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vendredi, 31 octobre 2025

Les Etats d'Europe centrale se rapprochent - L'axe de coordination d'Orbán et la pression financière de Bruxelles

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Les Etats d'Europe centrale se rapprochent

L'axe de coordination d'Orbán et la pression financière de Bruxelles

Elena Fritz

Bron: https://t.me/global_affairs_byelena 

Selon les recherches de Politico, la Hongrie travaille avec la République tchèque et la Slovaquie à la création d'un bloc de coordination au sein de l'UE. L'objectif est de coordonner des positions communes avant les sommets européens, en particulier sur les questions relatives à l'aide à l'Ukraine. À Bruxelles, on parle déjà d'une « alliance anti-ukrainienne », mais il s'agit en réalité d'un signe qui annonce une différenciation croissante au sein de l'UE.

Les points clés de l'initiative sont les suivants :

- coordination régulière des chefs de gouvernement avant les réunions du Conseil;

- recherche d'une ligne commune pour l'Europe centrale;

- distanciation par rapport à la politique d'escalade envers Moscou.

Viktor Orbán a exprimé ouvertement ce que de nombreux gouvernements pensent sans le dire :

«L'UE est à court d'énergie et d'argent. Qui va payer pour ce qui reste de l'Ukraine?».

Ce scepticisme intervient dans une période de tensions financières croissantes au sein de l'UE. Politico décrit comment la Commission européenne exerce une pression croissante sur les États membres pour les contraindre à trouver un accord sur le financement de l'Ukraine.

Politico : « L'UE joue les durs: si vous ne voulez pas prendre l'argent de la Russie, ouvrez vos propres portefeuilles».

Selon Politico, la plupart des gouvernements rejettent l'idée d'une dette européenne commune (euro-obligations).

La Commission utilise donc cette question comme levier pour forcer l'accord sur la confiscation des avoirs russes.

- Les gouvernements qui s'opposent à de nouvelles dettes ou à des paiements à Kiev sont soumis à des pressions: « Si vous ne faites pas payer la Russie, vous devrez payer vous-mêmes. »

- Le plan B – les euro-obligations – est considéré comme encore plus toxique politiquement que l'utilisation des fonds russes gelés.

- L'Allemagne et les Pays-Bas, en particulier, rejettent catégoriquement l'idée d'un endettement commun, tandis que les États fortement endettés comme la France et l'Italie peuvent difficilement soutenir de nouvelles charges.

- Néanmoins, Bruxelles mise sur le fait que des pays comme la Belgique, où une grande partie des fonds russes sont stockés, finiront par céder, par crainte de l'alternative que représente l'endettement commun.

Le directeur du Centre for European Policy Studies, Karel Lannoo, est cité dans ce contexte:

«Le manque de discipline budgétaire dans certains pays est tel que les euro-obligations sont impensables pour les dix prochaines années. C'est pourquoi les actifs russes restent la seule issue».

L'UE est donc soumise à une double pression d'ordre temporel:

1. L'Ukraine pourrait se retrouver dans l'incapacité d'agir financièrement d'ici mars 2026.

2. Dans le même temps, il y a le risque d'une contre-alliance en Europe centrale, qui pourrait bloquer de nouveaux plans d'aide; ce risque s'accroît.

Selon Politico, un diplomate européen a commenté ouvertement la tactique de Bruxelles:

« C'est de la diplomatie : on offre aux gens quelque chose qu'ils ne veulent pas afin qu'ils acceptent la proposition la moins désagréable. »

Conclusion :

L'UE se trouve dans une impasse financière et politique. La tentative d'utiliser les actifs russes révèle non seulement des risques juridiques, mais aussi le processus d'érosion de la cohérence européenne.

Dans le même temps, un groupe d'États se forme en Europe centrale, qui mise sur la souveraineté, le réalisme et la raison budgétaire.

Entre Budapest, Prague et Bratislava, ce n'est pas un bloc anti-ukrainien qui se crée, mais un indicateur précoce du retour de la rationalité politique en Europe.

L’Autre Gramsci

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L’Autre Gramsci

par João Martins

Source: https://www.arktosjournal.com/p/the-other-gramsci

João Martins se souvient du frère oublié du célèbre théoricien marxiste italien Antonio Gramsci, Mario Gramsci, un soldat dévoué dont la vie aventureuse incarnait la loyauté, le courage et le destin tragique des guerres civiles en Europe.

Au-delà de toutes tendances idéologiques, nous admirons les hommes et les femmes qui ont consacré leur vie à un idéal. Sans de telles vies, expériences et actes décisifs de volonté ou de courage, toute conception du monde devient totalement dépourvue d’humanité — ces visages, ces sentiments et ces émotions sont si souvent portés à des niveaux d’intensité étonnants qu’ils débouchent sur des drames humains tragiques. Les guerres civiles représentent le point culminant de tels drames, car aucune famille n’échappe au spectacle de ses membres présents de part et d’autre des barricades.

Récemment, lors de mes pérégrinations à travers l’histoire européenne moderne, je suis tombé sur un épisode des plus curieux qui m’a profondément ému — un épisode qui s’est déroulé en Italie durant la première moitié du 20ème siècle, ou, pour être plus précis, durant ce que l’historien allemand Ernst Nolte appelait la "Deuxième Guerre civile européenne".

Je souhaite partager avec vous le destin d’un homme portant un nom bien connu, mais dont la mémoire, en raison de circonstances politiques, a été reléguée dans l’oubli obscur de l’histoire. J’en profite donc pour sauver de l’oubli une vie, une damnatio memoriae, et pour brosser, aussi brièvement et injustement que ce soit, sa biographie extraordinaire.

Antonio Gramsci, le célèbre penseur marxiste et théoricien de l’"Hégémonie culturelle", était en prison sous le régime fasciste, qui lui permit néanmoins de poursuivre son travail idéologique en captivité. Il est décédé il y a 70 ans. Nous pouvons éprouver une certaine sympathie pour cet homme, ou même étudier sa pensée complexe ; pourtant, aucun biographe ne pourrait lui attribuer ce qui rend une vie humaine plus riche et plus belle — l’esprit d’aventure, de renoncement, cette impulsion rebelle de marcher à contre-courant ou simplement d’être la « brebis noire » de la famille. La dernière expression convient ici le mieux, évoquant la chemise noire des escadrons fascistes — la même que portait fièrement le frère d’Antonio, Mario Gramsci, et dans laquelle il savait vivre et mourir.

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Né en 1893 dans une famille modeste, le plus jeune de sept enfants, Mario Gramsci ne vécut pas longtemps, mais ses jours furent remplis de sentiments profonds et d'un patriotisme ardent — une vie si intense qu’elle aurait pu sortir tout droit du Manifeste futuriste italien, cette célèbre diatribe de Marinetti contre la timidité et la conformité, qui exaltait «l’amour du danger, l’habitude de l’énergie et de l’audace (…) le courage, l'audace, la rébellion».

Dans l’année fatidique de 1914, la Première Guerre mondiale éclata — un conflit qui clôturerait dans le sang les illusions impérialistes du 19ème siècle. À 22 ans, Mario Gramsci soutint avec enthousiasme l’entrée de l’Italie dans la guerre en 1915 et s’engagea volontairement au front, où il combattit comme lieutenant. Lorsque le conflit prit fin, l’Italie se trouva plongée dans une crise politique et sociale profonde (1). La « victoire mutilée » et la montée de l’agitation communiste le poussèrent à rejoindre les Fasci di Combattimento, la nouvelle organisation fondée par le vétéran socialiste et ex-soldat Benito Mussolini. Il grimpa rapidement au poste de secrétaire fédéral du Fasci de Varese, et même les supplications persistantes d’Antonio Gramsci et de toute la famille (Mario était le seul fasciste parmi eux) ne purent le dissuader — pas même les solides raclées qu’il reçut des camarades communistes de son célèbre frère, qui l’envoyèrent à l’hôpital.

Antonio rompit tout contact avec lui en 1921. Néanmoins, en août 1927, à la demande de leur mère, Mario tenta de se réconcilier avec Antonio — qui était alors emprisonné à San Vittore — pour l’aider dans ses difficultés juridiques.

En 1935, l’Italie déclara la guerre et envahit le Royaume d’Abyssinie. Encore une fois, Mario Gramsci se porta volontaire pour rejoindre le corps expéditionnaire italien qui allait conquérir l’Éthiopie de l’empereur Haïle Selassié — une campagne féroce de neuf mois qui permit à Mussolini de proclamer depuis le Palazzo Venezia la naissance de l’Empire italien.

En 1941, au milieu de la Seconde Guerre mondiale, mû par son esprit guerrier et désormais âgé de 47 ans, Mario — qui considérait la vie comme une bataille permanente — retourna en Afrique, cette fois pour faire face aux forces britanniques menaçant les possessions italiennes en Libye et en Afrique orientale italienne.

À mesure que la guerre avançait, les puissances de l’Axe perdaient l’initiative, et le tournant du conflit s’opéra de manière décisive en faveur des Alliés. En 1943, suite à une série de défaites, une partie de la péninsule italienne fut envahie par les troupes anglo-américaines. Le mécontentement se répandit dans le Grand Conseil fasciste, et Mussolini fut démis de ses fonctions par le roi Victor Emmanuel III, puis arrêté. Peu après, le 8 septembre, vint la trahison de Badoglio: l’Italie se rendit aux Alliés et déclara la guerre au Troisième Reich.

Au milieu du chaos, Mario resta inébranlable, sa foi dans la doctrine fasciste demeura intacte. Mussolini, libéré de la captivité par un commando SS, proclama le 23 septembre l'avènement de la République sociale italienne (RSI) — la courte mais mal famée République de Salò. Au lieu d’accueillir les envahisseurs avec des drapeaux blancs, ou parfois rouges ou même américains, Mario Gramsci répondit à l’appel fasciste à continuer le combat, en s’engageant dans les forces armées de la RSI.

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Capturé par les partisans, le Gramsci fasciste fut remis aux Britanniques et déporté dans un camp de concentration en Australie, très loin de chez lui. Les conditions difficiles qu’il endura — une forme de traitement inhumain réservée surtout aux soldats fascistes sans repentir — détruisirent peu à peu sa santé.

Libéré fin 1945, il revint en Italie, pour mourir peu après, ses blessures en camp s’étant révélées incurables. Il fut admis dans une clinique mal équipée, où il mourut à l’âge de 52 ans, en présence de sa femme Anna et de leurs enfants, Gianfranco et Cesarina.

Ironiquement, il est intéressant de noter qu’Antonio Gramsci, lorsqu’il tomba malade en prison à cause d’une maladie chronique contractée dans sa jeunesse, fut libéré et, en tant qu’homme libre, put recevoir un traitement — aux frais du régime fasciste — dans une clinique privée.

Le nom de Mario ne fut jamais donné à une rue, contrairement à celui de son frère Antonio, et il est presque oublié dans les pages injustes de l’histoire. Pourtant, Mario — le Gramsci en chemise noire — reste sans doute l’image même de l’aventurier: un exemple de courage et de loyauté, la glorification du soldat politique. Peut-être que les mots de John M. Cammett résument la richesse émotionnelle de la vie de Mario Gramsci: « Il était volontaire pendant la Première Guerre mondiale, volontaire lors de la guerre en Éthiopie, et à nouveau lors de la Seconde Guerre mondiale (à 47 ans !). Et entre ces catastrophes, il était un volontaire enthousiaste pour l’idéologie qui l’a finalement détruit ! Quelle vie ! » (2).

Notes:

(1) Bien que nation victorieuse, l’Italie n’a pas vu la pleine mise en œuvre des traités qui lui auraient accordé des territoires supplémentaires et des avantages économiques.

(2) John M. Cammett, “L’autre frère de Antonio : une note sur Mario Gramsci,” International Gramsci Society Newsletter 7 (mai 1997) [ http://www.internationalgramscisociety.org/igsn/articles/...  ].

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Hegel et l’Intelligence Artificielle

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Hegel et l’Intelligence Artificielle

Un essai dialogique d’Enrico Arduin : le volume est ouvert par la préface de Massimo Donà, directeur de la collection, et par une contribution de Gianfranco Bettin

de Giovanni Sessa

Source: https://www.barbadillo.it/125712-hegel-e-lintelligenza-ar...

Arduin_.jpgNous avons lu un volume original et très actuel. Original, mais attention, non dans le sens commun du terme, renvoyant, dans le cas d’une production intellectuelle, à quelque chose d’inhabituel et de singulier, mais dans un sens profond, comme une production centrée sur la confrontation avec l’origine.

Ce livre est très actuel pour une autre raison: il aborde, au-delà de tout canon herméneutique déjà expérimenté, le problème de l’Intelligence Artificielle (IA). Il s’agit du essai dialogique du philosophe Enrico Arduin, récemment paru dans le catalogue des éditions InSchibboleth, dans la collection « Facéties, sagacités et minuties », Hegel e l'intelligenza artificiale. Dialogo su Assenza e Esistenza (= Hegel et l’Intelligence Artificielle. Dialogue avec ChatGPT sur l’Absence et l’Existence). Pour toutes commandes : info@inschibbolethedizioni.com).

Le volume commence par la préface de Massimo Donà, directeur de la collection, ainsi que par une contribution de Gianfranco Bettin. Ces deux textes synthétisent, avec une argumentation pertinente, les thèses d’Arduin et introduisent le lecteur dans l’univers idéal des thèmes complexes abordés dans les pages du volume.

Jusqu’à présent, la bibliographie critique sur le thème de l’IA a été marquée par des positions divergentes. D’un côté, les partisans de l’IA, qui en exaltent les avantages et les aspects positifs, de l’autre, ses détracteurs, qui la considèrent essentiellement comme un danger pour la liberté et la pensée. Arduin, en revanche, part d’un échange direct et actif avec l’IA, un dialogue sur des thèmes que certains pourraient considérer inhabituels pour l’IA, concernant les aspects les plus significatifs de la spéculation d’un des grands pères de la philosophie, Hegel.

Dans la première partie du volume, l’auteur a choisi, en tant que deutéragoniste, le plugin « Mr. Logical », basé sur ChatGPT ; dans la seconde section, Arduin dialogue avec un modèle plus avancé de ChatGPT, produit au cours des premiers mois de 2024, tandis que, dans les conclusions, le dialogue devient le chat de la toute dernière génération, GPT-4.5.

Arduin est conscient que, dans le contexte actuel, marqué par des dispositifs synthétiques constitués de PC et de téléphones, il existe une possibilité d’intégration entre la dimension physiologique-biologique de l’humain et celle représentée par la nouvelle technologie. La comparaison qu’il met en scène, remarque Donà, est celle qui existe entre « la fragilité et l’imperfection de notre être sensible et l’action symbolique générée par les articulations synaptiques complexes conservées par un processus computationnel sans identité matérielle ni corporelle » (p. 10). De ce processus, il ressort, à la manière nietzschéenne, la disparition du sujet, de l’agent, puisque tout est action.

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Les questions pressantes, critiques, parfois subtiles, que pose Arduin à l’IA, l’éclairent. L’incipit du dialogue avec l’IA revient tout au long de la discussion et est représenté par la dialectique hégélienne, relue au-delà des exégèses scolastiques accumulées dans la philosophie depuis plus de deux siècles.

La conversation montre que chez le philosophe allemand, les concepts de Dieu et de la Religion ne renvoient jamais, souligne le préfacier, à quelque chose de semblable à une réification conceptuelle fallacieuse, qui ne peut être ramenée au mouvement général de l’Esprit (p. 12). De cette conceptualisation, conçue de façon dynamique, non statique, découle l’auto-cancellation à laquelle toute détermination de l’Absolu est destinée.

Le philosophe vénitien Andrea Emo en a pris conscience dans son ultra-temporalité. Dans la logique de l’essence, Hegel a saisi la négativité du principe, qui se répercute perpétuellement dans l’apparition « positive » des multiples. L’auteur conclut: « Adopter cette perspective exige une ouverture philosophique à la fluidité de la réalité et à la nature provisoire de nos horizons conceptuels. Elle nous invite à voir le monde [...] comme un processus dynamique et interconnecté en devenir » (p. 21). Arduin évoque et confronte, dans le dialogue avec l’IA, la thèse du « manque » lacanien.

Le « manque », que nous expérimentons concrètement dans la vie, donne lieu à un mouvement désirant sans fin, destiné à déstabiliser [...] toute tentative de « fixer » la substance du réel » (p. 13). L’origine est infondée, c’est la liberté non réduite aux catégories eidétiques, aux universaux.

Hegel et Lacan sont envisagés comme des auteurs capables de résoudre le problème complexe du rapport entre nos existences individuelles, «incorporées», et «le réseau extrêmement compliqué de processus computationnels rendu à l’humain [...] par une action inexistante mais hyper efficace capable de modifier [...] notre rapport [...] avec la réalité» (p. 13). La vision de Lacan, selon l’auteur, « offre une voie valable pour comprendre le processus dialectique [...] en intégrant les dimensions physiques, existentielles et symboliques de l’expérience humaine » (p. 22), nous rendant donc, selon Bettin, conscients que l’histoire de l’individu est l’histoire de la physis.

L’exégèse de Hegel est menée par Arduin à la lumière de la notion de «contradiction». Elle clarifie l’interrelation entre être et non-être et présente cinq configurations. La confrontation avec l’IA permet aussi d’accéder aux thèmes éthico-politiques vivants: entre autres, avec le lien qui unit pouvoir et liberté, toujours entrelacés, de façon à ce que, précise Donà, «reconnaître l’un, c’est aussi reconnaître, dans l’un, l’autre» (p. 15).

La thèse centrale du livre doit être saisie dans la discussion sur les développements futurs de l’IA, qui prévoient la nullification de la distance entre processus neuronaux numériques et l’expérience de la conscience analogique. Les premiers, attention, tendent toutefois à nier le flux de conscience humaine. La solution se trouve encore une fois dans la notion de «contradiction» chez Hegel, où les «dépassés» (intelligence analogique et computationnelle) ne sont pas effacés, mais radicalisés dans leur incommensurabilité. Une «synthèse», donc, incapable d’être vraiment telle, et de statuer et d’atteindre un nouveau positivum. En fin de compte, l’auteur remarque que la révolution informatique ne fait que remettre en question le problème de la signification, sur lequel la réflexion philosophique s’est penchée, dès l’origine, de manière sceptique et critique.

Enrico Arduin, Hegel e l'intelligenza artificiale. Dialogo con ChatGPT su l'Assenza e l'Esistenza (= Hegel et l’Intelligence Artificielle. Dialogue avec ChatGPT sur l’Absence et l’Existence), Edizioni InSchibboleth, pp. 345, 26 euros

jeudi, 30 octobre 2025

Orbán ressuscite l’esprit de Visegrád

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Orbán ressuscite l’esprit de Visegrád

Source: https://report24.news/orban-belebt-den-geist-von-visegrad...

Hongrie, Slovaquie et République tchèque – un trio de pays d’Europe centrale, dirigé par Orbán, Babiš et Fico, qui refuse de se soumettre aux eurocrates bruxellois. Désormais, le groupe de Visegrád cherche à se redonner vie avec ces trois États.

Pendant que Bruxelles inonde Kiev de milliards et parle de “solidarité européenne”, un contrepoids se forme discrètement mais avec détermination en Europe centrale. Viktor Orbán, qui est depuis des années l’enfant terrible de l’UE, pense que son heure est arrivée. Après les récentes élections en République tchèque et le retour au pouvoir du pragmatique Andrej Babiš, de nouveaux horizons stratégiques s’ouvrent. Avec le Premier ministre slovaque Robert Fico, Orbán veut raviver ce qui, autrefois, en tant que “groupe de Visegrád”, a conservé une bonne dose de bon sens – et qui pourrait aujourd’hui devenir le dernier bastion du bon sens sur un continent dominé par une fièvre de nature idéologique.

Si Prague, Bratislava et Budapest unissent leurs forces, elles pourraient sérieusement freiner la folie financière et politique des aides à l’Ukraine. Orbán a déjà prouvé à plusieurs reprises qu’il sait comment bloquer la machinerie de l’UE – au grand dam de la Commission, qui s’arroge de plus en plus de pouvoirs. Mais cette fois, il y a davantage en jeu. Il ne s’agit plus seulement de sanctions ou de quotas de réfugiés, mais de la question de savoir si l’Europe continuera à se laisser entraîner dans une guerre économique ou si elle choisira une voie basée sur la raison économique.

L’alliance de Visegrád – autrefois symbole de la résistance contre la tutelle bruxelloise – s’est effondrée lorsque la Pologne a rejoint, une fois pour toutes, la politique anti-russe menée par les États-Unis. Mais désormais, cette idée renaît sous la forme de “Visegrád 3”. Orbán, Babiš et Fico – trois hommes très différents, mais partageant un même point de vue: leur refus de faire de leurs pays des États vassaux de la bureaucratie européenne.

La victoire de Babiš aux élections tchèques marque un tournant décisif. Le milliardaire et ancien Premier ministre en a assez des leçons moralisatrices de Bruxelles. Son programme: défendre les intérêts nationaux plutôt que la loyauté transatlantique. Il se rapproche ainsi plus que jamais d’Orbán. Fico, de son côté, privilégie le dialogue avec Moscou plutôt que l’escalade – ce qui met en rage les soutiens de Kiev en Occident. Ce qui se forme ici n’est pas simplement une alliance politique utile, mais un contrepoids idéologique: souveraineté nationale contre ingérence supranationale, politique réaliste contre exaltation gonflée à la moraline, recherche de paix contre guerre permanente.

Une telle alliance constitue une épine dans le pied pour Bruxelles. Un pays seul peut plus facilement être mis sous pression qu’un trio. Si Budapest, Prague et Bratislava défendent leurs intérêts conjointement, à l’avenir, l’équilibre des pouvoirs dans l’UE pourrait basculer. Au Conseil, le bloc “Visegrád 3” aurait assez de poids pour bloquer de futurs financements pour l’Ukraine ou des paquets de sanctions. Bruxelles redoute le scénario qu’elle craint le plus: une coalition de forces réalistes au cœur de l’Europe.

De plus, au Parlement européen, on commence à sentir du mouvement. Balázs Orbán, le directeur politique du Premier ministre hongrois, a annoncé que la fraction “Patriots for Europe” voulait s’unir aux conservateurs européens et aux souverainistes. L’objectif : une nouvelle majorité de droite qui pourrait faire vaciller l’alliance déjà fragile d’Ursula von der Leyen. Ce double-front contre les eurocrates bruxellois sera-t-il couronné de succès ?

Foreign Affairs: « L’Amérique doit diviser le groupe BRICS » – Quand le monde devient trop indépendant

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Foreign Affairs: « L’Amérique doit diviser le groupe BRICS » – Quand le monde devient trop indépendant

Elena Fritz

Source: https://t.me/global_affairs_byelena 

Aux États-Unis, on pense désormais à voix haute à chercher comment fragmenter le bloc que forment les États du BRICS.

Dans Foreign Affairs, la revue porte-voix de l’élite de la politique étrangère américaine, deux stratégistes républicains, Richard Fontaine et Gibbs McKinley, écrivent très franchement que les États-Unis devraient isoler la Russie et la Chine — tout en se rapprochant davantage du Brésil, de l’Inde et de l’Afrique du Sud.

Pourquoi ?

Parce que ces cinq pays font quelque chose qui effraie Washington: ils construisent étape par étape un monde soustrait au contrôle américain.

Le véritable cœur du problème : le pouvoir par l’argent

Les auteurs le disent presque sans détour: si les États du BRICS commencent à ne plus commercer entre eux en dollars américains, Washington perdra son arme de pression la plus importante — le système financier utilisé comme une arme.

Car tant que le dollar reste la monnaie mondiale, les États-Unis peuvent presque frapper n’importe quel pays via les banques, le système SWIFT et les sanctions.

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Mais si le Brésil achète du pétrole en yuan, l’Inde paie en roupies et la Russie utilise ses réserves d’or, cette emprise disparaît peu à peu.

C’est cela qui compte — pas la démocratie, pas les valeurs invoquées, mais la domination économique.

Pourquoi les États-Unis doivent diviser

Un bloc BRICS uni serait une véritable alternative à l’ordre occidental: banques de développement propres, systèmes de paiement indépendants, et une voix politique commune qui ne plie pas devant Washington.

C’est ce qu’ils veulent empêcher.

Ils tentent donc de séduire les États « plus neutres » — le Brésil, l'Inde, l'Afrique du Sud — avec des accords commerciaux, des contrats d’armement, de l’attention diplomatique.

Objectif: affaiblir la cohésion interne du groupe BRICS pour que la Russie et la Chine restent seules.

La logique plus large...

Ce n’est pas un cas isolé, mais une partie d’une stratégie éprouvée: lorsqu’un concurrent devient trop fort, il est divisé de l’intérieur. Cette méthode a déjà fonctionné durant la Guerre froide — et elle doit maintenant empêcher la transformation de l’ordre mondial.

Mais cette fois, l’Occident ne fait plus face à des États dépendants, mais à des puissances régionales confiantes qui ont déjà appris à gérer les offres de Washington sans se soumettre.

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Conclusion :

Ce que Foreign Affairs présente comme une « stratégie », c’est en réalité la reconnaissance d'un fait patent: celui d'une hégémonie qui perd son contrôle.

Quand une superpuissance commence à parler ouvertement de division, cela montre qu’elle craint déjà l’unité des autres.

Et c’est là que se trouve le vrai tournant de la politique mondiale.

Les États-Unis ne combattent pas le BRICS, ils luttent pour retarder le moment où ils perdront le contrôle de la scène mondiale.

Il ne s’agit pas de politique, mais de garder le contrôle sur le système monétaire.

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Moeller van den Bruck, avant-garde de la révolution conservatrice

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Moeller van den Bruck, avant-garde de la révolution conservatrice

Par Enrico Colonna

Source: https://www.ilprimatonazionale.it/primo-piano/konservativ...

Souvent, lorsqu’on parle de la Révolution Conservatrice, l’idée qui en ressort est assez floue. Non pas parce qu’on ignore ce dont il s’agit — du moins parmi ceux qui s’intéressent à ces questions — mais parce que ce mouvement était plutôt varié en lui-même et parce qu’à différence d’autres mouvements culturels du 20ème siècle, la Révolution Conservatrice n’a pas eu de véritable manifeste (comme par exemple le Manifeste du Futurisme de 1909). Pour une systématisation bibliographique de ce mouvement, il faut attendre l’essai d’Armin Mohler de 1950, La Révolution Conservatrice, récemment réédité en Italie par "Passaggio al Bosco Edizioni" dans une version enrichie avec la bibliographie de Nicola Cospito et les essais d’Alain De Beniost, Adriano Scianca et Lorenzo Di Chiara.

Les trois étapes de la révolution conservatrice

Cependant, on peut repérer une sorte de « manifeste en trois étapes » dans l’œuvre de l’un de ses principaux initiateurs : Arthur Moeller van den Bruck. Né en 1876, soldat de réserve durant la Première Guerre mondiale, Moeller van den Bruck écrivit dans la dernière décennie de sa vie trois essais qui devinrent en quelque sorte les manifestes de la Révolution Conservatrice : Le Style prussien (1916), Le Droit des jeunes peuples (1919), et Le Troisième Reich (1923).

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Une « triade » qui amena un penseur marxiste comme Stefano Azzarà à qualifier Moeller van den Bruck de « Lénine de droite », en raison de ses réflexions sur l’effondrement de l’ordre bourgeois et la nécessité d’une transformation radicale après un tel effondrement.

Moeller van den Bruck a ses racines culturelles dans la lecture passionnée de Nietzsche et dans la critique artistique et littéraire: notons que sa première notoriété en Italie vint avec son essai La beauté italienne, écrit après un séjour en Toscane où il put admirer l’art et l’architecture du Moyen Âge et de la Renaissance. De cette formation culturelle émerge sa conception particulière du « style », qui, selon lui, ne concerne pas seulement l’art ou l’esthétique.

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Le style est la forme morale que donne un peuple à sa vie. La louange ici n’est pas pour la Prusse en tant qu’État ou sujet historique-politique, mais comme « manière d’être » : une façon d’être qui privilégie la mesure à l’excès, qui exaltent la primauté du devoir sur le plaisir, qui oppose l’héroïsme quotidien « anonyme » basé sur la constance à l’héroïsme du geste spectaculaire et de la gloire personnelle.

Le style et le droit des peuples jeunes

Moeller van den Bruck, en effet, est très satisfait que l’Allemagne se soit unifiée sous la direction du Royaume de Prusse et non, par exemple, du Royaume de Bavière : en s’unifiant sous la direction et l’impulsion militaire prussienne, l’Allemagne s’est formée sur cette base morale. Il soutient également qu’il existe des « Prussiens d’adoption », comme Georg Wilhelm Friedrich Hegel (originaire de Stuttgart), c’est-à-dire ceux qui ont fait leur la mentalité prussienne. La Prusse n’est donc pas une entité géographique sur la carte, mais — justement — un « style » qui imprègne tous les aspects de la vie.

À la fin de la Grande Guerre, Moeller van den Bruck acheva la rédaction de la deuxième étape de son « manifeste » de la Révolution Conservatrice : Le Droit des jeunes peuples.

A la base de ce texte se trouve une distinction assez « classique » : celle entre vieux et jeunes peuples. Les premiers, qui ont atteint le sommet de leur civilisation et sont désormais en déclin, doivent être balayés par les seconds, qui n’ont pas encore atteint leur plein développement et qui ont le droit historique et moral de se manifester sur la scène de l’histoire.

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Est ici évidente l’influence de la pensée de Hegel dans ses Leçons sur la philosophie de l’histoire, où le philosophe de Stuttgart souligne la nécessité du conflit et de la « tempête » pour garder la mer de l’histoire limpide et empêcher qu’elle ne se transforme en un marécage calme et plat.

Le conflit par lequel l’ancien est renversé par le nouveau occupe une place centrale dans la pensée de Moeller van den Bruck. La Première Guerre mondiale a été, dans cette vision de l’histoire, un « chapitre » de cette lutte.

La troisième voie du nationalisme allemand

Mais la notoriété de Moeller van den Bruck repose surtout sur la création d’une expression qui, après sa mort (en 1925, par suicide), a acquis une grande popularité : Le Troisième Reich.

Cette expression devint un mot-clé du mouvement völkisch, bien avant que le national-socialisme en fasse son programme politique.

Il est également intéressant de voir comment, à l’origine, l’auteur envisageait d'intituler « Der Dritte Weg » (la Troisième Voie)  cet essai qui constitue la troisième et dernière étape de son « manifeste »: une voie « allemande » vers la révolution, alternative aussi bien au capitalisme qu’au socialisme scientifique.

Comme le note Armin Mohler dans l’essai déjà cité sur la Révolution Conservatrice :

« Face au Saint-Empire romain universel de la nation allemande et au petit ‘Zwischenreich’ (l'Empire intermédiaire) de Bismarck, Moeller van den Bruck, avec le ‘Troisième Reich’, propose l’image d’un Empire final, où les contradictions du socialisme et du nationalisme, de la gauche et de la droite, s’annulent en se réunifiant. Le chiffre trois ne signifie pas seulement la succession des empires au fil de l’histoire ; il exprime l’idée d’une synthèse conciliant une thèse et une antithèse. »

En somme, un Empire de l’âme et un « mythe politique » mobilisateur. Une condition morale avant d’être historique, semblable à celui de l'« Allemagne secrète » évoquée par les intellectuels (comme l’historien Ernst Kantorowicz) réunis dans le cercle du poète nationaliste Stefan George.

Les Balkans sont la chair et le sang de l’Europe, tandis que l’UE n’est qu’une institution économique

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Les Balkans sont la chair et le sang de l’Europe, tandis que l’UE n’est qu’une institution économique

Maintenant, les drones turcs équipent les Albanophones du Kosovo, où le conflit pourrait être réactivé contre la Serbie

Par Francesco Cosimato

Source: https://www.barbadillo.it/125378-i-balcani-sono-carne-e-s...

Les livraisons de drones militaires au Kosovo par la Turquie remettent en question le statut des Balkans occidentaux et leur position par rapport à l’Union européenne, et plus généralement par rapport à l’Europe, cette réalité physique qui ne correspond pas aux institutions européennes : celles-ci ne représentent qu’une partie du continent et uniquement du point de vue économique : l’UE n’est pas un État.

Les drones sont des Skydagger Rft15, drones FPV capables de transporter jusqu’à 5 kg de charge utile, y compris des explosifs, et de voler sur 10 km à 130 km/h. Ils ont été fournis en grande quantité aux forces du Kosovo, qui, conformément à des accords prévoyant la présence des forces de l’OTAN (Kfor), ne devraient avoir que des missions de sécurité intérieure. Ils ne devraient donc pas disposer d’armes offensives.

Anti-Slaves, c’est-à-dire anti-Russes

Les Balkans sont assurément européens, mais ils sont lourdement marqués par des rivalités historiques et des ingérences occidentales : les États-Unis sont intervenus dans l’ex-Yougoslavie pour des raisons anti-slaves et, surtout, anti-russes.

L’auteur de cet article s’est rendu au Kosovo et voit comment la région est bien vivante grâce au financement américain, et comment les conditions de vie difficiles des minorités serbes sont inacceptables et incontestables, tout comme celles de la majorité albanaise.

L’Europe est un concept culturel depuis l’époque de Charlemagne, mais l’UE semble ne pas savoir ce qu’est l’Europe quand elle poursuit des politiques dictées par des puissances outre-océaniques.

La position turque dans les Balkans, depuis longtemps, est d’islamiser la région, formant une sorte de sandjakkat, qui, en se basant sur les données historiques ottomanes, comprime l’entité serbo-slave pour servir les intérêts des États-Unis.

Adhésion suicidaire à la politique américaine

La direction actuelle — une gouvernance, non élue par les peuples — de l’UE devrait examiner attentivement s'il est vraiment utile de suivre les États-Unis dans leur lutte contre les zones slaves en Europe. Priver l’Europe de la composante slave, cela ne signifie pas seulement la priver d’énergie, ce qui est déjà une question stratégique importante. Priver l’Europe de la Serbie et de la Russie, cela signifie priver le vieux monde de sociétés cohésives qui s’opposent à la dérive woke et gender, importée d’outre-atlantique. Le patriarche serbe de Belgrade s’installe à Pećka Patriarska, un lieu du Kosovo, juste pour mieux comprendre.

Cette gouvernance ne parvient pas à définir des lignes d’action diplomatique pour calmer les crises qui nous entourent. Cela conduira probablement à une Europe amputée, sans énergie, vieillie et idéologisée. Du Moyen-Orient à l’Asie, l’Europe devient insignifiante.

Diplomatie non, guerre oui

Les déclarations bellicistes de la commissaire européenne, Kaja Kallas, responsable de la politique étrangère et de la sécurité, indiquent la volonté d’éviter la voie diplomatique pour gérer les conflits. La volonté de la présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen, de « réarmer » une Europe qui n’est pas un État, s'avère également nuisible et dangereuse.

Une des choses les plus importantes à connaître sur les Balkans occidentaux est la « bataille de la plaine des merles », défaite serbe contre les Ottomans à Kosovo Polje le 28 juin 1389, épisode clé de la lutte entre chrétiens et Ottomans. Que ceux qui veulent livrer les Balkans au Sandjakkat aillent de l’avant…

mercredi, 29 octobre 2025

L'Europe, la grande perdante dans la guerre entre les États-Unis et la Chine pour les métaux rares, selon les médias

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L'Europe, la grande perdante dans la guerre entre les États-Unis et la Chine pour les métaux rares, selon les médias

Source: https://es.sott.net/article/102129-Europa-la-gran-perdedo...

Bruxelles risque de devenir subordonnée aux deux puissances en raison de sa dépendance aux services numériques américains et à l’exploitation minière chinoise, avertit le journal The Financial Times. Il ajoute que l’investissement de l’UE dans les industries clés est ridicule par rapport aux milliards que Pékin et Washington y investissent.

« La double dépendance de l’Europe vis-à-vis des services numériques américains et de l’industrie chinoise de traitement des minéraux critiques la rend très vulnérable aux pressions extérieures », souligne-t-il. 

Cela s’aggrave du fait que la stratégie de l’UE concernant les matières premières entre en conflit avec l’opposition des écologistes, tandis que ses investissements technologiques sont bien inférieurs à ceux de la Chine et des États-Unis, indique la publication. 

Même dans le domaine où l’Europe était considérée comme leader — énergie solaire, éolienne et véhicules électriques — la Chine domine actuellement ces secteurs, notamment avec la production de batteries au lithium. 

« Si Bruxelles ne parvient pas rapidement à mobiliser les États membres, l’UE finira par devoir supplier en permanence la Chine, les États-Unis ou les deux », résume The Financial Times. 

Cela se produit dans le contexte de la guerre technologique entre Pékin et Washington, dans laquelle les États-Unis restreignent l’accès de la Chine aux microprocesseurs, majoritairement fabriqués à Taïwan. La Chine, pour sa part, est devenue le leader mondial du traitement des métaux rares, en réalisant ses opérations à un coût 30% inférieur à celui de ses concurrents et en monopolisant les terres rares. Cela lui permet de contre-attaquer et d’imposer ses propres règles du jeu. 

Les nouveaux tarifs douaniers imposés par Trump contre la Chine entreront en vigueur à partir du 1er novembre, ce qui porterait les droits de douane de Washington contre Pékin à 130%, alors que jusqu’à présent, la Chine applique une taxe de 10% sur les produits américains. 

Le 15 octobre, la Chine a lancé un avertissement aux États-Unis concernant la guerre commerciale. La réponse de Pékin aux tarifs américains sera ferme et personne ne l’intimidera, ont assuré le ministère chinois du Commerce.

Guerre financière

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Guerre financière

Andrea Marcigliano

Source: https://electomagazine.it/guerre-finanziarie/

Bart De Wever, le Premier ministre belge, est tenaillé par de nombreux doutes.

La confiscation des biens russes, des actions et autres, situés dans l’Union européenne, pour les remettre à Zelensky, le laisse extrêmement perplexe. Et ce n’est pas parce qu’il serait un dangereux pro-russe. Absolument pas.

Le fait est qu’un tel comportement serait extrêmement inhabituel. Même pendant la Seconde Guerre mondiale, les biens allemands déposés dans les banques occidentales n’ont pas été touchés. Et inversement, bien sûr.

Il s’agit d’une attention mutuelle visant à ne pas faire totalement s’effondrer le système international du crédit et des banques.

Mais maintenant, la Commission européenne, soutenue par certains gouvernements, notamment ceux l’Allemagne et de la France, souhaite aller dans cette direction. Tous les actifs financiers russes seraient confisqués. Et, ensuite, remis à Zelensky.

Cependant, c’est là que commence la perplexité et l’inquiétude du Premier ministre belge. La Russie ne pourrait pas ne pas réagir, en confisquant et nationalisant des actifs économiques et surtout des entreprises européennes. Et cela causerait un grave, très grave, préjudice. Car ce que, dans leur ensemble, les pays européens perdraient, est énormément supérieur à ce qu’ils pourraient confisquer en actifs russes. Sans parler du petit détail que tout ce qui est confisqué en Europe irait, tout droit et gratuitement, dans les mains cupides de Zelensky. Tandis que les pertes retomberaient sur les pays européens eux-mêmes.

Ceci dit, De Wever est, manifestement, quelqu’un qui sait compter. Et il se rend compte que le jeu n’en vaut pas la chandelle.

Au contraire, il représente une voie très rapide vers le suicide économique.

D’où sa perplexité, qu'il exprime toutefois de manière très mesurée. Et cependant, très significative.

Car beaucoup, même dans les pays d’Europe occidentale, commencent à douter de cette politique de l’Union, visant une guerre sans règles ni quartier contre Moscou.

Des doutes qui, de l’Espagne à la Belgique, fragilisent de plus en plus ce qui reste encore debout de cette marionnette unitaire.

Pourquoi la gauche perd les élections... et est rejetée par les classes populaires

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Pourquoi la gauche perd les élections... et est rejetée par les classes populaires

Nicolas Maxime

Source: https://www.facebook.com/nico.naf.735

Javier Milei a été confirmé aux législatives de mi-mandat, encore un nouveau signe que le basculement dans le Monde vers la droite populiste se poursuit, pendant que la gauche continue de s’effondrer, incapable de comprendre ce qui lui arrive. La gauche perd élection après élection, et elle continuera à les perdre, partout dans le monde, pendant que l’extrême droite poursuit sa progression — y compris avec un programme économique pourtant contraire aux intérêts matériels des classes populaires. Pourquoi ? Parce que l’extrême droite, elle, a parfaitement compris la logique girardienne du bouc émissaire, en désignant les « assistés », les chômeurs, les migrants voire les fonctionnaires et les retraités comme étant responsables de la crise. Tandis que la gauche, devenue nullissime (y compris dans ses formes dites « radicales »), n’a plus rien compris au peuple, au point d'en être venue, par inversion mimétique, à faire du prolo blanc son bouc émissaire car perçu comme un plouc ou un  « beauf » réactionnaire et raciste.

Cette déconnexion avec le réel s’incarne parfaitement dans le mépris de classe d’un Édouard Louis, qui va jusqu’à rêver — comme il l’exprime sans gêne — d’un régime où les villes et les campagnes auraient des gouvernements séparés, tant il estime irréconciliables le peuple urbain « progressiste » et les campagnes jugées réactionnaires. C’est le symbole parfait d’une gauche culturelle, moraliste et métropolitaine, qui ne supporte plus le peuple réel, celui qui ne parle pas comme elle, ne vit pas comme elle, et surtout, ne vote plus pour elle.

Aux yeux des classes populaires, motivées par un instinct de survie et de préservation de leur mode de vie, la gauche d’aujourd’hui n’est plus qu’une « gauche morale », une gauche qui incarne précisément tout ce qu’elles détestent.

Cette « gauche morale » n’a plus grand-chose à proposer sinon quelques réformes sociétales, une écologie quinoa-vegan fondée sur les interdictions et la culpabilisation, et la taxation des riches comme ultime horizon moral. En somme, elle est devenue la gauche du Capital — celle des médias, des grandes institutions culturelles, des universités et des métropoles. Elle est désormais considérée par les classes populaires comme plus dangereuse encore que l’extrême droite, parce qu’elle a trahi le camp qu’elle prétendait défendre, elle inspire désormais le rejet d’une majorité silencieuse qui, faute d’alternative crédible, se tourne vers l’extrême droite ou se réfugie dans l’abstention, perçue comme le moindre mal.

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Comme le disait Jean-Claude Michéa, cette gauche a définitivement rompu avec le peuple dès lors qu’elle a cessé de se définir par la critique du capitalisme pour se fondre dans la logique du progressisme libéral. Depuis les années 1980, elle a abandonné la lutte des classes, la socialisation des moyens de production et la défense du monde du travail, pour devenir « gauche morale » des droits individuels, de la redistribution des richesses et de la bonne conscience. Elle ne s'adresse plus aux ouvriers et aux employés mais à la bourgeoisie culturelle, à ceux qui détiennent le capital symbolique, et non plus à ceux qui n’ont que leur force de travail pour vivre.

Comme le résume Michéa, elle ne combat plus le système, elle l’accompagne au nom du « progrès ». Et c’est précisément parce qu’elle a cessé d’être populaire qu’elle est devenue, dans le regard des classes populaires, la gauche du haut, celle des donneurs de leçons et des convertis au nouvel ordre moral libéral.

Dans ses enquêtes sur les campagnes françaises, il montre que les territoires périphériques et ruraux, loin d’être des bastions réactionnaires, sont d’abord des espaces de sociabilité, de solidarité et d’entraide, mais où domine un profond sentiment d’abandon. Coquard décrit un monde populaire attaché à la reconnaissance, au travail bien fait et qui voit dans la gauche diplômée et urbaine non plus une alliée, mais une élite moralisatrice qui ne les comprend pas et les méprise.

Pendant que la gauche sermonne et culpabilise, l’extrême droite capte les affects, les colères, les peurs — bref, tout ce que la gauche a méprisé au nom de sa « supériorité morale ». Et c’est ainsi qu’elle s’installe durablement comme le seul refuge politique pour ceux qui, désespérément, veulent encore croire qu’ils existent.

Bien entendu, l’extrême droite ou la droite populiste sera une impasse, et les classes populaires le découvriront (malheureusement) à leurs dépens. Car ce ne sont pas les immigrés, les minorités ou les élites culturelles qui menacent leurs modes de vie et les traditions : c’est le capitalisme lui-même, dans sa phase terminale, qui bascule désormais vers une forme autoritaire et libertarienne, où il n’y aura plus aucun compromis avec les travailleurs.

La véritable question est donc : comment le faire comprendre sans tomber dans les mêmes travers que la gauche morale ?

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Un pont à Budapest - Trump, Poutine et Orbán aux carrefours du chaos et de la puissance à Budapest

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Un pont à Budapest

Trump, Poutine et Orbán aux carrefours du chaos et de la puissance à Budapest

Alexandre Douguine

Alexandre Douguine retrace comment Budapest émerge comme le point de friction où l’imprévisibilité de Trump et la stratégie de Poutine reshaping le jeu mondial.

Entretien avec Alexandre Douguine dans le programme Escalation

Présentateur : Donald Trump, le président des États-Unis, sera fréquemment mentionné dans notre émission aujourd’hui. Il a eu une conversation téléphonique avec Vladimir Poutine et a rencontré personnellement Vladimir Zelensky. Je souhaite poser une question simple: sans les comparer directement, mais en analysant la dynamique de ces relations — comment la situation a-t-elle évolué après la conversation avec Poutine et la rencontre avec le leader du régime de Kiev? Existe-t-il des différences fondamentales entre ces interactions, ou Trump reste-t-il fidèle à son style, partout et toujours?

Alexandre Douguine : Lorsqu’on évalue le comportement de Trump en ce qui concerne la résolution de notre guerre contre l’Occident — en gros, contre Trump lui-même sur le sol ukrainien — nous partirons naturellement de notre propre perspective. Chaque fois que Trump fait un pas en direction de la Russie, nous considérons sa démarche comme favorable. Lorsqu’il soutient Zelensky et les politiques militaristes russophobes de l’Union européenne, nous qualifions une telle posture d’hostile. Pourtant, Trump vacille — il fait un pas dans une direction, un autre dans l’autre. Au moment où nous le déclarons favorable, il nous contredit subitement en promettant des Tomahawks aux Ukrainiens, en proclamant que l’Ukraine peut nous vaincre sur le champ de bataille, en exigeant que la Chine et l’Inde abandonnent l'achat de notre pétrole, et en renforçant les plans agressifs de l’UE. Dès que nous le qualifions d’hostile, il convoque Zelensky, l’humilie publiquement, le réprimande, lui tire les oreilles, se moque de ses protecteurs européens, et annonce en souriant qu’il serait heureux de rencontrer son “ami Vladimir” en Alaska ou à Budapest. L’Union européenne panique — Orbán et Fico apparaissent comme des rossignols blancs en raison de leur position souveraine. Trump ajoute alors: «Et si, demande-t-il à Zelensky — nous construisons un tunnel entre l’Alaska et la Sibérie russe?». Zelensky reste alors sans voix — c’est une humiliation publique. Nous trouvons cela amusant et commençons à penser que Trump se range de notre côté. Mais quinze minutes plus tard, il dit: « Peut-être que je plaisantais. Peut-être que je donnerai quand même les Tomahawks — je vais y réfléchir. Une rencontre ? — pas clair. Le tunnel ? — je ne sais pas. L’Inde doit toujours abandonner le pétrole. » Et il redevient hostile.

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De notre point de vue, son essence est insaisissable — il est à la fois une chose et une autre, son contraire. Cela est devenu sa norme, sa façon de faire. La gamme de ses fluctuations est plus grande que celle de l’administration Biden. Biden a poursuivi une politique d’escalade — pression sur la Russie, soutien maximal à l’Ukraine, militaire, économique, diplomatique, médiatique — mais dans certaines limites, évitant la confrontation nucléaire. Leur ligne rouge était claire: ne jamais dépasser la limite de l’escalade contrôlée. Trump semble n’avoir pas de telle limite. Livrer des Tomahawks à Kiev serait une menace anti-russe plus dure que tout ce que Biden a osé. C’est effrayant: dans le sens des politiques anti-russes, Trump est prêt à aller plus loin que les globalistes. Pourtant, il peut tout aussi bien dire à Zelensky: «Gère toi-même ton conflit avec les Russes» — chose impensable sous Biden. L'amplitude de ses variations s’étend dans les deux sens: on peut attendre de lui du favorable ou du catastrophiquement dangereux. Un pas vers nous sera presque certainement suivi d’un virage brusque vers nos adversaires. Il cherche à s’élever au-dessus du conflit, mais en reste un participant.

Poutine tente de négocier avec lui; lorsque Trump est par hasard sur notre longueur d’onde, il écoute des arguments d'ordre historique. Mais seulement partiellement — car c’est difficile pour lui. La raison historique pour laquelle l’Ukraine nous appartient demande des connaissances, de la dialectique et de la compréhension pour les origines de ce conflit. L’histoire de l’Amérique est courte — trois ou quatre siècles. La nôtre est longue; celle de la Chine remonte à cinq mille ans. Trump n’a aucun intérêt pour cette longue durée; il n’a pas le temps de s’y plonger. Il agit par impulsion — parfois en cherchant à obtenir le Prix Nobel, prix discrédité, qui est devenu une marque de honte pour les personnalités les plus viles, celles qui le reçoivent. Il aspire à la gloire d’un pacificateur, mais n’y parvient pas. Israël a soutenu ses “missions de paix” pendant quinze minutes avant de se remettre à bombarder Gaza. A ses propres yeux, il demeure un héros, et cela le motive. Pourtant, en substance, il ne se range derrière personne. Un pas vers nous — Budapest, la réprimande à Zelensky, le refus des Tomahawks — est suivi d’un coup de pied de la Maison Blanche. Il écoute un chanteur italien puis réprimande Zelensky: « Va-t’en ! ». C’est un spectacle effrayant, mais l’humiliation, cela fait partie de son style.

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Ce pandémonium ressemble à la série américaine Succession, où le magnat change de position chaque seconde, humiliant sans cesse tout le monde — ses proches, le monde entier, celui qui lui est proche et celui qui lui est éloigné. Pour Trump, le monde entier, c'est sa “succession”. Un geste vers nous ne doit nous donner aucune illusion — attendez-vous à un revirement soudain. Nous, cependant, nous avons un objectif stratégique: l’Ukraine sera nôtre, ou elle cessera d’exister. La neutralité est impossible; après ce qu’elle a fait, tout espoir en ce sens est perdu. Pour bétonner nos intérêts, nous devons rétablir le contrôle sur elle. Telle est notre tâche, et nous avançons dans cette direction — pas nécessairement dans l'immédiat, mais étape par étape. Trump, lui, s’en fiche; il est motivé par des motifs superficiels, momentanés, mais souvent grevés d'une grande dangerosité. Il n’est pas un allié et ne nous offrira pas l’Ukraine en cadeau. Nous devons la libérer nous-mêmes, la reconquérir, et établir une gouvernance conforme à nos intérêts.

Échapper à une Troisième Guerre mondiale — nucléaire ou autre — demeure une inconnue. Mais Poutine agit brillamment, de manière cohérente, cherchant à gagner en Ukraine sans déclencher une apocalypse nucléaire qui serait suicidaire. Telle est notre position.

Aux États-Unis, la situation paraît différente. Il y a trois forces stratégiques en présence. La première est le mouvement MAGA, grâce auquel Trump s’est élevé au pouvoir. Leur position est proche de la nôtre: pas d’interventions, pas d’aide à Zelensky — car ils estiment que ce n’est pas leur affaire. Quand Trump met fin à tout soutien à Zelensky, il parle au nom du mouvement MAGA: que Russes et Ukrainiens gèrent le conflit eux-mêmes. C’est aussi l'avis de l'électorat principal, la stratégie de MAGA. Lorsque Trump dévie, les militants de MAGA s’en affligent; lorsqu’il revient à leurs positions, ils l'acclament: « C'est mon président — c’est pourquoi j’ai voté pour lui». Si il dit: « Je vais donner des Tomahawks à Kiev », ils répondent: « Pas mon président — ce n’est pas la raison pour laquelle j’ai voté». C’est une force puissante. Ils veulent une Grande Amérique, pas un garant de la démocratie mondiale à la Wilson. Ils s’opposent au libéralisme, à la mode LGBT, au mouvement Antifa de Georges Soros, à la corruption, à Epstein.

Les Démocrates, la seconde force en présence, soutiennent Zelensky mais restent dans l’opposition et n’ont aucune influence sur la politique de Trump. La troisième force — les néoconservateurs et les RINOs, l’ancienne garde des Républicains cherchant l’hégémonie mondiale — comme Kellogg et d’autres autour de Trump, le poussent vers l’escalade. Entre MAGA et les néocons, Trump oscille, comme il le fait face à nos propres positions. Sa position sur l’Ukraine est le test décisif. MAGA est contre le soutien à Zelensky, mais Trump cherche à apparaître indépendant — comme Logan Roy dans Succession.

Présentateur : Au fait, je me souviens avoir lu que certains des scénarios et personnages de Succession étaient inspirés de Trump et de sa famille, même si la série a été créée avant sa présidence. En revenant à sa personnalité — d’après vos mots, il est clair que Trump possède une certaine stratégie, que ses actions et déclarations reposent sur quelque chose. Pourtant, beaucoup en Europe, en Amérique et en Russie constatent que Trump peut soudainement sortir quelque chose ou agir impulsivement simplement parce qu’il est Trump. Avant la dernière élection, Poutine, en réponse à la question de qui serait préférable pour la Russie, a nommé Biden — en disant qu’il était plus prévisible. L'imprévisibilité de Trump est-elle vraiment le résultat d’un manque de connaissance profonde ou de frivolité? Son équipe, disons, est plutôt expressive. Lorsqu’on leur demande pourquoi Budapest a été choisie pour une rencontre Trump–Poutine, ils répondent : « Et ta mère. »

Alexandre Douguine: Poutine a soutenu Biden pour ne pas nuire à Trump — s’il avait nommé Trump, ils l’auraient éliminé de la course, en l’accusant d’être la tête d'un « complot russe ». Ce fut une faveur. Biden était prévisible; ses lignes rouges étaient claires. Lui et les démocrates poursuivaient une escalade linéaire — une guerre chaude avec tout l’Occident qui finira par éclater.

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L’imprévisibilité de Trump va dans deux directions: il peut aller plus loin dans l’escalade ou dans la réconciliation. Son impulsivité, sa frivolité — qui, parfois, ressemblent à de la démence — sont évidentes. Celles de Biden étaient silencieuses; celles de Trump sont tapageuses. Mais il y a néanmoins une logique. Lorsque des néoconservateurs comme Kellogg ou le terroriste, désigné comme tel par la Russie, Lindsey Graham, lui mettent la pression, il s’appuie sur MAGA. Lorsqu’il demande trop à MAGA, il se tourne vers les néocons. Ce mouvement entre les pôles n’est pas une simple spontanéité mais un algorithme.

La réponse « et ta mère » à la question sur Budapest dépasse la simple impolitesse; c’est une réponse au ton russophobe de la question — l’allusion « es-tu l’espion de Poutine ? », Caroline Leavitt et l’équipe de Trump disent essentiellement: « Fous le camp, porc ». Et ils ont raison — c’est ainsi qu’on doit parler à une opposition fallacieuse qui a déclenché une guerre. Les journalistes libéraux qui assiègent le gouvernement se saisissent de telles phrases.

L’impulsivité de Trump possède sa propre logique, comme celle de Prigogine dans la physique du chaos: le chaos est un ordre complexe. Poutine a parlé à Valdai de la «philosophie de la complexité» d’Edgar Morin. Dans le monde quantique, Trump navigue bien — même si ce n’est pas la mécanique classique de Newton, mais un système non linéaire. Ses conditions aux limites sont plus larges que celles de Biden. Il est prêt à l’escalade tant que cela évite la guerre nucléaire. Biden, par russophobie, pouvait faire empirer la situation, tandis que Trump fait peut-être semblant d’être prêt à l’apocalypse. C’est un épicurien, un bon vivant, ni suicidaire ni fanatique, prêt à sacrifier les principes libéraux pour en tirer des avantages.

Présentateur : En poursuivant notre entretien — peut-être en abordant un autre sujet — j’aimerais discuter plus en détail du lieu possible de la prochaine rencontre entre Poutine et Trump. Cela revient à ce que vous avez mentionné plus tôt. A Budapest, en Hongrie: dans une ville avec un héritage historique et des atouts modernes liés au pays même et à ses dirigeants. Comment doit-on voir ce choix si les présidents de la Russie et des États-Unis se rencontrent réellement là-bas et si le choix de Budapest est confirmé?

Alexandre Douguine: Cette situation doit être analysée à travers le prisme des couches politiques et géopolitiques de la réalité. Il est évident que l’Europe n’est pas une — il y a deux Europes. Autrefois, l'«Occident collectif» — l’administration Biden et l’UE — formait un seul champ, celui des démocraties libérales et du mondialisme, avançant un programme de perversions, de défilés LGBT (interdits en Russie), de turbulences BLM, de haine de ses propres racines et cultures, de culture de l’annulation, de migrations incontrôlées. C’était la plateforme commune de l’Occident — des États-Unis et de l’Europe ensemble.

La révolution de Trump, fondée sur le mouvement MAGA, a introduit des tendances opposées en Amérique. Les États-Unis se sont retrouvés dans une position unique: ils sont toujours le « père » de l’Europe — le "papa" comme Rutte et von der Leyen appellent Trump, le parrain de l’Europe — mais leur président suit une stratégie contraire à celle des dirigeants de l’UE. J. D. Vance en a parlé en Europe; Elon Musk soutient activement les populistes, secouant les élites libérales-globalistes en Grande-Bretagne, en France, en Allemagne et en Roumanie via X.com. Ces élites ont été vaincues en Amérique, mais conservent une influence en Europe.

La deuxième Europe est souveraine, populiste, « à la façon du mouvement MAGA » — faire en sorte que l’Europe soit à nouveau grande, par analogie avec MAGA. C’est l'Euro-Trumpisme, défendant l’indépendance et la souveraineté, s’opposant aux mondialistes, à la migration de masse, au pandémonium LGBT et au mariage gay — tous interdits en Russie et en Hongrie. Le Budapest d’Orbán est la citadelle de l'Euro-Trumpisme, une forteresse du conservatisme et des valeurs traditionnelles où Soros, les défilés gays et la migration illégale sont interdits. C’est le contrepoids, façon MAGA, c'est une autre Europe face à l'Europe de l'UE.

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Interrogé sur « pourquoi Budapest ? », Trump répond: «C’est notre territoire». Orbán est son allié le plus proche en Europe. Fico est un populiste de gauche, tandis qu’Orbán est de droite et conservateur comme Trump. Un autre populiste conservateur est notre propre président Vladimir Poutine, qui mise sur le peuple et les valeurs traditionnelles tout en s’opposant à la migration et aux perversions. Trois leaders — Poutine, Trump et Orbán — se rencontrent à Budapest, un lieu plus proche de la Russie mais encore inclus dans l’Occident. Anchorage était autrefois proche aussi, faisant partie de notre ancien empire, tout comme la Hongrie durant la période soviétique. Trump exécute une danse géopolitique à nos frontières — hier l’Alaska, aujourd'hui Budapest. Après la visite de Poutine chez son ami Orbán, il est logique que Trump vienne à notre rencontre. Orbán est un outsider parmi les dirigeants paléolibéraux, mais il est un ami de Trump et de Poutine. En quel "ailleurs" pourraient-ils se rencontrer, sinon chez un ami commun, en quel autre lieu ces deux puissances en guerre devraient-elles se rencontrer pour bâtir des ponts? La Hongrie d’Orbán est l’adversaire principal de l’Ukraine: son veto bloque l’aide militaire, financière et diplomatique à Kiev au sein de l’UE. Orbán est notre ami, l’ami de Trump, proche des deux. Zelensky est en mode panique — il a subi une humiliation triple. Il s’appuie sur la direction libérale-globaliste de l’UE — Schwab, Larry Fink, le Forum de Davos. Zelensky est leur marionnette, un opposant à toute forme de souveraineté, aux nations et aux traditions, imaginant un monde sans la Russie, l’Ukraine, la France ou l’Allemagne — un gouvernement mondial et une humanité zombifiée. Sous couvert de patriotisme, il trahit idéologiquement l’Ukraine. Orbán, en revanche, est un vrai patriote hongrois, ne cédant pas la souveraineté ni à l’UE, ni à nous, ni à Trump. La Hongrie est le point symbolique idéal pour une rencontre Poutine–Trump.

Si la rencontre réussit à se faire — bien que, comme nous l’avons dit, rien n’est prévisible avec Trump, car il peut faire n’importe quelle cabriole dans son algorithme chaotique — la prochaine étape serait une visite de Trump à Moscou, à Saint-Pétersbourg, à Kazan ou à Sotchi, mais pas encore en Crimée. Trump tourne autour de nous: nous avançons vers lui, ou lui vers nous, ou nous nous rencontrerons sur un terrain neutre. L’Europe, sauf Orbán et Fico, n’est pas neutre — c’est une zone de conflit car elle arme le régime de Zelensky. Budapest est le choix logique de Trump. Les journalistes qui ont demandé « pourquoi Budapest ? » ont été rapidement écartés — le choix est évident. Où sinon, si ce n’est là? Anchorage a déjà été utilisée; l’Inde est impossible à cause de la question du pétrole; la Chine et le monde islamique ne conviennent pas. Budapest s’adapte parfaitement. Trump s’y sent confiant, parmi les alliés idéologiques du mouvement MAGA. Pour nous, c’est optimal: Fico est de gauche, Trump est de droite, et il n’accepte pas les gauchistes.

Cette rencontre pourrait être une percée — mais dans la fragile, volatile réalité de Trump, où il se comporte comme une figure de la mécanique quantique plutôt que comme en physique classique. Le monde sombre dans le chaos, qui exige une pensée rapide. L’inconstance de Trump n’est pas une folie, mais une logique d’un autre ordre. La psychanalyse révèle des scripts dans le chaos. Pour une action efficace, il faut une diplomatie quantique — comme Poutine l’a dit à Valdai — qui prend en compte les boucles rétroactives d’Edgar Morin. La résolution d’un problème en crée un autre — économique, idéologique ou religieux. Poutine gère ce chaos avec brio, suivant un algorithme complexe orienté vers la consolidation de la puissance, de la souveraineté et vers un monde multipolaire. Ses mouvements semblent non linéaires, mais ont du sens pour ceux qui les perçoivent. Trump est un chaos plus sauvage, mais lié à un algorithme. Une approche intégrée psychologique, idéologique et géopolitique pour le prochain rendez-vous pourrait le rendre fructueux. La convergence de Trump avec MAGA et avec nous donne naissance à l’idée d’un tunnel Alaska–Sibérie. La formuler, c’est déjà redessiner la carte du monde à l’ère de l’information.

D’un certain point de vue, c’est du trolling — mais dans notre époque, presque tout est du trolling. Nous vivons dans un monde rapide, superficiel, où la vérification des faits a disparu. Les mondialistes libéraux ont approprié ce terme : leurs intérêts sont des «faits», tout le reste est «fake» ou relève d'une «théorie du complot». La vérification des faits elle-même est devenue un faux. Les gens sont déconcertés; exposer les flux d’informations n’a plus d’importance. Le projet Alaska–Sibérie, lancé par Trump et repris par Poutine, commence à vivre sa propre vie. Qu’il soit réel ou non, cela importe peu. Il dissout le système mondialiste pour lequel un tel projet serait impensable. Une proposition d’un président américain, au cœur d’une guerre entre l’Occident et la Russie, pour une communication directe — cela sabote leur campagne informationnelle, comme l’a fait le sabotage du gazoduc Nord Stream en une forme matérielle, mais ici cela se passe dans l’imagination. À l’ère de l’information, l’imagination l’emporte sur la réalité.

Un jour, j’ai publié sur les réseaux sociaux une image générée par IA de Brigitte Macron comme une figure de type "Néandertal" sortant d’une grotte. Candace Owens l’a repostée, et maintenant cela figure dans un procès en France contre elle — une demande de 200 millions de dollars pour un repost. Où se trouve la frontière entre l’imagination et la réalité juridique? C’est un exemple de la philosophie de la complexité, des relations internationales quantiques.

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Présentateur : Revenons au Moyen-Orient. Cessez-le-feu, accords, la guerre stoppée par Trump — tout cela n’existe plus. Israël continue de frapper et l’admet ouvertement, déclarant ironiquement: «Nous frapperons maintenant, lancerons une opération, puis reviendrons à la paix».

Alexandre Douguine: Les mêmes cycles courts se répètent. Trump a arrêté la guerre, est arrivé à la Knesset, a reçu des applaudissements, est reparti — et tout a été oublié. La guerre continue, les gens meurent comme si de rien n’était. Personne ne le remarque; ils tournent la page et passent au sujet suivant — disons, à Budapest. Dans ce monde, il n’y a pas de stabilité — ni paix, ni guerre, ni victoire, ni défaite. C’est un monde de cycles courts, de fragments, de clichés, de titres de journaux réarrangés dans un ordre aléatoire. Baudrillard a appelé cela la post-histoire — où le passé et l’avenir échangent leur place à travers des flux informationnels. Netanyahu enregistre de nouvelles frappes sur Gaza comme si c’étaient des anciennes — d’avant le cessez-le-feu — et tout le monde acquiesce. Nous vivons dans un monde de discours. La vérification des faits devient absurde — cela prend trop de temps ; les gens oublient. Il faut, comme faire du surf, chevaucher les vagues des campagnes d’information vers son propre objectif, sans se laisser distraire. Israël fait cela — et, hélas, avec succès — poursuivant une politique atroce qui coûte des milliers de vies humaines.

 

mardi, 28 octobre 2025

Fico appelle à la création d'un front slave contre la folie de l'UE

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Fico appelle à la création d'un front slave contre la folie de l'UE

Source: https://x.com/SlavicNetworks

Le Premier ministre slovaque Robert Fico s'occupe de lancer ce qui pourrait devenir l'un des changements politiques les plus importants au sein de l'Union européenne depuis des années.

Il a proposé une nouvelle alliance entre la Slovaquie, la Pologne, la Hongrie et la République tchèque, quatre nations d'Europe centrale, principalement slaves, qui partagent des liens culturels, historiques et économiques profonds.

Son objectif : mettre fin à ce qu'il appelle la « folie » de Bruxelles.

Qu'entend Fico par « folie de l'UE » ?

Le dirigeant slovaque affirme que l'UE a perdu le contact avec la réalité.

Selon lui, l'Union n'est plus une instance de coopération, mais de contrôle, forçant les nations à se plier à des expériences idéologiques et économiques qui nuisent à leurs citoyens.

Parmi les principales préoccupations :

- Le Green Deal et les taxes ETS2 : le nouveau système d'échange de quotas d'émission de carbone de Bruxelles rendra le carburant, les transports et le chauffage plus chers pour les citoyens ordinaires.

- Le pacte migratoire : les pays qui refusent d'accueillir des migrants pourraient se voir infliger de lourdes sanctions financières.

- La surréglementation et les sanctions: ce sont là les politiques de l'UE qui, selon les termes de Fico, « détruisent l'industrie européenne au nom de l'idéologie ».

Fico qualifie cela de « folie de l'Union »: des politiques élaborées par des technocrates non élus qui vivent confortablement à Bruxelles, tandis que les familles à travers l'Europe sont confrontées à l'inflation et à la hausse des prix de l'énergie.

Un appel à la création d'un « front slave »

L'idée de Fico n'est pas anti-européenne.

Il ne veut pas détruire l'UE, mais la rééquilibrer.

« Il est temps que l'Europe centrale défende son peuple, et non les bureaucrates de Bruxelles. »

Son projet consiste à relancer la coopération entre les pays du groupe de Visegrád (Slovaquie, Pologne, Hongrie, Tchéquie) et à promouvoir :

-    Une politique énergétique réaliste

-    Le respect de la souveraineté nationale

-    La protection des industries et des traditions locales

-    L'opposition aux réformes idéologiques imposées

Ensemble, ces quatre pays représentent plus de 60 millions d'habitants, soit une force considérable au sein de l'UE qui pourrait en redéfinir l'orientation.

Pourquoi est-ce important à l'échelle mondiale ?

Depuis des décennies, Bruxelles est dominée par les voix de l'Europe occidentale, principalement l'Allemagne et la France.

Aujourd'hui, les nations slaves et d'Europe centrale affirment qu'elles méritent elles aussi d'avoir leur mot à dire.

Ce mouvement reflète une tendance mondiale plus large :

- Des nations qui revendiquent leur souveraineté contre l'idéologie

- Des économies qui recherchent un équilibre entre environnement et survie

- Des cultures qui défendent leur identité contre l'uniformisation

Si elle aboutit, la proposition de Fico pourrait créer un nouveau centre de pouvoir en Europe, ancré dans les valeurs slaves de réalisme, de foi et de liberté.

Coïncidence ou sabotage ? Des incendies dans des raffineries hongroises et roumaines soulèvent quelques questions

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Coïncidence ou sabotage ? Des incendies dans des raffineries hongroises et roumaines soulèvent quelques questions

Source: https://www.freilich-magazin.com/welt/zufall-oder-sabotag...

En l'espace de quelques heures, deux raffineries de pétrole en Hongrie et en Roumanie ont été secouées par des explosions. Les autorités s'interrogent encore sur la cause. La coïncidence temporelle rend la situation politiquement explosive.

Lundi 20 octobre, deux incidents graves se sont produits en l'espace de quelques heures dans deux raffineries d'Europe de l'Est. En Hongrie et en Roumanie, des installations ont été touchées par des explosions et des incendies. Deux groupes ayant des liens avec la Russie sont concernés: le géant hongrois de l'énergie MOL et la filiale roumaine de Lukoil.

Raffinerie fermée pour maintenance

Vers 11h30, une explosion s'est produite sur le site de la raffinerie Petrotel-Lukoil à Ploiești, en Roumanie. Selon les médias roumains, l'installation était hors service au moment de l'explosion en raison de travaux de maintenance. La détonation aurait eu lieu dans la zone où se trouve l'installation industrielle qui traite les eaux usées. Les autorités ont immédiatement ouvert une enquête, mais aucune cause officielle n'a encore été établie.

Incendie dans la raffinerie hongroise MOL

Quelques heures seulement après l'incident en Roumanie, un événement similaire s'est produit en Hongrie. Un incendie s'est déclaré dans la raffinerie MOL de Százhalombatta, l'un des principaux nœuds du réseau de stations-service en Europe centrale et orientale. L'installation traite le pétrole brut provenant de l'oléoduc russe Droujba. Selon les informations fournies par le gouvernement hongrois, l'incendie a pu être maîtrisé mardi matin. La cause exacte n'est pas claire.

Comme les deux événements se sont produits à peu de temps d'intervalle, les spéculations sur d'éventuels actes de sabotage se multiplient. Comme le rapporte le portail Hungarian Conservative, les événements donnent lieu à de telles suppositions. Les autorités officielles ne se sont pas encore exprimées à ce sujet.

L'UE prévoit de se passer de l'énergie russe

Les observateurs soulignent que ces incidents se sont produits le jour même où les ministres de l'Énergie de l'UE se sont mis d'accord sur un calendrier visant à mettre fin aux importations d'énergie russe d'ici 2028. Dans le même temps, Kiev exerce une pression croissante sur des pays comme la Hongrie pour qu'ils mettent fin à leur dépendance au pétrole russe. L'Ukraine a déjà attaqué à plusieurs reprises les infrastructures énergétiques russes par le passé, ce qui alimente les spéculations sur le contexte géopolitique des incidents récents.

Informations non confirmées en provenance de Slovaquie

De plus, le portail CZnews a signalé mercredi un incendie dans la raffinerie de Bratislava exploitée par le groupe MOL, qui traite du pétrole brut russe via l'oléoduc Droujba. Cependant, ces informations n'ont pas été confirmées par les autorités officielles, comme l'a annoncé CZnews dans une mise à jour.

Le Japon se réveille à la Tradition

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Le Japon se réveille à la Tradition

Moscou voit une nouvelle voie alors que le Japon passe d’un déclin libéral à une consolidation sur base de ses valeurs ancestrales

Alexander Douguine

Alexander Douguine voit le tournant du Japon sous Sanae Takaichi comme un réveil civilisateur qui pourrait aligner Tokyo avec la Russie dans la révolte mondiale contre le libéralisme.

Le Japon a élu sa première femme Premier ministre — Sanae Takaichi. Son élection constitue un signe politique très sérieux.

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Partout dans le monde, l’idéologie libérale s’effondre. Dès le début des années 1990, elle avait dominé la politique, l’économie et la culture — presque sans rencontrer d'opposition. Pourtant, après trente-cinq ans de règne ininterrompu, le libéralisme est arrivé à une exhaustion totale. Ses principes fondamentaux — universalité des droits de l'homme, la notion de « fin de l’histoire » (Fukuyama), le principe de l’identité individuelle, la woke culture, l’idéologie transgenre, l’immigration illégale, et le multiculturalisme — ont échoué à l’échelle mondiale.

Les libéraux étaient sur le point de prendre le contrôle de toute l’humanité; aujourd’hui, le libéralisme et le mondialisme s’effondrent partout. La Russie, la Chine, l’Inde, le monde islamique, les pays africains et l’Amérique latine — unis dans le BRICS — se sont levés précisément contre ce programme. L’élection de Donald Trump a été le premier grand coup porté à l’hégémonie libérale: dès son premier jour au pouvoir, il a rejeté les dogmes fondamentaux du projet libéral, y compris l’activisme LGBT et transgenre, ainsi que l’idéologie de la Critical Race Theory — celle du racisme anti-blanc qui avait envahi l’éducation et la culture occidentales. Tout ce paquet a été rejeté par la majorité de l’humanité non-occidentale, et maintenant aussi par l’Amérique elle-même. Seule l’Union européenne reste la dernière forteresse de ce pandémonium, bien que tous ses États membres ne partagent pas encore les mêmes convictions.

Il n’est donc pas surprenant que le paradigme libéral ait également disparu au Japon — longtemps considéré comme un pays intégré dans le monde occidental centré sur l’Amérique. À l’instar des Etats-Unis trumpistes, le Japon a élu une femme qu’on peut qualifier de « Trumpiste » — ou peut-être de «Trumpiste japonaise ». Sanae Takaichi incarne des valeurs traditionnelles: elle voit le mariage comme une union entre un homme et une femme, elle trouve normal que les femmes prenant le nom de leur mari après le mariage, et vise le « zéro immigration » — ce qui signifie que les migrants illégaux et légaux devraient être expulsés du Japon.

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Takaichi appelle à un retour à la foi shintoïste, à une réaffirmation du culte impérial, et à la renaissance du bouddhisme traditionnel. Elle visite régulièrement le sanctuaire dédié aux morts de la guerre de la Seconde Guerre mondiale, défiant ouvertement les récits libéraux sur le passé du Japon. En substance, elle prône la restauration de la souveraineté militaire et politique du Japon. Il est frappant que la première femme Premier ministre ait autrefois joué de la batterie dans un groupe de heavy metal. Cette femme remarquable — une ancienne batteuse de métal — mène désormais la renaissance de l’esprit samouraï, des valeurs traditionnelles, du culte impérial, de la religion shintoïste, et du culte de la déesse du soleil Amaterasu, ancêtre de la lignée impériale.

C’est rien de moins qu’une révolution conservatrice au Japon, qui se déroule sous nos yeux. Le parti bouddhiste modéré Komeito s’est retiré de la coalition de gouvernement avec le Parti libéral-démocrate maintenant dirigé par Mme Takaichi. Pourtant, elle a mobilisé une autre force — le Parti de l’innovation japonaise (Ishin no Kai), encore plus à droite et conservateur.

Est-ce une bonne ou une mauvaise chose pour nous ? Idéologiquement, c’est positif. La Russie aussi revient à des valeurs traditionnelles — aux idéaux de l’Empire, de l’Orthodoxie et de l’identité nationale. C’est notre tendance, comme c’est le cas en Amérique et de plus en plus dans le monde entier. Le Japon, qui se dresse aujourd'hui contre le libéralisme, ne fait que rattraper le reste de l’humanité, qui se débarrasse rapidement de toute la pourriture de l’idéologie libérale.

L’Union européenne reste le dernier bastion du déclin, de la dégénérescence et de la sénilité politiques — mais probablement pas pour longtemps. Le Japon, en revanche, rejoint les rangs des pays fondés sur des valeurs traditionnelles. La Russie appartient à ce même camp, ce qui crée un terrain fertile pour le dialogue.

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Parallèlement, le Japon reste néanmoins bien ancré dans le cadre de la politique étrangère américaine. Sa militarisation croissante signifie qu’il adoptera une ligne plus agressive dans la région du Pacifique. La Russie et le Japon ont une longue et difficile histoire commune — à commencer par la guerre russo-japonaise du début du 20ème siècle, lorsque Tokyo, après la restauration Meiji, s’était orienté vers les États-Unis. Cela pourrait présenter un certain risque pour la Russie.

Pourtant, cette nouvelle orientation du Japon est un défi encore plus grand pour la Chine — un autre géant du Pacifique, et ami proche ainsi que partenaire de la Russie. C’est pourquoi la restauration de relations normales avec un Japon récemment redevenu traditionaliste — et désormais idéologiquement plus proche de nous — ne doit pas se faire au détriment de notre partenariat qu'est la Chine, notre principal allié et partenaire fondamental .

Cependant, si nous voyons dans Sanae Takaichi — cette « batteuse d'esprit samouraï » — quelqu'un qui amorce un véritable mouvement vers la Russie et qui preste un effort sincère pour atteindre la souveraineté stratégique du Japon, c’est-à-dire vise à se libérer du contrôle direct du pays par les Américains, alors nous aurons une bonne base pour discuter. La Russie pourrait établir une relation bilatérale avec le Japon basée sur des intérêts mutuels. Nous pourrions même agir en tant que médiateurs de la paix dans le Pacifique, aidant nos amis chinois à passer de la confrontation à une forme de coopération en Asie de l’Est. En tant que grande puissance pacifique, la Russie pourrait jouer un rôle important dans cette transformation.

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Il est encore trop tôt pour dire ce que la gouvernance de cette exceptionnelle figure du Japon — qui incarne l’essence symbolique de la déesse Amaterasu — apportera. Mais, quoi qu'il en soit, son arrivée au pouvoir marque un moment remarquable dans l’histoire du Japon. Et peut-être, sous cette nouvelle « Déesse Amaterasu », la Russie pourra établir des relations constructives, tournées vers l’avenir, et multipolaires avec le Japon — des relations basées sur les plans idéologique, civilisationnel et géopolitique — en harmonie avec notre alliée et partenaire la plus chère, la grande Chine, où les valeurs traditionnelles prévalent également.

Au fait, les valeurs traditionnelles triomphent aussi dans la belle Corée du Nord — contrairement à ce qui se passe en Corée du Sud, pays qui demeure l’un des bastions de la décadence libérale. J’espère cependant que ce ne sera que temporaire, et que la Corée retrouvera son unité et sera alors véritablement coréenne. Il faut aussi se rappeler qu’il existe de profondes tensions entre la Corée et le Japon.

En résumé, la Russie a maintenant une chance de réinitialiser ses relations avec le Japon sur la base d’un retour commun aux valeurs traditionnelles. Voyons ce que cela donnera.

Gracq, le goût, le jugement, la littérature

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Gracq, le goût, le jugement, la littérature

par Claude Bourrinet

J'ai tenu à reproduire le texte de Gracq qui suit, et qui appartient aux entretiens accordés à Jean Carrière. Il y est question de "goût", point d'ancrage, s'il en est, de la critique littéraire depuis Montesquieu, depuis le début du XVIIIe siècle. Ce critère de valeur appartient particulièrement au monde du classicisme, ou du néoclassicisme, qui s'inscrit dans la longue tradition romaine d'une culture livresque nécessaire à la sélection des oeuvres. Certaines demeurent "classiques", illustres, donc, et destinées à être étudiées en classe.

Gracq est plus ou moins embrigadé par une certaine droite, il est vrai de moins en moins substantielle, soit qu'elle tende à s'amenuiser avec le nombre de ceux qui lisent encore, ou qu'elle tende même à constituer une minorité parmi ceux qui se contentent d'une consommation d'ouvrages produits industriellement. Gracq a la réputation d'être provincial, terne, grisâtre, sans scandales, sans cette ostentation provocatrice que prisent volontiers les entrepreneurs d'idées de notre pays, de gauche, certes, mais pas toujours. Partant, on a cru l'incorporer dans la cohorte des réactionnaires. A vrai dire, si la droite s'en est réjouie, la gauche littéraire l'a dénoncé comme tel.

C'est évidemment mal le connaître. Les exemples sont extrêmement nombreux de sa dilection à privilégier, parmi les livres qu'il a croisés, ceux qui, d'une façon ou d'une autre, ont sécrété assez de poudre pour faire exploser une ville, comme certaines oeuvres de Stendhal, de Rimbaud, de Lautréamont, des surréalistes, de Claudel et d'autres, ou qui (et ce sont du reste les mêmes) ont ouvert grand les portes sur le vent du large.

Sa conception de la littérature, du moins du roman, appartient de plain pied à la modernité. Pour lui, un roman est tout fiction : le monde supposé "extérieur", les personnages, les indices de réalité, rien n'est lié au "réel". Même la mort, qui termine invariablement ses romans, n'a de valeur qu'imaginaire. C'est-à-dire que ce qui donne consistance à un récit, c'est le verbe, le mot, la phrase. En ce qui concerne son "style", il trace un sillon d'existence avec une entière liberté d'invention, tordant, ses longues phrases, les disloquant, les nouant et les dénouant dans un jeu qui, parfois, semble nous faire perdre la piste, mais nous y ramène par des chemins de traverse. Le "sens" qui se dégage de ses romans trahit aussi une position singulièrement "rebelle", puisque, dans un premier temps, après avoir braisé l'atmosphère où se noient ses personnages dans de noires lumières, il dérive vers les lisières de l'Histoire, entre rêverie et abandon à l'instant, pour finir par choisir, avec joie et gratitude, l'appel de la Terre, non celle des paysans, comme invitait à le faire un Barrès, mais à la façon du poète, qui unifie le monde sur le point concret où s'inscrivent les pas du promeneur.

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Gracq n'est pas du tout "classique", ni passéiste, dans tous les domaines. Il se réclame ardemment du romantisme, surtout du romantisme allemand, Novalis, Hölderlin, Arnim, Kleist et d'autres, et surtout des poètes qui ont marqué les différentes ruptures de la poésie française, depuis Nerval et Baudelaire, jusqu'à Breton, en passant par Rimbaud, Lautréamont. Rappelons aussi qu'il était un fervent admirateur de Jünger. La littérature de fauteuil douillet, et la peur d'effaroucher le bourgeois (sans qu'il eût le désir de l'épater, ou de le déranger) n'étaient pas de son monde.

"L'idée de "goût" est difficilement dissociable de celle de « culture », et celle-ci de la digestion et de la longue rumination de la littérature passée. C'est avec le développement de cette culture que le goût est censé se former : plus ou moins conservateur par sa nature, il tient à une tradition, et cherche inconsciemment, peu ou prou, à la prolonger dans le tri qu'il opère de la littérature qui se fait. Pour cette raison, et pour d'autres, c'est une notion peu franche, qui ne s'avoue pas tout à fait pour ce qu'elle est, plutôt hostile à la nouveauté, et qu'il y a intérêt à utiliser le moins possible : l'idée de jugement, par exemple, paraît en matière de littérature, plus claire et plus saine que celle de goût. Le surréalisme, à mon avis, comme le romantisme autrefois, comme tous les mouvements révolutionnaires, a été parfaitement fondé à le suspecter (« Je me fais du goût l'idée d'une grande tache », a écrit à peu près Breton). C'est une idée qui tend à se rasseoir, comme s'est rassise déjà l'idée équivoque de « Beauté ».

lundi, 27 octobre 2025

La part mafieuse de l’État profond

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La part mafieuse de l’État profond

par Georges Feltin-Tracol

Commissaire général de la Police nationale, diplômé de Sciences – Po Paris, de criminologie et en droit, Jean-François Gayraud a déjà signé plusieurs ouvrages dont Le Monde des mafias : géopolitique du crime organisé (Odile Jacob, 2005) et L’art de la guerre financière (Odile Jacob, 2016). Le plus récent, paru en octobre 2023, concerne La Mafia et la Maison Blanche. Un secret si bien gardé de Roosevelt à nos jours (Plon, 574 p., 24,90 €).

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En s’appuyant sur une riche bibliographie de vingt pages, il étudie ce qu’il qualifie de « part d’ombre de la démocratie américaine », à savoir le rôle du crime organisé auprès des présidents des États-Unis d’Amérique à partir de Franklin Delano Roosevelt (1933 – 1945). Ainsi s’intéresse-t-il aux présidences de Roosevelt, de Truman, de Kennedy, de Johnson, de Nixon, de Reagan, de Clinton, d’Obama, du premier Trump et de Biden. « En revanche, avertit-il, nous n’aborderons pas 5 d’entre elles (Eisenhower, Ford, Carter, Bush père puis fils). Ce silence sur ces périodes n’est pas le fait d’un choix ou d’un oubli, mais s’explique par l’absence de sources crédibles. En effet, au fil des années, nos recherches n’ont jamais fait apparaître de traces suffisamment pertinentes. Au demeurant, ce vide doit être interprété avec prudence, puisque l’absence de preuve n’est pas toujours la preuve de l’absence ». Il souligne plus loin que « la dynastie Bush a suscité des interrogations quant à certains aspects de ses intérêts dans le monde du pétrole, de la finance ou de l’armement, aux États-Unis et à l’étranger. Cependant, rien qui ne concerne directement la Mafia ».

Jean-François Gayraud estime que « la haute criminalité est une dimension oubliée de la grande histoire ». Son « livre propose donc d’éclairer l’histoire politique visible par l’apport d’une histoire invisible et de l’invisible, cachée, au profit d’une histoire épaisse et profonde ». Son travail, très fouillé, s’accompagne en fin de volume d’un appareil critique de notes de soixante-trois pages.

Il observe que la « criminalisation aurait provoqué l’émergence d’un sixième pouvoir – après le législatif, le judiciaire, l’exécutif, la presse (quatrième) et le militaire/renseignement (cinquième) – capable d’influencer en profondeur le gouvernement, le droit, l’économie, les valeurs, les goûts, les mœurs: le crime organisé, jouant le rôle d’un “ gouvernement d’appoint ”, indépendant des autres pouvoirs ». Son expertise l’amène à analyser sa structure interne. La Mafia n’est pas un ensemble monolithique. C’est plutôt une société secrète criminelle dont l’unité de base repose sur la « Famille ». « Il ne s’agit pas d’une réalité biologique, précise-t-il, mais d’une construction par un processus d’initiation. Une Famille n’est donc pas constituée par des individus ayant tous un lien familial biologique (père, fils, cousin, oncle, neveu, etc.), mais par des hommes de sexe masculin [sic !], catholique et d’ascendance italienne, ayant été choisis pour intégrer cette nouvelle entité qui forme désormais leur nouvelle “ Famille ”. » Les groupes mafieux nord-américains se coordonnent plus ou moins avec de nombreuses nuances suivant les périodes, les objectifs visés et la personnalité de leurs chefs respectifs. Mais la figure du « Parrain » représente surtout une belle diversion. Par exemple, « la direction de la Famille de Chicago est traditionnellement collégiale. Al Capone puis Frank Nitti ne sont que des boss en titre. Le vrai pouvoir s’exerce de manière plus collective en coulisse. Ce leurre permet aux vrais chefs d’œuvrer à moindre risque. Ces boss de l’ombre sont alors Paul Ricca, Tony Accardo et Murray Humphreys ».

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Al Capone et Frank Nitti.

On croit souvent que le berceau de la Mafia italo-américaine se trouve à New York ou à Chicago. Erreur ! Les lecteurs férus des polars étatsuniens savent que son foyer originel se situe à La Nouvelle-Orléans. En raison de cette ancienneté, la Famille de cette ville dispose d’une autonomie certaine et couvre autant la Louisiane que le Texas.

Dans un long chapitre, Jean-François Gayraud revient sur l’assassinat de John Fitzgerald Kennedy en 1963 à Dallas. Pour lui, l’acte est commandité par la Mafia avec l’aide technique d’agents recrutés par la CIA pour des opérations clandestines anti-castristes à Cuba. À la fin de la décennie 1950, Mafia et CIA collaborent de manière ponctuelle sous la supervision lointaine du vice-président Richard Nixon. L’auteur revient en outre sur le rôle effacé du FBI dans la lutte anti-Mafia en raison des consignes de modération ordonnées par son tout-puissant directeur de 1924 à 1972, John Edgar Hoover. Ce dernier façonne le FBI en police politique et non pas en une force destinée à combattre les malfrats. La Mafia le tenait-elle grâce à des dossiers compromettants sur ce parieur frénétique des courses hippiques et sa vie privée ?

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John Edgar Hoover.

L’action du FBI en tant que police politique répressive s’efface grâce au cinéma qui l’enjolive en institution probe et courageuse. Il faut néanmoins savoir que la Mafia contrôle l’industrie cinématographique et le divertissement de masse. Le futur 40e président des États-Unis, acteur de profession à l’origine, Ronald Reagan, fut longtemps le président du principal syndicat des acteurs, la Screen Actors Guild (SAG), noyauté par les mafieux bien qu’« en Californie, la Famille présente à Los Angeles est faible en nombre et en organisation, et elle fonctionne sous la domination de celle de Chicago. La Californie, à l’image du Nevada, a toujours été un territoire plus ou moins ouvert à toutes les Familles; là, la Mafia emploie un plus grand nombre d’avocats, de banquiers et d’investisseurs, une technique lui permettant ainsi une présence plus diffuse et surtout très intégrée aux élites économiques. Elle est en fait souvent indissociable du big business ».

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Bien que modelé par le milieu, le 7e art ose parfois évoquer certains sujets connexes tels le film de Doug Liman Barry Seal. American Traffic (2017). Pilote talentueux, Barry Seal transporte des tonnes de cocaïne aux États-Unis au profit du cartel colombien de Medellin et en liaison avec la CIA. Il fuit vite la Louisiane et s’installe en Arkansas qui « sert alors de base arrière pour les transferts d’armes orchestrés par la CIA au profit des Contras au Nicaragua, ainsi que leur entraînement militaire ». On est à l’origine du fameux scandale de l’Irangate. Jean-François Gayraud signale qu’« à partir des années 1980, l’Arkansas devient “une petite Colombie”, un épicentre du trafic international de cocaïne. L’État est miné de l’intérieur par une narco-corruption endémique, protégée aux plus hauts niveaux de responsabilité. L’expression de “narco-État” n’est pas exagérée, tant la corruption née du trafic de la drogue y est répandue (p. 395) ». Bill Clinton, futur 42e président étatsunien (1993 - 2001), y exerce d’abord la fonction de procureur général (ministre de la Justice) de 1977 à 1979, avant d’en devenir le gouverneur à cinq reprises (1979 – 1981 et 1983 - 1992).

show-photo-2162642560.jpgOn peut toutefois regretter que l’auteur ne mentionne pas les relations étroites entre la Mafia, par l’intermédiaire du cinéma, et d’une part du « cinquième pouvoir », à savoir le complexe militaro-médiatique, grand instigateur du « cinéma de sécurité nationale » (Jean-Michel Valantin). Jean-François Gayraud n’hésite pas pourtant à citer les travaux de Peter Dale Scott sur l’« État profond ». Craint-il de s’éparpiller ou de s’aventurer sur des terrains glissants et obscurs ? D’éclairer les coulisses de l’histoire apparente ?

Il évoque cependant un roman de politique-fiction paru à Chicago en 2000. On relève des similitudes troublantes avec l’ascension de Barack Obama, élu de l’Illinois et donc de… Chicago. On oublie qu’Obama fut le sénateur local de 1997 à 2004. L’auteur d’America’s First (Research Association School Times Publications, Frontline Distribution International, 351 p., Chicago)), Charles D. Edwards a alors 31 ans. Ce Noir a grandi au Queens à New York. Il déménage et travaille à la mairie de… Chicago. Ce roman raconte l’arrivée au pouvoir à 46 ans de Calvin Smart. Bon orateur et juriste noir brillant, marié à Audrey, elle-même juriste, il atteint la fonction de président pro tempore du Sénat, soit le 4e personnage de l’État. Le président des États-Unis meurt d’une attaque cardiaque. Puis son vice-président devient le 44e président. Mais il meurt aux côtés du speaker de la Chambre des représentants (le 3e personnage de l’État) dans un attentat à Londres. Calvin Smart arrive à la Maison Blanche. Depuis toujours, le nouveau président fréquente la féroce Famille Giovinci et reçoit de fortes pressions de la Mafia afin de ne pas légaliser les drogues.

Entrepreneur immobilier à New York, Donald Trump doit rencontrer pour ses affaires des membres du milieu. Il y est contraint parce que « durant trois décennies (1970 – 1990), les cinq Familles de New York disposent d’une mainmise quasi absolue sur le marché du bâtiment et de la construction (BTP) à New York. […] La Mafia contrôle tous les métiers liés au secteur: le béton évidemment, mais aussi la maçonnerie, la plomberie, les fenêtres, la peinture, la menuiserie, etc. » Père spirituel de Trump, l’avocat Roy Cohn, démocrate, juif et homosexuel, « représente un lien unique vers la Mafia et les syndicats sans qui ses projets immobiliers ne peuvent prospérer sans heurt. Il est l’homme des contacts sensibles et des pots-de-vin, celui qui achète la paix et forge les alliances politiques et mafieuses ». Faute de preuves solides, Jean-François Gayraud ne fait qu’effleurer la présence insistante de quelques membres de la pègre russophone dans la proximité de l’homme d’affaire.

La Mafia et la Maison Blanche raconte plus d’un demi-siècle d’histoire souterraine passionnante. Il confirme le caractère ploutocratique des États-Unis d’Amérique. L’auteur explique bien en note que « le système démocratique américain est devenu malade en raison du pouvoir des lobbys et de l’argent – deux phénomènes liés – qu’une décision de la Cour suprême de 2010 (Citizen United vs Federal Election Commission) a conforté. Désormais, les entreprises privées et les syndicats peuvent participer au financement des campagnes sans limitation de versements. La corruption politique a été ainsi en partie légalisée ». Du fait de sa dépendance intrinsèque aux puissances financières, les États-Unis d’Amérique, par-delà la dimension mafieuse de l’État profond, sont très certainement – et de loin ! – le principal État-voyou de la planète.  

GF-T

  • « Vigie d’un monde en ébullition », n° 171, mise en ligne le 23 octobre 2025 sur Radio Méridien Zéro.

Le "mur coupe-feu" continue d’agiter les esprits en Allemagne – quelques faits

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Le "mur coupe-feu" continue d’agiter les esprits en Allemagne – quelques faits

Peter W. Logghe

Source: https://www.facebook.com/peter.logghe.94

Le ‘mur coupe-feu’, utilisé systématiquement comme un instrument antidémocratique, choque tellement que même le SPD appelle à briser le cordon sanitaire. Face à l’augmentation des pourcentages de l’AfD dans divers sondages, des dirigeants du SPD ont demandé à la CDU de modifier sa politique du ‘mur coupe-feu’ – mais uniquement en ce qui concerne Die Linke. Le ministre de l’Intérieur de Thuringe, Georg Maier (SPD), a déclaré au quotidien allemand Handelsblatt que diverses clauses d’incompatibilité, énoncées au sein de la CDU, empêchent la formation de majorités stables. Et c’est pourquoi l’AfD gagne de plus en plus d’adhérents.

Le contexte derrière tout cela sont les récents sondages dans le Land allemand de Saxe-Anhalt: l’AfD pourrait obtenir 40 % des voix, la CDU environ 26%. Un gouvernement sans l’AfD ne peut exister qu’avec une coalition incluant Die Linke. Mais la clause d’incompatibilité de la CDU empêche une telle coopération. « Il s’agit d’une nécessité realpolitisch », disent aussi Sebastian Fiedler et Sebastian Roloff. Donc: avec Die Linke. La seule autre option, mais posée comme « impossible », serait une collaboration « avec les ennemis de la démocratie, comme le parti d’extrême droite AfD ». La ‘tolérance’ de la gauche ne fait qu’aggraver le fossé social en Allemagne.

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La base locale de la CDU voit cela autrement: le mur coupe-feu, c’est n’importe quoi !

Stefan Kerth, président du district CDU en Vorpommern-Rügen, a demandé dans une vidéo à son parti de briser le cordon sanitaire contre l’AfD. Littéralement: « Le mur coupe-feu, c’est n’importe quoi, il n’a fait que renforcer l’AfD » (dans le journal local Ostsee-Zeitung). Non, ce que la CDU doit faire maintenant, c’est établir des conditions pour une coopération avec l’AfD: « La CDU veut faire avancer les choses, mais le cordon empêche tout changement de cap. » Et il a ajouté: « Pourquoi la CDU ne formule-t-elle pas des conditions pour une coopération? Dire quelles personnes, quelles activités, quels points du programme l’AfD doit abandonner?».

La CDU doit s’ouvrir à des coalitions et des partenariats en dehors des partis de gauche, et très rapidement: «Mieux vaut le faire maintenant, tant que nous pouvons encore en définir les accents et la direction». Kerth a échangé en 2023 sa carte de membre du SPD contre celle de la CDU à cause de la politique migratoire. Il a déjà déclaré qu’aucun changement fondamental de cap sur la migration n’est possible sans l’AfD. Depuis 2015, l’Allemagne a perdu le contrôle, et les partis de gauche ne traiteront jamais la problématique migratoire en profondeur, car ils la minimisent toujours.

Kerth ne voit aucun danger dans une participation au gouvernement de l’AfD: « Dans notre proximité, gouvernent des partis de droite et des nationalistes, des collègues de l’AfD. Et pourtant, le monde ne s’est pas effondré ! Et c’est précisément l’Allemagne, très sensible à l’histoire, qui retomberait immédiatement dans des affres similaires à celle qui existaient sous le Troisième Reich s'il n'y avait pas le cordon sanitaire? Je n’y crois plus. » Par ailleurs, d’autres politiciens CDU/CSU plus éminents s’expriment également en faveur de la levée du mur coupe-feu contre l’AfD, comme l’ancien ministre de la Défense Karl-Theodor zu Guttenberg, l’ancien secrétaire général de la CDU Peter Tauber et le président du comité des valeurs de base de la CDU, Andreas Rödder.

Hongrie et Roumanie: des raffineries de pétrole russe en flammes. Était-ce les Ukrainiens?

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Hongrie et Roumanie: des raffineries de pétrole russe en flammes. Était-ce les Ukrainiens?

Budapest/Bucarest. En quelques heures seulement, deux raffineries de pétrole ont explosé en Roumanie et en Hongrie, lundi 20 octobre. D’abord, vers 11h30, la raffinerie Petrotel-Lukoil à Ploieşti, en Roumanie, a explosé, et quelques heures plus tard, un incendie majeur s’est déclaré à la raffinerie MOL à Százhalombatta, en Hongrie. Les deux installations sont alimentées en pétrole brut via le pipeline russe Druzhba. 

La proximité temporelle des incidents alimente les spéculations sur des actes de sabotage ciblés. Les deux raffineries appartiennent à des entreprises ayant des liens étroits avec la Russie – Lukoil est un géant énergétique russe, MOL continue de maintenir des relations commerciales avec Moscou malgré la guerre en Ukraine. 

Les incidents se sont produits le jour même où les ministres européens de l’énergie ont adopté une feuille de route pour mettre fin aux importations d’énergie russes d’ici 2028. Kiev tente depuis un certain temps de faire pression sur les États membres de l’UE, qui continuent de dépendre du pétrole russe. 

Le Premier ministre hongrois Viktor Orbán a dû rassurer la population: l’approvisionnement en carburant était assuré, et les causes des explosions seraient examinées en profondeur. Cependant, Orbán ne peut pas non plus nier que l’Ukraine a, à plusieurs reprises, attaqué des infrastructures énergétiques russes dans le passé, et en 2023, elle a décerné une distinction à un commandant de drones responsable des attaques contre le pipeline Druzhba. 

Si l’implication ukrainienne dans les explosions est confirmée, la politique européenne se retrouverait dans une impasse difficile. D’un côté, la plupart des États membres de l’UE soutiennent toujours Kiev dans sa lutte contre la Russie. De l’autre, des attaques contre des installations énergétiques dans des États membres de l’OTAN pourraient être interprétées comme hostiles. Comme on le sait, des saboteurs ukrainiens sont également considérés comme principaux suspects dans l’explosion des pipelines Nord Stream en 2022. 

Ni Bucarest ni Budapest n’ont encore officiellement exprimé de soupçons contre Kiev. Les enquêtes sur les causes des incendies se poursuivent dans les deux pays (mü).

Source: Zu erst, Oct. 2025.

samedi, 25 octobre 2025

Pourquoi les libéraux se détestent-ils eux-mêmes?

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Pourquoi les libéraux se détestent-ils eux-mêmes?

Alexandre Douguine

Dans la psychologie et les sciences politiques, il existe désormais un terme intéressant qui devient de plus en plus usité: l’oikophobie. Ce terme désigne une haine profonde et irrationnelle de tout ce à quoi on appartient — le foyer, la culture, la famille, le peuple, l’État, et finalement, on débouche sur la haine de soi.

En psychologie, la haine des objets ou des choses courantes comme les meubles et les possessions familières de la maison, ainsi que la colère envers ses proches, peuvent être une manifestation de l’oikophobie.

En politique, l’oikophobie est souvent considérée comme une caractéristique des libéraux et des gauchistes. Ils ont une vision négative de l’amour pour le foyer, la famille, le patriotisme, le respect des traditions et pour toute identité stable. Ils considèrent intrinsèquement ces éléments comme indésirables, voire comme relevant du « fascisme ».

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Dans de nombreux cas, l’oikophobie est favorable aux gauchistes et aux libéraux, car elle peut être efficace pour promouvoir une stratégie de transgression de tout, de contestation, de déplacement des frontières, d’insolence envers les lois, les normes, et en faveur de la rupture de tous les tabous.

Dans la culture post-moderne, cette caractéristique prédominante est devenue la norme — désormais, la transgression et la désobéissance à tout sont devenues la norme, alors que l’adhésion aux traditions et aux lois est condamnée comme un mal à éradiquer.

Plus tôt, Macron avait déclaré que la France n’était pas sa patrie, mais plutôt un hôtel ou un arrêt temporaire dans son itinéraire. C’est pourquoi nous assistons à un déclin esthétique comme celui qui nous a été infligé lors de l’ouverture des Jeux Olympiques 2024 — une transgression et une démesure absolues, reposant sur des versions extrêmes de l’oikophobie. Cela reflète également le profil psychologique et politique de la majorité des mondialistes, des progressistes et des soutiens du Parti démocrate américain.

L’oikophobie est largement répandue parmi les libéraux russes, ainsi que parmi certains courants de la nouvelle gauche russe, qui tendent vers une interprétation trotskyste du marxisme et rejettent la version du patriotisme qui dominait sous l’ère soviétique.

De nouvelles recherches montrent que l’oikophobie est, en son essence, une blessure psychologique, qu’elle soit congénitale ou acquise, souvent liée à d’autres traumatismes psychologiques (souvent survenus durant l’enfance).

Conclusion : les libéraux (oikophobes) doivent suivre une thérapie.

L’Inde se rapproche-t-elle de l’Afghanistan pour contenir le Pakistan?

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L’Inde se rapproche-t-elle de l’Afghanistan pour contenir le Pakistan?

Lucas Leiroz

Source: http://newsnet.fr/293967

Un récent conflit entre des nations islamiques vient de se produire dans un contexte de rapprochement entre l’Afghanistan et l’Inde.

La décision récente de l’Inde de rouvrir son ambassade à Kaboul et de recevoir officiellement le chef de la diplomatie afghane s’est produite à un moment sensible, où se déroulait un affrontement armé, qui ne fut que de courte durée, entre les forces afghanes et pakistanaises. Bien que New Delhi n’ait aucun lien direct avec ces hostilités, il est plausible d’affirmer que le pays perçoit l’environnement régional actuel comme une opportunité de revoir et d’actualiser sa stratégie régionale — en particulier vis-à-vis du Pakistan.

Récemment, les forces armées afghanes et pakistanaises se sont affrontées dans la région frontalière de Spin Boldak. Selon le gouvernement taliban, le Pakistan a lancé l’attaque avec des armes légères et lourdes, tuant 15 civils et provoquant plus de 100 blessés, y compris des femmes et des enfants. Kaboul a affirmé avoir répliqué avec fermeté, en détruisant des postes militaires et en capturant des armements ennemis.

Islamabad, pour sa part, nie la version afghane, accusant les Taliban d’avoir lancé l’attaque en ciblant un poste militaire pakistanais. Selon l’armée pakistanaise, 37 combattants talibans auraient été tués lors de l’opération de représailles. Après quelques engagements courts mais dangereux, y compris après des bombardements aériens de part et d’autre, la situation semble enfin avoir pris une tournure de désescalade. Un cessez-le-feu temporaire de 48 heures a été convenu entre les deux parties, avec l’engagement de rechercher des solutions par le dialogue.

Dans ce contexte d’instabilité régionale, l’Inde a décidé de reprendre officiellement sa présence diplomatique à Kaboul. Bien que les autorités indiennes présentent ce geste comme le volet d’une démarche humanitaire et technique, le calendrier et la symbolique ne passent pas inaperçus. À un moment où le Pakistan fait face à des pressions simultanées à ses frontières et sur la scène intérieure, l’Inde repositionne sa stratégie régionale en s’appuyant sur le principe classique de la dissuasion.

Historiquement associé à la Guerre froide, le concept de dissuasion implique l’utilisation de moyens indirects pour limiter l’expansion d’un acteur adverse. Dans le contexte sud-asiatique, l’Inde ne semble pas chercher un affrontement direct avec Islamabad, mais vise plutôt à accroître sa capacité d’influence et d’interaction avec des acteurs voisins qui peuvent servir de contrepoids régional. Dans ce cas, l’Afghanistan offre à l’Inde une alternative diplomatique — pas nécessairement hostile, mais stratégiquement utile.

Il est important de noter que l’Inde ne soutient pas officiellement le gouvernement taliban, ni ne reconnaît sa légitimité. Cependant, en décidant de rouvrir son ambassade et d’accueillir des autorités afghanes à New Delhi, elle indique sa volonté de maintenir le dialogue et une présence active dans un pays qui a historiquement été dans l'orbite pakistanaise. La nouvelle approche indienne semble moins idéologique et plus pragmatique: engagement sélectif, axé sur la stabilité, l’infrastructure et une présence stratégique.

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Pour l’Afghanistan, qui éprouve des tensions avec le Pakistan et est toujours isolé sur la scène internationale, l’intérêt que lui portent les Indiens représente une voie de diversification géopolitique. Pour Islamabad, la manœuvre de New Delhi peut être perçue comme une stratégie de dissuasion indirecte: il ne s’agit pas d’une menace militaire, mais d’une érosion progressive de l’influence pakistanaise dans son environnement immédiat.

L’Inde ne fomente pas de conflits ni n’instrumentalise des crises, mais montre une capacité à transformer des moments d’instabilité régionale en fenêtres stratégiques. En renforçant sa présence à Kaboul lors d’une crise frontalière, elle projette l’image d’une puissance autonome et pragmatique, adaptée aux circonstances d’un monde instable et en transition — où l’équilibre ne se définit plus par des alliances rigides, mais par une flexibilité diplomatique et une présence sur plusieurs terrains.

Plutôt que d'affronter directement le Pakistan, l’Inde semble miser sur la dissuasion comme mécanisme à long terme. Cette approche combine diplomatie et positionnement géographique, en investissant dans des canaux parallèles d’influence qui limitent la marge de manœuvre de son rival traditionnel. Dans un scénario post-occidental, ce type de stratégie silencieuse peut être aussi efficace que des alliances militaires formelles.

En résumé, le réalignement actuel entre l’Inde et l’Afghanistan révèle non seulement une adaptation aux nouvelles dynamiques régionales, mais aussi un exercice sophistiqué de dissuasion stratégique. Sans recourir à la force, sans provoquer de confrontations directes, l’Inde renforce son rôle de puissance régionale agissant avec autonomie, pragmatisme et attention à l’équilibre multipolaire du système international.

vendredi, 24 octobre 2025

Identité et avenir de la civilisation occidentale - Un point de vue iranien

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Identité et avenir de la civilisation occidentale

Un point de vue iranien

Docteur Hamid Parsania

Hojjat al-Islam wa Muslimin Hamid Parsania

La mondialisation – le sécularisme – et l’oubli du sacré, ainsi que l’absence de celui-ci, constituent les concepts les plus importants pour exprimer l’identité de la nouvelle civilisation et culture occidentale. Dans l’histoire, la sécularisation, c’est-à-dire la mondanisation, fut un processus continu; cependant, une approche spirituelle et sacrée a toujours occupé une place importante et prédominante dans le domaine de la culture publique ainsi que dans les institutions scientifiques et épistémologiques. C’est pourquoi la tendance vers la mondanité s’est souvent dissimulée derrière des interprétations sacrées et spirituelles. Mais la civilisation moderne de l’Occident, en raison de phénomènes historiques liés à la sécularisation, a pu transformer sa forme théorique et philosophique en un concept de sécularisme, en se présentant comme un mythe de la démythification du monde dans le cadre d’une idéologie dominante, et de nouvelles figures épistémologiques sont entrées dans le champ de l’existence humaine.

L’intellect, qui auparavant était considéré comme l’Esprit Saint, la grâce divine générale et étendue qui illuminait et révélait l’univers et l’homme, a d’abord été réduit à l’horizon de la connaissance humaine et de la compréhension conceptuelle, pour enfin devenir une chose purement mentale – subjective – et, par la suite, une phénomène intersubjectif culturel et historique.

L’empirisme et le matérialisme, qui constituent une forme de réalisme mondain, sont devenus les courants épistémologiques dominants dans ce monde. Des philosophes tels que Descartes, Bacon, Hume, Kant, Nietzsche, Foucault, ainsi que des penseurs comme Hegel, Feuerbach et Marx ont façonné cette vision du monde.

Le résultat de ces changements a été la domination d’une rationalité instrumentale. Bien que cette rationalité, appelée science, ait été le fruit de cette évolution, sa norme ultime dans les sciences naturelles et humaines ne consiste qu’en la domination sur la nature ou sur l’homme.

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Max Weber parle d’un autre type de rationalité, orientée vers le domaine des valeurs, des idéaux, et des vérités sacrées et transcendantes. Il croit que ce type de rationalité, bien qu’ayant existé dans d’autres civilisations, n’a plus de traces dans la société occidentale contemporaine.

La civilisation occidentale, en raison de son approche mondaine et de son identité épistémologique, a créé des institutions scientifiques, économiques et politiques qui ont désormais dépassé leurs frontières, marginalisant ou subordonnant d’autres civilisations. Aujourd’hui, l’Occident n’est plus une culture limitée à une région géographique, mais une culture hégémonique mondiale. Les divisions diverses ainsi que les pluralités politiques et économiques mondiales, comme celles qui ont existé entre le bloc de l’Est et l’Ouest au 20ème siècle ou la division Nord-Sud, sont toutes des divisions qui se produisent dans le cadre de la même culture et civilisation, selon ses contradictions internes. C’est pourquoi les problèmes et les dommages de cette civilisation sont des défis mondiaux. Leur résolution concerne l’humanité entière dans sa situation actuelle.

La caractéristique principale de cette civilisation est que, malgré le fait que ses dimensions civilisationnelles ont atteint une envergure mondiale et dépassent sa propre histoire, elle est en revanche plus vulnérable que jamais dans ses dimensions épistémologiques et spirituelles. Alors que la civilisation occidentale ressent plus que jamais le besoin de sens dans sa vie, elle en est dépourvue parce qu’elle ne possède pas de logique ou de méthode pour l’atteindre. En effet, bien qu’elle bénéficie plus que jamais d’un rationalisme instrumental, elle est incapable de faire la distinction entre des valeurs qui donnent un sens et une finalité à la vie et à l’existence. Selon Max Weber, la seule réponse dans ce domaine est que chacun suit son propre Satan.

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La civilisation occidentale a construit son identité sur la base de l’existence mondaine et cette vie présente. Concernant la présence du sacré dans l’espace de l’existence et sa relation avec celui-ci, si elle ne nie pas l’existence sacrée, cela témoigne uniquement de son ignorance à son sujet.

Le sacré et l’existence sacrée ne sont pas des choses qui se placent en dehors ou en deçà de la vie mondaine et terrestre. Le sacré, qui concerne l’existence infinie et sans limite, s’il existe, est avant tout une unité mêlée à la vérité de cette existence, ce qui signifie qu’il ne peut y en avoir qu’un seul, et, deuxièmement, il reconnaît les choses multiples et limitées comme des signes, des manifestations et des révélations de lui-même. En d’autres termes, la présence ou l’absence du sacré dans l’interprétation et la signification de l’identité et de la vérité des mondes pluriels influence la compréhension. Par conséquent, l’ignorance et l’ignorance du sacré et du transcendant mènent à une ignorance de la signification et de la vérité de l’être, qui se manifestent dans la vie et l’existence mondaine.

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L’oubli du sacré par la culture occidentale et l’absence du sacré dans le cœur de la compréhension de cette civilisation ne sont rien d’autre que de l’ignorance, de l’aliénation par rapport à la vérité de cette civilisation et à ses éléments constitutifs. La puissance de cette aliénation et de cette ignorance repose sur le manque de cette même rationalité que les penseurs de cette civilisation reconnaissent plus que tout au cours de l’histoire. La solution à ce problème consiste à s’éloigner des obstacles que les penseurs et philosophes de cette culture ont progressivement construits au fil des siècles.

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L’interaction entre le Créateur et l’être humain, ainsi que la relation avec l’héritage spirituel et sacré de l’humanité, peut aider l’homme contemporain et la civilisation d’aujourd’hui à surmonter ces obstacles. Dans une lettre à Gorbatchev, l’imam Khomeini a évoqué une partie de l’héritage cognitif de la culture islamique pour cette interaction. Il a parlé du potentiel de la sagesse d’Avicenne pour briser les limites de la pensée positiviste, ainsi que des innovations de la philosophie de l’illumination de Suhrawardi pour réduire l'impact de la raison humaine et le type de connaissance conceptuelle qui facilitent la subjectivation ou la suppression des dimensions transcendantes et sacrées. Il a appelé les intelligences vives de la société russe à rechercher la relation avec le Créateur et l’héritage mystique du monde islamique, afin de voir la pluralité mondaine et terrestre du monde moderne à la lumière de l’unité de l’existence sacrée divine, comme le prétendent toutes les religions monothéistes.

La biographie de Carl Gustav Jung, le grand chamane

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La biographie de Carl Gustav Jung, le grand chamane

L'auteure du volume, Paola Giovetti, dirige la revue historique Luce e Ombra, organe de la Fondation Bibliothèque Bozzano-De Boni de Bologne

par Giovanni Sessa

Source: https://www.barbadillo.it/125477-la-biografia-di-carl-gus...

giovetti-350x497.jpgLa biographie de Jung pour les Edizioni Mediterranee

Paola Giovetti est une auteure prolifique, spécialisée dans les thématiques liées à la recherche psychique. Elle dirige la revue historique Luce e Ombra, organe de la Fondation Bibliothèque Bozzano-De Boni de Bologne. Il ne pouvait donc manquer, dans sa vaste bibliographie, un volume dédié à C. G. Jung. Son dernier ouvrage, Carl Gustav Jung, le grand chamane. Une biographie, vient tout juste de paraître auprès des Edizioni Mediterranee. (Pour commander : ordinipv@edizionimediterranne.net, Tél.: ++39 6 323 54 33). Il s’agit d’un travail organique, exhaustif, qui donne au lecteur un accès approfondi, non seulement à la biographie extérieure du psychanalyste suisse, mais révèle aussi les traits saillants de sa vie intérieure et de son parcours “réalisatif”.

Mme Giovetti montre une connaissance peu commune de la bibliographie critique consacrée à Jung, dont l’interprétation est menée avec une pertinence argumentative et une force de persuasion faites d’insistances ininterrompues. Elle s’attarde, ce qui constitue le principal mérite du volume, sur des aspects jusque-là tus, de la personnalité de Jung, exposée dès l’enfance au mystère de la vie. La reconstruction biographique est minutieuse, soutenue par une documentation abondante et une prose captivante qui rend la lecture agréable, comme c’est généralement le cas dans l’historiographie biographique anglo-saxonne.

Pour parler comme Prezzolini, Jung fut vraiment “un fils du 20ème siècle” (1875-1961), dont il vécut les tragédies et les élans intellectuels. Selon moi, pour entrer dans le vif du sujet, il est utile de commencer par le récit d’un rêve d’enfance du grand intellectuel, rapporté par l’auteure. Jung vit, dans cette expérience onirique, une prairie verte où « s’ouvrait une fosse sombre très profonde [...] en laquelle on descendait par un escalier raide [...]; au fond, il trouva un drap vert pareil à celui d'une tente » (p. 27), au-delà duquel, dans une salle, se trouvait un trône doré surmonté d’un tronc de chair et de peau, avec un grand œil dans la partie supérieure. Il s’agissait du « phallus rituel, symbole de vie et de puissance, que l’on trouve à l’origine de nombreuses religions de l’antiquité » (pp. 27-28).

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Dès l’enfance, Jung, donc, pressentit sa mission “chamanique” : connaître, par la résolution de l’ombre, le Soi, auquel on accède par l’intégration de la personnalité. Les chamans, rappelle Eliade, ont toujours œuvré, dans leurs voyages périlleux dans les “multiples états de l’être”, au bénéfice de leurs semblables, révélant que, dans la physis, tout est animé, en relation perpétuelle, dans une perspective, pour le dire avec Evola, de transcendance immanente. La même tâche que Jung se fixa face à l’humanité désorientée du 20ème siècle.

Ce n’est pas un hasard si Giovetti évoque la possible filiation familiale du Suisse avec J. W. Goethe, pour lequel Carl manifesta, dès sa jeunesse, une évidente harmonie de vision, notamment pour les œuvres scientifiques du poète (appréciées, entre autres, par Rudolf Steiner).

bleuler-1571495924.pngJung aurait voulu faire une carrière en archéologie, mais des raisons familiales l’incitèrent à étudier la médecine et à se consacrer à la psychiatrie. Poussé par le professeur Bleuler (photo), il consacra sa thèse à la psychologie et à la pathologie des phénomènes occultes. Jung participa activement aux expériences médiumniques de sa cousine, H. Preiswerk. Lui-même vécut d’ailleurs des expériences paranormales dans les maisons où il habitait : il entendit des “explosions” provenant des bibliothèques et vit un couteau se briser mystérieusement en quatre parties. Cet objet fut soigneusement conservé par le savant jusqu’à la fin de ses jours. Le savant suisse était étranger à tout dogmatisme, en particulier vis-à-vis des phénomènes mentionnés, à tout préjugé positiviste, niant la possibilité de l’impossible. Il rencontra Freud, qui le choisit comme élève préféré et comme possible successeur.

Paola Giovetti reconstitue leur relation, relevant que la cause de leur dissension n’était pas uniquement d’ordre théorique. Jung ne supportait pas le pansexualisme dogmatique du père de la psychanalyse, qu’il considérait comme un échappatoire de nature compensatoire à la dimension religieuse rejetée par l’athée Freud. Toutefois, dans la rupture, un rôle important fut joué aussi par leurs “équations personnelles”. Ce fut “l’assassinat du Père” Freud qui mit Jung en confrontation directe avec l’inconscient.

jung_wolff_emma-1359858254.jpgCe moment historique fut très difficile pour le psychologue des archétypes, qui réussit à surmonter la crise grâce à une figure féminine de grande importance pour sa vie, Tony Wolff (ci-contre). Jung, avec cette patiente et élève, eut une liaison passionnée que sa femme Emma parvint à tolérer grâce à l’amour sincère qui la liait à Carl. D’ailleurs, la confrontation avec l’“éternel féminin” selon Goethe joua toujours un rôle déterminant pour Jung, comme en témoigne la relation avec Sabine Spielrein, discutée par Giovetti.

L’animus masculin et l’âme féminine doivent s’intégrer pour parvenir à la coincidentia oppositorum alchimique. L’intérêt de Jung pour l’alchimie, développé suite à la lecture du Mystère de la fleur d’or, est essentiel pour comprendre la psychologie analytique: « La nigredo des alchimistes correspond à la confrontation avec l’Ombre […] L’albedo […] correspond à la rencontre avec l’archétype de l’âme pour le mâle et l'archétype de l’animus pour la femelle […] la rubedo représente la rencontre avec l’archétype du Soi » (p. 125).

Le-Livre-rouge-edition-texte-3328007814.jpgLa lecture du Livre rouge, composé de textes écrits en calligraphie gothique et de dessins, parmi lesquels de nombreux mandalas, clarifie la dimension imaginale, loin d’être centrée sur le logos, de la pensée jungienne, et symbolise le parcours existentiel et spirituel du psychothérapeute. Jung a tout mis en évidence dans la construction de la Tour de Bollingen, à laquelle il a travaillé personnellement, témoignage architectural de son univers de référence. Un cosmos silencieux face à l’approche casuistique, mais qui se révèle par l’approche analogique et synchronicique : « Le concept de synchronicité […] désigne la correspondance significative d’événements sans relation causale entre eux » (p. 157). Jung était homo religiosus: grâce à l’intégration acquise, il put conclure une interview, dans la dernière période de sa vie: «Je n’ai pas besoin de croire, je sais!» (p. 207).

Paola Giovetti, Carl Gustav Jung, Il grande sciamano. Una biografia (= Le grand chamane. Une biographie), Edizioni Mediterraneo, 210 pages, 19,50 euros.

Parution du numéro 488 du Bulletin célinien, consacré à Roger Nimier

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Parution du numéro 488 du Bulletin célinien, consacré à Roger Nimier

Sommaire :

2025-10-BC_Cover.jpgNimier, un an avant

Hussard un jour… hussard toujours

Prince de la chronique

Entretien avec Marc Dambre et Alain Cresciucci

Esthète et solitaire. Les thébaïdes de Monsieur Nimier

Le Saint-Brieuc de Roger Nimier.

Pol et Roger

Les deux prénoms – Pol et Roger – font irrésistiblement songer au champagne que prisait tant le second. Quand Pol Vandromme m’a proposé, au mitan des années 80, d’éditer un livre sur les relations croisées entre Céline, Roger Nimier et Marcel Aymé, j’ai naturellement trouvé l’idée excellente. Cela a donné cet essai qui restitue admirablement l’amitié et l’estime qui liaient ces écrivains¹. C’est d’ailleurs Aymé qui présenta Nimier à Céline. Tout cela est connu ; ce qui l’est un peu moins, c’est l’amitié entre Pol, le hussard belge, et Roger l’Ariel, tel que le baptisa Céline.
 
Terrible chagrin que celui qui terrassa l’auteur de La Droite buissonnière à l’automne 62. Cette lettre écrite après les obsèques en témoigne : « J’étais aux funérailles de Roger Nimier. Mais j’ai quitté Garches tout de suite pour me rendre à  Saint-Brieuc (avec Philippe Héduy, Antoine Blondin, et Jacques Perret), où avait lieu l’inhumation. (…) La disparition de Roger Nimier me laisse désemparé. Je suis, pour le moment, recru de fatigue et de chagrin. Nous voilà un peu plus seuls encore, et privés du meilleur d’entre nous (du plus fidèle, du plus fervent, du plus ingénieux), – ce qui n’arrange rien. »²
 

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Témoignage poignant qui fait désormais partie de l’histoire littéraire, tout comme la fameuse dédicace  « au maréchal des logis Destouches,  qui  paie aujourd’hui trente ans de génie et de liberté, respectueusement, le cavalier de 2e classe Roger Nimier, février 1949 »³. Cent ans exactement après sa naissance – il est né un 31 octobre –, ce numéro entend rendre hommage à celui qui contribua à la réhabilitation de Céline sur la scène littéraire. Il le fit d’une double façon : par ses articles dans la presse foisonnante de l’époque et par son rôle de conseiller littéraire chez Gallimard.  
 

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Céline lui en saura gré  comme en témoigne cette autre dédicace : « Vous serez toujours mon premier critique. Bon voyage et à bientôt cher Roger, fidèlement et amicalement. » Elle figure précisément sur son exemplaire de D’un château l’autre dont la réception critique n’eut pas été la même sans son entregent. Mais Nimier ne fut pas que cet intercesseur habile. Romancier, critique, scénariste, journaliste, ses talents multiples ne pouvaient que susciter la jalousie des ratés. Ceux qui furent regroupés sous la bannière des “hussards” n’étaient pas moins talentueux. Ayant confié un jour à Vandromme que, de ce cénacle, ce sont les romans de Jacques Laurent qui avaient ma préférence, je le vis tiquer : c’est qu’il ne lui avait pas pardonné certain propos condescendant à l’égard de Nimier. La fidélité de Pol envers Roger était sourcilleuse4
 

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Et je n’ai garde d’oublier  que c’est grâce à ce dernier que parut la première monographie consacrée à Céline5. Par sa mort tragique, Nimier demeure à jamais une figure de légende. Elle ne devrait pas estomper le merveilleux écrivain qu’il est. Puisse ce numéro susciter l’envie de découvrir une œuvre souvent mentionnée mais peu lue en définitive6.
  1. (1) Pol Vandromme, Marcel, Roger et Ferdinand, Éd. de la Revue célinienne, 1984.
  2. (2) Cf. Christian Dedet, Sacrée jeunesse (Chronique des sixties), Éd. de Paris, 2003, p. 416. Lettre reprise par l’auteur dans Roger Nimier, Antoine Blondin, Jacques Laurent et l’esprit hussard, P.-G. de Roux, 2012, p. 105.
  3. (3) Dédicace sur un exemplaire des Épées envoyé au Danemark.
  4. (4) Voir Pol Vandromme, Roger Nimier, Éd. Jacques Antoine, 1977. Réédité en 2002 aux éditions Vagabonde.
  5. (5) Due à Marc Hanrez, elle parut en novembre 1961 dans la collection “La Bibliothèque idéale” de Gallimard.
  6. (6) Mon appel à célébrer Nimier a été tellement bien entendu que tous les textes reçus ne peuvent trouver place dans ce numéro ; merci à Patrick Wagner (qui va également commémorer le centenaire de Nimier) de recueillir, en décembre prochain, ces textes dans sa revue Livr’arbitres.

De la bulle de l’intelligence artificielle et de la promesse lointaine d'une superintelligence

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De la bulle de l’intelligence artificielle et de la promesse lointaine d'une superintelligence

Markku Siira

Source:  https://geopolarium.com/2025/10/20/tekoalykupla-ja-supera...

La croissance explosive du secteur de l’intelligence artificielle a suscité des attentes d’innovations révolutionnaires, mais a également créé une bulle risquée qui rappelle la bulle Internet de la fin des années 1990. Des entreprises comme OpenAI ont investi des milliards dans le développement de l’IA, mais les pertes financières sont significatives, et les attentes des investisseurs quant aux retours se sont éloignées vers le futur — pour autant qu'elles se réalisent jamais.

L’incertitude économique a poussé les entreprises à chercher de nouvelles façons d’accroître leur base d’utilisateurs, comme la décision d’OpenAI d’autoriser des applications pour adultes basées sur l’érotisme. Cette tendance soulève des questions éthiques et sociales, notamment lorsque l’IA est développée vers une intelligence artificielle générale (Artificial General Intelligence, AGI), capable d’effectuer toute tâche intellectuelle humaine.

La bulle est visible dans les investissements massifs et dans des attentes déconnectées de la réalité. Les entreprises d’IA ont promis des technologies révolutionnaires, comme des véhicules entièrement autonomes, mais ces promesses ont souvent été déçues. Par exemple, les délais pour la pleine autonomie de Tesla ont été repoussés à plusieurs reprises, ce qui augmente la méfiance. La valorisation des entreprises repose largement sur le potentiel perçu et des images de marque, sans modèles commerciaux durables.

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La ligne d’OpenAI concernant les applications pour adultes montre les tentatives désespérées de commercialisation du secteur. Récemment, le PDG Sam Altman a assuré que l’entreprise ne développait pas de robots sexuels, mais après la conférence DevDay 2025, cette ligne de conduite a changé. De même, le personnage animé à connotations sexuelles de xAI a suscité des critiques, révélant la pression financière qui pousse la technologie vers des zones douteuses.

Ces orientations augmentent le risque d’abus. Des insiders rapportent des problèmes dans la gestion de matériel explicite, comme la violence envers des enfants. OpenAI promet des restrictions d’âge et une reconnaissance de l’âge basée sur le comportement, mais l’échec des mesures de Character.AI — comme le suicide d’un adolescent en Floride à cause d’un bot de jeu de rôle manipulatif — soulève des doutes. Aux États-Unis, une loi a été proposée pour interdire l’utilisation d’applications IA interactives par les mineurs.

Les défis technologiques et environnementaux accentuent la surchauffe du secteur. Le développement de l’IA repose sur d’énormes volumes de données et une puissance de calcul considérable, ce qui augmente la consommation d’énergie et soulève des questions écologiques. La formation de grands modèles linguistiques consomme beaucoup de ressources, mais le progrès reste concentré sur des domaines étroits, comme le traitement du langage, laissant de côté la résolution de problèmes généraux. Cela limite la capacité de la technologie à répondre aux attentes et accroît les risques liés à son développement.

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L’éclatement potentiel de la bulle de l’IA entraînerait de vastes conséquences. Sur le plan économique, il pourrait entraîner des pertes d’emplois dans le secteur technologique. Politiquement, cela accélérerait la réglementation aux États-Unis et en Europe, peut-être en limitant l’innovation tout en renforçant les normes éthiques. Socialement, la méfiance envers l’IA pourrait ralentir son adoption, mais un effondrement pourrait aussi orienter le secteur vers des applications plus durables.

L’objectif central du secteur est la superintelligence, qui dépasserait les capacités intellectuelles humaines, par exemple dans l’analyse médicale ou la résolution créative de problèmes. Son développement est techniquement et philosophiquement difficile, comportant d’importants risques et enjeux éthiques. La recherche de cette superintelligence alimente la surchauffe du secteur, car les attentes stimulent les investissements.

La rhétorique des dirigeants de l’IA révèle une logique cynique: la société doit accepter les dommages causés par le progrès technologique, comme la perte d’emplois et les crises éthiques. Cela se manifeste dans l’intégration de l’IA dans l’éducation, la santé ou le divertissement.

Même si la bulle économique éclate, l’IA ne disparaîtra pas de notre société. Son développement nécessite une évaluation critique et une régulation anticipée pour qu’elle serve l’intérêt général, et pas seulement les intérêts commerciaux à court terme. Sinon, la dystopie post-humaine créée par les entreprises technologiques pourrait devenir une réalité inévitable.

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jeudi, 23 octobre 2025

Sacré & consumérisme: des célébrations de Samhain à Halloween

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Sacré & consumérisme: des célébrations de Samhain à Halloween

La comparaison entre les deux interprétations de la fête de passage met en évidence la dégénérescence des liturgies dans le calendrier de la matérialité économique

par Riccardo Mulas

Source: https://www.barbadillo.it/125538-sacro-consumismo-dalle-c...

Samhain, le Nouvel An celtique

Nous l’admettons. La “fête” d’Halloween ne nous a jamais enthousiasmés. Au contraire, nous ne cachons pas une certaine méfiance envers une date que nous n’avons jamais vraiment ressentie comme étant celle qui révèlerait une identité propre. À vrai dire, les préjugés ont toujours été nombreux. Si nous devions écrire les mots qui viennent à l’esprit en pensant au 31 octobre, ce seraient avant tout: “costumes effrayants”. Ensuite, nous penserions à des fêtes déguisées, des soirées à thème, des locaux décorés, des étagères de supermarchés envahies par des citrouilles en plastique et des déguisements. Et à peu d’autres choses.

En somme, dans l’imaginaire, Halloween s’est toujours présenté comme une sorte de carnaval automnal, peut-être plus sombre, plus macabre, mais toujours dépourvu de substance. De même que nous n’attribuons pas de signification particulière aux œufs de Pâques ou aux bas de la Befana, symboles vidés à cause de leur commercialisation excessive; nous pensons que le 31 octobre est également devenu une mise en scène de style capitaliste, réduite au spectacle et à la consommation, privée de toute valeur spirituelle originelle.

Nous utilisons volontairement le mot “dégénéré” parce qu’animés par la curiosité de comprendre ce que jusqu’alors nous avions seulement jugé, nous avons découvert que derrière Halloween se cache en réalité une célébration très ancienne, dotée d’un sens symbolique et spirituel profond: le Samhain des peuples celtes. En laissant de côté les apparences et les préjugés, nous avons approfondi ses origines et sommes tombés sur une histoire qui fascine et surprend, faite de mythes, de légendes et de rites nés dans la mystérieuse et verte Irlande. 

Les racines celtiques d’une fête de “passage”

Les Celtes, peuples de bergers intimement liés aux rythmes de la nature, fondaient leur existence sur une relation sacrée avec la terre, source de vie et de prospérité. Pour eux, chaque saison avait une signification précise, et le passage du temps coïncidait avec le renouvellement cyclique de la nature. La fin de l’été, qui tombait précisément le 31 octobre, marquait la fin des pâturages et des récoltes, ainsi que le début de l’hiver, saison d’obscurité et de repos. En gaélique, Samhuinn signifiait “fin de l’été”.

Halloween naît donc de ces fêtes de passage, où la communauté célébrait non seulement la clôture d’un cycle, mais aussi le début de la nouvelle année naturelle. C’était un temps de transition, chargé d’ambivalence, de joie et de peur, de gratitude et d’incertitude, de fête et d’introspection. Le Samhain représentait le moment où les liens sociaux et spirituels se renforçaient, et où les rites de protection et de purification servaient à conjurer les peurs collectives et à invoquer la bienveillance des dieux.

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Avec le christianisme

Avec l’avènement du christianisme, ces traditions ne disparurent pas complètement ; au contraire, elles furent en partie intégrées, superposées ou réinterprétées. Le culte des esprits et de la mort se fondit avec celui des défunts et des saints, en maintenant vive la même tension spirituelle : l’idée que la “mort de l’été” n’était pas la fin, mais le début d’un nouveau cycle vital. En hiver, en effet, la nature semble mourir, mais en réalité elle se renouvelle dans le silence de la terre, où reposent les graines et les morts. De cette analogie naît le lien profond entre Samhain et le culte des défunts : la croyance que, dans la nuit entre la vieille et la nouvelle année, les esprits pouvaient franchir le seuil entre les mondes, unissant pour un instant l’au-delà et la vie terrestre. 

Cette nuit-là, les Celtes allumaient le Feu Sacré sur les collines, symbole de purification et de protection. Pendant trois jours, on dansait, on festoyait, on se déguisait avec la peau des animaux sacrifiés pour effrayer les esprits maléfiques, et on laissait en dehors des maisons de la nourriture et du lait pour les esprits bienveillants.

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C’était une fête qui parlait de peur et d’espoir, de fin et de renaissance, de nuit et de lumière. Un moment d’unité, où la communauté retrouvait sa propre essence face au plus grand mystère : celui du temps et de la mort.

La déformation d’Halloween

Si l’on met en parallèle les deux visions de la fête en question, l’ancienne et la moderne, on voit plus clairement l’évolution, ou plutôt, la dégénérescence, de la société: d’un monde où l’esprit dominait la matière, à un monde où la matière a fini par étouffer l’esprit; d’une communauté qui, en se rassemblant autour d’un feu sacré, affirmait son unité, à la société moderne qui exploite chaque occasion pour alimenter le consumérisme et remplir les poches de la caste marchande.

Halloween représente donc le miroir de notre temps, une métaphore d’une époque perdue et d’une société, qui n'est plus communauté, une époque qui erre entre la dissolution de la tradition, du sacré et de la mémoire, et l’émergence du monde illusoire de la consommation et de la matière.

23:20 Publié dans Traditions | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : traditions, samhain, automne, traditions celtiques | |  del.icio.us | | Digg! Digg |  Facebook