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vendredi, 29 avril 2016

Aufstand des Geistes

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Aufstand des Geistes

von BN-​Redaktion

Ex: http://www.blauenarzisse.de

aufstandf5755840c470ee55123426d_L.jpgSoeben ist der achte Band unserer Schriftenreihe BN-​Anstoß erschienen: „Aufstand des Geistes. Konservative Revolutionäre im Profil“ vereint zehn Portraits über Denker, die wir wiederentdecken müssen.

Denn nur wenn Parteien und Protestbewegungen von einem Aufstand des Geistes begleitet werden, können sie langfristig etwas bewirken und eine sinnvolle Neuordnung von Staat, Volk und Gesellschaft umsetzen.

Reaktionäre Rebellen …

Weil es eben um diese Prinzipien, Ideale und Ideen für eine „schöpferische Restauration“ (Rudolf Borchardt) gehen muß, wurde der Begriff der „Konservativen Revolution“ in unserem neuen Buch Aufstand des Geistes, das der Politologe Daniel Bigalke verfaßt hat und an dem außerdem die BN-​Autoren Carlos Wefers Verástegui und Felix Menzel mitgewirkt haben, sehr weit gefaßt, was im Vorwort erklärt wird.

Danach geht es direkt hinein in die Autorenportraits. Carlos Wefers Verástegui stellt mit Giambattista Vico (16681744) den „Vorläufer Spenglers“ vor, der in seiner Neuen Wissenschaft ein zyklisches Geschichtsbild entwarf, das mit einem völkerverderbenden Luxus über den Abschwung der Gegenwart Auskunft gibt. Vico deutete auch, wie es nach der Dekadenz weitergeht. Entweder komme ein Retter, ein fremder Eroberer oder es breche es „neues Mittelalter“ aus, in dem die zivilisierte Welt eine zweite Chance zur Revitalisierung erhalte.

… Sinnstifter, Erzieher, Dichter …

Verástegui hat auch das zweite Autorenportrait des Buches beigesteuert. Den Historiker Heinrich Leo (17991878) charakterisiert er als ein einen „reaktionären Rebell“ des 19. Jahrhunderts, der deshalb für die Gegenwart von größter Bedeutung ist, weil er die Gewaltfrage unübertroffen scharf umrissen hat und in seiner Naturlehre des Staates skizzierte, welche konservative Alternative es zur gewaltenteilenden Demokratie gibt.

Mit Julius Langbehn (18511907) ist danach ein Denker vertreten, der deutlich machte, daß wir eine Veränderung und Rückbesinnung auf allen Lebensbereichen brauchen. Daniel Bigalke beschäftigte sich insbesondere mit dem Werk Rembrandt als Erzieher, in dem Langbehn darum ringt, was „deutsche Kunst, Wissenschaft, Politik, Bildung und Menschheit“ ausmacht.

… Ökonomen, Wissenschaftler und Staatsdenker …

Bigalke verfaßte darüber hinaus die Portraits über Hans Blüher (18881955), den Bündischen, dem wir viel über das Verständnis zum Männerbund und unsere Stellung zur Natur zu verdanken haben, über Friedrich Gundolf (18801931), den Dichter, von dem das Lied „Schließ Aug und Ohr“ stammt, sowie über Edgar Julius Jung (18941934), den Staatsdenker, der die berühmte „Marburger Rede“ schrieb und daraufhin zu einem der ersten konservativen Opfer im Nationalsozialismus wurde.

… suchen nach der „wahren Ordnung“!

Verástegui stellt danach den Ökonomen und Soziologen Werner Sombart (18631941) als denjenigen konservativen Autoren vor, der sich am intensivsten mit dem Sozialismus und Kapitalismus beschäftigte und an Klarheit und Weite die Philosophen der Postmoderne deutlich übertraf. Friedrich Hielscher (19021990), der Sinnstifter, und Ernst Niekisch (18891967), der „Weltrevolutionär“ (Sebastian Haffner), werden danach wieder von Bigalke portraitiert. Abgeschlossen wird das Buch mit einem Beitrag über Václav Havel (19362011) von Felix Menzel. Insbesondere wird dabei auf die Essays aus der Dissidentenzeit des tschechischen „Dichterpräsidenten“ eingegangen, in denen er eine „Generalrevision“ der modernen Zivilisation forderte.

Das Buch umfaßt wie immer 100 Seiten, kostet 8,50 Euro und bietet all jenen „Urlaub von der Asylkrise“, die nicht nur an den Symptomen aktueller Probleme herumdoktern wollen.

Daniel Bigalke u.a.: Aufstand des Geistes. Konservative Revolutionäre im Profil. BN-​Anstoß VIII. Chemnitz 2016.

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mardi, 26 avril 2016

Etats-Unis: Une offensive judiciaire globale

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Etats-Unis: Une offensive judiciaire globale

par Jean-Michel Quatrepoint

Source : Fondation Res Publica, Jean-Michel Quatrepoint

Accueil de Jean-Michel Quatrepoint, journaliste économique, membre du Conseil scientifique de la Fondation Res Publica, auteur de “Alstom, un scandale d’État – Dernière liquidation de l’industrie française” (Fayard : août 2015), au colloque “L’extraterritorialité du droit américain” du 1er février 2016.

L’exportation du droit américain, l’extraterritorialité des lois américaines est un processus qui ne date pas d’aujourd’hui. Voilà des années, voire des décennies que les États-Unis développent une stratégie globale d’hyperpuissance en s’appuyant sur un arsenal juridique et en imposant leurs lois, leurs normes, au reste du monde. Il aura fallu l’amende colossale infligée à BNP Paribas (8,9 milliards de dollars) et celle qui, infligée à Alstom (772 millions de dollars), fut la véritable cause, quoi qu’en dise le PDG d’Alstom, de la vente de la division « énergie » à General Electric, pour que nos dirigeants découvrent la réalité d’une guerre économique engagée depuis des décennies. Ils ont ainsi découvert, tardivement, le caractère meurtrier d’un arsenal juridique dont la mise en place remonte à plus d’un quart de siècle.

Dans la décennie 90, après l’effondrement du communisme, les États-Unis vont se doter d’une série de lois qui concernent les entreprises américaines mais aussi toutes les entreprises étrangères. La majorité de ces lois, Trade Acts ou embargos, permettent aux responsables américains du commerce d’identifier et de sanctionner les comportements « injustes et déraisonnables » des acteurs économiques rivaux des Américains.

On peut classer ces textes dans quelques grands chapitres :
Le plus connu aujourd’hui est la lutte contre la corruption, le fameux Foreign Corrupt Practices Act(FCPA) qui s’appliquait aux entreprises américaines qui versaient des pots de vin aux fonctionnaires et aux hommes politiques pour obtenir des contrats. En 1998, ce FCPA est étendu aux entreprises étrangères et il va servir de modèle à la convention OCDE censée réprimer la corruption, notamment en matière de grands contrats.

Symposium Brochure.jpgLe second chapitre est une batterie de lois qui criminalisent le commerce avec les États sous embargo américain. Certaines de ces lois sont bien connues, telles les lois Helms-Burton et D’Amato qui sanctionnent les entreprises commerçant avec l’Iran, Cuba, la Libye, le Soudan etc. (au total il y aura 70 embargos américains à travers le monde). En 2006, un banquier britannique, un des dirigeants de la Standard Chartered, dira : « Putains d’Américains, qui êtes-vous pour nous dire et pour dire au reste du monde que nous ne devons pas travailler avec les Iraniens ? ». Quelques années plus tard la Standard Chartered devra payer 700 millions de dollars d’amende pour avoir commercé avec l’Iran.

Autre chapitre, une batterie de lois criminalisent le commerce avec les pays sous embargo ONU.
Ensuite viendra le blanchiment de l’argent sale des terroristes ou des narcotrafiquants.

Le Patriot Act, édicté en 2001 après l’attaque sur les Twin towers, sous couvert de lutte contre le terrorisme, donne des pouvoirs élargis aux différentes agences pour accéder aux différentes données informatiques.

Enfin la loi Dodd-Frank de juillet 2010 confère à la SEC (Securities and Exchange Commission), le gendarme américain de la bourse, le pouvoir de réprimer toute conduite qui, aux États-Unis, concourt de manière significative à la commission de l’infraction, même lorsque la transaction financière a été conclue en dehors des États-Unis et n’implique que des acteurs étrangers. Cela va donc très loin.

Cerise sur le gâteau, en 2014, le Foreign Account Tax Compliance Act (FATCA) donne au fisc américain des pouvoirs extraterritoriaux qui contraignent les banques étrangères à devenir ses agents en lui livrant toutes les informations sur les comptes et avoirs des citoyens américains dans le monde. Si elles n’obtempèrent pas, 30 % de leurs revenus aux États-Unis sont confisqués et, plus grave encore, elles peuvent se voir retirer leur licence. Or, pour une banque, notamment les plus grandes, ne plus pouvoir travailler aux États-Unis et ne plus pouvoir compenser en dollars équivaut à un arrêt de mort. On a souvent voulu voir derrière le FATCA le moyen pour les Américains de faire enfin plier les banquiers suisses, les « gnomes de Zurich », les obliger à abandonner leur sacro-saint secret bancaire. C’est vrai… mais c’est l’arbre, moral et médiatique, qui cache la forêt. Ainsi, BNP Paribas a été contrainte de fournir dans le cadre de son amende la liste des comptes de ses clients américains et franco-américains. C’est ainsi que des personnes fort respectables, qui ont la malchance d’avoir la double-nationalité mais qui ont toujours gagné et déclaré leur argent en France, sans avoir de revenus aux États-Unis, sont sommées par l’Internal Revenue Service (IRS), le fisc américain, de fournir toutes leurs déclarations d’impôts. Si jamais elles ont payé moins en France que ce qu’elles auraient payé aux États-Unis, l’IRS leur réclame la différence. Cela s’appelle du racket.

Avec le recul, on s’aperçoit qu’il est très difficile de contester chacune de ces mesures : Qui va s’élever contre le fait de lutter contre la corruption… ? De même qui n’est favorable à la répression des narcotrafiquants et du blanchiment de leur argent ? Il en est de même du terrorisme. C’est là toute l’habileté du projet américain théorisé en 2004 par Suzanne Nossel, laquelle a inspiré Hillary Clinton lorsque cette dernière était secrétaire d’État.

C’est la théorie non du soft power mais du smart power, affirmation par les États-Unis d’une vision universelle au nom de leur compétence universelle.

Les États-Unis se vivent comme le nouveau peuple élu. Leurs victoires contre les forces du mal (en 1945 contre le nazisme, plus tard contre le communisme), leurs performances économiques, témoignent de la supériorité de leur modèle. Il est donc normal que tous les autres peuples adoptent ce modèle car la globalisation implique l’uniformisation. Les États-Unis énoncent donc de grands principes, valables pour tous et que tous sont contraints de respecter à travers un arsenal juridique, à travers la puissance du dollar, à travers les technologies qui permettent de tout savoir (on pense à la NSA). Le tout, bien sûr, pour le bien commun.

Cette compétence universelle, par définition, s’applique à toutes les activités humaines. L’offensive contre la FIFA et Sepp Blatter (et par ricochet contre Michel Platini), a été menée par les Anglo-saxons, par les Américains. Une offensive fort habile car chacun sait que la FIFA (Fédération Internationale de Football Association), comme le CIO (Comité international olympique), sont des lieux où le népotisme et la corruption règnent en maîtres. Pour les Américains, il s’agit de faire exploser ce système et de le remplacer par un autre où la puissance américaine sera dominante et imposera ses règles.

Il est très difficile de s’opposer à ce smart power, véritable idéologie qui s’appuie sur la défense des droits de l’homme, la libre concurrence non faussée, le droit des consommateurs, le droit des minorités etc.

Cette stratégie s’appuie également sur les ONG anglo-saxonnes. Ce sont elles qui sont à l’origine de l’affaire Volkswagen. Loin de moi l’idée de défendre Volkswagen et l’industrie automobile allemande mais il est intéressant d’observer comment cette affaire s’est déroulée. Au départ, le lobby automobile européen, dominé par les industriels allemands, avait de très bonnes relations avec la Commission européenne et, évidemment, les normes de pollution et de consommation en Europe ont été fixées avec l’assentiment des constructeurs automobiles. Nous avons tous pu constater que l’affichage des consommations des véhicules ne correspond absolument pas à la réalité sur le terrain. Il se trouve que Volkswagen avait misé sur le diesel, invention essentiellement européenne, pour pénétrer le marché américain. Or, aux États-Unis, les normes anti-pollution pour le diesel sont beaucoup plus rigoureuses qu’en Europe, notamment pour les particules fines (on pourrait parler d’une norme protectionniste). Volkswagen a décidé, pour pénétrer le marché américain avec ses véhicules diesel, d’installer secrètement un logiciel fourni par Bosch. Logiciel qui permettait de masquer la réalité de émissions de particules. Ce truquage est découvert par une ONG américaine qui dévoile l’affaire en 2014 et transmet le dossier à l’agence fédérale de protection de l’environnement. C’est alors que l’affaire commence. Volkswagen, qui a effectivement triché, est piégée. Les media s’en mêlent, la machine s’emballe (48 Class actions, dans 48 États différents). La machine de guerre judiciaire américaine s’est mise en branle et le coût pour Volkswagen, indépendamment du coût pour son image, va se chiffrer en dizaines de milliards de dollars. Volkswagen (tout comme sa filiale Audi) avait énormément misé sur les États-Unis : le marché américain devait être le nouvel eldorado pour le constructeur automobile allemand qui espérait s’implanter aux États-Unis, bénéficier du dollar, d’une main d’œuvre moins chère qu’en Europe pour réexporter ensuite des modèles ou des sous-ensembles sur le marché européen et sur l’Asie. Ambition que l’industrie automobile américaine, en plein renouveau, grâce aux subventions données notamment à General Motors, ne voit pas d’un très bon œil. Est-ce un hasard si l’affaire du petit logiciel de Volkswagen a émergé ? Ce qui va se passer sur l’affaire Volkswagen est important car, si les Allemands plaident coupables, ils ont cependant commis un crime de lèse-majesté début janvier en refusant aux prosecutors et aux enquêteurs américains l’accès à leurs données, notamment sur le sol allemand. En effet, quand la machine judiciaire américaine est en branle (les entreprises qui sont « passées dans la moulinette » en savent quelque chose), les enquêteurs américains déboulent et ont accès à tout, mails, documents etc. Or les Allemands, invoquant la German law, qui interdit la communication de données à des puissances étrangères extérieures à l’Union Européenne, ont refusé de donner l’accès aux documents et aux mails internes à leur siège social. Les Allemands iront-ils jusqu’au bout du bras de fer, refuseront-ils d’obéir aux injonctions de la justice américaine? Cela peut se terminer par l’obligation pour Volkswagen de fermer ses usines aux États-Unis. On est là dans un processus lourd de conséquences.

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Les États-Unis, forts de leur puissance, ont donc développé un arsenal juridique tous azimuts. Ils décident qui peut commercer avec qui. Ils peuvent décider aussi d’éliminer les concurrents. Les entreprises françaises en savent quelque chose avec l’Iran. À la différence de ce qui se passait dans les années 80-90, ils bénéficient de la position du dollar: 78 % des transactions mondiales se font en dollars et tout est compensé par les États-Unis. Comme toutes les transactions en dollars transitent par les États-Unis, toute transaction en dollars est soumise à la loi américaine. Ils ont aussi les écoutes : on a découvert que la NSA et les services américains écoutaient systématiquement tout, y compris les chefs d’État… et personne n’a protesté. Et surtout, cette extraterritorialité devient un extraordinaire businessqui profite d’abord aux Américains. Les amendes proprement dites commencent à atteindre des montants conséquents. Pour les banques, le total des amendes infligées par la justice américaine est de 125 milliards de dollars, dont une bonne partie concerne les banques américaines. Mais les banques américaines ont été condamnées pour les affaires de subprimes (aucun banquier américain n’a fait de prison) tandis que les banques européennes et japonaises ont été condamnées pour avoir violé des embargos. Les banques suisses ont payé un très lourd tribut pour ne pas avoir communiqué à temps un certain nombre de données.

On en est aujourd’hui à 35 milliards de dollars d’amendes pour les banques étrangères et une demi-douzaine de milliards de dollars pour les groupes industriels. Sur les dix premières amendes infligées, notamment pour des affaires de corruption, aux groupes industriels, neuf concernent des groupes étrangers. Le record va à Siemens (800 millions de dollars) suivi par Alstom (772 millions de dollars).

Cet argent sert d’abord à l’auto-alimentation du système judiciaire américain (la SEC, le Trésor, le DOJ etc.) dont les coûts annexes sont considérables. Le système judiciaire américain, les centaines de milliers de lawyers des cabinets, sont embauchés par les entreprises et vivent « sur la bête ». L’argent des amendes fait donc vivre le système judiciaire américain au sens large. S’y ajoute la contestation de brevets etc. L’application de ce système de l’extraterritorialité est un formidable business qui alimente la machine judiciaire et juridique américaine.

Les gens de BNP Paribas seront sans doute heureux d’apprendre qu’une partie de leur amende va servir à indemniser les citoyens américains qui avaient été victimes de la prise d’otages à l’ambassade des États-Unis à Téhéran en 1979. Plus de cinquante personnes, retenues pendant 444 jours, n’avaient jamais été indemnisées parce que, dans l’accord entre l’Iran et Ronald Reagan, l’Iran avait refusé de payer quelque indemnité que ce soit (l’une des raisons pour lesquelles les Iraniens avaient pris en otage les personnels de l’ambassade américaine était la « prise en otage » par les Américains des compte iraniens à la Chase Manhattan Bank…). Le Congrès a l’intention d’utiliser 1 à 2 milliards de dollars, pris sur l’amende de BNP Paribas, pour indemniser ces ex-otages américains.

Plus grave : les accords que les entreprises étrangères sont contraintes de signer s’accompagnent généralement de la mise sous tutelle de fait de ces entreprises qui, de par le settlement, l’accord passé avec la justice américaine, subissent pendant six mois, un an, trois ans… la présence de contrôleurs indépendants chargés de vérifier que l’entreprise condamnée se conforme bien à toutes les règles de la compliance américaine. Alcatel Lucent avait été condamnée il y a quelques années à une amende pour corruption à propos d’affaires qui remontaient au début des années 2000 (le montant, moins important que celui infligé à Alstom, s’élevait quand même à 170 millions de dollars). Contrainte d’accepter pendant trois ans la présence d’un contrôleur indépendant, Alcatel Lucent devait lui donner toutes les informations que ce contrôleur jugeait utiles à la réalisation de sa mission. D’aucuns disent que Alcatel Lucent a été ainsi pillée pendant quelques années par la justice américaine. Les secrets de fabrication et un certain nombre de données essentielles peuvent être transférés ainsi à une puissance étrangère.
L’extraterritorialité du droit américain permet à la puissance américaine, sur les secteurs qu’elle estime stratégiques, d’asseoir sa domination.

Merci.

Source : Fondation Res Publica, Jean-Michel Quatrepoint, 01-02-2016

Impressionen der Reichsidee

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Impressionen der Reichsidee
 
von Johannes Konstantin Poensgen
Ex: http://www.blauenarzisse.de

Der Ghibellinische Kuss“ versammelt Aufsätze, Thesen und Reden Hans-​Dietrich Sanders zur Wiederherstellung des deutschen Reiches.

sander_der-ghibellinische.jpgHans-​Dietrich Sander (geb. 1928) ist den jüngeren oft nur noch als Kolumnist der Zeitschrift Neue Ordnung bekannt. Seine letzte Buchpublikation, Die Auflösung aller Dinge: Zur geschichtlichen Lage des Judentums in den Metamorphosen der Moderne, liegt achtundzwanzig Jahre zurück. Sanders Karriere gehörte zu denjenigen, die mit dem fortschreitenden Anziehen der Daumenschrauben in der Bundesrepublik der 80er beendet wurden.

Sander ließ sich damals nicht unterkriegen und machte mit seinen Staatsbriefen weiter, die er bis 2001 herausgab. Sanders Spätwerk, insbesondere seine Überlegungen zur ghibellinischen Reichsidee, liegen daher nicht als Monographie, sondern in Form einer Reihe von in über einem Jahrzehnt entstandener Artikel vor. Es ist sehr begrüßenswert, das eine Sammlung der bedeutendsten dieser Schriften jetzt unter dem Titel Der Ghibellinische Kuss im Arnshaugk-​Verlag erschienen ist.

Sander und sein Herausgeber sind nicht immer klar zu trennen

Neben der Tatsache, dass eine Reihe von Einzelaufsätzen nicht die beste Darstellungsweise des Themas ist, leidet dieses Buch jedoch noch unter einem anderen Strukturfehler. Im Wunsch, manche Texte dem Fortgang der Zeit anzupassen, griff der Herausgeber Heiko Luge zum Mittel der fortgeltenden Historisierung. Dass heißt, die alten Texte wurden an manchen Stellen der heutigen Lage angepasst. Vermutlich aus Altersgründen geschah dies jedoch nicht durch Sander selbst, sondern „nach Rücksprache mit dem Autor“ durch Luge.

An manchen Stellen sind daher Sander und sein Herausgeber schwer zu unterscheiden, zumal „nach Rücksprache mit dem Autor“ eine interpretationsoffene Formulierung ist. Bei einem Werk tieferen Inhalts handelt es sich aber nicht um einen Werbetext oder eine Gebrauchsanweisung, deren Autorschaft unerheblich ist. Das Lesen solcher Texte stellt eine Form der Verständigung zwischen Autor und Leser dar. Kurz, wenn Sander, aus welchen Gründen auch immer, nicht in der Lage war, sie selbst durchzuführen, hätte man die fortschreitende Historisierung besser unterlassen.

Das Reich als europäische Ordnungsmacht

Dass der Ghibellinische Kuss trotzdem ein bedeutendes Buch ist, liegt sowohl an der Problemstellung, wie am Lösungsvorschlag. Die erste ist, je nach Perspektive, die deutsche Frage in der Mitte Europas, oder die europäische Frage um Deutschland herum. Die erste gilt vielen als mit der Wiedervereinigung beantwortet. Was die Frage der europäischen Selbstbehauptung betrifft, so ist über kein Thema mehr Tinte ergebnislos verspritzt worden.

sander2xxx.jpgAuf der einen Seite stehen hier die Eurokraten und ihre Claqueure, die selbst dort, wo sie die Fehler ihre Baus erkennen, keine Korrektur im Blick haben, auf der anderen Seite die Europakritiker, die entweder zu achtundzwanzig einzelnen Nationalstaaten zurückwollen – immer noch die realistischste Nicht-​Lösung; oder aber sich in die Charles de Gaulle zugeschriebene Formulierung eines „Europas der Vaterländer“ flüchten, von dem keiner weiß, wie es aussehen, noch weniger was es zusammenhalten soll.

Sander hat all dem den Reichsgedanken voraus. Von diesem Fundament lassen sich Konturen einer um Deutschland als Hegemonialmacht gestalteten europäischen Ordnung entwickeln. Diese Ordnung, die die europäischen Völker um den Kern eines deutschen Nationalstaats gruppiert, ihnen Schutz gewährt und sie in ihrer Eigenart bewahrt, ist nach Sander Inhalt der ghibellinischen Reichsidee. Mit seinem auf Thomas Hobbes zurückgreifenden Herrschaftsbegriff, der Gegenseitigkeit von Schutz und Gehorsam, vermag er zudem die strukturelle Grundbedingung eines handlungsfähigen europäischen Raumes anzugeben.

Mit der Herrschaft des Reiches setzt sich Sander über die schwammigen Vorstellungen einer „europäischen Einigung“ hinweg, die bestenfalls weder Schutz gewährt, noch Gehorsam verlangt, schlimmstenfalls diesen einfordert, ohne jenen überhaupt geben zu können.

Die drei Verbote

Wer aber in der ghibellinischen Idee Rezepte für das Hier und Heute sucht, wird bei Sander enttäuscht werden. Er weiß zu gut, dass das heutige Deutschland nicht über die nötigen Mittel verfügt, nicht materiell, aber erst recht nicht geistig, dass es nicht „reichfähig“ ist. Aus dieser Einsicht schreibt er auch mehr für die Zukunft als für die Gegenwart, um die Idee des Reiches, der einzigen Ordnung, deren Europa aus eigener Kraft ohne einen äußeren Hegemon fähig ist, nicht in Vergessenheit geraten zu lassen. Dass zudem erst der ganz aktuelle Saustall ausgemistet werden muss, bevor es an langfristige Planungen geht, sollte jedem offensichtlich sein.

Wenn aber ein unabhängiges Europa möglich sein soll, so muss es zu einem eigenständigen Großraum werden. Nach den Erfahrungen der Globalisierung ergänzt Sander das „Interventionsverbot für raumfremde Mächte“ Carl Schmitts um ein „Immigrationsverbot raumfremder Stämme und Völkerschaften“, sowie um ein „Investitionsverbot raumfremden Kapitals“. Ob es möglich ist, die Globalisierung, die One World der Technik und des Verkehrs durch raumordnungspolitische Dekrete zu bannen, darf aber bezweifelt werden. Die Alternative dürfte jedoch ein immer weiter ausuferndes Chaos sein, dass aufgrund seiner schieren Ausmaße von keiner Ordnungsmacht mehr zu bändigen wäre, wie das Reich auf europäischem Boden eine darstellen könnte.

Leider keine kulturmorphologische Grundlage

sander3xxx.jpgEs bleibt die Frage der „Reichfähigkeit“ der Deutschen. Dass wir in der Lage sind über den eigenen Tellerrand hinauszublicken und ganz Europa im Blick zu haben, dies haben wir in unserer Geschichte mehrfach bewiesen, zuletzt ironischerweise unter Angela Merkel in der Eurokrise, während der es den Deutschen als einzigen nicht nur um kurzfristige Eigeninteressen ging. Zusammen mit unserer Mittellage und unserer relativen Macht betrachtet, ist Sander daher uneingeschränkt beizupflichten, dass eine europäische Ordnung nur von Deutschland ausgehen und um Deutschland herum gestaltet werden kann.

Sanders Ausführungen zu den Deutschen sind allerdings allzu oft reine Behauptungen. Um die Reichstauglichkeit der deutschen Volksseele genauer auszumessen, fehlt Sander leider die kulturmorphologische Grundlage. So verliert sich der promovierte Geistesgeschichtler bisweilen im Strom seiner Eindrücke, insbesondere, wenn es um die Bedeutung des Christentums, des römischen Erbes und beider Beziehung zum Germanentum geht, einem Thema, das unzählige Denker zu wüstesten Assoziationen verleitet hat.

lundi, 25 avril 2016

Intervento M. Rossi "Julius Evola e il terzo Reich"

Intervento M. Rossi "Julius Evola e il terzo Reich" - RigenerAzionEvola.it

Intervento di M. Rossi "Julius Evola e il terzo Reich: la lotta per la visione del mondo"
al convegno "Ripartire da Evola" organizzato da RigenerAzione Evola (www.rigenerazionevola.it).

Maurizio Rossi, analizza i rapporti tra Evola e il Regime nazionalsocialista. Con il suo intervento ne ha messo in luce le sua trasversalità e capacità di visione d’insieme, nonché il suo lavoro su di un piano più metapolitico. Sono note, infatti, le collaborazioni di Evola con il mondo tedesco dell’epoca, tese a propiziare quell’incontro tra le due aquile, ario-romana l’una, nordico-germanica l’altra, che già nel Medioevo ghibellino forgiarono lo spirito della migliore Europa. Anche queste intese mantenevano un respiro più alto, imperiale, e si concretizzarono con la sua collaborazione con numerose pubblicazioni ed interventi negli ambienti culturali del III Reich per cercare di imporre a concetti come “sangue”, “razza”, “suolo”, “comunità” una direzione ed un carattere spirituali, emancipandoli dal grezzo biologismo, strappandoli alla materialità. Altrettanto note sono le diffidenze con cui alcuni ambienti del Regime hitleriano guardarono al Barone, anche a causa della sua capacità di andare oltre gli steccati nazionalisti di un grezzo pangermanismo. C’è comunque da tenere a mente che nel 1943 c’era anche Evola, e pochi altri fidati, nel Quartier Generale di Hitler, ad attendere Mussolini all’indomani della sua liberazione dalla prigionia sul Gran Sasso. Un Evola, quello svelato da Maurizio Rossi, che fu un vero“homo faber”, non solo del suo destino, ma anche di quello dell’Europa dell’epoca.

Leggi di più per approfondire:
http://www.rigenerazionevola.it/e-ora...

Thilo Sarrazin: What Price is Europe Paying for the Refugee Agreement?

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Thilo Sarrazin: What Price is Europe Paying for the Refugee Agreement?

Thilo Sarrazin is the author of Deutschland schafft sich ab (“Germany Abolishes Itself”), an anti-immigration book that cost him his position on the board of Deutsche Bundesbank and made him a pariah among his former comrades in the Social Democrats. The following op-ed by Mr. Sarrazin, which was published on Sunday at the blog Die Achse des Guten, has been translated by Rembrandt Clancy.

Frau Merkel Assumes a Reserved Stance

by Thilo Sarrazin

17 April 2016

The past weeks have brought two deciding events, which could become the turning points for German (and European) contemporary history:

The Alternative für Deutschland (AfD) entered three additional state parliaments with double-digit returns. In Saxony-Anhalt and Baden-Württemberg they became the second largest party; in Rhineland-Palatinate they won more votes than the Greens and the Free Democratic Party (FDP) combined, and then with an unusually high voter participation. With respect to the overriding refugee question, many citizens apparently perceived the Christian Democratic Union (CDU), Social Democratic Party (SPD), Greens and the Left parties to be an opinion cartel and voted for the only party which called for an alternate refugee and immigration policy.

The coming months will show whether the as yet entirely inexperienced AfD (Alternative für Deutschland) mature into a major conservative party and overcome their relegation to the right-wing fringe. But this period will also show whether the other parties have understood the message of these elections. Many initial reactions give cause for doubt. The predominant analysis of established parties was that 75 to 85 percent of the voters did not choose the AfD, and this circumstance allows them to point to an overwhelming approval of the federal government’s refugee policy. Angela Merkel in particular acts as if the election results are of no importance to her federal government policy. As always it was Horst Seehofer of the Union, who as the only leading politician, dissented. But this dissent has a more muted effect each time it occurs, since it obviously does not lead to action. [Union: Christian Democratic Union (CDU) and the Christian Social Union (CSU) collectively]

Finding relief from the strongest enemies of the refugee policy

The federal government is finding relief in the strongest enemies of their refugee policy: the closure of the Balkan route launched in concert by Austria and the Balkan states led to dramatically declining arrival figures. Shortly before Easter, there were in fact several evenings in which refugees were not featured in the lead story of the television news. Good people in responsible positions were able to sidestep responsibility: The decline in the refugee numbers provided urgently needed relief, whilst their own welcoming culture need not be called into question.

The second deciding event was the EU refugee summit with Turkey. It left numerous questions open to be sure, but the nucleus of the agreement with Turkey nevertheless put a great deal in motion: if in future Greece actually sends back to Turkey all newly arriving refugees, soon there will no longer be anyone left to embark on this refugee route. Success of one part of the agreement means that the other part will run dry: if only a few refugees leave Turkey for Greece, only a few will also return; and the number of other refugees whom Turkey can then pass on to Europe as compensation will be correspondingly small.

On the other hand, in other respects this is good; for at the refugee summit, there was clearly no attempt made to agree a method for the distribution of refugees and illegal immigrants throughout the Schengen area. But such a settlement is prerequisite to the ability of the Schengen system to function at all over the long term.

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The question of terrorism cannot be meaningfully separated from the refugee question

A large number of Schengen countries have reservations about the further reception of refugees and illegal immigrants. That applies not only to the Eastern European states, but also to countries like France and Belgium. The integration of Muslims in those countries has succeeded only partially. The terrorist attacks which so rocked the two countries came from these groups. Moreover, it became clear from the connections which have been disclosed over the past weeks, that it is no longer possible to meaningfully separate the question of terrorism from the refugee question. The secret services are also aware of that, but the confusion in people’s minds has become much greater. Inevitably those political factions fundamentally in critical opposition to immigration from the Islamic cultural sphere will be strengthened.

If we assume that Angela Merkel would like to maintain the nucleus of her refugee policy, that obviously means that large numbers of people would continue to arrive, only they would simply be organised and distributed among the Schengen countries on the basis of an agreed procedure. Whom does she still have as allies? The Scandinavian states and Austria are no longer allies, while the Eastern European countries have never been allies. That leaves the Netherlands, Switzerland and Italy. In any case, the latter allows all refugees to continue their journey north, and in fact only a few even want to remain in Italy because the social services are so poor.

Conclusion: either Germany will continue to accept the bulk of the refugees and illegal immigrants to Europe, or she will change her welcoming culture. For this point to be reached, the agreement with Turkey could constitute a stepping stone. But does it really? Presumably Angela Merkel herself is not aware of this; obviously she is assuming a reserved stance. Never will she admit having acted improperly when last year she opened the borders.

The People Smugglers are already Redirecting Themselves

The agreement with Turkey has won time until the summer. All those Germans still disinclined to take leave of their illusions can project their wishes onto its success. By summer it will be apparent that even in the event of the agreement’s success, ample refugee routes across the Mediterranean will remain open. Already the people smugglers are redirecting themselves.

By the summer we will even know whether the price Europe is paying for the agreement is acceptable: Turkey would like the visa exemption for her citizens. In order to acquire it, the refugee waves serve as a lever to exert pressure. Visa exemption could, however, signify the next large wave of refugees: 30 percent of Turkish citizens are of Kurdish origin. Erdogan’s government is waging war against this minority. For the Kurds who have been persecuted and victimised by this war it could be very easy in the future should they wish to apply for asylum in Europe: They would only have to board an aeroplane with valid personal identification, and their reasons for asylum would be at least as good as those of numerous Eritreans, Afghans and Syrians. Did Angela Merkel consider the implications of visa exemption for Turkey or did she approve them? No matter how one looks at it, there is no concept to be discerned either intellectually or practically in the German refugee policy.

dimanche, 24 avril 2016

Cultural Marxism and the Birth of Modern Thought-Crime

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Cultural Marxism and the Birth of Modern Thought-Crime

By

Global Gold & http://www.lewrockwell.com

If a person has no philosophical thoughts, certain questions will never cross his mind. As a young man, there were many issues and ideas that never concerned me as they do today. There is one question, however, which has intrigued me for the longest time, and it still fascinates me as intensely as it did back then: Does spirit precede matter or is it the other way around? In other words, does human consciousness create what we perceive as our reality and the physical existence or vice versa; does the pre-existing material world determine our sentience and shape our cognition? In essence, what really lies beneath the surface of this question is the following: is a man born as a conscious being with a free will and self-determination or not?

Do not be alarmed; this is not an article on political philosophy. But it is a fundamental existential issue that I found underpins many of the doubts that I have regarding the functioning of our society and our political culture. While I freely admit I am no philosopher or expert in the field, in this article I will try to explain why the answer we choose to this crucial question, which most people never consider, has an amazing impact on the way we think, the way we live and act and the way society behaves as a whole.  By diving deeper into this debate, we uncover important insights that can help us understand how our Western society and its cultural identity have vastly degenerated and especially why family values have so dramatically deteriorated. A clearer understanding of the historical evolution of this age-old question and its far-reaching implications will provide valuable insights into the intellectual crisis of our Western societies and the strategic suppression of dissent and of independent thought and it will shed light on the origins on the intellectual bondage that we know today as Political Correctness.

The Kantian heritage and the intellectual shackles of Nonage

260px-Immanuel_Kant_(painted_portrait).jpgI believe it makes sense to start our quest to settle this age-old question by looking at the works of Immanuel Kant (1724 – 1804), the German philosopher who is considered the father of modern philosophy. In 1784 he wrote the following about Enlightenment:

“Enlightenment is man’s emergence from his self-imposed nonage. Nonage is the inability to use one’s own understanding without another’s guidance. This nonage is self-imposed if its cause lies not in lack of understanding but in indecision and lack of courage to use one’s own mind without another’s guidance. Dare to know! (Sapere aude.) “Have the courage to use your own understanding,” is, therefore, the motto of the Enlightenment.”

Today’s economic and political forces seem to be cognizant of the peril posed by a free-thinking citizenry. As our western culture faces an existential crisis and suffers attacks from multiple fronts, the political elite appears to be focused on enforcing its will at all costs. They are desperately trying to keep a multitude of threats at bay, and failing to do so, they are content with simply having the public accept their failure as a strategic victory: the immigration crisis, chronic economic instability, geopolitical conflicts with horrendous human costs, violations of personal liberties, they are all to be taken as facts of life; this is sold to us as the new normal. Therefore, their priority is to keep the body politic in check, to crush dissent and rebel-rousing. To do so, laws against specific actions are not enough. To “keep the peace”, one needs to have laws against thought itself. By re-defining right and wrong, controlling the narrative and limiting independent thought and free speech, the public, as a whole, remains strategically malleable and intellectually manageable.

Given the success of this strategy, and bearing in mind Kant’s definition of Enlightenment, it seems pertinent to raise the question: did we ever manage to evolve into mature and enlightened individuals or are we still trapped in our own self-imposed nonage? I believe the latter is the case; and to further clarify my view, there is no better man to quote than Kant himself:

“Laziness and cowardice are the reasons why such a large part of mankind gladly remains minors all their lives, long after nature has freed them from external guidance. They are the reasons why it is so easy for others to set themselves up as guardians. It is so comfortable to be a minor. If I have a book that thinks for me, a pastor who acts as my conscience, a physician who prescribes my diet, and so on–then I have no need to exert myself. I have no need to think if only I can pay; others will take care of that disagreeable business for me. Those guardians who have kindly taken our supervision upon themselves see to it that the overwhelming majority of mankind–among them the entire fair sex–should consider the step to maturity, not only as hard but as extremely dangerous. First, these guardians make their domestic cattle stupid and carefully prevent the docile creatures from taking a single step without the leading-strings to which they have fastened them. Then they show them the danger that would threaten them if they should try to walk by themselves. Now this danger is really not very great; after stumbling a few times they would, at last, learn to walk. However, examples of such failures intimidate and generally discourage all further attempts.”

The Frankfurt School and the origins of political correctness

What is becoming increasingly hard to deny, especially in Europe and the USA, is that we no longer have the absolute and inalienable right to free speech. Although we claim to be proud citizens of democratic societies that, in theory, respect and uphold individual freedoms, in practice, the definition of what constitutes free speech has grown so withered and so narrow, that it often makes a mockery of the very principle itself.  More and more topics have been classified as “off limits”, the public expression of the “wrong” personal opinions and ideas has been criminalized and even academic or scientific research of certain fields has been suppressed. But symptoms of our socially enforced self-censorship are evident in everyday conversations as well: Is it not deeply unsettling that it is next to impossible to have a normal, temperate debate about the immigration crisis, which is an existential matter that will most likely shape the future of the European continent?  The natural rights to one’s own independent thinking and to free speech have been heavily curtailed under the guise of what is now referred to as ‘political correctness’. Speaking one’s mind freely can have them branded as a pariah and a direct threat to society, but the repercussions do not end there: Self- censorship is also enforced through new laws implemented by our moral leaders, who feel that the power vested in them through their governmental offices extends to also placing limitations on what we can and cannot think.

250 years ago, Kant stressed the need for public debate as follows:

“It is very difficult for the individual to work himself out of the nonage which has become almost second nature to him. He has even grown to like it and is at first incapable of using his own understanding because he has never been permitted to exercise it. It is possible, however, for the public to enlighten itself. Indeed, if it is only granted freedom, enlightenment is almost inevitable. There will always be a few independent thinkers, even among the self-appointed guardians of the multitude. Once such men have thrown off the yoke of nonage, they will spread about them the spirit of a reasonable appreciation of man’s value and of his duty to think for himself. It is especially to be noted that the public which was earlier brought under the yoke by these men afterward forces these very guardians to remain in submission if it is so incited by some of its guardians who are themselves incapable of any enlightenment. That shows how pernicious it is to implant prejudices: they will eventually revenge themselves upon their authors or their authors’ descendants. Therefore, a public can achieve enlightenment only slowly. A revolution may bring about the end of a personal despotism or of avaricious tyrannical oppression, but never a true reform of modes of thought. New prejudices will serve, in place of the old, as guide lines for the unthinking multitude.”

In short, without the freedom to debate openly, the individual has not the means to escape his self-imposed nonage. Without the possibility to break free, and to enlighten ourselves, we remain powerless to question, to object to and to challenge the status quo. Like pieces on a chessboard, we have no say in our own fates and no control over the stratagems that we implicitly help to enforce. Silently complicit in devastating policies, in conflicts and in wars being fought in our name, we simply become bystanders and look on as our culture corrodes, our values degrade and our liberties are trampled upon. To understand how the modern man became complicit in his own intellectual subjugation, we have to go back and trace the roots of the crisis.

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“Emancipation through indoctrination”

Free thought and free speech have always been intertwined and correlated. The demise of both has its origins in the years between 1930 and 1968 when a group of intellectuals and so-called philosophers came together to establish a school of thought that was essentially focused on destroying Western civilization and all that it stands for (including its economic system based on capitalism) through ‘emancipation’. Max Horkheimer, a Marxist philosopher, was one of the founding fathers of the Frankfurt School, which embodied modern Critical Theory and was to a great extent characterized as neo-Marxist. Horkheimer, along with Jürgen Habermas, Theodor W. Adorno, Herbert Marcuse and Erich Fromm, to name but a few formed the Frankfurt School and its Institute for Social Research, an intellectual think-tank, that shaped the cultural understanding of the West and Germany in particular. According to Horkheimer, the critical theory would serve “to liberate human beings from the circumstances that enslave them.” Accordingly, their main objective was to create the theoretical and ideological platform for a cultural revolution. This group of “philosophers” sought to, and to a great extent, succeeded in achieving their objective by focusing specifically on culture. It is a culture that forms the foundation that shapes peoples’ mindsets and political outlook by controlling the language and ideas through institutional channels, particularly education. In short, Critical Theory is the politicization of logic. Horkheimer stated that “logic is not irrespective of content,” by which he practically meant that an argument is logical if it aims to destroy Western civilization and it is illogical if it supports it. This is, of course, the cornerstone of “political correctness” and why the open and unrestrained debate is frowned upon as subversive and inflammatory. It breeds dissent and doubt, it encourages critical analysis and it prevents intellectual uniformity and group-think.

Critical Theory and the war on God 

Couverture-673x1024.jpgThe Frankfurt School claimed that its Critical Theory is the theory of truth. The occidental philosophy, from St. Thomas Aquinas to Kant, as well as Hegel, Fichte, Schelling, and Goethe, should, therefore, be summarily dismissed and replaced by their own dogmatic set of rules and guidelines for “thinking right”. Critical Theory in sociology and political philosophy went beyond interpretation and understanding of society, it sought to overcome and destroy all barriers that, in their view, entrapped society in systems of domination, oppression, and dependency.

A principal yet controversial argument concerns their animosity towards religion and spirituality. According to the Frankfurt School, Christianity is the institutional revival of pagan philosophy and God is mere fiction. Religion led people to project their suffering to a divine entity, it served as a distraction from the misery caused by capitalism and in its core lies nothing but pure imagination. As the theories of Darwinism and Freudianism challenged the status of religion, accordingly, Marxism and Neo-Marxism dispelled the unenlightened mythical image of the age-old institutionalized divinity: Not God, but Man is the highest entity. Since it is not my purpose to discuss theology, but to demonstrate the mindset of the members of this school of thought, once again, I will refer to a quote by Immanuel Kant, who wrote the following in Critique of Pure Reason:

“Human reason, in one sphere of its cognition, is called upon to consider questions, which it cannot evade, as they are presented by its own nature, but which it cannot answer, as they transcend every faculty of the mind.” 

Kant was known as a fierce critic of the practice of religion, but he recognized that cognition and rationalization are indicative of the human mind and spirit, and are the means by which the individual arrives at the conclusion that there is a God. The significance of this argument lies in Kant’s belief in the free will and determination of the human mind to develop this process of rationalization in order to arrive at the conclusion that man is essentially good. In this context, God is more of a metaphor for morality and this plays a decisive role in the fundamental spirit versus matter question: Man’s mind and spirit precedes matter. Essentially, Kant reconciled these two concepts in a way that highlights human consciousness and self- determination.

The Frankfurt School positioned its ideology at the opposite end of the spectrum. It professed that man is limited in his existence as a mammal and as a product of nature that is driven by basic needs. There is no room for free will, no capacity for critical judgment or ability to distinguish right from wrong, no awareness, and no rationalization. This position has its roots in their Marxist background, which argues that man is a product of society: his mind and spirit are determined and shaped by the material world. Because of this vulnerability to external factors, the human mind is thought of as frail and manipulable and therefore man cannot be held accountable for his own decisions. This idea served as the basis for the “de-criminalization of crime” thesis of the Frankfurt School. As per Habermas, because man is a product of society,  it is inevitable that he adaptively yields to his criminal tendencies, since he is raised under the yoke of the structural violence of a criminal capitalist system.

The Frankfurt School believed that by stripping humanity of spirituality and by destroying the material surroundings created by the capitalist system and its structure, man will live free, without the feeling of responsibility and without the burden of conscience. They promised freedom, without free will, they envisioned emancipation, through intellectual assimilation and they guaranteed fairness, without justice.

The strategic importance of public education

According to the Frankfurt School, the system’s malfunction starts with the family. The family is the first and primary moral entity that we encounter. This entity raises children in an authoritarian manner that creates submissive, obedient and dependent adults.  In other words, it is the family that primes and programs us for fascism. Thus, by discrediting and destroying the family as a concept, one can nip capitalism and fascism in the bud. With this antagonistic attitude towards the family unit in society, combined with their ideological crusade against spirituality, the Frankfurt philosophers needed to put forward an alternative, to replace the old ways with their own roadmap for the future. In their view, the answer was simply to reprogram and reengineer society so that everyone behaves as is expected by others and so that human behavior becomes an act of reciprocity. This alone would be the universal code of ethics governing their utopia. To instill and to enforce this code in society, they proposed the use of institutions, and most importantly, education. Commandeering these institutional channels would be the most efficient way to impose and to promote their ethics, with education providing the key to assured compliance, weeding out dissent and any potential for future independent thinking by the individual.

The repercussions of this strategy are obvious in today’s society. Public education has conditioned us since childhood not to question the government and its collectivist policies. Maybe you remember one of our latest articles about the origins of the public education system, in which we introduced you to Wilhelm Wundt, the father of experimental psychology (and his proponents John Dewey and Edward Thorndike in the U.S.), the scientist who shaped today’s state education approach. He based his methodology on the following assumption: “Man is devoid of spirit and self-determinism”. He then set out to prove that “man is the summation of his experience, of the stimuli which intrude upon his consciousness and unconsciousness.” The great H. L. Mencken wrote in 1924 that the aim of public education is not: “ […] to fill the young of the species with knowledge and awaken their intelligence… Nothing could be further from the truth. The aim… is simply to reduce as many individuals as possible to the same safe level, to breed and train a standardized citizenry, to put down dissent and originality. That is its aim in the United States… and that is its aim everywhere else.”

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The rise of Cultural Marxism

The Frankfurt School developed the dogma that “freedom and justice” are dialectic terms, meaning that they stand in opposition to each other, in a zero-sum game, where “more freedom equals less justice” will be the consequence and “more justice equals less freedom” is the outcome. Based on this dialectic, freedom stood as the thesis, and justice reflected the anti-thesis.

This rather interesting dialectic approach was adopted from the ideas and works of Georg Wilhelm Friedrich Hegel. The Frankfurt School, however, twisted the core of the concept and denatured its consequential logicality. In short, the main difference between Hegel and Horkheimer’s dialectic approach lies in the conclusion: Hegel, an idealist, believed like Kant that spirit creates matter, while for Horkheimer, a disciple of Karl Marx and his theory of materialism, the opposite was the case. Marx postulated that the world, the objective reality, can be explained by its material existence and its development and not from the realization of a divine absolute idea or as a result of rational human thought, as adopted in idealism. Therefore, putting limits on the material world, placing external rules and guidelines on the environment within which individuals live, think and operate, should, in their view, suffice to shape their cognitive experience and confine their spirit to the “desired” parameters.

I believe this is the key point that links the Frankfurt school of thought to what we know today as “political correctness”. At its core, we find this familiar false belief that less freedom guarantees more justice, and therefore more security. This mantra is regurgitated through institutional and political messaging, instilled in social values and planted in the minds of the younger generation and future voters, though the educational channel, just like the Frankfurt School intended. Instead of creating the platform to encourage individual human development, by reasoning, raising questions and stimulating dialogue, the institutional system works as an assembly line, from cradle to grave, and it successfully standardizes individuals and primes them to submit to the status quo, to accept and not to question. This is the logic of Critical Theory and the core element of “political correctness”. It is a vain and doomed attempt to control the inherent entropy of human ideas and independent thinking, to force the flux of our intertwined and unique experiences to an unnatural stasis and ultimately, to break Man’s spirit and to bring his mind to heel. .

Now you can maybe understand what Tom DiLorenzo meant in one of our latest interviews about “cultural Marxism” when he said: “They largely abandoned the old “class struggle” rhetoric involving the capitalist and worker “classes” and replaced them with an oppressor and an oppressed class. The oppressed include women, minorities, LGBT, and several other mascot categories. The oppressor class consists of white heterosexual males who are not ideological Marxists like them.” When the members of the Frankfurt School were forced to leave Germany during Nazi rule, they moved to the USA, near Hollywood, and they established strong ties with Columbia University and Harvard. This is how they spread their influence in the United States and aside from Hollywood, they also turned the academic elite at most universities into reservoirs of “cultural Marxism”. Here in Europe, some of the most prominent names in politics today were among the 1968 rebel students who were mentored by the first generations of the Frankfurt School. These include former German Chancellor Gerhard Schröder and his Minister of Defense Joschka Fischer, current Vice-President of the German Bundestag, Ulla Schmidt, and last but not least Chancellor Angela Merkel. On the anniversary of “60 years Christian-Democratic-Union (CDU)” on June 16th, 2005 in Berlin, she explained how many changes in society which were triggered in 1968 have shaped the old German Republic and continue to influence the CDU to this day. As she put it: “We don’t want to return to the family concept, to the 1950s image of a woman and we don’t want to return to the sociopolitical frame of that time. We as women must march through the institutions und take our place in the key power positions in the leadership of this country”.

My understanding of cultural Marxism is that it has nothing to do with freedom, or with cultural enlightenment and social progress. Instead, as Horkheimer himself put it, it is all about the creation of identical individuals who do not come together and exchange ideas, as they operate like mindless machines. The Frankfurt School and its followers have therefore clearly proved to be the enemies of freedom and the conscious human mind.

In conclusion, let me yield the closing words to Immanuel Kant, who wrote, “ A large degree of civic freedom appears to be of advantage to the intellectual freedom of the people, yet at the same time it establishes insurmountable barriers. A lesser degree of civic freedom, however, creates room to let that free spirit expand to the limits of its capacity. Nature, then, has carefully cultivated the seed within the hard core–namely the urge for and the vocation of free thought. And this free thought gradually reacts back on the modes of thought of the people, and men become more and more capable of acting in freedom. At last free thought acts even on the fundamentals of government and the state finds it agreeable to treat a man, who is now more than a machine, in accord with his dignity.”

This article appeared in the latest Global Gold Outlook Report

Reprinted with permission from Global Gold.

samedi, 23 avril 2016

De visie van een Duits historicus op de relatie Vlaanderen en het Keizerrijk

Door: Dirk Rochtus

Ex: http://www.doorbraak.be

'Een vroeg verloren broederstam'

De visie van een Duits historicus op de relatie Vlaanderen en het Keizerrijk

lamp0228-4Dgr.jpgOver het lot van bezet België bogen zich tijdens WO I heel wat Duitse professoren. De historicus Lamprecht wilde Vlaanderen in het 'Reich'.

Als jonge kerel van amper twintig was Hendrik De Man (1885-1953) naar Duitsland, 'land van oorsprong en van belofte van het marxisme', getrokken om er aan de universiteit van Leipzig onder meer economie, geschiedenis en wijsbegeerte te studeren. In zijn Herinneringen beschrijft de latere voorzitter van de Belgische Werkliedenpartij, meermalige minister, maar vooral socialistische denker, de indrukken die toen beroemde professoren op hem hadden gemaakt. Uit een 'meeslepend college over vergelijkende beschavingsgeschiedenis' dat hij bij de historicus Karl Lamprecht (1856-1915) bijwoonde, meende De Man begrepen te hebben 'dat de loop der geschiedenis geen progressieve ontwikkeling is, doch een telkens – zij het onder andere vormen – weder-beginnen'.[i]

'Culturele tijdperken'

Volgens Lamprecht diende de periodisering van de geschiedenis te gebeuren op basis van Kulturzeitalter (culturele tijdperken) die overeenkomen met een bepaalde economisch-culturele ontwikkeling. Lamprecht vond een vergelijkende en economisch-culturele geschiedschrijving belangrijker dan een die draaide rond personen en politieke gebeurtenissen. Hij wilde de historische wetmatigheden onderkennen die de grondslag van het politieke en sociale gebeuren vormden. Over deze opvattingen ontbrandde de Methodenstreit met de aanhangers van Leopold von Ranke (1795-1886) die de geschiedenis, met de nadruk op die van staten, voorstelde als de poging om gewoon te tonen 'wie es eigentlich gewesen'. Mocht Lamprecht in Duitsland dan op veel weerstand botsen, in Frankrijk alvast oefende hij veel invloed uit op de Ēcole des Annales, een school van historici die in hun onderzoek de nadruk legden op economie en maatschappij.

'Lokale vrijheid'

Naar aanleiding van de honderdste sterfdag van Lamprecht verscheen bij de uitgeverij Leipziger Universitätsverlag een boek waarin de vele facetten van de controversiële historicus worden belicht [ii]. Voor de Eerste Wereldoorlog had Lamprecht nog zijn steentje bijgedragen tot de internationalisering van zijn vakgebied. Zo riep hij de jeugd op om in het buitenland te gaan studeren: 'Hinaus, du Jugend [...] hinaus in die Welt, die wir ganz kennen müssen, um uns selber recht zu kennen (...)'. Universele geschiedeniswetenschap en buitenlandse culturele betrekkingen waren voor hem middelen om te komen tot 'Völkerverständigung', een betere verstandhouding tussen de volken. Maar bij het uitbreken van de oorlog trad zijn geloof in de culturele zending van Duitsland meer naar voren. Dat bleek uit de reizen die hij in december 1914 en maart/april 1915 ondernam, naar het door de Duitsers bezette België en het Westfront. België speelde een grote rol in de militaire, strategische en economische plannen van het keizerlijke Duitsland. Talloze professoren braken zich het hoofd over het lot van de 'Belgische natie' en over de vraag of er zoiets als een 'belgische Seele' (ziel) bestond. Lamprecht beschouwde de Vlamingen als 'einen früh verlorenen [...] deutschen Bruderstamm' die het Duitse Rijk terug moest winnen. Hij pleitte dan ook in een gesprek met de keizer voor 'lokale vrijheid voor de Vlamingen en van daaruit opbouw van een eigen staat onder Duitse bescherming.' Daarmee vervreemdde hij de Belgische historicus Henri Pirenne (1862-1935), zijn collega en vriend van de Duitse cultuur, van zich.

___________

[i] Herinneringen van Hendrik De Man, Antwerpen/Arnhem, MCMXLI, p. 67

[ii] Jonas Flöter, Gerald Diesener (Hg.), Karl Lamprecht (1856-1915), Durchbruch in der Geschichtswissenschaft, Leipzig, 2015

 © www.mz-web.de

(Dit artikel verscheen in de ADVN-Mededelingen nr. 51, www.advn.be)

jeudi, 14 avril 2016

Aspects pratiques des convergences eurasiennes actuelles

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Aspects pratiques des convergences eurasiennes actuelles

Conférence prononcée par Robert Steuckers pour les « Deuxièmes journées eurasistes » de Bordeaux, 5 septembre 2015

Bonjour à tous et désolé de ne pouvoir être physiquement présent parmi vous, de ne pouvoir vous parler qu’au travers de « Skype ».

 Je vais essentiellement vous présenter un travail succinct, une ébauche, car je n’ai que trois quarts d’heure à ma disposition pour brosser une fresque gigantesque, un survol rapide des mutations en cours sur la grande masse continentale eurasiatique aujourd’hui. Je ne vous apporterai ce jour qu’un squelette mais vous promets simultanément un texte bien plus étoffé, comme ce fut d’ailleurs le cas après les « journées eurasistes » d’octobre 2014 à Bruxelles. 

L’incontournable ouvrage du Professeur Beckwith

Lors de ces premières rencontres eurasistes de Bruxelles, tenues dans les locaux du vicariat à deux pas de la fameuse Place Flagey, je me suis concentré sur les grandes lignes à retenir de l’histoire des convergences eurasiatiques, en tablant principalement sur l’ouvrage incontournable, fouillé, du Professeur Christopher I. Beckwith de l’Université de Princeton. Pour le Prof. Beckwith, la marque originelle de toute pensée impériale eurasienne vient de la figure du Prince indo-européen, ou plutôt indo-iranien, qui émerge à la proto-histoire, un Prince qui a tout le charisme et l’exemplarité nécessaires, toutes les vertus voulues, pour entraîner derrière lui une « suite » de fidèles, un « comitatus », comme l’attestent d’ailleurs la figure mythologique du Rama védique et celle de Zarathoustra, fondant ainsi une période axiale, selon la terminologie philosophique forgée par Karl Jaspers et reprise par Karen Armstrong. Le Prince charismatique et son « comitatus » injectent les principes fondamentaux de toute organisation tribale (essentiellement, au départ, de peuples cavaliers) et, par suite, de tout organisation territoriale et impériale, ainsi que le montre le premier empire de facture indo-européenne sur le Grand Continent eurasiatique, l’Empire perse. Ce modèle est ensuite repris par les peuples turco-mongols. Cette translatio au profit des peuples turco-mongols ne doit pas nous faire oublier, ici en Europe, le « droit d’aînesse » des peuples proto-iraniens. 

J’espère pouvoir aborder la dimension religieuse des convergences eurasiatiques lors de futures rencontres eurasistes, en tablant sur des œuvres fondamentales mais largement ignorées dans nos contextes de « grand oubli », de « grand effacement », car nous savons, depuis les travaux de feue Elisabeth Noelle-Neumann que le système dominant procède par omission de thématiques dérangeantes pour n’imposer que du prêt-à-penser, pour ancrer l’oubli dans les masses déboussolées. Parmi ces œuvres à ré-explorer, il y a celle de l’explorateur et anthropologue italien Giuseppe Tucci, dont Payot avait jadis publié l’immense travail sur les religiosités d’Asie centrale, sur les syncrétismes du cœur de l’Asie. Ceux-ci ont émergé sur un socle shamaniste, dont toutes les variantes du bouddhisme, surtout au Tibet, en Mongolie, dans les confins bouriates, ont gardé des éléments clefs. Le « Baron fou », Fiodor von Ungern-Sternberg, commandeur de la division de cavalerie asiatique du dernier Tsar Nicolas II, était justement fasciné par cette synthèse, étudiée à fond par Tucci. Ensuite, comme le préconise Claudio Mutti, le directeur de la revue de géopolitique italienne Eurasia, une relecture des travaux de Henry Corbin s’avère impérative : elle porte sur les traditions avestiques, sur le culte iranien de la Lumière, sur la transposition de ce culte dans le chiisme duodécimain, sur l’œuvre du mystique perse Sohrawardî, etc. Mutti voit en Corbin le théoricien d’une sagesse eurasiatique qui émergera après l’effacement des religions et confessions actuelles, en phase de ressac et de déliquescence. Le culte de la Lumière, et de la Lumière intérieure, du Xvarnah, de l’auréole charismatique, également évoquée par Beckwith, est appelé à prendre la place de religiosités qui ont lamentablement basculé dans une méchante hystérie ou dans une moraline rédhibitoire. L’avenir ne peut appartenir qu’à un retour triomphal d’une religiosité archangélique et michaëlienne, au service de la transparence lumineuse et du Bien commun en tous points de la planète. 

Aujourd’hui, cependant, je me montrerai plus prosaïque, davantage géopolitologue, en n’abordant que les innombrables aspects pratiques que prennent aujourd’hui les convergences eurasiatiques. Les initiatives sont nombreuses, en effet. Il y a la diplomatie nouvelle induite par la Russie et son ministre des affaires étrangères Sergueï Lavrov ; il y a ensuite les initiatives chinoises, également diplomatiques avec la volonté d’injecter dans les relations internationales une manière d’agir qui ne soit pas interventionniste et respecte les institutions et les traditions des peuples autochtones, mais surtout la volonté de créer de multiples synergies en communications ferroviaires et maritimes pour relier l’Europe à la Chine. Ensuite, l’Inde, sans doute dans une moindre mesure, participe à ces synergies asiatiques. Le groupe des BRICS suggère un système bancaire international alternatif. L’ASEAN vise à annuler les inconvénients de la balkanisation de l’Asie du Sud-est, en cherchant des modes de relations acceptables et variés avec la Chine et, parfois, avec l’Inde ou la Russie. 

D’Alexandre II à Poutine

alexander22006.jpgPour le dire en quelques mots simples, la Russie actuelle cherche à retrouver la cohérence du règne d’Alexandre II, qui avait tiré les conclusions de la Guerre de Crimée lorsqu’il avait accédé au trône à 37 ans, en 1855, alors que cette guerre n’était pas encore terminée. La Russie de Poutine et de Lavrov rejette en fait les facteurs, toujours présents, toujours activables, des fragilités russes du temps de Nicolas II et de la présidence d’Eltsine, période de la fin du XXe siècle que les Russes assimilent à une nouvelle « Smuta », soit à une époque de déliquescence au début du XVIIe siècle. L’idée de « smuta », de déchéance politique totale, est une hantise des Russes et des Chinois (leur XIXe siècle, après les guerres de l’opium) : pour les Européens de l’Ouest, la « smuta » première, c’est l’époque des « rois fainéants », des mérovingiens tardifs et les historiens, dans un avenir proche, considèreront sans nul doute l’Europe des Hollande, Merkel, Juncker, etc., comme une Europe affligée d’une « smuta » dont les générations futures auront profondément honte. 

Aujourd’hui, les risques auxquels la Russie est confrontée restent les mêmes que du temps de la guerre de Crimée ou du règne de Nicolas II. Elle est en effet tenue en échec en Mer Noire malgré le retour de la Crimée à la mère-patrie : l’OTAN peut toujours faire jouer le verrou turc. Elle est menacée dans le Caucase, où elle avait soumis les peuples montagnards après des campagnes extrêmement dures, très coûteuses en hommes et en matériels. Sous Alexandre II, elle franchit la ligne Caspienne-Aral pour s’avancer en direction de l’Afghanistan : cette marche en avant vers l’Océan Indien s’avère pénible et Alexandre II prend parfaitement conscience des facteurs temps et espace qui freinent l’élan de ses troupes vers le Sud. Le temps des campagnes doit être réduit, les espaces doivent être franchis plus vite. La solution réside dans la construction de chemins de fer, d’infrastructures modernes. 

Des ONG qui jouent sur tous les registres de la russophobie

La réalisation de ces projets de grande ampleur postule une modernisation pratique et non idéologique de la société russe, avec, à la clef, une émancipation des larges strates populaires. Le nombre réduit de la classe noble ne permettant pas le recrutement optimal de cadres pour de tels projets. Dès 1873, dès l’avancée réelle des forces du Tsar vers l’Afghanistan donc potentiellement vers le sous-continent indien, clef de voûte de l’Empire britannique dans l’Océan Indien, dit l’« Océan du Milieu », commence le « Grand Jeu », soit la confrontation entre la thalassocratie britannique et la puissance continentale russe. De 1877 à 1879, la Russie prend indirectement pied dans les Balkans, en tablant sur les petites puissances orthodoxes qui viennent de s’émanciper du joug ottoman. Entre 1879 et 1881, la Russie d’Alexandre II est secouée par une vague d’attentats perpétrés par les sociaux-révolutionnaires qui finiront par assassiner le monarque. La Russie faisait face à des révolutionnaires fanatiques, sans nul doute téléguidés par la thalassocratie adverse, tout comme, aujourd’hui, la Russie de Poutine, parce qu’elle renoue en quelque sorte avec la pratique des grands projets infrastructurels inaugurée par Alexandre II, doit faire face à des ONG mal intentionnées ou à des terroristes tchétchènes ou daghestanais manipulés de l’extérieur. Alexandre III et Nicolas II prennent le relais du Tsar assassiné. Nicolas II sera également fustigé par les propagandes extérieures, campé comme un Tsar sanguinaire, modèle d’une « barbarie asiatique ». Cette propagande exploite toutes les ressources de la russophobie que l’essayiste suisse Guy Mettan vient de très bien mettre en exergue dans Russie-Occident – Une guerre de mille ans. Curieusement, la Russie de Nicolas II est décrite comme une « puissance asiatique », comme l’expression féroce et inacceptable d’une gigantomanie territoriale mongole et gengiskhanide, alors que toute la littérature russe de l’époque dépréciait toutes les formes d’asiatisme, se moquait des engouements pour le bouddhisme et posait la Chine et son mandarinat figé comme un modèle à ne pas imiter. L’eurasisme, ultérieur, postérieur à la révolution bolchevique de 1917, est partiellement une réaction à cette propagande occidentale qui tenait absolument à « asiatiser » la Russie : puisque vous nous décrivez comme des « Asiates », se sont dit quelques penseurs politiques russes, nous reprenons ce reproche à notre compte, nous le faisons nôtre, et nous élaborons une synthèse entre impérialité romano-byzantine et khanat gengiskhanide, que nous actualiserons, fusionnerons avec le système léniniste et stalinien, etc. 

Pour affaiblir l’empire de Nicolas II, en dépit de l’appui français qu’il reçoit depuis la visite d’Alexandre III à Paris dans les années 1890, l’Angleterre cherche un allié de revers et table sur une puissance émergente d’Extrême-Orient, le Japon, qui, lui, tentait alors de contrôler les côtes du continent asiatique qui lui font immédiatement face : déjà maître de Taiwan et de la Corée après avoir vaincu la Chine déclinante en 1895, le Japon devient le puissant voisin tout proche de la portion pacifique de la Sibérie désormais russe. Londres attisera le conflit qui se terminera par la défaite russe de 1904, face à un Japon qui, suite à l’ère Meiji, avait réussi son passage à la modernité industrielle. Les navires russes en partance pour le Pacifique n’avaient pas pu s’approvisionner en charbon dans les relais britanniques, au nom d’une neutralité affichée, en toute hypocrisie, mais qui ne l’était évidemment pas... 

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Le Transsibérien bouleverse la donne géostratégique

Les troupes russes au sol, elles, s’étaient déplacées beaucoup plus rapidement qu’auparavant grâce aux premiers tronçons du Transsibérien. L’état-major britannique est alarmé et se rappelle du coup de bélier des armées tsaristes contre la Chine, lorsqu’il s’était agi de dégager le quartier des légations à Pékin, lors du siège de 55 jours imposé aux étrangers, suite à la révolte des Boxers entre juin et août 1900. Le géographe Sir Halford John Mackinder énonce aussitôt les fameuses théories géopolitiques de la dialectique Terre/Mer et de la « Terre du Milieu », du « Heartland », inaccessible à la puissance de feu et à la capacité de contrôle des rimlands dont disposait à l’époque la puissance maritime anglaise. Le Transsibérien permettait à la Russie de Nicolas II de sortir des limites spatio-temporelles imposées par le gigantisme territorial, qui avait, au temps des guerres napoléoniennes, empêché Paul I de joindre ses forces à celles de Napoléon pour marcher vers les Indes. Henri Troyat explique avec grande clarté à ses lecteurs français tous ces projets dans la monographie qu’il consacre à Paul I. De même, la Russie avait perdu la Guerre de Crimée notamment parce que sa logistique lente, à cause des trop longues distances terrestres à franchir pour fantassins et cavaliers, ne lui avait pas permis d’acheminer rapidement des troupes vers le front, tandis que les navires de transport anglais et français pouvaient débarquer sans entraves des troupes venues de la métropole anglaise, de Marseille ou d’Algérie. L’élément thalassocratique avait été déterminant dans la victoire anglo-française en Crimée. 

La Russie de Nicolas II, bien présente en Asie centrale, va dès lors, dans un premier temps, payer la note que les Britanniques avaient déjà voulu faire payer à Alexandre II, le conquérant de l’Asie centrale, assassiné en 1881 par une bande de révolutionnaires radicaux, appartenant à Narodnaïa Voljia. La Russie d’Alexandre II pacifie le Caucase, le soustrayant définitivement à toute influence ottomane ou perse, donc à toute tentative anglaise d’utiliser les empires ottoman et perse pour contribuer à l’endiguement de cette Russie tsariste, conquiert l’Asie centrale et affirme sa présence en Extrême-Orient, notamment dans l’île de Sakhaline. Au même moment, les marines passent entièrement des voiles et de la vapeur (et donc du charbon) au pétrole. La Russie détient celui de Bakou en Azerbaïdjan. La possession de cette aire sud-caucasienne, la proximité entre les troupes russes et les zones pétrolifères iraniennes fait de la Russie l’ennemi potentiel le plus redoutable de l’Angleterre qui, pour conserver l’atout militaire majeur qu’est sa flotte, doit garder la mainmise absolue sur ces ressources énergétiques, en contrôler une quantité maximale sur la planète. 

L’assassinat de Stolypine

StolypinCrop.JPGComme le danger allemand devient aux yeux des Britannique plus préoccupant que le danger russe,  ­ -parce que la nouvelle puissance industrielle germanique risque de débouler dans l’Egée et en Egypte grâce à son alliance avec l’Empire ottoman moribond-  l’Empire de Nicolas II est attiré dans l’alliance franco-anglaise, dans l’Entente, à partir de 1904. Stolypine, partisan et artisan d’une modernisation de la société russe pour faire face aux nouveaux défis planétaires, aurait sans doute déconstruit progressivement et habilement le corset qu’impliquait cette alliance, au nom d’un pacifisme de bon aloi, mais il est assassiné par un fanatique social-révolutionnaire en 1911 (les spéculations sont ouvertes : qui a armé le bras de ce tueur fou ?). Stolypine, qui aurait pu, comme Jaurès, être un frein aux multiples bellicismes qui animaient la scène européenne avant la Grande Guerre, disparaît du monde politique sans avoir pu parachever son œuvre de redressement et de modernisation. La voie est libre pour les bellicistes russes qui joindront leurs efforts à ceux de France et d’Angleterre. Ce qui fait dire à quelques observateurs actuels que Poutine est en somme un Stolypine qui a réussi. 

Dès que la Russie s’ancre plus solidement dans l’Entente, la propagande hostile à Nicolas II, orchestrée depuis Londres, fait volte-face : le Tsar cesse d’un coup d’être un abominable monarque sanguinaire et devient, comme par miracle, un empereur bon, paternel, qui aime ses sujets. Staline connaîtra un destin similaire : horrible boucher sanguinaire pour ses purges des années 1930, « bon petit père des peuples » pendant la seconde guerre mondiale, tyran antidémocratique dès que s’amorce la guerre froide. Avant Orwell, Lord Ponsonby décortiquera les mécanismes de cette propagande bien huilée, capable de changer de cap, de désigner comme ennemi l’ami d’hier et vice-versa, exactement comme dans l’Oceania de Big Brother. La Russie entre dans la Grande Guerre aux côtés des autres puissances de l’Entente : ce sera sa perte. Dmitri Merejkovski l’avait prévu. Les analyses de Soljénitsyne abondent également dans ce sens. L’affaire désastreuse des Dardanelles, voulue par Churchill en 1915, avait pour objectif inavoué d’arriver à Constantinople avant les Russes et de verrouiller les détroits turcs comme en 1877-78 : la duplicité londonienne ne s’était pas effacée au nom de la fraternité d’armes de 1914. 

Au temps des deux « géants rouges »

La Russie actuelle, celle de Poutine, entend conserver la cohérence territoriale de l’Union Soviétique défunte mais sans la rigidité idéologique communiste. Le communisme était une « idéologie froide » (Papaioannou) et un « système réductionniste » (Koestler), dont les retombées pratiques s’avéraient désastreuses, notamment sur le plan de la nécessaire autarcie agricole que devrait détenir toute grande puissance de dimensions continentales. Toute puissance de cet ordre de grandeur a pour obligation pratique de maintenir une « cohérence territoriale », de colmater toutes les brèches qui pourraient survenir au fil du temps, que celles-ci soient le fait de dissidences intérieures ou d’une subversion organisée par l’ennemi. Sous d’autres oripeaux que ceux du communisme, Poutine cherche à rétablir les atouts dont disposait l’Union soviétique entre 1949 et 1972, quand elle formait, avec la Chine, un bloc communiste de très grande profondeur territoriale. La Chine maoïste et l’URSS, de Staline à Brejnev, étaient certes des puissances continentales dont l’idéologie officielle était posée comme « progressiste ». Elles ont toutefois été marquées par une régression industrielle et technologique permanente par rapport aux Etats-Unis, au Japon ou à l’Europe occidentale, corroborant la théorie américaine du technological gap. Les développements internes à l’ère communiste ont certes balayé quelques archaïsmes, il faut le reconnaître, mais à quel prix ? Aujourd’hui, la situation est différente. La Chine est à la pointe de nombreuses innovations techniques. Elle est capable de développer des réseaux de chemins de fer performants, de construire des infrastructures aéroportuaires ultra-modernes, de gérer les flux de trafic urbain par d’audacieuses innovations technologiques, de fabriquer des porte-avions à double piste, etc. 

Même si on ne peut pas dire que la Russie et la Chine n’ont plus aucun contentieux, le binôme sino-russe tient parce qu’à Moscou comme à Beijing les diplomates savent que le déclin de l’URSS a commencé en 1972 quand Nixon et Kissinger déploient une intense activité diplomatique en direction de la Chine et transforment celle-ci en un allié de revers contre Moscou. 1972, il faut s’en souvenir, a été une année charnière : l’URSS était encerclée, coincée entre l’OTAN et la Chine, son déclin s’est automatiquement amorcé, tandis que la Chine, attelée à cette alliance de facto avec les Etats-Unis, était contrainte d’opter pour un développement continental, soit de tourner le dos au Pacifique, de ne plus y contrarier les intérêts stratégiques américains. Kissinger faisait ainsi d’une pierre deux coups : il affaiblissait la Russie et détournait la Chine maoïste des eaux du Pacifique (ce qui n’est plus le cas aujourd’hui, comme l’attestent les incidents récurrents en Mer de Chine du Sud). 

De l’alliance sino-américaine au déclin de l’Union Soviétique

mao_wideweb__470x282,0.jpgWashington consolidait ainsi son hégémonisme planétaire et unipolaire : De Gaulle était mort, l’Allemagne et l’Europe toujours divisées, les stratégistes américains planifiaient déjà la chute du Shah, coupable d’avoir soutenu les revendications des pays producteurs de pétrole et de développer une puissance régionale sérieuse, appuyée par des forces aériennes et navales efficaces, dans une zone hautement stratégique. Pour le monde musulman, 1979, année de la prise du pouvoir par Khomeiny, appuyé par les services américains, britanniques et israéliens dans un premier temps, sera l’année-charnière car, dès ce moment, il sera travaillé par des forces hostiles à l’ordre du monde de type « westphalien », ce qui nous conduira au chaos non maîtrisable que nous connaissons aujourd’hui. Avec ce désordre anti-westphalien sur son flanc sud, Poutine cherche tout simplement un pôle de stabilité alternative, permettant un développement normal de la Fédération de Russie dans un cadre impérial cohérent, combinant in fine les acquis d’Alexandre II ­ -qui avait déclenché le « Grand Jeu »-  et la sécurité stratégique obtenue par l’URSS après la seconde guerre mondiale et surtout à l’époque entre 1949 et 1972, quand la Chine ne dépendait en aucune façon des Etats-Unis et de leurs alliances sur les rimlands d’Eurasie. Cette sécurité, offrant la stabilité, doit aussi se refléter sur les plans religieux et idéologique : la pluralité des confessions ou des approches idéologiques ou, encore, des politiques économiques, ne doit pas nécessairement provoquer des dynamiques centrifuges. Au-delà de tous les clivages établis par l’histoire sur la masse continentale centre-asiatique, la politique générale doit être convergente et ne plus admettre les divergences qui conduisent inexorablement à une « smuta ». Cette volonté de convergence devrait valoir aussi pour l’Europe, au sens le plus strict du terme : cette idée était déjà présente chez le Tsar Alexandre I qui, après les troubles de l’ère révolutionnaire et napoléonienne, avait envisagé une convergence religieuse en Europe, une fusion de l’orthodoxie, du catholicisme et du protestantisme, pour consolider la première ébauche d’union eurasienne qu’était la Sainte-Alliance. 

Ukraine et « Corridor 5 »

Suite à la petite « smuta » de l’ère eltsinienne, la Russie n’a même pas pu conserver le projet d’une union entre les trois républiques slaves de l’ex-URSS, rêvée par Alexandre Soljénitsyne dès son exil américain. Les forces hostiles à toute union (formelle ou informelle) de l’Eurasie, à toute résurrection de la Sainte-Alliance, aux convergences générées par des communications optimales ont visé l’Ukraine, appelée à se détacher de la symbiose voulue par Soljénitsyne. Deux raisonnements historico-stratégiques ont conduit à cette politique : 

1)     l’Ukraine redessinée par Khrouchtchev dans les années 1950 contenait la Crimée, presqu’île dans l’espace maritime pontique sans laquelle la Russie n’a plus aucune projection vers la Méditerranée et ne peut plus être une grande puissance qui compte ;

2)     ensuite, l’Ukraine, dans la partie occidentale de la masse continentale eurasiatique, est un espace de transit, que les géopolitologues appellent, en anglais, a gateway region. Pour infliger une paralysie à l’adversaire, il convient en effet de bloquer tout transit en de telles régions, a fortiori si l’on veut bloquer les communications entre les puissances situées de part et d’autre de cet espace de transit. De Cadix à Kiev, l’Europe est traversée par ce qu’il est convenu d’appeler le « Corridor 5 ». A partir de Kiev, ce « corridor », poursuivi, mène en Inde, en Chine et sur les côtes du Pacifique : ce sont les tronçons de l’antique « route de la soie », empruntés par Marco Polo. 

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Pour toute puissance hégémonique hostile à la fois à la Russie et à l’Europe (centrée autour du pôle industriel allemand), le « Corridor  5 » doit être bloqué en tout lieu où l’on peut réanimer un conflit ancien moyennant les stratégies habituelles de subversion. La subversion de l’Ukraine -au nom de conflits anciens et au bénéfice apparent de forces idéologiques autochtones, ultranationalistes, dont on combat pourtant les homologues partout ailleurs dans le monde-  est par conséquent, un modèle d’école. On a délibérément choisit l’Ukraine parce qu’elle est une zone de transit des gazoducs russes en direction de l’Europe. En transformant l’Ukraine en une zone de turbulences, on oblige Russes et Européens à investir inutilement dans des projets alternatifs, pour contourner un pays désormais hostile, non pas parce qu’il entend défendre ses propres intérêts légitimes, mais, au contraire, parce qu’il veut, en dépit du bon sens, faire triompher les intérêts d’une puissance hégémonique, étrangère aux espaces russe et européen. Le nouveau gouvernement ukrainien se détache de la sorte de l’espace civilisationnel européen dont il fait partie. 

Par ailleurs, la subversion, inspirée par certains préceptes de Sun Tzu, vise aussi à anéantir les ressorts traditionnels d’une puissance ennemie : à l’heure des grands médias, cette forme de subversion déploie des spectacles ou des provocations déliquescentes, à l’instar des « pussy riots » ou des « femens ». Ce type d’actions subversives sape les fondements éthiques d’une société, en tablant sur les bas instincts et les carences en discernement du grand nombre, et, partant, détruit la cohésion de la politie, en ruine les structures sociales, les assises religieuses. La Russie de Poutine a veillé à annuler les capacités de nuisance de ces entreprises, fautrices de déliquescence irrémédiable, au grand dam des officines, généralement américaines, qui les avaient activées dans la ferme intention de saper les assises de la société russe et d’ébranler l’édifice étatique de la Fédération de Russie. 

Le mythe occidental des « sociétés ouvertes »

La Russie de Poutine, comme toute autre Russie qui chercherait à se consolider sur le long terme, doit donc retrouver une stabilité territoriale et géopolitique englobant les atouts de la Russie d’Alexandre II et ceux de l’URSS entre 1949 et 1972, quand la longue frontière centre-asiatique avec la Chine était sécurisée : face à la Chine post-communiste, Poutine ne répétera pas l’hostilité sourde et sournoise de Staline et de ses successeurs à l’égard de la Chine maoïste, en dépit d’une unité idéologique de façade qui faisait parler des deux « géants rouges ». La cohérence qu’il vise, à la fois tsariste et communiste, doit se compléter par une ouverture à d’autres zones de grande importance géostratégique dans le monde, afin de pallier les désavantages énormes que les fermetures communistes avaient entrainés. Dans la dialectique Sociétés ouvertes / Sociétés fermées, imaginée par Karl Popper, les sociétés russe et chinoise d’aujourd’hui optent pour un équilibre entre ouverture et fermeture : elles refusent l’ouverture tous azimuts, préconisée par les tenants du globalisme néolibéral (Soros, etc.) ; elles refusent tout autant les fermetures rigides pratiquées par les communismes stalinien, brejnevien, albanais et maoïste. Ce double refus passe par un retour en Chine à la pensée pragmatique de Confucius (condamné par les nervis maoïstes de la « révolution culturelle » des années 1960) et en Russie à des étatistes pragmatiques et bâtisseurs tels qu’en a connus l’histoire russe de la fin du XIXe siècle à 1914. Cette synthèse nouvelle entre ouverture et fermeture, pour reprendre la terminologie inaugurée par Popper, postule un rejet de l’extrémisme néolibéral, un planisme souple de gaullienne mémoire, une volonté de provoquer la « dé-dollarisation » de l’économie planétaire et de créer une alternative solide au système anglo-saxon, manchestérien et néolibéral. Cette synthèse, que l’on vise mais qui n’a pas encore été réalisée, loin s’en faut, permet déjà de forger des économies hétérodoxes, chaque fois adaptées aux contextes historiques et sociaux dans lesquelles elles sont censées s’appliquer. Disparaît alors la volonté enragée et monomaniaque de vouloir imposer à toutes les économies du monde un seul et même modèle. 

Le monde est un « pluriversum »

Russes et Chinois espèrent trouver dans le BRICS des cohérences nouvelles dans une diversité bien équilibrée, dans un « pluriversum » apte à respecter la diversité du monde contre toutes les tentatives de l’homogénéiser. Le groupe BRICS constitue une alternative plurielle au système dominant et américano-centré, le monde des Etats n’étant pas un « univers » mais bien un « plurivers » comme le disait le philosophe allemand du politique Bernhard Willms, décédé en 1991, et comme l’affirme aujourd’hui l’analyste géopolitique russe Leonid Savin. La recherche d’une économie hétérodoxe, souple et contextualisée (selon le vocabulaire du MAUSS, « Mouvement Anti-Utilitariste dans les Sciences Sociales »), correspond aussi à la volonté chinoise de déployer, à l’échelle planétaire, une diplomatie souple, hostile à toute pratique hystérique de l’immixtion, comme celles que préconisent les néo-conservateurs américains, les nouveaux philosophes regroupés peu ou prou derrière le pompon de Bernard-Henri Lévy ou les extrémistes salafistes stipendiés par l’Arabie Saoudite. 

La Chine préconise ainsi une diplomatie de la non-intervention dans les affaires intérieures des Etats tiers. La généralisation de ce principe, plus doux et plus pacifique que les modes de fonctionnement occidentaux actuels, devrait conduire à terme à supprimer ces facteurs d’ingérence et de conflits inutiles que sont bon nombre d’ONG américaines : en Chine, elles ne fonctionnent guère, sauf quand elles font appel à des fondamentalistes salafistes du Turkestan chinois, soutenus par les Turcs et les Saoudiens, ou à des sectes pseudo-religieuses farfelues ou quand elles instrumentalisent le Dalaï Lama. La Russie a commencé ce travail de neutralisation des organismes fauteurs de troubles et de guerres en jugulant le travail subversif des ONG d’Outre-Atlantique, considérées à juste titre comme des facteurs de « smuta », et en amorçant le contrôle des médias, de Google, etc. 

Le but premier d’un mouvement eurasien serait dès lors de participer à ces nouvelles forces à l’œuvre sur la planète, à favoriser les innovations qu’elles apportent pour nous sortir d’impasses mortifères. 

Empêcher le basculement de l’Europe vers la Russie, l’Eurasie, la Chine et l’Iran

Mais cette vaste panoplie d’innovations, qui cherchent à s’imposer partout dans le monde, va, bien entendu, provoquer une riposte de l’hegemon. Les conflits d’Ukraine et de Syrie ont été activés par des stratégistes mal intentionnés pour entraver la marche en avant de cet ensemble alternatif, englobant l’Europe. En effet, l’objectif premier des stratégistes de l’hegemon est d’empêcher à tout prix le glissement de l’Europe vers les puissances eurasiennes du groupe BRICS et vers l’Iran. C’est donc en premier lieu vers les zones possibles de connexion entre notre sous-continent et le reste de l’Eurasie que l’hegemon doit agir pour bloquer cette synergie grande-continentale. L’Ukraine avec, notamment, les ports de Crimée, était en quelque sorte l’interface entre la civilisation grecque, puis byzantine, et les voies terrestres vers le centre de l’Asie, l’Inde et la Chine ; elle a gardé cette fonction aux temps médiévaux des entreprises génoises qui demeuraient branchées sur les « routes de la soie » du nord, en dépit des tentatives de blocage perpétrées au Sud et au niveau du Bosphore par les Seldjouks puis par les Ottomans. La façade maritime méditerranéenne du Levant, soit du Liban et de la Syrie actuels, donnait accès aux routes de la soie menant, par la Mésopotamie et l’espace perse, aux Indes et à la Chine. Aujourd’hui, la Chine a développé les capacités de créer des réseaux ferroviaires trans-eurasiens, où les territoires de la Fédération de Russie, du Kazakhstan et de quelques autres anciennes républiques majoritairement musulmanes de l’ex-URSS, servent de jonction entre les deux espaces, l’européen et le chinois, que Leibniz jugeait déjà les « plus élevés en civilisation ». 

Les stratégistes mal intentionnés prévoient d’autres blocages dans la zone de connexion entre notre Europe et le reste de l’Eurasie. D’abord il y a la possibilité de créer une zone de turbulences durables, un abcès de fixation, en Transnistrie et en Moldavie, en bloquant tout transit entre l’Ukraine et l’Europe, tandis que le territoire du Donbass empêche déjà toute communication fluide entre l’Ukraine et la Russie du Don, de la Volga et de la Caspienne. Au sud, un général américain, Ben Hodges, commandant de l’OTAN jusqu’en 2014, envisage de soulever le Caucase du Nord en réactivant les conflits russo-tchétchène et russo-ingouche, de façon à troubler l’acheminement des hydrocarbures de la Caspienne et de créer une zone de turbulences sur le long terme entre les territoires russe et iranien. De même, ces stratégistes envisagent de réanimer le conflit russo-géorgien, placé au frigidaire depuis août 2008. Ou de déclencher un nouveau conflit entre l’Arménie et l’Azerbaïdjan pour la région du Nagorny-Karabach, ce qui aurait pour effet de bloquer toute liaison territoriale entre la Russie et l’Iran, surtout après le faux dégel entre l’Occident et Téhéran que l’on observe depuis les dernières semaines de l’année 2015. Plus à l’est, les mêmes stratégistes envisagent un projet de « chaotisation complète » de l’Asie centrale post-soviétique. Au départ de l’Afghanistan, ils envisagent de faire pénétrer au Turkménistan, au Tadjikistan, au Kirghizistan voire en Ouzbékistan des éléments fondamentalistes (talibans, partisans d’Al Qaeda, avatars de l’Etat islamique, etc., les golems ne manqueront pas…) qui feront subir à ces pays, s’ils se montrent récalcitrants, le sort de l’Irak ou de la Syrie. Le Turkménistan, riverain de la Caspienne et voisin de l’Afghanistan, pourrait être transformé en une zone de turbulences s’il ne cède pas aux pressions de l’OTAN qui lui fait miroiter une aide économique. Des terroristes afghans, que l’on posera comme « incontrôlables » en dépit de la présence américaine là-bas, passeront la frontière pour semer le chaos dans ce pays qui est un producteur d’hydrocarbures et un riverain de la Caspienne. 

Un chaos créé artificiellement

Ce chaos créé artificiellement est une application agressive de la stratégie ancienne de l’«endiguement». Non seulement il freinera l’acheminement de matières premières et d’hydrocarbures vers l’Europe mais troublera durablement les voies de communication entre la Russie, l’Inde et la Chine, où un pari possible sur des fondamentalistes pakistanais permettrait aussi de bloquer à nouveau les régions du Cachemire-Jammu et de l’Aksai Chin, ruinant toutes les tentatives d’apaisement entre Beijing et New Delhi, lesquelles avaient toujours été laborieuses. 

L’objectif impératif que doivent se fixer les cercles eurasistes, c’est d’œuvrer et de militer pour ne pas que nos contemporains s’embarquent dans de telles manœuvres bellicistes, pour qu’ils soient toujours rétifs aux sirènes des propagandes.  

Cependant, saper la cohésion européenne, œuvrer à disloquer les sociétés européennes et à affaiblir ses économies nationales et régionales ne passe pas seulement par l’organisation de conflits à ses frontières (Libye, Donbass, Syrie, Caucase) mais aussi, comme certains faits des années 1990 et 2000 semblent l’attester, de provoquer de mystérieux accidents dans le tunnel du Mont Blanc pour bloquer le « Corridor 5 » (toujours lui !), d’organiser des grèves sauvages pour paralyser les communications dans l’Hexagone et autour de lui, comme en 1995 pour mettre Chirac sous pression afin qu’il abandonne son programme nucléaire  –Jean Parvulesco se plaisait à le signaler et à rappeler les liens anciens entre certains syndicats socialistes français et l’OSS ou la CIA. Aujourd’hui, les clandestins bloquent parfois le tunnel sous la Manche à Calais, avec l’appui d’associations bizarres, se réclamant d’une xénophilie délirante ou d’une forme d’antifascisme fantasmagorique, dont l’objectif ne peut nullement être qualifié de « rationnel ». Est-ce pour rompre les liens entre la Grande-Bretagne et l’Europe ?

Cet ensemble de pressions constantes, s’exerçant sur les communications entre l’Europe et le reste de la masse continentale eurasiatique, a pour but essentiel d’empêcher la constitution d’un réseau efficace, la réalisation du vœu de Leibniz : faire de la « Moscovie » le pont entre l’Europe et la Chine. Les actuels projets ferroviaires chinois sont en effet très impressionnants. Le nouveau poids de la Chine, certes relatif, pourrait, estiment les stratégistes américains, provoquer un basculement de l’Europe vers l’Asie. Une telle éventualité a été un jour explicitée par Dominique de Villepin : celui-ci estimait que la concrétisation finale des projets ferroviaires et des routes maritimes envisagées par la Chine offrait potentiellement à la France et aux autres pays européens d’innombrables occasions de forger des accords lucratifs avec la Russie, les pays d’Asie centrale et la Chine dans les domaines des transports et des services urbains. Dans un article des Echos, de Villepin écrivait : « C’est là une tâche qui devrait non seulement mobiliser l’Union Européenne et ses Etats membres mais aussi les autorités locales, les chambres de commerce et les hommes d’affaires pour ne même pas mentionner les universités et les boîtes-à-penser ». Grande sagesse. Et clairement exprimée ! En termes très diplomatiques, de Villepin poursuit : le projet de route de la soie « est une vision politique qui induit les pays européens à renouveler le dialogue avec des partenaires du continent asiatique, permettant de forger, par exemple, des projets souples avec la Russie, notamment pour trouver les fonds nécessaires pour re-stabiliser l’Ukraine. Le lien entre l’Est et l’Ouest doit se maintenir ». Mieux : « Nous avons là une vision économique qui adapte la planification chinoise à la coopération économique internationale. Dans un monde financièrement volatile et instable, il s’avère nécessaire d’opter pour la bonne approche dans les projets à long terme, utilisant des outils nouveaux, de type multilatéral ». 

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Le grand projet OBOR des Chinois

La Chine envisage l’émergence de six corridors économiques, à replacer dans un projet plus vaste, baptisé OBOR (« One Belt, One Road » - soit « Une ceinture (maritime), Une route »). Cet OBOR entend consolider une route maritime de la Chine à l’Iran voire à la Mer Rouge et créer de solides liaisons ferroviaires entre l’Europe et la Chine. Il vise surtout à relier la Chine à soixante pays. Les six corridors majeurs sont : le CMREC ou Corridor économique Chine / Mongolie / Russie ; le NELB ou « Nouveau Pont Terrestre eurasien » (« New Eurasian Land Bridge ») ; le CCWAEC ou Corridor économique Chine / Asie centrale et occidentale ; le CICPEC ou Corridor économique Chine / Péninsule indochinoise ; le CPEC ou Corridor économique Chine / Pakistan ; et, enfin, le BCIMEC ou Corridor économique Bengladesh / Chine / Inde / Myanmar. A ces projets chinois, tous nécessaires d’un point de vue asiatique, s’ajoute celui du « Canal Eurasia », élaboré par les Russes et les Kazakhs. Ce canal doit relier la Caspienne à la Mer d’Azov (face à la Crimée !), permettant notamment d’acheminer du brut vers la Mer Noire donc vers les confins orientaux de l’Europe. L’enjeu ukrainien/criméen prend ici toute son ampleur. 

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De Marx à List

Ces projets, dont on pourrait dresser une longue liste, démontrent que les puissances du BRICS, du moins la Chine et la Russie, ne sont plus guère affectées, comme jadis, par l’idéologie prêtée à Marx et à Engels mais tentent d’appliquer ou de ré-appliquer les principes pragmatiques de l’économiste Friedrich List (1789-1846). Ce dernier était considéré comme un « libéral » mais, à coup sûr, un libéral « hétérodoxe », soucieux de tenir compte des contextes historiques dans lesquels se déployait l’économie. List était un idéologue du développement. Pour qu’une économie puisse se développer à un rythme correct, l’Etat ne doit nullement jouer un rôle de « veilleur de nuit », à l’instar de ce que souhaitent les théoriciens libéraux anglo-saxons. Au contraire, List pose l’Etat comme une instance constructrice, investisseuse. L’Etat est là pour construire des lignes de chemin de fer et des canaux. C’est List qui planifiera le premier réseau ferroviaire allemand, au sein du Zollverein, de l’Union douanière, dont il fut aussi un père fondateur. En Belgique et aux Etats-Unis, il préconisera le creusement de canaux. En France, il inspirera les praticiens de la « colonisation intérieure ». L’idée du Transsibérien en Russie, les suggestions pratiques des économistes et ingénieurs du Kuo Min Tang chinois s’inspirent toutes d’idées dérivées de List, après sa mort. La politique des grands projets gaulliens est « listienne », de même que le sont les pratiques chinoises, après la parenthèse maoïste et le ressac dû à la tristement célèbre « révolution culturelle » des années 1960. A partir de Deng Xiaoping, la Chine redevient « listienne » et « confucéenne » : c’est à cette double mutation de référence qu’elle doit son succès actuel. Ce serait à un retour à Aristote et à List que l’Europe pourrait devoir son hypothétique renaissance, du moins si l’avenir permettra l’élimination impitoyable des pseudo-élites déchues et abjectes qui nous gouvernent actuellement, exactement comme la Chine maoïste a éliminé sa « bande des quatre », pour ne pas sombrer dans les délires manichéens et idéologiques, dans un remake de la calamiteuse « éthique de conviction » de la « révolution culturelle » et de ses avatars malsains. 

Le clivage dans le monde ne passe plus par la dichotomie capitalisme / communisme ni par la piètre distinction entre sociétés ouvertes et sociétés fermées mais par une dichotomie entre « listiens » et néolibéraux qui recoupe aussi la distinction qu’opérait Max Weber entre « éthique de la conviction » et « éthique de la responsabilité ». Les néolibéraux, et le cortège à la Jérôme Bosch que constituent leurs alliés festivistes, gauchistes ou féministes, adhèrent à des éthiques farfelues de la conviction. Leurs adversaires les plus sérieux à une éthique « listienne » de la responsabilité. 

L’Allemagne dans ce grand jeu eurasien

Les projets chinois séduisent les Allemands. Ce n’est ni nouveau ni étonnant. Le moteur économique de l’Europe participe aux synergies suggérées par Beijing, en tire de substantiels bénéfices que la délirante « juridification » de la sphère économique tente de réduire par l’artifice de procès farfelus comme celui intenté contre Volkswagen en 2015. Est-ce la raison pour laquelle on tente de faire basculer l’Allemagne de Merkel dans le chaos, en lui imposant des flots d’hères inassimilables, flanqués d’activistes formés au terrorisme et à d’autres formes de guerres de la « quatrième génération », qui n’y produisent que du désordre et de la violence ? 

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Jusqu’ici, l’Allemagne avait réussi à desserrer la cangue américaine en se branchant sur les gazoducs russes, dont la gestion a été placée sous le patronage et l’impulsion des anciens chanceliers Helmut Schmidt et Gerhard Schröder. Leur socialisme, pragmatique et non idéologique, « listien » et wébérien, conjuguait ses efforts pour parfaire une diplomatie de l’apaisement, une Ostpolitik fructueuse. Ces efforts avaient abouti aux accords permettant, à terme, de construire le tracé des gazoducs « North Stream 1 & 2 », accentuant certes la dépendance allemande par rapport au gaz russe mais déconstruisant simultanément son extrême dépendance politique face au système atlantiste, tandis que le « South Stream » alimente l’Italie, l’Autriche et la Hongrie (où Orban refuse les sanctions contre la Russie, sur fond d’un revival marginal de l’idéologie eurasiste en pays magyar). 

Hans Kundnani, dans un article magistral de la revue américaine Foreign Affairs (janvier-février 2015), évoque une « Allemagne post-occidentale », c’est-à-dire une Allemagne qui se serait détachée de ses liens avec l’Occident anglo-saxon, de sa Westbindung, pour se mouvoir vers un espace essentiellement industriel, commercial et énergétique dont les pôles majeurs seraient la Russie et la Chine voire l’Inde. Pour la première fois dans l’histoire de la République Fédérale, une minorité de 45% seulement est encore en faveur du statu quo pro-occidental, impliquant l’adhésion à l’OTAN et/ou à l’UE comme seules possibilités diplomatiques. 49% des Allemands contemporains sont désormais en faveur d’une « position médiatrice », où l’Allemagne équilibrerait le jeu de ses relations entre l’Europe occidentale et la Russie. C’est le résultat tangible d’un anti-américanisme qui s’est sans cesse amplifié depuis la guerre du Golfe, déclenchée par Bush junior en 2003 et depuis les révélations d’Edward Snowden sur l’espionnage systématique pratiqué par la NSA. Les liens commerciaux avec la Russie et la Chine se sont considérablement accrus, accroissement qui permettait, jusqu’il y a peu de temps, le maintien de l’opulence allemande, assorti de l’espoir de voir celle-ci se consolider et se perpétuer. Ce lent glissement de l’Allemagne, cœur industriel et territorial du sous-continent européen, vers un Est eurasien très vaste, explique sans nul doute les attaques qu’elle subit depuis le printemps 2015. Par ailleurs, des stratégistes de l’ombre veillent à créer un espace pro-occidental, agité ou non de turbulences, entre l’Allemagne et la Russie que l’on baptisera pompeusement « Intermarium ». Cet « Intermarium », cet entre-deux-mers entre la Baltique et la Mer Noire, est la ré-activation d’un projet concocté à Londres pendant la seconde guerre mondiale par les gouvernements polonais et tchèque en exil, avec la bénédiction de Churchill, que l’alliance avec Staline avait rendu nul et non avenu : on a sacrifié, à Londres, les velléités d’indépendance polonaises et tchèques pour pouvoir exploiter à fond la chair à canon soviétique. Moscou ne voulait pas de ce bloc polono-tchèque, même à un moment où la guerre contre l’Allemagne hitlérienne atteignait un paroxysme inégalé. 

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Du « Cordon sanitaire » de Lord Curzon à l’Intermarium

Même si l’on peut considérer que ce projet d’un Intermarium n’est pas, a priori, une mauvaise idée en soi, qu’il est une application actuelle de projets géopolitiques très anciens, visant toujours à relier les mers du nord à celles du sud parce l’Europe, petite presqu’île à l’ouest de la très grande Eurasie, est géographiquement constituée de trois axes nord/sud : celui qui va de la Mer du Nord au bassin occidental de la Méditerranée (l’espace lotharingien du partage de Verdun en 843), celui envisagé mais non réalisé au moyen-âge par le roi de Bohème Ottokar II Premysl qui va de la Baltique à l’Adriatique (de Stettin à Venise ou Trieste, cités aujourd’hui reliées par une voie de chemin de fer directe et rapide) et, enfin, l’axe dit « gothique », reliant depuis les Goths, bousculés par les Huns, la Baltique à la Mer Noire et à l’Egée, au bassin oriental de la Méditerranée. Aujourd’hui, les stratégistes ennemis de toute vigueur européenne et de toute synergie euro-russe, veulent constituer un Intermarium, sur l’ancien axe gothique, qui serait une résurrection du « cordon sanitaire » de Lord Curzon, destiné à empêcher toute influence de l’Allemagne et de ses dynamismes sur la Russie, posée depuis le géopolitologue Halford John Mackinder comme le « cœur du monde » mais un « cœur de monde » qui ne peut être optimalement activé que par une forte injection d’énergie allemande. Toute alliance germano-russe étant, dans cette optique, considérée comme irrémédiablement invincible, invincibilité qu’il faut toujours combattre et réduire à néant, avant même qu’elle n’émerge sur la scène internationale. 

La submersion démographique que subit l’Allemagne depuis les derniers mois de l’année 2015, qui provoquera des troubles civils et ruinera le système social exemplaire de la République Fédérale, qui compte déjà plus de 12 millions de pauvres, a été plus que probablement téléguidée depuis certaines officines de subversion : plusieurs observateurs ont ainsi constaté que les nouvelles alarmantes sur la présence de migrants délinquants en Allemagne viennent de serveurs basés aux Etats-Unis ou en Angleterre, de même que les tweets ou autres messages sur Facebook incitant les migrants à commettre des déprédations ou des viols ou, inversement, incitant les Allemands à manifester contre la submersion démographique ou contre la Chancelière Merkel. Le conflit civil semble être fabriqué de toutes pièces, avec, au milieu du flot des réfugiés, l’armée de réserve du système, composée de djihadistes qui combattent le régime baathiste syrien ou le pouvoir chiite irakien ou l’armée russe en Tchétchénie mais se recyclent en Europe pour déborder les polices des Etats de l’UE en menant la guerre planétaire selon d’autres méthodes.

Spykman, les « rimlands » et l’endiguement

spykmanlivre.pngSi la submersion de l’Allemagne a pour but essentiel de briser les potentialités immenses d’un tandem germano-russe, elle vise aussi, bien sûr, à ruiner les bonnes relations économiques entre l’Allemagne et la Chine, d’autant plus que les chemins de fer allemands, la Deutsche Bundesbahn, sont partie prenante dans la construction des voies de trains à grande vitesse entre Hambourg et Shanghai. L’Allemagne et, partant, les pays du Benelux, sont fortement dépendants du commerce avec la Chine. Le but de l’hegemon est donc de briser à tout prix ces synergies et ces convergences. Affirmer cela n’est pas l’expression d’un complotisme découlant d’une mentalité obsidionale mais bel et bien un constat, tiré d’une analyse de l’histoire contemporaine : la réalisation du Transsibérien russe sous l’impulsion du ministre Witte a entraîné la théorisation et la mise en pratique de la stratégie de l’endiguement par Halford John Mackinder d’abord, par son disciple hollando-américain Nicholas Spykman ensuite. Sans Mackinder et Spykman, les Etats-Unis n’auraient sans doute jamais élaboré leur géostratégie planétaire visant à rassembler des alliances hétéroclites, parfois composées d’ennemis héréditaires, sur les franges du grand continent eurasien, avec l’OTAN de l’Islande à la frontière perse, le CENTO du Bosphore à l’Indus et l’OTASE en Asie du Sud-Est. 

Finalement, ces stratégies de l’endiguement sont une application de la fameuse « Doctrine de Monroe », dite de « l’Amérique aux Américains ». Derrière cette apparente revendication d’indépendance se camouflait une volonté de soumettre totalement l’Amérique ibérique au bon vouloir des Etats-Unis. Mais elle s’opposait aussi à la terrible menace qu’aurait pu faire peser sur le continent américain une Sainte-Alliance européenne inébranlable qui s’étendait de l’Atlantique Nord au Pacifique, puisque l’empire du Tsar Alexandre Ier en faisait partie. Cette Sainte-Alliance aurait parfaitement pu défendre les intérêts espagnols dans les Amériques ou les européaniser. A l’époque, la Russie avait une frontière commune avec l’Espagne en… Californie, à hauteur du poste russe de Fort Ross, abandonné seulement en 1842. Le Vieux Monde européen était uni –mais cette union n’allait durer qu’une petite quinzaine d’années- tandis que le Nouveau Monde américain était fragmenté. La Sainte-Alliance, pour le Nouveau Monde et pour les Etats-Unis, encore en gestation mais sûrs de pouvoir mener à terme une mission civilisatrice déduite de leur idéologie religieuse puritaine, constituait par voie de conséquence un double danger : celui de perpétuer le morcellement politique du Nouveau Monde au bénéfice de l’Euro-Russie et celui de se maintenir comme une unité indissoluble et de contrôler le monde pour le très long terme. 

« Doctrine de Monroe » et pratique de la table rase

monroeODA0OTcxNzI2OTY0MjM3.jpgLa « Doctrine de Monroe » est donc un rejet de l’Europe et des vieilles civilisations qu’elle représentait, de même qu’un rejet malsain et pervers de toute civilisation ancienne, quelle qu’elle soit, et, surtout, de toute grande profondeur temporelle : là, les délires puritains des sectes protestantes farfelues hostiles à la culture classique gréco-latine de l’Europe catholique ou même anglicane-élisabéthaine, rejoignait les folies de certains avatars incontrôlés de l’idéologie des Lumières. La conjonction de ces deux formes de folie et de nuisance idéologique, qui sévit toujours aujourd’hui, génère un fantasme criminel de destruction systématique d’acquis positifs et de legs historiques. 

La « Doctrine de Monroe », bien davantage que les socialismes messianiques qui pointaient à l’horizon avec la maturation des idées de Karl Marx, est donc une pratique perverse et sournoise de la table rase que tente de parachever de nos jours le néolibéralisme, né aux Etats-Unis à partir de la fin des années 1960 : toute démarche eurasiste constitue donc une révolte contre ce projet d’arasement total, représente une défense des vieilles civilisations, des traditions primordiales, et une revendication du primat de toute profondeur temporelle par rapport à des innovations-élucubrations inventées par des iconoclastes avides de pouvoir absolu, un pouvoir total qui ne peut s’exercer que sur des masses amorphes et amnésiques. 

Face aux avatars actualisés de la « Doctrine de Monroe », qui est passée d’une défense affichée de l’autonomie des Etats américains et des Etats créoles de l’Amérique ibérique à la volonté de contrôler les rives atlantiques et pacifiques qui font face à la bi-océanité étatsunienne, l’eurasisme bien compris vise, au contraire, à éradiquer les blocages et fermetures que génèrent les pratiques géopolitiques et la pactomanie américaines sur le continent eurasien, d’abord en Europe et en Asie. Ce rejet des verrouillages incapacitants induit tout naturellement la promotion volontaire d’une politique grande-continentale d’ouvertures rationnelles aux flux qui vivifient et ont jadis vivifié les territoires eurasiatiques. 

Ce volontarisme eurasiste réduit à néant le discours stratégique né de la distinction opérée par Karl Popper entre sociétés ouvertes et sociétés fermées, où les Etats-Unis se posent comme les promoteurs et les garants des « sociétés ouvertes », tout en pratiquant des fermetures calamiteuses dues à la pactomanie qu’ils pratiquent sur les rimlands eurasiens de l’Europe à l’Indochine. A l’Eurasie des fermetures, produit de la Guerre Froide, doit succéder une Eurasie des communications sans entraves entre l’Europe et la Chine : le monde réellement fermé est donc celui qu’ont établi les tenants de la « société ouverte » (de Popper et de Soros), tandis que l’Eurasie des communications ouvertes est le fait en gestation de ceux qui sont accusés, dans les médias dominants, d’être les adeptes des « sociétés fermées », d’hégélienne ou de marxienne mémoires. Sur cette contradiction flagrante, mais ignorée délibérément dans les discours médiatiques occidentaux, reposent toutes les ambigüités de la propagande, tout le flou incapacitant dans lequel marinent nos décideurs et nos concitoyens. 

Trois ouvertures historiques

Trois ouvertures historiques en Eurasie doivent nous servir de modèles : l’Empire de Kubilaï Khan, visité par Marco Polo, qui ne s’opposait pas à la libre circulation des biens, des caravanes et des idées, contrairement aux verrouillages seldjouk et ottoman ; les rapports espérés entre la Chine et l’Europe quand le jésuite Ferdinand Verbist exerçait son haut mandarinat en Chine au XVIIe siècle ; l’alliance informelle sous Louis XVI entre la France, l’Autriche et la Russie, où la première veillait à contrôler l’Atlantique Nord, les seconde et troisième à faire sauter le verrou ottoman. A ces trois modèles, il convient d’ajouter la notion de syncrétisme religieux, porté par une volonté de ne rien éradiquer, d’opérer des fusions fécondes et de générer de l’harmonie : c’était la préoccupation principale d’Alexandre Ier après les tumultes révolutionnaires et napoléoniens ; c’est la notion de « djadidisme » qui prévaut aujourd’hui dans l’islam de la Fédération de Russie, notamment au Tatarstan où se situe le grand centre spirituel de Kazan ; le djadidisme s’interdit de chercher querelle avec les autres confessions, contrairement aux formes diverses et pernicieuses qu’un certain islam a prises ailleurs dans le monde, soit le salafisme, le wahhabisme ou le mouvement des Frères musulmans, formes virulentes aujourd’hui en Occident et génératrices à court terme de graves conflits civils ; ces formes inacceptables ont cherché à s’implanter en Russie, à partir de la période de « smuta » que fut le premier gouvernement d’Eltsine : elles ont échoué ; ce n’est qu’à Kazan et au Tatarstan qu’un véritable « euro-islam » s’est constitué ; il n’y en a pas d’autres possibles et les constructions boiteuses d’un Tarik Ramadan, dont les prédécesseurs et collatéraux ont été financés et soutenus par les services américains, ne sont que des déguisements maladroits pour gruger les Occidentaux écervelés. Outre la volonté de convergence religieuse du Tsar Alexandre Ier, outre le syncrétisme centre-asiatique promu en Asie centrale au temps de la domination mongole, outre le djadidisme actuel de la Fédération de Russie, nous ne voyons guère d’autres filons religieux traditionnels qui tiennent vraiment compte de la profondeur temporelle voire immémoriale, nécessaire à l’établissement de véritables ferveurs structurantes, indispensables pour contrer les déliquescences du monde moderne. L’ouverture des communications, le rejet des véritables sociétés fermées par les intransigeances occidentales ou wahhabites/salafistes implique l’émergence d’un syncrétisme harmonisateur qui ne raisonne pas par exclusion (« ou bien… ou bien… ») mais par inclusion (« et… et… »). 

Quelques mots sur l’Inde

Cachemire-aujourd-hui-carte-simplifiee.gifMa démonstration, ici, que j’annonçais d’emblée « succincte » et incomplète, ne peut donc prétendre à l’exhaustivité. Mais elle ne saurait omettre d’évoquer l’Inde dans ce survol des convergences eurasiatiques. Depuis son indépendance en 1947, l’Inde est traditionnellement alliée à la Russie, hostile à la Chine, contre laquelle elle a mené une guerre sur les hauteurs de l’Himalaya. La volonté de convergence eurasiatique s’occupe de gommer ce conflit. Les régions himalayennes contestées permettraient, une fois pacifiées, un passage entre l’Inde et les territoires anciennement soviétiques et entre l’Inde et la Chine. L’affaire se corse parce que la Chine, du temps de son conflit avec l’Inde, avait soutenu le Pakistan pour obtenir un port sur l’Océan Indien et des voies de communications entre ces installations portuaires avec la région chinoise de Kachgar, via le tracé en montagne dit de « Karakoroum », partant d’Islamabad pour rejoindre le poste-frontière d’Aliabad au Cachemire. Le gros problème est que l’Inde revendique cette partie du Cachemire pour avoir un lien avec le Tadjikistan ex-soviétique. Par ailleurs, comme le soulignent deux historiens insignes des faits indiens, le Britannique Ian Morris et l’Indien Pankaj Mishra, l’Inde souhaite consolider la cohésion du commerce entre le Golfe et la Mer Rouge d’une part, le Golfe du Bengale et les eaux de l’Asie du Sud-Est, d’autre part. L’objectif géopolitique de l’Inde est d’affirmer sa présence dans l’Océan Indien, surtout dans l’archipel d’Andaman et dans les Iles Nicobar, face aux côtes thaïlandaises. Cette volonté entend créer un chapelet de relais entre la Mer Rouge et l’Insulinde, le même que celui voulu par la Chine, qui le prolongerait jusqu’à ses propres ports du Pacifique, ce qui explique le conflit actuel pour les îles et îlots, naturels ou artificiels, dans la Mer de Chine du Sud.  La consolidation de ce chapelet de relais maritimes, sans possibilité de le couper ou de le fragmenter, rendrait à l’ensemble des Etats d’Eurasie une autonomie commerciale et navale sur son flanc sud, tandis que la Russie rétablirait les communications par l’Arctique, de Hambourg au Japon. Une Egypte militaire, débarrassée du danger que représentent les Frères musulmans et les autres adversaires des syncrétismes féconds, ouvrirait, par Suez, l’espace méditerranéen au commerce eurasien, réalisant du même coup le vœu des Génois et des Vénitiens de notre moyen-âge, tout en isolant la Turquie, du moins si cette dernière entend encore jouer le rôle d’un verrou et non pas d’un pont, comme le souhaitent les Chinois qui leur proposent la construction, entre l’Iran et l’Egée, d’un chemin de fer les liant tout à la fois à l’Asie et à l’Europe. Erdogan se trouve devant un choix : abandonner les « otâneries » et les sottises fondamentalistes ou renouer avec un laïcisme et un syncrétisme turcs qui n’apporteraient que des bienfaits. 

La Chine, le chapelet de relais et l’Océan Pacifique

La consolidation du chapelet de relais maritimes de Cadix à Shanghai permettrait à l’Europe, à son centre germanique et à la Russie de se projeter vers le Pacifique, impératif géopolitique qu’avaient compris des hommes aussi différents que Louis XVI, La Pérouse, Lord Kitchener et Karl Haushofer. Kitchener prévoyait, dans une conversation avec Haushofer, que les puissances européennes (Royaume-Uni compris !) qui n’auraient pas de bases solides dans le Pacifique, seraient irrémédiablement condamnées au déclin. Haushofer avait tiré la conclusion suivante : l’Allemagne, présente dans les Mariannes, suite au retrait espagnol, avait des chances ce consolider ses positions mais, dans la foulée, rencontrait automatiquement l’hostilité des Etats-Unis qui cherchaient  -depuis 1848, date à laquelle ils acquièrent l’atout géostratégique majeur de la bi-océanité-  à dominer le marché chinois, quantitativement le plus important à l’époque, comme de nos jours. Le destin a décidé qu’après la rétrocession des Mariannes à Tokyo par l’Allemagne au Traité de Versailles de 1919, la lutte pour le Pacifique se déroulerait entre un Japon, agrandi de cette immense Micronésie, et les Etats-Unis, maîtres des Philippines depuis leur victoire sur l’Espagne en 1898. La seconde guerre mondiale donnera aux Etats-Unis la maîtrise absolue du Pacifique, atout qui scelle leur hégémonisme planétaire. Aujourd’hui, le télescopage géopolitique ne s’effectue pas entre une puissance européenne présente au centre du Pacifique (comme le furent successivement l’Espagne puis l’Allemagne de Guillaume II) ou le Japon shintoïste et les Etats-Unis, mais entre les Etats-Unis et la Chine, où cette dernière est endiguée par une chaîne de petites puissances (Japon vaincu en 1945 compris) entièrement contrôlées par le système des alliances américaines. Cette chaîne vise à empêcher la Chine de s’élancer vers le large et à doter les Etats-Unis des bases insulaires nécessaires pour harceler, le cas échéant, les convois et l’acheminement d’hydrocarbures vers les ports du littoral pacifique chinois, pour rendre précaire cette ligne vitale de communications maritimes. 

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Chine : double stratégie maritime et continentale

L’application de cette stratégie de harcèlement en Mer de Chine du Sud pourra soit étouffer la Chine soit épuiser les Etats-Unis (où le taux de pauvreté augmente dangereusement). La Chine avait jadis deux stratégies possibles : une stratégie continentale, d’expansion vers le Tibet et le Turkestan/Sinkiang, qui ne dérangeait pas les Américains puisqu’elle inquiétait les Soviétiques. Ou une stratégie maritime, à laquelle le maoïsme avait renoncé, permettant, à partir de 1972, de nouer une alliance informelle avec les Etats-Unis. Aujourd’hui, la Chine cherche à échapper à son endiguement par une double stratégie : à la fois continentale, vers le Kazakhstan et au-delà, par le truchement de chemins de fer trans-asiatiques, et maritime, par la consolidation d’un chapelet de relais dans le Pacifique et l’Océan Indien, dans la mesure du possible en harmonie avec son concurrent potentiel, l’Inde. L’Europe, centrée sur l’Allemagne, et, partant, le tandem euro-russe ont donc intérêt à assurer des projections sans obstacles vers l’Inde et la Chine, tout en évitant qu’une puissance comme le Japon continue à faire partie de la barrière maritime américaine. Or le Japon se débat de nos jours, coincé qu’il est dans le dilemme suivant : éviter l’absorption par la Chine, ce qui serait humiliant, eu égard aux conflits sino-japonais depuis 1895 et éviter l’inféodation perpétuelle à une puissance étrangère à l’espace asiatique comme les Etats-Unis. Attiser les contentieux sino-japonais va dans le sens des intérêts de l’hegemon. Harmoniser les rapports futurs entre le Céleste Empire et l’Empire du Soleil Levant est une tâche des cénacles eurasistes partout dans le monde.

La pacification des rapports entre toutes les composantes de la masse continentale eurasiste (flanquée du Japon) permettra l’avènement de ce que Jean Parvulesco appelait l’ « Empire eurasiatique de la Fin », dans toute son acception eschatologique. Cela signifie-t-il une « fin de l’histoire », un peu comme celle qu’avait envisagée Francis Fukuyama au moment de l’effondrement du système soviétique et de la plongée de la Russie dans la « smuta » eltsinienne ? Non, Fukuyama a déjà été réfuté par les faits : l’histoire ne s’est pas arrêtée, bien au contraire, elle s’est accélérée. Cet « Empire eurasiatique de la Fin » signifierait essentiellement la fin des divisions rédhibitoires, des interventions belligènes potentielles, inutiles et néfastes que déploraient Carl Schmitt ou Otto Hoetzsch. Ce serait le retour définitif de l’alliance informelle du XVIIIe siècle ou, enfin, un retour de la Sainte-Alliance, de l’Atlantique au Pacifique. 

Douze pistes pour une « pax eurasiatica »

J’emprunte ma conclusion au géopolitologue italien Alfonso Piscitelli qui suggère une douzaine de pistes pour aboutir à cette pax eurasiatica :

  1. Ne jamais renoncer à la coopération énergétique, ce qui signifie poursuivre envers et contre tout la politique des gazoducs North et South Stream, selon les modalités fixées par l’ancien Chancelier allemand Gerhard Schröder.
  1. Re-nationaliser les sources énergétiques pour les soustraire aux fluctuations erratiques d’un libéralisme mal conçu.
  1. Parier sur les BRICS et s’acheminer progressivement vers un « Euro-BRICS ».
  1. Viser des continuités politiques sur un plus long terme en généralisant les régimes présidentiels, façon gaullienne, avec élection directe du Président comme en France et en Russie, assorti d’un re-dimensionnement des pouvoirs non élus (des potestates indirectae, des pouvoirs indirects, dont la nuisance a été soulignée par Carl Schmitt). Le but final est un retour à une sorte de « monarchie populaire ».
  1. Proposer un islam modéré, calqué sur le djadidisme soviétique, russe et tatar, compatible, dans le monde arabe, avec des régimes militaires et civils détachés des extrémismes religieux, comme ce fut le cas dans l’Egypte nassérienne, dans l’Iran du Shah, dans la Libye de Khadafi et dans les régimes baathistes de Syrie et d’Irak. Toute pensée politique exprimée par les musulmans des diasporas doit s’inspirer de ces formes de panarabisme, de personnalisme baathiste, de kémalisme ou de valorisation de la chose militaire et non plus de délires salafistes ou wahhabites qui n’ont apporté que le chaos et la misère dans le monde arabo-musulman. 
  1. Favoriser l’intégration militaire de l’Europe, puis de l’Europe et de la Russie et, enfin de l’Euro-Russie et des BRICS, le tout évidemment hors de cette structure vermoulue qu’est l’OTAN qui ne peut conduire qu’au ressac européen, comme on l’observe très nettement aujourd’hui. 
  1. Plaider pour un monde multipolaire contre l’unipolarité voulue par Washington, selon les axes conceptuels mis au point par les équipes eurasistes russe autour d’Alexandre Douguine, Natella Speranskaya et Leonid Savin. 
  1. Travailler à une réglementation positive des migrations, comme l’ont préconisé le Président Poutine dans son discours à la Douma, le 4 février 2013, et Philippe Migault, quand il a plaidé pour une entente euro-russe en Méditerranée, sur fond du triple enjeu grec, syrien et cypriote.
  1. Favoriser une politique familiale traditionnelle comme en Russie pour pallier le ressac démographique européen.
  1. Entamer un dialogue culturel inter-européen qui inclut les linéaments de la pensée organique russe, comme l’avaient souhaité des figures allemandes comme l’éditeur Eugen Diederichs dès la fin du XIXe siècle ou le Prof. Otto Hoetzsch, grand artisan d’un réel dialogue germano-russe ou euro-russe de l’ère wilhelminienne à Weimar et de Weimar à l’ère nationale-socialiste, malgré l’hostilité du régime en place.
  1. Entamer un dialogue entre civilisations et grandes traditions religieuses, comme le voulait le Tsar Alexandre Ier et selon certains axes préconisés par les leaders religieux iraniens, comme le Président Rohani.
  1. Revenir à l’idée universelle romaine. L’eurasisme est un projet impérial, pan-impérial, qui est une actualisation des pouvoirs impériaux romain (et donc byzantin, allemand et russe), perse et chinois. 

J’ajouterai à cette douzaine de pistes une treizième, celle qui doit déboucher sur une dé-dollarisation définitive de l’économie mondiale. Quelques initiatives, surtout au départ des BRICS, ont déjà marqué des points dans ce sens.

Pour réaliser ce programme suggéré par Alfonso Piscitelli, il convient évidemment d’éviter deux écueils :

  1. Présenter ces pistes sous la forme d’un discours d’excité, truffé de rêveries ridicules, risquant de faire interpréter toute démarche eurasiste comme un irréalisme extrémiste, lequel serait automatiquement discrédité dans les médias.
  1. Eviter les polémiques gratuites contre les autres sujets de l’histoire européenne : pas de russophobie ou de germanophobie anachroniques, pas de sinophobie rappelant les discours sur le « péril jaune », etc. Et pas davantage de discours anti-grecs, sous prétexte que la Grèce aurait mal gérée ses finances, ou de discours hispanophobes, prenant le relais des « légendes noires » colportées contre l’Espagne impériale par les protestants dès la XVIe siècle.

Vous constaterez qu’il y a un immense chantier devant nous. Au travail !

Robert Steuckers,

Forest-Flotzenberg, septembre 2015, février 2016.

Bibliographie :  

-          Jean-Pierre ALLEGRET, « Les relations yuan-dollar : de la « guerredes monnaies » à la gouvernance monétaire et financière internationale », Diplomatie, n°71, novembre-décembre 2014.

-          Fernando ARANCON, La Union economica euroasiàtica o la reconstruccion del spacio postsoviético, http://elordenmundial.com, 5 avril 2015.

-          Stefan AUST & Adrian GEIGES, Mit Konfuzius zur Weltmacht – Das chinesische Jahrhundert, Quadriga Verlag, Berlin, 2012.

-          M. K. BADHRAKUMAR, Europe also pivots – to China, http://blogs.rediff.com , repris sur http://euro-synergies.hautetfort.com , 22 mars 2015.

-          Christopher I. BECKWITH, Empires of the Silk Road – A History of Central Eurasia from the Bronze Age to the Present, Princeton University Press, 2011.

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-          Les seigneurs de l’anneau, http://www.chroniquesdugrandjeu.com , repris sur http://euro-synergies.hautetfort.com, le 12 novembre 2015.

-          Moscou ou la technique du rhinocéros, http://leblancetlenoir.com , repris sur http://euro-synergies.hautetfort.com, 12 novembre 2015.

mercredi, 13 avril 2016

L’Europe et les migrations – causes, conséquences et gestion

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L’Europe et les migrations – causes, conséquences et gestion

par Albert A. Stahel,

Institut d’études stratégiques, Wädenswil

Ex: http://www.horizons-et-debats.ch

Le mouvement migratoire qui se répand actuellement en Europe pourrait s’inscrire dans la réalité au cours des prochaines années, peut-être même sur des décennies.

Les réfugiés syriens

Poussés par la pénurie de produits alimentaires, elle-même conséquence de la sécheresse qui a sévi entre 2006 et 2010, par la corruption du régime ainsi que par le «printemps arabe», l’opposition sunnite a manifesté au début de l’année 2011 dans la ville syrienne de Dara contre le régime issu de la minorité alaouite du président Bashar al-Assad, régime au pouvoir depuis 1963. Le gouvernement a alors accepté quelques réformes; ainsi, le rôle dirigeant du parti Baas a été supprimé du texte de la Constitution. Les pouvoirs du président en ont été augmentés d’autant. Très rapidement l’escalade du conflit a évolué vers une véritable guerre entre l’armée syrienne et les divers groupes armés sunnites tels la Free Syrian Army. Aujourd’hui, l’opposition sunnite est totalement divisée.


Un nombre sans cesse croissant d’Etats et de groupes étrangers se sont alors immiscés dans cette guerre. Ainsi, les Etats-Unis et la Turquie ont soutenu la Free Syrian Army par des livraisons d’armes tandis que l’Arabie saoudite et le Qatar finançaient avant tout les groupes islamistes qu’ils approvisionnaient également en armes. L’Iran est accouru au secours de son allié al-Assad, en expédiant au régime syrien non seulement des armes, mais aussi des conseillers militaires et des troupes de combat de la garde républicaine et du Hezbollah libanais. Depuis septembre 2015, la Fédération de Russie s’est également jointe aux hostilités, ses avions de combat se livrant à des bombardements depuis la base aérienne militaire de Hmeimim.


La conséquence de la poursuite de la guerre ininterrompue depuis 2011 a été la destruction, non seulement de villes comme Alep et Damas, mais aussi de sites archéologiques, telle l’Apamée hellénistique. En outre, les organisations salafistes comme l’Etat islamique (EI) ont détourné à leur profit la guerre en Syrie pour atteindre leurs propres objectifs et conquis d’immenses territoires. Actuellement, l’EI doit contrôler environ 50% de la Syrie. Une coalition conduite par les Etats-Unis mène une guerre aérienne contre l’EI, avec des résultats modérés. Faute de pouvoir utiliser ses propres troupes, Washington emploie des mercenaires kurdes recrutés au PYD syrien – de nouveau probablement allié du PKK kurde – et les Peshmergas irakiens.


En 2012, la Syrie avait une population d’environ 22'597'531 habitants.1 De mars 2012 à l’été 2015, il y a eu vraisemblablement 250'000 décès de Syriens et Syriennes. Dans le même temps, des millions de personnes, surtout Sunnites, se sont enfuis de Syrie. Selon l’UNHCR, on en dénombre 4'603'363, en Turquie, Egypte, Irak, Jordanie et au Liban2 dont, à la fin de l’année 2015, entre 2 et 2,5 millions étaient réfugiés en Turquie3 et 245'022 en Irak4. En Syrie même, plus de 7,5 millions de personnes déplacées auraient été chassées de leurs maisons et appartements.


Plus d’un demi-million de Syriens et Syriennes, surtout Sunnites, pourraient avoir émigré en 2015 depuis la Turquie jusqu’en Autriche, en Allemagne et en Suède en passant par la Grèce et la route des Balkans.

Les réfugiés irakiens

Depuis l’invasion des Etats-Unis et de leur «Coalition des bonnes volontés» en mars/avril 2003 et la chute de Saddam Hussein, la guerre règne en Irak entre les Chiites et les Sunnites. Très rapidement, à partir de 2003, s’est formée une quasi-avant-garde des Sunnites évincés du pouvoir, Al-Qaïda en Irak, dont le chef était le Jordanien Abu Musab al-Zarqawi. Après qu’il ait été abattu le 7 juin 2006, au laser et par des bombes dirigées par GPS depuis un avion de combat US F-16,5 Al-Qaïda en Irak s’est graduellement transformé en Etat islamique. Aujourd’hui l’EI, sous l’égide du calife Ibrahim, contrôle encore environ 30% de l’Irak malgré les pertes territoriales infligées au cours des derniers mois par les Peshmergas et l’armée irakienne.


L’Etat islamique continue ses attaques contre les opposants chiites et les membres du gouvernement de Bagdad. Sur le plan militaire, l’Irak va recevoir les conseils des Gardes de la révolution iraniens. Il y a également en Irak des milices chiites sous commandement iranien. Les Etats-Unis consolident avec leurs alliés la puissance de l’armée irakienne et lui dispensent des formations. L’objectif final est la reconquête de la grande ville irakienne de Mossoul qui sert de capitale à l’EI. La guerre en Irak pourrait encore durer quelques temps à cause du retrait, ordonné par le président Obama, de toutes les troupes de l’armée de terre américaine fin 2011 et de par la vacance de pouvoir qui en a résulté.


La population de l’Irak était en 2014 de 32'585'692 personnes.6 En décembre 2015 le nombre des réfugiés irakiens était estimé à 2'019'050.7 1'400'000 d’entre eux ont été déplacés à l’intérieur de l’Irak et 400'000 vivent en Syrie. Seuls 166'000 réfugiés sont stationnés en Turquie. Dans l’intervalle, une partie d’entre eux pourrait avoir émigré en Autriche, en Allemagne et en Suède.

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Les réfugiés en provenance d’Afghanistan, du Pakistan, d’Iran et d’Afrique du Nord

Parmi les candidats potentiels à l’émigration, il faut mentionner les jeunes en provenance de divers Etats d’Asie et d’Afrique du Nord, et ce, en raison de la situation économique, des conditions sociales, d’un mauvais approvisionnement en denrées alimentaires et en eau et aussi, en partie, à cause de la situation politique à l’intérieur du pays d’origine.

L’Afghanistan fait partie de ces Etats. Malgré la lutte pour le pouvoir entre le gouvernement de Kaboul et les Talibans, le calme règne dans de nombreuses provinces. S’il se produit des attaques terroristes de la part des Talibans, elles ont lieu surtout à Kaboul et sont dirigées contre les troupes américaines ou afghanes. L’augmentation du nombre de ces attaques pourrait être la conséquence du départ presque total des troupes territoriales des Etats-Unis et de leurs alliés à la fin de 2014.


Au 1er janvier 2016, on estimait la population de l’Afghanistan à 33'275'428 personnes.8 Une année auparavant, on n’en dénombrait que 32'376'967, ce qui équivaut à un taux de croissance de 2,78%. Malgré l’émigration, la population est en augmentation. Cependant, ce qui est inquiétant, c’est le fait que 14'067'852 personnes, soit 42,3% de la population, a moins de 15 ans, répartis entre 7'209'454 garçons et 6'858'398 filles. Au vu de la situation économique et sociale et de l’espérance de vie moyenne, qui est de 44,8 ans pour les hommes, une partie non négligeable de la population mâle de l’Afghanistan entre 10 et 20 ans pourrait désirer émigrer. Il pourrait s’agir là de 2,5 à 5 millions de jeunes.


Voisin de l’Afghanistan, le Pakistan présente une situation identique. Il en résulte là aussi – surtout dans le nord-ouest – des troubles dont les auteurs sont les Talibans pakistanais. Tout comme en Afghanistan, il y a au Pakistan d’énormes différences économiques et sociales entre les classes sociales les plus basses et les élites. Au 1er janvier 2016, le Pakistan avait une population de 190'814'320 personnes.9 Un an plus tôt, elle ne comptait que 187'831'555 personnes, ce qui signifie un taux de croissance démographique 1,59%. La couche de population des moins de 15 ans atteignait 67'603'605 personnes, soit 35,4% de la population totale, dont 34'726'298 garçons et 32'877'307 filles. Il est plus difficile d’estimer le nombre de candidats à l’émigration du Pakistan. Il pourrait cependant s’agir de plus d’un million.


L’Iran est dirigé par une théocratie. En Iran, les facteurs déterminants l’émigration sont le manque de perspectives économiques et une société sclérosée. Au 1er janvier 2016, l’Iran avait une population de 80'311'566 personnes.10 Dix ans plus tôt, ils étaient 79'321'632, ce qui, par conséquent, indique un taux de croissance démographique de 1,25% pour la République populaire islamique d’Iran. Début 2016, le nombre de jeunes de moins de 15 ans s’élevait à 19'318'947, soit 24,1% de la population, dont 9'907'235 garçons et 9'411'712 filles. En Iran également on relève un excédent de garçons. Au contraire des pays voisins, seuls quelques éléments des couches sociales les plus défavorisées seraient susceptibles d’être candidats à l’émigration. Les dirigeants politiques iraniens sont attentifs aux besoins des catégories sociales inférieures. Par contre, selon mes expériences personnelles lors de plusieurs voyages et de nombreux entretiens, ce sont avant tout les diplômés universitaires et les étudiants qui pourraient être tentés par l’émigration, notamment aux Etats-Unis.


Les pays d’Afrique du Nord offrent une image contrastée. La Libye est un pays en déliquescence, où le chaos domine et où s’affrontent différentes milices. Ici aussi, l’Etat islamique est actif et il a cherché à y établir un territoire sous contrôle. A la suite du «printemps arabe», la Tunisie s’est transformée en quasi démocratie. Toutefois la situation de politique intérieure y demeure marquée par l’instabilité. L’Algérie est dirigée par une dictature militaire. Les manifestations n’y sont pas admises. La population berbère de Kabylie exige de la classe dirigeante arabe la reconnaissance de son ethnie, voire même un degré d’accession à l’autonomie. Le même constat s’applique également aux Touareg des montagnes du Hoggar au Sahara. En plus de ces conflits et revendications ethniques, le régime est confronté à des attaques de la branche locale d’Al-Qaïda au Maghreb. Le Maroc voisin offre le même tableau que l’Algérie. Depuis longtemps les Berbères de l’Atlas et de la région de Marrakech y sont opprimés par les souverains arabes de Rabat. S’y ajoute en outre la question non résolue de l’avenir de la région de l’ancien Sahara espagnol. Les combattants sahraouis et leurs familles vivent toujours dans des camps de réfugiés en Algérie.


La Libye, pays en pleine déliquescence, avait en 2016 une population de 6'678'697 habitants.11 L’année précédente, elle était de 6'543'636, avec par conséquent un taux de croissance démographique de 2,06%. Avec un total de 2'188'409, dont 1'118'081 garçons et 1'070'328 filles de moins de 15 ans, nous avons ici une très jeune population (32,8?% du total). Là aussi, on relève un excédent de garçons. Au vu de la situation désastreuse du pays, la Libye devrait avoir une proportion élevée de candidats à l’émigration parmi les jeunes.


Au 1er janvier 2016, la Tunisie avait une population de 11'205'342 d’habitants avec un taux de croissance de 0,98?%.12 Avec 2'601'208 adolescents (1'343'408 garçons et 1'257'800 filles) de moins de 15 ans, la proportion par rapport à l’ensemble de la population s’élève à 23,2?%. La Tunisie a le taux le plus élevé de combattants étrangers engagés dans l’EI et doit aussi compter avec un pourcentage élevé de candidats à l’émigration.


L’Algérie comptait au 1er janvier 2016 une population de 40'319'284 habitants et un taux de croissance de 1,17%.13 24,2% de ces personnes, c’est-à-dire 9'752'025, avaient moins de 15 ans, dont 4'976'609 garçons et 4'775'416 filles. La dictature militaire limitant la libre circulation des jeunes, beaucoup d’entre eux seraient donc susceptibles de désirer émigrer.


Le Maroc ne diffère pas de l’Algérie dans la structure de sa population. Au 1er janvier 2016, le Maroc avait une population de 33'931'519 habitants et un taux de croissance de 1,07%.14 On y dénombrait 9'443'481 jeunes gens de moins de 15 ans, dont 4'791'809 garçons et 4'651'672 filles, soit 27,8% de l’ensemble de la population. Du fait que le Royaume du Maroc, comparé à la dictature militaire de l’Algérie, exerce une répression moindre à l’encontre de son opposition, le taux des candidats à l’émigration devrait être inférieur à celui relevé dans la dictature militaire algérienne.


Dans l’analyse des trois pays, Tunisie, Algérie et Maroc, il faut également considérer qu’ils ont, en raison de leur passé historique, encore une relation étroite avec l’ancienne puissance coloniale française, dont font notamment partie la langue et la culture.

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Les conséquences de l’appel de Mme Merkel

Avec son appel, la Chancelière allemande Mme Merkel a, en prônant l’entrée sans conditions des réfugiés syriens en Allemagne, enfreint différentes réglementations et entrainé diverses répercussions. Tout d’abord, avec son appel unilatéral, elle s’est non seulement placée au-dessus du droit de contrôle du Parlement allemand, mais elle a également annulé de son propre chef les deux Accords de Schengen et de Dublin. Tous deux reposent sur un contrôle de l’immigration des demandeurs d’asile en Europe et leur enregistrement obligatoire. En cas de refus de leur demande d’asile, ils doivent être renvoyés dans le pays dans lequel ils ont été enregistrés à leur arrivée en Europe. C’est principalement cette mesure qui a été abrogée.


En outre, elle a généré avec son appel un effet d’entrainement sur les réfugiés syriens vivant en Turquie ainsi que sur les candidats à l’émigration issus des pays mentionnés plus haut. En ce sens, elle est à l’origine d’un flux migratoire incontrôlé qui à présent déferle sur l’Europe. Non seulement les pays qui se trouvent sur la route des Balkans, comme la Grèce, la Macédoine, la Serbie, la Croatie, la Slovénie ont été submergés par l’endiguement de cette arrivée massive d’immigrés, mais en Allemagne même cela a déclenché un véritable chaos de réfugiés et de demandeurs d’asile. Comme le montre l’actualité, la police et les institutions allemandes ne parviennent plus, ni à enregistrer les demandes, ni à contrôler ce flot de plus d’un million d’immigrants. En fait, le chaos règne en Allemagne dans le domaine des réfugiés, complété par la petite délinquance de certains immigrants.


A cela s’ajoute le fait que l’intégration de nombre de ces immigrés – qui ne proviennent pas de régions en guerre – va très rapidement surcharger l’Allemagne. Un grand nombre de jeunes Afghans ont ainsi interrompu leur scolarité, lorsqu’ils ne sont pas tout bonnement analphabètes, ce qui signifie que, même dans leur propre langue, ils ne savent ni lire ni écrire. A quoi viennent s’ajouter les problèmes culturels, comme l’ont montré les évènements du 31 décembre 2015 à Cologne. Beaucoup de ces jeunes gens, en particulier ceux venant d’Afghanistan, du Pakistan, de l’Afrique du Nord, vivent dans des sociétés dans lesquelles les femmes comptent pour rien et sont au mieux des marchandises.


Cela n’est qu’en partie dû à l’islam en tant que religion. Ce sont notamment les sociétés d’où proviennent ces jeunes gens qui sont archaïques. Le fait que ce soient avant tout des jeunes hommes qui ont émigré en Europe génère un autre problème. A l’avenir, l’Allemagne va devoir se confronter à la société parallèle instable née de cette immigration.


Avec son appel, Mme Merkel n’a pas seulement remis en question l’avenir de l’Allemagne, mais c’est aussi l’avenir même de l’Europe qu’elle a remis en cause, par son abrogation unilatérale des Accords de Schengen et de Dublin. L’un après l’autre, les pays ont réintroduit les contrôles frontaliers. Ainsi, ces deux accords n’ont même plus la valeur du papier sur lequel ils ont été conçus.


Mme Merkel s’entête à refuser d’introduire en Allemagne des contrôles aux frontières et des quotas. En même temps, elle continue à parler d’une solution européenne pour la crise migratoire, ce qui, au vu des évènements, est devenu totalement inenvisageable. Elle remet de plus en plus en question l’avenir de l’Allemagne tout comme, en principe, celui de l’Europe toute entière.

Qui y a-t-il derrière l’appel de Mme Merkel?

Il y a deux ans encore, la chancelière fédérale refusait de manière impitoyable toute concession face à l’Italie au sujet de l’accueil par l’Allemagne de réfugiés en provenance d’Afrique. Etrange volte-face.

Malheureusement, on ne peut pour le moment que spéculer sur ce revirement. On peut concevoir que cet appel réponde à une proposition de l’administration Obama. Par la poursuite de leurs guerres au Moyen-Orient, les Etats-Unis sont responsables de la souffrance, des tragédies et du drame des réfugiés dans ces régions. Il est possible qu’au travers de l’accueil par l’Allemagne des réfugiés syriens venus de Turquie, l’administration Obama espère se soustraire à sa responsabilité vis-à-vis de la catastrophe engendrée par les Etats-Unis. Il est aussi plausible qu’on lui ait suggéré que l’Allemagne pourrait ainsi négocier des indulgences pour les crimes commis par le régime nazi en accueillant des réfugiés et générer en même temps un renouvellement de la société allemande vieillissante. Mais le fait est qu’avec cet appel, elle a déclenché un phénomène migratoire qui pourrait bouleverser l’Europe.

Solution à la crise migratoire

Comment pourrait-on résoudre cette crise migratoire et l’endiguer à l’avenir? Comme l’ont montré les récents évènements touchant aux réfugiés et aux migrants en provenance d’Afrique, la reconduite à la frontière et l’expulsion des personnes refusées est pratiquement impossible. Il ne reste que la possibilité de stopper le flux migratoire. Il faudrait pour cela que les trois pays, l’Allemagne, l’Autriche et la Suède, arrêtent leur soutien financier aux immigrants. En remplacement, on ne fournirait plus qu’un soutien pratique. Il faudrait en outre cesser de distribuer gratuitement des portables et de fournir le généreux soutien d’assistants sociaux et d’avocats. Dès à présent, les organisations humanitaires pour les réfugiés ne devraient plus recevoir d’aide financière de l’Etat. La prochaine étape de dissuasion serait l’obligation pour les migrants de séjourner impérativement dans des camps situés en dehors des grandes villes. Ensuite, les infractions, telles le fait de peloter des femmes ou même de les violer devraient être passibles de sanctions très sévères par l’Etat de droit.


La prochaine étape consisterait à ce que tous les Etats membres de l’espace Schengen réintroduisent leurs propres contrôles aux frontières. Sans cela, les flux migratoires ne pourront être stoppés. Lors de ces contrôles, les candidats à l’émigration venant d’Afghanistan, du Pakistan, de l’Iran et de l’Afrique du Nord devront être placés dans des camps directement à la frontière et être expulsés aussi rapidement que possible. Les Etats n’acceptant pas leurs ressortissants devront être poursuivis par les Etats européens.
Les mesures décrites doivent être prises immédiatement par les chefs d’Etats européens sensés, même s’ils sont vilipendés par Mme Merkel et sa clique d’écolos-gauchistes. Il ne reste que peu de temps à l’Europe pour sauver son espace culturel et économique.15    •

Source: www.strategische-studien.com du 13/3/16, première parution in: Portas Capital Newsletter, février 2016

(Traduction Horizons et débats)

1    The Military Balance 2015. The International Institute for Strategic Studies, London, 2015, p. 352
2    http://data.unhcr.org/syrianrefugees/regional.php
3    Stratfor. How German Politics will Change Europe, January 22, 2016, p. 3
4    http://data.unhcr.org/syrianrefugees/regional.php
5    Mc Chrystal, St., General, U.S. Army (ret), My Share of the Task, A Memoir, updated with a New Preface, Portfolio/Penguin, New York, 2014, p. 230
6    The Military Balance 2015, p. 330
7    www.unhcr.org/pages/49e486426.html
8    http://countrymeters.info/en/Afghanistan
9    http://countrymeters.info/en/Pakistan
10    http://countrymeters.info/en/Iran
11    http://countrymeters.info/en/Libya
12    http://countrymeters.info/en/Tunisia
13    http://countrymeters.info/en/Algeria
14    http://countrymeters.info/en/Morocco
15    Stratfor, How German Politics Will Change Europe, January 22, 2016, p. 5

mardi, 12 avril 2016

Pirinçci: Böhmermann ist kein Held

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Pirinçci: Böhmermann ist kein Held

von Felix Krautkrämer

Ex: http://jungefreiheit.de

Deutschland streitet über die Schmähkritik Jan Böhmermanns an Erdogan. Ist das noch Satire oder bloß plumpe Beleidigung? Die JUNGE FREIHEIT hat mit einem Experten für Fäkalsprache über den Fall geredet und den Publizisten Akif Pirinçci nach seiner Meinung zu Böhmermanns Gedicht befragt.

Herr Pirinçci, ganz Deutschland redet über Jan Böhmermann, weil er den türkischen Premier Erdogan in einem Schmähgedicht beleidigt hat. Können Sie die Aufregung nachvollziehen?

Pirinçci: Ach, der Böhmermann, das ist einer, der immer frech tut, aber in Wahrheit stets auf der richtigen Seite steht. Jetzt ist er halt mal ausgerutscht und hingefallen. Das wird aber keine negativen Konsequenzen für ihn haben, weil er sich den „richtigen“ Feind ausgesucht hat. Dafür wird er jetzt als Held gefeiert. Für etwas, wofür es keinen Mut brauchte.

Wie ein Besoffener, der durch die Straßen rennt und grölt

Wie finden Sie sein Gedicht?

Pirinçci: Lustig. Es ist auch keine Beleidigung an sich. Das Ganze ist doch sinnfrei. Bis auf den Punkt mit der Unterdrückung der Kurden enthält es auch keine politischen Inhalte. Der Rest ist auf jeden anwendbar, um ihn zu schmähen. Es ist, wie wenn ein Besoffener nachts durch die Straßen rennt und grölt. Und die Fäkalität in seinem Gedicht finde ich witzig.

Die Ausdrucksweise ist Ihnen ja auch nicht fremd …

Pirinçci: Wissen Sie, das linke Lustigsein war in den vergangenen Jahren ziemlich eingeschlafen. Es hatte keinen Biß mehr, keine Schärfe, alles war berechenbar, und da bin ich gekommen und habe das mal etwas aufgewirbelt, mit meiner Sprache. Ich habe diese Art der Schmähkritik hier ja quasi erst eingeführt. Satire muß nicht immer eine politische Botschaft haben, sondern darf manchmal auch einfach nur die Sau rauslassen. Als eigentliches Mittel zum Zweck.

In Ihrem Fall ist das aber nicht auf solche Begeisterung gestoßen.

pirin9783944872223.jpgPirincçi: Ich bin als Künstler aus dem deutschen Kulturleben ausgelöscht und ausradiert worden. Meine Bücher werden nicht mehr verkauft und sogar aus Bibliotheken verbannt, selbst meine Katzenkrimis. Da hat sich kaum einer daran gestört. Im Gegenteil: Die meisten haben das auch noch beklatscht. Böhmermann dagegen wird glimpflich davonkommen. Er wird ein paar tausend Euro Strafe wegen Beleidigung zahlen müssen, aber dann als heldenhafter Künstler in die Geschichte eingehen. Mir hat man dagegen die Existenz zerstört. Aber ich bin ja auch kein Linker. Da ist das dann ok.

Deutsche Debattenkultur könnte in Obszönitäten ertrinken

Noch ist nicht entschieden, ob es ein Verfahren im Fall Böhmermann geben wird.

Pirinçci: Egal, wie die ganze Angelegenheit ausgeht, die Kulturlandschaft kann nur verlieren. Entweder wird ein Richter entscheiden, was ein Künstler in Deutschland sagen darf und was nicht. Oder aber der Richter sagt, das ist alles von der Kunst- und Meinungsfreiheit gedeckt. Und dann wird die deutsche Debattenkultur, insbesondere im Netz, in Obszönitäten ertrinken und darin ersticken.

Wieso?

Pirinçci: Weil dann jeder reimen kann, was er will. Zum Beispiel über den Geruch gewisser Körperteile der Bundeskanzlerin, um bei Böhmermanns Beispiel zu bleiben. Und wenn es dann Ärger gibt, braucht er nur zu sagen: Das ist Satire, der Böhmermann durfte das ja auch.

Türken haben andere Beleidigungskultur

Sie stammen selbst aus der Türkei, hätte Böhmermann nicht wissen müssen, daß jemand wie Erdogan einen anderen Ehrbegriff hat als jemand, der nach 1968 in Deutschland sozialisiert wurde?

Pirinçci: Das glaube ich gar nicht. Wir haben in der Türkei eine viel hochentwickeltere Fluch- und Beleidigungskultur als die Deutschen. Das geht weit über das hinaus, was in Deutschland gebräuchlich ist. Ein „Ich fick deine Mutter“ ist da noch harmlos. Insofern müßte Erdogan das eigentlich abkönnen.

Warum reagiert er dann so empfindlich?

Pirinçci: Weil er weiß, daß er Deutschland in der Hand hat. Er sitzt am Flüchtlingshahn und wenn ihm ein Verhalten Deutschlands nicht paßt, dann dreht er diesen Hahn einfach etwas auf und läßt zehntausende Flüchtlinge nach Europa und Deutschland strömen. Andererseits: Vielleicht ist er auch einfach nur größenwahnsinnig geworden. Er hat gesehen, daß er in der Türkei unbequeme Journalisten ins Gefängnis stecken kann und hat sich möglicherweise gedacht: Mal gucken, ob das auch in Deutschland klappt. Nur daß er sich mit Böhmermann dabei eigentlich gar keinen unbequemen Komiker rausgesucht hat.

Ankara exige des poursuites pénales contre le comédien allemand pour ses propos sur Erdogan

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Ankara exige des poursuites pénales contre le comédien allemand pour ses propos sur Erdogan

Ex: http://www.lesobservateurs.ch
 

Jan-Böhmermann-Alles-alles-über-Deutschland.jpgLe satiriste allemand Jan Böhmermann (photos) avait, lors d’une émission diffusée par la chaîne publique ZDF-neo, traité le président turc de pédophile et de zoophile. Ankara exige à présent que des poursuites pénales soient engagées contre le comédien.

Le gouvernement turc a réclamé au ministre allemand des Affaires étrangères d’ouvrir des poursuites pénales suite à la diffusion, fin mars, de l’émission télévisée dans laquelle Jan Böhmermann avait lu un poème sur le président turc, Recep Tayyip Erdogan.

Selon le ministère allemand des Affaires étrangères, l’Allemagne envisage d’étudier méticuleusement le contenu des revendications demandées par la Turquie afin de déterminer un plan d’action approprié.

Le parquet allemand avait déjà ouvert une enquête préliminaire à l’encontre du comédien après qu’une vingtaine de plaintes ont été déposées, et, que le porte-parole de la chancelière allemande, Angela Merkel, a qualifié les propos du comédien de «sciemment insultants».

Source : RT

vendredi, 08 avril 2016

Presseschau - April 2016

mardi, 22 mars 2016

Duitse nationalisten willen weer vriend zijn met Rusland

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Door: Dirk Rochtus

Duitse nationalisten willen weer vriend zijn met Rusland

Ex: http://www.doorbraak.be

In Duits-nationaal voelende kringen, zoals ook bij de AfD, leeft begrip voor Rusland. Die sympathie komt niet uit de lucht vallen.

Geen enkele partij aan de rechterflank van de Duitse christendemocraten (CDU en CSU) was tot nu toe een langdurig succes beschoren. De neonazistische NPD bijvoorbeeld vegeteert als muurbloempje. Maar nu is er de populistische Alternative für Deutschland (AfD) die zich als enige kracht rechts van de christendemocratie weet te verankeren. Dat tonen de verkiezingen van 13 maart in drie Duitse deelstaten aan. De AfD zetelt daarmee al in acht deelstaatparlementen en breidt haar invloed verder uit. Dat zou op lange termijn ook zijn weerslag kunnen hebben op de buitenlandpolitiek van de Bondsrepubliek Duitsland, meer bepaald tegenover Moskou. De AfD steekt haar begrip voor Rusland niet onder stoelen of banken. Haar vice-voorzitter Alexander Gauland noemt Rusland een 'legitieme partner in het concert van de mogendheden' en een bondgenoot in 'de strijd tegen het islamitisch terrorisme'. Zeker met dat laatste raakt de AfD een gevoelige snaar bij een groot gedeelte van de Duitse bevolking.

Bondgenootschap


Een korte historische terugblik leert ons dat Duitsland en Rusland er bijzondere relaties op nahielden. Met het Verdrag van Rapallo van 16 april 1922 bijvoorbeeld vonden Duitsland als verliezer van de Eerste Wereldoorlog en Rusland als jonge Sovjetstaat elkaar, juist omdat beide toen voor het Westen nog paria's waren. In diezelfde periode waren er ook Duitse intellectuelen die dweepten met Rusland als alternatief voor het 'decadente' Westen. Arthur Moeller van den Bruck, boegbeeld van de 'Konservative Revolution' en auteur van het boek 'Das dritte Reich' (1923), brak een lans voor de samenwerking van het Duitse en het Russische volk als 'jonge volkeren', die omwille van hun dynamiek de toekomst zou toebehoren. Linke Leute von rechts, zo werden die Duitse nationalisten genoemd die toen droomden van een bondgenootschap met de Sovjet-Unie in de strijd tegen het kapitalistische Westen. Na de Tweede Wereldoorlog integreerde de Bondsrepubliek Duitsland zich in het Westen vanuit het geloof in de waarden van de democratie. Bondskanselier Konrad Adenauer (CDU) loodste de jonge West-Duitse staat binnen in Europa (via de Europese Gemeenschap voor Kolen en Staal) en in de trans-Atlantische gemeenschap via de Noord-Atlantische Verdragsorganisatie (NAVO). Maar zelfs tijdens de Koude Oorlog bleef de Bondsrepubliek zich bewust van de noodzaak aan goede betrekkingen met Moskou.

'Europa van de naties'

Zo komt het dat er in het huidige Duitsland heel wat Russlandversteher te vinden zijn in de politiek, de media en de academische wereld, zowel aan de linker- als aan de rechterzijde. Iemand die van heel links naar heel rechts ging, is de publicist Jürgen Elsässer die zijn sympathie betuigde voor de pro-Russische vleugel van de AfD. Hij interviewde in 2013 voor het extreemrechtse magazine Compact de Russische filosoof Alexander Dugin, de theoreticus van de Euraziatische beweging. Volgens Dugin zou Rusland Europa moeten beschermen tegen het 'verderfelijke' liberalisme en tegen het 'imperialistische' Amerika, en daarvoor de Westerse landen via hun parlementen moeten infiltreren. Dat doet Moskou nu al, bijvoorbeeld door financiële steun te geven aan het Franse Front National. Zoiets weigert de AfD, maar ze gaat geestelijk wel mee met Rusland. De nationaal-conservatief denkende Gauland praat de annexatie van de Krim door Rusland goed, en strijkt zo de Europese Unie tegen de haren in. Het electorale succes van de AfD zal het koor van Russlandversteher binnen maar ook buiten Duitsland versterken en zo ook het geloof in een 'Europa van de naties'.

(Dit artikel verscheen eerder in De Morgen).

vendredi, 11 mars 2016

Un regard inquiet vers l’Allemagne

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«L’intoxication de la culture du débat»

Un regard inquiet vers l’Allemagne

par Karl Müller

Ex: http://www.horizons-et-debats.ch

En 1952, juste quelques années après la guerre et seulement un an après sa création, la Cour constitutionnelle fédérale allemande a interdit, pour la première fois dans son histoire un parti: la Sozialistische Reichspartei (SRP) [parti socialiste de l’empire]. Ce parti se considérait comme le successeur de la NSDAP [parti d’Hitler]. Quatre ans plus tard, en 1956, fut décidé jusqu’à nos jours, une nouvelle et ultime interdiction de parti, à savoir le Parti communiste allemand (KPD).


La Cour constitutionnelle tenta, par ces deux interdits, à répondre aux dispositions de la toute jeune Loi fondamentale de la République fédérale allemande, dans ses articles sur les partis (Article 21 Lf.), exigeant une démocratie forte: «Les partis qui, d’après leurs buts ou selon le comportement de leurs adhérents, tendent à porter atteinte à l’ordre constitutionnel libéral et démocratique, ou à le renverser, ou à mettre en péril l’existence de la République fédérale d’Allemagne, sont anticonstitutionnels.» Et de continuer: «La Cour constitutionnelle fédérale statue sur la question de l’anti-constitutionnalité.» Notamment cette dernière disposition devait garantir que le reproche de l’anti-constitutionnalité ne devienne pas un instrument de campagne électorale et de diffamation des adversaires politiques et que la question de l’anti-constitutionnalité soit étudiée de façon approfondie au plan juridique.


On sait peu de choses sur la façon dont la Cour constitutionnelle avait défini l’anti-constitutionnalité et notamment la notion de l’ordre constitutionnel libéral et démocratique (FDGO) évoqué dans l’article 21. On ne peut omettre de rappeler cette définition :
«L’Ordre constitutionnel libéral et démocratique dans le sens de l’article 21 II GG est un ordre qui établit, en dehors de toute violence et contrainte, un ordre d’Etat de droit sur la base de l’autodétermination du peuple, selon la volonté de la majorité, dans la liberté et l’égalité. Il faut inclure dans les principes fondamentaux de cet ordre au moins: le respect des droits humains concrétisés dans la Loi fondamentale, notamment le droit de la personne à la vie et au libre épanouissement, le respect de la souveraineté populaire, de la séparation des pouvoirs, de la responsabilité du gouvernement, du respect de la loi de la part de l’administration, de l’indépendance des tribunaux, du principe du multipartisme et de l’égalité de chances pour tous les partis politiques avec le droit constitutionnel de la formation et de l’exercice d’une opposition.» (BVerfGE 2, 1; Leitsatz 2, 12s.)


Malgré cela, on est en Allemagne en passe de placer les opinions et les activités politiques indésirables sous le verdict d’«extrémisme» politique afin de les rendre anticonstitutionnelles. Pendant plusieurs décennies, au cours de la guerre froide, il était opportun de mettre en garde notamment contre l’«extrémisme de gauche» et de mettre cette étiquette sur nombre de mouvements sociaux critiques. Depuis le début des années 90, certains cercles n’ont pas hésité à utiliser cette notion à la suite de l’adhésion de la RDA à l’espace occidental du pays – malgré la situation catastrophique due à cette adhésion, tant sur le plan économique que social, des populations de cette partie du pays – et recommencent depuis quelques années à utiliser la grande menace de l’«extrémisme de droite» concernant les citoyens de la partie orientale de l’Allemagne.


L’ancien président du Bundestag Wolfgang Thierse a exprimé sa suspicion envers la population de l’Est de l’Allemagne. Ce fut le cas après que, dans une ville de l’est de l’Allemagne, une centaine de personnes avaient tenté, en criant «Nous sommes le peuple», d’empêcher les passagers d’un bus de sortir devant un centre d’hébergement pour réfugiés et que, dans une autre ville de la région, un autre centre tout neuf ait été incendié avant qu’il n’ait pu être utilisé. Thierse a su immédiatement qui dénoncer en affirmant que les populations de l’est de l’Allemagne étaient plus «réceptives pour des messages misanthropes» et «moins enracinées dans leurs convictions démocratiques et morales». Cela rappelle les années 90 lorsqu’on tenta d’expliquer des manifestations violentes d’une certaine jeunesse de l’Est par des thèses absurdes qui devaient surtout servir à dénigrer l’éducation et le système scolaire de l’ancienne RDA.

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Les différents points de vue entre l’Est et l’Ouest du pays est illustré par le livre d’un partisan du mouvement PEGIDA (Sebastian Hennig: «Pegida. Spaziergänge über dem Horizont. Eine Chronik» [Une promenade au-dessus de l’horizon. Une chronique]). On peut lire dans la préface: «On ne peut nier: la majorité des manifestants de Pegida sont des personnes ayant déjà été dans la rue en automne 1989. […] L’engagement de Pegida de 2014/2015 n’est pas la suite de la révolution de 1989/90. Mais il y a des ressemblances: en y regardant de près même des ressemblances étonnantes. Nous sommes confrontés à une accumulation de problèmes qu’on ne peut exprimer avec le vocabulaire du système politique au pouvoir. Ceux qui tentèrent de poser ouvertement les questions dérangeantes dans leur propre langage furent rapidement traités de nazis par la presse alignée – ou se présentant comme telle. Cette réaction stupide de la presse a attisé les protestations et a finalement accentué la mobilisation des forces. Le fait de parler d’une ‹manifestation nazie› n’est que le reflet d’une impuissance des responsables politiques, incapables de sortir de leurs idées fixes, ne voulant pas se confronter à la nouvelle réalité. La phrase d’introduction du premier appel de Neues Forum de septembre 1989 reste entièrement d’actualité: ‹Dans notre pays, il semble que la communication entre l’Etat et la population est perturbée›.»


Michael Beleites, auteur de la préface du livre a tout de même été représentant de la Saxe pour les documents de la Stasi pendant 10 ans, de 2000 à 2010. Ne serait-il pas possible qu’un grand nombre des habitants de l’Allemagne de l’Est ait une plus forte sensibilité face aux mensonges et à la tromperie en politique et aux tendances dictatoriales?

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Un collègue de parti de Wolfgang Thierse, le ministre allemand de la Justice Heiko Maas est allé plus loin encore. Il a placé tous ceux qui émettaient des doutes quant à la légitimité de la politique allemande actuelle concernant l’asile et les réfugiés, dans le groupe des «incendiaires spirituels» [geistige Brandstifter]. On ne fit pas même halte devant l’ancien juge de la Cour constitutionnelle Udo Di Fabio, ayant rédigé une expertise juridique pour le gouvernement bavarois, ce qui incita un journal tout à fait conformiste («Kölner Stadt-Anzeiger») d’écrire le 15 février 2016: «La perversion de la culture du débat en est venue à ce que le ministre de la Justice Heiko Maas (SPD) place l’ancien juge de la Cour constitutionnelle Di Fabio dans le groupe des incendiaires spirituels.» Le triste dérapage verbal du politicien de la CDU et commissaire de l’UE Günther Oettinger face à la présidente du parti Alternative für Deutschland (AfD) Frauke Petry, n’a retenu l’attention des médias que brièvement. Normalement, de tels manquements à la dignité d’autrui exigeraient une démission.


Mais une telle perversion de la culture du débat n’est pas due au hasard. Son objectif est la diffamation et l’affaiblissement de la démocratie. Il s’agit d’empêcher une opposition «fondée sur la Constitution et capable de représenter une opposition». En ce basant sur le bon vieux principe «diviser pour régner!». C’est le résultat du fait que la classe politique du pays veut gouverner contre la volonté du peuple et qu’il n’est donc plus possible de lutter avec des arguments. Et cela se passe dans une situation où de lourdes tâches nous attendent. En fait, la politique allemande se trouve, depuis un certain temps déjà, face à une série de crises sérieuses et très réelles. Un coup d’œil attentif dans les journaux le prouve. Mais en réalité, on ne s’efforce pas de trouver des solutions à ces crises, mais bien au contraire de les attiser (sciemment?). Au lieu de chercher avec la population des solutions, auxquelles les gens pourraient faire confiance, on construit des états d’exceptions, on parle d’«absence d’alternatives», on impose de force des solutions, on gouverne contre le peuple – et tout cela avec le soutien des médias, mais aussi avec celui de personnalités et de pays étrangers, voire d’organisations internationales. Une chose est certaine: ce n’est pas ainsi qu’on trouvera des solutions correspondant au bien commun.


Dans son livre «Mit der Ölwaffe zur Weltmacht» [Vers la domination du monde avec l’arme du pétrole] William F. Engdahl a intitulé un chapitre «Le ‹projet Hitler›». Il y décrit les réseaux du monde de la finance des Etats-Unis et de la Grande Bretagne dans les années 20 et 30 du siècle passé, qui mirent tout en œuvre pour affaiblir les démocraties européennes et permettre aux dictateurs de prendre le pouvoir. D’autres ouvrages importants confortent les thèses du livre d’Engdahl. Ce sont entre autres ceux de l’historien anglais Antony C. Sutton «Wallstreet und der Aufstieg Hitlers» [Wallstreet et la montée d’Hitler], de l’historien suisse Walter Hofer paru en 2001 et de l’historien américain Herbert R. Reginbogin «Hitler, der Westen und die Schweiz 1936–1945», ou encore celui paru il y a quelques années de Hermann Ploppa «Hitlers amerikanische Lehrer. Die Eliten der USA als Geburtshelfer des Nationalsozialismus» [Les maîtres américains d’Hitler. Les élites américaines comme accoucheuses du national-socialisme].


Aujourd’hui, même sans l’apparition d’un nouveau Hitler, le danger de la dictature est bien réel, également d’une dictature en Allemagne – cette fois-ci venant d’une autre direction géopolitique et avec d’autres formes de propagande que celle utilisée au cours des 12 années entre 1933 et 1945. Quel autre sens pourrait avoir sinon ce chaos voulu? Faut-il croire que la classe politique allemande voit sa voie vers la démocratie bouchée par l’ignorance et l’arrogance? Ou y aurait-il un plan caché dans tout ça?

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Martin Niemöller, ce théologien évangélique poursuivi par les nazis, nous a transmis la pensée suivante: «Lorsque les nazis ont déporté les communistes, je me suis tu, car je n’étais pas communiste. Lorsqu’ils ont mis en prison les sociaux-démocrates, je me suis tu, car je n’étais pas social-démocrate. Lorsqu’ils s’en prirent aux syndiqués, je me suis tu, car je n’étais pas syndiqué. Lorsqu’ils s’en sont pris à moi, il n’y avait plus personne pour protester.»


Cette pensée n’a-t-elle pas regagné en actualité face à la «perversion de la culture du débat», des tentatives d’exclusion sociale et de dénigrements en Allemagne? 

Une policière décrit la vie quotidienne dans les grandes villes allemandes

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Toujours plus d’espaces de non-droit étatique en Allemagne

Une policière décrit la vie quotidienne dans les grandes villes allemandes

Ex: http://www.horizons-et-debats.ch

rt. En novembre 2013, une lettre de lecteur fit fureur dans la revue Deutsche Polizei. La policière allemande d’origine grecque Tania Kambouri y racontait ouvertement sa vie quotidienne de policière sur le terrain. Elle décrit avec précision les lieux de non-droit qui se sont formés en plein centre de l’Allemagne, essentiellement dans les quartiers musulmans de la région de la Ruhr, à Brême ou à Berlin. En tant que policière, elle se heurte à toujours plus de difficultés dans l’exercice de son travail et en tant que fonctionnaire, elle est de moins en moins respectée. Dans l’accomplissement de son travail, elle n’est plus respectée en tant qu’être humain, très souvent blessée dans sa dignité et cela la touche profondément.


kambouriL._SX312_BO1,204,203,200_.jpgLa lettre de lecteur de Tania Kambouri fut très bien accueillie par ses collègues, ce qui l’incita à décrire ses expériences professionnelles dans un livre intitulé «Deutschland im Blaulicht – Notruf einer Polizistin» [L’Allemagne et les gyrophares – Appel d’urgence d’une policière]. Prenant des situations quotidiennes vécues dans son travail de policière sur le terrain, par exemple les parcages non autorisés, des disputes, des prises aux mains ou des contrôles d’identités, cette femme de 33 ans constate que les règles fondamentales d’un ordre libéral et démocratique sont de moins en moins respectées et cela particulièrement par des groupes de migrants. Ces gens ne reconnaissent pas la police comme représentante de la force publique mais y voient leurs ennemis. De ce fait, les policiers sont de plus en plus empêchés d’accomplir leurs missions et doivent craindre d’être victimes de violences. Il n’est plus question d’imposer le droit. Du coup, on observe des espaces de non-droit dans lesquels ce ne sont plus les lois qui régissent, mais la loi du plus fort.


Tania Kambouri critique les dits «juges de paix» des clans musulmans qui interviennent lors de disputes entre musulmans. Ces personnes ne jugent pas selon les lois allemandes, mais selon leurs propres traditions. Ainsi les structures parallèles se renforcent et l’ordre étatique est remis en question. Jusqu’à présent la politique et la justice ont fermé les yeux. Ainsi, Tania Kambouri exige davantage de soutien politique et juridique pour le travail de la police.

Elle ne se contente toutefois pas de décrire les dysfonctionnements, mais elle en analyse l’origine et soumet des propositions. Ce n’est certes pas par hasard qu’elle s’appuie sur des propositions de la procureure berlinoise Kirsten Heisig,1 malheureusement décédée bien trop jeune. Ce n’est qu’en appliquant avec énergie et conséquence les normes étatiques, à l’aide des moyens mis à disposition par l’Etat de droit, qu’on pourra faire disparaître les structures parallèles. Il faut poser les bases dès le jardin d’enfants. L’apprentissage de la langue allemande et la coopération avec les parents doivent être exigés et sont primordiaux. Les infractions et les délits – même mineurs – doivent être sanctionnés immédiatement pour avoir un effet d’apprentissage et de changement de comportement. Cela exige une coopération étroite entre les divers offices et institutions. La réduction de l’aide sociale doit également être envisagée dans de tels cas. Tout comme Kirsten Heisig, Tania Kambouri établit un rapport entre des sanctions trop faibles ou fixées tardivement et la stabilisation des comportements délinquants.Malgré plusieurs tentatives politiques de la faire plier, Tania Kambouri a tenu bon. Pour elle, seule la Loi fondamentale allemande compte. Selon elle, il va de soi qu’il est possible pour toute personne immigrée d’entreprendre des efforts d’intégration dans le pays, ce qui est le cas pour la grande majorité. La société doit exiger de toute personne voulant rester dans le pays cette capacité d’adaptation et une initiative personnelle. Comme conclusion, l’auteur décrit les difficultés quotidiennes auxquelles se heurte la police dans son travail. Il apparaît que les policiers en Allemagne sont de plus en plus victimes d’injures, voire d’agressions physiques, sans réel soutien de la part de la politique et de la justice. Tania Kambouri exige plus de compréhension et de soutien.    •

1    Kirsten Heisig. Das Ende der Geduld. Konsequent gegen jugendliche Gewalttäter.

ISBN 978 3 451 30204 6

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dimanche, 06 mars 2016

La teoria del “nomos” in Carl Schmitt: la geopolitica come baluardo contro il nichilismo?

Ugo Gaudino

Ex: http://www.geopolitica-rivista.org

nomos,203,200_.jpgLa complessa produzione di Carl Schmitt, tanto affascinante quanto labirintica, ha dato un contributo fondamentale alla comprensione del nichilismo e ai processi di secolarizzazione e neutralizzazione che l’hanno provocato. Spinto da un’inesorabile volontà di esorcizzare la crisi e la negatività in cui stava precipitando la decadente Europa d’inizio Novecento, il giurista tedesco si confronta impavidamente con la “potenza del Niente” – esperienza cruciale per la comprensione di quell’epoca e per restare dentro alla filosofia, come ammonivano Jünger ed Heidegger in Oltre la linea –, tentando di opporre all’horror vacui soluzioni di volta in volta sempre più solide, concrete ed elementari, nel corso di un itinerario intellettuale lungo, tortuoso e per certi aspetti contraddittorio.

1. Intellettuale eclettico dalla penna sottile e dai molteplici interessi, nonché figura di primissimo piano tra i malinconici testimoni della crisi di un’epoca (quella dell’Europa degli Stati sovrani e della sua migliore creazione, il cosiddetto ius publicum europaeum), l’ambiguità di un personaggio definito non a torto ”la sfinge della moderna scienza giuspubblicistica tedesca” non pregiudica la grandezza della sua prestazione, frutto di una visione del mondo disincantata che tenta di addomesticare il caos senza pretendere di neutralizzarlo completamente.

Il nucleo propulsivo della produzione schmittiana sta nel suo essere situato nel contesto di crisi dell’Europa di inizio Novecento, tanto storico-politica quanto logico-teorica. In questa sede si cercherà di far chiarezza sul secondo aspetto, analizzando i tentativi dell’autore di far fronte alla crisi del razionalismo moderno e della mediazione tra Idea e Realtà. Di fronte alle minacciose lande aperte dal nichilismo, Schmitt non reagisce affidandosi a procedimenti antitetici e costruendo edifici metafisici ormai obsoleti nell’età della tecnica né tantomeno crogiolandosi nello spleen come molti intellettuali sedotti dal “Niente”: il giurista di Plettenberg cerca invece di forzare la crisi, di radicalizzarla risalendone alle origini, decostruendola e provando a cogliervi il momento genetico di nuovo, possibile ordine per l’Occidente decadente.

Di qui la prima fase del suo percorso, quella del “decisionismo”, primo tentativo di opposizione al nichilismo. Partendo dalla consapevolezza dell’origine contraddittoria della politica, basata sulla coappartenenza originaria di violenza e forma, Schmitt afferma l’innegabilità degli aspetti entropici e distruttivi della stessa. Tramontata ogni pretesa di mediazione definitiva tra ideale e contingente da parte della ragione, la politica resta in balìa di questa frattura genealogica, in una dialettica in cui la trascendenza dell’Idea non è mai ontologicamente piena ma permeata da un’assenza originaria, immersa nelle sabbie mobili del cosiddetto “stato d’eccezione” che rispetto all’ordine si pone come ombra ed eventualità che può rovesciarlo da un momento all’altro.

La via d’uscita per imporsi sull’eccezione è individuata nella “decisione”, che nasce dal Nulla e tenta di costruire un edificio politico-giuridico nonostante le basi estremamente fragili: l’eccezione, per quanto pericolosa, è realisticamente considerata necessaria per partorire e mantenere l’ordine. Una prospettiva agli antipodi delle utopie dei normativisti, i quali trascurano la possibilità che l’ordine possa auto-rovesciarsi e restano ciecamente aggrappati alla regola ignorando che essa vive “solo nell’eccezione”, come affermato in Teologia politica. Chi decide sullo “stato d’eccezione” è per Schmitt “sovrano”, inteso come colui che riesce a compiere il salto dall’Idea alla Realtà e che ha l’ultima parola su quelle situazioni liminali in cui l’ordinamento è minacciato da gravi crisi che possono sconvolgerne le fondamenta.

Per quanto suggestiva, la fase del decisionismo sembra eccessivamente legata alla categoria dello Stato moderno, di cui il giurista appare profondamente nostalgico (pur non essendo uno “statolatra” tout court come vorrebbero farlo apparire alcuni: lo Stato è soltanto un “bel male” prodotto dalla cultura europea onde evitare la dissoluzione delle guerre civili). Pertanto, vista la crisi dei “Leviatani”, cui Schmitt assiste in prima persona nell’agonizzante Repubblica di Weimar, le strade da percorrere per neutralizzare il “Niente” sono quelle che conducono a istanze pre-statali, sopravvissute alla crisi della razionalità moderna – di cui lo Stato era un prodotto – e nelle quali ricercare l’essenza del “politico” dopo il tracollo della statualità.

2. Si apre così la seconda fase del pensiero schmittiano, incentrata sulla teoria degli “ordini concreti”: questa, ancorandosi alla concreta storicità e spazialità, rappresenta un passo in avanti rispetto alla fluidità dello “stato d’eccezione” e un ponte di collegamento con le successive elucubrazioni sul nomos. Vanificata l’illusione statocentrica, Schmitt dirige la sua lente d’ingrandimento sulle Ortungen dei popoli, soggetti in grado di decidere sulla propria esistenza politica – e quindi sulla dicotomia “amico/nemico” – anche andando “oltre” lo Stato.

Così come l’essenza del politico è ricercata al di là dello Stato, anche il diritto è ormai slegato da questo, che ha perso definitivamente il monopolio della politica che Weber gli riconosceva: pertanto, riprendendo l’istituzionalismo di Maurice Hauriou e di Santi Romano, Schmitt arriva a sostenere che le norme non coincidono né con universali astratti né con decisioni sovrane ma costituiscono il prodotto di determinate situazioni storico-sociali e di contesti in cui si articola il corpo di una nazione. Questa evoluzione ordinamentalista è una tappa necessaria per la costruzione di un edificio giuridico svincolato dallo Stato e fondato sulla concretezza di una normalità non più dipendente dal prius della decisione – in quanto creata dal sovrano – ma preesistente nella prassi di un “io sociale” sedimentatosi col tempo intorno alle consuetudini e allo ius involontarium. La decisione finisce per essere assorbita completamente in “ordinamenti concreti” dai tratti comunitaristici, emotivi ed irrazionali che sembrano avvicinarsi di molto alla concezione del Volk propugnata dal nazionalsocialismo, con cui nel corso di questi anni Schmitt ebbe un rapporto controverso. Negli ultimi anni di Weimar, infatti, il giurista si era fermamente opposto ai movimenti estremisti che avrebbero potuto mettere in pericolo la vita pubblica del Reich, tanto da denunciare l’incostituzionalità del partito nazista nel 1930. Nell’ottica schmittiana, “custode” della Costituzione era solo il Presidente del Reich, il cui ruolo fu difeso strenuamente fino all’ascesa di Hitler. Allora, principalmente per ragioni di opportunismo legate alla carriera prima ancora che per presunte affinità ideologiche, diventò membro del partito, da cui comunque fu allontanato nel 1936, accusato di vicinanza ad ambienti reazionari, conservatori e non ariani da Alfred Rosenberg.

Nonostante la palese eterodossia di un cattolico romano che rifiutava tanto il razzismo biologico quanto il tracotante imperialismo di marca hitleriana (da cui diverge il suo concetto di Grossraum), è innegabile che Schmitt in quegli anni abbia tentato, invano, di rendere compatibili le sue idee con la dottrina nazionalsocialista. Di qui l’ambizioso proposito, contenuto nel saggio del 1934 Stato, movimento, popolo, di delineare un modello costituzionale per il Terzo Reich, visto come la possibile realizzazione del “ordine concreto” in cui l’unità è assicurata dalla combinazione di questi tre elementi – probabilmente anche con l’obiettivo di arginare gli eccessi del Führer. Tuttavia, queste analogie non fanno di Schmitt un Kronjurist ma dimostrano solo la volontà dell’autore di svincolarsi dall’apparato teorico ancora legato alla dimensione statale e la necessità di elaborare un novus ordo capace di fungere da baluardo per il nichilismo.
La valorizzazione delle coordinate spazio-temporali, l’esaltazione del popolo e dell’elemento terrigno, uniti ai saggi di diritto internazionale maturati nel corso degli anni Venti e Trenta non sono dunque da considerare come tratti apologetici del regime quanto piuttosto come preludio alla teoria del nomos e ad una nuova idea di diritto priva di caratteri astratti e legata alla concretezza degli eventi storici, in cui si situa per diventare ordinamento e si orienta per modellare un ambiente, non sottraendosi alla storicità e alla temporalità ma rappresentando anzi un fattore che li co-determina.

Una riflessione dai tratti fortemente geopolitici che sembra neutralizzare la “potenza del Niente” valorizzando l’elemento spaziale in cui collocare l’idea politica, ormai lontana dagli abissi dello “stato d’eccezione”.

3. Il termine nomos viene impiegato nel suo senso originario e ricondotto alla prima occupazione di terra e a quelle attività pratico-sociali di appropriazione, divisione e sfruttamento della medesima. Il diritto è quindi unità di ordinamento e localizzazione (Ordnung und ortung) che non nasce con strumenti razionali ma neppure dalla decisione quanto dalla conquista del territorio: nella terra è situato il nesso ontologico che collega giustizia e diritto.

1a88f221e2fe7df09f12f25e91dff6f8_w600_h_mw_mh_cs_cx_cy.jpgDi qui la necessità avvertita dal giurista esperto del mondo classico di recuperare l’etimologia autentica del termine νεμειν, che si articola in tre significati: “prendere, conquistare” (da cui i concetti di Landnahme e Seenahme, sviluppati in Terra e mare nel ’42); “dividere, spartire”, ad indicare la suddivisione del terreno e la conseguente nascita di un ordinamento proprietario su di esso; “pascolare”, quindi utilizzare, valorizzare, consumare. Soffermandosi sulla genesi della parola nomos Schmitt vuole restituirle la “forza e grandezza primitiva” salvandola dalla cattiva interpretazione datale dai contemporanei, che l’hanno “ridotta a designare, in maniera generica e priva di sostanza, ogni tipo di regolamentazione o disposizione normativistica”, come afferma polemicamente ne Il nomos della terra, pubblicato nel 1950 e summa del suo pensiero giuridico e politico. L’uso linguistico di “un’epoca decadente che non sa più collegarsi alle proprie origini” funzionalizza il nomos alla legge, non distinguendo tra diritto fondamentale e atti di posizione e facendo scomparire il legame con l’atto costitutivo dell’ordinamento spaziale.

Bersaglio di Schmitt è il linguaggio positivistico del secolo XIX che in Germania aveva reso nomos con Gesetz, ossia legge, errore d’interpretazione ricondotto all’abuso del concetto di legalità tipico dello Stato legislativo centralistico. Il nomos indica invece la piena immediatezza di una forza giuridica non mediata da leggi, di un atto di legittimità costitutivo che conferisce senso alla legalità delle stesse, di una violenza non indiscriminata né indeterminata ma ontologicamente ordinatrice. Il riferimento al celebre frammento 169 di Pindaro sul nomos basileus e al nomos sovrano in Aristotele non fanno che rinforzare la tesi secondo cui la dottrina positivistica, malgrado l’ammonimento degli esponenti della scuola “storica” come Savigny, sarebbe rimasta intrappolata nel quadro nichilistico del suo tempo, da cui Schmitt tenta di uscire riallacciandosi a quegli elementi primordiali che rappresentano una risorsa simbolica fondamentale, da cui l’uomo nasce e a cui s’aggrappa per organizzare la sua vita. Assumendo la piena consapevolezza di essere “animali terrestri” si cerca di evitare la disgregazione dell’epoca contemporanea.

4. Partendo dalla terra, che salva dall’oblio filosofico, coadiuvato da Heidegger e Junger, lo Schmitt di Terra e mare e de Il nomos della terra ritorna alla dimensione ctonia e tellurica dell’individuo, ripercorrendo la storia del mondo e armandosi contro due minacce che rappresentano facce della stessa medaglia: da un punto di vista metafisico il nichilismo della tecnica, che ha prodotto la drastica separazione tra ordinamento e localizzazione, eliminando le differenze e trasformando il nomos in legge, si rispecchia geopoliticamente nell’universalismo di stampo angloamericano, che con la sua weltanschauung utopistica ha provocato la dissoluzione dello ius publicum europaeum, cardine dell’ordine politico dell’Europa moderna.

È opportuno segnalare che questa teoria non riposa su basi radicalmente antitetiche rispetto alle elaborazioni precedenti: l’idea di Giustizia che si manifesta nel nomos è ordine che si rende visibile attraverso il disordine, presa di possesso, recinzione e nel contempo esclusione, radicamento nello sradicamento. L’ultimo Schmitt, in altre parole, traduce in termini spaziali i concetti chiave elaborati negli anni ’20. La sovranità, collocata in precedenza nel tempo concreto della modernità come epoca dell’eccezione ma ancora in uno spazio astratto, ora si radica intensamente nella concretezza spaziale e più precisamente nel vecchio continente. In seguito alla prima rivoluzione spaziale moderna, con l’irruzione sulla scena storica del mare (spazio liscio, vuoto, anomico) e con la scoperta e l’occupazione dell’America prende forma l’ordine europeo degli Stati: il nuovo nomos è riorganizzazione dello spazio, rivolgimento, rivoluzione.

Così come lo Stato moderno non espunge davvero da sé il caos, ma ne è anzi attraversato e continuamente ferito, il nuovo ordine moderno prende forma confinando questo disordine al di fuori di sé, nello spazio extraeuropeo, ma mai cercando di neutralizzarlo in via definitiva.


2347592565.jpgL’irrazionalità della guerra viene dunque confinata nelle amity lines del mare mentre sul suolo continentale, a mo’ di razionalizzazione effettiva del sacrificio, resta la guerre en forme tra Stati che si riconoscono reciprocamente come sovrani e che non mirano all’annichilimento o alla criminalizzazione del nemico. Una delle maggiori conquiste del diritto pubblico europeo è stata infatti la limitazione della guerra (Hegung des Krieges) e la trasformazione dal bellum iustum delle guerre civili di religione in conflitti “giusti” tra pari, tra hostes aequaliter iusti. Quest’atto di contenimento non è stato frutto delle ideologie razionalistiche, bensì della particolare condizione di equilibrio di cui l’Europa moderna ha goduto fino al 1914. Un assetto fondato non solo sulla dialettica vecchio/nuovo mondo – strumentalizzata da Schmitt, secondo alcuni, per difendere l’imperialismo e il colonialismo europeo -, ma anche sul rapporto tra terraferma e libertà del mare che ha fatto in primis le fortune dell’Inghilterra, che ha scelto di diventarne “figlia” trasformando la propria essenza storico-politica ed arrivando a dominare lo spazio liscio e uniforme.

Ma è nello stesso humus culturale anglosassone che le logiche di neutralizzazione passiva proliferano: il culto del razionalismo, ignaro d’eccezione e di localizzazioni e che tutto uniforma con i suoi sterili meccanismi, che impone la soppressione degli elementi irrazionali ignorando che l’Es, per citare un celebre Freud, prima o poi riesploderà in forme ancor più brutali. Torna infatti la iusta bella, che mira al totale annientamento del nemico, rappresentato stavolta dai soggetti che non si piegano al mondialismo informe e ad una condizione “utopica” che in realtà è guerra civile globale: lo sradicamento dell’u-topos conduce alla deterritorializzazione, che è perdita del nomos in quanto orientamento e ricaduta nel vortice nichilistico che l’ottimismo positivista cercava di esorcizzare con l’uso astratto della ragione.

Ciò che Schmitt cerca di affermare, pertanto, è che solo assumendo consapevolmente la propria origine abissale, la negatività di base e la possibilità della fine inscritta in sé stesso un ordinamento può sperare di sottrarsi al nichilismo: lo ius publicum europaeum ha perduto concretezza trasformando il nomos in astratta legge globale ed abbracciando ideologie internazionaliste e pacifiste che hanno solo gettato il continente in conflitti drammatici e devastanti. Facendogli perdere, inoltre, la sua specificità ed inglobandolo in quella nozione di Occidente tanto indeterminata quanto adatta per un’epoca in cui l’ordine politico sembra esser stato ingabbiato dai gangli del Niente.

Bibliografia essenziale

AMENDOLA A., Carl Schmitt tra decisione e ordinamento concreto, Edizioni Scientifiche Italiane, Napoli, 1999
CASTRUCCI E., Nomos e guerra. Glosse al «Nomos della terra» di Carl Schmitt, La scuola di Pitagora, Napoli, 2011
CHIANTERA-STUTTE P., Il pensiero geopolitico. Spazio, potere e imperialismo tra Otto e Novecento, Carocci Editore, Roma, 2014
GALLI C., Genealogia della politica. Carl Schmitt e la crisi del pensiero politico moderno, Il Mulino, Bologna, 2010
PIETROPAOLI S., Schmitt, Carocci, Roma, 2012
SCHMITT C., Politische Theologie. Vier Kapitel zur Lehre der Souveränität, Duncker & Humblot, Monaco-Lipsia 1922, trad it. Teologia politica. Quattro capitoli sulla dottrina della sovranità, in Le categorie del ‘politico’ (a cura di P. SCHIERA e G. MIGLIO), Il Mulino, Bologna, 1972
ID., Verfassungslehre, Duncker & Humblot, Monaco-Lipsia 1928, trad. it. Dottrina della costituzione, Giuffrè, Milano, 1984
ID., Der Begriff des Politischen, in C. SCHMITT et al., Probleme der Demokratie, Walther Rothschild, Berlino-Grunewald, 1928, pp. 1-34, trad. it. Il concetto di ‘politico’. Testo del 1932 con una premessa e tre corollari, in Le categorie del ‘politico’, Il Mulino, Bologna, 1972
ID., Land und Meer. Eine weltgeschichtliche Betrachtung, Reclam, Lipsia 1942, trad. it. Terra e mare. Una considerazione sulla storia del mondo raccontata a mia figlia Anima, Adelphi, 2011
ID., Der Nomos der Erde im Völkerrecht des Jus Publicum europaeum, Greven, Colonia 1950, trad. it. Il Nomos della terra nel diritto internazionale dello “ius publicum europaeum”, Adelphi, Milano, 1991
VOLPI F., Il nichilismo, GLF editori Laterza, Roma, 2009

samedi, 05 mars 2016

Entretien avec Robert Steuckers sur Ernst Jünger, Armin Mohler et la « révolution conservatrice »

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Entretien avec Robert Steuckers sur Ernst Jünger, Armin Mohler et la «révolution conservatrice»


Propos recueillis par Valentin Fontan-Moret pour la revue Philitt (Paris)

I.
Vous distinguez plusieurs courants au sein de la Révolution conservatrice allemande. Auquel Ernst Jünger appartient-il ?


Ernst Jünger appartient, c’est sûr, au filon national-révolutionnaire de la « révolution conservatrice », quasiment dès le départ. C’est un courant forcément plus révolutionnaire que conservateur. Pour quelles raisons initiales Ernst Jünger a-t-il basculé dans ce nationalisme révolutionnaire plutôt que dans une autre catégorie de la RC ? Comme pour beaucoup de ses homologues, la lecture de Nietzsche, avant 1914, quand il était encore adolescent, a été déterminante. Il faut tout de même préciser que Nietzsche, à cette époque-là, est lu surtout par les franges les plus contestatrices des gauches allemandes et par la bohème littéraire. Il règne dans ces milieux un anarchisme joyeux et moqueur qui arrache les masques des bien-pensants, dénonce les hypocrisies et fustige le moralisme. Cet état d’esprit déborde dans le mouvement de jeunesse Wandervogel, auquel participe Ernst Jünger en 1911-1912. La découverte de Nietzsche a laissé peu de traces écrites dans l’œuvre de Jünger. Entre son retour de la Légion Etrangère et son engagement dans l’armée impériale allemande en 1914, nous disposons de peu de notes personnelles, de lettres adressées à ses parents ou ses amis. Son biographe Heimo Schwilk note simplement qu’Ernst Jünger a lu La Volonté de puissance et La Naissance de la tragédie. On peut en déduire que l’adolescent hérite de cette lecture une attitude de rebelle. Aucun ordre établi ne trouve grâce à ses yeux. Comme bon nombre de ses contemporains de la Belle Epoque, où l’on s’ennuie ferme, il rejette tout ce qui est figé. C’est donc essentiellement le Nietzsche que l’on a appelé « critique » et « démasquant » qui transforme Ernst Jünger à 18 ans. Il faut penser dangereusement, selon les injonctions du solitaire de Sils-Maria. Il faut aussi une rénovation totale, expérimenter un vécu incandescent dans des communautés d’extase dionysiaque. Ce vécu ardent, la guerre le lui offrira. Le cataclysme libère de l’ennui, des répétitions stériles, du ronron ânonné par les établissements d’enseignement. L’expérience de la guerre, avec la confrontation quotidienne à l’« élémentaire » (la boue, les rats, le feu, le froid, les blessures…) achève de ruiner tous les réflexes frileux qu’un enfant de bonne famille de la Belle Epoque pouvait encore receler en son fors intérieur.


ej_zvSHwlATT5aDQmG8.jpgMais ce qui fait de Jünger un « nationaliste » dans les années 1920, c’est la lecture de Maurice Barrès. Pourquoi ? Avant la Grande Guerre, on était conservateur (mais non révolutionnaire !). Désormais, avec le mythe du sang, chanté par Barrès, on devient un révolutionnaire nationaliste. Le vocable, plutôt nouveau aux débuts de la république de Weimar, indique une radicalisation politique et esthétique qui rompt avec les droites conventionnelles. L’Allemagne, entre 1918 et 1923, est dans la même situation désastreuse que la France après 1871. Le modèle revanchiste barrésien est donc transposable dans l’Allemagne vaincue et humiliée. Ensuite, peu enclin à accepter un travail politique conventionnel, Jünger est séduit, comme Barrès avant lui, par le Général Boulanger, l’homme qui, écrit-il, « ouvre énergiquement la fenêtre, jette dehors les bavards et laisse entrer l’air pur ». Chez Barrès, Ernst Jünger ne retrouve pas seulement les clefs d’une métapolitique de la revanche ou un idéal de purification violente de la vie politique, façon Boulanger. Il y a derrière cette réception de Barrès une dimension mystique, concentrée dans un ouvrage qu’Ernst Jünger avait déjà lu au Lycée : Du sang, de la volupté et de la mort. Il en retient la nécessité d’une ivresse orgiaque, qui ne craint pas le sang, dans toute démarche politique saine, c’est-à-dire dans le contexte de l’époque, de toute démarche politique non libérale, non bourgeoise.


Le camp national-révolutionnaire, au sein de la RC, est donc pour l’essentiel un camp de jeunes anciens combattants, directement ou indirectement influencés par Nietzsche et par Barrès (souvent via l’interprétation qu’en donnait Jünger). Camp qui souhaiterait bien, si l’occasion se présentait, faire un coup à la façon du Général Boulanger (cette fois avec le Corps Franc du Capitaine Ehrhardt).

II.
A partir de La Paix, essai publié en 1946, son oeuvre semble prendre un tournant individualiste, peut-être plus spirituel. Faut-il y voir une rupture avec la Révolution conservatrice ?

Je pense que le tournant « individualiste », comme vous le dites, et le tropisme spirituel/traditionaliste s’opère subrepticement dès que la période politique très effervescente, qui va de 1918 à 1926, cesse d’animer la scène politique allemande. Les traités de Locarno et de Berlin apportent un apaisement en Europe et l’Allemagne signe des traités plus ou moins satisfaisants avec ses voisins de l’Ouest et de l’Est. On ne peut plus parler d’une période révolutionnaire en Europe, où tout aurait été possible, comme une bolchévisation nationale de l’Atlantique au Pacifique. Les rêves des révolutionnaires barrésiens et futuristes ne sont plus possibles. L’effervescence bolchevique, elle aussi, s’estompe et l’URSS tente de se stabiliser. Jünger fait ses premiers voyages, quitte l’Allemagne, muni d’une bourse d’études, pour étudier la faune marine à Naples. La rencontre avec la Méditerranée est importante : ses paysages apaisent le soldat nordique revenu des enfers de Flandre et de Picardie.

Les traités et le séjour à Naples n’ont certes pas interrompu les activités éditoriales d’Ernst Jünger et de son frère Friedrich Georg. Ils participent tous deux aux revues les plus audacieuses de la petite sphère nationaliste, nationale-révolutionnaire ou nationale-bolchevique. Ils sont rétifs aux avances de Goebbels, Hitler ou Hess : surtout parce que les deux frères demeurent « boulangistes ». Ils ne veulent pas participer à des carnavals politiques, fussent-ils placés sous le signe d’un nationalisme né de la guerre et refusant les implications du Traité de Versailles. Dès l’avènement du national-socialisme au pouvoir en 1933, le retrait des frères Jünger s’accentue. Ernst Jünger renonce à toute position dans les académies littéraires mises au pas par le nouveau régime. Siéger dans ces académies contrôlées mènerait à un ronron stérile qu’un nietzschéen, même quiétiste, ne pourrait admettre. C’est aussi l’époque du premier repli en zone rurale, à Kirchhorst en Basse-Saxe, dans la région de Hanovre, berceau de sa famille paternelle. Puis quelques voyages en pays méditerranéens et, enfin, les séjours parisiens sous l’uniforme de l’armée d’occupation.


ej-ernstjunger.jpgL’abandon des positions tranchées des années 1918-1933 provient certes de l’âge : Ernst Jünger a 50 ans quand le III° Reich s’effondre dans l’horreur. Il vient aussi du choc terrible que fut la mort au combat de son fils Ernstl dans les carrières de marbre de Carrare en Italie. Au moment d’écrire La Paix, Ernst Jünger, amer comme la plupart de ses compatriotes au moment de la défaite, constate : « Après une défaite pareille, on ne se relève pas comme on a pu se relever après Iéna ou Sedan. Une défaite de cette ampleur signifie un tournant dans la vie de tout peuple qui la subit ; dans cette phase de transition non seulement d’innombrables êtres humains disparaissent mais aussi et surtout beaucoup de choses qui nous mouvaient au plus profond de nous-mêmes ». Contrairement aux guerres précédentes, la deuxième guerre mondiale a porté la puissance de destruction des belligérants à son paroxysme, à des dimensions qu’Ernst Jünger qualifie de « cosmiques », surtout après l’atomisation des villes japonaises d’Hiroshima et de Nagasaki. Notre auteur prend conscience que cette démesure destructrice n’est plus appréhendable par les catégories politiques usuelles : de ce fait, nous entrons dans l’ère de la posthistoire. La défaite du III° Reich et la victoire des alliés (anglo-saxons et soviétiques) ont rendu impossible la poursuite des trajectoires historiques héritées du passé. Les moyens techniques de donner la mort en masse, de détruire des villes entières en quelques minutes sinon en quelques secondes prouvent que la civilisation moderne, écrit le biographe Schwilk, « tend irrémédiablement à détruire tout ce qui relève de l’autochtonité, des traditions, des faits de vie organiques ». C’est l’âge posthistorique des « polytechniciens de la puissance » qui commencent partout, et surtout dans l’Europe ravagée, à formater le monde selon leurs critères.


Le 22 septembre 1945, rappelle Schwilk, Ernst Jünger écrit dans son journal : « Ils ne connaissent ni les mythes grecs ni l’éthique chrétienne ni les moralistes français ni la métaphysique allemande ni la poésie de tous les poètes du monde. Devant la vraie vie, ils ne sont que des nains. Mais ce sont des Goliaths techniciens –donc des géants dans toute œuvre de destruction, où se dissimule finalement leur mission, qu’ils ignorent en tant que telle. Ils sont d’une clarté et d’une précision inhabituelles dans tout ce qui est mécanique. Ils sont déroutés, rabougris, noyés dans tout ce qui est beauté et amour. Ils sont titans et cyclopes, esprits de l’obscurité, négateurs et ennemis de toutes forces créatrices. Eux qui peuvent réduire à rien des millions d’années (de cristallisation organique, ndt) par quelques maigres efforts, sans laisser aucune œuvre derrière eux qui puisse égaler le moindre brin d’herbe, le moindre grain de blé, la plus modeste aile de moustique. Ils sont loin des poèmes, du vin, du rêve, des jeux, empêtrés sans espoir dans des doctrines fallacieuses, énoncées à la façon des instituteurs prétentieux. Néanmoins, ils ont leur mission à accomplir ».


Ce sont ces sentiments-là qu’Ernst Jünger veut communiquer à ses lecteurs immédiatement après 1945. Schwilk, de loin, à mes yeux, le meilleur biographe d’Ernst Jünger, explique le sens du glissement qui s’opère dans l’esprit de notre auteur : tous sont coupables dans cette deuxième guerre mondiale qui fut « la première œuvre collective de l’humanité » (et une œuvre de destruction !). Les projets politiques ne pourront plus être « nationaux », réduits aux seules nations de petites ou moyennes dimensions. Il faut, pense Jünger tout de suite après la guerre, faire une Europe, où tous les peuples prennent conscience que la guerre a été simultanément gagnée et perdue par tous. Cette Europe doit renouer avec les principes de quiétude du moyen âge ou de l’ancien régime : il renonce clairement là aux concepts qu’il avait forgés dans les années 1920-1930, ceux de « mobilisation totale » et de « Travailleur » qui avaient formé la quintessence de sa philosophie nationale-révolutionnaire juste avant l’accession de Hitler au pouvoir. Ces concepts, constate-t-il en 1946, ne peuvent plus déboucher sur du positif. Ils sont appelés à faire basculer l’humanité dans l’horreur.


C’est ainsi que Jünger devient prophète de la « décélération » (die Entschleunigung), après avoir été dans les années 20, un prophète de l’accélération paroxystique (die Beschleunigung), comme le furent aussi les futuristes italiens, regroupés autour de Marinetti. Jan Robert Weber a sorti en 2011 une biographie d’Ernst Jünger centrée sur la notion de « décélération » : il y explique que la démarche spirituelle et « individualiste » (je dirais la démarche de l’anarque) se déploie en deux phases principales : le recours à l’écriture, hautement revendiquée comme refuge pour échapper au travail des titans et des cyclopes ou aux affres déliquescentes de la posthistoire, puis les voyages dans les refuges méditerranéens qui, très bientôt, seront, eux aussi, victimes de la modernité dévorante et de ses stratégies d’accélération. Jan Robert Weber : « C’est le moi apaisé d’un homme qui voyage à travers le monde dans la posthistoire ».

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III.
Armin Mohler a été le secrétaire d’Ernst Jünger et a oeuvré à faire connaître la Révolution conservatrice allemande. Pouvez-vous nous en dire plus sur son rôle, notamment auprès des courants assimilés à la “Nouvelle Droite” ?


ej_a1tr5dy_Dacs.jpgC’est évidemment une rupture non pas tant avec la RC (qui connait trop de facettes pour pouvoir être rejetée entièrement) mais avec ses propres postures nationales-révolutionnaires. Armin Mohler avait écrit le premier article louangeur sur Ernst Jünger dans Weltwoche en 1946. En septembre 1949, il devient le secrétaire d’Ernst Jünger avec pour première tâche de publier en Suisse une partie des journaux de guerre. Armin Mohler avait déjà achevé sa fameuse thèse sur la Révolution conservatrice, sous la supervision du philosophe existentialiste (modéré) et protestant Karl Jaspers, dont il avait retenu une idée cardinale : celle de « période axiale » de l’histoire. Une période axiale fonde les valeurs pérennes d’une civilisation ou d’un grand espace géoreligieux. Pour Armin Mohler, très idéaliste, la RC, en rejetant les idées de 1789, du manchestérisme anglais et de toutes les autres idées libérales, posait les bases, à la suite de l’idée d’amor fati formulée par Nietzsche, d’une nouvelle batterie de valeurs appelées, moyennant les efforts d’élites audacieuses, à régénérer le monde, à lui donner de nouvelles assises solides. Les idées exprimées par Ernst Jünger dans les revues nationales-révolutionnaires des années 20 et dans le Travailleur de 1932 étant les plus « pures », les plus épurées de tout ballast passéiste et de toutes compromissions avec l’un ou l’autre aspect du panlibéralisme du « stupide XIX° siècle » (Daudet !), il fallait qu’elles triomphent dans la posthistoire et qu’elles ramènent les peuples européens dans les dynamismes ressuscités de leur histoire. La pérennité de ces idées fondatrices de nouvelles tables de valeurs balaierait les idées boiteuses des vainqueurs soviétiques et anglo-saxons et dépasserait les idées trop caricaturales des nationaux-socialistes.

ej-mt-5x320.jpgArmin Mohler veut convaincre le maître de reprendre la lutte. Mais Jünger vient de publier Le Mur du Temps, dont la thèse centrale est que l’ère de l’humanité historique, plongée dans l’histoire et agissant en son sein, est définitivement révolue. Dans La Paix, Ernst Jünger évoquait encore une Europe réunifiée dans la douleur et la réconciliation. Au seuil d’une nouvelle décennie, en 1960, les « empires nationaux » et l’idée d’une Europe unie ne l’enthousiasment plus. Il n’y a plus d’autres perspectives que celle d’un « Etat universel », titre d’un nouvel ouvrage. L’humanité moderne est livrée aux forces matérielles, à l’accélération sans frein de processus qui visent à se saisir de la Terre entière. Cette fluidité planétaire, critiquée aussi par Carl Schmitt, dissout toutes les catégories historiques, toutes les stabilités apaisantes. Les réactiver n’a donc aucune chance d’aboutir à un résultat quelconque. Pour parfaire un programme national-révolutionnaire, comme les frères Jünger en avaient imaginé, il faut que les volontés citoyennes et soldatiques soient libres. Or cette liberté s’est évanouie dans tous les régimes du globe. Elle est remplacée par des instincts obtus, lourds, pareils à ceux qui animent les colonies d’insectes.


Devant l’ampleur de cette catastrophe anthropologique, l’anarque doit tenter d’échapper au Léviathan. Sa volonté d’indépendance, calme et non plus tapageuse, doit épouser la « volonté de la Terre », que cherchent à étouffer les goliaths et les titans. Pour Armin Mohler, Ernst Jünger renonce aux idéaux héroïques de sa jeunesse. Il ne l’accepte pas. Correspondant de journaux de langue allemande à Paris, il adresse régulièrement des reproches mordants et ironiques à Ernst Jünger. C’est la rupture. Les critiques et les récriminations fusent : Mohler écrit que Jünger s’est aligné sur la « démocratie des occupants ». Pire : il accuse la seconde épouse de Jünger, Liselotte Lohrer, d’être responsable de ce revirement ; elle ferait en sorte que son mari « ôte à ses propres disciples les idéaux qui ont forgé leur destin ».


AM_mohler-j-nger-briefe52a2b554d7f4d_720x600[1]_600x600.jpgLa ND française émerge sur la scène politico-culturelle parisienne à la fin des années 60. Ernst Jünger y apparait d’abord sous la forme d’une plaquette du GRECE due à la plume de Marcel Decombis. La RC, plus précisément la thèse de Mohler, est évoquée par Giorgio Locchi dans le n°23 de Nouvelle école. A partir de ces textes éclot une réception diverse et hétéroclite : les textes de guerre pour les amateurs de militaria ; les textes nationaux-révolutionnaires par bribes et morceaux (peu connus et peu traduits !) chez les plus jeunes et les plus nietzschéens ; les journaux chez les anarques silencieux, etc. De Mohler, la ND hérite l’idée d’une alliance planétaire entre l’Europe et les ennemis du duopole de Yalta d’abord, de l’unipolarité américaine ensuite. C’est là un héritage direct des politiques et alliances alternatives suggérées sous la République de Weimar, notamment avec le monde arabo-musulman, la Chine et l’Inde. Par ailleurs, Armin Mohler réhabilite Georges Sorel de manière beaucoup plus explicite et profonde que la ND française. En Allemagne, Mohler reçoit un tiers de la surface de la revue Criticon, dirigée à Munich par le très sage et très regretté Baron Caspar von Schrenck-Notzing. Aujourd’hui, cet héritage mohlerien est assumé par la maison d’édition Antaios et la revue Sezession, dirigées par Götz Kubitschek et son épouse Ellen Kositza.

IV.
Armin Mohler a travaillé en France, et s’est montré relativement francophile. Pourtant sa position a tranché avec celle des tenants de la “Nouvelle Droite” sur la question de l’Algérie française. Quel enseignement tirer de cette controverse sur le rapport de la pensée révolutionnaire conservatrice au monde ?


Armin Mohler a effectivement été le correspondant de divers journaux allemands et suisses à Paris dès le milieu des années 50. Il apprend à connaître les ressorts de la politique française : un texte magistral atteste de cette réception enthousiaste (qui renoue un peu avec le culte jüngerien de Barrès…). Ce texte s’intitule Der französische Nationaljakobinismus et n’a jamais été traduit ! Mohler est fasciné par la figure de Charles de Gaulle, qu’il qualifie d’« animal politique ». De Gaulle est pour Armin Mohler un disciple de Péguy, Barrès et Bergson, trois auteurs que l’on pourrait interpréter puis mobiliser pour re-propulser les valeurs de la RC. Pour ce qui concerne l’affaire algérienne, méconnue et totalement oubliée en dehors de l’Hexagone, Armin Mohler raisonne dans son texte sur les gaullismes (au pluriel !), Charles de Gaulle und die Gaullismen, en termes tirés de l’œuvre de Carl Schmitt (qui, à l’époque, critiquait le « vedettariat » de Jünger, son art de se faire de la publicité comme une « diva » ; les critiques de Mohler peuvent être comparées à celles formulées par Schmitt…). Pour le juriste, théoricien des « grands espaces », et pour Mohler, Jünger avait commis le péché de « se dépolitiser ».


Face au phénomène « de Gaulle », Mohler ne tarit pas d’éloges : le général a réussi à décoloniser sans provoquer une grande explosion politique, une guerre civile généralisée. Il félicite aussi le fondateur de la Ve République d’avoir amorcé un grand chambardement institutionnel après les soubresauts provoqués par l’indépendance algérienne. Là encore, c’est davantage le lecteur de Schmitt plutôt que de Jünger qui parle : la Constitution de 1958 est finalement l’œuvre d’un schmittien, René Capitan ; elle revalorise le politique bien davantage que les autres constitutions en vigueur en Occident. A cela s’ajoute que Mohler approuve l’introduction de l’élection directe du Président, suite au plébiscite du 28 octobre 1962. Enfin, Schmitt, disciple de Charles Maurras, Maurice Hauriou et Charles Benoist, a horreur des « intermédiaires » entre le monarque (ou le président) et le peuple. Mohler, inspiré par Schmitt, se félicite de la mise au pas présidentialiste des « intermédiaires », conséquence logique des nouveaux principes constitutionnels de 1958 et du pouvoir accru de la personne du Président, à partir de 1962. Le « quatrième gaullisme », selon Mohler, est celui de la « Grande Politique », d’une géopolitique mondiale alternative, où la France tente de se dégager de l’étau américain, en n’hésitant pas à pactiser avec des Etats jugés « voyous » (la Chine, par exemple) et d’assumer une politique indépendante dans le monde entier. Cette « Grande Politique » se brise en mai 68, quand la « chienlit » se manifeste et entame sa « longue marche à travers les institutions », qui a mené la France tout droit à la grosse farce festiviste d’aujourd’hui.

Mohler, non pas en tant que lecteur de Jünger mais en tant que lecteur de Schmitt, est gaulliste, au nom même des principes de sa RC. Il ne comprend pas comment on peut ne pas juger de Gaulle seulement sur des critères schmittiens. Il commente l’aventure des ultras de l’OAS en deux lignes. Mohler appartenait donc à un autre vivier politique que les futurs animateurs de la ND. Les nouvelles droites allemandes possèdent d’autres idiosyncrasies : la convergence entre Mohler et la ND française (avec le jüngerien Venner) viendra ultérieurement quand les clivages de la guerre d’Algérie n’auront plus de pertinence politique directe.


Mohler voulait transposer l’indépendantisme gaullien en Allemagne. En février 1968, il va défendre à Chicago le point de vue de la « Grande Politique » gaullienne à la tribune d’un « Colloque euro-américain ». Ce texte, rédigé en anglais et non traduit en français ( !) a le mérite d’une clarté programmatique : il veut, sous les couleurs d’un nouveau gaullisme européen, dégager l’Europe du carcan de Yalta.


S’il y a un enseignement à tirer, non pas de cette controverse mais de cette posture euro-gaullienne intransigeante, c’est qu’effectivement une lecture schmittienne des déchéances politiques européennes (à l’ère d’une posthistoire décadente) s’avère bien nécessaire. Et qu’un programme de sortie hors de toutes les tutelles incapacitantes est impératif, faute de quoi nous sombrerons dans un déclin définitif. Tous les ingrédients de notre disparition proche sont là.

V.
L’ influence que Jünger a exercé sur Mohler se ressent-elle dans la réception de la Révolution conservatrice allemande par nos contemporains ?


Pour une bonne part, oui. Malgré la grande diversité des aspects et perspectives que prend et adopte la RC, le Jünger national-révolutionnaire, le nationaliste soldatique, fascine sans doute davantage que l’anarque ou le voyageur qui observe des mondes sauvages encore plus ou moins intacts ou l’entomologiste qui se livre à ses « chasses subtiles ». Cependant, il est exact aussi que l’idée centrale du « Mur du Temps » n’est pas dépourvue de pertinence. Nous marinons bel et bien dans la posthistoire ; quant au gaullisme ou à un européisme similaire, on n’en voit plus vraiment la trace : Sarkozy et Hollande ont liquidé les derniers vestiges de l’indépendantisme gaullien. La posture antiaméricaine de Chirac en 2003, au moment de la seconde guerre du Golfe contre Saddam Hussein, est un souvenir déjà lointain : rare sont ceux qui évoquent encore l’Axe Paris-Berlin-Moscou, défini par Henri de Grossouvre. Par ailleurs, la longue liste d’auteurs suggérée par Mohler dans sa thèse de doctorat patronnée par Jaspers, suscite des vocations intellectuelles innombrables. On ne compte plus les thèses sur ces auteurs, même s’ils ont longtemps été ostracisés, au nom d’une « rectitude politique » avant la lettre. Toutes ces études ne participent pas de la même approche. Mais hors l’histoire, dans les tumultes désordonnés de la posthistoire chaotique, ce monde longtemps enfoui dans des souvenirs de plus en plus estompés, se reconstruira. Pour constituer un musée ? Ou pour constituer les prémisses d’un « grand retour » ?

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VI.
Les figures du Rebelle et de l’Anarque sont marquées par une vive aspiration à la liberté, qui n’est pas sans lien avec une notion de l’aventure qui fonde la dignité de la condition humaine chez Mohler. L’individu, libre et aventurier, est-il l’archétype de l’homme qu’idéalise la Révolution conservatrice ?


Oui, la liberté de l’écrivain, de l’homme authentique, l’autonomie de la personne, sont des qualités incontournables du rebelle et de l’anarque. Mieux : ils sont là, seuls, pour les incarner. Mohler, dans une querelle philosophique et théologique avec Thomas Molnar dans la revue Criticon, avait baptisé ce « réalisme héroïque » (appellation pertinente !) du nom de « nominalisme ». La ND, en traduisant uniquement sa contribution au débat avec Molnar, a, un moment, repris à son compte le terme de « nominalisme » pour exprimer son existentialisme héroïque, pour affirmer en quelque sorte un primat de l’existence sur les essences, mais en maniant des récits et des dispositifs différents de ceux de Sartre. Le « nominalisme », ainsi défini par Mohler, n’avait finalement que bien peu de choses à voir avec le nominalisme du moyen-âge. Non seulement le héros aventurier, le nietzschéen absolu, incarne l’aventure, mais aussi l’anarque quiet, le voyageur qui se transpose dans des mondes encore intacts, l’explorateur qui défie les pièges de la nature vierge, le vulcanologue comme Haroun Tazieff, le Commandant Cousteau ou l’observateur des grands mammifères terrestres ou marins ou encore l’entomologiste, sont également des figures qui refusent les conformismes des millions de consommateurs, troupeau bêlant des agglomérations posthistoriques.

Dans les rangs de la ND, nul mieux que Jean Mabire n’a défini l’aventurier dans un entretien qu’il a accordé à Laurent Schang, aujourd’hui collaborateur d’Eléments. Cet entretien était paru dans Nouvelles de Synergies Européennes, n°41/1999 et peut encore se lire ici : http://euro-synergies.hautetfort.com/archive/2007/10/21/j-mabire-entretien-sur-la-figure-de-l-aventurier.html . Mabire exprimait là, tout comme dans ses chroniques littéraires rassemblées dans la collection « Que lire ? », un existentialisme authentique : celui qui veut des hommes enracinés (dans leur patrie charnelle) mais désinstallés et qui fustige les hommes déracinés et installés. Dans cette formule claire, dans cette distinction qui a le mérite de la limpidité (merci à l’ami Bernard Garcet !), nous avons résumé le programme vital qu’il nous faudra nous appliquer à nous-mêmes pour devenir et rester de véritables rebelles et anarques.

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jeudi, 03 mars 2016

Presseschau - März 2016

dimanche, 28 février 2016

Orages d'acier d'Ernst Jünger

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Orages d'acier d'Ernst Jünger

Ex: http://www.juanasensio.com

In-Stahlgewittern-by-Ernst-Junger.jpgLe lecteur qui, comme moi, viendrait à peine d'achever la lecture de Tuer de Richard Millet pour lire ou relire les Orages d'acier (1) d'Ernst Jünger, un récit remarquable qu'André Gide tenait pour le plus beau des livres de guerre, serait presque immédiatement saisi par la différence de nature entre ces textes qui évoquent pourtant, tous deux, une expérience commune, la guerre, la mort vue, contemplée, donnée, évitée, méditée. D'un côté, un lyrisme lacrymalo-martial débité à l'hectolitre chez l'éditeur Pierre-Guillaume de Roux, peut-être désireux d'en remplir sa baignoire et de s'y prélasser, l'érotisme propre à quelque vieil eunuque fatigué dont les chromos criards n'émoustilleraient même pas les reins d'une première communiante, l'esthétisation en toc de celui qui se rêve si volontiers guerrier et n'est même pas capable de mettre sa plume au garde-à-vous. De l'autre, la sécheresse et même la froideur parfois inhumaine de celui dont le corps compte pas moins de vingt cicatrices et qui reçoit, tout jeune officier de pas même 24 ans, la Croix Pour le Mérite, le feld-maréchal Hindenburg estimant qu'il était imprudent qu'un homme si jeune fût décoré d'une pareille distinction, donnée, outre à Jünger, à 13 autres lieutenants dans toute l'armée allemande.
 
Je m'empresse de nuancer mon affirmation, non pas sur le pauvre Richard Millet, ostracisé d'opérette et guerrier de papier, mais sur la froideur d'Ernst Jünger. Elle n'est en effet qu'apparente, car nous constatons assez vite que c'est bel et bien l'homme qui est l'objet de toutes les attentions de l'écrivain, qui ne cesse d'ailleurs d'opposer celui-ci à la Machine qui, durant cette Première Guerre mondiale, commence à étendre sa puissance illimitée, dont ce même homme dont il s'agit de consigner la résistance et peut-être la fin programmée, n'est finalement qu'une des victimes collatérales, car, dans «cette guerre [...] le feu s'en prenait déjà plutôt aux espaces qu'aux hommes» (p. 379), écrira ainsi l'auteur, ajoutant, non sans humour, qu'il n'était donc pas peu fier d'avoir attiré l'attention du démiurge de fer, vu le nombre de ses blessures.

De la même façon, Ernst Jünger place l'homme, ses propres compagnons, au centre de son attention, et cela afin de montrer que, toujours selon lui, c'est l'humain qui peut, par son courage et en tentant le coup de force (2), venir à bout de la Machine : «Pour le choc proprement dit, on ne pouvait plus compter que sur un petit nombre d'hommes, en qui s'était formé un type de guerrier d'une trempe particulièrement dure», alors même, poursuit-il, que «la masse des suiveurs» ne peut entrer tout au plus «en ligne de compte que pour son potentiel de feu» (p. 362) et, nous le supposons, pour sa capacité à se sacrifier en grand nombre, et ainsi faire, tenter de faire contrepoids à la Machine inébranlable faisant gronder les fameux «orages d'acier» (p. 360), souvenir d'un vieux poème scaldique appartenant à la Saga d'Egill, fils de Grimr le Chauve écrite au XIIIe par Snorri Sturluson.

In-Stahlgewittern-2.jpgLa guerre est étrange, du moins certaines de ses phases. Nous pourrions dire d'elle qu'elle est l'étrangeté même, le tout autre, le plus souvent démoniaque, parfois la déhiscence d'un mystérieux au-delà du bien et du mal et pourtant, l'homme, toujours l'homme réduit à de la chair à canon, des cadavres horriblement torturés ou bien des guerriers impavides et courageux, est au centre du théâtre des opérations, au sens métaphysique et même religieux que nous pourrions donner à cette expression, comme si l'expérience de la Grande Guerre était comparable à la scène des vieux mystères du Moyen Âge : le boqueteau 125, bien connu des lecteurs de Jünger, «n'était jamais tenu que par quelques hommes, mais il prolongeait sa résistance, et c'est ainsi qu'il devenait, visible au loin dans ce paysage de mort, un exemple de ce que même le plus colossal affrontement n'est jamais que la balance où l'on pèse, aujourd'hui comme toujours, le poids de l'homme» (p. 349).

La Machine, un mot auquel Jünger ne confère aucune majuscule mais qu'il évoque pourtant dans sa diabolique prééminence, se montre, «de plus en plus puissante, sur le champ de bataille» (p. 345), ne serait-ce que par l'apparition des tanks, ces «éléphants de la bataille technique, dont les apparitions se faisaient toujours plus fréquentes» (p. 344), alors même que d'étranges scènes de fraternisation avec l'ennemi (cf. p. 278) deviennent de plus en plus improbables au fur et à mesure que nous nous enfonçons dans l'épaisseur des orages d'acier et que, par exemple, tel avion (en l'occurrence, allemand) arrose de balles traçantes les observateurs en parachute venant de s'échapper d'un engin abattu, signe selon Jünger que s'aggrave «la violence impitoyable de la guerre» (p. 271). En tout cas, contrairement aux dires de l'auteur, la Machine entend bien peser le poids de l'homme. Peut-être a-t-elle même procédé à cette mesure et a-t-elle estimé que le poids indiqué par sa balance était tout compte fait ridicule.

L'homme, broyé dans ce que Jünger appellera plus d'une fois la «bataille de matériel» (p. 230) ou bien les «batailles de matériel» (p. 255), se trouvant encore, mais pour combien de temps ?, au beau milieu de «cette guerre des armes à longue portée» (p. 196), ne s'en dresse pas moins dans l'horreur massifiée car, si «colossales que fussent les masses d'hommes et de matériel, le travail, aux points décisifs, n'était jamais accompli que par quelques poignées de combattants» (p. 229). Ce n'est sans doute pas un hasard sir les Orages d'acier deviendront le bréviaire de tant de combattants allemands, nationalistes ou pas d'ailleurs, après sa publication par Ernst Jünger à compte d'auteur, telle mâle lecture pouvant vous donner, au feu, l'ardeur et le courage nécessaires que de vagues discours de gradés seront bien incapables de ne serait-ce qu'évoquer.

Ernst Jünger se fait l'observateur attentif de la massification et, partant, de la déshumanisation progressive du grand conflit, comme lorsqu'il note, sur la ligne Siegfried où il se trouve au début de l'année 1917, qu'il observe pour «la première fois [...] à l’œuvre la destruction préméditée, systématique» qu'il ne cessera plus par la suite de «rencontrer jusqu'à l’écœurement dans les années suivantes» (p. 169). C'est le courage de certains combattants qui donne en tout cas à l'auteur «une image aussi noble que secrète de la confiance qu'on peut mettre en l'homme» (p. 113), et pas seulement lorsqu'il s'agit de ses propres hommes, puisque plusieurs épisodes de fraternisation avec l'ennemi sont évoqués (cf. p. 111), Ernst Jünger dédiant son livre «aux combattants français» (p. 6) de la Première Guerre mondiale.

Cette guerre qui ensanglante le Nord de la France, notamment les paysages de l'Artois bien connus d'un autre soldat de la Première Guerre mondiale, Georges Bernanos, tue ou détruit à petit feu les hommes, «bataille de matériel» nous l'avons dit qui consacre le «déploiement de moyens titanesques» (p. 92), est aussi l'occasion d'une expérience troublante, non seulement esthétique («Je vis là pour la première fois un tir qui pût se comparer aux spectacles naturels», p. 104), mais véritablement mystique, bien qu'il nous faille postuler une expérience mystique qui ne découvrirait point tant Dieu que la surrection de forces élémentaires, en partie seulement démoniaques, puisqu'elles semblent plutôt se situer par-delà le bien et le mal. Certes, l'esthétisation de certaines scènes macabres ou véritablement d'épouvante pourrait être reprochée à l'auteur, qui décrit froidement, cette froideur n'étant pas du reste incompatible avec l'esthétisation, des paysages désolés envahis par la mort : «Les alentours étaient parsemés d'autres cadavres par douzaines, pourris, calcinés, momifiés, figés dans une inquiétante danse macabre. Les Français avaient dû tenir des mois auprès de leurs camarades abattus, sans pouvoir les ensevelir» (p. 35). Le combattant, aux prises avec l'horreur, devient un monde pour lui-même, «tout imprégné de cet état d'âme sombre et épouvantable qui pèse sur le terrain désert» (p. 95), et nous verrons que cet état de conscience est celui qui permet, non seulement de pénétrer dans la «zone élémentaire» (p. 44) des combats, voire la Zone où, comme en Enfer selon Dante, il faut abandonner toute espérance (cf. p. 123), mais encore d'accéder à un état second, les puissances de la mort à l’œuvre permettant de déchirer le voile de la réalité qui nous masque l'existence de cette zone élémentaire, où se déchaîne le mal. Cette région, la guerre, tout autant que ses redoutables projectiles, semble y lancer plusieurs sondes qui s'enfoncent très profondément : «Les dangers vécus avaient bouleversé cette région obscure, située plus loin que la conscience, et si profondément que chaque accroc dans l'ordre habituel faisait jaillir la mort à son guichet» (p. 13).

En tout cas, c'est lorsqu'il est confronté à un danger imminent, à la mort d'un de ses hommes dont il assure le commandement ou bien lorsqu'il constate l'incroyable chance (3) qui lui a fait surmonter tel ou tel péril, qu'Ernst Jünger est à même de constater «l'existence d'une sorte d'horreur, étrangère comme une contrée vierge», ces moments lui procurant une espèce de sensation d'appartenir, pour le coup, à quelque no man's land suspensif et comme protégé par les portes de la perception, où il ne ressent pas de crainte, «mais une aisance supérieure et presque démoniaque» (p. 124), comme s'il possédait alors un véritable «don de voyance» (p. 283).

Oragesdacier01.jpgL'expérience du combat, surtout lorsqu'elle a lieu dans un théâtre des opérations où se déchaîne la Machine, surtout lorsque approche une «bataille telle que le monde n'en avait encore jamais vue (p. 121, j'ajoute le e manquant dans le texte), est la certitude de pénétrer dans un monde qui n'est pas celui, qui ne peut être celui de notre expérience quotidienne. Plus d'une fois, Ernst Jünger affirme ainsi qu'il a pu estimer se trouver dans une terre maudite (cf. p. 273) peuplée de démons, où il «errait comme sur un immense tas de décombres au-delà des bords du monde connu» (p. 151), terre maudite dont il remarque «la méchanceté spectrale» (p. 161) ou bien comparable à quelque contrée «des premiers âges» (p. 155), en bref, cette zone élémentaire dont j'ai parlé plus haut.

Certains spectacles atroces émeuvent plus que d'autres l'auteur, qui décrit sans trop d'émotion la vision d'un mort étalé, «l'uniforme en lambeaux», la tête arrachée et dont le sang coule dans une flaque d'eau : lorsqu'un brancardier le retourne «pour prendre ses effets personnels», Jünger affirme qu'il vit «comme dans un cauchemar que le pouce restait seul, dressé en l'air, au bout du bras mutilé» (p. 178). Ailleurs, il évoque les «restes informes» de son «meilleur chef de section» : «Il avait pris en plein dans les reins le coup d'un de nos propres obus. Des haillons d'uniforme et de linge, que le souffle de l'explosion lui avait arrachés du corps, pendaient au-dessus de lui aux branches déchiquetées de la haie d'aubépines à laquelle cette tranchée devait son nom» (p. 354). Pourtant, une image plus qu'une autre a frappé l'auteur : à ce moment écrit Jünger, «voici qu'un nouveau sifflement retentit haut en l'air : chacun sentit, la gorge serrée : celui-là, c'est pour nous. Puis un fracas énorme, assourdissant» indique que «l'obus s'était abattu juste au milieu de nous». Presque assommé, Jünger se relève, et voit l'horreur : «Dans le grand entonnoir, des bandes de cartouches de mitrailleuses, allumées par l'explosion, lançaient une lumière d'un rose cru. Elle éclairait la fumée pesante où se tordait une masse de corps noircis, et les ombres des survivants qui s'enfuyaient dans toutes les directions. En même temps, de nombreux et atroces cris de souffrance et des appels à l'aide s'élevèrent» (p. 295).

Sur le front, la guerre est une «réalité intensément vécue» (p. 250) par le combattant et non pas un plan sur lequel tel gradé décidera de mouvements, et plus d'une fois Ernst Jünger concèdera avoir été «comme fasciné» (p. 200) par les spectacles comme venus du «fond des âges» (p. 198) qui s'offraient à son regard. La guerre et la destruction donnent l'horreur absolue à contempler, quelque vision de l'Enfer sur terre et peut-être même de celui-ci dans son essence totalement négative, mais aussi, ce point ne doit pas être négligé, une connaissance surhumaine dans ce sens où elle semble s'affranchir des contraintes auxquelles les morts sont soumis dans leur vie quotidienne. Ainsi, plus d'une fois, Jünger évoquera tel moment où «même une âme simple entrevoit que sa vie est enfouie dans une sécurité profonde, et que sa mort n'est pas une fin» (p. 189). Il ne s'agit pas seulement d'esthétisation outrancière qui fascinent l’œil et l'oreille confrontés à une «destruction tourbillonnante» (p. 183) ou bien au spectacle interdit habituellement de «quelque rite secret» (p. 180) ou de «cérémonial terrible et silencieux» (p. 351), mais de la découverte d'une Zone, curieusement appelée «Chambre rouge» (p. 360) (4) par l'auteur, où la «guerre propose les plus profondes énigmes» (p. 343) qu'il n'est jamais permis à l'auteur de complètement comprendre, ni même voir.
Si la guerre est l'expérience de l'imminence d'une révélation, ajoutons immédiatement qu'il ne s'agit que d'une révélation sans cesse ajournée, procrastinée, sauf lorsque Jünger est blessé au point qu'il pense devoir mourir dans un paysage possédant à ses yeux «une transparence de verre» (p. 370) : «Je compris dans cette seconde, comme à la lueur d'un éclair, ma vie, dans sa structure la plus secrète. Je ressentais une surprise incrédule de ce qu'elle dût se terminer en ce lieu précis, mais cette surprise était empreinte d'une grande gaieté. Puis j'entendis le tir s'affaiblir peu à peu, comme si je coulais à pic sous la surface d'une eau grondante. Là où j'étais maintenant, il n'y avait plus ni guerre, ni ennemi» (p. 371).

C'est à la toute dernière page du chapitre intitulé La grande bataille, qu'Ernst Jünger évoque le plus longuement les problématiques, les imbriquant étroitement dans ce que nous pourrions appeler le nœud ou le cratère des Orages d'acier : «La formidable concentration des forces, à l'heure du destin où s'engageait la lutte pour un lointain avenir, et le déchaînement qui la suivait de façon si surprenante, si écrasante, m'avaient conduit pour la première fois jusqu'aux abîmes de forces étrangères, supérieures à l'individu. C'était autre chose que mes expériences précédentes, c'était une initiation, qui n'ouvrait pas seulement les repaires brûlants de l'épouvante. Là, comme du hait d'un char qui laboure le sol de ses roues, on voyait aussi monter de la terre des énergies spirituelles. J'y vis longtemps une manifestation secondaire de la volonté de puissance, à une heure décisive pour l'histoire du monde. Pourtant, le bénéfice m'en resta, même après que j'y eus discerné plus encore» et, conclut l'auteur : «Il semblait qu'on se frayât ici un passage en faisant fondre une paroi de verre», passage qui «menait le long de terribles gardiens» (p. 337), «le long de», notons cette expression, et non pas face ou, position inimaginable, derrière eux.

Une fois encore, si le royaume étranger que l'expérience de la guerre suggère à Ernst Jünger est vu de loin, lors de ces moments de prodigieuse exaltation qui coïncident avec les plus grands dangers (cf. p. 132), son accès proprement dit est barré, et la révélation finale, éblouissante, interdite, sauf à confondre cette dernière avec l'ultime remémoration, nous l'avons vu, d'une vie détruite, sauf à pénétrer, durant de longues années, «dans les profondeurs de nos rêves» (p. 318), l'immense «volonté de destruction» pesant sur le «champ de mort» se concentrant «dans les cerveaux, les plongeant dans une brume rouge» (p. 306), comme s'il était impossible d'oublier l'horreur une fois contemplée, comme si la Machine triomphait finalement, une fois de plus, de l'homme sans même avoir besoin de détruire sa chair.

Notes

(1) Ernst Jünger, Orages d'acier. Journal de guerre (In Stahlgewittern, 1920, traduit de l'allemand par Henri Plard, Christian Bourgois, 1970, puis Le Livre de poche, 2014, notre édition). Rappelons que ce sont seize petits carnets sur lesquels Jünger tenait son journal qui ont constitué le matériau de base de ce livre, dont il n'existe pas d'édition critique en langue allemande, tant il a été réécrit par son auteur, qui le publia d'abord à compte d'auteur, puis chez un éditeur spécialisé dans la littérature militaire.

(2) Ainsi, la double bataille de Cambrai «entrera dans l'histoire», selon l'auteur, «comme la première tentative de rompre par de nouvelles méthodes l'encerclement mortel de la guerre de positions» (p. 287).

(3) Les passages sont nombreux où une chance véritablement extraordinaire permet à Ernst Jünger d'éviter les pires dangers (cf. pp. 134, 135, 139-40, 153, 158, 215, 221, 238). Du reste, certaines scènes sont étonnantes, où l'auteur témoigne, dirions-nous, d'une extraordinaire insouciance, comme durant ces moments de repos où il lit Tristam Shandy (cf. p. 366) ou bien lorsqu'il anticipe telle scène inoubliable d'Apocalypse Now de Francis Ford Coppola (cf. p. 342).

(4) Cette «Chambre rouge» est totalement absente dans la traduction du texte (celle aussi d'Henri Plard révisée par Julien Hervier) pour la la collection, chez Gallimard, de la Pléiade, dans le premier volume intitulé Journaux de guerre. 1914-1918 (2008), p. 248, dont le texte donne simplement : «Nous avions contemplé une image dans un miroir».

samedi, 27 février 2016

Wo bleibt Prinz Eugen? Der Multikultiwahnsinn und das Ende Europas

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Tomislav Sunic:

Wo bleibt Prinz Eugen?

Der Multikultiwahnsinn und das Ende Europas

Alles dreht sich um die richtige oder falsche Kennzeichnung politischer Begriffe. Wir alle hier nennen uns freiheitsliebende Menschen, die heute sehr besorgt sind über die Zukunft der europäischen Identität. Unsere selbsternannten „antifaschistischen“ Gegner hingegen nennen uns Fremdenfeinde, Rassisten oder Nazis. Unserer eigenen Erfahrung nach – und meiner Erfahrung nach, die ich im ehemaligen Multkulti-Jugoslawien und in Multkulti-Amerika gesammelt habe, sowie aufgrund der Forschung vieler Soziologen, haben Multikulti-Staaten keine lange Lebensdauer. Früher oder später zerfallen sie alle in einem Bürgerkrieg. Ich kann hier wieder auf den ehemaligen zusammengeschusterten jugoslawischen Staat verweisen, der trotz aller akademischer Schönrederei unter der Vielfalt der Interessen seiner verschiedenen Völker zusammenbrechen musste.

Das heutige Migrationschaos trägt einen verlogenen Namen, nämlich „Flüchtlingskrise“. Von den tausenden und abertausenden Migranten, die nach Österreich hineinströmen, sind die meisten keine Flüchtlinge. Sie sind „Flüchtlinge“, nur insofern als sie von den Etablierten in den österreichische Medien schon im voraus als „Flüchtlinge“ bezeichnet wurden. Merkwürdigerweise stellen alle diese Migranten ihren Asylantrag nicht in der Türkei oder einem anderen Staat entlang der Balkanroute. Sie wollen alle unbedingt in die BRD. Sie bilden sich ein, Österreich, Deutschland und Schweden seien Schlaraffenländer, wo man gut leben und sich eine schöne Frau aussuchen kann. Aber – nein! Diese Migranten sind gar nicht schuld an ihren falschen Vorstellungen; es sind unsere Politiker mit ihren falschen Versprechungen, die wiederum bei den Einwanderern diese falschen Wunschvorstellungen hervorrufen.

Die Multikultiutopie unserer Politiker trägt einen anderen falschen Namen, nämlich das Unwort „Willkommenskultur“, obwohl der richtige Name auf gut Deutsch „Kultur der Selbstabschaffung“, „Schuldkultur“ oder „Selbsthasskultur“ heißen sollte. Was heute mit dem Wort „Willkommenskultur“ bezeichnet wird, hat gar nichts zu tun mit der althergebrachten europäischen Willkommenskultur. Die heutige Willkommenskultur ist bloß ein liberalistischer Ersatz für das gescheiterte kommunistische Projekt. Was einst die Kommunisten in Osteuropa mit ihrer Gewaltherrschaft nicht erzwingen konnten, will das heutige System mit seiner Ersatzideologie des Multikulturalismus erreichen. Der Kommunismus ging in Osteuropa zugrunde, weil er der Liberalismus seine materialistischen Heilsversprechungen besser umsetzen konnte. Das System glaubt, dass alle europäischen Völker in einem Multikulti-Superstaat von nichteuropäischen Zuwanderern ersetzt werden können und wie Ersatzteile ständig reproduziert werden können.

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Fragen wir unsere Politiker und Befürworter des Multikulturalismus, ob sie in Multikulti-Bezirken wie Wien-Favoriten oder in Neukölln in der BRD leben möchten! Sie werden „Nein!“ sagen. Sie predigen gerne von der Multkulti-Gesellschaft, so lange sie selbst von den Einwanderern fern bleiben und in ihren golden Ghettos in Sicherheit leben. Wenn sich eines Tages die Etablierten und ihre Gutmenschen doch entschuldige ich mich gerne bei Ihnen. Ich habe in den Multkulti-Bezirken in den USA sehr lang lange gelebt und habe dort sehr gut den Wortsinn der Doppelverriegelung an meiner Wohnungstür und Schusswaffen gelernt.

Historisch und philosophisch gesehen ist der heutige Multikulti-Wahn, bzw. die Willkommenskultur in Österreich, Deutschland und der EU, eine Abart der Ideologie der Hypermoral nach Arnold Gehlen. Es kann auch wissenschaftlich bewiesen werden, dass, je mehr die Bevölkerung eines Staates ethnisch und kulturell homogen ist, wie zum Beispiel in Japan, je mehr ein Staat von ethnisch und kulturell verwandten Bürgern bewohnt wird, desto größer ist die Überlebensdauer dieses Staates – und auch die Solidarität. Bei den nichteuropäischen Völkern in Afrika und Asien zum Beispiel ist es nicht vorstellbar, andere Völker massenweise ins eigene Land zu importieren. Nur bei den lebensmüden europäischen Völkern kann man diese selbstmörderischen Willkommenszüge beobachten, nicht jedoch bei den nichteuropäischen reichen Staaten wie Saudi Arabien. Dieser pathologische Hypermoralismus und Altruismus führt Europa letztendlich in den Selbstmord. Wenn ein Volk, wie die Deutschen, lebensmüde geworden ist, bedeutet das nicht das Ende der Politik; es bedeutet nur das Ende des schwachen Volkes.

Warum ist dieser Hyper-Altruismus, bzw. diese Selbstabschaffungs-Willkommenskultur heute besonders in Deutschland und in Österreich derart ausgeprägt und weniger inmitten anderer europäischen Staaten? Der Grund dafür ist nicht schwer zu erraten. Jegliche Kritik am Multikulturalismus kann einem Politiker oder einem Akademiker in Österreich oder BRD das Stigma des „Faschismus“ einbringen. Und das bedeutet quasi den Tod im öffentlichen Leben. Herr Faymann und Frau Merkel, aus Furcht vor der Nazikeule müssen sich jetzt mit dem massenhaften Import von Zuwanderern gegenüber jeglichen Nazivorwürfen versichern. Die Ideologie des Multikulturalismus ist heute eine Art Negativlegitimation ganz Europas geworden insbesondere inmitten der deutschen und österreichischen politischen Klasse. Dementsprechend wird jede Debatte, die sich kritisch mit dem Multikulturalismus befasst, mit dem Schlagwort „Fremdenfeindlichkeit“ etikettiert. Dieses Unwort „Fremdenfeindlichkeit“ dient heute der politischen Klasse in Europa als Alibi zum Fortbestehen ihres immerwährenden politischen Status quo.

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Im Gegensatz dazu werden Multikulti-Kritiker von den Medien zu absoluten Bösewichten und sogar zu Kriminellen erklärt. Damit wollen die Multikulturalisten jede Fehlentwicklung in ihrem eigenen System rechtfertigen und ihr eigenes System als das geringere Übel darstellen. Dessen sind sich auch die Politiker in Österreich und der BRD bewusst und deswegen müssen sie sich in den Augen der Weltöffentlichkeit päpstlicher als der Papst zeigen, bzw. müssen sie die massive Migrantenflut nach Deutschland und Österreich weiterhin befürworten. In diesem Sinne sind sie dazu gezwungen die Einwanderer besser zu behandeln als diese das überhaupt von ihnen erwarten würden. Es ist naiv zu glauben, dass die heutigen Befürworter der Willkommenskultur in Österreich mit Argumenten widerlegt werden können. Das deutsche Wort „Gutmensch“ schildert am besten diese selbstzensierende und hypermoralistische Multikulti-Spezies. Sollte jemand heute in Österreich zufällig wagen, seine wissenschaftlichen Quellen gegen den Multikulti-Mythos zu nennen, gerät er prompt ins Visier der Gesinnungswächter. Die etablierten Parteien und ihre Medien können ihre Macht nur durch die Dämonisierung der Andersdenkenden beibehalten, wie zum Beispiel im ehemaligen kommunistischen Jugoslawien, wo jeder Dissident automatisch als Faschist oder Krimineller etikettiert wurde. Die Politiker in Österreich, aber auch anderswo in Europa, sind in politischen Selbsttäuschungen verstrickt, die sich einerseits mit der Idealisierung der außereuropäischen Leute und anderseits mit der Abwertung der Einheimischen befassen.

Die sogenannte Willkommenskultur ist jedoch langfristig nicht haltbar. Sie führt nicht zum gegenseitigen Völkerverständnis, sondern verursacht bzw. vertieft nur den gegenseitigen Hass zwischen Völkern. Das haben wir unzählige Male in allen Multikulti-Gesellschaften gesehen. Zum Beispiel asiatische Amerikaner in den USA mögen nicht die Afro-Amerikaner und die Afro- Amerikaner sind gar nicht beliebt bei den hispanischen Latinos in Amerika. Die Krawalle zwischen Mitglieder der verschiedenen Völker inmitten heutiger Zuwanderer werden gar nicht in unserer Öffentlichkeit debattiert. Auch wenn die „bösen Deutschen“ und alle „bösen Nazis“ und alle „Faschsiten“ verschwinden würden, wird es keinesfalls den gegenseitigen Hass und Krieg inmitten verschiedener nichteuropäischen Gruppen und Völker verhindern. Rassismus und Fremdfeindlichkeit sind kein Privilegium der Österreicher oder der Deutschen oder anderer europäischen Völker.

Die heutige verlogene Willkommenskultur verlangt von uns deswegen, unseren politischen Feind zu erkennen. Wichtig ist: Nicht die vorderasiatischen oder afrikanischen Einwanderer tragen Schuld an dem Niedergang Europas, sondern die Systempolitiker und ihre kapitalistische „Superklasse“. Um unsere deutsche und unsere österreichische bzw. die gesamte europäische Identität wiederherzustellen, müssen wir zunächst den schrankenlosen globalen Kapitalismus in dieser Form demontieren und andere Werte an die oberste Stelle setzen. Multikulturalismus ist ein Mythos, der an das grenzenlose Wirtschaftswachstum und dementsprechend auf den grenzenlosen Zustrom von Migranten anknüpft. Nichteuropäische Einwanderer wissen derzeit genau, dass sie im selbsthassenden Europa sorglos leben können. Gefühle des Selbsthasses gibt es gar nicht bei den Politikern in ihren Heimatländern. Das Finanzkapital der Oligarchen in Europa, gepaart mit Schuldgefühlen der Europäer auf der einen Seite – und linke Multkulti-Prediger auf der anderen Seite, sorgen für weitere Zuwanderung der Abermillionen von nichteuropäischen Einwanderern. Wenn die Europäer wieder ihre eigene Identität aufbauen wollen, sollten sie zuerst den entfesselten Kapitalismus abschaffen. Die Auslandsimmigration würde dann sofort gestoppt werden. Einwanderer hätten dann keinen Grund mehr, in unseren Ländern zu leben und sich falsche Hoffnungen zu machen.

Wir werden bald sehen, wie sich die Geschichte weiter entwickelt. Im Rückblick stellt sich auch die Frage: Wozu hat Prinz Eugen seine langen Kriege gegen die türkischen Eroberer geführt? Zum Glück bleibt die Geschichte immer offen und es liegt nur an uns unsere Geschichte aufs Neue zu gestalten. Nicht die Jahre, sondern die Tage der Entscheidung liegen vor uns. Wir alle wissen die größte politische Weisheit aller Zeiten nur zu gut: Wer sich zum Schaf macht, den fressen bald die Wölfe. Also meine Damen und Herren, seien wir keine Schafe. Der Kampf geht weiter.

Ich danke für Ihre Aufmerksamkeit.

jeudi, 25 février 2016

L'Allemagne perd-elle la main en Europe?

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L'Allemagne perd-elle la main en Europe?

Ex: http://l-arene-nue.blogspot.com
 
Angela Merkel ne nous avait pas habitués à ça. A "l'incroyable Mme Merkel", on prêtait la capacité d'absorber tous les chocs et de protéger son peuple de leurs répliques, grâce à un « pragmatisme » hors normes, à la mesure de l'excellence supposée du « modèle allemand ». Dans un livre intitulé Angela Merkel et nous etparu en 2013, le journaliste Ralph Bollmann expliquait en ces termes l'imperméabilité de Mutti au phénomène classique de l'usure du pouvoir : « tant que la crise durera, les Allemands plébisciteront Angela Merkel (…) sa côte de popularité est liée au fait qu'elle [les] préserve de l'effort ».
 
Pourtant, la chancelière semble aujourd'hui en difficulté. Un sondage paru en fin de semaine dernière dans l'hebdomadaire Focus indique que près de 40 % des Allemands sont favorables à son départ. C'est beaucoup, même si un tel départ est très improbable à ce stade. Ça tombe en tout cas fort mal alors que des scrutins régionaux s’apprêtent à ponctuer toute l'année 2016, tels ceux de Rhénanie-Palatinat, du Bade-Wurtemberg et de Saxe-Anhalt qui auront lieu dès le 13 mars.
 
Or les enquêtes d'opinion font d'ores et déjà apparaître un fait saillant : le parti de droite radicale Alternative für Deutschland (AfD), un temps affaibli pour cause de règlements de comptes entre représentants de l'aile « libérale » et tenants de l'aile « conservatrice », a à nouveau le vent en poupe. Une enquête d'opinion le donne à 13%. Et la toute dernière sortie de Frauke Petry, sa patronne, semble indiquer que l'aile anti-immigration du parti s'est imposée face à l'aile anti-euro. Elle montre d'ailleurs peu de goût les précautions oratoires. Petry a en effet suggéré, pour lutter contre l'afflux de migrants à la frontière germano-autrichienne, que les policiers allemands pourraient éventuellement.... tirer sur les réfugiés ! En décembre, un autre élu du parti, Björn Höcke, s'était déjà illustré en affirmant que « le comportement reproductif des Africains » était une menace pour l'Allemagne. 
 
Le rebond de l'AfD et l'orientation prise par celui-ci ne sont évidemment pas sans causes. C'est bien la politique migratoire d'Angela Merkel qui les a provoqués, tout comme elle a provoqué la colère de la CSU bavaroise, et une fronde au sein même du parti de la chancelière, la CDU. Cette politique parfaitement erratique a d'abord consisté à annoncer l'accueil sans limite des réfugiés, avant, quinze jours plus tard, d'opérer un virage au frein à main et de rétablir précipitamment le contrôle aux frontières. A l'immense déception, sans doute, de ces commentateurs hexagonaux qui aiment à se prosterner devant la supériorité supposée de l'Allemagne pour mieux déprécier la France. Que d'eau apportée à leur moulin par l'initiale générosité merkelienne, et par les images - certes touchantes - de ces volontaires allemands se portant au devant des réfugiés la bouche pleine de mots de bienvenue ! On semblait découvrir que la précellence germanique, loin d'être limitée aux performances économiques, était également morale. Le pays confirmait son statut « puissance de paix » et se révélait ouvert, bienveillant, assuré, et définitivement à l'aise, désormais, avec son identité.
 
Quelques indices, toutefois, signalaient à qui voulait bien les apercevoir que le tableau était moins rose. Assez rapidement, les structures d'accueil se sont trouvé débordées, par exemple à Munich, une ville ayant connu, à l'automne 2015, des pics d'arrivées à plus de 10 000 personnes par jour. Même s'ils sont imputables à des groupuscules d'hyper-excités, les actes racistes augmentent à vive allure. Selon la BBC, la police fédérale allemande aurait annoncé une multiplication par cinq en un an des attaques contre les foyers de réfugiés. Celles-ci seraient passées de 199 en 2014 à 1005 en 2015. La semaine dernière, un centre d’accueil a même été attaqué... à la grenade
 
Et puis, il y a désormais le souvenir Cologne. De Cologne et des 700 plaintes pour agressions sexuelles déposées depuis cette fameuse nuit de la Saint-Sylvestre, dont on sent bien qu'elle marque un tournant dans le rapport du pays au phénomène migratoire. Comment la société allemande encaissera-t-elle le choc à long terme ? Difficile à prédire. Dans un article paru dans Le Débat et traitant des relations entre la France et l'Allemagne, Luuk van Middelaar souligne la manière très différente, dans chacun des deux pays, d'appréhender chocs exogènes et imprévus. « En France, un événement, même un événement dramatique, reste un signe de vie, de renouvellement, un appel à l'action (…) la presse transforme dûment la chose en un moment collectif, une nouvelle page dans le roman de la nation. (…) En Allemagne, en revanche, un événement sape l'ordre. La classe politique peine à la lire ; une crise y produit un non-sens, de la panique. Cela donne parfois des revirements brusques, mal contrôlés, telle la sortie du nucléaire en 2011 à la suite du tsunami japonais, ou les zigzags entre charité et fermeture face aux vagues migratoires de l'été 2015 », explique le philosophe néerlandais. Dans ces conditions, quel genre de « revirements brusques » et autres « zigzags » l’événement de Cologne nous promet-il ?
 
Le problème, par ailleurs, est qu'il n'arrive pas seul. Sans doute l'assurance allemande, due à la place prépondérante que le pays occupe en Europe, risque-t-elle d'être aussi entamée par la dégradation des relations avec ses voisins de l'Est.
 

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Les pays d'Europe centrale ont toujours été considérés comme appartenant à la sphère d'influence naturelle de l'Allemagne - comme son Hinterland - raison pour laquelle Berlin a beaucoup œuvré en faveur des élargissements de l'Union dans les années 2000. « Pour l'Allemagne, l'élargissement à l'Est est autant un devoir historique et moral qu'une nécessité politique. C'est de Pologne, de Hongrie et de Tchécoslovaquie qu'est partie, à des titres divers, la révolution pacifique qui a ouvert la voie à l'unification allemande. En outre, cet élargissement à l'Est plonge ses racines dans la célèbre Ostpolitik initiée dans les années 1970 par Willy Brandt », expliquait il y a quelques années le spécialiste Jacques-Pierre Gougeon. Une longue histoire donc, que la question migratoire vient compliquer, depuis que ces pays, Hongrie en tête, ont décidé de fermer leurs frontières aux réfugiés. Sans parler de la Pologne, partenaire majeur de la République fédérale. On s'en souvient, Angela Merkel avait toutfait pour imposer l'ancien premier ministre de ce pays, Donald Tusk, à la tête du Conseil européen. Aujourd'hui, le nouveau gouvernement de Varsovie va parfois jusqu'à convoquer l’ambassadeur allemand, une pratique pour le moins inhabituelle entre deux membres de l'UE ! Bref, la Mitteleuropa a du plomb dans l'aile.
 
merkel_untergang.jpgPendant ce temps-là, l'Europe du Sud non plus n'est pas immobile. Les gauches y grignotent du terrain jour après jour, ce qui ne manquera pas, à terme, de faire resurgir le volet économique d'une crise européenne désormais globale. Bien sûr, l'acharnement, entre janvier et juillet 2015, de la Banque centrale européenne et d'un Eurogroupe largement dominé par le ministre allemand des Finances Wolfgang Schäuble, ont réussi à briser Syriza en Grèce. D'ailleurs, la situation désespérée d'Athènes permet à Berlin de se livrer à présent à un marchandage indigne, en proposant à la Grèce plus de souplesse dans la mise en œuvre du troisième mémorandum contre davantage d'efforts dans le contrôle des frontières extérieures de Schengen. 
 
Mais au delà de la Grèce, c'est toute l'Europe méditerranéenne qui est travaillée par une poussée anti-austéritaire. C'est le cas du Portugal, où le gouvernement socialiste soutenu par la gauche radicale tient actuellement tête à Bruxelles dans le cadre de la mise en œuvre du « semestre européen ». C'est aussi la cas de l'Espagne, où l'on sent bien que, malgré les actuelles difficultés à former un gouvernement, il faudra désormais compter avec l'atypique parti Podemos. De fait, si ni le Portugal ni l'Espagne ne semblent sur le point de renverser la table dans l'immédiat, si aucun des deux pays, par exemple, n'envisage de quitter la zone euro et si l'expérience Syriza a quelque peu dégrisé les gauches alternatives, il n'en reste pas moins que les évolutions anti-austéritaires conjuguées au Sud contribuent à mettre la pression sur les pays créanciers d'Europe du Nord.
 
Enfin, un dernier élément de contexte à ne pas négliger réside dans la menace du Brexit, la sortie de la Grande-Bretagne de l'Union européenne. Celle-ci reconfigurerait en profondeur les équilibres au sein de l'UE. Bien que n'étant pas membre de l'euro, Londres demeure un allié pour Berlin lorsqu'il s'agit de faire évoluer l'ensemble européen vers davantage d'austérité et de déréglementation. Un allié dont la perte potentielle est jugée suffisamment dommageable pour que l'Allemagne ait choisi de mettre sur pied un groupe de travail anti-Brexit installé à Berlin, et chargé de trouver des « arrangements créatifs » pour de répondre aux exigences de David Cameron.

***

Des alliances que l'on croyait indéfectibles et qui s'effritent, des équilibres qui changent lentement mais sûrement, la trajectoire sur laquelle se trouve engagée l'Union européenne a de quoi inquiéter son maillon dominant, l'Allemagne. D'autant que le pays se trouve désormais tourmenté par une crise migratoire mal abordée, qui tend à prendre une place croissante dans la vie politique du pays. Pour autant, ceci n'empêchera pas la crise de l'euro de refaire violemment surface à la première occasion, réactivée par le retentissement de l'économie mondiale ou par quelque nouvelle crise financière survenant inopinément . Aussi peut-on sérieusement s'interroger : l'Allemagne est-elle en train de perdre la main en Europe ? Ira-t-elle jusqu'à perdre pied ?
 
 
Article initalement paru sur FigaroVox. 

mardi, 23 février 2016

Les Etats-Unis testent le pouvoir du TTIP sur VW

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Les Etats-Unis testent le pouvoir du TTIP sur VW

par Eberhard Hamer, économiste, Allemagne

Ex: http://www.horizons-et-debats.ch

Vice-président Biden a comparé avec l’OTAN ce que les Américains et leurs multinationales appellent «Accord de libre échange» (TTIP). Cet accord sert à soumettre l’Europe à la dominance économique américaine et à leurs intérêts. Il y a un aspect intérieur et un aspect extérieur:

  • C’est depuis longtemps que le gang autour de Juncker à Bruxelles s’efforce de démanteler les Etats-nations européens et d’anéantir le pouvoir de leurs Parlements pour assurer le pouvoir dominant de la Commission européenne. Pour cette raison le bureau politique à Bruxelles ne négocie qu’en secret avec les Américains, en excluant les Etats-nations. Ceci contredit la clause de subsidiarité et de souveraineté de l’UE. Mais la centralisation est le programme principal de Juncker, appliquée pendant la crise financière en partant de l’union de la concurrence économique, en passant par l’union de la responsabilité, puis de l’endettement pour arriver à l’union financière. Et encore récemment en Pologne quand l’UE est intervenue contre la destitution d’agents américains dans la radiodiffusion nationale polonaise. Bruxelles ne tolère ni des opinions divergentes de gouvernements ou Parlements, ni la limitation de l’influence des Etats-Unis en Europe.

 

  • Vers l’extérieur, TTIP sert, au profit de l’économie américaine (et de l’OTAN), à l’intensification de la guerre économique envers la Russie (sanctions, guerre du pétrole, guerre des monnaies). Selon la doctrine de Brzezinski, les Etats-Unis ne peuvent maintenir leur statut de puissance mondiale que s’ils contrôlent l’Europe, et ils ne peuvent dominer l’Europe que s’ils contrôlent l’Allemagne. Ceci non seulement sur le plan politique au sens des atlantistes, mais aussi sur le plan économique: la plupart des entreprises cotées au DAX sont sous tutelle américaine. Maintenant, tout cela doit être fusionné à l’aide du TTIP en un espace économique commun euro-atlantique, opposé à la Russie.

La prise du pouvoir économique et juridique en Europe à l’aide du TTIP est accompagnée d’attaques contre des bastions économiques avant tout allemands qui ne sont pas encore gérées par les Américains. Actuellement, c’est le tour de VW.


General Motors a essayé à deux reprises d’acquérir le «gros morceau VW» à l’aide de crédits illimités de la FED. La première fois la famille Porsche les a devancés. La deuxième fois ils ont échoué avec leur plainte contre le droit de Veto de la Basse-Saxe. Maintenant, ils tentent une troisième fois de saigner, voire de déprécier VW à l’aide d’autorités et d’avocats mandatés par eux aux Etats-Unis, pour après les racheter à bon marché.


Si VW essayait la même chose aux Etats-Unis, le gouvernement américain interviendrait immédiatement sous le prétexte de l’intérêt national et sécuritaire. Le vrai scandale concernant VW est que le gouvernement allemand ne défend pas VW et qu’il se sent visiblement obligé plutôt à la puissance américaine qu’aux 100?000 employés de VW.


Si nous tolérons que les Américains détruisent VW pour favoriser ses deux concurrents américains Ford et Opel (General Motors), l’Allemagne perdra un de ses phares dont l’éclairage rayonne loin au-delà de ses frontières. Ainsi, nous commençons à comprendre ce que les Américains entreprendront contre nos autres grandes entreprises et monopolistes du savoir-faire, à l’aide du droit américain sur sol allemand créé avec TTIP.


Il n’est donc pas étonnant qu’un gouvernement qui se tait face à la destruction de VW, soit tolérant envers, voire favorise activement, la prise de pouvoir des multinationales américaines sur l’économie allemande (TTIP). Une guerre d’anéantissement, telle que les Américains la mène contre VW, serait impossible pour les Allemands aux Etats-Unis et ne serait tolérée par aucun gouvernement ou congrès américain. On voit donc bien ce que vaut un accord entre un puissant (USA) et un impuissant (UE) conclu par un pouvoir mondial avec des fonctionnaires téléguidés par lui (Commission européenne). De plus, les fonctionnaires de l’organisation patronale représentent les intérêts des multinationales contre la grande majorité de ses membres qui sont des PME.


La teneur de la prise de pouvoir économique des Etats-Unis en Europe est bien illustrée par l’itinéraire et l’agenda d’Obama. Celui-ci inaugurera avec Mme Merkel la Foire de Hanovre pour «aligner la politique et l’économie sur l’accord TTIP».  

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(Traduction Horizons et débats)

vendredi, 19 février 2016

Heidegger, ein Faschist?

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Heidegger, ein Faschist?

von Prof. Dr. Paul Gottfried

Ex: http://www.blauenarzisse.de

Im Oktober ist im Karolinger-​Verlag die Schrift „Heidegger und der Antifaschismus“ von Bernard Willms erschienen. Herausgegeben wurde sie von Till Kinzel.

Heidegger-​Studien in Hülle und Fülle vorliegen, legte Willms etwas Originelles hin, als er durch seinen bündig gefassten Band Heideggers politische Kritiker auseinandernahm. Eine Schwemme an überhitzten Denunziationen kreist um Heideggers Einsatz für die „Deutsche Revolution“, die in seiner Freiburger Rektoratsrede von 1933 anklang, nachdem er eine Woche zuvor der NSDAP beigetreten war.

9770789a0f33e588bdf77280b57e9f04_L.jpgDie antisemitischen Äußerungen von Heidegger

Ausgehend von einem bahnbrechenden Band (1987) des chilenischen Kommunisten Victor Farias, sind einander jagende Anti-​Heidegger-​Demontagen zuhauf erschienen. Samt und sonders zielen sie darauf ab, Heideggers ideenpolitische Reise zum Faschismus von seiner Kinderstube bis zu seinem Tod aufzuzeigen. Auf seinem Lebensweg tauchen vermeintlich gewisse Charakteristika auf, im besonderen Abscheu vor der Moderne, Judenhass, und (bei Farias) eine Reihe von katholisch angehauchten tiefreaktionären Haltungen.

Willms, der sein Buch 1991 vollendete, war nicht imstande, die in den letzten zehn Jahren veröffentlichten Werke von Peter Trawny über die „Schwarzen Hefte“, die die antisemitischen Aussprüche aus Heideggers zwischen 1938 und 1941 niedergelegten „Überlegungen“ zusammentragen, und die Kinzel in seinem bibliographischen Anhang aufführt, zu besprechen. Aber meiner Ansicht nach ist dieser für Skandal sorgende Renner Willms Einschätzung kaum abträglich. Heideggers Anzüglichkeiten über Juden, dass sie „entwurzelt“ seien und zu einem krassen Händlertum gehören, sind klischeehaft und zwar schimpflich, aber kommen der Nazi-​Rassentheorie an Lästerlichkeit bei weitem nicht gleich. Leicht wäre es, ebenso unglimpfliche Bemerkungen zu Juden bei Churchill oder anderen zu finden. Dergleichen habe ich schon bei diesen Prominenten ausgebuddelt. Dem Anklagebrief entgegenzuhalten, ist aber die Tatsache, dass Heidegger vor 1933 von jüdischen Studenten umschwärmt wurde. Die berühmteste ist sicherlich die deutsche Jüdin Hannah Arendt. Seinem jüdischstämmigen Gönner und engem Freund Edmund Husserl hatte er zudem Sein und Zeit (1927) gewidmet.

Die größte Dummheit seines Lebens

Auch während des Krieges hielt Heidegger die seinem Tagebuch vertrauten antijüdischen Äußerungen nicht für „druckfähig“. Schon im April 1934 trat er verdrossen aus seiner Rektoratsstelle aus, und nach dem Krieg kennzeichnete er sein mit verschränkten Verweisen auf das Griechentum beschwingte Lob auf das Dritte Reich als die „größte Dummheit meines Lebens“. Leider genügt dieser begrenzte Reueausdruck keineswegs, um der Schlägerei ein Ende zu machen. Beim deutschen Intellektuellentum, so Willms, floriert eine Heimindustrie, die Heidegger eine lebenslange Anfälligkeit für die Nazi-​Bewegung unterstellt. Von dem verdeutschten Farias, über Bernd Martin, Hugo Ott und Jürgen Habermas bis zu Trawny schießen die Verrisse wie Pilze aus dem Boden.

Sie sind bestrebt, so Willms, Heidegger ins ärgste erdenkliche Licht zu rücken und hantierten mit fragwürdigen Kontinuitäten, um die beabsichtigte Bilanz zu ziehen. Aus der denunziatorischen Wortflut erschließen sich bestimmbare Grundmotive, die Willms akribisch untersuchte. Zuallererst ersparen sich die Denunzierenden die Mühe, Heideggers Seinsphilosophie zu bewältigen, eine erschöpfende Aufgabe angesichts der Verstricktheit des zu berücksichtigenden Lesestoffs. Statt mit stilistisch schweren Texten ringen zu müssen, kann sich der Kritiker mit politischen Mahnungen begnügen. Die seinsphilosophische Grübelei fühlt man sich berechtigt abzutun, denn sie entsprang einem Feind unserer jeweiligen Demokratie und ohnehin einem eingefleischten Faschisten.

Postmoderne Wende

Zum zweiten tauchten die vielfältigen Anklagen gegen Heidegger im Zusammenhang einer aufgeheizten Auseinandersetzung in Frankreich und anschließend in Deutschland zwischen einerseits den Modernisten, Linksdemokraten sowie Kommunisten, und andererseits den Vertretern der Postmoderne auf. Die postmodernen Vordenker, vor allem Jacques Derrida und Jean-​Francois Lyotard, reißen sich von Marx und anderen fortschrittlichen Vordenkern los, so der Jammerchor, um auf einen antidemokratischen, zeitfremden Mystiker ihre Spannkraft zu richten. Damit die Abgelenkten auf die rechte Bahn zurückgebracht werden können, tut es not, Heidegger in seiner vollen Niedertracht zu entlarven.

In Anknüpfung daran – und hier steckt das wahre Herzstück der Arbeit – bezeugen die Anstürme auf Heidegger den steten Versuch der ihn Denunzierenden, ihren Antifaschismus als Gründungslehre der aus der Besatzung entstandenen menschenrechtlichen deutschen Demokratie zu unterstreichen. Jedesmal wenn ein Möchtegern-​Prominenter Heidegger schlechtmacht, attestiert er seinen Mitbürgern oder seinen gleichgestimmten Kollegen, dass er anständiger ist. Als Paradebeispiel führt Willms Karl Jaspers an, der mit der „schnodderigen Bemerkung“ den Reigen eröffnete: „Heidegger weiß nicht, was die Freiheit ist.“

Wer Faschist ruft, will seine eigene moralische Überlegenheit beweisen

Stark geprägt von Heideggers Existenzphilosophie, die er in einer volkstümlichen Gestalt, den breiten Massen zugänglich machte, setzte Jaspers einen weitaus helleren Denker herab, um seine moralische Überlegenheit zu beweisen. Die Sache noch weiter trübend, so Willms, wusste Jaspers Bescheid, dass Heidegger einen philosophischen Freiheitsbegriff eingehend ausgearbeitet hatte. Was Jaspers mit seiner Urteilfindung bezweckte, war sich über einen höher zu rangierenden Kopf moralisch emporzuheben. Und mit seinem Gestus bekannte er sich zu der antifaschistischen Nachkriegsordnung, die für Heidegger keinen Platz übrig hatte.

Noch zeitbedeutender ist darüber hinaus, dass der politisch und kulturell grundlegende Antifaschismus den eingeschworenen Kommunisten und sonstigen Linkstotalitären eine rauschende Willkommenskultur bescherte. Namhaften kommunistischen Fürsprechern, am merkwürdigsten Berthold Brecht und Jean-​Paul Sartre, war alle Ehre im antifaschistischen Kampflager beschieden. Abbitte mussten Antifaschisten keineswegs leisten, auch wenn sie für Stalin und Mao unverschämt eingetreten waren. Während es gehalten sei, Heidegger wegen seiner 1933 verübten Verirrung laufend zu verdammen, belobigt man dennoch „antifaschistische” Kommunisten als vorbildliche Demokraten.

Hoffnung auf eine schicksalshafte Geschichtswende

Im Gegensatz zu dem heuchlerischen Gefasel der Sittenwächter sei die Auffassung, die Heideggers ehemaliger Assistent Karl Löwith in Denker in dürftiger Zeit (1953) darbietet, wenigstens vertretbar, dass Heideggers emotional aufgeladener Sinn der Schicksalshaftigkeit zu seiner eingangs positiven Haltung zum Dritten Reiches den Weg bahnte. Die Erwartung einer weltbewegenden Geschichtswende, die die „Destruktion“ aller bestehenden Wertsysteme nach sich ziehen muss, öffnete dem in die Rektoratsrede eingeflochtenen Thema „Nationalrevolution“ Tür und Tor.

Löwith sucht eine begriffliche Überleitung von Heideggers Denkansätzen zu seiner folgenschweren Entscheidung im Gefolge einer verhängnisvollen Regierungsveränderung. Er führt aus, dass Heideggers Aufbruch von einem subjektiven Dasein, das in Sein und Zeit herausgestellt wird, zu einem alles durchdringenden Seinsbegriff gewisse Weiterungen mittrug. Diese als philosophisch eingeordnete Wende hatte eine Politik der apokalyptischen Erwartung zur Folge. Seiner zeitlich begrenzten Empfänglichkeit für den 1933 vorgefallenen Erdenrutsch eilte Heideggers geistige Umorientierung voran.

Beiläufig erwähnt: Löwith, ein protestantischer Akademiker jüdischer Abkunft, wurde nach 1933 gedrängt, aus Deutschland nach Italien zu flüchten. Dort traf er mit seinem in Urlaub gegangenen Mentor zusammen, der drauflos redete, wie durch und durch begeistert er war von der Neuordnung. Der entflohene Ex-​Anhänger wurde von Entsetzen gepackt, als er Heideggers Ergüssen zuhörte. Nicht nur war er aus seiner Heimat hinausgedrängt worden. Ebenso beunruhigend war die sonderbar anmutende Begeisterung seines Freundes, den er nicht mehr wiedererkannte. Im Unterschied zu den jetzt in Schwung gekommenen Anti-​Heidegger-​Moralisten kreidete Löwith aber seinem gefallenen Idol später kein Festhalten seiner ehemaligen Haltungen an. Heidegger war eben eine im Wandel stehende und nicht immer auf einen glücklichen Ausgang zustrebende Denkfigur.

Bernard Willms: Heidegger und der Antifaschismus. Wien: Karolinger, 2015.

mercredi, 17 février 2016

Die USA proben ihre TTIP-Macht schon an VW

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Die USA proben ihre TTIP-Macht schon an VW

von Prof. Dr. Eberhard Hamer

Ex: http://www.zeit-fragen.ch

Was die Amerikaner und ihre Weltkonzerne «Freihandelsabkommen» (TTIP) nennen, hat der ehemalige Vizepräsident Cheney mit der Nato verglichen, es soll Europa der amerikanischen Wirtschaftsvormacht und ihren Interessen unterstellen. Dies hat eine innere und eine äussere Zielrichtung:

•   Schon lange betreibt die Juncker-Clique in Brüssel den Abbau der Nationalstaaten in Europa und die Entmachtung ihrer Parlamente, um dadurch Zentralherrschaft für die EU-Kommission zu gewinnen. Deshalb verhandelt das Politbüro in Brüssel auch geheim nur mit den Amerikanern, unter Ausschluss der Nationalstaaten und sogar geheim vor diesen. Das steht zwar im Gegensatz zur Subsidiaritäts- und Souveränitätsklausel der EU; die Zentralisierung ist aber Hauptprogramm von Juncker und wurde auch in der Finanzkrise (von der Wettbewerbs- über die Haftungs- und Schulden- bis zur Finanzunion) und jetzt in Polen bei der Intervention der EU gegen die Entmachtung von US-Agenten im polnischen Staatsrundfunk gezeigt. Brüssel duldet weder abweichende Meinungen von Regierungen oder Parlamenten noch Beschränkungen des US-Einflusses in Eu-ropa durch diese.

•   Nach aussen hin soll durch TTIP für die amerikanische Wirtschaft (wie die Nato) ein Wirtschaftskrieg gegen Russland geschlossen werden (Sanktionen, Ölkrieg, Währungskrieg). Nach der Brzezinski-Doktrin können die USA ihre Weltmacht nur behaupten, wenn sie Europa im Griff behalten, Europa wiederum könne man nur im Griff halten, wenn man die Zentralmacht Deutschland beherrsche. Dies gilt nicht nur politisch (Atlantiker), sondern auch wirtschaftlich (Mehrheit der DAX-Firmen in US-Hand) und müsse nun mit Hilfe von TTIP gegen Russland zu einem gemeinsamen euro-atlantischen Wirtschaftsraum verschweisst werden.

Die wirtschaftspolitische und wirtschaftsrechtliche Machtergreifung über Europa mit Hilfe von TTIP wird begleitet von Angriffen auf Wirtschaftsbastionen vor allem in Deutschland, die noch nicht in amerikanischer Hand sind. Dies gilt zurzeit für VW.

Zweimal hat General Motors versucht, «die fette VW» mit Hilfe unlimitierter FED-Kredite zu übernehmen. Beim ersten Mal ist ihnen die Familie Porsche zuvorgekommen, beim zweiten Mal scheiterten sie mit ihrer Klage gegen das Niedersachsen-Recht bei VW (Veto-Recht). Nun versuchen sie zum dritten Mal durch von ihnen beauftragte Behörden und Anwälte in den USA, VW zur Ader zu lassen, billig zu machen, um dann VW billig aufkaufen zu können.

Würde VW dies umgekehrt versuchen, würde die US-Regierung sofort mit dem Nationalvorbehalt (sicherheitsrelevant) eingreifen. Der Skandal um VW liegt jetzt darin, dass die deutsche Regierung sich nicht hinter VW stellt, dass sie sich offenbar mehr der US-Macht als den 100?000 Beschäftigten von VW verpflichtet fühlt.

Lassen wir die Amerikaner zugunsten der beiden amerikanischen Konkurrenten Ford und Opel (General Motors) VW vernichten, verliert Deutschland nicht nur national, sondern international einen seiner Leuchttürme. Nun wird uns klar, was die Amerikaner mit Hilfe eines durch TTIP geschaffenen amerikanischen Rechts in Deutschland gegen unsere anderen Grossunternehmen und Know-how-Monopolisten unternehmen werden.

Und so wundert es nicht, dass eine Regierung, die zur Zerschlagung von VW schweigt, auch die übrige Machtübernahme der US-Konzerne über die deutsche Wirtschaft (TTIP) duldet oder sogar mitbetreibt. Ein Vernichtungskampf, wie ihn jetzt die Amerikaner gegen VW führen, wäre umgekehrt in Amerika für Deutsche nicht möglich und würde vor allem auch von keiner US-Regierung und keinem Kongress geduldet. Daran zeigt sich wiederum, was ein Vertrag zwischen einem Mächtigen (USA) und einem Ohnmächtigen (EU) wert ist, wenn ihn eine Weltmacht mit von ihr gesteuerten Funktionären (EU-Kommission) abschliesst und wenn wiederum die Arbeitgeberverbandsfunktionäre gegen die Masse ihrer mittelständischen Unternehmen Konzerninteressen vertreten.

Was die wirtschaftliche Machtergreifung der USA über Europa dem US-Präsidenten wert ist, zeigt der Reiseplan Obamas, zur Hannover-Messe zu kommen, um «Politik und Wirtschaft zugunsten von TTIP auf Vordermann zu bringen».   

mardi, 16 février 2016

De briefwisseling tussen Kunicki en Jünger

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‘Wat ons bindt ... Duitsland!’

Uit de oproep van de communist Johannes R. Becher aan de 'nationalist' Ernst Jünger

De briefwisseling tussen Kunicki en Jünger toont hoe Polen zich langzaam opende voor het werk van het 'icoon van het Duitse nationalisme'

door Dirk Rochtus

Ex: http://www.doorbraak.be

Een Poolse germanist die zich midden jaren '80 wendde tot de enigmatische Duitse 'Dichtersoldat' Ernst Jünger (1895-1998): dat was niet zo vanzelfsprekend in het politiek-culturele klimaat van die jaren. Hoe uit die briefwisseling tussen Wojciech Kunicki en Ernst Jünger een intellectuele vriendschapsband groeide, vormt het voorwerp van het door Natalia Zarska geredigeerde boek "Wir Slawen sind Genies des Leidens".

KP_01.jpgAristocratisch

Waarom was die toenadering tussen een Poolse academicus en een beroemde Duitse schrijver niet zo vanzelfsprekend? In het eigen land, dat zichzelf niet meer als natie verstaat, - en misschien ook daarom, - was Jünger omstreden. Na de Eerste Wereldoorlog, waaraan hij als vrijwilliger het Eisernes Kreuz 1. Klasse en de Orden Pour le Mérite overhield, schreef hij zijn frontervaringen in esthetiserende wijze neer in het in dagboekvorm weergegeven 'In Stahlgewittern' (zie ook het boek Een oorlog kan ook mooi zijn. Ernst Jünger aan het westelijk front van de hand van Hans Verboven en Joris Verbeurgt). Verdacht was het dat iemand in de oorlog nog schoonheid kon ontwaren, waar linkse en liberale schrijvers de gruwel ervan aanklaagden, bijvoorbeeld een Erich Maria Remarque met zijn 'Im Westen nichts Neues' (1929).

'Verdacht' maakte Jünger zich ook door zich in de jaren 20 van vorige eeuw als 'conservatieve revolutionair' te engageren in nationaal-revolutionaire kringen die de democratie van de Republiek van Weimar (1919-'33) met geestelijke wapens bestreden. Tijdens het Derde Rijk poogden de nationaalsocialisten, met propagandaminister Joseph Goebbels op kop, de charismatische 'Dichtersoldat' in hun kamp te lokken. Tevergeefs. Jünger hield afstand tot het naziregime dat hij vanuit zijn aristocratische geesteshouding als plebejisch-totalitair verafschuwde. Zijn in 1939 verschenen verhaal 'Auf den Marmorklippen' wordt vaak als symbolisch versluierde kritiek op de nationaalsocialistische dictatuur opgevat, iets wat Jünger zelf als eenzijdige interpretatie afwees. Jünger had als officier in het bezette Parijs ook contacten met de 'Männer des 20. Juli', de generaals en officieren die op die dag in 1944 een bomaanslag pleegden op Adolf Hitler in de Wolfsschanze in Oost-Pruisen. Na de Tweede Wereldoorlog trok hij zich terug in het Zuid-Duitse Wilflingen waar hij tot aan zijn dood op 17 februari 1998 ijverig bleef publiceren en zijn keververzameling verder uitbouwde. Legendarisch was ook het bezoek dat de Franse president François Mitterrand en de Duitse bondskanselier Helmut Kohl hem daar op 20 juli 1993 brachten.

juengerpolski.jpgIcoon

Jünger was omstreden omwille van zijn esthetiserende kijk op de oorlog, zijn geestelijke strijd tegen de parlementaire democratie van 'Weimar', zijn elitair-contemplatief afstand houden van 'Bonn' (de Bondsrepubliek Duitsland). Linkse kringen in Duitsland lustten hem rauw. Maar ook in het communistische Polen kon zijn werk tussen 1945 en 1989 niet verschijnen. Sowieso hadden de Polen het moeilijk met Duitsland en 'alles' wat uit dat land kwam, en dan zeker met iemand die Natalia Zarska in haar nawoord een 'icoon van het Duitse nationalisme' noemt. Het getuigde dan ook van intellectuele moed van de Poolse germanist Kunicki (°1955), die doceert aan de universiteit van Wroclaw (het vroegere Breslau), om op 31 oktober 1985 een brief te versturen aan Jünger, met de mededeling dat hij een wetenschappelijk werk aan 'die Symbolik Ihrer erzählenden Schriften' wilde wijden: 'Mich interessiert vor allem die ästhetische Seite des Problems und wenn die politische Komponente gestreift wird, soll sie gerecht und nach meiner Beurteilung positiv behandelt werden.' (Ik ben vooral geïnteresseerd in de esthetische kant van het probleem en wanneer de politieke component aangeraakt wordt, dient ze fair en volgens mijn beoordeling positief te worden behandeld).

'Medestrijder tegen de nazi's'

Het kwam de historicus Gerald Diesener van de universiteit van Leipzig (toen nog DDR) ter ore dat er in Polen een Jünger-expert was opgestaan. Diesener deed onderzoek naar het 'Nationalkomitee Freies Deutschland' (een verbond van Duitse officieren die tijdens de Tweede Wereldoorlog in Sovjet-Russische gevangenschap waren terechtgekomen en zich daar onder leiding van Duitse communisten aan propaganda tegen Nazi-Duitsland wijdden). Een van die communisten toentertijd was Johannes R. Becher (1891-1958), ooit een bekend expressionistisch dichter, en later minister van Cultuur van de DDR. Na de machtsovername door Hitler was Becher naar de Sovjet-Unie geëmigreerd. In oktober 1943 richtte hij zich in een uitzending van radio 'Freies Deutschland' rechtstreeks tot Ernst Jünger als coryfee van het Duitse nationalisme. Becher beklemtoonde zijn respect voor de figuur van Jünger die weliswaar aan de andere kant stond, maar dat was nooit 'die Seite der Naziclique' geweest: 'Sie standen immer abseits und standen einsam (....)' (U stond altijd opzij en u stond er eenzaam). Ook al waren zij, - Becher en Jünger - , ideologische tegenstanders, toch was er volgens Becher iets dat deze 'Gegnerschaft' een bijzondere 'Weihe' (heiliging) gaf: 'Das Gefühl, die Gewißheit, dass über alle trennenden Begriffe und Trennungszeichen hinweg es einen uns bindenden Inbegriff gab ... Deutschland!' (Het gevoel, de zekerheid dat er over alle scheidende begrippen en tekens heen er één begrip was dat ons bond .... Duitsland!)

EJpoladsfadf_598.jpgBecher mocht dan wel marxist-leninist zijn, maar aan zijn vaderlandsliefde, aan zijn gloeiende liefde voor Duitsland en zijn grootse cultuur heeft hij nooit enige twijfel laten bestaan (zoals blijkt uit vele redevoeringen en zijn 'Deutschland-Dichtung'). De historicus Diesener had ontdekt dat de linkse Becher de rechtse Jünger als medestrijder tegen de nazi's wilde winnen, vanuit het besef 'Es ist Zeit, dass wir Deutschlandstreiter von rechts bis links unsere Waffen zusammenfassen' (het is tijd dat wij, strijders voor Duitsland van rechts tot links, onze wapens samenbrengen). Maar tegelijk wist Diesener dat Becher in een vroegere voordracht over het thema 'Moralische und ideologische Überwindung des Faschismus' (Morele en ideologische overwinning op het fascisme) Jünger als 'fascistische schrijver' had bestempeld. Daarom stelde Diesener de Poolse germanist Kuniciki de vraag of het vroegere oordeel van Becher over Jünger misschien niet moest worden herzien (gezien de respectvolle aanspreking in de radio-uitzending van oktober 1943) en hoe hij dit als kenner van de Duitse literatuur zag?

'Jüngergemeinde'

Zo ontstond vanuit de wetenschappelijke belangstelling van Kunicki voor Jünger ook een levenslange vriendschap tussen Kunicki en Diesener, de latere zaakvoerder van de uitgeverij Leipziger Universitätsverlag. Die vriendschap heeft zich ook vertaald in het voorliggende boek dat uitgegeven is naar aanleiding van de 60ste verjaardag van Kunicki en de 120ste van Jünger. Het boek omvat de briefwisseling van Kunicki met Jünger tussen 1985 en 1997, met Frau Liselotte Jünger tot 1998, met Diesener en de dichter Rolf Schilling en die tussen beide laatsten en Jünger zelf, evenals 'Notizen einer Reise' die de Poolse germanist in Duitsland ondernam. We lezen hoe Kunicki zich aan het werk zet om verschillende boeken van Jünger in het Pools te vertalen. Die vertalingen lagen lang in de lade tot eindelijk de tijd rijp was in Polen om het werk van Jünger uit te geven. Vanuit zijn decennialange passie voor het werk van Jünger bouwde Kunicki ook zijn contacten met de wereldwijde 'Jüngergemeinde' uit. Zo organiseerde hij in juli 2009 een internationaal congres over Jünger aan de universiteit van Wroclaw. Ook de referaten van dit congres verschenen bij Leipziger Universitätsverlag onder de titel 'Ernst Jünger – eine Bilanz'.

Foto: (c) Reporters

salwenXfL._SX319_BO1,204,203,200_.jpgTitel boek : 'Wir Slawen sind Genies des Leidens' - Wojciech Kunicki und Ernst Jünger: Briefe und Tagebücher
Auteur : Natalia Zarska
Uitgever : Leipziger Universitätsverlag
Aantal pagina's : 199
Prijs : 29 €
ISBN nummer : 978-3-86583-991-6
Uitgavejaar : 2015