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dimanche, 30 mai 2010

Drang nach? La scelta geopolitica di Berlino

Drang nach? La scelta geopolitica di Berlino

di Ernst Sultanov

Fonte: eurasia [scheda fonte]

Tante altre notizie su www.ariannaeditrice.it

 

Drang nach? La scelta geopolitica di Berlino

Il “si” di Berlino al fondo (che ammonta in complessivo a 750 bilioni di Euro) creato per salvare le economie europee è tentativo di guadagnare tempo. Tutti guardano la Germania in quanto paese più forte e più ricco dell’Europa. Però la decisione che verrà presa, pur nascendo nell’ambito economico, avrà impatto fondamentale anche sulla strategia geopolitica del governo federale.

L’elite tedesca ha sostanzialmente due opzioni. La prima prevede come obiettivo la rianimazione di una specie di Sacro Romano Impero Germanico. Cioè Berlino dovrà di nuovo prendere la responsabilità dell’Europa. Questo significherebbe anche che la Germania dovrà prendere le redini del potere che con la fine della seconda guerra mondiale sono sempre state nelle mani francesi.

La seconda può essere definita “Drang nach Osten” in quanto prevede una sorta di espansione “soft” verso l’Oriente o in altri termini rianimazione di vecchia alleanza con la Russia. La logica di questa strategia è molto chiara: c’è perfetta simbiosi geoeconomica che permette di mollare facilmente il fardello “europeo”.  Rispetto alla maggior parte dei paesi europei (puri parassiti dal punto di vista dello scambio commerciale) la Russia produce anche le materie prime, di cui ha bisogno la Germania. A sua volta la Russia è un mercato rilevante per l’industria tedesca. Questo spiega perché il rapporto tra Berlino e Mosca è rimasto stabile nonostante variazioni di governi sia da una che dall’altra parte perfino negli anni più turbolenti. La Germania ha dato il suo appoggio ai progetti di gasdotti lanciati da Mosca e nella stessa Gasprom c’è la partecipazione tedesca.

La difficoltà di portare avanti il progetto di “Pax Germanica” è dovuta a vari fattori, fra questi anche l’eredità del dopoguerra. I tedeschi sono stati considerati e istruiti come i semplici lavoratori che oltre tutto devono  portare la colpa di qunto accaduto sotto il governo di Hitler. Infatti le proteste in Grecia puntavano molto sul parallelo tra la politica del Terzo Reich e l’approccio molto rigido dell’attuale governo della Repubblica Federale. Dietro questa campagna c’è una forte resistenza da parte della Francia che cerca di spiegare la crisi puntando il dito contro gli speculatori – gli autentici colpevoli  della crisi. Intorno a Parigi si sono riuniti gli alleati di nuova “Entente” che già hanno bloccato il modesto tentativo tedesco di mettere in ordine le finanze europee.

Senza superare il Rubicone in una o in altra direzione Berlino rischia di essere trascinata dal degrado dell’attuale UE. Oltre agli “speculatori” esiste problema dei paesi che non producano. Però la tentazione di lasciare le cose come sono è molto forte soprattutto se dietro ci sono gli interessi e le pressioni finanziarie e politiche. La stessa Germania è molto esposta verso il sistema globale: dai fondi pensionistici che investivano in debito greco alla Deutsche bank che dal punto di vista operativo è più rappresentata da New York e Londra che da Francoforte.

L’immobilità di Berlino in questo caso potrebbe essere non solo pericolosa, ma addirittura micidiale. Per sostenere il “welfare europeo” ci vuole molto di più rispetto al risanamento della Germania dell’Est, che è stata già un impresa poco facile. In questo caso la Germania rischia di avere la “lieta” fine dell’URSS che fino all’ultimo stava mantenendo i paesi del “Blocco Socialista” diventati oggi i membri del club europeo.

* Ernst Sultanov è redattore di Eurasia

mercredi, 26 mai 2010

Mettre fin au déclin de l'Europe prendra une génération

Mettre fin au déclin de l’Europe prendra une génération

Ex: http://fortune.fdesouche.com/

Pour comprendre que la prospérité ne viendra pas des plans de relance de l’État mais des entrepreneurs et de leur prise de risque, cela prendra une génération

L’Union européenne dit sauver la Grèce, ou plutôt l’État grec, mais chacun comprend qu’elle sauve ses propres banques. Un mensonge de plus qui renforce la perte de confiance envers les autorités. L’Europe poursuivra son déclin si elle ne change pas complètement d’état d’esprit. «Aujourd’hui, si l’on réinventait l’automobile, elle serait interdite par les autorités parce que quelqu’un montrerait que la voiture peut tuer,» déclarait récemment Jürgen Hambrecht, président du conseil d’administration de BASF, lors de l’ISC Symposium de Saint-Gall. La prise de risque semble interdite en Europe. Pourtant la prospérité ne viendra pas des plans de relance d’États tous plus ou moins gravement endettés ni d’une politique monétaire créatrice de fausses incitations. Mieux vaut replacer l’entrepreneur dans le rôle de pilote, même si cela prendra une génération.

L’OCDE vient en effet de publier une étude fort intéressante * sur les impôts sur les salaires. Ceux-ci englobent les charges patronales et salariales de sécurité sociale et ce que l’on nomme le coin fiscal (tax wedge), c’est-à-dire l’écart entre le coût total de la main-d’œuvre pour l’employeur et ce que le salarié reçoit.

Pourquoi un entrepreneur aurait-il intérêt à investir en Europe si la moitié du coût du travail part en cotisations sociales?

Le pire coin fiscal se trouve en Belgique (55,2%), Hongrie (53,4%), Allemagne (49,2%) et France (49,2%).
La Grèce n’est pas loin (41,5%). Les bons élèves, ceux qui tentent d’attirer l’initiative privée, sont la Nouvelle-Zélande (0,6%), l’Islande (8,6%), le Luxembourg (11,2%), l’Irlande (11,7%).

D’une année à l’autre, la Nouvelle-Zélande fait le plus d’effort en direction des entreprises (–2,66% en un an), devant la Turquie et la Suède. Par contre, le coin fiscal a augmenté en Suisse, ce qui la place parmi les six pays qui partent dans le mauvais sens…

La Nouvelle-Zélande se met donc en évidence. Sa monnaie a gagné 20% contre le franc en un an en vertu des achats étrangers de ses obligations et de nombreuses implantations d’entreprises. La Chine est devenue son deuxième partenaire commercial, derrière l’Australie, dont le premier marché d’exportation est la Chine. L’ascension de l’Empire du Milieu frappe les esprits. Le pays fait maintenant partie du Top 5 des marchés d’exportation de 11 pays contre seulement 2 en 1990.

Ces classements valent plus que n’importe quel discours de Nicolas Sarkozy ou de José Barroso. Ils montrent qu’il y a des pays qui se battent pour attirer les investisseurs et d’autres qui accusent le marché. Pourtant le marché, c’est l’entrepreneur, le consommateur, chaque individu.

L’accélération du transfert de pouvoir vers l’Asie se lit dans une autre étude, effectuée par Goldman Sachs, qui décrit les cinq principaux marchés d’exportations en 1980, 1990, 2000 et 2008. L’Australie exprime à merveille cette redistribution des cartes. En 1980, ses 4 principaux marchés étaient le Japon, les États-Unis, le Royaume-Uni et la Nouvelle-Zélande. En 2008, ils sont remplacés par Japon, la Chine, la Corée et l’Inde. Les Etats-Unis ne sont plus que cinquièmes.

C’est en Europe que l’on observe la plus grande stabilité. L’Allemagne, l’Italie et le Royaume-Uni restent les trois principaux marchés d’exportation de la France. Le Top 5 des partenaires de la Suisse est également stable, à l’exception de l’arrivée en deuxième position des États-Unis.

Mais des modifications sont annoncées. En 2012, la Chine dépassera la France comme premier partenaire commercial de l’Allemagne. La part des exportations allemandes vers les pays du BRIC est d’ailleurs passée de 3,9% à 8,4% en huit ans. Pour Siemens ou BMW, les relations avec la France comptent moins qu’avec les pays du BRIC.

Le dernier classement de la compétitivité des pays réalisé par l’IMD, qui sort ce jour, permettra de suivre l’ascension des pays asiatiques et la position des membres de l’eurozone.

Pour sortir de cette logique du déclin, il ne faut pas demander aux hommes de l’État de rétablir une situation dont ils sont responsables, selon Patrick de Cazenove, secrétaire général du Cercle Bastiat. Mieux vaut rendre aux privés les services qui leur ont été pris et les laisser gérer, suivant ainsi le conseil de Deng Xiaoping: peu importe qu’un chat soit blanc ou noir s’il attrape la souris.

L’effort requis est considérable. La crise de la dette publique traduit, selon le philosophe Anthony de Jasay, un problème de préférence temporelle: les biens futurs ont moins de valeur que les biens actuels. C’est le symptôme de la carte de crédit et de l’«envole-toi maintenant et paie plus tard». L’apparente irresponsabilité des hommes politiques dans la gestion des retraites, des assurances sociales ou des services publics est plus rationnelle qu’il n’y paraît. Leurs promesses dépendent des votes obtenus lors des élections. Ils laissent supposer que leurs réserves financières sont immenses. Plane ainsi l’espoir d’un possible «envole-toi maintenant et ne paie peut-être pas, ou ne paie jamais». C’est parce que le gouvernement peut emprunter sur l’avenir que l’opposition à son programme dépensier ne rencontre guère d’opposition. Dans les démocraties modernes, le déficit est endémique. Les énormes déficits publics des mauvaises années ne font que succéder aux petits déficits des bonnes années. «Quand une société fonctionne avec une carte de crédit collective, il est difficile d’espérer mieux», selon de Jasay.

La crise de l’Europe, comme la crise bancaire, devrait inciter à sortir de ce cercle vicieux et à se sentir chacun responsable de ses décisions. L’exercice n’est pas impossible. D’ailleurs le nombre de pays qui n’ont pas de problème de dette publique n’est-il pas majoritaire?


* Les impôts sur les salaires, OCDE, mai 2010.

Le Temps

samedi, 22 mai 2010

EU verschwendet Geld für politisch korrekte Prestigeprojekte

EU verschwendet Geld für politisch korrekte Prestigeprojekte

Für Rückführungsprogramm für illegale Zuwanderer statt Neuansiedlungsprogramm – Nicht in EU-Flüchtlingsfond investieren, sondern in Familienförderung und Grenzschutz

geldverschwendung_D_716836b.jpgDie Europäische Union werfe Geld für Prestigeprojekte der political correctness zum Fenster hinaus, sagte der freiheitliche Delegationsleiter im Europäischen Parlament, Andreas Mölzer, anläßlich der heutigen Aussprachen im Europaparlament über den Europäischen Flüchtlingsfond und die Einrichtung eines Gemeinsamen Neuansiedlungsprogramms in der EU. „Hier geht es in erster Linie darum, die Massenzuwanderung aus der Dritten Welt nach Europa zu fördern. Diese Pläne sind ein Anschlag auf die historisch gewachsenen Völker Europas“, kritisierte Mölzer.

Anstatt bis zu 6000 Euro pro neuangesiedelter Person zu investieren, könne das Geld, so der freiheitliche EU-Mandatar, weitaus besser angelegt werden. „Mit dem Geld sind die autochthonen Familien zu unterstützen, damit die Geburtenraten wieder steigen. Ebenso hätte das Geld in die EU-Grenzschutzagentur Frontex zu fließen, damit endlich die Außengrenzen der EU wirkungsvoll gesichert werden können. Aber dazu besteht seitens der politisch korrekten EU-Polit-Nomenklatura keinerlei Bereitschaft“, erklärte Mölzer bei seiner Rede vor dem Plenum des Europäischen Parlaments in Straßburg.

Weiters wies der freiheitliche Europa-Abgeordnete darauf hin, daß die EU-Bürokratie weiter aufgebläht werden soll. „Wenn für das Neuansiedlungsprogramm ein eigenes Referat mit einem angemessenen Personalstand geschaffen werden soll, dann bedeutet nichts anderes als eine weitere Belastung der Steuerzahler, ohne daß diese einen Nutzen davon hätten. Und wenn schon ein eigenes Referat ins Leben gerufen werden soll, dann sollte sich dieses um die Ausarbeitung und Umsetzung eines Rückführungsprogramms für die Hunderttausenden von illegalen Zuwanderern kümmern, die heute in der EU leben“, verlangte Mölzer abschließend.

Ex: http://www.andreas-moelzer.at/

mercredi, 19 mai 2010

Entretien avec R. Steuckers sur les événements du Daghestan et les attentats de Moscou

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Archives de SYNERGIES EUROPEENNES - 1999

 

Entretien de Robert Steuckers sur les événements du Daghestan et les attentats de Moscou

 

Propos recueillis par Robert KORTENHORST

 

Robert KORTENHORST : En septembre 1999, de spectaculaires attentats ont frappé la Russie en plein cœur : des immeubles ont volé en éclats, il y a eu des dizaines de morts et des centaines de blessés. Les attentats sont-ils liés, comme on l’a dit, à la rébellion islamiste, partie de la Tchétchénie vers le Daghestan ?

 

Robert STEUCKERS : Je voudrais d’abord rendre un hommage ému à toutes les victimes innocentes de cette abominable tragédie. Ensuite, je veux déplorer ici le manque d’humanité de nos médias qui se disent « humanistes » face à cette abomination. Voilà des victimes du terrorisme aveugle qui ne valent apparemment pas une larme de la part des professionnels de l’indignation. Certes, ces victimes sont russes et européennes, donc elles sont, sans doute, a priori coupables de quelque chose, qu’elles ignorent… On oublie que la révolte islamiste tchétchène n’a pas été spontanée, il y a quelques années, mais qu’elle rencontrait un objectif géopolitique et géo-économique bien clair : contrôler l’acheminement des pétroles et des gaz de la Caspienne qui transitent par des oléoducs traversant cette république autonome non russe de la Fédération de Russie. Les intérêts américains veulent que ces matières premières passent par l'Azerbaïdjan et la Turquie, qu’elles arrivent dans des ports méditerranéens turcs (Ceyhan), afin que les armateurs occidentaux (pour la plupart anglo-saxons) en assurent la répartition dans le monde. Les Etats-Unis ne souhaitent pas que ces pétroles et gaz passent par la Russie, la Mer Noire et arrivent en Europe par le trafic fluvial sur le Danube. Dans ce cas, le commerce international du pétrole leur échapperait complètement à moyen terme. L’allié turc est suffisamment faible sur le plan structurel pour demeurer totalement inféodé aux intérêts américains. Ce n’est pas le cas de la Russie, de la Serbie et de l’Allemagne, puissances en mesure de contrôler le Danube, la Mer Noire, les oléoducs nord-caucasiens et la Caspienne.

 

Quant au Daghestan, c’est un territoire traversé du Sud au Nord par un grand oléoduc qui draine le pétrole vers la Tchétchénie et la côte russe de la Mer Noire via une bifurcation vers l’Ouest, d’une part, vers la Volga qui mène à Moscou et au cœur de la Russie, d’autre part. En lisant la carte, on comprend tout !

 

Ensuite, les conflits de ces récentes années et de ces derniers mois sont étroitement liés, ce que ne nous disent pas les médias aux ordres. Je voudrais rappeler ici :

Que l’Allemagne a réalisé, il y a deux ou trois ans, un très vieux projet qui remonte à Charlemagne. Le système fluvial du Main et du Rhin (donc de la Meuse et de l’Escaut par le biais des Canaux Wilhelmina,  Juliana et Albert) est désormais lié par un canal à très grand gabarit au système danubien. Une voie fluviale très importante, quasi aussi importante que la Méditerranée, traverse tout le continent européen, de la Mer du Nord (Rotterdam) à la Roumanie (Constantza). Pour les Etats-Unis et l’Angleterre, puissances maritimes, c’est un défi considérable, un enjeu vital. A terme, sur le théâtre européen, l’exploitation de ce système fluvial, signifie le ressac inéluctable des armateurs et des flottes commerciales maritimes anglaises et américaines (ou battant pavillons de complaisance, panaméen ou libérien). L’Allemagne est un partenaire de l’OTAN trop important pour qu’on l’attaque de front. Il fallait briser la synergie fluviale ailleurs : la Serbie était le maillon faible, parce qu’on pouvait plus aisément la démoniser. L’objectif principal de la guerre de ce printemps était justement de détruire les ponts du Danube à hauteur de Belgrade et de Novi Sad, ce qui bloque le trafic danubien, en direction de l’Autriche et de l’Allemagne en provenance de la Mer Noire, en direction de l’Ukraine et de la Russie en provenance d’Europe centrale. Au sein des Balkans, la Croatie est également perdante, puisque ses fleuves (la Drave et la Save) sont des affluents du Danube, de même que la Grèce, qui reçoit bon nombre de biens d’importation via le Danube et les voies routières et ferroviaires Belgrade-Salonique. Toute l’Europe est victime de la Guerre du Kosovo : je veux dire l’Europe honnête qui travaille et produit, l’Europe des bons pères de famille qui élèvent leurs enfants et veulent leur donner un avenir, pas l’Europe des manipulateurs médiatiques, des mafieux imbriqués dans les processus de décision politique, des dirigeants falots et irresponsables qui la dirigent, des faux intellectuels qui s’érigent en professeurs de morale, mais accordent un blanc-seing à des crimes aussi abominables que ceux qui viennent d’être perpétrés à Moscou.

 

Les guerres entre l’Azerbaïdjan et l’Arménie, la guerre de Tchétchénie et du Daghestan, la guerre du Kosovo et la problématique kurde en Turquie orientale sont étroitement liées. On peut dire sans grande exagération que c’est une troisième guerre mondiale. La révolte islamique tchétchéno-daghestanaise est un prétexte pseudo-religieux et pseudo-nationaliste : l’enjeu, c’est le pétrole de la Caspienne.

 

RK : Doit-on craindre des attentats en Belgique comme à Moscou ?

 

RS : Pas directement. Car l’armée belge n’est nullement en mesure d’intervenir sur la route du pétrole, à l’instar de l’armée russe. Cependant, l’arme du terrorisme aveugle peut être utilisée pour faire fléchir toute puissance européenne qui se mettrait à ruer dans les brancards. Rappelons tout de même les attentats du GIA dans les métros parisiens, il y a quelques années. Ensuite, chez nous, à Bruxelles, peu avant l’arrestation du Kurde Öçalan, Saint-Josse et Schaerbeek ont été le théâtre d’une véritable guérilla urbaine, où des nuées de jeunes Turcs, souvent mineurs d’âge, ont saccagé et incendié des immeubles appartenant aux communautés kurde et araméenne (cette dernière, chrétienne-orthodoxe de rite particulier, est étrangère à la question kurde mais coupable de ne pas accepter la terreur de l’Etat kémaliste turc !). La presse, même celle du régime laxiste et multiculturaliste, a souligné que cette émeute ultra-violente a été téléguidée par certains services de l’ambassade, avec la présence d’une équipe de télévision turque qui filmait avec complaisance l’œuvre des terroristes en herbe de nos vieux quartiers bruxellois. Cette émeute est un acte de guerre, sans déclaration préalable, sur notre sol national ! Je reste pantois devant l’inertie de notre gouvernement : pas de renvoi immédiat de l’ambassadeur de Turquie, pas de rappel de notre propre ambassadeur, pas de veto à l’OTAN, pas d’exigence formelle de payer et de réparer tous les dégâts commis et de dédommager les victimes belges et étrangères, pas d’excuses exigées du gouvernement turc, pas de sanctions contre les émeutiers, pas de dissolution des associations responsables de ce « dérapage contrôlé », pas de plainte du « Centre d’Egalité des Chances » contre le racisme anti-kurde (les Kurdes sont des Mèdes indo-européens et ne sont pas de souche turque) et anti-araméen (les Araméens sont des Sémites chrétiens et ne sont pas davantage de souche turque).

 

En théorie, à Bruxelles comme à Moscou ou à Paris, les attentats terroristes contre des objectifs civils sont désormais possibles. On sait que l’armée française tente d’organiser une riposte (isolement des quartiers d’émeutiers en coupant l’eau, le gaz et l’électricité, opération conjointes de blindés et d’hélicoptères, etc.). La Suisse prévoit également des mesures, comme vient de le dire le Général Peter Regli, chef de l’UNA, les services de renseignements militaires helvétiques (cf. Thurgauer Zeitung, 2 juin 1999). Je ne crois pas que des mesures préventives aient été prises chez nous… Malgré la présence de sites stratégiques importants dans les quartiers dangereux : Gares du Midi (avec le terminal des TGV et Eurostar), du Nord et de Schaerbeek. Jupiter rend aveugles ceux qu’il veut perdre…

 

samedi, 15 mai 2010

Les défaites du projet euratlantique

Les défaites du projet euratlantique

Jean-Michel Vernochet* (juin 2008)

Ex: http://www.geopolintel.fr/

otan_ou_europe.jpgAlors que le sort de la ratification du Traité de Lisbonne se joue le 12 juin en Irlande à l’occasion d’une consultation référendaire, le Président américain, sous couvert d’une visite d’adieu en Europe, s’est employé ces derniers jours à « faire avancer le dossier iranien » en Europe… Autrement dit et en clair, M. Bush, en fin de parcours, s’est essayé à « vendre la guerre » à ses satellites du Vieux Continent, de Ljubljana à Belfast via Berlin, Rome, Paris, Londres…

Est-ce tout à fait un hasard d’ailleurs si c’est à Belfast que s’achèvera la tournée européenne du président américain ? Que motive cet intérêt pour la verte Erin ? Bien sûr Belfast n’est pas Dublin, mais que l’on se rassure : si d’aventure les Irlandais se montrent réticents à s’engouffrer dans la construction européenne telle qu’imposée par les oligarchies européistes (une construction qui n’est pas autre chose que le mince cache-sexe d’une fusion euratlantique à venir), le dérisoire obstacle d’un vote négatif irlandais serait aussitôt contourné… Si cela est craint, ce n’en est pas moins une sérieuse hypothèse de travail et un obstacle a priori surmonté … Il en va ainsi de la volonté populaire dont il n’est tenu compte que lorsqu’elle ne se cabre pas, c’est-à-dire lorsqu’elle coïncide exactement avec les desiderata et les agendas des nomenklaturas néo-libérales. Une telle visite du maître américain - sur le départ certes, mais en gardant à l’esprit que ce ne sont pas les hommes s’agitant sur la scène médiatique qui décident des politiques, surtout aux É-U où les mêmes intérêts, les mêmes groupes de pression, continueront d’être actif après le départ de leur catastrophique homme de paille – ne doit cependant pas être interprétée trop vite comme l’une des dernières pirouettes d’un pouvoir déliquescent… Car le destin des peuples se joue et se noue dans la coulisse. Pendant que leurs médias nationaux distraient l’attention des Français avec des fadaises style « mariage cassé pour non-virginité de l’épouse », le rouleau compresseur des grands desseins géostratégiques continue de progresser sous nos yeux, mais sans que la foule des anonymes, le vulgum pecus, la masse ignorante, vous et moi, n’en puissent avoir la moindre idée…

Par exemple the Greater Middle East Initiative, le « Projet Grand Orient » de l’Atlantique à l’Indus, dont « l’Union pour la Méditerranée » n’est à l’évidence qu’un sous-ensemble… Qui en parle vraiment ? Qui en explique les tenants et aboutissants ?

Or, l’intégration de l’espace maritime méditerranéen qui nous concerne au premier chef, est déjà largement engagé grâce à un maillage sécuritaire serré par la VIe Flotte américaine et au moyen d’accords stratégiques croisés passés entre la plupart des États arabes riverains de la Méditerranée, la Turquie et Israël dans le cadre du dispositif Otan Active Endeavour qui se met en place en octobre 2001 et du Dialogue méditerranéen – on appréciera la dénomination de « Dialogue » pour des partenariats en matière de sécurité ! - instauré ou encore depuis 1995, par le truchement de l’UE, à travers le Processus de Barcelone. Accessoirement, on mesurera à l’aune de cette réalité diplomatique et sécuritaire Otan-UE-Maghreb-Machrek, les réticences affichées à participer à Paris le 13 juillet au lancement officiel de l’Union pour la Méditerranée aux côtés de M. Olmert, Premier Ministre israélien, notamment de la part de MM. Bouteflika et Khadafi dont la collaboration avec l’État hébreu s’est singulièrement accrue depuis 2006 - voir la dernière sortie de M. Khadafi - lorsqu’on sait qu’Algérie et Libye ont, sous l’égide de l’Otan, participé du 8 au 22 avril de cette année, et aux côtés des bâtiments de guerre de la VIe Flotte, à l’opération Phoenix Express 2008…

Ainsi l’unification sous la houlette de l’Amérique-monde, de l’espace euroméditerranéen, puis par la suite sans doute eurafricain – un autre projet de la Présidence française - sont des constructions ou des utopies dont les conséquences prévisibles ne sont guère enthousiasmantes pour personne : ni pour les Européens ni pour les Africains du nord et du Sud… Il est clair que l’Union pour la Méditerranée viendrait marcher sur les brisées d’organisations du Sud telles la Ligue arabe ou l’Union africaine, ce dont M. Khadafi semble en effet avoir pris une conscience tardive et quelque peu tartuffesque, le 10 juin lors d’un sommet arabe restreint à Tripoli ! Le cheval renâcle devant l’obstacle… Reste donc à savoir si l’UPM est un projet mort-né ?

Il faudrait ajouter que bien peu ne semblent avoir trouvé étrange que M. Sarkozy, dès les premiers jours de son mandat présidentiel, se soit précipité pour mettre en branle, cela sans aucune apparence de nécessité prioritaire, les projets Euromed et Eurafrique (ce dernier, pour l’heure, mis en attente), alors même qu’en matière de consolidation européenne proprement dite (sécurité intérieure et extérieure, sécurité énergétique, sanitaire et alimentaire) tout restait encore à faire ! Une Europe précisément sans Défense au moment où les tensions avec la République islamique d’Iran se ravivent et alors que les armées des états membres de l’UE ont été dissoutes ou réduites a quia, c’est-à-dire sans autre défense pour le présent que celle de l’Organisation du Pacte atlantique, l’Otan, sous haut commandement américain… Faut-il une autre preuve de la vassalisation, voire de la servitude, d’une Europe combattant aujourd’hui en Afghanistan au service de Washington dans un conflit à l’issue et à l’intérêt plus que douteux ?

Last but not least, quatre jour après la ratification irlandaise, le 12 juin - si importante pour M. Bush - doit intervenir un autre fait d’une importance capitale et qui éclaire l’ensemble des grandes manœuvres dont la zone Europe-Méditerranée est actuellement le théâtre : le 16 juin à Luxembourg, conseil des ministres des affaires étrangères des Vingt-Sept devrait entériner un partenariat avancé avec Israël. Cela signifie une intégration quasi complète au sein du marché unique, dans les institutions européennes avec la participation des ministres israéliens dans les conseils européens et d’experts dans tous les programmes et groupes de travail, « ce qui équivaudrait à conférer à l’Etat juif un statut de quasi-membre de l’UE » comme le soulignait le monde dans son édition du 7 juin.

La chose s’est préparé dans le silence feutré des chancelleries car apparemment rien n’avait filtré dans la grande presse – les archives du quotidien Le Monde sont muettes en 2007 sur cette question - histoire de mettre l’opinion devant le fait accompli. Nous avons ici une preuve supplémentaire que les vraies décisions, celles qui engagent le destin des nations ne sont pas connues du public, qu’elles sont soigneusement tues… Comme fut caché, dès l’origine, au début des années 40, les finalités réelles de la construction européenne… des objectifs pas très éloignés de ceux qui président aujourd’hui à la Greater Middle East Initiative : démembrer des États souverains et créer des entités fédérales sur des bases communautaristes… un prolongement et une amélioration substantielles de l’accord secret Sykes-Picot passé le 16 mai 1916 entre la France, la Grande-Bretagne et la Russie, lequel organisait le partage des dépouilles de l’Empire ottoman... Est-ce la aussi pure coïncidence si la tournée de M. Bush a démarré par la Slovénie là où justement, en avril dernier, se tint la commission chargée de finaliser cette discrète entrée de l’État hébreu dans la communauté des Vingt Sept ? On comprend mieux alors la hâte de M. Sarkozy à réaliser cette Union pour la Méditerranée si l’on considère avec un peu de recul, et dans son ensemble, l’échiquier géostratégique proche-oriental…

Au final, ce ne sont vraisemblablement pas les objurgations du Premier ministre palestinien, M.Salam Fayyad, par lesquelles il tente de détourner ses homologues européens d’une telle décision lourde conséquence puisqu’à travers elle l’Union deviendra partie prenante des conflits présents et à venir de l’une région les plus chaude, politiquement et militairement parlant, de la planète. Très modéré parce que tributaire de l’aide Européenne, le Premier ministre palestinien demande qu’au moins cette entrée soit soumise à condition, à savoir « qu’Israël se conforme aux lois internationales et aux droits de l’homme, y compris par le gel de la colonisation »… En vérité l’intégration à marche forcée de l’espace géopolitique euroméditerranéen qui s’opère en ce moment même sous nos yeux, rien ne semblant devoir l’arrêter, se fera par conséquent au nez et à la barbe de tous, Européens et Musulmans qui n’en pourront mais !

Source : Arab Commission for Human Rights

*Jean Michel Vernochet est essayiste, journaliste et géopolitologue

jeudi, 13 mai 2010

La Grèceest victime d'une guerre menée par les Anglo-Saxons

«La Grèce est victime d'une guerre menée par les Anglo-Saxons»

Ex: http://fortune.fdesouche.com/

Evidemment, tous les pessimistes finissent un jour par avoir raison : une catastrophe survient qui fait triompher leur mauvais augure. Mais Franck Biancheri a annoncé la crise déclenchée par les subprimes plus de deux ans avant qu’elle n’arrive, les désordres sociaux qui en sont nés (manifestations telles qu’on en voit en Grèce, Bossnapping [séquestration de patrons]) plusieurs mois avant qu’ils ne se réalisent.

Ambrose Evans-Pritchard, dans le «Daily Telegraph» du 13 décembre 2009

On accorde donc de plus en plus de crédit à ses analyses, et on le taxe de moins en moins de paranoïa. Aujourd’hui, son LEAP (Laboratoire européen d’anticipation politique) met en garde contre les bombes à retardement que sont l’Angleterre et les USA.

La Grèce est au plus mal et vous, vous vous focalisez sur le Royaume-Uni…

La Grèce ne pouvait plus continuer ainsi, c’est évident, et ce qui lui arrive maintenant sera à terme salutaire pour le pays. Mais tout le monde le savait depuis longtemps, et ses chiffres ne sont pas si désastreux. Il faut donc se demander «pourquoi maintenant» ? Tout a, en fait, commencé par une série d’articles en début d’année, publiée dans le Financial Times, la voix de la City, qui soulignait les problèmes du pays, laminait et laminait en parlant du danger que représentait sa situation économique. Il y a eu un travail de sape de longue haleine, qui a évidemment poussé les autres médias à couvrir ce thème. La crise de la Grèce est avant tout née d’une guerre psychologique : c’est une crise de confiance, une prophétie auto-accomplie.

Pourquoi le Royaume-Uni s’amuserait-il à faire cela ?

Parce que, suite à la crise, les Etats sont en situation de guerre économique. En Suisse, vous avez été les premiers à en prendre conscience, puisque les Britanniques et les Américains s’en sont pris à votre place financière très vite et très violemment, pour protéger et avantager les leurs. Les Européens commencent tout juste à comprendre ce qui leur arrive.

La Suisse était en concurrence directe avec ces deux pays, mais pourquoi s’en prendre à la Grèce ?

Ce n’est pas la Grèce qui est visée, mais la zone euro et sa monnaie. La Grèce est une cible facile parce que son économie n’est pas très importante – elle n’a donc pas les mêmes moyens pour se défendre que l’Allemagne ou la France. Couler l’euro, c’est intéressant pour la livre et le dollar. Créer cette diversion, c’est aussi un moyen de cacher ses problèmes.

C’est-à-dire ?

Le Royaume-Uni et les Etats-Unis sont dans une situation d’endettement privé et public insoutenable. Or, il y a actuellement trop de pays qui veulent se financer – d’ici décembre, il va falloir trouver entre 150 et 200 milliards d’euros – et pas assez d’argent à disposition. Ça ne va donc pas être simple pour les Anglo-Saxons. D’autant plus qu’une partie des emprunts arrive à maturité pour les Etats-Unis, qui vont devoir les refinancer. Dans ce contexte de forte concurrence, vous avez tout intérêt à apparaître comme un bon candidat, et à couler les autres candidats.

Vous pensez que d’autres pays, l’Espagne ou le Portugal par exemple, risquent d’être touchés ?

Ce qui a permis aux agences de notation de changer la note de la dette grecque, est la découverte que certains chiffres étaient faux – c’est certes un prétexte, mais dans le cas des deux pays que vous citez, elles auront de la peine à en trouver un. Je crois d’autant moins à une contamination que ces pays ne sont pas des gros opérateurs dans l’économie européenne. Zapatero a eu raison de s’énerver, parce qu’il n’y a aucune raison de retirer sa confiance à l’Espagne.

Vous dites que cet épisode aura des conséquences positives. Lesquelles ?

Pour la Grèce, ce sera l’occasion de moderniser son économie et d’entrer dans le XXIème siècle. Les Européens, eux, ont compris depuis un mois que la grande amitié occidentale est un mythe – les USA et le Royaume-Uni ne sont clairement pas dans le même camp. Cet épisode aura aussi fait apparaître la nécessité d’une véritable gouvernance économique au niveau européen, qui puisse prendre des mesures contraignantes – on est enfin en train de prendre la bonne direction, après les tergiversations de l’Allemagne. Enfin, les gens sont de plus en plus critiques face aux conseils des agences de notation, et des thermomètres que les Anglo-Saxons ont imposés à tous les pays pour mesurer la santé de leur économie. Ils reconnaissent leur partialité.

La prochaine catastrophe, c’est quoi ?

Le Royaume-Uni. Ce qui va se passer prochainement dans ce pays, en termes de révélations sur la réalité économique, va définitivement ouvrir les yeux des Européens. Des chiffres commencent à sortir dans la presse. Le Guardian a, par exemple, titré le 5 mai sur le fait que le déficit budgétaire du Royaume-Uni risque bien d’être plus élevé encore que celui de la Grèce, comparativement à leurs PIB respectifs. Les gens ne sont pas idiots : ils savent que si le pays a des soucis, c’est que sa place financière a de plus gros soucis…

Le Matin

mercredi, 05 mai 2010

Le partenariat russo-serbe dans les Balkans

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Bernhard TOMASCHITZ:

Le partenariat russo-serbe dans les Balkans

 

Le partenariat historique entre la Russie et la Serbie vit un renouveau depuis quelques années. Moscou était aux côtés de Belgrade lorsqu’il a fallu se battre contre l’indépendance du Kosovo, voulue par les Etats-Unis. Le puissant allié de Belgrade étend également son bras protecteur sur les Serbes de Bosnie qui se défendent contre le centralisme que veut imposer l’Etat de Bosnie-Herzégovine, ce qui aurait pour conséquence de mettre un terme à la large autonomie dont bénéficie la “Republika Srpska”. “Les citoyens de Bosnie-Herzégovine doivent décider eux-mêmes de leur avenir; par conséquent, on peut réinterpréter les accords de Dayton sur base d’un accord entre la Republika Srpska et la Fédération musulmane-croate, ainsi qu’entre elles et toutes les autres minorités ethnique qui y vivent”, a déclaré en novembre 2009 Vitali Tchourkine, ambassadeur russe auprès de l’ONU.

 

Le soutien russe à la Serbie ne signifie pas la résurrection pure et simple de l’alliance historique entre les deux peuples: derrière ce soutien, se profilent des considérations stratégiques objectives. Ce sont elles qui donnent le ton. Après que tous les nouveaux Etats issus de la dislocation de la Yougoslavie soient devenus ou adhérents de l’OTAN ou sont en passe d’entrer au sein du Pacte nord-atlantique, au vif déplaisir de Moscou, la Serbie reste le seul Etat dans les Balkans qui ne s’est pas soumis à l’hégémonisme américain. “La Russie, à cause de l’extension des zones d’influence américaines, court le danger d’être progressivement exclue du Sud-Est de l’Europe. Les Etats-Unis ont, depuis la fin de la guerre froide et dans le sillage des conflits en ex-Yougoslavie, largement étendu leur présence politique dans les Balkans occidentaux et, par le biais de l’OTAN ou d’alliances bilatérales en matière de sécurité, bétonné leur prééminence géostratégique dans la région”: telle est l’analyse de Dusan Reljic de l’institut berlinois “Stiftung Wissenschaft und Politik”. Depuis que la Russie est sortie de l’ère des faiblesses que fut l’époque d’Eltsine dans les années 90 et qu’elle a retrouvé une conscience politique bien profilée et la fait valoir en politique étrangère, elle s’oppose tout naturellement aux tentatives américaines d’asseoir l’hégémonie des Etats-Unis dans les Balkans.

 

Cela explique aussi pourquoi Moscou, par exemple, s’oppose à la politique de faire de la Bosnie-Herzégovine un Etat centralisé, politique préconisée par les Etats-Unis et l’Union Européenne. Dans le cas d’un régime centralisateur, la République serbe de Bosnie, qui s’oppose à toute adhésion à l’OTAN, perdrait son droit de veto. La Russie cherche donc à façonner à son avantage le cours politique dans les Balkans via la Serbie et les Serbes ethniques. Belgrade cependant est quasiment contrainte d’accepter le partenariat. Car sans l’aide de la Russie, qui possède un droit de veto au Conseil de Sécurité de l’ONU, la Serbie se retrouverait seule et isolée, livrée sans la moindre protection aux appétits de Washington et ne pourrait pas faire valoir ses intérêts nationaux légitimes, surtout quand il s’agira demain d’empêcher la sécession définitive du Kosovo.

 

Les efforts du Kremlin, qui tente de lier fermement la Serbie à lui, gènent et agaçent les Etats-Unis, puissance étrangère à l’espace européen qui cherche à placer les Balkans tout entiers sous son contrôle. Pour arrimer définitivement le plus grand et le plus peuplé des Etats ex-yougoslaves aux “structures euro-atlantiques”, on fait miroiter à la Serbie l’adhésion à l’Union Européenne que réclame effectivement Belgrade. Au printemps 2009, le secrétaire général de l’OTAN à l’époque, Jaap de Hoop Scheffer, avait déclaré que c’était devenu “pratique courante” de coupler l’adhésion à l’UE à l’adhésion à l’OTAN. Peu auparavant, l’ambassadeur russe en Serbie, Alexandre Konunzine, avait rappelé à Belgrade sa neutralité militaire officielle. Seule la Russie pouvait être pour la Serbie un “partenaire stratégique” et non le contraire, fit savoir un diplomate.

 

L’idée d’adhérer à l’OTAN, le pacte militaire dominé par les Etats-Unis, n’est guère populaire en Serbie. Les souvenirs de la guerre menée par l’OTAN contre la Serbie en 1999 sont encore trop douloureux; officiellement, cette guerre d’agression avait eu pour but de protéger les Albanais du Kosovo. Cette guerre, gérée en dépit des principes du droit des gens car elle avait été déclenchée sans l’approbation préalable du Conseil de Sécurité de l’ONU, avait coûté la vie à près de 3000 Serbes, dont beaucoup de civils. Ensuite, parce que des usines chimiques avaient été bombardées, l’environnement avait été considérablement pollué. En mai 2009, lors d’un sondage du “Centre pour les élections libres et la démocratie” (Belgrade), 39% des personnes interrogées se déclaraient en faveur d’une adhésion à l’UE mais seulement 16% en faveur d’une adhésion simultanée à l’OTAN et à l’UE. Toutefois, au cours des années écoulées, l’engouement partiel des Serbes pour l’UE s’est atténué. Pourquoi? A cause de l’attitude partisane de l’eurocratie bruxelloise dans la question du Kosovo et à cause des conditions jugées très “dures” qu’impose cette eurocratie aux Serbes pour qu’ils puissent se rapprocher de l’Union. Ces attitudes ont laissé des traces, ont provoqué amertume et suspicion; c’est pourquoi l’ “option russe” n’a pas été abandonnée. En octobre 2008, le ministre serbe de la défense nationale, Dragan Sutanovac, avait déclaré au quotidien français “Le Figaro”: “Si l’UE ne nous ouvre pas les portes.... nous trouverons  d’autres solutions avec la Russie”.

 

Sans que l’Occident ne semble s’en être aperçu, Moscou, au cours de ces dernières années, a travaillé inlassablement, en étant bien conscient de ses priorités et de ses objectifs, pour devenir, pour la Serbie et les autres pays de la région, un partenaire économique incontournable. Dans le déploiement de cette stratégie, les consortiums pétroliers Lukoil et Gazprom ont joué un rôle de premier plan. Si les choses se déroulent selon les voeux de Moscou, l’importance de la Serbie croîtra encore. En effet, l’embranchement septentrional du gazoduc “South Stream” amènera du gaz naturel russe vers l’Europe centrale en passant notamment par des territoires serbes. Parmi les effets positifs pour Belgrade, il y a, bien sûr, le gain de prestige politique mais aussi l’opportunité de lever des taxes de transit pour ce gaz naturel, ce qui constituera une nouvelle source de revenus pour le pays.

 

Bernard  TOMASCHITZ.

(article paru dans “zur Zeit”, Vienne, n°16/2010; trad. franç.: Robert Steuckers). 

 

L'ombre de la CIA sur Kiev

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SYNERGIES EUROPEENNES – BRUXELLES / ROME – décembre 2004

 

 

L’ombre de la CIA sur Kiev

 

Les Fondations Soros et Ford, la Freedom House et la CIA financent les “révolutions démocratiques” dans le monde

 

Le sort de la “révolution orange” en Ukraine, Monsieur James Woolsey y tient. Il ne peut en être autrement, puisqu’il est le directeur de la “Freedom House”, une organisation non gouvernementale américaine qui possède des sièges à Washington, New York, Budapest, Bucarest, Belgrade, Kiev et Varsovie. Elle se définit comme “une voix claire et forte qui veut la démocratie et la liberté pour le monde” et qui s’active “pour promouvoir les valeurs démocratiques et pour s’opposer aux dictatures”. Ce Monsieur James Woolsey dirige une brochette de politiciens, d’universitaires, d’industriels et d’intellectuels “transversaux”. Ce Monsieur James Woolsey a été, il y a quelques années, en 1995, le directeur de la CIA avant de s’occuper à “exporter la démocratie et la liberté dans le monde”. Grâce aux efforts d’innombrables activistes, issus de la “Freedom House”, et grâce à l’assistance économique, si charitable, d’autres organismes, comme ceux, bien connus, que sont les Fondations Soros et Ford, ce Monsieur James Woolsey  —dont les “honnêtes activités” s’étendent maintenant sur plus de soixante années—  peut désormais concentrer ses efforts dans “la lutte pour la liberté”, dans des pays meurtris et abrutis par une quelconque mélasse dictatoriale. Le palmarès de Woolsey et de ses amis est impressionnant : ils ont soutenu le “Plan Marshall” en Europe, favorisé la création de l’OTAN dans les années 40 et 50, multiplié leurs activités au Vietnam  pendant et après la guerre menée par ce peuple contre les Américains; ils ont financé Solidarnosc en Pologne et l’opposition “démocratique” aux Philippines dans les années 80.

 

Ce sont là les activités les plus médiatisées de cette “bonne” ONG et c’est sans compter les actions de “vigoureuse opposition aux dictatures” en Amérique centrale, au Chili, en Afrique du Sud ou durant le “Printemps de Prague”. Elle a aussi favorisé l’opposition à la présence soviétique en Afghanistan. Elle a excité les conflits inter-ethniques en Bosnie et au Rwanda. Elle s’est opposée à la “violation des droits de l’homme” à Cuba, au Myanmar, en Chine et en Irak. Elle s’est ensuite montrée hyper-active dans l’exportation de la “démocratie et de la liberté” dans les républiques de l’ex-URSS et dans l’ex-Yougoslavie post-titiste. C’est précisément dans cette ex-Yougoslavie, où le “mal” était personnifié par le Président Slobodan Milosevic, que notre ONG a peaufiné ses stratégies d’intervention, afin de les exporter ensuite en d’autres contrées, où le contexte est plus ou moins analogue. Notre bon Monsieur Woolsey a donc accueilli au sein de son organisation Stanko Lazendic et Aleksandar Maric, deux activistes serbes, peu connus de nos médias, mais qui ont joué un rôle-clef dans la chute de Milosevic. Ces deux personnages figurent parmi les fondateurs du mouvement étudiant “Optor” (= “Résistance”), aujourd’hui dissous, mais absorbé par le “Centre pour la révolution non violente” de Belgrade. Peu de temps avant la chute de Milosevic, le 5 octobre 2000, les militants d’Optor ont été invités en Hongrie, dans les salons de l’Hôtel Hilton de Budapest, où un certain Monsieur Robert Helvy leur a prodigué des cours intensifs sur les méthodes du combat non violent. Ce Monsieur Robert Helvy est un colonel à la retraite de l’armée américaine, vétéran du Vietnam. Robert Helvy a admis, face à la presse étrangère, avoir été, en son temps, engagé par l’Institut International Républicain, l’IRI, basé à Washington, afin de former les jeunes cadres militants d’Optor. Stanko Lazendic a révélé que le colonel était présent lors des séminaires : “Mais quand nous sommes allés là-bas, jamais nous n’avions pensé qu’il pouvait travailler pour la CIA. Ce qu’il a enseigné, nous l’avons appris d’autres personnes”.

 

Aujourd’hui, les méthodes qui ont été enseignées au tandem “Lazendic & Maric” pour le compte de la “Freedom House” sont en train d’être appliquées en Ukraine. Elles consistent à “exporter le Verbe démocratique” de maison en maison, d’université en université, de place publique en place publique. Un travail analogue s’effectue en Biélorussie, mais, dans ce pays, la mayonnaise ne semble pas prendre. En Ukraine, en revanche, les deux Serbes sont particulièrement actifs dans la formation et l’encadrement des militants et des cadres du mouvement “Pora” (= “C’est l’heure”), qui est inféodé à Iouchtchenko et a reçu la bénédiction de Madeleine Albright et de Richard Holbrooke, les deux stratèges de l’exportation de la “démocratie atlantiste”. La CIA, entre-temps, aide la “révolution orange” en marche depuis 2002 déjà, dès qu’elle a libéré 50.000 dollars pour créer la plate-forme internet de l’ONG qui s’oppose au duumvirat Kouchma-Yanoukovitch. Ensuite, elle a libéré 150.000 dollars pour créer un groupe de pression à l’intérieur du Parlement. Et encore 400.000 autres dollars pour former des candidats aux élections locales et des cadres syndicaux. Cette stratégie ressemble très fort à celle qui vient d’être appliquée en Géorgie, lors de la “révolution des roses”, où Washington à soutenu Saakashvili. Maric est arrivé mardi 30 novembre à l’aéroport de Kiev, sans donner d’explication quant à sa présence dans la capitale ukrainienne. Lazendic vient de confirmer, dans un interview, “que son compagnon n’avait pas été autorisé à entrer sur le territoire ukrainien”, “tant que ses papiers ne seraient pas tous en ordre”. La carrière ukrainienne de ce Monsieur Maric a donc été interrompue, en dépit de sa grande expérience de commis voyageur à la solde de Washington en Géorgie et en Biélorussie. Lazendic, lui, se vante d’avoir “fait des séjours démocratiques” en Bosnie et en Ukraine. Le mouvement “Pora”, “actif dans la diffusion des valeurs démocratiques et dans l’opposition aux dictatures”, est désormais privé des lumières du sieur Maric. Mais que l’on soit sans crainte, les “démocrates” peuvent toujours envoyer leur contribution financière au “mouvement orange”, via un compte de la “JP Morgan Bank” de Brooklyn, New York.

 

Siro ASINELLI,

Article paru dans “Rinascita”, Rome, 2 décembre 2004.

jeudi, 25 mars 2010

Schweizer Armee bereitet sich auf innere Unruhen in der Europäischen Union vor

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Abwehr von Flüchtlingströmen: Schweizer Armee bereitet sich auf innere Unruhen in der Europäischen Union vor

Udo Ulfkotte / http://info.kopp-verlag.de/

In der ruhigen Schweiz herrscht derzeit innenpolitische Unruhe. Die Sicherheitspolitische Kommission (SiK) des in Bern ansässigen Schweizer Nationalrats ist von der Schweizer Armeeführung über erwartete mögliche innere Unruhen und Flüchtlingstrecks in der Europäischen Union unterrichtet worden. Die Zukunft der EU sieht demnach völlig anders aus, als es Politiker behaupten …

»Auch in Europa können Situationen entstehen, die wir uns heute gar nicht vorstellen können.« Das hat der Schweizer Armeechef André Blattmann bei einer vertraulichen Darstellung der sich abzeichnenden Lage der Europäischen Union in der Sicherheitskommission (SiK) des Schweizer Nationalrates in Bern gesagt. Demnach könnten in den kommenden Monaten neben Griechenland auch in Spanien, Frankreich, Italien und Portugal immer neue schwere innere Unruhen ausbrechen. Die Folge? Die Armeen der anderen europäischen Staaten müssen sich auf Kampfeinsätze vorbereiten, auch in der Schweiz. Denn entstehende Flüchtlingsströme könnten zur Abwehr auch einen Schweizer Armeeeinsatz notwendig werden lassen. Bürger aus Ländern mit einer schwierigen finanziellen Lage könnten massenhaft in die Schweiz einwandern. Armeechef Blattmann sagt wörtlich: »Auch große Migrationsströme könnten einen Einsatz nötig machen. Denken Sie nur an die wirtschaftliche Situation in Griechenland: Plötzlich steht in einem EU-Land der Staat vor dem Bankrott!«

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Dienstag, 16.03.2010

Kategorie: Allgemeines, Geostrategie, Enthüllungen, Wirtschaft & Finanzen, Politik

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samedi, 20 mars 2010

L'ombre de la CIA sur Kiev

Archives de SYNERGIES EUROPEENNES - 2004

Siro ASINELLI:
L’ombre de la CIA sur Kiev

Les Fondations Soros et Ford, la Freedom House et la CIA financent les “révolutions démocratiques” dans le monde

or1.jpgLe sort de la “révolution orange” en Ukraine, Monsieur James Woolsey y tient. Il ne peut en être autrement, puisqu’il est le directeur de la “Freedom House”, une organisation non gouvernementale américaine qui possède des sièges à Washington, New York, Budapest, Bucarest, Belgrade, Kiev et Varsovie. Elle se définit comme “une voix claire et forte qui veut la démocratie et la liberté pour le monde” et qui s’active “pour promouvoir les valeurs démocratiques et pour s’opposer aux dictatures”. Ce Monsieur James Woolsey dirige une brochette de politiciens, d’universitaires, d’industriels et d’intellectuels “transversaux”. Ce Monsieur James Woolsey a été, il y a quelques années, en 1995, le directeur de la CIA avant de s’occuper à “exporter la démocratie et la liberté dans le monde”. Grâce aux efforts d’innombrables activistes, issus de la “Freedom House”, et grâce à l’assistance économique, si charitable, d’autres organismes, comme ceux, bien connus, que sont les Fondations Soros et Ford, ce Monsieur James Woolsey  —dont les “honnêtes activités” s’étendent maintenant sur plus de soixante années—  peut désormais concentrer ses efforts dans “la lutte pour la liberté”, dans des pays meurtris et abrutis par une quelconque mélasse dictatoriale. Le palmarès de Woolsey et de ses amis est impressionnant : ils ont soutenu le “Plan Marshall” en Europe, favorisé la création de l’OTAN dans les années 40 et 50, multiplié leurs activités au Vietnam  pendant et après la guerre menée par ce peuple contre les Américains; ils ont financé Solidarnosc en Pologne et l’opposition “démocratique” aux Philippines dans les années 80.

Ce sont là les activités les plus médiatisées de cette “bonne” ONG et c’est sans compter les actions de “vigoureuse opposition aux dictatures” en Amérique centrale, au Chili, en Afrique du Sud ou durant le “Printemps de Prague”. Elle a aussi favorisé l’opposition à la présence soviétique en Afghanistan. Elle a excité les conflits inter-ethniques en Bosnie et au Rwanda. Elle s’est opposée à la “violation des droits de l’homme” à Cuba, au Myanmar, en Chine et en Irak. Elle s’est ensuite montrée hyper-active dans l’exportation de la “démocratie et de la liberté” dans les républiques de l’ex-URSS et dans l’ex-Yougoslavie post-titiste. C’est précisément dans cette ex-Yougoslavie, où le “mal” était personnifié par le Président Slobodan Milosevic, que notre ONG a peaufiné ses stratégies d’intervention, afin de les exporter ensuite en d’autres contrées, où le contexte est plus ou moins analogue. Notre bon Monsieur Woolsey a donc accueilli au sein de son organisation Stanko Lazendic et Aleksandar Maric, deux activistes serbes, peu connus de nos médias, mais qui ont joué un rôle-clef dans la chute de Milosevic. Ces deux personnages figurent parmi les fondateurs du mouvement étudiant “Optor” (= “Résistance”), aujourd’hui dissous, mais absorbé par le “Centre pour la révolution non violente” de Belgrade. Peu de temps avant la chute de Milosevic, le 5 octobre 2000, les militants d’Optor ont été invités en Hongrie, dans les salons de l’Hôtel Hilton de Budapest, où un certain Monsieur Robert Helvy leur a prodigué des cours intensifs sur les méthodes du combat non violent. Ce Monsieur Robert Helvy est un colonel à la retraite de l’armée américaine, vétéran du Vietnam. Robert Helvy a admis, face à la presse étrangère, avoir été, en son temps, engagé par l’Institut International Républicain, l’IRI, basé à Washington, afin de former les jeunes cadres militants d’Optor. Stanko Lazendic a révélé que le colonel était présent lors des séminaires : “Mais quand nous sommes allés là-bas, jamais nous n’avions pensé qu’il pouvait travailler pour la CIA. Ce qu’il a enseigné, nous l’avons appris d’autres personnes”.

Aujourd’hui, les méthodes qui ont été enseignées au tandem “Lazendic & Maric” pour le compte de la “Freedom House” sont en train d’être appliquées en Ukraine. Elles consistent à “exporter le Verbe démocratique” de maison en maison, d’université en université, de place publique en place publique. Un travail analogue s’effectue en Biélorussie, mais, dans ce pays, la mayonnaise ne semble pas prendre. En Ukraine, en revanche, les deux Serbes sont particulièrement actifs dans la formation et l’encadrement des militants et des cadres du mouvement “Pora” (= “C’est l’heure”), qui est inféodé à Iouchtchenko et a reçu la bénédiction de Madeleine Albright et de Richard Holbrooke, les deux stratèges de l’exportation de la “démocratie atlantiste”. La CIA, entre-temps, aide la “révolution orange” en marche depuis 2002 déjà, dès qu’elle a libéré 50.000 dollars pour créer la plate-forme internet de l’ONG qui s’oppose au duumvirat Kouchma-Yanoukovitch. Ensuite, elle a libéré 150.000 dollars pour créer un groupe de pression à l’intérieur du Parlement. Et encore 400.000 autres dollars pour former des candidats aux élections locales et des cadres syndicaux. Cette stratégie ressemble très fort à celle qui vient d’être appliquée en Géorgie, lors de la “révolution des roses”, où Washington à soutenu Saakashvili. Maric est arrivé mardi 30 novembre à l’aéroport de Kiev, sans donner d’explication quant à sa présence dans la capitale ukrainienne. Lazendic vient de confirmer, dans un interview, “que son compagnon n’avait pas été autorisé à entrer sur le territoire ukrainien”, “tant que ses papiers ne seraient pas tous en ordre”. La carrière ukrainienne de ce Monsieur Maric a donc été interrompue, en dépit de sa grande expérience de commis voyageur à la solde de Washington en Géorgie et en Biélorussie. Lazendic, lui, se vante d’avoir “fait des séjours démocratiques” en Bosnie et en Ukraine. Le mouvement “Pora”, “actif dans la diffusion des valeurs démocratiques et dans l’opposition aux dictatures”, est désormais privé des lumières du sieur Maric. Mais que l’on soit sans crainte, les “démocrates” peuvent toujours envoyer leur contribution financière au “mouvement orange”, via un compte de la “JP Morgan Bank” de Brooklyn, New York.

Siro ASINELLI,
Article paru dans “Rinascita”, Rome, 2 décembre 2004.

vendredi, 19 mars 2010

Altbundeskanzler H. Schmidt vergleicht Obama mit Hitler

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Altbundeskanzler Helmut Schmidt vergleicht Obama mit Hitler

Gerhard Wisnewski / http://info.kopp-verlag.de/

»Beckmann« am 22. Februar 2010: War da was? Eigentlich nicht. Vielleicht bis auf die Kleinigkeit, dass Altbundeskanzler Helmut Schmidt den US-Präsidenten Barack Obama in eine Reihe mit Hitler und Stalin stellte. Skandal? Aufschrei? Nicht doch. Stattdessen eisernes Schweigen. Das Zentralorgan »Spiegel Online« erklärte auch warum: Der darf das!

Man schrieb den 22. Februar 2010. In der Talksendung Beckmann saßen dem Moderator zwei Talkgäste gegenüber. Ein weißhaariger, qualmender Helmut Schmidt im Rollstuhl und der jüdische Historiker Fritz Stern. Beide sollen an diesem Abend von Beckmann ordentlich Publicitiy für ihr politisch korrektes Gesprächsbuch Unser Jahrhundert bekommen. Doch dann wird es plötzlich alles andere als politisch korrekt.

»Es gibt eine Regel bei Diskussionen über aktuelle Themen: die sich jeder Teilnehmer merken sollte«, schrieb einmal der jüdische Journalist Henryk M. Broder: »Wer zuerst Hitler, Nazis, Drittes Reich sagt, hat die Arschkarte gezogen. So einer ist entweder NS-Sympathisant oder – noch schlimmer – er missachtet das 11. Gebot: Du sollst nicht vergleichen!«

Nur ganz besondere Persönlichkeiten können sich über dieses 11. Gebot hinwegsetzen, ja, eigentlich gibt es nur einen Deutschen, bei dem man sich das vorstellen kann. Und das ist der quasi unantastbare Altbundeskanzler Helmut Schmidt, der nun auch noch mit seinem jüdischen Freund im Studio saß.

Was Helmut Schmidt »an der Redeart von Barack Obama« nicht gefalle, wollte Gastgeber Reinhold Beckmann (ARD) wissen.

Darauf Schmidt: »Ich habe nichts gegen die Art der Rede. Aber ich habe erlebt, dass Charismatiker hinterher mehr Unheil gestiftet haben, als sie sich selber vorgestellt haben. Immerhin – Adolf Hitler war auch ein Charismatiker.«

Pause. Beckmann und Stern hat es die Sprache verschlagen. Im Studio und in Millionen von Wohnzimmern konnte man eine Stecknadel fallen hören. Stalin und Mao Tse-Tung seien auch Charismatiker gewesen, sagte Schmidt in die Stille hinein, was die Sache nicht besser, sondern nur noch »schlimmer« machte.

Nur, um das einmal festzuhalten: Der ehemalige und wahrscheinlich beste Bundeskanzler, den Deutschland je hatte (was eine relative Wertung ist, keine absolute), stellte den amerikanischen Präsidenten Obama in eine Reihe mit Massenmördern, die Abermillionen von Menschen auf dem Gewissen haben. Und das sollte man nie vergessen – denn eines ist sicher: unüberlegt oder zufällig hat Helmut Schmidt das bestimmt nicht getan.

Daher lautete die spannende Frage: Wie würden Politik und unsere »Qualitätsmedien« reagieren? Antwort: Man erlebte den Versuch, ein aufflackerndes Feuer durch Brennstoffmangel auszuhungern. Aber eine Sendung, die von Millionen Zuschauern gesehen wurde, kann man doch nicht totschweigen! Oh, doch. Man mag es nicht glauben, aber selbst vor einem Millionenpublikum ausgebreitete Skandale und Sensationen kann man ungeschehen machen, indem man sie einfach nicht wahrnimmt und nicht über sie berichtet.

Nehmen wir an, jemand würde einen riesigen Felsbrocken ins Wasser werfen, und auf dem Wasser würden sich nicht die kleinsten Wellen bilden – wäre das nicht der beste Beweis, dass mit diesem Wasser etwas nicht stimmen kann?

lundi, 15 mars 2010

Faut-il se garder d'une "russophilie" excessive?

omon.jpgFAUT-IL SE GARDER D’UNE « RUSSOPHILIE » EXCESSIVE ?

 

Entretien avec Pascal LASSALLE

 

Pascal LASSALLE est historien, professeur et conférencier. Il a fait ses classes militantes au sein des réseaux de la « Nouvelle Culture » (G.R.E.C.E, Synergies Européennes, Terre et Peuple), et reste plus que jamais attaché à la promotion d’une Europe-puissance souchée sur ses patries charnelles.

Il s’intéresse depuis quelques années aux problématiques est-européennes, en particulier celles qui concernent la Russie et son « étranger proche ».

Il est déjà intervenu à plusieurs reprises dans le cadre du G.R.E.C.E , Terre et Peuple (Tables rondes de 1999 et 2006, bannières locales), du cercle Sainte Geneviève ainsi que sur les ondes de Radio Courtoisie et Radio Bandiera Nera.

Il a dirigé les adaptations françaises des ouvrages de Gabriele Adinolfi, Noi Terza Posizione  (Nos belles années de plomb, l’Aencre, 2004) et Tortuga, l’isola che (non) c’è. (Pensées corsaires, abécédaire de lutte et de victoire, Editions du Lore, 2008) et collabore occasionnellement au mensuel le Choc du mois, à l’agence d’informations Novopress et au site d’analyses et de débats métapolitiques Europe maxima.

 

 

 

ID Mag: L’opposition grandissante de la Russie rénovée à la toute puissance américaine, associée à la personnalité « volontariste et patriote » de Vladimir Poutine, engendre un très vif engouement des milieux nationalistes et identitaires pour la patrie des Tsars et son actuel gouvernement. De votre côté, tout en soulignant les forces et les réalisations de la Russie nouvelle, vous mettez en garde contre un soutien systématique et sans nuance à toutes les prises de positions russes et une vision étroitement et uniquement  « géopolitique » de nos relations avec « l’empire de l’Est ». Pouvez-vous préciser et expliciter votre position ?

 

 

PL : Je suis depuis plus d’une vingtaine d’années partisan pour des raisons géopolitiques et civilisationnelles d’une synergie continentale euro-russe qu’un Guillaume Faye a pu qualifier d’ eurosibérienne . Depuis la prise de pouvoir par Vladimir Vladimirovitch Poutine, j’observe l’œuvre de redressement et de restauration en cours avec beaucoup d’intérêt, dans un premier temps assez captivé par la figure de cet Octave/Auguste de l’Est ou plutôt ce nouveau Mikhaïl Romanov qui a mis fin aux « temps des troubles » eltsiniens.

Les événements ukrainiens de 2004 et une découverte approfondie de ce pays « fantôme de l’Europe » pour reprendre l’expression de l’historien Benoist-Méchin ont agi sur moi comme un puissant révélateur de tendances et de phénomènes à l’oeuvre en Russie qui peuvent aisément nous échapper, vu que la patrie de Pouchkine a constitué de tous temps une réalité qui ne se laisse pas facilement appréhender.

Depuis, je m’efforce d’être un observateur attentif, dépassionné et lucide des évolutions en cours dans la Fédération russe et son « étranger proche », car lire régulièrement la presse locale ou regarder quotidiennement le journal télévisé de RTR Planeta pour ne citer que ces exemples vous permet d’entrevoir d’autres réalités pas toujours perceptibles au premier abord.

Je le fais en ayant toujours à l’esprit l’impératif civilisationnel d’une fédération impériale grande-européenne respectueuse de ses patries constitutives, sans négliger les intérêts géopolitiques et stratégiques d’une AlterEurope à venir.

À partir de là, je crois que tout patriote identitaire européen conséquent devrait se faire plus critique sur plusieurs aspects de la politique russe mis en œuvre depuis quelques années.

Un tel engouement confinant parfois à une certaine « russolâtrie » ne m’étonne pas vraiment quand il émane de cénacles nationalistes et souverainistes communiant encore et toujours dans le culte d’un état-nation jacobin, l’illusion d’un renouveau républicain, la promotion d’une Europe des nations, voire une europhobie et un antifédéralisme primaires (alors qu’au contraire, le machin de Bruxelles est beaucoup plus jacobin qu’autre chose).

Pour autant, une adhésion inconditionnelle au régime de Poutine chez des représentants de la mouvance identitaire ou néo-droitiste, voire nationaliste-révolutionnaire, me surprend davantage.

Encore que, je suis bien conscient des motifs avancés pour cela.

On peut évoquer la nécessité de faire contrepoids à l’hégémonie américaine et de contribuer à l’émergence d’un monde multipolaire, des phénomènes de compensation psychologiques (« c’est un Poutine qu’il nous faudrait ») ou l’espoir d’un « salut » venu de l’Est (« les divisions russes vont nous sortir de notre décadence et assainir nos banlieues »).

On soulignera également l’impératif d’une construction continentale de Brest à Vladivostok et l’affirmation que la Russie est pleinement européenne d’un point de vue identitaire, avec le constat que certaines réalités déplaisantes ne peuvent être que des épiphénomènes pudiquement évacués, voire occultés au nom d’une realpolitik bien pensée et de la crainte de faire le jeu du camp atlantiste.

Un désenchantement et une déception à l’égard des pays frères d’Europe centrale et orientale est palpable chez beaucoup, indéniablement à la hauteur des espoirs soulevés en 1989-91.

L’auteur de ces lignes fut l’un d’entre eux, mais il s’efforce de faire la part des choses,  ayant pris acte du fait que la plupart de ces pays ex-communistes ont embrassé la cause de l’atlantisme : ce positionnement plus que regrettable ne les transforme pas pour autant en états parias[1]

On trouvera aussi la fascination de certains pour les constructions intellectuelles néo-eurasistes et le statut envié d’un Alexandre Douguine qui s’est propulsé d’une marginalité nationale-bolchevique jusqu’aux périphéries du pouvoir poutinien.

Le numéro 131 d’avril-juin 2009 de la revue Eléments intitulé « Demain les Russes ! », illustre bien ces positionnements et se révèle d’ailleurs bien décevant dans son conformisme convenu, son absence de point de vue propre (pas d’articles étoffés, seulement un éditorial et trois longs entretiens) et de débat constructif : le sujet méritait incontestablement mieux ![2]

Qu’en est-il de ces réalités et équivoques que je m’efforce régulièrement de mettre en évidence ?

Tout d’abord le fait que la Russie du tandem Poutine/Medvedev entrevoit son avenir en regardant dans le rétroviseur d’une histoire mythifiée, voire falsifiée lorsqu’on se réfère aux « vérités » d’une historiographie soviétique dont la rigueur scientifique est devenue proverbiale. Entre amnésie sélective, raccourcis fulgurants, manipulations du réel et réhabilitations posthumes (le généralissime Staline), celle-ci a permis d’éviter à la Russie de connaître une culpabilisation collective à l’allemande, mais l’a fait tomber dans l’excès inverse, celui d’une « Histoire qui ne veut pas passer » et qui bégaye à nouveau, de manière durable semblerait-il.

Ces enjeux mémoriels et historiques ne doivent pas être négligés et considérés comme un épiphénomène somme toute secondaire.

Bien au contraire, ils apparaissent primordiaux dans l’esprit du pouvoir russe actuel avec l’écho démesuré qui leur est accordé. En témoignent par exemple l’ouvrage d’une Natalia Narotchnitskaia[3], qui, à l’exception de Dominique Venner[4], a souvent suscité des réactions plutôt complaisantes dans les mouvances précitées, l’importance donnée aux commémorations du 9 mai et de la « Grande guerre patriotique »[5] ou la mise en place le 19 mai 2009 d’une commission chargée de lutter contre les falsifications de « l’histoire commune » contraires aux « intérêts » russes dans les pays baltes ou en Ukraine[6].

On peut également évoquer la guerre culturelle qui se déploie sur les écrans avec la promotion de superproductions historiques nationales-patriotiques souvent sponsorisées par le Kremlin.

Ces longs-métrages, souvent intéressants et bien réalisés, n’hésitent pas à dépeindre sous les traits les plus sombres  un Occident éternellement hostile, que ce soient les Polonais (1612 de Vladimir Khotinenko, Taras Boulba de Vladimir Bortko) ou les Suédois (Alexandre,la bataille de la Neva de Igor Kalenov), alors que les cosaques zaporogues ukrainiens sont dépeints comme des combattants pour la « terre russe orthodoxe » ! (encore Taras Boulba). Attendons de voir le film de Fëdor Bondartchouk sur Stalingrad, en cours de production …

De fait, les Russes ont le grand mérite de cultiver une longue mémoire historique que nous avons ici reléguée aux oubliettes afin se reconstruire légitimement une identité post-soviétique.

Mais ils le font sur des bases problématiques et discutables, autant pour eux que pour nous.

On y perçoit l’extrême difficulté, voire l’incapacité qu’ils ont de se penser en dehors de l’empire, un empire originellement expansionniste (« tout territoire ayant un jour été russe est destiné à le rester ou le redevenir ») aux frontières toujours mal définies, centralisateur et russificateur. Cette tendance lourde, déclinée sur le mode d’un complexe post-impérial, n’a jamais disparu depuis la chute de l’URSS et me semble destinée à empoisonner durablement les relations de la Russie avec ses voisins.

Ce phénomène est renforcé par la quête obsessionnelle d’une puissance largement illusoire qui néglige des défis domestiques persistants, place ses priorités dans des enjeux symboliques et dans la reconstitution d’un espace, ou du moins, d’une aire d’influence exclusive recouvrant l’espace ex-soviétique, le fameux « étranger proche ».

Moscou devrait accepter de s’inscrire dans des frontières sécurisées et internationalement reconnues, prenant comme base solide celles de la Fédération actuelle.

Les dirigeants russes sont-ils bien conscients que dans leur situation particulière, celle d’un territoire immense au climat souvent hostile, l’espace est un considérable réducteur de puissance ?

Dès lors, je pense qu’il faut arrêter de victimiser systématiquement une Russie qui, pour être l’objet de réelles menées américaines dans sa périphérie, n’en porte pas moins une part de responsabilité dans le maintien de contentieux historiques régulièrement ravivés avec ses voisins, permettant de maintenir un levier commode et rêvé pour la Maison-Blanche.

Je ne suis pas loin de penser qu’un Zbignew Brzezinski à Washington s’accommode fort bien du renforcement des tendances chauvinistes, néo-impériales et néo-soviétiques en Russie, plutôt qu’être confronté à un pays régénéré sur des bases saines et solides, constituant un pôle attractif pour ses voisins (beaucoup de progrès à faire à Moscou dans le domaine du soft power), entretenant des relations normales avec eux et se rebâtissant un projet politique et identitaire connecté aux moments européens de son histoire.

 

ID Mag : Certains rêvent d’une Europe « de Brest à Vladivostok ». Selon vous, peut-on affirmer que la Russie est historiquement, culturellement et ethniquement « européenne » ?

 

 

PL : La Russie se révèle incontestablement européenne dans ses fondements originels.

L’ensemble grand-russien découle d’une ethnogénèse entre adstrats slaves orientaux et tribus finno-ougriennes sur la périphérie coloniale septentrionale d’un vaste empire patrimonial, communément et incorrectement qualifié de « Russie de Kiev » et qu’il vaudrait mieux nommer dans un souci d’objectivité historique, Rou’s (ou Ruthénie) de Kiev (Kyiv en ukrainien), un ensemble relié dynastiquement[7], économiquement et culturellement au reste de l’Europe du Haut Moyen Age.

L’invasion mongole constituera une rupture radicale dont les effets se feront sentir jusqu’à nos jours.

La Moscovie, noyau fondateur du futur empire russe (terme officialisé sous Pierre le Grand) se construira dès lors sur des ressorts politiques et culturels doublement asiatisés et orientalisés car relevant de l’influence tataro-mongole de la Horde d’Or et d’un modèle byzantin tardif, bien éloigné de ses racines helléno-européennes, introduit sous Ivan III[8].

Un modèle monarchique autocratique, patrimonial et prédateur, un fort messianisme politico-religieux (mythe de la « Troisième Rome », Orthodoxie figée) et certaines dispositions mentales en constituent les manifestations les plus patentes.

Ensuite, à partir des réformes de Pierre le Grand, la Russie « retardée » de plusieurs siècles par rapport aux évolutions civilisationnelles du reste de l’Europe, ne va cesser d’osciller dans un récurrent mouvement de balancier entre des relations passionnelles de fascination/répulsion avec l’Europe « romano-germanique », dilemme illustré par les débats entre occidentalistes, slavophiles, panslavistes et (néo)eurasistes.

Ce dernier n’a jamais été tranché jusqu’à aujourd’hui et une analyse rigoureuse du contexte russe le démontre régulièrement.

À mon sens, il serait de la responsabilité des mouvances identitaires de sensibiliser avec tact et franchise les interlocuteurs russes sincères et ouverts à la nécessité d’opérer un retour à l’Europe en activant dans leur héritage politique, culturel, ce qui ressort indiscutablement d’un héritage commun.

Commençant à connaître la mentalité russe, je ne me fais pas forcément beaucoup d’illusions. Aujourd’hui la tendance dominante, au sein des élites comme dans l’opinion, est de considérer la Russie comme une réalité singulière, une civilisation en soi, entre Europe et Asie.

Dans mes moments de doute, j’arriverais presque à me persuader que cette rupture est insurmontable et que la branche grande-russienne s’est radicalement coupée de l’arbre boréen.

Mais sachant qu’il n’y a pas de fatalité en Histoire, je me dis que nous devons œuvrer inlassablement pour favoriser une prise de conscience et un retour à notre Europe de frères prodigues souvent attachants, mais parfois bien distants et irritants…

 

ID Mag : Les « révolutions de couleurs » qui agitent certains pays de l’ex-bloc de l’Est  sont généralement présentées comme de pures manipulations et orchestrations américaines. Ici encore, vous appelez à la mesure et à la nuance. Quelle est, selon vous, la réalité de la situation, notamment dans le cas ukrainien ?

 

 PL : Le traitement de la fameuse question des « révolutions de velours » dans les mouvances (méta)politiques précitées renvoie souvent à un schéma réducteur, ou témoigne parfois d’une imprégnation pure et simple par les théories du complot, déclinées sur le mode du vieux complexe obsidional de la forteresse assiégée, très en vogue ces dernières années à Moscou.

Cette tendance très ancienne en Russie s’explique par une histoire troublée, mais en dernier lieu, cela me semble relever d’une infirmité politique et constituer sur un mode incapacitant une facilité empêchant les autorités russes de se remettre en cause et de se poser parfois les bonnes questions.

Dans le cas ukrainien, le postulat d’un mouvement mécaniquement téléguidé et prémédité de l’étranger ne tient pas et cette « révolution orange » n’aurait jamais eu lieu si de nombreuses conditions n’avaient pas été réunies avec l’espoir d’un profond changement, sans parler du lancinant contentieux historique avec le voisin russe.

Les ONG américaines, maintes fois évoquées, ont bien injecté des dollars et formé les militants de structures activistes comme Pora, mais l’ampleur du phénomène, répétition sur une plus grande échelle d’un mouvement de contestation semblable réprimé au printemps 2001, démontre que d’autres ressorts ont joué.

L’Ukraine, pivot géopolitique selon Zbigniew Brzezinski, a été à cette occasion l’objet d’ingérences répétées de la part des Américains, de l’UE, mais aussi de son « grand voisin du nord ».

Vladimir Poutine a commis là-bas, de l’avis de nombreux observateurs politiques, la première erreur marquante de son « règne ». Il s’est cru chez lui et ses visites répétées en faveur d’une présidence Koutchma corrompue et complètement déconsidérée ont été très mal reçues, y compris dans l’Est et le Sud russophones du pays.

Ces empiètements russes furent principalement motivés par le fait que l’accession au pouvoir d’une présidence « orange » remettait en cause le processus d’intégration programmé de l’Ukraine au sein d’un Espace Economique Commun dominé par Moscou, en plus d’interrompre la mise en place d’un régime autoritaire à la bélarussienne.

Ils ont une fois de plus révélés que l’Ukraine n’avait depuis 1991 qu’une indépendance formelle et que, gouvernée par des oligarchies créoles post-communistes, elle oscillait, notamment sous Koutchma, entre Occident et Russie au gré des intérêts de la nomenklatura en place.

Rappelons aux amateurs de vérités simples que c’est sous le « pro-russe » Viktor Ianoukovytch, alors Premier ministre, que se sont déroulées les premières participations de l’Ukraine au Partenariat pour la Paix, antichambre de l’Otan et que c’est le président « pro-russe » Leonid Koutchma qui a envoyé un contingent ukrainien en Irak.

C’est également ce dernier qui a écrit le livre « L’Ukraine n’est pas la Russie », réalité que les Russes dans leur ensemble, opinion publique et classe politique confondues, des libéraux pro-occidentaux aux nostalgiques de Staline, se refusent toujours à admettre, considérant l’Ukraine comme « le berceau » de la Russie et comme partie intégrante de leur ethnos.

L’élection de Viktor Iouchtchenko a été à ce moment-là perçue par beaucoup d’Ukrainiens comme la promesse d’une véritable indépendance et d’un «retour à l’Europe » si longtemps différé. C’était bien sûr à tort, l’impéritie, les rivalités personnelles et les choix funestes de la présidence « orange » se chargeant de rattraper la bourde initiale de Poutine.

Mais le contentieux historique est plus que jamais vivace et Moscou n’a pas manqué une occasion pour faire jouer tous les leviers en sa possession (Gaz, Crimée, flotte russe de Sébastopol, question linguistique et controverses historiques) afin de faire pression sur un état dont elle n’a jamais admis l’existence[9].

Cette querelle de couple dans laquelle l’épouse ukrainienne a fini par divorcer d’un conjoint moscovite insupportable, n’en finit pas de se prolonger pour le plus grand bonheur du notaire américain : il faudra bien pourtant que monsieur finisse par se rendre à l’évidence.

Ce n’est pas l’élection récente de Viktor Ianoukovytch[10] le 7 février dernier au poste de président qui devrait significativement changer la donne. Celui-ci, pour de multiples et récurrentes raisons, risque de s’en tenir à une politique multivectorielle de non-alignement. Les Russes restés prudents au cours de ce scrutin ne se font d’ailleurs pas beaucoup d’illusions ainsi qu’en témoignent par exemple les écrits de Douguine ou  des journalistes de RIA Novosti à propos de  l’homme de Donetsk[11].

Pour un patriote identitaire européen, s’opposer à l’entrée de l’Ukraine dans l’OTAN est une chose nécessaire et légitime, nier son identité propre et son droit à construire un état souverain en est une autre, à laquelle nous ne pouvons et ne devons nous résoudre.

Je souhaiterais que tous ceux qui, par méconnaissance ou calcul, proclament que « l’Ukraine et la Russie sont consubstantielles » fassent preuve d’un peu plus de rigueur, de discernement et de cohérence intellectuelle ou idéologique. Ils seraient bien avisés de cesser de répéter pieusement la version de l’Histoire made in Moscow, de se contenter d’un strict positionnement géopolitique et de relayer les scénarios russes, peu crédibles d’ailleurs, d’annexion ou d’éclatement du pays.[12]

Des ouvrages relativement objectifs et impartiaux sont aujourd’hui disponibles pour qui veut se donner la peine d’y voir plus clair.

Jean Mabire fut l’une des rares figures de la mouvance identitaire à avoir défendu le droit des Ukrainiens à une existence propre.

Effectivement l’Ukraine a eu, comme la Russie, une histoire tourmentée. À l’inverse de sa puissante voisine, elle a vu sa construction étatique maintes fois contrariée, mais elle est restée arrimée au noyau européen et ses fractures internes actuelles résultent d’une domination plus ou moins longue, selon les régions, du grand voisin du nord.

Elle a mené au cours des siècles une lutte pour sa liberté contre les dominateurs russes et polonais avec une opiniâtreté qui force l’admiration et ne va pas sans évoquer le combat des fils de la verte Erin contre la domination britannique.

L’Ukraine, identité enracinée sur un territoire, appartient de plain-pied à l’ensemble géopolitique et civilisationnel européen. Il est de notre devoir de le faire savoir et de convaincre les Russes que des relations apaisées, étroites et véritablement fraternelles entre peuples apparentés ne peuvent se baser que sur une pleine reconnaissance de l’identité de chacun.

Le pays des cosaques zaporogues a, de plus, toujours contribué à ancrer la Russie en Europe (Pierre le Grand a, par exemple, assis ses réformes à l’aide de cadres politiques et ecclésiastiques ukrainiens), d’où l’idée qu’une Ukraine réintégrée dans son cadre originel pourrait encourager la Russie à se déterminer significativement et à tourner une fois pour toutes son regard dans notre direction, loin de ses tentations eurasistes…

 

ID Mag: On parle de plus en plus d’une vague de « nostalgie », en Russie », pour la période soviétique et même de volonté de réhabilitation de celle-ci. Qu’en est-il exactement ?

 

 

PL : Comme je le signalais plus haut, une certaine nostalgie soviétique, l’idéologie communiste en moins, est à l’ordre du jour et ce processus s’est amplifié depuis le deuxième mandat de Poutine.

Nostalgie chez les petites gens qui, ayant subi les effets désastreux de l’ère Eltsine, ont tendance à idéaliser une période durant laquelle les besoins vitaux de la population, l’ordre public et d’autres choses comme l’accès généralisé à la culture étaient largement assurés.

Dans le domaine sportif, les piètres performances des athlètes russes aux jeux olympiques d’hiver de Vancouver ont ravivé cette sovietalgie.

La mémoire populaire se révèle généralement sélective  et il est de plus propre à l’être humain de refouler les peurs et agressions qu’un système oppressif a générées chez cet homo sovieticus brossé en son temps par un Alexandre Zinoviev et qui est bien loin d’avoir disparu.

Dans la Korpokratoura (Jean-Robert Raviot) actuellement au pouvoir où sphères politiques et économiques sont étroitement imbriquées, outre que cette période, pour la majorité d’entre eux, continue de structurer une bonne partie de leur paysage mental, on retient surtout de l’ère soviétique la grandeur apparente d’une grande puissance redoutée et respectée, qui, sous Staline notamment, avait porté les frontières de l’empire à son zénith.

Mêlée à des éléments de l’ère tsariste (symboles nationaux notamment), cette composante soviétique doit servir à renforcer un patriotisme officiel assis sur l’idée étatique (derjavnost’) et celle d’Unité affirmée sur un mode mobilisateur.

Dans le contexte d’un système de représentations si ambivalent, on referme l’accès aux archives d’Etat et on réécrit l’Histoire en faisant la part belle aux mensonges et fables de l’ère soviétique tout en déniant aux voisins de l’ « étranger proche » le droit de créer (sur un mode, il est vrai, parfois passionnel et polémique) leurs historiographies nationales et d’honorer ceux qu’ils considèrent comme des héros de la lutte anti-communiste (souvent ravalés par Moscou aux rangs de simples collaborateurs des nazis, dans la plus pure langue de bois soviétique).

Encore une fois, on pourrait s’étonner du relatif silence de ceux qui ont en leur temps justement condamné la reductio ad hitlerum dans notre beau pays et évitent de faire de même lorsqu’il s’agit de la Russie. Et qu’on ne vienne pas me dire que c’est de bonne guerre !

Moscou désire assurer une « continuité » dans son histoire récente sans risquer de fragiliser par l’évocation des « heures sombres » une identité problématique, encore convalescente après la chute de l’Union soviétique, « plus grande catastrophe géopolitique du XXème siècle » (Poutine).

Plusieurs déclarations du président Medvedev démontrent que remettre en cause le petit catéchisme officiel concernant la « Grande guerre patriotique » et « l’histoire commune »  aurait pu devenir difficile, voire judiciairement risqué (projet de loi de la Douma daté du 6 mai 2009 réprimant le « révisionnisme historique », finalement rejeté par le gouvernement le 29 juillet de la même année)[13], à l’intérieur comme à l’extérieur des frontières de la fédération.

Le drame pour le peuple russe est que la voie tracée par un Alexandre Soljenitsyne sur un traitement lucide et responsable de la période communiste n’ait pas été suivie et approfondie.

Le Kremlin se fait l’écho aujourd’hui de représentations majoritaires encore agissantes au sein de la population autour d’un passé récent qui continue à être mythifié par la nouvelle histoire officielle.

Poser ainsi les bases du futur me semble fâcheusement lourd d’impasses, d’équivoques et de contradictions qui ne manqueront de s’amplifier et de continuer à compromettre davantage l’image de la Nouvelle Russie.

 

ID Mag: Le redressement de la Russie est spectaculaire, il n’en est pas pour autant sans failles. Quelles sont selon vous les principales faiblesses qui le menacent ? La chasse aux oligarques a-t-elle été menée jusqu’au bout ? Où en sont- la démographie et la maîtrise de l’alcoolisme endémique ?

 

PL : Ce redressement spectaculaire, comme vous dites, a été freiné par les effets de la crise systémique mondiale qui a fini par toucher la Russie de plein fouet : Il semblerait que le pays commence timidement à s’en remettre, bien que des soubresauts sociaux transparaissent ça et là au travers du voile posé par les médias plus ou moins sous contrôle. L’avenir proche nous dira davantage ce qu’il en est dans ce domaine.

La Russie a le plus grand mal à faire le deuil de son empire et à se faire à l’idée que seule, elle est condamnée à rester une puissance régionale ayant hérité d’un arsenal nucléaire vieillissant, dont il est admis en haut lieu qu’il ne pourra être que partiellement modernisé (missiles stratégiques Topol-M et Boulava).

Sans l’Europe et une synergie bien pensée dont les contours ne peuvent encore être définis, elle me semble condamnée à rester une « puissance pauvre ».

Ce redressement pour avéré qu’il soit dans de nombreux domaines reste néanmoins fragile et peut même apparaître comme un phénomène « Potemkine » qui cache un envers du décor beaucoup moins reluisant.

Société civile embryonnaire en proie depuis des siècles aux prédations d’un pouvoir patrimonial, état faible contrairement aux idées reçues, phagocyté par une Korpokratoura, dont le mode d’exercice du pouvoir plébiscitaire et non compétitif préfigure peut-être les formes de régime post-démocratiques en voie de renforcement rapide en Occident.

Économie de rente dont les actifs sont plus ou moins affectés par une certaine baisse des cours du gaz et du pétrole, outil industriel dépassé (y compris la branche militaire, souvent incapable de satisfaire la demande étrangère et qui a perdu une grande partie de ses savoir-faire), infrastructures dignes d’un pays du Tiers-monde (une fois sorti de Moscou, Saint-Pétersbourg et de quelques îlots urbains « développés »).

La liberté d’expression est réelle sur des thématiques fondamentales qui nous sont chères, mais il ne vaut mieux pas s’aventurer à enquêter sur des affaires précises touchant des personnes bien identifiables...

La société est minée par une corruption structurelle qui n’est pas nouvelle (voir Les âmes mortes de Gogol par exemple) et dont on se demande si le pouvoir actuel s’en accommode ou montre son impuissance à la combattre efficacement, tellement le mal est profond, ceci en dépit de  sanctions conjoncturelles et exemplaires, fortement médiatisées.

L’armée doit être rapidement réformée à la lumière des enseignements du conflit géorgien, avec une professionnalisation et un « dégraissage » pour lequel la haute hiérarchie militaire freine des quatre fers. Sans parler du remplacement de matériels largement obsolètes dont le faible rythme de renouvellement pourrait être mis à mal par une baisse annoncée des crédits militaires : beaucoup d’effets d’annonce en général à l’occasion par exemple du vol récent du prototype d’un chasseur de 5ème génération, le Sukhoi PAK-FA T-50 qui est loin d’être entré en service et ne le sera qu’au prix d’une coopération avec l’Inde.

Les négociations au sujet de l’achat de bâtiments de projection et commandement français type Mistral, outre leurs arrière-pensées géopolitiques, démontrent qu’un savoir faire technologique s’est perdu depuis l’éclatement de l’URSS (les chantiers navals de Mykolaiv qui avaient conçu les porte-avions de la classe Kuznetsov sont aujourd’hui situés dans l’Ukraine indépendante).

Concernant les oligarques, on a éliminé ceux qui ont été associés à l’ancien pouvoir eltsinien (Boris Berezovski) ou qui ont eu des velléités de s’opposer au Kremlin en s’associant à des intérêts politiques et économiques étrangers (Mikhail Khodorkovski). Les autres, comme Roman Abramovitch ou Oleg Deripaska sont toujours là, plus discrets, rentrés dans le rang ou étroitement associés au pouvoir. Ils servent parfois de boucs émissaires pour le bon peuple et c’est l’occasion de réprimandes de la part du père fouettard Poutine sous l’œil attentif des caméras.

Selon certaines sources récurrentes, le judoka préféré des Russes ne serait pas dépourvu d’une fortune personnelle conséquente.

La population reste préservée de flux migratoires massifs venus de l’étranger. Elle connaît cependant quelques problèmes de cohabitation avec des ethnies non-slaves. Le pouvoir oscille entre une définition ethnique et étatique de l’appartenance russe (deux termes différents existent dans la langue de Dostoïevski pour désigner l’une ou l’autre) avec une certaine préférence donnée officiellement à cette dernière. I’année dernière, les Nachii, jeunesses poutiniennes « antifascistes » se sont vues confier dans plusieurs villes du pays la tâche de vider la rue de ses groupes nationalistes.

Groupes qui, lorsqu’ils ne sont pas infiltrés, voire purement et simplement générés par le FSB, sont largement instrumentalisés et tolérés au gré des intérêts et de la conjoncture du moment.

Je ne parle même pas de « l’ultranationaliste »  guébiste Vladimir Volfovitch Eidelstein alias Jirinovski qui, à la tête du LDPR  (Parti Libéral-démocrate de Russie) constitue l’exemple même de ces partis «pro régime » qui captent à la fois un certain électorat et constituent une tribune pour des prises de positions provocatrices et extrémistes que le Kremlin ne peut pas toujours assumer au grand jour, lâchées comme ballons d’essai à destination de l’opinion intérieure et internationale .

Le pouvoir joue clairement la carte de la cohésion ethnique et religieuse  de la population.

Cette dernière, qui bénéficie encore d’un haut niveau d’études et de qualification grâce à un système éducatif sélectif (malgré la corruption d’une partie du corps enseignant), connaît un collapsus démographique structurel malgré les mesures natalistes adoptées par le Kremlin et la très légère embellie de la dernière année (solde naturel à peine positif) : elle pourrait s’établir dans le pire des scénarios autour de 80-100 millions de personnes vers 2050 !

Son état sanitaire général reste préoccupant (je ne m’étendrai pas davantage sur les ravages de l’alcoolisme à tous points de vue) et son univers mental reste marqué par l’empreinte communiste dont les effets délétères seront longs à extirper.

Un nihilisme ambiant, empreint de matérialisme, de cynisme et d’une certaine dépolitisation prévaut dans une bonne partie de la jeunesse. Celle-ci subit un processus d’occidentalisation accéléré qui n’est pas efficacement contrebalancé par le « patriotiquement correct » au goût du jour et la mise en place d’organisations comme les Nachii.

Les fervents admirateurs du régime poutinien auront ainsi remarqué qu’il n’entreprend rien de significatif pour enrayer ce phénomène préoccupant et s’accommode fort bien de cette situation où la quête effrénée d’argent, le goût de l’informe, du strass et des paillettes n’a trop souvent rien à envier à  celui de nos sociétés occidentales, décliné de plus au tamis de la démesure russe comme en témoigne par exemple le cinéaste Andreї Mikhalkov-Konchalovsky dans son film Gloss (Glyanets en vo).

La population russe semble trouver un puissant dérivatif à un quotidien souvent gris dans une fierté nationale entretenue par le pouvoir, vis-à-vis duquel elle ne nourrit aucune illusion (« eux » et « nous »). Fierté nationale non condamnable en soi bien entendu, mais déclinée sur un mode excessif avec une paranoïa obsidionale et toujours une phobie atavique de l’ennemi intérieur et extérieur.

Je suis toujours frappé par le fait que le système communiste aux mensonges duquel presque personne ne croyait a réussi à tuer chez beaucoup d’anciens ressortissants soviétiques toute forme d’engagement politique et social au service d’un idéal collectif qui les dépasse : je me suis souvent heurté à des réactions empreintes de scepticisme désabusé.

Je n’ai pas vraiment développé, conformément à votre question les points positifs dans le tableau partiel parfois sombre et pessimiste que j’ai donné de ce peuple jeune (Moeller van den Bruck), mais nous savons que rien n’est jamais joué et que là où il existe une volonté, il y a un chemin.

 

ID Mag : Dans le cadre du monde multipolaire auquel nous aspirons, comment envisagez-vous l’évolution des relations entre la Russie et la puissance chinoise ?

 

PL : La Chine et la Russie ont établi un partenariat stratégique au sein de l’Organisation de coopération de Shanghai pour tenter de faire un tant soit peu contrepoids à la puissance hégémonique américaine.

Cette entente ne repose pas sur des fondements civilisationnels et stratégiques solides et n’est pas, selon moi, destinée à un grand avenir.

Pour l’instant, les deux pays font des manœuvres militaires communes fortement médiatisées. L’armée chinoise modernise son arsenal à grands renforts d’armes russes, bien que Moscou veille à limiter autant que possible les transferts de technologie.

Posture devenue récurrente, le Kremlin penche ostensiblement vers son voisin asiatique dès que des désaccords politiques ou économiques interviennent avec l’Union Européenne.

Cela n’empêche pas que l’avenir des relations sino-russes reste pavé de lourdes incertitudes.

Moscou ne peut que craindre le colossal différentiel démographique avec son voisin qui peut lorgner demain sur les immenses ressources minérales et stratégiques de l’hinterland sibérien.

Une immigration chinoise croissante pourrait poser un problème stratégique majeur dans un avenir très proche.

Bien que les contentieux territoriaux aient été récemment résolus, les Chinois n’ont pas oublié les « traités inégaux » du XIXème siècle et n’ont peut-être pas renoncé à récupérer un jour les territoires de la « Mandchourie du nord » avec Khabarovsk et Vladivostok[14].

Les Russes doivent comprendre qu’ils auront besoin de nous pour mettre en valeur ce « Grand Est » sibérien et que des contingents européens ne seront pas de trop pour assurer une veille vigilante sur le fleuve Amour, nouvelle frontière d’une Grande Europe à bâtir.

 

 

 

ID Mag : Un mot pour conclure et peut-être quelques conseils de lecture sur ce sujet ?

 

PL : Je suggèrerais à ceux qui sont intéressés par la question de faire l’effort de s’imprégner des réalités russes en essayant de franchir la barrière de la langue et en se plongeant dans ce monde passionnant (presse, littérature, cinéma, télévision), ce qui n’empêche pas de voyager et de faire des rencontres...

Je pense qu’un militant identitaire sérieux et sincère doit appréhender ces réalités de manière lucide et détachée en restant fidèle aux valeurs et principes qui sont les siens tout en faisant preuve d’intelligence (méta)politique.

Ce n’est pas en manifestant une adhésion aveugle et inconditionnelle aux évolutions en cours dans la Russie poutino-medvédienne que nous rendrons un grand service à notre cause et aux Russes eux-mêmes.

À nous de faire preuve d’une bienveillance critique qui n’empêche pas la ferme condamnation de phénomènes négatifs et contre-productifs et d’éviter l’écueil d’un pacte russo-européen qui abandonnerait à nouveau plusieurs peuples frères aux séculaires et incorrigibles convoitises de Moscou, car la tentation est réelle chez certains de lui  reconnaître une sphère d’influence exclusive en terre européenne[15].

Une observation attentive de la politique internationale de Moscou montre qu’elle a le plus grand mal à s’accommoder de l’Union Européenne, perçue, malheureusement à juste titre, comme une structure bâtarde, acéphale et vassalisée par Washington.

De ce fait, prenant compte de l’existence d’une nouvelle Europe proaméricaine, elle privilégie les relations bilatérales avec les états du noyau carolingien comme l’Allemagne, la France ou l’Italie, perçus comme des entités solides ayant fait leur preuve sur la scène de l’Histoire, sans perdre de vue le classique adage divide et impera .

Je pense qu’une avant-garde européenne telle que prônée par le Forum Carolus et Alain de Benoist par exemple, vertébrée par le noyau dur carolingien, élargi à l’Autriche et à la Hongrie, ne doit être envisagée que dans la perspective d’une grande Europe-puissance qui n’exclue pas nos frères européens de l’ex Pacte de Varsovie pour l’instant encore sensibles aux sirènes étatsuniennes.

Hypothèse pro-vocante et devant nous pousser à la réflexion : une Russie qui résonne toujours en terme de sphère d’influence exclusive sur son ancien « espace historique » (Narotchnitskaia), englobant des pays incontestablement européens comme le Belarus et l’Ukraine serait-elle prête à admettre l’existence à ses frontières d’une Grande Europe-puissance unifiée, détachée de la vassalité américaine et amicale qui affirmerait ses intérêts légitimes sans complexe ? Serait-elle prête à jouer avec nous la carte d’une fédération impériale paneuropéenne, à terme intégrée, une véritable entité eurosibérienne et non celle d’un empire simplement russe ou eurasiatique ?

Poser la question en embrassant la longue durée historique, c’est déjà commencer à apporter quelques éléments de réponse…

Un tel édifice respectueux de ses entités nationales et ethniques, pensé selon un nouveau jus publicum europaeum et un sain principe de subsidiarité aurait, entre autres choses, l’avantage de réduire à néant la plupart des contentieux territoriaux persistants et pesants.

Quoi qu’il en soit, pour survivre dans un nomos planétaire en pleine recomposition et rester dans l’Histoire, Européens et Russes devront entamer, chacun à partir de prémisses et de situations différentes, un mouvement de régénération convergeant vers un héritage boréen plurimillénaire, base matricielle commune d’un renouveau et d’un destin envisagés ensemble. Favorisons donc l’émergence d’un véritable courant altereuropéen et eurosibérien en Russie.

Sinon, dans le cas où le Kremlin s’obstinerait dans une perspective vétéro-impériale autocentrée et obsidionale, je crains fort que la Troisième voie, position risquée et peu aisée à assumer, ne puisse redevenir tôt ou tard d’actualité.

Quelques conseils de lecture ?

Pour la Russie, Les ouvrages de Gustave Welter (Histoire de Russie), Gonzague de Reynold (Le monde russe) et Andreas Kappeler (La Russie, Empire Multiethnique) peuvent offrir un cadre de réflexion historique solide. On pourra y ajouter les « classiques » de Nicolas Riazanovsky (Histoire de la Russie), Michel Heller (Histoire de la Russie et de son empire) ou Jean-Pierre Arrignon (Culture Guide Russie). Pour mieux saisir les réalités politiques et sociologiques d’un univers à la fois si loin et si proche, on pourra se référer aux ouvrages de Iouri Afanassiev (De la Russie), Jean-Robert Raviot, Marlène Laruelle, Jean-Sylvestre Mongrenier (La Russie menace-t-elle l’Occident ?), Georges Nivat, André Ropert (La misère et la gloire, histoire culturelle du monde russe), Alla Sergueeva (Qui sont les Russes ?), Lorraine Millot (La Russie nouvelle) ou d’Igor Kliamkine et Lev Timofeev (La Russie de l’ombre).

Signalons également un curieux ouvrage anonyme intitulé Projet Russie. Je peux également citer les remarquables biographies d’Henri Troyat sur les tsars et écrivains russes, ainsi que naturellement les grands classiques de la littérature, de Pouchkine à Soljenitsyne.

Mention particulière pour les romans « au marteau » d’un enfant terrible de la nouvelle littérature russe, Vladimir Sorokine  (notamment Journée d’un opritchnik, La glace ou la voie de Bro).

Les amateurs de polar pourront par exemple se plonger dans les œuvres de Thierry Marignac (Fuyards), Alexandra Marinina (Ne gênez pas le bourreau) ou Leif Davidsen (L’épouse inconnue)

Sur l’Ukraine, il serait indispensable de lire attentivement les travaux incontournables de Iaroslav Lebedynsky (Ukraine, une histoire en questions)[16], Mykola Riabtchouk (De la « Petite-Russie » à l’Ukraine) et Andreas Kappeler (Petite histoire de l’Ukraine) sans oublier le mythique Benoist-Méchin (Ukraine, le fantôme de l’Europe). On pourra compléter par Léonid Pliouchtch (Ukraine : à nous l’Europe !), Annie Daubenton (Ukraine : les métamorphoses de l’indépendance), Alain Balalas (De l’Ukraine) ou Arkady Joukovsky (Histoire de l’Ukraine). Les amoureux du mythe cosaque pourront parcourir le maître-livre de Iaroslav Lebedynsky, Les cosaques, une société guerrière entre libertés et pouvoirs, Ukraine 1490-1790.

 

 

Version révisée en mars 2010 d’un entretien recueilli en juillet 2009 par Xavier Eman pour ID magazine n°16 (automne 2009)



[1] Un fossé psychologique s’est considérablement creusé entre nous et nos frères de « l’Est ». Nous avons généralement une extrême difficulté à appréhender ce qu’ils ont vécu durant la période communiste et c’est bien sûr un peu normal. Néanmoins, rien ne nous empêche et c’est même fortement recommandé, de faire un réel effort d’empathie (je n’ai pas dit complaisance) à leur égard, par des rencontres et une connaissance accrue de ces réalités. Un survol de leurs représentations est tout à fait instructif : je signalerai par exemple ces entretiens avec l’Ukrainien Mykola Riabtchouk (http://www.europemaxima.com/?p=665) ou le Lituanien Richard Backis (http://www.diploweb.com/L-heritage-mental-du-sovietisme.html).

[2] Dans l’éditorial de ce numéro, Robert de Herte/Alain de Benoist ne fait pas mystère de son engouement pour la figure et les positions d’Alexandre Douguine, dont l’œuvre, nonobstant de nombreux points dignes d’intérêt, se présente fondamentalement comme les habits neufs d’une récurrente vision impériale russocentrée, sans parler de ses propos à l’emporte pièce dans les médias télévisés russophones où l’éminent penseur disserte sur la partition et l’invasion militaire de l’Ukraine avant de théoriser l’existence dans la partie orientale et méridionale du pays d’un fantasmatique peuple « nouveau-russe » (http://tap-the-talent.blogspot.com/search/label/Dugin).

En 1993, la figure historique de la Nouvelle droite écrivait dans une réponse au publiciste allemand Wolfgang Strauss publiée dans la revue Europa Vorn ( n°57, 15 septembre 1993, p: 3 , citée par Pierre-André Taguieff in Sur la Nouvelle droite, Descartes & Cie, 1994, p:311) : « Je suis en particulier hostile à toute forme de jacobinisme ou d’impérialisme. Je ne confonds pas l’idée traditionnelle d’Empire (…) avec les impérialismes modernes : français, anglais, américain, russe ou allemand. Je soutiens le droit des peuples à disposer d’eux-mêmes, qu’il s’agisse des Ukrainiens, des Géorgiens, des Tchétchènes, des habitants des pays baltes, des Irlandais du Nord, des Corses, des Bretons (…). Je ne crois pas que les Russes résoudront les problèmes auxquels ils sont affrontés en tentant de soumettre à nouveau à leur joug des peuples qui n’ont que trop évidemment manifesté le désir de s’en affranchir. Pour dire les choses autrement, je crois que leur avenir n’est pas dans l’imitation- qu’il s’agisse de l’imitation de l’Occident ou de l’imitation du passé (tsariste ou stalinien). Les Russes ont  certainement, compte tenu de leur histoire, un rôle à jouer en Asie. Je suis en revanche plus que réservé vis-à-vis de toute construction eurasiatique, qui me paraît être essentiellement fantasmagorique ».

Plus récemment, interrogeant longuement Douguine dans un captivant entretien publié dans la revue Krisis (N°32, juin 2009, p :143-146), Alain de Benoist n’a pas manqué cependant de lui poser une question reprenant nos informations sur les activités anti-ukrainiennes du Mouvement de la jeunesse eurasiste, question à laquelle son honorable interlocuteur n’a pas jugé bon de répondre franchement…

[3] « Que reste-t-il de notre victoire ? » Editions des Syrtes, Paris, 2008. Nous renvoyons les lecteurs à notre critique de cet ouvrage consultable sur (http://www.polemia.com/article.php?id=1674).

Madame Narotchnitskaia est par ailleurs à la tête d’une ONG mise en place avec l’aval du Kremlin, sise à Paris et New-York, L’Institut de la Démocratie et de la Coopération (IDC) qu’elle anime avec le journaliste britannique conservateur John Laughland.

[4] Dans un long et pertinent article intitulé « Mémoire russe et mémoire européenne » publié dans le numéro 38 de La Nouvelle Revue d’Histoire, septembre-octobre 2008, pages 32-35

[5] Comme l’affirmait Boris Gryzlov, président en exercice de la Douma russe que je cite de mémoire, la « Grande guerre patriotique » est le seul événement récent de l’histoire nationale susceptible de rassembler un maximum de citoyens autour d’un nouveau consensus identitaire.

Une véritable mythologie impulsée par Vladimir Poutine lors de sa fameuse allocution du 9 mai 2005 qui ne supporte donc aucune forme de critiques ou de remises en cause, aussi ténues soient-elles. Au besoin, intimidations et répression s’abattent sur les « contrevenants » ainsi qu’en témoigne le cas de Mikhaïl Suprun, un historien russe enquêtant sur le sort d’Allemands emprisonnés en Union soviétique durant la Seconde Guerre mondiale, qui a été arrêté en septembre 2009.L’historien a été brièvement détenu par des officiers des services de sécurité russes. Ils ont fouillé son appartement et emporté l’ensemble de ses archives. Accusé d’atteinte à la vie privée ( !), il risque en cas de condamnation une peine maximale de quatre ans de prison. Professeur d’histoire à l’Université Pomorskyi d’Arkhangelsk, ses travaux portaient notamment sur les prisonniers de guerre allemands capturés par l’Armée rouge et sur les minorités russes d’origine germanique, la plupart en provenance de Russie méridionale, déportés par Staline dans les camps d’Arkhangelsk.

 

[6] Cette commission comprenait deux personnalités présentées comme des historiens, l’incontournable Natalia Narotchnitskaia et Alexandre Tchoubarian, auteur d’un livre au titre prometteur, mais au final bien décevant, La Russie et l’idée européenne, (Editions des Syrtes, 2009). Ce dernier, interpellé par nos soins lors d’une présentation parisienne de l’ouvrage en octobre 2009, sur le fait de siéger dans une telle commission pour des historiens de métier, a  « dédramatisé » l’enjeu et magnifiquement botté en touche dans la plus pure tradition de la rhétorique soviétique, version perestroïka.

[7] Citons la princesse Anne, fille de Iaroslav le Sage qui a épousé notre bon roi Henri 1er en 1051, à propos de laquelle, en cette année France-Russie et d’exposition sur « La Sainte Russie » au Louvre, on a pas fini d’entendre parler de princesse « russe »…

[8] L’article d’Aymeric Chauprade, « Byzance écartelée entre deux mondes » publié dans la Nouvelle Revue d’Histoire  (n°15, novembre-décembre, 2004, p : 56-58) est, à cet égard, très éclairant.

[9] La question de la résistance nationaliste ukrainienne durant la seconde guerre mondiale n’en finit pas de susciter des réactions indignées à Moscou, qui pour l’occasion n’hésite pas à se joindre au chœur  planétaire (http://fr.rian.ru/world/20100127/185945143.html). La politique d’affirmation historique et mémorielle menée par la présidence Iouchtchenko était justifiée et légitime sur le fond ; même si sur la forme, elle est critiquable sur de trop nombreux points.

Les décrets faisant de Roman Choukhevytch (commandant suprême de l’Armée Insurrectionnelle Ukrainienne, l’UPA) et de Stepan Bandera (chef de l’aile révolutionnaire de l’Organisation des Nationalistes Ukrainiens OUN-R :  http://fr.novopress.info/35214/anniversaire-de-l%E2%80%99assassinat-de-stepan-bandera-notre-longue-memoire/) des héros de l’Ukraine ont créé des remous y compris à l’intérieur du pays tant les clichés mensongers de l’époque soviétique sont encore prégnants dans une bonne partie de la population. Dans le cas de Bandera, le calendrier choisi (en janvier dernier, entre les deux tours de scrutin présidentiel) révélait des arrière-pensées politiciennes évidentes et maladroites. Il n’empêche que l’accusation infâmante et diabolisante de collaboration avec les nazis ne tient pas stricto sensu et il est regrettable de voir les autorités russes user cyniquement de ces questions hautement sensibles dont elles bien connaissent la charge émotionnelle pour un public occidental.

Que ces hommes aient été tentés de jouer brièvement la carte allemande avant de déchanter (en camp de concentration dès l’été 1941 pour Bandera ou devant un peloton d’exécution pour d’autres) est l’évidence même. Etait-ce collaborer aux plans nazis et leur politique raciale que d’avoir été soutenus par certains secteurs de la Wehrmacht et de l’Abwehr pour former deux bataillons de volontaires en 1940-41 ? Il est bien facile de juger après-coup quand on connaît la fin de l’histoire.

L’amalgame entre la résistance de l’OUN/UPA et la division SS ukrainienne « Galicie » ne résiste pas à un examen historique sérieux, ni les accusations conjointes de la part des nazis puis des soviétiques d’avoir participé à des pogroms antijuifs, notamment à L’viv en 1941.

Par contre, si on veut rester sur le registre de la collaboration avec le régime national-socialiste, que dire du grand Staline qui a livré quantité de communistes allemands, parfois juifs, aux autorités hitlériennes entre septembre 1939 et juin 1941, sans parler des matières premières stratégiques qui ont alimenté la machine de guerre nazie dans sa guerre à l’Ouest ?

Il est confondant de voir des compatriotes issus souvent de milieux traditionnellement anticommunistes embrayer docilement le pas aux vieilles lunes de l’historiographie soviétique joignant leurs voix au concert des derniers dinosaures staliniens de l’université française qui s’évertuent, dans un registre voisin, à nier l’existence du Holodomor, la famine-génocide ukrainienne de 1932-33.

[10] Il est intéressant de noter que le nouveau président ukrainien a recouru, dès 2005, aux services du consultant politique américain Paul Manafort, républicain convaincu qui a notamment travaillé pour John McCain, rival malheureux de Barack Obama en 2008.

[11] Lors d’une conférence de presse commune entre Medvedev et Ianoukovytch, à l’occasion de la visite officielle de ce dernier à Moscou le 5 mars 2010, les deux hommes ont fait de belles déclarations de principe dans une atmosphère cordiale et détendue, mais se sont bien gardé de fixer des échéances précises. Une nouveauté cependant dans la bouche de Medvedev qui a évoqué un possible statut de la langue ukrainienne en Russie avec l’octroi de chaînes de télévision ukrainophones.

[12] À cet égard, l’Ukraine n’est pas comparable aux Balkans. Ce pays a payé le prix du sang au XXème siècle et son peuple a un tempérament généralement plus « doux », moins convulsif que ceux d’autres ethnies slaves. La guerre culturelle a cependant fait rage à Moscou tout au long de l’année 2009, avec toute une littérature clairement ukrainophobe qui allait des techno thrillers de gare, catégorie sous-Tom Clancy (comme Ukraine champ de bataille : le trident brisé de Georgiy Savitsky ) à des écrits assez délirants comme le fameux American salo d’O. Volia (http://www.kyivpost.com/news/nation/detail/38758/)

[13] Voir : http://www.lph-asso.fr/index.php?option=com_content&view=article&id=135%3Aderniere-heure-par-nikolay-koposov&catid=31%3Adossier-russie&Itemid=78&lang=fr

[14] Voir l’intéressant dossier du n° 995 du Courrier international (du 26 novembre au 2 décembre 2009) intitulé « Far East, quand la Sibérie sera chinoise ».

[15] Cela semble être le cas, par exemple, pour le géopoliticien Aymeric Chauprade, qui  avait déjà repris à son compte le théorème « mécaniste » de la révolution orange selon un storytelling simplificateur. Dans un article publié dans La Nouvelle Revue d’Histoire  (N°20, septembre-octobre 2005, p:38, texte repris dans la 3ème édition de Géopolitique, constantes et changements dans l’Histoire, Ellipses, 2007, p:558) et intitulé « les frontières de l’Europe », il exposait l’existence de cinq ensembles géopolitiques européens en affirmant que « même si elle présente d’incontestables traits civilisationnels européens (…), l’Ukraine, immense plaine ouverte sur l’Est, n’a pas vocation à faire partie du bloc européen ». Il écrit ultérieurement, dans un entretien donné à la revue Eléments (N° 131, avril-juin 2009, p : 32) qu’ « avec un peu moins de 50 millions d’habitants, l’Ukraine représente tout de même le tiers du poids démographique de la  Fédération de Russie. Mais c’est surtout le berceau de la Moscovie : historiquement, l’Ukraine et la Russie sont consubstantielles, d’autant que la première offre à la seconde un débouché sur la mer Noire, donc sur la Méditerranée ». De tels propos me paraissent démontrer les limites du pur exercice géopolitique lorsque ses critères d’analyse priment excessivement sur les impératifs civilisationnels et identitaires.

[16] Voir notre recension : http://www.polemia.com/article.php?id=1719

vendredi, 05 mars 2010

Analyse dissonante des élections en Ukraine

Analyse dissonante des élections en Ukraine

Un peu moins de 900.000 voix voix séparent Viktor Ianoukovitch (48.95% et 12 480 053 voix), et Youlia Timoshenko (45.47% et 11 589 638 voix) mais c'est le premier qui a été élu président, au cours d'une élection, dont la transparence a été soulignée par tous les grands états et les principales instances internationales mais qui a surtout mis un terme au mythe de la « démocratie Orange ». Seule la ravissante Youlia (l'Evita Peron de la mer noire), malheureuse perdante, a quelque peu tardé à reconnaitre le choix de ce peuple qui l'avait pourtant généreusement soutenu en 2004, veillant dans le froid et la nuit sur la place centrale de Kiev.

Orangisme, mauvaise gestion et dérives nationalistes
La gestion économique et politique des Orangistes n'a pas été brillante, aggravée il est vrai par la crise économique qui a très durement frappé le pays, comme le montre le graphique dessous sur l’évolution du PIB sur la période 2006-2009. 





Les brimades linguistiques à l'encontre de la minorité Russophone n'ont certainement pas contribué à favoriser leur implantation électorale à l'est du pays et le président sortant Viktor Iouchenko, héros de la démocratie et chouchou de l’Occident en 2004 (!), a réuni moins de 6% des suffrages et a choisi de décorer (entre les deux tours) la figure historique Ukrainienne de la collaboration nazie, Stepan Bandera, (dont les hommes ont tués plus de 100.000 Polonais pendant la seconde guerre mondiale). Il est d'ailleurs assez surprenant de n'avoir entendu aucun commentaire des démocraties Occidentales a propos de cette "émouvante cérémonie" de l’entre deux tours. Le premier ministre ayant alors affirmé que le président Ukrainien « crachait au visage de ses anciens sponsors». Logiquement, au second tour, les mouvements d'extrême droite Ukrainiens  ont appelé à soutenir le candidat Orange.
Cet échec flagrant des Orangistes est à la fois électoral mais également financier, la crise ayant privé de crédits leurs principaux bailleurs de fonds, les stratèges des diverses ONGs qui pullulent dans les pays frontaliers de la Russie, Ukraine et Géorgie en tête.
La victoire du candidat bleu n'est pas cependant une surprise totale pour tout commentateur initié, elle était même au contraire relativement prévisible. Un sondage de l'institut Ramsukov (pourtant affilié au parti du président défait) montre bien l'évolution forte des mentalités en Ukraine de 2005 (révolution Orange) à 2009 et le basculement "a l'est". En 2009 un sondage durant l'été montrait que le gouvernement Orange d'Ukraine était le gouvernement avec le soutien populaire le plus faible au monde, 85% des Ukrainiens désapprouvant l'action de leur gouvernement.

L'Ukraine plus unie qu'il n'y parait
Les élections de 2004 avaient dévoilées l'existence de deux Ukraines, la bleue (orientale, tournée vers la Russie) et l'orange (tournée vers l'Occident). Cette coupure n'est pas seulement politique et culturelle. Elle est aussi linguistique, les Ukrainiens « bleus » lorsqu'ils ne se considèrent pas comme Russes sont souvent Russophones voir parlent un dialecte local Ukraino-russe. Dans la partie Orange les populations sont Ukraïnophone (ou parlent un dialecte local Ukraino-polonais).

Les élections de 2010 ont quelque peu atténués cette coupure, comme le précise Jean Marie Chauvier, Ianoukovitch et son Parti remportent leurs plus grands succès dans les régions à majorité russophone de l’Est et du Sud : 90% à Donetsk (Donbass), 88% à Lugansk, 71% à Kharkov, 71% à Zaporojie, 73% à Odessa, 79% à Simféropol (Crimée), 84% à Sébastopol. Le leader « régionaliste » avait reçu l’appui du Parti Communiste et d’autres formations de gauche, en très net recul au premier tour.  Mais Ianoukovitch remporte également de substantiels succès dans l’Ouest ukraïnophone : 36% à Jitomir, 24% à Vinnitsa, 18% à Rovno, 41% en Transcarpatie…C’est seulement dans les régions de Galicie (Lvov, Ternopol, Ivano-Frankovsk), traditionnels bastions du nationalisme radical antirusse et antisémite, que ses scores sont les plus faibles : inférieurs à 10%.
Une remarque symétrique s’impose pour les résultats de Ioulia Timochenko. Majoritaire à l’Ouest (de 85 à 88% dans les régions galiciennes, 81% à Lutsk, 76% à Rovno, 71% à Vinnitsa, mais seulement 51% en Transcarpatie), elle remporte également des succès remarquables à l’Est (29% à Dniepropetrovsk, 34% à Kherson, 22% à Kharkov). Les 29% à Dniepropetrovsk ne sont pas le fruit du hasard : Ioulia en est originaire, et le clan industriel de cette région est rival de celui de Donetsk que domine Ianoukovitch. Comme quoi, là non plus, le clivage « est-Ouest » ou « Russophones contre ukraïnophones ne joue pas. La ville de Kiev se partage entre 65% pour Ioulia et 25% pour Viktor Ianoukovitch, alors que cette capitale est très majoritairement russophone. Le leader de l’Est industriel et ouvrier n’y est pas reconnu par une bourgeoisie et une « classe moyenne » pourtant très attachée à la langue et à la culture russes.
Enfin la percée du 3ième homme Sergueï Tiguipko montre bien que la lassitude des électeurs envers cette scission et l’intérêt que porte une grande partie d’entre eux à une éventuelle 3ième voie.


L'Ukraine nouvelle, pont entre l'est et l'ouest
Pourtant contrairement à ce que beaucoup de journalistes ou commentateurs ont affirmé, le résultat des élections en Ukraine ne traduit pourtant pas du tout un retour de l’Ukraine dans le giron Russe ou une quelconque résurgence impériale Russe qui serait un danger pour l’Ouest. Bien au contraire, la victoire bleue affirme la position de l’Ukraine comme nation périphérique de la Russie, sur la « route vers l’Europe » mais également comme « partenaire de nouveau fiable » pour la Russie. La position de Ianoukovitch de tendre la main à l’ouest et à l’est ne fait que confirmer la situation économique réelle du pays (afflux de capitaux Russes) mais également son besoin de capitaux Européens pour moderniser le pays et faire face au problèmes économiques aggravés depuis l’été 2008. A ce titre l’Ukraine de Ianoukovitch pourrait se retrouver dans la position d’un « pont » entre l’Europe et la Russie et non plus d’un fusible dirigé par Washington pour déstabiliser les relations Euro-Russes (guerre du gaz, conflits de pipelines etc.). La volonté du nouveau président de faire ses deux premiers voyages à Bruxelles et Moscou devrait rassurer les chancelleries Européennes mais également le Kremlin quand à la création du cartel énergétique Ukraino-Russe mais également du maintien de la flotte Russe en Crimée ou son opposition à ce que l’Ukraine rejoigne l’OTAN.

Comme l'a précisé le président Ukrainien lors de son investiture : " L'Ukraine poursuivra l'intégration avec l'Europe et les pays de l'ex-URSS en tant qu'Etat européen n'appartenant à aucun bloc ... L'Ukraine sera un pont entre l'Est et l'Ouest, une partie intégrante de l'Europe et de l'ex-URSS en même temps, l'Ukraine se dotera d'une politique extérieure qui nous permettra d'obtenir un résultat maximum du développement des relations paritaires et mutuellement avantageuses avec la Russie, l'UE, les Etats-Unis et autres pays qui influencent le cours des événements dans le monde". (source de l'extrait).

L’élection de Ianoukovitch semble donc ancrer l’Ukraine entre Bruxelles et Moscou, mais l’éloigner de Washington et cette ligne « globale » semble être souhaitée par le peuple Ukrainien, au début de l’année, un sondage du Kiev post montrait que 60% des Ukrainiens souhaitaient l’intégration à l’UE, 57% sont contre l’intégration à l’OTAN et seuls 7% voient la Russie comme un état hostile, 22% souhaiteraient un état unique Russie-Ukraine (Source :
Johnson Russia List 2010 issue 34 number 2).

Ianoukovitch, un « poutine ukrainien » pour la presse Occidentale ?
Il est symptomatique de voir à quel point la presse anglo-saxonne a critiqué les résultats de l’élection, l’égérie Kremlinophobe du Moscow Times, Youlia Latynina allant même jusqu’à expliquer le résultat des élections comme logique, les électeurs pauvres étant tentés par des votes Poujadistes (« letting poor people vote is dangerous »). Pas de chance pour elle, la carte électorale montre bien que c’est la partie la plus riche d’Ukraine, la plus industrielle qui est majoritairement « bleue » et pro Russe. 



Autre critique plutôt surprenante du résultat des élections, l'oligarque en exil Boris Berëzovski qui s'est fendu d'un commentaire des plus insultants (Uk / Ru), après avoir affirmé qu'il avait soutenu et financé la révolution orange.

L’Ukraine au cœur de l’Eurasie.
Le 1er janvier 2012 entrera en vigueur l’Espace économique commun Russie-Biélorussie-Kazakhstan impliquant la liberté de circulation des capitaux et des travailleurs. L’Ukraine est fortement invitée à s’y joindre ou, du moins, à s’en rapprocher. Les Russes insistent sur « l’intérêt pour l’Europe » d’encourager la formation de ce nouveau « marché commun » opérant une sorte de trait d’union entre les parties orientales (principalement la Chine) et occidentale (Union Européenne) de l’Eurasie. 
On peut se poser la question de savoir si le futur du continent ne se dessine pas également via la création de ces deux «zones», celle Occidentale de Bruxelles et celle Eurasiatique de Moscou. Une scission entre ces deux Europes, l’Occidentale, et l’Orientale reprenant la délimitation territoriale telle que le définit le projet de sécurité Européenne proposé par la Russie qui définit dans son point 10 la zone de Vancouver à Vladivostok comme séparée en deux, avec une partie qualifiée d’Euro-Atlantique et l’autre partie qualifiée d’Eurasiatique.

Pour l’heure comme le souligne l’expert Michael Averko, la tentative d’installer le nouveau mur entre les Europes à Kiev a échoué. L’impatience de l’OTAN et son extension à l’est forcenée, ou ses différentes actions militaires anti Serbes ont finalement contribué à involontairement et indirectement améliorer l’image de la Russie.

lundi, 15 février 2010

Offizielle Anfrage der französische Regierung an die USA über geheime LSD-Experimente in den 1950er-Jahre

Offizielle Anfrage der französischen Regierung an die USA über geheime LSD-Experimente in den 1950er-Jahren

F. William Engdahl - Ex: http://info.kopp-verlag.de/

Dieser Tage entsteht ein diplomatischer und politischer Skandal, der erhebliche Auswirkungen auf die amerikanisch-französischen Beziehungen haben könnte. Ausgelöst wurde er durch neue Untersuchungen des mysteriösen Ausbruchs von »Massenwahnsinn« in einem südfranzösischen Dorf, bei dem etwa 500 Menschen erkrankten und fünf starben.

LSD.jpgWie zuverlässige amerikanische Quellen berichten, ist beim Bureau of Intelligence and Research des US-Außenministeriums eine vertrauliche Anfrage des Büros von Erard Corbin de Mangoux, dem Chef des französischen Auslandsnachrichtendienstes DGSE (Direction Générale de la Sécurité Extérieure) eingegangen. Den Berichten zufolge bezieht sich die Anfrage auf die kürzlich veröffentlichte Darstellung über die Mitschuld der US-Regierung an dem mysteriösen Ausbruch von Massenwahnsinn in dem südfranzösischen Dorf Pont-Saint-Esprit im Jahr 1951.

Fast 500 Menschen waren damals betroffen, mindestens fünf von ihnen sind gestorben. Beinahe 60 Jahre lang hat man den Vorfall von Pont-St.-Esprit entweder auf eine Mutterkorn-Vergiftung – angeblich hatten die Dorfbewohner Brot gegessen, das mit bewusstseinverändernd wirkendem Schimmel verunreinigt war – oder auf eine organische Quecksilbervergiftung geschoben.

Ein kürzlich in den USA erschienenes Buch erhebt aufgrund von ausführlichen Interviews mit inzwischen pensionierten US-Geheimdienstmitarbeitern, die über die Vorgänge in Frankreich im Jahr 1951 direkt informiert waren, den Vorwurf, bei dem bis heute nicht geklärten Ausbruch von »Massenwahnsinn« in dem entlegenen Dorf handele es sich in Wirklichkeit um ein Top-Secret-CIA-Experiment, das im Rahmen des CIA-Forschungsprogramms MKULTRA (wie in ultra-geheim) durchgeführt wurde.

In seinem Buch A Terrible Mistake: The Murder of Frank Olson and the CIA’s Secret Cold War Experiments zu (Deutsch: Ein schrecklicher Fehler: Der Mord an Frank Olson und die CIA-Experimente im Kalten Krieg) dokumentiert der investigative Journalist H.P. Albarelli, dass der Krankheitsausbruch in Pont-St.-Esprit auf ein geheimes Projekt unter der Leitung der streng geheimen Abteilung Special Operations Division der US Army in Fort Detrick im US-Bundesstaat Maryland zurückzuführen ist, bei dem LSD versprüht wurde. Seiner Schilderung nach arbeiteten die Wissenschaftler, die mit der falschen Begründung verunreinigten Brotes oder einer Quecksilbervergiftung die wahre Ursache des Vorfalls vertuscht haben, für das Pharmaunternehmen Sandoz, das sowohl der US Army als auch der CIA mit LSD für Forschungszwecke geliefert hatte.

Eine französische Zeitung hatte damals über bizarre Vorfälle berichtet: »Es ist weder Shakespeare noch Edgar Poe. Es ist – leider! – die traurige Realität von Pont-St.-Esprit und seiner Umgebung, wo sich furchtbare Szenen von Halluzinationen abspielen, die geradewegs aus dem Mittelalter stammen könnten, Szenen voller Schrecken und Pathos, voll dunkler Schatten.« Die amerikanische Zeitschrift Time Magazine, deren Herausgeber Henry Luce eng mit den Propagandaaktivitäten der CIA in den 1950er-Jahren verbunden war, berichtete: »Betroffene fielen ins Delirium: Patienten warfen sich auf dem Bett hin und her, sie schrien entsetzt, aus ihrem Körper sprießten rote Blumen, ihre Köpfe hätten sich in geschmolzenes Blei verwandelt. Aus dem Krankenhaus von Pont-Saint-Esprit wurden vier Selbstmordversuche gemeldet.«

Laut Albarelli heißt es auf der Website des US-Justizministeriums bezüglich der Gefahren von LSD, Anfang der 1950er-Jahre sei »das Chemieunternehmen Sandoz so weit gegangen, der US-Regierung LSD als potenzielle geheime Waffen chemischer Kriegsführung anzupreisen. Sein Hauptverkaufsargument war dabei, schon eine kleine Menge könne, dem Trinkwasser zugesetzt oder in der Luft versprüht, eine ganze Armee von Soldaten orientierungslos, psychotisch und damit kampfunfähig machen.«

Seiner Darstellung nach lagen der CIA verschiedene Vorschläge amerikanischer Wissenschaftler vor, der Wasserversorgung einer mittelgroßen bis großen Stadt eine größere Menge LSD unterzumischen, doch nach Angaben ehemaliger Beamter der Behörde »ist das Experiment wegen der unerwarteten Zahl von Todesopfern bei der Operation in Frankreich nie genehmigt worden«.

Im Rahmen der Forschung über LSD als Offensivwaffe hat die US Army laut Albarelli in der Zeit von 1953 bis 1965 über 5.700 ahnungslose amerikanischen Militärangehörigen Drogen verabreicht. Aufgrund geheimer Verträge mit mehr als 325 Colleges, Universitäten und Forschungseinrichtungen in den USA, Kanada und Europa wurden gemeinsam mit der CIA an weiteren 2.500 Personen umfangreiche Tests mit LSD und anderen Drogen durchgeführt, viele davon waren Krankenhauspatienten und College-Studenten.

Ein Beamter der DGSE, der nicht namentlich genannt werden wollte, erklärt: »Sollten sich die Enthüllungen im Einzelnen als wahr erweisen, wäre dies für die Menschen in Pont-St.-Esprit und für alle Bürger Frankreichs äußerst bedrückend. Dass Regierungsbehörden der Vereinigten Staaten bewusst unschuldige ausländische Bürger zur Zielscheibe eines solchen Experiments machen würden, stellt einen Verstoß gegen das Völkerrecht und eine Verletzung internationaler Verträge dar.«

Montag, 08.02.2010

Kategorie: Allgemeines, Enthüllungen, Geheimdienste, Wissenschaft, Politik

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samedi, 13 février 2010

Herman van den Reeck, een zoeker in woelige tijden

Op 20 maart 2010 opent in het Bormshuis een nieuwe tentoonstelling:

Herman van den Reeck, een zoeker in woelige tijden

Ex: Nieuwsbrief Deltastichting - N°32 - Februari 2010
VandenReeck_afb132.jpgDit jaar is het 90 jaar geleden dat op 11 juli 1920 de student Herman van den Reeck op de Grote Markt te Antwerpen tijdens een verboden Guldensporenbetoging werd neergeschoten. Amper 19 jaar oud was hij een kind van zijn tijd. Hij behoorde tot die groep van jonge mensen die aan het Atheneum te Antwerpen, toen een kweekschool van radicale Vlaams-nationalisten, het geluk hadden leraren te hebben als Pol de Mont en dr. August Borms. Van den Reeck schuwde noch de verantwoordelijkheid in de studentenbeweging, noch de actie, en dit in een tijd waarin jongeren naast hun inzet voor Vlaanderen zich vooral aangesproken voelden door een gedachtewereld die soms troebel en onklaar was met een vleugje humanistisch internationalisme en de nooit-meer-oorloggedachte die leefde na de ‘Groote Oorlog’. Die jongeren, en dus ook Van den Reeck, zoekers in een woelige tijd, hoopten op een betere wereld én een vrij, onafhankelijk Vlaanderen.
 
Tekenend voor die tijd is dat vooral expressionistische jonge dichters na de dood van Van den Reeck gedichten aan hem opdroegen: Victor Brunclair, Wies Moens, Paul van Ostayen, Gaston Burssens, Marnix Gijsen en Geert Pijnenburg, René de Clercq en anderen. Ook August Borms schreef in zijn cel te Leuven een "Kerkerbloempje" over zijn oud-leerling.
 
De uitvaart voor Van den Reeck, die de eerste "Vlaamse Martelaar sedert 1830" werd genoemd, groeide uit tot een groots huldebetoon én een anti-Belgische manifestatie.
 
De zinloze dood van Herman van den Reeck, wiens enige misdaad was te proberen te verhinderen dat de politie een Vlaamse leeuwenvlag zou afnemen van meisjesstudenten mag niet vergeten worden. Daarom betoont het Bormshuis met deze tentoonstelling hulde aan de jonge zoeker Herman van den Reeck.
 
De tentoonstelling opent op zaterdag 20 maart 2010 om 14 u. in het Bormshuis, Volkstraat 30, 2000 Antwerpen. Iedereen is welkom.
 
De tentoonstelling is gratis te bezoeken in het Bormshuis van dinsdag 23 maart tot en met woensdag 30 juni tijdens de openingsuren op dinsdag, woensdag en vrijdag van 14 tot 17 u. en op zaterdag van 10 tot 16 u..
 
Begeleide groepsbezoeken (€ 1 p/p) aan de tentoonstelling (met inbegrip van het Bormsmuseum) zijn ook mogelijk buiten deze openingsuren, mits voorafgaande afspraak met conservator Lieve van Onckelen op het volgende E-postadres of op het telefoonnummer – 03 238 27 49, na 18 u.)

vendredi, 12 février 2010

Phase 2 in Kosovo. Total ethnic cleansing

Phase 2 in Kosovo. Total ethnic cleansing

     
di: Ugo Gaudenzi _ http://www.rinascita.eu/    

 

 
Kosovo%20Ethnic%20Map.jpg
The NATO occupation forces in Kosovo Metohija (the Serbian province, which, since 1999, has been ripped off Belgrade by Western aggression), will be, on the 1st of February of this year, reduced of 2600 squads. The Atlantic armed reduction to a total of 10 thousand squads has been “stylishly” justified by the concerned governments, as a “tactical improvement”, which could guarantee the troops with a “major flexibility” during the operations of interposition among the various ethnic groups (mainly: Albanians, Skipeteers, Serbians, Croatians and Gorans), which are  fighting with no interruption whatsoever after the mass expulsion of non-Albanians from the Serbian province (250 thousand is the count of the refugees beyond borders). In truth, the infinite Atlantic war has moved its front (in Afghanistan) and the reduction of the NATO troops in Kosovo is directly linked to the US request for colonial allies to increase the presence of a Western army in the Mountain nation.
For what concerns Kosovo Metohija – the harshest wound inflicted by Atlantics in the heart of Europe, still looking for its own freedom, after World War II – we have to underline how, after the territory forced division, they are now planning the eradication of Kosovo from Serbia. After 11 years of occupation, the NATO Atlantic commando has decided to force the status quo, transforming the 5 operation forces, placed to keep an eye on the North, South, East, West and Central part of the region, in an only device of strategic responsibility over all the Kosovarian territory, left aside the 5 zone dislocations: every Kfor sub-command has, since this February, the possibility of intervention during emergencies, everywhere throughout Kosovo.
The strategic idea is that of forcing, even military, the unification of Kosovo Metohija under the Albanian “government” of Pristine. Every race which is hostile to the separation of the province from its homeland, will be weakened, even at the cost of using acts of terrorism and of Albanian violence against churches and Serbian enclaves, as a pretext for a forced pacification. It has already occurred in 2004.
The very same declaration of Albanian “independence” of Pristine, immediately after the birth of Eulex, on February 2008, had been possible, thanks to the transformation of UCK gangs of terrorism into “internal police forces” in zones controlled by Albanians. Eulex’s mission, UE’s “general affairs” board (obviously not elected by the members of the Community), had been decided, two years ago, with the excuse of implementing the 1244 resolution of the UNO. The very same Eulex – which has in Kosovo, an armed force of 1400 “gendarmes”, among civilians and soldiers – ensures “safety”, i.e. armed control of the denser regions, still inhabited by Serbians, especially in the Northern part of the province (Mitrovica).
The eradication of the populations identities.
This is the Atlantic mission and of the so-called European Union.
Of which, colonial Italy is, a happy member.

jeudi, 11 février 2010

L'Union Européenne profite au crime organisé

Ex: http://www.lechocdumois.com/

La Roumanie et la Bulgarie, entrées dans l’Union européenne en janvier 2007, devaient accéder à l’espace Schengen en 2009. Déjà reporté à 2011, ce nouvel élargissement n’arrivera vraisemblablement pas avant 2013, car la Commission de Bruxelles doit faire face à des imprévus de taille : la corruption endémique des élites de ces pays et l’augmentation notable du crime organisé en Europe depuis leur entrée dans l’Union.

La Commission vient d’ailleurs de commander une étude fort discrète au criminologue bulgare Tihomir Bezlov, ancien prestataire de service de Lehman brothers ou de la Deutsche Bank, pour mesurer l’ampleur du phénomène et le combattre. Selon lui, l'entrée de ces pays dans l’U.E. a eu des effets secondaires étonnants sur le crime organisé qui, saisissant toutes les opportunités à tirer de cette intégration, s’est lancé en politique pour obtenir des postes clefs à tous les échelons du pouvoir et de l’administration. En 2008, la Commission de Bruxelles a rendu un rapport des plus critiques sur la corruption et les liens évidents entre classe politique bulgare et gangstérisme, bloquant même 500 millions d’euros de fonds européens en attendant une meilleure gestion de Sofia. Elle menace également de suspendre les milliards des fonds structurels de développement. Ici, les policiers craignent pour leur vie depuis que le ministre de l’Intérieur, Rumen Petkov a été contraint de démissionner, en avril 2008, sous la pression de la Commission. Soupçonné de détourner les subventions au profit du crime organisé, il était surtout accusé d’avoir livré l’identité d’un agent infiltré dans un trafic d’êtres humains !

Selon Europol, l’arrestation de criminels bulgares et roumains a augmenté de 40 % depuis leur entrée dans l’U.E. Les groupes criminels bulgares opèrent spécifiquement sur les escroqueries à la carte bleue, le trafic de drogues, de cigarettes, d’armes, de métaux et, principalement, d’êtres humains : mendicité organisée, trafic d’organes, d’enfants, prostitution, industrie pornographique. A Sofia, la capitale de la Bulgarie, on peut acheter un bébé pour 30 000 euros. D’après Bezlov, dont l’analyse est confirmée par un rapport d’Europol (2008), les criminels « bulgares » sont en fait « des Roms et des Turcs ethniques, implantés en Bulgarie ». Les Bulgares turcisés règnent sur le trafic d’héroïne, en lien avec la Turquie. Les Roms, eux, sont les patrons de l’enlèvement de femmes « ethnics bulgarians » – traduire par « Bulgares de souche ». Selon les estimations les plus modestes, l’exploitation sexuelle de ces femmes rapporte à leurs exploiteurs entre 900 millions et 1,8 milliard d'euros par an, soit 3,6 % à 7,2 % du PIB bulgare !

Comme tous les groupes criminels organisés, Roms et Turcs de Bulgarie sortent volontiers de leur domaine de prédilection. En octobre 2008, une enquête de la P.J. de Varna, sur la mer Noire a mis à jour un réseau contrôlant les revenus de la drogue et de la prostitution sur la côte. A sa tête, trois conseillers municipaux : deux représentants du parti Turc local et un militant des « libertés et des droits de l’homme » !

Les gangs roumains, eux, ont tendance à s’agrandir depuis leur entrée dans l’U.E ! Les gangs roumains multiplient les activités et se fixent des objectifs de plus en plus importants. Ils sont impliqués, dans la majorité des Etats membres de l’Union, dans le trafic de drogue, d’êtres humains, les fraudes numériques et les escroqueries à la carte bleue. Du fait de leur réputation de violence parfaitement méritée, ils compensent leur faible nombre par le recrutement d’autochtones fidèles. En Italie, leur ascension criminelle, rapide et brutale, est semblable à celle de la mafia albanaise (elle aussi basée sur des critères ethniques) : les Roms originaires de Roumanie s’emparent – au détriment des mafias italiennes ! – de nombreux « marchés » criminels. Leur principale base de travail est le port de Constansta, sur la mer Noire, une immense plaque tournante du commerce international, avec des flux difficiles à contrôler. Roumanie et Bulgarie servent également de lieu de passage, du fait de leurs frontières poreuses, aux trafics venus d’Europe de l’Est.

La Commission de Bruxelles a mis en place, en 2008, des commissions de coopération et de vérification pour aider Sofia et Bucarest à combler leurs lacunes dans la lutte contre la criminalité et la corruption. En attendant, le 29 janvier, grâce au mandat d'arrêt européen, un proxénète dit « Roumain » était extradé de Bucarest vers la France, où il exploitait 80 jeunes femmes depuis un an.

Patrick Cousteau



mardi, 09 février 2010

Kosovo, Phase 2: l'épuration ethnique totale!

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Udo GAUDENZI:

 

Kosovo, Phase 2: l’épuration ethnique totale!

 

Depuis le premier février 2010, les forces d’occupation de l’OTAN ont été diminuées de 2600 hommes ; ces forces sont stationnées dans la province serbe de Kosovo, arrachée à la tutelle de Belgrade par l’agression atlantiste de 1999 et la proclamation unilatérale d’indépendance du Kosovo en février 2008. La réduction de la présence atlantiste armée à 10.000 hommes au total a été justifiée « avec élégance » par les gouvernements intéressés comme une « amélioration d’ordre tactique », garantissant aux troupes déployées une « flexibilité accrue » lors de leurs interventions, quand elles s’interposent entre les diverses ethnies (principalement Albanais « skipetars », Serbes, Croates et Goranis), qui s’opposent les unes aux autres de manière ininterrompue depuis l’expulsion en masse de tous les non Albanais de cette province serbe ; il y a en effet 250.000 réfugiés au-delà des frontières du nouvel Etat autoproclamé. En réalité, la « guerre infinie », voulue par les atlantistes, réclame des troupes ailleurs, en Afghanistan par exemple, ce qui amène à réduire les effectifs de l’OTAN au Kosovo, mesure directement liée à la requête formulée par les Etats-Unis à l’endroit de leurs « alliés » (il faudrait dire de leurs « vassaux » ou de leurs « colonies »), à qui ils demandent d’augmenter les effectifs de leurs troupes dans l’Hindou Kouch.

 

Revenons au Kosovo, à la blessure la plus grave qu’ont infligée les atlantistes au cœur d’une Europe toujours à la recherche de sa liberté depuis la fin de la seconde guerre mondiale. Depuis la partition forcée du territoire initial de la Serbie, nous constatons que les atlantistes veulent désormais « compléter » leur objectif : arracher définitivement tous les liens qui pourraient encore unir le Kosovo à la Serbie. Depuis onze ans, l’OTAN occupe le pays et vient de décider, depuis son commandement suprême, de renforcer le statu quo, de le pérenniser, en transformant la structure de commandement des forces atlantistes au Kosovo. Cette structure prévoyait au départ le déploiement de cinq forces d’intervention distinctes, contrôlant respectivement le nord, le sud, l’est, l’ouest et le centre de la province. Dorénavant, il n’y aura plus qu’un seul dispositif, qui aura compétence stratégique sur l’ensemble du territoire kosovar, au lieu des cinq zones de compétence initiales. Toute subdivision du commandement de la Kfor dispose donc, depuis ce premier février, de la possibilité d’intervenir dans des situations conflictuelles d’urgence partout sur le territoire du Kosovo et non plus seulement dans la zone circonscrite qui leur était préalablement assignée.

 

L’idée stratégique qui se profile derrière cette modification structurelle est d’obliger toutes les parties concernées d’accepter, y compris sur le plan militaire, l’unité de facto du Kosovo, sous la férule du gouvernement albanais de Pristina. Toute ethnie hostile à la sécession kosovare et donc fidèle, dans une certaine mesure à la Serbie, sera désormais affaiblie dans ses revendications et ses aspirations et ne pourra plus évoquer comme prétexte les actes de terrorisme et de violence perpétrés par les Albanais contre les églises et les enclaves serbes, actes de violence qui avaient pourtant justifié la présence des troupes de la Kfor, appelées à « pacifier » la région. Ce refus de prendre en compte les déprédations et le vandalisme sauvage des Islamo-Albanais, on avait déjà pu l’enregistrer en 2004.

 

La déclaration unilatérale d’indépendance par les Albanais de Pristina s’est faite, rappelons-le, immédiatement après la création de l’Eulex, en février 2008. la création de l’Eulex avait eu pour corollaire de transformer les bandes terroristes de l’UÇK en une « force de police intérieure » dans les zones contrôlées par les Albanais. La « mission » de l’Eulex, un organisme créé par le Conseil des « affaires générales » de l’UE (organisme qui, bien entendu, n’est pas élu par les peuples de l’Union), avait déjà été décidée deux ans auparavant, sous le prétexte de traduire dans la réalité kosovare la résolution 1244 des Nations Unies. L’Eulex alignait au Kosovo une force de quelque 1400 gendarmes plus un nombre complémentaire de civils et de militaires. Elle devait assurer la « sécurité » et le contrôle armé des zones encore densément peuplées de Serbes, surtout dans le nord de la province, autour de la ville de Mitrovica. Derrière tout le prêchi-prêcha édulcorant des instances atlantistes et mondialistes, qui nous parlent de « démocratie » et de « droits de l’homme », l’objectif réel et concret de cette opération était de déraciner les Serbes, de les arracher à la terre kosovare et de les contraindre à l’émigration. Bref : l’objectif des atlantistes est de faire et de parfaire de manière totale et irréversible ce qu’ils ont bruyamment reproché aux autres de faire de manière ponctuelle et circonstanciée : de l’épuration ethnique à grande échelle, sous le couvert de propos lénifiants.

 

Voilà le type de mission que se donnent les atlantistes et leurs auxiliaires lâches et véreux de l’Union Européenne. Et les dirigeants de la colonie US qu’est devenue l’Italie ont participé allègrement à ce crime.

 

Udo GAUDENZI.

(éditorial du journal « Rinascita », Rome, 3 février 2010).

Site internet : http://www.rinascita.eu/

Courrier électronique : Rédaction de Rome : redazione@rinascita.net

Rédaction de Belgrade (Mirjana Vukidic – beograd@rinascita.net )

samedi, 30 janvier 2010

L'Europe, la forme et le fond

drapeaux-europe-27_1235928116.jpgL’Europe, la forme et le fond

par Claude BOURRINET

En fondant le questionnement, au sujet du projet fédéraliste européen, sur des considérations uniquement techno-administratives, on se condamne à ne trouver aucune réponse qui soit véritablement… européenne. Ce type de réflexion ne peut s’inscrire que par un élargissement à des problématiques liées à la nouvelle donne planétaire, et à une plongée dans ce qui constitue l’âme de l’Europe, à ses racines et à son identité.

Que le vieux continent soit devenu in fine une zone libérale chapeautée par une administration pléthorique et tatillonne (bien qu’il faille relativiser et jauger son importance par rapport à celle des administrations nationales), c’est plus que probable. Non parce que le modèle français, via ses énarques exportés à Bruxelles, s’imposerait à une Europe qui, pourtant, est loin d’être francophile, mais parce qu’un tel schéma a toujours été voulu, programmé, patiemment installé par les Anglais et leurs émules libéraux. On sait que, par-delà Albion, ce sont les U.S.A. qui mènent la danse, lesquels se satisfont d’une vaste zone ouverte au marché mondial, et surtout nord-américain, couplée à un État qui vide les nations de leurs pouvoirs régaliens, et se réserve de plus en plus des capacités à encadrer sévèrement des populations récalcitrantes, à les manipuler, à leur désigner l’Ennemi, à, au bout du compte, les arracher à leurs racines pour les livrer à l’oligarchie transatlantique. Ce n’est pas la taille des cornichons ou la nature du chocolat qui désignent le problème essentiel de l’Europe aujourd’hui, bien que, effectivement, ce dirigisme orienté vers la défense de groupes de pression particuliers montre bien quels intérêts défendent les commissaires européens, mais ce que la Nouvelle Classe dirigeante transnationale veut faire de ce que des décennies de mensonges ont transformé en « espace », concept neutre et aseptisé par excellence.

On sait par exemple que la droite, qui n’a plus rien à voir avec celle de jadis, du moins avec, en France (l’équivalent étant le protestantisme luthérien à la Bismarck, qui a donné le « modèle rhénan ») cette aile catholique qui se méfiait du pouvoir de l’argent et désirait protéger les ouvriers de l’arbitraire des puissants, a rompu avec cette morale traditionnelle pour faire son Mai 68, sa « libération » (voir Sarkozy & Co), et prône sans retenue un amour immodéré pour la jouissance sans scrupule de Mémon et de ses séductions. Cette droite a puisé sa légitimité chez Reagan et Thatcher, et n’a plus peur d’user de codes idéologiques et langagiers qui, il y a peu, suffisaient à susciter l’ire de nos intellectuels patentés et de nos professionnels de la contestation, qui sont passés d’ailleurs avec plume et bagages dans le camp atlantiste et sioniste. Maintenant, on peut être pour une liberté presque intégrale au sujet des mœurs, de l’économie, du moment que cela relève de la vie privée; on flatte un individualisme qui contamine la sphère publique, avec tous les effets néfastes que cela suppose; on a le loisir d’abandonner femmes et enfants, de montrer ses fesses à la télévision, d’investir dans la pornographie ou les sodas alcoolisés pour jeunes, de louer tout ce qu’il y a de vulgaire, pourvu qu’on soit bon producteur, rentable et énergique, et citoyen soumis, éponge à propagande ou propagandiste soi-même. C’est pourquoi on saisit dans la marche contemporaine de la société dite « postmoderne » une sorte de dichotomie entre une dimension « soft » de l’existence, alimentée par un hédonisme de supermarché, et une autre plus « hard », sécuritaire, démagogique, utilisant toutes les grosses ficelles de l’instrumentalisation populaire, la sale gueule des terroristes, les yeux louches des pédophiles, le crâne ras des néo-nazis, pour instaurer un État policier, avec sa surveillance ubiquiste. Atomisation sociale et flicage collectif vont donc de pair, gauche culturelle et droite musclée se rejoignent pour décerveler une population asthéniée par les désirs exacerbés et la peur injectée comme un sérum paralysant.

Mais d’Européens, nulle part !

La vérité est qu’il n’existe pas d’Europe. Cette vaste zone placée à la pointe de l’Eurasie appartient au dominion anglo-saxon. On l’a privée de son indépendance, de la maîtrise de son destin, de son âme. Poser la question en se demandant si elle peut être fédéraliste, ou si c’est impossible, est bien sûr utile, mais à condition de répondre d’emblée par la négative en raison des contraintes idéologiques, géopolitiques, économiques que je viens d’évoquer.

Il me semble au demeurant que les paramètres ont singulièrement évolué depuis une dizaine d’années. La nouvelle donne créée par l’abandon de la notion d’« Europe puissance », la défaite de ses partisans, et le triomphe des libéraux purs et durs, américanophiles, à la Sarkozy et à la Merkel (qui sont de véritables gouverneurs américains), ont démodé la contestation des 35 heures, des fonctionnaires, enfin tout ce qui nourrissait autrefois le mépris pour les assistés et les profiteurs du service public etc. d’une droite obsédée par l’économie.  Le problème crucial, pour ceux qui veulent refonder le politique, s’est déplacé et concerne par exemple le sens que l’on donne au travail humain, avec d’autres questions aussi importantes que l’art de vivre et le rapport à la nature (qu’on ne doit pas laisser aux récupérateurs écolo-gauchos). Notre tradition dorénavant s’inscrit dans une très longue histoire, qui recoupe parfois celle que l’on situe à gauche.

De la même façon, la décentralisation à la française, fondation d’un nouveau fédéralisme, dès lors qu’elle veut répondre à un fait historique assez irrémédiable qu’est la Révolution et la disparition des corps intermédiaires de l’Ancien Régime, paraît être un projet irréalisable, d’autant plus qu’il n’existe guère, hormis de façon nuancée dans certaines régions périphériques comme la Corse ou le Pays basque (et encore !), de substrat culturel pour sustenter une véritable autonomie de Régions que l’on peut d’ailleurs de plus en plus modeler à son gré, comme le montre la nouvelle réforme des collectivités territoriales. En vérité, on peut voir les départements comme des gouffres financiers, avec leurs potentats locaux et leur mini-centralisme à la Clochemerle, mais pour le Français moyen, c’est un legs de la révolution qui a maintenant force de tradition et d’identité. L’aventure récente de l’imposition d’une nouvelle plaque minéralogique en fait foi.

Pourquoi une telle réaction, et que représentent les pouvoirs de proximité pour l’homme de la rue ? Tout simplement un moyen, sans doute illusoire, de résister aux effets dissolvants et mortifères de la mondialisation, un outil faible mais réel pour amortir, tant que faire se peut, un pouvoir incontrôlable. Un peu comme le serait la nation si elle protégeait vraiment les citoyens.

L’attachement d’ailleurs à la fonction publique, qu’on soit fonctionnaire ou usagé, se présente dans les mêmes termes.

Il est donc nécessaire, pour comprendre les nouvelles données politiques, et la question toujours à fonder de la re-naissance d’une Europe véritable, de rester très près des angoisses de nos compatriotes, de les comprendre, de saisir la logique mondialiste qui agit jusque dans nos besoins les plus quotidiens, et en même temps de voir loin, de savoir d’où partir pour réactiver ce qui reste encore occulté, et qui se situe au fond de nous-mêmes, dans nos langues européennes, et dans notre territoire, qui est à saisir comme un héritage et comme un message.

Le problème n’est donc pas de savoir quelle forme doit avoir l’Europe, mais quelle sera sa nature, son identité.

Claude Bourrinet

vendredi, 15 janvier 2010

Gli eurocrati minacciano l'Islanda

583644_photo-1247854588203-1-0.jpgGli eurocrati minacciano l`Islanda

Per il ministro spagnolo Moratinos e i suoi accoliti, Reykjavik non può esimersi dal rimborsare Londra e L’Aja

Andrea Perrone

Se il referendum islandese boccerà la legge Icesave inevitabilmente ci sarà un rallentamento nel processo di adesione all’Unione europea. Sono le minacciose dichiarazioni del ministro spagnolo, Miguel Angel Moratinos (nella foto), presidente di turno dei ministri degli Esteri della Ue. La legge Icesave è stata varata dal governo islandese per rimborsare Gran Bretagna e Olanda i cui cittadini hanno subito perdite per la crisi finanziaria. “È normale - ha proseguito Moratinos, presidentedei ministri degli Esteri Ue - che il popolo islandese si opponga a questa legge, ma ci sono Stati membri che verrebbero colpiti nei loro interessi. E questo - ha concluso - porterebbe inevitabilmente a un rallentamento del processo di adesione alla Ue. Ma spero ciò non avvenga””””.
Nei giorni scorsi però il presidente della Repubblica islandese, Olafur Ragnar Grimsson, si è rifiutato di firmare una legge che impegnava il Paese a onorare i debiti contratti dalle sue banche, ora nazionalizzate. In sostanza Grimsson ha deciso di non autorizzare l’uso dei fondi pubblici per il rimborso dei debiti esistenti nei confronti degli istituti di credito olandesi e britannici, rimettendo la decisione nella mani del popolo per una consultazione referendaria. In quell’occasione il capo di Stato ha precisato che “gli islandesi vogliono essere padroni del proprio futuro”. Una scelta unica per un Paese che ha subito una dura bancarotta a seguito della tempesta finanziaria globale. Grimsson è stato indotto a trovare questa soluzione grazie alle petizioni messe in atto da vari comitati di cittadini islandesi, convinti di non dover essere loro a pagare per gli errori delle banche, hanno indotto Grimsson alla difficile scelta di accettare il referendum popolare. Il segretario di Stato britannico alla Finanze, Paul Myners, coinvolto in prima persona per via del ruolo giocato dal Regno Unito nella crisi islandese, ha espresso anche lui le sue minacce, facendo capire chiaramente che un voto popolare contrario al rimborso equivarrebbe a spingere l’Islanda fuori dalla comunità finanziaria internazionale. Ancora più duri gli olandesi. “Devono pagare”, ha tuonato senza mezzi termini il ministro dell’Economia de L’Aja, Wouter Bos.
A schierarsi invece al fianco dell’Islanda è stata invece la Lettonia. Tanto che il ministro degli Esteri di Riga, Maris Riekstins, ha denunciato “la risposta esagerata di alcuni politici europei”, sottolineando che le minacce contro Reykjavik a seguito del rifiuto del presidente di firmare un rimborso a Londra e L’Aia non sarebbero mai state proferite se il debitore fosse stato invece la Francia. “È questa una reazione dovuta al fatto che l’Islanda è un Paese piccolo? È difficile immaginare che osservazioni simili si sarebbero sentite se, per esempio, una tale misura fosse stata presa dal presidente francese”, ha puntualizzato ancora Riekstins.


09 Gennaio 2010 12:00:00 - http://www.rinascita.eu/index.php?action=news&id=289

mardi, 12 janvier 2010

L'offensive contre l'Europe passe par la Grèce

greek-riot-police-falling.jpgL’offensive contre l’Europe passe par la Grèce

Une tribune libre de Roberto Fiorini

On pourrait résumer ce qui arrive à la Grèce et, demain, à l’Europe, en une seule formule : « lorsqu’on veut tuer son chien, on dit qu’il a la gale ».

On dit que les déficits sont colossaux, et on sacrifie tout sur l’autel du nouveau Dieu Unique…

Les procédés à l’œuvre en Grèce, le sont aussi en France, mais avec des méthodes plus douces : la vaseline médiatique.

La réalité n’est pas celle annoncée par nos médias. Elle peut être vue de façon bien différente, si on y regarde de plus près.

Guerre contre l’Euro ?

Les déclarations des agences de notation étasuniennes en défaveur des PIGS (acronyme pour Portugal, Irlande, Grèce, Spain – Espagne – ; mais aussi mot méprisant signifiant « cochons », en anglais) correspondent à une manœuvre délibérée, organisée de toute pièce par les ennemis de l’Europe des peuples et relayée massivement par nos médias et ceux qui les contrôlent, pour déstabiliser l’Euro, et par ricochet, faire remonter le Dollar, au moment où la parité avec l’Euro allait clairement en sa défaveur.

L’Euro a chuté après la dégradation, par l’agence Fitch, de la note de la dette à long terme de la Grèce, ainsi que des notes des quatre principales banques commerciales du pays, toutes ramenées de A– à BBB+.

La parité Dollar / Euro est passée de 1,51 le 25 novembre 2009, à 1,43 le 18 décembre 2009. Ainsi, en peu de temps, la parité Dollar / Euro a baissé de 5 % en défaveur de l’Euro, sur une simple opération de communication, savamment orchestrée par les adversaires de l’Europe : Britannia et America.

Les agences de notations diffusent le mensonge

« L’agence Standard & Poor’s a, elle aussi, abaissé mercredi [16 décembre] la note de la Grèce d’un échelon et averti qu’elle pourrait aller plus loin encore si le gouvernement ne parvenait pas à réunir les soutiens politiques nécessaires à l’assainissement des finances publiques. » (NDLR : si toute la classe politique et syndicale ne suit pas le diktat des marchés, ce sera pire pour eux.)

Ces mêmes agences de notations qui sont à l’origine de la crise, se permettent de donner des avis qui servent d’ « étalon de mesure » à tout un système financier défaillant, alors qu’elles n’ont rien vu venir de cette crise, ou pire encore, qu’elles l’ont orchestrée et couverte. Voilà ce qui sert de « baromètre », de référence suprême, à nos élites politiques, médiatiques et à tous leurs cortèges de spécialistes et d’intellectuels de salons télévisuels.

Mais ces manœuvres ne sont qu’un élément mineur dans le libre échange mondial, car accepter de commercer alors qu’on n’a pas défini de parités de monnaies, c’est un suicide… Un libre échange sans parité de monnaies, que les élites corrompues, au pouvoir dans nos soi-disant démocraties, ont accepté de jouer, au détriment de nos emplois et de notre protection sociale.

Historique d’une mise en scène ? A vous de juger en quatre temps…

1 – Élection d’anciens « cadres » de l’OCDE pour assainir la situation des finances grecques :

7 octobre 2009 : la Grèce se dote d’un gouvernement centré sur l‘économie

« Ces cadres qui ont tous deux travaillé pour l’OCDE, l’Organisation de coopération et de développement économique, vont devoir mettre en œuvre les promesses de Georges Papandréou : relancer une économie menacée par la récession et assainir les comptes publics, à l’heure où le déficit budgétaire est évalué à 6% du PIB. »

2 – Découverte par la nouvelle équipe élue, de l’état présumé catastrophique de la dette grecque :

1er décembre 2009 : l’UE au chevet de la Grèce

« Le ministre de la Cohésion sociale (Grec) , en visite à Bruxelles, a affirmé au quotidien athénien que “le déficit des assurances atteindra les 4 milliards d’euros si on n’intervient pas au plus vite et de manière efficace. (…) En l’espace d’un mois, le déficit grec est en effet passé de 6% à 12.7% du PIB. »

Pourtant, « Il est vrai que la situation budgétaire du gouvernement grec est précaire. Sa dette devrait dépasser 110% du PIB l’année prochaine. C’est beaucoup, mais elle était de 118% en 1999, la dette du Japon atteindra bientôt 200%, et celle des Etats-Unis, 100%. Il reste que les précédents gouvernements grecs n’ont guère brillé par leur discipline : la dernière fois que le budget fut à l’équilibre, c’était en 1972 – sous la dictature des Colonels… »

NDLR : la Grèce s’est mise cette dette sur le dos pour faire comme les copains, qui jouent le jeu du libre échange. D’autres régimes, plus rigoureux, refusaient de payer des intérêts à des usuriers apatrides… C’est certainement pour cela qu’ils ont été renversés, d’ailleurs : démocrates et usuriers cohabitent dans la démocratie sociale, le régime préféré des copains/coquins, néo-esclavagistes.

Aujourd’hui, la Grèce achète de l’argent, 2,6 % plus cher que l’Allemagne sur les marchés. On ne prête pas aux pauvres, et cela pèsera forcément sur les comptes de la nation grecque et de son peuple qui, au final, paye toutes les factures publiques.

3 – Annonce de mesures d’austérité, avec les syndicats, pour canaliser le mécontentement (…et empêcher qu’il ne se manifeste autrement et directement, par le peuple ? En France, le mécontentement a aussi été canalisé aussi par les syndicats, au plus fort de la crise, mais ils n’ont rien obtenus de concret pour les travailleurs. Les méthodes sont identiques sur tout le continent européen avec, parfois, des variantes locales) :

15 décembre 2009 : Grèce : les mesures de rigueur annoncées ne satisfont personne

« Une centaine de syndicalistes grecs ont exprimé mardi leur inquiétude concernant l’avenir en bloquant les portes du ministère grec des finances, après la diminution des dépenses de protection sociale dévoilées lundi soir parmi les mesures de rigueur budgétaire rendues publiques par le gouvernement Papandreou. Il y a des mesures qui vont nous laisser sans emploi affirme Theodoros Georgiou, un syndicaliste du secteur de la construction, sans assurance, sans éducation scolaire, sans sécurité sociale. Il y a des mesures qui ne peuvent pas rester sans réponses et c’est ce que nous faisons ici”.

4 – Annonce de privatisations pour faire rentrer de l’argent dans les caisses :

17 décembre 2009 : la Grèce va privatiser pour éponger sa dette

« Une série de privatisations devrait rapporter environ 2,5 milliards d’euros à la Grèce et devrait permettre à Athènes de combler quelque peu son déficit public, a déclaré jeudi à Reuters le ministre des Finances Georges Papaconstantinou. (…) Signe des difficultés du pays, il a expliqué que les hôpitaux grecs devaient environ cinq milliards d’euros aux laboratoires pharmaceutiques. »

Une belle orchestration des événements !

Si la situation grecque n’a pas été orchestrée de main de maîtres, c’est un sacré paquet de coïncidences en peu de temps…

La crise qui éclate ainsi au grand jour, permet donc à certains d’avancer leurs pions et de prendre des parts de marché, facilement, en neutralisant des services publics.

On voit aussi très clairement que les mesures de protection sociale sont visées dans tout ce qui est annoncé : on sait d’avance dans quoi on va couper pour faire des économies… Le travailleur européen et sa famille payeront pour les autres.

Une des conséquences de la crise sera des réductions des dépenses publiques, pour rendre ainsi nos économies plus « compétitives », en réduisant les coûts que font peser les charges sociales sur les comptes de la nation. On continue ainsi de jouer le jeu du libre échange qui veut que tout soit dérégulé, et on s’aligne ainsi sur les normes imposées par le capitalisme libéral le plus sauvage.

Si les peuples des pays d’Europe ne se révoltent pas, ils verront le modèle que leurs anciens ont mis des décennies à construire, s’évaporer à cause de cette austérité manigancée…

Paradoxe suprême, cette victoire de la « pieuvre financière capitaliste » ou, en tout cas, ce début de remise en cause du modèle européen, intervient au moment même ou le modèle libéral semblait avoir fait faillite.

Objectif visé ? La nécessaire harmonisation, en vue du Marché Transatlantique de 2015

Les attaques en règle contre le modèle de capitalisme européen, plus protecteur, ont un but, là aussi clairement annoncé : rendre nos contraintes budgétaires aussi proches que possible de celles des USA. En préparant cette harmonisation (à la baisse) de nos normes fiscales et sociales, les pourris qui ont été mis en place par ceux qui les payent, préparent l’instauration du grand « Marché Transatlantique », qui a pour objectif d’aboutir, en 2015, à la création d’une grande zone d’échange USA-Europe.

Ce qui passe par la réalisation des conditions d’une non-concurrence entre pays d’une même zone d’échange… à venir, la zone transatlantique.

Dans un sens, on peut présumer, que fidèles à leurs façons de faire, ceux qui tirent les ficelles procèdent toujours par des tests en grandeur nature, mais à petite échelle, avant de les étendre au reste de l’objectif ciblé (nous, les Européens).

En ce sens, surveiller ce qui se passe en Grèce en ce moment, c’est peut-être lire dans la boule de cristal qui nous révélera l’avenir des travailleurs européens.

mardi, 05 janvier 2010

Intégration ou isolement? Le dilemme de la Grande-Bretagne face au continent

Grande_Bretagne_1689.gifArchives de SYNERGIES EUROPEENNES - 1990

Intégration ou isolement?

Le dilemme de la Grande-Bretagne face au continent

 

par Gwyn DAVIES

 

Le samedi 24 février 1990 s'est tenu à Londres le colloque annuel de l'association IONA. Sous la présidence de Mr. Richard Lawson, plusieurs orateurs ont pris la parole: le Prof. Hrvoje Lorkovic, Robert Steuckers, Gwyn Davies et Michael Walker. Vouloir publiera chacune de ces interventions. Nous commençons par celle de Mr. Davies.

 

A une époque de grande fluidité, lorsque des changements soudains bouleversent les modèles devenus conventionnels de la vie quotidienne, il est souvent nécessaire de juguler nos impulsions immédiates qui nous poussent à participer à l'euphorie générale que suscite la nouveauté. Lorsque des concepts jadis tenus pour intan­gibles et immuables s'effritent à une vitesse in­soupçonnée, il est trop facile de se laisser porter par l'effervescence d'une liberté nouvelle. Mais l'homme rationnel doit maintenir une saine dis­tance devant l'immédiateté provocatrice du chan­gement, car le changement per se  n'est pas un but en soi mais un simple catalyseur qui fera ad­venir un but. Les actions prestées à des époques aussi décisives ne doivent pas s'arcbouter sur le rien de l'éphémère mais, au contraire, réfléchir des analyses solides, denses et raisonnées. Car lorsque les pratiques conventionnelles subissent une révision radicale, des décisions doivent être prises rapidement, des choix doivent être posés; dans ces moments où nous sommes confrontés à des dilemmes, les fonctions sélectives de notre intelligence doivent pouvoir travailler à bon es­cient. Si les choses doivent se passer ainsi dans la vie personnelle de chacun d'entre nous, il est d'autant plus impératif qu'elles empruntent la même voie temporisatrice, réfléchie, délibérée, lorsque la destinée des nations est en jeu.

 

Lorsque les constantes rigidifiées de l'orthodoxie politique acceptée par tous sont challengées voire balancées par-dessus bord, lorsque la Grundnorm (la norme fondamentale) du gouver­nement des Etats est minée et affaiblie derrière le paravent de la cohésion structurelle de l'ordre existant, les groupes sociaux qui souhaitent de­venir des pièces influantes sur l'échiquier trans­formé n'enregistreront des succès, ne réaliseront leurs ambitions, que s'ils identifient correctement puis résolvent les questions-clefs que soulève la réalité nouvelle.

 

Susciter de nouveaux foyers d’énergie en Europe

 

Les événements récents qui ont agité la partie orientale de l'Europe au cours de ces derniers mois, ont soulevé l'espoir de voir disparaître la division artificielle du continent. Les deux blocs, aux contours bien distincts, qui se sont regardés en chiens de faïence depuis une quarantaine d'années, abrités derrière leurs retranchements respectifs (d'ordre tant physique que philoso­phique), se sont débarrassé aujourd'hui de leur antipathie mutuelle, au point de permettre à leurs satellites de dévier de leurs orbites préétablies.

 

En effet, avec l'implosion imminente de l'une des composantes du binôme USA/URSS, les liens gravitationnels qui avaient préalablement entravé le mouvement des planètes satellisées pourraient très bientôt se dissoudre. Mais les lois de l'ordre naturel nous enseignent que dans tout univers nouvellement émergé, de nouveaux foyers d'énergie doivent rapidement jaillir du chaos pour imposer de la discipline dans le vide désordonné. En gardant ces lois à l'esprit, il est d'une importance vitale de bien évaluer les mo­dèles émergeants hors de ce bouillonnement de transformations et de forger, sur base de telles données, un concept global pour indiquer à la Grande-Bretagne la marche à suivre dans la dé­cennie tumultueuse qui s'ouvre devant nous.

 

Le contexte historique des relations euro-britanniques

 

Avant de vous livrer notre contribution à l'élaboration de ce concept, il m'apparaît néces­saire de passer en revue le contexte historique des relations euro-britanniques.

 

D'abord, il me semble opportun de constater que les Iles britanniques n'ont pas eu la moindre in­fluence sur la scène européenne avant la conquête normande. L'installation par la force d'une aris­tocratie étrangère a conduit l'Angleterre à partici­per activement aux rivalités et machinations des dynasties de l'Occident chrétien et, plus particu­lièrement, à la longue lutte d'hégémonie avec les Capétiens de France. Le rêve angevin d'un Etat anglo-français faillit réussir après le mariage d'Henri II avec Eléonore d'Aquitaine mais le projet s'enlisa dans une orgie de luttes fratri­cides. Après l'échec de cette union, le Royaume d'Angleterre n'a plus eu la possibilité de jouer un rôle déterminant sur la scène politique euro­péenne et les Français affrontèrent seuls les fai­blesses du Saint Empire et les prétentions fragiles des Hohenstaufen.

 

Dès le début du XIIIième siècle, la Couronne anglaise ne s'engagea plus qu'à la périphérie de l'arène européenne en jouant le rôle d'un agent interventionniste. Beaucoup, sans doute, ne se­ront pas d'accord avec mon affirmation et cite­ront, pour la réfuter, les triomphes d'Edouard III et de Henri V en France et la grandiose participa­tion du Prince Noir dans la querelle pour la suc­cession au trône de Castille. Il n'en demeure pas moins vrai que, malgré les épisodes héroïques de Crécy, Poitiers, Navarette et Azincourt, l'Etat anglais fut incapable de transformer ses succès tactiques en gains stratégiques permanents.

 

Avec le début de la Guerre des Deux Roses (entre les partis de York et de Lancaster), la Guerre de Cent Ans touchait à sa fin et le conflit interne, très sanglant, qui se déroula sur le sol anglais, empêcha toute déviation des forces na­tionales vers des objectifs étrangers.

 

Ce ne fut pas avant le règne de Henri VIII que l'appétit pour les engagements transnationaux revint à la charge, aiguillonné par le tort causé au commerce de la laine flamande par la rivalité entre les maisons de Valois et de Habsbourg. L'intervention théâtrale et sans conséquence du Roi Henri peut être considérée comme la dernière expression de l'ancienne doctrine de l'absolutisme monarchique. Ses royaux succes­seurs ne purent plus se payer le luxe de traiter la politique étrangère comme un instrument au ser­vice de leurs ambitions personnelles.

 

L’ère impériale commence

avec Elizabeth Ière

 

L'ère élizabéthaine ouvrait un âge nouveau. La philosophie du temps s'accomodait parfaitement aux exigences du commerce, dont les demandes pressantes annulaient tous les autres impératifs qui tentaient de s'imposer à la Cour. Le com­merce devint ainsi le premier moteur de l'action royale. La Couronne répondit au défi écono­mique en élargissant ses perspectives et en adoptant une vision impériale, reflet de sa propre gloire et de l'agitation vociférante des princes marchands dont les fortunes aidèrent à asseoir l'ordre intérieur.

 

L'hégémonie monolithique des Habsbourgs d'Espagne sur le commerce avec l'Orient créa un goulot d'étranglement et obligea les négociants britanniques à chercher d'autres voies de com­munication; la royauté marqua son accord tacite pour l'organisation de telles expéditions; des compagnies à participation se mirent à proliférer, tirant profit des découvertes et de leur exploita­tion. Les bénéfices engrangés grâce au trafic d'esclaves et à la piraterie frappant les posses­sions espagnoles dans le Nouveau Monde ont conféré une légitimité officielle à l'idéologie ex­pansioniste. Et comme les raiders et les mar­chands avaient besoin de bases et que les bases demandaient à être défendues, l'Angleterre éla­bora une stratégie coloniale pour protéger et fournir en matériaux divers ses postes d'outre-mer. L'existence même de ces dépendances lointaines postulait l'inévitable développement de colonies, car colons, soldats et artisans débar­quaient sans cesse dans les comptoirs initiaux, processus qui assurait la promotion et l'expansion du commerce.

 

La protection des routes commerciales conduisit l'Angleterre à mener des guerres successives contre les puissances continentales, la Hollande, la France et l'Espagne. Ces guerres induisirent à leur tour la politique de Balance of Power (équilibre de puissance), qui atteindra son abo­minable apex dans les désastres humains de la première guerre mondiale.

 

En résumé, l'approche doctrinale des Britanniques vis-à-vis des querelles continentales était la suivante: soutien politique et militaire au parti ou à l'alliance dont la victoire empêcherait la création d'un bloc unitaire hostile disposant de suffisamment de ressources pour priver l'Etat britannique de l'oxygène du commerce. Les ré­sultats engrangés par ce calcul astucieux ont été énormes; il suffit de se remémorer les triomphes britanniques à la suite de la Guerre de Succession d'Espagne (1701-14) et de la Guerre de Sept Ans (1756-63). A la fin de ce conflit, le continent nord-américain était devenu chasse gardée de la Grande-Bretagne et sa suprématie maritime pou­vait faire face à tous les défis.

 

Arrivé au sommet de sa puissance, le régime des rois hannovriens oublia les prudences d'antan et poursuivit les projets d'outre-mer dans le plus parfait isolement. Mais cet oubli de la politique européenne traditionnelle coûta très cher; il en­traîna la perte des treize colonies américaines re­belles, soutenues par ses alliés européens, trop heureux de porter des coups durs à la vulnérable Albion.

 

La clef de la suprématie britannique: le système des coalitions

 

Mais les leçons de la défaite américaine ont été rapidement assimilées. Les guerres de la Révolution et de l'Empire offrirent l'occasion de remettre en jeu les règles du système des coali­tions. Tandis que les alliés de l'Angleterre rece­vaient de considérables subventions et affron­taient les Français sur terre, les Britanniques agissaient sur mer avec brio, contrôlaient les voies de communication maritimes et purent ainsi survivre au blocus continental napoléonien, fermé au commerce britannique, et à la défaite de toutes les puissances européennes devant les ar­mées de l'Empereur corse.

 

Grande-Bretagne-map.jpgEnsuite, après l'effondrement des rêves bona­partistes de conquête de l'Orient consécutif à la bataille perdue du Nil, les Britanniques purent débloquer des ressources considérables pour as­seoir leur domination aux Indes et s'emparer de colonies étrangères dont le site détenait une im­portance stratégique. Au Congrès de Vienne en 1815, c'est un second Empire britannique, fer­mement établi, qui se présentait face aux autres puissances européennes.

 

Dès le début du XIXième siècle, une destinée impériale prenait son envol et allait occuper toutes les imaginations britanniques pendant près d'un siècle. Les troubles intérieurs qui agitaient les puissances rivales permirent à cette destinée de se déployer sans opposition. L'Europe perdait tout intérêt aux yeux des Anglais. J'en veux pour preuves les abandons successifs d'atouts straté­giques en Europe continentale: la dissolution de l'union avec le Royaume du Hannovre en 1837 et, plus tard, l'abandon d'Héligoland pour obte­nir des réajustements de frontière en Afrique orientale.

 

Les Indes: pièce centrale de l’Empire britannique

 

L'ère de la Splendid Isolation  commençait et les seules menaces qui étaient prises en compte, étaient celles qui mettaient l'Empire en danger, et plus particulièrement les Indes. De là, le souci quasi hystérique qui s'emparait des milieux dé­cisionnaires londoniens lorsque la fameuse «question d'Orient» faisait surface et l'inquiétude qui les tourmentait face à l'expansionisme des Tsars en Asie Centrale. Avec toutes les res­sources de ses vastes domaines d'outre-mer, la Grande-Bretagne se croyait à l'abri de toute at­taque directe et les paroles de Joseph Chamberlain, prononcées en janvier 1902, sont l'écho de cette confiance: «Nous sommes le peuple d'un grand Empire... Nous sommes la nation la plus haïe du monde mais aussi la plus aimée... Nous avons le sentiment de ne pouvoir compter que sur nous-mêmes et c'est pourquoi j'insiste en disant que c'est le devoir de tout homme politique britannique et que c'est le de­voir du peuple britannique de ne compter que sur eux-mêmes, comme le firent nos ancêtres. Je dis bien que nous sommes seuls, oui, que nous sommes dans une splendid isolation, entourés par les peuples de notre sang».

 

Mais au moment même où ces paroles étaient prononcées, les réalités politiques du jour heur­taient de plein fouet cette arrogance. L'alliance anglo-japonaise de 1902 marquait une limite dans le déploiement de la politique étrangère britan­nique: Londres était obligée d'abandonner les «formules obligatoires et les superstitions vieil­lottes» (comme l'affirma Lansdowne à la Chambre des Lords), c'est-à-dire ne plus consi­dérer l'isolement comme désirable et adopter à la place une approche plus active de la scène inter­nationale, avec un engagement limité auprès de certaines puissances pour des objectifs spéci­fiques.

 

L'Allemagne wilhelmienne, aveuglée par les possibilités d'un destin impérial propre, renia, à cette époque, les principes de la Realpolitik, en rejetant toutes les offres d'alliance britanniques. La conséquence inévitable de ce refus fut le rap­prochement anglo-français, avec l'Entente Cordiale de 1904, impliquant la résolution à l'amiable des querelles coloniales qui, jusqu'alors, avaient envenimé les relations entre les deux puissances occidentales. Cette amitié nouvelle fut encore renforcée par les crises suc­cessives au Maroc et par la «conciliation des inté­rêts» entre Russes et Britanniques au détriment de la Perse.

 

La polarisation en Europe était désormais un fait et l'équilibre savamment mis au point par Bismarck pour éviter une tragédie fatale fut re­misé au placard et tous se précipitèrent avec une criminelle insouciance vers la destruction mu­tuelle. L'inutile catastrophe que fut la première guerre mondiale blessa et mutila l'Europe au point que même les puissances victorieuses en sortirent exsangues et épuisées par leur victoire à la Pyrrhus. Non seulement ce conflit inutile sema les graines de misères futures mais tous les pro­tagonistes furent désormais exposés aux usurpa­tions extra-européennes. Les bénéficiaires réels des carnages de la Somme et de l'Isonzo, de Verdun et de Tannenberg, furent des puissances observatrices et opportunistes, des belligérants prudents, comme le Japon et les Etats-Unis. Par le sacrifice de ses soldats dans la Forêt d'Argonne, les Etats-Unis, par le droit du sang versé, demandèrent à siéger à la Conférence de Versailles. Pour la première fois, une ombre transatlantique voilait un soleil européen, pâle et malade. La puissance américaine n'était encore qu'au stade de l'enfance et, bien que ses mar­chands avaient exploité à fond les opportunités laissées par les Européens occupés à s'entre-dé­chirer et avaient systématiquement braconné les anciens marchés réservés de l'Europe sur les autres continents, de vastes zones du globe res­taient à l'abri de la pénétration américaine grâce au protectionnisme colonial.

 

Le premier après-guerre

 

Durant ces années cruciales du premier après-guerre, quand la marée montante des nationa­lismes envahissait les débris d'anciens empires continentaux, la Grande-Bretagne quitta, dépitée, le théâtre européen, pour se vautrer une nouvelle fois dans les délices nostalgiques de sa gloire impériale d'antan. Mais la puissance de l'Empire s'était ternie dès les années 90 du siècle passé, lorsque le principe du Two Power Standard  (équilibre des forces entre, d'une part, la Grande-Bretagne, et, d'autre part, les deux na­tions les plus puissantes du continent) ne s'appliquait plus qu'à la flotte. Dans les années 30, qu'en était-il de ce tigre de papier? N'était-ce plus qu'illusion?

 

Tandis que les Français cherchaient à contrer une Allemagne renaissante en forgeant un jeu d'alliances complexes avec des Etats est-euro­péens et balkaniques, les Britanniques restaient stupidement aveugles. La politique étrangère du gouvernement national-socialiste allemand fonc­tionnait à l'aide du Führerprinzip. Les signes avant-coureurs d'un désastre imminent étaient parfaitement perceptibles. Mais un malaise débili­tant paralysait les ministères britanniques suc­cessifs. La crise tchécoslovaque demeurait, pour ces diplomates, «une querelle dans un pays loin­tain, entre des peuples dont nous ne savons rien». L'arrogance et l'ignorance venaient d'atteindre leur apogée.

 

L'incapacité de Neville Chamberlain à saisir le projet hitlérien dans sa totalité apparaît à l'évidence dans les garanties aussi pieuses que sans valeur que son gouvernement accorda à toute une série d'Etats est-européens instables. Ces gestes vains ne firent rien pour arrêter les ambitions germaniques et ne servirent qu'à en­traîner la Grande-Bretagne dans une guerre où la victoire était impossible et la défaite inévitable.

 

Si la première guerre mondiale avait permis aux Etats-Unis d'entrer dans un club d'élite de «courtiers de puissance» internationaux, la se­conde leur permit d'assumer simultanément les rôles de Président et de trésorier. A la Grande-Bretagne, il ne restait plus qu'à devenir le secré­taire scrupuleux, qui enregistre et annonce les motions décidées par le patron-contrôleur.

 

Les buts de guerre des Etats-Unis

 

Les Etats-Unis ne sont pas entrés dans le conflit à son début, animés par une ferveur libérale, par le feu d'une croisade. Ils sont entrés en guerre à contre-cœur, contraints d'agir de la sorte par une agression japonaise délibérée. Mais dès que leurs forces pesèrent dans la balance, les Etats-Unis décidèrent que leurs sacrifices pour la cause de la liberté ne seraient pas si vite oubliés et que le monde devrait leur en savoir gré. Le prix exigé par les Américains pour la sauvegarde de l'Europe était élevé: c'était le remodelage du Vieux Continent ou, du moins, de sa portion dite «libre». L'Europe devait être à l'image de ses li­bérateurs et le Plan Marshall était l'instrument destiné à provoquer la métamorphose.

 

Il n'est guère surprenant que les Américains aient largement réussi dans la tâche monumentale qu'ils s'étaient assignée, à savoir transformer l'Europe sur les plans culturel et économique. Le Vieux Continent, ébranlé, a été obligé d'embrasser la main tendue qui offrait les moyens de la reconstruction, quelqu'aient d'ailleurs été ces moyens. Les Etats-Unis utilisè­rent l'aide alimentaire et les transfusions de dol­lars pour reconstituer les économies des pays tombés dans leur sphère d'influence. Les Soviétiques utilisèrent, quant à eux, des moyens nettement plus frustes: l'Armée Rouge comme élément de coercition et la mobilisation en masse des forces de travail. Quoi qu'il en soit, l'assistance américaine précipita les bénéficiaires dans un réseau étroit de dépendance économique. Par leur «générosité» magnanime, les Etats-Unis s'assurèrent la domination de leur zone de comptoirs à l'Ouest de l'Elbe pendant quelque deux décennies après la fin de la guerre.

 

Si tel était le magnifique butin ramassé par les Américains, que restait-il aux Britanniques, si­non les fruits amères d'une défaite réelle mais non formelle? Les années d'austérité qui s'étendirent jusqu'à la fin des années 50 ternirent la «victoire» et mirent cruellement en exergue le coût de la guerre. L'Empire se désagrégea lente­ment, malgré la conviction têtue que la nation britannique restait un arbitre dans les affaires du monde. Cette illusion fit que les Britanniques se préoccupèrent d'une stratégie globale, au détri­ment d'une stratégie européenne. L'énorme charge des budgets militaires, due à cette volonté de garder une position en fait intenable, retarda la restructuration économique de la métropole, ce qui provoqua la chute de la livre sterling, devant un dollar qui ne cessait de monter.

 

Et malgré le désir de préserver le statut de super-puissance pour la Grande-Bretagne, la politique des gouvernements successifs ne put nullement ôter aux observateurs objectifs l'impression que notre pays n'était guère plus qu'un pion de l'Amérique. L'opération de Suez, qui sera un fiasco, fut lancée par l'état-major britannique malgré l'opposition de Washington. La réaction négative du State Department suffit à arrêter pré­maturément l'opération, ce qui contribua à aigrir les relations franco-britanniques pendant toutes les années 60. La Grande-Bretagne battit sa coulpe et ne tenta plus aucune intervention unila­térale sans recevoir au préalable l'imprimatur  de son «allié» d'Outre-Atlantique.

 

Les «special relationships»

 

Les fameuses special relationships,  dont on parle si souvent, sont effectivement spéciales, car quel Etat souverain délaisse volontairement ses intérêts légitimes pour satisfaire les exigences stratégiques d'un partenaire soi-disant égal? Le mythe de la dissuasion nucléaire indépendante de la Grande-Bretagne montre le véritable visage de ces «relations spéciales»: car sans la livraison par les Etats-Unis des fusées lanceuses, sans leur coopération dans la conception des bombes, sans leurs matériaux nucléaires, sans les facilités qu'ils accordent pour les essais, sans leurs plate­formes de lancement, sans leurs systèmes de navigation et sans leurs informations quant aux objectifs, où résiderait donc la crédibilité de l'arme nucléaire anglaise?

 

Un tel degré de dépendance à l'endroit de la technologie militaire américaine fait qu'un flux continu de concessions part de Londres pour aboutir à Washington: cela va des arrangements particuliers qui permettent aux forces américaines d'utiliser des bases britanniques d'outre-mer  —ce qui réduit à néant les discours pieux sur l'auto-détermination—  jusqu'aux droits de dé­collage et de survol pour les appareils de l'USAF en route pour attaquer des Etats tiers, sans que le gouvernement britannique ne soit mis au courant! Toutes ces concessions font que les Européens perçoivent de plus en plus souvent la Grande-Bretagne comme un simple pion dans la politique américaine; la promptitude empressée de nos politiciens qui obéissent aux moindres lubies du Pentagone signale qu'ils accordent une pleine confiance aux requêtes de Washington.

 

L'affaire de Suez, au moins, a prouvé la fragilité de l'édifice impérial. La course au désengage­ment qui s'ensuivit conduisit à accorder l'indépendance tant aux colonies qui la désiraient qu'à celles qui ne la désiraient pas. Le «rôle glo­bal» du Royaume-Uni ne se justifiait plus, ne méritait plus les soucis et l'attention qu'on lui avait accordé dans le passé. Pendant ce temps, la situation changeait en Europe.

 

Le défi du Traité de Rome

 

En 1957, les Six signent le Traité de Rome et mettent ainsi sur pied deux corps supra-natio­naux, la CEE et l'EURATOM, destinés à com­pléter la CECA déjà existante. Le but déclaré de ces organisations, c'était de favoriser une plus grande unité entre les Etats participants par l'harmonisation des lois et par une libéralisation des régimes commerciaux. Inutile de préciser que ces changements ne suscitèrent que fort peu d'enthousiasme en Grande-Bretagne; les Traités furent ratifiés avant le discours de Macmillan (Wind of Change),  quand le Royaume-Uni se laissait encore bercer par la chimère de la Commonwealth Preference  (La préférence au sein du Commonwealth). Mais l'institution de tarifs douaniers communs par les Etats membres de la CEE frappait les marchandises d'importation venues de l'extérieur. Il fallait ré­pondre à ce défi et c'est ainsi que le RU devint l'un des principaux signataires du Traité de Stockholm de 1959, établissant l'AELE (Association Européenne du Libre Echange; EFTA en anglais). Cette Association fut créée comme un simple mécanisme destiné à faciliter le commerce et n'avait pas d'objectifs en politique extérieure allant au-delà des buts purement mer­cantilistes.

 

Il apparut très vite que l'adhésion à l'AELE/EFTA n'était pas un substitut adéquat à la pleine adhésion à la CEE. Rapidement, les re­présentants des intérêts commerciaux de la Grande-Bretagne exercèrent une pression cons­tante sur le gouvernement, afin qu'il leur garan­tisse un accès préférentiel aux marchés plus lu­cratifs, c'est-à-dire qu'il demande la pleine ad­hésion du RU à la CEE. Macmillan s'exécuta et la première demande britannique fut soumise en juillet 1961, pour être finalement rejetée par De Gaulle en 1963, à la suite de longues négocia­tions inutiles. L'opposition française n'empêcha pas qu'une seconde demande fut formulée en 1967. L'amertume laissée par l'affaire de Suez était passée. Et la Grande-Bretagne entra finale­ment dans la Communauté le 1 janvier 1973, en même temps que l'Irlande et le Danemark. Un ré­férendum en 1975 donna des résultats en faveur de l'adhésion: 67% des votants ayant émis un avis favorable. Les rapports ultérieurs du RU avec la CEE furent souvent turbulents et diffi­ciles, ce qui trahit la profonde ambiguïté des atti­tudes britanniques à l'égard des principes consti­tutifs de l'eurocentrisme.

 

La Grande-Bretagne reste en marge de l’Europe

 

A tort ou à raison, la Grande-Bretagne se perçoit toujours comme une nation à part, jouissant d'un lien particulier, bien que souvent ambigu, avec les pays associés au Commonwealth, lesquels forment un monde où les affinités historiques ac­quièrent fréquemment plus d'importance que la solidarité interne.

 

L'influence pernicieuse des «relations spéciales» freine le développement d'une approche plus eu­rocentrée des relations internationales. Lorsque les intérêts militaires américains exigent que les politiques nationales de Londres et de Washington soient parallèles, comment cela peut-il être possible, comment la collaboration RU/USA peut-elle s'avérer rentable, si la Grande-Bretagne participe activement à un sys­tème protectionniste eurocentré? Il vaudrait la peine de noter le nombre de fois où le gouverne­ment britannique a résisté aux initiatives commu­nautaires parce qu'elles offusqueraient inutile­ment Washington et provoqueraient une «guerre commerciale» soi-disant au détriment de tous.

 

De plus, malgré que la Grande-Bretagne ait ac­cepté l'Acte Unique Européen, dont le premier article déclare que «les communautés euro­péennes et que la coopération politique euro­péenne auront pour objectif de contribuer en­semble à faire des progrès concrets en direction de l'unité européenne», Londres ne respecte que formellement ces aspirations. Tout ce qui va au-delà des paramètres de pure coopération écono­mique est perçu d'un très mauvais oeil à Westminster et les privilèges locaux et étriqués de la Grande-Bretagne sont défendus fanatique­ment, bec et ongles.

 

Pareilles équivoques ne donnent nullement con­fiance aux autres Européens; la crédibilité de la Grande-Bretagne est ruinée. De plus en plus de voix réclament la construction d'une Europe à deux vitesses avec, d'une part, les Etats récalci­trants relégués à un étage inférieur, de façon à permettre aux éléments plus progressistes de poursuivre le rêve de l'unité sans trop d'entraves. Tandis que la Grande-Bretagne croupit, asservie, sous le régime thatchérien, il semble inconcevable qu'une convergence réelle puisse un jour avoir lieu entre les partenaires eu­ropéens.

 

Alors que notre gouvernement proclame à grands cris l'importance du progrès scientifique et tech­nologique, la contribution britannique à l'Agence Spatiale Européenne est incroyablement basse. Alors que notre gouvernement se déclare le dé­fenseur impavide de la livre sterling, il refuse de participer au mécanisme de stabilisation qu'est le serpent monétaire européen. Voilà qui est abso­lument déconcertant. Si des objectifs éminement conservateurs comme ceux-là ne sont même pas activement poursuivis, pourquoi nous étonne­rions-nous que le gouvernement de Madame Thatcher s'oppose implacablement à l'augmentation des droits des travailleurs grâce à une nouvelle Charte sociale?

 

Dans tous ses domaines, le RU exerce ses préro­gatives pour bloquer et retarder les résolutions de la Communauté et pour satisfaire ses propres objectifs, en fin de compte négatifs pour le salut du continent. Si cette opposition s'appuyait sur une critique tranchante des principes mécanicistes et bureaucratiques qui sous-tendent le processus d'unification européenne porté par les institutions communautaires, la position britannique jouirait d'un certain capital de sympathie. Mais, malheu­reusement, cette hostilité ne consiste pas en une censure permanente et constructive du modus operandi;  au contraire, elle présente toutes les caractéristiques d'un nombrilisme malsain et per­vers. En effet, cet égoïsme étroit, justifié par l'«intérêt national», nous oblige à nous demander si le RU doit demeurer associé au processus d'unification européenne, tant que la seule justi­fication qu'il évoque pour son engagement, re­pose sur la base douteuse de l'expédiant écono­mique.

 

Une orientation européenne sans arrière-pensées pour la Grande-Bretagne

 

Or c'est précisément aujourd'hui, en ces jours décisifs, dans le tourbillon de changements qui balaye ce dualisme moribond auquel nous de­vons la division de notre continent, que les têtes pensantes en Grande-Bretagne doivent se mobili­ser pour construire le futur de l'Europe. Ces têtes pensantes doivent ignorer les événements péri­phériques de l'Afrique du Sud et de Hong Kong, montés en épingle pour les distraire. Ce sont des soucis résiduels, hérité d'un Empire qui est bel et bien mort aujourd'hui. Le seul défi actuel con­siste, pour nous, à définir quelles relations le RU entretiendra avec l'Europe. Cette question cru­ciale nous conduit à un dilemme tranché. En ef­fet, deux voies, qui s'excluent l'une l'autre, s'offrent à notre choix: celle de l'isolement et celle de l'intégration.

 

La première de ces voies ne demande pas un ef­fort particulier de lucidité car la politique actuelle de la Grande-Bretagne accentue déjà la tendance au désengagement en Europe. Cependant, il nous faudra bien mettre en évidence les dangers inhé­rents à ce retrait.

 

Un exemple: combien de temps le programme Inward Investment (Investissement intérieur), tant vanté par Madame Thatcher, survivra-t-il dans un RU découplé? Après tout, le rôle de Cheval de Troie pour les industries japonaise et américaine, que joue notre pays, n'est possible que parce que les investisseurs nippons et yankee considèrent le RU comme une tête de pont vers la CEE, idéale pour les opérations «tourne-vis». Ces opérations seraient rapidement évacuées ail­leurs si disparaissaient les opportunités de péné­trer le marché européen dans sa totalité.

 

Certes, les conséquences économiques d'un repli sur soi seraient catastrophiques. La menace qui pèse sur nous est toutefois plus terrible encore si on l'envisage d'un point de vue plus large. Si le RU prend ses distances par rapport à l'Europe, sans plus avoir d'ancrage de sécurité dans un Empire, il dérivera, erratique, sur la mer des re­lations internationales sans motivation et sans punch. Très rapidement, notre nation se réduirait à un simple appendice des puissants Etats-Unis et perdrait, dans la foulée et sans doute à jamais, tout vestige de son ascendance morale et cultu­relle.

 

Avec un tel destin à l'horizon, la perspective de voir un RU isolé, survivant comme une entité bien distincte au XXIième siècle, s'avère pure illusion. La seule vraie chance de préserver l'héritage culturel unique de nos îles, c'est, para­doxalement, de les immerger dans un idéal euro­péen. Cette solution n'est pas aussi contradictoire qu'elle en a l'air à première vue car l'éthos euro­péen n'exige pas un renoncement total à nos identités (à rebours du modèle américain si vo­race et destructeur). L'éthos européen appelle une synthèse entre l'élément national/ethnique et le projet continental. L'élément national/ethnique acquiert ainsi un sens du contexte civilisationnel, soit un sens vital du destin. Le concept d'Europe peut s'accomoder de la multiplicité de ses com­posantes sans mutiler celles-ci par quelque con­centration artificielle, par quelque corset de con­formisme.

 

Dans cette optique, l'idée d'une «Europe aux cent drapeaux» demeure parfaitement compatible avec l'objectif d'un continent plus fort et plus confédéré. Les progrès dans le sens de l'hété­rogénéité doivent toutefois toujours avancer dans le même sens que la marche à l'unité, si l'Europe veut éviter les pièges des monolithismes de tous ordres.

 

Comme la réunification allemande est désormais davantage une question de calendrier que de conjoncture, il existe un risque réel de voir les faibles économies est-européennes basculées dans une nouvelle Mitteleuropa germanocentrée. Les tentations de se livrer à un paternalisme ger­manique menacent la logique d'une Europe des peuples, car la diversité serait asphyxiée sous une uniformité germano-industrielle, terreau sur lequel pourraient germer de nouvelles idéologies autoritaires. Un tel scénario doit être évité à tout prix, si l'on veut faire l'économie d'un conflit. La Grande-Bretagne ne doit pas fuir ses respon­sabilités et doit participer à la sécurité collective du continent.

 

La notion de Balance of power  est sans doute démodée. Mais sauf si l'on pousse le processus d'unification européenne jusqu'à son ultime conclusion, avec la pleine participation de toutes les nations européennes dans l'enthousiasme, le retour de cette vénérable doctrine serait inévitable pour contrer les prédominances dangereuses. Dans le cas particulier qui nous préoccupe, l'énergie déployée par la ferveur pangermanique ne pourra être canalisée que par le consensus et non par la coercition, de façon à ce que, demain, l'Europe puisse être une et que tous les peuples du Continent puissent prospérer avec une égale vigueur.

 

Nous, peuples des Iles britanniques, devons être prêts à renier l'hypocrisie et la rhétorique propa­gée pendant des siècles de désintérêt hautain puis embrasser avec une conviction venue tout droit du cœur notre identité européenne réelle et con­crète. La barrière illusoire que constitue le Pas-de-Calais a longtemps été plus difficile à traver­ser pour nous que les immensités de l'Atlantique. Toutefois, le retour de la vraie perspective euro­péenne doit recevoir la priorité absolue. Re­connaître notre héritage européen commun, vouloir agir positivement à la lumière de cette évidence, voilà les impératifs vitaux à honorer si nous voulons préserver la paix, si nous voulons résister puis repousser l'avance d'une culture créole globale, faites de bric et de broc.

 

Gwyn DAVIES.  

vendredi, 04 décembre 2009

!Por un gran espacio europeo!

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¡Por un gran espacio europeo! ¡Sin libre comercio!

¡Si a Europa! ¡No a los eurócratas de Bruselas!
¡El continente necesita una nueva voluntad de potencia!

La juicio de Karlsruhe recientemente, a propósito del Tratado de Lisboa, tiene el mérito de la claridad: el “super-estado”, que nos tiene bajo su tutela, y que entre los gobiernos y los burócratas bruselenses roza la perfección, no es ratificable como si emanase de la voluntad de Dios. No estamos obligados a aceptarlo. Pero nos asalta una cuestión fundamental: la del futuro de Europa. El juicio de Karlsruhe no ha solucionado en modo alguno este problema, no ha aclarado si Europa y la eurocracia bruselense son una misma y única cosa.

Un vistazo al mapa, a las estadísticas, a las relaciones de fuerza y otros órdenes territoriales nos hace ver, sin rodeos, que los estados de pequeña y mediana dimensión territorial de Europa solo pueden frenar su pérdida de poder si actúan conjuntamente.  Otros hechos son igualmente patentes: los antiguos conflictos entre los estados europeos se atenúan gradualmente, emergen otros nuevos conflictos de intereses, pero ninguno de estos últimos es todavía primordial. Si se mide a escala global, las convergencias de intereses entre europeos prevalecen mientras que las divergencias pasan a un segundo plano.

Constituir una potencia hegemónica continental es una preocupación, incluso una pesadilla, que ronda desde hace mas de un siglo la política interna del subcontinente europeo, incluso aunque pueda parecer anacrónico frente a la dominación mundial estadounidense y a la aparición de nuevos polos de poder en Asia. Incidir en los conflictos internos en Europa y, por añadidura, incentivar potencias extraeuropeas, solo tendría una consecuencia: aumentar la fuerza de los otros y perpetuar el tutelaje de Europa.

La crisis financiera y económica, que golpea a todo el planeta, nos aporta algunos argumentos suplementarios a favor de la europeización de la política en Europa. Esta crisis ya ha permitido re-evaluar el fenómeno de la globalización. Aunque, seamos claros, no podremos deshacer las conquistas de la globalización, que comenzó hace mas de 500 años con el descubrimiento, la explotación y la colonización del mundo por las potencias europeas; sin embargo, la globalización no podrá continuar a ser una idea incontestable. A lo largo de estos últimos años, parecía que la labor principal de los estados consistía en una sola cosa: desregularizarse a sí mismos, renunciar a todas sus funciones de control y de dirección. Capitales y mercancías debían moverse con toda libertad; la vida humana, ella, debía reducirse a una existencia de “abejas necesitadas”, aceptando la flexibilidad, en competencia con sus homólogas ellas también alienadas en el mundo entero. Se planificaba una guerra de todos contra todos, ultima consecuencia de la victoria total del modelo anglosajón de librecomercio después de dos guerras mundiales y una guerra fría.

Aun hace dos años, no se hacia ningún esfuerzo intelectual para justificar ese modelo: tenia la legitimidad en él mismo. Aquellos que todavía osaban criticarlo eran tratados como incorregibles, reaccionarios, limitados, nacionalistas, anti-modernos, enemigos de la libertad, etc. Se les ridiculizaba. Y de repente, el peso de los hechos ha cambiado el juego. El ideólogo francés Emmanuel Todd, en “Después de la democracia”, constata “que habrá que o abolir el sufragio universal y renunciar a la democracia o limitar el libremercado, por ejemplo inventando fórmulas inteligentes de proteccionismo a nivel continental europeo, lo que implicaría cuestionar el sistema económico actualmente dominante”.

La proximidad conceptual entre el proteccionismo que Todd defiende y el bosquejo de un “gran espacio” continental del jurista alemán Carl Schmitt es bastante clara. Para la Europa actual, lo que está en juego no es solo la democracia sino el conjunto de las tradiciones históricas y culturales arraigadas en su territorio. Todo neo-proteccionismo europeo emergente no deberá limitarse únicamente al dominio económico. En los planos políticos y éticos, la lógica del librecomercio deberá ser estrangulada. Antes de nada, Europa deberá renunciar al universalismo de su discurso ideológico, banalizado sobre los derechos del hombre. Ese universalismo había acompañado la expansión económica y colonial de los países de Europa occidental pero ha alcanzado su limite hoy. Hoy, ese universalismo no sirve más que para una cosa: sobre el plano político, moral y jurídico, para dar un instrumento de presión potencial a culturas o religiones extraeuropeas, para que estas, en su momento, pongan en marcha una estrategia de expansión en Europa misma. En el plano de los derechos del hombre, Europa necesita un proteccionismo que llevaría a dar prioridad y protección a sus propios ciudadanos europeos en su “casa común”.

Es por eso que la Europa política del futuro debe edificarse sobre bases nuevas, históricas, intelectuales, culturales y espirituales. Porque ese universalismo puesto en practica por los eurócratas de Bruselas está ligado íntimamente a los mitos fundacionales de la Unión Europea. Esta, de hecho, considera que el año 1945 constituye un punto de partida histórico y que los Estados Unidos, en la forma del liberalismo y librecomercio que importaron en su celo misionero, han sido los salvadores de Europa…

Estos posicionamientos significan ipso facto fundar moralmente la Unión Europea sobre la victoria conseguida sobre el país que debió, debe y deberá contribuir más en las cargas financieras de las estructuras del gran espacio europeo y que constituye, de hecho, el país mas indispensable de todos en la formación de Europa. Por eso, todos los otros socios de la construcción europea llegan a considerar que las contribuciones alemanas son “reparaciones” que paga a causa de la Segunda Guerra mundial en lugar de considerarlas como inversiones para un futuro común donde, ellos también, tendrían la responsabilidad y el deber de contribuir en pos del interés colectivo.

En Alemania, este malentendido ha llevado a un gran cansancio respecto a Europa: los alemanes, de hecho, se sienten explotados; tienen la impresión de que se les maltrata, que se les exige demasiado, mientras que la élite que dirige su país acepta por ellos el rol de único financiador para mantener la cohesión mientras que esa élite misma ni siquiera es capaz de crear iniciativas políticas a favor de Europa. Los alemanes han enmendado su pasado hasta la saciedad, controlados por loqueros para que no sea posible ningún movimiento nacionalista: los otros socios de la UE, en esta materia, han hecho demasiado poco.

La distancia temporal que nos separa hoy de los hechos de la Segunda Guerra Mundial debe llevarnos a interpretar la tragedia europea del siglo XX como una autodestrucción colectiva, ¡donde todos tienen parte de culpa! Esa autodestrucción proviene de errores de juicio sobre la situación real de Europa, en el seno mismo del continente y fuera de él, sobretodo en la evaluación errónea de la influencia global que ejercía el Viejo Continente. Los beneficiarios de esos errores de juicio han sido la Rusia soviética y los Estados Unidos, dos potencias externas al espacio europeo. Si una nueva tragedia de la misma amplitud debiera golpear mañana a Europa, otros obtendrían beneficios y las consecuencias serían, esta vez, irreversibles.

Si Europa no formula rápido una voluntad de potencia común y la defiende de forma creíble, no podrá oponerse al modelo de librecomercio actual. De hecho lo contrario se vislumbra en el horizonte: cómo los mitos fundacionales de la UE son una fatalidad, estos invitan a las potencias exteriores a apoyar y favorecer las tensiones interiores en Europa, a explotarlas, a perennizarlas. Detrás del acuerdo británico sobre la adhesión turca se perfila la intención de reducir la idea europea a una simple aceptación del librecomercio: Europa no sería entonces un bloque geopolítico autóctono, estructurado entorno a la identidad autóctona, sino una zona de librecomercio. Polonia, la República Checa o Italia apoyan, ellos también, el deseo de los turcos de adherirse a la UE, se regocijan del golpe de Jarnac que infligen a Alemania y se jactan de ser los compañeros más leales de los Estados Unidos, proporcionando al mismo tiempo a estos, una especie de palanca de Arquímedes para dislocar la unidad europea.

Una Europa que se cimentase en nuevas bases políticas y espirituales, que considerase que sus formas culturales y sus formas de vida valen la pena ser protegidas, una Europa que se mostrase preparada para  su defensa, sería, a los ojos de los alemanes, un objetivo digno de ser realizado y justificaría los pagos desproporcionados que pagan por la construcción europea. Pero, en ese dominio, no nos debemos limitar solamente a las cuestiones financieras.

Es por eso que debemos decir “sí” a Europa y, en algunas condiciones, a la UE, pero únicamente si constituye una tentativa de dar forma al continente. Pero debemos decir “no”, y de forma decisiva, a la dominación de los burócratas y de los ideólogos fatuos que pontifican en Bruselas.

Enlace: http://euro-synergies.hautetfort.com

Autor: Thorsten Hinz
Traducción: Diego Urioste para
www.3via.eu

mercredi, 18 novembre 2009

Pour un nouveau Regnum Francorum

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Archives de SYNERGIES EUROPEENNES - 1997

 

POUR UN NOUVEAU REGNUM FRANCORUM:

 

Bilan critique et perspectives des relations franco-allemandes

 

Intervention de Louis Sorel lors du séminaire d'Ile-de-France de «Synergies Européennes», 26 octobre 1997

 

Se féliciter de l'excellence des relations franco-allemandes est devenu le point de passage obligé de la rhétorique politique française, officielle du moins, et l'axe Paris-Berlin est le support de représentations angéliques dont on ne peut comprendre le sens sans retour à l'histoire. On sait combien l'antagonisme franco-allemand aura pesé sur le destin de l'Europe moderne. Dans Les empires et la puissance,  le général Jordis von Lohausen voit en la dissolution de l'empire carolingien, de 843 à 880, l'origine première de la grande catastrophe européenne: «la lutte des frères jumeaux francs, écrit-il, de guerre en guerre, appelle à la rescousse des alliés influents jusqu'au moment  —en 1945—  où ces derniers prennent le gouvernail en main. L'Europe n'est plus qu'une province. La tragédie du Royaume franc désuni a pris fin». Et fort justement, au lendemain des lointaines conséquences de la division entre Francs de l'Est et Francs de l'Ouest, Winston Churchill affirme: «Il n'y aura pas de renouveau européen sans la grandeur spirituelle de la France, sans la grandeur spirituelle de l'Allemagne» (Discours de Zurich, 1946).

 

Après le long face à face de la période 1870-1945, l'axe franco-allemand (France-RFA) est donc devenu la colonne vertébrale du projet européen. Cette relation pérenne n'en est pas moins soumise aux paradoxes éléatiques depuis la réunification allemande. On en parle sans cesse, sans que pour autant elle ne semble véritablement progresser. Cette intervention se veut une modeste contribution à la formation d'une communauté de destin entre nos deux nations sœurs, un nouveau Regnum Francorum, dans une optique résolument grand-européenne. Après avoir dressé le bilan des relations franco-allemandes, nous jetterons les bases d'un nouveau départ et examinerons les formes possibles d'un futur Regnum Francorum.

 

Les rapports politico-stratégiques franco-allemands

 

Le bilan critique des rapports politiques et stratégiques entre la France et l'Allemagne commencera par un bref historique de ces relations depuis 1945. Encore qu'à cette date, il n'y ait pas, stricto sensu, de relation entre nos deux pays. L'Allemagne est considérée comme un simple objet de notre politique extérieure qui poursuit des objectifs classiques: rattachement de la Sarre, contrôle de la Rhénanie et morcellement territorial. Conformément au programme de Richelieu, il s'agit de fixer l'anarchie allemande. La rupture américano-soviétique vient contrarier ces projets. La nation allemande divisée par le rideau de fer, Washington entend bien relever la toute jeune RFA et l'arrimer à l'«Ouest» (entrée dans l'OTAN en 1954). La France lâche donc prise et la question de la Sarre est réglée en 1956. C'est alors que débutent les relations franco-allemandes  —par Allemagne, nous entendons RFA—  au sein desquelles nous distinguerons quatre phases: la réconciliation, entre 1954 et 1963; divergences et statu quo, de 1963 à 1974; le temps du «couple franco-allemand», de 1974 à 1989; la fin de l'idylle, depuis les «ratés» qui ont accompagné et suivi la réunification.

 

La réconciliation s'opère, à la fin de la IVième République, dans un cadre atlantique et sous l'égide des Etats-Unis. Le retour au pouvoir du général De Gaulle, en 1958, contrarie bien l'avancée de quelques projets de coopération  —dans le domaine nucléaire notamment—  mais les hésitations de l'Administration Kennedy en matière de politique européenne amènent Paris et Bonn à concevoir une communauté politique et stratégique franco-allemande. Signé par Charles de Gaulle et Konrad Adenauer le 22 janvier 1963, le traité de l'Elysée prévoit, dans un cadre inter-gouvernemental, le développement d'une étroite coopération diplomatique, militaire et éducative. Cet ambitieux traité est contré par Washington et les pressions sur la classe politique ouest-allemande amènent le Bundestag à voter un préambule rappelant le primat des solidarités transatlantiques et occidentales sur l'alliance franco-allemande, la prééminence de l'OTAN et la nécessité d'élargir la CEE à la Grande-Bretagne. Le traité de l'Elysée est vidé de sa substance.

 

Suit jusqu'en 1974 une phase de statu quo. La RFA refuse d'avoir à choisir entre la France et les Etats-Unis et le retrait des troupes françaises de l'OTAN (1966) amplifie les divergences. De Gaulle parti et Georges Pompidou élu (1969), les choses ne s'améliorent pas. Très méfiant tant vis à vis du Deutschmark que de l'Ostpolitik de Willy Brandt, le nouveau président français entame un rapprochement avec la Grande-Bretagne qui entre dans la CEE en 1974.

 

De Schmidt-Giscard à la réunification

 

Vient ensuite le temps du «couple franco-allemand», incarné par Valéry Giscard d'Estaing et Helmut Schmidt de 1974 à 1981, puis François Mitterrand et Helmut Kohl jusqu'à la réunification. Dans les années quatre-vingt, ce resserrement est particulièrement spectaculaire lors de la crise des euromissiles (discours de François Mitterrand au Bundestag, 1983). Il se traduit par la réactivation de l'UEO (Déclaration de Rome en 1984, Plate-forme de La Haye en 1987) et la relance du projet européen (Acte unique, 1986). C'est à la fin de la décennie que le cours de l'histoire bifurque et vient contrarier cet itinéraire soigneusement balisé.

 

En 1989, les événements se précipitent. Sous l'effet des contradictions du gorbatchévisme, la RDA se délite et la perspective de l'unité allemande, prévue par les Accords de Londres et de Paris (1954), est difficilement vécue à Paris. F. Mitterrand se précipite à Kiev le 6 décembre pour jouer un mauvais remake de l'alliance franco-russe, puis à Berlin-Est le 20 du même mois. Cette diplomatie erratique échoue à maintenir un statu quo qui déjà n'existe plus et la réunification est officielle en droit international le 3 octobre 1990. Depuis, l'alliance franco-allemande, bien qu'irréfragable, ne va plus de soi dans les esprits et il faut remettre l'ouvrage sur le métier.

 

Il n'y pas de création ex nihilo et au terme de quarante ans d'étroites relations franco-allemandes, il nous faut procéder à l'inventaire, pour ensuite refonder l'alliance entre nos deux pays. Nos deux nations héritent des structures de coopération intergouvernementales mises en place dans le cadre du traité de l'Elysée: sommets semestriels des Chefs d'Etat et de gouvernement; réunions trimestrielles des ministres des affaires étrangères et de la défense; commission interministèrielle dans chacun des deux pays pour coordonner l'action gouvernementale. Ce dispositif a été complété par le protocole du 22 janvier 1988, de nouvelles instance voyant le jour: Conseil franco-allemand de défense et de sécurité; Conseil franco-allemand économique et financier; Haut-Conseil culturel et Collège franco-allemand pour l'enseignement supérieur. Cet édifice se double d'une coopération étroite en matière d'armement. L'Institut de Saint Louis a été fondé en 1959  —il préfigure la future agence européenne de l'armement—  et depuis, de très nombreuses réalisations ont vu le jour. Pour le proche avenir, nous ne mentionnerons que le projet de réseau spatial de renseignement stratégique (Hélios II et Horus) dont les partenaires discutent encore. Les acquis sont donc réels mais ce trop rapide inventaire appelle deux remarques. Tout d'abord, la multiplicité des structures de coopération et des projets n'empêche pas les divergences; les structures ne sauraient pallier à la volonté politique. Ensuite, il apparaît que le rapprochement des sociétés civiles n'a pas suivi: peu de collaboration d'entreprises allemandes et françaises; peu d'échanges d'hommes; peu d'échanges culturels et linguistiques. Dans nombre de secteurs d'activité, Français et Allemands s'ignorent réciproquement et beaucoup reste à faire.

 

Par ailleurs, l'alliance franco-allemande  —que l'on justifie rituellement par le souvenir des guerres civiles européennes et l'impératif de paix entre nos peuples quand il faudrait renouer avec l'audace de la puissance—  ne va pas sans arrières-pensées que la pudeur nomme «malentendus».

 

Via une étroite coopération avec la RFA, la France cherche à l'encadrer et l'utiliser comme levier de puissance, pour prendre la direction de l'Europe occidentale. En somme, l'instrumentaliser à la manière de feu la Confédération du Rhin. Ceci explique les «ratés» diplomatiques de 1989 et le traité de Maastricht, notamment les dispositions relatives à l'Union économique et monétaire, peut légitimement être interprété comme une dernière tentative, illusoire, de lier l'Allemagne. C'est là son vice constitutif. De son côté, l'Allemagne s'est appuyée sur les Etats-Unis pour contrebalancer le poids de la France en Europe occidentale. Aujourd'hui, le conflit Est-Ouest achevé, les Etats-Unis jouent la carte du «partnership in leadership» (Bill Clinton) et la tentation de l'axe germano-américain est forte outre-Rhin, dans certains milieux monétaro-atlantistes. Le blocage, que l'on espère temporaire, du projet Hélios II s'explique pour partie par cette tentation.

 

Chacun des deux partenaires cherche donc à se placer au point d'intersection du système européen et du système atlantique, pour le plus grand profit des Etats-Unis, et l'alliance franco-allemande demeure incertaine, pour paraphraser Georges-Henri Soutou. Il nous faut donc faire fructifier les acquis des dernières décennies et pour cela jeter les bases d'un nouveau départ.

 

Les bases d'un nouveau départ

 

Toute réflexion sur l'avenir des relations franco-allemandes doit partir des bases géopolitiques, géo-économiques et géo-culturelles de l'axe Paris-Berlin, colonne vertébrale du projet européen.

 

Les bases géopolitiques tout d'abord. Dans son maître-ouvrage, J. von Lohausen souligne l'importance, dans le cours de l'histoire politique européenne, de la «communauté d'espace franc». Cet espace-noyau (le «Kernraum») correspond au territoire français et à la partie occidentale du territoire allemand qui réunis forment le «pays-tronc» du continent européen. Pour montrer l'importance de cette plaque tournante entre les péninsules européennes, de ce pont entre les mers qui baignent notre continent, J. von Lohausen recourt à l'image de «la paume dont les cinq doigts sont la Scandinavie, l'Angleterre, l'Espagne, l'Italie et les Balkans». Au cœur de l'Ancien Occident, au sens médiéval du terme, la «communauté d'espace franc» est l'épicentre de la Grande Europe. Il n'y aura donc pas de structuration politique d'une unité de sens et de puissance paneuropéenne sans entente et harmonie entre la France et l'Allemagne.

 

A l'échelle planétaire, ces deux pays partagent une même situation géopolitique. On sait que Alfred T. Mahan, Halford MacKinder, Nicholas Spykman et Karl Haushofer interprètent l'histoire du monde à partir de quelques schèmes fondamentaux: l'opposition entre puissances maritimes-thalassocratiques et puissances continentales-telluriques; le rôle pivot de la masse eurasiatique, le Heartland,  base géographique de la puissance continentale; l'affrontement entre Terre et Mer pour contrôler le Rimland,  ces territoires périphériques et péninsulaires qui, de la Norvège à la Corée, ceinturent le Heartland.  Pour déchiffrer le système-Monde post-guerre froide, ce corpus de représentations géopolitiques doit être remanié. L'univers est globalisé, c'est-à-dire unifié par les liaisons océaniques, aériennes et spatiales, et dans ce monde océano-spatial, la géographie des systèmes de graphes (systèmes de relations) compte tout autant que la configuration des terres et des mers. Situé en marge de ce maillage planétaire, l'espace russo-sibérien est déclassé. L'ancien Heartland  n'est plus la puissance émergente du début du siècle mais une «aire des possibles».

 

Le danger des thématiques atlantistes

 

Pivot du système-Monde, les Etats-Unis sont aujourd'hui le nouvel Heartland. Au cœur des flux planétaires flux de marchandises, de capitaux et d'information, ils sont les seuls à pouvoir intervenir militairement à l'autre bout du monde et se placent au sommet du «grand triangle» Amérique du Nord/Union européenne/Japon-NPI (la Triade de Kenichi Ohmae). Dans cette configuration planétaire, la France, l'Allemagne et tous les Etats Européens sont géopolitiquement subordonnés. Périphérie orientale d'un Nouvel Occident américano-centré, l'Europe est toujours un rimland, non plus eurasiatique aujourd'hui mais euratlantique. Plateforme d'influence américaine, elle est instrumentalisée par les Etats-Unis dans leur entreprise de refoulement de la Russie (roll-back) et de désenclavement de la masse continentale eurasiatique; à cet égard, la lecture du dernier ouvrage de Zbigniew Brzezinski est édifiante. Masquée par un ensemble de représentations illusoires  —thématiques de la «communauté atlantique» et des «droits de l'homme»—, cette situation est dommageable aux intérêts de nos deux nations. Elle interdit toute politique indépendante sur les marges méditerranéennes et moyen-orientales de notre continent, et entrave l'émergence d'un partenariat russo-européen profitable aux deux parties.

 

Les bases de l'alliance franco-allemande sont aussi géo-économiques. Terme clef de l'après-guerre froide, la mondialisation ne doit pas dissimuler la constitution de nouvelles territorialités économiques et espaces préférentiels d'échanges, les régions planétaires ou macro-régions. Sur une carte de la Triade, l'Union européenne et son hinterland apparaissent comme l'une des trois têtes économiques et financières du système-Monde. Au cœur, le binôme franco-allemand, noyau dur de la géo-économie européenne. Les deux autres têtes sont le Japon, flanqué des NPI d'Asie-Pacifique, et les Etats-Unis, qui polarisent l'ALENA.

 

On sait que le «turbo-capitalisme» américain (Edward N. Luttwak) a retrouvé son dynamisme et la diplomatie-Clinton vise avant tout conquérir des marchés et instituer une économie mondiale ouverte (diplomatie de négoce). Ce libre-échangisme tous azimuts vise à interdire la marche géopolitique vers la macro-régionalisation et ces conceptions géo-économiques états-uniennes sont contraires à celles des Européens. Rappelons que l'objectif du traité de Rome était de constituer un marché commun, c'est-à-dire un espace économique autocentré.

 

Il est vrai que le traité de Maastricht a mis à mal le principe de préférence communautaire mais il semble que, face à l'objectif américain de dissolution de l'Union européenne dans le marché-monde libéral, Français et Allemands puissent se battre pour faire prévaloir un libre-échange maîtrisé. Les projets américains sont des plus concrets. La «Déclaration sur les relations entre la Communauté européenne et les Etats-Unis» de novembre 1990 stipule que les parties s'engagent à «promouvoir les principes de marché, repousser le protectionnisme, élargir, renforcer et poursuivre l'ouverture du système commercial multilatéral». En 1995, la Commission européenne et le Département du commerce ont lancé le «Dialogue transatlantique des affaires», préalable à la signature la même année d'un «Nouvel agenda transatlantique» prévoyant la mise en place d'une zone de libre-échange euro-américaine. De telles perspectives ne manqueraient d'ouvrir plus encore le Grand Continent aux firmes d'outre-Atlantique qui seraient en mesure de faire prévaloir leurs propres normes de fabrication. Une riposte franco-allemande et plus largement européenne est indispensable; il y va de nos équilibres économiques, écologiques (viande aux hormones, organismes génétiquement modifiés) et sociaux.

 

Le choc des civilisations de Samuel Huntington

 

Reste à envisager les bases géo-culturelles de l'alliance franco-allemande. Dans un ouvrage fondamental, Le choc des civilisations, beaucoup moins simpliste que certains critiques ne l'ont affirmé, Samuel P. Huntington souligne le rôle fondamental des données ethno-linguistiques et religieuses dans un univers globalisé où sons et images relient les différentes «îles» de l'archipel-monde, aires de civilisation et sous-blocs culturels. L'occidentalisation des sociétés du Sud, qu'il distingue de leur modernisation, ne serait selon cet auteur qu'un vernis superficiel et la fin de la guerre froide signifiant aussi la fin d'un monde objectivement euro-centré, les temps présents seraient aux résurgences et à l'affirmation identitaires. En conséquence, l'instance culturelle deviendrait un champ majeur de confrontation.

 

Dans le découpage de S.P. Huntington, l'Europe occidentale et centrale ainsi que l'Amérique du Nord appartiennent à la même aire de civilisation, issue de la Chrétienté latine. L'Europe orientale, les Balkans et l'espace russo-sibérien relèvent de l'aire slave-orthodoxe, elle-même issue de la Chrétienté byzantine. C'est à notre sens tenir pour quantité négligeable les communes racines grecques de la civilisation européenne, au Levant comme au Couchant du Grand Continent. Inversément, si l'on ne peut nier que l'Amérique soit la fille de l'Europe, on ne saurait non plus faire l'impasse sur les rapports complexes d'attraction-répulsion qu'entretiennent les deux rives de l'Atlantique. A tout le moins, il nous semble judicieux de distinguer au sein de la «civilisation occidentale», vaste ensemble aux contours bien flous et aux solidarités relâchées depuis la disparition de tout adversaire global, une aire européenne et une aire anglo-saxonne.

 

Au cœur de l'espace européen, la France et l'Allemagne partagent donc une même identité de civilisation que de trop longues dissertations sur latinité et germanité ont partiellement oblitérée après 1870. Les origines franques de la nation française et le commun passé carolingien ont été refoulés mais le dessous finit toujours par prendre le dessus et l'on ne peut que louer le travail d'anamnèse fait par Dominique Venner et la revue Enquête sur l'histoire. Cette prise de conscience historique jointe à une commune appréhension de l'espace  —penser en termes de siècles et penser en termes de continents sont une seule et même chose, rappelle J. von Lohausen—  déterminera l'avenir de l'alliance franco-allemande. Dans l'immédiat, nos deux pays sont pareillement menacés par le modèle culturel américain, composante à part entière de la stratégie intégrale de Washington. L'exercice du soft power (pouvoir de persuasion et de séduction) contribue au déracinement et à la dislocation de nos sociétés, annihile la volonté de puissance de nos nations en nous privant de nos «énergies rétroactives» et, en dernière instance, «habille» et légitime la domination américaine. Pareillement confrontés aux stratégies culturelles de Washington, Paris et Berlin devraient forger en commun leur riposte et élaborer leur propre stratégie.

 

Au terme de cette partie, il semble évident que la France et l'Allemagne vivent dans le même espace-temps géopolitique —même situation et mêmes menaces—  et sont toutes deux objets de la stratégie intégrale des Etats-Unis. Cette communauté d'origine, d'espace et de civilisation débouche nécessairement sur une communauté de destin et c'est sur la base de cette vérité première qu'une plage d'intérêts communs peut être définie.

 

Vers un nouveau regnum francorum

 

Nous appelons «regnum» une communauté de peuples et de nations soudée par un même destin géopolitique. Entre la France et l'Allemagne, cette communauté de destin peut prendre deux formes: celle d'un «noyau» dur au sein de l'Union européenne ou celle d'une confédération entre nos deux pays, dans le cas où les Européens ne parviendraient pas se doter d'un toit politique. Sur les bases que nous avons précédemment jetées, la France et l'Allemagne ont vocation à former un «noyau dur» au sein d'une Union européenne réformée et élargie à l'Est. Cette nouvelle extension risque en effet d'entraîner une dilution, l'Union européenne évoluant vers une zone de libre-échange dépourvue de capacités diplomatiques et stratégiques. La solution, très officiellement recommandée par la CDU (document Schäuble-Lamers/1994), consiste à donner la possibilité aux Etats qui le veulent d'aller de l'avant. Alors qu'aujourd'hui, le Conseil européen vote à l'unanimité dans les domaines politique, diplomatique et stratégique, le droit de veto serait restreint à quelques questions  —admission d'un nouvel Etat membre, révision des traités et réforme des institutions, signature d'un nouveau traité...—  ce qui permettrait d'éviter la paralysie pour tout ce qui relève de l'action extérieure. En contrepartie, il existerait une option de sortie pour les Etats désireux de s'en tenir au cercle de droit commun et ne voulant pas participer à une quelconque initiative diplomatico-stratégique (une intervention militaire par exemple). La contrainte serait donc évitée. C'est le principe des «coopérations renforcées»: nul ne doit pouvoir s'opposer aux entreprises diplomatico-stratégiques des Etats volontaires; nul ne doit en contrepartie y être contraint. Cette avant-garde à laquelle participeraient au premier chef la France et l'Allemagne constituerait, au nom de la «raison d'Etat européenne» (Konrad Adenauer), un conseil de sécurité aux pouvoirs effectifs. Le recours à la géométrie variable, incontournable à quinze et plus encore à trente, serait donc contrebalancé par le principe du «noyau dur» sans lequel l'Europe à plusieurs vitesses deviendrait une Europe à la carte, où les forces centrifuges finiraient par l'emporter. A cette condition, l'Union européenne pourrait acquérir une personnalité politique et l'«européanisation de l'OTAN», dossier que nous ne développerons pas ici, ne serait pas une vaine entreprise.

 

Si le récent traité d'Amsterdam a retenu le principe des «coopérations renforcées», il reste cependant soumis à un vote préalable à l'unanimité. Les résultats de la conférence intergouvernementale de Turin sont donc maigres et il en va de même de la réforme de l'Alliance atlantique. Le primat des structures politiques de l'Alliance (Conseil atlantique) sur les structures militaires (OTAN) et la continentalisation des chaînes de commandement indispensables pour que les Européens puissent mener en toute souveraineté les actions militaires qu'ils jugent nécessaires et justifiées - demeurent à l'état de perspective. Certes les meilleurs coups, en stratégie comme aux échecs, se jouent longtemps à l'avance et la reconquista européenne sera le travail d'une génération. Il nous faut pourtant envisager d'autres «possibles».

 

Au cas l'Union européenne échouerait à se muer en un Grand Espace continental, il nous resterait, dans le prolongement du traité de l'Elysée, à explorer la voie de la «confédération franco-allemande» (Christian Saint-Etienne)/de la «République gallo-germanique» (Michel Korinman).

 

Cette voie exige au préalable que l'on prenne la juste mesure des changements intervenus depuis 1989. Principale puissance économique européenne, la nouvelle Allemagne est aujourd'hui un sujet politique et stratégique pleinement souverain. Elle a pris du poids et ne saurait être utilisée comme levier d'Archimède par la France. Le projet d'une Europe française a donc vécu mais, symétriquement, l'heure de l'Europe allemande n'a pas sonné. Si l'on élargit l'horizon, la vision fantasmatique que nationaux-jacobins et gaullo-maurrassiens entretiennent complaisamment se dissipe. En termes économiques, l'Allemagne représente 45% du Japon. Elle ne possède pas de force de frappe, toujours utile par ces temps de prolifération nucléaire, sa population vieillit et rêve d'une «Grande Suisse». Bref, l'Allemagne ne peut s'en sortir seule et, en cas d'échec du projet européen, une union franco-allemande serait profitable aux deux parties.

 

Une identité fondée dans les héritages qui la fondent:

Ce projet carolingien nécessiterait l'harmonisation des structures économiques et politiques de nos deux pays. Sur le plan économique, les choses sont déjà bien avancées, la France ayant renoncé aux fausses facilités du binôme inflation-dévaluation et fait sienne la culture de la stabilité qui domine chez ses voisins d'outre-Rhin. Il reste donc à rendre compatible nos systèmes politiques. Tout d'abord, travailler à une théorie franco-allemande de la nation qui fasse la synthèse de Herder et Rousseau: le «consentement actuel» des populations mis en avant par Ernest Renan ne saurait s'inscrire dans la durée sans une combinaison d'éléments objectifs (le sang, le sol, la langue, la religion, l'histoire) étudiés avec précision par la philosophie politique allemande (et le grand historien républicain Jules Michelet en France). Pas de corps sans âme mais pas d'âme sans corps, ainsi que le démontre Henry de Lesquen et le retour au droit du sang en matière de nationalité doit accompagner la promotion d'une identité française ancrée dans les héritages qui la fondent.

 

Une nouvelle architecture du territoire français:

Autre chantier, l'harmonisation de nos structures politico-institutionnelles. Il nous appartient d'œuvrer à une nouvelle architecture du territoire français, articulée sur les identités régionales et les patries charnelles, et pour cela s'inspirer du fédéralisme allemand ou, à tout le moins, des pratiques espagnoles de décentralisation (l'Espagne est un «Etat asymétrique de communautés autonomes») et du nouveau modèle britannique («dévolution des pouvoirs»). Ce dernier exemple est particulièrement intéressant la Grande-Bretagne étant jusqu'alors un Etat-Nation tout aussi ancien et centralisé que la France. Précisons qu'il ne s'agit pas d'aligner la France sur l'Allemagne mais de lui permettre de redécouvrir la totalité de son histoire, d'explorer des options politico-culturelles jadis négligées et de se ressourcer. En contrepartie, la France apporterait dans la corbeille une nostalgie active de la grandeur, une volonté affirmée d'indépendance dans un cadre planétaire et une forte culture stratégique qui fait contraste avec la «culture stratégique d'intégré» de l'Allemagne (Bruno Colson).

 

Fondée sur les principe du «grand-gaullisme», cette union serait dotée d'un toit politique. A l'opposé de tout constructivisme, il s'agirait de rechercher des articulations, de combiner des potentiels, de développer des synergies et non de fondre en un seul ensemble les deux principales nations européennes. Mettre en œuvre le cadre confédéral prévu d'abord par le plan Fouchet et ensuite par le traité de l'Elysée serait déjà ambitieux.

 

Sur le plan extérieur, ce Regnum Francorum adopterait la posture géopolitique recommandée par J. von Lohausen, celle du dos-à-dos. Cette recommandation ne doit pas être comprise comme un strict partage géographique des tâches entre une Allemagne continentale et une France plus maritime. La France a des intérêts propres et légitimes en Europe centrale et orientale et l'Allemagne outre-mer. Là encore, il s'agit de combiner et articuler au mieux nos dispositifs diplomatique, stratégique et géo-économique pour assurer à une nouvelle unité de sens et de puissance, que l'on qualifiera de «carolingienne», une présence continentale, océanique et spatiale.

 

Reste à s'interroger sur la faisabilité politique de nos thèses. Il n'y a pas en effet de métapolitique sans prise en compte de la dimension temporelle et stratégique des combats à mener et c'est cette volonté d'incarner nos idées dans le réel qui fait de nous des révolutionnaires-conservateurs.

 

Dans le cadre actuel, celui de l'Union européenne et des systèmes de pouvoirs existants, des avancées semblent possibles, jusqu'à un certain seuil du moins. La juste critique de l'eurocratie et de son pendant français ne doit pas nous amener à «jeter le bébé avec l'eau du bain». On ne peut cependant ignorer, particulièrement dans le cas français, la décrépitude des structures politico-institutionnelles et la mise sous influence d'une très large partie de la classe politique. On ne peut pas plus faire l'impasse sur le surgissement de forces potentielles de renouveau, populistes et identitaires, que l'on qualifiera pour faire simple de néo-nationalistes. Il nous faut donc clarifier notre positionnement idéologique vis-à-vis de ces forces.

 

Nous sommes les héritiers du gibelinisme médiéval

 

Il est clair que tout en étant attaché à nos patries respectives, la nation n'est pas notre ultima ratio politique mais un «tout partiel». Notre vision, celle d'un Grand Espace européen organisé sur le modèle d'un empire, nous place «au-delà du nationalisme» (Thierry Maulnier). Continentalistes, animés par un puissant patriotisme de civilisation, nous sommes les héritiers du gibelinisme médiéval. Pour autant, le retour des nations à l'avant-scène de l'histoire est une saine réaction à la pression des forces de nivellement et d'homogénéisation. Ainsi que Julius Evola l'a écrit, il n'y a pas de stabilité du tout sans stabilité des parties et la constitution d'un ensemble européen organique passe par la reconstruction politique des nations. Sur la base de ce «nationalisme restaurateur», prélude à la résurrection de valeurs vertébrantes et à la reconstitution d'un ensemble impérial, des rapprochements sont possibles, voire souhaitables, avec les néo-nationalismes mais il faudrait au préalable se donner les moyens d'exercer une action de formation et de rectification du «mouvement national», et pour cela, un certain nombre de canaux de communication existent, sont à réactiver ou investir. L'essentiel reste à faire.

 

Du Traité de l'Elysée à la Respublica europeæ

 

Môle géopolitique d'une future Respublica europeæ, la France et l'Allemagne ont donc vocation à se constituer en un nouveau Regnum Francorum. Sous la forme d'un noyau dur, condition sine qua non pour que l'Europe-puissance polarise l'Europe-espace. A défaut sous la forme d'une confédération, bâtie sur le socle du traité de l'Elysée. La première option, celle d'un directoire franco-allemand de l'Europe, est bien évidemment préférable à la seconde, solution de repli. Encore faudrait-il prendre garde à laisser ouvert, sur la base des «coopérations renforcées», un éventuel directoire européen, faute de quoi les Etats-Unis ne manqueraient pas d'instrumentaliser les rancœurs des Etats continentaux s'estimant lésés et marginalisés. Le rattachement de l'Espagne à l'espace-noyau carolingien, par exemple, constituerait une percée géopolitique majeure. Un axe Paris-Madrid-Berlin structurerait un ensemble territorial continu, du détroit de Gibraltar à la mer Baltique. Rassemblant les principales composantes romanes et germaniques de l'Europe, cet ensemble serait ouvert sur l'Atlantique, la Méditerranée et l'Orient européen. Très vite, il serait appelé à s'élargir à la Pologne, qui déjà participe au «triangle de Weimar» (Paris-Berlin-Varsovie), pour devenir la colonne vertébrale du Grand Continent.

 

Au-delà de ces computations politico-stratégiques, il ne faut pas perdre de vue notre objectif final, celui d'une Europe impériale. Une tel ensemble ne serait pas un simple bloc de puissance réductible à ses bases matérielles; tout empire se veut fils de Dieu ou de l'Histoire. Les philosophies modernes de l'histoire ayant fait déroute, il n'y aura donc pas d'empire européen sans renaissance spirituelle. Nous retrouvons là une antique vérité  —pas de Cité sans Sacré—  mais en la matière la géopolitique est impuissante. Il nous faut porter le regard sur l'horizon et appeler une renaissance du sacré.

 

Louis SOREL.

Cette communication a été présentée à Paris, le 26 octobre 1997, dans le cadre du séminaire francilien de Synergies Européennes consacré aux relations franco-allemandes.

 

* Leon Brittan, commissaire européen au commerce extérieur, a lancé en mars 1998 son projet de «nouveau marché transatlantique» (NMT). La création d'une vaste zone de libre-échange entre les Etats-Unis et l'Union européenne permettrait, si l'on en croit Leon Brittan, d'ouvrir le marché nord-américain aux entreprises européennes et de leur assurer 1000 milliards de francs de débouchés supplémentaires au terme de cinq années d'application. Le fait est que le NMT a été accueilli avec une certaine réserve à Washington. Non pas par désintérêt pour l'axe commercial nord-atlantique mais parce que ce projet n'incluait pas immédiatement les secteurs audiovisuel et agricole, deux des principaux postes exportateurs de l'économie des Etats-Unis. La mise en place d'une zone de libre-échange euro-américaine demeure au centre de la diplomatie Clinton et si le Conseil européen a officiellement ajourné le NMT (26 avril 1998), force est de constater que les Etats-Unis contrôlent l'agenda politique. Washington ouvrira ce nouveau front en date et heure voulues.

 

ADDENDUM: la question de l'Euro

 

Centrée sur la nécessaire structuration politique d'une Europe-puissance, sur une base franco-allemande, notre communication du 26 octobre 1997 n'aborde pas la question de l'euro. Depuis, le sommet de Bruxelles des 1 et 2 mai 1998 a lancé la troisième phase de l'Union économique et monétaire prévue par le traité de Maastricht. Onze pays membres de l'Union européenne ont été retenus, la Grèce ayant été «recalée» et le Danemark, la Grande-Bretagne ainsi que la Suède préférant s'abstenir. L'euro sera donc émis à compter du premier janvier 1999 et la disparition des monnaies nationales est prévue pour juillet 2002. Cette nouvelle étape est d'importance et d'aucuns attendent beaucoup des implications politiques de l'euro. Les européistes à la Monnet recourent au fonctionnalisme pour expliquer que la monnaie unique «produira» mécaniquement de l'identité politique. En la matière, l'euro-scepticisme est de bon aloi.

 

Précisons tout d'abord que l'on ne saurait rester indifférent aux avantages «techniques» d'une «monnaie d'empire»: disparition des coûts de transaction et accroissement des échanges intra-communautaires, formation d'un vaste marché européen des capitaux et baisse des taux d'intérêt; transparence des prix et mise en concurrence des systèmes fiscaux, réduction de la contrainte extérieure et affirmation de l'euro comme nouvelle devise-clef du système monétaire international. Nous ne sommes pas de ceux qui pleureront sur une «exception française» à base de fiscalisme, de déficits publics et d'économie administrée. Ceci dit, les inconvénients et zones d'ombre de l'UEM ne doivent pas être négligées. Les Onze ne constituent pas ce que les économistes appellent une «zone monétaire optimale»: les structures de production sont hétérogènes, les niveaux de salaires disparates et la mobilité de la main d'œuvre quasi nulle (hors une petite élite de cadres). Les ajustements entre nations ne pourront donc se faire par des transferts de main d'œuvre et moins encore en dévaluant sa monnaie. Reste comme variable d'ajustement le chômage.

 

Les prolongements politiques de l'UEM sont également hypothétiques. On remarquera tout d'abord que l'on a mis la charrue avant les bœufs; battre monnaie est un acte de souveraineté et, en toute bonne logique, la réforme des institutions aurait du précéder le lancement de l'euro. Il faut ensuite insister sur le fait que l'Euroland, expression d'origine américaine lourde de sens, est un non-être politique. Le scénario retenu est celui d'une zone euro pilotée par une banque centrale européenne toute-puissante  —flanquée d'un Conseil de l'Euro aux pouvoirs incertains—  face à des Etats diminués. Partisan d'un référendum sur la monnaie unique et le traité d'Amsterdam, Charles Pasqua a résumé la situation: «Il ne restera plus aux Etats nationaux qu'à enterrer les morts et soigner les blessés». Les forces du marché jointes à l'expertise financière des technostructures européennes cogéreraient l'Euroland .

 

Ce scénario dit du «wonderland*» laisse songeur. Les inévitables variations de la conjoncture économique européenne affectant différemment les Onze, ces «chocs asymétriques» ne manqueraient pas de susciter des tensions entre Etats de la zone euro mais aussi entre unités infra-nationales  —«zones économiques naturelles» (Kenichi Ohmae), les régions font aujourd'hui figure d'acteurs économiques constitués—  le tout sur fond d'animosité croissante entre eurocrates et opinions publiques. Sans puissance publique dotée de pouvoirs effectifs pour arbitrer et décider, en un mot sans gouvernement européen, l'Euroland pourrait bien rejoindre le cimetière des unions monétaires dépourvues de directoire politique. Pas de monnaie d'empire sans Imperium! La question du devenir politique de l'Union européenne est toujours ouverte.

 

Louis SOREL.

 

* Voir Yves Mény, «Embarquement pour l'inconnu?», Le Monde, 5 mai 1998. Yves Mény est directeur du Centre Robert Schumann, à l'Institut universitaire européen de Florence.

 

Bibliographie indicative:

Livres:

- Blot Yvan, L'héritage d'Athéna. Les racines grecques de l'Occident, Les Presses Bretonnes, 1996.

- Brzezinski Zbigniew, Le grand échiquier, Balland, 1997.

- Chaliand Gérard et Rageau Jean-Pierre, Atlas stratégique, Complexe, 1991.

- Colson Bruno, Europe: repenser les alliances, ISC-Economica, 1995.

- Colson Bruno, La stratégie américaine et l'Europe, ISC-Economica, 1997.

- De Lesquen Henri, Qu'est-ce que la nation ?, Etudes et documents du Club de l'Horloge, 1989.

- Evola Julius, Essais politiques, Pardès,1988.

- Foucher Michel (Dr), Fragments d 'Europe, Fayard, 1993.

- Huntington Samuel P., Le choc des civilisations, Odile Jacob, 1997.

- Luttwak Edward N., Le rêve américain en danger, Odile Jacob, 1995.

- Maillard Pierre, De Gaulle et l'Allemagne. Le rêve inachevé, Plon, 1990.

- Maillard Pierre, De Gaulle et l'Europe. Entre la nation et Maastricht, Tallandier, 1995.

- Soutou Georges-Henri, L 'alliance incertaine, Fayard, 1996.

 

Revues

- «Quarante siècles d'identité française», Enquête sur l'histoire, n°l, hiver 1991-1992.

- «L'Europe, une histoire de famille», Enquête sur l'histoire, n°l1, été 1994.

- «La vérité sur Clovis», Enquête sur l'histoire, n°17, automne 1996.

- «L'Allemagne, de Charlemagne à Helmut Kohl», Enquête sur l'histoire, n°20, printemps 1997.

 

mardi, 17 novembre 2009

La chute du Mur: et après?

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La chute du Mur : et après ?

ex: http://unitepopulaire.org

« Il y a vingt ans, il n’y eut, pour déplorer la chute du mur de Berlin et l’effondrement de l’empire soviétique, que les inébranlables de l’utopie communiste. Certains se sont évidemment cramponnés à la possibilité d’expériences de ce qu’on a appelé le socialisme réel. D’autres ont critiqué le triomphalisme du nouvel ordre mondial incarné par George H.W. Bush. Et le manque d’égards que l’Allemagne de l’Ouest a manifesté vis-à-vis des décombres de l’Allemagne de l’Est n’était pas loin de ressembler à de la cruauté. […] Nombre d’idéaux de la social-démocratie, notamment la justice sociale et l’égalité, s’inspirent du marxisme, et on les a jetés, comme le fameux bébé, avec l’eau du bain communiste. […]

Les revers économiques de ces dernières années semblent donner raison à Mikhaïl Gorbatchev, qui s’alarme de ce que le “capitalisme occidental, privé de son vieil adversaire, ne se voie comme le champion incontesté et le héros du progrès global, et ne s’apprête à précipiter les sociétés occidentales et le reste du monde dans une nouvelle impasse historique”. […] L’ère Thatcher-Reagan et son ultralibéralisme avait mis les choses en chantier bien avant la chute du mur de Berlin. Margaret Thatcher n’avait-elle pas déclaré, avec sa fameuse formule, que la société n’existait pas, et que seuls comptaient l’individu et sa famille ? C’était l’injonction du chacun pour soi. […] L’ultralibéralisme a porté atteinte au rôle de l’Etat, en réduisant sa contribution à une société meilleure, plus juste et plus égale. Les néolibéraux ont moins le culte de la justice que celui de l’efficacité, de la rentabilité, ou du bénéfice.

Pendant que les néolibéraux occupaient le terrain en bafouant et en rompant de vieux pactes sociaux-démocrates, les énergies de la gauche se consumaient en politiques culturelles, problèmes d’“identité” et autre multiculturalisme idéologique. […] Pour beaucoup de gauchistes de la fin du XXe siècle, la défense des cultures du tiers-monde, issues du néocolonialisme, avait pris le pas, quel que soit le degré de barbarie de ces cultures, sur la défense de l’égalité et de la démocratie. […] Résultat : les politiques qui se réclamaient, même de très loin, du marxisme, ont perdu tout crédit, et ont fini par mourir en 1989. »

 

Ian Buruma, Project Syndicate, novembre 2009