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samedi, 22 février 2020

Un auteur et son oeuvre : Julius Evola (1898-1974)

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Un auteur et son oeuvre : Julius Evola (1898-1974)

par Michel Malle

Ex: https:lemondeduyoga.org

De l’orient tantrique au club des seigneurs, en passant par l’hermétisme et le spiritualisme masqué, nombreux sont les sujets de réflexion de Julius Evola. Mais il est des caractéristiques que l’on retrouve dans chacun de ses écrits, donnant à l’ensemble de son œuvre une certaine unité : une compréhension particulière de la magie, l’aspiration à des altitudes inconnues …

« L’homme dont nous allons tracer le portrait tenta de suivre la voie d’un karma yogi, c’est-à–dire qu’il choisit l’action comme voie de réintégration spirituelle : l’action conforme au Dharma (la Norme Universelle). Il a toujours dit: « René Guenon fut mon maître », c’est pourquoi nous envisagerons son oeuvre en rapport avec celle de Guénon, et cela d’autant que, dans son testament, fondant l’association qu’il a laissé, Evola précise ainsi le but visé: « Défendre les valeurs traditionnelles au sens où l’entendait René Guénon, Julius Evola et d’autres auteurs de même doctrine ». Même si nous devrons nous opposer à lui, ce sera donc dans cette sienne optique. « Je ne me suis pas borné à exposer les doctrines traditionnelles, j’ai cherché quels pouvaient être leurs aboutissements dans la réalité » dit-il, en entendant par là « dans l’action « . « J’ai donc cherché les conséquences à tirer des doctrines traditionnelles dans le sens d’une organisation sociale et politique de l’État », et aussi, avec plus de succès selon nous, dans le sens d’une éthique et d’une pratique pour l’homme traditionnel contemporain. Cette volonté d’engagement a conduit Evola à travailler de concert avec les divers mouvements fascistes de ce siècle. Cet aspect de sa vie, indissociable de son oeuvre, est problématique et, pour cette raison, nombre de « spiritualistes » n’osent pas l’aborder ou la déforment. Cette couardise ne sera pas nôtre : l’oeuvre mérite d’être connue, les questions qu’elle pose doivent l’être, et si les réponses ne nous satisfont pas toujours, il nous faudra en trouver de meilleures.
[…]

[…] Il semble qu’il ait dirige lui-même sa formation humaine très tôt et très indépendamment: on ne sait d’ailleurs pratiquement rien de son enfance. Il fit des études techniques et mathématiques qui le menèrent au titre d’ingénieur mais, s’il en garda une tournure d’esprit « scientifique  » (à ne pas confondre avec « matérialiste »), il ne pratiqua jamais, pour des raisons éthiques délibérées. L’attitude anti–bourgeoise, qui est l’un des traits marquants de sa personnalité, semble avoir été précoce. Il en est de même de son caractère guerrier, puisqu’il « s’engage peine âgé de 20 ans et qu’il prend part à la première guerre mondiale en tant que sous-lieutenant d’artillerie sur le plateau d’Asiago » […] Chez lui, la pensée et l’action se développèrent toujours conjointement, ainsi, deux ans avant son engagement, il commença à écrire des poèmes en italien et en français (outre le grec et le latin, il maîtrisait parfaitement les principales langues européennes, ce trait dénote aussi la précocité de son européanisme, qui devait se développer dans le cadre d’une vision impériale). Parallèlement à la poésie, il pratiqua la peinture abstraite. Ce fut sa période « Dada »: il fut en effet, à l’époque, l’un des représentants italiens du mouvement : « J’ai adhéré à ce mouvement comme mouvement limite, et non pas comme mouvement artistique. Si l’on était sérieux, on ne pouvait en rester là. A partir de 1922, je me suis séparé des dadas » […]

Alors commença ce qui fut appelé sa « période philosophique » (1923-1927). II publia deux ouvrages sur « l’individu absolu », dont « la Théorie et la Phénoménologie de l’individu absolu », qui reflètent certaines idées de Nietzsche, Weininger et Michelstädter. II en dira finalement: « Je ne conseillerai à personne de les lire tant ils sont écrits en jargon universitaire ». […]

PREMIER APERCU SUR L’ORIENT TANTRIQUE

JE-yoga.jpgEn 1926 parut: « L’homme en tant que puissance ». C’est un premier essai qui, bien des fois repris, donnera en 1949 « Le yoga tantrique, sa métaphysique, ses pratiques ». Evola s’ouvre à l’Orient, en l’occurrence à la tradition hindoue, et cela est d’autant plus intéressant que l’orient d’Evola n’est pas le même que celui de Guénon, il s’agit essentiellement de doctrines émanant de la caste des ksatriyas, la caste guerrière, et par cet aspect on trouve quelque chose qui consonne remarquablement avec l’ancienne tradition occidentale: il s’agit aussi de science « magique ». Prévenons tout de suite une équivoque possible : ce qu’Evola nomme magie n’a pas grand-chose à voir avec ce que désigne le mot dans le langage courant actuel. […]

LE SPIRITUALISME DEMASQUE ET LA QUESTION DU CHRISTIANNISME

Prolongeant les oeuvres équivalentes de Guénon, il fait paraître en 1932 « Masques et visages du spiritualisme contemporain ». Le grand intérêt de cet ouvrage vient de ce qu’il aborde certains aspects du spiritualisme contemporain que Guenon n’avait pas analysés. […]

REVOLTE ET REVOLUTION TRADITIONNELLE

En 1934, Évola publia « Révolte contre le monde moderne ». Ce livre est considéré par ses disciples comme le plus important. Lorsque, du point de vue des idées, on se questionne sur la valeur de l’apport d’Evola, cette oeuvre, finalement, se dégonfle un peu. Elle présente l’intérêt d’une fantastique érudition retraçant l’histoire du point de vue d’une vision traditionnelle cyclique. De nombreux aspects du monde moderne y sont envisagés, que Guénon n’avait pas soulignés: aspects qui, sans être fondamentaux, méritaient d’être si remarquablement analysés. Le style est fort et, pourrait-on dire, vengeur. Mais, à notre point de vue, ce livre est entaché de cette idée, qui s’affirmera plus encore dans le suivant, que la caste noble est supérieure à la caste sacerdotale. La seule question qui nous intéresse est celle-ci: la connaissance est-elle supérieure à l’action, oui ou non? Si non, l’action ne peut plus se distinguer de l’agitation. Si oui, le spirituel est supérieur au guerrier, il convient alors qu’une civilisation traditionnelle reflète cette hiérarchie et peu importe que le spirituel et le temporel soient aux mains d’un même homme ou aux mains d’hommes différents, reliés hiérarchiquement. Ceci étant établi, l’importance qu’Evola a pu attacher à cette question reste problématique et la façon dont elle est abordée aussi. Dans « la Crise du Monde Moderne », c’est le monde moderne qui est en crise, non celui qui s’y oppose: si une révolution, au sens strictement étymologique, peut être traditionnelle, ce ne saurait être le cas d’une révolte.

Quoi qu’il en soit de ces critiques,  » Révolte contre le Monde Moderne » est un livre à lire, c’est probablement le plus important livre de « métaphysique de l’histoire » qui soit. […]

chev.jpgL’EPEE DE LUMIERE ET LE CHEVALIER D’OCCIDENT

En 1937, dans « Le mystère du Graal et l’idée impériale gibeline », Évola apporte une nouvelle contribution importante à la restauration doctrinale de la tradition occidentale. Malheureusement, et encore une fois, il fausse en partie l’idée civilisatrice traditionnelle. Toute l’argumentation d’Evola consiste à dire que l’Église, en développant les valeurs d’une religiosité féminine, mystique, passive face au monde spirituel se révèle être inférieure à la tradition du Graal, qui représente l’idéal chevaleresque. Mais l’argument est spécieux car, si cette démonstration va de soi, elle ne permet pas d’en conclure que la contemplation puisse être au-dessous de l’action. La Chevalerie est supérieure parce qu’elle est plus profondément spirituelle, et non parce qu’elle manie les armes: quant à l’Église, tant qu’elle ne consiste qu’en un exotérisme religieux, elle ne représente pas la pure autorité spirituelle, elle n’est qu’un pouvoir religieux. Si bien que, si l’Église et la Chevalerie étaient vraiment ce qu’en dit Evola il faudrait dire que la Chevalerie est supérieure à l’Église parce qu’elle est plus spirituelle et non dire que le guerrier est supérieur au contemplatif. Tout ce qu’apporte Evola dans l’affaire c’est une fâcheuse équivoque, car, une fois posé que le guerrier est au-dessus du prêtre, il se laisse aller à considérer toute éthique guerrière comme potentiellement porteuse d’une plus haute spiritualité que le Christianisme ; de là découle l’erreur de son « action politique ».

Quoi qu’il en soit, ce livre se pose comme « une étude sérieuse et engagée sur le Graal et le gibelinisme « , ce qu’il est, incontestablement. […]

LA CHUTE DU CLUB DES SEIGNEURS

Cette même année 1937, il publia « Le mythe du sang » en rapport très étroit avec les doctrines racistes allemandes. Certes, dans cet ouvrage, et dans celui qui suivra en 1941 «Synthèse des doctrines de la race », Evola s’oppose aux idées racistes matérialistes d’un Rosenberg et leur substitue l’idée d’une race de l’esprit » dans laquelle la race physique n’est qu’un élément d’une vaste équation: « L’idée d’une race allemande – dit-il – est une absurdité ». « Mais -dit Guénon de ce livre – le mot même de race nous parait être employé d’une façon assez impropre et détournée car au fond, c’est bien plutôt de caste qu’il s’agit en réalité… alors pourquoi parler encore de « race », si ce n’est par une concession plutôt fâcheuse à certaines idées courantes, qui sont assurément fort éloignées de toute spiritualité? ». En 1941, et toujours dans le même genre d’équivoque, Evola publia « La doctrine aryenne de lutte et de victoire « . […]

Pour situer historiquement son action, précisons qu’il fut très proche des milieux germaniques conservateurs et aristocratiques qui se réclamaient du « prussianisme et cultivaient la nostalgie des chevaliers teutoniques ». « Himmler – continue Evola -me portait un intérêt particulier » ainsi que « le baron von Gleichen, dont j’étais un ami intime » et qui était lui-même le chef du « club des seigneurs ». « Je connaissais en outre intimement le chancelier von Pappen et, en Autriche, Karl Anton von Rohan, dans ce milieu opposé au « populisme dictatorial » du national socialisme ». Voici ce qu’il en fut en Italie du côté fasciste: « Au tout début de la guerre, Mussolini lut ma « Synthèse d’une doctrine de la race » et me fit chercher pour me féliciter et me demander de collaborer avec lui -Mais Duce, je ne suis pas fasciste- car je n’ai jamais été d’aucun parti…  » En fait, il travailla, comme écrivain et comme conférencier en Italie, en Allemagne et en Autriche, à la formation doctrinale de certains milieux proches du pouvoir. […]

Standing_Bodhisattva_Gandhara_Musee_Guimet.jpgLA GRANDE LIBERATION DU PRINCE SIDDHARTA

Très étonnamment, au milieu de tout cela, Evola publia en 1943 « la Doctrine de l’Éveil, essai sur l’ascèse bouddhique ». Le fait que ce livre essentiel et vraiment spirituel ait été publié au coeur de cette période truffée d’erreurs logiques et de drames montre que la personnalité et l’oeuvre d’Evola sont très difficiles à aborder. II existe le double risque d’adhérer à certaines voies d’action sous prétexte qu’elles ont été formulées par un homme dont la doctrine est souvent transcendante et de repousser une doctrine dont l’action qui prétend en découler s’est par trop évidemment fourvoyée.
[…]

L’ASCENSION SOLITAIRE OU LE SOUFFLE LIBRE DE L’ESPRIT

Dans un appendice sur « les limites de la régularité initiatique », Évola reconsidère les notions guénoniennes sur l’initiation dans une optique qui nous parait aussi indispensable qu’intéressante. « Contre le schéma guénonien en lui-même il n’y aurait pas grand-chose à objecter », dit-il, tout en soulignant malicieusement le « caractère presque bureaucratique de cette régularité ». Néanmoins sa critique porte sur plusieurs points. D’abord sur les « débouchés »: « Le Compagnonnage est une organisation initiatique résiduelle d’origine corporative, de portée fort restreinte et d’ailleurs limitée à la France »; « La Franc–Maçonnerie moderne est l’un des cas d’organisation dont l’élément vraiment spirituel s’est « retiré » et chez lesquels le « psychisme » restant a servi d’instrument à des forces ténébreuses, pour qui s’en tient au principe de juger de l’arbre à ses fruits »; quant au « christianisme, c’est une tradition mutilée en sa partie supérieure », toutes choses nous semble-t-il indéniables; ce qui permet à Evola d’ironiser, peut-être un peu facilement,sur les « rares allusions des premiers siècles chrétiens de notre ère ou de certains rites de l’Église grecque orthodoxe à la chasse desquels sont partis certains guénoniens ». Outre ces problèmes pratiques, Évola affirme: « La continuité – « des influences spirituelles » – est illusoire lorsque n’existent plus de représentants dignes et conscients d’une chaîne initiatique donnée ».Il se propose d’éviter deux écueils: d’une part, les fantasmes auto-initiatiques à la Steiner qui ne font qu’appliquer au « domaine de l’esprit l’idéal américain du self made man » et, d’autre part, « une conception proche de celle du – « péché originel » -selon laquelle l’homme, irrémédiablement taré, ne pourrait rien par lui-même ». […]

LE VISIONNAIRE FOUDROYE

« Il fut blessé à Vienne d’un éclat d’obus dans la colonne vertébrale vers les derniers jours d’avril 1945 au cours d’un bombardement aérien soviétique. A partir de cette date il resta paralysé des deux jambes sans aucun espoir de guérison » […]

UN EXPOSE DE LA VRAIE DOCTRINE TRANTRIQUE

C’est en 1949 qu’Évola reprit ses publications avec « Le yoga tantrique, sa métaphysique et ses pratiques », livre qui développait le premier essai de 1926.  » S’il advenait un jour -écrit Jean Varenne à propos d’Evola et de Guénon que fussent éditées les oeuvres complètes de ces deux seigneurs de la pensée, on verrait à quel point elles représentent les deux visages d’un seul et même mouvement ». « L’Homme et son devenir selon le Védanta » et « le Yoga Tantrique » illustrent parfaitement ce propos. […]

je-rcmm.jpgLES HOMMES AU MILIEU DES RUINES

En 1951 il publie un livre au titre évocateur de son sentiment « Les hommes au milieu des ruines ». Il s’agit, comme pour faire le point d’une action passée, de poser les principes d’une reconstitution européenne traditionnelle. Sont envisagées les notions de révolution traditionnelle, d’autorité, de hiérarchie et d’état organique. Evola y développe aussi d’intéressantes considérations sur l’économie moderne et les corporations, sur la stratégie de la guerre occulte et sur le problème de l’explosion démographique. La doctrine y est solide, mais lorsqu’il s’agit de désigner le milieu humain propre à servir de moteur à un tel mouvement, la solution apparaît presque débile: en étant à peine méchant, on pourrait penser qu’un recyclage métaphysique de quelques divisions de parachutistes nourrirait l’espoir d’Evola.

METAPHYSIQUE DU SEXE

Fruit d’une fabuleuse érudition, cet ouvrage parut en 1958. Évola commence par l’indispensable nettoyage d’un terrain qui est loin d’être « vierge ». « Ce n’est pas l’homme qui descend du singe par évolution, mais le singe qui descend de l’homme par involution ». […]

Ceci posé, la doctrine traditionnelle s’épanouit: « de la fréquentation, même sans contact, d’individus des deux sexes, naît, dans l’être le plus profond de l’un et de l’autre, une énergie spéciale ou « fluide » immatériel, appelé « tsing ». Celui-ci dérive uniquement de la polarité du ying et du yang ». Cet enseignement de la tradition chinoise se trouve confirmé par Swamy Shivananda Sarasvati: « La semence est une énergie dynamique qu’il faut convertir en énergie spirituelle (ojas) ». Cette opération, qui va à contresens de l’écoulement nature! des forces, « est appelée viparîta-karanî (opération de l’inversion) ». « Un homme n’aime pas une femme parce qu’elle est belle »; Evola, reprenant une idée connue dit: « Il aime parce qu’il aime, au–delà de toute logique, et précisément ce mystère révèle le magnétisme de l’amour ». « Le substratum du sexe est super-physique, il a son siège dans ce que, avec les Anciens, nous appelons l’âme du corps — »le corps subtil  » – « . « Le sexe qui existe dans le corps, existe aussi et d’abord dans l’âme et, dans une certaine mesure, dans l’esprit même ».
[…]

CHEVAUCHER LE TIGRE

Avec « Chevaucher le tigre », en 1961, Evola fait oeuvre vraiment originale. I! pousse jusqu’à !’extrême ses audaces de pensée et formule un guide de conduite pour l’homme qui doit vivre dans un monde où tout hurle à la face du ciel et qui, refusant de « hurler avec les loups  » veut faire de leurs cris une musique pour son âme. […]”

Les carnets du yoga, n°43, novembre 1982, pp. 2-26.

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vendredi, 21 février 2020

ACTUALITÉ DE CARL SCHMITT: Les notions de politique, de guerre discriminatoire et de grands espaces

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ACTUALITÉ DE CARL SCHMITT:

Les notions de politique, de guerre discriminatoire et de grands espaces

Sur le NOMOS de la Terre et la dissolution de l'ordre européen

par Irnerio Seminatore

Ex: http://www.ieri.be

TABLE DES MATIÈRES

La République de Weimar et ses débats

L'ami et l'ennemi

La théorie moderne de l’État

La dissolution de l'ordre européen

Union européenne et Confédération d’États. De la guerre inter-étatique à la "guerre civile mondiale"

Ordre cosmopolitique, logique de la terre  et droits circonscrits

Le "pluriversum" comme nouvel ordre planétaire

Le Nomos de la Terre, la criminalisation de l'ennemi et la géopolitique des grands espaces

Types de Guerre et ordres juridiques

L'unification des théâtres et la sécurité collective

Conflits et systèmes d'équilibre: C.Schmitt et H.Kissinger

Le dilemme de l'ordre international. Système de règles ou système de forces? 

L'Europe, la démondialisation et les dangers du consensus de masse.

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La République de Weimar et ses débats

Carl Schmitt (1888-1985),  figure centrale  de la "révolution conservatrice" allemande fut l'une des personnalités  marquantes du débat constitutionnel  de la République  de Weimar, puis de la montée et triomphe du national-socialisme des années 20 et 30.

Ses ouvrages et en particulier "La notion de politique" ne cessèrent d'être les références de base de la politologie allemande de l'époque.

Quant à cette notion, il bouleversa les paradigmes de la politique, comme lieu de discrimination de l'ami et de l'ennemi et dans le sillage  de celle-ci  il décela les fondements  des concepts de souveraineté et de décision, en gardant pour maîtres Machiavel, Bodin et Hobbes. Sa contribution est au confluant de doctrines et de situations diverses et elle est  redevable,pour l'aspect doctrinal de  la mise en relation de la métaphysique et de la théologie politiques, propres à  la tradition de la "Respublica Christiana" du Moyen Age , avec le rationalisme de la politique moderne et, pour la conjoncture politique et intellectuelle, de  la période d'incertitudes et d'instabilité, ouverte par le Traité de Versailles et par le passage de l'Empire allemand à la République de Weimar.

Lorsque parut, en 1927, la "Notion de politique", la plupart des politistes déduisaient la spécificité de la politique de la théorie générale de l’État. Or la politique est une activité primordiale, consubstantielle à la constitution de la société et précède l'invention moderne  de l’État, forme historique et périssable de la politique. Puisque Schmitt refuse de définir la politique par le droit ou par l'institution de l’État, il en radicalise le trait essentiel, celui d'une "relation spécifique et fondamentale, ne se laissant déduire d'aucune autre relation et à laquelle on peut réduire toute autre activité et tout motif politique, qui est celle de l'ami et de l'ennemi".

Dans la conception de Schmitt le primat du  politique sur le droit est fondé sur la distinction, selon laquelle le politique est constituant et le droit régulateur. Ce primat repose en effet  sur une décision souveraine, qui rend effectives, en temps de crise ,les situations d'exception, car "il n'existe pas de normes, que l'on puisse appliquer au cahos".

"Souverain est qui décide de l'exception en situation d'exception. En effet la normalité ne prouve rien et l'exception prouve tout, car la règle ne vit qu'à partir  de l'exception". Dans ces conditions, la dictature souveraine préserve l'unité, face au danger d'une situation prolongée de crise. Ici le risque extrême est la dangerosité existentielle de l'ennemi, à combattre et à anéantir. Dans ce cas la dictature du souverain rétablit l'ordre détruit, le droit bafoué et la sécurité menacée , par un pouvoir d'exception et d'urgence.

L'ami et l'ennemi

C'est par le primat du politique qu'on peut faire le partage entre l'ami et l'ennemi, fondement du concept de politique dans sa réalité existentielle, lorsque l’État est mis lui même en question et qu'une lutte est à mener sans limites juridiques.

La distinction entre l'ami et l'ennemi est d'exprimer le"degré d'intensité d'un lien, ou d'une séparation, d'une association ou d'une dissociation". Quant à la figure de l'ennemi, il s'agit d' un ennemi public (hostis) et non privé (inimicus), contre lequel une guerre est toujours possible.Or, pour qu'une guerre soit déclarée contre l'ennemi interne ou extérieur, il faut qu'un certain type d'ordre soit  remis en cause. Or,à l'époque de Weimar,cette remise en cause concernait la stabilité politique, par l'absence d'un État fort et d'une économe saine. Ce fut alors la raison pour laquelle, dès cette période, la constitution de l’État opposa C.Schmitt à l'inspiration libérale de la période et à la démocratie de masse, professés par les courants sociaux démocrates, en raison de leur capacité  de dissolution de l' homogénéité sociale du pays.

L'homogénéité est ici à entendre comme l'accord de tous sur les décisions fondamentales de l'être politique, ce qui constitue une masse en unité. Or la substance  de cet ensemble   est de l'ordre des sentiments et des affects, tandis que sa dissolution résulte de la problématisation de la raison moderne, sans foi ni transcendance.

Poussant plus loin sa critique de la  paralysie de la démocratie de Weimar, et opposant à l'idéologie du progrès  l'image de l’État qui décide et qui gouverne, Carl Schmitt blâme  la neutralisation et la dépolitisation du régime des partis, le parlamentarisme érodé et la ploutocratie, ainsi que la "passivité" de la bourgeoisie, comme classe "discutidora" (Donoso Cortès) et devient un partisan de "l’État fort" et  de la "démocratie plébiscitaire".

51mFmfLmnNL._SX319_BO1,204,203,200_.jpgLa théorie moderne de l’État


Quant à la Constitution de la République de Weimar, paralysée par le pluralisme des intérêts particuliers et le libéralisme montant, considéré comme l'indécision organisée au sein de débats parmementaires sans fin, l’État se  rend incapable, selon Schmitt,  d'affronter la démocratie de masse. En se démarquant des droits de l'homme universel, indépendants du droit positif,  Schmitt soutient l'idée que toute constitution politique résulte d'un ordre qui se rend effectif par le droit, sans s'identifier à celui-ci. Or, dans toute constitution le souverain,( homme ou office), crée le cadre des conditions préalables du droit, l'ordre fondateur, la constitution.  Sous cet angle, l’État moderne est  légitimé démocratiquement, mais la démocratie, comme régime politique, est conditionnée à son tour, par la forme d’État et par l'homogénéité du peuple.
Enfin, en matière de relations internationales, Schmitt est à considérer comme le dernier représentant du " Ius Publicum Europaeum", le courant de pensée qui esquissa la trame du droit public européen, fondé sur la reconnaissance de la légalité et légitimité du "droit à la guerre" des États , au XVI ème et XVIIème siècles, tant exalté au XVIIIème, remis en cause par la Révolution française, repris avec le Congrès de Vienne en 1815 et prolongé jusqu'à l'universalisme abstrait de la Société des Nations et des Nations Unies au XXème siècle.

La dissolution de l'ordre européen


L'universalisme des institutions internationales   du premier et du deuxième après guerre, est tenu comme inapte à concevoir la variété des formes de la communauté juridique mondiale , car fait défaut à la Société des Nations et aux Nations Unies "toute pensée constructive  et toute substance d'une communauté" de peuples.

Quant au système international international publique, l'architecture  de celui-ci ne peut être assurée par une quelconque application de la "théorie pure du droit" ,à la Kelsen, dérivée d'une "Grundnorm", car celle-ci est de nature logico-transcendentale et  occulte l'origine profonde des normes.

D'après le Traité de Versailles et vis à vis  de l'Allemagne, les institutions universelles prolongeraient, pour Schmitt, sous un manteau juridique formel, la situation de guerre, derrière un ordre de façade et une paix "inauthentique".

Dans le cadre d'une situation européenne instable ou menaçante, la possibilité de l’État de s'autoconserver repose, pour Schmit, sur une action qui émane de sa souveraineté et de son autonomie, la capacité d'une décision  d'exception.

Ainsi , la survie  d'une communauté politique a besoin d'un État pourvu du "ius belli", car la guerre comme inimitié radicale ne peut exister que d’État à État et seul l’État peut lui consacrer des ressources vitales.

Sous cet angle, l’État qui mène une politique pacifiste ou humanitaire cesse d'être un sujet politique ou une unité significative du système international (Union européenne), car seul l’État, caractérisé par un rapport stable à son territoire et qui reste dans une relation de possession naturelle avec lui,  peut assurer l'auto-conservation d'une société.

41-mdkcq6IL._SX328_BO1,204,203,200_.jpgUnion européenne et Confédération d’États. De la guerre inter-étatique à la "guerre civile mondiale"

La naissance de l'Union Européenne,dans les années 50, anticipant sur un monde pacifié, remplace l'ancien ordre étatique autour d'un concept dépolitisé et fonctionnel, l'intégration régionale, se situant entre les deux niveaux, du globalisme  et les États nationaux classiques. Elle marque la fin de la géopolitique traditionnelle, comme rivalité entre sujets belliqueux et résiste à la tendance continentale et eurasienne  des "grands espaces", ainsi qu'à la diversification du monde multipolaire.

Sa constitution d'acteur incomplet, lui interdit de se ranger du coté des puissances eurasiennes  et de pratiquer un jeu d' équilibre  et de contre-poids entre le pouvoir thalassocratique dominant et la logique continentale du Heartland. Par ailleurs elle participe du politéisme des valeurs,  propre à l'universalisme  mondialiste et ne peut saisir les occasions de l'ère post-moderne, pour profiter de la reconfiguration du monde.

Avec le désencrage de la Grande Bretagne du continent  se confirme  la prépondérance des puissances de la mer sur celles de la terre et la déterritorialisation du pouvoir d'éversion, qu'il prenne la forme du néo-terrorisme global ou d'autres formes de conflit armé. Ceci  implique  une transformation de la guerre inter-étatique en "guerre civile mondiale". La politique devient une simple potentialité d'opposition et de révolte, au cœur d'un universalisme nihiliste. Dans ce contexte le processus de démondialisation en cours, avec l'irruption du politique  et le retour sécuritaire de la forme étatique, implique une revendication d'indépendance et d'initiative stratégique, autrefois impensable, vis à vis de l'Amérique. Cette revendication postule également une réforme institutionnelle profonde .Selon l'ancien président de la Commission, Jacques Delors, l'Union européenne devrait s’inspirer du modèle de la confédération d’État et des capacités d'action de troisième force. Conçue en revanche comme espace euro-atlantique et comme appendice de l'Amérique, sa liberté de manœuvre est limitée, bien qu'elle puisse se donner le but commun de la conservation politique, si son existence politique était assortie d'un "ius belli". Or, l'objectif historique d'Hégémon est d'éviter la constitution d'un bloc continental eurasien, le Heartland, rivalisant avec les États-Unis. Pour rappel, l'évolution planétaire du monde, depuis l'effondrement de l'Union Soviétique a comporté une déterritorialisation des sociétés, dépourvues de frontières et la soumission du monde à la logique des flux, ou, en définitive,à la logique de la mer. Au même temps l'élargissement de l'Union européenne et de l'Otan vers les grands espaces d'Asie a substitué le principe d'ordre des relations internationales, de l'universalisme abstrait du droit international public aux rapports de force du réalisme classique.

Ordre, cosmopolitisme, logique de la terre et droits circonscrits


L'affaiblissement des États souverains, débuté dans les entre deux guerres,  fait perdre aux conflits leur caractère limité aux profit des notions de guerre illimitée et  d'alliances militaires, qui coïncident aujourd'hui, avec les pôles de pouvoirs d'un système désormais planétaire.

Par ailleurs, l'apparition des grands espaces, depuis le XVIème siècle avec la découverte des Amériques, pose  le problème d'un nouvel ordre, qui puisse devenir le fondement de nouvelles légitimités et allégeances.

Avec le "Nomos de la terre"(1950) Schmitt exprime l'exigence d'une réflexion qui rende possible l'instauration de ce  nouveau droit et identifie cette condition dans l'enracinement des  nouvelles lois dans la logique de la terre , comme unités d'un ordre et d'un espace circonscrits.

La  condition de l'espace est primordiale, pour Schmitt, car elle définit le fondement de la légalité internationale,  toute forme d' ordre comportant  une délimitation de l'espace. C'est d'ailleurs la raison pour laquelle la modernité occidentale peine à imposer des formes de pouvoir stables, puisqu'elle a remplacé l'ordre concret de la terre par l'ordre abstrait de la loi . On comprendra mieux l'opposition de Schmitt à la pensée positiviste (H.Kelsen) et à l'idéal cosmopolitique (E.Kant),car Schmitt fait appel au substrat originel de toute société, la terre,comme fondement ancestral du droit

L'occultation de l'origine des normes par H.Kelsen, fait rappeler à Schmitt la  conception pluraliste des sources du droit, comme socle de toutes les manifestations  de l'ordre social

Il en découle que tout peuple, est lié à son environnement géopolitique, dont il est empreint et que la négation, par les universalistes, de tout enracinement à une source de vie, est une négation des souverainetés qui s'y exercent.

La conception actuelle du "nouvel ordre mondial" (W.Bush) rompt avec la diversité des attachements aux sols, politiques et moraux, civils et religieux, par l'universalisme fictif d'un modèle  unique,le régime démocratique, comme modèle de déracinement et d'aliénation culturelle.

Ainsi , à titre de prévention, le "pluri-versum" des peuples et des États, qui  est le nom schmittien de la multipolarité actuelle,représente  la succession historique des souverainetés européennes et leur dépassement, dans  la perspective des "grands espaces" et dans l'irruption planétaire d' un ordre global.

9783428074716-fr.jpgLe "pluriversum" comme nouvel ordre planétaire

A la fin du deuxième conflit mondial, Schmitt tire le bilan de l'affaiblissement de l’État souverain et de la  fin du système international euro-centrique. Le constat d'un universalisme sans espace et d'un normativisme abstrait, dépourvu  d'une légalité sur  laquelle fonder des accords, pousse Schmitt à interroger le nouvel ordre planétaire, afin de dégager les règles communes à une pluralité d'acteurs dissemblables. Ça lui saute aux jeux avec évidence que le nouvel ordre ne peut être le produit d'une logique juridique, mais d'un ordre spatial délimité. Le nouveau Nomos,se dessine ainsi, comme"la forme immédiate, par laquelle l'ordre social et politique d'un peuple, devient spatialement visible". La lecture planétaire  de Schmitt est celle d'une diversification du monde en grands espaces autonomes, globalement opposés à l'universalisme de la puissance hégémonique et alternatif à un univers d'Etats-Nations déclinant. Le Nomos de la Terre, la criminalisation de l'ennemi et la géopolitique des grands espaces

Avec "Le Nomos de la Terre" (de 1950), Schmitt consacre sa réflexion aux relations internationales, une constante omniprésente de sa conception de la politique. Il semble même que les relations extérieures aient constituées une priorité sur la politique intérieure, où le critère de l'ami et de l'ennemi reste latent. Schmitt remonte en effet, dans cet ouvrage, aux origines ancestrales du droit inter-étatique, émanant de l'Europe, jusqu'au début de l'âge moderne, après l'effacement de la République Chrétienne et la fin des guerres de religions. Il repère là un ordre spatial, précédant l'ordre juridique, car, pour être concret et non "utopique", tout ordre juridique est , pour Carl Schmitt, un ordre de la terre et une délimitation territoriale . Contre " l'humanisme neutralisant" de More et d’Érasme, qui deviendra plus tard, la philosophie de la paix internationale de la Société des Nations et des Nations Unies, Schmitt, vise la limitation de la guerre et non la criminalisation de celle-ci (avec ses corrélats de crimes et d'atrocités). qui conduisent  à la "guerre totale" et à la volonté d'anéantissement de l'ennemi. En effet la criminalisation de l'ennemi en droit international du XXIème siècle par les tenants de la sécurité collective des Nations-unies, se démarque de la conception des juristes  du "Ius Publicum Europaeum", qui faisaient abstraction de la "guerre juste",sur la base du concept de guerre entre souverainetés, réciproquement égales et menant des guerres limitées. La philosophie  du nomos de la terre  est ainsi, pour résumer,  la limitation de la guerre, finalité essentielle de tout droit international, une guerre envisagée sous l'angle des transformations, qui lui font subir l'extension des "théâtres" et la nouvelle "géopolitique" de l'ordre juridique.

Types de guerre et ordres juridiques

Ainsi et de manière analytique Schmitt y met en évidence les transformations de la relation entre guerre et ordres normatifs.

Ainsi ,dans la "guerre juste", élaborée par les théologiens du Moyen Age,sous la double autorité du Pape et de l'Empereur, garants suprêmes d'un droit des gents, chrétien, européen et terrien , l'inégalité des adversaires était une supposition bien réelle, qui faisait de ce type de conflit une guerre unilatérale et limitée, au delà de la qualification juridique de la "iusta causa".

La guerre- duel, entre souverainetés régulières des temps modernes ( issues du traité de Westphalie, 1648 ), fondée sur l'égalité formelle des belligérants, demeurait bilatérale et circonscrite.

En revanche la guerre discriminatoire ou guerre sanction du XXème siècle tend à devenir totale,  sous l'effet des conceptions universalistes et "utopiques", étendues à un ordre global (l'émisphère occidental) et comporte la criminalisation de l'ennemi, dans  le but de l'éradiquer, en agresseur et en coupable, rabaissé au rang de criminel. L'exemple majeur a été  le Traité de Versailles, qui manqua à sa tache primordiale de rétablir la paix.

L'ouvrage est reparti en  quatre grandes sections, qui  scandent  l'élargissement de la scène géopolitique et différencient les nouveaux  théâtres sur la base de stratégies euro-centriques du monde.

A_La première partie repose sur l'idée que tout ordre juridique est situé dans une région du monde  et ancré dans les clôtures d'un sol. Une "prise de terres" ancestrale est donc le titre de légitimité fondamental de tout ordre juridique, qui implique souvent une action de guerre.

B-La deuxième  traite de l'expansion coloniale européenne vers le Nouveau Monde. Elle se traduit par la découverte  des Amériques et la délimitation de champs d'action distincts entre l'Espagne et le Portugal par deux lignes globales, fixant leurs zones respectives d'influence,de commerce et d'évangélisation ( traité de Tordesillas, 1494),intégrées par des "lignes d'amitié" assignées aux deux puissances neutres ,la France et la Grande Bretagne. Au delà régnait, en principe, par  convention admise ,un état de nature sans foi ni loi, où une guerre de conquête sans limites pouvait opposer les belligérants européens. La guerre était corsetée en Europe, dans l'utilisation de la violence armée,par l'impératif religieux de la République Chrétienne, de telle sorte que Grotius et  Pufendorf formalisèrent le "ius gentium", oubliant que le titre de légitimité des États souverains d'Europe découlait de la "découverte" et de "l'occupation" des terres des Amériques.

C-La troisième partie parvient à la description de la guerre-sanction. En effet, comme suite à une "prise de terre" planétaire de la part des puissances européennes s'affirme la coexistence de deux ordres concrets   aux statuts distincts, le statut homogène de la mer et les statuts hétérogènes des terres.
C'est seulement la puissance globale qui opère la  jonction entre ces deux ordres et garantit un équilibre de pouvoir entre terre et mer (l'Angleterre d'abord et les États-Unis ensuite), conforme à ses intérêts géopolitiques. On passe ainsi, à la fin du XIXème ,de l'ordre territorial et souverain de l'Europe, celui du "Ius publicum europaeum", purement inter-étatique, à un ordre d'essence mixte, qui distingue les relations  métropolitaines étatiques (ou européennes), des rapports  coloniaux, non étatiques  et non européens. Les grandes transformations géopolitiques entraînent avec elles ,des changements importants dans les deux sphères,  du droit privé et du droit publique, qui sont respectivement, topique et  concret le premier( le commerce) et utopique et abstrait le deuxième ( les droits universels). Dans le même temps la guerre devient limitée et d'occupation (en Europe),  mondiale , totale, illimitée et d'anéantissement (dans les deux hémisphères) La figure de l'ennemi change également de statut et configure la puissance hostile en ennemi de l'humanité, en figure éversive, par rapport à celle d'un acteur local, bien identifié et souverain . Le processus de criminalisation de la politique étrangère et mondiale s"achève enfin , par une plongée tragique, non pas dans  l'anarchie hobbesienne, mais dans une sorte de nihilisme apocalyptique.

D-Dans la quatrième partie Schmitt approfondit la dichotomie des deux ordres, métropolitain et colonial et analyse la fin du dualisme, qui a caractérisé le  "ius publicum européum", suite à l'émergence d'un droit international indifférencié, par l'affirmation  de la notion d'Occident au niveau planétaire (XXème siècle).

L'unification des théâtres et la sécurité collective

Les théâtres de guerre, jadis séparés, sont unifiés conceptuellement par une vision universaliste et utopique de l'ordre mondial, assurée par l'abstraction du droit, la moralisation des litiges et la doctrine de la sécurité collective (la SdN  et les ONU). Une sécurité,garantie  par l'interventionnisme de l'acteur hégémonique (les Etats-Unis), ou encore, par l'adoption d'une repartition territoriale du monde, qui intègre la conception "multipolaire" de la planète, dans  la défense concrète  du nouveau nomos  atlantique et globaliste, aujourd'hui à son déclin.

9783428158065.jpgSchmitt, en  excluant toute conception universaliste du droit international parvient à la conclusion que l'ordre du monde ne peut se réaliser sans antagonismes entre les grands espaces, ou sans la domination d'un centre sur sa périphérie. Toutefois il reconnaît l'exigence d'une autorité supérieure, en mesure de trancher sur les différends et les tensions entre forces régulières et irrégulière, intérieures et extérieures. Il est incontestable que l’État moderne se distingue de tous les autres, pour avoir dompté,  à l'intérieur de ses frontières,  la relation ami-ennemi , sans l'avoir totalement supprimée.

Par ailleurs et dans  l'ensemble de son œuvre, Schmitt semble privilégier la priorité de la politique extérieure sur la politique interne, confirmée par sa recherche en matière de droit international public, qui porte sur le  principe de limitation de la guerre et sur la source de stabilité,  constituée par l’enracinement géopolitique  de tout système normatif.

Ainsi se conclut l'immense effort de théorisation, entrepris sous la République de Weimar et achevé, en ses grandes lignes, avec le "Nomos de la Terre".

On passe du cadre intellectuel de la politique interne  et donc de la distinction entre l'ami et l'ennemi, avec, en corrélat, la problématique de l’État moderne et de ses oppositions intérieures maîtrisables , à l'ordre imprévisible des relations internationales de l'âge planétaire.

Conflits et systèmes d'équilibre : C. Schmitt et H. Kissinger

La conclusion du système de pensée schmittien, élaboré au courant de trente ans, viendra de Carl Schmitt lui même, avec l'observation selon laquelle :" La pratique du "Ius publicum Europaeum" tendait à comprendre le conflit, dans le cadre d'un système d'équilibres. Désormais on les universalise, au nom de l'unité du monde".

Conclusion à laquelle parviendra également H.Kissinger dans "L'Ordre du Monde", lorsqu'il essaie de définir l'ordre souhaitable du XXIème siècle,  sur le modèle de la paix  de Westphalie (1648), rappelant  que "La paix de Westphalie ne reflétait pas une perspective morale unique, .......mais reposait sur un système d’États indépendants, acceptant que leurs ambitions respectives soient freinées par l'équilibre général des forces, réduisant l'ampleur des conflits ".

Le dilemme de l'ordre international. Système de règles ou système de forces?

Comment parvenir à la constitution d'une structure d'ordre ,capable de limiter les conflits et de préserver la paix ,dans un monde global?

C'est la question ontologique du système international actuel.

Par un système de règles admises et respectées, qui limitent  la liberté d'action des États, ou par un équilibre des forces, qui interviennent en cas d'effondrement des règles?

41tQLwk8LyL.jpgCe dilemme et cette  problématique rapprochent Schmitt et Kissinger, au delà de leur plaidoirie respective en faveur de l'Allemagne ou des Etats- Unis.

Deux éléments sont aujourd'hui communs à l'analyse des réalités internationales et apparaissent tout à fait incontournables, la multiplicité des acteurs, des civilisations et des cultures et, à l'opposé, l'unicité du cadre d'action, l'unité d' un monde clos, limité et interdépendant .

En revanche deux moyens demeurent optionnels: celui des règles communes d'ordre conventionnel et celui du système des forces, aux références divergentes et aux objectifs incompatibles.

Nous retrouvons dans ce dilemme de l'art de gouverner et de la High Polics l'éternelle opposition entre la loi et la force,  au service de l'idéal de la paix et de la sécurité, auquel ont consacré leurs esprits Schmitt et Kissinger,le premier avec la dialectique de l'ami et de l'ennemi, le deuxième dans la perspective du consensus et du rôle de l"Amérique, les deux en l'absence de la figure du perturbateur radical , la figure du peuple.

L'Europe, la démondialisation et le danger du consensus de masse

Au moment où l’irruption de la politique dans un monde dépolitisé, éveille  les peuples sous la bannière inattendue du populisme ou de l'éversion violente, suggérant l'exigence d'un nouveau compromis historique entre le démos et les élites, le danger de la "guerre civile mondiale" vient de l'absence conjointe du consensus de masse et de la négation de normes universelles observées.

Il en découle la perte de contrôle des pouvoirs, affranchis de la logique des équilibres et des contre-poids assurés au système de Westphalie par l'assurance des rapports de force, désagrégés aujourd'hui par le choc des civilisations et des cultures, qui engendrent un ordre chaotique du monde et une vision nihiliste de l’avenir.

 

 

Terre & Peuple Magazine n°82 - Quel avenir pour les autochtones d'Europe?

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Communiqué de "Terre & Peuple-Wallonie":

Terre & Peuple Magazine n°82

Quel avenir pour les autochtones d'Europe?

Le numéro 82 de la revue TERRE & PEUPLE Magazine est centré sur le thème ‘Quel avenir pour les autochtones d’Europe ?’.

Dans son éditorial ‘Le poids du réel’, Pierre Vial pointe la crise de confiance des Français : selon un sondage IPSOS, 75% n’écoutent même plus les ‘ficelles’ des politiciens.  Il cite Patrick Boucheron, professeur au Collège de France, pour qui le discours de Macron sur l’immigration est « non seulement mensonger, mais incompréhensible » !  Alors que la justice échoue à protéger les victimes des violences : ce n’est que dans 65% des cas que la police a été saisie et dans 18% que les procès-verbaux ont débouché sur des investigations.  Dans le même temps, la ministre Belloubet proclame : « Pour qu’il n’y ait pas de sentiment d’impunité, il doit toujours y avoir une réponse pénale ! »  Dans la foulée, la porte-parole du gouvernement Sibeth Ndiaye admet : « L’ambiance est à la sinistrose, mais il y a des signaux positifs ! »

La parution du tome II des Mémoires de Jean-Marie Le Pen justifie bien un entretien avec le Menhir, lequel démarre d’emblée sur l’explosion démographique (de deux à huit milliards d’humains sur un demi-siècle) et sur notre destruction dans moins de trente ans.  « Pour un peuple, survivre n’est pas un droit, mais un devoir à assumer sans faillir, comme la défense de son territoire dont il faut maîtriser l’accès.  Pendant 40 ans, nous avons, par idéologie ou par faiblesse, créé un appel de populations.  Il faut à présent les dissuader et les prévenir que ceux qui viennent sans y être autorisés n’auront droit à rien.  Mais que nous sommes prêts à les aider chez eux.  Le temps presse pour nous, peuple vieillissant.  En France, la gauche est sanctifiée et exploite, depuis la Libération, un monopole de la moralité.  Toute action débutant par une affirmation de soi, j’ai défini le Front National comme le parti de la droite nationale, populaire et sociale.  Chirac, élu par la droite, faisait une politique de gauche.  La division de la gauche m’a permis de supplanter Jospin, qui aurait été élu au second tour.  Ils ont eu peur et ont mobilisé tout le monde sur le pont, y compris l’Assemblée des évêques !  Chirac a trahi la tradition républicaine en refusant le débat de l’entre-deux tours.  Le FN a servi d’assistante sociale au peuple français, en lui faisant prendre conscience du péril qu’il court.  Notamment la révolution mondialiste New Age sous la houlette de l’ONU, dont les parrains en France tiennent le haut du pavé intellectuel et politique, bobos, gauche caviar et une certaine droite qui en attend de la main d’œuvre à bas salaires.  Les peuples pauvres n’attendront pas pour débouler aux endroits les plus favorables.  De la part des classes moyennes menacées, on ne relève que des résistances sporadiques minoritaires.  Le mouvement des Gilets Jaunes est original : le gilet, protection imposée par l’état, fait l’unité !  Il ne faut pas chercher à se dédiaboliser, mais au contraire s’affirmer et tenter des actions communes avec nos partenaires du Continent boréal, les pays slaves compris. »

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Robert Dun à la fin de sa vie: une chaleur humaine, un enthousiasme, un anarchisme nietzschéen des plus originaux

Thierry Durolle traite du retour à la terre comme stratégie de survie.  Il est lui-même un néo-rural.  Issu d’une famille orientée fortement à gauche, le collège, communautariste, l’a fait virer.  L’éducation nationale ne l’a pas convaincu et la sacro-sainte Shoah l’a laissé de marbre.  Il a exécré le mode de vie urbain, l’insécurité, le qui-vive perpétuel.  C’est alors qu’il a découvert le combat écologiste de Robert Dun et celui de Richard Walther Darré.  Et ensuite le numéro de Terre & Peuple Magazine consacré à l’écologie.  Les embrouilles avec les allochtones n’ont fait que fortifier son envie de quitter une ville acquise à l’ennemi.  La chance l’a fait rencontrer la mère de ses enfants qui, partageant par bonheur sa Weltanschauung, a fait le choix de les faire grandir en liaison avec la nature.  Le secteur isolé qu’ils ont choisi comportait une forte concentration d’anthroposophes et de cultivateurs biologiques, dont plusieurs familles ‘europaïennes’.  Il faut toutefois se garder d’idéaliser la vie campagnarde : tout y est plus difficile.  Disposer d’une voiture y est vital.  Les autochtones sont affectés des mêmes tares que les citadins et s’isoler est impossible.  A des rares exceptions, les ruraux n’acceptent pas les intrus.  Les exploitants agricoles, à bout de souffle, sont des empoisonneurs, volontiers malveillants.  Les cultivateurs bio sont nombreux, grâce notamment à une école Steiner.  Humanistes pro-migrants, ils n’en sont pas moins plus intéressants que les ruraux de base.  L’auteur se félicite de ne pas habiter le bourg, mais une maison en pleine nature.  Il avertit contre les ruses des malhonnêtes, qui pullulent dans les campagnes.  Le rythme de vie y est plus lent et moins stressant.  L’objectif d’un païen, d’un paganus, c’est de s’enraciner et dès lors de décélérer.

Roberto Fiorini nous interpelle sur la nécessité de penser à notre avenir très incertain de façon collective, car résister seul n’a que peu d’intérêt.  Il rappelle que c’est notamment Robert Dun qui, un des premiers, a suggéré un retour à la terre, dans un regroupement de familles ethniquement harmonieux.  En pratiquant une alimentation saine, d’origine connue et tant que possible en autonomie/autarcie relative. Il insiste sur le fait que notre alimentation est notre médication ! D’abord se rapproprier les tâches de la culture et de l’élevage, de la production d’électricité, du bois de chauffage, de l’eau potable…  Pour en vivre ou tout au moins retrouver les gestes essentiels, quitte à conserver une source de revenus à côté.  Tout en se recentrant sur l’instruction et l’éducation des enfants, pour les rendre plus forts que nous.  Tout cela dans le cadre d’une solidarité responsable avec les autres familles de la communauté.  En pratiquant la coopération et l’entraide mutuelle, en recherchant les activités communes, en partageant les plaisirs et les fêtes saisonnières, avec leurs chants et leurs danses.  Mais en demeurant toutefois lucidement conscients que la vie impose de s’adapter aux circonstances de l’évolution.  Il souligne l’importance de l’autogestion dans le processus de décision, et de son adaptation aux circonstances et aux goûts de chaque groupe.  Il insiste aussi sur la nécessité de mettre en œuvre une véritable bienveillance communautaire, socle de la solidarité.  Celle-ci requiert de chacun la frugalité, le détachement des appétits personnels excessifs et surtout la volonté de faire le bien des siens.

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Pierre-Paul Jobert s’attache à situer et évaluer la menace que font peser certains progrès techniques, en biotechnologie, en cybernétique, en intelligence artificielle.  Il invite les traditionalistes que nous sommes à prendre attitude en évitant de s’enfermer dans un choix entre nostalgie ou modernité.  Il prévient contre la vision déformée que peuvent inspirer sur la matière des fictions futurologues, romanesque ou cinématographique ou des vulgarisations par des auteurs dont l’autorité se mesure pour l’essentiel à leurs succès de librairie.  L’IA et la robotique n’en mettent pas moins en question les notions de travail et de travailleurs.  La caste de ces derniers tendrait à se limiter à ceux qui auront à compléter l’IA et à la guider.  Mais l’IA est en mesure de suppléer, voire de remplacer avantageusement l’opérateur humain dans pratiquement les sept types d’intelligence que distingue Howard Gardner, à savoir les intelligences linguistique, logico-mathématique, visuelle, musicale, corporelle-kinesthésique, interpersonnelle-sociale, intrapersonnelle.  En fin de compte, il n’y aurait plus guère qu’en matière d’intelligence émotionnelle et de créativité que l’IA resterait à la traîne.  L’intelligence émotionnelle est celle de l’esthétique, celle de la lecture introspective de la douleur et de la finitude.  Celle qui suggère à notre auteur la gymnastique mentale de la méditation.  Pour ce qui est de la créativité, il n’y a pratiquement que dans l’innovation de rupture que l’IA peut être surclassée.  Mais se pose la question : à quoi doit servir notre travail ?  A produire un résultat désiré : hier c’était connaître et conquérir ; aujourd’hui c’est consommer et jouir ; demain ce sera quoi ?  Pour nous Gaulois, ce sera le désir d’être nous-mêmes, la volonté de puissance.  Faisons que notre désir ne change pas d’orientation.  Mais ne détournons pas les yeux devant les réalisations des hautes technologies au seul motif qu’elles servent un système détestable.  Recevons l’IA pour comprendre son fonctionnement et comment en tirer parti pour augmenter l’influence de notre peuple.  Pour faire grandir ses élites en étant ancrés dans le temps, dans la perspective du futur et non plus seulement pour survivre.

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Jean-Patrick Arteault définit la notion d’autochtone.  Il revendique cette qualité pour les Albo-Européens, ceux qui ont établi avec la terre d’Europe des liens millénaires, d’une durée assez longue pour être considérés comme permanents, structurés par la vision indo-européenne, un inconscient culturel bâti sur la longue durée.  Ils sont les autochtones d’Europe, comme les Sami le sont de la Laponie, ce qui leur confère avec la terre ancestrale un rapport privilégié, spirituel, culturel et politique.  L’allochtone a ce même rapport avec une autre terre.  Antonin Campana, qui anime le blog Terre Autochtone, y a diffusé le résumé de son livre ‘Grand Remplacement : Que faire’, lequel propose une stratégie de libération.  Pour Jean-Patrick Arteault, cet ouvrage est l’équivalent de ‘L’Etat Juif’ de Théodore Herzl.  Il fait remarquer qu’il ne s’est passé que cinquante-deux ans entre la parution de celui-ci et la déclaration d’indépendance d’Israël.  Il juge peu probable l’effondrement total que présupposent les stratégies survivalistes.  Aucune d’entre elles ne permettrait d’y faire face.  Les identitaires réagissent au Grand Remplacement sans en prendre la mesure ni réaliser que l’Etat prête la main à la disparition des autochtones.  Le monde des nations est mort.  Que son effondrement s’opère brutalement est moins probable que dans une succession de chocs, de crises, de guerres.  L’oligarchie viserait à se passer de la majeure partie des classes populaires et moyennes, au moyen de l’appauvrissement, de la dégradation de l’enseignement et de la réflexion autonome, de l’affaiblissement de la cohésion sociale et par un encadrement techno-policier qui ne se préoccupe même plus de dissimuler la fin programmée des libertés publiques.  Le survivalisme n’est dès lors plus seulement une précaution, mais une vision politique : l’édification de communautés autonomes, solidaires et puissantes, qui attirent et rayonnent. La Base Autonome Durable devenant Zone Autochtone Défendable avant de devenir Zone Libérée.  Chaque extension de ZAD doit s’accompagner d’une structuration politique.  Le premier stade est la capacité de supporter les chocs.  L’autonomie ne peut pas être repli devant la technologie, mais synthèse archéo-futuriste d’Européens à la fois völkisch et faustiens.  La solidarité doit s’abstenir d’intervenir au profit de l’allochtone, du traître et du mouton imbécile.  Survivre dans des réserves n’est pas un destin acceptable, d’autant moins que le système peut se dégrader insensiblement, son architecture permettant aux oligarques et à leurs serviteurs de continuer de vivre bien.  C’est pourquoi il nous faut ne rien lâcher.

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Johan Morgan rappelle que l’histoire de la ZAD de ND-des-Landes est celle d’une victoire des zadistes.  En 1962, l’exode rural vers les villes avait inspiré une loi instituant des ZAD (zones d’aménagement différé), dans lesquelles l’administration disposait d’un droit de préemption en vue d’y aménager des équipements à moindre coût, en l’espèce un aéroport sur 1.350 Ha.  Le choc pétrolier a remisé le projet, qui n’est ressorti qu’en 2000, pour être enfin déclaré d’utilité publique en 2008.  Des associations locales, des partis du centre et de gauche et des mouvements écologistes organisent une première occupation en 2009.  L’entreprise Vinci ayant obtenu la concession du chantier, les actions se multiplient : squat des bâtiments expropriés, sabotages, occupations de fortune, barrages routiers, entartages d’élus, attaques de permanences PS, arrestations, procès…  Soutenus par les black Blocks et autres antifas, les défenseurs sont déterminés et l’opération de police César est un fiasco   .  Le 17 novembre 2012, une manifestation internationale rassemble quarante mille personnes sur le site.  Beaucoup s’engagent comme volontaires sur les chantiers, dans un mouvement de solidarité communautaire, car la diversité y est moins que discrète.  Et ce n’est pas qu’une favela de plus, car les gens sérieux entreprennent aussitôt des activités agricoles et d’élevage, montent des serres, installent des ruches, plantent des arbres fruitiers.  Ils montent un centre d’accueil, une infirmerie, une boulangerie, une bibliothèque, un hebdomadaire, une radio pirate, une garderie, un conseil de médiation, des soirées de projections, de débats, de concerts.  A cela, l’Etat et Vinci opposent une stratégie d’usure par les procédures, la démoralisation, l’asphyxie financière.  Les zadistes tiennent bon en multipliant les recours.  Jusqu’en 2018, quand le projet d’aéroport est abandonné.  Mais les maraîchers et les éleveurs continuent d’occuper le terrain.  Le 24 mai, 1.800 gendarmes appuyés par des hélicoptères et des blindés, tirent plus de mille grenades dont les fameuses GL1-F4 qui font leurs premières victimes.  Les constructions sont en grande partie rasées.   1.200 Ha se retrouvent disponibles pour les agriculteurs « historiques », qui se laisseraient tenter par le piège d’une agriculture ultra-productive.  Les zadistes exploitants qui souhaitent continuer doivent solliciter des conventions d’occupation précaire, voire de fermage.  On peut en conclure que les actions populaires ont donc encore du poids.  A défaut d’apporter une bonne réponse, les zadistes ont posé les bonnes questions !

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Robert Dragan se demande s’il faut redouter l’IA (intelligence artificielle) ou seulement ceux de ses ‘spécialistes’ qui s’ingénient à terroriser la masse de leurs lecteurs.  L’hypothèse, vertigineuse, de l’autonomisation de la technologie est nourrie par la réalité d’une accélération continue du traitement des données.  Il est significatif que des scientifiques de la branche préfèrent formuler certaines hypothèses dans des romans de science-fiction, voire des prophéties d’hybridation à brève échéance de l’humanité aux machines.  On observe d’ailleurs que la progression n’est pas linéaire et commence à se tasser.  Dans tout système physique, il y a trois barrières : spatio-temporelle, quantique et thermo-dynamique.  La miniaturiasation se heurte à la muraille du silicium, en attendant la découverte de limites plus élevées.  L’algorithme d’apprentissage de la machine par renforcement est nécessairement l’œuvre d’un programmeur.  C’est dans une virée anticléricale que les philosophes matérialistes du XVIIIe siècle ont conçu l’homme comme une machine, mais l’esprit humain est une ‘matière’ largement inconnue.  On lui compte quatre dimensions en interconnexion permanente : mémoire-langage-volonté-émotion, dont les machines intelligentes ne présentent qu’un simulacre.  Notre dépendance à leur égard n’est pas sans danger.  Scientifiques et entrepreneurs affectent de s’en inquiéter et surfent sur la vague pour lever des fonds (voir la lettre ouverte d’une centaine de chercheurs réputés qui critiquent le projet Cerveau Humain financé par l’Union Européenne à hauteur d’un milliard d’euros).  Que les tenants de la Singularité technologique affirment « La nature est mal faite : il faut la réparer. » relève du mythe du Golem.  Notre intelligence ne procède pas de notre vitesse à répondre à des choix binaires, mais de notre vouloir fondé sur notre psychologie basée sur notre sensibilité et notre volonté.  Notre cerveau (et l’esprit qu’il contient) est lié à notre corps, n’en déplaise à la caste des grands entrepreneurs et des scientifiques qui projettent de nous assujettir.

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Thierry Durolle interroge Sarah Dye, une patriote identitaire dans l’Etat d’Indiana.  Maraîchère biologique, elle vend au marché de la ville proche les légumes qu’elle cultive sur une parcelle de 1,5 Ha.  Elle a fait partie d’un mouvement gauchiste de ré-ensauvagement anarcho-primitiviste et elle a, durant des années, habité une yourte de toile.  A partir du moment où son couple a donné le jour à des enfants, il a été décidé de leur accorder l’eau courante chaude et froide et l’électricité.  Outre des légumes courants, elle cultive des aromates.  Elle ne laboure qu’avec des outils manuels.  Elle fertilise avec du compost et paille pour réduire le besoin d’eau.  Pour garantir ses semis de printemps, elle a monté une serre chauffée à l’électricité.  Les enfants assument leur part des travaux.  Chaque vendredi est consacré (dix à douze heures) à récolter et conditionner en vue du marché du samedi.  Sarah Dye élève des moutons Shetland, pour leur laine qu’elle a appris à filer et à tisser.  Dans sa région, une petite agriculture biologique survit grâce à une clientèle bourgeoise et à quelques bons restaurants.  Grâce aussi à des subventions publiques pour construire des serres-tunnels, lesquelles permettent d’allonger la saison.  Sarah cultive avec amour un patrimoine culturel européen, qu’elle a recueilli dans les histoires merveilleuses de sa grand-mère scandinave.  Adolescente, elle avait été endoctrinée au modernisme anti-blanc, le mouvement anarcho-primitiviste étant lui aussi gangréné.  C’est avec son premier enfant que le couple s’est détaché de cet endoctrinement.  Il est soucieux de protéger ses enfants en leur limitant la télévision, les dessins animés, les faux héros et en les instruisant à la maison.  Et en les prévenant contre le globalisme. Et en leur transmettant les savoir-faire traditionnels, ainsi que tous les peuples devraient pratiquer pour préserver leur héritage.  Seuls les Européens sont punis d’interdiction par l’hypocrisie de la gauche radicale et des marxistes culturels.  Identity Evropa, le mouvement identitaire de Sarah, s’appelle désormais American Identity Movement.  Depuis plusieurs mois, des groupes antifas et radicaux de gauche manifestent sur le marché où Sarah propose les produits de ses cultures, pour organiser leur boycott.  Mais surtout pour empêcher Sarah d’en persuader d’autres d’adopter un mode de vie enraciné : un peuple déraciné est plus aisé à contrôler.  Aujourd’hui, l’acte le plus révolutionnaire est fonder une famille et cultiver un jardin.  C’est aussi la voie de la sagesse.  Pour sarah, les blancs d’Amérique sont de la famille de ceux d’Europe.

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Johan Morgan interroge Vik Gadsden, auteur de la chaîne YouTube qui porte son nom.  L’émetteur public France Culture s’est appliqué à la disqualifier à l’occasion du premier Salon du Survivalisme, en la qualifiant de « survivaliste traditionnelle de la sphère xénophobe et complotiste ».  Alors que la chaîne s’attache en fait à être généraliste et neutre, par souci de toucher le public le plus large possible.  Mais certains sujets (l’accès aux armes à feu, la défense des siens, les tactiques paramilitaires de survie, etc) peuvent apparaître, à des journalistes du service public, de l’ivraie d’extrême droite à arracher hors du bon grain néo-survivaliste de gauche.  Après moins de quatre ans d’existence, la chaîne de Vik Gadsden regroupe une ‘communauté’ de plus de vingt mille abonnés, presque tous des individus de sexe masculin, blancs, âgés entre 15 et 45 ans.  Depuis une dizaine d’années, le survivalisme est devenu une mode et un marché, avec des salons, des magazines, une demande de matériels, mais avant tout de connaissances et de compétences.  Drogués du consumérisme, seuls les blancs, fourmis parmi les cigales, paraissent mordus.  Vik Gadsden lui-même vit avec sa femme de manière austère, mais libre, dans un Van aménagé qui lui permet de visiter ses gens.  L’an dernier, sur la chaîne survivaliste d’Alex Ricwald, Vik Gadsden a traité de l’entraide clanique et de la dimension éventuellement païenne du clan.  Pour ce qui le concerne personnellement, par réaction identitaire aux monothéismes universalistes, conquérants et haineux, le paganisme européen éveille en lui des échos, notamment par sa vision du monde et du temps en cycles perpétuellement recommencés.  Un ami lui a offert une roue solaire.  Elle lui évoque notre place dans l’univers, les points cardinaux, les quatre saisons.  Il juge naturel de la porter.

Robert Dragan dénonce la ministre de la Santé Agnès Buzyn qui a décrété la mort de l’homéopathie.  Elle fonde sa condamnation sur un rapport de 2015 du HMRC, le conseil national australien pour la santé et la recherche médicale, qui concluait : « Il n’y a pas de problèmes de santé pour lesquels il existe des preuves fiables de l’efficacité de l’homéopathie. »  Sur quoi l’Association australienne d’Homéopathie a mené une enquête sur le comportement du HMRC en s’appuyant sur une analyse approfondie de l’Homeopathy Research Institute.  Ces travaux ont mis en évidence des fautes procédurales et scientifiques graves.  Au mois d’août dernier, le NHMRC a publié un projet de rapport de 2012 qui, à rebours de celui de 2015, concluait qu’il existait bien, dans cinq états pathologiques « des preuves encourageantes de l’efficacité de l’homéopathie ».  Le professeur Anne Kelso, directeur général du NHMRC, a souligné : « Contrairement à certaines affirmations, l’examen n’a pas conclu que l’homéopathie est inefficace. »  Il est rappelé que la désignation de la ministre Buzyn a posé un embarrassant problème de conflit d’intérêts, de même que la reconduction du mandat de son mari Yves Lévy comme directeur général de l’INSERM, l’Institut national de la santé et de la recherche médicale !

Les juges contre la démocratie...

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Les juges contre la démocratie...

Entretien avec Anne-Marie Le Pourhiet 
Ex: http://metapoinfos.hautetfort.com

Nous reproduisons ci-dessous un entretien avec Anne-Marie Le Pourhiet, cueilli sur Figaro Vox et consacré à la montée en puissance des pouvoirs juridictionnels face à la souveraineté des États et à l’auto-détermination de leurs peuples. Anne-Marie Le Pourhiet est professeur de droit public à l’université Rennes-I et vice-président de l’Association française de droit constitutionnel.

Salvini devant les tribunaux: les juges contre la démocratie?

FIGAROVOX.- Le Sénat italien, à la suite d’une demande d’un tribunal de Catane, a décidé de renvoyer en justice Matteo Salvini pour séquestration de migrants, celui-ci ayant bloqué un bateau de migrants au large de la Sicile lorsqu’il était ministre de l’intérieur. De telles mesures visant à limiter l’immigration clandestine sont pourtant soutenues par une majorité des Italiens. Cette décision révèle-t-elle un retournement du droit contre la volonté générale?

Anne-Marie LE POURHIET: C’est beaucoup dire. S’il s’agissait d’un contentieux administratif tendant à faire admettre la responsabilité de l’État italien pour faute résultant de la violation du droit international humanitaire ou des normes européennes, on pourrait parler de conflit entre la démocratie et le droit. Mais ici, il s’agit de poursuites pénales visant la personne d’un ex-ministre de l’intérieur (et vice-président du Conseil) engagées sur le fondement du Code pénal italien pour «abus de pouvoir et séquestration de personnes», ce qui est pour le moins fantaisiste. C’est d’autant plus étonnant qu’un décret-loi (équivalent des ordonnances françaises) adopté en juin 2019 par le gouvernement Conte avait justement renforcé les pouvoirs du ministre de l’intérieur pour refuser l’entrée des navires de migrants dans les ports italiens. Ce n’est pas la première ni la dernière procédure de ce type engagée par des procureurs siciliens contre Matteo Salvini. Ce qui change c’est qu’à la faveur du renversement de coalition politique opéré l’été dernier, le Sénat a, cette fois, levé l’immunité, dans un revirement parfaitement cocasse digne de la commedia dell’arte où l’on voit les parlementaires «Cinq étoiles» voter exactement en février le contraire de ce qu’ils avaient voté en mars pour lâcher aujourd’hui le vice-président du gouvernement qu’ils soutenaient hier.

Nous sommes davantage ici face à un phénomène de procureurs militants qui opèrent sur fond de querelles politiciennes incohérentes. On ne sait pas non plus s’il y a des ONG derrière les poursuites pénales du parquet de Catane, mais c’est assez probable, sachant que Salvini est évidemment la bête noire des militants pro-migrants.

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Ces pressions sont-elles particulièrement fortes sur la question migratoire? On se souvient du Pacte de Marrakech qui présentait les migrations comme des «facteurs de prospérité, d’innovation et de développement durable». Plus récemment, un collège d’experts a remis à Emmanuel Macron et au gouvernement un rapport appelant à amender une politique migratoire jugée trop restrictive...

Il y a évidemment une pression idéologique très forte en Europe, dirigée contre le modèle wesphalien d’État-Nation et contre la protection qu’il suppose de la souveraineté et des frontières nationales. Les «valeurs» de l’Union européenne inscrites à l’article 2 du traité nous imposent la «tolérance», le respect des droits de l’homme «y compris des droits des personnes appartenant à des minorités» et surtout l’incontournable «non-discrimination» conçue comme une abolition de toutes les distinctions et hiérarchies, à commencer par celles qui séparent le national de l’étranger.

Le rapport du Parlement européen du 4 juillet 2018 invitant à ouvrir une procédure de sanction contre la Hongrie pour violation des «valeurs» de l’Union contient trois pages consacrés aux «Droits fondamentaux des migrants, des demandeurs d’asile et des réfugiés» mettant en cause notamment le législateur hongrois qui ne serait pas suffisamment accueillant ni pour les migrants ni pour les ONG qui les soutiennent. Comme par hasard, juste deux jours après la publication du rapport Sargentini, le Conseil constitutionnel français censurait une disposition législative réprimant l’aide aux migrants illégaux au nom d’un principe de fraternité universelle sorti de nulle part mais ressemblant comme deux gouttes d’eau au sans-frontiérisme dominant dans les institutions européennes et dans les ONG qui les influencent.

Cette montée en puissance du pouvoir juridictionnel répond manifestement à une logique d’importation. D’où vient-elle historiquement?

Elle est avant tout d’origine anglo-saxonne car la common law fait depuis toujours la part belle à la jurisprudence alors que le droit romain imprègne davantage le droit continental. Mais c’est évidemment la construction européenne qui est devenue l’élément moteur de ce gouvernement des juges puisque c’est sur leur servilité que repose entièrement le système de primauté des normes européennes sur le droit national. Or ces normes européennes véhiculent justement le modèle multiculturel nord-américain hyper-individualiste. C’est pour cela que la Hongrie et la Pologne, en particulier, sont dans le collimateur de l’Union au sujet du statut et de la composition de leurs tribunaux supérieurs. La commission européenne redoute que les pouvoirs polonais ou hongrois ne désignent des juges peu favorables aux normes européennes.

Pire, ce sont les constitutions mêmes de ces États, c’est-à-dire leurs lois fondamentales souveraines qui sont critiquées et accusées de ne pas correspondre aux «valeurs» de l’Union. Le rapport Sargentini reproche ainsi à la Constitution hongroise de retenir, entre autres abominations, une «conception obsolète de la famille». De son côté, la France a eu le droit, en 2008, à un rapport hallucinant de l’«experte indépendante» du Conseil des droits de l’homme de l’ONU, Mme Gay McDougall, clouant au pilori le modèle républicain français jugé insuffisamment favorable aux droits des minorités et nous enjoignant de modifier la Constitution ou au moins son interprétation! La souveraineté des États et l’auto-détermination de leurs peuples n’existent plus pour les ONG et les institutions supranationales qu’elles manipulent.

En quoi cette évolution s’inscrit-elle à rebours du modèle historique français?

En France, la Révolution française, dans la continuité des monarques de l’Ancien régime, a fermement interdit aux juges de s’immiscer dans l’exercice des pouvoirs législatif et exécutif. Le juge, chez nous, doit être la simple «bouche de la loi», elle-même votée par les citoyens ou leurs représentants, qui l’applique fidèlement et objectivement dans les litiges. La loi des 16 et 27 août 1790 dispose: «Les tribunaux ne pourront ni directement, ni indirectement, prendre part à l’exercice du pouvoir législatif, ni empêcher ou suspendre l’exécution des décrets du corps législatif sanctionnés par le Roi, à peine de forfaiture». Il s’agissait, bien entendu, d’empêcher des cours aristocratiques, réputées réactionnaires, de s’opposer à l’application de la loi «expression de la volonté générale» dans un nouveau régime qui se voulait démocratique. Le Code pénal de 1810 punit même de la dégradation civique le magistrat qui aura suspendu l’exécution d’une loi.

Quand on voit aujourd’hui nos juges, nationaux comme européens, passer leur temps à écarter les lois françaises au motif que leur application porterait, selon leur appréciation toute subjective, une atteinte disproportionnée aux «droits» individuels, notamment ceux des migrants, on mesure l’inversion vertigineuse accomplie depuis le XVIIIe siècle. Contrairement à ce qui est généralement affirmé, ce gouvernement des juges est aux antipodes de la notion d’État de droit telle qu’elle a été conçue par les juristes allemands du XIXe siècle qui voulaient, au contraire, éliminer l’arbitraire des juges et des fonctionnaires.

Anne-Marie Le Pourhiet, propos recueillis par Joachim Imad (Figaro Vox, 14 février 2020)

Richard Jewell : un nouveau chef-d’œuvre signé Clint Eastwood

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Richard Jewell : un nouveau chef-d’œuvre signé Clint Eastwood

Par Aurélien Chartier

Ex: https://lesobservateurs.ch

Nous vivons une époque étrange. Dans un passé très proche, un film défendant la présomption d’innocence contre les pratiques douteuses du FBI et des médias ne ferait guère polémique. Éventuellement, certains cercles conservateurs pourraient critiquer l’image négative du FBI dans le film bien que le scénario ne fasse que très peu d’écarts avec la réalité.

Mais nous sommes en 2020 et les institutions en question devenues les hérauts de la lutte contre Donald Trump, elles se retrouvent de facto intouchables pour la gauche américaine. Une situation pour le moins improbable dans le cas du FBI qui cherchait à déstabiliser les mouvements progressistes des années 1960 et 1970.

Vous pensez que j’exagère ? Alors que je m’apprêtais à entrer dans la salle, un employé du cinéma, hippie aux cheveux longs ayant l’âge d’être mon grand-père, a tenu à me prévenir que Clint Eastwood était poursuivi en justice pour ce film.

Lorsque j’ai demandé plus d’information, il m’a répondu avec une fierté peu dissimulée qu’il prévenait tous les spectateurs du film. Renseignement pris après le film, il n’existe que la menace d’une action en justice, concernant un aspect mineur du film et n’impactant aucunement son message (spoilers dans le lien). Nous voici donc prévenus que les films se permettent quelques libertés artistiques, un fait apparemment surprenant pour le camp progressiste.

Pour en revenir au film, on suit la vie de Richard Jewell, agent de sécurité devenant héros d’un jour pour avoir lancé l’alerte au colis suspect lors de l’attentat du parc du Centenaire.

Nullement enjolivé, le personnage est décrit avec tous ses défauts : obèse, vivant avec sa mère, renvoyé d’un poste de vigile sur campus pour abus d’autorité et désirant maladivement rejoindre la police, alors même que les policiers se moquent plus ou moins ouvertement de lui.

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Le thème du héros poursuivi par un système déterminé à sa perte et sauvé par un avocat courageux est récurrent dans le cinéma hollywoodien. La vraie force du film est de prendre un personnage aux antipodes de la victime classique et davantage à l’image de ceux qui le persécutent.

Ainsi, Richard Jewell est montré pendant la majeure partie du film comme cherchant à aider autant que possible le FBI, alors que ces agents tentent de le piéger via des procédés souvent abjects. Si cela donne quelques passages tragi-comiques, cela renforce également l’absence complète de morale du FBI qui profite de la crédulité de sa victime pour l’amener à sa perte.

À l’opposé, l’avocat est un personnage plus conventionnel pour son côté cynique vis-à-vis de la police, mais qui devient plus humain au contact des épreuves que subit son client. Sa présence seule suffit d’ailleurs à montrer en quoi la qualification du film comme « conservateur » est un non-sens qui ne convaincra personne ayant un semblant d’esprit critique. Le film le présente sous un angle permettant de lire sur une affiche dans son bureau « J’ai plus peur de l’État que du terrorisme ». Un message que ne renierait probablement pas la majorité des libertariens américains.

La direction du film se veut viscérale et réaliste, suivant les personnages dans leur quotidien devenu un enfer, une fois la chasse médiatique enclenchée. Le sentiment d’étouffement ressenti par Richard et sa mère est parfaitement retranscrit via la réalisation les montrant retranchés dans un appartement minuscule avec une horde de journalistes à la porte. L’ajout d’extraits télévisés réels sur la télévision de l’appartement ne fait qu’accentuer cet aspect réaliste.

La réalisation est soutenue par un excellent jeu d’acteurs. Peu connu du grand public, la prestation de Paul Walter Hauser dans le rôle-titre est digne d’un Oscar. Sam Rockwell et Kathy Bates ont également des performances mémorables dans les rôles respectifs de l’avocat et de la mère. Olivia Wilde joue à la perfection une journaliste peu scrupuleuse se rendant progressivement compte des conséquences de ses actions. Un arc narratif qui n’est malheureusement pas complètement approfondi par le scénario. Dans une situation équivalente, Jon Hamm est très bon dans son rôle d’agent du FBI mais ne bénéficie que d’un développement limité.

Malgré ces défauts mineurs, Richard Jewell est une excellente histoire qui méritait d’être retranscrite par Clint Eastwood, dont le talent de réalisateur n’est plus à prouver depuis longtemps.

Offrant une critique juste et incisive des excès de pouvoir du FBI et des médias qui sont prêts à sacrifier un innocent pour des gains à court terme, le film sonne comme une alarme face à un système qui ne s’est pas amélioré depuis 1996. Reste à savoir s’il trouvera son public ou finira plombé par les polémiques de comptoir initiées précisément par les médias visés.

  • Le cas Richard Jewel, drame américain de Clint Eastwood, avec Paul Walter Hauser, Sam Rockwell, Kathy Bates et Olivia Wilde ; durée 2h09, sortie nationale le 19 février 2020.

À lire aussi : Clint Eastwood reste une tête de mule.

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jeudi, 20 février 2020

La Sibérie : coffre-fort de la Russie ou cœur de l’Eurasie ?

L’Europe : «de l’Atlantique à l’Oural» ou «de Lisbonne à Vladivostok» ?

par Maruice Rossin*

Lors du 50e anniversaire de la signature du traité de Rome, date de la fondation de l’Europe, Poutine écrivait que l’Europe ne pourrait pas vraiment être elle-même sans la Russie, et que, « en même temps », la Russie ne cesserait jamais de manifester son grand désir d’Europe. 

La Russie pourrait réveiller l’Europe pour réaliser avec elle une grande œuvre, la mise en valeur de l’espace sibérien. L’Europe s’étendra alors de Lisbonne à Vladivostok.

LES FAITS

Le 25 mai 2018 à Saint-Pétersbourg, dans un débat lors du Forum d’Affaires (SPIEF 2018), le président Macron énonce incidemment, comme une évidence, que « L’Europe va de l’Atlantique à l’Oural ». Le président du patronat russe, Alexandre Chokhine, lui coupe la parole pour rétorquer instinctivement : « non, l’Europe c’est de Lisbonne à Vladivostok ! ». Le président Poutine approuve pleinement cette répartie en confessant qu’il a été pris de court et qu’il allait faire la même réponse. 

Ces échanges posent deux problèmes fondamentaux,

  • la Russie est-elle européenne ?  De nombreux hommes politiques le pensent en particulier en Europe.
  • la Russie est-elle eurasiatique voire même asiatique ? La géographie de ses frontières l’impose.

L’occupation de l’espace sibérien apportera la réponse à ce dilemme, puisque la Russie, seule, ne pourra la réaliser.

ENJEUX

Far West ou Far East?

Dans un monde dominé de plus en plus par la finance internationale, l’existence de ressources minières gigantesques dans ses sous-sols associés à une population très faible – 2 habitants au km2 -, risque de faire de la Sibérie un objet de convoitise marchande plus que de respect historique et culturel. Cet attrait est d’autant plus fort que l’Asie densément peuplée, incapable de se nourrir,  est située à côté de vastes territoires agricoles, inoccupés et inexploités.

Pour la Chine, c’est le Far West: la Sibérie est trop grande, trop proche, trop riche et trop vide de population pour rester russe. Pékin souhaite-t-il l’occuper humainement, économiquement, et la réintégrer dans son espace vital au nom du pragmatisme et de l’histoire ?

Pour la Russie, c’est le Far East: la Sibérie a été jusqu’à aujourd’hui son coffre-fort. Deviendra-t-elle, par une association étroite avec l’Europe, le cœur de cette Eurasie chère au Président Poutine? Le destin de la Russie est lié au succès de la mise en valeur de ses provinces sibériennes, c’est-à-dire de 77 % de son territoire. L’Europe trouverait alors un rêve mobilisateur de ses excès, de ressources financières et humaines, dans une continuité historique avec la construction d’un monde nouveau qui lui redonnerait espoir et raison d’être.

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COMMENTAIRES PROSPECTIFS

« L’Europe de l’Atlantique à l’Oural » ou « l’Europe de Lisbonne à Vladivostok » ?

Si l’on parle de géographie figée dans la physique des reliefs, le président Macron a raison, mais il oublie les trois-quarts du territoire russe. Malgré toutes les sanctions, les groupes européens et en premier, français, restent très présents en Russie. La France était fin 2018 le 1er investisseur étranger en stock (17,1 Mds USD) soit 13% des flux d’IDE (1) entrants en Russie en 2018. Avec plus de 500 filiales françaises implantées (1200 entreprises ayant au moins un actionnaire français), la France est le premier employeur étranger en Russie (150.000+ salariés), devant l’Allemagne. 35 entreprises du CAC 40 sont présentes en Russie.

 Si l’on parle de politique et de vision du futur, si l’on pense à l’avenir et que l’on donne au mot « Europe » un sens large aussi visionnaire que celui d’un Pierre le Grand il y a 400 ans, alors le président Poutine a aussi raison.

La Sibérie : or doux, or noir, or bleu, or vert mais c’est également :

  • Un territoire de 13 millions km² (plus de 3 fois l’Europe des 27) et 38 millions habitants, mais occupé par les hommes depuis 200.000 ans,
  • Une diversité géographique liée à l’immensité de son espace dont l’exploitation varie avec le temps. Le réchauffement climatique ouvre d’énormes possibilités agricoles,
  • L’or bleu, avec le lac Baïkal et ses 20% des réserves d’eau douce du monde, avec 4 fleuves s’écoulant Sud-Nord de 4-6.000 km de long et 10-20.000 m3/seconde de débit, avec une voie maritime arctique maintenant ouverte. D’un transport actuel Ouest – Est avec le train, on va revenir au traditionnel Nord Sud plus conforme au relief et aux voies naturelles,
  • L’or vert avec l’agriculture, l’élevage et les forêts :
    • Des dizaines de millions d’hectares de terres favorables à la culture ou à l’élevage. Des forêts, avec 20% des réserves forestières et 50% des conifères du monde,
  • Une occupation humaine sous des formes variées, avec
    • Des peuples indigènes dispersés mais de grandes richesses culturelles, sauvés par les zibelines et « l’or doux de leur fourrure » qui, par le iassak (2) remplissait les caisses du tzar,
    • Une colonisation sur les 500 dernières années, forcée pour les uns (éloignement pour ls tzars, goulag pour les communistes), refuge pour les autres, mais toujours une forte implication de l’Etat central. Stolypin avec sa politique volontariste, déplaça 4 millions de personnes en 10 ans, et sauva ces territoires russes des invasions étrangères en 1919. 
    • Une dépopulation dramatique depuis les années 1990 correspondant à un désengagement de l’Etat.
  • L’or noir, avec Farman Soulmanov qui découvre le 21 juin 1960, que « la Sibérie flotte sur une mer de pétrole dont il est le premier explorateur navigateur ». (E Hoessli), auquel s’ajoutent toutes les richesses minières de la planète, métaux précieux ou non, c’est le coffre-fort.

Russie : la Sibérie ne pourra pas rester le coffre-fort russe où l’on prélève ce dont on a besoin. Il faudra impérativement l’intégrer dans l’espace russe. C’est le grand pari du président Poutine : mobiliser les ressources de toutes origines pour sa mise en valeur… tout en en restant le maître du jeu et en imposant priorités et rythme du mouvement.  La Sibérie se développera-t-elle en restant russe grâce au concept d’Eurasie développé par le président Poutine, qui proposent une alternative à la globalisation mondiale de l’économie dominée par les Anglo-Saxons (FMI, BIRD, OMC…), avec ou sans l’Europe ?

Chine : les Chinois ont la mémoire longue et raisonnent dans la durée. La mise en valeur de l’Extrême-Orient russe nécessite des investissements importants et la stabilisation de la région  par l’occupation de son espace part des paysans. La Chine possède les deux – fonds et hommes -, et en grandes quantités. Les IDE chinois en Russie sont dirigés en priorité au-delà de la frontière de la province du Heilongjiang. Le ministère du Commerce chinois estimait en 2017 que les investissements cumulés chinois en agriculture, forêts et pêches s’élevaient à plus de 3 milliards de $ jusqu’en 2016. Les paysans et éleveurs chinois ont commencé à traverser le fleuve Amourdès les années 1990, ils ont été organisés par des officiels de Heilongjiang avec des campagnes mixtes russo-chinoises. En 2011, c’étaient 6,9 millions de mou (ou 480 000 ha) de terres russes concernées par ce schéma. Malgré les difficultés bureaucratiques rencontrées par les producteurs pour exporter leurs produits sur la Chine (soja, maïs, colza), le mouvement est lancé et on est passé de 8 000 tonnes d’huile végétale exportées en 2011 à 220.000 tonnes en 2015/2016, et même 1 million de tonnes de soja en 2017. 

Si l’on connaît approximativement les sommes investies par la Chine en Sibérie, on ne connait pas le nombre de Chinois qui s’y sont installés. Les chiffres, selon les sources et les objectifs recherchés, varient entre 150 000 et 15 millions. La Chine veut « réoccuper » les terres grâce aux hommes qui les cultiveront et investir conjointement dans l’exploitation des richesses minières et énergétiques. L’État central participe directement dans les investissements financiers importants, et organise, via ses régions limitrophes, les mouvements de colonisation des terres inoccupées russes voisines. C’est une stratégie qui s’inscrit dans la durée. Elle pourrait être gagnante.

Europe : l’Europe gère les actions et contradictions des 27 économies et peuples nationaux avec une boussole plus orientée vers le soleil couchant et le grand large atlantique, que vers le soleil levant et les richesses sans limites de ce continent « Eurasie » assis sur la chaîne de l’Oural. Les actions comme celles de Total vont dans la continuité de l’utilisation du coffre-fort sibérien, et non dans celui de la création de nouvelles richesses durables dans ses territoires désertifiés. Et pourtant, l’Europe – à commencer par la France – dispose d’un potentiel humain exceptionnel pour risquer et gagner le défi de la mise en valeur de l’espace naturel sibérien. Si l’État du Heilongjiang organise la colonisation des terres russes voisines avec méthode et succès, il n’en est pas de même pour les États Européens. L’homme seul peut rêver. Pour que le rêve devienne réalité, il faut organiser la colonisation de ces espaces nouveaux.

La mise en valeur de l’espace sibérien ou le nouveau Far East de l’Europe.

  • Un espace aussi vaste ne peut être défendu durablement que par une occupation économique et humaine de son espace rural, dans l’esprit des paroles du Président Poutine : … pour la défense du territoire, « l’agriculture, c’est plus important que les fusils ».
  • De nombreuses missions scientifiques ont sillonné la Sibérie depuis Pierre le Grand on dispose de très nombreuses informations scientifiques et humaines. « Le savoir d’avant est fondamental pour le construire d’après ». Au début du vingtième siècle, la Sibérie a été un grand producteur et exportateur de blé, de lait et elle peut le redevenir. « L’ensemble des exportations est construite sur la croissance du beurre sibérien » (Stolypine (3)), on taxait les céréales sibériennes, trop compétitives par rapport aux productions de la Russie européenne.
  • On ne sait pas quelles productions domineront le marché dans 50 ans – soja et palme, qui dominent le marché des corps gras aujourd’hui étaient quasi-inconnus il y a 40 ans -. La Sibérie dispose d’un réservoir de génétique aussi important que celui de ses ressources minières. Soja et blé viennent de Sibérie. Et les scientifiques soviétiques puis russes, dans la lignée de Vavilov, disposent de collections de ressources végétales incomparables.
  • Une chose est certaine : la nouvelle agriculture sibérienne ne sera pas une copie de l’agriculture de la Beauce ou de Krasnodar, il faudra l’inventer.
  • Avant la conquête russe, les steppes sibériennes étaient parcourues par des dizaines de millions de vaches et de chevaux yakoutes, outre les millions de rennes plus au nord. Ne dit-on pas que, là-haut, c’est le renne qui a domestiqué l’homme et lui a permis d’occuper ces espaces du grand nord.
  • Réoccuper la Sibérie, c’est définir une « colonisation » de son espace, en fixant les zones prioritaires, avec des schémas de financement adaptés, en inventant des modes de production propres à ces territoires nouveaux et suffisamment souples pour qu’ils puissent se définir au fur et à mesure de leur implantation : en quelques mots établir une dynamique entre la science, la finance et l’homme, ce dernier étant le plus important, donc le premier à mobiliser.
  • La France dispose d’un monde agricole avec des ressources humaines qui ne peuvent s’exprimer, faute d’espace. Dans le domaine spécifique de l’élevage, elle dispose du premier troupeau de bovins européen dont l’adaptation aux conditions sibériennes a été couronnée de succès, et le gouverneur de Tioumen, Sergeï Sobianin, promoteur de cette opération, déclarait en 2002, « les bêtes, c’est bien, c’est un succès, mais ce dont nous avons besoin maintenant, ce sont de bergers, nous les invitons à venir s’installer… ». D’autres Européens – Hollandais, Allemands – sont intéressés par cette aventure comme leurs ancêtres le furent il y a un à deux siècles par l’épopée du Far West américain!
  • Dans le monde actuel en crise, on a aussi d’autres groupes prêts à s’établir pour courir la nouvelle conquête de l’occupation de l’espace rural, comme les Boers d’Afrique du Sud, comme les Argentins en instabilité politique et économique chronique…. dès que le pays d’accueil, stable, montre son souhait de recevoir ces nouveaux défricheurs et garantit qu’ils pourront exprimer leur capacité de construire une agriculture nouvelle dans la durée. 

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CONCLUSION

La Sibérie peut faire rêver en 2020, non seulement par l’exploitation de ses richesses minières, mais aussi par l’occupation de son espace géographique. Le monde de demain en aura besoin, car l’or bleu et l’or vert seront les piliers de la croissance future.

Les appétits des voisins immédiats sont immenses, c’est bien là le danger. L’Europe, un géant économique, peut trouver avec une politique coordonnée avec celle de la Russie, un domaine où, elle montrera qu’elle sait encore construire un avenir pour ses citoyens qui ont l’impression, aujourd’hui, d’être dans une impasse. Débridons leur capacité de produire et aidons-les à s’exprimer là où il y a des besoins pour de nombreuses années encore : en Sibérie, dans le Far East !

La Sibérie et l’Europe : Éléments de contexte  

Interprétation géographique

Du point de vue de la géographie physique, la Russie s’étend sur une superficie totale de 17,1 millions de kilomètres carrés, dont 13,1 millions km2 constituent la Sibérie, ce qui signifie que 77 % du territoire russe se situe en Asie, si on admet que la chaine de l’Oural sépare l’Asie de l’Europe. À titre de comparaison, les États-Unis s’étendent sur 9,63 millions km2 et l’Europe des 28 (comprenant le Royaume Uni) avec ses 4,49 millions km2 représente à peine le tiers de la Sibérie russe. Dire alors que la Russie va de l’Atlantique à l’Oural revient ignorer 77 % de son territoire, ou mieux encore affirmer que les 13,1 millions de km2sont de fait des terrae nullius, alors que ces terres sont russes.

Interprétation historique et politique

Il faut se plonger dans l’histoire pour mieux comprendre la géographie et le sens politique attaché à l’expression « de l’Atlantique à l’Oural ». On comprendra alors pourquoi la frontière de l’Europe s’arrête à la chaîne de l’Oural pour les uns et va jusqu’à Vladivostok pour les autres, tout en sachant que l’Oural est plus proche de Lisbonne (6 000 km) qu’il ne l’est de Vladivostok (7 700 km), lui-même encore très éloigné de l’extrémité du territoire russe de la Tchoukotka qui borde le détroit de Bering.

• Ivan le Terrible (1530-1584) fut le premier tzar à s’intéresser à la Sibérie. Après avoir fait tomber le verrou tatare en 1552 avec la prise de Kazan, il confia la responsabilité de la marche vers l’Est à un riche entrepreneur venu du Nord, un Pomor (4) de la famille Stroganov. Ce fut donc un oligarque intéressé par le développement de ses affaires, qui le premier traversa cette chaîne de montagne de l’Oural et entreprit la conquête du khanat de Sibir avec les Cosaques venus du sud. Les nouveaux territoires étaient riches en fourrures et en minerais de toutes sortes, ils remplissaient les caisses de l’État. À titre comparatif, le Mayflower débarqua les premiers colons anglais en Amérique en 1624.

• Pierre le Grand (1689-1725), organisa l’empire russe avec une boussole qui était la science universelle dans tous les domaines, en particulier dans celui de la géographie. C’est son géographe officiel Vassili Tatitchev qui plaça la limite entre Europe et Asie sur les monts Oural. 

 Était-ce une décision purement de géographie physique sans raison politique, car il y a bien une chaîne de montagne qui marque la séparation des deux continents – Europe et Asie -,  avec des grandes plaines de part et d’autre de cette ligne naturelle ? 

Était-ce une décision politique prise dès le 18e siècle par un visionnaire comme Pierre le Grand sut l’être, avec :

– d’un côté l’affirmation d’appartenir à l’Europe avec la construction de la ville de Saint-Petersbourg, 

– de l’autre l’affirmation d’être un territoire asiatique au-delà des frontières de l’Oural avec de nouveaux territoires allant jusqu’au Pacifique, occupés et protégés par les Cosaques ? 

Les Cosaques avaient atteint l’océan Pacifique avec la mer d’Okhotsk bien avant la naissance de Pierre le Grand. Pierre aurait été l’initiateur de cette première décision politique plaçant la Russie à la fois en Europe et en Asie, ce qui aboutira plus tard au concept politique plus général de l’Eurasie, si cher au président Poutine. Ou faut-il y voir une vision maléfique du pouvoir russe comme le pense le think tank européen Thomas-More qui imagine que l’Europe a été arbitrairement délimitée à l’est par l’Oural par Tchikhatev-Pierre le Grand, pour que la Russie se trouve à cheval sur deux continents, et de ce fait, devenue la puissance continentale bi-continentale, elle irait dominer le monde en commençant par avaler la petite Europe ?

• Le général De Gaulle a utilisé la formulation « de l’Atlantique à l’Oural », qui sonne tel l’olifant, lors d’un discours prononcé à Strasbourg en novembre 1959 : « Oui, c’est l’Europe, depuis l’Atlantique jusqu’à l’Oural, c’est l’Europe, c’est toute l’Europe, qui décidera du destin du monde ! » De Gaulle, plus tard, en 1965 avait expliqué le sens qu’il entendait par cette formule : « Pour que cette Europe soit possible, il faut de grands changements. D’abord que l’Union soviétique ne soit plus ce qu’elle est, mais la Russie. Ensuite que la Chine menace ses frontières orientales, donc la Sibérie. Et que peut-il advenir dans un certain nombre d’années ? La formule permet de montrer aux Russes que la création d’une Union européenne occidentale n’est pas dirigée contre eux, n’est pas un acte de guerre froide ; elle entretient un certain espoir chez les Allemands de l’Est, les Tchèques, les Polonais, les Hongrois. Elle ne constitue cependant qu’une anticipation historique. » Ainsi De Gaulle voyait dans « l’Atlantique à l’Oural » une manière pour le continent de redevenir « l’élément principal de notre civilisation ». Ainsi De Gaulle :

– soit faisait l’impasse sur quatre siècles de l’histoire de la Russie en passant par les pertes et profits du 3/4 de son territoire, 

– soit imaginait que la mise en valeur de ces nouvelles terres serait la grande œuvre de l’Europe de demain, comme le lui susurrait Kroutchev à Rambouillet quelques années plus tôt2

• Plus tard, le président Sarkozy imaginera un autre « projet de civilisation », avec l’Union de la Méditerranée qui devrait être le « pivot de l’Eurafrique, ce grand rêve capable de soulever le monde. » Autant la chancelière allemande Angela Merkel épousait les grandes lignes de la tradition allemande avec les relations Est-Ouest, une voie rapide pour accroître les échanges avec la Chine, puissance économique mondiale, autant elle avait des doutes sur l’axe Nord-Sud. L’Allemagne préférait les Routes de la soie avec l’Eurasie aux voies d’ébène et de coton avec l’Eurafrique.

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La Sibérie peut faire rêver en 2020, non seulement par l’exploitation de ses richesses minières, mais aussi par l’occupation de son espace géographique. Le monde de demain en aura besoin, car l’or bleu et l’or vert seront les piliers de la croissance de demain.  

Les appétits des voisins immédiats sont immenses, c’est bien là le danger. L’Europe, un géant économique, peut trouver avec une politique coordonnée avec celle de la Russie, un domaine où elle montrera qu’elle sait encore construire un avenir pour ses citoyens qui ont l’impression, aujourd’hui d’être dans une impasse. Débridons leur capacité de produire et aidons-les à s’exprimer là où il y a des besoins pour de nombreuses années encore, en Sibérie, dans le Far East !

De coffre-fort de la Russie, la Sibérie sera devenue le cœur de l’Eurasie russe, battant au rythme de l’Europe

Notes :

(1) IDE : investissements directs étrangers

(2) le iassak (Ясак) ou l’impôt prélevé sur les fourrures (l’or doux), pour le compte du tzar.

(3) Piotr Stolypine : Premier Ministre de Nicolas II, promoteur de la colonisation rurale en Sibérie.

(4) les Pomors sont des colons russes vivant dans le bassin de la mer Blanche.

*Maurice Rossin : Contributeur invité.

Monsieur Rossin est ingénieur agronome. Il a créé, dirigé et conseillé différentes sociétés privées ou étatiques en Afrique, en Amérique Latine, en Asie centrale et en Europe. Il fut également conseillé agricole à l’ambassade de France à Moscou de 2003 à 2007.  

The Future Belongs to Polymaths

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The Future Belongs to Polymaths

Ex: https://medium.com

I want to start with a little story. Many years ago, I saw a fresco by Raphael. “The School of Athens” is one of the pearls of Renaissance art. On it, the artist depicted immortal images of great thinkers: Heraclitus, Empedocles, Parmenides, Pythagoras, Aristotle, Plato, Socrates…and there was among them the only one woman who has always been for me a kind of model, an archetype of female wisdom — Hypatia of Alexandria. Raphael gave her the features of his beloved Margherita Luti. I looked at this collection of great minds of mankind and even then I understood that I knew the one secret. Lorenzo de’ Medici also knew it.

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In the XV century, he established the Platonic Academy in Florence, headed by Marsilio Ficino. This Academy brought together outstanding philosophers, artists, architects, sculptors, and poets of the Renaissance. This was the time of the total triumph of a new type of man — homo universalis, a prominent representative of which was Leonardo da Vinci-painter, architect, sculptor, inventor, writer, musician and scientist. The very embodiment of the Union of music and mathematics, science and art. Why did this type of personality disappear today-in an era of deep specialization, and the place of the universal thinker who saw the whole picture of the world was taken by the one who looks at the world through the keyhole of his profession? These are the questions I started asking.

The XXI century presents us with global challenges. We are watching the rapid development of new technologies. But it seems that neither politicians, nor businessmen, nor inventors know the opportunities and risks associated with the development of Artificial Intelligence and biotechnologies. The problems we will soon have to deal with are beyond our comprehension. Fundamental climate changes and the risk of environmental disaster, the growth of the world’s population and migration processes, unknown epidemics and pandemics, unemployment-these are just some of the problems that can radically change our lives. These are the main questions that we have to answer.

But to solve these problems, you need a different type of thinking. As Albert Einstein said, “We can not solve our problems with the same level of thinking that created them.” To understand these problems, we need a global perspective. But where does the global perspective come from if narrow specialization is imposed everywhere? However, it is not enough today. I told you I knew a secret. It’s time to tell it.

The future belongs to polymaths. The polymaths were the most influential people in the history of mankind. They could create atypical combinations of skills, to combine and synthesize knowledge from different disciplines. Only polymaths can comprehend and respond to the challenges facing man in the XXI century.

How to create conditions for the formation of individuals with polymathic thinking? To do this, it is necessary to transform the entire educational paradigm and create a new educational model. How? We need to unite the best minds of mankind. Lorenzo de ‘Medici had a Big Idea. She inspired me. We live in an era when we need to dare to think on a larger scale. For many years, while developing a project called Janus Academy, I tried to create a matrix of the future educational system that will replace or become a real alternative to the educational model being implemented today.

The modern educational model is focused on the formation of a specialist of a narrow profile who has passed the “school of skills and competencies”, but not the “school of knowledge”. The result is obvious: the skills and competencies acquired today need an immediate upgrade tomorrow because they are outdated. A student enters an endless race by replacing one worn-out part with another. Without a basic knowledge axis, he simply has nowhere to integrate the acquired skills. As a result, we do not get a person who has realized his potential, but a “one-button specialist” with a “passport of competencies”, who adapts flexibly to changing trends. An individual who knows how to use Agile, but knows nothing about the history of civilizations, structural linguistics, world culture, classical and modern art.

Today, education has ceased to be a way of inheriting culture and has become a tool for achieving career success.

However, if we look at the founders of the five largest companies in the world - Bill Gates, Larry Page, Steve Jobs, Warren Buffett and Jeff Bezos - we find that they are all polymaths, universal personalities, but not narrow specialists.

The same universal personalities were Aristotle, Ptolemy, Leonardo da Vinci, Newton, Kepler, Leibniz, Descartes, Thomas Edison, Benjamin Franklin and others.

Leonardo_self.jpgWhen we dream of succeeding in a rapidly changing world, we often forget that the most successful people are polymaths. And gradually, interdisciplinary employees, people with polymathic thinking become one of the most valuable assets.

We are afraid that soon robots will replace us in the workplace and all processes will be automated. The machine will surpass man in his abilities. Of course, it will surpass — if we are talking about the abilities of a narrow specialist. But she would never be able to beat the polymath. Historian Felipe Fernandez-Armesto emphasizes: “Specialists can invent gadgets, formulate algorithms and exchange blows. But to transcend experience and change the world, ideas need mental space where influences from all disciplines can mingle alchemically. Those spaces are in polymaths’ brains. To conquer empires of the intellect, you have to exceed your own domain. Classical Greece, Renaissance Italy and Victorian England all revered and rewarded generalists, for whom today universities have little or no space or patience. “

Society abandoned the idea of polymaths after the industrial revolution. As Ellwood Cubberley, was an American educator and a pioneer in the field of educational administration, said in 1898: “Our schools are, in a sense, factories, in which the raw products (children) are to be shaped and fashioned into products to meet the various demands of life.”

What problems do polymaths face today, does society accept them, does it allow them to discover their deep potential, apply all their knowledge and skills and be at the center of world processes? In one of the articles I met the opinion that in our society there is a clear rejection of people who lead a polymathic lifestyle. However, it does not get tired of encouraging narrow specialists in every possible way. This is one of the consequences of industrialization: the idea that man is just a mechanism in a huge machine. Moreover, this is the result of the industrialization of consciousness. Because of the reaction of society, many polymaths avoid calling themselves polymaths. Some people start deliberately talking about themselves as specialists, believing that this will help them have a successful career. Others name different functions, depending on the context. Still, others are waiting for an opportunity to demonstrate their many skills, i.e. they are waiting for a “request” from the society itself.

Leonardo da Vinci, the most outstanding example of a polymath, also faced serious problems. Waqas Ahmed, the author of the fundamental study “The Polymath: Unlocking the Power of Human Versatility” says in an interview: “If you look at Leonardo Da Vinci, who’s considered the archetype of the polymath in the Western mind, he faced a lot of adversity. He did not have the socioeconomic status to excel in one field, let alone multiple fields, but he had an innate curiosity and that curiosity overcame any obstacles that he faced in his work environment or in his social environment. And so that curiosity does inevitably build in a kind of fearlessness that you see in many polymaths over history. ( … ) You need to have unfaltering belief in your method to creativity and to progress and you need to be able to deal with the kind of cynicism and skepticism and even envy that you will inevitably face moving forward.”

I face this problem. The question of the nature of my work has always puzzled me. Of course, over time, I had to introduce myself as: “Philosopher, publicist, cultural scientist, a specialist in Antiquity, curator of Janus Academy” (sometimes even shortening all this to: “philosopher, a specialist in Antiquity”). But the field of my interests and intellectual practices covers the entire field of Humanities, and if I am so passionate about antiquity, it does not mean that I am limited by It. Also, I specialized in personalized learning, developing individual educational programs. Organizing conferences, seminars, presentations, and cultural events; strategic planning; experience in public speaking; working with experts, embassies, and public figures; negotiating; creating (and curating) intellectual and art clubs; developing educational programs for cultural venues; conducting interviews; and working as an editor-compiler of scientific magazines. Besides, writing books, playing in the theater. So who am I? And most importantly, how can I design my life so that the diversity of my knowledge and experience can open up to the world and change something in it?

And in response to this question, I decided to release my “Black Swan”. To create a project that will mark the beginning of a revolution in education. The mission of this project is to consolidate all the most important thinkers, researchers, cultural figures and scientists who set themselves the goal of creating a new interdisciplinary educational program that meets the challenges of the XXI century and can maintain its main task — to be a way of inheriting culture.

1-proportions-of-the-face-leonardo-da-vinci.jpgOften can you see students who do not listen to what their lecturers say? And only imagine that this very lecture is given to a student by his favorite writer or scientist, whose books he reads with great interest. Will he be more attentive to every word, will he take the learning process more seriously and most importantly-will he has a passion, a passion for learning, for mastering new disciplines, new areas, and directions? Would you like to learn from the best of the best? Learn in the process of live communication?

In Janus Academy students do not acquire a narrow specialization, but fundamental knowledge that allows them to unlock their cognitive and intellectual potential.

1. interdisciplinary program “POLYMATH” (2 years of study)

2. 32 directions

3. more than 150 author’s courses that form a unique educational complex:

- a complex of humanitarian disciplines that give students fundamental knowledge,

- a STEM (Science, Technology, Engineering, Mathematics) complex that develops innovative thinking and the ability to collect, analyze, systematize and critically comprehend information.

4. brilliant teaching staff (about 200 leading Russian and European scientists and specialists, researchers, philosophers, cultural and artistic figures)

5. training of international communities of polymath teachers to solve global problems of mankind.

My friend told me that you should be able to explain an interesting idea even to a 6-year-old child. And he asked me to explain to his 6-year-old daughter the purpose of my project. “How will you tell her about the polymaths, about the Renaissance man?” And I said to the little girl,” Imagine a small island. Did you imagine? Now imagine a vast continent, no! — imagine a whole world! See how different they are? In ordinary educational institutions, people are made into small Islands, and in my Academy, everyone will have the opportunity to become a whole world!” And the little girl understood me.

How do I see the project, for example, in 10 years? From the very beginning, I laid the Foundation of Janus Academy not only with the revolutionary potential but also with the potential for growth. In other words, I have a good idea of how this project will grow to an entire Empire within a few years, with its well-thought-out, branching structure. It will cover the whole world and unite the best minds of mankind. And at the center of this Empire will be the idea of a polymath.

If this type of personality does not begin to form now, if it is not allowed to express itself as much as possible in all areas of human activity, if it is not allowed to find the key to the global challenges that the XXI century throws at us, we will disappear as metaphysical beings, as intellectual individuals, and as a biological species. We have entered a transitional stage, Interregnum, when the outdated paradigm has already been destroyed and the new one has not yet emerged. It’s time to “reinvent the world”.

Russian philosopher, cultural scientist, a specialist in Antiquity, curator of Janus Academy.

Sacrifier l’économie réelle pour sauver la planète ?

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Sacrifier l’économie réelle pour sauver la planète ?

De l’obsolescence des révoltes populaires

par Antonin Campana

Ex: http://www.autochtonisme.com

Les manifestations populaires, celles des Gilets Jaunes, comme celles des opposants au projet gouvernemental de réforme des retraites, ont rarement été aussi massives avec aussi peu de résultats à la clé. Depuis plus d’un an, des millions de Français ont manifesté contre les projets gouvernementaux sans que cela ne stoppe ni même n’enraye la mécanique implacable de casse sociale et de spoliation des plus faibles initiée par Macron. Le mot « dédain » revient régulièrement dans la bouche des commentateurs : dédain pour les travailleurs, dédain pour les plus modestes, dédain pour les Français en général… Seul le dédain et le mépris peuvent en effet expliquer ce refus ostensible de considérer les souffrances et les inquiétudes des gens qui descendent dans la rue.

En 1968, plusieurs semaines de grèves ont abouti aux accords de Grenelle (avec notamment une augmentation de 35% du SMIG). En 1986-1987, 28 jours de grèves ont fait capoter le projet de grilles des salaires à la SNCF. En 1995, 22 jours de grève ont fait plier Alain Juppé. Certes, toutes les grèves que la France a connues n’ont pas débouché sur des avancées sociales significatives. Certaines furent des échecs. D’autres obtinrent quelques concessions seulement. Mais aucune de celles qui ont eu l’envergure du mouvement social qui a commencé le 05 décembre, n’a été confrontée à une telle indifférence du pouvoir. Aucune concession significative n’a permis aux grévistes de sauver la face. Au contraire, ils ont encaissé pendant plusieurs semaines les railleries, la condescendance, le mépris et l’arrogance des membres de la Majorité. Comme si leur action n’avait en soi aucune importance ! Même chose d’ailleurs pour les Gilets Jaunes, écartés d’un revers de main, après que médias et macroniens les aient catalogué homophobes, racistes et antisémites !

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Ce qui peut surprendre, si l’on considère l’agitation sociale dans notre pays depuis le début du mouvement des Gilets Jaunes jusqu’aux grèves de décembre et janvier, est moins l’échec de cette importante contestation sociale, que la manière dont elle a été traitée par le pouvoir. Macron est le premier du genre à avoir clairement signifié à tous les Français qu’il se moquait totalement de la paralysie du pays et des conséquences économiques d’un an de manifestations, de grèves et de blocages. L’essentiel était que sa feuille de route soit suivie. Entêtement d’un enfant-roi devenu président du régime, ou conséquence d’une évolution des rapports de forces ?

Economie réelle et économie financière

Jusqu’aux années 80, la richesse des élites oligarchiques était basée sur le travail productif national. C’était la bonne marche de l’industrie, du commerce et des transports du pays qui assurait les fortunes. Autrement dit, plus les ouvriers, les employés et tous les salariés faisaient régulièrement et correctement leur travail, plus l’oligarchie était prospère. L’oligarchie redoutait donc les grèves et concédait régulièrement quelques miettes aux gens qu’elle exploitait. L’oligarchie avait aussi grand intérêt à investir dans l’appareil global de production : ses usines mais aussi, via l’Etat à son service, les réseaux de transport (routes, autoroutes, voies ferrées…), les infrastructures du pays (ouvrages d’art, réseaux électriques, télécommunication…) et même l’établissement de routes migratoires (pour disposer d’une main d’œuvre servile)…

Au début des années 80, les ultralibéraux prennent le pouvoir. Partout, c’est la fin du contrôle du mouvement des capitaux. Autrement dit, l’argent que l’oligarchie devait nécessairement investir dans le pays pourra désormais servir à construire des usines dans des pays à la main d’œuvre bon marché, avec bien sûr, à la clé, la fermeture des usines du périmètre national. C’est le début des « délocalisations ».

Les ultralibéraux vont également imposer (à partir de 1983 en France), la dérégulation des marchés financiers. Les règles qui imposaient des contraintes et des limites à l’imagination des banquiers, des investisseurs et des spéculateurs sont abolies. Le monde de la banque et de la finance devient un casino. Le capital financier devient une marchandise que l’on manipule et sur laquelle on parie.

Progressivement, la richesse oligarchique qui dépendait autrefois de l’économie réelle va ainsi dépendre de l’économie financière.

Les chiffres sont aujourd’hui sans appel.

http://www.financeglobale.fr/La_finance_globale/Tableau_de_synthese_files/2002.png

La sphère économique mondiale

(Unité : le Téra dollar soit le millier de milliards de dollars)

Source : www.financeglobale.fr

Il y a deux manières de calculer le poids de la sphère financière (cf. l’économiste Raphaël Didier).  Soit, comme le fait l’économiste Patrick Artus, en additionnant, au niveau mondial, l’encours de crédit, l’encours d’obligations, l’encours de produits dérivés et la capitalisation boursière. Soit, comme le fait l’économiste François Morin, en additionnant les marchés dérivés, les marchés des changes et les marchés financiers (tableau). Dans le premier cas, la sphère financière représente plus de 1100 % du PIB mondial, soit 12 fois plus que l’économie réelle. Dans le second cas, les flux financiers sont près de 60 fois supérieurs aux flux de l'économie réelle !

La seule activité bancaire en France représente 4.2 fois le PIB du pays, sans même prendre en compte l’activité de la banque centrale. Le bilan de la BNP est à lui seul équivalent au PIB de la France (voyez ici) ! Que pèsent dans ces conditions la SNCF, Michelin et ce qu’il reste de l’industrie française ?

Mettez-vous à la place d’un oligarque ou d’un fond d’investissement. Préféreriez-vous investir votre agent dans une économie réelle qui stagne ou dans une économie financière en pleine croissance ? Préféreriez-vous gérer les revendications d’une masse salariale indisciplinée ou miser anonymement dans un casino qui vous assure de gagner des sommes colossales à tous les coups ? Préféreriez-vous investir en bourse ou dans une usine du Pas-de Calais ?

En fait, l’oligarchie a déserté l’économie réelle pour se gaver dans l’économie financière. Les deux économies sont aujourd’hui totalement découplées. Même l’arrêt économique de la Chine, suite au Coronavirus, n’empêche pas les bourses de grimper (pour le moment !). Alors une grève en France ! L’indice Baltic Dry mesure le transport maritime global. En 5 mois et demi, il s’est effondré de 83.52%. On pourrait penser que c’est autrement plus préoccupant que l’occupation d’un rond-point dans la Creuse, n’est-ce pas ? Et bien pas du tout : dans le même temps le Cac 40 est passé de 5400 points à 6100 points !

Les oligarques évoluent aujourd’hui dans un univers parallèle alimenté par les banques centrales. Celles-ci inondent les marchés financiers et ignorent totalement l’économie réelle. Les tombereaux de Dollars, d’Euros, de Yen imprimés par les banques centrales atterrissent, via le Casino,  dans les poches d’oligarques qui s’enrichissent à hauteur que la population s’appauvrit.

L’économie réelle n’a plus aucun intérêt pour les 0.01%, d’autant que tout ce qui compte « stratégiquement » leur appartient désormais : l’eau (y compris en France, via des firmes comme Veolia, Suez ou Saur), l’énergie, les transports, la santé, l’agro-alimentaire, les médias, Internet, les télécommunications, etc.

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De ce constat objectif, il découle que les cheminots, les agents de la RATP, les infirmières, les enseignants ou les dockers peuvent faire grève autant qu’ils le désirent. Cela n’aura aucune chance de toucher, même de manière très superficielle, le train de vie des oligarques qui spéculent sur les marchés. Mettez en rapport le marché des changes (FOREX) ( 5100 milliards de dollars qui changent de mains tous les jours. Six fois plus qu’en 1992. Plus de deux fois le PIB français !) et le chiffre d’affaire de la SNCF (33 milliards d’Euros… par an) et vous comprendrez que la grève des cheminots et la galère des usagers n’aient pas beaucoup ému nos élites bancaires et financières !

C’est un fait et cela explique largement l’échec du mouvement des Gilets Jaunes,  l’échec des grèves contre la réforme des retraites et l’arrogance gouvernementale : pour l’essentiel, la richesse des dominants ne provient plus de l’économie réelle ! La contestation sociale ne touche plus les « gros » comme à l’époque de Zola, comme en 1968, ou même, encore, comme en 1995 !

Mais Macron et le gouvernement, me direz-vous, ne sont-ils pas impactés par la contestation sociale ?

Bien sûr, ils encaissent les coups, mais c’est leur job. Ils sont payés pour ça. Les « élus » sont élus parce-que les médias oligarchiques et les milieux économiques ont organisé leur promotion. Ce sont des larbins de l’oligarchie. Tant que la contestation sociale ne met pas en péril la situation de leurs maîtres, leur rôle consiste à être sourd et aveugle à la détresse de leur peuple, tout en continuant à faire remonter vers l’oligarchie les biens réels qu’ils peuvent encore voler à celui-ci (réseaux d’eau, ports et aéroports, cotisations retraite, Française des Jeux, Métros…). Cependant, ces « élus » n’ignorent pas qu’ils tiennent, pour l’oligarchie, un rôle de fusible ; qu’ils sont, pour l’oligarchie, des leurres chargés de dévier les coups qui pourraient atteindre les possédants. La contestation sociale fait peur aux politiciens car ils savent que leur tête pourrait finir au bout d’une pique. Aussi, s’entourent-ils de leurs propres larbins, chargés de les protéger en éborgnant et mutilant les récalcitrants. Aussi font-ils parfois, sans déroger à leur mission, quelques concessions symboliques, qui tiennent plus de la trouille que de l’esprit de justice. Aussi tiennent-ils un discours sur le réchauffement climatique qui justifie leurs politiques de spoliation… mais aussi, indirectement,  la volonté de leurs maîtres de déconnecter définitivement l’économie financière de l’économie réelle.

Sacrifier l’économie réelle pour sauver la planète

Au dernier Forum de Davos, il était piquant de voir les grands promoteurs de la mondialisation se soucier avec force de la « planète ». Les mêmes qui se sont arrangés jusque là pour que nous ne puissions rien acheter qui n’ait préalablement parcouru plusieurs milliers de kilomètres, les mêmes qui ont délocalisé sans scrupules notre industrie, générant largement la pollution qu’ils dénoncent, déclaraient à qui voulait les entendre qu’ils allaient maintenant, foi de Greta Thunberg, « sauver la planète ». Peut-on rappeler ici qu’un porte-conteneurs pollue autant qu’un million de voitures ?

Les vraies raisons de cet hypocrite préoccupation écologique sont à rechercher dans ce que nous avons exposé plus haut : l’économie financière est aujourd’hui totalement déconnectée de l’économie réelle. Celle-ci lui est désormais plus un boulet qu’un atout. L’économie financière « hors sol » peut maintenant sacrifier ce par quoi elle avait autrefois vécu. Le Forum économique mondial de Davos (FEM) qui s’est tenu du 21 au 24 janvier 2020 a organisé la mise en scène sanglante de ce sacrifice. Ravalée par les Grand Prêtres de l’économie financière (banquiers centraux, BlackRock, fonds d’investissements…) au rang de bouc émissaire du réchauffement climatique, l’économie réelle a été donnée en offrande au dieu du Climat afin de « sauver la planète » (voir aussi l’article de William Engdahl mis en ligne sur le site du Centre de Recherche sur la Mondialisation ).

Le rôle de l’économie financière est de soutenir l’économie réelle. Il fallait une bonne raison pour justifier la réorientation des flux de capitaux de l’économie réelle vers les produits financiers, beaucoup plus rentables. Le « réchauffement climatique » induit par l’économie réelle était une raison toute trouvée.  A Davos, nous avons ainsi assisté à la bénédiction Urbi et orbi d’une opération que la Finance a commencé il y a déjà plusieurs années. 

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Ainsi, dès 2011, BlackRock, Goldmans Sachs et différents fonds de pension américains ont fondé le Conseil des Normes Comptables de Soutenabilité écologique (Sustainability Accounting Standards Board (SASB). Le but de cette structure est d’orienter les différents investissements en fonction de leurs adéquations aux impératifs écologiques. Parmi les organisations « philanthropiques » qui animent le Conseil et fixent les normes on relèvera notamment, outre BlackRock et Goldman Sachs, State Street Global, Carlyle Group, Rockefeller Capital Management, Fidelity Investments, Bank of America, Merril Lynch, UBS…

En 2015, la Banque des Règlements Internationaux (B.R.I.), associée à BlackRock, a lancé le Groupe de Travail sur la Divulgation Financière relative au Climat (TCFD). Le groupe est alors dirigé par Mark Carney, Gouverneur de la Banque d’Angleterre. Carney, ancien de Goldman Sachs,  est aussi membre du Conseil du Forum de Davos ainsi que président du Conseil de Stabilité Financière de la B.R.I. Il vient d’être nommé Conseiller au changement climatique de Boris Johnson ( !).

En 2016, le TCFD a lancé « l’Initiative Finance Verte » (G.F.I). Le but : canaliser l’économie financière vers des investissements « verts », des investissements « résilients au changement climatique », en vue de « limiter les émissions de CO2 ». Les banquiers centraux de la B.R.I. ont nommé 31 membres dirigeants, parmi lesquels les représentants de BlackRock, de Generation Investment Management dirigé par Al Gore, de J P Morgan Chase, de Barclays, de HSBC,  du Crédit Agricole…

Tout ce petit monde de banquiers centraux, de financiers, de fonds de pension, de fonds d’investissement, de banques d’affaires… s’est donc logiquement retrouvé à Davos pour décréter qu’il était urgent de « sauver la planète ». Comment ? On l’a vu, c’est très simple : il suffit de canaliser les investissements vers les secteurs d’activité qui émettent le moins de CO2 et de sanctionner éventuellement ceux qui ne se soumettent pas à une discipline « écologique » de fer ! 

Ainsi, Mark Carney (le Gouverneur de la Banque d’Angleterre devenu expert en climat auprès de Boris Johnson), déclare à la BBC, sur la foi d’une analyse d’un fond de pension ( !) : « si vous additionnez les politiques de toutes les entreprises ici-bas aujourd’hui, elles correspondent à un réchauffement de 3,7/3,8°C » (avec, bien sûr, élévation de 9 mètres du niveau des océans et famines à la clé) et d’avertir que les fonds de pension qui ignorent le changement climatique risquent à présent la banqueroute (cité par William Engdahl). Autrement dit, les fonds de pension qui continuent à investir dans l’économie réelle polluante (les « entreprises ») et ignorent les conseils de BlackRock, Goldman Sachs ou Rockefeller seront poussés à la faillite ! 

BlackRock justement (12 500 milliards de dollars de chiffre d’affaire, 7000 dollars d’investissements, 6 fois le PIB de la France) a clairement mis les points sur les i, quelques jours avant le forum de Davos de 2020. Son PDG, Larry Fink, a fait savoir dans une lettre datée du 16 janvier que le « risque climatique » force une « recomposition fondamentale de la finance » et un « changement dans l’allocation des capitaux » qui sera plus rapide que le climat lui-même.  Larry Fink prédit : « Dans le futur proche (et plus proche que certains n’anticipent), il y aura une réallocation incitative du capital ». BlackRock construira son portefeuille en fonction de la « soutenabilité [écologique] » des entreprises. Il se défaussera « d’investissements qui présentent un haut risque en termes de soutenabilité [écologique], comme les producteurs de charbon thermique », il lancera « de nouveaux produits d’investissement qui examinent de plus près les énergies fossiles » et renforcera « [son] engagement vers la soutenabilité [écologique] ».

Dit plus clairement : sous prétexte de risque climatique, BlackRock annonce que les capitaux iront de plus en plus vers des « produits d’investissements » indépendants des énergies fossiles et des émissions de CO2, c’est-à-dire de l’industrie et des entreprises de l’économie réelle. Les « nouveaux produits » en question seront donc de plus en plus des produits purement financiers. Cela tombe bien, ce sont aussi les plus lucratifs ! Ce « changement dans l’allocation des capitaux », déjà très largement entamé, menace donc directement l’économie réelle. Les financiers somment hypocritement l’économie réelle de se tourner résolument vers les « énergies vertes », tout en sachant que les « énergies vertes » ne permettront pas à l’économie réelle de fonctionner, ni même de nourrir, de loger et d’habiller 7 milliards et demi d’êtres humains !

A moins de trouver une nouvelle source d’énergie, il n’est donc pas possible aujourd’hui de dissocier l’activité de production des énergies fossiles. En décidant de ne plus financer les projets liés aux énergies fossiles, la Banque Européenne d’Investissement, outil de la Commission européenne, signe l’arrêt de mort de l’économie réelle. Produire oblige à émettre du CO2, et cesser d’émettre du CO2 revient à cesser de produire. L’argent est le sang des entreprises. Priver les entreprises de financements pour lutter contre le changement climatique revient à asphyxier l’économie. Mettre des limites à l’économie réelle provoquera des faillites, du chômage, de la misère et de la contestation sociale. C’est pourtant ce que font en toute lucidité les 0.01% à la tête de l’économie financière.

Et tout cela pour sauver la planète ? Allez, sans rire ?

Et maintenant, que peut-il se passer ?

Seulement 13.5% des placements des assureurs « français » sont dirigés vers des entreprises non financières. A peine 5% des transactions financières à travers le globe correspondent à des biens et des services réels. Sous perfusion des banques centrales qui lui assurent de gagner à tous les coups, l’économie financière ne veut plus de l’économie réelle : celle-ci n’offre plus aux investisseurs des débouchés aussi rentables que les actifs financiers ou les produits dérivés. Aussi se donne-t-elle de bonnes raisons pour réorienter les flux de capitaux de l’économie réelle vers les produits financiers et la spéculation. Qui veut tuer son chien l’accuse de la rage, dit-on.

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Mauvais calcul des 0.01% ? On pourrait le penser, car que se passera-t-il quand les banques centrales cesseront de faire fonctionner la planche à billet ? Jusqu’à présent, le système financier est alimenté en argent frais par les banques centrales. Il peut donc tourner en circuit fermé.  Mais demain ?

Admettons que pour une raison ou une autre, la perfusion financière soit coupée. Immédiatement, les bourses commenceraient sans doute à dévisser. Quelques fonds d’investissement seraient ruinés, des banques systémiques feraient sans doute faillite, mais au final qui serait réellement touché ? Les 0.01% prévenus à l’avance de la manœuvre ou les petits épargnants qui ne pourraient même plus retirer des banques leurs maigres économies ?  Voyez ce qu’il s’est passé à Chypre, voyez ce qu’il se passe au Liban.  Et puis regardons les faits : en 40 ans, l’essentiel des biens réels a été transféré aux 0.01% ! Ces derniers finissent aujourd’hui d’acheter avec de la monnaie de singe les derniers biens réels qu’ils n’ont pas. Et après que se passera-t-il ? Pensez-vous que, pour les ultra-riches, il soit vital que les usines et les industries dont la seule fonction est de fabriquer de quoi nourrir, habiller et loger le petit peuple, continuent à fonctionner ? Bien sûr que non, puisque ces entreprises ne leur rapportent rien.

Ici nous en revenons aux Gilets Jaunes, au mouvement de grèves et à l’indifférence des gouvernements nommés par les 0.01%. Les maîtres et leurs larbins se fichent de la contestation sociale car désormais la contestation sociale ne leur cause aucun préjudice. Bloquer l’économie réelle est obsolète car, du point de vue oligarchique, elle n’a plus aucune utilité, si ce n’est pour nourrir des masses humaines sans importance.

C’est quasiment acté : les 0.01% ont fait sécession ! Ils travaillent depuis 40 ans à s’exfiltrer de la population anonyme. Et ce processus d’exfiltration est sur le point d’aboutir. Ce qu’il se passera ensuite au sein de cette population ne les concernera plus. L’effondrement économique qu’ils auront causé, et qu’on mettra sur le compte du réchauffement climatique, fera connaître aux peuples la misère et la barbarie.  Mais ce ne sera pas le problème des 0.01% : que le peuple crève !

Néanmoins, il reste une chose que l’oligarchie ne possède pas encore totalement : la sécurité. Bien sûr, les larbins gouvernementaux surveille la population grâce à des lois toujours plus liberticides. Bien sûr, des forces de police importantes sont chargées d’assurer la protection des dominants. Mais cela suffira-t-il ?

On sait que la société créée par l’oligarchie est une société multiraciale et multiculturelle. Pense-t-elle, cette oligarchie, que la misère fera se jeter les unes contre les autres les différentes communautés ? Pense-t-elle qu’elle se fera ainsi oublier ? Espère-t-elle, cerise sur le gâteau, qu’elle pourra même manipuler à son avantage les différents groupes en conflit ?

Antonin Campana

00:38 Publié dans Ecologie, Economie | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : économie, économie réelle, écologie | |  del.icio.us | | Digg! Digg |  Facebook

Steun voor NAVO brokkelt af: Meerderheid wil geen hulp aan lidstaat met militair conflict met Rusland

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Steun voor NAVO brokkelt af: Meerderheid wil geen hulp aan lidstaat met militair conflict met Rusland

Ex: https://www.xandernieuws.net

Sinds president Bill Clinton is de NAVO een agressieve alliantie geworden waarmee vooral Amerikaanse geopolitieke doelstellingen worden gerealiseerd. (Afbeelding: (2)).

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De steun voor de NAVO / NATO onder de bevolking van de lidstaten is aan het afbrokkelen. In 11 van de 16 landen zegt een (relatieve en/of absolute) meerderheid geen steun te willen verlenen als een lidstaat in een militair conflict verzeild raakt, vooral niet als dat Rusland is. De –zoals we vaker schrijven: overwegend helaas nog immer naïeve- Nederlanders staan bovenaan in het korte lijstje waar de meerderheid zo’n oorlog wèl steunt, in procenten zelfs nog boven de VS.

‘North Atlantic Terror Organization’

Na de Val van het IJzeren Gordijn en het Warschaupact transformeerde het Atlantische bondgenootschap zich onder president Bill Clinton van een defensieve naar een agressieve, imperialistische  alliantie, die zich weinig aantrok van internationale wetten. Dit leidde al snel tot de even illegale als schandalige oorlog tegen Joegoslavië / Servië, waar de moslims heimelijk werden bewapend om grote slachtpartijen aan te richten onder de overwegende christelijke Servische bevolking, wat een bloedige burgeroorlog in gang zette. Dat leverde de NATO de bijnaam North Atlantic Terror Organization op.

Sinds begin deze eeuw volgden de steun aan de zinloze, verwoestende Amerikaanse oorlogen in of tegen Afghanistan, Irak, Libië en Syrië, waarbij zoveel burgerslachtoffers vielen, dat dit de perfecte voedingsbodem bleek voor de snelle opkomst van islamitische terreurgroepen zoals het reeds bestaande Al Qaeda, en later ISIS. De Westerse globalisten grepen de grotendeels door henzelf gecreëerde chaos en ellende vervolgens maar al te gretig aan om een enorme migrantenstroom naar Europa te faciliteren, en zelfs aan te moedigen.

Meerderheid wil geen hulp aan lidstaat met militair conflict met Rusland

Met uitzondering van Nederland, de VS, Canada, Groot Brittannië en Litouwen is een meerderheid van de bevolking in 11 van de 16 landen –waaronder Frankrijk, Duitsland en Spanje- inmiddels TEGEN het volgens de artikelen van de NAVO verplicht te hulp schieten van lidstaten die in een militair conflict terecht komen, vooral als de tegenstander Rusland is.  Zelfs in de voormalige Oostblok landen Polen, Tsjechië, Hongarije, Slowakije en Bulgarije, die decennialang hebben moeten zuchten onder het Sovjet juk, is een meerderheid tegen. Bulgarije spant daarbij de kroon met 69% tegenstanders, en slechts 12% voorstanders.

Het gemiddelde van de 16 landen komt uit op 50% tegen militaire hulp, en 38% voor. Op de algemenere keuzevraag of mensen positief of negatief tegen de NAVO als organisatie staan, is in meer landen een meerderheid te vinden (de genoemde vijf landen plus Duitsland, Polen en Italië). Opvallend is dat in de VS slechts 52% het bondgenootschap positief vindt. Onder Republikeinen is dat zelfs maar 45%. President Trump heeft regelmatig de onvrede van de Amerikanen over het niet nakomen van de afgesproken 2% defensie uitgaven door bijna alle Europese lidstaten verwoord.

Gekeken naar de politieke kleur van mensen staat ‘rechts’ duidelijk veel positiever tegenover de VS, de NAVO en militair ingrijpen in andere landen, dan ‘links’. (Toch zullen vermoedelijk maar weinig mensen deze website ervan beschuldigen links te zijn.)

Turken alleen op papier nog NAVO lid, in realiteit vijand

Het zal niemand verbazen dat het percentage voorstanders van de NAVO in Turkije het laagst is: 21%. Dat land is alleen nog op papier lid, maar heeft zich in realiteit onder de islamistische dictator Erdogan als een vijand van het Westen ontpopt.

De onverminderde steun van Europa en de NAVO voor de zich almaar agressiever opstellende Turken zou een reden kunnen zijn waarom slechts 25% van de Griekse bevolking de NAVO nog een warm hart toedraagt.

NAVO op termijn vervangen door alliantie met Rusland?

Is er nog een toekomst voor de NAVO weggelegd? De burgers in de meeste lidstaten willen zowel met Amerika als Rusland goede betrekkingen onderhouden. Daarentegen wil slechts een zeer kleine minderheid van 4% van de Nederlanders en 5% van de Britten dit eveneens. De burgers in deze landen leunen nog overweldigend naar de Verenigde Staten toe.

De tendens lijkt echter dat langzamerhand steeds meer Europeanen de eindeloze Amerikaanse / NAVO oorlogen zat beginnen te worden. Dat is hoopgevend, aangezien de Westerse mainstream media nog stevig in de grip van de Transatlantici zijn, en daardoor uitsluitend eenzijdige pro-NAVO en anti-Rusland propaganda blijven verspreiden.

De tijd lijkt daarom rijp om eens goed na te gaan denken over een nieuwe Europese koers, misschien los van de VS, en een die kan leiden tot een broodnodige veel betere band –en op termijn zelfs alliantie- met het land dat al een enorm deel van de Europese energie levert: Rusland. Dat zal de veiligheid en stabiliteit op ons continent enorm ten goede komen. Grootschalige, overduidelijk op oorlog tegen Rusland gerichte NAVO oefeningen zoals het in gang gezette Europe Defender 20, zullen echter niet echt helpen om het Kremlin ervan te overtuigen dat wij vreedzame intenties hebben, en niet uit zijn op een grootschalig militair conflict.

Xander

(1) Pew Research via Zero Hedge
(2) Afbeelding: WikiMedia Commons, auteur Staff Sgt. Keith Anderson, bron https://www.dvidshub.net/image/1657360 , As a work of the U.S. federal government, the image is in the public domain.

Zie ook o.a.:

31-01: Duitse soldaten moeten tijdens militaire oefening eigen auto gebruiken omdat 80% pantservoertuigen kapot is
16-01: 15 Turkse F-16’s schonden dinsdag 91 keer Griekse luchtruim en voerden schijnaanvallen uit
08-01: Oekraïense oud-kolonel: MH-17 ramp opgezet door Britse geheime dienst en Poroshenko

mercredi, 19 février 2020

L’autre droite polonaise

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L’autre droite polonaise

par Georges FELTIN-TRACOL

Ex: http://www.europemaxima.com

Quatre faits majeurs ont marqué les élections générales du 13 octobre dernier. La majorité gouvernementale constituée autour du PiS (Droit et Justice) de Jaroslaw Kaczynski est reconduite, ce qui est en soi un événement majeur depuis la fin du régime communiste en 1990.

Si le PiS et ses alliés remportent la majorité absolue des sièges à la Diète, cette entente ne dispose que de 48 sièges sur cent au Sénat désormais présidé par un opposant de centre-droit. Disparue à l’occasion des élections précédentes, l’Alliance de la gauche démocratique retrouve une représentation parlementaire de 49 sièges. Animée par les agrariens du Parti paysan qui sert souvent de force d’appoint aux gouvernements de droite comme de gauche, la Coalition polonaise (30 députés) réunit les centristes de l’Union des démocrates européens, les libéraux-sociaux du Parti démocratique, les régionalistes de Silésie ensemble et les anciens populistes de Kukiz’15 désormais ralliés à la démocratie directe, au conservatisme libéral et à l’intégration européenne.

Mais la surprise provient de la Confédération, véritable cauchemar de Kaczynski qui n’a pas empêché l’émergence sur sa droite d’un pôle authentiquement radical. Lancée le 6 décembre 2018, la Confédération Liberté et Indépendance avait récolté aux élections européennes de mai dernier 621 188 voix et 4,55 %. Aux législatives, ce cartel obtient 1 256 953 voix, soit 6,81 % et onze députés. Grâce à un usage massif et réfléchi des réseaux sociaux, il devient la troisième force politique chez les moins de trente ans. Pour le Sénat, en raison du mode de scrutin majoritaire uninominal à un tour, elle ne rassemble que 144 124 bulletins (0,79 %).

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La Confédération Liberté et Indépendance soutient la sortie de la Pologne de l’Union européenne. Cet ensemble souverainiste s’oppose aussi à l’avortement, au féminisme et à la vague LGBTXYZ. Plutôt climatosceptique, il préconise l’emploi simultané du charbon et des énergie renouvelables. C’est enfin une alliance électorale de sept mouvements, trois majeurs et quatre mineurs. Parmi ces derniers, mentionnons l’Association nationale STOP NOP pour la connaissance de la vaccination qui rejette les campagnes de vaccination obligatoire, les protestataires anti-bureaucratiques relativement « poujadistes » du Parti des chauffeurs qui exige un code de la route moins répressif et des infrastructures routières plus sûres, l’Union des familles chrétiennes qui défend la vie et le catholicisme traditionnel, et, rassemblant d’anciens activistes de la Ligue des familles polonaises et de Samoobrona, la Ligue nationale, un temps proche du PiS, dont le discours se réfère à la doctrine sociale de l’Église et au solidarisme de troisième voie.

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Examinons maintenant ses principaux piliers. Avec un élu, la Confédération de la Couronne polonaise dédiée à Dieu et à la Vierge Marie, est une formation monarchiste sans prétendant, car le royaume de Pologne fut jusqu’en 1772 une monarchie élective. Avec cinq députés chacun, le mouvement KORWIN et le Mouvement national en sont les deux moteurs. KORWIN est l’acronyme polonais de Coalition pour la restauration de la liberté et de l’espoir de la République, clin d’œil évident à son président-fondateur, l’ancien député européen loufoque Janusz Korwin-Mikke de sensibilité libertarienne minarchiste (un État réduit à ses seules prérogatives régaliennes). Lointain héritier du Parti national-démocrate du penseur nationaliste Roman Dmowski (1864 – 1939), le Mouvement national lutte pour une Pologne subsidiariste et ethniquement homogène.

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Roman Dmowski

La Confédération Liberté et Indépendance s’oppose avec force à la politique étrangère catastrophique, atlantiste et pro-occidentale, du PiS. Sur les traces du pro-russe Roman Dmowski, elle a proposé à la Russie de partager l’Ukraine : l’Est dont le Donbass reviendrait à Moscou, l’Ouest, y compris la Galicie, à la Pologne. Elle reprend à son compte la vision géopolitique du grand rival de Dmowski, le maréchal Pilsudski. Elle se justifie par le fait que la Pologne accueille déjà des centaines de milliers d’immigrants d’origine ukrainienne. Si pour certains, l’ukrainien ne serait qu’une variante dialectale du russe, la Confédération estime qu’il s’agit d’une variante paysanne du polonais. Aucun ne s’est demandé si l’ukrainien ne serait pas plutôt la langue-mère du polonais, du russe et du bélarussien…

Si la Confédération Liberté et Indépendance ne sombre pas dans de vaines querelles de personnes, elle pourra à terme vraiment représenter une alternative crédible à Jaroslaw Kaczynski. Encore faudrait-il qu’elle délaisse une bonne fois pour toute l’impression persistante d’amateurisme politique.

Georges Feltin-Tracol

• « Chronique hebdomadaire du Village planétaire », n° 159, mise en ligne sur TV Libertés, le 10 février 2020.

Déconstruction allemande

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Déconstruction allemande

Ex: http://www.dedefensa.org

Plus qu’“à l’Allemande”, nous parlons d’une “déconstruction allemande”, avec l’essentiel de l’expression mis sur le mot “déconstruction”. L’Allemagne elle-même, malgré toutes ses vertus et ses nombreux fleurons, n’a en effet rien d’exceptionnel ni de spécifique dans la crise qui la frappe. Les éléments qui la composent sont similaires à ceux qu’on trouve dans la crise française, dans la crise italienne, dans l’évolution hongroise ou l’évolution polonaise, etc. Il s’agit de l’acte de déconstruction qui joue désormais à fond contre le Système, et qui s’appuie comme sur un levier sur les courants populistes de toutes sortes s’affirmant de différentes façons dans tous ces pays.

Comme on le lit ci-dessous, c’est la démission d’ Annegret Kramp-Karrenbauer (AKK) de la présidence de la CDU qui porte la crise allemande à entrer dans le domaine de son paroxysme. Les éléments crisiques de ce que nous nommons “tourbillon crisique“ ont ceci de particulier par rapport au concept classique de “crise” que leur paroxysme n’est pas un instant de réalisation de toutes les tensions, mais au contraire un épisode de bonne durée, et parfois de longue durée. Ainsi en est-il du “tourbillon crisique” européen, et en son sein la crise allemande est effectivement entrée dans sa phase paroxystique puisque Merkel s’en va avec les élections législatives de 2021, que son successeur désigné AKK prend la décision brutale d’abandonner, que son renoncement est dû au caractère désormais ingouvernable, incohérent, etc., du parti conservateur CDU qui verrouillait jusqu’ici la vie politique allemande.

Forteresse équilibre et référence obligée en Europe, exemple à la fois économique et politique de puissance domestiquée, désormais meneuse de l’Europe depuis la longue agonie (à partir de Sarko, de façon accélérée) de toute ambition française à affirmer une souveraineté régalienne au coeur de l'Europe, l’Allemagne est entrée dans une crise ontologique qui est elle-même en train de pulvériser le “modèle allemand”. La digue a cédé devant la poussée populiste qui n’est évidemment rien d’autre qu’un outil maniée par les forces de résistance et de dissidence, nécessairement antiSystème en raison des positions respectives des uns et des autres. L’originalité de la situation est que la CDU est menacée par des tentations populistes sur ses deux ailes, – sur la droite avec l’AfD, sur la gauche avec Der Linke.

Les étiquettes politiques n’ont évidemment pas grande importance, tout comme le terme “populiste” utilisé à hue et à dia. Ces identifications répondent en général à l’ambition classique et purement défensive de la “diabolisation” des forces contestatrices du Système, pour tenter de retarder le plus possible les instants de vérité de l’effondrement des structures du Système. C’est en cela qu’il s’agit bien d’une bataille de déconstruction, mais d’une déconstruction paradoxale comme nous le notions hier, – avec le terme “déconstructuration” où la puissance déstructurante du Système, qui s’appuie sur ses propres structures pour se déchaîner, et, n’y trouvant plus de structures antiSystème à attaquer mais prisonnière de sa mécanique déstructurante, en vient à s’attaquer à ses propres structures, à se déstructurer elle-même :

« [...C]ette “déconstructuration” passant par l’évolution irrésistible de la surpuissance à l’autodestruction en finissant par une attaque de “déconstructuration” prenant pour cible ultime, – puisque rien d’autre ne subsiste et que la “déconstructuration” est la seule activité possible de cette surpuissance, – les structures et les constructions que le Système avait édifiées pour déstructurer et déconstruire le monde. »

Sans doute la crise allemande, qui atteint brusquement son paroxysme, est-elle la plus grave en Europe, parce qu’elle touche le pays-leader de l'ensemble européen d’une part, et que d’autre part elle touche un pays qui est complètement étranger à l’instabilités depuis sa refonte complète de 1945-1950. Au contraire de la France et de l’Italie par exemple, qui ont l’habitude des crises internes et de l’instabilité, l’Allemagne a surtout connu des crises externes. Ces crises avaient lieu dans le cadre des rapports Est-Ouest en Europe, ce cadre délimité par la position et l’action de l’URSS et la division en deux Allemagnes (RFA à l’Ouest et RDA à l’Est). D’une façon assez logique, ces crises alimentées de l’extérieur renforçaient la stabilité structurelle de la situation intérieure allemande (ouest-allemande), encouragée par les pressions des puissances “occupantes” (les USA particulièrement).

La situation est fondamentalement différente aujourd’hui, et la crise allemande se greffe dans son opérationnalité sur la crise européenne comme par un effet mimétique (alors que les autres crises nationales sont des crises à tendance eurosceptique et anti-européiste). L’Allemagne de l’après-guerre devenue Allemagne réunifiée a été conçue avec la nécessité d’un ou de plusieurs “tuteurs” (les USA, l’OTAN, l’UE) qui contribuaient indirectement mais décisivement à sa stabilité intérieur (à sa structuration intérieure). Bien entendu, les crises déstructurantes que connaissent ces “tuteurs” eux-mêmes contribuent à la fragilisation de l’Allemagne, à sa vulnérabilité aux poussées déstructurantes.

La crise allemande désormais ouverte comme une plaie béante est une crise typique de notre époque, une “crise sans but”, qui n’a pas été provoquée par l’une ou l’autre ambition, l’une ou l’autre stratégie (celle du fasciste de service, par exemple, comme on aime à le proclamer) qui apparaîtrait alors comme une structure alternative à la structure en train d’être détruite. C’est une “crise de destruction”, dont le but et l’ambition se satisfont de la destruction des structures en place ; l’ironie étant que cette sorte de “crise sans but” sinon la destruction est typique des crises suscitées par le Système, et qu’elle se fait aujourd’hui (comme d’autres parallèlement à elle) contre le Système. 

Ci-dessous, un article de RT-français du 11 février 2020, rapportant succinctement les circonstances de la crise qui a conduit à la démission d’AKK.

dedefensa.org

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AKK s'en va, la CDU en crise

Coup de tonnerre politique en Allemagne. Annegret Kramp-Karrenbauer, surnommée AKK, ne sera pas candidate à la succession d’Angela Merkel à la chancellerie et va abandonner la présidence du parti conservateur d'ici quelques mois, le temps de trouver un successeur qui sera en même temps candidat à la chancellerie. 

Lors d'une réunion dans la matinée de la direction du parti démocrate-chrétien CDU de la chancelière, Annegret Kramp-Karrenbauer a justifié sa décision par la tentation d'une partie de son camp de s'allier avec le parti de droite radicale AfD (Alternative pour l’Allemagne). «Une partie de la CDU a une relation non clarifiée avec l’AfD», a-t-elle déclaré. En outre, une frange du CDU est également partisane d'un rapprochement avec le parti de gauche radicale Die Linke, alors que AKK rejette clairement toute alliance avec l'une ou l'autre de ces formations.

Si aucun lien entre la CDU et la gauche de Die Linke n’a – pour l'heure – été établi, une partie significative des conservateurs prône en revanche ouvertement un rapprochement avec l’AfD. C’est le cas de la Werte Union, un cercle de conservateurs au sein de la CDU auquel avait fait face Annegret Kramp-Karrenbauer lors du dernier congrès du parti, à Leipzig.

Cet abandon est une conséquence directe de l'élection du président de la région de Thuringe, le 5 février, grâce aux voix coalisées du parti anti-immigration de l'AfD et de l'aile droite du parti d'Angela Merkel. A la surprise générale, le candidat du petit parti libéral FDP, Thomas Kemmerich, avait été désigné à une très courte majorité pour diriger la Thuringe, provoquant la colère de nombreux responsables politiques. La chancelière allemande avait alors fustigé «un acte impardonnable», et le secrétaire général du parti, Paul Ziemiak, avait accusé la CDU régionale d'avoir «enfreint» les règles édictées au plan national en mêlant leurs votes à ceux «de nazis». 

C'est dans ce contexte que Thomas Kemmerich a annoncé sa démission... moins de 24h après son élection. «La démission est inévitable [...] nous avons décidé de demander la dissolution du parlement de Thuringe», a-t-il déclaré le 6 février, lors d'une conférence de presse. De nouvelles élections régionales anticipées doivent bientôt être organisées.

Sans tête d'affiche à un an des élections législatives 2021, la droite allemande sort de facto affaiblie par ces deux épisodes. L'un des proches de la chancelière, le ministre de l'Economie Peter Altmaier, a parlé d'une «situation extrêmement grave» pour le parti conservateur allemand d'Angela Merkel, l'Union chrétienne-démocrate (CDU). «Il en va de notre avenir», a-t-il affirmé, tandis que la dirigeante des écologistes a parlé d'une «situation dramatique» pour le pays. 

Le départ annoncé d'AKK constitue également un revers majeur pour Angela Merkel, qui avait placé en orbite cette femme partageant peu ou prou, malgré quelques différences de fond, le même cap politique de droite «modérée». 

«Il est possible que la fin de la chancelière se rapproche», juge le quotidien Süddeutsche Zeitung, alors que le dernier mandat en cours d'Angela Merkel, entamé en 2018, est rythmé par des crises incessantes au sein de sa fragile coalition avec les sociaux-démocrates ou à l'intérieur de son propre parti. 

Parmi les potentiels successeurs à AKK, une personnalité se détache : le conservateur Friedrich Merz, vaincu de peu par l'ex-future présidente du CDU. Celui-ci a récemment acté son départ du conseil d’administration de la branche allemande de BlackRock. Objectif : revenir sur le devant de la scène politique allemande en vue de 2021 avec une ligne plus à droite.

Où est passé le bien commun ?

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Où est passé le bien commun ?

A propos du livre de Jean Tirole, Prix Nobel d'économie

Ex: http://www.geopolintel.fr

Depuis le retentissant échec économique, culturel, social et environnemental des économies planifiées, depuis la chute du mur de Berlin et la mutation économique de la Chine, l’économie de marché est devenue le modèle dominant, voire exclusif d’organisation de nos sociétés. Même dans le « monde libre », le pouvoir politique a perdu de son influence, au profit à la fois du marché et de nouveaux acteurs. Les privatisations, l’ouverture à la concurrence, la mondialisation, le recours plus systématique aux mises aux enchères dans la commande publique restreignent le champ de la décision publique. Et pour celle-ci, l’appareil judiciaire et les autorités indépendantes de régulation, organes non soumis à la primauté du politique, sont devenus des acteurs incontournables.

Pour autant, l’économie de marché n’a remporté qu’une victoire en demi-teinte, car elle n’a gagné ni les cœurs ni les esprits. La prééminence du marché, à qui seule une petite minorité de nos concitoyens font confiance, est accueillie avec fatalisme, mâtiné pour certains d’indignation. Une opposition diffuse dénonce le triomphe de l’économie sur les valeurs humanistes, un monde sans pitié ni compassion livré à l’intérêt privé, le délitement du lien social et des valeurs liées à la dignité humaine, le recul du politique et du service public, ou encore l’absence de durabilité de notre environnement.

Un slogan populaire qui ne connaît pas de frontières rappelle que « le monde n’est pas une marchandise ». Ces interrogations résonnent avec une acuité particulière dans le contexte actuel marqué par la crise financière, la hausse du chômage et des inégalités, l’inaptitude de nos dirigeants face au changement climatique, l’ébranlement de la construction européenne, l’instabilité géopolitique et la crise des migrants qui en résulte, ainsi que par la montée des populismes partout dans le monde.
Où est passée la recherche du bien commun ? Et en quoi l’économie peut-elle contribuer à sa réalisation ?

Pour mieux comprendre le bien commun

Définir le bien commun, ce à quoi nous aspirons pour la société, requiert, au moins en partie, un jugement de valeur. Ce jugement peut refléter nos préférences, notre degré d’information ainsi que notre position dans la société. Même si nous nous accordons sur la désirabilité de ces objectifs, nous pouvons pondérer différemment l’équité, le pouvoir d’achat, l’environnement, la place accordée à notre travail ou à notre vie privée. Sans parler d’autres dimensions, telles que les valeurs morales, la religion ou la spiritualité sur lesquelles les avis peuvent diverger profondément.

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Il est toutefois possible d’éliminer une partie de l’arbitraire inhérent à l’exercice de définition du bien commun. L’expérience de pensée qui suit fournit une bonne entrée en matière. Supposez que vous ne soyez pas encore né, et que vous ne connaissiez donc pas la place qui vous sera réservée dans la société : ni vos gènes, ni votre environnement familial, social, ethnique, religieux, national… Et posez-vous la question : « Dans quelle société aimerais-je vivre, sachant que je pourrai être un homme ou une femme, être doté d’une bonne ou d’une mauvaise santé, avoir vu le jour dans une famille aisée ou pauvre, instruite ou peu cultivée, athée ou croyante, grandir au centre de Paris ou en Lozère, vouloir me réaliser dans le travail ou adopter un autre style de vie, etc. ? »

Cette façon de s’interroger, de faire abstraction de sa position dans la société et de ses attributs, de se placer « derrière le voile d’ignorance », est issue d’une longue tradition intellectuelle, inaugurée en Angleterre au XVIIe siècle par Thomas Hobbes et John Locke, poursuivie en Europe continentale au XVIIIe siècle par ­Emmanuel Kant et Jean-Jacques Rousseau (et son contrat social), et plus récemment renouvelée aux États-Unis par la théorie de la justice du philosophe John Rawls (1971) et la comparaison interpersonnelle des bien-être de l’économiste John Harsanyi (1955).

Pour restreindre les choix et vous interdire de « botter en touche » par le biais d’une réponse chimérique, je reformulerai légèrement la question : « Dans quelle organisation de la société aimeriez-vous vivre ? » La question pertinente n’est en effet pas de savoir dans quelle société idéale nous aimerions vivre, par exemple une société dans laquelle les citoyens, les travailleurs, les dirigeants du monde économique, les responsables politiques, les pays privilégieraient spontanément l’intérêt général au détriment de leur intérêt personnel.

Car si […] l’être humain n’est pas constamment à la recherche de son intérêt matériel, le manque de prise en considération d’incitations et de comportements pourtant fort prévisibles, que l’on retrouve par exemple dans le mythe de l’homme nouveau, a mené par le passé à des formes d’organisation de la société totalitaires et appauvrissantes.

Concilier intérêt personnel et intérêt général

Ce livre part donc du principe suivant : que nous soyons homme politique, chef d’entreprise, salarié, chômeur, travailleur indépendant, haut fonctionnaire, agriculteur, chercheur, quelle que soit notre place dans la société, nous réagissons tous aux incitations auxquelles nous sommes confrontés. Ces incitations – matérielles ou sociales – et nos préférences combinées définissent le comportement que nous adoptons, un comportement qui peut aller à l’encontre de l’intérêt collectif.

C’est pourquoi la recherche du bien commun passe en grande partie par la construction d’institutions visant à concilier autant que faire se peut l’intérêt individuel et l’intérêt général. Dans cette perspective, l’économie de marché n’est en rien une finalité. Elle n’est tout au plus qu’un instrument ; et encore, un instrument bien imparfait si l’on tient compte de la divergence possible entre l’intérêt privé des individus, des groupes sociaux et des nations, et l’intérêt général.

9782130729969_h430.jpgS’il est difficile de se replacer derrière le voile d’ignorance tant nous sommes conditionnés par la place spécifique que nous occupons déjà dans la société, cette expérience de pensée permettra de nous orienter beaucoup plus sûrement vers un terrain d’entente. Il se peut que je consomme trop d’eau ou que je pollue, non pas parce que j’en tire un plaisir intrinsèque, mais parce que cela satisfait mon intérêt matériel : je produis plus de légumes, ou j’économise des coûts d’isolation, ou je me dispense de l’achat d’un véhicule plus propre. Et vous qui subissez mes agissements, vous les réprouverez.

Mais si nous réfléchissons à l’organisation de la société, nous pouvons nous accorder sur la question de savoir si mon comportement est désirable du point de vue de quelqu’un qui ne sait pas s’il en sera le bénéficiaire ou la victime, c’est-à-dire si le désagrément du second excède le gain du premier. L’intérêt individuel et l’intérêt général divergent dès que mon libre arbitre va à l’encontre de vos intérêts, mais ils convergent en partie derrière le voile d’ignorance.

Bien-être et droits

Un autre bénéfice de cet outil de raisonnement que représente l’abstraction du voile d’ignorance est que les droits acquièrent une rationalité et ne sont plus de simples slogans : le droit à la santé est une assurance contre la malchance d’avoir les mauvais gènes, l’égalité des chances devant l’éducation doit nous assurer contre les différences qu’induit l’environnement où nous naissons et grandissons, les droits de l’homme et la liberté sont des protections contre l’arbitraire des gouvernants, etc.

Les droits ne sont plus des concepts absolus, que la société peut ou non accorder ; ce qui les rend plus opératoires, car en pratique ils peuvent être octroyés à des niveaux divers ou entrer en conflit les uns avec les autres (par exemple, la liberté des uns s’arrête là où commence celle des autres).

La recherche du bien commun prend pour critère notre bien-être derrière le voile d’ignorance. Elle ne préjuge pas des solutions et n’a pas d’autre marqueur que le bien-être collectif. Elle admet l’usage privé pour le bien-être de la personne, mais pas l’abus de cet usage aux dépens des autres. Prenons l’exemple des biens communs, ces biens qui, derrière le voile d’ignorance, doivent pour des raisons d’équité appartenir à la communauté : la planète, l’eau, l’air, la biodiversité, le patrimoine, la beauté du paysage…

Leur appartenance à la communauté n’empêche pas qu’in fine ces biens seront consommés par les individus. Par tous à condition que ma consommation n’évince pas la vôtre (c’est le cas de la connaissance, de l’éclairage sur la voie publique, de la défense nationale ou de l’air). En revanche, si le bien est disponible en quantité limitée ou si la collectivité veut en restreindre l’utilisation (comme dans le cas des émissions carbonées), l’usage est nécessairement privatisé d’une manière ou d’une autre.

C’est ainsi que la tarification de l’eau, du carbone ou du spectre hertzien privatise leur consommation en octroyant aux agents économiques un accès exclusif pourvu qu’ils acquittent à la collectivité le prix demandé. Mais c’est précisément la recherche du bien commun qui motive cet usage privatif : la puissance publique veut éviter que l’eau ne soit gaspillée, elle souhaite responsabiliser les agents économiques quant à la gravité de leurs émissions, et elle entend allouer une ressource rare – le spectre hertzien – aux opérateurs qui en feront un bon usage.

Le rôle de l’économie

Ces remarques anticipent en grande partie la réponse à la ­deuxième question, la contribution de l’économie à la recherche du bien commun. L’économie, comme les autres sciences humaines et sociales, n’a pas pour objet de se substituer à la société en définissant le bien commun. Mais elle peut y contribuer de deux manières.

41-RfSol41L._SX326_BO1,204,203,200_.jpgD’une part, elle peut orienter le débat vers les objectifs incarnés dans la notion de bien commun en les distinguant des instruments qui peuvent concourir à leur réalisation. Car trop souvent, comme nous le verrons, ces instruments, qu’il s’agisse d’une institution (par exemple le marché), d’un « droit à » ou d’une politique économique, acquièrent une vie propre et finissent par perdre de vue leur finalité, allant alors à l’encontre du bien commun qui les justifiait de prime abord. D’autre part, et surtout, l’économie, prenant le bien commun comme une donnée, développe les outils pour y contribuer.

L’économie n’est ni au service de la propriété privée et des intérêts individuels, ni au service de ceux qui voudraient utiliser l’État pour imposer leurs valeurs ou faire prévaloir leurs intérêts. Elle récuse le tout-marché comme le tout-État. L’économie est au service du bien commun ; elle a pour objet de rendre le monde meilleur. À cette fin, elle a pour tâche d’identifier les institutions et les politiques qui promouvront l’intérêt général. Dans sa recherche du bien-être pour la communauté, elle englobe les dimensions individuelle et collective du sujet. Elle analyse les situations où l’intérêt individuel est compatible avec cette quête de bien-être collectif et celles où au contraire il constitue une entrave.

« Économie du bien commun » de Jean Tirole, Éditions PUF, Paris mai 2016, 640 pages, 18€.

Jean Tirole. TSE

 

Racism - A Tool of Globalisation

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Racism - A Tool of Globalisation

Ex: https://www.katehon.com

It scarcely needs saying that, to listen to the liberal-leftist claptrap gushing from outfits such as The Guardian, one would think that Britain (and the predominantly white, Western world generally) is a hotbed of racism and xenophobia. Although having been particularly prominent since Britain’s decision to leave the European Union, the issue has again risen to headline news as a result of the so-called “Megxit” – the decision of Prince Harry and Meghan Markle to step back from royal duties, with the racism of the British tabloid press being a supposed factor.

While it is easy enough to point out anecdotal examples of racism anywhere, the notion that Britain suffers from either chronic or widespread racism – the kind that singer Lily Allen ascribes to the reason for Boris Johnson’s election victory – is difficult to defend. Academic research into the matter shows that Western countries are among the most racially tolerant in the world when it comes to the possibility of ethnic minorities moving in as next door neighbours. Remainers, who were aghast at Britain’s “xenophobic” decision to “turn its back” on Europe, may be interested to know that British parents are relatively happier for their children to enter interracial relationships than parents on the continent. And the Migration Observatory at Oxford University points out that the vast majority of immigrants to the UK find Britain to be hospitable and welcoming, and that they are able to improve their lives as a result of hard work. Moreover, while blacks are among the lowest earners in the UK, the government’s own figures show that the percentage of households earning more than £1,000 per week is greater among Indians, Chinese and other Asians than it is among British whites. So if racism is an explanation as to why some ethnic groups fail to earn as much as whites then the British people must be remarkably selective with their racism.

Nothing that demonstrates Britain as a relatively open and tolerant society should really come as much of a surprise. Britain has always been a cosmopolitan country, with centuries of experience in trade, relations and diplomacy that has stretched to every corner of the globe. And in spite of having been a supposed “oppressive” imperial power, we have also managed to remain on good terms with most of the former colonies under the aegis of the Commonwealth. The most that can be said for the notion that Britain is a “racist” country is to compare it to some purified ideal rather than to the situation in other countries – much like condemning a nation that has the highest cancer survival rates in the world on the grounds that there are still some natives who are dying from the affliction.

Because genuinely deplorable cases of racism – conscious, seething prejudice that either can or does erupt in hatred for people of other races – are difficult to discover in any statistically significant quantity, the concept has to be redefined in numerous, nebulous ways so as to present it as a problem.

One of these is to condemn people’s more casual, unwitting behaviour (such as throwaway comments, careless observations or subtly different treatment) as “micro-aggressions” or “unconscious bias”. Such behaviour may, of course, be a source of irritation for those on the receiving end, but it is likely to be a vicissitude of minority or “outsider” status based upon any characteristic, not just race. For instance, it could just as easily be experienced by a city dweller visiting the countryside or a council estate resident in posh suburbia (and vice versa). People generally tend to prefer and empathise with what is familiar to them, sifting the unfamiliar into broad categories or “stereotypes” purely as a result of inexperience. In a particular case, a few polite words may resolve the matter, but in general the eventual cure will be increased familiarity and (in the case of race) cultural integration. But even if such “unconscious bias” was a purely racial phenomenon it would hardly mean that a country is akin to a torch brandishing lynch mob.

Another tactic is simply to regard any possible behaviour as racist. For instance, while most anti-racists are concerned with hatred being directed to other races, it also seems to be “racist” to be attracted to someone because of their race. It is “racist” to ignore other cultures (or to celebrate British culture), but including them, imitating them or even celebrating them is derided as “cultural appropriation”. And pointing out any distinction based on a person’s ethnicity is also racist, yet treading the opposite path by trying to ignore racial consideration leads one to a charge of “racial insensitivity”. As if that is not enough, disagreement is shut down entirely by the dismissal of any attempt to define racism in objective terms as “white-splaining”, focussing instead on a BAME individual’s subjective feelings and “lived experience”. This has become legally manifest in so-called “hate crimes”, where the mere perception of the alleged victim is enough to permanently flag an incident as being “hate” related.

The ultimate, of course, is the notion that the mere fact of being white is sufficient to categorise a person as racist purely as a result of his “privileged” birth into an inherently oppressive social hierarchy, regardless of that person’s awareness of this alleged status. This, in turn, paves the way for claiming that any negative discrepancy between whites and ethnic minorities “must” owe itself to racism (in the same way that the gender pay gap “must” result from sexism), and that any critical words directed by a white person against a BAME individual – such as Meghan Markle – is de facto racist rather than based on some other (quite legitimate) complaint. It then, somehow, becomes the duty of the “privileged whites” to “educate” themselves on their inherently racist status rather than demanding their accusers for evidence of actual racist behaviour. This turns on its head the notion that a person asserting a proposition should bear the burden of proving it – which demonstrates, of course, that such proof is probably lacking.

The result of all of this is to rob racism of its moral gravity and its seriousness as a social issue. For if is true that minor, unwitting (but otherwise unmalicious) behaviour is racist, if any choice that could be made ends up being racist, and if white people are automatically racist by virtue of their birth, then racism cannot attract any serious moral culpability. People can be morally responsible only for their consciously chosen actions where they have the option to do good, not for aspects about themselves that they cannot help or for situations where every option is bad. But because any notion of being “racist” attracts such severe stigma, its entrenchment as an undoubted and immutable fact of society means that actual crimes and real problems are permitted to flourish in order to tiptoe around anything that could cause racial sensitivities – such as the Manchester grooming scandal, and the ignorance of the fact that white boys from poorer backgrounds are among the lowest school achievers. And so the irony of defining racism so fatuously is that real racist outcomes result from an attempt to avoid being racist.

Moreover, the whole thing could amount to a self-fulfilling prophecy, as could identity politics generally. By making people more aware of their basic characteristics such as race, gender, sexuality, creed and so on before sifting these into categories of oppressors and oppressed, the latter begin to take on the mantle of victimhood and ascribe all of their personal foibles and failures to discrimination. The result is a mental self-sentencing to a life of destitution at the hands of the white, privileged male, regardless of how hard one might try to escape from it. On the other side, if the aforesaid white, privileged male is going to be automatically condemned as racist, then he is more likely to approach BAME individuals with suspicion and hostility. Thus, antagonisms are stoked and inflamed, rather than resolved.

Much of all of this has been written before, and will continue to be written again by those who do not share a leftist disposition. Less attention, however, is paid to the reason why racism – and wokeism generally – has become such a deafening screech at the forefront of the national political conversation when the open and tolerant nature of British society is not difficult to demonstrate (and, moreover, when there are far more important issues to talk about). Indeed, as election after election has pointed out, it is really a disproportionately loud, minority conversation, perpetuated by middle class, bleeding hearts within the M25 rather than by the country as a whole – let alone any actual “victims”.

The reason for this loudness is not just because, as Laurence Fox suggested, such people need something to get upset about. In fact, the lefty, liberal, metrollectuals – as we argued in a previous essay – are actually being recruited as useful idiots in a project which has more sinister foundations.

We are currently living in a world in which the dominant paradigm is globalisation in the form of the gradual erosion of national sovereignty, open borders, the consolidation and centralisation of states into larger entities, globally managed trade, collective security and perpetual interventionism and warfare. Explicitly supranational outfits such as the EU are an example of such globalisation, but so too is increasing inter-state “co-operation” in order to combat supposedly worldwide problems such as climate change and the elimination of tax and regulatory independence. In order for this globalising project to flourish, its proponents must seek the breakdown of local, national and regional cultures, identities and allegiances, which serve to dilute or even prevent people’s adherence to globalised institutions and orders.

The problem with this programme is that it has been extremely difficult to promote and defend explicitly on account of its woeful unpopularity once its implications become clear. Openly, politicians have managed to turn to some blatantly anti-democratic measures – for instance, repackaging the rejected EU constitution as the Lisbon Treaty in order to increase European integration. More insidiously, however, they have managed to configure the so-called “Overton window” of acceptable opinion by setting up a false dichotomy of progress on the one hand and retrogression on the other. On the progressive side, their programme is associated with openness, tolerance, freedom, and advancement. On the other side, however, any celebration or assertion of national primacy, traditional values and cultures – the kind of elements, such as Brexit, that are at odds with globalisation – is painted as a plunge back to Nazism, fascism and the belligerent nationalism of the 1930s which led to World War II and mass extermination. Thus, by forcing their association with a dark era, any threats to the globalising project are neutered. Cries of “racism” are simply a part of this strategy, and it explains also why anyone a mere inch to the right of centre-left (such as Boris Johnson or Nigel Farage) is derided explicitly as a “fascist”.

All of this is demonstrated by the ways in which the mainstream media has completely inverted the way in which we should examine the record and characteristics of politicians, with serious incompetence and criminality being ignored while relatively trivial matters are given the spotlight. If a Prime Minister or President was to, say, drive his country to ruin, throw millions of bombs at foreign countries, or kill and maim countless innocent civilians, no one bats an eyelid if those actions are more or less in line with globalising tendencies. In fact, he might even be lauded as a great statesman, as those who still carry a candle for Saint Barack of Obama seem wont to do. Yet if the same politician was to, say, utter something untoward about someone’s skin colour, make reference to Muslim women wearing the burqa as “letterboxes”, unwittingly “misgender” someone, or make an ill-judged flirtation with a woman, he is likely to be hounded out of office for being “racist”, “misogynistic” or “trans-phobic”. For instance, Donald Trump’s decision to assassinate Iranian general Qasem Soleimani earlier this month is a far more important factor in determining his fitness for office – his respect for international law and diplomacy, his understanding of the limits of his constitutional authority, his grasp of geo-political circumstances, his judgment of cause and effect, not to mention the morality of extra-judicial killing – than anything “racist” he might have said. And yet, because this assassination was broadly within the programme approved by the American “deep state”, it received far less criticism than his supposed “pussy-grabbing” misogyny and innate xenophobia.

In fact, if Trump was regarded as a promoter of the globalising project rather than as a detractor, he could have said and done exactly the same “racist” and “misogynist” things that supposedly make him a terrible president, but we would hear nothing about it. The extent of Bill Clinton’s “misogynistic” record, including allegations of sexual misconduct, assault and actual rape, are worse, or at least no better, than Trump’s alleged affronts against women (and most of the latter, strangely enough, came to light only after Trump became a presidential candidate). Yet because Clinton is a liberal hero no one bothers to mention it.

The liberal-left who cry “racist!” and “fascist!” are simply gullible drones in this globalising project. The focus of our anti-racist political narrative is not on preventing real racism. It is about shaming and embarrassing us into accepting and sustaining a totalitarian world order – an order which we are, thankfully, rejecting.

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L’ordre public à l’abandon

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L’ordre public à l’abandon

Régis de Castelnau

Interview donnée au site Atlantico. Que l’on peut retrouver directement sur leur site.

RENONCEMENT COUPABLE

Dissolution de l’ordre public : le vrai procès du siècle que les Français devraient intenter à l’Etat.

Atlantico.fr : Un agriculteur de la Marne, Jean-Louis Leroux, a été mis en examen pour tentative d’homicide involontaire après avoir tiré sur un homme qui tentait de lui voler du carburant dans son exploitation. S’il a été libéré ce jeudi, le cas de l’exploitant agricole est un exemple type du renoncement de l’Etat en matière d’ordre public : son exploitation avait déjà fait l’objet d’une quarantaine de vols et, bien qu’il ait porté plainte une trentaine de fois, absolument rien n’avait été fait. 

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Jean-Louis Leroux, un homme juste et simple, face à une canaille magistrate sans foi ni bon sens: cet homme est désormais le symbole d'une humanité normale face à des élites dévoyées. Il faudra que justice lui soit rendue un jour, au prix le plus fort.

Le cas de Jean-Louis Leroux est à ajouter à une longue liste de cas similaires. Dans la Marne, lors d’une marche organisée en son soutien, les agriculteurs ont dénoncé « l’abandon des territoires ruraux ». Quartiers perdus de la République, campagnes… quelles sont ces catégories de la population oubliées par l’Etat et quels sont les délits que l’Etat juge « si peu importants » (exemples concrets) ? 

Régis de Castelnau : Le cas de Jean-Louis Leroux est absolument exemplaire. Le nombre de vols dont il avait été victime et le nombre de plaintes qu’il avait déposées en vain démontrent le retrait de l’État et son impossibilité désormais à assurerla sécurité des citoyens, ou au moins essayer de le faire. Rappelons qu’en France, à la différence des États-Unis par exemple, le fait de posséder des armes est interdit aux particuliers et c’est un monopole de l’État, chargé de maintenir l’ordre et la sécurité dans la société civile. Et c’est bien cette mission qui est la contrepartie de cette interdiction. Le problème est qu’aujourd’hui, et il faut le dire nettement l’État a abandonné la France périphérique et en particulier les territoires ruraux à une délinquance prédatrice qui met les habitants en rage et peut les amener pour pallier l’impuissance affichée de l’État à recourir à l’autodéfense. Et il n’y a pas beaucoup d’arguments à opposer à une population qui ne veut pas d’une violence incontrôlée mais qui ne supporte plus d’être ainsi abandonnée. Il y a des centaines d’exemples de cette dégradation de la vie civique dans les petites villes et dans les campagnes. La nouveauté depuis une quinzaine d’années, c’est l’arrivée de gangs étrangers organisés et qui se livrent à une véritable prédation sur les territoires qu’ils occupent. C’est l’exemple extraordinaire des associations caritatives dont certains de ces groupes ont pris le contrôle ! Les associations Emmaus par exemple, dans l’ouest elles sont contrôlées par des réseaux tchétchènes qui récupèrent la partie lucrative des dons pour mettre alimenter les trafics dans leur pays d’origine. Ce sont les Roms souvent mandatés par des ferrailleurs qui récupèrent tous les métaux possibles allant jusqu’à profaner les cimetières pour y récupérer les croix métalliques ou couper les fils de téléphone pour récupérer le cuivre. Il y a aussi chose extraordinaire, le vol de bétail dans les champs ou carrément du matériel agricole lourd qui prend ensuite le chemin des Balkans. Les compagnies d’assurances ne suivent plus, et les gendarmes faute de moyens n’interviennent même plus. Le pire étant qu’en général les auteurs des forfaits sont connus mais que dans le souci d’éviter des troubles sociaux, les forces de l’ordre vont se garder d’intervenir.

La question des « quartiers perdus de la république » est une peu différente, la faillite du système d’assimilation à la française, a concentré dans les banlieues anciennement rouges des populations dont la majorité n’a aucune perspective d’intégration. L’État s’est retiré de ces territoires et la nature ayant horreur du vide en a laissé l’organisation à l’alliance entre la pègre et les barbus, le tout avec des administrations municipales qui pour se reproduire se vautrent très souvent dans un clientélisme qu’on n’imagine pas. Aucune tendance politique n’est épargnée et aujourd’hui en Seine-Saint-Denis le parti de Christoph Lagarde en fait une splendide démonstration.

Atlantico.fr : Comment expliquer ce renoncement total de l’Etat en matière d’ordre public ? Quelles en sont les causes ? Est-ce dû à de trop lourdes préoccupations budgétaires où est-ce également le fait d’une vision idéologique de la politique pénale ou de la répression différenciée selon les profils de délinquants ou criminels ? 

Régis de Castelnau : C’est d’abord une question de moyens, et clairement l’inspection générale des finances de Bercy s’opposera à toute allocation de ressources supplémentaires aux forces policières chargé de l’ordre républicain sur le territoire et surtout chargé de prévenir et de lutter contre la délinquance qui pourrit la vie des citoyens : violence, vols, cambriolages, agressions gratuites, toute cette violence de tous les jours dont les statistiques nous ont montré l’explosion.

C’est exactement la même chose avec le service public de la justice. Je recommande la lecture du livre remarquable d’Olivia Dufour «Justice, une faillite française » remarquable diagnostic et réquisitoire contre cet État refusant pour des raisons budgétaires de doter la France d’une Justice digne de ce nom. Alors, face à ce manque de moyens, tant des forces de l’ordre que de l’appareil judiciaire, un certain nombre de comportements on finit par être adoptés. Il y a tout d’abord une forme de consensus entre les forces de police et les parquets pour laisser impunie toute une délinquance que l’on va qualifier « de tous les jours », délinquance qui a quand même un impact considérable sur la population. On trouve ainsi banal qu’à diverses occasions des milliers de voitures, qui sont celles des pauvres, soient incendiées. Il n’y a jamais ni recherche des auteurs (en général bien connus des forces de police) et une volonté de minorer le phénomène de la part des pouvoirs publics. Pareil pour les cambriolages, les vols avec ou sans violence, les agressions gratuites etc. Il faut savoir qu’il y a en France 1 million et demi d’infractions avec auteurs connus par an qui ne sont pas poursuivies ! Concernant la répression pénale deux facteurs rendent celle-ci impuissante. Tout d’abord énormément de décisions ne reçoivent aucune exécution, faute de moyens, c’est-à-dire de magistrats chargés de les prendre en charge, et de moyens techniques (nombre de places de prison, éducateurs, juges de l’application des peines), ce qui fait que des gens ayant parfois jusqu’à 20 condamnations sur leurs casiers judiciaires n’ont jamais fait une minute de détention. La valeur dissuasive de cette répression n’existe pas. Mais il y a aussi une part d’idéologie, ou évidemment la culture de l’excuse est très prégnante et aboutit à un « à quoi bon » tout à fait démobilisateur. Il y a une perception justifiée que la répression s’abat sur des populations déjà défavorisées ou marginales, alors beaucoup pensent que ce n’est pas la peine d’en rajouter. Paradoxalement, l’incroyable répression dont ont été l’objet les gilets jaunes et le mouvement social le démontre aussi. Dès lors qu’ils se sont trouvés en face des couches populaires et non plus des populations marginales, des magistrats ont eu la main particulièrement lourde. Ce qui démontre que le « laxisme » qui existe lorsqu’on examine les conséquences de la répression n’est pas une fatalité, mais relève bien un choix politique.En tout cas, il n’est pas excessif de dire que cette délinquance a été aujourd’hui en partie dépénalisée. Ce qui pour les « honnêtes gens » est quelque chose d’insupportable quand ils y sont confrontés. Il y a également un domaine où les magistrats ont la main particulièrement lourde comme le démontre l’affaire Leroux. Terrorisé par les risques de basculement dans l’autodéfense et la violence arbitraire qui l’accompagnerait, les tribunaux condamnent lourdement toutes les velléités de légitime défense. Suscitant d’ailleurs une incompréhension et une rage de très mauvais augure.

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Atlantico.fr : Comment remédier à cette situation ? Comment éviter que l’ordre public ne se dissolve davantage ? 

Régis de Castelnau : Je pourrais vous répondre lapidairement, « en débarrassant la France de ce gouvernement et de ce président qui n’ont qu’une obsession : démanteler les services publics y compris des grands services publics administratifs régaliens que sont la police et la Justice ». Lorsque l’on voit les réformes d’organisation et de procédure judiciaires adoptées au printemps dernier, la volonté d’Emmanuel Macron apparaît clairement. Rendre plus difficile, plus compliqué, plus cher l’accès à la justice en espérant tarir la source des contentieux. C’est exactement ce qui s’est passé avec les ordonnances travail où le recours aux prud’hommes a été à ce point compliqué, que le nombre d’affaires dont ces juridictions sont saisies s’est complètement effondré.

Donc pour remédier à la situation décrite, et revenir à un ordre républicain qui n’est plus aujourd’hui assuré, il n’y a qu’une solution : redonner à la police et à la justice les moyens d’exercer leurs missions.

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mardi, 18 février 2020

La répression pénale s’introduit à l’intérieur de la conscience

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La répression pénale s’introduit à l’intérieur de la conscience

Par Raoul de Bourges 

71wNj1C-eaL.jpgJosé Ortega y Gasset affirmait que se proclamer de droite ou de gauche, c’était accuser dans l’un et l’autre cas une hémiplégie morale. Nulle possibilité que François Sureau tombât dans une quelconque infirmité. Il se campe de longue date en défenseur de la liberté, de toutes les libertés publiques. C’est le rôle impérieux qu’il s’arroge, une fois encore, avec la rigueur du juriste et la verve de l’avocat et écrivain qu’il est, dans son opuscule Sans la liberté publié en septembre 2019 aux Tracts Gallimard.

Notre fiévreux Don Quichotte n’aime rien moins que les lois liberticides : lois mémorielles, attributions aux magistrats du parquet de faire le tri entre les bons et les mauvais manifestants, loi organisant la répression des fausses nouvelles, loi imposant l’immatriculation des vélos. Il déteste qu’on touche aux symboles et le vélo est une sorte de citadelle qui, si elle cède, s’ajoutera à la longue liste des libertés envolées. Ainsi en est-il encore de la loi Avia qui doit être promulguée et qui « introduit désormais la répression pénale à l’intérieur de la conscience ». Cette loi se fixe comme objet de lutter contre les propos haineux sur Internet, ce que Sureau fustige évidemment : « Si l’on revient un instant aux "discours de haine" que la loi se propose désormais de faire réprimer par les sociétés privées qui les diffusent, et qui suscitent en effet le dégoût ou la révolte, il me semble qu’il est erroné de penser qu’une simple loi, par l’effet de son édiction, pourra réduire un phénomène qui résulte de mécanismes sociaux et humains complexes […] A l’heure où les gouvernements sont bien obligés d’avouer leur impuissance face aux dérèglements de l’environnement ou à la mondialisation des échanges […] Hantés par la crainte d’une violence sociale à la fois générale et diffuse, nous cherchons à recréer une forme de civilité par la répression. C’est une voie sans issue. » L’affirmation peut surprendre à l’heure où l’on ne voit pas comment, sans un retour à plus d’autorité et un rappel aux devoirs de chacun, on pourrait parvenir à restaurer la concorde sociale. Mais Sureau demeure inflexible en stipulant que l’Etat de droit, dans ses principes et ses organes, a été conçu pour que ni les désirs du gouvernement ni les craintes de peuples n’emportent sur leur passage les fondements de l’ordre politique, et d’abord la liberté : « C’est cette conception même que, de propagande sécuritaire en renoncements parlementaires, nous voyons depuis vingt ans s’effacer de nos mémoires sans que personne ou presque ne semble s’en affliger. » Ainsi prédit-il que la loi Avia nous ouvrira un horizon chinois, où l’Etat et les opérateurs, par une incessante coopération électronique, pourront rejeter un citoyen « vers les ténèbres extérieures de la mort sociale ». L’Etat orwellien dont le comportement est rarement un modèle, qu’il s’agisse de légalité ou d’honneur -pensons au débranchement de Vincent Lambert, honte absolue dont s’est couvert l’Etat qui aurait dû le sauver plutôt que de le sacrifier-, impose une tutelle toujours plus forte à laquelle le citoyen n’a pas d’autre choix que de s’y soumettre.

Si l’édifice des droits se lézarde, il ne faut pas se méprendre quant à l’intention de notre auteur. Il n’est nullement question pour lui de défendre la surenchère des droits qui embouteillent nos démocraties : « Le citoyen se pense moins comme citoyen que comme individu, réclamant des droits pour lui et des supplices pour les autres, prêt à ce que la liberté de tous s’efface pour peu qu’on paraisse lui garantir la sienne, sous la forme d’une pleine capacité de jouissance des objets variés qu’il aime. Bernanos écrit que la liberté des autres lui est aussi nécessaire que la sienne. Cette idée n’est plus si communément partagée. Les gouvernements n’ont pas changé. C’est le citoyen qui a disparu. » L’individu est devenu tout à fait solitaire, libre mais seul. Doté de droits quasi illimités, mais désespérément seul. Se pose dés lors la question de savoir à quelles appartenances il pourrait se rattacher. Au culte de la nature ? A celui du Dieu des catholiques qui longtemps prévalut en nos vieilles terres chrétiennes ? Sureau ne le dira pas, mais le libéralisme libertaire, cette version dévoyée de la liberté, a engendré deux monstres : le monstre du contrôle social et la société liquide de l’individu anomique sans racines et sans espérance.

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Impuissants à organiser leurs polices, depuis vingt ans, les gouvernements restreignent drastiquement les libertés pour conserver les faveurs du public et s’assurer de son vote, « nous éloignant chaque année un peu plus des mœurs d’une démocratie ». Or, la liberté est un bien très précieux sans laquelle il n’y a pas de société politique. La prééminence de l’égalité -de l’égalitarisme- comme pierre angulaire de l’action politique moderne est à cet égard préoccupante par le déséquilibre qu’elle engendre au sein même de nos valeurs fondatrices.

Ni de droite ni de gauche, disions-nous, l’avocat des libertés renvoie toutes les obédiences dos à dos : « La gauche a abandonné la liberté comme projet. La droite a abandonné la liberté comme tradition, comme élément central d’une tradition nationale au sens d’Edmund Burke. Le premier camp réclame des droits "sociétaux" comme on dit aujourd’hui, dans un long bêlement progressiste, le deuxième réclame des devoirs dans un grand bêlement sécuritaire. » Citant René Girard et son inspiré désir mimétique, Sureau déplore que nous nous exprimions avec les mots de nos maîtres, cependant que ces maîtres ne se survivent que dans leur docilité à nos passions : « Et quand bien même nous serions devenus incapables de former à nouveau le projet politique de la liberté, nous devrions encore préférer la simple licence, la pulvérisation de l’idée de liberté en cent images irréconciliables, sa diffusion en mille comportements opposés, plutôt que ce que l’ordre social nous promet : la dictature de l’opinion commune indéfiniment portée par les puissances nouvelles de ce temps, et trouvant un renfort inattendu dans le désir des agents d’un l’Etat discrédité de se rendre à nouveau utiles au service d’une cause cette fois enfin communément partagée -celle de la servitude volontaire. »

The Faustian impulse and European exploration

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The Faustian impulse and European exploration

By Ricardo Duchesne

Ex: https://fortnightlyreview.co.uk

IN HIS 2003 book, Human Accomplishment: Pursuit of Excellence in the Arts and Sciences, 800 BC to 1950, Charles Murray argued that the great artistic and scientific accomplishments were overwhelmingly European. ”What the human species is today,” he wrote, “it owes in astonishing degree to what was accomplished in just half a dozen centuries by the peoples of one small portion of the northwestern Eurasian land mass.”

This claim goes against the modern grain of the world history community – indeed, against fashionable belief. The New York Times unsurprisingly called it “more bluster than rigor” and “unconvincing”1, but it was nonetheless the first attempt to quantify “as facts” the creative genius of individuals in terms of cultural origin and geographic distribution. Murray did this by calculating the amount of space allocated to these individuals in reference works, encyclopedias, and dictionaries. Based on this metric, he concluded that “whether measured in people or events, 97 percent of accomplishment in the sciences occurred in Europe and North America” from 800 BC to 1950.  Murray’s inventories of the arts also confirmed the overpowering role of Europe, particularly after 1400. Although Murray did not compare their achievements but compiled separate lists for each civilization, he noted that the sheer number of “significant figures” in the arts is higher in the West in comparison to the combined number of the other civilizations. He explained this remarkable “divergence” in human accomplishments in terms of the degree to which cultures promote or discourage autonomy and purpose. I am persuaded that individualism is one of the critical variables.2

The point I want to make, however, is that Murray pays no attention to accomplishments in other human endeavors such as leadership, exploration, and heroic deeds. The achievements he measures come only in the form of “great books” and “great ideas.” In this respect, Murray’s book is similar to certain older-style Western Civ textbooks where the progression of modern liberal ideals is the central theme. David Gress dubbed this type of historiography the “Grand Narrative.” By teaching Western history in terms of the realization of liberal democratic values, these texts “placed a burden of justification on the West … to explain how the reality differed from the ideal.’3 Gress called upon historians to do away with this idealized image of Western uniqueness and to emphasize the realities of Western geopolitical struggles and mercantile interests. Norman Davies, too, has criticized the way early Western civilization courses tended to “filter out anything that might appear mundane or repulsive.”4

MY VIEW IS that Europeans were not only exceptional in their literary endeavors, but also in their agonistic and expansionist behaviors. Their great books, including their liberal values, were themselves inseparably connected to their aristocratic ethos of competitive individualism. There is no need to concede to multicultural critics, as Davies does, “the sorry catalogue of wars, conflict, and persecutions that have dogged every stage of the [Western] tale.”5 The expansionist dispositions of Europeans as well as their literary and other achievements were similarly driven by an aggressive and individually felt desire for superlative and undemocratic recognition.

It has been said that when Mahatma Gandhi was asked what he thought of Western civilization he answered, “I think it would be a good idea.” Academics today interpret this answer to mean that the actual history of the West—such things as the conquest of the Americas and the expansion of the British Empire— belie its great ideas and great books. I challenge this naïve separation between an idealized and a realistic West borrowing Oswald Spengler’s image of the West as a strikingly vibrant culture driven by a type of personality overflowing with expansive, disruptive, and creative impulses. Spengler designated the West as a “Faustian” culture whose “prime-symbol” was “pure and limitless space.” This spirit was first visible in medieval Europe, starting with Romanesque art, but particularly in the “spaciousness of Gothic cathedrals;” “the heroes” of the Scandinavian, Germanic, and Icelandic sagas; the Crusades; the Viking sailing of the North Atlantic Ocean; the Germanic conquest of the Slavonic East; the Spaniards in the Americas; and the Portuguese in the East Indies.6

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“Fighting,” “progressing,” “overcoming of resistances,” struggling “against what is near, tangible and easy”—these are some of the terms Spengler used to describe this soul. This Faustian being is animated with the spirit of a “proud beast of prey,” like that of an “eagle, lion, [or] tiger.” Moreover, the seemingly peaceful achievements of the West, not just its warlike activities, were infused with this Faustian impulse. As John Farrenkopf puts it:

[T]he architecture of the Gothic cathedral expresses the Faustian will to conquer the heavens; Western symphonic music conveys the Faustian urge to conjure up a dynamic, transcendent, infinite space of sound; Western perspective painting mirrors the Faustian will to infinite distance; and the Western novel responds to the Faustian imperative to explore the inner depths of the human personality while extending outward with a comprehensive view.7

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IN MY BOOK, The Uniqueness of Western Civilization, I trace the West’s Faustian creativity and libertarian spirit back to the aristocratic warlike culture of Indo-European speakers who began to migrate into Europe roughly after 3500 BC, combining with and subordinating the ‘ranked’ Neolithic cultures of this region. Indo-European speakers originated in the Pontic-Caspian steppes. They initiated the most mobile way of life in prehistoric times, starting with the riding of horses and the invention of wheeled vehicles in the fourth millennium BC, together with the efficient exploitation of the “secondary products” of domestic animals (dairy goods, textiles, large-scale herding), and the invention of chariots in the second millennium. The novelty of Indo-European culture was that it was led by an aristocratic elite that was egalitarian within the group rather than by a single despotic ruler. Indo-Europeans prized heroic warriors striving for individual fame and recognition, often with a “berserker” style of warfare. In the more advanced and populated civilizations of the Near East, Iran, and India, local populations absorbed this conquering group. In Neolithic Europe, the Indo-Europeans imposed themselves as the dominant group, and displaced the native languages but not the natives.

I maintain that the history of European explorations stands as an excellent subject matter for the elucidation of this Faustian restlessness. An overwhelming number of the explorers in history have been European. The Concise Encyclopedia of Explorers lists a total of 274 explorers, of which only 15 are non-European, with none listed after the mid-fifteenth century.8 In the urge to explore new regions of the earth and map the nameless, we can detect, in a crystallized way, the “prime-symbol” of Western restlessness. We can also detect the Western mind’s desire – if I may borrow the language of Hegel – to expand its cognitive horizon, to “subdue the outer world to its ends with an energy which has ensured for it the mastery of the world.”9

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The Greeks initiated the science of geography. But just as pertinent is how contentious individuals, born in a culture engaged in widespread colonizing activities between 800 and 500 BC, drove this science. Hecataeus (550 – 476 BC), the author of the first book of geography, Journey Round the World, based his knowledge on his extensive travels along the Mediterranean and the Black Sea. To be sure, the Phoenicians, starting around the first millennium BC, established approximately 30 colonies throughout the African shores in the western Mediterranean, Sardinia, Malta, and as far west as Cádiz in modern Spain. However, more than thirty Greek city-states each established multiple colonies, with some estimating that the city of Miletus alone set up ninety colonies. All in all, Greek colonies were stretched throughout the Mediterranean coasts, the shores of the Black Sea, Anatolia in the east, southern France, Italy, Sicily, and in the northern coast of Africa, not to mention the long colonized islands of the Aegean Sea.

A popular explanation as to why the Greeks launched these overseas colonies is population growth and scarce resources at home. But the evidence shows that much of these colonial operations were small-scale undertakings rather than mass migrations led by impoverished farmers. Commercial interests and the incentive to gain new agricultural lands were motivating factors. But I would also emphasize the “general spirit of adventure” permeating the Greek world since Mycenaean times. Many of the colonies, as A. G. Woodhead has shown, had “their origins in purely individual enterprise or extraordinary happenings.”10

Hecataeus envisioned the world as a disc surrounded by an ocean. But soon there would be a challenger – Herodotus, born in 484BC. He too offered numerous geographical and ethnographic insights based on his extensive travels, and he did so in explicit awareness of his own contributions and in direct criticism of his predecessor. This competitive desire on the part of individuals to stand out from others was ingrained in the whole social outlook of classical Greece: in the Olympic Games, in the perpetual warring of the city-states, in the pursuit of a political career, in the competition among orators for the admiration of the citizens, and in the Athenian theater festivals, where numerous poets would take part in Dionysian competitions amid high civic splendor and religious ritual. New works of drama, philosophy, and music were expounded in the first-person form as an adversarial or athletic contest in the pursuit of truth.

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DURING THE HELLENISTIC centuries, explorers would venture into the Caspian, Aral, and Red Seas, establishing trading posts along the coasts of modern Eritrea and Somalia. Perhaps the most successful of Hellenistic explorers was Pytheas. In his book, On the Ocean, he recounts an amazing journey (ca. 310BC) northward to Brittany across the Channel into Cornwall, through the Baltic Sea, the coast of Norway, and even Iceland.11

These explorations encouraged astronomical and geographical scholarship leading to the full conceptualization of the shape of the earth itself by Eratosthenes (276-185BC), who not only contextualized the location of Europe in relation to the Atlantic and the North Sea, but calculated the spherical size of the earth (within 5 percent of its true measure), with the obvious implication that the Mediterranean was only a small portion of the globe. This spirit of inquiry continued through the second century AD, when Ptolemy wrote his System of Astronomy and his Geography, where he rationally explained the principles and methods required in mapmaking and produced the first world map depicting India, China, South-East Asia, the British Isles, Denmark and East Africa.

There was far less desire to explore the geography and landscapes of the world among the peoples of the non-Western world. While in the first century BC the Han dynasty extended its geographical boundaries south into Vietnam, north into Korea, and east into the Tarim Basin, the Chinese showed little geographical interest beyond their own borders. What is striking about Chinese maps in general is how insular they were in comparison with the much earlier maps of Ptolemy. Even a sixteenth-century reproduction of Zheng He’s sailing maps lacks any apposite scale, size, and sense of proportion regarding the major landmasses of the earth.

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The Chinese supposition that the earth was flat remained almost unchanged from ancient times until Jesuit missionaries in the seventeenth century brought modern ideas. In stark contrast, Greek philosophers of the fifth and fourth centuries BC were already persuaded that the earth was a sphere. Aristarchus of Samos, who lived about 310 to 230 BC, went so far as to postulate the Copernican hypothesis that all planets revolve in circles around the sun, and that the earth rotates on its axis once in twenty-four hours.

Indian civilization showed little curiosity about the geography of the world; its maps were symbolic and removed from any empirical concern with the actual location of places. Maritime activity among the isolated civilizations of America was restricted to fishing from rafts and canoes. The Phoenicians left no geographical documents of their colonizing expeditions.12

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The Vikings “discovered in their gray dawn the art of sailing the seas which emancipated them”—so says Spengler.13 During the last years of the eighth century, marauding bands of Vikings pillaged their way along the coast lines of Northern Europe and down around Spain, into the Mediterranean, Italy, North Africa, and Arabia. Some hauled their long boats overland from the Baltic and made their way down the great Russian rivers all the way to the Black Sea. During the ninth and tenth centuries, their primary aim was no longer plunder as much as finding new lands to settle. Their voyages far into the North Atlantic were “independent undertakings, part of a 300-year epoch of seaborne expansion” which resulted in the settlement of Scandinavian peoples in Shetland, Orkney, the Hebrides, parts of Scotland and Ireland, the Faroe Islands, Iceland, Greenland, and Vinland (present-day Newfoundland).14 They colonized the little-known and unknown lands of Iceland from 870AD onward, Greenland from 980 onward, and then Vinland by the year 1000 AD. The Icelandic geographers of the Middle Ages showed considerable detailed knowledge in their descriptions of the Arctic regions, stretching from Russia to Greenland, and of the eastern seaboard of the North American continent. This is clearly attested in an Icelandic Geographical Treatise preserved in a manuscript dating from about 1300, but possibly based on a twelfth-century original.

Peter Whitfield speculates that “some conscious impulse towards exploration and conquest” must have motivated these voyages, “prompted by harsh living conditions at home.”15 Jesse Byock explains that the settlement of Iceland was led by sailor-farmers seeking to escape population pressures in the Scandinavian mainland, and that, in turn, the settlement of Greenland was initiated by Icelanders escaping Malthusian pressures in Iceland. At the same time, the cultural world Byock reveals, through his careful reading of numerous heroic sagas associated with these voyages and settlements, is that of aristocratic chieftains and free farmers venturing into unknown lands, competing with other chieftains and struggling for survival and renown.16

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In the next centuries after the Vikings, the travels of Marco Polo (1254-1324) throughout the Asian world found expression in the Catalan Atlas of 1375, which was quite innovative in showing compass-lines, and in the accurate delineation of the Mediterranean. On the strength of Ptolemy’s work, Islam fostered its own geographical tradition with the benefit of their extensive dominions and travels. Ibn Battuta (1304-1374), the greatest Muslim traveler, visited every Muslim country and neighboring lands. But his “overmastering impulse,” to use his own words, was to visit “illustrious sanctuaries”17 – unlike Marco Polo’s desire, which was to visit non-Christian lands barely visited by Europeans and learn about the unknown tribes of Asia, including the numinous land of Cathay.18 In 1154, the greatest Islamic cartographer, al-Idrisi, produced a large planispheric silver relief map that was original in not portraying the Indian Ocean in a landlocked way and in offering a more precise knowledge of China’s eastern coast. But Islamic geography would go no further.

SPENGLER WRITES THAT the Spaniards and the Portuguese “were possessed by the adventured-craving for uncharted distances and for everything unknown and dangerous.’19 By the beginning of the 1400s, the compass, the portolan chart and certain shipping techniques essential for launching the Age of Exploration were in place. The Portuguese, under the leadership of Henry the Navigator would go on, in the course of the fifteenth century, to round the southern tip of Africa, impose themselves through the Indian Ocean, and eventually reach Japan in the 1540s. They would create accurate maps of West Africa as far as Sierra Leone, as well as rely on Fra Mauro’s new maps, one of which (1457) mapped the totality of the Old World with unmatched accuracy while suggesting, for the first time, a route around the southern tip of Africa. A mere two years after Diaz had sailed around the Cape; Henricus Martellus created his World Map of 1490, which showed both the whole of Africa generally and the specific locations of numerous places across the entire African west coast, detailing the step-by-step advancement of the Portuguese.

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The question of what motivated the expeditions of the Portuguese is a classic one, and, conversely, so is the question of why China abandoned the maritime explorations started by Zheng He. Why were his expeditions not as consequential historically as the ones initiated by Henry the Navigator? For Felipe Fernández-Armesto, Zheng He’s voyages were displays of “China’s ability to mount expeditions of crushing strength and dispatch them over vast distances.” Zheng He’s expeditions did not last and were less consequential, according to Fernández-Armesto, because China’s Confucian government assigned priority to “good government at home” rather than “costly adventures” abroad, particularly in the face of barbarian incursions from the north.20

At the same time, Fernández-Armesto portrays China’s mode of exploration in rather admiring terms: her peaceful commerce, scholarship, and even “vital contributions to the economies of every place they settled.’21He almost implies, indeed, that the Chinese, not the Europeans, were the true explorers, on the grounds that He’s expeditions along the Indian Ocean were more difficult (due to wind patterns) than the European ones through the Atlantic, and that the Europeans navigated through the Atlantic in order to overcome their marginalized economic position rather than to explore.

The major flaw in Fernández-Armesto’s account (as in all current accounts) is the unquestioned assumption that the Chinese expeditions were “explorations” stirred by disinterested curiosity while the Portuguese expeditions were primarily economic in motivation. The Chinese did little that can be considered new in the exploratory sense; they did not discover one single nautical mile; the Indian Ocean had long been a place of regular navigation, unlike the Atlantic and the western coasts of Africa. The Portuguese, it is true, were poor and many of the sailors manning the ships were longing for better opportunities, but what drove the leading men above all else was a chivalric desire for renown and superior achievement in the face of economic costs, persistent hardships, and high mortality rates.

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The Chinese were ahead of Europe in technology when the 1400s started, but their technology thereafter remained for the most part unchanged; whereas the Portuguese (and Europeans) would advance continuously. Furthermore, the nautical problems the Portuguese had to face were more difficult.  As Joseph Needham has noted,

Almost as far as Madagascar the Chinese were in the realms of the monsoons, with which they had been familiar in their own home waters for more than a millennium. But the inhospitable Atlantic had never encouraged sailors in the same way, and though there had been a number of attempts to sail westwards, that ocean had never been systematically explored.22

The main motivations of the Portuguese cannot be adequately explained without considering the chivalric and warlike spirit of the aristocratic fidalgos. Fernández-Armesto acknowledges that the ethos of chivalric honor “did make the region peculiarly conducive to breeding explorers.”23 But to him this was an ethos rooted in medieval romances exclusive to Portugal and Spain. Besides, he rejects any notion of Western uniqueness, and does not properly explain the differences between economic, religious, and chivalric motivations.

As I see it, the chivalric motivations of the Portuguese colored and intensified all their other motivations, and this is why they exhibited an excessive yearning for spices, a crusading zeal against non-Christians, a relentless determination to master the seas. The chivalry of the Portuguese was a knightly variation of the same Faustian longing the West has displayed since prehistoric times. The ancient Greeks who established colonies throughout the Mediterranean, the Macedonians who marched to “the ends of the world,” the Romans who created the greatest empire in history, the Franks who carved out Charlemagne’s Empire, and the Portuguese, were all similarly driven by an “irrepressible urge to distance.”

NO SOONER DID Columbus sight the “West Indies” in 1492, than one European explorer after another came forth eager for great deeds. By the 1520s, Europeans had explored the entire eastern coast of the two Americas from Labrador to Rio de la Plata. From 1519 to 1522 Ferdinand Magellan led the first successful attempt to circumnavigate the earth through the unimagined vastness of the Pacific Ocean. It has been said that Magellan’s energy and vision equaled that of Columbus; he “shared with his great predecessor the tenacity of a man driven by something deeper than common ambition.’24

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Between 1519 and 1521 Hernán Cortés put himself at the command of an expedition that would result in the conquest of the Aztec Empire. These days many regard Cortés as something of a criminal, and this is true. The campaigns he conducted against the Mexicans were graphically barbaric. At the same time, Cortés was a prototypical Western aristocrat, or, as described by his secretary, a man “restless, haughty, mischievous, and given to quarrelling.’25 The running story on Cortés today is that if he had not conquered Mexico someone else would have. The real agents were the guns, the steel swords, the horses, and the germs. Without denying any of these factors, I agree with Buddy Levy’s recent portrayal of Cortés as a man who displayed, again and again, an extraordinary combination of leadership, tenacity, diplomacy, and tactical skill. Finding gold was a priority for Cortés and his men, but, as Cortés’s impassioned speeches and the character descriptions of his contemporaries both testify, he was above all a man driven by an “insatiable thirst for glory and authority;” “he thinks nothing of dying himself, and less of our death.”26 A similar account can be given of Francisco Pizarro.

The same spirit that drove Cortés and Pizarro drove Luther in his uncompromising challenge to the papacy’s authority: “Here I stand, I cannot do otherwise.” It drove the “intense rivalry” that characterized the art of the Renaissance, among patrons, collectors, artists, and that culminated in the persons of Leonardo, Raphael, Michelangelo, and Titian.27 It motivated Shakespeare to outdo Chaucer, creating more than 120 characters, “the most memorable personalities that have graced the theater – and the psyche – of the West.’28 Let us recall that the age of the conquistadores was Spain’s golden age; the age of El Greco, Velázquez, Calderón de la Barca, and Francisco López de Gómara; the time of Cervantes’s Don Quixote and the realist transformation of the chivalrous imagination, of Lope de Vega and the creation of a new literary style in the picaresque novel with its sympathetic story of thieves and vagabonds. This century saw, additionally, a veritable revolution in cartography. As early as 1507, the German cosmographer, Martin Waldseemüller, produced a map depicting a coastline from Newfoundland to Argentina, and showed the two American continents clearly separated from Asia.

IN THE FACE of a list of rather ordinary human motivations, such as the motivation to acquire wealth and conquer new lands, it is very difficult to ascertain the Faustian character of the explorers, extract its essential nature, and apprehend it for itself. I want to suggest, even so, that the history of exploration during and after the Enlightenment era offers us an opportunity to apprehend clearly this soul. For it is the case that, from about the 1700s onward, explorers come to be increasingly driven by a will to discover irrespective of the pursuit of trade, religious conversion, or even scientific curiosity. My point is not that the unadulterated desire to explore exhibits the Faustian soul as such. The urge to accumulate wealth and advance knowledge may exhibit this Faustian will just as intensively. The difference is that in the desire to explore for its own sake we can see the West’s psyche striving to surpass the mundane preoccupations of ordinary life, comfort and liberal pleasantries, proving what it means to be a man of noble character.

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The minimization of any substantial differences among humans cultivated by the modern model of human nature has clouded our ability to apprehend this Faustian desire.  The original outlook of Locke and French Enlightenment thinkers, themselves the product of the persistent Western quest to interpret the world anew, fostered a democratic model wherein humans came to be seen as indeterminate and more or less equal, a “white paper,” a malleable being determined by outside circumstances, tradition-less and culture-less. This egalitarian view was nurtured as well in the philosophy of Descartes, Leibnitz, and Kant, with its emphasis on the innate and equally a priori cognitive capacities of humans qua humans.

It should come as no surprise, then, that historians (and psychologists) write of human passions and motivations as essentially alike across all cultures. In our subject of inquiry, exploration, we are normally told that “the desire to penetrate and explore the world’s wild places is a fundamental human impulse.” Frank Debenham’s Discovery and Exploration, a broad survey published in 1960, informs us that “man’s natural inquisitiveness has been a mainspring of discovery and exploration.”29 Yet, much of Debenham’s book is about modern Europeans exploring the world. There is an appendix that lists a total of 203 famous explorers, of which only eight are non-Western.30

61MKttOBHsL._SX328_BO1,204,203,200_.jpgLikewise, Fernández-Armesto’s book Pathfinders is described as “a study of humankind’s restless spirit,” but once he reaches the period after the 1500s, he has no explorers outside the West to write about. This may explain why he becomes disparaging toward European explorers, particularly those who came after the 1700s, describing them (David Livingstone, Henry Morton Stanley, Roald Amundsen, and others) as “failures,” “naïve,” “bombastic,” “mendacious,” “useless,” and “incompetent.”31

My view is the opposite: the history of exploration provides us with a profoundly revealing index of Western heroic self-fashioning. There is much to be learned about the uniqueness of the West in the life experiences and the motivations driving such men as Captain Cook. During the course of his legendary three Pacific journeys between 1768 and 1779, it is said that he explored more of the earth’s surface than any other man in history. His methods were said to be “practical and humane,” and yet he was also a heroic figure, filled with a zeal for greatness. In his own words, what he wanted above all else was the “pleasure of being first;” to sail “not only farther than man has been before me but as far as I think it possible for man to go.”32

Fernández-Armesto is highly critical of Robert Falcon Scott’s somber expressions of boldness, risk, duty, and resolve during the last days of his tragic expedition to the South Pole in 1911-12. Max Jones offers a far more incisive assessment of the significance of Scott, less as a “great” explorer than as someone who “composed the most haunting journal in the history of exploration.’33 Jones extols the captivating drama of the journals, the mounting tension and ever present anxiety as the ship battles to reach the Antarctica coast, and the epic-like account of the relentless march to the Pole. Jones situates Scott within a wider cultural setting: his immersion in polar literature, his awareness of characters in major novels who sought to prove themselves, his copy of Darwin’s Origins of Species and Scott’s “bleak vision of the universe as a struggle for existence,” the literary influences of Ibsen and Thomas Hardy and their fascination with the dependency of the human will on the indifferent power of nature and necessity.

Overall, the pervading idea of the journals is the heroic vision of exploration as a test of individual worthiness and national character. From his early manhood, Scott was filled with anxiety and doubts about his adequacy in life’s struggles: “I write of the future; of the hopes of being more worthy; but shall I ever be – can I alone, poor weak wretch that I am bear up against it all.”34 Expedition narratives through the nineteenth century, Jones observes, became ever more focus on the character of the explorer than on the economic externalities, so exploration became an inner journey, “a journey into the self, nowhere more so than in the emptiest of continents, Antarctica.’35 Scott understood this: “Here the outward show is nothing; it is the inward purpose that counts.” There was nothing to see in the center of Antarctica except the reflection of the inner Western quest to face the struggle of life in a heroic fashion.

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Ricardo Duchesne is professor at the University of New Brunswick, Department of Social Science, Saint John, Canada. He is the author of The Uniqueness of Western Civilization (2011). [US Amazon link.]

This article was revised 8 October 2012 to correct an editing error.

NOTES:

  1. Judith Shulevitz, “‘Human Accomplishment:’ the Best and the Brightest,” The New York Times,  30 November 2003.
  2. Charles Murray, Human Accomplishment, The Pursuit of Excellence in the Arts and Sciences 800 BC to 1950 (New York: HarperCollins Publishing Inc, 2003), 252-259.
  3. David Gress, From Plato to NATO, The Idea of the West and Its Opponents (The Free Press, 1996).
  4. Norman Davies, A History of Europe (New York: Random House, 1997), 28.
  5. Davies, 15-16.
  6. Oswald Spengler, The Decline of the West: I: Form and Actuality, translated by Charles Francis Atkinson (New York: Alfred Knopf, 1973), 183-216.
  7. John Farrenkopf, Prophet of Decline: Spengler on World History and Politics (Louisiana State University Press, 2001), 46.
  8. Ibid.
  9. G.W.F. Hegel, Philosophy of Mind. Being Part Three of the Encyclopedia of the Philosophical Sciences, translated by William Wallace (Oxford University Press, 1971), 45.
  10. A.G. Woodhead, The Greeks in the West (New York: Praeger, 1966), 32-33. Robin Lane Fox’s Travelling Heroes: Greeks and The Epic Age of Homer (Allen Lane, 2008), deals with how their travels from one end of their world to the other shaped the Greeks’ myth, heroes, and gods.
  11. For an up-to-date review of the Greek explorations of the Atlantic world, including a chapter on Roman expeditions to the North Sea, see Duane Roller’s Through the Pillars of Herakles: Greco-Roman Exploration of the Atlantic (Routledge, 2006).
  12. Rome is not known to have carried as many explorations as the Greeks; still, it should be noted that the Romans penetrated deeper into Africa than any European power until well into the nineteenth century; see L. P Kirwan, “Rome Beyond The Southern Egyptian Frontier,” The Geographical Journal, (123.1: 1957).
  13. Decline of the West, 332.
  14. Jesse Byock, Viking Age Iceland (Penguin Books, 2001).
  15. Peter Whitfield, New Found Lands. Maps in the History of Exploration (New York: Routledge, 1998), 18.
  16.  The Vinland Sagas, The Norse Discovery of America, translated with an introduction by Magnus Magnusson and Hermann Palsson (Penguin Books, 1965).
  17. Daniel Boorstin, The Discoverers (Vintage Books, 1985), 121.
  18. John Larner, Marco Polo and the Discovery of the World (New Haven, CT: Yale University Press, 1999).
  19. Decline of the West, 333.
  20. Pathfinders, A Global History (New York: Norton, 2006), 109-117.
  21. Ibid.
  22.  Joseph Needham, The Shorter Science and Civilization in China, Volume 3: A Section of Volume IV, Part I and a Section of Volume IV, Part 3 of Needham’s Original Text (Cambridge University Press, 1995), 141.
  23. Pathfinders, 145.
  24. Whitfield, 93.
  25. Buddy Levy, Conquistador, Hernan Cortes, King Montezuma, and the Last Stand of the Aztecs (Bantam Books, 2009), 3.
  26. Levy, 203.
  27. See Rona Goffe’s, Renaissance Rivals (New Haven: Yale University Press, 2004), for an account of the passionate strivings of the greatest artists of the Renaissance to outdo both living competitors and the masters of antiquity.
  28. Frank Dumont, A History of Personality Psychology (Cambridge University Press, 2010), 20.
  29. Frank Debenham, Discovery and Exploration (London: Paul Hamlyn, 1960), 6.
  30. The same line of reasoning occupies Piers Pennington’s The Great Explorers (London: Aldus Books, 1979): “this book tells the story of the world’s great adventures into the unknown,” yet the fifty-plus explorers listed are from the Occident. See also The Discoverers: An Encyclopedia of Explorers and Exploration, ed. Helen Delpar (New York: McGraw-Hill, 1980).
  31. Pathfinders, 394.
  32. Cited in Hanbury-Tenison, ed., The Oxford Book of Exploration (Oxford University Press, 1993), 490-3. This book is an anthology of writings by explorers.
  33. Max Jones, “Introduction” in Robert Falcon Scott’s Journals: Captain Scott’s Last Expedition (Oxford University Press), xvii.
  34. Ibid., xix.
  35. Ibid, xxxiv-xxxv.

Macron et la « westlessness » à Munich

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Macron et la « westlessness » à Munich

Ex: http://www.dedefensa.org

 
 

À Munich avait lieu l’annuelle conférence anciennement et poétiquement connue (du temps de la Guerre froide) sous le nom de la Wehrkunde. D’habitude, il s’agit d’un festival de certitudes cliquetantes et de roulages d’épaules des principaux partenaires des USA, le nid de l’atlantisme regroupé en rang et au pli du pantalon autour des envoyés des USA approbateurs, en faveur de la puissance de l’OTAN et du  bloc-BAO en général, du suprémacisme occidental. L’argument pèse son poids, il va du char de combat et des bombes intelligentes aux valeurs de la civilisation et à l’indépassable démocratie occidentale.

Cette fois-ci, ce fut un peu différent. Divers orateurs geignirent considérablement en constatant que les nationalismes des divers membres du bloc-BAO, pimentés d’un zeste de protectionnisme et d’une pincée d’égoïsme isolationniste, compromettaient gravement la cohésion de l’ensemble. La commentatrice de l’excellente gazette-sur-site RT.com, Helen Buyinski, a parfaitement raison de remarquer que les geignards qui ont développé ce thème confondent cause et conséquence, comme à l’habitude. Elle prend le cas des pays européens par rapport à l’UE, mais le cas vaut universellement pour les pays du bloc-BAO, dans tous les comportements de leurs activités, et particulièrement dans celui de l’affirmation d’une suprématie qui n’est plus qu’une vieille coquille vide du passé

« Les pays Européens présents à la Conférence de Munich sur la sécurité qui accusent le “nationalisme” du déclin de l’Occident confondent la cause et l’effet. Ce sont leur caricatures vide et contraignante du « ibéralisme » qui fait fuir les pays européens [du rassemblement institutionnel qu’est l’UE] vers le nationalisme ».

Et Buyinski enchaînent à propos du « Westlessness », néologisme anglo-saxon, ou anglicisme si l’on veut, quasiment intraduisible sinon par une expression vaguement significative mais avec une certaine ambition dialectique, selon l’idée du « moins d’occidentalité », – et qui ferait mieux, pour résumer le propos, d’aller voir du côté de Spengler et de son Déclin de l’Occident… C’est effectivement ce que font les organisateurs de la conférence, qui ont effectivement  suscité cet anglicisme en le présentant comme thème de la conférence en sollicitant la référence spenglerienne, sans doute inspirés par les déclarations audacieusement iconoclastes du président français Macron :

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« Un anglicisme, créé et mis en avant dans le rapport introductif de la Conférence de sécurité de Munich-2020, est présenté non seulement comme le thème de cette conférence, mais également comme la synthèse de la situation actuelle de l’Occident : il s’agit du concept de « westlessness ». Ce terme, analysé en profondeur et avec des références dès le début du rapport présentant la conférence, peut se définir par « un sentiment généralisé de malaise et d’agitation face à l’incertitude croissante quant à l’objectif d’un Occident durable », soit une version modernisée des thèses de l’essai « Le déclin de l’Occident »’ du philosophe conservateur allemand Oswald Spengler (1880-1936).

Le rapport précise ensuite : « Des changements de pouvoir de grande envergure dans le monde et des changements technologiques rapides contribuent à un sentiment d’anxiété et d’agitation. Le monde devient moins occidental. Mais plus important encore, l’Occident lui-même peut aussi devenir moins occidental. C’est ce que nous appelons « Westlessness ».

Là-dessus, les philosophes se sont affrontés, – à savoir le secrétaire d’État Mike Pompeo et le président Macron. Leurs  deux discours semblaient être comme une joute verbale du tac au tac, autour de cette idée antagoniste du « Je suis en déclin, moi non plus ».

« Je suis heureux d’annoncer que la mort de l’alliance transatlantique a été prématurément annoncée. L’Occident est en train de gagner, nous gagnons collectivement et nous le faisons ensemble », a déclaré Mike Pompeo, samedi à la Conférence sur la Sécurité de Munich… […], dans une allusion à peine voilée aux célèbres remarques du président français Emmanuel Macron sur la « mort cérébrale » de l’OTAN.

Les nations « libres » ont tout simplement plus de succès que tout autre modèle qui a été essayé dans l’histoire des civilisations », a-t-il déclaré, en faisant remarquer que les migrants fuient vers l’Europe, et non vers Cuba, et que les gens vont étudier « à Cambridge et non à Caracas » tandis que les entreprises sont ouvertes dans la Silicon Valley et non à Saint-Pétersbourg ».

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Macron est intervenu après Pompeo. Manifestement, il a voulu lui répondre, comme Pompeo avait prétendu répondre à Macron, bref on s’échange quelques petites piques selon les règles du marquis de Queensbury. Entêté, le Français n’a voulu céder en rien à son interlocuteur américaniste, lequel n’était en plus, ou en moins, point de son rang… Le Français l’a fait indirectement, en s’adressant à ses partenaires européens, parce que pour lui la situation des USA n’est pas la même que celle de l’Europe, – belle trouvaille, – parce que l’Europe est dans le même espace continental que la Russie, et pas les USA, – observation judicieuse.

« L’Europe « devient un continent qui ne croit plus en son avenir », a-t-il affirmé, avant de proposer une vision beaucoup moins optimiste du monde occidental.

Il y a en effet un affaiblissement de l’Occident. Il y a 15 ans, nous pensions que nos valeurs étaient des valeurs universelles, qu’elles domineraient toujours le monde, et nous étions dominants en termes de technologie militaire, etc ».

Mais dans le monde d’aujourd’hui, « les valeurs ont changé » et de nouvelles puissances sont apparues, a dit M. Macron, en particulier la Chine et la Russie.

J’entends la défiance de tous nos partenaires [vis-à-vis de la Russie], je ne suis pas fou. Mais il est vrai qu’être défiant et faible à la fois… ce n’est pas une politique, c’est un système complètement inefficace », a insisté Macron. Il a observé qu’il y a toujours « un deuxième choix », ici reprendre le dialogue avec Moscou, – « aujourd’hui nous parlons de moins en moins, les conflits se multiplient et nous ne sommes pas capables de les résoudre ».

C’est toujours le même rythme, la même stratégie du « en même temps » chez Macron, et aussi bien dans sa réflexion stratégique. Ainsi parle-t-il notamment des sanctions antirusses, pour déplorer qu’elles participent au gel d’une situation qui interdit le dialogue tout en coûtant aussi cher, sinon plus cher à l’Eutrope-sanctionneuse, qu’à la Russie-sanctionnée. Et pourtant dit-il subrepticement, mais on retiendra surtout ce coup d’arrêt, et pourtant « je ne propose pas de les lever, je fais juste le constat ».

« Nous avons accumulé les conflits gelés, les systèmes de défiance, des sanctions qui n’ont absolument rien changé en Russie, je ne propose pas du tout de les lever, je fais juste le constat…[…] Nos sanctions et les contre-sanctions nous coûtent aussi cher, à nous Européens, si ce n’est plus, qu’aux Russes ».

Président « en-même-temps », Macron clame haut et fort que les sanctions sont une sottise mais surtout, surtout, – « n’allez pas croire que je propose de cesser cette sottise, je la constate simplement ». Il y a là-dedans, quel que soit le rapport de force que les experts du Quai d’Orsay mesurent avec leur calculette, comme une faiblesse grave de la volonté, une infécondité du caractère.

Curieusement, alors que l’évidence ne manque pas de nous dire que la France a gagné, avec le départ de l’UE du Royaume-Uni, une position stratégique dominante en Europe notamment comme unique puissance nucléaire, il y a comme une étrange pusillanimité, – « je suis le plus fort en Europe, mais n’allez pas croire que je veux me servir de cette position, je la constate simplement ». Non seulement, il n’en fait que le constat sans vouloir en faire un instrument de pression pour ses conceptions, – s’il en a, et dans le bon sens, – mais en plus il se précipite pour expliquer aux Allemands qu’il va faire tout son possible pour leur faire croire qu’il leur donne une sorte de participation dans le constat de cette puissance nucléaire, comme si les Allemands pouvaient s’en croire également les récipiendaires, oubliant cette règle d’or que le nucléaire ne se partage pas, – un seul bouton, un seul doigt.

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Macron pousse le « enmêmetempisme », nouvelle doctrine postmoderne, jusqu’à faire déployer une poignée de soldats français sur les frontières russes des pays baltes, pour convaincre ces importants partenaires stratégiques, à la politique si complètement équilibrée, qu’il faut aussi soutenir la France dans son intérêt quasi-exclusif pour le seul vrai danger, sur sa frontière Sud. (Et sur son Ouest, dito les États-Unis.)… « En même temps », il faut expliquer aux Russes que ce déploiement des forces françaises sur leur frontière occidentale, dans le cadre de l’OTAN lourdement tenu par les américanistes et les amis-polonais, est tout ce qu’il y a de plus amical ; une sorte de main tendue à la Russie, en signe d’amitié si l’on veut.

« En même temps », effectivement et même évidemment, Macron est plus que jamais partisan d’une architecture européenne de sécurité avec la Russie, la recherche d’un développement de « règles du jeu dans un espace partagé ». Pour autant, c’est-à-dire « en même temps », Macron n’est pas un naïf, et on ne la lui fait pas ; il sait tout de la duplicité de la Russie, et il y a même des députés de LaREM à Paris, qui constitue une redoutable escadrilles à cet égard, pour évoquer la Russie à propos du revers stratégique terrible du dévoilement des ébats intimes de Griveaux, – car il y a  du Russe dans l’affaire, comme chacun sait, Piotr Pavlenski, qui est en plus un anti-Poutine, c’est tout dire

« Je pense [dit le président] que la Russie continuera à essayer de déstabiliser, soit [via] des acteurs privés, soit directement des services, soit des « proxies », estimant que Moscou continuerait d’être « un acteur extrêmement agressif » dans ce domaine. « Mais il faut se méfier, il n’y a pas que la Russie, il y a beaucoup d’autres pays », a-t-il déclaré ».

En même temps (suite), « il y a beaucoup d’autres pays »… Lesquels ? demanderont sans doute les Russes, intéressés au moins par politesse.

L’Otan prépare son déploiement au Moyen-Orient élargi

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Stoltenberg s'entretenant avec des militaires irakiens

L’Otan prépare son déploiement au Moyen-Orient élargi

Ex: http://www.zejournal.mobi

En définitive, ce devrait bien être l’Otan qui investira le monde arabe après le retrait du CentCom (Commandement central des États-Unis au Moyen-Orient). L’Allemagne pourrait jouer le rôle de leader au sein de l’Alliance.

Le secrétaire général, Jens Stoltenberg, espère :

  1. déployer l’Alliance en Tunisie et faire durer éternellement la guerre en Libye ;
  2. déployer l’Alliance en Irak et en Jordanie et faire durer éternellement la guerre en Syrie.

Le 1er février 2020, la Turquie s’est soudainement rapprochée de l’Otan dont elle est membre et est entrée en conflit avec la Russie en Syrie. Elle a en outre repris le transfert des jihadistes de Syrie vers la Libye via la Tunisie.

Le 12 février 2020, les ministres de la Défense de l’Otan ont décidé, dans un premier temps, de renforcer leur « mission d’assistance » en Irak bien que le Parlement irakien a exigé le retrait des troupes étrangères.

Jens Stoltenberg prépare ce plan depuis plus de six mois. Ainsi a-t-il conclu des accords secrets avec le roi Abdallah de Jordanie et le ministre tunisien des Affaires étrangères qu’il a longuement reçus à Bruxelles.


- Source : Réseau Voltaire

lundi, 17 février 2020

Michel FOUCHER : Le retour des frontières

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Michel FOUCHER : Le retour des frontières

 
 
 
Le géographe et ambassadeur Michel Foucher présente une vaste réflexion sur "Le retour des frontières", titre d'un ouvrage qu'il a publié chez CNRS éditions (2016). Signalons qu'il vient de publier un remarquable numéro de la Documentation photographique : "Les frontières", CNRS éditions 2020 (n°8133). C'est à cette occasion, et en soutien aux enseignants de spécialité HGGSP que Diploweb met en ligne cette vidéo d'une conférence conduite en 2016, en partenariat avec GEM.
 
Extrait du résumé par Joséphine Boucher pour Diploweb.com Qu’est-ce qu’une frontière ? Lorsqu’elle est internationale, c’est une institution. Bien plus qu’une simple ligne de sable ou une crête de montagne, elle fait l’objet de traités et est soumise à un processus défini, du dépôt du dossier du traité de délimitation aux Nations Unies aux démarcations sur le terrain par des commissions dédiées. Il s’agit donc d’une véritable institution du droit international qui sert à définir et à délimiter le périmètre de l’exercice d’une souveraineté étatique. À la frontière s’exercent de multiples fonctions de souveraineté, juridiques, régaliennes, fiscales, douanières, qu’elles soient réelles ou plus symboliques.
 
C’est l’un des paramètres de l’identité collective et de la citoyenneté, et qui permet au plan symbolique de distinguer le dedans et le dehors, lesquels sont des éléments constitutifs de toute communauté humaine. Il y a là deux aspects fondamentaux de la question de la frontière, à savoir la question des limites et celle de l’attachement, de l’appartenance symbolique à une collectivité.
 
C’est d’ailleurs l’une des difficultés de ce malaise de la construction européenne comme acteur stratégique et politique, suite à ce refus de définition. L’Union européenne n’est en effet pas capable de politique extérieure car elle n’a jamais défini la limite entre le dedans et le dehors, sa seule politique extérieure étant celle de l’élargissement. Après avoir défini ce qui fait une frontière, qu’en est-il désormais du retour des frontières ? Il s’agit en fait d’une nouvelle visibilité de ces tracés, même si, rappelons-le, l’invisibilité n’est pas synonyme d’effacement. À cette étape, il convient de déconstruire les idées fausses qui ont pu être émises sur les frontières.
 
La première est celle du discours d’un monde sans frontières permis par une globalisation néo-libérale. Toute régulation serait un obstacle, la politique et les Etats seraient des freins à la bonne marche de l’économie, et au gouvernement se substituerait la gouvernance, c’est-à-dire gouverner sans politique. Or aujourd’hui, les phénomènes de dé-mondialisation et le retour d’un certain protectionnisme témoignent d’une volonté de se protéger, qui n’est pas forcément, rappelons-le, un cloisonnement. L’autre dérive sur la problématique frontalière était d’assimiler la question des frontières à la barrière, au mur, en particulier anti-migratoire. Il est important de ne pas confondre migrations et frontières.
 
La deuxième partie de cette conférence a été construite pour aborder l’actualité de ces questions de frontières via une chronique et des exemples de diverses régions du monde, afin de repérer à partir de différentes sources ce qu’il s’y passe concrètement, pour en faire une analyse et en tirer des enseignements plus généraux sur la réaffirmation des frontières. (...) Enfin, il convient de s’intéresser plus particulièrement à la problématique du voisinage européen, et ce aussi au-delà des questions migratoires. Aucune autre région du monde n’a un tel environnement stratégique. En effet, en cartographiant précisément les conflits sur la base objective des rapports réguliers de l’ « International Crisis Group », il apparaît que sur les 75 conflits, crises graves et guerres ouvertes répertoriées par l’ONG dans le monde au printemps 2016, 85% se trouvent dans un rayon de 3 à 6 h de vol de Paris. Les questions frontalières jouent de fait à 3 échelles : nationale, infra-nationale et régionale. (...)
 
Pour conclure, ce retour des frontières dans les faits et dans les consciences est une bonne nouvelle, à condition d’en user avec discernement. Si abolir des frontières revient à faire disparaître des Etats, les franchir aisément ne les annule pas. La frontière, invention humaine, est aussi un refuge et une ressource pour qui vit des différences et peut élaborer des micro-stratégies. Le retour des frontières est certes un phénomène avéré aujourd’hui, mais il ne signifie pas pour autant le repli sur soi ; la bonne frontière est la frontière agréée ouverte, et pas le refus du monde ni la négation ultra ou néo-libérale de l’importance symbolique et réelle des frontières. Où placer le curseur entre solidarité et responsabilité ? Entre liberté et sécurité ? Ce sont là de véritables difficultés et questions à se poser actuellement. Donnée politique inscrite dans l’espace, la frontière est donc un sujet véritablement et éminemment politique.
 
Images et montage : Fabien Herbert

Bundesregierung im Krieg gegen die heimische Industrie

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Bundesregierung im Krieg gegen die heimische Industrie

Ex: https://kopp-report.de

»Umweltkiller Auto« und Energiekonzerne, die nicht als lebensnotwendige Versorger der Bevölkerung dargestellt, sondern gezielt als Umweltzerstörer diffamiert werden: Die Reihe deutscher Industriekonzerne, die dem Machterhalt der Bundesregierung geopfert werden, nimmt selbstzerstörerische Ausmaße an.

Mit dem Siegel »Made in Germany« versuchte Großbritannien Ende des 19. Jahrhunderts deutsche Importware als vermeintlich billig und minderwertig zu diskreditieren. Doch der Schuss der Briten ging buchstäblich nach hinten los. Nicht zuletzt dank einem damals noch weitestgehend intakten Bildungssystems und der daraus resultierenden deutschen Ingenieurskunst sowie traditionellen Handwerksbetrieben wurde »Made in Germany« zu einer einzigartigen Erfolgsgeschichte. Dass ausländische Kräfte, wirtschaftliche Konkurrenten und eigentlich befreundete Staaten alle Hebel in Bewegung setzen, um die weltweit führende Exportnation zu schädigen, mag bis zu einem gewissen Grad nachvollziehbar sein – dass deutsche Politiker die eigene Wirtschaft diesen Kräften jedoch widerstandslos ausliefern, ist schlicht ein Skandal.

So setzt bekanntlich die USA europäische Länder und explizit Deutschland massiv unter Druck, damit der chinesische Telekomausrüster Huawei nicht am milliardenschweren 5G-Netzausbau beteiligt wird.

Als Grund wird die US-Administration nicht müde zu betonen, dass der chinesische Großkonzern der Wirtschaftsspionage nicht nur beschuldigt, sondern längst überführt sei.

Der massive Druck geschieht dabei aber nicht etwa aus Sorge um die Sicherheit Deutschlands digitaler Infrastruktur, sondern verfolgt in der Hauptsache das Ziel, den Zuschlag für den sensiblen Digitalausbau an US-Konzerne sicherzustellen.

Spätestens nach den Enthüllungen des Whistleblowers Edward Snowden weiß die ganze Welt, dass US-Geheimdienste nicht nur den gesamten weltweiten Datenverkehr abhören, auswerten und sammeln, sondern dass die Dienste zudem über »Backdoors« bei den großen Techkonzernen verfügen. Zum Teil ist diese Zusammenarbeit zwischen der CIA und dem Silicon Valley sogar offenkundig. »In-Q-Tel« heißt der Risikoinvestment-Arm der CIA. Ganz offen investiert der US-Geheimdienst so in Datenanalyse-Firmen aus dem Silicon Valley. Neben Beteiligungen bei Google und Facebook gerät immer mehr das Geheimdienstinvestment bei der Big-Data-Firma Palantir ins Blickfeld der Öffentlichkeit.

In Amerika werden dadurch bereits Informationen von Militär, Geheimdiensten und aus Polizeidatenbanken miteinander vermischt und zur Aufstandsniederschlagung in Afghanistan und dem Irak, sowie im Kampf gegen den islamistischen Terrorismus und zur Kriminalitätsbekämpfung, eingesetzt. »Gotham« heißt das umstrittene Programm der CIA-Firma. Gotham City ist bekanntlich die Stadt, in welcher der Superheld Batman auf Verbrecherjagd geht. Hier wird ein dystopisches Bild von New York City gezeichnet, einem zukunftspessimistischen Szenario einer in Gewalt, Verbrechen und Korruption untergehenden Gesellschaft. Im 21. Jahrhundert stemmt sich jedoch kein Superheld gegen dieses Untergangsszenario, sondern die CIA mit ihrem Silicon-Valley-Unternehmen Palantir.

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Anstatt mit Muskeln und Kampftechniken werden die Kriege heutzutage mit Terabytes ausgefochten. Mit einer einfach zu bedienenden Suchmaske kann zu jedem einzelnen Knotenpunkt ein eigenes Netzwerk erstellt werden.

Der Firma werden regelrechte Superkräfte nachgesagt: So enthüllte der US-Kriegsreporter Mark Bowden, dass deren Software die Geheimdienste letztlich auf die Spur des seit Jahren untergetauchten Osama Bin Laden geführt habe. Und das Schneeballsystem des Milliardenbetrügers Bernie Madoff soll das Analyseprogramm aus 20-Terabyte-Daten innerhalb weniger Stunden rekonstruiert haben. Das Programm Gotham ist eine riesige Rasterfahndung, die Massendaten aus dem Internet, überwachte Telekommunikation, Kontobewegungen, staatliche Register und Archive sowie Bewegungsprofile analysiert und zusammenführt. Kritiker befürchten, dass die CIA-Investments bei Google und Facebook genau diesem Zweck dienten, nämlich durch die Hintertür Zugriff auf riesige Datenberge zu erlangen und mit Hilfe der Spionage- und Analyseprogramme von Palantir entsprechend auswerten zu können. Bei der Polizei in Hessen wird die Spionage-Software bereits genutzt und Anfang Januar 2020 gab auch die Polizei in Nordrhein-Westfalen bekannt, zukünftig die umstrittene Software einzusetzen. Der anfängliche Auftragswert liegt bei 14 Millionen Euro.

Wirtschaftskrieg gegen Deutschland

Volkswagen, Deutsche Bank und Siemens sind Beispiele, wie mit gezielter Wirtschaftsspionage durch die Amerikaner der deutschen Wirtschaft geschadet wird. Erst werden unzählige Betriebsgeheimnisse wie Patente und Antriebssysteme abgeschöpft, um dann Milliardenstrafen gegen erfolgreiche Konkurrenten auf dem Weltmarkt zu verhängen. Das perfide Gebaren der US-Geheimdienste folgt stets demselben Muster. Auch dies sind Erkenntnisse der Snowden-Enthüllungen über die globale und verdachtsunabhängige Überwachung und Speicherung milliardenfacher Daten auf Vorrat.

51Ur3UtclEL._SX318_BO1,204,203,200_.jpgDurch komplexe Überwachungssoftware wie PRISM, Tempora und XKeyscore werden diese Datenberge sodann von der NSA durchforstet und mit der CIA und anderen Behörden gemeinsam weiter verwertet.

Schließlich kann die NSA, mit illegal beschafften Daten, die Deutsche Bank nicht vor einem New Yorker Gericht auf Milliardensummen verklagen. Und so überlässt die NSA die illegalen Daten dem US-Justizministerium und der US-Börsenaufsichtsbehörde SEC, die dann bei »eigenen« Ermittlungen ganz genau wissen, wo es was zu suchen bzw. zu finden gibt.

Die SEC ist befugt, gegen alle in den USA börsennotierten Unternehmen zu ermitteln.

Zuerst waren die Ermittlungen auf Insiderhandel und Betrug begrenzt, nach 9/11 wurden der Behörde durch den Patriot Act jedoch noch weitreichendere Befugnisse zugesprochen.

Auch hier wurden die erheblichen Kompetenzerweiterungen offiziell mit einer angeblichen Terrorbekämpfung und mit dem Verdacht von Embargo-Verletzungen begründet. Dieses Vorgehen, wie im Fall der Deutschen Bank, ist noch nicht lückenlos bewiesen, aber auch Dr. Gert-René Polli, Gründer des österreichischen Bundesamts für Verfassungsschutz, hält diese These für »allemal plausibel«.

Im Zuge der Finanzkrise um den Handel mit Immobilienkrediten, die zu Paketen geschnürt und weltweit gehandelt und somit verkauft wurden, den sogenannten »mortage-backed securities«, geriet die Deutsche Bank ins Visier der amerikanischen Dienste und Behörden und musste schließlich in den USA eine Geldstrafe in Höhe 11,75 Milliarden Dollar berappen.

Auch weitere US-Sanktionen gegen deutsche Firmen (und gegen Russland) ordnet der Chefvolkswirt der Bremer Landesbank, Folker Hellmeyer, als Teil eines Wirtschaftskrieges gegen Europa und Russland ein. Seine genauen Worte lauten:

»Wir befinden uns mitten in einem Wirtschaftskrieg.«

Während sich die Hiobsbotschaften in der deutschen Wirtschaft wie Meldungen über Massenentlassungen häufen, gerät die deutsche Industrie nicht nur unter massiven Druck globaler Gegenspieler, sondern die Bundesregierung selbst befeuert den Krieg gegen die eigene Industrie. So wurde das einstige Premiumprodukt deutscher Ingenieurskunst – das Automobil –, zuerst durch eine immens aufgeblasene Dieselschmutzkampagne beschädigt und anschließend pauschal als Umweltkiller diffamiert.

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Sonntag, 09.02.2020

L’art contemporain est le soft power planétaire

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L’art contemporain est le soft power planétaire

Par Maximilien Friche 

Ex: http://mauvaisenouvelle.fr


Le manifeste cannibale Dada de Francis Picabia disait en 1924 « L’honneur se vend et s’achète comme le cul. » Aujourd’hui le cynisme ne fait plus scandale, il est la règle qui régit tous nos rapports sociaux et humains. Dans son dernier ouvrage, Nouvelle Géopolitique de l’art contemporain, Aude de Kerros précise : « On ne parle plus de valeur intrinsèque d’une œuvre, mais de cote, d’indice monétaire. » (p8)

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Depuis longtemps maintenant, nous constatons l’arnaque intellectuelle et morale de l’art contemporain. Depuis longtemps, nous dénonçons la convergence des oppressions entre un Etat français dirigiste et une finance internationale globalisante, au profit d’un art unique conceptuel aux messages pseudo subversifs et véritablement progressistes. Depuis peu, nous avons pris conscience que l’art contemporain était devenu un art financier, une simple monnaie. Aude de Kerros nous rappelle d’ailleurs à ce titre que les conseillers financiers recommandent d’avoir dans son portefeuille d’actifs environ 20% d’art. La rentabilité de l’art est estimée à 8%. Aucun risque. Même si c’est moche, même si c’est idiot, et surtout si ce n’est pas de l’art, cela vaut le coup. C’est ce qu’elle appelle l’innocent argent de poche de l’hyperclasse (p13) et c’est aussi bien souvent la possibilité d’un blanchiment de l’argent du crime et du trafic de drogue. C’est surtout, concernant l’art conceptuel, le lieu du délit d’initiés permanent. L’hyperclasse se met d’accord sur la valeur d’une œuvre et l’œuvre a cette valeur. Attribuer un prix est du ready made sur du ready made finalement. C’est de l’art parce qu’on l’a décidé. De la même façon, cela vaut plus ou moins cher parce qu’on le décide.

Toutes ces prises de conscience, nous les devons entre autres à Aude de Kerros au travers de ces divers ouvrages dont L'art caché : Les dissidents de l'art contemporain ; Des révélations inédites sur l'art actuel et L'imposture de l'art contemporain : Une utopie financière. Mais comme le monde est entré dans son ère trotskyste des organisations et que tout change en permanence de peur que l’on ne s’aperçoive de la bêtise de ce qui existe, il faut rester en veille. C’est ce que fait Aude de Kerros en nous expliquant désormais La nouvelle géopolitique de l’art contemporain.

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New-York : seul l’art conceptuel permet d’imposer un arbitraire

Le livre s’ancre dans l’histoire en rappelant la guerre froide et l’invention du soft power américain. Tout est venu de la CIA et de la guerre froide. Le coup de génie a été de récupérer les artistes en les achetant finalement, en les transformant en valeur marchande. « Un artiste de gauche peut librement, par ses œuvres, exprimer ses idées, sa critique de la société, et en même temps être promu, acheté, institutionnalisé. » Nous avons là, en définitif le premier exemple d’« en même temps » machiavélique, bien avant que notre algorithme de président n’en abuse à tour de bras. Une hégémonie américaine a suivi l’effondrement du bloc soviétique. Les USA ont utilisé l’art contemporain comme une arme pour globaliser le monde et effacer les identités culturelles et civilisationnelles. En art, la globalisation impliquerait un processus de « décivilisation » ? Ce n’est pas une conséquence non souhaitée, mais un objectif revendiqué. Nathalie Obadia avoue que l’art contemporain comme soft power, est un outil indispensable à la paix dans le monde et à la concorde universelle. En gommant les civilisations, en standardisant la culture, on supprime selon cette idéologie le risque de guerre et on peut imposer cette autre dictature à visage humain. « New York souhaiterait exercer sans partage son pouvoir de consécration et d’exclusion, bref de décider seul les critères de “l’art contemporain”. Sans identité, sans esthétique, seul l’art conceptuel permet d’imposer un arbitraire. » (p137) Seulement, l’hégémonie passée, certaines civilisations peuvent prouver qu’elles ne sont pas mortes et il faut bien avouer que l’art contemporain s’essouffle, comme une éternelle et gâteuse avant-garde (p15). « La martingale dérision-mépris-sidération-confusion-inversion semble avoir atteint ses limites. » (p258)

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La Russie, la Chine : tant de vie !

Aude de Kerros montre qu’aujourd’hui la géopolitique de l’art contemporain est celle des places pétrolières, des grandes places financières et des Gafam. Pour autant, la géopolitique de l’art tout court, est plus complexe. Ainsi, alors que le marché de l’art contemporain est avant tout un marché de l’offre, la Chine s’inscrit, elle, dans un marché de demande correspondant davantage à un désir anthropologique. Et il faut bien avouer que le carcan conceptuel et froid aurait bien du mal à contenir tant de vie culturelle. De la même façon, en Russie, art contemporain signifie art libre et non uniquement conceptuel. La vie artistique n’y est quasiment pas subventionnée, donc quasiment pas contrôlée, elle est de fait plus créative, plus imprévisible. En Chine, la seule contrainte est la non critique ouverte du gouvernement, ce qui laisse tout de même beaucoup plus de possibilités d’expression artistique qu’en Occident.

Paris au service du soft power américain

« Paris depuis vingt ans ne sert plus sur le marché mondial que de présentoir publicitaire gratuit en offrant ses monuments pour exposer des produits en voie de cotation extrême. » (p57) Notre vocation est donc d’être la tête de gondole de l’art contemporain, la caution culturelle et intellectuelle d’un art qui en est intrinsèquement dépourvu. « La politique d’influence française met en permanence les institutions françaises au service du soft power américain. » Cet alignement officiel de l’Etat, cette soumission à la globalisation, n’a pas détruit l’art en France, il a simplement conduit les artistes à aller peindre dans leurs grottes. Ainsi existe-t-il depuis 1981 un art caché, sorte d’exception française. L’ironie fut que cet art caché français reçut un temps le soutien de la Chine avant que cette dernière utilise la route de la soie, pour mieux ceinturer les échanges et se concentrer sur ses frontières.

L’art contemporain sera multipolaire ou …

Pour Aude de Kerros, l’art contemporain international est devenu total : hybride, commercial, financier, intellectuel, juridique, monétaire, patrimonial, visant le succès populaire mondial, transcendant les cultures et les classes sociales. Le global kitsch et le flashy pop art a pris la tête des blue chips de l’art contemporain, embarquant le peuple dans l’achat de produits dérivés. » (p218) Et aujourd’hui les pays critiques vis-à-vis de cette globalisation qui nie les civilisations sont les anciens pays communistes. Ils se lancent dans la promotion de leur art civilisationnel. En effet, grâce aux œuvres d’art, l’identité des pays qui ont connu la guerre, le totalitarisme se recompose. « Paradoxalement, les arts civilisationnels, mis au ban du globalisme, sont aujourd’hui plus ouverts que l’art contemporain soumis à sa boucle d’asservissement financier. » (p258)

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On peut donc refermer ce livre avec un peu d’optimisme, car, derrière la globalisation, se cache la multiplication des soft power particuliers et enracinés. Qu’attend donc la France pour les rejoindre ? Aujourd’hui, l’art contemporain, l’art conceptuel, admet à ces côtés de l’art pour bénéficier de sa réputation. La peinture que l’on croyait perdue revient de ce double effet des soft power enracinés et d’un épuisement de l’art conceptuel. L’art est devenu un moment de l’art contemporain, pour paraphraser Debord qui savait que dans un monde où tout est faux, le vrai est un moment du faux.

André Siegfried et le collectivisme américain

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André Siegfried et le collectivisme américain

Par Nicolas Bonnal

 

Ex: https://leblogalupus.com

Une culture organisée autour de la consommation de masse encourage le narcissisme — qui désigne la tendance à voir le monde comme un miroir, et plus précisément comme une projection des peurs et des désirs intimes d’une personne — non pas parce qu’elle rend possessif et capricieux, mais parce qu’elle rend faible et dépendant. Elle mine la confiance que les individus ont en leur capacité à comprendre et modeler le monde, et à pourvoir à leurs propres besoins. Le consommateur a le sentiment qu’il vit dans un monde qui défie la compréhension et le contrôle pratiques, un monde de bureaucratie géante, «saturé d’informations» et constitué de systèmes technologiques complexes et réticulaires susceptibles de s’effondrer subitement, comme lors de la coupure d’électricité géante qui a plongé le Nord-Est des États-Unis dans l’obscurité en 1965 ou lors de la fuite de radiations de Three Mile Island en 1979.

— Christopher Lasch, The Minimal Self (trad. SD).

Rien ne ressemble plus un américain qu’un autre américain, rien ne ressemble plus à un homme moderne qu’un autre homme moderne. On supprime sexes, nations et cultures pour bien le démontrer ; pas besoin d’être un esprit traditionnel pour s’en rendre compte.

Journaliste, essayiste et connaisseur des sociétés anglo-saxonnes, André Siegfried, qui fut repris par Julius Evola, avait la dent dure. Il y a déjà un siècle il écrivait sur ce conformisme des modernes :

« De là une tendance grandissante à réduire toutes les vertus à celle, primordiale, de la conformité. »

Important, l’américain n’est pas une victime (c’est ce que ne comprennent pas les antisystèmes, en France comme ailleurs) : il est un volontaire, un enthousiaste, comme dit Céline. Siegfried :

« Ce ne sont pas les dirigeants qui imposent cette manière de voir, ni même le gouvernement, c’est le grand public lui-même. Dans les universités, la majorité des étudiants sollicitent l’enseignement d’une vérité toute faite, ils demandent aux maîtres moins une culture qu’un instrument de succès. »

AS-ame.jpgPhilippe Grasset a comparé l’américanisme au germanisme. Siegfried rappelait :

« La même crainte instinctive que ressentait la France devant le système germanique, à la veille de la guerre, elle l’éprouve maintenant à l’égard de certaines méthodes américaines, symbolisées dans l’usine Ford. Elle sait bien que, si ce système triomphe, la productivité du monde subira un accroissement formidable, que tout ce qui demeure entre nos mains, latent, noué et matériellement stérile, s’épanouira en réalisations de richesse, mais elle hésite à payer le prix. »

A cette époque (années vingt donc), Duhamel publie ses justes Regards sur le monde moderne ; Céline décrit la rue newyorkaise ou les usines Ford dans les inoubliables pages du Voyage, Hermann Hesse narre sa révolte intérieure dans le Loup des steppes. Siegfried ajoute sur cette massification, ce fordisme des esprits :

« Une transformation sociale d’immense portée résulte en effet de cette structure, qui incline toutes les énergies vers un même but. L’être humain, devenu moyen plus que but, accepte ce rôle de rouage dans l’immense machine, sans penser un instant qu’il puisse en être diminué. La religion, enrôlée dans l’entreprise, exalte à ses yeux le rendement comme une mystique de la vie et du progrès. »

Tocqueville nous disait qu’il ne nous resterait que la famille dans sa Démocratie. Pas même, selon notre essayiste :

« Mais, prise entre l’individu atrophié et la société trop puissamment organisée, la famille se trouve diminuée : aux yeux des chercheurs de rendement social, elle apparaît presque comme un barrage qui arrête le courant. Si l’Église catholique la défend à ce titre, comme une forteresse de résistance et de sécession, la société dans son ensemble ne compte plus sur elle pour l’éducation de la nation : c’est à l’école publique, aux Églises, aux dix mille associations de morale, d’éducation, de réforme, c’est à la presse et presque à la publicité qu’elle demande plutôt d’éduquer les masses. »

Le monde est un drive-in où l’on subit la même programmation, cinématographique, radiophonique ou télévisuelle. Tex Avery s’en rendit très bien compte, lui le dernier esprit libre américain avec Henry Miller.  

Siegfried conclut donc sur cette abdication et ce collectivisme :

« Par-là, en l’absence de ces institutions intermédiaires, dont la collaboration sociale se tempère d’autonomie, le milieu américain tend à prendre l’aspect d’un collectivisme de fait, voulu des élites et allègrement accepté de la masse, qui subrepticement mine la liberté de l’homme et canalise si étroitement son action que, sans en souffrir et sans même le savoir, il confirme lui-même son abdication. »

Le pire est la jeunesse moderne qui est d’autant plus massifiée qu’elle se croit (ou est décrétée) rebelle :

« De cette discipline sociale c’est surtout l’élite étrangère, mal assimilée, qui paraît souffrir. Il se trouve aussi des Américains d’âge mûr pour protester contre elle. Mais la jeunesse, elle, ne laisse apparaître aucune protestation, aucune réaction contre la tyrannie collective : elle l’accepte manifestement comme allant de soi, elle n’a pas la mentalité individualiste ; bref, le régime lui convient. »

Il y a même un vertige à abandonner son individualité :

« Du reste, le profit qu’elle en retire est si grand, la sécurité qu’elle y trouve si parfaite, le vertige de la collaboration qu’elle apporte à quelque chose de plus grand qu’elle-même est si enivrant que, dans cet abandon où il entre du mysticisme, le reste échappe à sa pensée ou à son regret. Nous continuerons cependant de nous demander si, dans cette atmosphère, l’individu peut survivre. »

9782070259120.jpgEt comme Ortega Y Gasset à cette même et lucide époque, Siegfried dénonce le péril collectiviste américain et il pressent ce que l’européen va perdre :

« Dans son enthousiasme à parfaire une incomparable réussite matérielle, l’Amérique ne risque-t-elle pas d’éteindre cette flamme de liberté individuelle que l’Europe, enfantine peut-être dans son rendement économique, avait cru être un des trésors essentiels de l’humanité civilisée ? »

Il en fait même le procès de cette civilisation :

« Ainsi, au moment où les États-Unis connaissent un état de prospérité tel que jamais le monde n’en avait vu de semblable, l’observateur impartial éprouve un doute : cette maîtrise inouïe des biens de la terre conduit-elle en fin de compte à une civilisation plus haute ? Initiatrice des formes modernes de la grande production industrielle, l’Europe s’arrête, effrayée, en percevant les conséquences extrêmes que, logiquement, sa pratique entraîne. »

Il faut rappeler que l’Europe d’alors n’avait pas tout perdu :

« Si certains Européens, qui veulent rajeunir industriellement leur vieux continent, ont pris les États-Unis pour modèle, il en est d’autres qui hésitent et regrettent leur passé, comme plus raffiné et meilleur. Vue du nouveau monde, quand ils y vont, l’Europe, sous une perspective nouvelle, leur apparaît autre qu’ils ne pensaient, autre aussi que les reproches des penseurs orientaux ne la leur avaient dépeinte. À la lumière du contraste américain ils s’aperçoivent que, dans sa hiérarchie des valeurs, la poursuite matérielle n’avait pas tout absorbé, qu’elle réservait encore une grande place, dans ses vénérations, à la pensée libre et sans profit, à la recherche des joies de l’esprit, payée souvent du renoncement à la fortune ou au confort. »

Depuis l’Europe a craqué, et le reste du monde…

NICOLAS BONNAL

Sources :

  • André Siegfried – Les Etats-Unis d’aujourd’hui, dernières pages (classiques.uqac.ca)

dimanche, 16 février 2020

Mondialisation : le combat perdu d’Emmanuel Macron

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Mondialisation : le combat perdu d’Emmanuel Macron

 
 
par Jean Goychman 
Ex: http://www.zejournal.mobi

L’Histoire de l’Humanité n’est jamais figée dans le temps. Le jeu des puissances à la surface de la planète ne s’arrête jamais. Le Monde tel qu’il est apparu à la fin de la seconde guerre mondiale, consacrant l’hyper-puissance des États-Unis d’Amérique est en train de s’estomper et laisse apparaître une nouvelle organisation géopolitique.

Les mondialistes n’ont plus d’avenir

Cette phrase, prononcée par Donald Trump aux Nations Unies l’an passé, en écho du discours qu’Emmanuel Macron venait de tenir, dans le cadre d’une réunion sur le climat, mérite qu’on l’examine. Le cadre était loin d’être neutre, il s’agissait d’un « Sommet Climat » terme consacré à ces grand’messes mondialistes organisées sous l’égide de l’ONU afin de nous rappeler que, comme le disait Simon Linett en 2008 « le réchauffement anthropique est un problème mondial qui ne peut se résoudre qu’au niveau d’un gouvernement mondial.. »

Cette mondialisation a une apparence : celle d’une sécurité et d’une prospérité mondiales qui résulteraient de la généralisation d’un libre-échange planétaire dans lequel il n’existerait plus de raison de déclencher des guerres, le bonheur des peuples étant assuré. Dans la réalité, il s’agissait surtout de donner le pouvoir à une « élite », seule capable aux yeux des promoteurs de cette idée, de diriger le monde en contrôlant les leviers essentiels.

Pour arriver dans ce « paradis terrestre », il fallait progressivement faire disparaître les frontières, mais aussi les peuples et leurs identités culturelles.

La seconde tentative

Après l’échec patent de la Société des Nations, définitivement acté au début de la seconde guerre mondiale, ayant montré que, du point de vue de cette élite, les peuples et surtout la démocratie qui leur donnait le pouvoir politique étaient des obstacles dont il fallait s’affranchir. Après la seconde guerre mondiale et les massacres des populations (y compris civiles) qu’elle avait engendrée, l’heure devenait propice pour installer un pouvoir mondial qui garantirait la paix. L’Organisation des Nations Unies était une première étape. Mais il fallait trouver une sorte « d’appartement témoin » qui ferait la démonstration in situ de ce que pourrait être le monde futur. Particulièrement touchée par deux guerres successives, la population européenne était particulièrement sensible et il suffisait de dénoncer le nationalisme comme responsable des guerres. Le raisonnement était simple. Le nationalisme cause la guerre, faisons disparaître les nations. C’est sur cette base fausse que les théoriciens de l’Europe « intégrée » jetèrent leur dévolu. Pour « enjamber » les nations européennes,  le fédéralisme était l’objectif final, mais nécessitait une approche progressive. Ce fut la « politique des petits pas » chère à Jean Monnet, qui préconisait de multiplier les associations dans tous les domaines des pays européens, et en particulier la France et L’Allemagne. Créée avec l’aide vigilante du Département d’État, l’Allemagne fédérale, composée de « landers » était devenue « facile à manier » pour ces projets, qui étaient tous autant de perte de souveraineté nationale. On assista alors à plusieirs tentatives telles que la création de la CED (défense européenne) ou encore la CECA (charbon et acier) et d’autres moins connues qui échouérent toutes, en raison de l’attachement du peuple français à sa souveraineté. Ce ne fut qu’en 1957, après une gestation difficile, que fut créé le « marché commun » par la signature du Traité de Rome en mars 1957.

De Gaulle entre en scène

En mai 1958, la IVème République vit ses derniers instants le Président Coty se résoud à faire appel « au plus illustre des Français » en appelant le Général de Gaulle. Au début, de Gaulle veut régler en priorité le problème algérien pour se retourner ensuite vers l’Europe ayant « les mains libres ».

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Dollar AMGOT (Allied Military Government of Occupied Territories )

De Gaulle, qui avait suivi de près la construction européenne, avait parfaitement discerné que le but final était une fédéralisation de l’Europe sous le contrôle de « l’ami américain »auquel il s’était opposé dès la Libération. Il avait notamment fait échouer la tentative américaine d’imposer le dollar « AMGOT » à la population française. Cependant, même si l’affaire algérienne est pour lui une priorité, il arrive avec un plan bien arrêté dans sa tête. Il veut doter au plus vite la France de l’arme nucléaire. Bien que lancé sous la IVème République, à laquelle il faut rendre cette justice, le programme nucléaire militaire n’était pas considéré avant de Gaulle comme une priorité. Ce dernier était informé des idées en matière de dissuasion, des réflexions du général Gallois, qui venait de passer en 2ème section. De Gaulle s’en inspira assez largement, cela me fut confirmé par Pierre Clostermann, qui voulût bien m’honorer de son amitié, et qui me raconta la genèse de la force de dissuasion française et les réunions auxquelles il avait assisté.

En 1960, à Reggane, eut lieu la première explosion nucléaire, mettant ainsi notre pays dans le club alors très fermé des pays disposant de l’arme atomique. Pour autant, et malgré les pressions innombrables qui s’exerçaient sur lui, de Gaulle refusa, contrairement aux Anglais, de donner les clés de la force nucléaire française aux Américains. Il justifia cette position en disant que le concept de la dissuasion nucléaire était basé sur une défense « tous azimuts » sans aucune exception. C’est cette position formelle qui a permis à la France d’occuper une place à part sur l’échiquier international en lui donnant une indépendance totale. C’est justement ce dont de Gaulle allait avoir besoin pour proposer, dans le Traité de l’Élysée signé en janvier 1963 par le chancelier Conrad Adenauer, à l ‘Allemagne la protection du bouclier nucléaire français. Il se trouvait alors en opposition frontale avec l’OTAN. La suite est connue, les députés allemands ont préféré la puissance militaire américaine.

La désindustrialisation

De Gaulle disparu, l’Angleterre entra dans l’Europe et fit pencher la balance vers le libéralisme débridé.

Crée en 1973, la « Commission Triatérale » est devenue un des relais majeurs de ce projet. Un article du Monde Diplomatique publié en novembre 2003 sous le titre « Pouvoirs opaques de la Trilatérale » est très explicite. Dans cette nouvelle organisation mondiale, destinée à affirmer la toute-puissance de la finance et des échanges commerciaux. Dans un cadre totalement déréglementé,  les grands perdants ne pouvaient être que les classes moyennes que le capitalisme industriel avait réussi à faire émerger dans les pays occidentaux. Les plus touchées par ces transferts industriels qui faisaient des pays émergents les nouveaux ateliers du monde – en raison de leurs coûts de fabrication  beaucoup plus faibles -, furent naturellement ces classes sociales. Peu enclines à la révolte, elles allaient se servir de leurs bulletins de vote pour manifester leur aversion et la crainte que leur inspirait ce système qui leur avait été imposé, souvent malgré elles.

Autant le capitalisme industrie était distributeur de richesses (Henry Ford construisait des voitures pour les vendre à ses ouvriers), autant le capitalisme financier est concentrateur de ces mêmes richesses dans un petit nombre des mains.

Le divorce et la montée du populisme.

Ce qui faisait la fortune des « élites » ruinait les classes plus « populaires » Les élites devinrent de moins en moins démocratiques et les peuples de plus en plus avides de souveraineté. Les élites mondialistes voulaient la fin des nations, alors que les peuples réclamaient leur protection. De partout, les partis populistes gagnèrent du terrain, élection après élection. En France, cela commença avec le traité destiné a promulguer une constitution européenne. Le score du référendum du 29 mai 2005 fut sans appel. Pourtant, la présence au second tour de l’élection présidentielle de 2002 de Jean Marie Le Pen aurait dû inciter la classe politique française gouvernante à y réfléchir. Sa réponse à l’époque a été de modifier la Constitution pour ne plus avoir à proposer de référendum. Pourtant, le peuple français croyait en l’avenir de l’Europe. Simplement, lorsqu’il pensait Europe, il pensait plutôt à la vision d’une Europe des nations et on se gardait bien de le détromper. Comme disait le cardinal de Retz : « on ne sort de l’ambiguïté qu’à son propre détriment » et il était plus confortable pour nos élites de conserver cette ambiguité. Mais la machine fédérale avançait. L’euro était en vigueur et, au delà des délocalisations d’usine, on vit arriver, autorisés par « l’espace Schengen » les premiers « travailleurs détachés » La crise financière de 2008 et son long cortège de mesures dites « d’austérité » ont suffi pour retirer à nos concitoyens les rares illusions qu’ils conservaient.

Ensuite, ce fut le Brexit, interminable affrontement entre une élite dirigeante acquise à la mondialisation et un peuple britannique qui, après l’avoir expérimenté, n’en voulait plus.

Le coup fatal à la mondialisation : Poutine, Trump et Xi-Jiping

Avec ces trois chefs d’État, est réapparu un système que les mondialistes croyaient avoir éradiqué, celui des intérêts nationaux.Poutine a, le premier, dit clairement qu’il défendrait les intérêts de la Russie et a agi dans ce sens. Trump ne se cache pas de son engouement pour la « doctrine de Monroe » et le retour à l’isolationisme américain. Quant à Xi Jimping, son discours de Davos de 2018 est on ne peut plus clair. En 2049, cent après la révolution communiste chinoise, la Chine sera la première puissance économique et militaire de la planète. On voit donc parfaitement ce qui a justifié le propos de Donald Trump cité au second paragraphe.

La riposte de Emmanuel Macron

Apparemment, notre président se refuse à enterrer la mondialisation. Son idée, qu’il est pratiquement le seul à défendre encore, est celle de l’intégration européenne. Dans son discours devant la dernière promotion de l’École de Guerre, il se félicite de la réduction de notre force de dissuasion nucléaire. Or, le principe élémentaire qui soutend la dissuasion est que, pour être efficace, elle se doive d’être dissuasive. Sa réduction semble donc plutôt contre-productive.

Ensuite, il envisage de s’associer avec d’autres pays européens pour élargir cette force de dissuasion.

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Le Charles de Gaulle et le sous-marin nucléaire Saphir en rade de Toulon en 2004

PATRICK GARDIN/ASSOCIATED PRESS

«Soyons clairs : si une négociation et un traité plus larges (sont) possibles, nous le souhaitons […]. Les Européens doivent être parties prenantes et signataires du prochain traité car il s’agit de notre sol»

Or, ce qu’oublie Emmanuel Macron, c’est qu’une telle décision, qui engage les intérêts vitaux de notre pays, (puisqu’il s’agit de notre défense nationale) ne peut-être décidée par lui seul. Elle concerne l’ensemble du peuple Français, dont le consentement ne peut-être obtenu sans recours à un référendum. Évidemment, il faudrait renégocier certains traités, mais on peut s’attendre, (contrairement au vote du Bundestag de juin 1963 sur le traité de Paris) que les Allemands soient tout à fait d’accord. Dans le climat social actuel, il est quasi-certain que le peuple français répondrait « non » à un tel référendum. Un passage « en force » risque également d’être périlleux et certaines voix se sont d’ores et déjà mobilisées contre ce projet. Notre président devrait pourtant savoir qu’une force dite « de dissuasion », ne peut se concevoir que dans le cadre de la défense d’une nation souveraine qui serait menacée par une puissance étrangère. L’Europe n’étant pas une nation, on ne voit pas qui pourrait menacer l’Europe en tant que telle. La souveraineté européenne n’existe pas, pas plus d’ailleurs que le peuple européen. Pourquoi vouloir à tout prix pousser les feux d’une mondialisation moribonde en allant à marche forcée vers une intégration européenne qui ne peut se faire aujourd’hui qu’à l’encontre de nos intérêts nationaux ?

Encore une fois, Emmanuel Macron devrait méditer  les deux phrases suivantes du général de Gaulle :

«  La seule réalité internationale, ce sont les nations » et « Il n’est pire déformation de l’esprit que de voir les choses non pas telles qu’elles sont mais telles que l’on voudrait qu’elles soient »


- Source : RI

Les recettes néolibérales pour écraser les peuples

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Les recettes néolibérales pour écraser les peuples

Par Nicolas Bonnal

Irak, Iran, Syrie… ubi solitudinem faciunt, pacem appellant – Le bilan mondial occidental résumé par Tacite au temps des bretons : Rafler, massacrer, saccager, c’est ce qu’ils appellent à tort asseoir leur pouvoir. Font-ils d’une terre un désert (ubi solitudinem faciunt) ? Ils diront qu’ils la pacifient (pacem appellant). Actuel, non ?

Raptores orbis, postquam cuncta vastantibus defuere terrae, et mare scrutantur: si locuples hostis est, avari; si pauper, ambitiosi: quos non Oriens, non Occidens, satiaverit. Soli omnium opes atque inopiam pari affectu concupiscunt. Auferre, trucidare, rapere, falsis nominibus imperium; atque, ubi solitudinem faciunt, pacem appellant.

Ces Romains, qui veulent tout, ne trouvent plus de terre à ruiner. Alors, c’est la mer qu’ils fouillent ! Riche, leur ennemi déchaîne leur cupidité, pauvre, il subit leur tyrannie. L’Orient, pas plus que l’Occident, n’a calmé leurs appétits. Ils sont les seuls au monde qui convoitent avec la même passion les terres d’abondance et d’indigence. 7. Rafler, massacrer, saccager, c’est ce qu’ils appellent à tort asseoir leur pouvoir. Font-ils d’une terre un désert ? Ils diront qu’ils la pacifient.

Agricola, XXX, discours du rebelle breton Calgacus.

Certains trouvent que le peuple réagit en France, je trouve moi qu’il réagit peu. C’est du congelé (frozen conflict), dixit la subtile Caitlin Johnstone, qui espérait encore l’an dernier une énième révolution 2.0. Une jacquerie n’est pas une révolution, pas même une rébellion, et elle renforce le pouvoir.

La gauche sociale a disparu, les minoritaires partis populistes sont infiltrés, sous contrôle, tous adorateurs de l’OTAN (voyez Manlio Dinucci). Depuis Thatcher, comme je l’ai montré dans ma Lettre ouverte à la vieille race blanche, le système autoritaire-libéral n’a fait que se renforcer (cruauté, incontestabilité, tartuferie). Et à chaque fois nous avons moins réagi. En France dans le pire des cas on pourrait remplacer l’actuel pion de cour par un autre pion – une pionne – et le tour serait joué. Le système occidental fonctionne, et tout le monde se soumet benoîtement  au modèle américain promu sous Reagan : la révolution conservatrice décrite par Sorman dans les années 80 a très bien marché. La fortune et la morale pour les oligarques ;  la pauvreté, la précarité et les insultes (« raciste, fasciste, inadapté, antisémite, violent, macho », etc.) pour le bon peuple. Monsieur LVMH est ainsi plus riche que dix millions de Français, et il leur fait la morale avec sa presse et ses rebelles défilés de mode.

Il y a dix ans, Lucien Cerise disait déjà :

« L’oligarchie occidentale ne craint qu’une chose : que les peuples qu’elle est en train de martyriser, à commencer par les Grecs et à suivre par nous, se tournent vers des pays non-occidentaux pour y trouver du soutien, d’abord moral et plus si affinités. L’oligarchie craint par-dessus tout que l’on puisse comparer les systèmes de société et que cela soit en défaveur du système dans lequel elle veut nous faire rester. Elle veut que nous aimions notre cage et nous inoculer le syndrome de Stockholm afin que nous aimions notre bourreau. À cette fin, les pays non-occidentaux sont décrits dans les médias comme  » autoritaires « , ou pires encore, des horribles dictatures, où les gens sont malheureux, persécutés, assassinés, les élections truquées, etc. »

arton24817-c4dc0.jpgLucien appelait à une saine réaction populaire, comme disait Pie X dans les prédictions qu’on lui prête. Mais tout cela a fait long feu et les sondages donnent Macron vainqueur aux prochaines élections… Ou Sarkozy. On continuera de tonner contre (Flaubert) puis on fera la queue devant Picard, McDonald,  ou chez le marchand d’or.

Dix ans après, Trump a trahi, la Russie est toujours aussi isolée et sanctionnée, et la Chine est considérée comme un tiers-monde incapable de gérer sa crise médicale. Syrie, Irak, Iran sont ruinés, comme le Venezuela. Les peuples de ces pays-cibles vivent un martyre économique, comme jadis les irakiens, et ceux qui cliquent en leur faveur ne font pas le moindre geste pour les soulager. Les USA peuvent imposer n’importe quoi à l’Europe, et tous les leaders humanitaires, les féminins et les efféminés, sont contents. On a eu une hausse dantesque du coût du logement, trois millions de migrants, des attentats irréels, Notre-Dame, une dizaine de guerres et on a voté pour qui l’on sait en France avec les conséquences mutilantes que l’on sait. Que fabriquent nos grands militants, nos grands révoltés ?

Cerise dressait un tableau déjà triste :

« Balayons devant notre porte et ne cessons jamais de rappeler la triste réalité de l’Occident atlantiste : dictature des banques, démocratie virtuelle, référendums annulés et scrutins trafiqués par diverses méthodes, fiction totale de la  » menace terroriste  » ici, mais soutien au terrorisme ailleurs, kidnappings de milliers d’innocents dans des prisons plus ou moins secrètes où on les torture en douce, épidémies de dépressions, de cancers, de divorces et d’enfants obèses ou hyperactifs, etc. Le multiculturalisme, qui permet de comparer les codes culturels, donc de les critiquer, est l’ennemi frontal de l’oligarchie occidentale car il ouvre sur autre chose que son modèle unique de société ; raison pour laquelle cette oligarchie essaie de remplacer le multiculturalisme et la pluralité des nations souveraines par un seul monde sans frontières où règnerait la monoculture occidentale libérale-libertaire. »

Depuis, on a touché le fond (voyez ce pape ou le déclin arabo-musulman…), et on a creusé encore. La crise de la dette mitonnée par l’élite achèvera de nous mettre au pas. On prendra sur ce qui reste de retraite ou d’épargne pour sauver ce système menacé qui ne fait que se renforcer….

Il faudrait comprendre enfin notre manque de réaction face aux réformes néolibérales et aux razzias écologiques de mille milliards et plus : la vérité simple c’est qu’il faut affamer le peuple, l’abrutir, et le rouer de coups, car dès qu’on lui donne à manger et à voter, il en veut plus. La logique néolibérale vise à de nouveau priver le peuple de tout, même d’air et d’eau (réservés aux riches), pour qu’il ne puisse plus râler.

517P4roYlcL._SX210_.jpgVilliers-de L’Isle-Adam le disait déjà dans ses Contes cruels : « le premier des bienfaits dont nous soyons, positivement, redevables à la Science, est d’avoir placé les choses simples essentielles et « naturelles » de la vie HORS DE LA PORTEE DES PAUVRES. »

Eau, air, logement, travail rétribué, mais aussi bagnole ou liberté : le peuple apprend partout à se passer de tout.

Tout cela était expliqué en 2010 dans ma Lettre ouverte (Editions de Maule, à télécharger gratuitement), bien avant l’actuel résident. Je rappelais que les derniers à résister étaient les « privilégiés », les fonctionnaires en l’occurrence, et ce depuis les années Juppé. Et qu’artisans et paysans avaient depuis longtemps été soumis et anéantis, eux qui résistaient encore du temps du maudit Poujade, quand on ne les avait pas encore ruinés et sidérés. La programmation d’une société désindustrialisée de termites et de serviteurs (servus, l’esclave), asexués arrive à bon terme sous Philippe-Juppé-bis. Reconnaissons que la réaction populaire est insignifiante comparée à celle de novembre 1995.

Le système n’a plus peur du peuple, c’est lui qui fait peur au peuple. Imposer une marionnette embrouillée dans ses fils comme Trump n’a fait que renforcer les maîtres. A coups de migrants, de transition énergétique, de sexophobie orwellienne et de manip’ médiatique en boucle, on vient à bout d’une résistance qui se limite à cliquer, elle qui a perdu tout  « pouvoir tellurique ». C’est Carl Schmitt qui parlait de cette résistance tellurique perdue partout. Voyez ce que deviennent les boliviens ou les vietnamiens qui vont bosser masqués (pollution…) pour Gap.

C’est le triomphe de la guerre hybride et des bombardements culturels qui justifie le reflux militaire américain. La guerre n’est plus nécessaire.

Deux citations de Nietzsche et Tocqueville pour expliquer ce qui se passe. Pourquoi le peuple résistait, pourquoi il ne résiste plus ; pourquoi il se résigne.                                                                                                                      

Nietzsche écrit dans Volonté de puissance (§ 154) :

« A l’arrière-plan de ces débordements, il y a l’explosion d’une répugnance concentrée contre les  » maîtres « , l’instinct profond du bonheur qu’il y aurait rien qu’à se sentir libéré d’une si longue oppression… (C’est généralement le symptôme que les couches inférieures ont été traitées avec trop d’humanité, qu’elles commencent déjà à sentir sur la langue le goût d’un bonheur qui leur est interdit… Ce n’est pas la faim qui engendre les révolutions, c’est le fait que chez le peuple l’appétit vient en mangeant…) »

715-luYXq9L._AC_SY445_.jpgCela c’est quelque chose que les leaders de Davos appliquent. Pas d’humanitarisme, privons le peuple et il se calmera. Il ne s’agit pas de donner plus, comme au cours des Trente Glorieuses, quand on avait une U.R.S.S. un peu plus convaincante que la Russie miniature de Poutine, des syndicats marxistes et des partis communistes. Car si on lui donne, il demandera plus. Faisons-lui peur avec la dette, le climat, le machisme, les attentats, il se soumettra. Trottinette/bicyclette, jeûne et smartphone au programme. Dix mètres carrés pour mille euros. Voyez le film Marie-Francine, de Valérie Lemercier, qui a très bien compris tout cela. Quatre ans plus tard le mouvement social se contente d’empuantir un peu plus Paris, avec sa grève des éboueurs qui ne débouche sur rien.

Tocqueville confirme Nietzsche, dans l’Ancien régime et la révolution (livre troisième, chapitre IV). Le peuple peut exploser dans certains cas, ce qui a contrario prouve qu’il ne réagissait pas dans d’autres :

« Nulle part, au contraire, l’ancien régime ne s’était mieux conservé que le long de la Loire, vers son embouchure, dans les marécages du Poitou et dans les landes de la Bretagne. C’est précisément là que s’alluma et se nourrit le feu de la guerre civile et qu’on résista le plus violemment et le plus longtemps à la Révolution ; de telle sorte qu’on dirait que les Français ont trouvé leur position d’autant plus insupportable qu’elle devenait meilleure. »

En ce moment c’est l’inverse ; les Français trouvent leur position d’autant plus supportable qu’elle devient pire. Ceux qui réagissent fuient sans demander leur compte. Les rares qui râlent dans la rue ne font reculer personne. C’est devenu la Bolivie… 

Tocqueville (Soljenitsyne confirmera avec le tsarisme) ajoute que le régime devenu trop suave et gentil se fait exterminer. A contrario encore celui qui devient dictatorial est encensé, surtout en France où le bourgeois, le catho comme le retraité, adore traditionnellement la poigne, le képi.

Tocqueville, toujours dans son trop oublié Ancien Régime rappelle que le régime de Louis XIV pouvait commettre n’importe quelle monstruosité alors que l’on ne passa rien au mari de Marie-Antoinette :

« Une telle vue étonne ; l’histoire est toute remplie de pareils spectacles. Ce n’est pas toujours en allant de mal en pis que l’on tombe en révolution. Il arrive le plus souvent qu’un peuple qui avait supporté sans se plaindre, et comme s’il ne les sentait pas, les lois les plus accablantes, les rejette violemment dès que le poids s’en allège. Le régime qu’une révolution détruit vaut presque toujours mieux que celui qui l’avait immédiatement précédé, et l’expérience apprend que le moment le plus dangereux pour un mauvais gouvernement est d’ordinaire celui où il commence à se réformer. Il n’y a qu’un grand génie qui puisse sauver un prince qui entreprend de soulager ses sujets après une oppression longue. Le Mal qu’on souffrait patiemment comme inévitable semble insupportable dès qu’on conçoit l’idée de s’y soustraire. Tout ce qu’on ôte alors des abus semble mieux découvrir ce qui en reste et en rend le sentiment plus cuisant : le mal est devenu moindre, il est vrai, mais la sensibilité est plus vive. La féodalité dans toute sa puissance n’avait pas inspiré aux Français autant de haine qu’au moment où elle allait disparaître. Les plus petits coups de l’arbitraire de Louis XVI paraissaient plus difficiles à supporter que tout le despotisme de Louis XIV. Le court emprisonnement de Beaumarchais produisit plus d’émotion dans Paris que les Dragonnades. »

Je ne sais plus quel libertarien disait que tout va bien quand l’Etat a peur de ses citoyens, et pas les citoyens de l’Etat ; nous n’y sommes pas, et la conséquence de tout cela n’est pas la révolte mais la soumission aux bras armés du néolibéralisme étatisé. Je ne répéterai pas la phrase de Céline sur les Français parfaitement enthousiastes à la veille de la plus grosse raclée de leur histoire. Je citerai la chanson de Boris Vian plutôt : « ils cassent le monde… Il en reste assez pour moi. »

NICOLAS BONNAL

Sources :

  • Nietzsche – Volonté de puissance
  • Tocqueville – L’Ancien régime et la révolution
  • Guy Sorman – La révolution conservatrice américaine

00:53 Publié dans Actualité | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : actualité, nicolas bonnal, néolibéralisme | |  del.icio.us | | Digg! Digg |  Facebook

L’écologie vue de droite

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L’écologie vue de droite

William de Vere

Quelles que soient ses associations contemporaines, la demeure naturelle de l’écologie politique se trouve à droite – pas la fausse droite associée au Parti Républicain en Amérique, bien sûr, dont le conservatisme n’est guère plus qu’un attachement désespéré et autodestructeur aux principes libéraux des Lumières, mais ce que Julius Evola appelait la Vraie Droite : l’éternelle dévotion pour l’ordre, la hiérarchie et la justice, impliquant une hostilité implacable envers les principes anarchiques et désintégrants de l’âge moderne.

Cependant, si un engagement pour l’intégrité écologique a longtemps été un pilier de la droite européenne, aux Etats-Unis cela est typiquement considéré comme une planche de la plateforme politique progressiste – une partie de sa proposition préemballée d’ouverture des frontières, de redistribution économique, et d’individualisme amoral. L’absence de tout large consensus de droite sur les questions environnementales dans ce pays est partiellement due au fait que notre principal parti conservateur, une coalition tendue de fondamentalistes protestants et d’oligarques néolibéraux, s’est révélé incapable (ou non-désireux) de réellement conserver la plupart des vestiges de la société traditionnelle. Cela inclut la pureté, la totalité, et l’intégrité de notre terre natale, qui constitue une partie significative de l’héritage national américain. Articuler une approche de droite de l’écologie tout en dénonçant sa subversion par la gauche politique reste donc une tâche nécessaire, due à ses connotations invariablement progressistes dans ce pays.

Mon argumentation pour la place essentielle de l’écologie dans tout programme de Restauration Américaine, ainsi que mes idées concernant la forme qu’elle devrait prendre, différera nettement des autres approches « conservatrices » bien connues. Elle n’est pas fondée simplement sur notre devoir de conserver sagement les ressources naturelles pour un futur usage humain, ni sur le pouvoir de restauration de la beauté naturelle et de la récréation, et elle n’est pas non plus un engagement patriotique pour préserver l’héritage de notre pays natal. Ceux-ci ont leur place, mais sont subordonnés au principe ultime de l’écologie bien comprise : que le monde naturel et ses lois sont une expression primordiale de l’ordre cosmique et méritent donc notre respect. Ressaisir l’attitude métaphysique et éthique du monde traditionnel, et restaurer une société en accord avec lui, demande donc une défense de l’ordre naturel contre ceux qui chercheraient à le subvertir.

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Pour commencer, il faut distinguer entre les variantes de droite et de gauche de l’écologie politique, qui diffèrent si grandement dans leurs fondements métaphysiques et leurs ramifications politiques qu’elles constituent deux approches complètement séparées de la préservation écologique.

L’écologie gauchiste ou progressiste est essentiellement une excroissance des idéaux des Lumières de liberté et d’égalitarisme, étendus au monde naturel. L’écologie progressiste se présente sous deux apparences. La plus connue est la version d’élite, technocratique et internationaliste associée aux Verts européens, au Parti Démocrate américain, et à une myriade d’ONG, d’agences internationales et de célébrités sur tout le globe. Lorsqu’elle est sincère (et pas simplement un moyen d’obtenir du pouvoir ou une croix pour y crucifier les Blancs mâles hostiles à l’écologie), cette variante d’écologie progressiste place ses espoirs dans l’énergie propre, les accords internationaux, le développement durable, et l’aide humanitaire comme moyens nécessaires pour inaugurer une société écologiquement saine. Sa cause symbolique est le réchauffement global, une faute qui est attribuée presque exclusivement au monde développé et qui peut être vaincue par des réglementations pénalisant ces nations pour leurs péchés historiques.

Cover-for-Direct-Action-Manual-655x1024.jpgL’autre version est plus ouvertement radicale dans ses prescriptions politiques, et pourrait être comprise comme le bras écologique de la Nouvelle Gauche. Elle trouve son armée parmi les adhérents des mouvements post-1980 « Earth First ! » et des Fronts de Libération de la Terre ou des Animaux, ainsi que parmi les anarchistes verts, les anarcho-primitivistes et les éco-féministes ; ses tactiques sont les manifestations de masse, la désobéissance civile, et les actes mineurs de sabotage qui sont parfois qualifiés d’« éco-terrorisme ». Les activistes souscrivant à ces vues tendent à rejeter complètement la civilisation, et travaillent à combattre ses nombreux maux – hiérarchie, racisme, patriarcat, spécisme, homophobie, transphobie, les classes, l’étatisme, le fascisme, privilège blanc, capitalisme industriel, et ainsi de suite – pour mettre fin à l’exploitation et à l’oppression de toute vie sur Terre. « Libération totale » est leur cri de ralliement. Bien que s’inspirant du primitivisme romantique et du Transcendantalisme de la Nouvelle-Angleterre, les fondements philosophiques de l’écologie gauchiste peuvent être retrouvés plus directement dans la contre-culture des années 60, la critique de la théorie des races, le féminisme, et les mouvements pour la paix et les droits civiques.

En dépit de leur engagement ostensible en faveur de la préservation naturelle, les deux variantes de l’écologie gauchiste (pour des raisons discutées plus loin) se résument finalement à une fixation sur la « justice environnementale » et l’humanitarisme facile, et sont dépourvues des traits d’une vision-du-monde écologique véritablement holistique et intégrale. Cependant, en dépit de la nature apparemment monolithique de l’environnementalisme américain, la compréhension progressiste de l’écologie n’est pas la seule à prendre racine dans ce pays.

Pour beaucoup de ses premiers prophètes, comme les poètes romantiques et les transcendantalistes de Nouvelle-Angleterre, ainsi que les philosophes de la nature du XIXe siècle et les défenseurs de la vie sauvage, le mysticisme de la nature était l’expression contemporaine d’une doctrine primordiale, une doctrine qui met l’accent sur l’ordre naturel et sur une dévotion à des forces qui transcendant l’humanité. Pour les hommes de l’Occident, cette ancienne doctrine et sa compréhension du cosmos sont exprimées, symboliquement et théoriquement, dans les religions indo-européennes traditionnelles et leurs ramifications philosophiques.

D’après certains défenseurs de cette tradition, si l’homme primordial – avec son accès direct à la réalité divine – a pu posséder cette sagesse dans son entièreté, quand l’humanité chuta de son état primordial, ces anciennes connaissances passèrent dans la mémoire lointaine. On en trouve un vague écho dans les doctrines religieuses traditionnelles du monde antique, comme les anciens paganismes européens, l’hindouisme védique, et le premier bouddhisme. Des traces philosophiques de cette ancienne sagesse peuvent aussi être discernées dans la métaphysique des pythagoriciens, des néoplatoniciens et des stoïciens.

Si certains courants du christianisme ont mis l’accent sur une conception strictement dualiste et antinaturelle du cosmos, ce n’est pas la seule vision ni même la vision prédominante. Les théologiens et les mystiques chrétiens plus ésotériques (très souvent des Européens influencés par leur panthéisme ou leur néoplatonisme ancestral) ont aussi regardé le monde naturel comme le déploiement d’une réalité divine, comme cela est exprimé dans la théologie du mysticisme franciscain et rhénan, ainsi que dans l’hermétisme chrétien de la Renaissance.

51y9ZYpQKDL.jpgFinalement, pour s’opposer au développement du libéralisme des Lumières, du socialisme, du matérialisme scientifique et de l’industrialisme dans l’époque moderne, le romantisme et l’idéalisme allemand offrirent une nouvelle expression artistique et philosophique de l’ancienne vision-du-monde holistique, qui trouva plus tard son expression la plus radicale dans l’anti-anthropocentrisme de Nietzsche, Heidegger, and Robinson Jeffers.

Bien sûr ce serait une exagération de prétendre que tous ces penseurs étaient des proto-écologistes ou même, d’ailleurs, préoccupés de la préservation de la nature sauvage. L’important est plutôt de comprendre qu’ils proposent tous, dans des langages et des concepts adaptés à des cultures et des époques différentes, une manière particulière d’approcher une vérité primordiale : que le cosmos est un tout organique interconnecté, un ordre naturel qui demande notre soumission.

L’orientation métaphysique fondamentale du monde traditionnel, et donc de la Vraie Droite, pourrait être techniquement décrite comme un « émanationnisme panenthéiste ». Dit simplement, il y a une réalité ultime, un fond silencieux qui contient et transcende tout ce qui est, qui est connu sous le nom de Dieu, Brahman, Absolu, Tao, Un, ou Etre. Tout ce qui existe est un déploiement ou une émanation de cette unité primordiale, des plus hautes déités et des anges jusqu’aux éléments matériels dans les boyaux de la Terre. S’il y a une hiérarchie de l’être, tout ce qui existe a une dignité dans la mesure où cela participe à ce déploiement divin. Tout dans le cosmos est une émanation de cette réalité transcendante, incluant toutes les choses sur la Terre et dans le Ciel : les animaux, les plantes, les montagnes, les fleuves et les mers, et les rythmes du temps, ainsi que les processus biologiques, chimiques et écosystémiques qui leur donnent ordre et être.

Cela inclut la race humaine, qui occupe une position unique dans la hiérarchie cosmique. Dans l’unité primordiale, le vêtement sans coutures qui reliait toutes les autres créatures connues dans leur allégeance sans faille à la loi naturelle, la conscience humaine naquit. Bien que partageant la forme matérielle des autres animaux et des ordres « inférieurs » de la création, l’humanité possède aussi la raison et la volonté propre, introduisant la multiplicité dans l’unité divine. Nous nous trouvons entre la Terre et le Ciel, en quelque sorte.

D’une part, cela nous rend capables de transcender les limitations du monde matériel et d’obtenir un aperçu dans les niveaux supérieurs de l’être, fonctionnant ainsi comme un aspect de « la nature réfléchissant sur elle-même ». De la même manière, unique parmi les autres émanations connues du Divin, nous sommes capables d’agir par notre volonté propre, violant la loi naturelle et nous plaçant nous-mêmes ainsi que notre intelligence comme des rivaux de l’Absolu. De plus, étant donné notre volonté propre, nos désirs artificiels, et nos moyens artificiels efficaces pour les obtenir, les humains ne peuvent pas en bonne conscience poursuivre les fins purement naturelles de la propagation, de l’hédonisme et de la survie à tout prix. Pour vraiment accomplir sa nature, pour se réintégrer dans cette unité primordiale dont il est actuellement aliéné, l’homme doit transcender ce qui est simplement humain et accorder sa volonté avec celle de l’Absolu. Certains humains sont capables d’approcher cet état : ce sont les aristocrates naturels, les arhats, les saints, les Übermenschen.

260px-Савитри_Деви.jpgBien sûr, étant donné notre nature défectueuse et déchue, la plupart des humains resteront attachés à leur volonté propre et à leurs intérêts matériels. Ainsi, alors que la religion de l’égalitarisme propose un anthropocentrisme fondamental par lequel tous les humains sont égaux simplement du fait qu’ils sont humains, dans la doctrine traditionnelle cela est nié par le fait de l’inégalité humaine. Comme l’a observé Savitri Devi, un beau lion a plus de valeur qu’un humain dégénéré, étant donné la plus grande conformité du lion vis-à-vis de l’ordre naturel et de l’Eidos divin. Pour cette raison, la métaphysique traditionnelle aussi bien qu’une écologie vue de droite requièrent le rejet de l’humanitarisme sentimental de la gauche moderne, d’après lequel chaque vie humaine (ou même chaque vie non-humaine, dans le cas des droits des animaux) a une valeur égale.

Une implication additionnelle de cette vision est que, les humains étant inégaux dans leur capacité à approcher le divin et à exercer le pouvoir d’une manière juste, les arrangements sociaux doivent assurer le règne du type supérieur. C’est l’essence de la structure sociale indo-européenne tripartite ; le système de castes du prêtre, du guerrier, et du marchand/artisan qui formait la base des sociétés traditionnelles. La régression des castes caractéristique du monde moderne, l’effondrement de toutes les structures sociales traditionnelles et la consécration du règne démocratique ne signifient pas vraiment que nous bénéficions d’un auto-gouvernement. Cela signifie simplement qu’au lieu d’être gouvernés par des valeurs cléricales (spirituelles) ou royales (nobles), nous sommes gouvernés au mieux par des valeurs bourgeoises (économiques) ou au pire plébéiennes (anarchiques). Les valeurs du bourgeois et du plébéien sont invariablement orientées vers le confort, le plaisir et la possession, plutôt que vers la transcendance ou l’honneur. L’organisation tripartite est donc nécessaire pour contrôler les impulsions les plus profanes et les plus destructives de l’humanité contre elle-même et contre le monde naturel.

Le corollaire de cette attitude est une suspicion envers les fondements philosophiques de la modernité tardive, avec son réductionnisme débridé, son atomisme, et sa vision purement instrumentale de l’homme. D’autres implications sociopolitiques s’ensuivent.

L’écologie de droite implique un rejet de l’économie marxiste-communiste et de l’économie néolibérale, la première pour son nivellement égalitaire et les deux pour leur réduction de l’homme à un être purement économique. En plus de sa toxicité pour l’esprit humain, cette tyrannie de l’économie conduit les humains à regarder le monde non comme le vêtement de Dieu mais comme une simple réserve, une collection de ressources pour la satisfaction des désirs humains.

Tout en défendant la technologie qui améliore vraiment la vie humaine et minimise l’impact humain sur les autres espèces, l’écologiste de droite rejette la technologie qui encourage la laideur, l’hédonisme, la faiblesse et la destruction irresponsable.

Tout en comprenant l’importance des villes comme centres de culture et de commerce, l’écologiste de droite préfère la cité fortifiée italienne, en harmonie avec l’environnement, avec une cathédrale en son centre, à la métropole moderniste inhumaine ou à la banlieue bétonnée.

Cette écologie implique aussi une opposition à la croissance excessive de la population humaine, qui menace la solitude spirituelle, la beauté de la vie sauvage, et l’espace nécessaire pour la continuation de la spéciation. La qualité et la quantité sont mutuellement exclusives.

Additionnellement, contrairement à l’accusation de « totalitarisme » souvent employée contre elle, la Vraie Droite croit que la différence et la variété sont un cadeau de Dieu. Au lieu de voir cela comme un impératif catégorique d’apporter autant de diversité que possible dans un endroit donné, la droite cherche à préserver les différences culturelles, ethniques et raciales. Elle doit donc chercher aussi à préserver les différents écosystèmes et espèces du monde, ainsi que la diversité humaine des races et des cultures, contre la destruction irresponsable par des acteurs humains (les catastrophes naturelles inévitables sont une autre question). A mesure que le monde de l’humanité sombre dans une plus grande corruption, le monde naturel demeure comme un reflet des valeurs supérieures éternelles, un tout unifié se déployant en accord avec l’ordre divin.

Une objection possible doit être discutée. Toutes les croyances indo-européennes, et en fait la plupart des doctrines traditionnelles sur le monde, postulent une fin inévitable à ce monde. Que cela prenne le nom d’Age de Fer, de Seconde Venue, d’Age du Loup, ou de Kali Yuga, la plupart enseignent que ce cycle cosmique doit finir pour faire place à un nouveau cycle. Cela implique généralement la destruction de la Terre et de tout ce qui s’y trouve. Comment cela peut-il être réconcilié avec une écologie de droite, qui postule le devoir de préserver ces vestiges de la nature vierge qui reflète le mieux l’ordre divin ? Quel est donc l’intérêt, si tout cela est destiné à être détruit de toute façon ?

Avant tout, ce scénario apocalyptique est aussi un dogme de la science moderne, inévitablement impliqué par sa théorie de l’évolution cosmique. Si ce n’est pas par la folie humaine, la vie sur Terre sera détruite par l’expansion du Soleil ou par le refroidissement de l’univers. La différence est que l’écologiste progressiste n’a aucune raison impérieuse et objective de préserver ce qui est pur et authentique dans la nature au-delà de son goût personnel ; aucune échappatoire, en fait, devant les griffes de la subjectivité complète et du nihilisme. C’est pourquoi l’écologie progressiste se résume typiquement à un souci pour la justice sociale, quand elle n’est pas simplement une préférence personnelle pour une belle mise en scène ou des opportunités de récréation en plein air.

A-3638849-1389612017-5305.jpeg.jpgPour l’écologiste de droite, cependant, la fin de toutes les choses humaines n’est pas un argument pour ne pas vivre avec honneur et combattre sans passion contre les forces de désintégration et de chaos. L’Homme contre le Temps peut, sur le long terme, être voué à échouer dans ses entreprises terrestres, mais cela ne diminue pas sa résolution. C’est parce qu’il agit avec le sens du détachement noble – le karma yoga de la Bhagavad Gita, le wou-wei de Lao-Tseu, ou l’Abgeschiedenheit de Maître Eckhart – par lequel l’action découle de la pureté de son être et de son rôle dans le cosmos plutôt que d’un calcul utilitaire ou d’un effort volontaire. Soutenir l’ordre naturel demande de défendre ses expressions les plus pures : le saint, l’innocent et le noble parmi l’humanité, ainsi que les arbres et les loups et les rochers qui étaient là avant nous, qui respectent dans une harmonie inconsciente l’ordre cosmique auquel l’homme peut seulement aspirer.

Dans son engagement à vivre en conformité avec l’ordre naturel et à le maintenir contre l’arrogance de l’homme moderne, l’écologiste de droite accepte le rôle de la violence détachée. La plupart de la rhétorique environnementaliste que l’on entend aujourd’hui est formulée dans le verbiage mou du gauchisme contemporain : droits, égalité, anti-oppression, « éthique du soin », etc. En plus de son fort penchant métaphysique, l’écologie de droite offre aussi une écologie plus virile, une croyance de fer qui dédaigne la technologisation et la surpopulation du monde parce que cela conduit à la diminution de toute vie ; qui respecte les lois de fer de la nature, du sang et du sacrifice, de l’ordre et de la hiérarchie ; et qui méprise l’hybris humain à cause de sa petitesse. C’est une écologie qui aime le loup, l’ours, le guerrier, ainsi que l’orage et le feu de forêt, pour le rôle qu’ils jouent dans le maintien de l’ordre naturel ; qui veut conserver de larges parties de la Terre sauvage et libre, qui ne peut pas supporter de la voir rationalisée, mécanisée et domestiquée. C’est une écologie qui méprise la mollesse, la facilité, le sentimentalisme, et la faiblesse.

L’écologiste de droite sait que « la vie en accord avec la nature » n’est pas une idylle rousseauiste ou un impératif néo-branché de « tout laisser aller », mais qui demande du stoïcisme, de la dureté, et la conformité envers un millier de lois dures pour la recherche de la force et de la beauté. C’est une religiosité virile, une ascèse de l’action plutôt qu’un simple salut personnel ou une extinction.

Vue sous cet angle, l’écologie est un trait nécessaire pour la restauration de la société traditionnelle. Par « traditionnelle » nous ne voulons pas parler des valeurs familiales de l’économie de marché, du fanatisme fondamentaliste bruyant que le terme implique dans l’Amérique du XXIe siècle, mais plutôt d’une attitude qui est fondée sur l’ordre divin et naturel, qui dicte que toutes les choses doivent être à leur place. Concernant l’homme et la nature, cela signifie que l’humanité doit reconnaître sa place dans l’ordre cosmique et son rôle de gardienne consciente du tout, plutôt que de se voir comme un seigneur tyrannique. Cela demande la sagesse et l’introspection nécessaires pour comprendre notre rôle dans le plan divin et pour bien accomplir nos devoirs. Cela demande de l’authenticité, de reconnaître le sol culturel et historique dont nous sommes sortis, et de préserver les traditions et la mémoire de nos ancêtres. Ce respect envers l’ordre cosmique demande de respecter sa manifestation dans les rochers, les arbres et le ciel, dont la beauté et le pouvoir servent continuellement à nous rappeler la sagesse transcendante de l’ensemble.

Une esquisse antérieure de cet essai a été publiée dans Social Matter Magazine.

Source: http://www.counter-currents.com

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