Avec Fils de la nation, Jean-Marie Le Pen publie après bien des années d’hésitation et d’attente le premier tome de ses Mémoires. Ils concernent la première partie de sa vie, de sa naissance à La Trinité-sur-Mer en juin 1928, jusqu’au début des années 1970 à son accession à la présidence du Front National. Il raconte avec une belle truculence son enfance, son adolescence meurtrie par la disparition subite de son père en mer en 1942, touché par une mine, une scolarité agitée, et des années étudiantes dans la capitale au cours desquelles les Parisiennes se montraient sensibles à la prestance physique du président de la Corpo de Droit.
Jean-Marie Le Pen relate bien sûr son engagement chez les légionnaires parachutistes en Indochine, à Suez et en Algérie. Il en profite pour rétablir quelques vérités aujourd’hui bien étouffées par les cabots universitaires. D’une manière plus intime, et après avoir dépeint un monde qui n’existe plus, celui de sa Bretagne natale, il insiste sur sa passion de la mer. Fils et petit-fils de marin pêcheur, il navigue tôt et juge le métier de marin plus éprouvant que celui de mineur… Ami d’Éric Tabarly, il accepte un jour de prendre à son bord un jeune garçon qui deviendra un grand navigateur amnésique de cette période jugée sulfureuse pour ses intérêts, l’« Amiral » Olivier de Kersauson.
Une révolte d’avant-garde
L’homme des vagues et des embruns garde en lui une forte dimension tellurique. « Par ma mère, je tiens aussi à la terre. Les fenêtres de notre maison de La Trinité donnaient sur le jardin abrité du vent de mer. Mon père y planta le jour de ma naissance un platane sycomore, mon jumeau, dont je ne peux plus faire le tour avec mes bras quand je l’enlace, lors de mes trop rares visites. Les arbres et les pierres me parlent autant que les vagues (pp. 354 – 355). » Il y a du paganisme dans son catholicisme traditionnel. Loin de le rebuter, cette coexistence l’élève. « C’est peut-être pour cela que j’aime tant la Grèce, cet autre pays, avec le Morbihan, où la terre et la mer n’en finissent pas de se mêler. J’ai toujours été philhellène (p. 355). » C’est en 1950 qu’il découvre la patrie d’Homère et d’Aristote. Il comprend tous les bienfaits de la culture classique enseignée par les Jésuites et l’école laïque quand celle-ci inculquait aux garnements de solides connaissances. Il perçoit qu’« il y a quelque chose dans les sanctuaires de la Grèce antique qui rend sensible le sacré (p. 357) ». Cette sensibilité l’amène à reproduire le geste des antiques Hellènes sur le site d’Olympie. « Je me déshabillai et me mis dans la position du départ, comme les athlètes deux mille ans plus tôt, nu comme il convenait (p. 356). » Plus tard, au Parthénon encore épargné du fléau touristique, il renouvelle l’action d’Olympie ! « J’étais seul, encore une fois, et encore une fois je me mis nu. Puis je picorai mes olives et me repus de ma pastèque dont je jetai le vert sous un arbuste (p. 358). »
Cette inclination vers le sacré élémentaire prédisposait très certainement Jean-Marie Le Pen à considérer autrement l’écologie. « J’ai lu en leur temps le docteur Carrel et le docteur Carton, qui furent plus que des précurseurs de l’écologie quand les progressistes, modérés ou de gauche, ne rêvaient encore que béton et bakélite : cela m’aide à ne pas perdre de vue que la récupération de l’écologie par l’extrême gauche est une imposture (p. 366). » Plus jeune député de France en 1956 grâce à la vague poujadiste, il insiste volontiers sur l’aspect pionnier du « mouvement Poujade, que l’on présente comme un combat d’arrière-garde de ploucs ringards, de beaufs menés par quelques fascistes, était en fait très en avance. D’une part, c’est l’agriculture industrielle et la grande distribution qui sont aujourd’hui obsolètes, alors que le bio, le raisonné, le commerce de proximité, les circuits courts ont montré leur intérêt : le coût social de prétendus progrès des années cinquante et soixante n’a pas fini d’être calculé. D’autre part, le fiscalisme, dont je n’ai cessé en soixante ans de carrière politique de dénoncer les méfaits, est non seulement un étrangloir économique, mais la matrice de l’État policier. L’habitude de surveillance, les instruments statistiques qu’il crée, ont été mis à profit par le totalitarisme informatisé qui s’installe. La réaction du peuple était juste, et Poujade l’a exprimée avec talent (p. 211) ». Cet éloge rejoint l’admiration de la rédaction de la revue anarcho-royaliste Le Lys Noir, il y a quelques années. Avant la mode des bio-carburants (qui engendre d’autres problèmes agricoles), Pierre Poujade eut l’anticipation de fonder en 1979 une Association nationale pour l’utilisation des ressources énergétiques françaises (ANUREF), puis dès l’année suivante un syndicat de producteurs de topinambours de l’Aveyron. Il réclama en vain le recours à un carburant national « essence – alcool ».
Il regrette néanmoins l’impasse dans laquelle se fourvoya le papetier de Saint-Céré dans le Lot. « La révolution sociale et mentale que les technocrates menaient par l’impôt devait engendrer, en matière de commerce, les géants de la grande distribution. Pierre Poujade se révolta contre l’État qui spoliait les petits au profit des gens. […] C’était, soixante ans avant Trump, l’espoir d’une contre-révolution nationale et populaire contre la trahison des élites (p. 211). » Jean-Marie Le Pen trouve que Poujade ne comprit pas l’enjeu civilisationnel. « Un grand ministère du commerce et de l’artisanat l’aurait comblé. Pour vouloir le pouvoir, il faut plus d’appétit qu’il n’en avait (p. 218). » Toutefois, « Poujade fut quand même grand, il fut un précurseur. Il a donné un moment un véritable espoir au peuple. Ce fut un libérateur à moitié (p. 221) ».
On y lit au fil des pages les talents culinaires de Roger Holeindre et d’autres portraits parfois incisifs. François « Brigneau, mon ami, mon presque frère, qui fut souvent aussi mon ennemi. Tout nous rapprochait dans la vie, beaucoup, en politique, nous séparait (pp. 361 – 362) ». Son avis sur Charles de Gaulle correspond globalement à l’interprétation de Dominique Venner dans La Grandeur et leNéant. Pressenti un temps à la présidence du futur FN par les membres d’Ordre Nouveau, ce qu’il refusa tout net, Venner n’est cité qu’une seule fois, en page 349, et n’est même pas répertorié en index ! Rencontré en ces temps estudiantins, Jean Mabire est oublié… Impossible de parler de toutes les amitiés de jeunesse.
Des portraits féroces
Le président d’honneur du Front National se montre plus féroce encore envers d’autres contemporains. « Garçon à la parole déjà fuligineuse (p. 159) », Michel Rocard y est qualifié de « diffamateur de bonne foi (p. 256) » quand il hurlait à la « torture » en Algérie. Avec Jean-Louis Tixier-Vignancour, le candidat de l’Opposition nationale à la présidentielle de 1965, Jean-Marie Le Pen confirme ce qu’il avait déjà exprimé précédemment. « La candidature Tixier restera le plus grand regret de ma vie politique (p. 347). » Pourtant, « j’avais été frappé par ses plaidoiries, sa faculté de synthèse. […] L’homme n’était pas […] une personnalité sans ombres et il ne fut pas simple de l’intégrer au projet. Son image était épouvantable, y compris dans le milieu de la droite nationale. Il avait une réputation de picole, justifiée, et de collabo, injuste. C’était un sauteur aussi (p. 341) ». Pour preuve, cette savoureuse anecdote : le célèbre avocat « avait un faible pour les demoiselles très fardées et très vulgaires, au point que je dus un jour supprimer d’une liste d’invités trois putes. Son épouse protesta, vous avez écarté trois amies de mon mari, oui Madame, ce sont de drôles d’amies(p. 345) ».
Avec le recul, malgré sa jeunesse, le Président Le Pen pense qu’il aurait dû se présenter contre le Général De Gaulle. En dépit d’une défaite certaine face au président sortant, « nous aurions eu les cent mille militants. Gagné des années. Changé Mai 68. Réussi l’union des patriotes qui a toujours été mon objectif. Lancé quinze ans plus tôt, et dans une société beaucoup plus saine, l’aventure qui a produit le Front National (p. 347) ». Par conséquent, au moment des événements, « s’il y avait eu un vrai parti de droite avec une organisation militante en ordre de bataille, la face du monde, ou au moins de la France, aurait pu s’en trouver changée (p. 347) ». Prenant parfois des accents dignes d’Ivan Illich d’Une société sans école en des termes bien plus durs, il dénonce « ce rêve fou d’hégémonie scolaire [qui] est le fruit paradoxal de la “ révolution ” de Mai 68, qui vouait la fonction enseignante au nettoyage des WC. La Salope n’est pas crevée, tel un moloch femelle qui se renforce des armes tournées contre elle. L’Alma Mater affermit la Dictature des pions (p. 379) ». Cette scolarisation programmée de l’ensemble du corps social constitue une retombée inattendue du résistancialisme dont « le pire legs […] fut […] l’inversion des valeurs morales (p. 132) ». Il ne faut donc pas s’étonner que « le résistancialisme […] a perpétué la guerre civile pour pérenniser ses prébendes et son pouvoir. Et qui le perpétue toujours (p. 131) ». L’auteur sait de quoi il parle puisqu’il en a été la cible principale quarante ans durant d’une rare diabolisation avec plusieursprocès intentés à la suite d’infâmes lois liberticides.
Jean-Marie Le Pen dénonce avec force l’Épuration. Il aurait plutôt aimé que les Français se retrouvassent unis autour de la patrie restaurée et de ses martyrs. Ce ne fut pas le cas, par le jeu personnel de l’homme du 18 juin et des manigances communistes. Il n’oublie pas que Maurice Thorez déserta et se réfugia à Moscou, que le PCF démarcha les autorités d’occupation allemande afin de refaire paraître L’Humanité au nom de l’amitié germano-soviétique et que le « Parti » n’a jamais eu75 000 fusillés, mais seulement des centaines de terroristes.
L’Épuration et ses conséquences
Ainsi écorne-t-il le tristement célèbre groupe Manouchian dont l’« Affiche rouge » est enseignée dans les écoles, collèges et lycées de l’Hexagone à des gamins qui n’entendront jamais parler du capitaine de corvette Henri Honoré d’Estienne d’Orves dont la mémoire est insultée par des cloportes sociétalistes. « Sous le nom de résistance, des étrangers vont faire la guerre en France à d’autres étrangers, pour le compte d’un gouvernement étranger, en y impliquant malheureusement le peuple français comme masse de manœuvre d’une stratégie révolutionnaire et comme victime de celle-ci (p. 126). » Profondément légaliste, Jean-Marie Le Pen a toujours désapprouvé les actions violentes illégales et le terrorisme. Le « résistant » « est la perversion morale qui érige en modèle la confusion du militaire et du civil, utilisée à des fins politiques (p. 135) ». A-t-il au moins lu Théorie du partisande Carl Schmitt ?
Cette réticence se comprend parce qu’il considère que « la phraséologie de la décolonisation doit tout au résistancialisme. Celle du terrorisme aussi (p. 133) ». Pendant la Guerre d’Algérie, le FLN n’imita-t-il pas la France libre en créant un GPRA (Gouvernement provisoire de la République algérienne) qui singeait le GPRF (Gouvernement provisoire de la République française) de 1944 – 1946 ? « Le résistancialisme a bravé l’obéissance et justifié toutes les rébellions, politiques ou morales. Il devait servir de modèle quelques années plus tard aux mouvements qui allaient se lever contre l’autorité de la France. Il exaltait l’attentat individuel, le meurtre “ patriotique ”, le sabotage : on allait s’en souvenir (p. 133). » Ce n’est pas un hasard si le préfet de police de Paris en mai 1968, Maurice Grimaud, provenait de la « Résistance ». Il ordonna par conséquent aux forces de l’ordre une incroyable modération envers les émeutiers gauchistes pour le malheur de la société française.
Il en résulte désormais que « le monde ancien, l’homme ancien, ont été dissous, et se dessinent maintenant l’homme nouveau et ses valeurs nouvelles. Aux héros et aux saints qu’on nous montrait en exemple a succédé l’écocitoyen LGBT friendly et phobophobe, ouvert au vivre ensemble, au culte de la terre mère, qui ne fume pas, accueille le migrant et se prépare à rouler en voiture autonome (p. 380) ». La formule est belle et cinglante. Rectifions-là cependant. La voiture autonome peut aider à sortir de l’emprise des énergies fossiles même si elle implique du fait des terres rares d’autres dépendances stratégiques. Pris dans un sens à la fois écologique et païen, le culte de la terre mère peut, à l’instar des mouvements sociaux-populistes dans les Andes, fort bien susciter l’inévitable re-indigénisation des Albo-Européens. Quant à ne pas fumer, l’auteur aurait pu être plus précis. L’éco-citoyen déteste la cigarette, mais ne rechigne pas à fumer des pétards ! Acte hautement anti-moderne (le tabac vient d’Amérique), ne pas fumer permet en outre de ne pas financer l’État hexagonal ethnocidaire et les firmes multinationales prédatrices. Quant à la phobophobie citoyenneépidermique, elle demeure hémiplégique. Certaines phobies restent plus qu’encouragées par les médiats : la serbophobie dans les années 1990, la corsophobie récurrente, l’omniprésente russophobie et l’incontournable fachophobie. Le phobophobe carabiné a lui-même des propres phobies dont il ne doute pas la portée totalitaire.
Européen convaincu !
Fils de la nation revient enfin sur son hostilité supposée à l’égard de l’Europe. En janvier 1953, avec d’autres jeunes compatriotes, Jean-Marie Le Pen va aux Pays-Bas aider les populations néerlandaises touchées par des inondations catastrophiques. « Je garde quelque fierté de cette équipée hollandaise. Et une conviction européenne forte. Député, quatre ans plus tard, je voterai contre le traité de Rome, dont je perçois tout de suite l’esprit supranationaliste et les pièges qu’il réserve malgré ses avantages immédiats. Cela fera de moi un adversaire résolu de l’usine à gaz bruxelloise et de la révolution mondialiste par le libre-échange, non un ennemi de l’Europe. Surtout pas un ennemi de l’Europe. Je suis Français, patriote, solidement enraciné dans ma petite patrie la Bretagne, mais je me sens aujourd’hui comme en 1953, profondément européen, solidaire des peuples européens devant la submersion migratoire comme je l’étais alors devant la submersion marine (pp. 165 – 166). » Lors de ses dernières campagnes présidentielles, il revendiquera l’« Europe boréale » et soutiendra à une alliance salutaire entre les nations blanches d’Amérique du Nord, d’Europe et de Russie tout en gardant sa fidélité pour ses patries charnelle et politico-historique. Jean-Marie Le Pen s’inscrit lui aussi dans les « trois patries » subsidiaires de l’homme boréen !
Surnommé le « Menhir » du fait de ses origines bretonnes proches de Carnac, Jean-Marie Le Pen apporte un témoignage remarquable. Ce livre connaît un franc succès auprès des milliers de Français (hélas bien trop peu nombreux !) qui ont au moins une fois voté pour lui. Il souligne que « le mépris du peuple est une constante de la gauche (p. 217) ». Il reviendra certainement sur ce mépris dans un second tome intitulé Tribun du peuple. On a dès à présent hâte de découvrir le « phénomène Le Pen » par lui-même.
Georges Feltin-Tracol
• Jean-Marie Le Pen, Mémoires. Fils de la nation, Éditions Muller, 2018, 446 p., 22,90 €.



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Ce sentiment de commune appartenance a franchi des millénaires. A la fin de la période dite des Juges, chefs de tribu qui résistent à la menace d’envahisseurs et autres Philistins et à la tentation de revenir au culte de Baal, Samuel, le dernier des Juges, institue le premier fédérateur, le roi Saül, dont le gendre, David, installe un état solidement centralisé. Le fils de David, Salomon (-973 à-933), marque avec l’édification du Temple l’apogée du Royaume d’Israël, qu’il répartit en douze districts. Nœud de communication commercial central, le pays fait jonction entre l’Egypte et Babylone et entre la Méditerranée et l’Inde. Mais l’édification de sanctuaires dédiés à des dieux étrangers, dont Astarté, va susciter la révolte de Jéroboam lequel, avec l’appui du Pharaon, provoque la scission entre les royaumes de Juda et d’Israël. Celui-ci est le théâtre des affrontements entre les défenseurs de la tradition (les prophètes) et les partisans du polythéisme, appuyés par des princesses étrangères, dont Jézabel (qui sera assassinée). Car les prophètes préconisent, pour se libérer du polythéisme, le hérem ou sacrifice sanglant, ce que pratiqua avec zèle le roi Jéhu et sa dynastie (-872 à -744) sur les partisans de Baal. Au contraire, le petit royaume de Juda était, à l’exception de la reine Athalie (-842), resté fidèle à la tradition monothéiste. En dépit de l’alliance de Juda avec l’Egypte, Nabuchodonosor envahit le pays et déporta le roi, les nobles et les meilleurs artisans à Babylone, où il les autorisa à vivre en communauté avec leur prophète Ezechiel. 
A sa mort, les Romains vont jouer la rivalité entre ses fils et c’est la fin du Royaume Hasmonéen, dont la politique de judaïsation forcée n'a pas pu gommer les différences : les villes de la côte étant plus hellénistes que juives. Les pharisiens étaient influents dans les campagnes et les Sadducéens puissants à Jérusalem, les Esséniens se murant dans leur isolement. Mais avec un attachement, partagé par tous, pour une littérature hébraïque florissante. Les révoltes et les répressions se succèdent avec les assassinats et les massacres. La Judée est rattachée au monde romain par Pompée. Membre de la maison du grand-prêtre Hyrcan II, Hérode est un habile manœuvrier qui parvient à se faire apprécier à Rome par les détenteurs successifs du pouvoir, Antoine puis Octave. Il en obtient d’être installé roi de Judée. Il s’empare de Jérusalem grâce aux légions romaines et règne sans scrupule par l’assassinat, y compris des siens. 
L’inconvénient de ces socialismes est précisément d’être nationaux et dès lors moins aptes aux alliances que les démocraties populaires, à commandement unique et qui pensent globalité et non pas préférences. La défense de leurs valeurs ethniques et culturelles place les identitaires dans la situation de réactionnaires, face à des adversaires qui ont déjà transformé la France. Autre vache sacrée de la réaction, les racines chrétiennes, que les identitaires français voient catholiques, en opposition au protestantisme et à l’orthodoxie, soit aux deux tiers des Européens blancs ! En oubliant l’héritage païen multimillénaire, qui s’accommode de l’agnosticisme des masses albo-européennes, de leur curiosité scientifique, de leur goût de la nature et de leur amour du vrai. On doit en conclure que l’avenir de la révolution appartient aux racialistes païens plutôt qu’aux nationaux catholiques.
Jean-Patrick Arteault 








Péladan was the head of the Ordre Kabbalistique Rose-Croix (Kabbalistic Order of the Rosicrucian), succeeding his brother Adrien. While the original Rosicrucians, who had appeared mysteriously in Europe during the early seventeenth century and issued anonymous manifestos, seem to have been among the precursors of the Masonry and Illuminism that fermented the French Revolution against the Church and the Monarch, Péladan, on the contrary, was a Catholic traditionalist who repudiated the ideals of the French Revolution and the “Liberty, Equality, Fraternity” of the Grand Orient of Masonry, stating in 1883, “I believe in the Ideal, Tradition and Hierarchy.”
The Salon de la Rose et Croix was established in 1892 to exhibit Symbolist art to the public. Art was magic, not rituals and incantations. It was intended as the harbinger of a spiritual revolution that would overthrow the materialistic and the decadent, and as the antithesis to the art of the other salons. The first exhibition drew fifty thousand visitors. Clearly, the French yearned for something transcending the crassness of Grand Orient liberalism and secularism, which had rotted France for a century; the “disenchantment of the world,” as he called it. Richard Wagner’s music had a special place, Péladan regarding Wagner as “a therapeutic detoxifier of France’s materialism.” Erik Satie was the Order’s official composer, and Debussy was a close colleague. Péladan defined what was required in his appeal for exhibitors: “The order favors the Catholic Ideal and mysticism. After that, Legends, Myths, Allegory, Dreams, the paraphrasing of great poets, and finally, all lyricism.”

Notre groupe bruxellois a bien entendu suivi les travaux du Club de l’Horloge, structure métapolitique visant à régénérer les débats politiques en France, sans pour autant oublier les modèles extra-hexagonaux capables de modifier la donne dans une cinquième République, dont la constitution demeurait jacobine mais où son fondateur avait évoqué, avant son retrait et son trépas, la possibilité de créer un Sénat des Régions et des Professions, pour empêcher les partis de phagocyter les saines énergies nationales.
Parmi les manifestations ou happenings politiques où je me suis retrouvé aux côtés de Blot, il y eut, juste après les obsèques de Jean van der Taelen, un meeting organisé à Drogenbos par Marguerite Bastien, ancienne juge au Tribunal du Travail de Bruxelles, qui s’était jetée dans la politique (contestatrice du système en place), tant elle était dégoûtée par la déliquescence son ministère, alors que ses racines politiques initiales se situaient dans une extrême-gauche que l’on qualifierait aujourd’hui de festiviste ou de sociétale. Yvan Blot a pris la parole dans cette auberge de Drogenbos, défendant les racines grecques de la civilisation européenne, amorce première de son tropisme grec des deux premières décennies du 21ème siècle. Le Comte Jean de Marcken de Merken, qui assistait à la conférence, à la même table que moi, lui, disait préférer les racines romaines. Il y eut ensuite, un mois plus tard, une conférence de presse, toujours cornaquée par Marguerite Bastien, où toute la clique des journalistes « chiens de garde du système » (le mot est de Serge Halimi) était présente, prête à nous bouffer tout cru. A la tribune, j’étais à l’extrémité gauche, avec le Baron François van Caloen (un ancien du Bataillon de Corée) et Blot à l’extrémité droite (avec Marguerite Bastien). Nous étions les premiers visés : un journaliste de la RTBF, au patronyme ibérique, me déclare tout de go qu’il sera « très méchant ». Il annonce l’hallali. En face de moi, le journaliste néerlandais Rinke van den Brink qui avait publié un vaste ouvrage sur les « droites extrêmes » deux ans plus tôt, un ouvrage tout à fait courtois et parfaitement documenté dont la traduction française portait un titre très différent de l’original : L’Internationale de la haine. C’est en partie grâce à cet ouvrage que j’avais pu, en 1994, confectionné sous la houlette de Roland Gaucher un numéro entier du Crapouillot, titré « Les nouveaux nationalistes ». Face à Blot, l’inénarrable, l’omniprésent, l’ubiquitaire, l’incontournable Manuel Abramowicz. Rinke van den Brink, incité par le journaliste d’origine espagnole, ouvre le feu en ma direction : comme j’avais lu très attentivement son livre, je lui ai rétorqué qu’il avait dit exactement la même chose que les paroles, textes ou attitudes qu’il me reprochait incongrûment parce que je n’avais nullement l’intention de faire de la politique : j’étais là parce que Blot y était et parce que j’estimais que je devais rendre hommage à la touchante fidélité qu’il avait montré à l’égard de Jean van der Taelen, en assistant à la messe de son enterrement. Le pétard de van den Brink était mouillé, il n’a pas explosé. L’Ibère, par voie de conséquence, n’a pas pu être « très méchant » : frustration. Pauvre garçon. Il range sa caméra. Abramowicz ouvre alors le feu contre Blot en posant la question suivante : « Quelles ont été vos sources d’inspiration en rédigeant les statuts du FN ? ». Blot a eu beau jeu de répondre : « J’ai tout simplement repris ceux du RPR (de Chirac) ». Deuxième pétard mouillé lancé par ceux que nous nommions « la bande à Bouboule ». Mais, malgré cela, une nouvelle question bafouillée et incohérente de l’incontournable Manu la Gaffe : « Monsieur Blot, pourquoi rédigez-vous des statuts démocratiques alors que vous êtes contre la partiCRASSIE ? ». Blot était un peu tarabusté par la nature imbécile de la question. Le pauvre Manu n’y pouvait rien : on ne lui a jamais appris la rhétorique car le brave garçon est assistant social. Je saisis la parole et pose à mon tour une question au grand bachi-bouzouk de notre carnaval « antifasciste » bruxellois : « Pourquoi, Monsieur Abramowicz, utilisez-vous un vocabulaire d’extrême-droite ? En sciences politiques, on dit ‘partitoratie’ et non ‘particrassie’ comme dans les pamphlets de l’idéologie que vous prétendez combattre. Mimétisme ? ». Silence ennuyé de tous, à commencer par le brave van den Brink. Le débat fut clos. Ils quittèrent tous la salle, avec de longues tronches dépitées.
On le voit : il y avait moyen de bien s’amuser dans les années 1990 à Bruxelles, aux dépens des plus sots et des plus caricaturaux de nos ennemis. Plus tard, j’ai suivi, de trop loin malheureusement, l’infléchissement hellénique de la pensée d’Yvan Blot, avec la création de son « Institut néosocratique », où il a eu l’intelligence politique et métapolitique de nous exhorter à relire attentivement Aristote, à renouer avec son réalisme politique, à nous replonger dans L’Ethique de Nicomaque, voire à réhabiliter la figure du Spoudaios, chef charismatique faisant l’équilibre entre la raison, le bon sens et l’éthique de la responsabilité. Personnellement, je pense retrouver le Spoudaios dans la figure du Caïd de la Citadelle de Saint-Exupéry. Mais le Spoudaios, pour Blot, n’allait être rien moins que le Président russe, Vladimir Poutine.
Depuis une dizaine d’années, Ivan Blot s’était rapproché de la Russie de Vladimir Poutine dont il s’attachait à donner une image plus empathique et plus proche de la réalité que celle de la doxa médiatique. Le monde orthodoxe l’intéressait. Et le modèle russe, mélange de traditions patriotiques et religieuses, le passionnait. Il admirait l’acceptation par la Grande Russie de toute son histoire. De la commémoration du Staline de la grande guerre patriotique à la réhabilitation du dernier tsar Nicolas II. Une démarche exemplaire pour l’Europe de l’Ouest, confite en repentance et honteuse de son passé.
Du 13 juin au 12 juillet, sur le site Polémia, il avait analysé ainsi les quatre causes du déclin occidental : » nous avons traité de la cause finale (
Mais c’est essentiellement son travail intellectuel qui sera au cœur de sa vie. Il va mettre en valeur les racines gréco-romaines et philosophiques dans, entre autres ouvrages,







Lors du référendum de Maastricht de 1992, il appelle à un « oui » critique au nom de l’intérêt de l’Europe, car Michel Jobert est très européen. « L’Europe, si elle nous tient à cœur, n’aura de visage, d’identité, que si elle est capable d’assurer elle-même sa sécurité, au lieu de faire semblant de ne pas voir que, au-dessus d’elle, le parapluie nucléaire américain est troué depuis des années et que les États-Unis se replient d’Europe, à l’évidence (dans L’aveuglement du monde occidental. Chroniques de politique internationale 1993 – 1996, Albin Michel, 1997, p. 334). » Parfois désabusé, il estime par exemple que « la fameuse trilogie – monnaie unique, politique étrangère commune, défense commune – est, malgré les étapes et les dates fixées dans l’accord de Maastricht, du domaine de l’imaginaire ou de l’approximation (op. cit., p. 25) ». 
Soixante-dix ans après sa mort, Georges Bernanos fait toujours l’objet d’interprétations intéressées. Certaines se focalisent sur le romancier et ignorent l’essayiste et le polémiste. D’autres, au contraire, valorisent le pamphlétaire et écartent son œuvre romanesque. Thomas Renaud a le mérite de montrer que ces deux facettes forment un seul ensemble de manière irrécupérable. « Complexe et torturé, dans la mesure où il n’a jamais voulu faire taire les appels de son âme, Bernanos a porté avec lui les violents paradoxes de la nature humaine, sans que ne soient jamais trahies ses plus profondes convictions. Catholique, royaliste, anti-démocrate, anti-clérical et anti-moderne, ennemi des bourgeois et partisan des petits jusqu’à la mauvaise foi, il demeura tout cela à la fois, depuis son adolescence jusqu’à son dernier souffle. D’un côté, les “ droitards ” se fourvoient en dénonçant en lui un traître passé à gauche, de l’autre, certains néo-bernanosiens se trompent également en occultant l’admiratif disciple de Drumont, le militant de rue de l’Action française, le solide soldat des tranchées et le chrétien intégral (p. 114). »
Du fait des impératifs du volume, l’auteur s’intéresse à la vie de Georges Bernanos, quitte à reléguer au second plan sa vision politique. Elle demeure cependant bien présente pour expliquer les prises de position virulentes d’un fervent chrétien inquiet de l’avenir de la foi et des fidèles. Attention au contre-sens ! Bernanos se moque du sort des États modernes. Ce catholique a compris que la modernité est en perdition, elle est la perdition et correspond à la Chute de l’Homme adamique. D’où la démarche de son biographe. « Il nous semblait préférable de présenter aux lecteurs qui le connaissaient mal un Bernanos vivant, sans l’habituelle hémiplégie intellectuelle des lecteurs “ de droite ” et “ de gauche ”. Sébastien Lapaque a fait beaucoup pour rendre ce Bernanos “ en bloc ” que trop de critiques avaient divisé. Cette petite biographie doit ouvrir largement sur l’œuvre et permettre une belle amitié avec un auteur particulièrement attachant, qui n’a jamais souhaité jouer la comédie (1). »

Un Maître espion « représentant personnel du président Macron pour la Syrie »




