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lundi, 22 juin 2009

Dé-dollarisation: le démantèlement de l'empire militaire et financier américain

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Dé-dollarisation : le démantèlement de l’empire militaire et financier américain
par Michael Hudson - http://contreinfo.info/

Les membres de l’Organisation de Coopération de Shanghai, réunis à Iekaterinbourg avec l’Inde et le Brésil, n’ont guère d’autre choix que de rechercher une alternative au dollar, juge l’économiste Michael Hudson. Continuer à financer à crédit la consommation américaine, les dépenses du Pentagone et de ses 750 bases à l’étranger, en accumulant des dollars et des bons du Trésor équivaudrait pour eux à accumuler en parallèle les risques tant financiers que militaires. Ils sont désormais contraints, estime-t-il, d’inventer une voie de sortie du dollar. L’heure est venue pour un monde multipolaire a affirmé le Président russe Medvedev, et le président de la Banque centrale chinoise lui fait écho en déclarant que l’objectif est désormais de créer une une monnaie de réserve internationale qui ne serve pas les intérêts exclusifs des USA. Hudson indique que les autorités américaines se sont vues infliger une fin de non recevoir à leur demande d’assister au sommet de l’OCS. Ce non, dit-il, c’est un mot que les américains vont entendre beaucoup plus souvent à l’avenir.

Par Michael Hudson, 13 juin 2009

La ville Russe de Iekaterinbourg, la plus importante à l’est de l’Oural, pourrait désormais être connue comme le lieu où sont morts non seulement les tsars mais aussi l’hégémonie américaine. Non pas uniquement l’endroit où le pilote américain Gary Powers a été abattu en 1960, mais aussi celui où l’ordre financier international dominé par les USA a été mis à bas.

La remise en cause de l’Amérique sera le thème principal des réunions élargies de Iekaterinbourg, en Russie (ex-Sverdlovsk) des 15 et 16 Juin rassemblant le président chinois Hu Jintao, le président russe Dmitri Medvedev et les représentant les six pays de l’ Organisation de Coopération de Shanghai (OCS). Cette alliance regroupe la Russie, la Chine, le Kazakhstan, le Tadjikistan, le Kirghizstan et l’Ouzbékistan. L’Iran, l’Inde, le Pakistan et la Mongolie y ont le statut d’observateurs. Mardi le Brésil s’y joindra pour les discussions commerciales entre les pays du BRIC (Brésil, Russie, Inde et Chine). 

Les participants ont assuré à des diplomates américains que leur objectif n’était pas le démantèlement de l’ empire financier et militaire des États-Unis. Ils veulent simplement discuter de l’aide mutuelle, indépendamment du rôle des États-Unis, de l’OTAN ou du dollar américain en tant que support du commerce international. Les diplomates américains se demandent ce que cela signifie vraiment, si ce n’est une étape visant à rendre l’hégémonie américaine obsolète. C’est ce que signifie « monde multipolaire », après tout. Pour commencer, en 2005, l’OCS avait demandé à Washington d’établir un calendrier de retrait de ses bases militaires en Asie centrale. Deux ans plus tard, les pays de l’OCS se sont ralliés officiellement à la position des ex-républiques de la CEI appartenant à l’Organisation du Traité de Sécurité Collective (OTSC), qui avait été fondée en 2002 en tant que contrepoids à l’OTAN. 

Pourtant, la réunion n’a suscité que le désintérêt collectif de la presse aux États-Unis et même en Europe, bien que l’ ordre du jour y soit de remplacer le standard mondial du dollar par un nouveau système financier, ainsi qu’un nouveau système de coopération pour la défense. Un porte-parole du Conseil des Relations Extérieures (Un institut d’études géopolitiques américain, ndt) a déclaré qu’il pouvait difficilement imaginer que la Russie et la Chine puissent surmonter leurs rivalités géopolitiques [1], suggérant que l’Amérique peut pratiquer le « diviser pour régner » que la Grande-Bretagne a si habilement utilisé durant de nombreux siècles pour fragmenter les opposition dans son propre empire. Mais George W. Bush ( qui déclarait « Je suis un rassembleur, non un diviseur ») s’est placé dans la continuité de l’administration Clinton pour pousser la Russie, la Chine et leurs voisins à trouver un terrain d’entente, lorsqu’il s’agit de trouver une alternative au dollar, et du même coup à la possibilité pour les Etats-Unis de prolonger indéfiniment leur déficit de la balance des paiements.

Cette séquence, qui pourrait représenter les dernières manifestations de l’hégémonie américaine, a débuté dès le mois d’avril lors de la conférence du G-20, et est devenue encore plus explicite à Saint-Pétersbourg au Forum économique international du 5 Juin, lorsque M. Medvedev a demandé à la Chine, la Russie et l’Inde de « construire un ordre mondial de plus en plus multipolaire. » Ce qui signifie en clair : nous avons atteint nos limites en ce qui concerne les subventions à l’encerclement militaire de l’Eurasie par les Etats-Unis, tout en les laissant s’approprier nos exportations, nos entreprises, les actifs et les biens immobiliers en échange d’une monnaie de papier de valeur douteuse. 

« Le système unipolaire maintenu artificiellement » dont a parlé M. Medvedev [2], est fondé sur « un seul grand centre de consommation, financé par un déficit croissant, et donc de plus en plus de dettes, une monnaie de réserve jadis forte et une domination dans le système de l’évaluation des actifs et des risques. » A la racine de la crise financière mondiale, a t-il conclu, il y a le fait que les États-Unis produisent trop peu et dépensent trop. Leurs dépenses militaires sont particulièrement choquantes, comme par exemple le renforcement de l’aide militaire américaine à la Géorgie annoncé la semaine dernière, le bouclier de l’OTAN en Europe de l’Est, et la mainmise des États-Unis dans les régions riches en pétrole comme le Moyen-Orient et l’Asie centrale. 

Le point de friction avec tous ces pays est celui de la capacité qu’ont les États-Unis de faire fonctionner indéfiniment la planche à billets. Le surplus de dépenses d’importations des consommateurs américains par rapport aux exportations, les rachats par les USA de quantités de sociétés étrangères et de biens immobiliers, les dépenses que le Pentagone effectue à l’étranger : tous ces dollars aboutissent dans les banques centrales étrangères. Elles sont ensuite confrontées à un choix difficile : soit recycler ces dollars aux États-Unis en achetant des bons du trésor américains, soit laisser le « marché libre » déterminer le cours de leur monnaie par rapport au dollar - et par là même à déterminer le prix de leurs exportations sur les marchés mondiaux, créant ainsi du chômage et provoquant la faillite d’entreprises.

Lorsque la Chine et d’autres pays recyclent leurs flux de dollar US en achetant des bons du Trésor pour « investir » aux États-Unis, cette accumulation n’est pas vraiment volontaire. Cela ne reflète pas une foi en l’économie américaine qui rémunèrerait l’épargne des banques centrales, ni une quelconque préférence d’investissement, mais tout simplement un manque d’alternatives. Les « marchés libres » à la mode des USA piègent les pays dans un système qui les obligent à accepter indéfiniment des dollars. Mais désormais, ils veulent en sortir.

Cela implique la création d’une nouvelle alternative. Plutôt que de faire simplement « des changements cosmétiques comme certains pays et peut-être les organisations financières internationales pourraient le vouloir », comme l’a dit M. Medvedev à Saint-Pétersbourg : « ce dont nous avons besoin, ce sont des institutions financières d’un type tout à fait nouveau, où ne domineraient ni les problèmes politiques et les motivations [sous-jacentes], ni aucun pays en particulier. »

Lorsque les dépenses militaires à l’étranger ont provoqué le déficit la balance des paiements US et ont conduit les Etats-Unis à abandonner l’étalon or en 1971, les banques centrales se sont trouvées démunies de cet actif traditionnellement utilisé pour solder les déséquilibres des paiements. La solution par défaut a consisté à investir les flux issus des paiements ultérieurs en obligations du Trésor américain, comme si celles-ci étaient « aussi fiables que l’or ». Les banques centrales détiennent maintenant pour 4 000 milliards de dollars de ces obligations dans leurs réserves internationales. Ces prêts ont également financé la plupart des déficits budgétaires du gouvernement américain depuis maintenant plus de trois décennies ! Etant donné que la moitié environ des dépenses discrétionnaires du gouvernement américain est consacrée aux opérations militaires - dont plus de 750 bases militaires à l’étranger et dans des opérations de plus en plus coûteuses dans les pays producteurs de pétrole et ceux qui permettent son transit - le système financier international est organisé de manière à financer le Pentagone, ainsi que les rachats par les États-Unis d’actifs étrangers censés rapporter beaucoup plus que les bons du Trésor que les banques centrales étrangères détiennent.

La principale question à laquelle sont confrontées les banques centrales mondiales est donc de savoir comment éviter d’ajouter encore plus de dollars US à leurs réserves et, par conséquent, de financer encore plus les dépenses qui creusent le déficit des États-Unis - y compris les dépenses militaires à leurs propres frontières ? 

Pour commencer, les six pays de SCO et les pays du BRIC ont l’intention de commercer dans leurs propres monnaies afin de bénéficier mutuellement du crédit que les États-Unis avait monopolisé jusqu’à présent à son profit. À cette fin, la Chine a passé des accords bilatéraux avec l’Argentine et le Brésil pour effectuer leur échanges commerciaux en renminbi, la monnaie chinoise, plutôt qu’en dollar, en livre sterling ou en euros [3] . Il y a deux semaines, la Chine a également conclu un accord avec la Malaisie pour que les deux pays commercent en renminbi [4]. L’ancien Premier ministre, le Dr. Tun Mahathir Mohamad, m’a expliqué en janvier qu’en tant que pays musulman la Malaisie voulait éviter de faire tout ce qui pourrait faciliter l’action militaire américaine contre les pays islamiques, y compris la Palestine. La nation a trop d’actifs en dollars, ont expliqué ses collègues. Le gouverneur de la Banque centrale chinoise, Zhou Xiaochuan, a écrit officiellement sur son site Internet que l’objectif est maintenant de créer une monnaie de réserve « indépendante d’une nation particulière » [5]. C’est l’objet des discussions à Iekaterinbourg.

En plus d’éviter de financer la prise de contrôle par les États-Unis de leur propre industrie et l’encerclement militaire américain de la planète, la Chine, la Russie et d’autres pays voudraient certainement se développer comme l’Amérique l’a fait. En fait, ils considèrent les États-Unis comme une nation hors-la-loi, financièrement et militairement. Comment caractériser autrement une nation qui promulgue un ensemble de lois pour les autres - sur la guerre, le remboursement de la dette et le traitement des détenus - mais n’en tient pas compte elle-même ? Les États-Unis sont maintenant le plus grand débiteur mais ont évité la punition des « ajustements structurels » imposés à d’autres pays endettés. Les taux d’intérêt US et les réductions d’impôt, alors les déficits commerciaux et budgétaires explosent, sont considérés comme le comble de l’hypocrisie, lorsqu’ils sont comparés à l’austérité que les programmes de Washington imposent aux autres pays par le biais du FMI et des officines de Washington.

Les États-Unis demandent aux pays endettés de vendre leurs services publics et leurs ressources naturelles, d’augmenter leurs taux d’intérêts et d’augmenter les impôts au détriment de la paix sociale pour dégager un maximum d’argent et payer les créanciers.

Et aux USA, le Congrès a empêché la société Chinoise CNOOK d’acheter Unocal pour des raisons de sécurité nationale, tout comme il a empêché Dubaï d’acquérir des exploitations portuaires américaines et empêché des fonds souverains d’acheter des infrastructures clés. Les étrangers sont invités à imiter les japonais qui avaient investi dans des « éléphants blancs » comme le Rockfeller Center, sur lequel les investisseurs ont rapidement perdu un milliard de dollars puis ont fini par se retirer. 

À cet égard, les États-Unis n’ont pas vraiment laissé à la Chine et aux autres pays en situation d’excédent de la balance des paiements d’autres choix que de devoir trouver un moyen d’éviter de nouvelles accumulations de dollars. À ce jour, la Chine tente de diversifier ses avoirs en dollars ailleurs qu’en bons du Trésor US, qui ne se sont pas révélés très fructueux. Hank Paulson, qui venait de la banque Goldman Sachs, avait conseillé à la banque centrale chinoise d’investir dans les titres à haut rendement émis par Fannie Mae et Freddie Mac, en expliquant que ceux-ci étaient de facto des obligations publiques. Ces titres se sont effondrés en 2008, mais au moins, le gouvernement américain a repris ces deux organismes de prêt hypothécaire, augmentant de facto de 5 200 milliards de dollars la dette nationale. En fait, ce renflouement a été rendu nécessaire en grande partie à cause des investissements effectués par les Etats étrangers.

Infliger des pertes aux investisseurs gouvernementaux étrangers aurait quelque peu atteint la réputation des bons du Trésor, non seulement en détruisant la crédibilité des États-Unis, mais aussi parce que les émissions d’obligations par le gouvernement étaient insuffisantes pour absorber les dollars qui coulaient à flot dans l’économie mondiale avec la montée en flèche du solde déficitaire de la balance des paiements des États-Unis. 

En recherchant de nouveaux actifs pour protéger la valeur de leurs avoirs en dollars alors que la bulle de crédit de la Réserve fédérale se traduisait par une baisse des taux d’intérêt, les fonds souverains chinois ont cherché à se diversifier à la fin de 2007. La Chine a pris des participations dans les fonds d’ investissement Blackstone et Morgan Stanley à Wall Street, Barclays en Grande-Bretagne, dans la Standard Bank d’Afrique du Sud (qui fut affiliée à la Chase Manhattan du temps de l’apartheid dans les années 1960) et dans le conglomérat financier belge Fortis proche de l’effondrement. Mais le secteur financier américain s’écroulait sous le poids de sa dette phénoménale, la valeur des actions des banques et des firmes d’investissement a plongé dans le monde entier.

Les étrangers voient le FMI, la Banque mondiale et l’Organisation Mondiale du Commerce comme les représentants de Washington dans un système financier soutenu par les bases militaires américaines et les porte-avions qui entourent la planète. Mais cette domination militaire est un vestige d’un empire américain qui n’est plus en mesure de régner par sa force économique. La puissance militaire américaine est basée davantage sur des armes atomiques et les frappes aériennes à longue distance que sur les opérations au sol, qu’il est devenu politiquement trop impopulaire de monter sur une grande échelle. 

Sur le front économique, on ne voit pas comment les États-Unis pourraient trouver les 4 000 milliards de dollars qu’ils doivent aux gouvernements étrangers, à leurs banques centrales et aux fonds souverains mis en place pour écluser la surabondance de dollars. L’Amérique est devenue un mauvais payeur et de fait, une mauvais payeur agressif sur le plan militaire, car elle cherche à conserver le pouvoir sans pareil jadis gagné sur le plan économique. La question qui se pose est de savoir comment peser sur son comportement. Yu Yongding, un ancien conseiller de la banque centrale de Chine désormais membre de l’Académie des Sciences chinoise, a proposé de faire remarquer au secrétaire américain au Trésor Tim Geithner que les États-Unis devraient « épargner » d’abord et avant tout en pratiquant une réduction de leur budget militaire. « Les recettes fiscales des Etats-Unis ne sont pas susceptibles d’augmenter à court terme en raison de la faible croissance économique, de la rigidité des dépenses et du coût de mener deux guerres. » [6

À l’heure actuelle, c’est l’épargne étrangère, et non pas celle des américains, qui finance le déficit budgétaire américain en achetant la plupart des bons du Trésor. Cela se traduit par un impôt levé sans la contrepartie d’une représentation des électeurs étrangers sur la manière dont le gouvernement des États-Unis utilise leur épargne forcée. Pour les « diplomates » du système financier , il est donc nécessaire d’élargir le champ d’application de leurs politiques, au-delà du seul marché de secteur privé. Les taux de change sont déterminés par de nombreux facteurs, en plus de celui des « consommateurs brandissant des cartes de crédit » , pour reprendre l’euphémisme habituel qu’utilisent les médias américains à propos du déficit de la balance des paiements. Depuis le 13ème siècle, la guerre a été un facteur dominant dans la balance des paiements des grandes nations - et de leurs dettes. Les obligations d’Etat financent essentiellement des dettes de guerre, dans la mesure ou en temps de paix les budgets ont tendance à être équilibrés. Ceci relie directement le budget de la guerre à la balance des paiements et aux taux de change. 

Les pays étrangers se voient encombrés de reconnaissances de dette qui ne seront pas honorées - dans des conditions telles que s’ils agissent afin de mettre fin au festin américain, le dollar va plonger et leurs avoirs en dollars vont chuter par rapport à leur monnaie nationale et aux autres devises. Si la monnaie chinoise s’apprécie de 10% par rapport au dollar, sa banque centrale enregistrera l’équivalent de 200 milliards de dollars de pertes sur ses 2 000 milliards de dollars.

Cela explique pourquoi, quand les agences de notation envisagent que les titres du Trésor des États-Unis puissent perdre leur notation AAA, elles ne veulent pas signifier que le gouvernement ne serait pas en mesure d’imprimer des dollars papier pour honorer ses dettes. Elles indiquent plutôt que la valeur du dollar va se déprécier internationalement. Et c’est exactement ce qui se passe en ce moment. Lorsque M. Geithner prit un visage grave pour déclarer devant un auditoire à l’Université de Pékin au début du mois de Juin qu’il croyait en un « dollar fort » et que les investissements de la Chine aux États-Unis étaient sûrs, il a été accueilli par des rires sarcastiques [7]. 

L’anticipation d’une hausse des taux de change de la Chine incite les spéculateurs à chercher à emprunter des dollars pour acheter du renminbi et bénéficier de la hausse. Pour la Chine, le problème est que ce flux spéculatif deviendrait une prophétie auto-réalisatrice en faisant grimper sa monnaie. De ce fait, le problème des réserves est intrinsèquement lié à celui des contrôles de capitaux. Pourquoi la Chine devrait-elle voir ses compagnies rentables vendues pour des dollars fraîchement créés, que la banque centrale doit utiliser pour acheter à faible taux des bons du trésor américain ou perdre encore plus d’argent à Wall Street ? Pour éviter ce dilemme, il est nécessaire d’inverser la philosophie de l’ouverture des marchés de capitaux que le monde a adopté depuis Bretton Woods en 1944.

A l’occasion de la visite de M. Geithner en Chine, « Zhou Xiaochuan, directeur de la Banque populaire de Chine, la banque centrale du pays, a déclaré que c’était la première fois depuis que les pourparlers semestriels ont commencé en 2006, que la Chine avait besoin d’apprendre des erreurs de l’Amérique tout comme de ses succès » lorsqu’il fut question de la déréglementation des marchés de capitaux et du démantèlement des contrôles. 

Une ère est donc arrivée à son terme. Face à des dépenses démesurées des Etats-Unis, la dé-dollarisation menace de forcer les pays à revenir aux doubles taux de change, qui furent fréquents entre les deux guerres mondiales : un taux de change pour le commerce des produits, un autre pour les mouvements de capitaux et les investissements, tout au moins pour les économies de la zone dollar [8].

  Même sans contrôle des capitaux, les pays réunis à Iekaterinbourg prennent des mesures pour éviter de recevoir involontairement de plus en plus de dollars. Voyant que l’hégémonie globale des États-Unis ne peut pas se poursuivre en l’absence du pouvoir d’achat qu’ils leur procurent eux-mêmes, ces gouvernements cherchent à hâter ce que Chalmers Johnson a nommé dans son ouvrage « les douleurs de l’empire » : la faillite de l’ordre mondial financier et militaire américain. Si la Chine, la Russie et leurs alliés non-alignés suivent leur propre chemin, les États-Unis ne pourront plus vivre grâce à l’épargne des autres (sous la forme de leurs propres dollars recyclés), ni disposer de cet argent pour financer des dépenses militaires illimitées. 

Des responsables américains voulaient assister à la réunion de Iekaterinbourg en tant qu’observateurs. On leur a répondu : non. C’est un mot que les américains vont entendre beaucoup plus souvent à l’avenir. 

Michael Hudson est un économiste spécialisé dans le domaine de la balance des paiements. Il a été le conseiller économique en chef du candidat Démocrate à la présidentielle Dennis Kucinich. Il est l’auteur de nombreux ouvrages, dont : « Super Imperialism : The Economic Strategy of American Empire »


Publication originale Michael Hudson, traduction Madeleine Chevassus pour Contre Info


[1] Andrew Scheineson, “The Shanghai Cooperation Organization,” Council on Foreign Relations, Updated : March 24, 2009 : “While some experts say the organization has emerged as a powerful anti-U.S. bulwark in Central Asia, others believe frictions between its two largest members, Russia and China, effectively preclude a strong, unified SCO.”

[2] Kremlin.ru, June 5, 2009, in Johnson’s Russia List, June 8, 2009, #8.

[3] Jamil Anderlini and Javier Blas, “China reveals big rise in gold reserves,” Financial Times, April 24, 2009. See also “Chinese political advisors propose making yuan an int’l currency.” Beijing, March 7, 2009 (Xinhua). “The key to financial reform is to make the yuan an international currency, said [Peter Kwong Ching] Woo [chairman of the Hong Kong-based Wharf (Holdings) Limited] in a speech to the Second Session of the 11th National Committee of the Chinese People’s Political Consultative Conference (CPPCC), the country’s top political advisory body. That means using the Chinese currency to settle international trade payments ...”

[4] Shai Oster, “Malaysia, China Consider Ending Trade in Dollars,” Wall Street Journal, June 4, 2009.

[5] Jonathan Wheatley, “Brazil and China in plan to axe dollar,” Financial Times, May 19, 2009.

[6] “Another Dollar Crisis inevitable unless U.S. starts Saving - China central bank adviser. Global Crisis ‘Inevitable’ Unless U.S. Starts Saving, Yu Says,” Bloomberg News, June 1, 2009.

[7] Kathrin Hille, “Lesson in friendship draws blushes,” Financial Times, June 2, 2009.

[8] Steven R. Weisman, “U.S. Tells China Subprime Woes Are No Reason to Keep Markets Closed,” The New York Times, June 18, 2008.

dimanche, 21 juin 2009

Fear Is Eroding American Rights

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Fear Is Eroding American Rights

By Paul Craig Roberts - http://vdare.com/

The power of irrational fear in the US is extraordinary. It ranks up there with the Israel Lobby, the military/security complex, and the financial gangsters. Indeed, fear might be the most powerful force in America.

Americans are at ease with their country’s aggression against Afghanistan, Iraq, and Pakistan, which has resulted in a million dead Muslim civilians and several million refugees, because the US government has filled Americans with fear of terrorists. "We have to kill them over there before they come over here."

Fearful of American citizens, the US government is building concentration camps apparently all over the country. According to news reports, a $385 million US government contract was given by the Bush/Cheney Regime to Cheney’s company, Halliburton, to build "detention centers" in the US. The corporate media never explained for whom the detention centers are intended.

Most Americans dismiss such reports. "It can’t happen here." However, in north-eastern Florida not far from Tallahassee, I have seen what might be one of these camps. There is a building inside a huge open area fenced with razor wire. There is no one there and no signs. The facility appears new and unused and does not look like an abandoned prisoner work camp.

What is it for?

Who spent all that money for what?

There are Americans who are so terrified of their lives being taken by terrorists that they are hoping the US government will use nuclear weapons to destroy "the Muslim enemy." The justifications concocted for the use of nuclear bombs against Japanese civilian populations have had their effect. There are millions of Americans who wish "their" government would kill everyone that "their" government has demonized.

When I tell these people that they will die of old age without ever seeing a terrorist, they think I am insane. Don’t I know that terrorists are everywhere in America? That’s why we have airport security and homeland security. That’s why the government is justified in breaking the law to spy on citizens without warrants. That’s why the government is justified to torture people in violation of US law and the Geneva Conventions. If we don’t torture them, American cities will go up in mushroom clouds. Dick Cheney tells us this every week.

Terrorists are everywhere. "They hate us for our freedom and democracy." When I tell America’s alarmed citizens that the US has as many stolen elections as any country and that our civil liberties have been eroded by "the war on terror" they lump me into the terrorist category. They automatically conflate factual truth with anti-Americanism.

The same mentality prevails with regard to domestic crime. Most Americans, including, unfortunately, juries, assume that if the police make a case against a person and a prosecutor prosecutes it, the defendant is guilty. Most Americans are incapable of believing that police or a prosecutor would frame an innocent person for career or bureaucratic reasons or out of pure meanness.

Yet, it happens all the time. Indeed, it is routine.

Frame-ups are so routine that 96% of the criminally accused will not risk a "jury of their peers," preferring to negotiate a plea bargain agreement with the prosecutor. The jury of their peers are a brainwashed lot, fearful of crime, which they have never experienced but hear about all the time. Criminals are everywhere, doing their evil deeds.

The US has a much higher percentage of its population in prison than "authoritarian" countries, such as China, a one-party state. An intelligent population might wonder how a "freedom and democracy" country could have incarceration rates far higher than a dictatorship, but Americans fail this test. The more people that are put in prison, the safer Americans feel.

Lawrence Stratton and I describe frame-up techniques in The Tyranny of Good Intentions. Police and prosecutors even frame the guilty, as it is easier than convicting them on the evidence.

One case that has been before us for years, but is resolutely neglected by the corporate media, whose function is to scare the people, is that of Troy Davis.

Troy Davis was convicted of killing a police officer. The only evidence connecting him to the crime is the testimony of "witnesses," the vast majority of whom have withdrawn their testimony. The witnesses say they testified falsely against Troy Davis because of police intimidation and coercion.

One would think that this would lead to a new hearing and trial. But not in America. The Republican judicial Nazis have created the concept of "finality." Even if the evidence shows that a wrongfully convicted person is innocent, finality requires that we execute him. If the convicted person is executed, we can assume he was guilty, because America has a pure justice system and never punishes the innocent. Everyone in prison and everyone executed is guilty. Otherwise, they wouldn’t be in prison or executed.

It is all very simple if you are an American. America is pure, but other countries, except for our allies, are barbaric.

The same goes for our wars. Everyone we kill, whether they are passengers on Serbian commuter trains or attending weddings, funerals, or children playing soccer in Iraq, is a terrorist, or we would not have killed them. So was the little girl who was raped by our terrorist-fighting troops and then murdered, brutally, along with her family.

America only kills terrorists. If we kill you, you are a terrorist.

Americans are the salt of the earth. They never do any wrong. Only those other people do. Not the Israelis, of course.

And police, prosecutors, and juries never make mistakes. Everyone accused is guilty.

Fear has made every American a suspect, eroded our rights, and compromised our humanity.

Paul Craig Roberts [email him] was Assistant Secretary of the Treasury during President Reagan’s first term.  He was Associate Editor of the Wall Street Journal.  He has held numerous academic appointments, including the William E. Simon Chair, Center for Strategic and International Studies, Georgetown University, and Senior Research Fellow, Hoover Institution, Stanford University. He was awarded the Legion of Honor by French President Francois Mitterrand. He is the author of Supply-Side Revolution : An Insider's Account of Policymaking in Washington;  Alienation and the Soviet Economy and Meltdown: Inside the Soviet Economy, and is the co-author with Lawrence M. Stratton of The Tyranny of Good Intentions : How Prosecutors and Bureaucrats Are Trampling the Constitution in the Name of Justice. Click here for Peter Brimelow’s Forbes Magazine interview with Roberts about the recent epidemic of prosecutorial misconduct.

samedi, 20 juin 2009

America's Left-Conservative Heritage

America’s Left-Conservative Heritage

Recent dialogue between Kevin R.C. Gutzman, Christian Kopff and Tom Piatak concerning the tension between classical liberal-libertarians and traditionalist conservatives reminded me of an observation from my Portuguese “national-anarchist” colleague Flavio Goncalves concerning  the clarion call issued by Chuck Norris a while back: “Seems like the US Right is as revolutionary as the South American Left? Your country confuses me.”

It does indeed seem that most of the serious dissidents in America are on the Right nowadays, and I think this can be understood in terms of America’s unique political heritage. American rightists typically regard themselves as upholders and defenders of American traditions, while American liberals tend to admire the socialism and cultural leftism of the European elites. However, the republican political philosophy derived from the thought of Locke, Montesquieu and Jefferson that found its expression in such definitive American documents as the Declaration of Independence and the Constitution, and of which modern neo-classical liberalism and libertarianism are outgrowths, is historically located to the left of European socialism.

A variety of thinkers from all over the spectrum have recognized this. For instance, Russell Kirk somewhat famously remarked that conservatives and socialists had more in common with one another that either had with libertarians. Murray Rothbard observed that “conservatism was the polar opposite of liberty; and socialism, while to the “left” of conservatism, was essentially a confused, middle-of-the-road movement. It was, and still is, middle-of-the-road because it tries to achieve liberal ends by the use of conservative means.” Seymour Martin Lipset affirmed Rothbard’s thesis:

Given that the national conservative tradition in many other countries was statist, the socialists arose within this value system and were much more legitimate than they could be in America…Until the depression of the 1930s and the introduction of welfare objectives by President Roosevelt and the New Deal, the AFL was against minimum wage legislation and old age pensions. The position taken by (Samuel) Gompers and others was, what the state gives, the state can take away; the workers can depend only on themselves and their own institutions…Hence, the socialists in America were operating against the fact that there was no legitimate tradition of state intervention, of welfarism. In Europe, there was a legitimate conservative tradition of statism and welfarism. I would suggest that the appropriate American radicalism, therefore, is much more anarchist than socialist.

Back in 1912, when the German Social Democrats won 112 seats in the Reichstag and one-third of the vote, Kaiser Wilhelm II wrote a letter to a friend in which he said that he really welcomed the rise of the socialists because their statist positions were much to be preferred to the liberal bourgeoisie, whose antistatism he did not like. The Kaiser went on to say that, if the socialists would only drop antipatriotism and antimilitarism, he could be one of them. The socialists wanted a strong Prussian-German state which was welfare oriented, and the Kaiser also wanted a strong state. It was the pacifism and the internationalism of the socialists that bothered him, not their socialism. In the American context, the “conservative” in recent decades has come to connote an extreme form of liberalism; that is, antistatism. In its purest forms, I think of Robert Nozick philosophically, of Milton Friedman economically, and of Ronald Reagan and Barry Goldwater politically.

Thomas Sowell has provided some interesting insights into what separates the Left and Right in contemporary American discourse. Both Left and Right are derivatives of eighteenth century radicalism, with the Left being a descendent of the French Revolution and the Right being a descendent of the American Revolution. What separates the legacies of these two revolutions is not their radicalism or departure from throne-and-altar traditionalism, but their differing views on human nature, the nature of human society, and the nature of politics. Both revolutions did much to undermine traditional systems of privileged hierarchy. After all, how “traditional” were the American revolutionaries who abolished the monarchy, disestablished the Church, constitutionally prohibited the issuance of titles of nobility, constitutionally required a republican form of government for the individual states and added a bill of rights as a postscript to the nation’s charter document? One can point to the Protestant influences on the American founding that coincide with the Enlightenment influences, but how “traditional” is Protestantism itself? Is not Protestantism the product of a rebellion against established religious authorities that serves as a kind of prelude to a latter rebellion to established political authorities?

I would maintain that what separates the modern Right and Left is not traditionalism versus radicalism, but meritocracy versus egalitarianism. For the modern Left, equality is considered to be a value in its own right, irrespective of merit, whether individual or collective in nature.  The radical provisions of the U.S. Constitution, for instance, aimed at eliminating systems of artificial privilege. No longer would heads of state, clerics, or aristocrats receive their position simply by virtue of inheritance, patronage or nepotism, but by virtue of individual ability and achievement. No longer would an institution such as the Church sustain itself through political privilege, but through the soundness of its own internal dynamics. To be sure, these ideals have been applied inconsistently throughout American history, and all societies are a synthesis of varying cultural and ideological currents. For instance, it is clear that nepotism remains to some degree. How else could the likes of George W. Bush ever become head of state?

Yet, for the Left, equality overrides merit. With regards to race, gender or social relations, for example, it is not sufficient to simply remove barriers designed to keep ethnic minorities, women or homosexuals down regardless of their individual abilities or potential contributions to society. Instead, equality must be granted regardless of any previous individual or collective achievement to the point of lowering academic or professional standards for the sake of achieving such equality. This kind of egalitarian absolutism is also apparent with regards to issues like the use of women in military combat or the adoption of children by same-sex couples. The Left often frames these issues not in terms of whether the use of female soldiers is best in terms of military standards (perhaps it is) or what is best for the children involved or whether the parenting skills of same-sex couples is on par with those of heterosexual couples (perhaps they are), but in terms of whether women should simply have the “right” to a military career or whether same-sex couples should simply have “equal rights” to adopt children, apparently with such concerns as military efficiency, child welfare and parental competence being dismissed as irrelevant.

To frame the debate in terms of tradition versus radicalism would seem to be setting up a false dichotomy. Edmund Burke, the fierce critic of the French Revolution considered by many to be the godfather of modern conservatism, was actually on the left-wing of the British politics of his time. For instance, he favored the independence of Ireland and the American colonies and even defended India against imperial interests. A deep dig into Burke’s writings reveals him to have been something of a philosophical anarchist. His opposition to the French Revolution was not simply because it was a revolution or because it was radical, but because of the specific content of the ideology of the revolutionaries who aimed to level and reconstruct French society along prescriptive lines. The American Revolution was carried out by those with an appreciation for the limits of politics and the limitations imposed by human nature, while the French Revolution was the prototype for the modern totalitarian revolutions carried out by the Bolsheviks, Nazis (whom Alain De Benoist has characterized as “Brown Jacobins”), Maoists , Kim Il-Sung and the Khmer Rouge.

One can certainly reject the hyper-egalitarianism championed by the Left and still favor far-reaching political or social change. It would be hard to mistake Ernst Junger for an egalitarian, yet he was contemptuous of the Wilhelmine German military’s practice of selecting officers on the basis of their class position, family status or political patronage rather than on their combat experience. He preferred a military hierarchy ordered on the basis of merit rather than ascribed status. Junger’s Weimar-era writings are filled with a loathing for the social democratic regime, yet he called for an elitist worker-soldier “conservative revolution” rather than a return to the monarchy.

Nor does political radicalism imply the abandonment of historic traditions. I, for one, advocate many things that are quite radical by conventional standards. Yet I am extremely uncomfortable with left-wing pet projects such as the elimination of “offensive” symbols like the Confederate flag; the alteration of the calendar along PC lines (C.E. and B.C.E instead of A.D. and B.C); the attacks on traditional holidays like Christmas or Columbus Day; a rigidly secular interpretation of the First Amendment (and I’m an atheist!); and the attempted reconstruction of language along egalitarian lines (making words like “crippled” or “retarded” into swear words or the mandatory gender neutralization of pronouns). All of these things seem like a rookie league version of Rosseauan/Jacobin/Pol Potian “year zero” cultural destructionism. Nor do I wish to do away with baseball, Fourth of July fireworks displays, Civil War re-enactors or the works of Edgar Allan Poe. I am also somewhat appalled that one can receive a high school diploma or even a university degree without ever having taken a single course on the history of Western philosophy. It is not uncommon to find undergraduates who have never heard of Aristotle. If they have, they are most likely to simply dismiss him as a sexist and defender of slavery. I’ve met graduate level sociology students who can tell you all about “the social construction of gender” but have no idea who Pareto was.

The principal evil of the Cultural Marxism of present day liberalism is its fanatical egalitarianism. Unlike historic Marxists, who simply sought equality of wealth, cultural Marxists seek equality of everything, including not only class, race, or gender, but sexuality, age, looks, weight, ability, intelligence, handicap, competence, health, behavior or even species. I’ve heard leftists engage in serious discussion about the evils of “accentism.” Such equality does not exist in nature. It can only be imposed artificially, which in turn requires tyranny of the most extreme sort. The end result can only be universal enslavement in the name of universal equality. For this reason, the egalitarian Left is a profoundly reactionary outlook, as it seeks a de facto return to the societies organized on the basis of static caste systems and ascribed status that existed prior to the meritocratic revolution initiated by the Anglo-American Enlightenment.

Perhaps just as dreadful is the anti-intellectualism of Political Correctness. In many liberal and no-so-liberal circles, the mere pointing out of facts like, for instance, the extraordinarily high numbers of homicides perpetrated by African-Americans is considered a moral and ideological offense. If one of the most eminent scientists of our time, Dr. James Watson, is not immune from the sanctions imposed by the arbiters of political correctness, then who would be? Are such things not a grotesque betrayal of the intellectual, scientific and political revolution manifested in Jeffersonian ideals? Is not Political Correctness simply an effort to bring back heresy trials and inquisitors under the guise of a secularized, egalitarian, fake humanitarian ideology? The American radical tradition represents a vital “left-conservative” heritage that elevates meritocracy over both an emphasis on ascribed status from the traditional Right and egalitarianism from the Left. It is a tradition worth defending.

mercredi, 17 juin 2009

Islam: Obama lance un "missile" symbolique vers l'Europe

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Islam : Obama lance un « missile » symbolique vers l'Europe

Après la Bosnie, le Kosovo, la Turquie, les Etats-Unis via le président américain lancent un nouveau message symbolique en vue de déstabiliser l'Europe. Barack Obama a défendu aujourd'hui au Caire le port du voile pour les musulmanes en Occident, prenant le contre-pied de la France.

C'est par trois fois que M. Obama a pris la défense du voile islamique dans son discours prononcé à l'Université du Caire, critiquant le fait qu'un pays occidental « dicte les vêtements » qu'une musulmane « doit porter ».

Au nom de la laïcité, la France a banni en 2004 dans les écoles les signes religieux ostentatoires avec une loi interprétée comme ciblant surtout le voile islamique. La polémique fait également rage au Canada et en Allemagne alors qu'en Belgique, 90% des écoles le bannissent et il est jugé « discriminatoire » par un décret du Conseil d'Etat.

« Il est important pour les pays occidentaux d'éviter de gêner les citoyens musulmans de pratiquer leur religion comme ils le souhaitent, et par exemple en dictant les vêtements qu'une femme doit porter », a-t-il lancé.

Sans jamais citer la France ou d'autres pays, il a enchaîné en affirmant qu'« on ne doit pas dissimuler l'hostilité envers une religion devant le faux semblant du libéralisme ».

« Je sais qu'il y a un débat sur ce sujet », a encore dit M. Obama avant de trancher sur ce sujet toujours controversé en Occident devant un public trié sur le volet, parmi lequel de nombreuses femmes voilées.

« Je rejette », a-t-il ainsi affirmé, « les vues de certains en Occident » pour qui le fait « qu'une femme choisisse de couvrir ses cheveux a quelque chose d'inégalitaire ».

Il a encore souligné que « le gouvernement américain s'est porté en justice pour protéger le droit des femmes et des filles à porter le voile » et « punir ceux qui voudraient le leur dénier ».

Pour la première fois, une Américaine musulmane portant le voile, Dalia Mogahed, d'origine égyptienne, a fait son entrée à la Maison Blanche comme conseillère de Barack Obama.

Mais la question du port du voile, notamment à l'école, met aussi à l'épreuve des gouvernements et opinions publiques dans des pays musulmans.

M.G.
<http://www.dailymotion.com/fr/channel/news>
08/06/2009

Corespondance Polémia
13/06/2009
 

M.G.

mardi, 16 juin 2009

Le discours du Caire comme paradigme de la dhimmitude rampante

Le discours du Caire comme paradigme de la dhimmitude rampante

Ex: http://www.insolent.fr/
090611Le discours prononcé par le président des États-Unis à l'université du Caire le 4 juin est apparu à beaucoup de braves gens comme pavé des meilleures intentions. On l'a présenté comme annonciateur de temps heureux où l'épée deviendra charrue et où le lion jouera gentiment avec la gazelle.

Cependant, il contient un tel nombre de demi-vérités et de franches légendes qu'il faut un certain temps pour les analyser froidement et en mesurer les conséquences. Dans un tel propos, l'interprétation de l'auditeur, plus encore que celle du lecteur, compte finalement plus que l'habile formulation du rédacteur.

Le mensonge brut, le plus gros, consiste à poser comme un dogme, que la civilisation se trouverait redevable en quoi que ce soit de la religion islamique. Postulat, naturellement non-démontré, car indémontrable, puisque faux, un tel sophisme alimente la propre nostalgie interne des musulmans pour leur âge d'or. Modestement d'ailleurs ceux-ci le situent entre 622 et 661, c'est-à-dire à l'époque où Mahomet, de 622 jusqu'à sa mort, puis les quatre califes dits "rachidoun" gouvernent à Médine la communauté des croyants (1).

À partir des Omeyyades, autrement dit : de la dynastie de Moawiya, gouverneur de la Syrie conquise, et qui, cinquième calife, régnera à Damas, nous considérons souvent en occident que l'empire islamique médiéval était devenu une puissance culturellement estimable. Elle le restera plus ou moins jusqu'à la destruction de la capitale abbasside de Bagdad par les Mongols en 1258.

Il se trouve que l'islamisme proprement dit professe une tout autre vision. Ceux que, par commodité, nous acceptons d'appeler "salafistes", du nom qu'ils se donnent eux-mêmes par référence à la doctrine des "pieux ancêtres", pensent de ces sociétés ultérieures : damascène, puis mésopotamienne ou persane, a fortiori andalouse ou ottomane, qu'elles témoigneraient, à les en croire, déjà d'un abâtardissement.

Revenons par conséquent aux affirmations développées dans le discours de M. Obama.

Pour qu'elles contiennent la moindre part de vérité, il faudrait pouvoir déterminer en quoi, au VIIe siècle, la prédication religieuse de la péninsule arabique a pu déterminer elle-même un seul "progrès de l'esprit humain". On reste bien en peine, du point de vue occidental.

La thèse dans laquelle s'inscrit implicitement le discours présidentiel américain se retrouve dans la triple conclusion citant successivement le Talmud, la Bible et ce qu'il appelle le "saint" Coran. En elle-même, cette présentation devrait heurter le chrétien. Elle met le livre musulman au-dessus du nôtre, dont le message spécifique s'appelle l'Évangile. Accessoirement, celui-ci ne donne aucune ligne directrice étrangère à celles de l'Ancien Testament, insistant plus spécifiquement, pour faire court sur une dimension humaniste, elle-même présente dans le Lévitique, et résolument pacifique : "quiconque vit par l'épée périra par l'épée".

Admettons cependant, un instant, que la croyance commune monothéiste, reformulée à leur manière au VIIe siècle par les Bédouins du Hedjaz, les rapprocherait d'un tronc commun judéo-chrétien. Supposons même que cela permette effectivement de parler, bien hardiment d'une "fraternité d'Abraham". On peut le concevoir en lisant honnêtement certains passages du livre saint des mahométans.

Mais, alors, si l'on se situe sur un tel terrain, la même lecture contredit totalement l'affirmation centrale du discours du Caire de M. Barack Husseïn Obama, répétant cette déclaration à peine croyable :
À Ankara, j’ai dit clairement que l’Amérique n’est pas et ne sera jamais en guerre contre l’Islam.
Comment un homme aussi documenté, épaulé par des "agences gouvernementales" – terme américain qui désigne des bureaucraties aussi puissantes que le Département d'État, la CIA, la NSA, etc. – peut-il ignorer ce que tout un chacun peut trouver tout seul dans le Coran.

Les citations djihadistes habituellement abondent. On gagnera à les retrouver soi-même.

Ici je me permets simplement d'en emprunter le tableau au plus favorable des islamologues français, l'universitaire protestant Bruno Étienne. Voici comment il résume la violence recommandée par la "récitation" coranique (2) :
- "Le combat vous est prescrit" (sourate 2 vv216-217 répété à sourate 3, vv157-158, v169, sourate 8 v17)
- "combattez-les jusqu'à ce qu'il n'y ait plus de luttes doctrinales et qu'il n'y ait plus d'autres religion que celle de Dieu" (sourate 8 v39) ;
- "combattez ceux qui ne croient pas en Dieu, au jour dernier, qui ne considèrent pas comme illicite ce que Dieu et son Prophète ont déclaré illicite, ainsi que ceux qui parmi les gens des Écritures, ne pratiquent pas la religion de la vérité, jusqu'à ce qu'ils payent, humiliés et de leurs propres mains le tribut." (sourate 9 v29)
-et enfin "ô croyants ! combattez les infidèles qui vous entourent. (sourate 9, vv41,111 et 123; sourate 97 v35 ; sourate 59 v8)

Que faut-il de plus à ce paradigme de la dhimmitude rampante ? Si l'on envisage, au-delà de ce que des musulmans ont pu accomplir de positif, leur religion elle-même (3) on doit voir la vérité en face : cet islam-là a déclaré la guerre à l'occident.

M. Obama constate que "la violence extrémiste menace gravement notre sécurité" et il parle de "la situation en Afghanistan". À qui veut-il faire croire qu'il ne s'agit pas d'une guerre ?

On s'étonnera par conséquent que le président français ait cru bon de déclarer : "Je suis totalement d'accord avec le discours du président Obama, y compris sur la question du voile. (…) en France, toute jeune fille qui veut porter le voile peut le faire. C'est sa liberté." (4)

Dans notre pays, on a pris l'habitude d'appeler des "réformes" toute modification des lois et des règlements. Au nombre de celles-ci, envisage-t-on en haut lieu d'abroger, par conséquent, la Loi du 15 mars 2004 "encadrant, en application du principe de laïcité, le port de signes ou de tenues manifestant une appartenance religieuse dans les écoles, collèges et lycées publics" ou de ne pas l'appliquer ? On aimerait des précisions de la part du premier magistrat de la république.

 

Apostilles

  1. À partir du second calife, Omar ibn el-Khattab (634-644) conquérant, par l'épée,de la Syrie, de la Perse, de la Mésopotamie et de l'Égypte, les successeurs de l'envoyé (khalifa al-rasoul) y prennent le titre de commandeurs des croyants (amir al-mumenin dont l'occident médiéval a fait "miramollin") titre novateur, excluant comme "infidèles" les judéo-chrétiens.
  2. Dans son livre "Islamisme radical" chapitre "du Jihad au tyrannicide" publié en 1987 (Hachette) pages 179-180.
  3. Rappelons qu'officiellement, au moins sein de l'islam sunnite, qui prévaut à l'université égyptienne al-Azhar, "l'interprétation" (idjtihâd) est fermée depuis plus de 700 ans. Cette situation remonte aux califes abbassides. Elle irrite certes quelques "réformistes", au sens occidental du mot.
  4. Le 6 juin à Caen cf AFP, publié le 06/06/2009 à 14 h 05.
JG Malliarakis

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dimanche, 14 juin 2009

Stratégie Brzezinski, Axe Paris/Berlin/Moscou et guerres indirectes

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Archives de SYNERGIES EUROPEENNES - 2003

 

 

 

Stratégie Brzezinski, Axe Paris/Berlin/Moscou et guerres indirectes

 

Exposé de Robert Steuckers au colloque de “Terre & Peuple/Wallonie”, Château Coloma, 16 novembre 2003

 

Mon exposé d’aujourd’hui tient en quatre parties :

1.

Je vais brosser une fois de plus, comme lors de deux ou trois réunions précédentes, la situation dans laquelle nous nous trouvons, au risque de me répéter et d’ennuyer ceux qui étaient présents lors de nos mini-colloques sur la “stratégie Brzezinski” et sur la question afghane ou lors des réunions de l’école des cadres de “Synergies Européennes”, où nous avions analysé en détail l’ouvrage de Brzezinski. Effectivement, les opérations dans les Balkans en 1999, l’invasion de l’Afghanistan à partir d’octobre 2001 et l’invasion de l’Irak au cours de ce dernier printemps, constituent trois étapes de la stratégie Brzezinski ou de projets assimilables et parallèles, que l’on peut découvrir en lisant les innombrables publications anglo-saxonnes sur l’importance stratégique et l’histoire de l’Asie centrale, de l’Afghanistan, du Pakistan, de l’Iran et des Indes. Il convient de bien se mettre en tête que les événements qui se déroulent aujourd’hui dans le monde sont l’application, par les Etats-Unis, de la stratégie de Brzezinski, que nous n’avons cessé d’analyser et de dénoncer. On ne peut comprendre la géopolitique américaine d’aujourd’hui, et, partant, les thèses de Brzezinski, que si l’on comprend les grands enjeux stratégiques de l’histoire passée de l’Europe et de l’Eurasie. A la lumière de nombreux faits historiques, nous allons voir comment les victoires ou les défaites des siècles précédents revêtent toujours une actualité stratégique, ravivée par les stratèges américains, épaulés par des instituts d’études historiques bien rodées.

2.

Je vais ensuite esquisser les principaux éléments de la réponse européenne et russe à cette stratégie, qui est trop timide, quasi absente de la presse quotidienne écrite et télévisée (souvent indirectement à la solde des Etats-Unis). Jusqu’ici seul l’ouvrage d’Henri de Grossouvre sur l’Axe Paris/Berlin/Moscou constitue une réponse cohérente, recèle un projet concret, notamment au niveau d’une éventuelle politique satellitaire et énergétique, commune à l’UE et à la Fédération de Russie, éventuellement épaulée par l’Inde et la Chine.

3.

Je vais évoquer ensuite, de manière plus exhaustive, les embûches extérieures, déjà en place, qui se dresseront devant toute politique d’unification stratégique du Vieux Monde. Ces embûches sont de trois ordres :

A.

La présence déjà bien tangible des “deux anacondas”, déployés par les Etats-Unis; ces deux anacondas sont l’US Navy (avec sa stratégique du porte-avions) et le réseau d’espionnage satellitaire, dont “ECHELON”, qui a été dénoncé avec une certaine vigueur verbale dans quelques rapports de l’UE, mais avec peu d’échos dans la presse quotidienne. La faiblesse de l’Europe actuelle est donc une faiblesse sur mer et une faiblesse dans l’espace circumterrestre. Dans les deux cas, une coopération avec la Russie s’avère nécessaire sinon impérative, vu que la flotte ex-soviétique demeure potentiellement un atout stratégique et tactique efficace, et que la politique spatiale russe recèle, elle aussi, des atouts considérables. Henri de Grossouvre en a bien conscience.

 

Guerre culturelle ou guerre cognitive

 

B.

La deuxième catégorie d’embûches relève de ce que l’on appelle désormais la “guerre cognitive”. Le réseau de revues et de cercles qu’a constitué la ND, dans sa phase d’ascendance et de maturité, avant son déclin, son navrant enlisement dans l’impolitique et le solipsisme infécond de son principal animateur, avait parfaitement reconnu l’importance de ce type de conflictualité politique. Sur le plan de la politique intérieure, la ND, après avoir lu Gramsci, parlait de “métapolitique”, soit d’une stratégie culturelle visant à faire changer les mentalités et, par voie de conséquence, par provoquer un changement politique. Sur le plan de la politique extérieure, ce réseau avait également évoqué la “guerre culturelle” que menaient les Etats-Unis contre l’Europe et le reste du monde. Le théoricien de cette “guerre culturelle” était le linguiste et angliciste français contemporain, Henri Gobard. Celui-ci dénonçait avec justesse et précision les manœuvres de la guerre culturelle américaine contre l’Europe. Gobard démontrait ainsi que cette guerre était bien planifiée, qu’elle avait des buts stratégiques précis, qu’elle s’inscrivait dans un projet politique global, visant à assurer et à pérenniser l’hégémonie américaine sur tous les continents. Nous allons voir comment la “guerre culturelle” ou la “guerre cognitive” est théorisée aujourd’hui par une nouvelle génération de stratèges et militaires français, notamment Christian Harbulot et François-Bernard Huyghe.

 

C.

Troisième catégorie d’embûches : les guerres indirectes susceptibles d’être immédiatement déployées contre l’Europe. Ce sont bel et bien des guerres latentes, dont tous les dispositifs sont en place, prêts à être activés. Il y a d’abord le “terrorisme fabriqué” (ou susceptibles d’être monté en un temps record), dont le Prix Nobel de littérature, l’Anglo-Indien V. S. Naipaul, a décrit clairement les mécanismes psychologiques. Dans les grandes agglomérations de la planète, donc dans les banlieues de nos villes, des masses de jeunes désœuvrés, sans espoir d’avenir, basculent dans un religiosisme hystérique, très manipulable, rapidement virulent. Ces populations, détachées de leurs racines, se recréent un univers fanatique, à cause précisément de leur mal de vivre. C’est un terreau idéal pour recruter des suicidaires en vue d’actions terroristes. C’est comme cela que l’on a “fabriqué” les talibans sous d’autres cieux. L’opération pourrait parfaitement se répéter chez nous, la masse démographique des diverses immigrations, ou “ethnies de passage”, devenant de plus en plus manœuvrable à de telles fins. Toute révolte dans les banlieues, avec raids sur les quartiers plus fortunés, mobiliserait des troupes et des moyens considérables et paralyserait ipso facto nos pays. La France, sur ce chapitre, court les dangers les plus grands.

 

Les trois ennemis qu’il faut impitoyablement éliminer

 

Ensuite, comme nous l’a démontré récemment Xavier Raufer, les mafias à l’œuvre au sein de nos sociétés, notamment les mafias italiennes et turques, sont liées depuis longtemps à certains services américains : elles aussi peuvent être activées à tout moment contre les Etats européens. Enfin, l’idéologie et la pratique néo-libérales, constate Raufer, permettent à ces mafias de prospérer. La formule de la stratégie qui permettra de faire imploser l’Europe de l’intérieur est donc la suivante : actions conjuguées des masses déboussolées des banlieues, des groupes religieux extrémistes qui tentent de les structurer, des mafias et des réseaux néo-libéraux (politiques et bancaires). L’intégrisme religieux/terroriste de pure fabrication, le banditisme organisé et les cénacles manipulateurs et pervers d’économistes néo-libéraux sont les trois ennemis actuels de l’Europe : ceux qu’il convient d’éliminer impitoyablement pour assurer l’avenir de nos enfants. Traduit dans un programme politique clair, cela signifie : restaurer la justice en appliquant le principe de la tolérance zéro, épurer la magistrature de tous ses éléments laxistes (avec la création d’une nouvelle “drossarderie” de salut public qui procèderait à l’arrestation immédiate de juges ou de policiers laxistes sous le chef de complicité avec les mafias, à leur traduction devant des juridictions d’exception sans appel, à leur châtiment immédiat); revenir aux principes d’une économie régulée (basée sur les théories de la régulation), non plus néo-libérale mais ordo-libérale, avec possibilité de livrer sans délais les propagandistes néo-libéraux aux tribunaux de la drossarderie, afin de juger les banquiers et financiers qui ont imposé le néo-libéralisme à nos sociétés et se sont fait ainsi les complices des mafias et du banditisme, tout en fragilisant nos tissus industriels. L’application de ces deux politiques permettra rapidement d’éliminer, manu militari, les “petites mains” de ces mafias, recrutées parmi les petits délinquants et petites frappes de quartier. Cette politique de la “main de fer” se lit en filigrane dans le travail de Xavier Raufer, qu’on ne peut certainement pas qualifier d’extrémiste. Il met tout simplement en exergue certaines nécessités de notre temps.

 

La collusion entre néo-libéralisme, terrorisme et criminalité

 

Et qu’on ne vienne par nous dire qu’il s’agit de théories “d’extrême-droite” ou de discours “néo-fascistes” : la “Fondation du 2 mars”, peu suspecte de sympathie à l’égard de ces théories et discours, a produit des ouvrages très clairs sur la collusion néo-libéralisme/criminalité/terrorisme, sous les plumes de Jean de Maillard (Le marché fait sa loi. De l’usage du crime par la mondialisation) et de Michel Koutouzis (L’argent du djihad), ancien directeur des recherches de l’”Observatoire géopolitique des drogues” (OGD) et aujourd’hui consultant auprès des Nations Unies et de la Commission de Bruxelles (le lobby “anti-fasciste” pro-drogues aura, nous semble-t-il, quelque difficultés à traiter de “fascistes” ces institutions; tout antifascisme qui campe sur des positions en faveur de la drogue, et donc des mafias qui la commercialisent, se met d’ores et déjà hors la future loi européenne; précisons enfin que tous ceux qui, émanant des partis de l’ancienne majorité “arc-en-ciel”, qui ne partagent pas nos positions, ne partagent pas non plus celles des Nations Unies). De son côté, l’économiste René Passet, qui fait partie du conseil scientifique d’Attac, vient de publier Mondialisation financière et terrorisme, qui va dans le même sens. La lecture croisée de tous ces ouvrages s’impose au politiste, qui a pour mission d’avertir, de conscientiser et de mobiliser ses concitoyens, comme à l’homme politique, qui n’a qu’un devoir, celui d’agir rapidement et avec efficacité; ces livres sont les émanations d’une “gauche” qui se réveille enfin, péniblement et timidement, de ses sommeils dogmatiques et de ses trips oniriques, faits de laxisme, d’eudémonisme, de délires et d’irréalisme. Le législateur catéchonique peut y puiser l’arsenal futur de son action restauratrice, capable de satisfaire un peuple dont les sensibilités de droite ou de gauche, en tous cas populistes, sont plus ou moins partagées en proportions égales. Car le clivage fondamental qui se dessine, au-delà de la binarité gauche/droite usuelle, est le suivant : d’un côté, le laxisme, avec pour issue la déliquescence et le retour à la loi de la jungle; de l’autre, la rigueur, avec pour résultat le retour à la croissance dans l’ordre social (savant dosage d’ordo-libéralisme, de keynésisme et d’hétérodoxie économique).

 

4.

Dans la quatrième partie, je vais me pencher sur deux aspects de la philosophie de l’histoire chez Toynbee : les notions de “Challenge-and-Response” [défi-et-réponse] et de “Withdrawal-and-Return” [retrait-et-retour]. La première de ces notions recèle un volontarisme évident : il n’y a, dans la logique du défi et de la réponse, aucune forme de déterminisme géographique ou racial, ce qui ne signifie pas  que Toynbee rejette les facteurs raciaux ou géographiques. La seconde de ces notions implique la nécessité de se retirer du “présent mondain”, sans pour autant quitter le monde (“withdrawal”), sans vouloir se soustraire aux lois du temps et de l’espace, pour s’armer de savoir, opérer des rétrospectives fructueuses, pour retourner ensuite au réel (“return”), plus fort, mieux armé, plus  clairvoyant. Dans la logique du “withdrawal-and-return”, façonner le futur n’est possible de manière optimale que si l’on s’est préalablement plongé dans le passé. La démarche de Toynbee est en ce sens “archéofuturiste”. Toute la politique anglo-saxonne fonctionne sur base de travaux d’historiens méticuleux, comme on peut s’en apercevoir en compulsant les catalogues des éditeurs, qui fourmillent d’ouvrages sur l’histoire antique, médiévale et moderne des “points chauds” de la planète. Les Européens et les Russes gagneront la “guerre culturelle” ou la “guerre cognitive”, s’ils travaillent de la même façon, s’ils adoptent la logique du “withdrawal-and-return”, telle que Toynbee l’a décrite.

 

◊ 1ière PARTIE : La stratégie Brzezinski

 

Théorisée dès le milieu des années 90, la stratégie de Zbigniew Brzezinski s’est réalisée définitivement sur le terrain à partir de 1999, quand les armées américaines prennent réellement pied dans les Balkans européens, et y installent des bases militaires de grandes dimensions, les plus importantes depuis la guerre du Vietnam. La deuxième étape, précédée d’une installation américaine en Ouzbékistan, a été constituée par le bombardement et l’invasion de l’Afghanistan en octobre 2001. Cette deuxième étape conduit au contrôle des “Balkans eurasiens”, selon la terminologie de Brzezinski. La troisième étape, non explicitement préconisée par Brzezinski, vise le contrôle de la Mésopotamie (de l’Irak). Elle constitue une volonté de mettre un terme à la fameuse “Question d’Orient”, qui agite l’échiquier international depuis la dernière décennie du  19ième siècle. Les Etats-Unis reprennent ici à leur compte les projets stratégiques de l’Empire britannique défunt, c’est-à-dire a) empêcher toute puissance européenne (Russie comprise) de se donner une fenêtre sur l’Océan Indien et surtout sur le Golfe Persique; b) empêcher l’organisation économique et infrastructurelle de la région par une puissance européenne ou par une alliance de plusieurs puissances européennes (Russie comprise). Pour les observateurs de l’échiquier international entre 1890 et 1914, comme pour les stratèges américains d’aujourd’hui, la “Question d’Orient” concerne tout autant les Balkans européens que le Proche-Orient et la Mésopotamie.

 

La France évincée de Mossoul

 

Immédiatement avant 1914, l’objectif premier était d’empêcher toute organisation et toute modernisation du territoire arabe sous domination ottomane par le tandem germano-turc, dont le principal axe de communication moderne aurait été le chemin de fer “Berlin/Bagdad”. Est-ce faire du “germanisme naïf” de rappeler aujourd’hui cette aventure du chemin de fer Berlin/Bagdad, comme nous le reprochent parfois certains  “souverainistes” français? Non. Car, à l’époque, les autorités allemandes avaient fait appel à d’autres puissances européennes, pour exploiter de concert les atouts de cette région du monde, y compris la France. Dans le cadre de l’exploitation planifiée de la Mésopotamie, l’Allemagne de Guillaume II, malgré ses lacunes et ses insuffisances, a eu une politique positive de la main tendue. On ne peut le nier. L’obsession de la “revanche” avait empêché Paris de se joindre à cette dynamique potentielle. Ce refus a contribué à faire éclater les carnages de 1914. Mais dès la fin des hostilités en 1918, les Britanniques, qui avaient découvert des gisements pétroliers dans la région de Mossoul, proposent une modification du tracé prévu pour les zones de protectorat, en s’attribuant bien entendu cette région pétrolifère, auparavant attribuée à la France. Les Britanniques font ainsi coup double : ils arrachent à la Turquie toute possibilité d’indépendance énergétique et soustraient aux Français des gisements qui leur auraient permis de consolider leur présence au Proche-Orient. Après les saignées de 1914-18, il restait à la France deux protectorats proche-orientaux, le Liban et la Syrie, peu viables économiquement et, qui plus est, coûtaient cher à la métropole.

 

En 1922, le Traité de Washington, imposé par les puissances maritimes anglo-saxonnes, oblige la France, théoriquement victorieuse mais en réalité totalement vaincue, vidée de son sang, privée de ses réserves démographiques rurales, à réduire, de manière drastique, le tonnage de sa flotte de guerre; l’objectif poursuivi par Londres et Washington, c’est que la France ne puisse plus vraiment tenir les deux bassins de la Méditerranée ni s’aventurer dans l’Atlantique. Les “alliés” britanniques et américains coupent les “nageoires” de la puissance qui, par étourderie et par dogmatisme figé, a sacrifié ses enfants par centaines de milliers, en combattant l’ennemi principal de Londres, qui s’approchait trop du Golfe Persique. En passant devant chacun de ces émouvants monuments aux morts de France, il faut penser au sang versé par ces braves paysans pour que se consolide l’emprise britannique sur la région du Golfe, un sang qui n’a même pas été payé avec le pétrole de Mossoul... Le patriotisme tapageur d’après 1918 a servi de dérivatif pour masquer, derrière d’irréels flonflons, la double défaite réelle de la France : au Proche-Orient et sur les mers. La clique des bellicistes laïcards braillait ce patriotisme tapageur, pour ne pas avouer son échec, pour ne pas avouer avoir été roulée dans la farine par les financiers londoniens et new-yorkais. Le peuple de France, s’il n’avait pas été aveuglé, lui aurait, à coup sûr, demandé des comptes...

 

En 1941, les troupes françaises du Général Dentz, stationnées au Liban et en Syrie, sont délogées par les Britanniques. Depuis, la France garde certes une présence culturelle dans cette région, qui est de plus en plus ténue, mais elle n’a plus aucune présence militaire. Par honte, les médias dominants en France depuis 1918, se gardent bien de rappeler les clauses du Traité de Washington de 1922, la rétrocession de Mossoul et les événements de 1941 en Syrie et au Liban. Le bon peuple pourrait commencer à se poser certaines questions...

 

Balkaniser le Proche-Orient, couper les côtes méditerranéennes de leur hinterland

 

Aujourd’hui, Israël fait office, dans la région, de pion américain, d’avant-poste dans la stratégie des thalassocraties. Avec la présence britannique à Chypre et l’alliance avec la Turquie, cette situation permet un contrôle facile de la région, focalisant le ressentiment arabe contre le seul Israël, qui, finalement n’est jamais qu’un instrument, que l’on déifie pour flatter un certain orgueil juif et faire passer à l’arrière-plan le statut subalterne de l’Etat hébreu, pur et simple pion. Or, l’histoire passée n’avait pas retenu que cette seule hypothèse : avant 1914, le sionisme de Théodore Herzl passait pour une idée au service de l’Allemagne wilhelminienne, cherchant à s’ancrer dans l’espace est-méditerranéen. La stratégie anglaise et américaine était différente à l’époque : elle pariait sur l’indépendantisme arabe et finançait au Liban et en Syrie l’éclosion d’une “conscience arabe” anti-turque. Le pouvoir ottoman répondit par une répression féroce, envoyant à la potence une vingtaine d’intellectuels arabisants, s’aliénant par ricochet les populations arabes du Proche-Orient. L’objectif était de fragmenter l’espace sous domination ottomane, de balkaniser à terme le Proche-Orient, de couper les côtes méditerranéennes de l’hinterland syrien et irakien, de s’emparer des nappes pétrolifères, de plonger l’aire proche-orientale dans un chaos permanent, de façon à ce qu’elle ne retrouve jamais plus de cohérence géopolitique. Le résultat pratique des missions “culturelles” arabes, financées par des organisations missionnaires américaines, a débouché, plus tard, sur la révolte des tribus nomades et cavalières, téléguidée par Lawrence pendant la première guerre mondiale; Lawrence croyait sans doute sincèrement œuvrer à l’indépendance des peuplades bédouines dont il admirait le mode de vie. N’oublions toutefois pas que les sociétés archéologiques anglaises, actives en Mésopotamie, comptaient parmi leurs membres des prospecteurs et des géologues chargés de découvrir discrètement le pétrole du sous-sol. Lawrence en avait fait partie.

 

Après avoir manipulé adroitement les Arabes de Syrie et du Liban, puis ceux de la péninsule arabique et du désert jordanien, les Britanniques font toutes les concessions voulues aux sionistes, qui changent de camp, très habilement, dès l’effondrement du front russe et dès l’intervention américaine en 1917. La révolution bolchevique éloignait les masses armées russes des détroits turcs, d’une part, de l’Arménie, du Kurdistan et de la région de Mossoul, d’autre part. En affaiblissant la Russie par l’organisation et le financement d’une révolution délirante, les services britanniques et américains conjurent la menace d’une invasion russe du Proche-Orient, au départ du Caucase, qui pourrait se solder par une occupation des côtes méditerranéennes et menacer l’Egypte (en 1916 les armées russes avaient largement pénétré dans le territoire kurde à l’Est de la Turquie actuelle). Dans ce cas, le sionisme serait peut-être devenu une idée au service des visées russes...

 

Une Turquie sans aucune indépendance énergétique

 

En Turquie, l’idéologie de Mustafa Kemal, le futur “Ataturk”, sied également aux Britanniques: en développant son “mythe hittite”, en voulant “européaniser” la Turquie, elle renonce ipso facto à toute revendication sur des territoires arabes qui recèlent du pétrole. La Turquie kémaliste est une Turquie sans aucune indépendance énergétique, condamnée à n’être plus rien d’autre qu’un jouet aux mains de l’impérialisme anglo-saxon. Une observation attentive des événements de l’époque confirme cette vue : en effet, quand les positions d’Ataturk et d’Inönü n’étaient pas encore clairement définies, les Britanniques se méfient de tout éventuel réveil turc et arment la Grèce qui envahit l’Ionie et pousse ses régiments en direction du centre de l’Anatolie. Dès que les Turcs déclarent qu’ils suivront plutôt la “géopolitique hittite” de Mustafa Kemal, qu’ils renoncent à jamais à toute prétention sur les territoires arabes qu’ils avaient jadis dominés, Londres (et Washington) lâchent la Grèce, car une présence hellénique et orthodoxe à proximité des Détroits et sur les rives de la Mer Noire pourrait, en cas de changement de donne en Russie, créer un espace pan-orthodoxe, englobant la Mer Noire et le bassin oriental de la Méditerranée. Londres, fidèle à sa politique bien établie depuis Pitt, n’en veut à aucun prix. Cette idée pan-orthodoxe demeure sous-jacente, notamment avec le principe nationaliste grec de l’”Enosis” (le rattachement de Chypre à la mère patrie grecque), avec les investissements discrets de firmes privées russes à Chypre (notamment dans l’immobilier), avec la fourniture de missiles russes aux forces grecques de l’île, avec l’esquisse d’une solidarité greco-serbe, greco-arménienne, greco-syrienne, greco-iranienne, etc., lors de l’attaque de l’OTAN contre la Serbie, si bien que l’on a évoqué aux Etats-Unis, avec une certaine inquiétude, la possible émergence d’un “axe” Athènes/Erivan/Téhéran. Si l’on se rémémore tous ces faits, on peut en conclure que la nouvelle Turquie kémaliste a pour fonction, depuis les années 20 du 20ième siècle, de verrouiller les Détroits, de tenir la Russie éloignée du bassin oriental de la Méditerranée, de tenir les Grecs en respect, de ruiner l’idée d’Enosis à Chypre (avec la complicité évidente des Anglais), d’abandonner toute idée de solidarité entre Turcs et Arabes, de façon à ce qu’aucun espace stratégique ne puisse se reconstituer entre les Détroits et le Golfe Persique.

 

L’idée du “Grand Moyen-Orient”

 

Quand à l’idée pantouranienne, qui se développe pendant l’entre-deux-guerres dans bon nombre de cénacles nationalistes turcs, elle est tenue en réserve afin d’être instrumentalisée contre la Russie, si besoin s’en faut. Lors de l’effondrement de l’Union Soviétique, cette idéologie a servi à créer des chaînes de télévision en une langue turque unifiée pour les besoins de la cause, qui véhiculait la vision américaine, forgée dans les officines de Brzezinski, d’un “grand Moyen-Orient”, englobant toutes les républiques musulmanes et turcophones de l’ancienne URSS. Autre aspect concret et pratique de l’idéologie pantouranienne : tout ressortissant turcophone de l’ancienne URSS et du Sinkiang chinois reçoit automatiquement la nationalité turque. Si la Turquie devient membre de l’Union Européenne, ce ne sont pas seulement les 70 millions de citoyens turcs de la République de Turquie qui recevront un libre accès au territoire de nos pays, mais aussi les quelque cent millions de turcophones d’Asie centrale. Le pantouranisme vise à noyer l’Europe sous les flots démographiques de la Grande Turcophonie, et de venger ainsi les défaites d’Attila aux Champs Catalauniques, des Avars au 7ième siècle, des Hongrois à Lechfeld en 955, des Ottomans devant Vienne en 1529 et en 1683. La mémoire pantouranienne est une longue mémoire, pour laquelle les événements vieux de plusieurs siècles gardent leur pleine signification, sont toujours actuels. Face à des idéologies post-chrétiennes de la table rase, de l’amnésie revendiquée comme élection, qui handicapent l’Europe, c’est une force et un atout considérables. Par l’artifice d’un octroi de la nationalité turque aux Turcophones d’Asie, Ankara entend bien établir des colonies turques jusqu’en Bretagne et en Irlande, bien au-delà des plaines de Champagne, où Attila s’est heurté aux légions romaines et aux armées germaniques, pour refluer, battu, vers la Hongrie. Il faut y réfléchir, car la notion du temps, chez les Orientaux, n’est pas celle d’un temps segmenté, où chaque segment passé est considéré comme définitivement mort, mais un temps éternel, où chaque événement du passé est toujours considéré comme vivant, comme appelant une réponse adéquate, adaptée à la nouvelle donne. Cette vision vivante du temps écoulé, en Orient, nous montre bien dans quelle faiblesse structurelle permanente l’idéologie des Lumières, idéologie de l’amnésie volontaire et revendiquée, a plongé l’Europe. 

 

Récapitulons maintenant les événements de ces cinq dernières années, en tenant compte des leçons de l’histoire, que nous venons d’évoquer :

 

La conquête des Balkans européens :

 

La Bosnie, vous vous en souvenez tous, a été objet de beaucoup de sollicitude de la part des intellectuels branchés du Tout Paris, qui ne sont jamais que de vils propagandistes à la solde de Washington et qui prennent leurs ordres chez Brzezinski. Pourquoi avons-nous eu droit à ce délire permanent en faveur d’une Bosnie musulmane, reliquat de la présence ottomane dans les Balkans? Un simple coup d’oeil sur une carte physique de la région nous le fera comprendre. La Bosnie fait partie des Alpes dinariques. Elle est une région surélevée, facile à tenir dès qu’on s’y est ancré, et permet de menacer la côte adriatique et les vallées de la Save, dont de nombreux affluents descendent des hauteurs dinariques de la Bosnie, comme le Vrbas, la Bosna (qui a donné son nom à la région), la Drina et l’Una. Ces données géographiques et hydrographiques permettent de comprendre que la puissance qui tient la Bosnie, tient automatiquement l’ensemble de la péninsule balkanique, du moins sa façade occidentale, en lisière de l’Adriatique. Dès que la Bosnie tombe aux mains des Ottomans au 15ième siècle, ceux-ci s’ancrent solidement dans la région. Il faudra quatre cents ans pour les en déloger! Dès que les Ottomans abandonnent la Bosnie à l’Autriche-Hongrie en 1878 puis, plus formellement, en 1908, nous assistons à un véritable jeu de dominos, les pièces restantes de l’Empire ottoman dans les Balkans, tombent les unes après les autres, si bien qu’à la vieille de la première guerre mondiale, les Turcs ne sont plus présents qu’en Thrace, à quelques dizaines de kilomètres d’Istanbul, sous la menace des Bulgares.

 

Quand les intellos parisiens travaillent à l’émergence d’une “dorsale islamique”

 

Nos intellectuels médiatisés (et vaguement télégéniques) vont instrumentaliser un mixte 1) de philo-islamisme, délires multiculturels obligent, 2) d’idéologie des droits de l’homme (on est sous le règne de Clinton, démocrate, alors on utilise cette idéologie-là plutôt qu’une autre; avec Bush junior, on justifie les conquêtes et les expéditions punitives par un discours impérial, non enjolivé d’eudémonisme, comme on l’aperçoit chez des auteurs comme Kagan et Kaplan), 3) de néo-ottomanisme, afin de justifier anticipativement l’installation de formidables bases américaines dans la région, en plein centre de cette Bosnie, dont l’importance stratégique reste primordiale. Voilà bien à quoi ont servi les discours tout à la fois larmoyants et vindicatifs de la clique parisienne des Glucksmann, Lévy et autres Finkelkraut : à installer sur les hautes collines dinariques de la Bosnie, puis du Kossovo, des fantassins, des chars, des bombardiers et des missiles américains, pointés sur l’Italie, l’Autriche, l’Allemagne, la Hongrie, la Méditerranée orientale, etc. Pour les géopolitologues serbes, il s’agit de consolider une “dorsale islamique” alliée des Etats-Unis et territorialement proche de la Turquie, laquelle est également totalement inféodée à Washington et privée, depuis Ataturk, de toute indépendance énergétique. Le nationalisme et le militarisme kémalistes, tapageurs et à connotations machistes, ne sert qu’à camoufler un état d’impolitisme et d’impuissance navrant, pareil à celui d’une femme entretenue...

 

Dans le contexte de la maîtrise par les Américains de la péninsule que forment les Balkans européens, la Bosnie et le Kossovo constituent un territoire stratégique central, situé sur les points les plus élevés des Alpes dinariques, tandis que la Serbie constitue un point stratégique capital sur le Danube, principale artère fluviale en Europe, comme j’ai déjà eu maintes fois l’occasion de l’expliquer. La Serbie médiévale s’étiole après la mort du grand roi Douchan en 1355 et après la défaite de ses successeurs à Andrinople (Edirne) sur la rivière Maritza en Thrace en 1371, parce qu’elle a perdu ses territoires méridionaux de plus haute altitude. Mais Belgrade, dans la plaine du Danube, ne tombe qu’en 1439, donnant aux Ottomans une place forte importante sur le Danube. Deux ans plus tard, en 1441, ils peuvent vassaliser la Valachie et contrôler ainsi tout le Sud-Est européen au Sud du Danube. L’assaut contre Contantinople ne se fera qu’après toutes ces opérations. Nous y reviendrons. Il faudra attendre 1718, pour que des soldats de nos régions, des Hutois, reprennent Belgrade pour le compte du Saint-Empire et sous les ordres du Prince Eugène. La prise de Belgrade, après 277 ans d’occupation ottomane, marque le début de la fin pour la Sublime Porte en Europe du Sud-Est : plus jamais les Ottomans n’ont constitué une menace sérieuse pour l’Europe, même avec l’alliance française ou anglaise. Pour la petite histoire, la généralisation de la culture de la pomme de terre en Europe du Nord permet de lever des armées permanentes, sans avoir la nécessité de constituer des réserves de blé, ce que la France et l’Empire ottoman possédaient à satiété. Cette “puissance céréalière” a constitué l’assise de leur puissance militaire. Avec la généralisation de la culture de la pomme de terre, la Prusse, l’Autriche, la Pologne-Lithuanie et la Russie peuvent aligner dorénavant des troupes numériquement plus importantes que l’Empire ottoman et son hinterland islamique.

 

On ne prend pas Constantinople à partir de l’Anatolie

 

La leçon la plus importante qu’il convient de tirer de notre lecture de l’histoire balkanique et du front euro-ottoman, c’est que la péninsule balkanique a toujours constitué un tremplin indispensable pour la conquête de l’Asie Mineure, du Moyen-Orient, de la Perse, de l’Asie centrale et de l’Egypte. Philippe de Macédoine et Alexandre le Grand ont inauguré cette stratégie dans l’antiquité. Quand ils ont sécurisé à leur profit la périphérie balkanique de leur Macédoine d’origine, ils ont pu dominer la Grèce et ses ports, puis s’élancer en direction de l’Indus. Il faut donc maîtriser d’abord les Balkans pour pouvoir contrôler les territoires qui, à l’époque, ont été soumis à Alexandre le Grand. Le géopolitologue serbe Sacha Papovic nous rappelle que les Seldjoucides, les premiers Turcs à pénétrer en profondeur l’Asie Mineure, l’actuelle Anatolie, n’ont jamais réussi à prendre Constantinople. En effet, les Seldjoucides échoueront devant Byzance. Papovic en conclut que l’on ne prend Constantinople qu’au départ des Balkans, le “chemin anatolien” s’avérant trop difficile. Les Ottomans appliqueront cette stratégie que nous pouvons qualifier de “macédonienne”.

 

La stratégie “macédonienne” ou “alexandrine” des Ottomans consistera à prendre et à occuper les bases balkaniques avant d’enlever Byzance, qui tombera comme un fruit mûr dans leur panier. Après la défaite serbe à Edirne (Andrinople) en 1371, les Ottomans avancent en direction du cœur dinarique du massif montagneux balkanique et battent les Serbes lors de la fameuse bataille du “Champ des Merles” en 1389. La Serbie médiévale, foyer de culture inégalé, est rayée de la carte. Seule la maîtrise complète des Balkans a permis aux Ottomans de maîtriser entièrement le Moyen-Orient et l’Egypte (déjà les Hittites et les Hyksos avaient suivi la même voie dans la plus haute antiquité). Dans la même logique “alexandrine”, les Ottomans s’opposeront aux Perses dans des conditions géographiques et stratégiques similaires à celles qui ont présidé à la longue lutte entre Rome et les Parthes (une étude parallèle des batailles entre Romains et Parthes, puis entre Ottomans et Perses, pour la maîtrise du Caucase et de la Mésopotamie, pourrait se révéler très instructive).

 

Face à cette double défaite serbe au 14ième siècle, en 1371 et en 1389, seuls quelques Européens sont conscients de l’enjeu : Jean de Vienne, chevalier franc-comtois au service de la France, amiral de sa flotte dans la Manche —qui ne sera pas écouté quand il demandera de détruire les nids de pirates anglais dans la  Manche— prêche la croisade, mais n’est guère entendu. L’Ordre de la Toison d’Or, fondé par le Duc de Bourgogne, en 1430, puis le fameux “Vœu du Faisan” de Philippe le Bon en 1454, juste après la chute de Constantinople, constituent des réponses bourguignonnes (donc les nôtres) à cette menace. Enfin, deux croisades hongroises se lèveront pour conjurer le danger, mais en vain.

 

Des pans entiers de la mémoire européenne ont disparu définitivement

 

Revenons au contexte : le roi Lazare de Serbie tombe au combat en 1389, lors de la bataille du “Champ des Merles”. Inquiet de voir les Ottomans s’approcher du Danube, l’Empereur Sigismond appelle à la croisade. Des chevaliers français, bourguignons et allemands, dont l’Amiral Jean de Vienne, le Comte de Nevers, futur Duc de Bourgogne sous le nom de Jean sans Peur, répondent à son appel. Mais l’armée qui s’ébranle en 1396 en direction de l’actuelle Bulgarie est hétéroclite et mal commandée. Face à elle, un génie militaire turc, le Sultan Bayazid II Yildirim (la “foudre”), qui emporte la victoire. Le massacre est effroyable. Des milliers de prisonniers allemands et franco-bourguignons sont égorgés (leur mort crie vengeance!). Pour se venger du bon accueil des Bulgares à l’égard des croisés occidentaux, les Turcs rasent Nicopolis et ravagent le pays de fond en comble. Après la Serbie, la Bulgarie médiévale est à son tour éradiquée, toute sa culture monacale, dont le grand monastère de Tirnovo, est réduite en cendres. On ne s’en rend pas suffisamment compte aujourd’hui mais cette culture formidable des monastères de Bulgarie, du Kossovo orthodoxe et de la Serbie médiévale, et plus tard de la Croatie catholique et renaissanciste, a été totalement détruite. Des pans entiers de la mémoire européenne, et non des moindres, ont ainsi disparu définitivement. Beaucoup de Slaves des Balkans émigrent vers la Russie et l’Ukraine, pour échapper à la furie ottomane. Ces faits historiques doivent être pris en considération quand on évoque la candidature turque à l’UE.

 

Après l’échec retentissant de Nicopolis en 1396, les Européens connaissent un répit. Les Mongols de Tamerlan s’engagent sur la voie jadis empruntée par les Seldjoucides : ils pénètrent en Anatolie et écrasent les Ottomans à Ankara en 1402, mais, comme leurs prédécesseurs, ils ne parviennent pas à prendre Byzance, ni à atteindre les côtes ioniennes. Bloqués en Asie Mineure malgré leur victoire, les Mongols ravagent l’Est de l’Anatolie, l’actuel Kurdistan. Les traces de ces destructions sont encore visibles aujourd’hui. Les systèmes d’aqueduc qui alimentaient les villes disparaissent, sapant ainsi les bases hydrauliques de toute urbanisation et, partant, de toute impérialité, celle de Rome comme celle de la Chine, les deux modèles de Leibniz. Les Génois et les Vénitiens taisent cette défaite et n’évoquent pas la présence des hordes mongoles en Asie Mineure, de crainte d’alarmer leurs clients et bailleurs de fond en Occident. Nous devons une description de ces événements à un Bavarois, Hans Schiltberger, prisonnier des Ottomans depuis la désastreuse bataille de Nicopolis en 1396. Schiltberger, d’autres Allemands et Franco-Bourguignons ainsi que 10.000 cavaliers serbes avaient été contraints de se battre dans les rangs ottomans (pour défendre Byzance contre les Mongols!). Il nous a laissé un récit de cette défaite ottomane; elle laisse vingt ans de répit à l’Europe, qui ne mettra pourtant rien à profit pour affronter dans de bonnes conditions la menace mortelle qui la guettait au Sud-Est.

 

Après le départ des Mongols, l’arrière-pays anatolien, appauvri, ruiné, vivote misérablement. Le pouvoir ottoman, dans ses tentatives de redressement, se heurte à une opposition populaire, que l’on a appelé la “révolte des derviches”, dont les justifications religieuses sont mystiques, voire panthéistes et ascétiques. Cette révolte se place sous la direction du Cheikh Bedreddin et de Bürklüce Mustafa; elle a l’appui de bandes turkmènes, venues d’au-delà de la Caspienne, ainsi que de la secte de Torlak Kemal. Les masses paysannes se rebellent ainsi contre le pouvoir central et sunnite des Ottomans, exactement comme il y aura aussi des révoltes paysannes, des jacqueries, plus ou moins mystiques et ascétiques en Europe centrale et occidentale. En trois batailles, le Sultan Mehmed I bat les rebelles en 1420 et fait pendre ou empaler les chefs de l’insurrection. L’unité balkano-anatolienne de l’Empire ottoman est sauve, le bloc territorial ottoman correspond dorénavant à l’ancien bloc byzantin. L’expansion peut reprendre. La leçon actuelle à tirer de la “révolte des derviches” de 1420, qui a donné aussi du répit à l’Europe, c’est que la lourdeur du pouvoir ottoman, et du pouvoir militaire turc actuel, incitait et pourrait à l’avenir inciter tout pouvoir européen intelligent à fomenter des révoltes sociales en Anatolie ou au Kurdistan, afin d’obliger la Turquie à lâcher du lest dans les Balkans et à Chypre, afin de rendre inopérant l’instrument turc de l’hégémonisme américain.

 

L’ancien pouvoir ottoman plus cohérent que les Américains aujourd’hui !

 

Dès 1422, les Ottomans reviennent dans les Balkans, profitent des querelles entre Slaves et y consolident tranquillement leurs atouts géopolitiques et stratégiques. Les Serbes s’allient aux Hongrois, prouvant par là qu’une alliance entre les puissances danubiennes peut contenir l’avance ottomane, tandis que toute opposition entre Serbes et Hongrois conduit, au contraire, à favoriser l’expansion turque. Mais cette alliance ne suffit pas : les Turcs prennent Belgrade (plus exactement la place forte de Smederevo sur le Danube) en 1439. Ce qui confirme la thèse de notre collègue serbe Sacha Papovic : pour prendre Constantinople, il faut d’abord s’implanter solidement dans les Balkans, en contrôler tous les points stratégiques importants, tant dans les zones montagneuses que sur le cours du Danube. En 1441, les Ottomans envahissent la Transylvanie et protègent ainsi le cours du Danube à leur profit. Les Balkans forment, à partir de cette annexion de la Transylvanie, l’antique Dacie des Romains, une unité cohérente sous la férule turque. Le grand port de l’Egée, Salonique, prise en 1423, gagne un hinterland homogène, ce qui n’est plus le cas aujourd’hui, vu la destruction de toute cohérence dans les communications potentielles sur la ligne Belgrade/Salonique, la plus courte entre le Danube et la Méditerranée, comme on avait pu le constater pendant la première guerre mondiale, à la suite de l’offensive de von Mackensen à travers le territoire serbe en direction de l’Egée. En ce sens, le pouvoir ottoman était plus cohérent que le projet américain d’aujourd’hui, qui vise un morcellement territorial extrême, rendant impossible tout développement économique dans cette région, car il y découpe les voies de communications fluviales, ferroviaires et routières, qui restent de ce fait démantelées et inopérantes.

 

Le projet bourguignon a fusionné avec le projet impérial germanique, avec la volonté espagnole de contrôler toute la Méditerrannée et avec l’esprit corsaire et chevaleresque de l’Ordre de Malte

 

L’invasion de la Transylvanie provoque en Hongrie l’appel à une deuxième croisade anti-ottomane. Contrairement à celle de 1396, elle est bien organisée par un capitaine hors pair, Janos Hunyadi. Ses armées disposent d’artillerie. Elles entrent en Transylvanie et avancent vers Andrinople. A la tête de cette croisade, le Roi Vladislav I de Pologne-Hongrie, qui règnait sur un vaste hinterland, correspondant au territoire de la “Nouvelle Europe” selon Bush. Dans la stratégie américaine actuelle, mise au point par Luttwak, Brzezinski et Bagnall, l’Amérique doit contrôler et la Turquie et la “dorsale islamique” et les territoires qui ont servi d’aire de rassemblement à la deuxième croisade hongroise. Ainsi, les Américains entendent contrôler deux zones offensives situées entre l’Allemagne et la Russie, recréer le “Cordon sanitaire” de Lord Curzon, empêcher toute continuité territoriale et stratégique entre l’Allemagne et la Russie (comme l’avait très bien vu le géopolitologue russe contemporain, le Colonel Morozov), couper l’axe danubien en deux tronçons, empêcher toute projection de la puissance allemande vers la Mer Noire (le projet bourguignon, repris par Maximilien I, dès son mariage avec Marie de Bourgogne; le projet bourguignon fusionne, dès la fin du 15ième siècle, avec l’impérialité romaine-germanique; il y a donc continuité entre ce projet bourguignon et les actions du binôme austro-hongrois d’une part, et avec celles de l’Espagne et de l’Ordre de Malte en Méditerranée, d’autre part; pour nous, ici, en Brabant, dans ce Château Coloma, où a œuvré avant nous un Louis Gueuning, il n’y a pas d’autres légitimités en Europe; ceux qui partagent ce projet, et s’y inscrivent, sont nos alliés, ceux qui ne le partagent pas, ceux qui balbutient des bricolages hostiles à cette vision sublime, sont nos ennemis et les ennemis de notre civilisation; voilà une définition claire de l’ennemi —et du camarade—, qui, comme nous l’ont enseigné Carl Schmitt et Otto Koellreutter, permet le politique).

 

Toujours les divisions entre Européens !

 

L’appel à la croisade de Janos Hunyadi et de Vladislav I, auquel répondent des combattants allemands et tchèques, suscite beaucoup d’enthousiasme : l’Albanie se soulève derrière Skanderbeg, la Valachie de même, sous l’autorité de Vlad Dracul (Vlad l’Empaleur ou “Dracula”); le Basileus byzantin, isolé à Constantinople, accepte l’union de tous les chrétiens; Venise avance ses navires de guerre jusque dans la Mer de Marmara. Mais malgré les facultés de stratège de Janos Hunyadi, les armées hongroises sont écrasées en 1444 à Varna en Bulgarie. Le bouillant roi Vladislav I n’écoute par les conseils de pondération d’Hunyadi, il fonce sur le dispositif turc bien arcbouté sur ses positions et est taillé en pièces. Hunyadi échappe au désastre et devient le régent du royaume de Hongrie. En 1448, une deuxième offensive hongroise se solde également par un échec au Kossovo, parce que les Valaques de Vlad Dracul changent de camp en pleine bataille. Toujours les divisions entre Européens!

 

Le fils de Janos Hunyadi, Matthias Corvinus, devient Roi de Hongrie en 1458. En 1456, il avait repris Belgrade avec une armée moderne, constituée de paysans levés en masse et bien entraînés. Dans la bataille, le Sultan est blessé. Les cloches sonnent à toute volée dans l’Europe entière. Mais cette victoire éclatante, prouvant l’intérêt tactique d’une armée de lansquenets de souche paysanne, n’aura que des résultats éphémères : en 1459, le Prince serbe Georg Brankovic se soumet au Sultan. Les Bosniaques du roi Stepan appellent Rome et l’Occident à l’aide, mais la noblesse bogomile, victime d’inquisitions dans les siècles précédents, passe aux Turcs : 70% de la population bosniaque se convertit, par haine des catholiques et des orthodoxes. Ailleurs dans les Balkans, les conversions à l’Islam ne dépasseront jamais les 10% (comme en Grèce et en Bulgarie, où subsistent des populations autochtones islamisées). La conversion de la noblesse bogomile à l’islam constitue le cœur du problème bosniaque actuel.

 

Une volonté géopolitique danubienne et pontique

 

Après la prise de Salonique en 1423, et vu la poussée turque ininterrompue, les Ducs de Bourgogne, nos souverains, formulent des projets de reconquête, qu’ils ne pourront pas réaliser à cause des événements de la guerre de Cent Ans, à cause de la pression française potentielle sur nos frontières méridionales et sur le Duché de Bourgogne. Dès 1429, Philippe le Bon prend conscience du danger. Il fonde l’Ordre de la Toison d’Or, le 10 janvier 1430, dont l’inspiration spirituelle repose sur le mythe grec des Argonautes, c’est-à-dire les navigateurs et aventuriers qui exploraient la Mer Noire. L’objectif de l’Ordre, au départ, était de renouer avec les idéaux chevaleresques de la Perse antique et de l’Arménie traditionnelle. Cet idéal était toutefois doublé d’une perspective géopolitique bien concrète : reprendre pied en Mer Noire, en longeant le Danube, comme l’avait fait l’armée européenne de 1396. Jean sans Peur, père de Philippe le Bon, avait ramené de sa captivité chez Bayazid-la-Foudre (Yildirim), un savoir clair sur les données géopolitiques de la région balkanique et pontique. Epoux de Marguerite de Bavière depuis 1385, il avait des connaissances sur l’espace danubien, la Bavière étant riveraine du grand fleuve et, par conséquent, liée aux dynamiques géopolitiques de cette immense région qui s’étend des Alpes à la Mer Noire. De nombreux chevaliers et fantassins bavarois avaient d’ailleurs combattu aux côtés de Jean sans Peur à Nicopolis. Ce sont les villes flamandes qui paieront son énorme rançon, exigée par Bayazid. Assassiné par les Français en 1419, Jean sans Peur lègue à son fils Philippe le Bon, à moitié bavarois et au quart flamand, l’héritage bourguignon, qu’il arrondira, si bien qu’il deviendra le futur “Cercle de Bourgogne” dans le Saint-Empire de Charles-Quint. Dès 1442, Philippe le Bon prépare la Croisade qui s’annonce à l’appel du Pape Eugène IV. Il n’y participera pas, vu la défaite de Varna en 1444. Cependant, malgré ce désastre, une flottille bourguignone, sous le commandement de Walleran de Wavrin, part pour la Mer Noire. Un autre noble bourguignon, Geoffroi de Thoisy, se livre à la course dans les mêmes eaux. Ces opérations n’auront guère de lendemain. Mais elles demeurent néanmoins les indices d’une volonté géopolitique danubienne et pontique, c’est-à-dire d’une volonté de contester le pouvoir ottoman sur le Danube, dans la Mer Noire et en Crimée. Nous y voyons les prémisses de la “Sainte-Alliance” d’Eugène de Savoie et de Maximilien-Emmanuel de Bavière (le “Roi Bleu”) et à l’alliance entre l’Espagne, l’Autriche et la Russie, forgée à Vienne en 1725-26.

 

Notre mission “nationale et impériale”

 

Comme Philippe le Bon entendait reconstituer la dorsale lotharingienne pour mieux unir l’Europe et comme l’Ordre de la Toison d’Or était destiné à devenir l’instrument de cette politique, l’épine dorsale spirituelle et militaire d’une future Europe unifiée, la “matière bourguignonne”, dans sa rutilante diversité, recèle in toto les linéaments de notre “mission nationale et impériale”. Il n’y en a pas d’autre. Il faudrait un autre colloque pour en déterminer la nature et explorer les possibilités de sa réactualisation. Les événements des deux croisades hongroises de 1396 et de 1444 en constituent l’épopée fondatrice.

 

La leçon à tirer aujourd’hui de toute l’histoire de la conquête ottomane des Balkans, des plaines hongroises et de la Transylvanie est la suivante : comme nous l’a clairement enseigné Sacha Papovic, il faut commencer par contrôler les Balkans pour maîtriser le Moyen-Orient (Haute Mésopotamie en 1515, Syrie en 1516, Egypte en 1517), la région du Golfe (prise de Bagdad en 1534) et l’Asie centrale (Alexandre le Grand). L’objectif de la politique anglo-saxonne est d’imiter Alexandre le Grand et les Ottomans, de contrôler les territoires que l’un et les autres ont jadis contrôlés pour tenir les aires civilisationnelles voisines en échec (Saint-Empire/Europe, Russie, Inde, Chine). Les projets de “marché commun” grand-moyen-oriental, s’étendant de l’Egypte au Tadjikistan, que l’on formule aujourd’hui aux Etats-Unis, vont bel et bien dans ce sens. Ce vaste espace est confié à l’une des cinq structures de commandement militaire américain dans le monde, en l’occurrence l’USCENTCOM, qui englobe également la Corne de l’Afrique et le Soudan. On parle également de “Nouvel Orient énergétique”, qui comprend aussi la Libye (en voie de normalisation) et le Pakistan. Il s’agit de soustraire les potentialités énormes de ces régions à l’influence européenne et russe et, ipso facto, de soustraire les masses démographiques de ces régions au commerce futur de l’UE et de la Fédération de Russie. Les événements confirment cette démarche “alexandrine” : les préliminaires de la conquête du “Grand Moyen Orient” ont commencé en Bosnie dès 1993-94, pour se poursuivre au Kossovo en 1999 et ensuite en Macédoine. Pour déstabiliser la région de fond en comble, le levier de départ a été la population musulmane bosniaque ou albanaise, et les réseaux mafieux qu’elles abritent, que l’on a artificiellement et habilement excitée contre ses voisins slaves et orthodoxes, avec la complicité des Turcs, des Saoudiens (bailleurs de fonds) et des intellectuels parisiens de la rive gauche (Glucksmann, Lévy, Finkelkraut et quelques autres).

 

D’abord aligner des historiens et des philologues

 

Cette stratégie américaine a été épaulée par de bonnes connaissances historiques réelles, par un savoir précis sur les dynamiques géopolitiques et stratégiques qui ont animé l’histoire de ces régions, des connaissances et un savoir bien mieux étayés que les formulations bancales du prêt-à-penser que nous ont servi les intellos parisiens et les médias américains, jusqu’à l’écœurement. En Europe, les universités n’ont jamais reçu l’ordre de produire des ouvrages précis sur les régions clefs de l’histoire mondiale. Le mépris qu’affichent les histrions politiciens et les béotiens immondes de la classe marchande pour les historiens en particulier, pour les diplômés des facultés de philosophie et lettres en général, va se payer cher, très cher. Les politiciens perdront les maigres bribes de pouvoir qu’ils détiennent encore vaille que vaille sous l’hégémonisme américain et les mercantiles vénaux vont perdre de juteux marchés. Pour avoir le pouvoir et les marchés, il faut d’abord aligner des historiens et des philologues, bien payés et employés dans des bureaux et des instituts de recherches géopolitiques prospectifs, tournés vers l’avenir et soucieux du bien de la “Grande Cité” impériale. Sans historiens et sans philologues, sans bureaux et sans instituts géopolitiques, on bascule dans la fange et la médiocrité. Celle dans laquelle nous nous vautrons effectivement.

 

La conquête des Balkans eurasiens :

 

La notion de “Balkans eurasiens” nous vient directement du célèbre ouvrage de Zbigniew Brzezinski, Le grand échiquier, où l’auteur étale, dans un langage toutefois feutré, le projet de mainmise américaine sur les anciennes républiques soviétiques turcophones et musulmanes. L’Asie centrale ex-soviétique était composée, en effet, de plusieurs républiques telles le Kazakhstan (16 millions d’hab., dont de nombreux Slaves), le Turkménistan (3,5 millions d’hab.), l’Ouzbékistan (19 millions d’hab.), le Kirghizistan (4,2 millions d’hab.), le Tadjikistan (de langue indo-européenne/persane, 5 millions d’hab.). L’objectif des Etats-Unis, lors de la liquéfaction de l’URSS, a été de détacher ces nouveaux états de l’ancienne métropole russe et de les inféoder à Washington par le biais de relais turcs/pantouraniens ou intégristes-islamistes. Cet espace centre-asiatique se retrouve donc balkanisé de fait dès le début de l’ère post-soviétique. La région compte désormais deux grandes bases américaines, Karchi Khanabad en Ouzbékistan et Manas au Kirghizistan. Cette mainmise sur de vastes zones de l’Asie centrale ex-soviétique constitue la réalisation des projets géopolitiques d’Homer Lea, formé à West Point à la fin du 19ième. Au cours des dernières décennies du 19ième siècle, en effet, l’Empire russe et l’Empire britannique poursuivaient des objectifs contradictoires : les Russes voulaient déboucher sur les mers chaudes, notamment l’Océan Indien; les Anglais voulaient protéger les voies d’accès aux Indes, joyau de leurs possessions dans le monde, et entendaient faire de l’Océan Indien une mer intérieure entièrement contrôlée par leur flotte. Pour protéger les Indes, les Anglais devaient “contenir” les Russes loin des rives de l’Océan Indien : de là, l’origine de toutes les stratégies de “containment”, appliquées pendant la  Guerre Froide. La fin de la “Guerre Froide” n’y a rien changé. De cette lutte entre la Terre et la Mer naîtra la géopolitique proprement dite : si Lea ne retient pas le vocable, MacKinder et le Suédois Kjellén finissent par le généraliser et l’introduire dans le discours politique et journalistique.

 

La fin du “Grand Jeu” annonce-t-elle l’avènement du “Nouvel ordre mondial”?

 

L’Afghanistan avait été une pièce maîtresse dans le conflit anglo-russe larvé qui s’est déroulé depuis les années 20 du 19ième siècle. Le territoire afghan abrite en effet les tronçons centraux de la fameuse “Route de la Soie” (“Silk Road”). Pour éviter de s’affronter directement, Russes et Britanniques s’étaient finalement accordés sur une neutralisation du territoire afghan, qui, de ce fait, ne sera jamais colonisé. Londres estimait que le danger allemand en Mésopotamie était plus important que la présence russe dans le Caucase et aux frontières afghanes. La Russie est aujourd’hui considérablement affaiblie. Les Etats-Unis, qui ont pris le relais de l’Empire britannique, comme le leur avaient demandé leurs géopolitologues Mahan et Lea, ont profité des attentats du 11 septembre 2001 (fabriqués?), pour parfaire la tâche en installant des bases en Ouzbékistan et au Kirghizistan et en conquérant l’Afghanistan. Sur le terrioire de ce pays conquis, trois bases américaines se sont installées, exactement sur les nœuds routiers des routes de la soie (car il y en a plusieurs). Ces bases sont Bagram, Mazar-e-Sharif et Kandahar. Sans compter la base de Jacobvabad au Pakistan. Sur base des géostratégies élaborées par Mahan et Lea, il y a un siècle, et sur base des doctrines de Brzezinski, Washington entend mettre un point final à cette lutte entre la “Terre” et la “Mer”, que Kipling avait nommé le “Grand Jeu”. Sous-entendu, le messianisme américain entend parachever le “Grand Jeu” pour mettre un terme à l’histoire proprement dite et faire advenir de la sorte le “Nouvel Ordre Mondial” annoncé par Francis Fukuyama, qui a quelque peu révisé ses positions trop idéalistes.

 

La conquête des Balkans eurasiens est désormais une réalité. Les attentats du 11 septembre 2001 ont constitué le prétexte pour intervenir en Afghanistan et pour entretenir des troupes en Asie centrale.

 

La conquête de la Mésopotamie :

 

Nous avons vu que les Ottomans n’ont conquis la Mésopotamie sur les Perses qu’après avoir totalement sécurisé les Balkans, grâce, notamment, à la complicité de François I. J’ai déjà eu plusieurs l’occasion, à cette tribune, d’évoquer l’importance cruciale des opérations militaires en Irak (mai 1941), au Liban et en Syrie (juin-juillet 1941), enfin en Iran (août-septembre 1941). Il s’agissait de la réponse britannique à l’occupation par l’Axe de l’ensemble de la péninsule balkanique, ce qui prouve, une fois de plus, que les deux zones géostratégiques sont indissolublement liées l’une à l’autre.

 

Aujourd’hui, les Etats-Unis ont commencé par les Balkans, poursuivi par l’Afghanistan et terminé, jusqu’à nouvel ordre, par la Mésopotamie (l’Irak). Si les opérations dans les Balkans répondaient à l’impératif géopolitique de contenir l’Europe centrale germanique et la Russie au Nord du Danube (comme le firent les Ottomans dès la prise de Belgrade en 1439) et de couper l’artère danubienne (un autre vieux projet), si la conquête de l’Afghanistan répondait à un autre impératif géopolitique, celui d’occuper les espaces à l’extrêmité orientale de l’antique Empire d’Alexandre le Grand, la conquête de l’Irak obéit à plusieurs impératifs tout aussi importants. Elle consiste évidemment à occuper une des pièces centrales de cet antique Empire d’Alexandre, à parachever l’encerclement de l’Iran (nous y revenons), à prévenir définitivement toute tentative de coopération entre un pouvoir modernisateur en Irak, d’une part, et la Russie et l’Europe, d’autre part.

 

Saddam Hussein, en effet, avait signé des contrats avec Volkswagen et Renault, avec des constructeurs de camions russes, avec d’autres firmes européennes en matière de construction d’infrastructures. Avec la conquête américaine, tous ces contrats vont être annulés au profit de constructeurs automobiles d’Outre-Atlantique et, évidemment, comme la presse européenne l’a souligné  avec une réelle amertume, au profit d’Halliburton, le consortium où Dick Cheney a beaucoup d’intérêts. De plus, comme Gerhoch Reisegger l’a écrit dans son ouvrage, dont nous avons traduit des extraits significatifs pour Au fil de l’épée (recueils n°46 et 47, juin et juillet 2003), Saddam Hussein voulait facturer son pétrole en euros et amorcer de la sorte un passage généralisé du pétro-dollar au pétro-euro, passage qui aurait signifié, à moyen terme, la fin d’un hégémonisme américain, essentiellement financier.

 

Parachever l’encerclement de l’Iran

 

La conquête de l’Irak parachève également un autre objectif stratégique : l’encerclement de l’Iran. Celui-ci est désormais coincé dans un étau formé par de nombreuses bases américaines : à l’Est, les trois bases d’Afghanistan, les trois bases réparties en Ouzbékistan, au Kirghizistan et au Pakistan; à l’Ouest, les quatre nouvelles bases d’Irak (Bashur, H1, Talil et Bagdad); au Sud, toutes les bases du Koweit et du Golfe; au Nord, la nouvelle base américaine installée en Géorgie. En retrait, la base d’Inçirlik en Turquie, Israël, Djibouti et Diego Garcia. Visiblement, l’Iran est la prochaine victime. Il constitue le centre du “Grand Moyen Orient”. La périphérie est conquise, ce centre est encerclé : ou bien il tombera comme un fruit mûr, ou bien il sera secoué par une révolution à justifications idéologiques délirantes, ou bien il sera annihilé militairement.

 

◊ 2ième Partie : La réponse européenne : l’Axe Paris/Berlin/Moscou

 

Indubitablement, le théoricien le plus cohérent de l’Axe Paris/Berlin/Moscou est Henri de Grossouvre. Cet auteur dégage quatre raisons majeures pour forger cette alliance continentale: 1) Se donner du poids dans la guerre commerciale entre l’UE et les Etats-Unis; 2) Corriger les effets pervers de la mondialisation néo-libérale; 3) Répondre aux enjeux énergétiques des années 2010-2030; 4) Organiser une politique spatiale commune.

 

◊1. Henri de Grossouvre dresse le bilan chiffré de l’état économique du monde dans lequel l’Axe est appelé à se former : l’UE détient désormais 32% du PIB mondial, tandis que les Etats-Unis, 28%. L’UE vient donc de dépasser les Etats-Unis. Raison pour laquelle ceux-ci s’alarment et agissent, font donner leur puissante machine militaire. Ensuite, Washington se place en état d’alerte parce que l’Europe et l’Asie ont fait front commun contre les Etats-Unis lors du sommet de l’OMC à Seattle en décembre 1999. L’idée d’un bloc euro-asiatique se fait jour, contre lequel les Etats-Unis ne pourront rien faire. Par ailleurs, les points de friction entre les deux rives de l’Atlantique s’accumulent : sur les viandes, les bananes, sur l’industrie aéronautique (Boeing/Airbus). Les esprits amnésiques ne se souviennent pas que l’une des clauses implicites de l’intervention des Etats-Unis dans les affaires européennes pendant la seconde guerre mondiale avait pour objectif de ruiner les industries aéronautiques nationales, celles de l’Allemagne principalement, mais aussi celles des autres pays européens. La coopération franco-allemande pour Airbus est donc vue d’un très mauvais œil à Washington. L’UE et les Etats-Unis s’affrontent ensuite sur le problème des sanctions contre les firmes européennes qui commercent ou tentent de commercer avec l’Iran ou avec Cuba. La Wallonie a subi un ressac de son industrie métallurgique depuis la rupture des relations commerciales avec l’Iran. De notre point de vue, c’est inadmissible. La coopération accrue de l’UE avec la Russie vise donc à consolider nos positions réciproques face à l’agressivité économique américaine et à fusionner le savoir-faire en matières aéronautiques.

 

Corriger les effets pervers de la  mondialisation libérale

 

◊2. Quand Henri de Grossouvre parle de “corriger les effets pervers de la mondialisation libérale”, il incrimine, à juste titre, le phénomène généralisé du “bougisme”, c’est-à-dire de la fébrilité acquisitive, du consumérisme effréné, d’une mobilité permanente et sans repos, d’une dissolution du tissu social sous l’effet des incessantes sollicitations “novistes”. L’inventeur de ce nouveau vocable de “bougisme” n’est autre que Pierre-André Taguieff, actif dans la “Fondation du 2 mars”. En cernant, avec sa précision de philosophe, cette tare de notre monde contemporain, Taguieff jette les bases, sans doute à son corps défendant, d’une nouvelle “révolution conservatrice” à la française. Car, qu’il le veuille ou non, l’ancienne recherche des permanences, ou la volonté de les préserver dans toute leur “force tranquille”, volonté que l’on retrouve chez un père fondateur du conservatisme comme Chateaubriand, était un désir profond de ne pas sacrifier au culte moderne du changement perpétuel, donc à un progressisme dissolvant dont procède le “bougisme” d’aujourd’hui. Henri de Grossouvre, pour sa part, estime que la nécessaire résistance au “bougisme”, dont l’américanisme est une variante, a pour objectif politique concret de restaurer ce que ce bougisme élimine par sa frénésie, soit toutes les structures intermédiaires entre l’individu et le marché mondial: l’école, la famille, la communauté, l’appartenance nationale, l’Etat, bref, tout l’espace du politique, tout l’espace de la Bildung, tout ce qui relève du “long terme”. Sans ces structures intermédiaires, aucune instance politique n’est pourtant en mesure de planifier quoi que ce soit pour la durée, tout étant livré au hasard et à l’immédiateté du présent. L’Axe PBM, dont Henri de Grossouvre espère l’avènement, peut nous aider à sortir du “bougisme”, dont l’américanisme est depuis longtemps le principal paradigme, en soustrayant l’économie mondiale à la logique du manchesterisme sauvage et de la spéculation, pour revenir à une économie que Michel Albert, au début des années 90, qualifiait de “rhénane”, c’est-à-dire patrimoniale, axée principalement sur les investissements infrastructurels (outils, voies de communication, etc.), tout en cultivant le souci de préserver la qualité des établissements d’enseignement, tout en tablant sur le bon fonctionnement des écoles et des universités, lesquelles ne peuvent évidemment se développer ni même assurer leur fonction, si persiste la logique perverse du “bougisme”. L’Axe PBM, en procurant à l’Europe une assise territoriale et une masse de productivité considérable, permet de se dégager de l’économie spéculatrice de modèle américain et de mettre, de ce fait, un terme à ce “bougisme” qui disloque nos sociétés.

 

◊3. Henri de Grossouvre estime que la constitution de l’Axe PBM nous permettra d’affronter les enjeux énergétiques à venir, ceux des années 2010-2030. La conquête de l’Irak va entraîner, par la force des choses, l’installation pesante d’un monopole américain sur les immenses réserves de pétrole de cette région. Entre 2010 et 2020, le monde, prévoient les experts, va connaître l’apogée de la production de pétrole. Après, ce sera le déclin. Dans ce contexte, l’objectif des Américains est d’être présents avant les autres, de rafler le maximum de pétrole pour conserver leur hégémonie dans le monde. L’occupation des gigantesques gisements mésopotamiens et arabiques rend nécessaire le partenariat euro-russe en matières énergétiques. Pour de Grossouvre, comme pour nous, il n’y a pas d’autre solution. Henri de Grossouvre analyse ensuite les tenants et aboutissants du rapprochement Schroeder/Poutine. Il nous rappelle que les accords germano-russes portent justement sur l’énergie et sur la sécurité (i.e. une revalorisation du rôle de l’OSCE, que les Américains ont toujours cherché à minimaliser en faveur de l’OTAN, surtout de son volet civil). Henri de Grossouvre constate le bon fonctionnement de ce tandem germano-russe : autour de lui, les autres puissances européennes, dont la France, doivent faire chorus pour échapper à la dépendance énergétique, que va nous imposer l’hyper-puissance américaine.

 

◊4. Enfin, Henri de Grossouvre stigmatise la dépendance européenne en matières spatiales. Maîtres de l’espace circumterrestre, les Américains déploient des satellites espions et contrôlent les télécommunications. En ce domaine aussi, seule une coopération accrue, et même étroite, entre l’Europe et la Russie s’avère nécessaire. On voit les premiers résultats : le projet européen Galileo (GPS) intéresse la Russie, la Chine et l’Inde. La suprématie américaine a provoqué la volonté de toutes les grandes puissances d’Eurasie de se soustraire à la dépendance imposée par le monopole américain dans le domaine des satellites de télécommunication.

 

◊ 3ième Partie : Les embûches extérieures à l’avènement d’un Axe “Paris/Berlin/Moscou”

 

Trois faisceaux d’embûches semblent entraver actuellement le processus de construction européenne et l’avènement d’un véritable “Axe Paris-Berlin-Moscou”. Ce sont les suivants :

 

◊1. Les systèmes de renseignement américains, et les satellites de contrôle qu’ils alignent dans l’espace circumterrestre, permettent aux stratèges du Pentagone d’avoir la mainmise quasi complète sur l’information médiatique à l’échelle de la planète entière. François-Bernard Huyghe a rendu compte de cette situation dans un ouvrage très important : L’ennemi à l’ère numérique. Chaos, information, domination (PUF, Paris, 2001). Ce livre deviendra un classique de la pensée stratégique contemporaine. Il importe de le lire, de le relire, de le méditer et de le faire connaître pour apprendre à nos concitoyens à décrypter les pièges de la propagande médiatique universelle car elle vise à confisquer à tous les peuples de la Terre, et donc aussi aux peuples européens, le sens du réel, de la réalité historique et géopolitique, dans laquelle ils s’inscrivent depuis des millénaires. La perte de ce sens des réalités historiques conduit à la déchéance politique et au déclin total.

 

Les armes de la connaissance historique sont essentielles

 

◊2. Notre Europe est effectivement soumise à une “guerre cognitive” systématique, dont le premier impératif est de forger des “armes de la connaissance”. Les écoles anglo-saxonnes excellent en ce domaine : elles parviennent, sur base de travaux universitaires très sérieux et bien étayés, à développer des propagandes simplistes, gobées à grande vitesse par les opinions publiques de tous les pays du monde. L’Europe actuelle, démissionnaire, est à la traîne. Le personnel politique qui la gère, sans vraiment la gouverner, ne juge pas opportun de se doter d’instituts historiques de même valeur, capables de forger, pour l’Europe, une vision cohérente et pragmatique de l’histoire. Au contraire, les idéologies dominantes, qui s’agitent au sein des institutions européennes, estiment que l’histoire est un fardeau du passé, dont il convient de se débarrasser, notamment en ne l’enseignant plus correctement dans les écoles. Or, en politique, et plus encore en “grande politique”, les armes de la connaissance sont essentiellement les armes de la connaissance historique ; à terme, ce sont elles qui, bien maîtrisées, procurent la victoire. Eugène de Savoie a vaincu les Turcs et sauvé l’Europe grâce à ses excellentes connaissances historiques. Clausewitz et ses disciples insistent également sur la nécessité de bien connaître l’histoire pour forger des stratégies efficaces.

 

Etats-Unis : le tropisme mafieux

 

◊3. L’Europe de Bruxelles et de Strasbourg n’est pas suffisamment attentive aux phénomènes de guerre indirecte. Xavier Raufer, sur ce chapitre, insiste très fort sur le rôle des mafias et du terrorisme fabriqué, dans son dernier ouvrage, Le grand réveil des mafias (J. C. Lattès, Paris, 2003). Xavier Raufer nous apprend à  identifier l’ennemi mafieux, grâce à un vade-mecum clair et succinct ; il nous démontre que les dangers mafieux sont occultés, notamment par les Etats-Unis, qui ont subi, et accepté, un “véritable tropisme mafieux”, qui nous permet de parler sans hésitation et sans paranoïa inutile, d’une véritable fusion entre la politique américaine et les mafias d’origine sicilienne ; outre les drogues et la prostitution, l’industrie américaine du porno alimente les caisses des mafieux et, par voie de conséquence, les caisses noires de certains “services spéciaux”. Les pages que consacrent Raufer aux mafias turques sont très instructives et démontrent bien la collusion américano-turque en ce domaine. Et nous indiquent deux pistes pour contester la présence turque au sein de l’UE et son maintien dans l’OTAN.

 

Sur le premier faisceau d’embûches :

 

Les systèmes médiatiques américains utilisent ce que François Bernard Huyghe appelle les “quatre arts martiaux” que sont

1)       L’ART D’APPARAÎTRE, de dire la guerre, de la montrer,de la narrer (tout en excluant toute autre narration possible), de truquer le récit dans le sens voulu ; il s’agit d’organiser des “psyops” ou “psychological operations” destinées à répandre dans le monde la “bonne doctrine” en combinant adroitement récits, photographies et films, comme nous l’avons vu lors de l’affaire de Timisoara en Roumanie en 1989 ou lors du conflit kosovar en 1999 ;

 

2)       L’ART DE TROMPER, autrement dit l’art d’utiliser la désinformation, de répandre des médisances contre l’ennemi désigné comme tel dans l’ensemble du “village global” ; il s’agit essentiellement d’appliquer à la stratégie contemporaine l’”art des illusions” déjà préconisé par le stratège de l’antiquité chinoise, SunTzu ; l’objectif est d’altérer la perception de la réalité chez l’ennemi et de provoquer, chez lui, une décision erronée ; en ce sens, la “désinformation consiste à propager délibérément des informations fausses pour influencer une opinion et affaiblir un adversaire ;

 

3)       L’ART DE SAVOIR, c’est-à-dire d’exercer une surveillance ubiquitaire, notamment via le réseau ECHELON, selon le principe avéré : «Qui verra, vaincra» ; l’objectif est de collecter systématiquement des informations utiles, via des satellites ou des “logiciels renifleurs”, tout en poursuivant des finalités diverses : frapper à moindre risque un ennemi moins bien informé, garder les “bonnes” informations stratégiques pour soi, intoxiquer l’adversaire ;

 

4)       L’ART DE CACHER, ou de dissimuler ses intentions derrière un rideau opaque de contre-informations. En clair, il s’agit d’organiser la prolifération d’informations inutiles ou redondantes afin de conserver secrètes celles qui importent vraiment et de les utiliser, le cas échéant, contre un adversaire qui les ignore.

 

Exercer ces quatre arts martiaux, à l’heure actuelle, implique de disposer d’un réseau satellitaire performant : c’est le cas des Etats-Unis et non pas de l’Europe, d’où le nanisme politique et militaire de l’Union Européenne. Celle-ci n’a jamais appliqué les “quatre arts martiaux” que Huyghe a mis en exergue.

 

Sur le deuxième faisceau d’embûches :

 

Pour l’équipe de l’armée française dirigée par Christian Harbulot, la suprématie cognitive découle d’une doctrine de la domination douce. Ces officiers et stratèges français constatent que les Etats-Unis ne raisonnent pas, en ce domaine, en termes d’alliés, d’ennemis et de “neutres”, mais, plus prosaïquement, plus simplement, en termes d’«audiences étrangères», qu’il convient de manipuler, d’influencer et de pervertir. Les objectifs des “opérations cognitives” américaines sont donc

1)       de créer les conditions intellectuelles et psychologiques optimales, pour pouvoir prendre rationnellement les bonnes décisions au bon moment (puisqu’on a sélectionné et trié le bon savoir utile, selon les règles du “troisième art martial”, analysé par Huyghe ;

 

2)       d’empêcher les autres d’en faire autant, après les avoir abreuvé de fausses informations, de fausses valeurs, etc. ;

 

3)       d’obtenir des “cibles” qu’elles adoptent le comportement voulu. Cette méthode générale de la guerre cognitive, actuellement pratiquée par les Etats-Unis, ne peut réussir que s’il y a longue préparation (“Shaping the mind”). Il s’agit bel et bien d’une stratégie globale mûrement réfléchie, depuis des lustres, qui vise la colonisation totale de la sphère des idées, la conquête de la “noosphère”, dans le jargon des initiés. L’objectif final est de créer une superstructure normative mondiale, qui va définir la réalité humaine de manière uniforme, tout en abondant, bien entendu, dans le sens de la politique américaine. C’est l’application, à l’heure des médias électroniques, d’une stratégie culturelle commencée avec le cinéma de Hollywood, dès la fin de la seconde guerre mondiale en Europe et en Asie.

 

L’Europe, qui, comme le reste du monde, est la cible de cette stratégie, ne peut riposter qu’en méditant les mêmes principes. Cela signifie, avant toute chose,

1)       de se réapproprier sa propre histoire, d’en connaître les dynamiques fécondes, qui permettent de consolider ses positions, et les dynamiques perverses, qui mènent à l’implosion ; et cela implique aussi,

 

2)       d’explorer l’histoire de l’adversaire pour faire émerger, chez lui, sur son territoire, des conflits paralysants. En clair, il s’agirait, pour des stratèges européens cohérents, d’exploiter les colères des Noirs américains ou de soutenir habilement les mouvements de contestation intérieurs aux Etats-Unis.

 

La nouvelle gauche altermondialiste a été piégée

 

Autre exemple de manipulation particulièrement réussie, bien mise en exergue par Harbulot : le succès médiatique accordé au fameux livre de Toni Negri et Michael Hardt, intitulé Empire, et considérée par les journaux new-yorkais comme “la plus grande théorie alternative du 21ième siècle”. En effet, cet ouvrage préconise l’émergence d’un vaste réseau de micro-contestations émiettées, qui rejettent toute forme de nationalisme ou de continentalisme, c’est-à-dire qui ôtent d’avance toute assise territoriale à la contestation du globalisme américano-centré. Or sans assise territoriale, il est impossible de s’opposer à Washington. La guerre cognitive permet donc au système médiatique, au service de l’impérialisme et du globalisme américains, d’offrir aux altermondialistes une théorie toute faite qui va les induire en erreur et les condamner au sur-place. Le pouvoir mondial réel coupe ainsi l’herbe sous les pieds de la contestation contemporaine orchestrée par la nouvelle gauche altermondialiste et induit dans ses rangs un ferment idéologique de dissolution permanente, difficilement éradicable (cf. Christian Harbulot & Didier Lucas, La guerre cognitive. L’arme de la connaissance, Lavauzelle, Panazol, 2002).

 

Sur le troisième faisceau d’embûches :

 

Les guerres indirectes se mènent généralement selon les critères des “conflits de basse intensité” (ou, en anglais : low intensity warfare). L’exemple d’école le plus récent est la guerre dite des “Contras” menée dans les années 80 contre le gouvernement sandiniste au Nicaragua. Mais, pour Xavier Raufer, les “guerres de basse intensité” ne se bornent pas à la seule stratégie d’armer des groupes insurrectionnels dans les pays visés, mais aussi à y entretenir des réseaux mafieux, qui disloquent la cohérence politique, qui servent d’éventuels réseaux d’espionnage et de sabotage. Xavier Raufer nous rend attentifs à une longue histoire, édulcorée et occultée : celle de l’étroite imbrication entre le pouvoir américain et les réseaux mafieux italiens. En effet, la mafia sicilienne, constate-t-il, fait partie intégrante du pouvoir américain. Xavier Raufer nous en montre les mécanismes et explique que les structures mafieuses se déploient à merveille dans les systèmes néo-libéraux, institués justement pour permettre cette fluidité qui arrange bien des “services”. Dans la partie historique de sa démonstration, il rappelle que la mafia est un relais en Europe de la puissance américaine depuis 1943, quand les services spéciaux de Washington ont fait appel à Lucky Luciano, emprisonné en Amérique, pour oganiser le débarquement allié en Sicile.

 

Les mafias ont pour objectif de déstabiliser les sociétés européennes

 

En Belgique, nous avons affaire à trois autres réseaux mafieux, non italiens, particulièrement efficaces : les réseaux marocains, turcs et albanais. Tous trois sont stratégiquement liés aux Etats-Unis et à l’OTAN, notamment par la fusion mafias/armée qui règne en Turquie et par la quasi identité entre l’UCK albanaise et les mafias locales. Quant au Maroc, vieil allié des Etats-Unis, il constitue le pion principal du dispositif stratégique des Etats-Unis en Afrique du Nord : le financement de ce pays s’effectue par le trafic du cannabis en direction de l’Europe (70% de ce stupéfiant consommé en Europe provient effectivement de la région du Rif). Les mafias ont pour objectif de déstabiliser les sociétés européennes, leurs structures politiques (on le voit clairement au niveau de la justice), leurs économies. Elles permettent en outre de réaliser des opérations boursières déstabilisantes, de s’ancrer sur le marché de l’immobilier, d’amasser un argent incontrôlable, de constituer des réseaux d’espionnage, d’armer des structures terroristes, de commettre des assassinats si besoin s’en faut. La non élimination de tels réseaux nous condamne à n’être que les objets misérables d’une stratégie de guerre indirecte particulièrement pernicieuse. Mais dont on voit les résultats : déliquescence totale de la sphère publique, avec la bénédiction d’un personnel politique, manifestement lié à ces réseaux. La peur d’éventuels partis politiques challengeurs est motivée essentiellement par le risque de voir l’édifice en place remis complètement en question, surtout si les partis challengeurs en piste annoncent qu’ils feront la guerre à la drogue, cheval de bataille des mafias marocaines et turques. Les officines anti-racistes, qui font tant de tintamarre dans les médias, n’ont pas pour objectif réel de protéger des citoyens de souche étrangère qui seraient les victimes innocentes d’une vindicte gratuite de la part d’autochtones  xénophobes, mais, plus précisément, de décréter “raciste” toute position critique à l’égard du pouvoir occulte, illégal, mais réel, des diverses mafias ancrées dans la réalité belge. Les officines anti-racistes sont un bel exemple du “quatrième art martial” selon Huyghe : l’art qui consiste à dissimuler ses intentions réelles derrière un écran de fumée idéologico-médiatique.

 

◊ 4ième Partie : Les concepts de Toynbee

 

Dans l’immense œuvre du philosophe britannique de l’histoire, Arnold Joseph Toynbee, nous avons retenu deux idées fondamentales : celle de “défi-et-réponse” (“Challenge-and-Response”) et celle de “retrait-et-retour” (“Withdrawal-and-Return”). Tout défi (“challenge”) entraine une réponse, pour Toynbee, ce qui implique que sa vision de l’histoire est dynamique, libre de tout déterminisme : le champ est toujours ouvert pour de nouvelles réponses, portées par des acteurs divers, hétérogènes, individuels ou collectifs. Toynbee parie sur les capacités créatrices de l’homme; il estime qu’elles finissent toujours par avoir le dessus. Tout groupe humain, juste avant qu’il ne crée une civilisation, subit des défis, issus de l’environnement social ou de l’environnement géographique. Si le défi est trop fort ou trop faible, nous n’assisterons pas à l’émergence d’une civilisation. Exemple : les Eskimos ne développent pas une civilisation, mais plus simplement une culture faite de simples stratégies de survie. Les cultures tropicales, sous leurs climats paradisiaques, ne développent pas davantage de civilisation, l’intensité du défi y étant trop faible. Les défis sont aussi, dans le langage de Toynbee, des “stimuli”. Ils sont de cinq ordres, dans la classification qu’il nous propose : 1) une géographie très âpre; 2) des terres vierges qu’il s’agit de rentabiliser; 3) des coups portés au groupe par des ennemis ou par la nature; 4) une pression extérieure permanente incitant à la vigilance, donc à l’organisation; 5) des pressions intérieures, entraînant la pénalisation d’un ou de plusieurs groupe(s) particulier(s) au sein d’une civilisation dont les principes de base sont autres; cette “pénalisation” entraîne l’émergence d’un mode de vie différent, permettant l’éclosion d’une culture en marge, à laquelle le pouvoir peut ou non attribuer des fonctions sociales ou économiques particulières; ce fut le cas des phanariotes grecs dans l’Empire ottoman; des juifs au Maroc et dans l’Espagne arabisée, puis dans l’Europe centrale germanophone; des Parsis en Inde; des Nestoriens entre la Mésopotamie et le Turkestan chinois. La spécificité de ces cultures procède d’un défi, celui qui les ostracise et les minorise; la spécificité culturelle des populations “pénalisées” constitue donc la réponse à ce type de défi. Pour Toynbee, les civilisations —ou l’efficacité des cultures “pénalisées”— s’instituent quand les conditions multiples de leur émergence concourent à un optimum, c’est-à-dire quand le degré de pénalisation n’est ni trop rude ni trop bénin.

 

Retrait et retour, yin et yang

 

L’Europe et notre civilisation en général, la Russie, notre espace idéologique “pénalisé”, subissent des défis. Ces défis “pénalisants” ou ces pressions extérieures (américaines) ne sont nullement définitifs. En tant qu’espace idéologique “pénalisé”, nous devons acquérir une discipline plus grande, accumuler un savoir pratique, historique, stratégique, et finalement instrumentalisable, supérieur à celui des formations (im)politiques au pouvoir. Nous devons agir comme un “shadow cabinet” perpétuel qui suggère des alternatives politiques crédibles, clairement rédigées et bien charpentées dans leur argumentation. Pour Toynbee, la Cité idéale correspondait à l’idée augustinienne de “Civitas Dei”, soit une réalité transcendantale appelée à s’incarner, comme le Christ s’était incarné dans le monde pour le redresser après sa “chute”. Quand la Cité ne correspond plus à son modèle transcendantal (et ce modèle ne doit pas être nécessairement “augustinien” pour nous... il pourrait être tout simplement grec ou romain), elle sombre dans le “mondain” ou le “profane”, dans le “péché” ou plus simplement, pour Spengler comme pour nous, dans la décadence, voire dans la déchéance. Pour Toynbee, un mouvement ou un espace idéologique qui se contenterait de pleurnicher sur la disparition du temps d’avant la déchéance, qui cultiverait les archaïsmes, serait un mouvement “résigné”, passéiste et passif. L’homme d’action (celui de Blondel?), l’homme animé par l’esprit de service ou de chevalerie, l’homme qui entend œuvrer pour la Cité, se mettre au service de sa communauté charnelle, puise dans le passé les leçons pour l’avenir qu’il va forger par son action vigoureuse. Il n’est pas résigné mais volontaire et futuriste. Il transfigure le réel après un “retrait” (withdrawal), un détachement vis-à-vis de la mondanité déchue, amorphe, qui se complait dans sa déchéance. Ce recul est simultanément un plongeon dans la mémoire (la plus longue...), mais ce recul ne saurait être définitf : il postule un “retour” (return). Le visionnaire devient activiste, prospectif, il donne l’assaut pour remodeler la Cité selon le modèle transcendantal qui lui avait donné son lustre jadis. L’acteur de la “transfiguration” se met donc en retrait du monde, du présent (du présentisme), sans pour autant vouloir le quitter définitivement; son retrait est provisoire et ne peut s’assimiler au refus du  monde que cultivaient certains gnostiques du Bas-Empire; il reste lié au temps et à l’espace; il a un but positif.

 

Toynbee utilise aussi les concepts chinois de “yin” et de “yang”. Dès que la Cité trouve ou retrouve une harmonie, une plénitude qui risque de sombrer dans une quiétude délétère, matrice de toutes les déviances, de tous les vices. La phase de “yang” est alors une phase d’effervescence nécessaire et positive, une phase de tumulte fécond qui vise l’avènement d’un “yin” plus parfait encore. Toynbee évoque notamment le risque d’une rigidification des institutions, où celles-ci, vermoulues, sont idolâtrées par les tenants du pouvoir en place, incapables d’arrêter le flot du déclin. Une phase de “yang” est alors nécessaire, portée par des forces nouvelles, qui ont effectué un “retrait” pour mieux revenir aux affaires.

 

La tâche de la métapolitique, l’objet de la “guerre cognitive” en cours est justement de générer à terme ce que Toynbee entendait par “transfiguration” ou par “yang”. A nous d’être les acteurs de cette transfiguration, de nous joindre aux forces porteuses du “yang” à venir, des forces encore dispersées, disparates, mais qu’il faudra unir en une phalange invincible !

 

Robert STEUCKERS.

(Forest-Flotzenberg, novembre 2003).

 

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vendredi, 12 juin 2009

Krieg, weil Saddam die Dollar-Herrschaft in Frage stellte

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Archiv - September 2003

Krieg, weil Saddam die Dollar-Herrschaft in Frage stellte

Gerhoch Reisegger über den 11. September 2001, den Irak-Krieg und Alternativen zur Globalisierung

http://www.deutsche-stimme.de/

 

DS: In Ihrem neuen Buch »Wir werden schamlos irregeführt – Vom 11. September zum Irak-Krieg« wollen Sie durch die Auswertung und Verknüpfung einer Vielzahl von Quellen belegen, daß sowohl die Anschläge vom 11. September 2001 als auch der US-Angriffskrieg gegen den Irak das Ergebnis von Fälschungen und Manipulationen der Geheimdienste und der Administration der USA sind. Worauf stützen Sie Ihre These, daß die Attentate des 11. September ein lange geplanter und technisch wie medial mit größtem Aufwand durchgeführter Betrug sind?

 

Reisegger: Die als »Beweise« gelieferten Fernseh-Bilder erwiesen sich bei genauer Analyse als Fälschungen, sogenannte »virtual reality« eben. Wenn jenseits jedes vernünftigen Zweifels feststeht, daß Ursache und Wirkung nicht im behaupteten Zusammenhang stehen können, kann das Ereignis – die angeblich als fliegende Bomben benutzten Kamikaze-Flieger – aus physikalischen und geometrischen Gründen unmöglich stattgefunden haben. Dies haben wir anhand der publizierten offiziellen »Beweise« nachgewiesen. Die Wirkung – der Brand und der anschließende Kollaps der WTC-Türme und von Teilen des Pentagons – muß daher andere Ursachen haben. Damit sind alle weiteren Geschichtchen über Passagierlisten, Flugzeugentführungen, Bekenner-Videos eines Phantoms bin Laden, gefundene Betriebsanleitungen zum Fliegen einer Boeing 767 in Arabisch, das was sie sind: Desinformation.

Sobald dies einmal unumstößlich feststeht, ist auch der ganze Verlauf des Geschehens in völlig anderer Weise nurmehr zu erklären und zu verstehen. Es handelt sich also offensichtlich um ein Staatsverbrechen, dessen Urheber an den entscheidenden Hebeln der Macht sitzen, die bei einer derartigen Planung von den beabsichtigten politischen Wirkungen ausgehen, das heißt die medial zu transportierende politische »Erklärung« des Geschehens ist der eigentliche Ausgangspunkt. Die »Geschichten« rund um das Ereignis sind daher die lange geplanten und gut vorbereiteten Kernpunkte, zu denen ein passender Auslöser – »9.11.« – in Gang gesetzt wurde.

Die politische und ökonomische Analyse würde natürlich auch zu einem »gesetzmäßig« ablaufenden Prozeß führen, an dessen Ende ebenso der »perpetual war« zur Erreichung des »ewigen Friedens« steht. Nur sind diese »Gesetze«, die man in den Politischen Wissenschaften aufgestellt hat, nicht von der gleichen unerbittlichen Strenge und Konsequenz wie die Gesetze in den Naturwissenschaften; sie sind im strengen Sinn überhaupt keine »Naturgesetze«, so daß man hier lange darüber streiten kann ob und welche Ursachen diese oder jene Wirkungen gehabt haben. Im Fall des 11. September aber sind die politischen und ökonomischen Fakten in den USA schon seit langem so, daß sie ganz zwanglos die Anschläge erklären und dafür auch das stärkste Motiv abgeben.

 

DS: Die Zwillingstürme des World Trade Center waren eines der wichtigsten Symbole für die ökonomische und kulturelle Macht der USA überhaupt. Wäre es denn nicht geradezu irrsinnig und selbst für eine Supermacht wie die Vereinigten Staaten hochgefährlich, solch ein Machtsymbol im Zuge eines Komplotts selbst zu zerstören?

 

Reisegger: Ich glaube, daß hier die »Symbolik« erstens sehr überschätzt wird, denn Symbole sind letztlich geistig-ideelle Angelegenheiten, und ich sehe nicht, daß dazu in den USA eine besondere Affinität besteht. Im Gegenteil, im Land des grenzenlosen Materialismus scheint mir das das letzte Motiv zu sein, das die Handlungen determiniert.

Für die Änderung der Anti-Kriegsstimmung in den USA gegen den Eintritt in den Zweiten Weltkrieg bedurfte es des »Überfalls« der Japaner auf die Pazifik-Flotte der USA in Pearl Harbor, für den Vietnam-Krieg des selbst inszenierten Vorfalls in der Tonking-Straße, etc. Die Liste ist beliebig fortsetzbar. Für die einseitige Aufhebung des Völkerrechts, den »Krieg gegen den Terror«, der sich laut Sicherheitsberaterin Condoleezza Rice gegen 60 bis 70 Länder richtet, also die halbe Welt, bedarf es eines besonders starken Mittels: eben der Sprengung der WTC-Türme. Im übrigen verläßt sich die Macht der USA ja nicht auf Symbole, sondern ihre Macht stützt sich ganz einfach auf die ungeheuerlichsten Gewaltmittel und Terrormethoden.

 

DS: In der nicht unbeträchtlichen Literatur zum 11. September 2001, die die Ereignisse anders als offiziell verordnet deutet, sind Sie einer der wenigen Autoren, die versuchen, die Zerstörung des WTC in den Gesamtzusammenhang der diesem Ereignis vorausgehenden, sich zu Ungunsten der USA zuspitzenden weltwirtschaftlichen und weltpolitischen Lage zu stellen. Wie stellt sich diese Lage in groben Zügen dar?

 

Reisegger: Dies ist mit einem einzigen Satz zu beantworten: Die USA sind bankrott. Wirtschaftlich, moralisch und geistig. In welcher Dimension sich dieser Bankrott abspielt, ist ja wesentlicher Inhalt des Buches. Er übersteigt all unsere Vorstellungskraft. Noch sind die USA die gefährlichste und bedrohlichste Militärmacht. Allerdings hat Macht weit mehr Dimensionen als nur die militärische. Wenn eine oder mehrere dieser anderen Dimensionen der Macht weggebrochen sind, so reicht die militärische nicht aus, den Status zu halten.

Die Wirtschaft als eines der wichtigsten Elemente politisch-gesellschaftlicher Existenz ist, wie erwähnt, bankrott. Die Legitimität, manchmal als die »moralische« Autorität oder »Führungsrolle« der USA umschrieben, ist ebenfalls vor aller Welt in nichts zerronnen. Einen gesellschaftlichen Zusammenhalt gibt es nicht, weil es in den USA ja nicht einmal den Begriff des Volkes gibt. Die bei uns – fälschlich – geglaubte geistige und wissenschaftliche Potenz ist ein Ammenmärchen; tatsächlich ist das allgemeine Bildungsniveau erbärmlich und der Analphabetismus breiter Schichten erinnert an Dritte-Welt-Länder.

Die Perspektiven sind bloß in Deutschland so verbogen, weil wir als besiegtes und total umerzogenes Volk am selbständigen Denken seit bald 60 Jahren gehindert werden. Was bei uns angeblich geglaubt wird oder geglaubt werden muß, ist in anderen Ländern etwas entspannter. Dort hat man längst die Zeichen der Zeit erkannt und sieht die USA wie sie sind: ein verkommenes Imperium, das sein Ende mit einem letzten großen Ausfall – im totalen Krieg – aufzuhalten sucht.

 

DS: Welche Motive haben Ihrer Ansicht nach die USA zum Irak-Krieg bewogen?

 

Reisegger: Motiv für den Irak-Krieg war ausschließlich das Öl. In einem doppelten Sinn freilich. Meist sieht man bei uns nur die alleinige Ressource Öl als Energieträger einer industrialisierten Welt. Diese zu besitzen und zu kontrollieren wäre schon Motiv genug, sich mittels eines Raubkrieges in deren Besitz zu setzen. Der meiner Ansicht nach viel bedeutendere Grund lag aber im »Verbrechen« Saddam Husseins, den Dollar als Handelswährung in Frage zu stellen, indem er das irakische Öl nicht mehr für Dollar verkaufte. Das heißt, er hat die Funktion des Dollars als Reservewährung in Frage gestellt. Hier verstehen die USA aber keinen Spaß, denn mit einem Satz die Sache auf den Punkt gebracht handelt es sich um folgendes: Die USA fabrizieren Dollar – fiat-money, aus dem Nichts geschöpft und durch nichts gedeckt –, und der Rest der Welt produziert Güter, leistet Dienstleistungen oder fördert Rohstoffe, die mit diesen Dollar-Billionen von den USA »gekauft« werden. Wertvolles wird also gegen Wertloses – Papiergeld – getauscht.

Auf dieser Grundlage funktionierte der geradezu von der US-Verfassung garantierte »American way of life«. In dem Augenblick, wo der Rest der Welt nicht mehr mitspielt, ist der Bankrott der USA auch unmittelbar von den Amerikanern zu spüren, denn dann »geht nichts mehr«. Das heißt, der Irak hatte jenseits des Ölbedarfes einer amerikanischen Verschwendungsgesellschaft (über 50 Prozent des in den USA verbrauchten Öls muß importiert werden, in den kommenden Jahren steigt dies auf zwei Drittel des Bedarfes an.) mit seiner Weigerung, Dollars weiter anzunehmen, den USA den Totenschein ausgestellt.

 

DS: In Ihrem Buch stellen Sie die These auf, daß die USA we-gen einer sich ankündigenden Dollar-Krise und einem historisch singulären volkswirtschaftlichen Ungleichgewicht zu einer globalen »Flucht nach vorn« gezwungen sind. Können Sie einige Aspekte dieser makroökonomischen Krise der USA erläutern?

 

Reisegger: Die obigen Ausführungen sind bereits die Umrisse der Krise der USA. Leider bleiben wir davon nicht verschont. Das Problem ist, daß in einer begrenzten Welt mit begrenzten Ressourcen ein exponentielles Wachstum nicht »ewig« möglich ist. Die kapitalistischen Wirtschaftsdoktrinen beruhen aber gerade darauf. An einem Beispiel kann ich es vielleicht klarmachen: Geld und Waren/Dienstleistungen befinden sich in einem Kreislauf und gleichsam in einem »Gleichgewicht«. Wenn also das Geld sich durch Verzinsung ständig nominell vermehrt, müssen sich die Waren und Leistungen im gleichen Ausmaß vermehren. Das übersteigt natürlich längst den natürlichen Bedarf.

Es bedürfte einer Reform des Geldwesens, weil von hier aus die derzeitigen inneren Zwänge ausgehen. Das bedeutet einerseits eine Normierung des Geldes (um es den Manipulationen der Politiker und Banken zu entziehen), eines weitgehenden Zinsverbotes, um arbeitslose Einkommen zu unterbinden, seines Einsatzes als Risiko-Kapital, was konkret bedeutet, daß Kapitalbesitz denselben Gewinn- und Verlustmöglichkeiten unterliegt, wie jedes menschliche Unternehmen. Das ist natürlich das schiere Gegenteil zu einem MAI-Abkommen, das den (Finanz-) Kapitalbesitzer auf Kosten der Allgemeinheit allein vor jeglichem Risiko und Verlust schützen soll, wie dies eigentlich auch bei jedem Bankkredit – in der Regel – der Fall ist (auch wenn ein Geschäft kein Erfolg wurde, sind Zinsen und Tilgung für ein dafür zur Verfügung gestelltes Darlehen weiter zu zahlen).

 

DS: Als ökonomische Alternative zur Globalisierung schlagen Sie ein Autarkiekonzept vor. Wie müßte dieses beschaffen sein, um ökonomisch tragfähig zu sein?

 

Reisegger: Bei den Ausführungen zur Autarkie bezog ich mich auf eine Ausführung Erich Frieds und hatte auch die Ideen Johann Gottlieb Fichtes vom »Geschlossenen Handelsstaat« im Kopf. Die Durchführung solcher alternativer Konzepte ist freilich eine schwierige Sache, weil man ja gegen ein ganz anders gepoltes Umfeld ankämpfen muß. Die Grundgedanken sind aber die: Die Autarkie basiert auf der Volksgemeinschaft und auf Solidarität, die es natürlich nur in kleineren, überschaubaren Gesellschaften geben kann. Das impliziert von vornherein eine organische Ordnung und Organisation des Gemeinwesens. Damit werden schon viele der heutigen Auswüchse auf natürliche Weise begrenzt. Im praktischen Bereich handelt man auf Gegenseitigkeit: Das heißt man organisiert den Außenhandel bi- oder multilateral. Ich liefere dies und jenes gegen bestimmte andere Güter in einem ausgeglichenen Umfang. Die Handelsströme bleiben ausgeglichen, vergleichbare Güter sind die wertmäßige Grundlage des Tausches/Handels. Märkte werden gegen ruinöse Konkurrenz geschützt, weil die importierten Mengen dem Bedarf angepaßt sind. Markt und Wettbewerb sind nach wie vor die innerstaatliche Norm, aber innerhalb einer jedem Volk eigenen Ordnung.

Es ist dies in der Tat die Antithese zur Globalisierung – und die einzige Hoffnung zum Überleben. Im Grunde war und ist dies die Norm. Die relativ kurze Zeit des angeblichen Fortschritts, der »offenen Märkte«, der »offenen Gesellschaft«, kann sich nicht als in der Menschheitsgeschichte »bewährtes« Modell ausgeben. In einem Jahrhundert haben wir die größten Katastrophen erlebt, und wie es aussieht beschleunigt sich alles noch mehr.

 

DS: Der Rezensent Ihres Buches in der Zeitung »Junge Freiheit« stellte sich die Frage, »was die Welt und vor allem Europa und Deutschland von einem Staat zu erwarten haben, in dem Ereignisse wie der 11. September möglich und zum Mittel der Politik geworden sind«. Darf ich diese Frage an Sie weitergeben?

 

Reisegger: Nun, die Frage habe ich in meinem Buch selbst schon gestellt. Sie ist, wie Sie unschwer erkennen, eine rhetorische, und somit zugleich die Antwort. Wir haben absolut nichts von diesem Staat zu erwarten. Ich habe zwar geschrieben und es in der nächsten Ausgabe meines Buches nochmals ausdrücklich betont: ich kann zwischen dem Volk und dem einfachen Amerikaner und den politischen und wirtschaftlichen »Eliten« natürlich unterscheiden. Wenn also von den USA, Amerika, und so weiter die Rede ist, meine ich das System, den »American way of life«. Es wäre auch zu billig zu sagen, die Amerikaner sind mitschuldig, weil sie ja die demokratische Möglichkeit hätten, sich eine andere Regierung zu wählen. So etwas ist ein Popanz und die Vokabel »Demokratie« schafft natürlich nichts dergleichen. Sie, die Amerikaner, sind in Wahrheit ebenso Geiseln ihrer eigenen kriminellen Cliquen, die die Verfassung, die Bürgerrechte, den Rechtsstaat überhaupt längst außer Kraft gesetzt haben.

Andererseits ist aber auch nicht viel von »den« Amerikanern zu erwarten. Das, was Gotthard Günther in seiner »Amerikanischen Apokalypse« beschrieben hat, ist möglicherweise eine sich anbahnende Änderung hin zu einem Dritten Weltalter, als Nachfolge der Hochkulturen der zweiten Stufe, wo sich aber die jeweiligen Vertreter ebensowenig zu sagen haben wie jene der ersten Stufe (der Cromagnon-Mensch), denen der zweiten Stufe (den Vertretern der uns historisch bekannten folgenden Hochkulturen). Wir haben uns nichts zu sagen, die Banalität amerikanischer Philosophie wirkt auf uns geradezu lächerlich. Die wirkliche Übernahme dieser Lebensweise wäre der Tod des »Alten Europa«, dessen, was Europa und das Abendland war und noch ist.

 

DS: Zum Schluß noch eine grundsätzliche Frage: Die Fakten- und Materiallage bei vielen weltpolitisch wendeträchtigen Vorkommnissen in der Geschichte ist nach wie vor zwiespältig. Da besteht einerseits die Gefahr, ein vorgegebenes und manipuliertes Geschichtsbild unhinterfragt zu übernehmen, das andere Extrem besteht darin, sich in haltlosen Verschwörungstheorien zu verstricken, die im Endeffekt nur die eigenen Ohnmachtsgefühle erhöhen. Welcher Umgang mit Geschichte ist Ihrer Ansicht nach angemessen?

 

Reisegger: Damit komme ich zu einer grundsätzlichen Frage des Umganges mit Geschichte: wie kann man Sein und Schein auseinanderhalten? Nun, am besten indem man bei der Wahrheit bleibt. Ich reagiere allergisch auf die Unterstellungen mit dem Wörtchen »Verschwörungstheorie«. Immer dann wenn man jemandem auf die Schliche kommt, ertönt dieses Wort wie die Posaunen von Jericho. Es ist klar, was damit bezweckt wird: jeden Diskurs zu unterbinden, indem man diffamiert. Lautstärke gegen Inhalt. Dogma gegen Wahrheitssuche. Das funktioniert, aber – zum Glück – nicht wirklich.

Wie kommt man nun durch dieses Dickicht an Fakten und Fiktion? Man muß eine ganzheitliche Betrachtung anstellen, das Allgemeine vor dem Speziellen und über längere Zeiträume das Prozeßhafte zu erkennen versuchen, auch die Parallelen, die eigenen Methoden und ihren Geltungsbereich kennen, aber ebenso jene der »anderen Seite«. Das Studium Carl von Clausewitz‘ kann nicht schaden: Beurteilung der Lage und der Mittel in bezug auf das Ziel, und zwar der eigenen wie jener des Feindes. In einem so rückgekoppelten Prozeß entwickelt man die Strategie, wobei sich je nachdem Ziel wie Strategie ändern können. Damit erkennt man meist auch, was Faktum und Täuschung ist, was fehlt und was abstrahiert werden kann.

Um nochmals auf den 11. September zurückzukommen: Wenn die zentrale These dieses ganzen (Lügen-) Gebäudes einstürzt, ist es nicht mehr notwendig, sich mit allen Details in ihrer unendlichen Verästelung zu befassen, denn stürzt einer der sie tragenden Pfeiler, stürzt das ganze Gebilde in sich zusammen. Es ist dann irrelevant, ob oder ob nicht jemand angeblich mit dem Handy aus einem Flugzeug telefoniert hat, oder ob oder ob nicht jemand etwas gesehen hat (haben kann) oder sich es nur einbildet, oder ob man in einem Segelfliegerverein eine Boeing zu fliegen lernen kann oder nicht.

 

DS: Sehr geehrter Herr Reisegger, ich bedanke mich für das Gespräch.

 

Das Gespräch führte DS-Mitarbeiter Hugo Fischer

Biographie

Gerhoch Reisegger

Reisegger arbeitet als selbständiger Unternehmensberater, zuvor war er Geschäftsführer eines Informatik-Unternehmens und Marketing-Direktor der österreichischen Tochter eines US-Computer-Konzerns. Dem österreichischen Bundesheer gehört er als Reserveoffizier an. Reisegger ist ein gefragter Vortragsredner, beispielsweise beim internationalen Kongreß der Russischen Akademie der Wissenschaften. Er ist Gründer und Obmann der »Johann Heinrich von Thünen Gesellschaft Österreich zur Förderung neuer Ansätze in Land- und Forstwirtschaft und der Nationalökonomie«. Er entfaltete eine rege publizistische Tätigkeit, beispielsweise für die Zeitschrift »Staatsbriefe«, die Weltnetzseite »www.staatsbriefe.de« und das Weltnetz-Nachrichtenportal »www.rbi-aktuell.de.« Im Mai diesen Jahres erschien von unserem Gesprächspartner das Buch »Wir werden schamlos irregeführt – Vom 11. September zum Irak-Krieg« (496 S., Pb., 153 Abb., EUR 19,50).

jeudi, 11 juin 2009

"Barrez-vous, les Américains!"

« BARREZ-VOUS LES AMERICAINS ! »

 

Editorial du numéro 36 de Rébellion ( bientôt disponible)

 

* Propos tenu par un prolétaire de l’usine Molex à Villemur-sur-Tarn


Cela est désormais clairement dit ; la rhétorique médiatique ne prenant le soin que de présenter la chose sous le mode interrogatif : la classe ouvrière serait-elle devenue xénophobe ? Qu’a-elle fait ? Elle proteste contre les délocalisations… La suspicion est lancée et comme on le sait, le traitement réservé à ceux que le pouvoir a choisis arbitrairement de qualifier comme tels, est la marginalisation et surtout la répression. Toute velléité de défense un peu vive, de la part des prolétaires victimes des licenciements massifs et quotidiens, est d’emblée qualifiée de « violences faites aux biens et aux personnes ». Il s’agit en fait des « séquestrations » de dirigeants d’entreprises dont usent les travailleurs afin de se faire entendre et non d’actes de vandalisme et de violence illégitime comme le laisse entendre le gouvernement. Ainsi, grâce à la terminologie juridico-politique dominante, est neutralisé le sens de l’action concrète conduite par ceux qui sont acculés par le capital dans l’ultime réserve de la protection de leur simple existence et survie économique et sociale, de même qu’est corrélativement brouillée, occultée, la forme de la lutte de classe que peut prendre cette autodéfense du prolétariat. Un étau répressif et idéologique, est de ce fait constitué, entre d’un côté, le pôle « xénophobie » et de l’autre, « violence illégitime ». Seul, le discours idéologique du capital et de ses représentants gouvernementaux, institutionnels et médiatiques - dans sa parfaite transparence neutralisante, instrumentalisante - aurait la légitimité de dire la vérité objective dans son unicité, gommant par là même les aspérités des contradictions les plus vives, les plus exacerbées, qui naissent pourtant, de manière bien réelle sur le terrain de la vie sociale. Car ce qu’il faut cacher est le secret le plus profond, le plus inavouable : le capitalisme est un système agonisant ; aucune thérapie ne viendra à bout de son pourrissement inéluctable. Sa contradiction originelle le mine toujours mais de façon toujours plus exacerbée, plus ample et intense : accumulation de richesses à un pôle de la société, paupérisation, précarité, insécurité sociale à un autre. Satisfaction, jouissance indécente et aliénée d’un côté, inquiétude permanente, lutte quotidienne pour continuer son existence de l’autre.

Cette situation a l’avantage – vécu douloureusement par le prolétariat – de poser clairement à la conscience des travailleurs, la question de l’absence de réponse à la crise dans le cadre du capitalisme. Cette crise dont les « spécialistes » nous disent qu’elle ne sera qu’un mauvais souvenir dans quelques mois ou une année et qui nous est ainsi présentée comme une fatalité naturelle, certes d’ampleur inégalée mais comme, somme toute, il peut y en avoir dans l’histoire naturelle climatique. Météorologie, économie politique même combat ! Il serait d’ailleurs intéressant d’étudier sous cet angle, l’usage idéologique quotidien du message météorologique adressé aux citoyens par les nouveaux prêtres médiatiques commentant celui-ci. Zeus supplanté par Météo France : que pouvons-nous faire de notre vie alors que le ciel nous tourmente quotidiennement ? Osciller entre fatalisme et reconnaissance impuissante des déterminismes naturels. La vie sociale serait du même ordre et de même niveau. Pourtant les prolétaires commencent à prendre des initiatives et c’est bien cela qui inquiète la classe dominante. La mobilisation contre les licenciements est importante et certains ont même l’idée de traverser les frontières afin de soutenir leurs camarades en Allemagne, par exemple, victimes des mêmes mesures, le trop fameux « plan social » (encore une entourloupe de vocabulaire, que de rhétorique de la part de la bourgeoisie ! C’est tout ce qui lui reste depuis qu’elle ne pense plus). Leur action exprime bien un internationalisme en acte (et non verbeux comme celui des gauchistes) articulé à la préoccupation de la conservation locale de leurs conditions de travail dont se moquent bien les actionnaires et dirigeants des entreprises capitalistes (1) : le capital n’a pas de patrie. De là, la parole de dépit- que nous citons en exergue - du prolétaire de Molex à la suite de la « libération », grâce à la présence des forces de police, du dirigeant « séquestré » de cette usine, (« Barrez-vous les américains ! ») mais qui n’en révèle pas moins une compréhension intuitive de la condition faite aux travailleurs par les multinationales toutes puissantes. Dans sa simplicité, la formule va bien plus loin que toutes les arguties proposées par les têtes « pensantes » de la politique qui ne voient là qu’impudence xénophobe. Elle touche du doigt la violence faite aux exploités par la mondialisation impérialiste du capital sur tous les continents. Cette violence faite aux économies locales de subsistance où s’effondre la simple possibilité de se nourrir modestement dans les pays du Sud, engendrant les bidonvilles des mégalopoles et l’émigration de désespoir, la violence faite de guerres locales où s’affrontent des bandes armées par le capital afin de se partager des territoires soumis à la rapine, la violence déclenchée par les interventions américano-otanesques à visées géostratégiques et géoéconomiques (Irak, Balkans,Afghanistan, déstabilisation du Pakistan, etc.), la violence enfin que subissent les prolétaires des nations relativement plus nanties mais qui voient leurs acquis sociaux et vitaux se réduire comme peau de chagrin. Ainsi le rejet de ce système par les travailleurs commence à se faire entendre et c’est cette parole qu’il s’agit d’étouffer sous la calomnie voire la répression.

 

Il restera un long chemin à parcourir, pour les plus humbles, afin de comprendre la portée et la nature des enjeux qu’il leur faudra affronter. Ils n’auront pas d’alliés parmi les partis politiques électoralistes (2), de faux amis au sein de ceux se proclamant « anticapitalistes », pèsera la chape de plomb du clivage droite/gauche et pour finir, en Europe, ils seront sous surveillance du cheval de Troie de l’OTAN. Pour autant, le capital se nourrit de leur travail (3) et de ce point de vue il dépend d’eux. La seule perspective qui vaille, alors, est le socialisme ; lorsque les prolétaires forgent les instruments politiques leur permettant de renverser le rapport de force entre les classes sociales.

 

 

Notes :

 

1.« L’intérêt exprime une fraction de la plus-value ; un simple quota du profit classé sous un nom particulier ; le quota qui revient au simple propriétaire du capital, qui est intercepté par lui. Mais cette partition simplement quantitative se transforme en partition qualitative qui donne aux deux fractions une forme concrète métamorphosée dans laquelle ne semble plus battre la moindre artère de leur être originel. […] L’intérêt en soi exprime donc précisément l’existence des conditions de travail en tant que capital dans leur opposition sociale au travail et leur métamorphose en forces personnelles exerçant leur pouvoir sur le travail. Il résume le caractère aliéné des conditions de travail par rapport à l’activité du sujet. Il représente la propriété du capital ou la simple propriété capitaliste, en tant que moyen de s’approprier les produits du travail étranger, comme une domination s’exerçant sur du travail étranger. Mais il représente ce caractère du capital comme quelque chose qui lui revient en dehors du procès de production lui-même, et n’est en aucune façon le résultat de la déterminité spécifique de ce procès de production. Il ne le représente pas en opposition au travail, mais, au contraire, sans rapport avec le travail et comme un simple rapport entre un capitaliste et un autre capitaliste. » Karl Marx. Théories sur la plus-value. Tome III. P.580.81.82. Editions Sociales. Lorsque le fétichisme du capital se reflète de manière inversée dans la conscience des actionnaires et des financiers sous la forme de l’inquiétude pour leur taux d’intérêt ce sont les affres du chômage et des délocalisations que vivent concrètement les prolétaires.

  1. Dont les représentants européens élus ont montré, une fois de plus, leur servilité envers une idéologie impérialiste en quittant la salle lors du discours du Président iranien à la conférence dite Durban II.

  2. Ceux qui cherchent à dépasser le faux clivage droite/gauche devraient trouver là matière à réflexion, c’est-à-dire dans la dynamique du rapport entre classes sociales et dans la recherche adéquate des moyens politiques et doctrinaux, nécessaires à une intervention dans les luttes politiques et sociales. D’après les derniers chiffres disponibles et d’après les extrapolations rationnelles que l’on peut faire, il y a environ, aujourd’hui, entre 8 et 10 millions de personnes vivant sous le seuil de pauvreté. Cela s’appelle la prolétarisation. Potentiellement, l’explosion sociale guette le système. Le mouvement théorique et pratique auquel nous appartenons est l’expression de cette potentialité.

 

mercredi, 10 juin 2009

Faux dialogue avec un faux islam

Faux dialogue avec un faux islam

Ex: http://www.insolent.fr/

 

090603 Le président Barack Obama, partant pour l'Égypte et pour l'Arabie ne pouvait pas mieux poser le problème : "Les États-Unis et le monde occidental doivent apprendre à mieux connaître l'islam" (1).

Mieux connaître l'islam et les pays musulmans ? Excellente intention. Nous ne saurions trop lui recommander, à cet égard, la découverte des travaux de Henri Lammens. (2)

Mais le sens véritable de ce discours du chef d'État américain avait été expliqué dès sa prestation lors du Forum de la prétendue "alliance des civilisations" à Istanbul, les 6 et 7 avril 2009. L'idée stratégique, qui se veut géniale, consiste à tendre la main à ceux qu'on considère comme des "islamistes modérés". Pas très original. GW Bush ne disait pas autre chose. VV Poutine le répète tous les jours. En 2001, Margaret Thatcher avait fait scandale en remarquant le peu d'empressement de tels amis à condamner le 11 septembre.

Disons donc à ce sujet, sans exclure nécessairement la pertinence d'un tel calcul, qu'on gagne à savoir de quoi on parle.

Or, l'étiquette a été inventée, et a commencé d'être utilisée pour désigner le parti AKP, actuellement majoritaire au parlement d'Ankara, et dirigé d'une main de maître par son fondateur Recep Tayyip Erdogan.

Le sophisme politiquement correct consiste à en faire l'équivalent oriental de la démocratie chrétienne.

Il nous semble donc utile d'en savoir plus sur les idées et sur les références de cet homme politique et de son mouvement.

Certains imaginent parfois le chef du gouvernement actuel d'Ankara comme une sorte d'habile démagogue "populiste". Corrigeons cette erreur. Sous ses dehors apparemment violents et sanguins, capable de claquer la porte d'un débat qui lui déplaît (3) il s'agit d'un personnage fin et subtil

La plus grosse bourde politique qu'on lui connaisse fut de réciter, il y a plus de 10 ans l'œuvre d'un poète.

On aime beaucoup les poèmes en orient, on les comprend un peu moins bien en Europe. Connaître l'Islam consiste aussi, cependant, à savoir entrer dans cette logique.

Ainsi, l'actuel Premier ministre a beaucoup pâti d'un fameux discours. Prononcé en décembre 1997, lors d'une campagne électorale à Siirt, ville dont il deviendra député lors d'une élection partielle en mars en 2003 (4), quelques phrases firent scandale.

L'orateur sera jugé en 1998. Et il purgera même en 1999 une peine de prison de 4 mois, assortie d'une privation de ses droits civiques de 5 années. À cette date, et pour cette raison, il prendra le virage décisif de sa carrière. Il décide en effet de se séparer, pour des raisons de méthode, de son vieux chef Necmettin Erbakan. Rappelons que sous l'étendard de ce dernier, il avait conquis en 1994 pour les islamistes la mairie d'Istanbul.

Le fameux passage incriminé doit être rappelé : "Les minarets sont nos baïonnettes, les coupoles nos casques, les mosquées nos casernes et les croyants nos soldats."

Or, à première vue on serait tenté de juger le propos ambigu. On pourrait même l'interpréter comme une volonté de conquête pacifique par l'islamisation, par les "mosquées" plus que par les "casernes".

Comment se fait-il que, pour ce simple extrait d'un poème, pour une citation littéraire en somme, car il s'agit de cela, on l'ait mis un temps au ban du débat démocratique ?

Redisons-le : proclamé inéligible, il attendra plusieurs années avant d être réintégré dans l'espace de la république. On ne pouvait faire moins dans un régime se prévalant des valeurs occidentales que de reconnaître, un an après la victoire de son parti, que le peuple avait tranché en sa faveur.

Selon les critères habituels de l'Union européenne, Erdogan peut même passer pour persécuté et ses adversaires laïcs pour d'odieux persécuteurs.

Nous soupçonnons d'ailleurs les négociateurs bruxellois d'en juger ainsi.

Nous constatons en effet qu'à Bruxelles on préfère discuter avec les islamiques qu'avec les laïques.

Peut-être changerait-on d'avis en découvrant l'identité du charmant "poète" véritable auteur du texte jugé explosif.

Car à son sujet, aucune ambiguïté ne saurait être invoquée.

L'auteur originel de la citation maudite s'appelait Ziya Gökalp, de son vrai nom Mehmed Ziya. Né en 1876, à Diyarbekir, certains le soupçonnent pour cette unique raison d'une ascendance kurde. Il prendra son pseudonyme de Gökalp, qui signifie "le héros bleu", en tant que militant puis dirigeant du parti "Union progrès" : il fera figure de théoricien de la révolution jeune-turque.

Rappelons que ce mouvement était dirigé essentiellement contre ce qu'on appelait, alors, "l'ottomanisme". C'est-à-dire qu'il refusait les politiques de réformes menées à partir des années 1830, période connue sous le nom de "Tanzimat", et dont le programme tendait à établir l'égalité civile et militaire entre toutes les composantes de l'Empire ottoman. Les jeunes-turcs s'opposaient à cette émancipation. (5)

Rêvant d'un grand empire allant de l'Albanie à l'Asie centrale, et théoricien lui-même de ce programme "pan-touranien" et "pan-turciste" Gökalp allait même plus loin dans la précision. À ses yeux on ne pouvait accorder aucune place aux minorités chrétiennes, aux "Grecs, Arméniens et Juifs, corps étranger dans la nation". L'égalité ne pouvait être reconnue aux "giaours" supposés infidèles puisque "islam veut dire soumission".

Il voulait d'autre part forcer la turcisation linguistique et ethnique de l'Empire.

On peut donc, à bon droit, considérer ce personnage comme un précurseur des totalitarismes du XXe siècle. Il sera écarté et exilé, entre 1919 et 1922, en raison de sa compromission avec les crimes jeunes-turcs. On peut dire enfin qu'il avait théorisé le génocide des Arméniens de 1915, que Talaat Pacha mit en œuvre et qu'Enver Pacha couvrit de son autorité politique.

Voilà la référence très poétique de l'actuel chef de gouvernement turc Erdogan. Peut-on vraiment assimiler son parti à l'inoffensive démocratie chrétienne ?

On aime beaucoup les poèmes en orient, on les comprend un peu moins bien en Europe. Pour cela, et pour quelques autres raisons, je pense inopportun de faire de la Turquie un État-Membre de l'Union.

Apostilles

  1. Déclarations sur Canal + le 2 juin
  2. cf. "À redécouvrir : L'Islam, croyances et institutions"
  3. Comme il l'a fait à Davos en janvier 2009.
  4. Ville kurde, Siirt avait voté en décembre 2002 à 32 % en faveur du parti kurde "Dehap". Mais celui-ci fut écarté de l'Assemblée, n'ayant pas obtenu 5 % à l'échelon national, et il donna aux élections partielle qui suivirent une consigne d'abstention. M. Erdogan, dont le parti venait d'obtenir la majorité des, sièges au parlement fut élu lors du scrutin partiel par 82 % des votants.
  5. cf. L'Insolent du 24 avril Racines jacobines des crimes turcs"

JG Malliarakis
2petitlogo

 

vendredi, 05 juin 2009

La Chine à l'offensive contre le dollar

La Chine à l'offensive contre le dollar

Alors que la crise économique bat son plein, contrairement à ce que proclament, sans grande conviction, nos augures gouvernementaux, alors que l’économie américaine s’effondre, les relations financières entre les Etats-Unis et la Chine se cantonnent dans l’opacité. Sur ce sujet, les communiquants sont discrets et les profanes n’y voient pas très clair. A vrai dire, la discrétion a toujours été une des premières vertus de l’empire du Milieu et peut-être bien que les communicants n’ont rien d’autre à dire de plus que nous ne sachions déjà.

Les Chinois, grands amateurs de bons du trésor américains, sont les premiers créanciers des Etats-Unis ; le yuan serait fortement sous-évalué, permettant aux Américains d’y trouver un financement de leur dette publique ; la Chine souhaiterait, appuyée par l’Iran, les pays du BRIC et peut-être bien par la Russie, se désolidariser du dollar pour adopter une nouvelle monnaie de réserve internationale qui le remplacerait, dans un système placé sous les auspices du Fonds monétaire international et dégagé des influences politiques de certains pays ; la Chine augmente ses réserves d'or qui ont quasiment doublées durant les cinq dernières années pour atteindre désormais 1054 tonnes – la Chine, rappelons le, est devenue en 2007 le premier pays producteur du métal précieux, dépassant l'Afrique du Sud, leader historique. Tout cela, le profane le sait, mais la confusion demeure. Polémia soumet à la réflexion de ses cybernautes une étude rédigée par l’économiste Antoine Brunet, directeur d'AB Marchés, qui devrait éclairer leur lanterne.

Polémia


La Chine à l'offensive contre le dollar


Certains croyaient qu'il existait un accord implicite entre les Etats-Unis et la Chine : les premiers acceptaient la sous-évaluation massive du yuan, mais obtenaient en échange de la seconde un financement indéfectible de la dette publique américaine, et la reconnaissance du dollar comme seule vraie monnaie de réserve. On l'a même appelé "l'accord Bretton Woods 2". Or depuis juillet 2008, et jusqu'à la récente visite du président brésilien Lula à Pékin, tout indique que cet accord, s'il a jamais existé, n'existe plus. Dès juillet dernier, on vit ses premières fissures. Les dirigeants chinois interrompent, unilatéralement et sans avertissement préalable, le processus de réévaluation très graduel du yuan contre dollar qu'ils avaient accepté sous la pression du Congrès américain (de 8,28 yuans pour 1 dollar en juillet 2005 à 6,85). Quand le cours équilibrant se situe sans doute à 2 yuans pour 1 dollar, on mesure la provocation que cette interruption soudaine signifiait pour les dirigeants américains.

Au même moment, l'organisme qui gère les réserves de change de l'Etat chinois décide de sortir des obligations Agencies (Freddie Mac et Fannie Mae) pour se concentrer sur les seules obligations du Trésor américain. Ils accentuent ainsi la crise des Agencies, et contraignent monsieur Paulson à les nationaliser le 7 septembre pour un coût de 200 milliards de dollars. Un stress qui conduira les dirigeants américains à lâcher Lehman Brothers huit jours plus tard. La Chine ne jouant plus le jeu, la panique s'était emparée de l'administration américaine.

L'arrivée d'Obama à la présidence des Etats-Unis ne ramènera pas la Chine à plus de coopération. En janvier 2009, sans doute pour décourager la nouvelle administration d'exiger une réévaluation du yuan, la Chine interrompt ses achats d'obligations du Trésor à plus de deux ans ; elle ne les reprendra qu'en mars, et pour un montant limité, après que Tim Geithner, nouveau secrétaire au Trésor, a dissuadé publiquement ses partenaires du G7 de réclamer l'inscription du yuan à l'agenda du G20 suivant ;

En clair, la Chine entend bien continuer à capitaliser sur son commerce extérieur l'avantage que lui donne la sous-évaluation massive du yuan. Pour autant, elle n'entend plus financer le déficit public américain, ni soutenir le dollar comme monnaie de réserve. En mars, le numéro deux chinois, Wen Jiabao, et le gouverneur de la banque centrale, M. Zhou, dénigraient la capacité du dollar à se maintenir comme monnaie de réserve et pointaient la nécessité de son remplacement à terme par une monnaie non nationale : un nouveau DTS.

Au même moment, la Russie annonçait vouloir remplacer le dollar par une monnaie non nationale avec l'aval des autres pays du BRIC (Brésil, Inde et Chine) ainsi que de la Corée du Sud et de l'Afrique du Sud. D'ailleurs, la Chine et le Brésil, qui ont des réserves de change considérables, ont refusé de s'inscrire comme les pays du G7 dans les accords d'emprunt en dollar du FMI, accords qui visent à protéger de la crise mondiale les pays émergents en difficulté (Mexique, Turquie, Pologne, etc.). S'ils ont consenti le 23 mars à financer le FMI, c'est à la condition expresse que, pour la première fois de son histoire, il se finance par émission d'obligations, et ce libellées en DTS et non en dollar.

Dans le même esprit, la Chine révélait, le 27 avril, que ses réserves d'or s'élevaient, non pas à 400 tonnes d'or comme affirmé depuis 2003, mais en réalité à 1.000 tonnes. Tout est bon pour déconsidérer le dollar et convaincre les pays tiers (les pays du Golfe en particulier) de le répudier comme monnaie de réserve et comme monnaie de règlement. Enfin, dernier coup porté au billet vert, le 18 mai, le Brésil et la Chine, à l'occasion d'un voyage du président Lula à Pékin, annoncaient qu'ils n'utiliseraient plus le dollar comme moyen de règlement dans leurs échanges bilatéraux.

Dans ces grandes manœuvres visant à mettre en cause le privilège du dollar tout en conservant pour elle une monnaie sous-évaluée, la Chine joue donc un rôle central. Une évolution hautement géopolitique. Comme l'a rappelé Adam Poser, du Peterson Institute, « le gouvernement américain a toutes les raisons de croire que le dollar doit rester la devise de référence du commerce international. C'est une question géopolitique autant que monétaire. Il offre la meilleure sécurité possible aux Etats-Unis dans l'économie mondiale ».

Les Chinois comme les Russes semblent ne pas avoir oublié que c'est en finançant la guerre des étoiles par le dollar, monnaie de réserve, que les Etats-Unis de Reagan avaient défait l'URSS de Brejnev.

Antoine Brunet,
Economiste, directeur d'AB Marchés.
22/05/09

Correspondance polémia
26/05/09

jeudi, 04 juin 2009

Euro-america o Eurasia?

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Archives - 2003

 

 

Euro-america o Eurasia?

 

 

 

Intervento di Fausto Sorini svolto al seminario internazionale PCdoB di Brasilia del 25-26 Settembre 2003, dedicato all'analisi del quadro mondiale (tratto da http://www.resistenze.org)

 

1) Con l’occupazione militare dell’Iraq si è espressa in modo organico una volontà di dominio globale da parte dei settori più aggressivi dell’imperialismo americano. Controllare il Medio Oriente, maggiore riserva petrolifera mondiale, significa condizionare tutte le dinamiche economiche del pianeta, ed in particolare quelle di Unione europea e Cina, che dal petrolio di questa regione sono ancora oggi largamente dipendenti. Non a caso Russia e Cina, nel primo incontro al vertice tra Putin e Hu Jintao, hanno deciso di intensificare la cooperazione in campo energetico.

 

2) Lo scenario è quello di una competizione per l’egemonia mondiale nel 21° secolo. Gli Stati Uniti, di fronte alle proprie difficoltà economiche, a un debito estero che è il maggiore del mondo, all’emergere di nuove aree economiche, geo-politiche e valutarie che ne minacciano il primato mondiale, scelgono la guerra “permanente” e “preventiva” per tentare di vincere la competizione globale sul terreno militare, dove sono ancora i più forti. E dove si propongono di raggiungere una superiorità schiacciante sul resto del mondo, per cercare di invertire una tendenza crescente al declino del loro primato economico.

Nel 1945 gli Usa esprimevano il 50% del PIB del mondo; oggi sono al 25% (come l’Unione europea). Con le attuali tendenze dell’economia mondiale, i centri studi dei Paesi più industrializzati prevedono un ulteriore dimezzamento della % Usa nei prossimi 20 anni. Sarebbe la fine dell’egemonia mondiale dell’imperialismo americano, l’ascesa di nuovi centri di potere, capitalistici e non, un’autentica rivoluzione negli equilibri planetari. Si sono fatte guerre mondiali per molto meno.

 

3) Unione europea, Russia, Cina, India sono le principali potenze economiche e geo-politiche emergenti dotate anche di forza militare. L’Eurasia è il principale ostacolo al dominio Usa sul mondo. Chi avesse ancora dei dubbi, si rilegga Paul Wolfowitz, ideologo dell’amministrazione Bush : “Gli Stati Uniti devono appoggiarsi sulla loro schiacciante superiorità militare e utilizzarla preventivamente e unilateralmente…Il nostro primo obiettivo è di impedire l’emergere ancora una volta (dopo l’Urss - ndr) di un rivale…Ciò richiede ogni sforzo per impedire ad ogni potenza ostile di dominare una regione il cui controllo potrebbe consegnarle una potenza globale. Tali regioni comprendono l’Europa occidentale, l’Asia orientale (la Cina - ndr), il territorio dell’ex Unione Sovietica e l’Asia sud-occidentale (l’India - ndr)”. 

 

4) Non si tratta di una linea congiunturale, facilmente reversibile con un cambio di presidenza, ma di un orientamento che viene dal profondo dei settori più aggressivi e oggi dominanti dell’imperialismo americano. Un orientamento strategico che guarda alle grandi sfide del 21° secolo, non una breve parentesi. Vi sono differenze nei gruppi dominanti Usa e nell’opinione pubblica, nella stessa amministrazione Bush. Ma le posizioni meno oltranziste oggi sono minoranza e prevedibilmente lo saranno per molto tempo, fino a quando la linea attuale non andrà incontro a sconfitte economiche o militari (tipo Vietnam).

 

5) Gli Usa aspirano, come ha ben sintetizzato Fidel Castro, ad una “dittatura militare planetaria”. E’ una minaccia “diversa”, ma per certi aspetti più grande di quella rappresentata dal nazi-fascismo nel secolo scorso. Gli Usa dispongono oggi di una superiorità militare sul resto del mondo assai maggiore di quella che Germania, Giappone e Italia avevano all’inizio della seconda guerra mondiale. Nemmeno il Terzo Reich pensava al dominio globale del pianeta, così come esso viene teorizzato da alcuni esponenti dell’amministrazione Bush. Ciò spiega perché la linea della “guerra preventiva” suscita una opposizione tanto vasta, che coinvolge la grande maggioranza dei Paesi del mondo. E’ significativo che gli Usa, con la scelta di fare la guerra all’Iraq, siano rimasti in forte minoranza nell’Assemblea generale dell’Onu e nel Consiglio di Sicurezza, dove non solo hanno avuto l’opposizione dei paesi maggiori (Francia, Germania, Russia, Cina), ma dove non sono riusciti – pur esercitando pressioni fortissime – a “comprare” il voto di paesi come Messico, Cile, Angola, Camerun, da cui non si attendevano tante resistenze. Con la guerra in Iraq gli Usa hanno scontato un isolamento politico senza precedenti. Si calcola che solo il 5% dell’opinione mondiale abbia sostenuto la guerra. Una nuova generazione che, con il crollo dell’Urss e la crisi dell’ideale comunista, era cresciuta in tanta parte del mondo col mito del modello americano, oggi comincia ad aprire gli occhi e a maturare una coscienza critica potenzialmente antimperialista, come non si vedeva dai tempi del Vietnam. E’ un grande patrimonio, che peserà nel futuro del mondo.

 

6) La spinta verso un mondo multipolare è inarrestabile, anche se essa procederà con gradualità, perché nessuno oggi ha la volontà e la forza di sfidare apertamente gli Usa. Cresce in ogni continente la tendenza alla formazione di “poli regionali”, volti a rafforzare la cooperazione economica, politica, militare dei paesi dell’area per essere presenti sulla scena mondiale con maggiore potere contrattuale. Tutti ritengono di avere bisogno di tempo per rafforzarsi. Questo può spiegare la prudenza della Cina (e per altri versi della Russia) nei rapporti con gli Usa: vogliono rinviare ad altri tempi una possibile frattura, che in particolare la Cina mette nel conto. Mentre Francia e Germania, con diversa collocazione, non considerano matura la fine del legame transatlantico. Tali disponibilità al compromesso si sono espresse nel voto unanime (con la non partecipazione della Siria) a favore della risoluzione 1483 (22 maggio 2003) del CdS dell’Onu, che in qualche misura legittima a posteriori l’occupazione militare dell’Iraq e “riconosce” i vincitori. La questione si ripropone nella trattativa in corso in questi giorni, in cui si tratta di definire natura, ruolo e comando di un eventuale coinvolgimento dell’Onu in un Iraq tutt’altro che normalizzato, dove gli Usa sono impantanati, costretti a spendere cifre astronomiche, militarmente sotto il tiro di una resistenza irakena che si rivela più tenace e radicata del previsto. Le maggiori potenze che pure si sono opposte alla guerra, nella logica della più classica realpolitik - puntano anche a non farsi escludere da ogni influenza sul nuovo Iraq e dai giganteschi interessi legati alla ricostruzione del paese; e a tutelare i propri interessi in campo, dalle concessioni petrolifere al recupero dei debiti contratti dal vecchio regime di Saddam Hussein. Cercano di costringere gli Usa, oggi in difficoltà, ad accettare quei vincoli Onu ai quali nei mesi scorsi si erano sottratti. Il rischio è quello di contribuire a sostenere e legittimare l’occupazione militare e il comando degli Usa in Iraq, offrendo loro un salvagente senza significative correzioni della loro politica aggressiva. Vedremo su quali basi avverrà il compromesso.

 

7) Questa guerra ha fatto nascere un forte movimento popolare, che ha coinvolto centinaia di milioni di persone, in ogni continente. Il 15 febbraio 2003 più di cento milioni di persone hanno manifestato contemporaneamente in ogni parte del mondo. Era dalla fine degli anni ’40, dai tempi del Movimento dei partigiani della pace, che non si vedeva una mobilitazione così estesa a tutte le latitudini. Si tratta di una delle novità più importanti del quadro internazionale dopo il 1989. Anche se tale movimento non ha avuto la forza per fermare la guerra e oggi vive una fase di delusione e di riflusso, si sono poste importanti premesse per le lotte future e per la ricostruzione di un movimento mondiale contro la logica imperialista della guerra, che non si fermerà. Vi è qui un terreno fondamentale di lavoro per i comunisti e le forze rivoluzionarie di ogni parte del mondo. Purtroppo mancano forme anche minime di coordinamento internazionale di tale lavoro; e questo limite, che dura ormai da molti anni, non vede ancora in campo ipotesi di soluzione ed iniziative adeguate da parte dei maggiori partiti comunisti che avrebbero la forza e la credibilità per prenderle. Ciò rende tutto più difficile, ed espone il movimento contro la guerra, soprattutto in alcune regioni del mondo, all’influenza prevalente delle socialdemocrazie, delle Chiese o di alcuni raggruppamenti trotzkisti (come è stato finora, in buona misura, nel movimento di Porto Alegre). L’appuntamento del prossimo Forum Sociale Mondiale in India, potrebbe vedere in proposito alcune novità, ed un suo ampliamento unitario: in senso geo-politico, con il coinvolgimento dell’Asia, oltre l’asse originario imperniato su Europa occidentale, Stati Uniti e America Latina (poi si dovrà guardare all’Africa, all’Europa dell’Est, alla Russia); e in senso politico, con l’auspicabile superamento di una persistente pregiudiziale antipartitica, che si è finora risolta in sorda ostilità soprattutto nei confronti dei partiti comunisti. Se sarà così, il movimento non potrà che trarne vantaggio, consolidamento e maggiori legami coi movimenti operai dei rispettivi paesi, con generale beneficio del movimento mondiale contro la guerra e la crescita in esso di una più matura coscienza antimperialista.

 

8) L’opposizione alla “guerra preventiva” viene non solo dalle tradizionali forze di pace, ma anche da parte di potenze imperialiste come Francia e Germania, che fanno parte del nuovo ordine mondiale dominante. Potenze non “pacifiste”, come si è visto in Africa (ad es. in Congo, dove la competizione interimperialistica tra Francia e Stati Uniti, per il controllo delle immense risorse minerarie della regione è costata la vita in pochi anni a 4 milioni di persone…); o nella guerra della Nato contro la Jugoslavia, che ha visto Francia e Germania pienamente coinvolte. Questi paesi sono gli assi portanti dell’Unione europea, un progetto autonomo di costruzione di un polo imperialista (con la sua moneta : l’ euro) che vuole giocare le sue carte nella competizione globale. E che in prospettiva punta a dotarsi di una forza militare autonoma dagli Usa. Questi paesi non accettano di sottomettersi al dominio Usa, ma procedono con prudenza in questo processo di autonomizzazione : non hanno oggi la forza di sfidare apertamente gli Usa, non hanno un sufficiente consenso degli altri Paesi dell’Unione europea per mettere apertamente in discussione l’equilibrio “transatlantico”.

 

9) Le contraddizioni che oppongono la grande maggioranza dei Paesi del mondo al progetto militarista e unipolare Usa, sono di natura diversa: -vi sono contrasti tra imperialismo e Paesi in via di sviluppo, che aspirano alla pace e a un ordine mondiale più giusto nella ripartizione delle ricchezze del pianeta; - vi sono contrasti tra imperialismi, per la ripartizione delle risorse mondiali e delle rispettive sfere di influenza; - vi sono contrasti tra imperialismo e paesi di orientamento progressista (Cina, Vietnam, Laos, Corea del Nord, Cuba, Venezuela, Brasile, Libia, Siria, Palestina, Sudafrica, Bielorussia, Moldavia…) che in vario modo aspirano ad un modello di società diverso dal capitalismo dominante. Si evidenzia qui in particolare il contrasto con la Cina, grande potenza socialista (economica e nucleare), diretta dal più grande partito comunista al mondo, che sta emergendo come la grande antagonista degli Usa nel 21° secolo. Questo dichiarano apertamente vari esponenti Usa, che valutano che nei prossimi 20 anni, con gli attuali tassi di sviluppo, il PIB della Cina potrebbe eguagliare quello degli Usa, il divario di potenza militare potrebbe ridursi, e quindi “bisogna pensarci prima che sia tardi”, se non si vuole che la Cina divenga per gli Stati Uniti, nel 21° secolo, quello che l’Urss è stata nel secolo scorso; - vi sono contrasti con grandi paesi come la Russia e l’India (potenze nucleari), che pur non avendo oggi una coerente collocazione progressista in campo internazionale, non fanno parte del sistema imperialistico dominante, e hanno interessi nazionali e una collocazione geo-politica che contraddicono le aspirazioni egemoniche degli Usa. La Casa Bianca, nel suo documento sulla Sicurezza nazionale del settembre 2002, li definisce paesi dalla “transizione incerta”, che potrebbero evolvere verso una crescente omologazione agli interessi Usa e al suo modello sociale e politico (distruzione di ogni statalismo in campo economico, democrazia liberale in campo politico-istituzionale, rinuncia al potenziamento del proprio potenziale militare e nucleare e ad ogni “non allineamento” in politica estera…); ma che potrebbero evolvere in senso opposto e quindi rappresentare una “minaccia” per l’egemonia Usa e per l’attuale ordine mondiale dominante.

 

10) Vi è una spinta, nei vari continenti, alla formazione di entità regionali più autonome dagli Usa e con un proprio protagonismo sulla scena mondiale: -in Europa, con l’Ue e il rapporto Ue-Russia; -nell’area ex-sovietica, con la Csi; -in America Latina, con il Mercosur e la convergenza progressista di Brasile, Cuba, Venezuela…; -in Africa, con l’Unione africana e il Coordinamento per la cooperazione e lo sviluppo dei paesi dell’Africa australe (SADC), imperniato sul nuovo Sudafrica e sui governi progressisti della regione (Angola, Mozambico, Namibia, Zimbabwe, Congo, Tanzania…); -in Asia, con lo sviluppo del rapporto Cina-Asean/Cina-Vietnam. Nel 2010 i dieci paesi dell’Asean e la Cina formeranno il più grande mercato comune del pianeta; con le spinte verso una riunificazione della Corea su basi di neutralità, denuclearizzazione e allontanamento di tutte le basi militari straniere; con il rafforzamento del ruolo del “Gruppo di Shangai” (Russia, Cina, Kazachistan, Kirghisia, Uzbekistan, Tagikistan) : imperniato sull’asse russo-cinese, con la recente significativa richiesta di Putin all’India di entrare a farne parte. Il processo di avvicinamento tra Cina e India pesa enormemente sugli equilibri mondiali.

 

11) Gli Usa osteggiano il formarsi di questi “poli regionali” e cercano di favorirne la “disaggregazione”, oppure di sostenere all’interno di essi l’egemonia delle forze che sono sotto la loro influenza. Ne derivano contrasti di natura diversa nei principali organismi internazionali (Onu, FMI, G7, Wto, Unione Europea, nella stessa Nato). Ultimo in ordine di tempo il fallimento del vertice WTO a Cancun, dove è emerso uno schieramento “Sud-Sud”, imperniato su Cina, India, Brasile, Sudafrica (e con la significativa presenza di paesi come Cuba e Venezuela) che si è fatto interprete degli interessi dei Paesi in via di sviluppo, contro le pretese egemoniche dei maggiori centri dell’imperialismo. Le contraddizioni tendono continuamente a ripresentarsi : basti pensare alle tensioni e alle minacce che investono Iran, Siria, Arabia Saudita, crisi palestinese, Corea del Nord, Venezuela, Cuba; ad una situazione interna all’Iraq non normalizzata; alla permanente competizione economica e valutaria Usa-Ue / dollaro-euro... Ma c’è diversità di interessi in campo, di progetti politici e di modello sociale, anche tra le forze che si oppongono all’unilateralismo Usa. Ad esempio : la Cina, il Vietnam, Cuba, il Venezuela…non hanno la stessa collocazione strategica, della Germania di Schroeder o della Francia di Chirac, che invece difendono un certo modello economico e un ordine mondiale fondato sul predominio delle grandi potenze capitalistiche. Emblematica la vicenda di Cuba che è sostenuta dai Paesi socialisti e progressisti, ma osteggiata dall’Unione europea che si è vergognosamente avvicinata agli Usa nel rilancio di una campagna ostile. La lotta di classe non è scomparsa, così come non scomparve negli anni ’40 quando forze tra loro assai diverse per riferimenti sociali e politici trovarono una comune convergenza contro il nazi-fascismo, per poi tornare a dividersi negli anni della guerra fredda, perché portatori di interessi e di modelli di società tra loro alternativi.

 

12) Il fatto che l’opposizione alla guerra di grandi paesi come Russia, Cina, Francia, Germania non abbia superato una certa soglia di asprezza (oltre la quale il contrasto tende a spostarsi sul terreno dello scontro aperto, anche militare); il fatto che momenti di forti divergenze si alternino a situazioni in cui prevale la ricerca di una mediazione e di un compromesso, sorge non già – come sostengono le teorie di Toni Negri sul nuovo impero - dall’esistenza di interesse omogenei di un presunto “capitale globale” e di un presunto “direttorio mondiale” in cui esso troverebbe espressione politica organica e unitaria, ma da rapporti di forza internazionali che, sul piano militare, non consentono oggi a nessun paese o gruppo di paesi di portare una sfida aperta, oltre certi limiti, alla superpotenza Usa.

 

13) Come ricostruire internazionalmente un contrappeso capace di condizionare la politica estera degli Stati Uniti? Questo è il problema n°1 per tutte le forze che non vogliono una nuova tirannia globale. E’ necessaria la convergenza di più forze, tra loro assai diverse: -innanzitutto la resistenza del popolo irakeno e delle forze che in Medio Oriente la sostengono (Siria, Iran, resistenza palestinese…) per mantenere aperto il “fronte interno”, contro l’occupazione militare, e scoraggiare nuove avventure. E’ necessario un sostegno internazionale a questa resistenza, oggi pressochè inesistente al di fuori del mondo arabo; sostegno non separabile da quello alla causa palestinese, in grave difficoltà dentro una dinamica politico-diplomatica sempre più condizionata dagli Usa, che con Israele vogliono il controllo pieno del Medio Oriente; -la ripresa del movimento per la pace negli Usa e su scala mondiale, riorganizzando le sue componenti più dinamiche e determinate, per impedirne la dispersione e il riflusso; -il consolidamento delle più larghe convergenze politico-diplomatiche tra Stati, contro l’unilateralismo Usa, senza di che è impensabile una ripresa di ruolo dell’Onu (obiettivo che non va abbandonato, in assenza di alternative più avanzate che oggi non esistono). Si impone un maggior ruolo dell’Assemblea generale rispetto al Consiglio di Sicurezza e una composizione più rappresentativa del Consiglio stesso; -lo sviluppo, negli Stati Uniti, di una opposizione alla politica di Bush e in Gran Bretagna a quella di Blair, oggi entrambi in crisi di consenso. La difesa intransigente del diritto di Cuba, della Siria, dell’Iran, della Corea del Nord e di ogni altro paese minacciato a proteggere la propria sovranità da ogni ingerenza esterna, è parte integrante della lotta contro il sistema di guerra, indipendentemente dal giudizio che ognuno può avere sulla situazione interna di questo o quel paese.

 

14) Come evolverà l’Europa? Sono emerse divisioni non facilmente superabili tra Usa e Unione europea, all’interno dell’Unione europea e della Nato (cioè tra alleati del tradizionale blocco atlantico), come mai era accaduto nel dopoguerra. Nell’Unione europea (e nella Nato) continuerà il contrasto tra filo-americani e sostenitori di un’Europa più autonoma dagli Usa, imperniata sul rapporto preferenziale tra Francia - Germania - Russia. Anche per questo gli Usa vorrebbero l’ingresso nell’Ue di Turchia e Israele, loro alleati di fiducia (soprattutto Israele, perché anche in Turchia, come si è visto in relazione al conflitto irakeno, sta emergendo una dialettica nuova). Una sconfitta elettorale (possibile) dei governi di centro-destra in Italia e in Spagna, favorirebbe una collocazione europea più autonoma.

 

15) E’ vero che gli Usa sono oggi orientati ad agire anche militarmente in modo unilaterale, senza farsi condizionare né dall’Onu nè dalla Nato, ma essi non rinunceranno alla Nato, che continua ad essere per loro uno strumento prezioso per controllare l’Europa e le strutture politico-militari, di sicurezza, di intelligence, nonché l’industria e la tecnologia militare dei Paesi europei integrati nell’Alleanza. E per disporre di basi militari sul continente, poste sotto il loro controllo, magari spostandole o creandone di nuove nei paesi europei più fedeli e sottomessi, come alcuni paesi dell’Est. Gli Usa dispongono di una presenza militare in 140 Stati su 189 (con altri 36 vi sono accordi di cooperazione militare), con 800 basi militari e 200.000 soldati dislocati all’estero in permanenza (esclusi quelli presenti in Iraq). Ciò rende attualissima e non rituale la ripresa di una iniziativa del movimento per la pace per la chiusura delle basi militari Usa nei rispettivi Paesi. Per il ritiro di tutti i militari impegnati all’estero a supporto di azioni di guerra e di occupazione militare. Per attivare iniziative e dinamiche di disarmo in campo internazionale.

 

16) Un intellettuale britannico vicino a Tony Blair, ha scritto dopo la guerra in Iraq che in Europa il bivio è “tra euroasiatici, che vogliono creare un’alternativa agli Usa (lungo l’asse Parigi – Berlino – Mosca – Delhi – Pechino) ed euroatlantici, che vogliono mantenere un rapporto privilegiato con gli Usa”. Tony Blair ha espresso con chiarezza la sua linea euroatlantica in una intervista al Financial Times (28.05.2003), affermando: “Alcuni auspicano un mondo multipolare con diversi centri di potere che si trasformerebbero presto in poteri rivali. Altri pensano, e io sono tra questi, che abbiamo bisogno di una potenza unipolare fondata sulla partnership strategica tra Europa e America”. Dunque: “Euro-america” o “Eurasia”?

 

17) Chi vuole un’ Europa davvero autonoma dagli Usa e dal suo modello di società, deve avere un progetto alternativo, che vada oltre l’attuale Unione europea e le basi su cui essa è venuta formandosi e che comprenda tutti i paesi del continente (anche Russia, Ucraina, Bielorussia, Moldavia…). Un progetto che: -sul piano economico, contrasti la linea delle privatizzazioni e prospetti la formazione di poli pubblici sovranazionali (interessante la proposta, in altro contesto, che il presidente venezuelano Hugo Chavez ha sottoposto a Lula, per la formazione di un polo pubblico continentale per la gestione delle risorse energetiche, collegato ad una banca pubblica regionale che serva a finanziare progetti di sviluppo e con finalità sociali); -sul piano politico-istituzionale, contrasti ipotesi federaliste volte a svuotare la sovranità dei Parlamenti nazionali e sostenga un’ipotesi di Europa fondata sulla cooperazione tra Stati sovrani, non subalterna ai poteri forti delle maggiori potenze imperialistiche che dominano l’attuale Unione europea; -sul piano militare, preveda un sistema di sicurezza e di difesa pan-europeo, alternativo alla Nato, comprensivo della Russia (una sorta di Onu europea), che già oggi – considerando il potenziale nucleare di Francia e Russia – disporrebbe di una forza difensiva sufficiente a dissuadere chiunque da un’aggressione militare all’Europa. Dunque, un progetto opposto a quello di un riarmo dell’Unione europea, di una sua militarizzazione e vocazione imperialistica, volte a rincorrere gli Usa sul loro terreno. E’ vero che oggi l’imperialismo franco-tedesco è assai meno pericoloso per la pace mondiale di quello americano e può fungere a volte da contrappeso. Ma guai a trarne una linea di incoraggiamento al riarmo dell’Ue: i movimenti operai e i popoli europei, e qualsivoglia progetto di Europa sociale e democratica, verrebbe colpiti al cuore da una politica di militarizzazione del continente su basi neo-imperialistiche. Essa stimolerebbe la corsa al riarmo a livello internazionale, e il costo di una crescita esponenziale delle spese militari, in un’Europa neo-liberale dove già oggi vengono colpite duramente le spese sociali, distruggerebbe quel poco che rimane dell’Europa del Welfare.

 

18) L’Unione europea non può fare da sola. Se vuole reggere il confronto con gli Usa ed uscire dalla subalternità atlantica, deve essere aperta ad accordi di cooperazione e di sicurezza con la Russia (che è parte dell’Europa), con la Cina, l’India; e con le forze più avanzate e non allineate che si muovono in Africa, in Medio Oriente, in America Latina. Solo una rete di unioni regionali, non subalterne agli Usa (di cui l’Europa sia parte) può modificare i rapporti di forza globali e condizionare la politica Usa. Gli Usa non possono fare la guerra a tutto il mondo.

 

19) In paesi come Russia, Cina, India – potenze nucleari in cui vive la metà della popolazione del pianeta, che potrebbero esprimere tra 20 anni un terzo della ricchezza mondiale (e che la stessa amministrazione Bush definisce “paesi dalla transizione incerta”) – le forze comuniste, di sinistra, antimperialiste, non subalterne al modello neo-liberista e agli Usa, costituiscono già oggi una forza maggioritaria (in Cina) o che potrebbe diventarlo (Russia, India) nell’arco di un decennio.

Un’alleanza elettorale in India tra Congresso e Fronte delle sinistre (animato dai comunisti) potrebbe vincere le prossime elezioni (previste per il 2005), su un programma che recuperi le istanze progressive del non-allineamento. Un’avanzata dei comunisti e dei loro alleati alle prossime elezioni politiche in Russia può creare le condizioni per un compromesso con Putin (con una parte almeno delle forze che sostengono Putin) e collocare la Russia su posizioni più avanzate. Sono possibilità, non certezze. Per questo parlo di un processo che potrebbe maturare “nell'arco di un decennio”. Ma che dispone delle potenzialità per affermarsi e su cui forze importanti in questi Paesi stanno lavorando.

 

20) Come ha sintetizzato Samir Amin, “un avvicinamento autentico fra l’Europa, la Russia, la Cina, l’Asia costituirà la base sulla quale costruire un mondo pluricentrico, democratico e pacifico”. Un’ Eurasianon allineata può rappresentare un interlocutore fondamentale anche per le forze progressiste in America Latina e in Africa. Non sarebbe il socialismo mondiale, ma certamente un avanzamento strategico nella direzione giusta. E con il clima politico che caratterizza il mondo di oggi, non sarebbe poco.

 

 

 

mercredi, 03 juin 2009

A propos des accords Reagan/Gorbatchev

 

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SYNERGIES EUROPÉENNES - Juin 1988

 

 

 

A propos des accords Reagan-Gorbatchev

 

 

par Jean-Rémy Vanderlooven

 

 

La récente signature, en décembre dernier, du traité américano-soviétique portant sur une réduction des euro-missiles a fait couler beaucoup d'encre. La ren-contre à Moscou de Reagan et de Gorbatchev prouve en tout cas que cet accord est durable. Enfin un évé-nement médiatique qui ne soit sucité ni par une catastrophe ni par un scandale?

 

 

Bien que le traité, désormais ratifié par le Congrès américain, ne concerne que 3 à 7% de la puissance de feu nucléaire des deux super-puissances, réactions et com-mentaires ont fusés en tous sens.

 

Certains en ont déduit, hâtivement sans doute, que Reagan et Gorbatchev s'étaient soudain convertis au pacifisme angélique, d'autres y ont trouvé une preu-ve supplémentaire du machiavélisme soviétique, et quelques-uns, enfin, sont partis en quête d'un para-pluie, pas trop troué, sous lequel se réfugier frileu-sement. Toutes ces gesticulations révèlent un double manque considérable: la lucidité et la dignité.

 

 

En fait, la signature de ce traité trouve sa véritable im-portance historique, en tant que signe d'une dou-ble modification d'analyse et de stratégie dans le chef des deux grands et "subsidiairement" du statut de l'Europe de l'Ouest.

 

 

USA

 

 

Depuis quelques années, la stratégie mondiale des E-tats-Unis se réoriente en fonction de deux éléments re-lativement neufs. D'une part, une résurgence de la tentation isolationniste. Celle-ci est illustrée, au plan économique, par les différentes "guerres" euro-amé-ricaines (aciers, pâtes, etc.), ou encore, par la dégringolade —voulue— du dollar sur toutes les pla-ces financières, ce qui a pour double effet de faire fi-nancer la démagogie reaganienne par le reste du mon--de et d'élever des barrières autour du marché in-térieur américain. Parallèlement, au plan militaire, l'IDS ne sanctuarise que le territoire américain.

 

 

D'autre part, la source de la vitalité américaine glisse de la côte Est vers la côte Ouest, recentrage motivé par le transfert du centre de gravité économique de l'At-lantique-Nord au Pacifique. Cette double con-train-te, à laquelle s'ajoute au relatif manque de "fia-bi-lité" des alliés de l'OTAN, conduit, dans la pensée stratégique américaine, à une marginalisation toujours plus marquée de l'Europe de l'Ouest. Un désengagement progressif des Américains en Europe est donc de plus en plus probable.

 

 

URSS

 

 

En ce qui concerne l'URSS, il serait temps d'aban-donner nos phantasmes concernant une quelconque volonté de démocratisation de type "occidentalo-libéral". La nouvelle direction du pays a relevé un dé-fi d'une toute autre nature: la modernisation d'un sys-tème économique obsolète, condition de survie de l'empire. Cette exigence détermine le choix de nou-velles priorités: la société civile et l'infrastructure économique/technologique prennent, momentané-ment (?), le pas sur la logique d'un impérialisme pu-rement militaire et sur son corrolaire, la course aux armements.

 

Cette réorientation fondamentale devra permettre à la fois le transfert de ressources financières et humai-nes à l'intérieur de l'URSS et, via une amélioration du "look" diplomatique, une meilleure collaboration avec le reste du monde. Si tout ceci peut se traduire par une moindre militarisation de la société sovié-ti-que, par une relative décentralisation du pouvoir et par un assouplissement des normes de commu-nica-tion et d'information, l'Union Soviétique restera mal-gré tout fort éloignée d'un quelconque "plura-lis-me".

 

 

Les indices de ce changement de stratégie ne man-quent pas; l'URSS s'est longtemps montrée très ac-ti-ve dans le monde par ses interventions militaires, sou-vent massives. Dans les pays d'Europe centrale, à Cuba, au Vietnam, en Angola, en Ethiopie, en Af-gha-nistan (ces entreprises ont d'ailleurs eu pour effet d'atténuer le complexe d'"assiégés" des dirigeants so-viétiques).

 

Or, plus récemment, un relatif désengagement est per-ceptible, illustré, par exemple, par une aide plus dis-crète au Nicaragua, par la non-intervention directe en Pologne, par les velléités de retrait d'Afghanistan ou encore par le traité sur les euromissiles.

 

 

Tout cela rend l'étouffement complet des satellites eu-ropéens moins impératif et diminue l'acuité de l'af-frontement avec les nations ouest-européennes.

 

 

Europe de l'Ouest

 

 

Les Européens de l'Ouest ne peuvent nullement es-pé-rer imposer une stratégie propre et volontariste dans le cadre de ces bouleversements.

 

 

En effet, du fait des conséquences de ses guerres ci-viles et des erreurs historiques qui ont jalonné les po-litiques de colonisation puis de décolonisation, l'Europe a dû renoncer à son rôle de leader mondial. Cependant, les atouts qu'elle conserve, doivent lui permettre de développer une tactique "opportuniste" en fonction du relatif espace d'autonomie qui s'offre à elle.

 

 

Cette tactique devrait s'articuler sur trois options fon-damentales: 1) le neutralisme (non-alignement idéo-logique par rapport aux deux super-puissances; ce que les Allemands nomment plus justement la Blockfreiheit);  2) le recentrage et 3) la redécouverte de ces axes naturels de collaboration internationale.

 

 

Neutralisme

 

 

"Plutôt rouge que mort?". Certainement pas: une tel-le attitude n'est qu'une façon, parmi d'autres, de sa-crifier, une fois de plus, l'essentiel: la dignité. En fait, le nouveau neutralisme dont ont besoin le centre et l'ouest de notre continent est la première condition de son indépendance: il s'agit de s'affranchir de la tu-telle exercée par les deux grands, tutelle qui n'apporte qu'une protection illusoire au prix d'une vassalisation bien réelle. Dans cette optique, tant l'iso-la-tionnisme américain que l'attitude nouvelle des Soviétiques à l'égard du glacis est-européen sont des opportunités qui ne peuvent être négligées.

 

 

Recentrage

 

 

Au-delà de cette neutralité réinventée, l'espace euro-péen ainsi créé ne pourra définir son identité et affir-mer sa vocation internationale qu'en faisant appel à un système de références et de projets se rapportant à lui-même.

 

 

Potentiels culturels et traditions politiques purement européens sont, en effet, appelés à former la base d'une vision prospective de notre devenir, par la mi-se en avant de la communauté de destin de nos peu-ples. Nous voilà bien éloigné du "grand marché" pu-rement mercantile et ouvert à tous vents que nous proposent nos technocrates...

 

 

Axes d'ouverture

 

 

Contrairement aux dires des farfelus du mondialisme militant, l'avenir international de l'Europe ne passe pas par Séoul ou Lima, lieux pour nous excentri-ques, appartenant à l'espace sud- ou nord-pacifique.

 

 

Notre histoire indique à suffisance les solidarités (et les interdépendances) naturelles qui devraient être ré-ac-tualisées: l'axe est-ouest d'une part, l'axe nord-sud d'autre part.

 

Les conditions d'émergence du premier axe ont été dé-veloppées dans le points précédent. En ce qui con-cerne le deuxième axe  —l'Afrique—  sa réalité est clairement inscrite dans les faits. Nombre de nos pro-blèmes parmi les plus concrets, comme l'immi-gration ou l'approvisionnement en énergie, par exemple, ne pourront être résolus que sur base d'un dialogue trans-méditerranéen.

 

 

Défis

 

 

Il s'agit donc, pour l'Europe, de relever un défi: re-constituer une identité européenne propre qu'il fau-dra concrétiser dans un espace autonome et inscrire dans une alternative internationale dynamique.

 

Au boulot,...

 

 

Jean-Rémy VANDERLOOVEN.

 

 

jeudi, 28 mai 2009

Obama et le guêpier pakistanais

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Obama et le guêpier pakistanais,
par Eric Margolis - Ex: http://contreinfo.info/

En quelques phrases sèches, Eric Margolis résume la situation, décrit les forces en présence et clarifie les enjeux. Embourbés dans une guerre ingagnable en Afghanistan, les USA qui bombardent déjà régulièrement le Pakistan ont poussé Islamabad à attaquer les pachtounes des zones tribales, au risque de faire voler en éclat la stabilité du pays et d’embraser la région tout entière. « Le véritable danger provient des États-Unis qui agissent comme un mastodonte enragé, foulant aux pieds le Pakistan, et contraignant l’armée d’Islamabad à faire la guerre à son propre peuple, » avertit Margolis qui connaît bien la région et les pachtounes pour les avoir côtoyés de près lors de la guerre contre les soviétiques.

Par Eric Margolis, Winnipeg Sun, 17 mai 2009

Le Pakistan a finalement cédé la semaine dernière aux demandes irritées de Washington, et a envoyé ses troupes contre la rébellion des tribus pachtounes des Provinces de la Frontière du Nord-Ouest - que l’occident dénomme à tort les « talibans ».

L’administration Obama avait menacé de mettre fin aux versements annuels de 2 milliards de dollars que reçoivent les dirigeants politiques et militaires du Pakistan en faillite et de bloquer 6,5 milliards d’aides futures, à moins qu’Islamabad n’envoie ses soldats dans les turbulentes zones tribales du Pakistan qui sont situées le long de la frontière afghane.

Cela s’est conclut par un bain de sang : quelques 1 000 « terroristes » tués (comprendre : la plupart sont des civils) et 1,2 millions de personnes - la plus grande partie de la population de la vallée de Swat - sont devenues des réfugiés.

Les forces armées pakistanaises instrumentalisées par les États-Unis ont remporté une brillante victoire contre leur propre peuple. Cela n’avait malheureusement pas été le cas lors des guerres contre l’Inde. Bombarder des civils est cependant beaucoup moins dangereux et plus rentable.

Washington, profondément déçu d’être incapable de pacifier les tribus pachtounes de l’Afghanistan (alias les talibans), a commencé à s’en prendre au Pakistan, tentant de venir à bout de la résistance pachtoune dans les deux pays. Les drones de la CIA ont déjà tué plus de 700 pachtounes pakistanais. Selon les médias, seuls 6% étaient des militants, et le reste des civils.

Les pachtounes, également improprement appelés pathans, forment la plus nombreuse des populations tribales. Quinze millions d’entre-eux vivent en Afghanistan, constituant la moitié de sa population. Vingt-six millions vivent au delà de la frontière du Pakistan. La Grande-Bretagne impérialiste a divisé les pachtounes par une frontière artificielle, la ligne Durand (qui forme aujourd’hui la frontière entre l’Afghanistan et le Pakistan). Les pachtounes rejettent cette frontière.

De nombreuses tribus pachtounes ont accepté de rejoindre le Pakistan en 1947, à condition que leur patrie soit autonome et libre de troupes gouvernementales. Les pashtounes de la vallée Swat n’ont rejoint le Pakistan qu’en 1969.

Lorsque les pachtounes du Pakistan ont accru leur aide à la résistance des pachtounes d’Afghanistan, les USA ont débuté leurs attaques de drones. Washington a contraint Islamabad à violer sa propre constitution en envoyant des troupes dans les terres pachtounes. Avec pour résultat l’actuelle explosion de colère des pachtounes.

J’ai vu les pachtounes faire la guerre et je peux témoigner de leur légendaire courage, de leur sens aigu de l’honneur et de leur détermination. Ils sont aussi extrêmement querelleurs, batailleurs et irritables.

On apprend vite à ne jamais menacer un Pachtoune ou à lui poser des ultimatums. Ce sont les guerriers montagnards qui ont défié les États-Unis en refusant de livrer Osama bin Laden, car il était un héros de la guerre anti-soviétique et était leur invité. L’ancien code de « Pachtunwali » guide toujours leurs actions : ne pas attaquer les pachtounes, ne pas tricher avec eux, ne pas causer leur déshonneur. Pour les pachtounes, la vengeance est sacrée.

Aujourd’hui, les politiques de Washington et les récentes atrocités de la vallée de Swat menacent de déclencher le pire cauchemar du Pakistan, au second rang après une invasion indienne : que ses 26 millions de Pachtounes fassent sécession et rejoignent les pachtounes d’Afghanistan pour former un état indépendant, le Pachtounistan.

Cela ferait éclater le Pakistan, inciterait probablement les farouches tribus balouches à tenter de faire sécession et pourrait tenter la puissante Inde d’intervenir militairement, au risque d’une guerre nucléaire avec le Pakistan assiégé.

Les pachtounes des zones tribales n’ont ni l’intention ni la capacité de se répandre dans d’autres provinces du Pakistan, le Punjab, le Sindh et le Baluchistan. Ils veulent seulement qu’on les laisse tranquilles. Les craintes d’une prise du pouvoir des talibans au Pakistan ne sont que pure propagande.

Les pakistanais ont rejeté à maintes reprises les partis islamiques militants. Nombreux sont ceux qui ont peu d’amour pour les Pachtounes, qu’ils considèrent comme de rustiques montagnards qu’il vaut mieux éviter.

L’arsenal nucléaire du Pakistan, bien gardé, ne représente pas non plus un danger - du moins pas encore. Les craintes au sujet des armes nucléaires pakistanaises proviennent des mêmes fabricants de preuves - ayant un agenda secret - que ceux qui nous ont sorti les fausses armes de Saddam Hussein.

Le véritable danger provient des États-Unis qui agissent comme un mastodonte enragé, foulant aux pieds le Pakistan, et contraignant l’armée d’Islamabad à faire la guerre à son propre peuple. Le Pakistan pourrait finir comme l’Irak occupé, divisé en trois parties et impuissant.

Si cela continue, les soldats pakistanais patriotes pourraient à un moment se rebeller et abattre les généraux corrompus et les politiciens qui émargent à Washington.

Tout aussi inquiétant, un soulèvement de pauvres se répandant à travers le Pakistan - lui aussi dénommé à tort « taliban » - porte la menace d’une rébellion radicale rappelant celle des rebelles naxalites de l’Inde.

Comme en Irak, ce sont une profonde ignorance et l’arrogance militariste qui conduisent la politique des États-Unis en Afghanistan. Les gens d’Obama ne comprennent pas ce vers quoi ils se dirigent en « Af-Pak ». Je peux le leur dire : un triste désastre que nous regretterons longtemps.


Publication originale Winnipeg Sun, traduction Contre Info

mercredi, 27 mai 2009

El poder y la resistencia intelligentes

El poder y la resistencia inteligentes

En su condición de superpotencia el gobierno norteamericano dispone de una fuerza militar y de un potencial económico que excepto la Unión Soviética, ninguno de sus adversarios ni todos juntos han podido retar. Ese poder es la base de una enorme influencia política; sin embargo, salvo excepciones, a la mayoría de las administraciones estadounidenses les ha faltado talento para convertir su musculatura en liderazgo autentico y para conducir constructivamente la política exterior con el Tercer Mundo, particularmente con América Latina.

En los nuevos escenarios internacionales, la astucia y la sutileza que asoman en la administración de Barack Obama pueden hacer la diferencia. A esa combinación de poder y racionalidad, en las audiencias en el Senado para su confirmación, Hillary Clinton llamó “poder inteligente”. De aplicarse esa doctrina, es probable que, en parte, la inteligencia condicione la confrontación. Talento contra talento pudieran ser los términos de una nueva ecuación en las relaciones políticas internacionales.


Hillary Clinton, que no fue incluida en la fórmula presidencial y se  pintó sola para Secretaria de Estado, el segundo cargo ejecutivo más importante, es la encargada de bordar a mano una política latinoamericana basada en el “poder inteligente” que no renuncia al empleo de la fuerza ni a ninguno de los objetivos estratégicos del imperio americano, aunque probablemente se propone cambiar brutalidad por la sutileza y en lugar de confrontar los cambios, se suma a ellos como una vez intentó hacer Kennedy con la Alianza para el Progreso.

Por primera vez la presencia de los ejecutivos norteamericanos en las capitales latinoamericanas no ha estado caracterizada por un clima de violento rechazo, sino todo lo contrario. En México y en Puerto España, Estados Unidos avanzó en su proyecto de lavado de imagen, dejando una zaga entre confusa y favorable. Es cierto que fuerzas políticas avanzadas se han percatado de la trampa pero también lo es que esas fuerzas, eficaces para la alerta temprana y la denuncia, carecen de capacidad decisoria.

Piezas claves en esa estrategia cuyos contornos no son todavía totalmente visibles, son Cuba y Venezuela y en otra dimensión menos protagónica Bolivia, donde Estados Unidos no adelanta compromisos, tal vez porque todavía no está seguro de poder controlar a la violenta oligarquía vernácula que no se resigna a la perdida de sus privilegios y rechaza como el diablo a la cruz el protagonismo de los pueblos originarios.

Ante los esfuerzos de Estados Unidos para reconstruir su disminuida influencia política en América Latina y reestructurar sus mecanismos de dominación en la región, Cuba se levanta como un obstáculo. No se trata de que la Isla desee o pueda oponer una resistencia física a las maniobras imperiales, sino de una capacidad de convocatoria que opera de oficio y actúa como catalizador de una cohesión que jamás había sido alcanzada. Esas circunstancias explican ciertos matices en el discurso de Obama y en el de los miembros pensantes de su administración respecto a: “Un nuevo comienzo en las relaciones con Cuba”.

Con sólo atenuar la brutalidad de la retórica de Bush basada en la arrogancia y la fuerza bruta, Obama y la Clinton lograron un clima que en gran medida desmontó la confrontación anunciada para la Cumbre de las Américas en Puerto España. Ello se debió a su enfoque inteligente del diferendo con Cuba.

Es cierto que Obama no pudo evitar los pronunciamientos de varios gobernantes latinoamericanos, algunos tan radicales como los de Daniel Ortega, aunque también es verdad que al evadir la confrontación dejó todo el asunto en una “zona de duda”

Hasta aquí se evidencia lo que pudiéramos llamar un ejercicio de relaciones públicas que, para ser instalado como política y estrategia, necesita pasar de las palabras a los hechos. La próxima visita de la Secretaria de Estado a Centroamérica y su coincidencia con la mayor parte de los mandatarios latinoamericanos, en la próxima toma de posesión de Mauricio Funes como presidente de El Salvador, será otro round.

Tal vez Hillary sepa que, para afianzar su “New Deal” latinoamericano, Estados Unidos no sólo no puede evadir el tema cubano, sino que está obligado a pasar de las palabras a los hechos. No obstante, nadie debe esperar acciones espectaculares ni cambios definitivos, tampoco aspirar a que Norteamérica se desmienta ideológica o políticamente.

Respecto a Cuba, cabe esperar que Estados Unidos se mueva en un “programa mínimo”, no exactamente avanzando, sino desmontando a cuentagotas acciones agresivas e injustificadas. El modo como la dirección cubana y los procesos avanzados de América Latina maniobren para sacar ventajas de giros que a veces pueden ser imperceptibles para los profanos, influirá en los saldos definitivos.

En cualquier caso, en ciertos aspectos el escenario está creado. La capacidad de resistencia de Cuba y la determinación de su pueblo, así como la comprensión y la solidaridad con que sus demandas son apoyadas por los gobiernos y los pueblos latinoamericanos, son un blindaje al que se suma la calidad de los argumentos y la altura del actual  liderazgo político en el continente.

Si en verdad, la nueva fase de la lucha política se convirtiera en una genuina batalla de ideas y la confrontación fuera de talento contra talento, se puede asegurar que al valor no le faltará inteligencia ni a la inteligencia valor.

Jorge Gómez Barata

Extraído de Visiones Alternativas.

~ por LaBanderaNegra en Mayo 19, 2009.

dimanche, 24 mai 2009

Politica hostil de EE.UU hacia Corea es antipacifica y anti-reunificacion

Politica hostil de EE.UU. hacia Corea es antipacifica y anti-reunificacion

Tambien despues de aparecer la nueva administracion Obama, Estados Unidos recurre a las maniobras de empeorar aun mas las relaciones entre el Norte y el Sur de Corea y obstaculizar el avance de la causa de la reunificacion intensificando la cooperacion con las autoridades conservadoras del Sur de Corea en la confrontacion con la Republica Popular Democratica de Corea de Corea. Esto demuestra que la politica hostil de EE.UU. a esta no ha cambiado ni en lo minimo.

Insiste asi el diario Rodong Sinmun en un articulo individual difundido este jueves y continua:

Tal politica hostil se caracteriza por la de agresion y de guerra para aplastar con las fuerzas a la RPDC y por la de criminal confrontacion y de division que impide la reconciliacion y la unidad de la nacion y la reunificacion de la patria.

Tambien debido a tal politica, los coreanos sufrieron la catastrofe de la guerra en la decada de 1950 del siglo pasado, y experimentaron la pena de division estando siempre en el peligro de guerra sin lograr la paz duradera en mas de medio siglo.


EE.UU. practica hoy tambien la politica para agredir en lo militar al Norte de Corea hostilizandolo de continuo.

EE.UU. es el fautor principal que dividio la nacion coreana en dos y el perverso estorbador de la reunificacion de la patria.

EE.UU. intenta realizar a toda costa la ambicion dominacionista y agresiva exacerbando la confrontacion N-S tras ocupar indefinidamente el Sur de Corea. Tal intencion del imperio ha venido azuzando la perduracion de la division de la nacion coreana y el empeoramiento de las relaciones N-S.

La realidad demuestra evidentemente que mientras sigue siendo la invariable politica hostil de EE.UU. a Corea, no es posible alcanzar la paz y la reunificacion del pais que es la aspiracion de la epoca y el angustioso anhelo de la nacion.

Todos los coreanos del Norte, el Sur y en ultramar deben avivar mas las llamas de la lucha pannacional por frustrar dicha politica de EE.UU. y sus maniobras de provocacion de guerra de agresion a esta y de confrontacion con la RPDC, tienen que observar la paz de la Peninsula Coreana y lograr cuanto antes la causa historica de la reunificacion independiente de la nacion.

Extraído de Korean News.

samedi, 23 mai 2009

Obama aggrave la situation au Pakistan et en Afghanistan

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Obama aggrave la situation au Pakistan et en Afghanistan

Ex: http://contreinfo.info/

Nous nous disons mener une guerre contre les talibans. En réalité, il s’agit d’une guerre contre les Pachtounes, qui sont 40 millions, à cheval sur la frontière entre Pakistan et Afghanistan, et qui veulent retrouver à Kaboul la voix au chapitre perdue en 2001. Par une ironie de l’histoire, la stratégie du diviser pour régner de l’empire britannique, qui a présidé au tracé de la Ligne Durand, rend vaine toute logique militaire d’affrontement avec les Pachtounes en Afghanistan. C’est l’échec - prévisible - de la confrontation avec les tribus en Afghanistan qui met aujourd’hui le hinterland pachtoune du Pakistan à feu et à sang. L’occupation étrangère a pour résultat d’unifier toutes les tribus, toutes les familles, contre les envahisseurs, menaçant du même coup la cohésion du Pakistan, et renforçant les tendances les plus extrémistes. Quelle est la solution ? A l’inverse de ce que planifie Obama, c’est le départ des forces étrangères, dont la présence enflamme la région, qui est le préalable à toute amélioration de la situation. Le temps est-il venu - enfin - de comprendre que ce ne seront pas les opérations militaires de contre-insurrection et les bombardements meurtriers sur la population civile qui parviendront à promouvoir les droits de la femme à Kaboul ? Analyse de Graham E. Fuller, ancien responsable de la station Afghane de la CIA.

par Graham E. Fuller, Saudi Gazette, 10 mai 2009

Malgré tous les discours sur le « smart power », le président Obama suit au Pakistan le même chemin menant à l’échec, qui avait été balisé par George Bush. La réalité impose une révision drastique de la pensée stratégique américaine.

• La force militaire ne permettra pas de prévaloir, que ce soit en Afghanistan ou au Pakistan ; les crises ont empiré avec la présence de l’armée américaine.

• Les talibans sont constitués en grande partie de montagnards islamistes fervents et ignorants. Ce sont également tous des Pachtounes. La plupart des Pachtounes voient les talibans - que cela plaise ou non - comme le principal outil permettant la restauration du pouvoir pachtoune en Afghanistan, perdu en 2001. Les Pachtounes sont aussi l’un des peuples au monde les plus farouchement nationalistes, xénophobes et tribaux, qui ne s’unissent que contre les envahisseurs étrangers. En fin de compte, les talibans sont sans doute plus Pachtounes qu’ils ne sont islamistes.

• Croire possible de sceller de façon étanche la frontière pakistano-afghane relève du fantasme. La « ligne Durand » est une ligne arbitraire tracée par l’empire britannique au coeur des tribus pachtounes des deux côtés de la frontière. Et il y a deux fois plus de Pachtounes au Pakistan qu’il n’y en a en Afghanistan. Le combat des 13 millions de Pachtounes afghans a déjà enflammé les 28 millions de Pachtounes du Pakistan.

• L’Inde est la principale menace géopolitique pour le Pakistan, et non l’Afghanistan. Le Pakistan doit donc toujours faire de l’Afghanistan un État ami. De plus, l’Inde est décidée à prendre pied résolument en Afghanistan - dans les domaines du renseignement, de l’économie et du politique - ce qui donne des frissons à Islamabad.

• Le Pakistan ne rompra donc jamais les liens avec les Pachtounes, ni ne les abandonnera dans les deux pays, qu’il s’agisse de radicaux islamistes ou non. Le Pakistan ne pourra jamais se permettre de voir des Pachtounes hostiles à Islamabad ayant le contrôle à Kaboul, ou sur son territoire.

• Partout, l’occupation crée la haine, comme les États-Unis sont en train de l’apprendre. Pourtant, les Pachtounes sont notablement absent du mouvement jihadiste au niveau international, bien qu’ils soient nombreux à s’être rapidement alliés sur leur territoire avec Al-Qaida pour combattre l’armée américaine.

• Les États-Unis avaient toutes les raisons de frapper en représailles à la présence d’Al-Qaida en Afghanistan, après l’attentat du 11 septembre. Les talibans représentaient un cas d’école de régime brutal et incompétent. Mais les talibans ont abandonné le terrain, plutôt qu’ils n’ont perdu la guerre de 2001, afin reprendre le combat plus tard. De fait, on peut débattre pour savoir s’il aurait été possible - avec une pression exercée par le Pakistan, l’Iran, l’Arabie saoudite et la quasi-totalité des autres pays musulmans qui considèrent les talibans comme des rustres - de contraindre les talibans d’extrader Al-Qaïda sans recourir à la guerre . Ce débat est en tout cas, maintenant sans objet. Mais les conséquences de cette guerre débilitante sont funestes et elles continuent encore à se propager.

• La situation au Pakistan est passée de mauvaise à pire encore, en conséquence directe de la guerre menée par les États-Unis et qui fait rage sur la frontière afghane. La politique américaine a désormais porté la guerre d’Afghanistan au delà de la frontière avec le Pakistan, par des incursions, des assassinats et des bombardements de drones - c’est une réponse classique lors de l’échec face à une insurrection. Vous souvenez-vous de l’invasion du Cambodge, afin de sauver le Vietnam ?

• Le caractère islamique et tribal profondément enraciné du pouvoir pachtoune dans les Province de la Frontière du Nord-Ouest du Pakistan ne sera pas transformé par l’invasion ou la guerre. C’est une tâche qui requiert probablement plusieurs générations pour que commence à se transformer le caractère social et psychologique qui sont profondément ancrés dans cette région. La guerre provoque une réponse viscérale et atavique.

• Le Pakistan est de fait en train de commencer à se fissurer sous la pression incessante exercée directement par les États-Unis. Les sentiments anti-américains au Pakistan sont très virulents, renforçant le radicalisme islamique et contraignant même les non-islamistes à y adhérer.

Seul le retrait de l’Amérique et de l’OTAN sur le terrain commencera à permettre à ces émotions proche de la frénésie de s’estomper au Pakistan, et à la région de commencer à se refroidir. Le Pakistan est expérimenté en matière de gouvernance et il est très capable de faire face à ses propres islamistes et mouvements tribaux dans des circonstances normales. Jusqu’à récemment, les islamistes pakistanais avaient l’un des plus faibles taux de succès électoral dans le monde musulman.

Mais les politiques américaines ont porté le nationalisme, la xénophobie et l’islamisme à leur paroxysme. Maintenant que Washington exige que le Pakistan se charge de réparer l’échec des politiques américaines en Afghanistan, Islamabad ne parvient plus à gérer sa crise interne.

L’armée pakistanaise est plus que capable de maintenir le pouvoir de l’État contre les milices tribales et de défendre ses propres armes nucléaires. Seule une convulsion nationaliste et révolutionnaire pourrait modifier cette situation - ce dont la plupart des Pakistanais ne veulent pas. Mais Washington peut encore réussir à déstabiliser le Pakistan en poursuivant sa stratégie de ligne dure. Un nouvel épisode de régime militaire - qui n’est pas ce dont le Pakistan a besoin - sera le résultat probable, et même dans ce cas, les politiques fondamentales d’Islamabad ne changeront pas, sauf au niveau cosmétique.

En fin de compte, seuls les islamistes modérés eux-mêmes peuvent l’emporter sur les radicaux dont la principale source de légitimité provient de l’incitation à la résistance populaire contre les envahisseurs extérieurs. Malheureusement, les forces américaines et les islamistes radicaux sont maintenant proches d’un état de co-dépendance.

Il serait encourageant de voir naître une démocratie en Afghanistan. Ou d’assister à une généralisation des droits des femmes et de l’éducation - des domaines où paradoxalement l’occupation soviétique avait plutôt bien réussi. Mais ces changements ne vont pas se produire, même dans une génération, compte tenu de l’histoire de dévastation sociale et économique de ce pays depuis plus de 30 ans.

La menace d’Al-Qaida ne provient plus des grottes de la frontière, mais de ce qu’elle symbolise, et a depuis longtemps diffusé ses métastases à d’autres activistes du monde musulman. Les Pachtounes se battent pour obtenir une plus grande participation au pouvoir en Afghanistan. Mais peu de Pachtounes des deux côtés de la frontière se placeront longtemps dans une perspective radicale de jihadisme international, une fois disparue l’incitation qui naît de la présence américaine. Personne de part et d’autre de la frontière, ne le souhaite réellement.

Ce qui peut être fait doit être en harmonie avec la culture politique. Il faut laisser les non-militaires et les organisations internationales neutres, libre de préoccupations géopolitiques, prendre en charge la guérison des plaies afghanes et la construction des structures de l’État. Si les huit dernières années avaient apporté des succès, peut-être une pourrait-on adhérer aux politiques menées par les États-Unis. Mais la situation sur le terrain ne montre qu’une détérioration continuelle, rendant l’issue de plus en sombre. Allons-nous renforcer encore cette même politique ? Ou les États-Unis vont-ils reconnaître que la présence américaine est devenue plus un problème que la solution ? Ce débat n’est pas encore ouvert.


Publication originale Saudi Gazette, traduction Contre Info

Si hay un imperio y paises rebeldes, los que restan son paises tributarios

Si hay un imperio y países rebeldes, los que restan son países tributarios

El manejo comunicacional oculta dos de esas verdades y hace blanco en la tercera, en los que resisten.

Y hay un imperio. “El imperio norteamericano ya no es algo que se oculte. En marzo de 1999, la portada del New York Times Magazine exhibía un gigantesco puño cerrado, pintado con las franjas y estrellas de la bandera de los Estados Unidos, debajo del cual se leían las palabras: «Lo que el mundo requiere ahora: para que funcione la globalización, Norteamérica no puede tener miedo de actuar como la superpotencia todopoderosa que es».

“Así se anunciaba el Manifiesto por un mundo rápido, de Thomas Friedman, que instaba a los Estados Unidos a cumplir su papel de agente encargado de poner en vigor el orden global capitalista: «la mano oculta del mercado jamás funcionará sin un puño oculto [...] el puño oculto que mantiene seguro al mundo para las tecnologías del Valle de la Silicona se llama Ejército, Fuerza Aérea, Marina y Cuerpo de Infantería de Marina de los Estados Unidos». Cuatro años después, en enero de 2003, cuando ya dejó de haber razón para simular que el puño estaba oculto, la portada completa del Magazine anunciaba un ensayo de Michael Ignatieff con las siguientes palabras:


“El imperio norteamericano. Acostúmbrense a él: ¿Qué otra palabra, que no sea «imperio» describe esa cosa imponente en la que Norteamérica se está convirtiendo? [...] Ser una potencia imperial [...] significa hacer cumplir el orden existente en el mundo, y hacerlo en interés de Norteamérica•” (1)

George Walker Bush en 2002, al anunciar al mundo La Estrategias de Seguridad de los Estados Unidos expresó “Somos una fuerza militar sin paralelo, tenemos el derecho de actuar en todo el mundo para imponer la economía de mercado y garantizar la seguridad energética, podemos atacar a quien consideremos una amenaza o a cualquier país que pueda convertirse en una competencia militar”. (2)

“Imprimen (los Estados Unidos) las divisas requeridas por el comercio internacional en cantidades que no conocen límites…, mantiene un control monopólico sobre los organismos internacionales de crédito e inversión.”, (se posee) “…un sinnúmero de noticias… que reflejan los privilegios nacionales que ese país ha impuesto al mundo. Hay políticos dentro y fuera de Estados Unidos que se ofenden si alguien se atreve a calificarlo como imperio, cual si existiera otra palabra que lo defina mejor.”

Estados Unidos tiene siete flotas y más de 800 bases militares distribuidas en el planeta. “El poder militar estadounidense se apoya en su arsenal nuclear. Posee 534 misiles balísticos intercontinentales (ICBM) Minuteman III y Peacekeeper; 432 de lanzamiento submarino (SLBM) Trident C-4 y D-5 instalados en 17 submarinos del tipo Ohio, y alrededor de 200 bombarderos nucleares de largo alcance que pueden ser abastecidos en el aire, entre ellos 16 invisibles B-2. Los misiles son portadores de varias ojivas. El número de cabezas nucleares desplegadas oscila entre 5 mil y 10 mil. Sus Fuerzas Armadas disponen de más de 2 millones de hombres. A esto se añaden cientos de satélites de uso militar y comunicaciones, que componen el escudo espacial y los medios para la guerra electromagnética.” (3)

La propaganda y acción del poder capitalista se centran en lograr la sospecha, condena y/o desestabilización de los estados y pueblos que no aceptan esta unipolaridad: Cuba, Venezuela, Bolivia, Ecuador, Nicaragua, Corea del Norte, Irak, Irán, Afganistán, China, Rusia…

Como conclusión de lo anterior la soberanía nacional de los otros países está condicionada por el imperio.

Así se explican la Europa que siempre coincide con las políticas norteamericanas, las socialdemocracias y derechas latinoamericanas que nunca han condenado en la OEA las ilegalidades de Estados Unidos, los miembros mayoritarios de la ONU que han permitido el bombardeo de Yugoslavia, las invasiones de Irak, Afganistán, el acuerdo ilegal entre su organismo de paz y la OTAN.

El mundo provincial en desarrollo se evita conflictos entregando pacíficamente bajo la forma de la economía de mercado los recursos naturales y humanos que las corporaciones necesitan controlar para sus planes de seguir privilegiadas después de la crisis final capitalista.

Conclusión lógica: como no puede haber imperios sin naciones subyugadas hay orgullos falsos de soberanía.

Rómulo Pardo Silva

Notas
1 http://www.forosocialsevilla.org/spip.php?article39
2 http://www.rebelion.org/noticia.php?id=71764
3 http://www.prensa-latina.cu/index.php?option=com_content&task=view&id=80915&Itemid=1

Extraído de Mal Publicados.

00:35 Publié dans Actualité | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : impérialisme, etats-unis, politique internationale | |  del.icio.us | | Digg! Digg |  Facebook

mardi, 19 mai 2009

Dirigente de Kirguistan denuncia permanencia de base aérea de EE.UU

Dirigente de Kirguistán denuncia permanencia de base aérea de EE.UU

El vicepresidente del Comité de Asuntos Internacionales de la Cámara Legislativa de Kirguistán, Kabai Karabékov, afirmó que todos los acuerdos referentes a la base que Estados Unidos emplazó en ese país asiático han vencido, y la permanencia de sus tropas es injustificada.

Insistió el líder parlamentario en que no existen razones para que efectivos del Pentágono permanezcan en Kirguistán.

El parlamento kirguís rescindió el respectivo acuerdo con Estados Unidos y otras once naciones de la llamada coalición antiterrorista. No se justifica que siga funcionando la base de Manas y permanezcan en ella militares extranjeros, reiteró el diputado.
Reiteró Karabékov que no se justifica que siga funcionando la base de Manas y permanezcan en ella militares extranjeros.

Karabékov fue tajante al advertir que todos los acuerdos sellados anteriormente perdieron ya su vigencia.


Con esas palabras el vicepresidente del comité parlamentario explicó la inutilidad de una propuesta del senado estadounidense de destinar 30 millones de dólares al desarrollo de la aeronavegación de Kirguiztán si este país acepta tropas de Washington en Manas.

Recientemente la secretaria de Estado de la potencia del Norte, Hillary Clinton, dijo a la prensa que se sentía confiada en que sea alcanzado un acuerdo.

En nombre de la lucha global contra el terrorismo, Manas fue inaugurada en 2001 de acuerdo con la ONU para apoyar la invasión de fuerzas de la OTAN encabezadas por Estados Unidos contra Afganistán.

Unos mil 200 efectivos estadounidenses y de otros países permanecen en ese enclave militar.

A tenor de una resolución aprobada por el parlamento kirguiz el 19 de febrero, las tropas foráneas tendrán que marcharse de ese cuartel 180 días después de invalidado el acuerdo, o sea en la primera mitad de agosto.

Extraído de Radio Habana Cuba.

Espace et temps chez Ezra Pound

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Archives de "Synergies Européennes" - 1986

Vintilia Horia:

 

Espace et temps chez Ezra Pound

 

Pour avoir défendu une position similaire, pour s'être attaqué à l'usure comme procédé hétérodoxe dans le cadre de l'Eglise de son temps, Dante perdit sa patrie, fut condamné à mort et dut passer le reste de ses jours loin des siens. Au XXème siècle, Ezra Pound subit le même sort…

 

Ce qu'on pourrait appeler "le plan vital" dans la poésie d'Ezra POUND ne peut trouver qu'une seule comparaison, ancienne mais toujours valable: l'œuvre de DANTE. La poésie que ce grand Italien a produite ne se limite pas à La Divine Comédie mais comprend aussi De la Monarchie, œuvre en prose contenant le projet d'une société basée sur l'idée impériale. Cette idée recèle une transcendance que l'homme doit conquérir en subissant les épreuves de l'enfer, épreuves de la connaissance en profondeur; en tant qu'être inférieur, il doit surpasser les purifications du purgatoire afin de trouver, avec l'aide de l'amour, considéré comme possibilité maximale de sagesse, les dernières perfections du Paradis. Dans cette optique, la Vie serait un voyage, comme l'imaginaient les Romantiques ainsi que RILKE et JOYCE. Dans l'œuvre de POUND, ce qui nous rapproche de La Divine Comédie, ce sont les Cantos Pisans. Dans toute la poésie et la prose de POUND, comme dans tous les gestes de son existence, on repérera un souci quasi mondain de la perfection, confinant au métaphysique. L'homme, dans cette perspective, doit se perfectionner, non seulement sur le plan de la transcendance et de l'esprit, mais aussi dans le feu des affrontements momentanés qui composent sa vie de pauvre mortel. La perfection spirituelle dépend de l'héroïcité déployée dans le quotidien. "La lumière plane sur les ténèbres comme le soleil sur l'échine d'une bourrique".

 

Une révolte contre le monde moderne

 

Le pire, chez DANTE, l'ennemi qu'il combattit tout au long de sa vie d'exilé, fut la confusion consciente entre pouvoir temporel et pouvoir spirituel. La tâche du Pape, c'était de s'occuper de la santé et du salut des âmes. L'Empereur, lui, devait s'occuper du monde visible, sans jamais perdre de vue le but ultime. Le Souverain Pontife ne devait s'abstenir de lutter contre les maux du quotidien. L'homme est une combinaison d'antagonismes complémentaires. Sa complexe constitution psychosomatique révèle un désir d'harmonie finale, désir qui s'exprime sans cesse conformément à la "coincidentia opposi- torum". L'affrontement politique, qui caractérisa et marqua l'existence de DANTE, constitue finalement le sceau typique d'un être capable de vivre et d'assumer la même essence, tant dans sa trajectoire vitale que dans son œuvre; la marque de l'affrontement politique confèrera une aura tragique à POUND également. Cette similitude dévoile non seulement une certaine unité de destin commune aux deux poètes mais aussi l'immuabilité de la tragédie humaine, (de l'homme en tant que zoon politikon, NdT), à travers les siècles. Le poète nord-américain ne put échapper au XXème siècle à ce sort qui frappa le Florentin six cents ans plus tôt. On constate une relation perverse avec la politique qui affecte l'homme et  lui est dictée par le droit, ou plutôt le devoir, de se scruter sous l'angle du péché originel. La politique est le terrain où l'homme trouvera, avec le maximum de probabilités, une tribune pour se faire comprendre aisément et rendra ses pensers accessibles aux commentateurs.

 

La révolte de Pound contre le monde moderne est une attitude quasi générique, consubstantielle à sa génération. En effet, c'est cette lost generation nord-américaine qui abandonna sa patrie lorsque le puritanisme céda le pas au pragmatisme, dans un mouvement comparable à la révolte de KAFKA contre la technique considérée comme inhumaine. Mais ce n'est pas la technique qui définit le désastre. HEIDEGGER a consacré un essai entier à ce problème crucial et nous savons désormais combien les machines et leur développement peuvent être nocives et ceci seulement par le fait qu'il y a malignité chez ceux qui les manipulent. Le problème nous apparaît dès lors beaucoup plus profond. Il s'agit de l'homme lui-même et non des œuvres qu'il produit. Il s'agit de la cause, non de l'effet. Déjà les romanciers catholiques français de la fin du XIXème, tout comme le Russe DOSTOIEVSKI, avaient souligné ce fait. C'est le manque de foi, la perte du sens religieux qui octroye à l'homme des pouvoirs terrestres illimités.

 

Le problème n'est donc pas physique mais métaphysique. POUND n'est certes pas un poète catholique. C'est un homme soulevé par une religiosité profonde qui se situe dans une forme d'ésotérisme compris comme technique de la connaissance. Ce qui lui permet d'utiliser les mêmes sources et de chercher les mêmes fins que BERNANOS ou CLAUDEL. Il n'est donc pas difficile de rencontrer des points communs   -et d'impétueux déchaînements au départ d'une même exégèse-  entre POUND et l'auteur du Journal d'un curé de campagne, qui lança de terribles attaques contre notre monde actuel après la seconde guerre mondiale.

 

Le Mal, c'est l'usure

 

En conséquence, nous pouvons affirmer que, de son premier à son dernier bilan, POUND sait où se trouve le mal. Il le définit par le terme usure, tout en se proclamant combattant contre tout système voué à l'utiliser sous les formes de l'exploitation, de l'oppression ou de la dénaturation de l'être humain et contre toute Weltanschauung  ne se basant pas sur le spirituel. C'est là que les attaques de POUND contre l'usure, présentes dans les Cantos, trouvent leurs origines, ainsi que ses critiques d'un capitalisme exclusivement basé sur ce type d'exploitation et son désir de s'allier à une régime politique ressemblant à l'Empire défendu et illustré par DANTE.

 

Ses émissions de Radio-Rome dirigées contre ROOSEVELT durant les dernières années de la guerre sont, dans ce sens, à mettre en parallèle avec les meilleurs passages des Cantos. Pour avoir défendu une position similaire, pour s'être attaqué à l'usure comme procédé hétérodoxe dans le cadre de l'Eglise de son temps, DANTE perdit sa patrie, fut condamné à mort et dut passer le reste de ses jours loin des siens. Ezra POUND subit le même sort. Lorsque les troupes nord-américaines submergèrent l'Italie, POUND fut arrêté, moisit plusieurs mois en prison et, pour avoir manifesté son désaccord avec un régime d'usure, un tribunal le fit interner dans un asile d'aliénés mentaux. Son anti-conformisme fut taxé d'aliénation mentale. Cette leçon de cynisme brutal, d'autres défenseurs d'un régime d'usure, je veux dire de l'autre face de l'usure, celle de l'exploitation de l'homme en masse, l'apprendront. Cette usure-là engendre les mêmes résultats, en plus spectaculaire peut-être puisque le goulag concentre davantage d'anti-conformistes déclarés tels et condamnés en conséquence.

 

"L'usure tue l'enfant dans les entrailles de sa mère" déclare un des vers de la célèbre finale du Cantos XV. Cet enfant pourrait bien être le XXIème siècle, celui que POUND prépara avec tant de passion, avec un soin quasi paternel. Ce siècle à venir est déjà menacé de tous les vices prévus par le poète, contrairement à sa volonté et à ses jugements empreints de sagesse.

 

Vintilia HORIA.

 

(traduit de l'espagnol par Rogelio PETE, décembre 1985).

 

samedi, 16 mai 2009

"The Civil War": un documentaire sur la Guerre de Sécession

The civil war : un documentaire orienté sur les facteurs de la guerre de Sécession

Le documentaire de Ken Burns, The civil war, sur la guerre de Sécession, vient de sortir en DVD chez ARTE Editions. Ces neuf épisodes font revivre les grands moments de ce conflit qui ensanglanta l’Amérique de 1861 à 1865. Mais ils passent sous silence la complexité de l’origine du conflit.

Image Hosted by ImageShack.us La guerre de Sécession, qui fit 620 000 morts, fut le conflit le plus sanglant de toute l’histoire des Etats-Unis : les pertes furent supérieures d’un tiers à celles de l’Amérique durant la Seconde Guerre Mondiale, pour une population pourtant sept fois moins nombreuse (31 millions d’habitants à la veille des hostilités).

La monumentale fresque de Ken Burns (11 heures de film) offre un récit captivant à l’aide de citations et photographies d’archives souvent pertinentes. Mais ce documentaire réalisé en 1990 développe une analyse malheureusement très manichéenne des enjeux et facteurs de la guerre de Sécession. Le titre de la série, déjà, est une indication. « Civil war » (guerre civile) est l’appellation retenue par le camp nordiste. Alors que les confédérés (sudistes), eux, parlent de « War between the States » (guerre entre les Etats). Cette différence sémantique n’est pas un détail mais une réalité cruciale. Quand le 9 février 1861, sept Etats américains décident de faire sécession et fondent une Confédération, il s’agit pour le Sud de défendre sa civilisation contre les Etats du Nord. Deux visions du monde vont s’affronter. Le premier épisode du documentaire est très révélateur du parti pris de l’auteur. Il s’appelle « La cause ». Le message est clair… Pour Ken Burns, le conflit n’a qu’une seule cause : la question de l’esclavage.

Dans un numéro remarquable de la Nouvelle Revue d’Histoire de mars-avril 2005, un dossier consacré à L’Amérique divisée met en perspective les racines du conflit. Economiques d’abord, entre le Nord reposant sur un système industriel et financier, et le Sud, essentiellement agricole, en état de dépendance. « Grâce au coton, les Etats du Sud fournissent les trois quarts des exportations de l’Union. Logiquement, ils devraient en tirer une richesse confortable. Pourtant, c’est le Nord qui fait les plus gros bénéfices, parce qu’il contrôle les importations et les exportations », souligne Dominique Venner. Diminués économiquement et politiquement par rapport au Nord, les Etats du Sud le sont également démographiquement : les immigrants venus d’Europe affluent vers le Nord affairiste mais se détournent du Sud.

Une réalité civilisationnelle beaucoup plus complexe que l’unique argument passionnel de l’esclavage. On notera enfin que The civil war dresse parfois des portraits caricaturaux des principaux protagonistes. Un peu comme Barack Obama aujourd’hui, Abraham Lincoln, dans le camp nordiste, prend des allures de messie. Le président des Etats-Unis élu en 1860 est décrit comme un homme au regard pénétrant et profondément humain… tandis que Jefferson Davis, président de la Confédération des Etats sudistes, est présenté sous un angle tyrannique, « insomniaque » et « froid comme un lézard ». Bref, si The civil war fait revivre avec talent la chronologie des évènements, le téléspectateur devra faire preuve de perspicacité pour s’affranchir d’un récit ne faisant pas preuve toujours de la « rigueur historique », vantée pourtant sur le coffret de ces quatre DVD.

Auguste Kurtz pour Novopress France


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jeudi, 14 mai 2009

Le Maghreb pris dans l'unification méditerranéenne et transatlantique

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Le Maghreb pris dans l’unification méditerranéenne et transatlantique

Ex: http://www.mecanopolis.org/

L’influence des Etats-Unis et de l’Europe sur le Maghreb
En collaboration avec la revue Questions internationales (La Documentation française)Avec Dorothée Schmid, chercheuse à l’IFRI (Méditerranée/ Moyen Orient)
Et Hamid Barrada, journaliste, directeur Maghreb/Orient sur la chaîne TV5

La revue Questions internationales proposait un excellent numéro sur le Maghreb en novembre-décembre 2004, qui suggérait tout l’intérêt de la tenue d’un tel café géopolitique sur le Maghreb et les rivalités de pouvoir entre Etats-Unis et Europe dans cette région. Nos deux intervenants considéraient ici le Maghreb comme une entité au sein d’un ensemble méditerranéen et proche-oriental plus vaste, plutôt que par ses Etats pris un à un. Dorothée Schmid a montré comment la politique européenne au Maghreb devait faire face à un investissement américain croissant dans cette zone, tandis que Hamid Barrada s’intéressait aux ambitions américaines dans la région et à la perception de ces politiques américaines par les habitants.

La politique européenne au Maghreb:
Travaillant sur la politique européenne en Méditerranée, Dorothée Schmid a porté son intérêt sur les stratégies comparées des Américains et des Européens au Maghreb. Il ressort que si nouvel activisme américain il y a au Maghreb, il est certes bien moindre que pour le Moyen-Orient, mais suffisamment important pour susciter des inquiétudes côté européen.

1.Le Maghreb, une chasse gardée européenne ?


Le Maghreb étant une région proche de l’Europe sur de nombreux points, culturels, historiques, géographiques, économiques, il constitue une région prioritaire dans la politique extérieure de l’Union européenne. 2005 marque les dix ans du partenariat euro-méditerranéen, cette grande initiative de coopération régionale avec la rive sud de la Méditerranée. Ce partenariat est du reste essentiellement économique (accords bilatéraux de libre-échange, avec l’Algérie, le Maroc et la Tunisie, coopération financière) ; ses volets politiques et culturels faisant pâle figure à côté. Le Maroc a su tirer son épingle du jeu, en attirant une part importante des ressources consacrées au partenariat (deuxième pays partenaire méditerranéen le mieux doté après l’Egypte) ; la Tunisie est présentée par ses partenaires européens comme un modèle de réforme économique libérale ; l’Algérie est entrée dans le partenariat tardivement, en 2002, (et la signature d’un accord de libre-échange avec l’UE doit être vue surtout comme un appui diplomatique européen pour l’Algérie dans la mesure où le pays est mono-exportateur d’hydrocarbures), et la Libye a été récemment invitée à rejoindre le Processus de Barcelone. L’Union européenne souhaite encourager l’intégration entre les pays partenaires eux-mêmes, et le Maghreb reste un modèle sous-régional possible ; l’initiative d’Agadir d’intégration régionale démontre l’existence d’un véritable moteur maghrébin.

2.La redéfinition européenne de sa politique de voisinage


Or, aujourd’hui, l’élargissement de l’UE est quasiment achevé et le temps semble être venu d’un verrouillage des frontières et de l’Union. La standardisation des relations de l’Union avec les Etats du Sud et les Etats de l’Est est en marche : la Méditerranée devient ainsi traitée comme le Caucase, l’Ukraine, la Biélorussie ou la Moldavie. Le but semble être l’unification de ces régimes à un grand marché élargi ; tous les aspects de l’Union sauf les institutions, comme le disait Romano Prodi.
Les conséquences pour le Maghreb sont importantes : on assiste à un renforcement des relations bilatérales et à un abandon de la perspective régionale méditerranéenne. Qui plus est, des problèmes de financement ne tardent pas à se faire jour, avec une compétition des différents Etats riverains de l’UE pour savoir lequel profitera le plus des aides européennes. Les pays les plus réformateurs, les plus en phase avec l’UE et respectant le mieux les droits de l’homme devraient être à terme récompensés pour leur volonté de réforme, selon une logique du premier arrivé premier servi. Les pays méditerranéens ne sont pas forcément les mieux placés dans cette compétition. Cependant, le Maroc vise déjà un statut d’association avancée avec l’UE, qui se concrétiserait d’abord par la mise en place d’une union douanière, sur le modèle turc.

En fait, selon Dorothée Schmid, on assiste à une dilution de la priorité méditerranéenne de l’UE, qui pourrait annoncer la fin de la politique méditerranéenne de l’Europe. L’avenir sera aux relations bilatérales étroites entre des Etats méditerranéens pris individuellement et certains Etats-membres de l’UE, la France au premier chef.

3.Une présence américaine intense


C’est dans ce contexte que la présence américaine dans la région se fait plus intense. On peut même dire que les Etats-Unis restent et demeurent l’unique puissance méditerranéenne, quelle que soit l’activité européenne en cours. En plus de la présence militaire, l’administration Bush s’intéresse diplomatiquement et économiquement au Maghreb. Le 11 septembre 2001 a tout changé. Auparavant, les Américains tenaient le régime algérien en quarantaine, voyaient avec une forte hostilité le régime libyen, et manifestaient de l’indifférence pour la Tunisie, la timide cordialité avec le Maroc étant pleine de distances. Depuis le 11 septembre, le Moyen Orient élargi jusqu’au Maroc est passé au cœur des préoccupations de l’administration Bush. La montée en puissance de l’islam politique en Algérie ou au Maroc inquiète, la prolifération nucléaire de la Libye angoisse, l’obsession démocratique pour la région ne faiblit pas (avec une théorie des dominos, la démocratie se répandant d’Irak aux autres pays par contagion de Marrakech au Bangladesh), et la politique d’hydrocarbures (gaz et pétrole) est naturellement essentielle.
Les Américains ont donc lancé une offensive diplomatique dans la région, qui se concrétise par les nombreuses tournées d’officiels américains au Maghreb, et par l’invitation régulière des chefs d’Etat maghrébins à la Maison blanche. C’est dans ce contexte qu’est intervenu le rétablissement spectaculaire des relations avec la Libye. Une collaboration renforcée s’établit par ailleurs dans le domaine sécuritaire avec l’Algérie, qui est présentée comme un modèle de lutte anti-terroriste. Enfin, un accord de libre-échange a été signé avec le Maroc en 2004, dont la faible portée économique ne doit pas masquer la très forte importance politique.

4.Vers une rivalité Europe - Etats-Unis au Maghreb


Une réelle rivalité transatlantique se dessine en fait sur le front économique. Le Middle East Partnership initiative traduit une offensive économique des Etats-Unis à l’échelle du grand Moyen-Orient. Les Américains ont déjà signé des accords de libre-échange avec la Jordanie, le Maroc, Bahreïn, et d’autres ne tarderont pas, en un temps absolument record. Derrière les intérêts commerciaux officiels, ces accords sont présentés comme un volet de la diffusion de la liberté dans le monde. L’accord avec le Maroc, négocié en secret, est plutôt léonin, les Américains n’ayant rien cédé sur leurs intérêts. Les Américains soutiennent par ailleurs l’accès de l’Algérie à l’OMC, et raflent désormais les concessions d’hydrocarbures en Libye…
Toute une rivalité potentielle entre les Etats-Unis et l’UE est donc en train de naître. Les Européens craignent que les accords de libre échange signés par les pays de la région avec les Américains rendent impossible la mise en œuvre des accords euro-méditerranéens. Par ailleurs, les Européens craignent d’être cooptés pour financer les plans américains de développement de la région.

5.Les conséquences pour le Maghreb de cette rivalité transatlantique


Les conséquences pour la rive sud méditerranéenne de cette rivalité Etats-Unis - Europe sont assurément d’abord et avant tout une ouverture économique généralisée qui sera difficile pour les économies de la région. Peut-on dire que les Américains comme les Européens négligent les intérêts des Maghrébins ? Les zones de libre échange s’inscrivent fondamentalement comme des projets politiques visant la démocratie et les réformes. La Commission européenne et le Conseil européen s’alignent progressivement sur le discours de réforme américain même si l’UE se montre encore peu sourcilleuse en matière de droits de l’homme. Si les Américains sont plus durs en parole quant au respect des droits de l’homme, ils se montrent finalement en pratique assez peu regardants. Etats-Unis et Europe se rejoignent en tout cas pour louer systématiquement le modèle marocain, seul exemple de démocratisation progressive et pacifique observable dans la région. On peut en conclure que les Américains comme les Européens privilégient la stabilité de la région et l’UE compte même sur les Etats-Unis pour faire la loi si nécessaire.
Si côté américain, il y a une réelle défiance des néo-conservateurs pour les régimes arabes, les Maghrébins sont ravis de voir qu’on s’intéresse à eux, surtout quand l’UE pense plus à ses frontières de l’Europe orientale qu’à son voisinage méditerranéen. Les crispations, côté européen, sont alors réelles. Et comme l’a ajouté Dorothée Schmid lors du débat, les Européens ne peuvent pas défendre aussi bien leurs intérêts commerciaux dans la région que les Américains, dans la mesure où l’UE accompagne ses projets de libre échange d’une aide économique importante, là où les Américains sont beaucoup plus libres.

Au final, l’UE et les Etats-Unis se livrent une concurrence pas forcément nuisible pour le Maghreb, puisqu’elle fait monter les enchères en faveur des pays maghrébins. Mais il faut s’attendre à ce que les Européens restent structurellement plus engagés dans la région, même s’ils devront apprendre à composer avec les Américains. Les Maghrébins devront, eux, apprendre à négocier à court terme avec les Américains et sur le fond avec les Européens.

Ambitions américaines et perceptions maghrébines:
Hamid Barrada souligne d’emblée que les relations du Maghreb avec les Etats-Unis ne sont pas nouvelles. Le Maroc ne fut-il pas le premier pays à reconnaître les Etats-Unis d’Amérique lors de l’indépendance américaine ? De même, les Américains ont joué un rôle substantiel dans la libération du Maghreb, soutenant les intérêts de la décolonisation et faisant reconnaître politiquement la légitimité du combat algérien.

Proximités américano-maghrébines:
Le traumatisme du 11 septembre a changé la vision américaine du reste du monde. Et leur intérêt pour le Maghreb en est sorti renforcé. Les Marocains avaient infiltré les réseaux islamistes partant combattre les Soviétiques en Afghanistan, et avaient donc in fine infiltré le réseau de Ben Laden. Un bras droit de Ben Laden était d’ailleurs un agent marocain, qui fut livré aux autorités américaines pour connaître le fonctionnement d’Al Qaida. De même, les Algériens ont beaucoup aidé les Américains dans la lutte anti-terroriste. Le chef d’Etat algérien fut le premier des chefs d’Etat à se rendre à Washington après le 11 septembre 2001, et Washington lui a rapidement livré les armes que l’Algérie réclamait à l’Europe pour sa lutte contre le terrorisme… La Libye fut aussi très précieuse aux Américains pour donner des informations sur le rôle des Pakistanais dans la prolifération nucléaire en Iran et ailleurs. Kadhafi jouant la carte américaine, il devient un témoin à charge contre l’Iran. Enfin, la Mauritanie risquait de devenir une base arrière du réseau Al Qaida, l’un des hommes les plus proches de Ben Laden est un Mauritanien. Là encore, Kadhafi a été très précieux aux Américains pour leur donner des informations là-dessus, et sur les plans d’Al Qaida de s’implanter au Sahara. La Mauritanie a dû jouer finement pour ne pas se faire reprocher ses relations inavouables avec l’Irak de Saddam. C’est ainsi que le pays a reconnu Israël (il y a un ambassadeur israélien à Nouakchott) afin de donner des gages aux Etats-Unis. Mais cette politique du régime mauritanien a été vivement critiquée, au point de donner lieu en Mauritanie à un rapprochement entre nationalistes arabes et islamistes.

Les Etats-Unis face aux rivalités algéro-marocaines sur le Sahara occidental:
Les rivalités entre Algérie et Maroc quant au Sahara occidental perturbent les plans américains dans la région. L’affaire du Sahara occidental n’étant pas réglée, chaque Etat a intérêt à collaborer au plus vite avec les Américains pour bénéficier de leur soutien dans le conflit. L’Algérie commença à proposer aux Américains un partage entre Maroc et Polisario. Les Marocains ont alors accepté l’accord de libre-échange avec les Etats-Unis - accord qui n’a pas une finalité économique mais bien plutôt politique - afin que les Américains ne se mêlent surtout pas de l’affaire du Sahara occidental.
Comme cela est ressorti lors du débat qui a suivi l’intervention de Hamid Barrada, il y a eu un consensus au Maroc sur cet accord de libre-échange : il permettait en effet aux Marocains d’entretenir de bonnes relations avec les Etats-Unis quant au Sahara occidental. L’opposition islamiste marocaine, pourtant représentée au Parlement, ne s’est donc pas opposée à cet accord de libre-échange (conclu en des termes très proches de l’accord américano-jordanien).
Certes, l’Afrique du Sud a pris parti pour le Polisario dans ce conflit du Sahara occidental. Il faut y voir ici la faiblesse de la diplomatie officielle marocaine, qui semble ne pas s’être remise de la disparition de Hassan II qui menait une diplomatie parallèle assez efficace . Au contraire l’Algérie a tout une tradition de diplomatie militante et a un réel intérêt pour l’Afrique noire. Il n’est dès lors pas étonnant qu’elle ait su rallier à elle l’Afrique du Sud. Toutefois, dans ce conflit finalement assez artificiel entre Maroc et Algérie - identitaire pour l’armée algérienne et nationale pour les Marocains comme le disait Hubert Védrine - il semble momentanément que l’Algérie a en fait perdu la main. Elle laisse donc le dossier ouvert, comme en suspens, pour ne pas favoriser un renforcement du royaume jugé préjudiciable à ses intérêts.

Le projet américain pour le grand Moyen-Orient:
Les Maghrébins savent très bien tenir le langage de la démocratie qui plaît tant aux Américains. Qui plus est, les femmes conduisent au Maroc, contrairement à la situation saoudienne, et tout le monde parle de démocratie dans le royaume de Mohammed VI. Autant dire que cela conforte les Américains dans leur bonne opinion sur le Maroc.
Le problème pour les Américains vient plutôt du fait que les Maghrébins sont très bien renseignés sur la politique américaine. Pour Hamid Barrada, les Américains créent de l’islamisme jihadiste tous les jours avec leur politique irakienne, d’autant plus insupportable qu’elle n’est pas suffisamment dénoncée par des voix politiques arabes officielles. Mais cela ne veut pas dire que tous les musulmans adoptent fatalement le point de vue islamiste. Si seuls les musulmans peuvent régler le problème de l’islamisme, la qualité de l’information empêche en fait tout choc de civilisations. Si les Arabes condamnent la politique irakienne des Etats-Unis, ils sont loin d’être tous convertis à l’islamisme. Hamid Barrada souligne en revanche qu’Hassan II avait mal mesuré la capacité de nuisance de l’islamisme saoudien. Le roi du Maroc s’était déclaré fondamentaliste pour ne pas laisser le champ libre aux islamistes. Mais ces derniers sont aujourd’hui au Parlement marocain et pourraient bien gagner en 2007.

Le débat a donné lieu à des échanges éclectiques et intéressants, notamment sur la perception maghrébine d’une éventuelle entrée de la Turquie en Europe. Les Marocains semblent fascinés par la démarche turque de rapprochement progressif mais durable vers l’Union européenne : utiliser l’accord de libre-échange pour mieux poser ensuite sa candidature. Hamid Barrada souligne que le monde arabe perçoit mal que la Turquie puisse être refusée simplement au nom de sa religion majoritaire. En fait, on entend soudain beaucoup parler de la Turquie au Maghreb depuis qu’elle est plus ou moins rejetée. Ce à quoi rétorque Dorothée Schmid, que la Turquie est au contraire entrée en négociation d’adhésion et que cela est perçu positivement au Maghreb.

Quant à la place de la francophonie au Maghreb, Dorothée Schmid sourit à cette « vieille lune de la politique française » qu’il faudra bien revoir un jour. Si l’anglais devient effectivement la langue diplomatique que les élites maghrébines apprennent, il n’a pas de perspectives rapides d’usage courant pour la population. Pour Hamid Barrada, les deux langues, arabe et française, cohabitent harmonieusement au Maroc notamment, où on parle aussi espagnol au Nord. A Dubai, les cours de français se développent prodigieusement pour… les Indiens et Pakistanais qui veulent émigrer au Canada ! Dorothée Schmid ajoute que depuis la délivrance plus parcimonieuse de visas américains aux étudiants arabes, ceux-ci ne se tournent certainement pas vers la France, mais vers les universités américaines du Caire et de Beyrouth.

Au final, ce café semble donner une leçon de réalisme politique. Les Maghrébins savent bien qui est l’hyperpuissance du monde actuel. S’ils ne partagent pas nécessairement ses politiques, loin de là bien souvent, ils ne tiennent pas à rester sourds aux intérêts américains pour la région.

Compte-rendu : Olivier Milhaud, Université de Paris 1

samedi, 09 mai 2009

Estados Unidos refuerza su imperio militar mundial

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Estados Unidos refuerza su imperio militar mundial

 

Ernesto Carmona - Argenpress - http://3via.eu/

 

 

Mientras los medios ocultan noticias sobre gasto bélico, producción de armas, nuevos inventos para matar y el fortalecimiento del aparato militar de EEUU y de los países ricos aliados del imperio, el Instituto Estocolmo de Investigación de la Paz (SIPRI, su sigla en inglés) informó que el gasto militar del mundo creció en 45% durante los últimos 10 años, con EEUU acumulando casi la mitad del crecimiento del poderío bélico global. A dos décadas de la extinción del “peligro comunista”, en un mundo en crisis financiera y económica, con el planeta en peligro y un tercio de la población mundial amenazada por el hambre, la pregunta es ¿qué gran guerra planean las potencias occidentales?.

Entre cientos de noticias militares ocultadas a la ciudadanía mundial, la transnacional DynCorp construirá una base de EEUU en Cite Soleil, Haití, EEUU libra una guerra secreta en Sudán mientras la Corte Penal enjuicia al presidente en ejercicio de ese país. También hay un informe sobre el peligro para la paz mundial que significa que Obama mantenga al republicano Gates al frente del Pentágono por su tenebroso curriculum vitae.

Aumenta el gasto militar a través del planeta

El SIPRI reportó que el gasto militar del mundo entre 1998 y 2007 corresponde al 2,5% del producto bruto mundial (GDP, en inglés) y a 202 dólares por cada habitante del planeta. El gasto militar creció 6% en 2007 respecto a 2006, situándose en 1.339 millones dólares. Pero EEUU es el campeón en esta carrera, pues gastó 547 mil millones, el 45% del total del mundo.

Gran Bretaña, China, Francia, y Japón son los más grandes gastadores de dinero en militares y armas pero apenas llegan al 4% o 5% cada uno, muy detrás de las astronómicas cifras de EEUU. El crecimiento regional más grande en militares y armas se dio en la Europa Oriental ex comunista que aumentó sus gastos en 162% entre 1998 y 2007. EEUU y Europa occidental cuentan con 73 de las 100 más grandes empresas de armas del mundo, cuyas ventas en 2006 ascendieron a 292,3 mil millones dólares.1

DynCorp construirá una base militar de EEUU en Cite Soleil, Haití

EEUU planea expropiar y demoler los hogares de centenares de haitianos súper pobres que habitan el gigantesco tugurio de Cite Soleil, en Puerto Príncipe, para hacer sitio a una base militar. DynCorp, una desprestigiada contratista del gobierno de Washington, que opera como brazo cuasi oficial del Pentágono y la CIA, tiene el encargo de ampliar la base que alberga a los soldados de la misión de la ONU “para estabilizar Haití” (MINUSTAH) en el campo de batalla montado por la invasión militar extranjera que comenzó después que fuerzas especiales de EEUU secuestraran y expulsaran al exilio al presidente Jean-Bertrand Aristide el 29 de febrero de 2004.

Los moradores de Cite Soleil han sido victimados en repetidas masacres efectuadas por la MINUSTAH, que desde su aparición discrimina a los ciudadanos más pobres. Según el alcalde de Cite Soleil, Charles José, y un capataz de DynCorp en el sitio, el financiamiento para la expansión será proporcionado por el Departamento de Estado a través de la controvertida Agencia de EEUU para el Desarrollo (USAID, en inglés), en un uso muy poco ortodoxo de los fondos de “ayuda”. Los estrategas de Washington se proponen apoderarse de las primeras propiedades inmobiliarias en que se asienta Cite Soleil. El cuadrante tiene un puerto, está cerca del aeropuerto, colinda con la principal carretera al norte y está anillado por las fábricas y el viejo complejo de la Haitian American Sugar Company.2

La guerra secreta de EEUU en Sudán

La Corte Penal Internacional anunció acusaciones amenazadoras contra Omar al-Bashir, el presidente árabe de Sudán, en la primera vez que ese tribunal incrimina a un jefe de estado en ejercicio. Después del anuncio, que el sistema informativo occidental difundió como noticia por todas partes y en cada hogar estadounidense, al término del mismo día el presidente al-Bashir ordenó la expulsión de diez organizaciones no gubernamentales internacionales (ONGs) que operaban en Darfur.

Pero los grandes medios en lengua inglesa no han divulgado en ninguna parte que EEUU acaba de intensificar su ya antigua guerra por el control de Sudán y de sus recursos naturales (petróleo, cobre, oro, uranio y tierras fértiles para plantaciones de caña de azúcar y goma arábiga, esenciales para la Coca Cola, Pepsi y los helados Ben & Jerry).

Esta guerra ha estado llevándose a cabo también a través de numerosas ONGs supuestamente humanitarias instaladas en Darfur, mediante compañías militares privadas, operaciones de “mantenimiento de paz” y operaciones militares encubiertas (eufemismo para asesinatos secretos) apoyadas por EEUU y sus aliados más cercanos.

La lucha por el control de Sudán se manifiesta en los puntos más álgidos de la guerra por Darfur.

Hay Fuerzas Especiales de EEUU asentadas en tierras de frontera de los estados de Uganda, El Chad, Etiopía y Kenia, y las dos grandes preguntas son: 1] ¿Cuántas de las matanzas “denunciadas” por las ONGs están siendo cometidas por las poderosas fuerzas de EEUU para inculpar después a al-Bashir y al gobierno de Sudán?; y 2] ¿Quién financia, arma y entrena a los rebeldes insurrectos contrarios a al-Bashir?

Pareciera que la acusación a Sudán desnuda a la Corte Penal Internacional como una herramienta más de la política exterior hegemónica de EEUU.

Peligros de mantener a Gates como jefe del Pentágono

El Secretario de Defensa Robert Gates, quien desempeñó el mismo cargo en los últimos años de Bush, no sólo tiene una larga historia de operaciones secretas con la CIA, sino que también es responsable de la más evidente politización de la inteligencia estadounidense.

Como vice director de la CIA, debajo de William Casey, Gates pellizcó a la inteligencia para que exagerara la amenaza militar de la Unión Soviética y justificar mejor los enormes aumentos del presupuesto del departamento de Defensa, o Pentágono, durante la era de la guerra fría de Reagan, mientras simultáneamente se derrumbaba la Unión Soviética.

Gates infló el fantasma del comunismo en América Central, apoyando a los escuadrones de la muerte de la derecha de El Salvador y financiando a “los contra” de Nicaragua en toda esa región. El estallido del escándalo Irán-Contra consiguió que Gates fuera rechazado como director de la CIA después de la muerte de William Casey. (Irán-Contra fue un cambalache ilegal de drogas y armas en beneficio de “los contra”, pero sin “involucrar” oficialmente a EEUU y teniendo a Irán como proveedor bélico)

Según fuentes de inteligencia extranjera, Gates participó en la “Sorpresa de Octubre” para retrasar la liberación de 52 rehenes en Teherán hasta que asumiera Reagan, en 1981. Gates también concentró la ayuda a Saddam Hussein durante la guerra Irán-Iraq, suministrando a Hussein armas químicas, armamento y equipamiento. Gates asumió el control de la secretaría de Defensa una vez que salió Rumsfeld, en diciembre de 2006, y extendió puntualmente la guerra en Iraq con una oleada de 30.000 tropas nuevas. Gates se opuso al plan de Obama de fijar un calendario de 16 meses para el retiro de Iraq.4

*) Resúmenes de historias periodísticas ocultadas por la gran prensa de EEUU y el mundo, elegidas entre cientos de noticias estudiadas por el Proyecto Censurado de la Universidad Sonoma State de California para la selección final de 25 historias relevantes a publicarse en el anuario Censored 2009/2010.

Fuentes:
1) Investigador: Nick Sieben; Consejero de la facultad: Julia Andrzejewski, St. Cloud State University; Evaluador: Carla Magnuson
–"Global Military Spending Soars 45 Percent in 10 Years." Agence France Presse, 9 June 2008 http://www.commondreams.org/archive/2008/06/09/9503
–Instituto Estocolmo de Investigación de la Paz, SIPRI.
http://www.sipri.org/contents/milap/milex/mex_trends.html
2) Investigado por Leora Johnson y Rob Hunter.
– “UN Military Base Expanding: What is Washington up to in Cité Soleil?” Kim Ives,
Haiti Liberté, 9/04/2008
http://www.haitianalysis.com/2008/9/3/un-military-base-expanding-what-is-washington-up-to-in-cit-soleil
3) Estudiante investigador: Curtis Harrison / Evaluador académico: Keith Gouveia
–“Africom’s Covert War in Sudan” Keith Harmon Snow, Dissidentvoice.org, 3/6/2009 http://www.dissidentvoice.org/2009/03/africoms-covert-war-in-sudan
–“Aren't There War Criminals in The US? Legitimacy of Global Court Questioned Over Sudan” Thalif Deen, Inter Press Service, March 9, 2009 http://www.commondreams.org/headline/2009/03/09-10
4) Estudiante investigador: Chris McManus y evaluado académico: Diana Grant
–“The Danger of Keeping Robert Gates” Robert Parry Consortiumnews.com 11/13/2008 http://www.consortiumnews.com/2008/111208.html

 

vendredi, 08 mai 2009

Le profezie di Tocqueville

Le profezie di Tocqueville

«Se in luogo di tutte le varie potenze che impedirono o ritardarono lo slancio della ragione umana, i popoli democratici sostituissero il potere assoluto della maggioranza, il male non avrebbe fatto che cambiare carattere [...] Per me, quando sento la mano del potere appesantirsi sulla mia fronte, poco m’importa di sapere chi mi opprime, e non sono maggiormente disposto a infilare la testa sotto il giogo solo perché un milione di braccia me lo porge»


Così Alexis Henri Charles Clérel de Tocqueville (in foto) scriveva nel 1840 nella sua celeberrima Democrazia in America. Nella sua riflessione politica il saggista francese metteva seriamente in discussione il diritto della maggioranza a governare, determinato inevitabilmente dalla natura stessa del principio democratico. Egli rilevava con amarezza come l’attribuire la sovranità alla volontà caotica e dubbiosa delle masse fosse equivalente all’investire del potere decisionale un’entità incapace in molti casi di esercitare anche solo il potere di opinione. Questa prassi negativa determinava a suo dire una cronica instabilità, la quale favoriva l’insorgere di poteri campanilistici e di interessi politici di nicchia, spesso e volentieri tirannici o settari, e in ogni caso alimentati dalla brama per il benessere, il desiderio di potere personale e il conformismo. E infatti, proprio sulla base di queste convinzioni, l’autore si permetteva di affermare:

«Se cerco di immaginare il dispotismo moderno, vedo una folla smisurata di esseri simili ed eguali che volteggiano su se stessi per procurarsi piccoli e meschini piaceri di cui si pasce la loro anima».

Eppure i padri costituenti, all’indomani della rivoluzione, temevano l’utilizzo stesso della parola “democrazia”, considerata di sapore giacobino (quando non sovversivo). Personaggi come Hamilton e Adams appartenevano a quella corrente, inizialmente di gran lunga maggioritaria, che identificava negli ideali del governo elitario il modello funzionale alla nascente repubblica, e rigettavano la partitocrazia come un sistema nel quale «l’egoistico interesse viene eretto innanzi alle folle come fosse un pilastro della società» . Il modello politico che conseguiva da queste convinzioni era basato su un diritto di voto limitatissimo, includente meno del 2% dei cittadini. Quel numero esiguo di elettori (poco più di trentamila su tre milioni di abitanti) identificati per criterio di censo, avrebbe rappresentato nell’idea della classe dirigente rivoluzionaria quel bacino di uomini “illuminati” capaci di prendersi cura dell’intera nazione in nome del popolo.

All’epoca in cui Tocqueville scrisse il suo saggio, gli Stati Uniti esistevano ormai da più di sessant’anni, e le istituzioni politiche avevano perso il carattere elitario voluto dai padri fondatori. Un sistema partitocratico fortemente radicato e legato ai maggiori cartelli finanziari del paese basava la propria sopravvivenza proprio sulla difesa degli interessi di classe. Un vasto popolo di elettori, legittimati dal principio di sovranità del quale erano investiti, si autoesaltava nella celebrazione del principio democratico, mentre le brigate di cavalleria del generale Jackson portavano i nativi ad un passo dall’estinzione. Sull’argomento Tocqueville si esprimeva in questo modo:

«Gli spagnoli, con mostruosità senza precedenti, coprendosi di onta incancellabile, non sono giunti a sterminare la razza indiana e nemmeno a condividere i loro stessi diritti [...] Gli americani [...] hanno invece raggiunto questo doppio risultato con meravigliosa facilità, tranquillamente, legalmente e filantropicamente [...] mai nessuna più grande atrocità fu compiuta, e quel che è peggio, essa è il prodotto di uno Stato che si celebra come l’Impero della Libertà».

Vi è un’incontestabile verità da rilevare nella riflessione di Tocqueville: i giudizi sugli esiti dell’applicazione del sistema democratico nella sua interpretazione moderna sfiorano il limite della profezia. Non è un caso che l’ordine sociale in vigore presso i paesi che dalla democrazia americana sono più o meno indirettamente influenzati si basi proprio su antivalori quali il consumismo, l’egoismo ed il conformismo, camuffati dietro ad espressioni come “cultura del libero mercato”, “centralità della classe media” o “moderazione politica”. L’Occidente contemporaneo non soltanto ha realizzato le paure del pensatore francese, ma le ha radicalizzate, giungendo a farne veri e propri pilastri del suo modus vivendi.

Mettiamo a fuoco la realtà statunitense, autoreferenziale al punto da considerarsi “matrice” esportabile a qualsiasi latitudine.

LE ELEZIONI PRESIDENZIALI

Le elezioni presidenziali negli USA si basano su un principio che vanta origini antichissime, essendo stato teorizzato dai padri costituenti nel 1787. Secondo tale principio la carica presidenziale non si conquista con la maggioranza popolare, ma con quella dei componenti di uno specifico Collegio Elettorale, composto da 538 “Grandi Elettori” che vengono assegnati Stato per Stato al candidato che vi prevale, anche per un solo voto. Questa caratteristica distorce non poco il principio della sovranità popolare, e ancor di più quello della proporzionalità del potere politico dei cittadini: infatti il sistema di assegnazione dei Grandi Elettori è sbilanciato a favore dei piccoli Stati, nel rispetto di un “compromesso storico” (uno dei tanti che tiene in piedi il fragile sistema politico statunitense) sottoscritto alla fine del ‘700 per rassicurare gli Stati minori di fronte al rischio di una “tirannia dei partners più grandi”. Si verifica così che realtà elettorali ristrette come il piccolo Wyoming posseggano un grande elettore ogni 170.000 abitanti, mentre circoscrizioni più consistenti come quella del Texas ne posseggano uno ogni settecentomila residenti.

La conseguenza strategica di questa prassi è che i candidati alla presidenza circoscrivono la loro azione a determinati “bacini elettorali”, lasciando da parte interi Stati (considerati già acquisiti dall’una o dall’altra parte) o addirittura ignorandoli perché poco incisivi. Ad esempio, nelle elezioni presidenziali del 2004 soltanto in 20 Stati (corrispondenti al 37% della popolazione) furono organizzate campagne elettorali impegnative, lasciando fuori dai giochi le tre circoscrizioni più popolose del paese: California e New York (roccaforti democratiche) e Texas (bacino repubblicano d’eccellenza). È inevitabile quindi che la stragrande maggioranza della popolazione si consideri semplicemente “fuori dai giochi” ed eviti di recarsi a votare, come dimostrano le statistiche riguardanti l’affluenza alle urne (linea gialla):




I dati mostrano chiaramente come nella maggior parte dei casi la partecipazione elettorale superi di poco la metà degli aventi diritto. A conferma della prassi di ignorare gli Stati più popolosi perché relativamente sicuri o ininfluenti ci sono le percentuali di voto di New York (dove usualmente si reca a votare meno della metà degli aventi diritto) e del Nevada (dove la media scende al 40%) nonché le statistiche generali sui votanti (che nel 2008 sono stati 132 milioni su un totale di 212 aventi diritto). A questi dati ne aggiungiamo un altro, fondamentale: lo status sociale dei votanti è in maggioranza individuabile nel ceto medio-alto.
Percentuali di questo tipo vengono interpretate da sedicenti analisti come sintomo di una raggiunta “maturità politica” del popolo americano.

La realtà è ben diversa: la storia delle elezioni presidenziali ci dimostra come il sistema elettorale sopra descritto serva alla classe politica per mettersi al riparo dall’emergere di “terze posizioni” meno legate agli interessi dei potentati economici che sostengono i due partiti principali (Partito Repubblicano e Partito Democratico). L’attribuzione delle prerogative politiche al di fuori di ogni parametro proporzionale garantisce alle forze “moderate” il monopolio della politica, scoraggiando di fatto la nascita e la proliferazione di organizzazioni che possano minare il “bipolarismo perfetto”, e che quindi potrebbero mettere in discussione le basi liberalcapitaliste del sistema. Serve una prova? Negli ultimi decenni dell’800 due formazioni politiche di estrazione non borghese, il Partito Populista (radicato nell’Ovest agricolo ed espressione del ceto contadino) ed il movimento dei “Mugwumps” (alimentato dalle élites aristocratiche meridionali) tentarono di scalzare il predominio dei “moderati”. Nonostante la percentuale di consenso nei confronti di queste organizzazioni raggiungesse in certi casi il 10% (corrispondente a parecchi milioni di voti) sia i Populisti che i Mugwumps non riuscirono mai ad ottenere più di qualche seggio alla Camera dei Rappresentanti, e non riuscirono mai ad avere una presenza stabile al Senato.
Lo stesso sistema elettorale garantisce al duopolio PD-PR il controllo stabile dei loro “territori”, stabilisce entro quali limiti debba svolgersi il confronto fra i due gruppi di potere e preserva l’egemonia moderata da pericolose derive politiche alternative.

In sostanza: due gruppi di potere, sostenuti dai poteri forti dello Stato, dell’economia e della finanza, mantengono l’iniziativa politica escludendo qualsiasi istanza di rinnovamento, appoggiandosi alla classe media (tendenzialmente conservatrice anche quando vota democratico) ed avvalendosi di una legge elettorale che scoraggia il pluralismo reale.

A questo punto non è difficile capire che il popolo americano è tutt’altro che politicamente maturo: ingabbiato in un sistema rigidamente bipolare, esso soffre una cronica crisi di sfiducia verso la classe politica, e si è ormai rassegnato ad una sorta di “pensiero unico” imperante, garantito dall’influenza finanziaria dei suoi fautori e tutelato dall’ordinamento sociale vigente. Immaginiamoci di essere un elettore repubblicano dello Stato di New York: che ci andiamo a fare in cabina elettorale se sappiamo che nella nostra circoscrizione la maggioranza si esprimerà a favore del candidato democratico, e che a prescindere dalla percentuale che otterrà il fronte che cerchiamo di contrastare si prenderà tutto, annullando comunque la nostra rilevanza politica? Tanto vale che ce ne stiamo a casa!

Se estendiamo questo ragionamento ad una buona metà dei cittadini statunitensi, riesce piuttosto facile capire come mai circa cento milioni di americani neanche si preoccupano di iscriversi alle liste elettorali.

Francesco Benedetti (Blocco Studentesco-Firenze)

La croisade européenne pour l'indépendance des Etats-Unis

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Archives de SYNERGIES EUROPEENNES - 1990

 

La Croisade européenne pour l'indépendance des Etats-Unis

Jacques de LAUNAY, La croisade euro­péen­ne pour l'indépendance des Etats-Unis 1776-1783,  Albin Mi­chel, 1988, 258 pa­ges, 120 FF.

 

Cette étude de Jacques de Launay dégage des événe­ments de la fin du XVIIIième siècle une constante: la volonté de Louis XVI et de Marie-Thérèse de cons­truire la paix en Europe par une politique d'alliances dynastiques. Cette unité eu­ropéenne, re­groupant au moins les Bourbons de France et d'Espagne et les Habs­bourgs d'Au­triche, se serait di­rigée contre la puissance mari­time qu'était l'Angleterre. La politique de Louis XVI visait à trans­former le bloc européen en une puissance navale ca­pable de damer le pion à la thalassocratie britannique. C'est la raison essen­tielle de l'intervention française aux côtés de Washington, soutenue par une volonté de venger l'affront canadien et le désastre du Traité de 1763, qui avait ôté à la France ses possessions sur les rives du St. Laurent. Jacques de Launay décrit aussi les avatars ultérieurs des «Amé­ricains», aristocrates et francs-maçons fran­çais qui participèrent à l'aventure américaine. Leurs idéaux ne correspondaient ni à l'absolutisme ni au ja­cobinisme. Beaucoup connurent l'exil, cer­tains d'en­tre eux périrent sous le couperet. A la fin du livre, dans un jeu de douze annexes, l'auteur nous com­munique une foule de ren­seignements divers sur l'é­poque de la guerre d'indépendance américaine (Robert Steuckers).

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samedi, 02 mai 2009

La critique nationale-socialiste du capitalisme et de l'impérialisme américains

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Archives de SYNERGIES EUROPÉENNES - Novembre 1987

 

La critique nationale-socialiste du capitalisme et de l'impérialisme américains

par Günther MASCHKE

A l'automne 1918, les troupes fraîches et bien équipées (voire suréquipées) du général Pershing, com-mandant en chef du corps expéditionnaire américain, décidaient de l'issue de la Première Guerre mon-diale. Malgré cela, et bien que, contrairement à Foch, Pétain et Haig, Pershing fût le seul chef allié à vou-loir porter la guerre jusqu'à Berlin et occuper l'intégralité du territoire allemand, peu d'Allemands nourrirent à l'époque des sentiments anti-américains. La haine des vaincus se dirigea plutôt contre l'An-gle-terre et, plus encore, contre la France: n'était-ce pas les Anglais qui, dès la fin des combats, main-tinrent jusqu'en 1919 un blocus économique qui réduisit à la famine un million d'Allemands? N'était-ce pas les Français qui imposèrent le diktat de Versailles avant d'occuper la Ruhr? A l'inverse, l'éphémère prospérité que connut la République de Weimar entre 1925 et 1929 n'était-elle pas due aux crédits amé-ricains? Même si la crise économique mondiale frappait l'Amérique plus durement encore que l'Alle-magne, l'image positive d'une Amérique, pays vaste, libre, aux potentialités infinies, demeurait, parmi les Allemands, pratiquement intacte.

La sympathie allemande pour l'Amérique de Roosevelt

L'année 1933 n'altéra pas ce beau tableau, bien au contraire: la propagande nationale-socialiste et les au-teurs politiques sérieux étaient plutôt pro-américains pendant les premières années du régime. La politi-que de Franklin Delano Roosevelt, au pouvoir depuis mai 1933, fut même accueillie avec faveur, voire avec enthousiasme, et l'on s'enhardit, en Allemagne, à mettre en parallèle New Deal  et national-socialisme.

De fait, les deux systèmes furent perçus comme deux variantes d'une "Troisième Voie", la seule pro-metteuse, entre le capitalisme libéral et le bolchévisme. Comme le national-socialisme, faisait-on ob-server, le New Deal  essaie de résorber le chômage de masse par l'intervention de l'Etat dans le do-maine économique; d'un côté comme de l'autre, une politique sociale garantissait la sécurité matérielle de l'exis-tence. En Allemagne comme aux Etats-Unis, la libre entreprise, échec évident, était désormais contrôlée et bridée par l'Etat planificateur; ici comme là-bas, une nation en proie au désespoir et à la ré-signation était enfin mobilisée et vitalisée par un chef charismatique. La France et l'Angeterre, restées fi-dèles au libéralisme bourgeois, étaient condamnées au déclin. Quant à l'Union Soviétique, elle ne pou--vait, au mieux, que se maintenir par la terreur. Seuls, les Allemands, les Italiens et, dans une moin-dre mesure, les Américains, avaient compris que les temps avaient changé.

Parfois, les sympathies nationales-socialistes pour Roosevelt frisaient l'idôlatrie. Colin Ross (1), le jour--naliste le plus brillant du Troisième Reich, évoque, en 1935, l'impression que lui laissa une con-fé-rence de presse à la Maison Blanche: "Bien sûr, le sourire rooseveltien est, si l'on veut, le fameux keep smiling  américain. Mais le rire et le sourire du président sont bien plus que cela. C'est un rire fondé sur la souffrance. C'est l'expression d'une âme, d'une expérience du monde, qui, parce qu'elle connaît, pour les avoir éprouvées, toute la misère et toute la détresse de l'univers, sait sourire et soulager par la tendresse. La charge immense de travail et de responsabilité qui pèse sur Roosevelt a gravé dans son visage les mêmes sillons que dans celui d'Adolf Hitler".

L'attitude positive du national-socialisme à l'égard de Roosevelt et du New Deal s'infléchira en 1935-1936, mais pour faire place à un scepticisme prudent plutôt qu'à une hostilité déclarée. Plusieurs fac-teurs joueront, que les observateurs allemands ne purent tous identifier. Ainsi, les Américains finirent par remarquer les mesures antisémites prises peu après l'arrivée d'Hitler au pouvoir. Ils s'en alarmèrent, eux qui pensaient pouvoir tourner le dos aux querelles européennes et retrouver leur ancien iso-la-tion-nisme pour mieux s'attaquer à leurs problèmes intérieurs: montée du chômage, misère de masse, éro-sion des sols, endettement de l'Etat, etc… De plus, Roosevelt passait, y compris en Allemagne, pour un ardent défenseur de l'isolationnisme. Cependant, l'immigration juive aux Etats-Unis, de plus en plus in-fluente, entra en relation avec le brain trust  de Roosevelt, comme en témoigne l'exemple du publi-ciste et sociologue Walter Lippman. A partir de 1935, médias et "instituts scientifiques" se mettront à "édu-quer" les Américains, jusque là plutôt rétifs en la matière, sur les dangers du "nazisme". Du coup, les organisations allemandes et germanophones d'Amérique devinrent suspectes, surveillées par toutes sor-tes de mouchards. Les groupements nationaux-socialistes déclarés n'étaient pas les seuls visés: les as-sociations culturelles, musicales ou folkloriques furent surveillées, en butte aux chicanes et aux tra-cas-series.

L'échec du New Deal

Cependant, le national-socialisme assista (et sur ce point, son analyse et sa critique furent très souvent pertinentes) à la déconfiture progressive et à l'échec final de la politique de New Deal.

En 1933, Roosevelt s'était lancé dans la bataille avec un élan incroyable et dès le premier trimestre, la fameuse "Révolution des 100 jours", avait mené à bien plusieurs réformes. La nouvelle aggravation de la crise économique mondiale et quelques faillites bancaires retentissantes pendant les derniers mois du gouvernement d'Herbert Hoover, adepte à 100% du libéralisme de marché, paralysèrent pour un temps toute opposition à Roosevelt. Le printemps 1933 marqua l'apogée de la crise: tout le crédit aux USA était pratiquement gelé et peut-être Roosevelt aurait-il alors pu nationaliser en un tour de main le secteur bancaire pour financer sa révolution. Une occasion pareille ne se représenterait plus…

Mais la résistance s'organisait. Les milieux d'affaires, la haute finance, bref le Big Business,  pro-tes-tè-rent contre les interventions dirigistes et planificatrices du New Deal,  jugées "contraires à l'esprit amé-ricain" et propagèrent le mythe de l'effort individuel et de l'initiative privée. Quant aux Etats de l'U-nion, ils virent, dans la tentative de Roosevelt de créer un puissant pouvoir central, une violation de leurs droits traditionnels et fondamentaux. Enfin, la Cour Suprême fit barrage à l'extension du pouvoir exécutif du président et torpilla ses projets de loi les uns après les autres.

La critique nationale-socialiste dressa un bilan difficilement contestable: Roosevelt avait échoué parce qu'il n'avait pas su  —et aussi peut-être parce qu'il ne pouvait  pas—  devenir dictateur. En fait, le pré-sident américain, naguère encore comparé à Hitler, n'était pas un Führer  et les Etats-Unis, selon Colin Ross qui voyait ainsi confirmée sa thèse de "l'échec du melting pot", n'étaient, au mieux, que "les peuples unis de l'Amérique": ils ne formaient ni un Etat au sens européen du terme ni une nation politiquement unie. La démocratie  qui s'y manifestait à travers la lutte des pouvoirs particuliers et des lobbies  avait eu raison de la dictature souhaitée. C'est pour cela que Roosevelt ne pouvait  atteindre aucun des objectifs du New Deal.  Les réformes en profondeur firent dès lors place à la propagande; mais la propagande ne pouvait réussir que si elle se cherchait (et se trouvait) un adversaire, une cible.

L'analyse critique de Giselher Wirsing à l'encontre du New Deal de Roosevelt

Sous le Troisième Reich, Giselher Wirsing fut l'un de ces journalistes qui, tout en sacrifiant aux rites obligatoires de la propagande officielle, furent également capables d'analyses de qualité. En 1938, dans une série d'articles rédigés pour les Münchner Neueste Nachrichten,  et, l'année suivante, dans des textes plus importants écrits pour la revue qu'il dirigeait, Das Zwanzigste Jahrhundert,  Wirsing décrit les cau-ses de l'échec du New Deal:  ces travaux, de haut niveau intellectuel, sont la quintessence des innom-bra-bles reportages, articles, brochures et études scientiques parus en Allemagne entre 1935 et 1939 sur le thè-me des  Etats-Unis. En 1942, Wising regroupa ses essais dans un ouvrage intitulé Der maßlose Kontinent - Roosevelts Kampf um die Weltherrschaft  (= "Le continent de la démesure; le combat de Roo-sevelt pour la domination du monde") (2). Bien que, dans cet ouvrage, Wirsing réaffirme que le New Deal,  même s'il avait réussi, n'aurait finalement eu que de maigres résultats, sa plume de jour-na-liste y est plus acérée: entretemps, les Etats-Unis sont entrés en guerre contre l'Allemagne. "C'est pré-ci-sément dans le domaine de la politique agricole, écrit Wirsing, que le New Deal devait essuyer le re-vers moral le plus cuisant, bien qu'Henri Wallace, ministre de l'agriculture de Roosevelt,…eût révélé les carences du système agraire aux USA. La politique agricole du New Deal  devint une juxtaposition d'ex-pédients qui permirent certes d'alléger le poids de la crise mais n'en vinrent jamais réellement à bout. Pour Wallace, le problème-clé de l'agriculture mécanisée américaine était la surproduction alors que le marché mondial s'était rétréci par suite des mesures d'autarcie prises dans le monde entier. De sorte que le New Deal,  au lieu d'engager la bataille pour la production, fit l'inverse: il fit tout pour li-miter la production. C'est cette idée fondamentale qui inspira l'Agricultural Adjustment Act  (AAA) de 1933. Une politique agricole véritablement  constructive n'aurait jamais dû s'appuyer sur une analyse aus-si né--gative tant que les excédents enregistrés dans les campagnes contrastaient avec les carences les plus effroyables en milieu urbain".

La stabilisation des prix agricoles, couramment pratiquée aujourd'hui, fut alors anticipée par des méthodes extrêmement brutales: enfouissement de la viande porcine, déversement en mer de tonnes de fruits mûrs, incendie des champs de coton: toutes ces mesures étaient le contraire exact des Ernteschlachten (batailles pour les récoltes) nationales-socialistes. Elles furent considérées par les capitalistes comme typiques du "dirigisme d'Etat" et par les communistes comme … typiques du "capitalisme"…

Quand l'abondance devient un fléau

Anticapitaliste d'inspiration nationaliste et romantique, Wirsing a bien cerné la réalité en mettant en lu-mière une contradiction inhérente à plusieurs volets du New Deal:  le hiatus entre l'intervention de l'E-tat, propre au New Deal,  et les axiomes d'un libéralisme presque dogmatique:

"Wallace adopta une démarche mécanique  fondée sur la théorie du pouvoir d'achat. Il constata que l'a-gri-culteur américain produisait trop dans tous les domaines, que la chute des prix devenait irrépressible et que l'endettement menaçait d'étouffer l'ensemble du système agraire. Il en concluait qu'il fallait limi-ter la production jusqu'au point où l'offre, ainsi réduite, s'harmoniserait à la demande. Théorie parfai-te-ment conforme, du reste, au libéralisme classique… Or, les initiateurs de cette politique agricole, qui per-suadèrent  —par toute une série de mesures coercitives—  l'agriculteur de ne plus cultiver ses champs et de détruire ses récoltes, se prirent pour des révolutionnaires. Ils parvinrent effectivement à fai-re passer le revenu agricole net de 4,4 milliards de dollars en 1933 à 7 milliards en 1935, mais cette aug-mentation rapide des prix était due en bonne partie à la sécheresse catastrophique de 1935, aux tor-na-des de poussière et aux inondations de l'année 1936-1937. Paradoxalement, Roosevelt vit dans la séche-resse son meilleur allié: avec l'AAA, c'est elle qui avait miraculeusement augmenté le pouvoir d'achat dans l'agriculture. L'indstrie des biens de consommation, qui soutenait Roosevelt, pouvait être satisfaite des résultats".

Naturellement, ni Wirsing ni Colin Ross (qui publia, également en 1942, Die "westliche Hemisphäre" als Programm und Phantom des amerikanischen Imperialismus  [= "L'hémisphère occidental", pro-gram-me et spectre de l'impérialisme américain]) (3) ni d'ailleurs l'explorateur suédois Sven Hedin, le sym-pa-thisant d'Hitler sans doute le plus célèbre, n'ont manqué de signaler qu'en Allemagne, l'intervention de l'Etat s'inspirait de conceptions doctrinales macro-économiques éprouvées alors qu'aux Etats-Unis, elle res-tait con-fuse et contradictoire. Le fait est qu'en Allemagne, et pas seulement à cause du réarmement, les chômeurs disparurent (sur ce point, le régime a sans doute exagéré ses mérites: le plein emploi ne fut jamais réellement atteint, pas même au début de la guerre) alors qu'aux USA, les résultats demeu-rè-rent médiocres malgré l'organisation de travaux de nécessité publique et le Service du Travail. En Allemagne, la dictature, mais aussi la grande tradition allemande du socialisme d'Etat produisaient leurs effets. Ces deux éléments n'existaient pas aux Etats-Unis. Ecoutons Wirsing résumer la queston agraire aux Etats-Unis, en sachant que ses observations valent pour l'ensemble du New Deal:

"Les tendances régionalistes et particularistes ne se manifestèrent nulle part de façon plus marquée que dans la question agraire. Quand des régions entières furent subitement menacées d'un nouveau fléau, comme le Middle West par les tornades de poussière de 1934-35, ou les Etats du Mississipi par les crues dévastatrices de l'année 1937, le Congrès consentit à débloquer des fonds parfois importants. Mais le système démocratique empêcha une imbrication adroite des diverses mesures ponctuelles dans le cadre d'une planification globale qui eût brisé toute résistance. A cause de l'impéritie du Congrès, de la sot-tise des Governors  des Etats, des groupements d'intérêts, etc…, le gouvernement de Roosevelt ne put jamais franchir l'obstacle…".

Les excellents projets de Roosevelt sont torpillés par les intérêts corporatistes privés

La liste des projets gouvernementaux torpillés par la Cour Suprême, que ce soit la loi sur les pensions des cheminots ou la déclaration d'illégalité de l'Agricultural Adjustment Act,  en 1936, est, elle aussi, in-finie. Roosevelt essaya bien de désamorcer l'opposition en y introduisant des juges favorables à sa politique et en adjoignant à ses opposants des "suppléants" avec droit de décision (les Américains di-sent: "to pack the Court");  la manœuvre avorta. Son projet favori, notamment la création d'une "Tennessee Valley Authority",  resta lettre morte. Roosevelt voulait aménager la vallée du Tennessee en y construisant de grands barrages et d'imposantes centrales électriques afin d'empêcher les inon-da-tions, permettre l'irrigation et fournir aux agriculteurs l'électricité à bon marché dont ils avaient le plus grand besoin pour leur élevage de bétail laitier et de boucherie, sans compter les programmes de reboi-sement et de terrassement. Sur le terrain, tout cela réussit. Jusqu'au jour où les compagnies privées d'é-lec-tricité sabotèrent cette politique énergétique et ces plans grandioses de mise en valeur du sol américain.

Si la comparaison entre l'interventionnisme américain et l'interventionnisme germanique montra à quel point il avait été hasardeux, de parler, en tant qu'observateurs allemands, d'affinités, même écono-mi-ques, entre le na-tional-socialisme et le New Deal,  il devint peu à peu patent que Roosevelt et Hitler avaient, en matière de commerce extérieur, des conceptions diamétralement opposées.

La guerre commerciale : autarcie contre libre-échangisme

Cette opposition, qui fut un facteur décisif de l'entrée en guerre des USA, donna au national-socialisme l'occasion d'étudier de près l'impérialisme américain (en fermant bien sûr les yeux sur son impérialisme à lui). Dès 1933, les relations économiques germano-américaines se détériorèrent. L'économie dirigée allemande, qui tendait au réarmement et à l'autarcie, jugula et planifia les importations, adapta les ex-por-tations aux importations grâce à des accords de compensation et à l'institution de taux de change multiples. Le principe allemand "marchandise contre marchandise" et le monopole d'Etat en matière de com-merce extérieur débouchèrent, par le biais des accords bilatéraux de clearing et de la technique de la "répartition des devises", sur une bilatéralisation des échanges.

On conçoit, dès lors, que la politique américaine de libre-échange, la "open door policy",  ait rencontré une résistance de plus en plus vive: en développant leurs relations économiques avec l'Amérique latine, les Allemands réussirent même à évincer les Américains et les Anglais de marchés aussi importants que ceux de l'Argentine ou du Brésil. Avec le pacte germano-soviétique, et les victoires successives des for-ces de l'Axe, les Américains entrevirent le spectre d'une partition du marché mondial (4): ils redoutèrent de plus en plus d'être handicapés économiquement et commercialement dans des zones de plus en plus vastes; qui plus est, la main d'œuvre bon marché des pays de l'Axe risquait même de saper leurs posi-tions concurrentielles partout ailleurs.

En 1941, année de l'attaque allemande contre l'Union Soviétique, le géopoliticien allemand Karl Haus-ho-fer publia son étude intitulée "Le bloc continental" (5). Ce bloc continental devint le cauchemar des Etats-Unis. Dans cette optique, l'Allemagne, la Russie, le Japon et les territoires qu'ils contrôlaient, donc également l'Afrique du Nord, la Chine et la Corée, ainsi que l'ensemble balkanique, devaient for-mer un bloc militaro-économique sur lequel se briseraient les ambitions anglo-américaines d'hégémonie mondiale. Finalement, la terre l'emporterait sur la mer, l'économie d'Etat sur le libre-échange, l'auto-ri-ta-risme sur la démocratie car le grand-espace suivrait sa propre loi alors que le libéralisme, impliquant partout des normes apparemment objectives, était contraint d'intervenir tous azimuts et de postuler dans le monde entier des conditions d'action uniformes.

                                                        

Aux Etats-Unis, la réaction à l'encontre de cette perspective d'un bloc continental tourna rapidement à l'hystérie, surtout par calcul de propagande: depuis 1937, Roosevelt voulait la guerre avec le Japon. A partir de 1939-1940, il voudra la guerre avec l'Alle-magne. Et décrira comme un "îlot impuissant" (!) une nation comme les Etats-Unis dont le volume du commerce ex-té-rieur, grâce à un marché intérieur gigantesque, n'atteignait à l'époque que 5 ou 6%. Dans son discours du 10 juin 1940, prononcé en Virginie, Roosevelt proclamait:"Pour moi-même comme pour l'écrasante majorité des Américains, l'existence d'un tel îlot est un cau-che-mar affreux, celui d'un peuple sans liberté, le cauchemar d'un peuple affamé, incarcéré, ligoté, d'un peuple nourri jour après jour par les gardiens impitoyables qui régentent les autres continents et n'ont pour nous que mépris". Et Walter Lippman ajoutait le 22 juillet 1940 dans la revue Life:"Si les cartells étatisés des puissances de l'Axe cimentaient un bloc continental eurasien de l'Irlande au Japon, les conséquences pour les Etats-Unis en seraient la baisse du niveau de vie, la montée du chô-mage et une économie réglementée. La disparition des libertés de notre libéralisme nous obligerait du même coup à nous adapter aux puissances de l'Axe". Et Lippmann concluait: "Le fait est qu'une éco-no-mie libre telle que nous la connaissons, nous, citoyens Américains, ne peut survivre dans un monde sou-mis à un régime de socialisme militaire".

Un monde trop petit pour deux systèmes

Le 9 juin 1941, Henry L. Stimson, Ministre de la Guerre, déclarait à l'Académie militaire de West-Point (6): "Le monde est trop petit pour deux systèmes opposés". Il est frappant de constater que la cam--pagne de Roosevelt contre l'Allemagne avait commencé dès 1937,  c'est-à-dire avant l'Anschluß  et l'an-nexion de la Tchécoslovaquie, voire avant les crimes collectifs perpétrés par les nationaux-socia-listes. Par contre, elle coïncida avec le moment précis, où l'échec du New Deal  éclata au grand jour. Com-mentaire de Giselher Wirsing:"L'été 1937 fut le grand tournant. Pas seulement politiquement, mais économiquement. Au moment où le président essuyait une défaite face à la Cour Suprême, un nouveau déclin économique brutal s'a-mor-ça… Dans l'industrie et l'agriculture, s'annonça une chute générale des prix. L'industrie et le com-merce avaient constitué d'importantes réserves en prévision de nouvelles hausses. En même temps, sous la pression du Big Business  et du Congrès, le président avait réduit sensiblement les dépenses fé-dé-rales et fait des coupes sombres dans les budgets de relance et d'aide sociale… Ce fut la "dépression Roosevelt". Au printemps 1938, on comptait à nouveau 11 millions de chômeurs. L'arsenal de lois du New Deal,  déjà incohérent en lui-même, s'avérait impuissant face aux faiblesses structurelles… On élabora pour l'agriculture un Agricultural Adjustment Act,  nouvelle version, mais inspiré des vieux principes: une limitation draconienne des cultures… La loi sur les salaires et le travail fut vidée de sa sub-stance. Dans tous les domaines, aucun progrès par rapport à 1933…".

L'exutoire de Roosevelt: la politique étrangère

Sven Hedin (7) a fait remarquer que les salaires payés par la Works Progress Administration  (WPA) pour les travaux de secours aux chômeurs ne dépassaient pas 54,87 dollars mensuels. Même la sécurité sociale ne fut pas transformée radicalement par le New Deal.  Voici le bilan qu'en dresse Sven Hedin: "En juillet 1939, le Social Security Bulletin  révéla que les pensions de retraite versées aux USA at-teignaient, par personne et par mois, 19,47 dollars. Mais en Alabama, le montant ne dépassait pas 9,43 $, en Caroline du Sud, 8,18$ mensuels, en Géorgie 8,12$, dans le Mississipi 7,37$ et en Arkansas 6$ seulement! Quiconque découvre l'amère réalité américaine derrière les slogans officiels ne peut que me-surer l'échec de Roosevelt en politique intérieure. Beaucoup remarquèrent que ce fut là un facteur dé-ter-minant du recours à l'aventure extérieure". Ce point de vue, des millions d'Américains l'ont partagé et aujourd'hui encore, les historiens critiques envers Roosevelt y adhèrent.

Le "discours de quarantaine" du 5 octobre 1937 marqua le début d'une véritable guerre froide contre l'Allemagne et le Japon. Même si l'on tient compte du conflit sino-japonais, les propos de Roosevelt sont assez énigmatiques:"Des peuples et des Etats innocents sont cruellement sacrifiés à un appétit de puissance et de domi-na-tion ignorant le sens de la justice… Si de telles choses devaient se produire dans d'autres parties du mon-de, personne ne doit s'imaginer que l'Amérique serait épargnée, que l'Amérique obtiendrait grâce et que notre hémisphère occidental ne pût être attaqué… La paix, la liberté et la sécurité de 90% de l'hu-ma-nité sont compromises par 10% qui nous menacent de l'effondrement de tout ordre international et de tout droit… Lorsqu'un mal se répand comme une épidémie, la communauté doit mettre le malade en qua-rantaine afin de protéger la collectivité".

"Hémisphère occidental" contre bloc continental

Les nationaux-socialistes virent bien que l'idée rooseveltienne d'"hémisphère occidental" (dont les limites d'intervention ne furent jamais précisées!) était grosse d'une volonté d'hégémonie mondiale directement opposée à leurs ambitions propres, plutôt continentales. Le déclin de l'Angleterre (à l'époque, le phénomène suscita en Allemagne une multitude de commentaires dans les milieux journalistiques et scientifiques) (8) positionna les Etats-Unis dans le rôle de l'héritier, mais un héritier qui apparaissait plus agressif encore que le de cujus.  Alors que s'annonçait (ou avait déjà commencé) le choc avec les Etats-Unis, en 1942-1943, plusieurs auteurs allemands se mirent à étudier ce nouvel impérialisme et leurs con-clusions ressemblent à s'y méprendre aux analyses marxistes qui furent ultérieurement publiées sur les Etats-Unis. Dans son ouvrage Imperium Americanum  (9), paru en 1943, Otto Schäfer relate "l'extension de la sphère de puissance des Etats-Unis" depuis le refoulement de l'Angleterre, la guerre contre l'Espagne, l'acquisition du Canal de Panama, le contrôle des Caraïbes jusqu'à la péné-tra-tion du Canada et de l'Amérique latine. Et Schäfer illustrait son propos par un bilan statistique de la politique américaine d'investissements à l'étranger.

Helmut Rumpf, spécialiste de droit public, décrivait en 1942, dans son livre Die zweite Eroberung Ibero-Amerikas  (= "La deuxième conquête de l'Amérique ibérique") (10), la mise au pas et le pillage économique du Mexique et de l'Amérique centrale par les USA.

Albert Kolb (11), enfin, se pencha sur les relations avec les Philippines, Hans Römer (12) sur les in-gé-ren-ces américaines dans les guerres civiles d'Amérique centrale, et Wulf Siewert (13), dans Seemacht USA  (= "La puissance maritime des Etats-Unis") sur le développement de la marine américaine sous Roosevelt, qui suscita outre-Atlantique un enthousiasme proche de la ferveur qu'avait jadis inspirée en Al-le-magne la flotte de Guillaume II (toutes proportions gardées, car la US Navy  devait connaître des len-demains plus heureux que la flotte impériale allemande). L'idée maîtresse de cette abondante litté-ra-ture, présentant, très souvent un niveau scientifique fort honorable, c'est que la doctrine de Monroe, dé-fen-sive au moment de sa conception et de sa proclamation (1823), puisqu'elle devait défendre le con-ti-nent américain contre toute intervention européenne, était depuis longtemps devenue une doctrine offen-sive autorisant des interventions illimitées dans l'"hémisphère occidental". Il était dès lors dans la logi-que des choses que le publiciste américain Clarence K. Streit (14) finisse par réclamer (en 1939) une fu-sion entre les Etats-Unis et la Grande-Bretagne et que Walter Lippmann envisage la création d'un super-Etat regrou-pant —sous direction américaine— tous les pays "atlantiques" régis par le capitalisme libéral.

Les Allemands ont sous-estimé les Américains

Un économiste aussi sérieux que Friedrich Lenz (15) affirmait encore en 1942, dans son livre Politik und Rüstung der Vereinigten Staaten  (= "Politique et armement des Etats-Unis"), que la production de guerre aux USA était beaucoup trop lente pour représenter à bref délai une menace pour l'Allemagne. Le capitalisme libéral, que le New Deal n'avait fait qu'égratigner, était incapable, assurait Lenz, d'assumer la directivité qu'implique une politique d'armement. Lenz allait jusqu'à soutenir qu'en 1941, "les USA ne pouvaient aligner que 425 chars lourds". Or, même si les objectifs de production annon-cés par Roosevelt le 6 janvier 1942 (60.000 avions, 35.000 chars et 20.000 tubes de DCA pour 1942, 125.000 avions, 75.000 chars et 35.000 tubes de DCA pour 1943) ne furent jamais atteints, et si le dé-veloppement rapide de l'armée entraîna outre-Atlantique de graves difficultés, les Etats-Unis, en appro-vi-sionnant massivement l'Armée Rouge, n'en apportèrent pas moins aux Allemands la preuve irréfu-table de l'efficacité de leur production guerrière.

Sven Hedin lui-même affirmait: "Aux manœuvres de l'automne 1941, l'armée américaine était équipée de fusils mitrailleurs et de blindés en bois et en carton pâte, exactement comme la Reichswehr d'après 1919". Apès les manœuvres, le général McNair déclarait que "deux divisions seulement sont en état de se battre". Et Sven Hedin ajoutait:

"En 1940, les forces armées ne comptaient que 250.000 hommes. Or, le Victory Program  américain prévoit pour l'assaut contre l'Allemagne un effectif de 6,7 millions d'hommes répartis en 215 divisions. Comment Roosevelt va-t-il les former, les entraîner, les armer pour qu'ils viennent à bout des divisions aguerries de l'Allemagne et de ses alliés?".

Bien sûr, à l'époque, la conquête des richesses russes paraissait acquise pour l'Allemagne et les Japonais allaient de succès en succès. Mais le paradoxe, c'est que cette sous-estimation des Etats-Unis était due à une analyse pertinente de l'échec du New Deal!  L'échec économique et social des Etats-Unis trouva tout simplement un exutoire dans le domaine de l'économie de guerre…

Pourtant, on débattit, sous le Troisième Reich, des conséquences d'une défaite éventuelle de l'Axe face aux Etats-Unis: Friedrich Lenz affirma qu'après l'échec du capitalisme libéral et les succès des Etats to-ta-litaires (parmi lesquels il comptait généreusement l'Union Soviétique bien que celle-ci fût entre-temps passée dans le camp adverse), l'effondrement de ces mêmes Etats entraînerait une régression sans précé-dent dans l'histoire mondiale: "Promettre le rétablissement de la civilisation libérale du XIXème siècle sur les ruines des systèmes totalitaires d'Allemagne, d'Italie et du Japon, et peut-être même de Russie soviétique est une position réactionnaire", et Lenz d'ajouter avec une ironie féroce: "Peut-être Thomas Mann sera-t-il alors le nouveau praeceptor Germaniae  de cette civiliation libérale?".

L'idéal social de "Park Avenue"

L'idée américaine accélère-t-elle ou retarde-t-elle l'histoire? Giselher Wirsing, lui, polémique contre l'entrée en guerre des USA en avançant des arguments sociaux: "Park Avenue va-t-elle diriger le monde? Dans quel but? On a a calculé qu'en 1927, les 4000 familles qui y résidaient, dépensaient un budget annuel gloabal de 280 millions de dollars. Sur ce total, 85 mil-lions ont été dépensés pour entretenir la garde-robe de ces dames et de leurs filles… Pour se nourrir, ces 4000 familles ont dépensé 32 millions de dollars et pour leurs bijoux, 20 millions par an!… Voilà la civilisation pour laquelle il faudrait se battre! Et pour laquelle devront mourir les soldats chinois, indiens, australiens, anglais, sud-africains, canadiens et égyptiens!… Pour quelle liberté? Pour celle de Park Avenue,  celle de drainer les milliards du monde entier. Pour la liberté de profiter de la guerre".

Mais quel ordre une Amérique victorieuse offrirait-elle au monde? Le pronostic le plus séduisant est ce-lui que propose Carl Schmitt dans un article (16) publié dans la revue Das Reich  du 19 avril 1942 et in-titulé Beschleuniger wider Willen oder Problematik der westlichen Hemisphäre  (= "Accélérateur de l'his--toire malgré lui, ou le problème de l'hémisphère occidental"); Schmitt y justifie son pronostic en sou-lignant la propension obligée des Etats-Unis à violer les autres grands-espaces et leur incapacité à créer pour eux-mêmes un grand-espace (Grossraum)  cohérent et circonscrit:

"En essayant de prolonger la puissance maritime et la domination mondiale britanniques, le président des Etats-Unis n'a pas seulement recueilli de cet héritage les parts les plus avantageuses; il s'est ipso facto placé sous la loi qui gouvernait au siècle dernier l'existence politique de l'Empire britannique. L'Angleterre était devenue la gardienne de tous les "hommes malades", à commencer par celui du Bos-pho-re, jusqu'aux maharadjas indiens et aux sultans de toutes sortes. L'Angleterre était un frein au dé-veloppement de l'histoire mondiale… Quand Roosevelt quitta le terrain de l'isolationnisme et de la neutralité, il entra, qu'il le voulût ou non, dans la logique retardatrice et rigidifiante qui fut celle de l'empire mondial britannique".

Carl Schmitt poursuit: "Dans la foulée, le président proclama l'avènement du "siècle américain" afin de coïncider avec la ligne idéologique américaine traditionnelle, tournée théoriquement vers l'avenir et toutes formes d'innovation comme l'avait démontré l'essor spectaculaire des Etats-Unis au XIXème sièc-le. Ici encore, comme à toutes les étapes importantes de l'histoire politique américaine ré-cen-te, on s'enlise dans les contradictions inhérentes à cet hémisphère qui a perdu toute cohésion intérieure. Si Roosevelt, en entrant en guerre, était devenu l'un des grands ralentisseurs de l'histoire mondiale, passe encore; ce serait déjà beaucoup. Mais la vacuité de la décision annihile tout effet authentique. C'est ainsi que s'accomplit le destin de tous ceux qui lancent leur barque dans le maëlström de l'histoire sans que leur intériorité ne soit assurée (ohne Bestimmtheit des inneren Sinnes).  Ce ne sont ni des hommes impulseurs de mouvement, ni de grands retardateurs: ils ne peuvent que finir… accélérateurs malgré eux…".

Les idées de "grand-espace" (17), dont les nationaux-socialistes n'ont pas la paternité mais qu'ils ont récu-pérées pour camoufler et justifier leurs propres ambitions, succombèrent, sur le champ de bataille, à la "pensée globale" des Américains, et des millions d'Allemands, aujourd'hui encore, s'en disent soulagés. Mais ce constat n'infirme en rien la critique qui fut faite jadis, sous Hitler, du capitalisme amé-ricain ni l'idée grandiose de servir la paix en créant de grands-espaces fermés aux interventions de puis-sances géopolitiquement étrangères. On peut même prévoir que les Américains vont devenir les gar-diens de l'ordre ancien, les conservateurs des formes politiques révolues. Dans la perspective d'une éman-cipation européenne qui ne pourra compter, bien évidemment, que sur ses propres forces, il fau-drait distinguer, dans les idées de cette époque, entre ce qui relevait des besoins et de la propagande et ce qui mériterait plus ample approfondissement.

Günther MASCHKE.

(trad. Jean-Louis Pesteil; texte tiré de la revue autrichienne Aula et reproduit dans Orientations avec l'aimable autorisation de l'auteur; adresse d'Aula: AULA-Verlag, Merangasse 13, A-8010 Graz, Autriche)