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samedi, 09 mai 2020

OTAN : « Defender 2020 » est une « provocation irresponsable » pour le Cercle de réflexion interarmées

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OTAN : « Defender 2020 » est une « provocation irresponsable » pour le Cercle de réflexion interarmées

Ex: https://www.les-crises.fr

Source : Capital

32A05C00188170FB-0003.jpgDans une tribune, une dizaine de militaires de haut rang ayant quitté le service et regroupés au sein du Cercle de réflexion interarmées, s’inquiètent de la participation de la France au prochain exercice militaire de l’OTAN.

Defender 2020, le prochain exercice militaire de l’OTAN, soulève un débat majeur. Quand bien même on craindrait les « cyber-intrusions » russes ; même si, pris de court par le retour populaire de la Crimée dans le giron russe, les Européens gouvernés par l’Amérique furent tétanisés par l’habileté de Poutine, il n’en reste pas moins qu’organiser des manœuvres de l’OTAN, au 21ème siècle, sous le nez de Moscou, plus de 30 ans après la chute de l’URSS, comme si le Pacte de Varsovie existait encore, est une erreur politique, confinant à la provocation irresponsable. Y participer révèle un suivisme aveugle, signifiant une préoccupante perte de notre indépendance stratégique. Est-il possible que la France s’en dispense ?

Le surgissement d’un fléau planétaire qui confine près de 4 milliards de Terriens, éclairant d’une lumière crue les grandes fragilités de l’humanité, pourrait contribuer à nous débarrasser des vieux réflexes de guerre froide. Faisant soudain peser une menace existentielle, ce fléau transfrontalier hiérarchise les priorités stratégiques, dévoile la futilité des anciennes routines et rappelle le poids de notre appartenance à l’ensemble eurasiatique, dont la Russie est le pivot ancestral.

Certains peuvent redouter de choquer nos partenaires de l’Est européen encore accablés par les souvenirs du rideau de fer. Ils oublient cependant qu’en 1966, il y a plus d’un demi-siècle, Charles de Gaulle dont tout le monde se réclame, mais que personne n’ose plus imiter – sauf en posture – , avait purement et simplement signifié à l’allié américain à qui l’Europe et la France devaient pourtant leur survie, qu’il n’était plus le bienvenu à Fontainebleau. C’est que le « Connétable », ayant chevillé à l’âme l’indépendance du pays, n’avait pas oublié qu’en 1944 Roosevelt avait l’intention de mettre la France sous tutelle administrative américaine.

Pourtant, nombre de militaires d’abord, au prétexte que l’OTAN était une norme opérationnelle et technologique, pourvoyeur à l’occasion d’un appui logistique essentiel, n’ont cessé de militer pour contourner l’affirmation d’indépendance gaullienne, sans cesser de s’en réclamer.

Ensuite, du côté des politiques dès avril 1991, dans l’opposition, appuyant Philippe Seguin contre Charles Pasqua et Jacques Chirac, François Fillon également opposé au traité de Maastricht, avait tenté la quadrature du cercle dans une tribune du Monde. Il y soutenait que l’Europe de la défense était une « chimère », tout en proposant de « placer ses alliés au pied du mur en proposant une véritable européanisation de l’alliance atlantique, en concurrence avec l’actuel projet de simple replâtrage de l’OTAN sous leadership stratégique américain. » Son but était également de préparer le retour de la France dans le commandement d’une OTAN repensée, à l’aune, disait-il de « l’esprit de 1949 » avec une « européanisation de tous les commandements » et « coopération et interopérabilité des forces plutôt que leur intégration ».

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Nicolas Sarkozy décide de « rentrer dans le rang »

Dès son entrée à l’Élysée en 1995, Jacques Chirac, pourtant le premier héritier de l‘exigence d’indépendance sous le grand pavois de Charles de Gaulle, entamait les négociations pour le retour de la France dans le Commandement intégré de l’Alliance. En échange – mais sans réel moyen de pression – il réclamait, l’attribution à Paris du poste de Commandement du flanc sud de l’Alliance à Naples, tout de même port d’attache de la 6ème flotte de l’US Navy. Un article de Libération dont la lecture est édifiante détaillait le 27 février 1997, sous la plume de Jacques Amalric, ancien correspondant du Monde à Washington et à Moscou, les dessous de ces marchandages. Chacun jugera à quel point les contorsions sémantiques contrastaient avec l’inflexible fermeté gaullienne, 30 ans plus tôt.

Au passage, il est juste de rappeler que c’est la gauche française qui, apparemment à contre-emploi, s’est opposée au sabordage de l’héritage gaullien. En 1997, Lionel Jospin, devenu premier ministre, affronta directement Jacques Chirac sur cette question.

Mais celui qui a décidé de « rentrer dans le rang » de la structure militaire intégrée c’est bien Nicolas Sarkozy, venu en août 2007 aux États-Unis rencontrer Georges Bush. Le résultat fut l’annonce faite par le Président Français devant le Congrès des États-Unis, le 7 novembre 2007, 41 ans après l’affirmation d’indépendance de Charles de Gaulle. L’affaire fut entérinée par le parlement français saisi par une motion de censure, rejetée en 2009. Pour le prix de son retour, Paris reçut la compensation du Commandement non directement opérationnel dit « Allied Command Transformation » (A.C.T) basé à Norfolk dont la mission est une réflexion technologique, structurelle, tactique et stratégique en même temps qu’une action pédagogique vers les pays membres, visant à la fois à la prise de conscience et à l’harmonisation.

Sans en nier l’importance, on ne peut s’empêcher de penser qu’il s’agit d’une consolation :

1) Fournir le cadre conceptuel pour la conduite de futures opérations conjointes combinées

2) Définir le concept et les moyens capacitaires des opérations futures de l’Alliance

3) Évaluer la pertinence des concepts opérationnels émergents – notamment dans le domaine des hautes technologies – et les traduire en une doctrine d’emploi validée par la recherche scientifique à la fois fondamentale et expérimentale

4) Persuader les nations membres, individuellement et collectivement, d’acquérir les capacités indispensables et de fournir la formation initiale nécessaire à la mise en œuvre des nouveaux concepts validés, qu’ils soient endogènes à l’OTAN ou générés hors Alliance.

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Le processus est un renoncement

Nous en sommes là. 54 ans après la brutalité du panache stratégique gaullien, le processus est un renoncement. Aujourd’hui, alors que le pouvoir a abandonné à Bruxelles et à la Banque Centrale Européenne une partie de sa marge de manœuvre régalienne, en échange de la construction d’une Europe dont la voix peine à se faire entendre, quand on écoute les affirmations d’indépendance de la France, on est saisi par l’impression d’une paranoïa. La contradiction diffuse le sentiment d’un « théâtre politique » factice, probablement à la racine d’une désaffection électorale, dont l’ampleur est un défi pour notre démocratie.

Enfin, pour un pays européen déjà sévèrement frappé par d’autres menaces, dans une Union menaçant de se déliter, alors que le voisin grec est confronté à un défi migratoire lancé par le Grand Turc membre de l’Alliance, mais cependant engagé dans une stratégie de retour de puissance par le truchement d’une affirmation médiévale religieuse clairement hostile, aller gesticuler militairement aux ordres de Washington aux frontières de la Russie qui n’est depuis longtemps plus une menace militaire directe, traduit pour le moins une catalepsie intellectuelle, confinant à la perte de l’instinct de survie.

Il faut rechercher les racines de ce naufrage dans notre passé récent. S’étant abîmée à deux reprises au 20ème siècle dans le nihilisme suicidaire, la 2ème fois dans une abjection morale impossible à justifier, l’Europe a, en dépit des vastes apports de ses « lumières », perdu les ressorts moraux de l’estime de soi, condition première d’une affirmation de puissance.

Plus encore, le sillage mental de cet héritage insupportable véhicule toujours un parasitage du jeu démocratique. Interdisant à la pensée conservatrice de s’exprimer, la mémoire du génocide raciste plombe toutes les politiques de contrôle des flux migratoires et de répression des incivilités, y compris celles menaçant clairement l’intégrité du territoire.

Cette dépression morale de la Vieille Europe a conduit à son effondrement stratégique, laissant libre cours à l’empiétement américain. De ce point de vue, il n’est pas étonnant que l’Allemagne se soit aussi longtemps affirmée comme le premier point d’appui stratégique de l’Amérique en Europe.

Ajoutons que les accusations qui, dans ce contexte, où les menaces ont radicalement évolué, soupçonnent l’Amérique de perpétuer une mentalité de guerre froide hors du temps, ne manquent pas de pertinence. Le blocage politique antirusse de toutes les élites américaines confondues s’articule à l’obsession stratégique de perpétuer la raison d’être de l’OTAN, un des principaux adjuvants de la prévalence américaine après 1949.

Notons cependant que, sévèrement critiqué par sa propre bien-pensance, Trump qui harcèle verbalement l’Europe en même temps que la plupart de ses alliés, est, au contraire de son administration et du complexe militaro-industriel, favorable à un rapprochement avec la Russie.

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Conclusion

Dans ce contexte dont il faut bien reconnaître que la trajectoire générale est à rebours de la décision de rupture gaullienne de 1966, que faire pour nous libérer de l’emprise américaine et initier un rapprochement avec Moscou ? Tirant le bilan des avantages / inconvénients de notre retour dans le commandement intégré avec cependant des responsabilités opérationnelles réduites, devrions-nous, balayant tous les inconvénients, tourner le dos à Washington désormais considéré par beaucoup comme un hostile ?

Le Dao chinois affirme que « la réalité se construit du battement des contraires ». Illustrant le mouvement cosmologique et la succession cyclique des saisons, la vision porte également sur les interactions entre les situations, les hommes et leurs organisations. Elle spécule que tout changement est le résultat d’une contrainte adverse, sans être nécessairement un affrontement hostile.

Dans le cas qui nous occupe, il est illusoire de croire que, sans une pression significative, les États-Unis modifieraient à la fois leur attitude de suzerain à l’égard des membres de l’alliance et leur hostilité anachronique avec la Russie.

L’épidémie qui frappe le monde bouleverse les routines et les repères. Elle met à jour les dysfonctionnements et les incohérences. Propice aux introspections, elle rappelle qu’à la chute de l’URSS, l’OTAN, saisie par un hubris de puissance a exercé de lourdes pressions sur les marches de la Russie, au-delà des frontières allemandes, mettant la sécurité de l’Europe en danger. Du coup, la crise incite à revenir à l’essentiel du régalien : la sécurité de la France et l’indépendance de sa diplomatie dont on voit bien qu’elles ne peuvent être abandonnées à d’autres.

Le moment est venu de tenter une pression sur Washington en engageant un dialogue stratégique avec Moscou. Si la France se dispensait de participer à certains manœuvres de l’OTAN aux portes de la Russie, anticipant une menace militaire classique aujourd’hui évaporée, elle sonnerait le réveil de la raison, « coup de cymbale » adressé à Washington et Moscou signifiant la fin des léthargies. Le but ne serait pas un renversement d’alliance, mais un rééquilibrage.

Au demeurant, l’initiative marquant le retour de notre indépendance n’a que trop tardé quand on songe que dans le document officiel « Joint Nuclear opérations»* référencé JP-3-72 récemment analysé par la Fondation pour la Recherche Stratégique le Pentagone planifie l’emploi d’armes nucléaires tactiques sur le théâtre européen dans les phases conventionnelles du combat aéroterrestre y compris celles impliquant les forces spéciales. Ce concept est scénarisé et mis en œuvre dans le prochain exercice OTAN Defender 2020 dans lequel l’envahisseur de certains pays européens est clairement désigné.

Si l’exercice a lieu, il devrait permettre de valider sur le papier l’emploi éventuel de nouvelles armes nucléaires tactiques sous contrôle des États-Unis que le traité INF de 1987 interdisait jusqu’en 2019. La France, en participant à cet exercice comme membre de la structure militaire intégrée de l’Otan cautionnerait cette nouvelle stratégie en contradiction complète avec la doctrine française de dissuasion qui refuse toute bataille nucléaire.

Surtout elle apporterait, involontairement, sa caution à la réactivation de la guerre froide avec la mise au ban occidental de la Fédération de Russie présentée comme l’agresseur potentiel principal des pays européens. Ce qui est, là également, en contradiction avec l’orientation actuelle de la diplomatie française qui vise un rapprochement avec la Russie.

Pour éviter que l’initiative d’un désistement français soit perçue comme une provocation par les pays baltes et les PECO, il serait nécessaire de placer la manœuvre diplomatique dans un contexte européen. Paris donnerait l’élan en coordination étroite avec l’Allemagne.

Dans cette démarche gardons-nous de deux écueils : le premier serait de tourner le dos à Washington, « Il s’agit de faire l’Europe sans rompre avec les Américains, mais indépendamment d’eux », répétait Charles de Gaulle ; le deuxième serait la tentation fédéraliste, tant il est vrai que « l’arbitraire centralisation provoquera toujours, par chocs en retour, la virulence des nationalités. (…) L’union de l’Europe ne saurait être la fusion des peuples (…) Mais elle peut et doit résulter de leur systématique rapprochement. » (Charles de Gaulle, Mémoires d’espoir).

Pour le Cercle de Réflexions Interarmées. Général (2S) François Torrès, Général (2S) Jean-Claude Rodriguez, Général (2S) Jean-Serge Schneider, Général (2S) Grégoire Diamantidis, Général (2S) Marc Allamand, Général (2S) Jean-Pierre Soyard, Contre-Amiral (2S) François Jourdier, Général (2S) Jean-Claude Allard, Général (2S) Christian Renault, Capitaine de Vaisseau (ER) Alexis Beresnikoff,

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Quand le Covid-19 contamine le "Pacte du Quincy"...

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Quand le Covid-19 contamine le "Pacte du Quincy"...

par Richard Labévière

Ex: http://prochetmoyen-orient.ch

Le président des Etats-Unis ne conseille pas seulement aux victimes du Covid-19 de se désinfecter les poumons à l’eau de javel, il menace aussi ses grands amis saoudiens de retirer toutes ses troupes de la péninsule arabique, si Riyad ne cesse pas sa guerre des prix du pétrole, de connivence avec la Russie. Dans un appel téléphonique au prince héritier saoudien Mohammad ben Salmane (MBS) – début avril -, Donald Trump a expliqué, en substance, que les pays producteurs devaient réduire l’offre mondiale de pétrole en raison de l’effondrement de la demande consécutive à la pandémie du Covid-19.

Au cours de la conversation téléphonique, Donald Trump aurait à peu près tenu ce langage à MBS : à moins que les pays membres de l’Organisation des pays exportateurs de pétrole ne réduisent leurs productions, je ne pourrai empêcher la Chambre des Représentants et le Sénat d’adopter une loi décidant le retrait des soldats américains qui assurent la protection de la monarchie wahhabite.

Apparemment, le prince héritier n’en a pas cru ses oreilles, à tel point – selon Reuters – qu’il aurait demandé à ses collaborateurs de quitter la salle afin de poursuivre la conversion en privé… Le téléphone raccroché, le locataire de la Maison blanche a aussitôt « tweeté » qu’il espérait que le « chef de facto » du royaume réduise la production saoudienne de plusieurs millions de barils !

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Verbatim : « je viens de parler à mon ami MBS d’Arabie saoudite, qui a parlé avec le président Poutine et je m’attends à ce qu’il réduise d’environ 10 millions de barils/jour la production saoudienne et peut-être beaucoup plus. Si cela arrive, cela sera bénéfique pour l’industrie du pétrole et du gaz… ». Dans un « tweet » suivant, il a ajouté : « Si l’Arabie saoudite pouvait diminuer sa production de 15 millions de barils/jour, ce serait une grande et bonne nouvelle pour tout le monde ».

Après avoir déchiré l’accord de la COP-21 de Paris sur le réchauffement climatique, l’accord sur le nucléaire iranien ( signé en format 5 plus un :les membres permanents du Conseil de sécurité de l’ONU et l’Allemagne) du 15 juillet 2015 à Vienne obtenu après quinze ans d’âpres négociations, celui sur les missiles de portée intermédiaire, suspendu le financement de plusieurs agences de l’ONU dont l’OMS tout récemment, fragilisant ainsi toutes espèces d’approches et de négociations multilatérales, Donald Trump donne un sérieux coup de canif à l’un des principaux piliers de la diplomatie américaine en vigueur depuis la fin de la Seconde guerre mondiale : le Pacte du Quincy.

UN PACTE HISTORIQUE DE 75 ANS

Au retour de la conférence de Yalta (14 février 1945), le président des Etats-Unis Franklin Roosevelt convoque le roi Ibn Séoud – le fondateur du royaume d’Arabie saoudite – à bord du croiseur lourd USS-Quincy (CA-71) qui mouille dans le lac Amer, au beau milieu du canal de Suez.

Débattant d’abord de la colonisation juive en Palestine, Roosevelt cherche à obtenir l’appui du roi saoudien en faveur de l’établissement du « foyer national juif en Palestine » que le Royaume-Uni a promis au baron Rothschild par la Déclaration Balfour (2 novembre 1917). Face à un refus catégorique du monarque wahhabite, la discussion glisse ensuite sur la Syrie et le Liban afin d’écarter définitivement la France de ces deux pays.

Enfin, les deux chefs d’Etat abordent la question de l’avenir de la dynastie saoudienne et du pétrole arabe. Traumatisée par le blocus japonais de la Seconde guerre mondiale qui a coupé les Etats-Unis d’un accès aux matières premières – gaz, pétrole et caoutchouc -, la Maison blanche considère désormais que ce type d’approvisionnement relève de la sécurité nationale. Profitant des incertitudes qui pèsent sur l’avenir de la famille Saoud – qui n’a aucune légitimité à gérer les lieux saints de l’Islam (La Mecque et Médine) face à la dynastie historique des Hachémites – Roosevelt propose un premier marchandage « pétrole contre sécurité ». Autrement dit, laissez les compagnies pétrolières américaines exploiter les plus grandes réserves d’hydrocarbures du monde. En contrepartie, les Etats-Unis d’Amérique protégeront le maintien en place et la reproduction de votre dynastie ploutocrate…

ibn-seoud-635677-264-432.jpgL’historien français Jacques Benoist-Méchin (1901 – 1983) relate avec une grande précision comment les deux chefs d’Etat ont noué ce marchandage du siècle. Le résultat de cette discussion s’articule en quatre points : 1) la stabilité de l’Arabie saoudite fait partie des « intérêts vitaux » des États-Unis qui assurent, en contrepartie, la protection inconditionnelle de la famille Saoud et accessoirement celle du Royaume contre toute menace extérieure éventuelle ; 2) par extension, la stabilité de la péninsule arabique et le leadership régional de l’Arabie saoudite font aussi partie des « intérêts vitaux » des États-Unis ; 3) en contrepartie, le Royaume garantit l’essentiel de l’approvisionnement énergétique américain, la dynastie saoudienne n’aliénant aucune parcelle de son territoire. 

Aramco, à l’époque américaine, bénéficie d’un monopole d’exploitation de tous les gisements pétroliers du royaume pour une durée d’au moins soixante ans ; 4) les autres points portent sur le partenariat économique, commercial et financier saoudo-américain ainsi que sur la non-ingérence américaine dans les questions de politique intérieure saoudienne. La durée de cet accord est prévue pour une durée de 60 ans. Ce pacte a été renouvelé pour une nouvelle période de 60 ans, le 25 avril 2005 lors de la rencontre entre le président George W. Bush et le prince héritier Abdallah à Crawford (Texas).

Auparavant dès 1933, le roi wahhabite avait déjà concédé à la Standard Oil of California (SOCAL) une concession de 60 ans concernant l’est de l’Arabie saoudite, concession partagée avec la Texas Oil Company (Texaco) à partir de 1936. Le même accord est étendu en superficie en 1938, intégrant en 1948 la Standard Oil of New Jersey (Esso) et la Standard Oil of New York (Socony) au sein de l’Aramco. Les promesses verbales de Roosevelt concernant le « foyer national juif » – renouvelées par écrit dans une lettre datée du 5 avril 1945 – seront actées par le président Truman, qui va favoriser la fondation d’Israël en 1948.

Depuis la signature de ce pacte, le Pentagone dispose d’unités de ses services spéciaux déployées dans l’ensemble de la péninsule arabique, assurant aussi le fonctionnement d’un véritable « pipeline » pour transférer à prix d’or noir des cargaisons d’armements parmi les plus sophistiqués dont les Saoudiens ne savent pourtant pas se servir, nombre de cargaisons sous emballages plastiques restant dans des entrepôts sous haute surveillance…

Mais cet accord permet surtout aux troupes américaines d’occuper et de « protéger » la reproduction de la ploutocratie wahhabite, favorisant ses initiatives diplomatiques, religieuses et militaires visant l’Iran chi’ite et la prétention géopolitique d’une domination sans partage de l’ensemble des mondes musulmans. Comme l’ont souligné de nombreux chercheurs comme Faouzi Skali et Alain Chouet1, cette politique américaine a favorisé une « wahhabisation » des islams d’Asie et d’Afrique, favorisant aussi l’expansion de l’Islam radical et du terrorisme, également en Europe et en France.

LA FIN DU PETROLE DE SCHISTE AMERICAIN

Selon une note blanche d’un service européen de renseignement : « plusieurs entreprises avaient pris l’engagement d’acheter une grande quantité de pétrole brut West Texas Intermediate à un certain prix. Le prix proposé par les vendeurs semblait bon marché au moment de la signature des contrats. La date de règlement des contrats était le 21 avril 2020. Mais cette fois, les vendeurs ont insisté pour livrer physiquement le pétrole aux acheteurs avant le paiement. Cela a posé un problème. Les acheteurs n’avaient pas la capacité de stockage nécessaire pour accepter le pétrole qu’ils avaient acheté il y a plusieurs mois. Ils ne pouvaient le stocker nulle part. La seule solution était de vendre immédiatement à quelqu’un d’autre. Mais personne n’était intéressé. Tous avaient déjà rempli leurs capacités de stockage. Les sociétés qui avaient l’obligation d’accepter le pétrole des producteurs ont alors proposé de payer d’autres personnes pour prendre leur pétrole. Lorsque le prix a commencé à être négatif, la décision a été prise de proposer un stockage supplémentaire à moins 50 dollars. Finalement, le contrat d’option de Mai du West Texas Intermediate a été clôturé à moins 37 dollars ».

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Pour la première fois de leur histoire, les contrats à terme sur le pétrole West Texas Intermediate (WTI) se sont négociés en valeur négative sur le New York Mercantile Exchange (Nymex) et le brut américain prévu à la livraison en Mai a perdu 55,90 dollars en une journée pour clôturer à moins 37,63 dollars le baril ! Cette chute vertigineuse est en partie le résultat de la liquidation forcée sur le marché à terme « à tout prix ». En fait, l’effondrement des prix s’explique par l’accroissement des cargaisons bloquées par les raffineries qui réduisent leur production, puisqu’elles ne peuvent vendre leurs produits sur un marché où la demande s’est asséchée à cause de la propagation de la pandémie du Covid-19. Le prix négatif élevé « signifie que le stockage est au maximum de ses capacités », a déclaré Albert Helmig, PDG de la société de conseil Grey House et ancien vice-président du Nymex.

La plupart des grands pays consommateurs sont encore en situation de confinement. Le trafic aérien mondial a diminué de plus de 80 % et la demande d’essence et d’autres produits pétroliers raffinés est faible. Conséquence structurelle majeure pour l’économie américaine : les producteurs de pétrole de schiste ont déjà réduit une partie de leur production, mais ils devront la réduire encore beaucoup plus. Le nombre de plates-formes pétrolières et gazières américaines en activité est passé de plus de 1 000 l’année dernière à 529, la semaine dernière. Elle pourrait tomber en dessous d’une centaine durant les prochaines semaines.

La production de pétrole de schiste nécessite un prix du baril à environ 45 dollars. Actuellement, aucun producteur américain de pétrole de schiste ne peut atteindre ce prix plancher. Tous sont déjà très endettés et envisagent de fermer leurs puits. Une fois fermés, les puits ont tendance à se boucher et nécessiteront d’importants travaux coûteux pour être réouverts. Dans ces conditions, il est peu probable qu’ils soient de nouveau rentables au cours des deux à cinq prochaines années, voire jamais, puisqu’il n’y a aucune raison de s’attendre à ce que le pétrole brut atteigne à nouveau son précédent pic aux environs de 100 dollars le baril.

Aujourd’hui, la dette totale des producteurs américains de pétrole de schiste est estimée à plus de 200 milliards de dollars. Selon certains experts, cette situation pourrait même engendrer un effondrement du système bancaire américain et la situation de l’Arabie saoudite aggrave ces perspectives !

LA DICTATURE WAHHABITE FRAGILISEE

En effet avec le Covid-19, les mauvaises nouvelles s’accumulent pour la dictature wahhabite : exacerbation des tensions régionales, enlisement saoudien dans le conflit yéménite (depuis 2015) et guerre des prix du pétrole liée à la récession amorcée par la pandémie.

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Avec un prix du baril qui plafonne aux alentours de 20 dollars depuis Mars, Riyad devrait connaître un accroissement de son déficit budgétaire, déjà estimé à hauteur de 6,6 % de son PIB pour 2020. Début avril, la monarchie a demandé aux agences d’État d’amputer leur budget en cours d’au moins 20 % pour faire face à la baisse du prix du baril. Le budget 2020 avait déjà été revu à la baisse avec une réduction de 8 % des dépenses. En fait, l’Arabie saoudite a besoin d’un prix du pétrole d’au moins 85 dollars le baril pour équilibrer le déficit budgétaire de son gouvernement et d’au moins 50 dollars le baril pour équilibrer les comptes courants. Selon plusieurs prévisionnistes, ces deux déficits vont s’aggraver par rapport au prix actuel du pétrole et le déficit budgétaire notamment sera beaucoup plus important, au moins à hauteur de 15 % du PIB.

L’impact économique du Covid-19 remet en question certaines perspectives du plan « Vision-2030 », en particulier les plans pour NEOM – mégalopole du futur qui devait s’installer dans le Nord-Est saoudien. Les nouvelles politiques du « divertissement » et du « tourisme », pierres angulaires initiales du plan, seront fortement impactées, sinon abrogées.

La dictature wahhabite se trouve ainsi dans une situation très délicate qui n’est pas sans conséquences politiques et géopolitiques. Riyad se retrouve de plus en plus isolé, du moins avec des alliés sur lesquels elle ne peut plus systématiquement compter, dans un environnement toujours plus hostile. Cette évolution explique partiellement pourquoi depuis quelques mois la dictature wahhabite essaie de jouer l’apaisement avec Téhéran et cherche une porte de sortie à la guerre au Yémen.

MBS lui-même a dû revoir à la baisse ses ambitions de transformer la monarchie et de devenir le leader incontesté du monde sunnite. Dans cette conjoncture, il durcit le régime et réprime toute personne ou organisation susceptible de contester son pouvoir personnel. Accusés de trahison, quatre membres de la famille royale ont été arrêtés le mois dernier, dont le dernier frère vivant du roi Salmane – Ahmad ben Abdelaziz – et l’ancien prince héritier Mohammad ben Nayef.

Toujours à cause du Covid-19, la suspension « temporaire » de la omra (le petit pèlerinage) et la possible annulation du hajj (le grand pèlerinage annuel à La Mecque), sont d’autres défis. La défection des quelque deux millions de pèlerins qui étaient attendus en Juillet prochain risque d’affecter la légitimité des Saoud, censés être gardiens des lieux saints. On peut en tout cas s’attendre à une recrudescence d’attaques politiques ciblant personnellement MBS.

MBS avait aussi beaucoup misé sur le prochain G-20 qui devrait se dérouler à Riyad en Novembre prochain. Celui-ci risque d’être annulé ou de se tenir par visioconférence. Mais la dictature wahhabite devra affronter une échéance encore plus décisive avec l’élection présidentielle américaine. Alors que la monarchie pâtit d’une image de plus en plus négative aux Etats-Unis, particulièrement dans le camp démocrate, le prince-héritier devrait beaucoup prier pour une nouvelle victoire de Donald Trump. Dans le cas contraire, le cauchemar pourrait s’avérer de plus grande ampleur pour la dynastie des Saoud.

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LE RETOUR DE L’IRAN ?

La Maison Blanche a déchiré l’accord sur le nucléaire iranien le 8 mai 2018. La semaine dernière, Le New York Times indiquait que les États-Unis veulent maintenant y revenir : « Le secrétaire d’État Mike Pompeo prépare une singulière volte-face affirmant que les États-Unis sont toujours partie prenante à l’Accord nucléaire iranien auquel le président Trump a pourtant renoncé, dans le cadre d’une stratégie complexe visant à faire pression sur le Conseil de sécurité des Nations unies pour qu’il prolonge un embargo sur les armes à destination de Téhéran ou qu’il impose de nouvelles sanctions beaucoup plus sévères contre ce pays… ».

Dans cette perspective, Mike Pompeo est en train de bricoler un plan qui ne peut qu’inquiéter les pays européens : les États-Unis prétendent, en substance, qu’ils restent légalement « partie-prenante » de l’accord nucléaire – mais seulement pour invoquer un « retour à la case départ » qui permettrait de rétablir les sanctions de l’ONU contre l’Iran, les mêmes qui étaient en vigueur avant l’accord. Si l’embargo sur les armes n’est pas renouvelé, les États-Unis feraient valoir leur « droit » de pays membre originel de l’accord. Cette mesure obligerait à rétablir le large éventail de sanctions qui interdisaient les ventes de pétrole et les arrangements bancaires avant l’adoption de l’accord en 2015. L’application de ces anciennes sanctions serait, en théorie, contraignante pour tous les membres des Nations unies.

Désormais pris à son propre piège, l’administration américaine cherche non seulement à imposer de nouvelles sanctions à l’Iran, mais veut forcer Téhéran à renoncer à toute prétention de préserver l’accord de l’ère Obama. Ce n’est qu’en le brisant « de l’intérieur », disent plusieurs hauts fonctionnaires américains, que l’ayatollah Ali Khamenei et le président Hassan Rouhani seraient contraints de négocier un tout nouvel accord conforme aux intérêts de Donald Trump qui a fait de ce dossier l’un de ses principaux arguments électoraux pour l’élection présidentielle de novembre prochain.

Le plan Pompeo ne peut fonctionner. Il n’y aura pas de « retour à la case départ » pour les sanctions et l’Iran s’en tiendra à l’accord. L’option de retour à la case départ fait partie du mécanisme de règlement des différends prévu aux articles 36 et 37 de l’accord. Le site UN Dispatch en donne une brève description : « L’accord … crée un panel de huit membres, appelé « Commission conjointe », qui servira de mécanisme de résolution des litiges. Les membres de ce panel sont les cinq membres du Conseil de sécurité ayant le droit de veto, plus l’Allemagne, l’Iran et l’Union européenne. Il y a huit membres au total. Si une majorité estime que l’Iran a triché, la question est renvoyée au Conseil de sécurité. Aucun pays ne dispose d’un droit de veto ».

Selon l’accord nucléaire le Conseil de sécurité ne peut imposer de nouvelles sanctions. En fait, le Conseil de sécurité doit décider s’il continue ou non à lever les sanctions en vigueur. S’il ne le fait pas, les anciennes sanctions restent en vigueur. Ce cadre évite la perspective d’un veto russe et garantit que si les pays occidentaux pensent que l’Iran triche, les sanctions seront automatiquement réimposées.

Les États-Unis ne participent plus à la « commission conjointe » et ne peuvent donc pas déclencher le processus. Il n’y aura pas non plus de majorité pour soumettre le désaccord au Conseil de sécurité des Nations unies. Dans sa résolution 2231, le Conseil de sécurité des Nations unies a également établi que seuls les participants à l’accord peuvent déclencher un processus de retour en arrière. Le fait que les États-Unis déclarent aujourd’hui être toujours un « État participant » à l’accord sera considéré comme une véritable farce par tous ceux qui se souviennent des remarques de l’administration Trump concernant la décision d’en sortir ! Un diplomate européen de haut rang a déjà rejeté « le plan Pompeo », estimant que celui-ci « était parfaitement farfelu, irréaliste et indécent. On ne peut pas piétiner à longueur de journée le multilatéralisme et, en même temps, lui imposer des virages à 360 degrés ! ».

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L’article du New York Times conclut : « la stratégie de l’administration pourrait bien fonctionner, même si d’autres membres des Nations unies ignoraient cette initiative. A ce moment-là, sur le papier du moins, les Nations Unies retourneraient à toutes les sanctions contre l’Iran qui existaient avant que M. Obama ne signe l’accord avec Téhéran… Pourtant, seuls les participants à l’accord peuvent déclencher un tel processus de retour à la case départ. Or, les États-Unis ne sont plus reconnus en tant que participant effectif ».

Il est peu probable que les pays européens acceptent la dernière initiative de Washington. En janvier dernier, ils ont fait savoir qu’ils déclencheraient le mécanisme de règlement des différends qui prévoit une relance des sanctions, parce que l’Iran a dépassé certaines limites de l’enrichissement d’uranium. L’Iran a répliqué en faisant valoir qu’il était toujours dans les limites de l’accord et a ensuite menacé de quitter le traité de prolifération nucléaire si les Européens continuaient dans cette voie. Depuis, on observe le plus grand silence des Européens, dont plusieurs chancelleries admettent que le bras de fer déclenché par les Américains est en train de tourner à l’avantage de l’Iran.

En effet, à force de vouloir absolument faire rendre gorge à l’Iran – et ce par les moyens les plus tordus -, Washington pousse non seulement Pékin, Moscou et Ankara à soutenir davantage Téhéran, mais aussi les pays européens à se dissocier de cet objectif qui tourne à l’obsession. Plusieurs pays arabes – sunnites -, pas seulement le Qatar, et non des moindres, comme l’Egypte sont aussi en train de ce dissocier de cet « iran-bashing » en train de tourner à l’hystérie.

Un haut-diplomate européen qui a longtemps été en poste a Téhéran conclut : « Comment les Européens pourraient-ils accepter les dernières manipulations de Mike Pompeo alors que Washington leur crache dessus depuis plusieurs mois ! En définitive et malgré les difficultés économiques et politiques qui frappent l’Iran, il se pourrait bien que la pandémie du Covid-19 favorise, à terme, un singulier retour politique et géopolitique de Téhéran… ».

En attendant, bonne lecture. A la semaine et continuez à bien prendre soin de vous.

Richard Labévière
4 mai 2020

1 Alain Chouet : Au cœur des services spéciaux – La menace islamiste : fausses pistes et vrais dangers. Editions La Découverte, Paris, 2011.

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La crise des crises: du sanitaire au véritaire

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La crise des crises: du sanitaire au véritaire

par François-Bernard Huyghe

Ex: http://www.huyghe.fr

C’est la méga-crise. D'abord sanitaire, elle suscite en cascade une crise financière et économique (de l'offre et de la demande), sociale et politique, du travail et du loisir, technologique (rôle du numérique) et géopolitique, culturelle et idéologique, sans doute écologique et quasi anthropologique de notre rapport avec le danger et la mort. Et ne parlons pas de la crise de l’autorité scientifique et de la prévision ou de la vérité. Le virus est le déclencheur ou le révélateur de contradictions latentes et de conflits oubliés.

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Toutes ces crises induites ont pour caractéristiques d'avoir été suscitées par les premières réactions à la pandémie, comme de confiner la moitié de la population de la Terre, donc par la gestion de crise. Nul n'avait songé à le faire lors de la grippe de Hong Kong en 1968 qui tua un million de personnes, dont 17.000 en France. Entre accepter les coups du destin et vouloir sauver les vies "à tout prix", le choix est éthique (Agamben : « Peut-on suspendre la vie pour la protéger ? »). Mais la seconde option suppose l'autorité de l'État, la croyance des citoyens (qui détermine leur comportement vertueux) et la base de la Vérité scientifique.

Du coup, la méga-crise devient méta-crise - crise des conditions qui définissent la crise-. Elle remet en cause le cadre dans lequel elles étaient pensées jusqu’ici ; elles étaient récurrentes, admises, mais entraient dans les calculs politiques ou économiques : gestion, communication, cellule de crise, crise de réputation, crise sanitaire, industrielle, e-crise, cybercrise, etc. Toutes ces notions suggéraient que c’était un défi et une opportunité de se réformer et de se moderniser. Et une incitation innover, mais dans la même direction. Les premiers de cordée comme nos gouvernants ont certainement, à l‘ENA ou en entreprise, travaillé sur des scénarios de « com de crise ». Même l’auteur de ces lignes enseigné la matière.

Or les crises induites se chevauchent ou se contredisent : comment sortir de la crise sanitaire sans aggraver la crise économique ? Ou comment défendre nos intérêts géopolitiques demain face à de nouvelles hégémonies sans risques économiques ou sociaux nouveaux de déstabilisation ? Telles sont les équations à résoudre.

S'ajoute un singulier rapport avec la réalité : l'épidémie devient infodémie. La mésinformation concurrence l'information fiable ; le doute se répand, surtout dans le domaines scientifique - causes, modes de propagation, efficacité des mesures et des médicaments, anticipations et probabilités, thèses farfelues... - au moment, précisément, où le politique s'appuie sur la légitimité de la science et des experts pour justifier ses décisions. Les interprétations complotistes prolifèrent.

07dc5871f5a46f58375dd92e2728eb22.jpgToutes ne sont peut-être pas innocentes. Les USA (dans une moindre mesure l'UE) dénoncent la guerre de l'information menée par la Chine. En sens inverse, Pékin stigmatise l'infoguerre venue de l'Ouest. Les gouvernements sont tentés de combattre la mésinformation en ligne en certifiant certains contenus. Notre pays vient d’inventer une plateforme en ligne qui trie les articles sur la pandémie « sûrs et vérifiés ». Sous l’égide de Sibeth Ndaye. Fact-checking pour start-up nation.

Plus efficace que la censure (binaire : message autorisé / non autorisé), la chasse aux fakes et au complotisme agit sur le code (le critère du crédible). Cela incite le citoyen à un auto-contrôle (en lui disant "ne soyez pas dupes"). Cette information AGDG (Avec Garantie Du Gouvernement) évoque un peu Miniver d’Orwell ou le « bureau de l’esprit public » de 1792. Le spectre de la manipulation justifie une prise de contrôle.

Elle se heurte au constat non pas que ce gouvernement ait été plus menteur qu’un autre, mais que, sur le confinement, les masques, les tests, la peur "pire que le virus", les frontières et à peu près toutes les mesures qu'il a fini par prendre, il a professé deux vérités successives au moins. L’État séducteur se fait maintenant État vérificateur et État-média. État maternant aussi : son souci du care le pousse à nous préserver des fables nocives. Nounou, raconte moi une vérité.
Dernière minute: Mais il y a des résistances. Le 30 avril, le gouvernement lançait sa plateforme Désintoxcoronavirus destinée à indiquer les "bonnes" sources d'information et à dissiper les "infox" sanitaires. Et... la retirait cinq jours plus tard, face aux protestations des rédactions. Subissant un procès en incompétence et une crise de crédibilité sans précédents, le pouvoir ne veut pas se donner en plus l'image de la censure indirecte (sources fiables contre fakes). C'est un premier échec pour une stratégie de contrôle idéologique qui disqualifie l'adversaire comme propagateur de faux et de théories complotistes - donc exclu du domaine de l'opinion libre puisque sorti de celui de la réalité-.

Un danger dévoilé - Contre la société des Ombres

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Daniel Cosculluela:

Contre la société des Ombres

« Elle est devenue ingouvernable, cette « terre gâtée » où les nouvelles souffrances se déguisent sous le nom des anciens plaisirs; et où les gens ont si peur. Ils tournent en rond dans la nuit et ils sont consumés par le feu. Ils se réveillent effarés, et ils cherchent en tâtonnant la vie. Le bruit court que ceux qui l'expropriaient l'ont, pour comble, égarée».
Guy Debord.

Une question mérite d'être posée qui ne l'est qu'accessoirement. Au-delà et par-delà la signification politique du voilage islamique, existe-t-il un impact en terme de santé, nuisance ou bénéfice ? ...


Les recherches auxquelles nous nous sommes livrées ne nous ont pas permis de découvrir de bénéfices avérés .... si ce n'est d'éviter les coups de soleil !


Dans le champ des nuisances les entrées sont plus nombreuses.


Mais il importe tout d'abord de souligner que même dans les milieux qui prônent le voilement des femmes, cette imposition ne concernerait les filles qu'à partir de la puberté. Mais des voix de plus en plus nombreuses et écoutées insistent pour recommander le port du voile le plus précocement possible. Et l'on observe dans les espaces publics, au-delà des théocraties musulmanes, des fillettes pré-pubères enveloppées de sombres voiles hermétiques. Si l'on en croit l'lmam saoudien Abdallah Daoud, le voilement intégral dès la naissance viserait à protéger l'enfant de la convoitise sexuelle des hommes « ..... pour ne pas tenter les pervers » (ouma.com le 04/02/2013),

Nous allons examiner le problème dans trois directions :

- La santé physique
La carence en vitamine D engendre une hypovitaminose résultant d'une faible exposition solaire quotidienne. Des études l'attestent, paradoxalement(!), tant dans des pays tels que la Jordanie et le Maroc que dans les pays nordiques. Le problème est le même chez les femmes juives orthodoxes pour les mêmes raisons.


De ce fait, s'observe une ostéoporose, un trouble de la densification des dents et donc un trouble du développement (rachitisme, retard de croissance, diminution des défenses immunitaires, hypotonie musculaire, fatigabilité, convulsions hypo-calcémiques).
De plus le port prolongé du voile autour des cheveux peut majorer la séborrhée du cuir chevelu et s'accompagner de chutes de cheveux, voire d'alopécie.

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- La santé mentale
Le voile enferme les fillettes dans une double contrainte, d'une part une hyper-sexualisation liée au risque d'attentat sexuel dont elles pourraient faire l'objet de par leur seul statut féminin, d'autre part une infantilisation par le pré-supposé de la résistance ou dénégation que l'enfant peut opposer à la sollicitation. Cela freine donc le développement affectif et cognitif, limite les déplacements géographiques (risqués par essence) et entrave le développement intellectuel et la curiosité naturelle qui le porte.


Cela conduit l'enfant à ne se promouvoir que comme reproductrice, gardienne d'une intimité domestique.


Ce qu'observant le Docteur Aslem Lazaar Selimi (06 avril 2016) déclare:« il faut sauver {es petites filles. Je suis psychiatre à l'hôpital de Nabeul (Tunisie), et tous les jours, des médecins m'adressent des petites filles voilées, pour « troubles psychogènes»!!!! Facile pour moi d'identifier l'origine de ces troubles, pas besoin d'être psy pour comprendre qu'un voile/ ça voile !! ».


- La santé sociale
Le voile est une entrave au développement relationnel qui, nonobstant les règles le déterminant, est le fondement de toute société (et éventuellement civilisation). Le modèle culturel ainsi promu ne participe guère du développement de la gent féminine mais surtout, sinon essentiellement, il menace nos fondements civilisationnels. A ce titre il n'est ni discutable, ni tolérable. Et si quelques féministes intellectuellement décharnées le tolèrent ou le promeuvent, ça n'est là que l'expression de la seule chose que (disait Jacques Lacan): "La psychanalyse ne peut pas soigner: la connerie !!".

Daniel Cosculluela.

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vendredi, 08 mai 2020

Entretien avec Jean-Yves Le Gallou: fausses nouvelles et vrais bobards

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Entretien avec Jean-Yves Le Gallou: fausses nouvelles et vrais bobards

Jean-Yves Le Gallou, fondateur de Polemia et spécialiste des médias, analyse le traitement des informations durant le confinement.

  Durant cette période d’épidémie, la moisson n’a-t-elle pas été particulièrement fructueuse pour vous qui traquez les fausses nouvelles ?

— Si. Les fausses nouvelles ont été doublement systémiques : nous avons eu des fausses nouvelles gouvernementales, précieusement relayées par les médias. Ainsi quand l’ineffable Sibeth Ndiaye et le petit arrogant Véran ont affirmé que les masques étaient inutiles, Le Parisien a publié une infographie pour illustrer la « vérité » gouvernementale. Quand, un mois plus tard, le gouvernement a expliqué que les masques seraient obligatoires après le déconfinement, Le Parisien a repris son infographie pour se caler sur la nouvelle vérité officielle…

N’y a-t-il pas eu – encore plus nettement que d’habitude – la dénonciation par les médias de prétendues « fausses nouvelles » d’une part et, d’autre part, la diffusion de leurs propres bobards ?

— Oui. Sur l’origine du virus, on nous a obligés dans un premier temps à croire que le coupable c’était le pangolin : le pangolin, vous dis-je ! Evoquer l’hypothèse d’une sortie accidentelle du virus du laboratoire P4 de Wuhan, inauguré en 2017 par Cazeneuve, le Premier ministre de Hollande, et Yves Levy, le mari de Buzyn, c’était être « complotiste » ! Et les chasseurs de « fake news » vous dénonçaient. Aujourd’hui, c’est presque devenu une hypothèse mainstream relayée par les services spéciaux et les ministres des pays occidentaux. Macron lui même nous a dit « on nous a caché des choses ». Le découvreur du sida, le prix Nobel Montagnier, a même envisagé l’hypothèse d’une fabrication humaine. A son tour il a été accusé d’être « complotiste ».

Alors, accident de la nature ou accident scientifique ? Origine naturelle ou fabrication humaine ? Aujourd’hui nous ne connaissons pas l’origine du virus et il serait sage de le reconnaître.

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Qu’appelez-vous « l’Etat Big Mother » ?

41ER6ZP8YHL._SX284_BO1,204,203,200_.jpg— C’est à l’échelon de l’Etat la philosophie de la mère abusive qui s’impose : « Couvre-toi », « Mets ton sweat », « Ne sors pas, tu vas attraper froid ». Veran traite les Français comme des enfants. C’est très exactement ce que condamne Michel Schneider, l’auteur de Big Mother : « Ecoute, proximité, caresses, urgence, amour. Les hommes politiques jouent à la mère. Dirigeants n’osant plus diriger, citoyens infantilisés attendant tout de l’Etat : la France est malade de sa politique comme certains enfants le sont de leur mère » ! C’est le triptyque de la soumission : Big mother (infantilisation des Français), Big brother (surveillance générale), Big Other (priorité à l’immigré).

Vous n’hésitez pas à parler de « dictature Macron ». N’exagérez-vous pas?

— Hélas non, en novembre dernier nous avions consacré le Forum de la dissidence de Polémia à « La dictature Macron ». Pourquoi ? Parce que la logique du pouvoir est post-démocratique : imposer à l’opinion les dogmes du mondialisme, de l’immigrationnisme et la déconstruction de tous les héritages et traditions. La crise sanitaire – amplifiée par l’incurie gouvernementale – est une formidable occasion pour faire avancer les pions de l’idéologie dominante. La stratégie du choc est mise en oeuvre avec la dictature sanitaire : limitation de la liberté d’expression, sous couvert de lutter contre les « fake news » : dès mars, le préfet Solly, directeur de Facebook France, a annoncé le renforcement de la « régulation » – traduisez censure – sur les réseaux. Et labellisation de la parole officielle au nom de la lutte contre l’épidémie. Restriction de la liberté de circulation bien au-delà du strict nécessaire pour lutter contre l’épidémie (funérailles impossibles, fermeture des parcs, des forêts, des plages, etc.). Mise en cause de la liberté du culte catholique. Atteintes à la liberté de prescription médicale (chloroquine). Ce n’est peut-être pas encore le Goulag mais c’est un pas en avant dans le Moulag.

Pensez-vous qu’avec le déconfinement nous échapperons à cette « dictature sanitaire » ?

— Non, le déconfinement sera au contraire l’occasion d’inscrire dans le marbre de la loi certaines mesures prises lors de l’état d’urgence sanitaire. D’imposer dans la durée le principe de l’ausweisspour circuler. D’avancer dans le traçage électronique des citoyens. De remettre en cause le secret médical. En attendant le vaccin obligatoire avec puce électronique voulu par Bill Gates et l’OMS.

Certains rêvent d’un retour au moins partiel au souverainisme, leçon de cette épidémie. Y croyez-vous ?

— Dans cette affaire, certains ont fait un mauvais procès à l’Union européenne qui n’est en rien responsable des problèmes de santé qui restent du domaine des Etats, voire des Etats fédérés comme en Allemagne. C’est peut-être paradoxal, mais certains souverainistes sont les idiots du pouvoir qu’ils exonèrent de ses fautes en en rejetant la responsabilité sur Bruxelles. Le vrai combat à mener c’est celui contre l’idéologie dominante et les hommes qui la mettent en œuvre : que ceux-ci soient à Paris ou à Bruxelles ne change pas grand chose. Il ne faut pas se tromper de combat. L’épidémie de coronavirus a surtout montré la faillite de l’Etat francais emberlificoté dans des pratiques managériales (« qualité – contrôle – performance – pilotage ») aussi prétentieuses qu’inefficaces.

Quels effets cette épidémie semble-t-elle avoir sur l’immigration clandestine ? Va-t-on être plus regardant ?

D-Cohn-Bendit_7c5793ec5f1e8748077cd20662d9de9d.jpg— Je crains que non ! Le gouvernement Conte en Italie a annoncé qu’il allait régulariser 200 000 clandestins, soi-disant pour faire face aux besoins de l’économie. Et depuis l’Allemagne – où il échappe au confinement – Cohn Bendit nous explique que nous avons été sauvés par les livreurs dont beaucoup sont clandestins et qu’il faut les remercier en leur donnant des papiers. Quant au Conseil d’Etat, il a imposé la réouverture des guichets de demande d’asile.

Retiendrez-vous dans votre choix pour les prochains Bobards d’or la dénonciation d’une « messe clandestine » à Saint-Nicolas ou à Saint-André-de-l’Europe ?

— Le montage sur la « messe clandestine » à Saint-Nicolas-du-Chardonnet y trouvera sa place dans la catégorie Bobard coronavirus.

Une conclusion ?

— Dissidence ! Résistance ! •

Propos recueillis par Anne Le Pape

Photo :  Anne Le Pape

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Extrait de: Source et auteur

L’économie européenne devrait connaitre une récession de 7,5% en 2020… si tout se passe bien

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L’économie européenne devrait connaitre une récession de 7,5% en 2020… si tout se passe bien

par Ivan Lapchine

En communiquant ses nouvelles prévisions, le 6 mai, la Commission européenne a prévenu que «l'économie de l'UE connaîtra[it] une récession dans des proportions historiques cette année». Elle devrait être à peu près semblable pour la moyenne des 27 Etats membres et pour la seule zone euro, avec des contractions des produits intérieurs bruts (PIB) respectives de 7,5% et 7,75%. Une reprise est attendue en 2021 aux environs de 6% pour les deux ensembles.

L’ampleur du choc causé par le coronavirus se constate dans celle de la révision brutale des prévisions de la Commission :   elles ont été revues à la baisse d'environ neuf points de pourcentage par rapport à ce qui était envisagé à l’automne et de 6,5 points en seulement deux mois.

Tous les Etats membres ont été atteintes, mais pour l’année 2020, l’ampleur de la récession variera suivant les pays et la structure de leur économie. L’Espagne, la Grèce et le Portugal où le tourisme apporte habituellement une importante contribution économique seront les plus touchés avec près de 9% de contraction du PIB.

Le taux de chômage dans la zone euro devrait passer d’une moyenne de 7,5% en 2019 à 9,5% en 2020, avant de retomber à 8,5% en 2021. Dans l'UE, il devrait passer de 6,7% en 2019 à 9% en 2020, puis tomber à environ 8% en 2021. Certains Etats membres connaîtront une augmentation du chômage plus importante que d'autres. Ceux qui comptent une forte proportion de travailleurs sous contrat de courte durée et ceux dont une grande partie de la main-d'œuvre dépend du tourisme sont particulièrement vulnérables. Les jeunes qui entrent sur le marché du travail en ce moment auront également plus de mal à trouver leur premier emploi.

La zone euro proche de la déflation

Enfin, les prix à la consommation devraient chuter sensiblement cette année en raison de la baisse de la demande et de la forte baisse des prix du pétrole, qui, ensemble, devraient plus que compenser les hausses de prix isolées causées par les ruptures d'approvisionnement liées à la pandémie. La zone euro, se trouvera dangereusement proche de la déflation avec un indice de progression des prix de 0,2% en 2020, et à 1,1% en 2021. La situation ne sera guère meilleure pour la moyenne des 27 avec une inflation prévue à 0,6% en 2020 et 1,3% en 2021.

Après avoir baissé depuis 2014, le ratio dette publique/PIB devrait de nouveau augmenter en 2020. Dans la zone euro, il devrait passer de 86% à 102,75% et de 79,4% à 95% dans l’UE.

La Cour constitutionnelle allemande fixe un ultimatum à la #BCE et menace la zone #euro#Allemagne  #UE  #Economie

 https://t.co/huRi7VxTOEpic.twitter.com/OVSjb9cx65

— RT France (@RTenfrancais) May 6, 2020

Incertitude «exceptionnellement élevée» et risques «orientés à la baisse»

Dans son communiqué, la Commission européenne ajoute que ses prévisions «sont assombries par un degré d'incertitude plus élevé que d'habitude». En effet, elles se basent sur un scénario qui prévoit un déconfinement progressif de l’activité économique en Europe à partir de mai. Mais la commission prévient qu’«une pandémie plus grave et plus durable […] pourrait entraîner une baisse du PIB beaucoup plus importante».

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L’exécutif européen affirme avec insistance la nécessité d’un plan de relance coordonnée au niveau européen qu’elle prépare et espère faire accepter aux Etats membres malgré leurs divergences. Dans son communiqué la Commission européenne souligne qu’«étant donné l'interdépendance des économies de l'UE, la dynamique de la reprise dans chaque Etat membre affectera également la force de la reprise des autres Etats membres».

«Reprise collective» et «réponses coordonnées»

A ce sujet, Valdis Dombrovskis, vice-président de la commission a déclaré : «Notre reprise collective dépendra de la poursuite de réponses fortes et coordonnées aux niveaux européen et national. Nous sommes plus forts ensemble.»

Paolo Gentiloni, commissaire européen à l'économie, a pour sa part souligné que «tant la profondeur de la récession que la force de la reprise ser[aie]nt inégales, conditionnées par la vitesse à laquelle les fermetures peuvent être levées, l'importance des services comme le tourisme dans chaque économie et par les ressources financières de chaque pays». Et pour lui ces divergences entre les économies constituent «une menace pour le marché unique et la zone euro» qui peut toutefois être atténuée «par une action européenne commune et décisive».

Enfin, la Commission redoute un reflux de la mondialisation qu’elle caractérise par «des changements d'attitude plus radicaux et permanents à l'égard des chaînes de valeur mondiales et de la coopération internationale». Cette tendance, écrit-elle, «pèserait sur l'économie européenne très ouverte et interconnectée».

Ivan Lapchine

Extrait de: Source et auteur

De la “pandémie médiatique” : entretien avec François-Bernard Huyghe

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De la “pandémie médiatique” : entretien avec François-Bernard Huyghe

Ex: https://www.ojim.fr

Nous avons déjà présenté plusieurs ouvrages du médiologue François-Bernard Huyghe qui vient de publier en mai une nouvelle édition actualisée de son opus Fake news (“Manip, Infox et Infodémie”) aux éditions VA Press. Entretien.

Question : Vous venez de publier une nouvelle édition de Fake news, version entièrement remaniée de votre livre sur les « infox ». Il y a une telle actualité du faux qu’il faille compléter l’édition de l’année dernière ?

François-Bernard Huyghe : Il y a même urgence ! La preuve : après avoir fait adopter une « loi contre le manipulation de l’information » (en 2018), le gouvernement a envisagé de créer une plateforme « Désinfox coronavirus » pour contrer rumeurs et affabulations relatives à l’épidémie et suggérer de “bonnes” sources. Selon le mot de Debord, le système libéral “ne veut être jugé que sur ses ennemis” ; visiblement, le macronisme a choisi le registre “Fakes, complotisme, délire haineux et fantasmes extrémistes” pour disqualifier toute parole critique. Plutôt qu’à une censure du contenu (interdire de dire x ou y), on agit désormais sur le code (informations vérifiées — devinez par qui — versus manipulations ne relevant pas de l’opinion mais de la malfaisance). Le citoyen est invité à intérioriser les normes du politiquement correct et de l’authentiquement correct. Il y a un enjeu idéologique considérable. Même si le projet mal ficelé a été abandonné, la tentation de réguler le code demeure.

Bien entendu, dire cela ce n’est pas nier qu’il prolifère des explications délirantes, des photos truquées, des révélations imaginaires, des thèses douteuses ou des prédictions invraisemblables sur la pandémie. Il a même fallu inventer un néologisme pour désigner le phénomène : infodémie. La propagation du faux parallèle à celle du virus.

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Vous dites même que la crise prend une dimension géopolitique ?

Oui, il y a comme des strates dans la mésinformation relative au Covid-19 :

- Il y a d’abord le phénomène ancestral de la rumeur ou de la pensée magique en période de catastrophe : remèdes miracles, boucs-émissaires désignés, récits surprenants sur “la vérité qu’on nous cache”, explications bricolées etc. se répandent spontanément.

- Une composante “médiologique”, disons liée aux technologies de l’information. Les réseaux sociaux qui permettent à chacun de s’exprimer, de diffuser, mais aussi de se dissimuler, sont favorables par nature aux discours alternatifs, éventuellement aux trucages, et toujours aux emballements collectifs. Surtout ici dans un domaine où le discours “scientifique” ou l’établissement des “faits” donnent lieu à interprétations hasardeuses.

- Outre la dimension politique nationale (un gouvernement donnant des versions contradictoires mais toujours “appuyées sur les scientifiques” à quelques jours de distance), il y a un enjeu géopolitique. Pour faire simple : les Chinois, après avoir un peu cafouillé au début de l’épidémie, lancent une grande opération de charme (soft power) sur le thème nous avons bien maîtrisé et notre modèle est universel. Côté américain ou dans les milieux atlantistes on riposte : les Chinois ont menti, ils manipulent l’opinion mondiale, non à l’hégémonie de Pékin. Une guerre internationale de l’information est en cours.

Au fait, comment reconnaît-on une “fake news” ?

Il faut que ce soit une nouvelle (un récit, une citation une photo de quelque chose qui se serait produit) et qu’elle soit fausse. Ce qui en général se reconnaît à ce qu’elle contredit la logique, ou les autres témoignages, ou les sources originelles. Ou encore si l’on peut prouver la fabrication : il y a des logiciels, des ONG, des rubriques “fact-checking” des médias qui passent leur journée à vérifier et la probabilité qu’un faux avéré ne soit pas signalé en ligne en quelques minutes est très faible.

Mais après avoir examiné le message, il faut aussi faire son auto-examen. Ne pas qualifier de fake tout ce qui relève de l’interprétation des idées ou de l’anticipation du futur, ne pas qualifier de manipulation tout ce qui contredit nos croyances (ni ne tenir pour démontré tout ce qui les renforce)…

Vous qui êtes un défenseur de la langue française vous avez placé un glossaire anglais (ou globish) des mots employés à ce sujet ?

Oui, bien forcé : tout ce débat sur les fake news (qui auraient fait élire Trump ou provoqué le Brexit) s’est développé aux États-Unis après 2016 ; et les médias et centres de recherches étatsuniens ont produit énormément de néologismes à ce sujet. Demandez-vous pourquoi les Européens se sentent obligés de penser puis d’adopter ces idées et ce vocabulaire.

Fake news : Manip, Infox et Infodémie en 2021, Format Kindle, VA Press, mai 2021 (6,49 €)

L'Arabie saoudite au bord du désastre économique

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L'Arabie saoudite au bord du désastre économique

par Jean-Paul Baquiast
Ex: http://www.europesolidaire.eu
 
Comme on pouvait le pressentir, l'épidémie mondiale de coronavirus qui ralentit considérablement la demande de pétrole pose un véritable problème de survie économique au Royaume saoudien.

Celui-ci subsiste essentiellement sur une seule ressources, le pétrole et le gaz dont la nature (Allah ?) l'avait richement doté. Pour réduire cette dépendance, le prince héritier Mohammad bin Salman al Saoud (MBS) avait envisagé de diversifier l'économie. Pour cela, il avait tenté d'y appeler des investisseurs étrangers compétents notamment dans le domaines des nouvelles sciences et technologies. Il avait élaboré à cette fin un plan dit Vision 2030. Mais aujourd'hui il n'a plus les moyens de leur offrir des conditions d'accueil attrayantes.

Ceci d'autant plus que le pétrole saoudien est désormais en compétition avec le pétrole russe. Certes, la Russie souffre aussi de la baisse des cours pétroliers, mais elle dispose d'une économie suffisamment puissante pour ne pas en dépendre. Le roi Salman, père du prince, a prévenu le 19 mars que le Royaume devait se préparer à une bataille très difficile. C'était  peu avant le 26 mars, où il devait présider une réunion du G20, autrement dit des 20 puissances les plus riches du monde. Cette réunion était supposée proposer une politiques internationale permettant de lutter contre le virus. Comme l'on sait, rien de sérieux n'en est sorti.

MBS, sunnite, avait initialement accusé l'Iran chiite d'être à la source de l'épidémie, alors qu'elle en est elle-même durement frappée. Ses proches avaient porté la même accusation contre le Qatar, supposé s'opposer à la Vision 2030. Ce furent ensuite les travailleurs éthiopiens venus chercher de l'emploi à Riyad qui furent suspectés d'être des porteurs du virus. Des milliers d'entre eux furent expulsés, dans des conditions dites inhumaines par les associations.

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Il est vrai que l'Arabie Saoudite est particulièrement victime du coronavirus. Début avril, 200.000 cas ont été identifiés, dont 150 membres de la famille royale, famille il est vrai très nombreuse. Le 6 avril, un couvre-feu a été décrété dans les principales villes. De nombreux magasins alimentaires ont été fermés, provoquant l'inquiétude des milieux populaires. 

De plus le Hajj, pèlerinage annuel que font, au moins une fois dans leur vie, les musulmans aux lieux saints des villes de La Mecque et Médine, en Arabie saoudite, devant se tenir du 28 juillet au 3 août, ne pourra avoir lieu. Ce pèlerinage est traditionnellement une source de profits considérables pour le Royaume. Deux millions de pèlerins étaient attendus. On rappellera par ailleurs que MBS prévoyait la création d'une ville dite futuriste, nommée Neom, à laquelle il espérait pouvoir consacrer 600 milliards de dollar, lesquels rapporteraient des profits bien supérieurs. On devait y trouver, entre autres, des automobiles volantes et des serviteurs robotiques. .

Certes le Royaume dispose de réserves financières considérables, provenant de la vente du pétrole. Mais celles-ci s'épuiseront vite. Malheureusement, selon les observateurs, la crise actuelle aurait semé la panique dans l'esprit de MBS. Perdant son sang-froid, il envisagerait un retour à un nationalisme agressif et à d'autres décisions irrationnelles qui seraient la risée de toute la région, à commencer par l'Iran et la Russie. Il ne pourra espérer aucun appui de Washington, l'allié de toujours, qui affronte bien d'autres nécessités.

 

jeudi, 07 mai 2020

ROCK HAINE ROL !

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Christian Rol:

Réflexions en état de confinement

ROCK HAINE ROL !

via Facebook

Tous les connards qui ont voté Macron n’osent plus vraiment revendiquer leur forfait ; mais ils lui trouvent quand même des circonstances atténuantes et louent le « chef de guerre » en bras de chemise, agité comme un toxico en manque et coiffé comme un dessous de bras, qui aujourd’hui, en s’adressant aux cultureux subventionnés, a dit son vœu de voir un été « apprenant et culturel ». Rien que ce jargon mériterait la Haute Cour !

Aujourd’hui, avant mon échappée belle quotidienne sur les plages désertes, j’ai du subir la fréquentation de quelques uns de mes contemporains, dont un jardinier, un abruti de première bourre qui vient m’expliquer à moi que ce flicage est normal. Je lui raconte quand même qu’au marché de ce matin il y avait l’éternelle équipe de bourrins galonnés qui slalomait entre les croquants avec une mitraillette à la main ( !). Non, l’autre, il trouve ça normal. « Ben, c’est le plan Vigipirate qui s’applique… je vois pas le problème… »

Qu’est-ce qu’on peut espérer avec des enflures pareilles, des bons français disposés à tous les renoncements, toute les trahisons, toutes les privations de liberté ? Quelle malédiction me fit naître dans cette époque et dans ce pays ?

Les bricoleurs fébriles qui tiennent lieu de « pouvoir exécutif » se cassent le nez un jour sur deux sur une ordonnance absurde bientôt contredite par le ministère voisin ou tel mandarin plein de componction ; au point que même les journalistes serviles (pléonasme) ne savent plus sur quel pied danser et hésitent, désormais, à relayer l’information avec l’empressement de passeurs de plats.

Dans cette valse des décisions clownesques, la négresse burlesque déguisée en Casimir tient une place de choix que personne ne songera à lui envier. La Sénégalaise est la risée de la France entière mais c’est une partie du plan : faire avaler des couleuvres en rigolant, ça passe mieux…

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Depuis quelques jours, et à la veille de ce fameux déconfinement à plusieurs vitesses, les bras cassés s’emmêlent un peu plus encore les pinceaux avec le retour à l’école des gniards ingérables. Faut-il les renvoyer sur les bancs de leur classe ou les maintenir à la maison ? Choix cornélien. Surtout pour les parents à bout qui préfèrent désormais voir la marmaille dégager de la maison plutôt que d’avoir à subir un jour de plus leurs mioches encore plus caractériels qu’eux-mêmes.

Je fulmine en rond, plus encore qu’au début car, désormais, mon instinct se voit confirmé par les actes : les salopards distillent au compte-goutte le menu pour les années qui viennent. En entrée : Soupe à la grimace sur son lit de fumier. Attali en rêvait, l’Institut Montaigne en parle : plus de vacances ou presque, plus de ponts du mois de mai et des semaines au taf de 48 heures. Tout cela, évidemment, sans évoquer la moindre hausse de salaire, « effort de guerre » oblige ! Mais ce n’est là qu’une mise en bouche… La retraite à 70 ans, ça viendra plus tard. Comme les rançons prohibitives sur les droits de succession, les impôts et les taxes en tout genre…

Tout cela, bien sûr, ne me concerne pas, ou à peine. Ma marginalité m’aura finalement épargné bien des déceptions puisqu’un pessimiste ne saurait tomber de haut.

En attendant la mise en place de ce joli programme (sans parler des libertés sous cloche), souhaitons-nous une rentrée explosive qui débouche sur des « troubles » ingérables par le régime.

Je ne vois pas d’autre solution pour nous sortir de cette dictature capitaliste, le jour d'après, dont le covid 19 (1984, assurément) aura été un Cheval de Troie plutôt bien ficelé…

C. Rol

La Futuwah. La caballería espiritual islámica

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La Futuwah. La caballería espiritual islámica
por el profesor Fernando Soto
 
El término “Futuwah”puede ser entendido como “caballería espiritual”. Podemos comprenderlo entonces como el conjunto de atributos del “fatá”, atributos que están directamente vinculados a su realización espiritual.
 
Fatá es: El joven o adulto, en la plenitud de sus fuerzas, en el mediodía de su existencia, que está dispuesto a ofrecer su vida por ideales superiores, que han sido trazados de antemano por todos los profetas, y muy especialmente por el sello de la profecía, el profeta Muhammad (la paz y las bendiciones sean con él).
 
El término Futuwah empieza a ser utilizado en tierras del Islam, más precisamente en la región de Persia, y estaba asociado a grupos de jóvenes practicantes de artes marciales o ligado a gremios o ciertos oficios relacionados con armas. Esta es la primera forma en la que el término es utilizado, la segunda es una más profunda, y se vincula con círculos sufíes.
 
La importancia de la excelencia del comportamiento en la tradición islámica

71aBtyOvRwL.jpgExiste una idea de elite que es amiga de Allah (swt), la cual para acceder a ese grado, a pasado por sucesivos estadíos, en los cuáles su elevación espiritual es variada. La elite compuesta por obviamente, los profetas, pero también otras categorías como los "Siddiqin" (los verídicos), los "Shuhada" (testigos o mártires) o los "Salihin" (hombres de bien).
 
Existe un Hadiz ligado directamente a la capacidad del hombre de adorar a Dios a través de su comportamiento: "Es adorar a Dios como si Lo vieras, pues aunque no Lo veas, El te ve". Es la Divinidad misma quien afirma en el libro de libros, el Corán, que no ha hecho a los genios y a los hombres, sino para que Lo adoren. Y la excelencia en el comportamiento, es sin duda, la única via de dar testimonio de la creencia.
 
Dentro del sufismo, la idea de nobleza está vinculada no sólo al linaje sanguíneo, sino también a la nobleza que se manifiesta a través del comportamiento humano. Existe un célebre Hadiz del Profeta (saw): "He sido enviado para perfeccionar la nobleza del comportamiento". Es el Arcángel Gabriel quien le dice a Muhammad (saw): "Oh Muhammad, te he traído la perfección del comportamiento [...] consiste en que perdones al que ha sido injusto contigo, que des al que te niega su dádiva, que visites al que se ha desviado de tí, que te apartes del que da pruebas de incomprensión hacia tí, y que practiques el bien con el que actúa contigo por el mal". Es el Profeta el ejemplo de caballero, el modelo a seguir. Sin embargo, también lo es Abraham (Ibrahim) con su fuerza para destruir los ídolos, Moisés cuando le pide a Khidr (as) la posibilidad de ser su discípulo, para ser instruido en el "camino recto".
 
Los sufíes, intérpretes de una concepción profunda de Caballería

Es en Persia, como dijimos anteriormente,y más precisamente en la región del Jorasán,donde surge un sabio llamado Abu Abd Al Rahman Al Sulami. Al Sulami ( 1021) codifica para las generaciones posteriores en su obra "Futuwah" lo que vendría a ser un texto que contiene todas las virtudes, recopiladas través de distintas tradiciones (Hadiz y Corán especialmente) que se remontan al tiempo de los profetas y especialmente a la época del sello de la profecía, Muhammad (saw). En dicha obra hallamos comentarios, consejos y alusiones a otros maestros de la senda espiritual.
 
71hywy7qD3L.jpgIbn Arabi de Murcia, llamado el "Shaykh Al Akbar" (el más grande los maestros), también hizo uso de la tinta para plasmar a través de sus textos sobre Caballería espiritual enseñanzas que provienen de una profunda raíz Abrahámica. En su libro, cada profeta realiza la Futuwah, de un modo que varía, sin embargo, muestran a través de sus actos su amistad con la Divinidad, su proximidad a Allah (swt).
 
Según Hassan Al Basri (728) la Futuwah era una ciencia útil, que se reconocía por sus acciones, no por sus palabras.
 
Yunayd, otro sabio persa (910),dijo que la Futuwah consiste en abolir la visión (del yo, del ego) y romper todos los lazos (que impidan la relación directa con la Divinidad).
 
Respondiendo a Yunayd, Abu Hafs le contestó: "Lo que dices es muy hermoso, pero para mí la Futuwah consiste sobre todo en obrar con rectitud y en no exigir al prójimo que haga otro tanto."
 
Finalmente, para Suhrawardi (1191) la Futuwah es la médula de la Sharia (ley), de la Tariqa (camino) y de la Haqiqa (verdad).
 
Esperamos que este breve escrito sirva para entender un poco más acerca de la vida militar medieval islámica, y que ilumine algo el concepto de "caballero", desde una perspectiva musulmana.
 
Un caballero musulmán tenía un sentido ético y profundamente espiritual de la vida, una vida centrada en Dios, su ley y sus ejemplos a seguir. Eso era virtud caballerezca.

Deutschlands Automobilindustrie droht ein Desaster

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Torsten Groß:

Deutschlands Automobilindustrie droht ein Desaster

Ex: https://kopp-report.de

Der bekannte Wirtschaftswissenschaftler Ferdinand Dudenhöffer hat eine düstere Prognose für die Automobilindustrie abgegeben. Nach Einschätzung des deutschen Hochschulprofessors, der an der Universität St. Gallen lehrt, wird sich die Branche weltweit frühestens im Jahr 2025 von den Nachwirkungen der Corona-Krise erholt haben. Das ist vor allem für die deutsche Volkswirtschaft eine schlechte Nachricht. Denn der Wohlstand unseres Landes ist maßgeblich vom Kraftfahrzeugbau abhängig, der mit 436 Mrd. Euro mehr als ein Fünftel zum Gesamtumsatz des verarbeitenden Gewerbes beisteuert und 836.000 Menschen beschäftigt.

In keinem anderen Land der Welt hat die Autoindustrie einen so großen Anteil an der heimischen Wertschöpfung wie bei uns. Wichtig auch: Etwa zwei Drittel der Einnahmen aus dem Verkauf deutscher Fahrzeuge werden im Ausland generiert. Doch dort wird die Nachfrage infolge des weltweiten Konjunktureinbruchs 2020 deutlich zurückgehen.

Dudenhöffer geht davon aus, dass der Autoabsatz in Asien im Vergleich zum Vorjahr von 32 Millionen verkauften Einheiten auf heuer 25,9 Millionen sinkt, ein Minus von über 19 Prozent. Für Nordamerika rechnet Dudenhöffer mit einem Absatzverlust von 4 Millionen Einheiten oder 20 Prozent gemessen an der Stückzahl, die 2019 erreicht wurde.

Und in Europa dürften nach den Berechnungen des Experten 2,8 Millionen Autos weniger abgesetzt werden als noch in 2019 (minus 17,7 Prozent), wobei Westeuropa wegen der schon heute hohen Marktsättigung stärker betroffen sein wird als der Osten des Kontinents, wo es in puncto Mobilität noch Nachholbedarf gibt.

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Weltweit wird die Zahl der produzierten Autos im laufenden Jahr gegenüber 2019 um 14,4 Millionen Einheiten auf 65,2 Millionen einbrechen, was einem Rückgang von über 18 Prozent entspricht. Das wäre der niedrigste Stand seit 2011. Noch dramatischer sieht die Prognose für Deutschland aus. Bei uns soll der Ausstoß um 900.000 auf dann nur noch 3.800.000 Fahrzeuge sinken. 100.000 Arbeitsplätze stehen auf der Kippe. Bereits jetzt sind nach Angaben des Verbandes der Automobilindustrie (VDA) 400.000 Beschäftigte in der Branche von Kurzarbeit betroffen. Kein Wunder, dass die Hersteller auf eine möglichst schnelle Wiederaufnahme der Produktion drängen, die in einigen Werken bereits wieder anläuft, wenn auch nur eingeschränkt. Denn die Lieferketten aus dem Ausland sind fragil. Viele Fahrzeugkomponenten z.B. aus Norditalien stehen wegen des Shutdowns und der Ausfuhrbeschränkungen noch nicht wieder zur Verfügung.

Vor allem aber fehlt es an Nachfrage der Käufer. In Erwartung der von Wirtschaftsforschern vorhergesagten schweren Rezession und millionenfacher Arbeitslosigkeit halten sich die Verbraucher mit teuren Neuanschaffungen wie einem Auto verständlicherweise zurück. Im Vorfeld des am heutigen Dienstag stattfindenden Telefongipfels mit Bundeskanzlerin Merkel fordert der VDA deshalb eine vom Staat finanzierte, zeitlich befristete »Neustart-Prämie« als Anreiz, um Konsumenten zum Kauf eines Neuwagens zu motivieren. Insidern zufolge soll diese Prämie nach den Vorstellungen der Branche mindestens 2.500 Euro betragen. Dieser »Sockelbetrag« könne mit zusätzlichen Boni kombiniert werden, um den Absatz umweltfreundlicher Fahrzeuge im Sinne der Klimaschutzziele – zusätzlich zum bereits bestehenden Förderprogramm Elektromobilität (FEM) – zu unterstützen. Auch Jahreswagen sollen in das Prämienmodell einbezogen werden.

Ob sich die Branche mit diesen weitreichenden und für den Steuerzahler kostspieligen Forderungen wird durchsetzen können, bleibt abzuwarten. Eine politische Entscheidung soll heute noch nicht getroffen werden. Kritiker sehen in der Kaufprämie eine ungerechtfertigte Bevorzugung der Autoindustrie gegenüber anderen Branchen, die wirtschaftlich ebenfalls mit dem Rücken zur Wand stehen.

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Im Übrigen stellt sich die Frage, ob sich der gewünschte Effekt in der jetzigen Phase tatsächlich einstellen würde. Denn noch ist die Corona-Epidemie nicht ausgestanden, eine zweite oder gar dritte Infektionswelle, wie sie z.B. bei der Spanischen Grippe der Jahre 1918/1919 auftrat, könnte eine erneute Verschärfung des Lockdowns durch die Politik zur Folge haben – ein Szenario, das von den Mainstreammedien gestützt auf die Aussagen des Robert Koch Instituts (RKI) und anderer einschlägig bekannter Virologen jeden Tag aufs Neue an die Wand gemalt wird. So lange diese Unsicherheit besteht, werden auch großzügige Kaufprämien die Konsumenten nicht dazu verleiten, in Scharen in die Autohäuser zu strömen. Notwendig ist eine langfristige Perspektive im Umgang mit dem Virus und ein politisches Konzept, das ein höchstmögliches Maß an Gesundheitsschutz vor allem für die besonders gefährdeten Gruppen der Bevölkerung gewährleistet, ohne dabei die Wirtschaft zu ruinieren. Daran fehlt es in Deutschland auch Monate nach dem Ausbruch der Pandemie bis heute.

Experte Dudenhöffer prognostiziert, dass sich der weltweite Automarkt erst 2025 wieder erholt haben wird. Erst dann könnten die Absatzzahlen des Jahres 2019, dem letzten Jahr von Corona, wieder erreicht bzw. leicht übertroffen werden. Von dieser Entwicklung dürfte Asien überproportional profitieren, weil hier die Motorisierung der Bevölkerung in vielen Ländern deutlicher geringer ist als in den Industriestaaten Nordamerikas und Europas.

Bis diese lange Durststrecke überwunden ist, wird es zu einer Schrumpfung der Branche kommen, um die bestehenden Überkapazitäten abzubauen, die Dudenhöffer auf 25 Prozent beziffert. Unabhängig von der aktuellen Krise wird dieser Strukturwandel zahlreiche gut bezahlte Jobs in der Automobilindustrie kosten, auch bei uns.

Eine zusätzliche Belastung speziell für die deutschen Hersteller resultiert aus der politischen Verteufelung des Dieselmotors und dem aus Gründen des »Klimaschutzes« erzwungenen Umstieg auf elektrisch betriebene Fahrzeuge, deren Produktion deutlich weniger Teile und damit auch Arbeitskräfte insbesondere bei den Zulieferern erfordert.

Der Autobranche stehen also schwere Zeiten ins Haus. Die Maßnahmen zur Bekämpfung der Virus-Pandemie haben die Lage noch einmal deutlich verschärft. Darunter werden hierzulande vor allem solche Bundesländer zu leiden haben, die große Produktionsstandorte beherbergen, etwa Niedersachsen mit VW in Wolfsburg, Nordrhein-Westfalen (Ford), Baden-Württemberg (Daimler-Benz, Porsche) und Bayern (BMW, Audi).

Ganze Regionen, in denen der Automobilbau wirtschaftlicher Taktgeber ist, droht der Niedergang, wenn dort in größerem Maßstab Jobs und damit Kaufkraft verloren gehen. Dafür verantwortlich sind Fehlentscheidungen der Politik, die nicht nur in der Corona-Krise, sondern schon zuvor getroffen worden sind!

Le "monde d'après" le coronavirus : ce merveilleux espace carcéral global

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Le "monde d'après" le coronavirus : ce merveilleux espace carcéral global

par Karine Bechet-Golovko
Ex: https://russiepolitics.blogspot.com
 
Bracelet électronique, application de traçage, de géolocalisation, de distanciation, c'est le nouveau monde du coronavirus, ce fameux "monde d'après", qui après avoir assigné à domicile plus de 4 milliards d'êtres humains se prépare à les mettre sous surveillance, "pour leur bien", "par civisme", "sans les contraindre". Nous entrons avec joie et bonheur dans un univers carcéral quotidien. Tant que nous nous laissons faire, il n'y a plus aucune raison pour que ça s'arrête. En France, en Russie, en Italie, à Hong Kong, même dans le si petit Liechtenstein et ailleurs, un monde global s'installe. Inhumain, faute de ne pouvoir déjà être sans humains. La dernière liberté de l'homme, celle de renoncer à sa liberté.
 
Puisque l'on ne peut objectivement pas laisser indéfiniment les gens enfermés à domicile, surtout qu'ils ne sont alors plus suffisamment productifs (et donc finissent pas coûter chers), surtout que les virologues reconnaissent l'évidence - à savoir qu'il est tout à fait possible d'attraper le coronavirus en restant confiné à la maison, il faut bien organiser la sortie. Et passer à l'étape suivante.
 
Mais la sortie ne peut être brutale, sinon un sentiment de liberté trop fort emporterait tout le travail de conditionnement réalisé à ce jour. Autrement dit, il ne peut s'agir que d'une liberté surveillée, toujours conditionnée au chantage à la soumission - si vous ne respectez pas les mesures liberticides, les chiffres du Covid vont remonter (ce n'est pas compliquer à organiser) et retour à l'assignation à domicile. 
 
Comme avec les détenus : si tu ne respectes pas les règles de la libération conditionnelle, retour au mitard.
 
Alors différentes solutions de traçage sont prévues. L'application Covid de traçage électronique discutée en France passe mal chez les Français, qui n'ont pas envie de voir leur smartphone préféré définitivement transformé en outil de surveillance. A Singapour d'ailleurs, l'application mobile de surveillance des distances, qui fonctionnait sur la base du volontariat n'a pas fait fureur, les gens étaient peu enclin à la télécharger et lorsqu'ils le faisaient, ils ne l'activaient pas forcément. Et ces applications n'ont de sens que si elles sont utilisées de manière collective.
 
smartphonesurveillance.jpgC'est toute une structure qui se met en place, qui doit effectivement recréer une nouvelle réalité, directement sorties des films de science-fiction techno-totalitaires. Et les idées "novatrices" ne manquent pas. Mais le discours ne peut se permettre la coercition, l'illusion du volontariat et du civisme est mise en avant pour cacher une démarche banalement totalitaire.
 
Précision du cabinet du Secrétariat d'Etat au numérique :
"Nous avons pleinement conscience que tout le monde ne possède pas de smartphone, des solutions alternatives sont à l’étude pour que ceux qui n’ont pas cet équipement ou ceux qui ne savent pas bien s’en servir puissent avoir accès à cet outil s’il est déployé"
Bref, ce n'est pas que les gens ne veulent pas de traçage, c'est qu'ils n'ont pas de smarphone ou ne savent pas s'en servir. Car les gens sont conscients de leur "devoir civique" dans la lutte pour le Covid: 
"l’objectif du Gouvernement est que tout citoyen qui souhaite contribuer à casser les chaines de transmission et de propagation du virus puisse le faire, librement"
La dernière liberté de l'homme, celle de renoncer à sa liberté.

Et la dernière idée est celle du bracelet électronique. La technique existe, puisqu'elle est utilisée en pénale pour les personnes placées en résidence surveillée. En Russie, à Mourmansk, les malades du Covid "relâchés" y sont soumis, pour être tracés (ce qui a provoqué de fortes critiques de la part de députés fédéraux). En Italie, les personnes âgées pourraient en être garnies - elles présentent vraiment un danger public ... Hong Kong et la Corée du Sud l'utilisent déjà pour les voyageurs étrangers. Explication en France :
"L'idée est d'avoir un bracelet, ou un autre objet connecté, qui ne soit pas relié au smartphone et permettrait de connaître les personnes croisées par son porteur durant la journée et celles qui se sont rendues dans différents lieux"
Super, ce ne sera pas connecté à votre smartphone. Mais pour savoir qui tu croises, il faut 1) que tous portent ce bracelet électronique et 2) qu'il soit identifié, sinon ça ne peut pas marcher ... Donc tous tracés. Et d'ailleurs, c'est un geste civique, pas de quoi s'inquiéter : 
"Le but n'est pas de traquer une personne pour savoir si elle est allée à la Poste ou au supermarché mais d'aider les autorités à gérer la circulation du virus. C'est un acte de civisme, comme l'attestation de sortie."

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"Acte de civisme", non pas sanitaire, mais civisme, "comme l'attestation de sortie". Donc acte de soumission. Nous avons accepté de nous plier à l'attestation de sortie, maintenant la pression monte d'un cran. Si nous acceptons ceci, il y aura encore un cran supplémentaire. Comme l'histoire de la grenouille : si on la jette dans l'eau bouillante, elle saute et se sauve; si on la met dans l'eau tiède en augmentant progressivement le feu, elle se laisse cuire. La casserole est aujourd'hui sur le feu. 
 
Les virus existeront toujours et les mesures liberticides ne sont jamais temporaires, elles formatent une nouvelle réalité en étant régulièrement intégrées à la législation normale, comme ce fut déjà le cas avec la normalisation des mesures "exceptionnelles" liées à la lutte contre le terrorisme en France. La dernière liberté de l'homme est de renoncer à sa liberté. Voulez-vous renoncer ?
 

mercredi, 06 mai 2020

Corona-Zwangsmaßnahmen: Die Wut wächst!

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Stefan Schubert:

Corona-Zwangsmaßnahmen: Die Wut wächst!

Ex: https://kopp-report.de

Am vergangenen Wochenende hat sich der Souverän dieses Landes eindrucksvoll mit Demonstrationen zurückgemeldet und die Wiederherstellung seiner elementaren Freiheitsrechte eingefordert. Während Linksterroristen der Antifa einmal mehr versuchten, politisch Andersdenkende zu unterdrücken, führten Medien und Politik gleichzeitig eine Diffamierungskampagne gegen regierungskritische Bürger durch.

Deutschlandweit beteiligten sich Zehntausende Bürger an Demonstrationen und forderten ihre (eigentlich) vom Grundgesetz geschützten Rechte ein. Die Reaktionen der politisch-medialen Eliten darauf beweist einmal mehr, wie fortgeschritten der Meinungstotalitarismus in diesem Land bereits ist.

Anstatt Positionen des Volkes anzuhören, sein eigenes Handeln und seine eigenen Positionen zu hinterfragen, stellt der Mainstream lediglich erneut seine Diskursunfähigkeit unter Beweis. Jegliche Regierungskritik wird von der Staatspropaganda versucht als »Rechts« oder als eine »Verschwörungstheorie« zu framen. Die Protagonisten dieser Willkür reichen von herrschenden Politikern, Staatsjournalisten von ARD und ZDF sowie deren Anhängsel bei Spiegel, Süddeutsche und Co. bis zu den schwarzuniformierten Linksterroristen der Antifa.

Die Meinungsfreiheit in diesem Land ist auf den Personenkreis beschränkt, der die Meinung des Mainstreams widerspiegelt und die Meinung der Regierung beklatscht.

Das Waffenarsenal der Totalitären ähnelt in der Corona-Krise auch deren Vorgehen bei Themen wie Flüchtlingskrise, Migration, Ausländerkriminalität und Islam. Auch bei diesen Themen verweigern sie sich jeglicher Diskussion, weil sie argumentativ nicht in der Lage sind eine offene Debatte zu führen, geschweige denn diese für sich zu gewinnen.

Mangels Argumenten bedienen diese sich einzig einem moralisierenden Ton, der allein darauf gerichtet ist, jeglichen Diskurs im Keim zu ersticken. Betraf es vor Corona mehrheitlich Bürger die politisch rechts von einer extrem nach links gerutschten Merkel-CDU standen, erfahren aktuell Millionen Bürger dieses Landes, wie schnell und wie willkürlich man von dieser Regierung und ihren Staatsmedien als »Verschwörungstheoretiker« zu stigmatisieren versucht wird:

• Sie haben sich eine eigene Meinung zum Coronavirus gebildet? – Verdachtsfall Verschwörungstheoretiker!

• Sie haben eine regierungsabweichende Meinung zum Coronavirus? – Verschwörungstheoretiker!

• Sie äußern öffentlich eine regierungswidersprechende Meinung zum Coronavirus? – Rechter Verschwörungstheoretiker!

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Stasi-Journalismus bei der Tagesschau

Vorneweg bei dieser »Menschenjagd« marschiert die Tagesschau der ARD. Ein Artikel auf tageschau.de über eine Demonstration für Grundrechte ist mit »Jahrmarkt der kruden Ideen« betitelt.

Die Kommentarfunktion ist hier natürlich abgeschaltet. Die Diffamierungen der mit über acht Milliarden Euro zwangsfinanzierten medialen Blockwarte, in diesem Fall zeichnet die »Journalistin« Silvia Stöber für dieses Machwerk verantwortlich, sind mehrheitlich nach dem gleichen Muster aufgebaut. Obwohl deutschlandweit zehntausende und in dem Berliner Fall mehrere hundert  Menschen aus der Mitte der Gesellschaft sich friedlich versammelten, um für ihre Freiheitsrechte einzustehen, suchen sich die Häscher der ARD gezielt diskussionswürdige Minderheitenmeinungen aus der Menge heraus, um damit dann die Demonstration als Ganzes zu stigmatisieren.

Ein Mann hält ein kleines Pappschild mit der Aufschrift »5 G Kills« vor sich und wird sofort fotografiert und für die Bebilderung des Artikels verwendet. Die wenigsten Bürger auf dem Rosa-Luxemburg-Platz dürften mit der »Verschwörungsideologie QAnon«, so Silvia Stöber auf tageschau.de, bekannt, geschweige denn mit dieser übereinstimmen, doch trotzdem wird diese Einzelmeinung ganz am Anfang prominent in den Artikel eingebaut, um die gesamte Demonstration ins Lächerliche zu ziehen – dieser ein verschwörungsideologisches framing zu verpassen.

Die drehende Stimmung in der Bevölkerung lässt die Merkel-Regierung und ihre medialen Handlanger merklich nervöser werden. Doch selbst die reihenweise Aufhebung der Zwangsmaßnahmen durch Gerichte lässt den Staatsapparat nicht innehalten, sondern immer wilder um sich schlagen.

Erfahren muss dies aktuell der Rechtsanwalt und FDP-Bundestagsvizepräsident Wolfgang Kubicki. Im Angesicht des Festhaltens der Bundesregierung an den weitreichenden Grundrechtseinschränkungen kritisiert Kubicki:

»Mittlerweile habe ich das Gefühl, einige Ministerpräsidenten gefallen sich in der Rolle, dass sie auftreten können wie Sonnenkönige und den Eindruck vermitteln, die Gewährung von Freiheiten seien Gnadenakte.«

Auch bezüglich der widersprüchlichen Argumentation zur Einschränkung elementarer Freiheitsrechte der Bundesregierung und des Robert-Koch-Instituts leistet sich Kubicki eine eigene Meinung. Bekanntlich wurden die Zwangsmaßnahmen zuerst mit der Verdopplungszahl der Infizierten begründet, als diese das vorgegebene Ziel unterschritten, führten die Berliner Eliten nun die sogenannte Reproduktionsrate als alles verbindliche Messlatte an. Ein mehr als befremdliches Verhalten findet auch Kubicki:

»Heute habe ich gelernt, dass der R-Wert offenbar gar nicht mehr alleine aussagekräftig ist, anders, als es die Bundeskanzlerin Mitte April noch vermittelte. Was mich wundert, weil wesentliche Grundrechtseinschränkungen mit diesem R-Wert begründet worden sind.«

Weiter äußert sich Kubicki: »Ein Schelm, wer Böses dabei denkt. Der R-Wert des Robert-Koch-Instituts steigt ausgerechnet zur Konferenz der Kanzlerin mit den Ministerpräsidenten, bei der vor weiteren Lockerungen gewarnt werden soll“, so der Bundestagsvizepräsident. Er haben den Eindruck, dass die Zahlen »politisch motiviert« seien, so Kubicki.

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Die Bundesregierung und die Mainstream-Medien verstricken sich immer tiefer in Widersprüche um die Zwangsmaßnahmen aufrechtzuerhalten und werden dabei ertappt und vorgeführt.

Was meinen Sie, wie die Bundesregierung darauf reagiert? Einsicht? Aufklärung? Und mit dem Einräumen der widersprüchlichen Positionen?

Natürlich nicht, die Staatsmacht schaltet umgehend in den Diffamierungsmodus. Der Chef der bayerischen Staatskanzlei Florian Herrmann (CSU) nahm Kubicki ins Visier und verbreitete über die Medien: »Diesen Vorwurf halte ich für äußerst problematisch… Das sind Vorwürfe, die man normalerweise nur von der AfD kennt. Das sind Verschwörungstheorien.«

Inzwischen in der VSA:

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Le Tannou-Touva : un Etat pastoral inféodé à Moscou

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Erich Körner-Lakatos :

Le Tannou-Touva : un Etat pastoral inféodé à Moscou

Situé au Nord-Ouest de la Mongolie, la République populaire du Tannou-Touva a existé de 1921 à 1944

Celui qui, de nos jours, se souvient encore de la république pastorale du Tannou-Touva au Nord-Ouest de la Mongolie, peut être considéré comme un as imbattable en histoire contemporaine. Cette république a disparu en 1944, âgée d’à peine vingt-trois ans. Elle n’est un objet de recherches que pour une poignée d’historiens spécialisés, tout comme les républiques boers de Zoutpansberg et de Goshen en Afrique du Sud ou encore l’Etat libre d’Acre, proclamé peu avant 1900 par des pionniers de la culture du caoutchouc dans ce triangle territorial situé entre le Brésil, la Bolivie et le Pérou.

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Le Tannou-Touva avait une superficie deux fois supérieure à celle de l’Autriche actuelle, avec 170.500 km2. C’était une immense vallée fermée. Sa partie orientale était impropre aux cultures et servait de zone de pâturages. La partie septentrionale, elle, était riche de forêts et de lacs. C’est la raison pour laquelle les Chinois appellent les habitants de ce pays les « our yan khai » (Uriankhai), soit « le peuple qui habite les forêts ». Il convient de signaler encore une particularité du pays : aucune région du monde ne se trouve plus éloignée de la mer que ne l’était le Tannu-Tuwa.

En 1921, 65.000 âmes vivaient dans le pays, dont 12.000 agriculteurs et négociants russes. Les autochtones se donnent le nom de « Touvains ». Leur ethnogénèse est largement méconnue de nos jours encore. La plupart des ethnologues pensent qu’ils sont le produit d’un mélange de tribus turques et de groupes ethniques mongols et sibériens, même si certains traits du visage, chez une minorité d’entre eux, rappellent ceux des Finno-Ougriens. Sur le plan religieux, ils adhèrent au lamaïsme, soit à la forme tibétaine du bouddhisme.

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Malgré son éloignement de tout, la région a vu arriver et partir bien des conquérants étrangers. En 1207, Gengis-Khan conquiert la région mais, par la suite, les Mongols perdent rapidement tout intérêt pour la région peuplée de pasteurs nomades. A partir de 1757, le Tannou-Touva fait formellement partie de la Chine et paie tribut à son empereur. L’impôt annuel est constitué de peaux rares que l’on envoie à Pékin. Sur le plan administratif, les Touvains relèvent d’une province chinoise appelée le Tannou-Uriankhai et attribuée à la Mongolie extérieure, elle-même soumise à la tutelle chinoise depuis 1697.

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Au 19ème siècle arrivent des négociants chinois qui troquent les bois des cerfs de type maral, considérés comme la base d’un aphrodisiaque, contre du thé vert, du tabac et des tissus. En même temps arrivent de l’Ouest des colons russes. Après 1880, les populations autochtones connaissent un éveil politique, ce qui crée des tensions puis suscite des révoltes contre la tutelle chinoise et contre les incursions des négociants russes.

Le 12 février 1912, la monarchie est renversée définitivement en Chine. Pour le Tannou-Touva, c’est là un motif pour faire sécession car ses habitants ne se sentent liés à la Chine que par le rapport féodal avec l’empereur mandchou. Trois jours après l’abolition de la monarchie, la République de l’Uriankhai est proclamée. En octobre 1913 arrive à Saint-Pétersbourg une pétition rédigée en langue mongole demandant au Tsar de bien vouloir placer le pays sous la protection russe. Six mois plus tard, c’est chose faite.

Le 16 juin 1918, des notables touvains et russes proclament la fin du protectorat et annoncent l’indépendance du pays. Mais c’est un vœu pieux car, en novembre 1918, des unités russes blanches sous le commandement de l’Amiral Koltchak occupent le pays. Dans le Sud s’installent des troupes mongoles et au Sud-Est, pendant un certain temps, ce sont des unités chinoises qui occupent les terres touvaines. En juillet 1919 arrive l’Armée Rouge.

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Le 14 août 1921, la République populaire du Tannou-Touva est proclamée. L’organe suprême de cette république populaire est le « Grand Khoural », une sorte d’assemblée du peuple, où chaque délégué représente cinquante yourtes. Le terme « Khoural » dérive du mongol et signifie, à l’origine, un conseiller de Gengis-Khan. Le Parlement proprement dit est le « Petit Khoural » qui élit le gouvernement. Le premier Premier ministre fut Dondouk Kuular reste prudemment à Moscou, à 4688 km du Tannou-Touva, à cause de la ferme opposition des moines lamaïstes. Cette prudence ne lui a pas servi à grand-chose car Staline donna l’ordre de l’arrêter en janvier 1929. Trois ans plus tard, Kuular est fusillé.

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Son successeur Salchak Toka, lui, reste bien droit dans la ligne et cherche à sédentariser les pasteurs nomades. Beaucoup de ceux-ci fuient alors vers les forêts. La répression exercée par le Parti populaire révolutionnaire des Touvains frappe ensuite les moines : en 1929, il y avait plus de vingt monastères dans le pays. Deux ans plus tard, il n’en restait que deux.

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Sur le modèle des purges moscovites, Toka, devenu président du parti, organise à son tour une féroce répression : en 1938, il met en scène un procès-spectacle dans la capitale Küsül et fait fusiller plusieurs de ses rivaux politiques sous prétexte qu’ils étaient des espions japonais.

A partir de 1940, le pays est dirigé par la première femme présidente du monde, Khertek Ankhima-Toka, dans la vie privée épouse du chef du parti. Mais les jours de la petite république pastorale sont comptés : Staline projette son annexion car on y aurait découvert des gisements d’uranium.

Le 17 août 1944 le « Petit Khoural » vote à l’unanimité son annexion à l’Union Soviétique, ce que Moscou accepte officiellement deux mois plus tard. Le 11 octobre 1944 s’achève définitivement la brève histoire de la République du Tannou-Touva.

Erich Körner-Lakatos.

(article paru dans « zur Zeit », Vienne, n°12/13-2020).

Les dernières années

A partir de 1940, le Tannou-Touva a donc pour présidente Khertel Ankhimaa-Toka, première femme au monde à accéder à un tel statut. Dans la vie privée, elle est l’épouse du Chef du Parti Populaire Révolutionnaire. Cette dame a pris des positions géopolitiques courageuses. Trois jours après le déclenchement de l’Opération Barbarossa, elle déclare la guerre à l’Allemagne, acte qui, à Berlin, dans les locaux de la Wilhelmstrasse, cause une certaine perplexité. Même les plus chevronnés des fonctionnaires du ministère allemand des affaires étrangères ont du mal à situer sur la carte cet étrange sujet du droit international. Le Tannou-Touva est dès lors le tout premier Etat à s’être proclamé allié de l’Union Soviétique.

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Pendant la seconde guerre mondiale, le Tannou-Touva aligne dans l’Armée Rouge un régiment d’infanterie et une unité de cavalerie. En tout, 1600 hommes. Ils participèrent à la guerre bien qu’une grande partie des Touvains aient fui la conscription. L’armée touvaine est surtout constituée de colons russes et d’immigrés chinois ou mongols. Le Tannou-Touva offre ensuite à l’Union Soviétique 60.000 chevaux de trait pour tirer les charrettes « panje », typique des pays de la steppe. Un certain nombre de Touvains participent à un entraînement de conducteurs de chars, qui seront envoyés au front.

On ne sait pas exactement où ces alliés touvains de Staline ont été engagés. L’un de ces combattants a toutefois été proclamé « héros de l’Union Soviétique ». Quelque 90 officiers et soldats ont obtenu la médaille du mérite touvain pour bravoure au feu.

E.K.L.

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Quelles seront les conséquences de l’énorme escroquerie culturelle perpétrée par nos écoles et par les médias ?

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Quelles seront les conséquences de l’énorme escroquerie culturelle perpétrée par nos écoles et par les médias ?

par Kenneth Anderson

L’énorme escroquerie culturelle que constituent le « marxisme culturel », le féminisme radical, l’homosexualité militante, le relativisme postmoderne, etc., a été véhiculée dans tout l’Occident essentiellement par les écoles et les médias, même si, au cours de ces trente dernières années, la science évolutionnaire qu’est la sociobiologie, ainsi que le simple bon sens, ont parfaitement perçu que ces idées sur la nature humaine relevaient bel et bien de l’escroquerie pure et simple.

Lorsqu’Edward O. Wilson, professeur à Harvard, a dit : « Les gènes tiennent la culture en laisse. Cette laisse est très longue mais, inévitablement, les valeurs seront limitées dans les effets qu’elles produiront sur le pool génétique humain. Le cerveau est un produit de l’évolution. Le comportement humain est une technique fonctionnant en circuit et par laquelle le matériel génétique humain a été et sera maintenu intact ».

L’origine biologique du comportement social a fait évoluer une nature humaine qui s’est affirmée tout au long de l’histoire humaine jusqu’à nos jours ; elle implique une génétique centrée sur les spécificités raciales, définie par le genre, graduée selon les âges, hétérosexuelle sur le plan matrimonial, hiérarchique, ethnocentrique voire xénophobe, parmi tous autres réflexes d’ordre conservateur, induisant notamment la sélection groupale comme unité première d’un processus de sélection efficace, suivi d’un processus de sélection individuel.

L’escroquerie colossale perpétrée par nos écoles et par les médias fait que ces instances ignorent délibérément la science sociobiologique. Certains des exposants de cette escroquerie sont conscients de son inanité mais n’ont pas le courage de s’y opposer dans les cadres éducatifs et médiatiques. D’autres perçoivent leur seule ascension individuelle ou la seule ascension de leur groupe et tolèrent le développement permanent de l’escroquerie.

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Mais comme Wilson l’a dit, inévitablement, les valeurs (ou les contre-valeurs) trouveront leurs limites selon les effets que l’escroquerie aura sur le pool génétique humain. L’escroquerie culturelle sous le joug de laquelle nous vivons aujourd’hui sera immanquablement rejetée pour faire place aux valeurs promues par la véritable nature humaine. La question est la suivante : serons-nous erronément précipités vers ces valeurs positives par des fascistes de gauche ou de droite ou serons-nous ramenés, sur un mode tranquillement conservateur, vers la santé culturelle grâce à un processus d’adaptation de nos institutions, comme la séparation constitutionnelle des pouvoirs et grâce à des Etats de type assainis, des Etats ethniques, reposant sur des fondements ethnopluralistes, protégeant nos populations de tout impérialisme prédateur, de tous les suprématistes délirants, de tous les ploutocrates gloutons, grâce à l’adoption d’un fédéralisme défensif ?

Kenneth Anderson.

(ex : https://civilizingthebeast.blogspot.com ).

Les anglo-sionistes lancent une PSYOP stratégique contre la Chine

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Les anglo-sionistes

lancent une PSYOP stratégique

contre la Chine

Ex: https://echelledejacob.blogspot.com

 
Peut-être que la rengaine «C’est la faute des Russes» est devenue obsolète. Ou peut-être que les dirigeants de l’Empire ont finalement compris que la Chine était encore plus dangereuse que la Russie. Mais mon intuition personnelle est simplement que les anglo-sionistes paniquent d’avoir perdu la face « tous azimuts » avec leur gestion catastrophique – médicalement et, plus encore, politiquement – de cette crise socio-économique provoquée par la pandémie, et qu’ils pointent maintenant le doigt vers à peu près tout le monde – et même entre eux.

La Russie a joué un rôle crucial ici, car c’est dans leur guerre de communication contre elle que les dirigeants de l’Empire ont inventé ce que j’appelle maintenant les «normes de preuve Skripal», signifiant «très probable». Ce dernier principe étant subrepticement accepté par tous les Européens au nom de la «solidarité» – avec qui exactement est rarement spécifié, parfois « atlantique » – il était, dirons-nous, «naïvement raisonnable» de penser qu’il fonctionnerait à nouveau cette fois-ci. Encore une fois, personnellement, je n’en suis pas du tout sûr. Beaucoup de choses ont changé au cours des deux dernières années : non seulement les Européens ont finalement découvert à quel point le conte de fées de Skripal était complètement stupide et incroyable, mais le niveau de dégoût, et même de haine envers Trump et les États-Unis a fortement augmenté.

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De plus, la Chine a beaucoup plus à offrir à l’Europe que les États-désUnis en désintégration – alors pourquoi se ranger du côté des perdants ? Dernier point, mais certainement pas le moindre, les Européens découvriront – et certains l’ont déjà fait, que les États-Unis se soucient comme d’une guigne, non seulement des Européens ordinaires, mais même de leurs classes dirigeantes [cf le brigandage des masques contre le virus, NdT]. Aparté Une étude rapide de l'histoire montre que lorsque les élites exploiteuses se portent bien, elles se soutiennent toutes loyalement, mais lorsque les choses commencent à partir en vrille, elles se retournent immédiatement les unes contre les autres. Le meilleur exemple récent de ce phénomène est le schisme des élites dirigeantes américanistes qui, depuis l'élection de Trump, se sont immédiatement retournées les unes contre les autres et se battent désormais violemment comme des "araignées dans une boîte" (pour utiliser une expression russe).

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En fait, cette constatation est si vraie qu'elle peut même être utilisé comme outil de diagnostic très fiable : lorsque vos ennemis sont tous unis, c'est qu'ils sont probablement confiants dans leur victoire, mais dès qu'ils se retournent les uns contre les autres, vous comprenez que les choses sont très mauvaises pour eux [Théorie de la "Discorde chez l'ennemie", chère à De Gaulle, NdT]. De même, nous voyons maintenant comment les Européens du Sud se mettent vraiment en colère contre leurs «alliés de l'UE» au Nord - Macron semble s'aligner derrière Trump même s'il utilise un langage diplomatique plus prudent. Enfin, la façon dont la CIA a sa politique étrangère, le Pentagone une autre et Foggy Bottom [Affaires étrangères] la sienne - même si elle se limite aux sanctions et à la stigmatisation - vous dit à peu près tout ce que vous devez savoir pour voir à quel point en est arrivée la crise systémique de l'Empire.

Bien qu’il ne reste que très peu de gens vraiment intelligents au sein du gouvernement américain, il y en a encore beaucoup «dans les strates élevées» et il ne leur a pas fallu longtemps pour découvrir que cette pandémie était une occasion en or pour coller tous leurs propres échecs et erreurs sur le dos de la Chine. Les arguments ? Vraiment facile :
 

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LA TERREUR JAUNE DANS TOUTE SA GLOIRE

1 – La propagande anti-chinoise a une longue histoire aux États-Unis et il était vraiment facile de la rallumer.

2 – La plupart des Américains ont une réaction complètement irrationnelle au mot «communiste», il est donc très facile, pour tout organe de propagande américain de mentionner le PCC, de «mentir» dans la même phrase, et de paraître crédible, indépendamment de ce que dit la phrase – comme, par exemple, une preuve factuelle.

3 – La ploutocratie américaine est terrifiée par la puissance économique et industrielle chinoise, d’où la diffamation d’entreprises comme Huawei ou DJI qui sont déclarées menaçantes pour la sécurité nationale des États-Unis. Blâmez tout sur les Chinois et les oligarques américains vont adorer !

4 – La Chine et la Russie sont dans une relation plus profonde qu’une alliance. J’appelle cela une «symbiose» tandis que les Chinois parlent d’un «Partenariat stratégique global de coordination pour la nouvelle ère» et les Russes d’une «alliance cruciale». Les termes n’ont pas vraiment d’importance ici, ce qui compte, c’est que la Russie et la Chine sont au coude à coude contre l’Empire, c’est ce qu’ils veulent dire par «coordination», et que les tentatives américaines – certes peu nombreuses et maladroites – pour briser cette alliance ont totalement échoué.

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5 – Comme pour toute nouvelle pandémie, il a fallu du temps à la Chine pour comprendre la nature de ce qui se passait et il était extrêmement facile d’accuser celle-ci d’obscurcissement délibéré – tout en gardant à l’esprit le fait que la Chine a informé le monde dès le 31 décembre, ce qui est évidemment omis, tout comme la présence d’une délégation multinationale de l’OMS pour enquêter sur cette question. En réalité, on pourrait aussi bien accuser la Chine d’être trop ouverte en permettant à diverses estimations et hypothèses de circuler avant même que le gouvernement chinois n’ait établi tous les faits. C’est un cas parfaitement insoluble de double contrainte : condamné si vous le faites et condamné si vous ne le faites pas.

6 – La culture politique américaine est telle que 99,99% des Américains américains croiront littéralement tout mensonge, aussi stupide soit-il, concernant le reste du monde [comme ils disent si joliment !, NdT], que d’accepter toute vérité désagréable sur leur pays. Faire d’un autre pouvoir un bouc émissaire, en particulier un pouvoir communiste, provoque une réaction instinctive d’approbation de la part d’une grande majorité des Américains.

7 – Lorsque l’OMS n’a clairement pas marché dans la propagande américaine [contre la Chine], ce fut une bonne occasion pour Trump de supprimer son financement. Non seulement les États-Unis devaient déjà des millions de dollars à l’OMS, de $50 à $200 millions, selon la personne à qui vous le demandez, mais le prétexte facile pour ne pas payer était de l’accuser d’être pro-chinois. Il est évident que Trump ne voit aucune utilité à l’ONU, à part en tant que punching ball, et c’était une occasion parfaite pour s’entraîner une fois de plus.

8 – Comme pour tout événement effrayant, un véritable tsunami de rumeurs complètement non fondées, et carrément stupides, a commencé à se déverser dès qu’il a été clair qu’il s’agissait d’un événement majeur. Tout ce que la machine de propagande américaine avait à faire était de parler sérieusement de certaines de ces rumeurs, en faisant croire que les médias ne faisaient que «rapporter» plutôt qu’inventer des histoires.

9 – La Chine est également une menace majeure pour les intérêts américains en Asie, et cette pandémie a fourni à ces derniers une occasion parfaite pour présenter des rapports venant de Taïwan comme des rapports venant de Chine – c’est une vieille astuce. Quant au gouvernement taïwanais, il était plus qu’heureux de l’aubaine d’avoir un autre prétexte pour haïr la Chine, rien de nouveau ici non plus.

10 – Enfin, les économistes américains n’ont pas mis longtemps à comprendre que cette pandémie aurait un effet dévastateur sur la «meilleure économie de l’histoire de la galaxie», si bien que le fait de rejeter la faute sur la Chine est le moyen idéal pour Trump et ses maîtres néocons de dévier toute accusation lancée contre eux.

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Les récits qui ont ensuite été inventés sont vraiment magnifiques. Voici quelques-uns de mes favoris :
Le FBI dit que des États étrangers ont piraté des centres de recherche américains à la recherche de percées dans l’étude de la COVID-19. Bien que cet article pointe du doigt l’Iran, pas la Russie ou la Chine, il donne très bien le ton de «on nous attaque». Remarquez le pluriel dans «États étrangers».
Les États-Unis lancent une «enquête à grande échelle» sur le laboratoire de Wuhan.
Une étude a-t-elle prouvé que le coronavirus était une création humaine, comme le prétend un lauréat français du prix Nobel de médecine ? Excellent coup joué, il donne du pouvoir à l’argument en citant une célébrité, peu importe qu’il y ait beaucoup plus de voix crédibles disant que cette théorie est une baliverne. [Cf l’interview du Pr Montagnier sur Cnews encadré par la fine-fleur des « journalistes » atlantistes, NdSF]


Il y en a beaucoup plus, je suis sûr que vous les avez vus aussi.

Finalement, et inévitablement, cette PSYOP stratégique a fait monter les enchères et FOXnews – évidemment – a diffusé ce véritable chef-d’œuvre : «Sen. Hawley : Que les victimes du coronavirus poursuivent le Parti communiste chinois ». Vraiment, c’est génial. «J’ai perdu mon emploi, que les camarades chinois diaboliques me remboursent» est une mélodie agréable pour les oreilles de la majorité des Américains.

À l’heure actuelle, la plupart des déclarations américaines ne sont que de simples mensonges, mais comme la Chine, avec le temps, publiera finalement des données corrigées plus précises, ces statistiques mises à jour seront immédiatement interprétées comme la preuve qu’initialement les Chinois mentaient délibérément, et non pas comme le résultat des Chinois eux-mêmes obtenant progressivement une meilleure image de ce qui s’est réellement passé. Encore une fois, c’est le cas typique de double contrainte où vous êtes toujours coupable.

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Je dois mentionner qu’il y a une autre raison qui pourrait contribuer à la décision des États-Unis de rejeter la faute sur la Chine : on ne sait toujours pas d’où vient ce virus, mais une possibilité est qu’il soit originaire des États-Unis et a été amené en Chine par les Américains – que ce soit délibérément ou non n’est pas la question ici. Quant aux rapports qui prétendent que les États-Unis dissimulent délibérément l’ampleur réelle de la catastrophe aux États-Unis, ils sont ignorés.

En outre, il est maintenant douloureusement évident que les politiciens américains ont très mal apprécié la situation en commençant à dire que c’était un problème chinois ou que ce n’était « pas pire que la grippe saisonnière », ou les deux. Ce n’est que le dernier exemple de ce que j’appelle le «messianisme narcissique américain», conduisant les dirigeants à croire en leur propre propagande, pour finir par découvrir que la réalité existe toujours, et qu’elle est radicalement différente des illusions de la plupart des Américains.

Maintenant, tous ces politiciens américains – les Republicrates autant que les Démoblicains – doivent courir dans tous les sens en cherchant à planquer collectivement leurs culs. Quelle meilleure façon d’y parvenir que de rejeter la faute sur la Chine ?

Comme je l’ai dit plus haut, c’est intelligent, mais absolument pas très intelligent.


Les États-Unis sont déjà coincés dans une guerre impossible à gagner contre la Russie – comme je le rappelle toujours à tout le monde, cette guerre est à 80% communication, 15% économique et seulement 5% militaire. Ouvrir un «deuxième front» à grande échelle est logique en termes d’opportunité politique à court terme, en particulier pendant une année électorale, mais à long terme, il est voué à un désastreux échec. En fait, s’il y a quelque chose que l’histoire nous enseigne, c’est que l’ouverture d’un second front lorsque vous ne pouvez même pas gérer le premier est suicidaire. Mais qui se soucie de l’histoire, en particulier aux «États-Unis d’Amnésiques» ? Et puis, quand vous êtes en même temps exceptionnel et totalement supérieur, pourquoi voudriez-vous vous soucier de l’histoire des peuples et des nations «déplorables» ici où là ? Appelez-les simplement «fosses à purin» et agitez votre drapeau – de fabrication chinoise. C’est ce qui suffit pour «paraître présidentiel» de nos jours …

Indépendamment de tout ce qui a été dit ci-dessus, l’élan de cette campagne sinophobe est trop important pour être inversé ou arrêté. Et puisque la plupart de la classe politique américaine la soutient, cela continuera probablement même après l’élection présidentielle américaine, en supposant qu’elle ait lieu.

Pourtant, tout cela pose une question : que s’est-il vraiment passé ? Quelle est la vérité ?

La vérité est que personne ne sait vraiment. Il faudra probablement des années pour obtenir l’image complète et, plus encore, les bons chiffres. Quels chiffres corrects ? Eh bien, tous : porteurs, résistants, groupes d’âge, comorbidité, caractéristiques exactes du virus et de ses diverses mutations, efficacité des différents tests, quel médicament antiviral pourrait aider, ses effets secondaires, rôle du vaccin BCG pour aider le corps à combattre le virus, etc.

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Pour l’instant, je ne pense pas que quiconque le sache vraiment, même le pourcentage de porteurs asymptomatiques change d’ordre de grandeur en fonction de l’informateur. Bien sûr, certaines suppositions sont plus proches de la vérité que d’autres, par définition, mais il est encore très difficile de déterminer lesquelles.

Il est important de garder à l’esprit maintenant que la plupart de ce que nous voyons a très peu de rapports avec une enquête scientifique. Ce que nous voyons, c’est une tentative d’utiliser cette pandémie à des fins politiques, financières et géostratégiques.

Et s’il vous plaît, ne pensez pas que ce n’est que Trump ! N’oubliez pas ce que Nancy Pelosi, la présidente de la Chambre des représentants US, disait en février !

C’était près de deux mois après que la Chine avait averti l’OMS qu’une crise majeure se préparait !

Mais Pelosi, tout comme Trump, ne pense qu’au pouvoir, à l’argent et à l’influence, pas à la sécurité des «déplorables» que les Démocrates détestent tant, comme les Républicains aussi bien sûr, mais ils ne le disent tout simplement pas aussi ouvertement que Hillary.

Quant à mesurer le respect de Trump pour ses semblables, surtout les femmes, souvenez-vous simplement de son conseil : il suffit de «les attraper par la chatte».

Ensuite, il y a un autre risque très réel : alors que la situation empire de plus en plus aux États-Unis et, en particulier, pour la réélection de Trump, il pourrait bien décider de faire ce que beaucoup de politiciens font dans une telle situation : déclencher une grande guerre. Avant la pandémie, les États-Unis n’avaient clairement pas les cojones pour déclencher une guerre contre l’Iran, mais maintenant que la pandémie paralyse l’économie mondiale et que tous les côtés abjects du système capitaliste transnational deviennent évidents, je ne mettrais pas Trump à l’abri de l’idée de commencer une guerre contre l’Iran juste pour dévier les nombreuses accusations portées contre lui. L‘Idiot en chef a maintenant ordonné aux forces de l’US Navy, au large des côtes de l’Iran, de – sans blaguer – « abattre et détruire » toute vedette iranienne armée qui « harcèlerait » l’US Navy.

Apparemment, il ne comprend toujours pas que si un navire de l’US Navy exécutait un tel ordre, il se retrouverait immédiatement face à un essaim de missiles anti-navires iraniens. De toute évidence, son narcissisme messianique et sa mégalomanie enragée ne permettent tout simplement pas à Trump de comprendre que les Iraniens existent pour de vrai, qu’ils sont sérieux, et que, contrairement aux États-Unis, ils ont soigneusement étudié les conséquences de toute guerre contre les États-Unis et bien qu’ils ne provoqueront jamais délibérément une telle guerre, ils la combattront si nécessaire, avec une énergie infiniment plus forte que les États-Unis. Aparté Comme un politicien américain typique agitant le drapeau, Trump pense probablement que si tout va mal pour eux, les États-Unis pourront atomiser l'Iran et l'emporter. Il a raison sur le premier point, mais complètement tort sur le second. Si des armes nucléaires sont utilisées contre l'Iran, alors il y aura une guerre totale et longue pour expulser les États-Unis et l'entité sioniste du Moyen-Orient. Mais c'est un sujet pour un autre jour.

Les politiciens américains me rappellent une personne vivant dans une cabane dans l’Arctique qui décide de la brûler pour se chauffer : bien sûr, cette stratégie fonctionnera pendant un petit moment, mais seulement au prix d’une catastrophe beaucoup plus importante. C’est ce que presque tous les politiciens américains ont fait avec cette pandémie, et c’est pourquoi ils n’accepteront jamais aucune responsabilité pour quoi que ce soit.

Covered_ass.jpgDécouvrez ce petit âne mignon sur la droite.

Ne ferait-il pas une mascotte et un symbole parfait pour les deux partis politiques américains et pour les nombreux politiciens américains qui ne pensent qu’à se couvrir ?

Il y a encore une chose que je voudrais mentionner ici : il y a beaucoup de gens qui aiment bien noter toutes les fois où quelqu’un a prédit que cette pandémie se produirait. Ils prennent ces avertissements comme preuve d’un complot. La vérité est que la communauté scientifique et même le grand public, du moins ceux qui lisent encore des livres, savaient parfaitement que ce n’était qu’une question de temps avant qu’une telle pandémie ne se produise, car notre société rendait un tel événement inéluctable. Un seul exemple :
 
La prochaine épidémie : nouvelles maladies émergentes dans un monde déséquilibré

51W2kHMNNUL._SX331_BO1,204,203,200_.jpgEn 1995, la journaliste américaine Laurie Garrett a publié un excellent livre intitulé «The Coming Plague: Newly Emerging Diseases in a World Out of Balance» dans lequel elle a expliqué pourquoi et même comment une pandémie mondiale émergerait naturellement en raison de la nature même de notre société moderne. Je recommande fortement ce livre en dépit du fait qu’il a maintenant un quart de siècle : il est très bien écrit, facile à lire et il est très convaincant en disant que de telles pandémies étaient inévitables, et sans besoin de faire appel aux théories non confirmées de la guerre biologique.

L’histoire montrera que nous tous, notre planète entière, n’avons pas pris cela, et bien d’autres avertissements, au sérieux.

Demandez-vous ce qui est plus facile pour un politicien : accepter que tout notre ordre socio-politique est insoutenable et carrément dangereux – ou «déséquilibré» pour utiliser l’expression de Garrett, ou rejeter la faute sur les cocos chinois et leur programme «secret» de guerre biologique » ?

Je pense que la réponse va de soi.

The Saker

Traduit par jj, relu par Hervé pour le Saker Francophone

mardi, 05 mai 2020

Peut-on faire un lien entre véganisme et suicide civilisationnel de l'Occident?

Peut-on faire un lien entre véganisme et suicide civilisationnel de l'Occident?

(via Facebook)

Sans tomber dans l'éthologie (Fabre, Lorenz surtout, ...), soit absolument calquer le comportement humain sur celui des animaux (et vice-versa), je me souviens de Spengler notifiant quelque part que les herbivores sont caractérisés par une vision monoculaire, avec leurs yeux logés sur les positions latérales du crâne, là où les carnivores ont une vision binoculaire, avec leurs yeux au front ; c'est que les animaux herbivores sont bas dans la chaîne alimentaire, ils doivent regarder autour deux pour éviter le danger, qui est surtout représenté par les animaux carnivores, qui eux regardent droit devant, puisqu'ils guettent et complotent pour leur nourritures ; Spengler écrit alors que le carnivore étant par défaut un prédateur, il regarde "face à lui" ou "vers l’horizon", et sur un plan humain on pourrait dire qu'il a une "idéologie", donc un "avenir".

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Les végans, qui, rappelons-le, "radicalisent" le végétarisme (ils refusent absolument tout ce qui est lié à l'animal, donc même les produits laitiers), semblent donc correspondre à cette typologie : le fait qu'ils soient devenus "herbivores" pourrait être perçu comme un des nombreux symptômes de la fin de la civilisation occidentale.

51jUjQe6GUL._SY445_QL70_ML2_.jpgPlus encore, la nutrition des végans, selon plusieurs études scientifiquement, entament plus précisément un déficit de vitamine B12, de créatine et de testostérone, celle-ci étant bien sûr la testostérone mâle qui régule (à travers l'amygdale) des traits typiquement virils, et Barzilai - un Israélien - fait de la "biohistoire" (interpréter l'histoire de la civilisation à travers les modifications biologiques chez l'homme), et lui pense que c'est la chute du taux de testostérone qui justement explique la chute de l'Occident, et notamment la montée du féminisme, de l'irrationalisme, etc (par-delà même les caractéristiques que nous connaissons tous à propos des déficients en testostérone, soit la dysfonction érectile, etc).

Tout cela serait bien sûr à creuser mais il semblerait bien que, comme à plusieurs endroit, la réalité soit binaire, soit on est le prédateur, soit on est la proie, et le véganisme semble être un choix explicite.

On Titus Burckhardt's Symbolism of Chess

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On Titus Burckhardt's Symbolism of Chess

Troy Southgate

(ex: Facebook)

AVT_Titus-Burckhardt_3182.jpegIn The Symbolism of Chess, which Titus Burckhardt (1908-1984) had published in the Spring 1969 issue of Studies in Comparative Religion, the Traditionalist School thinker shares with his readers an interesting viewpoint on the relationship between free will and destiny.

As he explains, "At each stage of the game, the player is free to choose between several possibilities, but each movement will entail a series of unavoidable consequences, so that necessity increasingly limits free choice, the end of the game being seen, not as the fruit of hazard, but as the result of rigorous laws." That which appears to be the result of self-determination, therefore, eventually results in a player having to abide by an increasing number of rules. Burckhardt compares the manner in which free will is eventually governed by fate to the relationship between liberty and knowledge, arguing that for a chess player freedom is realised within the possibilities of the game itself: "In other words, freedom of action is here in complete solidarity with foresight and knowledge of the possibilities; contrariwise, blind impulse, however free and spontaneous it may appear at first sight, is revealed in the final outcome as a non-liberty."

Burckhardt went on to suggest that a correct interpretation of the link between liberty and knowledge finds its fulfilment through mankind's self-identification with the divine, and that "Spirit is Truth; through Truth, man is free; outside truth, he is the slave of fate." I believe that we can apply this way of thinking to a political context, too, particularly if you consider how the inhabitants of modern societies may be distinguished by their tendency to abrogate responsibility to the extent that members of a privileged minority can attain empowerment beyond their wildest dreams.

41zjc3UndLL._SX304_BO1,204,203,200_.jpgOnce states and empires began herding the masses beneath a single banner, many of those struggling to adapt to the game of life gradually discovered that the pieces on the chess board had already been set up on their behalf. In Burckhardt's example, a failure to conform with the rules has dire consequences and that also holds true for those who find themselves on the receiving end of the political establishment. The difference between his idea that spiritual liberty is attained by adhering to a primordial framework of truth, something that can be justified within that specific context, the very nature of the political system into which we are formally inducted at birth means that unless we retain the freedom to reject the game altogether our liberty remains non-existent. After all, I am perfectly sure that Burckhardt's competitor will have entered the tournament at his or her own discretion and yet from the very first move becomes subject to the parameters that have been carefully formulated by its architects.

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Pierre Le Vigan: «La mobilité comme liberté de bouger ou l’autonomie comme vraie liberté»

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Pierre Le Vigan:

«La mobilité comme

liberté de bouger ou

l’autonomie comme

vraie liberté»

Nous sommes, en ce moment de confinement, privés de mobilité. Mais si la mobilité est une liberté, elle n’est pas toute la liberté. Il y a une liberté supérieure, qui implique de pouvoir être mobile, mais de pouvoir choisir aussi d’être immobile. Cette liberté supérieure, c’est l’autonomie. Et au-delà de la liberté de circuler, dont nous ne pouvons être durablement privés, la grande question qui se pose est celle de reconquérir une liberté comme autonomie, perdue depuis la révolution industrielle et les sociétés de masse.

Dès le XIXe siècle, les inconvénients des sociétés de masse avaient été relevés par Tocqueville, puis par Nietzsche : instinct grégaire, perte du sens de l’initiative et de la responsabilité, Le paradoxe de la situation actuelle est que le confinement de masse fait suite à la mobilisation de masse. Le contraste est fort entre l’incitation à la mobilité, il y a encore deux mois (« Bougez-vous »), et l’assignation à résidence, à 1 km maximum de son domicile (« Restez chez vous »). Et pourtant, une question se pose : et si la logique était la même ? Sachant que ce sont en tout cas les mêmes qui nous reprochaient « de ne pas traverser la rue pour trouver un travail » qui nous demandent maintenant de ne pas traverser la rue, sauf pour des courses de première nécessité. Jusqu’à la mi-mars, la mobilité était louée, elle était au service de la mobilisation de toutes les énergies au service de l’économie. Nous devons maintenant nous croiser le moins possible, ce qui, dans sa forme extrême, donne l’injonction « Restez chez vous », la distanciation sociale étant rabattue sur l’enfermement chez soi. Nous nous apercevons alors que presque rien n’est possible sans déplacement. Et nous prenons la mesure de notre vulnérabilité. Dans la France périphérique, celle des campagnes, mais aussi celles des grandes banlieues, où les petits commerces ont disparus, il faut faire des km pour rejoindre le supermarché. Un peu partout, pour voir ses amis, et sa famille, il faudrait faire un trajet excédant les limites autorisées. La mobilité perdue fait partie de nos libertés. Mais en a-t-il toujours été ainsi ?

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A partir du moment où les hommes se sont sédentarisés, ils n’ont pu échapper à l’impôt, ni aux pouvoirs, royaux et féodaux. Mais une société de sédentaires est une société d’inégaux. Cela limite le pouvoir du souverain, car le souverain veut l’homogène, plus facile à contrôler, et rencontre l’hétérogène, plus insaisissable. Quant à l’ancrage de chacun dans sa terre, propriétaire ou aspirant à le devenir, il freine les possibilités de mobilisation par le souverain. Allez mobiliser des paysans en période de moisson ! Même Napoléon n’a pas trouvé à cela des solutions satisfaisantes. Le paysan n’aime pas être longtemps loin de chez lui. La terre donne une inertie. Et l’inertie limite le pouvoir. A partir du moment où le monde immobile de la terre s’est mis en mouvement, sous les coups de butoirs de la révolution industrielle, les choses ont changées. Première mobilité, l’exode rural a commencé quand le paysan n’a plus pu vivre de sa terre. Et avec l’industrie arriva la démocratie. Du moins le principe premier de toute démocratie : l’idée d’égalité des hommes qui les fait, à part égale, des citoyens. Chacun est alors légitime à participer à la vie politique, quelle que soit sa situation et sa position sociale.

A partir de là, tout le monde peut désirer ce qu’a tout le monde. C’est même un moteur – la jalousie – dont le capitalisme a besoin. L’envie remplace le besoin (Franck Fischbach), l’envie étant plus flexible et plus souple que le besoin, et même que le simple désir, encore ancré dans le réel. Le besoin tend à se limiter désormais à un seul domaine, les rapports du capitalisme et de la terre, car le capitalisme a un besoin objectif d’un certain nombre de matières premières nécessaires à la production d’énergie, et se heurte à des limites objectives, la terre offrant des ressources non infiniment renouvelables.

Mais, entre le capitalisme et les hommes, ce qui prédomine, ce sont désormais les valeurs mobilières (capitaux, placements…). La société industrielle devient à la fois de plus en plus mobile et de plus en plus marchande. Mais cette mobilité n’est plus le nomadisme des sociétés sans Etats étudiées par Pierre Clastres. Ce nomadisme connaissait des souverainetés éphémères, militaires, fragiles. La mobilité moderne est une mobilité sous contrôle. Elle l’est avec les permis de voyager que devaient porter sur eux les ouvriers du XIXe siècle (le « livret ouvrier »). Chacun est sous tutelle, et dépendant du système de l’argent : banques, crédit, assurances, centrales d’achat pour grandes surfaces, …

Dans ce système où chacun dépend d’une grande machine étatique et marchande lointaine, la liberté de mobilité n’est en rien une liberté comme autonomie. Cette liberté comme autonomie, c’est celle dont disposait le paysan dans une économie localisée, peu monétarisée. La liberté comme mobilité est en fait la liberté de devoir être mobile, de devoir être flexible, de devoir être adaptable, et interchangeable. C’est Spinoza interprété au premier degré : « La liberté, c’est l’intellection de la nécessité ».

Confinés, nous voyons que l’on demande d’être encore plus flexible (le télétravail n’a plus d’heure et déborde sur toute la vie), de nous passer plus encore des services publics (réduits au minimum), de nous auto-contrôler plus encore (en nous délivrant à nous-mêmes des autorisations de sortie dérogatoire). La numérisation de tout le vivant et le traçage de tous à tout moment ont fait un grand pas, légitimés par la « santé », réduite au Covid-19, tandis que se multiplie les dégâts collatéraux (chômage, dépressions, violences, …) dus à la gestion de la crise sanitaire. A l’occasion du confinement, le gouvernement, faisant sortir notre pays de la démocratie parlementaire, multiplie les ordonnances, notamment sur le travail, et en profite pour affaiblir les protections sociales. Au même moment, les délais pour décider d’avorter sont encore allongés, après la suppression du délai de réflexion en 2015, et de la notification des droits de la femme enceinte, le ministre Olivier Véran s’étant inquiété, suite au confinement, de la baisse du nombre d’avortements : « Il y a une réduction inquiétante du recours à l’IVG », Public Sénat, 1er avril 2020, formulation pour le moins choquante, loin de l’esprit initial de la loi de Simone Veil. On voit par-là que le confinement n’empêche pas la marche du monde libéral de se poursuivre, et même de forcer l’allure. Toujours plus de mobilisation, toujours plus de « c’est mon choix », toujours plus d’individualisme.

Pas plus en confinement qu’auparavant, l’économie n’est mise au service du bien commun. Le pouvoir de l’argent, et la jouissance malsaine de la transparence, de vouloir tout savoir sur tous, et de vouloir tout contrôler se sont réunis. Ils ont étendu leur emprise de la sphère économique à l’ensemble de la vie. Biopouvoir : le voilà. Si le confinement permettait à chacun de comprendre qu’il va nous falloir, collectivement, reprendre le pouvoir sur nos vies, il n’aura pas été totalement inutile.

Pierre Le Vigan

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Les racines profondes de la diabolisation de la Chine

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Les racines profondes de la diabolisation de la Chine

 
 
Auteur : Pepe Escobar 
Ex: http://www.zejournal.mobi

Hegel a vu l’histoire se déplacer d’est en ouest : « L’Europe est ainsi fondamentalement la fin de l’histoire, l’Asie le début ».

Attachez vos ceintures : la Guerre Hybride américaine contre la Chine va forcément s’intensifier frénétiquement, car les rapports économiques identifient déjà le Covid-19 comme le point de basculement où le siècle asiatique – en fait eurasiatique – a véritablement commencé.

La stratégie américaine reste, pour l’essentiel, dominatrice sur tout le spectre, la stratégie de sécurité nationale étant obsédée par les trois principales « menaces » que sont la Chine, la Russie et l’Iran. La Chine, en revanche, propose une « communauté de destin partagée » pour l’humanité, s’adressant principalement au Sud Global.

Le récit prédominant des États-Unis dans la guerre de l’information en cours est désormais gravé dans le marbre : Le Covid-19 est le résultat d’une fuite d’un laboratoire de guerre biologique chinois. La Chine est responsable. La Chine a menti. Et la Chine doit payer.

9200000083225332.jpgLa nouvelle tactique normale de diabolisation continue de la Chine n’est pas seulement déployée par des fonctionnaires grossiers du complexe industrie-militaire-surveillance-médias. Nous devons creuser beaucoup plus profondément pour découvrir comment ces attitudes sont profondément ancrées dans la pensée occidentale – et ont ensuite migré vers la « fin de l’histoire » des États-Unis. (Voici des sections d’une excellente étude, « Unfabling the East : The Enlightenment’s Encounter with Asia », de Jurgen Osterhammel).

Seuls les Blancs sont civilisés

Bien au-delà de la Renaissance, aux XVIIe et XVIIIe siècles, chaque fois que l’Europe faisait référence à l’Asie, c’était essentiellement au sujet de la religion qui conditionnait le commerce. Le Christianisme régnait en maître, il était donc impossible de penser en excluant Dieu.

En même temps, les docteurs de l’Église étaient profondément troublés par le fait que dans le monde Signifié, une société très bien organisée pouvait fonctionner en l’absence d’une religion transcendante. Cela les dérangeait encore plus que ces « sauvages » découverts en Amérique.

Lorsqu’elle a commencé à explorer ce qui était considéré comme « l’Extrême-Orient », l’Europe était enlisée dans des guerres de religion. Mais en même temps, elle a dû faire face à une autre explication du monde, et cela a alimenté certaines tendances antireligieuses subversives dans la sphère des Lumières.

C’est à ce stade que les savants européens ont commencé à remettre en question la philosophie chinoise, qu’ils ont inévitablement dû dégrader au rang de simple « sagesse » du monde parce qu’elle échappait aux canons de la pensée grecque et augustinienne. Cette attitude, soit dit en passant, prévaut encore aujourd’hui.

Nous avons donc eu ce qu’on appelait en France les chinoiseries – une sorte d’admiration ambiguë, dans laquelle la Chine était considérée comme l’exemple suprême d’une société païenne.

Mais ensuite, l’Église a commencé à perdre patience face à la fascination des Jésuites pour la Chine. La Sorbonne a été punie. Une bulle pontificale, en 1725, a rendu hors la loi les chrétiens qui pratiquaient des rites chinois. Il est assez intéressant de noter que les philosophes sinophiles et les Jésuites condamnés par le Pape insistaient sur le fait que la « vraie foi » (le Christianisme) était « préfigurée » dans les textes chinois anciens, notamment confucianistes.

La vision européenne de l’Asie et de « l’Extrême-Orient » a été principalement conceptualisée par une puissante triade allemande : Kant, Herder et Schlegel. Kant, d’ailleurs, était également géographe, et Herder historien et géographe. On peut dire que la triade a été le précurseur de l’orientalisme occidental moderne. Il est facile d’imaginer une nouvelle de Borges mettant en scène ces trois-là.

Autant qu’ils aient pu connaître la Chine, l’Inde et le Japon, pour Kant et Herder, Dieu était au-dessus de tout. Il a planifié le développement du monde dans tous ses détails. Et cela nous amène à la question délicate de la race.

Rompant avec le monopole de la religion, les références à la race ont représenté un véritable tournant épistémologique par rapport aux penseurs précédents. Leibniz et Voltaire, par exemple, étaient sinophiles. Montesquieu et Diderot étaient sinophobes. Aucun n’expliquait les différences culturelles par la race. Montesquieu a développé une théorie basée sur le climat. Mais cela n’avait pas de connotation raciale – c’était plutôt une approche ethnique.

Voyages_de_François_Bernier_contenant_[...]Bernier_François_bpt6k15216009.JPEGLa grande rupture est venue du Philosophe et voyageur français François Bernier (1620-1688), qui a passé 13 ans à voyager en Asie et a publié en 1671 un livre intitulé « La Description des États du Grand Mogol, de l’Indoustan, du Royaume de Cachemire, etc ». Voltaire, de façon hilarante, l’appela Bernier-Mogol – car il devint une star en racontant ses histoires à la cour royale. Dans un livre ultérieur, « Nouvelle Division de la Terre par les Différentes Espèces ou Races d’Homme qui l’Habitent », publié en 1684, le « Mogol » distingue jusqu’à cinq races humaines.

Tout cela était basé sur la couleur de la peau, et non sur les familles ou le climat. Les Européens étaient automatiquement placés au sommet, tandis que les autres races étaient considérées comme « laides ». Par la suite, la division de l’humanité en jusqu’à cinq races a été reprise par David Hume – toujours sur la base de la couleur de la peau. Hume a proclamé au monde anglo-saxon que seuls les blancs étaient civilisés, les autres étaient inférieurs. Cette attitude est toujours aussi répandue. Voir, par exemple, cette diatribe pathétique récemment publiée en Grande-Bretagne.

Deux Asie

Le premier penseur à avoir réellement élaboré une théorie de la race jaune est Kant, dans ses écrits entre 1775 et 1785, soutient David Mungello dans « The Great Encounter of China and the West, 1500-1800 ».

Kant qualifie la « race blanche » de « supérieure », la « race noire » « d’inférieure » (d’ailleurs, Kant n’a pas condamné l’esclavage), la « race cuivrée » de « faible » et la « race jaune » d’intermédiaire. Les différences entre elles sont dues à un processus historique qui a commencé avec la « race blanche », considérée comme la plus pure et la plus originale, les autres n’étant que des bâtardes.

Kant a subdivisé l’Asie par pays. Pour lui, l’Asie de l’Est signifiait le Tibet, la Chine et le Japon. Il considérait la Chine en termes relativement positifs, comme un mélange de races blanche et jaune.

Il était définitivement plus tendre. Pour lui, la Mésopotamie était le berceau de la civilisation occidentale, et le jardin d’Eden se trouvait au Cachemire, « le paradis du monde ». Sa théorie de l’évolution historique a connu un grand succès en Occident : l’Orient était un bébé, l’Égypte un enfant, la Grèce un jeune. L’Asie de l’Est de Herder était composée du Tibet, de la Chine, de la Cochinchine, du Tonkin, du Laos, de la Corée, de la Tartarie orientale et du Japon – des pays et régions touchés par la civilisation chinoise.

260px-Franz_Gareis_Portrait_Friedrich_Schlegel.jpgSchlegel était comme le précurseur du hippie californien des années 60. C’était un passionné de sanskrit et un étudiant sérieux des cultures orientales. Il disait que « en Orient, nous devrions rechercher le romantisme le plus élevé ». L’Inde était la source de tout, « toute l’histoire de l’esprit humain ». Pas étonnant que cette idée soit devenue le mantra de toute une génération d’orientalistes. Ce fut également le début d’une vision dualiste de l’Asie à travers l’Occident qui est encore prédominante aujourd’hui.

Ainsi, au XVIIIe siècle, nous avions pleinement établi une vision de l’Asie comme une terre de servitude et le berceau du despotisme et du paternalisme, en contraste flagrant avec une vision de l’Asie comme le berceau des civilisations. L’ambiguïté est devenue la nouvelle norme. L’Asie était respectée en tant que mère des civilisations – systèmes de valeurs compris – et même mère de l’Occident. En parallèle, l’Asie était rabaissée, méprisée ou ignorée parce qu’elle n’avait jamais atteint le niveau élevé de l’Occident, malgré son avance.

Ces despotes orientaux

Et cela nous amène à Hegel. Hyper bien informé – il a lu des rapports d’ex-Jésuites envoyés de Pékin – Hegel n’écrit pas sur « l’Extrême-Orient » mais seulement sur l’Orient, qui comprend l’Asie de l’Est, essentiellement le monde chinois. Hegel ne se soucie pas beaucoup de la religion comme le faisaient ses prédécesseurs. Il parle de l’Orient du point de vue de l’État et de la politique. Contrairement à Schlegel, partisan des mythes, Hegel voit l’Orient comme un état de la nature en train de se rapprocher d’un début d’histoire – contrairement à l’Afrique noire, qu’il a vue se vautrer dans la fange d’un état bestial.

Pour expliquer la bifurcation historique entre un monde stagnant et un autre en mouvement, conduisant à l’idéal occidental, Hegel a divisé l’Asie en deux.

Une partie était composée par la Chine et la Mongolie : un monde puéril d’innocence patriarcale, où les contradictions ne se développent pas, où la survie de grands empires atteste du caractère « insubstantiel », immobile et anhistorique de ce monde.

L’autre partie était Vorderasien (« Asie Antérieure »), réunissant l’actuel Moyen-Orient et l’Asie Centrale, de l’Égypte à la Perse. C’est un monde déjà historique.

9200000022810499.jpgCes deux immenses régions sont également subdivisées. Ainsi, le « Asiatische Welt » (monde asiatique) de Hegel est finalement divisé en quatre : premièrement, les plaines des fleuves Jaune et Bleu, les hauts plateaux, la Chine et la Mongolie ; deuxièmement, les vallées du Gange et de l’Indus ; troisièmement, les plaines de l’Oxus (aujourd’hui l’Amour-Darya) et des Jaxartes (aujourd’hui le Syr-Darya), les plateaux de Perse, les vallées du Tigre et de l’Euphrate ; et quatrièmement, la vallée du Nil.

Il est fascinant de voir comment, dans la Philosophie de l’Histoire (1822-1830), Hegel finit par séparer l’Inde en tant que sorte d’intermédiaire dans l’évolution historique. Nous avons donc finalement, comme l’a montré Jean-Marc Moura dans « L’Extrême Orient selon G. W. F. Hegel, Philosophie de l’Histoire et Imaginaire Exotique », un « Orient fragmenté, dont l’Inde est l’exemple, et un Orient immobile, figé en chimère, dont l’Extrême Orient est l’illustration ».

Pour décrire la relation entre l’Est et l’Ouest, Hegel utilise quelques métaphores. L’une d’elles, assez célèbre, évoque le soleil : « L’histoire du monde voyage d’est en ouest, l’Europe étant ainsi fondamentalement la fin de l’histoire, et l’Asie le début ». Nous savons tous où nous ont menés les sordides histoires dérivées de la « fin de l’histoire ».

L’autre métaphore est celle de Herder : l’Orient est « la jeunesse de l’histoire » – mais avec la Chine qui occupe une place particulière en raison de l’importance des principes confucianistes qui privilégient systématiquement le rôle de la famille.

Rien de ce qui précède n’est bien sûr neutre en termes de compréhension de l’Asie. La double métaphore – utiliser le soleil et la maturité – ne pouvait que conforter l’Occident dans son narcissisme, hérité plus tard de l’Europe par les États-Unis « exceptionnels ». Cette vision implique l’inévitable complexe de supériorité, dans le cas des États-Unis encore plus aigu parce que légitimé par le cours de l’histoire.

Hegel pense que l’histoire doit être évaluée dans le cadre du développement de la liberté. Or, la Chine et l’Inde étant anhistoriques, la liberté n’existe pas, sauf si elle est apportée par une initiative venant de l’extérieur.

Et c’est ainsi que le fameux « despotisme oriental » évoqué par Montesquieu et l’intervention possible, parfois inévitable, et toujours précieuse de l’Occident sont, en tandem, totalement légitimés. Il ne faut pas s’attendre à ce que cet état d’esprit occidental change de sitôt, voire jamais. D’autant plus que la Chine est sur le point de revenir au premier rang.

Traduit par Réseau International

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lundi, 04 mai 2020

Sur l’interdiction du Hizbollah en Allemagne ou force salamalecs pour Israël

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Karl Richter

Sur l’interdiction du Hizbollah en Allemagne ou force salamalecs pour Israël

Malgré la crise du coronavirus, il y a tout de même d’autres thématiques sur lesquelles il conviendrait de s’entretenir. Parmi celles-ci, l’interdiction en Allemagne du Hizbollah chiite, désormais posé comme « organisation terroriste » suite à de longues pressions du lobby pro-israélien, interdiction qui est l’œuvre du ministre de l’intérieur allemand Seehofer, surnommé « Drehhofer », du verbe « drehen », « tourner », tourner comme une girouette. Cette gesticulation de Seehofer-la-girouette est, sur le plan politique, totalement dépourvue de sens car, d’abord, le Hizbollah ne commet pas d’attentats terroristes sur le sol allemand, et, ensuite, cette interdiction postule, très logiquement, qu’il aurait fallu aussi rompre toutes relations diplomatiques avec le Liban car, dans ce pays du Levant, le Hizbollah participe régulièrement à l’exercice du pouvoir.

Cet incident démontre une fois de plus, et très clairement, que la politique dite « allemande » est dictée par d’autres et qu’en aucun cas elle est faire par des Allemands pour des Allemands. Comme j’ai pu le constater personnellement après plusieurs visites à ce pays, le Hizbollah bénéficie au Liban d’une aura considérable tant chez les chrétiens que chez les musulmans. Pourquoi ? Parce que, d’une part, il dispose d’un vaste réseau d’organisations caritatives et, d’autre part, il a la réputation de pouvoir tenir tête militairement et efficacement tant aux Israéliens qu’aux terroristes sunnites de l’Etat islamiste (soutenu par Israël et les Etats-Unis). C’est donc avec raison qu’un représentant du conseil des gardes de la révolution iranienne a pointé l’attention du gouvernement fédéral allemand, suite à l’interdiction proclamée par Seehofer, pour lui dire que le Hizbollah a contribué de manière importante à ce que les coupeurs de têtes de l’Etat islamiste n’ont pas pu étendre leurs activités dans les capitales européennes au cours de ces dernières années (voir le lien : https://www.almasdarnews.com/…/hezbollah-prevented-isis-fr…/).

On déplorera tout particulièrement une chose dans cette affaire de l’interdiction du Hizbollah en Allemagne : le médium « Compact » (revue + chaîne TV) de Jürgen Elsässer, qui se déclare « non conformiste », a appuyé la décision ridicule et Israel-friendly de Seehofer en la décrivant comme un « coup contre les islamistes ». Cela nous permet de poser un constat : toute expression de l’Islam-bashing fait toujours mouche dans les milieux « populistes de droite » qui, décidément, demeurent complètement désorientés dans leurs postures idéologiques.

Plus pénible encore : la première demande d’interdiction du Hizbollah date de juin 2019 et vient précisément des élus de l’AfD au Bundestag et avait été, à l’époque, rejeté à la majorité ! Raison de plus pourquoi il conviendrait de voir en l’AfD, qui a décidé de se poser comme, je cite, « pro-juif à 100% », tout ce que l’on veut sauf une réelle alternative pour l’Allemagne.

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Restons-en aux faits : en 2006, le Hizbollah avait empêché que le Sud du Liban soit conquis et absorbé par les Israéliens. Israël ne l’a jamais oublié, tout comme le fait, d’ailleurs, que le Hizbollah est désormais une partie constitutive du « corridor chiite » et constitue dès lors un facteur géopolitique de poids dans la région. Mais ce n’est pas là notre problème. Ce qui compte surtout, c’est que le Hizbollah n’a jamais poursuivi l’objectif d’islamiser le monde entier ni d’envoyer des barbus complètement camés pour commettre des attentats-suicides dans le monde. Mettre sur le même plan le Hizbollah, d’une part, et al Qaeda ou l’Etat islamique, d’autre part, relève de la stupidité politique et de l’aveuglement idéologique. L’interdiction par Seehofer  -cet homme sait-il faire autre chose qu’interdire ?- fait honte : ce n’est pas là mon gouvernement, ce n’est pas là mon Allemagne.

(via Facebook).

 

Anton Mussert, fasciste batave

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Anton Mussert, fasciste batave

par Christophe Dolbeau

            Au nombre des leaders fascistes qui ont essaimé dans l’Europe des années 1930, le Néerlandais Anton Mussert est certainement l’un des moins connus du grand public. Chef du Mouvement national-socialiste des Pays-Bas (Nationaal-Socialistische Beweging der Nederlanden ou NSB), il est le plus souvent présenté, fort succintement, comme un pâle imitateur d’Adolf Hitler et une piteuse créature des nazis, mais peut-être mérite-t-il mieux que ce portrait sommaire et affligeant.

Un brillant ingénieur

            Fils de Johannes Leonardus Mussert (1856-1913), instituteur et directeur d’école, et de Frederika Witlam (1856), Anton Adriaan Mussert – que ses parents nomment couramment « Adje » – vient au monde le 11 mai 1894 à Werkendam, une petite commune du Brabant-Septentrional. Il est le cinquième enfant de la famille (1). D’abord scolarisé dans l’école de son père, il fréquente ensuite le lycée de Gorinchem (Gorkum) où il obtient plutôt facilement son baccalauréat en 1912. Attiré par les voyages et les navires, le jeune homme (qui appartient à l’association Onze Vloot ou Notre Flotte) souhaiterait endosser l’uniforme de la Marine et faire une carrière d’officier, mais sa petite taille (moins d’un mètre soixante-cinq) et une vue déficiente lui barrent irrémédiablement cette voie. Sur les conseils de son père, il décide donc d’entreprendre des études de génie civil. C’est alors qu’éclate la Première Guerre mondiale, ce qui l’incite à se porter volontaire dans l’armée, toujours dans l’espoir d’y faire carrière, à l’instar de son frère aîné Jo. Une fois encore, ses espérances vont être déçues : affecté dans l’artillerie de forteresse, il n’atteint en effet que le modeste grade de caporal, avant d’être réformé (1915) pour un grave problème rénal. Cette fois, le jeune homme se résoud à suivre une voie civile et rejoint l’École Polytechnique de Delft.

            Étudiant brillant, Anton Mussert est également un élément particulièrement sérieux qui ne participe jamais aux fêtes étudiantes, ne fume et ne boit pas. Solitaire, on ne lui connaît que deux amis, Willem Schermerhorn (1894-1977), qui sera plus tard Premier ministre, et le Juif Jacob Josephus Jitta (1893-1991) qui restera longtemps l’un de ses proches… Sa formation s’achève le 5 juillet 1918, date à laquelle il décroche, cum laude, son diplôme d’ingénieur. Entre-temps, l’étudiant s’est marié, le 19 septembre 1917, ce qui a soulevé pas mal de vagues au sein de la famille. Âgé de 23 ans, Mussert a en effet épousé, grâce à une dispense royale et malgré l’opposition de sa mère, sa tante Maria Witlam (1876-1951) qui a tout de même 18 ans de plus que lui. [Bien qu’il soit membre de l’Église Réformée et réputé plutôt strict, Anton Mussert aura tout au long de son existence une vie sentimentale agitée. On lui connaît plusieurs liaisons extra-conjugales, notamment avec Jadwiga Rosenblatt (1886-1950), une Juive d’origine polonaise, et avec Marietje (Miep) Mijnlieff, la fille (1923-2016) de sa cousine Helena Mijnlieff-Verburg (1889-1951)]

           hlmnha_56-0000003_0001.jpg Fraîchement diplômé, Mussert entre en 1918 au Service national des eaux (Rijkswaterstaat) puis deux ans plus tard, il intègre le Service provincial des eaux d’Utrecht qui offre une meilleure rémunération. Il passe alors pour un technicien remarquable, doublé d’un homme de qualité « dont la personnalité résultait d’une pensée droite et opiniâtre et qui avait un sens profond de l’ordre, de la règle et des convenances bourgeoises »(2). Remarqué pour son zèle et son efficience, il est d’ailleurs rapidement promu et devient, le 1er novembre 1927, à 33 ans, le plus jeune ingénieur en chef du pays. Son premier véritable engagement politique est lié à sa profession puisqu’il a trait au projet de construction d’un canal reliant le Rhin au port d’Anvers. Jugeant ce plan trop favorable à la Belgique et contraire aux intérêts de Rotterdam, de nombreux patriotes néerlandais s’y opposent. Ils se regroupent au sein d’un Comité d’action (Nationaal Comité van Actie) dont Mussert est le secrétaire, et font campagne contre le traité belgo-hollandais que le gouvernement a signé en 1925. Au final, cette mobilisation porte ses fruits : en 1927, l’accord est rejeté par le Sénat et le ministre des Affaires Étrangères, Herman van Karnebeek, contraint de démissionner. À compter de cette époque, Mussert s’implique de plus en plus dans le débat politique. Probablement influencé par les succès de Mussolini, il se rapproche du Dietsche Bond, la Ligue Thioise, qui milite pour la création de Grands Pays-Bas. On le retrouve aussi dans les rangs de la Nationale Unie ou Union nationale, le mouvement nationaliste et corporatiste du professeur F. C. Gerretson (3).

Le national-socialisme néerlandais

            À la fin des années 1920 et au début des années 1930, les Pays-Bas n’échappent pas à la récession mondiale : un très fort chômage s’instaure, de nombreuses faillites surviennent, d’innombrables boutiquiers subissent une forte paupérisation, et le climat général du pays s’en ressent. Le Parti social-démocrate et les partis confessionnels se montrent incapables de juguler la crise qui finit même par ébranler les forces armées. Le 5 février 1933, aux Indes orientales néerlandaises, les marins du croiseur De Zeven Provinciën se mutinent et il faudra bombarder le navire pour ramener son équipage à la raison. Dans ce contexte délétère, nombre de Néerlandais espèrent un sursaut national et en viennent à souhaiter un pouvoir fort, capable de prendre des mesures radicales. L’exemple italien impressionne. C’est dans cette perspective que le 14 décembre 1931, Anton Mussert et Cornelis van Geelkerken (1901-1976) fondent, à Utrecht, le Mouvement national-socialiste des Pays-Bas (NSB). Le chef suprême ou Leider en sera Mussert. Contrairement à ce que l’on pourrait croire à la vue de sa dénomination, le nouveau mouvement s’inspire beaucoup plus du fascisme que du national-socialisme allemand. Mussert se vante d’ailleurs de n’avoir jamais lu Mein Kampf et de n’avoir aucune intention de le faire. Admirateur de Mussolini, il se déclare hostile à la démocratie et favorable à un gouvernement fort, mais ne préconise ni racisme ni antisémitisme. Le mouvement comptera d’ailleurs dans ses rangs et parmi ses bailleurs de fonds un certain nombre de Juifs. « Le NSB n’était pas foncièrement antisémite », remarque Anthony Anderson (4), « et certains Juifs hollandais adhérèrent au mouvement ». « Mussert », ajoute Francis Bertin (5), « ne songea pas, du moins pendant les années précédant la Seconde Guerre mondiale, à assumer les options idéologiques nationales-socialistes allemandes : les idées de primauté raciale, de valeur du sang, de Lebensraum, de conception du monde fondée sur un dynamisme du devenir, ne figurèrent nullement dans les idées du NSB ». Le programme du NSB repose avant tout sur quatre valeurs fondamentales : la croyance en Dieu, l’amour de la Patrie, le service et la solidarité. Favorable à l’instauration d’un État corporatif et chrétien, il prône la lutte contre le libéralisme et le marxisme, réclame l’ordre et la vertu, garantit la propriété privée, invoque le nationalisme néerlandais et la fierté nationale, affirme le primat des intérêts nationaux et proclame son attachement à l’empire colonial. En 1937, un document du mouvement précise encore que « le national-socialisme veut instaurer un esprit de volonté, de fierté, de sentiment du devoir, de foi en sa propre force, de droit à l’existence, de sens national, de sentiment de solidarité, de volonté de coopération, de générosité, pour qu’il en résulte une nation florissante et rénovée qui offre la possibilité d’un bien-être moral et physique à ses fils de toutes conditions et de tous métiers » (6). Jusque là, on ne peut pas vraiment dire que la nouvelle formation se montre particulièrement transgressive et subversive.

          Mussertaffiche.jpg  Dirigée avec talent et sincérité, elle rencontre en tout cas un indéniable succès. De 1000 adhérents à peine, à ses débuts, elle recrute vite et regroupe déjà 33 000 membres en 1934, puis 52 000 en 1936. Une grande manifestation qu’elle organise à Amsterdam, en 1934, réunit plus de 25 000 personnes. S’inspirant beaucoup de ce qui se fait en Italie et en Allemagne, l’appareil du mouvement est assez complexe. Les militants portent un uniforme noir et saluent à la romaine en prononçant les mots de « Hou Zee » (héritée du langage des marins, cette expression signifie quelque chose comme « Garde le cap ! » ou « Bonne navigation ! »). Le swastika n’a pas cours au NSB, mais le mouvement de Mussert utilise souvent la rune du loup ou crampon (Wolfsangel) qui figure sur certains fanions et oriflammes. Il utilise par ailleurs les anciennes couleurs nationales – orange, blanc et bleu – ou « Prinsenvlag ». À partir de 1936, le drapeau du mouvement se composera, quant à lui, de deux bandes horizontales, noire et rouge, avec au centre un triangle (symbolisant le delta du Rhin) renfermant un écusson aux couleurs orange-blanc-bleu, frappé d’un lion avec flèches et épée et encadré des lettres NSB. Le siège central du NSB est à Utrecht et la formation s’articule en dix-sept districts qui se divisent eux-mêmes en groupes et blocs. Le mouvement dispose d’un hebdomadaire, Volk en Vaderland, d’un quotidien, Het Nationale Dagblad, et d’un mensuel, Nieuw Nederland, qui tous trois atteignent un vaste public (certains numéros spéciaux de Volk en Vaderland seront tirés à 800 000 et même un million d’exemplaires durant la campagne électorale de 1935). Au fil du temps, le NSB se dote d’une organisation féminine, la Nationaal-Socialistische Vrouwenorganisatie (7) qui édite son propre journal, De Nationaal-Socialistische Vrouw. Il se dote également d’une organisation de jeunesse ou Nationale Jeugdstorm, ainsi que d’une association étudiante ou Nederlandsche Nationaal-Socialistische Studentenfederatie (NNSS) qui publie le journal De Wig (le groupe prendra en 1940 le nom de Nederlandsche Nationaal-Socialistische Studentenfront). Il existe aussi un Front Paysan ou Boeren Front qui attirera jusqu’à 50 000 agriculteurs. Comme il sied à tout mouvement fasciste de l’époque, le NSB crée en outre un service d’ordre ou Weer Afdeeling (d’abord nommé Weerbaarheids Afdelingen). Composé de douze brigades (avec un effectif global atteignant parfois 15 000 hommes), ce corps de défense possède un hymne spécifique, WA marscheerd (sur l’air du Horst Wessel Lied) et son propre journal, De Zwart Soldaat. Il se double d’un discret service de renseignement ou Centrale Inlichtingen Dienst.

            Dynamique, le NSB effectue une percée significative lors des élections d’avril 1935 où il attire au moins 300 000 électeurs, soit un score encourageant de 7,94% qui lui assure 44 sièges (sur 535) à la Chambre. Joint au décorum menaçant dont s’entoure le mouvement, ce succès électoral inquiète désormais sérieusement les partis traditionnels qui s’accordent tous sur l’impérative nécessité de barrer la route à la formation de Mussert. Dès avril 1934, ce dernier a dû abandonner son emploi suite à la promulgation par le gouvernement d’un décret interdisant à tous les fonctionnaires d’adhérer au NSB. En riposte à cette mesure, le mouvement créera la qualité de « membre secret ». Ces péripéties n’empêchent pas le chef du mouvement d’effectuer une tournée triomphale d’un mois à Java et Sumatra où il compte de nombreux partisans et où le gouverneur général Bonifacius Cornelis de Jonge (1875-1958), un sympathisant, le reçoit à deux reprises avec tous les égards. La répression ne cesse pourtant de se durcir : une seconde loi vient interdire aux civils de porter des uniformes, et une troisème prohibe l’usage de drapeaux et insignes politiques. Même les églises s’en mêlent : la hiérarchie calviniste interdit aux fidèles d’adhérer au NSB, tandis que l’Église Catholique menace de priver de sacrements les militants de ce mouvement. Plusieurs lettres pastorales condament explicitement le national-socialisme et adjurent les croyants de s’en tenir éloignés. En juin 1936, Mussert tentera, avec l’aide de Mussolini, de convaincre le Vatican de faire lever ces interdits, mais sa démarche demeurera sans effet.

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Germanophilie et répression

            Le dénigrement systématique dont le NSB fait l’objet constitue un gros obstacle à son développement car il entretient un hallo négatif autour du mouvement et finit par faire naître des craintes à son sujet. Le phénomène, il faut bien le dire, est facilité par la radicalisation du NSB, au sein duquel l’attraction du nazisme allemand se fait de plus en plus sentir. Le 7 août 1936, le mouvement a reçu l’adhésion de Meinoud Marinus Rost van Tonningen (1894-1945), un ancien haut fonctionnaire de la SDN (8), qui se pose vite en rival de Mussert et en germanophile avéré. Compétent, diligent et efficace, le nouveau venu stimule indubitablement le militantisme, mais il entraîne aussi le NSB dans une direction qui n’était pas initialement celle de ses fondateurs. Des notions nouvelles, le Sang et le Sol (Blut und Erde), l’antisémitisme et la suprématie de l’État intègrent désormais la rhétorique du mouvement et s’affichent à la une de son journal (dont Van Tonningen devient rédacteur en chef). La conséquence de cette réorientation et de la campagne antifasciste est immédiate : les effectifs baissent et aux élections de mai 1937, le score du NSB n’est plus que de 4,22%, ce qui ne lui assure plus que quatre députés et deux sénateurs. Le 16 novembre 1936, Anton Mussert est reçu par Hitler (et à cette occasion, Herman Gœring lui affirme que jamais le Reich ne revendiquera un mètre carré de territoire néerlandais…). À compter de cette époque, et peut-être simplement pour ne pas se laisser déborder par Van Tonningen, il change de ton vis-à-vis des Juifs. Dans une interview qu’il accorde, le 6 octobre 1937, au journaliste américain (et marxiste) Barrie Stavis, Mussert rappelle que les « bons Juifs » peuvent adhérer au NSB (où ils seraient une cinquantaine), mais il ajoute que s’il y a désormais un problème juif aux Pays-Bas, c’est de la propre faute des Israélites : « Moi, je n’ai jamais parlé d’eux avant qu’ils me désignent comme leur ennemi. Mais oui, je suis leur ennemi. Ils constituent une menace pour la civilisation – comme les communistes. Je suis leur ennemi et le resterai » (9). Peu de temps après cette déclaration, le NSB annonce que dorénavant, les Juifs ne pourront plus adhérer au mouvement. En 1938 toujours, Mussert propose officiellement de réunir la Guyane anglaise, la Guyane française et le Surinam pour en faire un foyer national juif. En compensation pour la perte du Surinam, les Pays-bas recevraient une partie du Mozambique portugais. Soumis au Parlement, le projet sera discuté et largement rejeté. Dans la fameuse interview accordée à Stavis, Mussert ne se cache pas non plus d’avoir plus de sympathie pour le Reich que pour le Royaume-Uni : « Avec une flotte pour protéger nos Indes Orientales, je m’allierais à l’Allemagne », déclare-t-il. « Nous appartenons à la même souche germanique et les gens de même race doivent marcher ensemble. De plus, le fascisme doit conquérir le monde » (10).

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L'armée néerlandaise pendant la "drôle de guerre".

En septembre 1939, lorsque la guerre éclate entre l’Allemagne, la Grande-Bretagne et la France, les Pays-Bas restent neutres, en espérant bien, comme en 1914-18, être épargnés par le conflit. Pour sa part, le NSB (surtout les éléments proches de Rost van Tonningen) ne se cache pas d’être favorable au Reich. Mussert lui-même demeure cependant circonspect. En janvier 1940, il déclare à deux agents allemands qui l’ont approché que ses militants ne se battront jamais contre leurs compatriotes, mais en avril, il affirme à une journaliste américaine de CBS qu’en cas de guerre, les gens du NSB se contenteront d’attendre les Allemands « les bras croisés » (11). Ce positionnement ambigu rend le mouvement suspect et l’expose à toutes sortes de rumeurs malveillantes. Au mois d’avril 1940, le célèbre journaliste Vladimir Poliakoff (« Augur ») annonce, par exemple, dans le New York Times, que le NSB s’apprête à enlever la reine Wilhelmine, ce qui entraîne aussitôt la proclamation de l’état de siège aux Pays-Bas. Le 19 avril, une vingtaine de cadres du NSB sont arrêtés sur soupçon d’appartenance à la 5e colonne. Mussert échappe à la rafle mais il doit désormais se cacher dans une ferme.  Les autorités ont la main particulièrement lourde puisque ce sont bientôt 10 000 membres et sympathisants du NSB qui sont arbitrairement internés. Parfois victimes de violences, certains y laisseront la vie : « Sept d’entre eux », écrit A. H. Paape, « trouvèrent la mort dans des fusillades provoquées par la nervosité de leurs gardiens » (12) Finalement, le 10 mai 1940, la Wehrmacht lance une offensive contre les Pays-Bas afin de couper l’herbe sous les pieds des Britanniques qui auraient pu tenter de passer par là pour attaquer le Reich. Puissant et techniquement impeccable, l’assaut ne laisse aucune chance à la petite armée néerlandaise dont le commandant en chef, le général H. G. Winkelman (1876-1952) capitule le 15 mai. Dès le 13, la reine et le gouvernement ont quitté le territoire, confié le pouvoir à des secrétaires généraux, et gagné Londres d’où ils vont diriger la résistance. Durant les brefs combats, le NSB ne fait rigoureusement rien pour aider l’ennemi et les quelque 100 à 200 Hollandais qui assistent les troupes d’invasion proviennent pour la plupart du Parti national-socialiste hollandais des travailleurs ou NSNAP (13), une formation rivale de celle de Mussert. « Après la guerre », précise F. Bertin (14), « les enquêtes menées pour découvrir une complicité pratique du NSB dans l’attaque allemande ne découvrirent rien de positif en ce sens ». À titre personnel, Anton Mussert perd à cette époque son frère Jo. Lieutenant-colonel d’active, ce dernier est abattu, le 14 mai, par deux subalternes égarés qui le soupçonnent, à tort, de vouloir trahir. Il sera totalement réhabilité après-guerre.

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Jeu de dupes

            À la cessation des hostilités, Anton Mussert pense que les Allemands vont lui confier les rênes du pays et débute alors un grand jeu de dupes qui va durer cinq ans. Le 16 mai 1940, interdiction est faite au Néerlandais de s’exprimer à la radio comme il en avait l’intention. Berlin a d’autres plans. Le 18 mai, le ministre Arthur Seyss-Inquart (15) est nommé Commissaire du Reich aux Pays-Bas (Reichskommissar für die Niederlande) où il entre officiellement en fonction le 29. Outre ce plénipotentiaire, les autorités comprennent le général d’aviation Friedrich Christiansen (1879-1972), commandant en chef de la Wehrmacht, le Brigadeführer SS Hanns Albin Rauter (1895-1949), responsable des services de sécurité et de la police, et l’Oberdienstleiter Fritz Schmidt (1903-1943), délégué du parti nazi. Mussert a bien mandaté le comte d’Ansembourg (16) pour le représenter auprès des occupants mais ceux-ci n’ont a priori aucun désir de coopérer avec le NSB. En fait, Seyss-Inquart s’efforce, dans un premier temps, d’obtenir la coopération de formations moins marquées. C’est dans cette perspective que se constituent un Comité National puis, le 24 juillet 1940, une Union Néerlandaise (Nederlandsche Unie). Approuvée par les secrétaires généraux, cette Union Néerlandaise – qui n’a rien à voir avec le NSB – est en phase avec les ex-Présidents du Conseil Hendrikus Colijn et Dirk Jan de Geer (17) qui reconnaissent la primauté de l’Allemagne et prônent tous deux une collaboration dans la dignité. Le nouveau groupement est bien accueilli par la population et recrute près de 400 000 membres en deux mois ; en février 1941, il compte déjà 800 000 adhérents et montera même jusqu’au million. Rappelons au passage que les Pays-bas n’ont alors que 8,7 millions d’habitants. Prête à collaborer, l’Union Néerlandaise se montre néanmoins rétive à toute tentative de germanisation et de nazification, ce qui contrarie le Reichskommissar et finit par entraîner, en décembre 1941, la dissolution de l’association. Autre groupe à subir les foudres de Seyss-Inquart, le parti social-démocrate qui est interdit en juin 1941. Durant un an, l’occupant a essayé, en vain, de prendre le contrôle de ce parti, ainsi que des syndicats, mais ils ont préféré se saborder plutôt que de se soumettre…

            arméeNL40.jpgÀ ce stade, il ne reste plus pour « collaborer » que les partis et mouvements qui se réclament d’une idéologie proche du nazisme, à savoir le NSB, le NSNAP et le Zwart Front. À l’instar des anciens Présidents du Conseil que nous avons déjà mentionnés (et de nombreux autres politiciens européens), Anton Mussert pense que l’Allemagne a définitivement gagné la partie, et que la collaboration est « l’unique chance qui reste à la Hollande de préserver son indépendance dans la future Europe hitlérienne » (18). Le 5 juin 1940, il rencontre donc Seyss-Inquart qui ne possède pas une très haute opinion du chef fasciste. « Le Leider du NSB », note F. Bertin, « restait attaché à l’autonomie de la Hollande et l’esprit profond du national-socialisme lui restait étranger » (19). Mussert multiplie cependant les gestes de bonne volonté, dont tous ne sont d’ailleurs pas très habiles : ainsi, le 22 juin 1940, lors d’une étrange « fête de la Libération », offre-t-il une cloche en bronze de trois tonnes à Herman Gœring, alors qu’un mois plus tôt, le 14 mai, la Luftwaffe a bombardé Rotterdam, tué un millier de civils et fait 80 000 sans abri…

Quiproquo

            Le problème majeur auquel Mussert ne va cesser de se heurter, c’est que les Allemands ne partagent absolument pas sa vision des choses. Lorsqu’il envisage une alliance avec le Reich, ses interlocuteurs songent à une annexion pure et simple. « À sa façon », remarque justement A. Anderson (20), « Mussert était un ardent patriote. Pour lui, il était tout simplement impensable que la Hollande devînt un territoire allemand ». Afin de sauver les apparences, au plan constitutionnel, le juriste Johan Herman Carp (1893-1979) suggère de placer Mussert à la tête du Conseil d’État, ce qui ferait un peu de lui le régent du royaume et l’autoriserait à conclure la paix avec l’Allemagne. Cette astucieuse solution permettrait d’officialiser l’alliance avec l’Allemagne et reconnaîtrait implicitement l’indépendance des Pays-Bas. Le 16 août 1940, c’est sans surprise que le Commissaire du Reich refuse ce plan. La survie des Pays-Bas ne figure décidément pas à l’agenda nazi. En témoigne encore l’attitude de la censure qui empêche la publication d’un article où Mussert affirme : « Nous n’avons jamais demandé et nous ne demanderons jamais à devenir Allemands, pas plus que nous ne demanderons jamais à un Allemand de devenir Néerlandais. Nous aimons notre pays et notre drapeau, tout comme ils aiment les leurs » (21). Le chef du NSB pourrait s’en tenir là et se retirer du jeu mais tel n’est pas son choix. À la fin août 1940, il signe une « Note sur l’union des peuples germaniques » (Bond van Germaansche volkeren) et se rend, le 23 septembre suivant, à Berlin pour y soumettre son projet à Hitler. Mussert souhaite non seulement sauver l’indépendance de sa patrie, mais propose aussi de créer de Grands Pays-Bas qui comprendraient la Hollande, la Frise, les Flandres et une partie du nord de la France, et s’appuieraient sur les colonies néerlandaises, le Congo et la communauté sud-africaine des Afrikaans (22). Cet « empire thiois » serait bien sûr le vassal et l’obligé du Reich. Plus tard, il évoquera à nouveau une union nordique – avec respect des langues vernaculaires, des religions, des fiertés nationales, des coutumes et des cultures – seule capable, selon lui, de tenir tête aux USA, au Japon et à l’URSS. Il va sans dire que le Führer ne se prononce pas…

            Parallèlement à leurs manœuvres avec l’Union Néerlandaise, les Allemands s’efforcent d’instrumentaliser Mussert et le NSB sans leur accorder rien de concret. Le 30 juin 1941, Seyss-Inquart supprime tous les partis politiques sauf le NSB, ce qui a pour conséquence d’attirer dans le mouvement la plupart des militants du NSNAP et du Zwart Front. Cet afflux d’éléments pro-nazis vient sensiblement renforcer Rost van Tonningen et l’aile germanophile du NSB. Le mouvement avoisine dès lors les 100 000 adhérents. Les occupants ne prennent pas Mussert au sérieux et préfèrent de toute évidence travailler avec Van Tonningen qui prône ouvertement l’absorption des Pays-Bas par le Reich. Hostile à cette ligne, Mussert ne possède visiblement ni l’énergie ni le tempérament de s’y opposer fermement. « En faisant de la surenchère », notent P. Milza et M. Benteli, « les partisans de Van Tonningen vont obliger Mussert à s’engager plus loin dans la voie de la collaboration mais sans qu’il se soit jamais rallié à leurs vues pangermanistes » (23). « Sa force et son caractère », renchérit A. H. Paape (24), « étaient insuffisants pour en faire autre chose qu’un jouet aux mains des Allemands ; il fit de plus en plus de concessions importantes, et il se laissa récompenser par des promesses qui ne se concrétisèrent qu’à peine ».

qKZzgOgcBs6WdQgDEn2r.jpgUn chef impuissant

            Au nombre des déficiences de Mussert, il faut tout d’abord mentionner son incapacité à garder le contrôle de ses troupes. Défavorable au recrutement de SS au sein de son mouvement, il finit cependant, dès juin 1940, par céder aux pressions de Gotlob Berger et Hanns Albin Rauter. De jeunes militants rejoignent donc le régiment “Westland“ puis la 5e division blindée “Wiking“. Le 11 septembre 1940, Mussert charge même Johan Hendrikus Feldmeijer (1910-1945) de créer une SS Générale néerlandaise (Nederlandsche SS, puis, à partir du 1er novembre 1942, Germaansche SS in Nederland). Théoriquement indépendante des Allemands, cette organisation (7000 hommes, répartis en 5 régiments territoriaux) se présente comme la garde du Leider, mais en pratique, elle échappe largement à son emprise et servira de vivier à la Waffen-SS. Les relations de Mussert avec l’institution SS seront toujours exécrables. Venu inspecter, en décembre 1940, la SS Générale néerlandaise, le Dr Joseph Grohmann accuse le NSB de n’être qu’un « repaire de Juifs et de francs-maçons » (25). Quant au chef du NSB, c’est à son corps défendant qu’il finit par autoriser l’enrôlement de ses adhérents dans la Waffen-SS. Ce faisant, il perd toute autorité sur eux. En juin 1941, peu après l’annonce de l’attaque contre l’URSS, Arnold Meijer (1905-1965), chef du Nationaal Front, lance un appel à la constitution d’une légion de volontaires ou Vrijwilligerslegioen Nederland. Relayée par Mussert et le général Hendrik Alexander Seyffardt (1872-1943), ancien chef d’état-major de l’armée royale, l’idée fait vite son chemin : le 27 juillet, les premières recrues, largement issues du NSB, défilent à La Haye, avant de partir pour Debica, en Pologne. Chapeautés par la Waffen-SS, ce qui n’était pas prévu, ces hommes vont se battre dans le secteur de Leningrad, puis en Croatie, avant d’intégrer la 4e brigade SS “Nederland“ (1943) et de constituer enfin la 23e division SS “Nederland“. Tout ce que Mussert obtient de Berlin, c’est que ces soldats puissent porter sur le bras un écusson aux couleurs du Prinsenvlag (orange-blanc-bleu). Il aurait bien voulu en outre qu’ils ne prêtent pas serment à Hitler mais il ne pourra l’éviter. Lui-même sera d’ailleurs appelé, le 12 décembre 1941, à prouver sa loyauté au Reich en prêtant serment au Führer, en présence de Martin Bormann et du ministre Hans Lammers. Au total, près de 30 000 Néerlandais passeront par la Waffen-SS, quelque 8000 par le NSKK et 14 000 par l’Organisation Todt. Ajoutons qu’outre ces formations militaires ou paramilitaires, il existe également, aux Pays-Bas, un Front du Travail (NAF), avec près de 600 000 membres, et un Service du Travail (NAD) de 20 000 recrues. Sur tous ces gens, Mussert n’a aucun pouvoir.

            Quels que soient les efforts de Mussert, ses relations avec la SS restent mauvaises. Réticent à l’égard de la personnalité même du Néerlandais (dont il considère notamment le mariage comme un inceste) et très hostile aux idées « européistes » du Leider, Himmler favorise ostensiblement Rost van Tonningen et les tenants de la Grande Allemagne. Ses adjoints ne sont pas plus tendres : dans une lettre en date du 14 novembre 1942, le Brigadeführer Rauter juge que « Mussert est un petit-bourgeois, intérieurement ennemi des Allemands et Hollandais cent pour cent », avant de préconiser carrément « d’anéantir le NSB » (26). Cyniques, les Allemands continuent toutefois à se servir du mouvement néerlandais, mais sans offrir grand chose en contrepartie. Le 10 décembre 1942, Hitler reçoit Mussert auquel il octroie officiellement le titre de Leider van het Nederlandsche volk ou Guide du peuple néerlandais. Il ne s’agit néanmoins que d’un titre purement honorifique et le pouvoir réel demeure aux mains de Seyss-Inquart. Cette « promotion » est annoncée avec un certain éclat aux Hollandais, le 13 décembre, à l’occasion du 11e anniversaire du NSB. Elle incite Mussert à constituer (janvier 1943), autour de Johan Herman Carp, une espèce de cabinet fantôme (Gemachtigden van den Leider) de neuf secrétaires d’État (dont ses rivaux Rost van Tonningen et Cornelis van Geelkerken). Ces hommes n’ont qu’un rôle consultatif, ce qui n’empêche pas la résistance d’abattre rapidement trois d’entre eux ! De plus en plus audacieuse, cette résistance (en l’occurrence le groupe communiste CS-6) s’en prend aussi au vieux général Hendrik Seyffardt qui est abattu sur le pas de sa porte, le 5 février 1943 (il mourra le lendemain), ainsi qu’au président de la Chambre de Culture, Hermannus Reydon, qui est assassiné le 23 août suivant. Suite à cette multiplication d’actes hostiles, les Allemands déclenchent – contre l’avis de Mussert – une vaste campagne de représailles, l’opération « Silbertanne », qui coûtera la vie à plus de 50 otages. Ils créent aussi une police auxiliaire (Hulppolitie) et exigent que les militants du NSB se muent désormais en supplétifs de leurs services de sécurité. Le général Hanns Albin Rauter place d’ailleurs le service de renseignement du NSB sous son autorité directe, tandis que l’on procède (mars 1943) au recrutement d’une Garde Nationale ou Landwacht que commanderont Van Geelkerken et Arie Johan Zondervan. Il y aura encore, en 1945, la constitution d’une seconde unité SS, la 34e division “Landstorm Nederland“, grâce à l’enrôlement de miliciens NSB. Ces mesures ne relèvent aucunement de Mussert qui se trouve placé au pied du mur et ne peut que cautionner ou s’effacer.

            Un autre sujet de friction entre le Leider et les Allemands concerne la politique antisémite de ces derniers. Quoiqu’il ait tenu, à partir de 1938, des propos très hostiles à la communauté israélite, Anton Mussert n’a jamais été un antisémite fanatique. Entraînés par plus extrémistes que lui, nombre de membres du NSB prêtent cependant la main aux rafles qu’organise la police nazie, quand ils n’opèrent pas, de leur propre chef et pour leur propre compte, quelques exactions. Plus de 105 000 Juifs sont alors arrêtés et déportés. Dans les camps de transit situés aux Pays-Bas (Westerbork, Bois-le-Duc, Amersfoort), ils sont souvent gardés par des policiers ou des SS hollandais. Pusillanime, Mussert ne proteste pas mais s’associe discrètement au plan du secrétaire général à l’Intérieur K. J. Frederiks qui entreprend de « sécuriser » certains Juifs (artistes, intellectuels, anciens combattants).

JoSpier1947.jpgCeux-ci sont placés dans deux résidences protégées, De Schaffelaar et Huize de Briezen, à Barneveld, ou encore à la Villa Bouchina, à Doetinchem. Dans ce dernier lieu séjournent notamment neuf Juifs (27), dont l’illustrateur Jo Spier (photo), un ami personnel de Mussert (28). Cette protection ne suffira malheureusement pas à empêcher la déportation des intéressés qui finiront tout de même par être expédiés vers le ghetto de Theresienstadt. La répression ne vise pas que les Juifs mais frappe toute la population néerlandaise. Après l‘échec de l’opération « Market Garden » (parachutage de troupes alliées près d’Arnhem) qui s’est accompagnée d’une grève générale des chemins de fer, Seyss-Inquart riposte en bloquant, de novembre 1944 à février 1945, l’approvisionnement des grandes villes. On parlera d’hiver de la faim (hongerwinter) et le manque de nourriture fera au moins 18 000 morts. Là encore, Mussert se tait. Il est d’autant plus impuissant que le 5 septembre 1944 (le mardi fou ou « Dolle Dinsdag »), ses partisans, pris de panique, se sont massivement enfuis en Allemagne avec femmes et enfants. Près de 65 000 d’entre eux campent près de Lunebourg, en Basse-Saxe. Ceux qui sont restés, les plus décidés, se rangent désormais derrière les Allemands et abandonnent le Leider à son sort ; Van Tonningen et Van Geelkerken ayant été démis de leurs fonctions de vice-présidents du NSB, Mussert se trouve dans un grand isolement. Comme l’écrit A. H. Paape, « son parti, son mouvement n’avaient pas besoin d’être liquidés à l’heure de la libération du territoire ; ils étaient morts depuis longtemps » (29).

Une triste fin

            La situation militaire semblant définitivement compromise, Anton Mussert envisage de rejoindre le NSKK en qualité de simple chauffeur de camion, mais il n’aura pas le temps de mettre ce plan à exécution. Victime, le 25 avril 1945, d’un accident de voiture, il se retrouve à l’hôpital Maria Stichting, à Haarlem – où il échappe de justesse à un enlèvement par des résistants – puis à l’hôpital Bronovo de La Haye. Sorti le 4 mai et rentré à Utrecht, au siège du NSB, il y apprend la capitulation des troupes allemandes du secteur et prend dès lors ses dispositions pour se rendre aux nouvelles autorités. Le 7 mai 1945, il avertit la police locale qu’il se tient à sa disposition : aussitôt appréhendé, il est incarcéré à Scheveningen. C’est la fin du NSB.

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L'arrestation de Mussert.

L’épuration qui débute alors est extrêmement rigoureuse puisqu’elle entraîne le placement en détention de 150 000 à 200 000 personnes. Toutes ne restent pas incarcérées, mais selon Paul Sérant (30), il y a encore, en octobre 1945, 96 000 prisonniers politiques, dont 24 000 femmes. Même les enfants paient le prix fort puisque 12 000 d’entre eux sont placés dans des foyers provisoires et 8000 dans des camps spéciaux. En ce qui le concerne, le Leider est jugé les 27 et 28 novembre 1945 à La Haye, dans la salle de bal du Palais Kneuterdijk. Accusé de collaboration avec l’ennemi, de violation de la Constitution et de haute trahison, Mussert soutient que son seul but fut d’éviter l’annexion, de sauver la souveraineté néerlandaise, et de garantir la place du royaume dans la future Europe de Hitler. Reconnu coupable, il est condamné à mort le 12 décembre. Son appel ayant été rejeté (20 mars 1946), le condamné rédige une lettre d’adieu au peuple néerlandais. Dans ce document, daté du 28 mars 1946, il justifie son engagement politique, met en parallèle son action et celle de la résistance, et compare enfin son sort à celui de Johan van Oldenbarnevelt et Johan de Witt, qui furent tous deux injustement condamnés à mort au XVIIe siècle (31). Le 5 mai 1946, la reine Wilhelmine rejette son recours en grâce, ce qui scelle définitivement le sort de l’ex-Leider. Deux jours plus tard, le 7 mai 1946, Anton Mussert est extrait de sa cellule vers 6h du matin. Accompagné de son beau-frère, Willem Torpstra, du révérend Sijbrandij et de deux gardiens, il gagne, en voiture, le Waalsdorpvlakte, un site où 250 résistants ont été passés par les armes durant l’Occupation. Le peloton d’exécution est déjà en place et à 6h 30, tout est terminé. « La mort de tout homme, même celle de Mussert, mérite le respect », écrit sobrement le journal socialiste Het Vritje Volk

            La saga du Leider néerlandais ne s’arrête pas tout à fait là. Inhumée anonymement dans un carré particulier du cimetière central de La Haye, sa dépouille mortelle ne va pas y rester. Dans la nuit du 16 au 17 juin 1956, un commando de vétérans du Front de l’Est et de militants flamands du Vlaams Militanten Orde enlève en effet le cercueil et va le réenterrer dans un lieu secret, probablement en Flandre. Dirigée par le nationaliste flamand Bert Eriksson (1931-2005), il s’agit de l’opération « Wolfsangel ». Fort marries, les autorités néerlandaises prétendront par la suite que le commando s’est trompé de cercueil et que les restes de Mussert ont été ensevelis dans une fosse commune et mélangés à d’autres… Le mystère demeure.

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Mussert dans sa cellule.

Soixante-quinze ans après l’exécution d’Anton Mussert, il est permis de s’interroger sur l’équité de la peine qui l’a frappé. Sincère et apparemment désintéressé (32), le chef du NSB ne fut probablement pas le pire des protagonistes de cette tragique époque. On peut certes lui reprocher d’avoir volontairement collaboré avec l’occupant et ce faisant cautionné les excès de ce dernier. On peut également regretter la consternante docilité dont il s’obstina à faire preuve durant cinq ans. Il faut cependant tenir compte du fait que ses choix, ou ses silences, n’eurent jamais pour but de servir « méchamment » (33) les intérêts de l’ennemi ni de desservir ses compatriotes. Mussert pensait, naïvement sans aucun doute, défendre son pays et en assurer la survie. Lorsque des crimes furent commis, ce fut le plus souvent à l’initiative d’individus qui prétendaient agir en son nom, mais qui opéraient en fait pour le compte de la police nazie. Si l’on compare enfin la sanction maximale qui lui fut infligée à celles qui frappèrent d’autres collaborationnistes de premier plan, force est de conclure que sa condamnation fut plus emblématique que vraiment appropriée. Il fallait exorciser une collaboration qui n’avait pas été que purement symbolique et permettre aux Pays-Bas de figurer dignement dans le cortège des vainqueurs antifascistes. Il fallait donc un symbole, un archétype de traître à châtier, et ce fut assez logiquement le fondateur et Leider du NSB. À côté de cela, Jan Eduard de Quay (1901-1985), qui avait dirigé l’Union Néerlandaise, sera anobli et deviendra même Premier ministre (1959). Vice-président du NSB, chef des jeunesses, inspecteur de la Landwacht et SS-Oberführer, Cornelis van Geelkerken (1901-1979) sortira de prison en 1959. L’ancien ministre-président Dirk Jan de Geer (1870-1960) s’en tirera avec un an de détention et une amende de 2000 florins ; le chef du Front du Travail, Hendrik van Woudenberg (1891-1967) sera libéré en 1956 ; Arie Johan Zondervan (1910), inspecteur de la Landwacht et vétéran du Front de l’Est, sera libéré en 1951, et Jacobus Schrieke, patron de la police, en 1955… Incarnation désignée de la trahison et bouc émissaire de toutes les frustrations de la défaite et de l’occupation, personne n’aurait compris, en 1946, que Mussert ne fût pas fusillé. Pour les Néerlandais, son procès et sa fin ne furent pas tant une question de justice qu’un exutoire collectif.

Christophe Dolbeau

Notes:

(1) Au total, il y a eu sept enfants, à savoir Josephus (Jo) Adrianus (1880-1940), Maarten (Max) Johan (1882-1941), Jacobus Frederik (1884-1884), Helena (Leni) Arnolda Frederika (1887-1954), Anton Adriaan (1894-1946), Frederika Johanna (1899-1900) et Jakoba (Coby) Maria (1898-1981).

(2) Voy. A. H. Paape, « Le mouvement national-socialiste en Hollande – Aspects politiques et historiques », Revue d’histoire de la Deuxième Guerre mondiale, 17e année, n° 66, p. 35.

(3) Le Dr Frederik Carel Gerretson (1884-1958) était professeur d’histoire coloniale à l’Université d’Utrecht. Co-fondateur en 1925 de l’Union Nationale, il fut aussi l’un des dirigeants de l’Union Historique Chrétienne (calviniste). Défenseur de la Royal Dutch et de l’empire, il fut sénateur en 1951.

(4) Voy. Anthony Anderson, « A Forgotten Chapter. Holland Under the Third Reich », conférence donnée le 17 octobre 1995 à l’Université de Californie du Sud.

(5) Voy. F. Bertin, L’Europe de Hitler, vol. 1, Paris, Librairie Française, 1976, p. 185.

(6) Ibid, p. 186.

(7) dirigée notamment par A. M. van Hoey Smith-van Stolk, Olga de Ruiter-van Lankeren Matthes (1902-1982), Elisabeth Keers-Laseur (1890-1997) et Julia op ten Noort (1910-1994).

(8) Né en Indonésie et fils de général, Meinoud Marinus van Tonningen fut durant dix ans le représentant de la SDN à Vienne où il se lia au chancelier Dollfuss. Chargé par Seyss-Inquart de la liquidation des partis de gauche néerlandais, il fut également président de la Banque Nationale des Pays-Bas (et fut peut-être tué, le 6 juin 1945, car il en savait trop long sur certaines transactions financières ayant eu lieu sous l’Occupation).

(9) Voy. Barrie Stavis, « Holland Has a Führer Too », New Masses du 4 janvier 1938, p. 17-18. [Les propos que Stavis (1906-2007) met dans la bouche de Mussert semblent sujets à caution car ce journaliste (et futur dramaturge) ne fait pas montre à l’égard du chef du NSB d’une grande objectivité. Dans le même texte, il parle en effet « de sa bestialité, de son opportunisme, de son fanatisme barbare, de sa vanité de paon et de son peu de compassion et d’humanité » (sic). Il existe de nombreuses photographies de Mussert et chacun peut y constater que le Néerlandais possédait un physique assez banal, bréviligne et bien découplé. Or Stavis le décrit comme « petit, avec un ventre rond et bien nourri, une paire de bajoues et un double menton » ; plus loin, il évoque « ses yeux bleus, froids, et bordés de rouge », ainsi que « sa bouche mauvaise et cruellement mince, semblable à une fente » (p. 17). Après l’avoir encore comparé à une grenouille, il conclut en affirmant que c’est un piêtre orateur, peu convaincant et dépourvu de charisme (p. 18). Il semble que l’on soit donc bien fondé à douter des propos qu’il rapporte…]

(10) Ibid, p. 17.

(11) Cité par F. Bertin, op. cit., p. 192.

(12) Voy. A. H. Paape, op. cit., p. 47.

(13) Fondé en 1931, le Nationaal-Socialistische Nederlandsche Arbeiderspartij est une petite formation, très antisémite, dirigée par l’économiste Ernst Herman van Rappard (1899-1953).

(14) Voy. F. Bertin, op. cit., p. 195.

(15) Avocat de formation, l’Autrichien Arthur Seyss-Inquart (1892-1946) a été chancelier puis gouverneur (Reichstatthalter) d’Autriche et vice-gouverneur de Pologne occupée, avant d’être nommé Commissaire du Reich aux Pays-Bas. Condamné à mort à Nuremberg, il a été exécuté par pendaison le 16 octobre 1946.

(16) Ancien maire d’Amstenrade et sénateur du Limbourg, le comte Maximilianus Victor Eugène Hubertus Josef Maria de Marchant et d’Ansembourg (1894-1975) sera Commissaire du Limbourg durant l’Occupation. Condamné en 1946 à 15 ans de détention, il sera libéré en 1954.

(17) Avocat et deux fois président du Conseil des ministres, Dirk Jan de Geer (1870-1960) a d’abord émigré à Londres en mai 1940, avant de rentrer aux Pays-Bas et d’y publier une brochure conseillant aux habitants de coopérer avec les Allemands.

(18) Voy. Pierre Milza et Marianne Benteli, Le Fascisme  au XXe siècle, Paris, Éditions Richelieu, 1973, p. 318.

(19) F. Bertin, op. cit., p. 208.

(20) Voy. A. Anderson, op. cité.

(21) Voy. Paul Sérant, Les vaincus de la Libération, Paris, Robert Laffont, 1964, p. 335.

(22) Dans le même esprit, Mussert et Van Tonningen demanderont à Alfred Rosenberg (1893-1946), le ministre des Territoires de l’Est, d’octroyer aux Pays-Bas des zones de colonisation en Russie [où existent d’ailleurs, près d’Irkoutsk, des villages de « Hollænders » ayant conservé leurs traditions néerlandaises]. Entre 1941 et 1944, quelques centaines de Néerlandais partiront effectivement s’établir en Biélorussie et en Russie – Voy. Geraldien von Frijtag, « Le projet colonial hollandais pendant la Seconde Guerre mondiale », Encyclopédie pour une histoire nouvelle de l’Europe [en ligne].

(23) Voy. P. Milza et M. Benteli, op. cit., p. 318.

(24)  Voy. A. H. Paape, op. cit., p. 54.

(25) Voy. F. Bertin, op. cit., p. 216.

(26) Ibid, p. 214.

(27) Il était prévu à l’origine d’en accueillir 63…

(28) Dessinateur humoristique et publicitaire, Joseph Eduard Adolf Spier (1900-1978) fut par la suite déporté à Theresienstadt où il collabora, en 1944, au tournage d’un film (Theresienstadt. Ein Dokumentarfilm aus dem jüdischen Siedlungsgebiet). Émigré aux USA après la guerre, il y poursuivit sa carrière d’illustrateur.

(29) Voy. A. H. Paape, op. cit., p. 59.

(30) Voy. P. Sérant, op. cit., p. 338.

(31) Voy. Franz W. Seidler, Die Kollaboration, Munich-Berlin, Herbig, 1999, p. 397.

(32) Nous disons « probablement » car une chercheuse, le Dr Tessel Pollmann, soutient que Anton Mussert aurait possédé cinq maisons, une imprimerie, une maison d’édition, une villa, ainsi que des antiquités dérobés à des Juifs, soit une fortune évaluée à un million de florins de 1945 (ou 5 millions d’euros actuels) – voy. Haaretz du 8 avril 2009 (« Researcher : Dutch Nazi Collaborator Stole Millions »). Cette affirmation paraît bien étonnante et bien tardive. S’agissant pour la plupart de biens immobiliers difficiles à dissimuler, on peut s’étonner qu’il n’en ait jamais été fait état lors de la procédure engagée contre Mussert en 1945…

(33) Ce furent les Belges qui introduisirent cette notion très subjective dans leur Code pénal, après la Première Guerre mondiale. Elle était destinée à souligner le caractère malveillant de certains actes délictuels.

1001004011858902.jpgBibliographie

– Paul Sérant, Les vaincus de la Libération, Paris, Robert Laffont, 1964.

– A. H. Paape, « Le mouvement national-socialiste en Hollande – Aspects politiques et historiques », Revue d’histoire de la Deuxième Guerre mondiale, 17e année, n° 66 (avril 1967).

– Lawrence D. Stokes, « Anton Mussert and the NSB : 1931-45 », History, vol. 56, n° 188 (octobre 1971).

– Pierre Milza et Marianne Benteli, Le Fascisme au XXe siècle, Paris, Éditions Richelieu, 1973.

– Francis Bertin, L’Europe de Hitler, vol. 1, Paris, Librairie Française, 1976.

– Franz W. Seidler, Die Kollaboration, Munich-Berlin, Herbig, 1999.

– Jan Meyers, Mussert, een politiek leven, Soesterberg, Aspekt, 2005.

– Tessel Pollmann, Mussert and Co, Amsterdam, Boom, 2012.         

Une intrigue policière dans l’Angleterre occupée

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Une intrigue policière dans l’Angleterre occupée

par Georges FELTIN-TRACOL

On appelle « thriller » une catégorie de roman qui suscite un suspense permanent et un dénouement inattendu. En 1978, le Britannique Len Deighton écrit un roman qui joint le polar, le récit d’espionnage et l’uchronie. SS – GB est d’ailleurs devenu un classique de la science-fiction.

9780008201241.jpgHistorien de formation, l’auteur plonge le lecteur à la fin de l’année 1941 dans une Angleterre vaincue et occupée par l’Allemagne. Si le roi George VI est prisonnier dans la Tour de Londres, son épouse et leurs filles, la princesse héritière Elizabeth et sa sœur Margaret, vivent en exil en Nouvelle-Zélande. Winston Churchill est pendu haut et court. À l’instar de l’éphémère « France libre » de Charles de Gaulle qui « s’est promu général et [qui] a déclaré qu’il était la voix de la France. Ça n’a jamais abouti à rien (p. 174) », la « Grande-Bretagne libre » s’incarne depuis l’Amérique du Nord dans un certain contre-amiral Conolly. Cette résistance extérieure complète une résistance intérieure plus ou moins balbutiante.

En Angleterre uchronique

Quand Len Deighton sort son uchronie, il prend bien soin d’éviter toute digression politique. En effet, l’ancien roi Edouard VIII, devenu le duc de Windsor, et Sir Oswald Mosley vivent toujours. Contrairement au film de Kevin Brownlow diffusé par la BBC en 1964, It Happened Here (« En Angleterre occupée »), le roman ne fait donc aucune allusion sur une éventuelle restauration d’Edouard VIII ou sur l’instauration d’un régime fasciste dont Mosley serait le Leader. L’auteur fait en sorte que l’armée allemande gouverne la Grande-Bretagne depuis la capitulation britannique du 18 février 1941.

Responsable du maintien de l’ordre public et de la sûreté de la population, les Allemands bénéficient de l’expertise de Scotland Yard. Le commissaire Douglas Archer et son adjoint, l’inspecteur Harry Woods, constituent une efficace « brigade criminelle ». Fin limier au palmarès impressionnant d’enquêtes résolues, le commissaire Archer « avait non seulement la réputation d’être un des plus brillants policiers de la brigade criminelle, mais en outre il était jaune, il avait l’air sportif, avec ce genre de visage osseux et un peu pâle que les Allemands trouvaient aristocratique. Il avait le type “ germanique ”, un exemple parfait du “ Nouvel Européen ”. Et il parlait même un excellent allemand (p. 24) ». Son supérieur hiérarchique, le général ou Gruppenführer SS Fritz Kellerman, l’apprécie beaucoup et le chouchoute souvent.

Régulièrement affecté aux meurtres liés au marché noir ainsi qu’à divers trafics de contrebande, le commissaire Archer enquête cette fois-ci sur l’assassinat d’un certain Spode. Ses recherches attirent vite l’attention particulière de Berlin. Il passe bientôt sous l’autorité directe du Standartenführer (colonel) SS Huth de l’état-major personnel du Reichsführer SS Heinrich Himmler. Cette subordination dérange Douglas Archer qui se veut apolitique bien qu’il sait que son collègue et ami, Harry Woods, fricote avec la résistance intérieure.

Un récit riche et complexe

L’intrigue de SS – GB est brillante. Le lecteur découvre le quotidien des Anglais marqué par le rationnement, les pénuries, les rafles, les profiteurs de guerre, etc. Au risque de déflorer l’histoire, Douglas Archer, au cours de son enquête, entre en contact avec certains résistants influents. Par ailleurs, il apprend que le dénommé Spode était un ingénieur en physique nucléaire. Sa mort participe à une vaste machination où se mêlent manœuvres de résistants et contre-opérations de la part des occupants eux-mêmes. Len Deighton décrit les profondes, vives et tenaces rivalités entre la Wehrmacht, représentée à Londres par Fritz Kellerman, l’Abwehr et les SS.

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Son enquête prend vite une tournure politique puisque entrent en ligne de compte l’évasion du roi, la volonté de provoquer l’entrée en guerre des États-Unis d’Amérique et la possession prochaine d’une bombe atomique. Or, si les SS, et Huth en particulier, veulent être les premiers à la détenir, la Wehrmacht et Himmler lui-même, influencé par son mage – gourou, s’y refusent. Chef d’un groupe de résistants, le colonel Mayhew use de machiavélisme afin de libérer George VII et de retarder l’acquisition de la bombe par les Étatsuniens tout en les contraignant à entrer dans le conflit européen. Ayant obtenu l’accord de Franklin Delano Roosevelt, il monte une opération commando en concertation avec quelques unités d’US Marines.

SS – GB ne verse pas dans le manichéisme primaire. C’est un ouvrage de son époque, le milieu des années 1970, quand l’hypermnésie historique hémiplégique n’avait pas encore pris une boursouflure exubérante. Un agréable roman au dépaysement uchronique garanti!

Georges Feltin-Tracol.

• Len Deighton, SS – GB, Denoël, coll. « Folio – Science Fiction », n° 601, 2017, 519 p, 9,10 €.

«En Italie comme en France, le vrai coupable est le système libéral»

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«En Italie comme en France, le vrai coupable est le système libéral»

Entretien avec Pierre d'Her

Si l’État italien s’est trouvé dépassé par l’ampleur de la crise, des militants de Casapound ont apporté à leur échelle, une pierre précieuse pour venir en aide au peuple romain. 

L’Italie a été le premier pays d’Europe a être particulièrement touché par l’épidémie du Covid-19. Avec 28.884 décès et 211.000 cas confirmés dans toute la botte à ce jour, les Italiens entament un déconfinement progressif à partir du 4 mai. Malgré une crise sanitaire inquiétante et un État qui semble dépassé, les militants de la Casapound ne se sont pas laissé abattre par la fatalité.

Convaincu de la nécessité de servir leur peuple avant tout, les militants ont bravé le confinement pour distribuer plusieurs tonnes de produits élémentaires aux habitants de la capitale, ont accompagné les Italiens durant ces longues semaines au rythme des émissions de Radio Bandiera Nera et ont même organisé des vidéoconcerts de leurs groupes phares : Bronson ou encore Ultima Frontiera. 

Pierre d’Her vit à Rome depuis plusieurs années, il a participé aux élans de solidarité au cœur de la ville éternelle. Pour Infos-Toulouse, il décrypte ces heures sombres vécus par tout un peuple, et qui risquent de ne pas s’arrêter au déconfinement. Surveillance, répression et précarité risque de succéder à la crise sanitaire. 

Infos-Toulouse : Quelle est la situation sanitaire aujourd’hui en Italie ?
Pierre d’Her : Les chiffres de contaminations, de décès et de guérisons montrent que la situation s’améliore en particulier dans le nord du pays. Le bilan atteint un peu plus de 28.000 décès, mais bien malin celui qui peut réussir à lire correctement ces chiffres. La moyenne d’âge des personnes décédées est de 79 ans, au 28 avril, seul 4,7% des victimes étaient âgées de moins de 60 ans. Le pays tarde pourtant à redémarrer, les autorités faisant peser le spectre de la reprise de la contamination en cas de libre circulation de la population.

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On reproche en France une gestion hasardeuse de la crise, que dire du gouvernement italien ?
Le gouvernement italien actuel a mal géré la crise mais a aussi payé des années de coupures budgétaires dans le domaine de la santé. Le manque de lits disponibles, de ventilateurs pulmonaires, de stocks de masques et de matériel de protection pour le personnel soignant n’est certainement pas uniquement la faute du gouvernement actuel mais des 30 milliards de coupures budgétaires de ces vingt dernières années. Comme en France, le vrai coupable est le système libéral.

Les fautes du gouvernement sont certainement d’avoir mis beaucoup de temps à réagir. En janvier, alors qu’il était encore possible d’intervenir avec des quarantaines limitées et l’investissement dans le dépistage, on nous disait que le virus n’atteindrait pas l’Italie et que le pays était de tout de façon prêt à se défendre.

« 40% des bars et restaurants ne rouvriront pas »

L’Italie a toujours eu une réputation particulière en termes de gestion. Nous dirige-t-on vers des scandales ?
Les premiers scandales de gaspillage voire de détournements d’argent public sont déjà en train d’être découverts. 30 millions d’euros ont été débloqué par la région Lazi pour acheter des masques, dont le tiers a déjà été versé à une fantomatique société au capital de 10.000 euros, spécialisée dans la vente… d’ampoules électriques, véridique ! On attend encore la livraison. Ajoutant que le prix de vente de ces masques dépassait d’un tiers le prix du marché on se demande bien à qui a profité le crime…

Dans une Italie déjà précaire, à quelles conséquences doit-on s’attendre économiquement ?
Les millions de salariés mis au chômage technique n’ont pas encore touché un centime et les prévisions les plus optimistes parlent du mois de juin pour les premiers versements. Les titulaires d’activités ont touché 600 euros d’aides, ce qui pour la plupart des commerçants ne représente qu’un infime pourcentage des dépenses mensuelles sachant que les factures continuent à arriver et que le paiement des charges sociales n’a pas été annulé mais juste repoussé.

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Beaucoup craignent la réouverture car les vautours viendront tous présenter la facture. Juste à Rome, on estime que 40% des bars et restaurants ne rouvriront pas, ainsi que 45% des hôtels. D’autre part, la gestion de la sortie de crise est très inquiétante, le gouvernement voulant imposer des mesures de contrôle sanitaire qui empêchera les commerces de travailler en limitant le nombre de clients, en imposant de nombreux frais pour procurer du gel, des gants, des masques aux clients et au personnel, et en imposant dans certains cas le paiement électronique, diabolisant l’argent liquide vecteur de transmission de microbes mais surtout outil d’évasion fiscale. Le 18 mai, vous aurez le droit d’aller travailler et juste de gagner ce qu’il vous faut pour survivre et payer vos impôts, ne vous avisez pas de penser que vous aurez le droit de vous divertir. Avec l’été qui arrive, les scénarios les plus fous sont envisagés, comme l’interdiction des plages publiques, les phases horaires programmées pour accéder aux plages privées, l’interdiction des jeux de balle et un nombre limité de baigneurs distants l’un de l’autre.

Près de dix tonnes de produits élémentaires distribués aux Romains

Casapound s’est particulièrement mobilisé pendant cette crise. Quel a été l’engagement de ses militants durant ses longues semaines ?
Pour ce qui est de la maison mère, il a bien sur fallu réorganiser les tours de garde car de nombreux militants ne pouvaient plus se déplacer sans risquer des amendes salées. Pour ce qui est de la solidarité et du travail des militants, nous avons organisés de nombreuses collectes et distributions alimentaires dans les différentes villes d’Italie et en particulier deux grosses distributions à Rome les 21 avril et 1er mai derniers où furent donnés de l’aide à prêt de 500 familles. Certains étaient sur place, d’autres, ne pouvant pas se déplacer furent livrés par nos militants et une flotte de taxis mis à disposition gratuitement.

Certaines de nos communauté en ont aussi profité pour faire quelques travaux dans les sections et pour nettoyer et occuper de nouveaux espaces comme ce fut le cas à Ostie. À noter aussi que cette quarantaine a eu au moins l’avantage d’augmenter l’audience de nos médias comme le Primato Nazionale en ligne et sur papier, l’activité de la Testa di Ferro fut stimulée par le temps libre pour lire et enfin notons le grand retour de notre radio en ligne, Radio Bandiera Nera, qui bénéficie de taux d’écoutes tout à fait honorables. Comme beaucoup, nous avons aussi organisés des concerts et conférences en ligne et en direct.

Notons l’initiative dite des « Mascherine tricolore », les masques tricolores qui organisent dans toute l’Italie des centaines de manifestations pour rappeler au gouvernement que les masques protègent des virus et ne sont pas faits pour rendre le peuple muet.

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Comment ce sont déroulés ces distributions à la population ?
Ce sont prêts de 10 tonnes de denrées de première nécessité qui furent distribuées. Eau, pâtes, riz, conserves, produits pour l’hygiène personnelle et désinfectants. De nombreux militants sont venus pour distribuer et assurer la sécurité des personnes venus récupérer les colis. En effet, la police n’aurait pas hésité à tout interrompre et à distribuer des PV si le nombre n’était pas de notre côté. Malheureusement, cet État est encore plus policier qu’auparavant et a transformé de nombreux concitoyens en petits espions paranoïaques et jaloux. Hier encore, les policiers de la Digos (les RG Italiens) filmaient pour augmenter leurs archives et un hélicoptère nous survolait.

D’une manière plus concrète, on ne peut qu’avoir un immense sentiment de tristesse de voir ces Italiens en file pour attendre quelques kilogrammes de pâtes et de la lessive. Des pères et des mères de famille « normaux », des personnes âgées accompagnées par nos jeunes militants jusqu’à la maison. Le tout s’est déroulé dans le calme et le silence car il n’y a rien à fêter, silence interrompue deux fois pour écouter « L’inno a Roma » de Pucini et l’hymne national Italien. À noter comme je vous le disais précédemment, la présence d’une trentaine de chauffeurs de taxi qui avaient répondu à notre appel pour apporter des colis à des familles ne pouvant pas se déplacer : huit familles à Talenti, cinq familles à la Magliana, six familles à Tor Vergata… Les voitures se remplissaient de dizaines de kilos de sacs et de packs d’eau.

« Une majorité des citoyens sont dociles voire pire complices »

Quels lendemains sont à prévoir en Italie, à la sortie de cette période ?
C’est une catastrophe annoncée. L’économie italienne était déjà mal en point depuis la mise en place de l’Euro. L’endettement colossal du pays, augmentée dans les derniers mois d’une manière exponentielle a déjà valu à la dette italienne d’être notée comme « Junk bonds », vendredi dernier par l’agence de notation Fitch. On a ici le sentiment que l’idée est d’éliminer définitivement la classe moyenne, le commerce indépendant et de proximité au profit des chaînes. Le bilan est dur à faire mais on estime qu’un tiers des commerces ne rouvrira pas. L’industrie du tourisme est sinistrée pour au moins un an, les millions d’Américains et d’Asiatiques venant visiter le pays chaque année n’étant pas attendus avant longtemps.

Les politiciens parlent d’augmenter le télétravail ce qui ne peut se faire que dans certaines branches et de livraisons à domicile pour les restaurants ce qui provoquera outre un changement radical de la profession, la mort assurée de nombreuses activités.

La chose inquiétante est la sorte d’apathie de la population. À force d’avoir cultivé cette idée de peur de la mort, quasiment irrationnelle à moins d’être âgée, en mauvaise santé ou particulièrement malchanceux, une majorité des citoyens sont dociles voire pire complices, appelant au besoin les forces de l’ordre pour dénoncer un voisin qui aurait reçu une visite ou une famille sur un toit à griller des saucisses. Peu de gens s’indignent que l’on utilise des drones ou des hélicoptères pour chasser les promeneurs solitaires sur une plage déserte ou dans la montagne. Malgré les 25 degrés à Rome, un nombre non négligeable de personnes portent en plus du masque, qui n’est pas obligatoire à part dans les endroits fermés, des doudounes, bonnets et capuches pour se protéger du monstre COVID.

Sera-t-il possible de vous rendre visite prochainement ?
Si tout va bien dès juin, tous les commerces et hôtels devraient être rouverts mais certainement avec des restrictions que nous ne connaissons pas encore. Pour ce qui est de CasaPound, elle n’a jamais fermée, elle demeure un îlot de liberté que l’on peut toujours rejoindre si l’on est un renard furtif.

Propos recueillis par Étienne Lafage.

Confinement : le débat interdit

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Confinement : le débat interdit

par Jean Quatremer

Ex: http://www.geopolintel.fr

Il n’a fallu que quelques instants, le 16 mars, pour que le chef de l’État et son gouvernement, au nom de la lutte contre la pandémie de coronavirus, assignent à résidence les Français et les privent de la plupart de leurs libertés civiles, politiques et sociales que l’on croyait inaliénables : liberté d’aller et de venir, liberté de réunion, liberté d’entreprendre, liberté de travailler, etc. La justice a été mise quasiment à l’arrêt, les avocats confinés, les détentions provisoires automatiquement prolongées, les forces de l’ordre (entendues dans un sens très extensif puisqu’elles incluent les policiers municipaux et assimilés) investies des pleins pouvoirs appliquer ces mesures privatives de liberté.

Le confinement sans base légale

Cette suspension de l’État de droit s’est faite sans base légale. En effet, le décret du 16 mars restreignant les déplacements des citoyens n’entre pas dans les compétences du pouvoir exécutif, puisque seul un juge judiciaire, le juge des libertés, peut normalement en décider sur une base individuelle. Néanmoins, la justice administrative, en l’occurrence le Conseil d’État, l’a validé en s’appuyant sur la théorie jurisprudentielle des « circonstances exceptionnelles », ce qui n’est sans doute pas sa décision la plus inspirée.

Ce n’est que le 23 mars que le Parlement a donné une base légale aux mesures annoncées le 17 mars en votant dans la précipitation la loi créant un « État d’urgence sanitaire » qui autorise le gouvernement à le déclencher « en cas de catastrophe sanitaire mettant en péril, par sa nature et sa gravité, la santé de la population », une définition particulièrement floue. Toute cette loi cultive le flou, les infractions qu’elle prévoit laissant par exemple une large part à l’interprétation policière et donc à l’arbitraire. Reconductible par le Parlement - éventuellement pour une durée supérieure à deux mois- il donne les pleins pouvoirs à l’exécutif, le Parlement étant dépouillé de ses pouvoirs et réduit au rôle de simple spectateur. Si l’Assemblée n’a pas modifié le projet du gouvernement, le fait majoritaire étant ce qu’il est, le Sénat, dominé par la droite classique, a heureusement réussi à introduire quelques garde-fous dans ce texte improvisé et mal ficelé en prévoyant notamment qu’il cessera de s’appliquer en tout état de cause le 1er avril 2021, sauf vote d’une loi contraire. Une précision fondamentale à laquelle les services du gouvernement n’avaient curieusement pas pensé.

Pas tout à fait une dictature

Il est remarquable que cette législation d’exception, justifié par le recours à un langage guerrier unique en Europe (« Nous sommes en guerre ») n’ait pas fait l’objet d’une saisine du Conseil constitutionnel, l’opposition, tout aussi interdite de terreur que l’opinion publique, ayant renoncé à exercer ses droits, un fait sans précédent, alors qu’il s’agit d’une atteinte particulièrement grave à l’État de droit. Les juges constitutionnels n’ont été saisis que sur un point de détail, la suspension des délais pour juger des questions préjudicielles de constitutionnalité (QPC), une disposition qu’il a d’ailleurs validée.

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Tant que l’État d’urgence sanitaire s’appliquera (jusqu’à la fin du mois de juillet vient-on d’apprendre), la France n’est plus une démocratie, même si elle n’est pas tout à fait une dictature. En son temps, François Mitterrand avait dénoncé le « coup d’État permanent » qu’étaient les institutions de la Ve République. Le coronavirus a permis d’aller jusqu’au bout de cette logique institutionnelle. Le chef de l’État, s’appuyant sur une majorité soumise et face à une opposition inexistante, s’est emparé de tous les leviers de pouvoir en invoquant la nécessité de préserver la santé des Français et une urgence sanitaire qu’il n’a pas voulu voir venir, lui qui dix jours plus tôt incitait les Français à continuer à vivre comme avant.

Cette mise entre parenthèses de l’État de droit s’est accompagnée de l’arrêt brutal d’une grande partie de l’économie, conséquence logique du confinement. Surtout, le gouvernement a décidé, sans aucune concertation, quels commerces pourraient rester ouverts, contraignant les entreprises à mettre au chômage partiel plus de 11 millions de salariés du secteur privé.

Absence de débat

Il est proprement sidérant que ces pouvoirs exceptionnels confiés à l’Etat pour appliquer un confinement brutal et sans nuance à tout un pays, l’un des plus durs d’Europe avec ceux de l’Espagne, de l’Italie et de la Belgique, n’ait donné lieu à aucun débat, comme s’il n’y avait pas d’autre choix. Pourtant, jamais une démocratie n’a utilisé dans le passé cette méthode pour lutter contre une pandémie (il y a seulement eu des confinements partiels au début du siècle précédent), notamment lors de la grippe espagnole de 1918-1919, de la grippe asiatique de 1959 ou de la grippe de Hong Kong de 1969. Le fait que le confinement ait été une solution inventée par la Chine, un régime totalitaire, pour contenir la pandémie de coronavirus aurait dû au minimum interroger sur sa légitimité. Pourtant, il s’est imposé presque naturellement, tout se jouant en réalité lorsque l’Italie a pris la décision de confiner l’ensemble de sa population à compter du 10 mars, ce qui a provoqué un effet domino, chacun voulant montrer qu’il avait aussi à cœur de protéger sa population : l’Espagne l’impose le 15 mars, la France le 16, la Belgique le 18...

Pourtant, il y avait matière à débattre et sur tous les plans. Sur le principe du confinement lui-même d’abord. Car il n’est qu’un pis-aller visant à ralentir la propagation du virus et éviter un engorgement des hôpitaux qui pourrait se traduire par des morts additionnels. En clair, le virus continuera à circuler et à tuer ceux qu’il doit tuer après la levée du confinement - dans une proportion que personne ne connait- puisqu’il n’existe et qu’il n’existera pas avant un ou deux ans un vaccin et que les traitements en sont encore au stade expérimental.

Le confinement est un piège politique

Manifestement, personne n’a réalisé qu’il risquait d’être très difficile de sortir sans dommage politique du confinement une fois décidé, une partie de l’opinion publique risquant de s’autopersuader au fil des jours qu’il s’agit en fait d’éradiquer la maladie. Si la pandémie continue à tuer, et elle le fera, le gouvernement sera automatiquement accusé de mettre en danger la santé de ses citoyens pour sauver « l’économie », un gros mot pour une partie des Français comme si le fait de travailler pour vivre était secondaire par rapport à la santé… Autrement dit, la tentation sera forte de revenir au confinement aveugle pour faire taire les polémiques ou d’en sortir le plus tard possible, la voie choisie par la France après six semaines d’État d’urgence sanitaire.

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C’est d’ailleurs pourquoi des pays comme la Suède, la Suisse, l’Allemagne ou encore les Pays-Bas soit n’ont pas adopté cette stratégie, laissant la vie suivre son cours normal, soit l’ont appliqué avec beaucoup plus de finesse, ce qui a permis d’éviter d’en passer par la case des pouvoirs exceptionnels confiés à l’exécutif et surtout de casser l’économie.

Pourquoi confiner tout un pays ?

Ce verrouillage total d’un pays est d’autant plus discutable que des régions entières étaient et sont encore quasiment épargnées par le virus : pourquoi imposer le même traitement à la Creuse qu’à l’Ile de France, aux Pouilles qu’à Milan ? Pourquoi n’avoir pas confiné en fonction de l’extension de la pandémie, exactement comme l’a fait l’Allemagne, où les Länder sont compétents en matière de santé publique, avec le succès que l’on sait ? Ainsi, dès le départ, deux foyers ont été identifiés en France : l’Oise et Mulhouse. Or, plutôt que de réagir immédiatement en isolant ces deux régions et en déployant des moyens médicaux militaires pour soulager les hôpitaux, le gouvernement a tergiversé laissant le virus se répandre. Il reste sidérant qu’il ait fallu attendre le 24 mars, soit une semaine après la décision de confiner le pays, pour que le service de santé militaire soit envoyé en renfort à Mulhouse ! De là à penser que le confinement total ait aussi été motivé par l’incapacité des autorités à anticiper la crise, il n’y a qu’un pas que je me garderai bien de franchir.

De même, le choix des entreprises à fermer et des mesures de précautions à prendre aurait aussi été un champ de discussion possible. Par exemple, on a rapidement su que l’air conditionné permettait au virus de circuler au-delà d’un mètre et de contaminer de nombreuses personnes. Dès lors, fermer les cordonneries, les galeries d’art ou les fleuristes et laisser les supermarchés ouverts a-t-il un sens médical ? De même, la fermeture des écoles était-elle nécessaire ? Tout cela a été laissé à l’appréciation d’une bureaucratie sans contrôle et sans aucune concertation avec l’ensemble des acteurs économique et sociaux.

Pourquoi assigner à résidence une population entière ?

Enfin, il est apparu très tôt que la maladie était en très grande majorité fatale pour les personnes âgées de plus de 70 ans (moyenne d’âge des décès en Italie ou en France : 80 ans) et celles qui ont des pathologies graves, en clair les personnes affaiblies. Dès lors, confiner tous les actifs et plonger le pays en récession était-il rationnel ? Peut-être aurait-il fallu se concentrer sur la protection de ces groupes à risques plutôt que de mettre sous cloche tout un pays sans penser au lendemain, d’autant qu’on sait pertinemment que le virus est là pour longtemps.

Le débat devient, à ce point-là, particulièrement émotionnel, car il renvoie à notre rapport à la mort. Pourquoi une telle pandémie, qui n’est pas la première que le monde ait affrontée et qui est surtout très loin d’être la plus mortelle de l’histoire, a-t-elle conduit des États à décider de mesures sans précédent tout en sachant qu’elles n’étaient pas un remède ? Pourquoi une telle panique, surtout si l’on compare la mortalité causée par le coronavirus avec celle des autres maladies ? Même s’il faut être encore prudent, puisque cinq mois après son apparition, on sait toujours aussi peu de chose du covid-19, ce qui devrait nous mettre en garde sur le scientisme qui nous a saisis, les médecins ayant dit tout et son contraire sur cette pandémie, rendant ainsi la décision politique particulièrement difficile. Mais rappelons néanmoins que 400.000 nouveaux cancers sont diagnostiqués chaque année en France et que 150.000 Français en meurent et pourtant tabac et alcool ne sont toujours pas interdits alors que cela permettrait d’en éviter une bonne partie. Si toute vie mérite d’être sauvée, pourquoi se monter si désinvolte à l’égard du cancer ? De même, les grippes saisonnières (alors qu’il existe un vaccin qu’une grande majorité estime dispensable) tuent chaque année entre 3000 et 15.000 personnes (sans parler des plus de 30.000 morts de la grippe de Hong Kong en 1969 dans un pays de 51 millions d’habitants ou du nombre équivalent de morts en 1959 dans un pays de 45 millions d’habitants), les infections saisonnières respiratoires 68.000 personnes, les accidents de la route 3500 personnes auxquels il faut ajouter les handicapés à vie. Et pourtant, personne n’a songé à interdire la voiture (et chaque mesure visant à renforcer la sécurité suscite son lot de protestations, rappelons les 80 km/h) ou à faire de la lutte contre la pollution ou la malbouffe un impératif catégorique.

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Si on regarde les statistiques de la mortalité dans le monde, on s’aperçoit que la faim (pourtant facile et peu couteuse à éradiquer), la malaria, le SIDA ou encore les guerres (souvent faites avec les armes produites par nos industries) tuent infiniment plus que le coronavirus ne tuera jamais.

Choisis ton camp camarade, mais il n’y a qu’un camp du bien, celui du confinement !

Il faudrait sans doute interroger la responsabilité des médias audiovisuels dans cette panique qui s’est emparée des opinions publiques occidentales (avec une exception allemande, les télévisions germaniques ayant volontairement décidé de traiter le covid-19 à la place qu’il mérite). Annoncer tous les matins le nombre de morts sans les mettre en perspective (par rapport à la moyenne habituelle des morts, leur âge, la comorbidité dont ils souffraient, etc.), consacrer des journaux entiers à la pandémie ne peut qu’ébranler même les têtes les mieux faites... Imaginez que chaque matin on égrène le nombre de morts en France toutes causes confondues et qu’on y consacre l’ensemble des journaux : qui oserait encore tout simplement vivre ?

Il ne s’agit pas de dire qu’une mort n’a aucune importance, mais simplement que toute politique publique doit faire l’objet d’une évaluation coût-bénéfice. Si on n’interdit pas les ventes d’armes, le tabac, l’alcool, la voiture, les camions, les centrales thermiques, c’est parce que collectivement nous estimons que le coût serait supérieur au bénéfice que nous en tirerions. Mais ce débat, dans la déferlante émotionnelle qui dure depuis deux mois, est de fait interdit. Ceux qui ont osé questionner la stratégie choisie et surtout sur sa durée ont été cloués au pilori par les plus radicaux, ceux qui se font entendre. Être opposé à la prolongation du confinement, c’est être pour le « sacrifice » de ceux qui sont malades, « cracher à la gueule des morts » et j’en passe. Bref, choisis ton camp camarade, mais il n’y a qu’un camp du bien, celui du confinement ! J’ai même été menacé de mort, moi et ma famille, par de braves gens qui estiment que toute vie doit être sauvée à n’importe quel prix sans que la contradiction de leurs propos ne leur effleure l’esprit pour avoir osé m’interroger dans deux tweets du 9 avril, trois semaines après le début du confinement : « C’est dingue quand on y songe : plonger le monde dans la plus grave récession depuis la seconde guerre mondiale pour une pandémie qui a tué pour l’instant moins de 100.000 personnes (sans parler de leur âge avancé) dans un monde de 7 milliards d’habitants. La grippe saisonnière, qui tue surtout les jeunes enfants, c’est entre 290.000 et 650.000 par an dans le monde. Et tout le monde s’en tape, mais grave ».

La récession la plus grave de tous les temps hors période de guerre (et encore)

Or, le confinement va entrainer une récession inimaginable par sa violence : elle devrait atteindre entre 8 % et 15 % du PIB, un recul de l’activité sans précédent en temps de paix (il faut remonter à 1942 pour enregistrer une récession de -10 %). Jamais on n’a mis une économie totalement à l’arrêt comme on vient de le faire, il faut en prendre conscience. Le chômage partiel touche désormais près de douze millions de travailleurs (un salarié du privé sur deux !) et les licenciements secs entrainés par des milliers de faillites d’entreprises vont se compter par centaines de milliers voire millions une fois que le dispositif de chômage partiel pris en charge par l’État arrivera à échéance (car il coûte une fortune). Et plus l’arrêt de l’économie se prolongera, plus difficile sera le redémarrage. Le coût engendré par la mise en place d’un filet social et par les plans de l’économie va entrainer une dégradation sans précédent des comptes publics et les jeunes générations qui vont devoir payer deux fois le confinement : par la perte de leur emploi et par l’augmentation des impôts pour ceux qui le conserveront.

Il ne faut pas oublier que le chômage est une aussi catastrophe sanitaire, mais plus diffuse et donc socialement plus acceptable : on estime ainsi à 14.000 les décès qu’il cause chaque année en France par les maladies induites. Et comment ne pas parler de son cortège de misère, de faim, de déclassement social, etc.. Les effets du confinement vont aussi d’avoir des conséquences terribles sur le mental des Français, sur les violences faites aux femmes et aux enfants, sur leur santé (par exemple, les dépistages précoces des cancers, des AVC, des crises cardiaques sont suspendus et on ne sait encore rien des suicides, etc.), sur le décrochage scolaire (combien d’enfants ont purement et simplement disparu du système ?).

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Un État de droit durablement affaibli

Enfin, croire que les libertés publiques, la démocratie, sortiront intactes de cet épisode est juste un doux rêve. L’État d’urgence sanitaire va rester inscrit dans notre droit pour longtemps exactement comme l’État d’urgence, déclenché en 2015 a finalement été intégré au droit commun. Il est rare qu’un Etat renonce de lui-même aux pouvoirs gagnés sur le législatif et la justice. Le tracking des individus, via les smartphones, que certains considèrent comme une nécessité, pourrait bien devenir la règle au nom de la sauvegarde de notre santé devenue LA priorité, la vie privée étant ravalée au rang de préoccupation d’un autre âge. Avoir choisi le confinement total et l’État d’urgence laissera des traces durables dans la démocratie française.

Je ne prétends pas ici apporter une réponse. Simplement, les premiers éléments du déconfinement montrent qu’une autre voie aurait été possible : confinement pas département, large pouvoir d’appréciation laissé aux autorités locales, saisine du juge judiciaire pour consigner les porteurs du virus, etc. Je regrette juste l’absence de délibération démocratique avant la mise en place de l’État d’urgence sanitaire et sa prolongation. Comme si sacrifier les générations de moins de 60 ans et suspendre l’État de droit étaient des évidences non questionnables.

En conclusion provisoire, je pense qu’il ne faut pas se tromper sur la signification de l’évènement inimaginable que nous vivons : c’est le triomphe de l’individualisme, celui de la santé immédiate de l’individu face au bien-être collectif actuel et futur. Les termes du débat sont en réalité identiques à ceux du changement climatique : doit-on accepter de sacrifier son bien-être immédiat pour assurer la survie de l’espèce humaine ?

Jean Quatremer 30 avril 2020