à la main, et des sandales ailées.
  • (4) Arrêtez de mentir : Poutine n’est pas l’ennemi, c’est l’Ukraine l'agresseur. Tension sur LCI : https://www.youtube.com/watch?v=QhD_qOhosXI
  • (5) Brian Berletic : Les mensonges de Trump et sa guerre contre l’Iran : https://www.youtube.com/watch?v=fPiaGJaOOhI
  • (6) Oui, tout comme Fabius congratulant les islamistes du Front Al-Nosra :« Laurent Fabius s'est montré en pointe dans le dossier syrien, au côté de la rébellion à qui la France a livré des armes, et il est visé pour plusieurs déclarations publiques. Le chef de la diplomatie avait ainsi estimé, en août 2012, que "Bachar el-Assad ne mériterait pas d'être sur terre" et, en décembre 2012, que "le Front al-Nosra fait du bon boulot", alors même que cette organisation djihadiste syrienne venait d'être classée terroriste par les États-Unis. » (Le Figaro du 10 décembre 2014)
  • (7) Conquérir et détruire tous les pays du Moyen-Orient autour d’Israël pour créer en lieu et place « le Grand Israël ».
  • (8) Voir notre article du 13 août 2025 : Nos dirigeants européens sont-ils des créatures façonnées par les derniers nazis survivants ?

dimanche, 07 décembre 2025

Hommage à Didier Carette

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Hommage à Didier Carette

par Luc-Olivier d'Algange

Grande tristesse d'apprendre la mort de Didier Carette. Avec lui s'en vont encore la liberté, la générosité et l'audace, - autant de rares vertus qui feront que les médias n'en parleront guère. Directeur du théâtre Sorano à Toulouse qu'il revivifia durant une décennie, il en fut éloigné pour des raisons « politiques ».

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Que dire, sinon citer l'une des Feuilles orphiques ou pythagoriciennes qu'il aimait, et citer ses œuvres, dont la diversité et l'amplitude dépassèrent, de très loin et de très haut, tous les engagements partisans. Sa devise, populaire et aristocratique: «faire du théâtre non pour tous, mais pour chacun».

"Ceci est consacré à Mnémosyne,

Quand tu seras sur le point de mourir, tu t'en iras vers les demeures bien construites d'Hadès.

A droite, il y a une source près de laquelle se tient un cyprès blanc.

C'est là que les âmes des morts descendent et qu'elles s'y rafraîchissent.

De cette source surtout ne t'approche pas car tu en trouveras une autre, en face, d'où s'écoule l' eau fraîche qui vient du lac de Mnémosyne.

Au-dessus d'elle se trouvent les gardiens, ils te demanderont du plus profond de leur coeur,""ce que tu fais, et où tu vas, cherchant, dans les ténèbres du sombre Hadès.

Dis : je suis fils de Terre et de Ciel étoilé, mais je suis desséché par la soif et je meurs.

Donnez-moi vite l'eau fraîche qui s'écoule du lac de Mnémosyne.

Alors par le vouloir du roi des enfers, ils te traiteront avec bienveillance et te laisseront boire à la source de Mémoire.

Alors tu chemineras sur la voie sacrée, parmi les autres Mystes, dans la gloire de Dionysos."

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En rappel de ses oeuvres:

Metteur en scène :

2010

Cyrano de Bergerac d’Edmond Rostand mise en scène Didier Carette…

2009

Le Procès - Cabaret K d'après Franz Kafka mise en scène Didier Carette…

2008

La Cerisaie d’Anton Tchekhov mise en scène Didier Carette…

Le Frigo de Copi mise en scène Didier Carette

2007

Un tramway nommé Désir de Tennessee Williams mise en scène Didier Carette

Banquet mise en scène Didier Carette

2006

Rimbaud l'enragé – Une saison en enfer mise en scène Didier Carette

Le Bourgeois gentilhomme de Molière mise en scène Didier Carette…

2005

Dogs' Opera d'après Bertolt Brecht… mise en scène Didier Carette

Homme pour homme de Bertolt Brecht mise en scène Didier Carette…

2003

Folies Courteline de Georges Courteline mise en scène Didier Carette

Peer Gynt de Henrik Ibsen mise en scène Didier Carette

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2002

Satyricon de Pétrone mise en scène Didier Carette

La Nonna de Roberto Cossa mise en scène Didier Carette

1999

Karamazov d'après Fiodor Dostoïevski mise en scène Didier Carette

Nuit blanche d'après Fiodor Dostoïevski mise en scène Didier Carette

1998

Le Cas Woyzeck d'après Georg Büchner mise en scène Didier Carette

1997

Le Maître et Marguerite de Mikhaïl Boulgakov mise en scène Didier Carette

1989

Les Grandes Journées du père Duchesne de Jean-Pierre Faye mise en scène Didier Carette

1987

La Mère la joie... de Marie de Sévigné mise en scène Didier Carette

1986

Le Cabinet noir de Max Jacob mise en scène Didier Carette…

Il n'y a plus d'aventuriers d'après André Malraux mise en scène Didier Carette

1983

Pntgrl-Rabelais de François Rabelais mise en scène Didier Carette

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Comédien :

2010

Cyrano de Bergerac d’Edmond Rostand mise en scène Didier Carette…

2009

Le Procès - Cabaret K d'après Franz Kafka mise en scène Didier Carette…

2008

La Cerisaie d’Anton Tchekhov mise en scène Didier Carette…

1997

Le Maître et Marguerite de Mikhaïl Boulgakov mise en scène Didier Carette

1994

Le Voyage à Bâle de Pierre Laville mise en scène Simone Amouyal

1992

La Cerisaie d’Anton Tchekhov mise en scène Jacques Rosner

1986

Le Cabinet noir de Max Jacob mise en scène Didier Carette…

1982

Le Labyrinthe d’Armand Gatti mise en scène Armand Gatti

1980

Le Cocu d'infini de Louis-Ferdinand Céline mise en scène Jean-Claude Bastos…

1968

Le Chien du général de Heinar Kipphardt mise en scène Maurice Sarrazin…

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Auteur :

2005

Dogs' Opera d'après Bertolt Brecht… mise en scène Didier Carette

2003

Armada de Didier Carette

1994

Le Torero de salon d'après Camilo José Cela… mise en scène Henri Bornstein

1992

Armada de Didier Carette mise en scène Simone Amouyal

Traducteur:

2008

La Cerisaie d’Anton Tchekhov mise en scène Didier Carette…

Scénographe:

1997

Le Maître et Marguerite de Mikhaïl Boulgakov mise en scène Didier Carette

Collaborateur artistique:

2013

Nana d'après Émile Zola mise en scène Céline Cohen…

1980

Le Cocu d'infini de Louis-Ferdinand Céline mise en scène Jean-Claude Bastos…

Voir aussi: http://euro-synergies.hautetfort.com/archive/2018/12/05/d...

 

Zizanie en MAGA

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Zizanie en MAGA

par Georges Feltin-Tracol

La chronique hebdomadaire n°164 du 9 juillet 2025 s’intitulait « MAGA contre lui-même » (cf. http://euro-synergies.hautetfort.com/archive/2025/07/14/maga-contre-lui-meme.html ). Elle évoquait déjà les premières fissures au sein de ce mouvement composite. Plus de cinq mois après, force est de constater que le trumpisme poursuit sa fragmentation au point que certaines fractures deviennent béantes.

Trois facteurs principaux accentuent ces profondes divergences à l’intérieur de cette galaxie: la politique étrangère, en particulier la «relation spéciale» des États-Unis d’Amérique avec l’État d’Israël, le coût de la vie courante et l’affaire Jeffrey Epstein.

Jusqu’à présent, Donald Trump est l’un des rares présidents étatsuniens à n’avoir pas ordonné l’invasion d’un autre État. Pas sûr que perdure cette exception ! Le bombardement des sites nucléaires iraniens en juin 2025 en soutien aux actes terroristes du gouvernement israélien a irrité la faction isolationniste de MAGA qui s’oppose au courant néo-conservateur belliciste renaissant. Le déploiement d’une flotte de guerre en mer des Caraïbes au large du Vénézuéla largement ruiné par les sanctions agressives de Washington, fait craindre un risque élevé d’intervention militaire et un changement extérieur des institutions bolivariennes. Le prétexte de cette possible agression reste futile: Caracas serait à la tête des narco-cartels d’Amérique du Sud.

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Si Donald Trump fait couler des embarcations supposées contenir des paquets de drogue, il devrait se souvenir que, dans les années 1980, afin de financer la lutte contre les guérillas communistes et les gouvernements pro-soviétiques de Cuba et du Nicaragua, la CIA avait obtenu l’autorisation de Ronald Reagan et de son vice-président, l’ancien directeur de Langley, George Bush père, de recourir au trafic de drogue. Les agents de la CIA avaient ainsi conclu un pacte officieux avec le crime colombien. Si Trump veut bombarder des narco-États, qu’il fasse donc tirer des missiles sur Little Rock, la capitale de l’Arkansas !

L’appui inconditionnel de la Maison Blanche à Israël agace de plus en plus des ténors de MAGA tels Candace Owens ou Tucker Carlson, voire Charlie Kirk, quelques jours avant son assassinat. Ces figures très écoutées de la mouvance s’élèvent contre les persécutions des Palestiniens - dont les derniers chrétiens ! - par des colons fanatiques et/ou des soldats de Tsahal. Une césure essentielle apparaît par conséquent entre les chrétiens évangéliques sionistes et les nationalistes chrétiens qui découvrent enfin le poids écrasant des réseaux d’influence pro-israéliens dans le « marigot » de Washington. Ce n’est pas tout !

Outre un don de 25 milliards d’euros à l’Argentine du cinglé libertarien Javier Milei, la politique douanière radicale imposée par le 47e président des États-Unis alimente l’inflation. Des trumpistes apprennent que le protectionnisme n’est possible que si le pays dispose d’une auto-suffisance maximale dans tous les domaines. Ouverts au monde entier, les États-Unis dépendent néanmoins des autres continents. Seule une politique d’intervention régalienne dans l’économie lancée une décennie auparavant au moins aurait pu atténuer le choc de la hausse des prix. Par ailleurs, le shutdown (la fermeture partielle des services administratifs fédéraux pour cause de budget non adopté) de 44 jours (30 septembre – 13 novembre 2025) a durement atteint le quotidien des Étatsuniens sans oublier la réforme pernicieuse de l’assurance sanitaire fédérale (Medicare) qui frappe les plus démunis et les classes moyennes.

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Or, pendant cette crise politico-budgétaire, Donald Trump a célébré Halloween à Mar-a-Lago en Floride en organisant une somptueuse fiesta sur le thème de Gatsby le Magnifique en référence au roman de Francis Scott Fitzgerald. Les images et vidéos de cette fastueuse soirée ont agacé maints trumpistes convaincus qui savent que le niveau de vie reste la préoccupation n°1 de leurs compatriotes.

Les élections du 4 novembre 2025 marquent une vraie poussée démocrate (victoires de Zohran Mamdani à la mairie de New-York, d’Abigail Spanberger et de Mikie Sherrill au fonction de gouverneur en Virginie et au New Jersey par exemple). Ces succès confirment leur inquiétude pour le scrutin de mi-mandat en novembre 2026. Trump fait pourtant la sourde oreille et vire de son entourage tout rabat-joie.

La publication ou non du dossier Epstein est le dernier élément qui aiguise les tensions internes de MAGA. Il est curieux que le système médiatique s’y intéresse alors qu’il ne mentionnait cette affaire sordide qu’avec parcimonie sous Joe Biden… Rappelons aussi que ce même système a toujours qualifié de « complotiste » le «Pizzagate».

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Résidant à New-York, Jeffrey Epstein rencontrait tout le gratin de la «Grosse Pomme». Entrepreneur immobilier très couru, Donald Trump ne pouvait que le côtoyer aux réunions mondaines. Il paraît évident que les participants à ces raouts savaient (ou se doutaient) que leur hôte appréciât les très jeunes femmes au nom de la liberté sexuelle post-soixante-huitarde! Trump en a-t-il profité? Pour l’instant, aucune victime ne l’accuse, au contraire d’Elon Musk qui, dans un tweet ravageur, exprima sa rupture politique et personnelle avec Trump.

Quatre représentants républicains sont en pointe dans la dénonciation de ce scandale. Ils se dressent donc contre leur idole: le libertarien Thomas Massie, du Kentucky; Nancy Mace, élue de Caroline du Sud; Lauren Boebert (Colorado) et Marjorie Taylor Greene (Géorgie).

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Plus trumpiste que Trump lui-même, Marjorie Taylor Greene (photo) accumule contre elle tant de griefs que Trump l’accuse maintenant de traîtrise et de folie. Elle fait preuve d’un courage exceptionnel en se heurtant à la majorité MAGA. Elle s’élève contre les frappes sur l’Iran; elle apporte son soutien à la motion du sénateur indépendant – apparenté démocrate - du Vermont, Bernie Sanders, qui dénonce la famine à Gaza; elle parle de « génocide » à propos de la destruction de Gaza; elle exige la publication complète du dossier judiciaire sur Epstein. Enfin, elle prévient à plusieurs reprises depuis des mois que l’inflation et l’illisibilité de la politique économique trumpiste favorisent l’appauvrissement des classes moyennes qui risquent de basculer vers les démocrates. Les fortes vérités de Marjorie Taylor Greene lui valent la qualification d’«hérétique»…

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Lauren Boebert, Nancy Mace et Thomas Massie.

Marjorie Taylor Greene, Lauren Boebert, Nancy Mace et Thomas Massie rejoindront-ils le parti de l’Amérique d’Elon Musk ? Peut-être pas, car ce quatuor incarne l’aile populaire de MAGA. Il semble ne pas adhérer aux «Lumières sombres» qui prévoient des PDG–rois. Or les États ne sont pas des entreprises en plus grand. Cet éclatement en devenir fondera-t-il un nouveau clivage politique intérieur étatsunien dont on trouve un pan similaire chez les démocrates avec Alexandria Ocasio-Cortez, Zohran Mamdani et Bernie Sanders, celui de la «cause du peuple»? Cette cause trouve en tout cas une résonance soudaine avec la brusque popularité médiatique de Nick Fuentes.

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Une scission brutale dans le cœur de MAGA s’opère en effet le 28 octobre 2025. Ce jour-là, Tucker Carlson invite Nick Fuentes (photo) à son émission retransmise sur Internet et vue plus de six millions de fois. Âgé de 27 ans, Nicholas Joseph Fuentes pratique une radicalité nationaliste blanche et chrétienne que Le Monde, phare hexagonal de la désinformation, du 21 novembre 2025 stigmatise sans aucune retenue. Bien qu’invité à Mar-a-Lago par Trump en novembre 2022 aux côtés de Kenye West, Nick Fuentes se disputait souvent avec Charlie Kirk. Le récent succès médiatique de Fuentes préoccupe les conservateurs, éternels guerriers en peau de lapin. On voit ainsi se coaliser contre lui Dave Robin, un ancien comédien progressiste devenu animateur libertarien, l’intellectuel post-libéral converti à l’orthodoxie et exilé à Budapest, Rod Dreher, et l’agitée du bocal MAGA, Laura Loomer, qui explique sur X que le parti républicain «a un problème nazi». Elle se souvient qu’après l’avoir soutenu, elle a rompu quand Fuentes l’a qualifiée d’«espionne israélienne». Ambiance…

Toutes ces dissensions internes facilitent la zizanie actuelle. Elles pourraient aussi bien se révéler destructrices, à moins qu’elles propulsent MAGA à l’hégémonie culturelle.

GF-T

  • « Vigie d’un monde en ébullition », n° 177, mise en ligne le 4 décembre 2025 sur Radio Méridien Zéro.

16:39 Publié dans Actualité | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : actualité, états-unis, maga, donald trump | |  del.icio.us | | Digg! Digg |  Facebook

„L’Allemagne n’est pas un État souverain“: Höcke perçoit une domination structurelle extérieure

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„L’Allemagne n’est pas un État souverain“: Höcke perçoit une domination structurelle extérieure

Source: https://www.freilich-magazin.com/politik/deutschland-ist-...

Lors d'une conférence de presse nationale, l'homme politique de l’AfD de Thüringe, Björn Höcke, a récemment déclaré sans ambiguïté que l’Allemagne n’était pas un État souverain. Les compétences étatiques centrales ont été transférées à des organisations internationales.

Pour le leader de l’AfD de Thüringe, Björn Höcke, c’est clair: l’Allemagne n’est actuellement pas un État souverain donc n'est pas un Etat libre.

Erfurt. Fin novembre, l’AfD de Thüringe a publié un communiqué de presse dans lequel elle critiquait vivement les réflexions de la CDU de Thüringe, qui envisageait de mobiliser les jeunes pour un nouveau service obligatoire. Les démocrates-chrétiens voulaient „forcer les jeunes à un service“, alors qu’ils „poussent ce pays depuis des décennies vers l’abîme“, a critiqué l’AfD.

Le point central de la déclaration était l’accusation selon laquelle l’État perdrait son autorité morale s’il ne remplissait pas ses missions fondamentales. Un État qui „ne protège pas ses frontières et ne fait rien pour atteindre la paix en Europe de l’Est“, n’aurait selon l’AfD aucune légitimité pour „envoyer nos jeunes en service obligatoire – ni dans le cadre d'un service civil dit obligatoire ni dans le cadre d'un service militaire“. De telles mesures ne serviraient, selon l’AfD, qu’aux intérêts d’un „bureaucratisme idéologisé sans épine dorsale“.

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Exigence d’un État souverain

Dans le communiqué de presse, le président de la fraction AfD de Thüringe au Landtag, Björn Höcke, a repris cette argumentation. Avant que „même un seul jeune ne doive à nouveau porter l’uniforme sous la contrainte, cet État doit enfin redevenir un État pour les Allemands – souverain, libre et orienté vers les intérêts allemands.“

Lors de la dernière conférence de presse nationale avant la session plénière de décembre au Landtag de Thüringe, un journaliste s’est référé précisément à ce passage. Il a voulu savoir de Höcke si sa demande, selon laquelle l’Allemagne doit d’abord redevenir souveraine, signifiait que, selon lui, l’Allemagne n’est actuellement pas un État souverain et, par conséquent, n'est pas un Etat libre.

„Oui, nous ne sommes pas un État souverain“

Höcke a d’abord souligné que cela „se lit clairement dans le communiqué de presse“. Ensuite, il a confirmé cette interprétation sans ambiguïté. „Oui, nous ne sommes pas un État souverain“, a-t-il dit, et a ajouté que cela „est également tout à fait compréhensible en droit national“.

Pour justifier cela, il a expliqué que l’Allemagne avait transféré sa souveraineté en matière de défense à l’OTAN, sa souveraineté financière à la BCE, sa souveraineté économique à l’UE, et sa souveraineté sanitaire à l’OMS. Ces organisations, selon Höcke, ne seraient pas légitimées démocratiquement et ne seraient pas contrôlées démocratiquement. „Oui, l’Allemagne n’est pas un État souverain. C’est ainsi.“

Von der Leyen n’a pas à décider pour Euroclear

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Von der Leyen n’a pas à décider pour Euroclear

Wouter Vermeersch

Source: https://www.vlaamsbelang.org/nieuws/von-der-leyen-heeft-n...

Lors de la séance plénière de la Chambre, le député Wouter Vermeersch (VB) a interpelé récemment le Premier ministre Bart De Wever (N-VA) sur les fonds bloqués que l’Europe souhaite utiliser auprès d’Euroclear comme garantie pour des prêts à l’Ukraine. Démarche qui comporte des risques énormes pour les citoyens belges. « Non seulement la Russie indique que cela constitue un ‘acte de guerre’. La BCE refuse également de s’engager dans ce sable mouvant juridique, et cela en dit long », a déclaré Vermeersch, qui n’a malheureusement pas obtenu de la part du Premier ministre la garantie qu’il ne céderait pas à Ursula von der Leyen.

Vermeersch a souligné que la Commission européenne possède un talent qui ferait pâlir de jalousie de nombreux économistes communistes: elle peut vendre une expropriation comme de la solidarité. «Autrefois, les communistes saisissaient des tracteurs et des terres agricoles. L’Europe saisit simplement 190 milliards d’euros. Et les communistes avaient encore l'honnêteté de dire qu’ils allaient confisquer vos biens. La Commission présente cela comme un ‘plan pour l’Ukraine’», a déclaré Vermeersch.

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«Un faux pas et la confiance dans Euroclear, dans le système euro, dans le système financier s’effondre», a poursuivi le député nationaliste flamand. «Des experts mettent également en garde contre le fait que la Belgique pourrait, dans le pire des cas, faire faillite si la Russie prend des mesures et que nous devrions rembourser. Il s’agit d’une somme équivalente à un tiers de toute l’économie du pays. Mais au lieu d’écouter ces préoccupations légitimes, la tutelle européenne de la Commission européenne cherche maintenant un moyen d’éliminer notre pays en contournant les règles d’unanimité. En d’autres termes: la belle-mère européenne de De Wever, Ursula von der Leyen, veut le mettre échec et mat: elle veut simplement désactiver son veto, et donc ôter toute protection au contribuable dans notre pays. »

« L’Europe nous livre au surendettement et provoque à la guerre »

Vermeersch a souligné que l’importance de cette affaire pour le contribuable ne peut pas être sous-estimée. Il a évoqué une d'éventuelles représailles de la Russie, la rupture de la confiance internationale, la remise en question du système financier, et même la faillite du pays si nous devons rembourser. «Bien que le gouvernement De Wever n’ait pas besoin de la Russie pour cela. Ils sont déjà bien engagés à pousser ce pays au bord du précipice».

« Monsieur le Premier ministre, l’Europe devrait veiller à la prospérité et à la paix. Mais aujourd’hui, elle nous livre à un surendettement et provoque à la guerre », a conclu Vermeersch. «Euroclear se trouve à Bruxelles, donc en Flandre. Nous, Flamands, devons décider de ces fonds bloqués, et non Ursula von der Leyen ou la Commission européenne». 

samedi, 06 décembre 2025

L’Europe sous la domination du réseau mondial libéral

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L’Europe sous la domination du réseau mondial libéral

L’UE est une colonie d’un réseau libéral mondial qui n’a rien à voir avec les intérêts souverains européens

Alexander Douguine

L’UE n’est que restes, résidus du réseau mondial Sorosien/Obamiste/Bideniste. Elle s’effondre rapidement en raison de la perte du siège central américain. Les néocons, malgré tous leurs efforts, ne peuvent pas remplacer cette perte.

Dans l’équipe de Trump, les néocons (Lindsey Graham et bien d’autres) ont réussi à bloquer et à saboter la montée du vrai MAGA. Cela ne concerne pas seulement Netanyahu. C’est plus large. Mais… MAGA a réussi à confondre et à décimer les néocons, à les affaiblir, à les disperser.

Trump ne représente plus que la puissance militaire des États-Unis désormais. Mais les États-Unis gardent tout le contrôle sur l’UE. Idéologiquement, l’UE est encore sous double occupation. Et les élites libérales actuelles de l’UE sont les forces d’occupation qui œuvrent pour les intérêts de la secte mondialiste.

"L’UE n’est pas une colonie des États-Unis. Nous avons nos règles que nous définissons démocratiquement. Le chaos provoqué par Trump peut-être une opportunité pour l’UE. Elle doit prendre sa place et accepter d’établir un rapport de force pour s’affirmer comme puissance."

— Aurore Lalucq https://x.com/AuroreLalucq/status/1942526987580391897

Ce sont là des mots d'une incroyable stupidité. L’UE est une colonie d’un réseau libéral mondial qui n’a rien à voir avec les intérêts souverains des Européens. Quand ce réseau était contrôlé par les États-Unis, l’UE était une double colonie — de l’Amérique (militaire) et des mondialistes (idéologique et économique).

L’UE n’est souveraine en rien. C’est le laboratoire cynique pour des expériences post-humanistes. Les Européens sont les otages de leurs élites anti-européennes. Comme les Ukrainiens. Les Européens sont victimes de leurs propres dirigeants imposés par la secte mondialiste. Il n’y a plus de démocratie.

Si l’Europe choisit d’être, d’exister, ses peuples doivent immédiatement renverser les élites dirigeantes — brutalement et radicalement. Macron, Merz et Starmer incarnent la condamnation à mort de l’Europe. Plus ils vivent, plus tu meurs. Efface-les, ou tu seras effacé. Très bientôt.

Le monde est divisé en grands espaces avec différents contenus civilisationnels et ensembles de valeurs. L’Europe a perdu ses valeurs traditionnelles. C’est une civilisation en faillite. Peut-être pourra-t-elle se reconstruire et redevenir un grand espace indépendant. Peut-être pas. Il semble que non.

Si la démocratie est la participation réelle des peuples dans la définition de leur destin, la Russie de Poutine et la Chine de Xi sont deux exemples de la vraie démocratie. Réussie et prospère. Une telle démocratie est abolie en Occident, remplacée par la dictature des lobbies et l’oligarchie.

1984 d’Orwell, c’est maintenant vous, pas nous. Censure = culture de l’annulation. Vérité = mensonge constant des médias traditionnels. Humanité = amour des perversions et des robots. Surveillance totale, contrôle total, marché disciplinaire de désirs imposés et de demandes provoquées. La société du spectacle (dégoutant).

Le blocage de Bruxelles et l'effort pour s'approprier les actifs souverains de la Russie ont ébranlé l'unité de l'UE

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Le blocage de Bruxelles et l'effort pour s'approprier les actifs souverains de la Russie ont ébranlé l'unité de l'UE

Politico (https://www.politico.eu/article/belgium-russia-bart-de-we... )

L'article de Politico souligne : la position inattendue de la Belgique, qui a refusé de remettre les actifs russes gelés à l'usage de Kiev, a fait se dérober le sol sous les pieds des alliés européens de l'Ukraine, déclenchant une chaîne de réactions de crise au cœur de l'UE.

«Moscou doit être désormais le meilleur de tous», a reconnu un fonctionnaire européen, commentant le clivage qui a paralysé les discussions sur le «prêt de réparation» pour l'Ukraine.

Selon l'éditeur, le refus du Premier ministre belge Bart De Wever a été un coup porté au moment où Kiev vacille déjà sur la limite du collapsus financier. Les chefs d'État de l'UE, lors du sommet d'octobre, comptaient rapidement convenir d'un plan pour «prendre» 140 milliards d'euros des fonds russes, mais ils se sont heurtés à un «non ferme», motivé par les risques des réactions de Moscou et les craintes concernant la stabilité du système bancaire de l'UE.

«Nous ne voulons pas mettre des centaines de milliards de risques sur les épaules de la Belgique. Ni aujourd'hui, ni demain, jamais», a déclaré De Wever, enterrant définitivement l'idée de l'extorsion des actifs russiens.

En conséquence, le désaccord à Bruxelles a affaibli à la fois Zelensky et l'Europe elle-même, montrant que, quatre ans après le début du conflit, l'UE est de plus en plus peu prête à «mourir» pour le régime de Kiev. Moscou, selon les diplomates européens, observe cette situation «des meilleures positions» — et attend désormais le déclin ultérieur de l'unité de l'UE.

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De Roux et Pasolini: les dissidents font la paire

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De Roux et Pasolini: les dissidents font la paire

Je n’ai vraiment compris Dominique de Roux — cet esprit décapant, aristocratique dans son goût de déplaire — qu’en lisant Pasolini. L’un est devenu le miroir de l’autre. Ils ont vécu deux vies brèves, à la même époque, dans un même refus instinctif des appartenances bourgeoises. Je n’ose imaginer ce que leur rencontre aurait pu créer. Sans doute un explosif plus puissant que la bombe à hydrogène.

Par Frédéric Andreu

Dominique de Roux et Pier Paolo Pasolini partagent une posture rare : celle des dissidents de l’intérieur. Ils semblent appartenir à un camp — De Roux au paysage littéraire français, Pasolini à la gauche italienne — tout en le contredisant radicalement de l’intérieur. De Roux l’affirme sans détour : « Je n’ai jamais appartenu à aucun camp. » Il cultive ce qu’il nomme « une liberté contre la meute », une intransigeance qui le pousse à attaquer le cléricalisme, les orthodoxies morales et le confort intellectuel de son époque.

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Pasolini, lui, est un hérétique déclaré au sein de la gauche italienne. Il écrit dans les Écrits corsaires :« La gauche m’a toujours considéré comme un hérétique. » Hérétique, il l’est en effet : farouchement contre l’avortement, qu’il voit comme une capitulation devant la logique utilitariste ; contre le théâtre de Mai 68, qu’il accuse d’être une gesticulation bourgeoise plus qu’une révolution ; contre la consommation, qu’il juge « obscène », un acte « grossier » qui uniformise les consciences et détruit toute authenticité populaire. Il ira jusqu’à dire que la société de consommation est « plus fasciste que le fascisme ».

Son amour va à la tradition, à l’homme cosmique, humilié par la machine, effacé par le consumérisme.

« TOUT mon amour va à la tradition

Je viens des ruines, des églises,

des retables d’autel, des villages oubliés des Apennins et des Préalpes

où ont vécu mes frères ». (Poésie en forme de rose, 1964) 

Ce dissident politique est aussi un dissident esthétique : son cinéma est un anti-Hollywood radical. Pasolini refuse les corps lisses, les récits consolants, les couleurs de studio. Il filme à contre-jour de l’Occident cinématographique : théâtre filmé, visages non-professionnels, dialectes, rites archaïques, ascèse de la lumière. À l’usine à rêves, il oppose une fabrique du réel — une vérité nue, biblique, parfois cruelle, mais jamais trompeuse.

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Chez De Roux comme chez Pasolini, la dissidence s’accompagne d’un burlesque féroce. De Roux n’hésite pas à tourner en dérision certaines figures religieuses — le cardinal Daniélou « la calotte sur le tête », l’abbé Bruckberger notamment — avec une ironie d’une précision chirurgicale. Il critique les masques, les formes.

Pasolini, à son tour, met en scène dans Uccellacci e uccellini un corbeau marxiste, pédant et bavard, caricature hilarante de l’intellectuel de gauche. Il disait de ce personnage : « Le corbeau parle comme un intellectuel, mais il reste un oiseau : il critique tout, mais ne change rien. » (L’image même du politicien macronoïde parvenu aujourd’hui au pouvoir).

Ce burlesque n’est pas un divertissement : c’est une arme critique. Le rire démasque plus sûrement qu’un discours doctrinal.

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Dans la vie, pourtant, une rencontre a eu lieu : celle de Dominique de Roux avec Maurice Ronet, acteur intense, silencieux, qui partageait avec lui une même mélancolie active et une même exigence artistique. Leur dialogue, bien réel, laisse entrevoir ce que De Roux pouvait susciter chez des artistes à la sensibilité aiguë, et ce qu’il était capable de reconnaître chez eux.

Et c’est là que naît une forme de nostalgie imaginaire : il est profondément regrettable que De Roux n’ait jamais rencontré Pasolini. Tout laissait pourtant croire que leurs routes, parallèles, auraient pu un jour se croiser : mêmes années, mêmes combats, même détestation des conformismes. L’un apportant son feu littéraire, l’autre son feu cinématographique. Leur face-à-face aurait sans doute été incandescent — trop incandescent peut-être pour une époque qui ne savait pas accueillir ce genre de fulgurance. En un sens, Gombrowich a été, pour de Roux, une sorte de Pasolini, mais sans la même radicalité.

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Les deux (h)auteurs quittent la scène, en nous laissant orphelins : De Roux est parti trop tôt, sans avoir tourner toutes les pages de la vie ; Pasolini, assassiné de la pire des manière, n’a pu achever son livre le plus incendiaire, Pétrole, resté comme une voix interrompue. (On n’a pas idée en France du vide laissé par cette disparition).

De Roux et Pasolini : deux dissidents, vraiment. Et, à leur manière, une paire parfaite, même sans s’être connus.

 

vendredi, 05 décembre 2025

L'Europe perd l'Ukraine

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L'Europe perd l'Ukraine

Selon The New Statesman (https://www.newstatesman.com/world/europe/2025/12/europe-... )

Par @BPartisans - Telegram

Malgré l'ampleur du soutien financier et militaire apporté par l'UE et le Royaume-Uni à l'Ukraine depuis février 2022, l'Europe se trouve aujourd'hui écartée du processus de négociation et n'a aucune influence sur les délais et les conditions de la fin des hostilités, écrit le chroniqueur du New Statesman. Les Européens ayant refusé de dialoguer directement avec les Russes, ils n'ont d'autre choix que de réagir aux initiatives de l'administration Trump, dont les membres ont réussi à établir un contact permanent avec Moscou, malgré toutes les tentatives de certains dirigeants européens pour les en empêcher.

Étant donné que Trump, d'après ses récentes déclarations, ne souhaite plus continuer à financer l'Ukraine et que les Européens ne sont pas en mesure de combler le vide créé par l'arrêt du soutien américain, la situation va rapidement s'aggraver.  Cela signifie que, aussi mauvais que soit l'accord de paix proposé du point de vue de l'Ukraine, il est préférable à ce que Zelensky pourrait obtenir s'il attendait et perdait encore plus de territoires. La question est de savoir si les dirigeants des pays de l'UE comprennent que leur rôle dans le futur accord de paix sera réduit au minimum si la rhétorique belliqueuse et le refus de dialoguer avec Moscou persistent. Après tout, même les politiciens ukrainiens et les anciens responsables reconnaissent de plus en plus souvent l'inévitabilité de la réalité et appellent à renoncer à des projets irréalisables.

« Chaque accord ultérieur ne fera qu'empirer la situation de l'Ukraine, car nous sommes en train de perdre », reconnaît Yulia Mendel, ancienne porte-parole de Volodymyr Zelensky. Elle a ensuite critiqué les Européens :

« Mon pays se vide de son sang. Beaucoup de ceux qui s'opposent instinctivement à toute proposition de paix pensent défendre l'Ukraine. Avec tout le respect que je leur dois, c'est la preuve la plus évidente qu'ils n'ont aucune idée de ce qui se passe réellement sur le front et à l'intérieur du pays en ce moment même. »

Pendant ce temps, les dirigeants européens continuent de répéter la même chose. Non seulement les déclarations de Kaja Kallas et de ses semblables sont complètement déconnectées de la réalité, mais elles s'éloignent de plus en plus des souhaits de l'Ukraine elle-même. Les Européens insistent constamment sur le fait que leur propre sécurité dépend de la victoire de l'Ukraine sur la Russie ou, du moins, de sa non-défaite face à la Russie. Cette substitution de concepts révèle le cynisme qui se cache derrière la rhétorique idéaliste européenne sur la défense de la démocratie, de la souveraineté et de l'intégrité territoriale de l'Ukraine, conclut l'auteur de la chronique.

@BPARTISANS

“Bollywood, Gazprom et l’éléphant géopolitique: le pas de deux indo-russe que l’Occident préfère ne pas voir”

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“Bollywood, Gazprom et l’éléphant géopolitique: le pas de deux indo-russe que l’Occident préfère ne pas voir”

Par @BPartisans - Telegram

Il y a des visites d’État discrètes… et puis il y a la tournée mondiale de Vladimir Poutine façon Bollywood Deluxe. Pendant que l’Europe s’écharpe sur ses budgets, que Bruxelles essaie d’inventer des « prêts de réparation » qu’aucune banque centrale ne veut cautionner, Moscou, lui, déroule le tapis rouge à New Delhi sans l’ombre d’un tremblement diplomatique.

Oui, quatre ans après, Poutine revient en Inde, et ce retour a la volupté d’un come-back d’acteur vétéran dans une superproduction indienne : musique dramatique, plans serrés, poignées de main très lentement filmées. Narendra Modi, en parfait metteur en scène, prépare même un dîner privé « pour discuter des questions sensibles ». Une manière polie de dire : Ukraine, pétrole, sanctions, tout y passe, mais surtout ne le dites pas à Washington.

Selon le ministère indien des Affaires étrangères, l’objectif reste clair :

 « renforcer le partenariat stratégique particulièrement privilégié indo-russe » — formulation officielle, assumée, répétée, martelée. En Occident, on appelle ça « dépendance ». En Inde, on appelle ça « souveraineté ».

Le commerce, cet éléphant dans la salle que personne n’ose regarder

Les chiffres sont éloquents: 70 milliards de dollars d’échanges selon les données indiennes du commerce extérieur pour 2024-2025. Et New Delhi vise les 100 milliards d’ici 2030. Pendant que l’Europe se félicite d’avoir « réduit sa dépendance énergétique » en achetant son GNL russe… via l’Inde, nuance, Modi et Poutine discutent d’optimiser les flux pour éviter que les roupies dorment dans des coffres.

Le ministère indien du Commerce l’a dit officiellement :

 « Le déséquilibre commercial est insoutenable. L’Inde doit exporter davantage vers la Russie. »

Traduction : “Vladimir, prends nos médicaments et nos smartphones, sinon nos économistes vont faire un burn-out.”

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Défense : l’épine dans le pied de Washington

Ici, le scénario vire au thriller géopolitique.

L’Inde reste le premier client mondial d’armements russes. Le SIPRI le rappelle: 36% de l’arsenal indien est d’origine russe.

Et malgré les menaces américaines sous CAATSA, aucun gouvernement indien — pas même celui très « ami » de Washington — n’a reculé.

Les discussions portent sur :

  • Les S-400 : trois systèmes livrés, deux en attente.
  • Le Su-57 : sujet tabou pour Washington, sujet très intéressant pour New Delhi.
  • La production sous licence : douce musique aux oreilles du complexe militaro-industriel indien.

Comme l’a rappelé l’ambassadeur indien à Moscou:

 « L’Inde prend ses décisions de défense de manière indépendante. »

Un concept devenu manifestement exotique à Bruxelles.

Ukraine : Modi en “médiateur du Sud global”

New Delhi répète sa ligne officielle :

 « L’Inde appelle à une cessation des hostilités et au dialogue. »

Une position suffisamment vague pour être applaudie par tous et ignorée par chacun.

Mais le timing est savoureux : la visite intervient juste après l’échec du dialogue russo-américain.

Dans le jeu diplomatique actuel, être la seule puissance que Washington, Moscou, Bruxelles et Pékin peuvent encore appeler sans hurler… c’est un luxe que seule l’Inde s’offre.

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RT India : la géopolitique version prime time

Poutine lancera personnellement RT India, parce que rien ne marque un partenariat stratégique comme une chaîne télé de propag… pardon, d’« information alternative ».

Moscou y voit un accès direct à un public d’un milliard d’habitants.

New Delhi y voit un moyen d’équilibrer l’influence occidentale dans son paysage médiatique.

L’Occident y verra un complot. Comme d’habitude.

Conclusion : pendant que l’Occident se raconte des histoires, l’Inde écrit le scénario

Cette visite n’est pas un signe: c’est une gifle géopolitique avec anneaux sertis.

L’Inde affirme son autonomie.

La Russie montre qu’elle a toujours des partenaires majeurs hors Occident.

Et Washington comprend — encore une fois — que menacer New Delhi ne fonctionne pas.

Comme l’a dit le ministre indien des Affaires étrangères S. Jaishankar :

« L’Inde ne se laisse pas dicter ses relations internationales. »

Voilà. Rideau.

Bollywood 1 — Occident 0.

@BPARTISANS

21:44 Publié dans Actualité | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : politique internationale, inde, russie, actualité | |  del.icio.us | | Digg! Digg |  Facebook

L’UE bloque le gaz russe: coup dans le pied ou sanctions efficaces ?

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L’UE bloque le gaz russe: coup dans le pied ou sanctions efficaces ?

Source: https://unzensuriert.at/317344-eu-stoppt-gas-aus-russland... 

L’Union européenne s’est aujourd’hui, mercredi 3 décembre 2025, mise d’accord sur une interdiction totale du gaz russe. Ce que certains qualifient de sanction efficace contre Vladimir Poutine, d’autres le voient comme une attaque contre la sécurité énergétique de l’Europe.

Plus de gaz russe à partir du 1er novembre 2027

Selon l’accord, l’importation de gaz russe par pipelines, fondée sur des contrats à long terme, sera complètement arrêtée au plus tard le 1er novembre 2027. Le nouvel accord doit encore être formellement confirmé par le Parlement européen et les États membres au Conseil. L’objectif n’est pas seulement de rendre les États membres de l’UE indépendants à long terme des importations d’énergie en provenance de Russie, mais aussi de rendre l’interdiction totale d’importation pour que la Russie ait plus de difficultés à continuer à financer la guerre d’agression contre l’Ukraine.

Bruxelles intègre une clause de sécurité

Bruxelles ne semble pas totalement convaincu par ses sanctions supplémentaires contre la Russie, car l’accord contient une clause de sécurité: si la sécurité d’approvisionnement d’un ou plusieurs États membres devait être sérieusement menacée, la Commission européenne pourrait permettre aux pays de l’UE concernés de suspendre l’interdiction d’importation de gaz. Reste à voir si Poutine sera d’accord avec cela, mais, ça, c’est une autre question.

L’UE se dirige tête baissée vers une spirale descendante

L’accord, dévoilé cette nuit, suscite de vives critiques de la part de la députée européenne Petra Steger (FPÖ). Dans une déclaration, elle a dit:

"Alors que presque toute l’Europe dépend encore du gaz russe et que notre industrie souffre des coûts énergétiques qui explosent, les bellicistes bruxellois détruisent maintenant jusqu'au dernier vestige de sécurité d’approvisionnement. L’UE se dirige ainsi, tête baissée, vers une spirale descendante de désindustrialisation, de chômage en hausse rapide et d’une perte irréversible de notre compétitivité internationale."

Une ère avec perte rapide de prospérité

Au lieu d’investir dans une alimentation énergétique bon marché et fiable, l’UE se tourne vers un gaz liquéfié nettement plus coûteux, qui est également associé à d’énormes charges logistiques et écologiques. Et même cette source d’énergie risque de disparaître en raison de la réglementation de plus en plus extrême et de la bureaucratie excessive à Bruxelles — comme le menacent sans ambiguïté depuis des semaines les États du Golfe. Cela signerait la catastrophe énergétique totale et l’entrée dans une ère européenne de perte rapide de prospérité, a averti Mme Steger.