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lundi, 04 septembre 2017

L’Allemagne et l’Orient jusqu’en 1918

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Robert Steuckers

L’Allemagne et l’Orient jusqu’en 1918

Brève allocution lors d’une journée historique tenue à Louvain, 5 août 2017

Chers amis,

Pour cette journée, où l’amitié compte plus que l’étalage du savoir, je serai bref, insuffisamment exhaustif pour évoquer le rapport, bien plus complexe que je ne pourrai le dire aujourd’hui, entre l’Allemagne et ce qu’il est convenu d’appeler l’ « Orient ».

Pour ne pas allonger plus que de raison cette allocution, je me suis concentré sur une seule source : l’excellent ouvrage de

Jstew.jpgJules Stewart,

The Kaiser’s Mission to Kabul – Secret Expedition to Afghanistan in World War I,

I.B. Tauris, London, 2014.

Avant d’entrer dans le vif du sujet, il convient d’abord de rappeler que le terme d’“Orient”, tel qu’il fut utilisé dans l’expression consacrée des diplomates du 19ème siècle, soit la « Question d’Orient », concernait tout d’abord les Balkans, alors encore sous tutelle ottomane. Les Européens du début du 19ème siècle, pour la première fois dans l’histoire médiévale et moderne, pour la première fois depuis la protohistoire avec les peuples cavaliers pré-iraniens et depuis l’aventure d’Alexandre le Grand, sortaient d’une misère et d’un sous-développement par rapport à la puissance ottomane de Soliman le Magnifique, par rapport à la civilisation indienne et à l’Empire chinois. Il leur fallait parachever l’unité du continent dans une période de paix relative, inaugurée par le Congrès de Vienne de 1814 et pour ce faire, libérer les Balkans, à commencer par la Grèce chère aux Philhellènes dont Lord Byron. Deux puissances s’étaient déjà donné pour tâche d’effacer toute présence ottomane en Europe : l’Autriche-Hongrie et la Russie. Alliées dans cette tâche au 18ème siècle, elles s’opposeront l’une à l’autre jusqu’à devenir ennemies au courant du 19ème. L’Autriche-Hongrie se donnait pour mission historique de contrôler l’ensemble du bassin danubien jusqu’à son delta sur la Mer Noire. La Russie, quant à elle, visait la libération de tous les peuples slaves et orthodoxes des Balkans, ce qui impliquait de contrôler le cours du Danube en Roumanie et en Serbie et d’obtenir en Mer Egée et sur la côte adriatique des points d’appui dans le bassin oriental de la Méditerranée que l’Angleterre considérait comme sa « chasse gardée ». Pour les stratèges de Londres, aucune puissance européenne, a fortiori la Russie avec son immense hinterland, ne pouvait asseoir une domination quelconque sur ce bassin oriental de la Grande Bleue ni même y asseoir une présence trop gênante sur ce maillon indispensable le long de la route maritime des Indes, alors que l’on envisageait déjà de creuser le Canal de Suez. Contenir la Russie sur la rive nord de la Mer Noire était l’impératif majeur des Britanniques : c’est la raison du déclenchement de la Guerre de Crimée (et, subséquemment, des événements actuels en Ukraine !), c’est aussi la raison qui a conduit la marine anglaise à soutenir les Ottomans moribonds dans la guerre qui les a opposés à la coalition des orthodoxes balkaniques soutenus par Saint-Pétersbourg en 1877-1878. Il est important de se remémorer ces faits pour comprendre la dynamique à l’œuvre aujourd’hui. Si la Turquie existe en tant qu’Etat et si sa position géographique idéale lui permet de dicter sa volonté à ses voisins ou d’y avancer ses pions, c’est parce qu’elle a reçu l’appui anglais en 1877-1878. Au seul prix d’une cession de Chypre à l’Angleterre (1878).

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La Turquie actuelle, et, avant elle, l’Empire ottoman, doit donc sa survie à l’Angleterre dans son long combat pour contenir la Russie loin des mers chaudes et loin des routes maritimes vers les Indes. L’Angleterre est certes sa seule alliée dans le concert européen mais cette alliée limite l’influence et la souveraineté de l’Empire ottoman. En effet, en cédant Chypre aux Anglais en 1878, les Ottomans ont renoncé à une conquête chèrement acquise au 16ème siècle, qu’ils entendaient pourtant conserver à tout prix, si bien qu’après le désastre turc de Lépante en 1571, le Sultan avait pu dire : « En détruisant notre flotte à Lépante, ils nous ont rasé la barbe ; en leur prenant Chypre en 1570, nous leur avons coupé le bras ». L’importance que les Turcs accordent à Chypre s’est révélée une fois de plus en 1974, lors de l’invasion de l’île par leurs armées et par l’entêtement actuel d’y demeurer envers et contre tout (et tous !). L’abandon de Chypre ne fut pas le seul ressac ottoman devant les Britanniques : en 1882, l’Egypte, théoriquement une dépendance de la Sublime Porte, passe entièrement sous contrôle britannique. Les Anglais, sous l’impulsion de Gordon, envahissent alors le Soudan afin de contrôler tout le cours du Nil. En 1885, Gordon est tué à Khartoum par les mahdistes, secte guerrière islamiste et fondamentaliste que l’on a parfois appelé les « derviches » (une vitrine du Musée de l’Armée à Bruxelles rappelle ces événements et la brève intervention belge contre les mahdistes dans le sud du Soudan à l’époque).

Avec l’élimination progressive de toute présence ottomane dans les Balkans, sous l’action des peuples balkaniques eux-mêmes, la « Question d’Orient » cesse de conserver son acception limitée au Sud-Est européen et finit par s’étendre à tout l’espace jadis conquis par Alexandre le Grand. Elle concerne donc l’Iran, ou la Perse comme on disait à l’époque. La Perse du 19ème craignait surtout la Russie qui avait conquis, à ses dépens, l’Azerbaïdjan et entendait se tailler des zones d’influence dans la région, surtout sur le littoral de la Caspienne. Les Perses ne font pas davantage confiance aux Anglais qui, eux, cherchent aussi à contrôler une partie du territoire persan dans le sud pour assurer une liaison entre la Méditerranée et les Indes (l’objectif des impérialistes maximalistes de Londres était de relier territorialement et ferroviairement le Cap au Caire et le Caire à Calcutta). Pour amorcer sa modernisation, la Perse fait alors appel à d’autres Européens : les Suédois pour encadrer les éléments modernes de leur armée ; les Belges pour mettre sur pied leur système douanier. Les Anglais utiliseront la stratégie du « regime change » avant la lettre, cherchant, via toutes sortes de dissidents, à imposer à la Perse un régime de monarchie constitutionnelle calqué sur le modèle belge !

L’Inde entrera à son tour dans la définition d’un vaste « Orient ». Au 19ème siècle, l’Inde est l’objet du « Grand Jeu » entre la Russie, qui est censée chercher un débouché sur l’Océan Indien, et l’Angleterre qui compte coûte que coûte défendre ses possessions indiennes contre la grande puissance continentale qu’est la Russie qui avance inexorablement vers les terres persanes, afghanes et indiennes, en conquérant l’Asie centrale musulmane, jusqu’aux zones qui font aujourd’hui partie du Turkménistan et de l’Ouzbékistan. Pour notre auteur, Jules Stewart, cette hantise des milieux militaires et diplomatiques de Londres relevait de la paranoïa pure et simple depuis que le Tsar Paul 1er avait tenté vainement, par une alliance hypothétique avec Napoléon, de maîtriser la Perse et l’Inde. Nul mieux qu’Henri Troyat a décrit l’action politique de ce Tsar. Je vous engage à lire les biographies des tsars et tsarines qu’a ciselées cet auteur français d’origine arménienne. Rien de bien substantiel ne permet, selon Stewart, d’attester que les gouvernants russes convoitaient les Indes anglaises. Seuls quelques généraux isolés couchaient sur le papier le syllogisme suivant : « Qui possède les Indes règne sur le monde ». Si la Russie sera considérée, quelques décennies plus tard, comme le « Heartland », la « Terre du Milieu » par les géographes militaires britanniques (à la suite des thèses de Halford John Mackinder), l’Océan Indien sera considéré comme la « Heartsea », l’ « Océan du Milieu ». L’Inde est dès lors la « civilisation du milieu », située entre l’Europe et la Chine. Cette civilisation du milieu a été ruinée par la colonisation britannique de la fin du 18ème au 19ème.

Face à ce « Grand Jeu » entre Britanniques et Russes, l’Allemagne, qui vient à peine de trouver son unité en 1871, finit, au bout d’un moment, par rêver d’une Inde indépendante mais influencée par l’esprit allemand, lui-même nourri d’orientalisme indien, védique/sanskrit, via des travaux précis de philologie ou par la philosophie de Schopenhauer. Quand éclate la première guerre mondiale, le désir est d’atteindre l’Inde, de la soulever contre son oppresseur britannique. La seule voie permettant d’atteindre le sous-continent de la « civilisation du milieu » passe par l’Afghanistan. Une alliance avec l’Afghanistan permettrait dès lors d’influencer politiquement, militairement et culturellement l’Inde. A la fin du 19ème siècle, l’Afghanistan n’est plus une puissance militaire et politique sérieuse, malgré les victoires afghanes lors des deux premières guerres anglo-afghanes du 19ème siècle. Son territoire demeure toutefois le seul tremplin possible pour atteindre directement ou indirectement les possessions britanniques des Indes. Pour comprendre la dynamique de l’histoire afghane, il faut revenir au 18ème siècle. En 1747, Ahmad Shah Durrani règne grâce à l’appui des tribus pachtounes. Son pouvoir s’étend de l’Iran au Cachemire, de l’Asie centrale à l’Océan Indien. Ce sera le dernier grand empire afghan de l’histoire. En 1773, quand ce Shah pachtoune meurt, cet empire tombe en quenouille. Ses successeurs sont faibles, incapables de calmer les ardeurs des fractions qui s’affrontent. A l’Est de cet ensemble centré sur les territoires pachtounes, les Sikhs se révoltent et chassent les Afghans de leurs territoires, créant, à partir de 1780, un empire sikh qui sera annexé par les Britanniques en 1849. Rappelons que les Sikhs constituent un mouvement religieux indien hostile aux musulmans, bien que strictement monothéiste, obligeant ses membres à adopter souvent des rites contraires à ceux de l’islam.

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A partir de la dissolution de l’empire d’Ahmad Shah Durrani et du réveil sikh, les Afghans ne seront plus des envahisseurs souvent victorieux, comme dans le passé, mais seront systématiquement envahis. Ils ne seront toutefois pas colonisés car ils parviendront toujours à épuiser les forces de leurs ennemis, comme dans les deux guerres anglo-afghanes de 1838 (qui se terminera par un désastre pour l’armée anglaise) et de 1878. Une troisième guerre anglo-afghane, celle de 1919, a obligé Londres à reconnaître définitivement l’indépendance de l’Afghanistan, avec, pour contrepartie, la cessation de tout paiement au bénéfice du monarque ou du gouvernement de Kaboul. Le pays vivra dans la paix jusqu’à l’entrée des troupes soviétiques en décembre 1979.

Pourquoi les Britanniques ont-ils toujours montré un intérêt si pressant pour le territoire afghan ? Parce qu’ils ont toujours craint une invasion russe des Indes qui, comme toutes les invasions de l’histoire dans cette partie précise du monde, passerait forcément par l’Afghanistan. Or, rappelle Stewart dans son livre (p. 4) : « Il n’y a aucune preuve, mises à part quelques déclarations belliqueuses imprimées dans des journaux ou des revues russes, que Saint-Pétersbourg considérait sérieusement d’étendre démesurément les lignes logistiques de ses armées, sur des distances de centaines de kilomètres dans des zones tribales dangereuses, pour aller affronter des forces britanniques puissantes qui les auraient attendues aux portes des Indes ». En 1878, au moment où l’Empire britannique s’assure la maîtrise de Chypre pour avoir aidé l’Empire ottoman à contenir les Roumains, les Bulgares et les Russes, la situation est peut-être plus préoccupante pour les Anglais qu’en 1838, année où s’était décidée la première guerre anglo-afghane. Les Russes ont déjà conquis une bonne partie de l’Asie centrale : Tachkent (1865), Samarkand (1868), Krasnovodsk (1869), Andijan (1871), Khiva (1873), Boukhara (1876). L’Empire russe s’approche donc des frontières afghanes et indiennes. Cette avancée provoque les craintes anglaises. En 1881, un an avant que les Anglais s’emparent de l’Egypte, le Tsar Alexandre II est assassiné par des éléments révolutionnaires. La spéculation est ouverte, évidemment : qui aurait bien pu téléguider ces terroristes, qui sont certes le produit des mécontentements qui traversaient la société russe en pleine mutation à l’époque ? Si l’on retient l’hypothèse d’une possible intervention extérieure occulte, on peut imaginer l’action de services visant à priver l’Empire tsariste d’un monarque capable de gérer efficacement ses immenses territoires et de donner la puissance civile et militaire à un Etat que d’aucuns perçoivent comme un rival incontournable. Les conquêtes russes sous le règne d’Alexandre II avaient été parachevées en moins de cinq ans, sans bénéficier d’une logistique moderne, sans chemins de fer ou voies fluviales navigables.

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Devant le spectacle géant qu’offrait cette lutte entre une puissance maritime maîtresse de la « civilisation du milieu » et de l’Océan du Milieu, l’Allemagne de Bismarck reste très sceptique. Le Chancelier de Fer ne s’intéresse pas aux conquêtes coloniales. Il disait déjà des Balkans « qu’ils ne valaient pas les os d’un pauvre mousquetaire poméranien ». Bismarck veut un nouveau Reich prussianisé qui soit centré sur l’Europe et sur l’Europe seule, dont il est le cœur ; ou, pour reprendre l’image qu’utilisait le géopolitologue et général autrichien Heinrich Jordis von Lohausen, ce Reich, né dans la Galerie des Glaces de Versailles en 1871, ou ce Zollverein qui l’a précédé dans les décennies antérieures, est la paume d’une main à laquelle sont accrochés cinq doigts soit cinq péninsules ou îles : la Scandinavie, l’ensemble insulaire britannique, l’Ibérie, l’Italie et les Balkans. C’est la paume qui tient les doigts. Sans une paume saine et solide, la civilisation européenne n’a pas de cohérence, n’est qu’un ensemble disparate. A l’époque de Bismarck, le penseur Constantin Frantz, dans son oeuvre fondamentale que l’on ferait bien de relire régulièrement, voyait les deux puissances occidentales, la France et l’Angleterre comme des puissances qui renonçaient à leur européanité parce qu’elles s’étaient embarquées dans des conquêtes coloniales qui risquaient d’importer en Europe des conflits d’intérêts nés en dehors de leur propre espace civilisationnel. Ces puissances s’étaient extraverties, oubliaient la fraternité qui devait nécessairement les lier aux autres Européens. L’équilibre de notre civilisation se voyait ainsi ébranlé et deux puissances importantes de la Pentarchie issue du Congrès de Vienne de 1814 cessaient de partager le destin de leurs voisins. Frantz était pourtant un adversaire du Reich prussianisé de Bismarck : pour lui l’idéal était un retour à la souplesse du Reich traditionnel qu’incarnait l’Autriche.

La politique sceptique de Bismarck était partagée par les deux premiers empereurs prussiens, dont le père de Guillaume II, Frédéric III, qui ne régna que 99 jours. La prudence de Bismarck ne correspondait pas aux vues du jeune Kaiser Guillaume. Celui-ci, pourtant à moitié anglais, a très tôt décidé d’affronter la Grande-Bretagne dans une course à la puissance. Il estime que son empire a le droit d’avoir une vaste place au soleil dans le monde où l’Empire britannique se taille la part du lion. La première démarche d’extraversion allemande sera d’armer les Ottomans et de les outiller économiquement : l’Allemagne, aussitôt, prend pied sur le marché ottoman. La part de ses transactions commerciales avec « l’homme malade du Bosphore » passe très rapidement de 6 à 21%. Les Britanniques sont houspillés hors du marché turc : leurs parts passent de 60 à 35%. Très vite, l’Allemagne de Guillaume II tient 45% du marché turc, plus que les parts cumulées de la France et de l’Angleterre. Cette politique est diamétralement opposée à celle de Bismarck, qui se voulait équilibrée, européo-centrée et ne cherchait jamais à battre un adversaire commercial sur le terrain. Devant ces succès de la nouvelle politique extérieure allemande à partir de l’éviction de Bismarck, la France constate qu’elle ne joue presque plus aucun rôle majeur dans le Levant. Les Britanniques voient plutôt la situation d’un bon œil et, dans un premier temps, dans les années 1890, adoptent l’attitude du fairplay : ils estiment que les Allemands les soulagent d’un fardeau, celui d’armer eux-mêmes les Ottomans contre les Russes, selon les critères avérés d’une politique d’endiguement pratiquée depuis longtemps contre la plus grande des puissances continentales. Les Russes, eux, sont furieux : leur allié traditionnel en Europe du centre et de l’Ouest, surtout sous l’impulsion de Bismarck, arme désormais leur ennemi héréditaire, celui qui occupe illégitimement Constantinople et a désacralisé Sainte-Sophie. Les futurs camps de la première guerre mondiale se mettent ainsi en place : mais l’Entente n’est pas encore réellement forgée puisque l’Angleterre s’est violemment opposée aux avancées françaises en direction du Nil. Ce sera l’incident de Fachoda qui a failli déclencher une guerre anglo-française. Le Nil de son delta à sa source devait, selon les stratégistes britanniques de l’époque, être inclus dans l’Empire de Victoria ; de même, aucune puissance européenne majeure ne pouvait se tailler une fenêtre sur l’Océan Indien. En 1898, l’année de Fachoda, Guillaume II fait une tournée dans l’Empire ottoman. Il arrive à Constantinople, visite ensuite Damas et Jérusalem. Il déclare être le protecteur de l’islam, ce qui fait croire aux simples sujets musulmans de la Sublime Porte que les Allemands se sont convertis à l’islam. L’artisan de la politique ottomane et musulmane de Guillaume II est Max von Oppenheim. Cet aristocrate d’origine israélite est officiellement un « archéologue ». Il entend fabriquer une idéologie panislamique au service de l’expansion allemande.

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Dans ce contexte naît aussi le fameux projet d’un chemin de fer de Berlin à Bagdad. Avec, en Syrie, la possibilité de bifurquer vers La Mecque, rendant aisé et peu coûteux le pèlerinage rituel des musulmans, tout en rentabilisant la ligne, potentiellement très fréquentée. Le Berlin-Bagdad suit un tracé stratégique car il donne accès au cuivre du Taurus, au pétrole de Mossoul et au coton de la Mésopotamie, autant de matières premières indispensables à une Europe centrale qui en est totalement dépourvue et n’a pas de colonies où s’en procurer à bon marché. Les chemins de fer sont la hantise des Britanniques qui voient en eux un procédé technique qui annule partiellement les avantages de leur flotte commerciale. De plus, un chemin de fer qui va de l’Europe centrale, dominée par le challengeur allemand, à Bagdad se rapproche dangereusement du Golfe Persique, fenêtre stratégique très importante sur l’Océan Indien. Le géopolitologue et cartographe allemand Walter Pahl, issu des centres d’études syndicaux, démontrait que l’Empire britannique avait pour clef de voûte le sous-continent indien et cherchait, entre l’Afrique du Sud et l’Australie, à créer un « arc » qu’aucune puissance européenne véritablement efficace ne pouvait percer. Seule l’Italie, faible et sous-développée avant le fascisme, pouvait avoir une partie de la Somalie ; la France pouvait conserver Madagascar (qui sera rapidement occupé en 1941) et Djibouti ; l’Indochine donnait plutôt sur le Pacifique et ne troublait pas l’harmonie de l’« arc » ; les Pays-Bas, liés historiquement à l’Angleterre, gardaient l’Insulinde (l’Indonésie) mais sans Singapour, gardienne d’un goulot d’étranglement entre les immensités océaniques du Pacifique et l’« Océan du Milieu ». Au moment où le projet du chemin de fer Berlin-Bagdad prenait forme, les Russes achèvent la ligne Saint-Pétersbourg/Samarkand, s’approchant dangereusement de Hérat, la porte occidentale de l’Afghanistan. De plus, dans les débats politiques russes, un certain général Leonid Skobolev plaide pour une destruction définitive de l’Empire ottoman, ce qui constituerait, avec Guillaume II, un casus belli avec l’Allemagne. Skobolev entend annexer Constantinople. Les Britanniques constatent qu’ils ont trois ennemis potentiels : les affronter tous les trois, au risque de les voir s’allier entre eux, est difficile sinon impossible. Il faut donc faire un choix. Arthur Balfour demande que le Koweit devienne un protectorat britannique. Lord Landowne répète qu’aucune autre puissance européenne ne doit avoir accès au Golfe Persique. Lord Kitchener et Lord Curzon expliquent à leurs contemporains que les chemins de fer construits par les Russes et les Allemands sont autant de tentatives d’atteindre les Indes pour les arracher à l’Empire de Victoria et de ses successeurs. Ces projets ferroviaires constituent donc tous des dangers pour la domination britannique sur le Golfe Persique, désormais à cinq jours de voyage de Berlin. Cependant, le Berlin-Bagdad était loin, très loin, d’être achevé en 1914. Curieusement, Churchill, n’est pas alarmé : pour lui, « ce n’est pas une route maritime » donc c’est moins dangereux car cela n’empêchera pas les Britanniques, le cas échéant, de pratiquer un blocus.

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En 1907, la future Entente prend forme, avec la « Convention anglo-russe ». Dorénavant, la Russie, pour Londres, n’est plus perçue comme l’ennemie principale qui menace les Indes. L’ennemi principal est désormais l’Allemagne. La France est vue comme un partenaire mineur à qui on laisse le Maroc à condition qu’il ne s’occupe plus de l’Egypte et du Nil. La Russie est un futur partenaire contre une Allemagne qui arme les Ottomans. Le Tsar Nicolas II n’est plus décrit comme un suppôt de Satan dans la presse londonienne. La « Convention anglo-russe » décide d’octroyer à chacune des deux puissances signataires des zones d’influence en Perse. Les Allemands, de leur côté, constatent qu’ils sont encerclés et que l’Inde est faible sur ses frontières avec l’Iran, l’Afghanistan et le Tibet. Ils doivent dès lors chercher à asseoir leur influence 1) en Iran, dans les régions situées entre les zones russes et anglaises (que parcourront par la suite Wassmuss, von Hentig et Niedermayer) ; 2) en Afghanistan, parce qu’il a été de tous temps le tremplin permettant aux conquérants d’entrer en Inde ; 3) au Tibet et en Inde où ils doivent former de nouvelles générations d’intellectuels indépendantistes, hostiles à l’Angleterre et favorables à l’Allemagne.

Habibullah.jpgEn Afghanistan, à l’époque, règne le roi Habiboullah, une forte personnalité. Il est pro-britannique, moderniste sur le plan des mœurs et par son féminisme qui ouvre des écoles pour les filles. Il s’habille à l’occidentale et assure la modernisation de son pays. Il n’a jamais quitté l’Afghanistan. Il n’est pas sur la même longueur d’onde que son frère Nasroullah qui est tout à la fois moderniste (mais sur le seul plan technique, non sur les moeurs) et islamiste, alors qu’il a souvent voyagé à l’étranger. Nasroullah est pro-allemand. Le principal intellectuel du royaume d’Afghanistan est le journaliste Mahmoud Tarzi, adepte d’un « nationalisme islamique ». De 1910 à 1914, les zones tribales de l’actuel Pakistan sont en ébullition : la répression britannique est sévère. Les Pachtounes afghans veulent porter secours à leurs frères de race et se mettent en mouvement en direction de la frontière. Nasroullah fait distribuer 5000 fusils et 500.000 cartouches aux guerriers tribaux pachtounes. Habiboullah réagit très rapidement et promet de punir avec la plus extrême sévérité tous ceux qui entendent attaquer les Indes britanniques. Habiboullah réclame, devant l’assemblée venue l’écouter alors que les Pachtounes appellent au djihad contre les Anglais, qu’on lui apporte un Coran ; il met ses contradicteurs au défi « de trouver un verset ou un chapitre du Coran qui appelle au djihad contre ses amis » (Stewart, p. 24). « Il menaça alors d’arracher la langue à tous ceux qui oseraient encore appeler au djihad et de faire trancher les pieds de ceux qui seraient surpris à marcher vers les zones de combat » (ibid.).

Ce discours féroce n’empêcha pas un mouvement pro-allemand d’éclore au sein de la société afghane/pachtoune, immédiatement avant le déclenchement de la première guerre mondiale, mouvement d’opinion similaire à celui que l’on repérait au Maroc. En Libye, les Sénoussistes anti-italiens seront d’abord appuyés par les Turcs, ensuite, après 1918, par les Britanniques. En 1914, l’Empire britannique entre donc en guerre contre l’Allemagne, allié à la France et à la Russie, ses anciennes ennemies. Mais cette guerre est aussi une guerre contre l’Empire ottoman, allié des Allemands. Les Britanniques sont obligés de réduire leurs garnisons en Inde. Les soldats indiens de l’Empire et les troupes coloniales anglaises sont expédiés sur le front occidental. L’Inde est très mal défendue pendant le conflit : il n’y a plus que 15.000 soldats britanniques dans le sous-continent. Habiboullah se déclare neutre mais ses adversaires considèrent que cette neutralité est favorable aux seuls Britanniques. Nasroullah, pro-allemand, est corrompu, ce qui dessert sa popularité, mais il fonde, avec l’intellectuel Tarzi, le « mouvement jeune-afghan », calque du mouvement jeune-turc au pouvoir à Constantinople.

A Berlin, Max von Oppenheim, qui connaissait T. E. Lawrence pour l’avoir rencontré sur des sites archéologiques au Levant et en Mésopotamie, préconise deux stratégies : 1) aider l’armée turque à entrer en Egypte le plus vite possible ; 2) susciter une révolte générale dans les Indes anglaises. Ludwig von Moltke réclame aussitôt le soutien à tous les mouvements subversifs en Inde. Un « Berlin Committee » voit le jour pour s’ouvrir à tous les contestataires indiens en Europe. Ce seront principalement des musulmans qui l’animeront mais il y aura aussi des Hindous et des Sikhs. Franz von Papen, qui cherchera ultérieurement à organiser des sabotages aux Etats-Unis, préconise l’achat d’armes américaines pour les envoyer aux Indes via le territoire américain (encore neutre en 1914) ou le Mexique. L’entreprise tournera au fiasco car les Néerlandais confisqueront toutes les armes quand elles arriveront dans les ports de l’Insulinde hollandaise.

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Comme les musulmans, en général, n’admirent que les vainqueurs, les Allemands, au début de la guerre, ont la cote grâce à leurs succès contre les Russes à Tannenberg, contre les Serbes dans les Balkans, contre les Français avant la bataille de la Marne et surtout pour les victoires germano-turques à Gallipoli et à Kut-al-Amara en Irak, avec von der Goltz. A Berlin, on décide de lancer des opérations en Orient, avec pour but principal de soulever les Afghans contre les Britanniques et de les amener à envahir les Indes, obligeant ainsi les Britanniques à dégarnir le front picard qu’ils tiennent en France. Trois hommes seront sélectionnés pour mener ces opérations à bien : 1) Werner Otto von Hentig, diplomate avec une riche expérience en Chine, en Perse et dans l’Empire ottoman. On le rappelle du front russe ; 2) Oskar von Niedermayer, officier d’artillerie, géographe maîtrisant parfaitement la langue persane et ancien explorateur chevronné qui fut le premier Européen à traverser le terrible désert iranien du Dasht-i-Lout ; 3) Wilhelm Wassmuss, diplomate que les Anglais surnommeront le « Lawrence allemand » ; il avait commencé sa carrière à Madagascar pour la poursuivre en Perse, où il fut consul à Bouchir, puis au Caire où le déclenchement de la première guerre mondiale le surprend ; il met ses connaissances de la Perse au service de son pays et est recruté pour participer à l’opération commune ; il se disputera avec Niedermayer et von Hentig, qui vise le soulèvement des Afghans, et organisera la guérilla de tribus persanes contre l’occupation britannique, forçant les Anglais à créer des unités locales, les « South Persian Rifles » pour venir à bout de ces soulèvements ; après la guerre, il tentera en vain de débloquer les fonds promis aux tribus perses pour perpétuer l’abcès de fixation en dépit de la défaite allemande ; l’échec de ses démarches lui briseront le moral ; il meurt en 1931, à peine âgé de 51 ans.

Werner von Hentig et Oskar von Niedermayer sont tous deux sceptiques quand les autorités militaires allemandes leur annoncent la teneur de leur mission : pour les deux hommes, seule une invasion des Indes par une armée afghane particulièrement bien équipée, avec un solide appui turc, pourrait apporter des résultats. Ils ont raison. Leur expédition sera un échec.

Pourquoi ? La mission allemande à Kaboul ne recevra pas l’appui des Ottomans car Enver Pacha et Rauf Bey, bien que favorables au départ à l’alliance germano-ottomane, saboteront l’initiative. La raison de leur mauvaise grâce vient des récriminations scandalisées des officiers allemands en poste dans l’Empire ottoman, suite aux massacres d’Arméniens et de chrétiens d’Orient. Les officiers allemands et austro-hongrois envoient des rapports très négatifs à Berlin et à Vienne. Les Turcs sont furieux des critiques que l’on peut émettre sur leurs comportements. Ils exigent le renvoi de bon nombre de diplomates allemands. Ils refusent ensuite de fournir une troupe d’élite de 1000 hommes à l’expédition Hentig/Niedermayer/Wassmuss, comme ils l’avaient préalablement promis. En fait, au-delà de cette querelle qui, dans un premier temps, concernait le génocide arménien, force est de constater que les Ottomans et les Allemands n’avaient pas les mêmes buts de guerre subversive en Orient. Pour les Allemands, l’ennemi principal est l’Angleterre et il faut provoquer une révolte générale dans les Indes britanniques. Pour les Turcs, l’ennemi principal reste la Russie, qui soutient les Arméniens orthodoxes et les Grecs de l’espace pontique. Il faut donc soulever les peuples turcophones d’Asie centrale et y réduire à néant les bénéfices de la conquête russe. Les Allemands visent à asseoir une présence en Perse mais les Turcs, eux, ne veulent pas d’une trop grande influence allemande dans ce pays car il est chiite et ennemi héréditaire du système sunnite de l’Empire ottoman. Les Allemands, pour leur part, ne veulent pas devenir l’instrument d’une politique turque visant l’affaiblissement définitif de la Russie en Asie. On peut avancer l’hypothèse que Niedermayer envisage déjà une future alliance germano-russe dans une perspective bismarckienne rénovée. Dans ce contexte fragile, Niedermayer estime que la seule chose qu’il puisse obtenir est de créer une chaîne de communication entre Bagdad et l’Inde, avec des relais en Perse (entre les zones contrôlées par les Russes et les Anglais) et en Afghanistan. C’est le projet modeste (par rapport à ce qui lui était demandé…) qu’il tentera de réaliser. Mais les Afghans, mieux informés qu’il ne le croyait sur la situation des fronts en Europe, ne marcheront pas dans la combine et demeureront neutres, bien qu’assez bienveillants à l’égard des Allemands.

Les leçons à tirer de ces épisodes peu connus de la première guerre mondiale, c’est que l’Europe (qui n’est jamais qu’une Allemagne agrandie ou la combinaison du centre germanique avec les périphéries péninsulaires ou insulaires) a besoin des relais que l’expédition Hentig/Niedermayer/Wassmuss entendait créer. C’est d’ailleurs d’une brûlante actualité : l’industrie allemande vient de se rendre compte, dans un rapport, que les sanctions imposées par les Etats-Unis contre la Russie et contre l’Iran, appuyées une nouvelle fois début août 2017 par le Parlement américain, punit plutôt l’Europe que les Russes ou les Iraniens, capables de se développer dans une relative autarcie. Les intérêts de l’Europe et de l’Allemagne ne sont donc pas ceux de la Turquie (ottomane ou non) ni ceux des puissances thalassocratiques anglo-saxonnes. Après la première guerre mondiale, les Français, les Allemands, les Suisses, les Suédois, les Italiens ont tenté de prendre pied en Iran et parfois aux Indes. En Iran, les Suisses ont envoyé des ingénieurs pour la construction de lignes de chemin de fer en haute montagne. Les Allemands ont participé au creusement de canaux, à la construction de ponts, etc. Si la Turquie conserve son rôle de verrou qui empêche le transit des marchandises européennes vers l’Orient et le transit des marchandises orientales vers l’Europe, l’Iran demeure une terre indispensable pour que puisse s’animer une gigantesque dynamique eurasienne. Celle que veut activer la Chine qui déplore que l’Europe demeure prisonnière de ses « nuisances idéologiques », la rendant aveugle face aux réalités. Pour l’observateur et sinologue allemand Stefan Aust, la force des Chinois est d’avoir renoué avec leur tradition confucéenne, une philosophie qui n’est pas une religion du désert ni l’avatar de l’une de ces religions du désert qui aurait été laïcisée comme le presbytérianisme de Wilson qui influence encore et toujours tous les travers de la politique étrangère américaine. L’avenir de l’Europe est de renouer avec ses propres traditions aristotéliciennes, avec l’Ethique de Nicomaque

Robert Steuckers.

(Louvain/Forest-Flotzenberg, août 2017).

The Geopolitics of Jason Jorjani

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The Geopolitics of Jason Jorjani

Jason Reza Jorjani
World State of Emergency [2]
London: Arktos Media, 2017

Dr. Yen Lo: ”You must try, Comrade Zilkov, to cultivate a sense of humor. There’s nothing like a good laugh now and then to lighten the burdens of the day. [To Raymond] Tell me, Raymond, do you remember murdering Mavole and Lembeck?”[1] [3]

If Dr. Jason Jorjani were an inanimate object, he would be an exploding cigar; or perhaps one of those cartoon guns with a barrel that twists around [4] and delivers a blast to the man behind the trigger.[2] [5] Jorjani, however, is neither a gun nor a cigar, but an author, and with his new book he delivers another kind of unexpected explosion of conventional — albeit alt-Right — expectations. Anyone possessed with the least amount of intellectual curiosity — and courage — needs to read this book; although you should keep well away from windows and beloved china, as you will likely want to hurl it away from time to time.

After the twin hammer blows of first, publishing Prometheus and Atlas (London: Arktos, 2016), and then almost immediately taking on the job of Editor-in-Chief at Arktos itself, Jorjani has symmetrically one-upped himself by almost simultaneously resigning from Arktos and unleashing a second book, World State of Emergency, the title of which represents, he tells us almost right at the start, his “concept for a state of emergency of global scope that also demands the establishment of a world state.”[3] [6]

It’s no surprise that there hasn’t been much change here, but a glance at his resignation statement — helpfully posted at his blog[4] [7] — shows that he has set his sights on new targets, and changed his focus from how we got here to where we — might? must? — be going.

In my view, the seismic political shift that we are shepherding, and the Iranian cultural revolution that underlies it, represents the best chance for the most constructive first step toward the Indo-European World Order that I conceptualize in my new book, World State of Emergency.

Another change is that unlike his previous book, where the length and variety made it a bit difficult to keep the thread of the argument before one’s mind, this work is relatively straightforward. In fact, he provides an admirably clear synopsis right at the start, and by Ahura Mazda he sticks to it.

Over the course of the next several decades, within the lifespan of a single generation, certain convergent advancements in technology will reveal something profound about human existence. Biotechnology, robotics, virtual reality, and the need to mine our Moon for energy past peak oil production, will converge in mutually reinforcing ways that shatter the fundamental framework of our societies.

It is not a question of incremental change. The technological apocalypse that we are entering is a Singularity that will bring about a qualitative transformation in our way of being. Modern socio-political systems such as universal human rights and liberal democracy are woefully inadequate for dealing with the challenges posed by these developments. The technological apocalypse represents a world state of emergency, which is my concept for a state of emergency of global scope that also demands the establishment of a world state.

An analysis of the internal incoherence of both universal human rights and liberal democracy, especially in light of the societal and geopolitical implications of these technologies, reveals that they are not proper political concepts for grounding this world state. Rather, the planetary emergency calls for worldwide socio-political unification on the basis of a deeply rooted tradition with maximal evolutionary potential. This living heritage that is to form the ethos or constitutional order of the world state is the Aryan or Indo-European tradition shared by the majority of Earth’s great nations — from Europe and the Americas, to Eurasia, Greater Iran, Hindu India, and the Buddhist East.

In reviewing Jorjani’s previous book [8], Prometheus and Atlas, I said that it could serve as a one-volume survey of the entire history of Western thought, thus obviating the need to waste time and money in one of the collegiate brainwashing institutes; I also said that “the sheer accumulation of detail on subjects like parapsychology left me with the feeling of having been hit about the head with a CD set of the archives of Coast to Coast AM.”

The new book changes its focus to technology and its geopolitical implications, but a bit of the same problem remains, on a smaller scale and, as I said, the overall structure of the argument is clear. In the first chapter, Jorjani lands us in media res: the Third World War. Unlike the last two, most people don’t even realize it’s happening, because this is a true world war, a “clash of civilizations” as Samuel Huntington has famously dubbed it.

The dominance of Western values after the Second World War was a function of the West’s overwhelming military and industrial power; the ease which that power gave to the West’s imposition of its values misled it into thinking those values were, after all, simply “universal.” With the decline of that power, challenges have emerged, principally from the Chinese and Muslim sectors.

Jorjani easily shows that the basis of the Western system — the UN and its supposed Charter of Universal Human Rights — is unable to face these challenges; it is not only inconsistent but ultimately a suicide pact: a supposed unlimited right to freedom of religion allows any other right (freedom from slavery, say, or from male oppression) to be checkmated.

Chapter Two looks at the neocon/neoliberals’ prescription for an improved world order, the universalizing of “liberal democracy.” Here again, Jorjani easily reveals this to be another self-defeating notion: liberalism and democracy are separate concepts, which history shows can readily be set to war with each other, and Moslem demographics alone predicts that universal democracy would bring about the end of liberalism (as it has wherever the neocon wars have brought “democracy”).[5] [9]

For a more accurate and useful analysis, Jorjani then pivots from these neo nostrums to the truly conservative wisdom of the alt-Right’s political guru, Carl Schmitt.

Schmitt’s concept of the state is rooted in Heraclitus: the state emerges (note the word!) not from the armchair speculations of political philosophers on supposed abstract “rights,” but from

Decisive action required by a concrete existential situation, namely the existence of a real enemy that poses a genuine threat to one’s way of life.

Thus, there cannot be a “universal” state: the state must be grounded in the ethos or way of life of a particular people, from which it emerges; and it does so in the state of emergency, when the people confronts an existential Enemy. Unless . . .

Humanity as a whole were threatened by a non-human, presumably extraterrestrial, enemy so alien that in respect to it “we” recognized that we do share a common way of life that we must collectively defense against “them.”[6] [10]

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There it is — bang! Just as Jorjani found a passage in Heidegger’s seminar transcripts that he could connect to the world of the paranormal,[7] [11] he grabs hold of this almost off-hand qualification and runs for daylight with it.

We have in interplanetary conflict a threat to Earth as a whole, which according to the logic of Schmitt’s own argument ought to justify a world sovereign. This is even more true if we substitute his technological catalyst[8] [12] with the specter of convergent advancements in technology tending towards a technological singularity, innovations that do not represent merely incremental or quantitative change but qualitatively call into question the human form of life as we know it. This singularity would then have to be conceived of, in political terms, as a world state of emergency, in two senses: a state of emergency of global scope, and a world state whose constitutional order emerges from out of the sovereign decisions made therein.

After this typically Jorjanian move, we are back to the land of Prometheus and Atlas, where each chapter is a mini-seminar; Chapters Three, Four and Five are devoted to documenting this “technological singularity” that “calls into question the human form of life as we know it.”

Take biotechnology:

What is likely to emerge in an environment where neo-eugenic biotechnology is legalized but not subsidized or mandates is the transformation of accidental economic class distinctions, which is possible for enterprising individuals to transcend, into a case system based on real genetic inequality.[9] [13]

Next up, robotics, artificial intelligence, drones, and most sinister of all, virtual reality:

In some ways, the potential threat to the human form of life from Virtual Reality is both more amorphous and more profound than that posed by any other emergent technology. It could become the most addictive drug in history. The enveloping of the “real world” into the spider-web of Cyberspace could also utterly destroy privacy and personal identity, and promote a social degenerative sense of derealization.

None of this matters, however, if we cannot maintain the “development of industrial civilization” after “the imminent decline in petroleum past the global peak in oil production.” This can only be addressed by the third technological development, “a return to the Moon for the sake of Helium-3 fueled fusion power.” This will “challenge us to rethink fundamental concepts such as nationalism and international law.” Who, on the Moon, is to be sovereign?

Having softened up the reader with this barrage of terrifying facts, Jorjani is ready to spring his next trap. The task of regulating biotechnology and guiding us to the moon requires a world state; Schmitt has shown us that a state can emerge only from the ethos of a particular people.

However,

We have also seen that a bureaucratic world state will not suffice. Certain developments in robotics mean the end of personal privacy [and] as we live ever more of our lives in cyberspace, identity theft is coming to have a much more literal meaning. All in all, the convergent technological advancements that we have looked at require a maximal trust society simply for the sake of human survival. We need a world society with total interpersonal transparency, bound together by entirely sincere good will.

And yet, even if we could create such a society, perhaps by biotechnology itself, we don’t have the time: we have at most a generation to act. Is there “an already existing ethos, a living tradition that is inter-civilizational[10] [14] and global in scope,” as well as promoting high levels of mutual trust?

That would be, of course, “the common Aryan heritage of the Indo-European civilizations.”

It’s as if Jorjani took Carl Schmitt and Kevin MacDonald[11] [15] and through some kind of genetic engineering produced a hybrid offspring: the World State.

Reeling but still upright, the Alt-Right reader at least still has this to hang onto: “good old Aryan culture!” Lulled into complacency, he doesn’t even see the next punch coming:

Iran or Iran-Shahr — literally the “Aryan Imperium” — is the quintessentially Indo-European Civilization.

Iran is not just one great civilization among a handful of others, it is that crossroads of the world that affords all of humanity the possibility for a dialogue toward the end of a new world order.

A renaissance of Greater Iran . . . will be the spearhead of the war for an Indo-European World Order.

Once the Iranian or Aryan Renaissance triumphs domestically, the Persians and Kurds in the vanguard of the battle against the nascent global Caliphate — with its fifth-column in the ghettos of the major European cities — will reconstitute Greater Iran as a citadel of Indo-European ideals at the heart of what is now the so-called “Islamic world” . . . this is going to happen.

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At this point, the alt-Right reader throws up his hands and shouts “No mas! I didn’t sign up for this crusade!”

Now might be the point to bring up the general question: in what sense — if any – is Jorjani an Alt-Right writer? There is that resignation business, and what’s with all this Iranian Renaissance stuff?[12] [16]

Well, you say “Aryan,” he says “Iran.” The point is that the Aryan Imperium is explicitly White, and fulfills Greg Johnson’s principle of setting up a white hegemony where all public issues are discussed in term of “what’s good for the White race,” rather than other hot button issues like school choice, abortion, etc. Under Jorjani’s postulated “world emergency” the new Aryan overlords would be viewed as both necessary and, therefore, literally unquestionable.[13] [17]

In a way, the Aryan Imperium is even too white, hence the alt-Rightist’s discomfort. Jorjani delights in taking “conservative” ideas and taking them to their logical endpoint. Enumerating the accomplishments of the Indo-Iranians, he lists “major . . . religious traditions such as . . . Zoroastrianism, Hinduism, and Buddhism.” As in his previous book, Jorjani goes beyond the fashionable anti-Jihadism of the Right and locates the root of the problem in the Semitic tradition as such.

This is probably not what most alt-Rightists signed on for. But then, it is they who are among “those self-styled ‘identitarians’ who want to hold on to Traditional Christianity and hole up in one of many segregated ethno-states.” Not to worry; they will “perish together with the other untermenschen” in the coming world state of emergency, which will be the “concrete historical context for the fulfillment” of Zarathustra’s prophecy of a “new species,” the Superman.

So, I guess we have that to look forward to, at least.[14] [18]

As you can see, the anti-Christian animus can claim a pedigree back to that alt-right darling, Nietzsche, although it may not be something one is supposed to mention in public. That brings us to another sense in which Jorjani is an alt-Right thinker: he draws on, and orients himself by, the alt-Right canon: Nietzsche, Heidegger, Schmitt, de Benoist, Faye, Dugin, etc.

But again, as always . . .

“I’ve tried to clear my way with logic and superior intellect. And you’ve thrown my own words right back in my face, Brandon. You were right, too. If nothing else, a man should stand by his words. But you’ve given my words a meaning that I never dreamed of! And you’ve tried to twist them into a cold, logical excuse for your [Aryan Imperium].”[15] [19]

Calm down, people! Always with a little humor, comrades, to lighten the day’s geopolitical work.

While there is a cottage industry of goodthinkers trying to find evidence — well, more evidence — of how Heidegger’s allegiance to National Socialism “twisted” his thought, Jorjani found connections with parapsychology and even the occult; it’s a toss-up which association Heidegger epigones found more infuriating.

Now, Jorjani uptilts Heidegger’s colleague and fellow party-member Carl Schmitt; did Schmitt argue that the world-state of liberal globalist dreams was logically and existentially impossible? Sure, except this place here where he grants that one would be possible and necessary — if aliens invaded.[16] [20]

As for your White Imperium, sure, we’ll have that . . . run out of Tehran![17] [21]

The alt-Right is full of titanic thinkers of the past — Heidegger, Spengler, Yockey, Benoist — and their modern epigones (fully their equals, at least in their own minds), but Jorjani is the thinker we need now: more than just a lover of wisdom, he’s a wise guy.[18] [22]

That’s how Wolfi Landstreicher describes Max Stirner, and we might compare our situation to the Left Hegelians and Die Freien who populated the Berlin beerhalls and Weinstube — the blogs of the day — in the wake of Hegel. Among them were such “serious” thinkers as Karl Marx — and we know how that turned out — and Bruno Bauer, who invented the Christ Myth theory.

But there was also an individual — a Unique One — born Caspar Schmidt, calling himself — his online handle, if you will — “Max Stirner.”

As I wrote in my review [23] of Landstreicher’s new translation of The Unique One and Its Property, Stirner was driving people nuts right from the start.

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Marx famously claimed to have found Hegel standing on his head, and to have set him right-side up; in other words, he re-inverted Hegel’s already inverted idealist dialectic and made material reality the basis of ideas.

Stirner, by contrast, picked Hegel up and held him over his head, spun him around, and then pile-drove him into the mat; a philosophical Hulk Hogan.

Stirner’s magnum opus is a kind of parody of Hegelianism, in which he spends most of his time using the famous dialectic to torment Hegel’s epigones, first Feuerbach and then, at much greater length, the Whole Sick Crew of (mid-19th century Euro-)socialism.

Have you philosophers really no clue that you have been beaten with your own weapons? Only one clue. What can your common-sense reply when I dissolve dialectically what you have merely posited dialectically? You have showed me with what kind of ‘volubility’ one can turn everything to nothing and nothing to everything, black into white and white into black. What do you have against me, when I return to you your pure art?[19] [24]

Of course, unless you’re Howard Roark claiming “no tradition stands behind me,” everyone has their sources; the more creative among us are the ones who transform them, and no one’s alchemical sleight of hand is as dramatic as Jorjani’s.[20] [25] As the great Neoplatonist John Deck wrote:

Clearly, there can be no a priori demonstration that any philosophic writer is more than a syncretist: but if it is good to keep our eyes open to spot “sources,” it is even better to bear in mind that a philosopher is one who sees things, and to be ready to appreciate it when sources are handled uniquely and, in fact, transmuted.[21] [26]

As always, the Devil — or Ahriman — is in the details.[22] [27]

In reviewing his previous book, I took Jorjani to task for assuming that a particular view of Islam, the fundamentalist, was ipso facto the “true” or “original” version of the religion.

Why privilege the fundamentalist, or literalist, view? It is as if Jorjani thinks that because religion determines culture (true) it does so in a way that would allow you to read off a culture simply from a study its sacred books, especially the ethical parts.[23] [28]

But the latter is neither the same as nor a valid inference from the former. A religion does not “imply” a culture, like a logical inference. Both the Borgia’s Florence and Calvin’s Geneva are recognizably “Christian” and totally unlike any Islamic society, but also almost totally unlike each other.

By this method, one could readily predict the non-existence of lesbian rabbis, which, in fact, seem to be everywhere.

The temptation, of course, is to dismiss those outliers are “not really Islam,” in preference to one’s own, whether one is a Wahabi oneself or an observer like Jorjani insisting Wahbism is “real” Islam; but to call the moderate Islam that made Beirut “the Islamic Riviera” heretical ironically puts Jorjani and other anti-jihadis in the same boat as an Obama, who hectors terrorists about “betraying Islam” and lectures us that “Islam is a religion of peace.”[24] [29]

And yet Jorjani himself upbraids Huntington for advising Westerners to “take pride in the uniqueness of western culture, reaffirming, preserving and protecting our values from internal decay,” which he derides as “the kind of conservatism that imagines “western values” to be static.”

In the book under review here, Jorjani doubles down: Islam is still based on a book actually written by this chap Mohammed, and a reading thereof shows it to be “impervious to reform or progressive evolution.”

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But to this he now adds a similar concept of Zoroastrianism, but of course given a positive spin:

A handful of ideas or ideals integral to the structure of Iranian Civilization could serve as constitutional principles for an Indo-European world order: the reverence for Wisdom; industrious innovation; ecological cultivation, desirable dominion; chivalry and tolerance.

Jorjani writes in his two, last, geopolitical chapters as if there were a discernable set of “principles” written down or carved in stone as defining Zoroastrianism, and that these principles were adhered to, unquestionably, down through Persian history, accounting for its salient features. In reality, like all religions, Zoroastrianism was in favor and out of favor, adhered to strictly and given mere lip service, and always subject to reinterpretation and syncretism with outside sources.

After flourishing early on among the Achaemenid Persians (600s to 300s BC), Zoroastrianism was suppressed under the Parthian regime (200s BC to 200s AD), only to reemerge under the Sassanid dynasty for a few final centuries before the Arab conquest imposed Islam.

Zaehner distinguished three distinct periods in the history of pre-Islamic Zoroastrianism: “primitive Zoroastrianism,” that is, the prophet’s own message and his reformed, monotheistic creed; “Catholic Zoroastrianism,” appearing already in the Yasna Haptaŋhaiti and more clearly in the Younger Avesta, which saw other divinities readmitted in the cult, a religious trend attested in the Achaemenid period, probably already under Darius I and Xerxes I, certainly from Artaxerxes I onwards as shown by the calendar reform that he dates to about 441 BCE and finally the dualist orthodoxy of Sasanian times.[25] [30]

At times Jorjani recognizes this interplay of text, interpretation, and historical necessity, at least with Christianity:

The so-called “Germanization of Christianity” would be more accurately described as an Alanization of Christianity, since Alans formed the clerical elite of Europe as this took shape.[26] [31]

Or here:

One particularly colorful practice which reveals the love of Truth in Achaemenid society is that, according to Herodotus, the Persians would never enter into debates and discussions of serious matters unless they were drunk on wine. The decisions arrived at would later be reviewed in sobriety before being executed. . . . It seems that they believed the wine would embolden them to drop all false pretenses and get to the heart of the matter.

Indeed, and rather like the Japanese salarymen as well.[27] [32] But it comports poorly with Zoroaster’s insistence on sobriety and temperance; indeed, according to Zaehner, the whole point of Zoroaster’s reforms was the recognition that the drunken, orgiastic rites of the primitive Aryans (involving the entheogen haoma, the Hindu soma) were inappropriate for peasants in a harsh mountainous terrain.[28] [33]

I have spent this time — shall we say, deconstructing — Jorjani’s account of Zoroastrian culture because it is the envelope in which he presents us with his Indo-European principles, and is therefore important; but this must not be taken to mean I object to the principles themselves. They are fine ones, but if we choose to make them the principles for our Indo-European Imperium, it will be because we do so choose them our own, not because they instantiate some hypothetical, synchronic version of Zoroastrianism which we have already persuaded ourselves must govern our choices.[29] [34]

Such great, world-creating choices require the guidance of great minds, and not just those of the past. The Great Thinkers of the past are not only Titans but dinosaurs; and racing around them is a wily newcomer, Jason Jorjani — a prophet, like Nietzsche or Lawrence, who imagines new forms of life rather than reiterating the old ones[30] [35] — to whom the archeo-future belongs.

Notes

[1] [36] The Manchurian Candidate (Frankenheimer, 1962)

[2] [37] Surprisingly, this myth is confirmed: MythBusters Episode 214: Bullet Baloney [38] (February 22, 2014).

[3] [39] Big scope and small scope, as we used to make the distinction back in the analytic philosophy seminars. Down the hall in the English Department corridor, Joyce Carol Oates was typing away at her novel of madness in Grosse Pointe, Expensive People: “I was a child murderer. I don’t mean child-murderer, though that’s an idea. I mean child murderer, that is, a murderer who happens to be a child, or a child who happens to be a murderer. You can take your choice. When Aristotle notes that man is a rational animal one strains forward, cupping his ear, to hear which of those words is emphasized — rational animal, rational animal? Which am I? Child murderer, child murderer? . . . You would be surprised, normal as you are, to learn how many years, how many months, and how many awful minutes it has taken me just to type that first line, which you read in less than a second: I was a child murderer.” (Vanguard Press, 1968; Modern Library, 2006).

[4] [40] “My Resignation from the alt-Right,” August 15th, 2017, here [41].

[5] [42] It’s happening here as well; a commenter at Unz.com observes that [43] “That’s the thing about representative democracy with universal, birthright citizenship suffrage. You don’t need to invade to change it, just come over illegally and have children. They’ll vote their homeland and culture here.”

[6] [44] Jorjnan’s paraphrase of Schmitt’s The Concept of the Political, p. 54: “Humanity as such cannot wage war because it has no enemy, at least on this planet.

[7] [45] In Prometheus and Atlas, Jorjani discusses an imaginal exercise conducted by Heidegger himself in his Zollikon Seminars, in which participants are asked to “make present” the Zurich central train station. Heidegger insists that “such ‘making present’ directs them towards the train station itself, not towards a picture or representation of it,” his conclusion being that ‘We are, in a real sense, at the train station.” (Quoting from Zollikon Seminars: Protocols, Conversations, Letters [Northwestern, 2001], p. 70). See my review [8] for a discussion of the implications of the Japanese saying, “A man is whatever room he is in.”

[8] [46] In a late work, Theory of the Partisan, Schmitt already begins to suggest that the development of what we would now call “weapons of mass destruction” may already constitute such a planetary threat.

[9] [47] Perhaps only evaded by “a small but highly motivated and potentially wealthy anarchical elite of Transhumanists who want to push the boundaries ad infinitum.”

[10] [48] I think Jorjani reverses “civilization” and “culture” (i.e., ethos) as defined by “Quintillian” here [49] recently: “The left cunningly advances its false narrative by deliberately contributing to the confusion between two terms: culture and civilization. Simply put, a civilization is an overarching (continental) commonality of shared genetics, religious beliefs, and political, artistic, and linguistic characteristics. A civilization is generally racially identifiable: African civilization, Asian civilization, and white European civilization. A civilization can have any number of constituent cultures. The culture of the Danes and that of the Poles are very different in superficial details, but they are both immediately identifiable as belonging to the same Western civilization. Africans are similarly divided among a variety of culture and ethnicities.” But “As I [Jorjani] understand it, a civilization is a super-culture that demonstrates both an internal differentiation and an organic unity of multiple cultures around an ethno-linguistic core.” Both would agree, however, that “the Indo-Europeans originated nearly all of the exact sciences and the technological innovations based on them, the rich artistic and literary traditions of Europe, Persia and India, as well as major philosophical schools of thought and religious traditions.” (Jorjani)

[11] [50] See, for example, the discussion of trust in White societies in Greg Johnson’s interview with Kevin MacDonald, here [51].

[12] [52] Not that there’s anything wrong with that.

[13] [53] A typically subtle point: by requiring a high-trust population, Jorjani implicitly excludes Jews and other Semites. A low-trust people themselves, the Jewish plan for World Order is to encourage strife within and between societies, until the sort of managerial or administrative state Jorjani rejects is installed to maintain order, under the wise leadership of the secular rabbis.

[14] [54] “So we finish the eighteenth and he’s gonna stiff me. And I say, “Hey, Lama, hey, how about a little something, you know, for the effort, you know.” And he says, “Oh, uh, there won’t be any money, but when you die, on your deathbed, you will receive total consciousness.” So I got that goin’ for me, which is nice.” Bill Murray, Caddyshack (Landis, 1980).

[15] [55] Rupert Cadell, upbraiding the crap-Nietzscheanism of his former pupils in Rope (Hitchcock, 1948). Cadell, of course, actually refers to “your ugly murder” which, the viewer knows, sets off the action of the film.

[16] [56] A not uncommon trope in science fiction, from The Day the Earth Stood Still to Childhood’s End to Independence Day; as well as a particularly desperate kind of Keynesian economic punditry: in a 2011 CNN interview video Paul Krugman proposed Space Aliens as the solution to the economic slump (see the whole clip here [57] for the full flavor).

[17] [58] I am reminded of the moment when Ahab reveals his hidden weapon against the Great White Whale: “Fedallah is the harpooner on Ahab’s boat. He is of Indian Zoroastrian (“Parsi”) descent. He is described as having lived in China. At the time when the Pequod sets sail, Fedallah is hidden on board, and he later emerges with Ahab’s boat’s crew. Fedallah is referred to in the text as Ahab’s “Dark Shadow.” Ishmael calls him a “fire worshipper,” and the crew speculates that he is a devil in man’s disguise. He is the source of a variety of prophecies regarding Ahab and his hunt for Moby Dick.” (Wikipedia [59]) For more on Moby Dick and devils, see my review of Prometheus and Atlas.

[18] [60] “You know, we always called each other goodfellas. Like you said to, uh, somebody, “You’re gonna like this guy. He’s all right. He’s a good fella. He’s one of us.” You understand? We were goodfellas. Wiseguys.” Goodfellas (Scorsese, 1990). Who but Jorjani would define “arya” as “‘crafty,’ and only derivatively ‘noble’ for this reason.” But then is that not precisely the Aryan culture-hero Odysseus?

[19] [61] Max Stirner,The Philosophical Reactionaries: The Modern Sophists by Kuno Fischer,reprinted in Newman, Saul (ed.), Max Stirner (Critical Explorations in Contemporary Political Thought), (Basingstoke and New York: Palgrave Macmillan, 2011), p. 99.

[20] [62] Given Jorjani’s love of Heraclitus, one thinks of Water Pater’s description, in Marius the Epicurean, of the Roman philosopher Aristippus of Cyrene, in whom Heraclitus’ “abstract doctrine, originally somewhat acrid, had fallen upon a rich and genial nature well fitted to transform it into a theory of practice of considerable simulative power toward a fair Life.”

[21] [63] John N. Deck, Nature, Contemplation, and the One: A Study in the Philosophy of Plotinus (University of Toronto Press, 1969; Toronto Heritage series, 2017 [Kindle iOS version].

[22] [64] Including such WTF moments as Jorjani off-handedly defines “Continental Philosophy” as “largely a French reception of Heidegger.”

[23] [65] Ethical treatises, such as Leviticus, as best seen as reactions to the perceived contamination of foreign elements, rather than practical guides to conduct; Zaehner dismisses the Zoroastrian Vendidad as a list of “impossible punishments for ludicrous crimes. . . . If it had ever been put into practice, [it] would have tried the patience of even the most credulous.” R. C. Zaehner, The Dawn and Twilight of Zoroastrianism, London, 1961, pp. 27, 171.

[24] [66] As one critic riposted, “Who made Obama the Pope of Islam?” Indeed, the Roman Catholic model may be the (mis-)leading model here; Islam, like Judaism, lacks any authoritative “magisterium” (from the Greek meaning “to choose”) to issue dogma and hunt down heretics. Individual imams have only their own personal charisma and scholarly chops to assert themselves, just as individual synagogues hire and fire their own rabbis, like plumbers. On Jorjani’s model, lesbian rabbis should be as scarce as unicorns, rather than being a fashionable adornment of progressive congregations.

[25] [67] Encyclopedia Iranica Online, here [68]. Quoting Zaehner, op. cit., pp. 97–153.

[26] [69] Compare, on your alt-Right bookshelf, James C. Russell: The Germanization of Early Medieval Christianity: A Sociohistorical Approach to Religious Transformation (New York and Oxford: Oxford University Press, 1994).

[27] [70] What, by the way, happened to Japan, which in Jorjani’s first book was specially favored by its non-Abrahamic traditions and catastrophic encounter with atomic energy to lead the way into the new future?

[28] [71] Zaehner, op. cit., p. 81. In fact, Herodotus never mentions Zoroaster at all, suggesting how obscure and un-influential the cult was at that time. Rather than the modern idea of “in vino veritas,” the “wine” here, as in the symposiums of Greece, may have been “mixed wine” containing entheogenic substances. “Visionary plants are found at the heart of all Hellenistic-era religions, including Jewish and Christian, as well as in all ‘mixed wine’, and are phenomenologically described in the Bible and related writings and art.” (Michael Hoffman, “The Entheogen Theory of Religion and Ego Death,” in Salvia Divinorum, 2006.)

[29] [72] Whether it’s Cyrus or Constantine, periods of Imperium are ipso facto periods of syncretism not orthodoxy. Surely this is more in accord with the author’s notion, here and elsewhere, of truth emerging from a Heraclitean struggle?

[30] [73] “[Henry] James evidently felt confident that he could make his last fictions not as a moralist but as a prophet; or a moralist in the sense in which Nietzsche and Lawrence were prophets: imagining new forms of life rather than reinforcing old ones.” Denis Donoghue, “Introduction” to The Golden Bowl (Everyman’s Library, 1992).

Le despotisme éclairé et ses avatars modernes

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Le despotisme éclairé et ses avatars modernes

Bernard Plouvier,

auteur, essayiste

Ex: https://metamag.fr

« Quant à moi, j’aime l’État plus que mon âme », Niccolo Machiavel

Qu’est-ce qui différencie le populisme du despotisme éclairé ? Le but ! Ce n’est pas le bien de la Nation qui est la cible visée par ce dernier système politique, mais la puissance et la grandeur de l’État. Machiavel, théoricien de ce type de gouvernement, pose en principe que le bon « Prince » dirige avec douceur quand il le peut, avec ruse le plus souvent, avec brutalité au besoin, mais toujours avec le souci de l’efficacité.

Les despotes éclairés sont les dévots de la raison d’État, réagissant en idéalistes pragmatiques, qui estiment que la fin justifie et ennoblit les moyens. Tout ce qui est profitable ou simplement utile à l’État devient, ipso facto, licite. Le succès fait disparaître jusqu’au souvenir des crimes qui ont paru nécessaires à l’obtention du résultat. Est beau, juste et noble ce qui a réussi. C’est un peu trop vite confondre l’État et le Bien commun. L’État n’est jamais qu’un moyen… il n’y a pas que les adeptes du despotisme éclairé qui oublient cette notion. C’est, en principe, le bien de la Nation qu’un bon gouvernement doit rechercher : c’est la définition du populisme !

Les despotes éclairés du XVIIIe siècle – Frédéric II de Prusse, Joseph II, antépénultième empereur romain de langue germanique, Pierre le Grand au début du siècle et Catherine II de Russie à la fin, Gustave III de Suède, le marquis de Pombal au Portugal ou Robert Turgot – réalisèrent des expériences politiques fort rationnelles, où un monarque héréditaire (ou un grand ministre agissant en son nom) luttait contre les féodalités nobiliaires, judiciaires et cléricales, en s’appuyant sur la fraction la plus dynamique du peuple aux plans économique et intellectuel, dans le but de moderniser l’État et d’en accroître la puissance et le prestige, voire l’étendue.

L’expression « despote éclairé » n’est pas « une création d’un historien allemand du XIXe siècle », comme l’a écrit un docte universitaire : sa sottise fut immédiatement reprise par ses confrères historiens. En réalité, on la trouve, dès 1758, sous la plume de l’ami de Diderot, Melchior von Grimm, dans sa Correspondance littéraire. On peut en faire remonter la préhistoire au cardinal de Richelieu, même si les historiens, recopiant les Mémoires de Frédéric II, en bornent l’ancienneté au règne personnel de Louis XIV, aidé de grands ministres (Colbert, Louvois et Vauban sont les plus connus) et de quelques littérateurs (‘’Molière’’, Boileau, Racine ou La Fontaine), utiles à la gloire de son règne.

Dans ce système, le monarque (ou son substitut) s’appuie sur des hommes de talent qui ont réussi dans les affaires (manufacturiers, négociants et armateurs, grands administrateurs) ou qui sont des penseurs originaux (les physiocrates français, ou la trinité enluminée : Montesquieu, ‘’Voltaire’’ et Diderot ; ailleurs : les idées de Thomas Hobbes ou les écrits et la personne de Julien Onfroy de La Mettrie). Ces hommes sont moins des conseillers que des incitateurs, remerciés avec plus ou moins de chaleur une fois que le maître a remporté ses premiers succès, dont il ne veut partager la gloire avec personne.

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Affirmer que le despote éclairé s’appuie sur la bourgeoisie pour contrer la noblesse et le haut-clergé, c’est faire preuve d’une grande simplicité et d’un défaut de documentation : tous les monarques médiévaux ont utilisé ce moyen pour asseoir leur pouvoir personnel et s’opposer aux grands prédateurs féodaux.

Certains appuis des monarques « éclairés » proviennent de milieu pauvre, de la caste nobiliaire ou du vivier clérical. Denis Diderot est issu du monde de l’artisanat peu aisé, ce qui ne l’empêche pas de conseiller Catherine II ; l’abbé Ferdinando Galiani et de nombreux aristocrates jouent un rôle de premier plan en Suède, en Autriche-Hongrie et surtout en Prusse et en Russie.

Seuls les corps constitués (assemblées du clergé, cour des pairs et parlements) sont repoussés par les monarques réformateurs qui veulent substituer au système des castes privilégiées le service de l’État, comme cela existe, depuis le XVe siècle, à Florence. Une bureaucratie zélée remplace les hiérarques traditionnels, avantageusement et à meilleur coût. Partout, le mot d’ordre est de laïciser, de moderniser, d’améliorer dans toutes les activités : de l’agriculture au commerce et aux manufactures, aussi bien qu’en matière de justice, d’enseignement, d’hygiène publique et d’art militaire ou de navigation. On casse les féodalités et l’on accroît les rentrées fiscales. Quand c’est possible, on étend le territoire.

Le despotisme éclairé, c’est le culte de l’État, fort, centralisé, uniformisé, ce qui fâche les membres des minorités ethniques qui veulent à toute force « cultiver leur différence », et de l’État moderne appliquant les innovations techniques et ne repoussant pas les idées originales, ce qui irrite les réactionnaires.

Le budget est maintenu en équilibre et la balance commerciale idéalement excédentaire, du moins en période de paix : c’est un héritage de Colbert. C’est ce qu’Antonio de Oliveira Salazar, à mi-chemin du populisme et du despotisme éclairé au XXe siècle, appelait « une politique nationale de vérité » : on règle ses dépenses sur ses recettes et l’on gère l’État comme le bon père de famille le fait (en principe) de son ménage.

Le menu peuple est protégé des fantaisies des nobles et du clergé ; il devient leur égal face à la Justice. En revanche, il doit travailler, obéir aux lois et fournir toujours plus de soldats et de marins, sans grogner et, si possible, avec enthousiasme. La promotion sociale des sujets de haute valeur est assurée : ce type de gouvernement modère les conséquences de la stratification en castes (liées à la naissance) et en classes (liées au niveau de fortune). De ce fait, il instaure un certain degré de méritocratie, du moins pour ceux qui se plient en tous points au monarque, qui, pour se vouloir éclairé par les lumières de la raison, n’en reste pas moins un despote ombrageux.

À la suite de Frédéric II, on a voulu définir ce régime par une phrase lapidaire autant que cynique : « Tout pour le peuple. Rien par le peuple » . En réalité, la formulation exacte serait : « Tout pour l’État », le monarque en étant le premier serviteur. Hegel l’a fort bien compris et en a formulé la théorie, vers 1820. Dans le despotisme éclairé, le souverain veut améliorer les conditions de vie de la majorité de ses sujets (idéalement, celle de tous), mais il ne demande nullement l’avis du peuple. Tout au plus, les élites sont-elles consultées de loin en loin, lorsque le monarque le décide.

L’armée n’intervient que pour défendre les frontières ou agrandir le territoire national : le despotisme éclairé n’a rien d’une dictature militaire. Même en Prusse, il existe beaucoup plus de fonctionnaires civils que d’officiers.

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Dans tous les cas, le despote éclairé ne sort pas du cadre de l’autocratie, de la monarchie absolue. De ce fait, les réformes sont abolies dès qu’au despote succède un monarque faible ou traditionaliste, trop facilement ému par les jérémiades ou les menaces des grands féodaux et du haut-clergé. Le système ne persiste qu’en Prusse où, un demi-siècle après le Grand Frédéric, Bismarck puis Guillaume II transcendent son œuvre, en y adjoignant une protection sociale, bien avant l’action des réformistes du XXe siècle.

Le despotisme éclairé est le système qui définit le moins mal le régime franquiste en Espagne qui ne fut pas une dictature populiste, ainsi que les expériences de divers Caudillos latino-américains durant le XIXe siècle : Simon Bolivar dans la fugace Grande-Colombie, Gabriel Moreno en Équateur, José Rodriguez de Francia au Paraguay, ou, au Mexique, le moderniste Porfirio Diaz, renversé par le  richissime socialiste, vaniteux et entouré d’affairistes, Francisco Madero, associé puis ennemi de l’Indien raciste et sanguinaire Emiliano Zapata, qui rêvait d’en revenir au mode de vie paléolithique des chasseurs-cueilleurs, ou encore la tentative du dernier Shah d’Iran, Mohamed Reza, de moderniser son État et sa Nation, en dépit d’un fanatisme religieux omniprésent et qui réussit à balayer son régime.

Les dictateurs « fous de dieu », qui furent si nombreux de la Renaissance du Quattrocento (Jérôme Savonarole) et de l’époque moderne (Oliver Cromwell) jusqu’à nos jours (les chefs d’État de l’islam djihadiste), sont généralement opposés aux riches (de nos jours : les grands capitalistes, les maîtres des multinationales) et aux rhéteurs ineptes des parlements, mais ce sont avant tout des théocrates hallucinés, des fanatiques, nullement des populistes, encore moins des individus éclairés par la raison. S’il leur arrive, inconstamment, d’entreprendre des réformes pour améliorer le sort de leur Nation, ce n’est nullement leur but premier : le triomphe de leur conception de la divinité est l’unique préoccupation de ces fous furieux.


Les sanglantes dictatures marxistes furent très exactement calquées sur ce fanatisme d’essence religieuse. L’athéisme ne fait rien à l’affaire : les sanguinaires disciples de Marx et d’Engels, qui avaient tous leur herméneutique très personnelle des textes sacrés de l’utopie communiste, voulaient imposer le bonheur sur Terre aux élus, issus d’un prolétariat de fantaisie. L’absurde berquinade dégénéra en génocides, en dantesques règlements de comptes avec les « ennemis de classes » et les « déviationnistes ». L’Inquisition catholique, même celle du marrane Thomas de Torquemada, ne fut qu’amusette comparée aux ignominies des polices politiques de chaque « paradis des travailleurs ».

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À l’opposé, les « révolutionnaires-conservateurs » européens, au XXe siècle, ne furent que des réactionnaires, issus de milieux fortunés et/ou cultivés, haïssant la plèbe et reprochant au IIIe Reich sa politique de fusion des castes et des classes sociales : Oswald Spengler, Ernst Jünger, Ernst von Salomon, Julius Evola n’en finissent pas d’agonir « l’aspect prolétarien et même vulgaire du national-socialisme ». Ce sont des nostalgiques du despotisme éclairé, mais nullement des héritiers de la centralisation jacobine de 1792-94 : le jacobinisme fut, avant tout, la mise en tutelle de l’Éxécutif par le Législatif.

Le mot d’ordre de ces esthètes a été donné en 1934 par l’un des précieux ridicules de la vie littéraire française, Abel Bonnard : « Une nation peut se sauver sans le secours d’un grand homme, elle ne le peut sans l’existence d’une élite ». C’est une phrase entièrement démentie par l’histoire des civilisations : tout système stable voit fleurir une élite d’administrateurs et de cadres, de scientifiques et de techniciens… quant à savoir si les purs intellectuels sont utiles à la Nation et à l’État, c’est une question qui risque de tourner à l’aporie.

Au XXe siècle, en Ibérie et en Amérique latine, les néo-despotes militaires se sont limités à réprimer l’agit-prop communiste, de façon d’ailleurs bien moins brutale que n’auraient agi les marxistes s’ils étaient parvenus au Pouvoir. L’opinion publique, désinformée par des clowns fort malhonnêtes, en a fait des monstres, alors qu’ils sont parvenus à éviter à leurs peuples la barbarie marxiste.

D’une manière générale, les nombreuses dictatures antimarxistes du XXe siècle, dites contre-révolutionnaires, comme celle des colonels grecs durant les années 1970 ou celle des généraux et amiraux chiliens ayant mis fin au règne chaotique de Salvator Allende, elles n’eurent rien de « populiste », étant l’expression de l’omnipotence du capitalisme cosmopolite, soutenu par la puissance de l’US-Army et de la ribambelle des services secrets des USA.

Le chevalier dans l’imaginaire européen

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Le chevalier dans l’imaginaire européen

par Paul-Georges Sansonnetti

Ex: https://www.theatrum-belli.com


Malgré l’envahissement des sociétés modernes et, en conséquence, de l’existence quotidienne par les sciences et les techniques, le chevalier demeure un personnage exemplaire car nimbé d’un prestige qui joint les contingences de l’humain aux orbes de la métaphysique. Prestige qui, dans toute l’Europe et bien au-delà, devait survivre à la disparition de l’ancien régime royal et féodal ou, selon les nations, à sa transformation en monarchie constitutionnelle. C’est pourquoi, par exemple, la République française a le pouvoir de conférer, entre autres, le titre de « chevalier de la Légion d’Honneur ». De plus, à travers notre « vieux continent », comme disent les natifs d’outre Atlantique (qui, eux aussi, associent médailles et chevalerie), des ordres célèbres issus du Moyen Âge – de la Toison d’Or à la Jarretière en passant par Calatrava – existent toujours. Tout cela semble dire que l’image du chevalier manifeste quelque chose de fondamental et, de la sorte, d’indissociable de l’identité européenne.

Dans l’imagination populaire, où se télescopent reliquats de l’Histoire, séquences de cinéma, séries télé et album de B.D. (pardon, de « romans graphiques », selon la dénomination désormais académique), le chevalier est un personnage possédant un ensemble de qualités qui font de lui un être hors du commun, différencié du troupeau de l’humanité ordinaire. À l’exemple de Bayard, « sans peur et sans reproches », on l’imagine prêt à défendre « la veuve et l’orphelin » ; il est le « chic type » qui, semblablement à Martin de Tours, saint patron de notre nation, se montre immédiatement secourable au malheureux quémandant secours. Jadis, il y a trente ans, tout personnage sympathique et courageux qui, de façon fictionnelle ou tangible captivait le public, participait un peu – sinon beaucoup – de la figure du chevalier. Ainsi, sur le petit écran, Tanguy et Laverdure étaient-ils Les Chevaliers du ciel, tandis que le refrain du générique de Starsky et Hutch qualifiait ces policiers de « chevaliers qui n’ont jamais peur de rien ! ». Certes, la comparaison est outrée mais néanmoins fort significative. De façon émouvante, Georges Rémi, alias Hergé, en rédigeant une lettre à son fils Tintin, écrit que la carrière qui attendait ce dernier devait être journalistique mais qu’en réalité elle fut au service de la chevalerie (1). Et même dans l’univers futur que déploie la plus célèbre saga du Septième Art – Star Wars, rassemblant des fans par millions sur toute la planète – l’harmonie et la pax profunda galactique dépendent de l’ordre de chevalerie Jédi.

« CHEVALIER » RIME AVEC « JUSTICIER »

Nous avons brièvement fait allusion aux qualités du chevalier. Trois d’entre elles émergent et caractérisent le comportement existentiel de ce personnage. En premier le courage, ce « cœur » immortalisant le Rodrigue de Pierre Corneille et qui, dans l’esprit des anciens, impliquait aussi la générosité. Le courage se raréfiant, il ne reste du « cœur » que sa synonymie de générosité ; ce qu’illustre « les restos du cœur » à l’initiative de Coluche. Selon le monde médiéval, celui qui n’est pas avare de son sang est obligatoirement généreux. En second intervient la droiture, qualité exigeant que l’on ne transige pas et que symbolise l’épée du chevalier. Puis s’impose l’humilité, car le chevalier véritable s’interdit tout sentiment d’orgueil, toute hubris aurait dit les Grecs par la voix d’Hésiode. Courage, droiture et humilité, ouvrent une brèche dans la densité de ce que d’aucuns, usant d’un néologisme, nommeront l’ « égoïté », le haïssable « moi-je ». Par ces trois notions, le chevalier prend ses distances d’avec « l’humain trop humain », insatiable accumulateur de médiocrité, dénoncé par Fréderic Nietzsche, le « philosophe au marteau ».

Refuser l’hubris et même la combattre farouchement, tant en soi-même qu’à l’extérieur, dans la société, implique de vivre guidé par la diké, c’est-à-dire la justice, affirme encore Hésiode (2). De fait, le chevalier est, par excellence, l’individu qui s’efforce d’avoir en toute circonstance une attitude juste. Gouvernant spirituellement la chevalerie, saint Michel archange tient, comme Thémis, la balance et l’épée. Parce qu’il préside à la psychostasie du Jugement Dernier, la seule référence à sa personne nécessite de se comporter avec équité. Le chevalier est obligatoirement un justicier.

Nous venons de citer Hésiode à propos de ces antinomiques polarités que constituent l’hubris et la dyké. Il nous faut revenir sur ce que cet auteur en dit afin de découvrir l’un des soubassements possibles de la chevalerie. Hésiode considère en effet que l’hubris est symptomatique d’une humanité éloignée de l’Âge d’Or. Toutes les conséquences négatives de cette démesure de l’« égoïté » allaient se précipiter durant le dernier Âge voué au métal du dieu de la guerre, Arès. C’est la raison pour laquelle Zeus, dont Thémis fut une épouse, donna naissance aux héros « ceux-là mêmes qu’on nomme demi-dieux » (3). Les armes à la main, ils œuvrent pour la dyké, même si certains d’entre eux sombrent parfois dans l’hubris (4). Ancêtre d’Héraclès, le modèle même du héros pourrait se nommer Persée. Il annonce les chevaliers de légende en ce que, vainqueur de deux monstres, on le voit brandir l’épée et monter Pégase, le plus mythique de tous les chevaux (5) puisque les ailes dont il est pourvu font que son galop devient un envol. Blasonnant de la tête de Méduse (6), le bouclier offert par Athéna, Persée se révèle un justicier dès lors qu’il renverse la tyrannie que Polydectès exerçait sur l’île de Sériphos et qu’il chassera Acrisios de la cité d’Argos. Le mythe de Persée est apparu d’une telle importance aux yeux des Grecs que pas moins de cinq constellations, sur les quinze principales constituant l’hémisphère boréal, au-dessus du zodiaque, lui sont consacrées (7). C’est également porté par Pégase que Bellérophon affrontera une horreur — et erreur — génétique, la chimère.

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LE CHEVAL ET L’ÉPÉE

L’équipement du chevalier pourrait se ramener à sa monture et à l’épée (8). Dans l’ancien monde, tout objet, parallèlement à sa destination utilitaire, pouvait revêtir une signification symbolique. Cette omniprésence du symbole contribuait à une mise en mémoire de ce qui s’imposait comme essentiel, fondamental même, pour les individus et la société qu’ils composaient. Un cheval ou une épée relèvent de l’utilitaire : avec un coursier, on augmente les possibilités de couvrir de longues distances et, par une arme, on peut sauvegarder son intégrité corporelle. Mais l’animal et l’objet se chargent également de significations symboliques explicitant ce que Mircea Eliade nommerait un « changement radical de statut ontologique » (9).

Le cheval, « la plus belle conquête de l’homme » selon un dicton bien connu, permet donc d’aller plus vite et plus loin. Ce qui sous-entend que le dressage de l’équidé confère une capacité à outrepasser le conditionnement temporel et spatial. La monture représente le corps d’un individu – sa composante animale (10) – et l’équitation est métaphorique d’une totale maîtrise des instincts inhérents au corps. La maîtrise, voilà le mot clef. Le chevalier idéal se distingue du commun des mortels ou même d’un simple cavalier par la faculté de se dominer, de posséder le commandement absolu sur son corps et sur le psychisme que conditionne la densité physiologique (11). Ajoutons que le déplacement du cheval s’opère selon un triple mode : le pas, le trot et le galop. Le pas s’accorde au rythme de l’homme et, par conséquent, au monde des corps physiques, au domaine matériel qui nous entoure. Le trot représenterait le monde subtil, celui de l’âme ou, si l’on préfère et pour se rapprocher de l’interprétation des anciens, du « Double », le corps de nature subtile, la « physiologie mystique » (12) dirait encore Eliade. Enfin, le galop qui, métaphoriquement, à l’image de Pégase, faisant que le coursier s’envole, correspond à l’illimité des corps glorieux, là où règne la pure lumière divine (13). Ces trois états résument la constitution de l’être et de ce qui, au-delà du perceptible, appartient à l’éternité.

Celui qui possède la maîtrise qu’illustre l’équitation a le droit de porter une arme, en l’occurrence l’épée. Par la brillance de sa lame, l’épée apparaît métaphorique d’un éclairement car l’acier bien fourbi reflète la lumière et se confond avec. Comme le note Gilbert Durand, cette arme — surtout brandie par un chevalier — se mue en un « symbole de rectitude morale » (14). Dans Le Conte du Graal de Chrétien de Troyes, le maître d’armes de Perceval, lors de l’adoubement chevaleresque de son élève, lui dit qu’avec l’épée « il lui confère l’ordre le plus élevé que Dieu ait établi et créé, l’ordre de chevalerie qui n’admet aucune bassesse » (15). Gilbert Durand ajouterait que « La transcendance est toujours armée » (16). D’autant plus que dans le symbolisme chrétien, saint Paul nous le rappelle (17), l’épée c’est le Verbe ; ce que confirme saint Jean l’Évangéliste lors de sa vision d’un être au corps glorieux dont le visage ressemblait « au soleil lorsqu’il luit dans sa force » tandis que « de sa bouche sortait un glaive aigu à double tranchant » (18). Le Verbe, autrement dit la parole, ce qui implique l’écriture et les mots qui naissent des lettres, se change en épée ; comme pour dire que, selon l’ancien monde, le langage à la source d’une civilisation est indissociable de la lumineuse rectitude joignant, par l’ethos qu’elle nécessite, l’humain au divin.

Prenant en quelque sorte le relais des helléniques pourfendeurs de monstres, le Christianisme suscite, sous l’autorité de l’Archange de justice, toute une phalange de saints combattants : Georges, Théodore, Victor, si bien nommé, ou encore Véran. À côté de ces bienheureux en armes, le chevalier idéal, tel que le Moyen Âge l’a imaginé et que le monde moderne en rêve encore, s’oriente spirituellement vers une source de clarté divine. D’autant plus qu’à la même époque, passage du XIIè au XIIIè siècle, surgissent les cathédrales gothiques – vouée à la lumière de par la prépondérance des vitraux — et toute une littérature chevaleresque consacrée à un objet illuminant comme l’astre diurne et synonyme de suprême connaissance : le Graal.

Pour les auteurs de ces récits en vers ou en prose, il ne fait aucun doute que le but et l’idéal de toute chevalerie consiste à rejoindre un calice miraculeux. Mais qu’est-ce que le Graal ? Le symbole d’une transformation radicale de l’être, sa rencontre avec le principe divin qu’il porte en lui. Mon regretté maître en Sorbonne, Jean Marx, disait que la signification du Graal était exposée sur une pièce archéologique d’une extrême importance découverte au Danemark et datée du premier siècle avant notre ère. Il s’agit du célèbre chaudron celtique de Gundestrup (19) dont la signification rituelle ne fait aucun doute puisque huit divinités, occupant sa surface extérieure, le situe symboliquement in medio mundi dès lors qu’elles semblent regarder vers les directions cardinales et intermédiaires de l’espace.

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Une scène décorant l’intérieur révèle ce que sous-entend la chevalerie. Même si l’image qui va retenir notre attention est très antérieure à l’institution chevaleresque, elle traduit très précisément la symbolique du Graal (20). Cette scène est séparée en deux registres par un motif végétal disposé à l’horizontale. Le registre inférieur montre une file de guerriers s’avançant, sous la conduite d’un officier ou, peut-être, d’un officiant, vers un personnage d’une taille formidable qui les empoignent l’un après l’autre pour les tremper, tête la première, dans un récipient disposé devant lui. Pareil personnage n’est autre que le Dagda (littéralement, « dieu bon »), maître de l’éternité, du savoir total et des guerriers (21). Ce récipient, l’un des attributs du dieu, est le chaudron d’abondance (22), de résurrection et d’immortalité. De cette « trempe », les guerriers ressortent, sur le registre supérieur, d’une part, changés en cavaliers et, d’autre part, casqués : ce ne sont plus de simples fantassins, les pieds en contact avec la terre, mais des êtres que la maîtrise d’une monture emporte en sens inverse que leurs compagnons du registre inférieur. Quant au casque les coiffant, sa signification pourrait être la suivante : de par le fait que la tête de chacun de ces guerriers a été plongée dans le chaudron, ils ressortent le mental désormais protégé, armé, « blindé » pourrait-on dire et, de la sorte, définitivement à l’abri de toute faiblesse (23). Ajoutons que les différents motifs ornant les casques (un oiseau, un sanglier, des cornes de cerf et un cimier en crin de cheval) personnalisent chacun des cavaliers, comme le ferait un blason (24). Cette cavalerie issue d’une seconde naissance – spirituelle – annonce la chevalerie du Graal.

On pourrait dire que, par l’ascèse chevaleresque, se produit intérieurement une distanciation d’avec cette « égoïté » déjà mentionnée. Distanciation faisant éclore des états de conscience que l’ancien monde assimilait à un autre corps, de nature non plus physique, bien entendu, mais subtile. Selon les peuples, on l’a nommé eidolon (dans la Grèce antique), delba (chez les Celtes d’Irlande), hamr ou, sous son aspect supérieur, fylgja (chez les Vikings) et Régis Boyer, approfondissant l’étude de ces deux derniers termes, intitule précisément son ouvrage Le Monde du Double (25). La tradition chrétienne ne fera pas exception puisque l’âme sera perçue comme la duplication immatérielle du corps physique ainsi que, par exemple, le montre un chapiteau de la basilique romane de Vézelay représentant la mort d’un avare. Un petit personnage à l’image du mourant sort de sa bouche, illustrant ainsi la formule « rendre l’âme ».

Ce thème du Double est explicite dans la mythologie grecque avec les Dioscures. Castor, le mortel, accède à l’immortalité par son frère Pollux qui, lui, est immortel. Précision importante, ils patronnent les cavaliers et, au ciel étoilé, constituent le signe astrologique des Gémeaux. Le symbolisme qu’exprime cette figure céleste sera repris par le Moyen Âge puisque Castor et Pollux sont sculptés au portail occidental de la cathédrale de Chartres sous l’aspect de deux jeunes gens qui, par un geste rituel (26), sont positionnés de telle façon que chacun apparaît comme le reflet de l’autre dans un miroir. Ils tiennent devant eux un écu. Un unique écu alors qu’ils sont deux ? Ce qui signifie bien qu’il n’y a en réalité qu’un seul personnage. Plus tardif (XIIIè siècle) que cette sculpture mais s’en inspirant peut-être, l’un des sceaux de l’Ordre du Temple montre deux chevaliers tout équipés montés sur un même cheval (27). Remplaçant l’unique écu, la monture laisse supposer qu’il n’y a en réalité qu’un cavalier mais figuré avec son Double – rendu visible – comme à Chartres. Ainsi que le fit remarquer Gilbert Durand après publication de l’un de mes ouvrages (28), cette image de deux combattants sur la même monture rappelle fortement ce que l’on voit sur deux pièces archéologiques datant de la période des invasions germaniques et découvertes en des lieux éloignés l’un de l’autre (29). Elles montrent exactement la même figuration d’un cavalier renversant son adversaire tandis que, derrière lui sur le cheval, un personnage de taille réduite l’aide à tenir fermement sa lance dans le combat. Ce personnage n’est autre que sa fylgja (littéralement, « accompagnatrice »), terme évoqué plus haut et désignant le Double ou corps subtil d’un être (30).

Durant l’expédition des Argonautes, les têtes de Castor et Pollux furent illuminées par le phénomène appelé « feu de Saint Elme ». Ce qui fait immédiatement songer à la descente du feu du Saint Esprit sur tête des Apôtres lors de la Pentecôte, fête célébrée au début ou, approximativement, au milieu de la période astrologique des Gémeaux. Or, c’est précisément ce moment de l’année que choisit l’enchanteur Merlin pour créer la fameuse Table Ronde destinée à rassembler les meilleurs d’entre les chevaliers. Ainsi que nous l’avons dit dans d’autres études, Merlin pourrait être considéré comme bien autre chose qu’un sage doté d’un prodigieux savoir. On l’a considéré comme l’héritier et le continuateur du druidisme. Disons que, comme son nom latinisé (chez Geoffroy de Monmouth) l’indique, il serait le détenteur de ce que l’on nomme, depuis René Guénon, la Tradition primordiale (31) synonyme d’Âge originel ou, pour se référer une fois encore à Hésiode, d’Âge d’Or.

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Ce n’est pas non plus par hasard si Chrétien de Troyes, dans le récit qui inaugure le cycle du Graal, fait arriver son héros, Perceval, dans un énigmatique château — véritable temple de la connaissance suprême — un soir de Pentecôte (32). Là, il assistera au cortège du Graal. Dans diverses études, il nous a été donné de montrer toute l’importance de ce singulier procession où sont portés cinq objets éminemment symboliques. Il ne fait guère de doute que l’auteur de ce récit compose une scène d’une importance extrême permettant d’entrevoir à quelle signification d’ordre initiatique se réfère ce modèle idéal de chevalerie qu’illumine le Graal. Nous en sommes arrivés à la conclusion suivante : par la disposition des cinq personnages qui le constituent, ce cortège stylise la silhouette de quelqu’un se tenant debout et levant ses bras en V, de façon à former un caractère runique, le quinzième de l’écriture germanique de la période des invasions. On pourrait s’étonner du rapprochement que nous établissons entre cette lettre d’un alphabet païen qui avait disparu depuis six siècles au moins et ce conte médiéval tout empreint de religiosité christique. Mais ce serait oublier ce qui a été dit un peu plus haut concernant l’image du combattant chevauchant avec sa fylgja et que l’on retrouve sur le sceau templier. D’autant plus que le caractère runique tracé par le cortège du Graal renvoie à la symbolique des Dioscures version germanique (33), comme le font remarquer d’éminents runologues parmi lesquels Lucien Musset (34) et Wolfgang Krause (35). De plus, Chrétien de Troyes introduit dans ce cortège une composante directement allusive aux Gémeaux. En effet, après le porteur de la lance qui saigne surnaturellement (36), « parurent deux autres jeunes gens tenant des chandeliers d’or pur (…) Ces jeunes gens, qui tenaient les chandeliers, étaient d’une grande beauté » (37). Nous sommes tentés de dire que cette beauté fait songer à Castor et Pollux puisqu’on les représente, nous dit P. Commelin, « sous la figure de robustes adolescents d’une irréprochable beauté » (38).

Si l’on admet que le cortège du Graal stylise à l’extrême la silhouette d’un personnage aux bras levés, le précieux calice occupe la place du cœur. Le Graal étant d’or fin (39), on pourrait dire qu’il évoque l’Âge que blasonne ce même métal. D’une part, le cortège trace la silhouette du Double et, d’autre part, le Graal, en constituant le cœur de cette autre corporéité, annonce la transformation du Double en corps glorieux et, de la sorte, la réintégration de l’Âge d’Or (40).

À travers les images chargées de symboles des récits arthuriens, le but initiatique de la chevalerie consistait à proposer une vision héroïque de l’existence tournée vers l’idée d’une possible restauration des temps primordiaux. Restauration qu’énoncent le Grec Hésiode ou le Romain Virgile (41) et qui, dans l’Apocalypse de Jean, se traduit par l’apparition de la Jérusalem céleste dont le matériaux singulier — cet « or pur, pareil à du pur cristal » (42) – est évocateur de l’Âge originel. Chrétien de Troyes fait allusion au fait que l’Âge comparé au métal solaire reviendra et, ainsi, ensevelira celui voué au Fer ; et ce par l’armure du chevalier destiné à restaurer le royaume du Graal. En effet, Perceval porte un haubert dont les mailles de fer sont recouvertes d’or (43).

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L’image du chevalier idéal se présente donc comme indissociables d’un supposé Âge d’Or. Dans l’imaginaire médiéval, ce thème d’un commencement merveilleux fit se confondre le Jardin d’Éden et des données issues du paganisme telles que l’apollinienne Hyperborée ou les îles du Nord du monde du légendaire irlandais (44). C’est probablement la raison pour laquelle la légende envoie saint Brandan découvrir le Paradis terrestre dans une région septentrionale sinon polaire (45). L’éthique chevaleresque pourrait alors être définie comme la tentative de parvenir à cette rupture de niveau ontologique qu’énonce Éliade et qui, tout en suscitant la mémoire des origines, ferait en sorte de préparer à un retour du fondement originel de toute civilisation. Issu de l’Antiquité et repris par le Moyen Âge cette conception de l’existence et de l’Histoire replace l’identité européenne dans un contexte non point évolutionniste mais conforme à ce que l’on pu nommer, avec René Guénon, la Tradition.

Paul-Georges SANSONETTI

  • Diplômé de l’Ecole du Louvre,
  • Diplômé de l’Ecole Pratique des Hautes Etudes,
  • Doctorat de Lettres de 3eme Cycle

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NOTES :

(1) Lettre reproduite dans l’ouvrage de Numa Sadoul intitulé Tintin et moi, entretiens avec Hergé, Editions Casterman (2000), p. 254.

(2) Cf. Jean-Pierre Vernant, Mythe et pensée chez les Grecs, Editions Maspéro (Paris, 1965), p. 18.

(3) Dans Les Travaux et les Jours, Editions Librairie Générale Française (Paris, 1999), p. 102, vers 157-160.

(4) Ainsi, sous les murs de Troie, pour certains d’entre eux.

(5) Avec Sleipnir (littéralement, « Glissant »), le cheval à huit jambes du dieu scandinave Odinn. Or, Odinn est le maître de la noblesse, classe sociale destinée à incarner la fonction guerrière et, selon les circonstances, à assumer l’autorité spirituelle que confèrent des étapes initiatiques.

(6) On sait que le regard de Méduse, la Gorgone, changeait en pierre les infortunés qui la rencontraient. Persée en la décapitant grâce aux armes divines (le bouclier miroir donné par Athéna et le glaive par Hermès) montre qu’il est capable de neutraliser la pétrification qu’opère cette créature monstrueuse dont, se confondant avec sa chevelure, les nœuds de vipères traduisent un mental horriblement venimeux. Cette neutralisation de ce que l’on nommerait un pouvoir incapacitant donne naissance à Pégase, autrement dit à la jonction entre terre et ciel ou, si l’on préfère, entre les humains (mortels) et les Olympiens (immortels). La sienne (tenant la tête de Méduse), Pégase, Danaé et ses parents, Céphée et Cassiopée.

(8) La lance accompagne souvent l’épée mais sa signification est la même. Dans les deux cas, il s’agit d’une arme droite symbolisant la rectitude.

(9) Dans Le sacré et le Profane, Edition Gallimard (Paris, 1969), p. 156.

(10) Telle est probablement la signification du centaure, créature tantôt négative, l’être prisonnier de ses pulsions animales (on songe à ces centaures ivres qui s’emparent des femmes Lapithes ou encore à Nessus enlevant Déjanire), tantôt exemplaire si les instincts sont totalement maîtrisés (ainsi pour Chiron, initiateur d’Héraclès et d’Achille, devenu le signe astrologique du Sagittaire).

(11) On aura compris que l’équitation est métaphorique du yoga. De plus, la représentation de la Tempérance montre que cette figure féminine tient un mors comme attribut emblématique. Sur ce thème, cf P-G. Sansonetti, Chevalerie du Graal et Lumière de Gloire, Editions Exèdre (Menton, 2004), p. 240 et suivantes.

(12) Dans Le Yoga, immortalité et liberté, Editions Payot (Paris, 1968), p. 239.

(13) Sur un plan iconographique médiéval, ce monde radieux car divin est traduit par l’auréole dorée des saints personnages et par le ciel d’or entourant les figures de la Trinité ou les entités angéliques. Ce même procédé intervient dans les mosaïques byzantines et dans l’art orthodoxes ainsi que dans certaines miniatures persanes ; cf Henri Corbin, Terre céleste et Corps de résurrection, Editions Buchet-Chastel (Paris, 1961), p. 44.

(14) Dans Les Structures Anthropologiques de l’Imaginaire, Editions Bordas (Paris, 1973), p. 189.

(15) Transcription en prose moderne par Jacques Ribard, Editions Honoré Champion (Paris-Genève, 1997), p. 44.

(16) Les Structures Anthropologiques de l’Imaginaire, op. cit., p. 179.

(17) Epître aux Théssaloniciens, 4, 8.

(18) Apocalypse, 1, 16.

(19) Du nom de la localité où il fut mis à jour. Cet objet est conservé au Nationalmuseet de Copenhague mais une réplique existe au Musée des Antiquités Nationales de Saint-Germain-en-Laye (dans la grande salle d’archéologie comparée).

(20) Pour une étude plus détaillée de cette scène, nous ne pouvons que renvoyer à notre ouvrage, déjà mentionné, Chevalerie du Graal et Lumière de Gloire, p. 91 et suivantes.

(21) Cf. Françoise Le Roux et Christian-J. Guyonvarc’h, Les Druides, Editions Ouest France (Rennes, 1986), p. 379.

(22) Equivalent celtique de l’inépuisable corne d’abondance dans la tradition grecque. On notera que le chaudron de Gundestrup contient l’image d’un autre chaudron, divin celui-là.

(23) Ce qui n’est pas sans évoquer l’image de Pallas Athéna, toujours casquée car déesse de l’intelligence armée.

(24) A propos de l’oiseau blasonnant le premier cavalier, on a retrouvé dans un site celtique de Roumanie (à Ciumesti) un casque d’apparat surmonté d’un oiseau métallique aux ailes articulées. Peut-être s’agit-il de la représentation d’un corbeau, animal dédié au dieu Lug. Porté par le second cavalier, le sanglier, très fréquent dans l’art celte, relève d’un symbolisme polaire car associé à la notion de terre originelle et de lumière (l’accentuation des soies dorsale évoque une radiance de la colonne vertébrale) ; sur le sanglier, cf. René Guénon, le chapitre XXIV des Symboles fondamentaux de la Science sacrée, Edition Gallimard (Paris, 1965). Le casque du troisième porte des cornes de cerf, emblème du dieu forestier Cernunnos précisément représenté dans la décoration intérieure (et sans doute aussi extérieure) du chaudron. Enfin, le quatrième cavalier arbore un cimier assez semblable à ceux ombrageant les casques grecs ou italiques. Comme il ne peut s’agir que de crin de cheval, le symbolisme renvoie à ce dernier animal consacré à la déesse cavalière Epona. Il n’est sans doute pas inutile de signaler que le motif végétal isolant l’un de l’autre les deux registres possède trois racines qui jouxtent le chaudron ; on nous précise ainsi que pareille figuration s’identifie avec ce que contient et représente le récipient : la « force vitale » (source d’abondance et de résurrection) souvent figurée par l’Arbre Axe du monde qui, marquant l’invariable milieu de toute chose, joint la terre au ciel. Sans doute s’agit-il d’un tel Arbre qui, ici, est stylisé en une simple ligne végétale ramifiée. Si cet Arbre fait corps avec le chaudron, cela signifie que ceux dont la tête est plongée dedans en ressortiront définitivement porteurs de ce que l’Arbre symbolise. La notion de jonction entre l’humain et le divin est donc indissociable de cette « proto-chevalerie » conçue par la tradition celtique. Dans le récit intitulé La Queste del Saint Graal, il est question de passer de la chevalerie terrestre à la chevalerie « célestielle ».

(25) Editions Berg International (Paris, 1986). Cette silhouette aux bras en V est celle du crucifié. Toutefois, l’iconographie chrétienne présente parfois Jésus non point sur la croix mais sur un une sorte d’Y (comme le montre la mitre de Saint Charles Borromeo, dans le trésor de la cathédrale de Milan) ou carrément sur ce qui ressemble fort à la rune quinzième (ainsi, dans l’église San Andrea à Pistoie, sur la chaire en marbre par Jean de Pise, réalisée en 1301 ; ou encore, dans la cathédrale de Cologne, le Christ dit « de la peste » datant aussi du XIVème siècle). On pourrait également citer, du XIIème siècle et légèrement antérieur à l’œuvre de Chrétien de Troyes, sur le tympan du monastère de Ganagobie, la singularité de l’auréole du Christ : au lieu de comporter une croix, cette auréole est marquée par un tracé évocateur de la rune quinze.

(26) Tous deux portent une main à leur épaule : la senestre à l’épaule droite pour le premier et la dextre à l’épaule gauche pour le second. Ils indiquent ainsi la clavicule — du latin clavicula, « petite clef » – comme pour avertir celui qui les contemple que cette sculpture nécessite des clefs de lecture. Le « meuble » héraldique déployé sur leur écu résume tout un processus alchimique reflétant la transmutation de l’homme mortel en un être immortel. En effet, ce meuble est intitulé « rais d’escarboucle » et, en alchimie, l’escarboucle est synonyme de pierre philosophale, le Grand Œuvre sensé conférer l’immortalité.

(27) 0n a interprété le fait que deux Templiers enfourchent un même cheval comme un symbole de pauvreté de l’Ordre. Cette assertion tient d’autant moins qu’à l’époque où ce sceau était en usage le Temple possédait une fortune considérable.

(28) Graal et Alchimie, Editions Berg International (Paris, 1992).

(29) Il s’agit d’abord d’une bractéate en or trouvée à Pliezhausen, dans le Wurtemberg (Allemagne). Le motif qu’elle porte est reproduit de façon répétitive sur le casque découvert à Sutton Hoo, Suffolk (Angletrre), dans la tombe d’un prince anglo-saxon enterré probablement en 625. Le fait que nous soyons en présence de deux représentations exactement semblables montre toute l’importance de ce motif et tendrait à prouver que les artistes (ou artisans) reproduisaient scrupuleusement certains modèles d’inspiration initiatique.

(30) Le mot fylgja est norrois mais il correspond au gothique fulgja et, dans la terminologie concernant ce qu’il conviendrait de nommer, avec Mircea Eliade, la « physiologie subtile » (Le Yoga, op.cit., p. 81), correspond à l’aspect supérieur du Double. On peut voir au Musée de Berlin une tête d’argile très schématiquement façonnée sur laquelle sont répartis cinq caractères runiques formant approximativement le mot fulgja. Comme on peut le lire sous la reproduction photographique de cet objet dans la Mythologie Générale, Editions Larousse (Paris, 1936), p. 247, « cette statuette représenterait sous un aspect concret, la partie immatérielle d’un être vivant ».

(31) Cf diverses études dans lesquelles nous avons montré que ce nom latinisé, Merlinus, occultait la notion de Tradition primordiale ou, ce qui revient au même, de Pôle ; cf., par exemple, notre article consacré au film de Peter Jackson, Le Seigneur des Anneaux dans le n° 22 de la revue Liber Mirabilis (saison 2001-2002), p. 34.

(32) Entre autres à l’occasion d’un article intitulé Les symboles dans le cortège du Graal, pour la revue Histoire et images médiévales (Février-Mars 2006), p. 39.

(33) Rappelons que Tacite établit un parallèle entre les Dioscures et les Alci que « l’on vénère comme deux frères, comme deux jeunes hommes » ; chapitre XLIII de De Germania, Editions Les Belles Lettres (Paris, 1967), p. 97.

(34) Dans Introduction à la Runologie, Editions Aubier Montaigne (Paris, 1976), p. 137.

(35) Cf son ouvrage Les Runes, Editions du Porte-Glaive (Paris, 1995), p.36.

(36) Il s’agit de la lance du centurion Longin qui perça le flanc du Christ lors de la crucifixion.

(37) Le Conte du Graal, traduit en français moderne par Jacques Ribard, Editions Honoré Champion (Paris, 1997), p. 70.

(38) Mythologie grecque et romaine, Edition Pocket (Paris, 1994), p. 354.

(39) Vers n° 3233 de l’Edition William Roach

(40) N’oublions pas que le symbolisme chrétien avait incorporé la doctrine des quatre Âges symbolisés par des métaux, à la fois par la connaissance du texte d’Hésiode et par le passage du livre de Daniel où, dans le songe de Nabuchodonosor, il est question de la statue dont la tête est d’or, la poitrine d’argent, le ventre et les cuisses d’airain et les mollets de fer.

(41) Dans ses Bucoliques, quatrième églogue, le poète annonce la naissance de l’enfant qui va « bannir le siècle de fer et ramener l’Âge d’Or (…) Cet enfant vivra de la vie des dieux » ; traduction de M. Charpentier de Saint Prest, Editions Garnier frères (Paris). On sait que Chrétien de Troyes avait lu Virgile, comme le montre le vers 9059 où il cite les noms de Lavinie et d’Énée, personnages de l’Énéide.

(42) 21 – 18, Bible du chanoine Crampon.

(43) « Une(s) armes totes dorees. » dit le texte original ? Vers 40

(44) Il est question, dans le Lebor Gabala, de quatre îles au Nord du monde où se trouvait le chaudron de résurrection et siège de l’enseignement druidique ; cf. Françoise Le Roux et Christian-J. Guyonvarc’h, Les Druides, op. cit., p. 305. Cette thématique d’un lieu mystérieux situé « quelque part » dans l’extrême Nord et qui, singulièrement verdoyant (le nom même de Groenland a suscité des interrogations), serait le siège d’une connaissance supra-humaine rejoint l’ultima Thulé des auteurs grecs et latins, de Pythéas et Sénèque à Virgile qui, dans ses Georgiques (1, 30), situe cette contrée « aux extrémités du monde ».

(45) Le Voyage de Saint Brandan par Benedeit, Edition 10/18, bibliothèque médiévale (Paris, 1984).

dimanche, 03 septembre 2017

Studiegenootschap Erkenbrand Conference 2017- Towards a New Golden Age

Studiegenootschap Erkenbrand Conference 2017

Towards a New Golden Age

On 14 October 2017, Studiegenootschap Erkenbrand will host its second annual conference. Speakers will be Jared Taylor, Millennial Woes, Robert Steuckers and Guillaume Durocher.
 
For tickets, visit: www.erkenbrand.nl/tickets

US-Hauptziel ist, ein Bündnis zwischen Russland und Deutschland zu verhindern

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US-Hauptziel ist, ein Bündnis zwischen Russland und Deutschland zu verhindern

Ex: http://www.zeit-fragen.ch

Der Gründer und Vorsitzende des führenden privaten US-amerikanischen Think tanks Stratfor (Abkürzung für Stategic Forecasting Inc.) George Friedman in einem Vortrag vom 4. Februar 2015 für The Chicago Council on Global Affairs über die geopolitischen Hintergründe der gegenwärtigen Ukraine-Krise und globale Situation insgesamt (Ausschnitte):

«Kein Ort kann auf Dauer friedlich bleiben, auch die USA nicht. Ich meine, wir [die USA] werden von Kriegen begleitet beziehungsweise betroffen. Europa wird, wie ich vermute, zwar nicht zu den grossen Kriegen zurückkehren, aber es wird wieder zum menschlichen Normalfall zurückkehren: Es wird seine Kriege haben, seine Friedenszeiten, und es wird seine Leben verlieren. Es wird keine 100 Millionen Tote geben wie im letzten Krieg, aber die Idee von der europäischen Auserwähltheit, wie ich denke, wird dazu beitragen. Es wird Konflikte in Europa geben, es gab schon Konflikte in Jugoslawien und jetzt auch in der Ukraine.


Europas Beziehungen zu den Vereinigten Staaten – wir haben keine Beziehungen mit «Europa». Wir haben Beziehungen mit Rumänien, wir haben Beziehungen mit Frankreich, aber es gibt kein Europa, mit dem die USA Beziehungen haben […].

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Mit dieser Karte (ohne die deutschsprachige Beschriftung auf der rechten Seite) illustrierte George Friedman, was er mit einem «Cordon Sanitaire» meint, der Russland von Deutschland trennen sollte. Solche Pläne, die auf den polnischen Marschall Pilsudski zurückgehen – dieser wollte damit nach dem Ersten Weltkrieg einen antirussischen slawischen Staatenbund schaffen –, lebten nach 1990 wieder auf und nahmen 2016 konkrete Gestalt an, als Polen und Kroatien die Drei-Meere-Inititiative ins Leben riefen. Der zweite Kongress der Initiative fand vom 6.–7. Juli 2017 in Warschau unter Teilnahme von US-Präsident Donald Trump statt.


Das Hauptinteresse der US-Aussenpolitik während des letzten Jahrhunderts, im Ersten und Zweiten Weltkrieg und im Kalten Krieg, waren die Beziehungen zwischen Deutschland und Russland, denn vereint sind sie die einzige Macht, die uns bedrohen kann. Unser Hauptinteresse war, sicherzustellen, dass dieser Fall nicht eintritt.


Wenn Sie ein Ukrainer sind, werden Sie Ausschau danach halten, wer Ihnen als einziger helfen kann – und das sind die Vereinigten Staaten. Letzte Woche oder etwa vor 10 Tagen war der Oberbefehlshaber der amerikanischen Bodentruppen in Europa, General Ben Hodges, zu Besuch in der Ukraine. Er kündigte dort an, dass die US-Militärberater offiziell demnächst kommen sollen. Eigentlich hat er dort die Medaillen an die ukrainischen Kämpfer verteilt, obwohl das militärische US-Protokoll verbietet, dass die Medaillen an Ausländer verliehen werden. Doch er tat das, weil er damit zeigen wollte, dass die ukrainische Armee seine Armee ist. Dann ging er weg. Und die Vereinigten Staaten liefern baltischen Staaten Waffen, Artillerie und andere Militärausrüstung – die baltischen Staaten, Rumänien, Polen und Bulgarien – das ist ein sehr interessanter Punkt. Und gestern haben die Vereinigten Staaten angekündigt, dass sie vorhaben, die Waffen in die Ukraine zu liefern. Das wurde dementiert, aber sie tun das, die Waffen werden geliefert. Und bei allen diesen Handlungen agieren die Vereinigten Staaten ausserhalb der Nato. Denn die Nato-Entscheidungen müssen von allen Nato-Mitgliedern einstimmig getroffen werden.


Der Punkt bei der ganzen Sache ist, dass die USA einen «Cordon Sanitaire», einen Sicherheitsgürtel um Russland herum aufbauen. Und Russland weiss es. Russland glaubt, die USA beabsichtigten, die Russische Föderation zu zerschlagen. Ich denke, wir wollen sie nicht töten, sondern nur etwas verletzen beziehungsweise ihnen Schaden zufügen. Jedenfalls sind wir jetzt zurück beim alten Spiel. Und wenn Sie einen Polen, Ungarn oder Rumänen fragen – sie leben in einer ganz anderen Welt als die Deutschen, und die Deutschen leben in einer ganz anderen Welt als Spanier, also es herrscht Uneinigkeit in Eu­ropa. Aber was die Ukrainer bevorzugen werden, das werde ich Ihnen genau sagen: Sie werden versuchen, das Zischen seitens der USA zu vermeiden.


Die Vereinigten Staaten aus ihrem fundamentalen Interesse kontrollieren alle Ozeane der Welt. Keine andere Macht hat das je getan. Aus diesem Grunde intervenieren wir weltweit bei den Völkern, aber sie können uns nicht angreifen. Das ist eine schöne Sache. Die Aufrechterhaltung der Kontrolle über die Ozeane und im Weltall begründet unsere Macht. Der beste Weg, die feindliche Flotte zu besiegen, ist zu verhindern, dass diese gebaut wird. Der Weg, den die Briten gegangen sind, um sicherzustellen, dass keine europäische Macht die Flotte bauen konnte, ist, dass die Europäer einander bekämpften. Die Politik, die ich empfehlen würde, ist die, die Ronald Reagan angewendet hat, in Iran und im Irak. Er unterstützte beide Kriegsseiten, so dass sie gegeneinander kämpften (Iran-Irak-Krieg 1980–1988) und nicht gegen uns. Er war zynisch, es war nicht moralisch vertretbar, aber es funktionierte. […]


Die Frage, die jetzt für die Russen auf dem Tisch ist, ist, ob man die Ukraine als eine Pufferzone zwischen Russland und dem Westen haben will, die wenigstens neutral bleiben wird, oder ob der Westen so weit in die Ukraine vordringen wird, dass der Westen nur 100 Kilometer von Stalingrad und 500 Kilometer von Moskau entfernt sein wird. Für Russ­land stellt der Status der Ukraine eine existenzielle Frage dar. Und die Russen können bei dieser Frage nicht einfach so weggehen, loslassen. Für die USA gilt, wenn Russland sich weiterhin an die Ukraine hängt, werden wir Russ­land stoppen. Deshalb starten die USA solche Massnahmen, wie sie kürzlich General Hodges, der für Blamagen bekannt ist, angesprochen hat, und zwar über Eingreiftruppen in Rumänien, Bulgarien, Polen und den baltischen Staaten. Damit begründet man das Intermarium («Zwischenmeer-Land»), das Territorium zwischen dem Schwarzen Meer und der Ostsee. Dieses Konzept arbeitete Pilsudski aus, und das ist die von den USA bevorzugte Lösung.


Und die Sache, worauf wir keine Antwort parat haben, ist die Frage, was wird Deutschland in dieser Situation unternehmen. Die reale unbekannte Variable in Europa sind die Deutschen, wenn die USA diesen Sicherheitsgürtel aufbauen, nicht in der Ukraine, sondern zum Westen, und der Einfluss der Russen in der Ukraine wird schwinden – wir wissen nicht, wie die deutsche Haltung ausfallen wird. Deutschland befindet sich in einer sehr eigenartigen Lage. Der ehemalige Bunderkanzler Gerhard Schröder ist im Aufsichtsrat von Gazprom. Die Deutschen haben ein sehr komplexes Verhältnis zu den Russen. Die Deutschen wissen selbst nicht, was sie tun sollen. Sie müssen ihre Waren exportieren, die Russen müssen ihre Waren abnehmen.

Anderseits verlieren sie die Freihandelszone, die sie brauchen, um andere Sachen aufzubauen. Für die Vereinigten Staaten ist es das Hauptziel zu verhindern, dass deutsches Kapital und deutsche Technologien und die russischen Rohstoff-Ressourcen und die russische Arbeitskraft sich zu einer einzigartigen Kombination verbinden – was die USA seit einem Jahrhundert zu verhindern versuchen. Also, wie kann man das erreichen, dass diese deutsch-russische Kombination verhindert wird? Die USA sind bereit, mit ihrer Karte diese Kombination zu schlagen: Das ist die Linie zwischen dem Baltikum und dem Schwarzem Meer.


Für die Russen ist die entscheidende Frage, dass die Ukraine ein neutrales Land wird, kein prowestliches. Weissrussland ist hier eine andere Frage. Nun, wer mir eine Antwort darauf geben kann, was die Deutschen in dieser Situation tun werden, der kann mir auch sagen, wie die nächsten 20 Jahre Geschichte aussehen werden. Aber unglücklicherweise müssen die Deutschen immer wieder Entscheidungen treffen. Und das ist das ewige Problem Deutschlands. Deutschland ist wirtschaftlich enorm mächtig, aber gleichzeitig geopolitisch sehr zerbrechlich, und sie wissen niemals, wie und wo sie ihre Exporte verkaufen können. Seit 1871 – das war immer «die deutsche Frage» und die Frage Europas. Denken Sie über die deutsche Frage nach, welche jetzt wieder mal aufkommt. Das ist die nächste Frage, die wir uns stellen müssen, was wir aber nicht tun, weil wir nicht wissen, was die Deutschen tun werden.»

Abschrift der Untertitel des Videos, veröffentlicht am 17.3.2015;  http://www.youtube.com/watch?v=9fNnZaTyk3M

samedi, 02 septembre 2017

Melanie Halle - AfD-Song

Melanie Halle - AfD-Song (Jennifer Rostock Konter)

 
Unsere Antwort auf Jennifer Rostocks Anti-AfD-Song. Ein besonderer Dank geht an Till (Klavier) für die Melodie und den Text, sowie an Martin für die Inspiration!
 
Ihr mochtet das Video und wollt uns unterstützen?
Wir freuen uns über jede Spende an: Ein Prozent IBAN: DE77 8005 3762 18940580 00 BIC: NOLADE21HAL
Verwendungszweck: AfD-Song
 

vendredi, 01 septembre 2017

Ortega y Gasset et la montée eschatologique de la stupidité

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Ortega y Gasset et la montée eschatologique de la stupidité

par Nicolas Bonnal

Ex: http://www.dedefensa.org

Relire Ortega Y Gasset, pourquoi faire ?

Pour y trouver les éléments expliquant notre présent effondrement moral, intellectuel et psychique, qui ne frappe pas encore tout le monde, comme il ne frappait pas encore tout le monde à l’époque d’Hitler, Staline et Mussolini !

Sous un masque libéral d’emprunt britannique, Ortega a surtout célébré l’homme traditionnel, l’élite traditionnelle, et a il a regretté l’avènement de l’homme-masse, le dernier homme nietzschéen, qui est toujours plus content, toujours plus massifié et toujours plus soumis.

Comme Tocqueville, le très modéré (en apparence) auteur espagnol voit arriver un homme bien nouveau et bien inquiétant :

« Symptôme d'une autre réalité, d'une réalité très grave : l'effroyable homogénéité de situation où le monde occidental tout entier sombre de plus en plus. Depuis que ce livre a paru, et par les effets de la mécanique qui y est décrite, cette identité s'est développée d'une manière angoissante. »

Au fait, laissons de côté la palingénésie sur l’homme de droite ou de gauche à laquelle ce grand penseur est ramené par les ilotes et les aborigènes de la culture. Le mot important ici, comme sous la plume de Bernanos, celui de la France contre les robots, est celui d’imbécile.

« Etre de gauche ou être de droite c'est choisir une des innombrables manières qui s'offrent à l'homme d'être un imbécile; toutes deux, en effet, sont des formes d'hémiplégie morale. »

Ortega Y Gasset reprend la comparaison coutumière avec le vieil et décati empire romain, mais avec quelle subtilité :

« A suivre la route où nous nous sommes engagés, nous aboutirons tout droit, par la diminution progressive de la « variété des situations », au Bas-Empire, qui fut lui aussi une époque de masses et d'effroyable homogénéité.

Déjà sous le règne des Antonins on perçoit clairement un phénomène étrange qui aurait mérité d'être mieux mis en évidence et analysé par les historiens : les hommes sont devenus stupides. »

C’est d’ailleurs vrai, il n’y a plus eu de grand écrivain, de grand poète romain, ni même de grand compositeur, après le début du deuxième siècle. Comme pour nous pour le début du misérable (horreur puis divertissement) vingtième siècle.

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Ortega souligne l’effondrement du langage (Nietzsche le fait bien sûr, quand il parle de David Strauss et de la presse – de la langue pressée –  qui bouffe le verbe allemand)…

« Mais le symptôme et, en même temps le document le plus accablant de cette forme à la fois homogène et stupide - et l'un par l'autre - que prend la vie d'un bout à l'autre de l'Empire se trouve où l'on s'y attendait le moins et où personne, que je sache, n'a encore songé à le chercher : dans le langage. Le premier est l'incroyable simplification de son organisme grammatical comparé à celui du latin classique… »

Après la langue, ce qui nourrit le crétinisme est non pas la politique, mais le politicisme. On écoute le grand homme :

« Le politicisme intégral, l'absorption de tout et de tous par la politique n'est que le phénomène même de la révolte des masses, décrit dans ce livre. La masse en révolte a perdu toute capacité de religion et de connaissance, elle ne peut plus contenir que de la politique - une politique frénétique, délirante, une politique exorbitée puisqu'elle prétend supplanter la connaissance, la religion, la « sagesse », en un mot les seules choses que leur substance rend propres à occuper le centre de l'esprit humain. »

Le politicisme a une fonction anti-spirituelle, comme le sport d’ailleurs qui accompagnait le développement des fascismes :

« La politique vide l'homme de sa solitude et de sa vie intime, voilà pourquoi la prédication du politicisme intégral est une des techniques que l'on emploie pour le socialiser. »

Ortega n’est guère optimiste. Nous sommes condamnés à nous standardiser (de l’étendard de Jeanne d’Arc à la standardisation fordienne, un beau programme de civilisation, pas vrai ?)

« L’homme de vingt ans constatera bientôt que son projet se heurte à celui du voisin, il sentira combien la vie du voisin opprime la sienne. Le découragement le portera à renoncer, avec la facilité d'adaptation propre à son âge, non seulement à tout acte, mais encore à tout désir personnel ; il cherchera la solution contraire, et imaginera alors pour lui-même une vie standard, faite des desiderata  communs à tous; et il comprendra que pour obtenir cette vie, il doit la demander ou l'exiger en collectivité avec les autres. Voilà l'action en masse.

C'est une chose horrible… »

Bien avant la prison planète, le camp de concentration électronique, Ortega Y Gasset note :

« Dans une prison où sont entassés beaucoup plus de prisonniers qu'elle n'en doit contenir, personne ne peut changer de position de sa propre initiative ; le corps des autres s'y oppose. »

Enfin une jolie notation qui fera plaisir aux partisans du général Lee (le refus de l’Etat centralisé totalitaire – dixit Murray Rothbard, philosophe juif libertarien).

« Ces mois derniers, tout en traînant ma solitude par les rues de Paris, je découvrais qu'en vérité je ne connaissais personne dans la grande ville, personne sauf les statues. »

Ortega remet d’ailleurs l’Amérique à sa place :

« Le vieux lieu commun: « l'Amérique est l'avenir », avait obscurci un instant leur perspicacité. J'eus alors le courage de m'inscrire en faux contre cette erreur et j'affirmai que l'Amérique, loin d'être l'avenir, était en réalité un passé lointain, puisqu'elle était une façon de primitivisme… »

Tout cela est dans ses géniales préfaces. Voyons le corpus de cette révolte des masses. Après un éprouvant et larmoyant trimestre de tourisme, il est bon de se replonger dans un Ortega Y Gasset :

« Ce trait, d'une analyse complexe, est bien facile à énoncer. Je le nommerai le phénomène de l'agglomération, du « plein ». Les villes sont pleines de population ; les maisons, de locataires. Les hôtels sont remplis de pensionnaires ; les trains, de voyageurs; les cafés, de consommateurs ; les promenades, de passants. Les salles d'attente des médecins célèbres sont envahies de malades, et les spectacles - à moins qu'ils ne soient trop déconcertants, trop intempestifs - regorgent de spectateurs. Les plages fourmillent de baigneurs. Ce qui, autrefois, n'était jamais un problème, en devient un presque continuel aujourd'hui : trouver de la place.

Restons-en là. »

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Un homme nouveau, un mutant est apparu : l’homme-masse. Ortega :

« … autrefois, aucun de ces établissements et de ces véhicules n'était habituellement plein. Aujourd'hui, ils regorgent de monde, et, au dehors, grossit une foule impatiente d'en profiter à son tour. Bien que ce fait soit logique, naturel, il est hors de doute qu'il ne se produisait pas auparavant, et qu'il se produit aujourd'hui. »

Une observation naturelle. La Guerre et le divertissement de masse made in USA (lisez mon Céline, le chapitre sur Hermann Hesse et son Loup des steppes) ont produit un homme qui aime l’amoncèlement.

« Les individus qui composent ces foules ne sont pourtant pas surgis du néant. Il y a quinze ans, il existait à peu près le même nombre d'êtres qu'aujourd'hui. »

Cette masse est fière d’elle :

« Aujourd'hui, au contraire, les masses croient qu'elles ont le droit d'imposer et de donner force de loi à leurs lieux communs de café et de réunions publiques… »

L’époque aussi craint ; elle se dit moderne et elle enterre tout le reste (d’où la disparition des statues, livres, histoire, peuples, sexes, etc. qui embarrassent notre modernité devenue abusive en ce début de vingt-et-unième siècle) :

« Il est inquiétant qu'une époque se nomme elle-même « moderne », c'est-à-dire dernière, définitive, comme si toutes les autres n'étaient que des passés morts, de modestes préparations, et des aspirations vers elle… »

Je parle tout le temps de présent perpétuel, notion présente chez Hegel, Kojève, Debord. On le rencontre dès le début du dix-neuvième siècle en lisant Balzac, Gogol, Tocqueville, Edgar Poe. Plus génialement, Ortega parle lui d’un présent définitif qui accompagne nos crétins du progrès.

« Sous le masque d'un généreux futurisme, l'amateur de progrès ne se préoccupe pas du futur; convaincu de ce qu'il n'offrira ni surprises, ni secrets, nulle péripétie, aucune innovation essentielle; assuré que le monde ira tout droit, sans dévier ni rétrograder, il détourne son inquiétude du futur et s'installe dans un présent définitif. »

C’est tellement beau qu’on le répète en espagnol, langue aujourd’hui interdite sur le tiers du territoire espagnol :

« Bajo su máscara de generoso futurismo, el progresista no se preocupa del futuro: convencido de que no tiene sorpresas ni secretos, peripecias ni innovaciones esenciales; seguro de que ya el mundo irá en vía recta, sin desvíos ni retrocesos, retrae su inquietud del porvenir y se instala en un definitivo presente.”

Ortega insiste après Bloy ou Flaubert sur l’autosatisfaction de cet homme masse moderne qui exécute partout des jugements sommaires (Guy Debord) :

« L'homme-masse se sent parfait… En revanche, l'homme médiocre de notre temps, ce nouvel Adam, ne doute jamais de sa propre plénitude… Sa confiance en lui-même est paradisiaque.

Le sot ne soupçonne pas sa sottise : il se croit très spirituel. De là cette enviable tranquillité avec laquelle il se complaît et s'épanouit dans sa propre bêtise. »

Il cite une belle phrase d’Anatole France…

« Le méchant se repose quelquefois, le sot jamais. »

Le con, pour reprendre Audiard, qui reprenait saint Thomas (1), ose en effet tout, mais surtout tout le temps.

Notre humaniste remet à leur place fascisme et bolchévisme, mais on n’insistera pas.

« C'est pourquoi bolchevisme et fascisme, les deux essais « nouveaux » de politique que tentent l'Europe et ses voisines, sont deux exemples évidents de régression essentielle. »

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Il observe comme Alexis Carrel ou la Boétie que l’homme est victime du luxe, et qu’il sombre dans l’imbécillité. J’ai étudié cette notion chez Pearson, et bien sûr chez Pétrone et Juvénal.

« Nous aurions tendance à nous imaginer qu'une vie engendrée dans l'abondance excessive serait meilleure, de qualité supérieure, plus « vivante » que celle qui consiste précisément à lutter contre la disette. Mais il n'en n'est pas ainsi. »

Bizarrement, Ortega n’aime ni le sport ni la plage ! La culture et l’amour étaient mal vus dans la société de bronzés qui s’annonçait…

« Par exemple, la tendance à faire des jeux et des sports l'occupation centrale de la vie; le culte du corps – régime hygiénique et souci de la beauté du costume; l'absence de tout romantisme dans les relations avec les femmes; se distraire avec l'intellectuel, mais le - mépriser au fond, et le faire fouetter par les sbires et les laquais; préférer une vie soumise à une autorité absolue plutôt qu'à un régime de libre discussion, etc.). »

Sur le sport et les plages, notre auteur se montre une rare fois optimiste :

« Tout, depuis la manie du sport physique (la manie, non le sport lui-même), jusqu'à la violence en politique, depuis l' « art nouveau » jusqu'aux bains de soleil sur les ridicules plages à la mode. Rien de tout cela n'a vraiment de racines profondes, car tout cela n'est au fond que pure invention, dans le mauvais sens du mot, dans le sens de caprice frivole. »

Le caprice frivole est prêt à en reprendre pour un troisième siècle ! Enfin il donne une bonne définition de l’homme-masse :

« Je m'attarde donc loyalement, mais avec tristesse, à montrer que cet homme pétri de tendances inciviles, que ce barbare frais émoulu est un produit automatique de la civilisation moderne. »

Barbare automatique est une belle expression, un oxymore pour nous qui allons bientôt être remplacés ou dépecés par les robots.

Mais Ortega Y Gasset évoque aussi un effondrement moral, un encanaillement :

« L'avilissement, l'encanaillement n'est pas autre chose que le mode de vie qui reste à l'individu qui s'est refusé à être celui qu'il fallait qu'il fût. Son être authentique n'en meurt pas pour cela. Mais il se convertit en une ombre accusatrice, en un fantôme qui lui rappelle constamment l'infériorité de l'existence qu’il mène, en l'opposant à celle qu'il aurait dû mener. L'avili est un suicidé qui se survit. »

Qui vit trop meurt vivant, dit Chateaubriand. L’occident ne peut pas mourir puisqu’il est déjà zombie.

Nouvelle pique contre les américains :

« Quand la masse agit par elle-même, elle ne le fait que d'une seule manière - elle n'en connaît point d'autre. Elle lynche. Ce n'est pas par un pur hasard que la loi de Lynch est américaine : l'Amérique est en quelque sorte le paradis des masses ».

Mais ne nous acharnons plus sur eux ! Que sommes-nous devenus, Français, Italiens, Allemands, pour jeter la pierre aux pauvres américains ?

Ortega Y Gasset consacre ensuite un beau chapitre à la catastrophe étatique (voyez Nietzsche et son monstre froid, Tocqueville et sa puissance tutélaire) :

« Aujourd'hui, l'Etat est devenu une machine formidable, qui fonctionne prodigieusement, avec une merveilleuse efficacité, par la quantité et la précision de ses moyens. Etablie au milieu de la société, il suffit de toucher un ressort pour que ses énormes leviers agissent et opèrent d'une façon foudroyante sur un tronçon quelconque du corps social.

L'Etat contemporain est le produit le plus visible et le plus notoire de la civilisation. »

L’étatisme suppose la fin de la vie et de sa spontanéité :

« Voilà le plus grand danger qui menace aujourd'hui la civilisation: l'étatisation de la vie, l' « interventionnisme » de l'Etat, l'absorption de toute spontanéité sociale par l'Etat; C'est-à-dire l'annulation de la spontanéité historique qui, en définitive, soutient, nourrit et entraîne les destins humains. »

L’étatisation suppose bureaucratisation et stérilisation, elle est la clé de notre suicide. Nous sommes assassinés par l’Etat (il nous ôtera la peine de vivre, pronostique Tocqueville), par le super-Etat européen, et par l’Etat mondial techno-totalitaire.

« L'Etat pèse avec une suprématie antivitale sur la société. Celle-ci commence- à devenir esclave, à ne plus pouvoir vivre qu'au service de l'Etat. Toute la vie se bureaucratise. Que se produit- il? La bureaucratisation provoque un appauvrissement fatal de la vie dans tous les domaines.

La richesse décroît et les femmes enfantent peu. Alors l'Etat, pour subvenir à ses propres besoins, renforce la bureaucratisation de l'existence humaine. »

La bureaucratisation aboutit à la guerre moderne :

« Cette bureaucratisation à la seconde puissance est la militarisation de la société. »

Je vous laisse relire ce classique qui n’a pas encore révélé tous ses secrets, comme on dit à la télé !

Note

(1) Thomas : Et propter eandem rationem etiam omnes stulti, et deliberatione non utentes, omnia tentant, et sunt bonae spei

Petite bibliographie

Nicolas Bonnal – Céline, la colère et les mots (Avatar) ; Chroniques sur la fin de l’histoire ; le livre noir de la décadence romaine (Amazon.fr)

Chateaubriand – Mémoires d’outre-tombe, la Conclusion

Ortega Y Gasset – la révolte des masses

Alexis de Tocqueville – De la démocratie en Amérique, II

Hermann Hesse – le loup des steppes

Nietzsche – Ainsi parlait Zarathoustra ; considérations inactuelles (David Strauss)

Edgar Poe – Entretiens avec une momie

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Walter Schubart’s Messianic-Promethean Synthesis

Walter Schubart’s Messianic-Promethean Synthesis
Ex: http://www.geopolitica.ru
 
Oswald Spengler, the philosopher-historian who gave the modern West an empirical theory for the traditional outlook of history as organic, on studying civilizations over millennia, warned Western Civilization that it was on its downward cycle of decay and death, and would after a last hurrah on the world stage, sink into cultural and historical oblivion. This final and permanent stagnation, when history would end for Western Civilisation like it had for others, he called fellaheen, after the Arabic word for those who till the soil. While the soil is where the healthy organism germinates at its beginning, it is also where it ends, when Civilization collapses, and returns to its primal origins from whence it does not re-emerge. (Oswald Spengler, The Decline of The West, London: Allen and Unwin, 1972).
 
That Western Civilization has indeed embarked on a prolonged cycle of decay into death can only be rejected by the ignorant such as those who overpopulate academia, who are too befuddled by the West’s technology and ability to impose democracy over the world with a combination of bombs and moral degeneracy, to see what is unfolding before the eyes of anyone who does not live a mentally and/or physically closeted existence.
 
WS-ESO.jpgLike the optimism of the Victorians (or at least the strata that did not live in squalor) during the Industrial Revolution, with their Darwinism, the West is supposedly continuing to march forward in progress as the epitome of human ascent, toward which all that has gone before was merely a prelude. In this scenario, we are about to enter a dispensation that will “end history,” as Professor Francis Fukuyama put it, (F. Fukuyama, “The End of History?,” The National Interest, Summer 1989, http://www.wesjones.com/eoh.htm) having achieved all that there is to achieve with the universal triumph of liberal-democracy. Those such as Fukuyama and Amercian millenialists such as Colonel Ralph Peters, (R. Peters, “Constant Conflict,” Parameters, U. S. Army War College, Summer 1997, http://ssi.armywarcollege.edu/pubs/parameters/Articles/97...) and fellow “neocon” ideologues such as Michael Ledeen (M. Ledeen, “Dishonorable Congressman,” National Review, 10 September 2003, http://www.nationalreview.com/article/207982/dishonorable...) see life eternal, where detached realists see for the Western Civilisation death, and the Western organism as a zombified rotting corpse animated by technology and money, infecting all it touches with a cultural syphilis that those such as Colonel Peters actually applaud as wonderfully “toxic” to whatever remains in the world of traditional cultures. (R. Peters, op. cit.).
 
Even if the USA is, as the centre of contagion, beyond remedy, must Europe exhaust its possibilities and succumb to fellaheen level? Organic relationships can be symbiotic and complementary (Lev Gumilev, Ethnogenesis and the Biosphere,  http://gumilevica.kulichki.net/English/ebe2a.htm) or amalgamate through synthesis. They need not be parasitic, distorting, or retarding in regard to a culture-organism’s life cycle. That is how, if we accept at least broadly the work of Russian ethnologist Lev Gumilev, new ethnoi and super-ethnoi are formed (Ibid.). Like any mixture, it depends on the qualities and circumstances of what is being mixed as to whether the consequences will be invigorating or pathogenic. A blood transfusion of compatible types might save a life, but will sicken or kill if the blood types are incompatible. A virus can create a vaccine, or it can cause sickness and death, depending on the amount and transformation of the virus. 
 
Dr. Walter Schubart, a Baltic-German convert to Orthodoxy, married to a Russian, widely known as an authority on Russia prior to World War II, reaching a similar historical-philosophy to Spengler’s, proposed the synthesis of the “Promethean” (what Spengler called “Faustian”) Westerner and the messianic Russian, each complementing the other. (Schubart was professor of sociology and philosophy at the Latvian State University. Dismissed by the Germans in 1941, he was thought to have died in a Soviet prison camp).
 
Even Spengler, despite his suspicion of Bolshevik Russia as leading a “coloured revolution against the white world,” (Spengler, The Hour of Decision, New York: Alfred A Knopf, 1963) also foresaw other possibilities for Russia, even under Bolshevism, as early as 1922 (Spengler, “The Two Faces of Russia and Germany’s Eastern Problems,” Politische Schriften, Munich, 14 February, 1922). He foresaw that Bolshevism would probably become Russianized, divest itself of Marxist doctrine, and develop into a Slavic authoritarian state, with which Germany could work in alliance against the Western liberal plutocracies. This at least was the policy pursued by Walter Rathenau, German foreign minister, with the Treaty of Rapallo, and a Russo-German alliance was sought by the most conservative of Germany’s military and political elite, regardless of any Marxian façade maintained by Russia. 
 
Of the two types, Promethean and Messianic, Schubart wrote that “Messianic man” “longs to bring the discordant external world to harmony with the image that he carries within him.” “He does not love the world for itself but only so that he can build within it the Kingdom of God”. The world is “raw material for his mission.” “Messianic man” seeks reconciliation; unity. (W. Schubart, Russia and Western Man ([1938] New York: Frederick Ungar, 1950), 72-73). The Kingdom of God must be realised on earth. (Ibid., 74).The Gothic Westerner had a messianic impulse with his Crusades not only to secure the Holy Land from the Moor, but to make Jerusalem the centre of the Kingdom of God. 
 
The contrast now between the West and Russia is that “Promethean” (Faustian) man seeks only to exploit and rule the earth, (Ibid., 80) which Spengler saw as the final epoch of the Late West’s domination by the machine. (Spengler, The Decline…, XIV, “The Form-World of Economic Life (B) The Machine,” Vol. II, 499-507). The Westerner seeks as an end goal “middle class comfort.” The Russian is impelled to sacrifice “in a final dramatic scene.” (Schubart, 80). The Russian is the collective Katehon, holding back the Antichrist. The West has become the Antichrist. The Russian is a martyr. He accepts his fate Christ-like. Rather than submit to Napoleon, the Russians set their Holy City, Moscow, ablaze. The sight forever affected Napoleon. (Ibid., 83-84).
 
The Russian mission is to liberate the world from the contagion of the Late West, or to liberate Europe from its own terminal Western hubris; to “redeem” the West or to “replace it.” (Ibid., 191). This sense of mission has long been conscious among Russian thinkers and holy men. In 1852, seventy years before Spengler, Ivan Kireyevsky, the Slavophil philosopher, wrote of the decline of the West: “The spiritual development of Europe has already passed in zenith. In atheism and materialism it exhausted the only powers at its disposal – those of abstract rationalism – and now it is approaching bankruptcy.” (Quoted by Schubart, ibid.).
 

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Schubart cited ethnologist and philosopher-historian Nikolay Danilevski’s Russia and Europe (1871) as anticipating Spengler on organic culture cycles, in which the replacement of the West by Russia as the next world-civilisation was part of the ongoing cyclic historical process. (Ibid., 192). Danilevski had also critiqued the Westernisation of Russia by Peter as ill-fated. Foreshadowing Spengler, Danilevski’s culture epochs are those of youth, adulthood, and old age. He saw the Slavic as being in the youth phase, and that with its capital in Constantinople, the Slavic would be considered by a decaying world as its redeemer. 
 
With the revival of “Eurasianism,” and Dr. Alexander Dugin’s blueprint for a multipolar world against Amercian globalization, achieving influence among the highest echelons of Russian politics and scholarship, the vision of Danilevski and the 19th century Slavophils, and Spengler’s prescience on a post-Western Russian world-civilisation are being actualized. Konstantin N. Leontiev at about the time of Danilevski advanced the idea of “the law of cyclicity of historical development.” Lev Gumilev’s cyclic-ethnology has a great deal of influence in present-day Russia. (Mark Bassin, The Gumilev Mystique, Cornell University Press, 2016). Russia has therefore had a long tradition of scholarship on culture-morphology. 
 
Schubart believed there was after the crisis of World War I a revival of religion in the West. Spengler also stated that during the epochal crisis of a Late civilisation there is a “second religiousness” (Spengler, The Decline…, Vol. II, 455). Materialism, secularism, rationalism and scientism, do not satisfy an innate religious yearning, and themselves must assume religious forms. Note how zealous atheists and Darwinists are in defending their faith. Now there are a proliferation of cults and religions throughout the West, symptomatic of existential crisis, of a yearning for a return to the nexus with the divine that is lost in the “Winter” epoch. If the spiritual chaos that marks a culture in decay takes form as a “second religiousness” in the Spenglerian sense, then perhaps Schubart’s aborted hope of a re-spiritualised West as the prelude to a Russian symbiosis will eventuate. At the time Schubart saw Western man “approaching closer to the spirit” of Russia. “While the night of decline is descending upon Western culture, which is destined to perish, the dawn of the Millennium is coloring the distant horizon…” (Schubart, 284). “The approaching collapse of Western culture is unavoidable, and we may even ask ourselves whether it would be desirable to avoid it.” (Ibid., 293). 
 
Neither Spengler nor Schubart believed it organically possible to return the West to a “Spring” epoch, any more than it is possible for a geriatric to return to youth, despite whatever cosmetic and medicinal efforts are made.
 
What Schubart did hope for was a chastising of the Late West’s hubris, which we see in our collapsing societies, and existential angst, that would lead to the liberation of religious feeling without which “no new creation can become possible.” (Ibid., 293). In this “apocalyptic age” Schubart saw the promise of “new life,” while in Russia a new type emerges that is transforming what is of value in Western culture, without being retarded or distorted by it, despite the conscious efforts of inner and outer enemies. “This new type, while truly Russian, is yet heir to the eternal values of the West.” (Ibid., 295). “For although the Russian of today is not yet the Man of the Millennium, yet it is he – and only he – who will succeed in evolving him; the Russian will purify himself until he has attained the height of development necessary to produce him.” (Ibid., 295).
 
Schubart wrote that “The spiritual Russian needs practical qualities; the practical European is in need of a new humanity.” Schubart called it a “synthesis.” (Ibid., 297). The remaining option is for the Late West to continue as an animated zombie at the call of the USA, as a carrier of culture-pathogens. 
 
“A new Apocalypse is approaching with a Last Judgement – and a Resurrection! Promethean man already bears upon his brow the sign of Death. Now let the Man of the Millennium be born!” (Ibid., 300).
 

jeudi, 31 août 2017

Eric Voegelin: A Philosopher of Crisis

Many people, I suspect, find themselves in this position. They have heard that Eric Voegelin is a great philosopher of history, much esteemed by such eminent conservatives as Willmoore Kendall, Russell Kirk, and Mel Bradford, and that he and Leo Strauss rank as the most influential political theorists of the contemporary American Right.1 They eagerly obtain a copy of Voegelin’s most comprehensive work, Order and History. They are intrigued by the book’s opening: “The order of history emerges from the history of order”; but after reading a few pages, they turn away in bafflement. Though he can on occasion write with great beauty, Voegelin’s style is often dense and his train of thought difficult to follow. Even the great economist Murray Rothbard once told me that he found Voegelin’s “leap in being” unfathomable.

Reading Voegelin is well worth the effort his demanding books require, and Jeffrey C. Herndon’s insightful new book Eric Voegelin and the Problem of Christian Order offers a useful guide to an important part of Voegelin’s work.2 Before turning to it, however, it will be helpful to look at the historical situation that formed Voegelin’s thought. Mark Lilla here grasps the essential point. In an excellent survey article on Voegelin, Lilla remarks: “In the twentieth century, European history writing became a kind of Trümmerliteratur, a look back at the civilization that collapsed in 1933 . . . or 1917, or 1789, or further back still. . . . Edmund Husserl spoke for many German thinkers when he declared, in a famous lecture just before the Second World War, that ‘the “crisis of European existence” . . . becomes understandable and transparent against the background of the teleology of European history that can be discovered philosophically.’”3

How did the Nazis, a gang of brutal thugs, succeed in gaining power in Germany? Once Hitler attained power, why did the Western powers fail to stop him before his bid for European mastery? To Voegelin, as the quotation from Lilla suggests, these questions were of prime importance. Only a spiritual collapse could explain the failure to resist such an obvious menace.

But we must here avoid a misleading impression. Voegelin was by no means a head-in-the clouds philosopher who was never willing to descend from the empyrean to analyze mundane events. Quite the contrary; he often had penetrating and unusual insights on political affairs. He once told me he thought that Britain, blinded by ideology, had wrongly insisted on sanctions against Italy after its invasion of Ethiopia, thus driving Mussolini into alliance with Hitler. He also contended that Christian Science had exercised a deleterious pacifist influence on such British appeasers as Lord Lothian and recommended that I read Christopher Sykes’s biography Nancy: Lady Astor for background on the issue. (Although I’m fairly familiar with the literature on World War II origins, I’ve never seen anyone else make this point.)

His insights were by no means confined to the 1930s. He sharply rejected the influential book by Fritz Fischer, Griff nach der Weltmacht (1961), which placed near-exclusive blame on Germany for the First World War. (He thought that the only decent German prose in the book was in some of the letters of Kaiser Wilhelm that it included.) He said that the diplomatic crisis after the Austrian ultimatum to Serbia should have been settled though a conference of the Great Powers. The smaller nations such as Serbia should have been told, “taisez-vous!”

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To cope with political upheaval, Voegelin believed that severe measures were required. He points out in The New Science of Politics, his most popular book, and elsewhere that if one adds the votes for the Nazis and the Communists in the last years of the Weimar Republic, one obtains a large majority of the population in favor of revolutionary overthrow of the existing order. In this circumstance, the ruling authorities would have been justified in suspending ordinary democratic rule. Voegelin supported for this reason the clerical regime of Engelbert Dollfuss, which was willing to act forcibly to counter revolutionary violence; and in his The Authoritarian State, buttressed with learned citations from Ernest Renan and the French jurist Maurice Hauriou, he offers a detailed defense of emergency authoritarian rule.4 

This might stave off immediate disaster, but as I suggested earlier, a deeper problem—spiritual crisis—finally had to be confronted. Voegelin believed that order in society is much more than a political problem in the conventional sense. Besides the everyday world, there is a transcendent realm: human beings exist in tension between it and the world we grasp through the senses. Voegelin calls this tension the In-Between or, using a term of Plato’s, the Metaxy. The transcendent cannot be described in language that is literally true: myth and symbol are our only recourse. As he puts the point in his philosophically deepest book, The Ecumenic Age, Plato “is aware of the limits set to the philosopher’s exploration of reality by the divine mystery. . . . Since the philosopher cannot transcend these limits but has to move in the In-Between, the Metaxy, . . . the meaning of his work depends on an ambiance of insight concerning the divine presence and operation in the cosmos that only the myth can provide.”5

But what has all this to do with politics? Voegelin thought that the rulers of a society must mirror their society’s conception of cosmic order in the way they organize the government. In doing so, it is vital that the governing authorities preserve the tension between the human and divine realms.

If this requirement is flouted, disaster threatens. If, e.g., a society thinks that God’s kingdom on earth can be established, its futile attempt to overcome the tension in which human beings exist will result in tyranny or chaos. Voegelin thought that this “derailment of being” paralleled the ideas of the Gnostics, a movement that flourished in the first few centuries of the Christian era. As the name suggests, the Gnostics believed in salvation through the possession of esoteric knowledge. In like fashion, Voegelin argues, Comte’s positivism, Marxism, and Nazism contend that human nature can be completely remade under the guidance of a revolutionary elite. In seeking to bring an end to the tension between human beings and the divine, these movements “immanentize the eschaton,” as Voegelin famously put it in The New Science of Politics.6 That is to say, these movements treat the symbol of the end of history as if it were a project that can be achieved in ordinary time.

Voegelin’s analysis of totalitarianism differs on a crucial point from the view of Hannah Arendt in her famous The Origins of Totalitarianism. Voegelin and Arendt knew each other, and he clarified the difference between them in a notable review of her book, to which she responded. He thought that she correctly saw that totalitarian movements aimed to change human nature. “This is, indeed, the essence of totalitarianism as an immanentist creed movement.” But “I [Voegelin] could hardly believe my eyes” that Arendt did not rule out such a change as impossible. For Voegelin, the structure of being is unchangeable: precisely because of this, attempts to alter it lead to disaster.7

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Voegelin’s view that society represents cosmic order may strike those new to it as hard to grasp. Here Herndon’s book offers considerable help. Before Voegelin wrote Order and History he planned a massive History of Political Ideas. This he abandoned as unsatisfactory, but Herndon thinks that, to a large extent, it reflects Voegelin’s mature views. The History has the advantage of presenting certain aspects of Voegelin’s thought in more detail than is available elsewhere. Herndon gives us a detailed account of one part of this massive treatise; he covers the period from the rise of Christianity to the Reformation.8 Someone new to Voegelin who reads Herndon’s book will get a good grasp of the basics of Voegelin’s thought.

Herndon brings out that for Voegelin, Saint Paul devised a series of “compromises” that enabled the Christian community to survive and grow in the world. These compromises preserved the necessary tension between the divine and human: in doing so they enabled the members of the community to achieve concord (homonoia). Herndon remarks, “Christian homonoia as understood by Saint Paul was no mean achievement in history.”9 Herndon ably expounds the extensions and alterations of the Pauline compromises in the Middle Ages, culminating in the thought of Thomas Aquinas.10(Herndon might have mentioned the great influence on Voegelin’s account of the Holy Roman Empire of Alois Dempf’s Sacrum Imperium.) The Reformation overthrew the delicate balance between the divine and the human described at its best in Aquinas’s thought, though never fully achieved in practice; and Voegelin is scathing in his account of Luther and Calvin as political thinkers. Luther divorced the political world from the sacred; worse yet, Calvin attempted to construct an immanent universal Christianity. Herndon comments, “If Voegelin’s treatment of Luther was harsh, his examination of Calvin borders on the scandalous.”

What are we to make of all this? I find Voegelin’s thought impressive and his erudition staggering; but it seems to me that he fails to address a fundamental issue. Why should we accept what he says about the nature of being? Voegelin often does not give arguments for his views; indeed, in these matters, he distrusts the use of propositions altogether. For him, the mystical insights of certain great thinkers, Plato foremost among them, are primary, and Voegelin devotes most of his philosophical attention to an exposition of the myths and symbols of these thinkers. He was certainly capable of argument: to see this one has only to examine in The Authoritarian State the nimble dialectics he uses to analyze the new constitution proposed for the Dollfuss regime. But he thought that its place in philosophy was distinctly minor. I well remember one conversation in which he several times corrected me for referring to a philosopher’s “position,” a word he deemed unacceptably ideological.11

Voegelin also is open to challenge about the way he thinks society represents the cosmic order. Why must it be the ruling authorities who establish the order of society? In the classical liberal view, such matters belong entirely to civil society. Why should the police and defense departments decide how human society represents God? To ask this question is not at all to challenge Voegelin’s assumption that society mirrors cosmic order.12

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Although Voegelin had been a member of the private seminar of the great Austrian economist Ludwig von Mises and had a good understanding of free-market economics, he dismissed what he considered extreme or dogmatic classical liberalism. He treated John Locke with scorn, hardly viewing him as a major thinker at all. The great classical liberal Charles Comte was for him someone who wished to overthrow the order of being. For Voegelin a strong state is essential.

I disagree with Voegelin here, for reasons set out elsewhere. But accept or reject the fundamental tenets of Voegelin’s thought, no one who studies him can fail to benefit from his insights and synoptic vision.13

Notes

  1. Voegelin and Strauss corresponded intermittently over many years, and their letters have been published: Faith and Political Philosophy (Columbia, MO: University of Missouri Press, 2004). On one occasion, Strauss asked Voegelin what he thought of Karl Popper. Voegelin responded that Popper had deliberately twisted the meaning of Bergson’s phrase “open society” in his The Open Society and Its Enemies. Bergson meant societies open to the transcendent, as Popper decidedly did not. Strauss wrote back that Voegelin’s letter had been very useful to him in his efforts to block Popper from teaching at the University of Chicago. Voegelin once told me that he thought a major weakness of Strauss’s thought was that he never attempted an interpretation of Christianity.
  2. The book is based on the author’s doctoral dissertation at LSU. It is on the whole well written, though I regret to report that the author is guilty more than once of the solecism “mitigate against.”
  3. Mark Lilla, “Mr. Casaubon in America”, New York Review of Books, June 28, 2007, 29. Voegelin esteemed Husserl highly, and he wrote illuminatingly about him in his correspondence with Alfred Schutz. He thought, though, that Husserl at times succumbed to a positivist view of history.
  4. This book led to the unfair claim by Aurel Kolnai, in The War Against the West (1938), that Voegelin sympathized with fascism.
  5. The Irish philosopher William Desmond also uses the concept of the Metaxy. See, e.g., his Being and the Between(Albany, NY: State University of New York Press, 1995).
  6. Arthur Versluis in The New Inquisitions (Oxford: Oxford University Press, 2006) assails Voegelin for his view of the Gnostics. He contends that totalitarian movements endeavor to impose a fixed system of beliefs. The Gnostics, by contrast, were a spiritual movement without rigid dogmas. Versluis’s critique fails to confront what for Voegelin is the key point, the direct possession of saving knowledge by an elite. In his later works, though, Voegelin thought that he had overemphasized the role of the Gnostics. Other movements were involved in the derailment of being as well. Cyril O’Regan, Gnostic Return in Modernity (Albany, NY: State University of New York Press, 2001) is an outstanding analysis of Gnosticism, with some attention to Voegelin.
  7. Voegelin analyzed Nazism as a deformation of being in his early The Political Religions and in his lectures Hitler and the Germans. In the former work, he notes the importance of the symbol of light in Nazi propaganda: images and descriptions of “shining” abound.
  8. Voegelin never published the History, but it is now available in his Collected Works in eight volumes.
  9. On his visit to the United States in the 1920s, Voegelin attended the lectures of the sociologist Franklin Giddings at Columbia University. Giddings’s “consciousness of kind” influenced Voegelin’s later discussions of homonoia.
  10. Herndon does not mention that after his treatment of Aquinas in the History, Voegelin sometimes suggested that Aquinas held overly rigid notions of being and natural law. He in part anticipated the controversial work of Jean-Luc Marion, God Without Being.
  11. Frederick Wilhelmsen, among others, has criticized Voegelin for his departures from Christian orthodoxy. Whether Voegelin was a Christian obviously depends on how one characterizes Christianity. Herndon gives a good account of the controversy. Incidentally, when he was Archbishop of Munich, Cardinal Ratzinger (now Pope Benedict XVI) sent Voegelin a letter in 1981 saying that his thinking had “fascinated and enriched” him.
  12. I owe this insight to my late friend Robert Nozick, who immediately raised the problem after he asked me to give him a brief account of Voegelin’s thought.
  13. For my criticisms of Voegelin on classical liberalism see my “The Fallacies of Voegelinian Liberalism,” Mises Review, Fall 2000. My tone in that essay is much too harsh.

First published: February. This article is reprinted with the author’s permission.

TAFTA/TTIP - Histoire de l'impérialisme économique américain

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TAFTA/TTIP (1ère Partie) - Histoire de l'impérialisme économique américain

mercredi, 30 août 2017

Violent “Color Revolution” in America?

 

 

 

 

The objective of these staged protest movements against Trump is not to support democracy. Quite the opposite. It is to ensure complete control over the US State apparatus by a competing faction of the corporate establishment. Where is the civil rights movement? Where is the US antiwar movement?  Rarely are these engineered protests against US led wars. 

A grassroots and united movement against the Trump presidency and the Neocons, against war and social injustice is what has to be achieved. But this will not occur when several of the organizations which are leading the protest against Trump are supported and funded by Wall Street. 

Michel Chossudovsky, Global Research 2017

***

A race war and a civil war are being incited by the US political establishment and Deep State opponents of Donald Trump, in order to foment violence towards Trump’s removal from the White House. The events in Charlottesville,  together with “Russia-Gate” are being used as a “defining moment of crisis” and a pretext to justify Trump’s overthrow.

Turning American streets into war zones

America has never faced chaos of this nature in modern times: manufactured domestic political terrorism disguised as civil unrest, masking a coup. The stated goal of the agitators is “mass insurrection”and “all forms of violence” to make the country “ungovernable”

Just as the global “war on terrorism” is a criminality and treason disguised as “freedom fighting” and “the defense of liberty”, this war against Trump, labelled as the “new Hitler”, is part of an unfolding domestic terror operation, which ironically utilizes the propaganda techniques of Hitler and the Third Reich (Goebbels), not to mention the anarchist playbook of Saul Alinsky (and, by extension, Hillary Clinton and Barack Obama, both of whom are Alinsky disciples). (See  also Ben Carson quoted in the Washington Post,  “Hillary Clinton, Saul Alinsky and Lucifer, explained”, July 20, 2015)

From the violence and propaganda brainwashing to the manipulation and destruction of culture and history (statues and monuments, etc.). what is unfolding is a repeat of familiar institutional terror.

Goals are achieved through the weaponization and mobilization of indoctrinated and deceived masses as well as grassroots activists, coupled with mind-controlled authoritarian thugs.

The larger “resistance” features a toxic combination of professional paid anarchists, brainwashed “social justice warriors”, and deluded protestors who are misinformed and invariably ignorant as to who is supporting and funding the “protest movements”. There is no rational conversation to be had, no reasoning, in such an atmosphere of ginned-up hysteria.

This large-scale extortion aims to devastate the United States from within, forcing Trump out of office. An already deeply divided and confused nation with an already shredded social fabric will be torn apart.

The mainstream corporate media, the engineers of delusion and mob-manipulating propaganda, is ginning it up, creating mass hysteria and mental affliction.

What is taking place is not simple protests from supporters of a losing political faction, but a domestic terrorism operation planned and executed by the establishment majority—supported by neoliberals as well as neoconservative Republicans—in defense of their system against perceived existential threat from anti-establishment movements. Mob violence has always been a weapon of the oligarchy. It was inaccurate and tactically stupid for Trump to call this insurrection “Alt-Left”. It is in fact a mainstream establishment operation, which uses “left”, “progressive” and antifa symbols to pursue its political objectives.

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The ultimate objective is to create social divisions which prevent the development of a real and independent mass protest movement against the seats of corporate power.

This “chaos agenda”is a “color revolution”. The elites and Deep State figures behind today’s American anarchy are the same ones that funded and orchestrated “color revolutions” around the world, the toppling of Ukraine and the installation of the Ukrainian neo-Nazi Svoboda regime, unrest in Turkey, the destabilization of Syria, the European refugee crisis, and the Arab Spring. What worked overseas is now being applied within US borders.

The Purple Revolution began the night Trump won the presidential election that foiled the installation of Hillary Clinton. This warfare has escalated and intensified in the months ever since, culminating with Charlottesville.

The increasingly failing Trump/Russian hack narrative is being replaced by a variation on an old theme: Nazis. “Trump is a Nazi”. Nazis must die.

Trump’s repeated denials and long history of standing against Nazis, the KKK and white supremacists, and having nothing to do with them, are to no avail.

Antifa

The mainstream media predictably fails to report the fact that Antifa anarchist groups are responsible for the majority of the continuing political violence, including Charlottesville, Boston, and the Battle of Berkeley, enabled by police stand-downs and incompetence. Local police forces, university police, and local mainstream media in heavily liberal cities (such as Berkeley) openly back the Democratic Party’s anti-Trump agenda and act in support of the anarchists.

Masked, armed authoritarian anarchists, provocateurs and terrorists are referred to blandly in mainstream media accounts as “counter-protestors”,when in fact they are the instigators and shock troops of the larger national coup, and vastly outnumber Trump supporters (not all of whom are “right-wing). These violent groups, operating under the banners of “peace and justice” in fact embody the opposite.

Antifa: a violent movement rises

Antifa: seeking peace through violence (CNN)

These supposedly leaderless domestic front groups, including Antifa, Black BlocBlack Lives MatterOccupyDisrupt J20By Any Means Necessary (BAMN) and others can all be traced to the Democracy Alliance, elite “civil society” foundations, establishment politicians, Democrats and Republicans, and assets of the Deep State. The connections between the Washington establishment and the myriad anarchist groups are well known. Moreover,  these domestic front organizations –many of which include within their ranks grassroots progressive activists– are invariably funded (directly or indirectly) by corporate establishment foundations.

These various groups whose instigators mobilize “a progressive grassroots” have been combined and mobilized into one coordinated anti-Trump agitation apparatus. Like the terrorist networks that they are, they function like any other CIA covert operation, each cell inculcated from the others, with plausible denial in place for the organizers and leadership.

The Justice Department has done virtually nothing about these groups, while CIA-connected media such as CNN devote puff pieces to puff pieces in support of Antifa’s “peace through violence” agenda, and then scrubbing the (accurate) title post-facto for more favorable publicity.

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Charlottesville

Charlottesville was not a spontaneous eruption of violence but the new stage of civil war.

The Charlottesville Clash: Protest and Counter-Protest, Politicized Media Propaganda

The white nationalist events were long planned. The removal of Confederate statues led to the incitement. While this was the largest gathering of various white nationalist groups in recent history, these relatively small, fringe, politically insignificant groups are routinely monitored and/or infiltrated by the FBI. The idea that US domestic intelligence and law enforcement, and Virginia and Charlottesville authorities were not fully aware of, and ready for, any possibility of violence is preposterous. Permits were granted.

There is compelling evidence that the police stood down. (Also see here) The venue was turned into trap, a kill zone, with alt-right nationalist participants crammed inside barricades, surrounded at chokepoints by Antifa.

It is no coincidence that Charlottesville was set up in virtually the same fashion as the spring 2017 Battle of Berkeley, where outnumbered Trump supporters gathering for an event were also trapped behind barricades and surrounded by Antifa, and forced to fight off attacking mobs. In Charlottesville as well as Berkeley, hours of open street warfare were allowed to take place unabated by the police.

(see also the following related report White nationalist fires gun into crowd, police do not move (New York Times)

While chaos in Charlottesville erupted on all sides, many accounts strongly suggest that the Antifa forces instigated the violence. Also demanding investigation is evidence of orchestration and stagingand other highly suspicious anomalies.

The presence of the FBI and other intelligence agencies must be noted. Virginia governor Terry McAuliffe is a notorious long-time Democratic operative and Clinton surrogate. Unite the Right Rally organizer Jason Kessler was a member of Occupy and an Obama supporterCrisis actors were hiredfor the event.

The man who drove a car into a crowd, killing Heather Heyer, committed an act of terrorism and murder by any definition. But this act of murder occurred after hours of street warfare that was stopped, and allowed to escalate.

It is also not clear who the driver actually was. Was it James Fields, the man who was arrested, or was it someone else? Whoever it was had the skills of a stunt driver. Adding to the confusion are questions about the identity and behavior of those who were attacking the vehicle with baseball bats.

Was Charlottesville a staged false flag operation? Why was this melee allowed to explode? Who gave the orders, and who financed the fighters on both sides?

What is crystal clear is that the entire Washington political establishment, Deep State and mainstream media are benefitting. Trump’s opponents have their pretext and potent new propaganda weapons. They have Heather Heyer as a martyr and symbol of “resistance”.

Charlottesville is shamelessly being used as a fundraising toolHeather Heyer becomes a symbol and martyr.

Ukraine connection to Charlottesville

As detailed by Lee Stranahan (and on Twitter) there are disturbing connections to Ukraine. These same connections were also noted by Julian Assange.

James Fields, the alleged driver, connected to Ukraine is spotted on videotape chanting “Blood and Soil” and torch-marching, the slogan of Nazi Ukraine Svoboda Party. The Charlottesville torch march was identical to the torch marches in Ukraine. In fact, Ukrainian flags were flown in Charlottesville.

Is it merely a coincidence that elements of the CIA/Obama/Clinton Ukraine coup show up here? The Washington politicians now spewing outrage about racism and Nazis at Trump today, including John McCain are active collaborators with the Ukrainian Nazis.

Is it also coincidental that these Ukrainian Nazis, working in conjunction with US establishment DNC and Republicans alike, also happen to be the central figures behind the completely false Trump/Russia hack narrative that never seems to die?

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Intimidation of thought and ideas

Staged mob violence and authoritarian threats are not limited to the streets. Thought itself is under attack.

Not only Trump supporters, but all opponents and critics of the political establishment cannot express themselves without threat of reprisal, censorship, and violence.

A full-scale assault is being carried out against alternative media.

The campaign against “hate speech” and “hate content” labels any anti-establishment media as “hate”. The attack is so broad-brush that entire networks are branded right-wing or “alt-right”, when in fact, many are not right-wing, and many are non-partisan. Facebook, Twitter, YouTube, Google, among others, are engaged in campaigns of censorship and control, including the policing of content, the demonetization and suspension of sites, control of political content, and outright censorship through deletion.

Hypocrisy

While Trump is no “Role Model” of political and moral behavior, he has been branded a Nazi and white racist, despite his disavowal and criticism of white supremacists, Nazis, David Duke and the Ku Klux Klan. According to Israel Shamir:

President Trump condemned both sides participating in the brawl‚ both white nationalists and Antifa. It is exactly what his opponents were waiting for. His attempt to stay above the brawl was doomed to defeat: liberal hegemonists immediately branded him a racist and neo-Nazi. Trump reminded them that not all defenders of the monument were white racists, but this argument didn’t work. (Global Research,  August 26, 2017

Despite the fact that he spoke out forcefully, many times. (Trump spent much of a recent rally in Phoenix detailing his many responses. See here.) The mainstream media offers no quarter.

Screenshot: Trump quoted in Vox, August 15, 2017

Similarly, the majority of Trump supporters have no association with extremist groups of any kind, and have long opposed white nationalists and the “Alt-Right”. Violence has been aggressively disavowed by most of Trump’s base, including Mike Cernovich, who has forcefully denounced violence, and Jack Posobiec, who organized anti-violence rallies weeks prior to Charlottesville. The mainstream media refused to report on these events, while continuing to label him a right-wing extremist and Nazi.

Meanwhile, the establishment “Left” has persistently engaged in violence, without disavowing violence. Project Veritas has exposed and proven the fact that violence is a routine method utilized by Democratic Party operatives. Former president Barack Obama openly encouraged the mobs, pushing them to continue “expressing themselves”.  Former Attorney G Loretta Lynch called for blood in the streets. Democratic members of Congress openly call for Trump’s assassination.The Alexandria mass shooting was the work of a Bernie Sanders supporter. The mainstream media ignores or refuses to accurately report these stories.

Staged anarchist agitation and violence—“protest culture”—is not only being normalized, but popularized. The masses are being successfully indoctrinated. Witness the pervasiveness and viciousness of Hollywood and sports celebrities, who have not refrained from calling for violence against Trump.

Orwellian madness on steroids

Even as establishment-guided mobs intimidate and commit violence, their victims are blamed for violence and hate crimes.

Trump is vilified as a world-ending Nazi/fascist/racist/misogynist, the symbol of tyranny, while the true tyrants and criminals continue to walk free.

Peace is achieved through violence.

Mob violence is noble and heroic.

Attacked from all sides

Trump is under attack and increasingly isolated.

Glen Greenwald beg’s the question: What’s worse: Trump’s agenda or empowering generals and CIA operatives to subvert it?

In addition to being assaulted from outside (Purple Revolution, Russia/hack, Robert Mueller, impeachment threats, etc.), he is being  sabotaged and subverted from inside the White House, and from inside his innermost circle, by the likes of National Security Adviser H.R. McMasterDina Habib Powell and the West Wing globalists including Ivanka Trump, Jared Kushner, Gary Cohn, and Steve Mnuchin.

McMaster has purged the administration of Trump loyalists and populists, and replaced with Bush/Obama/Clinton/Deep State operatives, and runs foreign policy with vice president Mike Pence. Pence routinely issues statements contradictory to Trump’s own ideas. He has not been the focus of any mainstream media criticism. This Bush loyalist is in perfect position to become president in the event of Trump’s removal (by whatever means that occurs).

The neocon generals—Mattis, McMaster, Kelly—“oversee” and control Trump on all matters, treating him like a child. Kelly controls all information to and from Trump.

Trump often seems not to understand what is happening. On the day Charlottesville occurred, Trump applauded the Virginia authorities and Terry McAuliffe, who were more likely involved in causing the disaster. Trump also congratulated the anarchists in Boston—on Ivanka Trump’s urging. Was he oblivious to the fact that the 4,000 Boston protestors were protesting him?

For Trump’s Afghanistan strategy address to the nation, Kelly insisted that Trump walk back the controversy of his remarks on Charlottesville. McMaster and Mattis also insisted, and Trump agreed.

The swamp is not being drained. It is being filled to overflowing. With all of this damage, some of it self-inflicted (why has Trump allowed it?), how will this president hope to deal with a manufactured civil war?

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No end in sight

The Summer of Rage is in full swing, but the rage is far from over.

There continue to be anti-Trump events in all major cities in the country, seemingly every weekend. Ginned-up Antifa mobs are being mobilized in response to small pro-Trump “Freedom of Speech” events scheduled to take place in San Francisco and Berkeley on the weekend of August 26. The upcoming clash is already being called the Battle of Berkeley 3.

With the fervent and unanimous support of the San Francisco Bay Area political establishment—all of whom are Democratic Party faithful who (including Congresswoman Jackie Speier, Nancy Pelosi, etc.) are openly calling for Trump’s ouster—it is expected that yet another comparatively small gathering for “prayer, patriotism and free speech”—Trump supporters—will be swarmed and viciously shut down by mobs of Trump-hating Antifa and “social justice warriors”.

The media ignores the fact that the organizers of the pro-Trump rally condemn Nazis and white supremacists, and prohibit them from attending. Headlines continue to brand the event “far right” and“Nazi”, in order to incite.

Reprinted with permission from GlobalResearch.ca.

mardi, 29 août 2017

Les néocons poussent les USA et le monde dans une crise dangereuse

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Les néocons poussent les USA et le monde dans une crise dangereuse


Par le Saker – Source The Saker

D’abord, mes prévisions

En octobre dernier, j’ai écrit une analyse que j’ai intitulée Les États-Unis sont à la veille d’affronter la pire crise de leur histoire… et comment l’exemple de Poutine pourrait inspirer Trump et je pense que c’est une bonne chose d’y revenir maintenant. Je commençais l’analyse en examinant les calamités qui pourraient frapper les États-Unis si Hillary était élue. Puisque ce n’est pas arrivé (Dieu merci !), nous pouvons sans problème ignorer cette partie et regarder ma prédiction de ce qui arriverait si Trump était élu. Voici ce que j’écrivais.

Trump gagne.  Problème : il sera complètement seul. Les néocons ont un contrôle total, total je le répète, sur le Congrès, les médias, la banque et la finance, et les tribunaux. De Clinton à Clinton, ils ont profondément infiltré le Pentagone, Foggy Bottom [quartier où se trouvent de nombreux services gouvernementaux, NdT] et les agences à trois lettres. La Fed est leur fief. Comment diable Trump pourrait-il faire face à ces féroces « fous dans la cave » ? Regardez la campagne de haine vicieuse que toutes ces « personnalités » (depuis les acteurs jusqu’aux journalistes en passant par les politiciens) ont déchaîné contre Trump – elles ont brûlé leurs vaisseaux, elles savent qu’elle perdront tout si Trump l’emporte (et s’il prouve qu’il se laisse facilement avoir, son élection ne fera aucune différence). Les néocons n’ont rien à perdre et ils combattront jusqu’au bout. Que pourra faire Trump pour que les choses changent s’il est entouré de néocons et de leurs agents d’influence ? Mettre en place une équipe totalement différente ? Comment va-t-il les sélectionner ? Son premier choix a été de prendre Pence comme vice-président – un désastre (il est déjà en train de saboter Trump sur la Syrie et le résultat des élections). Je redoute d’apprendre qui Trump désignera comme chef de cabinet à la Maison blanche et je crains qu’il ne nomme quelque nouvelle version du tristement célèbre Rahm Emanuel uniquement pour calmer les néocons…  Et si Trump prouvait qu’il a à la fois des principes et du courage, les néocons peuvent toujours le liquider et le remplacer par Pence. Et voilà ! [En français dans le texte, NdT]

Je poursuivais en suggérant que le seul choix de Trump serait de suivre l’exemple de Poutine et de faire aux néocons ce que Poutine avait fait aux oligarques. À l’évidence ce n’est pas ce qui s’est passé. En effet, un mois après l’élection de Trump, j’ai écrit une autre analyse intitulée Les néocons et l’« État profond » ont châtré la présidence de Trump, c’est cuit, les gars !

Il y a moins d’un mois, j’ai averti qu’une révolution de couleur était en cours aux États-Unis. Mon premier élément de preuve était la prétendue « enquête » que la CIA, le FBI, la NSA et d’autres menaient contre le candidat du président Trump au poste de conseiller à la sécurité, le général Flynn. Ce soir, le complot pour se débarrasser de Flynn a finalement réussi et le général Flynn a dû offrir sa démission. Trump l’a acceptée. Maintenant, mettons immédiatement une chose de côté : Flynn était loin d’être un saint ou un homme parfaitement sage qui aurait sauvé tout seul le monde. Il ne l’était pas. Cependant, Flynn était tout simplement la pierre angulaire de la politique de sécurité nationale. (…) L’« État profond », dirigé par les néocons, a forcé Flynn à démissionner sous le prétexte idiot qu’il avait eu une conversation téléphonique avec l’ambassadeur de Russie sur une ligne ouverte, non sécurisée et clairement surveillée.  Et Trump a accepté cette démission. Depuis que Trump est arrivé à la Maison Blanche, il a pris coup sur coup de la part des médias néocon-sionistes, du Congrès, de toutes les « stars » de Hollywood, culs doublement bénits, bien-pensants et propres sur eux, et même des politiciens européens. Et Trump a encaissé chaque coup sans jamais riposter. Nulle part on n’a vu son fameux « Vous êtes viré ! ». Mais j’avais encore de l’espoir. Je voulais espérer. Je sentais que c’était mon devoir d’espérer. Mais maintenant, Trump nous a tous trahis. Je le répète, Flynn n’était pas mon héros. Mais il était, tous comptes faits, le héros de Trump. Et Trump l’a trahi. Les conséquences de tout cela seront immenses. Pour une raison : Trump est maintenant clairement brisé. Il n’a fallu que quelques semaines à l’« État profond » pour castrer Trump et le faire s’incliner devant les puissances établies. Ceux qui auraient voulu le soutenir comprendront maintenant qu’il ne les soutiendra pas eux-mêmes et ils s’éloigneront tous de lui. Les néocons se sentiront des ailes d’avoir éliminé leur pire ennemi et, enhardis par cette victoire, ils pousseront leur avantage, doublant la mise encore et encore. C’est fini, les gars, l’État profond a gagné.

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Je concluais ensuite que les conséquences de cette victoire seraient catastrophiques pour les États-Unis :

Dans leur rage haineuse contre Trump et le peuple américain – c’est-à-dire « le panier de déplorables » –, les néocons ont dû montrer leur vrai visage. Par leur rejet du résultat des élections, leurs émeutes, leur diabolisation de Trump, les néocons ont mis en évidence deux choses cruciales : premièrement que la démocratie américaine est une sinistre plaisanterie et qu’eux, les néocons, sont un régime d’occupation qui gouverne contre la volonté du peuple américain. En d’autres termes, exactement comme Israël, les États-Unis n’ont plus de légitimité. Et puisque, tout comme Israël, les États-Unis sont incapables d’effrayer leurs ennemis, ils sont fondamentalement nus, sans légitimité, sans capacité de coercition. Donc oui, les néocons ont gagné. Mais leur victoire élimine la dernière chance pour les États-Unis d’éviter un effondrement.

Je crois que ce que nous voyons aujourd’hui sont les premiers signes de l’effondrement imminent.

Les symptômes de l’agonie

  • À l’extérieur, la politique étrangère des États-Unis est essentiellement « gelée » et, à la place d’une politique étrangère nous avons une longue série de menaces vides lancées à une liste de pays diabolisés à qui sont promises maintenant « les flammes de l’enfer » s’ils osaient désobéir à Oncle Sam. Si c’est bon pour faire les grands titres, cela ne qualifie pas pour faire une « politique » quelle qu’elle soit (j’ai discuté longuement de cette question lors de ma récente interview avec South Front). Ensuite, il y a le Congrès qui a fondamentalement déchu Trump de ses pouvoirs de diriger la politique étrangère. Cette forme étrange et illégale de « vote de défiance » martèle encore dans son message que Trump est soit un fou, soit un traître, soit les deux.
  • À l’intérieur, Trump est maintenant accusé des dernières émeutes à Charlottesville ; après avoir été un agent de Poutine, il est encore diabolisé comme une sorte de nazi (voir le premier et le second avertissement de Paul Craig Roberts à propos de cette dynamique).
  • Sur le plan organisationnel, il est clair que Trump est entouré d’ennemis comme l’illustre le fait absolument scandaleux qu’il ne peut même pas parler à un chef d’État étranger sans que la transcription de cette conversation ne soit divulguée aux siomédias.

Je crois que ce sont là des étapes préliminaires pour préparer une crise majeure et l’utiliser pour chasser Trump, soit par un processus d’impeachment soit par la force sous prétexte de crise. Regardez le message que les siomédias ont martelé dans les esprits de la population américaine.

La préparation psychologique pour le coup d’État à venir : les terrifier tous à mort

Voici trois exemples très parlants tirés de la couverture de Newsweek :

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Posez-vous la question : quel est le message ici ?

Trump est un traître, il travaille pour Poutine, Poutine veut détruire la démocratie aux États-Unis et maintenant, ces deux hommes sont ensemble les deux personnes les plus dangereuses sur la planète. C’est un « complot contre l’Amérique », pas moins !

Pas mal, n’est-ce pas ?

« Ils » sont clairement là pour « nous » avoir et « nous » sommes terriblement en danger : Kim Jong-un est sur le point de déclarer une guerre nucléaire aux États-Unis, Xi et Poutine menacent le monde avec leurs armées et « notre » propre président est arrivé au pouvoir grâce au « KGB russe » et aux « hackers de Poutine », il travaille maintenant pour les Russes, il est aussi à l’évidence un nazi, un suprémaciste blanc, un raciste et, peut-être un « nouvel Hitler » (tout comme Poutine, bien sûr !).

Et puis il y a ces musulmans et ces Aye-rabs vraiment effrayants qui apparemment ne veulent que deux choses dans la vie : détruire « notre mode de vie » et tuer tous les « infidèles ». C’est pourquoi nous avons besoin de la TSA, de 16 agences de renseignement et de troupes de police militarisées SWAT partout : au cas où les terroristes viendraient nous prendre là où nous vivons.

De dangereuses conséquences internationales

Tout cela serait assez drôle si ce n’était pas extrêmement dangereux. D’une part, les États-Unis s’en prennent vraiment à un dangereux ennemi lorsqu’ils essaient constamment de faire peur à Kim Jong-un et au gouvernement de la RPDC. Non, pas à cause des armes nucléaires nord-coréennes (qui ne sont probablement pas des ICBM capables de lancer des armes nucléaires mais une combinaison pas nécessairement compatible de « dispositifs » nucléaires et de missiles balistiques à portée intermédiaire), mais à cause de l’immense et difficile tâche de détruire l’armée conventionnelle nord-coréenne. La vraie menace, ce n’est pas les missiles, mais une combinaison mortelle d’artillerie conventionnelle et de forces spéciales qui représente un très faible danger pour les États-Unis ou leur armée, mais qui constitue une énorme menace pour la population de Séoul et de la partie nord de la Corée du Sud. Les armes nucléaires, sous quelque forme que ce soit, sont vraiment un problème en plus, un « glaçage » toxique sur un « gâteau conventionnel » déjà très dangereux.

Aparté
Un cauchemar de la vie réelle : maintenant, si vous voulez vraiment vous terrifier vous-même et rester éveillé toute la nuit, considérez ce qui suit. Alors que je crois personnellement que Kim Jong-un n’est pas fou et que le principal objectif des dirigeants nord-coréens est d’éviter une guerre à tout prix, que se passe-t-il si je me trompe ?  Qu’en est-il si ceux qui disent que les dirigeants nord-coréens sont totalement fous ont raison ? Ou, ce que je crois beaucoup plus probable, si Kim Jong-un et les dirigeants nord-coréens sont parvenus à la conclusion qu’ils n’ont rien à perdre, que les Américains vont tous les tuer, en même temps que leurs familles et leurs amis ? Que pourraient-ils faire, théoriquement, s’ils sont vraiment désespérés ? Eh bien, permettez-moi de vous le dire : oubliez Guam, pensez Tokyo ! En effet, tandis que la RPDC pourrait dévaster Séoul avec des systèmes d’artillerie dépassés, ses missiles sont probablement capables de frapper Tokyo ou la région de Keihanshin qui englobe Kyoto, Osaka et Kobé, y compris les industries clés de la région industrielle de Hanshin. La zone du Grand Tokyo (la région de Kanto) et la région de Keihanshin sont très densément peuplées (37 et 20 millions d’habitants, respectivement) et contiennent un très grand nombre d’industries, dont beaucoup déclencheraient un désastre écologique aux proportions immenses si elles étaient frappées par des missiles. Non seulement cela, mais une attaque sur les principaux nœuds économiques et financiers du Japon donnerait probablement lieu à un effondrement international genre 9/11. Donc si les Coréens du Nord voulaient vraiment, vraiment nuire aux Américains, ce qu’il pourraient faire est de frapper Séoul et des villes importantes au Japon entraînant une immense crise politique pour la planète entière. Pendant la Guerre froide, nous avions coutume d’étudier les conséquences d’une attaque soviétique contre le Japon et la conclusion était toujours la même : le Japon ne peut se permettre aucune guerre. Le territoire japonais est trop petit, trop densément peuplé, trop riche en cibles lucratives et une guerre dévaste tout le pays. C’est encore vrai aujourd’hui, encore plus. Imaginez seulement la réaction en Corée du Sud et au Japon si une attaque américaine folle sur la RPDC entraînait une frappe de missiles sur Séoul et Tokyo ! Les Sud-Coréens ont déjà fait connaître leur position sans aucune ambiguïté, d’ailleurs. Quant aux Japonais, ils placent officiellement leurs espoirs dans des missiles (comme si la technologie pouvait atténuer les conséquences de la folie !). Donc oui, d’accord, la RPDC est extrêmement dangereuse et la pousser dans ses derniers retranchements est totalement irresponsable en effet, armes nucléaires ou non.

Ce que nous observons aujourd’hui est une boucle de rétroaction positive dans laquelle chaque geste des néocons déstabilise plus profondément le système tout entier. Inutile de le dire, c’est extrêmement dangereux et ne peut avoir qu’une catastrophe ou un effondrement final pour résultat. En fait, les signes que les États-Unis perdent totalement le contrôle sont déjà partout, voici seulement quelques gros titres en guise d’illustration :

Une expression française dit que « quand le chat n’est pas là, les souris dansent », et c’est exactement ce qui se passe maintenant : les États-Unis sont à la fois très faibles et essentiellement absents. Quant aux Arméniens, ils disent que « La souris rêve de ce qui pourrait terrifier le chat ». Bon, les « souris » du monde dansent et rêvent, et ignorent tout simplement le « chat ». Chaque mouvement du chat ne fait qu’aggraver les choses pour lui. Le monde change pendant que le chat est occupé à se détruire.

Des conséquences intérieures dangereuses

blackkids.jpgLes émeutes raciales seraient en tête de ma liste. En fait, elles se passent déjà partout aux États-Unis, mais elles sont rarement présentées en tant que telles. Et je ne parle pas des émeutes « officielles » de Black Lives Matter, qui sont assez mauvaises, je parle des nombreuses mini-émeutes que les médias officiels essaient systématiquement de dissimuler. Ceux qui sont intéressés à ce sujet devraient lire le livre de Colin Flaherty, Don’t Make the Black Kids Angry, qui montre que les attaques racistes par des Noirs sur des Blancs (également dites « chasse à l’ours polaire ») sont en augmentation presque partout dans le pays. De même, à quelqu’un qui persiste obstinément à ignorer la forte corrélation entre la race et le crime devrait lire l’analyse essentielle de Ron Unz, Race and Crime in America.  Maintenant, avant que quelque militant autoproclamé de la police de la pensée m’accuse de racisme : je ne parle pas du tout des causes des problèmes raciaux aux États-Unis. Je dis seulement que la violence raciale y est grave et s’aggrave rapidement.

Le deuxième problème que je vois menacer la société américaine est une délégitimation extrêmement rapide de tout le système politique étasunien et, en particulier, du gouvernement fédéral. Pendant des décennies, les Américains ont voté pour « A » et chaque fois ce qu’ils ont fini par avoir, c’est « non-A ». Parmi les exemples, il y a le célèbre « lisez sur mes lèvres, pas de nouveaux impôts », bien sûr, mais également les promesses d’Obama de stopper les guerres idiotes, et maintenant la promesse de Trump de « drainer le marais ». On a menti aux Américains pendant des décennies et ils le savent. Il y a un fossé grandissant entre les prétendues « valeurs américaines » enseignées dans les écoles et la réalité du pouvoir. Alors que les États-Unis sont officiellement censés défendre la démocratie, la liberté et toutes les bonnes choses préconisées par les Pères fondateurs, la réalité dégoûtante est qu’ils couchent avec les wahhabites, les nazis et les sionistes. L’hypocrisie omniprésente de tout cela menace maintenant de faire tomber tout le système politique étasunien exactement comme l’hypocrisie tout aussi omniprésente du système soviétique a fait tomber l’URSS (si vous êtes intéressé, vous pouvez en lire davantage sur ce thème ici). La simple vérité est qu’aucun régime ne peut survivre longtemps lorsqu’il soutient activement l’exact opposé de ce qu’il est officiellement censé défendre. Le résultat ? Je n’ai pas encore rencontré d’Américain adulte qui croie sincèrement qu’il/elle vit dans dans « le pays des hommes libres et la maison des braves ». Peut-être que les nourrissons avalent encore ces sottises, mais même les adolescents savent que c’est carrément de la foutaise.

Troisièmement, pour toutes les statistiques encourageantes sur le Dow Jones, le chômage et la croissance, la réalité est que la société américaine se transforme rapidement en une société à trois vitesses : au sommet, un petit nombre de gens obscènement riches, en dessous, une certaine quantité de professionnels qualifiés qui servent les richissimes et qui luttent pour maintenir un style de vie associé dans le passé à la classe moyenne. Et puis l’immense majorité des Américains qui cherchent fondamentalement à gagner « un salaire minimum plus un petit quelque chose » et qui survivent essentiellement en ne payant pas pour l’assurance santé, en ayant généralement deux emplois, en mangeant de la « bouffe prolo » bon marché et malsaine et en renonçant à ce dont tout travailleur américain pouvait profiter dans les années 1950 et 1960 (un parent à la maison, des vacances payées, une deuxième maison pour les vacances, etc.). Les Américains sont pour la plupart des gros bosseurs et, jusqu’à présent, la plupart d’entre eux survivent, mais ils sont aussi pour la plupart à un salaire de la pauvreté vraiment grave. Beaucoup d’entre eux ne font que joindre les deux bouts parce que leurs parents et leurs grands-parents les aident (c’est également vrai pour l’Europe du Sud, d’ailleurs). Un segment important de la population américaine survit maintenant grâce à Walmart et à Dollar Store. Une fois que cela ne marche plus, les tickets alimentaires sont la dernière option. Cela, ou la prison, bien sûr.

Combinez tout cela et vous obtenez une situation extrêmement explosive, potentiellement. Il n’est pas surprenant que lorsque tant d’Américains ont entendu le commentaire de Hillary sur le « panier de déplorables », ils aient pris cela comme une déclaration de guerre

Et que prévoient les néocons pour faire face à tout ça ?

En réprimant la liberté d’expression et la dissidence, bien sûr ? Quoi d’autre ?

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Leur unique réponse – la répression bien sûr !

YouTube, Google, Facebook, Twitter – tous sont en train de réprimer le « mauvais » discours qui comprend à peu près n’importe quel sujet qui fait froncer les sourcils à une grande variété de ceux qui se décrivent eux-mêmes comme « libéraux ». GoDaddy et Google poursuivent même des noms de domaine. Certes, personne n’est jeté en prison pour défendre, disons, le Deuxième amendement, mais ils sont « démonétisés » et leurs comptes sont simplement fermés. Ce ne sont pas les flics qui répriment la liberté d’expression, c’est « l’Amérique des affaires », mais l’effet est le même. Apparemment, les néocons ne réalisent pas que la censure n’est pas une stratégie viable à l’ère d’Internet. Ou peut-être le réalisent-ils et essaient-ils délibérément de provoquer une réaction ?

Ensuite il y a la campagne de diffamation dans les médias : à moins de faire partie d’une sorte de « minorité », vous êtes supposé être néfaste de naissance et coupable de tous les maux sur la terre. Et votre chef est Trump, bien sûr, ou peut-être même Poutine lui-même, voir ci-dessus. Les mâles blancs chrétiens et hétérosexuels feraient mieux de se mettre à l’abri…

Quoi qu’il en soit, par leur insistance maniaque, d’une part à humilier et à écraser Trump et d’autre part à réprimer des millions d’Américains, les néocons commettent une double erreur. D’abord ils montrent leur vrai visage et ensuite, ils déstabilisent les institutions mêmes qu’ils utilisent pour contrôler et diriger ce pays. Cela, bien sûr, ne fait qu’affaiblir les néocons et les États-Unis eux-mêmes et ensuite affaiblit la boucle de rétroaction positive mentionnée plus haut, qui menace maintenant le système international tout entier.

Nous et eux

Ce qui rend l’effondrement graduel de l’Empire anglosioniste particulièrement dangereux est qu’il est de loin le plus grand et le plus puissant empire de l’histoire mondiale. Aucun empire n’a jamais eu le quasi monopole du pouvoir dont les États-Unis ont joui depuis la Seconde Guerre mondiale. D’une manière ou d’une autre, militaire, économique, politique, sociale, les États-Unis sont sortis de la Seconde Guerre mondiale comme un géant et alors qu’il y a eu des hauts et des bas au cours des décennies qui ont suivi, l’effondrement de l’URSS n’a fait que réaffirmer ce qui apparaissait comme leur victoire totale. À mon avis, subjectif il est vrai, le dernier président américain compétent (non, je n’ai pas dit « bon », j’ai dit « compétent ») était George Herbert Walker Bush qui, contrairement à ses successeurs, savait au moins comment gouverner un Empire. Après cela, tout n’est que déclin, de plus en plus rapidement. Et si Obama a probablement été le président le plus incompétent dans l’histoire des États-Unis, Trump sera le premier à être ouvertement lynché pendant qu’il est en poste. Résultat, l’Empire anglosioniste est maintenant comme un immense train de marchandises qui a perdu sa locomotive mais qu’un énorme élan pousse en avant même s’il n’y a plus personne pour le contrôler. Le reste de la planète, à l’exception sans importance des Européens de l’Est, fait des pieds et des mains pour sortir de la trajectoire de ce train incontrôlé. Jusqu’à présents, les rails (bon sens minimum, réalités politiques) résistent plus ou moins, mais un accident (politique, économique ou militaire) pourrait arriver à tout moment. Et c’est très, très effrayant.

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Les États-Unis ont entre 700 et 1000 bases militaires dans le monde, tout le système financier international est profondément enchevêtré avec l’économie américaine, le dollar US est toujours la seule véritable monnaie de réserve, les bons du Trésor américain sont détenus par tous les acteurs internationaux importants (y compris la Russie et la Chine), SWIFT est politiquement contrôlé par les États-Unis, qui sont le seul pays au monde qui peut imprimer autant d’argent qu’il veut et, pour couronner le tout, ils ont un énorme arsenal nucléaire. Résultat, un effondrement des États-Unis menacerait tout le monde et cela signifie que personne ne voudrait le provoquer. L’effondrement de l’Union soviétique n’a menacé l’humanité que d’une seule manière : par son arsenal nucléaire. En revanche, tout effondrement des États-Unis menacerait tout le monde de diverses manières.

Donc la vraie question aujourd’hui est celle-ci : le reste de la planète peut-il empêcher un effondrement catastrophique de l’Empire anglosioniste ?

C’est l’ironie de notre situation : même si la planète entière est malade et fatiguée de l’arrogance incompétente des Anglosionistes, personne ne veut que leur Empire s’écroule dans le désastre. Et pourtant, avec les néocons au pouvoir, un tel effondrement semble inévitable, avec des conséquences potentiellement dévastatrices pour tout le monde.

C’est vraiment incroyable, réfléchissez-y : tout le monde hait les néocons, non seulement une majorité d’Américains, mais vraiment la planète entière. Et pourtant ce groupe numériquement faible a en quelque sorte fait en sorte de mettre tout le monde en danger, y compris eux-mêmes, par leur affreux caractère vindicatif, leur arrogance infinie et leur myopie idéologiquement induite. Que cela ait pu se produire, et à l’échelle planétaire, est un témoignage dramatique de la dégradation morale et spirituelle de notre civilisation : comment avons-nous pu laisser aller les choses si loin ?

Et la question suivante, évidente : pouvons-nous les arrêter ?

Honnêtement, je ne sais pas. J’espère, mais je n’en suis pas sûr. Mon plus grand espoir avec Trump était qu’il serait prêt à sacrifier l’Empire pour le salut des États-Unis (le contraire de ce que font les néocons : ils sont prêts à sacrifier les États-Unis pour sauver l’Empire) et qu’il organiserait une transition relativement sûre et, avec un peu de chance, non violente de l’Empire à un « pays normal ». À l’évidence, cela ne se produira pas. Au lieu de quoi, les néocons menacent tout le monde : les Chinois, les Russes, les Nord-Coréens et les Vénézuéliens bien sûr, mais aussi les Européens (économiquement), tout le Moyen-Orient ( (via la « seule démocratie du Moyen-Orient »), tous les pays en développement et même le peuple américain. En plus, ils menacent même le président des États-Unis lui-même, et d’une manière assez peu subtile !

Donc quelle est la suite ?

Vraiment, je ne sais pas. Mais mon sentiment dominant est que Trump sera chassé du pouvoir, soit pour « crimes et délits graves », soit pour « raisons médicales » (ils le déclareront tout simplement fou et inapte à assumer la présidence). À voir combien Trump est faible et mou, il pourrait même être « convaincu » de démissionner. Je ne les vois pas l’assassiner, simplement parce qu’il n’est pas non plus Kennedy. Après cela, Pence arrive au pouvoir et ce sera présenté à tous comme un événement merveilleux, un rassemblement des élites suivi d’une répression immédiate et sans merci de toute forme d’opposition politique ou de dissidence, qui sera immédiatement étiquetée comme raciste, homophobe, antisémite, terroriste, etc. On trouvera la sale main du « KGB russe » (oui, je sais, le KGB a été dissout en 1991) partout, en particulier chez les libertariens américains (qui seront probablement les seuls à avoir assez de cervelle pour comprendre ce qui se passe). La (pseudo) Gauche jubilera. Si cette façon de procéder déclenche un niveau de résistance inattendu, régional ou social, un 9/11 sous fausse bannière suivi d’une guerre sera le scénario le plus probable (pourquoi renoncer à quelque chose qui a tellement bien marché la première fois ?). À moins qu’ils ne décident de ré-envahir la Grenade ou de donner à Nauru une raclée bien méritée, n’importe quelle guerre plus ou moins réelle entraînera un échec catastrophique pour les États-Unis au point que le recours aux armes nucléaires par les fous néocons pourrait devenir un risque très réel, en particulier si des cibles symboliques, comme des porte-avions, sont frappées (en 1991, lorsque les États-Unis ont envoyé la 82e AB en Irak, il n’y avait rien entre cette troupe d’infanterie légère et les divisions blindées irakiennes. Si les Irakiens avaient attaqué, le plan était d’utiliser des armes nucléaires tactiques. Ensuite tout cela fut rapidement oublié).

Il y a une raison pour laquelle les néocons prospèrent en temps de crise : cela leur permet de se dissimuler derrière le chaos, en particulier s’ils sont ceux qui l’ont provoqué en premier. Cela signifie que tant que les néocons sont proches du pouvoir, ils ne permettront jamais, jamais, que la paix éclate soudain, de peur que les projecteurs soient subitement dirigés sur eux. Chaos, guerre, crises – c’est leur habitat naturel. Pensez-y comme au sous-produit de leur existence. Finalement, bien sûr, ils seront arrêtés et vaincus, comme tous leurs prédécesseurs dans l’Histoire. Mais je frémis lorsque je pense au prix que l’humanité devra payer cette fois-ci.

The Saker

L’article original article a été rédigé pour Unz Review

Traduit par Diane, vérifié par Wayan, relu par Catherine pour le Saker francophone

 

Du "populisme" d'après Laclau, Mouffe, Errejon.

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Du "populisme" d'après Laclau, Mouffe, Errejon

Par

Blog : Le blog de Vincent Présumey

Avertissement d' "euro-synergies": ce texte émane d'une voix de gauche qui s'oppose à l'utilisation par les populistes de gauche de l'oeuvre de Carl Schmitt. Nous affichons cet article pour montrer les arguments de cette gauche radicale qui refuse aujourd'hui, pour de bonnes et de mauvaises raisons, les théories émises par les idéologues de Podemos ou d'autres mouvements postmarxistes.Nous supposons que nos lecteurs pourront faire la part des choses: rendre à Marx ce qui revient à Marx, à Gramsci ce qui revient à Gramsci et à Schmitt ce qui revient à Schmitt. Coïncidentia oppositorum !

* * *

Le "populisme" est à la mode. Voici quelques mois, beaucoup d'adhérents de la "France insoumise" s'insurgeaient contre l'emploi de ce terme à l'égard de leur mouvement, croyant qu'il s'agissait de les amalgamer au Front National, dans la continuité des attaques que nous tous, militants de gauche opposés aux normes de la dite "construction européenne", avons eu à connaître depuis des années. Mais ils ont fini pour la plupart d'entre eux par réaliser que leur chef se réclame du dit "populisme" depuis un certain temps déjà, en tant qu'axe stratégique pour les présidentielles puis pour son mouvement, et leur réponse a changé : elle consiste à dire que les critiques ignorent la profondeur analytique et conceptuelle de la chose, laquelle renvoie aux oeuvres de deux supposés grands penseurs, l'un, décédé, l'argentin Ernesto Laclau, l'autre étant l'universitaire belge Chantal Mouffe.

Un petit livre (rouge ! - aux éditions catholiques du Cerf) est devenu le bréviaire de pas mal d'entre eux, et il est vrai que Construire un peuple, Pour une radicalisation de la démocratie, entretiens entre la théoricienne du "populisme" C. Mouffe et son principal promoteur dans Podemos (1), Inigo Errejon, est réussi au point de vue de la vulgarisation : il donne une version abrégée des conceptions principales de ce courant. Il me servira donc ici de point de départ pour une rapide analyse de ses principaux aspects idéologiques.

Chantal Mouffe et l'essentialisme.

Chantal Mouffe présente comme le résultat de profondes recherches sociologiques et politologiques un certain nombre de truismes que le bon sens connaît fort bien depuis toujours : "les identités politiques ne sont pas données, elles ne répondent pas à une nature par essence, mais sont constamment en construction." Ces formules s'opposent, selon elle, au "marxisme" et aux "marxistes" ainsi qu'à la "social-démocratie". La grande critique du "marxisme" à cet égard a été faite par elle-même et Ernesto Laclau en 1985 dans Hégémonie et stratégie socialiste (2). Le "marxisme" avait "une conception essentialiste qui faisait de l'existence des identités politiques le préalable à leur articulation dans le discours.", à savoir : "un "essentialisme de classe", dans lequel les identités politiques dépendaient de la position de l'acteur social dans les rapports de production, rapports qui déterminent sa conscience."

Dans un premier temps on pourrait penser qu'est visé le déterminisme économique, à l'oeuvre notamment dans le "marxisme" officiel de la seconde Internationale au début du XX° siècle , repris sous une forme aggravée dans les formulations idéologiques liées au stalinisme, déterminisme qui peut s'autoriser de telle ou telle formule de Marx mais certainement pas de l'ensemble de son oeuvre. Seuls deux "marxistes" trouvent grâce aux yeux de C. Mouffe, en tant qu'"hérétiques" supposés et pas en tant que "marxistes", Gramsci et Lukacs. Qu'aussi bien chez Lénine que chez Trotsky ou Rosa Luxembourg la place de l'action politique consciente contredise explicitement tout déterminisme économique semble lui avoir échappé (cette pauvre R. Luxembourg avait bien fait quelques efforts, explique-t-elle, mais "sans y arriver vraiment" !).

Le déterminisme économique, en fait, n'est en rien la cible de Chantal Mouffe. Ce n'est pas tant la supposée "dépendance" de l'identité politique envers les rapports de production qui est appelée par elle "essentialisme", ni une formation de la conscience qui serait directement conditionnée par la place de l'individu dans ces rapports. Ces visions schématiques "marxistes" ne font que lui faciliter la tache, mais ce ne sont pas elles qu'elle vise. C'est la relation entre rapports sociaux et identités politiques, c'est l'idée que les forces politiques correspondent évidemment à des intérêts sociaux pas forcément immédiatement conscients, qui est taxée d' "essentialisme".

Il nous faut faire une petite parenthèse sur ce terme. C. Mouffe en effet, procède à une inversion – Marx aurait peut-être dit : une inversion idéologique ! - dans son emploi.

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Qu'est-ce que l' "essentialisme" ? Depuis Aristote on oppose l'essence d'une chose à ses accidents, mais ceci n'est une opposition que pour les interprètes superficiels - déjà chez Aristote, le nécessaire n'existe pas sans le contingent ni l'essence sans les accidents. La véritable opposition est celle du nominalisme et de l'essentialisme et elle a été exposée et explicitée notamment par les biologistes. "Le chat a des poils parce qu'il est un mammifère" est une proposition banale, essentialiste sans le savoir : le concept de mammifère ne préexiste pas ontologiquement aux individus (3). Dans une démarche scientifique, reposant sur le réalisme – le monde existe indépendamment et antérieurement à ma perception -, il faut se garder, avec une vigilance en éveil, de tout essentialisme, de toute conception centrée sur une norme idéale, de toute confusion entre science et valeur.

Une très belle critique de l'essentialisme se trouve sous la plume de Marx, dans la Sainte Famille (1844) : à la pomme et à la poire réelles que je mange, est substitué le concept de fruit, et pomme et poire deviennent des manifestations du "fruit absolu", chaque chose individuelle devenant l'incarnation d'une abstraction, d'une essence.

L'essentialisation, explicite ou implicite, de l'adversaire ou du contradicteur, est un phénomène courant qui constitue le principal obstacle aux débats argumentés : untel dit ceci parce qu'il est cela, un "marxiste", un "libéral", ou, pire, en raison de sa "nature", de classe, ethnique, de genre, etc (la pensée essentialiste est obligatoire dans le racisme). Ceci évite ou empêche de considérer ce que dit effectivement untel. La critique de l'essentialisme recoupe donc la critique de l'idéalisme et de l'institution d'abstractions figées à titre de modèles explicatifs, mais elle va au delà car elle critique aussi l'explication essentialiste des pensées, opinions et identités elles-mêmes : elle permet un matérialisme non dogmatique.

Il s'agit de rompre avec la classe ouvrière.

Ce que C. Mouffe, elle, dénonce comme "essentialisme" constitue précisément le contraire de l'essentialisme, à savoir le fait d'écarter les explications toutes faites sur les idées des uns et des autres par la référence à un quelconque mot en "isme" permettant de les classifier dans des catégories figées, pour pouvoir accomplir l'effort de prise en compte des réalités sociales et individuelles (les deux allant toujours de pair), des rapports matériels des individus entre eux et avec le monde, non pour ériger ces rapports en une nouvelle "essence", mais pour approcher au plus près la réalité concrète mouvante et contradictoire. Elle essentialise, par contre, le "marxisme", et avec lui la "social-démocratie", leur adressant ce reproche central qui pour elle résume, en fait, leur soi-disant "essentialisme" :

"Leur théorisation était différentes, mais finalement les deux courants ["marxisme" et "social-démocratie"] abordaient le socialisme en fonction des demandes de la classe ouvrière." (je souligne, VP).

La "social-démocratie", ce sont les partis socialistes, social-démocrates, travaillistes, ayant largement dérivés vers le libéralisme. Le "marxisme", c'est ici ce qui est censé s'être situé "à gauche" des précédents, soit, principalement, les partis communistes et apparentés. Pour Chantal Mouffe leur grand défaut était de procéder "en fonction des demandes de la classe ouvrière" (sic). Althussérienne orthodoxe jusque là (et peut-être bien réelle "marxiste essentialiste" ! ), elle aurait pris conscience du problème en raison de son engagement féministe londonien. Sans doute. On notera la double essentialisation a-critique à laquelle elle procède.

Premièrement, les forces politiques issues de la social-démocratie et du stalinisme (qu'il soit permis d'appeler ainsi les catégories essentialisées de C. Mouffe que sont "la social-démocratie" et "le marxisme", on se rapproche ainsi, d'un cran, du réel), représentaient bel et bien la classe ouvrière, et c'est bien là, deuxième point central, ce qu'il leur est reproché.

Exit tout questionnement sur la bureaucratie, la confiscation de la représentation, l'Etat "soviétique", etc. C. Mouffe en rompant avec ce qu'elle considérait comme son "marxisme", n'a pas à faire l'effort de critiquer le rapport politique de subordination et d'instrumentalisation, ni donc de se questionner sur les forces sociales en jeu, des appareils social-démocrates et "communistes" issus du stalinisme, avec la classe ouvrière. Non : le problème, c'est la référence à la classe ouvrière.

Pas de rupture avec les vieux partis en tant qu'appareils bureaucratiques, mais une rupture réelle avec toute référence à la classe ouvrière, et donc avec le mouvement ouvrier. La "critique de l'essentialisme" joue là le rôle classique d'une couverture idéologique : la conscience est proclamée autonome, les classes n'existent pas, donc inventons. Rompre avec "l'essentialisme" voulait dire rompre avec la classe ouvrière. Inventons ! Inventons quoi ? Le "populisme".

Voici le Populisme !

Le populisme fut ainsi défini par Ernesto Laclau dans La raison populiste :

"Un mode d'articulation opérant selon une logique équivalentielle, qui aboutit, par un enchaînement d'équivalences entre une multiplicité de demandes hétérogènes, à créer un peuple."

Sous ce verbiage impressionnant, voire intimidant, on pourrait penser qu'on a une démarche pragmatique assez simple, voire cynique, somme toute :

"L'idée des néo-populistes, c'est d'allier des luttes locales et a priori sans lien, comme par exemple celle pour le mariage homosexuel et celle contre la construction d'un aéroport et celle contre la fermeture d'une école maternelle. Chaque lutte possède un ennemi local (les cathos intégristes, les promoteurs immobiliers, la mairie de droite). Plus on agrège des luttes ensemble, moins ce qui "nous" relie a de substance, mis à part celle d'être en lutte contre une série d'ennemis tout aussi protéiformes. On a donné le nom de peuple, ou "les gens", pour décrire le nous, et celui des élites pour décrire l'ennemi. Ça permet de mobiliser toutes ces luttes dans un front large. Donc c'est pas si compliqué que ça, la formule est pas si obscure que ça en contexte, la stratégie fonctionne pour gagner des élections (voir Syriza, Podemos, Revolution Ciudadana) en évitant la fragmentation qui caractérise la gauche de la gauche depuis longtemps." (je recopie ici une intervention dans un débat sur Facebook).

Mais aucun des exemples donnés ici, et on pourrait en ajouter d'autres, ne s'est construit en réalité de cette manière. En ce qui concerne Podemos, il y a eu initiative politique d'un groupe, dans le contexte créé par les mouvements massifs d' "indignés" occupant les places publiques en 2012, mais il ne s'agit pas de l'expression politique directe de ce mouvement, ni de la fédération de luttes "sans lien entre elles". C. Mouffe et I. Errejon sont pleinement d'accord et se félicitent du fait que "l'initiative de Podemos est lancée sans aucune forme de consultation préalable entre les mouvements, ni les assemblées, ni avec les indignés." Il ne fallait surtout pas soumettre cette initiative à la discussion ! Le mode d'articulation dont parle Laclau n'est pas la fédération démocratique de mouvements divers. Au demeurant, ces mouvements étaient déjà articulés dans le 15M et les Indignés, précisément parce qu'ils n'étaient pas sans liens entre eux, mais que tous étaient des réactions sociales aux attaques capitalistes – "essentialisme" "marxiste" ! La question de leur représentation politique se posait publiquement, ouvertement, en Espagne depuis 2012. Comme l'avoue très franchement Errejon, Podemos en tant que mouvement "populiste" n'a pas été pensé et fondé pour assurer démocratiquement cette représentation. De fait, il n'aurait pas agi autrement si l'intention avait été de court-circuiter et de confisquer cette représentation le plus vite possible (4).

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Les modes idéologiques actuelles à l'extrême-gauche ne facilitent pas, il est vrai, la compréhension critique de ce dont il s'agit réellement là. Ainsi, le terme d' "intersectionnalité" peut être facilement combiné aux "modes d'articulation" à la Mouffe-Laclau. Rien n'existerait "par essence", ni classes, ni genres, ni nations, tout serait "construction sociale et langagière", croyance qui constitue justement le plus sûr moyen de faire de l'essentialisme réel, celui que critiquait Marx il y a un siècle et demi, et que critiquent les biologistes aujourd'hui : cataloguer des "ismes" et des "phobies" les uns à côté des autres ("classisme", "sexisme", "homophobie", "islamophobie", "spécisme" ... (5)) en éclatant toute compréhension unifiée de la société et des rapports de production, ce qui permet éventuellement d'y faire son marché et de choisir son "isme" et sa "phobie" (6).

Au fond, Laclau et Mouffe ne font-ils pas de l' "intersectionnalité" ? Certes, mais avec un petit quelque chose de plus assez éclairant sur les confusions possibles autour de cette notion.

Deux termes clefs sont présents dans la formulation fumeuse de Laclau citée ci-dessus. Les "demandes" sont "hétérogènes", ce qui peut vouloir dire plus encore que sans lien apparent (mais avec un lien social sous-jacent), comme présenté ci-dessus par l'intervenant sur Facebook. Elles peuvent être, même, et elles le sont chez Laclau – comme elles l'étaient dans le mouvement politique qui a toujours été le sien : le péronisme de gauche – contradictoires, opposées.

C'est-à-dire, en termes soi-disant "essentialistes", qu'elles peuvent émaner de groupes sociaux aux intérêts opposés. Le "mode d'articulation" façon Laclau associe des intérêts opposés. Et il les associe dans "un peuple", seconde notion clef.

Combinons tout cela : il s'agit d'unir des intérêts sociaux opposés dans un seul et même "peuple". Dit comme cela, c'est certes beaucoup moins original ...

"Nous" contre "Eux".

Chez Laclau, ce dont il vient d'être question est la plupart du temps présenté comme une description des pratiques socio-politiques effectives, surtout dans des sociétés destructurées par le néolibéralisme comme celles d'Amérique du Sud, plus que comme une méthode préconisée pour construire des organisations politiques de masse. De Peron à Christina Kirchner, présidente néo-péroniste de l'Argentine qui lui rendra un hommage appuyé à sa mort en 2004, en passant par Chavez, Morales, Correa ..., mais aussi des rassembleurs de "droite", voire néolibéraux comme Fujimori au Pérou, le "mode d'articulation" à la Laclau a pu être fréquemment identifié, au point de friser la banalité sans contenu.

Mouffe entend, sur ces fondements, définir une manière de "produire du politique" expression synonyme ici du "construire un peuple" de Laclau : "Il me paraît fondamental de comprendre que la politique consiste à créer un "nous" et que ça implique nécessairement de le distinguer d'un "eux". Le sujet politique collectif (le "peuple") se constitue en désignant, en affrontant, en détestant, un ennemi : c'est ce qui fait son identité, puisque lui-même est formé de groupes aux intérêts hétérogènes voire opposés. L'ennemi est perçu comme celui qui vous fait du mal, mais sa définition ne doit pas être "essentialiste", comme de bien entendu : il n'est donc pas défini, mais décrit, et ne sera donc pas forcément, un groupe exploiteur et/ou oppresseur. Juste un ennemi.

Nous touchons là à l'apport plus propre à C. Mouffe. Elle a péché cette brillante trouvaille chez un illustre "penseur du politique" : Carl Schmitt. Il est permis de dire, l'ignorance ne servant de rien à personne (Spinoza), que chez Carl Schmitt, le "nous" était le Volk germanique, le "eux" la juiverie internationale (7). Carl Schmitt était le principal théoricien du "politique" et du droit, ou du non-droit, de l'Etat national-socialiste allemand entre 1933 et 1945. Certes, on ne saurait voir là une sorte de principe de contre-autorité qui interdirait d'étudier ou de se servir de Carl Schmitt. Il faut l'étudier, mais sans être dupe. Or, dans Construire un peuple, C. Mouffe, I. Errejon et l'éditeur évitent soigneusement d'informer le lecteur de ces données élémentaires sur le supposé grand penseur dont il est ici question. N'ayons pas la naïveté de croire qu'ils ont supposé les lecteurs tous assez cultivés pour savoir de qui il retournait. La jeune lectrice ou le jeune lecteur "insoumis" pourra facilement s'imaginer que Carl Schmitt était un grand "critique du libéralisme", et l'ignorance à cet égard se manifeste même chez de possibles lecteurs d'un âge plus canonique (8).

Le leader charismatique.

L'addition d'intérêts hétérogènes construit "un peuple" en se définissant comme un "nous" contre un "eux", et en se rassemblant autour de la figure d'un chef charismatique :

"Pour créer une volonté collective à partir de demandes hétérogènes, il faut un personnage qui puisse représenter leur unité, je crois donc qu'il ne peut pas y avoir de moment populiste sans leader, c'est évident." - un leader "charismatique".

Un peuple, un ennemi, un leader !

Sa relation à la base est autoritaire dans le cas du "populisme de droite" – et de mentionner Marine Le Pen. Mais il peut y avoir "un autre type de relation, moins vertical" ... sans plus de précisions, et l"horizontalité insoumise" en la matière n'a convaincu que les convaincus ...

Pour appuyer ces propos de C. Mouffe, I. Errejon pense opportun de citer le dirigeant anarchiste espagnol Buenaventura Durruti. L'exemple, comme le seraient tous les exemples pris dans l'histoire du mouvement ouvrier à l'exception partielle de Ferdinand Lassalle, est mal choisi, car ici la lutte commune (et non les "demandes hétérogènes" !), et l'organisation, préexistent au dirigeant reconnu comme tel. Dans le schéma "populiste" le chef est au contraire un identifiant nécessaire et donc préalable, puisque les "demandes" sont "hétérogènes" : la figure du chef et la figure de l'ennemi sont l'une et l'autre indispensables.

L'agonisme "démocratique".

Parvenu à ce stade, le sympathisant du "populisme" ou du "populisme de gauche" s'estimera sans doute en droit de protester :

"Vous êtes en train de nous tailler un costard qui suggère fortement que des mouvements comme la France insoumise sont des hordes fédérées par un Chef, contre une représentation de l'Ennemi, visant à fonder un Peuple dans lequel des intérêts – des intérêts de classe - hétérogènes, coexistent. Vous êtes en train de nous faire croire que c'est comme Mussolini. Mais vous mentez, car C. Mouffe dit bien qu'elle pense "avec et contre" Schmitt, sa vision du politique se situant dans le cadre de la démocratie pluraliste. Aucun confusion avec le fascisme n'est donc permise."

Il est exact que, à ce stade, les caractéristiques énumérées se prêtent fort bien à la description du fascisme lors de son émergence. Précisons toutefois que je ne me suis pas livré ici à un exercice autre que l'analyse du discours des théoriciens du "populisme" sur lui-même. Ni Podemos, ni la FI, ni le M5S italien, n'ont été ici analysés en eux-mêmes par leur place dans les rapports sociaux et politiques réels (de manière "marxiste essentialiste" !). Nous en sommes encore à l'analyse du discours et de la théorie. Et il est vrai qu'à ce stade, c'est en effet assez "inquiétant" !

Mais rassurons-nous donc, C. Mouffe, qui "pense" avec C. Schmitt, ne préconise pas de détruire quelque ennemi que ce soit par la violence, mais seulement d'instaurer temporairement, par la voie des urnes, une "hégémonie" nouvelle. Elle prend soin de distinguer l'antagonisme de Schmitt de ce qu'elle appelle l'agonisme de la démocratie pluraliste, qu'elle entend donc préserver. Nous voila rassurés ... mais "pensons" un peu, nous aussi, "avec et contre" C. Mouffe !

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L'agon, c'est la compétition chez les citoyens grecs de l'Antiquité, fort conflictuelle, mais se situant dans le champ de la confrontation politique, rhétorique ... ou sportive. Il ne devait pas dégénérer en stasis, en guerre civile - mais c'est arrivé, souvent. La joute politique agonistique fait vivre la démocratie dans la cité en donnant forme aux conflits, sans jamais détruire la cité, ce qui se produit lorsque l'un des groupes en compétition – le démos, l'aristocratie, les nouveaux riches ...- entreprend de faire prévaloir radicalement ses intérêts. Pour être précis, l'agon évite d'entrer dans la voie de la réalisation du partage des terres et de l'abolition des dettes, ces deux revendications révolutionnaires du monde antique et au delà, qui s'accompagnent souvent, qui plus est, lorsque tel ou tel groupe entreprend de les satisfaire, de la libération collective d'esclaves. Historiquement l'exemple romain est intéressant : vers 130-120 av. J.C., les Gracques, voulant restaurer un corps civique étrillé par les inégalités, sont entrés dans la voie du partage des terres et de l'abolition des dettes. Leurs adversaires aristocratiques ont déclenché contre eux les guerres civiles romaines, au nom de la préservation de la république, conduisant à sa liquidation après des décennies de guerres généralisées dans toute la Méditerranée. L'ordre agonistique a été sauvé de la révolution sociale ... au prix de sa disparition. La compétition politique a disparu, remplacée par les joutes de rhéteurs et les jeux du cirque.

Le sens précis de la démocratie pluraliste maintenue par la confrontation agonistique, mais non antagonique, selon C. Mouffe, est que jamais le cadre social de celle-ci, que serait le capitalisme, ne prendra fin. I. Errejon enfonce le clou : le "libéralisme" veut mettre fin au conflit et donc à la politique, et le "marxisme" veut abolir "la contradiction capital-travail", passant à des "sociétés sans politique". Donc : si nous voulons préserver la politique, n'abolissons pas la contradiction capital-travail (on comprend mieux que le populisme soit disposé à être tout ce que l'on voudra, sauf une organisation de classe).

Qu'il y ait là une réaction contre de nombreux discours "marxistes", et aussi utopistes ou anarchistes, annonçant une société sans classe, ni Etat, ni politique, sans doute. Mais enfin, nous avons affaire à des gens qui se prévalent de leur capacité à "penser", et à "penser" "avec et contre", s'il vous plaît ! La notion d'"agonisme" opposée à "antagonisme" provient, disions-nous, des anciens Grecs, chez lesquels il n'y avait pas de "contradiction capital-travail". Preuve qu'on peut avoir de la "politique" sans celle-ci, non ? Que le réglement de cette contradiction là doive mettre fin au politique, au débat, aux confrontations d'intérêts, d'idées et d'objectifs, demanderait à être démontré, et ne l'a jamais été (y compris par ceux qui souhaitaient cette eschatologie). En somme, C. Mouffe et I. Errejon, ces "post-marxistes", conservent précieusement par devers eux une croyance, et une seule, de l'ancien mouvement ouvrier : celle selon laquelle en finir avec le capitalisme mettrait fin à la politique. Peu importe qu'ils tiennent la chose pour impossible ou pour dangereusement possible, le résultat est le même, puisque cette croyance devient chez eux un repoussoir. Au service d'une orientation politique précise : en finir avec le mouvement ouvrier, ne plus représenter d'intérêts de classe, unir des intérêts de classe opposés, et donc, préserver le capitalisme.

Or, il se trouve que le compère Carl Schmitt, sur ce point, était tout à fait d'accord. La contradiction capital-travail n'était pas son sujet et il entendait clairement maintenir le capitalisme. Sauf que chez lui, l'union du "peuple" sous un "chef" contre un "ennemi", maintenant au passage le capitalisme, détruisait sans états-d'âmes la démocratie pluraliste et même libérale. Cela s'appelait, permettons nous encore l'impolitesse de le rappeler, le national-socialisme, abrégé en nazisme, n'est-ce pas.

Aucun doute sur le fait que C. Mouffe est pour la démocratie pluraliste et donc qu'à ce titre, elle est bien "contre" son maître C. Schmitt. Mais démocratie pluraliste et capitalisme pour elle font bloc, sont associés. Donc, maintenir la démocratie pluraliste implique de maintenir le capitalisme, même si elle n'insiste pas trop, se contentant en général de sous-entendre ce point comme une évidence qui devrait aller de soi. Son "populisme", qui est, sinon "de gauche", en tout cas pas "de droite", se maintiendrait ainsi dans les limites d'une confrontation rigoureuse et animée, débordant la bienséance libérale, mais toujours civilisé. Pas de sang.

Qu'il soit permis d'avoir un doute, non pas sur la sincérité de l'attachement de C. Mouffe à la démocratie, mais sur le fait qu'on puisse rester civilisé en galvanisant des foules derrière un chef et contre un ennemi, tout en préservant le capitalisme. De ce point de vue, l'expérience de plusieurs gouvernements de gauche latino-américains est importante, particulièrement celle du Venezuela, qui, sous Chavez, était resté, voire véritablement devenu, une démocratie pluraliste. Mais sous Maduro ... non seulement le capitalisme, mais le paiement des dividendes aux actionnaires et créanciers impérialistes, sont préservés. Quand à la démocratie pluraliste ...

D'ailleurs C. Mouffe, devant les élans "antagonistes" d'I. Errejon qui compare la passion politique contre l'ennemi à celle des bandes de supporters d'un match de foot – une comparaison signifiante, nous y reviendrons -, lesquelles "'s'entre-tuent parfois", concède que "l'agonisme n'élimine pas l'antagonisme, c'est une façon de le sublimer." Des régimes qui "subliment" la passion de foules que l'on ne peut satisfaire sur le fond car le capital et son accumulation sont maintenus et poursuivis, il y en a eu ... et leur degré de violence, pas "antagonique" envers le capital, s'est avéré "antagonique" envers la civilisation et la culture humaines.

Nous ne sommes donc pas rassurés par la profession de foi démocrate-pluraliste "avec et contre" C. Schmitt de C. Mouffe.

Soyez quand même rassurés, notre ADN est antifasciste !

Errejon précise : "Pour nous, l'adversaire ce sont ceux d'en haut qui ont confisqué la démocratie, pas ceux d'en bas, sous prétexte qu'ils viendraient d'autres pays ou qu'ils auraient une autre couleur de peau. Ceux qui auraient ce genre d'idées, pas question de négocier ni de discuter avec eux ; pour nous, c'est une frontière infranchissable."

Avec les fascistes, racistes et xénophobes, il entend avoir des rapports "antagonistes" et pas "agoniques".

Dont acte. Mais il y a un talon d'Achille. C. Mouffe le fait ressortir elle-même. Elle explique d'abord que si "la confrontation peuple/caste" est bien de nature "agonistique", ceci signifiant clairement "qu'il ne s'agit pas d'essayer d'en finir avec la "caste" par une révolution ou un coup d'Etat" (et donc qu'il ne s'agit pas d'en finir avec elle d'une façon générale, car la "démocratie pluraliste" supposant la "confrontation agonistique" aucun des deux camps opposés ne doit être éliminé, tout au plus peuvent-ils se transformer en d'autres termes contradictoires opposés). Ces précisions étant apportées, elle demande à I. Errejon : "qui sont ceux de la caste" ?

"Leur indéfinition même fait leur pouvoir mobilisateur", répond ce dernier. Si nous étions rassurés, nous ne le sommes plus.

La "caste" et "l'oligarchie" sont les termes qui désignent, dans les trois mouvements "populistes" d'Europe occidentale, nonobstant leurs différences, que sont Podemos, la FI et le M5S, la figure de l'ennemi. Dans les deux premiers d'entre eux, peut-être même aussi dans le troisième, nul doute que ce sont les capitalistes qui sont perçus ainsi par beaucoup d'adhérents de base. L' "essentialisme" a la vie dure, forcément puisqu'il s'agit des rapports sociaux réels ... Mais dans le discours des chefs, il ne s'agit pas du capital, mais seulement de sa couche supérieure, le capital financier et boursier, lequel n'aurait pourtant aucune existence si le capital dit "productif" ne l'engendrait pas et ne recourrait pas à lui en permanence. La dénonciation de la "caste" est donc une formulation ambigüe qui se nourrit de l'existence du capital financier. Lui sont agrégés les politiciens et les gros acteurs médiatiques. Il s'agit là d'une représentation fétichisée, qui fantasme l'ennemi dans la figure du riche médiatique. Elle est indissociable des représentations traditionnelles contre la "finance cosmopolite", c'est-à-dire des représentations antisémites qui s'exprimaient ouvertement avant 1945, et à nouveau aujourd'hui dans plusieurs pays d'Europe centrale et orientale. Il est indispensable de dire et de comprendre cela pour caractériser les "populismes". En faisant ce constat, personne n'a traité I. Errejon ou J.L. Mélenchon d'antisémite. Toute tentative d'interdire que cette question soit abordée au motif que ce serait malséant, est une tentative d'interdire tout débat démocratique sérieux sur ce à quoi nous avons effectivement affaire (9).

Plus généralement la figure de l'ennemi est plastique et évolutive, ce qui semble beaucoup plaire à I. Errejon. Lui-même ne fera jamais d'un groupe ethnique ou national son ennemi, pas de doutes là-dessus. Mais la méthode de mobilisation politique qu'il théorise et promeut ne comporte en elle-même aucun garde-fou contre cela. Au contraire, en suscitant à la fois la "passion" dans la dénonciation de "la caste", sans que le but soit pour autant de transformer les conditions sociales qui fondent l'existence de la dite "caste", elle est susceptible de porter à son paroxysme passion et frustration en même temps. Dans la société capitaliste, de telles contradictions politiques ne se résolvent en général que par la désignation de boucs émissaires ne faisant pas partie du coeur de la classe dominante.

A propos du "patriotisme".

La métaphore favorite d'I. Errejon pour décrire ce que doit être la mobilisation de la foule rassemblée contre la caste est le match de foot. C'est plus qu'une métaphore : les "passions" doivent être mobilisées, explique C. Mouffe – d'autant plus qu'il s'agit d'associer des couches que leurs intérêts pourraient opposer. Dans un cadre de pensée présenté comme rationnel, le congédiement des conditions sociales concrètes en tant qu'"essentialisme" ouvre grand la porte à l'irrationnel, non pas à cet irrationnel qui est en chacun de nous, non pas aux émotions et passions d'amour et de colère qui animent évidemment tout mouvement social vivant, mais bien à l'irrationnel proprement dit, la galvanisation autour du Chef charismatique, la célébration du drapeau – I. Errejon est en quête d'un "drapeau", de l'objet -, la sensation des individus fusionnant dans le slogan, le cri, l'émulation du match. Toute une thématique de "la foule" qui remonte à Gustave Le Bon refait surface ici, qui n'est pas la même chose que la foule constituée, marchant à la lutte, faite d'individus conscients ou accédant à la conscience, de la manifestation "ouvrière", laquelle n'est pas pour autant sans chaleur et souffle.

Au final, le "peuple" qu'il s'agit de "construire" est déjà là, c'est celui des Etats-nations à défendre contre le "mondialisme" de la "caste" - cette problématique là est peut-être plus présente chez I. Errejon que chez C. Mouffe, de même que son appétence pour "la plèbe". Il me semble, dans ce cadre, significatif que les termes "patrie" et "patriotisme" soient utilisés par eux, préférentiellement à "nation". Cette évolution se retrouve chez J.L. Mélenchon, où l'idée nationale républicaine et égalitaire se mélange et fait de plus en plus place à un pathos émotionnel autour de "la patrie", terme qui renvoie à la filiation et au sol. La terre, les morts, la colline inspirée ... le sang, sont-ils si loin ?

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Qu'il soit au moins permis de poser la question. Cela d'autant plus que la non mise en cause de la "démocratie pluraliste" équivaut de fait au maintien des Etats existants. En France, J.L. Mélenchon est un défenseur conséquent des intérêts impérialistes "nationaux". En Espagne, I. Errejon est gêné et contourné envers l'Etat espagnol. Mais, conséquent, il a pris la décision de l'appeler "Espagne" et de laisser de côté la question de la monarchie. Catalogne, Pays Basque et Galicie font donc partie de "l'Espagne", même si I. Errejon se réserve une marge de manoeuvre sur ces questions.

Ils ont bon dos ...

Ajoutons rapidement quelques remarques sur les références de nos penseurs. J'en ai mentionné une qui me semble de loin la plus sérieuse et la plus problématique : Carl Schmitt. Mais celui dont on aime à prononcer le nom, comme s'il était un label de pensée profonde, c'est "Gramsci". On pourrait dire que nous assistons à la mise en scène d'une essentialisation de Gramsci ...

Il est vrai que ceci n'a rien de nouveau. Dans le PC italien de Palmiro Togliatti, qu'I. Errejon invoque régulièrement comme le grand exemple passé de réussite "national-populaire", avait commencé la fétichisation de "Gramsci" au détriment de sa pensée impossible à mettre en cage, elle. C. Mouffe sait cependant très bien à quoi s'en tenir et elle a la franchise de le dire :

" ... nous reprenons son idée de "guerre de position", la lutte à l'intérieur des institutions, mais Gramsci pensait que c'était en préparation de la "guerre de mouvement", lors de la rupture révolutionnaire. Et ça, nous l'avons laissé de côté." En effet ; et de plus la "guerre de position" de Gramsci est loin de se réduire à "la lutte à l'intérieur des institutions".

Mouffe poursuit : "Un autre exemple est que le noyau central d'une hégémonie doit toujours être une classe fondamentale, et nous avons écarté cette idée."

Que reste-t-il alors du révolutionnaire prolétarien et marxiste Antonio Gramsci ? Rien, si ce n'est des expressions qui font intelligent, telles que l'assaisonnement à tout propos d'un peu de "guerre de position". C. Mouffe et I.Errejon sont ceci dit convaincus que "si Gramsci avait vécu à notre époque, il serait arrivé à une conception semblable à la notre" !

Cette affirmation nous apprend beaucoup sur la psychologie sociale (ah,"essentialisme", quand tu nous tiens ...) de Mouffe et Errejon. Le "marxisme" dont ils ont hérité dans leur jeunesse, résultat de décennies d'impasses politiques et bureaucratiques, était d'une telle fadeur que c'est sans doute un sentiment de libération intellectuelle qui les habite, et se complète d'un sentiment universitaire de supériorité, une fois qu'ils ont rompu avec leur fétiche, "l'essentialisme", et que licence leur est donner de raconter ce qu'ils veulent.

Le traitement de Gramsci est central. Nous le retrouvons avec quelques antiennes sur Hegel dont le "travail du négatif" est assimilé à la construction du peuple contre "eux" sans que jamais la négation ne s'arrête, car, c'est bien connu, il ne faut surtout pas mener la lutte à son terme. Et nous le retrouvons envers Machiavel, tantôt avec la thématique du nouveau Prince qui construit un peuple, une véritable idée machiavélienne qui conseille d'ailleurs au dit Prince de faire une révolution sociale pour cela, tantôt avec celle de la lutte agonistique des dominants et des dominés dans la cité, dont on oublie un peu vite que Machiavel la fait persister au moyen du "retour au principe" de la république, une rinovazione ou une réformation qui est à l'origine du mot "révolution", faute de laquelle la république se corrompt et meurt.

Du réformisme ?

Daniel Tanuro, dans une contribution dont je puis reprendre la plupart des termes (11), conclut ainsi sur ce supposé "populisme" :

"Il [ce "pauvre Gramsci"] doit se retourner dans sa tombe car ce que Mouffe propose est ce que la social-démocratie a prétendu faire… et qui l’a transformée en social-libéralisme. "

Je crois toutefois qu'il est nécessaire de pousser le bouchon un peu plus loin. Le réformisme était un courant du mouvement ouvrier qui préconisait une évolution progressive. Il est peu à peu devenu un non-réformisme, rallié aux contre-réformes dites libérales. Le "populisme" reprend en effet la thématique réformiste, refusant la révolution ou l'appelant "révolution citoyenne". Mais ce n'est pas une simple reprise. D'une part, il se présente comme la réponse à la corruption des vieux partis issus du mouvement ouvrier, et cette réponse consiste à "construire le peuple", au lieu de, et contre, le fait d'agir pour la représentation politique du prolétariat. D'autre part, il y met une chaleur "plébéienne", comme dirait Errejon, "patriotique", faisant appel à la notion centrale d' "ordre", qui le situe, si l'on veut faire des rapprochements historiques, non comme une résurgence du réformisme d'un Blum ou d'un Huysmans, certainement pas, mais comme un courant "néo" au sens de Marcel Déat en 1932 (12). Cela ne veut pas dire qu'on affirme qu'il finira de la même façon. Mais c'est un droit et un devoir imprescriptibles que de mettre en débat ces éléments, un droit et un devoir envers la génération de maintenant.

VP, le 24/08/2017.

Notes:

(1) Errejon est le théoricien mais pas le chef charismatique, qui est Pablo Iglesias. Il est cependant important de noter que Podemos, par rapport à la FI et au M5S, reste l'organisation qui ressemble le plus à un parti au bon sens du terme. Cela tient au fait qu'un mouvement social l'a précédé et a permis son émergence, et que des courants existent de fait en son sein, différences qui ne sont pas négligeables.

(2) Faire de l'idéologie un facteur autonome était déjà un thème central de Laclau en 1977 dans Politics and Ideology in Marxist Theory, New Lefts Books éd.

(3) Sur la critique de l'essentialisme par les biologistes de l'évolution, qui n'a rien à voir avec l'emploi de ce terme chez Mouffe, voir le Guide critique de l'évolution, sous la direction de G. Lecointre, Belin, 2009.

(4) Errejon est naturellement convaincu que si l'initiative n'avait pas été prise alors, aucune formation politique nouvelle n'aurait vu le jour. Il est vrai que les fondateurs de Podemos ont occupé le vide laissé par gauche et extrême-gauche traditionnelles. Mais il est vrai aussi que depuis 2012 la question d'une nouvelle formation politique était posée ouvertement et massivement en Espagne.

(5) Pour des raisons qu'il serait trop long de développer ici, le mot "racisme" est par contre de moins en moins présent dans ces énumérations, qui mettent à sa place notamment l'islamophobie.

(6) Le PIR (Parti des Indigènes de la République) dit rejeter l' "intersectionnalité". En fait il choisit un seul groupe ethno-religieux au nom duquel toute forme d'oppression est pour lui légitime.

(7) "Il est permis de le dire". Car, comme de longue date pour le nazi philosophe Martin Heidegger, il n'est en fait pas permis de le dire dans certains cercles et publications. Il est d'ailleurs à craindre que la mode "populiste" n'entraîne une mode des idées soi-disant profondes de Carl Schmitt, le nazi juriste.

(8) http://clubpolitiquebastille.org/spip.php?article197 Charles Jérémie écrit, pour jeter l'anathème sur mon "auvergnate" personne ("Vincent Présumey écrit beaucoup de sa bonne Auvergne, parfois des choses intéressantes."), que "Ainsi, faire découler de Chantal Mouffe, Carl Schmitt and Co un possible antisémitisme est tout à fait insensé. Imbuvable." . Que penser d'un "ashkénaze" prenant la défense de ... Carl Schmitt contre un "auvergnat"!? Il est vrai qu'on apprend dans le même article que "En France dans le mouvement ouvrier, il n’y a qu’un exemple de contamination antisémite.", celui des néos, et encore seulement à la fin des années trente ! Décidément, oui, "L'ignorance n'a jamais servi de rien à personne" (Spinoza).

(9) Tel est bien le sens de l'interdit jeté par C.Jérémie contre la soi-disant accusation d'antisémitisme envers Mélenchon, dans l'article en lien à la note précédente. "Stigmatiser me lasse", écrit-il plus haut. Il doit donc ressentir une grande lassitude.

(11)

https://blogs.mediapart.fr/jean-marc-b/blog/120817/le-mom...

(12)

https://blogs.mediapart.fr/robert-duguet/blog/040817/l-hi...

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lundi, 28 août 2017

Feuerbach et la copie de christianisme vers 1860

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Feuerbach et la copie de christianisme vers 1860

par Nicolas Bonnal

Ex: http://www.dedefensa.org

J’ai écrit sur ce sujet, citant le fameux texte de Swift qui se demande avec quoi on pourra remplacer le christianisme en 1707 (voyez Paul Hazard). Dans ses lettres si perçantes, Montesquieu se moque du pape, « vieille idole qu’on encense par habitude. » Un siècle après Michelet se demande, à propos de la fin du moyen âge, ce que la religion fait encore en occident (elle attendait Bergoglio !) et impute son maintien à l’habitude et à l’éducation, ce qui n’est pas si faux, la natalité catholique dans les classes privilégiées s’étant bien maintenue. Seule une poignée de chrétiens, souvent socialistes alors, se révoltèrent contre l’involution des bourgeoisies dévotes, des patrons bien féroces, des clergés plus ou moins pédophiles et les démocraties chrétiennes que Bayrou ou Merkel ont célébrées et accompagnées comme une cohorte d’euphoriques démoniaques. Car on ne m’empêchera pas de dire ce que j’ai à dire sur ce sujet pointu. L’Eglise catholique romaine est un des bras désarmants de Soros, du mondialisme et du trotskysme de la fin.

Et si cette Eglise n’a peut-être pas de divisions au sens de Staline, elle en est une.

J’en viens à Ludwig Feuerbach.

Feuerbach est un grand philosophe athée qui a exercé une grande influence, y compris stylistique, sur des maîtres tels que Karl Marx ou Guy Debord.

Dans l’introduction à la deuxième édition de son livre sur le christianisme, il écrit ces phrases très justes et très sensées, qui annoncent notre ère postmoderne du simulacre et de la simulation, pour reprendre une expression que Baudrillard puis le film Matrix ont rendue célèbre. On est à l’époque de Flaubert ou Dostoïevski qui eux aussi se moquent comme ils peuvent du pseudo-christianisme de leur époque (voyez l’ignoré Idiot ou bien sûr Bouvard et Pécuchet).

Et cela donne :

« Pour ce temps-ci, il est vrai, qui préfère l’image à la chose, la copie à l’original, la représentation à la réalité, l’apparence à l’être, cette transformation est une ruine absolue ou du moins une profanation impie, parce qu’elle enlève toute illusion. Sainte est pour lui l’illusion et profane la vérité. »

Feuerbach pressent la falsification de la société de l’image avant que celle-ci n’apparaisse. Mais le télégraphe, mais la presse, mais l’agence Reuters, mais la photographie sont déjà là… La société de l’ineptie actuelle est déjà là, et son abjection spirituelle qui se reconnaît dans le nullissime pape François qu’elle accepte sans broncher.

Feuerbach comprenait comme le jeune Marx de la question juive que Rome n’est plus dans Rome, que le chrétien moderne n’est pas vraiment chrétien. Il est coquet et sans caractère (pensez au mensch ohne eigenschaften, l’homme sans qualités de Robert Musil):

feuerbach2Q1RFEM3L._SX195_.jpg« J’ai déclaré par conséquent que, pour trouver dans le christianisme un digne objet d’étude, j’avais été obligé de faire abstraction du christianisme moderne, dissolu, confortable, épicurien, coquet et sans caractère, et de me reporter dans ces temps où la fiancée du Christ, vierge encore, chaste et pure, n’avait pas mêlé à la couronne d’épines de son fiancé céleste les roses et les myrtes de la Vénus païenne, dans ces temps où, pauvre en vérité des trésors de la terre, elle était riche et heureuse dans la jouissance des mystères d’un amour surnaturel. »

Puis Feuerbach enfonce le clou ; et à notre époque de culte papiste (papimane, disait déjà le pauvre Rabelais), ces phrases ne feront pas de mal à certains – et en confirmeront d’autres dans leurs prévarications (comme le remarque à ses frais mon amie Béatrice du site Benoit-et-moi.fr, on adore encore, on adore toujours les chasses aux sorcières et on est toujours prêt à accompagner la police de la pensée athée et multiculturelle pour les mener en humant l’odeur de la chair rôtie) :

« Depuis longtemps la religion a disparu et sa place est occupée par son apparence, son masque, c’est-à-dire par l’Eglise, même chez les protestants, pour faire croire au moins à la foule ignorante et incapable de juger que la foi chrétienne existe encore, parce qu’aujourd’hui comme il y a mille ans les temples son encore debout, parce qu’aujourd’hui comme autrefois les signes extérieurs de la croyance sont encore en honneur et en vogue. »

Feuerbach parle déjà, parle déjà, assez génialement je dois dire, de monde moderne, ce monde que les vrais chrétiens comme Léon Bloy ou Chesterton condamneront une génération plus tard en invoquant à tort ou à raison le moyen âge :

« Ce qui n’a plus d’existence dans la foi, — et la foi du monde moderne, comme cela a été prouvé à satiété par moi et par d’autres, n’est qu’une foi apparente, indécise, qui ne croit pas ce qu’elle se figure croire ; — ce qui n’existe plus dans la foi, doit, on le veut à toute force, exister dans l’opinion; ce qui en vérité et par soi-même n’est plus saint doit au moins le paraître encore. »

La foi est remplacée par l’opinion. Le mot doxa est ainsi promis à une riche manipulation. Je vous laisse découvrir ce grand auteur, qui n’est pas là vous ôter la foi, mais vos illusions sur la religion modernisée, cent ans avant le culte de l’abjection vaticane.

J’ajouterai ce morceau du meilleur guide de voyages de tous les temps, le voyage en Espagne de Théophile Gautier :

« Le peuple aussi commence à calculer combien vaut l’or du ciboire ; lui qui naguère n’osait lever les yeux sur le blanc soleil de l’hostie, il se dit que des morceaux de cristal remplaceraient parfaitement les diamants et les pierreries de l’ostensoir ; l’église n’est plus guère fréquentée que par les voyageurs, les mendiants et d’horribles vieilles, d’atroces duenhas vêtues de noir, aux regards de chouette, au sourire de tête de mort, aux mains d’araignée, qui ne se meuvent qu’avec un cliquetis d’os rouillés, de médailles et de chapelets, et, sous prétexte de demander l’aumône, vous murmurent je ne sais quelles effroyables propositions de cheveux noirs, de teints vermeils, de regards brûlants et de sourires toujours en fleur. L’Espagne elle-même n’est plus catholique ! »

Léon Bloy, encore et toujours :

«Et ce cortège est contemplé par un peuple immense, mais si prodigieusement imbécile qu'on peut lui casser les dents à coups de maillet et l'émasculer avec des tenailles de forgeur de fer, avant qu'il s'aperçoive seulement qu'il a des maîtres, — les épouvantables maîtres qu'il tolère et qu'il s'est choisis. »

Sources

Ludwig Feuerbach – L’essence du christianisme (préface à la deuxième édition)

Théophile Gautier – Voyage en Espagne, ch.14.

Paul Hazard – La crise de la conscience européenne

Nicolas Bonnal – Comment les peuples sont devenus jetables (Amazon.fr)

dimanche, 27 août 2017

»Verblendete Realitätsverweigerer« - Vom SPD-Parteisoldaten zum AfDler

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»Verblendete Realitätsverweigerer«

Vom SPD-Parteisoldaten zum AfDler

Guido Reil rechnet im PAZ-Interview mit der Sozialdemokratie ab

Ex: http://www.preussische-allgemeine.de

Guido Reil (47) kann auf eine klassische SPD-Karriere zurück-blicken. Er war 26 Jahre Parteimitglied im Ruhrgebiet, der sogenannten Herzkammer der deutschen Sozialdemokratie. Geradezu typisch auch sein beruflicher Werdegang: Er absolvierte eine Ausbildung im Bergbau, war dort Steiger und fungiert als Gewerkschafter. In der Kommunalpolitik war er als Bezirksvertreter tätig. Außerdem ist er Ratsherr in seiner Heimatstadt Essen. 2016 verließ Reil demonstrativ die SPD und wurde wenige Monate später Mitglied der Alternative für Deutschland (AfD), die er auf dem Weg zur Volkspartei sieht. Über Motive und Hintergünde seines politischen Weges sprach Bernd Kallina in Essen mit Guido Reil.

PAZ: „Mehr SPD ging nicht“, sagen Sie im Rückblick auf Ihre jahrzehntelange Mitgliedschaft in der ältesten deutschen Partei. Trotzdem haben Sie die Sozialdemokratie vergangenes Jahr plötzlich verlassen. Das muss schwerwiegende Gründe gehabt haben. Welche?
Guido Reil: Es gab mehrere Gründe. In erster Linie hing das mit einer anhaltenden Realitätsverweigerung des heutigen Establishments der SPD zusammen. Das Hauptproblem bei diesen Berufspolitikern besteht darin, dass sie mit dem wahren Leben der kleinen und lohnabhängigen Menschen, mit den Arbeitern und Angestellten, also mit denjenigen, deren Interessen sie eigentlich vertreten sollten, nichts mehr zu tun haben.

PAZ: Wie erklären Sie sich diese Distanz?
Reil: Sie kennen das ganze Leben der Menschen an der Basis zu wenig, wenn überhaupt! Diese Realitätsverweigerer, wie ich sie bezeichne, sind hier in erster Linie Akademiker, die über mehrere Semester – meist im sozialwissenschaftlichen Bereich – Theoriearbeit geleistet haben. Nichts gegen Theoriearbeit. Nur hat sie bei vielen zu einer unglaublichen Distanz zum wirklichen Leben der einfachen Leute geführt, oftmals gepaart mit linksideologischer Utopiegläubigkeit, die nicht weiterführt, sondern konkrete Problemlösungen erschwert! In aller Regel ist dieser Personenkreis schon sehr jung in die Parteiarbeit eingestiegen, hat sich hochgedient und gleichzeitig Kadavergehorsam gelernt. Denn wer querschießt, auch mit besten Argumenten, kann seine Parteikarriere frühzeitig begraben. Die SPD steht mit diesem Missstand allerdings nicht alleine, unsere alten Parteien sind allesamt streng und straff durchorganisiert. Wer da aufmuckt, muss eine Hausmacht haben, und die hatte ich, weil ich wusste, die Leute stehen hinter mir.

PAZ: Wann kam es dann zum eigentlichen Bruch? War es die Asylkrise?
Reil: Zunächst war es die Tatsache, dass ich seit 2005 den grundsätzlichen Kurs der SPD nicht mehr verstanden habe. Meine Parteifreunde hatten eigentlich nur noch Interesse am Verbleib in der Regierungskoalition. Dann hatten wir einen massiven Zuzug von Migranten aus Rumänien und Bulgarien seit 2010 und ein paar Jahre später die alles übertreffende Flüchtlingskrise seit September 2015. Sie erwies sich gewissermaßen als Speerspitze einer strategischen Fehlentwicklung, die im Land und in den Kommunen massiv ankam und das Fass zum Überlaufen brachte. Ich sage ganz klar: Der überwiegende Teil dieser Menschen war keine Bereicherung für unsere Gesellschaft. Ich meine nicht nur Kriminelle, sondern auch Zuwanderer, die sich durch Schwarzarbeit ernähren und dabei gnadenlos ausgebeutet werden. Hinzu kommt eine Vielzahl von Migranten, die sich überhaupt nicht integrieren wollen und ganz bewusst zur Entstehung von konfliktträchtigen Parallelgesellschaften in unserem Land beitragen. Offenkundig ist auch, dass große Bereiche von schwerster Kriminalität Migranten aus dem Balkan zuzurechnen sind. Da wird zum Beispiel Kindergeld von Kindern aus dem Ausland bezogen, die es gar nicht gibt, und viele andere Gesetzwidrigkeiten, die von unseren Parteivertretern, allen voran der SPD, in den Parlamenten schlicht und einfach hingenommen werden. Das macht den eigentlichen Skandal aus.

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PAZ: An welche anderen Gesetzwidrigkeiten denken Sie dabei?
Reil: Ich denke an Menschen aus dem Libanon, die ohne Pässe schon vor Jahrzehnten zu uns kamen und noch heute enorme Schwierigkeiten bereiten. Wir haben es dabei auch mit organisierter Kriminalität schwerster Art zu tun, vor allem in Berlin, Hamburg und Essen. Ich habe dies als ehrenamtlicher Richter in Essen hautnah miterlebt. Da gibt es zum Beispiel Libanesen, die gleich viermal nach arabischem Recht verheiratet sind und für vier Familien Sozialhilfe auf unsere Steuerkosten kassieren. All das passiert ohne wirksame Gegenmaßnahmen!

PAZ: Aber das müssten Ihre damaligen sozialdemokratischen Parteifreunde doch auch registriert haben?
Reil: Eben nicht! Ich hatte nie das Gefühl, dass sie die himmelschreiende Problematik ernsthaft interessiert hätte. Es war vielmehr so, dass ich, der die unhaltbaren Zustände immer wieder aufgriff, dafür massiv beschimpft wurde, auch vom Integrationsrat der Stadt Essen. Ich wurde als Rassist und angeblicher Fremdenfeind gebrandmarkt und als „Nazi-Sozi“ an den Pranger gestellt. Oder, das war dann die andere Flucht-Variante vor Verantwortung, mir wurde beschwichtigend entgegengehalten, dass es sich doch nur um marginale Einzelfälle handle, die man nicht überbewerten dürfte.

PAZ: Wie erklären Sie sich diese Ablenkungs- und Verdrängungssymptome?
Reil: Das heutige SPD-Parteiestablishment will die ganze Misere aus ideologischen Gründen nicht wahrhaben. Multi-Kulti muss aus dessen Sicht immer eine Bereicherung sein. Abweichungen vom Idealbild werden nicht ernsthaft zur Kenntnis genommen. Dabei handelt es sich aber um eine ideologisch bedingte Wahrnehmungsstörung mit staatspolitisch gemeingefährlichen Auswirkungen für unser Land.

PAZ: Welche Lösung schlagen Sie vor?
Reil: Die Lage ist durch jahrelange Fehlentwicklung leider sehr verfahren, und eine Ideallösung habe ich auch nicht parat, aber es gibt eine ganze Menge Lösungsansätze. Fangen wir bei der Flüchtlingsproblematik an, dem entscheidenden Punkt, bei dem bei mir das Fass zum SPD-Austritt endgültig übergelaufen ist. Wichtig ist: Man muss die Probleme offen ansprechen, das ist der aller-erste Schritt. Ich habe die Bilder vor den Bahnhöfen doch gesehen, mit den Tausenden von jungen Männern – und nachdem ich weiß, wo diese Menschen landen, nämlich bei uns, wo die ungelösten Probleme schon übergroß sind und durch weiteren Zuzug noch verschärft werden. Dem Ruhrgebiet und insbesondere dem Essener Norden geben diese nicht zu bewältigenden Menschenmassen endgültig den Rest! Das musste ich doch massiv thematisieren, auch gegen Widerstände. Deswegen hatte ich ja im Herbst 2015 zu Demonstrationen vor Ort aufgerufen, die dann von oben, das heißt von der damaligen NRW-Ministerpräsidentin Hannelore Kraft SPD-intern verboten wurden.

PAZ: Nicht nur Frau Kraft, vor allem die Jungsozialisten hatten Sie schon frühzeitig auf dem Kieker und deckten Sie mit Nazi-Vorwürfen ein. Herr Reil, meinten sie das wirklich ernst oder waren das nur Totschlag-Argumente gegen einen parteiinternen Gegner?
Reil: Ich habe mir diese Frage zu Beginn der jahrelangen Auseinandersetzungen auch oft gestellt und muss heute leider sagen: Ja, eine deutliche Mehrheit dieser Jusos sind tatsächlich so verblendet. Die glauben das wirklich! Die sehen in jedem, der für Zuzugsbegrenzungen von Migranten eintritt, einen Nazi! Deswegen sind sie auch so aggressiv. Man kann mit denen gar nicht vernünftig reden. Ich habe mehrfach versucht, mit ihnen zu einem fairen Dialog zu kommen. Das ging nicht. Die bekommen sofort Schaum vor dem Mund und fangen an zu schreien. Ein rationaler Dialog mündiger Bürger, immerhin das Erziehungsziel der Bundesrepublik Deutschland in Abgrenzung zur NS- und SED-Diktatur, ist mit diesen Leuten, so wie ich sie kennenlernte, nicht möglich. Aber ich muss noch ergänzen: Mit der Faschismuskeule fuchtelten nicht nur die jungen, unerfahrenen Jusos wild herum, auch einige etablierte Sozialdemokraten schlossen sich dieser Totschlagsgebärde an.

PAZ: Nun gab es in den vergangenen Jahren und Jahrzehnten eine ganze Reihe von anerkannten, ja berühmten Sozialdemokraten, die vor grenzenloser Zuwanderung nach Deutschland und Europa warnten. Otto Schily hielt schon 1998 die Grenze der Belastbarkeit Deutschlands durch Zuwanderung für überschritten. Nicht zuletzt Helmut Schmidt sprach im Interview mit der „Frankfurter Rundschau“ angesichts massiver Migration von der ernsten Gefahr einer, so wörtlich, „Entartung der Gesellschaft“. Warum sind diese klaren Worte staatsmännischer Verantwortungsethik in der heutigen SPD keine handlungsleitenden Vorbilder mehr?
Reil: Weil die, die jetzt und in den vergangenen Jahren in der Verantwortung standen, in keiner Weise mehr in der traditionellen Sozialdemokratie verwurzelt sind. Ich habe die Sozialdemokratie sozusagen noch mit der Muttermilch aufgenommen und habe SPD-Genossen und Gewerkschaftssekretäre von altem Schrot und Korn kennengelernt, die waren ganz nah am Volk. Auch Herbert Wehner hat schon in den 80er Jahren eindringlich vor einer übertriebenen Multikulturalisierung gewarnt. Helmut Schmidt, Sie erwähnten ihn, ist und bleibt für mich der größte Sozialdemokrat der Bundesrepublik, nicht nur wegen seiner realistischen Einschätzung in der Zuwanderungsfrage. Doch das will man heute in der SPD nicht mehr wahrhaben und erleidet dadurch Schiffbruch.

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PAZ: Nach Ihrem SPD-Austritt und vor allem durch Ihren Wechsel zur Alternative für Deutschland, AfD, mussten Sie viele Ausgrenzungen und Schikanen hinnehmen. Welche waren besonders belastend?
Reil: Ja, die Auseinandersetzungen zwischen den politischen Lagern, vor allem im ausufernden „Kampf gegen Rechts“, haben an Härte und Brutalität enorm zugenommen. Konkret: Mein Haus wurde beschmiert, das Auto meiner Frau völlig zerstört. Rein materiell ein Gesamtschaden in Höhe von 14000 Euro.

PAZ: Das sind ja ähnliche Vorkommnisse wie in Rheinland-Pfalz beim dortigen AfD-Landesvorsitzenden Uwe Junge, oder?
Reil: Bei meinem Parteifreund Junge war die Gewaltanwendung noch schlimmer. Bei ihm drangen Extremisten ins Haus ein und verwüsteten es. Außerdem haben sie ihn auch tätlich angegriffen. Das ist schon eine Nummer krasser als bei mir – vorläufig. Aber: Hätte ich nicht Personenschutz in letzter Zeit gehabt und wären bei meinen Auftritten nicht ständig Polizisten dabei, ich befürchte, dass ich manche Konfrontation nicht heil überstanden hätte, so zum Beispiel bei der traditionellen Maikundgebung in diesem Jahr. Eine Hundertschaft Polizei musste einschreiten, sonst hätten mich fanatisierte Gegendemonstranten sicherlich gelyncht. Das ist jetzt keine Übertreibung, Video-Aufzeichnungen belegen die erschreckenden Szenen eindeutig! Und ich muss gestehen: Als ich hautnah in die Augen dieser aufgeputschten und hasserfüllten Menschen gesehen habe, stieg in mir Angst auf, obwohl ich bestimmt kein Weichei bin! Es ist mir unheimlich, was sich da zum schlechten Stil der politischen Auseinandersetzung leider entwickelt hat.

PAZ: „Was mir auf der Seele brennt!“ heißt der Untertitel Ihres im April erschienen Buches „Wahrheit statt Ideologie“. Was liegt Ihnen beim Blick in die Zukunft besonders auf der Seele?
Reil: Mein Hauptziel ist die Ent-Dämonisierung der AfD. Der einzige Grund, warum die AfD noch nicht die Stimmenanteile hat, die sie eigentlich haben müss­te, ist eine geschlossene, sogenannte Volksfront gegen sie. Fast alle gesellschaftlich relevanten Gruppen agitieren gegen diese junge und aufstrebende Partei: Kirchen, Parteien, mit Steuergeldern finanzierte Anti-Rechts-Gruppen und ein Großteil unserer Leitmedien. Uns wird dabei immer unterstellt, wir hätten Vorurteile. Aber ich frage Sie: Warum wählen die Leute genau dort, wo sie den Migranten besonders ortsnah verbunden sind, in den sogenannten Mulitikulti-Zonen, warum wählen diese Bürgerinnen und Bürger verstärkt die AfD? Da frage ich mich doch, wer hat denn hier nachvollziehbare Vorurteile? Die hat doch der, der von etwas spricht, wovon er keine Ahnung hat.

Die Entzauberung der Welt

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Die Entzauberung der Welt

Stefan Martin

Ex: http://aka-blaetter.de

Immer deutlicher treten die Fehlentwicklungen der Moderne zu Tage. Werner Kunze beschäftigt sich mit der Frage, ob die Moderne noch zukunftstauglich ist. Herausgekommen ist eine brillante Analyse des herrschenden Zeitgeistes.

Das Unbehagen an der Moderne wächst. Es mehren sich die Stimmen derer, die eine kritische Bestandsaufnahme fordern. „Die herrschende Kultur des Westens ist ganz ersichtlich an immanente Grenzen gestoßen, sie ist erschöpft, wie nach einer durchtanzten Nacht, ihr Make-up rissig“ konstatiert der Bundesverfassungsrichter Udo Di Fabio in seinem 2005 erschienen Buch „Die Kultur der Freiheit“.

Die Epoche der Moderne beginnt mit der Französischen Revolution und ihrer populären Forderung nach Freiheit, Gleichheit und Brüderlichkeit. Der Königsberger Philosoph Immanuel Kant gibt den Leitspruch der Aufklärung „Sapere aude. Habe Mut, dich deines eigenen Verstandes zu bedienen“ aus. Fortan soll der Mensch ein selbstbestimmtes, von allen gesellschaftlichen und religiösen Zwängen befreites Leben führen. Ratio und Vernunft stehen im Zentrum der Bewegung. Die Aufklärer glauben zutiefst an die Veränderbarkeit der politisch-sozialen Verhältnisse. Nicht wenige, wie der Franzose Auguste Comte (1798–1867) sehen in dem aufkeimenden Zeitalter der Moderne das finale, unübertreffliche Stadium der Geschichte.

Und heute, so fragt Werner Kunze: Haben sich die weitreichenden Hoffnungen und Erwartungen der Gesellschaftsingenieure von 1789 erfüllt? Zweifellos hat der wissenschaftlich-technische Fortschritt eine bewundernswerte Verbesserung unserer materiellen Lebensverhältnisse bewirkt. Wir leben gesünder, behaglicher und komfortabler als jemals zuvor. Aber sind wir auch glücklicher? Augenscheinlich ist dem nicht so. Die rapide Abnahme der Geburtenzahl in Deutschland, das Auseinanderbrechen der Familienbande – von der Politik oft verharmlosend als Patchwork-Glück dargestellt – und die drastische Zunahme psychischer Erkrankungen wie Burn-Out und Depression sprechen für sich und können, so Werner Kunze, von Menschen guten Willens nicht länger ignoriert werden. Ein ganzes Heer von Psychologen, Psychiatern und Sozialarbeitern ist mittlerweile nötig, um die psychischen Schäden in unserer Gesellschaft wenigstens oberflächlich zu behandeln.

Der Fortschritt wird’s schon richten!

Wie stellt sich die Moderne uns heutigen Zeitgenossen dar? Der Autor nähert sich der Frage aus der Vogelperspektive, um das große Ganze besser in den Blick nehmen zu können. Er hofft so, zu übergeordneten Erkenntnissen zu gelangen, denn „wer sich nur in der Froschperspektive bewegt, braucht sich nicht zu wundern, wenn er zumeist nur Schlamm und Dreck sieht“. Zu den Charakteristika der Moderne zählt Kunze die enthemmte Beschleunigung, die Ausrichtung des einzelnen an der Masse, eine nie da gewesene Konzentration auf das Materielle mit Geld als universellem Bewertungsmaßstab sowie die offenkundige Orientierungs- und Ziellosigkeit der gesellschaftlichen Eliten. Der Fortschritt wird’s schon richten!

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Die Beschleunigung hat nahezu alle Lebensbereiche erfasst. Das Rad der Moderne dreht sich schneller und schneller. Wo das Ziel abhanden kommt, werden Tempo und Schnelligkeit zum Selbstzweck erhoben.  Besonders offenkundig wird dies in der Politik. Was heute noch im Brustton der Überzeugung verkündet wird (die Renten / die Banken etc. sind sicher, der Mindestlohn / die Wehrpflicht / die Atomkraft etc. stehen nicht zur Debatte), ist schon morgen Schnee von gestern.

Ein weiteres Kennzeichen der Moderne sieht Kunze in der Vermassung: Massenmedien, Massengeschmack, Massenverhalten. Niemand zwingt uns, groteske Casting-Shows anzuschauen und Dieter Bohlen dabei zu beobachten, wie er vor laufender Kamera Minderjährige bloßstellt. Auch unsere Daten im „sozialen Netzwerk“ Facebook hinterlegen wir ganz freiwillig. Der allseits propagierte Individualismus steht dabei in krassem Gegensatz zur freiwilligen Ausrichtung des Individuums an der Masse. Trashfernsehen, Facebook & Co. sind auffälliger Ausdruck dieses Zeitgeist-Phänomens.

Nicht zuletzt ist es die einseitige Betonung des Materiellen, die den Zeitgeist prägt. Mehr als 200 Jahre nach dem Beginn der Aufklärung hat die materialistische Weltanschauung, nach der nur das als existent gilt, was sich nach naturwissenschaftlichen (und damit vermeintlich objektiven) Gesetzmäßigkeiten erklären lässt, auf ganzer Linie gesiegt. Längst ist der Materialismus in den Bereich des Privaten übergeschwappt. Von der Beherrschung der Natur durch den wissenschaftlich-technischen Fortschritt ist es nur noch ein kleiner Schritt zur Beherrschung der zwischenmenschlichen Angelegenheiten. Menschliche Beziehungen werden verzweckt. Oder wie es der Soziologe Aldo Haesler jüngst in der ZEIT ausdrückte: „Heute dienen menschliche Beziehungen als Rohstoff, um einen künstlichen Mehrwert herzustellen. In unserer Vorstellung ist jede Beziehung ein potentielles Win-Win-Spiel.“ Networking nennt man das auf Neudeutsch.

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Immaterielle menschliche Bedürfnisse wie Geborgenheit, Liebe, Gefühle, Ästhetik und Phantasie bleiben zunehmend auf der Strecke. Völlig zu Recht beklagt der Autor eine Halbierung des Menschen: „Heute gilt es als chic, cool zu sein, nüchtern, distanziert, emotionsfrei. Wir sprechen vom falschen Pathos, kennen aber auch kein richtiges mehr. Wir sind innerlich ärmer, weil rationaler geworden.“ Den Preis für die unser gesamtes Leben durchdringende Intellektualisierung und Rationalisierung hat Max Weber bereits 1919 benannt: Die Entzauberung der Welt. Wehmütig erinnert Kunze an die nach zwei verlorenen Weltkriegen verschüttet gegangene Tradition des deutschen Idealismus. Noch Fichte, Hölderlin, Hegel und Schelling sahen den Menschen als ganzheitliches Wesen mit einem elementaren Bedürfnis nach Sinn und Methaphysik. Besonders angetan haben es ihm die deutschen Romantiker. Hier gerät Kunze nachgerade ins Schwärmen:  „Der Romantik gebührt das Privileg, sich als erste Bewegung mit den grundsätzlichen Fragen der Moderne kritisch auseinandergesetzt zu haben. Sie behält einen Ehrenplatz als eine der schönsten und sympathischsten Blüten am prächtigen Baum der deutschen Kultur- und Geistesgeschichte“. In der romantischen Hinwendung zu Gemüt, Gefühl, Freundschaft und Liebe erblickt er einen nach wie vor existenten, heute jedoch leider fast ausgetrockneten Teil der deutschen Volksmentalität. Sehr früh habe sich die deutsche Romantik gegen den kalten Rationalismus gewandt und mit Leidenschaft versucht, der Tradition, der Gefühlsseite des Menschen, der Poesie und der Musik ihren Platz zu geben.

Wie anders die heutigen Zeiten! Von Transzendenz und Religion erwarten wir schon lange keinen Halt mehr. Das letzte soziale Band in unserer Gesellschaft scheint das Geld zu sein. Wo menschliche Nähe, Empathie und Geborgenheit zum knappen Gut verkommen und Gefühle bestenfalls als peinlich gelten, fungiert das immer unsichtbarer werdende Geld als letztes Schmiermittel im Räderwerk der modernen Gesellschaft. Man mag sich gar nicht vorstellen, was passiert, wenn sich die materiellen Lebensverhältnisse – beispielsweise in Folge einer  weiteren Eskalation an den Finanzmärkten oder der plötzlichen Verknappung fossiler Energieressourcen – merklich verschlechtern.

Zu den Paradoxien der Moderne gehört, dass sich viele der aufklärerischen Ideen in ihr Gegenteil verkehrt haben. Stichwort: freie Meinungsäußerung. Heutzutage wird jeder, der gegen die vom Zeitgeist verordneten Dogmen verstößt, an den medialen Pranger gestellt. Zu diesem Dogmenbestand zählen: Das Individuum hat Vorrang vor der Gemeinschaft, alle Menschen sind prinzipiell gleich, der Mensch ist von Natur aus gut, Prägungen durch Herkunft, Abstammung, Begabung, Vererbung existieren nicht oder sind irrelevant. Wer vom vorgegebenen Tugendpfad (Thilo Sarrazin, Eva Herman) abweicht, wird zum Abschuss freigegeben. Mit Meinungsfreiheit hat das freilich nichts mehr zu tun. Die modernen Tugendwächter, die ständig auf der Lauer liegen, um Verstöße gegen die Political Correctness aufzuspüren und anzuprangern, haben augenscheinlich ihren John Stuart Mill (1806–1874) nicht gelesen. In seiner Schrift „Über die Freiheit“ weist Mill eindringlich auf die Gefahr des Despotismus über das Individuum hin: „In der Diskussion darf keine Meinung, mag sie noch so vereinzelt sein, unterdrückt werden. Denn wie können wir sicher sein, ob die Meinung, die wir uns anschicken zu unterdrücken, eine falsche Meinung ist?“ Vor der Gefahr des „Despotismus der Gesellschaft über das Individuum“ sind auch so genannte offene Gesellschaften nicht gefeit.

Eindrucksvoll führt Kunze dem Leser die Kollateralschäden der Moderne vor Augen. Jede dritte Ehe in Deutschland wird geschieden, in Großstädten gar jede zweite. 37 % aller erwachsenen Frauen leben als Single. Die Zahl der Patchwork-Familien steigt kontinuierlich. Logische Folge der Auflösung der Familienbande (im Zusammenspiel mit der rasenden Beschleunigung des Lebens) ist die starke Zunahme psychischer Erkrankungen wie Burn-Out und Depression, deren Behandlung 2008 Kosten von knapp 15 Milliarden Euro verursachte. Neben Managern, Sozialarbeitern und Akademikern sind in zunehmendem Maße Kinder und Jugendliche davon betroffen.

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Die Bilanz der 68er „Kultur“-Revolution ist verheerend

Auch die Bevölkerungsentwicklung gibt Anlass zur Sorge: Die Geburtenrate in Deutschland ist seit der 68er-Kulturrevolution um die Hälfte (!) gesunken. Demographieforscher können die weitere Entwicklung ziemlich genau vorhersagen: In 100 Jahren werden noch ca. 25 Millionen Deutsche in unserem Land leben. Der eigentliche Skandal besteht laut Kunze darin, dass „unsere Volksvertreter mitsamt den öffentlichen Medien kein Wort des Entsetzens oder auch nur des Bedauerns über die Katastrophe verlieren, dass die jahrhundertelange Geschichte der Deutschen im 21. Jahrhundert endgültig und unwiderruflich zu Ende geht.“

Die düstere Stimmungslage in Deutschland drückt sich nicht zuletzt in der wachsenden Distanz der Menschen zur Demokratie aus. Nach einer im September 2009 veröffentlichten Umfrage sind gut zwei Drittel der Deutschen überzeugt, „von den Parteien belogen zu werden.“ Jeder dritte Deutsche hat kein Vertrauen mehr in die Demokratie.

Wie konnte es dazu kommen? Die Ursachen für die besorgniserregende Entwicklung in Deutschland sieht Kunze in der 68er Bewegung, an der er kein gutes Haar lässt. Keineswegs handele es sich dabei um eine längst vergangene Protestbewegung Flower Power bewegter Studenten, sondern um manifestierten Zeitgeist. Dieser trete als „unsichtbarer Dirigent auf, den niemand ausdrücklich gerufen hat, dem sich aber fast alle beugen.“ Als Ahnherren der 68er Bewegung macht Kunze den Philosophen Jean Jacques Rousseau (1712–1778) aus. In dessen 1755 veröffentlichter Schrift „Abhandlung über den Ursprung der Ungleichheit unter den Menschen“ stellt Rousseau die Behauptung auf, der Mensch sei von Natur aus gut und erst durch Kultur und Zivilisation verdorben worden. Anders ausgedrückt: Wenn wir den guten Menschen wieder auffinden wollen, müssen wir zur Natur zurück. Die 68er-Adepten der Frankfurter Schule um Adorno, Horkheimer und Marcuse griffen Rousseaus These vom „guten Menschen im Naturzustand“ begierig auf und verleibten sie ihrer verqueren Philosophie ein. Seither gehört es zur festen Überzeugung der 68er und ihrer Nachfahren im Geiste, den Menschen von den Zwängen und Verpflichtungen des Staates, der Arbeit, der Familie, der Gesellschaft etc. zu befreien.

Tatsächlich trifft Kunze hier einen wunden Punkt. Das Gesellschaftsbild der 68er beruht auf einem naiven und vollkommen realitätsfremden Menschenbild. Die Mär vom „edlen Wilden“ ist durch moderne Forschung längst widerlegt (selbst den Hippies ist es mit Drogenunterstützung nicht gelungen, dem paradiesischen Naturzustand näher zu kommen). In der Abrechnung mit der 68er Generation entfacht Kunze einen wilden Furor. Ihre Weigerung, die Ambivalenz des Menschen anzuerkennen, zeuge von mangelndem Realitätssinn und ideologischer Verblendung. Der Mensch sei eben nicht nur vernünftig und gut, sondern bisweilen auch egoistisch, verantwortungslos und niederträchtig. Mit Verve prangert er die Radikalität an, mit der die 68er gewachsene kulturelle Errungenschaften, angefangen von bürgerlichen Tugenden bis hin zu staatlichen Institutionen, zerstört haben.

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Es gibt sie noch, die blaue Blume

Die Symptome sind damit benannt. Doch welche Therapie empfiehlt Kunze? Es geht nicht ohne die Ergänzung durch die Kant’sche Pflichtethik, insbesondere nicht ohne die Ausrichtung am Gemeinwohl. Es geht nicht ohne die Reaktivierung von bürgerlichen Tugenden wie Fleiß, Anstand, Verlässlichkeit und Verantwortungsbewusstsein. Es geht nicht ohne die Rückbesinnung auf bewährte Traditionen. Es geht zuallerletzt nicht ohne die Rückeroberung der Meinungsmacht im Lande.

Und des Autors persönlicher Wunsch? „Eine gewisse Rückbesinnung auf die Romantik. Von Zeit zu Zeit und bei passender Gelegenheit. Es gibt sie noch, die blaue Blume, sie hat sich nur vor den profanen Blicken versteckt.“

Werner Kunze: „Die Moderne. Ideologie, Nihilismus, Dekadenz”.  Bublies Verlag 2011, 336 S., 19,80 Euro.

Stefan Martin

geb. 1979, Ingenieur, VDSt Freiberg.

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07:59 Publié dans Livre, Livre, Philosophie | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : philosophie, livre, modernité, monde moderne, nihilisme | |  del.icio.us | | Digg! Digg |  Facebook

samedi, 26 août 2017

The US Empire, the CIA, and the NGOs

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The US Empire, the CIA, and the NGOs

An interview with F. William Engdahl

The Ancient Greeks knew: “Religion is regarded by the common people as true, by the wise as false, and by rulers as useful.” No less a figure than the late Zbigniew Brzezinski and the CIA made use of this saying by recruiting the Muslim Brotherhood to fight a proxy war against the Soviet Union in Afghanistan, which led to the withdrawal of the Soviets from the Hindu Kush. Since then, the CIA used the mercenaries to fight more proxy wars in the Balkans, Chechnya, and Azerbaijan. Due to the wars of aggression against Iraq, Libya, Syria and Yemen the US and its vassal states created sectarian violence that led to civil wars. Right now, the CIA and the Muslim Brotherhood are present in the form of ISIS in Syria and Iraq.

No one has studied this triad more intensively than F. William Engdahl who is a renowned geopolitical analyst, risk consultant, author, and lecturer. Engdahl was born in Minneapolis/MN, and grew up in Texas. After earning a degree in politics from Princeton University, and graduate study in comparative economics at Stockholm University, he worked as an economist and investigative journalist in the US and Europe. He was named Visiting Professor at Beijing University of Chemical Technology and delivers talks and private seminars around the world on different aspects of economics and politics with the focus on geopolitical events. For the last 30 years, Engdahl has been living in Germany.

He has written numerous best-selling books on oil and geopolitics: The Lost Hegemon: Whom The Gods Would DestroyFull Spectrum Dominance: Totalitarian Democracy in the New World Order, Seeds of Destruction: The Hidden Agenda of Genetic Manipulation, and not to forget: Target China to name only a few. His books are translated into 14 foreign languages.

His latest book on the role of the NGOs focuses on their involvement in US regime change operations and in steering up fabricated mass protests to facilitate the efforts of the US Empire and the CIA to replace resilient national oriented governments by obedient ones that will execute the Washington agenda. All this happens under the pretext of democracy à la US-American style.

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The following interview focuses on Engdahl’s latest book in German Secret files NGOs (Geheimakte NGOs).

Ludwig Watzal:  I guess we could agree upon the fact that the CIA is the world’s worst terror organization. After WW II, hardly any coup d’état or organized uprising happened without the helping hand of the CIA. As I understood your book, in the last 25 years, the CIA got quite a few so-called little helpers in the form of NGOs. Please, could you elaborate on that?

William Engdahl: During the Reagan Presidency very damaging scandals were becoming public about CIA dirty operations around the world. Chile, Iran, Guatemala, the top secret MK-Ultra project, the student movement during the Vietnam War to name just a few. To take the spotlight away from them, CIA Director Bill Casey proposed to Reagan creating a “private” NGO, a kind of cut-out that would pose as private, but in reality, as one of its founders the late Allen Weinstein said in a later interview to the Washington Post, “doing what the CIA did, but privately.” This was the creation of the NGO named National Endowment for Democracy in 1983. Soon other Washington-steered NGOs were added like the Freedom House or the Soros Open Society Foundations, the United States Institute of Peace and so forth.

The money was often channeled via USAID of the State Department to hide its origin. Every major regime attack by the US Government since then including the Solidarnosc in Poland, the Yeltsin CIA-backed Russia coup, the 2004 Ukraine Orange Revolution, the 2008 Tibet riots, the Arab Spring of 2011 to today—all have been done by this group of very select “democracy” NGOs. Little wonder that countries like Russia and China or Hungary act to ban them as “undesirable NGOs.”   

LW: You quote Allen Weinstein, co-author of the founding act of the NGO National Endowment for Democracy (NED), saying; “Much of what we do today was done 25 years ago by the CIA.” Are the US NGOs such as NED, CIPE, USAID, NDI, not to speak of the Soros network, the fifth column of the CIA?

WE: As I indicated above, I would say so in my opinion. Invariably their NGO agenda fits the given agenda of Washington foreign policy. Coincidence? I don’t believe so.

LW: Your critic focused mainly on a few US NGOs or would you include all non-governmental organizations in general? Aren’t all these NGOs driven by a good mind and noble deeds to spread democracy and freedom around the world?

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WE: This is the devil in the concept of Bill Casey. Hiding very black dirty anti-democratic CIA operations behind private political NGOs waving the banner of “Human Rights” has been very effective for Washington’s global agenda of toppling un-cooperative regimes around the world. In effect the CIA has weaponized human rights. Curiously useful regimes for Washington such as Saudi Arabia go unbothered by calls for democracy. Their oil billions finance Washington’s global terrorism agenda.

Take the recent case of the fake democracy White Helmets NGO in Syria doing propaganda in intimate cooperation with ISIS, to justify the US-led war against the duly elected Assad regime. White Helmets get money reportedly from Soros Foundations, from the US and UK governments and were created by a former British Army Intelligence officer James Le Mesurier. Their atrocity videos have repeatedly been exposed as fake, staged by actors. Their alleged Sarin gas video showing unprotected White Helmets “first responders” handling alleged Sarin gas victims with no protective HAZMAT protection is a joke, a fake as was exposed widely after by a number of HAZMAT Sarin gas experts.

The Washington–or EU in some cases—political NGOs are effective because they can attract many innocent good-willed people. I recently received a very touching personal letter from a European Medical Doctor who had been 18 months working with the best humanitarian intention with Doctors without Borders in South Sudan before their US-backed independence. She was so grateful after reading my NGO book as she could understand all the seeming irrational directions their American Doctors Without Borders leader gave the staff. She quit because of burnout and now said she understands why. Honest doctors were being used by Washington for secret political agendas. South Sudan was target because China was receiving a major share of her oil from there via Khartoum.

Of course, not all NGOs are doing the work of the CIA. I focus on the ones with a hidden political agenda, who, as I describe in the book, have weaponized human rights and the word democracy for devious ends.

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LW: In 1984, the hedge fund-Billionaire George Soros, established in Budapest the Soros Foundation. His first target was Poland. Pope John Paul II and US President Ronald Reagan met in 1982 at the Vatican to discuss the destabilization of the Communist Bloc. In this endeavor, has there also been an involvement of the Soros Foundation?

WE: The Soros Foundation established the Stefan Batory Foundation in Warsaw in 1988 to train activists to ultimately topple the Communist regime. They played a major role “building democracy” and immediately after the collapse in Poland of the government of General Czesław Kiszczak in August, 1989. Soros brought Harvard University “Shock Therapy” economist Jeffrey Sachs into Poland to push privatization of state enterprises, create a hyperinflation and open choice Polish state assets for auction to western investors like friends of Soros for pennies or then, for pfennig.

LW:  The two chapters on the plundering of the former Soviet Union by the CIA, Soros and his Harvard Boys in cooperation with the Yeltsin clan and former KGB official is quite shocking. Please, elaborate on this Mafia-like undertaking.

WE: I have to refer readers to the book as the treatment has been cross-checked and is exhaustive. In brief, the CIA under the direction of then-President George H.W. Bush managed to corrupt several very high-ranking KGB generals who recruited a network of young Komsomol or Communist Union of Youth proteges such as Boris Berezovsky and Mikhail Khodorkovsky to become their hand-picked “oligarchs” to plunder the State assets for pennies compared to their true worth. This was the infamous “voucher” scandal that valued the entire state assets including oil and gas, machine-making companies, high-tech, all at a little under $16 billion. They literally raped Russia for personal gain. And the CIA and its network of Western banks such as Riggs Bank in Washington allowed them to launder the money out of Russia. Even I was shocked to verify the details. It was criminal. Yeltsin was their boy. Some said so long as his supply of good Vodka was guaranteed he would do anything Soros and his Harvard economists demanded.

The interesting point to note is that President G.H.W. Bush, former director of the CIA, ordered three simultaneous NGO destabilizations in the same year, 1989.  The three were Russia, China in Tiananmen Square and Yugoslavia. The book documents this in great detail.

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LW:  After Vladimir Putin succeeded Boris Yeltsin as Russia’s President, he immediately stopped the robbing of Russia. Do you think that could be one cause why the political class in Washington hates and demonizes him to such an extent, which is irrational?

WE: Putin came from a Russian nationalist faction (as opposed to what were called cosmopolitan or internationalist faction) of the KGB and its successor. They knew they had to act with stealth until their grip was secure in 2000 when Yeltsin was forced to quietly “retire” or face revelations and Yeltsin was convinced to name Putin acting President.

There has been an undeclared war against a stable nation-state in Russia since well before 1917. The founder of Stratfor, George Friedman, one of the better informed American analysts of geopolitics and former consultant to the Pentagon and CIA among others, recently gave an interview after the CIA Ukraine “coup d’ etat” which Friedman called “the most blatant coup in US history.” That if you recall was the one where Viktoria Nuland as US Assistant Secretary of State went to Kiev and handed out candy bars to the protesters in Maidan Square and telephoned her contempt for the EU to the US Ambassador in Kiev.

Friedman noted what I have documented in my various other books such as Mit der Ölwaffe zur Weltmacht, that the foreign policy of the United States of America for at least the past century as the USA emerged on the decline of the British Empire, the US foreign policy priority has been to prevent at all costs the merging of economic interests and cooperation between especially Germany and Russia. The world has undergone two world wars because of this unfortunate geopolitical dogma of US foreign policy, a dogma taken over from the British and from the father of British geopolitics, Sir Halford Mackinder.

Washington hates and demonizes Putin for the reason he has moved deliberately to stabilize Russia as a great nation, which it truly is as I can attest from almost 25 years of personal experience. And as a result of Washington’s demonization, Putin’s influence in the world seems only to grow stronger—first with China, then Eurasia nations, Africa, the Middle East, Asia, even the Philippines and Latin America. The world is becoming fed up with the endless agenda of overt and covert USA wars everywhere. We need to look closely behind the Trump words and very soon we find the same old, degenerate oligarchs and their so-called deep-state of unelected bureaucrats at work.  

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LW:  The dismantling of Yugoslavia was a catastrophe. The Germans under the chancellorship of Gerhard Schroeder and his infamous foreign minister Joschka Fischer joined forces with Clinton to overthrow the Serbian President Slobodan Milosevic. In this coup-like operation, were there also NGOs involved? And what was their strategy?

WE: Yes. Follow the subsequent career of Mr. Fischer. A street thug from the 1968 Frankfurt protests becomes crowned by the USA and its mainstream media as a statesman, apparently the reward for delivering the Green Party vote for bombing Yugoslavia in 1999. After office, Fischer got an honorary teaching post at my Alma Mater, Princeton. Later George Soros invites Mr Fischer on to his new European council on Foreign Relations think tank.

In terms of the toppling of Slobodan Milosevic, the US government and its select NGOs including NED and Soros foundations, organized, financed, and trained key student leaders and others in a successful coup, under the name Otpor! (Resistance!), with the now -ubiquitous logo of the threatening clenched fist. Serbian translations of Gene Sharp’s writings on nonviolent action were used and the key leaders were personally trained by Sharp’s associate US Army colonel Robert Helvey in secret meeting places to avoid police. Otpor! got by some estimates as much as $30 million from U.S. government-linked organizations such as the National Endowment for Democracy (NED), International Republican Institute (IRI), and US Agency for International Development (USAID). The destruction of Yugoslavia was orchestrated since the 1980’s by Washington, first Bush Sr. then Clinton. The aim was to create a war in Europe to justify the continued presence of a NATO whose raison d’être after the collapse of the Soviet Union was hard to justify to American taxpayers or to the Europeans who were planning an independent European Defense Pillar apart from NATO. For Washington and the influential US military industrial complex such independence was tabu!. The second aim was to establish a huge US military presence later in Kosovo called Camp Bond Steel.

LW:  When the Arab masses went into the streets of Tunis, Cairo and Tripoli, the Western media, and political class were thrilled. Finally, democracy, freedom, and human rights found their way into the Arab world. Were these uprisings spontaneous or were they organized and orchestrated from outside forces?

WE: The entire Arab Spring was secretly planned and financed by Washington and US-financed NGOs. Then-Secretary of State Hillary Clinton was a key figure along with her bizarre Muslim Brotherhood assistant Huma Abedin. The RAND Corporation, which is a Pentagon think tank responsible for developing the technique of mob “swarming” like bees, as a way using facebook and social media to steer protests, played a key role.

The protest student groups in Egypt were US-trained, again using translations of Gene Sharp, they were brought to Europe to be secretly trained by the leaders of Otpor!.

In the case of Libya’s Qaddafi, a more urgent regime change was deemed necessary as the now-famous DCLeaks and Wikileaks emails of Hillary to her private adviser Sidney Blumenthal reveal. Qaddafi, who contrary to his demonized image had built up Libya with the highest living standard in all Africa, was about to unveil creation of an alliance of Muslim central banks and introduction of a Gold Dinar currency for oil sales not US dollars. He was doing so together with Ben Ali of Tunisia and Mubarak in Egypt. As Hillary wrote to Blumenthal, that had to be blocked by whatever means. The means to “block” were the illegal bombing of Libya and the assassination of Qaddafi and turning Libya into a field of rubble. The original Pentagon-CIA-State Department plan called for the immediate toppling of another thorn in Washington’s side immediately after Qaddafi, that was Bashar al Assad in Syria. That has not worked out well for the Washington planners and a great human tragedy unnecessarily has grown out of 6 years of what essentially is a US-led war there.

LW:  In the old days, the conquerors brought in its wake the missionaries. Today, the Western neo-colonial powers come with hundreds of NGOs who teach the indigenous population how Western democracy is supposed to function. Do you think the NGOs serve the interest of these people? What about the German NGOs who especially carry a lot of ideological ballast, for example, in the form of gender mainstreaming with them? What do you make of that?

WE: I think your analogy with the “Christian” missionaries of the past and the “Human Rights” or “democracy” NGOs today is very fitting. I am not competent to comment on the activities of various German NGOs. My main focus is Washington, the hegemonic power today and source of so much that is destructive, unfortunately.

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LW: At the beginning and at the end of your book you refer to George Orwell’s double think that means “War is Peace, Freedom is Slavery, Ignorance is Strength.” Do we live in times where the original meanings of words become different contents? Do the US Empire and its vassal states wage war in the name of democracy and destroy the nation states with the same democratic rhetoric?

WE: This is why I found the Orwell quote so appropriate. His book 1984 in many ways is a description of what has been allowed to happen to our western democracies, especially in Britain and the USA.

LW: If you could give the NGOs a piece of advice, what would you tell them?

WE: For the honest persons who may have got caught up in nice rhetoric about values, human rights and such, I would suggest looking more closely at the money trail feeding your given NGO. For the NED or Soros foundations I would suggest they would all do mankind a favor by shutting their doors permanently. That you allow nations and individuals to decide their own sovereign future without your unwanted meddling. I would say, to paraphrase Cromwell to the British Long Parliament, ”You human rights NGOs, Go! You have sat too long here for any good you have been doing. Depart, I say, and let us have done with you. In the name of God, go!”

LW: Mr. Engdahl, thanks for the interview.

WE: Thank you for your interest and excellent questions.

Dr. Ludwig Watzal works as a journalist and editor in Bonn, Germany. He runs the bilingual blog Between the lines. He can be reached at: www.watzal.com. Read other articles by Ludwig.

 


The Lincoln Myth: Ideological Cornerstone of the America Empire

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The Lincoln Myth: Ideological Cornerstone of the America Empire

“Lincoln is theology, not historiology. He is a faith, he is a church, he is a religion, and he has his own priests and acolytes, most of whom . . . are passionately opposed to anybody telling the truth about him . . . with rare exceptions, you can’t believe what any major Lincoln scholar tells you about Abraham Lincoln and race.”–Lerone Bennett, Jr., Forced into Glory, p. 114

The author of the above quotation, Lerone Bennett, Jr., was the executive editor of Ebony magazine for several decades, beginning in 1958. He is a distinguished African-American author of numerous books, including a biography of Martin Luther King, Jr. He spent twenty years researching and writing his book, Forced into Glory: Abraham Lincoln’s White Dream, from which he drew the above conclusion about the so-called Lincoln scholars and how they have lied about Lincoln for generations. For obvious reasons, Mr. Bennett is incensed over how so many lies have been told about Lincoln and race.

Few Americans have ever been taught the truth about Lincoln and race, but it is all right there in The Collected Works of Abraham Lincoln (CW), and in his actions and behavior throughout his life. For example, he said the following:

“Free them [i.e. the slaves] and make them politically and socially our equals? My own feelings will not admit of this . . . . We cannot then make them equals” (CW, vol. II, p. 256.

“What I would most desire would be the separation of the white and black races” (CW, vol. II, p. 521).

“I have no purpose to introduce political and social equality between the white and black races . . . . I, as well as Judge Douglas, am in favor of the race to which I belong, having the superior position. I have never said anything to the contrary” (CW, vol. III, p, 16). (Has there ever been a clearer definition of “white supremacist”?). 

“I am not, nor ever have been in favor of bringing about in any way the social and political equality of the white and black races . . . . I am not nor ever have been in favor of making voters or jurors of negroes, nor of qualifying them to hold office, nor to intermarry with white people” (CW, vol. III, pp. 145-146).

“I will to the very last stand by the law of this state [Illinois], which forbids the marrying of white people with negroes” (CW, vol. III, p. 146).

“Senator Douglas remarked . . . that . . . this government was made for the white people and not for the negroes. Why, in point of mere fact, I think so too” (CW, vol. II, p. 281)

Lincoln was also a lifelong advocate of “colonization,” or the deportation of black people from America. He was a “manager” of the Illinois Colonization Society, which procured tax funding to deport the small number of free blacks residing in the state. He also supported the Illinois constitution, which in 1848 was amended to prohibit the immigration of black people into the state. He made numerous speeches about “colonization.” “I have said that the separation of the races is the only perfect preventive of amalgamation . . . . such separation must be effected by colonization” (CW, vol. II, p. 409). And, “Let us be brought to believe it is morally right, and . . . favorable to . . . our interest, to transfer the African to his native clime” (CW, vol. II, p. 409). Note how Lincoln referred to black people as “the African,” as though they were alien creatures. “The place I am thinking about having for a colony,” he said, “is in Central America. It is nearer to us than Liberia” (CW, vol. V, pp. 373-374).

Bennett also documents how Lincoln so habitually used the N word that his cabinet members – and many others – were shocked by his crudeness, even during a time of pervasive white supremacy, North and South. He was also a very big fan of “black face” minstrel shows, writes Bennett.

For generations, the so-called Lincoln scholars claimed without any documentation that Lincoln suddenly gave up on his “dream” of deporting all the black people sometime in the middle of the war, even though he allocated millions of dollars for a “colonization” program in Liberia during his administration. But the book Colonization After Emancipation by Phillip Magness and Sebastian Page, drawing on documents from the British and American national archives, proved that Lincoln was hard at work until his dying day plotting with Secretary of State William Seward the deportation of all the freed slaves. The documents produced in this book show Lincoln’s negotiations with European governments to purchase land in Central America and elsewhere for “colonization.” They were even counting how many ships it would take to complete the task.

Lincoln’s first inaugural address, delivered on March 4, 1861, is probably the most powerful defense of slavery ever made by an American politician. In the speech Lincoln denies having any intention to interfere with Southern slavery; supports the federal Fugitive Slave Clause of the Constitution, which compelled citizens of non-slave states to capture runaway slaves; and also supported a constitutional amendment known as the Corwin Amendment that would have prohibited the federal government from ever interfering in Southern slavery, thereby enshrining it explicitly in the text of the U.S. Constitution.

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Lincoln stated at the outset of his first inaugural address that “I have no purpose, directly or indirectly, to interfere with the institution of slavery in the States where it exists. I believe I have no lawful right to do so, and I have no inclination to do so.” Furthermore, “Those who nominated and elected me did so with full knowledge that I had made this and many similar declarations and had never recanted them; and more than this, they placed in the [Republican Party] platform for my acceptance, and as a law to themselves and to me, the clear and emphatic resolution which I now read: Resolved, that the maintenance inviolate of the rights of the States, and especially the right of each state to order and control its own domestic institutions according to its own judgment exclusively, is essential to the balance of power on which the perfection and endurance of our political fabric depend . . .” By “domestic institutions” Lincoln meant slavery.

Lincoln also strongly supported the Fugitive Slave Clause and the 1850 Fugitive Slave Act in his first inaugural address by reminding his audience that the Clause is a part of the Constitution that he, and all members of Congress, swore to defend. In fact, the Fugitive Slave Act was strongly enforced all during the Lincoln administration, as documented by the scholarly book, The Slave Catchers, by historian Stanley Campbell (University of North Carolina Press, 2011). “The Fugitive Slave Law remained in force and was executed by federal marshals” all during the Lincoln regime, writes Campbell. For example, he writes that “the docket for the [Superior] Court [of the District of Columbia] listed the claims of twenty-eight different slave owners for 101 runaway slaves. In the two months following the court’s decision [that the law was applicable to the District], 26 fugitive slaves were returned to their owners . . .” This was in Washington, D.C., Lincoln’s own residence.

Near the end of his first inaugural address (seven paragraphs from the end) Lincoln makes his most powerful defense of slavery by saying: “I understand a proposed amendment to the Constitution . . . has passed Congress, to the effect that the Federal Government shall never interfere with the domestic institutions of the States, including that of persons held to service [i.e., slaves]. To avoid misconstruction of what I have said, I depart from my purpose not to speak of particular amendments so far as to say that, holding such a provision to now be implied constitutional law, I have no objection to its being made express and irrevocable” (emphasis added).

The Corwin Amendment, named for Rep. Thomas Corwin of Ohio, said:“No amendment shall be made to the Constitution which shall authorize or give to Congress the power to abolish or interfere, within any state, the domestic institutions thereof, including that of persons held to labor [i.e., slaves] or service by the laws of said State.” 

After all the Southern members of Congress had left, the exclusively-Northern U.S. Congress voted in favor of the Corwin Amendment by a vote of 133-65 in the House of Representatives on February 28, 1861, and by a vote of 24-12 in the U.S. Senate on March 2, two days before Lincoln’s inauguration.

Lincoln lied in his first inaugural address when he said that he had not seen the Corwin Amendment. Not only did he support the amendment in his speech; it was his idea, as documented by Doris Kearns-Goodwin in her worshipful book on Lincoln entitled Team of Rivals. Based on primary sources, Goodwin writes on page 296 that after he was elected and before he was inaugurated Lincoln “instructed Seward to introduce these proposals in the Senate Committee of Thirteen without indicating they issued from Springfield.” “These proposals” were 1) the Corwin Amendment; and 2) a federal law to nullify personal liberty laws created by several states to allow them to nullify the Fugitive Slave Act.

In 1860-61 Lincoln and the Republican Party fiercely defended Southern slavery while only opposing the extension of slavery into the new territories. They gave three reasons for this:

(1) “Many northern whites . . . wanted to keep slaves out of the [new territories] in order to keep blacks out. The North was a pervasively racist society . . . . Bigots, they sought to bar African-American slaves from the West,” wrote University of Virginia historian Michael Holt in his book, The Fate of Their Country (p. 27).

(2) Northerners did not want to have to compete for jobs with black people, free or slave. Lincoln himself said that “we” want to preserve the territories for “free white labor”.

(3) If slaves were brought into the territories it could inflate the congressional representation of the Democratic Party once a territory became a state because of the three-fifths clause of the Constitution that counted five slaves as three persons for purposes of determining how many congressional representatives each state would have. The Republican Party feared that this might further block their economic policy agenda of high protectionist tariffs to protect Northern manufacturers from competition; corporate welfare for road, canal, and railroad-building corporations; a national bank; and a giving away, rather than selling, of federal land (mostly to mining, timber, and railroad corporations). Professor Holt quotes Ohio Congressman Joshua Giddings explaining: “To give the south the preponderance of political power would be itself to surrender our tariff, our internal improvements [a.k.a. corporate welfare], our distribution of proceeds of public lands . . .” (p. 28).

Lincoln called the Emancipation Proclamation a “war measure,” which meant that if the war ended the next day, it would become null and void. It only applied to “rebel territory” and specifically exempted by name areas of the South that were under Union Army control at the time, such as most of the parishes of Louisiana; and entire states like West Virginia, the last slave state to enter the union, having been created during the war by the Republican Party. That is why historian James Randall wrote that it “freed no one.” The apparent purpose was to incite slave rebellions, which it failed to do. Slavery was finally ended in 1866 by the Thirteenth Amendment to the Constitution, with virtually no assistance from Lincoln, as described by Pulitzer prize-winning Lincoln biographer David Donald in his book, Lincoln. On page 545 of his magnum opus David Donald writes of how Lincoln refused to lift a finger to help the genuine abolitionists accumulate votes in Congress for the Thirteenth Amendment. Stories that he did help, such as the false tale told in Steven Spielberg’s movie about Lincoln, are based on pure “gossip,” not documented history, wrote Donald.

Lincoln Promises War Over Tax Collection

In contrast to his compromising stance on slavery, Lincoln was totally and completely uncompromising on the issue of tax collection in his first inaugural address, literally threatening war over it. For decades, Northerners had been attempting to plunder Southerners (and others) with high protectionist tariffs. There was almost a war of secession in the late 1820s over the “Tariff of Abominations” of 1828 that increased the average tariff rate (essentially a sales tax in imports) to 45%. The agricultural South would have been forced to pay higher prices for clothing, farm tools, shoes, and myriad other manufactured products that they purchased mostly from Northern businesses. South Carolina nullified the tariff, refusing to collect it, and a compromise was eventually reached to reduce the tariff rate over a ten-year period.

By 1857 the average tariff rate had declined to about 15%, and tariff revenues accounted for at least 90% of all federal tax revenue. This was the high water mark of free trade in the nineteenth century. Then, with the Republican Party in control of Congress and the White House, the average tariff rate was increased, by 1863, back up to 47%, starting with the Morrill Tariff, which was signed into law on March 2, 1861, two days before Lincoln’s inauguration by Pennsylvania steel industry protectionist President James Buchanan. (It had first passed in the House of Representatives during the 1859-60 session).

Understanding that the Southern states that had seceded and had no intention of continuing to send tariff revenues to Washington, D.C., Lincoln threatened war over it. “[T]here needs to be no bloodshed or violence,” he said in his first inaugural address, “and there shall be none unless it is forced upon the national authority.”

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And what could “force” the “national authority” to commit acts of “violence” and “bloodshed”? Lincoln explained in the next sentence: “The power confided in me will be used to hold, occupy, and possess the property and places belonging to the Government and to collect the duties and imposts; but beyond what may be necessary for these objects, there will be no invasion, no using of force against or among the people anywhere.” “Pay up or die; the American union is no longer voluntary” was his principal message. In Lincoln’s mind, the union was more like what would become the Soviet union than the original, voluntary union of the founding fathers. He kept his promise by invading the Southern states with an initial 75,000 troops after duping South Carolinians into firing upon Fort Sumter (where no one was harmed, let alone killed).

The Stated Purpose of the War

The U.S. Senate issued a War Aims Resolution that said: “[T]his war is not waged . . . in any spirit of oppression, or for any purpose of conquest or subjugation, or purpose of overthrowing or interfering with the rights or established institutions of those [Southern] states, but to defend . . . the Constitution, and to preserve the Union . . .” By “established institutions” of the Southern states they meant slavery.

Like the U.S. Senate, Lincoln also clearly stated that the purpose of the war was to “save the union” and not to interfere with Southern slavery. In a famous August 22, 1862 letter to New York Tribune editor Horace Greeley, he wrote that:

“My paramount objective in this struggle is to save the Union, and it is not either to save or destroy slavery. If I could save the Union without freeing any slave I would do it; and if I could save it by freeing some and leaving others alone I would also do that.” Of course, Lincoln’s war destroyed the voluntary union of the founding fathers and replaced it with an involuntary union held together by threat of invasion, bloodshed, conquest, and subjugation.

The Very Definition of Treason

Treason is defined by Article 3, Section 3 of the U.S. Constitution as follows: “Treason against the United States, shall consist only in levying War against them, or in adhering to their Enemies, giving them Aid and Comfort.” The most important word here is “them.” As in all the founding documents, “United States” is always in the plural, signifying that the “free and independent states,” as they are called in the Declaration of Independence, are united in forming a compact or confederacy with other states. Levying war against “them” means levying war against individual states, not something called “the United States government.” Therefore, Lincoln’s invasion and levying of war upon the Southern states is the very definition of treason in the Constitution.

Lincoln took it upon himself to arbitrarily redefine treason, not by amending the Constitution, but by using brute military force. His new definition was any criticism of himself, his administration, and his policies. He illegally suspended the writ of Habeas Corpus (illegal according to this own attorney general, Robert Bates) and had the military arrest and imprison without due process tens of thousands of Northern-state citizens, including newspaper editors, the Maryland legislature, the mayor of Baltimore, the grandson of Francis Scott Key who was a Baltimore newspaper editor, Congressman Clement L. Vallandigham of Ohio, his chief critic in the U.S. Congress, and essentially anyone overheard criticizing the government. (See Freedom Under Lincoln by Dean Sprague and Constitutional Problems Under Lincoln by James Randall).

More than 300 Northern newspapers were shut down for criticizing the Lincoln regime as documented by James Randall, the preeminent Lincoln scholar of the twentieth century.

Lincoln’s Real Agenda: A Mercantilist Empire

Lincoln began his political career in 1832 as a Whig. Northern Whigs like Lincoln were the party of the corporate plutocracy who wanted to use the coercive powers of government to line the pockets of their big business benefactors (and of themselves). They proclaimed to stand for what their political predecessor, Alexander Hamilton, called the “American System.” This was really an Americanized version of the rotten, corrupt system of British “mercantilism” that the colonists had rebelled against. Its planks included protectionist tariffs to benefit Northern manufacturers and their banking and insurance industry business associates; a government-run national bank to provide cheap credit to politically-connected businesses; and “internal improvement subsidies,” which we today would call “corporate welfare,” for canal-, road-, and railroad-building corporations. So when Lincoln first ran for political office in Illinois in 1832 he announced: “I am humble Abraham Lincoln. I have been solicited by many friends to become a candidate for the legislature. My politics are short and sweet, like the old woman’s dance. I am in favor of a national bank . . . in favor of the internal improvements system and a high protective tariff.” He would devote his entire political career for the next twenty-nine years on that agenda.

The major opposition to Lincoln’s agenda of a mercantilist empire modeled after the British empire had always been from the South, as Presidents Jefferson, Madison, Monroe, Jackson, and Tyler, among others, vetoed or obstructed Whig and later, Republican, legislation. There were Southern supporters of this agenda, and Northern, Jeffersonian opponents of it, but it is nevertheless true that the overwhelming opposition to this Northern, Hamiltonian scheme came from the Jeffersonian South.

Henry Clay was the leader of the Whigs until his death in 1852, and Lincoln once claimed that he got all of his political ideas from Clay, who he eulogized as “the beau ideal of a statesman.” In reality, the Hamilton/Clay/Lincoln “American System” was best described by Edgar Lee Masters, who was Clarence Darrow’s law partner and a renowned playwright (author of The Spoon River Anthology). In his book, Lincoln the Man (p. 27), Masters wrote that:“Henry clay was the champion of that political system which doles favors to the strong in order to win and to keep their adherence to the government. His system offered shelter to devious schemes and corrupt enterprises . . . He was the beloved son of Alexander Hamilton with his corrupt funding schemes, his superstitions concerning the advantage of a public debt, and a people taxed to make profits for enterprises that cannot stand alone. His example and his doctrines led to the creation of a party that had not platform to announce, because its principles were plunder and nothing else.”

This was the agenda that Abraham Lincoln devoted his entire political life to. The “American System” was finally fully enacted with Lincoln’s Pacific Railroad Bill, which led to historic corruption during the Grant administration with its gargantuan subsidies to railroad corporations and others; fifty years of high, protectionist tariffs that continued to plunder Agricultural America, especially the South and the Mid-West, for the benefit of the industrial North; the nationalization of the money supply with the National Currency Acts and Legal Tender Acts; and the beginnings of a welfare state with veterans’ pensions. Most importantly, the system of federalism that was established by the founding fathers was all but destroyed with a massive shift in political power to Washington, D.C. and away from the people, due to the abolition (at gunpoint) of the rights of nullification and secession.

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Lincoln’ Biggest Failure

Slavery was ended peacefully everywhere else in the world during the nineteenth century. This includes Massachusetts, Rhode Island, Connecticut, and New York, where slaves were once used to build slave ships that sailed out of New York, Providence, Hartford, Providence, and Boston harbors. There were still slaves in New York City as late as 1853.

Nobel prize-winning economist Robert Fogel and co-author Stanley Engerman, in their book, Time on the Cross, describe how the British, Spanish, and French empires, as well as the Swedes, Danes, and Dutch, ended slavery peacefully during the nineteenth century. Whenever slaves did participate in wars in Central America and elsewhere, it was because they were promised freedom by one side in the war; the purpose of the wars, however, was never to free the slaves.

The British simply used tax dollars to purchase the freedom of the slaves and then legally ended the practice. The cost of the “Civil War” to Northern taxpayers alone would have been sufficient to achieve the same thing in the U.S. Instead, the slaves were used as political pawns in a war that ended with the death of as many as 850,000 Americans according to the latest research (the number was 620,000 for the past 100 years or so), with more than double that amount maimed for life, physically and psychologically. (Lincoln did make a speech in favor of “compensated emancipation” in the border states but insisted that it be accompanied by deportation of any emancipated slaves. He never used his “legendary” political skills, however, to achieve any such outcome, as a real statesman would have done – minus the deportation).

The Glory of the Coming of the Lord?

By the mid nineteenth century the world had evolved such that international law and the laws of war condemned the waging of war on civilians. It was widely recognized that civilians would always become casualties in any war, but to intentionally target them was a war crime.

The Lincoln regime reversed that progress and paved the way for all the gross wartime atrocities of the twentieth century by waging war on Southern civilians for four long years. Rape, pillage, plunder, the bombing and burning of entire cities populated only by civilians was the Lincolnian way of waging war – not on foreign invaders but on his own fellow American citizens. (Lincoln did not consider secession to be legal; therefore, he thought of all citizens of the Southern states to be American citizens, not citizens of the Confederate government).

General Sherman said in a letter to his wife that his purpose was “extermination, not of soldiers alone, that is the least part of the trouble, but the people” (Letter from Sherman to Mrs. Sherman, July 31, 1862). Two years later, he would order his artillery officers to use the homes of Atlanta occupied by women and children as target practice for four days, while much of the rest of the city was a conflagration. The remaining residents were then kicked out of their homes – in November with the onset of winter. Ninety percent of Atlanta was demolished after the Confederate army had left the city.

General Philip Sheridan similarly terrorized the civilians of the Shenandoah Valley in Virginia. All of this led historian Lee Kennett, in his biography of Sherman, to honestly state that “had the Confederates somehow won, had their victory put them in position to bring their chief opponents before some sort of tribunal, they would have found themselves justified . . . in stringing up President Lincoln and the entire Union high command for violation of the laws of war, specifically for waging war against noncombatants” (Lee Kennett, Marching Through Georgia: The Story of Soldiers and Civilians During Sherman’s Campaign, p. 286).

About All Those Statues

Professor Murray N. Rothbard (1926-1995) was perhaps the most famous academic libertarian in the world during the last half of the twentieth century. A renowned Austrian School economist, he also wrote widely on historical topics, especially war and foreign policy. In a 1994 essay entitled “Just War” (online at https://mises.org/library/just-war), Rothbard argued that the only two American wars that would qualify as just wars (defined as wars to ward off a threat of coercive domination) were the American Revolution and the South’s side in the American “Civil War.” Without getting into his detailed explanation of this, his conclusion is especially relevant and worth quoting at length:

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“[I]n this War Between the States, the South may have fought for its sacred honor, but the Northern war was the very opposite of honorable. We remember the care with which the civilized nations had developed classical international law. Above all, civilians must not be targeted; wars must be limited. But the North insisted on creating a conscript army, a nation in arms, and broke the 19th-century rules of war by specifically plundering and slaughtering civilians, by destroying civilian life and institutions so as to reduce the South to submission. Sherman’s famous march through Georgia was one of the great war crimes, and crimes against humanity, of the past century-and-a-half. Because by targeting and butchering civilians, Lincoln and Grant and Sherman paved the way for all the genocidal horrors of the monstrous 20th century. . . . As Lord Acton, the great libertarian historian, put it, the historian, in the last analysis, must be a moral judge. The muse of the historian, he wrote, is not Clio but Rhadamanthus, the legendary avenger of innocent blood. In that spirit, we must always remember, we must never forget, we must put in the dock and hang higher than Haman, those who, in modern times, opened the Pandora’s Box of genocide and the extermination of civilians: Sherman, Grant, and Lincoln.

Perhaps, some day, their statues will be toppled and melted down; their insignias and battle flag will be desecrated, and their war songs tossed into the fire.

Perhaps, some day. But in the meantime, and for the past 150 years, the mountain of lies that has concocted the Lincoln Myth has been invoked over and over again to “justify” war after war, all disguised as some great moral crusade, but in reality merely a tool to enrich the already wealthy-beyond-their-wildest-dreams military/industrial complex and its political promoter class. As Robert Penn Warren wrote in his 1960 book, The Legacy of the Civil War, the Lincoln Myth, painstakingly fabricated by the Republican Party, long ago created a “psychological heritage” that contends that “the Northerner, with his Treasury of Virtue” caused by his victory in the “Civil War,” feels as though he has “an indulgence, a plenary indulgence, for all sins past, present, and future.” This “indulgence,” wrote Warren, “is the justification for our crusades of 1917-1918 and 1941-1945 and our diplomacy of righteousness, with the slogan of unconditional surrender and universal rehabilitation for others” (emphasis added). Robert Penn Warren believed that most Americans were content with all of these lies about their own history, the work of what he called “the manipulations of propaganda specialists,” referring to those who describe themselves as “Lincoln scholars.”

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vendredi, 25 août 2017

How French “Intellectuals” Ruined the West: Postmodernism and Its Impact, Explained

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How French “Intellectuals” Ruined the West: Postmodernism and Its Impact, Explained

Postmodernism presents a threat not only to liberal democracy but to modernity itself. That may sound like a bold or even hyperbolic claim, but the reality is that the cluster of ideas and values at the root of postmodernism have broken the bounds of academia and gained great cultural power in western society. The irrational and identitarian “symptoms” of postmodernism are easily recognizable and much criticized, but the ethos underlying them is not well understood. This is partly because postmodernists rarely explain themselves clearly and partly because of the inherent contradictions and inconsistencies of a way of thought which denies a stable reality or reliable knowledge to exist. However, there are consistent ideas at the root of postmodernism and understanding them is essential if we intend to counter them. They underlie the problems we see today in Social Justice Activism, undermine the credibility of the Left and threaten to return us to an irrational and tribal “pre-modern” culture.

Postmodernism, most simply, is an artistic and philosophical movement which began in France in the 1960s and produced bewildering art and even more bewildering  “theory.” It drew on avant-garde and surrealist art and earlier philosophical ideas, particularly those of Nietzsche and Heidegger, for its anti-realism and rejection of the concept of the unified and coherent individual. It reacted against the liberal humanism of the modernist artistic and intellectual movements, which its proponents saw as naïvely universalizing a western, middle-class and male experience.

It rejected philosophy which valued ethics, reason and clarity with the same accusation. Structuralism, a movement which (often over-confidently) attempted to analyze human culture and psychology according to consistent structures of relationships, came under attack. Marxism, with its understanding of society through class and economic structures was regarded as equally rigid and simplistic. Above all, postmodernists attacked science and its goal of attaining objective knowledge about a reality which exists independently of human perceptions which they saw as merely another form of constructed ideology dominated by bourgeois, western assumptions. Decidedly left-wing, postmodernism had both a nihilistic and a revolutionary ethos which resonated with a post-war, post-empire zeitgeist in the West. As postmodernism continued to develop and diversify, its initially stronger nihilistic deconstructive phase became secondary (but still fundamental) to its revolutionary “identity politics” phase.

It has been a matter of contention whether postmodernism is a reaction against modernity. The modern era is the period of history which saw Renaissance Humanism, the Enlightenment, the Scientific Revolution and the development of liberal values and human rights; the period when Western societies gradually came to value reason and science over faith and superstition as routes to knowledge, and developed a concept of the person as an individual member of the human race deserving of rights and freedoms rather than as part of various collectives subject to rigid hierarchical roles in society.

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The Encyclopaedia Britannica says postmodernism “is largely a reaction against the philosophical assumptions and values of the modern period of Western (specifically European) history” whilst the Stanford Encyclopaedia of Philosophy denies this and says “Rather, its differences lie within modernity itself, and postmodernism is a continuation of modern thinking in another mode.” I’d suggest the difference lies in whether we see modernity in terms of what was produced or what was destroyed. If we see the essence of modernity as the development of science and reason as well as humanism and universal liberalism, postmodernists are opposed to it. If we see modernity as the tearing down of structures of power including feudalism, the Church, patriarchy, and Empire, postmodernists are attempting to continue it, but their targets are now science, reason, humanism and liberalism. Consequently, the roots of postmodernism are inherently political and revolutionary, albeit in a destructive or, as they would term it, deconstructive way.

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The term “postmodern” was coined by Jean-François Lyotard in his 1979 book, The Postmodern Condition. He defined the postmodern condition as “an incredulity towards metanarratives.” A metanarrative is a wide-ranging and cohesive explanation for large phenomena. Religions and other totalizing ideologies are metanarratives in their attempts to explain the meaning of life or all of society’s ills. Lyotard advocated replacing these with “mininarratives” to get at smaller and more personal “truths.” He addressed Christianity and Marxism in this way but also science.

In his view, “there is a strict interlinkage between the kind of language called science and the kind called ethics and politics” (p8). By tying science and the knowledge it produces to government and power he rejects its claim to objectivity. Lyotard describes this incredulous postmodern condition as a general one, and argues that from the end of the 19th century, “an internal erosion of the legitimacy principle of knowledge” began to cause a change in the status of knowledge (p39). By the 1960s, the resulting “doubt” and “demoralization” of scientists had made “an impact on the central problem of legitimization” (p8). No number of scientists telling him they are not demoralized nor any more doubtful than befits the practitioners of a method whose results are always provisional and whose hypotheses are never “proven” could sway him from this.

We see in Lyotard an explicit epistemic relativity (belief in personal or culturally specific truths or facts) and the advocacy of privileging  “lived experience” over empirical evidence. We see too the promotion of a version of pluralism which privileges the views of minority groups over the general consensus of scientists or liberal democratic ethics which are presented as authoritarian and dogmatic. This is consistent in postmodern thought.

Michel Foucault’s work is also centered on language and relativism although he applied this to history and culture. He called this approach “archeology” because he saw himself as “uncovering” aspects of historical culture through recorded discourses (speech which promotes or assumes a particular view). For Foucault, discourses control what can be “known” and in different periods and places, different systems of institutional power control discourses. Therefore, knowledge is a direct product of power. “In any given culture and at any given moment, there is always only one ‘episteme’ that defines the conditions of possibility of all knowledge, whether expressed in theory or silently invested in a practice.”[1]

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Furthermore, people themselves were culturally constructed. “The individual, with his identity and characteristics, is the product of a relation of power exercised over bodies, multiplicities, movements, desires, forces.”[2]  He leaves almost no room for individual agency or autonomy. As Christopher Butler says, Foucault “relies on beliefs about the inherent evil of the individual’s class position, or professional position, seen as ‘discourse’, regardless of the morality of his or her individual conduct.”[3] He presents medieval feudalism and modern liberal democracy as equally oppressive, and advocates criticizing and attacking institutions to unmask the “political violence that has always exercised itself obscurely through them.” [4]

We see in Foucault the most extreme expression of cultural relativity read through structures of power in which shared humanity and individuality are almost entirely absent. Instead, people are constructed by their position in relation to dominant cultural ideas either as oppressors or oppressed. Judith Butler drew on Foucault for her foundational role in queer theory focusing on the culturally constructed nature of gender, as did Edward Said in his similar role in post-colonialism and “Orientalism” and Kimberlé Crenshaw in her development of “intersectionality” and advocacy of identity politics. We see too the equation of language with violence and coercion and the equation of reason and universal liberalism with oppression.

It was Jacques Derrida who introduced the concept of “deconstruction,” and he too argued for cultural constructivism and cultural and personal relativity. He focused even more explicitly on language. Derrida’s best-known pronouncement “There is no outside-text” relates to his rejection of the idea that words refer to anything straightforwardly. Rather, “there are only contexts without any center of absolute anchoring.” [5]

Therefore the author of a text is not the authority on its meaning. The reader or listener makes their own equally valid meaning and every text “engenders infinitely new contexts in an absolutely nonsaturable fashion.” Derrida coined the term différance which he derived from the verb “differer” which means both “to defer” and “to differ.” This was to indicate that not only is meaning never final but it is constructed by differences, specifically by oppositions. The word “young” only makes sense in its relationship with the word “old” and he argued, following Saussure, that meaning is constructed by the conflict of these elemental oppositions which, to him, always form a positive and negative. “Man” is positive and ‘woman’ negative. “Occident” is positive and “Orient” negative. He insisted that “We are not dealing with the peaceful co-existence of a vis-a-vis, but rather with a violent hierarchy. One of the two terms governs the other (axiologically, logically, etc.), or has the upper hand. To deconstruct the opposition, first of all, is to overturn the hierarchy at a given moment.”[6] Deconstruction, therefore, involves inverting these perceived hierarchies, making “woman” and “Orient” positive and “man” and “Occident” negative. This is to be done ironically to reveal the culturally constructed and arbitrary nature of these perceived oppositions in unequal conflict.

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We see in Derrida further relativity, both cultural and epistemic, and further justification for identity politics. There is an explicit denial that differences can be other than oppositional and therefore a rejection of Enlightenment liberalism’s values of overcoming differences and focusing on universal human rights and individual freedom and empowerment. We see here the basis of “ironic misandry” and the mantra “reverse racism isn’t real” and the idea that identity dictates what can be understood. We see too a rejection of the need for clarity in speech and argument and to understand the other’s point of view and avoid minterpretation. The intention of the speaker is irrelevant. What matters is the impact of speech. This, along with Foucauldian ideas, underlies the current belief in the deeply damaging nature of “microaggressions” and misuse of terminology related to gender, race or sexuality.

Lyotard, Foucault, and Derrida are just three of the “founding fathers” of postmodernism but their ideas share common themes with other influential “theorists” and were taken up by later postmodernists who applied them to an increasingly diverse range of disciplines within the social sciences and humanities. We’ve seen that this includes an intense sensitivity to language on the level of the word and a feeling that what the speaker means is less important than how it is received, no matter how radical the interpretation. Shared humanity and individuality are essentially illusions and people are propagators or victims of discourses depending on their social position; a position which is dependent on identity far more than their individual engagement with society. Morality is culturally relative, as is reality itself. Empirical evidence is suspect and so are any culturally dominant ideas including science, reason, and universal liberalism. These are Enlightenment values which are naïve, totalizing and oppressive, and there is a moral necessity to smash them. Far more important is the lived experience, narratives and beliefs of “marginalized” groups all of which are equally “true” but must now be privileged over Enlightenment values to reverse an oppressive, unjust and entirely arbitrary social construction of reality, morality and knowledge.

The desire to “smash” the status quo, challenge widely held values and institutions and champion the marginalized is absolutely liberal in ethos. Opposing it is resolutely conservative. This is the historical reality, but we are at a unique point in history where the status quo is fairly consistently liberal, with a liberalism that upholds the values of freedom, equal rights and opportunities for everyone regardless of gender, race and sexuality. The result is confusion in which life-long liberals wishing to conserve this kind of liberal status quo find themselves considered conservative and those wishing to avoid conservatism at all costs find themselves defending irrationalism and illiberalism. Whilst the first postmodernists mostly challenged discourse with discourse, the activists motivated by their ideas are becoming more authoritarian and following those ideas to their logical conclusion. Freedom of speech is under threat because speech is now dangerous. So dangerous that people considering themselves liberal can now justify responding to it with violence. The need to argue a case persuasively using reasoned argument is now often replaced with references to identity and pure rage.

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Despite all the evidence that racism, sexism, homophobia, transphobia and xenophobia are at an all-time low in Western societies, Leftist academics and SocJus activists display a fatalistic pessimism, enabled by postmodern interpretative “reading” practices which valorize confirmation bias. The authoritarian power of the postmodern academics and activists seems to be invisible to them whilst being apparent to everyone else. As Andrew Sullivan says of intersectionality:

“It posits a classic orthodoxy through which all of human experience is explained — and through which all speech must be filtered. … Like the Puritanism once familiar in New England, intersectionality controls language and the very terms of discourse.” [7]

Postmodernism has become a Lyotardian metanarrative, a Foucauldian system of discursive power, and a Derridean oppressive hierarchy.

The logical problem of self-referentiality has been pointed out to postmodernists by philosophers fairly constantly but it is one they have yet to address convincingly. As Christopher Butler points out, “the plausibility of Lyotard’s claim for the decline of metanarratives in the late 20th century ultimately depends upon an appeal to the cultural condition of an intellectual minority.” In other words, Lyotard’s claim comes directly from the discourses surrounding him in his bourgeois academic bubble and is, in fact, a metanarrative towards which he is not remotely incredulous. Equally, Foucault’s argument that knowledge is historically contingent must itself be historically contingent, and one wonders why Derrida bothered to explain the infinite malleability of texts at such length if I could read his entire body of work and claim it to be a story about bunny rabbits with the same degree of authority.

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This is, of course, not the only criticism commonly made of postmodernism. The most glaring problem of epistemic cultural relativity has been addressed by philosophers and scientists. The philosopher, David Detmer, in Challenging Postmodernism, says

“Consider this example, provided by Erazim Kohak, ‘When I try, unsuccessfully, to squeeze a tennis ball into a wine bottle, I need not try several wine bottles and several tennis balls before, using Mill’s canons of induction, I arrive inductively at the hypothesis that tennis balls do not fit into wine bottles’… We are now in a position to turn the tables on [postmodernist claims of cultural relativity] and ask, ‘If I judge that tennis balls do not fit into wine bottles, can you show precisely how it is that my gender, historical and spatial location, class, ethnicity, etc., undermine the objectivity of this judgement?” [8]

However, he has not found postmodernists committed to explaining their reasoning and describes a bewildering conversation with postmodern philosopher, Laurie Calhoun,

“When I had occasion to ask her whether or not it was a fact that giraffes are taller than ants, she replied that it was not a fact, but rather an article of religious faith in our culture.”

Physicists Alan Sokal and Jean Bricmont address the same problem from the perspective of science in Fashionable Nonsense: Postmodern Intellectuals’ Abuse of Science:

“Who could now seriously deny the ‘grand narrative’ of evolution, except someone in the grip of a far less plausible master narrative such as Creationism? And who would wish to deny the truth of basic physics? The answer was, ‘some postmodernists.’”

and

“There is something very odd indeed in the belief that in looking, say, for causal laws or a unified theory, or in asking whether atoms really do obey the laws of quantum mechanics, the activities of scientists are somehow inherently ‘bourgeois’ or ‘Eurocentric’ or ‘masculinist’, or even ‘militarist.'”

How much of a threat is postmodernism to science? There are certainly some external attacks. In the recent protests against a talk given by Charles Murray at Middlebury, the protesters chanted, as one,

“Science has always been used to legitimize racism, sexism, classism, transphobia, ableism, and homophobia, all veiled as rational and fact, and supported by the government and state. In this world today, there is little that is true ‘fact.'”[9]

When the organizers of the March for Science tweeted:

“colonization, racism, immigration, native rights, sexism, ableism, queer-, trans-, intersex-phobia, & econ justice are scientific issues,”[10] many scientists immediately criticized this politicization of science and derailment of the focus on preservation of science to intersectional ideology. In South Africa, the #ScienceMustFall and #DecolonizeScience progressive student movement announced that science was only one way of knowing that people had been taught to accept. They suggested witchcraft as one alternative. [11]

Despite this, science as a methodology is not going anywhere. It cannot be “adapted” to include epistemic relativity and “alternative ways of knowing.” It can, however, lose public confidence and thereby, state funding, and this is a threat not to be underestimated. Also, at a time in which world rulers doubt climate change, parents believe false claims that vaccines cause autism and people turn to homeopaths and naturopaths for solutions to serious medical conditions, it is dangerous to the degree of an existential threat to further damage people’s confidence in the empirical sciences.

The social sciences and humanities, however, are in danger of changing out of all recognition. Some disciplines within the social sciences already have. Cultural anthropology, sociology, cultural studies and gender studies, for example, have succumbed almost entirely not only to moral relativity but epistemic relativity. English (literature) too, in my experience, is teaching a thoroughly postmodern orthodoxy. Philosophy, as we have seen, is divided. So is history.

Empirical historians are often criticized by the postmodernists among us for claiming to know what really happened in the past. Christopher Butler recalls Diane Purkiss’ accusation that Keith Thomas was enabling a myth that grounded men’s historical identity in “the powerlessness and speechlessness of women” when he provided evidence that accused witches were usually powerless beggar women. Presumably, he should have claimed, against the evidence, that they were wealthy women or better still, men. As Butler says,

“It seems as though Thomas’s empirical claims here have simply run foul of Purkiss’s rival organizing principle for historical narrative – that it should be used to support contemporary notions of female empowerment” (p36)

I encountered the same problem when trying to write about race and gender at the turn of the seventeenth century. I’d argued that Shakespeare’s audience’s would not have found Desdemona’s attraction to Black Othello, who was Christian and a soldier for Venice, so difficult to understand because prejudice against skin color did not become prevalent until a little later in the seventeenth century when the Atlantic Slave Trade gained steam, and that religious and national differences were far more profound before that. I was told this was problematic by an eminent professor and asked how Black communities in contemporary America would feel about my claim. If today’s African Americans felt badly about it, it was implied, it either could not have been true in the seventeenth century or it is morally wrong to mention it. As Christopher Butler says,

“Postmodernist thought sees the culture as containing a number of perpetually competing stories, whose effectiveness depends not so much on an appeal to an independent standard of judgement, as upon their appeal to the communities in which they circulate.”

I fear for the future of the humanities.

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The dangers of postmodernism are not limited to pockets of society which center around academia and Social Justice, however. Relativist ideas, sensitivity to language and focus on identity over humanity or individuality have gained dominance in wider society. It is much easier to say what you feel than rigorously examine the evidence. The freedom to “interpret” reality according to one’s own values feeds into the very human tendency towards confirmation bias and motivated reasoning.

It has become commonplace to note that the far-Right is now using identity politics and epistemic relativism in a very similar way to the postmodern-Left. Of course, elements of the far-Right have always been divisive on the grounds of race, gender and sexuality and prone to irrational and anti-science views but postmodernism has produced a culture more widely receptive to this. Kenan Malik describes this shift,

“When I suggested earlier that the idea of ‘alternative facts’ draws upon ‘a set of concepts that in recent decades have been used by radicals’, I was not suggesting that Kellyanne Conway, or Steve Bannon, still less Donald Trump, have been reading up on Foucault or Baudrillard… It is rather that sections of academia and of the left have in recent decades helped create a culture in which relativized views of facts and knowledge seem untroubling, and hence made it easier for the reactionary right not just to re-appropriate but also to promote reactionary ideas.”[12]

This “set of concepts” threaten to take us back to a time before the Enlightenment, when “reason” was regarded as not only inferior to faith but as a sin. James K. A. Smith, Reformed theologian and professor of philosophy, has been quick to see the advantages for Christianity and regards postmodernism as “a fresh wind of the Spirit sent to revitalize the dry bones of the church” (p18). In Who’s Afraid of Postmodernism?: Taking Derrida, Lyotard, and Foucault to Church, he says,

“A thoughtful engagement with postmodernism will encourage us to look backward. We will see that much that goes under the banner of postmodern philosophy has one eye on ancient and medieval sources and constitutes a significant recovery of premodern ways of knowing, being, and doing.” (p25)

and

“Postmodernism can be a catalyst for the church to reclaim its faith not as a system of truth dictated by a neutral reason but rather as a story that requires ‘eyes to see and ears to hear.” (p125)

We on the Left should be very afraid of what “our side” has produced. Of course, not every problem in society today is the fault of postmodern thinking, and it is not helpful to suggest that it is. The rise of populism and nationalism in the US and across Europe are also due to a strong existing far-Right and the fear of Islamism produced by the refugee crisis. Taking a rigidly “anti-SJW” stance and blaming everything on this element of the Left is itself rife with motivated reasoning and confirmation bias. The Left is not responsible for the far-Right or the religious-Right or secular nationalism, but it is responsible for not engaging with reasonable concerns reasonably and thereby making itself harder for reasonable people to support. It is responsible for its own fragmentation, purity demands and divisiveness which make even the far-Right appear comparatively coherent and cohesive.

In order to regain credibility, the Left needs to recover a strong, coherent and reasonable liberalism. To do this, we need to out-discourse the postmodern-Left. We need to meet their oppositions, divisions and hierarchies with universal principles of freedom, equality and justice. There must be a consistency of liberal principles in opposition to all attempts to evaluate or limit people by race, gender or sexuality. We must address concerns about immigration, globalism and authoritarian identity politics currently empowering the far- Right rather than calling people who express them “racist,” “sexist” or “homophobic” and accusing them of wanting to commit verbal violence. We can do this whilst continuing to oppose authoritarian factions of the Right who genuinely are racist, sexist and homophobic, but can now hide behind a façade of reasonable opposition to the postmodern-Left.

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Our current crisis is not one of Left versus Right but of consistency, reason, humility and universal liberalism versus inconsistency, irrationalism, zealous certainty and tribal authoritarianism. The future of freedom, equality and justice looks equally bleak whether the postmodern Left or the post-truth Right wins this current war. Those of us who value liberal democracy and the fruits of the Enlightenment and Scientific Revolution and modernity itself must provide a better option.

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Helen Pluckrose is a researcher in the humanities who focuses on late medieval/early modern religious writing for and about women. She is critical of postmodernism and cultural constructivism which she sees as currently dominating the humanities. You can connect with her on Twitter @HPluckrose

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Notes

[1] The Order of Things: An Archaeology of the Human Sciences (2011) Routledge. p183

[2] ‘About the Beginning of the Hermeneutics of the Self: Two Lectures at Dartmouth.’ Political Theory, 21, 198-227

[3] Postmodernism: A Very Short Introduction. (2002) Oxford University Press. p49

[4] The Chomsky – Foucault Debate: On Human Nature (2006) The New Press. P41

[5] http://hydra.humanities.uci.edu/derrida/sec.html

[6] Positions. (1981) University of Chicago Press p41

[7] http://hotair.com/archives/2017/03/10/is-intersectionality-a-religion/

[8] Challenging Postmodernism: Philosophy and the Politics of Truth (2003) Prometheus Press. p 26.

[9] In Sullivan http://hotair.com/archives/2017/03/10/is-intersectionality-a-religion/

[10]  http://dailycaller.com/2017/01/30/anti-trump-march-for-sc...

[11] http://blogs.spectator.co.uk/2016/10/science-must-fall-ti...

[12] https://kenanmalik.wordpress.com/2017/02/05/not-post-trut...

Helen Pluckrose

Helen Pluckrose is a researcher in the humanities who focuses on late medieval/early modern religious writing for and about women. She is critical of postmodernism and cultural constructivism which she sees as currently dominating the humanities.

Misère de la déconstruction : Deleuze, Foucault, Derrida, « French theorists » au service du nihilo-mondialisme américain

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Misère de la déconstruction : Deleuze, Foucault, Derrida, « French theorists » au service du nihilo-mondialisme américain

par Yannick Jaffré

Ex: http://www.katehon.com/fr

Si les États-Unis ont été le laboratoire social du post-modernisme, des Européens, Français à l'avant-garde, en furent les théoriciens. Comme souvent, les Américains font d'abord, pensent ensuite et, philosophiquement, presque jamais par eux-mêmes. Ainsi la dissolution du patriarcat, l’individualisme économico-juridique, le règne du consumérisme et le relativisme moral ont-ils été expérimentés aux États-Unis avec plus de spontanéité et de radicalité qu’en Europe. Mais la vague post-moderne a dû ses concepts au travail de philosophes français. Sans l'hégémonie américaine combinant puissance matérielle et mimétisme social, hard et soft power, l'anti-monde des quarante dernières années aurait bien sûr été impossible ; mais sans les élaborations, ou élucubrations, menées en Europe par certains penseurs, il n'aurait pas exercé la même séduction intellectuelle.

Des deux côtés de l'atlantique, cependant, cette hégémonie n'a jamais été complète. L'histoire n'a pas de fin, aucune époque n'est parfaitement synchronique, et toute domination trouve ses contrepoids. Contre le nihilisme post-moderne, le katekhon a bien opéré. - Par l'inertie des traditions culturelles et des structures familiales, par un patriotisme imprégné de religiosité et un populisme qui viennent de porter Trump au pouvoir en Amérique, par un mouvement de réaction contre la « moraline » droit-de-l'hommiste qui doit encore trouver en Europe sa traduction politique. Je suis de ceux qui considèrent que la configuration nihilo-mondialiste est morte, dans l'ordre de l'esprit comme dans celui de la matière. Mais le cadavre poursuit ses destructions, comme un zombie. Il faut donc encore en disperser les restes.

Il n'est pas utile en revanche d'entrer dans les subtilités, somme toute bien facultatives, de la déconstruction philosophique. La diversité interne de ses courants, réelle, n'est pas essentielle. Toutes ses variantes sont rassemblées sur la même ligne de front par leurs cibles communes : l'enracinement historique, la substantialité philosophique, la décence morale et, au strict plan politique, les nations dans leur identité et les États dans leur souveraineté. Somme toute, la déconstruction croise les deux principales idéologies soixante-huitardes : le post-marxisme et le libertarisme, qui ont rapidement surmonté leur antagonisme initial. La première peut être représentée par Toni Negri1 dont les « multitudes mondiales », qui succèdent aux classes nationales, ont pour première passion, plus que la lutte anti-capitaliste, de détruire « cette merde d’État-nation2 » (sic…). Quant à l'autre coulée répandue par mai 68, libertaire et « alterolâtre », cosmopolite et « autophobe », elle débouche sur la « gauche morale » immigrationniste. C'est elle que j'aborde ici à travers ses maîtres à penser Deleuze, Foucault et Derrida.

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Les Américains, qui leur ont offert chaires sur chaires, les ont regroupés avec quelques autres sous le label « French Theory ». Cette faveur renseigne sur leur compte. Si elles touchent par endroits à l’éternité des grandes œuvres d’art, les philosophies majeures restent en effet, pour une part décisive, filles de leur temps. Il n’est pas seulement permis, il est nécessaire de les apprécier d’après leurs patries d'élection. Cette « géolocalisation » devient même indispensable quand une philosophie prétend lutter contre ce qui domine son époque. On pourrait sous ce rapport s’amuser de la popularité intellectuelle dont jouissent les déconstructeurs chez ceux qu’aux États-Unis on appelle liberals : occupant l’aile gauche du parti démocrate, progressistes en matière de mœurs, laissant intacts les piliers du libéralisme économique, ils sont, autrement dit, des libéraux-libertaires. Acteurs majeurs du capitalisme post-moderne dans sa superstructure idéologique, et bénéficiaires de son infrastructure économique, ils ont fait des déconstructeurs français leurs serviteurs érudits - semblables à ces esclaves grecs qui, dans l'antiquité, chapitraient la jeunesse romaine décadente. A cette différence près que ceux-ci entretenaient les fondements de l'histoire européenne que ceux-là veulent terminer. Pour parler « années 1970 », ces philosophes ont été les « valets du capital » post-moderne.

Lus de Berkeley à Columbia, donc, Deleuze, Foucault et Derrida sont les plus célèbres figures de la French theory. Je vais brièvement entourer le foyer commun de leur pensée. Ayant fait litière de la sentence opportuniste d’Heidegger selon laquelle la biographie des penseurs compterait pour rien3, je dirai aussi quelques mots de leurs parcours politiques personnels.

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Deleuze forge des concepts puissants, nietzschéens, animés par les forces de l’art et de la vie. Naturaliste, il croit en suivre les croissances dans le « biotope » politique. Ainsi propose-t-il, dans l’Abécédaire qui a tant contribué à populariser sa pensée, la notion de « devenir révolutionnaire ». Une situation devient à ce point insupportable, dit-il, qu’elle cesse dans une explosion de liberté qui déracine les « arbres » - métaphores de tous les ordres oppressifs. Sur cette terre retournée fourmillent alors des « rhizomes » qui désignent dans la botanique deleuzienne d’imprévisibles ramifications libertaires. Car la liberté pousserait là, dans des « flux », entre les « branches », indisciplinée, anarchique, avant que les arbres liberticides reprennent vite et comme fatalement racine. Deleuze constate avec placidité que les révolutions « tournent mal » sans vraiment dire pourquoi, l’oppression lui paraissant devoir « arriver » à la liberté dans une sorte de balancement cosmique.

On ne peut à l'évidence concevoir avec lui un éventuel rôle positif de l’État, ni la valeur de la substance, au sens stoïcien de ce qui dure, tandis qu’on est happé par des flux « désirants ». Flux dont le potentiel consommateur-destructeur habite l’angle mort de cette pensée. Et c’est sans injustice flagrante que le vocabulaire deleuzien du « nomadisme », de la « déterritorialisation » et donc des « flux », se retrouve aujourd’hui dans la langue du capitalisme financier apatride. Et c'est aussi sans surprise qu'il sert à dissoudre par l'immigration l'identité des peuples et, avec elle, leur souveraineté politique. Deleuze, rétif aux rigueurs de la dialectique hégelienne, méprise les points d’arrêts, de repos et de contrainte, autrement dit les institutions indispensables à la liberté collective. Il renvoie ainsi les moments négatifs politiquement nécessaires – coercition, institution, autorité - aux « passions tristes » spinozistes, aux « forces faibles » nietzschéennes, autrement dit aux pathologies de la soumission. Et sa pensée offre l'aspect d’une sorte d'anarcho-naturalisme artiste qui, par constitution, supporte très mal l'épreuve historique. Ne comprenant l'histoire européenne qu'à travers ses grandes œuvres culturelles, il l'ignore superbement comme destin civilisationnel. Pour ceux qui font de ce destin leur combat, Deleuze n'offre que des armes piégées.

Quant à son parcours personnel, on peut y reconnaître une certaine fidélité et une probité stoïcienne. Il a certes cultivé le fétichisme des marges dans le joyeux (?) désordre de l'université de Vincennes, esquivé ensuite les questions embarrassantes sur les conséquences sociales et existentielles du gauchisme, refusé, en somme, de regarder en face le soleil noir de Mai. Mais après avoir embrassé la veine vitaliste de 68, sans jamais y revenir, il n’a jamais personnellement couru après les bénéfices, narcissiques ou matériels, de l’avant-garde.

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On lit chez Foucault une prose théorique parfois étincelante, ainsi dans les inoubliables ouvertures de ses deux œuvres maîtresses, Surveiller et punir et Les mots et les choses. On y apprend aussi beaucoup car un corpus de faits - historiques, scientifiques et esthétiques -, donne à chaque proposition essentielle un appui probatoire. Mais en dépit d’une telle volonté positiviste, le concept foucaldien de pouvoir glisse entre les doigts comme l’eau de Thalès : élément  universel imprégnant toute chose, il serait à ce point répandu dans les institutions, les discours et les pratiques quotidiennes, qu’il en devient impensable. Avec cette conséquence logique qu’on ne peut échapper à un pouvoir partout oppresseur qu’en se projetant le long de lignes de fuite extraordinaires. Cédant comme Deleuze à l’idolâtrie des marges cultivée par son époque, Foucault réserve ainsi l’expérience de la liberté aux déments, aux criminels, aux parricides, aux transsexuels. Dès lors en effet que l’État (et toutes les institutions qui en émanent) ne serait qu’un pur agent d’oppression, n’importe quoi, à la lettre - du maoïsme aux droits de l’homme en passant par la révolution iranienne -, devient contre lui une ressource envisageable. Ayant bien saisi pourtant le passage des sociétés hiérarchisées « verticales » aux sociétés de contrôle « horizontales », Foucault, tout à sa répugnance pour l’État, n’imagine pas de le mobiliser contre les nouvelles dominations. Quant aux « subjectivations » individuelles dont il entreprend l’histoire originale depuis les Grecs, éprouvant chez eux, sans qu’œuvre ici le hasard, une dilection particulière pour les cyniques, elles se logent aujourd’hui à merveille dans le nouveau capitalisme de consommation. Celui-ci absorbe tous les modes de vie alternatifs dès lors qu'ils ne touchent pas, à travers une pensée rigoureuse et substantielle, au cœur de son réacteur. Il accumule les bénéfices de sa propre critique en y employant une armée de serviteurs « impertinents » (dont la « rebellocratie  » du spectacle, selon l'expression de Philippe Murray, occupe au bout de la laisse la tête la plus avancée).

Honnies par le penseur, les institutions de la république ne furent pas si mauvaises mères pour l’universitaire. Il y menait jusqu’en 68 une belle carrière sans vagues, qu’il poursuivit ensuite au Collège de France. Il devient peu après Mai un « compagnon de route » des maoïstes spécialisé dans la question carcérale, avant d’abonder intellectuellement la Révolution islamique iranienne en même temps que, sans solution de continuité, les « nouveaux philosophes » (Deleuze, lui, avait eut le bon goût de les tenir sur-le-champ dans le mépris qui leur revient). Il achève avec eux sa trajectoire en rejoignant le droit-de-l’hommisme4 qui, envahissant le champ politique à partir de la fin des années 70, va former avec l’hédonisme le couple infernal des deux décennies suivantes. Les choses s’aggravent encore post-mortem puisque le principal légataire éditorial de Foucault, François Ewald, allait conseiller, en plus de la Fédération française des sociétés d’assurance, Denis Kessler l’ex-maoïste dirigeant du Medef. Je crois qu’il n’est plus à craindre qu’un jour contre son ambiance apparente, mais conformément à ses lames de fond, le foucaldisme devienne un libéralisme. C'est fait. De son vivant, Foucault avait adopté les uns après les autres les états de la critique institutionnelle, majoritaire, permise et sans risque. A telle enseigne qu’on peut soupçonner son positivisme revendiqué, qui devrait a priori loger sa déontologie dans le respect des faits, d’avoir abrité une sourde servilité au Fait hégémonique s’insinuant, honteuse ou inconsciente d’elle-même, sous la flamboyance des concepts et des poses. 

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Derrida, enfin. Il livre quelques puissants textes à l’époque de L’écriture et la différence (1967) avant de se fortifier dans l’idée qu’entre le concept et la métaphore, la philosophie et la littérature, les frontières devaient s’effacer au profit de la notion d’« écriture »5 - qui ne peut chez lui, lecture faite, être confondue avec le style. Se plaçant dans le sillage de Heidegger, Derrida entend « dé(cons)truire » l’équation fondamentale du projet philosophique grec : la saisie de l’être des choses par la pensée rationnelle. S’il n’y a pas lieu de soustraire ce projet à la critique, qui est un de ses gestes essentiels, elle n’en épuise sans doute pas toutes les virtualités. On pourrait au risque de passer pour un humble naïf s’attarder un instant, quels dégoût, mélancolie ou consternation que nous inspire le devenir de l’Occident contemporain, sur les plus hautes réalisations du Logos. Il serait donc pour Derrida à déconstruire d’urgence ou, plus subtilement, il connaîtrait une déconstruction interne que la pensée devrait recueillir. Mais alors que Heidegger entendait pour ce faire une Voix « gréco-allemande » plus ancienne que les calculs de la rationalité technicienne, Derrida reçoit son inspiration là, près de lui-même, dans la lettre hébraïque. Et il fait glisser, après Lévinas et tant d'autres intellectuels juifs, la philosophie d’Athènes à Jérusalem. Elle s'y perd sans retour. Dès lors que le monde est supposé échapper au logos qui s’efforce de l’éclairer, qu’il se renferme désormais dans une écriture indéfiniment déchiffrable, on prend en effet le chemin du désert théologique.

Derrida, adoptant assez naturellement le ton de l’Ecclésiaste rabaissant les vains édifices humains, renvoie ainsi les grandes philosophies à leurs impensés, leur logique consciente à ce qu’elle refoule, leurs intentions rationnelles à une lettre qui, « disséminante » et « différante », les déborde parce que l’infini travaille en elle6. Il passe au rouleau compresseur kabbalistique les distinctions sur lesquelles repose la pensée occidentale (cause et effet, substance et accident, sujet et objet, etc.) avec un acharnement formel qui exprime une sorte de haine froide. Dans une telle atmosphère de confusion, on marche à rebours de l’esprit du logos avec ses déterminations habitables. Rien ici ne paraît pouvoir subsister, durer, s’établir ou s’affirmer sinon, peut-être, la figure du philosophe prophète qui semble posséder, lui et lui seul, la consistance du particulier et le magistère de l’universel. Il juge en effet sans bienveillance, en brandissant une Loi aussi absolue que retirée du commun, les œuvres politiques, les cultures et les mondes particuliers des peuples (moins Israël...) qui veulent être quelqu’un dans l’histoire. Restent alors, pour tout solde, un empêchement de pensée et une théologie judaïque de contrebande.

Quand Deleuze s’installe avec ses concepts vivants dans une affirmation sans dialectique, Derrida administre au sens une correction infinie qui, n’affirmant jamais que l’imperfection du monde, porte en chaire un maître de l’obscurité. On passe donc, d’un French theorist à l’autre, du refus libertaire de la dialectique à son engloutissement dans les eaux glacées d’une théocratie négative. Pour un résultat somme toute équivalent : partageant les mêmes hostilités - métaphysique contre la substance, politique contre la nation-, ils ligotent la philosophie au cosmopolitisme des droits de l'homme.

Derrida s’est montré publiquement plus discret que Foucault. Jouissant dans l’université française d’une marginalité confortable, il empile les chaires américaines, soutient les dissidents tchèques, rentre en 1995 au comité de soutien à Lionel Jospin, duquel il s’éloigne en 2002 parce qu’il juge sa politique d’immigration impitoyable... Il accomplit en définitive le parcours sans faute d’une grande conscience de gauche pétitionnaire – Antigone séfarade d’amphithéâtre contre les méchants Créon d’État - qui ne se risque sur le champ de bataille qu'abrité sous le Paraclet du droit naturel cosmopolitique.

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A moins de croire à la stratégie du cheval de Troie, douteuse en général, il faut bien se rendre à l’évidence : ces pensées sont à tel point aspirées par les pôles du monde capitaliste « post-moderne », qui mêle hédonisme et juridisme, qu’elles sont impropres à en combattre les toxines. Pire, elles les répandent. Émasculant intellectuellement la capacité politique des peuples, la déconstruction méprise l’État et la Nation - l’acteur du pouvoir et sa source légitime – au profit de résistances introuvables. Par la Nature chez Deleuze, par les Faits avec Foucault, par la Loi aux termes de Derrida, on finit par perdre la mesure dans les choses, l’autorité des faits vacille et l’esprit des lois devient impensable. En pourchassant avec les gauchistes sa configuration patriarcale, nationale et industrielle, ils ont prêté leurs amples pensées à l’ennemi capitaliste qui, disais-je, passait avec eux au stade puéril, mondial et consumériste. A travers leurs cas particuliers le magistère de 68 est en cause, avec son « héritage impossible7 ».

Les French theorists déconstruisent, critiquent ou subvertissent les catégories de la tradition philosophique occidentale. Mais le poids des choses contrarie sans cesse leur prétention avant-gardiste de dépasser par la pensée ce qui, dans cette tradition, abrite les conditions d’un monde habitable. Même quand ils l’abordent plus humblement, la logique même de leur pensée leur fait maltraiter l’histoire. « Post-modernes », ils ne cherchent dans leur époque, et donc n’y trouvent, que des dates de péremption, frissonnant de plaisir à chaque acte de décès qu’ils croient pouvoir prononcer. En réalité, complaisamment postés partout où le « vieux monde » est déjà mort, ils ne conjurent que des menaces révolues en s'aveuglant avec métier sur les dangers présents.

Qu’on me comprenne bien : je ne pointe pas ici le retard sur le Temps des intellectuels en question. Non, je suis tout au contraire frappé par leur collusion avec le capitalisme dont ils semblent instruire la critique. S’ils étaient « inactuels » ou « intempestifs », ils joueraient du marteau nietzschéen. S’ils surmontaient leur époque, ils suivraient le totem des philosophes selon Hegel, « chouettes de Minerve prenant leur envol au crépuscule ». Bref, s’ils pensaient leur époque en s’écartant d’elle, pour la subvertir, la surmonter ou la dépasser, ils rempliraient le rôle moderne auquel ils prétendent. Mais, épousant la trajectoire du 68 des élites, ils sont passés d’une révolution libertaire parlant marxiste au « droit de l’hommisme » antiraciste millésimé « années 80 ». Via, donc, les universités américaines. Mais ils subissent aujourd'hui, le temps de leur splendeur passé, le retour d'une logique implacable : à force d’ignorer les permanences au fond des choses pour se précipiter à l’avant-garde de la critique de la domination, on est irrémédiablement condamné à épouser les formes que la domination prescrit à sa critique.

C'est au fond le vieux Jacques Duclos qui avait raison. Dans un opuscule paru dès l'été 19688, le dirigeant stalinien mettait en garde contre les descendants de Bakounine jetant des pierres au quartier latin. Ces gauchistes, avertissait-il, propagent un désastreux « amorphisme » révolutionnaire : leur haine des formes, des mœurs et des institutions, les condamne à définir la liberté comme une pure négation ou, ce qui revient au même, comme un pur plastique. « Détruire c’est créer » disait ainsi Bakounine, l’éternel adolescent.

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Aux aurores de la modernité, Descartes avait pressenti les audaces terribles qui s’ouvraient devant la volonté infinie, illimitée et prométhéenne à laquelle la science nouvelle faisait découvrir sa puissance. Puissance qui pourrait s’exercer non seulement contre une tradition intellectuelle imparfaite mais aussi, et c’était la crainte de Descartes, contre tous les ordres moraux et politiques. Ainsi ne cesse-t-il dans le Discours de la méthode de mettre en garde contre une extension « démocratique » du doute radical qu’il pratique dans le domaine de la connaissance pure. De la grandeur inquiète de ces commencements, nous sommes passés au gauchisme de consommation « post-soixante-huitard ». S’il recule dans le passé, il continue d’irradier notre présent comme une strate géologique recouverte mais encore active.
Depuis quarante ans, la liberté moderne échoue ainsi sur une plage artificielle qui, après 68, a recouvert les durs, les vertueux pavés « gaullo-communistes ».

Un haïssable petit « moi » s'y agite, formant des pâtés capricieux, qui exige, revenu à la maison, de consommer sans ranger sa chambre. Bientôt père en rollers chantonnant Vincent Delerm, il n’hésite pas à porter des dreads-locks qui, bien acceptées dans son « job », aggravent son cas devant l’Éternel juge de tous les styles. Il prend avec l’âge l'aspect d’un vieux poupon arrogant et vagissant, réclamant l'air méchant de jouir encore et encore, et qui, gênant, tout le monde, ressemble trait pour trait à Dany Cohn-Bendit... Mais Cohn-Bendit va mourir bientôt, son monde est en phase terminale, et la déconstruction restera dans l'histoire de la pensée européenne comme le symptôme d'une dépression passagère. Le réalisme politique, la décence éthique et la consistance philosophique ont commencé leur insurrection. Mais c'est une autre histoire. Elle s'ouvre devant nous.

Notes:

Le site katehon.com ne donne malheureusement pas les notes de cet article !

jeudi, 24 août 2017

Robert STEUCKERS, Pages celtiques

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Robert STEUCKERS,

Pages celtiques

A paraître, septembre 2017

A commander :

ladiffusiondulore@gmail.com

Ce nouveau recueil de Robert Steuckers explore de multiples champs de réflexion autour de la question celtique.

Des origines de la déesse celtique Brigid devenue sainte irlandaise, en passant par la mythologie des Iles britanniques et la saga du christianisme irlando-écossais, l’étude du projet politique pan-celtique de la République d’Irlande, ou encore une causerie sur la notion de « patrie charnelle », sans oublier un vibrant hommage au nationaliste breton Olier Mordrel, cet ouvrage rassemble les attributs permettant de parfaire nos connaissances sur ce foisonnant héritage celte.

 

 

Tendances lourdes du djihadisme

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Tendances lourdes du djihadisme

par François-Bernard Huyghe

Ex: http://www.huyghe.fr

La même semaine : deux attentats à la voiture-bélier en Catalogne (plus un probablement manqué avec des bonbonnes de gaz), des agressions au poignard en Finlande et en Sibérie, tout cela revendiqué ou attribué à l’État islamique. Si l’on suit les données fournies par le Monde, 87 personnes ont déjà péri cette année en Europe (dont un tiers au Royaume-Uni), pas toutes du fait de l’islamisme, puisque ces données tiennent compte des attentats kurdes en Turquie.

Si l'on élargit la perspective, en prenant les chiffres globaux publiés par le National Consortium for the Study of Terrorism and Responses to Terorrism, l'année dernière, il y a eu de par le monde 13.400 attaques terroristes tuant 34.000 personnes. mais, parmi celles-ci, les attentats commandités par l'EI, menées par des organisations ralliées ou simplement inspirées par Daech auraient tué 11.700 personnes (dont, il est vrai, 4.400 auteurs des attentats, ce qui prouve qu'il n'est pas très difficile de trouver des kamikazes). Pour une organisation dite agonisante et contre laquelle se dressent les soixante plus grandes puissances mondiales plus un nombre impressionnant de groupes armés....

Pour le dire autrement, si les tendances se prolongent, il faut s’attendre de plus en plus a) à ce que des islamistes attaquent dans la rue à l’arme blanche b) à ce qu’il y ait encore des voitures-bélier c) à ce que des djihadistes continuent quand même à perpétrer des attentats à l’arme à feu ou à l’explosif en Europe.

Sur le dernier point - même si l’on compare - en terme de l'efficacité la plus cynique, disons l’attaque à la Kalachnikov sur les Champs-Élysées à la fusillade du Bataclan ou l’explosion de Manchester (22 morts dans une foule très dense) à la période des attentats à l’explosif à Londres en 2005 (al Qaïda à l’époque), l’emploi des armes « par nature » (armes automatiques difficiles à se procurer, explosifs dangereux à fabriquer) semble plus rare et moins mortel.

Ceci peut s’expliquer par le fait qu’il y ait eu, comme à Marseille, des arrestations d’artificiers « juste à temps ». Autres explications possibles : l’État islamique sur le point d’être écrasé sur son propre territoire ne peut plus envoyer des commandos aguerris sur le front et/ou préfère encourager des initiatives économiques en termes de préparation (prendre sa voiture ne demande pas une énorme planification), à la portée de ceux qui n’ont pas fait la hijrah (aller sur la terre du califat). Soit Daech n’est plus guère en mesure d’organiser des opérations lourdes et sophistiquées, soit il considère comme tout aussi rentable d’inspirer des gens qui prendront des initiatives, même avec de moyens modestes, de façon décentralisée, et souvent avec autant d’impact médiatique.

Le raisonnement qui précède pourrait se retourner si, une fois le califat territorialement écrasé, quelques milliers de combattants européens « foreign fighters » revenaient en Europe. Même en retirant ceux qui seraient découragés par des mois d’horreur et ceux qui iraient en prison (où ils feraient sans doute du prosélytisme avec tout le prestige de leur expérience du front), cela pourrait laisser la place pour des attentats menés par des vétérans peu désireux de revenir à notre vivre-ensemble.

Dans tous les cas, nous sommes confrontés à une situation inédite : il y aura dans notre pays (ou susceptibles d’en franchir les frontières), des milliers de gens qui ne passeront pas tous à l’acte mais qui estimeront qu’il est juste et nécessaire de tuer de policiers, des militaires ou des passants pris au hasard. Mais aussi de périr dans l’action et de gagner ainsi le paradis des martyrs, tout en vengeant les persécutions dont les Européens seraient collectivement coupables à l’égard des musulmans. Il faut peut-être s’attendre à lire tous les deux mois environs que quelqu’un s’est précipité avec un couteau ou qu’une voiture a foncé sur la foule… Tous ces attentats ne seront pas forcément mortels, mais en dépit d’un taux d’échecs, ils contribueront à une sinistre routine. En écrivant ce terme nous pensons au livre « Terrorisme et routine » (1880) du russe Romanchenko qui théorisait une violence anti-étatique et justifiait l’attentat. Si l’on se souvient que de 1878 (attentat de Véra Zassoulitch contre le général Trepov) jusqu’à un attentat social-révolutionnaire contre Lénine en 1918, la Russie a connu des centaines de morts par attentats, il faut prendre l’expression routine au sérieux et se dire qu’un cycle terroriste peut durer longtemps.
Globalement, il y a quatre façons de finir pour les mouvements terroristes
Ils gagnent
Ils deviennent une force politique classique et négocient
La répression en vient à bout
Le mouvement s’épuise par découragement ou fautes d’objectifs historiques.

L’hypothèse d’une victoire des djihadistes semble impossible dans la mesure où l’est leur objectif proclamé, l’extension du califat à la Terre entière et la conversion de tous les hommes. La transformation de l’EI en mouvement politique légal ou en force armée négociant un accord avec ses adversaires avant de déposer les armes contre compensation ne paraît pas non plus très proche.

La répression ? Il fut certes possible d’arrêter à peu près tous les membres de l’Armée rouge japonaise ou d’Action Directe en France mais ce raisonnement s’applique mal à notre pays aujourd’hui. Difficile à transposer 18.500 signalements pour radicalisation en 2017, qui certes ne commettront pas tous d’attentats, mais qui ne font pas partie d’une seule organisation susceptible d’être décapitée un jour, qui se réunit, planifie ses actions, etc., avec de petits groupes prenant des initiatives de façon plutôt autonome.

Reste l’idée du renoncement. Nous ne l’obtiendrons pas par une déradicalisation que nous sommes aussi peu capables de définir que de pratiquer avec succès (le dernier centre de déradicalisation vient de fermer faute de clients et de résultats). Quant au contre-discours dont nous avons fait la critique sur ce site, il semble incapable de sortir de trois figures récurrentes : 1) ils vous mentent 2) ils vous lavent le cerveau, 3) les musulmans s’en désolidarisent. Cette rhétorique ne fonctionne guère avec des gens qui se réfèrent à une doctrine structurée qui, sur la base de hadiths et d’interprétations théologiques littéralistes qui remontent au hanbalisme et qui, dans tous les cas, ne croient pas un mot de ce que disent les mécréants et les musulmans « hypocrites ».

En attendant d’avoir appris à mener la lutte idéologique qui transformerait leur logiciel, nous en sommes réduits à compter sur l’effet de lassitude ou de découragement. C’est une équation à au moins deux inconnues, en prenant pour hypothèse que la califat finira bien par tomber et perdre toute implantation territoriale.

Que deviendront les anciens combattants, notamment français ou francophones ? Ceux qui n’auront pas été tués sur place auront le choix entre continuer à combattre dans la région (en Libye, par exemple) sous les mêmes couleurs, rejoindre d’autres groupes djihadistes et éventuellement contribuer à donner une seconde jeunesse à la franchise al Qaïda, retourner en Europe au risque de la prison (où ils recruteront ?), passer entre les mailles du filet, rester salafistes mais « quiétistes » en renonçant à la violence armée remonter des cellules en Europe… Peu d’entre eux en revenant se convertiront aux valeurs de la République et de la laïcité.

Mais l’autre question est d’ordre symbolique : l’effet de la chute de l’EI pour des gens qui ont précisément été attirés par son utopie : fonder le califat des vrais croyants destiné à conquérir la Terre et venger tous les torts subis par les croyants. Si la promesse n’est pas tenue, les sympathisants vont-ils se tourner vers d’autres formes d’islamisme ? Ou croire, comme les y incite le discours de Daech, à ne voir là que la dernière épreuve imposée par Dieu avant l’inévitable victoire ? Aux banques de la colère ou du ressentiment, la perte du territoire et l’écrasement des derniers « lions » du calife accroissent notre débit. Des batailles du VII° siècle en passant par les Croisades, la colonisation et les guerres au terrorisme, il s’agit d’un seul crime à leurs yeux. La simple idée de venger le califat peut-elle susciter davantage encore de vocations ?

Baisse de la létalité des attentats, capacité à accepter cela comme une « routine » statistiquement inévitable et moindre effet symbolique ? Récupération des djihadistes par d’autres organisations ? Ressentiment et violence de ressentiment après la chute de l’EI ? Telles sont les inconnues dont dépend l’avenir du terrorisme djihadiste. Son passé remonte aux années 90 (les attentats de 1995 liés à l’islamisme algérien font huit morts en France) : au moins une génération et le temps de deux organisations principales (Al Qaïda puis Daech). Entretemps nous n’avons appris ni à les écraser militairement, ni à les contrer idéologiquement.

Les militaires prennent-ils le pouvoir à Washington?

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Les militaires prennent-ils le pouvoir à Washington?

par Jean-Paul Baquiast

Ex: http://www.europesolidaire.eu

Le « limogeage » de Steve Bannon par Donald Trump suscite d'innombrables commentaires. Les premiers concernent d'abord les vraies raisons du départ de Bannon. A-t- été effectivement renvoyé par Trump de la fonction de conseiller spécial pour la stratégie dans laquelle il avait été nommé par ce dernier il y a sept mois. A-t-il au contraire démissionné de son plein gré pour rejoindre son bastion éditorial de Breitbart.com http://www.breitbart.com/ ?
 
Dans le premier cas, Trump a-t-il volontairement limogé Bannon dont il ne supportait plus les critiques, ou sous la pression de l'Etat profond américain dont les deux piliers sont les militaires et Wall Street. Ces derniers s'irritaient de plus en plus du fait que Bannon voulait obliger Trump à s'affranchir de la tutelle toujours plus pesante qu'ils exerçaient sur le Président.

D'autres commentaires concernent les projets de Bannon une fois libéré de ses fonctions officielles. Va-t-il soutenir plus ouvertement Trump en rendant public tout ce qu'il sait des pressions des militaires? Va-t-il au contraire mener « une guerre nucléaire » contre Trump, comme il l'aurait promis, du fait que selon lui, Trump avait abandonné les grandes lignes de son programme électoral, celles visant à désengager l'Amérique de ses guerres extérieures et à la doter d''une politique économique protectionniste et isolationniste, conforme à celle que Steve Bannon et le lobby Breitbart avaient toujours recommandé?

Nous pensons pour notre part que, quelles qu'en aient été les raisons, le départ de Bannon permettra aux militaires (Les généraux Kelly et McMaster à la Maison-Blanche, le général Mattis au Pentagone) de contrôler directement la Maison Blanche et mettre le Président et l'Administration fédérale au service de leurs objectifs.

Ceci signifierait, même si ce terme est peu employé par les médias américains, que se mettrait en place une véritable dictature militaire soft, c'est-à-dire ne faisant pas pour le moment appel aux forces armées pour vaincre les résistances encore toute verbales d'une partie du corps politique américain.

Mais quels objectifs poursuivrait cette dictature militaire, s'exerçant pour le moment sous le couvert de Trump? La encore, les opinions peuvent différer. Nous pensons pour notre part qu'elle reviendrait aux objectifs annoncés par Hillary Clinton durant sa campagne, visant notamment à reprendre militairement l'initiative au Moyen-Orient. Par contre, le projet d'une guerre nécessairement nucléaire contre la Corée du Nord et à terme contre la Chine, telle que celle toujours préconisée par Trump, ne serait pas retenu, car les militaires n'y voient que des inconvénients.

Ils réserveraient l'immense supériorité militaire américaine à l'objectif qui a toujours été celui de l'Etat profond, réduire la Russie à l'impuissance. Ceci permettrait à l'Amérique de redevenir la seule superpuissance nucléaire qu'elle avait été un temps. Le Pentagone paraît en effet prêt à une guerre nucléaire contre la Russie, quelles qu'en soient les conséquences désastreuse au plan mondial. Mais les militaires espèrent sans doute que Vladimir Poutine, confronté à ce risque, reculerait et céderait aux exigences de l'Empire américain.

Steve Bannon, pour sa part, paraissait totalement opposé à ce pari aux risques immenses. D'où sa neutralisation, sous une forme ou sous une autre, par les militaires.

 

Homage to Henning Eichberg (1942-2017)

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Homage to Henning Eichberg (1942-2017)

by Arne Schimmer
Ex: https://institutenr.org

“Wer trägt die schwarze Fahne heut’ durch die gespalt’ne Nation?
Who carries the black flag today in the divided nation?
Wer sprengt die Ketten, wer haut darein und kämpft für die Revolution?
Who breaks the chains, who strikes forward and struggles for the revolution?
Bist du dabei, bin ich dabei, heut’ oder morgen schon?
Do you, do I, today or maybe tomorrow?
Wann stürzt im Lande die Fremdherrschaft vor der deutschen Revolution?
When will foreign domination in this country fall before the blows of the German revolution?
Hervor, Leute, hervor – hervor!
Onward, lads, onward – onward!
Die schwarze Fahne empor!
Hold high the black flag!
Denn überall wo das Unrecht herrscht, geht die Fahne der Freiheit empor!
Everywhere where unrighteousness rules, raise high the flag of freedom!”

Every nationalist militant knew the words of this third stanza of the song: it was the unofficial anthem of the entire movement, so to speak. Henning Eichberg, who composed its text, was the principal thinker of the German national-revolutionary movement in West Germany, during the 60s and 70s. This theorist ended up emigrating to Denmark to become a member of the Socialistisk Folkeparti (Socialist People’s Party). At the end of his life, one could say that he belonged entirely to the political left of his new country. Despite this astonishing transition in the political landscape of Germany and Scandinavia, the key concepts of the “Nation” and “People” (“Nation” and “Volk”) remained cornerstones of his scientific and political interests.

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These two key concepts came directly from his idiosyncratic past, his biographical itinerary. Henning Eichberg was born on December 1st 1942 in Schweidnitz in Silesia. His family left the region before the end of the war and settled in Saxony. Even when Eichberg began his political mutation and fully and entirely became a man of the left, he never stopped considering himself as a Silesian, as he recalls elsewhere in an interview accorded to the magazine Ökologie in 1998: “At the start of the project of modernity, peoples rose and sought to make themselves subjects of history, they marched in the name of liberty, equality, and fraternity … but this third value was forgotten: precisely, brotherhood, sisterhood, the communitarian feeling, or to mark it in red letters, solidarity … That’s why we must restart the project of modernity from zero. The preceding project lead to the murder of entire peoples, ethnic cleansing. Genocide and ethnocide are diametrically opposed to fraternity. That’s why I hold onto my Silesian identity, so that it is not forgotten. Silesia will not die with the old generation. The American Indian didn’t die at Wounded Knee either.”

From Adenauer’s CDU to Pure Nationalism

In 1950, the family of the young Henning Eichberg moved to Hamburg. In a retrospective interview given in 2010, he reminded his readers that he never felt at home in West Germany. In the 1950s, the young man Eichberg sought to become involved in the Adenauer era. He joined the Christian democratic CDU and obtained the rank of reserve officer in the Bundeswehr. Yet his reflections and observations made him realize one thing: the parties of the CDU only envisioned German reunification from an entirely theoretical point of view; moreover the increasing Americanization of the country particularly disturbed him. At the start of the 1960s, Eichberg reoriented himself politically bit by bit. This labor of reflection lead him to call himself a “national revolutionary.” His character attracted attention as he produced an enormous amount of work as publicist in these years, notably writing in the magazines Nation Europa, Deutscher Studenten-Anzeiger, Deutsche National-Zeitung und Soldatenzeitung and for a very important theoretical organ despite its niche style: Junges Forum. He quite justly acquired the reputation of being the principal theorist of the national-revolutionary movement in West Germany. In a work devoted to this movement, the very attentive observer of German extra-parliamentary movements Günter Bartsch vividly describes him as the “Rudi Dutschke of the right,” in his reference work “Revolution von rechts? Ideologie und Organisation der Neuen Rechte.” Some of his texts, written under the pseudonym Hartwig Singer were truly the foundational texts of a new political theory at the time. He then had the ambition to develop a theoretical corpus for German nationalism that could stay the course and endure. This corpus must, in his opinion, answer all the great questions of the moment and enter into serious competition with the ideas proposed by the “new left.”

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The Western Characteristic

Happy are those who still posses the little black books entitled Junge Kritik, which Eichberg edited at the time, today the younger people have enormous difficulty finding them even in specialized bookstores! The owners of these precious booklets can measure the quality of Eichberg’s thoughts, unequaled in Germany in the 1950s and 60s. There Eichberg raised nationalism to a very respectable theoretical level: in his proofs, he starts from the postulate of a “Western characteristic,” the origin of the psychology and mores of the peoples of Europe, from which one could also deduce the emergence of typically European / Western phenomena like technology. Eichberg sought to deploy his political efforts to keep these traits of the European psyche intact in the framework of industrial societies, which all need to renew themselves from their identitarian origins.

But even while he was becoming the principal theoretical innovator of the nationalist camp in Germany at the time, Eichberg had already branched out into certain circles of the “new left” in Hamburg, who were also fighting against imperialism, especially American imperialism. These circles were “Club Lynx” and Arie Goral’s Galerie. Though Eichberg portrayed himself as a radical anticommunist in the 1960s, that didn’t prevent him from finding many positive ideas in the emerging 68er movement, because they raised a “revolt against the establishment.” He said an authentic right would never defend this establishment. Consequently, he made the watchword of this new anarchic left his own: “Disorder is the first duty!” However at the same time, Eichberg rejected conventional “socialism” and argued for a “European socialism” which was simultaneously a modern nationalism. He then referred to the left wing of the NSDAP in the 1920s.

Another revealing discovery by Eichberg in 1966: his participation in the summer camp of the French youth who militated within the “Fédération des Etudiants Nationalistes” (FEN). He was impressed by the revolutionary determination of French militant but also their will to reconnect with the socialist and syndicalist traditions of their country. Eichberg saw a “new socialism for the Europeans of tomorrow” emerging. These years saw the emergence of the ideal of a “European Nation” among French and German nationalists.

Observers of Eichberg’s path will remark with interest that he had not entirely passed to the new left by the end of the 1960s. He had good reasons not to take the plunge. In principle, he saluted the merits of the left-wing revolt, which had shaken the political edifice of West Germany, but he also criticized the indifference the leftists displayed to the position of their own people. Eichberg thought that that leftist students militated in “diversions” when they rose up for Mao’s China or Ho Chi Minh’s Vietnam instead of fighting firstly or at least simultaneously for the reunification of Germany, itself an emblematic victim of Soviet and American imperialism. Eichberg deplored the fact that the left wing opposition didn’t harmonize its struggle for the liberation of Vietnam with the struggle for the liberation of Germany. So at first Eichberg retained his basic opinions: create a “new right” in parallel (and not necessarily in opposition) to the “new left” but a new right where militants must be both “nationalists” and “socialists,” as Günter Bartsch recounts in the book I just mentioned. Thus Eichberg held his distance in the 1960s and 70s.

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The Magazine “Wir Selbst” as a new tribune for Eichberg

Among the mythic actions that one mentions regarding Eichberg in the framework of his “new right,” there is a protest against the conferences held by Willy Brandt with the DDR’s Prime Minister Willi Stroph in Kassel in 1970. The group assembled by Eichberg distributed tracts entitled: “The division of Germany is the division of the German proletariat.” Two years later, Eichberg drafted the founding program of a movement, Aktion Neue Rechte, whose first principle would be “the nationalism of liberation” (Befreiungsnationalismus). This “nationalism of liberation” would spread in a Europe and a world divided into two blocs, one communist, the other capitalist. This incapacitating and humiliating division thus demanded the German people’s unconditional solidarity with the combat of all ethnic minorities within states, with all the peoples deprived of their national sovereignty by the American and Soviet superpowers, also victims of this duopoly. In 1974, the militants around Eichberg founded Sache des Volkes/ Nationalrevolutionäre Aufbauorganisation (Cause of the People/National Revolutionary Construction Organization – SdV/NRAO). Eichberg clearly intended to pursue one goal: encourage the political left to take the national question into consideration. Starting from this moment, he was a persona grata in certain circles of the left. He could publish his articles in some of their organs like Pflasterstrand, das da and Ästhetik & Kommunikation. He participated in the inaugural congress of the Green Party in 1979 in Baden – Wurttemberg. He then cultivated the hope of seeing a “third way” emerge from the ecological movement, distant from the fixed ideas of the right and left. But alas, he rapidly had to note that it was an error: henceforth, he would consider the Green Party as a new bourgeois party.

Eichberg was fascinated by Rudi Dutschke’s evolution. In his last years and especially before his death, the late leader of the Berlin student protesters increasingly emphasized the idea of German national self-determination in his political thought. In 1979, Siegfried Bublies founded the magazine Wir Selbst, with a national-revolutionary inspiration as Eichberg intended. Bublies had been a permanent fixture of the “Young National Democrats” in Rhineland – Palatinate. This well organized organ would become Eichberg’s principal tribune from where he would spread his non-conformist ideas.

In this magazine, Eichberg could display his always innovative ideas, which challenged and provoked but also forced the reader to reflect, to review his unrefined convictions. Eichberg’s thought was a thought in motion, nothing frozen in immobile concepts. He didn’t affirm a concept of “nation,” but he sought, with his readers, to define something organic and living: national identity. He probed every approach to re-root the people despite the deracinating context of late capitalist industrial society, in order to relieve the loss of countries and regions under the blows of globalization and Americanization.
Ultimately, Eichberg gave up seeking to influence the German political scene. In 1982, he definitively emigrated to Denmark where he received a professorship at the university of Odense. In his Danish exile, he clearly broke more and more with right wing milieus. Much later, his former disciples would learn with stupefaction that he argued for a multicultural society in his own way. From his Danish professorship, Eichberg would acquire an international scientific renown. He became specialist in “body culture” and sport. All that was distant from the theories he professed in the columns of Wir Selbst or Volkslust. His theories on sport and body culture are very interesting but their very acute scientific character obviously doesn’t electrify militants like the innovative and pioneering texts of the national-revolutionary faction he boldly drafted in the 1960s, 70s, and 80s.

Henning Eichberg passed away in Odense in Denmark on April 22nd, 2017.

Wer trägt die schwarze Fahne

1. Wer trägt die schwarze Fahne dort durch Schleswig und Holsteiner Land?
Das sind die Bauern, das ist Claus Heim, der trägt sie in der Hand.
Sie pfändeten ihnen die Höfe weg, da bombten sie die Behörden entzwei.
Im Jahr achtundzwanzig erhoben sie sich gegen Zinsdruck und Ausbeuterei.
/ : Hervor, Leute hervor, hervor! Die schwarze Fahne empor! Denn überall,
wo das Unrecht herrscht, geht die schwarze Fahne empor.

(Who carries the black flag in the lands of Schleswig and Holstein?
It’s the peasants, Claus Heim carries it in hand.
Their farms mortgaged and taken, they blew up the government agencies!
In the year of 28, they rose against interest and exploitation)

2. Wer trägt die schwarze Fahne dort durch das Westfalenland?
Das ist der Kumpel von der Ruhr, er trägt sie in der Hand.
Sie schlossen ihnen die Zechen zu, das war das letzte mal;
im Jahr sechsundsechzig erhoben sie sich gegen Bonn und das Kapital.
/ : Hervor, Leute hervor, hervor! Die schwarze Fahne empor! Denn überall,
wo das Unrecht herrscht, geht die schwarze Fahne empor.

(Who carries the black flag in the land of Westphalia?
It’s the coal-miner of the Ruhr, he carries it in hand.
They’ve closed his mines, it’s the last time;
In the year of 66 they rose against Bonn and Capital.)

3. Wer trägt die schwarze Fahne heut` durch die gespalt`ne Nation?
Wer sprengt die Ketten, wer haut darein und kämpft für die Revolution?
Bist du dabei, bin ich dabei, heut` oder morgen schon?
Wann stürzt im Land die Fremdherrschaft vor der deutschen Revolution?
/ : Hervor, Leute hervor, hervor! Die schwarze Fahne empor! Denn überall,
wo das Unrecht herrscht, geht die Fahne der Freiheit empor.

Source: http://euro-synergies.hautetfort.com/archive/2017/08/17/h...