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jeudi, 11 février 2021

Maugis de Christopher Gérard - Plus vrai que le vrai

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Maugis de Christopher Gérard

Plus vrai que le vrai

Ex: https://le-carnet-et-les-instants.net

9782363713384.jpgChristopher GÉRARD, Maugis, Pierre-Guillaume de Roux, 2020, 256 p. 18 €, ISBN : 978-2-36371-338-4

Tout commence par une guerre très semblable à celle qui nous hante encore : cet interminable conflit qui a traversé presque tout le 20e siècle, coupant l’Histoire en deux parties inégales, et qui continue à alimenter les idéologies totalitaires, les fantasmes et les remords. Mais cette guerre de 1914-1945 est abordée ici sous l’angle de l’épopée, où s’affrontent les belligérants à l’onomastique inconnue, et où les principaux compagnons d’armes du héros sont évoqués comme des personnages homériques, y compris dans leurs qualificatifs flamboyants.

La modernité paradoxale du livre tient à son décalage. À travers cette utopie des XVII provinces, du Royaume de France à l’âge des armes lourdes et de l’Occupation du sol par les Teutons, dans un contexte qui mêle l’Histoire à la fable, on découvre avec une netteté qui ne fait que croître au fil des pages une image contrastée et terriblement fidèle de notre monde déchiré, entre chaos et renouvellement.

Cette similitude inversée donne à la scène d’ouverture du récit de Christopher Gérard, sobre et cruelle, le coup de cymbale de la nécessité.


Lire aussi : la fiche de Christopher Gérard sur Objectif plumes


Le ravissement naît de l’étrange hiatus, parfaitement voulu, entre la singularité des situations et un univers suffisamment proche du nôtre pour marquer sa distance : dans cet intervalle s’exprime la philosophie naturelle de Maugis.

Une certaine tradition fantastique, faite de réalisme et d’irréalité, et assumée, vient ainsi recouper un autre fil d’Ariane, l’Histoire utopique, telle que la mémoire romanesque pourrait le reconstituer, après la bataille, grâce au don des analogies.

Ainsi les aventures pythagoriciennes du héros nous mènent bien plus loin qu’on n’imagine dans la découverte d’un secret perdu : la vie.

Maugis est le nom initiatique que François d’Aygremont a reçu à Delphes au terme d’un an d’instruction et d’une gradation des rituels. Par ce nom, ou à travers lui, François est fait mage et guerrier à la fois. Il se lance à la recherche d’une lumière qui se dérobe, mais dont l’existence est attestée par une très ancienne et très véridique tradition.

L’Ardenne, Oxford, Delphes, Bruxelles, Paris, Aran en Irlande, Rome, Bénarès et le Nord magnétique se mêlent dans une trame serrée dont la quête de la liberté, à mener sur soi-même, est la clé.

Enthousiaste et curieux, artiste et soldat, François d’Aygremont après avoir reçu à Delphes son initiation, est désormais susceptible de tous les savoirs, et mûr pour tous les combats.

« Émerveillé, Maugis fit un tour complet sur lui-même ». Cette phrase toute simple pourrait s’appliquer au lecteur, à la fois désorienté et admiratif, face à l’univers qui se déploie autour de lui, au fur et à mesure qu’il avance dans ce domaine inconnu et dangereux.

Malgré un enchaînement de lieux et de circonstances qui happent le héros, l’impression la plus frappante pour le lecteur est la ligne claire qui traverse le récit de bout en bout, la force de pénétration narrative ininterrompue qui unit tous les événements et leur donne leur musique. Comme une balle bien placée qui atteint son but noir sur blanc.

christopher-gerard-cape.jpgDans ce monde de guerre (et même les périodes de paix sont les intervalles entre deux combats), les décors ont une présence rayonnante parce qu’ils sont mêlés à l’activité des hommes sans être complices de la hideur de la mort. L’idéal antique se glisse dans le temps parallèle de l’actualité.

« Il est entendu qu’un livre actuel s’honore de dériver d’un livre ancien » (J.L.Borgès, Fictions). On ne pourrait pas mettre un nom fixe sur le livre imaginaire dont Maugis serait issu, mais on en distingue bien les contours. Quelque part entre les Poneys sauvages de Michel Déon et les Chevaleries de Montherlant, se situe la source.

« L’an 1919, cinq jeunes gens français sentirent le besoin de former entre eux une société un peu codifiée et un peu âpre. » Ce début de Solstice de juin fournit au roman dont nous parlons ici, comme dans une cantate, le chant alterné du souvenir. Cela n’enlève rien à la singularité d’un livre nouveau, pas plus que le contexte implicite d’une société secrète n’enlève son sens à la solitude essentielle de Maugis.

Quelque chose du grand souffle du compagnonnage tragique circule, à travers le temps et l’espace, dans ce roman minutieux et violent. Non parce que la destruction et la mort y règnent en demiurges implacables, mais parce que tout conspire à transformer un drame collectif en un seul destin, qui est héraldique.

C’est la raison implicite pour laquelle le rôle, c’est-à-dire l’épaisseur romanesque, des personnages féminins, est contenu, comme un feu sous la brume. Sans doute le sujet ne s’y prête pas. L’ensemble du livre s’apparente à une chambrée où des moines-soldats, entre deux circonstances éternelles, rêvent des femmes un peu comme de personnages de légende. Le monde appartient aux femmes, mais les principaux personnages sont sortis du monde et ne peuvent y rentrer que par une porte dérobée : le mystère.

Dans cette aventure d’un autre temps, et donc parfaitement adaptée au nôtre, la vie est une suite de secrets, de combats, d’initiations et d’amours impossibles à quoi on reconnaît, si on a soi-même vécu dans le siècle, que le modèle est tiré du présent le plus authentique et qu’un roman réussi est une vérification de l’expérience par l’éternité.

Le charme puissant de cette utopie du réel naît sans doute de la minutie avec laquelle les moindres variations de la feuille de température de l’expérience sont reconstituées. « La poésie n’est faite que de beaux détails », disait Voltaire. Il faut simplement préciser que dans Maugis, les détails sont d’autant plus vrais qu’ils sont imaginaires : non parce qu’ils n’existent pas dans le monde sensible, mais parce qu’ils renvoient à un univers fantasmatique plutôt qu’au fac-similé des faits matériels : ils font concurrence à la topographie, comme Balzac faisait concurrence à l’état-civil.

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Que subsiste-t-il d’une vie, sinon le sillage de l’Esprit, c’est-à-dire de la volonté appliquée à sa vision ? Le reste, quelques objets à la valeur fictive, des vêtements défraîchis, des livres dont personne ne veut plus, des amitiés effacées, des exploits sans témoins, des amours sans preuves, est aboli au lendemain de la mort. L’intelligence, l’amour, l’héroïsme y passent comme le reste, faute d’une œuvre qui parle encore aux vivants, et disent la geste d’une aventure en passe de devenir un mythe.

Il faut lire Maugis avant que l’éclat des choses divines qui hante la nuit des hommes ne se dissipe tout à fait.

Luc Dellisse.

lundi, 08 février 2021

Quand le conflit constitue le coeur du politique: la grande leçon de Julien Freund

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Quand le conflit constitue le coeur du politique: la grande leçon de Julien Freund

par Louis Soubiale

Ex: http://lafautearousseau.hautetfort.com

Parce que nos contemporains sont devenus amnésiques au point d’avoir perdu jusqu’au sens du tragique, ont-ils fini par se persuader que la France, l’Europe et plus généralement l’occident, étaient enfin rentrés dans l’ère du progrès continu, de l’eudémonisme et de la parousie terrestre.

Pour s’en tenir aux 27 États de l’Union européenne, les baby-boomers et leurs successeurs n’ont jamais connu les périodes d’instabilité vécues par leurs aïeux, dues, pour l’essentiel, aux guerres ou aux périodes de famines – voire d’épidémies, au miroir desquelles notre Covid-19 fait figure de douce plaisanterie. Nos sociétés pacifiées – à défaut d’être authentiquement pacifiques – ont participé d’un désarmement qui n’est pas seulement d’ordre militaire, puisqu’il affecte intellectuellement et psychologiquement la majorité de nos concitoyens qui sont désormais convaincus, au prix d’un manichéisme séraphique des plus consternants, que la « paix » constitue, à jamais, leur indépassable horizon éthique, tandis que la « guerre » – dont la Seconde Guerre mondiale symbolise, à leurs yeux souvent voilés par une crasse ignorance, l’évènement topique et archétypique –, figure eschatologique sécularisée, renvoie à des temps barbares, archaïques et, comme tels, définitivement révolus. Dit autrement, nos sociétés post-modernes semblent pathologiquement avoir évacué, à peu de frais, tout scénario, quand ce n’est pas jusqu’à l’idée même de conflictualité, de la simple rivalité ou opposition agonale à l’hostilité polémogène ou belligène.

jef810.jpgQuelle n’est pas leur surprise mâtinée d’horreur, lorsque, contre toute attente, surgit, comme satyre au détour d’un bois, la figure inattendue, brute – voire brutale – et grossière de l’antagonisme, surtout lorsqu’il est de nature politique ! C’est ainsi que le mémorable épisode antagonique de la prise d’assaut du siège du Congrès des États-Unis d’Amérique – une fraction du peuple s’étant élevée contre ses représentants élus – a littéralement sidéré les opinions publiques occidentales qui l’ensevelirent sans réserve – et sans nuance – sous un flot incontinent de réprobations excommunicatrices et de condamnations conjuratrices – l’on remarquera, en effet, que la démonologie et l’exorcisme ne sont, paradoxalement, jamais loin dans les esprits déspiritualisés et laïcisés de nos belles âmes offusquées…

Prolongeant Clausewitz qui considérait que la guerre était la continuation de la politique par d’autres moyens, Julien Freund (1921-1993), philosophe et sociologue du politique et du conflit, écrivait dans son maître-ouvrage, L’Essence du politique, que « la politique porte en elle le conflit qui peut, dans les cas extrêmes dégénérer en guerre ». S’appuyant sur la critériologie schmittienne de l’ami et de l’ennemi, Freund la dépasse en l’élevant au rang d’une des trois hypostases du politique – les deux autres étant la distinction du public et du privé et la relation du commandement avec l’obéissance. Freund considère que toute politique, réellement ou virtuellement, suppose le conflit. Ce faisant, rejoignant Machiavel, le philosophe de Villé récuse toute morale dans le champ du politique : « il n’y a pas de politique morale, il n’y a qu’une morale de la politique. » Cette dernière se résume au moyen spécifique d’action du politique : la force – dont le rôle est de « conserver », la ruse n’étant que sa « servante ». Si son maître et ami, le juriste Carl Schmitt, se bornait à identifier le politique partout où se manifeste une relation de type agonistique entre l’ami et l’ennemi, Freund, en bon aristotélicien, classera le politique parmi les six activités originaires de l’homme, chacune étant considérée comme une « essence » : l’économique, le religieux, la science, la morale et l’esthétique.

Le politique est donc, par excellence, le topos de la confrontation. S’il ne débouche pas toujours sur l’élimination physique de l’adversaire, au moins renferme-t-il, inévitablement, cette potentialité qui, formellement, d’une part lui confère les traits d’un concept-limite, substantiellement, d’autre part, en fait le domaine de tous les imprévus – de la simple discordance ou dissidence à l’affrontement physique, en passant aussi par l’aboutissement du compromis. Telle est la grande leçon de Freund, qui a appris de Max Weber que les points de vue ne sont pas toujours dialectiquement conciliables et de Georg Simmel que le conflit peut aussi être « une forme positive de socialisation ». Plus tard, Chantal Mouffe s’en souviendra – bien que partant directement des travaux de Carl Schmitt, là où ceux de Freund eussent été plus pertinents – pour forger son concept d’« agonisme », type de conflit antagonistique apprivoisé ou « sublimé » par la politique démocratique. L’assentiment de Freund au réalisme anthropologique n’évacue donc pas l’inimitié ou l’hostilité, attendu, précisément, que la finalité du politique, enté sur la recherche constante du bien commun, est de « savoir envisager le pire pour empêcher que celui-ci ne se produise » (La Décadence, 1984). La violence et la mort sont parfois ces « pires » que toute politique doit savoir efficacement conjurer. Mais si « la politique repose sur la peur », la peur du conflit est, quant à elle, impolitique.

Source : https://www.politiquemagazine.fr/

Le roman bernanosien de Raspail

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Le roman bernanosien de Raspail

Par Raoul de Bourges 

« Nous étions fort peu nombreux, à l’époque, à avoir entendu la voix du curé de Bief, car le huis clos avait été prononcé dès l’ouverture du procès par un président d’assises catholique soucieux de ne pas livrer en pâture à la presse et au public les détails abominables d’un épouvantable crime de sang dont le coupable était un jeune prêtre. Cette décision avait soulevé un tollé. Elle serait inconcevable aujourd’hui où l’opinion dominante se réjouit dès que l’indignité d’un prêtre, amplifiée par les médias, affaiblit le corps de l’Eglise. » Jean Raspail, formidable écrivain, héraut des cœurs purs et autres aventuriers, offre La Miséricorde à ses lecteurs et à tous les chercheurs de sens : « Monsieur le président, cet homme a tué sa maîtresse et son enfant précisément parce qu’il était prêtre. Ne l’aurait-il pas été au plus profond de lui-même qu’il se serait contenté lâchement des facilités humaines. De nos jours, une vie de défroqué marié, cela n’a rien d’impossible. L’Eglise même, parfois, l’envisage. »

Comment comprendre cette affirmation de l’avocat qui semble absconse à un esprit qui serait parfaitement horizontal et ignorant des questions célestes ? Indéchiffrable assertion pour qui aurait épousé l’une des formes de péché du monde moderne, à savoir le refus de l’invisible. Faut-il redire que le génie du christianisme se trouve dans la possibilité du salut, dans le relèvement offert à tous et singulièrement aux plus petits, à la lie de l’humanité, cette lie faite de pécheurs qui consterne les puissants et les intelligents mais qui est la matière première dont Dieu façonne sa croix d’espérance ?

imagesJRasp.jpgDans le roman, le vicaire général donne au chanoine Jacquelein sa vision de la rédemption qui constitue en soi la fine pointe du catholicisme : « Comprenez-moi mon ami. Cette folie supposée nous arrange trop bien. Si on pouvait la crier sur les toits sans remuer trop de boue, quelle bonne affaire ce serait pour le sacerdoce catholique enfin lavé d’une souillure publique ! […] Plus de parjure, plus de sacrilège, plus de sang sur les mains consacrées, pas de pardon à s’arracher du cœur : Dieu ouvre ses bras aux irresponsables et accueille le dément dans son paradis… Ne l’avez-vous pas pensé, tout comme moi ? Le vicaire général tira sur sa pipe en se forçant à réfléchir. Sa foi ne s’embarrassait pas de subtilités. En d’autres temps, sans haine et pour Dieu, sans doute aurait-il expédié au bûcher hérétiques et sorciers, refusé les cimetières aux suicidés, excommunié les princes adultères, exorcisé les déments et les monstres à grands coups d’eau bénite et de formules latines. Au fil des siècles, pensait-il, c’étaient des gens de cette trempe qui avaient bâti l’Eglise catholique, inaccessibles à cette faiblesse, à ce luxe corrosif de l’âme moderne que sont le doute et l’excès de tolérance. Une âme à sauver, une âme sauvée, le curé de Bief ? Ainsi les crimes les plus horribles conduiraient-ils à Dieu plus sûrement que le sentier escarpé où peinait le chanoine Jacquelein, guidant vers les sommets éternels son maigre troupeau de fidèles ? »

Dans Le Journal d’un curé de campagne, Bernanos s’interroge : « Le mauvais prêtre est un monstre. La monstruosité échappe à toute commune mesure. Qui peut savoir les desseins de Dieu sur un monstre ? A quoi sert-il ? Quelle est la signification surnaturelle d’une si étonnante disgrâce ? »

En dépit de la marque indélébile du péché originel dont il est lui-même entaché, le prêtre demeure l’un des derniers héros des temps modernes. Cet expert en humanité est l’ultime figure, un croisé pour la gloire de Dieu et le salut du monde au cœur des sociétés liquides, qui combat pied à pied nihilisme et relativisme, réfute en bloc la caricature de vie dans laquelle homo-aeconomicus se débat. Il conserve dans ses mains le fil ténu qui le relie à son semblable, ce prochain chancelant au bord du précipice, tenté par la folie du mouvement permanent et du n’importe quoi. Animé d’un amour et d’une prévenance mystérieux, il l’invite à se détourner de l’abîme mortel. L’homme de Dieu scande à temps et à contretemps à cet homme moderne devenu un narcisse survolté l’injonction lumineuse de rester incarné et de croire à l’invisible : « joie de vivre, joie de croire », et par une fraternelle commutativité de la chair et de l’esprit « joie de croire, joie de vivre ». Pourtant, la croix du prêtre voué à Dieu est faite d’un bois lourd et sacrificiel. Jean Raspail la décrit sans ambages, au détour des années 1960, de façon crue : « Cinq villages, plus huit hameaux dispersés sur le causse, au bout de chemin épouvantables. Des kilomètres par tous les temps, beaucoup de pannes de moto. Il faudrait une 2 CV. Même d’occasion, c’est trop cher. Il rafistolait la moto. Et toutes ces pannes de moto pour visiter un bien maigre troupeau. Question d’habitude… Les reins brisés, les vêtements trempés, le corps glacé, le rhume permanent, les mains noires de cambouis, les chaussures en blocs de boue, pour confesser des vieilles et des marmots, pour célébrer des messes et prononcer des sermons dans des églises vides et sales, pour tenir des réunions de jeunes où personne jamais ne venait, à l’exception de deux ou trois anormaux désoeuvrés, pour marier des filles enceintes jusqu’aux dents, fermer les yeux à des mourants damnés dans leur obstination, et puis jouer au foot le jeudi, crevé comme il était, pour entraîner une douzaine de grands niais, parce que jadis il jouait bien, avant-centre au séminaire, une bonne raison pour s’épuiser tout une après-midi sur une prairie glaiseuse, dans le seul but de parler de Dieu cinq minutes aux garçons, enfin courir les fermes pour combattre ce qui était trop honteux, la vieille délaissée sur son grabat, la fille de quatorze ans qui fréquente, l’enfant qu’on bat et il qu’il faut protéger, le bébé d’alcooliques qui va mourir sans baptême… Il avait bien du travail. Mais ça irait quand même ! Ah oui, ça irait ! »

AVT_Jean-Raspail_3933.jpgEn filigrane, notre auteur questionne : la voie qui conduit à Dieu peut-elle être autre que crucifiante ? L’accès au salut peut-il ressembler à une aimable baguenauderie le long d’un blond chemin parsemé de rassurants petits cailloux ? Avec cette clé de compréhension située aux antipodes de l’offre des marchands de bonheur en toc, nous mesurons combien le christianisme demeure un scandale pour les païens.

Raspail propose dans ce roman bernanosien une méditation profonde qui heurte frontalement les consciences modernes, défie les logiques matérialistes et pourrait ressembler, par instants, à un hymne au conservatisme. La protection des trésors patiemment forgés par notre civilisation apparaît ici comme un enjeu décisif. L’écho de la prophétique phrase de Péguy y résonne puissamment : « Le malheur du monde moderne c’est qu’il a considéré comme négociables des valeurs que le monde antique et le monde chrétien considéraient comme non négociables ».

vendredi, 05 février 2021

Nous sommes en pleine guerre mentale menée avec des ‘’neuro-armes’’

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Nous sommes en pleine guerre mentale menée avec des ‘’neuro-armes’’

Eduardo Martinez de la Fe

Ex : https://tendencias21.levante-emv.com

Nous sommes plongés dans une guerre mentale qui passe inaperçue: de puissantes neuroarmes sont mises au point pour influencer le cerveau humain, sur la base de technologies qui ont vu le jour à des fins médicales.

À notre insu, nous vivons dans une guerre mentale secrète axée sur le néocortex, la région du cerveau impliquée dans les fonctions cognitives supérieures.

De puissantes neuro-armes sont actuellement développées ou testées pour nous empêcher de penser par nous-mêmes, selon le géostratège et spécialiste du renseignement Pedro Baños.

Il ajoute que, grâce à la technologie, notre espèce a atteint une forme particulière d'immortalité: nous avons déposé notre âme dans le cloud, où elle restera à jamais, avec tous nos secrets et nos émotions les plus intimes, nos pensées et nos faiblesses.

Cependant, il avertit que cet exploit technologique s'est produit à un moment très particulier pour notre espèce: nous vivons dans une Matrice géopolitique où la réalité que nous percevons de nous-mêmes et de notre destination est une illusion créée par les élites pour consolider leur pouvoir mondial.

Ainsi, à l'illusion d'immortalité s'ajoute un autre mirage non moins déconcertant: celui qui nous fait croire que nous faisons partie d'une civilisation organisée qui marche à l’unisson vers un progrès commun et durable, dans lequel notre âme immortelle est en sécurité grâce au nuage d'informations que nous partageons. Rien n'est plus éloigné de la vérité.

Pénétrer l'enchevêtrement

Il n'est pas facile de découvrir l'enchevêtrement mental dans lequel nous sommes, car il est parfaitement dissimulé dans les méandres de notre esprit.

La seule faculté qui nous rend libres est engourdie par les charmes de la technologie, qui nous submerge dans un espace d'information et de loisirs parfaitement conçu pour nous faire réfléchir le moins possible.

Cependant, Baños a pris la peine d'analyser et de dévoiler ce qui nous arrive en coulisses en tant qu'espèce et l'a documenté dans trois ouvrages emblématiques qui constituent un rapport exceptionnel sur les secrets les mieux gardés du monde actuel.

En réalité, selon cette recherche, nous vivons dans un monde dominé par des élites qui ont acquis le pouvoir de créer une culture de masse et qui cachent, derrière l'idéal humaniste que la plupart d'entre nous partageons, le véritable moteur de notre histoire, qui n'est autre que la volonté de pouvoir et de domination mondiale d'une minorité.

D'abord, par une minorité de pays: le plus important est les États-Unis, dont la capacité militaire dépasse largement celle de ses deux rivaux immédiats: la Russie et la Chine.

Ensuite, par une minorité au sein de ces pays: de puissantes multinationales et des fonds d'investissement, qui ont acquis la capacité de contrôler les décisions politiques et ont infiltré les institutions démocratiques pour les pervertir et en faire des participants à leur ambition.

Perversion technologique

La troisième clé de cette réalité cachée est la façon dont la technologie, porteuse des progrès les plus significatifs jamais réalisés par notre humanité, est également pervertie par ces élites pour soumettre nos esprits à ce que l'auteur de cette recherche appelle la "dictature de la micropuce".

Si dans ses deux premiers travaux, Así se domina el mundo (2017) et El dominio mundial (2018), Baños a clairement montré que ces pouvoirs cachés développent une géopolitique culturelle pour influencer la société à travers les médias, les réseaux sociaux, l'art et la culture, dans la troisième partie de cette trilogie, il se penche sur ce qu'il appelle El dominio mental.

Dans ce troisième livre, il révèle la face cachée de la technologie: ce qui se cache derrière la révolution provoquée par les disciplines scientifiques telles que les neurosciences et les technologies associées, qui ont vu le jour à des fins médicales: elles visent discrètement à nous faire penser selon des schémas culturels qui homogénéisent la pensée et font taire les divergences.

Le côté sombre de la technologie

En réalité, nous sommes devenus les vassaux numériques de tout ce monde technologique souterrain, dans lequel l'Internet des objets a ouvert la possibilité d'un contrôle total de la vie des citoyens, dit M. Baños.

La technologie est devenue le plus grand piège contre la social-démocratisation, car elle permet une manipulation toujours plus grande de l'esprit humain, impose la pensée unique et a même acquis la capacité de diriger le vote, ajoute-t-il.

Selon ces recherches, l'esprit humain, devenu le saint graal de la manipulation, est le trou noir qui engloutit toutes les technologies qui tentent de le confondre: il devient le maillon faible du nuage informatique où sont stockées les pensées et les émotions des gens.

Musée de l'horreur

Parmi ces technologies, du côté obscur, on trouve la surveillance et la manipulation des émotions par les ondes cérébrales, la poussière neurale (une micropuce implantée dans le corps qui peut transmettre des informations biométriques à un ordinateur), la duplication du cerveau pour modéliser la prise de décision par une deuxième voix dans notre tête. Ce ne sont là que quelques exemples.

Ce musée de l'horreur, aussi réel que les épidémies et les catastrophes naturelles que nous subissons, est complété par le transhumanisme mental, qui permet, entre autres, d'étendre la domination culturelle par la manipulation du métabolisme, ce que la DARPA appelle la biorévolution, et la neurostimulation, le plus grand potentiel jusqu'à présent pour manipuler l'esprit en faveur de croyances religieuses et sociales spécifiques.

Une variable future de la perversion du transhumanisme est de modifier génétiquement les soldats: immunisés contre la peur et la douleur, et dépourvus de tout sentiment, ils deviendront plus dévastateurs que les armes nucléaires, selon les experts consultés par Baños.

Au-delà de…

Cet au-delà de la technologie se concrétise par des expériences secrètes qui, selon Pedro Baños, sont développées dans le domaine des neuro-armes : elles comprennent la guerre sonique, le harcèlement électronique, l'utilisation d'ultrasons et d'infrasons pour perturber l'équilibre naturel des personnes, et l'utilisation de substances psycho-chimiques (utilisées en médecine) pour obtenir des changements de personnalité favorables à des intérêts cachés.

Pedro Baños montre, de manière bien documentée et rigoureuse, que nous sommes en pleine guerre mentale orientée vers le neurocortex, la région du cerveau qui définit le nouveau contexte de guerre, basé plus sur l'esprit que sur le monde physique.

Ce contexte est bien illustré par un exemple: la communauté du renseignement connue sous le nom des "cinq yeux", composée d'analystes des États-Unis, du Royaume-Uni, du Canada, de l'Australie et de la Nouvelle-Zélande (aucun de l'UE), a formé une unité dite "cybermagiciens" pour employer des techniques cérébrales de manipulation sociale, comme l'a révélé le chercheur Musa Khan Jalalzai, cité par Baños.

La réalité est que nous ne sommes pas dans le "Brave New World" de Huxley, ni dans un scénario qui ne peut pas évoluer au-delà de ce que nous avons atteint aujourd'hui, comme le dit la culture que les modèles induits dans lesquels nous sommes inclus nous ont imposés.

Le potentiel humain est toujours intact et nous pouvons et devons trouver des formules pour ne pas céder à la pression de la guerre mentale et maintenir active notre capacité à penser par nous-mêmes, conclut Pedro Baños dans son dernier ouvrage.

Référence

Pedro Baños, El dominio mental: La geopolítica de la mente,  Ariel, Barcelona, 2020.

17:41 Publié dans Actualité, Livre, Livre | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : pedro banos, livre, domination mentale, neurosciences | |  del.icio.us | | Digg! Digg |  Facebook

jeudi, 04 février 2021

Naar Engeland gedeporteerd. Vlaamse geïnterneerden op het eiland Man 1940-1945 door Carlos H. Vlaemynck

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Bespreking van: Naar Engeland gedeporteerd. Vlaamse geïnterneerden op het eiland Man 1940-1945 door Carlos H. Vlaemynck

Björn Roose

11 november komt er weer aan en daarmee de jaarlijkse herdenkingen. Die zullen ook respectievelijk 100 jaar na het einde van de Eerste Wereldoorlog en bijna 75 jaar na het einde van de Tweede ongetwijfeld behalve over oorlog en vrede ook over de good guys en de bad guys gaan. Niet meer dan passend dus om in deze tijd van het jaar een boekje te lezen dat nóg maar eens aantoont dat de officiële good guys dat verre van altijd waren (en zijn).

Naar Engeland gedeporteerd - Vlaamse geïnterneerden op het eiland Man - 1940-1945 is zo'n boekje. Carlos H. Vlaemynck schreef het neer "uit de mond" (zoals dat dan heet) van Ieperling Luc Desramault en ik ga er van uit dat het in 1984 bij De Nederlandsche Boekhandel (DNB, sinds 1986 bekend onder de naam Uitgeverij Pelckmans) verschenen werk ook nu nog verbazing kan wekken bij de lezers. Ikzelf kende de basis van het verhaal, maar niet de "details", en dit boek gaat in zowel op die basis als op die "details".

Wat die basis betreft, die doet Vlaemynck al meteen in zijn inleiding uit de doeken:

"Toen België op 10 mei 1940 voor de tweede maal in nog geen kwarteeuw door Duitse troepen overrompeld werd, besloot de regering alle verdachte personen, zowel vreemdelingen als landgenoten, bij wijze van voorzorgsmaatregel in hechtenis te nemen. Van uur tot uur zonden de nationale radiozenders oproepen uit waarin de bevolking aangespoord werd hulp te verlenen bij het onschadelijk maken van vijandelijke parachutisten, spionnen en saboteurs. Weldra maakte er zich een ware spionnen-psychose van de bevolking meester. Deze psychose werd in de hand gewerkt door de sterke verhalen van de honderdduizenden vluchtelingen. Overal dacht men leden van de 'Vijfde Colonne' te zien en het aantal preventieve arrestaties steeg onrustbarend. Duizenden mensen, onder wie vooral leden van het V.N.V., het Verdinaso, Rex en de K.P. kwamen aldus in de gevangenis terecht. De meesten onder hen waren onschuldig. Zij kregen echter de kans niet hun onschuld te bewijzen omdat hun aanhouding slechts een zogenaamde 'voorlopige administratieve veiligheidsmaatregel' was, hetgeen iedere vorm van rechtsbijstand uitsloot. Nadat de Franse en Britse troepen op de 19de mei het Nederlandse en het Belgische leger te hulp waren gesneld, gingen de militaire autoriteiten van beide mogendheden eveneens tot aanhoudingen op Belgisch grondgebied over. Zij deden dit onder voorwendsel de aanvoerlijnen van hun strijdkrachten in het opmarsgebied veilig te stellen. Vooral de Fransen lieten zich bij dit wederrechtelijke optreden - België was immers een bondgenoot en geen bezet gebied - niet onbetuigd. Met het oog op de te verrichten arrestaties hadden zij zelfs maanden vooraf door geheime agenten in het neutrale België 'verdachtenlijsten' laten opstellen. Ten gevolge van het bijzonder snel oprukken van de Duitse troepen werd een aanzienlijk aantal politieke gevangenen in uiterst verwarde omstandigheden naar Frankrijk gedeporteerd. Voor velen onder hen betekende deze wegvoering het begin van een wekenlange lijdensweg. [Voor onder andere Joris Van Severen betekende het zelfs het einde, noot van mij] Een kleine groep verdachten kwam evenwel in Engeland terecht."

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Bij die "kleine groep verdachten" het hoofdpersonage van dit boekje, Luc Desramault, destijds gouwleider (regionaal leider) van het Algemeen Vlaamsch Nationaal Jeugdverbond, voor wie deze deportatie vijf jaar zou duren. Liever dan hier het hele verhaal dunnetjes over te doen, houd ik het bij een aantal veelbetekenende citaten:

"Onze bewaking [bij de eerste stop, de gevangenis van Ieper, noot van mij] bestond deels uit politieagenten en deels uit leden van een soort plaatselijke burgerwacht." [terwijl in "klassieke" geschiedenisboeken altijd volgehouden wordt dat burgers pas andere burgers gingen gevangenhouden tijdens de repressie-annex-straatterreur, noot van mij]

"In de bus [waarmee de stouterds afgevoerd werden richting Oostende om van daar richting Engeland gedeporteerd te worden, noot van mij] kregen wij het gezelschap van een zestal Joodse vrouwen die drie kinderen bij zich hadden. Voorts waren er nog enkele communisten bij uit Moeskroen, Wervik en Menen alsook enkele vreemdelingen." [Geef toe, een gezelschap dat, als de Vlaams-nationalistische "verdachten" nationaal-socialisten zouden geweest zijn, toch wel zéér explosief was samengesteld, noot van mij.]

"Op onze bus zat er een jonge jodin die door de natuur met heel wat charmes begunstigd was. Zij bracht het zover dat een van de gendarmen erg verlangend werd om even met haar alleen te zijn ... Toen beiden na geruime tijd terugkwamen, bleek de jodin in het bezit te zijn van enkele koekjes en karamels die wij van haar konden kopen om onze kwellende honger te stillen. Zij bracht het zover dat wij zelfs een weinig water kregen om onze brandende keel te verfrissen." [Het gemengde gezelschap had dus duidelijk ook geen hekel aan mekaar, noot van mij.]

"Niettegenstaande wij slechts verdachten waren, werden wij onderworpen aan het reglement dat van toepassing was op de veroordeelden [in de Londense gevangenis Pentonville, noot van mij] (...) Onze ondervragers hadden een burgerpak aan en waren telkens met vieren. Merkwaardig genoegen kregen wij nooit hun gelaat te zien. Zij droegen steeds een zwarte satijnen kap voorzien van twee doorkijkspleten en een mondopening over het hoofd. Het maakte aanvankelijk een vrij lugubere indruk en liet ons het ergste vermoeden. (...) De ondervragingen duurden twee dagen telkens zonder onderbreking van 8 tot 12 uur en van 13 tot 17 uur. Zij gingen gepaard met heel veel intimidatie. Herhaaldelijk kregen wij te horen dat indien wij de waarheid niet zouden zeggen, zij er die wel uit zouden krijgen! Herhaalde malen verklaarden zij onomwonden dat zij ons zouden afmaken, hetgeen bij ons de bedenking ontlokte dat indien zij toch reeds van plan waren ons te liquideren het dan in feite geen zin meer had om ons te ondervragen. Het kruisverhoor bestond meestal uit vragen die zij door elkaar stelden in de hoop ons op tegenstrijdige antwoorden te kunnen vangen. Dit leverde evenwel niets op aangezien wij niets te verbergen hadden. Wij waren weliswaar allemaal op de een of andere wijze in de Vlaamse beweging actief geweest, maar dit had met de oorlog nooit iets te maken gehad." [Deze mensen waren dus zonder welke officiële beschuldiging dan ook opgepakt, gedeporteerd en gevangen gezet en nu hoopte de belgische staat er op dat ze zelf bewijzen zouden leveren van collaboratie terwijl ze zelfs ... de oorlog niet van dichtbij hadden gezien, noot van mij.]

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"Toen wij in Hutchinson [Hutchinson Camp, een Brits concentratiekamp op het eiland Man, noot van mij] aankwamen, zaten er naar schatting wel vijfduizend joden in het kamp en hoop en al een vijftigtal niet-joden, onder wie Leo Hoste en ik." [Weer dat eigenaardige idee om potentiële "nationaal-socialisten" op te sluiten samen met joden, noot van mij.]

"Het is via dit communicatiesysteem [in de gevangenis van Leeds, de volgende halte van Desramault, noot van mij] dat wij tot de ontdekking kwamen dat er in de gevangenis heel veel Ierse politieke gevangenen zaten. Zij waren leden van de I.R.A. Wij hadden deze drie mysterieuze letters reeds herhaaldelijk als graffiti op de muren van de gevangenis zien prijken, maar de inhoudelijke betekenis van dit letterwoord was toen nog maar een vaag begrip voor ons. Geleidelijk aan leerden wij deze Ierse nationalisten en hun strijd voor de volledige hereniging van hun eiland in één onafhankelijke republiek beter kennen." [Ofte flater nummer zoveel van de Engelsen, noot van mij.]

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"Hoezeer de Londense politiemannen zich [dit keer in Camp X, een ander concentratiekamp op het eiland Man, noot van mij] ook inspanden om het kampleven draaglijker te maken, toch kreeg de drang naar de vrijheid sommigen van ons zo erg te pakken dat er ontvluchtingspogingen werden ondernomen. Een van de merkwaardigste pogingen werd op touw gezet door drie geïnterneerde Nederlanders. Een was officier bij de Koninklijke Nederlandse Marine, de tweede was stuurman bij de Nederlandse Koopvaardij en de derde was piloot bij de K.L.M.. Alle drie werden, terecht of ten onrechte, dat heb ik nooit geweten, verdacht van lidmaatschap bij de N.S.B. Zij hadden hun tocht zorgvuldig gepland en voorbereid. Aldus hadden zij wekenlang in de fabriek waar zij overdag werkten kleine hoeveelheden benzine gehamsterd. Op een mooie morgen kaapten zij ongezien een motorbootje, brachten de benzine aan boord en startten de motor. Met een brede zwaai staken zij van wal en stevenden op volle kracht de Ierse Zee in zuidwestelijke richting op met de kennelijke bedoeling de kust van de neutrale Ierse Republiek te kunnen bereiken. Aanvankelijk scheen hun poging te zullen slagen maar plots kwamen zij echter in een opstekende storm terecht. Aangezien de Ierse Zee een soort van binnenzee is, zijn de golfslagen er kort maar krachtig. Zij kregen water in de boot en de motor begon te sputteren. Weldra viel hij geheel stil en wat zij ook probeerden om hem weer op gang te krijgen, niets mocht baten. Voortgestuwd door de storm dreven zij af naar de Schotse kust. Een Brits legervliegtuig had reeds de drenkelingen opgemerkt en toen hun vaartuig in de branding aan diggelen sloeg en zij uitgeput aan land strompelden, werden zij er opgewacht door militairen die hen oprecht feliciteerden met de gedurfde stunt! Later moesten zij voor een krijgsgerecht verschijnen en werden er tot één maand gevangenisstraf veroordeeld wegens diefstal van benzine en het ontvreemden van een boot. De Britse eigenaar van het vaartuigje weigerde schadevergoeding te vragen. Als sportieve Engelsman vond hij het al erg genoeg dat hun poging mislukt was!" [En dat zijn nu de dingen die een mens veel te weinig leest in "oorlogsverhalen", het respect dat "vijanden" voor mekaar kunnen opbrengen in de juiste omstandigheden, noot van mij]

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"Aldus gingen langzaam maar zeker de oorlogsjaren voorbij. Een paar malen kregen wij bezoek van leden van het Belgische Rode Kruis. Vóór onze aankomst in 'Camp X' hadden wij ze nog nooit gezien. Met veel tegenzin spraken zij Nederlands en het eerste wat zij deden, was ons verwijten maken. Volgens hen waren wij slechte Belgen, omdat wij in een interneringskamp zaten. Het was onze plicht dienst te nemen bij het Belgisch Leger en te gaan strijden tegen de Duitsers. Daarop hebben wij hen ons standpunt uiteengezet. Wij zegden dat wij bereid waren de Belgische strijdkrachten in Groot-Brittannië te vervoegen op voorwaarde dat wij eerst volledig in het openbaar gerehabiliteerd zouden worden. Daar konden zij niet voor instaan, zegden zij, wij moesten dat met de Engelsen regelen. En wanneer wij dan met de Engelsen daarover van gedachten wisselden, verwezen zij ons naar de Belgische regering te Londen. Het gevolg was dat de zaken bleven zoals zij waren en dat de afgevaardigden van het Belgische Rode Kruis ons kamp niet meer bezocht hebben." [Kafka, iemand ?, noot van mij]

En dan, dan moest de kers op de taart nog komen:

"Toen de afreisdatum aanbrak, pakten wij onze koffers en kregen wij onze identiteitskaarten terug. Voorts gaven de Britten ons een vrijgeleidebrief waarop stond dat wij in België overal mochten heengaan waar wij maar wensten. Op 20 mei 1945, Pinksterzondag, stapten wij voor het eerst in ruim vijf jaar als vrije burgers aan boord van een Brits legervliegtuig. (...) Bij de uitgang van de luchthaven [die van Evere, noot van mij] werden wij tegengehouden door enkele mannen in burger. Zij wensten onze persoonsbewijzen te zien. Geen onheil vermoedend toonden wij ze onze vrijgeleidebrieven. Daarop zegden zij dat er voor ons vervoer voorzien was om ons naar Brussel te brengen. (...) Toen men ons daar ter hoogte van het Cantersteen liet uitstappen, werden wij spoedig omringd door een vijandig gezinde menigte die, naar wij later vernomen hebben, daar uit Duitsland gerepatrieerde collaborateurs stond op te wachten. Wij werden er uitgemaakt voor 'sales boches' (smerige moffen) en kregen harde klappen te incasseren. (...) Onder veel gejouw en getier van de omstaanders werden wij [na een ondervraging in Cantersteen, noot van mij] terug in de camion geduwd die ons na een korte rit in het 'Klein Kasteeltje' afleverde. Wij vlogen er bij de aldaar reeds opgesloten incivieken en brachten daar een tiental dagen door. Het eten was er bar slecht en bestond hoofdzakelijk uit gedeshydrateerde rode kool en wortelen. Weldra zat iedereen met diarree geplaagd. Daarna werden wij overgebracht naar de gevangenis van Sint-Gillis (...) Vanuit Sint-Gillis werd ik dan overgeplaatst naar de inmiddels tijdens de oorlog wederopgebouwde gevangenis van Ieper. (...) Het duurde tot in september 1945 vooraleer ik de militaire auditeur te zien kreeg. Hij wist mij alleen maar te vertellen dat er tegen mijn gedrag tijdens de oorlog niets viel in te brengen en dat er derhalve geen reden was om mij te vervolgen. (...) Aangezien ik onschuldig was, gaf de krijgsauditeur bevel mij op staande voet [na zo'n vijf jaar volkomen onterechte vrijheidsberoving dus, noot van mij] in vrijheid te stellen. Hij gaf mij echter de raad mij voor mijn eigen veiligheid voorlopig niet in de buurt van Ieper te vestigen. Ik heb zijn raad opgevolgd en heb eerst een drietal maanden in Vilvoorde bij een zuster van mijn vader gewoond. (...) Daarna heb ik nog zogezegd mijn domicilie gehad bij mijn broer in Komen. Het is daar dat ik dan op 28 februari 1946 een officieel attest van buitenvervolgingstelling heb bekomen."

Om dit waanzinnige verhaal te beëindigen geef ik nog graag mee dat in die officiële buitenvervolgingstelling nog steeds geen reden stond aangegeven waarom Luc Desramault vijf jaar van zijn leven beroofd is door de Belgische staat, maar wel dat die buitenvervolgingstelling "slechts van voorloopigen aard" was en "het hernemen van het onderzoek niet [verhindert] ingeval er zich nieuwe bezwaren voordoen".

Allemaal het overdenken waard als de wereld van de oorlogsjaren weer eens door iemand opgedeeld wordt in zwart en wit ...

mercredi, 03 février 2021

Karl Haushofer en het nationaal-socialisme: tijd, werk en invloed door Perry Pierik

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Bespreking van: Karl Haushofer en het nationaal-socialisme: tijd, werk en invloed door Perry Pierik

Björn Roose

Wie zich ook maar voor een uurtje in geopolitiek verdiept – en dat zijn er sinds die tak van de wetenschap de laatste decennia weer enigszins gededouaneerd is geraakt toch niet weinig –, komt hoe dan ook bij de naam Karl Haushofer terecht. Het is dan ook enigszins spijtig dat Perry Pierik het woord “geopolitiek” niet eens vernoemt op de cover van dit boek, zodanig dat wie nog nooit gehoord heeft van geopolitiek niet door dat woordje kan aangetrokken worden om het boek ter hand te nemen. Nah ja, “nationaal-socialisme” zal een belangrijker verkoopsargument geweest zijn en Pierik is per slot van rekening niet alleen schrijver, maar ook uitgever (dit boek is uitgegeven bij Aspekt, waarvan hij de eigenaar is) en boeken over het nationaal-socialisme en aanverwanten zijn zo’n beetje de specialiteit van zijn uitgeverij. “Als de nationaal-socialisten niet hadden bestaan, dan hadden ze ze moeten uitvinden”, zei een Franstalige kennis van me wel eens en hij had voor de wereld van uitgevers, documentairemakers en cineasten zeker gelijk.

frontImagesLink.jpgNu, los daarvan, dit Karl Haushofer en het nationaal-socialisme is een redelijk sterk boek. Ook voor wie meer wil weten over geopolitiek, want Pierik gaat uitgebreid op het vakgebied in in het derde hoofdstuk Geopolitik: de mores van het vak. De ideeën van Friedrich Ratzel, Rudolf Kjellén, Halford Mackinder en uiteraard Karl Haushofer en de andere geopoliticus in de familie, zijn zoon Albrecht passeren, samen met die van een aantal mindere goden, uitgeverijen, begunstigers, enzovoort, de revue. Bovendien zijn in het boek 35 bladzijden aan voetnoten opgenomen en 20 bladzijden aan literatuurregister. Daarin zit héél veel over de geopolitiek, zodat wie zich verder wil verdiepen in die wetenschap zich nog lang niet zal gaan vervelen.

Maarreuh, geopolitiek, was dat niet iets van de nationaal-socialisten? Was dat niet de semi-wetenschappelijke uitleg die ze gaven aan hun drang naar Lebensraum (en nach Osten)? Zou zoiets niet beter in de hoek blijven liggen waarin het na WOII geschopt is? Wel, dat soort vragen zal allicht ook de reden geweest zijn waarom Pierik dit boek geschreven heeft.

Mijn mening: politici (en dat zijn nationaal-socialisten net zo goed al communisten en “democraten”) maken altijd, net zoals “gewone” burgers (én een groot deel van de wetenschappelijke wereld), misbruik van die conclusies die de wetenschap (tijdelijk) trekt en stofferen er hun eigen aannames mee. Dat dat zal gebeuren, mag geen reden zijn om niet verder te streven naar kennis. En als iemand streeft naar kennis, zal hij doorgaans niet zoveel zelfbeheersing aan de dag leggen dat hij die voor zich houdt tot ze “volledig” is. Wetenschappers hebben een ego, willen niet dat een ander hen vóór is, en verdienen óók graag hun boterham.

Dat er zelfs in de definitie van geopolitiek nogal verschillen zitten van persoon tot persoon, van instelling tot instelling, maakt het er uiteraard niet makkelijker op. Dat er héél veel factoren meespelen óók niet. En dat iedereen er mee doet wat hem zint al evenmin. David Criekemans definieerde geopolitiek in 2005 als “het wetenschappelijk studieveld behorende tot zowel de Politieke Geografie als de Internationale Betrekkingen, die de wisselwerking wil onderzoeken tussen de politiek handelende mens en zijn omgevende territorialiteit (in haar drie dimensies; fysisch-geografisch, menselijk-geografisch en ruimtelijk)”, wat het wel zo’n beetje samenvat, maar ook meteen duidelijk maakt dat geopolitiek over álles kan gaan en overal heen kan.

md1367120941.jpgIs het dan eigenlijk wel een wetenschap, kan je je afvragen? En, weerom mijn mening, dat is het en dat is het niet. Is filosofie een wetenschap? Is psychologie een wetenschap? Is economie een wetenschap? Die eerste twee vragen zullen veel mensen meteen met een “nee” beantwoorden, al zullen de beoefenaars van de wetenschap in kwestie daar wellicht een andere mening over hebben, maar economie wordt algemeen gezien als wetenschap. Ik, als economist, zeg dat het dat niet is. Op basis van de economische “wetenschap” zijn systemen gevestigd die zo ver uiteenlopen als communisme en kapitalisme, verdedigt de ene een “miljardairstaks” en de andere een “flat tax”, is de ene in crisistijden voor zware overheidsinvesteringen terwijl de andere pleit voor het buiten de economie blijven van de staat. En elke politicus én elke economist heeft “wetenschappelijke” bewijzen die zijn gelijk staven. En stuk voor stuk zijn ze van oordeel dat hun tegenstanders onwetenschappelijke klungelaars zijn. Of ze negeren die tegenstanders volkomen. Ergo: als we economie als een wetenschap beschouwen, kunnen we geopolitiek óók als een wetenschap beschouwen.

Sterker nog: er is eigenlijk véél meer overeenstemming in de geopolitieke wereld dan er in de economische wereld is. Zonder dat die overeenstemming met de macht van de straat afgedwongen wordt (cfr. de zogenaamde consensus in de wetenschappelijke wereld over klimaatopwarming, afgedwongen door activistische politieke instellingen en dito van mediatieke roeptoeters voorziene burgers). Er zijn een aantal verschillende verklaringsmodellen, geen daarvan is volledig, en er is sprake van voortschrijdend inzicht, maar de voorlopige conclusies gaan geen radicaal verschillende richtingen uit. Én het is ook gewoon een razend interessant kennisdomein, zeker in tijden waarin grotendeels gedaan wordt alsof grenzen voor eeuwig vastliggen, handels- en andere oorlogen zich bedienen van flauwe excuses, en gedateerde internationale instellingen hun leven proberen te rekken.

51MI6LAnouL._SX339_BO1,204,203,200_.jpgNu, ook los van de rol van Karl Haushofer in de geopolitiek – een rol die eigenlijk nauwelijks kan overschat worden – is dit een interessant boek. De naam van Haushofer zal namelijk zelden genoemd worden zonder ook die van Rudolf Hess te noemen. Rudolf Hess, de gevangene en gehangene van Spandau, de plaatsvervanger van Adolf Hitler, de man met een vredesmissie, is ondanks alle literatuur die over hem gepleegd is nog steeds een van de enigma’s van de twintigste eeuw (daar kom ik bij een latere boekbespreking nog op terug). En hij was jaren een leerling en vriend van Karl Haushofer en diens zoon Albrecht. Hij had hun naamkaartje op zak toen hij naar Schotland vloog. De Haushofers wisten (de zoon in verschillende hoedanigheden) naar alle waarschijnlijkheid van zijn plannen. Al die zaken komen aan bod in Karl Haushofer en het nationaal-socialisme – Tijd, werk en invloed, wat toch veel meer is dan wat Wikipedia ter zake vermeldt. Dat spreekt namelijk alleen van Hess die Haushofers ideeën zou geïntroduceerd hebben bij Hitler en van Hess die Haushofers “joodse familie” (Haushofers vrouw was joods) beschermde tegen diezelfde Hitler, maar vertikt het het ook maar met een woord te hebben over de invloed die de Haushofers (zowel Karl als Albrecht) gehad hebben op zijn “vlucht”.

En dan is er natuurlijk ook nog Karl als vader van Albrecht. De twee kwamen na de “vlucht” van Hess in een neerwaartse spiraal terecht (het nationaal-socialistische regime was zich wél bewust van het feit dat er een samenhang was tussen Hess en de Haushofers die véél verder ging dan het promoten van geopolitieke ideeën), maar zelfs binnen die spiraal bleven ze een merkwaardig evenwicht bewaren. Een evenwicht tussen afkeuring en goedkeuring van de Führer, tussen conservatisme en nationaal-socialisme, tussen oost en west, tussen esoterisme en wetenschap. Een evenwicht dat kennelijk heel moeilijk te begrijpen is in hysterische tijden als de onze en dat daarom steeds weer afgedaan wordt als onzin. Een evenwicht dat Karl Haushofer niet kon redden van een gevangenschap in Dachau en Albrecht Haushofer van executie in de nasleep van het conservatieve von Stauffenberg-complot. Een evenwicht dat Karl Haushofer en zijn echtgenote Martha definitief verloren toen ze zich op 10 maart 1946 achtereenvolgens vergiftigden en ophingen (al lijkt me dat, in combinatie met het lot van Hess, sowieso ook weer een eigenaardigheid).

Voeg aan dit alles een een hoofdstuk toe over de Duitse Sonderweg, een gedegen uitleg over de revolutionaire toestand die uiteindelijk Hitler aan de macht bracht, een stavaza van de geopolitiek op het moment van publicatie (2006) en zelfs – al hoefde dat voor mij niet – een hoofdstuk over wat er van Karl Haushofer gemaakt is in de esoterische literatuur, en je weet dat dit boek van Perry Pierik een aanrader is. Lezen dus !

Epuisement de l'Europe?

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Epuisement de l'Europe?

René Girard

Achever Clausewitz

Editions Champs, 2007

(extraits)

« [En 1940] l’esprit guerrier n’était plus là du tout. L’histoire était devenue implacable. En fait, les Français avaient, à leur tour, l’idée que l’esprit allemand était essentiellement tourné vers la guerre, que c’était dorénavant leur culture à eux (…). Mais ce n’était plus du tout la culture des Français. Il faut penser cette situation comme l’inverse exact de celle de 1806, qui faisait croire à Clausewitz et Germaine de Staël que les guerriers par excellence étaient les Français. Ces derniers ont en effet pris acte, en 1940, que les siècles de la prépondérance française était derrière eux, qu’ils allaient assister au retour des Germains et de l’empire. Quand la culture de la guerre change de camp, la vision de l’histoire change, elle aussi. (…) la France du Second Empire, et surtout celle de la IIIe République, s’est bâtie sur un mythe napoléonien qui l’a littéralement achevée en l’obligeant à vivre au-dessus de ses moyens. Notre dénégation de la réalité est allée croissant, au fur et à mesure que montait, de son coté, le ressentiment allemand. Mais c’est toujours la puissance déclinante qui vit au-dessus de ses ressources. En 1806, c’était la Prusse ; en 1940, c’était la France, mais dans des proportions évidemment incomparables, car la montée aux extrêmes avait progressé. On peut dire de la même façon que l’esprit guerrier a quitté l’Allemagne (…). Là aussi, c’est fini, quelque chose a été cassé. Chaque pays européen a été brisé à son tour par cette tornade. »

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« Il y a de formidables tabous en France, beaucoup de sujets qui fâchent, et dont on ne veut pas parler. (…) Napoléon est littéralement divinisé, comme Jules César. Mais sa mort n’a rien fondé. L’Empire français est mort avec lui. Alors son petit neveu a reconstruit Paris pour essayer de le faire oublier : Iéna, Wagram, Austerlitz, Caulaincourt évoquent plus des avenues, des gares ou des rues, que les batailles ou les généraux qui ont conduit la France à sa ruine. Nous étions encore, il y a peu de temps, dans le mythe de la ‘grandeur française’, dans Louis XIV et dans Napoléon. De Gaulle a porté ce mythe à sa manière. Nous avons changé d’époque. C’est sans doute une bonne chose. Cela indique une sortie de la religion nationale. La continuation de ce qu’il y avait de meilleur dans le gaullisme consistera à renoncer à certains mythes gaulliens, comme un nationalisme trop étroit, par exemple. »

« …l’Europe (…) est un continent fatigué, qui n’oppose plus beaucoup de résistance au terrorisme. D’où le caractère foudroyant de ces attaques, menées souvent par des gens ‘de l’intérieur’. (…) L’Europe était moins malléable du temps de Napoléon. Elle est redevenue, après le communisme, cet espace infiniment vulnérable que devait être le village médiéval face aux Vikings. »

Addendum à

http://euro-synergies.hautetfort.com/archive/2021/01/31/la-roue-des-civilisations-le-zodiaque-a-t-il-une-influence-sur-la-successio.html

Citation oubliée dans la compilation « La ‘Roue’ des civilisations » (astro-histoire, etc.) :

« L’entrée dans l’ère du Verseau est bien plus tragique que les changements d’ères précédents. Le passage du Taureau au Bélier n’a vu que l’affaiblissement de l’empire égyptien, celui du Bélier aux Poissons la décadence romaine. Mais le début du Verseau contient la liquidation apocalyptique évoquée par le mythe de Babel… »

(Robert Dun, Le message du Verseau, 1977)

Une autre citation coïncidant partiellement avec le thème de l’astro-histoire, mais qui peut être placée en « Additif » :

« …depuis Alexandre, aucun conquérant n’a réussi à triompher lorsqu’il s’est dirigé vers l’Orient. Toutes les grandes invasions ont eu lieu dans l’autre sens, qui correspond à la course du soleil sur l’horizon, de l’Est vers l’Ouest, l’Occident, le ‘bout du monde’ qui se termine avec les rivages de l’Océan et les caps finis-tère (Irlande, Bretagne, Galice).

Voici les vainqueurs : Jules César, Attila, Tamerlan, Gengis-Khan : ils marchaient vers l’ouest, comme les conquistadors ibériques du Nouveau Monde et ceux du Far West.

Voici les vaincus, marchant vers l’Est : l’empereur Julien, Charles XII, Napoléon, Hitler. 

Hitler aurait dû comprendre le sens cosmique de la marche des peuples migrateurs vers l’Occident : Ases, Scythes, Germains, Celtes. On ne renverse pas le cours du destin, serait-ce pour rejoindre la ‘Horde d’Or’. On ne boit jamais deux fois à la même source. »

(article dans la revue « Nostra », hors-série n° 2, 1983)

11:09 Publié dans Livre, Livre, Philosophie | Lien permanent | Commentaires (1) | Tags : philosophie, europe, rené girard, livre | |  del.icio.us | | Digg! Digg |  Facebook

mardi, 02 février 2021

L'histoire de la tradition européenne selon le rebelle Dominique Venner

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L'histoire de la tradition européenne selon le rebelle Dominique Venner

La maison d'édition l'Arco e la Corte a publié l'essai de l'intellectuel français Histoire et tradition des Européens". 30 000 ans d'identité.

par Francesco Marotta

Ex: https://www.barbadillo.it

    "[...]L'histoire est une créatrice de sens. A l'éphémère de la condition humaine, elle oppose le sentiment de l'éternité des générations et des traditions [...]". (Dominique Venner)

510AY7pYSFL._SX355_BO1204203200_-310x433.jpgL’ouvrage est désormais disponible dans toutes les librairies italiennes. Histoire et tradition des Européens. 30.000 ans d'identité de Dominique Venner se trouve donc partout en Italie. Cet essai, publié par L'arco e la Corte, édité par Manlio Triggiani et traduit par Gaetano Marabello, est passé presque inaperçu. Une chose inexplicable, surtout dans ces milieux "culturels" qui devraient lire les écrits de Venner avec plus d'attention, au lieu d'exalter seulement la magniloquence des samouraïs d'Occident. En bref, analyser soigneusement ses œuvres et comprendre sa personnalité est une toute autre chose. Mais comme souvent, pour eux, construire autour de la fin tragique de Dominique le panégyrique habituel qui heurte même sa mémoire, passe avant tout. Mais c'est un essai dans lequel il n'y a presque aucune trace du dernier acte, de "secouer les consciences anesthésiées et de réveiller la mémoire de nos origines". C'est un écrit que nous recommandons en particulier à ceux, nombreux, qui ne connaissent pas ses œuvres, sa passion pour l'histoire et, en même temps, les nuances de l'historien avec son talent descriptif et narratif peu commun.

Dans l'introduction de Gaetano Marabello, sur la base d'un article de Francesco Borgonovo publié dans le journal La Verità du 1er octobre 2018, intitulé "Défendons maintenant les hommes doux et assez de la rhétorique du rebelle", la querelle habituelle se détache : Dominique Venner, le rebelle ou le révolutionnaire ? Borgonovo semble n'avoir aucun doute. Selon le journaliste, l'historien français fait partie du grand groupe catalogué à droite, selon un étiquetage facile, l'inscrivant de plein droit dans le seul rôle du révolutionnaire. Dommage que Venner, quiétait conscient des vicissitudes troublantes de notre époque, qu’il lisait notamment avec les yeux clairs, dépourvus des préoccupations idéologiques de la modernité : il y flairait l'humus des révolutions du Petit Siècle. L'un des traits distinctifs de Venner était son rejet de l'ordre dominant. Ses valeurs ne coïncident pas avec celles de la modernité. Sa conduite humaine dépeignait son intériorité. Pour preuve, il suffit de considérer comment il a été ostracisé pendant longtemps parce qu'il était contre toute orthodoxie. Anticonformiste et lucide dans l'exposé des particularités de la "pensée unique", interdite et souvent raillé par les scribes bien intentionnés, il dédaigne tout ce que les autres recherchent. Dominique Venner, le cœur rebelle, savait dire "Non".

Après avoir terminé ce petit et consciencieux préambule, il est maintenant temps d'aborder l'essai en question. Publié en France en février 2002 par les Éditions du Rocher, Histoire et tradition des européens : 30 000 ans d'identité, montre clairement dès les premières pages qu'il n'y a pas de "Tradition" des peuples européens mais des traditions. Ceux-ci font partie de la notion d'Ethnos, comprise comme une communauté caractérisée par l'homogénéité de la civilisation, de la langue, de l'histoire, de la culture, des coutumes, des traditions et des mémoires historiques, traditionnellement installée sur un territoire donné. Le point de vue de Venner, imprimé dans son exposition captivante, est celui d'un "historien témoin de son temps". Par conséquent, l'histoire et les traditions européennes font inévitablement partie d'une communauté de culture qui ne peut être trouvée "en aucune façon ailleurs". Ses examens font une brèche dans une époque dont la caractéristique principale est le désaveu total des particularités de tout un continent, victime du déracinement, de la pathologie sociale de notre temps. Mais pour comprendre le chaos dans lequel nous vivons, il est nécessaire d'observer les choses en posant des questions importantes.

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En bon Français qu'il était, la question qu’il se posait était évidente : qu'est-ce que la France ? Du point de vue de quelqu'un qui croit en une Europe très différente de la bureaucratisation et de la financiarisation de l'économie : qu'est-ce que l'Europe ? Mais le point central, la hantise, était avant tout la question de savoir ce que nous sommes et où nous allons. Pour Dominique Venner, soit l'Europe s'élève par une volonté de puissance, soit elle est condamnée à périr aux mains d'hommes "dénaturés", ne tirant plus ses richesses des peuples qui la constituent. Et la seule façon qu'il a connue d'exprimer sa pensée a été de voyager à travers l'histoire, en mettant en évidence un héritage spirituel à la merci de l'idéologie de la mondialisation qui se moque de la poésie homérique, des légendes celtiques et nordiques, de l'héritage romain, de l'imagination médiévale et de l'amour courtois. L'objectif de Dominique Venner, on peut le résumer à ceci : apporter des éléments utiles pour ne pas exclure la possibilité pour quiconque d'entreprendre une recherche authentique de nos traditions, en réaffirmant la seule façon que nous connaissons d'"être face à la vie, à la mort, à l'amour et au destin".

Poussant ses investigations dans les méandres de la mythologie grecque, de la mythologie romaine et de la mythologie nordique, son livre ressemble beaucoup à une invitation à faire pleinement l'expérience d'une "certaine humanité" qui est profondément ancrée dans les peuples d'Europe. D'Achille à Ulysse, nous avons des héros qui "expriment un monde intérieur" bien au-delà des contextualisations fournies par une certaine historiographie. Discuter longuement des deux héros, aux passions opposées mais à la même volonté, qui "traversent le temps depuis les poèmes homériques", sans rien faire d'autre que de nous dire comment ils ont consacré leur existence à "se construire par l'exercice du corps et de l'esprit" ; nous parler, de l'Histoire telle que nous la comprenons, le "théâtre de la volonté" qui est alors "une invention européenne" et non le fruit de l'héritage de l'exotisme des XVIIIe et XIXe siècles ; continuellement mis à jour, avec de nouveaux traits stylistiques universels teintés de naïveté. Mais dans cet essai, l'Orient a toute sa place, dépouillé des pièges et assimilant les particularités des autres : "Nous disons Orient, mais l'Orient a tous les visages. L'Égypte n'est pas la Chine, le monde sémitique n'est pas l'Inde", car le substrat des peuples de la Terre est formé par la pluralité des peuples et des cultures particulières. Caché par cette civilisation universelle d'abord, puis par les "cultures multiples", tant vantées par Lévi-Strauss et par l'ethnocentrisme qui imprègne l'idéologie du progrès.

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Dans un paragraphe auquel il a donné un titre sans équivoque, "Tendances suicidaires contemporaines", comme s’il avait eu une vision anticipatrice du désastre que nous vivons aujourd'hui, Venner met l'accent sur ces pulsions autodestructrices des peuples européens, qui essaient de se donner la mort par un suicide collectif tout en aigreur et en fureur : "Il n'y a pas d'exemple historique de civilisation qui ait poussé à un tel degré le refus de survivre et la volonté de se supprimer". Un des héritages des deux guerres mondiales qui est lié au développement bourgeois d'un certain protestantisme (voir aussi les postulats d'un certain catholicisme), ainsi que le mantra d'une sotériologie d'absolution des péchés commis par le biais de l'expiation perpétuelle, en vue d'une possible rédemption et d'un salut. Mais pour sortir de cette dépendance et des résidus des utopies universalistes, "nous sommes obligés de faire un effort intellectuel et spirituel à la hauteur du défi", en prenant soin de toutes ces nuances auxquelles nous n'avons même pas pensé. En particulier, approfondir et élaborer avec de nouvelles synthèses aussi cette herméneutique créative déjà traitée par Mircea Eliade, une source d'inspiration pour la raison qu'"elle révèle des interprétations qui n'étaient pas saisies auparavant" en raison de la tendance à traiter les problèmes avec des grilles interprétatives-idéologiques sur l'état des choses.

Mais le long voyage accompli par Venner, pour rédiger cet ouvrage, tient compte des 30.000 ans de culture européenne, de l'espace géographique où elle s'est développée, avant même les preuves symboliques et esthétiques que l'on trouve dans la grotte Chauvet, en Ardèche, dans le sud de la France. Un fil conducteur qui relie l'histoire des peuples indo-européens aux spécificités de la personnalité des protagonistes de l'Iliade et de l'Odyssée, ou, en termes de linguistique : d'Émile Benveniste à Georges Dumézil, de la Túatha Dé Danann irlandaise au chaudron celtique, du voyage des Pythies au mystère des Hyperboréens, etc. A la fin de son tour du monde à des époques plus récentes, il en vient à comparer les vicissitudes des "poèmes fondateurs" de la culture européenne. Comme La Chanson de Roland écrite dans la seconde moitié du XIe siècle avec Homère, Achille, Priam, Siegfried, Hector, "du héros avant la Destinée", illustrant son essence et le fameux "sentiment d'une communauté de destin". Fournir une clé de lecture qui ressemble à la continuation d'un long voyage, en compagnie de Télémaque, un encouragement pour le lecteur à redécouvrir les expériences et la valeur du voyage : les différentes significations de l'"être" par rapport à nous mais certainement pas "univoque".

Rome est morte à cause de ses conquêtes, lorsque "ses empereurs ont cessé d'être d'origine romaine" et que les Romains eux-mêmes ont été supplantés par des masses d'immigrants de tous les peuples conquis, assimilant leurs traditions, leurs identités, leurs cultures et leur sens du "Sacré". Sans s'en rendre compte, ils sont passés de l'ordre du cosmos à la mortification radicale de l'autosuffisance de l'homme (unicum peccatorum), sanctionnant ainsi l'inversion des pôles, de la mesure à l'excès. Dans ce travail de Venner, l'un des plus importants de sa mouvance, on distingue l'interlocuteur très préoccupé par les dynamiques négatives qui ont investi le Vieux Continent. Il est également une invitation à relire attentivement l'injonction delphique qui dit "Connais-toi toi-même". Dominique, l'historien qui a exploré avec prudence mais grande conscience les secrets de la chevalerie, du sens de la dignité et de l'honneur, de la loyauté et de la générosité, de la courtoisie et de l'éthique du service, avait sans doute une vision verticale des choses dans le monde. Il a parfaitement réussi à combiner ses examens sur le nihilisme et le pillage de la nature avec l'étude des œuvres de Huxley et Orwell, de Guy Debord et des écrits de Flora Montcorbier. Un amateur de longues réflexions qui a lu attentivement "Le Communisme de Marché" : De l'Utopie Marxiste à l'Utopie Mondialiste" du philosophe et économiste, insérant dans cet ouvrage certaines de ses idées sur "la fabrication des zombies", la religion de l'Humanité de l'Occident et l'homo œconomicus du futur, pour une métaphysique renouvelée de l'histoire. On peut comprendre que Dominique, ait pu voir la descente d'Hypnos et de Thanatos, le sommeil et la mort, prêts à conduire l'esprit de l'Europe devant le destin ultime.

*Storia e tradizione degli europei. 30.000 anni d’identità I Dominique Venner (traduzione a cura di Gaetano Marabello e con postfazione di Manlio Triggiani, L’arco e la Corte, Collana “Historiae”, pp. 278, euro 18)

mercredi, 27 janvier 2021

Réponses au Questionnaire de la Nietzsche Académie d'Abir Taha

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Réponses au Questionnaire de la Nietzsche Académie d'Abir Taha

Ex: https://nietzscheacademie.over-blog.com

Réponses au Questionnaire de la Nietzsche Académie d'Abir Taha, diplomate libanaise, philosophe et poète, chercheur à la Sorbonne (Centre d’histoire des philosophies modernes), auteur de deux ouvrages sur Nietzsche : "Nietzsche, Prophet of Nazism : the Cult of the Superman" et "Le Dieu à venir de Nietzsche, ou la Rédemption du Divin" (Paris, Editions Connaissances et Savoirs, 2005) traduit en anglais sous le titre "Nietzsche's Coming God, or the Redemption of the Divine".

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Abir Taha.

Nietzsche Académie - Quelle importance a Nietzsche pour vous ?

Abir Taha - La pensée de Nietzsche a façonné ma Weltanschauung de façon indélébile, et ce depuis mon plus jeune âge, mais depuis elle a bien évolué dans un sens plus spirituel et même mystique : dans mes écrits, y compris mes deux ouvrages sur Nietzsche, je parle du vrai Nietzsche, de sa vision pagano-hindouiste-dionysiaque et néo-aristocratique. Ainsi je mets l’accent surtout sur sa spiritualité occultée et j’explique que, loin d’être un matérialiste et un athée absolu, Nietzsche préconisait un « athéisme spirituel » d’inspiration païenne et prônait un nouveau mode de divinité qui devrait naître suite à la mort du Dieu monothéiste. Mon roman philosophique « The Epic of Arya – In Search of the Sacred Light » est décrit par nombre de critiques littéraires aux USA et en Europe comme la deuxième partie d’ « Ainsi Parlait Zarathoustra », et l’on me surnomme dans les cercles philosophiques « la sœur de Zarathoustra ».

N.A. - Être nietzschéen qu'est-ce que cela veut dire ?

A.T. - Le nietzschéen est un Surhomme en devenir, tout comme ce dernier est un dieu en devenir. Le nietzschéen est un pont vers la vraie vie, la seule digne d’être vécue : la vie héroïque, tragique, divine, celle qui prône la beauté, la perfection, la noblesse de pensée et de forme. Le nietzschéen est l’homme qui s’est débarrassé de ses peurs et de ses désirs « humains, trop humains », c’est l’aigle qui vit sur les cimes de l’Esprit, et qui fait fi des occupations et réflexions stériles d’une humanité formée de fragments d’hommes superficiels et superflus ne recherchant que le « bonheur bovin », au lieu de ressembler aux dieux, leurs aïeux, en s’élevant au-dessus de leur condition humaine et créant au-dessus d’eux-mêmes afin qu’ils périssent et que vive le Surhumain.

N.A. - Quel livre de Nietzsche recommanderiez-vous ?

A.T. - Tous les livres de Nietzsche sont des perles et des puits de sagesse et donc doivent être lus, mais son Zarathoustra reste la bible du Surhumain, l’aube de l’Age d’Or et du retour des dieux.

e9a020946d21371bba6401f58c7a2e7c.jpgN.A. - Le nietzschéisme est-il de droite ou de gauche ?

A.T. - Nietzsche prône un aristocratisme spirituel – par opposition à l’aristocratie héréditaire – et supranational, le règne d’une « race des seigneurs » dont la mission serait de créer le Surhumain, le sens de la terre et par conséquent le seul sens et but de la vie, cette dernière n’étant rien d’autre que création et élévation perpétuelles. La vocation de l’homme est donc la réalisation de sa nature divine, et la création du Surhumain. Ceci est l’essence de la philosophie de Nietzsche. Par conséquent, comment parler encore de gauche et de droite, lorsqu’on regarde le monde du haut de l’Everest de l’Esprit qu’est la pensée de ce grand philosophe, « dernier disciple du dieu-philosophe Dionysos » ? Ceci étant dit, si l’on insiste à le classer, et donc à parler de politique au lieu de Grande Politique, la philosophie de Nietzsche est clairement de droite, et même d’extrême droite, étant donné son aristocratisme radical – lequel, cependant, prône une nouvelle noblesse non pas héréditaire mais spirituelle – et étant donné que même son supranationalisme (et son dédain du nationalisme étroit) était fondamentalement aristocratique, par opposition à l’universalisme humaniste de gauche. Les Seigneurs de la terre sont des âmes élevées, des Arhats ou Bodhisattvas qui se trouvent aux quatre coins du monde, au-delà des frontières érigées par les hommes, ce sont des Hyperboréens qui vivent sur les cimes, bien au-delà des vallées des troupeaux d’hommes fragmentaires aux âmes étroites et aux vertus horizontales.

N.A. - Quels auteurs sont à vos yeux nietzschéens ?

A.T. - Nietzsche est à lui seul un paradigme. Il n’y a qu’un seul Nietzsche. Je décris Nietzsche comme « l’esprit le plus grand et l’âme la plus riche », un géant de l’esprit qui scinda l’histoire en deux, le pré et le post-Nietzschéisme. Cependant, bien qu’il n’y ait qu’un seul Nietzsche, ce grand philosophe a influencé diverses écoles philosophiques et penseurs de tous bords, et à des degrés différents : Sri Aurobindo, Heidegger, Bergson, Freud, Sartre, pour ne citer que quelques exemples.

N.A. - Pourriez-vous donner une définition du Surhomme ?

A.T. - L’éternel dépassement de soi que Nietzsche préconise culmine dans la création du Surhumain, de l’Übermensch, qui est ainsi l’essence même et le sens de la vie. Il est l’homme complet, l’homme qui s’est dépassé, l’héritier des dieux et le créateur de nouveaux dieux. Chez les Hindous, on le nomme Arhat, et chez les Bouddhistes, Bodhisattva. Nietzsche décrit ainsi le Surhumain : "J’ai pour la première fois réuni en moi le juste, le héros, le poète, le savant, le devin, le chef ; j’ai étendu ma voûte au-dessus des peuples, j’ai dressé des colonnes sur lesquelles repose un ciel - assez fortes pour porter un ciel." Le Surhumain est l’homme synthétique, le philosophe artiste, le grand législateur de l’avenir, "l’unité du créateur, de l’amoureux, du chercheur, dans la puissance… la grande synthèse du créateur, de l’amoureux, du destructeur". C'est un Friedrich Nietzsche, le grand réformateur de l'humanité qui "impose sa main au prochain millénaire" car il est cet homme prédestiné qui fixe les valeurs pour des millénaires." Le Surhumain, antithèse exacte de "l'homme moderne", représente le zénith de la vision aristocratique du monde, incarnant des valeurs totalement différentes de celles des humains ordinaires, des valeurs hors du commun, hors du médiocre. Ce concept radicalement élitiste de Surhumain ne s'applique qu'aux êtres d'exception, c'est une espèce qui "n'est pas encore née" (sauf exception), comme dit Nietzsche ; en effet, le dépassement de soi, et par conséquent, la création du Surhumain, est un but réservé aux rares esprits supérieurs et créatifs, et reste un rêve impossible pour le commun des mortels qui, selon Nietzsche, n’ont pas de valeur inhérente.

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N.A - Votre citation favorite de Nietzsche ?

A.T. - « Il faut que tu veuilles brûler dans ta propre flamme : comment voudrais-tu redevenir neuf si tu n'es pas d'abord devenu cendre ! »  « J'aime ceux qui ne cherchent pas, derrière les étoiles, une raison pour périr ou pour s'offrir en sacrifice ; mais ceux qui se sacrifient à la terre, pour qu'un jour la terre appartienne au Surhumain. » [« Ainsi parlait Zarathoustra »] 

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The Epic of Arya - In Search of the Sacred Light

Synopsis

THE THIRD WAY —

“I am searching for the Light… not the light made by man, but the Light that made man.”

“Know that it was but one god who died on the cross, and many are waiting to be born.”

—Abir Taha ...

The Epic of Arya is about man’s eternal quest for the divine. It depicts man’s perennial inner struggle between light and darkness, and teaches him to re-conquer his lost divinity by unveiling the “god within”, the Inner Light. Overcoming the “death of God” declared by Nietzsche, The Epic of Arya speaks about the redemption of the divine and its rebirth in man. To redeem God in men: that is Arya’s sacred mission.

Half-woman, half-goddess, Arya is torn between Love and Truth, between passion and duty. Confused, she wonders: should she accept her human plight, or fulfil her divine destiny? A fundamental question ever haunts her: is Love human or divine? In that fateful question lies the future of humanity, for in each man, the divine flame slumbers, waiting to be kindled by the Light of Awakening. Rising above her fears, and breaking her idols, Arya, awakened and liberated, preaches the Eternal Religion which is above men’s fleeting religions, narrow identities, and imperfect creeds, heralding a new, higher consciousness beyond the frontiers erected within man and between men.

An inner journey of self-discovery, this inspirational, allegorical novel is the spiritual bible: it heals, awakens, transforms. Arya’s epic conveys a universal message of unity, hope, and salvation in a world torn apart by the clash of civilisations and religions, offering a spiritual alternative to the two scourges plaguing mankind today: the scourge of religious fundamentalism—God idolatry—and the scourge of atheist materialism—God denial—for only a spiritual awakening can save man from his own blind folly.

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Nietzsche's Coming God

by Abir Taha

In Nietzsche's Coming God, the author demonstrates that the "destructive" and "nihilistic" side of Nietzsche's thought was in fact only a hammer that Nietzsche used in order to destroy the "millenarian lies" of Judeo-Christianity, a necessary - albeit transitory - stage that preceded his ultimate creation: the Superman, an incarnation of the god in the making... the coming god. Contrary to popular belief, Nietzsche was both a free spirit and a deeply spiritual thinker who welcomed the death of the false god - the god who curses and denies life - not as an end in itself, but as a prelude to the rebirth of the divine. Indeed, although Nietzsche was an avowed atheist, he was also "the most pious of the godless," as he described himself in Thus Spoke Zarathustra. Nietzsche dreamt of, and augured, a new mode of divinity and a new hope for mankind which, having rejected both religious obscurantist dogma as well as Cartesian rationalist dogma, would be the search for eternal self-perfection and self-overcoming. The death of the god of monotheism thus paved the way for a new, pantheistic and pagan vision of the divine, heralding a "god to come" beyond good and evil, a god who affirms and blesses life. Nietzsche's coming god is none other than Dionysus reborn, or the redemption of the divine. Abir Taha holds a postgraduate degree in Philosophy from the Sorbonne, and is a career diplomat for the government of Lebanon, having previously served as the Consul at the Lebanese embassy in Paris. A thinker and a poet as well, she has spent years conducting in-depth research and analysis into Nietzsche's thought, which has led her to assert the importance of the spiritual dimension of his philosophy, derived from the Vedic tradition of India as well as ancient Greek philosophy. Unlike other Nietzsche scholars, who treat him as a purely secular philosopher, Taha believes that this spirituality lies at the very heart of his thought. In English she has previously published Nietzsche, Prophet of Nazism: The Cult of the Superman (2005) and The Epic of Arya: In Search of the Sacred Light (2009).

mercredi, 20 janvier 2021

Solzhenitsyn from Under the Rubble

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Solzhenitsyn from Under the Rubble

Aleksandr Solzhenitsyn et al.
From Under the Rubble
Boston: Little, Brown & Company (1975)

futr-194x300.jpgShortly before being deported from the Soviet Union in 1974, Aleksandr Solzhenitsyn contributed three essays to a volume that was later published in the West as From Under the Rubble. The title was a clear metaphor for dissident voices speaking out from beneath the rubble left by communism. The rubble itself represents the remains of the traditional and spiritual life of Solzhenitsyn’s Russia which had been destroyed by the October Revolution and its bloody aftermath. In this volume, Solzhenitsyn lays out what it means to be a nationalist and a dissident against the totalitarian Left. Remarkably little has changed. 

Today’s Dissident Right will find a mirror image of its struggles in these essays — only needing to make a trivial adjustment of application. One would only need to exchange Solzhenitsyn’s references to Russia or Russians for today’s whites to find a near-perfect fit. Aside from the usual clarity, insight, and depth found in Solzhenitsyn’s work, it’s this familiarity which perhaps gives us the most comfort and inspiration when reading him. We think we have it bad today — Solzhenitsyn had it worse, and he persevered. And if he could persevere, so can we.

*  *  *

“As Breathing and Consciousness Return,” the first essay in the collection, begins by addressing Solzhenitsyn’s differences with fellow dissident Andrei Sakharov. It’s an illuminating contrast. Although both publicly opposed the repressive Soviets, it was Sakharov who ultimately championed the humanism and individualism of the West which so revolted Solzhenitsyn. Despite being abused and repressed by communism, Sakharov could not bring himself to condemn its socialist underpinnings. In this sense, Sakharov had much in common with the modern liberal. In a famous essay — to which Solzhenitsyn responded in this one — Sakharov had condemned “extremist ideologies” such as fascism, racism, and, most disingenuously, Stalinism. But Solzhenitsyn saw through this prestidigitation as simply a way to deflect blame away from Lenin and the other, supposedly purer, communists of the revolutionary period.

In response, Solzhenitsyn denies that Stalinism even existed. He points to the fact that there is no written Stalinist doctrine, not that Stalin himself had the intellectual horsepower to develop one. He then itemizes all the atrocities committed by Lenin and his cohorts that had little to do with Stalin (“What of the concentration camps (1918-1921)? The summary executions by the Cheka? The savage destruction and plundering of the Church (1922)? The bestial cruelties at Solovki (1922)? None of this was Stalin. . .”) He notes that Stalin’s main departure from Lenin was to inflict the same ruthless repression against his own party, as he did during the Great Terror of the mid-1930s. It’s almost as if Sakharov, who waxed about the “high moral ideals of socialism,” would approve of communism if only it did not devour its own.

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Solzhenitsyn uncovers not only the moral shabbiness of liberalism, but the pie-in-the-sky ignorance which fuels it. Basically, we have intellectuals like Sakharov, who were not laborers, trying to convince their readers that “only socialism has raised labor to the peak of moral heroism.” Solzhenitsyn’s response is typically trenchant:

But in the great expanse of our collectivized countryside, where people always and only lived by labor and had no other interest in life but labor, it is only under “socialism” that labor has become an accursed burden from which men flee.

In peering beyond the strife of his age, Solzhenitsyn then distills Sakharov’s enlightened humanism down to what matters most to today’s dissidents: globalist anti-nationalism. It’s the inheritors of Andrei Sakharov who are dogging white ethnonationalists today, and Aleksandr Solzhenitsyn saw this in clear relief as far back as 1974. Note the striking similarity between his assertion of nationalism and Greg Johnson’s, from chapter seven of Johnson’s White Nationalist Manifesto:

Solzhenitsyn:

Ah, but what a tough nut it has proved for the millstones of internationalism to crack. In spite of Marxism, the twentieth century has revealed to us the inexhaustible strength and vitality of national feelings and impels us to think more deeply about this riddle: why is the nation a no less sharply defined and irreducible human entity than the individual? Does not national variety enrich mankind as faceting increases the value of a jewel?

Johnson:

The ethnonationalist vision is of a Europe — and a worldwide European diaspora — of a hundred flags, in which every self-conscious nation has at least one sovereign homeland, each of which will strive for the highest degree of homogeneity, allowing the greatest diversity of cultures, languages, dialects, and institutions to flourish.

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Solzhenitsyn also points out the double standard of progressives such as Sakharov who aim for greater freedom through greater state control. As a victim of state control himself, Solzhenitsyn argues that this can only lead to “hell on earth.” Sakharov wishes for the state to administer not only scientific and technological progress, but the psychological progress of its citizens as well. Solzhenitsyn finds this questionable, since such “moral exhortations” would be futile without coercive force. 

And what would this freedom achieve for us anyway? Like many modern dissidents, Solzhenitsyn doesn’t disparage freedom, but realizes the danger when you have too much of it. Of course, being a devout Christian, he insists that freedom must serve a higher purpose. He pines for Tsarist autocracy in which autocrats were subservient to God. In such systems, the people are indeed freer. When leaders recognize no higher power, the likely outcome becomes totalitarianism, with nothing inhibiting governments from gross atrocity. Even in the so-called liberal democracies in the West, the corruption that must necessarily be birthed by two-party or parliamentary systems crushes the freedoms of the people:

Every party known to history has always defended the interests of this one part against — whom?  Against the rest of the people. And in the struggle with other parties it disregards justice for its own advantage: the leader of the opposition . . . will never praise the government for any good it does — that would undermine the interests of the opposition; and the prime minister will never publicly and honestly admit his mistakes — that would undermine the position of the ruling party. If in an electoral campaign dishonest methods can be used secretly — why would they not be? And every party, to a greater or less degree, levels and crushes its members. As a result of all this a society in which political parties are active never rises in the moral scale. In the world today, we doubtfully advance toward a dimly glimpsed goal: can we not, we wonder, rise above the two-party or multiparty parliamentary system? Are there no extraparty or strictly nonparty paths of national development?

What Solzhenitsyn maintains — and what many dissidents today understand — is that land trumps political freedom. People and peoples require land for true freedom. With land they own, people have obligations, self-worth, stability, and a chance at prosperity. And this leads to the most important freedom of all: freedom to think, the freedom to call a lie a lie — lies which require the surrender of our souls to swallow and then repeat. While land ownership helps preserve the physical health of a nation, this inner freedom to resist lies helps preserve its moral health.

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Referring to the pre-moderns. . .

[T]hey preserved the physical health of the nation (obviously they did, since the nation did not die out). They preserved its moral health, too, which has left its imprint at least on folklore and proverbs — a level of moral health incomparably higher than that expressed today in simian radio music, pop songs, and insulting advertisements: could a listener from outer space imagine that our planet had already known and left behind it Bach, Rembrandt, and Dante?

Solzhenitsyn’s connection to today’s Dissident Right can be seen in how he places an almost mystical imperative upon the nation and one’s obligation to it through work and honest living. Human beings are weak, and when tempted with freedom, they will often give in to corruption or corrupt others. This can lead to either the decay of society (as Solzhenitsyn witnessed in the West) or its demise through totalitarianism (as he so famously experienced in the Soviet Union). Both outcomes threaten the health and future of nations. Andrei Sakharov recognized the danger of the latter, but not the former — indeed it was his globalist progressivism that has led the West even further into decadence and corruption in the years since From Under the Rubble was published. 

To speak out against this makes one a dissident. Solzhenitsyn was not only a dissident against totalitarianism, he was also a dissident against Western decadence, the same Western decadence that has led to non-white immigration and the ongoing destruction of the civilizations that white people created millennia ago. Beneath this is the lie of racial egalitarianism, and modern whites are being fed this lie in nearly the same manner as which the Soviet people were fed the lie of class egalitarianism.

Solzhenitsyn teaches us to never give in to this lie. 

And no one who voluntarily runs with the hounds of falsehood, or props it up, will ever be able to justify himself to the living, or to posterity, or to his friends, or to his children.

*  *  *

“Repentance and Self-Limitation in the Life of Nations” bears a much more obvious and direct connection to modern white dissidents than the previous essay. In it, Solzhenitsyn exhorts his fellow Russians to seek absolution and redemption for the sins of the Russian past. He is quite sincere about this, and believes that, to an extent, his people cannot move forward in friendship with other peoples (or with themselves) without contrite acknowledgment of past atrocities. “Repentance is the only starting point for spiritual growth,” he tells us. Since, as we discussed above, Solzhenitsyn believed in the distinct character of individual nations, he also believed that nations “. . . are very vital formations, susceptible to all moral feelings, including — however painful a step it may be — repentance.”

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So far, so bad, today’s dissident might tell us. Is this not how whites are expected to behave in the face of endless waves of non-white immigration into their homelands? Such people, as well as blacks and Jews in the United States, demand repentance for colonialism, imperialism, slavery, the Jewish Holocaust, the list goes on. Aren’t these demands the weapons non-whites use against whites to usurp their very civilization?

Certainly, they are. Solzhenitsyn understood the abusive and one-sided nature of this relationship and concludes his essay with two points that redeem it entirely. One, that Russians have no obligations to repent unless those nations attempting to extract repentance also repent. For example, Solzhenitsyn readily accepts Russia’s guilt for past behavior, some of which he witnessed personally during World War II:

. . . but we all remember, and there will yet be occasion to say it out loud: the noble stab in the back for dying Poland on 17 September 1939; the destruction of the flower of the Polish people in our camps, Katyn in particular; and our gloating, heartless immobility on the bank of the Vistula in August 1944, whence we gazed through our binoculars at Hitler crushing the rising of the nationalist forces in Warsaw — no need for them to get big ideas, we will find the right people to put in the government. (I was nearby, and I speak with certainty: the impetus of our advance was such that the forcing of the Vistula would have been no problem, and it would have changed the fate of Warsaw.)

After this, however, he then offers up a prodigious list of atrocities that the Poles themselves committed in the past and explains that the Polish lack of repentance for them (both historical and contemporary) makes it difficult for him to unburden his heart to them.

Well then, has any wave of regret rolled over educated Polish society, any wave of repentance surged through Polish literature? Never. Even the Arians, who were opposed to war in general, had nothing special to say about the subjugation of the Ukraine and Byelorussia. During our Time of Troubles, the eastward expansion of Poland was accepted by Polish society as a normal and even praiseworthy policy. The Poles thought themselves as God’s chosen people, the bastion of Christianity, whose mission was to carry true Christianity to the “semipagan” Orthodox of savage Muscovy, and to be the propagators of Renaissance university culture.

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In the face of this, Solzhenitsyn expects nothing less than “mutual repentance” for his ideas to become applicable. This is exactly the attitude white people should take in the face of non-whites living in their homelands. If American blacks demand whites repent over slavery, then they themselves must repent over the horrific surge of crime, corruption, rape, and murder that they have presided over since the abolition of slavery. If Jews demand whites to repent over the Jewish Holocaust then they themselves must repent over their leading role in the October Revolution, the Holodomor, the Great Terror, and the Gulag Archipelago, all of which resulted in tens of millions killed. All groups of people have atrocities in their past which were committed both against themselves and others (and, in many cases, against white people).

So if non-whites wish to make white people repent for the past, whites should follow Aleksandr Solzhenitsyn’s lead by saying two words:

“You first.”

Second, Solzhenitsyn underscores Russian suffering in the past. If a nation has been both victimizer and victim throughout history, then abject mea culpas simply become inappropriate. Solzhenitsyn understood historical Russian suffering well (and experienced its contemporary suffering firsthand as a Gulag zek in the 1940s and 1950s). There is no pulling the wool over his eyes. Quotes such as these say it all:

The memory of the Tartar yoke in Russia must always dull our possible sense of guilt toward the remnant of the Golden Horde.

And

Did not the revolution throughout its early years have some of the characteristics of a foreign invasion? When in a foraging party, or the punitive detachment which came down to destroy a rural district, there would be Finns, there would be Austrians, but hardly anyone who spoke Russian? When the organs of the Cheka teemed with Latvians, Poles, Jews, Hungarians, Chinese?

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It may seem weak or effeminate for whites to play the victim card, but as the non-whites have shown, it is a powerful card. All whites must play it in order to counter it when played against them. As discussed above, tens of millions of whites were murdered, starved to death, or incarcerated by the Soviet system between the world wars. Whites must follow Solzhenitsyn’s logic and own this. For example, when American blacks demand repentance over slavery, whites need to point out that whites were brought to North America as slaves in similar numbers, under equally hazardous circumstances, and were in many cases treated worse than the blacks were. And if blacks wish to complain about contemporary racism or segregation, whites must counter with crime statistics and the undeniable fact that blacks victimize whites in these crimes many more times than the reverse.

Fortunately, Solzhenitsyn sees beyond all this and wants the endless finger-pointing to end. 

Who has no guilt? We are all guilty. But at some point the endless account must be closed, we must stop discussing whose crimes are more recent, more serious and affect most victims. It is useless for even the closest neighbors to compare the duration and gravity of their grievances against each other. But feelings of penitence can be compared.

And compare we must. This is may not change the minds of the enemies of whites, but it will stiffen the resolve of white people. And what do a people need more than resolve in order to survive and thrive?

*  *  *

In “The Smatterers,” Solzhenitsyn’s final contribution to From Under the Rubble, our author outlines the defining characteristics of the Soviet intelligentsia to the point of creating a universal type. Thanks to Solzhenitsyn’s ruthless insight into human nature, all dissidents on the Right now have a reliable blueprint for their Left-wing, humanist oppressors. Several decades and thousands of miles may separate many of us from Solzhenitsyn’s Soviet dystopia, but in “The Smatterers,” one of his most prescient works, Solzhenitsyn shows us that his enemies are indeed our enemies. Nothing fundamental has changed with the Left. Its adherents today follow the same psychological pattern and ape the same grotesque behaviors of the Soviet and pre-Soviet elite which beleaguered dissidents throughout the twentieth century.

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Some of these characteristics are itemized below:

Anti-Racism: “Love of egalitarian justice, the social good and the material well-being of the people, which paralyzed its love and interest in the truth. . .”

Passionate Intolerance: “Infatuation with the intelligentsia’s general credo; ideological intolerance; hatred as a passionate ethical impulse.”

Atheism: “A strenuous, unanimous atheism which uncritically accepted the competence of science to decide even matters of religion — once and for all and of course negatively; dogmatic idolatry of man and mankind; the replacement of religion by a faith in scientific progress.”

Anti-Nationalism: “Lack of sympathetic interest in the history of our homeland, no feeling of blood relationship with its history.”

Hypocrisy: “Perfectly well aware of the shabbiness and flabbiness of the party lie and ridiculing among themselves, they yet cynically repeat the lie with their very next breath, issuing ‘wrathful’ protests and newspaper articles in ringing, rhetorical tones. . .”

Materialism: “. . . it is disgusting to see all ideas and convictions subordinated to the mercenary pursuit of bigger and better salaries, titles, positions, apartments, villas, cars. . .”

Ideological Submission: “For all this, people are not ashamed to toe the line punctiliously, break off all unapproved friendships, carry out all the wishes of their superiors and condemn any of their colleagues either in writing or from a public platform, or simply by refusing to shake his hand, if the party committee orders them to.”

Arrogance: “An overweening insistence on the opposition between themselves and the “philistines.” Spiritual arrogance. The religion of self-deification — the intelligentsia sees its existence as providential for the country.” (Solzhenitsyn also points out how the Soviet intelligentsia of his day would give their dogs peasant names, such as Foma, Kuzma, Potap, Makar, and Timofei.)

With his typical wry sense of humor, Solzhenitsyn asks, “If all these are the qualities of the intelligentsia, who are the philistines?” 

Seriously, however, could anyone have turned in a more accurate depiction of today’s Leftist avengers who use government and big tech corporations as weapons against the people? Yes, some of the above characteristics are shared by all decadent elites. And yes, today’s milieu has become far more degenerate than Solzhenitsyn’s (racial diversity, non-white immigration, feminism, gay rights, and transgenderism will do that). But the source of power behind both elites remains the same: “the maintenance of the obligatory ideological lie.” 

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As discussed above, in Solzhenitsyn’s day, the lie was class egalitarianism; today it is racial and gender egalitarianism. One must enthusiastically support and propagate such lies to become part of the country’s elite. There is no second path. In fact, for these elites, these smatterers, as Solzhenitsyn calls them, following any second path becomes anathema and must be swiftly punished. He draws a straight line from the “atheistic humanism” of the smatterers to the “hastily constituted revolutionary tribunals and the rough justice meted out in the cellars of the Cheka.”

This is how nations lose their souls. Forcing lies onto a nation’s elite warps them — it makes their minds inconsequential but their actions highly consequential. 

Then millions of cottages — as well-designed and comfortable as one could wish — were completely ravaged, pulled down or put into the wrong hands and five million hardworking, healthy families, together with infants still at the breast, were dispatched to their death on long winter journeys or on their arrival in the tundra. (And our intelligentsia did not waver or cry out, and its progressive part even assisted in driving them out. That was when the intelligentsia ceased to be, in 1930. . .)

And not just in the Soviet Union. Smatterers in the West are equally consequential. Back in the early 1970s, Solzhenitsyn predicted the immigration crisis which is now ravaging Europe, and correctly blamed it on the “spirit of internationalism and cosmopolitanism” of these smatterers. The following passage is uncannily prescient:

In Great Britain, which still clings to the illusion of a mythical British Commonwealth and where society is keenly indignant over the slightest racial discrimination, it has led to the country’s being inundated with Asians and West Indians who are totally indifferent to the English land, its culture and traditions, and are simply seeking to latch onto a ready-made high standard of living. Is this such a good thing?

Solzhenitsyn’s answer to all of this, and the action he prescribes, is to simply reject the lie. This, to him, is more important than “our salaries, our families, and our leisure.” Even our very lives. This is what makes a dissident a dissident. Many in his day and ours justify accepting the ideological lie for the sake of their children. Solzhenitsyn responds by asking what kind of degenerate society will we bequeath to our children and grandchildren if we don’t stand up to these lies? Because Solzhenitsyn bears a blood identification with the Russian nation (as the Dissident Right today does with the white European diaspora), he believes that no personal gain or loss can outweigh the importance of rejecting ideological lies. This, as much as anything, preserves the spiritual and ultimately the physical health of a nation and a people.

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mardi, 19 janvier 2021

Le moment national-bolchevik d’Alexandre Douguine

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Le moment national-bolchevik d’Alexandre Douguine

par Georges FELTIN-TRACOL

Ex: http://www.europemaxima.com

Il faut encore une fois saluer l’excellente initiative éditoriale d’Ars Magna qui a sorti dans la collection « Heartland » en novembre 2020 Les templiers du prolétariat d’Alexandre Douguine (467 p., 32 €).

Cet ouvrage au titre quelque peu énigmatique paraît en Russie en 1997. Il correspond à la phase activiste de son auteur. Avec l’écrivain et ancien dissident Édouard Limonov, Alexandre Douguine cofonde le Parti national-bolchevik, fer de lance de l’opposition nationale-patriotique à la présidence détestable de Boris Eltsine.

Par « templiers du prolétariat », Alexandre Douguine entend une avant-garde, une fraternité militante qui s’engage en faveur du « travailleur […] humilié et écrasé comme avant, plus qu’avant (p. 173) ». Il en appelle ouvertement à une révolution nationale des forces laborieuses, d’où la référence explicite au national-bolchevisme.

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Cet ouvrage s’intéresse aux effets politico-théoriques de ce courant né en Allemagne après 1919. Alexandre Douguine trouve toutefois une tradition similaire dans l’histoire religieuse russe. Ainsi se montre-t-il intarissable sur les sectes issues du schisme orthodoxe de 1666 – 1667. Il examine par ailleurs d’un point de vue original plusieurs œuvres littéraires russes. Il se penche tout autant sur l’essai remarquable d’Ernst Jünger, Der Arbeiter (1932), que sur le situationniste français Guy Debord. Il décrypte d’une façon déconcertante le titre, Absolute Beginners. « Absolute Beginners est un concept repris par David Bowie dans un arsenal de doctrines gnostiques très profondes. Cela a donné une bonne chanson et un clip étrange (p. 255). »

En dévoilant « la métaphysique du national-bolchevisme », Alexandre Douguine décrit un amalgame inattendu ainsi qu’une manifestation opérative de la « voie de la main gauche ». Pour lui, « le national-bolchevisme est une supra-idéologie commune à tous les ennemis de la société ouverte (p. 16) ». Cela implique la lecture « de droite » de Karl Marx et « de gauche » de Julius Evola. Il y ajoute des éléments propres à la civilisation russe, à savoir un millénarisme vieil-orthodoxe lié à la « Troisième Rome ». À cette eschatologie politique intervient la vue du monde flamboyante de Jean Parvulesco. Son « Empire eurasiatique de la Fin » se confond avec le grand espace géopolitique soviético-russe. « L’empire soviétique était un empire au sens plein, avance Alexandre Douguine. Il était uni par une idée universelle commune – l’idée du socialisme, dans laquelle s’incarnait la volonté russe primordiale de vérité et de justice. L’empire soviétique était une continuation légitime de l’empire russe et orthodoxe, mais plus universel, plus commun, plus global (p. 224). »

9791096338436-475x500-1.jpgAlexandre Douguine se détourne donc d’un certain anti-communisme compassé, car il a compris très tôt les conséquences géopolitiques de la disparition subite de l’URSS et leurs implications psychologiques sur l’homo sovieticus. Cependant, la formation nationale-bolchevique éclatera bientôt en au moins trois factions en raison des divergences croissantes d’ordre politique et personnel entre ces deux principaux animateurs.

Avant même l’arrivée au pouvoir de Vladimir Poutine, Alexandre Douguine s’oriente vers l’eurasisme qu’il va renouveler et redynamiser. Il poursuit son combat en l’adaptant aux circonstances nouvelles. C’est la raison pour laquelle l’ouvrage, Les templiers du prolétariat, constitue un précieux témoignage pour mieux comprendre le parcours intellectuel de son auteur.

Georges Feltin-Tracol

• « Chronique hebdomadaire du Village planétaire », n° 197, mise en ligne sur TVLibertés, le 12 janvier 2021.

lundi, 18 janvier 2021

Une dystopie bien ambiguë

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Une dystopie bien ambiguë

par Georges FELTIN-TRACOL

La Française d’origine belge Diane Ducret se fait connaître du public en 2011 et 2012 avec la parution des deux volumes sur les Femmes de dictateur. Elle se tourne ensuite vers le roman et l’essai. Elle a depuis sorti huit autres titres. Son plus récent, La Dictatrice, est un récit dystopique fictif. Cet ouvrage présente d’indéniables ambiguïtés politiques qui laissent songeur le lecteur.

L’intrigue de La Dictatrice est simpliste. Diane Ducret ne se fatigue pas beaucoup en imaginant la trame de son récit. Née sous X à Strasbourg, l’héroïne, Aurore Henri, est adoptée par le couple Henri. Journaliste, cette femme aux cheveux châtains et aux yeux bleus couvre le conflit en Irak et anime un blogue irrévérencieux, L’observatrice sans filtre.

L’histoire débute à Munich, le 8 novembre 2023. Les vingt-sept chefs d’État et de gouvernement des États-membres de l’Union européenne, en majorité eurosceptiques, discutent des modalités pratiques de sa dissolution. Aurore Henri manifeste à Marienplatz contre cette folle décision. Mécontente, elle prend une pierre, la lance et atteint le nouveau chancelier allemand. Arrêtée quelques semaines plus tard à Paris, elle est extradée, jugée à Munich, le 26 février 2024, et condamnée pour l’exemple à cinq ans de détention dans la prison de Landsberg.

Ces quelques éléments attirent de suite l’attention. D’autres dates et d’autres personnages n’entraînent aucune équivoque possible. Née un 20 avril 1989, Aurore Henri (AH) s’entoure de Hugo Humbert, d’Edward Golling ou de l’architecte génial Alberto Sperucci… La Dictatrice calque volontairement son intrigue sur la chronologie politique d’un célèbre dirigeant germanique des années trente et quarante du XXe siècle. Diane Ducret a-t-elle voulu prendre le contre-pied de la fameuse maxime de Karl Marx pour qui « la première fois l’Histoire se répète comme tragédie, la seconde fois comme farce » ? À la différence que la répétition se veut ici dramatique.

Comment canaliser le mécontentement populaire ?

Assumant son geste et montrant sa sincère compassion à tous, y compris ses détracteurs les plus virulents, Aurore Henri devient bientôt une vedette politique. Elle reçoit dans sa cellule un abondant courrier de femmes battues, de filles empêchées d’avorter, d’homosexuels et de lesbiennes persécutés. Elle entretient sa notoriété en mettant en ligne un commentaire hebdomadaire sur Twitter. La prisonnière la plus célèbre d’Europe s’attaque aux mouvements anti-avortement, aux groupes homophobes, au « nationalisme viril (p. 60) » ainsi qu’au « souverainisme membré (idem) ». Telle une nouvelle Lysistrata, elle demande aux femmes de faire la grève du sexe. Elle avait prévenu son auditoire. Au moment de son procès, n’avait-elle pas lancé au juge : « Je crois que les privations sont le germe des révolutions. Nous venons d’assister à une révolution. Mais nous avons oublié que les révolutions engendrent des années de terreur (p. 35) » ?

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Quand Aurore Henri retrouve la liberté en 2029, le continent européen subit de plein fouet la « Grande Dépression » économique, le « Grand Effondrement » civilisationnel, une féroce crise énergétique et des catastrophes climatiques alternant des épisodes de froid rigoureux et d’autres d’intenses sécheresses. Les États-nations font faillite. Le désordre s’installe partout. Vienne la sociale-démocrate se sépare de la très conservatrice Autriche. La Catalogne et l’Andalousie proclament leur indépendance. Les Européens crèvent de froid, faute de chauffage, et meurent de faim. En France, par exemple, « la politique de réduction des terres agricoles et l’industrialisation du territoire a affaibli l’indépendance alimentaire du pays (p. 78) ». La poly-crise mondiale n’empêche cependant pas que « les États-Unis, la Russie et la Chine se partageaient l’énergie et les richesses du monde. Le rêve européen s’était éteint (p. 118) ».

Inquiets de la tournure des événements, deux membres de l’hyper-classe mondialistes, la richissime Helen et le conseiller de l’ombre Nicolas, prennent sous leurs ailes Aurore Henri dès sa sortie de prison. Malgré ses réticences initiales, Aurore Henri accepte les conseils avisés de Nicolas. Ce dernier lui apprend que sa fraîcheur médiatique et ses années de détention représentent deux excellents atouts publics. L’ancienne prisonnière bénéficie aussi du soutien du « magnat tchèque de la presse (p. 171) », Artur Krotinsky qui « possède nombre des quotidiens, hebdomadaires et féminins les plus importants d’Europe (p. 82) ». Allusion limpide à Daniel Kretinsky, le propriétaire tchèque de Marianne (cf. Faits & Documents, n° 452, du 1er au 30 juin 2018). Pourquoi est-il visé et non pas Drahi, Bouygues ou Dassault ? Serait-ce une manifestation xénophobe ? Diane Ducret se vengerait-elle indirectement d’un quelconque refus ?

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Autre fait intrigant. Diane Ducret imagine que la crise de civilisation frappe durement la Grande-Bretagne post-Brexit si bien que ses banques « tentèrent d’abord de se maintenir à flot en ponctionnant les comptes de leurs clients. Les assurances vie, les actions, les portefeuilles sont vidés, avec pour obligation légale de laisser 10 000 livres disponibles par tête. Ceux qui en ont les moyens s’enfuient en direction des États-Unis, du Golfe ou de l’Asie, les autres voient partir en fumée le travail de toute une vie. Les maisons achetées à crédit sont saisies, si bien qu’à la fin de l’année, Londres compte cinq cent milles personnes sans foyer (p. 75) ». Plus que le corralito argentin et les récents exemples grec et chypriote de blocage des comptes courants, elle sous-entend le retour de l’emprisonnement pour dette qui appartient à la tradition judiciaire anglo-saxonne. L’importation de cette mesure sur le continent serait couplée à la nationalisation des domiciles. Les députés de la majorité macronienne n’ont-ils pas envisagé une taxe sur les propriétaires au motif ubuesque qu’ils ne paient pas de loyer ? Le bankstérisme cherche à domestiquer des populations de plus en plus rétives.

Mandragore et eunomie

Dans un contexte chaotique et conflictuel, Aurore Henri développe une vision féministe, matriarcale, écologiste et gynocratique. Contre les États nationaux-souverainistes, elle rappelle « aux peuples que de grandes valeurs, dépassant leur intérêt personnel, les unissent (p. 85) ». Elle soutient la renaissance de l’Europe, car « nous sommes une civilisation, nous sommes une famille. Nous ne sommes pas un marché, une économie dont on se débarrasse lorsqu’elle n’est plus avantageuse ! […] L’Europe nous a élevés, c’est notre foyer. […] Sitôt que nous ne serons plus une grande puissance […] d’autres s’approprieront nos ressources, puisqu’ils ne nous craindront plus. Nous allons devenir la cible des spéculateurs qui s’enrichiront sur nos dettes (pp. 13 – 14) ». Elle réclame par conséquent « la création d’une Nouvelle Europe, rempart contre la corruption, les affaires, la violence, l’avarice et le manque de valeurs. Une Nouvelle Europe maternelle, spirituelle et bienfaitrice ! (p. 165) » Ainsi partage-t-elle la juste colère de son conseiller spécial quand le pape refuse de les recevoir au Saint-Siège. « “ C’est bien le problème de notre continent, il est pris en otage par la gériatrie. Ils nous emportent avec eux dans la tombe, parce qu’ils n’ont plus la force de faire pousser la vitalité ”, enrage Nicolas (p. 133). »

Détentrice d’une formidable notoriété, Aurore Henri invite d’abord les Européens à assiéger les sièges du pouvoir. Elle somme ensuite les gouvernements nationaux d’organiser un référendum fondateur de la « Nouvelle Europe ». Dix-sept États sur les vingt-sept participent à ce scrutin, ouvert le 30 janvier 2033, qui se traduit par 70 % de oui.

Depuis le début de sa carrière politique et en faveur d’une crise polymorphe toujours plus grave, Aurore Henri anime une formation politique de dimension européenne, les « Phalanges sacrées ». Militant dévoué corps et âme, le « phalangiste » se doit de renier sa foi en public. Tous agissent en faveur du « Programme pour l’établissement d’une Nouvelle Europe ». Peu de temps auparavant, la future chancelière de la Nouvelle Europe a répondu à une journaliste que « ce n’est pas moi qui suis radicale, c’est le chaos de notre époque. Je ne suis qu’une voix qui tente d’ordonner le chaos (p. 203) ».

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Elle ne veut pas refaire les mêmes erreurs que ses prédécesseurs en matière de construction européenne. Attachée aux symboles, elle présente au peuple européen un nouvel étendard plus mobilisateur à ses yeux. « Voici le drapeau de notre Union. Il unifie dans la même couleur les disparités de nos peuples, le rouge du sang que nous avons versé pour nous retrouver. La plante en son centre nous rappelle ce que nous avions oublié. Nos racines communes, seules, feront fleurir la paix et l’unité (p. 211). » La plante en question est la mandragore. Pourquoi cette plante ? « La mandragore est le symbole du combat pour la singularité de notre culture. Elle est notre signe de ralliement dans la lutte contre les excluants en tant que destructeurs d’unité et d’égalité (p. 415) », s’enflamme Hugo Humbert.

Aurore Henri reprend à son compte la réflexion de Nicolas qu’elle tue peu après. Son conseiller évoque Sparte et la notion d’eunomie qui « signifie la bonne législation, l’ordre bien réglé, l’équité, le juste équilibre, l’harmonie (p. 163) ». Dans l’hémicycle vide et en ruine du Parlement européen à Bruxelles, elle lance au monde entier en direct : « Vivons dans une Europe qui, telle une cité grecque, respecterait l’humain, le vivant, et glorifierait son environnement ! Convergeons vers un même but, comme un arbre unit en un seul tronc toutes ses racines ! Nous sommes la déesse Europe ! (p. 165) » Elle fait édifier un somptueux palais, le Megala Mandragora, sur un pic rocheux des Météores en Thessalie grecque. Quelle en est l’explication ? « Les Météores, en équilibre entre ciel et terre, entre Orient et Occident, entre terre et mer, étaient la quintessence géographique de son projet politique (p. 400) », parfaite concrétisation géographique de la Nouvelle Europe eunomique. Ne propose-t-elle pas d’ailleurs établir « l’équilibre parfait entre les citoyens, dotés des mêmes droits, éduqués dès leur plus jeune âge par la poésie et la philosophie, tournés vers le bien commun (p. 163) » ?

Manifestation d’une idée grande-européenne

Certes, au début de son ascension politique, Aurore Henri défendait « une seule humanité, une seule Terre, une seule vie. Il faut oser repenser la transcendance, et privilégier comme valeurs maîtresses de nos sociétés celles qui nous unissent et donnent sens à nos vies. Le collectif et l’individuel ne feront alors plus qu’un, ils ne s’opposeront plus, puisque chacun, en se réalisant lui-même, réalisera les valeurs de tous (p. 86) ». Le poids des responsabilités l’oblige néanmoins à revoir se renouveler. Portée par l’eunomie, la Nouvelle Europe se veut idéocratique. « Tout comme la Nouvelle Europe, l’Union soviétique était le nom d’un pays conceptuel, d’une idée (p. 494). » Citant Nietzsche et Hegel, Aurore Henri rêve d’un État « régénéré. Un État total harmonieux constituant une unité organique, qui soumettrait la science et la religion, dans lequel la séparation des pouvoirs n’existerait pas. Un État qui subordonnerait le particulier à l’universel pour le bien de l’humanité. Un État qui, par la discipline qu’il imposerait, serait le chemin sur la liberté véritable des hommes (p. 345) ». Le nouvel État eunomique sort de l’OTAN, se désengage du FMI, annule ses dettes et nationalise les firmes transnationales. Quant à l’OMS, pour rester dans l’actualité sanitaire et vaccinale, son bras droit rugit : « L’OMS ? Une bande de dégénérés vendus aux laboratoires pharmaceutiques de l’Ancien Monde ! (p. 419) »

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Avec Aurore Henri, l’habitant du vieux continent se transforme en « fier Néo-Européen à part entière (p. 424) ». Désormais, « la Nouvelle Europe est un corps organique, libéré de ceux qui l’entravaient. Chaque pays est un organe nécessaire à sa survie, tous les organes œuvrant de concert (p. 285) ». Les seize points du Programme entrent dès lors en application. Le point 3 affirme ainsi que « seuls les citoyens bénéficient des droits civiques. Pour être citoyen, il faudra adhérer aux valeurs de la Nouvelle Europe, et par ses actes, ses croyances ou ses intentions, ne pas chercher à la détruire ou à la déstabiliser. Les citoyens pourront être déchus de leurs droits civiques et être bannis s’ils ne respectent pas les valeurs de la Nouvelle Europe (p. 167) ». Le gouvernement néo-européen commence une politique ambitieuse de grands travaux en liaison avec le septième point : « La Nouvelle Europe ne financera plus ses politiques publiques par la taxation du travail, mais par la taxation des transactions financières et commerciales, et la mise en place de nouveaux mécanismes économiques libérant les citoyens du joug de la pression fiscale (p. 168). » Le pendant social de l’eunomie officielle sonne familièrement avec le cinquième point : « La Nouvelle Europe s’engage à procurer à tous ses citoyens des moyens d’existence sous la forme d’un revenu d’existence de base, donné à chaque citoyen afin de garantir sa survie et sa dignité (p. 168). » Une nouvelle forme de servage se réinstalle de cette façon tant l’allocation universelle de base – à ne pas confondre avec le revenu de citoyenneté – incite à la caporalisation des masses.

L’eunomie s’occupe de tout et de tous…

Diane Ducret a-t-elle lu L’Altermonde de Jean-Claude Albert-Weil ou certains textes du jeune Guillaume Faye qui théorisent un grand espace continental autarcique ? On peut s’interroger. « Les anciennes usines automobiles sont recyclées en usines propres fabriquant des voitures à air comprimé (p. 295) » d’un seul et unique modèle : la Henri. Mieux encore, « Les villes côtières sont alimentées par d’incroyables turbines sous-marines nourries par les courants marins. Leur fabrication, sur les chantiers du Havre à l’abandon, redonne vie à la région, et fierté aux habitants. […] Sur les pourtours de l’Atlantique, des centrales à énergie marémotrice sont bâties, captant l’énergie issue des mouvements de l’eau créés par les marées et l’effet conjugué des forces de gravitation de la Lune et du Soleil. La première, celle du Mont-Saint-Michel, est un symbole de la liaison entre patrimoine et futur eunomique. Des centrales captant l’énergie sismique sont creusées au pied des volcans. La première est inaugurée en Italie, sur les contreforts de l’Etna. Dans le sud de l’Espagne, les immenses plaines industrielles d’Andalousie sont recouvertes de panneaux solaires. En Allemagne ainsi qu’en Pologne sortent de terre des centrales géothermiques, afin d’en capter l’énergie qui est convertie en chaleur. Des barrages et moulins de taille considérable sont construits sur chaque fleuve et rivière, afin d’en potentialiser la force et de capter l’énergie hydraulique liée au déplacement de l’eau. Des dynamos eunomiques sont installées dans chaque foyer. Les citoyens sont invités à produire leur part d’énergie, afin de prouver leur implication dans le projet commun. Un fichier recense les foyers selon le ratio de leur production (p. 296) ». L’autosuffisance énergétique sans recourir au nucléaire ? Comme c’est bizarre…

Aurore Henri lance des équipes scientifiques à travers le monde entier à la recherche des vestiges primordiaux de la femme originelle et de la Déesse-Mère. Le régime eunomique exalte en effet la Terre-Mère, sacralise la femme et célèbre les menstruations. Cet hyper-féminisme qui ravirait l’exquise Alice Coffin et la délicieuse Caroline De Haas s’accompagne d’une misandrie légale. « La parole d’une femme est désormais comme une preuve indirecte et suffit à déclencher une enquête à charge, faisant sauter, pour l’homme incriminé, la présomption d’innocence. Sur simple dénonciation, les hommes reconnus coupables de viol ou de harcèlement sexuel sont soumis à la stérilisation chimique (p. 371). »

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Cette politique misandrique se décline aussi en mesures démographiques osées. La sexualité eunomique implique l’usage obligatoire de moyens contraceptifs masculins et féminins jusqu’à l’âge révolu de 20 ans. Il y a en outre un contrôle strict des naissances avec la limite de deux enfants par couple et un emploi de la PMA pour les femmes stériles. Quant à la cérémonie des « Fiancés de la mandragore », elle relève sciemment des pratiques eugéniques. « Chaque participant trouvera l’amour eunomique. […] Ces derniers s’engagent à confier l’éducation du premier-né de leur union à la chancelière, renonçant à leurs droits parentaux. Ils ne se montreront pas infidèles et ne pourront dissoudre leur lien qu’en motivant par écrit leur choix, le ministère examinant alors le bien-fondé de leur requête (p. 378) ». Pourquoi ? Parce que « un véritable mariage eunomique unit harmonieusement deux citoyens de Nouvelle Europe, lors d’une cérémonie néopaïenne officiée par des membres du parti (p. 368) ». Là encore apparaît l’exemple spartiate.

Contre une opposition souvent armée (Nowa Prawica en Pologne et Terra Lliure en Catalogne), le régime eunomique prend diverses lois répressives contre tous « ceux qui par leurs mots, par leurs pensées contestataires contradictoires avec les valeurs de l’Union, mettent en péril son grand projet (p. 415) ». Par ailleurs, il s’attaque au fléau de l’obésité. Et si les gros refusent leur cure d’amaigrissement ? « C’est bien tout le drame des malades, la plupart d’entre eux n’ont même pas conscience d’avoir besoin d’aide. Il est de votre devoir, lorsque vous tenez à quelqu’un, de tout faire pour le préserver, même contre sa volonté (p. 420) », tonne Hugo Humbert. Les chantres de la vaccination ne disent-ils pas la même chose ? Dans ces conditions, il va de soi que « l’opinion n’existe pas […], c’est un fantasme créé par la presse, faisant profit de la peur et du doute. Dans un pays où un dirigeant montre la voie avec assurance, le peuple est libéré de l’asservissement de l’opinion. Il n’a plus à penser, il n’a qu’à le suivre ! (p. 240) » Le nouveau réseau social néo-européen Newer remplace à juste titre Twitter, Facebook et Instagram. La liberté d’expression serait-elle finalement qu’une illusion vicieuse ? Pour sa part, Hugo Humbert, commandeur suprême des SS1 et ministre de l’Intérieur, a constitué en secret un immense fichier de toute la population. Il a « eu l’idée de placer des logiciels espions dans les messages envoyés aux membres s’abonnant aux pages Twitter et Instagram d’Aurore Henri. Collectant patiemment toutes les informations disponibles en ligne ainsi que sur leurs clouds privés, il avait amassé en quelques années la plus grande banque de données personnelles jamais détenue par aucun parti politique. De leurs goûts musicaux, leurs problèmes de santé à leurs préférences intimes, l’Internet livrait à son œil myope tout de leurs frustrations et de leurs espoirs (p. 251) ». On pense ici à l’inscription gratuite à La République en marche. Mais remplir en ligne sa déclaration fiscale annuelle ne permettent-elle pas à l’administration des impôts de tout connaître des contribuables en temps réel ?

Avertissement ou anticipation ?

Dès 2037 – 2038, la production néo-européenne chute; la crise économique repart. La Nouvelle Europe s’oppose aussi à une Russie expansionniste avant de lui déclarer la guerre. Les forces eunomiques néo-européennes s’effondrent en 2045 sous les coups d’une alliance entre la Russie, la Turquie et les États-Unis. Aurore Henri met fin à ses jours dans son palais des Météores.

La Dictatrice se lit-il au second degré ou entre les lignes ? Le fichage informatique, le revenu d’existence de base, la judiciarisation des intentions sont des sujets de préoccupation immédiate. Contre qui ou contre quoi ce livre est-il destiné ? Diane Ducret a-t-elle rédigé une satire dystopique ? Prévient-elle le public des menées menaçantes de l’État profond hexagonal ? S’élève-t-elle contre la manifestation tangible du « populisme des bien-pensants », Emmanuel Macron ? Dénonce-t-elle au contraire par avance un éventuel candidat – surprise à la présidentielle de 2022 – genre Christophe Mercier dans la troisième saison de Baron noir – en résonance avec l’exaspération grandissante des électeurs ?

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Bien que paru au début de l’année 2020, l’ouvrage fait écho à la sortie énigmatique d’Emmanuel Macron à Brut, le 4 décembre 2020 ? « Peut-être que je ne pourrai pas être candidat. Peut-être que je devrais faire des choses dans la dernière année, dans les derniers mois, dures parce que les circonstances l’exigeront et qui rendront impossible le fait que je puisse être candidat. » Des commentateurs y ont vu l’annonce préventive d’une répétition d’un renoncement à un second mandat à l’instar de François Hollande. Il est en fait possible qu’Emmanuel Macron ne soit pas candidat en 2022 car, pour un motif quelconque (sanitaire, sécuritaire, voire « anti-populiste »), il n’y ait pas d’élections présidentielles. Son mandat présidentiel sera prolongé sine die par une Assemblée nationale complaisante, elle aussi prolongée, et un Sénat mis au pas au cours d’un coup d’État élyséen réussi. Ce putsch institutionnel obtiendrait la bénédiction de la Commission européenne, de Berlin et du gâteux de la Maison Blanche Joe Biden ou de la future Messaline de Washington, Kamala Harris. On ne peut en tout cas que rester circonspect devant un livre si étrange quant à son intention véritable.

Georges Feltin-Tracol

• Diane Ducret, La Dictatrice, Flammarion, 511 p., 2020, 21,90 €.

 

dimanche, 17 janvier 2021

Le XXIe siècle et la tentation cosmopolite

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Le XXIe siècle et la tentation cosmopolite

Par Bernard Plouvier
Ex: https://www.eurolibertes.com

« Consommer est devenu le but suprême
de l’existence des individus,
ce qui comble d’aise
les maîtres du “village terrestre”
peuplé d’hédonistes
(les travailleurs)
et de psychopathes
(les parasites sociaux) »

Entretien avec Bernard Plouvier, auteur de Le XXIe siècle et la tentation cosmopolite, éditions de L’Æncre

Vous abordez dans votre livre des thèmes très divers, tel les origines de l’Homo sapiens, le domaine territorial de la race blanche, dite « caucasienne », les constantes de la société humaines et les variables culturelles, mais également l’ambiguïté du « libéralisme » et du « melting pot » des USA, l’expérience mondialiste et l’économie globale qui permet aux ploutocrates de confisquer les États… Le titre de cette collection « Nouveau siècle, nouveaux enjeux » semble parfaitement s’appliquer au thème de ce livre ?

le-populisme-ou-la-vraie.jpgNous autres, Européens autochtones, vivons indéniablement une période de « fin de civilisation », qui ressemble à s’y méprendre à celle vécue par les contemporains de la fin de l’Empire romain d’Occident. Cette constatation, assez peu réjouissante, mérite à la fois que l’on établisse un bilan des réalisations anciennes et que l’on apporte quelques réflexions comparatives sur les valeurs qui s’estompent et celles qui émergent.

Au Ve siècle, l’enrichissement général des citoyens de l’Empire romain avait conduit au relâchement de l’effort collectif et deux nouvelles religions moyen-orientales – la chrétienne et celle des adorateurs de Mithra – avaient supplanté le culte des dieux de l’État. De nos jours, la fraction la plus inventive de l’humanité contemporaine s’est lancée dans la course effrénée aux petites joies individuelles, au lieu d’œuvrer comme auparavant pour la collectivité.

Au Ve siècle, le pouvoir spirituel avait asservi puis anéanti la puissance politique. De nos jours, les maîtres de l’économie écrasent les autres pouvoirs : exécutif, législatif, judiciaire, médiatique et même spirituel.

Consommer est devenu le but suprême de l’existence des individus, ce qui comble d’aise les maîtres du « village terrestre » peuplé d’hédonistes (les travailleurs) et de psychopathes (les parasites sociaux).

L’économie globale et la mondialisation de la vie économique et culturelle sont deux notions nées aux USA durant la IIe Guerre mondiale. Du fait de l’implosion des sociétés communistes, elles sont devenues la réalité quotidienne de presque tous les peuples de la planète : rêve pour les uns, cauchemar pour les autres… c’est affaire de sensibilité et d’idéal.

Il est évident que Franklin Delano Roosevelt, le grand concepteur, n’aurait nullement apprécié notre monde où les grands actionnaires des multinationales et des trusts nationaux d’Asie manipulent, du fait de la toute-puissance de l’argent, les pantins de la politique et des media.

Quelle est votre définition du « cosmopolitisme », un mot qui, au XVIIIe siècle, à l’époque des Lumières, représentait le nec plus ultra : cela revenait alors, pour l’élite, à s’informer des autres cultures que celle de son pays d’origine ?

Le cosmopolitisme à la sauce mondialiste équivaut au mixage des cultures et au brassage des populations, de façon à liquider l’option nationale, jugée pernicieuse. L’Europe est ainsi envahie d’extra-Européens, souvent incultes, toujours faméliques et avides, également nantis pour la plupart d’une religion médiévale, c’est-à-dire grosse de l’expression d’un fanatisme anachronique, mais également porteurs d’un racisme revanchard dont l’expression est évidente, sauf pour les pitres qui façonnent l’opinion publique et ceux qui font semblant de nous gouverner.

005984422.jpgLa propagande mondialiste reflète, c’est évident, les choix de nos maîtres, qui leur sont dictés par leur intérêt. Le grand village terrestre ne doit plus être composé que d’individus qui consomment beaucoup, au besoin à crédit, et pensent gentiment ce qu’imposent les fabricants d’opinion publique.

Dans leur désir d’uniformiser l’humanité, pour augmenter la rentabilité du négoce en facilitant le travail des producteurs, des distributeurs et des revendeurs de biens de consommation, nos maîtres font l’impasse sur de nombreuses données génétiquement programmées de l’espèce humaine, non susceptibles d’éducation ou de rééducation. En outre, il nient allègrement une évidence : la profonde inégalité des êtres humains et des civilisations passées.

Par intérêt également, ils autorisent le développement de conduites sociales aberrantes pour peu que cela leur fournisse un marché lucratif (pornographie, conduites addictives, coutumes alimentaires absurdes conformes à des préceptes religieux antiques ou médiévaux).

Que cela envahisse le continent phare du melting pot, celui des trois Amériques (pour reprendre une expression rooseveltienne), ne nous regarde pas en tant qu’Européens, mais il est grotesque de le tolérer dans notre continent, qui fut le continent civilisateur durant deux millénaires et demi.

Pourquoi ne pas aimer ce monde nouveau, apparu il y a une vingtaine d’années, lors de l’effondrement des sociétés communistes et du triomphe de l’american way of life ?

Dépourvus de culture historique et philosophique, nos nouveaux maîtres créent une société mono-culturelle, multi-raciale parfaitement artificielle, qui ne peut en aucun cas créer une civilisation stable, donc durable, ni innovante au plan intellectuel et spirituel.

L’étude des espèces animales démontre que l’égoïsme et l’individualisme sont nocifs à moyen terme pour l’espèce, mais aussi pour les individus. Sans discipline, sans hiérarchie fondée sur les qualités et les mérites individuels, sans cohésion du groupe fondée sur l’utilité sociale, il ne peut y avoir de sécurité donc de survie, encore moins d’expansion pour l’espèce considérée.

Ce qui effare le plus un observateur européen contemplant la société actuelle est de constater que les Européens de souche ont, par veulerie et par esprit de facilité, renoncé à leur histoire. De la position de civilisateurs de la planète, ils sont passés en un demi-siècle au statut de colonisés, achetant des produits de médiocre qualité et d’infime durée de vie, fabriqués le plus souvent en Asie, et se gavant d’une sous-culture élaborée aux USA et au Japon.

L’étude de quelques grandes civilisations européennes défuntes démontre que l’homogénéité ethnique est l’une des conditions fondamentales de l’implantation, puis du rayonnement d’une civilisation originale. La perte du sens de l’effort collectif, l’incorporation de populations ou de croyances issues d’autres continents sont les conditions idéales pour amener la dégénérescence, puis la mort d’une civilisation, c’est-à-dire l’instauration d’un nouvel « âge des ténèbres ».

On ne peut guère compter sur le milieu des universitaires, où règnent en maîtres le conformisme et le misonéisme, ni sur les media, par définition aux ordres du Pouvoir, pour provoquer une réflexion critique chez nos contemporains, alors même que l’avenir de l’Europe dépend essentiellement de la prise de conscience de l’originalité et de la richesse de leur passé par les Européens de souche, qui seuls doivent décider de l’avenir du continent et de sa race.

Le XXIe siècle et la tentation cosmopolite, édition L’Æncre, collection « à nouveau siècle, nouveaux enjeux », dirigée par Philippe Randa, 452 pages, 35 euros. Pour commander ce livre, cliquez ici.

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samedi, 16 janvier 2021

Les suprémacistes aiment la fiction

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Les suprémacistes aiment la fiction

par Philippe-Joseph Salazar

Ex: https://lesinfluences.fr

Comment trois romans signés Jean Raspail, William L. Pierce et Jack London sont plébiscités par la contre-culture suprémaciste.

COMMENT RAISONNENT-ILS ? Un jour, à la Rhumerie, Roland Barthes, en tirant sur son Petit Corona de chez Freeman & Son, jadis sis à 65 Kingsway, Londres, déclara : « Si un jour tout ça disparaissait et qu’il faudrait choisir entre la Théorie de la relativité et la Recherche du temps perdu, je garderais Proust. Avec la Recherche on pourra retrouver Einstein, mais l’inverse c’est douteux ... » Pour saisir cette saillie, il faut se souvenir que Barthes s’était approprié un mot ancien, remis en selle par Michel Foucault – ce mot ? « Mathésis ».

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Par « mathésis », Roland Barthes voulait dire que la littérature a des pouvoirs d’apprentissage et de connaissance qui souvent dépassent, et de loin, ce que la science ou les intellectuels peuvent dire du monde.

Une racine indo-européenne remontant à la nuit des temps. En grec ancien le mot dénote apprentissage, instruction, connaissance. Par « mathésis », Barthes voulait dire que la littérature a des pouvoirs d’apprentissage et de connaissance, et d’intellection, qui souvent dépassent, et de loin, ce que la science ou les intellectuels peuvent dire du monde. Un roman peut parler mieux qu’un bouquin d’historien sur une révolution volée au peuple – L’Éducation sentimentale de Flaubert. Mieux révéler de la (dé)colonisation que des mémoires d’universitaire sur l’Algérie – L’Étranger d’Albert Camus. Etc. Cherchez les exemples. On pourra continuer à produire des thèses sur l’URSS : Soljenitsyne a tout dit, et en mieux.

« Mathésis » a partie liée avec la connaissance divinatoire, la mantique (même souche) : la littérature est une forme de divination, elle fait entrevoir ce qui sera, ou pourrait être, ou ne sera pas. Les œuvres de fiction anticipent et font présager du futur car, dixit Platon : « Le dieu a donné la divination à l’homme pour suppléer à la raison. » La fiction supplée aux idées. D’ailleurs cette citation se trouve dans le Timée qui, avec le récit du Critias, donne une narration à mi-chemin entre la science fiction et la politique, la fameuse description d’une société idéale – l’Atlantide. Platon invente là d’un coup à la fois un genre littéraire (le récit dit utopique) et un genre politique (qu’est-ce une société idéale). « Idéale », bref structurée selon une idée testée, car l’Atlantide a existé, dit Platon. Ce n’est pas une fiction mais une réalité qu’il s’agit, politiquement, de rétablir.
Voilà qui nous mène au cœur du sujet : les récits de politique-fiction raciale. Pas tous, seulement ceux qui sont lus, récités et cités maintenant, et qui ont un effet politique de formation, de « mathésis ».

Deux constatations : un, ceux de l’extérieur ne saisissent pas l’importance formatrice de ces récits ou se contentent de les ridiculiser – comme les adversaires du djihad se moquaient des discours et écrits du Califat de l’État islamique. Deux, si l’internationale blanche peut aligner des récits de politique-fiction forts, la gauche radicale (ou flasque), elle, n’a plus rien, et c’est stupéfiant : aucun roman, aucun récit de fiction qui galvanise les troupes. Car dans les années cinquante et soixante la gauche eut sa grande littérature d’action, à la fois hautainement littéraire et les mains dans le cambouis de la pratique : deux ou trois générations de jeunes ont lu les romans de Sartre, Camus, Beauvoir – et ont cru à la Révolution – politique, sociale, sexuelle. En 1968 ils sont passés à deux doigts de la victoire politique immédiate mais force est d’admettre qu’ils ont alors remporté une victoire sur le long terme : l’idéologie régnante et le discours dominant actuels, même dans leur travesti gestionnaire et leur langage hébété, gardent en effet les traits les plus forts de ce qui fut mis en imagination par ces œuvres littéraires prémonitoires, leur « mathésis ».

Or, en catimini, c’est la droite raciale qui a pris le relais. Il existe une littérature qui forme, qui instruit, qui fait apprendre – une « mathésis » blanche, lue et relue à la fois comme mantique, c’est-à-dire par son pouvoir de prémonition, et comme une pratique, c’est-à-dire de quasi manuels de rébellion. Trois romans : Le Camp des saints de Jean Raspail (1973), Les Carnets de Turner d’Andrew Macdonald (nom de plume de William L. Pierce) (1978) et Le Talon de fer de Jack London (1908). On a là un « dispositif » rhétorique (autre notion de Foucault).

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Jean Raspail, une fascination incantatoire

  Le Camp des saints est devenu un classique de l’internationale blanche, traduit en de nombreuses langues. C’est un des romans français les plus vendus au monde. Au début des années 1970, Jean Raspail imagina cette invasion de l’Europe depuis l’Inde, et la défaite mondiale de l’Occident, désespérément et inutilement défendue par de rares Justes face à l’holocauste global, et narrée depuis le réduit suisse alors que les « Barbares » montent à l’assaut. En 1972, la loi Pleven contre l’incitation au racisme est votée, le film Avoir vingt ans dans les Aurès sort en salle, le militant maoïste Pierre Overney est assassiné, Le Pen fonde le Front national et la guerre du Viêt-Nam a encore trois ans devant elle avant la déferlante des boat-people (1975-1978). Le roman vient aussi quatre ans après le discours du Britannique Enoch Powell, des « rivières de sang », prémonitoire, selon lui, de la montée de l’immigration du Commonwealth vers le Royaume-Uni et de ses conséquences.

On a dit que c’était une dystopie, mais c’est inexact : contrairement à Orwell dans 1984, Raspail ne décrit pas une société néfaste qui s’installe, un fonctionnement inhumain d’institutions, bref une utopie de malheur, mais l’effondrement d’une société, l’Occident comme on disait alors.

Aucune solution n’est proposée, sauf une, inéluctable, et rapide, celle de la destruction. C’est un livre de politique-fiction, ce n’est pas une utopie politique qui offre la prémonition d’une société idéale à rebâtir. C’est une apocalypse géopolitique sans rachat des péchés – les erreurs politiques ayant conduit à ce génocide des Occidentaux – et sans espoir de renaissance.

Pour les lecteurs de l’internationale blanche actuelle, le roman est lu à travers le calque de la crise récente des réfugiés et de la crise plus ancienne de l’immigration en France. Raspail a pu, adroitement, faire de nouvelles éditions, raboter, expliquer, paraphraser mais une chose est certaine : il ne propose pas un projet politique. Son attrait, général par l’internationale blanche actuelle, est qu’il avertit de ce qui arrivera si aucun « plan » n’est en place pour contrecarrer l’action délétère des gouvernants occidentaux. La fascination qu’exerce le roman est de l’ordre incantatoire : sans « plan », sans préparation, nous sommes perdus – les réseaux suprémacistes parlent de « prepping » : il faut se préparer. Comme l’intrusion au Congrès américain, et toutes ses conséquences, le jour où se tint le vote de certification du scrutin présidentiel (6 et 7 janvier 2021) le réseau Boogaloo sommait ses partisans : « Commencez le maillage, planifiez, préparez-vous. Imprimez des cartes de vos quartiers. Sortez vos kits de survie et entraînez-vous. Ayez des amis sûrs. Au jour fixé vous n’aurez sous votre contrôle que ce que vous aurez préparé. »

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William Luther Pierce III, l’influence suprématiste

  Or c’est ici qu’intervient le deuxième roman clef (Roland Barthes parlait de « texte tuteur »), Les Carnets de Turner.

Ce qu’ils offrent est justement un scénario de politique-fiction où ceux qui se sont préparés finissent, après des aventures épiques, par faire triompher leur résistance à la destruction des Blancs par les Noirs téléguidés par les Juifs (le roman fonctionne avec ces trois actants comme on dit en théorie de la narration). Sa structure narrative est cruciale pour comprendre la fascination que ce roman exerce sur la jeune génération des « réalistes raciaux ». Il s’agit de mémoires retrouvés longtemps après le triomphe de l’Organisation (blanche) sur le Système (le gouvernement américain et ses alliés), présentés par un historien de la Grande Révolution – celle-ci fut le résultat de la résistance et de la campagne de terreur menée par l’Organisation et planifiée par son comité central, l’Ordre. Cette insurrection nationaliste blanche, après des revers et des défaites, finira par s’étendre au monde entier, en 2000, par l’éradication de tous les peuples non blancs (Juifs compris). Peu importe son auteur, William Luther Pierce III (1933-2002), un intellectuel et figure éminente du suprématisme blanc américain (l’Alliance nationale), car l’impact intellectuel du roman dépasse le cadre, en réalité assez restreint, de sa propre influence : c’est un cas où les idées passent par une fiction plus que par la propagande de parti, et s’étendent au delà du cercle étroit des fidèles.
Mais les Carnets ne sont pas une utopie : on n’y trouve pratiquement aucune description de l’Organisation et encore moins du fonctionnement de la société née de la Grande Révolution et de l’éradication des races non blanches. Le but du roman est de décrire un processus de « prepping » d’un individu, de sa conscientisation d’homme blanc, de sa préparation à l’action et de son passage à la résistance, y compris avec l’aveu de ses faiblesses : non seulement le roman est centré sur un actant principal, le héros, Turner, mais c’est lui-même qui raconte, à la première personne, ce qu’il a vu et fait. En d’autres termes c’est l’individu en action qui est placé au premier plan, avec forces et défauts, non pas un chef charismatique, mais un fantassin, de base. Le roman, outre qu’il est bien écrit et bien structuré, offre donc à lire l’histoire d’une résistance réussie à l’oppression vue de la base, d’où sa force d’identification et le succès qu’il rencontre depuis.

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Jack London, le levier anticapitaliste et anti-élites

  Mais le Système, l’ennemi des Carnets ? C’est ici qu’intervient le troisième texte tuteur, le roman plus ancien de Jack London, Le Talon de fer. Le livre est le récit, consigné dans un manuscrit miraculeusement retrouvé sept siècles après les évènements, d’une insurrection « fraternelle » suivie de trois autres « Révoltes » étalées sur trois siècles, « toutes noyées dans le sang, avant que le mouvement mondial du travail ne s’épanouisse ». Trotsky en donne ce résumé fulgurant en 1937 : « Dans son tableau de l’avenir il ne laisse absolument rien subsister de la démocratie et du progrès pacifique. Au-dessus de la masse des déshérités s’élèvent les castes de l’aristocratie ouvrière, de l’armée prétorienne, de l’appareil policier omniprésent et, couronnant l’édifice, de l’oligarchie financière. »

Le récit est une dystopie : on y découvre une société « idéale », c’est-à-dire, selon l’idée que décrit assez justement Trotsky, d’une oligarchie financière dans ce qu’il nomme, à tort ou à raison, écrivant en 1937, un régime fasciste. Le héros n’est pas le narrateur mais sa femme, issue de cette oligarchie. En quoi ce récit de politique fiction est-il le troisième élément du dispositif rhétorique ? De quoi est-il persuasif ? Premièrement du fait que, pour les lecteurs de l’internationale blanche, il ne décrit pas une société fasciste, justement, mais la société actuelle. La phrase de Trotsky est aisément traduisible : au dessus de la masse des Blancs dont on a annulé l’héritage s’élèvent les élites, à savoir les syndicats, les forces de l’ordre, un système omniprésent de contrôle et, au sommet, l’oligarchie de la finance. Il manque les médias mais ne font-ils pas partie de l’appareil idéologique de la superstructure, cet Überbau, cet édifice, terme marxiste employé par Trotsky à juste escient ? Or, deuxièmement, la nouvelle idéologie raciale blanche, suprémaciste ou non, est anticapitaliste ou anti-élites car, à ses yeux, elles sont les leviers du « cosmopolitisme » qui opère un gommage forcené des différences culturelles et biologiques entre les races afin d’optimiser les flux marchands et les flux de main d’œuvre de l’internationalisme marchand. Troisièmement, l’« oligarchie » dissimule la dureté de ses opérations sous les labels lénifiants de diversité, proximité, solidarité, vivre ensemble – une rhétorique de l’asservissement consenti de « déshérités ». Ce qu’offre donc Le Talon de fer c’est une description de ce qu’est le « Système » auquel Les Carnets de Turner font allusion, mais ne décrivent pas. Les deux romans s’emboîtent.

Pour résumer, ces trois romans forment une « mathésis », une construction prémonitoire du monde qui anime la jeune génération de « réalistes raciaux », « nationalistes blancs » ou « suprémacistes ». L’influence de ces récits de fiction tient donc à la fois à leur contenu et à la manière dont les trois romans se soutiennent les uns les autres pour former un cadre intellectuel – au sens où la passion qui anime ces récits porte une interprétation des faits et une intelligence des enjeux. Ce sont les trois fictions clefs qui nourrissent, par toutes sortes de réseaux parfois extrêmes, un plan de prise de conscience de l’identité blanche et de préparation à une prise éventuelle du pouvoir. Puissance potentielle de la fiction.

jeudi, 14 janvier 2021

L'homme qui a tué le président des États-Unis d'Amérique - Présentation du roman posthume de Guillaume Faye

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L'homme qui a tué le président des États-Unis d'Amérique

Présentation du roman posthume de Guillaume Faye

Duarte Branquinho

Guillaume Faye (1949-2019) s'est fait connaître comme un penseur et un essayiste de la droite radicale française et de ce que l’on appelle désormais le ‘’réseau identitaire européen’’, mais son imagination et sa fascination pour la technoscience se sont révélées assez tôt. Il n'est donc pas surprenant qu'il nous ait donné cette surprise posthume, un roman qui est une incursion dans l'histoire alternative, ou plutôt, dans un univers parallèle.

Déjà en 1985, Faye, qui s'était fait remarquer par ses essais politiques, notamment le brillant ouvrage intitulé Le Système à tuer les peuples (1981), écrit le scénario d'une bande dessinée, faisant ainsi ses débuts dans la fiction. Avant-guerre, illustré par Jean-Marc et Éric Simon et publié par Carrère, était un "thriller" qui mêlait la science-fiction et le fantastique, mais où, surtout, le décor nous montrait le monde qu'il entendait prophétiser, celui de la Grande Fédération Européenne, dans laquelle se mêlaient des éléments archaïques et futuristes. En 1998, dans son livre L'Archéofuturisme, en annexe de cet essai provocateur et révolutionnaire, Faye a aussi illustré son monde par la fiction, dans une nouvelle intitulée Un jour dans la vie de Dimitri Léonidovitch Oblomov, qui a été traduite en allemand et publiée de façon autonome par les éditions Jungeuropa l'année dernière. Ensuite, dans L'Archéofuturisme V2.0: nouvelles cataclysmiques (Editions du Lore, 2012), il a à nouveau utilisé la fiction pour illustrer ses idées et présenter l'avenir qu'il espérait.

Nederland

Bartholomé est un homme d'âge moyen, chef de ventes dans une entreprise de nouilles et soupes asiatiques, solitaire dont la vie est inintéressante. Un jour, depuis son nouvel appartement, il observe une belle voisine sur un balcon voisin et tombe immédiatement amoureux. Il devient obsédé par cette femme qui correspond exactement à son type et lui rappelle un amour passé, achète de puissantes jumelles et commence à l'observer quotidiennement, à contrôler ses mouvements et à imaginer sa vie, présente et future - avec lui, bien sûr. Jusqu'au jour où elle voit un homme la rencontrer dans son appartement. L'existence d'un rival est insupportable et Bartholomé, sur les conseils de Barthélémy, son "double" qui vivait comme un parasite dans son cerveau depuis l'enfance, décide de le tuer et, sans le savoir, assassine le président des Etats-Unis, Frank Nederland, à coups de carabine.

Dès lors, la "solution" qui allait ouvrir la voie à son grand amour se transforme en une course où les événements se précipitent et où les vents changent soudainement de direction.

L'intrigue a tous les ingrédients d'un roman policier, d'un thriller politique et d'un roman de science-fiction, sans oublier les touches d'humour.

Il y a des références que l'on a repéré dans des ouvrages antérieurs, comme la firme géante Typhoone, qui figurait déjà dans Avant-guerre, ainsi que des jeux de mots amusants sur des noms propres, comme le procureur Silvester Schwarzenegger et l'agent Arnold Stallone, mais aussi des noms fictifs dans lesquels on reconnaît des auteurs pour lesquels Guillaume Faye n'est pas toujours amical et en profite parfois pour régler des comptes, comme Bernard Loogan, Albin Delanoist, John-Yvan Legallooblow ou Peter Krebs. Il y a également une référence à un sport populaire, le "rollerball", en hommage au film culte du même nom réalisé en 1975 par Norman Jewison.

Le texte se réfère à l'annexe des notes à la fin du livre, et c'est là que nous trouvons un indice qui nous dit où l'action de ce roman se déroule à Washita D.C., où l'on paie en "thalers" et où il existe une religion officielle avec ses déesses, où les gens communiquent par le réseau Intertronic avec leurs PED, boivent des boissons comme la "vodschkaïa" ou le "café salé" et où il y a des animaux comme la "chepulavanka" ou le "sanglion". Dans la note sur le professeur Josef Stiin, on nous dit que cet astrophysicien, adepte de la théorie des "pluri-verses", a révélé dans son ouvrage Pluridimensional Journey qu'il a réussi à voir une planète semblable à la sienne, appelée par ses habitants Terre, et située dans une dimension cosmique parallèle dans la soi-disant Voie lactée.

Nederland, publié par Alba Leone en septembre de l'année dernière, se lit comme un film d'action, avec son rythme rapide, ses descriptions passionnantes, une scène bien construite et des personnages nombreux et variés. Mais au final, ce que l'histoire anticipe bientôt, il y a un sentiment de manque car l’étrangeté du lien entre cet univers et le nôtre demeure. Serait-ce vraiment "le nôtre", ou serait-ce un monde différent ? La réponse se trouve dans une suite que Faye, enlevé par les dieux trop tôt, n'a pas eu le temps d’écrire.

Texte publié dans l'hebdomadaire O Diabo, 8 janvier 2021.

Pour commander le roman: https://danielconversano.com/product/nederland-guillaume-faye/

Cinq livres de Faye pour 80 euros: http://www.ladiffusiondulore.fr/home/851-pack-faye-5-ouvrages-a-prix-reduit-.html?search_query=faye&results=8

Archéofuturisme 2.0 : http://www.ladiffusiondulore.fr/documents-essais/368-l-archeofuturisme-v20-nouvelles-cataclysmiques.html?search_query=faye&results=8

 

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mercredi, 13 janvier 2021

America First: 1939–1941

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America First: 1939–1941

thoseangrydays-200x300.jpgLynne Olson
Those Angry Days: Roosevelt, Lindbergh, and America’s Fight over World War II, 19391941
New York: Random House, 2013

The idea of America First policy is back after a long hiatus. The first proponent for such a policy was none other than George Washington. He endorsed the idea in his farewell address [2], stating:

The nation which indulges towards another a habitual hatred or a habitual fondness is in some degree a slave . . . which is sufficient to lead it astray from its duty and its interest. Antipathy in one nation against another disposes each more readily to offer insult and injury, to lay hold of slight causes of umbrage…when accidental or trifling occasions of dispute occur. Hence, frequent collisions, obstinate, envenomed, and bloody contests.”

The president who took an opposing view [3] was John F. Kennedy:

“Let every nation know, whether it wishes us well or ill, that we shall pay any price, bear any burden, meet any hardship, support any friend, oppose any foe to assure the survival and the success of liberty.” (My emphasis.)

How the standard wisdom went from Washington’s concern for entangling foreign alliances to Kennedy’s declaration that he’ll bet the farm on the liberty of an ally occurred in the years between 1939 and 1941. The great issue was whether or not the United States should become involved in World War II.

How that debate occurred is documented by Lynne Olson’s [4] book Those Angry Days: Roosevelt, Lindbergh, and America’s Fight over World War II, 19391941. The book is highly illuminating. The controversy was hot and heavy from the start of World War II in 1939 until the attack on Pearl Harbor. The quarrel split families, caused fistfights in Congress, and led to deplatforming and other forms of nastiness. When reading about the conflict, there is a raw sense of current events to it also.

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For example, how far does America go to protect an ally? If an ally is spying on one’s citizens, are they really an ally? Are “dictators” an automatic evil or are they a rational response to a nation’s foreign and domestic threats? How big should the military be in a time of peace? Are Jews full citizens or a separate people pursuing their own interests?

To Fight or Not to Fight

The two men that personified the struggle are Charles A. Lindbergh and Franklin Delano Roosevelt. Lindbergh, the first man to cross the Atlantic solo in an airplane, believed the United States should keep out of the war in Europe. Roosevelt was the chief interventionist. Or, more accurately, Roosevelt’s passionate supporters caused him to be an interventionist.

Lindbergh’s and Roosevelt’s mutual dislike went back to a controversy in 1934. Roosevelt wanted to end any appearance of impropriety involving airmail contracts to private aviation firms by using Army Air Corps aircraft to deliver the mail. Lindbergh argued that the Army’s aircraft were not suited to the role for technical reasons. After several crashes, Roosevelt went back to contracted aircraft. Lindbergh won his first round against the President.

In September 1939, the antipathy between the two men intensified when the British declared war on Germany for invading Poland. Lindbergh and the isolationists felt that the United States should stay out of the war. They were motivated by the unsavory end to the First World War.

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In brief, the United States had lent money to various Allied powers. Thus Americans were drawn into the conflict to protect their investments, then weren’t paid back anyway. World War I killed 500 Americans per day during the Meuse-Argonne Offensive, so the price for involvement was steep. The British also loaded armaments on passenger ships and flew the US Flag on these ships to deceive German U-Boats. When those passenger ships were sunk, Americans understood they were being manipulated by the British. Additionally, British propaganda about “The Hun” had been proven false before the 1920s were finished. Furthermore, there was a sense that the British were not an innocent party in the war — they were an imperialist power.

Shortly after the start of hostilities, Lindbergh argued for [5] an American policy along the following lines:

  1. An embargo on offensive weapons and munitions.
  2. The unrestricted sale of purely defensive armaments.
  3. The prohibition of American shipping from the belligerent countries of Europe and their danger zones.
  4. The refusal of credit to belligerent nations or their agents.

He further argued that the United States had an important racial connection to all of Europe that should not be forgotten in a time of increasing Japanese belligerence and other problems with non-whites.

Since Lindbergh was already a national hero, people took notice.

Meanwhile, there was a highly active pro-intervention group consisting of different factions with different backgrounds and motivations. Olson mentions Jewish pressure in Hollywood, but she doesn’t say much about Jewish influence in the Roosevelt administration. Olson also mentions “anti-Semites,” but puts them in the category of kooks rather than the serious thinkers that they were. Of that, Wilmot Robertson says,

Instead of submitting anti-Semitism to the free play of ideas, instead of making it a topic for debate in which all can join, Jews and their liberal supporters have managed to organize an inquisition in which all acts, writings, and even thoughts critical of Jewry are treated as a threat to the moral order of mankind. The pro-Semite has consequently made himself the mirror image of the anti-Semite . . . the Jewish intellectual who believes passionately in the rights of free speech and peaceful assembly for all, but rejoices when permits are refused for anti-Semitic meetings and rocks crack against the skulls of anti-Semitic speakers. [1] [6]

In addition to the organized Jewish community, several other groups supported American involvement in the conflict. Some were American Anglophiles who were prominent in New England. There was also a sub-set of men who can be called the Plattsburg graduates.

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The Plattsburg graduates were upper-class Americans who had attended military training in Plattsburg, New York in 1915. These men went on to become officers during the First World War. They were not isolationists so much as men wishing the nation be prepared for conflict should it come. Although they had some training, many of their enlisted soldiers were rushed into battle with only two days’ training. Since they were prominent men as well as veterans, people took notice of their ideas. They pushed for enlarging the armed forces in 1940.

A First Look at the Isolationists’ Problems

The isolationists’ main problem was that the German point of view was never well-received by Americans. The fact that Hitler was greeted with flowers in Austria, the Sudetenland, and other parts of German-speaking Europe just didn’t register. Instead, the public felt that Nazi Germany was an enormous threat. The German American Bund, a pro-Nazi group based in New York City, were painted as “fifth columnists” in the media. German books and publications that stated their case didn’t sell.

Fascist optics have never worked in America.

Interventionist Dirty Tricks and Metapolitics

The pro-interventionist faction had two things going for them: dirty tricks and great metapolitics. The British government focused on intelligence gathering on isolationists, German diplomats in the US, and German sympathizers. This included wiretapping as well as infiltration of spies by the British, the FBI, and private groups like the Jewish Anti-Defamation League (ADL). The ADL didn’t use Jews as spies; they found whites to do the job.

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Other than a few exceptions, most isolationists had no connection to any foreign government and they weren’t able to draw upon organizational resources or any government to do the same to their enemies.

The dirty tricks weren’t as important as metapolitics:

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One of the best metapolitical leaders for intervention was Robert E. Sherwin [9], a playwright who came to believe that America should enter the war. Many of his plays were made into influential pro-intervention movies. Some of the outstanding movies based on Sherwin’s work were:

  • Waterloo Bridge [10] (1940): This is a fallen woman/romance story that made the British look cool.
  • Abe Lincoln in Illinois [11] (1940): “The implied comparison of America’s dilemma in the 1850s to that in the late 1930s was clearly understood by the play’s audiences. Heywood Broun of the New York World called Abe Lincoln in Illinois “the finest piece of propaganda ever to come into our theater. . . . To the satisfied and the smug, it will seem subversive to its very core. And they will be right. . . . It is the very battle cry of freedom.” [2] [12]

Pastor-Hall-images-94004dff-57c6-41b4-a00a-ed9815faef8.jpgOther pro-intervention movies were:

  • Pastor Hall [13](1940): This film tells the story of a Christian minister put in a Nazi prison camp. It is probably more fiction than fact.
  • That Hamilton Woman [14] (1941): Starring Vivian Leigh, it compares Hitler to Napoleon and endorses war against dictators.
  • Mrs. Miniver [15] (1942): This film follows the life of a happy upper-middle-class English family that participates in the Dunkirk evacuation and the following Battle of Britain. It is the best of the pro-war films of the early 1940s.

No Hollywood movies were portraying the Communists in Europe during the 1920s and 30s in a poor light. There was nothing about Germans stranded in dysfunctional new Eastern European nations following the collapse of the Austro-Hungarian Empire. There was nothing about Bela Kun, Soviet atrocities, or Gulags. The pro-intervention movies were “propaganda with a very thick coating of sugar.” [3] [16]

An Incident Was Inevitable . . .

By late 1941, the Battle of Britain was over, but the Roosevelt administration had drafted many young men into the armed forces where they trained with wooden rifles or trucks labeled “tank.” Morale was low, and the economy had not shifted to producing war equipment. Meanwhile, Roosevelt also adopted the Lend-Lease Policy. This allowed the British to get American aid, and it effectively made America a British ally, albeit a non-belligerent one.

By this point, Lindbergh felt that war was inevitable. It was only a matter of time before some incident would draw the United States into the fray. On September 11, 1941, Lindbergh decided to deliver a speech [17] explaining which factions had pushed America into a corner. He identified the three factions as the British, the Roosevelt administration, and the Jews. The Des Moines speech was entirely true, and it led to an explosion in the national conversation. Any criticism of Jewish interests carries the charge of anti-Semitism. [4] [18] Olson argues that the speech caused the American public to focus on Jewish issues rather than avoiding entry into the conflict.

The incidents were already on the way, though, so it hardly mattered. The US Navy was escorting merchant ships to Britain as far as Iceland, and the USS Greer had already fired shots at a German U-Boat.

Between September and December 1941, the isolationists retained a solid grip on the public mind and confined pro-war activists a great deal. Wrinkles from the USS Greer incident could be smoothed over. Then isolationist newspaper, the Chicago Tribune, owned by the isolationist Robert R. McCormick, published a leaked War Department plan to fight Germany. Ironically, the plan was created by a pro-German American army officer, Albert Coady Wedemeyer, and it was used when war came. The leak was probably made by US Army Air Forces General “Hap” Arnold.

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Then came Pearl Harbor.

In the wake of the devastation in Hawaii, the isolationists admitted that the United States had to go to war — with Japan. And the President agreed with them. The US only declared war on Japan. It was Hitler who declared war on the United States following the attack. Had that not occurred, it is highly likely that America would have cut aid to England and Russia and focused on the Pacific. The conflict in Europe would have played out far differently.

Charles Lindbergh spent the war as an industry consultant. He ceased criticism of Roosevelt and became a test pilot and aircraft developer. The pro-German Wedemeyer helped the invasion of Normandy and became a general officer. Other prominent America First activists joined the war effort and did heroic service. One of them, Gerald Ford, eventually became president. Another isolationist who became president was John Kennedy. Indeed nearly all the isolationists turned out to be heroes later, but most had to “disavow,” to a degree, their previous activism.

The far-Right of the isolationists, William Dudley Pelley and Laura Ingalls [19] (the aviator, not the girl from Little House on the Prairie) (photo) were sent to jail for a time under trumped-up charges.

Laura_Ingalls_aviator_2a.jpgAmerica First and isolationism still matter. Indeed, the isolationists were not proved wrong. They could claim that they had kept America neutral until it was attacked by a treacherous foe. They did, however, make mistakes that can be discussed in retrospect.

Isolationist Failings 

The Second World War was not caused by Hitler, it was caused by the reaction to his rise to power. Hitler was greeted with the same hysteria by the same sorts of people that got hysterical over Trump. Hitler’s movement could have been tempered by the ordinary workings of the representative government, but an Antifa mattoid burned down the Reichstag, allowing Hitler to assume emergency powers.

Additionally, the British drew the red line against Hitler in the wrong place. It should have been drawn between Germany and France and Germany and the Low Countries. Instead, it was drawn at Poland. Once the British and French drew the line in Poland, it was only a matter of time before the United States was involved due to the many ties between the two nations. In the end, isolationism came apart when the Japanese attacked Pearl Harbor.

There was also never creative output on the part of the isolationists that matched the pro-war effort. Anne Lindbergh’s book that supported America First ideas, The Wave of the Future, was difficult to understand. Futurist books are always iffy. In addition to good movies, the interventionists had Dr. Seuss as a cartoonist who portrayed isolationists as ostriches with their heads in the sand. There were also many pro-intervention newspaper editors and reporters.

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America’s Yankee elite was terribly divided. Yankees from the Mid-West tended to support isolationism. Those in New England wanted preparedness, if not outright interventionism. Meanwhile, the hostile organized Jewish community was united in pushing for war. Therefore, criticism of Jews as war agitators could be balanced by many examples of blue-blooded Northeastern WASPs who were members of Jew-free country clubs that supported interventionism.

Epilogue

The isolationists did shape policy to such a degree that the British paid a dear price for World War II. To get the Lend-Lease Act passed, Roosevelt pressured the British government to sell large British holdings in the United States. [5] [20] This action was repeated enough times that by the end of the conflict, Britain had debts and no assets to generate income to pay the debts. Additionally, the Labour Party made several poor economic decisions after they came to power at the end of the war. The British were the richest and most powerful people in the world in 1914. By the winter of 1946, the British were on food rations and they were suffering a coal shortage.

The isolationists were also not wrong about Jewish and Communist influence on American policy. In the aftermath of World War II, the political Right in Hollywood organized a blacklist and removed the worst of the lot. American cultural products flourished afterward. The music, movies, and television of the 1950s remain the gold standard. Consider that there are TV channels devoted to shows from the 50s and early 60s, but none replay the 1980s sitcom Head of the Class or the late 1970s’ Welcome Back Kotter. The America First Right also used the various tools — anti-subversion acts, anti-totalitarianism measures, et cetera that were designed for use against American “Nazis” — against Communists.

The interventionists were right about other things too. It became standard wisdom that “dictators” were always a threat, and Hitler could have been “stopped at Munich” before the war. Events in Iraq, Egypt, and Libya during the Arab Spring have proven that anarchy is far worse than “dictators.” Furthermore, stopping “aggression” at some figurative “Munich” is not always a viable option. Those who escalated the Vietnam War genuinely believed they were stopping a “Hitler” at the “Munich” of South Vietnam.

The questions raised by the America First and isolationist movements remain valid today.  How far should America go to support an ally? How can we take sides in far-off wars involving nations with vastly different cultures than our own? How big should America’s military be? When is the right time to get involved?

Notes

[1] [21] Wilmot Robertson, The Dispossessed Majority (Cape Canaveral, Florida: Howard Allen Press, 1981), p. 187.

[2] [22] Ibid., 109.

[3] [23] Ibid., 409.

[4] [24] One of Lindbergh’s supporters during this time was Kurt Vonnegut. He would go on to serve in the Battle of the Bulge and was a prisoner of war in Dresden when it was firebombed in 1945. Vonnegut would go on to write Slaughter House Five, perhaps one of the greatest anti-war works of literature.

[5] [25] For further reading on this matter, I suggest The Last Thousand Days of the British Empire (2009).

Article printed from Counter-Currents: https://counter-currents.com

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[1] Image: https://counter-currents.com/wp-content/uploads/2021/01/thoseangrydays.jpeg

[2] farewell address: https://www.ourdocuments.gov/doc.php?flash=true&doc=15&page=transcript

[3] an opposing view: https://www.jfklibrary.org/archives/other-resources/john-f-kennedy-speeches/inaugural-address-19610120

[4] Lynne Olson’s: http://www.lynneolson.com/

[5] argued for: http://www.charleslindbergh.com/americanfirst/speech3.asp

[6] [1]: #_ftnref1

[7] Image: https://counter-currents.com/wp-content/uploads/2020/10/HERES-THE-THING-scaled.jpg

[8] here.: https://counter-currents.com/2020/10/heres-the-thing-selected-interviews-vol-2/

[9] Robert E. Sherwin: https://www.imdb.com/name/nm0792845/?ref_=ttfc_fc_wr4

[10] Waterloo Bridge: https://www.imdb.com/title/tt0033238/fullcredits?ref_=tt_ov_wr#writers/

[11] Abe Lincoln in Illinois: https://www.imdb.com/title/tt0032181/

[12] [2]: #_ftnref2

[13] Pastor Hall : https://www.imdb.com/title/tt0032894/

[14] That Hamilton Woman: https://www.imdb.com/title/tt0034272/

[15] Mrs. Miniver: https://www.imdb.com/title/tt0035093/?ref_=nv_sr_srsg_0

[16] [3]: #_ftnref3

[17] deliver a speech: https://modernhistoryproject.org/mhp?Article=Lindbergh1941

[18] [4]: #_ftnref4

[19] Laura Ingalls: http://wesclark.com/burbank/ingalls.html

[20] [5]: #_ftnref5

[21] [1]: #_ftn1

[22] [2]: #_ftn2

[23] [3]: #_ftn3

[24] [4]: #_ftn4

[25] [5]: #_ftn5

lundi, 11 janvier 2021

Entrecroisements transfigurateurs entre le Roman du Début et celui de la Fin

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Entrecroisements transfigurateurs entre le Roman du Début et celui de la Fin

par Laurent James
Ex: https://parousia-parousia.blogspot.com
 
008115746.jpgPubliés à peu près au même moment, la distance temporelle entre L’Epopée des Arvernes de Jean-Paul Bourre et Le Procès des Dieux de Maxence Smaniotto est en réalité d’environ 2300 ans : les Poissons sont littéralement encerclés par ces deux volumes romanesques absolument bouleversants, dont la juxtaposition forme une terrible nasse immergée dans les plus profondes eaux souterraines de l’Europe intérieure.

Des Druides flamboyants aux journalistes névrosés, de l’Arvernie tournoyante à la Nouvelle Notre-Dame de l’Humanité, de Doria la guerrière banshee au visage enduit d’argile verte à Karima la froide universitaire déterminée à en finir avec l’Olympe, la lecture successive – ou même alternée, pourquoi en effet ne pas passer d’un livre à l’autre chapitre après chapitre, pour tomber dans une espèce de grand vertige totémique – de ces deux romans produit dans l’âme du lecteur une vision d’ensemble, à la fois de l’ontologie tout à fait lumineuse de l’espèce humaine spécifiquement européenne, ainsi que de l’ensemble absolument démoniaque de ce qui en constitue l’irréfragable ennemi radical, la vaste collusion de tous ceux qui sont déterminés à annihiler cette espèce en éradiquant ses Dieux, ses morts, ses armes, ses œuvres, ses ferveurs, son histoire, ses invocations, ses joies, sa mélancolie, sa tristesse, son ivresse, ses chants, sa sexualité, son fanatisme et sa haine.

Jean-Paul Bourre est le plus grand romancier français épique actuel, cela finira peut-être par se savoir. Un romancier fiévreux, homérique, médiumnique et « atteint d’une forme de synesthésie subite et sauvage », comme le rappelle Tony Baillargeat dans sa préface. Un romancier, c’est avant tout un meneur de loups ; et Bourre en est tout simplement le dernier.

61P8dewd40L.jpgSujet de rédaction : « Cent mille guerriers gaulois s’installent dans un grand désordre sur la rive droite du Rhône ; après être parvenus à traverser le fleuve, ils affrontent des dizaines de milliers de légionnaires romains qui finissent par lâcher une troupe d’éléphants. Décrivez le tumulte qui s’ensuit ». 

J’aimerais savoir combien d’écrivains contemporains relèveraient le défi… 

L’Epopée des Arvernes est avant tout un roman sur la paternité, tissé suivant une trame flamboyante de filiations paternelles : d’abord le jeune Moran, qui franchit les premières pages du roman en assistant à la destruction totale de son village et la profanation du cairn funéraire de son père Luconios, le « loup des neiges »… héros fougueux que l’écrivain a la cruauté tragique de faire périr à Lutèce, torturé sur le poteau des Nautes … passant ensuite le flambeau à son fils Luern, à l’épaule droite incisée, enfant, par son père Moran pour démultiplier la puissance de la bandaison de l’arc,… Luern le compagnon de combat de Brennos, géniteur – juste avant la prise de Rome – du petit Bituit,… puis Celtill le rebelle, et enfin Vercingétorix, lumineuse guirlande de pères combattant la puissance de Rome, au service de l’Arvernie et du peuple des forêts, de victoire en victoire jusqu’à la défaite.

Un lac volcanique bordé d’aulnes verts, la présence trouble et permanente de guerriers Pictes tatoués sur tout le corps, des cauchemars bariolés d’immondes bestioles, des bardes fiévreux gorgés d’hydromel, des ermites s’entretenant avec des fées au creux de leurs grottes, la déesse Damona étreignant un grand chêne sous la lune, l’enchanteresse Île Verte surgissant d’un rideau de brumes, … Tout, dans ce roman, n’est que fugitives visions du mystère profond de la vie, sans aucun enjolivement d’aucune sorte.

Ca décapite en effet à tour de bras chez Jean-Paul Bourre, aux cris de « Charogne puante ! », avant d’accrocher la tête de l’ennemi au seuil de sa hutte. On y baise également beaucoup sous l’orage, on crache par terre, on éventre des ours, on prépare des soupes de lard arrosée de cervoise, on pleure en évoquant des sentiers perdus qui mènent vers l’Autre Monde, on arrache des viscères à la lance à crochets en riant, on essuie sa moustache pleine de ragoût de porc.

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Jean-Paul Bourre.

Dominique de Roux a écrit dans Immédiatement cet aphorisme que tout le monde a oublié : « Les Druides prononçaient des mots si compacts qu’ils trouaient l’air et y restaient immobiles, plantés dans le vide comme des oiseaux surpris dans leur vol ». Ces mots compacts, Jean-Paul Bourre les a patiemment glanés au fil de ses promenades dans les nuées du plateau de Gergovie, pour les restituer ici avec précision.

Tiens ! voici la tête d’un corbeau, fichée sur une pique, devant la hutte de l’épouse de Moran. Je l’avais oubliée… Dans son bel ouvrage Le Grand Monarque et le Souverain Pontife, Rhonan de Bar nous rappelle que décapiter un corbeau, cet animal totem du Roi Brennos qui accompagne aussi bien Lug que Brân le Béni, cela « revient à séparer le Mercure du Caput Mortuum », c’est-à-dire augurer rien de moins que la décollation de Louis XVI.

Le Procès des Dieux est le roman anthropogonique de la Fin du Cycle des Rois. 

Car si certains gnostiques pop revendiquent la victoire des Sans-Rois comme la seule possibilité de retrouver les clefs de la connaissance, nous sommes encore quelques-uns à savoir pertinemment que c’est justement la défaite des Rois, et celle concomitante de l’Eglise, qui nous les a fait perdre définitivement, ces clefs. Alors, bien sûr, maintenant que nous sommes seuls, nous n’avons plus le choix, et nous nous plongeons dans l’œuvre d’Abellio pour activer la transfiguration prophétique du monde par le Christ intérieur.

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Maxence Smaniotto.

Et j’en profite pour affirmer, de manière péremptoire mais tout à fait assumée, que Le Procès des Dieux constitue le point central du triangle équilatéral formé par Les yeux d’Ezéchiel sont ouverts, La fosse de Babel et Visages immobiles : son point de fuite dynamique vers l’effacement gnostique de l’histoire européenne ; un effacement que l’on espère analogue au détachement – au laisser-être – de Maître Eckhart, « phase dialectique préalable à la déification de l’homme, c’est-à-dire à l’engendrement de Dieu par l’homme et la fusion de l’homme dans la déité de Dieu » (Manifeste de la Nouvelle Gnose, p. 134).

Gabriel est journaliste à News Challenges, média tenu par le dynamique milliardaire saoudien Khaled al-Waaleed qui rêve de « changer le monde ». Car, dans le roman de Smaniotto, et contrairement au Soumission de Houellebecq où la démocratie française devient progressivement musulmane, c’est l’islam qui finit par être majoritairement soumis au progressisme sociétal occidental ; les imams gays ou féminins promus aujourd’hui par Télérama, France Inter et les syndicats de salariés, ont fait tache d’huile. Après tout, il est tout à fait envisageable que ceux qui parviendront à en finir avec l’islam radical ne soient pas Génération Identitaire, ni Riposte laïque ni Gérald Darmanin, mais une alliance dynamique, inclusive et sociétale entre le CFCM, Bill Gates, Philippe Martinez et Marlène Schiappa. Les nationalistes contemporains sont si stupides qu’ils n’ont toujours pas compris que c’est l’islamo-gauchisme qui éteindra toute étincelle vivante au cœur de l’islam, en plaçant les musulmans sous le boisseau de la République. Ne se souviennent-ils pas de ce qui s’est passé avec le catholicisme ?

L’islamo-gauchisme est la plus grande arme de guerre contre l’islam, et une occasion historique de renforcer le gauchisme.

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Notons que dans le roman, la Chine confucéenne reste la seule et unique force mondiale à pouvoir résister au nihilisme impérialiste occidental. Confucius plus fort que Platon, Bouddha, Jésus et Mahomet réunis face à la Bête ?... C’est à envisager sérieusement.

Maxence Smaniotto montre que ce que nos ennemis nomment « la convergence des luttes » a toutes les chances d’être victorieuse, car – et c’est une autre des spécificités notables de notre époque – le Pouvoir et ses opposants sont fondamentalement d’accord sur l’essentiel. N’oublions pas que l’écriture inclusive, la lutte contre les biais de genre ou contre la transphobie ne sont plus depuis longtemps des revendications de groupes minoritaires mais de rigoureuses obligations administratives émanant du Parlement européen. 

Une société comme Kaufman & Broad est florissante car elle obéit en tous points aux mots d’ordre naguère gauchistes militants, et devenus aujourd’hui des diktats officiels : la parité à toutes les réunions et tous les comités, l’écriture inclusive, les règlements intérieurs pour le bon accueil des juifs, des arabes et des LGBT et la lutte contre le harcèlement sexuel. Et son Président s’appelle Nordine Hachemi, dont la foi musulmane diffère probablement de celle de Ayman al-Zawahiri. Absolument inattaquable du point de vue cégétiste. Et, en plus, Kaufman & Broad lutte efficacement contre l’oppression patriarcale de la religion catholique, en détruisant tranquillement les petites fermes à chapelle de nos quartiers.

En réalité, il s’agit d’une véritable convergence des putes qui se dresse devant nous : syndicalistes, vegans, militants intersectionnels et éco-solidaires, antispécistes, chrétiens téléramesques, musulmans des Lumières, … tous au service intégral de la déconstruction de l’autorité verticale et de la refondation des liens sociaux par la confusion active, l’indiscernabilité généralisée et le nihilisme post-festif. Et, surtout, au service intégral de l’universalisation du nihilisme occidental, et de la super-colonisation mondiale des peuples par l’idéologie du décloisonnement civilisationnel, ce que Smaniotto appelle « le darwinisme inclusif ». 

Le monde d’après les Rois, c’est surtout le monde d’après les Dieux.

Le roman débute avec la capture de Pan dans les marais de la Camargue par la police républicaine. Thierry Rotz, le ministre de l’Intérieur chargé d’arrêter les derniers Dieux encore libres, et de contrer les activités terroristes des salafistes aussi bien que du groupe de réinformation métaphysique Lernaia Hudra, est surnommé « Le Cathare ». Il s’agit là de l’une de ces remarquables illuminations de Maxence Smaniotto qui parsèment le roman, mais que je ne prendrai pas le temps de développer ici même. Le point commun entre tous nos ennemis est en effet une volonté tout à fait avérée de pureté mentale, faite à la fois du refus de la présence de la matière dans l’esprit et de refus de la présence d’esprit dans la matière, une volonté qui prit un temps le nom de catharisme, mais également, suivant les époques, d’arianisme, de dualisme gnostique ou de déisme universaliste (Thomas Paine).

maxence-smaniotto-l-armenie-au-dela-des-cliches.jpgEtonnez-vous après cela que les gnostiques pop que j’évoquais plus haut soient de fervents adeptes des cathares. Ils croient que ceux-ci ont tous été exterminés par les dominicains, alors qu’en réalité, ils ont anéanti l’Eglise, bâti la République américaine et pris le pouvoir en Occident. S’ils sont Sans-Rois, c’est parce qu’ils sont Avec-la-République.

Le journaliste fade et pâlot Gabriel est donc invité à assister au Procès des Dieux, qui se tient au Tribunal International pour les Crimes des Olympiens. Reconstruite après l’incendie d’avril 2019 dans l’optique architecturale d’un idéal universaliste et humaniste, la Nouvelle Notre-Dame de l’Humanité est idéale pour accueillir ce Tribunal. Au-delà du procès de l’Olympe, le lecteur aura compris que c’est un véritable procès de l’Europe qui se tient – au nom des valeurs de Kaufman & Broad, les valeurs de l’Occident.

Au temps des premiers Rois celtes, la femme primordiale revêtait les atours de femme-louve et femme-renard, ou de guerrière experte à la fois dans l’art de la volupté et la prière opérative, mais le monde d’après les Rois décrit par Smaniotto, ce monde de la fin du début de la Fin, n’est peuplé que de présentatrices transgenres à BFMTV, de féministes lesbiennes et voilées, de vigilantes universitaires anti-patriarcales et d’avocates aux cheveux violets.

Un autre genre, effectivement.

« La Femme, son essence, reste la vraie victime de fond de ces pratiques préislamiques », dit Samira à son patron al-Waaleed à propos des récits de Homère. « La guerre racialisée dans l’Iliade, la soumission genrée au patriarcat pour l’Odyssée. Hitler n’aurait pas pu faire mieux avec son Mein Kampf ». 

La professeure Karima Trong donne une assise universitaire à cette vision durant ses cours publics, en une harangue fleuve que je me permets ici de citer longuement, tant celle-ci synthétise prodigieusement la vision de nos ennemis ontologiques : « Derrière chaque acte fondateur autour duquel se structure une civilisation impérialiste, inégalitaire et patriarcale, se nichent les dieux grecs. Ils ont changé de nom pour mieux perpétuer leur existence, mais ils ont toujours été là. […] Cette nouvelle humanité, débarrassée de l’influence des dieux, est nécessaire. L’histoire nous montre une fois de plus pourquoi. Alexandre dit le Grand était élève d’Aristote, et mènera guerres sur guerres, jusqu’à l’Inde. Plus tard, Rome la latine s’hellénise et met à feu et à sang une grande partie de l’Europe, l’Afrique du Nord et la plupart du Moyen-Orient. Le christianisme succède à Rome, recueille l’héritage hellène et ça donne l’inquisition, les bûchers, l’oppression de la femme qui est assimilée au Diable, les génocides en Amérique du Sud et les croisades. Ensuite c’est au Romantisme de réactualiser les mythes grecs et sa philosophie. Dans leurs poèmes se nichent les germes du nationalisme, et ce n’est pas un hasard si le national-socialisme, avec sa quête de pureté raciale, hissera le Romantisme allemand au rang de culture aryenne. Mais les Olympiens ne se sont pas arrêtés au seul nazisme, ils ont poursuivi, répandant leurs ganglions un peu partout. Dans le fascisme italien, qui entendait ressusciter l’Empire romain, et même en URSS, où les formes classiques de l’architecture étaient remises au goût du jour. Nombre d’édifices des années 1930 et 1940 ne sont rien d’autre qu’une ruse que les dieux grecs avaient trouvée pour ériger de nouveaux temples à leur gloire. »

EHTlgbyWoAAv7QB.jpgHermès se défend particulièrement bien en prenant ses juges à partie, parce qu’il sait qu’en réalité, c’est pour de tout autres raisons que ceux-là s’attaquent à l’Olympe : l’une est iranienne et ne fait que défendre Zoroastre humilié, l’autre est juif talmudique et ne fait que combattre l’helléno-christianisme, un troisième est républicain donc franc-maçon, etc. Apprenant sa condamnation à la prison « jusqu’à l’oubli » dans les entrailles des îles Kerguelen, Hermès prévient alors le jury : « Vous ne vous rendez pas compte. Vous allez libérer les Titans » …

Ne leur pardonnez pas, mon Père, car ils savent très bien qu’ils ne savent pas ce qu’ils font.

Chez eux, chez nos ennemis ontologiques de l’Europe éternelle, la logique du tiers-inclus s’est muée en militantisme non-binaire, la transfiguration de l’humanité par l’émergence du Moi transcendantal s’est pervertie en atomisation confusionnelle, la conscience vive de l’Androgynat primordial a dégénéré en abâtardissement pédérastique… Mais pourquoi diable tous ces gens-là passent-ils leur temps à comprendre systématiquement tout de travers ? Marx avait noté que les événements historiques se produisaient toujours deux fois, d’abord sous forme de tragédie puis sous forme de farce. Je crois bien que l’une des définitions les plus efficaces pour désigner notre post-modernité est que, pour la première fois de notre cycle historique, celui-ci ayant débuté – je le rappelle pour ceux qui découvriraient ce blog ou qui n’auraient jamais lu Jean Phaure – il y a 64 800 ans, et bien pour la première fois c’est la comédie qui précède la tragédie. 

C’est ce que certains appellent « La Grande Parodie ». 

Notez bien qu’en toute logique, cela ne peut qu’être favorable à l’efficacité cosmologique du Grand Nettoyage par le Vide, lequel ne saurait en aucune manière être suivi d’une quelconque comédie, puisque personne n’aurait l’idée même de rigoler après le Grand Fracas, le Knout de la Fin des Temps.

Au-delà de la haine du père, de la filiation, du christianisme grec, et donc des Dieux de l’Olympe, se tient cependant encore autre chose. C’est ce que comprend Karima vers la fin du roman : « les Olympiens étaient dans nos cerveaux bien avant l’émergence de la conscience humaine ». Leur haine est bien plus vaste que ce que vous ne le pensiez, bien plus enracinée. S’il y a bien quelque chose d’enraciné en eux, c’est leur haine envers le Pôle Nord, envers l’Homme de Néandertal. Celui-ci est même la cible privilégiée du Coronavirus ! Serait-il définitivement maudit ?...

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Haïr l’Europe, c’est d’abord haïr l’Eglise du Paléolithique si chère à Pierre Gordon, c’est haïr les dolmens de nos campagnes. Le progressiste n’a qu’une passion : pisser et chier contre les menhirs (et mutiler les chevaux). Le progressiste républicain hait le Néolithique, qui ne serait que « l’émergence des inégalités, le début des religions et des dieux, celui des violences de masse ».  

Jean-Paul Demoule (sic !) est un exemple absolument lumineux de scientifique qui passe sa vie à faire le Procès des Dieux, de tous nos Dieux qui précédèrent le règne de Zeus – et à nier toute existence d’un peuple indo-européen. Un scientifique rigoureusement, radicalement, plénièrement et – j’ose l’écrire – fanatiquement anti-abellien.

La présence de Jean-Paul Demoule en France en ce début de vingt-et-unième siècle, c’est le contraire rigoureux du deuxième Concerto pour piano de Rachmaninov. Cette œuvre musicale bouleversante ne décrit rien de moins que l’écriture du concerto même, depuis les affres troubles du réveil du musicien jusqu’à l’émergence extatique de l’œuvre à la fin du troisième mouvement. Et c’est lorsque l’œuvre émerge que le Concerto se termine.

A contrario, la civilisation européenne a d’abord émergé des abords solaires du cercle polaire, s’est progressivement dégradée de par la lente pourriture de son peuple, puis de ses élites, jusqu’à son extinction à la fin du Quatrième Âge. Et c’est lorsque l’Europe coule que Jean-Paul Demoule surgit, brandissant l’affirmation éminemment paradoxale de l’inexistence de la Dame qui lui a donné la vie.

Un jour prochain, nous retrouverons dans les ordures la bague de Luconios sertie d’une pierre noire apte à éveiller les esprits du Lac des Anciens.

Et les âmes tièdes ne pourront alors rien opposer à notre ultra-violence retrouvée.

18:32 Publié dans Livre, Livre | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : livre, maxence smaniotto, jean-paul bourre | |  del.icio.us | | Digg! Digg |  Facebook

jeudi, 07 janvier 2021

Luc-Olivier d'Algange: Prologue à L' Ame secrète de l'Europe

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Prologue à L' Ame secrète de l'Europe

Luc-Olivier d'Algange

La meilleure façon de présenter un livre est, peut-être, de dire ce qu’il n’est pas. Ce livre n’est pas une somme, ni une thèse, ni un travail savant. Le lecteur n’y trouvera rien d’exhaustif ni de systématique ;tout au plus quelques aspects, à tel moment de l’aube ou du crépuscule, d’un paysage où se retrouver, avec quelques essors espérés, une amitié commune, après notre expropriation. L’exil intérieur est source de folles sagesses dont aucune ne se soumet à la tristesse, - ce péché par excellence car il est au principe de tous les autres. Tout est perdu, sauf la joie, que les Grecs savaient divine.

9782917579145.jpgVoici donc rassemblés, avec de nombreux inédits, L’Ombre de Venise, Le songe de Pallas, Lectures pour Frédéric II et Au seul nom d’une déesse phénicienne, livres naguère publiés par les audacieuses et coruscantes éditions Alexipharmaque, - lesquelles, comme leur nom l’indique, proposaient des contre-poisons aux toxiques divers dont ce temps nous assomme et dont le moindre n’est pas l’outrance moralisatrice qui exerce désormais ses hystéries sur tous les fronts. A les comparer, les anciennes addictions, opiacées ou autres, nous semblent bien douces.

Les Modernes vivent sous l’emprise de la drogue dure de leur dédain et de leur dédire. Leur stupeur n’est guère dionysienne. Sous leurs pas, la terre ne danse pas, elle se glace. Aux architectures en béton correspondent des âmes bétonnées. Rien n’est plus étranger à ces hommes amers que la reconnaissance des influences, la porosité de l’âme humaine aux forces et aux fastes du cosmos, sa perméabilité à l’esprit des lieux, son accord avec l’âme du monde qu’évoquait Virgile. Si imbus d’eux-mêmes, si bien incarcérés, que tout ce qui leur vient de leurs prédécesseurs, et du monde, leur semble une offense faite à leur vanité sans mesure, nos Modernes font passer leurs reniements pour des «repentances» et cheminent, en crabe, dans un univers qu’ils ignorent avec tous les moyens technologiques mis à leur disposition.

Lire, c’est-à-dire prêter attention à autre chose qu’à leurs ressassements infirmes  est au-dessus de leurs forces, si pleins d’eux-mêmes que la pensée d’autrui, sa musique, leur sont impensables et inaudibles pour des raisons presque physiologiques. Nous ne sommes pas sans mesurer ce qu’il y a de téméraire ou d’absurde à écrire, selon les exigences et les conseils de nos bons maîtres, en ces temps hypnotisés d’images, et pour le reste, censeurs et fanatiques. Cet exercice qui requiert une attention constante au mouvement de la pensée accordée à ce bien commun par excellence, notre langue ; cet exercice, qui parfois est spirituel, s'il n'est pas voué à disparaître, demeurera le bien ultime de ceux auxquels tout à été ôté. « En étrange pays dans mon pays lui-même » disait Aragon .

9782866811396.jpgCependant, ne déplorons point trop de vivre dans ce temps qui nous offre la chance inquiétante et exaltante de ressaisir, avant qu’elle ne disparaisse, et de notre mémoire même, ce qu’est une une civilisation ! Le crépuscule, nous dit HöIderlin, détient le secret de l’aurore. Jamais, sans doute, dans ce déclin et cet abandon, les formes anciennes ne nous parurent si éclatantes et si mystérieuses, si proches serais-je tenté de dire, sitôt que notre regard touche, par une décision résolue,  à la grande limpidité qui va jusqu’au fond du Temps.

Peu de chose nous séparent de la vie magnifique, de l’origine resplendissante, de notre puissance et de notre joie. De ce peu de choses, marasmes divers, intoxications morales, les écrits ici rassemblés espèrent, pour quelques uns, dissiper le pouvoir. Que leur vertu rêvée soit celle du claquement des doigts qui dissipe l’hypnose d’impuissance dans laquelle nous sommes plongés ! La lucidité revient alors, en ressac. Soudain nous savons que l’on veut notre mort, et, plus exactement notre mort-vivante, afin que nous puissions encore servir.

L’héritier, ce méchant homme selon la vulgate bourdieusienne, est un condamné à mort. Ses affinités avec la Grèce d’Empédocle et d' Homère, l’Allemagne de Novalis et de Nietzsche, l’Italie de Dante et de D’Annunzio, la France de Maurice Scève et de Gérard de Nerval, font de lui l’homme qui n’a plus cours. Les Moralisateurs veillent à ce qu’il soit inaudible. Un mot, ou deux, suffisent à l’exclure. Ces adeptes de la morale répandue semblent ignorer que, selon le mot de Pierre Boutang, la morale n’est pas quelque chose que l’on fait aux autres mais seulement à soi-même, et dans le secret. La vulgarité suprême est de l’oublier.

Ces propos seraient mal compris si on les songeait de désespérance. La lucidité qui interdit de se fourvoyer en optimismes fallacieux ou «progressistes» est une chance lustrale. Tout ce que nous aimons y revient, telle l’épiphanie de la lumière sur l’eau, l’éternité même, «la mer allée avec le soleil» du poème d'Arthur Rimbaud. Celui qui se désillusionne des valeurs réenchante les Principes.

Les Modernes se soumettent à toutes les abstractions, ils adorent l’Indistinct, qui, pour eux, a pris la place du Dieu des théologies révolues. La confusion est d’autant plus aisée qu’entre l’Indistinct d’aujourd’hui et le Dieu de jadis la  différence est subtile et que le subtilité est devenue la chose du monde la moins bien partagée. Rien ne fait plus horreur au Moderne que la diffraction de l’Un, le chromatisme de la pensée, l'expérience métaphysique de la lumière qui émane ou resplendit de même rien ne lui est plus étranger que l'ombrage et le secret.

Sa lumière artificielle, scialytique, n'envahit pas seulement ses supermarchés, ses bureaux mais la pensée elle-même, qui aplatit toute chose, efface la douceur des reliefs. Dans ce monde d'apparences, plus rien n'apparaît. L'apparence sans l'apparaître est totalitaire. Sans l'orée, où nous la voyons advenir, elle se donne pour fin dernière, et nous fige, face à elle, en statues de sel. Alors, et dans tous les sens du terme, nous ne pouvons plus nous sauver.

froLOda.jpgL'horreur visible des débuts de l'industrialisation, avec ses murs noircis de suie et ses feuillages racornis de miasmes, laissait au moins aux hommes la tentation de l'exotique, le voyage de Gauguin ou de Ségalen. La grande uniformisation planétaire nous ôte ces idylles . Le bien pour ce mal sera de nous retourner vers nos propres sources intérieures. Ce sera l'affaire non de tous mais de chacun, - de quelques uns, pour être plus précis, nous ne le savons que trop, élite fervente et rêveuse qui s'opposera à «l'élite» mal élue, comme on dirait mal élevée, des actuelles technocraties. Le proverbe est juste; «le poisson pourrit par la tête», - mais contre l'élite malversée, il faudra bien inventer une élite élue par l'écume de l'Aphrodite Anadyomène, une élite aimée des dieux, de même qu'à la masse, il faudra opposer un peuple, qui serait, lui aussi, dans la reconnaissance de ses dieux et de ses symboles. Ce sera la poésie ou rien.

Le christianisme, qui fut, non de toujours, mais pendant longtemps, l'espace même de l'Europe, sa définition la moins fallacieuse, qu'en reste-t-il si on lui ôte sa légende dorée, son ressouvenir des héros et des Saints, ses Anges, son latin mystique, ses rameaux de poésie ? Il lui reste la morale, mais une morale souvent frappée par le vil sophisme qui confond la justice et l'esprit de vengeance.

Est-il alors nécessaire de préciser que l'Europe qui titre cet ouvrage est bien loin de l'Europe économique, de l'Europe administrative et commerciale ? Nous avons pris le droit, dans nos solitudes, de parler d'autre chose, comme Stefan George évoquant, et invoquant, l'Allemagne secrète, face à l'Allemagne utilitaire, «managériale» et publiciste. Nous voici à ce tournant où il nous faut, pour ne point tomber, convoquer ces alliés impondérables que sont les œuvres et les songes.  Les songes sont les étymologies de nos actes. 

Luc-Olivier d'Algange

L'Ame secrète de l'Europe, L'Harmattan 2020.

samedi, 02 janvier 2021

Comme le temps passe, le roman mythologique de Robert Brasillach

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Comme le temps passe, le roman mythologique de Robert Brasillach

Par Frédéric Andreu-Véricel

René et Florence, les personnages principaux de ce roman arc-en-ciel sont deux jeunes gens qui s'aiment.

Aimer, pour eux, cela veut dire se tenir la main, se promener au bord de la mer et cela veut dire, aussi, contempler des îles lointaines, ces miroitantes fata morgana de leur enfance.

Par leurs yeux nimbés de réminiscence, nous entrons presque à notre insu dans le royaume émerveillé de leur enfance, qui est aussi un peu le nôtre.

Il n'est pas rare que j'ouvre mon vieux livre de poche, à la couverture déchirée, dans le métro, le bus, les salles d'attente du dentiste et, avouons-le, dans la vie elle-même que la démocratie libérale a transformé en une grande salle d'attente. Alors, ces temps morts se transforment en moments narratifs aux éclats de rêve, d'enfance et d'amour...

Mais, comme tout ce qui touche de près ou de loin aux années trente, à la Collaboration, à Brasillach, la lecture de Comme le temps passe ne va pas vraiment de soi. D'où, la question : peut-on lire Comme le temps passe de ce côté-ci de l'Histoire ?

Comme le temps passe est une des oeuvres les plus sensibles du XXe siècle, une oeuvre qui n'a pas oublié le nom des fleurs. Tout le monde en convient y compris les professionnels de la détraction.

Il est cependant regrettable que les controverses entre détracteurs et partisans de l'auteur toisent les oeuvres. Si populaires avant-guerre, ses romans, et surtout les poèmes écrits en prison, sont devenus, à une époque où l'on ne lit plus guère de poèmes, des bannières de ralliement.

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L'Histoire est écrite par les vainqueurs et il ne nous appartient pas d'écrire l'Histoire écrite par les vaincus. Rappelons tout de même que Robert Brasillach a subit un procès au terme duquel il fut exécuté dans la fleur de l'âge pour fait de Collaboration.

Tuer un poète, afin de prouver au monde entier sa détermination à lutter contre la barbarie nazie, il fallait y penser. Tuer un poète - étoile montante de la littérature française - au terme d'un procès bâclé, afin de rétablir la démocratie et l'Etat de droit, il fallait y penser. Et ils y ont pensé.

On pourrait cependant se dire, cela concerne l'homme, ses engagements politiques et non l'oeuvre, si les choses se passaient comme nous aimerions qu'elles se passent.

J'aimerais tant que l'on cesse de prendre en otage - dans le sens du pour ou celui du contre - une oeuvre romanesque et poétique si originale et féconde, à des fins bassement idéologiques. Oui mais voilà, l'idéologisme, c'est comme la délation en temps de guerre, cela ne fait pas partie des grandeurs françaises ; cela fait partie des "passions tristes" au sens que Spinoza donne à ces termes.

On a beau dire que Comme le temps passe est un roman sensible, un dialogue avec les personnages qui sont ceux-là même de l'âme, un bonheur inouï de lecture, lire Brasillach reste, 75 ans après le procès de son auteur, une activité "suspecte".

Du coup, celui qui aurait l'idée saugrenue de réhabiliter l'oeuvre de Brasillach serait suspecté de coucher avec les idées de l'auteur ; le jeu freudien des compensations psychologiques, le mettrait dans la quasi-obligation de ramener Louis Aragon au niveau d'un auteur mineur. Moi, je défends l'oeuvre lumineuse de Brasillach comme je défends bec et ongle celle d'Aragon, comme je défends la nécessité de la lecture en elle-même, aussi absolument que je hais la société post-littéraire.

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Ouvrir un ouvrage de Brasillach, c'est ouvrir un arc-en-ciel dans la monochromie de notre temps et tant pis si l'évoquer dans un article ou dans une causerie entre amis, c'est s'exposer à des remarques, des procès d'intention logés entre les sourcils. Prononcer le nom même de Brasillach, c'est aussi montrer que les maîtres de la réduction et de l'amalgame, ont certes remporté des batailles stratégiques, mais non la guerre.

Laissons donc ces "termites de la réduction qui rongent la vie humaine depuis toujours" (Kundera) a leur périmètre : les faux plafonds de la critique universitaire ; à leurs réseaux: les médias "mainstream" et surtout à leurs tuniques de Nessus : le politiquement correct et ses déclinaisons infinies (l'historiquement, le moralement, le littérairement correct, etc.).

Le principe de séparation d'une oeuvre et de son auteur, proposé je crois bien par Marcel Proust en son temps, c'est bien joli, cela prévaut dans le monde des madeleines trempées dans le thé, mais dans le monde réel, cela ne marche pas ou très mal. C'est l'exemple type d'une mauvaise bonne idée. Cela fonctionne par temps de paix mais non par temps de guerre, et nous sommes en guerre, celle que livre la fausse liberté à la vraie liberté, le pays légal au pays réel, celle que livrent, redoutable, les mondialistes aux patriotes.

Par temps de guerre, dans un pays occupé, on prend des risques. On ne trahit pas ses amis, ni leur mémoire. On défend Brasillach comme le fit, en son temps, son beau-frère, Maurice Bardèche.

Et puis, voyons aussi les choses autrement, en attendant la trêve des confiseurs, la rareté des livres de Brasillach sur les étagères des libraires, c'est la rareté de l'or.

Une question demeure, essentielle : Pourquoi Comme le temps passe peut changer la vie? Pas la vie en général, mais votre vie à vous, irradiée que vous êtes par sa lecture.

A mon avis, cette question ne peut avoir de réponse qu'intérieure. Lire Comme le temps passe, c'est s'exposer à une fréquence narrative qui fait entendre les chuchotements de l'enfance. C'est comme porter à son oreille un coquillage tout résonnant des bruits de la mer, les vagues de la baie d’Alcudia.

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Tout se passe en effet comme si le lecteur qui regarde le monde par les yeux de René et/ou de Florence (les personnages principaux du roman) accédait au double regard platonicien. Il perçoit alors, pour reprendre les termes de Luc-Olivier d'Algange, "le matin profond de sa mémoire". Sans le savoir, il se relie à une "cadena aurea", une chaîne d'or fréquentielle des chercheurs d'âme. Oui, Comme le temps passe parle de l'âme et parle à l'âme. Et c'est là l'essentiel.

En un mot, Comme le temps passe, c'est l'oeuvre de la "réminiscence" des choses qui ne passent pas. Comment ce miracle est-il possible ?

Sans prétendre là encore à une réponse exhaustive, je commencerais par évoquer une expérience personnelle (et donc aussi potentiellement transpersonnelle). Il m'arrive d'ouvrir Comme le temps passe comme on consulte un oracle, avec de belles et surprenantes rencontres à la clé, non seulement avec les personnages du roman, Florence, René et la majestueuse tante Espérance, mais aussi avec des personnes bien réelles. Anne Brassié, la biographe de Robert Brasillach que je rencontrais alors que je tenais le livre à la main - rencontres qui laissent à penser qu'elles sont aussi des rencontres d'âmes.

Il arrive aussi que les pierres d'attente de ce livre, les roches narratives que la lecture rend soudain phosphorantes, éclairent les voies anciennes de mon enfance. Hölderlin a tout dit lorsqu'il a dit : "L'homme est un dieu lorsqu'il rêve et un mendiant lorsqu'il réfléchit". Ces rêves-là ne s'écrivent non pas au passé mais au présent, le présent de la "réminiscence". J'ai notamment revu, en lisant Brasillach, la crique de nos vacances, entre Sète et Agde.

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La chienne Nita s'amuse avec les vagues, tandis que le tuba de plongée de mon père sillonne l'onde comme la nageoire d'un requin. Ma mère, qui ne sait pas nager, me surveille de loin. Partout, le bleu immense de la mer.

J'étais un enfant rêveur, dans le brouillon de ses 9 ou 10 ans. Dans l'immeuble encore brut de décoffrage de nos vacances (celui des ouvriers et des classes moyennes de l'époque), il y avait cette fille de l'étage du dessus qui se penchait à la fenêtre. Brune comme le soir. Je crois qu'elle était Espagnole mais je n'en suis pas certain. Elle me regardait, je la regardais ; c'était ma Florence à moi.

Pour elle, je ramassais de jolis coquillages.

Comme Hernie dans Summer of 42 (le superbe film de Robert Mulligan), j'espérais tant la revoir l'été suivant. Mais l'été suivant, je ne la revis point. Je ne l'ai cependant pas oubliée. Elle est, comme l'écrit si joliment Brasillach à l'endroit de la Tante Espérance, "remontée de la banalité courante à un empyrée de mythologie". Comme le temps passe, la magie de l'enfance et le "halo autour des choses".

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In everyone's life there is a summer 42 dit le trealer du film de Mulligan. "Dans la vie de chacun, il y a en effet en chacun un amour d'été", réitération du paradis perdu qui est au fond de tous les peuples.  Le livre de Brasillach réveille cette mémoire endormie, ce temps où nous sommes nés à l'amour, cette rencontre d'été qui dort en nous comme une Belle au bois dormant et le paradis perdu d'Adam et Eve qui vit en chaque peuple. L'un conduit à l'autre ; l'autre conduit à l'un.

Le livre de Brasillach, c'est cette boite à souvenirs qui, une fois ouverte, dégage le "halo" mystérieux de la nostalgie. Ce halo mystérieux - que refuse obstinément notre époque - est pourtant essentiel à la vie véritable.

C'est ce halo qui fait que certains événements de la banalité courante rentrent dans notre "mythologie personnelle". Une vie sans "halo autour des choses" est une vie sans caisse de résonnance, réduite à une équation libérale, à un contrat à durée déterminée, à bilan de santé.

Autrement dit, l'équation, c'est le mythe moins la magie de la vie, moins l'inattendu, moins l'espérance ; c'est l'avènement de l'enfant de la mère inutilement né" (Aragon). Nous y sommes.

Ce halo enchanteur, c'est aussi le seul antidote véritablement efficace contre l'utilitarisme, "cette idée toxique, que l'économie pourrait résoudre l'essentiel de nos problèmes" (Alain de Benoist).

Avec le recul, on se rend compte que le procès de Brasillach, c'est aussi le procès de ce halo autour des choses, le procès de la "collaboration" avec l'enfance, avec la poésie de la vie.

Tuer un poète, ce n'est pas très difficile et cela rend possible toutes les lâchetés et les renoncements à venir. Cela rend possible la surexploitation des sols, les surdoses de sulfate et les poulets aux hormones. Il fallait tuer Brasillach pour que les multinationales remportent définitivement la guerre et pour que les peuples la perdent.

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La "mythologie personnelle" décrite dans Comme le temps passe, cela veut dire se remettre à l'écoute de la vie et de son récit.

Comme le temps passe est en effet le contraire même de "ces romans réalistes sans rivage" que fustigeait justement Aragon. Roman énigmatique ou autre chose qu'un roman, telle est la question ? Pour moi, on peut mettre Comme le temps passe dans le genre du roman comme on peut chausser un soulier d'une demi-pointure qui n'est pas la sienne. C'est possible mais pas très confortable.

Connaissez-vous beaucoup de romans avec pour incipit "Au commencement, il y eut le paradis terrestre" ? Avec Adam et Eve qui parlent dans la préface ? Un roman dont les lumineux accidents narratifs invitent à découvrir sa "mythologie personnelle" ? Moi, je n'en connais qu'un et c'est Comme le temps passe.

Dès la première ligne, le lecteur est en effet prévenu : les pages qui suivent relatent une histoire avec des personnages personnifiés à minima (on ne connaît que leurs prénoms) et une trame narrative qui conduisent moins à "définir" une "histoire" romanesque qu'à "infinir" sa propre vie.

"Infinir sa propre vie", en explorer les couches, les ciels, en percer l'intime secret, rien que cela ! En d'autres termes, ce roman vise à nous faire entendre notre "légende narrative", le récit, voire le récital, qui nous précède et dont chacun est tributaire, sans que nous en soyons conscients. Et cette découverte est aussi essentielle à la vie que l'oxygène que nous respirons.

Je parle avec le coeur, sans faux semblants, sans le recours à ce métalangage universitaire, ronronnant et velléitaire. Même si cette liberté de ton a un prix, même si elle me coûte peut être les fatwas des spécialistes aigris et des maîtres censeurs. Mais qu'importe ! Je persiste et signe : j'affirme que Comme le temps passe n'est pas à proprement parler un "roman".

Si Comme le temps passe, oeuvre hiéroglyphique de l'enfance, est "autre chose" qu'un roman, alors qu'est-il exactement ?

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Il y a tout d'abord un ton onirique général qui entoure le texte. Tel Ulysse conduit par les Phéaciens, le lecteur se retrouve sur Ithaque, un beau matin. Comme le temps passe nous conduit sur les rivages de notre enfance rêvée et de nos premiers amours. Bien qu'onirique, le décor du roman est ancré (et encré) par un espace circonstancié et non dans les brumes surréalistes. La côte catalane, les îles Baléares sont tout-à-fait repérables sur une carte.

Même si le texte de Brasillach nous entraîne dans une vision onirique, elle est celle des rêves éveillés et éveilleurs qui prolongent le réel et non des sommeils insondables.

Nous apprenons par exemple que le métier de René est vendeur d'automobiles, activité on ne peut plus concrète. Nous apprenons que les parents de René et de Florence ont disparu dans un accident ferroviaire. Cela aussi, voyez-vous, c'est concret comme une pierre.

D'autres accidents narratifs émaillent le récit. Par exemple, cette scène cocasse où la vieille auto de René tombe en panne, digne d'une scène à la Louis de Funès (On peut aisément imaginer le "coup de la panne" !).  La scène de l'auto rappelle à Florence (qui se trouve dans l'auto au côté de René) une scène heureuse de son enfance. Florence se revoit en effet en compagnie de son ânesse qui s'arrête soudainement. Impossible de repartir même en tirant sur l'attelage de l'animal entêté ! D'apparence anecdotique, cette scène (qui ne dure qu'un court paragraphe) est pour moi hautement significative.

Les traces du conte dans le roman brasillacien, les animaux dont il ne manque que la parole.

Nous savons depuis les travaux des anthropologues du monde animal, que le traitement infligé aux animaux par une société, métaphorise le degré d'humanité de cette société. Un baromètre qui indique presque objectivement ce qu'une société cache.

Essayons de relire cette scène de l'ânesse à l'aune de cet axiome. Le templum augural de cette scène, elle nous dit quoi ?  Elle nous révèle quoi de l'univers de Brasillach ? L'auteur fait de cette ânesse un "personnage mythologique". L'auteur nous précise ensuite qu'elle marche au rythme du "pas ecclésiastique", signe de la tradition chrétienne dans laquelle s'inscrit Brasillach. L'auteur campe avec cette ânesse un personnage à part entière dont il ne manque, au fond, que la parole.

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Les animaux, dans les romans, jouent aussi leur rôle. Mais ils en sont rarement les acteurs centraux. Le roman moderne met en scène des personnages, réels ou imaginaires.

Il en va tout autrement de ces contes de Grimm qui firent la joie de ma jeunesse. Ces derniers mettent en scène des animaux qui parlent "pour de vrai". Dans les contes, les grenouilles parlent aux princes ; les oiseaux élisent leur roi et racontent des histoires. Dans les contes de fée, les animaux ont la parole.

Avec ses animaux "mythiques" mais qui ne parlent pas, Comme le temps passe est donc à la fois "plus" qu'un roman, mais "moins" qu'un conte. Il serait en effet excessif de qualifier ce texte de conte de fée. Une seule fois, l'auteur précise qu'"il y eut un temps où les animaux parlaient". La rupture avec le conte est donc assumée. Le premier chapitre du "roman" décrit trois ou quatre poules ("dont l'une vécut très vieille et boitait"), une demi-douzaine de chats, un chien et un flamant rose "qui lui aussi fait partie de la mythologie personnelle" des enfants. Une maison, un jardin, des jeux qui trainent sur le sol et un jardin, un jardin surtout "où il semblait que toute l'existence devait s'écouler". On apprend aussi que les animaux de cette arche "suivent les enfants" lorsqu'ils empruntent le chemin menant à la mer.

Chez Brasillach, les animaux suivent les enfants, les rois du jardin. Dans le conte de fée, c'est généralement le contraire. Les animaux sont à la fois des messagers mais aussi des acteurs, des "personae" au sens grec du terme (per sonna, "pour le son") à part entière. Brasillach précise qu'"un jour les animaux parlaient" ce qui indique qu'ils ne parlent désormais plus. L'aigrette fait cependant partie de la "mythologique personnelle" des enfants, comme l'ânesse de Florence, mais ils ne parlent cependant pas à la première personne comme dans les contes de fée.

Bref, il ne manque aux animaux de Brasillach que la parole pour faire de Comme le temps passe un conte à part entière.

L'ânesse est un animal bourru ! Elle supporte mal l'attelage que Florence essaie de lui fixer sur le dos. Elle refuse subitement d'avancer, et a même semble-t-il, fait tomber d'un coup de patte le marque-page inséré dans le livre !

Vous rendez-vous compte ! Cela fait trois jours que je recherche en vain le passage de l'ânesse !

Trois jours que l'ânesse se joue de moi ! C'est dire la magie de Comme le temps passe qui est tout autre chose qu'un roman sans rivage, ni roman, ni un conte de fée. Alors qu'est-t-il ?

Il relève peut être d'un genre narratif situé "quelque part" entre le roman et le conte que l'on pourrait dire "le roman mythologique" - en tout cas un espace narratif où l'ânesse de Florence attend le lecteur pour une promenade à travers les mots...

Frédéric Andreu-Véricel

Contact : fredericandreu@yahoo.fr

dimanche, 27 décembre 2020

Eliade et Cioran : l’échange épistolaire sur la fin de l'Europe

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Eliade et Cioran : l’échange épistolaire sur la fin de l'Europe

Par Andrea Scarabelli

Ex : https://blog.ilgiornale.it/scarabelli

Le 22 avril 1986, Mircea Eliade meurt à Chicago. Il avait perdu connaissance deux jours auparavant, abandonné dans sa chaise de lecture : il tenait dans ses mains un livre fraîchement imprimé, contenant un portrait de lui-même, aussi net que sacrément génial. Il s'agissait du livre Exercices d'admiration ; son auteur, Emil Cioran, il l’avait rencontré pour la première fois, de nombreuses années auparavant, autant dires plusieurs vies antérieures, en 1932 de l'autre côté de l'océan. L'"ontologue" Constantin Noica le lui avait présenté. De retour d'une conférence sur Tagore, Eliade était alors l'enfant prodige de la "jeune génération" qui s'était surtout rassemblée autour du "Socrate roumain" Nae Ionescu, chef spirituel d'un groupe d'intellectuels nés à l'aube du XXe siècle, dont beaucoup se sont ensuite répandus à travers l'Europe et le monde dans ce qui fut l'une des dernières diasporas modernes. L'une des plus fécondes, comme l'a souligné Adolfo Morganti il y a quelques années dans le numéro d'Antarès consacré à ce sujet. Elle a dispersé dans le monde entier des génies absolus tels que Cioran et Eliade mais aussi, notamment, Ioan Petru Culianu et Paul Celan, sans oublier Eugène Ionesco, Camilian Demetrescu et Vintilă Horia (selon qui, comme l'indique le titre de l'une de ses œuvres les plus célèbres, même Dieu est né en exil).

41V8pVT+FQL._SX308_BO1,204,203,200_.jpgEntre les deux hommes, presque des contemporains, séparés par seulement quatre ans de vie, est née une amitié qui - entre les hauts et les bas de l’existence, comme cela arrive souvent aux hommes dotés de caractère et de profondeur spirituelle - a duré jusqu'à la fin des jours d'Eliade (Cioran le suivra en 1995). Un monument littéraire à cette relation de longue durée entre deux géants de l’esprit est Una segreta complicità  (Adelphi), la première édition mondiale de la correspondance entre les deux exilés roumains, d'où émerge une incroyable complémentarité, mêlée d'antagonisme, souvent non exempte de virulente controverse, comme le rappellent les deux éditeurs, Massimo Carloni et Horia Corneliu Cicortaş, mais toujours sous la bannière d’une entente secrète que Cioran a témoigné à Eliade le jour de Noël 1935 :

"Bien que j'éprouve une sympathie infinie pour vous, je ressens parfois le désir de vous attaquer, sans argument, sans preuve, et sans idées. Chaque fois que j'ai eu l'occasion d'écrire quelque chose contre vous, mon affection s'est accrue. Envers tous les gens que j'aime, j'ai un sentiment si complexe, chaotique et ambigu, que le simple fait d'y penser me donne le vertige. Je suis peut-être le seul, parmi les amis que vous avez, à comprendre vos accès de colère, votre désir de supprimer la continuité de la vie".

C'est, après tout, l'expression vivante d'un personnage titanesque, qui survit non seulement dans la lutte, mais peut-être précisément grâce à la lutte, l'incarnation d'une vision tragique du cosmos, mais en même temps une force vitaliste et foudroyante (ceux qui croient que le sentiment tragique implique une conception sombre et pessimiste de l'existence devraient lire quelque passagers de l’oeuvre de Nietzsche).

Mais l'intérêt de cette correspondance n'est pas seulement biographique. En plus d'enregistrer les étapes et les bifurcations de deux vies exemplaires et paradigmatiques, la succession des lettres - surtout les toutes premières, plus intéressantes de ce point de vue - rend compte directement d'une civilisation à l'agonie, étouffée par la pression des événements, un kaléidoscope des tragédies du XXe siècle, un sinistre prélude à la catastrophe finale, qui retirera à jamais l'Ancien Monde de la liste des acteurs de l'Histoire du Monde. Eliade écrivit à Cioran ce qui suit en novembre 1935, depuis Bucarest:

"Ces dernières semaines, je n'ai fait que penser à la fin apocalyptique de notre époque. J'ai la conviction que tout va s'arrêter très bientôt, peut-être même dans trente, quarante ans ; l'art, la culture, la philosophie - tout ira en enfer. Tout ce qui concerne notre époque (Kali-yuga) va s'effondrer de manière apocalyptique. L'Europe est en train de craquer - de stupidité, d'orgueil, de luciférisme, de confusion. J'espère que la Roumanie n'appartient plus à ce continent qui a découvert les sciences profanes, la philosophie et l'égalité sociale".

Ceux qui naguère auraient défini ces mots comme des "prophéties noires" n'ont qu'à considérer l'état "culturel" actuel de notre civilisation. En comparaison, ces perspectives ne sont peut-être que trop édifiantes.

17928284.jpgDe même, la différence entre deux visions du monde opposées concernant l'Est et l'Ouest apparaît chez les deux hommes, Cioran cherchant pour ainsi dire à trouver un Est dans l'Ouest, et Eliade étant poussé à aller dans la direction opposée, sans toutefois se laisser aller à l'exotisme facile, tant à la mode à l’époque que maintenant. Il écrit à Cioran le 23 avril 1941 depuis Lisbonne, où il séjourne en tant qu'attaché de presse à la légation roumaine (le magnifique Journal portugais, publié en italien par Jaca Book, témoigne de son séjour en terres lusitaniennes) : "Vivant face à l'Atlantique, je me sens de plus en plus attiré par des géographies qui m'étaient autrefois insignifiantes. J'essaie de trouver mon salut en dehors de l'Europe. Vasco de Gama est toujours arrivé en Inde".

D'ailleurs, avant que son imagination ne revienne des rives ensoleillées de la Lusitanie, l'historien des religions avait été physiquement en Inde une décennie plus tôt. De 1928 à 1931, pour être précis, avant d'être diplômé en 1933 de l'université de Bucarest. Il avait retravaillé et élargi sa thèse de doctorat (dont la version originale a été récemment publiée par les Edizioni Mediterranee, éditée par Cicortaş) pour en faire le volume Yoga. Essai sur les origines du mysticisme indien, publié en 1936 et rapidement envoyé à Cioran, qui le commente comme suit : "En lisant votre Yoga, j'ai réalisé à quel point je suis européen. À chaque étape, j'ai comparé Nietzsche avec lui. Je me sens plus proche des derniers bolcheviks ou derniers hitlériens que de la technique de la méditation. Vos raisons de revenir d'Inde me lient à une vision politique de l'univers".

9782070328444_1_75.jpgLeur relation épistolaire et humaine survivra à cette Europe dont ils avaient tous deux rédigé le rapport d’autopsie, vivant en ses derniers moments comme l’on vit la fin d'une saison, avec cette amère conscience qui transparaît d'une note du Journal portugais d'Eliade datant de novembre 1942 (un an après la lettre précitée) et écrite dans la ville espagnole d'Aranjuez avec ses mille palais et jardins caressés par le Tage : "Le palais rose. Les magnolias. A côté du palais, des groupes de statues en marbre. Vous pouvez entendre le bruit des eaux du Tage qui se déversent dans la cascade. Une promenade dans le parc du palais : de nombreuses feuilles sur le sol. L'automne est arrivé. Les rossignols. Le minuscule labyrinthe d'arbustes. Des bancs, des ronds-points. Nous sommes les derniers". J'aime à penser que dans cette lointaine année 1942, dans l'œil de la tempête, Eliade parlait implicitement de lui et de son vieil ami, à des centaines de kilomètres de là, mais partageant avec lui un destin bien plus élevé, que même la tragédie européenne qui a suivi n'a pas pu écraser.

A partir de 1945, pendant onze ans, ils vivent tous deux à Paris, puis Eliade s'installe aux Etats-Unis, où il reste jusqu'à la fin de ses jours, rencontrant Cioran en France pendant les vacances d'été. Ces "deux Roumains de la ‘jeune génération’, jetés par le destin en Occident" ne cesseront jamais de s'écrire, avec leur patrie tourmentée désormais loin derrière eux, dans une relation destinée à dépasser ce Minuit de l'Histoire qu'était le XXe siècle ("Tout est religieux, puisque l'histoire ne l'est pas" écrivait Cioran à Eliade en 1935, faisant inconsciemment écho au concept de terreur de l'histoire qu'Eliade développerait dans ses écrits, l'idée qu'en dehors de la sphère du sacré, l'histoire s'épuise dans un ensemble d'abattoirs).

Leur relation n'a cessé de se poursuivre, au-delà de l'histoire, au-delà de la douleur: en découvrant le portrait dessiné par son ami, il semble qu'Eliade, juste avant de fermer les yeux et de ne plus jamais les ouvrir, ait souri.

Laurence Debray: Souvenirs d’une jeune fille bien rangée

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Laurence Debray: Souvenirs d’une jeune fille bien rangée

par Georges FELTIN-TRACOL

Ex: http://www.europemaxima.com

Livre-Debray.jpgIl n’y a pas de grand homme pour son valet de chambre. Il n’y a pas non plus de grand penseur pour sa fille aînée. Avec Fille de révolutionnaires, la journaliste macronienne Laurence Debray a ravi tous les détracteurs de son père, Régis Debray. La photographie du bandeau de la couverture attire déjà l’attention. On la voit presque au garde-à-vous devant une porte tenant un fusil. À l’âge de dix ans, elle séjourne en juillet dans un camp des Jeunesses communistes à Cuba où elle apprend entre autres à manipuler des armes. Un mois plus tard, elle participe à un camp de jeunes aux États-Unis. En accord avec sa mère d’origine vénézuélienne, Elizabeth Burgos, son père veut qu’elle prenne enfin partie. À Cuba, la jeune fille découvre que chaque matin commence par la cérémonie des couleurs cubaines et des autres nationalités présentes. Elle observe que « si le communisme prêche l’égalité, un bon communiste est meilleur que les autres et doit sans cesse le prouver (p. 246) ». Entre le modèle castriste et l’exemple yankee, elle choisit finalement « la vieille Europe, assez modérée et confortable : on y mange bien, lit bien, dort bien (p. 253) ».

Adulte, après une scolarité franco-espagnole ponctuée de nombreuses fugues, Laurence Debray travaille deux années dans une banque à New York avant de se reconvertir dans le journalisme et d’écrire une biographie sur son héros qui a dû dernièrement bien la décevoir, le félon royal Juan-Carlos. Épouse d’Émile Servan-Schreiber, fils de Jean-Jacques, elle côtoie depuis l’enfance tout le petit monde germano-pratin de la gauche bien-pensante. Elle a discuté avec Danièle Mitterrand et Lucie Aubrac. Elle a aussi bénéficié de cours particuliers de la part du couple Blandine Kriegel – Alexandre Adler. Certains traumatismes ne guérissent jamais. L’auteur ne cache pourtant pas son admiration pour sa grand-mère paternelle, Janine Alexandre – Debray, conseillère de Paris et éphémère sénatrice gaulliste de la capitale. Elle signale que sa famille est apparentée aux Ritzen. Elle aurait pû rappeler que l’oncle de son père était Pierre Debray-Ritzen, ce médecin proche de la Nouvelle Droite hostile à la psychanalyse.

770f0d966f0540bae7baf410856bfce1.jpgElle dépeint des parents entièrement préoccupés par la politique au point qu’ils ne s’en occupent guère. Ses jeunes années sont surtout marquées par l’incessante traque parentale de Klaus Barbie dont le procès télévisé va marquer le début de l’ère de l’hypermnésie victimaire. Elle insiste en outre longuement sur les années de son père passées à La Havane aux côtés de Fidel Castro et du Che ainsi que sur sa période de guérillero en Bolivie et sur les conditions éprouvantes de détention. Ambassadeur de France à La Paz, l’ancienne barbouze en chef anti-OAS, Dominique Ponchardier, aidera beaucoup le détenu et ses parents.

Au cours de sa détention, Régis Debray écrit une lettre restée confidentielle au Général de Gaulle. Sa fille relève que « certains déclarent aujourd’hui que le gaullisme paternel lui est venu sur le tard, après son désenchantement mitterrandien. Ils ne savaient pas que mon père avait collé sur un mur de sa cellule la couverture d’un Paris Match montrant le général en uniforme (p. 120) ». Ainsi À demain de Gaulle (1990) révèle-t-il une inclination plus ancienne, déjà perceptible dans La puissance et les rêves (1984) et Les Empires contre l’Europe (1985).

Laurence Debray pose un regard désabusé sur son adolescence. Du manque d’implication de ses parents dans son éducation et des oppositions vives qui en découlent, elle reconnaît volontiers : « Je compris plus tard que j’habitais plus une langue qu’un pays. Je n’ai plaisir qu’à lire et écrire en français; l’espagnol et l’anglais resteront des langues utilitaires et fonctionnelles. J’ai une patrie littéraire qui me tient bien de patrie tangible. Elle est très pratique, on peut l’emmener partout avec soi (p. 244). » Quand le nomadisme adopte un Ersatz d’enracinement…

Fille de révolutionnaires traduit bien l’introspection d’une pauvre petite fille des beaux quartiers de Paris, aujourd’hui mère de famille, nostalgique d’une confrontation toujours reportée avec l’autorité parentale. Les effets sociétaux de Mai 68 nuisent à tous, y compris et surtout à la progéniture des révolutionnaires de gauche.

Georges Feltin-Tracol

• Laurence Debray, Fille de révolutionnaires, Stock, 2017, 312 p., 20 €.

Le livre est désormais disponible en version "poche":

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vendredi, 25 décembre 2020

Réflexions sur la Vingt-Cinquième heure de Virgil Gheorgiu à l'heure du Covid et du confinement

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Réflexions sur la Vingt-Cinquième heure de Virgil Gheorgiu à l'heure du Covid et du confinement

par Nicolas Bonnal

Ex: https://nicolasbonnal.wordpress.com

La vingt-cinquième heure ? C’est selon Virgil Gheorgiu : « Le moment où toute tentative de sauvetage devient inutile. Même la venue d’un messie ne résoudrait rien. »

10364170._SX318_.jpgNous y sommes car nous avons devant nous une conspiration avec des moyens techniques et financiers formidables, une conspiration formée exclusivement de victimes et de bourreaux volontaires. On a vu les bras croisés le cauchemar s’asseoir depuis la mondialisation des années 90 et la lutte contre le terrorisme, puis progresser cette année à une vitesse prodigieuse, cauchemar que rien n’interrompt en cette Noël de pleine apostasie catholique romaine. La dégoutante involution du Vatican s’est faite dans la totale indifférence du troupeau de nos bourgeois cathos, et on comprend ce qui pouvait motiver Drumont, Bloy ou Bernanos contre une telle engeance de bien-pensants. Un pour cent ou un pour mille de résistants ? Le reste s’est assis masqué et a applaudi.

La situation est pire que sous le nazisme ou le communisme, car à cette époque elle était localisée. Il y a des Thomas Mann, il y a des Soljenitsyne pour témoigner, pour tonner contre, comme dit Flaubert. Là, la situation techno-nazie de Schwab et consorts est et sera globale. La crise du virus a déclenché une solution totalitaire planétaire et des expédients ubiquitaires et démentiels. Certes c’est surtout l’occident la cible, et cette vieille race blanche toujours plus gâteuse, que je mettais en garde il y a  dix (Lettre ouverte) ou trente ans (La Nuit du lemming). Mais c’est le propre des Cassandre de n’être jamais crus ou des Laocoon d’être étouffés par les serpents. Lisez dans Virgile l’entrée du cheval dans la cité de Troie pour comprendre. Après la mort de Laocoon le peuple troyen enjoué abat les murs et laisse entrer la machine pleine de guerriers. Allez, un peu de latin :

Diuidimus muros et moenia pandimus urbis.

005705267.jpgNous sommes donc à la veille d’une gigantesque extermination et d’un total arraisonnement. Et tout cela se passe facilement et posément, devant les yeux des victimes consentantes ou indifférentes que nous sommes. Nous payons ici l’addition de la technique et de notre soumission. De Chateaubriand à Heidegger elle a été rappelée par tous les penseurs (voyez ici mes chroniques). C’est cette dépendance monotone qui nous rend incapables de nous défendre contre les jobards de l’économie et de l’administration qui aujourd’hui veulent faire de leur troupeau humain le bifteck de Soleil vert ou les esclaves en laisse électronique. Et le troupeau est volontaire, enthousiaste comme disait Céline avant juin 40.

Chateaubriand dans ses Mémoires :

« Au milieu de cela, remarquez une contradiction phénoménale : l’état matériel s’améliore, le progrès intellectuel s’accroît, et les nations au lieu de profiter s’amoindrissent : d’où vient cette contradiction ?

C’est que nous avons perdu dans l’ordre moral. En tout temps il y a eu des crimes ; mais ils n’étaient point commis de sang−froid, comme ils le sont de nos jours, en raison de la perte du sentiment religieux. A cette heure ils ne révoltent plus, ils paraissent une conséquence de la marche du temps ; si on les jugeait autrefois d’une manière différente, c’est qu’on n’était pas encore, ainsi qu’on l’ose affirmer, assez avancé dans la connaissance de l’homme ; on les analyse actuellement ; on les éprouve au creuset, afin de voir ce qu’on peut en tirer d’utile, comme la chimie trouve des ingrédients dans les voiries. »

9782266002622-fr.jpgVoilà pourquoi les parlements et les administrations ne seront arrêtés par rien. Et le troupeau renâclera peut-être trois minutes mais il se soumettra comme les autres fois sauf qu’ici ce sera global et simultané. Quant aux minorités rebelles (1% tout au plus) le moins que l’on puisse dire c’est qu’elles ne sont pas très agissantes…

Dans la vingt-cinquième heure Virgil Gheorghiu dénonce avec son personnage Trajan notre déchéance liée au progrès, au confort, à la technique, à la bureaucratie, ce qu’on voudra. Et cela donne :

« Nous apprenons les lois et la manière de parler de nos esclaves pour mieux les diriger. Et ainsi, peu à peu, sans même nous rendre compte, nous renonçons à nos qualités humaines, à nos lois propres. Nous nous déshumanisons, nous adoptons le style de vie de nos esclaves techniques… »

Cela explique pourquoi l’homme moderne fils des droits constitués et pas gagnés se laisse liquider partout si commodément.

« L’homme moderne sait que lui-même et ses semblables sont des éléments qu’on peut remplacer. »

Celui qui ne veut pas de leur ordre nouveau sera liquidé ou marginalisé (pas de restau, de magasin, de transport, d’eau, d’électricité). Georghiu, futur prêtre orthodoxe, le dit :

« Ceux qui ne respectent pas les lois de la machine, promue au rang des lois sociales, sont punis. L’être humain qui vit en minorité devient, le temps aidant, une minorité prolétaire. »

L’humain déshumanisé, Gheorghiu l’appelle le citoyen technique :

« Les esclaves techniques gagneront la guerre. Ils s’émanciperont et viendront les citoyens techniques de notre société. Et nous, les êtres humains, nous deviendrons les prolétaires d’une société organisée selon les besoins et la culture de la majorité des citoyens, c’est-à-dire des citoyens techniques. »

unnamedqsjvg.jpgEt comme Chateaubriand Gheorghiu rappelle :

« Dans la société contemporaine, le sacrifice humain n’est même plus digne d’être mentionné. Il est banal. Et la vie humaine n’a de valeur qu’en tant que source d’énergie. »

Et de conclure moins lugubre que visionnaire :

« Nous périrons donc enchaînés par les esclaves techniques. Mon roman sera le livre de cet épilogue… Il s’appellera la vingt-cinquième heure. Le moment où toute tentative de sauvetage devient inutile. Même la venue d’un messie ne résoudrait rien. Ce n’est pas la dernière heure : c’est une heure après la dernière heure. Le temps précis de la société occidentale. C’est l’heure actuelle, l’heure exacte. »

Je dis moins lugubre que visionnaire car il est temps de voir et de dire que tout cela est au final scientifique et juste, comme disait l’orthodoxe Vladimir Volkoff. Volkoff disait que le bolchévique c’est celui qui en veut plus, idéaliste, progressiste, banquier central, militaire ou agent secret ou même journaliste. Le troupeau c’est celui qui n’y croit pas ou ricane et de toute manière  se soumet. C’est celui qui en veut moins. C’est le troupeau des troyens euphoriques.

PS. Gheorgiu écrit aussi : Pour finir les hommes ne pourront plus vivre en société en gardant leurs caractères humains. Ils seront considérés comme égaux, uniformes et traités suivant les mêmes lois applicables aux esclaves techniques, sans concession possible à leur nature humaine. Il y aura des arrestations automatiques, des condamnations automatiques, des distractions automatiques, des exécutions automatiques. L’individu n’aura plus droit à l’existence, sera traité comme un piston ou une pièce de machine, et il deviendra la risée de tout le monde s’il veut mener une existence individuelle. Avez-vous jamais vu un piston mener une vie individuelle ? Cette révolution s’effectuera sur toute la surface du globe. Nous ne pourrons nous cacher ni dans les forêts, ni dans les îles. Nulle part.

Virgil Gheorghiu – La vingt-cinquième heure

https://chroniquesdepereslavl.blogspot.com/2020/12/guerre-contre-lhomme.html

mardi, 22 décembre 2020

Les amoureux de la fin du monde : le mouvement chrétien sioniste

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Les amoureux de la fin du monde : le mouvement chrétien sioniste

Introduction au livre « Les amoureux de la fin du monde ». Sur le mouvement chrétien sioniste

par Francisco José Fernàndez-Cruz Sequera

"Je bénirai ceux qui te béniront, et je maudirai ceux qui te maudiront ; et en toi seront bénies toutes les familles de la terre ».

Genèse 12:3.

Une croyance, c’est un modèle mentalement produit au départ d'un fait, réel ou imaginaire, qui cherche simultanément à satisfaire un désir, parfois perçu comme un besoin par l'individu, modèle pour lequel une explication rationnelle est inconnue ou inacceptable. Les individus qui partagent une croyance ou un modèle idéal, rendent bien compte de cette définition. Cela donne lieu à la naissance de dogmes, posés comme s'il s'agissait de faits réels. Ces dogmes élaborent des normes morales conséquentes, nécessaires pour les maintenir dans la durée.

Cette croyance irrationnelle donne lieu à l'apparition de formes de pensée que nous appelons « pensée magique » et « pensée religieuse », qui se situent au même niveau en ce qui concerne leur vérification empirique. La magie [1] et la religion [2] sont des modi operandi d’une pensée, qui se connecte à un type de connaissance sans fondement rationnel, en prétendant que la pensée religieuse a son origine dans une connaissance révélée par une divinité. Par conséquent, ce type de pensée place son origine dans un mystère, compris comme englobant toute réalité qui dépasse les possibilités humaines de leur compréhension. Julio Caro Baroja[3] a déclaré que la religion et la magie dans le monde ancien faisaient partie d'un seul et même système, dans lequel les rites religieux étaient souvent liés à des actes magiques, et que chaque groupe de croyances religieuses avait sa propre magie particulière. Cela étant, on peut affirmer que la pensée magique consiste en un mode de pensée et de raisonnement qui conduit à tirer des conclusions ou des idées basées sur des hypothèses non justifiées empiriquement, souvent de nature surnaturelle, en attribuant une relation de cause à effet, soit un lien logique de cause à effet, entre elles, pour expliquer un phénomène extérieur à la personne elle-même.

La pensée magique est une forme de raisonnement, dans laquelle la logique déductive rationnelle est utilisée pour expliquer une réalité extérieure, pour expliquer le fonctionnement de celle-ci, sans aucun support empirique. Comme on dirait vulgairement, c'est "tricher dans la solitude"... pour toujours gagner. Ainsi, la pensée magique projette les propriétés de son expérience psychologique sur une réalité biologique ou inerte, avec un but ou une intention prédéterminée. Elle consiste à croire que les pensées personnelles en soi peuvent avoir des effets sur la réalité en dehors de la personne ou du groupe, ou que penser à quelque chose équivaut à le faire. Il s'agit donc d'un type de raisonnement causal qui cherche des coïncidences entre des actes et des événements, ce qui génère la croyance erronée que ses propres pensées, paroles ou actions vont causer ou éviter un fait concret, d'une manière qui défie les lois naturelles de cause à effet communément acceptées par la logique et la science. S'inscrit également dans la pensée magique, le transfert de concepts issus de l'observation biologique, sur la manière dont fonctionnerait la nature inanimée. La conséquence de ce qui précède est que le sujet ou le groupe social dans lequel il est intégré, attribue des relations causales entre des actions et des événements qui ne sont pas rationnellement liés entre eux, ou dont le lien de causalité logique n'est pas empiriquement démontrable, et que le consensus scientifique n'accepte pas comme valables.

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Cette façon de penser est prédominante en matière de religion, de religiosité populaire et de superstition, car dans ces formes de pensée, on part d'un présupposé qui met en relation les rituels religieux, les prières, les sacrifices ou l'observance d'un tabou ou les croyances non critiques dans les dogmes, avec certaines attentes de sanction, de bénéfice et de récompense dans la réalité matérielle actuelle, ou dans une hypothétique réalité future ou parallèle de caractère surnaturel. En psychologie clinique, elle peut amener un patient à éprouver la peur d'accomplir ou de s'abstenir d'accomplir certains actes, ou d'héberger certaines pensées, en raison de sa croyance dans la corrélation entre ce comportement et son résultat souvent désastreux pour lui-même.

A tout moment et en tout lieu, la pensée magique a pris une forme religieuse pour tenter d'expliquer, par son eschatologie, l'origine et la fin du monde. Il y a toujours eu des groupes religieux qui, à partir d'une croyance irrationnelle, ont fixé la date, le jour et l'heure de la fin du monde ou de la « fin des temps » ; mais, au moins jusqu'au moment d'écrire ces lignes, celle qui annonçait la fin des temps ou du monde, n'est pas arrivée.

Les chrétiens n'ont pas été étrangers à cette vision magique de l'existence, héritée dans leur cas des juifs dont sont issues leurs croyances. Dans le judaïsme, les différentes écoles rabbiniques associées à des traditions différentes, associent l'arrivée d'un "sauveur" du peuple "choisi" par leur Dieu, le Messie, comme un signe eschatologique, qu'elles attendent depuis des milliers d'années comme un événement historique, variant notamment de l'une à l'autre, sans préjudice du fait que toutes partagent leur origine dans les prophéties du Tanakh, ou canon hébreu de la Bible, et fondent leur croyance sur des interprétations consolidées dans la littérature rabbinique. Il en va de même pour l'idée de la restauration du Temple de Jérusalem, ou pour celle du retour du peuple d'Israël sur la "Terre promise", qui sont également comprises et interprétées comme des prophéties eschatologiques ou des événements historiques futurs d'occurrence inexorable. Et cette diversité de croyances et d'interprétations ayant le même fondement, s'étend à des questions telles que la résurrection des morts, le jugement final, la création ou le gouvernement divin. Il n'est donc pas surprenant que l'eschatologie chrétienne soit si proche de celle du judaïsme, puisqu'elle se fonde sur les évangiles du premier siècle qui reflètent la tradition juive et sur les enseignements des théologiens ultérieurs basés sur cette tradition.

Les premiers chrétiens attendaient avec impatience la seconde venue du Christ[4], et cette croyance avait sa raison d'être dans les revendications mêmes de Jésus, le rabbin à l'origine du mouvement chrétien. Selon les textes de ses propres disciples, il a annoncé son retour après sa propre mort : "En vérité, je vous le dis, il y en a ici qui ne mourront pas avant d'avoir vu le Fils de l'homme venir dans son royaume" (Mt. 16, 28).

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Mais les chrétiens de l'Église primitive, après les premières décennies sans le retour de celui qu'ils reconnaissaient comme le fils de Dieu, ont réalisé que l'histoire pouvait durer beaucoup plus longtemps qu'ils ne le pensaient initialement, ce qui a amené certains à s'interroger sur l'accomplissement de la prophétie du Nouveau Testament, en disant

"Qu'est-il advenu de la promesse que le Christ viendrait, car depuis la mort de nos ancêtres, tout est resté le même depuis que le monde a été fait ?" (2 Pet. 3:4) [5]

Et l'apôtre Pierre leur répondit : "Frères, n'oubliez pas que pour le Seigneur, un jour est comme mille ans, et mille ans sont comme un jour. (2 Pet. 3:8).

À partir du cinquième siècle, le christianisme a dû faire face à la concurrence d'autres religions ou d'initiatives philosophiques comme le mithraïsme, qui a donné lieu à des pratiques de sortilèges et d'incantations, en plus de l'astrologie ; ou à des doctrines d'un niveau spirituel excentrique comme le néoplatonisme, contre lequel le christianisme, par le biais de la controverse philosophique, s'est battu. L'aspect le plus important de ce débat est peut-être la différenciation ultérieure entre la theurgia, magie cérémonielle, propre à une vision du monde donnée ; et la goeteia, qui en vient à être la "magie inférieure", peut-être associée par la suite à la "magie noire".

Une fois le monde antique détruit par le christianisme, et établi comme seule religion pouvant être professée, déjà au cours du Moyen Age et de la Réforme protestante, la théologie chrétienne a traité des quatre derniers états de l'être humain : la mort, le jugement, l'enfer et la gloire ; qui s'expliquent à partir de l'eschatologie chrétienne, en partant de la prophétie des événements qui sont censés se produire, de la Grande Tribulation, dans laquelle le rôle de l'Antéchrist deviendra prépondérant, à la Parousie, "glorieuse venue" ou seconde venue de Jésus-Christ, puisque la première se serait produite entre l’an 6 av. J.C. et la fin de l'existence de Jésus, coïncidant avec la "fin des temps".

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Sur la base de ces éléments, les croyances chrétiennes divergent dans l'interprétation des textes et des prophéties évangéliques, forgeant leurs propres multiples versions de ce qui doit arriver. Mais ce sur quoi ils s'accordent, c'est qu'il y aura des signes qui précéderont la "fin des temps", bien qu'ils ne soient pas d'accord non plus sur ce que sont exactement ces signes. Mais, en général, prenons comme point de référence ceux annoncés par l'apôtre Paul, qui soulignait qu'après un temps d'attente, et avant la venue du Christ, trois choses devraient se produire :

1) La proclamation de l'Evangile doit atteindre toutes les nations : "Et ce message du Royaume sera prêché dans le monde entier, afin que toutes les nations le connaissent ; et alors viendra la fin" (Mt. 24:14).

2) A la fin de l'histoire, Israël sera réconcilié avec le Christ et sera sauvé : "Une partie d'Israël tiendra  jusqu'à ce que tous les païens soient entrés, alors tout Israël sera sauvé" (Rom. 11:25).

3) Et enfin, "l'apostasie générale", une crise religieuse mondiale dans laquelle l'Antéchrist régnera :

"Ne craignez aucun message spirituel comme si c'était le jour du Seigneur qui est déjà venu. Avant ce jour, la rébellion contre Dieu doit venir en premier, quand l'homme du péché qui sera assis dans le temple de Dieu et sera adoré apparaîtra, il viendra avec une grande puissance et avec des signes mensongers et des miracles. Il utilisera toutes sortes de maux pour tromper" (2 Thess. 2:1-12).

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La seule chose qu'un observateur objectif et impartial sait bien, c'est que si l’adepte d’une religion messianique de ce type n'aime pas une série d'événements ou de prévisions sur ce qui va se passer, il a tellement de possibilités de choisir qu'il trouvera difficilement une "heure de fin" à son goût et à sa mesure. Les avantages de la pensée magique.

Et la vérité est qu'il n'y a pas de mal à croire en ce que l'on veut, ni à se donner, seul ou en groupe, les explications de l'origine et de la fin de ce qui existe. Notre but n'est pas de nier l'existence d'une réalité surnaturelle, qui ne peut être démontrée empiriquement, puisque l'acceptation ou non d'une proposition religieuse ou d’une autre relève de la sphère très personnelle de chaque individu et de chaque communauté humaine. Il s'agit de mettre en évidence la volonté des juifs, des sionistes et des chrétiens sionistes de déduire de leurs croyances particulières un destin politique pour la planète entière, qui serait d'application générale, forcée et violente, imposée au reste de l'espèce humaine et à la planète entière en général. Et c'est ce qui s'est déjà produit avec différentes religions en différents lieux et à différents moments, c'est ce qui se produit aujourd'hui avec le mouvement sioniste chrétien évangélique comme bélier du sionisme et du judaïsme, qui tente de nous conduire à une guerre finale dans laquelle se réalisent les prophéties de son eschatologie biblique millénariste, née bien avant l'arrivée du premier juif en Europe et la contamination de la culture occidentale par la vision juive de l'existence. Un fait qui s'est produit grâce à l'influence de la communauté juive elle-même insérée en Europe, des hérésies chrétiennes du judaïsme et, enfin, du sionisme.

Pour commander l'ouvrage: https://editorialeas.com/producto/los-amantes-del-fin-del-mundo/

Notes :

1] L'art ou la science cachée qu'il est censé produire, par certains actes ou paroles, ou avec l'intervention d'êtres imaginaires, donne des résultats contraires aux lois naturelles.

2] Le culte de l'être humain envers les entités auxquelles sont attribués des pouvoirs surnaturels, à travers lesquels on recherche une connexion avec le divin et le surnaturel, ainsi qu'un certain degré de satisfaction spirituelle par la foi ou la dévotion, afin de surmonter la souffrance et d'atteindre le bonheur.

3] Caro Baroja, Julio. Les sorcières et leur monde. Madrid. Alianza Editorial. 1961. Pages 38 à 49.

4] "Bientôt, très bientôt, viendra celui qui doit venir et ne tardera pas" (Hebr. 10, 37). "Dieu, qui est le juge, est déjà à la porte. "La fin de toutes choses est proche" (1 P. 4, 7). "Oui, venez vite, amen. Viens, Seigneur Jésus" (Apoc. 22:20).

5] La Reina Valera est l'une des traductions espagnoles de la Bible les plus fréquemment utilisées par les protestants hispanophones. L'actuelle Reina Valera est le résultat d'une série de révisions effectuées par les Sociétés bibliques unies sur l'une des premières traductions de la Bible en espagnol: la Bible de l'ours de 1569. Dans un sens plus large, elle inclut les révisions faites par d'autres entités qui se basent sur les textes de la Reina Valera. La traduction du moine espagnol con-verti au protestantisme, Casiodoro de Reina, connue sous le nom de Bible de l'Ours de 1569, a la particularité d'être la première traduction de la Bible à être faite à partir des textes en langue originale ; utilisant le Texte Masorétique pour l'Ancien Testament, et le Textus Receptus pour le Nouveau Testament. Avant la publication de l'œuvre complète de Casiodoro de Reina, les Bibles existantes (ou une partie d'entre elles) en langue espagnole étaient des traductions faites à partir de la Vulgate de Saint Jérôme de Stridon. La Bible de l'ours a été publiée à Bâle, en Suisse, le 28 septembre 1569, et son traducteur était Casiodoro de Reina, un religieux espagnol converti au protestantisme. Elle a été surnommée Reina Valera parce que Cipriano de Valera en a fait la première révision en 1602. La Reina Valera a été largement répandue pendant la Réforme protestante du XVIe siècle. Pendant plus de quatre siècles, elle a été la seule Bible en usage au sein de l'église protestante hispanophone. Aujourd'hui, la Reine Valera, avec plusieurs révisions au fil des ans (1862, 1909, 1960, 1995, 2011), est l'une des Bibles en langue espagnole les plus utilisées par de nombreuses églises chrétiennes issues de la Réforme protestante, y compris les églises évangéliques, ainsi que par d'autres groupes confessionnels chrétiens, tels que l'Église adventiste du septième jour, l'Église de Jésus-Christ des Saints des Derniers Jours, l'Église de Dieu Ministère de Jésus-Christ International, le Gideons International et d'autres chrétiens protestants non confessionnels. Avant la Réforme protestante, la traduction des Saintes Écritures dans les langues vernaculaires était interdite par le décret du Concile de Trente, et les quelques traductions qui existaient devaient prendre comme base textuelle la Vulgate latine, qui était le texte officiel de l'Église catholique. Le travail de Casiodoro de Reina a la particularité d'être la première traduction complète de la Bible en espagnol faite à partir des langues originales, en utilisant, comme mentionné ci-dessus, le texte dit Masorétique pour l'Ancien Testament, et le texte dit Textus Receptus, pour le Nouveau Testament. La Bible préalpine et la Bible alphonsine (premières versions de la Bible complète en espagnol) sont des traductions faites à partir du latin. Avant la publication de la Bible de l'Ours, il n'existait que des versions partielles de la Bible des langues hébraïque et grecque en espagnol, telles que la Bible d'Albe et la Bible de Ferrare (contenant l'Ancien Testament) et les textes de Juan Pérez de Pineda et Francisco de Enzinas (Nouveau Testament). La Bible de Casiodoro de Reina reflète la beauté littéraire de ce qu'on appelle l'âge d'or de la littérature espagnole. Dans Historia de los heterodoxos españoles, le savant catholique Marcelino Menéndez Pelayo fait l'éloge de La Biblia del Oso d'un point de vue littéraire, qu'il considère comme mieux écrite que les versions catholiques de Felipe Scío de San Miguel (1793) et Félix Torres Amat (1825).

lundi, 21 décembre 2020

Boris Nad : préface à son livre The Reawakening of Myth

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Boris Nad : préface à son livre The Reawakening of Myth

(Éditions PRAV, 2020)

https://pravpublishing.com/the-reawakening-of-myth/

indexbnreaw.jpgLe livre qui vous est présenté, The Reawakening of Myth, est la suite de deux ouvrages : The Return of Myth et The Awakening of Myth. Le premier, The Return of Myth, a été publié en Serbie en 2010. Le livre initialement intitulé The Awakening of Myth a été, pour diverses raisons, intitulé par l'éditeur Towards the Post-History of the World et publié à Belgrade en 2013. The Return of Myth était un ouvrage assez volumineux, comptant plus de trois cents pages, composé de plusieurs livres de différents genres littéraires, comprenant aussi un recueil de poésie. Le deuxième livre était une sélection d'essais explorant et abordant divers topoi mythiques. Au risque de se donner un satisfecit, on pourrait dire que, dans ces derniers livres, l'auteur a exploré des domaines très divers : de la géographie et de l'histoire sacrée à l'histoire de l'art, de la géopolitique à la mythologie, de la "théorie hyperboréenne" à la technocratie, de "l'idée du centre" et de la notion que ce centre représente réellement quelque chose qui est maintenant perdu, à l'opposition moderne entre l'Orient et l'Occident. Towards the Post-History of the World se termine par un survol de l'Apocalypse chrétienne.

L'idée fondamentale Boris Nad à travers ces travaux, c’est qu'aujourd'hui (contrairement à la préhistoire ou à la post-histoire) nous vivons dans un monde historique, un monde dont les forces mythiques se sont retirées - mais jamais entièrement. D'une manière mystérieuse, le mythe se répète dans l'histoire, que nous en soyons conscients ou non. Max Weber a discerné que nous vivons dans un "monde désenchanté" et que nous sommes condamnés à vivre dans une "cage de fer". Ce "mode de vie", qui est un signe d'éloignement du sacré et de négation de l'existence même du sacré, dont le mythe lui-même est une expression, est ce qui constitue le fondement même de l'ère moderne. Pourtant, ce constat n'est que partiellement vrai : les forces mythiques se retirent et se sont effectivement retirées, mais elles reviennent aussi et reviennent dans le monde historique, et toujours de manière inattendue. La "démythologisation" et la "re-mythologisation" sont des processus qui se produisent constamment, parfois en même temps : certains mythes disparaissent pour être remplacés par de "nouveaux" (parfois sous la forme des "anti-mythes" de l'ère moderne). Ceux-ci peuvent être "nouveaux" dans leur forme mais pas dans leur contenu, qui appartient toujours au monde des archétypes profondément enracinés. Un exemple en est le début de l'ère chrétienne, lorsque les anciens mythes ont été remplacés par de "nouveaux" mythes sur le Sauveur, dans lesquels les théologiens et les Pères de l'Église ne voyaient pas le mythe mais l'histoire littérale et véritable et, en fait, l'événement central de l'histoire (tel qu'il est enregistré et décrit dans les Evangiles).

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Une nouvelle vague de démythologisation a commencé avec le siècle des Lumières, mais ce "nouvel âge de la raison", dans lequel l'homme, pour le moins, revendique et semble avoir assumé pour lui-même l'autorité et le statut divins, n'était lui-même "qu'un mythe" - le mythe de "l'homme éclairé", peut-être celui de Prométhée, "celui qui pense vite", ou plus sinistrement, le mythe des Titans qui assaillent l'Olympe (le Ciel), le monde des dieux, et même le "père des dieux et des hommes" (Zeus).

Dans tous les cas de figure, parler de "retour du mythe" à l'époque moderne peut sembler anachronique. En effet, à l'"âge de la raison", le mythe est relégué à une place très modeste : il peut être l'objet d'études (marginales), un objet de ridicule, de mépris ou de moquerie comme s’il relevait de la "superstition" des "sauvages", comme s’il était une tentative simpliste d'"explication du monde", ou simplement une histoire amusante des temps passés qui, bien que non dépourvue d'imagination et de poésie, n'est au fond que du "délire de primitifs". La raison est censée éclairer le mythe de sa lumière froide. L'essence du mythe, cependant, échappe à la raison. Le mythe n'est ni l'histoire ni une superstition, mais une réalité intemporelle, une réalité qui n'est peut-être "jamais arrivée du tout ou nulle part", mais qui se répète constamment dans l'histoire et, de plus, est une réalité qui détermine et définit l'histoire. Un mythe n'a pas besoin d'avoir eu lieu de la manière dont il est décrit, et il n'a en fait jamais eu lieu de cette manière, mais il aurait pu avoir lieu et il a eu lieu dans une certaine mesure. Comme l'a fait remarquer Novalis dans son oeuvre : "Seul ce qui n'est jamais arrivé nulle part est vrai."

55613299._SY475_.jpgLe XXe siècle n'a pas manqué d'érudits lucides et pénétrants du mythe. Il suffit de mentionner ici deux d'entre eux : le penseur et écrivain roumain Mircea Eliade, qui a surmonté le faux dualisme du sacré opposé au profane, car "il n'y a pas d'existence profane", et l'écrivain allemand Ernst Jünger, qui réfléchissait constamment au rapport entre les mondes mythique et historique. Rappelons quelques points de référence importants d’Eliade. Selon Eliade, les images, les symboles et les mythes qui ont été oubliés ou supprimés en Occident depuis le XIXe siècle nous révèlent les modalités les plus cachées de l'être humain. Le rôle spirituel des œuvres littéraires à l'époque moderne ? Elles ont préservé et transmis de nombreux mythes, bien que parfois sous une forme dégradée. Eliade a également souligné le fait que le regain d'intérêt pour le symbolisme et le mythe en Europe occidentale a coïncidé temporellement avec l'entrée des peuples asiatiques sur la scène historique, à commencer par la révolution de Sun Yat-sen. Par ailleurs, nous devons également au XXe siècle la découverte que toute connaissance "objective", "scientifique" n'est, en réalité, pour citer Alexandre Douguine, qu'"une variation particulière de la mythologie", et que "le développement et le progrès ont un caractère cyclique". En d'autres termes, le progrès - cette invention des modernes - n'est qu'illusoire. L'humanité, malgré tous les changements qu'elle a subis, reste essentiellement "telle qu'elle a toujours été". L'ère du positivisme et du matérialisme optimistes est terminée pour l’essentiel : "À sa place est venue une nouvelle compréhension des constructions mythologiques" et "la réhabilitation de ces diverses disciplines et sciences qui ont été trop hâtivement classées comme dépassées et primitives". Cette prise de conscience fait également s'effondrer le sentiment de suprématie ou de scepticisme à l'égard del’antique héritage de l'humanité et des civilisations du passé lointain (la soi-disant préhistoire). Notre époque n'est pas privilégiée par rapport aux autres époques de l'histoire humaine qui l'ont précédée. Ce serait plutôt l'inverse : nous sommes en présence d'une involution et d'un déclin spirituel patent.

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Après tout, nous ne connaissons pas le passé ancien de l'humanité, ou nous ne le connaissons pas suffisamment, car "l'histoire officielle", comme l'a noté René Guénon, ne va nulle part au-delà des six mille dernières années, une période qui est négligeable par rapport à la durée totale de l'existence de l'homme sur Terre. Une obscurité dense s'abat sur tout le reste. Devant toutes nos tentatives de connaître le passé lointain, un mur mystérieux et impénétrable émerge. Il n'est pas accessible à la "raison" (à la connaissance scientifique), car la portée de la "raison" (les connaissance et recherche rationnelles) est tout à fait modeste ; la raison a ses limites évidentes. Cela ne signifie pas pour autant que la "raison" doive être bannie, tout comme l'ère positiviste a tenté de se débarrasser de toutes ces forces qu'elle qualifiait d'"irrationnelles" et de "choses relevant du passé mort". L'écrivain allemand Jünger a proposé une approche différente et probablement beaucoup plus difficile et exigeante : l'utilisation simultanée des deux optiques, de deux angles d'observation, des méthodes de connaissance "rationnelles" et "irrationnelles". La lune, par exemple, est à la fois un corps physique et cosmique qui fait l'objet d'observations et de mesures scientifiques, ainsi qu'un fait mythologique ou même une entité métaphysique ; la lune n'est pas simplement un objet mort pour la connaissance scientifique, "objective", qu'un scientifique peut aborder "froidement" et sans préjugés.

Boris Nad n'est pas un scientifique ou un érudit, mais seulement un écrivain. Cela lui donne une plus grande liberté, une plus grande accessibilité, tout en le libérant de l'obligation de suivre la méticulosité scientifique. Le mythe, cependant, est un topos auquel, en tant qu'écrivain, il est souvent revenu. Sa première œuvre littéraire, publiée dans son pays natal, a été un court roman "épique-fantastique" intitulé The Feast of the Victor (2005). En gros, cette histoire mythique se déroule à un moment où différentes perspectives temporelles et spatiales se croisent. En fait, cette histoire, bien que suscitée par des événements immédiats (la guerre dans le pays qui s’appelait la Yougoslavie), se déroule dans un lieu intemporel ou "uchronie". Cette approche présente des similitudes avec celle employée par Jünger dans sa nouvelle Sur les falaises de marbre (1939). Cette comparaison ne concerne bien sûr que l'approche, et non la valeur de l'œuvre littéraire. Son livre The Silent Gods (2008), qui est un recueil de nouvelles, de notes et de prose, et le recueil de récits fantastiques intitulé The Invisible Kingdom (2016) étaient centrés sur des thèmes mythiques et sur mes propres variations d'intrigues mythiques bien connues.

51q4qC48j5L._SX342_BO1,204,203,200_.jpgLe livre qui s’offre maintenant aux lecteurs est une sorte de sélection d'écrits par le biais de laquelle Boris Nad se présente au public anglophone de manière plus complète que jamais. En fait, ce livre se compose de trois ouvrages, dont le premier est l'édition anglaise abrégée de The Return of Myth, publié à l'origine en 2016 à Melbourne, en Australie, par Manticore Press. Ce texte a été réédité et partiellement retraduit pour l'occasion et annexé à un texte non traduit auparavant, The Golden Fleece. La deuxième partie est un court roman, A Tale of Agartha, c'est-à-dire un récit du royaume souterrain qui a, pendant des milliers d'années, influencé de manière invisible et mystérieuse les événements à la surface de la Terre, l'histoire et le monde des nations. C'est l'un des grands mythes de l'Orient que l'auteur aborde de la  manière caractéristique d'un écrivain : sous la forme d'un conte fantastique. La troisième partie de ce livre, Sacred History and the End of the World, complète les deux premières, comprenant des textes qui ont été laissés de côté dans l'édition anglaise précédente de Return of Myth ainsi que d'autres textes, non traduits et non publiés auparavant, dans lesquels il aborde des sujets connexes d'une manière extrêmement libre, à la façon d’un essayiste. Ces sujets comprennent, entre autres, la notion d'histoire sacrée, l'apparition de l'Antéchrist et la seconde venue du Christ (qui est d'une importance particulière pour le christianisme oriental), et les relations entre l'Orient et l'Occident. Cette dernière partie ne concerne pas seulement la crise de l'Occident, mais aussi la crise dans laquelle les sociétés (et civilisations) orientales sont de plus en plus impliquée dans une phase descendante - des crises qui, sans aucun doute, ont essentiellement la même racine spirituelle. Aujourd'hui plus que jamais, il est nécessaire que l'Est et l'Ouest se rapprochent plutôt que, comme cela a été le cas au cours de l'ère moderne (contrairement à certaines périodes historiques antérieures), de s'éloigner davantage l'un de l'autre et de se diviser. La première et nécessaire condition pour cela est que l'Est et l'Ouest se connaissent mieux et engagent enfin le dialogue (sinon, ils ne cesseront d’être en guerre).

Pourtant, ici, dans les pages de ce livre, ce n'est pas l'Est et l'Ouest qui se rencontrent, mais surtout le lecteur et l'écrivain. L'ambition de l'écrivain n'est pas d'expliquer ou d'interpréter quoi que ce soit ; il ne cherche pas à persuader, mais plutôt à poser des questions, à parler simplement de ce qui est important pour lui avec sa propre voix et en suivant le flux de ses propres pensées. Il n'est pas nécessaire que le lecteur et l'écrivain soient toujours d'accord sur tout, mais il est nécessaire qu'il y ait une certaine affinité entre eux. Ce sont les désaccords et les disputes qui rendent le dialogue souhaitable et possible. Le rôle du lecteur n'est pas moins exigeant que celui de l'écrivain, car c'est au lecteur de faire revivre l'œuvre de l'écrivain. Si ce livre facilite cela, ne serait-ce qu'au niveau symbolique, alors il aura atteint son but. Après tout, tout ce qui est important se passe d'abord au niveau des symboles, dans le domaine où l'esprit règne souverainement, et ne provoque qu'ensuite des conséquences dans le monde que nous appelons si maladroitement "matériel".

Boris Nad,

Serbie, août 2020.

00:29 Publié dans Livre, Livre, Traditions | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : boris nad, tradition, traditionalisme, mythe, livre | |  del.icio.us | | Digg! Digg |  Facebook

samedi, 19 décembre 2020

"Droite / gauche, histoire d'une dichotomie" de Marcel Gauchet ou l’histoire de l'éternelle dispute sur les étiquettes politiques

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"Droite / gauche, histoire d'une dichotomie" de Marcel Gauchet ou l’histoire de l'éternelle dispute sur les étiquettes politiques

L'intéressant essai du penseur français a été publié en Italie par Diana edizioni, avec une introduction du professeur Marco Tarchi

par Andrea Scarano

Ex: https://www.barbadillo.it

Les dynamiques des sociétés contemporaines ont longtemps buté sur les difficultés qu’entraînait l’usage généralisé de la dyade droite/gauche tant dans l’orbite de la représentation parlementaire que dans l'explication des phénomènes politiques, économiques et sociaux. Existe-t-il une définition appropriée et non ambiguë de ces deux catégories ? Quelles sont les caractéristiques qui ont favorisé leur succès, malgré leur taux élevé de généralité et d'abstraction ? Faut-il encore faire usage de ces concepts établis il y a plus de deux siècles en France, mais qui se sont répandus et enracinés partout en assumant les chrismes de l'universalité ?

41B2wGt7wML._SX318_BO1204203200_.jpgLa maison d'édition Diana propose la réimpression d'un essai de Marcel Gauchet "Droite/Gauche - histoire d'une dichotomie", enrichi d'une introduction de Marco Tarchi et d'une postface de l'auteur, annexe nécessaire à une publication datant déjà de 1992.

D'une part, le Dr. Tarchi, politologue toscan, fait remarquer que le débat sans fin sur le sujet, qui, toujours, annonce d’inévitables discussions et des polémiques assurées, ne conduit pas à un accord unanime dans la communauté scientifique, à la fois parce que les catégories examinées n'existent pas dans la réalité et parce que nommer signifie juger et comparer, en s'éloignant de la sphère de « neutralité axiologique » ; d'autre part, pour soutenir que la droite et la gauche sont "deux concepts suspendus entre des essences, des types idéaux et des conventions relatives" capables d'identifier une relation de continuité entre les croyances et les attitudes politiques, mais qui ne trouvent pas d'applications automatiques dans le monde de l'expérience concrète et sont forcés, par la force des choses, de mélanger des composantes distinctes, car ils ne présentent pas de caractères définitifs d’exclusion réciproque..

L'auteur retrace les étapes d'un processus - qui a débuté au moment de la Restauration en France - qui se caractérise par l'utilisation croissante de la dyade dans la pratique parlementaire ; il y a eu toutefois émergence de différences importantes, dues à l'apparition d’extrêmes et de "nuances" de centre-droit et de centre-gauche, ont immédiatement obligé les acteurs à choisir des alliances gravitant vers le centre pour permettre au système de s'auto-perpétuer.

Non utilisée par Marx, Engels ou le premier Lénine, l'opposition droite/gauche s'est consolidée grâce à quelques facteurs déterminants : l'élargissement du suffrage et la progression vers une démocratie représentative au sens contemporain du terme amis en exergue le besoin croissant d'identification des électeurs, jusqu'alors habitués à d'autres "fractures" (blanc/rouge, conservateur/républicain) dans un contexte qui a enregistré progressivement, surtout dans les années autour de l'affaire Dreyfus, l'apparition de partis socialistes et l'accentuation de la discorde sociale et civile.

L'appropriation par le public des nouveaux labels gauche/droite s’est fait parallèlement à la diffusion d'une ample désaffection de ce même public pour l'utilisation en bloc des deux termes, désaffection qui s’opérait entre ajustements et "réinventions" plutôt que par simples transferts ou passages d'un registre à l'autre. Ils sont désormais configurés comme des notions indéfiniment ouvertes, susceptibles d'enrichissement ou de renouvellement sémantique, instruments d'unification symbolique de différentes familles politiques, capables de véhiculer dans le camp qui les a créés (la gauche) des espoirs en un avenir d'harmonie et de nourrir dans le camp qui les a subis (la droite) des négations, des réserves et des soupçons, comme éléments nuisibles à la cohésion et à l'harmonie collective.

capture_decran_2016-07-07_a_11.20.09.pngLes finalités, les contenus et les programmes changent mais l'"ordre de bataille" de la politique française reste formellement inchangé : dans un mélange de conflit et de fragmentation, les modérés et les alternances du centre continuent à gouverner, laissant "libre cours" aux doctrinaires des extrêmes et à un dualisme aussi élémentaire que manichéen, virulent et implacable.

À l'époque de l'idéologisation de la lutte des classes et du choc entre fascisme et communisme, l'attraction militante est devenue encore plus virulente : si les desseins totalitaires aspirent à restaurer l'unité sociale en tant que corps - comme l'a observé Claude Lefort - l'entrée dans la modernité individualiste, historique et démocratique va dans une direction diamétralement opposée, brisant l'ordre symbolique, l'attachement au sacré et la dépendance à une source divine.

Gauchet identifie un problème structurel - essentiellement le même dans ses principales caractéristiques même après l'avènement du gaullisme et la réforme institutionnelle constitutive de la Vème République semi-présidentielle - dans la combinaison d'une division exaspérée de l'opinion publique et d'un jeu bipolaire qui multiplie les partis plutôt que de les réduire, perpétuant la pratique des accommodements de la politique efficace. La droite et la gauche prennent le parti du gouvernement ou de l'opposition en vertu du mécanisme induit par le principe de la majorité ; en même temps, le champ idéologique des "grandes familles" se divise en trois parties : le conservatisme, le libéralisme et le socialisme.

Le processus d'universalisation de la dyade, facilité par des besoins cognitifs de simplification des choix et par une adhésion effective à la compétition politique, s'inscrit dans le processus plus large de création d'un système de références qui a rendu plus clair l'ordre profond de la société et a identifié dans le principe du conflit une de ses caractéristiques constitutives fondamentales, renfermant - note Gauchet - "l'âme et la mémoire d'une manière d'être en politique". Au moment où la droite et la gauche commencent à représenter l'intégration organique d'une dualité, leur contenu original est partiellement transformé à nouveau car il ne comprend plus seulement un antagonisme impitoyable, mais est chargé d'expliquer "la coexistence ordinaire et inévitable des opposés".

Gauchet appartient pleinement à un courant interprétatif "fonctionnaliste" qui met en évidence l'importance des archétypes mentaux dans la capacité d'orientation des individus, dans l'organisation des pensées et dans la génération des idées, ainsi que les caractéristiques d'un concept défini dans l'espace et capable de stabiliser les conflits, immédiatement compréhensible et transférable d'une culture à l'autre.

MGcondpol.jpgCette approche contraste avec celle "essentialiste" (identifiable, en grande partie, dans les écrits de Norberto Bobbio), qui échappe au test empirique d'une discrimination claire entre les deux catégories et n'explique pas les transformations que le passage du temps et l'évolution des circonstances ont imposées aux pratiques des partis et mouvements politiques traditionnellement placés dans l'un ou l'autre domaine.

La succession des événements historiques contraint, en effet, les forces politiques à un mouvement continu de croisement réciproque qui justifie la perplexité de ceux qui - comme Alain De Benoist - ont récemment réfuté la validité de certaines oppositions binaires, parmi lesquelles : liberté/égalité, ordre/justice, conservatisme/progressivisme. Ces mêmes identités sociales sont d'ailleurs le fruit d'une sédimentation culturelle en constante transformation et, tout en restant au centre des objectifs de l'intégration politique, ne coïncident plus avec des blocs de valeurs monolithiques.

Gauchet souligne comment trois phénomènes principaux ont déstabilisé les repères dominants dans l'espace européen après 1945 : la pénétration de l'esprit démocratique et l'acceptation du pluralisme, avec l'évaporation consécutive du couple antifascisme/anticommunisme et le relâchement pour de nombreux citoyens d'une affiliation politique inconditionnelle ; la dissociation des blocs et le retour en vogue de l'idée libérale, associée à la mondialisation économico-financière et au processus d'individualisation de la société ; la délégitimation du projet de contrôle public de l'économie.

Bien que la fracture droite/gauche soit tombée en discrédit, la position de ceux qui pensent qu'il n'est pas possible d'émettre une hypothèse sur sa désintégration ou sa recomposition, du moins à court terme, semble être partageable - de l'humble avis de l'auteur. La redistribution des anciennes identités que l'on retrouve dans les nouvelles polarisations - l'auteur consacre un espace au populisme et à l'écologisme des deux camps - indique qu'elle conserve un rôle organisateur, bien que nettement réduit par rapport au passé.

Favorisée par la volonté des politiciens professionnels de réduire la multiplicité des conflits à deux camps et deux visions du monde schématiques, sa persistance résiduelle trouve un soutien non seulement dans les classes supérieures mais aussi dans les classes subordonnées, de plus en plus "mobiles" d'un point de vue électoral ; débarrassé de significations métaphysiques improbables, il continue en partie à fonctionner comme un intermédiaire entre l'individu et la communauté politique, en maintenant le pouvoir évocateur d'un "totem extrêmement expressif d'une société dans laquelle le fait d'avoir combiné une politisation traditionnellement forte avec des organisations politiques chroniquement faibles n'est pas la moindre des bizarreries".