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samedi, 30 décembre 2017

Europe et Russie: ne pas mettre en danger les points communs

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Europe et Russie: ne pas mettre en danger les points communs

Dans le Brandebourg oriental, la conférence avec Gabriele Krone-Schmalz et Matthias Platzeck a suscité un vif intérêt

par Eva-Maria Föllmer-Müller

Ex: http://www.zeit-fragen.ch/fr

Le 25 novembre 2017, au château de Neuhardenberg à l’est de Berlin, la journaliste et écrivaine Gabriele Krone-Schmalz et l’ancien Ministre-président du Land de Brandebourg et actuel président du Forum germano-russe Matthias Platzeck (SPD) ont pris part à un débat public. Le modérateur de la conférence était Frank Mangelsdorf, rédacteur en chef de la «Märkische Oderzeitung». Le thème de la conférence était «Les relations entre l’Europe et la Russie».

Le texte d’introduction parlait d’une «relation faussée entre l’Europe et la Russie» et commentait: «Indépendamment de la qualité des relations du moment, les deux parties ne sont nullement indifférentes l’une à l’autre, et l’intérêt fondamental de vouloir coopérer ne peut être nié. Il y a donc suffisamment de raisons de rechercher des voies vers un nouveau rapprochement.»
Les participants à cette réunion étaient au nombre de 200 environ, la plupart d’entre eux venus de Berlin. En juin, trois heures à peine après l’annonce de la conférence, tous les billets avaient été écoulés. Malgré tout, quelques intéressés tentèrent leur chance à l’entrée. Et pourtant Neuhardenberg, ça n’est pas vraiment la porte à côté. Il faut compter au moins une heure et demie depuis Berlin vers l’est, et traverser en partie le Margraviat de Brandebourg, le paysage le plus aquatique d’Allemagne, avec ses belles allées bordées d’arbres presque jusqu’à la frontière polonaise.

Comprendre la Russie: la meilleure des positions

Les participants y ont trouvé leur compte, ce que l’on a pu mesurer aux applaudissements fournis. Il en a été ainsi dès l’ouverture, lorsque Gabriele Krone-Schmalz a critiqué l’utilisation négative de la notion de «Russlandversteher» [personnes faisant preuve de compréhension envers Moscou, ndt.], terme dont elle est elle-même également souvent affublée. Elle n’a jamais compris pourquoi le mot de «comprendre» pouvait être utilisé de façon aussi négative, car la compréhension est à la base de toute démarche sensée. Pour elle, il est évident que la connaissance et la compréhension doivent être à la base de tout jugement (et non la condamnation). Donc, le fait de «comprendre» Moscou, d’être un «expert» de la Russie, est la meilleure des positions qu’on peut avoir.

Relations culturelles et humaines millénaires

A la question du modérateur sur les évènements des 27 dernières années, depuis l’enthousiasme initial de l’Ouest pour la Perestroïka et la Glasnost de Gorbatchev, et l’évolution de nos rapports avec la Russie, Matthias Platzeck a apporté la réponse suivante: la recherche des causes est toujours en cours, mais ce qui s’est passé est plutôt effrayant. La Russie, cependant, est un pays avec lequel nous avons des relations culturelles, humaines et sociales millénaires. Avec aucun autre pays, notre histoire n’est aussi étroite, et cela avec tous les hauts et les bas qu’elle comporte. Reste inoubliable, un postulat élaboré dans les années 1989/90: en Occident, on est parti de l’idée que nous avions gagné la guerre froide. Francis Fukuyama a publié son livre sur «La fin de l’histoire» et proclamé la victoire définitive de la démocratie occidentale et du capitalisme. Il n’y aurait à l’avenir plus qu’une seule superpuissance. Il y avait pourtant aussi la Charte de Paris et son idée maîtresse: «A présent, nous vivrons tous ensemble et en paix.»
Bien sûr, la Russie était toujours là. Mais le pays était accablé, et l’Occident n’avait pas vraiment réagi comme il l’aurait fallu. Au contraire, le concept dominant était que nos valeurs, notre démocratie, notre système économique étaient les meilleurs. Il ne restait donc aux Russes qu’à devenir comme nous, s’ils désiraient un meilleur avenir pour eux. Jusqu’à présent, on s’interroge encore trop peu sur l’histoire, les traditions, la mentalité de ce peuple. Et Platzeck de préciser qu’il était convaincu que la Russie et les Russes chercheront leur propre voie et qu’ils la trouveront.

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«Diktats idéologiques»

Mais l’Occident a réagi une fois de plus avec la «diabolisation de la Russie» [«Feindbild Russland»] aux tentatives de ce pays de trouver sa propre voie. La «russophobie» ne date cependant pas d’hier, selon Gabriele Krone-Schmalz. En Occident, on a toujours prétendu que nous avions gagné la guerre froide. Cependant, en disant cela, la guerre froide n’est pas automatiquement terminée. Pour qu’elle soit vraiment finie, il faudrait que les deux parties se considèrent comme gagnantes. Mais nous avons tout mesuré à l’aune de notre propre monde: chez nous tout est mieux et nous faisions tout mieux.
Gabriele Krone-Schmalz parle d’expérience. Pendant la période des bouleversements, elle était à Moscou correspondante pour la Russie de l’ARD – la 1re chaîne de télévision allemande – et elle l’a constaté elle-même: tout le monde s’y est précipité pour expliquer qu’il fallait faire ceci, et puis cela, et encore cela. «Tous ces diktats idéologiques ont mis fin à beaucoup de bonnes initiatives, et le font encore aujourd’hui», dit-elle. La Russie a dû surmonter simultanément trois révolutions: premièrement, le passage de l’économie planifiée à l’économie de marché, deuxièmement, de la suprématie du parti communiste à un système orienté vers l’Etat de droit et troisièmement, de l’Union soviétique à l’Etat national. L’Ouest a montré peu de compréhension en la matière. Au contraire, il s’est produit une mise sous tutelle occidentale accrue.

Si nous avions considéré les choses sur un pied d’égalité …

Matthias Platzeck sait de quoi il parle, quand il décrit les effets délétères de l’ère Eltsine sur l’amour-propre des Russes. A l’époque, on lui expliquait: «Maintenant, nous ne sommes plus rien du tout. Nous n’avons plus aucune importance dans le monde.» Si aujourd’hui, «dans la Russie profonde», on utilise dans une discussion les notions «économie de marché», «démocratie» ou «privatisation», cela jette un «froid glacial» dans la salle parce que, pour beaucoup de Russes, cela reste associé à leur pire traumatisme du passé récent, c’est-à-dire les années 1991–1998, durant lesquelles 95% de la population ont presque tout perdu.
«Le fait que nous ayons si peu pris tout cela en considération et avions été si peu attentifs, signifie un manque d’intérêt, sinon nous aurions agi différemment sur de nombreux points, si nous avions pris tout cela plus au sérieux, si nous avions considéré les choses sur un pied d’égalité», a ajouté Platzeck.

Journalisme sérieux …

La plupart des grands médias occidentaux y ont joué un rôle très défavorable. Sous les applaudissements, Krone-Schmalz a attiré l’attention sur les divergences existant entre l’opinion publique et l’opinion propagée par les médias. Sur la question du modérateur de savoir si nous ne nous donnions pas assez de temps de réflexion et décrivions les choses uniquement en noir et blanc, Gabriele Krone-Schmalz, qui enseigne également le journalisme, a expliqué quel devait être aujourd’hui la contribution d’un journalisme sérieux. Même si aujourd’hui tout doit aller plus vite et que le monde est devenu plus complexe, il ne faut pas sacrifier le soin et la minutie, ne pas tomber dans la simplification divisant l’univers en bons et méchants.
A présent, de nombreux journalistes ont modifié leur image de soi et leur rôle en croyant devoir mettre leurs semblables sur la «bonne voie». «Je trouve cela déplorable.» En réalité, le journalisme a la tâche, «de raconter toute l’histoire, le mieux possible, et pas seulement le point de vue d’une partie. Il a l’obligation d’effectuer un changement de perspective, c’est-à-dire de se mettre à la place de ceux-là mêmes, dont il veut décrire la réalité de vie, afin de mieux la comprendre et la situer.» Quand, pour des raisons de manque de temps ou parce que tout est compliqué, on suit un schéma directeur [«mainstream»] en créant l’atmosphère que tout ce qui n’entre pas dans ce modèle doit être taxé d’extrémisme ou être rejeté, alors apparait une situation dans laquelle «une majorité de la population ne se retrouve plus dans cette presse».

… au lieu de reportages stéréotypés

Matthias Platzeck critique également les reportages stéréotypés. Il s’agit d’une situation dramatique, quand il n’y a pratiquement plus de différenciation possible dans des processus aussi sensibles que le travail pour la paix. Il y a d’énormes divergences entre ce qui préoccupe et ce que pensent le citoyen lambda et la «réalité» publiée par les médias et les politiques. «C’est une situation qui doit nous alarmer.» Et: «Les médias ne doivent pas éduquer, ils doivent informer sur la réalité.»

Informer sur la réalité avec respect et en gardant une certaine distance

A ce propos, Gabriele Krone-Schmalz s’est exprimé très clairement sur les récits concernant Donald Trump: «Ce que je pense de Trump n’a aucune importance. En tant que journaliste, je dois trouver et expliquer les raisons pour lesquelles il a été élu.» Il est inacceptable que je le fasse d’une «manière irrespectueuse, simplement parce que je ne peux pas supporter ce type». Il est tout aussi irresponsable d’expliquer l’élection de Trump par les activités «de quelques services et le piratage de quelques comptes de courrier électronique». Cela s’avoisine à «du colportage de rumeurs». Il faut informer sur la réalité, avec respect et en gardant une certaine distance. C’est ainsi qu’il faut lire les articles. Si l’on commence à criminaliser tout contact avec la Russie, cela ne contribuera en rien à l’amélioration des relations entre la Russie et les Etats-Unis, tout au contraire. Lors de sa campagne électorale, Trump a déclaré que de bonnes relations russo-américaines sont dans l’intérêt des Etats-Unis, «et là, cet homme a raison». Mais tout ce qu’il entreprend en ce sens joue en sa défaveur et génère des accusations contre lui «allant éventuellement même lui coûter son poste».

Aller sur place et entretenir des relations personnelles

Le modérateur a également interrogé Matthias Platzeck, qui a présidé le SPD pendant une année, sur les rapports entretenus par son parti avec la Russie. Réponse de Platzeck: «Ah, c’était une belle soirée … jusqu’à présent.» – La politique est un métier, il faut savoir ce qu’on fait, et c’est lourd à porter. Pour maintenir la paix sur notre continent, il ne suffit pas de lire des rapports, il faut aussi aller sur place, il faut entretenir des relations personnelles. Dans les CV des députés du Bundestag, on trouve de nombreux liens avec les Etats-Unis, l’Angleterre, la France, et plus souvent avec la Nouvelle-Zélande qu’avec la Russie.


Egon Bahr a toujours pris grand soin de ses canaux d’informations à Moscou. Lorsqu’une situation s’aggravait, il pouvait les appeler et obtenir des informations fiables basées sur une confiance mutuelle. Quand on ne connaît pas un pays, le danger d’une guerre accidentelle est d’autant plus grand. C’est un des aspects à prendre en compte, lorsqu’aujourd’hui on parle de l’«aliénation des peuples». 2017 a été l’année de l’échange de jeunes germano-russe: «Cette année n’a pas été prise en compte en Allemagne, c’est un signal d’alarme.»

Deux poids, deux mesures

Suite à la question de savoir si l’Occident utilise le système du «deux poids, deux mesures» quand il s’agit de la Russie, Gabriele Krone-Schmalz répond spontanément qu’elle traite de ce sujet dans tous ses livres. Chaque jour, on peut traiter de ce sujet, tant c’est fréquent. «C’est égal, qu’il s’agisse du dopage ou d’autres choses, le deux poids deux mesures est définitivement établi quand il s’agit de la Russie, ce qui est très blessant.» Et Matthias Platzeck complète qu’il s’en est lui-même souvent aperçu lors de débats publics en Russie. Quand il était question de violation du droit international de la part de la Russie, des Russes l’ont souvent questionné sur les décisions du Bundestag de 2003, lors de l’attaque – contraire au droit international – des Américains contre l’Irak, ayant coûté des centaines de milliers de vies humaines. «Pourquoi, à l’époque, aucun d’entre vous n’a-t-il réclamé de sanctions?»

Le manque d’entente mutuelle met en danger l’intérêt commun

A la fin de la réunion, le modérateur a soulevé la question concernant les points communs encore existants entre l’Allemagne et la Russie. Krone-Schmalz a répondu qu’il y avait, en réalité, de très nombreux points communs, entre autres l’intérêt commun du bien-être des sociétés de part et d’autre et d’une bonne entente mutuelle. Le plus grand danger est que, suit à la méfiance qui s’est installée, on en vienne à des affrontements violents. Le plus grand problème réside dans les nombreux malentendus qui pourraient mener, «à ce que les choses tournent mal, échappent à tout contrôle et qu’on ne puisse plus les corriger.»
Il faut donc instaurer en Allemagne une politique de l’histoire et de la mémoire, a commenté Matthias Platzeck, il n’y a aucun futur possible tant que cela n’aura pas été mutuellement éclairci. Nous devons nous demander pourquoi 27 millions de victimes des opérations militaires contre l’Union soviétique, la «pire guerre d’extermination que l’humanité ait jamais connue», n’ont pas, dans notre mémoire collective, la même valeur que d’autres victimes. Après cette guerre d’extermination, les peuples de l’Union soviétique nous ont proposé la réconciliation, et pour finir également leur amitié. «Nous n’avons pas traité ce cadeau avec la sensibilité qui s’imposait.» Grande approbation dans la salle.
Tout cela est perçu en Russie, et accroit encore l’aliénation. Il y a, certes, une sympathie marquée envers l’Europe et particulièrement envers l’Allemagne, mais la Russie commence peu à peu à s’en détacher. Cette aliénation croissante induit un grand danger: moins on en connait sur la culture, la façon de vivre, la langue de l’autre, plus on peut raconter les plus grandes absurdités, car il n’y a plus guère de connaissances réelles à disposition.

Quand ça ne marche pas «en haut» – l’importance des jumelages

Toutefois, à la Conférence Internationales des Jumelages ayant récemment eu lieu à Krasnodar en Russie et à laquelle ont participé les ministres allemands et russes des Affaires étrangères, l’ambiance était bien différente: «Nous ne laisserons pas détruire cela!» Et on a proclamé l’année des jumelages interrégionaux et intercommunaux. C’est là une initiative sensée à laquelle il faut maintenant insuffler la vie. Et sous les applaudissements nourris, ils ont ajouté: «Si cela ne marche pas «en haut», il faut qu’au moins cela fonctionne ‹en bas›».    •

GKS-Rver.jpgGabriele Krone-Schmalz

Gabriele Krone-Schmalz est née en 1949 à Lam en Basse-Bavière en 1949. Elle a étudié l’histoire de l’Europe orientale, les sciences politiques et la slavistique. Elle est diplômée en Histoire et Sciences politiques, journaliste indépendante et auteur. De 1987 à 1991, elle a été correspondante d’ARD pour la Russie à Moscou. Depuis 2000, elle est membre du comité directeur du Dialogue de Pétersbourg, depuis 2006, elle est membre du Conseil d’administration du Forum germano-russe. Depuis 2011, elle occupe une chaire de journalistique et de communication télévisuelle à la Business and Information Technology School (BiTS) d’Iserlohn. Comptant au nombre des experts majeurs de la Russie en Allemagne, elle passe régulièrement à la télévision. Elle a publié de nombreux livres, dont le dernier «Comprendre la Russie» (17. édition 2016) et «L’âge de glace» (2017).

Matthias Platzeck

Matthias Platzeck est né en 1953 à Potsdam. Il est ingénieur diplômé en cybernétique biomédicale. Il a fait partie des 144 députés des nouveaux Länder, envoyés au Bundestag allemand après la réunification. En 1990, il a été nommé, pour le parti Bündnis 90, ministre de l’Environnement, de la Protection de la nature et l’Aménagement du territoire du Land de Brandebourg. De 1991 à 1993, il a appartenu au Comité fédéral des porte-paroles du parti Bündnis 90, dont il refusa la fusion avec les Verts ouest-allemands en 1993.

platzeck-teaser-DW-Vermischtes-Potsdam-jpg.jpgEn 1994, il fut de nouveau nommé ministre, et en 1995 Matthias Platzeck a rejoint le SPD. En 1997, Matthias Platzeck fut félicité pour sa gestion des opérations lors des inondations catastrophiques de l’Oder en juillet et août. Depuis juin 1998, il appartient au Comité national du SPD au Brandebourg. En 2005, il a été nommé président du SPD. De 1998 à 2002, il a été maire de Potsdam. En 2002, il a été élu Ministre-président du Land de Brandebourg par le Parlement. En 2004 puis en 2009, il a chaque fois été réélu Ministre-président de Brandebourg. En 2013, il s’est retiré de son poste pour raisons de santé. Matthias Platzeck a reçu de nombreuses distinctions, entre autres la Croix fédérale du mérite de première classe de la République fédérale d’Allemagne (1998), l’Ordre «Pierre le Grand» de l’Académie russe pour les questions de sécurité, de défense et du système juridique (2005), la Grande Croix fédérale du mérite avec étoile et bandoulière de la République fédérale d’Allemagne (2011).


Le 19 février 2017 à Dresde, Matthias Platzeck a prononcé une allocution fondamentale très remarquée sur les rapports entre l’Europe et la Russie. On peut retrouver et relire ce discours sur: www.deutsch-russisches-forum.de/portal/wp-content/uploads...

Etats-Unis, OTAN et UE – une alliance de guerre commune

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Etats-Unis, OTAN et UE – une alliance de guerre commune

par Willy Wimmer, ancien secrétaire d’Etat au Ministère fédéral allemand de la Défense

Ex: http://www.zeit-fragen.ch/fr

Durant la Guerre froide, il n’y avait aucun problème à expliquer l’importance de l’OTAN. Le Soviet Military Power, édité par le Pentagone et garni d’images et de constatations impressionnantes, nous fournissait une importante argumentation. Du moins, c’était le cas pour les partenaires de l’alliance en Europe de l’Ouest. On n’a réalisé que beaucoup plus tard qu’il y avait quelque chose de louche là-dedans, ceci en observant le comportement de l’époque et d’aujourd’hui des partenaires nord-européens de l’OTAN. En ce temps-là, il n’y avait aucune prise de position de l’Alliance sans que Danois et Norvégiens exprimassent très fort leurs opinions personnelles. La menace remarquée par l’Alliance, relative au Pacte de Varsovie, était généralement vue différemment et d’une façon moins grave à Copenhague ou/et à Oslo. Pourtant, les armées de blindés étaient véritablement face à face. Depuis l’apparition du Danois Rasmussen et du Norvégien Stoltenberg, nous devons constater en Europe centrale un changement complet des mentalités, soit une mutation en va-t’en-guerre suprêmes sur ordre de l’OTAN. Comment doit-on s’expliquer cela, notamment au regard du passé?

Etats-Unis en 1988: l’armée rouge en Europe centrale a un caractère purement défensif

Il faudra y réfléchir, quand au cours de la semaine de Saint Nicolas de l’année 2017 le contrat du belliciste Stoltenberg auprès de l’OTAN sera prolongé de deux ans. Mais ce n’est pas tout. Encore en 1988, le gouvernement américain déclara que même la présence massive du Pacte de Varsovie et notamment de l’armée rouge en Europe centrale avait un caractère purement défensif. Il s’agissait de «protéger la petite mère Russie» comme conséquence des expériences faites avec Napoléon et Hitler. Malgré tout ce qui avait compté au cours des décennies précédentes comme la «bible de l’OTAN», les partenaires de Washington niaient toute intention agressive envers le Pacte de Varsovie dominé par Moscou.

Politique américaine actuelle: un mur de séparation doit à nouveau diviser l’Europe

Et aujourd’hui? Les archives de Washington montrent clairement à quel point l’Occident, uni par la force au sein de l’OTAN, a rompu sans pitié toutes les promesses sur la non-extension de l’OTAN. Pire encore, comme le montre le réarmement par les Américains en Europe centrale et orientale soutenu par nous tous. C’est la politique déclarée des Etats-Unis de séparer à nouveau l’Europe par un mur allant de la mer Baltique à la mer Noire. S’il n’est pas encore possible d’éliminer la Russie, elle doit du moins être exclue du bon voisinage. Mais il faut prendre en compte encore deux autres éléments. Dans des Etats comme l’Ukraine, les démons du passé nazi sont revitalisés à l’aide de l’OTAN et de l’UE. Le regard non seulement à «droite», mais «vers l’Est». En Ukraine et selon Spiegel online aussi en Hongrie avec des liens dans d’autre camps. Des liens évidemment peu avouables qu’on ne peut ni imaginer ni croire …

Le bellicisme de l’Occident …

Si le gouvernement des Etats-Unis avait attribué, à notre plus grande surprise, au Pacte de Varsovie en pleine guerre froide un caractère purement défensif, on ne peut certes pas dire la même chose de l’OTAN actuelle à la frontière occidentale de la Russie. Le bellicisme de l’Occident est trop palpable depuis la guerre d’agression contre la Yougoslavie. Le caractère exceptionnel des Etats-Unis s’est distingué, depuis la fin de la guerre froide, uniquement par son abstention de tout engagement pour la paix et l’entente. Aux yeux de Washington, le monde représentait uniquement les conditions-cadres pour sa propre industrie d’armement, comme le démontre de manière remarquable le rejet de toute engagement pour la paix en Europe et en Asie du Nord-Est.

… et le rôle de l’UE

Et qu’en est-il de l’Europe de l’Ouest transformée, sous le joug de l’Union européenne, en une machine de destruction d’Etats? Aujourd’hui, l’adhésion à cette UE ne signifie plus la protection durable des valeurs fondamentales. Il est bien possible qu’un pays ne soit un jour plus en mesure de se gérer lui-même, de protéger son territoire national, son autorité étatique et sa population. Pour garantir cela, les peuples se sont déclarés d’accord d’accéder à l’Union européenne d’aujourd’hui et ont même salué ce pas avec joie.
Nous devons cependant constater qu’aujourd’hui ce consentement est utilisé pour créer autre chose. Quiconque se réfère aux éléments constitutionnels de cette Union européenne, est marginalisé sans pitié par les dirigeants et leurs troupes de choc de la presse, puis, au mieux, méchamment dénigré en tant que membre de l’extrême droite ou des nazis. Les frontières ne sont plus gardées et quiconque se permet d’émettre une critique au sein du Bundestag se fait injurier et ridiculiser. L’autorité étatique se manifeste quand des personnes âgées sont mises à l’amende à Düsseldorf lorsqu’ils s’asseyent sur un banc d’arrêt de bus, ou lorsqu’une ancienne nation modèle de l’industrialisation n’est plus capable de terminer la construction d’un aéroport, ou lorsque la «Deutsche Bahn» échoue à placer des trains opérationnels sur les rails. Pendant ce temps, les frontières allemandes sont libres d’accès. Des concitoyens turcs démontrent, comment on peut pousser à l’extrême la lutte contre son ancien pays d’origine, grâce au fait que la citoyenneté allemande est octroyée trop facilement. Le peuple, auquel ont été consacrées des lettres dorées sur le Reichstag, n’est plus que témoin de la transformation de son pays en un Etat multiethnique.

Un mort-né européen: l’union militaire

La semaine passée, un mort-né supplémentaire, sous forme d’une union militaire, a été baptisé. Est-ce que c’est ainsi que nous voulons contribuer à la paix dans le monde? L’ancienne Union d’Europe occidentale était en fait un excellent exemple de comment réaliser cela. Tout le monde s’était mis d’accord pour une défense légitimée uniquement par la Charte des Nations Unies. C’était pour la défense, non pas pour la projection de pouvoir global, afin d’être à temps prêts à participer à la prochaine guerre américaine dans le monde avec une alliance de guerre européenne.
Notre choix est manifestement de pouvoir choisir entre les intérêts anglo-saxons et français pour lesquels nos soldats sont envoyés au combat. Le Proche- et le Moyen-Orient pour les Anglo-Saxons, l’Afrique pour le «shooting star» français, récemment décoré à Aix-la-Chapelle? Un engagement clair pour la défense de l’Europe de l’UE devrait remplir au moins une condition: on devrait toujours se préoccuper de la situation, dans laquelle on se trouve et faire des déclarations claires sur comment le monde devrait se présenter. Suite à cela, on pourrait définir le montant que chaque pays aurait à verser pour la défense commune. Mais aucun des chefs d’Etats et aucun des gouvernements dans cette UE agressive ne veut cela. On préfère développer des projets de pouvoir global faisant grimper les budgets militaires. En tant que citoyens, nous ne pouvons pas même choisir, si notre argent est utilisé pour les victimes des guerres déclenchées par nous-mêmes ou pour les guerres elles-mêmes. Dans tous les cas, l’argent a disparu et nous sommes forcés par nos gouvernements de financer notre assurance vieillesse nous-mêmes. Même la question du déclenchement d’une guerre ou non, n’est plus décidée par le peuple souverain. L’UE nomme des commandants militaires créant des zones de tension et de guerres en outrepassant les Parlements et sans respecter les frontières des Etats, soumis au bon vouloir des Anglo-Saxons ou des Français laissant les blindés aller et venir.

L’éclatement est préprogrammé

Ils ont bien existé, ces excellents fonctionnaires ministériels allemands. Un exemple en était le dirigeant ministériel Hans Ambos qui était mandataire du système pour les avions de combat «Tornado». C’est à lui que nous devons de savoir que, pour la dernière augmentation de 5% de la puissance de combat, il aurait fallu débourser 100% du prix d’achat de ces avions, ce qui aurait représenté l’éclatement du budget fédéral. Avec une UE ne reconnaissant et n’acceptant plus les citoyens comme le souverain et le garant de la paix, l’éclatement est préprogrammé.    •
(Traduction Horizons et débats)

vendredi, 29 décembre 2017

Relations internationales: la fin des dogmes!

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Relations internationales: la fin des dogmes!

par Guillaume Berlat

Ex: http://www.zejournal.mobi

 
Auteur : Guillaume Berlat | Editeur : Walt | Mardi, 19 Déc. 2017 - 14h46

« La pensée ne doit jamais se soumettre, ni à un dogme, ni à un parti, ni à une passion, ni à un intérêt, ni à une idée préconçue, ni à quoi que ce soit, si ce n’est aux faits eux-mêmes, parce que, pour elle, se soumettre, ce serait cesser d’être » (Henri Poincaré). Mais qu’est-ce au juste que le dogme ? « Point de doctrine établi ou regardé comme une vérité fondamentale, incontestable (dans une religion, une école philosophique) ». Telle est la définition qu’en donne le petit Robert 1 ! Aujourd’hui, le champ des relations internationales est soumis par certains esprits critiques à un questionnement sans précédent – depuis 1989, la chute du mur de Berlin, l’effondrement de l’URSS et l’avènement de l’hyperpuissance américaine (Hubert Védrine), le retour en force de la Russie au Moyen-Orient – après avoir vécu sous le règne incontesté de multiples dogmes venus, le plus souvent, d’outre-Atlantique. Qui n’a pas entendu parler de celui de « la fin de l’histoire » pensée et vulgarisée par le grand expert en prévision, Francis Fukuyama ?

Horresco referens, les dogmes font désormais l’objet d’attaques anti-dogmes – telles celles des hackers informatiques -, par des hérétiques, des déviants qui contaminent par leurs mauvaises pensées les peuples et dont le nombre ne cesse de croitre de façon exponentielle. Que constate-t-on en effet aujourd’hui ? Après le temps des certitudes assénées et des vérités révélées vient celui des interrogations légitimes et des doutes sérieux sur l’intangibilité des dogmes. Vérité d’un jour n’est pas celle de toujours comme dit l’adage. Certaines vérités imposées ad nauseam aux citoyens par les médias « mainstream », au nom d’une fausse transparence, n’auraient-elles été que de grosses contre-vérités, de vulgaires mensonges, de mauvaises fables, de minables bobards ? Heureusement, les médias alternatifs jouent parfois leur rôle de passeurs d’idées, d’éclaireurs de l’obscurantisme, contribuant, avec le temps, le courage, la volonté à démystifier les supercheries de nos dirigeants, nos chercheurs idéologues et autres usurpateurs de haut vol.

Même si la liste est loin d’être exhaustive, cinq exemples récents (libre-échange et mondialisation ; hyperpuissance américaine ; effacement russe ; pérennité de l’Union européenne ; omnipotence de l’OTAN) éclairent notre propos. Rien ne vaut la confrontation de la théorie à la pratique.

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LE DOGME DU LIBRE-ÉCHANGE ET DE LA MONDIALISATION (1)

Que n’a-t-on entendu depuis la chute du mur de Berlin de la part des grands ayatollahs du libéralisme nous assénant le primat incontesté et incontestable du libre-échange, de la mondialisation et son corollaire, la fin des États nations avec l’ouverture des frontières. En dernière analyse, ces augures nous promettent la paix perpétuelle à l’instar de l’ouvrage d’Emmanuel Kant qu’ils n’ont vraisemblablement jamais lu. Leur projet de Grand Moyen-Orient immortalisé par George W. Bush doit être le premier point d’application de leur dada dans le monde du XXIe siècle. Il doit conduire à une occidentalisation/américanisation de la planète que les peuples accueilleront tel un don du ciel (2). A tel point qu’ils en redemanderont, supplieront de se vautrer dans la servitude volontaire pour l’éternité. Tel est le nouveau rêve américain relayé urbi et orbi par les amis fidèles, disons les « idiots utiles » de l’administration américaine et de ses « think tanks ». Un remake du meilleur des mondes grâce au « soft power » à l’américaine, voire parfois avec l’aide du « hard power » pour les récalcitrants ! La carotte et surtout le bâton.

Or, quelle est l’une des plus importantes conclusions du sommet du G20 de Hangzhou (4-5 septembre 2016), premier sommet du genre sous présidence chinoise ? Les dirigeants constatent la défiance croissante des peuples à l’égard du libre-échange, de la mondialisation. Ils relèvent, avec objectivité, que ce dogme n’a plus les faveurs de ses géniteurs si l’on en croit les positions tranchées prises sur le sujet par les deux candidats à l’élection présidentielle américaine de novembre 2016. Ils observent également que les négociations des traités de libre-échange entre les États-Unis et l’Union européenne (TAFTA) ; entre les États-Unis et l’Asie (TPP) sont dans l’impasse, si ce n’est menacés par Donald Trump. Enfin, « en dépit des promesses répétées du G20, le nombre des restrictions affectant le commerce et les services a continué à augmenter » (communiqué final) (3). Mieux encore, lors du sommet du G20 au niveau des ministres des Finances de Baden-Baden (17-18 mars 2017), le premier de la présidence de Donald Trump, la délégation américaine s’oppose à toute mention de la défense du libre-échange, de l’interdiction du protectionnisme et des résultats de la COP21 sur le climat (4). On sait ce qu’il en est advenu depuis. Elle jette les évangiles dans la poubelle de l’Histoire. Rien ne va plus dans le monde idéal qui nous avait été promis, juré, craché. Il ne s’agissait que d’un remake du Veau d’or. Y compris à l’OMC (5).

La pilule est difficile à digérer, certes. Mais, pas le moindre acte de contrition de la part des prêtres du libre-échange et du mondialisme ! (6) Ils sont aux abonnés absents.

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LE DOGME DE L’HYPERPUISSANCE AMÉRICAINE

Que n’a-t-on entendu après la chute de l’empire du mal ? Le monde passerait d’une structure bipolaire à une nouvelle unipolaire marquée par le règne sans partage de l’hyperpuissance américaine. Une sorte de gendarme du monde allant éteindre les feux aux quatre coins du monde, y compris sans l’autorisation du Dieu Conseil de sécurité de l’ONU. Tel Moïse et les Tables de la Loi, l’Amérique s’impose comme une sorte de législateur universel imposant ses normes, ses idées, sa langue, sa cuisine, son mode de vie, son manque d’humour et ses mensonges (sur la présence d’armes de destruction massive en Irak que personne n’a du reste jamais trouvées)… à tout un chacun. Le multilatéralisme se réduit comme peau de chagrin sous les coups de boutoir de l’unilatéralisme américain. A quoi bon entretenir à grands frais le machin qui n’est qu’un vulgaire arbre à palabres inutile ? A quoi bon penser, Washington s’en charge à votre place et gratuitement ?

Or, que constate-t-on aujourd’hui ? (7) La superbe n’est plus de mise tant la réalité douche l’hubris américain. Sur le plan économique, la Chine tient la dragée haute aux États-Unis endettés. Sur le plan technique, certains émergents monopolisent le marché du numérique et de la connectique en dépit de la puissance de la « Silicon Valley ». Sur le plan géopolitique, le Moyen-Orient, qui était la chasse gardée et exclusive de l’Amérique, voit quelques braconniers (russes) opérer au vu et au su de tout le monde, voir défier ouvertement l’Oncle Sam en débauchant certains de ses alliés les plus fidèles et les plus historiques. L’Amérique, en pleine campagne électorale, se montre affaiblie face à un quarteron de dirigeants autoritaires lors du G20 de Hanghzou (Chine) qui jettent quelques grains de sable dans la machine yankee (8). La situation en Irak, en Syrie semble lui échapper pour employer un euphémisme très diplomatique (9). L’allié historique turc rue dans les brancards, faisant ami-ami avec Moscou qui fait la loi sur le théâtre d’opérations syrien, y compris en tançant Israël.

La remise en cause du dogme par les croyants est toujours, à plus ou moins long terme, annonciatrice de réformes, voire de schismes. Elle a aussi pour corollaire la croissance du nombre des agnostiques déçus par les manquements à la parole du Dieu Amérique. Que dire de la semaine durant laquelle les Chinois refusent de dérouler le tapis rouge, à sa descente d’avion, à Barack Obama (en fin de second mandat présidentiel). En outre, il se fait traiter par le président philippin de « fils de pute » (en tagalog) ?

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LE DOGME DE L’EFFACEMENT RUSSE (10)

Que n’a-t-on entendu en boucle après la transformation de l’URSS en Fédération de Russie sur la sortie de l’Histoire, de la marginalisation économique, politique, géopolitique, culturelle, sécuritaire du gros ours rouge ? Le temps du duopole américano-soviétique est définitivement révolu. Il appartient désormais à une histoire ancienne, celle du XXe siècle. Pire encore, la chute vertigineuse du cours des matières premières de ces dernières années aura à l’évidence raison des velléités de Vladimir Poutine de jouer les empêcheurs de tourner en rond, voire de se prendre pour un nouveau Tsar en annexant la Crimée. Elle le mettra à genoux et le conduira à faire amende honorable la corde au cou tels les Bourgeois de Calais immortalisés par Auguste Rodin. La slavophobie, la russophobie courent partout sur les plateaux de télévision. Personne n’y trouve à redire sauf quelques hurluberlus ou originaux qui croient à l’avenir des nations.

Or, qu’en est-il aujourd’hui ? Prenons deux exemples emblématiques pour mesurer le chemin parcouru depuis le début des « révolutions arabes » (11). Hier, les Russes étaient traités en parias, en pestiférés, surtout au Proche et au Moyen-Orient. Aujourd’hui, ils ont droit aux égards américains (12). S’agissant du conflit syrien, les choses sérieuses ne se traitent plus dans les conférences des « affinitaires » et autres farfeluteries imaginées dans les usines à penser américaines (13). Désormais, c’est Moscou qui mène le branle militairement (en faisant le ménage sur le terrain) et diplomatiquement (en organisant une rencontre à Moscou et Syriens et Turcs au nez et à la barbe des Américains) (14). Pour ce qui est du conflit israélo-palestinien, Moscou tente une médiation entre les deux adversaires en les invitant à Moscou pour discuter directement entre eux alors (15) que Washington a jeté l’éponge il y a belle lurette et que Paris ne pèse plus rien, y compris avec sa conférence internationale médiatique, à Paris au début 2017. La Russie dispose de plus d’atouts de médiateur que l’Amérique de Donald Trump surtout après sa décision de transfert de son ambassade à Jérusalem.

L’écriture et la lecture des Évangiles se fait de moins en moins à Washington et de plus en plus à Moscou par une curieuse ironie de l’Histoire, au grand désespoir des « ludions médiatiques » anglo-saxons (16). « Les mouches ont changé d’âne ».

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LE DOGME DE LA PÉRÉNNITÉ DE L’UNION EUROPÉENNE (17)

Que n’a-t-on entendu au cours des dernières décennies ? La liste de ces vérités incontestables est impressionnante. C’est grâce à la construction européenne que nous vivons en paix depuis 1945. C’est grâce au marché commun, puis à l’Union européenne que le niveau de vie des Européens connaît une croissance permanente et que le chômage recule. C’est grâce à la politique européenne de sécurité et de défense que les 28 comptent dans le concert des nations et que la sécurité, la paix, la concorde règnent dans le monde. C’est grâce à un puissant service européen d’action extérieure (SEAE) que l’Europe est un acteur incontournable dans le concert des nations. C’est grâce à un euro fort que l’Europe s’impose dans le monde économique. C’est grâce à Schengen et à la liberté de circulation que ce traité organise que nous sommes protégés d’incursions extérieures. C’est grâce à une commission indépendante que l’intérêt général européen prévaut sur l’intérêt égoïste des nations (18). En un mot, « l’eurobéatitude court partout et transforme toutes les salles de presse en sacristies de la nouvelle religion » (19).

Or qu’en est-il aujourd’hui, plus particulièrement après le vote du peuple sur le « Brexit » ? Les certitudes d’hier se transforment aujourd’hui en incertitudes, en interrogations sur les mantras de la technostructure bruxelloise relayés par l’élite parisienne. La guerre est en Ukraine, le terrorisme frappe au cœur de l’Europe, la croissance est atone, le chômage augmente, la PESD est une coquille vide (20), l’Europe est spectatrice du monde, l’euro fort est critiqué par les exportateurs, Schengen est vilipendé et remis en cause par certains États membres dans le contexte de la crise migratoire (21). Pire encore, les peuples, que l’on avait voulu ignorer et mettre au pas en contournant l’expression de leur malaise (Cf. l’opération inqualifiable de Nicolas Sarkozy sur traité constitutionnel), se rebellent dans les urnes. Certains vont même jusqu’à reprendre les propos de Margaret Thatcher : « les référendums sont les armes des dictateurs et des démagogues ». A ce rythme, il faudra dissoudre les peuples. La béance actuelle donne le vertige (22). L’Europe a été bâtie à l’envers. C’est cela qu’il faut changer comme le souligne justement Hubert Védrine.

Les croyants sont de moins en moins nombreux aux offices. Heureusement, les grands prêtres (chefs d’État et de gouvernement des 27/28) se retrouvent régulièrement à Bruxelles pour d’inutiles grands-messes. Mais la foi n’y est plus. Seule reste une liturgie désuète pour tenter de sauver les apparences ! L’hymne à la joie n’a pas les mêmes accents lyriques lors des cérémonies du soixantième anniversaire du traité de Rome (25 mars 2017) qui coïncident avec le lancement du « Brexit ». Aujourd’hui, et plus encore demain, il faut (faudra) sauver le soldat Europe (23). Dans tous les cas, le statu quo n’est plus tenable

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LE DOGME DE L’OMNIPOTENCE DE L’OTAN (24)

Que n’a-t-on entendu après l’effondrement de l’URSS à Evere (siège de l’OTAN situé près de l’aéroport de Bruxelles-Zaventem), temple de l’atlantisme, d’une liturgie désuète ? Alors que certains agnostiques (la France) caressent le projet fou de démonter « l’Église » avec la dissolution du Pacte de Varsovie, la mise au point américaine la plus solennelle tombe telle une fatwa. Il n’en est pas question. Au contraire, l’OTAN va s’élargir aux anciens ennemis (la Russie exceptée), oublier le hors-zone en se mêlant de tout et de rien (sécurité, économie, écologie, droits de l’homme…) aux quatre coins de la planète. L’ambassadeur des États-Unis auprès de l’OTAN est chargé, par le Dieu Amérique, de réciter la nouvelle religion atlantiste et d’encourager les fidèles à psalmodier sur les nouveaux textes sacrés. Mais, il faut aussi aller remettre de l’ordre manu militari en ex-Yougoslavie, et, plus tard, après les attentats du 11 septembre 2001, en Afghanistan.

Or, qu’en est-il aujourd’hui ? Y compris, parmi les croyants les plus inconditionnels, les aventures militaires américaines – parfois maquillées sous le logo de l’OTAN – sont de plus en plus remises en cause, pire elles agacent. Les batailles gagnées haut la main ne se finissent-elles pas par des débandades peu glorieuses (Irak, Afghanistan, Libye…) que les peuples désavouent majoritairement, découvrant les mensonges sur les prétendues armes de destruction massive en Irak ? Certains voient d’un mauvais œil cette nouvelle guerre froide développée par l’OTAN avec la Russie (déploiement de défenses anti-missiles en Pologne et en Roumanie, de troupes dans les pays baltes, langage belliqueux des secrétaires généraux de l’Alliance). Washington n’inventerait-il pas un nouvel ennemi (grosse ficelle américaine) pour justifier sa présence sur le continent européen ? Manifestement, la défiance éclairée fait place à la confiance aveugle. Cerise sur le gâteau, Donald Trump qualifie le « NATO » d’ « obsolète », allant même jusqu’à accuser les alliés (Allemagne en tête) de ne pas contribuer suffisamment à leur défense commune. Le secrétaire d’État américain, Rex Tillerson snobe la réunion des 5 et 6 avril 2017 à Bruxelles, nouvel acte de défiance à l’égard de l’Alliance atlantique.

Force est de constater que le dogme atlantiste de l’Amérique – hormis chez ses fidèles relais néo-conservateurs européens – ne fait plus guère recette. Pire encore, les évangiles otaniens sont contestés après avoir longtemps été loués et célébrés lors des sommets de l’Alliance au cours desquels la liturgie servait de bible. Horresco referens ! Le temps est à l’hérésie venue d’Outre-Atlantique ! Qui l’eut cru, il y a quelques années encore ?

« L’évidence détruit le doute » (25). Rien ne pire qu’une fausse évidence, puisqu’elle a tout d’une vraie. Montrer sans démontrer, c’est le mensonge dans lequel nous piège cette frénésie de dogmes venue d’Outre-Atlantique, d’Outre-Tombe, dirait Chateaubriand. Surtout lorsqu’elle s’entoure d’une « névrose de répétition » (Freud) à travers une débauche de communication. « Ainsi dans un monde saturé d’images, on aurait tendance à espérer le triomphe de la transparence. Au contraire, la très grande visibilité a généré une nouvelle forme d’invisibilité » (26). Or, cette démarche idéologique et dogmatique, qui nous submerge à travers une information à jet continu, se situe à l’opposé d’une approche scientifique respectueuse de la « vérité des faits » et permettant d’appréhender la réalité au travers de la raison (« libido sciendi » de Saint-Augustin), démarche qui sied, en principe, à l’étude sérieuse des relations internationales. Que sont devenus les authentiques cartésiens au pays de René Descartes ? Vers quel monde allons-nous ? Nul ne le sait, y compris chez nos brillants oracles. Il est vrai que les « prévisions sont difficiles surtout lorsqu’elles concernent l’avenir » comme nous le rappelle l’humoriste Pierre Dac.

Aujourd’hui, les questions ne manquent pas. Oserons-nous opposer l’information au savoir ? Saurons-nous dépasser l’image qui absorbe le regard mais, surtout, neutralise la réflexion sans laquelle rien n’est possible dans une démocratie digne de ce nom ? Aurons-nous le courage de ne plus céder à la tentation facile du panurgisme médiatique et américain ? Tels sont les principaux défis que devront relever les citoyens au XXIe siècle s’ils ne souhaitent pas se transformer en pions d’un totalitarisme médiatique ! Une question de la plus haute importance est désormais aussi sur la table. La liberté d’expression, sans cesse invoquée, n’est-elle plus qu’un leurre ? Les mots ne sont-ils plus désormais que mensonges (Cf. le débat lancé aux États-Unis par Donald Trump sur les informations bidon ou « fake news ») ? Tout semble embrumé dans une langue de bois épaisse. In fine, les crises multiples qui secouent le monde n’auront-elles pas un effet positif sur nos modes d’appréhension de la réalité de notre planète en nous contraignant, lentement mais sûrement, à nous orienter vers la fin des dogmes dans les relations internationales et, peut-être, à imaginer un futur recomposé ?

Notes:

(1) Guillaume Berlat, La mondialisation c’est comme les trains : elle peut en cacher une autre, www.prochetmoyen-orient.ch , 8 août 2016.

(2) Serge Audier (critique de l’ouvrage La démocratie universelle. Philosophie d’un modèle politique de Florent Guénard, Seuil, 2016), La démocratie, ça s’exporte mal, Le Monde des Livres, 9 septembre 2016, p. 8

(3) Simon Leplâtre, Commerce, climat, Brexit, fiscalité : les leaders mondiaux dans le flou, Le Monde, 7 septembre 2016, p. 3.

(4) 20/20 au G20, Le Canard enchaîné, 22 mars 2017, p. 1.

(5) Éditorial, L’OMC est morte, vive l’OMC !, Le Monde, 13 décembre 2017, p. 25.

(6) Sylvie Kauffmann, La mondialisation en panne, Le Monde, 11-12 septembre 2016, p. 26.

(7) Frédéric Chatillon/Célia Belin (sous la direction de), Les États-Unis dans le monde, CNRS éditions, 2016.

(8) Brice Pedrolotti/Cédric Pietralunga, Au G20, le triomphe des dirigeants autoritaires. Les chefs d’État chinois russe et turc se sont imposés face à des responsables occidentaux affaiblis, Le Monde, 7 septembre 2016, p. 3.

(9) Isabelle Mandraud, Poutine pousse ses pions au Moyen-Orient, Le Monde, 13 décembre 2017, p. 2.

(10) Guillaume Berlat, L’étrange victoire ou les clés du succès russe en Syrie, www.prochetmoyen-orient.ch , 25 avril 2016.

(11) Yves Aubin de la Messuzière, Monde arabe, le grand chambardement, Plon, 2016.

(12) Marc Semo, Accord américano-russe pour une trêve en Syrie, Le Monde, 11-12 septembre 2016, p. 3.

(13) Claude Angeli, L’imprévisible Poutine rebat les cartes en Syrie, Le Canard enchaîné, 7 septembre 2016, p. 3.

(14) Richard Labévière, Nouvelle donne : Assad et Erdogan bientôt à Moscou, www.prochetmoyen-orient.ch , 5 septembre 2016.

(15) Piotr Smolar, Moscou tente une médiation dans le conflit israélo-palestinien, Le Monde, 7 septembre 2016, p. 4.

(16) Andreï Gratchev, Un nouvel avant-guerre ? Des hyperpuissances à l’hyperpoker, Alma, 2017.

(17) Guillaume Berlat, Union européenne : un nouveau remake de la SDN ? De Stefan Zweig à Romain Gary, www.prochetmoyen-orient.ch , 9 mai 2016.

(18) Thierry de Montbrial/Thomas Gomart (sous la direction de), Notre intérêt national. Quelle politique étrangère pour la France ?, Odile Jacob, 2017.

(19) Philippe de Villiers, Le moment est venu de dire ce que j’ai vu, Albin Michel, 2016, p. 239-240.

(20) Éditorial, L’Europe de la sécurité est une priorité, Le Monde, 9 septembre 2016, p. 22.

(21) Pierre Lellouche, Une guerre sans fin, Cerf éditions, 2017, pp. 207-215.

(22) Didier Modi, Le rêve européen. Autopsie d’un cauchemar, éditions Europolis, 2017.

(23) Hubert Védrine, Sauver l’Europe, Liana Lévi, 2016.

(24) Guillaume Berlat, Varsovie : comme un parfum de guerre froide…, www.prochetmoyen-orient.ch , 11 juillet 2016.

(25) Mazarine Pingeot, La dictature de la transparence, Robert Laffont, 2016, p. 137.

(26) Mazarine Pingeot, précitée, pp 19-20.

jeudi, 28 décembre 2017

Islamabad et la lutte contre le terrorisme

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Islamabad et la lutte contre le terrorisme

par Jean Paul Baquiast

Ex: http://www.europesolidaire.eu

Le Pakistan avait été accusé le 21 août 2017 par Donald Trump de soutenir le terrorisme. Islamabad, par la voix du ministère des affaires étrangères, avait qualifié le lendemain de  décevantes les critiques américaines. Celles-ci  « ignorent les énormes sacrifices de la nation pakistanaise » dans la lutte contre le terrorisme.

Il est indéniable que le Pakistan, qui comporte en son sein de très nombreux groupes approchés par le terrorisme islamique, n'est nulle part considéré comme un agent très actif du contre-terrorisme. Ceci n'a pas empêché la tenue à Islamabad les 20-22 décembre d'une conférence régionale sur le terrorisme. Y participaient des parlementaires d'Iran, de Turquie et d'Afghanistan. La Russie et la Chine y étaient représentées en tant qu'invitées. 

L'Iran était représentée par le Speaker Ali Larijani, la Russie par le Speaker de la Douma Vyacheslav Volodin, très proche du Kremlin, la Turquie par le vice-président de l'Assemblée Ismail Kahraman et l'Afghanistan par le Speaker Abdul Rauf Ibrahimi, porte-parole du Hezb-e-Islami Gulbuddin qui est la plus grande des factions du parti Hezb-e-Islami d'Afghanistan. On observera que celui-ci a été placé, à tort ou à raison, sur la liste officielle des organisations terroristes par le Canada, les États-Unis et le Royaume-Uni.

L'objet de la conférence était la lutte contre le terrorisme en Afghanistan. L'accent a été mis sur les substantielles ressources que lui procurait le narco-trafic. Le Pakistan et l'Iran considèrent que depuis l'arrivée dans le pays de la coalition sous direction américaine, les cultures de pavot se sont considérablement multipliées, ainsi que le nombre des laboratoires manufacturant la drogue. Les vues aériennes confirment d'ailleurs ce jugement.

Vyacheslav Volodin a mis en parallèle la Syrie et l'Afghanistan, exposant que si les mêmes efforts internationaux n'étaient pas faits pour combattre les organisations terroristes islamiques en Afghanistan, celle-ci pourrait devenir le fiel d'un Etat Islamique EI ressuscité. L'on constate en effet depuis l'élimination de l'EI en Syrie, que des transferts importants de militants islamiques et même d'armements se font vers l'Afghanistan. Or la Russie se préoccupe de plus en plus d'infiltrations islamiques dans les pays dits du 'Stan à sa frontière sud (Afghanistan, Tajikistan et Uzbekistan). Celles-ci pourraient très vite multiplier les attentats en Russie même.

Vladimir Poutine

Vladimir Poutine, dans un communiqué le lendemain de la conférence d'Islamabad, a constaté qu'en effet, sous la présence américaine, les trafics de drogues et le terrorisme n'ont pas diminué, mais au contraire augmenté. Cependant, avec sa prudence habituelle, il s'est refusé à en faire porter la responsabilité sur les Etats-Unis. Sans les Américains, a-t-il dit, la situation aurait pu être pire.
Il ne paraît pas favorable à une intervention russe en Afghanistan sur le modèle qui a rencontré un plein succès en Syrie.

Cependant, le 26 décembre, lors d'un sommet « informel » des Etats du CIS (Commonwealth of Independent States) à Moscou, il a mis l'accent sur la volonté russe de participer aux efforts communs contre le terrorisme, le crime trans-frontières, le trafic de drogues et d'armes. Il a par ailleurs confirmé la volonté de renforcer la coopération économique et les investissements productifs au sein des pays du CIS et du Collective Security Treaty Organization (CSTO).

Moins discrètement, le chef d'Etat-Major général russe le général Valery Gerasimov a confirmé qu'après leur défaite en Syrie des milliers de combattants de l'EI se dirigeaient vers la Libye et les pays de l'Asie du sud-ouest. Il a par ailleurs indiqué que, selon des observations spatiales ou d'autres sources, des centaines de combattants de l'EI s'entrainent désormais dans les bases américaines en Syrie. Les questions russes sur cette question sont restées sans réponse des Américains.

Concernant l'Afghanistan, les experts militaires russes considèrent qu'elle est en train de devenir un point fort de l'EI, avec plus de 10.000 hommes entrainés et bien armés s'y étant retranchés.

Le Pakistan proche ne devrait pas considérer ceci sans inquiétude, s'il était bien décidé, comme le gouvernement l'affirme, à lutter contre le terrorisme.

Quoi qu'il en soit, rien n'a été dit officiellement sur ces questions lors de la conférence de décembre 2017 à Islamabad.

 

samedi, 23 décembre 2017

Did The Anglo-British Bomb Japan To Stop Bose?

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Did The Anglo-British Bomb Japan To Stop Bose?

It was more than seven decades ago that the United States dropped the world’s first atomic bomb on Japan, obliterating the city of Hiroshima, killing 140,000 people and ushering in a new era of nuclear conflict.

Today President Barack Obama has become the first sitting US president to visit Hiroshima. Obama made it clear in his interview with Japan’s public broadcaster NHK that he would not offer an apology and Japan also said it would not seek one.

The majority of Americans have long viewed the two atomic bombings as necessary in bringing the war to an end and therefore saving even more lives, although this argument has been widely queried by historians.

General Douglas MacArthur, Commander of US Army forces in the Pacific, stated on numerous occasions before his death that the atomic bomb was completely unnecessary from a military point of view: “My staff was unanimous in believing that Japan was on the point of collapse and surrender.”

General Curtis LeMay, who had pioneered precision bombing of Germany and Japan (and who later headed the Strategic Air Command and served as Air Force chief of staff), put it most succinctly: “The atomic bomb had nothing to do with the end of the war.”

Was Hiroshima Necessary? Why the Atomic Bombings Could Have Been Avoided By Mark Weber from The Journal of Historical Review, May-June 1997 (Vol. 16, No. 3), pages 4-11.

So why were the bombs dropped on Japan?

To this day no one apart from the GreatGameIndia team have brought to light the connection between the decision to bomb Hiroshima and Nagasaki to Subhas Chandra Bose’s plot the bring down the British Empire.

World War II illustration created by the Japanese. Subhas Chandra Bose backed up by Japenese tanks is shown beheading the British Lion feasting on bones of dead Indians.

Although many in India, scholars besides, know about Netaji Subhash Chandra Bose, we shall include a couple of paragraphs below to put the matter in the context of international geopolitics. In World War II, the case for dropping two bombs on Japan was not an impeccable one, and many reasons are likely to be hidden from the public eye.

Could the equations of the Anglo-British involving a possible defeat in the Indian theater by a Bose-Japan combine have been a part of the decision process?

Bose was able to flee house arrest in Calcutta and go to Germany. Studying the German viewpoint of the international politics gave him an understanding that Gandhi and Nehru may not have had. In a very daring trip he would go further on to Japan, spend a few years there and have an audience with the Premier. He would subsequently land in Burma and take control of the Burmese Indian National Army. Upon learning that Bose had come to Burma and was raising an army, the Indian soldiers of the British army switched sides in favor of their countryman. Bose was thus able to raise an army of about 40,000 strong, equipped with arms from Japan. In addition, the Emperor of Japan committed about 100,000 Japanese troops and some air squadrons for his assistance. With this formidable combine, he stood a good chance of marching on to Delhi. The 100,000 Japanese troops would eventually back down, but Bose resolved to continue the fight. He occupied the Andaman and Nicobar islands, Nagaland, Mizoram, Assam and was about to enter Bengal. From the vantage of the Andaman and Nicobar islands, the Indian National Army had effectively tied up Mountbatten in Ceylon, and he was unable to move.

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World War II illustration created by the Japanese. Subhas Chandra Bose backed up by Japenese tanks is shown beheading the British Lion feasting on bones of dead Indians.

Bose had a brilliant strategy. A main force was to march on to Delhi. This would however be aided by three other forces, each of which would have first performed the task of destroying the British hold over three major ports – Calcutta, Vishakapatnam and Chennai as well as the Dutch control of ports at Machilipatnam and Yanam. The unit landing in Calcutta would join the units from Nagaland and Assam towards Delhi, while the units from Vishakapatnam and Chennai would march towards Bombay.

The conquest of these five cities, to be completed in two weeks, would have effectively ended British rule in India, cutting it off from the sea. But Bose would follow the same moral principle that Napoleon had: “Never my sword against my own people”. Around the end of July 1945 he dropped leaflets over the cities of Madras, Vishakapatnam and Calcutta, requesting citizens to leave so that the INA could bomb these coastal towns prior to landing. He set a two week deadline, after which he would start the attack.

Subhash planned to strike against the British and it is very likely that they would have been unable to face an attack by the INA. On 6 August 1945, before the deadline set by Bose was to expire, Hiroshima would be bombed, and then on 9 August, the second bomb would be dropped on Nagasaki. After the Japanese surrender, Subhash evacuated the Andaman on 15 August 1945, in a plane with Japanese markings. This plane was shot down by American gunners over Manila, en-route to Tokyo. Three POWs were taken in this crash. In accord with the Geneva convention, they stated their rank, name and age. The American captors did not realize who their prisoners were. So they telegraphed the information to the British, who responded “Discard the Baggage”. The Americans GIs refused to obey this instruction. The British advised them to hand over the three prisoners to Stalin’s red army.

Excerpt from the article Bose’s Plot To Bring Down The British Empire.

What follows after Bose’s plane was shot down is explained in detail in our article titled The Heroic Saga: The Escape, Exile & Death Of Bose.

The impact Bose and the INA had on the events in British India has since been downplayed by all the power groups that have controlled India, and not much is taught in modern history about the role played by this very great man.

GGI News & Analysis

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Read all articles related to Subhash Chandra Bose here – #NetajiFiles

La nouvelle stratégie spatiale américaine

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La nouvelle stratégie spatiale américaine

par Jean Paul Baquiast

Ex: http://www.europesolidaire.eu

Donald Trump vient d'annoncer ce que sous son autorité sera la Stratégie de Sécurité Nationale 2018 et au delà 1). On a beaucoup remarqué les menaces voilées que comporte cette Stratégie à l'égard de la Russie et de la Chine. Mais l'on a pas assez commenté l'importance qu'y comportera la construction d'une infrastructure spatiale beaucoup plus ambitieuse qu'elle ne l'est actuellement.

Le Pentagone est en train de réaliser que tous les systèmes d'armes américains font confiance au GPS et aux communications satellitaires. Mais qu'arriverait-il si ces ressources se trouvaient détruites par un ennemi éventuel?

Le Colonel Richard Zellmann, commandant la 1st Space Brigade basée au Colorado, vient de remarquer dans un rapport que si l'Armée américaine devait se passer de ces outils, elle devrait tripler ses effectifs, sans être pour autant assurée de conserver sa supériorité. Or les récentes recherches russes et chinoises visent à développer des satellites anti-GPS ou à brouiller leurs résultats. Ce brouillage pourra être produits par des stations terrestres (jammers) peu coûteuses et faciles à implanter ou transporter 2)

En conséquence, l'Armée et la Marine américaine ont commencé à former des personnels maitrisant des savoirs tombés en désuétude depuis plus de 20 ans. On pensera notamment aux sextants, apparus au 18e siècle sous le nom d'octants (image). A plus long terme, la DARPA (Defense Advanced Research Projects Agency) développera des systèmes de géolocalisation se passant du GPS, tel des gyroscopes et capteurs destinés à ce que l'on appelle la navigation inertielle. Le principe en est simple. Chaque piéton la pratique intuitivement dans la campagne en évaluant le nombre de ses pas dans une direction donnée, et en se repérant à fin de contrôle sur des signaux tels que les clochers d'église.

Par ailleurs le Pentagone mettra en service de nouvelles générations de satellites dotés de capacités anti-brouillage.

Donald Trump dans le document qu'il vient de diffuser a précisé que « The United States considers unfettered access to and freedom to operate in space to be a vital interest, « Any harmful interference with or an attack upon critical components of our space architecture that directly affects this vital US interest will be met with a deliberate response at a time, place, manner and domain of our choosing ».

Les Européens ne pourront que constater leur quasi absence dans ces nouveaux domaines stratégiques.

Références

1) Voir CNN
http://edition.cnn.com/2017/12/18/politics/5-things-to-kn...

2) L'Agence spatiale européenne annonce le lancement imminent de 4 nouveaux satellites, destinés au système Galileo, le rival du GPS
http://www.gpsdaily.com/reports/Galileo_satellites_atop_r...

jeudi, 21 décembre 2017

Amerika moet weg uit het Midden-Oosten

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Amerika moet weg uit het Midden-Oosten

SAMEN MET TURKIJE EN IRAN WIL RUSLAND DE WERELD HERTEKENEN

‘Amerika moet weg uit het Midden-Oosten’

Alexander Doegin wordt wel eens de huisideoloog van Poetin genoemd. Hij droomt van een nieuwe wereld. Waar Turkije en Iran het Midden-Oosten beheersen en Europa geen vazal van de Verenigde Staten meer is. ‘Vergeet dat liberalisme. Daag ons uit met jullie eigen waarden.’

Van onze redactrice in Nederland Corry Hancké

De Russische filosoof Alexander Doegin was zaterdag in Amsterdam voor de jaarlijkse Nexus Conferentie. Een dag later vertelt hij over de clash die hij daar met de Franse filosoof Bernard-Henri Lévy had. De twee mannen zijn elkaars tegenpolen.

‘Hij is alles wat ik niet ben. Lévy verdedigt de imperialistische ideologie van het Westen en vecht tegen de opkomende multipolaire wereld. Alles wat ik bewonder, keurt hij af. Alles waarvoor hij staat, vind ik fout. Het was een echte clash van ideeën. Het was boeiend, want we vertrekken allebei vanuit de idee van een eeuwenoude oorlog tussen beschavingen: de oorlog tussen Sparta en Athene of tussen Rome en Carthago. Een oorlog tussen een landmacht en een zeemacht.’

‘De landmacht – en dat is een land als Rusland, staat voor een onveranderlijke, collectieve identiteit. De zeemacht ziet constante verandering, globalisering en vooruitgang als hoogste goed. Ze probeert iedereen te bevrijden van een collectieve identiteit, omdat die onderdrukkend zou zijn.

Maar dat liberalisme loopt ten einde. Het eindigt in decadentie en een complete loskoppeling van de natuurlijke wetten. Geslachtsbepaling of het uitstellen van de dood door artificiële intelligentie, zijn een ontkenning van de menselijke waarden. Je krijgt immortaliteit voor de prijs van
menselijkheid.’

Welke waarden zijn belangrijk voor een landmogendheid?

‘Een landmacht baseert zich op het concept van eeuwigheid. Het gaat om identiteit, het is een sacrale houding tegenover de natuur, de wereld en God. In die visie is God belangrijker dan de mens, hiërarchie is beter dan gelijkheid, traditie en identiteit zijn belangrijker dan verandering en grensverlegging. Eigenlijk is de afwezigheid van verandering de meest positieve waarde. Je probeert dezelfde te zijn als je voorouders en je conserveert hun manier van leven.’
‘De geest van de moderne mens is zo beïnvloed door de zeemogendheid dat hij de landwaarden als archaïsch, negatief beschouwt. Maar als je vanuit de waarden van een landmacht kijkt, dan zie je dat vooruitgang leidt tot decadentie, immoraliteit en verlies van waardigheid. Het verlies van de collectieve identiteit is nihilisme.’
‘Men probeert ons tegenwoordig te vertellen dat de weg naar een zeemogendheid de enige mogelijke is. Maar dat klopt niet, het is een keuze. Landen als Rusland, China, Turkije, Iran of zelfs India kunnen kiezen voor identiteit in plaats van voor liberalisme, vooruitgang, bevrijding,... De hegemonie van de westerse waarden is niet onaantastbaar. De geschiedenis ligt open.’

Rusland zoekt toenadering tot Turkije. De Turkse president Erdogan deelt jullie ‘landwaarden’?

‘Correct, hij moet kiezen tussen een Euraziatische en westerse identiteit. Ik had mijn bedenkingen bij hem, maar nadat hij de Gülenpartij heeft opzijgezet, komt hij steeds dichter bij die Euroaziatische kernwaarden en neemt hij steeds meer afstand van het Westen.’

Helpt u hem daarbij?

‘Ja, ik help de Turken om te kiezen voor het Eurazianisme. Mijn boek is in Turkije vertaald en het biedt aan de militairen een ander denkkader. Tevoren kenden ze alleen het Navo-Atlantisch denkkader, waarin hen werd geleerd hoe ze tegen Rusland moeten vechten. In mijn handleiding leg ik uit dat Turkije kan kiezen en ook tegen de VS kan vechten. Vroeger, als je als Turk niet tevreden was met de rol van de Amerikanen in de regio, zoals hoe ze de Koerden naar onafhankelijkheid helpen, dan had je geen keuze, want je had maar één denkkader.’
‘Iran staat voor dezelfde keuze. Dat land zag Rusland altijd als de oude vijand, maar toen mijn boeken er werden vertaald, ontdekten de Iraniërs dat er parallellen bestaan tussen het Euroazianisme en hun visie op de samenleving. Dat sloeg een brug tussen Rusland, Turkije en Iran. Die metafysische brug leidt uiteindelijk naar concrete politieke actie.’
Ze heeft alvast de situatie in Syrië doen kantelen. Rusland en Turkije gingen samenwerken en samen gaven ze de Syrische president al-Assad de mogelijkheid om de burgeroorlog in zijn land te winnen. ‘Dat klopt, Syrië was de laatste dominosteen die viel.’

Begon het toen in 2015 een Russische piloot boven Turkije werd neergeschoten?

‘Ik heb toen hard gewerkt om een confrontatie tussen Turkije en Rusland te vermijden en om de banden tussen beide landen aan te halen. Niet omdat ik pro-Turks ben, neen, ik ben Russisch-orthodox. Maar ik ben tegen de Amerikaans hegemonie.’
‘Die samenwerking heeft ook geleid tot de deal tussen Irak en de Iraanse generaal Soeleimani, waardoor het opstandige Kirkoek weer in handen van Irak kwam. Dat was de tweede grote overwinning die we hebben behaald in de multipolaire wereld.’

Die nieuwe samenwerking verandert de situatie in het Midden-Oosten grondig.

‘Ja, maar daar zijn tientallen jaren aan voorafgegaan. Na de val van de Sovjetunie hebben we met een aantal Russische patriotten een Euraziatische visie ontwikkeld, gebaseerd op de “landwaarden”. Die visie zijn we aan het uitdragen en we werken aan een alliantie met Turkije en Iran. Het was een lange weg. Poetins politiek is de finalisatie van die ideeën.’ 

De strijd in Syrië was het eerste kantelpunt. Wat wordt de volgende stap?

‘Amerika moet weg uit het Midden-Oosten. Eerst zullen we aandacht geven aan de heropbouw van Syrië en Irak. We hebben een militaire overwinning behaald, nu moet de politieke volgen. We moeten de territoriale eenheid bewaren, we moeten uitzoeken wat we aan de Koerden kunnen bieden. Ze zijn door het Westen in de steek gelaten en nu kan Rusland een oplossing voor de Koerden zoeken. We zullen hen geen nieuwe staat laten bouwen, want niet iedereen is daar voorstander van. Islamitische Staat moet verdwijnen, dat is duidelijk. En de invloed van de Saudi’s moet worden gestopt. De oorlog in Jemen moet worden beëindigd. Daar kunnen we, tegen de Saudi’s in, de sjiieten helpen.’

U wil de Verenigde Staten weg uit het Midden-Oosten. De huidige Amerikaanse president Trump is sowieso minder geïnteresseerd in buitenlands beleid. Het kan dus voor de Russen niet zo moeilijk zijn om de Amerikanen te verdrijven?

‘Het is iets gemakkelijker dan vroeger. Trump zegt dat hij een non-interventionist is. Hij zou natuurlijk afstand kunnen nemen van die belofte, zoals hij wel vaker heeft gedaan. Maar hij heeft binnenlandse problemen. Dat hij die maar eerst oplost. Wij willen vrede, we willen een wereld die vrij is van de Verenigde Staten en van zijn zogenaamde democratie. Laat Eurazië en Europa met rust. Europa moet niet bang zijn, wij gaan dat niet inpalmen.’

En Oekraïne dan?

‘Oekraïne is deels Europees deels Russisch. Het is een nieuwe staat, die de keuze had als België te worden, een land met twee entiteiten. Maar het westelijke deel van Oekraïne wilde het hele land domineren, in naam van de democratie en de mensenrechten, alhoewel er ook fascisten bij waren.
Daarom is het oostelijk gedeelte in opstand gekomen en die opstand hebben wij gesteund. Wij zijn dus geen dreiging voor Europa, wij zijn geen dreiging voor West-Oekraïne. Dat is voor ons een legitiem deel van Oost-Europa.’
‘Het is boeiend: je ziet in Oost-Europa steeds meer landen die toenadering tot ons zoeken. Ik merk dat landen als Polen of Hongarije zich afvragen of Europa wel zo’n ideale wereld is. De Polen denken dat democratisering en vooruitgang hun katholieke identiteit vernietigen. De beweging die de nadruk legt op de Poolse identiteit groeit, ik krijg er steeds meer aanhangers. Hetzelfde voor Hongarije. Daar vraagt men zich af wat het beste is: hun identiteit laten vernietigen door Europa of ze te behouden, met onze steun. Voor hen is de EU een culturele bedreiging. Wij daarentegen dringen ons niet op, zij hebben gewoon de keuze.’
‘Aangezien wij Europa niet bedreigen, hebben de Europeanen een kans om over hun identiteit na te denken. Ze hebben gezien welke chaos de Amerikaanse zeemogendheid veroorzaakt. Europa heeft een kans om zich te bezinnen. Ik droom van een sterk, onafhankelijk Europa dat zijn eigen logica hanteert en dat misschien tegen ons is. En toch verkies ik dat, want dat zou betekenen dat Europa opnieuw waardigheid heeft en niet langer de vazal van de Verenigde Staten is. Wees de ander die het verschil maakt. Nu? met al dat liberalisme, zijn jullie dat niet. Daag ons uit met jullie eigen
waarden.’

mardi, 19 décembre 2017

Syrie: le facteur chinois

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Bernhard Tomaschitz :

Syrie: le facteur chinois

Beijing accroît son engagement en Syrie pour mieux asseoir sa stratégie géopolitique après le conflit !

La Chine vient donc d’accroître son engagement en Syrie. Depuis avril 2016, quelque 300 conseillers et instructeurs chinois sont présents en Syrie d’après le Middle East Monitor ; désormais, la Chine veut y envoyer des soldats pour soutenir le Président Bachar El-Assad. On pense que ces soldats appartiendront aux fameuses unités d’élite chinoises, les « Tigres de Sibérie » et les « Tigres de Nuit ». Selon le droit chinois, l’envoi d’expéditions militaires à l’étranger est autorisé, à condition que ce soit pour combattre le terrorisme. Ensuite, on peut dire que les intérêts syriens et chinois coïncident en matière de sécurité. D’après les sources syriennes, quelque 5000 islamistes venus du Xinjiang chinois combattent dans les rangs de Daesh. Les Chinois craignent dès lors que ces hommes, après la défaite subie par l’organisation terroriste, ne reviennent dans leur pays et y commettent des attentats.

La Chine a cependant d’autres intérêts en Syrie, sur le long terme cette fois, car ce pays du Levant aura un rôle important à jouer dans le grand projet chinois de la « route de la soie », l’OBOR. C’est la raison majeure qui amène Beijing à intervenir dans le processus de paix. « En tant que membre permanent du conseil de sécurité de l’ONU, la Chine a toujours veillé à ce que règne la paix, la stabilité et le développement au Proche-Orient », a déclaré, fin novembre 2017, Geng Shuan, porte-paroles du ministère chinois des affaires étrangères. Geng Shuan s’est avéré encore plus précis : « La Chine soutient les efforts des pays de la région qui cherchent à renforcer la lutte antiterroriste et entendent rétablir l’ordre et la stabilité ». La Chine est prête à échanger des idées avec les pays de la région « qui travailleront à la réalisation du projet OBOR et qui voudront assurer la paix et la stabilité en optant pour une politique de développement ».

La Chine, tout comme la Russie, veut participer à grande échelle à la reconstruction de la Syrie pour gagner en influence dans la région aux dépens des Etats-Unis. Beijing et Moscou profitent du fait que l’Occident, engoncé dans ses marottes idéologiques, cultive encore et toujours l’illusion d’un changement de régime à Damas. « Les Etats occidentaux disent qu’ils apporteront leur soutien à la reconstruction de la Syrie seulement si s’amorce « un processus crédible conduisant à un véritable changement politique soutenu par la majorité du peuple syrien », écrivait l’agence Reuters le 24 novembre 2017. La Chine, elle, ne demande à la Syrie que de faire preuve de ‘flexibilité’, d’esprit de dialogue et de négociation.

Pour se préparer à l’ère de la reconstruction, une rencontre bilatérale sino-syrienne de haut niveau a eu lieu en juillet dernier. Y participait également la « Banque d’investissements structurels asiatique », créée à l’initiative de la Chine. On y a planifié l’édification d’un parc industriel en Syrie, qui serait ouvert aux entrepreneurs chinois et aurait une valeur de deux milliards de dollars. Comme le remarquait Asia Times, « rien n’aurait davantage de sens qu’un engagement chinois ». Finalement, les négociants syriens ont été très actifs sur la route de la soie pour le petit commerce, avant la tragique guerre civile syrienne ». Les Chinois n’ont pas oublié non plus qu’aux temps de l’ancienne route de la soie la Syrie contrôlait le passage des marchandises vers l’Europe et vers l’Afrique.

Aujourd’hui, ajoute Asia Times, le projet OBOR fera inévitablement émerger un « moyeu syrien ». Ce n’est donc pas un hasard si l’ambassadeur syrien en Chine, Imad Mustafa, mise sur cet atout. La Chine, la Russie et l’Iran recevront la priorité demain, après la fin des hostilités, quand il s’agira de lancer les programmes de reconstruction, de rééquipement et d’investissements infrastructurels. Les Etats-Unis et, à leur suite, les Etats de l’Union européenne, resteront sur le carreau.

Avec l’aide de la Chine, Assad pourra sans doute réaliser son rêve des « Quatre mers ». En 2009, il avait déclaré dans un interview : « Dès que l’espace économique entre la Syrie, la Turquie, l’Irak et l’Iran sera intégré, nous deviendrons le lien nodal entre la Méditerranée, la Caspienne, la Mer Noire et le Golfe Persique. Dès que ces mers seront reliées entre elles, nous serons, dans le monde, le point d’intersection optimal pour tous investissements, transports et autres ». On avait planifié en Syrie la construction de routes, de ports et d’oléoducs. De plus, la stratégie dite des « Quatre mers » avait été évoquée dans « Syria today » en janvier 2011 : ce projet, disait le magazine syrien, «montrera que la Syrie, en matière de stabilité, ne dépendra plus des Etats-Unis et de leurs principaux alliés : c’est là un message clair pour beaucoup d’autres pays comme le Venezuela, le Brésil et l’Argentine ».  Assad n’a plus pu réitérer ce message car, très peu de temps après l’avoir formulé une première fois, les Etats-Unis ont déclenché leur guerre contre la Syrie, par terroristes interposés.

Or, sept ans après avoir énoncé ce projet, Assad a, envers et contre tout, consolidé son pouvoir et a offert aux adversaires géopolitiques des Etats-Unis l’occasion de gagner considérablement en influence au Levant. On dirait que l’histoire a puni l’Amérique. L’analyste russe Alex Gorka en tire des conclusions pertinentes : « La Chine peut devenir un acteur très important en Syrie. La Syrie, en effet, doit être reconstruite et la Chine est en mesure d’offrir cette aide. En tant que membre permanent du conseil de sécurité de l’ONU, le rôle qu’elle peut jour pour parvenir à une solution pacifique est de toute première importance. La participation chinoise fait que le processus de paix sera vraiment international, avec une large représentation de puissances autres qu’occidentales, réduisant du même coup le rôle que pourra jouer l’Ouest ».

Bernhard TOMASCHITZ.

(article paru dans « zur Zeit », Vienne, n°50/2017, http://www.zurzeit.at ).  

lundi, 18 décembre 2017

« Dans les démocraties libérales, tout est fake news » : entretien avec Alexandre Douguine

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« Dans les démocraties libérales, tout est fake news » : entretien avec Alexandre Douguine

Entretien accordé par Alexandre Douguine aux hebdomadaire Knack (version néerlandaise) et Le Vif à Bruxelles

Propos recueillis par Jeroen Zuallaert

Ex: http://zejournal.mobi

 
Auteur : Jeroen Zuallaert | Editeur : Walt | Lundi, 18 Déc. 2017 - 11h04

« Vous prononcez le mot démocratie comme s’il était sacré. Vous trouvez certainement que les antidémocrates ne sont pas humains ! » Notre confrère de Knack s’est entretenu avec Alexandre Douguine, le prophète autoproclamé de Vladimir Poutine qui rêve d’un empire eurasien où il n’y a pas de place pour les journalistes.

Alexandre Douguine n’est pas l’idéologue maison de Vladimir Poutine. « Ou du moins pas littéralement », admet-il. « À l’heure actuelle, je n’occupe pas de position officielle au sein de l’appareil d’État. Je n’ai pas de ligne directe avec Poutine, je ne l’ai même jamais rencontré. Mais j’ai mes façons de communiquer ».

Pourtant, le terme « idéologue maison » n’est pas mal choisi, estime Douguine. « Si vous comparez mes théories et mes écrits à mon travail, vous pouvez uniquement en conclure que Poutine a suivi pratiquement toutes mes propositions politiques. Il a resserré les liens avec l’Iran et la Turquie et il a annexé la Crimée, ce que je lui recommande depuis des années. Il mise sur les normes et les valeurs traditionnelles. Il a fondé l’Union eurasienne, qui doit constituer la base d’un empire eurasien. Il y a dix ans, j’étais à Washington pour un débat, et on m’a introduit en ces termes : "Ne regardez pas la position de monsieur Douguine, regardez ses écrits et comparez-les aux actes de Poutine". C’est tout à fait ça ».

En Russie, Douguine est surtout populaire dans les cercles militaires, où la lecture de sa Quatrième théorie politique est obligatoire pour les futurs officiers. Cette théorie succède à trois idéologies politiques – le libéralisme, le communisme et le fascisme – qui d’après lui ont perdu leur légitimité. La quatrième théorie politique doit combiner les éléments des trois théories précédentes, même si Douguine semble surtout détester la démocratie libérale. La quatrième théorie politique doit devenir l’idéologie dominante en Eurasie, une alliance géopolitique entre la Russie et l’Europe, qui, tout comme dans 1984 de George Orwell, doit endiguer ce qu’il appelle l’impérialisme américain.

Vous avez qualifié l’investiture de Trump de « l’une des meilleures journées de votre vie ». Êtes-vous toujours de cet avis ?

Alexandre Douguine : Je pouvais à peine en croire mes oreilles ! Pour moi, l’élection de Trump est la preuve que le peuple américain est toujours en vie. Je suis très heureux de l’avènement du trumpisme, même si aujourd’hui il est pris en otage par le Deep State (l’État dans l’État, NLDR). Aujourd’hui, Trump se trouve dans la camisole de force des globalistes américains, on dirait un personnage de Vol au-dessus d’un nid de coucou. Et pourtant, rien que son élection a été une gifle énorme pour l’interventionnisme américain. Grâce à lui, l’Amérique n’est plus le centre de la globalisation. Même s’il n’arrive qu’à implémenter un centième de ce qu’il a promis, ce serait un soutien incroyable pour le projet eurasien.

Assistons-nous à la fin du libéralisme ?

Ce n’est certainement pas encore la fin, mais les aspects négatifs du libéralisme se manifestent de plus en plus clairement. C’est une sorte de fascisme libéral qui considère tout le monde qui ne possède pas au moins un iPhone 6 comme moins humain. La modernité se voit elle-même comme un objectif final, alors que pour les traditionalistes c’est un choix. Heureusement, de plus en plus de personnes comprennent que le libéralisme est fondamentalement une erreur.

Quelle est pour vous l’erreur du libéralisme ?

Il a privé l’homme de toute forme d’identité collective. La religion, les valeurs traditionnelles, la hiérarchie, la conscience nationale : il faut s’en débarrasser. Tout devient optionnel : on peut choisir sa religion, sa nation, et aujourd’hui même son sexe.

Les transgenres sont tout de même une réalité...

Au contraire, c’est l’idéologie pure. L’homme invente ces concepts et la réalité s’y adapte. Les transgenres et l’homosexualité sont une idéologie politique, ils sont le dernier stade du libéralisme.

L’homosexualité a toujours existé, non ?

C’est de la propagande politique pure qui impose des normes de manière totalitaire à la société.

Dans une démocratie libérale, personne n’est contraint à être homosexuel, non ?

À partir du moment où on autorise quelque chose, la norme change. Au fond, les normes sont une sorte de schéma qu’il faut suivre, et si vous tolérez autre chose que la norme, vous en faites automatiquement une nouvelle norme. Si vous autorisez l’homosexualité, vous détruisez la société hétérosexuelle, parce que vous lui enlevez une forme d’identité collective. L’objectif ultime du libéralisme, c’est d’éliminer l’humanité : vous donnez le choix aux gens de poursuivre leur vie comme un cyborg, ou comme un animal.

Il n’y a tout de même personne qui propose ça sincèrement ?

Nous devons comprendre que le libéralisme est un produit de la modernité. Les concepts tels que le racisme, l’esclavage et le totalitarisme sont des concepts européens nés dans la modernité. Quand le libéralisme était encore contraire au fascisme et au communisme, on aurait dit un système antitotalitaire. Mais à présent qu’il n’y a plus de grands ennemis idéologiques, le libéralisme montre son vrai visage. Les idéologues tels que George Soros et Karl Popper divisent le monde en deux groupes : les sociétés ouvertes et fermées. Tout comme les communistes divisaient le monde en capitalistes et prolétaires et les nazis faisaient la distinction entre les ariens et les non-ariens, ils divisent le monde en progressistes – les bons – et les conservateurs – les mauvais.

Cela ne rime à rien, non ? Dans une démocratie libérale, les conservateurs ont tout à fait le droit d’avoir des idées conservatrices.

Dans une démocratie libérale, seuls les conservateurs libéraux sont les bienvenus. Ceux qui ne le sont pas sont immédiatement marginalisés et criminalisés. Les gens comme moi, qui préconisent une démocratie non libérale, sont immédiatement traités de fascistes et de stalinistes. Nous sommes les nouveaux juifs et ouvriers du goulag. Votre société soi-disant ouverte n’accepte que les partisans de la société ouverte.

AD-book4PTH.jpgMais les partis conservateurs sont tout de même autorisés dans les sociétés occidentales ?

Le débat est mené uniquement parmi les partisans du libéralisme. On peut être libéral de droite et libéral de gauche. On peut être libéral d’extrême droite ou libéral d’extrême gauche. Mais il est impossible d’être non libéral.

Considérez-vous le Front national comme un parti libéral ?

Le FN est un parti libéral d’extrême droite, car il est pour la république et la démocratie. Mais même lui est diabolisé et conspué parce qu’il n’est pas assez libéral.

N’est-il pas normal que les opposants politiques se critiquent entre eux ? Le FN peut tout de même simplement participer aux élections.

Mais ses adeptes sont diabolisés, ce sont des parias ! La même chose vaut pour les personnes qui soutiennent Trump. Si vous êtes dans un café à New York et vous dites que vous avez voté Trump, vous risquez de vous prendre une gifle.

Si vous êtes dans un café à Moscou et vous dites que vous détestez Poutine, vous risquez aussi de vous prendre une gifle.

Je ne suis pas d’accord avec cette analogie. En Russie, on peut parfaitement être anti-Poutine. Le seul moment où nous défendons Poutine, c’est quand nous sommes confrontés aux haïsseurs de l’extérieur. C’est une forme de solidarité russe collective.

Selon votre interprétation, l’Eurasie est-elle une démocratie ?

Vous prononcez le mot démocratie comme s’il était sacré. Vous trouvez certainement que les antidémocrates ne sont pas humains !

C’est une simple question. Votre interprétation de l’Eurasie est-elle démocratique ?

Ah, c’est quoi démocratique ? Disons-le ainsi : pour moi, l’Eurasie ne doit pas être non démocratique. Le taux démocratique de l’Eurasie dépend de ce que décide la société.

N’est-il pas logique qu’une telle décision découle d’un processus démocratique ?

Je trouve qu’une société doit pouvoir décider d’être régie par un monarque ou un dictateur. Le résultat d’une telle décision ne doit pas forcément être une démocratie. La seule véritable décision démocratique en Russie a été prise à l’époque du Zemski Sobor, l’assemblée russe qui a élu le premier tsar des Romanov au 17e siècle. Nous avons choisi un monarque, et nous en avons toujours été contents.

Que se passe-t-il si une société change d’avis ?

Tant qu’il n’y a pas de révolution, il y a un accord tacite qui légitime l’autorité du régime. Les libéraux veulent mettre fin à l’histoire et imposer leur idéologie à tout le monde alors que l’histoire politique est ouverte : la démocratie n’est pas une valeur universelle incontestable que le monde entier n’a qu’à accepter.

Ne trouvez-vous pas problématique que la Russie n’ait pas d’élections impartiales ?

Nos élections sont absolument impartiales, car chez nous elles ne servent pas à amener un nouveau régime au pouvoir. En tant que société, nous sommes plus ou moins contents de Poutine. Alors peu importe le pourcentage exact de gens qui votent pour lui.

Pourtant, vous êtes régulièrement critique vis-à-vis de Poutine ?

Je trouve qu’il ne fait pas ce qu’il a à faire, mais cela ne signifie pas que je ne trouve pas qu’il soit le seul leader légitime possible de la Russie. L’esprit russe fonctionne à plusieurs niveaux. Pour nous, la contradiction n’est pas inacceptable.

Quelle est votre principale critique envers Poutine ?

Je lui reproche d’avoir créé un système où il soit le seul individu capable de prendre une décision. En soi, c’est mieux que le chaos total, mais c’est instable. Poutine se comporte comme s’il était immortel. Malheureusement, il ne l’est pas.

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Vous plaidez en faveur d’une dynastie Poutine.

C’est impossible, car pour cela il faut les institutions, et pour fonder ces institutions il faut formuler les principes de votre vision de la société. Il ne le fait pas. Le plus grand problème de Poutine, c’est qu’il n’a pas d’idéologie. C’est un leader génial qui a transformé un pays qui se désagrégeait en puissance souveraine. Aujourd’hui, chacun doit deviner ce qu’il signifie par « démocratie », « tradition », « religion » ou « modernisation ». Et celui qui devine mal, est puni. En 2014, j’ai été éjecté de l’université parce que j’ai critiqué sa politique étrangère. Mais je me suis résigné, je ne m’intéresse pas à ma carrière.

Êtes-vous content de la politique étrangère de Poutine ?

Je la trouve généralement équilibrée. Sa plus grande erreur c’est de ne pas avoir poursuivi la libération de l’Est de l’Ukraine. Il aurait pu pénétrer beaucoup plus loin en Ukraine. On savait à l’avance qu’il y aurait des sanctions économiques. Aujourd’hui, nous payons un prix lourd pour un produit relativement limité.

Voyez-vous un successeur possible ?

Dans le système de Poutine, il n’y a pas de place pour un successeur. Il craint de nommer un héritier qui soit aussi fort que lui, parce qu’il pourrait l’éclipser. Il était impossible de trouver un meilleur dirigeant que lui, mais nous en avons trouvé de pires. Entre 2008 et 2012, Dmitri Medvedev a pratiquement détruit le système, et il est toujours Premier ministre. C’est un danger que Poutine manipule : si vous ne me soutenez pas, je mets le monstre libéral sur le trône, et notre stratégie au Moyen-Orient tombe à l’eau. Rien n’a été réglé formellement. Le problème, c’est que Poutine parie sur deux systèmes : il est tant eurasianiste que libéral. Dans le paradigme économique, il trouve le libéralisme nettement plus important. Il devrait faire un testament où il explique son idée à son héritier.

Vous souhaitez que Poutine détermine à quel point la Russie peut être occidentale.

(hoche la tête) Il doit traduire son intuition individuelle en une doctrine destinée à sécuriser l’ordre futur. Il n’a tout simplement pas d’idéologie déclarée, et cela devient de plus en plus problématique. Chaque Russe sent que cette approche hyper individuelle de Poutine représente un risque énorme. La propagande à la télévision russe devient de plus en plus stupide. Les talk-shows politiques sur Pervyj Kanal (la principale chaîne publique, NLDR) sont carrément stupides. Les présentateurs sont une bande de libéraux qui se font passer pour des conservateurs par considérations financières. C’est une espèce de jeu : si Poutine change d’avis, il faut changer toute la machine de propagande. Là, ils invitent en permanence les mêmes idiots américains et ukrainiens pour faire passer l’Occident pour stupide. Ce n’est plus convaincant. Comprenez-moi bien : l’Occident est mauvais, mais nous devons au moins prendre la peine de l’étudier.

Ne craignez-vous pas que pour beaucoup de Russes les libertés occidentales paraissent attrayantes ?

Les Russes sont plus constants que vous ne le pensez. Dans les années nonante, les Russes ont été séduits par le libéralisme, mais ils ont rapidement senti la réalité amère. Nous ne devons pas craindre les Russes et leur présenter une caricature de la réalité à laquelle personne ne croit. C’est pourquoi je trouve la télévision russe actuelle aussi répugnante.

Cette critique vaut-elle également pour Russia Today et Sputnik ?

C’est tout à fait différent. RT et Sputnik font parfaitement leur travail. Ils promeuvent une alternative à l’agenda libéral globaliste. Ils élargissent l’opinion démocratique. Nous nous défendons uniquement contre l’élargissement agressif de la société moderne. L’Occident devrait accepter que la forme de société libérale soit optionnelle.

Ne trouvez-vous pas problématique que des médias comme Russia Today et Sputnik inventent tout le temps des événements ?

Les médias mentent en permanence. Tout est fake news. On ne peut approcher la réalité de manière neutre. L’esprit humain fonctionne toujours avec de l’information pro-cédée. Si vous cherchez la vérité, je vous conseille de devenir philosophe : vous aurez une vie intéressante. Celui qui travaille dans les médias est par définition un menteur.

De quelle façon est-ce que je mens, monsieur Douguine ?

Vous mentez parce que vous faites passer une réalité codée définie par la société, par les détenteurs de pouvoir qui contrôlent les médias. Antonio Gramsci dirait : vous mentez parce que vous avez conclu un pacte historique avec le capitalisme. Tout est idéologique, dit le marxisme, et l’idéologie est une fausse conscience : un mensonge pur.

AD-putin.jpgMais il y a les faits, tout de même ? Si demain Moscou lâche une bombe sur Bruxelles, et j’écris que Moscou a lâché une bombe sur Bruxelles, ce n’est pas un mensonge ?

(ricane) D’abord et avant tout, vous ne pourrez rien écrire si cela arrive. Vous serez mort.

Mettons que je survive.

Même alors, il vous faut recueillir des informations et vérifier les sources. Qui paiera votre billet pour accéder aux ruines ? Comment allez-vous prouver que Moscou est derrière les bombardements et non Oussama ben Laden ? Aujourd’hui, il n’est même pas clair qui étaient les auteurs du 11 Septembre ! D’abord, c’étaient les Saoudiens, mais à présent le président Trump a suggéré qu’il fallait une nouvelle enquête. Pourquoi est-ce nécessaire ? Parce que tout est fake news.

Vous êtes sérieux là ?

Dans notre société, on ne peut jamais être vraiment sûr que l’avion avec lequel Moscou a soi-disant lâché la bombe ait été détourné au dernier moment par des musulmans. Vous connaissez le film Conspiracy Theory ?

Non.

C’est un film extrêmement intéressant dont le personnage principal voit des complots partout, et qui est traité de fou. Mais finalement, il s’avère qu’il est le seul à avoir eu raison depuis le début.

Mais c’est de la fiction, non ?

Non, c’est le paradigme de la réalité. Nous vivons dans une réalité virtuelle du fake news. Le journalisme aussi est un produit typique de la modernité. La vérité est difficile à trouver, et pour la trouver nous devons éliminer le journalisme.

Vous voulez supprimer le journalisme ?

Il y a des sociétés sans journalisme qui ne sont pas pires que la société occidentale. En même temps je réalise que les mensonges peuvent être diffusés de millions de façons. Nous cherchons tout au plus la sécurité, la tolérance, le confort, et peut-être un peu de justice sociale. Le libéralisme ne s’occupe que d’efficacité et d’accélération, et plus de la recherche de la vérité.

L’autoritarisme s’intéresse encore beaucoup moins à la vérité.

Au contraire, dans l’autoritarisme il y a encore un choix. Le totalitarisme, la théocratie, la société de castes : dans les systèmes autoritaires, nous avons le choix entre plusieurs mensonges, ce qui est nettement plus agréable. En démocratie libérale, il n’y a qu’un mensonge à croire : l’assertion que la démocratie est la moins pire de toutes les formes de gouvernement. (réfléchit) Vous savez, le mal est surtout en nous. Nous mettons trop d’espoir et de confiance en la technologie épistémologique. Par exemple, je suis très préoccupé par la confiance aveugle des sociétés en les réseaux sociaux.

Vous aussi vous êtes un fervent utilisateur des réseaux sociaux.

J’essaie de transformer le poison en remède.

La Russie utilise les réseaux sociaux pour influencer les élections étrangères.

(ricane) Je crains que vous nous surestimiez. Oui, la Russie essaie de s’armer contre les attaques technologiques de l’Occident, mais nous n’y parvenons guère. Au fond, c’est une réaction à la guerre en réseau américaine des années nonante. Il vous faudra encore un peu de patience. Notre cyberprogramme n’en est qu’à ses balbutiements, et on nous accuse déjà d’avoir piraté les élections !


- Source : Le Vif (Belgique)

Ukraine. L'Union européenne à la botte de Washington

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Ukraine. L'Union européenne à la botte de Washington

par Jean-Paul Baquiast

Ex: http://www.europesolidaire.eu

L'Union européenne, lors d'un sommet européen à Bruxelles le 14 décembre, a décidé de reconduire ses sanctions contre la Russie à propos de l'Ukraine. Ces sanctions touchent des banques, des entreprises de défense et des compagnies pétrolières russes, et interdisent aux Européens les investissements financiers en Russie.

Le conflit ukrainien connait actuellement un regain. Les Ukrainiens de Kiev, soutenus et armés jusqu'ici de façon non officielle par les Etats-Unis, ont repris de violentes offensives contre les séparatistes russophones de l'Est. Les Occidentaux accusent la Russie de soutenir les « rebelles » séparatistes, notamment en leur fournissant des armes, ce qui semble exact, bien que Moscou démente catégoriquement la chose. Mais le soutien russe reste modeste. Il n'est en rien comparable à l'aide occidentale. On apprend d'ailleurs aujourd'hui que le Canada a décidé, officiellement, d'armer les Ukrainiens de l'Ouest   https://www.agoravox.fr/actualites/international/article/...

La décision du sommet européen devra encore être officiellement adoptée par les 28 pays de l'Union européenne, probablement dès la semaine prochaine, selon un porte-parole de l'Estonie, le pays qui assure la présidence tournante de l'Union jusqu'à fin décembre.

Il est regrettable que ni Angela Merkel ni Emmanuel Macron n'aient présenté d'objections à la décision du Conseil, au prétexte que le protocole de Minsk n'était toujours pas appliqué. Mais ils ont paru en imputer la responsabilité à la Russie, sans mentionner la volonté de Kiev, affichée dès le début, de n'en tenir aucun compte,. Depuis quelques mois, elle a repris ses offensives sur une large échelle.

Moscou a réagi calmement, mais il est évident que les relations entre la Russie et les Européens, déjà quasiment au point mort, ne s'amélioreront pas. Dans un premier temps, les contre-sanctions russes, dont souffre principalement l'agriculture françaises, ne seront pas levées.

La récente tournée européenne du secrétaire d'Etat Rex Tillerson a montré que Donald Trump fera tout son possible pour éloigner l'Europe de la Russie...et qu'il y a déjà réussi. Tillerson n'a cessé d'affirmer que la Russie était une menace grandissante pour l'Europe: « L'agression russe en Ukraine reste la plus grande menace actuelle contre la sécurité européenne » “Russia's aggression in Ukraine remains the biggest threat to European security.”. Aucun de ses interlocuteurs européens n'a fait valoir la moindre objection.

Il en résultera qu'au plan géostratégique, l'alliance entre la Russie et la Chine se renforcera. L'Europe sera de moins invitée à s'y joindre, le voudrait-elle. Quant à l'Ukraine, Vladimir Poutine dans sa dernière conférence de presse a mis en garde contre le risque d'un « massacre dans les Etats ukrainiens russophones pire que celui de Srebrenica si les Occidentaux continuaient à renforcer leur aide aux forces ukrainiennes nationalistes de Kiev ». On remarquera qu'avec sa prudence habituelle il n'a pas évoqué dans ce cas une intervention militaire de la Russie en défense des républiques populaires de Lougansk et de Donetz.

vendredi, 15 décembre 2017

L'Allemagne, la France et l'Eurasie

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L'Allemagne, la France et l'Eurasie

par Jean-Paul Baquiast

Ex: http://www.europesolidaire.eu

Dans une Allemagne ou Angela Merkel semble avoir perdu sa capacité à rassembler les différents partis politiques, il est intéressant de constater la montée en influence de Sigmar Gabriel, actuel ministre des Affaires Etrangères et membre influent du SPD, Parti social-démocrate (voir https://fr.wikipedia.org/wiki/Sigmar_Gabriel).

Ceci est d'autant plus important que Sigmar Gabriel défend des perspectives très intéressantes dans le domaine international. Elles concernent tout autant la France que l'Allemagne. Ainsi, dans un discours-programme sur la politique étrangère, le 5 décembre, il paru prendre acte de la perte d'influence des Etats-Unis en Europe. Mais loin de la regretter, il s'est est quasiment réjoui. Il y voit une occasion pour l'Allemagne de réaffirmer ses ambitions géopolitiques. Il parlait devant des diplomates et experts de haut rang rassemblés dans le cadre du Forum Berlinois sur la politique étrangère organisé par l'influente Fondation Körber 1).

Certains pourraient craindre en France que le concept de Grande Allemagne qui était sous-jacent à son discours corresponde à celui d'Europe allemande. En effet, pour lui, il n'est pas question d'envisager d'une façon ou d'une autre le retrait de l'Union européenne. Cependant, même s'il ne l'a pas dit, obligé à la réserve diplomatique, il considère que l'Allemagne n'a rien à gagner dans l'Europe actuelle, largement au service des intérêts américains, tant économiques omni-présents à Bruxelles que politico-militaires fondamentalement anti-russes au sein de l'Otan.

Par contre, si l'on peut dire les choses d'une façon un peu brutale que Sigmar Gabriel ne voudrait certainement exprimer officiellement, il ambitionne une Europe franco-allemande, ou plutôt alémano-française. Avec réalisme, il admet que si l'Allemagne dispose d'une puissance économique et financière infiniment supérieure à celle de la France, celle-ci aura longtemps, car ces choses ne s'improvisent pas, la supériorité d'une force armée polyvalente, de solides industries de défense et de capacités de déploiement incomparables dans un certain nombre de théâtres mondiaux.

On peut penser qu'aujourd'hui Emmanuel Macron, par divers qualités que nous n'examineront pas ici, est beaucoup plus rassurant pour l'Allemagne que ses prédécesseurs. Macron lui-même avait déjà montré son attrait pour une Europe franco-allemande, mais le moins que l'on puisse dire est qu'Angela Merkel ne l'avait pas encouragé dans cette voie. Les ouvertures d'un Sigmar Gabriel, même si celui-ci ne dispose encore que de pouvoirs limités au sein de l'actuelle ou de la future Grande Coalition, ne pourront que l'intéresser.

Une stratégie eurasiatique

Au plan international, Sigmar Gabriel, dans son discours, s'est radicalement démarqué de ce que l'on pourrait appeler la stratégie américaine de ses prédécesseurs, visant à faire de l'Allemagne le meilleure élève d'une classe européenne dont Washington resterait toujours le magister. Il a expliqué, pour la première fois en Allemagne, dans une instance aussi influente que le Forum Berlinois, qu'il portait un intérêt considérable au grand projet de la Chine, dont nous avons souvent discuté ici, relatif à l'OBOR, “One Belt One Road” ou “nouvelle Route de la Soie”). Il y voit une initiative très prometteuse pour intégrer les politiques économiques, géopolitiques et géostratégiques des nombreux pays qui seront ainsi reliés.

Certes la Chine, responsable de l'initiative, entend en rester le moteur, mais en aucun cas elle ne paraît viser à le faire à son seul profit, non plus qu'à celui de la Russie, son alliée indéfectible. Il a expliqué que «  Nous, en Occident, pourrions être à juste titre critiqués pour n'avoir conçu aucune stratégie comparable ». Il semble y voir, non seulement pour l'Allemagne, mais pour une Europe alémano-française, une occasion irremplaçable permettant de s'intégrer à la construction d'un grand ensemble eurasiatique en gestation. Celui-ci deviendrait sans discussions la première puissance mondiale à tous égards – peut-être la seule puissance capable d'assurer la survie du monde face aux multiples crises qui se préparent.

Il serait inadmissible que la France ne voit pas les enjeux et tarde encore, comme elle le fait actuellement, à rejoindre le grand ensemble eurasiatique qui se mettra d'autant plus vite en place qu'une Allemagne sous la direction d'un Sigmar Gabriel, déciderait sans attendre d'en exploiter les opportunités.

1) Voir
* https://www.deutschland.de/fr/topic/politique/forum-berli...
* https://www.koerber-stiftung.de/en/berlin-foreign-policy-...

mardi, 12 décembre 2017

L’atlantisme: une passion française

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L’atlantisme: une passion française

Auteur : Guillaume Berlat
Ex: http://zejournal.mobi

 

 

« L’OTAN est un faux-semblant. C’est une machine pour déguiser la mainmise de l’Amérique sur l’Europe. Grâce à l’OTAN, l’Europe est placée sous la dépendance des États-Unis sans en avoir l’air » déclarait le 13 février 1963 le général de Gaulle qui en connaissait un rayon sur nos meilleurs amis américains. Manifestement, les choses ont peu évolué dans notre Douce France. Au lieu de se tenir à distance respectable de cette institution avatar de la Guerre Froide comme l’avait fait le premier président de la Cinquième rompant avec la structure militaire intégrée de l’Alliance atlantique, ses successeurs n’ont eu de cesse que de reprendre une place pleine et entière à Evere et à Mons. Malheureusement, le rôle d’idiot utile n’est jamais payant auprès du grand frère américain, pas plus hier qu’aujourd’hui. La théorie de la servitude volontaire chère à Etienne de la Boétie n’a pas pris la moindre ride. Il est pathétique d’entendre déclamer par les servants de la liturgie des éléments de langage de l’OTAN les fadaises sur « l’alliance la plus durable de l’histoire ». Quelques précisions sémantiques s’imposent d’entrée de jeu pour mieux appréhender le concept d’atlantisme qui n’est pas neutre.

PRÉCISIONS SÉMANTIQUES

Avant toute chose de quoi parle-t-on concrètement dans un domaine où la confusion est souvent la règle ? D’un fort ancrage anglo-saxon de l’OTAN que l’on doit compléter par un questionnement sur la finalité de l’Alliance atlantique après la fin de la Guerre froide.

Un fort socle anglo-saxon de l’OTAN

Sur le plan de l’étymologie : le terme d’atlantisme est un dérivé d’atlantique, concept contenu dans l’appellation de l’ « Organisation du traité de l’Atlantique Nord » (OTAN sous son acronyme français et NATO en anglais). Le mot atlantique est issu du grec atlantikos, Atlantique. Il est un dérivé d’Atlas, du nom d’une chaîne de montagnes situées en Afrique du Nord. L’adjectif « atlantique » qualifie ce qui concerne l’Océan atlantique et les pays riverains. L’atlantisme désigne une politique extérieure caractérisée par le soutien apporté aux Etats-Unis, notamment dans le cadre de l’OTAN. Conceptualisé au début de la Guerre froide, l’atlantisme prône une étroite coopération entre les Etats-Unis, le Canada et les pays européens dans les domaines politique, militaire, économique et culturel. L’objectif avoué consiste, en principe, à assurer la sécurité des pays membres de l’OTAN (clause de solidarité de l’article 5 qui veut qu’une attaque contre l’un de ses membres est considérée comme une attaque contre tous) et de protéger les valeurs qui les unissent : démocratie, libertés individuelles et Etat de droit. L’atlantisme désigne aussi l’attitude politique, l’opinion, la doctrine de ceux qui font du Traité de l’Atlantique Nord (OTAN) la base de leur action extérieure et qui, au nom de ces principes, s’alignent de manière plus ou moins systématique, idéologique sur la politique extérieure des Etats-Unis qu’elle soit entièrement justifiée ou totalement infondée, ce qui arrive parfois.

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Un questionnement sur la finalité de l’OTAN dans l’après-guerre froide

Depuis la fin de la Guerre froide, l’atlantisme est souvent dénoncé, dans les mouvements de gauche et altermondialistes de certains pays d’Europe, mais aussi chez ceux qui se revendiquent du gaullo-mitterrandisme, comme un soutien à la politique étrangère des États-Unis et à la défense d’une conception purement anglo-saxonne du libéralisme économique. Les préjugés envers l’atlantisme sont plutôt favorables au Royaume-Uni, en Pologne, dans les pays Baltes, et défavorables en France et en Allemagne. Un atlantiste est un partisan de l’atlantisme. L’adjectif atlantiste qualifie ce qui est relatif à l’atlantisme(1). L’Atlantiste se revendique d’une vision occidentaliste et universaliste du monde consistant à prétendre se substituer aux autres peuples pour définir leurs intérêts, y compris par la force pour les plus récalcitrants d’entre eux (Cf. concept du Grand Moyen-Orient développé par George W. Bush après la guerre en Irak). On peut mesurer les effets négatifs d’une telle conception du monde à travers les expériences afghane, irakienne, libyenne. Cette approche atlantiste peut se résumer sommairement en un amour immodéré de l’OTAN(2) complété par une haine viscérale de la Russie(3).

Un retour en arrière sur l’immédiat après Seconde Guerre mondiale dans notre pays.

LA TENTATION OTANIENNE : UN MARQUEUR DE LA QUATRIÈME RÉPUBLIQUE

Durablement affaiblie sur la scène internationale après « l’étrange défaite » de 1940, la France de la Quatrième République n’a d’autre ressource que de se soumettre aux Diktats de Washington surtout à une époque où le péril soviétique est bien présent en Europe. La défaite de Dien Bien Phu ne redore pas le blason terni d’une France affaiblie politiquement, économiquement et diplomatiquement. En dépit des appels à l’aide lancés à l’Amérique pour l’aider à desserrer l’étau autour de la cuvette de la mort, Washington reste de marbre. Cela lui permettra de remplacer la France en Indochine. L’expédition franco-britannique de Suez est condamnée par les États-Unis. Les premières tentatives d’acquisition de l’arme atomique font l’objet de sévères mises en garde de Washington auquel l’OTAN emboîte le pas.

La France est accusée d’être un pays proliférateur et priée de cesser de jouer dans la cour des grands. La guerre d’Algérie vient ajouter un sujet de mécontentement américain à l’endroit de la « Grande Nation ». Mais, lorsqu’on est affaibli, il faut savoir faire bon cœur contre mauvaise fortune et se montrer un otanien discipliné et servile. Accepter sans coup férir les humiliations répétées, les Oukazes, les rabaissements… venus de Washington. Il faudra attendre le retour du général de Gaulle au pouvoir en 1958 pour que la donne change petit à petit… mais sûrement. Cela va décoiffer chez les esprits formés au moule de la servitude atlantiste.

Le retour du général de Gaulle aux affaires en 1958 constitue de ce point de vue une véritable rupture idéologique vis-à-vis de l’Amérique et de ses outils de domination, en particulier militaires.

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LE CHOIX DE L’INDÉPENDANCE NATIONALE : LE DÉSIR DU GÉNÉRAL

Seul un retour à une économie forte et dynamique permet au premier président de la Cinquième République de gagner son indépendance militaire.

Le retour de l’autonomie économiqueC’est que le général de Gaulle a quelques idées bien arrêtées sur la nature de la relation qu’il entend développer avec les États-Unis qui lui ont donné pas mal de fil à retordre pendant la Seconde Guerre mondiale et à la Libération de la France qui avait vocation à un régime de tutelle. La première de ses préoccupations consiste à rembourser toutes ses dettes aux Américains tout en mettant un terme au conflit algérien pour retrouver les mains libres. Allié fidèle en cas de coup dur, il le sera comme pendant les crises de Berlin et de Cuba. Aligné indéfectible en temps normal, il refusera de l’être choisissant la voie de l’indépendance nationale. Construire une Europe avec un moteur franco-allemand, renforcer le franc, contester la convertibilité du dollar, réclamer voix au chapitre dans les grandes décisions otaniennes… telles sont les grands axes de la politique étrangère du général de Gaulle. Contrairement à certains de ses éminents successeurs, il fait ce qu’il dit. Les actes suivent les paroles au grand dam de nos excellents amis américains très peu portés à la contradiction et au rejet de leur politique hégémonique, pour ne pas dire parfois, leur politique impériale.

Le choix de l’indépendance militaire

Qui dit indépendance économique, dit indépendance diplomatique (parler avec Moscou, établir des relations diplomatiques avec Pékin, critiquer la guerre du Vietnam lors du discours de Phnom Penh ; titiller Washington en Amérique latine et au Québec…) et indépendance militaire (parvenir au seuil nucléaire sans l’aide américaine et faire ses premiers essais nucléaires dès le début des années 1960 dans le Sahara). Toutes choses, on l’imagine, qui ne sont pas du meilleur goût pour nos alliés américains et pour toute la piétaille française grassement rémunérée pour lutter contre le terrorisme mais surtout pour cultiver un état de servitude volontaire vis-à-vis du tuteur américain.

N’ayant obtenu aucune réponse favorable à ses demandes de traitement identique à celui des Britanniques, le général de Gaulle en tire les conséquences : retrait de la structure militaire intégrée, départ de toutes les troupes américaines stationnées en France, déplacement du siège de l’OTAN de Paris à Bruxelles… Circulez, il n’y a rien à voir en France. Allez voir chez nos voisins belges ! Ils seront ravis de vous héberger à Bruxelles et à Mons pour aller vous préparer à faire la guerre… surtout après la fin de la Guerre froide. Le premier président de la République traite directement avec l’ours soviétique et avec Mao sans aller chercher ses instructions à la Maison Blanche.

En France, les vieux démons ont la vie dure. Chassez le naturel, il revient au galop. Sortie par la grande porte de l’histoire gaullienne, la pensée atlantiste revient par la petite fenêtre de l’histoire sarkozyste.

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LE RETOUR AU BERCAIL OTANIEN : LE CHOIX DE NICOLAS SARKOZY

Après quelques hésitations des successeurs directs du général de Gaulle en termes de positionnement par rapport à l’OTAN, c’est l’un de ceux qui se prétendent ses héritiers qui pratiquera la transgression, la trahison.

Les héritiers du général

Les successeurs du général de Gaulle, avec des degrés différents, maintiennent le dogme gaullien tout en se montrant plus souple sur la forme. Georges Pompidou n’aura pas le temps matériel de s’affirmer mais fait le voyage aux États-Unis sous les lazzis. Valery Giscard d’Estaing apprécie ses rencontres avec ses homologues américains, flattant ainsi son ego démesuré. François Mitterrand veut se différencier de l’homme du coup d’état permanent tout en le caricaturant mais doit, au moins au début de son premier quinquennat, montrer pattes blanches en raison de la présence de ministres communistes dans son premier gouvernement. L’affaire Farewell lui permet de démontrer qu’il est un allié fiable dans la lutte contre les menées subversives de l’URSS.

Reconnaissons-lui le mérite d’avoir proposé la création d’une confédération européenne après la chute du mur de Berlin (rejetée avec vigueur par tous nos alliés) et d’avoir interpellé George Bush père lors du sommet de l’OTAN à Rome en 1992, lui rappelant que l’Alliance atlantique n’était pas la Sainte Alliance. Quant à Jacques Chirac, il s’opposera, certes, à la guerre en Irak de 2003 mais fera assaut d’amabilités auprès de Washington pour se faire pardonner sa déviance anti-atlantiste. Il en faudra de peu pour qu’il rejoigne la structure militaire intégrée de l’OTAN. Il y renoncera dans la mesure où les Américains ne lui proposeront pas un grand commandement.

« Sarko l’américain », le capitaine de pédalo et Jupiter

Il faudra attendre l’arrivée au pouvoir en 2007 pour que « Sarko l’américain » brise le tabou en reprenant en 2009 le chemin perdu du Saint des Saints en se rangeant sous la coupe du Pentagone. Les Américains décident, les Français exécutent comme des idiots utiles. En échange, nous recevons un commandement à Norfolk en Virginie (SACT ou Commandement Suprême Allié de la Transformation). Tout est bien qui finit bien pour la France ! Le président de la République multiplie les attentions à l’endroit de ses interlocuteurs américains. Mais, contrairement à ce qu’il escomptait (ceci ne relevait-il pas de la vulgaire farce ?), les Américains et autres Britanniques ne font pas le moindre pas en direction de la politique européenne de sécurité et de défense.

L’argument est imparable en période de restrictions budgétaires, pourquoi faire mal au Berlaymont ce que l’on fait parfaitement à Evere ! C’est le règne du circulez, il n’y a rien à voir. Quant à François Hollande qui avait critiqué la décision de Nicolas Sarkozy alors qu’il était le chef de l’opposition, il n’y trouve rien à redire dès qu’il prend ses fonctions à l’Élysée. Il fait même rédiger un rapport par Hubert Védrine qui souligne les inconvénients d’un nouveau départ de la structure intégrée. Tout est bien qui finit bien. Jupiter écrase la main de Donald Trump mais essuie ses avanies successives (retrait de l’accord sur le climat, décertification de l’accord sur le nucléaire avec l’Iran, retrait de l’UNESCO au moment où une Française, Audrey Azoulay est désignée comme directrice générale Place Fontenoy…). Dans son discours sur la refondation de la Sorbonne, il se prononce pour une défense européenne en concertation avec l’OTAN, le membre de phrase qui tue. Ce qui signifie en clair que tout change pour que rien ne change ! La servitude volontaire a encore de beaux jours devant elle.

La voie est désormais libre pour tout ce que la France compte d’admirateurs de l’Amérique.

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L’AMOUR DE L’AMÉRIQUE : LES NÉOCON TIENNENT LE HAUT DU PAVÉ PARISIEN

L’américanisme touche d’abord une haute administration passée par le même moule de l’ENA qui est majoritairement néo-conservatrice.

Une haute administration passée par le même moule

Mais, il y a plus grave encore dans cette otanomania. Elle concerne toute la haute administration française (formée sur les bancs de l’ENA) qui constitue le meilleur ambassadeur des thèses néoconservatrices en France et dans les institutions internationales. Que nous dit le général Pierre Lorenzi sur le sujet : quand les hauts fonctionnaires civils trustent la quasi-totalité des directions du ministère de la défense (des armées) et des postes interministériels à vocation stratégique ?

La  qualité de l’administration civile française, la valeur de ses hauts fonctionnaires, issus pour un certain nombre de l’ENA et l’ouverture de la Défense à des savoir-faire originaux ne sont pas contestées. La Défense peut se sentir honorée de l’attrait de ces fonctionnaires civils pour la chose militaire. Mais cette tendance très nette à la substitution des personnels d’encadrement aboutissant peu à peu au monopole des personnels civils sur ces postes laisse perplexe quand on connait l’investissement de la Défense – et donc du contribuable français  – dans la sélection et la formation permanente de ses  officiers généraux. Aller chercher ailleurs ce dont la Défense dispose largement en son sein, à un moment où les contraintes budgétaires sont sans cesse rappelées, répond-il à un besoin effectif ?

Pour illustrer ces propos, observons la distribution des rôles dans l’appareil de sécurité et de défense français et les parcours universitaires et professionnels de leurs détenteurs : président de la République : inspecteur des finances ; Premier ministre : conseiller d’Etat ; ministre des Armées : conseillère d’Etat ; Secrétaire Général de la Défense et de la Sécurité Nationale : conseiller maître à la Cour des Comptes ; éphémère prédécesseur du ministre des Armées, directeur des Affaires financières au ministère de la Défense, directeur du Service Historique de la Défense, directeur des Relations Internationales et de la Stratégie au ministère des Armées, directeur de la DGSE, responsable national du contre-terrorisme, coordinateur du renseignement auprès du Président : tous diplômés de l’ENA !

Sans compter le nombre considérable de conseillers, membres et directeurs de cabinets de ces dirigeants, et la diminution considérable du nombre de militaires dans le pilotage des derniers Livres blancs de la Défense, dont l’extension à la sécurité constitue là encore un prétexte supplémentaire à la marginalisation des militaires. Plus largement, on peut s’étonner que le musée de l’air et de l’espace, à forte dimension militaire, ne soit plus dirigé par un officier général de l’armée de l’Air ou que la communication de la défense (DICOD) soit désormais pilotée exclusivement par des civils (4).

Une haute administration majoritairement néo-conservatrice

Ce que l’on dit moins est que notre élite bienpensante pense (le terme est peu approprié), parle anglais, ne rêve que d’un monde unilingue et se nourrit au lait des « think tanks » d’Outre-Atlantique, du cinéma d’Hollywood, de la chanson anglo-saxonne, privilégie le « fast food » à la gastronomie française…. Elle se montre de plus en plus incapable de penser français de parler français. À Abidjan, le président de la République, Emmanuel Macron qui avait vanté la veille à Ouagadougou les vertus de la langue française et de la francophonie (il était accompagné de sa représentante personnelle pour la Francophonie, Leïla Slimani), n’hésite pas à évoquer une task force » (pour évoquer un groupe de travail ou une force opérationnelle) et « l’intelligence » (en parlant du renseignement).

En un mot, elle est néo-conservatrice, plus néo-conservatrice que les néo-conservateurs américains-5). C’est la fable bien connue de l’élève qui dépasse le maître. Cette élite gagnerait à méditer le petit opuscule de Noam Chomsky intitulé « De la guerre comme politique étrangère des États-Unis »(6). On reste confondu au spectacle d’une haute administration formée sur les bancs des meilleures écoles de la République, en particulier de l’ENA, qui succombe aux sirènes américaines sans mesurer les impasses auxquelles conduit la diplomatie (ou l’absence de diplomatie) d’une Amérique rongée par l’hubris alors même qu’elle perd de plus en plus son rôle de nation indispensable dans le monde. Pense-t-elle que la France serait une terre de mission américaine qui se grandirait en s’abaissant au rôle de valet de Washington ?(7)

Cette dérive néo-conservatrice préjudiciable aux intérêts bien compris de la France ne semble émouvoir que quelques esprits chagrins ! Comment parler sérieusement de « souveraineté européenne » comme le fait le président de la République, Emmanuel Macron lors de son discours de la Sorbonne tout en se mettant dans le même temps sous le parapluie américain de moins en moins fiable et de moins en moins crédible depuis l’arrivée de Donald Trump à la Maison-Blanche (le président jugeant « obsolète » l’OTAN) ? Nous devenons plus otanien que les Américains alors que ces derniers deviennent moins otanien. Méfions-nous que notre atlantisme ne se transforme un jour en Atlantide, cette île mythique évoquée par Platon qui fut engloutie par les flots dans un cataclysme provoqué à l’instigation de Zeus, dieu grec que les Romains appelaient Jupiter… Telle serait la morale de cette passion française, qui dévore nos élites et qui a pour nom l’atlantisme.

Notes:

(1) www.toupie.org/Dictionnaire/Atlantisme.htm 

(2) Jaap de Hoop Scheffer, « La Turquie pose un sérieux problème à l’OTAN », Le Monde, 24 octobre 2017, p. 22.

(3) Gaidz Minassian, L’illusoire « soft power » russe, Le Monde, 24 octobre 2017, p. 22.

(4) www.asafrance.fr/item:la-defense-pilotee-par-des-hauts-fo... , 20 octobre 2017. 

(5) Juliette Grange, Les néoconservateurs, Agora Pocket, 2017.

(6) Noam Chomsky, De la guerre comme politique étrangère des États-Unis, Agone, 2017.

(7) Jean-Michel Autran, La France, terre de mission américaine, Vendémiaire, 2017.

vendredi, 08 décembre 2017

Niko Roa: El Aliado Persa

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Niko Roa: El Aliado Persa

Centro Cultural Buenavista

 

mardi, 05 décembre 2017

L'Iran en train de s'imposer au Moyen-Orient au détriment de l'Arabie Saoudite

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L'Iran en train de s'imposer au Moyen-Orient au détriment de l'Arabie Saoudite

par Jean-Paul Baquiast

Ex: http://www.europesolidaire.eu

Les forces chiite Houthis sont en voie de prendre le contrôle complet du Yémen. Elles en éliminent progressivement les représentants du gouvernement se disant légitime de Sanaa, la capitale. Elles devraient prochainement la conquérir entièrement, ainsi qu'une partie de plus en plus étendue des provinces stratégiques du sud du pays.

Elles viennent d'annoncer la mort de l'ancien président, Ali Abdallah Saleh, tué dans des affrontements à Sanaa. Celui-ci était leur allié, jusqu'au moment où il s'était enfui pour leur échapper et s'était réfugié en Arabie saoudite.Il suffit de regarder une carte du Yémen pour comprendre l'intérêt stratégique du pays au profit de celui qui le contrôle. Il commande très largement le trafic maritime dense qui circule en Mer Rouge à partir ou vers le canal de Suez.

C'est la raison pour laquelle l'Arabie saoudite, avec le soutien des Etats-Unis, s'efforce depuis des mois d'en éliminer les Houthis, tribus chiites du nord du pays, en guerre contre le gouvernement officiel, allié depuis le début des pétro-monarchies sunnites. En fait, elle a surtout bombardé les populations, détruit les cultures vivrières et engendré les morts, les famines et les épidémies qui dévastent actuellement le Yémen

Or l'Iran est en train de s'imposer comme puissance dominante au Moyen-Orient. Son objectif est de remplacer dans ce rôle l'Arabie Saoudite. Il n'est donc pas étonnant qu'elle ait décidé depuis le début de soutenir les rebelles Houthis. Bien qu'elle s'en défende, elle l'a fait en leur fournissant des armes et semble-t-il quelques contingents de combattants. Cette perspective était insupportable pour Ryad. L'Arabie avait donc décidé d'attaquer les positions Houthis avec notamment des moyens aériens considérables et des armes modernes acquis aux Etats-Unis. Mais les Saoudiens sont de piètres miliaires. Ils n'ont jamais réussi à se débarrasser des Houthis.

Ils ne réussiront pas davantage aujourd'hui, autant que l'on puisse le pronostiquer, à les empêcher de s'emparer de la partie utile du Yemen. Les efforts impuissants de l'héritier du trône saoudien Mohammad bin Salman, le montrent amplement. 

L'ennui est que, comme indiqué, ce sera inévitablement l'Iran qui profitera de cette impuissance, au détriment de l'Arabie saoudite. L'Iran vient de déclarer, par la voix de son président Hassan Rohani, que les Yéménites vainqueurs allaient faire regretter leurs actions aux "agresseurs", dans une allusion à l'Arabie saoudite. 

L'axe chiite

Mais si l'Iran est en train de cerner l'Arabie par le sud, elle est depuis bien plus longtemps en bonne voie pour le faire par le nord. Elle est l'élément le plus actif de la coalition politico-militaire dit « axe chiite » qui est en train de se former et qui réunira l'Iran, la Syrie et une partie de l'Irak. L'objectif, comme nous l'avons souvent relaté ici, est non seulement d'affirmer les Chiites en face des Sunnites, mais d'éliminer du Moyen-Orient l'influence et les intérêts américains. Nul n'ignore en effet que depuis plus de 15 ans, ce sont les politiques désastreuses de Washington qui ont provoqué de nombreux conflits et des centaine de millions de morts.

L'Iran est d'autant plus motivée aujourd'hui pour jouer un rôle déterminant au sein de l'axe chiite que le président américain affirme en toutes circonstances que l'Iran est un ennemi organique des Etats-Unis et doit donc être rapidement détruite. Pour ce faire, il semble compter en premier lieu sur l'Arabie saoudite. Un des premiers objectifs de l' « axe chiite » en cours de mise en place sera donc, même s'il s'en défende, de neutraliser une Arabie alliée de Washington.

La Russie, pour sa part, a toujours encouragé l' « axe chiite », notamment à travers Damas et dans une moindre mesure Téhéran. Il est en effet vital pour elle de résister aux efforts américains qui cherchent à l'éliminer de la région, et notamment de ses bases en Syrie.

Mais peut-on craindre qu'elle profite des échecs de Ryad pour prendre des postures beaucoup plus agressives à l'égard de la coalition militaire américano-arabe, et au profit de Téhéran. Cela ne semble pas être dans le caractère de Vladimir Poutine, qui a toujours préféré les négociations. Au Moyen-Orient, certes, il n'acceptera jamais de se voir éliminer au profit de Washington, avec l'appui des Saoudiens. Cependant, il continue à entretenir différents types de dialogues avec ceux-ci. On ne doit sans doute pas, à Moscou, renoncer à la perspective de relations apaisées avec les monarchies sunnites. 

dimanche, 03 décembre 2017

Les Etats-Unis continuent à développer une scission entre la Russie et l’Europe

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Les Etats-Unis continuent à développer une scission entre la Russie et l’Europe

par Eberhard Hamer,

professeur en économie, Allemagne

Ex: http://www.zeit-fragen.ch/fr

Récemment, le Département d’Etat américain a présenté une nouvelle liste des sanctions contre la Russie. Il remplit ainsi une exigence signée par le Président Trump le 2 août, intitulée CAATS (Countering America’s Adversaries Through Sanctions Act). Ce règlement prend effet le 29 janvier 2018 et comprend une nouvelle attaque de la guerre économique contre la Russie, concernant non seulement des entreprises russes, mais en premier lieu les entreprises européennes réalisant des affaires avec des entreprises russes sanctionnées.


L’accentuation de cette nouvelle guerre économique correspond entièrement à la devise trumpienne de l’«Amérique d’abord». S’agissant par exemple des sanctions contre les entreprises russes et allemandes participant à la pipeline North Stream, le but avoué est de couper l’Europe du gaz russe, afin de mieux lui imposer l’achat de gaz liquide américain plus cher, actuellement disponible en abondance mais sans aucun acheteurs trouvé. Il faut donc que le gazoduc North Stream soit interrompu à mi-chemin, tout en menaçant en même temps les entreprises allemandes impliquées, pour stopper leur participation.


Toutes les sanctions américaines sont punissables aux Etats-Unis, car la justice américaine soumet au droit américain toutes les affaires accomplies dans le monde entier et facturées en dollar ou effectuées à l’aide du dollar. Tout endroit, où le dollar est utilisé, est un territoire soumis à la juridiction et à l’hégémonie américaine. Cela permet aux Etats-Unis de condamner et d’exploiter à volonté les sociétés européennes. Seul VW a déjà dû payer 25  milliards d’euros à la justice américaine à cause des normes US spécialement introduites contre les moteurs diesel. La Deutsche Bank, quant à elle, a dû régler plus de 10 milliards et d’autres multinationales européennes des montants de différentes hauteurs.


EH-visionen.jpgL’acte américain CAATS prévoit que toutes les sanctions doivent être harmonisées avec les partenaires étatsuniens. On ne peut donc guère l’exprimer plus ouvertement: les sanctions ne seront poursuivies que là où elles nuisent aux partenaires américains au niveau de la concurrence. Finalement, les entreprises américaines restent les instances décisionnelles des sanctions.


De cette manière, les Etats-Unis veulent non seulement isoler systématiquement la Russie de l’Europe et empêcher les sociétés russes de réaliser quelques affaires que ce soit avec l’Europe, mais ils veulent également menacer de peines (et d’exécution de peines) le reste du monde et notamment l’Europe, si un commerce a lieu avec des entreprises russes. Cela a des conséquences considérables en Europe, où le commerce avec le marché de l’avenir le plus optimiste (Russie) a diminué de 30% au cours des deux dernières années. Parallèlement à la réduction du commerce européen avec la Russie, le commerce américain avec ce pays a augmenté. Il ne s’agit donc non seulement de causer du tort à la Russie, mais aussi de soutenir l’idée «America first» [«Amérique d’abord»], c’est-à-dire empêcher l’Europe de faire des affaires avec la Russie, là où les entreprises américaines veulent et peuvent les accomplir.


Il est difficile de s’imaginer une manière plus brutale d’effectuer l’impérialisme économique américain au détriment de l’Europe. Non seulement les grandes entreprises n’osent plus faire du commerce avec la Russie ou participer à des investissements russes – mais également des centaines d’entreprises de grandeur moyenne, ayant jusqu’à présent bien commercé avec la Russie, n’osent plus continuer leurs affaires, parce qu’ils ne survivraient pas à des brutaux paiements de sanction américains.


Aux Etats-Unis se prépare encore un nouveau durcissement de la guerre économique contre la Russie: on veut interdire aux banques européennes et même à des privés de commercer ou de tenir des emprunts russes. Ainsi, on veut punir la Russie de ne plus vouloir accepter le dollar comme seul monnaie mondial, mais de vouloir imposer le rouble comme moyen de paiement international. En outre, on veut empêcher les marchés financiers européens d’utiliser le rouble au lieu du dollar et de ne plus du tout travailler avec des emprunts en roubles.


De telles mesures unilatérales nuisent à l’Europe et devraient être discutées avec les alliés européens. On aurait au moins pu s’attendre à des protestations de la part de la Commission européenne et du gouvernement fédéral allemand. Mais non, pas de réaction! L’UE cède sans broncher à la puissance coloniale, même là où cela fait mal.


Isoler la Russie de l’Europe est non seulement fatale à court terme pour une partie de notre économie, mais à long terme pour toute notre prospérité en Europe: la politique de l’«Amérique d’abord» au profit des sociétés américaines rend maintenant déjà tout commerce avec les Etats-Unis de plus en plus difficile et le réduit fortement. Cela aura des conséquences dramatiques, quand le système pourri du dollar des Etats-Unis surendettés s’effondra.


A long terme, la Russie va continuer à augmenter sa solvabilité, mais à l’avenir, elle aura également besoin de l’économie européenne. L’économie allemande continuera uniquement à croître jusqu’en 2050, si elle s’élargit vers l’Est. La Russie dispose de toutes les matières premières dont nous avons besoin et nous avons toutes les technologies dont la Russie a besoin. Pour les deux pays et pour l’Europe, cette coopération est décisive pour la prospérité durant un siècle.1 Si nous nous laissons évincer par les Etats-Unis, les entreprises américaines concurrentes vont conquérir ce marché et nous resterons les perdants.


Mais qui ose, en Allemagne ou en Europe, s’opposer au comportement arbitraire des Américains?   

1    cf. Hamer, Eberhard, Visionen 2050. Wohin steuern wir? Trends und Prognosen für Deutschland und Europa. [Vision 2050. Où nous dirigeons-nous? Tendances et prévisions pour l’Allemagne et l’Europe], Kopp Verlag 2016

dimanche, 26 novembre 2017

European Union, Euro-skepticism, Western Civilization, Eurasianism and Slavic World

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European Union, Euro-skepticism, Western Civilization, Eurasianism and Slavic World

Boris Nad (Serbia) interviews Robert Steuckers (Brussels)

Q.: The European Union, in fact the entire European continent, is in a deep crisis today. The impression is that this crisis is primarily the result of a crisis of ideas. Political ideologies, and first of all liberalism, are deplored, obsolete, anachronistic. We can also say the same for other parts of the political spectrum. Do you share this impression?

A.: Well, the first idea that comes in my mind is one derived from Moeller van den Bruck’s articles in the Twenties : the people that have adopted and assimilated liberalism die after some decades because they will have lost their organic stamina. Liberalism is thus a disease before being a mere mentality. Liberalism and modernism are akin because both refuse to accept permanencies in the political City. In the 17th century, you had on philosophical and literary level the so-called quarrel between the Ancients and the Moderns, which took several aspects, some of them may well be considered retrospectively as positive but nevertheless there is an etymological connection between “modernism” and the French word “mode”, i. e. fashion, “mode” being always transitory and can be changed at will. When you consider all things political as mere “modes”, you thrive to escape the very pressure of reality which is made of time and space. All necessities, derived from the acceptance of the limits implied by time or space, are perceived by the Moderns as burdens that you should get rid of. Today you don’t even have to try to get rid of them but to wipe them out thoroughly or to transform them so that they acquire a new fully artificial and therefore transitory dimension. This is the essence of liberalism. But even if liberalism has its roots in the 17th and 18th centuries, it has never been, at least after the Battle of Waterloo in 1815, a powerful political movement, the conservative or Christian democratic in a first period, the socialist movement in later decades could temper liberalism’s rejection of realities and permanencies. Even if the official liberal parties, being more liberal-conservative than liberal in the Anglo-Saxon meaning of the word, were rather quantitatively weaker than the two other main political families in Europe, the anti-political spirit that was indeed the fundament of its core ideology could ran into the thoughts of the Christian democrats (despite the Church doctrine) and of the social-democrats (despite their watered down Marxism). Gradually the conservative, the Christian democrats and the social-democrats took over most of the ideas of basic liberalism.

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France was partially spared because it had a “caudillist” leadership introduced by De Gaulle in 1958 after the collapse of the 4th Republic, that was genuinely liberal. The personality of the President could prevent the liberals and the main parties to phagocytize the political body. But this was only a respite as we’ll see. In 1945, Europe was destroyed by the war. It took a bit more than a decade to recover, especially in Germany. But once the horrors cleared, Europe could reach economic power again. France in the Sixties, being a permanent member of the Security Council of the United Nations, could claim more independence within the West. For the United States, it was time to inject a new and stronger dose of liberal poison into the European political bodies. The United States has as ideology all the poisons needed to contaminate the world, i. e. not only the reality denying Enlightenment you find in Western Europe but also the basic puritanical denegation of the medieval European heritage, a denegation that was sweetened during the first decades of the 18th century by the deist movement and the Whigs. The American colonists developed the sense of a mission in the world that combined puritanical fanaticism and enlightened liberalism, apparently softer but nevertheless radical in its hate against inherited traditions and institutions.

affiche_07.jpgThe more radical underlying principles were adapted to the Zeitgeist of the Fifties and the Sixties by think tanks lead ultimately by the OSS (“Office of Strategic Studies”). This created the perverse corpus of May 68 that was launched into Germany and France. Both countries could resist in the Seventies although their societies were all the same contaminated by the bacillus that was eroding gradually their traditional psychological assets.  A second wave had to be prepared to give all the Western societies the last blow to let their political bodies crumble down. Next to the May 68 ideology, more or less derived from the Frankfurt School, a new weapon was forged to destroy Europe (and partly the rest of the world) more efficiently. This weapon was the infamous Thatcherite neoliberalism. At the very end of the Seventies, neoliberalism (be it Thatcherism or Reaganomics) was celebrated as a new liberation ideology that was about to get rid of the political State-centered praxis. Neither the Christian democrats nor the social-democrats were able to resist staunchly and to remember their supporters that the Church doctrine (based on Thomas Aquino and Aristoteles) or the interventionist socialist tradition were genuinely hostile to such an unbridled liberalism. Economics became more important than politics. We entered at that very moment the so-called post-history where no marks were still to be found. Even worse, the corrupt “partitocratic” system, in which Christian democrats and social-democrats were painfully muddling through, prevented any rational reaction and any challenge from new parties, blocking the democratic process they so vehemently pretend to incarnate alone.

Europe is now in a blind alley and seems unable to escape the liberalism of May 68 as well as neoliberalism as new challenging forces seems unable to gather enough votes to get into power effectively. You have to take into account that the conventional forces have been in power since almost 70 years and have literally occupied all the institutions by nominating officers at all levels, who couldn’t be replaced instantaneously by new really efficient people. Challengers risk launching newcomers into realms they are unable to master.  

Q.: Europe is, as you say, in a blind street. The European Union has been hit by a political, economic, immigrant crisis ... Then a wave of terrorism followed. European political bodies and institutions seem paralyzed. So far, European integration was threatened by so-called Euro-skeptical movements. It seems that today we are at the beginning of a wave of secessionism, like the one in Catalonia, which shakes many European countries. What is your relationship to that?

A.: Some secret services beyond the Atlantic have as a policy to weaken Europe by regular non military attacks typical of the so-called “Fourth Generation Warfare”. Economic stratagems, stock exchange manipulations are the usual tricks used by those whose main aim is to prevent Europe to develop fully, to find a better autonomy in all political and military matters, to reach a quite high welfare enabling rewarding R&D, to develop a strong commercial relationship with both Russia and China. Therefore Europe should constantly be undermined by all kind of troubles. Chirac’s France was the best example, beyond the well-known psy-ops that the “color revolutions” are. France is still a nuclear power but cannot develop this capacity beyond a certain level: in 1995, when experiments where performed in the Pacific Ocean, Greenpeace, as a pseudo-ecological movement tried to torpedo them. But on French territory, strikes paralyzed the country, orchestrated by a socialist trade union that had been anti-communist in the Fifties and had received support by the OSS. Social-democrats and socialist trade-unionists had secretly an Atlanticist support what’s often forgotten nowadays.

To get rid of Chirac, who had supported a phantom alliance between Paris, Berlin and Moscow at the time of the 2003 Bush’ invasion of Iraq, the activists among the African migrants communities in the dreary suburbs near Paris launched a series of violent riots in November 2005 after a first minor incident that caused accidentally two deadly casualties. Eventually the riots extended to other cities like Lyon and Lille.

carteemeutes.jpgAs the New Right writer Guillaume Faye had previously told it: France in the present-day situation is totally unable to reestablish law and order when riots spread in more than three or four big urban areas. The riots lasted the time needed to promote a new previously obscure petty politician, Nicolas Sarközy, who promised to wipe out the troublemakers in the suburbs and did of course absolutely nothing once in power. Charles Rivkin, US ambassador in France is the theorist of this “4th Generation Warfare” operations aiming at exciting migrant communities against law and order in France (see: http://euro-synergies.hautetfort.com/archive/2011/03/21/t... ). This vicious strategy was only possible in France ten or twelve years ago as no other European country had such a huge amount of migrants among its population. The refugee crisis that hit Germany in 2015 is a next chapter in the sad story of Europe’s submersion and neutralization. Germany has now to face the same violent communities as France did and does. The purpose is evidently to weaken the country that is thriving industrially due to the excellent commercial links it has with Eurasia in general. The aim of the British and American secret services has always been to prevent any German-Russian connection. Now Germany is weakened by the critical mass of the million fake refugees that will rapidly let collapse the social security system that has always been the peculiar mark of German social systems (be they Bismarckian, national-socialist, Christian-democratic or social-democratic).

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The complete destabilization of the European industrial societies (Sweden, France, Germany, Italy and partially the Low Countries) lead to social and political shifts that sometimes take the shape of so-called “populist movements” that the media frantically label as “extreme rightist” or “neo-fascist”, in order to stop their development. Till now they have been unable to get a serious share of power, the conventional parties having infiltrated all institutions (press, media, justice, banks, etc.). In Spain, which is a poorer country that doesn’t attract the migrants as the given material advantages are less interesting, the only possible lever to launch a “4th Generation Warfare” operation against the country was the Catalan micro-nationalism. If Catalonia secedes, one of the most industrialized provinces of historical Spain will leave a commonwealth that exists since the marriage of Isabella of Castile and Ferdinando of Aragon in 1469. This would mean a serious setback for Spain, which is already fragile, and would have to depend from the neighboring countries, i. e. from an also destabilized France and a Germany that has to cope with its refugee problem and with an erosion of its social security system, leading to general dissatisfaction, to a rejection of the conventional political parties and eventually to a further development of the challenging AfD-party, whereby Merkel becomes unable to build an ideologically coherent majority for her next government.

My position is to say that all this problems currently jeopardizing Europe’s future have not occurred by pure coincidence. They are all linked together even if, by saying that, I’ll inevitably be accused of manipulating a “diabolical causality” or to adhere to “plot theories”. But I don’t see the Devil here as a supernatural being but I simply use the word as an easy image to stigmatize real forces and endeavors that try to shape the world according to their own interests. But on this same chessboard, the Europeans are unable to spot the enemy and to define their own interests.

RS-EEb.jpgQ.: In 2016, you published the book The European Enterprise: Geopolitical Essays. It explores the historical, cultural and spiritual foundations of the main European empires, i.e. the Reich principle, which is not equivalent to "nation" (If I understand it well), you consider that the natural development of Europe has been hampered or avoided by the "Western civilization". You pay special attention to the "Russian theme" - the Russian space and the concept of Eurasia. Why is it necessary in the era of globalization or attempts by the United States to impose itself as a world hegemon, or to "globalize" its own political and economic model?

A.: Indeed I’ve explored and I’ll continue to explore the European past as amnesia is the worst illness a political body can suffer of. You cannot think Europe without thinking simultaneously the notion of Empire and the so-called “Roman form”. Carl Schmitt was very conscious of being the heir of the “Roman form”, be it heathen/imperial or Catholic or inherited by the “German Nation”. No one is currently denying the importance of Schmitt in the realm of political theory. Some circles of the American New Left, like the “Telos Press”, have even promoted his works in the New World beyond all the hopes the few German students of Schmitt’s works had ever dreamt of. The Roman Empire was geographically and hydrographically based on the Mediterranean Sea and the Danube River: the “Middle Sea” assuring communication between the Rhone Valley and Egypt, between Greece and Hispania, etc. and the Danube link between Southern Germany and the Black Sea and beyond this Pontic Area the legendary Colchis and Persia what will later be mythologized by the Chivalry Order of the Golden Fleece created by Philip, Duke of Burgundy in 1430.  

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After the fall of the Roman Empire, there was the well-known “translatio imperii ad Francos” and later, after the Battle of Lechfeld in 955, a “translatio imperii ad Germanos”. The central part of Europe became so the core of the Empire, being centered now on the Rhine, the Rhone and the Po. The Danube axis was cut at the level of the “Iron Gates” beyond which the Byzantine area extended far to the East. The Byzantine Empire was the direct heir of the Roman Empire: there the legitimacy was never disputed. The Mount Athos community is a spiritual center that has recently be fully recognized by the Russian President Putin. The Roman-German Empire (later Austrian-Hungarian), the Russian Empire as heir of Byzantium and the Mount Athos religious community partake the same symbols of a golden flag with a black double-headed eagle, remnant of a very old Persian traditional cult where birds assured the link between Earth and Heavens, between men and the gods. The eagle being the most majestic bird flying to the highest heights in the sky, it became obviously the symbol of the sacred dimension of Empire.

archange.jpgLiving within the territorial frames of an Empire means to fulfill a spiritual task: to establish on Earth a similar harmony as the one displayed by the celestial order. The dove symbolizing the Holy Spirit in Christian tradition has indeed the same symbolic task as the eagle in imperial tradition: assuring the link between the Uranic realm (Greek Uranus/Vedic Varuna) and the Earth (Gaia). As the subject of an Empire, I’m compelled to dedicate all my life trying to reach the perfection of the apparently perfect order of the celestial bodies. It’s an ascetic and military duty featured by the archangel Michael, also a figure derived from the man/bird beings of the Persian mythology that the Hebrews brought back from their Babylonian captivity. Emperor Charles V tried to incarnate this Chivalry’s ideal despite the petty human sins he consciously committed during his life. He remained truly human, a sinner, and dedicated all his efforts to keep the Empire alive, to make of it a dam against decay, which is the task of the “katechon” according to Carl Schmitt. No one better than the Frenchman Denis Crouzet has described this perpetual tension the Emperor lived in his marvelous book, Charles Quint, Empereur d’une fin des temps, Odile Jacob, Paris, 2016. I’m reading this very thick book over and over again which will help me to precise my imperial world view and to understand better what Schmitt meant when he considered Church and Empire as ‘katechonical” forces. This chapter is far from being closed.

CrouzetCHV.jpgCrouzet explains in his book that the German and European Reformation wanted to “precipitate” things, aspiring at the same time to experiment lively the “eschaton”, the end of the world. This precipitation theology is the very first outward sign of modernism. Luther in a quite moderate way and the other actors of Reformation in an extreme way wanted the end of a world (of a historical continuity) they considered as profoundly infected by evil. Charles V, explains Crouzet, has an imperial and “katechonical” attitude. As an Emperor and a servant of God on Earth, he has to slow down the “eschaton” process to preserve his subjects from the afflictions of decay.

After Luther the extreme puritanical elements of Reformation in Northern France, Holland, Münster and Britain will render this “precipitation theology” even more impatient, even again Anglican England and Anglican rule in the Thirteen Colonies of Northern America, as tragic events testify it like the beheading of King Charles I due to Cromwell puritanical revolution. This way of seeing history as a deep malediction has been inherited by the Founding Fathers in the future United States. With the deist tradition in England and in the Whig political tradition both in Britain and Northern America, this “precipitation theology” will be skillfully rationalized and given an enlightened varnish that will culminate in President Wilson’s design to purge the world of evil. The “precipitation philosophy” (and not “theology”) of French philosophers will lead to a secular political eschatology under the shadow of the guillotine, under which all those who were supposed to slow the process had to perish preventively. After Wilson, several American diplomats will coin principles preventing the very sovereignty of States to express itself by launching all kind of pro-active projects with or without wars. Since the collapse of the Soviet system, the rationally disguised “precipitation theology” will once again run amuck. You know the results: catastrophe in the Balkans, stalemate in Iraq, endless war in Syria and Afghanistan. “Precipitation theology” as feature of the Western world, of the world lead by the Western hemisphere or by the realms West of Western Europe or of Central Europe, offers no valuable solution to the problems that inevitably occur in the imperfect world under the perfect Uranic Heavens. The views of Charles V consisted in slowing down the process and in leading moderate military operations against the rebels. It was a better stance anyway. 

In the Nineties, I discovered that China and many other Asian countries developed an alternative way to harmonize international relations, excluding among other things the post-Wilsonian principle of intervening violently in other countries’ affairs. This is the principle adopted not only by Xi Ping’s China today but also by Putin and Lavrov. The Chinese alternative excludes for instance the policy of “regime change” that has thrown Iraq and Syria in these atrocious civil wars the previous Baathist regimes could wisely but nevertheless ruthlessly avoid. But isn’t it better to have a ruthless “katechonical” although imperfect regime than to see hundreds of thousands innocent people killed in senseless attacks, bombing, shelling or Taliban/Salafist slaughters? The “precipitation theology” of post-puritanical/neo-Wilsonian America and of Salafist Muslims has created chaos in otherwise seemly calm countries. Didn’t Luther himself warn his contemporaries that the Devil was able to use the theological speak (or “newspeak”) to dupe the people?

Russia is important in this general frame of a “katechonical” interpretation of history as an antidote to the “crazy eschatological” one. Russia is heir of Byzantium also direct heir of the “Roman form”. It was considered as the stronghold of conservatism before 1917, even if this conservatism was fossilized by Konstantin Pobedonostsev as Dmitri Merezhkovski, who rejected later all the aspects of the Soviet revolution, could observe. Russia hasn’t experiment the traumatic 16th century Reformation and its contemporary iconoclast rage and was later preserved from the silliest deist or frenchified philosophy of the 18th century. This doesn’t mean that Russia was a backward country: Catharina II was a female enlightened despot that has made of Russia a great power; Alexander I had traditional and appeasing ideas on religion, that we should study attentively now after the Syrian disaster; Alexander II modernized the country at full speed at the end of the 19th century and could wipe out the disadvantages Russia had inherited from the 1856 Paris Treaty after the Crimean War, etc. But Russia, except during the first decennia of the Bolshevik regime, seems to have remained immune to the dangerous toxicity of “precipitation theology”.

The Byzantine style of developing chess-like strategies instead of looking for immediate retaliation or aggression has finally inspired Russian diplomats and statesmen. Byzantine style and Chinese Confucian harmony can serve nowadays as practical alternative models in a Western world confused by media propaganda which has ceaselessly conveyed a modernist post-puritanical form or another of “precipitation theology”. Therefore the Eurasian idea, provided it conveys this “katechonical” precipitation-less ideas similar to those Charles V wanted to apply in his Empire before confronting the Ottomans, is the real alternative to a world that would otherwise be ruled and perverted by a superpower that draws his principles from the craziest adepts of the former “precipitation theology” of its own “Founding Fathers”.

chevbouc.jpgI could add that a “precipitation theology or ideology” doesn’t express itself by all sorts of millennial pseudo-religious babbling claptrap like the one which is predicated for instance in Latin America but can also act as an economic fundamentalism like the neoliberal craze that affects America and Europe since the end of the Seventies. Puritanism can also quite often be reversed in its diametral contrary i. e. postmodernist debauch what explains that millennials, femens, pussy rioters, Salafists, neoliberal “banksters”, media moguls, color revolutionists, etc. follows on the international chessboard the same “4th Generation Warfare” agenda. Aim is to destroy all the dams civilization has set to serve the “Katechon” or the Aristotelian  “Spoudaios”. We must define ourselves as the humble servants of the Katechon against the pretentious designs of the “precipitators”. This means serving the imperial powers and fighting the powers that are perverted by the “precipitators”. Or having a Eurasian option and not an Atlanticist one.

Q.: You are a supporter of Eurasianism. It clearly separates you from those who share the hard-line nationalist positions and many thinkers, or alleged thinkers from the right. Your geopolitical thought is, as you say, a response to the thought of the American strategist of Brzezinski and is deeply rooted in European tradition. Can you basically explain your geopolitical conception?

A.: You could indeed count me among the supporters of a neo-Eurasianism but the roots of my own Eurasianism are perhaps quite different than those attributed to traditional or new Russian Eurasianism; nevertheless these different perspectives do not collide as antagonisms; on the contrary they could perfectly complete each other to promote a worldwide anti-system resistance movement. The most important thing if you want to develop a strong Eurasianist movement is to have simultaneously a wide vision on the history of each political historical component of the combined territory of Europe and Asia and to give oneself for task to study it by looking for convergences and not for enmities. This had already been suggested by Prof. Otto Hoetzsch in the Twenties and Thirties for West Europe and Russia. Therefore one first step would be to find as far back as possible in history a convergence between West European powers and Russia as a Eurasian entity. Peter the Great, as you know, connected Russia to Europe by opening a window on the Baltic Sea, leading unfortunately to a vicious war with Sweden at the beginning of the 18th century. But after the vicissitudes of the Seven Years’ War (1756-1763), France, Austria and Russia were allies and the territory of their realms extended from the Atlantic to the Pacific, being de facto a Eurasian alliance. Leibniz, who was not only a philosopher and a mathematician but also a diplomat and a political adviser was in a first step quite distrustful in front of Russia as a new power because it could have been a new “Mongol Khanate” or a “Tartary” threatening Europe. In a second step, seeing with benevolence the development of Peter’s Russia, he started to perceive gigantic Russia as the necessary territorial link that would enable communications between Europe and the two old civilizational spaces that were at his time China and India, that had a quite higher level of civilization than Europe at that time, as present-day historians remember it, like Ian Matthew Morris in Britain (in: Why the West Rules – For Now…) and the Indian teaching in England, Pankaj Mishra (in: From the Ruins of the Empire and Begegnungen mit China und seinen Nachbarn). Pankaj Mishra is a typical Third World ideologist displaying some sort of resentment against the West, more specifically against the former British rule in India. 

During the short period when France, Austria and Russia were allies important Eurasian designs avant la lettre were initiated: the development of a strong French fleet in order to avenge the disastrous defeats of Louis XV in Canada and India during the Seven Years’ War, the exploration of the Pacific Ocean by Russian and French sea captains, the common efforts of Austria and Russia to liberate the Balkans and the Northern coast of the Black Sea with Crimea as the main territorial asset enabling to settle a first important Russian navy base in the Pontic area. The French fleet defeated the English in Northern America in 1783 which made possible the complete independence of the United States (!). Russia could conquer Alaska, build a stronghold in California and contemplate a strong Russian-Spanish alliance in the New World. Russian sailors could land in the Hawaii Islands and claim them for their Czar. The French explorations in the Pacific were on many levels very fruitful and one should never forget that Louis XVI some few minutes before going up the stairs of the scaffold where he was to be guillotined asked news of La Pérouse, who had been lost while exploring the Northern shores of the Pacific. This first Eurasian design avant la lettre was torpedoed by the French revolutionists paid and excited by the English and Pitt’s secret services according to the historian Olivier Blanc (in: Les Hommes de Londres, histoire secrète de la Terreur, 1989). Pitt wanted to get rid of a regime that promoted the development of a fleet and had outlined the guidelines of French world politics.

dostoWrDi.jpgThe second Eurasian project avant la lettre was the very short-lived “Holy Alliance” or “Pentarchy” created in the aftermath of the Treaty of Vienna in 1814. It allowed the independence of Greece but failed after the independence of Belgium when England and France helped to destroy the United Kingdom of the Netherlands. The “Holy Alliance” definitively crumbled down when the Crimea War started as two Western powers of the “Pentarchy” clashed with Russia. The Anti-Western affect spread widely in Russia and the core ideas of it are clearly outlined in Dostoyevsky’s main political book,  A Writer’s Diary, written after his Siberian exile and the Russian-Turkish War of 1877-78. The West permanently plots against Russia and Russia has to defend itself against these constant endeavors to erode its power and its domestic stability.

But now back to Eurasia: two important books have been published in recent years that should be the bedside books of all those who are animated by the Eurasist idea:  Prof. Christopher I. Beckwith’s Empires of the Silk Road – A History of Central Eurasia from the Bronze Age to the Present (2009) and Peter Frankopan’s The Silk Roads – A New History of the World (2015). Beckwith’s book is the most complete panorama of Eurasian history: the core ideas from his captivating chapters I now constantly keep in mind are first the fact that in a very far past Indo-Iranian horsemen tribes coined sets of rules that determined all the future organization schemes of kingdoms and empires on the Silk Road; second, Beckwith states that modern times and modern ideologies ruined completely the sublime accomplishments of the Central Asian realms throughout the ages. A new Eurasianism should then have as main task to restore the spirit that allowed these extraordinary achievements. Prof. Beckwith masters a good dozen of ancient and modern languages spoken or having been spoken in Central Asia, a tremendous wide knowledge that enables him to understand more thoroughly the old texts and the very spirit that enhanced the thriving of kingdoms and empires.  

PFsilk.jpgPeter Frankopan’s book is more factual but also enables to criticize the Western arrogant attitude namely in Iran. The chapters in his book dedicated to old Persia and modern Iran would allow diplomats to settle bases for a renewed cooperation between European powers and Iran, provided, of course, that Europeans really would abandon the guidelines dictated by NATO and the United States. Eurasianism compels you to study history more thoroughly than the present-day Western way of leading policies in the world. Facts shouldn’t be ignored or disregarded simply because they don’t fit into the schemes of the superficial interpretation of the Enlightenment the Western powers are currently handling, provoking at the same time a concatenation of catastrophes.

Indeed the intellectual acceptation of the excellence of past and present Asian or Central Asian traditions and the will to pacify the immense territory between Western Europe and China lead us to dismiss the Brzezinski project of launching a permanent war (as an updating of the Trotskite project of “permanent revolution” that the neocons partook in a “former life”) and to favor the Chinese “One Belt, One Road” project, which is the only serious project for the 21st century.

Q.: The United States itself today is undergoing a difficult and comprehensive crisis. Trump and trumpism are certainly not the cause but the consequences. On the other hand, with the rise of Russia and China, the geopolitical situation in the world has changed, the world is no longer unipolar. Hal Brands for liberal Bloomberg notes that US foreign policy has reached its historic critical point, that the project of globalization of its political model faces failure, that the main goal of the US in the future will be to defend the „world's liberal order“. In other words, the time of American hegemony is nearing its end, and the events in the Middle East, in Syria, as it seems, speak in favor...

A.: This is not a question of yours but a general statement that easily be shared by alternative minds. The crisis the United States are undergoing nowadays can be explained by the inadequacy of the religious/ideological core of its „deep state“ in front of the plurality of actual or potential world views that could be as efficient as the mix of religious puritanism, deism and wilsonism that gave the United States an incredible strength during the 20th century. The puritanical core of radical protestantism, as seen in Dutch or British history at the time of the iconoclasts or Cromwell’s Roundheads. The attitude of these radicals is a savage rejection of past heritages and a will to eradicate everything that’s judged „impure“ or „belonging“ to a „bad past“, exactly along the same lines the Wahhabites are currently working in the Near East. If you share such views you start indeed an eternal war against the entire world. But this is practically impossible on the long run. Resistances emerge permanently and some countries or civilizational areas can always be considered as breakwaters, especially as they have enough power or space to avoid invasion, i. e. if they can offer a sufficient „mass“, as Elias Canetti once wrote, to resist on the long term. Even Afghanistan is a „mass“ able to resist but of course not to reverse the trend. Russia and China can together offer such a „mass“ but the struggle will nevertheless be hard as the Latin American part of the BRICS has more or less be compelled to surrender or to weaken its position. Venezuela undergoes a „color revolution“ that risks to bring it back in the so-called backyard of the United States.

In the near future, the United States will as a consequence try to keep its domination on Western Europe (even if on the other hand they try to weaken it through uncontrolled migrations and Soros initiatives), on Latin America and especially on Africa, where they develop a new form of imperialism through the AFRICOM command structure to counter the Chinese and to kick the French out of their „Françafrique“, while wooing them to participate in the process of their own neutralization! Nevertheless this policy is due to fail as such an ubiquitous control is impossible on the basis of a mass of 350 millions taxpayers.  Such a „mass“ has been useful till the end of the 1990s as it allowed the Atlantic superpower to launch military and civilian R&D programs that could be made profitable on all levels in a sufficiently short term to build up the real hardpower of Washington and to be always ahead of their opponents. But 350 millions consumers and taxpayers are now no longer sufficient to sustain the competition.

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Detroit's crumbled down theatre

The project of a „Big Society“, which would have given the American citizens a social security system as in Europe, has been hampered by the Vietnam war. The Reaganomics ruined huge urban areas such as Detroit. At the end of the line, American society has become steadily unstable, the racial issues and the ubiquitous drug problem making both the situation even more complicated: these two issues may let us conclude that the Soros initiatives aim deliberately at creating an even worse racial situation in Europe so that European nations couldn’t be able to challenge the former main superpower of the West and that the drug problem is in a certain sense a serious backlash if you keep in mind that drugs were introduced in the 1960s due to special CIA ops in Laos and Burma where Chinese opponents were cultivating the weeds in order to finance potential nationalist insurrections in Maoist China. The secret services’ support to drug smugglers allowed indirectly a financing of the Vietnam war that Congress would never have voted. Drugs, unsolved domestic conflicts in race mixed areas and neoliberal Reaganomics were and are all expediencies that have left behind significant marks in the American society and, above all, created a junk culture they cannot get rid of anymore. The countries that will be strong enough to resist to the effects of this junk culture and to reject it will be resilient. The other ones will perish slowly.    

Q.: You learn Russian and studied Russian culture. Also, in your research, you have paid special attention to the traditions and ethnos of the East of Europe. For example, to Scythians, the indo-European ethnicity that inhabited the Eurasian steppe, south of Russia, and is extremely important in the ethnogenesis of the Slavs. Slavic cultures, including the Serbian and the Slavs of Balkans, unfortunately, have not been sufficiently studied in the West of Europe. Do you have the impression that the Slavic heritage is not only not well known, but also systematically suppressed and underestimated in Western Europe?

A.: I never learned Russian properly but it’s true that as teenagers my friends and I were seduced by Russian history and fascinated by the conquest of Siberia from the Urals to the Pacific Ocean. When I started to publish my journals at the beginning of the 1980s, I was deeply influenced by a German cultural and political trend that had emerged a couple of years before. This trend took into account the nationalist elements of the left-wing movements since the 19th century and also all the diplomatic traditions that had favored an alliance between Germany and Russia (or the Soviet Union). The Germans, but also the people in the Low Countries, were upset because the US Army had deployed deadly missiles in Central Europe, compelling the Soviets to do the same so that in case of war Central Europe would have been definitively nuked. No one could accept such a policy and the result of that was the birth of the pacifist neutralist movement that lasted till the fall of the Berlin Wall and that allowed incredible convergences between left-wing and conservative or nationalist groups.

In the frame of this movement, we started to translate or summarize German texts or debates in order to show that history could have been different and that the will to analyze the past with other eyes could open perspectives for a different future. We didn’t reduce our research to German questions but broaden it in order to see things from an “All-European” point of view. We stated of course that history had been reduced to Western European history, what was an intellectually unacceptable reductionism that I could spot very early by reading some books on East European countries while writing down an end paper at the end of my secondary school studies. My friends and I didn’t reduce our readings to contemporary history but widen them to medieval and ancient history. So we were attracted by the Scythians, namely after having read a book of the French historian Arthur Conte, where he reminded us that many Slavic people trace back their origins not only from Slavic tribes but also from Sarmatians knights, including those who had formerly built up the cavalry of the Roman Legions.

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The Sarmatian element is not only important for Slavic people but also for the West that has tried to wipe out this heritage from the collective memory. Nevertheless, British historians, with the help of Polish colleagues, admit now that Sarmatian Knights are at the origin of the Celtic Arthurian myths, as the Roman cavalry in Roman Britain was partly or mainly composed of Sarmatian Knights.

RSch-D.jpgThe German historian Reinhard Schmoeckel hypothezises that even the Merovingians, from whom Chlodowegh (Clovis for the French) descended, were partly Sarmatian and not purely Germanic. In Spain, historians admit that among the Visigoths and the Sueves that invaded the peninsula as Germanic tribes were accompanied by Alans, a horsemen people from the Caspian and Caucasus area. The traditions they brought to Spain are at the origin of the chivalry orders that helped a lot to perform the Reconquista. As you say, all that has been neglected but now things are changing. In my short essay on the geopoliticians in Berlin between both world wars, I remember a poor sympathetic professor who tried to coin a new historiography in Europe taking the Eastern elements into accounts but whose impressive collection of documents were completely destroyed during the battle for Berlin in 1945. His name was Otto Hoetzsch. He was a Slavic philologist, a translator (namely during the negotiations of the Rapallo Treaty, 1922) and a historian of Russia: he pleaded for a common European historiography stressing the convergences and not the differences leading to catastrophic conflicts like the German-Russian wars of the 20th century. I wrote that we all have to walk in his footsteps. I suppose you agree.

Accord de la Russie et de la Chine pour développer la route maritime nord

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Accord de la Russie et de la Chine pour développer la route maritime nord

par Jean Paul Baquiast

Ex: http://www.europesolidaire.eu

Dès l'époque soviétique, la Russie avait fait d'importants investissements pour développer la route maritime nord qui relie l'Est du pays au nord de l'Europe le long des côtes arctiques de la Russie. Un moment mis en sommeil avec la chute de l'URSS, cet ambitieux projets avait été repris par la Russie, notamment à partir du début de ce siècle. Nous avions précédemment consacré plusieurs articles à cette question.
 

Une telle route impose des dépenses considérables, compte tenu du fait que même en été, la banquise s'étend tout au long du parcours. Le réchauffement climatique espéré dans ces régions n'a pas encore eu d'effets sensibles. Il faut d'abord construire des brise-glaces, aujourd'hui à propulsion nucléaire, des brise-glaces remorqueurs, des tankers et navires de charges adaptés, et surtout des ports permettant d'accueillir ces navires et les marchandises destinées à être transportées.

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Comme il fallait s'y attendre, récemment, la Russie et la Chine viennent de s'accorder pour coopérer sur ce projet. En juillet 2017 une réunion entre Xi Jinping et Dmitri Medvedev a confirmé que Moscou et Pékin avaient l'intention de développer conjointement la route nord, dans la cadre du grand projet chinois de Route de la soie maritime chinoise. Pékin a l'intention de transporter ses marchandises à travers l'Arctique depuis l'Europe vers la Chine, réduisant ainsi les distances de 20% à 30%, économisant du temps, du carburant et des ressources humaines. Considérant que 90% des marchandises chinoises sont transportées par voie maritime, cette route nord, même si elle n'intéressait qu'une petite partie de ces transports, générerait d'importantes économies. .

Il y a quelques jours, le brise-glace russe Christophe de Margerie, du nom du défunt PDG français (touchante attention, à remarquer), affrété par Total, a été le premier navire commercial à emprunter le passage Arctique du nord-est pour rallier l'Asie. Ceci a représenté un gain de 15 jours par rapport à la route de Suez.

Simultanément le brise glace chinois Xuelong 2 a emprunté la route vers l'Amérique du nord, réduisant dans les mêmes proportions la durée du passage de traversé le passage du Nord-Ouest dans l'Arctique, atteignant l'Amérique du Nord depuis l'Asie. C'était la première fois qu'un navire chinois avait fait ce trajet, si l'on excepte les navires non chinois affrétés par l'entreprise chinoise COSCO.

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L'intérêt futur de la route nord-est

D'un point de vue pratique, il existe deux routes maritimes à travers l'Arctique, si l'on excepte la route dite nord-nord traversant le pôle, qui ne sera pas praticable avant au mieux 2050, la route dite du nord-est, et celle dite du nord-ouest. Cette dernière reste encombrée de glaces profondes, même pendant l'été. La route du nord-est n'est évidemment jamais en eau libre, mais les glaces que l'on y rencontre en été peuvent être fracturées par de puissants brise-glaces, à l'avenir de préférence nucléaire.

La coopération entre la Russie et la Chine sur cette voie sera très rentable pour les deux pays. Ils l'utiliseront pour leurs besoins propres, mais aussi ceux d'autres pays (probablement notamment le Japon) choisissant cette solution. Pour la Chine, le passage par le Canal de Suez représente 12.000 miles nautiques, celui par le nord sera inférieur à 7.000 nautiques.

Rappelons que les ambitions de la Chine en matière de nouvelles voies maritimes ne se limitent pas à l'Arctique. Elle envisage la construction à travers le Nicaragua d'un canal transaméricain qui se propose de rivaliser avec le canal de Panama. Mais les travaux au Nicaragua seront considérables et Panama a entrepris de doubler la capacité de son canal.

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Les routes de l'Arctique représenteront inévitablement l'avenir en termes d'opportunités et d'économies de coûts. En comparaison avec le canal de Suez, qui est la route actuelle par laquelle la Chine atteint l'Europe, avec un trajet de près de 12 000 miles nautiques, le passage par la voie arctique du Nord-Ouest est inférieur à 7 000 milles.

Dans l'Arctique, la Chine ne se limitera pas à offrir du transport. Elle envisage, en accord avec la Russie, d'y exploiter des réserves apparemment considérables en hydrocarbures et autres ressources naturelles.

Les environnementalistes ne manqueront pas de dénoncer les dégâts nécessairement considérables que provoqueront ces projets sur la faune et la flore arctiques. Celles-ci apparaissent aujourd'hui aux scientifiques bien plus riches qu'ils ne supposaient. Mais aucune des puissances composant le Conseil de l'Arctique ne s'en soucie évidemment.

Rappel

Rappelons que, en terme de droit international, l'Arctique est partagée entre les États-Unis, le Nord du Canada, la Finlande, le Groenland (Danemark), l'Islande, la Norvège, la Russie et la Suède et est administré par le Conseil de l'Arctique. Les pays non membres comprennent la France, l'Allemagne, l'Inde, l'Italie, le Japon, la Corée du Sud, les Pays-Bas, la Pologne, Singapour, l'Espagne, le Royaume-Uni et la République populaire de Chine. Ceci ne veut pas dire qu'un de ces Etats puisse s'attribuer un monopole sur les routes l'empruntant. Par contre, ils sont juridiquement habilités à décider de l'usage qu'ils font de ce que l'on nomme leurs zones côtières exclusives.


Pour en savoir plus:

Voir :

https://journal-neo.org/2017/11/22/the-huge-implications-...

http://french.china.org.cn/china/txt/2017-10/10/content_5...

 

samedi, 25 novembre 2017

Wenn Engel fallen – Der Islam erobert Birma

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Wenn Engel fallen – Der Islam erobert Birma

Sie war ein Engel der Europäer, schwebte über allen Zweifeln. Sie wurde auf die fast schon göttliche Ebene von Mahatma Gandhi, Nelson Mandela und Martin Luther King erhoben. Sie wurde 1990 vom Europäischen Parlament mit dem Sacharow-Preis geehrt. Sie erhielt 1991 den Friedensnobelpreis. US-Präsident Bill Clinton verlieh ihr 2000 „The Presidential Medal of Freedom“, Paul David Hewson alias Bono widmete ihr im Folgejahr mit seiner irischen Erfolgscombo U2 mit der Hymne „Walk On“ ein musikalisches Denkmal.

Die europäischen Romantiker der Glückseligkeit lagen ihr zu Füßen, war sie doch der Inbegriff dessen, was ihnen ihr eigener Rassismus als Inkarnation des von Natur aus unschuldigen Opfers nicht nur des Kolonialismus, sondern nun auch noch des Militarismus eingab.

Ach, wäre sie doch nur rechtzeitig gestorben! Hätte sie ihr Leben doch so heldenhaft abgeschlossen, wie sie es gelebt hatte! Man hätte ihr mehr als nur musikalische Denkmale errichtet, Schulen nach ihr benannt, Heiligenbücher über sie geschrieben, ihr Leben zu einem abendfüllenden Kinofilm gemacht. Sie wäre unsterblich geworden – eine Ikone der Menschheit, eine Heroin des Guten.

Pressespiegel Indien
Indien: Unterstützung für Myanmar in der Rohingya-Krise
 
Aber das Schicksal meinte es nicht gut mit ihr. Es wollte ihr die Unsterblichkeit nicht gönnen. Deshalb ließ es sie ihren Traum erleben – ihr armes Land wurde von den Fesseln der Diktatur gelöst, sie selbst zur wichtigsten Politikerin ihres Landes. Und dann geschah es. Aus der Ikone wurde eine Realpolitikerin, die ihr Land schützen wollte gegen die Unterwanderung durch kulturfremde Zuwanderer. Sie wollte es schützen vor den Ideologen einer weltweit agierenden Gruppe von Fanatikern, welche angesetzt hatten, sich einen Teil ihres Landes herauszuschneiden. Sie wollte es schützen gegen gewaltsam betriebene Bestrebungen, aus einer Provinz ihres buddhistischen Landes einen radikalislamischen Staat zu machen.

Doch die mangelnde Bereitschaft, sich als weiteres Opfer in einem seit 1.400 Jahren andauernden Kampf arabisch inspirierter, rassistischer Imperialisten gegen die indigenen Völker Südostasiens bereitwillig herzugeben, ließ den Engel stürzen.

In der Tradition der Kämpfer

Die Rede ist von Aung San Suu Kyi, Außenministerin und de-facto-Chefin des heutigen Myanmar, vielen Europäern immer noch besser bekannt als Burma oder Birma.

Suu Kyi kam am 19. Juni 1945 als Tochter des burmesischen Nationalhelden Aung San in der Hafenstadt Rangun/Yangon zur Welt. Damals gehörten Stadt und Land offiziell zum britischen Empire, doch seit 1942 war das Land japanisch besetzt. Vater Aung San, zu Studentenzeiten 1939 nach einem Besuch bei Chinas Mao Gründer der Kommunistischen Partei Birmas, hatte sich in Japan militärisch ausbilden lassen, kämpfte im Weltkrieg erst an der Seite der Japaner gegen die Europäer. Als ihm bewusst wurde, dass die 1943 gemachte Zusage der Japaner, Burma in die Unabhängigkeit zu entlassen, nicht eingehalten wurde, sagte er sich 1945 von den mittlerweile taumelnden, asiatischen Inselimperialisten los und erklärte Nippon den Krieg. Nach dessen Kapitulation rief er die „Antifaschistische Volksbefreiungsliga“ (AFPFL) ins Leben und erfreute sich bei seinem Bestreben nach Unabhängigkeit der Unterstützung des letzten britischen Vizekönigs von England. Diesem Louis Francis Albert Victor Nicholas Mountbatten aus dem hessischen Adelsgeschlecht der Battenberg, Onkel des Prinzgemahls von Queen Elisabeth 2, war die Aufgabe übertragen, die fernöstlichen Kolonien geregelt in die Unabhängigkeit zu entlassen.

Aung San handelte mit Mountbatten maßgeblich jene Verträge aus, die am 4. Januar 1948 zur Unabhängigkeit des Vielvölkerstaates Birma führten. Selbst allerdings sollte Aung San diesen Tag nicht mehr erleben: Am 19. Juli 1947 fiel er einem Attentat politischer Konkurrenten zum Opfer. Suu Kyi, die damit faktisch vaterlos aufwuchs, ließ sich jedoch vom Leben ihres Vaters inspirieren. Nach langem Auslandsaufenthalt mit Tätigkeiten unter anderem bei den Vereinten Nationen kehrte sie 1988 zurück in ihre Heimat. Dort nahm sie den friedlichen Kampf gegen eine Militärdiktatur auf, die sie wiederholt mit Politikverbot und Hausarrest belegte. So wurde sie zu einer Heldin aller Pazifisten, Antifaschisten und all jener, die von einer besseren Welt träumen, in der der Mensch sich und seine ihm innewohnenden, aggressiven Anlagen selbst überwindet und allumfassender Weltfriede der allgemeinen Glückseligkeit herrscht.

Nach langen Jahren der Diktatur lockerten dann die Militärs behutsam ihre totalitären Fesseln. Birma fand den behutsamen Weg zu Demokratie, Suu Kyi wurde in aller Welt gefeierte Führerin ihres Landes auf dem Weg in die Demokratie.

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Rassistische Übergriffe gegen Buddhisten

Dann aber geschah etwas, das ihre weltumspannende Anhängerschaft in tiefe Verzweiflung warf. Aus dem Engel wurde ein Realpolitiker, der seine Aufgabe, für sein Land und dessen Volk zu kämpfen, nicht nur als Lippenbekenntnis betrachtete, sondern bereit war, dafür konsequent einzutreten.

Der Hintergrund des Absturzes dieses Engels fand sich im Westen ihres buddhistisch geprägten Landes, in einer am Indischen Ozean gelegenen Provinz namens Rakhaing/Arakan. Diese an Bangladesh angrenzende Provinz war seit der britischen Kolonialzeit Ziel islamischer Auswanderer aus den überbevölkerten Regionen Bengalens gewesen. Eine Volkszählung der Briten aus dem Jahr 1891 hatte bei einer Gesamtbevölkerung von rund 672.000 Menschen bereits einen Anteil von 126.600 muslimischen Bengalen und 443.000 Buddhisten ergeben. Konnten die Birmesen in der Kolonialzeit nichts gegen die Einwanderung tun, so verweigerten sie den Bengalen und ihren Nachkommen jedoch seit der Unabhängigkeit Myanmars die Anerkennung als Staatsbürger – und da auch das überbevölkerte Bangladesh die Verantwortung für seine verlorenen Kinder verweigerte, gelten diese Muslime heute als staatenlos.

Clash of Cultures

Palästinenser, Rohingya und die Kurden – der Export religiöser Konflikte

Als nun 2010 das Militärregime seinen harten Griff auf das Land lockerte, Islam-Aktivisten ihre Stunde gekommen. Mit Übergriffen gegen die buddhistische Mehrheitsbevölkerung in Arakan bis hin zu Überfällen auf Polizeistationen provozierten die im arabischen Ausland geschulten Kämpfer Mohameds jene Situation der muslimischen Opferrolle, mittels derer sie bereits in Thailand und auf den Philippinen das Ziel ihrer islamischen Machterweiterung in die Wege zu leiten suchten. Aus den muslimischen Bengalen wurde das Kunstvolk der Rohingya geschaffen. Die rassistisch motivierten Provokationen der Islamaktivisten gegen die Buddhisten mit dem deklarierten Ziel eines unabhängigen islamischen Staates auf dem Boden der noch zu Birma gehörenden Provinz riefen nun jedoch das Militär auf den Plan, welches zwar zugelassen hatte, dass Myanmar sich demokratischen Ideen öffnete, nicht aber bereit war, darüber die staatliche Integrität in die Brüche gehen zu sehen.

Die militärische Reaktion auf den islamischen Versuch der Ausdehnung nach Osten wurde propagandistisch von den Islamaktivisten zu einem Gräuelfeldzug des Militärs hochgefahren; die birmanisch-bengalische Bevölkerung zum Instrument der weltweiten Empörungsmaschinerie, mit der die Anhänger des arabischen Imperialisten aus dem siebten Jahrhundert regelmäßig agieren, wenn ihre Eroberungspläne auf Widerstand stoßen. Die Bengalen reagierten wie erwartet: Sie flohen vor den bis heute durch keine neutrale Stelle bestätigten Gräueltaten, die dem Militär angelastet wurden. Auf über 800.000 Menschen wird ihre Zahl bis heute geschätzt – und sie werden von ihrer Regierung in Dhaka wie einst jene Araber, die bei Gründung des Staates Israel dem Aufruf des islamischen Großmufti von Jerusalem folgten und ihre Wohnungen verließen, in Lager gepfercht, statt wie beispielsweise einst die deutschen Flüchtlinge aus Osteuropa in die Heimatgesellschaften integriert.

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Ein Engel stürzt

Das Vorgehen der Islamaktivisten in Myanmar wie der Regierenden in Bangladesh verfehlte seine Wirkung nicht. Die Träumer der Glückseligkeit rund um den Globus wandten sich nun an ihren Engel Suu Kyi. Möge sie doch bitte umgehend und bedingungslos als faktische Staatspräsidentin des bösen Staates Myanmar, der dieses angebliche Rohingya-Volk vertrieb, ihr Militär an die Kette legen und die Rückkehr der nach Bangladesh Heimgekehrten zulassen. Schnell waren auch Forderungen im Raum, die bislang erfolgte Unterstützung der demokratischen Regierung von Suu Kyi einzustellen und das Land bis zum Gehorsam mit Sanktionen zu belegen. Jene Aktivitäten der Islamaktivisten, die bereits 2012 das Auswärtige Amt der Bundesrepublik erstmals zu einer Reisewarnung veranlasst hatte, hatten Erfolg: Destabilisierung der jungen, noch labilen Demokratie, um aus dem wankenden Land ein weiteres Stück herauszureißen und dem dikatorisch geführten, sunnitischen Weltreich der islamischen Gemeinschaft anzugliedern.

So begann nun der Engel der Glückseligen im Eiltempo zu stürzen. Denn Suu Kyi blieb sich und der von ihr empfundenen Verantwortung für ihr buddhistisch geprägtes, sino-tibetisches Volk treu und verweigerte die Unterwerfung unter den postkolonialistischen Anspruch der Europäer und der Migrationsexperten der Vereinten Nationen darauf, dass jeder Mensch das uneingeschränkte Recht habe, dort zu siedeln, wo immer ihm der Sinn danach stehe.

„Ethnische Säuberung“ und Rassismus

Man kann das, was in Myanmar derzeit geschieht, als „ethnische Säuberung“ bezeichnen. Denn tatsächlich ist die gegenwärtige Situation derart, dass die Nachkommen der illegalen, bengalischen Einwanderer zurück in ihr Herkunftsland ziehen. Doch man darf dabei zweierlei eben nicht vergessen: Die von der indigenen Bevölkerung nicht gewünschte Landnahme seit über 100 Jahren, und die gezielte Provokation des Konflikts durch die geschulten Aktivisten der islamischen Expansion.
Und insofern kann man die Situation auch gänzlich anders betrachten. Denn nicht nur die Geschichte, sondern auch das Vorgehen islamischer Aktivisten andernorts belegt, dass es sich dabei um das erprobte Vorgehen einer rassistischen Vereinigung handelt, die es gezielt darauf anlegt, vorhandene, indigene Kulturen zu zerstören und durch ein eigenes, kollektivistisches Kulturverständnis zu ersetzen. Denn genau das haben die Krieger des Mohamed seit bald eineinhalb Jahrtausenden überall getan, wo sie mit Gewalt oder mit Tücke die Macht an sich gerissen hatten: Auf der arabischen Halbinsel, in den christlichen und jüdischen Gemeinden rund um das südliche Mittelmeer, im zoroastrischen Persien wie im christlichen Kleinasien und Südosteuropa, in Indien und auf den Inseln des Indonesischen Archipels.

Rassisten im Namen Mohameds

„Rassistisch“? Können das nicht nur weiße Europäer sein? Ja – so wollen es alle Nicht-Europäer und so sollen es alle Europäer glauben. Der böse, weiße Mann, der den armen unterdrückten Völkern ihre Identität stiehlt, sie versklavt und ausbeutet!
Doch nicht nur die Vereinten Nationen sehen das anders. In der am 27. November 1978 durch die 20. Generalkonferenz der UNESCO verabschiedeten Erklärung ist in Artikel 3 zu lesen:

„Jede auf der Rasse, der Hautfarbe, dem Volkstum, dem nationalen Ursprung oder der von rassistischen Überlegungen getragenen religiösen Intoleranz beruhende Unterscheidung, Ausschließung, Beschränkung oder Bevorzugung, welche die souveräne Gleichheit der Staaten und das Recht der Völker auf Selbstbestimmung beseitigt oder gefährdet oder welche das Recht jedes Menschen und jeder Gruppe auf volle Entfaltung in willkürlicher und diskriminierender Weise begrenzt, ist mit den Erfordernissen einer gerechten, die Achtung der Menschenrechte garantierenden Weltordnung unvereinbar; das Recht auf volle Entfaltung beinhaltet den gleichberechtigten Zugang zu den Mitteln der persönlichen und gemeinschaftlichen Entwicklung und Erfüllung in einem Klima der Achtung für die Werte der Zivilisation und Kulturen, sowohl national als auch weltweit.“

Bereits 1948 definierte die Generalversammlung der Vereinten Nationen in der „Convention on the Prevention and Punishment of the Crime of Genocide“ den Tatbestand des Völkermordes als „acts committed with intent to destroy, in whole or in part, a national, ethnical, racial or religious group”.

KEIN ENDE DER KONFLIKTE IN BURMA
Die Rohingya und das Spiel der Mächte
 
Nichts anderes als jene „mit den Erfordernissen einer gerechten … Weltordnung“ unvereinbaren Handlungen gegen religiös Andersdenkende sind das Grundkonzept des seit 1.400 Jahren schriftlich nachzulesenden Welteroberungsplanes des Mohamed – und dieser wird nach wie vor überall dort exekutiert, wo der Islam die staatliche Gewalt hat. Wo immer der Islam, ob mit Gewalt oder durch Unterwanderung, die Macht an sich riss, zielte er in der festen, rassistischen Überzeugung, dass nur derjenige ein Mensch sein könne, wer gleichzeitig Muslim ist, darauf ab, „nationale, ethnische, rassische oder religiöse Gruppen“ zu zerstören und deren nationale Kultur durch die des Islam zu ersetzen.

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Nichts anderes auch als ein derart rassistisch begründeter Angriff auf die kulturelle Identität der Birmesen war die zuerst schleichende, dann militant und nun über den islamischen Opferkomplex eingeforderte Landnahme Arakans durch muslimische Bengalen und die Aktivisten des Mohamed.

Die sogenannten Rohingya, die sich heute als Kinder illegaler, bengalischer Migranten in den Lagern ihres Herkunftslandes finden, sind dabei nichts anderes als das Faustpfand und die Opfer jener, die ihre als Religion bezeichnete, rassistische Ideologie der Welteroberung immer noch auf den Fahnen stehen haben und gegen die sich die buddhistisch geprägte Bevölkerung Myanmars spätestens seit den Angriffen der Islamaktivisten auf buddhistische Nachbarn und die buddhistische Administration auch nach den Regeln des Völkerrecht völlig zurecht zur Wehr setzt. Denn der islamische Angriff richtet sich gegen ein Mitglied der Vereinten Nationen – und dieses hat nach der Charta der Vereinten Nationen gemäß Kapitel VII Artikel 51 „das naturgegebene Recht zur individuellen oder kollektiven Selbstverteidigung“.

Illegale Einwanderer verbreiten Terrorismus

Anlässlich eines internationalen Treffens der Außenminister in der birmesischen Hauptstadt – der noch amtierende Deutsche hatte zuvor großzügig 20 Millionen Euro dafür bereitgestellt, dass die bengalischen Heimkehrer nicht in die Gesellschaft von Bangladesh reintegriert werden müssen – brachte Suu Kyi die Angelegenheit auf den Punkt.

„Illegale Einwanderung ist die Verbreitung von Terrorismus und gewalttätigem Extremismus, von sozialer Disharmonie bis hin zur Gefahr eines Atomkriegs. Die Konflikte stehlen den Gesellschaften den Frieden, lassen Unterentwicklung und Armut zurück, bringen Völker und selbst ganze Länder gegeneinander auf“, schrieb die Friedensnobelpreisträgerin vor allem den böse dreinblickenden Vertretern Europas in Stammbuch. Sie meinte damit nicht nur die illegale Einwanderung der Muslime nach Myanmar, sondern schaute auf die ganze Welt.

Nur wenig ist so, wie es erscheinen soll
Myanmar, Medien und die Propagandalüge
 
Ach, hätte sie doch nur geahnt, dass in dieser Welt Täter nur laut genug schreien müssen, um als bemitleidenswerte Opfer zu gelten! Hätte sie doch nur geahnt, dass Engel aus Entwicklungsländern niemals selbst die Initiative ergreifen dürfen, sondern für die Gutmenschen dieser Welt zu tätschelnde Mündel bleiben müssen! Ihr Sturz aus dem Olymp der Heiligkeit kannte kein Halten mehr – denn sie hatte es gewagt, der Weltmeinung der islamischen Opferrolle die Stirn zu bieten und ihr Land und ihr Volk gegen die muslimische Landnahme verteidigen zu wollen!

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Birma geht verloren

Nun übten die Guten dieser Welt schließlich den massiven Druck auf das mühsam um eine demokratische Zukunft kämpfende Myanmar aus, der das Land einknicken ließ. Suu Kyi erklärte unter der Androhung der „Weltgemeinschaft“, ihr Land durch Sanktionen abschließend ins Chaos zu treiben, die Bereitschaft, die illegalen Einwanderer wieder aufzunehmen. Sie wird wissen, dass sie damit ihre eigenen Landsleute in Rakhaing zu Fremden macht, die sich dem islamischen Rassismus nun entweder unterwerfen oder ihr angestammte Heimat unter dem Druck der Einwanderer verlassen müssen. Denn mit den bengalischen Opfern ihrer eigenen Agitatoren werden auch diese wieder in Myanmar eindringen und ihren Kampf um die Errichtung eines islamischen Staats auf birmesischem Boden ungebremst fortsetzen. Und sie werden diesen Kampf gewinnen – denn sie wissen nun: Sie müssen nur dafür sorgen, dass die Opfer Mohameds in den Augen der Welt zu Opfern der Gegner Mohameds werden, um den buddhistischen Gegner zu bezwingen.

Statt der Hydra des islamischen Terrors den Kopf abzuschlagen, hat die Weltgemeinschaft ihr einmal mehr das Futter gegeben, das sie braucht, um ihren Siegeszug fortzusetzen. Den Rakhaing wird ebenso wenig reichen, wie eines Tages Myanmar reichen wird. Bangladesh verfügt derweil und in Zukunft über genügend hungrige Mäuler, um nun auch die Eroberung der nächsten Provinz Birmas in Angriff nehmen zu können. Der Islam, der Südostasien bereits von Westen, Süden und Osten in die Zange nimmt, wird wie einst in Baktrien seinen Feldzug erst beenden, wenn es kein buddhistisches Südostasien mehr gibt.

vendredi, 24 novembre 2017

La France, Hariri, le Hezbollah et Israël

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La France, Hariri, le Hezbollah et Israël

par Jean-Paul Baquiast

Ex: http://www.europesolidaire.eu

Le premier ministre libanais est rentré dans son pays après une libération d'Arabie Saoudite et un séjour de quelques jours à Paris, marquant l'intervention du président Macron dans une situation dont la complexité est sans doute clairement perçue par le gouvernement français, mais où les intentions de Paris n'apparaissent pas aux yeux du profane.

S'agit-il de réaffirmer l'appui de la France à un Liban multi-confessionnel, avec une forte présence de chrétiens francophones, mais aussi disposant de nombreux représentants à Paris, très appréciés et pas seulement par les amateurs de « restaurants libanais »? Très bien en ce cas.

S'agit-il de rappeler à l'Arabie saoudite que même si celle-ci a pris la haute main au Moyen Orient sunnite, avec l'appui des Etats-Unis, la France, traditionnellement présente dans la région, entend encore essayer d'y jouer un certain rôle? Pourquoi pas?

Mais si la France voulait , à travers Hariri, contribuer à diminuer l'influence du Hezbollah au Liban et dans le front Chiite qui s'est mis en place avec l'appui des Russes contre l'alliance américano-saoudienne, alors on ne peut que s'interroger. Les études récentes faites à propos du Hezbollah montrent que celui-ci est devenu une sorte d'Etat non officiel, disposant d'une armée puissante et de nombreux appuis (voir https://southfront.org/hezbollah-capabilities-role-middle...

On ne voit pas ce que serait l'intérêt de la France à tenter de contrer le Hezbollah. D'une part, la tâche serait désormais impossible. D'autre part, jusqu'à présent le Hezbollah ne s'est jamais montré particulièrement opposé aux Européens non plus qu'à la France. Il la soutiendrait même semble-t-il dans sa volonté de se protéger contre le terrorisme islamique qui continue à menacer non seulement l'Europe mais aussi la Russie, désormais alliée du Hezbollah.

S'agirait-il enfin pour la France de céder aux « pressions amicales » d'Israël, en lutte ouverte contre le Hezbollah et l'Iran, et dont la position d'ensemble dans la région paraît de plus en plus fragilisée. Certes la France est aussi alliée d'Israël pour de multiples raisons. Elle considérerait comme une catastrophe le fait de le voir disparaitre, comme l'avait publiquement affirmé il y a quelques années un leader iranien. Mais est-il adroit pour elle de paraître endosser les objectifs radicaux de Binjamin Netanyahu et de la droite israélienne, qui joue à fond l'appui de Washington au détriment d'autres appuis que pourrait trouver Israël, notamment en Russie.

Si avec le retour d'Hariri à Beyrouth, la diplomatie française entendait contrer tout à la fois le Hezbollah, Bashar al Assad et la Russie, elle ferait évidemment fausse route.

mardi, 21 novembre 2017

La Chine intervient directement dans le problème des Rohingyas

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La Chine intervient directement dans le problème des Rohingyas

par Jean Paul Baquiast

Ex: http://www.europesolidaire.eu

Le 19/11, en visite dans la capitale birmane, Naypyitaw, le ministre chinois des Affaires étrangères, Wang Yi, a expliqué que des concertations pourraient permettre de trouver une sortie de crise acceptable pour les deux pays voisins dans la crise dite des Rohyngias 1). Il a annoncé en ce sens que la Chine proposait un programme en trois phases pour résoudre la crise.

Il s'agit d'abord d'instaurer un cessez le feu entre la Birmanie et le Bangladesh. Les deux pays en ont accepté le principe et même semble-t-il commencé à l'appliquer. L'armée birmane a annoncé avoir cessé le 5 septembre ses combats contre les rebelles séparatistes rohingyas. Ceci devrait en principe supprimer la fuite des Rohingias de l'Etat birman d'Arakan vers le Bangladesh.

La seconde phase consisterait en discussions bilatérales entre la Birmanie et le Bangladesh pour trouver une solution à court terme. Enfin, la troisième et ultime phase devrait être de travailler sur un dénouement du conflit à long-terme.

Il s'agira ensuite d'organiser le rapatriement des Rohingyas. La tâche, selon nous, devrait être difficile, voire impossible, compte tenu du nombre de ceux-ci soit environ à ce jour 600.000. Ceci en tous cas fera partie des discussions qui se tiendront en début de semaine entre les ministres des Affaires étrangères du Dialogue Asie-Europe (Asem), un rendez-vous programmé tous les deux ans. Federica Mogherini, chef de la diplomatie européenne, devrait aussi s'exprimer lors de la réunion Asem après s'être rendue au Bangladesh durant le week-end.

En préambule, Wang Yi a rappelé que pour mettre fin au conflit, il faudrait que la « communauté internationale » et le Conseil de sécurité de l'Onu aident les deux pays à "élaborer les conditions nécessaires à un environnement favorable". On devrait savoir rapidement si ceci fait partie des voeux pieux ou s'il s'agit d'une perspective réaliste.

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Montée en puissance de la Chine

Quoique il en soit, la « communauté internationale » en premier lieu la Birmanie, le Bangladesh et surtout l'Inde, directement intéressée, devrons tenir compte de l'intervention de la Chine dans une zone qu'ils considéraient comme leur pré carré, mais où la non-intervention de l'Inde dans le conflit entre Birmanie et Bangladesh avait pu surprendre. Celle-ci s'explique sans doute par le refus de l'Inde de s'immiscer dans un conflit où l'intervention des Etats-Unis avait joué un rôle déclencheur essentiel (voir notre article). Mais ce faisant, elle avait laissé une chaise vide que la Chine s'est empressée d'occuper.

Cela d'autant plus que les grands projets de la Chine dits One Belt One Road Initiative intéresseront tous les pays traversés. Ainsi Pékin a proposé, comme nous l'avions relaté ailleurs, de mettre en place un « corridor économique » qui partira de la province chinoise du Yunnan vers la ville birmane de Mandalay et s'étendra plus tard à l'est vers la capitale économique birmane de Rangoon, dite auss Yangon, puis à l'ouest vers la « zone économique spéciale » de Kyaukpyu, toujours en Birmanie. formant ainsi trois grands axes de coopération entre divers grands projets situés sur ces trois axes.

La conseillère d'Etat birmane Aung San Suu Kyi a dit avoir pris en haute considération ​cette proposition. La construction d'un couloir économique avec la Chine était conforme selon elle au plan de développement national de la Birmanie. A la suite de quoi, le Général Min Aung Hlaing, président de fait de la Birmanie, vient de rappeler qu'il considérait la Chine comme «  la meilleure amie de la nation ».

Ainsi se précise le projet chinois dit China-Pakistan Economic Corridor (CPEC). Il prolongera vers le Pakistan, avec beaucoup plus de moyens, le China-Myanmar Economic Corridor (CMEC) déjà en cours de négociation.

Tout cela manifeste la volonté de Pékin de jouer un rôle économique et diplomatique essentiel dans une zone jadis soumise à l'influence principale de l'Inde et, à travers celle-ci, des intérêts britanniques et américains. Le profil de la Chine comme première puissance mondiale se précise.

1) Nous avions précédemment rappelé les grandes lignes de cette crise et les raisons d'arrière plan  pouvant l'expliquer
Voir La Birmanie confrontée à un djihad d'inspiration américano-saudienne
http://www.europesolidaire.eu/article.php?article_id=2677...=

dimanche, 19 novembre 2017

Sur la crise au Zimbabwé

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Sur la crise au Zimbabwé

par Jean Paul Baquiast

Ex: http://www.europesolidaire.eu

Le Zimbabwé est venu brutalement dans l'actualité à la suite de ce qu'il faut bien nommer un coup d'état militaire

Ceux qui connaissent peu la situation au Zimbabwé, (voir https://fr.wikipedia.org/wiki/Zimbabwe) après ce qui est apparu comme un coup d'état militaire, ont encore du mal à comprendre les tenants et les aboutissants de cette crise. Le Zimbabwe, dite précédemment Rhodésie, est une ancienne colonie britannique, disposant de grandes richesses agricoles et minières. Depuis son indépendance, il a été le terrain d'une lutte permanente entre ceux des anciens propriétaires, les « fermiers blancs », qui s'efforçaient de conserver leurs biens, et les descendants des esclaves noirs qui revendiquaient pour eux la totalité du pays. Robert Mugabe avait dès l'origine pris le parti de l'indépendance complète à l'égard de ce qui restait du pouvoir blanc.

Or pourtant, dans la nuit du 14 au 15 novembre, des officiers ont annoncé être intervenus contre les « criminels » de l'entourage du président Mugabe, 93 ans, ce terme de criminels désignant la faction du parti au pouvoir, la Zanu-PF, qui soutient la femme du président,, Grace Mugabe 52 ans. Celle-ci ambitionnait de devenir présidente et avait beaucoup intrigué – et dépensé d'argent – pour ce faire. Elle était entrée en conflit ouvert avec le vice président Emmerson Mnangagwa, qui espérer succéder à Mugabe, le plus vieux chef d'Etat de la planète mais encore actif. Elle avait obtenu de son mari qu'il le limoge.

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Le Crocodile

Emmerson Mnangagwa dit Le Crocodile (voir image), dont le limogeage a provoqué mercredi le coup de force de l'armée contre le régime de Robert Mugabe, avait fui le Zimbabwe dans la suite de son éviction le 6 novembre, mais il avait promis de défier le président Mugabe et son épouse. Or il vient de rentrer au Zimbabwe le 17 novembre, manifestement avec l'accord des militaires ayant pris le pouvoir après le coup d'état.

L'armée, qui contrôle la capitale Harare, a annoncé ce même jour avoir arrêté plusieurs proches du président, se félicitant de « progrès significatifs » dans son opération de purge au sein du parti au pouvoir de la Zanu-PF. « Nous avons mis la main sur plusieurs des criminels, tandis que d'autres sont toujours en fuite », a fait savoir l'armée dans un communiqué publié dans le journal d'Etat The Herald.

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Rappelons qu'au Zimbabwe, les tensions entre factions au sein du parti au pouvoir, l'Union nationale africaine du Zimbabwe-Front patriotique (Zanu-PF), ont dégénéré, dans la nuit de mardi 14 à mercredi 15 novembre, en un coup d'Etat qui n'a pas voulu se dire comme tel. Mercredi, l'armée contrôlait les rues de la capitale, Hararé, dans le cadre d'une opération destinée, selon elle, à éliminer des « criminels » de l'entourage du président Robert Mugabe.

Pendant des années, l'armée a toujours été loyale à Robert Mugabe. Des officiers lui étaient redevables, car avec le système de patronage existant au Zimbabwe, le parti au pouvoir faisait en sorte de satisfaire les généraux en leur offrant des fermes, souvent de celles fermiers blancs expropriés. Mais ils ont eu peur que Grace Mugabe, ne prenne en main les commandes de l'Etat. Le limogeage de Mnangagwa était le geste de trop, car celui-ci était l'homme fort au sein du pouvoir. Grâce Mugabé s'appuyait sur la faction au sein de la Zanu-PF opposée à Emmerson Mnangagwa dont elle avait réussi à obtenir le soutien. Celle-ci était bien moins favorable à l'armée

Emmerson Mnangagwa fut d'abord un personnage important de la lutte pour l'indépendance dans les années 1970, puis il a été ministre la plupart du temps depuis les années 1980, il a travaillé pour les services de renseignement — il fut notamment chargé de la répression dans le Matabeleland (dans l'ouest du pays) contre ce que le pouvoir percevait comme une opposition. Il a toujours été perçu comme un partisan de la ligne dure et un soutien de l'armée au sein du gouvernement.

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La Chine

Pour comprendre la situation actuelle, il faut essayer aussi de comprendre les pouvoirs et intérêts extérieurs qui s'intéressent au pays. Sans entrer dans les détails, on notera le rôle de l'Afrique du sud, qui s'est toujours positionnée comme alliée et protectrice du Zimbabwé. Par contre les pays occidentaux, et notamment la Grande Bretagne et les Etats-Unis, multiplient les manœuvres diplomatiques pour reprendre sous contrôle le gouvernement du pays. Elles ont deux buts, récupérer l'accès aux ressources considérables de celui-ci, et empêcher qu'il ne tombe davantage dans l'orbite de la Chine.

La Chine en effet a noué depuis plusieurs années de bonnes relations avec le Zimbabwé. Elle y investit massivement dans divers secteurs importants et a plusieurs fois aidé l'économie à sortir des crises considérables qu'elle n'a cessé de rencontrer depuis l'indépendance. Manifestement l'alliance avec le Zimbabwé sera un atout important dans l'effort de la Chine pour étendre son influence dans toute l'Afrique.

On aurait pu penser que le  coup d'état avait été organisé, sur le mode du « regime change », par les puissances occidentales pour obtenir un gouvernement plus docile. Mais les généraux ont affirmé qu'il n'en était rien. Les déclarations d'amitié avec la Chine ont été renouvelées.

Pour notre part, nous n'y voyons pas encore assez clair pour prévoir dans quel sens penchera Emmerson Mnangagwa, s'il revient définitivement  au pouvoir avec l'appui de l'armée. Tout laisse prévoir que ce sera dans le sens d'un approfondissement des relations avec la Chine. Cependant la forme dictatoriale du pouvoir ne devrait pas changer.  Nous y reviendrons si nécessaire. 

Référence

Nous publions ici, avec son accord, un article de Bernard Lugan, que l'on peut retrouver sur son blog L'Afrique Réelle - blog que par ailleurs nous conseillons Voir http://bernardlugan.blogspot.fr/2017/11/zimbabwe-fin-de-route-pour-robert.html. 
Le moins que l'on puisse dire est que l'auteur ne manifesta pas une sympathie aveuglante à l'égard des mouvements indépendantistes. Ceci ne retire rien à la pertinence de ses observations

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Zimbabwe : fin de route pour Robert Mugabe?

par Bernard Lugan

Robert Mugabe, dit « Comrade Bob », né en 1924 dans le dispensaire d'une mission protestante, eut, durant toute sa vie, des certitudes bornées par le christianisme révolutionnaire, par le marxisme et par la haine des Blancs.

En 1963, il fut un des fondateurs du mouvement nationaliste ZANU (Zimbabwe African National Union), avant d'être arrêté en 1964.

Le 11 novembre 1965, dirigés par Ian Smith, et en dépit des menaces de sanctions économiques et politiques, les Blancs de Rhodésie du Sud -228 000 pour 4.847.000 d'Africains-, rompirent avec la Grande-Bretagne et ils proclamèrent l'indépendance du pays sous le nom de Rhodésie. L'ONU vota des sanctions et un embargo total.

Libéré en 1975, Robert Mugabe partit pour le Mozambique où il devint le chef de l'aile militaire de la ZANU, la ZANA (Zimbabwe African National Army).

Quasiment cernée par des pays ennemis, la petite armée rhodésienne, rustique et pugnace résista à toutes les attaques. Jusqu'au moment, où, croyant acheter sa survie en la poignardant dans le dos, l'Afrique du Sud blanche lui coupa les approvisionnements en carburant. Les dirigeants rhodésiens furent alors acculés à signer les accords de Lancaster House. Puis, du 27 au 29 février 1980, eurent lieu des élections.

Ce fut un vote ethnique dans la mesure où les suffrages des 70 % de Shona se portèrent sur les candidats de Robert Mugabe, tandis que les votes des 30% de Matabélé se retrouvèrent sur les candidats de leur leader, Josuah Nkomo. Une fois de plus, l'ethno-mathématique avait donc parlé et en avril 1980, la Rhodésie devint officiellement indépendante, sous le nom de Zimbabwe.

Dans le sud du pays, en zone matabélé, une guerre tribale éclata aussitôt, les Matabélé n'acceptant pas de se voir dirigés par les Shona qu'ils avaient soumis avant la venue des Blancs. Cette révolte fut férocement écrasée par la 5° brigade de l'armée du Zimbabwe, exclusivement composée de Shona encadrés par des Nord-Coréens.

Depuis 1980, « Comrade Bob » régnait donc sur ce qui fut la prospère Rhodésie dont il fit un goulag ruiné. Et pourtant,  l'héritage laissé par le régime blanc était exceptionnel : le pays disposait d'excellentes infrastructures routières et ferroviaires, la population était largement alphabétisée et l'économie de type industriel avait un secteur agricole hautement compétitif. De plus, la politique des sanctions internationales avait contraint les Rhodésiens à créer une industrie de transformation.

Quelques années plus tard, l'héritage laissé par les « colons » ayant été dilapidé, la faillite était totale.

En 1995, l'augmentation de 67% du prix du litre d'essence et de 345% de celui du pétrole lampant utilisé pour la cuisine et l'éclairage domestique provoqua de graves émeutes dans les principales villes du pays. Leur répression fut sanglante.

En 1999 la catastrophe connut une nouvelle accélération avec l'effondrement  du dollar zimbabwéen qui  perdit 80% de sa valeur face aux devises. L'inflation dépassa alors les 57%, tandis-que le prix du gallon d'essence passa de 5 à 12 dollars zimbabwéens. Quant au taux de chômage, il atteignit les 50% Or, avec une croissance démographique de 2,8% par an, le Zimbabwe voyait arriver chaque année des dizaines de milliers de jeunes adultes sur le marché du travail.

Tentant une manœuvre de pure démagogie, Robert Mugabe fit voter par l'Assemblée l'expropriation sans indemnité des fermiers blancs, puis il ordonna à ses militants d'occuper leurs fermes. Plusieurs fermiers furent alors massacrés et leurs femmes violées...Dans le plus total silence des bonnes âmes européennes.

Or, comme les trois quarts des productions agricoles industrielles et commerciales soutenant la balance des paiements du Zimbabwe, à savoir le tabac, le paprika, le coton et l'élevage, avaient pour origine les 4000 fermes encore possédées par les Blancs, le résultat de cette spoliation ne se fit pas attendre. Dès 2001, jadis exportateur de nourriture, le Zimbabwe  fut ainsi contraint de lancer un appel à l'aide internationale pour éviter la famine... Et comme 300 000 emplois avaient été perdus dans le secteur agricole et ses dérivés, le taux de chômage bondit à 65%...

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A la fin de l'année 2007, l'inflation avoisinait en cumulé les 100 000 %. En 2008, les prix des produits alimentaires augmentèrent de 30 à 40% par jour et ceux des  transports publics de 15 à 20% par jour...Au mois  de février 2008, l'inflation était de 165 000 %, au mois de juillet de 2,2 millions de % et  le 19 août de 15 millions de % !!! Début août, la canette de bière coûtait 800 milliards de dollars zimbabwéens.

Pour le clan qui avait fait main-basse sur le pays, tout allait cependant bien puisque, le 31 juillet 2013, Robert Mugabe remporta les élections présidentielles en étant élu pour un 6° mandat...

A partir de ce moment, Grace Mugabe, l'épouse du président, prit de plus en plus d'importance dans la vie politique du pays en devenant  secrétaire nationale de la ligue féminine du parti au pouvoir.

En 2016, le pays fut une nouvelle fois au bord de la famine et le gouvernement se vit obligé d'importer des cargaisons massives de nourriture. Au mois de février, la situation fut à ce point grave que les entreprises furent contraintes de participer à l'achat de vivres à l'étranger...Mais, le 27 février, alors que le pays était en état de quasi famine, les 92 ans du président Mugabe furent fastueusement célébrés devant 50 000 invités dans une débauche de dépenses.

Le mandat de Robert Mugabe s'achevant en 2018, et, compte tenu de l'âge du président, des remous commencèrent à parcourir le parti présidentiel ; d'autant plus qu'au mois de juillet 2016, tout le pays fut secoué par d'importants mouvements sociaux. C'est dans ce contexte lourd d'orages que le clan présidentiel tenta d'imposer Grace Mugabe (48 ans), pour succéder à son époux devenu cacochyme. La fracture au sein du parti de gouvernement apparut alors au grand jour car Grace Mugabe était plus que contestée en raison de ses frasques multiples et de son insolent train de vie.

Ses opposants se rangèrent alors derrière le vice-président Emmerson Mnangagwa mais, au mois d'octobre 2017, ce dernier fut démis et il s'enfuit au Mozambique.Tout  bascula alors, car l'armée, pourtant pilier du régime, prit son parti. Certes, afin d'empêcher l'installation au pouvoir de Grace Mugabe, mais d'abord pour précéder un mouvement de purge qui allait permettre la nomination aux postes de commandement de partisans de cette dernière.

Emmerson Mnangagwa succédera-t-il à Robert Mugabe dont il fut jusqu'à ces derniers mois, non seulement l'homme de main, mais celui qui, chef de ses services de renseignement, fut l'exécuteur de ses plus basses, de ses plus sanglantes et de ses plus sordides œuvres ?

Si tel était le cas, nul doute que les démocrates et les défenseurs des droits de l'homme trouveraient en lui un interlocuteur « bienveillant »...

Bernard Lugan


[1] Le numéro de décembre 2017 de l'Afrique Réelle que les abonnés recevront le 1er décembre contiendra un important dossier consacré au Zimbabwe.

Le Southern Command à l'assaut de l'Amérique latine

Le Southern Command à l'assaut de l'Amérique latine

par Jean-Paul Baquiast

Ex: http://www.europesolidaire.eu

southern-command-vinyl-transfer-decal-1.jpgLes Etats-Unis ont mis en place des bases militaires et déployé des troupes dans toute l'Amérique Latine. Elles dépendent du Southern Command. www.southcom.mil/ De son côté la 4e flotte patrouille dans toutes les eaux avoisinantes. Y préparent-—ils une guerre de grande ampleur? Veulent-ils occuper des territoires? Le gouvernement a toujours répondu que ces forces étaient là pour combattre des terroristes ou des narco-trafiquants.

Personne de sensée ne peut croire de telles raisons. Des forces aussi importantes ne sont pas nécessaires dans cet objectif. Il s'agit en fait d'associer militairement les Etats du continent à une présence de l'Armée américaine. Ces Etats, qui avaient il y a quelques années, tel le Brésil, sous le président Lula, voulu se dérober à cette forme d'occupation, sont aujourd'hui, ayant perdu toute indépendance, obligés de l'accepter. Non seulement ils doivent l'accepter, mais ils doivent remercier le Pentagone de tant de sollicitude.

Ainsi l'ambassade américaine à Brasilia vient de faire connaître (voir https://br.usembassy.gov/southcom-observe-humanitarian-lo... que le Southern Command a organisé les 6/13 novembre 2017 des séances d'entrainement à Tabatinga en Amazonie brésilienne. Celles-ci ont permis à l'US Army, associée à des personnels civils et militaires des Etats voisins, de conduire des « opérations de Pacification et d'Assistance humanitaire » dans cette région jusqu'ici considérée comme une chasse gardée par le Brésil, le Pérou et la Colombie. Un effectif de 50 soldats d'active de l'armée américaine, complétés par 31 membres de la Garde Nationale, ont participé à cette généreuse opération, baptisée “AmazonLog 17” ou “Operation America United,”

Les organisateurs de l'opération ont annoncé qu'elle préludait à la mise en place d'une base logistique américaine dans la région, base qui a été présentée comme internationale (Integrated Multinational Logistics Units). En clair il s'agira d'une base américaine pouvant accueillir des hélicoptères, des troupes terrestres et du matériel militaire.

De nombreux autres bénéficiaires

D'autres Etats ont depuis longtemps bénéficié d'une telle assistance. Citons entre autres le Guatemala, la Jamaïque, Panama, l'Argentine, le Pérou et le Chili. Plus récemment, en Antarctique, dans des régions dédiés en principe à des recherches scientifiques, des militaires américains pourront intervenir à partir d'une base en Terre de Feu.

Plus grave, il apparaît que les bases du Brésil, du Pérou et de la Colombie sont de plus en plus organisées pour conduire de véritables opérations militaires contre le Vénézuéla et le cas échéant la Colombie. Lorsque Donald Trump avait menacé Caracas d'une offensive de grande ampleur, si Ernesto Maduro s'entêtait à coopérer pour l'exploitation de ses considérables ressources pétrolières avec Moscou et Pékin il ne plaisantait pas. La frontière du Vénézuéla se trouve à quelques 500 km au nord de Tabatinga, précité.

Mais là encore, le prétexte humanitaire est évoqué. C'est ce que vient de déclarer l'amiral Kurt Kidd, chef du Southern Command. « L'Amérique doit se préparer à protéger les populations vénézuéliennes de l'instabilité et des famines qui se préparent ».

vendredi, 17 novembre 2017

Pologne: l'alternative jagellonienne

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Pologne: l'alternative jagellonienne

Alexandr Bovdunov
Ex: https://www.geopolitica.ru

La politique étrangère polonaise s’est traditionnellement distinguée par deux paradigmes mutuellement exclusifs nommés d’après les deux plus fameuses dynasties qui gouvernèrent le pays à différentes époques : la Piast et la Jagellon. Le premier paradigme met l’accent sur l’Occident et sur une politique active en Europe Centrale [1].

Ce paradigme « Piast » implique que la Pologne maintienne des relations amicales, ou du moins des relations neutres avec la Russie, qui est vue comme servant de contrepoids à l’Allemagne et même comme alliée de la Pologne, en cas de conflit avec ce voisin occidental [= l’Allemagne]. Les ambitions de l’Allemagne concernant la Pologne sont vues comme nécessairement contrebalancées en recourant à l’appui des voisins orientaux de la Pologne.

L’une des plus importantes caractéristiques de cette orientation est le désir de construire un Etat-nation polonais ethniquement homogène, qui rejette ou limite substantiellement l’ambition impériale de la Pologne concernant les anciennes terres du Commonwealth polono-lithuanien. L’orientation Piast fut surtout influente durant la période d’entre-deux-guerres de la politique étrangère polonaise telle que formulée par l’un des plus importants idéologues du mouvement national polonais, le fondateur de « Endecja » (Démocratie Nationale), Roman Dmowski [2].

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Roman Dmowski

A la différence du paradigme Piast, le paradigme jagellonien oriente la politique étrangère polonaise vers l’Est, insistant sur la reconquête de l’ancienne intégrité territoriale de plusieurs parties du Commonwealth polono-lithuanien. L’idée jagiellonienne cultive parmi les Polonais le désir d’exercer un contrôle sur les terres des actuelles Ukraine et Biélorussie [Belarus].

Partant de cette position, l’expansion de l’influence polonaise vers l’Est est considérée comme favorisant la transition de ces Etats vers la matrice civilisationnelle « européenne » et occidentale et promouvant leur développement selon cette orientation. La Pologne est ainsi conceptualisée comme une puissance régionale responsable de la situation de l’Ukraine, de la Biélorussie et de la Lituanie actuelles [3].

Jozef Pilsudski, principal adversaire de R. Dmowski dans le mouvement national polonais et figure assez célèbre de la période de l’entre-deux-guerres, est traditionnellement considéré comme un adhérent du projet géopolitique jagellonien. La stratégie jagellonienne de l’Etat polonais sous Pilsudski était caractérisée par l’intention d’établir un protectorat en Ukraine avec l’aide de Simon Petlioura, ce qui conduisit à la guerre soviéto-polonaise de 1919-1921. Du fait des efforts de Pilsudski, l’Etat polonais nouvellement indépendant fut taillé dans ces frontières et devint inévitablement ethniquement hétérogène. La Pologne était composée de la région de Vilnius (l’actuelle capitale de la Lituanie) et des territoires de l’Ukraine occidentale et de la Biélorussie occidentale. A son tour, le développement du projet géopolitique jagellonien provoqua l’émergence du projet idéologique du « Prométhéisme » et la formation du concept géopolitique de l’« Intermarium » qui demeure influent de nos jours.

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Jozef Pilsudski

La doctrine du « Prométhéisme », telle que développée par J. Pilsudski, est construite sur la présentation par A. Mickiewicz de la Pologne comme le « Christ de l’Europe » ainsi que sur les idées de J. Slowacki, B. Trentowski, A. Towianski, et d’autres. Ces penseurs et d’autres penseurs similaires (à l’exception de J. Hoene-Wronski qui considérait les Polonais comme les porteurs de la mission slave mondiale aux cotés des Russes) formulèrent la base de l’idéologie messianique polonaise qui souligna le rôle exclusif particulier du peuple polonais dans l’histoire mondiale ainsi que dans l’histoire de l’Europe de l’Est [4]. Comme le remarque le sociologue polonais Ilya Prizel, la formation de ce complexe messianique produisit une profonde contradiction entre les racines occidentales et slaves de l’identité polonaise dont la conscience aigüe est particulière au nationalisme romantique et à l’autodétermination romantique des Polonais. Prizel remarque : « D’une part, les romantiques polonais approuvaient le culte du nativisme et restaient méfiants vis-à-vis des idées d’origine occidentale. D’autre part, ils rejetaient la slavophilie de style russe comme étant une aberration asiatique. En résultat, puisque les Polonais étaient à la fois catholiques romains et slaves, les romantiques pensaient qu’ils étaient le ‘peuple élu’ destiné à civiliser les Slaves et à sauver le monde » [5].

La composante antirusse du messianisme polonais devient ainsi une partie d’une doctrine géopolitique particulière qui prêche la nécessité d’affaiblir la Russie au maximum et de désintégrer l’Etat russe, en accord avec le « Prométhéisme ». Selon cette vision, les Polonais devraient initier et conduire la lutte pour « libérer » les peuples de Russie en vue de leur autodétermination nationale. Regardant l’interconnexion de l’identité nationale et de la politique étrangère de la Pologne, Prizel écrit : « croyant que la Pologne était enfermée dans une bataille éternelle contre la Russie, Pilsudski continuait à croire à la ‘mission civilisatrice’ prométhéenne de la Pologne à l’Est, ce qui requérait une Pologne puissante et méritait l’appui occidental » [6].

Le principal objectif de la doctrine géopolitique du Prométhéisme était l’affaiblissement et la division subséquente de la Russie tsariste puis soviétique, en soutenant les mouvements nationalistes des peuples non-russes. D’après des documents récemment déclassifiés provenant des services de renseignements russes, les services secrets polonais et le Ministère des Affaires Etrangères développèrent leur activisme « prométhéen » en appelant au développement de centres indépendants parmi les émigrations nationalistes qui pouvaient lutter contre l’Union Soviétique, le but ultime étant la fragmentation maximale de l’URSS et sa division en le plus grand nombre possible de parties [7]. A partir de 1926, l’Organisation Prométhée polonaise commença à fonctionner à Paris et impliqua des représentants des divers mouvements nationalistes parmi les peuples soviétiques d’Azerbaïdjan, les Cosaques du Don, les Tatars, les Géorgiens, les Caréliens, les Koumis, les Ukrainiens, les Tatars de Crimée, les Ingriens, et divers peuples du Nord-Caucase. L’Institut Oriental de Varsovie et l’Institut de Recherche sur l’Europe de l’Est de Vilnius participèrent aussi à ce projet [8].

En termes géopolitiques de base, qui opposent les approches tellurocratique et thalassocratique de la domination et les intérêts des puissances atlantistes et continentales, ce projet polonais possède une orientation clairement antirusse et donc atlantiste.

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Le projet géopolitique de l’Intermarium défini par le cartographe et géographe polonais E. Romer peut être considéré comme un concept qui entre dans le cadre du paradigme jagellonien. Ce projet a pour but final la création d’une union fédérale des Etats d’Europe de l’Est situés entre la Baltique et la Mer Noire. Ce projet, bien qu’il puisse être séduisant dans une certaine mesure en termes de développement de liens régionaux, n’est rien de plus, d’un point de vue géopolitique, qu’une forme de « cordon sanitaire » séparant l’Allemagne de la Russie. Une telle entité géopolitique était envisagée pour créer un potentiel militaire et économique comparable à ceux de l’Allemagne et de l’URSS et, si nécessaire, d’être capable de résister à ces deux puissances [9].

Au début de la Seconde Guerre mondiale, le mouvement pour une fédération d’Europe de l’Est ouvrit un centre à New York où, avec l’appui de l’élite commerciale américaine et de spécialistes influents, le Comité de Planification pour l’Europe centrale et orientale [Central and Eastern European Planning Board] fut lancé [10].

D’après le géopoliticien américain contemporain Alexandros Petersen, la stratégie de l’« Intermarium prométhéiste » est une doctrine typiquement atlantiste qui fonctionne comme une alternative à la politique de « containment » de Kennan. Petersen appelle cela l’« implication stratégique » de la « myriade de peuples eurasiens captifs à l’intérieur de l’orbite russe » dans un projet atlantiste [11]. Petersen remarque : « La vision de Pilsudski avait été partiellement réalisée avec l’effondrement de l’Union Soviétique … L’Eurasie aujourd’hui englobe encore des centaines de minorités, et les petits Etats d’Eurasie combattent encore pour leur souveraineté » [12].

Le concept géopolitique de l’Intermarium-Prométhéisme peut être directement retracé jusqu’aux idées de H. Mackinder sur l’établissement d’un certain nombre d’Etats-marionnettes dans le territoire de la Russie et autour d’elle (Biélorussie, Ukraine, Russie du Sud, Daguestan, Géorgie, Arménie, Azerbaïdjan) [13] ainsi qu’aux idées de Z. Brzezinski (qui est en fait Polonais de naissance) sur la division souhaitable de la Russie [14]. Des preuves de la pensée antirusse agressive de la doctrine « Intermarium-Prométhéisme » qui est typique de l’actuelle politique étrangère polonaise peuvent être vues dans l’appui de la Pologne à la « Révolution Orange » en 2004 et au coup d’Etat de 2014 en Ukraine, dans l’appui actif de la Pologne à la Géorgie durant le conflit militaire russo-géorgien en août 2008, et dans l’attitude favorable de la Pologne envers les séparatistes tchéchènes durant et après la seconde guerre de Tchétchénie [15].

Nous pouvons voir un renouveau d’intérêt pour le projet « Intermarium » encore aujourd’hui. Cette proposition apparaît dans des discussions entre des politiciens d’Europe de l’Est et des spécialistes, sous son vrai nom ou sous l’apparence d’un « axe Baltique-Mer Noire », d’un « arc Baltique-Mer Noire », d’une « coopération Baltique-Mer Noire », ou d’un « corridor Baltique-Mer Noire » [16]. D’après le spécialiste américain des projets fédéraux en Europe de l’Est, Jonathan Levy, les échos de l’« Intermarium » peuvent encore être entendus dans la politique étrangère polonaise contemporaine dans son fort intérêt pour l’Est, spécifiquement l’Ukraine et la Biélorussie d’une part et, d’autre part, le renforcement des liens de la Pologne avec ses voisins dans la région, particulièrement avec les membres du Groupe de Višegrad [17]. Le dirigeant de la Confédération de la Pologne Indépendante, le conservateur Leszek Moczulski, insiste activement sur le renouveau de l’idée de l’Intermarium. La suggestion de Moczulski repose sur sa conviction de la nécessité de créer un bloc géopolitique de pays s’étendant entre les mers Baltique, Noire et Adriatique, opposé à la fois à l’Occident (principalement l’Allemagne et l’Union Européenne) et à la Russie [18]. Le parti des frères Kaczynski, Loi et Justice, a activement exploité le thème de l’Intermarium pendant la campagne électorale de 2005 et a basé sa plate-forme politique sur l’« ABC Intermarium » qui, par exemple, a soutenu la Croatie dans ses efforts pour rejoindre l’UE et a tenté de coopérer avec l’Ukraine de Youtchenko [19].

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Leszek Moczulski

Nous pouvons mentionner encore une autre théorie qui affecte encore de nos jours la formulation de la politique polonaise envers ses voisins de l’Est, la doctrine Giedroyc-Meroshevsky formulée par des émigrants polonais dans les années 1960-70. Les principes de base de ce projet ont été publiés à Paris dans le journal polonais Kultura, dont le rédacteur était l’écrivain, journaliste et ancien diplomate Jerzy Giedroyc. Comparé au paradigme jagellonien classique, la nouveauté de ce concept repose sur sa reconnaissance d’une région spéciale entre la Russie et la Pologne, nommée ULB (Ukraine, Lituanie, et Biélorussie). Giedroyc et son co-auteur, Meroshevky, ont appelé à l’abandon du révisionnisme géopolitique dans l’Est et, d’abord et avant tout, à une révision du désir de récupérer les territoires polonais annexés par l’URSS en 1939 [20]. Les auteurs de ce concept ont appelé au respect du droit à l’autodétermination nationale et à l’indépendance des Ukrainiens, des Lituaniens et des Biélorusses et ont critiqué les idées des Polonais « qui rêvent non seulement d’une Lvov ou d’une Vilnius polonaises, mais même d’une Minsk et d’une Kiev polonaises » et qui « trouvent leur idéal dans une Pologne indépendante en fédération avec la Lituanie, l’Ukraine et la Biélorussie » [21]. L’idée que « l’alternative à l’impérialisme russe ne peut être que l’impérialisme polonais, et l’a toujours été » fut rejetée par Meroshevsky comme inadéquate par rapport aux réalités de notre temps [22]. Dans un article publié dans Kultura, intitulé « Le complexe polonais : la Russie et la zone ULB », Meroshevsky a aussi qualifié la « noble idée jagellonienne » de version de l’impérialisme polonais et a appelé ses compatriotes à comprendre que « les Ukrainiens, les Lituaniens et les Biélorusses au XXe siècle ne peuvent plus être des pions dans le jeu historique polono-russe » [23].

D’après A. Miller, en dépit de la condamnation déclarée de l’impérialisme, de la critique des anciennes stratégies de contrôle russe et polonaise, dès son stade de développement cette doctrine exhiba un caractère principalement antirusse. Cela peut s’expliquer par le fait qu’elle lutte encore pour la « libération » des Ukrainiens, des Lituaniens, et des Biélorusses vis-à-vis du contrôle russe (puis soviétique) historique.

Miller fait référence à une intéressante déclaration de la figure bien connue d’émigration ukrainienne, Jaroslaw Pelenski, qui dans les années 1990 fut le directeur de l’Institut des Etudes d’Europe de l’Est à l’Académie Nationale des Sciences d’Ukraine, et qui maintint antérieurement des liens étroits avec Giedroyc. Motivé par une antipathie envers la Russie, Pelenski souligna que Giedroyc et Meroshevsky excluaient ce pays de leur vision sans aucune raison en termes de principes. Pelenski, d’autre part, pensait que le concept de la formation ukrainienne-biélorusse-lituanienne devrait s’élargir jusqu’à inclure certaines parties de la Russie. Il trouva un écho avec l’important politicien polonais et ancien activiste de Solidarité, Dariusz Rosati, qui reconnut aussi que l’essence de cette doctrine était le fait que l’Ukraine et la Biélorussie ont des sentiments plutôt antirusses [24].

En fait, la doctrine Giedroyc-Meroshevsky, bien qu’elle prétende toujours le contraire, est simplement une version cosmétiquement retouchée de l’idée jagellonienne. C’est l’Est et non l’Ouest qui est la priorité déclarée de cette approche géopolitique dans la politique étrangère polonaise. Ainsi, elle ne peut pas être considérée comme une variante du paradigme Piast de la géopolitique polonaise. De plus, la nature antirusse de cette idée est clairement visible dans le fait que l’un de ses buts principaux pour la Pologne dans l’Est est la déclaration d’indépendance de la zone ULB vis-à-vis de la Russie. Il est bien naturel que la notion d’« indépendance » puisse être interprétée très largement, et donc être étendue pour comprendre tout projet d’intégration dans l’espace postsoviétique comme une « attaque » contre l’indépendance de la région ULB. Le fait même que la Pologne conçoive une relation spéciale avec ces pays et, comme l’annonce le concept, soit destinée à jouer le rôle unique de défendre leur indépendance, est la preuve d’un effort pour protéger la région et donc établir une relation inégale.

Comme le remarque O. Nemensky, un autre facteur important qui caractérise l’application partielle de la doctrine Giedroyc-Meroshevsky et ses clauses comme caractéristiques de la « doctrine jagellonienne » est l’incapacité de la part d’un nombre considérable de Polonais d’accepter que la vieille politique polonaise était d’une nature impérialiste [25]. De plus, en dépit de l’acceptation nominale de cela dans la politique étrangère polonaise envers l’Est, la même doctrine déclare que c’est l’impérialisme russe, et non l’impérialisme polonais, qui est le danger principal pour l’Ukraine, la Lituanie et la Biélorussie.

moczulgeopoba6377addaa.jpgAinsi, en dépit des thèses apparemment anti-impérialistes de la doctrine en question, son adaptation par l’élite polonaise n’a fait que renforcer le caractère expansionniste, messianique et antirusse de la politique étrangère polonaise. Le choix de l’Ukraine et de la Biélorussie comme objets de la politique orientale polonaise et la nature générale de celle-ci (cela sera discuté plus loin) sont directement liés à cette influence. Une autre caractéristique importante de ce « nouveau » projet géopolitique est la faveur accordée à une participation accrue de la Pologne à l’intégration européenne, ce qui serait combiné avec le maintien de régimes libéraux-démocratiques dans les pays de l’Est [26]. Actuellement, la combinaison de ces idéologies est démontrée par la participation active de la Pologne au « Partenariat de l’Est » de l’Union Européenne.

Les contributions de Giedroyc et Meroshevsky proposent ce qui essentiellement une version nouvelle et adoucie de la vieille idée jagellonienne promouvant une politique étrangère active dans l’Est et gardant un œil sur le patronage de la Pologne sur les nations de Lituanie, d’Ukraine et de Biélorussie. Cette tendance n’a manifestement pas disparu dans la politique étrangère après 1989. En fait, A. Lorak affirme que la notion d’ULB de Giedroyc a formé la base de la nouvelle politique orientale de la Pologne après 1989 [27] et a maintenant été utilisée pour justifier le rôle actif de la Pologne dans le « Partenariat de l’Est ». Cet auteur dit que la doctrine Giedroyc-Meroshevsky est essentiellement apparentée à la doctrine du Prométhéisme, dont le principe de base est surtout d’assurer la sécurité et le leadership de la Pologne au moyen de l’émancipation de ses voisins de l’Est vis-à-vis de la Russie [28]. Cette voie a été poursuivie dans la politique étrangère polonaise depuis l’effondrement du système mondial bipolaire [29].

De plus, la Stratégie de Sécurité Nationale polonaise en action de 2007 à 2014 postulait que l’Etat polonais contemporain est d’une importance fondamentale pour promouvoir l’expansion de l’UE et de l’OTAN, spécialement en Ukraine, en Moldavie, au Sud-Caucase, et dans la parie ouest des Balkans [30]. Le document dit, par exemple, que « la démocratisation de la Biélorussie aurait un effet fortifiant positif sur la sécurité de la Pologne » [31]. La nature atlantiste de cette stratégie peut être vue dans la proclamation que les USA sont le principal allié de la Pologne et dans la reconnaissance que l’« ambition de traiter l’UE comme un contrepoids aux Etats-Unis » [32] est une menace pour la sécurité polonaise. Cette préférence sans ambiguïté pour les USA et l’OTAN a été renouvelée dans la mise à jour stratégique de 2014, qui se concentre surtout sur la nécessité de contenir la Russie.

L’élément le plus important de l’actuelle politique orientale de la Pologne est son attitude envers la diaspora polonaise dans les pays étrangers et sa manipulation comme un instrument de politique étrangère et d’expansion culturelle. Comme l’a remarqué l’analyste ukrainien Vladislav Gulevich, l’intensification de cette politique de la diaspora depuis 2006 « peut être vue comme un désir de créer un environnement religieux et culturel dominé par le catholicisme et la culture polonaise de Rite Romain » [33].

Semper-Polonia-logo.jpgEn effet, l’idée de « Polonia », de Monde Polonais, est activement utilisée dans le discours politique polonais qui unit la nation polonaise, quel que soit le lieu de résidence de ses membres. D’après Giedroyc, depuis 1990 le Sénat de la République de Pologne a fourni un financement important pour le développement de la « Polonia ». Si initialement une seule organisation fut impliquée dans cette initiative – l’Association des Communautés Polonaises – en 2008 plus de 75 ONG furent inclues, la plus grande étant la Communauté Polonaise, Semper Polonia, et la Fondation pour l’Assistance aux Polonais dans l’Est. Ces organisations reçoivent plus de 76% de tous les subsides gouvernementaux visant à soutenir la diaspora polonaise (17,1 millions de dollars). Le Sénat polonais a clairement identifié les principales priorités de travail de cette « Polonia » comme étant le développement de projets éducationnels pour les Polonais à l’étranger (26% du financement), le développement de la culture polonaise (plus de 17%), et le développement de médias étrangers polonais et pro-polonais (10%) [34].

Le fait de la combinaison des politiques de soutien aux compatriotes avec la politique étrangère de la Pologne apparaît dans la manière dont en 2006 l’un des candidats à la présidence de la Biélorussie était le représentant de l’opposition unie, Alyaksandr Milinkevich, qui est membre de l’Union des Polonais en Biélorussie [35].

La confiance accordée aux organisations non-gouvernementales, la « diplomatie humanitaire », et la pénétration culturelle des anciens territoires de l’Etat polono-lituanien sont les facettes distinctives de la politique polonaise envers l’Ukraine et la Biélorussie. Kiev et Minsk hébergent tous deux des départements de l’Institut Polonais qui travaillent avec les universitaires, enseignants et étudiants locaux pour diffuser les idées de l’histoire et du destin communs de la Pologne, de l’Ukraine et de la Biélorussie, l’importante contribution culturelle du Commonwealth polono-lituanien au développement des deux nations, la promotion de la perspective polonaise à l’histoire de l’Ukraine et de la Biélorussie, et les relations ukrainiennes et biélorusses avec les Polonais et les Russes. Les échanges de personnel de la Polonia sont aussi une composante active qui emploie des diplômés dans les branches des entreprises polonaises ou locales intéressées par une coopération avec la Pologne, renforçant ainsi la présence économique de la Pologne dans la région. Dans le cadre de la Polonia, une attention particulière est portée au catholicisme. Les Polonais forment approximativement 50% du clergé dans la communauté catholique biélorusse qui forme 20% de la population. Des contributions sont aussi faites à la communauté catholique croissante en Ukraine. « D’après l’Annuaire Pontifical, le nombre total de catholiques (de tous rites) en Ukraine est maintenant d’environ 5 millions de personnes (environ 10% de la population) [36].

Comme le remarque le chercheur polonais K. Pomoska, l’orientation vers l’Est (spécialement vers l’Ukraine, la Biélorussie et la Russie) continue d’être une priorité majeure de la politique étrangère polonaise. La Révolution Orange en Ukraine et le préjugé pro-occidental subséquent dans la politique étrangère de l’Etat ukrainien sont considérés comme des réussites de la politique étrangère polonaise [37]. Le soutien à l’opposition en Biélorussie et les relations froides avec la Russie restent des caractéristiques « européanisées » de la stratégie de la politique étrangère polonaise qui, bien qu’utilisant des instruments de l’UE, est stratégiquement orientée vers les USA.

Notes :

[1] Неменский О. IV Речь Посполитая: взгляд на Восток [Электронный ресурс] URL: http://www.apn.ru/opinions/article9544.htm (дата доступа - 17.08.2011).

[2] См.: Дмовский Р. Германия, Россия и польский вопрос. СПб., 1909.

[3] Fawn R. Ideology and national identity in post-communist foreign policies. N.Y.: Routledge, 2003. P. 187.

[4] Гулевич В. Границы евразийства и их преодоление / Левиафан: материалы семинара «Геополитика/Геостратегия». М., 2011. С.201-202.

[5] Prizel I. National identity and foreign policy: nationalism and leadership in Poland, Russia and Ukraine. Cambridge. Cambridge University Press, 1998. P. 57.

[6] Ibid.

[7] Соцков Л. Секреты польской политики. 1935-1945гг. Рассекреченные документы Службы внешней разведки Российской Федерации. М., 2010. С. 269-290.

[8] Woytak R. The Promethean Movement in Interwar Poland //East European Quarterly, 1984. vol. XVIII, no. 3. Pp. 273-278.

[9] Levy J. The Intermarium: Wilson, Madison, & East Central European Federalism. N.Y.: Universal-Publishers, 2007. P. 175.

[10] Ibid.

[11] Petersen A. The World Island: Eurasian Geopolitics and the Fate of the West. Santa Barbara: ABC-CLIO, 2011. P. 60.

[12] Ibid. P. 74.

[13] Mackinder H. Situation in South Russia. 21 January 1920 / Documents on foreign policy 1919 – 1939. First series. V. III. 1919. London, 1949. C. 786–787.

[14] Бжезинский З. Великая шахматная доска. Американское превосходство и его геостратегические императивы. М.: Международные отношения, 2010. С. 239.

[15] Дворовенко П. «Чеченская карта» польской политики. Империя: информационно-аналитический портал [Электронный ресурс] URL: http://www.imperiya.by/politics1-8490.html (время доступа - 12.08.2011)

[16] Савин Л.В. Проект Междуморья и геополитика региональных рисков // Геополитика. 2011. Вып. 10. С.45-47.

[17] Levy J. The Intermarium: Wilson, Madison, & East Central European Federalism. N.Y. Universal-Publishers, 2007. P. 340.

[18] Reprintsev V. Ukraine in Polish Foreign-Policy Doctrines / [Ukrainian Statehood in the Twentieth Century: Historical and Political Analysis. Kyiv: Political Thought, 1996. P. 156.

[19] Андреев А. Новая Речь Посполитая [Электронный ресурс] URL:http://www.apn.ru/opinions/article9504.htm (дата обращения - 20.08.2011).

[20] Spero J.D. Bridging the European divide: middle power politics and regional security dilemmas. N.Y.: Rowman & Littlefield, 2004. P. 35.

[21] Мерошевский Ю. «Польский комплекс» России и территория УЛБ. [Электронный ресурс] URL:http://www.polonica.ru/node/136 (дата доступа - 13.08.2011).

[22] Ibid.

[23] Ibid.

[24] Миллер А.И. Тема Центральной Европы: История, современные дискурсы и место в них России // Регионализация посткоммунистической Европы: Сб. науч. тр. М.: ИНИОН, 2001. С. 35.

[25] Неменский О. IV Речь Посполитая: взгляд на Восток [Электронный ресурс] URL:http://www.apn.ru/opinions/article9544.htm (дата доступа - 17.08.2011).

[26] Lacroix J., Nicolaīdis K. European Stories: Intellectual Debates on Europe in National Contexts. Oxford: Oxford University Press, 2011. P. 226.

[27] Lorek A. Poland's Role in the Development of an 'Eastern Dimension' of the European Union. Munich: GRIN Verlag, 2009. P. 24. [28] Ibid. P.88

[29] Ibid. P. 24

[30] Polish National Security Strategy. Warsaw 2007. P.7.

[31] Polish National Security Strategy. Warsaw 2007. P. 7.

[32] Ibid. P. 9.

[33] Гулевич В. Диаспоральная политика Польши на "Восточных территориях" (Украина, Беларусь) [Электронный ресурс]URL: http://www.geopolitika.ru/Articles/Page/320 (дата обращения - 20.07.2011).

[34] Гулевич В. Указ. соч.

[35] Неменский О. Указ. соч.

[36] Гулевич В. Указ. соч.

[37] Pomorska K. Are we there yet? From adaptation to Europeanisation of Polish foreign policy [Электронный ресурс] URL: http://euce.org/eusa/2011/papers/7j_pomorska.pdf (дата обращения - 20.08.2011).

21st-Century Geopolitics Of Japan

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21st-Century Geopolitics Of Japan

Andrew Korybko
Ex: https://www.geopolitica.ru

Japan, as the Asian geographic analogue of Great Britain, is a strategic outlier in the Eurasian supercontinent by virtue of its location, which has in turn greatly influenced its political decisions across the centuries and shaped it into an historically thalassocratic power. The Oriental state prudently chose to implement selective Westernization following the Meiji Restoration in 1868, which allowed it to grow by leaps and bounds ahead of its regional competitors and ultimately emerge as a Great Power in its own right. Japan’s grand strategy was to literally become the Great Britain of Asia, and to that end it sought to carve out its own empire in the Eastern Hemisphere through brutal conquest and a divide-and-rule strategy which would ultimately enable it to replace its European counterparts as the uncontested hegemon in this part of the world.

The World War II-era “Greater East Asian Co-Prosperity Sphere” was the high point of Japan’s “traditional” geostrategic ambitions, after which it was humiliatingly occupied by the US until the present day following the two devastating nuclear bombings in Hiroshima and Nagasaki. From 1945 onwards, Tokyo has been Washington’s “Lead From Behind” partner in East and Southeast Asia, being encouraged by the US to take on a leading regional role in order to give America a “local face” behind which it could project its dominance. It’s for this reason why the US appointed Japan to become the main player in the Asian Development Bank (ADB) and actively supported its efforts to invest in the former territories that had briefly constituted its imperial realm during the Second World War.

The end of the Cold War and subsequent rise of China as a Global Power (inadvertently aided and abetted by US investments) saw Japan’s role progressively transform from a solely economic-institutional “Lead From Behind” capacity to a military one, with Tokyo only just recently “reinterpreting” its post-war constitution in order to allow the deployment of military troops abroad and sale of military equipment to foreign partners. For all intents and purposes, the US is tacitly encouraging Japan to “more peacefully” follow in its pre-World War II-era footsteps in reasserting its traditional Rimland ambitions in East and Southeast Asia, though for as much as this might lead one to believe that Tokyo is still acting as a total puppet of Washington, its leadership has surprisingly begun a fast-moving rapprochement with Moscow.

This seemingly inexplicable turn of events is but one of the many paradigm shifts taking place all across the globe and in every single sphere as the Multipolar World Order gradually enters into being, and the consequences of this comprehensive change are expected to impact on the grand strategies of each Great Power, Japan included. It’s therefore of heightened relevancy to examine the 21st-century geopolitics of the country, though taking care to note that all future developments concerning this state are much more dependent on domestic trends than they are for most other players. That being the case, the analysis will begin by examining how Japan’s domestic situation influences its foreign policy, after which it will then elaborate more on the external manifestations of Tokyo’s grand strategy. The final part of the research will then summarize the prevailing trends that one can expect from Japan’s 21st-century geostrategy.

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Demographic Die-Out

Japan’s population is dying out, and fast. The number of senior citizens is surging, while child births are way below replacement level. To make matters worse, Japanese young adults are eschewing sex for a variety of socio-cultural reasons, mostly thought to have something to do with the typically stressful life of urban workers and the convenience that the near-ubiquity of technology provides in “satisfying” carnal desires and creating the easily manageable illusion of a “relationship”. If the present trends continue, then Japan is expected to suffer one of the most profound population losses ever for a peacetime population in the coming decades, which has led to many observers becoming extraordinarily concerned about the country’s overall future. Considering Japan’s global importance as the world’s third-largest economy, this could be expected to have major implications for all of its partners, both fellow Great Powers and developing states alike.

Robotic Replacements

There is, however, a chance that no dire scenarios will unfold so long as Japan is successful in replacing its shrinking population with robots. It may sound futuristic but it’s already happening, at least when it comes to the economy. “This Company’s Robots Are Making Everything—and Reshaping the World”, a very insightful article published by Bloomberg in mid-October 2017, provides an eye-opening look at just how important the Japanese robotics company Fanuc has been in making this happen. It’s by and far the world leader in this field, having already captured a quarter of the global market. In addition, nearly one-third of all the world’s industrial robotics orders last year were Fanuc sales to China, which interestingly tightens the complex economic interdependency between these two rivals and shows just how important of a driver this company is for the global economy at large. Accordingly, it’s only natural then that Fanuc takes the lead in replacing Japan’s dwindling human workforce with robots in the future, since it’s already replacing the labor force of other countries as it is.

So long as there’s a stable and inversely proportional relationship between the decrease in Japan’s population and the rise of its industrial robotic sector, then theoretically speaking, there isn’t much for Tokyo to worry about on the structural level. Instead of fretting about what to do with its newfound unemployed masses like the rest of the world is doing, Japan could just work on retraining its citizens to fill the crucial non-robotic niches that are still left in its economy. It remains likely that the world will nevertheless eventually employ some combination of “universal basic income” (UBI) and virtual reality (VR) to placate the population along the lines of the long-term scenario forecast in the author’s work about “The Geopolitics Of The Techno-Civilizational World Order”, but Japan will probably have the least difficulty in doing this because of the “natural” rate at which the country is transitioning to it anyhow.

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Without any undemocratic subversive behavior on the part of the Japanese elites, their country is already moving towards the dystopian outcomes associated with “Agenda 21”, but with the key difference being that Japan will experience minimal social disruption so long as its food and energy needs continue to remain provided for. The first of course deals with feeding the remaining human population, which shouldn’t be too troublesome if their numbers continue to diminish and technological advances in industrial-scale urban agriculture continue. As for the latter, no robotic-driven civilization-society can function without reliable energy supplies, and it’s here where many believe that Japan will forever remain dependent on geopolitical processes beyond its control in the Mideast, though the reality of the matter is that Tokyo has sought to preemptively avoid this crippling vulnerability through alternative energy advancements and a game-changing rapprochement with Moscow.

The Russian Rapprochement

The geopolitical dimension of Japan’s energy policy has seen it rapidly improve relations with Russia, which were stagnant for decades because of the US-manufactured issue that Tokyo refers to as the “Kuril Islands Dispute”. The contours of this conundrum are outside the scope of this analysis, but it’s relevant to say that it took Japan’s flexibility on the issue to rejuvenate ties with Russia, which are currently on the rise and better than at any time in the post-war period. Russia is receptive to Japan’s outreaches because it needs investment in its resource-rich but underpopulated Far East, and likewise, Japan needs reliable access to these said resources, be they agricultural, mineral, or especially energy. Altogether, the dynamics of the Russian-Japanese partnership represent a dual balancing act for both parties that was described at length in the author’s 2016 work about how “Russia’s Diplomatic Balancing Act In Asia Is To The Benefit Of Its Chinese Ally”, with the obvious caveat being that Tokyo isn’t doing this to aid Beijing even if that’s indeed the inadvertent outcome of what’s happening.

Carrying on, Russia is seen as a reserve of immense energy wealth which could easily power Japan’s future robotic society for decades to come, and without any of the attendant geostrategic risks that come from importing resources from the conflict-prone Mideast across the bottlenecked Strait of Malacca and then through the contentious waters of the South China Sea. Russia is therefore conceptualized as Japan’s neighboring “battery”, though one which will only share its power provided that Tokyo concedes to accept Moscow’s sovereignty over the Kuril Islands, albeit possibly through the unique NISEC sub-state socio-economic sharing arrangement that the author suggested last year. On a larger level, the Japanese-Russian rapprochement is geostrategically advantageous for Tokyo because it gives the island nation a bit more maneuverability for negotiating with the US, and it also sends a signal to China that Japan is interested in an apolitical non-hostile presence along its northeastern continental borderland. This plays into the prestige that Japan is trying to cultivate as it reestablishes itself as a Great Power and attempts to lessen the complete strategic dependence that it’s historically had on the US since the post-war military occupation.

The Race For Resources

Russia can be very useful for powering Japan’s energy-intensive robotic society in the future, but these automated replacement workers won’t do anything for the country’s economy unless they have raw materials to work with in producing items for export. The Russian Far East can only provide some of what’s needed, and definitely not on the scale that the Japanese economy requires, which is why Tokyo has had to scour the world for the necessary resources. This has seen the country establish a post-war economic presence in Southeast Asia with the encouragement of the US, as well as engaging in sizeable investments all across Africa after the end of the Cold War. The parallel rise of China during this latter period meant that the world’s most populous country was now competing for the same number of finite physical resources, therefore turning this relaxed search mission into a pressing race against Japan’s historic rival.

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Trade Route And Transit State Tango

Prospecting resources and developing new marketplaces is one thing, but accessing them is another, and that’s why the world is presently in the midst of an intense period of competitive connectivity. China’s One Belt One Road global vision of New Silk Road connectivity is slated to transform the declining unipolar global system into an emerging Multipolar World Order, and Tokyo is simply unable to compete with Beijing because of the disparity in scale between their two economies. It’s for this reason why Japan decided to partner with India in pioneering the so-called “Asia-Africa Growth Corridor”, also known as the “Freedom Corridor”, in order to collectively pool their existing resources and economic complementarities in carving out a niche for themselves in the Greater Indian Ocean Region. The specific geopolitics of the wider Chinese-Indian New Cold War that this is a part of were examined in detail in the author’s book-length article series on the topic for the Islamabad-based political consultancy firm CommandEleven, but it’s enough for the casual reader to understand that there’s a complex tango going on between Japan and China for access to trade routes and transit states.

The partnership with India obviously allows Japan to strengthen its presence in the Indian Ocean, while the one with Russia interestingly provides Tokyo with the chance to become the East Asian “gatekeeper” along the Northern Sea Route to Europe. Altogether, Japan’s strategic cooperation with these two Great Powers is predicated on the self-interested idea of securing its access to crucial trade routes and transit states, though this also in and of itself gives Tokyo influence over regions that are strategically important for Beijing as well. The ideal outcome would be that these two East Asian powerhouses join forces in strengthening Silk Road Globalization through a combination of active cooperation and friendly competition with one another institutionalized through Japan’s prospective membership in the Chinese-led Asian Infrastructure Investment Bank and the possible establishment of the megaregional Free Trade Area of the Asia-Pacific (FTAAP) and Regional Comprehensive Economic Partnership (RCEP) economic deals. Heavy US influence on Japan will probably preempt this from happening, however, and therefore lead to Tokyo continuing to function as one of the key pillars in the “China Containment Coalition” that’s being built all across the Indo-Pacific. 

The antagonistic scenario that the US is pushing Japan towards with China is the same as what it’s doing vis-à-vis the EU and Russia, though in a different manner accommodating for the changed situational relations between them. Instead of deceptively emphasizing a “zero-sum” outcome when it comes to competitive connectivity projects and the race for resources, the US is promoting a “zero-sum” mentality in relation to “values”, having spared no expense or effort to convince the EU elites that Russian “values” are purportedly incomparable with Western ones and therefore constitute a “threat”. The whole point of this massive disinformation operation on both ends of Eurasia is to prevent the ultimate Great Power convergence between the EU and Russia on the Western half and China and Japan on the Eastern one, which would collectively result in most of the supercontinent being liberated of unipolar influence when accounting for the multipolar impact of Russia’s “Ummah Pivot” in the “Greater Mideast” and China’s Silk Road success in ASEAN. India is of course the geostrategic exception in this model, but it would likely be forced to fall into line with the Multipolar World Order in this scenario or otherwise risk hemispheric isolation as the US’ last main outpost.

The Intricacies Of The Japanese-Chinese Competition

Accepting that the current trends indicate that the US-provoked Japanese-Chinese competition will probably extend into the indefinite future, the most responsible thing that can be done is to examine the intricacies of this New Cold War rivalry from a thought-provoking perspective uncommon to most analyses on this topic. Instead of focusing on the advantages that China has in this rivalry like a lot of analysts have already done, it’s worthwhile exploring the topic from the reserve angle in looking at it from Japan’s perspective in order to identify what possible advantages Tokyo might have as well. For instance, the Japanese “Maritime Self-Defense Force” already functions as a blue-water navy even if it does so unofficially, and there’s a chance that it could give China a serious run for its money in any potential clash between the two. Added to that is Japan’s robotic prowess, which could lead to pivotal military advances in the future that might decisively shift the balance of power between the two.

That said, the above factors are only applicable when it comes to military affairs, but the likelihood of a hot conflict between the two isn’t too probable for a variety of reasons, partly having to do with the complex economic interdependence between them but also the US’ mutual defense obligations to Japan. Both parties are vulnerable to Hybrid War disruptions in the shared transit states constituting their respective competitive connectivity projects in mainland ASEAN (the “Greater Mekong Subregion”), the Mideast and Central Asia, and East Africa, but China will always be more at risk than Japan because of how much it depends on these routes in order to secure its own domestic stability. The inverse proportional relationship between Japan’s declining population and rising robotic replacements means that Tokyo could theoretically weather any transit state disruptions much better than China, which has staked its entire 21st-century future on the New Silk Roads in order to sustain domestic growth and prevent the socio-political unrest that would inevitably accompany any Hybrid War-inflicted economic downturn.

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Veiled Vulnerabilities

Despite its salient strategic advantage in being comparatively (key word) less dependent on transit state volatility than China, Japan isn’t exactly in a position to directly press its advantage against its rival if times got tough for Beijing. Neither side can afford a trade war against the other, which in any case would be more devastating for Japan than for China because of the monopoly that the People’s Republic enjoys on rare earth mineral production. Japan needs these resources in order to sustain its technological-robotic future, so it’s not in a position to tempt China to cut off its exports like it temporarily did in 2010 in connection with a flare-up of the East China Sea dispute. Nor, for that matter, could Japan afford for Chinese cobalt and coltan companies in the Congo to decline selling this necessary component for electric vehicle batteries, cruise missiles, and almost every ubiquitous modern-day technological gadget such as smartphones. After all, China controls roughly 60% of the global cobalt market, the demand of which is expected to spike by two-thirds in the next decade, and securing reliable access to this indispensable resource is a pressing priority for Japan.

Another veiled vulnerability affecting Japan’s 21st-century geostrategy is closer to home in the form of the Ryukyu Islands, of which anti-American Okinawa is a part. This island chain only became part of Japan relatively recently in the late 19th century, and the population of its most militarily important island resents the American bases there which are responsible for insufferable noise and a spree of high-profile crimes include rapes and murders. The locals don’t want the US to remain in their homeland, but are powerless to evict them due to the overriding influence that Washington has over Tokyo and the near-impossibility of this ever happening. Nevertheless, an asymmetrical measure that China could in theory employ (key conditional, as there isn’t any existing proof of this) would be to encourage the anti-American protest movement and help it develop to the level of an autonomous, “federalist”, or even separatist one despite the improbable odds of it actually succeeding. The point, though, would just be to cause maximum disruption at one of Japan’s most sensitive military locations in the hopes of provoking an escalating spiral of violence that could partially distract Tokyo from whatever hostile proxy action it would be engaged in against China at the time (e.g. trade war).

Prevailing Trends

All told, there are several prevailing trends that are forecast to guide Japan’s 21st-century geostrategy. In the order that they were introduced in this analysis, these are:

* Japan’s demographic die-out and replacement with robotic workers;

* The Russian-Japanese rapprochement to secure reliable energy supplies for Tokyo’s continued technological-robotic rise;

* The race for finite manufacturing resources in the “Global South” regions of mainland ASEAN (the “Greater Mekong Region”), South Asia, and East Africa, as well as the need to develop Japanese-friendly markets in this part of the world and the Mideast-Central Asia;

* The resultant competition with China for the aforesaid, and the disruptive role of American influence in turning Tokyo into Beijing’s chief Asian rival instead of its natural strategic partner in jointly advancing Silk Road Globalization in the Multipolar World Order;

* Japan’s advantageous geostrategic position in being comparatively less affected by future American-managed Hybrid Wars in the Greater Indian Ocean Region;

* and Tokyo’s veiled vulnerabilities in being dependent on China’s export of rare earth minerals to power its technological-robotic industries and the risk that Beijing could clandestinely destabilize the Ryukyu Islands through various degrees of pro-autonomy movements all the way up to separatism.

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Concluding Thoughts

The simplified points mentioned above demonstrate the phased logic that goes into Japan’s grand strategy and explain some of its more recent moves, whether the surprising decision to enter into a rapprochement with Russia or the somewhat overdue one to partner up with India in the Greater Indian Ocean Region. Everything ultimately comes down to Japan’s seemingly inevitable transition into becoming the world’s first large-scale techno-robotic civilization, however, as it’s from this core trend that all the others are derived to some degree or another. Altogether, the bigger picture behind Japan’s 21st-century geostrategy should allow one to get an idea about the structural limitations inherent to its “China Containment Coalition” actions, as there’s only so much that Tokyo can do and so far that it can go against Beijing before it begins to feel the consequences from the People’s Republic discretely suspending the sale of rare earth minerals to the island nation and/or supporting a destabilizing Ryukyu autonomy campaign.  

The already existing and multidimensional system of complex economic interdependency, coupled with both sides’ near-equal naval capabilities, acts as a form of checks and balances between the two Asian Great Powers and could ideally be reframed in such a way as to convince Japan’s decision makers and strategists of the mutually disadvantageous nature of the Chinese-Japanese rivalry that their American military occupier encouraged them to aggravate over the past couple of years. A reconceptualization of the relationship between these two related civilization-states could inject fresh thinking into this dynamic and demonstrate how beneficial the win-win possibilities of bilateral Silk Road cooperation are in comparison to the lose-lose “zero-sum” game that the US is provoking between them. The US wants to continue using Japan as its “unsinkable aircraft carrier” in perpetuity so that it can “contain China”, but reversely, the failure of this policy would “unchain China” by accelerating the global trend towards a Multipolar World Order.          

As it stands, there aren’t any indications that Japan desires to redirect its grand strategy away from “zero-sum” unipolarity and towards win-win multipolarity, however it nonetheless can’t be ignored that Tokyo is indeed behaving in a relatively independent fashion by continuing to restore its relations with Moscow. Washington obviously isn’t too happy about this, though at the same time, the pragmatic strategists in the US’ permanent military, intelligence, and diplomatic bureaucracies (“deep state”) understand the necessity of this move and appreciate how its optics could be manipulated by savvy propagandists in an attempt to instigate suspicion between Moscow and Beijing, capitalizing on the fact that Russia hasn’t publicly explained its grand strategic balancing act. Looking forward, it’s expected that the Chinese-Japanese competition will continue all along the Greater Indian Ocean Region, merging with the Chinese-Indian one of which it’s now inextricably a part, in order to add critical mass to the Asian component of the New Cold War. 

DISCLAIMER: The author writes for this publication in a private capacity which is unrepresentative of anyone or any organization except for his own personal views. Nothing written by the author should ever be conflated with the editorial views or official positions of any other media outlet or institution.

jeudi, 16 novembre 2017

Mohammad bin Salman pris dans les conflits géopolitiques mondiaux

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Mohammad bin Salman pris dans les conflits géopolitiques mondiaux

par Jean Paul Baquiast

Ex: http://www.europesolidaire.eu

Ce texte fait suite à deux précédents articles, référencés ci-dessous, que nous avions consacrés à un effort pour tenter de comprendre ce qui se passe depuis quelques semaines en Arabie saoudite

Addendum au 13/11/2017

Voir la mise à jour que nous venons de publier
http://www.europesolidaire.eu/article.php?article_id=2757...

***

Lors de sa visite surprise à Riyad le 10/11 auprès du nouvel homme fort de l'Arabie Saoudite, le prince héritier Mohammad bin Salman (MBS), Emmanuel Macron a voulu rappeler la position de la France. Le communiqué diffusé par l'Elysée à l'issue de la rencontre semble vouloir, derrière les généralités diplomatiques, indiquer que Paris s'inquiète de voir Riyad qui poursuit une guerre de plus en plus meurtrière au Yemen, qui participe à une « coalition arabe » menée par les Etats-Unis laquelle accumule les échecs au Sahel, et plus récemment qui fait monter la tension avec l'Iran jusqu'à risquer un affrontement militaire.

Au Liban, la France traditionnelle alliée des partis libéraux et francophones libanais, se demande si, sous couvert de lutter contre une prétendue emprise du Hezbollah dans ce pays, l'offensive menée par MBS contre le premier ministre Hariri, l'ayant poussé à démissionner et se réfugier à Rihad, où il semble aujourd'hui détenu, ne marque pas la volonté de la maison des Saoud de reprendre la main sur le Liban tout entier, ceci au détriment des intérêts français.

Le communiqué, de façon non conflictuelle, s'est félicité de " la stratégie de développement " du prince héritier définie dans sa “vision 2030” , ainsi que de « son discours sur l'ouverture de son pays et l'appui à un islam modéré ». Mais là encore le communiqué fait silence sur les doutes de la France quant à la viabilité d'une « vision » visant à remplacer le pétrole comme facteur de développement par de nouvelles sciences et technologies. Les Saoudiens seront incapables de le faire par eux-mêmes faute de compétences.

De même, en France, on ne perçoit pas clairement, quelles que soient les ambitions affichées par MBS, comment le pays qui a toujours abondamment financé et politiquement aidé le djihadisme islamique, cesserait de le faire. Comment notamment pourrait il se débarrasser d'un islam whahabite de plus en plus extrémiste, présent dans l'ensemble de la société. Concernant les mœurs, le fait d'avoir autorisé les femmes à conduire des automobiles ne sera qu'un alibi pour protéger voire renforcer la domination absolue des hommes.

Que deviendra MBS?

La visite de Emmanuel Macron, autant que l'on puisse l'interpréter sans connaître les pensées et arrières pensées de ce dernier, vise à conforter l'avenir de MBS. Celui-ci, malgré les apparences découlant du succès momentané de son « coup d'état », sous prétexte de lutte anti-corruption, contre une partie de la monarchie et des pouvoirs jusqu'ici dominants, n'est en rien à l'abri d'un éventuel « contre-coup d'état » provenant des intérêts momentanément écartés.

On parle beaucoup de la possibilité d'une prise de pouvoir provenant de militaires humiliées par les échecs de la guerre au Yemen et les reculs, face notamment aux Turcs. Les généraux saoudiens sont incapables de commander efficacement des forces sur le terrain, mais seraient parfaitement capables d'un putsch comme il y en a eu de nombreux autres de par le monde. Derrière les militaires se rassembleraient probablement les princes et hommes d'affaires évincés par MBS.

Même s'il n'y avait pas de coup d'état militaire, il pourrait y avoir un coup d'état d'inspiration whahabite qui mobiliserait tous les conservatismes refusant les réformes que, pour son propre avenir politique, MBS voudrait imposer au pays.

Mais dans de telles perspectives, comme l'Arabie Saoudite n'est qu'un pion dans des affrontements géopolitiques mondiaux la dépassant, l'avenir de MBS ou celui de ses opposants dépendra presqu'exclusivement de la façon dont les Etats-Unis pourront les utiliser dans leur volonté d'éliminer l'influence russe au Moyen-Orient.

Eliminer l'influence russe

Jusqu'à ce jour, le pouvoir saoudien s'était inscrit en tête de la coalition sunnite visant à combattre ce que l'on a nommé l'axe chitte, comprenant en premier lieu l'Iran, l'actuel gouvernement de Damas et certains représentants de Bagdad. Cet axe ne se caractérise pas seulement par des convictions religieuses à faibles conséquences politiques, mais par la volonté de s'affranchir de l'influence américaine qui jusqu'à ces derniers temps avait mis l'ensemble du Moyen-Orient au service des intérêts politiques et pétroliers américains. Les Russes, depuis l'allocation de bases militaires par Damas et leurs interventions armées ayant réussi à sauver le pouvoir de Bashar el Assad, sont une composante essentielle de cet axe chiite s'opposant à la coalition sunnite.

Plus personne ne discute aujourd'hui le fait que les Etats-Unis se soient engagés depuis la fin de la 2e guerre mondiale dans un effort de longue haleine visant à neutraliser la Russie, seule puissance disposant d'une arme nucléaire suffisante pour leur tenir tête. Dans cette perspective, leur capacité de mobiliser à leur service la totalité de l'Arabie saoudite a toujours constitué, en dehors des enjeux pétroliers et économique, la raison essentielle de l'alliance américaine avec un pays par ailleurs aussi rétrograde.

Il faut donc se demander, sans pouvoir apporter de réponse claire vu l'opacité du pouvoir saoudien, si le coup d'état de MBS n'aurait pas été provoqué, ou tout au moins fortement aidé, par les services américains au prétexte de rallier à l'influence américaine les composantes les plus modernistes de la société saoudienne. Il est difficile en effet de croire que subitement un prince saoudien, aussi ambitieux soit-il, surnommé récemment le prince rouge compte tenu de son ouverture apparente à une certaine forme de démocratie sociale, aurait pu décider seul de s'opposer à une partie très puissante de la monarchie saoudienne, et plus encore réussir à le faire.

Si donc comme il est probable, Washington continuait à soutenir de multiples façons MBS contre des opposants restés très puissants, ledit MBS n'aurait pas trop d'inquiétude à avoir concernant sa possibilité de s'imposer à la totalité du Royaume et les multiples princes dont il a fait ses ennemis. Ceci d'autant plus qu'il continuera à apparaitre, y compris à Tel Aviv, comme un adversaire déterminé de l'Iran

Les choses seraient très différentes si Washington découvrait que MBS pourrait être d'une certaine façon influencé par Moscou et indirectement par l'Iran dont Donald Trump affirme vouloir la perte. Ceci paraissait inimaginable jusqu'à ces derniers temps. Cependant Vladimir Poutine a fait récemment quelques avances au Royaume, qui été bien accueillies.  La visite du roi Salman à Moscou le 5 octobre, a constitué la première venue officielle d'un dirigeant saoudien en Russie. Elle a marqué la volonté russe de se rapprocher du monde sunnite, et celle du Roi Salman, avec l'appui russe, de s'opposer à l'influence grandissante de l'Iran. A la suite de cette visite a été définitivement signé l'accord permettant à Rihad de se doter de missiles russes S.400. Il est vrai que ceux-ci ne pourraient être utilisés que contre d'éventuels missiles iraniens ou venant du Hezbollah,  ce dont le Pentagone se réjouirait.

Ceci ne signifie pas que l'alliance russo iranienne sera remise en question ni que l'Arabie se rangera subitement du côté russe.  Mais ces divers éléments ne doivent pas manquer d'inquiéter Washington. Dans ce cas, MBS pourrait perdre brutalement l'appui américain et se retrouver à son tour dans des geôles saoudiennes. Ni la Russie, ni moins encore la France, à défaut d'interventions militaires improbables, ne pourraient alors le sauver

Références

06/11 http://www.europesolidaire.eu/article.php?article_id=2749...?

08/11 http://www.europesolidaire.eu/article.php?article_id=2751...?

Note

Sans partager nécessairement en tous points l'analyse d'Alexandre del Valle, nous conseillons la lecture de son article bien documenté 

http://www.atlantico.fr/rdv/geopolitico-scanner/tres-bonn...