Osons cependant entreprendre ici de corriger quelques illusions d'optique.
Rien de plus faux, d'abord rien de plus contraire à l'Histoire, rien de plus trompeur pour l'avenir que l'idée romantique de "la vieille Turquie immobile." Propagée par Pierre Loti, elle ne correspond qu'aux fantasmes surannés du personnage. Mais elle continue ses ravages.
Ce peuple de la steppe est venu d'Asie centrale au XIe siècle. S'il avait correspondu en quoi que ce soit aux rêveries des orientalistes, le pays qui porte son nom n'existerait même pas.
Aujourd'hui animé d'une grande énergie, bouillonnant de ses contradictions et de son dynamisme vital, il se pousse à nouveau sur la scène mondiale.
Occupant dès maintenant une place géostratégique décisive, poussant son économie vers l'avenir, il cherche aussi l'agrandissement de son espace vital.
L'Union européenne, quant à elle, formatée en 1991 par le traité de Maastricht, déformée par le traité signé à Nice en 2001, n'en finit pas de ne pas se doter d'une véritable politique extérieure. Cela vaut peut-être mieux, penseront d'ailleurs certains, tant que le président de la commission de Bruxelles, actuellement M. Barroso, et tant que la majorité du parlement de Strasbourg persisteront à raisonner et à agir, au rebours des intérêts, et surtout de l'âme de notre Vieux Continent.
Telle une certaine fusée expérimentale détournée par une puissance mauvaise, et que le professeur Tournesol préféra détruire plutôt que de la perdre, je sais que certains croient sauver l'Europe en lui retirant ses institutions. J'espère qu'on pardonnera quand même à ceux qui souhaitent encore donner une dernière chance à la raison.
Personne ou presque n'ose s'insurger contre la manière péremptoire dont les évolutions nous sont présentées. On voudrait bien pourtant pouvoir renvoyer dos-à-dos les docteurs Tant-Pis du souverainisme comme leurs confrères Tant-Mieux de l'eurocratie. Les choix binaires et caricaturaux proposés aux citoyens, moins sots que l'imaginent les communicants, ne sauraient être tenus pour étrangers à l'indifférence que suscite à ce jour la campagne actuelle.
Néanmoins, sans illusion pour l'immédiat, m'adressant à une partie plus éclairée, plus rare aussi, de l'opinion, je voudrais souligner l'évolution de la politique régionale d'Ankara depuis le début de l'année 2009.
Cet hiver, en février, un nouveau secrétaire d'État chargé des relations avec l'Europe est apparu. Ce négociateur s'appelle M. Egemen Bagis. On ne peut pas considérer comme positive l'évolution qui en est résultée si j'en juge par l'évaluation d'un grand quotidien du soir, habituellement moins sévère pour ce pays : "méthode" d'Ankara pour adhérer à l'Union européenne crée le malaise à Bruxelles
Au-delà de la polémique sur la nomination de M. Rasmussen, "c'est la méthode suivie par Ankara qui pose problème", souligne un diplomate bruxellois. S'incarnant en porte-parole des pays musulmans, ce qui a aussi fortement déplu, M. Erdogan a relancé les interrogations quant à la volonté réelle de son pays de respecter la liberté d'expression, l'une des exigences les plus fortes des négociateurs européens.
"Très choqué" par la pratique de la Turquie et son évolution vers ce qu'il a appelé "une religion plus renforcée, une laïcité moins affirmée", Bernard Kouchner a, quant à lui, saisi l'occasion pour affirmer, mardi 7 avril, qu'il n'était plus favorable, désormais, à l'entrée de la Turquie dans l'Union européenne.
La
Deux mots sur ce nouvel interlocuteur. Pour la première fois dans ce pays, il ne s'agit pas d'un parlementaire du parti au pouvoir, mais d'un professeur de Relations internationales. Or la ligne qu'il représente risque fort d'étonner tous ceux qui imaginent à la fois une Turquie aspirant avant tout à une intégration européenne et, en même temps, une sorte de barrière contre les divers courants de l'islamisme proche-oriental.
Puissance régionale, aspirant à jouer un rôle mondial, la république fondée par Mustapha Kemal a cessé de se penser elle-même comme une sorte de pré carré inviolable, protégée contre elle-même par son armée laïque, gardant jalousement des frontières définitives. Il va falloir désapprendre les images fortes, convaincantes, mais hélas fausses, propagées par Benoist-Méchin.
En 2004 par exemple, pour complaire à la commission de Bruxelles, une révision constitutionnelle majeure liquidait la conception théoriquement nationaliste de la supériorité du droit interne. En même temps, symboliquement, la peine de mort était abolie. Donc désormais, quand ce qu'on appelle "l'État profond" voudra se débarrasser d'un gêneur, d'un journaliste arménien ou d'un contestataire quelconque il devra renoncer aux méthodes judiciaires. Il lui restera le recours de l'assassinat. Le scandale momentané sera suivi d'une enquête stérile, d'un procès truqué, et enfin d'un jugement débonnaire quand les exécuteurs auront bien voulu se livrer à la police. Jusqu'ici ça ne marche pas trop mal, dans cet excellent pays, où l'on attache plus d'importance à la cuisine qu'à la philosophie, je veux dire à la pratique plutôt qu'aux grandes idées abstraites.
Ankara peut donc avancer sereinement, et impunément sur la voie de son projet multidirectionnel.
Nommé officiellement le 1er mai Ahmet Davutoglu, 50 ans, se verrait, nous assure-t-on, accusé par ses adversaires de "néo-ottomanisme".
Cette expression, citée par "Libération" (2) ne veut strictement rien dire.
Ou plutôt elle peut recouvrir des concepts tout à fait contradictoires.
"L'ottomanisme" historique domina l'évolution de l'Empire au cours du XIXe siècle. Cela fonctionna à partir des années 1830- 1839 ("Tanzimat" réformateur), puis 1856 (égalité complète des citoyens vis-à-vis du service militaire). Et cela dura jusqu'à la catastrophique révolution jeune-turque de 1908-1909. Cette évolution eût conduit à un résultat sans doute préférable à ce que fabriquèrent le sinistre Enver pacha, jusqu'en 1918, puis Mustapha Kemal.
Parler de "néo-ottomanisme" permet de ne pas comprendre.
En fait la "doctrine Erdogan" consiste à dire par la bouche de M. Davutoglu de façon très réaliste :
"la Turquie ne peut pas privilégier ses liens avec l’Orient ou avec l’Occident car les deux sont indissolublement liés".
Que le caractère "multidirectionnel" de son projet dépasse, certes, comme celui de l'hitlérisme défini dès les années 1920, ses capacités propres, ne l'empêchera pas de nuire. Dans les années 1980 la junte militaire avait inventé Turgut Özal. Premier ministre (1983-1989) puis président de la république civil (1989-1993), il déposa auprès de l'Union européenne la candidature d'Ankara. Or il donnait déjà du monde turc une définition très large "de l'Adriatique à la muraille de Chine".
Nous ne nous trouvons donc pas dans une situation de véritable innovation doctrinale, due à on ne sait quelle bouffée d'islamisme mystique. Les confréries auxquelles se rattachent, aussi bien aujourd'hui MM. Erdogan et Gül que M. Özal hier, n'ont jamais pensé autre chose. Je développerai bientôt ce point particulier. Ahmet Davotuglu n'en donnera sans doute que la version savante et diplomatique.
Et pour bien comprendre les choix que la Turquie devrait et pourrait opérer, on peut citer plusieurs potentialités.
1° la plus déstabilisante pour le proche orient vise les pétroles du nord de l'Irak. Elle prétend s'appuyer sur les droits de la minorité turkmène dans la ville de "Kirkouk à moitié kurde" (3). Sans le vote de mars 2003 du parlement d'Ankara, qui ne permit pas alors, faute d'une majorité suffisante, l'envoi d'un premier contingent de 62 000 hommes aux côtés des Anglo-Américains, nous pourrions en observer le scénario.
2° la plus classique pour les stratèges conservateurs consiste à intervenir pour "maintenir l'ordre dans le Kurdistan irakien" en frappant une fois de plus dans la zone montagneuse où se réfugient les rebelles marxistes-léninistes du PKK, mais aussi en satellisant les "Kurdes modérés" installés au pouvoir.
3° la plus extravagante mais aussi la plus inquiétante pour le gouvernement chinois, qui la prend très au sérieux, consiste à encadrer la contestation des Ouïgours du Sin-kiang, supposés de race turque et de religion mahométane.
4° la plus illusoire vise les anciennes républiques dites "musulmanes" détachées de l'Union soviétique en 1991. Elle permettrait de réunir l'Anatolie au "Turkestan" chinois via l'ancien "Turkestan" russe. Ce programme "panturquiste", après avoir beaucoup intéressé les Allemands à partir de 1941 (4) a séduit, semble-t-il, un certain nombre d'hommes d'affaires occidentaux. Au début des années 1990, les Ouzbeks, Kazakhs, Kirghiz, Turkmènes et Azéris (5) ont vu avec plaisir arriver des cousins très lointains. Ces gens aimables leur parlaient un idiome forgé par Kemal sous le nom de langue "soleil", voisin des leurs. De plus ils semblaient susceptibles de compter en dollars. Mais tout le monde est revenu sur terre, et le projet a depuis tourné court. Le plus important pays de la région, l'Ouzbékistan fait accessoirement figure de principal opposant à cette "grande idée".
5° la plus immédiate, celle qui préoccupe Israël, consiste à se présenter comme le porte-parole des pays musulmans du proche orient et à prendre en main le projet d'un État palestinien, en mettant en place un accord avec la Syrie, etc. Freinée par le gouvernement Bush, cette démarche semble prendre de la crédibilité avec la présidence d'Obama.
6° la plus dangereuse pour l'Europe, la seule qui la concerne directement, vise une expansion rêvée dans les Balkans, en direction de l'Adriatique, vers l'ensemble des territoires que l'on appelait autrefois "Roumélie". Le secrétaire général de l'Organisation de la Conférence islamique, le Turc Ekmeleddin Ihsanoglu est parvenu, lors la XIe réunion des 57 pays musulmans qui s'est tenu à Dakar en 2008, à faire insérer une résolution se solidarisant et appelant explicitement à une intervention en vue de protéger les coreligionnaires opprimés dans les Balkans et en citant la Thrace occidentale et la Bulgarie. Dans les années 1990 on a appelé cela la flèche verte. Elle vise en fait l'ensemble des pays du sud-est européen.
Pour toutes ces raisons et pour quelques autres je juge, quant à moi, fort périlleux pour ne pas dire inconvenant d'imaginer l'adhésion de la Turquie à l'Union européenne.
Apostilles
- cf. Le Monde édition du 11 avril 2009
- cf. Libération du 5 mai.
- cf. Le livre de Amanj al-Barzanji "Kirkouk à moitié kurde" Cairn 2007
- Date où ils mirent un terme à leur alliance avec Staline. Un rapport secret de 1943 rédigé par l'ambassadeur du Reich Von Papen, et publié après la guerre, démontrait l'absurdité de ce projet. En 1944 un jeune officier pro-nazi Alpaslan Turkes fut emprisonné pour y avoir imprudemment adhéré. Plus tard il fondera, et dirigera jusqu'à sa mort, le parti des Loups gris "MHP" qui représente environ 15 % du corps électoral, qui a plusieurs fois participé au gouvernement et siège actuellement au parlement sur la base de cette doctrine inchangée.
- Le Tadjikistan appartient, lui, du point de vue linguistique, à la sphère iranienne.
JG Malliarakis




del.icio.us
Digg

En el piso de una taberna en los Balcanes, el dueño trazó una raya amarilla: a un lado queda Eslovenia; al otro, Croacia, de modo que quienes piden un bistec de cerdo y una jarra de cerveza en un país de la Unión Europea, salen de las fronteras comunitarias un rato después, en busca de los baños. Y el asunto es motivo de risa para los parroquianos.

10/05/2009 – 10h00




Rupture avec l’esprit des institutions
Rusia y EEUU vuelven a cruzarse peligrosamente en el Cáucaso, una región clave en la disputa estratégica por el control de los recursos energéticos de Eurasia que ya tuvo su primer desenlace armado con la llamada “guerra de Georgia” en agosto pasado. Ejercicios militares de la OTAN y un reposicionamiento estratégico de Rusia en Abjasia y Osetia del Sur, marcan el calendario inmediato de una región de alto voltaje conflictivo.




Per la destra, per lo meno quella che non lo disprezza, Marc Augier detto Saint-Loup è il romanziere della civiltà minacciata e dell’Europa delle patrie carnali… Due temi che sono punto di riferimento dopo Solstice en Laponie, pubblicato nel 1939, dove l’autore espone già il suo timore per l’evangelizzazione e la colonizzazione delle popolazioni lapponi da parte dei mercanti della morale. Riflessione che prosegue sotto l’occupazione, soprattutto negli articoli sui Baschi ed i Bretoni dove Saint-Loup pone i primi fondamenti del “federalismo etnico” quale principio su cui vuole organizzare l’Europa (2). Sia detto tra parentesi, la difesa dei popoli minacciati non si limita nel suo spirito al solo territorio europeo giacché egli affermava nel 1941, in un articolo sull’avvenire dell’Impero francese: “Il nostro dovere in Africa è quello di ristabilire nel quadro storico e razziale una grande civilizzazione araba ed una grande civilizzazione nera (3)”.
Nonostante le apparenti contraddizioni, l’itinerario politico di Saint-Loup obbedisce ad una logica perfettamente coerente, dove la volontà di affermarsi caccia le contrazioni ideologiche. Prende forma un mondo di grande salute fisica e morale dove tutti i popoli hanno il diritto di esistere, purché radicati nelle loro proprie culture. Nel tempo, Saint-Loup ha tessuto un opera sincera attraverso la quale si è espresso uno spirito libero, che ha pagato la sua libertà con la cospirazione del silenzio di cui si circonda il suo nome.
