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vendredi, 18 juillet 2008

Mittelmeerunion: Ohne Nutzen für Europa

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Ohne Nutzen für Europa

  

Gaddafi bezeichnet

  

Mittelmeerunion als

  

"imperialistischen Plan"

von Andreas MÖLZER

Am vergangenen Sonntag wurde in Paris einen Tag vor dem französischen Nationalfeiertag die „Mittelmeerunion“ aus der Taufe gehoben. Der Mittelmeerunion, einem Lieblingsprojekt des amtierenden EU-Vorsitzenden, Frankreichs Präsident Nicolas Sarkozy, gehören neben den 27 Mitgliedstaaten der Europäischen Union fast alle Anrainerstaaten des südlichen und östlichen Mittelmeers an. Einzig Libyen, dessen „Revolutionsführer“ Gaddafi die Mittelmeerunion als „imperialistischen Plan“ bezeichnet hat, nimmt nicht teil.

Ob das in der französischen Hauptstadt gegründete Gebilde für Europa einen Nutzen bringt, ist jedoch zu verneinen. Schließlich gibt es zwischen der EU und den Anrainerstaaten des Mittelmeers bereits jetzt im Rahmen des sogenannten Barcelona-Prozesses ein weitreichendes Beziehungsgeflecht, wobei die Zusammenarbeit unter anderem die Bereiche Wirtschaft, Soziales oder Zuwanderung umfaßt. Worin nun der „Mehrwert“ der Mittelmeerunion bestehen soll, ist vollkommen unklar, außer, daß deren Gründung der Eitelkeit Sarkozys schmeichelt und einen bürokratischen Mehraufwand bringt.

Anstatt dieses Konstrukt ins Leben zu rufen, wäre es weitaus besser gewesen, in Paris insbesondere mit den Staats- und Regierungschefs der nordafrikanischen Anrainerstaaten des Mittelmeers Klartext zu sprechen. Schließlich handelt es sich bei ihnen durchwegs um die Herkunft- bzw. Durchreiseländer der Wirtschaftsflüchtlinge, die zu Abertausenden nach Europa strömen. Und ihre Bereitschaft, mit der EU bei der Bekämpfung der illegalen Zuwanderung zusammenzuarbeiten, läßt mehr als zu wünschen übrig.

Somit wäre es für Europa von Interesse gewesen, mit den nordafrikanischen Mittelmeer-Anrainerstaaten Verträge über die Rückführung illegaler Zuwanderer abzuschließen. Dabei wären die Vertragspartner der EU auch entsprechend in die Pflicht zu nehmen gewesen. Schließlich stellt die EU-Kommission bis 2010 drei Milliarden Euro für den Raum südlich des Mittelmeers zur Verfügung, ohne daß von den Empfängern eine Gegenleistung erwartet wird. Angesichts dieses gewaltigen Betrags wäre es wohl das Mindeste, jenen Empfängerländern, die nicht bereit sind, mit der EU bei der Bekämpfung der illegalen Zuwanderung zusammenzuarbeiten oder ihre eigenen Staatsbürger zurückzunehmen, die von den europäischen Steuerzahlen finanzierten Wohltaten zu streichen.

jeudi, 03 juillet 2008

Russie: impasse d'une mémoire blessée


 

Russie, les impasses d’une mémoire blessée : complexe post-impérial et perspective altereuropéenne

Que reste-il de notre victoire ? Russie-Occident : le malentendu
par
Natalia Narotchnitskaia, Editions des Syrtes, 208 pages, 18 euros.

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Dans un contexte de tensions et d’incompréhension croissantes entre une Russie renaissante et un Occident américanocentré, les éditions des Syrtes ont été bien inspirées de publier un petit essai qui tombe à pic. Celui-ci est l’œuvre de Natalia Alexeevna Narotchnitskaia, une des figures de proue de la mouvance patriotique russe et, de ce fait, le porte parole de bon nombre de ses compatriotes (1).

Née en 1948, personnalité éminente de l’Orthodoxie politique, cette historienne, membre de l’Académie des sciences, fut élue député du parti Rodina et occupa le poste de vice-présidente de la Commission des Affaires étrangères de la Douma. Farouche partisane d’une « civilisation orthodoxe » singulière fondée sur la prédominance des Russes ethniques, Narotchnitskaia s’est signalée par ses critiques de la globalisation et des mécanismes supranationaux. Partisane d’un maintien des souverainetés étatiques et nationales, elle s’est fait aussi connaître par ses vigoureuses prises de positions contre la désagrégation de la Yougoslavie et l’implication de l’Otan, ce jusqu’à la récente proclamation d’indépendance du Kosovo. Son premier ouvrage traduit en français est donc un événement éditorial, d’autant plus qu’elle dirige depuis peu un Institut russe de la démocratie et de la coopération, basé à Paris, qui vise notamment à observer les atteintes aux droits de l’homme en Occident. Polémique et passionné, son livre, desservi par une traduction parfois approximative, se présente comme un appel véhément lancé à l’opinion publique occidentale.

« le souvenir de la victoire est la pierre angulaire de la conscience nationale séculaire qui empêche la disparition de la Russie »

 

Narotchnitskaia bâtit son propos autour de la question sensible de la victoire soviétique du 9 mai 1945 au terme de cette Grande Guerre Patriotique menée contre l’envahisseur « fasciste ». Cette dernière aurait rétabli le territoire de la Russie historique et permis à l’URSS de retrouver son statut de grande puissance perdu en 1917, puis ultérieurement en 1990. Elle aurait, de plus, sollicité le sentiment national et la solidarité spirituelle du peuple russe. Narotchnistskaia s’élève vigoureusement contre ce qu’elle décrit comme des tentatives répétées de l’Occident pour ternir la mémoire de ce moment clé, celles-ci devant prouver que « le souvenir de la victoire est la pierre angulaire de la conscience nationale séculaire qui empêche la disparition de la Russie ». Dès lors, toute ébauche de critique, qu’elle émane d’historiens dénonçant les détachements de barrage du NKVD ou de Lettons réécrivant l’histoire « à des fins politiques » est vouée aux gémonies. Ne parlons même pas du pacte Molotov-Ribbentrop et ses fameux protocoles secrets, de l’héritage de Yalta ou des thèses de l’historien allemand Ernst Nolte concernant le « nœud causal » entre communisme et national-socialisme (2). Les pages sombres de cette période, sujets qui fâchent, sont allègrement passées à la trappe: rien sur les millions de victimes de la répression, des déportations ou du Holodomor, la famine génocide en Ukraine de 1932-1933 (3).

Bien entendu, l’auteur ne se cantonne pas à ce moment historique particulier et en profite pour dresser une vaste généalogie des agressions occidentales contre la Russie sur une longue durée, en fait depuis la fin du XIXème siècle. Elle s’appuie, pour cela, sur une approche strictement géopolitique (thèses de Mackinder principalement) et sur toute une série de références glanées chez des auteurs russes autant qu’occidentaux pour démontrer la permanence d’une politique hostile de refoulement et d’affaiblissement de la Russie de la part d’un Occident souvent ingrat. L’Allemagne et surtout les puissances anglo-saxonnes se taillent la part du lion, de la guerre balkanique de 1878 jusqu’aux tentatives d’élargissement de l’OTAN à l’Ukraine et à la Géorgie. La plupart des faits évoqués sont fondés, mais on sent qu’ils ont été soigneusement choisis pour justifier le postulat de base, énoncé de manière totalement réductrice et passionnelle. Pour l’auteur, les représentants du « projet antirusse du XXème siècle » combattent la « transmission de la conscience russe et soviétique » car sans cela « la guerre cesse d’être patriotique, et donc les Russes du XXème siècle n’ont pas d’histoire nationale, ni de structure d’Etat légitimes. En conséquence, toute ingérence extérieure et toute révolte intérieure, tout séparatisme sont juridiquement valables ». Les catégories négatives englobant les ennemis de la Russie sont bien délimitées et comprennent, outre les Occidentaux précités, les ennemis de l’intérieur comme les « libéraux occidentalistes postsoviétiques » ou les « bolcheviks internationalistes » incarnés par le trio Lénine-Trotski-Boukharine. L’ « interprétation marxiste nihiliste de l’histoire russe » sous forme de « phraséologie libérale et anticommuniste » sous l’ère Eltsine est aussi dénoncée.

Suivant ce dernier ordre d’idée, Narotchnitskaia affirme que les diverses campagnes de propagande pour la défense du « monde libre », de la Liberté et de la Démocratie ont servi à dissimuler l’enjeu véritable de la guerre froide, à savoir discréditer l’URSS en la privant de son statut de grande puissance rendu par la victoire de 1945 et la refouler à l’Est, loin des mers Noire et Baltique. Cela n’est pas trop mal vu dans l’ensemble. Cependant, s’il apparaît clairement que l’anticommunisme a bien été instrumentalisé par les Etats-Unis durant cette période, la réalité de la lutte entre systèmes idéocratique rivaux est un peu facilement négligée dans son argumentation. En Occident, depuis les années 90 du siècle dernier, nous avons vu se mettre en place une réalité post-démocratique (4) avec la chape de velours du « politiquement correct », de la part d’un « Monde libre » qui n’a plus à donner le change face à « l’Empire du mal ».

Image Hosted by ImageShack.usUne tendance regrettable de l’auteur à essentialiser dans la durée certaines catégories historiques et politiques utilisées est décelable. C’est le cas pour la notion de « Russie historique », c’est-à-dire envisagée dans son extension territoriale maximale avec une obsession des façades maritimes baltique et méridionale, ceci avec l’idée sous-jacente que tout territoire « réuni » au noyau initial moscovite est voué à le rester éternellement. De même, « l’espace géopolitique russe » est considéré dans sa plus grande extension, en incluant le glacis des pays du Pacte de Varsovie. A aucun moment, l’auteur n’envisage de mettre en doute le bien fondé de ces catégories et la légitimité éventuelle des tendances centrifuges de la part des populations non russes. Au contraire, elle affiche une nostalgie impériale décomplexée qui dépasse largement le cadre des frontières de la Fédération de Russie. Tout cela sonne comme un air de déjà-vu et entendu, que ce soient le fameux discours de Vladimir Poutine du 9 mai 2005, les déclarations dont sont régulièrement coutumiers les officiels russes ou le nouveau manuel d’histoire de Vladislav Sourkhov.

L’ouvrage de Narotchnitskaia a l’immense mérite de rendre ces points de vue et ces sentiments largement partagés, beaucoup plus intelligibles pour les observateurs attentifs de ce grand pays. L’auteur donne la clé qui sous-tend sa conception du monde lorsqu’elle décrit chez ses compatriotes « un sentiment d’appartenance à une Patrie sacrée qui ne s’identifie pas à l’Etat » et relève d’une conscience orthodoxe inscrite dans « une perception de la continuité historique ». Une Patrie conçue donc comme une notion métaphysique, opposée au régime du moment, fût-il celui de Staline ou de ses successeurs et contre lequel il était funeste de se dresser, que l’on s’appelle Vlassov ou Sakharov. On retrouve ainsi dans ces propos toutes les contradictions inextricables auxquelles sont confrontés tous ceux qui, pour des raisons diverses, ont fait l’économie d’un nécessaire et véritable bilan du communisme dans l’espace postsoviétique.

« un sentiment d’appartenance à une Patrie sacrée qui ne s’identifie pas à l’Etat »

 

Au terme d’une démonstration désireuse de montrer que les responsabilités des affrontements et des malentendus des siècles passés sont équitablement partagées, notre historienne invite Français et Allemands, noyau dur « carolingien » d’une avant-garde européenne chère à Henri de Grossouvre (5), à tirer un trait sur la guerre froide en ouvrant la voie d’un véritable axe Paris-Berlin-Moscou. Nous ne pouvons que souscrire à cela ainsi qu’à l’affirmation que les destinées de l’Europe et de la Russie sont étroitement liées. Prenons-la au mot tout en étant bien conscients que cela devra se faire sur des bases saines, avec un inventaire historique complet et serein, bien au-delà des pathologies de la repentance en vogue en Occident, afin de sortir une fois pour toute de ce jeu de miroir mémoriel où chacun se renvoie les images douloureuses de blessures non cicatrisées. Nos amis russes devront s’efforcer de s’extirper d’un complexe post-impérial qui les empêche d’opérer une analyse lucide du moment communiste de leur histoire, ce « passé qui ne veut pas passer », en assumant les erreurs et les crimes commis, puisque la Russie se considère elle-même comme l’héritière exclusive de l’Union soviétique. Ils devront également reconnaître les peuples jadis subjugués comme des entités politiques, historiques et culturelles distinctes (cas notamment des Baltes, des Ukrainiens ou des Biélorusses) en rétablissant avec eux des relations normales et équilibrées, conformes à l’esprit d’un nouveau Jus publicum europaeum. Ce qui implique d’essayer de penser l’identité russe au-delà de l’expérience historique d’un empire araseur des différences. Cela permettrait à l’ethnos russe d’opérer un véritable retour à une Europe envisagée comme matrice ethno-historique (nos origines boréennes) et communauté de destin communes, au sein d’un vaste ensemble intégré, afin d’affronter ensemble les immenses défis qui se profilent à l’horizon d’un nouveau siècle chaotique. Un travail historiographique judicieusement orienté pourrait contribuer à gommer progressivement les traces durables de la longue parenthèse « asiatique » ainsi que les tentations néo-eurasistes de doctrinaires comme Alexandre Douguine ou Alexandre Panarine.

Les autres Européens devront également dépasser le moment occidental de leur histoire en mettant en œuvre cette capacité de régénération métamorphique qui leur est propre, mode de dévoilement de leur identité faustienne dont ils ont maintes fois fait preuve au cours de leur histoire multimillénaire. Plus que jamais, veillons à ne pas renoncer au rêve d’un empire-puissance conjuguant souveraineté et subsidiarité dans une perspective altereuropéenne et eurosibérienne, afin que puisse se réduire une fracture infracivilisationnelle, sciemment entretenue et instrumentalisées, entre pôles européens romano-germanique et slavo-orthodoxe.

Pascal Lassalle
Source : http://theatrumbelli.hautetfort.com

(1) Les lecteurs russophones pourront consulter son site : http://narochnitskaia.ru/
(2) Ernst Nolte, La guerre civile européenne 1917-1945, Editions des Syrtes, 2000. Le lecteur pourra se référer également au débat entre Nolte et Dominique Venner dans Eléments n°98, p : 22-24.
(3) Notons à ce sujet que la chambre basse du Parlement russe a nié le caractère génocidaire du Holodomor et condamné une instrumentalisation politique de ce drame par le gouvernement de Kyiv au moment où se tenait le sommet de l’Otan à Bucarest, dans une résolution datée du 2 avril. Celle-ci a été soutenue par l’écrivain Alexandre Soljenitsyne qui a évoqué une « fable insensée » à destination de l’Occident, dans les colonnes des Izvestia.
(4) Voir Eric Werner, L’après-démocratie, L’Age d’Homme,2001.
(5) Voir Henri de Grossouvre (éd.), Pour une Europe européenne, Xenia, 2007.

NB : Natalia Narotchnitskaia donnera une conférence ce mercredi 14 mai à partir de 19h30 à la librairie du Globe, 67, boulevard Beaumarchais, 75003, Paris.

mardi, 10 juin 2008

Erdogan et les kémalistes

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Erdogan et les kémalistes

 

En Turquie, aujourd’hui, la lutte qui oppose kémalistes et fondamentalistes se perpétue et on n’en voit pas la fin. Récemment, une procédure a opposé la deuxième instance judiciaire turque au gouvernement d’Erdogan. Les juges reprochent au premier ministre turc actuel de porter atteinte à l’indépendance du pouvoir judiciaire; celui-ci, dans le cadre de la procédure d’interdiction lancée contre le principal parti gouvernmental, l’AKP d’Erdogan (ou “Parti de la Justice et du Progrès”), fait pression sur le tribunal constitutionnel pour qu’il mène cette procédure à terme et prononce la dissolution de l’AKP. Le parti d’Erdogan a réagi en lançant insultes et imprécations contre les juges. Le procureur suprême de l’Etat veut que l’on lance une procédure visant à examiner le comportement récent du parti. Le quotidien suisse alémanique, la “Neue Zürcher Zeitung” (NZZ) résume la situation comme suit: “Le pouvoir judiciaire dispose de trois possibilités: il peut refuser l’interdiction du parti; il peut se contenter d’un avertissement ou il peut considérer que le parti constitue le noyau dur des activités tramées contre l’ordre laïque et, subséquemment, le faire interdire. Une telle interdiction peut se contourner en procédant à la fondation d’un nouveau parti, appelé à être derechef le successeur de l’AKP. Mais, cette fois-ci, la procédure de dissolution, qui a été engagée, vise également à interdire tout activité politique à 71 personnes parmi lesquelles le président de l’Etat turc, Abdullah Gül, et le premier ministre Erdogan. Le mandat parlementaire d’Erdogan serait alors automatiquement suspendu, ce qui aurait pour effet de provoquer obligatoirement sa démission du poste de premier ministre”. Pour s’assurer malgré tout un avenir politique, Erdogan ne se préoccupe pas seulement de travailler à la fondation d’un nouveau parti politique mais aussi de renforcer son influence personnelle à l’étranger. En Allemagne, le nouvel ouvrage de Peter Winkelvoss, “Die türkische Frage” (“La question turque”), nous montre comment Erdogan cherche à instrumentaliser les Turcs d’Allemagne (et d’Europe) pour en faire l’avant-garde d’une politique étrangère turque selon ses voeux et pour influencer le destin de la République Fédérale, en manoeuvrant une fraction de l’électorat allemand, constituée de Turcs de souche. Son discours à Cologne en février dernier atteste de ce projet, dangereux pour l’ensemble de nos pays.

 

(Source: DNZ, Munich, 23/30 mai 2008; Peter Winkelvoss, Die türkische Frage, 17,90 Euro).

vendredi, 06 juin 2008

En souvenir d'un soldat politique de la Bundeswehr

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En souvenir d'un soldat politique de la Bundeswehr: le Général-Major Hans-Joachim Löser

 

La Bundeswehr n'a jamais connu de généraux politisés à la fa­çon latino-américaine. Elle a eu la chance, cependant, d'a­voir eu, dans ses rangs, quelques généraux capables de combiner leurs compétences militaires à un instinct politi­que sûr et à une intelligence aiguë des conséquences di­rectes de la politique de sécurité pour leur peuple. Ces officiers reconnaissaient le primat du politique, c'est-à-dire la responsabilité des hommes politiques démocratiquement élus, mais se réservaient toutefois la liberté d'exposer aux responsables politiques leurs convictions politiques solide­ment étayées par un savoir factuel et technique éprouvé, surtout lorsque ces convictions ne concordaient pas avec les idées des politiques, ce que ceux-ci n'aiment guère en­ten­dre. Parmi ces officiers allemands, capables de penser politiquement au meilleur sens du terme, il y avait le Gé­néral-Major e.r. Hans-Joachim (Jochen) Löser, qui vient de nous quitter, ce 13 février 2001, dans sa 83ième année.

 

Jochen Löser était issu d'une famille de Thuringe et de Sa­xe, bien ancrée dans les traditions. Après avoir passé son Abitur  en 1936 dans une école NAPOLA de Berlin-Spandau, il rejoint comme aspirant (Fahnenjunker) le 68ième Régi­ment d'Infanterie du Brandebourg. Au début de la guerre, il est Adjudant de Bataillon, plus tard, lors de la campagne des Balkans et de la campagne de Russie, il est promu Ad­judant régimentaire auprès du 230ième Régiment d'In­fan­terie. Quand commence la terrible bataille de Stalingrad, il la vit et l'endure avec le grade de commandant de ba­tail­lon. Il est grièvement blessé et reçoit la Croix de Chevalier. A­près avoir reçu une formation d'officier d'état-major et avoir servi à ce titre dans les Carpathes et sur le Front de l'Arctique, il évite en avril 1945, face aux troupes amé­ricaines, la bataille de défense de sa ville natale, Weimar, mission impossible et désormais dépourvue de sens. Après la guerre, il gère pendant dix ans une entreprise qui occupe des invalides de guerre. En 1956, il entre au service de la Bundeswehr. Il y exerce les fonctions de maître de confé­ren­ce à l'école militaire de Hardthöhe, de chef d'état-major d'une Division puis d'un Corps d'armée, finalement il accède au grade de commandeur d'une Brigade et d'une Division. En 1974, de son propre chef, il décide de quitter le service des armes et reçoit la Grande Croix du Mérite de la RFA.

 

Quand la FDP proposait une vraie alternative

 

J'ai connu Jochen Löser en 1967, quand je dirigeais le "Cer­cle de travail I" de la fraction FDP du Bundestag, qui s'oc­cupait également des questions de défense. A l'époque, le noyau de la politique de défense de la FDP était le suivant: il nous paraissait inutile d'équiper les troupes allemandes pla­cées sous le commandement de l'OTAN d'armes atomi­ques coûteuses, alors que les munitions ad hoc ne seraient jamais placées entre des mains allemandes. Nous nous po­sions la question: ne serait-il pas plus intelligent de con­centrer nos moyens pour améliorer la défense convention­nelle de l'Allemagne et de laisser la dissuasion nucléaire aux puissances qui pourrait l'utiliser en cas d'urgence? C'est donc surtout grâce aux conseils de Jochen Löser que la FDP, guidée par son expert en questions de défense, Fritz-Rudolf Schultz, a pu présenter une alternative en politique de sécurité, face à la Grande Coalition de l'époque; c'était une alternative inattaquable sur le plan des faits, qui te­nait nettement mieux compte des intérêts du peuple alle­mand divisé en cas de guerre que les plans habituels de l'OTAN.

 

Après 1969, la FDP, malheureusement, a abandonné ses pré­occupations en matières de défense et n'a plus ma­ni­festé d'intérêt pour ces réflexions. En tant que comman­deur, Jochen Löser ne voyait plus aucune possibilité de diffuser ses compétences techniques. Cela a sans doute mo­tivé son départ de la Bundeswehr. Il a alors commencé une fructueuse carrière d'écrivain politique, où il a couché sur le papier ses réflexions en matières de défense, qui, chaque fois, tenaient compte des intérêts de l'adversaire po­tentiel. Des ouvrages comme Gegen den Dritten Welt­krieg (Contre la Troisième Guerre mondiale), Weder rot noch tot (Ni rouges ni morts), Neutralität für Mitteleuropa (Neutralité pour l'Europe centrale), Kämpfen können, um nicht kämpfen zu müssen (Savoir combattre pour ne pas a­voir à combattre), puis, finalement, cette magnifique his­toire de la 76ième Division d'Infanterie de Berlin-Brande­bourg, intitulée Bittere Pflicht (Notre amer devoir), où Jo­chen Löser, le soldat qui défendait les intérêts de son peu­ple, rassemblait tous ses souvenirs, sans perdre de vue les in­térêts des autres peuples.

 

Detlef KÜHN.

(Hommage rendu dans l'hebdomadaire Junge Freiheit, http://www.jungefreiheit.de ).

jeudi, 05 juin 2008

Adieu au Général-Major Jochen Löser

 

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Adieu au Général-Major Jochen Löser

Le Général Major Jochen Löser est décédé le 13 février 2001, à l'âge de 83 ans. J'ai rencontré Jochen Löser le 6 octobre 1984, lors de ma toute première visite à la Foire de Francfort. J'arpentais ses immenses corridors à la recher­che de livres pertinents, capables d'ouvrir à mes lecteurs des horizons nouveaux, en prenant appui sur des faits tan­gibles, capables aussi de crever la croûte des ronrons de la pensée imposée par les médias. Dans le grand stand de Ber­telsmann, mon vœu a été exaucé. Bien en vue, plusieurs di­zaines d'exemplaires de Neutralität für Mitteleuropa s'a­li­gnaient sur les présentoirs. J'ai tendu la main, saisi un de ces exemplaires, que j'ai compulsé un peu fébrilement, pour découvrir une démarche qui était la mienne depuis la lecture du fameux ouvrage de Jacques Droz sur l'Europe cen­trale (paru chez Payot) et du livre collectif de Helmut Be­ring (Wirtschaftliche und politische Integration in Eu­ropa im 19. und 20. Jahrhundert, Vandenhoek & Ru­precht, Göttingen, 1984), où les auteurs abordaient éga­lement les questions relatives à la "Mitteleuropa". Jochen Lö­ser repla­çait la question de l'Europe centrale dans l'ac­tua­lité la plus brûlante, sur le fond d'une contestation gé­nérale de l'in­stal­lation des missiles américains sur le ter­ri­toire de la RFA. L'ouvrage que je tenais entre les mains é­tait un traité ra­tion­nel, réclamant l'élargissement de la zo­ne neutre en Eu­rope centrale. Les non-alignés n'auraient plus été seule­ment la Yougoslavie, l'Autriche, la Suisse, la Suède et la Fin­lande, mais tous ces pays soustraits à la lo­gique binaire de Yalta, plus les deux Allemagnes, le Béné­lux, le Da­ne­mark, la Pologne, la Tchécoslovaquie et la Hon­grie. Ce que je découvrais là était enfin une alternative co­hérente au sta­tu quo, qui correspondait à notre volonté de dépasser le duopole mis en place à Téhéran, à Yalta et à Postdam, entre 1943 et 1945.

J'ai aussitôt demandé un exemplaire de presse à la prépo­sée du stand, qui m'a dit: «Si ce livre vous intéresse, re­passez cet après-midi, l'auteur sera présent sur le stand». C'est ainsi que j'ai rencontré Jochen Löser et que nous a­vons tout de suite sympathisé. Le Général Löser était un hom­me affable, doux, d'une extrême gentillesse, avec un sou­rire extraordinaire. Une sorte de complicité est née dans ce stand, où œuvrait également le frère de la mili­tan­te écologiste radicale, Jutta von Ditfurth, fille du biologiste Hoimar von Ditfurth.

Notre visite chez le Dr. Otto Zeller

Nous avons travaillé ensemble pendant deux ans, en ten­tant de diffuser au maximum des alternatives au statu quo imposé par l'OTAN en matières de défense. Les réunions de tra­vail se déroulaient principalement à Bonn, au domicile de Jochen Löser, à proximité du Rhin et d'une falaise ma­gni­fique, couverte de vignobles en terrasse depuis l'époque des Romains. Un jour, pour finaliser l'édition des souvenirs de guerre du Général Löser, nous nous sommes rendus à Os­nabrück chez l'éditeur Otto Zeller. Un personnage extra­or­dinaire, dont je garderai éternellement le souvenir. Le Dr. Zeller, aujourd'hui décédé, était un grand linguiste, tra­duc­teur d'Homère et des Védas, auteur d'une fresque brossant l'histoire indo-européenne depuis les plus lointaines origi­nes. Une fois la version définitive du manuscrit du Général acceptée sans discussion et la remise des dernières photo­graphies de l'épopée de Löser et de ses soldats, Otto Zeller nous a invités chez lui, où il vivait seul  —et très triste—  de­puis le décès de son épouse, un être qui lui avait été très cher. Le Dr. Zeller habitait une vieille ferme nord-alle­man­de de type traditionnel, dont il avait scrupuleusement res­pecté l'aménagement, axé sur le foyer central. L'ar­chi­tec­tu­re tra­ditionnelle —repérable depuis la culture danubien­ne du Michelsberg (entre -4500 et -2750 av. J. C.)— de cet­te bâ­tisse m'a profondément impressionné. Nos plus loin­tains ancêtres avaient un sens de l'espace  —un feng shui oc­cidental—  beaucoup plus développé que nos modernistes en quête perpétuelle de sensationnel. Après une visite de cette superbe ferme, nous nous sommes retrouvés à trois, Lö­ser, Zeller et moi, autour de deux seaux, en train de pe­ler les pommes de terre pour le repas du soir, comme si nous étions en bivouac. Scène d'une extrême simplicité et d'une grande chaleur humaine. Car mes deux aînés, le mi­li­taire et le philologue, hommes façonnés et ciselés par des expériences extraordinaires, ont profité de ce moment pour se raconter leurs souvenirs. Et j'ai écouté.

Les souvenirs du Dr. Zeller

Le Dr. Zeller était juriste et philologue-linguiste; j'avais été le lecteur attentif de son ouvrage Problemgeschichte der ver­­gleichenden (indogermanischen) Sprachwissenschaft (1967; Histoire de la problématique des sciences linguisti­ques indo-européennes comparées), où il retraçait avec pré­­­cision l'évolution de la recherche linguistique des huma­nistes de la Renaissance à Hirt, en passant par Leibniz, Bopp, Rask, les frères Grimm, Schleicher, Schrader, etc. Autour de nos deux seaux, le Dr. Zeller a encore évoqué d'au­­tres souvenirs: j'en ai retenu trois. Sanskritologue, il a­vait été chargé d'accompagner dans Berlin le fils d'un Ma­ha­radjah, volontaire dans le bataillon indien de la Wehr­macht, qui sera stationné à Bordeaux. Il nous a brossé avec humour les anecdotes de cette visite, véritable choc entre deux civilisations. Ensuite, prisonnier de guerre, Zeller a dû servir d'interprète dans un tribunal militaire anglais, qui condamnait à la chaîne de pauvres diables de Polonais, de Russes et d'Ukrainiens, cherchant à rentrer à pied dans leur pays, mourant de faim sur les routes du Reich dévasté et chapardant des victuailles dans les casernes britanniques; des rixes éclataient parfois avec les gardes, à qui il arrivait de prendre un coup fatal. Inévitablement, ces bougres af­fa­més, qui avaient tué pour pouvoir manger, étaient con­dam­nés à la corde d'un gibet de sa Très Gracieuse Ma­jesté. Cette fonction d'interprète, imposée par la con­train­te, a­vait été pour notre philologue particulièrement hor­rible. Enfin, le début de sa carrière d'éditeur; le pouvoir com­mu­niste est-allemand vidaient les bibliothèques publi­ques et privées et vendait à l'Ouest des wagons entiers d'ou­vrages rares et anciens. Zeller les rachetait au kilo, sé­lectionnait les meilleurs titres pour en faire des réim­pres­sions, amorce de sa "Biblio Verlag".

Le lendemain, Zeller m'offrait le livre qu'il venait d'écrire pour ses enfants et ses petits-enfants, Am Nabel und im Auf­trag der Geschichte. Où les titres des chapitres étaient déjà une grande leçon: «Vouloir vivre sans histoire, est une utopie»; «Seul ce qui a une histoire est réel». Deux pré­cep­tes à retenir en toutes circonstances. Am Nabel und im Auf­trag der Geschichte est ensuite un vaste synopsis de l'é­popée indo-européenne dans l'histoire, depuis les méga­lithes jusqu'à la conquête spatiale.

Cette journée à Osnabrück m'a dévoilé l'extrême modestie de deux hommes exceptionnels, sur des plans différents. Une grande leçon. Que je n'oublierai jamais.

Stratégie du hérisson et défense civile

Sur le plan politique, ce bout de chemin fait avec Jochen Löser au beau milieu des années 80 m'a permis de déve­lop­per des idées originales en matières de défense, diamé­tra­le­ment différentes des doctrines officielles de l'OTAN et des thèses pacifistes maniées par une certaine gauche de con­viction donc d'irresponsabilité. Juste avant d'avoir écrit Neutralität für Mitteleuropa, Jochen Löser, avec le con­cours d'Harald Anderson, avait apporté une réponse ori­ginale aux conférences de Genève entre l'Est et l'Ouest, qui avaient débouché sur un échec (cf. Antwort auf Genf. Sicherheit für West und Ost, Olzog Verlag, Munich, 1984). Demeurant dans la logique théorique qui avait toujours été la sienne, y compris dans les coulisses de la FDP qui cher­chait une position originale au temps où elle était isolée dans l'opposition, Jochen Löser préconisait une "stratégie du hérisson", calquée sur les modèles helvétique et you­go­slave, permettant de rendre un territoire hermétique, im­pre­nable, par recours à des moyens strictement con­ven­tionnels. Cette stratégie avait ensuite pour corollaire d'as­surer une protection maximale des populations civiles (a­bris anti-atomiques, etc.), exposées aux opérations aérien­nes et terrestres de tout conflit susceptible d'éclater.

Löser nommait "Raumdeckende Verteidigung" ("Défense couvrant l'espace"), ce système de défense efficace, de ty­pe traditionnel, inspiré du modèle suisse, que d'autres, com­me le Général français Brossolette, appelaient "défense par maillage territorial". L'adoption d'un tel mode de dé­fense impliquait l'organisation d'une armée de citoyens, une milice territoriale (Löser: "Friedensmiliz", "Heimat­dienst" & "Heimatschutz"), appelée à couvrir les tâches non directe­ment combattantes, de même qu'à assurer les missions de soutien logistique, de protection des installations militaires sur les arrières du front, les transports et la surveillance des côtes. In fine, un maillage complet du territoire per­met d'assurer la suprématie du feu sur le mouvement, donc des systèmes de défense sur les stratégies d'attaque fron­tale.

Neutralité, finlandisation et Blockfreiheit

Une telle vision de la défense du territoire allemand per­mettait effectivement de le verrouiller contre toute atta­que venant de l'Est soviétisé, parce qu'à partir du Bran­de­bourg le territoire européen devient plus densément peuplé et structuré, donc moins ouvert comme l'est en revanche la plaine de l'Est, qui, elle, permettait hier le déploiement de masses de cavaliers et permet aujourd'hui celui de divisions de chars d'assaut. La densité du territoire allemand et ouest-européen permet de doter les défenseurs d'armes an­ti-chars très performantes, filoguidées ou à guidage élec­tro­nique, descendant en droite ligne des Panzerfäuste et des Panzerschrecke de la Wehrmacht. Simultanément, ce ver­rouillage et ce maillage militaire du territoire centre-eu­ropéen induisaient une remise en question de l'inféo­da­tion de la RFA aux structures de l'OTAN et de l'Alliance at­lan­tique. Le statut de neutralité  —décrié par les services de Washington maniant le (faux) spectre de la "finlan­di­sa­tion"—  redevenait une option possible.

Du terme polémique "finlandisation"

Neutralität für Mitteleuropa contient justement une criti­que serrée de ce concept de "finlandisation" que cri­ti­quaient et rejetaient les atlantistes. Löser commençait par po­ser les termes "neutre" et "neutralité" comme des con­cepts positifs du droit international, même s'il admettait que "neutraliste" et "neutralisme" recelaient une connota­tion propagandiste, qui n'était ni positive ni objective. La neutralité est un droit des Etats, garanti par l'art. 2, §2, de la Charte des Nations Unies. La neutralité est assortie d'ob­ligations: ne pas faire partie d'une alliance constitué à des fins de belligérance, ne pas céder la moindre parcelle du ter­ritoire national pour en faire un point d'appui pour une puissance voisine belligérante, armer le pays de façon à dis­suader tout ennemi de pénétrer sur son territoire. La neu­tralité implique donc, ipso facto, d'armer la nation et de choyer l'armée, qui l'incarne. La neutralité, au sens juri­dique du terme, n'est donc pas un pacifisme, un anti-mi­li­tarisme, que ceux-ci se camouflent ou non derrière le ter­me "neutralisme". La Finlande n'échappait pas à cette rè­gle, même si cette neutralité devait tenir compte de ses re­lations conflictuelles avec l'URSS entre 1917 et 1945.

Le projet de Löser était donc d'élargir le statut de neutra­li­té de l'Autriche à un espace centre-européen plus vaste, per­mettant de le dégager de la logique bellogène des blocs. Cette logique n'est donc pas celle d'une "finlandisa­tion", comme le proclament et l'entendent les défenseurs de l'OTAN; parce que les Etats concernés n'ont pas les mê­mes rapports de voisinage que ceux de la Finlande et de l'URSS. Elle est plutôt une "austrialisation" ou une "helvé­ti­sa­tion", donc un renforcement de souveraineté par désen­ga­gement vis-à-vis d'une alliance téléguidée par une seule su­per-puis­sance, de surcroît étrangère à l'espace européen ("eine raum­fremde Macht", auraient dit Carl Schmitt et Karl Haus­hofer).

Droits de l'homme et Armageddon 

Autre atout majeur de Neutralität für Mitteleuropa: la cri­tique du néo-machiavélisme occidental, camouflé derrière les discours sur les droits de l'homme. Avec la forte et élé­gante concision du militaire qui se consacre à l'écriture, Jo­chen Löser, dans le chapitre IV de cet ouvrage, critique vertement la volonté américaine de se poser comme l'in­car­nation du "bien" absolu, en lutte contre le "mal" absolu. Un bien qui proclame et défend les "droits de l'homme" et un mal qui les nie. Une telle attitude, explique-t-il, est une incongruité à l'âge des armes nucléaires. La puissance de des­truction de ces armes est telle qu'on ne peut, dans un pa­reil contexte, tenir un langage d'apocalypse, car déclen­cher l'apocalypse devient possible mais n'est évidemment pas souhaitable, puisque la riposte de l'adversaire reste tout de même en mesure de réduire les bases territoriales du vainqueur à néant, le ramenant ipso facto à l'âge de la pierre. Contrairement à Reagan qui parlait d'Armageddon, Löser raisonne au départ de Clausewitz: les intentions de la politique doivent correspondre aux moyens mis en œuvre; l'objectif politique souhaité ne peut être un despote; il doit s'adapter à la nature des moyens. A l'âge des armes nu­cléaires, les moyens sont théoriquement absolus, en prati­que, les puissances atomiques ont une marge de manœuvre très réduite. Le règlement des différends passe donc par la di­plomatie et les négociations.

Clausewitz et Bismarck

Cette perspective clausewitzienne interdit de placer la po­li­ti­que internationale sous le diktat des émotions, comme celles qu'éveillait dans les médias le nouveau culte des droits de l'homme, annoncé dès le discours inaugural de Car­ter en 1977.  La politique internationale ne peut fonc­tion­ner que si l'on jauge objectivement, avec sérénité, les faits, les intérêts, les divergences entre Etats. Löser rap­pelait une parole forte de Bismarck: «Agir selon des prin­cipes est une attitude qui, selon moi, revient à courir dans la forêt en tenant en bouche une barre de fer dans le sens de la longueur». Par conséquent, le diplomate ne peut agir sous la dictée de ses sympathies ou de ses antipathies pour des situations en vigueur dans le territoire d'une puissance voisine ou adverse, ou pour des personnes y exerçant une fonction souveraine. Les émotions suscitées par les antipa­thies ou les sympathies n'ont pas leur place dans la sphère du politique. Les juristes extrémistes et les moralistes é­chevelés n'ont pas de rôle à jouer dans la sphère austère du po­litique.

Certes, les dissidents d'une puissance voisine ont droit à l'a­si­le politique, à écrire et à œuvrer chez nous s'ils y sont ac­cueil­lis, mais leur sort ou leur sécurité ne doit pas troubler le jeu subtil de la diplomatie classique. Si l'enga­ge­ment des moralistes ou des juristes pour la liberté d'ex­pres­sion est un devoir moral, que personne ne va leur con­tester, les diplo­ma­tes ont, eux, le devoir politique et la res­ponsabilité de ne pas déclencher d'apocalypse ou de con­flit au nom de doc­trines éthiques vagues ou instables.

Voilà donc les thématiques que nous avons abordées entre 1984 et 1986. Mon discours à Versailles, lors du colloque du GRECE du 16 novembre 1986, est le résultat (succinct) de ces travaux. Pourquoi notre chemin s'est-il arrêté là? Tout simplement parce que l'accession de Mikhaïl Gorbatchev à la fonction suprême en URSS, remettait tout en question: et le duopole en place et l'ordre né de Yalta. Avec la pe­restroïka, les événements vont se précipiter: les accords "4 + 2", la réunification allemande, le dégel à Moscou, les manifestations de Prague, le démantèlement du Rideau de fer le long de la frontière austro-hongroise. Löser et moi avions l'intention de sortir, avec d'autres, un livre manifes­te, mais chaque jour apportait sa part d'innovations ou de changements, si bien que toutes nos planifications étaient réduites à néant. De l'accession de Gorbatchev au pouvoir à Moscou en 1985 jusqu'au triomphe d'Eltsine en août 1991, l'Europe a vécu une succession de bouleversements aux­quels nous n'étions pas préparés. Impossible dans de telles conditions d'achever un livre collectif, un tant soit peu sub­stantiel. Il a fallu abandonner. Et nos relations se sont in­terrompues. A mon vif regret.

De la vieille leçon du Taciturne

Quinze ans ont passé depuis nos derniers échanges épisto­laires ou téléphoniques. Quinze années de bouleversements inimaginables au jour de notre première rencontre, le 6 oc­tobre 1984. Mais quinze années où l'Europe n'a pas été ca­pable de trouver une solution rationnelle à ses problèmes de défense, comme nous le préconisions. Cet échec, dû à la piètre qualité intellectuelle et morale du personnel politi­que en place, est une tragédie. Notre civilisation s'est dé­li­bérément engagée dans une impasse. Le politique est mort. La citoyenneté, dont on parle à grands renforts de trémolos dans la voix, est devenue une illusion sinon une farce. Mais ce n'est pas une raison pour abandonner le combat: «Il n'est pas nécessaire d'espérer pour entreprendre, ni de réussir pour persévérer». Vieille leçon du Taciturne. En souvenir du Général-Major Jochen Löser, nous allons continuer le com­bat. Pour une Europe libre et forte, bien à l'abri de pi­quants, pareils à ceux du hérisson.

Robert STEUCKERS.

samedi, 31 mai 2008

Scholl-Latour: Anatolien ist kein Bestandteil Europas!

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AULA-Gespräch mit dem Islam- und Nahost-Experten Prof. Dr. Peter Scholl-Latour:

„Anatolien ist kein Bestandteil Europas!“

AULA: Mit den Anschlägen in Madrid scheint der islamistische Terror auch nach Europa gekommen zu sein. Drohen nun auch der Bundesrepublik Deutschland und Österreich derartige Anschläge?

Scholl-Latour: Das kann man nicht von vornherein sagen, aber mit der Möglichkeit muß natürlich gerechnet werden. Es geht ja im Grunde gar nicht so sehr darum, die jeweiligen europäischen Länder als solche anzugreifen als vielmehr durch islamistische Kampfgruppen Druck auf europäische Regierungen auszuüben.

AULA: Würde ein Beitritt der Türkei zur Europäischen Union das Problem des Islamismus in Mitteleuropa vergrößern?

Scholl-Latour: Vermutlich ja, denn das wäre mit einer sehr massiven Zuwanderung von Türken verbunden, und eine allmähliche Islamisierung der Türkei ist ja im Gange. Dann würde die Lage nämlich langsam unübersichtlich!

AULA: Halten Sie eine Verschärfung der Gesetze zur inneren Sicherheit für ein taugliches Mittel zur Terrorbekämpfung?

Scholl-Latour: Wenn es darum geht, Telefone abzuhören, also was hier man den „Lauschangriff“ nennt, dann schon. Im übrigen werden die Telefone schon längst abgehört – wenn nicht von den Deutschen, dann von den Amerikanern! Das ist ja alles ein Schattenboxen. Und wenn man dann nur noch einen Fingerabdruck auf die Kennkarte machen muß, dann ist das ja auch kein großer Eingriff in die persönliche Freiheit. Ich bin in der Vergangenheit kein Verbrecher gewesen und habe auch in der Zukunft nicht die Absicht, Verbrechen zu begehen. Einem normalen Menschen macht das ja nichts aus!

AULA: Sollten die Bundesrepublik Deutschland und Österreich ihre Truppen aus Afghanistan bzw. dem gesamten Krisengebiet des Nahen und Mittleren Osten abziehen?

Scholl-Latour: Ich würde das nicht so pauschal sagen. Jedenfalls sollten wir aus Afghanistan abziehen! Denn was haben wir da zu suchen? Im Moment ist es nach den Attentaten von Madrid sehr schwer, da es dann so aussähe, als ob wir irgendeiner Erpressung nachgäben bzw. Angst vor irgendwelchen Repressalien hätten, insofern sind wir in eine dumme Situation gekommen. Aber wir bräuchten diese Truppen auf dem Balkan, wo das Feuer nun wieder aufflammte, was im Grunde zu erwarten war. Es ist die Unfähigkeit der europäischen Politik, die sich in Afghanistan festlegt und das Kosovo einfach links liegen läßt, oder Bosnien, wo sie nichts richtig geregelt hat. Auch in Mazedonien können Konflikte jederzeit wieder aufflammen. Das sind doch die Gebiete, die für uns wichtig sind, und nicht der Hindukusch! Aber wenn man vernünftig vorginge, würde man natürlich eine Evakuierung deutscher und österreichischer Truppen aus Afghanistan vornehmen. Was sollten die denn da – vielleicht das Regime von Herrn Karsai stützen, das ja nicht repräsentativ ist?!

AULA: Sie halten also eine Präsenz bundesdeutscher und österreichischer Truppen auf dem Balkan, sprich im Kosovo, für durchaus sinnvoll!

Scholl-Latour: Das ist eine vernünftige Angelegenheit, aber dafür muß es erst eine politische Initiative geben! Die lassen das da alles schleifen, und der sogenannte Bevollmächtigte der „internationalen Gemeinschaft“ – was das genau ist, weiß ich nicht – in Bosnien-Herzegowina hat ja jede Vollmacht: Der kann jeden Minister absetzen, jeden Abgeordneten, jeden General, jeden Offizier – der hat ja mehr Kompetenzen als der frühere österreichische Gouverneur in Bosnien oder sogar der Pascha des Sultans. Das ist eine unglaubliche Situation, daß es auf europäischem Boden Protektorate gibt!

AULA: Könnte die Europäische Union – wie Politiker häufig erklären – durch die Aufnahme der Türkei dazu mithelfen, das Land zu demokratisieren und den Nährboden für Islamisten zu entziehen?

Scholl-Latour: Das ist völliger Quatsch! Im Gegenteil! Ich sage ja gar nicht, daß die Türkei radikal-islamisch wird, aber sie ist ein zutiefst islamisches Land und wird es mehr und mehr. Man darf sich nicht durch ein paar europäisierte Elemente in Istanbul und Ankara täuschen lassen. Es sind in den letzten zehn Jahren mehr Moscheen in der Türkei gebaut worden als im gesamten Osmanischen Reich in den ganzen Jahrhunderten! Und diese Moscheen sind voll, die Volksfrömmigkeit nimmt dort wieder sehr stark zu. Und die letzte Garantie gegen das Aufkommen einer gemäßigt islamischen Ausrichtung des Staates sind die Militärs, die ja im nationalen Sicherheitsrat bisher den Ton angaben. Würde man das im Namen der Demokratie beseitigen, dann wäre die letzte kemalistische, laizistische Hürde weggenommen. Es wäre dann so, daß es in der Türkei auf eine gemäßigt islamische Staatsform hinausliefe – und dagegen ist ja gar nichts einzuwenden, nur paßt das nicht ganz nach Europa herein, zumal die Türkei in ein paar Jahren der stärkste Staat EUropas wäre!

AULA: Teilen Sie somit nicht die Auffassung der österreichischen Außenministerin, die den Beitritt der Türkei zur EU nur davon abhängen lassen will, ob die politischen und wirtschaftlichen Rahmenbedingungen in der Türkei – Stichwort Kopenhagener Kriterien – erfüllt sind, also die Menschenrechte geachtet werden und die Abkehr vom Agrarstaat eingeläutet wird?

Scholl-Latour: Also das sagen die Deutschen ja auch. Das ist eine furchtbare Heuchelei mit den Menschenrechten! Das ist eine Beleidigung für die Türken. Ich habe übrigens ein sehr gutes Verhältnis zu den Türken, aber man muß einen ganz anderen Aspekt betrachten: Die Türken sind Erben eines großen Reiches und nicht Anhänger Europas. Wir können natürlich von gleicher Basis aus, nämlich von Europa zur Türkei, enge Beziehungen zu diesem Staat als einer großen Macht unterhalten, die ja bis zum Kaukasus und nach Zentralasien hereinreicht und eine Ordnungsfunktion im Orient hätte, aber doch nicht als Bestandteil Europas. Anatolien ist doch kein Bestandteil Europas!

AULA: Halten Sie freie und demokratische Wahlen im Irak unter US- oder UN-Mandat für realistisch?

Scholl-Latour: Unter US-Mandat bestimmt nicht, da würde getürkt und gefälscht! Und unter UN-Mandat, na ja, das wollen wir einmal hoffen. Aber das ist der einzige Weg, denn wenn man schon im Namen der Demokratie antritt, dann kann man auch nicht die Wahlen verweigern, und zwar Wahlen in dem Sinne, daß jedermann eine Stimme hat.

jeudi, 22 mai 2008

Le "Corridor 5", épine dorsale de l'Europe

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De Barcelone à Kiev: le Corridor 5, épine dorsale de l'Europe

Depuis la préhistoire, depuis la nuit des temps, les marchandises voyagent par la plaine si c'est possible. L'ambre arrivait de la Baltique à Trieste, non pas en traversant les Alpes mais en les contournant. De même, plus tard, les vaisselles et les étoffes, ainsi que tous les chargements importants, venaient du Moyen Orient par les plaines d'Europe centrale, arrivant par mer ou par terre, en empruntant les trajets les plus aisés. Il ne faut pas croire que la vapeur, l'électricité et les moteurs à explosion y ont changé beaucoup. Les engins mus par ces énergies sont certes plus véloces (mais aussi plus polluants) que les chevaux, mais il n'en demeure pas moins que les trajets en plaine restent plus faciles et que toute ascension d'une montagne coûte de l'énergie, des salaires, du temps et de la fatigue physique.

L'Europe d'aujourd'hui n'est pas une famille unie mais bien plutôt une bande d'hyènes. Chaque hyène cherche à manger le plus de viande morte possible. Cependant, même la bande d'hyènes connaît des règles. L'Europe doit faire en sorte que les règles qu'elle s'est données demeurent certaines, fixes et sûres, autrement l'échafaudage fragile qu'elle constitue croulerait rapidement. Il y a quelques décennies, les choses n'étaient pas ainsi, mais aujourd'hui la jeune construction européenne intégrée est peu sûre et génère des rigidités rédhibitoires. Pourtant, il me semble difficile de changer le tracé du Corridor 5. Je n'ai pas dit que c'était impossible, je dis que c'est difficile. Or, nous, Européens, avons déjà perdu trop de temps. Beaucoup trop.

Pourquoi a-t-on pensé le Corridor 5? Pour unir Barcelone à Kiev (et demain à Moscou) et y faire circuler des marchandises, des personnes, des salaires, des idées, des entreprises, de la technologie de toutes les manières rapides possibles. En d'autres termes, il faudrait que les technologies, les salaires et le savoir-faire des provinces occidentales de l'Europe s'échangent contre des matières premières des provinces orientales (qui en sont riches). L'Europe, sur ce tracé, doit donc construire des chemins de fer, des routes et des aéroports qui fonctionneront dans des conditions optimales.

Ce corridor déplait à beaucoup de monde, c'est l'évidence. Il irrite plus d'une puissance en ce monde. Personnellement, je ne trouve pas scandaleux que la Slovénie, par exemple, en tire des avantages. De même, je ne m'insurge pas de voir le développement industriel dont bénéficie l'Autriche depuis la chute du Rideau de fer (…).

Je pense qu'il serait bon que tous comprennent très bien la situation et apprennent à dire les choses telles qu'elles sont, pour éviter les byzantinismes et, surtout, pour gagner des milliards. L'Europe gagnerait du temps (surtout qu'elle n'en a pas trop devant elle). Nous devrions éviter les défiances mutuelles et imaginer que des tiers profitent toujours de la situation en coulisses: ainsi, par exemple, la Slovénie dit avoir peur de perdre l'atout que constitue le port de Capodistria, si le chemin de fer transeuropéen aboutit à Trieste. A son tour, l'Italie est convaincue que derrière la Slovénie se profilent l'Autriche et l'Allemagne. Malgré ces tiraillements, le Corridor 5 deviendra une réalité, au nez et à la barbe des Américains. Le plus tôt sera le mieux.

Les ports sont les points naturels où arrivent et d'où partent les marchandises qui voyagent par mer (le plus gros pourcentage, voire la quasi totalité, des marchandises stratégiques). Sous-évaluer ou nier la valeur géoéconomique des ports relève de la mauvaise foi ou de la naïveté. A plus forte raison, vouloir décentrer le système portuaire de l'Adriatique septentrionale et l'éloigner du Corridor 5, c'est objectivement ôter à ce Corridor une ressource très importante et, en définitive, faire le jeu de ceux qui s'opposent à sa concrétisation définitive.

Par exemple, personne ne m'ôtera un doute de la tête: les incidents étranges et répétés survenus dans les tunnels sous les Alpes (en premier lieu, celui du Mont Blanc) et les dizaines d'incidents survenus au Val di Susa…

Finalement, le Corridor 5 est vital pour l'Europe en général et pour la Padanie en particulier. Nous devons donc mettre toutes nos forces en œuvre pour que le trafic entre Barcelone et Kiev puisse s'effectuer sans heurt pour le bien de tous les peuples d'Europe. Le Corridor 5 est notre histoire passée. Il est aussi notre avenir. Les polémiques anti-autrichiennes ou anti-serbes doivent être reléguées dans les chroniques annexes, subalternes, superficielles.

Je vous adresse un fraternel salut padanien et européen.

Fabrizio BELLONI, Secrétaire national de la Lega Nord à Trieste.  

lundi, 19 mai 2008

Djihad contre la Serbie

Au Pakistan en 1998, on a déclaré la Djihad à la Serbie

Avertissement de 2008: Cet article de "La Padania", organe de la "Lega Nord" révèle l'alliance islamo-américaine contre la Serbie et prouve que parier sur les Etats-Unis contre une "invasion islamique" est une sottise, même et surtout chez ceux qui prétendent être alliés à la "Lega Nord", aujourd'hui au pouvoir en Italie.

Lors d'une convention de l'«Islamic Group», à laquelle trente délégations ont participé venues de nombreux pays et représentant divers mouvements d'inspiration islamiste radicale, le délégué kosovar a expliqué, devant son auditoire, l'importance géopolitique cardinale d'une "reconquête" musulmane du Kosovo.

Chaque fois que la question du Kosovo réapparaît sur la scène internationale, la Lega Nord d'Umberto Bossi se retrouve dans le collimateur de la gauche bien-pensante et des centristes sans idées, qui s'empressent de rappeler qu'elle est animée par des “amis de Milosevic”. La Lega n'a jamais été a priori “amie” de Milosevic, ni de personne d'autre, mais elle a toujours voulu militer pour la paix en Europe, assurer la défense d'un peuple assailli par les bonnes conscientes de la planète et défendre un principe de droit international, celui de la non ingérence; ces positions n'impliquent nullement d'être “ami” de la puissance dont il est question. On nous reproche surtout d'avoir été très tôt sur la brèche pour défendre un peuple européen en lutte contre le terrorisme islamique, que les bonnes consciences trouvaient parfaitement fréquentable avant le 11 septembre 2001.

Or, on vient d'apprendre, via le net, que dès 1998, donc une année avant que ne se déclenche la crise serbe, les principales organisations fondamentalistes islamistes du monde avaient haut et fort déclaré la djihad (la guerre sainte) à la Serbie, tout en définissant le Kosovo comme “le centre de la péninsule balkanique islamique”. Hier comme aujourd'hui, les prophètes de la pensée unique resteront incrédules, pourtant les faits sont patents: le monde musulman radical a formellement et publiquement juré de mener une lutte éternelle contre un pays européen, situé en une zone stratégique clef, la Serbie, bien avant le 11 septembre 2001, sans que les bonnes consciences, qui condamnent aujourd'hui le radicalisme musulman, ne s'en soient émues. De même, alors que cette circonstance était forcément connue des services secrets, cette déclaration de guerre ouverte n'a pas empêché la CIA et les autres services secrets occidentaux (y compris les services secrets suisses) d'armer et d'entraîner les guerilleros de l'UCK.

La preuve de cette déclaration de guerre se lit noir sur blanc sur un site internet; récemment encore, on pouvait le consulter en suivant les indications données par une publication éditée par le groupe intégriste palestinien Hamas, le "Filastin al-Muslimah" (décembre 1998). Peut-on vraiment lancer l'hypothèse qu'aucun service occidental n'a lu ce texte? Nous en doutons fortement. Penchons-nous sur le contenu de ce texte et sur les faits qu'il évoque. Du 23 au 25 octobre 1998, s'est tenue la 18ième convention de l'«Islamic Group» du Pakistan (Al-Jamayah al-Islamiyyah) à Islamabad, comme par hasard dans le Pakistan du putschiste Musharraf, devenu en un tournemain l'allié des Etats-Unis. Plus de trente délégations ont participé à cette réunion, issues de pays et de mouvements islamistes radicaux du monde entier. Ibrahim Ghoshes y représentait le Hamas; cet homme entretient depuis des années des rapports étroits avec le Groupe Islamique pakistanais et avec son leader, Qadi Hussein. Qui plus est, tous deux furent membres de la délégation islamique qui a servi de médiatrice entre l'Irak et le Koweit en septembre 1990. Au cours de ces trois journées de discussions, chaque délégué a attiré l'attention de l'assemblée sur les priorités à mettre sur le tapis pour défendre et diffuser l'Islam dans le monde. Ils ont consacré une attention particulière au problème de la djihad islamiste au Cachemire, une région que l'Inde et le Pakistan se disputent depuis longtemps. Les délégués ont pu voir des films vidéo sur les actions kamikazes, qui ont suscité des tonnerres d'applaudissements de la part du public.

Les travaux se sont ensuite penchés sur les cas de la Palestine, de la Turquie (le pays que d'aucuns veulent faire entrer dans l'UE), de l'Egypte, de la Jordanie, de la Syrie, de la Tchétchénie et du Yémen. L'avant-dernière intervention fut prononcée par le délégué du FIS algérien qui, après avoir décrit la situation qui régnait dans son pays, s'est lancé dans un interminable sermon accusant les “opérations terroristes” mises en œuvre par les forces de police, soi-disant sponsorisées par la France.

Mais ce délégué n'a pas eu un seul mot de pitié pour les centaines de femmes et d'enfants égorgés au nom d'Allah en Algérie. Enfin, dernier orateur, accueilli par tous les participants debout, applaudissant à tout casser: le délégué de l'UCK, l'armée de "libération" du Kosovo, qui venait de commencer sa propre campagne de terreur contre la population serbe orthodoxe et contre les forces de police, envoyées par Belgrade.

Le délégué kosovar a expliqué à l'assemblée quelle était l'importance géopolitique d'une conquête musulmane du Kosovo, surtout à la suite de la création d'un Etat islamiste en Bosnie et dans le contexte des liens entre l'UCK et les mouvements intégristes présents en Macédoine et en Albanie. Les motions ont ensuite été soumises au vote. Le document programmatique, accepté à l'unanimité, qui en a résulté, a retenu trois axes principaux d'action :

1.       La libération de la Palestine est un devoir pour tous les musulmans du monde et la guerre, pour en arriver à cet objectif, devra durer le temps qu'il faudra.

2.       L'autodétermination des Musulmans au Cachemire, via un mouvement de résistance armé, constitue également un objectif prioritaire.

3.       Obtenir la liberté pour les Musulmans du Kosovo.

Trente délégations étaient donc présentes, mais seulement trois peuples ont reçu la priorité dans l'agenda de l'«Islamic Group». Et l'un de ces peuples vit en marge de la masse démographique et territoriale musulmane : les Kosovars. Après l'allocution du dernier délégué, celui du Kosovo, la déclaration concluant les travaux a été prononcée; en voici le texte : «La convention a décidé de faire la guerre contre l'Inde, contre Israël, contre la Serbie, contre la Russie et contre l'Erythrée; ces guerres doivent être considérées dans leur ensemble comme relevant de la djihad».

Par conséquent, nous avons affaire à une guerre déclarée expressis verbis, qui doit être menée de concert par tous les Musulmans par obligation religieuse; c'est seulement en tenant compte de cette déclaration de guerre que l'on peut comprendre pourquoi il y avait tant de mercenaires islamistes dans les rangs de l'UCK au Kosovo, y compris certains hommes de Ben Laden). Telle est la vérité, accessible à tous, lisible en clair sur la grande toile, mais vérité occultée par les médias, qui ne font aucun commentaire. Bien avant que ne commencent les opérations militaires et paramilitaires serbes visant à nettoyer le Kosovo, bien avant la crise et la mission de l'OSCE, Belgrade avait essuyé officiellement une déclaration de guerre sainte de la part de trente nations musulmanes présentes à la réunion d'Islamabad.

Notre tâche n'est pas de réécrire ni même de juger l'histoire, mais, si l'on tient compte de la doctrine américaine de la guerre infinie contre le terrorisme (permettant désormais à Washington de faire la guerre préventivement), on peut dire, sans se tromper, que le droit international classique est bel et bien mort, assassiné par les islamistes et les Etats-Unis, dès que l'on a avalisé le concept d'«ingérence humanitaire». Mais cette involution calamiteuse n'est pas explicitée comme telle au public de nos démocraties: on préfère l'oublier et présenter sur les ondes et le petit écran une histoire qui a déjà été écrite.

Mauro BOTTARELLI.

(article paru dans "La Padania", Milan, 11 octobre 2002 - http://www.lapadania.com ).

 

 

samedi, 17 mai 2008

La doctrine du "Grand Maroc"

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Communiqué de "Democracia Nacional" (Barcelone)- 17 juillet 2002

Avertissement de 2008: Ce communiqué du groupe "Démocratie nationale" (Barecelone) mérite toujours, six ans après les événements, une lecture attentive car il recèle des vérités géopolitiques indépassables.

La doctrine du "Grand Maroc" et la guerre qui va éclater

Ce matin, 17 juillet, quand l'agence de presse espagnole a diffusé la nouvelle à 8 heures qu'une force opérationnelle spéciale de l'armée espagnole avait occupé l'Ile du Persil (Perejil), notre pays a vécu un moment d'allégresse et d'union nationale, sauf les marginaux de toujours (IU, ERC) et les nationalistes basques qui estiment que tout ce qui nuit à l'Espagne leur profite. L'Espagne a récupéré sa dignité nationale bafouée, mais, inévitablement, le pire reste à venir car la crise qui oppose l'Espagne au Maroc n'a pas cessé pour autant. Car, une chose est certaine, le Maroc cherche délibérément la guerre.

La doctrine du "Grand Maroc"

Quand, au début des années 50, le Sultan du Maroc obtient l'indépendance de son pays, le moteur idéologique premier du mouvement indépendantiste est l'Istiqlal, un parti nationaliste marocain. Son fondateur, El Fassi, avait élaboré au Maroc pendant la seconde guerre mondiale un programme de type nationaliste qui lui a valu d'être surnommé le "Sabino Arana" marocain, du nom d'un théoricien du nationalisme basque. En effet, sa doctrine, d'un point de vue espagnol, n'est pas moins délirante que la doctrine nationaliste basque.

El Fassi, se référant à des interprétations historiques d'une rigueur plus que douteuse, soutenait la thèse d'une suprématie marocaine, appelée à transformer le pays en une puissance régionale en Méditerranée occidentale. Il appelait cette doctrine celle du "Grand Maroc", une fiction géopolitique finalement assez absurde.

Le rayon d'action de ce "Grand Maroc" hypothétique englobait le Sahara occidental, la frange littorale d'Ifni, Ceuta, Melilla et les îles adjacentes, les territoires de Tindouf et de Colomb Bechar dans l'Ouest de l'Algérie, la totalité de la Mauritanie et une partie importante du Mali, ainsi que la plate-forme continentale des Iles Canaries.

Cette idée délirante n'a pas inspiré que le parti Istiqlal, mais a imprégné tout le processus de formation de l'Etat marocain jusqu'à ce que l'idée du Grand Maroc soit partagée aujourd'hui par toutes les forces politiques du pays, depuis les progressistes de l'Union Nationale des Forces Populaires jusqu'aux socialistes.

La marche vers le "Grand Maroc"

Tous les événements politiques provoqués par le Maroc au cours de la seconde partie du 20ième siècle ne sont pas dissociables de l'idée de "Grand Maroc". En certaines occasions, certaines de ces démarches revêtent un caractère spectaculaire, comme l'annexion de Villa Bens en 1958, d'Ifni en 1969 et du Sahara en 1975. Ou se terminent par des échecs retentissants, comme la guerre de 1957-58 qui a visé l'annexion du Sahara occidental et d'Ifni, ainsi qu'à terme l'annexion de la Maurétanie toute entière. Autre échec cuisant : le Maroc a cultivé l'intention d'inclure dans son territoire national une partie de l'Algérie lors de la guerre dite des "sables mouvants" en 1963. Finalement, nous avons l'épisode tout récent de la prise de l'Ile du Persil, rapidement reconquise par les Espagnols.

Les différents gouvernements espagnols, y compris ceux du temps de Franco, n'ont jamais pris en compte le projet de l'Istiqlal ni pris au sérieux la politique expansionniste du Maroc. Dès que la transition du régime franquiste à la monarchie parlementaire et constitutionnelle a été achevée, il a été impossible de trouver en Espagne des diplomates capables de comprendre le problème, malgré le fait que dans la salle du trône du palais royal marocain on pouvait voir une carte du "Grand Maroc", sur laquelle, bien évidemment, les Canaries apparaissaient comme faisant partie du Sultanat du Maghreb.

Il est toute aussi impensable que Juan Carlos I, qui a rendu visite tant de fois à son homologue alaouite, ne connaissait pas cette carte. Il est curieux également de constater que, tandis que les forces armées espagnoles continuaient à élaborer des plans d'opérations pour un éventuel "front sud", les différents gouvernements démocratiques (de l'UCD, du PSOE et du PP) ont toujours eu une politique de la main tendue à l'endroit de ce gouvernement marocain qui ne cachait pas ses intentions de s'approprier des territoires espagnols. Cette situation insolite nous force à méditer ici une phrase de Carl Schmitt: «Si tu prétends être l'ami de ton ennemi et que celui-ci continue à te considérer comme son ennemi, alors tu es perdu».

Le Maroc cherche la guerre

En 2001, le Maroc a acquis 20 chasseurs bombardiers YF-16 à nos "amis américains" (ndlr: via l'Arabie Saoudite). Peu de temps après cet achat, on apprend que le Maroc acquiert également une quantité énorme d'armes légères, comme des canons sans recul et des mortiers. Tout ce matériel semble à première vue inutile et surtout inapproprié pour combattre le Polisario. Il s'agit bel et bien d'un matériel destiné à combattre une puissance terrestre, en l'occurrence la seule puissance voisine qui pourrait s'opposer à la mise en pratique de l'idée du "Grand Maroc".

Il nous paraît important de ne pas perdre de vue la façon dont ces achats se sont réalisés. Tout ce matériel a été acheté avec l'aval des monarchies les plus réactionnaires du Golfe Persique, qui ont pour point commun, avec le Maroc, d'être les alliées des Etats-Unis!

Que s'est-il ensuite passé? Un jeune roi immature et un gouvernement corrompu commencent ensemble une aventure insensée. Mohammed VI, qui ignore les lois de la politique, veut se muer en un nouveau monarque des "pétro-dollars". Sa "simplicité" mentale l'induit à croire que quelques petits puits de pétrole forés dans les sables du désert vont lui apporter des richesses considérables, grâce à l'entremise des sociétés pétrolières américaines. Il pense que dorénavant, le Maroc ne va plus dépendre de ses exportations de fruits citriques et de haschisch en direction de l'UE et que son économie ne va plus cruellement dépendre des devises envoyées par les deux ou trois millions de travailleurs marocains dispersés à travers l'Europe. Le petit roi Mohammed VI croit qu'il deviendra très bientôt un nouveau monarque des mille et une nuits, un nouvel émir du pétrole. La crise marocaine actuelle ne s'explique que par l'immaturité politique et les faiblesses psychologiques personnelles de ce drôle de petit roi.

Encore plus surprenant, dans le contexte qui nous préoccupe : on construit en ce moment même, dans les chantiers navals espagnols, des bateaux pour la flotte ennemie! Toujours plus surprenant : les immigrés marocains sont admis sur le territoire de l'Union Européenne comme s'ils étaient les ressortissants d'un pays associé et ami. Les événements récents nous l'ont prouvé : il n'en est rien ! Car, tout concourt à affirmer que le Maroc cherche bel et bien la guerre.

La France modifie ses positions

Au cours de cette crise récente, la position de la France a considérablement varié par rapport aux crises antérieures. Jusqu'ici la politique française a consisté à préférer un Maroc francophile, renforcé par l'incorporation du Sahara, à un Sahara indépendant et hispanophile. Pour rappeler le passé, disons que dans toutes les péripéties coloniales du 19ième siècle et des débuts du 20ième, la politique française a cherché à affaiblir l'Espagne. Mais au cours de ces derniers mois, nous avons assisté à un changement de cap, notamment après le 11 septembre 2001

[ndlr: Pas si sûr! Le refus d'entériner la note de la présidence danoise —arrogance inadmissible à l'égard du Danemark et ingérence intempestive dans la bonne marche des institutions européennes—  montre que le Maroc et son roitelet de carnaval peuvent encore compter sur l'appui de Paris, qui reste, comme le prouve une quantité d'écrits quasi officiels, hostile à Vienne et à Madrid, capitales jugées "traditionnelles", de même qu'à des entités comme la Flandre et la Croatie. Cf. l'ouvrage écœurant et scandaleux d'une dame, Annie Lacroix-Riz, professeur à Toulouse-Le Mirail et spécialiste du Maroc (!); cet ouvrage est intitulé Le Vatican, l'Europe et le Reich de la première guerre mondiale à la guerre froide, Armand Colin, Paris, 1996. Si les nationalistes basques et marocains délirent selon nos amis espagnols, ces délires, à coup sûr, n'arrivent pas à la cheville de ceux que profère cette dame Lacroix-Riz! Cet ouvrage franchement insultant, purement propagandiste, s'attaque avec une rare violence à l'Allemagne, au Vatican, à l'Espagne, à l'Autriche, à l'Allemagne, à la Belgique (et, avec une haine qui laisse pantois tout en étant carrément raciste, à sa majorité flamande et au roi Léopold III), à la Pologne, à la Roumanie, à l'Italie et à la Hongrie. Ce bréviaire hallucinant de la haine jacobine à l'égard de tous les peuples européens a reçu une consécration universitaire imméritée et, de ce fait, sert de référence à des hauts fonctionnaires et à des diplomates français. Ce qui se passe de commentaires et explique parfaitement les campagnes haineuses de la presse française  —et pas seulement de la presse!— contre l'Autriche, la Croatie et l'Italie, auxquelles nous avons assisté au cours de ces deux dernières années. Depuis François I, rien n'a changé : l'Europe est toujours l'ennemi pour Paris, en dépit de la construction européenne, et l'Islam (ou une fraction organisée de celui-ci) reste, dans tous les cas de figure, l'allié privilégié; dans un tel contexte, l'"anti-racisme" de la pensée unique sert à diaboliser tout ce qui est européen, à empêcher les braves Français de souche de s'identifier et de se solidariser avec leurs voisins et à présenter sous un jour idyllique et parfaitement abstrait l'allié extra-européen, qui qu'il soit; s'il existait des Martiens ou des Vénusiens qu'on pourrait mobiliser contre le reste de l'Europe, on les présenterait sous des traits dithyrambiques, tout en stigmatisant tous les autres de "fascistes" ou de "nazis", ce qui est le cas : Russes, Hongrois, Autrichiens, Danois, Flamands, Hollandais, Suisses, Italiens, Croates, Serbes, Macédoniens, Espagnols encaissent régulièrement dans la presse parisienne ces épithètes dénigrantes, parfois modernisées en "populistes"; notons que les peuples africains ou asiatiques qui ont l'heur de déplaire aux tenants de cette idéologie criminelle, subissent, eux aussi, des campagnes de haine, comme ce fut le cas des Tutsis nilotiques en Afrique centrale, victimes d'un génocide planifié par les alliés de Mitterrand, que la Belgique officielle, titubant d'une sottise à l'autre, a entériné, elle aussi].

La France a compris qu'elle perd désormais la partie dans le Maghreb. Les Etats-Unis se sont substitués à elle —et à marche forcée—  comme le principal allié et client au Maroc. La France commence à comprendre que les Etats-Unis sont une puissance qui est aujourd'hui une concurrente et qui demain sera ennemie. Comprendra-t-elle que ses attitudes devront dans l'avenir éviter de créer des tensions à l'intérieur de l'UE. La France commence à comprendre qu'elle a perdu la partie en Afrique du Nord.

Quoi qu'il en soit, l'UE et particulièrement l'Espagne et la France savent désormais que nous faisons tous face à une problématique identique : au fanatisme alaouite qui vise à construire son "Grand Maroc", à la course aux armements que l'on observe au Maroc grâce à l'appui financier des principaux alliés arabes des Etats-Unis dans le Golfe et… à cette cinquième colonne potentielle que constituent les deux ou trois millions de citoyens marocains résidant en Europe occidentale.

Le rapatriement de ces contingents d'immigrés, une position de force devant les territoires menacés et la menace de couper les liens commerciaux unissant l'UE au Maroc sont les uniques éléments qui pourront à terme couper les racines du rêve insensé du "Grand Maroc".

DEMOCRACIA NACIONAL (Barcelone).  

 

 

vendredi, 16 mai 2008

Frank Böckelmann over mei 68

Mei ’68 : een eerste benadering


Dr. Frank Böckelmann was samen met Rudi Dutschke, Dieter Kunzelmann en anderen lid van de Subversive Aktion, een van de groepen (1965-1966) die in Duitsland aan het begin van de studentenrevolte stonden.

Hij werd geboren in 1941 in Dresden, studeerde in München filosofie en communicatiewetenschappen en werkte als journalist en mediawetenschapper. Hij publiceerde verschillende boeken, waaronder Die Welt als Ort. Erkundungen im entgrenzten Dasein (Karolinger-Verlag, 2007).
Hij werd naar aanleiding van de 40ste verjaardag van mei ‘68 door het weekblad Junge Freiheit geïnterviewd (nr. 16/08, 11.04.2008).

Enkele uittreksels uit dit merkwaardige interview.

Vraag: Wat was er eigenlijk aan de hand in 1968 ?

Böckelmann: Overtuigd van hun morele superioriteit trokken studenten en scholieren toen ten strijde tegen alle banden, relaties en invloeden, die het individu in zijn wens naar zelfontplooiing hinderden. Men bond de strijd aan met het kapitalisme, maar eigenlijk hielp men zo de volledige economisering van het dagdagelijkse leven en van de samenleving te realiseren.

Vraag: Een negatieve balans dus ?

Böckelmann: 40 jaar na datum moet men inderdaad durven toegeven: Ja. De ontbinding (op alle vlakken) leidde niet tot een nieuw gemeenschapsgevoel of tot een veelheid van rollen. Ongeacht wat we zijn en wat we doen, onze zelfwaardering is gestandaardiseerd, en dit volgens inkomen en volgens openbare waardering.

Bedenkt u ook maar eens, hoe verbluffend eenvoudig de rebellen van toen gelijk kregen. Bijna zonder verzet werden de eisen naar zelfontplooiing en detaboeïsering en gelijkberechtiging van allerlei minderheden openlijk begroet en door bijna alle welmenende burgers ondersteund. Afgezien van de kritiek op het kapitalisme – waar dit eigenlijk slechts een schijngevecht betrof – stampte de protestbeweging eigenlijk open deuren in. Werden de rollen van de geslachten en van de ouders, werd het respect voor autoriteit en voor nationale tradities nog wel door iemand verdedigd?

Vraag: U heeft het niet erg begrepen op zelfontplooiing?

Böckelmann: Eigenlijk is zelfontplooiing slechts de triomf van de onverschilligheid. Zeker als ze doel op zichzelf is. De zelfontplooiing van het individu is de fetisj van onze moderne tijd. Ze verwerpt alle historische, nationale en kulturele banden (…) Vooral een partij als de Grünen komen hiermee met zichzelf in tegenspraak. Immers, willen ze consequent opkomen voor kinderwelzijn en milieubescherming, dan kunnen ze dat niet door geatomiseerde individuen, maar alleen door mensen, die zichzelf zien als leden van plaatsgebonden gemeenschappen.

Vraag: Een min of meer gelijklopende situatie bestond er ook voor de machtsgreep door de nationaalsocialisten. Was 1933 het ’68 van de Weimarrepubliek?

Böckelmann: Wat de revolte van 1968 onderscheidt van de burgerlijke en communistische revoluties en ook van de machtsgreep van de nationaalsocialisten is het feit dat geen nieuwe ordening der dingen ontstaat, en dat de ‘vadermoord’ oneindig herhaald wordt. Steeds opnieuw moeten nieuwe restricties, verboden, grenzen, onderdrukking en verstarring worden ‘ontdekt’ en gedramatiseerd worden, zodat de emancipatie, de breuk met het ‘enge’ van het bestaan, kan opgevoerd worden. Steeds meer figuren uit deze periode, en in elk geval de knapste koppen zoals Maschke, Friedrich, Rabehl en Röhl, keren zich af van deze zogenaamde zelfontplooiing, die uiteindelijk op niets zal uitdraaien.

(vertaling : Peter Logghe)

jeudi, 15 mai 2008

Reflexoes sobre a proclamaçao unilateral de independencia do Kosovo

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Reflexões sobre a proclamação unilateral de independência do Kosovo

A questão coloca-se: deve ou não ser reconhecida a independência do Kosovo? Noutros termos, podemos reconhecer o direito de uma população, dispondo de um parlamento infra-estatal, de proclamar a sua independência, se a maioria dos seus representantes são a favor disso?

Neste questionamento, há dois princípios que se cruzam:

1) O direito dos povos a dispor de si, o direito de toda a identidade, assente em critérios objectivos e bases concretas (étnicas, linguísticas, históricas, etc. …), a dotar-se de um sistema de representação política próprio num quadro espacio-temporal determinado, seja no quadro de um Estado multiétnico (segundo o modelo helvético) ou num Estado que prevê um federalismo, mais ou menos assim entendido, segundo outros modelos, como o federalismo alemão ou o Estado de comunidades autónomas que é actualmente a Espanha. Este direito à autonomia dá o direito à infependencia? A questão pode permanecer aberta no quadro europeu.

2) O direito dos povos europeus a recusar toda a balcanização que enfraquece o continente no seu conjunto, gera no seu seio conflitos exploráveis por potências terceiras, geralmente estrangeiras ao território europeu (segundo a terminologia de Carl Schmitt: des «raumfremde Mächte»).

O primeiro destes princípios é um princípio de direito. O segundo é um princípio de geopolítica. A independência unilateral de independência do Kosovo suscita uma contradição: Opõe, mesmo porque foi declarada unilateralmente, o direito à geopolítica, enquanto que na Europa direito e geopolítica não deveriam opor-se mas antes formar, em concerto, uma unidade indissociável. O direito deve ajudar a consolidar o conjunto territorial, a barrar o caminho a toda a tentativa de deslocamento e não a sancionar práticas que desembocam no enfraquecimento ou desmantelamento.

O direito à autonomia, mesmo o mais alargado, inclusive até à independência estatal, é inalienável na perspectiva anteriormente desenhada por Herder, defensor filosófico das identidades populares, no mundo germânico como nos Balcãs, onde contou, precisamente, com muitos discípulos. Contudo, este jogo dialéctico complexo entre a identidade local e particular, de uma parte, e, de outra parte, a necessidade de assegurar um quadro sólido onde todas estas identidades poderiam desenvolver-se em paz e harmonia, implica construir, todos juntos na Europa, um quadro comum tirado das experiências vividas, muitas vezes tragicamente, pelos povos da Europa ao longo dos séculos. Este quadro deveria ser o avatar contemporâneo de uma unidade inicial comum, que ganhou asas a partir de um território centro-europeu desde o final da pré-história, nas premissas da proto-história. O facto etno-histórico europeu difundiu-se a partir de um centro, principalmente alto-danubiense (território das culturas do Michelsberg, depois das civilizações de La Tène e de Hallstatt) que, seguindo as margens do grande rio, se propagou depois nos Balcãs (culturas de Lipinski-Vir, de Starcevo,etc.). Os Balcãs são nossos, se são o nosso Ergänzungsraum imediato, o nosso trampolim em direcção ao mediterrâneo oriental, o Egipto, a Anatólia, o Crescente Fértil.

Este direito à autonomia é, certamente, um direito, mas unicamente para aqueles que reconhecem plenamente a unidade primordial dos nossos povos antes da sua difusão para as vastas periferias. A albanidade, como a helenidade, a celticidade ou a italianidade, não fogem a esta regra. Reconhecemos, então, totalmente, o princípio de uma albanidade europeia, cujas fronteiras se dirigem para sul, em direcção ao mediterrâneo oriental e ao Egipto (Mehmet Ali era de origem albanesa). Mas o Kosovo, ao tornar-se muçulmano após a conquista otomana, deixa de ser essa albanidade capaz de se projectar em direcção a esse Sul e a esse Oriente para aumentar o espaço europeu. É a traição quando comparada com o espírito do grande herói Skanderbeg, capitão no Adriático no século XV, às portas do mediterrâneo oriental, contra os otomanos. Ao tornar-se otomana e muçulmana, a albanidade volta as suas forças contra o centro da Europa, faz-se ponta de lança de duas direcções geopolíticas estrangeiras e, portanto, inimigas da Europa: a direcção dos povos turco-mongóis (que parte da Mongólia em direcção à puszta húngara e ao Adriático) e a direcção dos povos hamito-semitas (que parte da península arábica em direcção a todos os azimutes).

Independente, o Kosovo tornar-se-á o terceiro Estado muçulmano nos Balcãs depois da Albânia e da Bósnia. Formará, com eles, uma avant-garde panturaniana (turco-mongól) e arabo-muçulmana (hamito-semita) no belo seio de uma região que foi sempre o trampolim da Europa em direcção à sua periferia leste-mediterrânica e egípcia. Uma Europa encerrada nesta mesma região dos Balcãs não teria mais real abertura sobre o mundo, estaria condenada à subjugação e à implosão. Lembremo-nos dos povos pré-helénicos que fizeram a glória da Grécia antiga: transitaram pelos Balcãs, incluindo os macedónios de Filipe e Alexandre. Lembremo-nos de Roma, que teve de controlar os Balcãs antes de passar à ofensiva na Ásia Menor e de se lançar sobre o Egipto. A Europa não pode tolerar corpos estrangeiros nesta região altamente estratégica. Todo o corpo estrangeiro, isto é, todo o corpo que entende pertencer a agregados que não respeitam as direcções geopolíticas tradicionais da Europa, impede o desenvolvimento actual e futuro do nosso continente. Nas lutas planetárias que se desenham nesta alvorada do século XXI, aceitar um tal enfraquecimento é imperdoável da parte dos nossos dirigentes.

Nas querelas que animaram, no curso destes últimos anos, a pequena cena intelectual parisiense, certos polemistas argumentaram que há, ou havia, uma aliança implícita entre o germanismo centro-europeu e o otomanismo, depois entre o germanismo e os independentistas bósnios e albaneses, durante as duas grandes confrontações mundiais de 1914-1918 e 1939-1945. Este argumento ignora evidentemente a mudança dos dados. O maior pólo de potência, que se projectava nestas épocas, situava-se precisamente no centro do nosso continente, nas bacias fluviais paralelas do norte da Europa e na bacia do Danúbio, e arrastava o pólo otomano numa dinâmica dirigida ao sul, ao oceano Índico. No conflito balcânico dos anos 90 do século XX, o centro da Europa já não era de todo um pólo de potência, estava dividido (balcanisado!) e avassalado. A reactivação dos particularismos bósnios e albaneses não resultava já de um pólo de potência europeu à procura de se projectar em direcção à bacia oriental do mediterrâneo ou à mesopotâmia e ao oceano Índico, neutralizando positivamente, por uma política de mão estendida, algumas minorias muçulmanas. Esta nova reactivação, na última década do século XX, foi o resultado da aliança entre Wahabitas sauditas e puritanos do lado de lá do atlântico procurando, concertadamente, criar uma «dorsal islâmica» (segundo a terminologia dos geopolitólogos sérvios, entre os quais o nosso saudoso amigo Dragos Kalajic) cuja função geoestratégica deveria ser dupla: 1) bloquear o Danúbio à altura da capital da sérvia e 2) instalar sobre a linha Belgrado- Salónica um bloco territorial fora da soberania sérvia, porque esta linha é a via terrestre mais curta entre o centro danubiense da Europa e a bacia oriental do mediterrânico.

Um bloco territorial desta natureza, recebendo o apoio wahabita e americano, é inaceitável de um ponto de vista europeu, mesmo se a galeria de traidores, cretinos e cérebros de galinha que se dizem representantes da Europa em Bruxelas ou Estrasburgo, pretende o contrário. Esta galeria de idiotas raciocina dissociando o direito da geopolítica, enquanto que seria necessário pensá-los em fusão e em harmonia.

O Kosovo, que, para além desta posição central que ocupa na linha Belgrado-Salónica, é o antigo «Campo dos Melros», sítio da batalha sangrenta que opôs o exército medieval sérvio aos invasores otomanos. Sobre esse solo sacro, a aristocracia sérvia derramou todo o seu sangue para a salvaguarda da Europa. O «Campo dos Melros» tornou-se, portanto, pelo sacrifício desta cavalaria, um território sagrado, altamente simbólico, não somente para a sérvia e para os outros povos balcânicos em luta contra a barbárie otomana, mas também para os Húngaros, os soldados borgonheses e imperiais, que tentaram cruzadas infrutuosas para anular e impedir a vitória turca do Campo dos Melros. O esquecimento constitui uma outra falha cardinal e imperdoável: é dessacralizar a história, dessacralizar o político, privilegiar o processualismo e o presentismo nos raciocínios e actuações políticas e geopolíticas; é esquecer, num sentido e noutro, o longo prazo em benefício do imediato e do superficial. “Non possumus”: não incidiremos jamais em tais falhas!

Vários países europeus recusam reconhecer a independência do terceiro elo da «dorsal islâmica», como é o caso da Espanha, e os países maioritariamente ortodoxos como a Roménia e a Bulgária. Em França, na sacrossanta «República» apresentada como a parangona inultrapassável de todas as virtudes filosóficas, os dois novos defensores burlescos da política, o universalista mediomano Kouchner e o seu presidente, Sarkozy, denominado o «anão húngaro», apressaram-se a reconhecer desde logo, trompetes ruidosas e tambores retumbantes, a entidade wahabita-americanista que é o Kosovo. Perguntamo-nos como Voltaire ou Robespierre, devotas da Deusa Razão, conciliariam o seu laicismo com o preconceito dos wahabitas e dos seus aliados americanos. Mas o reconhecimento por Sarkozy e Kouchner do Kosovo é ao menos uma boa nova, porque interrogamo-nos sobre o que poderiam retorquir os dois larápios se amanhã uma enfiada de potências europeias ou outras adquirisse bruscamente a vontade de reconhecer uma república corsa, um novo ducado da Bretanha ou um novo Estado insular nas DOM-TOM ou, mais fácil ainda, o regresso à independência da Sabóia, que existe de jure. A independência da Sabóia poderia vir a ser, muito legalmente, a primeira alavanca para reanimar a existência política e estatal de Bresse (na província de Sabóia), da Lorena (grão-ducado imperial), do Franco-Condado, etc. Aos poucos, a velha Lotaríngia tomaria forma, ao longo do Ródano na Provença e no Delfinado, tornando actual o testamento de Carlos V (que nunca deveríamos ter esquecido, nem em Munique, nem em Viena, nem em Roma, nem em Madrid, nem em Bruxelas).

A Rússia, pela sua parte, poderia, através de uma interpretação jurisprudencial da independência do Kosovo, obrigar a aceitação da independência de duas províncias georgianas: a Abecásia e a Ossétia do Sul, desmembrando de um só golpe o principal peão dos EUA e da NATO no Cáucaso.

Qualquer que seja o resultado da independência kosovar na Europa, ele oferece-nos possibilidades de acção:

1) Se ninguém a reconhece ou se fortes resistências se opõem ao seu pleno reconhecimento não haverá «dorsal islâmica» nem bloco territorial a obstruir a linha Belgrado-Salónica.

2) Se todos reconhecem o Kosovo independente surge um pretexto para desmembrar a França e reconstruir o flanco ocidental e romano do defunto Sacro Império, cuja restauração permitiria à Europa dotar-se de uma espinha dorsal político-espiritual. Esta restauração significaria simultaneamente a morte definitiva da ideologia republicana, esse malefício que atinge o cúmulo do ridículo com o binómio Sarközy-Kouchner. O único perigo de um reconhecimento geral do Estado kosovar seria dar pretexto aos muçulmanos de Ceuta e Melilla para reclamarem uma independência análoga, com o beneplácito dos mesmos padrinhos wahabitas e yankees. Razão pela qual a Espanha recusa reconhecer o novo Estado auto-proclamado (para além do caso basco).

Em qualquer dos casos, teremos ocasião de militar em defesa da nossa visão da Europa. De permanecer combatentes, Verdadeiros «zoon politikon». Vestais de um inelutável Grande Retorno da tradição imperial.

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vendredi, 25 avril 2008

Gwenn ha Du

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Gwenn ha Du

 

Membre de Breiz Atao depuis son plus jeune âge, Ronan Caerléon (1914-1986) fut emprisonné à plusieurs reprises pour ses convictions autonomistes bretonnes. Il fut notam­ment l’éditeur d’Ololê, journal breton pour la jeunesse pu­blié pendant la guerre qui a marqué une génération de mi­litants de l’Emsav. Caerléon fut aussi l’initiateur du théâtre et du cinéma en langue bretonne, fidèle en cela à son maî­tre à penser l’abbé Y. V. Perrot, lâchement assassiné en 1943 (alors qu’il avait hébergé des résistants par solidarité celtique). Mais Caerléon fut aussi écrivain: il publia en ef­fet plusieurs titres essentiels pour toute personne qui s’in­téresse à l’histoire du nationalisme breton au XXème siè­cle. Ses livres étaient épuisés depuis longtemps et il faut donc saluer l’initiative d’une jeune maison d’édition, Brit­tia, fondée par un de ses descendants. Brittia réédite tous ces titres devenus un peu mythiques comme Complots pour une république bretonne, et bien sûr Gwenn ha Du, qui nar­re les premiers attentats intelligemment symboliques de la mouvance autonomiste, comme la destruction en 1932 du monument commémorant l’annexion du Duché de Bre­tagne par la France. Les textes de Gwenn ha Du sont cités: « N’attachez pas une importance exagérée aux théories qui font travailler les langues au détriment des bras ».

 

Donnez-moi cent hommes résolus…

 

Dans Le Rêve fou des soldats de Breiz atao, Caerléon re­trace l’histoire tragique de la Bezen Perrot, unité de vo­lontaires bretons portant l’uniforme allemand et impliqués dans la lutte contre les maquisards... dont tous n’étaient pas des Espagnols ou des jacobins fanatiques: il s’agit aussi d’une guerre civile entre Bretons. Vaincus, ces soldats per­dus, généralement très jeunes et d’un haut niveau culturel, seront impitoyablement pourchassés, comme d’ailleurs tous les patriotes bretons (10.000 assassinats à la Libération). Certains passeront à travers les mailles du filet et feront d’étonnantes carrières. Caerléon dépeint bien le climat terrible de cette époque complexe, ses figures telle celle de Célestin Lainé, chef du Kuzul Kuz, le Conseil de l’armée clandestine bretonne, qui prend à la lettre l’injonction de Pearse: « Donnez-moi cent hommes résolus, dressés dans la tradition celtique et j’affranchis l’Irlande ». Lainé était en ou­tre fasciné par le paganisme celtique qu’il fit renaître au grand scandale du clan catholique (allègrement trahi par le haut clergé, comme toujours). Dans Au village des condam­nés à mort, Caerléon évoque les aventures peu banales d’An­dré Geffroy, militant breton victime d’un montage (une fausse lettre de dénonciation aux Allemands trouvée par le Sûreté belge chez un Waffen SS flamand) qui faillit lui coûter la vie. Condamné sans réelle preuve à la peine ca­pitale il attendra 618 jours, enchaîné dans le quartier des condamnés à mort malgré les témoignages allemands qui l’innocentaient clairement. Son témoignage sur les ma­nipulations policières au sein des milieux bretons (qui du­rent encore: il s’agit sans doute du milieu le plus infiltré avec ses provocateurs, ses faux druides, etc.) est instructif. La description des conditions de détention dans la France des années 40 est hallucinante et rappelle d’autres bagnes dont la presse nous parle de façon plus qu’exclusive.

 

Patrick CANAVAN.

 

Oeuvres de Ronan Caerléon aux éditions Brittia, 34 rue de l’Avenir, F-22.190 Plérin, www.brittia.com

 

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mardi, 15 avril 2008

Kouchner: de Médecins du Monde à Militaires sans Frontières

Emmanuel Todd : « Kouchner est passé de Médecins du monde à Militaires sans frontières » Version imprimable Suggérer par mail
Emmanuel Todd : « Kouchner est passé de Médecins du monde à Militaires sans frontières »
Emmanuel Todd vient de publier, avec Youssef Courbage, un ouvrage, Le rendez-vous des civilisations (1), qui tord le cou à la thèse du choc des civilisations. Pour ces deux démographes, la montée de l'islam radical n'est que l'un des signes, nombreux, de la modernisation du monde musulman dont l'aspect démographique est d'ailleurs le plus éclatant. Les sociétés du monde musulman sont entrées dans une transition démographique qui voit progresser l'alphabétisation des hommes puis des femmes, avant que le nombre d'enfants par femme se rapproche de celui de l'occident. Tout cela évoque selon eux une montée de l'individualisme dans ces sociétés. L'analyse démographique les conduit ainsi à rejeter l'idée d'une différence de nature entre les sociétés anciennement chrétiennes et les sociétés musulmanes.


Que penser de la déclaration musclée de Bernard Kouchner sur l'Iran?
Emmanuel Todd : Son intervention ravive une interrogation personnelle qui date de la guerre d'Irak, où il s'était déjà prononcé en faveur de l'intervention américaine : quelle peut être la psychologie d'un médecin qui manifeste une préférence stable pour la guerre ? Nous passons trop vite de Médecins du monde à « Militaires sans frontières ».
Plus sérieusement Bernard Kouchner n'a fait qu'exprimer maladroitement la ligne Sarkozy, qui de fait est la ligne de Washington. Avant la présidentielle, j'avais suggéré que les Américains attendaient l'élection de Nicolas Sarkozy pour s'attaquer à l'Iran.

Le Quai d'Orsay propose une autre lecture de cette déclaration : il ne s'agirait pas, en fait, de menacer l'Iran mais de montrer à ses dirigeants actuels le coup économique de leur refus d'obtempérer aux recommandations de la communauté internationale.
On peut dire ce qu'on veut, mais le mot guerre a été prononcé, et le Quai d'Orsay apprendra d'autres nouvelles par la presse.

L'Iran inquiète davantage certains observateurs que l'Irak avant l'intervention américaine.
La question de l'Iran se présente sous la forme d'un flot d'images et de faits difficiles à interpréter vu de France. Il y a les propos absurdes du président Ahmadinejad, les images de femmes couvertes de noir, et l'islamophobie ambiante. Tout cela masque la réalité profonde de l'Iran : une société en développement culturel rapide, dans laquelle les femmes sont plus nombreuses que les hommes à l'université, un pays dans lequel la révolution démographique a ramené le nombre d'enfants par femme à deux, comme en France ou aux Etats-unis. L'Iran est en train de donner naissance à une démocratie pluraliste. C'est un pays où, certes, tout le monde ne peut pas se présenter aux élections, mais où l'on vote régulièrement et où les basculements d'opinion et de majorité sont fréquents. Comme la France, l'Angleterre ou les Etats-unis, l'Iran a vécu une révolution qui se stabilise et où un tempérament démocratique s'épanouit.
Tout cela est à mettre en rapport avec une matrice religieuse dans laquelle la variante chiite de l'islam valorise l'interprétation, le débat et, éventuellement, la révolte.

Pour un simple observateur occidental, l'assimilation du chiisme au protestantisme n'est pas une évidence qui tombe sous le sens.
Il serait absurde de pousser à l'extrême la comparaison. Mais il est clair que de même que le protestantisme a été, dans l'histoire européenne, un accélérateur de progrès et le catholicisme un frein, le chiisme apporte aujourd'hui une contribution positive au développement, notamment dans le domaine du contrôle des naissances : l'Azerbaïdjan, certes postcommuniste, mais également chiite, est à 1,7 de taux de fécondité, les régions alaouites de Syrie rattachées au chiisme, ont terminé leur transition démographique contrairement aux régions majoritairement sunnites. Au Liban, la communauté chiite, base sociale du Hezbollah, était en retard sur le plan éducatif et social, mais elle est en train de rattraper les autres communautés, comme on le voit dans l'évolution du taux de fécondité.
L'Iran est aussi une très grande nation qui manifeste une conscience réaliste de ses intérêts stratégiques dans une région où la majorité de ses voisins possède l'arme nucléaire : le Pakistan, l'Irak et l'Afganistan (via la présence de l'armée américaine), Isräel. Dans ce contexte, l'attitude européenne raisonnable serait d'accompagner l'Iran dans sa transition libérale et démocratique et de comprendre ses préoccupations de sécurité.

Dans votre livre, vous faites l'hypothèse tout à fait surprenante d'une possible laïcisation des sociétés musulmanes.
Dans la mesure où dans les mondes catholique, protestant, orthodoxe et bouddhiste, la baisse de la fécondité a toujours été précédée d'un affaiblissement de la pratique religieuse, on doit se demander si des pays musulmans dans lesquels le nombre d'enfants par femme est égal ou inférieur à 2 ne sont pas en train de vivre aussi, à notre insu – et peut-être même à l'insu de leurs dirigeants – un processus de laïcisation. C'est le cas de l'Iran.

Pourquoi les Américains et Sarkozy ont-ils adopté cette stratégie de confrontation avec l'Iran ?
Les services diplomatiques américains sont parfaitement au fait de la réalité iranienne, de la montée de la démocratie et de la modernisation du pays. Mais ils veulent abattre une puissance régionale qui menace leur contrôle de la zone pétrolière. C'est un pur cynisme utilisant l'incompréhension actuelle du monde musulman. Dans le cas de Sarkozy, je pencherais plus pour l'idée d'incompétence ou de sincère ignorance, qui le conduit néanmoins à amorcer une politique extérieure contraire à la morale et à l'intérêt de la France. D'éventuelles sanctions économiques françaises contre l'Iran feraient rire les Américains qui n'ont plus d'intérêts dans ce pays, et sourire les Allemands, qui ont comme nous en ont beaucoup, mais semblent pour le moment plus réalistes.

(1) Le rendez-vous des civilisations, Emmanuel Todd et Youssef Courbage, Le Seuil, 2007


Source :
http://www.marianne2.fr

dimanche, 13 avril 2008

E. Hermy: Recessie en Russische optie

Economische recessie en de Russische optie.

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In mijn betoog wil ik de correlatie aantonen tussen de neergang van een militaire en economische reus met name de Verenigde Staten, en de dreigende economische recessie die Europa zal treffen. Met dit referaat wil ik ook aantonen dat oorlogen en terreur niet noodzakelijk gewapende uiteenzettingen zijn maar dat de confrontatie zich meestal aandient via economische terreur en een economische oorlog.

De wereldmarkten en dus de economische macht zijn zich aan het verplaatsen. Als er economische machtsveranderingen zijn dan volgen ook de militaire machtsverhoudingen. Het één is gewoon het natuurlijke gevolg van het andere. De productie en afzetmarkten zijn na de verschillende delocalisatiegolven die teweeg werden gebracht door de globalisatie van het kapitalisme verschoven van Europa en de VS naar landen zoals Rusland, Brazilië, Zuid-Afrika, India en vooral naar China.

China heeft nu een groei van 8% op jaarbasis en is de belangrijkste groeimarkt van de wereld. Ter vergelijking: de VS hebben een voorspelde groei voor dit jaar van 0,1% tot 0,4% en Rusland zit China op de hielen met 6%. China heeft de VS ingehaald wat betreft het binnenhalen van buitenlandse investeringen. De volgende golf van globalisatie zal hoogwaardige producten van deze landen naar Amerika en Europa brengen omdat de groeilanden verplicht zijn om een grotere meerwaarde per product te realiseren om de eigen binnenlandse markten verder te kunnen laten groeien. Onze Europese economieën zullen nog onder zwaardere druk komen te staan dan nu al het geval is. Ook zal er een verdere delocalisering van arbeidsplaatsen plaatsvinden.

In India en China komen elk jaar meer dan 7 miljoen hooggeschoolde studenten op de arbeidsmarkt. Daarvan zijn ruim 600 000 architecten. In de VS zijn er dat 70 000 en in Europa zelf iets minder. Een gigantisch groeipotentieel en een gigantisch arsenaal aan intellectuele input. Het is nu niet meer nodig om deze mensen naar hier te halen om ons te beconcurreren want via de IT-revolutie kunnen zij onze middenkaders (en dus onze middenklasse) vanuit hun thuislanden uit de arbeidsmarkt duwen. Over de gehele wereld hebben de banken al 30% van hun banen uitbesteed aan die groeilanden. De verzekeringssector 20%. De boekhouding van 35% van de bedrijven word nu al gedaan in landen als India. Dit is nog maar een begin, de echte ‘boom’ moet nog komen zeggen alle analisten.

Alleen al in de VS zouden er zo 10 miljoen banen uitbesteed worden. Dat zou de werkeloosheid in de VS van 5% naar 11% omhoogstuwen. Voor Amerikanen is een overschrijding van de 5%-grens wat betreft werkeloosheid een ware nachtmerrie. Alles daarboven doet hen denken aan de grote depressie van de jaren ’20 tot aan het uitbreken van Wereldoorlog II in de vorige eeuw. Door de schaarste aan banen en de dreigende buitenlandse concurrentie zullen de lonen dalen. De mensen die nog een baan hebben zullen vrede moeten nemen met drastisch verlaagde inkomens. Men moet niet denken dat het alleen maar de laaggeschoolde banen zijn die daaronder zullen leiden. Computerprogrammeurs die in de VS een 100 000 Euro verdienden zijn buiten de deur gezet en vervangen door een bijna gratis model uit India, want die kost gemiddeld maar 20% van zijn Amerikaanse evenknie. Zo heeft het bedrijf 5 Indische programmeurs voor de prijs van een Amerikaan. Er zal een verschuiving zijn van de broodverdieners naar de rijstverdieners. En het brood zal schaarser worden …

Omdat we in Europa nog steeds totaal verbonden zijn met Amerika en met de dollar als betaalmiddel zullen die crisis en deze praktijken zich ook in Europa en in ons land manifesteren. Er staan al 10 000 Filippijnse IT-specialisten klaar om naar Europa te komen werken, waarvan er 1 000 voor de Belgische markt zijn bestemd.

Tegelijkertijd is er door de hypotheekcrisis in de VS een enorme financiële crash. Die hypotheekcrisis is het eindresultaat van het geven van leningen aan mensen die deze leningen nooit hadden mogen krijgen, omdat ze gewoon insolvabel waren. Er is een enorm wantrouwen gegroeid tussen de banken, en zo is de flux van cash aan reële marktrente gestremd geraakt (men is bang om aan elkaar te lenen). De nationale banken drukken echter massa’s geld bij en gooien dat op de markt en dit tegen lage rente. Een paar dagen geleden heeft de Federal Reserve, dat is de Amerikaanse Nationale Bank 200 miljard dollar in het systeem gepompt. Dit is al een eerste oorzaak van de geldontwaarding. Tegelijkertijd is er een enorme opstoot van de prijzen van energie en voedingsproducten die wordt voortgestuwd door de stijgende vraag vanuit de nieuwe groeimarkten en vooral dan door China. Deze factor die we allemaal kennen als inflatie tast de reële koopkracht aan van de mensen. Een combinatie van massaal goedkoop geld en van een groeiende vraag naar grondstoffen leidt tot deze inflatiespiraal. Om de inflatie te kunnen stoppen moet het geld duurder worden. Maar dan remt men de groei af en krijgt men een stagflatie. Dit is een nachtmerriescenario voor alle mensen en zeker voor de elite. Daarom moeten er nieuwe wegen worden gezocht om onze economie te reorganiseren

Op binnenlands en Europees vlak moeten er structurele economische en politieke veranderingen worden doorgevoerd. Op langere termijn moeten we zelf de Beurs en geldmarkt in vraag durven te stellen. Er moet een nationale revolutie in gang worden gezet die aan de dreigende economische achteruitgang van ons land en ons continent een halt wordt toegeroepen. Zeker in ons land en sommige andere Europese landen is de toestand dramatisch gezien het probleem van de vergrijzing. Maar ook de steeds meer falende scholingsgraad moet omhoog. Er moet een ander soort economie worden opgebouwd, waar innovatie en hoogtechnologische meerwaarde kunnen worden gerealiseerd. We moeten af van de productie van halffabricaten en lageloonbanen. We moeten een solidaristische volksgebonden economie naar voor schuiven. De interne klassenstrijd moet vervangen worden door de solidaire volksverbondenheid die het mogelijk moet maken om van onze Vlaamse economie een echte speerpunteconomie te maken. Een maatschappij waar tijdelijke opofferingen gecompenseerd worden door meer inspraak en macht in de bedrijven en in de economie. De economie en de politiek mogen niet in handen blijven van de huidige machtskaste. Ze moet worden overgedragen aan de nieuwe meritocratie die verantwoordelijkheid orde en tucht zal combineren met stijgende welvaart en welzijn. Daarom moeten op binnenlands vlak radicale economische en sociale hervormingen worden doorgevoerd.

Maar ook op geopolitiek vlak moeten er veranderingen komen. Er moeten nieuwe bondgenoten worden gezocht. Die kunnen garant staan voor grondstoffenmarkten en afzetmarkten. Als je weet dat dit land nu al meer dan 13% van alle buiten-Europese handel realiseert via Rusland, dan is het duidelijk dat zelf de machtselite al op twee paarden is gaan het wedden. Terwijl de Europese dictatuur zijn steun betuigt aan Amerika en zweert dat ze dat bondgenootschap eeuwig trouw zal blijven, investeren de Europese bedrijven en banken massaal in Rusland. 70% van alle buitenlandse investeringen in Rusland komen nu al vanuit de Europese Unie. Dat is ook niet verwonderlijk. Rusland heeft de volgende drie jaar een groeiverwachting van 6%. Na 2009 zal Rusland op het niveau van 1989 staan. Dat is het ogenblik waarop de muur en het communisme in elkaar zijn gedonderd. Analisten voorspellen dat er na 2009 pas echt een groei-explosie zal plaatsvinden.

Ondanks het feit dat men in Europa en de VS het huidige regime in Rusland corruptie en slecht democratisch beheer aanwrijft is het toch maar een feit dat dit Rusland al zijn oliewinsten terug in de economie stopt. Miljarden dollars worden zo in de economie gepompt. Dat heeft geleid tot de opkomst van een Russische middenklasse. Deze beschikt over genoeg inkomen om verbruikgoederen te kopen en zo de algemene economie verder groeikansen te geven. Hier ligt uiteindelijk de opportuniteit voor Europa en zeker ook voor ons land. Wij moeten nog meer gaan participeren in de voormalige Oostbloklanden en vooral in Rusland. Het is voor ons van levensbelang dat we een uitvoermarkt voor onze producten veilig stellen. Maar ook, wat nog van groter belang zal zijn in de toekomst, is dat we gas en olie zullen kunnen invoeren en zo onze economische groei zullen kunnen garanderen. Onze corrupte elite wil echter van twee walletjes eten. Ze wil wel meeprofiteren van een economische groeimarkt zoals Rusland maar ze is tegelijkertijd doodsbang om de Amerikaanse alliantie te verbreken. Nochtans is die alliantie, zoals ik reeds eerder aantoonde, een verkeerde optie. Het is de alliantie van de verliezers en van de achteruitgang. Het is een verbond dat ons zal meesleuren in de ondergang van een voormalige grootmacht. Onze elite is schatplichtig aan de Amerikaanse elite. Ze is verslaaft geraakt aan de ‘American Dream’. Zelf als die droom langzaam een nachtmerrie aan het worden is, dan nog blijven onze elites star vasthouden aan die alliantie.

Onze elites willen geen verandering. Ze zijn doodsbang voor verandering. Ze denken dat ze onder de paraplu van de VS nog altijd aanspraak kunnen maken op grote economische macht en invloed. Maar het monster van de globalisering keert zich uiteindelijk tegen diegenen die dat monster hebben gecreëerd. De globalisering heeft nieuwe superstaten laten ontstaan en die zullen met de oude afrekenen. De huidige Europese machtselite doet er verkeerd aan om Oost-Europa te willen Balkaniseren. Ook het sturen van troepen om Amerikaanse belangen te gaan verdedigen is misdadig. Men probeert Rusland te isoleren en te omsingelen, kijk naar Afghanistan en kijk wat er gebeurt in de vroeger Sovjetrepublieken. Kijk naar de installatie van nieuwe raketsystemen in Europese landen. Zelfs het stichten van moslimenclaves worden als buffer tegen de Russische groei en economische machtsuitbreiding gebruikt. Etnische tegenstellingen worden aangewakkerd. Die tegenstellingen zullen in ons gezicht ontploffen, want ook wij zijn reeds etnisch geïnfiltreerd.

Wij, in Europa, moeten ons beschermen tegen de pletwals die de huidige militaire en economische macht Amerika zal doen botsen met de nieuwe opkomende macht China. Darfour, maar ook veel andere Afrikaanse landen worden nu al ingepalmd door China omwille van de grondstoffen. Dat is een voorbode van veel zwaardere conflicten om grondstoffen en afzetmarkten. Wij hebben nieuwe vrienden nodig, die Europa tegen China kunnen beschermen. Want de terreur tegen Europa en Rusland zal vroeg of laat uitmonden in een open oorlog. Dan zal niet alleen onze koopkracht en onze welvaart aangetast worden. Dan zullen de levens van u en uw kinderen in de weegschaal worden gelegd.

Voor het N-SA is het duidelijk. Wij moeten in de Europese ruimte komen tot een hergroepering van krachten. Als we dat willen realiseren is de As Europa-Rusland de meest zinnige optie. Daarom onze strijd. Een strijd tegen oorlog en terreur. Tegen economisch imperialisme. Deze strijd kan alleen maar slagen als we een vrije en solidaristische volksstaat uitbouwen!

Algemeen Coördinator Eddy Hermy.Toespraak namens de N-SA op het Dineerdebat van Euro-Rus.

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vendredi, 11 avril 2008

R. Steuckers: intervention au colloque d'Eurorus

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Intervention de Robert Steuckers lors du colloque « Euro-Rus » de Termonde, 15 mars 2008

Mesdames, Mesdemoiselles, Messieurs, chers amis et camarades,

Rassurez-vous, je ne serai pas long et je ne répéterai pas, en d’autres termes, les arguments et les faits qui ont été évoqués par mes prédécesseurs à cette tribune. En guise de préambule, je répondrai toutefois à la question récurrente qui nous est si souvent posée, lorsque nous évoquons la possibilité et la nécessité d’un tandem euro-russe sur l’échiquier international. Cette question récurrente est la suivante : Comment cela se fait-il que vous adoptiez cette position favorable à la Russie, alors que, naguère, cette option a généralement été celle des gauches, tandis que vous passez pour les héritiers de la « révolution conservatrice » ? Cette question, que je n’hésite pas à qualifier d’inepte, reflète la confusion incapacitante qui a été sciemment mise dans la tête des Européens de l’Ouest pendant les quatre décennies de la Guerre Froide. Avant cette parenthèse et avant celle du pouvoir bolchevique à partir de 1917, la Russie était considérée comme le bastion de la ‘réaction’ contre les idées de la révolution française en Europe, c’est-à-dire contre les effets dissolvants de l’idéologie libérale, y compris dans sa version anglo-saxonne, smithienne et manchesterienne. Arthur Moeller van den Bruck, figure de proue de la révolution conservatrice allemande après le Traité de Versailles de 1919, traducteur de Dostoïevski et partisan d’une alliance germano-russe suite aux accords de Rapallo entre Rathenau et Tchitchérine (1922), avait écrit que le bolchevisme, en dépit de ses aspects déplaisants, incarnait la même attitude anti-libérale que la Russie tsariste et traditionnelle, mais sous d’autres oripeaux. Ces oripeaux ont été réduits en lambeaux au fil de sept décennies de communisme, jetés aux orties sans état d’âme, si bien que la Russie est redevenue aujourd’hui un bastion de résistance contre l’idéologie libérale de l’américanosphère.

Pour venir au vif du sujet de cet après-midi, abordons maintenant la question du Sud-Est européen. Jean Parvulesco, au beau milieu de la crise balkanique de 1999, me disait que les régions sud-orientales de l’Asie et de l’Europe étaient vitales pour le développement de ces deux continents. L’Indochine, où les principaux fleuves venus du cœur de l’Asie himalayenne viennent se jeter dans l’Océan Pacifique, et les Balkans, entre le cours inférieur du Danube et l’Egée, sont des territoires tremplins, permettant à la principale puissance centre-européenne, comme hier l’Empire d’Alexandre, l’Empire romain, l’Autriche puis l’Allemagne, de se projeter, militairement ou pacifiquement, vers le Proche-Orient, le Golfe Persique, l’Egypte (et le Nil), la Mer Rouge et l’Océan Indien. Pour Parvulesco, il n’y a pas de développement naturel et harmonieux de l’Europe sans une maîtrise pleine et complète de l’espace balkanique, comme il ne pourrait y avoir d’indépendance asiatique réelle sans une maîtrise pleine et complète des cours inférieurs des fleuves qui jaillissent du flanc oriental de l’Himalaya, pour se jeter dans le Pacifique face à l’archipel indonésien, riche en caoutchouc et en pétrole et anti-chambre de l’Australie. Dans son langage vert et rabelaisien, Parvulesco disait textuellement : « S’ils tiennent le sud-est, ils nous tiennent par les couilles ! ». L’histoire nous l’enseigne : il n’y a pas d’Europe puissante possible si des « raumfremde Mächte », des puissances étrangères à notre espace, occupent ou contrôlent, directement ou indirectement, l’ensemble balkanique.

L’Empire ottoman a tenu l’Europe en échec aussi longtemps qu’il a tenu les Balkans. Mais l’occupation ottomane a eu au moins un mérite : celui de donner un sens et un objectif à l’Europe combattante. De Jean Sans Peur, Duc de Bourgogne et Comte de Flandre, aux nationalistes balkaniques des guerres de 1912 et 1913, en passant par le Prince Eugène de Savoie-Carignan, l’Europe, à l’exception de la France, a ressenti comme un devoir de croisade et de reconquista la nécessité de bouter l’Ottoman hors de la péninsule balkanique.

L’Empire ottoman considérait la maîtrise des Balkans comme une étape en vue de conquérir l’Europe entière, à commencer par la « Pomme d’Or », Vienne, que ses armées assiègeront deux fois, en 1529 et en 1683. En vain. Le sursaut, in extremis, a été chaque fois admirable et nous ne sommes pas devenus turcs. L’objectif ottoman était de remonter le Danube, de Belgrade à Budapest et de Budapest à Vienne, puis, sans doute, de Vienne à Linz et au cœur de la Bavière pour faire tomber l’ensemble de l’Europe dans son escarcelle. Aujourd’hui les Etats-Unis installent leur principale base militaire sur le site même de la victoire ottomane de 1389, soit au Kosovo, à partir duquel les Turcs avaient commencé leur conquête de l’Europe.

Les Balkans sont donc un tremplin géostratégique de première importance depuis le Macédonien Alexandre le Grand, depuis les Romains dans leur marche vers l’Anatolie, corps territorial constitutif majeur de l’actuelle Turquie. Dans la perspective actuelle, qui est toujours celle du géopolitologue britannique Halford John Mackinder, théorisée en 1904, la maîtrise des Balkans permet la maîtrise de l’Anatolie, qui permet à son tour de maîtriser le Croissant Fertile et, partant, le Golfe Persique et la Mer Rouge et d’obtenir ainsi une fenêtre de premier ordre sur l’Océan Indien. La maîtrise des Balkans équivaut de ce fait à joindre solidement la « Terre du Milieu » à l’ « Océan du Milieu ». Cette volonté, qui est aussi celle de joindre l’Europe romano-germanique, la Russie néo-byzantine, la Perse et l’Inde, dans un sorte de « chaîne d’Empires » sur le « rimland » méridional de l’Eurasie, a été l’objectif de toutes les « grandes politiques » de l’histoire européenne : de César, qui le théorise avant de succomber sous les coups des Sénateurs romains aux Ides de Mars de 44 av. J. C., de Trajan qui le concrétise près de deux siècles après, de Julien dit l’Apostat qui ira mourir au combat en Mésopotamie, aux Croisades d’Urbain II et Godefroy de Bouillon à l’idée secrète de l’Ordre de la Toison d’Or créé par Philippe le Bon.

A la fin du 19ième siècle, les Européens, dont les Serbes, triomphent enfin de la présence ottomane en Europe orientale. Malheureusement, bien vite, les vainqueurs se déchireront entre eux, créant des animosités inter-européennes qui n’ont cessé de perdurer et qu’exploiteront habilement tous ceux qui voudront contrôler les Balkans, après 1914. Quant aux Turcs, ils essaieront toujours de revenir dans les Balkans, par le biais de l’OTAN, en soutenant les minorités musulmanes de Bulgarie, de Bosnie, d’Albanie et du Kosovo, en créant, comme on l’apprend, des réseaux de lycées turcs en Bosnie. C’était le rêve de Türgüt Özal, qui voulait faire émerger un pôle panturc de l’Adriatique à la Muraille de Chine. C’est le rêve d’Erdogan qui cherche à réaliser les mêmes objectifs mais cette fois par le biais d’un panislamisme dominé par la Turquie. Son discours récent, en février 2008, à Cologne, est très révélateur des intentions d’Ankara. Ne confondons toutefois pas le kémalisme et le pantouranisme. Le Général Mustafa Kemal, que les Turcs surnommeront affectueusement « Atatürk », le « Père de tous les Turcs », se voulait, au départ, sincèrement Européen, dans la mesure où il voulait imposer un mythe hittite à la Turquie défaite et dépecée, qu’il souhaitait par ailleurs désislamiser et désarabiser. Ce mythe hittite faisait explicitement référence à un peuple indo-européen, ayant vécu à la charnière de la proto-histoire et de l’histoire, venu d’Europe, via les Balkans, pour faire face à un environnement non européen en Anatolie et pour pousser sa puissance en direction du ‘dos’ du Croissant Fertile, aux confins septentrionaux de l’actuelle Syrie. De ce mythe, il reste, à Ankara, un impressionnant « Musée hittite », fondé par Atatürk lui-même. Outre ce musée, le mythe hittite de Mustafa Kemal n’a laissé aucune trace dans les projets politiques et géopolitiques de la Turquie contemporaine.

Le pantouranisme exalte une autre orientation géostratégique, si bien qu’on ne peut du tout le confondre avec le kémalisme. Dans le mythe pantouranien, l’Etat turc n’est pas posé comme l’héritier des Hittites qui avancent de l’Egée vers le Croissant Fertile mais l’héritier des hordes seldjoukides venues du fin fond de l’Asie pour s’élancer vers l’Egée, l’Adriatique et le Danube. Le pantouranisme prend forme, au niveau intellectuel, dès le début du 20ième siècle mais atteint son apogée pendant la seconde guerre mondiale, en 1942, quand une large fraction de l’élite politique et militaire turque croit à une victoire prochaine de l’Allemagne hitlérienne en Russie, victoire qui apportera, croit-elle, l’indépendance aux peuples turcophones de l’Asie centrale soviétique. Parmi les jeunes officiers séduits à l’époque par ce pantouranisme ou panturquisme, nous trouvons le futur leader MHP, le Colonel Türkes, dit le « Bazboug », le chef. Les pantouraniens, qui plaçaient leurs espoirs en une victoire allemande, seront jugés en 1945, quand la Turquie, qui avait senti le vent tourner, s’alignait sur les Etats-Unis. Jugement purement formel : quelques semaines après leurs lourdes condamnations, les panturquistes rentrèrent au foyer.

Les mythes hittite et pantouranien ne sont pas des vues de l’esprit, des coquetteries intellectuelles sans grande consistance. Elles reflètent des intentions politiques et stratégiques essentielles, suivies d’effets toujours bien concrets. Ainsi, dans ses multiples ouvrages, essais et articles, Zbigniew Brzezinski, grand stratégiste américain contemporain, auteur du livre programmatique « Le Grand Echiquier », cherche à mâtiner l’idéal pantouranien et un idéal « mongoliste », où il maintient en quelque sorte deux fers au feu : il utilisera le pantouranisme pour séduire les Turcs et détacher le cœur central de l’Asie de l’hégémonie russe, de le balkaniser et de le satelliser pour séparer la Russie de l’Iran et de l’Inde, où pour créer une unité éphémère, ‘gengiskhanide’, toujours remise en question de par sa mobilité incessante et de par les querelles d’héritage, une unité fragile, plutôt une instabilité chronique, qui aurait eu pour fonction de neutraliser les anciens empires de la région, à commencer par le persan ; mais dans cet espace, ce ne sera ni un étatisme ottoman ni un étatisme kémaliste qui devra avoir, in fine, le dessus, mais un « mongolisme », non pas tant animé par la sagesse de Gengis Khan, mais à la façon très négative de Tamerlan, fossoyeur de la Perse si fascinante des 12ième, 13ième et 14ième siècles. L’Asie centrale, faute d’être pleinement satellisable par les Etats-Unis, devra devenir un espace de chaos, un espace « tamerlanisé » ad infinitum, déstructuré faute d’être structuré par une idée impériale solide, visant la durée, la pérennité, à la romaine ou à la persane, à la Witte ou à la Stolypine. C’est une façon de réactualiser les stratégies d’un Richelieu et d’un Vauban, qui avaient cherché tous deux à ‘démembrer’ les frontières de leurs adversaires impériaux ou espagnols ou à plonger ‘les Allemagnes’ dans le chaos, entre une France stabilisée d’une main de fer par le nouvel absolutisme, après la Fronde et la répression des révoltes populaires, et son allié ottoman, bien campé sur le cours du Danube. Dans la perspective actuelle, il s’agit de plonger dans le chaos un vaste espace, correspondant peu ou prou au territoires dominés jadis par Gengis Khan, entre une Union Européenne stable mais ouverte et pénétrée sur le plan commercial et une Chine mise dans l’impossibilité de se trouver des alliés sur la masse continentale eurasienne et prête, dès lors, à accepter à terme une ouverture au commerce américain (projet bien concocté depuis 1848, quand la guerre du Mexique laissait prévoir le statut bi-océanique des Etats-Unis, pierre angulaire de leur puissance planétaire).

A cette imitation, mutatis mutandis, de la stratégie ‘démembrante’ de Richelieu par Brzezinski en Asie centrale correspond la stratégie américaine équivalente dans les Balkans, à l’époque du tandem Clinton/Albright, qui ont créé de toutes pièces les questions bosniaque et kosovare ; cette dernière rebondit aujourd’hui avec la proclamation unilatérale d’indépendance de Thaçi à Pristina. Le Kosovo est la région qui se trouve exactement au milieu de l’ouest de la péninsule balkanique, à l’ouest du massif des Monts Rhodope ; plus exactement de l’ensemble formé par l’Albanie, la Serbie et le Monténégro ; qui tient cette région, comme les Ottomans l’ont tenue, tient l’ensemble de la péninsule et contrôle les routes qui mènent à Belgrade et au Danube, via les vallées de l’Ibar (à Mitrovica) et de la Morava, plus à l’est. Exactement comme la puissance qui tient sous sa coupe la Bosnie tient, à terme, la côte adriatique, qu’elle surplombe, menace l’Italie et domine le cours de la Save qui mène aux frontières de l’Autriche et de la Vénétie. La stratégie américaine a donc réussi à créer, en pariant sur le fondamentalisme musulman et sur certains réseaux mafieux albanais, deux entités politiques hostiles à  -et en marge de-  leur environnement slave, grec et chrétien-orthodoxe, deux entités à la dévotion des Etats-Unis, de la Turquie et de leurs financiers saoudiens. L’atout stratégique qu’aurait pu constituer des Balkans unis est ainsi perdu pour l’Europe, avec, rappelons-le, la bénédiction d’une intelligentsia médiacratique (et médiocratique…) parisienne, qui, à l’époque de la crise bosniaque, professait un multiculturalisme irréaliste en faveur d’une Bosnie pluri-confessionnelle, posé comme le futur modèle incontournable de l’Europe entière ; en débitant ces discours, cette brochette d’intellos creux camouflait le fait, pourtant patent pour qui sait déchiffrer la ‘novlangue’ des fabriques d’opinion, qu’elle prenait ses ordres, en réalité, de Washington, pour briser, par matraquage médiatique, la solidarité spontanée pour la Serbie qui aurait animée la France.

Dans le Kosovo, la firme Halliburton, où Dick Cheney a de solides intérêts, a construit la plus grande base américaine d’Europe, ce qui confirme bien la volonté américaine de s’y maintenir pendant longtemps. L’objectif est de contrôler les oléoducs et gazoducs qui transitent ou transiteront dans la région ou à proximité, en provenance des rives de la Mer Noire et en direction de l’Adriatique, donc de l’Italie, Etat fondateur de la CEE, pour que gaz et pétrole soient distribués partout dans l’UE. La coopération euro-russe en matière énergétique serait ainsi soumise à une épée de Damoclès permanente. Le Kosovo se trouve légèrement en surplomb par rapport à la vallée de la Morava, entre la ville serbe de Nis et la capitale macédonienne Skopje, à mi-chemin entre Belgrade sur le Danube et Thessalonique sur l’Egée. Les vallées de la Morava (de Skopje à Belgrade) et de l’Axios (de Skopje à Thessalonique) forment donc la voie terrestre la plus courte entre le Danube et l’Egée, donc entre la Méditerranée orientale et l’Europe centrale. Cette zone est donc de la plus haute importance stratégique : une puissance planétaire se doit dès lors de la contrôler pour tenir ses éventuels concurrents en échec. L’enjeu consiste donc à contrôler les oléoducs et les gazoducs et cette ligne Belgrade-Thessalonique, comme le firent les Ottomans dans les siècles passés. Ce n’est pas un hasard s’ils ont évacué cette ligne au tout dernier moment : en 1912 quand ils avaient affaire et aux peuples balkaniques et à l’Italie. Le double contrôle de la ligne des oléoducs et gazoducs et de la ligne Belgrade-Thessalonique : tels sont donc les buts réels. Et c’est justement dans les Balkans, donc en Europe et contre l’Europe, que les Etats-Unis enregistrent aujourd’hui le meilleur succès dans leurs stratégies, avec des alliés musulmans, alors que l’islam combattant est présenté partout ailleurs comme l’ennemi de l’Occident américanisé. Les naïfs, y compris dans certains mouvements identitaires, croient benoîtement, que le Kosovo musulman ne peut en aucun cas être téléguidé par les services américains puisqu’il est tout simplement musulman, donc posé erronément comme allié aux auteurs réels ou présumés des attentats du 11 septembre 2001 à New York. C’est cette fable que croient et ânonnent les canules atlantistes, grand Béotiens en matière d’histoire, laquelle est effacée de leurs têtes, et en géographie, car apparemment aucun d’entre eux n’est capable de déchiffrer une simple carte physique d’école primaire, contrairement à leurs maîtres américains.

Ailleurs, les Etats-Unis ne rencontrent pas le même franc succès. Dans cette Asie centrale que Brzezinski voulait satelliser et ‘tamerlaniser’, Russes et Chinois, qui ont clairement perçu le danger, ont mis sur pied le « Groupe de Shanghai », alternative heureuse au chaos artificiel qu’avaient espéré et programmé les experts du Pentagone. Le « Groupe de Shanghai » est aujourd’hui la principale entrave à l’expansion planétaire des projets de Washington. Il rend caduque la volonté de Brzezinski de plonger cet espace, occupé par les ex-républiques soviétiques à majorité musulmane, dans un chaos à la Tamerlan.

Dans le Caucase, la tentative de former une série de sécessions en chaîne n’a pas entièrement réussi, comme dans les Balkans, même si le problème tchétchène est loin d’être résolu, reste un abcès purulent collé au flanc caucasien de l’espace géopolitique russe. Si le Kosovo se trouve au milieu d’une péninsule située entre l’Adriatique et la Mer Noire, la Tchétchénie se trouve, elle, au milieu d’un large isthme, forcément à double littoral, entre la Mer Noire et la Caspienne, où doivent logiquement passer les oléoducs et gazoducs amenant le brut des gisements de Bakou en Azerbaïdjan et des nouveaux champs de pétrole et de gaz du pourtour de la Caspienne. Le sécessionnisme tchétchène, lit-on dans la presse, a été animé, dès son éclosion, par des nationalistes locaux mais aussi par un djihadiste venu de Jordanie. Pourquoi de Jordanie ? Parce que dans ce pays arabe vit depuis un exode de Tchétchènes, fuyant l’avance des armées russes au 19ième siècle, une forte minorité de ceux-ci, dite « circassienne », ayant conquis bon nombre de postes importants dans l’armée et l’administration du royaume hachémite, ancien satellite britannique. Ce djihadiste arabisé n’a fait qu’un retour au pays de ses aïeux, pour aller y pratiquer les habituelles « guerres de base intensité » ou « stratégies lawrenciennes »   -notamment celle qui a donné naissance au Royaume de Transjordanie-   dans les zones pétrolifères que souhaitent contrôler les « Sept Sœurs », soit les grands consortiums britanniques ou américains des hydocarbures (sur l’apport démographique tchétchène, lire : Yo’av Karny, « De Kaukasus », Uitgeverij Atlas, Amsterdam/Antwerpen, 2003-2005).

En conclusion, les entités étatiques « indépendantes », que veulent imposer à la communauté internationale les puissances thalassocratiques, financières et pétrolières anglo-saxonnes, en pariant sur tribus dissidentes, mafias locales, sécessionnistes douteux, zélotes religieux, etc., ne sont pas acceptables dans la situation actuelle, surtout qu’elles concourent à installer des abcès de fixation musulmans, des enclaves islamisées, au cœur de territoires européens, avec, qui pis est, une dimension mafieuse et narco-trafiquante, pourtant dûment dénoncée par bon nombre d’institutions internationales. Ces enclaves musulmanes ne peuvent qu’aviver ou conforter le « choc des civilisations », annoncé dès 1993 par Samuel Huntington. Comme le soulignait récemment le Dr. Koenraad Elst dans les colonnes de « ‘t Pallieterke », le Kosovo n’est jamais qu’un instrument des Américains, qui, in fine, contrôlent tout le processus indépendantiste, et des Wahhabites saoudiens, qui visent une reconquista de toutes les terres qui furent, à un moment ou un autre de l’histoire, islamisées. Ni l’une ni l’autre de ces options ne vont dans le sens des intérêts de l’Europe.

La première étape d’une révolution métapolitique, qui ouvrirait les yeux des Européens afin qu’ils se rendent compte des manipulations médiatiques orchestrées depuis quantité d’officines d’Outre Atlantique (le « soft power »), serait de se doter d’une élite capable de lire des cartes et d’utiliser des atlas historiques (comme ceux de l’Ecossais Colin McEvedy). Cette lecture de carte, permettant de saisir d’un simple coup d’œil, les dynamiques de l’histoire, toujours récurrentes, a été l’un des objectifs de « Synergies Européennes ». J’invite tout un chacun à poursuivre ce travail, pour donner vigueur à toutes nos initiatives européistes et identitaires.

Robert Steuckers.  

 

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mercredi, 09 avril 2008

USA et Afro-Maghrébins de France

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NOVOPRESS - C’est un fait nouveau, mais d’autant plus inquiétant pour les européens de souche : les Etats-Unis cherchent à former et à tisser des liens avec les “futurs leaders noirs et arabes “en Europe et particulièrement en France. Cette information a été rapportée par le journal Suisse “L’Hebdo” et mis en ligne sur le site très politiquement correct Bondy Blog.

Le gouvernement des Etats-Unis cherche à tisser depuis quelques années des “liens étroits avec les minorités musulmanes en Europe”. (…) Chaque ambassade américaine sur le Vieux Continent compte au moins un collaborateur dévolu à cette mission.“La France, avec un pourcentage de sa population estimée à 10 % de confession qui se déclare musulmane (voire 30 % chez les moins de 15 ans), retient l’attention du département d’Etat de Condoleezza Rice. Le responsable du programme créé en 2005, Dan Fried, directeur des Affaires européennes au Département d’Etat, a profité de la visite de Nicolas Sarközy aux USA en novembre dernier, pour rencontrer une délégation essentiellement composée de maghrébins et de noirs de France à l’ambassade des Etats-Unis à Paris. Parmi les présents, Ali Laïdi, spécialiste du renseignement économique et du terrorisme islamique à l’IRIS (Institut des relations internationales et stratégiques), Saïd Branine, responsable du site Internet musulman oumma.com, Hervé Mbouguen, également animateur d’un site Web, grioo.com, dédié aux Noirs, Fayçal Douhane, du conseil national du Parti socialiste, en charge des questions de diversité et un membre du BondyBlog.

Le but est clair, comme le confie James L. Bullock, ministre conseiller aux Affaires publiques de l’ambassade américaine, “c’est notre intérêt que ça se passe bien ici. Nous voulons aider les Français à trouver une voie paisible pour leurs minorités “. L’ambassade américaine à Paris n’a pas attendu les émeutes de 2005 pour approcher les minorités françaises. Selon le journal suisse l’Hebod,” il y a trois ans et demi, le cap a été mis sur la banlieue, avec l’envie de « comprendre »“. Comme le confirme Laura Berg, attachée culturelle de l’ambassade des Etats-Unis, au journaliste de l’Hebdo, l’ambassade des USA dispose d’un budget annuel pour aider des projets culturels ou sociaux menés dans les banlieues françaises avec la bienveillance du gouvernement français. L’ambassade a ainsi apporté un soutien financier au Festival Blues sur Seine de Mantes-la-Jolie, dans les Yvelines. Laura Berg préfère taire les noms des associations aidées par les Etats-Unis, certaines œuvrant au dialogue judéo-musulman.

L’Amérique ne se contente pas d’aller dans les banlieues françaises. Elle invite aussi des acteurs de la diversité à se rendre chez elle. En trois ans, une cinquantaine d’entre eux, conviés par le Département d’Etat, ont eu droit à cette forme de reconnaissance. Cette année, Fayçal Douhane, Amirouche Laïdi, le président du Club Averroes qui milite pour la diversité dans les médias, et Stéphane Pocrain, ex-porte-parole des Verts, s’y sont rendus. Ali Laïdi, frère d’Amirouche, en revient. En avril 2008, Mohamed Hamidi, du Bondy Blog, et Karim Zéribi, homme politique et responsable associatif de Marseille, y effectueront un voyage de trois semaines. De même que Patrick Lozès, le président du CRAN (Conseil représentatif des associations noires), un groupe de pression mis en relation avec son grand frère américain, le NAACP, grâce aux bons soins de l’ambassade US à Paris.

Cette ouverture vers les futurs leaders africains de la France, du fait de la substitution de population que connait l’Hexagone, est un condensé de la politique américaine : objectifs économiques, protection de ses intérêts et messianisme religieux. Comme le confiera Laura Berg, attachée culturelle de l’ambassade des Etats-Unis, au journaliste suisse de l’Hebdo : “Nous les juifs, dit-elle en parlant aussi de Dan Fried, avons le devoir, durant notre passage sur terre, de rendre le monde meilleur. Il est absurde de penser que les juifs, qui sont eux-mêmes une minorité, veulent écraser les autres minorités. Je suis mariée à un Tunisien musulman. Je crois qu’il y a de l’altruisme dans le gouvernement américain. Mais cela ne veut pas dire que nous prenions toujours les bonnes décisions. En France, nous voulons promouvoir une vision positive de la diversité.”

[cc] Novopress.info, 2006, Dépêches libres de copie et diffusion sous réserve de mention de la source d’origine [http://lyon.novopress.info/]

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mardi, 08 avril 2008

Andreas Mölzer: Keine Gegenseitigkeit !

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Andreas MÖLZER:
Keine Gegenseitigkeit

Hier werden Minaretten gebaut, dort Christen verfolgt

Während die hierzulande lebenden Moslems immer lauter den Bau von Minaretten fordern, werden Christen in der islamischen Welt oftmals als Menschen zweiter Klasse behandelt, wie das Beispiel der Türkei zeigt. So ist den Christen, insbesondere den Katholiken, die Abhaltung von Gottesdiensten nur in Privathäusern oder ehemaligen Industrieanlagen möglich, und immer wieder kommt zu Angriffen auf Geistliche. Doch die Europäische Union, die dieses außereuropäische Land offenbar um jeden Preis aufnehmen will, schweigt zu dieser krassen Mißachtung grundlegender Menschenrechte.

Wenn Ankara in der Frage der freien Religionsausübung ein positives Zeichen will, dann ist Ministerpräsident Erdogan gut beraten, der Bitte des Kölner Kardinals Meisner nachzukommen und den Bau einer Kirche in Tarsus, der Geburtsstadt des Apostels Paulus, zu unterstützen. Daß die Türkei die Errichtung von Kirchen – die nicht notwendigerweise einen Turm haben, aber doch nach außen hin als christliche Gotteshäuser erkennbar sein müssen – zuläßt, ist das mindeste, was von diesem Land zu verlangen ist. Schließlich war die heutige Türkei als Teil des Byzantinischen Reiches rund 1500 Jahre lang christlich gewesen und erst die osmanischen Eroberungen verbreiteten den Islam in Kleinasien.

Ein besonderes Problem bei der Errichtung religiöser Bauten ist die fehlende Gegenseitigkeit in Europa und der islamischen Welt. Während dem politisch korrekten Polit-Establishment die Errichtung von Moscheen mit Minaretten nicht schnell genug gehen kann – schließlich müsse die religiöse und kulturelle Vielfalt ja „im öffentlichen Raum sichtbar werden“ – verhält es sich in den islamisch dominierten Ländern genau umgekehrt. Hier wird der Bau von Kirchen strikt unterbunden, und jene Christen, die sich offen zu ihrer Religion bekennen, sind in vielen Fällen ihres Lebens nicht mehr sicher.

Wenn nun Kardinal Schönborn fragt, wo beim Bau von Minaretten das Problem sei, dann ist ihm als Katholik zu antworten: Das Problem ist die falsch verstandene Toleranz mancher Kirchenfürsten gegenüber dem Islam. Im Gegensatz zu Schönborns Aussagen sind die klaren und mutigen Worte des Vorarlberger Bischofs Elmar Fischer begrüßenswert. Wenn dieser Kirchenmann Moscheen mit Minaretten als Provokation und als krasse Gefährdung des sozialen Friedens bezeichnet, dann ist das ein Zeichen von Weitblick, allzumal die Moslems in Österreich bekanntlich keine autochthone Minderheit sind.

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lundi, 07 avril 2008

Les critiques de Bassam Tibi

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L'Europe sans identité

La critique de la société multiculturelle par le politologue germano-syrien Bassam Tibi

 

Nous avions déjà eu l'occasion de souligner l'excellence des écrits du Prof. Bassam Tibi, sur les affres de la société muticulturelle. A l'occasion de la parution d'une traduction néerlandaise de l'un de ses derniers livres, consacré à la crise de la société multiculturelle, nous soumettons au jugement critique de nos lecteurs cette recension du journaliste flamand Ludo Leen, qui situe parfaitement la personnalité de Bassam Tibi et la thématique de ses ouvrages.

 

«Dans une société multiculturelle, il n'existe plus de valeurs liantes, propres d'une culture-modèle; il n'y a plus que des hommes qui vivent les uns à côté des autres, dans des groupes réduits à eux-mêmes, dans des espaces ré­duits, ce qui revient, en fait, à juxtaposer les ghettos ethniques. Une telle Europe ne serait dès lors plus qu'une simple zone habitée, neutralisée sur le plan axiologique, sans identité propre» (Bassam Tibi).

 

Douter des dogmes imposés par l'église de la multiculturalité n'est pas une démarche de l'esprit exempte de tout danger. Aux Pays-Bas, on a diabolisé Pim Fortuyn pour cela, avant de s'en débarrasser de manière profes­sion­nelle. Quant au Vlaams Blok, pour le même motif, on le traîne devant les tribunaux pour délit d'opinion. Tou­te résistance à l'idéologie multiculturaliste est considérée comme "anti-démocratique" ou comme "raciste", et automatiquement mis en équation avec un appel à l'épuration ethnique ou avec un plaidoyer en faveur d'une Flan­dre monoculturelle, répondant aux canons de la pure "aryanité", peuplée uniquement de grands Germains blonds aux yeux clairs… Cette escroquerie intellectuelle, cette malveillance caricaturale, ont rendu impossible jus­qu'ici tout débat rationnel sur la société multiculturelle. Or c'est justement un débat social ouvert que les tenants du beau monde onirique de la multiculture ne tiennent pas à amorcer.

 

L'intégration est un échec…

 

Jusqu'ici, Bassam Tibi a été un illustre inconnu sous nos cieux, alors qu'en Allemagne il s'est taillé une solide ré­pu­tation grâce à ses articles provocateurs et bien ciselés sur l'islam et l'intégration. Bassam Tibi est un client par­ticulièrement difficile à cerner pour les faiseurs d'opinion, adeptes de la "political correctness", surtout par­ce qu'il sait de quoi il parle. Son argumentation ne peut être balayée comme de "simples propos racistes de bis­trot". Le Prof. Tibi est musulman, il est originaire de Syrie et naturalisé allemand. Ses racines se situent à Da­mas. Dans son livre intitulé "Europa zonder identiteit - De crisis van de multiculturele samenleving" (= "L'Europe sans identité - La crise de la société multiculturelle"), ce politologue germano-syrien donne un formidable coup de pied dans la fourmilière. L'intégration est un échec, dit Tibi. Immédiatement après la seconde guerre mon­diale, seulement un million de musulmans vivaient en Europe. En 1998, il y en avait plus de 15 millions. Ce grou­pe au sein de la population globale va doubler voire tripler au cours de la première décennie du nouveau mil­lénaire: nous ferons face à une poudrière, ajoute-t-il. L'Europe évitera-t-elle un scénario cauchemardesque à la bosniaque? Cela dépend de notre capacité à intégrer les musulmans ou non. Quoi qu'il en soit, les prono­stics n'augurent rien de bon. «La société multiculturelle est loin d'être idyllique et les illusions multicul­tu­ralistes s'évanouissent comme des bulles de savon, dès qu'un problème réel se pose».

 

Du relativisme culturel

 

Bassam Tibi critique sévèrement le "relativisme culturel" qui domine la scène intellectuelle aujourd'hui en Eu­ro­pe, car elle repose sur un aveuglement: celui de croire à l'égalité des hommes et des cultures. L'Europe con­tem­poraine fait comme si ses valeurs démocratiques ne se trouvaient pas loin au-dessus des idées "pré-mo­dernes" des cultures autoritaires. «En se niant elle-même l'Europe en arrive à se haïr elle-même; ce qui doit sus­citer de la pitié, mais qui conduit aussi les autres à la considérer avec mépris et à se détourner d'elle», écrit Ti­bi, qui considère que les tenants de la multiculturalité constituent une "dangereuse combinaison de stupidité et d'ignorance délibérée" et font montre d'un haut degré d'intolérance! Tibi ne cesse, tout au long de ses ou­vra­ges, de critiquer très sévèrement l'idée de tolérance occidentale, qui est une tolérance mal comprise, et qui con­­duit à accepter le voile islamique; celui-ci n'est rien d'autre que le symbole publicitaire d'un islam en mar­che en nos murs; pire, l'Europe accepte que des fondamentalistes algériens, qui ont assassiné des milliers de fem­mes et d'enfants, reçoivent purement et simplement l'asile politique en Occident, où ils peuvent continuer tran­quillement à faire du prosélytisme. Tibi crache tout son mépris à l'endroit de la dictature intellectuelle qu'exerce en Europe la "political correctness", avec "son utilisation inflationniste de concepts dénaturés, hissés au rang de slogans creux, tels 'l'extrême-droite', le 'racisme' et la 'xénophobie' ". Il s'insurge enfin contre les in­ter­dits qu'érigent les intellectuels de gauche, qui font l'opinion. Ce sont eux qui sont les inventeurs du multi­culturalisme.

 

Une idéologie de gauche…

 

Bassam Tibi exprime clairement son rejet des marxistes actuels, avec lesquels il se trouvait sur les barricades en mai 68: «Ces idéologues des années 60, qui rêvent tout haut, qui demeurent étrangers au monde, ont tro­qué leurs slogans utopiques, répétés à satiété, qui nous parlaient d'une société sans classe contre une vision mul­ticulturelle de la société. C'est comme cela qu'ils règlent leurs comptes avec les valeurs occidentales. Leur ré­volution, qu'ils ont tant attendue, et qui devait se diriger contre un système haï, est restée lettre morte, tant ici que dans le tiers monde. Aujourd'hui, nous, les étrangers et les immigrés, devrions devenir leurs com­pli­ces, pour que soient enfin réalisés leurs rêves éthérés et pour que le système, qu'ils abominent, soit ébranlé jus­qu'en ses tréfonds». On comprendra que Bassam Tibi n'est guère apprécié aujourd'hui par ses anciens com­pagnons de combat…

 

Une culture directrice

 

Bassam Tibi présente à l'Europe un miroir et ce qu'il lui fait voir ainsi ne correspond pas à l'image idyllique que véhiculent les médias. Tibi plaide en faveur d'un "euro-islam", qui accepte et respecte l'identité européenne et par­tage les valeurs et les normes occidentales. Il estime que la culture européenne, dans ce processus, doit de­meu­rer la culture directrice, la culture-guide, la culture sur laquelle on s'orientera. Tibi plaide pour un dialo­gue sans tabous. Mais pour en arriver là, il faut du courage politique et il faut "abandonner la censure qu'exer­cent la political correctness et le moralisme trivial et vulgaire, qui en découle, afin de pouvoir résoudre les vé­ri­tables problèmes. Cela signifie surtout qu'il faut appeler un chat un chat". Et Tibi s'y emploie avec une verve in­contestable. Selon lui: «L'intégration n'est possible que si nous enterrons définitivement l'idéologie mul­ti­cul­tu­­raliste». Cette philippique contre le faux idéal d'une société multiculturelle et ce vibrant plaidoyer pour l'i­den­tité européenne nous viennent d'un "allochtone": ce qui en dit long, nous force à agiter nos méninges mais in­dique aussi, espérons-le, que le vent est vraiment en train de tourner… Les droites nationales et populistes trou­veront à coup sûr dans l'œuvre de Bassam Tibi une mine d'arguments; l'auteur est indubitablement un allié féal de ces droites populistes dans leur combat pour la spécificité européenne, pour ses valeurs et ses normes. Nous demandons à tous nos lecteurs de lire attentivement l'œuvre de ce courageux politologue allemand de sou­che syrienne!

 

Ludo LEEN.

(ex : Vlaams Blok Magazine, n°11/novembre 2002; références du livre de Bassam Tibi traduit en néerlandais: TIBI, Bassam, Europa zonder identiteit. De crisis van de multiculturele samenleving, Deltas, 2002, 287 pages, ISBN 90-243753-8X).

 

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mercredi, 02 avril 2008

Réflexions sur le discours d'Erdogan à Cologne

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Rolf KOSIEK :

Réflexions sur le discours d’Erdogan à Cologne

 

Maintenant, la mèche est vendue, les choses sont claires, on sait à quoi s’en tenir. Le dimanche 10 février 2008, le chef actuel du gouvernement turc Recep Tayyip Erdogan tenait un discours à la Salle Arena de Cologne devant 16.000 de ses compatriotes résidant en Allemagne ou dans les pays limitrophes. Textuellement, il a appelé ses auditeurs turcs à ne pas s’assimiler en Allemagne, à ne pas s’adapter au mode de vie allemand et à ne pas devenir citoyens allemands, mais, au contraire, à préserver leur identité turque. Il leur a surtout demandé de conserver leur spécificité culturelle et religieuse. Son discours, sans cesse entrecoupé de vivats tonitruants et d’applaudissements frénétiques, a atteint son apogée quand il a prononcé la phrase suivante : « L’assimilation est un crime contre l’humanité ».

 

Erdogan demande aux Turcs d’Allemagne, qui sont actuellement plus de 2,5 millions, de se maintenir comme une minorité islamique, culturellement isolée, en République Fédérale. En réclamant une telle attitude, il espère, en tant que politicien nationaliste et missionnaire religieux, que ce groupe devienne un jour, à une époque d’ores et déjà prévisible, la majorité dans le pays hôte pour pouvoir déterminer la marche des choses en Europe centrale. Il a demandé instamment à ses compatriotes de ne pas adopter le mode de vie allemand. Ils doivent, précise-t-il, conserver, en tant que groupe fermé sur lui-même, leur spécificité en terre étrangère, y constituer une colonie et subvertir substantiellement le peuple hôte. Lorsque Erdogan accepte le principe d’une intégration, il n’entend pas la dissolution des Turcs au sein du peuple qui les a accueillis, mais, en clair, une simple adaptation, purement extérieure, permettant de maintenir l’identité turque et les liens unissant les immigrés à leur ancienne patrie. Il demande surtout que la religion musulmane demeure intacte. Il faut d’abord qu’une société parallèle turque se constitue en Allemagne.

 

En tant que chef du gouvernement de la République turque et que pieux musulman, il œuvre depuis quelque temps à ramener son pays à un islam rigoureux, histoire de remettre les pendules à l’heure, après un bon siècle de sécularisation selon le modèle occidental. Au début du siècle qui vient de s’écouler, Mustafa Kemal Pacha avait imposé à la Turquie de se tourner vers l’Occident : sur le plan symbolique, il avait interdit le port du voile, mesure qui est rendue caduque aujourd’hui par le gouvernement Erdogan, dans une aire importante de la société turque. En effet, l’interdiction du port du voile dans les universités turques a été levée par le Parlement d’Ankara, où c’est le parti d’Erdogan qui donne le ton.

 

La deuxième étape sera l’islamisation de l’Europe. Les quelques dix millions de musulmans qui vivent aujourd’hui en Europe aideront à parachever ce processus. Ils devront œuvrer comme une avant-garde et remplacer lentement mais sûrement les peuples autochtones. Le recul des naissances, que l’on observe en Europe depuis les années 70, leur facilitera la tâche. Déjà, dans bon nombre d’écoles des grandes villes de la République Fédérale, les musulmans sont majoritaires.

 

Pour réaliser cet objectif, les Turcs qui vivent depuis deux générations en Allemagne et sont largement assimilés, doivent être ramenés à un islam strict. ‘Ceux qui ont depuis longtemps abandonné le voile et qui ont été contaminés, par le truchement de la langue allemande, par l’idéologie occidentale des droits de l’homme’, a déclaré avec force emphase Erdogan, il faut les ramener à la vraie foi et les empêcher de la renier, elle qui a été forgée par Mohammed, car le Coran interdit tout reniement. Ils peuvent certes conserver le passeport allemand comme un second atout mais doivent toujours se sentir liés à leur vieux peuple et à sa culture et ne pas se dissoudre dans la société allemande. Il faut que ces Turcs immigrés en Allemagne renouent avec l’intolérance islamique, rejettent le principe de la liberté d’opinion et de culte, continuent à pratiquer les mariages forcés et l’assassinat d’honneur et ramènent leurs femmes à leur position subalterne et, si possible, étendre ces attitudes dans toute l’Europe.

 

Afin que la minorité turque puisse continuer à exister en tant que groupe fermé sur lui-même, ses ressortissants doivent apprendre la langue allemande de manière satisfaisante. Erdogan a réclamé à Cologne l’introduction d’écoles turques dans la République Fédérale et la constitution d’une université turque. Ces mesures doivent servir à consolider la société parallèle turque d’Allemagne, lui donner la possibilité de mieux fonctionner et d’empêcher toute véritable intégration.

 

En prononçant ce discours, Erdogan a expressément attaqué la politique du gouvernement fédéral dont les buts, clairement exprimés, visent encore et toujours à intégrer au maximum les étrangers vivant sur le territoire allemand. Même si cette intégration a déjà clairement échoué depuis une dizaine d’années surtout par la volonté des Turcs, qui ne veulent pas de cette intégration, les instances de la République Fédérale ne cessent de pratiquer une politique immigrationniste reposant sur cette illusion. Elles ne veulent pas reconnaître que leur programme a été élaboré contre la volonté de ceux à qui il s’adresse, contre la volonté des immigrés, qui s’exprime dans le sens d’un refus depuis de nombreuses années ; raison pour laquelle cette politique immigrationniste est condamnée à l’échec, aujourd’hui comme demain.

 

On ne s’étonnera pas dès lors que tous les partis représentés au Bundestag ont apporté la contradiction à Erdogan, tant il a dénoncé et démasqué leur politique d’intégration, la posant très clairement comme irréaliste. Le Président du Bundestag, Norbert Lammert (CDU), considérait que ce discours était « lamentable sur le plan intellectuel et contre-productif sur le plan politique », qu’Erdogan « s’était, avec beaucoup d’énergie dans l’argumentation, opposé à une exigence que personne ne formule… Je pense que c’est malheureux et dommage ». Angela Merkel a déclaré, avec emphase, qu’elle était aussi la Chancelière des Turcs vivant en Allemagne. Le Président de la faction socialiste (SPD) du Bundestag, Struck, reprochait à Erdogan de favoriser l’éclosion de sociétés parallèles et a qualifié ses paroles de « totalement inacceptables ». Le Président de la fraction de l’Union démocrate-chrétienne (= CDU + CSU), Kauder, déplorait qu’Erdogan considérât ouvertement que les Turcs vivant en République Fédérale et possédant souvent la citoyenneté allemande comme des ressortissants turcs à part entière (cf. Frankfurter Allgemeine Zeitung, 13 février 2008). La chargée d’affaires à la politique d’intégration du gouvernement fédéral, Maria Böhmer, déclare, pour sa part, « avoir été totalement étonnée » du discours d’Erdogan. Elle a dit : « Car ce débat est depuis longtemps derrière nous. Nous voulons intégrer en Allemagne, ce qui signifie que nous voulons une participation de tous, avec l’égalité en droit ». Elle tentait d’attirer le client par des promesses : « Celui qui s’intègre en Allemagne, y gagne quelque chose » (Frankfurter Allgemeine Zeitung, 14 février 2008). Soit dit en passant : elle ne dit pas que ce sont les Allemands qui paieront. Quant au nouveau président de la CSU, Huber, il n’a trouvé qu’une réponse à la proposition d’Erdogan de créer en Allemagne des écoles turques : « C’est un poison pour la politique d’intégration, cela conduit à la formation de ghettos et à l’émergence d’une ‘Petite Turquie’ en Allemagne ». A ce propos, rappelons qu’en Bavière, depuis 1987/1988, existe un « cours d’initiation religieuse pour les écoliers turcs de confession islamique » pour les cinq premières années d’école primaire, cours pour lequel on opte volontairement ; ces cours sont donnés par des enseignants qui, pour la plupart, sont directement originaires de Turquie et prodiguent leurs leçons en langue turque. Il existe donc déjà bel et bien une ‘Petite Turquie’ en Bavière, terre où la CSU de Huber se présente aux électeurs (cf. Frankfurter Allgemeine Zeitung, 14 février 2008).

 

Les politiciens allemands, qui prennent leurs distances avec les dures réalités politiques, ne veulent tout simplement pas admettre ce que veulent vraiment Erdogan et la caste dirigeante turque. Par exemple, il ne leur viendrait jamais à l’idée de parler sur le même ton aux Allemands d’Alsace ou du Tyrol méridional qui, contrairement aux Turcs d’Allemagne, constituent, dans leur pays, la population autochtone, installée là depuis des siècles et formant la majorité. Ceux qui, en dépit de la « political correctness » qui règne en Allemagne, n’oublient quand même pas les réalités ethniques à l’instar de la caste qui donne le ton en République Fédérale, ne « dénieront pas à Erdogan tout droit moral à contester la coercition existante imposée à tous les hommes en République Fédérale de s’assimiler », comme le souligne Patrick Bahner (Frankfurter Allgemeine Zeitung, 14 février 2008). Les recettes allemandes pour l’intégration, replacées à l’avant-plan du débat suite aux déclarations d’Erdogan, conduiraient tout droit à l’égalitarisme de jacobine mouture. On reconnaîtrait encore dans l’avenir comme Turcs ceux d’entre ceux-ci qui parlent parfaitement l’allemand. « Les Turcs sont une nation fière et personne ne doit s’attendre à ce qu’ils troquent cette fierté pour un passeport ».

 

Seuls les Allemands sont suffisamment stupides et dépourvus d’amour-propre pour axer leur politique seulement sur les besoins des étrangers. Ils laissent les Turcs s’emparer ouvertement de terrains en Allemagne depuis de nombreuses années et continuent à promouvoir une politique d’intégration ; de surcroît, ils minimisent la criminalité violente commise par des étrangers sur leur sol. Justement, parlons-en : une semaine exactement avant le discours d’Erdogan à Cologne, le ministre fédéral de l’intérieur, Schäuble, avait facilité l’importation d’époux ou d’épouses en provenance de Turquie (Frankfurter Allgemeine Zeitung, 6 février 2008) et cherché ainsi à ouvrir la porte à une nouvelle vague d’immigration. Qui plus est, toute remarque sévère et critique à l’endroit d’étrangers en Allemagne est qualifiée de xénophobie voir d’incitation à la haine entre peuples et est, subséquemment, poursuivie pénalement et punie de lourdes peines de prison, disproportionnées, tandis que les jeunes Turcs peuvent allègrement scander leurs slogans où il est question de « Scheiss-Deutsche », de « Boches de merde », sans encourir les foudres de la justice. Les manchettes des journaux turcs, publiées à la suite de la catastrophe de Ludwigshafen, où des Turcs avaient péri dans un incendie attribué erronément à des pyromanes racistes, fourmillaient de sous-entendus germanophobes fort explicites.

 

Erdogan avait été annoncé à Cologne comme le « Führer de la Turquie » et, faut-il le dire, a tout de même raison sur bon nombre de points. Quelques jours plus tard, revenu à Ankara, il a confirmé ses propos qui avaient suscité tant d’incompréhension et de désarroi chez les gouvernants allemands. Devant la fraction parlementaire de l’AKP, son parti gouvernemental conservateur islamisant, il a notamment déclaré : « J’ai dit en Allemagne que nous étions contre l’assimilation… Je voudrais répéter une fois de plus ici que l’assimilation est un crime contre l’humanité » (Frankfurter Allgemeine Zeitung, 13 février 2008, page 1). En prononçant ces paroles, en persistant et en signant de cette façon, il a fait ce qu’un citoyen allemand devrait faire en Allemagne, où règne la « political correctness », pour être poursuivi pour racisme et xénophobie. Qui plus est, il a répété la falsification habituelle des Turcs, qui prétendent qu’ils ont contribué substantiellement à la construction de l’Allemagne contemporaine.

 

La grande manifestation turque de Cologne avait été organisée par l’UETD (= « Union der Europäisch-Türkischen Demokraten » ; « Union des Démocrates Turcs d’Europe ») et aurait été pour l’essentiel financée par elle. Cette organisation a été fondée récemment par l’AKP, le parti gouvernemental d’Erdogan, parce que les associations turques qui avaient existé jusqu’ici en Europe sont considérées comme trop peu religieuses ou trop laïques par le nouveau pouvoir à Ankara. La centrale de l’UETD se trouve à Cologne, dans la « Villa Turca » dans le faubourg de Porz. Elle dispose de bureaux dans les principales grandes villes allemandes. C’est par l’intermédiaire de cette association que l’AKP au pouvoir veut désormais influencer les Turcs résidant en Europe et les mobiliser pour réaliser ses projets de politique étrangère sur le long terme. Ce n’est pas un hasard si le Parlement d’Ankara, il y a à peu près quatre semaines, a accordé aux Turcs résidant à l’étranger le droit de vote pour le Parlement turc. Dans l’avenir, nous allons assister en Allemagne aux campagnes électorales turques, selon le ton donné par Erdogan dans son discours de Cologne.

 

Bien qu’Erdogan et ses projets politiques se démarquent considérablement de l’idéologie occidentale, de sa conception de la liberté et de sa vision de l’homme, on continue à soutenir les efforts pour faire entrer la Turquie dans l’UE, d’ici quelques courtes années. Même s’il n’y avait rien d’autre à reprocher aux Turcs, le spectacle donné par Erdogan à Cologne devrait suffire pour guérir les Européens de leurs errements, de l’idée que la Turquie est essentiellement une partie de l’Europe et que son adhésion à l’UE serait une aubaine pour la communauté. Les autorités eurocratiques de Bruxelles feraient bien, à leur tour, de mobiliser leurs énergies pour contrer l’actuel héritier de la puissance islamique dominante, qui, pendant des siècles, a visé la conquête de l’Europe et a fini par être battue, et d’œuvrer à conserver l’identité culturelle de notre continent.

 

De même, il va falloir réaffirmer les intérêts vitaux de l’Europe face aux tentatives actuelles des Etats-Unis d’exciter leurs alliés turcs contre la Russie ou d’autres puissances du Proche Orient et d’essayer à tout prix de les introduire dans l’Union Européenne dans le dessein d’affaiblir politiquement l’Europe. Une telle attitude exige de se défendre énergiquement contre les prétentions croissantes des mouvements islamistes. Le discours d’Erdogan à Cologne a eu au moins le mérite de la clarté, de nous montrer sans ambiguïté la situation telle qu’elle est aujourd’hui, où se situent les clivages, les lignes de fracture. Cela n’a toutefois rien à voir avec l’amitié qu’ont toujours cultivée les Allemands à l’égard des peuples arabes, une amitié qui doit demeurer.

 

Rolf KOSIEK.

(article paru dans « Deutschland in Geschichte und Gegenwart », n°1/2008).

 

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mardi, 01 avril 2008

A. Ivanov: trois Europe, trois pays

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Anatoly IVANOV :

Trois Europe, trois pays

 

Sur plus d’un point, je marque mon accord avec mon ami français Guillaume Faye. Nous avons effectivement besoin d’une utopie positive, d’autant plus que la définition de celle-ci correspond à celle du mythe, telle qu’elle nous a été léguée par Georges Sorel: le mythe est le but des efforts déployés. Le mythe est réalisable mais sa réalisation est difficile et exige beaucoup d’efforts pour arriver au succès dans la lutte, exige aussi le sacrifice de soi mais non pas avec cette joie triste des chrétiens dévorés par les lions, plutôt avec l’extase dionysiaque. Le mythe est une projection du pouvoir, générée par des hommes rares qui forgent une conception de l’avenir. Avant de vouloir, il faut créer un projet, susciter l’émergence d’une vision du monde.

 

Le mythe est donc un bon atout. Les sceptiques nous diront cependant que nos mythes n’inspirent plus que nous-mêmes. Et parmi ces mythes, il y a la conception fausse d’une Europe unie.

 

Il y a un siècle et demi, Nikolaï Danilevski, principal idéologue du slavisme russe, défendait, dans son ouvrage célèbre, « La Russie et l’Europe », une double thèse : Russie et Europe sont deux mondes différents et l’Europe ne connaît pas la Russie, ne peut pas la connaître et ne veut pas la connaître.

 

Sa thèse de la méconnaissance de la Russie par l’Europe reste actuelle. Pavel Toulaev a participé, en novembre l’année dernière (ndt : en 2006), à une conférence internationale à Madrid, d’où il nous a rapporté une affiche titrant « Ellos guian nuestra Europa » (« Ils guident notre Europe »). L’affiche reproduisait en outre trente portraits de penseurs ou d’écrivains : parmi eux, je n’ai trouvé aucun Russe, sans parler des Slaves en général. Conclusion : devons-nous distinguer ainsi LEUR Europe de NOTRE Europe ?

 

La seconde thèse de Nikolaï Danilevski ne correspond pas à la vérité. La présence de délégués européens à notre colloque précédent, et à celui d’aujourd’hui, prouve le contraire. S’ils peuvent et veulent nous connaître ? L’avenir le montrera.

 

Mais l’Europe de Danilevski est, elle aussi, une abstraction. Plekhanov ironisait à ce sujet, en disant qu’il ressemblait au gamin juif d’un récit qui divisait le monde en deux parties : la Russie et l’étranger. Il y a quatre ans, à l’époque où l’Irak était agressé, les Américains, mécontents de la position prise alors par la France et l’Allemagne, ont forgé une nouvelle dichotomie, en opposant les pays dits « énergiques » aux pays dits « passifs », ce qui me rappelle la classification raciale d’un savant allemand, Klemm, qui posait, lui aussi, une dichotomie entre races actives et races passives. Il tenait, bien évidemment dans le contexte de son époque, les Slaves pour les représentants d’une race « passive ».

 

Les considérations des Américains actuels ne sont pas aussi généralisantes : quelques pays slaves ont récolté leurs compliments, surtout la Pologne. Les Américains ont utilisé celle-ci pour enfoncer un coin dans l’Axe Paris-Berlin-Moscou. Il faut dire, avec regret, que cet Axe, en lequel Jean Parvulesco et d’autres ont placé de grandes espérances ne fut qu’une vision éphémère. Le changement de gouvernement en Allemagne l’a brisé et, après l’élection en France du russophobe Sarközy, il ne reste de cet Axe que des débris.

 

Mais il ne faut pas confondre les Etats et les peuples. Charles Maurras, qu’on a parfois appelé le « Marx de la Droite » affirme qu’il n’existe pas seulement un « pays légal », c’est-à-dire un pays officiel, mais aussi un « pays réel », ce que l’on appelle aujourd’hui la « majorité silencieuse ». Maurras a cru que cette majorité silencieuse pensait comme lui, qu’elle était au fond royaliste et catholique. Il s’est trompé : son « pays réel », en effet, était plutôt irréel, imaginé.

 

On peut idéaliser son peuple ; ou, au contraire, on peut désespérer de ses possibilités, de son avenir. Un exemple classique nous en est fournit par la discussion entre Tchernytchevski et Dobrolioubov.

 

Cette discussion nous est livrée par le roman « Le Prologue », où l’auteur s’est représenté, lui et son ami, sous les noms de ‘Volguine’ et ‘Levitski’. Dobrolioubov n’était pas d’accord avec son interlocuteur qui disait : « Le peuple est mauvais et bas dans la même mesure que le monde est beau ». Et Tchernytchevski racontait par dérision que les artisans chantaient, fin saouls : « Nous ne sommes ni voleurs ni brigands, nous sommes ouvriers de Stenka Razine ! ». Mais après le premier cri d’un policier, ces « anciens ouvriers de Razine » se dispersent tout de suite, en remerciant Dieu qu’ils ont rencontré un bon policier.

 

On cite souvent la piètre estime dans laquelle est tenue le peuple russe dans ce roman : « C’est une nation misérable, tous sont des esclaves, du haut en bas ». Comment cette nation, à son avis ‘misérable’ a pu vaincre Napoléon ou, du vivant même de l’auteur, libérer la Bulgarie du joug turc, ce démocrate-révolutionnaire n’a pas pu nous l’expliquer.

 

Nekrassov doutait aussi des capacités du peuple russe :

« Si tu te réveilleras, plein de forces…

Ou si tu as déjà fait tout ce que tu as pu :

As-tu créé une chanson qui ressemble à un gémissement

Pour t’endormir ensuite pour toujours ? ».

 

L’activité politique est sans aucun doute l’indice le plus important pour juger des ressources en énergie d’une nation, mais elle n’est pas le seul indice. Il y en a au moins un autre : c’est la capacité à construire un Etat. Mais un Etat qui ne doit pas se substituer au peuple. L’écrivain français Georges Bernanos écrivait dans son « Journal », au début de la seconde guerre mondiale, encore avant la défaite de la France : « On a volé la France aux Français, depuis qu’on leur a mis dans la tête que la France était uniquement l’œuvre de l’Etat, non la leur ». Et : « On a substitué au sentiment de la patrie la notion juridique de l’Etat ». Et voilà le résultat, ajoutait-il, « les Français n’ont plus de patrie » (cf. « Les enfants humiliés »). Les fruits d’une telle substitution sont toujours d’abord la stagnation, et puis l’effondrement.

 

L’Etat soviétique fut très fort mais tout le monde sait, aujourd’hui, quelle fut sa triste fin. Je note avec inquiétude tous les signes d’engourdissement de notre Etat et j’observe avec envie la vie politique orageuse, tempétueuse, de l’Europe orientale : Pologne, Roumanie, Ukraine. Vraiment, il y a deux Europe. La première est celle des pays où les sentiments nationaux demeurent aigus, où l’énergie non épuisée des peuples trouve à se manifester vers l’extérieur. Et puis, il y a celle où les sentiments sont émoussés, où règne l’apathie, l’indifférence et le je-m’en-fichisme.

 

Alors, et la dichotomie de départ ? Russie et Europe ? Il y a la Russie et les deux Europe. Où la Russie et la troisième Europe, différentes des deux précédentes mais néanmoins aussi l’Europe.

 

Vous dites, chers interlocuteurs, qu’il n’y en a que deux, la Russie et l’Union Européenne ? Mais l’élargissement de l’UE fait de celle-ci une instance de plus en plus instable. Perle parmi les nouvelles acquisitions de l’UE est la Pologne qui, fidèle à ses traditions, utilise son « liberum veto » envers et contre l’avis de toute l’Europe, médusée. Mais quelle raison les Européens ont-ils de s’étonner ? Il faut se souvenir de l’histoire.

 

La Pologne se pose comme obstacle au rapprochement mutuel entre l’UE et la Russie. Mais quelle Pologne : la Pologne légale ou la Pologne réelle ? Nous savons, par exemple, que malgré les affects anti-russes traditionnels des Polonais, plus de la moitié de la population polonaise s’oppose à l’installation des bases militaires américaines sur le territoire de sa patrie. Mais que faire, si ton peuple se tait, s’il est privé de la possibilité d’exprimer son opinion, si les autorités ‘légales’ ne s’intéressent pas à cette opinion, se contentant de ‘sondages’ falsifiés à plaisir ?

 

On peut imaginer que le peuple se tait à l’unisson avec toi, à la Maurras ; on peut désespérer du peuple, à la Tchernytchevski. Mais se dernier ne se perdait pas en conjonctures pour deviner comment se transformerait le peuple, seize ans après sa mort.

 

A part les deux pays de Maurras, le légal et le réel, il y en a encore un troisième, que j’appellerai le ‘peuple potentiel’. Nietzsche le devinait quand il disait : « Aimez le pays de vos enfants ». S. Morozov, dont je cite constamment le livre « La conspiration actuelle contre les peuples de Russie », affirme que nous traversons une période transitoire, où la vieille nation russe n’existe plus et la nouvelle nation n’existe pas encore. Mais l’image de cette nouvelle nation reste vague, y compris pour l’auteur du livre lui-même.

 

L’image de l’Euro-Russie, évoquée dans les milieux amis d’Europe occidentale, est encore plus vague. Gabriele Adinolfi, rédacteur auprès de la revue italienne « Orion », a prononcé un discours très important, qui est publié dans la revue espagnole « Tierra y Pueblo » (septembre 2006). Dans ce discours, Adinolfi exprime sa crainte : « Plus nous sommes immergés dans la réalité, plus nous la reflétons. Plus la sphère de notre imagination est vaste, plus ses contours seront indéfinis et nous ne pourrons les dessiner ». L’hypothèse de l’Euro-Sibérie ne se base, à son avis, que sur un espoir mal fondé. Nos pensées planent dans le domaine de la politique extérieure. Nous transférons nos propres vœux aux pays exotiques, que nous ne connaissons pas pratiquement. Cette Euro-Sibérie désirée, conclut Adinolfi, pourra s’avérer un mirage dans le désert.

 

Je voudrais ajouter une observation, tiré de mon expérience vitale. Quand il pleut, il semble toujours que le trottoir d’en face est plus sec, mais quand on traverse la rue, on s’aperçoit qu’il est mouillé dans la même mesure. Il y a vingt ans, Guillaume Faye plaçait ses espérances dans un réveil de l’Allemagne. En vain. Aujourd’hui, il les place dans une renaissance de la Russie. Et demain ?

 

Les catégories de pensée que sont l’Empire, l’Etat, etc. ne sont pas destinées à nous. Si nous sommes incapables de récolter suffisamment d’argent pour payer un billet d’avion Moscou/Paris ou pour louer une salle, nos affaires sont posément désastreuses. Mais, dans le même temps, nous songeons à construire l’Empire !

 

Gabriele Adinolfi compare notre situation à celle des premiers chrétiens dans l’Empire romain. A mon avis, c’est la seule comparaison adéquate, mais il saute, en la posant, par-dessus une grande étape historique nécessaire, parce qu’il nous parle des chrétiens, qui avaient déjà un canon et des structures bien organisées. Nous, nous n’avons rien.

 

Les chrétiens ne rêvaient pas de l’Empire, au contraire, ils le tenaient pour un ennemi. Ils cherchaient le Royaume de Dieu et on sait que ce Royaume n’est pas d’ici ou de là, il est « dedans de nous », ou, en d’autres mots, « au centre de nous-mêmes ».

 

Il me paraît curieux que Gabriele Adinolfi prêche la même chose. Il croit, par exemple, que le fameux choc des civilisations a lieu au-dedans de nous et que nous devons mettre en ordre notre monde intérieur avant de résoudre les problèmes mondiaux. Il doute ensuite de l’existence réelle d’une communauté spirituelle qui nous serait propre et dont les membres pourraient se référer à un « nous ». Je partage ses doutes, parce que quand on me suggère une ‘synthèse organique’ qui serait un mélange étrange de Gengis Khan et des saints chrétiens, je le dis sans circonlocutions inutiles : je ne ferai jamais partie d’un tel « nous » !

 

Existons-nous ? Non. Pour le moment. Mais je suis convaincu que nous existerons.

 

Anatoly IVANOV.

 

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lundi, 31 mars 2008

A. Mölzer: sur le Kosovo

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Andreas MÖLZER :

Réflexions sur la proclamation unilatérale d’indépendance au Kosovo

Cette manière de procéder  -de proclamer unilatéralement son indépendance-  peut avoir de terribles conséquences pour l’Europe, du moins pour sa portion située entre les Pays Baltes et les Balkans. Si l’on suit cette logique, la plupart des Etats doivent se dissoudre. Pourquoi les Hongrois de Transylvanie ou du sud de la Slovaquie, pourquoi les Russes des Pays Baltes, pourquoi les Allemands de Haute Silésie (actuellement polonaise) devraient-ils renoncer à cette autodétermination que s’accordent les Kosovars ? Vu sous cet angle, nous avons, en reconnaissant le Kosovo, ouvert une véritable boîte de Pandore. Les groupes ethniques, nés au cours de l’histoire, qui se sont développés sur un territoire précis pendant plusieurs siècles successifs, ont bien davantage le droit de revendiquer leur indépendance politique que les Kosovars, qui ne sont jamais qu’une nation d’immigrants.

Vu la nature explosive que revêt l’idée du droit des peuples à l’autodétermination dans ces régions multi-ethniques et bigarrées et vu les conséquences que cela pourrait entraîner, la seule alternative viable aurait été d’européaniser ces territoires. L’imbroglio ethnique et culturel que l’on retrouve en Europe orientale, et surtout dans les Balkans, et qui forme la trame de ces régions, ne peut trouver de solution pacifique que sous un baldaquin supra-national, comme au temps de la monarchie des Habsbourgs. Une perspective européenne pour l’ensemble des Balkans occidentaux serait effectivement une solution envisageable. Lorsque tous les Etats qui ont émergé de l’ancienne Yougoslavie seront devenus membres de l’UE, lorsque les marchandises circuleront librement dans un territoire sans frontières, les conflits de nationalités pourront de fait être définitivement surmontés.

Mais la situation actuelle ne nous permet pas d’être optimistes : les Balkans, semble-t-il, resteront un baril de poudre en Europe, pendant quelques générations encore. La fierté de la nation serbe a été bafouée ; l’orgeuil nationaliste des Albanais a été galvanisé ; les Croates de Bosnie n’ont trouvé aucune solution à leurs problèmes ; plus généralement, ces Etats nés de la dissolution de la Yougoslavie ne sont pas viables économiquement, ce qui rajoute encore de la poudre au baril déjà plein à ras bord.

Les autres Etats européens ne semblent pas réellement conscients de la situation : ils ne suggèrent aucune politique intelligente pour enrayer ce processus calamiteux. Dans le cas du Kosovo, ils ont aggravé la situation en voulant l’améliorer, n’ont pas contribué à apporter une solution durable. Nous réclamons une politique qui aille dans le sens des intérêts de l’Europe toute entière !

Andreas MÖLZER.

(Extrait d’un long article paru dans « zur Zeit », Vienne, n°9/2008 ; trad. fran9. : Robert Steuckers).

 

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dimanche, 30 mars 2008

Du précédent bosniaque à la crise du Kosovo

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Andreas MÖLZER :

Du précédent bosniaque à la crise du Kosovo

A coup sûr, nous pouvons dire que la création de la Bosnie a constitué le premier péché originel de la communauté internationale et de l’Union Européenne. Dans leurs efforts pour imposer le dogme de la viabilité et de l’excellence des entités étatiques multi-ethniques et muti-culturelles, elles ont cru, jusque aujourd’hui, qu’en Bosnie comme au Kosovo elles allaient pouvoir neutraliser les vieilles haines nationales et apaiser définitivement les conflits entre peuples qui en découlaient.

Dans le cas de la Bosnie, elles ont commencé par reconnaître, à côté des habituelles catégories ethniques, des identités religieuses. Serbes et Croates vivent là-bas dans des communautés imbriquées les unes dans les autres sur un même territoire, ce qui rendait la situation déjà extrêmement compliquée. Or, par-dessus cet imbroglio ethnique, les instances internationales n’ont rien trouvé de mieux que d’y superposer un niveau identitaire supplémentaire, d’ordre religieux et culturel, en mettant les Musulmans de Bosnie sur le même pied que les identités serbe et croate : le champ de la problématique en est devenu encore plus complexe. Le Kosovo s’ajoute aujourd’hui à un Etat bosniaque à dominante musulmane sur le sol européen, un Etat kosovar dont l’islam s’est considérablement radicalisé au cours des conflits de ces vingt dernières années. Des influences venues du Proche Orient et l’arrivée de moudjahiddins flanqués d’imams militants ont contribué à rendre fondamentaliste un islam albanais qui s’était fortement laïcisé au fil du temps. On ne s’étonnera pas, dès lors, d’apprendre que la Turquie fut le premier Etat à reconnaître le Kosovo indépendant, en y mettant beaucoup d’emphase.

Conséquence immédiate de la proclamation unilatérale de l’indépendance du Kosovo : les Serbes de Bosnie, ceux de la « Republika srpska », réclament, en même temps que les Serbes du Kosovo, que leurs zones de peuplement soient détachées des nouveaux Etats à dominante musulmane pour être rattachés à la Serbie. Quels arguments la communauté internationale et surtout l’Union Européenne pourraient-elles bien avancer pour rejeter cette requête ? Après qu’elles aient reconnu le Kosovo, mystère et boule de gomme !

Le projet imaginé et mis au point, il y a une bonne décennie, par le chef d’Etat serbe Milosevic et son homologue croate Tudjman, apparaît rétrospectivement bien réaliste, lui qui prévoyait, dans les zones de peuplement où Serbes et Croates vivaient imbriqués, une « épuration ethnique pacifique ». Ce projet rappelait certes les accords entre Hitler et Mussolini pendant la seconde guerre mondiale au Tyrol méridional et dans la zone du « Kanaltal » en Carinthie. Tudjman et Milosevic voulaient « désimbriquer » les zones mixtes de manière pacifique sans tenir compte du facteur islamo-bosniaque et arrondir à terme les territoires de la Croatie et de la Serbie. Mais ce projet n’a pu se réaliser. L’intervention américaine et la volonté de l’UE d’imposer son dogme de l’absolue nécessité d’Etats multi-ethniques s’y sont opposés.

Dorénavant, les frontières d’Etat pourront donc être révisées par des déclarations unilatérales d’indépendance et ces révisions seront automatiquement reconnues par la communauté internationale. Pour les Balkans, il conviendra d’imaginer et d’élaborer des projets viables sur le long terme et réellement générateurs de paix. Dans ce cas, le droit des peuples à la pleine autodétermination devra s’appliquer de manière radicale et complète. Il faudra organiser des referenda et votations populaires, ensuite procéder au détricotage des zones ethniquement bigarrées sur base du droit privé, dans la mesure où il faudra liquider et vendre des biens immeubles et mettre en œuvre le déménagement volontaire des populations qui ne veulent pas vivre sous la domination d’autres ethnies. Dans la logique qui vient de s’imposer, on devra envisager l’émergence d’un Etat pan-albanais, qui regroupera tous les territoires peuplés d’Albanais, c’est-à-dire l’Albanie, le Kosovo et les parties de la Macédoine et de la Bosnie où ils sont majoritaires. Mais ce qui est vrai pour les Albanais, doit être vrai pour les Serbes : ceux-ci doivent recevoir le droit de décider par consultation populaire, dans tous les Etats nés du démantèlement de l’ancienne Yougoslavie, s’ils veulent vivre ensemble dans un grand Etat serbe ou séparés dans plusieurs Etats. Il faudra ensuite vérifier dans quelle mesure les Monténégrins et les Macédoniens constituent ou non de véritables ethnies, avec une langue et une culture particulières, et dans quelle mesure ils sont encore ou non animés par le désir de posséder leur propre Etat.

Andreas MÖLZER.

(extrait d’un article paru dans « zur Zeit », Vienne, n°9/2008 ; trad. franç. : Robert Steuckers).

 

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samedi, 29 mars 2008

Entretien avec S.E. Vladeta Jankovic

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Entretien avec son Excellence Vladeta Jankovic, ambassadeur de Serbie auprès du Saint-Siège

L’ « Indépendance » du Kosovo : une entorse au droit international

Le quotidien romain « Rinascita » a interviewé l’ambassadeur de Serbie auprès du Saint Siège, Vladeta Jankovic. Les journalistes de Rinascita lui ont posé quelques questions sur l’avenir de la Serbie, sur les très prochaines élections politiques et administratives prévues pour le 11 mai 2008 et sur les risques qu’encourt le droit international à la suite de la proclamation unilatérale de l’indépendance du Kosovo par les séparatistes albanais.

Propos recueillis par Andrea PERRONE

Q. : Monsieur Vladeta Jankovic, Voyeslav Kostunica a démissionné de son mandat de premier ministre. La crise de la coalition au pouvoir à Belgrade a été suscitée par les débats sur l’adhésion éventuelle à l’Union Européenne et par la problématique de l’intégrité territoriale de la Serbie. Quelles sont les prévisions pour les prochaines élections ?

VJ : La démission du premier ministre était inévitable. Les divergences de vue entre les différents partenaires de la coalition portaient sur les éléments suivants : une partie du gouvernement, axée autour du Parti Démocratique de Boris Tadic, le Président serbe, était en faveur du processus d’intégration à l’Union Européenne, sans tenir compte du fait que la majeure partie des membres de l’UE avait reconnu la proclamation illégale d’indépendance du Kosovo. Les autres partenaires de la coalition de l’exécutif serbe, comme le Premier ministre, estimaient qu’il fallait geler le processus d’intégration à l’UE afin que les pays membres se déclarent tous en faveur de l’intégrité territoriale de la Serbie, telle qu’elle existait de facto avant la proclamation de l’indépendance kosovare. Ces divergences de vue portaient effectivement sur des éléments substantiels. A partir du moment où il a constaté qu’il ne pouvait plus obtenir l’unanimité, le Premier ministre a demandé au Président, en accord avec les principes de la Constitution, de dissoudre le Parlement et de fixer une date pour de prochaines élections législatives. Celles-ci ont été prévues pour le 11 mai. Le peuple se prononcera : il décidera s’il faut aller de l’avant dans les négociations avec l’Union Européenne, nonobstant le fait qu’une grande partie des Etats européens ait reconnu l’indépendance du Kosovo ou, au contraire, si Belgrade devra concentrer tous ses efforts pour conserver l’intégrité territoriale et la souveraineté de la Serbie, comme le reconnaissent par ailleurs les résolutions des Nations Unies.

Q. : Il y a un mois, Pristina s’est déclarée indépendante de Belgrade. Qu’en pensez-vous ?

VJ : Pour l’essentiel, je retiens qu’il n’y aura pas de différence, quel que soit l’équipe qui sortira victorieuse des élections du 11 mai : tous seront d’accord pour dire que l’indépendance du Kosovo est illégale et que l’idée d’un Etat kosovar indépendant est impensable. La Serbie ne le reconnaîtra jamais. Cependant, il est plus difficile de dire maintenant quelle approche sera la meilleure. Le plus important, c’est que tous les Serbes se mettent d’accord pour refuser l’indépendance du Kosovo. A l’heure actuelle, la majorité des Etats de l’UE a reconnu l’indépendance du Kosovo, ce qui fait 16 Etats sur 27.

Q. : Pensez-vous qu’un gouvernement plus fort, par exemple porté par un tandem Kostunica-Nikolic, aura une approche plus ferme sur la question de la sécession du Kosovo ?

VJ : Il me parait fort difficile de spéculer dès aujourd’hui sur les résultats des prochaines élections. Il me parait cependant impossible qu’un seul parti puisse obtenir d’emblée la majorité absolue, sans avoir besoin de partenaire.

Q. : Avec la sécession du Kosovo, c’est une boîte de Pandore qui s’ouvre…

VJ : C’est prévisible. Et c’était prévisible depuis longtemps. Et, de fait, les Albanais de Macédoine, qui forment 30% de la population macédonienne, cherchent déjà à obtenir davantage de droits pour leur minorité ; ils exigent que la langue albanaise soit reconnue comme langue officielle en Macédoine, que leur drapeau soit hissé sur les bâtiments publics, qu’une amnistie soit décrétée pour tous les Albanais qui ont participé à l’insurrection de 2001 en Macédoine. Ce pays est donc sur la voie de la fédéralisation. La partie albanophone de la Macédoine réclament aujourd’hui cette fédéralisation et finira demain par réclamer une sécession, vu que les Albanais de Macédoine ont déjà reconnu l’indépendance du Kosovo. Nous avons donc une crise sécessionniste en Macédoine et une autre en Géorgie, où les républiques indépendantistes d’Abkhazie et d’Ossétie du Sud veulent s’unir à la Russie. Voilà donc la boîte de Pandore que vous évoquiez dans votre question… De manière analogue, la Transnistrie pourra proclamer son indépendance, de même que le Nagorno-Karabakh, où le processus est déjà à l’œuvre. On peut également prévoir que de telles sécessions auront lieu ailleurs dans le monde. A peu près vingt-six pays ont reconnu l’indépendance du Kosovo, mais d’autres ont refusé de reconnaître cette sécession parce qu’ils craignent qu’ils auront tôt ou tard à affronter un problème similaire à l’intérieur de leurs propres frontières, comme Chypre, la Slovaquie, la Roumanie et l’Espagne. En dehors d’Europe nous avons l’Indonésie et l’Inde en conflit avec le Pakistan pour le Cachemire. L’indépendance du Kosovo a mis en crise l’ensemble du droit international. On remet ainsi en question les décisions des Nations Unies et leurs résolutions. Certains Etats prétendent que le Kosovo est un cas à part, un cas sui generis. C’est faux.

Q. : Pensez-vous que le rôle de Moscou et les futures décisions russes seront vraiment importants pour trouver une solution ?

VJ : Pour ce qui concerne Moscou, la Russie a soutenu la Serbie depuis le début de la crise. Le Kosovo est virtuellement perdu pour la Serbie depuis 1999. La Fédération russe, en 1999, sous Eltsine, était très faible économiquement et politiquement. Depuis lors, tout a changé. La Fédération de Russie est devenue beaucoup plus forte et veut prouver au monde qu’elle peut exercer une réelle influence sur la question. La Russie sous Poutine est en mesure de soutenir la Serbie, de forcer la décision en sa faveur, non pas parce que les Russes sont orthodoxes et slaves mais pour une question de principes, liée au droit international qui a subi une grave entorse à la suite de la proclamation unilatérale de l’indépendance du Kosovo. La Russie est redevenue forte et soutient la Serbie à la tribune des Nations Unies, à l’OSCE et dans toutes les organisations internationales. Mais il n’y a pas que la Russie qui soutient la Serbie au niveau international ; en effet, au Conseil de Sécurité, quinze pays s’affirment en faveur de Belgrade, dont la Russie, bien sûr, mais aussi la Chine, le Vietnam, l’Indonésie, la Libye et l’Afrique du Sud, dont le soutien est ferme, car, en Afrique, les frontières des Etats sont instables, complexes et difficiles à maintenir. Les Américains exercent une forte pression sur la République Tchèque, la Grèce, la Roumanie, mais ces pays continuent à résister car, potentiellement, ils pourraient avoir les mêmes problèmes que la Serbie avec le Kosovo. En outre, rappelons-nous que le monde a une population d’environ six milliards d’âmes et que si l’on additionne les habitants de la Chine, de la Russie, de l’Inde, de l’Indonésie, de l’Afrique du Sud, nous obtenons un chiffre de quelque trois milliards et demi de personnes ; nous pouvons dire alors que la majeure partie de la population de la planète soutient la Serbie.

Q. : Je voudrais vous parler des églises, des monastères et des Serbes du Kosovo ? Quel sera leur avenir ?

VJ : Les monastères et les églises du Kosovo doivent impérativement être placés sous la protection des contingents militaires de l’UNMIK. Les monastères orthodoxes du Kosovo sont d’une valeur culturelle inestimable : ils remontent aux 12ième, 13ième et 14ième siècles. Pour l’heure, ce sont des soldats italiens très courageux qui les défendent : leur attitude est exemplaire malgré le comportement du gouvernement italien et le rappel à Belgrade de notre ambassadeur en Italie. Ces monastères et ces églises, sous la protection des troupes italiennes de l’UNMIK relèvent d’un héritage culturel important pour le monde entier. Ils sont un patrimoine pour l’humanité toute entière et figurent d’ailleurs sur la liste des sites à protéger, dressée par l’UNESCO. Les fresques que l’on trouve dans ces bâtiments historiques sont parmi les plus belles de cet art au monde. On peut comparer leur facture et leur qualité à ce que l’on retrouve dans la cathédrale de Chartres en France.

Q. : Quelle différence y a-t-il entre la mission de l’UNMIK et celle d’EULEX ?

VJ : La mission de l’UNMIK est très importante. La Serbie ne s’oppose nullement à la présence de l’UNMIK parce que celle-ci a été décidée par le Conseil de Sécurité de l’ONU. En revanche, la mission européenne EULEX ne rencontre pas l’approbation de la Serbie, parce qu’elle n’a pas été sanctionnée par une décision des Nations Unies. La différence entre les deux missions est donc de taille. La mission de l’UNMIK découle d’une résolution votée aux Nations Unies et repose sur les principes de l’ONU, voilà pourquoi la Serbie accepte pleinement sa présence sur le territoire serbe.

Q. : Quelle est la position du Saint Siège et du Pape Benoît XVI, alias l’ancien Cardinal Josef Ratzinger, à propos de l’indépendance du Kosovo ?

VJ : La position du Saint Siège repose sur la prudence et la modération. Elle s’est déjà exprimée en diverses occasions et le Saint Père l’a confirmée lors de la présentation de mes lettres de créance, il y a un mois. Le Saint Siège comprend qu’il y a péril pour toute la chrétienté, pour les milliers de réfugiés qui ont dû quitter le Kosovo en 1999 ; le Saint Siège se préoccupe surtout de la défense de la justice et des principes du droit international. La Serbie croit, elle aussi, au droit international, au droit des gens et des Etats. C’est le moment de faire montre de solidarité et de ne plus penser aux divisions au sein de la chrétienté. Les chrétiens doivent défendre les droits et principes culturels des autres peuples. C’est très important pour le Saint Siège, non seulement pour les droits de la Serbie mais aussi pour ceux de tous les autres peuples et, subséquemment, pour la paix dans le monde.

(entretien paru dans « Rinascita », Rome, 20 mars 2008 ; http://www.rinascita.info ; adresse électronique pour toute information : info@rinascita.net ).

 

 

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jeudi, 27 mars 2008

Kosovo: nouveau protectorat américain?

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Safet BABIC :

 

Le Kosovo : nouveau protectorat américain ?

 

Le Kosovo, que les Allemands nomment aussi l’Amselfeld, le « Champ des Merles », est une région au centre de la péninsule balkanique, dont les frontières touchent au sud-ouest l’Albanie, au nord-ouest le Monténégro, au nord et à l’est la Serbie aujourd’hui réduite et, au sud-est, la Macédoine. Après la guerre de 1999, le Kosovo a reçu, par le truchement de la résolution 1244 des Nations Unies, le statut d’un territoire autonome à l’intérieur de la Serbie et a été placé sous l’administration de l’ONU.

 

Les frontières occidentales et méridionales du Kosovo sont constituées de zones montagneuses. Au centre de cette cuvette, nous trouvons deux plaines : celle du Champ des Merles, avec Pristina pour capitale, et la Métochie à l’Ouest, dont le centre est Prizren. Les deux plaines sont séparées par une zone de collines, semi-montragneuse. Le Kosovo, avec ses 10.877 km², a une superficie a peu près égale au tiers de celle de la Belgique. Sa densité démographique de 175 habitants par km² en fait un territoire à la population relativement dense. On estime que la population du Kosovo est d’environ 1,9 million d’habitants. Cette population est très jeune : 33% a moins de quinze ans ; 6% seulement a plus de 65 ans. Entre 350.000 et 400.000 Kosovars vivent à l’étranger, surtout en Allemagne, en Autriche et en Suisse. D’après des estimations récentes de l’OSCE, 91% de la population du Kosovo est albanaise, 5% est serbe et les derniers 4% sont constitués d’autres minorités, surtout des Tziganes et des Turcs. A la suite des élections parlementaires du 17 novembre 2007, que les Serbes ont boycottées, le PDK, ou « Parti Démocratique du Kosovo », formation du chef de l’opposition Hashim Thaçi, est devenu la principale force politique du pays. Une semaine après ces élections, ont commencé les ultimes négociations entre Serbes et Albanais du Kosovo à Baden près de Vienne. Elles se sont terminées le 28 novembre 2007 sans qu’un accord n’ait été conclu. Après cet échec, le Président Sejdiu a exclu toute poursuite des négociations avec la Serbie et a annoncé que la seule alternative serait de proclamer bien vite l’indépendance du Kosovo.

 

C’est ainsi que l’indépendance du Kosovo est devenue une probabilité toujours plus grande, même si la Serbie, et son allié traditionnel, la Russie, ont annoncé que ce ne serait pas sans conséquences. Les Albanais du Kosovo reçoivent le soutien des Etats-Unis et de l’Union Européenne. Même l’ancien ministre allemand des affaires étrangères, l’écologiste Fischer, n’hésite pas à transgresser certaines règles diplomatiques et à propager l’idée d’un Kosovo indépendant. Mais l’histoire nous enseigne toutefois que le Kosovo est le cœur même de la Serbie.

 

Une histoire sanglante

 

Ce n’est pas sans raison qu’un homme politique macédonien, il y a quelques années, qualifiait les Balkans de « débris d’empires ». Longtemps peuplé de populations de souche illyrienne, le Kosovo est devenu la patrie des Serbes, une population slave méridionale. Au départ, le Kosovo a été le centre de la Serbie médiévale. Le biographe de Charlemagne, Eginhard, mentionne déjà la Serbie en 822. L’Albanie n’apparaîtra dans les textes médiévaux qu’en 1272, après qu’elle eût été fondée par Charles d’Anjou. Avant l’occupation ottomane à la suite de la défaite serbe du Champ des Merles en 1389, aucune chronique n’évoque d’Albanais en Serbie. Ce n’est qu’après l’occupation complète de la Serbie par les Turcs musulmans que les Albanais pénètrent dans cette région située au nord de leur zone de peuplement, après avoir adhéré en masse à la religion islamique. Les historiens albanais voient dans les Albanais des descendants des Illyriens, ce qui est cependant contesté. Les Serbes quittent le pays par vagues, ce qui diminue leur pourcentage au sein de la nouvelle population.

 

A la suite des avancées des troupes du Prince Eugène de Savoie-Carignan, qui battent les Turcs, les Serbes se soulèvent au Kosovo et font payer cher aux occupants ottomans les avanies que ceux-ci leur avaient fait subir. La « Grande Migration » de 1690 mena beaucoup de Serbes sur le territoire de l’actuelle Croatie, où les souverains autrichiens les utilisèrent comme paysans-colons et garde-frontières, dotés de privilèges, le long de la frontière militaire austro-ottomane, afin de prévenir et contenir toute nouvelle invasion turque.

 

En 1871, le rapport était de 318.000 Serbes pour 161.000 Albanais au Kosovo. Tandis que la Serbie était devenue complètement indépendante en 1878, la domination turque au Kosovo ne se termina qu’en 1912. Dans les dernières années de l’occupation ottomane, la terreur anti-serbe alla crescendo, tant et si bien que peu avant que n’éclate la première guerre mondiale en 1914, il n’y avait plus que 90.000 Serbes dans la région. Pendant la seconde guerre mondiale, la Kosovo appartenait à l’Albanie qui était protectorat italien. Tandis que les Serbes sont demeurés jusqu’à nos jours assez germanophobes, l’Allemagne était généralement adulée chez les Albanais. Il y eut même une division de Waffen-SS constituée de volontaires albanais (la Division « Skanderbeg »).

 

Après 1945, le chef de la nouvelle Yougoslavie communiste, Tito, interdit aux Serbes de revenir sur le territoire du Kosovo, alors qu’il laissait les frontières entre la Serbie et l’Albanie ouvertes, ce qui entraîna l’immigration de 100.000 Albanais sur le territoire kosovar, sous souveraineté yougoslave. Sous Tito régnait un véritable embargo sur toutes les informations en provenance du Kosovo. Finalement, la minorité serbe subit ouvertement attaque sur attaque, ce qui, d’après des sources américaines, a entraîné l’exode hors du Kosovo de quelque 60.000 Serbes entre 1972 et 1982. En 1974, le régime titiste accorde une autonomie élargie aux Albanais du Kosovo. Cette autonomie fut annulée en 1989 après l’énorme vague d’indignation qui secoua la Yougoslavie après que les Albanais eurent commis des viols en masse et des voies de fait contre des concitoyens non albanais au Kosovo.

 

Dans les années 90, l’UçK se constitue grâce aux appuis que lui procurent les services secrets américains. L’UçK entendait systématiser la terreur pour parvenir à un Kosovo indépendant. L’appareil policier serbe riposta, avec toute la rigueur voulue, en 1999. L’exode des Albanais du Kosovo vers l’Albanie fut le prétexte saisi par l’OTAN pour intervenir militairement contre la Serbie. En Allemagne, le gouvernement rouge-vert de l’époque participa allègrement à cette violation flagrante du droit des gens, déguisée en « action de représailles », alors qu’un pays de l’OTAN comme la Grèce a eu le courage d’exprimer à l’égard de la Serbie sa « solidarité orthodoxe » et de rester neutre. Depuis 1999, 16.000 soldats de la KFOR, sous le commandement de l’OTAN, sont stationnés au Kosovo, dont 3500 militaires de la Bundeswehr allemande. Malgré cette présence, personne ne s’attend à une relance économique de la province, vu le taux de chômage de 70% qui y règne.

 

Aujourd’hui, on parle d’installer au Kosovo un protectorat américain supplémentaire, après que l’expérience bosniaque se soit, elle aussi, avéré un fiasco total. Dans le nouveau cabinet kosovar, on constate, par exemple, que le ministère de l’énergie sera confié à l’économiste Justina Pula-Shikora, qui avait travaillé jusqu’ici à la fameuse Fondation Soros à Pristina. L’Etat du Kosovo ne sera donc jamais qu’une marionnette aux mains de Washington. Pour amadouer le gouvernement de Belgrade, on promet aux Serbes qu’ils pourront adhérer à l’UE. Le contribuable allemand ira bien entendu de sa poche pour financer ce marché de dupes.

 

Un avenir sanglant ?

 

Il serait tout à fait incongru d’appliquer des critères centre-européens dans une région comme les Balkans. Sur le plan historique, le Kosovo a appartenu politiquement, depuis toujours, à la Serbie. Mais la Voïvodine, très fertile sur le plan agricole, appartenait jadis ethniquement à la Hongrie et est aujourd’hui peuplée majoritairement de Serbes. Quant aux Serbes de Bosnie, qui menacent de proclamer leur propre Etat indépendant sur le territoire bosniaque, ils ne sont arrivés là qu’à partir du 16ième siècle. Beaucoup d’entre eux venaient d’ailleurs du Kosovo. Il faut aussi se rappeler qu’une grande partie des 600.000 Serbes qui ont vécu pendant plusieurs siècles en Krajina, un territoire croate, ont quitté la Croatie après l’opération « Tempête » du Général Ante Gotovina en 1995.

 

Le mieux, à l’évidence, est de trouver des solutions pacifiques à cet imbroglio, prévoyant des entités ethniquement homogènes et cohérentes sur le plan territorial. On pourrait éventuellement procéder à des « échanges territoriaux » et à des compensations matérielles. Or ce sont précisément des solutions pacifiques de ce type-là que l’Occident, avec les Etats-Unis en tête, a sans cesse torpillé. Car finalement l’existence d’entités étatiques fragiles sert l’hégémonisme global. Les faiblesses intérieures entraînent la dépendance en politique extérieure. Cette réalité vaut sur le plan de la domination culturelle comme sur celui de la domination économique, ce que démontrent notamment les privatisations au profit de consortiums étrangers en Bosnie et au Kosovo. Ce dernier détient, soulignons-le, les plus grandes ressources en minerais divers d’Europe. Les Balkans ont toujours eu une grande importance géopolitique et, au beau milieu de ceux-ci, le Kosovo réunit à lui seul tous les atouts stratégiques de la péninsule. Il est à la croisée des voies de communications, à cheval sur les lignes de fracture de demain, quand il s’agira de maîtriser les sphères d’influence politiques et les réserves de matières premières.

 

L’offre serbe d’accorder une très large autonomie au Kosovo, d’accepter que se constitue une équipe de football kosovar indépendante et que la province aujourd’hui majoritairement albanophone dispose de représentations diplomatiques a été une offre correcte, une ouverture au dialogue intelligente et posée. Mais les Kosovars, excités par les Américains, ont exigé l’indépendance totale. Même si l’on raisonne en termes d’ethnies, de patries charnelles ou d’appartenance linguistique, on doit alors partir du principe minimal d’une partition possible et nécessaire du Kosovo entre la Serbie et l’Albanie. En effet, au nord de la rivière Ibar, la majorité de la population est serbe. En revanche, si l’on raisonne en termes d’histoire et de culture, cette partition est impensable pour les Serbes car la plupart des monuments religieux et des monastères serbes se situent au-delà de la rive sud de l’Ibar.

 

Si d’aventure le Kosovo devenait définitivement indépendant, les mouvements sécessionnistes auraient le vent en poupe dans le monde entier, ce qui constituerait un désavantage évident pour la Russie, principal adversaire géopolitique des Etats-Unis. La problématique du Kosovo montre, de manière exemplaire, que tout assemblage étatique multiculturel est, à terme, menacé d’éclatement et, qu’en fin de compte, seules les puissances extérieures à l’espace (« raumfremde Mächte ») profitent de leurs tensions intérieures. La protection qu’accordent les Etats-Unis aux Albanais musulmans du Kosovo ne tiendra qu’aussi longtemps que cela conviendra aux intérêts des cénacles dominants de New York et Washington. Si, un jour, les Albanais du Kosovo décidaient de mener leur politique à leur guise, ils devront vite déchanter et il ne leur resterait plus qu’à méditer un adage jadis forgé par Ernst Niekisch : « Celui qui a l’Amérique pour amie, n’a plus besoin d’ennemis ! ».

 

Safet BABIC.

(article paru dans « Deutsche Stimme », février 2008 ; cf. http://www.deutsche-stimme.de ; trad. franç. : Robert Steuckers).

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jeudi, 20 mars 2008

R. Steuckers : inleiding tot spreekbeurt op colloquium v. Eurorus (Dendermonde)

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Robert Steuckers : Geopolitieke implicatie van de conflicten in de Kaukasus en de Balkan

 

Al de conflicten, die voor 1914 ontstonden, werden na de ineenstorting van de Sovjetunie gereactiveerd. Alle mogelijke separatistische pogingen werden cynisch uitgebuit; niet meer door Europese mogendheden maar wel door de Verenigde Staten, die de beroemde Brzezinski-doctrine hebben aangewend; daarmee mikten ze op het fragmenteren van het oude Russische Rijk, van de Oekraïne tot aan de Chinese grens. Voor Brzezinski was het voor Amerika noodzakelijk een permanente chaos langs de vroegere Zijde-Route te creëren. De Verenigde Staten moesten daarbij de Soenni Islam, het Saoedisch-Wahhabitische geld en het Turkse pantoeranisme als instrumenten hanteren. Naast deze zuiver geostrategische wilskracht, die Brzezinski klaar heeft getheoretiseerd en geuit, moet men de eeuwige oliepolitiek van de Verenigde Staten in al onze strategische redeneringen bijvoegen: de conflicten in de Kaukasus, in Tsjetsjenië en in Daghestan, en in de Balkan met Kosovo, zijn ontstaan op de huidige of toekomstige routes van de olie- en gaspijplijnen, die de koolwaterstoffen naar Europa brengen of zullen brengen. Het doel van Washington mikt niet op de bevrijding van onderdrukte volkeren maar op de oprichting van vazalstaten die ter gelegenheid de transit van koolwaterstoffen naar Europa zouden kunnen blokkeren. Tegelijkertijd, willen de Verenigde Staten kleinschalige Staten creëren juist in het midden van landzones tussen hoog strategische zeegebieden, zoals tussen de Adriatische Zee en de Zwarte Zee, en simultaan tussen de grote waterweg Donau en de Egeïsche Zee, wat Kosovo betreft, en tussen de Zwarte Zee en de Kaspische Zee, wat Tsjetsjenië betreft. De grootste gemene deler van deze politiek is de volgende: ieder machtprojectie van Europa te beletten in de richting van de belangrijkste strategische zones van de wereld.

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