Félicien Marceau appartient à cette période bénie de notre histoire littéraire, où les frontières entre les genres n’étaient pas encore étanches. Les auteurs les plus doués circulaient librement d’une forme à l’autre et savaient être, avec un égal bonheur, romanciers, essayistes, dramaturges. Marceau a inventé une nouvelle formule théâtrale; la pièce écrite à la première personne. Ses pièces ont été jouées par Arletty, Jeanne Moreau, François Périer, Jean-Claude Brialy, Francis Blanche, Bernard Blier… Elles s’appelaient L’Œuf, La Bonne Soupe, L’Etouffe-Chrétien.. Elles remportèrent un succès considérable dans les années 1960.
L’individu en proie au terrorisme intellectuel d’un monde sans âme, voilà son credo. L’homme doit être un franc-tireur, prendre le maquis de la pensée courante et bâtir sa propre vérité. C’est pourquoi Marceau aime les personnages interlopes, mystérieux. Ses personnages sont en règle générale des inadaptés. Ils n’arrivent pas à entrer en communication avec leur époque. Marceau aime les contrebandiers, les voleurs, les prostituées ; ceux qui vivent une vie de roman dans un monde qui s’y prête guère. Quand on le présentait comme homme de droite, il répondait : « Oui, le système reste mon ennemi et je ne crois pas à la société. Il y a deux révolutions à faire: la révolution des masses et la révolution individuelle, et l’une ne doit pas faire oublier l’autre. » A son avis la liberté n’existe que lorsqu’on l’a conquise, c’est à dire éprouvée. Mieux: elle n’est pas donnée à jamais, mais toujours en péril.
L’époque a de plus en plus de mal à admettre que la littérature est une zone franche, une manière de plage ensoleillée où l’on va éviter la guerre civile et se baigner entre gens de bonne compagnie. Et puis, n’est-ce pas, quand toutes les idéologies sombrent, et elles sombrent souvent, ce qui reste au bout du compte, c’est le style. Le style, Félicien Marceau n’en manquait pas. Le style mais aussi la légèreté, l’impression de facilité dans l’art de dérouler les phrases et de raconter une histoire, c’est aussi pour cela bien plus que pour des engagements douteux, que certains écrivains sont secrètement détestés.
Félicien Marceau était un grand vivant qui fait honte aux moribonds, à leurs pauvres et funestes rêveries. Toutes les apparences de la santé se fixent dans ses livres, une lucidité indulgente, une gravité toujours teintée d’une sorte de tendresse ironique. Il a un air désinvolte, narquois et avide pour parler de la vie; il invente presque une façon nouvelle d’être heureux; il se compose devant l’existence une attitude goguenarde et insolente.
Louis Carette, c’était son nom, est né à Cortenberg, dans le Brabant, le 16 septembre 1913. « Au commencement, écrit-il dans son autobiographie, Les Années courtes, il y eut un grand tumulte. » Ses premiers souvenirs sont des souvenirs d’épouvante : la guerre, le sac d’une ville, des incendies, des morts. « Ce n’est pas ça, l’enfance. Cela ne devrait pas être ça. C’est une aube, l’enfance, non ces clameurs, non cette peur. » Fils de fonctionnaire, il fait ses études au collège de la Sainte-Trinité à Louvain.
Deux grands principes structuraient son enseignement. Principe numéro 1 : « L’ennemi du style, c’est le cliché. Qu’est-ce que le cliché ? C’est quelque chose qui a été écrit avant nous. Il faut écrire comme personne […]. Nous étions médusés, commente Félicien Marceau. Jusque-là nous pensions que bien écrire, c’était précisément écrire comme les autres, comme les écrivains. » Principe numéro 2 : il faut faire des comparaisons sans arrêt, « parce que, si on ne fait pas une comparaison, on ne voit pas. Or, le style, c’est faire voir ». Félicien Marceau n’oubliera jamais cette double injonction. Elle déterminera aussi bien son art littéraire que sa philosophie de la vie.
Après ses années de collège, Louis Carette entre à l’Université de Louvain. Et là ce jeune catholique fait ses premières armes dans ce qui est alors le seul quotidien universitaire au monde : L’Avant-garde. C’est son entrée en littérature, et c’est aussi, sous l’égide d’Emmanuel Mounier, son entrée en politique. Il préside la sous-section de la revue Esprit fondée à Louvain en 1933 et il publie, le 19 mai 1934, dans les colonnes de L’Avant-garde, un réquisitoire aux accents pré-sartriens contre la passion antisémite
Quand la guerre éclate, Louis Carette a vingt-sept ans et, depuis 1936, il est fonctionnaire à l’Institut national de la radiodiffusion. Mobilisé, il combat dans l’armée belge. Celle-ci est rapidement mise en déroute. Carette se replie avec son régiment en France. Après la reddition, il reprend ses activités sur le conseil de son ministre de tutelle. Mais, entretemps, l’I.N.R. a été rebaptisé Radio Bruxelles, et placé sous le contrôle direct de l’occupant. Il devient le chef de la section des actualités. En mars 1942, de retour d’un voyage en Italie, il trouve l’atmosphère alourdie.
S’extirpant de la glu de la camaraderie, Carette quitte donc la radio le 15 mai 1942. Il fonde sa propre maison d’édition, où il publie notamment le grand dramaturge Michel de Ghelderode, mais il ne choisit pas pour autant la voie de la Résistance. À la Libération, il apprend que la police le recherche, il fuit donc vers la France, en compagnie de sa femme, avec pour seul bien une valise et son Balzac dans l’édition de la Pléiade. En janvier 1946, il est jugé par contumace et condamné à quinze ans de travaux forcés par le conseil de guerre de Bruxelles qui, sur trois cents émissions, a retenu cinq textes à sa charge : deux chroniques sur les officiers belges restés en France, une interview d’un prisonnier de guerre revenant d’Allemagne, un reportage sur le bombardement de Liège et une actualité sur les ouvriers volontaires pour le Reich. Ces émissions ne sont pas neutres. Comme le dit l’historienne belge Céline Rase dans la thèse qu’elle vient de soutenir à l’université de Namur : « Les sujets sont anglés de façon à être favorables à l’occupant. » Cela ne suffit pas à faire de Carette un fanatique de la collaboration. Ainsi, en tout cas, en ont jugé le général de Gaulle qui, au vu de son dossier, lui a accordé la nationalité française en 1959 et Maurice Schumann, la voix de Radio Londres qui, en 1975, a parrainé sa candidature à l’Académie française.
De la lecture d’Une ténébreuse affaire, il tira la leçon, aussitôt appliquée, que dans la mesure où ce ne sont pas des juges mais des adversaires qui siègent dans un procès politique, il est préférable de s’exiler. Ce qu’il fit à la libération de son pays, en s’installant en France. Une fois arrivé, il a voulu, avant même de reprendre la plume, tourner la page. Il s’est donc doté d’un nouveau nom pour une nouvelle naissance et ce nom n’est évidemment pas choisi au hasard : il se lit comme une promesse de gaieté et d’insouciance après les sombres temps de la politique totale. Promesse tenue pour notre bonheur dans des romans comme Les Passions partagées ou Un oiseau dans le ciel.
Comme beaucoup d’intellectuels et écrivains situés à l’extrême-droite de l’échiquier politique, les aspects plébéiens, grégaires du fascisme, ne peuvent que révolter cet esprit distingué qui rejoindra, ce n’est pas un hasard, le groupe littéraire des Hussards. Au lieu de prendre la mesure de la catastrophe européenne, un certain nombre d’écrivains talentueux, regroupés autour des revues La Table ronde ou La Parisienne, firent flèche de tout bois contre ce qu’ils vivaient comme l’arrogance insupportable des triomphateurs. Sans se laisser entamer le moins du monde par la découverte de l’ampleur des crimes nazis, ils revendiquèrent pour eux la qualité de parias, de proscrits, de persécutés et la critique du résistancialisme leur tint lieu d’inventaire. Ils reconnaissaient que l’Occupation avait été une époque pénible, mais c’étaient les excès de la Libération qui constituaient pour eux le grand traumatisme. Félicien Marceau a toujours su préserver sa singularité. Reste qu’il faisait partie de cette société littéraire qui s’était placée sans état d’âme sous le parrainage des deux superchampions de l’impénitence : Jacques Chardonne et Paul Morand.

Félicien Marceau a commencé sa carrière en écrivant des romans : Chasseneuil (1948), Casanova ou L’Anti-Don Juan (1949), Capri petite île et Chair et cuir (1951). Mais c’est avec Bergère légère qu’il connaît son premier grand succès, en 1953. Il se réclame de Balzac, à qui il rend un hommage dans un essai, Balzac et son monde (1955). Qu’ils soient riches ou pauvres, parisiens, campagnards ou isolés sur une île italienne, les personnages de Félicien Marceau vivent en ingénus apparents dans une société jugée sans intérêt par l’auteur.
Marceau, qu’on classe paresseusement parmi les auteurs de boulevard, n’a pas usé pour nouer son intrigue de recettes éculées ; comme le dit Charles Dantzig dans son livre d’entretiens avec Félicien Marceau L’imagination est une science exacte, il a inventé une nouvelle formule théâtrale : la pièce écrite à la première personne. Dans L’œuf, comme un peu plus tard dans La Bonne Soupe, le coup de génie de Marceau consiste à transférer sur les planches un procédé tout naturel dans le roman : c’est le romancier en lui qui élargit le champ des possibles du théâtre.
Mais si la forme varie, la pensée de l’écrivain se caractérise par la constance de son questionnement. La virtuosité chez lui va de pair avec l’opiniâtreté. « Tous mes livres, écrit-il en 1994, sont une longue offensive contre ce que dans L’œuf j’ai appelé le Système, c’est-à-dire le signalement qu’on nous donne de la vie et des hommes. Ces lieux communs sont plus dangereux que le mensonge parce qu’ils ont un fond de vérité mais qu’ils deviennent mensonge lorsqu’on en fait une vérité absolue. »
Pour quelqu’un qui avait reçu à peu près tous les honneurs que la République des Lettres peut offrir, il était d’un naturel modeste. Il confessait écrire lentement, et se donner «un mal de phoque pour un chapitre ou un article que n’importe qui écrirait dans le quart d’heure». Il qualifiait sa pensée de «simplette» et parlait peu. Il professait souvent: «L’époque ne respecte que les spécialistes. Cultive ton are. Ne t’aventure pas dans l’hectare.» C’était un écrivain, pas un intellectuel. A partir des années 1960, Félicien Marceau vit à Neuilly (Hauts-de-Seine), dans un hôtel particulier où les visiteurs sont accueillis par un valet en gilet rayé. Il s’insurge quand on qualifie son théâtre de vulgaire ou de cynique : « Je prends toujours les personnages au niveau le plus quotidien, parce que je crois que c’est là qu’est la force de frappe… Pour faire comprendre ce qu’on veut dire, il faut partir du plus bas », déclare alors Félicien Marceau.
Cette année-là, l’auteur reçoit le prix Goncourt pour Creezy, l’histoire d’une cover-girl tuée par son amant député. Il présente aussi une pièce, Le Babour, avec Jean-Pierre Marielle. Mais le succès au théâtre n’est plus de saison. 1968 est passé par là, changeant la société française. Cela n’empêche pas Félicien Marceau de continuer à écrire. Il livre en particulier L’Homme en question (1973), avec Bernard Blier dans le rôle d’un ministre dévoré d’ambition.
http://www.allocine.fr/video/player_gen_cmedia=19407729&a...
Son roman Creezy lui vaut le Goncourt en 1969 ; en 1974, il reçoit le prix Prince Pierre de Monaco et sa course aux honneurs s’achève l’année suivante, dans un fauteuil laissé vacant par Marcel Achard, sous la plus illustre des coupoles. Cette élection n’est pas sans remuer des souvenirs. Pierre Emmanuel démissionne de l’Académie et Marceau le renvoie à son livre de souvenirs. Les Années courtes (1968), dans lequel il a fait le jour sur les engagements de sa jeunesse. Le scandale est bien vite émoussé et l’écrivain peut continuer sa vie de romancier, tenant de temps à autre une chronique au Figaro, offrant régulièrement un nouveau texte, abordant tous les genres et tous les styles, en restant cependant fidèle à ses principes: «Pour le romancier, la réalité n’est qu’un point de départ à partir de quoi il nous propose (…) une autre vie.»
Creezy et Le corps de mon ennemi ont donné deux films, eux aussi typiques des années 70. Il s’agit de La race des seigneurs de Pierre Granier-Deferre avec Delon et Sydne Rome, belle comme une couverture de Play-Boy sous Giscard. Le corps de mon ennemi est tourné avec Belmondo par Henri Verneuil sur des dialogues de Michel Audiard. C’étaient typiquement ce qu’on appelait les films du dimanche soir et il nous semble bien que c’est la première fois que nous avons vu, écrit au générique, le nom de Félicien Marceau, que c’est de cette manière, ausssi, que nous avons eu envie de lire l’écrivain qui inventait de telles histoires. Comme quoi, regarder la télé menait encore à tout en ce temps-là, même à Félicien Marceau.
En 1978, il signe l’adaptation de la Trilogie de la villégiature, de Carlo Goldoni, dont Giorgio Strehler offre une mise en scène inoubliable, à l’Odéon, à Paris. Un an plus tard, L’Œuf entre au répertoire de la Comédie-Française. La pièce fait un flop, malgré la présence de Michel Duchaussoy. De même, la présence de Danielle Darrieux dans la reprise de La Bonne Soupe, toujours en 1979, n’empêche pas l’échec. Félicien Marceau retourne au roman. En 1993, La Terrasse de Lucrezia lui vaut le prix Jean Giono. En 2000, il publie L’Affiche. En 2002, L’Homme en question est repris au Théâtre de la Porte-Saint-Martin par Michel Sardou. Le chanteur n’arrive pas à relancer un auteur dont il partage les convictions.
Cet amoureux du mot et de ses sortilèges laisse planer sur son absence l’ombre d’une œuvre riche et sarcastique, qui sut unir les fastes d’un Balzac aux irrévérences d’un La Bruyère. Comme toujours, quand une voix se tait, on est en droit de se demander si on continuera à l’entendre. La réponse n’est guère aisée. On ne s’aventurera pas beaucoup en postulant que son monumental « Monde de Balzac » défiera le temps, comme ses essais sur Casanova, fruits d’un double cousinage dû au goût du bonheur et à l’amour de l’Italie, résisteront à l’usure du temps. Pour ses romans, on, est en droit de ses demander s’ils bénéficieront de l’indulgence de la postérité. Il faudrait pour cela que l’Université, qui lui a préféré les expérimentations du Nouveau Roman, se mette à s’intéresser à lui. Et puis, il y a son théâtre, qui triompha sur le boulevard, alors qu’il méritait mieux que cela. Il fut un temps, comble de l’ironie, où on le comparaît à Brecht, en raison de son style assimilable au théâtre épique . Aujourd’hui, seuls les amateurs puisent encore dans ce répertoire. Marceau, qui se tut à l’aube du siècle dernier, y sera-t-il un jour renfloué ou est-il voué au cimetière des écrivains symptomatiques de leur temps ? La question reste entière.

(Notice rédigée en 1988 par Félicien Marceau)
Pourquoi moi? Pourquoi est-ce moi qu’on est allé chercher pour parler de Félicien Marceau? Je suis, il est vrai, de ses amis, le plus ancien. Cela laisse intacte la question: suis-je vraiment son ami? Ce qu’il peut m’horripiler parfois! Tenez, quand je le vois se donner un mal de phoque pour un chapitre ou un article que n’importe qui écrirait dans le quart d’heure.
Une justice à lui rendre pourtant: la chose imprimée, il ne reste que peu de traces de ses ahans. Le Marceau se lit sans difficulté. Parfois même avec agrément, si on en croit l’éminent critique du «Cri de la jeune fille», organe indépendant du Loiret. A mon idée, c’est surtout parce que sa pensée est simplette. Rarement chez lui de ces propos dont l’opacité est un si rassurant oreiller.
Conscient de cette infériorité intellectuelle, il parle peu. On raconte qu’un jour, congratulant Marcel Aymé à l’issue d’une de ses pièces, tout ce qu’il trouva à articuler fut: «Ah! Quelle bonne pièce!» Ce à quoi, après un silence de trois siècles, Marcel Aymé rétorqua: «La vôtre aussi est bien», échange de vues qui les laissa d’ailleurs, tous les deux, parfaitement satisfaits. Moi, avec des gens comme ça, je frise la crise de nerfs.
Calme, sois calme, mon âme. On m’a demandé un article objectif. Genre biobibliographie. Pour la biographie de Félicien Marceau, je renvoie à ses mémoires, «Les Années courtes», où il nous narre sa vie de 1913 à 1946. Pour le reste, son trait principal est d’avoir écrit à peu près autant de romans que de pièces, plus quelques essais. Je dois énumérer? Bon, j’énumère.
Bibliographie
Romans: «Chasseneuil», «Capri petite île», «Chair et Cuir», « ’Homme du roi», «Bergère légère», «Les Elans du cœur», «Creezy», «Le Corps de mon ennemi», «Appelez-moi Mademoiselle», «Les Passions partagées».
Pièces: «Caterina», «L’Œuf», «La Bonne Soupe», «L’Etouffe-chrétien», «Les Cailloux», «La Preuve par quatre», «Un jour j’ai rencontré la vérité», «Le Babour», «L’Ouvre-boîte», «L’Homme en question», «A nous de jouer».
Essais: «Casanova ou l’anti-Don Juan» et, encore sur Casanova (c’est une manie) «Une insolente liberté», «Le Roman de la liberté», et, plus considérable, en tout cas par le nombre de pages, un «Balzac et son monde» qui fait autorité, paraît-il (va-t-en voir), jusque dans le New Jersey.
Nouvelles: «En de secrètes noces» et «Les Belles Natures». Pour faire bon poids, ajoutons un opéra-bouffe, «Lavinia», et les quelques films tirés de ses romans ou de ses pièces.
On conviendra que tout ça ne fait pas très sérieux et quand on pense que ça a pu lui valoir des prix comme l’Interallié, le Goncourt, le Monaco, le grand prix de la Société des auteurs et enfin l’élection à l’Académie française, on se dit que, franchement… Silence, mon cœur! Apaise ton courroux. Cent fois, je lui ai dit: «L’époque ne respecte que les spécialistes. Cultive ton are. Ne t’aventure pas dans l’hectare.» Lui, il prétend que cette distinction entre les genres est une vue de professeur et que, de pièce en roman, il poursuit la même vérité, la même liberté. Pour reprendre ici une de ses répliques saisissantes d’originalité comme il en trouve une tous les trois ans: «Il vaut mieux entendre ça que d’être sourd.»
Et ses sujets ! Au lieu de nous raconter les amours d’un écrivain avec l’emballeuse-chef de sa maison d’édition, péripétie qui a permis de si brillantes variations dans le roman contemporain, il s’en va chercher des patineurs de Montpellier (sic), des cover-girls, des comtesses transalpines. Il prétend que ça donne de l’air. Je me demande si sa vraie clef n’est pas dans un court divertissement, intitulé «La Carriole du père Juniet» qu’il a eu le front de publier et où on voit un boomerang poursuivant sa propriétaire depuis les Invalides jusqu’en haut de la rue La Fayette. Bref, pour exprimer le fond de ma pensée, je me demande surtout ce que vient faire cet homme-là dans ce dictionnaire.
http://m.ina.fr/video/I14171115/felicien-marceau-et-franc...
Citations:
« Juste assez charmantes pour qu’on aie envie d’elles. Juste assez assommantes pour qu’on puisse les quitter avec soulagement. »
Faites-vous tant d’histoires, lorsqu’on joue votre air national? Moi, je me lève. C’est mon derrière qui obéit. Mais mon esprit reste libre.
il vouait à l’exécration ce monde, ce foutu monde qui se croit libre, ce monde où, de toutes les bouches, comme une bulle, sort le mot liberté, ce monde qui s’en goberge, qui s’en pourlèche, qui s’en barbouille jusqu’aux naseaux, qui le clame dans ses cortèges, qui l’inscrit sur ses banderoles, sans voir qu’entre la liberté et lui, il y a toujours un papier qui manque, qu’entre la liberté et lui, il reste la bêtise, l’inertie, les règlements avec leurs barbelés, les lois avec leurs miradors, les cons avec leurs conneries, les choses enfin avec leur pesanteur.

La vie, à chaque instant, offre ses bifurcations. On ne les prend pas ou on n’a pas le temps ou quelqu’un vous attend.On est sur des rails.[…..]Les hommes se gargarisent de « si »: si j’avais su.[….]… Se peut-il que notre vie ne soit que cette suite de carrefours où, à chaque fois, suivant qu’on prend à gauche ou à droite, tout serait différent?…
C’est étrange, tant de choses, tant de gens, d’événements qui sombrent dans les gouffres de l’oubli. Ce qu’on n’oublie pas, ce qu’on n’oublie jamais, ce sont les gestes mesquins, les gestes sordides. Ce qui reste gravé en lettres de feu, c’est la vulgarité.. L’humiliation et l’offense. données ou subies: pareil….Le souvenir des moments où, même par la faute d’un autre, on a été le complice d’un monde immonde.
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On croit qu’une vie, c’est sérieux. Une vie, ce n’est que ceci : six lettres, quatre factures et un extrait de compte.
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– D’abord comment va-t-il ?
– Il va très bien.
– Il est heureux ?
– Il est libre.
– C’est différent ?
– C’est l’étage au-dessus.
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J’étais entré au ministère aussi… Un autre univers. Qui me plaisait. Parce que, dans les ministères, le travail, je ne dis pas qu’il ne sert à rien, non, non, il sert mais au moins on ne voit pas à quoi. Ça rassure.
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http://www.regietheatrale.com/index/index/thematiques/aut...




del.icio.us
Digg
De ce fait le roman présente un intérêt historique évident, qui tient pour une large part à l’acuité de son auteur et à ses ambiguïtés – surtout pour nous autres, lecteurs contemporains, à qui la Seconde Guerre mondiale apparaît volontiers comme un affrontement manichéen qui rend impossible une compréhension exacte de ses ressorts historiques.
La condamnation pour complicité dans l'affaire Rathenau est toutefois décisive : la prison sera rétrospectivement une chance à plus d'un titre. Pour notre bonheur, d’abord, parce que cet épisode fournit le prétexte à certaines des pages les plus drôles du roman, von Salomon traitant de la vie carcérale avec un humour féroce, se réjouissant par exemple de pouvoir écrire en toute sérénité sans avoir à se soucier ni du gîte ni du couvert ; pour le sien, ensuite, parce que ce séjour en prison empêche sa réintégration au grade de sous-officier dans la Wehrmacht, lorsque la Seconde Guerre mondiale éclate (von Salomon appartient au corps royal des cadets, une expérience décrite dans le roman Les Cadets). Il peut ainsi se maintenir simultanément à l'écart de la politique, du front (il travaille pendant ces années dans l'industrie cinématographique) et par voie de conséquence, de la potence, une fois la guerre perdue.
On sent bien que la politique dans son sens le plus noble, celle qui s’attache aux États et aux peuples, est un tropisme de Von Salomon, et la politique occupe évidemment le devant de la scène dans la période; pourtant Le Questionnaire ne s'y résume pas, loin de là. Outre le récit des différents épisodes de la vie de l’auteur, on y trouve de nombreuses réflexions sur l'art, l'écriture et la littérature, sur l'Histoire, la société, la culture. Von Salomon est aussi un bon vivant, qui aime manger, boire, séduire, conduire des voitures avec une «gueule chromée», plutôt cigale que fourmi, et qui nous offre à l’occasion des saillies authentiquement rabelaisiennes.
Von Salomon consacre près de quatre-vingt pages (642-722) à un séjour en terres basques, du côté de Saint-Jean-de-Luz (le questionnaire s'intéresse à ses séjours à l'étranger) où il fait la connaissance de Mayie, avec laquelle il entretient une relation avant de regagner l'Allemagne. Ce roman dans le roman, évocation nostalgique d'un paradis perdu, s'intercale de façon presque surréaliste entre les derniers moments du régime nazi et l'entrée des Américains dans une Allemagne défaite, et s'imprime dans ce long récit comme un songe – et c'est sans doute comme un songe que ce souvenir est resté à von Salomon, qui écrit : «Mais quand je pense à Mayie, je pense à la France et quand je pense à la France, je pense à Mayie. Ô douce Mayie, Ô Sainte France ! Vous m'avez donné le rêve de ma vie, les grandes vacances de ma vie» (pp. 719-720). Le sentiment qui s’en dégage s’approche de celui que suscite le dernier moment de L’Éducation sentimentale. Ceux qui l’auront lu se souviendront sans doute du vertigineux saut dans le temps que ménage Flaubert à la fin du roman. Proust, à ce propos, écrit en 1920 (À propos du style de Flaubert, in La Nouvelle revue française) : «Sans l’ombre d’une transition, soudain la mesure du temps devenant au lieu de quarts d’heure, des années, des décades». Eh bien cet «abîme» qui s’ouvre et nous laisse justement contempler, amer, la folie d’une vie qui s’est écoulée avec fulgurance et qui contenait, avec le recul, beaucoup plus de vide que de matière – c’est le sentiment qui surnage ici.
On constate qu’avec une très grande intelligence littéraire, Von Salomon a donc ménagé la présence de ces trois pôles dans le récit (le Gouvernement militaire allié, le lecteur et lui-même), de sorte qu’ils apparaissent d’intensité à peu près égale et que l’un n’écrase pas les deux autres. Pour ce faire, il fallait accentuer démesurément la présence du Gouvernement militaire allié (aidé par son existence historique mais qui demeure, des trois pôles, le plus fragile) – raison pour laquelle il structure si profondément l’ensemble du roman – et il fallait forcer le lecteur à entrer dans le bocal, donc le faire déchoir de sa position confortable mais lointaine d’observateur, de destinataire naturel à qui tout est acquis. Raison pour laquelle son horizon d’attente est trompé : alors que le genre autobiographique invite le lecteur à se croire légitimement destinataire («Je veux montrer à mes semblables...», dit Rousseau dans l’incipit des Confessions), Von Salomon lui coupe l’herbe sous le pied et semble lui substituer le Gouvernement militaire allié. Il fallait enfin circonscrire la place démiurgique de l’auteur, une illusion que von Salomon parvient à donner dès lors qu’il semble se conformer aux injonctions du questionnaire, comme s’il n’était pas maître du récit.













Son retour en France, deux ans plus tard, marque le début de sa seconde carrière, qui avec des hauts, quelques-uns, et des bas, beaucoup plus, celle d’un artisan du cinéma français plus que d’un auteur, mais ceci est une histoire qui n’éclatera que vingt ans plus tard. Ciboulette est l’adaptation d’une opérette dont le cinéaste garde un souvenir des plus éprouvants de la » giclée acidulée » de la voix de la chanteuse Simone Berriau. C’est en 1932, il fait travailler son ami Prévert. Le film provoque un scandale chez l’auteur du livret et la carrière d’Autant-Lara connaît là sa première éclipse.



L’homme ne tourne plus, ne trouve plus les moyens financiers de tourner, mais il écrit. À quatre-vingt-six ans, il signe un recueil de souvenirs. Sa défense du » cinéma français » l’amène à écrire dans les Fourgons du malheur des choses telles celles-ci : » Celui qui mange un camembert en l’arrosant de Coca-Cola est encore plus irrécupérable qu’un Éthiopien débarquant gare Saint-Lazare. Cet Éthiopien, il n’est pas exclu qu’on arrive à le convertir à Voltaire ou à Montaigne. Dans dix générations. Pas avant. Mais le buveur de Coca-Cola ? Lui ? Impossible. »
Citations extraites du saisissant discours inaugural de Claude Autant-Lara devant le Parlement européen du 15 juillet 1989 :

Télémafia : Voici le premier livre de Claude Autant-Lara. Dérangeant, lui aussi. Comme ses films qui appartiennent à l’histoire du cinéma français. C’est après la parution de ce livre qu’il eut l’idée de rédiger sa « chronique cinématographique du XXème siècle » encore inachevée à ce jour et dont Télémafia est, en fait, le dernier tome.

A sa parution, en 1948, nous avons pris naïvement ce livre pour un roman de sciences fiction. A l’époque, à part quelques rares visionnaires aussitôt traités de défaitistes, nous croyions être occupés à construire un monde meilleur, plus juste, plus solidaire, sous la houlette de dirigeants éclairés. De Gaulle n’avait-il pas sauvé la France ? Et les communistes ne mettaient-ils pas en œuvre, tambour battant, le programme du Conseil National de la Résistance : sécurité sociale, allocations familiales, congés payés, chômage, retraites ? Les syndicats étaient puissants et un salaire d’ouvrier suffisait à faire vivre une famille entière. On s’attendait à ce que le système capitaliste s’effondre sous ses contradictions, comme l’avait prédit Marx. On pensait que le ciel descendrait bientôt sur terre sous la forme du socialisme, et tant pis pour la classe possédante ! Il y avait une forme d’équilibre social de la terreur qui avait son pendant extérieur dans la dissuasion atomique.
Notre pays est béni des dieux parce qu’il est dans le camp du bien et que ses élites sont au service du peuple, et donc nous n’avions rien à craindre du Coronavirus quand il est arrivé de Chine avec les français rapatriés, a déclaré notre apprenti Big Brother. Au cœur de l’épidémie, Il a harangué son peuple avec fougue, envoyé les fantassins au front, mis ses amis à l’abri dans leurs châteaux de province, et enfermé à la maison le reste de la population avec, pour résoudre tous les problèmes, une boîte magique de Doliprane. Tous ensemble, sous sa houlette éclairée, nous avons fait reculer la bête, au péril de nos vies. Evidemment, nous n’avons pas pu sauver tout le monde et beaucoup de vieillards sont morts, seuls, dans nos mouroirs à profit. Mais nous avons beaucoup appris. 



In his search for balance between individual and civil liberties, Tocqueville remains one of the most nuanced thinkers of the western political canon—and a fine diagnostician of enduring psychosocial problems and the systemic conditions in which they arise.
When and how, then, does fragility become a problem? From babies to the elderly and the sick, weak humans are uniquely skilled at mobilizing the attention and care—at times tyrannically—of others. Take the old problem of sibling rivalry. Signalling one’s needs and the fact that one is suffering—from, for example, hunger, loneliness or cold—is a crucial survival trait. In competing for parental attention and care, children will frequently learn to over-signal their suffering—often to the point of
Psychiatrist 








Dans ce monde du tout utilitaire et du tout jetable, l’ultime herméneutique est le bruissement de la nostalgie fondamentale de l’Être. On ne peut pas ne pas entendre ce bruissement, mais seulement le recouvrir par tous les bruits du monde moderne, voire par les slogans substitutifs tels que « progrès », « liberté » ou même « écologie ». Qui sait aujourd’hui qu’à Fiume on invitait les animaux pour assister aux conférences ?

Das geplante Gesetz ist ein Generalangriff auf die Gewaltenteilung und Rechtsstaatlichkeit in Deutschland. Facebook und Co. sollen unter Androhung immenser Bußgelder dazu genötigt werden, alle infrage kommenden Kommentare zu melden. Damit würden Facebook und Co. auf eine Stufe mit Strafverfolgungsbehörden wie Staatsanwaltschaft und Polizei gestellt werden.
Wie die vom antifaschistischen Kampf Beseelten die gesamte Republik unaufhörlich wissen lassen, ist das Gesetz zur Bekämpfung von Hasskriminalität auf rechtsextreme Hetze im Netz maßgeschneidert. Nur wird bekanntlich im Mainstream nicht zwischen einer legitimen rechten Meinung und rechtsextremen Äußerungen unterschieden, und so fragt sich der interessierte Bürger, ab welcher Definition die staatliche Strafverfolgung nun eigentlich einsetzt.
Zum Vergleich, seit den Grenzöffnungen 2015 hat der Generalbundesanwalt 2645 islamistische Terrorverfahren eingeleitet und das BKA weist 1,3 Millionen Straftaten durch Flüchtlinge aus, darunter Mord, Totschlag, Messerangriffe, Terroranschläge, bewaffnete Raubüberfälle, Drogenhandel, Vergewaltigung und Gruppenvergewaltigung. Eine entsprechende Reaktionen darauf von Genossin Justizministerin? – Fehlanzeige! Gab es aufgrund dieser Verbrechenswelle eine Gesetzesinitiative der Bundesregierung und eine konsequente Abschiebepolitik von kriminellen wie abgelehnten Asylbewerbern? Auch dies nicht. Wurden diese Gefahren für die Bevölkerung in den Medien entsprechend thematisiert und der Kontrollverlust und das Staatsversagen der Politik angeprangert und die Politik endlich zum Handeln aufgefordert? Wir alle kennen die Antwort!
Bruno Lafourcade a naguère publié un essai courageux Sur le suicide, une charge contre les Les Nouveaus Vertueux. Plenel, Fourest, Joffrin, etc. & tous leurs amis, un fort roman, L’Ivraie, qui retrace le parcours d’un ancien gauchiste devenu sur le tard professeur de français dans un lycée technique de la banlieue bordelaise. Il s’y montrait hilarant et désespéré, incorrect et plein d’humanité. Et styliste exigeant, car l’homme connaît la syntaxe et la ponctuation, classiques à souhait. Qu’il fasse l’éloge du remords (« qui oblige ») ou du scrupule, de la modestie conservatrice face à l’arrogante confiance en soi du progressiste, du dédain face à la haine plébéienne (« on imagine mal tout le dédain que peut contenir un point-virgule »), Bruno Lafourcade se montre drôle et féroce, quasi masochiste à force de pointer avec tant de lucidité les horreurs de ce temps – un misanthrope doublé d’un moraliste, classique jusqu’au bout des ongles. Saluons ce polémiste inspiré, son allergie si salubre aux impostures de l’époque. Et cette charge contre telle crapule télévisuelle, minuscule écrivain qui, sur le tard, après vingt ans de courbettes, renie un confrère, son aîné, devenu pour la foule l’égal de Jack l’Eventreur.
Encore un témoignage sur la misère des lycées techniques, se demandera le lecteur ? En fait, les choses sont bien plus complexes, grâce au talent, indiscutable, de Lafourcade, qui signe là un vrai livre d’écrivain, hilarant et désespéré, incorrect et plein d’humanité. 










Having found the original statement in the German text, which I own, I am not sure the Alt-Right has interpreted Spengler’s drift correctly. The author is not expressing contempt for the primitive church but rather viewing it as a prototype for revolutionary movements. Spengler correctly suggests that Marx, Engels, and the Bolsheviks, despite their pretension to being “scientific socialists,” viewed the early church as a model for their own movement; as did the French anarchist Georges Sorel, who thought his labor-class revolutionary movement needed a “redemptive myth” as powerful as the one that animated early Christians.
A different model, however, became prevalent in Puritanism, especially after this religious movement traveled to the New World. Perry Miller’s classic study Errand into the Wilderness (1956), leaves no doubt about the overshadowing presence of the ancient Hebrews on Puritan society and religion. The New Israelites—which is how the Puritans envisioned themselves—were bound by a covenant, just as the ancient Jews had been under the covenant of Abraham and Moses. Just as the Hebrews had gone forth from bondage to settle the Holy Land, so too were their Puritan successors summoned into the North American wilderness to carry out a divine mandate. They were to establish their own community of believers where they would build the godly city on the hill as the New Jerusalem. Puritan sermons and political ordinances are so permeated with Hebrew and Old Testament images and phrases that their borrowings from an earlier chosen people are unmistakable. Harvard, Yale, and other originally Puritan institutions encouraged the study of biblical Hebrew, and the most common Christian names given to both sexes were taken from Hebrew Scripture.
These Protestant traditions have served the American people well. Religious freedom but not indifferentism, the enforcement of strong communal moral standards, and the expectation that the young will apply themselves diligently to their work and study as a religious act, have all benefited our country. So have the Calvinist Protestant suspicion of power in the hands of earthly princes and an awareness of the need to rein in such political actors. One need not denigrate other political or religious traditions that suit other societies to recognize the strengths of what has worked well in this country. It is also the case that the Puritan-Calvinist value of teaching the young to study biblical and classical languages was a spur to education and the founding of great universities in early America.
Calvinist scholar James Kurth (photo) once defined “the American Creed” that dominated American views of international relations in the 20th century as a degraded form of American Protestant theology:






Quatrième extrait
Sixième extrait
Les masques tomberaient-ils, malgré la propagande, en dépit de la mobilisation ? Certains d’entre nous, trop peu bien entendu, ont pris goût à une vie décélérée et exempte des tourbillons et de l’agitation du quotidien, réalisent que cette liberté retrouvée les renvoie, par contraste, à leur ordinaire condition de servilité, se disent qu’au fond ils se satisferaient bien d’un prolongement de cette parenthèse enchantée. Ils ont même retrouvé une certaine forme de mesure et de sérénité dont le fol emballement de la vie moderne les avait privés (et ils en furent les complices volontaires, nous le savons bien !) : mais que valent ces gouttes d’eau dans l’océan de dispositifs digitaux, que peuvent ces minuscules prises de conscience contre le Grand Déferlement ? 
Renovatio Europæ est un recueil collectif issu d’« un projet de recherche basé à l’Instytut Zachodni à Poznan (Pologne) (p. 9) ». David Engels ne cache pas vouloir susciter « un conservatisme révolutionnaire (p. 225) » et, de ce fait, concevoir « une idéologie politique sceptique face à l’Union européenne, mais favorable à l’idée européenne (p. 22) ». Il entend « introduire, pour désigner un amour patriotique pour une Europe unifiée, basée non pas seulement sur des valeurs universalistes, mais aussi conservatrices, le terme d’« hespérialisme » – terme dérivé de l’appellation grecque de l’extrême Occident du monde connu d’antan, et formant le complément, voire l’opposition au terme d’« européisme », qui désigne habituellement un soutien non critique de l’Union européenne actuelle et de son idéologie dominante : la “ bienpensance ” politiquement correcte (p. 16) ». Ainsi considère-t-il que « l’hespérialisme est uniquement conservateur dans la mesure où il apprécie les valeurs du passé; mais en fait, on pourrait le décrire, tout aussi légitimement, comme orienté résolument vers le futur, même comme révolutionnaire (p. 226) ».
L’Italien Alvino-Mario Fantini souhaite l’apparition d’« une Droite révolutionnaire (p. 165) » dont la tâche principale serait « de reconstruire la civilisation occidentale sous toutes ses formes et de la restaurer afin de lui donner une place proéminente dans notre culture (p. 174) ». S’agit-il de la civilisation occidentale ou bien de la civilisation européenne ? Cet auteur ne définit pas l’Occident qu’il confond avec une hypothétique « Chrétienté du XXIe siècle » qu’il appelle de ses vœux. Rêve-t-il en néo-guelfe à de nouvelles compagnies missionnaires auprès des sociétés européennes si bien qu’après la « délaïcisation » réalisée se manifesterait « la profession visible des anciennes fois par de jeunes hommes arborant kippa et papillotes et par de vieux curés en soutane et béret (p. 175) » ? Et pourquoi pas le contraire ? Quelle place accorder aux communautés historiques musulmanes (Pomaks de Grèce, Bosniaques, musulmans d’Albanie, Gorans, Tatars de Pologne, Turcs de Bulgarie, etc.) ? Serait-il hostile au port du hijab et du tchador ? Ce croyant ne se sent-il pas solidaire des musulmanes exclues des collèges et des lycées laïques français parce qu’elles anticipaient une mesure prophylactique en vigueur en 2020 ? Sa « Chrétienté du XXIe siècle » ressemble beaucoup à l’ordre moral petit-bourgeois du XIXe siècle.
Autre énormité proférée par la « Figariste » de l’ouvrage : « Quand on a colonisé et utilisé des peuples qui désormais parlent français, on est responsable d’eux (p. 89). » Chantal Delsol ne comprend pas que le temps des colonies de grand-papy chanté par Michel Sardou n’existe plus. La Décolonisation est passée par là… C’est avec de tels arguments infantilisants que l’Afrique préfère se victimiser plutôt que de prendre son destin en main. Chantal Delsol n’évoque d’ailleurs pas le pillage organisé des richesses du Continent noir (de l’Asie, de l’Amérique latine et de l’Océanie) par les sociétés occidentales. Son point de vue se rapproche de celui d’Yves de Kerdrel, macroniste militant et ancien responsable du flotteur droitard du cosmopolitisme, Valeurs actuelles. « Au nom du droit de la mer, de l’entraide des marins et surtout du respect de la vie, je demande aux autorités françaises d’accorder à L’Aquarius le droit d’accoster à Marseille. Notre identité et notre civilisation sont menacées par la PMA et non par 58 réfugiés (3). » On pense strictement le contraire d’autant que dans le cadre d’un État vrai, néo–spartiate, la généralisation de la PMA favorisera la natalité autochtone.
Andras Lanczi ose la question cruciale : « Une constitution peut-elle créer une identité ? (p. 65) » Oui, si on observe les États-Unis; non si l’on regarde les précédents de l’Union Soviétique et de la Yougoslavie titiste. David Engels trace néanmoins les grands traits d’une nouvelle constitution européenne. Il dénonce au préalable le souverainisme stato-national qui amalgame « de manière presqu’insupportable les institutions de l’Union européenne avec l’idée européenne elle-même (p. 21) ». Oui, les nationaux-souverainistes « europhobes » « ignorent […] dangereusement le problème que la civilisation occidentale du XXIe siècle ne pourra survivre que si toutes les nations européennes forment un seul front commun contre les dangers qui pourraient venir de l’Est, de l’Ouest ou du Sud (pp. 21 – 22) ». Ces anti-européens condamnent les institutions alors que la responsabilité de leur nuisance incombe à des personnes telles Jacques Santer, José Manuel Barroso ou Josef Borrel (4).
Bien que désigné par le suffrage universel direct, ce président de l’Union rénovée ne bénéficie que de pouvoirs limités. « D’un côté, le Président se consacrerait à la politique extérieure, représentant l’Union européenne au Conseil de sécurité permanent des Nations Unies (sur base d’une fédéralisation du siège français), et, en cas de conflit, dirigerait les opérations des forces européennes. D’un autre côté, le Président tenterait de régler les conflits qui se présenteraient soit entre nations européennes, soit entre celles-ci et l’Union elle-même, en présidant une cour d’arbitrage permanente dont le composition et le mode de scrutin devraient, une fois de plus, favoriser le compromis et l’unanimité (p. 197). » La nouvelle Union européenne, on le voit, dispose d’« une force militaire européenne, composée, en temps de paix, par un cœur d’unités proprement européennes, appuyées par des contingents fixes des différents États-nations et dotées de capacités nucléaires (p. 198) ». Dans ces conditions, « l’Europe pourrait, à nouveau, devenir un véritable “ Sacrum Imperium ” et renouer avec sa dimension transcendantale, perdue depuis longtemps au profit du rationalisme, du matérialisme, du relativisme et du cynisme (p. 204) ». David Engels expose rapidement les bases géopolitiquement instables pour cause d’atlantisme d’une Confédération européenne.









En última instancia, toda persona, según Gramsci, es libre de estar a favor del capitalismo o del comunismo, e incluso si una persona no pertenece a la clase proletaria, puede ser miembro del partido comunista de su país y participar en batallas políticas siguiendo a los socialistas o comunistas. La afiliación de clase proletaria no es necesaria para la inclusión en un partido político. De la misma manera, a nivel del intelectualismo, no es necesario para nada estar en desventaja, no es necesario ser expulsado del sistema de la sociedad para ponerse del lado de la contrahegemonía que, y este es el principal fundamento gramscista, cualquier intelectual puede elegir y adherirse al pacto histórico de la revolución.
El concepto de contrahegemonía es introducido por el especialista en relaciones internacionales Robert W. Cox como una generalización del gramscismo y su aplicación a la situación global. Dice que hoy todo el sistema de relaciones internacionales se construye al servicio de la hegemonía. Todo lo que se nos dice sobre las relaciones entre Estados, sobre el significado de la historia, sobre guerras e invasiones es pura propaganda de la hegemonía de la élite oligárquica mundial. En gran medida, este constructo se apoya en el eje de la intelectualidad que opta por la hegemonía.
John M. Hobson, estudioso de las relaciones internacionales, autor de La concepción eurocéntrica de la política mundial, en la que critica el racismo occidental y afirma la brillante idea de construir las relaciones internacionales en un nuevo modelo de contrahegemonía basado en los trabajos de Cox, Gill y los neogramscistas es una bendición. La crítica es maravillosa, pero qué hacer, qué contrahegemonía debería crearse, no la encontraremos en sus obras, salvo en dos o tres páginas. Por tanto, es necesario contemplar la contrahegemonía.
Superar el género y las identidades colectivas humanas son solo detalles que ocuparán nuestra conciencia durante algún tiempo, asustarán a los conservadores y a los elementos liberales incompletamente modernizados y, a la inversa, inspirarán a los liberales para continuar sus próximas hazañas. Al mismo tiempo, cabe señalar que la agenda se ha estrechado, y con el desarrollo del arte genético y quirúrgico, la microtecnología, la biotecnología y el desentrañamiento del genoma, estamos, de hecho, al borde de que este programa se convierta en un tema técnico. Se propone no esperar más, sino pensar de tal manera que el liberalismo, en principio, en su programa nihilista, ha cumplido su cometido.





