Entretien avec Piero San Giorgio
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Piero San Giorgio est, depuis vingt ans, responsable des marchés émergents d’Europe de l’Est, du Moyen Orient et d’Afrique dans l’industrie high-tech. Depuis 2005, il se prépare à l’effondrement de l’économie et étudie les moyens d’y survivre.
Le thème de votre dernier livre peut surprendre. Dans « Femmes au bord de la crise » vous évoquez des figures féminines très fortes dans un monde au bord de l’effondrement. Comment êtes vous venu à écrire ce livre ?
Lorsque l’on parle de crises – personnelles ou de grande envergure – on a trop souvent l’image du héros hollywoodien, déterminé et invincible, qui mène la charge. Or les statistiques montrent que dans la plupart des crises, et ce malgré un siècle de féminisme tendant vers l’égalité homme-femme, ce sont les femmes qui sont en première ligne et qui souffrent le plus : précarité dans le travail, difficultés financières avec enfants à charge, violences, prédation sexuelle… Dans le monde moderne, les femmes ont, selon moi, beaucoup plus exposées aux risques et ont plus à perdre qu’avant.
Il y a trois raisons qui m’ont poussé à écrire ce livre. Tout d’abord, le fait que parmi les lecteurs de mes deux précédents livres “Survivre à l’effondrement économique” et “Rues Barbares – survivre en ville”, il n’y avait que 15 à 20 pour cent de femmes. Ensuite, en lisant l’édifiant essai de Laurent Obertone “France Orange Mécanique”, j’ai pris conscience de la réalité (j’ai revérifié toutes les statistiques choquantes cités dans cet ouvrage, et elles sont bien exactes) de la violence faite aux femmes aujourd’hui en France, en Europe et partout ailleurs. J’ai été bouleversé par certains des récits et je me suis dit que je ne pouvais pas rester inactif et donc essayer à contribuer à la prise de conscience et à la recherche de solutions spécifiquement pour les femmes.
Enfin, beaucoup de mes lecteurs m’écrivent pour me dire qu’ils travaillent à la mise en place d’une stratégie d’autonomie, de recherche de liberté et de sécurité, par la mise en place de Bases Autonomes Durables, mais qu’ils ont de la difficulté à expliquer leur démarche auprès de leurs épouses ou compagnes. Un nouveau livre était nécessaire pour qu’ils puissent le leur offrir, le leur faire lire… Du moins c’est ce que j’ai essayé de faire dans la première partie de “Femmes au bord de la crise”, que j’ai complété dans la deuxième partie par des interviews d’une vingtaine de femmes de toutes extractions sociales qui, seules ou en famille, se préparent et qui partagent leurs expériences, leur démarche et leur vécu au quotidien. Ces femmes sont formidables!
Quelle est votre définition de la féminité ?
A priori, c’est un mystère absolu ! Il faudrait que vous posiez la question a Conchita Saucisse ! Toutefois, c’est comme beaucoup de choses que l’on ne peut définir avec exactitude pourtant, lorsqu’on y est confronté, on reconnait la féminité instantanément ! Pour ne pas tourner autour du pot, pour moi, la féminité c’est à la fois le charme, la douceur, la séduction, la grâce, l’élégance naturelle, la maternité, l’érotisme… coexistant dans la même personne : un vrai mystère !
Paradoxalement, le caractère féminin n’est-il pas le mieux adapté à la survie ?
Anthropologiquement oui. Tant dans les peuples pré-littéraires, dans les récits de la Torah (Deutéronome) que chez les chimpanzés, lorsqu’une tribu ou un peuple avait conquis le territoire d’un autre, après avoir exterminé tous les mâles, y compris les vieillards et les enfants, les femme les plus belles et les plus fertiles sont absorbées par la tribu victorieuse. Dans ce sens, la femme a plus de chances de survivre et de continuer à transmettre son patrimoine génétique, à défaut du culturel. Aujourd’hui encore et malgré un siècle de féminisme, beaucoup de femmes ont comme stratégie de rencontrer l’homme le plus riche ou le plus puissant possible. Ce n’est pas une stratégie idiote, lorsque l’on voit le nombre de jolies femmes qui gravitent autour des hommes de pouvoir ou d’argent, et malgré leur physique ingrat, voire parfois objectivement repoussant (je pense a quelques hommes politiques ou autres capitaines d’industrie là). Toutefois, cette stratégie à deux points faibles : le premier est qu’il y aura toujours une femme plus belle, plus jeune surtout, ou plus intrigante pour venir la remplacer, notamment dans un monde où, grâce au féminisme entre autres, l’homme n’a plus d’obligation morale ni de pression sociale pour ne pas simplement jeter une femme pour une autre, si bien sûr, il en a les moyens matériels. Ainsi, la précarité des femmes s’en retrouve accrue. Et on ne parle même pas des cas où ces femmes feraient une erreur de jugement dans la puissance ou la fortune de leur cible ! Le deuxième point faible de cette stratégie est qu’en choisissant un tel homme, elles se mettent en position, si je puis dire, de dépendance.
Je crois profondément que les hommes et les femmes sont les deux parts complémentaires et indispensables à l’“unité de production”, vous me permettrez d’utiliser ce terme marxisant, qu’est la famille. Unité de production d’enfants, mais aussi de joies et de bonheurs simples. Or, dans mes livres, je parle d’acquérir de l’indépendance, de l’autonomie et de la liberté. Quoi de mieux que de travailler à cet idéal en famille?
Des Antigones aux Caryatides, de nombreuses jeunes femmes s’engagent dans l’action militante nationaliste/identitaire. Que pensez-vous de ce phénomène ?
Ah, je ne connais pas les Caryatides, enfin à part celles sur l’Erechthéion. Mais je vois très bien qui sont les Antigones, et je trouve leurs actions et positions politiques admirables et, surtout, très intelligentes. C’est un phénomène qui mérite de s’accentuer car sans elles, sans les femmes, nous autres hommes avons l’impression de combattre seuls. Bien souvent, après un combat politique ou simplement d’opinion, nous rentrons dans nos foyers vers nos femmes, nos mères, nos filles qui ne comprennent pas toujours, voire parfois réprouvent ce que nous faisons, à cause de la pression du politiquement correct notamment. Il est donc bienvenu de voir s’accroître des femmes qui combattent aussi, côte à côte des hommes, pour un combat qui, il me semble, mérite d’être mené – même s’il semble impossible à remporte, tant la tâche est immense et tant les probabilités de perdre sont grandes. Enfin, et c’est très important, ces mouvements me semblent agir avec féminité, grâce, politesse, intelligence… on est loin de la vulgarité crasse et gueulante des “femen” et autres groupes de grognasses immondes, financés par la banque !
Dans une optique de survie, la famille semble être pour vous la plus sûre des bases?
La famille est la cellule du corps social depuis que l’homme existe. Et bien qu’il y ait eu au cours de l’histoire et des géographies des rares et légères variantes, la famille humaine est tout d’abord l’union d’un homme et une femme avec pour objectif de perpétuer leur gênes et leur culture par l’intermédiaire de leurs enfants, qu’il faudra protéger, éduquer et rendre capables d’intégrer le corps social, que celui-ci soit le clan, la tribu ou la Nation, en tant qu’adultes autonomes et responsables, c’est à dire des citoyens. Au delà de la notion de survie stricto-senso, c’est donc la famille, et non l’Etat, qui a la responsabilité ( parce qu’elle fait l’essentiel du travail, bien qu’on puisse mutualiser un certain nombre de tâches au sein de la famille élargie ou d’une groupe de familles) de mener à bien cette “éducation” du petit d’homme pour le transformer en adulte “moral” et coresponsable de la “cité”. Pour cela, bien évidemment, il faut travailler sur l’autonomie, sur la capacité de production, sur les connaissances et compétences à acquérir, sur les valeurs communes garantes d’une identité forte et clairement identifiable, sur la capacité de se défendre contre la prédation et la violence – seul s’il le faut, mais préférablement en groupe. Sans la famille, il me semble bien impossible de faire tout cela. L’alternative, c’est à dire ce que nous vivons aujourd’hui, où nous sommes tous encouragés à l’individualisme et où toutes les tâches sont déléguées à l’Etat. Notre modèle sociétal à rempli la Cité – ou ce qu’il en reste – d’abrutis narcissiques, inaptes à travailler a quoi que ce soit d’utile, et incapables à ne serait-ce que comprendre où se trouve leur vrai intérêt. Cette population tombera de haut et souffrira terriblement lors des crises à venir. Préparons nous!
Transhumanisme, théorie du Genre: que vous inspire ces délires scientifiques? Pensez-vous qu’ils peuvent nous conduire à une catastrophe?
Paradoxalement, car amateur de science-fiction, je pense que non. Ces apprentis sorciers délirent complètement sur la capacité de changer l’homme par la technologie ou par de la doctrine, plus proche de la croyance religieuse que de la science. Autant le socialisme sous sa forme Nazie ou Communiste a pu causer des centaines de millions de morts car les Etats étaient puissants dans le réel, et qu’ils voulaient façonner l’”homme nouveau” à coups de baïonnette, de famines ou de camps de rééducation, autant ces sorciers modernes le font avec quoi? La gay-pride? Des manuels scolaires que les élèves, de plus en plus analphabètes, ne sauront de toute façon plus lire? Avec un Etat qui n’aura bientôt plus d’argent pour acheter les matraques des CRS? Et ces “théories”, ces croyances, sont tellement éloignées de la nature humaine profonde, de notre anthropologie de base que personne dans le monde réel ne les suivra. Vous imaginez la classe de banlieue française typique avec 70% de gamins d’origine sub-saharienne ou Nord-africaine à qui l’on dit qu’ils peuvent choisir d’être soit homme, soit femme? Le lendemain, le prof, il se fait lapider sa race par leur famille et leurs grands frères, wa Allah al Adhim! Si cela conduira à une catastrophe, ce sera pour ces grands prêtres du progrès qui ne comprendront pas pourquoi la populace va venir sous leurs balcons et les pendre aux réverbères des beaux quartiers de Paris. Personnellement, et bien que je comprenne les combats tels que ceux de la “Manif pour Tous” – et qui sont utiles pour le symbole, le panache, je pense que c’est trop tard, l’effondrement sociétal et économique sera sur nous avant que leurs vaines tentatives de reprogrammer nos enfants n’aboutissent. Mais je peux me tromper, bien sûr, donc restons vigilants.
Votre premier livre, « Survivre à l’effondrement » est paru en 2011 aux éditions Le Retour aux Sources. Comment jugez vous l’évolution de la « mouvance survivaliste » en France?
Le succès de ce livre m’a surpris! Nous en sommes à près de 40’000 exemplaires vendus, la version en anglais marche bien et celle en italien sort en septembre. Je vois souvent des lecteurs et des lectrices se passer le livre, l’annoter, le surligner… parfois certains en achètent par commandes de dix ou de vingt pour l’offrir a tous leurs amis… et tout cela sans aucun relai des grands médias, sans la télévision, sans aucune revue littéraire. Preuve qu’un autre monde, que d’autres réseaux se créent, alors que l’ancien se meurt…
Je crois que ce livre a dépassé la mouvance “survivaliste”, pour peu qu’il y en ait une, pour toucher un public bien plus large, constitué de jeunes et de moins jeunes, de couples, de familles, de retraités… qui, simplement, on pris le contenu de ce livre comme point de départ d’un travail, d’une quête, vers plus d’autonomie. Et ça donne des résultats! L’autonomie permet de consommer moins et mieux (eau et nourriture locale, meilleure consommation ou production énergétique), d’apprendre et acquérir de nouvelles compétences utiles, d’accroitre sa capacité à se défendre, et surtout à tisser un lien social plus réel et plus fort entre les membres d’une même famille, d’un quartier, d’un hameau, entre amis… finalement un peu comme dans les témoignages des femmes dans mon dernier livre. Au bout du chemin vers l’autonomie, se trouve la liberté réelle.
Vous préfacez « Too much magic : L’Amérique désenchantée » de J.H Kunstler. Ce livre est une critique féroce de la société US. Croyez-vous à son effondrement à court terme?
Ce livre est exceptionnel et c’est un grand honneur pour moi que de l’avoir préfacé. Encore Inconnu en France, Kunstler est pourtant l’un des auteurs majeurs aux USA aujourd’hui. Non seulement il écrit de manière superbe, mais sa critique de la société Etat-Unienne est mordante, drôle, documentée, factuelle et… désespérée. Pour lui, les USA se meurent. Ils meurent de leurs infrastructures délabrées, de leur classe politique corrompue, de leur population vivant dans une orgie de consommation futile et incapable de voir la réalité de la crise économique et énergétique à laquelle ils font déjà face. Les USA sont dans une fuite en avant dans le techno-narcissime (oh, qu’il est beau mon iphone 12S!), dans des aventures guerrières hasardeuses et coûteuses (Afghanistan, Irak, Syrie, Ukraine…), et le dans une gouffre d’endettement invraisemblable. L’Empire est nu. L’Empire va mourir. Et Kunstler décortique avec minutie et humour les raisons et les résultants de cette mort. Et ca va faire mal. Si vous voulez comprendre les USA d’aujourd’hui et donc où va le monde, il faut lire ce livre!
Que pensez-vous du phénomène des « milices » américaines et du courant libertarien?
Les Etats-Unis se sont fondés sur l’esprit pionner et sur l’idée de liberté subconstantielle à celui-ci. Ce pionnier devaient pouvoir défendre leur terre par eux mêmes, et se sont constitués en milices. Pendant longtemps, l’armée américaine n’existait pas. Il n’y avait que des milices incorporées selon les besoins dans la Garde Nationale. Et cet esprit de liberté-armée se retrouve dans mon pays, la Suisse, où le citoyen-soldat est le garant de la liberté et du bien commun, il est même le vrai contrepouvoir au gouvernement et aux partis politiques. Le renouveau de l’esprit de milice aux Etats-Unis est bien réel et se fonde dans le désir d’un nombre croissant d’américains – civils et soldats – de retrouver les sources de leur nation dans leur textes fondateurs, et non dans un gouvernement de plus en plus centralisateur et à tendance totalitaire. Ces citoyens pensent que par le fait d’être armés ils peuvent être le seul frein à la machine d’Etat qui s’est emballée sous l’effet corrupteur de l’establishment, que le président Eisenhower déjà, appelait “complexe militaro-industriel”, auquel il faudrait ajouter “bancaire”.
Le courant Libertarien est proche de ces idées et prône une état redimensionné aux tâches que lui confère la Constitution et non à un Léviathan bureaucratique. Pour les adeptes de cette philosophie politique, l’accent doit être mis sur les libertés individuelles que sont la liberté d’entreprendre, de vivre affranchi du contrôle et de la surveillance de l’état, voire à ne pas avoir à payer d’impôts ni de subventionner une sécurité sociale qu’ils considèrent comme inefficace et contre-productive. Mais il faut dire que c’est un mouvement très disparate et on y trouve des conservateurs, des religieux, des anarchistes de droite, des antisystème… leur “leader” historique, qui est un homme très respectable à mon avis, est Ron Paul qui lutte depuis des décennies contre la corruption rampante de Washington et contre les aventures militaires de son pays.
Bien que ces courants me soient sympathiques, je crains là aussi qu’il ne soit trop tard pour les USA : leur infrastructure est trop vétuste, leur population bigarrée est trop individualiste, leur chaînes d’approvisionnement en énergie, en nourriture et en équipements vitaux (médicaments, pièces de rechange, etc.) est trop fragile, leur économie trop endettée et incapable de créer de la croissance réelle. Ils sont finis. Et ces mouvements ne pourront, a mon avis, au mieux que créer des bases, des réseaux pour reconstruire sur les décombres. Ce serait déjà pas mal.
Crise économique, révoltes sociales, tensions ethniques, engrenages militaires à l’Est; croyez-vous que l’Europe va basculer dans un chaos majeur?
Vous oubliez dans votre liste nos classes dirigeantes corrompues et des peuples amorphes et apathiques! Oui, malheureusement, je crois que l’Europe – Suisse comprise – mais particulièrement les pays de l’Union Européenne, France et Royaume Uni en tête, vont basculer dans un chaos majeur. Quels en seront les déclencheurs? Ils peuvent être nombreux et s’amplifier les uns les autres : crise énergétique, dette irremboursable, effondrement de l’économie, tensions sociales, conflits ethnico-religieux, expéditions militaires hasardeuses… L’avion à tous ses moteurs en feu et le pilote est un sociopathe !. J’espère me tromper, mais je vois que ce que j’avais vu dès 2005 et mis par écrit en 2011 dans “Survivre à l’effondrement économique” arrive. Et de plus en plus vite. Je ne suis pas le seul à le voir, bien sûr, d’autres le voient aussi de Alain de Benoist à Guillaume Faye à Serge Latouche et bien d’autres encore! La question demeure : que pouvons nous faire? En politique? Collectivement? Identitairement? En tant que familles? En tant qu’individus – hommes ou femmes? Les réponses à ces questions ne s’excluent pas nécessairement, mais elles nécessitent de l’action. Or le temps est plus que jamais venu d’agir, de travailler dur pour acquérir nos moyens d’autonomie, d’autodéfense, de liberté réelle, je dirai même de reconquête ou, à défaut, de sécession – sans doute mentale pour commencer… et, dans toutes ces démarches, j’espère voir nos femmes être non seulement à nos côtés, mais à l’avant garde.
Propos recueillis par Monika Berchvok pour Rivarol
Piero San Giorgio, Femmes au bord de la crise, 242 pages, 16 euros.
James Howard Kunstler, Too much magic - L’Amérique désenchantée, 372 pages, 21 euros.
Livres disponible sur http://www.leretourauxsources.com
La revue Rébellion consacre un important dossier dans son numéro 61 à la question de l’engagement féminin dans les mouvements militants radicaux. Il faut reconnaître que le sujet n’avait jamais vraiment évoquer jusque là, surtout par des militantes de notre famille de pensée.
Une enquête de terrain mener par Alaïs Vidal donne l’opinion de plusieurs femmes engagés dans l’activisme patriotique. « Si nous voulons avoir notre place dans ces milieux exclusivement masculins, déclare Louise, il faut savoir à certains moments taper du poing, sortir de notre « carcan de douceur et de grâce ». La solution ? C’est Iseult , une des animatrices du groupes de jeunes filles militantes les Antigones, qui l’avance : « Être une fille ce n’est pas une faiblesse mais une force. Prenez votre place sur la dentelle du rempart ». Le numéro 61 de la revue Rébellion est disponible contre 5 euros ( frais de port compris) à l’adresse suivante : RSE BP 62124 – 31020 Toulouse cedex 02.