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dimanche, 05 mai 2019

La métaphysique de la tripartition indo-européenne

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La métaphysique de la tripartition indo-européenne, Partie 1

Collin Cleary

Note de l’auteur :

Cet essai fut originellement écrit il y a presque exactement treize ans. Je m’étais abstenu de le publier pendant toutes ces années, parce que je considérais que les idées qu’il contenait étaient un peu trop spéculatives et audacieuses. Je crois cependant que ces idées sont trop intéressantes pour être gardées indéfiniment non-publiées. Dans l’espoir que d’autres puissent en profiter, j’ai décidé que le temps était venu de publier cet essai. Je dois cependant souligner que ces idées sont en effet hautement spéculatives, et la théorie exposée ici demeure un travail en progrès.

  1. Introduction : le schéma tripartite de Dumézil

Le plus éminent savant dans le domaine des études indo-européennes est le regretté Georges Dumézil du Collège de France. La contribution de Dumézil à ce domaine plutôt restreint peut être résumée à deux choses : (a) il remarqua que toutes les cultures indo-européennes  exhibaient une structure tripartite fondamentale ; et (b) il découvrit que cette structure était  codifiée dans la mythologie de chaque peuple indo-européen. Je décrirai d’abord simplement cette tripartition et ensuite j’en proposerai quelques exemples. Ce sujet est déjà familier pour beaucoup de mes lecteurs.

Au sommet de la société indo-européenne se trouve ce que Dumézil appelle la première fonction. Celle-ci incarne des aspects jumeaux : un aspect juridique et un aspect sacerdotal. Elle concerne l’administration de la justice, et la religion. Elle est donc parfois appelée la fonction « sacerdotale-royale » ou « sacerdotale-juridique ». La deuxième fonction est assumée par la classe guerrière ou militaire, qui sert à protéger la société dans son ensemble et à faire la guerre à ses ennemis. La troisième fonction incorpore tous ceux qui s’occupent de la production ou de la fourniture de biens, de services, et de nourriture. Ainsi, cette classe incorpore tous les marchands, fermiers, commerçants, artisans, etc.

Quant à savoir quelle est la fonction qui règne vraiment dans la société indo-européenne, c’est une question complexe. D’une certaine manière, il semble évident que la première fonction règne. Elle joue un rôle organisateur et structurant dans la société. Parce qu’elle inclut un aspect juridique, elle est impliquée dans la compréhension et l’application de lois abstraites. De plus, puisqu’elle implique aussi un aspect religieux, c’est la première fonction qui fournit à la société l’accès au divin, la plus haute autorité de toutes. Cependant, dans la plupart des  sociétés indo-européennes, c’est de la classe guerrière, ou classe de la deuxième fonction, que les souverains provenaient. C’est le cas pour la caste indienne des Kshatriyas, par exemple.

Donc qui règne, la première ou la deuxième fonction ? Le problème est facilement résolu en regardant la description de la société timarchique traditionnelle dans la République de Platon. La timarchie est une société gouvernée par des membres de la classe guerrière, qui sont éduqués et conseillées par des membres de la première fonction, ou classe sacerdotale. Cela fait des guerriers des souverains de facto, mais puisque les prêtres font les lois, et servent d’autorité finale, on pourrait aussi soutenir qu’au sens réel c’est la première fonction qui règne. La timarchie est en fait la forme prise par la plupart des sociétés indo-européennes traditionnelles.

A présent, permettez-moi de donner quelques exemples spécifiques de tripartition dans les cultures indo-européennes, et dans le mythe indo-européen. En Inde nous trouvons trois castes principales : brahmanes (prêtres), kshatriyas (guerriers), et vaishyas (producteurs). Une quatrième caste, les shudras, est simplement celle des serviteurs des autres. Les aspects jumeaux de la première fonction sont représentés par les dieux Varuna et Mitra. La deuxième fonction est représentée par le dieu puissant et belliqueux Indra. La troisième fonction est représentée par les jumeaux Ashvins.

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En allant très loin en fait, parmi les Celtes nous trouvons les druides (qui étaient prêtres et juristes), les flaith (qui étaient une aristocratie militaire), et les bo airig, qui signifie littéralement « hommes libres possédant du bétail ». Parmi les tribus germaniques nous trouvons une tripartition sociale similaire, et des dieux similaires. Odin et Tyr représentent, respectivement, l’aspect religieux et l’aspect juridique de la souveraineté. Comme Varuna, Odin est représenté comme un habile magicien. Comme Mitra, Tyr est le contrat personnifié. Thor, qui correspond très clairement à Indra, est le dieu des guerriers. Freyr et Freya représentent la troisième fonction. Il faut noter, à cet égard, que tout ce qui a un rapport avec la production ou la fécondité est associé à la troisième fonction. C’est pourquoi Freyr et Freya, des dieux de la sensualité, sont des dieux de la troisième fonction. Dans le panthéon romain, nous avons Jupiter (première fonction), Mars (deuxième fonction), et Quirinus (troisième fonction). En Iran nous trouvons les Amesa-Spentas, aspects du Seigneur Sage, Ahura Mazda. Ceux-ci incluent Asa et Vohu Manah, qui représentent l’ordre cosmique et la moralité et qui sont donc des déités de la première fonction. Xsathra est puissance ou pouvoir, et est donc associé à la deuxième fonction. Armaiti, Haurvatat, et Amerutat sont les patrons, respectivement, de la terre, de la santé, et de l’immortalité, et semblent donc représenter des caractéristiques de la troisième fonction.

La tripartition est encodée dans le mythe indo-européen par d’autres manières encore. Dans un mythe scythe, par exemple, les dieux envoient à l’humanité quatre objets : un calice, une épée, un joug, et une charrue. Le calice est clairement un objet rituel, représentant la première fonction sacerdotale. L’épée est évidemment un objet de guerre et est donc associée à la deuxième fonction. Le joug et la charrue servent à cultiver le sol, et sont donc des objets de troisième fonction. Dans la légende irlandaise, les Tuatha de Danaan étaient supposés avoir quatre grands trésors. Le premier était la Pierre du Destin, qui servait pour les couronnements. Le deuxième et le troisième étaient l’épée invincible de Lug au Long Bras, et une lance magique (les deux ensemble représentent la deuxième fonction). Le quatrième était le Chaudron du Dagda, qui était une sorte de corne d’abondance.

La tripartition est au cœur de l’Iliade. Ce qui cause la Guerre de Troie est la rivalité entre les déesses Héra, Athéna et Aphrodite, parmi lesquelles un certain Pâris doit choisir la plus belle. Pour le séduire, Héra lui offre la souveraineté (première fonction) ; Athéna lui offre la prouesse militaire (deuxième fonction) ; et Aphrodite lui offre l’amour de la plus belle femme dans le monde (troisième fonction). En choisissant Aphrodite, et Hélène, Pâris voue sa nation à la perte en sortant de l’ordre naturel des choses : pour les Indo-Européens, la souveraineté et la chevalerie doivent toujours passer avant la sensualité.

Ayant fait un bref exposé de la tripartition indo-européenne, je vais maintenant arguer que nos ancêtres avaient raison de penser que la tripartition est plus qu’une simple structure sociale. Les trois fonctions sont en réalité les reflets d’une métaphysique tripartite plus profonde, et chaque niveau de réalité exhibe cette structure. Avant de commencer à défendre cette idée, je veux très brièvement faire trois remarques. Avant tout, je ne dis pas que « toutes les choses vont par trois ». Ce dont je parle ici est une forme particulière de structure triple, et non la triplicité en tant que telle. Ma procédure sera inductive. Je présenterai de nombreux exemples d’aspects de la réalité structurés d’une manière analogue au système social indo-européen. Dans les sections 7 et 8 je proposerai des exposés purement abstraits de la nature de ces principes, m’abstenant de toute application spécifique de ceux-ci.

Ensuite, je ne traiterai pas de la question de la manière dont les anciens Indo-Européens auraient pu posséder cette connaissance avancée. Je supposerai que je n’ai pas besoin de convaincre mes lecteurs qu’il est possible que nos lointains ancêtres connaissaient plus de choses que nous, et non pas moins.

Enfin, il est inévitable que certains objecteront à ma procédure ici en disant que les Indo-Européens tentaient simplement de justifier leur structure sociale en la « lisant » dans la structure même du cosmos. Cette objection sera émise spécialement par ceux qui objectent aux traits de l’« idéologie » indo-européenne qui sont « politiquement incorrects », par exemple le patriarcat, l’aristocratie, le militarisme, et, mon « isme » préféré, ce que Jacques Derrida appelait le « phallo-logocentrisme ». Il est bien sûr possible que les Indo-Européens aient simplement pu lire leur structure sociale dans les cieux, mais nous devons au moins envisager que cela a pu être l’inverse – qu’ils ont pu lire cette structure dans les cieux, et ensuite bâtir leur société autour d’elle. Mais cette objection est vraiment à coté de la question, car les exemples de tripartition que je présenterai ici sont principalement mes propres observations, ma propre application des catégories indo-européennes à d’autres régions du réel.

La Métaphysique de la Tripartition indo-européenne, Partie 2
La tripartition dans la Société Humaine Société, Psychologie, et Physiologie

Collin Cleary

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Le Jugement de Pâris par Rubens

  1. L’Ame Humaine Tripartite

Pour commencer, les Indo-Européens pensaient traditionnellement que la société doit être structurée en trois parties ou « fonctions », parce que les gens eux-mêmes exhibent trois types d’âmes basiques.

Les étudiants de la philosophie grecque réaliseront que c’est exactement la vision de Platon. Dans la République, Platon divise sa cité idéale en trois classes : les philosophes, les gardiens ou guerriers, et les producteurs. Cela correspond précisément à la tripartition indo-européenne, les philosophes-rois prenant la place des prêtres-juristes. Mais dans la République, Platon ne fait cette remarque politique que pour faire une remarque psychologique. Il dit que chaque être humain exhibe cette structure tripartite.

Dans nos âmes il y a un élément-guide – un élément qui contrôle, qui dit oui ou non, qui parle « sens » en nous quand les émotions s’égarent. Cet élément se préoccupe à la fois des règles, de l’ordre, de la logique, et de ce que nous appelons la spiritualité. Il correspond donc à la fonction juridique-sacerdotale de la société indo-européenne. Nous avons aussi ce que Platon appelle un élément « passionné » [spirited] (à ne pas confondre avec « spirituel ») qui bat sauvagement dans la poitrine dès que le corps ou l’honneur de quelqu’un est menacé. Il nous pousse à combattre, parfois stupidement. Cela correspond évidemment à l’élément gardien ou guerrier (deuxième fonction). Enfin, nous avons ce que Platon appelle la partie « appétitive » ou « désirante » de l’âme. C’est la partie de nous qui est avide de biens physiques : nourriture, sexe, plaisirs sensuels de toutes sortes, argent, trésors, biens immobiliers, etc. La vertu, pour Platon, est présente dans une âme quand ces trois éléments coexistent harmonieusement, l’harmonie étant largement imposée par le contrôle de la première fonction, ou fonction rationnelle.

  1. Les trois types humains

L’autre remarque psychologique de Platon est que les gens diffèrent selon la proportion de ces éléments dans leur âme individuelle. Pour le dire simplement, certains humains tendent naturellement à être intellectuels ou spirituels. D’autres sont principalement passionnés, agressifs, préoccupés par les choses comme la compétition, l’honneur, et la gloire. D’autres encore sont principalement appétitifs, avec des préoccupations qui ne s’élèvent jamais au-dessus du niveau de la satisfaction physique et sensuelle, ou du gain matériel.

Bref, pour Platon et pour les Indo-Européens, il existe des souverains et des prêtres naturels, des guerriers naturels, et des producteurs et des commerçants naturels. Pour les Indo-Européens, la société doit exhiber une structure tripartite parce que les humains eux-mêmes se répartissent dans un tel groupement. Soit dit au passage, Platon pensait que la plus grande partie de l’humanité tombait dans la troisième classe appétitive, et c’est pourquoi il s’opposait à la démocratie. Le règne de « la majorité » signifie inévitablement le règne de ceux qui ne sont pas principalement raisonnables, spirituels, ou honorables, mais plutôt de ceux qui sont principalement préoccupés par le gain personnel, et par l’instant.

  1. Les types somatiques et tempéramentaux 

sheldon.jpgWilliam Herbert Sheldon

Ainsi, ce que nous avons vu jusqu’ici est que la tripartition indo-européenne nous fournit une psychologie selon laquelle nous pouvons comprendre la dynamique de notre âme individuelle, et selon laquelle nous pouvons nous catégoriser et nous comprendre, nous-mêmes et les autres. Cependant, la tripartition n’est pas seulement présente dans l’âme mais aussi dans le corps. Dans ce qui suit je m’inspirerai des travaux du psychologue W. H. Sheldon, dont le travail a été déclaré « discrédité » aujourd’hui (tous ses livres sont épuisés), parce qu’il a commis le péché impardonnable de suggérer que la biologie forme notre destin [1].

Sheldon distingue trois types physiques ou « morphes », et trois types de tempérament, ou « tonies ». Les morphes seront familiers à beaucoup d’entre vous : ce sont l’ectomorphe, le mésomorphe, et l’endomorphe [2] (la signification littérale de ces noms sera discutée dans la section 4, plus loin).

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L’ectomorphe est typiquement mince, peut-être quelque peu fragile et délicat. La linéarité prédomine. Il y a peu de graisse et peu de masse musculaire. Le tempérament typiquement exhibé par l’ectomorphe est cérébrotonique. Il est souvent introverti, souvent complètement absorbé dans ses propres processus de pensée. La plupart des schizophrènes exhibent un type ectomorphique. Le cérébrotonique tend à un comportement nerveux, obsessif, et est souvent hautement doué pour les recherches théoriques. Je n’ai pas besoin de souligner ce que nous avons tous observé dans nos vies : que les « cérébraux » et les « dingues de science » tendent à être minces, dégingandés, et nerveux. Mais ce type, qui est attiré par l’abstrait et le rationnel, peut aussi être attiré par le spirituel et le mystique.

Le mésomorphe a typiquement des épaules larges, avec une taille étroite, lui donnant une apparence triangulaire. Il est naturellement bien-proportionné. Comme l’ectomorphe, il tend à avoir peu de graisse, mais à la différence de l’ectomorphe sa musculature est prononcée. C’est un athlète naturel, avec un corps construit pour le conflit et la compétition. Concernant son tempérament, Sheldon l’appelle somatotonique. C’est un tempérament orienté vers l’action. Le somatotonique est un guerrier, recherchant la compétition, l’effort, la victoire, et la gloire de toutes sortes. De tels individus tendent vers l’extraversion. Ils veulent faire des choses, plutôt que s’asseoir et y réfléchir. Ils tendent à l’insensibilité, et même parfois à la brutalité. Ils veulent diriger, mais ils peuvent aussi être des partisans fanatiques s’ils rencontrent quelqu’un qu’ils estiment plus hautement qu’eux-mêmes.

L’endomorphe est de forme ovale, tendant souvent à l’obésité. Il est l’opposé diamétral de l’ectomorphe. En termes géométriques, il est rond plutôt que droit. La musculature qu’il peut avoir est très souvent cachée sous la graisse. L’endomorphe est viscérotonique ou « dominé par les boyaux ». Un représentant des théories de Sheldon remarque que pour les viscérotoniques « l’amour du confort physique, de la nourriture, des cérémonies polies, de la compagnie, et du sommeil sont des caractéristiques dominantes ». Il est caractérisé par « la douceur du corps et de l’esprit » [3]. Cette « douceur de l’esprit » se manifeste par une tendance à la passivité, à la complaisance, à l’amabilité indiscriminée, à la jovialité, et à une absence de volonté ou une incapacité à faire des jugements fermes ou tracer des distinctions fermes.

Il devrait être évident que ces trois types corporels et tempéramentaux correspondent aux trois fonctions indo-européennes. L’ectomorphe et cérébrotonique est l’intellectuel, le raisonneur abstrait, le juge, ainsi que le mystique. Le mésomorphe et somatotonique est le guerrier naturel. L’endomorphe et viscérotonique est naturellement incliné vers la production, la consommation, et la satisfaction sensuelle. La description par Sheldon des trois tempéraments peut être considérée comme un supplément à la discussion par Platon des types rationnel, passionné, et appétitif. Dans la distinction des trois « morphes » associés à ces types nous trouvons une expression physique de la tripartition, ce qui est particulièrement remarquable.

  1. La signification du mésomorphe

Ce qui est particulièrement intéressant ici est la « position médiane », au niveau physique aussi bien qu’au niveau spirituel, occupée par les mésomorphes-somatotoniques. Comme l’ectomorphe, il est maigre. Comme l’endomorphe, il est épais. Mais sa maigreur épaisse est musculaire. Il manque de la graisse de l’endomorphe, mais à la différence de l’ectomorphe sa musculature tend à être visible.

Dans l’enseignement ésotérique de Platon – rapporté sous forme fragmentaire par Aristote et d’autres – le grand philosophe distingue deux principes ultimes et métaphysiques qu’il appelle l’Un et la Dyade Indéfinie. L’Un est conçu comme mesure, ordre, proportion. La Dyade est conçue comme les principes jumeaux du Grand et du Petit. On peut facilement surimposer les trois morphes à ces catégories, le mésomorphe représentant un milieu entre des extrêmes. C’est le type parfaitement mesuré, ordonné, proportionnel. C’est dans l’espoir d’approcher de sa forme que des millions de dollars sont dépensés chaque année pour adhérer à des sociétés de gymnastique. L’endomorphe et l’ectomorphe sont, respectivement, le Grand et le Petit. C’est comme si l’endomorphe avait trop de quelque chose et l’ectomorphe trop peu.

Il y a une autre manière plus importante par laquelle le mésomorphe-somatotonique est un « milieu » entre les deux autres. L’ectomorphe tend vers l’abstrait, le cérébral, et l’intellectuel. L’endomorphe-viscérotonique est à l’opposé : inclinant vers la sensualité, la physicalité, et l’oubli insouciant. En termes platoniciens-aristotéliens, l’un est plus proche du domaine du Formel et de l’Idéal, l’autre du matériel. Il est probable que les deux mènent des existences problématiques. Le mésomorphe, d’autre part, est un heureux milieu entre les deux. Il est incontestablement physique, et se réjouit de sa physicalité. Mais à la différence de l’endomorphe, sa physicalité n’est pas celle de l’autosatisfaction et de la sensualité. Le mésomorphe utilise sa physicalité pour poursuivre des idéaux. Ceux-ci vont de buts triviaux, comme gagner une partie, ou marquer un point, à des questions plus sérieuses, comme défendre l’honneur, vaincre une menace contre soi-même ou son peuple, ou défendre les sans-défense.

Le mésomorphe-somatotonique possède ainsi l’idéalisme de l’ectomorphe, mais sans sa tendance aux choses détachées-du-monde et à l’obsession de soi. Il possède la physicalité de l’endomorphe, mais sans sa tendance à la recherche du plaisir et à la passivité. C’est essentiellement pour cette raison que les anciens peuples, en particulier les Indo-Européens, regardaient ce type comme le type humain idéal. Ils lui érigeaient des statues, écrivaient des poèmes épiques et des sagas sur lui, et en général lui rendaient un culte comme étant l’être humain qui pouvait le plus approcher du divin (je reviendrai sur ce point quand je discuterai de la tripartition dans le tantrisme).

Le buste triangulaire du mésomorphe (souvent appelé la « forme en V ») est également intéressant. N’est-il pas fascinant que ce type, qui est une sorte d’équilibre entre les deux autres, approche d’une forme « triangulaire », et que cette forme soit trouvée si attirante ?

  1. Les organes corporels

Si nous regardons l’arrangement du corps humain, nous trouvons quatre systèmes principaux alignés autour de son axe central, l’épine dorsale. Ce sont le cerveau, le cœur, les boyaux, et les organes génitaux. Dans la pensée traditionnelle, ils sont l’expression physique des trois fonctions : le cerveau représentant, bien sûr, la première fonction. La passion de la deuxième fonction a depuis longtemps été associée à la région du cœur. Le terme de Platon qui est traduit par « passion » est thumos, qui était conçu comme une partie physique du corps, situé dans la région du cœur. Les boyaux et les organes génitaux représentent clairement la troisième fonction. Il est également intéressant de remarquer que le cœur occupe à peu près une position médiane entre le cerveau et les organes génitaux, de même que le mésomorphe-somatotonique est le milieu entre les deux autres types.

Une « qualité yang » dure caractérise les organes associés à la première et à la deuxième fonctions. Une « qualité yin » douce est typique des organes associés à la troisième fonction. Spécifiquement, les organes de la cavité abdominale sont non seulement mous, mais ils sont aussi les moins protégés par les os. Tout durcissement de ces organes signifie une maladie. La tête, par contre, une région associée à la première fonction, est l’une des parties les plus dures du corps. On peut aussi trouver des structures dures et cristallines dans le cerveau lui-même, dans la glande pinéale [4]. A la deuxième fonction sont associées les muscles les plus importants et les plus visiblement apparents du corps, dont la « dureté » est un signe de puissance. Nous utilisons le terme « durcir » pour décrire le processus de perfectionnement de ces muscles, qui sont si nécessaires pour l’attaque et la défense. Bien que les organes sexuels soient associés à la troisième fonction, chez le mâle ils ont, du moins une partie du temps, la qualité yang dure. C’est grâce à l’interaction de l’anatomie sexuelle mâle avec le système circulatoire, qui est un système de deuxième fonction, comme je le discuterai brièvement.

  1. Les Doshas ayurvédiques et les types sexuels 

La typologie physique et tempéramentale précédente fut considérablement développée par les anciens peuples indo-européens, en utilisant un vocabulaire très différent, bien sûr. Le meilleur exemple de cela peut être trouvé dans l’ancien système indien de la médecine ayurvédique. Ce matériel a été popularisé dans les années récentes dans un certain nombre de best-sellers, en particulier ceux de Deepak Chopra (envers qui nous devrions à part cela adopter un sain scepticisme). Le système dépend d’une division des êtres humains en trois types, appelés doshas : Vata, Pitta, et Kapha. Ceux-ci sont conçus comme des forces opérant dans le corps.

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Tout comme dans l’image platonicienne de l’âme, nous avons trois types en nous, mais chez la plupart des gens un dosha prédomine. Un type Vata est mince et dégingandé, avec une tendance à la crainte et à l’obsession de soi. Il est aussi imaginatif, introspectif, et souvent intellectuel. En d’autres mots, ectomorphique-cérébrotonique. Ce qui est particulièrement fascinant ici, c’est que l’Ayurveda conçoit le dosha Vata comme « dirigeant » les autres doshas. Deepak Chopra parle en fait du Vata comme du « roi » des doshas [5]. Le type Pitta est musculaire et bien-proportionné, agressif, impérieux, et déterminé. En d’autres mots, le type « guerrier » ; le mésomorphe-somatotonique. Le type Kapha a une tendance à l’obésité, à la bonne humeur, à l’autosatisfaction, et à la paresse mentale. Evidemment, l’endomorphe-viscérotonique.

Cette tripartition fut remarquée par les Indiens même dans le domaine du sexe. L’Ananga Ranga, un manuel sexuel indien de date incertaine (bien que clairement rédigé durant le dernier millénaire) divise les hommes en trois types sexuels : le Shasha ou homme-lièvre, le Vrishabha ou homme-taureau, et l’Ashwa ou homme-étalon. Je commencerai par l’homme-taureau. On le reconnaît, affirme l’Ananga Ranga, à son phallus ou lingam d’une longueur correspondant à la largeur de neuf doigts. Autant que je puisse me l’imaginer, cela correspond approximativement à la moyenne de Kinsey. D’après le texte, le corps de cet homme est « solide, comme celui d’une tortue ; sa poitrine est charnue, son ventre dur, et les grenouilles [= les triceps] de ses bras sont tournées de manière à être mises de face ». Bref, c’est un mésomorphe classique. Le texte nous informe que sa disposition est « cruelle et violente, agitée et irascible, et son Kama-salila [= semence] est toujours prêt » [6]. L’homme-étalon a un lingam d’une longueur correspondant à peu près à la largeur de douze doigts. Il est de forme épaisse. Le texte nous dit qu’il est « d’esprit insouciant, passionné et avide, glouton, changeant, paresseux, et rempli de sommeil » [7]. Il s’agit clairement du type endomorphe-viscérotonique, correspondant à la troisième fonction indo-européenne.

J’ai gardé l’homme-lièvre pour la fin, parce qu’ici la correspondance n’est pas aussi précise. Le texte nous dit que son lingam est d’une longueur correspondant à peu près à la largeur de six doigts. « Sa figure est courte et maigre, mais bien proportionnée en forme et en fabrication … son visage est rond … Il est d’une disposition tranquille ; il fait le bien pour l’amour de la vertu ; il est impatient de se faire un nom ; il est humble dans son comportement… » [8]. Rien ici sur l’aspect mince, dégingandé et introspectif. Mais l’adjectif « maigre » suggère la minceur. Le fait qu’il fasse le bien « pour l’amour de la vertu » suggère le goût des principes du cérébrotonique classique. Notez, à ce propos, que l’homme-taureau ou mésomorphe est le milieu mathématique précis entre l’homme-lièvre et l’homme-étalon. L’homme-lièvre a une taille de six doigts, l’homme-taureau de neuf, et l’homme-étalon de douze. Neuf est un nombre très important dans les traditions indo-européennes, particulièrement dans la tradition germanique.

  1. Paracelse

Paracelsus.jpgParacelse

Nous trouvons quelque chose de remarquablement similaire à ces distinctions physiologiques indiennes tripartites dans les ouvrages du médecin et alchimiste allemand du XVIe siècle, Theophrastus Bombastus von Hohenheim, appelé Paracelse. Il y a une sorte d’esprit indo-européen à l’œuvre chez ce penseur, car il insiste pour passer du système quadripartite des éléments (Terre, Air, Feu, et Eau – qui est peut-être bien une conception d’origine proche-orientale et non indo-européenne) au système tripartite du Soufre, du Mercure et du Sel. Mais ce n’est pas la pure triplicité de ce système qui est curieuse, mais plutôt sa correspondance exacte avec les trois fonctions indo-européennes.

Dans son Opus Paramirum (1530-1), Paracelse écrit, « La première chose que le médecin devrait savoir est que l’homme est composé de trois substances » [9]. Ce sont le Mercure, le Soufre et le Sel, dit-il, qui se combinent pour faire un corps. « Pour rendre les choses visibles, la Nature doit être obligée de se montrer … Prenez un morceau de bois. C’est le corps. Maintenant brûlez-le. La partie inflammable est le Soufre, la fumée est le Mercure, et la cendre est le Sel » [10]. Comme le note un commentateur, « Il utilisait ces termes pour décrire des principes de constitution, représentant l’organisation (Soufre), la masse (Sel), et l’activité (Mercure), toutes des variétés des formes spécifiques accomplies par les intelligences et semences immanentes de la matière » [11]. La correspondance avec le système indo-européen est donc comme suit : le Soufre, le principe organisateur = Première Fonction ; le Mercure, le principe actif et volatile = Deuxième fonction ; et le Sel, le principe de la pure masse ou matière = Troisième Fonction.

Notes

[1] Mêmes les bibliothèques se débarrassent des livres de Sheldon. Des exemplaires sont encore en circulation, mais souvent pour un prix élevé. Voir en particulier les ouvrages suivants : The Varieties of Human Physique (New York: Harper, 1940); The Varieties of Temperament (New York: Harper, 1942); Atlas of Men: Guide for Somatotyping the Adult Male at All Ages (New York: Gramercy Publishing, 1954).

[2] La terminologie de Sheldon continue à vivre dans les milieux de la santé et du fitness – particulièrement dans le bodybuilding.

[3] Robert S. De Ropp, The Master Game (New York: Delacorte Press, 1968), 116.

[4] Ces remarques peuvent être trouvées dans Wolfang Schad, Man and Mammals: Toward a Biology of Form, trans. Carroll Scherer (Garden City, New York: Waldorf Press, 1977), 17.

[5] Deepak Chopra, Perfect Health (New York: Harmony Books, 1991), 36.

[6] Kalayana Malla, Ananga Ranga, trans. F.F. Arbuthnot and Richard F. Burton (New York: Medical Press, 1964), 16

[7] Ibid., 16. Il est intéressant de noter que Shiva, l’incarnation de la troisième fonction, le principe du Tamas dans la théorie indienne des gunas, est appelé « seigneur du sommeil ».  Plus de détails là-dessus plus tard.

[8] Ibid, 15.

[9] Paracelse, Essential Readings, ed. Nicholas Goodrick-Clarke (Berkeley, California: North Atlantic Books), 76.

[10] Ibid., 78.

[11] Ibid., 28.

La métaphysique de la tripartition indo-européenne, Partie 3
La tripartition chez les animaux et dans la  nature en général

La tripartition chez les animaux

  1. Les trois systèmes de Schad

Jusqu’ici j’ai appliqué la tripartition indo-européenne au domaine humain, à l’ordre politique et sociétal, à la psychologie individuelle et de groupe, à la physionomie, à l’anatomie, et à la sexualité. Je vais maintenant passer à un niveau d’abstraction plus élevé, à la nature de l’organisme des mammifères en général. Dans les remarques qui suivent, je m’inspirerai principalement de l’œuvre des scientifiques Wolfgang Schad et Henri Bortoft, adeptes de l’anthroposophie.

Schad identifie trois processus fonctionnels fondamentaux dans l’organisme des mammifères : le système nerveux-sensoriel, le système respiratoire-circulatoire, et le système métabolique-membres. En termes de tripartition indo-européenne, les correspondances sont assez évidentes. Le système nerveux-sensoriel fonctionne pour guider le corps. Il correspond donc à la première fonction (souvenez-vous que l’ectomorphe, que j’ai identifié à la première fonction, a été décrit en termes de tempérament comme un cérébrotonique, où le système nerveux domine). Le système respiratoire-circulatoire correspond à la deuxième fonction. Une coïncidence heureuse fait que dans les traductions [anglaises] de Platon, nous utilisons le terme « spirited » pour décrire les gardiens ou guerriers, qui sont censés posséder l’« esprit ». Les anciens Indo-Européens pensaient que leurs guerriers étaient littéralement inspirés. Les types guerriers sont aussi connus pour leur manière de respirer et de gonfler la poitrine, une forme de parade destinée à intimider les autres mâles. Ainsi, il y a une association naturelle entre la deuxième fonction, le guerrier, et le système respiratoire-circulatoire. Mais beaucoup plus important est le fait que c’est dans le système circulatoire que nous trouvons les principaux gardiens du corps : les globules blancs qui servent à attaquer les envahisseurs.

Il nous reste à examiner le système métabolique-membres. Il y a là aussi une association entre le métabolisme et la troisième fonction indo-européenne. Dans la société indo-européenne, la troisième fonction est la fonction nourricière ; elle inclut tout ce qui est concerné par la fabrication ou l’apport de nourriture. Les deux organes du corps qui représentent le plus les différents aspects de la troisième fonction (qui sont complexes) sont l’estomac et les organes génitaux (souvenez-vous que l’endomorphe, que j’ai identifié à la troisième fonction, est fréquemment caractérisé par un estomac protubérant, et une tendance à la gloutonnerie). Le « caractère négatif » de la troisième fonction (que je discuterai en détail plus tard) est illustré par l’action des organes digestifs, qui suppriment l’identité de la matière étrangère et la  convertissent en la propre substance du corps.

  1. Rongeurs, ongulés, et carnivores 

Dans l’être humain, les trois systèmes de Schad existent dans un état d’équilibre. Chez d’autres mammifères, cependant, ces systèmes existent d’une manière telle que l’un domine les autres. Schad affirme que les rongeurs (castors, spermophiles, lemmings, souris, taupes, rats, écureuils, etc.) sont dominés par le système nerveux-sensoriel. On peut voir cela non seulement dans leur activité nerveuse frénétique (similaire à celle de l’ectomorphe-cérébrotonique humain), mais aussi dans le fait que leur tête est beaucoup plus grosse et plus développée que leurs membres. Les ongulés (buffles, chameaux, vaches, chevreuils, chèvres, chevaux, cochons, etc.) sont dominés par le système métabolique-membres. Cela se reflète dans leur grande taille. En particulier, leur estomac est habituellement très grand, et leurs membres sont aussi allongés et massifs. Comme l’endomorphe-viscérotonique humain, ils tendent à être passifs, à se déplacer lentement, et aiment manger.

Les carnivores (chats, loups, dauphins, blaireaux, belettes, etc.) sont dominés par le système respiratoire-circulatoire, que Bortoft décrit significativement comme « intermédiaire entre les deux autres [systèmes] » [1]. Il écrit : « Dans leur forme bien proportionnée, dans laquelle aucune partie du corps n’est développée plus que les autres, aussi bien que par leur taille intermédiaire, ils représentent un équilibre actif entre les deux extrêmes du rongeur et de l’ongulé » [2]. Cette description correspond exactement à mon traitement du mésomorphe-somatotonique humain. Les carnivores, comme les guerriers de la deuxième fonction, sont bien sûr caractérisés par une nature de prédateur. Et qui sont les souverains de facto du royaume animal ? Les carnivores, bien sûr.

Schad dit des choses fascinantes sur la vie de ces trois types de conduite des mammifères, et sur leur relation particulière avec la mort. Le rongeur, dit-il, « vit involontairement » et « meurt avec joie ». Sa vie nerveuse hyper-cinétique semble le rendre fatigué de l’existence, et il meurt généralement facilement et sans combat. Le cas extrême serait celui du lemming.  L’ongulé, par contre, « vit avec joie » et « meurt involontairement ». L’ongulé meurt mal. Il est souvent difficile à achever, et se débat et proteste bruyamment. Lorsqu’il se trouve face à une menace réelle ou potentielle, le rongeur réagit généralement par la fuite ; l’ongulé réagit par l’« évitement tranquille ». Par contre, le carnivore attaque. « Il s’expose également à la vie ou à la mort. Avec la mort aussi bien qu’avec la vie, il a une relation active ». Plus loin, il nous dit que le carnivore « accepte également la possibilité de la vie ou de la mort » [3]. En termes humains, cette étrange combinaison d’héroïsme et de résignation est typique, bien sûr, du guerrier tel qu’il est classiquement conçu.

  1. Exemples anatomique : dents et os

Nous pouvons trouver la tripartition même à un niveau beaucoup plus concret, reflété dans le dessin des parties individuelles du corps. Prenez les dents, par exemple : les incisives, les canines et les molaires. Schad nous montre que chez les rongeurs les incisives dominent, chez les carnivores les canines, et chez les ongulés les molaires. Chacun accentue le type de dents dont il a besoin pour sa forme de vie. Mais chez l’être humain, ces trois types sont également développés, parce que nous pouvons manger – et en faire notre subsistance – toutes les nourritures mangées par les rongeurs, les carnivores, et les ongulés.

Ce simple fait nous oriente vers des questions de grande importance concernant la place de l’homme dans l’univers ; son rôle cosmique, si vous voulez. Non seulement les êtres humains possèdent les trois types de dents, également développées, mais, comme je l’ai déjà mentionné, dans l’être humain les trois systèmes corporels (nerveux-sensoriel, respiratoire-circulatoire, et métabolique-membres) sont équilibrés, sans qu’aucun ne domine les autres. Qu’est-ce que cela signifie ? Dans le concept indo-européen traditionnel de la royauté, le roi, bien qu’il vienne d’une caste, était en réalité considéré comme incarnant les trois fonctions. Maintenant, je dirais que l’homme est à la nature ce que le roi est à son royaume. Comme le roi, qui incarne tous les aspects de son royaume dans sa personne, l’homme incarne tous les aspects de la nature. L’homme est à la fois rongeur, carnivore et ongulé. L’homme est le microcosme. Si on peut dire qu’il est le « roi de la nature », sa royauté est une intendance. Son rôle n’est pas d’être un tyran, ni de piller son royaume, mais d’y travailler presque comme un jardinier travaille dans un jardin : s’assurer que le sol est capable de supporter la croissance, planter les graines d’une manière judicieuse, guider la croissance de ses plantes, et bien sûr éliminer les herbes mauvaises et nuisibles.

Comme exemple anatomique supplémentaire de tripartition, considérez les trois types de cellules osseuses. Les ostéoblastes synthétisent les nouveaux os, et réparent les os existants en prenant du calcium dans le sang et en créant des matrices osseuses. Les ostéocytes maintiennent la force osseuse. Enfin, les ostéoclastes dissolvent les os dans le sang afin de briser et de réassimiler les vieilles structures osseuses. Nous avons ici un mécanisme organisateur positif, un mécanisme préservateur, et un mécanisme destructeur négatif. Comme un auteur le remarque, cela correspond étroitement à la trinité des dieux hindous, Vishnou, Brahma, et Shiva [4]. Comme nous le verrons plus loin, ces trois dieux sont conçus comme l’incarnation de forces qui correspondent exactement aux trois fonctions indo-européennes.

  1. Vie microscopique

Maintenant, pour l’instant je n’ai rien à dire sur les groupes d’animaux autres que les mammifères. Je n’ai rien à dire non plus sur les plantes. Ce sont des domaines pour une réflexion ultérieure. Je dirai cependant quelque chose sur la forme de vie la plus primale, la cellule de base et le micro-organisme.

Il y a différentes sortes de cellules, avec des structures différentes, mais dans la structure basique de chaque cellule nous pouvons voir une tripartition. Le noyau, dont le reste de la cellule reçoit ses ordres de marche, semblerait correspondre à la première fonction. La membrane de la cellule, qui entoure la cellule et la protège, serait la deuxième fonction. Enfin, la mitochondrie, et d’autres structures, qui déconstruisent et assimilent les molécules de nourriture pour fournir de l’énergie à la cellule, semblerait représenter la troisième fonction.

En prenant à nouveau les humains comme exemple, nos corps commencent par être des organismes microscopiques tripartites. Après environ trois semaines, l’embryon humain se développe en une sphère composée de soixante cellules appelées une blastula. La blastula se replie sur elle-même et développe trois structures de base, l’ectoderme, le mésoderme, et l’endoderme. De l’ectoderme se développeront la protection extérieure du corps, l’épiderme, ainsi que le cerveau et le système nerveux. L’ectomorphe est simplement quelqu’un chez qui cette composante prédomine. Le mésoderme se développe en muscles, os, système respiratoire et circulatoire, et est le trait saillant du mésomorphe. Enfin, l’endoderme, qui prédomine dans l’endomorphe, se développe en système digestif, ainsi que dans la parité du  système respiratoire et du canal alimentaire.

Si on regarde la structure de la blastula originelle, on découvre que l’ectoderme et l’endoderme naissants sont mis ensemble, pour former la couche extérieure de la blastula. Le mésoderme est le noyau intérieur. Cela suggère le lien entre les opposés polaires de la première fonction et de la troisième fonction. En un certain sens, ceux-ci existent sur un continuum. Les anciens reconnaissaient cela, et c’est pourquoi Platon parlait de sa Dyade Indéfinie comme du Grand et du Petit. Similairement, les deux extrêmes qui s’opposent au milieu dans la doctrine aristotélicienne des vertus sont conçus comme s’ils étaient sur un continuum. Même plus tard, quand l’ectoderme et l’endoderme sont plus complètement différenciés, ces deux sont encore visiblement présents sur un continuum. Et le mésoderme réside encore au centre de l’organisme, à l’intérieur de la coquille extérieure formée par l’ectoderme et l’endoderme.

Que le mésoderme doive se trouver à l’intérieur des deux autres, plutôt que sur le continuum avec eux, est hautement significatif. Cela reflète le caractère spécial de la deuxième fonction : son coté à part, son statut de médiation entre les autres fonctions. De plus, parce que dans la deuxième fonction les deux autres sont harmonisées et réalisées (un point sur lequel je reviendrai plus loin), la deuxième fonction est, d’une certaine manière, la « vérité intérieure » des autres. La position du mésoderme comme noyau intérieur est la vérité intérieure exprimée physiquement.

La tripartition dans le monde physique en général

  1. Le macrocosme

Le niveau le plus abstrait que nous considérerons sera l’existence en tant que telle. Mais avant d’atteindre ce niveau, regardons d’abord simplement notre monde physique, et ensuite les constituants physiques de ce monde. A nouveau, c’est un domaine dans lequel beaucoup de spéculations sont possibles, et ici je ne peux proposer que quelques suggestions.

Une division triple évidente de notre monde serait celle de la terre, du ciel et de l’atmosphère, et des cieux au-delà. Sur la terre nous trouvons du liquide et du solide, des océans et des continents. La terre est la source d’abondance, de la subsistance. A ce niveau de la réalité, elle est donc la troisième fonction. La coprésence du liquide et du solide représente la coprésence dans la troisième fonction du chaos (« les eaux » sont un symbole pérenne de la force du chaos), et de l’abondance ; l’indéfinition, et la fécondité précise. Le ciel plane au-dessus de la terre. L’atmosphère entoure celle-ci et la protège. Le ciel a souvent représenté une force mâle, et la terre la force féminine. Dans le système germanique, le ciel correspond à Tyr, la terre à Ing. Les deux sont des dieux mâles, mais Tyr fait partie des Ases, Ing des Vanes. De même, je dirais que le ciel et l’atmosphère représentent la deuxième fonction. Il est aussi remarquable que, comme je l’ai montré, la deuxième fonction soit associée à l’inspiration, au sens littéral ; à l’air et à la respiration. La première fonction est représentée par les corps célestes, en particulier le soleil, qui exerce une influence sur la terre depuis en-haut, une influence que les scientifiques commencent seulement à comprendre. Le soleil est aussi un symbole pérenne de la première fonction. Il apparaît dans la République de Platon comme un symbole de l’idéal. Comme je le discuterai brièvement, le soleil joue aussi ce rôle dans la pensée indienne.

  1. Physique

L’équation d’Einstein E=mc2 décrit l’univers physique en termes d’énergie, de masse, et de lumière. Comme nous le verrons, dans la philosophie indienne la première fonction indo-européenne est identifiée à la lumière, la troisième fonction à la masse, et la deuxième, une fonction de médiation avec l’énergie. La masse ou matière dans la physique contemporaine est décrite comme un « tourbillon d’atomes », de même que, en termes métaphysiques, la  troisième fonction est souvent identifiée au chaos, ou au « flux » d’Héraclite. Nous pouvons aussi remarquer que tous les atomes après l’hydrogène sont tripartites, composés de protons positifs, d’électrons négatifs, et de neutrons à charge neutre. L’électron négatif exhibe l’aspect d’indétermination et de « flux » normalement associé à la troisième fonction. Les électrons sont conçus pour être toujours en mouvement (dans le modèle classique, orbitant autour du noyau), de sorte qu’il est impossible d’établir précisément leur position.

Notes

[1] Henri Bortoft, The Wholeness of Nature (Hudson, New York: Lindisfarne Press, 1996), 94.

[2] Ibid., 94-95. Caractères italiques ajoutés.

[3] Schad, 228-229; 216.

[4] Michael S. Schneider, A Beginner’s Guide to Constructing the Universe (New York: HarperCollins, 1995), 55. Schneider identifie en fait les ostéoblastes à Brahma, les ostéocytes à Vishnou, et les ostéoclastes à Shiva. Pour des raisons qui deviendront évidentes, j’ai changé cet ordre.

La métaphysique de la tripartition indo-européenne,  Partie 4
La tripartition dans la pensée et le langage  humains

arjuna-warrior-203x300.jpgArjuna

  1. Universel, particulier, et individuel

Avant de nous tourner vers le niveau de ce qui est purement idéal et transcendant, notre niveau d’abstraction le plus élevé, je parlerai brièvement de la manière dont la tripartition se manifeste quand nous tentons d’incarner l’idéal dans la pensée et le langage.

Avant tout, il y a trois types fondamentaux de noms : l’universel, le particulier, et le singulier. Nous parlons du « loup » comme d’une espèce (ou de la gent « lupine »), et nous parlons des « loups » ou d’« un loup », et nous parlons de loups singuliers ou individuels (par exemple « Fenris »). L’universel représente la troisième fonction en ce qu’elle est une réalité potentiellement illimitée, et, pour cette raison, indéfinie. Il n’est pas sans caractère, mais son caractère n’est pas d’être un individu déterminé. Le particulier représente la première fonction : c’est l’universel rendu plus spécifique et précis. L’universel est un potentiel indéfini pour l’existence multiple. Le particulier réalise le potentiel de l’universel pour l’instanciation. Mais bien qu’« un loup » soit un existant, « un loup » est « un loup » est « un loup », etc. C’est un générique, et donc encore en un certain sens une existence indéfinie. Le singulier, l’individuel, qui serait un loup unique et non un loup générique, a vraiment une existence réelle. Comme la relation du mésomorphe avec l’ectomorphe et l’endomorphe, il fait la médiation entre l’universel et le particulier. C’est une existence particulière élevée au niveau de la réalité pleinement concrète, dans et par la réalisation de certaines des facettes, mais pas de toutes, de l’universel lui-même.

  1. Jugement perceptuel : identité, différence, et fondement

Dans le perceptuel et toutes les autres formes de jugement, trois concepts prédominent : identité, différence, et le fondement. Nous disons que les choses sont les mêmes ou autres, et nous disons cela dans la conscience d’un certain fondement ou base pour l’identification ou la distinction. Par exemple, deux hommes sont les mêmes, ou différents par la taille, qui est le fondement. Ici, l’identité représente la première fonction qui unit, égalise, rend un. La différence représente la troisième fonction qui divise et désagrège (cela deviendra plus clair quand je discuterai des gunas indiens dans un moment). Le fondement représente la deuxième  fonction, faisant à nouveau la médiation entre les deux. Il représente une constante résolue dans le jeu des identités et des différences. Comme la classe guerrière, il fournit la condition même sous laquelle les hommes, ou quoi que ce soit, peuvent être associés ensemble, ou tenus à part.

  1. Le syllogisme

En logique, nous distinguons entre trois types basiques d’argument ou de syllogisme : la catégorique, l’hypothétique, et le disjonctif. Le catégorique nous permet d’associer des concepts ou d’appliquer des concepts à des cas particuliers. Voici un exemple :

Tous les princes sont des Kshatriyas.
Tous les Kshatriyas sont des guerriers.
Donc, tous les princes sont des guerriers.

Cet argument opère entièrement à l’intérieur du domaine de l’idéal ou de l’abstrait, associant des catégories de choses. Ou prenons cet exemple :

Tous les princes sont des Kshatriyas.
Arjuna est un prince.
Donc, Arjuna est un Kshatriya.

Cet argument subsume un particulier sous un universel. Il inverse l’ordre ontologique des choses. L’existence est une réalisation de l’universel dans le monde, un cas particulier. L’argument catégorique « fait revenir » le cas dans l’universel. Les deux formes de pensée (passer d’une catégorie abstraite à une catégorie abstraite, et subsumer des particuliers dans des universaux) sont caractéristiques de la cérébralité de la première fonction.

Un exemple d’un syllogisme disjonctif serait celui-ci :

Arjuna est chez lui ou il est parti chasser.
Il n’est pas chez lui.
Donc il est parti chasser.

Cette forme d’argument dépend de la distinction nette – de l’exclusion des possibilités, l’une par rapport à l’autre. Elle exhibe donc l’aspect diviseur et fractionneur de la troisième fonction.

Un syllogisme hypothétique ressemble à cela :

Si Arjuna découvre que son fils est mort, alors il cherchera à se venger.
Arjuna a découvert que son fils est mort.
Donc, il cherchera à se venger.

La proposition hypothétique a un but, elle est orientée vers l’action, et conséquente. Elle exprime les conséquences qui s’ensuivront si une condition antécédente est satisfaite. Un syllogisme hypothétique ne subsume pas simplement un particulier dans un universel, il nous dit quelque chose que nous pouvons attendre du monde. Il est intéressant de noter que tous les syllogismes catégoriques peuvent être convertis en syllogismes hypothétiques. Par exemple :

Tous les princes sont des Kshatriyas.
Arjuna est un prince.
Donc, Arjuna est un Kshatriya.

devient

Si quelqu’un est un prince, alors il est un Kshatriya.
Arjuna est un prince.
Donc, Arjuna est un Kshatriya.

Notez la subtile différence que fait la conversion. Elle semble maintenant dire : « Si vous découvrez que quelqu’un est un prince, alors vous pouvez savoir que c’est un Kshatriya, donc faites attention, car Arjuna, qui est un prince, etc.… ». L’hypothétique est un argument mondain, dynamique, et donc il représente la deuxième fonction [1].

En étudiant spécifiquement le syllogisme catégorique, il consiste en termes majeur, mineur, et médian. Pour reprendre le même argument —

Tous les princes sont des Kshatriyas.
Arjuna est un prince.
Donc, Arjuna est un Kshatriya.

kshatriya.jpg— « Kshatriya » est le terme mineur, « Arjuna » est le terme majeur, et « prince » est le terme médian. Le terme mineur est la catégorie la plus large dans cet argument, le plus abstrait des universaux nommés à l’intérieur de lui. De même, suivant mon identification de l’universel avec la troisième fonction, le terme mineur représente aussi la troisième fonction. Le terme majeur donne une spécificité au terme mineur : il nomme un quelque chose spécifique qui appartient au terme mineur (l’universel). De même, du fait de ce rôle de « spécifieur » ou d’« identifieur », le terme majeur représente la première fonction. Le médian relie le mineur et le majeur, puisqu’il est présent dans les deux prémisses. Du fait de cette fonction médiatrice, que j’ai déjà discutée dans d’autres contextes, le terme médian semble correspondre à la deuxième fonction.

Il y a aussi, en général, une tendance souvent notée dans notre pensée à grouper les choses par trois (cela peut être universel, mais je soupçonne que cela pourrait être plus répandu parmi les Indo-Européens). On apprend aux enfants leur « A-B-C », par exemple, pas leur « A-B-C-D ». La plupart des gens ont trois noms : un premier, un médian, et un dernier. Nos histoires et fables abondent de trois : trois ours, trois frères, trois vœux, trois sorcières, trois demi-sœurs laides, trois haricots, trois voies sur la route, etc. De nombreux dictons ou rimes ont trois parties : « Jeannot sois agile ! Jeannot sois rapide ! Jeannot saute par-dessus le chandelier ! » ; Je crie ! Vous criez ! Nous crions tous pour de la crème glacée ! [“I scream! You scream! We all scream for ice cream!”] ; « Menteur, menteur, pantalon en feu ! » [“Liar, Liar, pants on fire!”] ; « Plus de stylos, plus de livres, plus de foutus professeurs ! » ; « Hip ! Hip ! Hourrah ! » ; « Du peuple, par le peuple, pour le peuple » ; « Crac, zim, boum » [Snap, Crackle, Pop], etc. Le mythe indo-européen est rempli de trois. Dans le mythe nordique il y a trois puits, trois racines, trois Nornes, trois frères (Odin, Vili et Vé), trois enfants de Loki, etc. Les Grecs avaient trois parques, trois grâces, une déesse à trois faces (Hécate), un loup à trois têtes (Cerbère), etc. La plupart des traditions indo-européennes parlent aussi d’une bataille entre un héros et un monstre à trois têtes. Il suffit de dire que de même que le monde exhibe la triplicité fondamentale que j’ai décrite, nos esprits pourraient être conçus de manière à ordonner même les choses les plus triviales en modèles triples.

Voir aussi mon article « The Gifts of Odin and His Brothers » [Les cadeaux d’Odin et de ses frères] dans What is a Rune? And Other Essays (San Francisco: Counter-Currents Publishing, 2015) pour une discussion de la structure triple fondamentale de l’esprit humain.

Note

  1. Il y a certaines raisons de dire que la forme hypothétique « fait la médiation » entre la catégorique et la disjonctive. Examinez les trois formes posées à plat :

Categorical Disjunctive Hypothetical (Modus Ponens)

P are Q           P v Q           P > Q
R is P             -P                 P
R is Q             Q                 Q

Notez que dans la forme hypothétique, P et Q sont d’abord mis ensemble (comme dans l’argument catégorique) par une implication (« P implique Q ») puis séparés (comme dans l’argument disjonctif), mais pas opposés.

La métaphysique de la tripartition indo-européenne, Partie 5
La tripartition et les gunas

  1. L’émergence des gunas du Brahman

Nous avons manifestement affaire à trois principes qui se manifestent sous différentes formes. Ces principes ont le statut des idées platoniciennes : des formes transcendantes que nous pouvons approcher par leurs diverses expressions dans le monde. Mais pouvons-nous exprimer les trois principes dans l’abstrait ?

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Le domaine de recherche le plus évident est celui des traditions philosophiques et mystiques indo-européennes. Ici nous avons de la chance, car il y a beaucoup de sources d’inspiration. Comme on pouvait s’y attendre, la tradition indienne est la source la plus riche. Les anciens Aryens reconnaissaient et discutaient explicitement et exactement ce que j’ai soutenu dans cet article : que toutes les choses exhibent la même structure tripartite.

Ce dont je parle spécifiquement est l’ancienne doctrine des gunas. Guna signifie quelque chose comme « qualité », et cela peut aussi avoir signifié « partie d’un tout ». Guna est donc le même concept désigné dans la philosophie allemande par « moment ». Un moment est une partie d’un tout séparable seulement en pensée. Les gunas sont trois moments de l’Etre, dont nous pouvons parler séparément, mais qui ne peuvent pas réellement exister en séparation.

Les gunas proviennent du Brahman, qui est l’Absolu ou Immensité Transcendante existant au-delà de toute la création. Je comprends le Brahman comme étant le « fondement de l’Etre ». Quel est le fondement sur lequel l’existence ou la création devient elle-même présente ? C’est le Brahman. Pour cette raison, on en parle parfois comme d’un néant. Le brahman est en effet « néant » [« no-thing »], mais ce n’est pas un véritable néant : il doit être réel pour être le fondement sur lequel la figure de la création apparaît.

Par le pouvoir de Maya ou Illusion, le mouvement apparaît dans cette immensité transcendante du néant. Ce mouvement a, par nécessité, trois et seulement trois formes : centripète, centrifuge, et orbitante (mouvement autour d’un point). Comme le remarque Alain Daniélou : « cette triade imprègne toutes choses et apparaît dans tous les aspects de l’univers, physique aussi bien que conceptuel » [1].

  1. Sattva, Tamas, et Rajas 

La force centripète d’attraction crée la cohésion, ou agrégation. Les hindous l’appellent Sattva ou « existence », car toute existence est une agrégation [d’éléments différents]. Le Sattva est donc le principe d’unité, ayant une fonction liante ou préservatrice. Il est figuré par la lumière, et comme le Soleil. Il est associé à l’intelligence, et avec le rêve. Il devrait être évident qu’il s’agit de la première des fonctions indo-européennes. Le Sattva est incarné par le dieu Vishnou, le « Préservateur ».

La force centrifuge est l’opposée de Sattva. Ce n’est pas une force d’attraction, mais de répulsion. Ce n’est pas une force de cohésion, mais de dispersion, d’annihilation, et de retour dans l’Immensité. Elle empêche la concentration. Cette force est appelée Tamas, obscurité ou inertie. Le Tamas est l’obscurité, parce que là où il y a dispersion il y a dispersion d’énergie, et donc absence de lumière. De même, à cause de cette association avec le chaos, l’obscurité, et l’absence d’unité, il s’agit de la troisième fonction. Le dieu Rudra incarne le Tamas. Il est aussi appelé Shiva, le destructeur et seigneur du sommeil. Le Tamas ou Shiva est considéré comme la nature intérieure de toutes choses, puisque toutes choses sortent de la désintégration, pour ensuite se désintégrer à nouveau. Comme le Sattva, le Tamas est associé au sommeil, mais cette fois c’est un sommeil sans rêves – un sommeil sans formes ni images.

L’équilibre entre le Sattva et le Tamas donne naissance à une troisième force, le Rajas. En cosmologie, c’est le mouvement tournant, circulaire (que, soit dit au passage, les Grecs associaient à la perfection). Rajas signifie « activité ». C’est la source de toutes les formes et espèces différentes de la création. Tout mouvement rythmique – le type de mouvement exhibé par la vie – vient du Rajas. A la différence du Sattva et du Tamas, le Rajas n’est pas lié au sommeil, mais à la conscience éveillée. Le Sattva est associé à la forme ou à l’intelligence, le Tamas à la masse ou à la matière, et le Rajas à l’énergie. Ces associations correspondent étroitement au soufre, au sel et au mercure de Paracelse. Chose intéressante, le Rajas est considéré comme incarné dans Brahma, qui est le singulier nominatif masculin de Brahman, c’est-à-dire la personnification du Brahman. Le Rajas est évidemment la deuxième fonction indo-européenne.

Daniélou remarque : « L’une ou l’autre des trois tendances prédomine dans chaque sorte de chose, dans chaque espèce d’être » [2]. Nous avons vu cela dans les êtres humains, dans la tendance de certains hommes à être rationnels ou spirituels, d’autres passionnés, et d’autres appétitifs. Et cette doctrine des types humains peut justement être trouvée dans la psychologie tantrique. D’après le Tantra, les hommes appartiennent au Sattva, au Rajas, et au Tamas. Seuls les deux premiers sont aptes à entreprendre des pratiques spirituelles.

  1. Divya, Vira, et Pashu 

L’homme du Tamas (troisième fonction) est appelé Pashu, qui signifie « animal ». Pashu vient de « pac », lier. Le Pashu est lié à des désirs animaux – faim, sexe, confort, avidité – ainsi que par la convention sociale (à ce propos, c’est précisément de cette manière que les Grecs regardaient l’homme appétitif : ils le voyaient largement comme un animal ; comme non pleinement humain). Le tantrisme soutient que dans l’âge actuel, qui est appelé le Kali Yuga, le type Pashu prédomine.

L’homme du Sattva (première fonction) est appelé Divya, un « être divin ». Comme le Pashu, il est en un certain sens non-humain, parce qu’il est plus qu’humain. Cet homme suit un chemin intérieur, se détachant du monde. Le Divya est très rare dans le Kali Yuga.

L’homme du Rajas (deuxième fonction) est appelé Vira. Ce mot vient de la racine indo-européenne vir- dont viennent les mots modernes viril et vertu. Le vira est un être humain pleinement réalisé : un être viril et héroïque. Il y a des viras de la main droite et des viras de la main gauche. Le vira de la main droite est héroïque mais dépourvu de sens critique. Il combat pour des idéaux qu’il a à peine examinés, et se met au service de l’autorité qu’il ne conteste jamais. En fait, avec le vira de la main droite, la soumission à l’autorité et l’accomplissement aveugle du devoir sont considérés comme les vertus suprêmes.

Le vira de la main gauche peut commencer dans cet état, mais, comme le Divya, il suit un chemin intérieur. Il peut être comparé à l’idéal taoïste chinois du « guerrier lettré ». Julius Evola écrit : « Montant des niveaux inférieurs aux niveaux supérieurs, les viras sont soumis à toujours moins de limitations et de liens » [3]. Le vira atteint un point au-delà du bien et du mal, où il devient autonome au sens littéral de se donner une loi à soi-même. L’idéal pour le vira de la main gauche, et donc l’idéal humain tout court, est l’indépendance, l’autosuffisance, la complétude, et le détachement. Ce sont des caractéristiques que nous retrouvons dans la tradition grecque, dans le concept aristotélicien de Dieu, le Moteur Immobile. Pour Aristote, l’homme idéal approche le plus possible des qualités du Moteur Immobile. Dans le Tantra, l’homme idéal est celui qui incarne le plus pleinement Brahma, l’incarnation du Rajas.

Le fait que le mot « vertu » soit dérivé de la même racine que vira est très significatif. Avant tout, il suggère un lien inattendu entre virilité et vertu, ou entre masculinité et vertu. La conclusion évidente à tirer est que les anciens considéraient les vertus comme des réalisations masculines. Cela se confirme si nous nous tournons vers Aristote. Le mot grec normalement traduit par le mot latin vertu est arete, qui est peut-être le mieux traduit par « excellence ». Dans son Ethique à Nicomaque, Aristote discute la nature de l’homme vertueux, et ne lie nulle part ses observations à la femme. De plus, Aristote conçoit la vertu comme un milieu entre deux extrêmes. Par exemple, le courage est un milieu entre la lâcheté et l’irréflexion. Le vira indien – qui, comme je l’ai dit, est le type guerrier mésomorphe et somatotonique – est une sorte de milieu entre le Divya et le Pashu. En effet, tout ce qui est analogue à la deuxième fonction indo-européenne occupe une position médiane entre les deux autres fonctions. Si nous regardons la liste des vertus d’Aristote, son milieu entre les extrêmes équivaut à une description du vira. Je soupçonne que les deux extrêmes opposés au milieu décriront aussi très bien les caractéristiques du Divya et du Pashu.

Ceux chez qui le Tamas prédomine, les Pashus, adorent des fantômes et des esprits (Bhuta et Preta). Ceux chez qui le Sattva prédomine, les Divyas, adorent les Devas. Ceux chez qui le Rajas prédomine, les viras, adorent les génies (Yakshas) et les anti-dieux (Asuras). Ce dernier fait est extrêmement intéressant, car le terme Asura est relié au vieux-norrois Aesir [= Ases], qui est le nom du groupe des dieux de première et de deuxième fonctions dans la tradition germanique : Odin, Thor, Tyr, etc.

D’après le Tantra, le Tamas est en réalité le chemin vers l’illumination. Mais en dépit du fait qu’il est une créature du Tamas, le Pashu ne peut pas en tirer avantage. Le Tamas est annihilation et absence d’unité. Souvenez-vous qu’il est aussi associé au sommeil profond, sans rêves. La voie de l’illumination, de la compréhension du fondement ultime de toutes choses, l’Immensité transcendante du Brahman, passe par l’annihilation et la multiplicité. Sur le plan de l’action, le vira détruit avec son épée. Le vira de la main gauche tourne son pouvoir vers l’intérieur, et détruit le jeu de la multiplicité dans sa propre âme. Il tente d’atteindre un état comme celui du sommeil sans rêves, mais dans un état d’éveil, sous son contrôle. D’où l’usage de la méditation, et de pratiques conçues pour parvenir à la maîtrise totale du corps, comme les diverses formes de yoga et d’arts martiaux.

Mais le monde externe des choses et le monde interne des pensées et des images sont tous deux issus de Sattva, la force centripète. Tout ce qui s’oppose à Sattva s’oppose au monde lui-même, et à l’intention du créateur. « Le but de tout créateur est d’empêcher une compréhension qui détruirait sa création », note Daniélou. « C’est pourquoi [il est dit que] ‘l’Ame [l’Atman, le vrai Soi] n’est pas à la portée du faible’. Elle doit être conquise en s’opposant à toutes les forces de la nature, à toutes les lois de la création » [14]. Ainsi, celui qui cherche l’illumination doit devenir un guerrier contre toute la création, en fait contre les dieux eux-mêmes. C’est pourquoi l’homme le plus adapté à la quête de l’illumination doit être l’homme qui répond à la description du vira de la main gauche – du moins, c’est le cas dans le Kali Yuga.

Notes

[1] Alain Danielou, The Myths and Gods of India (Rochester, Vermont: Inner Traditions, 1991), 22.

[2] Ibid., 27.

[3] Julius Evola, The Yoga of Power, trans. Guido Stucco (Rochester, Vermont: Inner Traditions, 1992), 55.

[4] Danielou, 33.

La métaphysique de la tripartition indo-européenne, partie 6
F. W. J. Schelling et la tripartition indo-européenne

von_schelling.jpgFriedrich Schelling, 1775–1854

  1. Les influences de Schelling : la Trinité chrétienne et Jacob Boehme

Je me tourne finalement vers une tradition indo-européenne différente, celle de l’Idéalisme allemand du XIXe siècle. J’inclus ce matériel afin de prouver le caractère pérenne de la pensée indo-européenne. On pourrait dire que toute l’histoire de la philosophie occidentale (et indienne) est une longue et inconsciente tentative pour retrouver la sagesse connue « directement » par nos ancêtres indo-européens.

Remarquablement, dans la philosophie tardive de F. W. J. Schelling, qui était un ancien  copain d’école de Hölderlin et Hegel, nous trouvons une doctrine qui correspond exactement à l’ancienne théorie aryenne des gunas. Ceci en dépit du fait que Schelling avait, autant que nous le sachions, une faible connaissance de la philosophie indienne. Il écrivait à une époque où les détails de la pensée indienne commençaient seulement à être connus des intellectuels européens. Les détails ésotériques des gunas n’étaient certainement pas connus de Schelling, et pourtant il écrit comme s’il les traduisait dans le langage de la philosophie idéaliste.

Spécifiquement, je parle de la Potenzlehre de Schelling, une doctrine des Puissances, qu’il développa durant toute sa carrière, mais qui ne s’épanouit pleinement que dans sa tardive et dénommée « philosophie de la mythologie ». Pour pleinement comprendre cette doctrine, on doit explorer ses antécédents dans la tradition mystique occidentale. Avant tout, Schelling, Hegel et les philosophes allemands en général étaient fascinés par le mystère de la Trinité chrétienne. On pourrait démontrer que ce que nous connaissons sous le nom de « la Trinité » n’est pas une conception proche-orientale originale mais en réalité un résultat de la « germanisation » du christianisme, développée après la conversion de nos ancêtres païens. L’idée de trois « personnes » en une seule correspond à peu près à la notion aryenne de l’unité des trois gunas dans le Brahman. Sans trop entrer dans les détails, je suggérerais que le Père correspond à la première fonction indo-européenne, le Fils à la troisième fonction, et le Saint Esprit à la deuxième fonction. En cela je suis influencé par Hegel, qui traitait le Père comme le logos, ou Idée Absolue, le Fils comme la Nature, et le Saint Esprit comme l’homme, qui est l’unité du logos et de la nature, ou de Dieu et de l’animal [1].

L’influence mystique immédiate sur Schelling fut l’Allemand Jacob Boehme, qui concevait toute la réalité comme possédant une structure triple. Considérez la citation suivante de Boehme :

« Ainsi donc la lumière éternelle, et la vertu de la lumière, ou paradis céleste, se meut dans l’obscurité éternelle ; et l’obscurité ne peut pas comprendre la lumière ; car ce sont deux Principes [séparés] ; et l’obscurité désire la lumière, parce que l’esprit s’y contemple lui-même, et parce que la divine vertu est manifestée en elle. Mais bien qu’elle n’ait pas compris la divine vertu et la lumière, elle s’est cependant continuellement et ardemment élevée vers elle, jusqu’à ce qu’elle ait allumé la racine du feu en elle-même, à partir des rayons de la lumière de Dieu ; et alors naquit le Troisième Principe, sortant de la matrice obscure, par la spéculation de la vertu [ou puissance] de Dieu. » [2]

Il y a donc trois principes, un de lumière, un d’obscurité, et un qui réconcilie. Boehme conçoit les trois principes comme étant réunis au sein de ce qu’il nomme l’Ungrund : le fondement transcendant et ineffable de tout l’être qui est lui-même sans fondement, parce qu’il n’y a rien au-delà de lui qui pourrait servir de fondement. A nouveau, nous avons une correspondance avec l’existence des gunas à l’intérieur du Brahman. Boehme conçoit ses trois principes comme imprégnant toute la réalité [3]. L’homme, affirme-t-il, est la véritable réalisation des trois principes. A cause de la coprésence des trois principes dans l’homme, ce dernier a le potentiel pour comprendre l’ensemble de la création.

  1. Les Trois Puissances 

Tournons-nous maintenant vers Schelling : celui-ci parle de Trois Puissances, qu’il conçoit comme des principes ou des idéaux, et comme des agences de volition. Schelling a une manière particulière et algébrique de parler des Puissances comme –A ou A1, +A ou A2, et A3. J’abandonnerai cet usage, et je ferai une nouvelle violence à la terminologie de Schelling en parlant de la première puissance comme étant la troisième, la seconde comme étant la première, et la troisième comme étant la seconde. L’idée est de faire apparaître les corrélations avec les fonctions indo-européennes. Ma présentation ne fera cependant pas violence aux idées de Schelling.

Schelling conçoit un temps primordial où les trois puissances existaient par elles-mêmes, avant qu’elles puissent s’exprimer dans un monde d’objets. De plus il voit les puissances comme des aspects de l’Absolu – l’équivalent du Brahman dans sa philosophie.

La Troisième Puissance est conçue par Schelling comme une pure et indéfinie possibilité d’être (das sein Koennende). C’est une sorte d’« être-en-soi » primal, qui est indéfini, illimité, et négatif. Il possède, affirme-t-il, un pur pouvoir d’auto-négation. Il peut annuler ou rejeter tout ce qu’il est et devenir n’importe quoi d’autre. Il n’a pas d’identité fixée. Les parallèles philosophiques incluent le flux d’Héraclite, et l’apeiron d’Anaximandre. Il correspond à peu près au Yin chinois, et est donc le principe féminin. Schelling conçoit aussi cette Puissance comme de la pure subjectivité. La Troisième Puissance est manifestement équivalente au Tamas indien.

La Première Puissance est un principe d’ordre et d’objectivité. Elle est l’opposée de la Troisième Puissance : spécifique, légale, précise, distincte. C’est le principe de l’identité, et de la différentiation. La Première Puissance est être pur, par opposition à la pure possibilité de l’être. Sa fonction est de placer des « limites » autour du chaos qui est la Troisième Puissance, et de faire exister des entités précises. Alors que la Troisième Puissance est das sein Koennende, « l’être possible », la Première Puissance est das sein Muessende, « l’être obligé ». La Troisième Puissance est « être-en-soi », mais la Première Puissance est « être-en-dehors-de-soi », parce que les limites fournies par la Première Puissance sont en-dehors d’elle, placées autour d’une autre. C’est donc un principe mâle, équivalent au Yang chinois, et au Sattva indien. La raison en est simple : la nature de la femelle est de générer en elle-même, la nature du mâle est de générer dans un autre (donc, « être-en-dehors-de-soi »). Parce que la Première Puissance est pure objectivité et non subjectivité, elle ne possède pas de volonté propre, ce qui est l’une des facettes d’un sujet.

Ces deux Puissances ne peuvent coexister parce qu’elles sont des opposés totaux. Sans elles, il ne peut y avoir de monde. Donc quelque chose d’autre doit fonctionner pour les réunir. Entrez ce que j’appelle la Seconde Puissance, simplement pour l’identifier avec la deuxième fonction indo-européenne. A nouveau, tout ce qui correspond à la deuxième fonction constitue une sorte de milieu entre les première et troisième fonctions. Ainsi, la Seconde Puissance doit posséder un être objectif (comme la Première Puissance), mais avec la possibilité de changement (comme la Troisième Puissance). Pour le dire d’une autre manière, la Seconde Puissance doit être quelque chose de précis, mais elle doit aussi être libre.

La Troisième Puissance est pure subjectivité, et la Première Puissance est pure objectivité, donc d’une manière ou d’une autre la Seconde Puissance unira sujet et objet. Ce fait est significatif, car Schelling conçoit l’Absolu comme le « point d’indifférence » entre sujet et objet. Il y a ici une correspondance exacte, encore une fois, avec la théorie indienne des gunas. Le vira est l’homme dans lequel le Rajas prédomine, et la personnification de Rajas est Brahma. Ainsi, c’est le vira qui est dans la position unique d’atteindre le Brahman lui-même par une transformation de sa propre nature. Chez Schelling, la Seconde Puissance, qui correspond au Rajas, est la réunion du sujet et de l’objet, alors que l’Absolu, qui correspond au Brahman, est la transcendance du sujet et de l’objet. C’est comme si la Seconde Puissance était l’Absolu « tourné vers l’intérieur », et vice-versa. L’implication semble être que celui qui s’identifie à la Seconde Puissance, ou Rajas, peut s’élever vers l’Absolu, ou Brahman, par une sorte d’héroïque changement de Gestalt.

Alors que la Première Puissance est « être en-dehors de soi », et que la Troisième Puissance est « être en soi », la Seconde Puissance est « être avec soi ». Ce choix des mots suggère que dans la Seconde Puissance il y a une sorte de totalité, d’accomplissement, de réconciliation, et d’autosuffisance [4]. Schelling remarque plus loin que si la Troisième Puissance est l’Illimité, et la Première Puissance est le Limitant, la Seconde Puissance est le « purement autolimitant ». Ici encore, nous voyons une anticipation métaphysique du vira. J’ai dit plus haut que le vira atteint un point où il devient autonome au sens littéral de se donner une loi à soi-même. C’est l’autolimitation dans sa forme la plus élevée. Le vira est autonome, indépendant, autosuffisant, et complet, tout comme la Seconde Puissance primale. La Troisième Puissance est « l’être possible », la Première Puissance est « l’être obligé », et la Seconde Puissance est das sein Sollende, « l’être qui devrait ». Sollen signifie « devrait », et donc dans la Seconde Puissance une dimension éthique ou idéaliste apparaît. C’est prévisible, puisque la Seconde Puissance se manifeste au niveau humain dans l’homme « passionné ».

Si nous pouvons parler de la Troisième Puissance comme étant la matière ou élément matériel, et de la Première Puissance comme étant la forme, alors qu’est-ce que la Seconde Puissance ? Encore une fois, puisqu’elle constitue une sorte de milieu entre les deux autres, en un certain sens la Seconde Puissance doit être une union de la matière et de la forme. Je me souviens ici de la théorie hégélienne des trois types d’art : symbolique, classique, et romantique. Le symbolique est l’art qui est excessivement formel, stylisé, et contraint. Il prend l’art égyptien comme exemple. L’art romantique se soucie avant tout de soulever des émotions et de soupeser des mamelles : un art qui a perdu toute retenue. Ici, la forme est brisée ou dépassée par un excès de contenu ; par un sentiment sans contraintes. L’art classique occupe une position moyenne, une unité parfaite de la forme et du matériel. Et qu’utilise Hegel comme exemple de l’art classique ? Les sculptures grecques de dieux et d’athlètes, bien sûr. En d’autres mots, des mésomorphes : des corps de deuxième fonction gouvernés par le Rajas, ou la Seconde Puissance schellingienne. Dans tout ce qui occupe la position de deuxième fonction, il y a une complémentarité presque parfaite de la forme et de la matière, de la raison et de l’émotion, des forces centripètes et centrifuges, etc.

La Seconde Puissance est donc l’union primale et parfaite de la forme et de la matière. C’est la forme platonicienne d’un dieu (et il faut répéter que les Grecs utilisaient le mésomorphe, la parfaite union humaine de la forme et de la matière, pour représenter leurs dieux), alors que la Première Puissance et la Seconde Puissance sont de simples forces (comme l’« amour » et la « haine » d’Empédocle). La Seconde Puissance est l’union éternelle des deux autres Puissances. Quand les trois Puissances s’extériorisent dans la création, la relation éternelle entre elles s’exprime d’une manière temporelle. Le monde est simplement la réunion et la séparation de la Première Puissance et de la Troisième Puissance, Sattva et Tamas, étendues dans le temps. L’agent ultime de ce processus dans le monde est le vira, l’homme de la deuxième fonction, qui est à la fois préservateur et destructeur. Edward Allen Beach, parlant de la Potenzlehre de Schelling, dit que « [la Seconde Puissance] est … la cause finale [aristotélicienne] ou but final vers quoi tend tout l’organisme idéal de l’univers » [5].

  1. Les Anti-Puissances

Schelling appelle les trois Puissances prises ensemble « la figure de l’être ». Mais l’histoire ne se termine pas ici, car Schelling dit que l’exposé jusqu’ici n’est qu’un exposé d’essences pures. Comment exactement un monde spatio-temporel concret vient-il à l’être, à partir de ces Puissances ? J’ai parlé un peu plus haut des Puissances s’extériorisant dans la création. Mais comment cela a-t-il lieu ? La réponse de Schelling à cela est très obscure.

Il commence par remarquer que c’est plutôt dans l’ordre naturel des choses que la Troisième Puissance doive se subordonner à la Première Puissance : cette matière doit se mettre en position d’être informée. Mais cela ne se passe pas toujours comme cela. Nous pouvons le constater autour de nous. Si la Troisième Puissance, dans toutes ses expressions, se donnait à la Première Puissance continuellement et sans résistance, alors tous les objets matériels seraient des expressions parfaites de leurs formes. Il n’y aurait pas de laideur, pas de défaut, pas de difformité. Mais puisque ce n’est pas le cas, la relation entre la Troisième Puissance et la Première Puissance doit être plus compliquée que nous le pensions.

Parce que la Troisième Puissance est pure possibilité d’être, elle peut très bien faire comme elle veut ! Dans cette Puissance se trouve une dualité : c’est une potentialité de donner naissance à l’existence, à être fécond, mais c’est aussi une potentialité de nier toutes les potentialités, de dire non à tout. Elle a donc toujours en elle la possibilité de se rebeller contre son rôle de matrice, de mère, de toute la création. En faisant cela, elle devient résistante à l’ordre, à la forme, à la détermination, à la raison, et au règne de la Première Puissance. Son obscurité s’accroit, et devient impénétrable. Schelling appelle cette forme pervertie de la Troisième Puissance « B ». Je l’appellerai « l’anti-Troisième ». L’anti-Troisième de Schelling est exactement analogue à l’« aigre » de Jakob Boehme : un pouvoir égoïste négateur, tourné vers l’intérieur.

En résultat de la transformation de la Troisième Puissance en anti-Troisième, la Première Puissance lui est subordonnée. Cela indique le grand pouvoir de la Troisième Puissance : en se fermant simplement à la Première Puissance ou en lui résistant, elle subvertit le rôle naturel de la Première Puissance et la jette dans un état de déséquilibre. Souvenez-vous que la Troisième Puissance est subjectivité et la Première Puissance objectivité. En étant rejetée par la Troisième Puissance, la Première Puissance est rejetée sur elle-même, et développe ainsi la subjectivité [6]. Alors que, comme Ouranos, elle avait jadis joui d’une félicité inconsciente dans les bras de Gaïa, elle vient maintenant à la conscience – mais seulement en étant castrée. Elle se tourne vers l’intérieur. Et lorsqu’elle se conçoit, elle se conçoit seulement comme dirigée dans le sens de la soumission de l’anti-Troisième.

Pour continuer le parallèle masculin-féminin, l’anti-Troisième trouve son représentant humain dans la femme moderne « libérée » (à l’extrême, dans la « haïsseuse de l’homme », qui peut aller jusqu’à abjurer entièrement l’amour des hommes, et à réprimer le désir d’être pénétrée). Ce que la Première Puissance devient en résultat de la venue à l’être de l’anti-Troisième, c’est le mâle moderne, qui est préoccupé par la conquête physique de la femme, considérant cela comme l’essence de la virilité. Il est en fait un être entièrement physique.

Une parfaite illustration de cette dynamique se trouve dans Women in Love de D. H. Lawrence, qui montre le cours de deux histoires d’amour. La première, entre Ursula Brangwen et Rupert Birkin, illustre la relation naturelle entre la Troisième Puissance et la Première Puissance. Ursula est une « femme naturelle », qui rêve d’être possédée par Birkin. Birkin, pour sa part, est attiré par Ursula, mais refuse de se donner à elle complètement, désirant connaître quelque chose de supérieur à l’amour charnel. Bref, il a quelque chose du vira en lui. L’autre couple est Gudrun Brangwen, sœur d’Ursula, et Gerald Crich, meilleur ami de Rupert. Gudrun est l’anti-Troisième incarnée. Elle désire quelque chose, mais ne s’identifie à rien. Elle saute d’intérêt en intérêt, de lieu en lieu. Elle repousse le désir de Gerald, et l’humilie, disant à un moment : « Tu es si insistant, et il y a si peu de grâce en toi, si peu de finesse. Tu es si brutal. Tu m’embête – tu ne fais que m’ennuyer – c’est horrible pour moi » [7]. Naturellement, Gerald est obsédé par elle, et répond à ces paroles en lui faisant violemment l’amour, et en tentant plus tard de l’étrangler. Gerald est l’être entièrement physique dont j’ai parlé ; la perversion de la Première Puissance. C’est un propriétaire de mine qui (comme Clifford dans L’amant de Lady Chatterley de Lawrence) s’immerge totalement dans le dur monde des machines et des plans de production. Il s’enorgueillit de sa physicalité brutale, et, à la différence de Rupert, est préoccupé par le sexe.

Maintenant, remarquez que la Première Puissance correspond à la première fonction, qui correspond, en termes de types humains, à l’ectomorphe-cérébrotonique. Ainsi, ce qui est particulier dans le changement produit dans la Première Puissance par l’anti-Troisième est que la Première Puissance devient, d’une certaine manière, son propre opposé. En termes humains, le cérébrotonique, l’homme qui « vit dans sa tête », finit par penser qu’il devrait être son opposé : l’homme physique, le sensualiste, le « mâle ». Ce dont nous parlons, en essence, est un divya (ou divya potentiel) qui désire secrètement être un pashu. Mais un tel homme, bien qu’il puisse ne penser à rien d’autre hormis la possession sexuelle des femmes, ne réussit jamais à vraiment ou totalement posséder une femme, parce que son obsession est en fait non-masculine et, finalement, repoussante pour les femmes. C’est le mâle détaché et distant, spirituellement viril, qui se révèle le plus attirant. C’est à lui que les femmes souhaitent vraiment se donner. Entrez le vira, et la Seconde Puissance.

Nous trouvons la relation entre la Seconde Puissance et les deux anti-Puissances représentées dans le Nibelungenlied germanique médiéval. Le roi burgonde Gunther pose les yeux sur Brünhild semblable à une amazone, mais pour mériter sa main il doit se soumettre à l’épreuve du combat. S’il perd, Brünhild prend sa vie. Brünhild représente l’anti-Troisième, qui est devenue activement hostile et même mortelle pour la Première Puissance, ou Puissance mâle. Gunther, qui représente la Première Puissance émasculée, ne peut vaincre Brünhild, et donc il s’assure de l’aide de Siegfried. En tant que héros guerrier, Siegfried représente, bien sûr, la Seconde Puissance. Se rendant invisible, Siegfried agit secrètement au nom de Gunther, et gagne la main de Brünhild pour son roi. Par la suite, cependant, Brünhild se refuse à Gunther dans le lit conjugal, et donc Siegfried est à nouveau appelé pour se faire passer pour Gunther et obliger Brünhild à la soumission. Lorsqu’il réussit, elle crie : « Je ne résisterai plus à ton noble amour. J’ai découvert que tu sais maîtriser les femmes » [8].

Un curieux problème ici concerne le sexe qui doit être attribué à la Seconde Puissance. Si la Première Puissance est « mâle » et si la Troisième Puissance est « femelle », qu’en est-il de la Seconde Puissance ? Je l’ai caractérisée comme médiatrice entre les deux autres, donc serait-elle androgyne ? Etant donné que j’ai identifié la Seconde Puissance à la Deuxième fonction, à la figure guerrière mésomorphe-somatotonique, cela semble être une suggestion absurde – jusqu’à ce qu’on jette un coup d’œil sur les représentations mythologiques indo-européennes du guerrier. Ici on trouve des preuves abondantes que le guerrier était regardé comme ayant des caractéristiques à la fois masculines et féminines. Par exemple, Thor apparaît en travesti, tout comme Héraclès (à partir du XVIe siècle, les représentations artistiques d’Héraclès l’ont le plus souvent décrit en habits féminins). La figure d’Arjuna dans le Mahabharata est aussi décrite comme androgyne. Pourquoi exactement le guerrier ou vira devrait être vu de cette manière doit avoir un rapport avec son important rôle métaphysique, discuté plus haut, comme un être qui peut passer entre les opposés du sujet et de l’objet, de la forme et de la matière, du masculin et du féminin pour accomplir l’unité avec l’Absolu ou Brahman. Le nom Perceval (ou Parzival) signifie « perce la vallée ». C’est celui qui dépasse les opposés (entre les « montagnes ») pour atteindre l’Un.

A la différence de la Première Puissance et de la Troisième Puissance, d’après Schelling la Seconde Puissance ne subit pas de changement ; elle demeure constante. Mais, affirme Schelling, elle ne peut être pleinement réalisée tant que les deux autres Puissances n’ont pas terminé leur développement. Ainsi, du fait de l’inversion ou perversion de la Première Puissance et de la Troisième Puissance, la Seconde Puissance n’est plus l’équilibre éternel du Limité et de l’Illimité. Selon les mots de Beach, la Seconde Puissance prend le statut d’une « condition future » encore à atteindre [9]. En d’autres mots, l’unité du Limité et de l’Illimité devient un but ou un point final idéal. Schelling croit que c’est la fin vers laquelle toute l’histoire se dirige. Mais la conception historique de Schelling, comme celle de Hegel, est christianisée et linéaire. Beach remarque que « Schelling voit toute la tendance de l’histoire du monde postérieure à la Création comme étant précisément d’amener la première puissance invertie à la soumission, de changer [l’anti-Troisième] à nouveau [en la Troisième Puissance  positive] » [10].

  1. Implications de la théorie de Schelling

Si nous abandonnons la vision linéaire de l’histoire de Schelling et que nous la remplaçons par un modèle cyclique indo-européen traditionnel de changement historique, ce qui en résulte est une conception de l’anti-Troisième et de la Première Puissance évoluant continuellement vers l’unité, ce qui veut dire, donnant continuellement naissance à la réalisation de la Seconde Puissance. Après que le zénith de la Seconde Puissance est atteint, il y a une période où les deux autres Puissances se normalisent : quand l’anti-Troisième devient la Troisième Puissance « naturelle », et que la Première Puissance regagne son statut d’agent objectif inspirateur. Mais ensuite cela est suivi par un déclin, où les deux Puissances deviennent à nouveau perverties, et où la Seconde Puissance se retire apparemment, mais seulement pour resurgir plus tard, et ainsi de suite.

Du conflit et de la réconciliation graduelle de la Première Puissance et la Troisième Puissance, un monde vient à l’être. Schelling pense que son exposé du conflit des anti-Puissances n’est pas un exposé d’essences abstraites. Quand la Troisième Puissance se rebelle contre sa nature de réceptrice de forme, elle devient l’élément matériel lui-même, car la matière est précisément ce qui a la nature de recevoir la forme et de lui résister.

Pour dire cela en termes humains, le monde donne perpétuellement naissance au vira, mais le vira naît dans le conflit. Les conditions nécessaires pour donner naissance au vira sont le conflit et la disharmonie. C’est dans le creuset du trouble, de la guerre et de la désunion que le vira surgit – et monte à cette occasion. En défiant et en surmontant ces conditions, ceux qui peuvent être des viras réalisent leur nature de vira, et imposent l’ordre au chaos. Mais cet « âge d’or » ne peut pas durer, et le désordre et la disharmonie finissent par revenir – et ainsi de suite, ad infinitum.

Une telle vision de l’histoire est grosse de conséquences philosophiques. Par exemple, le dénommé « problème du mal » est résolu. Le mal – conflit, guerre, désordre, disharmonie, etc. – existe simplement pour amener le vira, l’incarnation de Dieu dans le monde, à l’être.

Nous avons aussi répondu à la question « pourquoi y a-t-il quelque chose et non pas rien ? ». Le rien qui est le Fondement de l’Etre est le Brahman. Du Brahman, un monde constitué par les trois gunas ou Puissances vient à l’être. La réalité la plus élevée dans ce monde est accomplie par la plus haute chose vivante dans le monde, qui est le vira humain. Il est l’expression humaine de Brahma, et en tant que tel il peut, par une transformation de lui-même, « faire revenir la création sur elle-même » et accomplir l’unité avec le Brahman, la base de l’existence comme telle. Ainsi, il n’y a pas « quelque chose et non pas rien », car le quelque chose est le rien inconscient de lui-même.

Conclusion générale

Comme je l’ai annoncé au début de cette série, ma procédure dans cet essai a été inductive. J’ai commencé par exposer la structure tripartite de la société indo-européenne, et ensuite dit que d’autres parties du monde naturel exhibent une structure analogue : l’âme humaine elle-même, les types corporels humains, l’anatomie humaine, l’anatomie des organes ou systèmes individuels, l’embryon humain, les mammifères, la cellule isolée, le monde macroscopique, le monde microscopique de l’atome, et la structure de la pensée et de la logique humaines. Je crois que ces analogies sont plausibles. Dans certains cas, en particulier ceux des analogies entre types humains et types de mammifères, les analogies sont très précises et frappantes.

Ayant vu les mêmes structures se répétant à travers les différents aspects de la réalité, j’ai ensuite demandé s’il y avait un moyen de mettre à nu la nature de ces structures et de parler d’elles dans l’abstrait – de les connaître « en elles-mêmes et par elles-mêmes ». Plutôt que de donner mon avis en premier, j’ai d’abord regardé la Tradition, et trouvé exactement ce que je recherchais – dans la théorie indienne des gunas. Nous pouvons voir que les Indiens ont remarqué la même répétition de la structure tripartite dont j’ai parlé. En expliquant les gunas, j’ai eu l’occasion de revenir au sujet des types humains, et j’ai développé certaines suggestions sur la manière dont nous pourrions les utiliser pour élaborer une théorie de l’histoire, et une compréhension du but de l’existence elle-même.

J’ai aussi donné un exposé de la Potenzlehre de Schelling. Celui-ci servait deux buts. D’abord, il montrait comment un exposé encore plus abstrait des trois principes peut être donné. Ensuite, sa correspondance remarquable avec la théorie indienne des gunas semble indiquer que la conscience des trois principes est éternelle. Je mets cela en relation avec l’idée hermétique de la « philosophie pérenne ». Si une idée continue à apparaître dans des systèmes philosophiques ou mystiques différents, particulièrement s’il y a peu ou aucun contact entre les auteurs de ces systèmes, je prends cela comme la preuve prima facie de sa vérité.

Maintenant, on pourrait objecter que j’ai simplement « lu » ce schéma tripartite dans diverses choses, mais qu’on pourrait tout aussi bien trouver la dualité et la quadrité et la quintité dans ces mêmes choses. Cette objection manque son but, car, comme je l’ai dit au début, je ne recherche pas la pure triplicité, mais plutôt un type spécifique de triplicité. Ensuite, l’objection semble déloyale à la lumière des analogies vraiment remarquables que je crois avoir exposées ici. En fin de compte, mon argument en faveur de la vérité des principes, et la crédibilité des principes comme guides pour comprendre le monde, est pragmatique. Je crois que j’ai montré que voir le monde selon ces trois structures – ça marche. Cela nous ouvre des horizons ; cela nous permet de mieux organiser, catégoriser et analyser les choses, et de voir leurs relations. De plus, cela conduit à des réflexions vraiment profondes sur la nature de l’existence dans son ensemble.

Notes

[1] Hegel ne dit pas vraiment que l’Esprit est une unité du logos et de la nature, ou de Dieu et de l’animal, mais c’est une implication de ses idées, et correspond exactement à la vision philosophique grecque, qui influença fortement Hegel.

[2] Jacob Boehme, Concerning the Three Principles of the Divine Essence, trans. John Sparrow, 1648 (London: John M. Watkins, 1910), VII: 25; p. 100.

[3] « Et aucun lieu ou position ne peut être conçu ou trouvé là où l’esprit de la tri-unité n’est pas présent, et dans chaque être... », Boehme, Six Theosophic Points, trans. John Rolleston Earle (New York: Alfred A. Knopf, 1920), I:21; pp. 18-19.

[4] Une petite application de ce principe peut être trouvée dans les habitudes alimentaires des carnivores de rang moyen. Alors que les rôdeurs subsistent principalement par les féculents, les graisses et les huiles, et les ongulés par la cellulose, les carnivores subsistent par les protéines ; c’est-à-dire par une nourriture similaire à leur propre matériel corporel. Voir Schad, Man and Mammals, 32.

[5] Edward Allen Beach, The Potencies of Gods (Albany, New York: State University of New York Press, 1994), 126.

[6] Cela rappelle la dialectique maître-esclave dans la Phénoménologie de l’Esprit de Hegel : subjugué par le maître, l’esclave se tourne vers l’intérieur et donne naissance au Geist.

[7] D. H. Lawrence, Women in Love (New York: Viking Press, 1969), 434.

[8] Nibelungenlied, trans. Helen M. Mustard, in Medieval Epics (New York: Modern Library, 1963), 282.

[9] Beach, 136.

[10] Ibid., 134.

vendredi, 03 mai 2019

Ernst Jünger ou les figures de la haute tenue

Né en 1895, décédé à presque 103 ans en 1998, Ernst Jünger peut être qualifié sans hésitation de « grande conscience européenne », non pour un pseudo-message qu’il aurait à délivrer aux générations actuelles et à venir, mais pour son maintien droit et stoïque face aux événements, au monde et aux hommes. En cela, il est un modèle, une de ces falaises de marbre souffrant à peine de l’érosion du temps comme des éléments. « La tenue, comme le goût, est de l’ordre de la civilité – qui est la racine de la civilisation. Celle-ci peut être gravement atteinte, délitée, submergée, il demeure, dans le cœur de quelques-uns une « cité inspiratrice ». La tenue, est alors ce qui tient – vis-à-vis de soi-même et des autres. Toute l’œuvre de Jünger nous enseigne, avec amitié et sans crisper, à tenir bon » confiait Luc-Olivier d’Algange.(1)

On ne comprend obstinément rien à Jünger si l’on persiste à ignorer son passé soldatesque en même temps qu’on jetterait systématiquement sur lui un regard d’opprobres et de ressentiments. La tenue était alors, pour ce tout jeune homme à peine sorti des jupons maternels, la condition (dernière) du héros pour autant que l’exécutant savait rester prudemment à sa place, la première, en l’occurrence, celle du front, des balles et des bombes. Certes, il ne fut pas le seul à tenir son rang, mais bien peu en firent, comme lui, une éthique, sinon une idiosyncrasie. C’est sans doute ce que nos sombres temps médiocres reprochent à cette personnalité altière, eux qui se vautrent dans l’autre entendu, désormais, comme le comble de l’horizontalité démocratique, métonymie universelle de la « non-discrimination ».

C’est que notre fière et arrogante époque se croit libre comme jamais, prétendument, elle ne l’aurait été dans son histoire, tout auréolée des victoires faciles de son individualisme triomphant que viendraient régénérer des droits de l’homme inextinguibles et extensibles. Nos contemporains vouent un culte désormais sans borne au progrès. À l’heure d’une extraordinaire crise du sens, celle-ci semble devoir se résoudre dans un improbable sens de l’histoire, au risque que tant d’yeux rivés sur cette chimérique boussole n’en deviennent proprement aveugles aux farces et aux tragédies d’une histoire que, par ailleurs, il est de bon ton de conchier et de congédier.

Jünger était un adepte des formes, non pas tant pour des motifs esthétiques que parce qu’elles reflétaient selon lui une certaine permanence archétypale que seule une connaissance intuitive pouvait appréhender. C’est dire que cet effort de translucidité visionnaire n’est pas à la portée du premier venu. Cette quête d’un « supraréel » qui se confondrait uniment avec le réel attendu qu’il ne peut être question de dissocier deux mondes qui n’en font résolument qu’un, aurait presque à voir avec la démarche traditionisme de René Guénon. La fonction assignée chez l’auteur d’Eumeswill à la « Figure »(2) emprunte assez à la pensée métaphysique.

florence-henri-ernst-jünger.jpgLe Rebelle et l’Anarque sont ces figures, ces paradigmes, ces « représentations » offertes à la reconnaissance de l’homme qui les perçoit comme manifestation épiphaniques insaisissables par la pensée mais s’imposant à l’évidence, pour peu qu’il accepte – l’homme n’est jamais contraint que par soi-même dans la vision jüngerienne du monde – de ne pas lui tourner le dos.

Il nous propose, ce faisant, deux voies qui loin de s’opposer peuvent éventuellement se conjoindre avec le temps. Il est vraisemblable – car plus logique – que le Rebelle surgira avant l’Anarque, celui-ci apparaissant comme le point le plus haut de la maturité. Si l’on veut bien admettre que chaque « type » jüngerien correspond aux grands âges de la vie, sans doute nous approcherions-nous d’une certaine vérité philosophique. Le temps du Soldat est celui de l’impétuosité et du jeu, de l’innocence et de l’inconséquence, rapidement rattrapé par celui du Travailleur dont les appétits semblent insatiables et qui succombe aux charmes neufs et vénéneux de la puissance. Puis arrive, à pas de loup, le temps du Rebelle suspendant à son tableau de chasse les différents trophées de ses désillusions successives (3).

Lorsque survient celui de l’Anarque, ces dernières sont balayées. L’Anarque devient plus sage, à proportion de ce qu’il sait qu’il ne doit rien attendre de quiconque.

« Aide-toi toi-même, le Ciel ne fera rien pour toi, mais tu n’en seras pas moins heureux » pourrait être cette maxime du bonheur solitaire. « Le trait propre qui fait de moi un anarque, c’est que je vis dans un monde que, ‘‘en dernière analyse’’, je ne prends pas au sérieux. Ce qui renforce ma liberté. Je sers en volontaire. […] Pour l’anarque, les choses ne changent guère lorsqu’il se dépouille d’un uniforme qu’il considérait en partie comme une souquenille de fou, en partie comme un vêtement de camouflage. Il dissimule sa liberté intérieure, qu’il objectivera à l’occasion de tels passages. C’est ce qui le distingue de l’anarchiste qui, objectivement dépourvu de toute liberté, est pris d’une crise de folie furieuse, jusqu’au moment où on lui passe une camisole de force plus solide. […] Le libéral est mécontent de tout régime ; l’anarque en traverse la série, si possible sans jamais se cogner, comme il le ferait d’une colonnade. C’est la bonne recette pour quiconque s’intéresse plus à l’essence du monde qu’à ses apparences – le philosophe, l’artiste, le croyant. […] Je ne fais aucun cas des convictions, et beaucoup de cas de la libre disposition de soi. C’est ainsi que je suis disponible, dans la mesure où l’on me provoque, que ce soit à l’amour ou à la guerre. Je ne respecte pas les convictions, mais l’homme. Je regarde et je garde. »(4)

Gardons-nous bien de penser que Jünger nous invite à rompre avec le monde. Tout au plus, nous incite-t-il plutôt à « trouver la sécurité dans la sauvagerie des déserts, et avant tout dans notre propre cœur afin de changer le monde. »(5)

Notes

(1) Livr’Arbitres, n° 27, p. 26.

(2) Voir Ernst Jünger, Type, nom, figure, Christian Bourgois, Paris, 1996.

(3) « Quant au Rebelle, nous appelons ainsi celui qui, isolé et privé de sa patrie par la marche de l’univers, se voit enfin livré au néant. Tel pourrait être le destin d’un grand nombre d’hommes, et même de tous — il faut donc qu’un autre caractère s’y ajoute. C’est que le Rebelle est résolu à la résistance et forme le dessein d’engager la lutte, fût-elle sans espoir. Est rebelle, par conséquent, quiconque est mis par la loi de sa nature en rapport avec la liberté, relation qui l’entraîne dans le temps à une révolte contre l’automatisme et à un refus d’en admettre la conséquence éthique, le fatalisme », Traité du Rebelle ou le recours aux forêts dans Essai sur l’homme et le temps, Christian Bourgois, Paris, 1970, p. 44.

(4) Eumeswill, La Table Ronde, Paris, 1977, 1978. Traduction Henri Plard.

(5) Passage à la ligne (1950).

vendredi, 26 avril 2019

La malédiction de la classe pensante

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La malédiction de la classe pensante

par James Howard Kunstler
Ex: https://echelledejacob.blogspot.com 
 
Comment expliquer l’étrange mélange de névrose et de malhonnêteté qui s’est emparé de la classe pensante américaine depuis l’ascension de Donald Trump comme figure de proue épique de notre navire d’État ? Tout semble se réduire à la honte et à l’échec. 

Il y a, par exemple, l’échec des principaux vizirs économiques américains à arrêter l’effondrement de la classe moyenne – et avec lui, la désintégration des familles – qui a plus que tout produit le résultat des élections de 2016. Qu’y a-t-il de plus urgent : la destruction de toutes ces villes, de toutes ces villages et de toutes ces vies dans les zones sinistrées, ou la baisse de vingt points de l’indice boursier S & P ? 

Le choix fait par les « experts » ces dix dernières années est évident : gonfler à tout prix les marchés financiers en recourant à des interventions politiques malhonnêtes dont ils sont assez intelligents pour savoir qu’elles finiront par faire sauter le système bancaire. Ils l’ont fait pour préserver leur réputation assez longtemps pour prendre leur retraite. Le problème, c’est que les dommages sont maintenant si graves que, lorsque viendra le temps de présenter des excuses, ce ne sera pas suffisant. Ils perdront leur liberté et peut-être leur tête. 

La névrose et la malhonnêteté sont exactement ce qui a fait de deux des entreprises les plus sacrées et les plus nobles de ce pays, l’enseignement supérieur et la médecine, des rackets honteux. Dimanche soir, CBS 60 Minutes a couvert les deux bases dans son article principal sur la façon dont l’école de médecine de NYU a récemment déclaré son programme sans frais de scolarité. Ce grand triomphe est dû à un énorme don en espèces de l’un des fondateurs de la compagnie Home Depot, le milliardaire Ken Langone. Nulle part dans l’émission, la SCS n’a soulevé la question de savoir comment le coût d’un diplôme était devenu si scandaleux. Ou comment M. Langone a fait fortune en mettant toutes les quincailleries locales en faillite, ce qui lui a permis de saisir les revenus annuels de dix mille propriétaires de petites entreprises et de leurs employés. Le grand geste de l’université de New York n’est qu’un moyen de mettre par écrit le rôle honteux des dirigeants de l’université dans le racket du prêt pour accéder au collège qui peut détruire d’innombrables vies. 

La névrose et la honte sont les moteurs de la politique identitaire avec toutes ses persécutions et punitions rituelles étranges. C’est la classe pensante qui a mené la campagne pour les droits civiques dans les années 1960. Nous voici cinquante ans plus tard avec des douzaines de villes en ruines, des systèmes scolaires publics défaillants et des prisons remplies d’hommes noirs sans commune mesure avec leur démographie actuelle dans la population générale (37 % contre 13 % à l’échelle nationale). En Californie, c’est 29% alors que seulement 6% des résidents masculins de l’État sont afro-américains. Le récit favori de la classe intellectuelle dit que le taux élevé d’incarcération est dû à l’application injuste des lois sur les drogues pour des infractions relativement mineures, en particulier le fait d’être pris en train de posséder de l’herbe. 

Ok, la marijuana est légale en Californie depuis plusieurs années maintenant. Cela a-t-il modifié les statistiques ? Je suppose qu’on le saura bientôt. Y a-t-il une autre explication ? Peut-être un mauvais comportement disproportionné d’autres types : agression, vol, meurtre ? Peut-être le résultat des politiques gouvernementales conçues par la classe pensante pour promouvoir les familles monoparentales sans père présent depuis trois générations maintenant ? 

Après tout ce temps et toutes les preuves de la perniciosité de cette condition, pourquoi n’y a-t-il pas de débat à ce sujet ? Pourquoi la classe pensante est-elle si malhonnête au sujet de l’ingrédient le plus ruineux de l’école publique quotidienne : mauvais comportement, violence et perturbation constante de la classe ? Les classes pensantes doivent avoir honte et être consternées de tout cela, car cela semble contredire tous les efforts puissants déployés pour élever la sous-classe noire. Et quelle a été la réponse la plus notable ? Le département de l’Éducation de M. Obama a ordonné aux districts scolaires de cesser de suspendre et de discipliner les enfants noirs qui se sont mal comportés parce que cela avait l’air mauvais, et cette politique est toujours en place.
 
Comment ça se passe ? 

Le dernier appel de la classe pensante à remédier à ces problèmes par ailleurs insolubles et embarrassants est la panacée des réparations pour les descendants des esclaves. Bien sûr, l’argent dépensé pour les services sociaux au cours du dernier demi-siècle, s’il avait été simplement distribué en espèces, aurait fait de chaque Afro-Américain un millionnaire. Personnellement, je ne peux imaginer une pire façon d’attiser l’animosité raciale à travers l’Amérique jusqu’au point de rupture que ces réparations proposées. Nous en entendrons certainement davantage parler dans le long cheminement vers les élections de 2020, et cela ne fera que rendre les États-Unis plus fous aux yeux du reste du monde. 

La position de la classe pensante sur l’immigration légale et illégale est peut-être encore plus cynique – parce qu’elle sait sûrement à quel point elle est malhonnête, même par le brouillard de l’auto-illusion. La semaine dernière, le procureur général de Californie Xavier Becerra a proposé que l’immigration illégale soit décriminalisée. Étonnamment, personne n’a ri de cet exercice extraordinaire de casuistique. Pendant ce temps, l’État sombre dans l’insolvabilité, la misère et le chaos – un rappel que les gens n’obtiennent pas nécessairement ce qu’ils attendent, mais plutôt ce qu’ils méritent. 

Le RussiaGate, bien sûr, a été le lieu le plus aigu de malhonnêteté névrotique dans ce pays au cours des deux dernières années. Les principaux organes d’information de la classe pensante – The New York Times, The WashPo, CNN, MSNBC – ont non seulement omis de s’excuser pour la dangereuse hystérie qu’ils ont sciemment propagée, mais ils persistent à soutenir à tout prix la matrice des fantasmes dans ce qui doit maintenant être considéré comme une tentative sans espoir pour préserver leur réputation et peut-être même leurs moyens de subsistance. La répudiation de cette absurdité par l’inquisiteur en chef Robert Mueller ne pouvait être plus absolue, même s’il était contraint par la réalité et contre sa volonté et son instinct de le faire. Et maintenant, quelle voie empruntera tout cet animus malade de la classe pensante dans sa frénésie destructrice et honteuse pour se justifier ? 

James Howard Kunstler 

Traduit par Hervé pour le Saker Francophone

vendredi, 12 avril 2019

Liberalism: the other God that failed

While Arthur Koestler was awaiting execution after being captured and sentenced to death by Francoist forces as a communist spy during the Spanish Civil War, he had a mystical experience. Formerly a Marxist materialist who believed the universe was governed by “physical laws and social determinants”, he glimpsed another reality. The world now seemed instead as “a text written in invisible ink”.

The experience left him untroubled by the prospect of his imminent death by firing squad. At the last moment, he was traded for a prisoner held by Republican forces. But the epiphany of another order of things that came to him in the prison cell stayed with him for the rest of his days, informing his great novel of communist faith and disillusion, Darkness at Noon (1940), his later writings on the history of science, and a lifelong interest in parapsychology.

Koestler_(1969).jpgKoestler was a pivotal figure in the post-war generation that rejected communism as “the God that failed”— the title of a celebrated book of essays, edited by the Labour politician Richard Crossman and published in 1949, to which Koestler contributed. The ex-communists of this period followed a variety of political trajectories. André Gide, another contributor to the collection, abandoned communism, after a visit to the Soviet Union in 1936, to become a writer on issues of sexuality and personal authenticity.

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The rise of post-truth liberalism

By John Gray

Other ex-communists became social democrats, while a few became militant conservatives or lost interest in politics completely. Stephen Spender, poet and novelist and author of Forward from liberalism (1937), morphed into a cold-war liberal. James Burnham, a friend and disciple of Leon Trotsky, rejected Marxism in 1940 to reappear as a militant conservative, publishing The Suicide of the West: the meaning and destiny of liberalism (1964) and eventually being received into the Catholic Church. All of them became communists in a time when liberalism had failed. All were able to return to functioning liberal societies when they abandoned their communist faith.

When interwar Europe was overrun by fascism, the Soviet experiment seemed to these writers to be the best hope for the future. When the experiment failed, and they renounced communism, they were able to resume their life and work in a recognisably liberal civilisation.

Post-war global geopolitics may have been polarised, with a precarious nuclear stand-off between the Soviet Union and the US and its allies. Liberal societies may have been flawed, with McCarthyism and racial segregation stains on the values western societies claimed to promote. But liberal civilisation was not in crisis. Large communist movements may have existed in France, Italy and other European countries, while Maoism attracted sympathetic interest from alienated intellectuals. But even so, liberal values were sufficiently deep-rooted that in most western countries they could be taken for granted. The West was still home to a liberal way of life.

The situation is rather different today. Liberal freedoms have been eroded from within, and dissidents from a new liberal orthodoxy face exclusion from public institutions. This is not enforced by a totalitarian state, but by professional bodies, colleagues and ever vigilant internet guardians of virtue. In some ways, this soft totalitarianism is more invasive than that in the final years of the Soviet bloc.

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How Thatcherism produced Corbynism

By John Gray

The values imposed under communism were internalised by few among those who were compelled to conform to them. Ordinary citizens and many communist functionaries were a bit like Marranos, the Iberian Jews forced to convert to Christianity in mediaeval and early modern times, who secretly practised their true religion for generations or centuries afterwards. Such fortitude requires rich inner resources and an idea of truth as something independent of subjective emotion and social convention. There are not many Marranos in the post-liberal west.

Some have attempted to revive classical liberalism, an anachronistic project that harks back to a time when western values could command a global hegemony. Others have opted for a hyperbolic version of liberalism in which western civilisation is denounced as being a vehicle for global repression.

In this alt-liberal ideology, the central values of classical liberalism — personal autonomy and the rejection of tradition in favour of critical reason — are radicalised and turned against the liberal way of life. A heretical cult, alt-liberalism is what liberalism becomes when it tears up its roots in Jewish and Christian religion. Today it is the ruling ideology in much of the academy and media.

In these conditions one might suspect self-censorship, since anyone expressing seriously heterodox views risks a rupture in their professional life. Yet it would be a mistake to think alt-liberals are mostly cynical conformists. Since practising cynics realise that the views they are publicly promoting are actually false, cynicism presupposes the capacity to recognise truth. In contrast, alt-liberals appear wholly sincere when they denounce the society that privileges and rewards them. Unlike the Marranos, whose public professions concealed another view of the world, alt-liberals conceal nothing. There is nothing in them to conceal. They are expressing the prevailing western orthodoxy, which identifies western civilization as being uniquely malignant.

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Deluded liberals can't keep clinging to a dead idea

By John Gray

Of course, civilisational self-hatred is a singularly western conceit. Non-western countries — China, India and Russia, for example— are increasingly asserting themselves as civilisation-states. It is only western countries that denounce the civilisation they once represented. But not everything is as it seems. Even as they condemn it, alt-liberals are affirming the superiority of the West over other civilisations. Not only is the West uniquely destructive. It is only the West — or its most advanced section, the alt-liberal elite — that has the critical capacity to transcend itself. But to become what, exactly? Lying behind these intellectual contortions is an insoluble problem.

In his essay in The God that failed Gide wrote: “My faith in communism is like my faith in religion. It is a promise of salvation for mankind.” Here Gide acknowledged that communism was an atheist version of monotheism. But so is liberalism, and when Gide and others gave up faith in communism to become liberals, they were not renouncing the concepts and values that both ideologies had inherited from western religion. They continued to believe that history was a directional process in which humankind was advancing towards universal freedom.

Without this idea, liberal ideology cannot be coherently formulated. That liberal societies have existed, in some parts of the world over the past few centuries, is a fact established by empirical inquiry. That these societies embody the meaning of history is a confession of faith. However much its devotees may deny it, secular liberalism is an oxymoron.

A later generation of ex-communists confirms this conclusion. Trotskyists such as Irving Kristol and Christopher Hitchens who became neo-conservatives or hawkish liberals in the Eighties or Nineties did not relinquish their view of history as the march towards a universal system of government. They simply altered their view as to the nature of the destination.

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You're reaping what you sowed, liberals

By John Gray

Instead of world communism, it was now global democracy. Western interventions in Afghanistan, Iraq and later Libya were wars of liberation backed by the momentum of history. The fiascos that ensued did not shake this belief. The liberalism of these ex-Trotskyists was yet another iteration of monotheistic faith.

Alt-liberals aim to deconstruct monotheism, along with the grand narratives it has inspired in secular thinkers. But what emerges from this process? Once every cultural tradition is demolished, nothing remains. In principle, alt-liberalism is an empty ideology. In practice it defines itself by negation.

Populist currents are advancing throughout the West and supply the necessary antagonist. The old liberalism that prized tolerance no longer survives as a living force. Iconoclasts who smash statues of colonial-era figures are raging at an enemy that has long since surrendered. An impish avatar of a vanished liberal hegemony, alt-liberalism needs populism if it is to survive.

Resistance to populist movements fills what would otherwise be an indeterminacy at the heart of the alt-liberal project. Privileged woke censors of reactionary thinking and incendiary street warriors are mutually reinforcing forces. At times, indeed, they are mirror-images of one another. Both have targeted the state of Israel as the quintessential embodiment of western evil, for example. Not only do alt-liberals and populists need one another. They share the same demonology.

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Today's voguish communists should remember Budapest

By James Bloodworth

Viewing the post-liberal West from a historical standpoint, one might conclude that it will suffer the same fate as communism. Facing advancing authoritarian powers and weakened from within, a liberal way of life must surely vanish from history. True, some traces will remain. Even in societies where denunciation for reactionary thinking is a pervasive practice, fossil-like fragments of ancient freedoms will be found scattered here and there. But surely the global liberal order will finally implode, leaving behind only defaced remnants of a civilisation that once existed.

In fact, any simple analogy between the fall of communism and the decay of liberalism is misleading. The difference is that old-style liberals have nowhere to go. To be sure, they could abandon any universalistic claim for their values and think of them as inhering in a particular form of life — one that is flawed, like every other, but still worthwhile.

Yet this is hardly a viable stance at the present time. For one thing, this way of life is under siege in what were once liberal societies. Yet liberals cannot help but see themselves as carriers of universal values. Otherwise, what would they be? Anxious relics of a foundering civilisation, seeking shelter from a world they no longer understand.

There may be no way forward for liberalism. But neither is the liberal West committing suicide. That requires the ability to form a clear intention, which the West shows no evidence of possessing. Nothing as dramatic or definitive will occur. Koestler and the ex-communists of his generation regarded communism as the God that failed because they once believed it to be the future. Today almost no one any longer expects liberal values to triumph throughout the world, but few are able to admit it — least of all to themselves. So instead they drift.

It is not hard to detect a hint of nostalgia among liberals for the rationalist dictatorships of the past. Soviet communism may have been totalitarian, but at least it was inspired by an Enlightenment ideology. Though it has killed far fewer people, Putin’s Russia is far more threatening to the progressive world-view.

China, on the other hand, is envied as much as it is feared. Its rulers have renounced communism, but in favour of a market economy, globalisation and a high-tech version of Bentham’s Panopticon — all of them imported western models. The liberal west may be on the way out, but illiberal western ideas still have a part in shaping the global scene.

When ex-communists became liberals, they shifted from one secular faith to another. Troubled liberals today have no such option. Fearful of the alternatives, they hang on desperately to a faith in which they no longer believe. Liberalism may be the other God that failed, but for liberals themselves their vision of the future is a deus absconditus, mocking and tormenting them as the old freedoms disappear from the world.

 

jeudi, 04 avril 2019

Pierre Manent on Machiavelli, Luther, and the Eclipse of the Natural Law

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Pierre Manent on Machiavelli, Luther, and the Eclipse of the Natural Law

For most participants in modern political discourse, human rights are real and natural law is not.

More than that, the limits of natural law—not just particular natural law arguments made about human nature and its institutions—are seen as oppressive and mere constructs. Human rights, by contrast, are real freedoms that must be respected and benefits that must be granted to all human beings.

The French political philosopher Pierre Manent’s most recent book, Natural Law and the Rights of Man, is developed from his 2017 lectures for the Etienne Gilson Chair at the Institut Catholique in Paris and will be published in English later this year. (The final lecture is already available in translation.) In it, Manent offers a diagnosis of the way in which human rights have come to eclipse the natural law. He also advances an argument about the nature of political action and command in light of that law’s rationality and outlines the consequences of obscuring action. This shift from natural law to human rights was supposed to free us, Manent concludes, but has left us paralyzed.

pm-lex.jpgThe Double Standard that Relativism Creates

The perfect example arose last month. On February 19, the Trump administration announced a new campaign to fight laws in 72 countries that criminalize same-sex sexual acts. Why did Out magazine condemn it as racist and colonialist, instead of supporting it as a way to keep gays from being killed and imprisoned? Because rights claims are the moral trump card in our public debates, but not when it comes to cultures other than our own. As Manent notes, in our own countries, the bien pensant constantly make judgments about right and wrong in order to reform society. It is inexcusable to maintain the status quo, they claim, since nothing is more urgent or just than for men and women like us to recognize, declare, and vindicate our fundamental rights. But regarding other countries, they are more likely to suspend judgment: We would not want to suggest that our way of life is superior to those of other cultures, especially in a post-colonial era. As a result, we regard the “other” with cultured non-judgment, while furiously judging ourselves.

In effect, Manent argues, we posit that human rights are a rigorously universal principle, which have value for all cultures without exception. At the same time, we posit that all cultures and forms of life are equal, and that all appraisal that would presume to judge them is discriminatory. On the one hand, all human beings are equal, and we must fight vigorously for the equality of men and women in our society; on the other hand all cultures have the right to an equal respect, even those that violate the equality of human beings, and we should refrain from condemning cultures that, for example, keep women in a subordinate state.

This contradiction captures the paralysis Manent sees in our contemporary framework of rights. If we want to condemn barbarism without using scare quotes, he writes, there must be a human nature with which our actions can accord or that we are capable of violating. That nature operates according to a logic that we did not create ourselves. As he put it in a recent interview with the conservative French weekly Valeurs Actuelles, the natural law is the group of rules that necessarily order human life, and that human beings have not made. These laws fix the limits of our liberty, but also give it its orientation.

The Pleasant, the Useful, and the Honest

As Manent sees it, the natural law is not an ideal but a set of practical principles for action that helps agents act toward a happy life. All true action is a collaboration and balancing between the three principal motives of human action: the pleasant, the useful, and the honest. Without objective, transcendent principles, there is nothing to guide human freedom—nothing to determine what is pleasant, useful, or honest. “Natural law,” he concludes, “is the only serious defense against nihilism.”

Our problem today is that such thinking no longer makes sense to us. Manent traces this incomprehension to the reduction of our understanding of human nature to the separated individual and examines how it manifests itself in Niccolo Machiavelli and Martin Luther. Like other early moderns, Machiavelli claimed that he would not analyze humanity from inductive, Aristotelian principles, but would consider it “as it actually is.” Manent argues that Machiavelli fails to do this, because he substitutes a theoretical action for action “as it actually is.”

Instead of practical action, Machiavelli examines action as it can be seen by the theoreticians, without the point of view of the agent. For Machiavelli, human beings are prisoners of a fear of death and a fear of natural or divine law—a law that protects, but locks us in fear. To overcome this, he calls for a new kind of human agent who no longer fears the law and can therefore act according to what the situation authorizes and demands. We must escape our conscience (and the practical judgments it makes) and turn to the science of history for theoretical guidance for our action.

Manent sees a similar repudiation of practical reasoning and action in Luther: The acting Christian is replaced by the believer. For Luther, the Law produces a guilt and despair that can only be cured by faith, not action. The certitude of faith, not actions or conduct or conscience, determine salvation. As we saw with Machiavelli, the man who acts according to his conscience formed by the principles of the law is unable to accomplish his necessary end. Lutheran faith and Machiavellian virtu are different, but they both claim to allow us to escape the shame of the practical life and make the necessary break between ourselves and the law.

The Loss of the Law

In their own ways, therefore, Machiavelli and Luther illustrate the modern loss of the law as “rule and measure of action.” In a 2014 essay—which will serve as an appendix to the forthcoming translation of La loi naturelle et les droits de l’homme—Manent diagnoses our illness as a loss of the intelligence of law. This loss was not accidental, he writes:

We have lost it because we wanted to lose it.  More precisely, we have fled from law. We are still fleeing from it. We have been fleeing from law since we took up the project—let us call it “the modern project”—to organize common life, the human world, on a basis other than law. . . . Rights and self-interest are the two principles that allow for the ordering of the human world without recourse to law as the rule and measure of action. Of course we still have laws, indeed more laws than ever, but their raison d’être is no longer directly to regulate our actions but rather to guarantee our rights and equip us to seek our interests in a way that is useful or at least not harmful to the common interest.

pm-hommecite.jpgOur flight from the law in the name of more freedom to act has paradoxically undermined the principles for practical action. It turns out that we could not make our own meaning and give ourselves our own laws and ends.

This is the heart of the problem that Manent identifies with the modern state. In ancient political thought, only the body politic as a whole could be autonomous or give itself the law. In the modern conception of the state—especially for French conceptions of the state rooted in Jean-Jacques Rousseau’s thought—the citizen authorizes the state’s commands that he must obey. How then can he be said truly to obey? Manent argues that the idea of obeying my own commands or commanding myself simply does not work. It requires that I imagine myself as two, a commanding self and an obeying self that is distinct but also me; I cannot imagine myself to be autonomous without producing a heteronomy in myself. In this way, our society confuses command and obedience and obscures them. This in turn damages our ability to perform true political actions, given that command is “the core and essence of action.”

The greatest contrast Manent identifies between the ancient and the modern world is the difference between the free agent and the free individual. The free agent is concerned more about the intrinsic quality of his action than the objects exterior to his action, while the free individual is more concerned with exterior obstacles to his action than its intrinsic quality. For example, free agents and free individuals view death differently. For the individual, death is an obstacle to be removed. For the agent, death becomes part of the logic of action. Death is not the chief obstacle to be overcome or conquered, and therefore the great menace, but one of the many rules and motifs governing action. The individualistic view of death as an extrinsic act of life is most fully captured in euthanasia, the arbitrary but authorized killing of innocents.

How Modernity Crowded Out the Possibility of Action

In the Greek city, a well-constituted democracy, each citizen commands and obeys alternately. No one would dream of pretending that he obeys himself or commands himself. At the beginning of the modern epoch, we deliberately abandoned the law that commands and gives a rule of action. In its place, the modern state organizes the condition of action—an action now judged not according to its rule or end, but according to its effects. By abandoning ourselves to the inertia of laissez-faire, laissez-passer, however, we have lost sight of the central role of command in practical life, especially the commanding role of the law as rule of common action. Instead, we place our faith in the idea that a certain inaction, or a certain abstention from action, is the origin of the greatest goods.

We have a greater flux of goods and services, but we abstain from actions that would be likely to moderate and direct the movement of men and things. Between two modes of passivity— suffering and enjoying—that hold all our attention and provide the matter of all our new rights, we have no more place for acting.

For all of this bracing diagnosis, Manent offers little in the way of prescription. How does his analysis cash out in terms of practical political action? Perhaps it helps to uncover the roots of the powerlessness that many feel in the face of larger political forces, and to explain how the possibility of real political action came to be so circumscribed.

If so, what is the alternative? What could help us recover our sense of the intelligence of law? Neither the absolutism of radical Islam in France’s present, nor the absolutism of throne and altar in her past, receive the philosopher’s endorsement; he gestures, rather, toward ancient Greece. There he finds representative self-government in accord with the natural law and without the conceits of the modern state. At the end of his Valeurs Actuelles interview, he also gestured toward France’s rich literary and spiritual traditions and history of rational discussion. These should, said Manent, “allow us to find an alternative to virulent and blind rights claims and the irony, shoulder-shrugging, or sterile sarcasm of the politically incorrect.”

Nathaniel Peters

Nathaniel Peters is the executive director of the Morningside Institute and a lecturer at Columbia University.

About the Author

mercredi, 03 avril 2019

René Guénon et notre civilisation hallucinatoire

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René Guénon et notre civilisation hallucinatoire

Les Carnets de Nicolas Bonnal

Ex: http://www.dedefensa.org

Il est évident que nous vivons sous hypnose : abrutissement médiatique/pédagogique, journaux, actus en bandeaux, « tout m’afflige et me nuit, et conspire à me nuire. » Mais cette hypnose est ancienne et explique aussi bien l’ère d’un Cromwell que celle d’un Robespierre ou d’un Luther-Calvin. L’occident est malade depuis plus longtemps que la télé…O Gutenberg…

Je redécouvre des pages extraordinaires de Guénon en relisant Orient et Occident. Il y dénonce le caractère fictif de la notion de civilisation ; puis son caractère hallucinatoire à notre civilisation ; enfin son racisme et son intolérance permanentes (sus aux jaunes ou aux musulmans, dont les pays – voyez le classement des pays par meurtre sur Wikipédia – sont les moins violents au monde). Problème : cette anti-civilisation dont les conservateurs se repaissent, est la fois destructrice et suicidaire. Exemple : on détruit des dizaines de pays ou des styles de vie pour se faire plus vite remplacer physiquement (puisque métaphysiquement nous sommes déjà zombis)…

Voyons Guénon :

« La vie des mots n’est pas indépendante de la vie des idées. Le mot de civilisation, dont nos ancêtres se passaient fort bien, peut-être parce qu’ils avaient la chose, s’est répandu au XIXe siècle sous l’influence d’idées nouvelles…Ainsi, ces deux idées de « civilisation » et de « progrès », qui sont fort étroitement associées, ne datent l’une et l’autre que de la seconde moitié du XVIIIe siècle, c’est-à-dire de l’époque qui, entre autres choses, vit naître aussi le matérialisme; et elles furent surtout propagées et popularisées par les rêveurs socialistes du début du XIXe siècle.»

Guénon pense comme le Valéry de Regards (1) que l’histoire est une science truquée servant des agendas :

« L’histoire vraie peut être dangereuse pour certains intérêts politiques ; et on est en droit de se demander si ce n’est pas pour cette raison que certaines méthodes, en ce domaine, sont imposées officiellement à l’exclusion de toutes les autres : consciemment ou non, on écarte a priori tout ce qui permettrait de voir clair en bien des choses, et c’est ainsi que se forme l’« opinion publique ».

Puis il  fait le procès de nos grands mots (comme disait Céline : le latin, le latinisant en particulier estconifié par les mots), les mots à majuscule du monde moderne :

« …si l’on veut prendre les mêmes mots dans un sens absolu, ils ne correspondent plus à aucune réalité, et c’est justement alors qu’ils représentent ces idées nouvelles qui n’ont cours que moins de deux siècles, et dans le seul Occident. Certes, « le Progrès » et « la Civilisation », avec des majuscules, cela peut faire un excellent effet dans certaines phrases aussi creuses que déclamatoires, très propres à impressionner la foule pour qui la parole sert moins à exprimer la pensée qu’à suppléer à son absence ; à ce titre, cela joue un rôle des plus importants dans l’arsenal de formules dont les « dirigeants » contemporains se servent pour accomplir la singulière œuvre de suggestion collective sans laquelle la mentalité spécifiquement moderne ne saurait subsister bien longtemps. »

rg-quantité.jpgIl a évoqué la suggestion comme Gustave Le Bon. Il va même parler d’hypnose, notre René Guénon !

«  À cet égard, nous ne croyons pas qu’on ait jamais remarqué suffisamment l’analogie, pourtant frappante, que l’action de l’orateur, notamment, présente avec celle de l’hypnotiseur (et celle du dompteur est également du même ordre) ; nous signalons en passant ce sujet d’études à l’attention des psychologues. Sans doute, le pouvoir des mots s’est déjà exercé plus ou moins en d’autres temps que le nôtre ; mais ce dont on n’a pas d’exemple, c’est cette gigantesque hallucination collective par laquelle toute une partie de l’humanité en est arrivée à prendre les plus vaines chimères pour d’incontestables réalités ; et, parmi ces idoles de l’esprit moderne, celles que nous dénonçons présentement sont peut-être les plus pernicieuses de toutes. »

A l’époque moderne, le mot devient une idole. TS Eliot en parle aussi dans un poème célèbre, les chorus :

Words that have taken the place of thoughts and feelings…

La science ne nous sauve en rien, bien au contraire. Autre nom à majuscule, elle sert aussi notre mise en hypnose (pour René Guénon, aucun mot à particule n’a de sens sérieux, et il est important de le noter) :

« La civilisation occidentale moderne a, entre autres prétentions, celle d’être éminemment « scientifique » ; il serait bon de préciser un peu comment on entend ce mot, mais c’est ce qu’on ne fait pas d’ordinaire, car il est du nombre de ceux auxquels nos contemporains semblent attacher une sorte de pouvoir mystérieux, indépendamment de leur sens. La « Science », avec une majuscule, comme le « Progrès » et la « Civilisation », comme le « Droit », la « Justice » et la « Liberté », est encore une de ces entités qu’il faut mieux ne pas chercher à définir, et qui risquent de perdre tout leur prestige dès qu’on les examine d’un peu trop près. »

Le mot est une suggestion (repensez à la psychologie des foules de Le Bon) :

« Toutes les soi-disant « conquêtes » dont le monde moderne est si fier se réduisent ainsi à de grands mots derrière lesquels il n’y a rien ou pas grand-chose : suggestion collective, avons-nous dit, illusion qui, pour être partagée par tant d’individus et pour se maintenir comme elle le fait, ne saurait être spontanée ; peut-être essaierons-nous quelque jour d’éclaircir un peu ce côté de la question. »

Et le vocable reste imprécis, s’il est idolâtré :

« …nous constatons seulement que l’Occident actuel croit aux idées que nous venons de dire, si tant est que l’on puisse appeler cela des idées, de quelque façon que cette croyance lui soit venue. Ce ne sont pas vraiment des idées, car beaucoup de ceux qui prononcent ces mots avec le plus de conviction n’ont dans la pensée rien de bien net qui y corresponde ; au fond, il n’y a là, dans la plupart des cas, que l’expression, on pourrait même dire la personnification, d’aspirations sentimentales plus ou moins vagues. Ce sont de véritables idoles, les divinités d’une sorte de « religion laïque » qui n’est pas nettement définie, sans doute, et qui ne peut pas l’être, mais qui n’en a pas moins une existence très réelle : ce n’est pas de la religion au sens propre du mot, mais c’est ce qui prétend s’y substituer, et qui mériterait mieux d’être appelé « contre-religion ».

L’hystérie occidentale, européenne ou américaine, est violente et permanente (en ce moment russophobie, Afghanistan, Syrie, Irak, Venezuela, Libye, etc.). Elle repose sur le sentimentalisme ou sur l’humanitarisme :

« De toutes les superstitions prêchées par ceux-là mêmes qui font profession de déclamer à tout propos contre la « superstition », celle de la « science » et de la « raison » est la seule qui ne semble pas, à première vue, reposer sur une base sentimentale ; mais il y a parfois un rationalisme qui n’est que du sentimentalisme déguisé, comme ne le prouve que trop la passion qu’y apportent ses partisans, la haine dont ils témoignent contre tout ce qui contrarie leurs tendances ou dépasse leur compréhension. »

rg-cmm.jpgLe mot haine est important ici, qui reflète cette instabilité ontologique, et qui au nom de l’humanisme justifie toutes les sanctions et toutes les violences guerrières.  Guénon ajoute sur l’islamophobie :

« …ceux qui sont incapables de distinguer entre les différent domaines croiraient faussement à une concurrence sur le terrain religieux ; et il y a certainement, dans la masse occidentale (où nous comprenons la plupart des pseudo-intellectuels), beaucoup plus de haine à l’égard de tout ce qui est islamique qu’en ce qui concerne le reste de l’Orient. »

Et sur la haine antichinoise :

« Ceux mêmes d’entre les Orientaux qui passent pour être le plus fermés à tout ce qui est étranger, les Chinois, par exemple, verraient sans répugnance des Européens venir individuellement s’établir chez eux pour y faire du commerce, s’ils ne savaient trop bien, pour en avoir fait la triste expérience, à quoi ils s’exposent en les laissant faire, et quels empiétements sont bientôt la conséquence de ce qui, au début, semblait le plus inoffensif. Les Chinois sont le peuple le plus profondément pacifique qui existe… »

Sur le péril jaune alors mis à la mode par Guillaume II :

« …rien ne saurait être plus ridicule que la chimérique terreur du « péril jaune », inventé jadis par Guillaume II, qui le symbolisa même dans un de ces tableaux à prétentions mystiques qu’il se plaisait à peindre pour occuper ses loisirs ; il faut toute l’ignorance de la plupart des Occidentaux, et leur incapacité à concevoir combien les autres hommes sont différents d’eux, pour en arriver à s’imaginer le peuple chinois se levant en armes pour marcher à la conquête de l’Europe… »

rg-orocc.jpgGuénon annonce même dans la deuxième partie de son livre le « grand remplacement » de la population occidentale ignoré par les hypnotisés et plastronné par les terrorisés :

« …les peuples européens, sans doute parce qu’ils sont formés d’éléments hétérogènes et ne constituent pas une race à proprement parler, sont ceux dont les caractères ethniques sont les moins stables et disparaissent le plus rapidement en se mêlant à d’autres races ; partout où il se produit de tels mélanges, c’est toujours l’Occidental qui est absorbé, bien loin de pouvoir absorber les autres. »

A la même époque de nombreux écrivains (Chesterton, Yeats, Céline, Madison Grant ou Scott Fitzgerald en Amérique) pressentent/constatent aussi le déclin quantitatif de la population en occident. Guénon semble par contre avoir surestimé la résilience orientale au smartphone et au béton, à la télé et au shopping-center… Sans oublier Hollywood, le tabac et le chewing-gum. Mais on ne se refera pas.

Concluons : notre bel et increvable occident est toujours aussi belliqueux, destructeur et autoritaire ; mais il est en même temps humanitaire, pleurnichard, écolo, mal dans sa peau, torturé, suicidaire, niant histoire, racines, polarité sexuelle… De ce point de vue on est bien dans une répugnante continuité de puissance hallucinée fonctionnant sous hypnose (relisez dans ce sens la Galaxie Gutenberg qui explique comment l’imprimerie nous aura altérés), et Guénon l’aura rappelé avec une sévère maîtrise…

Note 

(1) Valéry : « L’Histoire est le produit le plus dangereux que la chimie de l’intellect ait élaboré. Ses propriétés sont bien connues. Il fait rêver, il enivre les peuples, leur engendre de faux souvenirs, exagère leurs réflexes, entretient leurs vieilles plaies, les tourmente dans leur repos, les conduit au délire des grandeurs ou à celui de la persécution, et rend les nations amères, superbes, insupportables et vaines… L’Histoire justifie ce que l’on veut. Elle n’enseigne rigoureusement rien, car elle contient tout, et donne des exemples de tout. »

Sources 

René Guénon, Orient et occident, classiques.uqac.ca, pp.20-35

Milan Kundera Warned Us About Historical Amnesia. Now It’s Happening Again

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Milan Kundera Warned Us About Historical Amnesia. Now It’s Happening Again

 

The struggle of man against power is the struggle of memory against forgetting.
—Milan Kundera

Milan Kundera is 90-years old on April 1, 2019 and his central subject—The Power of Forgetting, or historical amnesia—could not be more relevant. Kundera’s great theme emerged from his experience of the annexation of his former homeland Czechoslovakia by the Soviets in 1948 and the process of deliberate historical erasure imposed by the communist regime on the Czechs.

As Kundera said:

The first step in liquidating a people is to erase its memory. Destroy its books, its culture, its history. Then have somebody write new books, manufacture a new culture, invent a new history. Before long that nation will begin to forget what it is and what it was. The world around it will forget even faster.

mk-book4.jpgI first read Kundera’s Book of Laughter and Forgetting (1979) back in 1987, when I was a member of the British Communist Party. The book shook my beliefs and Kundera’s writing became a part of a process of truth-speaking that shook the USSR to the ground in 1989.

In the 90s we believed we were living in a “post-mortem” era in which all the hidden graves of the 20th century would be exposed, the atrocities analyzed, the lessons learned. Lest we forget. We also thought we’d entered a time in which the Silicon Valley dream of digitizing all knowledge from the entire history of the printed and spoken word would lead us towards the infinite free library, the glass house of truth and the global village of free information flow. The future would be a time of endless remembrance and of great learning.

How wrong we were. The metaphor of the glass house has turned into that of the mirrored cube. The global village has collapsed into tribal info-warfare and the infinite library is now a war zone of battling conspiracy theories. The internet has become a tool of forgetting, not remembrance and the greatest area of amnesia is the subject that Milan Kundera spent his entire life trying to preserve, namely the horrors of communism.

This theme is set out on the very first page of the Book of Laughter and Forgetting in which Kundera describes a moment in Prague in 1948 amidst heavy snow in which the bareheaded Communist leader Klement Gottwald, while giving a speech in Wenceslas Square, was given a hat by his comrade Clemetis:

Four years later Clemetis was charged with treason and hanged. The Propaganda section immediately airbrushed him out of the history and obviously the photographs as well. Ever since Gottwald has stood on that balcony alone. Where Clemetis once stood, there is only bare wall. All that remains of Clemetis is the cap on Gottwald’s head.

After the fall of the USSR, there was a vast outpouring of truth-telling about the fallen communist regimes in Russia, Czechoslovakia, East Germany, Bulgaria, Hungary, Albania, Romania and Poland. The stagnant debt and corruption, the human rights abuses in political-prisons and orphanages, the hidden mass graves, the illegal human experiments, the secret surveillance systems, the assassinations, the mass starvations, and the overwhelming evidence of the failure in each country of “the planned economy.” The structures, too, of government-misinformation, the eradication of free speech and the re-writing of history—erasing your opponents by murdering them and then wiping all traces of their existence from the history books. In the 90s the hidden data from Stalin’s famine-genocide in the Ukraine (1923–33) was exposed. Later, the scale of Chairman Mao’s genocides staggered the world. Even the methods that communist regimes used to produce historical amnesia were exposed.

For a brief period, the consensus was that the communist experiment had failed. Never again, said the postmodernists and historians. Never again, said the economists and political parties. Never again said the people of former communist countries. Never again.

Fast forward 20 years and never again has been forgotten. The Wall Street Journal in 2016 asked: “Is Communism Cool? Ask a Millennial.” Last year MIT Press published Communism for Kids and Teen Vogue ran an excited apologia for Communism. Tablet announced, with some concern, a Cool Kid Communist Comeback.” On Twitter, there is new trend of people giving themselves communist-themed names: “Gothicommunist,” “Trans-Communist,” “Commie-Bitch,” “Eco-Communist.” The hammer and sickle flag has been re-appearing on campuses, at protests and on social media.

How could we have forgotten?

A poll in the UK by The New Culture Forum from 2015 showed that 70 percent of British people under the age of 24 had never heard of Chinese communist leader Mao Tse-Tung, while out of the 30 percent who had heard of him, 10 percent did not associate him with crimes against humanity. Chairman Mao’s communist regime was responsible for the deaths of between 30 to 70 million Chinese, making him the biggest genocidal killer of the 20th century, above Stalin and Hitler.

mk-b5.jpgOne of the reasons Mao’s genocides are not widely known about is because they are complex and covered two periods over a total of seven years. Information on the internet tends to be reduced into fast-read simplified narratives. If any facts are under dispute we have a tendency to shrug and dismiss the entire issue. So it is precisely the ambiguity over whether Mao’s Communist Party was responsible for 30, 50 or 70 million deaths that leads to internet users giving up on the subject.

The rational way of dealing with clashing estimates would be to look at the two poles. To say, at the bare minimum, even according to pro-communist sources, Mao was responsible for 30 million deaths and at the other extreme, from the most anti-communist sources, the number is 70 million. So it would be reasonable to conclude that the truth lies somewhere in between and that even if we were to take the lowest number it is still greater than the deaths caused by Stalin and Hitler.

However, this reasoning process does not occur. Our reaction when faced with a disputed piece of data like this is similar to our response when faced with a Wikipedia page that carries the warning: “The neutrality of this article is disputed.” Fatigue and lack of trust kicks in. And so, without an argument needing to be made by Mao’s apologists, the number he killed is not zero, but of zero importance.

Conflict-induced-apathy can be manipulated for political ends. We see this in the way neo-communists set out their stall. They don’t challenge the data about the number of 20th Century deaths their ideology is linked to. Rather, they claim that there are conflicting data and that anyone claiming one data set is definitive has a vested interest in saying that—ergo, no data are reliable. And so they manage to airbrush 30–70 million deaths from history.

Part of what makes the data on communist genocides hard to pin down is that the state records were often erased by communist regimes. Take the largest genocide in the history of mankind—the Great Chinese Famine (1958–62). To date, no official recognition of this genocide has been made by China’s communist government. For 40 years this historical episode has been hidden and denied. There are 100 monuments to the Irish Famine, but to this day the only memorial to the Great Chinese Famine is one made by hand out of bricks and tiles, located in the middle of a Chinese farmer’s privately-owned field.

mk-B7.jpgUntil the data on the deaths in communist China are definitively agreed, until they enter the history books, conflicting data will keep on being used to conceal the magnitude of Mao’s crimes. We also see this happening with the Ukranian genocide known as Holodomor (1932–33). Different political groups argue about whether the deaths were three million or 10, which then gives space to other groups online who want to deny it ever occurred.

If you want to make data vanish these days, don’t try to hide them, just come up with four other bits of data that differ greatly and start a data-fight. This is historical amnesia through information overload.

When we lose not just the data, but the record of who did and said what in history beneath the noise of contrary claims, then we are in trouble. We can even see this in the accusation made against Milan Kundera in the last 10 years—that he was a communist informant, that he was a double agent, that his entire literary canon was the result of a guilty conscience for having betrayed a fellow Czech to the communists.

The confusion and profusion of narratives around Kundera lead us to simply drop the author completely, due to conflict-induced apathy. It has already eroded his reputation. We will never know if what he said in his own defense is true, the argument-from-apathy goes, so we shouldn’t trust anything he’s ever said or written, even his indictments against communism—even his theories about historical amnesia as a communist propaganda tool. All of this might as well be forgotten.

To get rid of an enemy now, you don’t have to prove anything against them. Instead, you use the internet to generate conflicting accusations and contradictory data. You use confusion to elevate hatred and fear until that enemy is either banned from the net, their history re-written or erased from the minds of millions through conflict-induced apathy.

If the struggle of man is the struggle of memory against forgetting, as Kundera said, then we have in the cacophony of the internet a vast machine for forgetting. One that is building a new society upon the shallow, shifting sands of Historical Amnesia.


Ewan Morrison’s new novel NINA X is published by Fleet on April 4 2019. NINA X concerns a woman who escapes from the cult she was born and raised within and who now has to survive in our world. Follow him on Twitter @MrEwanMorrison

lundi, 01 avril 2019

Julius Evola pour tous (les hommes différenciés)

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Julius Evola pour tous (les hommes différenciés)

par Thierry DUROLLE

L’un des plus célèbres penseurs de la Droite radicale européenne fait toujours parler de lui, quarante-quatre ans après sa disparition. Ce penseur est Julius Evola. Nous préférons le qualifier de penseur plutôt que d’intellectuel, terme originellement péjoratif et qui d’ailleurs ferait bien de recouvrir sa définition initiale. Gianfranco de Turris, président de la Fondation Evola en Italie et auteur d’un magistral Elogio e difesa di Julius Evola, nous rappelle qu’Evola fut « peintre et philosophe, poète et hermétiste, morphologue de l’histoire et politologue, critique des mœurs et sexologue, orientaliste et mythologue, spécialiste des religions et de la Tradition. Mais ce fut aussi un alpiniste chevronné,il fut journaliste, conférencier et universitaire (p. 6) ».

Julius Evola est-il toujours actuel ? N’a-t-il pas été relégué dans la poubelle de l’Histoire par les forces de la subversion ? Et, est-ce que ses idées demeurent pertinentes encore aujourd’hui ? « Au début de l’année 2018, le 12 février, le principal quotidien italien de gauche, La Repubblica, publia en première page un article au titre exceptionnel et extravagant : “ Evola et le fascisme inspirent Bannon, le cerveau de Trump. ” […] Le philosophe et politologue russe Alexandre Douguine admit dans plusieurs interviews que sa pensée avait été profondément influencée par celle de Julius Evola […]. Or, le fait est que Douguine est assez proche du président russe, et fut même présenté comme son “ conseiller ” (p. 8). »

Deux exemples plutôt maladroits pour tenter de justifier de l’actualité de la pensée du Baron. Deux éminences grises déchues, l’un publiciste, l’autre « Raspoutine de sous-préfecture », pour reprendre l’amusante expression d’un traducteur à l’ego hypertrophié. Deux agents de l’anti-Europe, l’un national-libérale (sioniste ?) et l’autre néo-eurasiste pan-russe, deux formes de soumission politiques et spirituelles. Bref, rien d’évolien là-dedans. À noter qu’un certain Jason Horowitz s’émut, dès février 2017, de la possible influence d’Evola sur Bannon dans un article intitulé « Steven Bannon cited Italian thinker who inspired fascists ». La pensée de Julius Evola représente toujours un danger pour l’ennemi.

Il est évident que l’œuvre de Julius Evola reste d’actualité, puisqu’elle met en exergue notre européanité d’une part (sur les plans mythologiques, culturels, spirituels, et politiques) et la Tradition d’autre part. « Ses » idées sont d’actualité aussi car il fut un temps où elles furent la norme, l’évidence même. Ceux qui connaissent bien les différents écrits d’Evola peuvent témoigner de la présence constante de la Tradition comme principe ordonnateur et, en ce sens, cosmique. La pensée de Julius Evola est authentiquement de Droite, d’une Droite métaphysique, éternelle, verticale, ordonnée du haut vers le bas. La cohérence entre le verbe et l’action chez Evola suscite le respect et l’admiration : rares sont ceux qui unirent les deux à un tel niveau.

Pénétrer la pensée protéiforme du penseur italien n’est pas forcément chose aisée. Cela peut demander une certaine persévérance mais aussi une entrée adéquate. Par où commencer ? En ce qui nous concerne, nous avons toujours conseillé, dans la mesure du possible, de lire en premier Révolte contre le monde moderne pour avoir, au minimum, le « décor » de la pensée évolienne. Puis Orientations et Les hommes au milieu des ruines nous semblaient être deux ouvrages politiques fondamentaux à lire à la suite du maître-ouvrage mentionné. Mais il s’agit là d’une première approche au caractère politique. Elle ne permet pas d’avoir une vue d’ensemble des thèmes évoliens.

C’est là que toute la pertinence du Petit livre noir s’offre aux néophytes. Et nous ne pouvons que nous réjouir de la réédition augmenté de ce vade mecum grâce à la toute jeune maison d’édition helvète Lohengrin ! Clin d’œil anti-marxiste-maoïste au malheureusement célèbre Petit livre rouge, ce recueil de citations représente probablement l’une des meilleures façons d’aborder l’œuvre d’Evola dans son intégralité. Les extraits – qui furent soumis en leur temps à l’auteur – sont classés dans onze catégories distinctes et sont issus de quasiment tous les ouvrages d’Evola, dont certains toujours en attente d’une traduction française (!) en plus d’articles et de divers entretiens.

La préface de Gianfranco de Turris se veut aussi synthétique que le contenu de l’ouvrage. Turris fait une présentation de l’homme et ses idées qui, ici aussi, sera idéale pour les nouveaux venus. Enfin, la couverture bien que de noire vêtue, arbore dorénavant un magnifique portrait de Julius Evola signé Jacques Terpant, illustrateur et peintre de grand talent. En quatrième de couverture cette citation d’Evola fait figure de programme : « Seule un retour à l’esprit traditionnel dans une nouvelle conscience unitaire européenne pourra sauver l’Occident. » Gageons que la lecture du Petit livre noir éveille une nouvelle génération d’Européens à un tel impératif.

Thierry Durolle

• Julius Evola, Le petit livre noir, édition augmentée, Éditions Lohengrin, 2019, 175 p., 18 €.

dimanche, 31 mars 2019

Reflecting on the Interwar Right

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Reflecting on the Interwar Right

Please note this rightist opposition to war must be distinguished from the objections of Communist sympathizers or generic leftists to certain wars for ideological reasons. For example, George McGovern, who was a longtime Soviet apologist, protested the Vietnam War, while defending his own role in dropping bombs on helpless civilians in World War Two. For McGovern the “good war” was the one in which the US found itself on the same side as the Soviets and world Communism. Clearly McGovern did not object to American military engagements for rightist reasons.

My own list of interwar American Rightists would include predominantly men of letters, e.g., Wallace Stevens, H.L. Mencken, George Santayana (who was Stevens’s teacher at Harvard and longtime correspondent), Robert Lee Frost, the Southern Agrarians, and pro-fascist literati Ezra Pound and Lovecraft, (if accept these figures as part of a specifically American Right). Although Isabel Patterson and John T. Flynn may have regarded themselves as more libertarian than rightist, both these authors provide characteristically American rightist criticism of the progress of the democratic idea. The same is true of the novelist and founder of the libertarian movement Rose Wilder Lane, whose sympathetic portrayal of an older America in “House on the Prairie” has earned the disapproval of our present ruling class. Many of our rightist authors considered themselves to be literary modernists, e.g., Stevens, Pound and Jeffers. But as has been frequently observed, modernist writers were often political reactionaries, who combined literary innovations with decidedly rightist opinions about politics. Significantly, not only Mencken but also Stevens admired Nietzsche, although in Stevens’s case this admiration was motivated by aesthetic affinity rather than discernible political agreement.

This occasions the inevitable question why so many generation defining writers, particularly poets, in the interwar years took political and cultural positions that were diametrically opposed to those of our current literary and cultural elites. Allow me to provide one obvious answer that would cause me to be dismissed from an academic post if I were still unlucky enough to hold one. Some of the names I’ve been listing belonged to scions of long settled WASP families, e.g., Frost, Stevens, Jeffers, and, at least on one side, Santayana, and these figures cherished memories of an older American society that they considered in crisis.  Jeffers was the son of a Presbyterian minister from Pittsburgh, who was a well-known classical scholar. By the time he was twelve this future poet and precocious linguist knew German and French as well as English and later followed the example of his minister father by studying classics, in Europe as well as in the US.

Other figures of the literary Right despised egalitarianism, which was a defining attitude of the self-identified Nietzschean Mencken. The Sage of Baltimore typified what the Italian Marxist Domenico Losurdo describes as “aristocratic individualism” and which Losurdo and Mencken identified with the German philosopher Nietzsche. This anti-egalitarian individualism was easily detected in such figures as Mencken, Pound and the Jeffersonian libertarian, Albert J. Nock.

états-unis,droite américaine,conservatisme,conservatisme américain,littérature,lettres,lettres américaines,littérature américaine,histoire,paul gottfried,philosophie,nietzschéismeIt may be Nock’s “Memoirs of a Superfluous Man” (1943) with its laments against modern leveling tendencies, and Nock’s earlier work “Our Enemy, The State” (1935) which incorporated most persuasively for me this concept of aristocratic individualism. Nock opposed the modern state not principally because he disapproved of its economic policies (although he may not have liked them as well) but because he viewed it as an instrument of destroying valid human distinctions. His revisionist work Myth of a Guilty Nation, which I’m about to reread, has not lost its power since Nock’s attack on World War One Allied propaganda was first published in 1922. Even more than Mencken, whose antiwar fervor in 1914 may have reflected his strongly pro-German bias, Nock opposed American involvement in World War One for the proper moral reasons, namely that the Western world was devouring itself in a totally needless conflagration. Curiously the self-described Burkean Russell Kirk depicts his discovery of Nock’s Memoirs of a Superfluous Man on an isolated army base in Utah during World War Two as a spiritual awakening. Robert Nisbet recounts the same experience in the same way in very similar circumstances. 

Generational influence:

These interwar rightists of various stripes took advantage of a rich academic-educational as well as literary milieu that was still dominated by a WASP patrician class before its descendants sank into Jed Bushism or even worse. These men and women of letters were still living in a society featuring classes, gender roles, predominantly family owned factories, small town manners, and bourgeois decencies. Even those who like Jeffers, Nock and Mencken viewed themselves as iconoclasts, today may seem, even to our fake conservatives, to be thorough reactionary. The world has changed many times in many ways since these iconoclasts walked the Earth. I still recall attending a seminar of literary scholars as a graduate student in Yale in 1965, ten years after the death of Wallace Stevens, and being informed that although Stevens was a distinguished poet, it was rumored that he was a Republican. Someone else then chimed in that Stevens was supposed to have opposed the New Deal, something that caused consternation among those who were attending. At the times I had reservations about the same political development but kept my views to myself. One could only imagine what the acceptance price for a writer in a comparable academic circle at Yale would be at the present hour. Perhaps the advocacy of state-required transgendered restrooms spaced twenty feet apart from each other or some even more bizarre display of Political Correctness.  I shudder to think.

But arguably the signs of what was to come were already present back in the mid-1960s. What was even then fading was the academic society that still existed when Stevens attended Harvard, Frost Dartmouth, though only for a semester, or Nock the still recognizably traditional Episcopal Barth College. Our elite universities were not likely to produce even in the 1960s Pleiades of right-wing iconoclasts, as they had in the interwar years and even before the First World War.  And not incidentally the form of American conservatism that came out of Yale in the post-war years quickly degenerated into something far less appealing than what it replaced. It became a movement in which members were taught to march in lockstep while advocating far-flung American military entanglements. The step had already been taken that led from the interwar Right to what today is conservatism, inc. Somehow the interwar tradition looks better and better with the passage of time.

jeudi, 28 mars 2019

Michael Snyder et la dystopie californienne

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Michael Snyder et la dystopie californienne

Par Nicolas Bonnal

Ex: https://leblogalupus.com

Les films de dystopie (Blade runner, Rollerball, Soleil vert) nous promettaient un futur abominable et surréaliste, et en vérité nous avons un futur nul qui confirme l’observation de Léon Bloy faite en 1906, à savoir que nous sommes déjà morts. On est dans un monde bête, laid, matérialiste, certes surpeuplé, mais qui ne va pas trop mal, qui fonctionne globalement. Ce n’est pas grave, on continue dans les fictions de nous promettre un futur abominable au lieu de nous montrer notre présent cher et dégoûtant… Il semble que ce pessimisme extra soit de mise dans nos sociétés pour établir la dictature ou cet imprécis ordre mondial dont rêve une partie des élites humanitaires. On nous promet le pire pour nous donner des ordres. Mais c’est un autre sujet… je maintiens que le seul film de dystopie réaliste reste Alphaville puisqu’il montrait notre décor, notre apparence de réalité, mais truffé de contrôle mental et cybernétique. C’est bien là que nous sommes, et pas dans les espaces infinis.

ms-bend.jpgJe lis Michael Snyder et son blog apocalyptique depuis des années et je fais donc attention chaque fois qu’à la télévision on montre des images de la vie quotidienne en Amérique. Or de petits films sur mes espagnols à travers le monde démontrent qu’effectivement les conditions de vie aux USA sont devenues sinistres et hors de prix, sans qu’on puisse évoquer la poétique de Blade runner…Plusieurs amis fortunés qui font aussi des allers et retours et m’ont confirmé que le vieil oncle Sam coûte bien cher, comme Paris, Londres et des milliers d’endroits (même se loger en Bolivie devient un exploit, vive Morales-Bolivar-Chavez…), pour ce qu’il offre ; d’autres amis moins fortunés, universitaires, survivent durement. Car il y a en plus les persécutions politiques qui gagent nos si bienveillantes démocraties…

On écoute les dernières révélations de Snyder sur la Californie :

« 53% des californiens veulent partir… Cela montre simplement ce qui peut arriver lorsque vous laissez des fous diriger un État pendant plusieurs décennies. Dans les années 1960 et 1970, la possibilité de s’établir sur la côte ouest était «le rêve californien» de millions de jeunes Américains, mais à présent, «le rêve californien» s’est transformé en «cauchemar californien».

Snyder ajoute ce que nous savons par le cinéma (qui ment toujours moins que les news) :

« Les villes sont massivement surpeuplées, la Californie connaît le pire trafic du monde occidental, la consommation de drogue et l’immigration clandestine alimentent un nombre incroyable de crimes, les taux d’imposition sont abominables et de nombreux politiciens de l’état semblent être littéralement fous. Et en plus de tout cela, n’oublions pas les tremblements de terre, les incendies de forêt et les glissements de terrain qui font constamment les gros titres dans le monde entier. L’année dernière a été la pire année pour les feux de forêt dans l’histoire de la Californie , et ces jours-ci, il semble que l’État soit frappé par une nouvelle crise toutes les quelques semaines. »

calg.jpgEn vérité les gens supporteraient tout (« l’homme s’habitue à tout », dixit Dostoïevski dans la maison des morts), mais le problème est que cette m… au quotidien est hors de prix ! Donc…

« Un nombre croissant de Californiens envisagent de quitter l’État – non pas à cause d’incendies de forêt ou de tremblements de terre, mais à cause du coût de la vie extrêmement élevé, selon un sondage publié mercredi. Le sondage en ligne, mené le mois dernier par Edelman Intelligence, a révélé que 53% des Californiens interrogés envisagent de fuir, ce qui représente un bond par rapport aux 49% interrogés l’année dernière. L’enquête a révélé que le désir de quitter le pays le plus peuplé du pays était le plus élevé. »

On évoque les règlementations de cet état exemplaire pour tous les progressistes et sociétaux de la foutue planète :

« Grâce à des restrictions de construction absolument ridicules, il est devenu de plus en plus difficile de construire de nouveaux logements dans l’État. Mais entre-temps, des gens du monde entier continuent à s’y installer car ils sont attirés par ce qu’ils voient à la télévision. »

Notre grand pessimiste documenté précise :

« En conséquence, l’offre de logements n’a pas suivi la demande et les prix ont explosé ces dernières années. Les chiffres suivants proviennent de CNBC …

À l’échelle de l’État, la valeur médiane des maisons en Californie s’élevait à 547 400 $ à la fin de 2018, tandis que la valeur médiane des maisons aux États – Unis était de 223 900 $ . À titre de comparaison, la valeur médiane des maisons dans l’État de New York s’établissait à 289 000 dollars et à 681 500 dollars à New York; New Jersey était 324 700 $. Oui, il y a beaucoup d’emplois bien rémunérés en Californie, mais vous feriez mieux d’avoir un très bon travail pour pouvoir payer les paiements hypothécaires d’une maison valant un demi-million de dollars. »

Du coup il faut vivre avec des colocataires, même en couple !

« Bien sûr, de nombreux Californiens se retrouvent dans une situation financière extrêmement pénible en raison de coûts de logement incontrôlables. Ils sont donc plus nombreux que jamais à emménager avec des colocataires. En fait, un rapport récent a révélé que le nombre de couples mariés vivant avec des colocataires «a doublé depuis 1995» … Le nombre de couples mariés vivant avec des colocataires a doublé depuis 1995, selon un rapport récent du site immobilier Trulia. Environ 280 000 personnes mariées vivent maintenant avec un colocataire – et cela est particulièrement vrai dans les villes coûteuses comme celles de la côte ouest. »

La Californie n’est pas seule dans ce cas :

« À Honolulu et à Orange Country, en Californie, la part des couples mariés avec des colocataires est quatre à cinq fois supérieure au taux national. San Francisco, Los Angeles, San Diego et Seattle ont également des taux très élevés de couples mariés avec colocataires. Ces mêmes villes ont des coûts de location et de logements très supérieurs à la moyenne (Trulia note que les coûts de logement dans tous ces marchés ont augmenté de plus de 30% depuis 2009), les habitants de San Francisco, extrêmement coûteux, ont besoin de plus de 123 000 dollars de revenus pour vivre confortablement… »

Puisqu’on parle d’Honolulu, je ne saurais trop recommander, sur la dystopie hawaïenne, le film d’Alexander Payne avec Clooney, film nommé justement les Descendants, qui traite du néant dans la vie postmoderne. Honolulu, un Chicago au prix de Monaco. Dire qu’il y en a encore pour critiquer Rousseau…

calcrazy.pngLes impôts pleuvent comme en France :

« En plus des coûts de logement, de nombreux Californiens sont grandement frustrés par les niveaux de taxation oppressifs dans l’État. À ce stade, l’État a le taux d’imposition marginal le plus élevé de tout le pays … Avec 12,3%, la Californie est en tête des 50 États en 2018 avec le taux d’imposition marginal le plus élevé, selon la Federation of Tax Administrators ; et cela n’inclut pas une surtaxe supplémentaire de 1% pour les Californiens ayant des revenus de 1 million de dollars ou plus. »

Evidemment on a d’autres privilèges culturels…Snyder :

« Hier, j’ai écrit un article intitulé «Les rats, la défécation publique et la consommation de drogue à ciel ouvert: nos grandes villes occidentales sont en train de devenir des enfers inhabitables» , et cela a déclenché une tempête de feu. Plus de 1 000 commentaires ont déjà été publiés sur cet article, et quelques personnes enthousiastes ont tenté de convaincre le reste d’entre nous que la vie sur la côte ouest n’est pas si mauvaise. Je suis désolé, mais si votre ville compte beaucoup plus de toxicomanes par voie intraveineuse que d’élèves du secondaire, ce n’est pas un endroit où je voudrais fonder une famille … »

La conclusion pas très gaie :

« Au total, environ 5 millions de personnes ont fait leurs valises et ont quitté définitivement la Californie au cours des 10 dernières années. Malheureusement, la nation tout entière est en train de devenir comme la Californie et si nous ne renversons pas les choses, il n’y aura plus de place où aller. »

C’est TS Eliot, cité dans Apocalypse now, qui dans ses Hommes creuxévoque ce monde qui ne finira pas dans une déflagration, mais dans un pleurnichement (not in a bang but a whimper). Nous y sommes et cette agonie interminable peut encore bien durer cent ans…

Note

J’ajouterai cet extrait de Ron Unz sur la Californie :

« Le style de vie californien, riche et extrêmement agréable, de l’après-guerre, était largement reconnu aux États-Unis, et ce leurre magnétique fut à l’origine des premières étapes de la croissance démographique très rapide de l’État. Mais plus récemment, les effets néfastes de la congestion routière, des options de logement épouvantables et de la concurrence acharnée sur le marché de l’emploi ont considérablement réduit l’attrait de l’État. La croissance a fortement diminué , en partie parce que l’afflux continu d’immigrants a été partiellement compensé par un départsimultané de résidents existants. »

https://nicolasbonnal.wordpress.com/2019/02/18/michael-sn...

 

Dostoïevski et l’invention du droit à tuer

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Dostoïevski et l’invention du droit à tuer 

Les Carnets de Nicolas Bonnal

Les hommes politiques américains postmodernes (mais nos socialistes aussi) ont pris goût à la brutalité et aux guerres via la farce humanitaire (voyez Carnage de Polanski pour vous amuser à ce sujet) ; et ils estiment qu’ils ont le droit de tuer qui ils veulent et quand ils veulent. Jusqu’au moment où les russes et les chinois…Il en est de même des terroristes qui servent des agendas si compliqués maintenant qu’il est difficile de dire pour qui ils œuvrent : mais qui ont gardé le goût de la même supériorité ontologique jadis décrite par Dostoïevski et reprise par Hitchcock dans la Corde, pour justifier leurs massacres. J’ai étudié dans mon livre sur Hitchcock les sources du scénario, qui n’ont rien à voir ni avec le communisme ni avec le fascisme – bien plutôt avec deux lobbies prestigieux.

fd-frka2222.jpgOn reprend donc Raskolnikoff dans ces pages immortelles :

« Les hommes ordinaires ont l’obligation d’observer les lois et n’ont pas le droit de sortir de la légalité et cela parce qu’ils sont ordinaires. Quant aux hommes extraordinaires, ils ont le droit de commettre toutes sortes de crimes et de sortir de la légalité, uniquement parce qu’ils sont extraordinaires. C’est bien ainsi. »

Raskolnikoff poursuit :

« J’ai simplement fait allusion au fait que l’homme extraordinaire a le droit... je veux dire, pas le droit officiel, mais qu’il a le droit de permettre à sa conscience de sauter... certains obstacles et ceci seulement si l’exécution de son idée (qui est peut-être salutaire à toute l’humanité) l’exige. Vous avez dit que mon article n’était pas clair : si vous le voulez, je puis vous l’expliquer dans la mesure du possible. Je ne fais peut-être pas erreur en supposant que c’est bien cela que vous désirez. Voici : à mon avis, si les découvertes de Kepler et de Newton, par suite de certains événements, n’avaient pu être connues de l’humanité que par le sacrifice d’une, de dix, de cent... vies humaines qui auraient empêché cette découverte ou s’y seraient opposées, Newton aurait eu le droit et même le devoir... d’écarter ces dix ou ces cent hommes pour faire connaître ses découvertes à l’humanité. »

Mais ce qui rend Raskolnikoff dangereux, c’est qu’il voyage à travers les siècles et qu’il compare ses pulsions personnelles et criminelles à toutes les cruautés historiques connues :

« Ensuite, je me souviens que j’ai développé, dans mon article, l’idée que tous les... eh bien, les législateurs et les ordonnateurs de l’humanité, par exemple, en commençant par les plus anciens et en continuant avec les Lycurgue, les Solon, les Mahomet, les Napoléon, etc., tous, sans exception, étaient des criminels déjà par le seul fait qu’en donnant une loi nouvelle, ils transgressaient la loi ancienne, venant des ancêtres et considérée comme sacrée par la société. Et, évidemment, ils ne s’arrêtaient pas devant le meurtre si le sang versé (parfois innocent et vaillamment répandu pour l’ancienne loi) pouvait les aider. »

Une grandiose observation :

« Il est remarquable même que la plupart de ces bienfaiteurs et ordonnateurs de l’humanité étaient couverts de sang. »

Le criminel est un génie (n’invente-t-il pas aussi sa réalité, comme disait un certain Karl Rove trop oublié à propos de leur « empire » ?) :

fd-crch.jpg« En un mot, je démontre que non seulement les grands hommes, mais tous ceux qui sortent tant soit peu de l’ornière, tous ceux qui sont capables de dire quelque chose de nouveau, même pas grand-chose, doivent, de par leur nature, être nécessairement plus ou moins des criminels. »

Evidemment comme dans la Corde la difficulté est de savoir qui est inférieur et qui est supérieur (en vérité comme on sait celui qui est supérieur c’est celui qui tue et qu’on n’attrape jamais – et les élites US n’ont toujours pas de souci à se faire de ce côté-là) :

« Quant à ma distinction entre les hommes ordinaires et les hommes extraordinaires, elle est quelque peu arbitraire, je suis d’accord ; mais je ne prétends pas donner des chiffres exacts. Je suis seulement persuadé de l’exactitude de mes assertions. Celles-ci consistent en ceci : les hommes, suivant une loi de la nature, se divisent, en général, en deux catégories : la catégorie inférieure (les ordinaires) pour ainsi dire, la masse qui sert uniquement à engendrer des êtres identiques à eux-mêmes et l’autre catégorie, celle, en somme, des vrais hommes, c’est-à- dire de ceux qui ont le don ou le talent de dire, dans leur milieu, une parole nouvelle. » 

Après Dostoïevski enfonce le clou avec insistance – et on comprend pourquoi les gilets jaunes ou les iraniens ont du mouron à se faire :

« …la première catégorie, c’est-à-dire la masse en général, est constituée par des gens de nature conservatrice, posée, qui vivent dans la soumission et qui aiment à être soumis. A mon avis, ils ont le devoir d’être soumis parce que c’est leur mission et il n’y a rien là d’avilissant pour eux. Dans la seconde catégorie, tous sortent de la légalité, ce sont des destructeurs, ou du moins ils sont enclins à détruire, suivant leurs capacités… »

Il faut soumettre le troupeau et nous mener vers un but, celui de la surclasse, et que Dostoïevski le visionnaire appelle déjà la nouvelle Jérusalem ! Le maître :

« …le troupeau ne leur reconnaît presque jamais ce droit, il les supplicie et les pend et, de ce fait, il remplit sa mission conservatrice, comme il est juste, avec cette réserve que les générations suivantes de ce même troupeau placent les suppliciés sur des piédestaux et leur rendent hommage (plus ou moins). Le premier groupe est maître du présent, le deuxième est maître de l’avenir. Les premiers perpétuent le monde et l’augmentent numériquement ; les seconds le font mouvoir vers un but. Les uns et les autres ont un droit absolument égal à l’existence. En un mot, pour moi, tous ont les mêmes droits et vive la guerre éternelle, jusqu’à la Nouvelle Jérusalem, comme il se doit ! »

Cette « guerre éternelle pour une paix éternelle », expression de Charles Beard, mélange de messianisme assassin et de complexe de supériorité de superhéros est une clé pour comprendre le comportement actuel de ces élites tortueuses. Il n’est pas une ligne de notre désastreux destin moderne (médiocrité du quotidien gris y compris) qui n’ait été écrite par l’impeccable voyant Dostoïevski. Voyez d’ailleurs les dernières pages de crime et châtiment (l’épilogue I) qui décrivent la première guerre mondiale.

Sources

Dostoïevski - Crime et châtiment, livre III, chapitre 5

Nicolas Bonnal – Hitchcock et la condition féminine (Amazon.fr)

lundi, 25 mars 2019

Le syndrome de Gulliver – Dans les marges de L’effondrement des puissances de Leopold Kohr

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Le syndrome de Gulliver – Dans les marges de L’effondrement des puissances de Leopold Kohr

Le syndrome de Gulliver

 (« Sky is the limit », Emmanuel Macron)

  • Le devenir-monde est un phénomène inflationniste qui porte en lui les germes de sa destruction. Si du jour au lendemain la critique exigeante changeait d’échelle, si elle bénéficiait de la même couverture médiatique que la nullité quotidiennement servie sur les différents supports de l’abêtissement national, elle s’effondrerait aussitôt. Il y a là une contradiction fondamentale qui n’est jamais pensée car nous oublions de considérer sérieusement les effets de la taille. Les conséquences de l’oubli de la taille, c’est la thèse de Leopold Kohr dans L’effondrement des puissances.  La critique se doit de travailler petit. Echappant aux phénomènes d’accroissement, elle se déplace à une échelle d’invisibilité qui la rend inaccessible aux géants broyeurs d’intelligence. Si elle rencontre un lecteur, sous les radars, cette rencontre sera fatale. C’est bien cette fatalité déflationniste qui hante aujourd’hui le pouvoir, la démultiplication incontrôlable d’une contestation qui se miniaturise pour finir par fragiliser un édifice imprenable par tout moyen d’accumulation quantitative.

 

  • lk-effpui.gifUne chaîne d’information en continu, afin de tenir l’antenne pendant des heures, doit créer de nouvelles formes de discours, inventer des méthodes de remplissage contraires à toute logique proportionnelle, pour reprendre le concept essentiel de Leopold Kohr. Nous appelons encore aujourd’hui information ou journalisme des discours et des pratiques récemment apparus à partir d’un certain seuil critique. Au-delà de ce seuil s’opère une réversion. L’information de masse, diffusée en continu, en direct, ce babille incontinent de discours incapables de faire retour sur eux-mêmes, de s’entendre, se transforme en désinformation de masse. Le journalisme, sommé de capter tous les bruits du monde, de faire droit aux moindres insignifiances, de tout accueillir pour ne rien rater, de se brancher sur tous les flux, s’effondre sous les données qu’il amasse aléatoirement. Toujours grossir, tel est l’adage de la modernité tardive. Augmenter sa taille, accroître sa diffusion, saturer les écrans, envahir les étals. Jusqu’au collapse. A une certaine échelle de taille, plus rien n’est possible. Il en va de même pour le discours critique qui a besoin, pour se déployer, d’être protégé de l’inflation, de se tenir en-deçà de toute masse critique, de créer son propre écosystème.

 

  • Le discours du pouvoir que l’on entend partout, dont la production se confond avec la prolifération de matraquages publicitaires, y compris pour faire accepter une réforme scolaire, sombre fatalement dans l’insignifiance. Il devient inaudible. Pour se maintenir, il doit dès lors nourrir un métabolisme promotionnel qui n’a plus de comptes à rendre à ses détracteurs. C’est alors qu’il bascule dans tous les abus. Ne pouvant plus être entendu, il transforme cette incapacité en une logique d’écrasement quantitative. Il fait de la masse le critère indiscutable de son impunité. En gagnant le nombre, il perd la raison et justifie l’annihilation de ses détracteurs sur la seule manipulation des chiffres. « Cela arrive, explique Leopold Kohr dans L’effondrement des puissances, à chaque fois que ce pouvoir persuade son possesseur qu’il ne peut être remis en cause par aucune des autres accumulations de pouvoir plus grandes que celle qu’il possède lui-même. »

 

  • A partir d’un certain seuil d’accumulation du capital, économique, culturel, symbolique, les individus estiment qu’ils n’ont plus de compte à rendre à ceux, les plus petits qu’eux, qui ne pourront jamais les menacer réellement. Ils deviennent des brutes et cela quelle que soit leur culture, leur niveau d’éducation. L’information de masse accompagne logiquement cette effrayante dérive, y compris quand elle se fantasme réinformation de masse, car elle est ce pouvoir d’écraser quantitativement toutes les pensées insaisissables sur ce seul critère, de les nier sans autre procès que le poids relatif des uns et des autres. Plus besoin de réfuter, il suffit de saturer le temps d’antenne, de répéter mille fois les mêmes formules, de faire tourner en boucle les mêmes images, de dresser les hommes à la répétition.

 

  • lk-break.jpgLeopold Kohr cite Jonathan Swift : « on observe que plus les créatures humaines sont corpulentes, plus elles sont sauvages et cruelles en proportion. » Cette corpulence doit être comprise comme la métaphore d’une disproportion qui s’accroit avec l’accumulation tératologique des capitaux des uns, de la misère économique, culturelle et symbolique des autres. Cette tendance s’accompagne d’un retrait progressif de la contestation. En face d’une force sans partage, dont on sait qu’elle nous écrasera plutôt que de se limiter en reconnaissant sa limite, « la force du désaccord humain, de l’esprit critique, montre une tendance proportionnelle à décroitre tout aussi naturellement » remarque Leopold Kohr. Il attribue cette tendance, cette sensibilité décroissante, à une sorte d’instinct, à l’intérêt pour notre propre survie. Cet intérêt s’accompagne « d’un engourdissement moral adapté aux situations ». Paradoxalement, au-lieu de se révolter contre l’accumulation d’injustices, impuissant à agir face à un géant qui le piétine, « l’être humain ordinaire, ajoute Leopold Kohr, est plutôt enclin à perdre le peu de conscience qui lui restait quand les victimes n’étaient pas encore trop nombreuses. » Cette structure défensive transforme l’être humain ordinaire en un simple spectateur de ce qui lui arrive. Il contemple la démesure, sidéré, préférant renoncer à l’esprit critique plutôt que d’éprouver dans sa chair la réalité de son impuissance.

 

  • Il en va d’une véritable rééducation. Décroître, accepter le caractère limité d’une critique, formulée dans une langue et un style singulier. Accepter de renoncer à un plus grand pouvoir de diffusion, ne pas outrepasser un seuil irréversible à partir duquel la qualité s’effondre fatalement devant la quantité. Personne n’est à l’abri de cette tentation, celle d’être plus, d’accumuler plus de pouvoir, plus de visibilité, y compris fantasmatique, d’augmenter son poids. « Ton discours ne pèse pas assez », ainsi parle le malade de la quantité, ce fou qui croit rivaliser sur le terrain de la masse et sur les rives de Brobdingnag avec les géants de Swift.

La petitesse des talents invisibles contre le gigantisme écrasant des sans-idées.

….

Léopold Kohr, L’effondrement des puissances, R§N Editions, 2018 ( 1957, 1er édition).

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Sur l'effondrement qui vient...

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Sur l'effondrement qui vient...
par Eric Werner
Ex: http://metapoinfos.hautetfort.com

Nous reproduisons ci-dessous un point de vue d'Eric Werner, cueilli sur le site d'Antipresse et consacré à la crise climatique et à l'effondrement sur lequel elle doit déboucher.

Penseur subtil et profond, Eric Werner est l'auteur de plusieurs essais marquants comme L'avant-guerre civile (L'Age d'Homme, 1998 puis Xénia, 2015) L'après-démocratie (L'Age d'Homme, 2001), Douze voyants (Xénia, 2010), De l'extermination (Xénia, 2013) ou Le temps d'Antigone (Xénia, 2015) et de recueils de courtes chroniques comme Ne vous approchez pas des fenêtres (Xénia, 2008) et Le début de la fin et autres causeries crépusculaires (Xénia, 2012). Il vient de publier dernièrement Un air de guerre (Xénia, 2017).

Sur l'effondrement qui vient

La crise climatique inquiète, et à juste titre. Car elle est bien réelle. On ne peut plus aujourd’hui dire, comme l’ont longtemps fait (et continuent d’ailleurs encore à le faire) certains (ceux qu’on appelle les «climatosceptiques»), qu’elle n’existe pas. Oui bien sûr qu’elle existe. En sous-estimer la gravité est même d’une particulière stupidité.

D’un autre côté aussi, chacun voit bien que la crise climatique n’est pas catastrophique pour tout le monde. Il en est de la crise climatique comme d’autres menaces aujourd’hui considérées comme existentielles: le terrorisme, par exemple. Le terrorisme est effectivement une menace très grave pour nos sociétés, mais qui ne voit en même temps tout le bénéfice qu’en retirent certains, ne serait-ce qu’au travers de la prétendue lutte contre le terrorisme. Je dis prétendue, car, justement, je ne pense pas qu’ils n’aient jamais songé sérieusement à le combattre. Il leur est d’une bien trop grande utilité. Les deux choses sont vraies: et que le terrorisme est une vraie menace pour nos sociétés, et que cette menace est très largement instrumentée à des fins n’ayant, en règle générale, rien à voir avoir avec la lutte contre le terrorisme (l’instauration de l’État total, entre autres). Logiquement parlant, c’est tout à fait compatible.

Il en va de même (je cite en vrac) de la pédophilie, des violences faites aux femmes, des excès de vitesse sur route, des fake news, etc. Il est à la fois vrai que toutes ces choses très tristes existent, et en même temps, quelque part, que si elles n’existaient pas il faudrait les inventer: tant il est évident que l’indignation vertueuse qu’elles suscitent, indignation dont il ne viendrait, bien sûr, à personne l’idée de suspecter l’absolue et totale sincérité, n’est pas perdue pour tout le monde. Pascal Vandenberghe soulignait dans une récente chronique de l’Antipresse [1] la grande actualité, à notre époque, du Tartuffe de Molière et du réquisitoire contre les faux dévots. Si vous voulez instaurer l’État total, vous ne pouvez évidemment pas vous dispenser de prendre des airs de faux dévot, c’est assez évident.

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Revenons-en à la crise climatique. Les spécialistes s’accordent en règle générale à dire qu’une hausse de plus de 2 degrés de la température moyenne de la planète par rapport à ce qu’elle était à l’ère préindustrielle serait dangereuse pour la civilisation, en ce qu’elle déclencherait des phénomènes qui très vite deviendraient irréversibles: un certain nombre de phénomènes en boucle en particulier (la hausse de température se nourrissant d’elle-même: à travers la fonte des glaces polaires, du permafrost, etc.). À terme, c’est l’existence même de l’homme sur terre qui serait menacée. C’est là la réalité. En même temps tout le monde sait bien que cette limite de 2 degrés ne sera pas respectée. On ira bien au-delà. La perspective de 3 ou 4 degrés est en règle générale considérée comme réaliste, mais certains, plus pessimistes encore, vont jusqu’à dire que le réchauffement climatique pourrait atteindre 5 à 6 degrés, voire 7 à 8 [2]. Une récente étude a même évoqué une augmentation de température de 16 degrés [3] !

On objectera ici les engagements récents pris à conférence de Paris, engagements aux termes desquels les États ont promis de prendre un certain nombre de mesures pour diminuer leurs émissions de CO2. Mais, d’une part, les spécialistes considèrent que ces mesures en elles-mêmes sont insuffisantes (même si elles étaient prises, on n’échapperait pas à une hausse de 2,7 à 3,7 degrés [4], et d’autre part, tout porte à croire que les engagements en question ne seront pas tenus. Ils ne le seront pas, tout simplement parce que personne n’est vraiment décidé à s’engager dans cette direction, autrement dit à sacrifier ses propres intérêts à court terme à ceux de l’humanité à moyen ou long terme, ce qu’exigerait pourtant une telle démarche. Ni les dirigeants, ni leurs assujettis volontaires n’y sont mentalement prêts. Tout, en eux, y renâcle.

Ce qu’en un sens, on peut comprendre. L’être humain est ainsi fait qu’il vit au jour le jour. Qui vivra verra. Il peut, il est vrai, par la raison, se projeter dans le moyen ou long terme. Beaucoup le font. De là à adapter leur comportement à ce que la raison leur dicte de faire, il y a loin. Quelques rares individualités y parviennent, mais elles sont l’exception. La raison est par elle-même incapable d’éduquer à la raison. L’éducation se fait par les circonstances, le plus souvent les épreuves. Et même pas toujours. Elles échouent parfois à le faire. On dit et répète volontiers que pour échapper aux catastrophes qui nous guettent, nous devrions apprendre à «vivre autrement»: par exemple moins ou mieux consommer. Mais qui est réellement prêt à le faire? A aller jusqu’au bout de cette démarche?

Alors même que le gouvernement suisse a promis à la COP 21 de réduire ses émissions de CO2 de 50 % pour 2030, il n’hésite pas à inscrire à son agenda le doublement, à certains endroits, des autoroutes aujourd’hui existantes, car celles-ci ne parviennent plus, paraît-il, à absorber un trafic en constante augmentation. Il convient donc d’en construire de nouvelles. Les promesses, comme toujours, n’engagent que ceux qui y croient.

Tout porte donc à penser que l’humanité continuera sur sa lancée actuelle, celle conforme au paradigme de la croissance indéfinie, produire toujours plus pour consommer toujours plus, et donc que les émissions mortifères de CO2 non seulement ne diminueront pas mais continueront inexorablement à augmenter à l’avenir, peut-être pas au même rythme exactement qu’aujourd’hui, mais suffisamment quand même pour que la limite officiellement considérée comme ne devant pas être dépassée sans risque grave, celle des 2 degrés, soit très largement dépassée, avec toutes les conséquences que cela implique (conséquences qui sont maintenant bien documentées: personne, encore une fois, ne peut nourrir le moindre doute à ce sujet. Le terme d’effondrement se justifie ici pleinement).

Je ne peux évidemment pas prouver ce que je vais dire ici. Mais il me semble que les responsables le savent eux aussi très bien. Ils font simplement semblant de ne pas le savoir. Ils savent très bien qu’au train où vont aujourd’hui les choses, nos sociétés sont promises à une mort prochaine. Mais ils ne peuvent évidemment pas le dire ouvertement. Ni bien sûr non plus admettre leur propre responsabilité en la matière. Ils se donnent donc des airs de faux dévots, ceux leur assurant une certaine légitimité écologique: voyez, nous aurons fait notre possible, si nous échouons, ce ne sera pas faute d’avoir essayé, etc. Ils n’auront naturellement rien fait, mais c’est ce que croiront les gens. Au passage, ils en profiteront pour étendre un peu plus encore les prérogatives de Big Brother. De nouvelles réglementations verront le jour, avec à la clé la création de nouveaux postes administratifs. Et bien sûr de nouveaux impôts. L’écologie comme accélérateur social.

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Pas plus que les lois antiterroristes n’ont réellement pour but de combattre le terrorisme, les lois dites climatiques n’ont réellement pour objet de combattre le réchauffement climatique. Elles sont à elles-mêmes leur propre fin.

Nous poursuivrons notre réflexion dans une prochaine chronique, en nous plaçant cette fois au plan pratique. Que faire ? Comment nous orienter ?

Eric Werner (Antipresse n°172, 17 mars 2019)

NOTES

1 - «Molière, illustre “doctus imitator”», No. 170 du 3.3.2019.

 

2 - Clive Hamilton, Requiem pour l’espèce humaine, Les Presses de Science Po, 2013, p. 217.

 

3 - Cité in Derrick Jensen, Introduction à Écologie en résistance, vol. 1 (recueil collectif), Éditions Libre, 2018, p. 14.

 

4 - Cité in Le Courrier (Genève), 31 octobre 2018, p. 9.

vendredi, 22 mars 2019

Quand Alexandre Zinoviev dénonçait la tyrannie mondialiste et le totalitarisme démocratique

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Quand Alexandre Zinoviev dénonçait la tyrannie mondialiste et le totalitarisme démocratique

Ex: https://echelledejacob.blogspot.com 

 
Les propos « visionnaires » d’Alexandre Zinoviev, tenus en 1999, confirment la mise en place du mondialisme. Dans un monde où il n’y a plus de « garde-fou » tout peut arriver. Ça rejoint l’analyse de Vladimir Boukovski.
 
« Il me semble que dans le système de séparation des pouvoirs, il faudrait ajouter à ses trois composantes traditionnelles, le législatif, l’exécutif et le judiciaire, une quatrième : le pouvoir monétaire.» 
Alexandre Zinoviv - L’occidentisme (1995)

Avant-propos : Passionnante découverte: Alexandre Zinoviev (1922-2006), auteur russe qui décrit dans cet entretien sa vision de la réorganisation du monde devenu unipolaire et post-démocratique. 

Cet entretien a lieu en 1999 ! Vous serez surpris de la pertinence de ses réflexions presque 17 ans plus tard. Il y décrit l’évolution de l’Occident libéral vers une démocratie totalitaire.


Comme la domination planétaire est unipolaire (pas de contre-poids), on peut craindre des dérives totalitaires piégeant les peuples qui ne peuvent plus s’appuyer sur une aide venue de l’extérieur. Le détricotage des acquis sociaux est alors inéluctable. 

Nous pouvons ajouter à ce constat visionnaire et cinglant de Zinoviev, tout l’axe de la technologie, de la robotique et surtout du transhumanisme non abordé dans cet entretien et qui ne manque pas de nous inquiéter dans le cadre de l’ampleur potentielle des dérives attendues. 

Liliane Held-Khawam 

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Dernier entretien en terre d’Occident : juin 1999 

Entretien réalisé par Victor Loupan à Munich, en juin 1999, quelques jours avant le retour définitif d’Alexandre Zinoviev en Russie ; extrait de « La grande rupture », aux éditions l’Âge d’Homme. 

Victor Loupan : Avec quels sentiments rentrez-vous après un exil aussi long ? 

Alexandre Zinoviev : Avec celui d’avoir quitté une puissance respectée, forte, crainte même, et de retrouver un pays vaincu, en ruines. Contrairement à d’autres, je n’aurais jamais quitté l’URSS, si on m’avait laissé le choix. L’émigration a été une vraie punition pour moi. 

V. L. : On vous a pourtant reçu à bras ouverts ! 

A. Z. : C’est vrai. Mais malgré l’accueil triomphal et le succès mondial de mes livres, je me suis toujours senti étranger ici. 

V. L. : Depuis la chute du communisme, c’est le système occidental qui est devenu votre principal objet d’étude et de critique. Pourquoi ? 

A. Z. : Parce que ce que j’avais dit est arrivé : la chute du communisme s’est transformée en chute de la Russie. La Russie et le communisme étaient devenus une seule et même chose. 

V. L. : La lutte contre le communisme aurait donc masqué une volonté d’élimination de la Russie ? 

A. Z. : Absolument. La catastrophe russe a été voulue et programmée ici, en Occident. Je le dis, car j’ai été, à une certaine époque, un initié. J’ai lu des documents, participé à des études qui, sous prétexte de combattre une idéologie, préparaient la mort de la Russie. Et cela m’est devenu insupportable au point où je ne peux plus vivre dans le camp de ceux qui détruisent mon pays et mon peuple. L’Occident n’est pas une chose étrangère pour moi, mais c’est une puissance ennemie. 
 

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V. L. : Seriez-vous devenu un patriote ? 

A. Z. : Le patriotisme, ce n’est pas mon problème. J’ai reçu une éducation internationaliste et je lui reste fidèle. Je ne peux d’ailleurs pas dire si j’aime ou non la Russie et les Russes. Mais j’appartiens à ce peuple età ce pays. J’en fais partie. Les malheurs actuels de mon peuple sont tels, que je ne peux continuer à les contempler de loin. La brutalité de la mondialisation met en évidence des choses inacceptables. 

V. L. : Les dissidents soviétiques parlaient pourtant comme si leur patrie était la démocratie et leur peuple les droits de l’homme. Maintenant que cette manière de voir est dominante en Occident, vous semblez la combattre. N’est-ce pas contradictoire ? 

A. Z. : Pendant la guerre froide, la démocratie était une arme dirigée contre le totalitarisme communiste, mais elle avait l’avantage d’exister. On voit d’ailleurs aujourd’hui que l’époque de la guerre froide a été un point culminant de l’histoire de l’Occident. Un bien être sans pareil, de vraies libertés, un extraordinaire progrès social, d’énormes découvertes scientifiques et techniques, tout y était ! Mais, l’Occident se modifiait aussi presqu’imperceptiblement. L’intégration timide des pays développés, commencée alors, constituait en fait les prémices de la mondialisation de l’économie et de la globalisation du pouvoir auxquels nous assistons aujourd’hui. Une intégration peut être généreuse et positive si elle répond, par exemple, au désir légitime des nations-soeurs de s’unir. Mais celle-ci a, dès le départ, été pensée en termes de structures verticales, dominées par un pouvoir supranational. Sans le succès de la contre-révolution russe, il n’aurait pu se lancer dans la mondialisation. 

V. L. : Le rôle de Gorbatchev n’a donc pas été positif ? 

A. Z. : Je ne pense pas en ces termes-là. Contrairement à l’idée communément admise, le communisme soviétique ne s’est pas effondré pour des raisons internes. Sa chute est la plus grande victoire de l’histoire de l’Occident ! Victoire colossale qui, je le répète, permet l’instauration d’un pouvoir planétaire. Mais la fin du communisme a aussi marqué la fin de la démocratie. 

Notre époque n’est pas que post-communiste, elle est aussi post-démocratique. 

Nous assistons aujourd’hui à l’instauration du totalitarisme démocratique ou, si vous préférez, de la démocratie totalitaire. 

V. L. : N’est-ce pas un peu absurde ? 

A. Z. : Pas du tout. La démocratie sous-entend le pluralisme. Et le pluralisme suppose l’opposition d’au moins deux forces plus ou moins égale ; forces qui se combattent et s’influencent en même temps. Il y avait, à l’époque de la guerre froide, une démocratie mondiale, un pluralisme global au sein duquel coexistaient le système capitaliste, le système communiste et même une structure plus vague mais néanmoins vivante, les non-alignés. Le totalitarisme soviétique était sensible aux critiques venant de l’Occident. L’Occident subissait lui aussi l’influence de l’URSS, par l’intermédiaire notamment de ses propres partis communistes. Aujourd’hui, nous vivons dans un monde dominé par une force unique, par une idéologie unique, par un parti unique mondialiste. La constitution de ce dernier a débuté, elle aussi, à l’époque de la guerre froide, quand des superstructures transnationales ont progressivement commencé à se constituer sous les formes les plus diverses : sociétés commerciales, bancaires, politiques, médiatiques. Malgré leurs différents secteurs d’activités, ces forces étaient unies par leur nature supranationale. Avec la chute du communisme, elles se sont retrouvées aux commandes du monde. Les pays occidentaux sont donc dominateurs, mais aussi dominés, puisqu’ils perdent progressivement leur souveraineté au profit de ce que j’appelle la « suprasociété ». Suprasociété planétaire, constituée d’entreprises commerciales et d’organismes non-commerciaux, dont les zones d’influence dépassent les nations. Les pays occidentaux sont soumis, comme les autres, au contrôle de ces structures supranationales. Or, la souveraineté des nations était, elle aussi, une partie constituante du pluralisme et donc de la démocratie, à l’échelle de la planète. Le pouvoir dominant actuel écrase les états souverains. L’intégration de l’Europe qui se déroule sous nos yeux, provoque elle aussi la disparition du pluralisme au sein de ce nouveau conglomérat, au profit d’un pouvoir supranational. 
 

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V. L. : Mais ne pensez-vous pas que la France ou l’Allemagne continuent à être des pays démocratiques ? 

A. Z. : Les pays occidentaux ont connu une vraie démocratie à l’époque de la guerre froide. Les partis politiques avaient de vraies divergences idéologiques et des programmes politiques différents. Les organes de presse avaient des différences marquées, eux aussi. Tout cela influençait la vie des gens, contribuait à leur bien-être. C’est bien fini. Parce que le capitalisme démocratique et prospère, celui des lois sociales et des garanties d’emploi devait beaucoup à l’épouvantail communiste. L’attaque massive contre les droits sociaux à l’Ouest a commencé avec la chute du communisme à l’Est. Aujourd’hui, les socialistes au pouvoir dans la plupart des pays d’Europe, mènent une politique de démantèlement social qui détruit tout ce qu’il y avait de socialiste justement dans les pays capitalistes. 

Il n’existe plus, en Occident, de force politique capable de défendre les humbles. 

L’existence des partis politiques est purement formelle. Leurs différences s’estompent chaque jour davantage. La guerre des Balkans était tout sauf démocratique. Elle a pourtant été menée par des socialistes, historiquement opposés à ce genre d’aventures. Les écologistes, eux aussi au pouvoir dans plusieurs pays, ont applaudi au désastre écologique provoqué par les bombardements de l’OTAN. Ils ont même osé affirmer que les bombes à uranium appauvri n’étaient pas dangereuses alors que les soldats qui les chargent portent des combinaisons spéciales. La démocratie tend donc aussi à disparaître de l’organisation sociale occidentale. Le totalitarisme financier a soumis les pouvoirs politiques. Le totalitarisme financier est froid. Il ne connaît ni la pitié ni les sentiments. Les dictatures politiques sont pitoyables en comparaison avec la dictature financière. Une certaine résistance était possible au sein des dictatures les plus dures. Aucune révolte n’est possible contre la banque. 

V. L. : Et la révolution ? 

A. Z. : Le totalitarisme démocratique et la dictature financière excluent la révolution sociale. 

V. L. : Pourquoi ? 

A. Z. : Parce qu’ils combinent la brutalité militaire toute puissante et l’étranglement financier planétaire. Toutes les révolutions ont bénéficié de soutien venu de l’étranger. C’est désormais impossible, par absence de pays souverains. De plus, la classe ouvrière a été remplacée au bas de l’échelle sociale, par la classe des chômeurs. Or que veulent les chômeurs ? Un emploi. Ils sont donc, contrairement à la classe ouvrière du passé, dans une situation de faiblesse. 
 

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V. L. : Les systèmes totalitaires avaient tous une idéologie. Quelle est celle de cette nouvelle société que vous appelez post-démocratique ? 

A. Z. : Les théoriciens et les politiciens occidentaux les plus influents considèrent que nous sommes entrés dans une époque post-idéologique. Parce qu’ils sous-entendent par « idéologie » le communisme, le fascisme, le nazisme, etc. En réalité, l’idéologie, la supraidéologie du monde occidental, développée au cours des cinquante dernières années, est bien plus forte que le communisme ou le national-socialisme. Le citoyen occidental en est bien plus abruti que ne l’était le soviétique moyen par la propagande communiste. Dans le domaine idéologique, l’idée importe moins que les mécanismes de sa diffusion. Or la puissance des médias occidentaux est, par exemple, incomparablement plus grande que celle, énorme pourtant, du Vatican au sommet de son pouvoir. Et ce n’est pas tout : le cinéma, la littérature, la philosophie, tous les moyens d’influence et de diffusion de la culture au sens large vont dans le même sens. A la moindre impulsion, ceux qui travaillent dans ces domaines réagissent avec un unanimisme qui laisse penser à des ordres venant d’une source de pouvoir unique. (…)

V. L. : Mais cette « supraidéologie » ne propage-t-elle pas aussi la tolérance et le respect ? 

A. Z. : Quand vous écoutez les élites occidentales, tout est pur, généreux, respectueux de la personne humaine. Ce faisant, elles appliquent une règle classique de la propagande : masquer la réalité par le discours. Car il suffit d’allumer la télévision, d’aller au cinéma, d’ouvrir les livres à succès, d’écouter la musique la plus diffusée, pour se rendre compte que ce qui est propagé en réalité c’est le culte du sexe, de la violence et de l’argent. Le discours noble et généreux est donc destiné à masquer ces trois piliers – il y en a d’autres – de la démocratie totalitaire. 

V. L. : Mais que faites-vous des droits de l’homme ? Ne sont-ils pas respectés en Occident bien plus qu’ailleurs ? 

A. Z. : L’idée des droits de l’homme est désormais soumise elle aussi à une pression croissante. L’idée, purement idéologique, selon laquelle ils seraient innés et inaltérables ne résisterait même pas à un début d’examen rigoureux. Je suis prêt à soumettre l’idéologie occidentale à l’analyse scientifique, exactement comme je l’ai fait pour le communisme. Ce sera peut-être un peu long pour un entretien. 

V. L. : N’a-t-elle pas une idée maîtresse ? 

A. Z. : C’est le mondialisme, la globalisation. Autrement dit : la domination mondiale. Et comme cette idée est assez antipathique, on la masque sous le discours plus vague et généreux d’unification planétaire, de transformation du monde en un tout intégré. C’est le vieux masque idéologique soviétique ; celui de l’amitié entre les peuples, « amitié » destinée à couvrir l’expansionnisme. En réalité, l’Occident procède actuellement à un changement de structure à l’échelle planétaire. D’un côté, la société occidentale domine le monde de la tête et des épaules et de l’autre, elle s’organise elle-même verticalement, avec le pouvoir supranational au sommet de la pyramide. 

V. L. : Un gouvernement mondial ? 

A. Z. : Si vous voulez. 

V. L. : Croire cela n’est-ce-pas être un peu victime du fantasme du complot ? 

A. Z. : Quel complot ? Il n’y a aucun complot. Le gouvernement mondial est dirigé par les gouverneurs des structures supranationales commerciales, financières et politiques connues de tous. Selon mes calculs, une cinquantaine de millions de personnes fait déjà partie de cette suprasociété qui dirige le monde. Les États-Unis en sont la métropole. Les pays d’Europe occidentale et certains anciens « dragons » asiatiques, la base. Les autres sont dominés suivant une dure gradation économico-financière. Ça, c’est la réalité. La propagande, elle, prétend qu’un gouvernement mondial contrôlé par un parlement mondial serait souhaitable, car le monde est une vaste fraternité. Ce ne sont là que des balivernes destinées aux populations. 
 

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V. L. : Le Parlement européen aussi ? 

A. Z. : Non, car le Parlement européen existe. Mais il serait naïf de croire que l’union de l’Europe s’est faite parce que les gouvernements des pays concernés l’ont décidé gentiment. L’Union européenne est un instrument de destruction des souverainetés nationales. Elle fait partie des projets élaborés par les organismes supranationaux. 

V. L. : La Communauté européenne a changé de nom après la destruction de l’Union soviétique. Elle s’est appelée Union européenne, comme pour la remplacer. Après tout, il y avait d’autres noms possibles. Aussi, ses dirigeants s’appellent-ils « commissaires », comme les Bolcheviks. Ils sont à la tête d’une « Commission », comme les Bolcheviks. Le dernier président a été « élu » tout en étant candidat unique. 

A. Z. : Il ne faut pas oublier que des lois régissent l’organisation sociale. Organiser un million d’hommes c’est une chose, dix millions c’en est une autre, cent millions, c’est bien plus compliqué encore. Organiser cinq cent millions est une tâche immense. Il faut créer de nouveaux organismes de direction, former des gens qui vont les administrer, les faire fonctionner. C’est indispensable. Or l’Union soviétique est, en effet, un exemple classique de conglomérat multinational coiffé d’une structure dirigeante supranationale. L’Union européenne veut faire mieux que l’Union soviétique ! C’est légitime. J’ai déjà été frappé, il y a vingt ans, de voir à quel point les soi-disant tares du système soviétique étaient amplifiées en Occident. 

V. L. : Par exemple ? 

A. Z. : La planification ! L’économie occidentale est infiniment plus planifiée que ne l’a jamais été l’économie soviétique. La bureaucratie ! En Union Soviétique 10 % à 12 % de la population active travaillaient dans la direction et l’administration du pays. Aux États Unis, ils sont entre 16 % et 20 %. C’est pourtant l’URSS qui était critiquée pour son économie planifiée et la lourdeur de son appareil bureaucratique ! Le Comité central du PCUS employait deux mille personnes. L’ensemble de l’appareil du Parti communiste soviétique était constitué de 150000 salariés. Vous trouverez aujourd’hui même, en Occident, des dizaines voire des centaines d’entreprises bancaires et industrielles qui emploient un nombre bien plus élevé de gens. L’appareil bureaucratique du Parti communiste soviétique était pitoyable en comparaison avec ceux des grandes multinationales. L’URSS était en réalité un pays sous-administré. Les fonctionnaires de l’administration auraient dû être deux à trois fois plus nombreux. L’Union européenne le sait, et en tient compte. L’intégration est impossible sans la création d’un très important appareil administratif. 

V. L. : Ce que vous dites est contraire aux idées libérales, affichées par les dirigeants européens. Pensez-vous que leur libéralisme est de façade ? 

A. Z. : L’administration a tendance à croître énormément. Cette croissance est dangereuse, pour elle-même. Elle le sait. Comme tout organisme, elle trouve ses propres antidotes pour continuer à prospérer. L’initiative privée en est un. La morale publique et privée, un autre. Ce faisant, le pouvoir lutte en quelque sorte contre ses tendances à l’auto-déstabilisation. Il a donc inventé le libéralisme pour contrebalancer ses propres lourdeurs. Et le libéralisme a joué, en effet, un rôle historique considérable. Mais il serait absurde d’être libéral aujourd’hui. La société libérale n’existe plus. Sa doctrine est totalement dépassée à une époque de concentrations capitalistiques sans pareil dans l’histoire. Les mouvements d’énormes masses financières ne tiennent compte ni des intérêts des États ni de ceux des peuples, peuples composés d’individus. Le libéralisme sous-entend l’initiative personnelle et le risque financier personnel. Or, rien ne se fait aujourd’hui sans l’argent des banques. Ces banques, de moins en moins nombreuses d’ailleurs, mènent une politique dictatoriale, dirigiste par nature. Les propriétaires sont à leur merci, puisque tout est soumis au crédit et donc au contrôle des puissances financières. L’importance des individus, fondement du libéralisme, se réduit de jour en jour. Peu importe aujourd’hui qui dirige telle ou telle entreprise ; ou tel ou tel pays d’ailleurs. Bush ou Clinton, Kohl ou Schröder, Chirac ou Jospin, quelle importance ? Ils mènent et mèneront la même politique. 

V. L. : Les totalitarismes du XXe siècle ont été extrêmement violents. On ne peut dire la même chose de la démocratie occidentale. 

A. Z. : Ce ne sont pas les méthodes, ce sont les résultats qui importent. Un exemple ? L’URSS a perdu vingt million d’hommes et subi des destructions considérables, en combattant l’Allemagne nazie. Pendant la guerre froide, guerre sans bombes ni canons pourtant, ses pertes, sur tous les plans, ont été bien plus considérables ! La durée de vie des Russes a chuté de dix ans dans les dix dernières années. La mortalité dépasse la natalité de manière catastrophique. Deux millions d’enfants ne dorment pas à la maison. Cinq millions d’enfants en âge d’étudier ne vont pas à l’école. Il y a douze millions de drogués recensés. L’alcoolisme s’est généralisé. 70 % des jeunes ne sont pas aptes au service militaire à cause de leur état physique. Ce sont là des conséquences directes de la défaite dans la guerre froide, défaite suivie par l’occidentalisation. Si cela continue, la population du pays descendra rapidement de cent-cinquante à cent, puis à cinquante millions d’habitants. Le totalitarisme démocratique surpassera tous ceux qui l’ont précédé. 
 

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V. L. : En violence ? 

A. Z. : La drogue, la malnutrition, le sida sont plus efficaces que la violence guerrière. Quoique, après la guerre froide dont la force de destruction a été colossale, l’Occident vient d’inventer la « guerre pacifique ». L’Irak et la Yougoslavie sont deux exemples de réponse disproportionnée et de punition collective, que l’appareil de propagande se charge d’habiller en « juste cause » ou en « guerre humanitaire ». L’exercice de la violence par les victimes contre elles-mêmes est une autre technique prisée. La contre-révolution russe de 1985 en est un exemple. Mais en faisant la guerre à la Yougoslavie, les pays d’Europe occidentale l’ont faite aussi à eux-mêmes. 

V. L. : Selon vous, la guerre contre la Serbie était aussi une guerre contre l’Europe ? 

A. Z. : Absolument. Il existe, au sein de l’Europe, des forces capables de lui imposer d’agir contre elle-même. La Serbie a été choisie, parce qu’elle résistait au rouleau compresseur mondialiste. La Russie pourrait être la prochaine sur la liste. Avant la Chine. 

V. L. : Malgré son arsenal nucléaire ? 

A. Z. : L’arsenal nucléaire russe est énorme mais dépassé. De plus, les Russes sont moralement prêts à être conquis. A l’instar de leurs aïeux qui se rendaient par millions dans l’espoir de vivre mieux sous Hitler que sous Staline, ils souhaitent même cette conquête, dans le même espoir fou de vivre mieux. C’est une victoire idéologique de l’Occident. Seul un lavage de cerveau peut obliger quelqu’un à voir comme positive la violence faite à soi-même. Le développement des mass-media permet des manipulations auxquelles ni Hitler ni Staline ne pouvaient rêver. Si demain, pour des raisons « X », le pouvoir supranational décidait que, tout compte fait, les Albanais posent plus de problèmes que les Serbes, la machine de propagande changerait immédiatement de direction, avec la même bonne conscience. Et les populations suivraient, car elles sont désormais habituées à suivre. Je le répète : on peut tout justifier idéologiquement. L’idéologie des droits de l’homme ne fait pas exception. Partant de là, je pense que le XXIe siècle dépassera en horreur tout ce que l’humanité a connu jusqu’ici. Songez seulement au futur combat contre le communisme chinois. Pour vaincre un pays aussi peuplé, ce n’est ni dix ni vingt mais peut-être cinq cent millions d’individus qu’il faudra éliminer. Avec le développement que connaît actuellement la machine de propagande ce chiffre est tout à fait atteignable. Au nom de la liberté et des droits de l’homme, évidemment. A moins qu’une nouvelle cause, non moins noble, sorte de quelque institution spécialisée en relations publiques. 

V. L. : Ne pensez-vous pas que les hommes et les femmes peuvent avoir des opinions, voter, sanctionner par le vote ? 

A. Z. : D’abord les gens votent déjà peu et voteront de moins en moins. Quant à l’opinion publique occidentale, elle est désormais conditionnée par les médias. Il n’y a qu’à voir le oui massif à la guerre du Kosovo. Songez donc à la guerre d’Espagne ! Les volontaires arrivaient du monde entier pour combattre dans un camp comme dans l’autre. Souvenez-vous de la guerre du Vietnam. Les gens sont désormais si conditionnés qu’ils ne réagissent plus que dans le sens voulu par l’appareil de propagande. 

V. L. : L’URSS et la Yougoslavie étaient les pays les plus multiethniques du monde et pourtant ils ont été détruits. Voyez-vous un lien entre la destruction des pays multiethniques d’un côté et la propagande de la multiethnicité de l’autre ? 

A. Z. : Le totalitarisme soviétique avait créé une vraie société multinationale et multiethnique. Ce sont les démocraties occidentales qui ont fait des efforts de propagande surhumains, à l’époque de la guerre froide, pour réveiller les nationalismes. Parce qu’elles voyaient dans l’éclatement de l’URSS le meilleur moyen de la détruire. Le même mécanisme a fonctionné en Yougoslavie. L’Allemagne a toujours voulu la mort de la Yougoslavie. Unie, elle aurait été plus difficile à vaincre. Le système occidental consiste à diviser pour mieux imposer sa loi à toutes les parties à la fois, et s’ériger en juge suprême. Il n’y a pas de raison pour qu’il ne soit pas appliqué à la Chine. Elle pourrait être divisée, en dizaines d’États. 

V. L. : La Chine et l’Inde ont protesté de concert contre les bombardements de la Yougoslavie. Pourraient-elles éventuellement constituer un pôle de résistance ? Deux milliards d’individus, ce n’est pas rien ! 

A. Z. : La puissance militaire et les capacités techniques de l’Occident sont sans commune mesure avec les moyens de ces deux pays. 

V. L. : Parce que les performances du matériel de guerre américain en Yougoslavie vous ont impressionné ? 

A. Z. : Ce n’est pas le problème. Si la décision avait été prise, la Serbie aurait cessé d’exister en quelques heures. Les dirigeants du Nouvel ordre mondial ont apparemment choisi la stratégie de la violence permanente. Les conflits locaux vont se succéder pour être arrêtés par la machine de « guerre pacifique » que nous venons de voir à l’oeuvre. Cela peut, en effet, être une technique de management planétaire. L’Occident contrôle la majeure partie des ressources naturelles mondiales. Ses ressources intellectuelles sont des millions de fois supérieures à celles du reste de la planète. C’est cette écrasante supériorité qui détermine sa domination technique, artistique, médiatique, informatique, scientifique dont découlent toutes les autres formes de domination. Tout serait simple s’il suffisait de conquérir le monde. Mais il faut encore le diriger. C’est cette question fondamentale que les Américains essaient maintenant de résoudre. C’est cela qui rend « incompréhensibles » certaines actions de la « communauté internationale ». Pourquoi Saddam est-il toujours là ? Pourquoi Karadzic n’est-il toujours pas arrêté ? Voyez-vous, à l’époque du Christ, nous étions peut-être cent millions sur l’ensemble du globe. Aujourd’hui, le Nigeria compte presqu’autant d’habitants ! Le milliard d’Occidentaux et assimilés va diriger le reste du monde. Mais ce milliard devra être dirigé à son tour. Il faudra probablement deux cent millions de personnes pour diriger le monde occidental. Il faut les sélectionner, les former. Voilà pourquoi la Chine est condamnée à l’échec dans sa lutte contre l’hégémonie occidentale. Ce pays sous-administré n’a ni les capacités économiques ni les ressources intellectuelles pour mettre en place un appareil de direction efficace, composé de quelque trois cent millions d’individus. Seul l’Occident est capable de résoudre les problèmes de management à l’échelle de la planète. Cela se met déjà en place. Les centaines de milliers d’Occidentaux se trouvant dans les anciens pays communistes, en Russie par exemple, occupent dans leur écrasante majorité des postes de direction. La démocratie totalitaire sera aussi une démocratie coloniale. 

V. L. : Pour Marx, la colonisation était civilisatrice. Pourquoi ne le serait-elle pas à nouveau ? 

A. Z. : Pourquoi pas, en effet ? Mais pas pour tout le monde. Quel est l’apport des Indiens d’Amérique à la civilisation ? Il est presque nul, car ils ont été exterminés, écrasés. Voyez maintenant l’apport des Russes ! L’Occident se méfiait d’ailleurs moins de la puissance militaire soviétique que de son potentiel intellectuel, artistique, sportif. Parce qu’il dénotait une extraordinaire vitalité. Or c’est la première chose à détruire chez un ennemi. Et c’est ce qui a été fait. La science russe dépend aujourd’hui des financements américains. Et elle est dans un état pitoyable, car ces derniers n’ont aucun intérêt à financer des concurrents. Ils préfèrent faire travailler les savants russes aux USA. Le cinéma soviétique a été lui aussi détruit et remplacé par le cinéma américain. En littérature, c’est la même chose. La domination mondiale s’exprime, avant tout, par le diktat intellectuel ou culturel si vous préférez. Voilà pourquoi les Américains s’acharnent, depuis des décennies, à baisser le niveau culturel et intellectuel du monde : ils veulent le ramener au leur pour pouvoir exercer ce diktat. 

V. L. : Mais cette domination, ne serait-elle pas, après tout, un bien pour l’humanité ? 

A. Z. : Ceux qui vivront dans dix générations pourront effectivement dire que les choses se sont faites pour le bien de l’humanité, autrement dit pour leur bien à eux. Mais qu’en est-il du Russe ou du Français qui vit aujourd’hui ? Peut-il se réjouir s’il sait que l’avenir de son peuple pourrait être celui des Indiens d’Amérique ? Le terme d’Humanité est une abstraction. Dans la vie réelle il y a des Russes, des Français, des Serbes, etc. Or si les choses continuent comme elles sont parties, les peuples qui ont fait notre civilisation, je pense avant tout aux peuples latins, vont progressivement disparaître. L’Europe occidentale est submergée par une marée d’étrangers. Nous n’en avons pas encore parlé, mais ce n’est ni le fruit du hasard, ni celui de mouvements prétendument incontrôlables. Le but est de créer en Europe une situation semblable à celle des États-Unis. Savoir que l’humanité va être heureuse, mais sans Français, ne devrait pas tellement réjouir les Français actuels. Après tout, laisser sur terre un nombre limité de gens qui vivraient comme au Paradis, pourrait être un projet rationnel. Ceux-là penseraient d’ailleurs sûrement que leur bonheur est l’aboutissement de la marche de l’histoire. Non, il n’est de vie que celle que nous et les nôtres vivons aujourd’hui. 

V. L. : Le système soviétique était inefficace. Les sociétés totalitaires sont-elles toutes condamnées à l’inefficacité ? 

A. Z. : Qu’est-ce que l’efficacité ? Aux États-Unis, les sommes dépensées pour maigrir dépassent le budget de la Russie. Et pourtant le nombre des gros augmente. Il y a des dizaines d’exemples de cet ordre. 

V. L. : Peut-on dire que l’Occident vit actuellement une radicalisation qui porte les germes de sa propre destruction ? 

A. Z. : Le nazisme a été détruit dans une guerre totale. Le système soviétique était jeune et vigoureux. Il aurait continué à vivre s’il n’avait pas été combattu de l’extérieur. Les systèmes sociaux ne s’autodétruisent pas. Seule une force extérieure peut anéantir un système social. Comme seul un obstacle peut empêcher une boule de rouler. Je pourrais le démontrer comme on démontre un théorème. Actuellement, nous sommes dominés par un pays disposant d’une supériorité économique et militaire écrasante. Le Nouvel ordre mondial se veut unipolaire. Si le gouvernement supranational y parvenait, n’ayant aucun ennemi extérieur, ce système social unique pourrait exister jusqu’à la fin des temps. Un homme seul peut être détruit par ses propres maladies. Mais un groupe, même restreint, aura déjà tendance à se survivre par la reproduction. Imaginez un système social composé de milliards d’individus ! Ses possibilités de repérer et d’arrêter les phénomènes autodestructeurs seront infinies. Le processus d’uniformisation du monde ne peut être arrêté dans l’avenir prévisible. Car le totalitarisme démocratique est la dernière phase de l’évolution de la société occidentale, évolution commencée à la Renaissance.
 

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Biographie d’Alexandre Zinoviev 

Alexandre Zinoviev est né dans un village de la région de Kostroma (URSS). Ses parents (le père est peintre en bâtiment) emménagent à Moscou. Alexandre qui montre de grandes capacités entre à l’Institut de philosophie, littérature et histoire de Moscou en 1939. Ses activités clandestines de critique de la construction du socialisme lui valent d’être exclu de l’Institut. Arrêté, puis évadé, il vit une année d’errance avant de s’enrôler dans l’Armée Rouge où il finit la Seconde Guerre mondiale comme aviateur et décoré de l’ordre de l’Étoile rouge. 

Entré à la faculté de philosophie de l’Université d’État de Moscou en 1946, Alexandre Zinoviev obtient en 1951 son diplôme avec mention. En 1954 il soutient une thèse de doctorat sur le thème de la logique dans Le Capital de Karl Marx, puis devient, l’année suivante, collaborateur scientifique de l’Institut de philosophie de l’Académie des sciences d’URSS. 

Alexandre Zinoviev est nommé professeur et directeur de la chaire de logique de l’Université d’Etat de Moscou en 1960. Il publie de nombreux livres et articles scientifiques de renommée internationale (ses oeuvres majeures ayant toutes été traduites à destination de l’Occident). Souvent invité à des conférences à l’étranger, il décline cependant toutes ces invitations. 

Après avoir refusé de renvoyer deux enseignants Alexandre Zinoviev est démis de son poste de professeur et de directeur de la chaire de logique. En 1976, pour avoir voulu publier Hauteurs béantes, un recueil de textes ironiques sur la vie en Union soviétique, il se voit proposer par les organes de sécurité le choix entre la prison et l’exil. Avec sa famille, il trouve refuge à Munich où il accomplit diverses tâches scientifiques ou littéraires. 

Révolté par la participation de la France et de l’Europe occidentale aux opérations de l’OTAN contre la Serbie, Alexandre Zinoviev retourne en Russie en 1999. Dans son article « Quand a vécu Aristote ? », il soutient que les récits et écrits historiques ont toujours été de tout temps détournés, effacés, falsifiés au profit d’un vainqueur. 

Source Liliane Held Khawam

samedi, 16 mars 2019

Sénèque et la mondialisation malheureuse

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Sénèque et la mondialisation malheureuse

par Nicolas Bonnal

Ex: https://nicolasbonnal.wordpress.com

Le monde moderne n’est qu’un monde usé jusqu’à la corde, et qui se croit nouveau parce qu’il a tout oublié.

L’actualité de Sénèque est toujours extraordinaire, jusques et y compris dans le domaine de la médecine (lettre XCV, voyez ce qu’en dit De Maistre) ou de la géographie ; son théâtre ignoré fourmille aussi de traits de génie et c’est dans sa tragédie Médée que Sénèque médite les limites de la science, de la navigation…et de la mondialisation, deux mille ans avant les rédacteurs fatigués de Zerohedge.com

On écoute l’universitaire Jean-Noël Michaud sur ce monologue du chœur de Médée :

« Les vers 374-379 sont célèbres car on y a vu l’annonce de la découverte du Nouveau Monde. Et en fait on a eu raison : depuis que la science grecque et les savants d’Alexandrie ont établi que la terre était ronde et que le monde connu des Grecs et des Romains ne représentait tout au plus qu’un quart de la surface terrestre, l’Océan a cessé, dans la pensée des savants, d’être uinculum rerum, on a supposé qu’au-delà de l’Océan, comme au sud de l’équateur, il y avait d’autres terres, nouos orbes. »

Michaud ajoute :

« L’Amérique existait donc, dans la pensée des astronomes et des gens cultivés qui connaissaient leurs travaux, 1500 ans avant qu’on ne la découvre. »

Ce monde techniquement et géographiquement maîtrisé est spirituellement rétréci. Michaud :

« Naviguer n’est plus une entreprise héroïque qui requiert l’aide des dieux et un équipage de princes, n’importe qui peut sillonner la mer, sans l’aide d’un vaisseau magique. On construit des villes partout, l’univers s’ouvre à toutes les routes, on voit des Perses au bord de l’Elbe et des Indiens au bord de l’Araxe. La terre est le village planétaire de nos modernes internautes. Comme il nous est difficile aujourd’hui de ne pas donner à ces vers un sens positif, puisque même les adversaires de la mondialisation nous expliquent qu’en réalité ils sont pour ! »

Car l’empire romain est une mondialisation, est une matrice très consciente :

« Ce que disent ces vers, c’est bien ce que l’empire est en train de réaliser à l’échelle de l’orbis Romanus : assurer la permanence des relations maritimes, civiliser des régions sauvages en y établissant des villes, envoyer sur le Rhin des auxiliaires syriens et sur l’Euphrate des Espagnols. »

Et c’est la fin de la poésie dans le monde (je sais, on va nous traiter de ringards, de retardataires…) :

jasonbateau.jpg« Les Argonautes ont fait tomber la première barrière et ce premier écroulement a provoqué de proche en proche la chute de toutes les barrières qui séparaient les peuples les uns des autres, le monde civilisé du monde barbare, le cosmos de tous les au-delà, merveilleux ou épouvantables. »

Très belle envolée de l’universitaire sur le vieillissement du monde (si visible aujourd’hui mais pensez au grand remplacement de la démographie romaine…) :

« Peut-être Sénèque se souvient-il de la version hésiodique de la fin des temps : quand aux derniers temps de la cinquième race, la race de fer, tout sera vieux, les enfants viendront au monde avec des tempes blanches. On a l’impression que le chœur annonce aussi que le cosmos finira par s’éteindre dans la sénilité. »

La quête de la toison d’or précipite la fin d’un monde qui sera vieux et médiocre :

« En allant la chercher dans un espace où l’homme n’a pas sa place, Jason a libéré dans le monde des hommes les forces déchaînées d’un monde qu’un dieu ne domine plus. Le choeur Audax nimium donne à Médée sa dimension cosmique mais la réalisation de sa vengeance marquera aussi l’épuisement du cosmos et la fin du tragique. »

Un peu de Sénèque maintenant, inspiré auteur de théâtre :

« Il fut hardi, le premier navigateur qui osa fendre les flots perfides sur un fragile vaisseau, et laisser derrière lui sa terre natale, confier sa vie au souffle capricieux des vents, et poursuivre sur les mers sa course aventureuse, n’ayant pour barrière entre la vie et la mort que l’épaisseur d’un bois mince et léger ! On ne connaissait point alors le cours des astres, et l’on ne savait point encore se régler sur la position des étoiles qui brillent dans l’espace. »

Comme Hésiode, Rousseau ou Kierkegaard, Sénèque célèbre l’innocence ignorante de nos pères :

« Nos pères vivaient dans des siècles d’innocence et de pureté. Chacun alors demeurait tranquille sur le rivage qui l’avait vu naître, et vieillissait sur la terre de ses aïeux, riche de peu, ne connaissant de trésors que ceux du pays natal. »

Ensuite le vaisseau de Thessalie met fin aux enchantements des origines (les lucifériens bien sûr préfèreront ce qu’ils croient un progrès) ; et il y a un prix à payer (le réchauffement climatique ?) :

« Le vaisseau de Thessalie rapprocha les mondes que la nature avait sagement séparés, soumit la mer au mouvement des raines, et joignit à nos misères les périls d’un élément étranger. Ce malheureux navire paya chèrement son audace par cette longue suite de dangers qu’il lui fallut courir, entre les deux montagnes qui ferment rentrée de l’Euxin, et qui se heurtaient l’une contre l’autre, avec le retentissement de la foudre, tandis que la mer, prise lançait jusqu’aux nues ses vagues écumantes. »

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Le prix à payer ? Sénèque en parle tel quel – c’est la fin des limites (mais dans un monde devenu petit, cela sonne comme une cour de prison abandonnée pour prisonniers…) :

« Quel fut le prix de ce hardi voyage ? Une toison d’or, et Médée plus cruelle que les flots mêmes, digne récompense des premiers navigateurs. Maintenant la mer est soumise, et se courbe sous nos lois : plus n’est besoin d’un navire construit par Minerve, et monté par des rois ; la moindre barque peut s’aventurer sur les flots : les bornes antiques sont renversées, et les peuples vont bâtir les villes sur des terres nouvelles. »

 Les derniers vers sont fantastiques :

« Le monde est ouvert en tout sens, et rien plus n’est à sa place…L’Indien boit l’eau glacée de l’Araxe, le Perse boit celle de l’Elbe et du Rhin. Un temps viendra, dans le cours des siècles, où l’Océan élargira la ceinture du globe, pour découvrir à l’homme une terre immense et inconnue ; la mer nous révélera de nouveaux mondes, et Thulé ne sera plus la borne de l’univers. »

Sources

Sénèque, Médée Traduit par Eugène Greslou,  1834

Jean-Noël Michaud Le chœur Audax nimium (Sénèque, Médée, 301-379) (Persée, via latina)

mardi, 12 mars 2019

Between Buddha & Führer: The Young Cioran on Germany

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Between Buddha & Führer:
The Young Cioran on Germany

ecioran-barbarie.pngEmil Cioran
Apologie de la Barbarie: Berlin – Bucharest (1932-1941)
Paris: L’Herne, 2015

This is a very interesting book released by the superior publishing house L’Herne: a collection of Emil Cioran’s articles published in Romanian newspapers, mostly from before the war. Besides becoming a famous aphorist in later years, before the Allied victory, Cioran was still free to be a perceptive and biting cultural critic and political analyst.

While reading the book, I was chiefly interested in understanding the motivations behind Cioran’s support for nationalism and fascism. We can identify a few recurring themes:

  • A sense of humiliation at Romania’s underdevelopment, historical irrelevance, and cultural/intellectual dependence with regard to the West: “That is why the Romanian always agrees with the latest author he has read” (22).
  • A pronounced Germanophilia, appreciating German artists’ and intellectuals’ intensity, pathos, and diagnostic of Western decadence.
  • Frustration with democratic politics as leading selfish individualism and political impotence.
  • A marked preference for belief and irrational creativity over sterile rationalism and skepticism.

Cioran, who had already been well acquainted with German high culture during his studies in Romania, really took to Hitlerian Germany when he moved in 1933 there on a scholarship from the Humboldt Foundation. He writes:

In Germany, I realized that I was mistaken in believing that one can perfectly integrate a foreign culture. I hoped to identify myself perfectly with the values of German history, to cut my Romanian cultural roots to assimilate completely into German culture. I will not comment here on the absurdity of this illusion. (100)

The influence of Cioran’s German sources clearly shines through, including Nietzsche, Spengler, and Hitler himself.[1] [2] Cioran’s infatuation proved lasting. He wrote in 1937: “I think there are few people – even in Germany – who admire Hitler more than I do” (240).

On one level, Cioran’s politics are eminently realistic, frankly acknowledging the tragic side of human existence. He admires Italian Fascism and especially German National Socialism because these political movements had restored strong beliefs and had heightened the historical level and international power of these nations. If liberties must be trampled upon and certain individuals marginalized for a community to flourish, so be it. On foreign policy, he favors national self-sufficiency and Realpolitik as against dependence upon unstable or sentimental alliances.

Cioran is extremely skeptical of pacifist and universalist movements, convinced that great nations each have their own historical direction. Human history, in his view, would not necessarily converge and ought to remain pluralistic. If Europe was to converge to one culture, this would tragically require the triumph and imposition of one culture on the others. In particular, he believed Franco-German peace would be impossible without the collapse of one nation or the other (little did he suspect both would be crushed). Diversity and a degree of tension between nations and civilizations were good, providing “the essential antinomies which are the basis of life” (98).

Alongside these rather realistic considerations, spoken in a generally detached and level-headed tone, Cioran’s politics and in particular his nationalism were powerfully motivated by a sense of despair at the state of Romania. Cioran viscerally identified with his nation and intensely felt what he considered to be its deficiencies as a bucolic and peripheral culture. He then makes an at once passionate and desperate plea a zealous nationalist and totalitarian dictatorship which could spark Romania’s spark geopolitical, historical, and cultural renewal. Only such a regime, on the German model, could organize the youth and redeem an otherwise irrelevant nation. The continuation of democracy, by contrast, would mean only the disintegration of the nation into a collection of fissiparous and spoiled individuals: “Another period of ‘democracy’ and Romania will inevitably confirm its status of historical accident” (225).

Cioran_Reichsausländer_01-200x300.jpgA rare and stimulating combination in Cioran’s writings: unsentimental observation and intense pathos.

Cioran’s nationalism was highly idiosyncratic. He writes with amusing condescension of the local tradition of nostalgic and parochial patriotic writing: “To be sure, the geographical nationalism which we have witnessed up to now, with all its literature of patriotic exaltation and its idyllic vision of our historical existence, has its merits and its rights” (150). He was also uninterested in a nationalism as merely a moralistic defensive conservatism, defined merely as the maintenance of the borders of the Greater Romania which, with the annexation of Transylvania, had been miraculously established in the wake of the First World War.

For Cioran nationalism had to serve a great political project, it had to have a set of values and ambitions enabling a great historical flourishing, rather than be merely a sentimental or selfish end in itself. He writes of A. C. Cuza, a prominent politician who made anti-Semitism his signature issue:

Nationalism, as a sentimental formula, lacking in any ideological backbone or political perspectives, has no value. The dishonorable destiny of A. C. Cuza has no other explanation than the agitations of an apolitical man whose fanaticism, which has never gone further than anti-Semitism, was never able to become a fatality for Romania. If we had had no Jews, A. C. Cuza would never have thought of his country. (214)

Similarly, Cioran argues that the embrace of nationalism is dependent on time and purpose:

One is a nationalist only in a given time, when to not be a nationalist is a crime against the nation. In a given time means in a historical moment when everyone’s participation is a matter of conscience. The demands of the historical moment also mean: one is not [only] a nationalist, one is also a nationalist. (149-50)

Cioran was also – at least in this selection of articles – uninterested in Christianity and aggressively rejected Romania’s past and traditions, in favor a revolutionary project of martial organization, planned industrialization, and national independence. For Cioran, Romania needed nothing less than a “national revolution” requiring “a long-lasting megalomania” (154).

All this seems far removed from the agrarian traditionalism and Christian mysticism of Corneliu Zelea Codreanu’s Iron Guard. Cioran did, however, hail the Guard as a Romanian “awakening” and after Codreanu’s murder wrote a moving ode to the Captain [3]. By contrast, Cioran excoriates the consensual Transylvanian politician Iulia Maniu as an ineffectual and corrosive “Balkan buddhist,” peddling “political leukemia” (220).

A friend of mine observed that at least some aspects of Cioran’s program resembles Nicolae Ceaușescu’s later formula: perhaps late Romanian communism did seek to reflect some of the nation’s deep-seated aspirations concerning its place in the world.

One is struck by the contrast between Cioran’s lyricism on Germany, his desperate call to “transfigurate” Romania, and his perfectly lucid and quite balanced assessment of Fascist Italy [4]. There is something quite unreasonable in Cioran’s revolutionary ambitions. Fascism, certainly, is an effective way of instating political stability, steady leadership, and civil peace, annihilating communism, maximizing national power and independence, and educating and systematically organizing the nation according to whatever values you hold dear.

cioranherne.jpgBut fascism cannot work miracles. Politics must work with the human material and historical trajectory that one has. That is being true to oneself. To wish for total transformation and the tabula rasa is to invite disaster. Such revolutions are generally an exercise in self-harm. Once the passions and intoxications have settled, one finds the nation stunted and lessened: by civil war, by tyranny, by self-mutilation and deformation in the stubborn in the name of utopian goals. The historic gap with the ‘advanced’ nations is widened further still by the ordeal.

In the case of Romania, I can imagine that a spirited, moderate, and progressive authoritarian regime might have been able to raise the country’s historical level, just as Fascism had in Italy. Romania could aspire to be a Balkan hegemon. Beyond this, raising Romania would have required generations of careful and steady work, not hysterical outbursts, notably concerning population policy. The country had a comparatively low population density – a territory twice the size as England, but with half the population. There was a vigorous and progressive eugenics movement in interwar Romania [5] which also sought to improve the people’s biological stock, but this came to naught.

Another very striking aspect of Cioran’s fascism and nationalism is that he does not take race seriously. He says in his first article written from Germany (November 14, 1933):

If one objects that today’s political orientation [in Germany] is unacceptable, that it is founded on false values, that racism is a scientific illusion, and that German exclusivism is a collective megalomania, I would respond: What does it matter, so long as Germany feels well, fresh, and alive under such a regime?

Reducing National Socialism’s appeal to mere emotional power, although that is important, will certainly puzzle progressive racialists and evolutionary humanists.[2] [6] In the same vein, Cioran occasionally expresses sympathy for communism, because of that ideology’s ability to inspire belief. There is something irresponsible in all this. And yet, living in an order of rot and incoherence, we can only share in Cioran’s hope: “We have no other mission than to work for the intensification of the process of fatal collapse” (51).

One wonders how Cioran’s disenchantment with Hitlerian Germany occurred. The fact that he wrote his conversion note [7]On France [7] in 1941, before the major reversals for the Axis, is certainly intriguing.

Cioran’s comments on Romania’s ineptitude are striking and sadly well in line with the current state of the Balkans. Cioran hailed from Transylvania, which though having a Romanian majority, had significant Saxon and Hungarian minorities and a tradition of Austro-Hungarian government. Cioran contrasts the stolid Saxons with the erratic Romanians, the staid Transylvanian “citizens” with the corrupt “patriots” of the old-Romanian provinces (Wallachia, Moldova). So while he rejected any idea of Romania becoming merely a respectable, prosperous “Switzerland,” Cioran also desired some good old-fashioned (bourgeois?) competence. He indeed calls Transylvania “Romania’s Prussia.”

To this day, besides Bucharest, the wealthier and more functional parts of the country are to be found in Transylvania. In the 2014 presidential elections, there was an eerie overlap [8] between the vote for the liberal-conservative candidate Klaus Iohannes and the historical boundaries of Austria-Hungary.

What I find most stimulating in Cioran is his dialectic between his concerns as a pure intellectual – lucidity, the vanity of things, universal truth – and his recognition of and desire for the intoxicating needs of Life: belief, action in the here-and-now, ruthlessness, and passion. Cioran writes:

The oscillation between preoccupations that could not be further from current events and the need to adopt, within the historical process, an immediate attitude, produces, in the mind of certain contemporary intellectuals, a strange frenzy, a constant irritation, and an exasperating tension. (117)

I was shocked to encounter the following passage and yet the thought had also occurred to me:

In Germany, I began to study Buddhism in order not to be intoxicated or contaminated with Hitlerism. But my meditation on the void brought me to understand, by the contrast, Hitlerism better than did any ideological book. Immediate positivity and the terror of temporal decision, the total lack of transcendence of politics, but especially the bowing before the merciless empire of becoming, all these grow in a dictatorship to the point of exasperation. A suffocating rhythm, alternating with a megalomaniacal breath, gives it a particular psychology. The profile of dictatorship is a monumental chiaroscuro. (233-34)

Nature, ‘red in tooth and claw,’ and the inevitable void: a fertile dialectic, from which we may hope Life with prevail.

Notes

[1] [9] E.g. Cioran observes that fears surrounding Hungary’s ambition to reconquer Transylvania from Romania only existed due to Romania’s own internal political weakness: “[There is an] unacceptable illusion among us according to which foreign relations could compensate for an internal deficiency, whereas in fact the value of these relations depends, at bottom, on our inner strength” (171). A classic Hitlerian point.

[2] [10] Elsewhere, Cioran denounces, in the name of a lucid Realpolitik, overdependence on the unreliable alliance with France and sympathy for the “Latin sister nation” Italy, which was then supporting Hungary: “Concerning affinities of blood and race, who knows how many illusions are not hidden in such beliefs?” (172). Certainly, people have often confused linguistic proximity with actual blood kinship.

 

Article printed from Counter-Currents Publishing: https://www.counter-currents.com

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[1] Image: https://www.counter-currents.com/wp-content/uploads/2019/03/Cioran_Reichsausländer_01.jpg

[2] [1]: #_ftn1

[3] ode to the Captain: https://www.counter-currents.com/2016/10/ode-to-the-captain/

[4] Fascist Italy: https://www.counter-currents.com/2019/01/italy-mussolini-fascism/

[5] eugenics movement in interwar Romania: https://www.upress.pitt.edu/books/9780822961260/

[6] [2]: #_ftn2

[7] conversion note : https://www.counter-currents.com/2019/02/ciorans-on-france/

[8] eerie overlap: https://www.reddit.com/r/MapPorn/comments/8cv6cf/the_map_of_the_austrohungarian_empire_18671918/

[9] [1]: #_ftnref1

[10] [2]: #_ftnref2

lundi, 11 mars 2019

Lumière de la Tradition

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Lumière de la Tradition

par Alastair Crooke
Ex: https://echelledejacob.blogspot.com
 
Nous présentons rapidement un texte d’Alastair Crooke avant de revenir sur certaines réflexions qu’il suscite nécessairement, certes par son contenu, mais encore plus par sa chronologie qui renvoie à d’autres réflexions sur le même thème. Ce thème, c’est celui de l’interrogation fondamentale sur ce qu’on nomme la Tradition, comme orientation majeure qui pourrait nous suggérer des élans, des conceptions, des perceptions permettant d’aborder l’immense question du véritable “Grand Remplacement” qui devrait nous importer : qu’est-ce qui remplacera cette immense et infâme Système qui entend conduire la civilisation, la terre et tout le reste à un destin catastrophique anthropisation, et qui ne peut que s’effondrer lui-même, qui est d’ores et déjà en cours d’effondrement comme un s’affaisse un immense concentré de pourriture.

Alastair Crooke, qui introduit sa réflexion en faisant explicitement allusion à la Tradition et à l’un des philosophes du XXème siècle qui a illustré ce courant de pensée (Julius Evola), expose un aspect de la situation américaine (cette fois, nous écartons le qualificatif “américaniste”) où se développe une réflexion autour de cette référence qui est par définition “primordiale” et “principielle”. On voit que des esprits et des plumes sont au travail dans ce sens, éclairant une intuition qui éclaire notre temps parcouru des “Signes de la Fin des Temps”.

D’autre part, à partir de cette introduction avec ses données fondamentales, Crooke décrit, à partir d’auteurs essentiels, leurs interférences opérationnelles dans la situation politique actuelle aux USA, dans la “guerre civile en cours”. En même temps, on comprend bien la précision qui est faite selon laquelle cette interprétation essentielle de la situation US, notre “Rome postmoderne”, peut évidemment être étendue à d’autres territoires, d’autres ensembles, d’autres communautés et d’autres nations, parce qu’il s’agit du destin commun de l’effondrement d’une civilisation universelle et absolument perverse et de son remplacement. Tout cela fait une excellente illustration de l’évolution accélérée des dimensions catastrophiques de l’époque eschatologique que nous vivons.

Le titre original de Alastair Crooke sur Strategic-Culture.org du 4 mars 2019 était « US Conservatives Pursue a ‘Ben Option’ of Global Ramification ». Nous lui avons substitué la première phrase du texte.
dde.org
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« Sommes-nous Rome ? »

Sommes-nous ‘Rome’? La question prend aujourd’hui une place considérable dans l'esprit des conservateurs, des libertaires et des catholiques américains lors de leurs diverses conférences. L’Amérique suit-elle le destin de l’empire romain ? Décadence bureaucratique, dette publique massive, armée surchargée, système politique apparemment incapable de relever les défis ; « l’empire romain sur sa fin a souffert de ces maladies, et certains craignent que ce soit également le cas de l'Amérique contemporaine », note The American Conservative, une publication qui poursuit cette “ligne” éditoriale avec constance et avec un lectorat en constante augmentation depuis plusieurs années. (Notez que ce n’est pas la conception du vice-président Pence, qui argumente avec insistance à propos de ce qui est littéralement une Rédemption évangélique imminente, avec la politique dite de Rapture.)

The American Conservative choisit de façon très différente de sonner l’alarme :

« Si les libertaires de droite s'inquiètent de l’effondrement structurel, les conservateurs culturels et religieux ajoutent une dimension morale et spirituelle au débat. La montée de l'hédonisme, le déclin de l'observance religieuse, la séparation continue de la famille et la perte générale de cohérence culturelle, – pour les traditionalistes, ce sont les signes annonciateurs d’un âge des ténèbres. »

Et voici leur narrative en réponse à ces craintes : Vers l’an 500, une génération après la déposition du dernier empereur romain par les Francs, un jeune homme ombrien (originaire de la province de l’Ombrie, en Italie), fut envoyée à Rome par ses riches parents pour terminer ses études. Dégoûté par la décadence de Rome, il s’enfuit dans la forêt pour se faire ermite et choisir un destin de prière et de méditation.

Il s'appelait Benoît. Il fonda ensuite une douzaine de communautés monastiques et écrivit ses fameuses “règles” auxquelles on attribue le mérite d'avoir aidé la culture menacée et ses valeurs à survivre dans ces temps difficiles. Le professeur Russell Hittinger a résumé la leçon de Benoît dans l’âge des ténèbres : « Comment vivre la vie pleinement et complètement ? En écartant la recherche du succès dans le monde, au profit de la recherche du succès humain. »

Comment l’exemple d’un moine médiéval pourrait-il être pertinent pour notre époque laïque ? Parce que, dit le philosophe de la morale Alasdair MacIntyre, cette référence démontre qu'il est possible de construire « de nouvelles formes de communauté au sein desquelles la vie morale pourrait se maintenir » pendant un âge des ténèbres, – y compris, peut-être, un âge comme le nôtre.

MacIntyre propose la « suggestion inquiétante » selon laquelle la teneur du débat moral d'aujourd'hui (sa stridence et son interminabilité) est le résultat direct d'une catastrophe par rapport à notre passé ; une catastrophe si grande que son examen critique moral a été presque effacée de notre culture et de notre vocabulaire, exorcisé dans notre langue. Il fait référence aux “Lumières européennes”. Ce que nous possédons aujourd'hui, soutient-il, ne sont que des fragments d'une tradition plus ancienne. En conséquence, notre discours moral, qui utilise des termes tels que “bien”, “justice” et “devoir”, a été dépouillé du contexte qui le rend intelligible.

« Pour MacIntyre », écrit Rod Dreher, auteur de The Benedict Option, « Nous vivons une catastrophe semblable à celle de la chute de Rome, dissimulée par notre liberté et notre prospérité ». Dreher poursuit: « Dans son livre capital, ‘After Virtue’, publié en 1981, MacIntyre affirmait que le projet des Lumières avait coupé l’homme occidental de ses racines dans la tradition, mais il n’était pas parvenu à produire une morale contraignante fondée sur la seule raison. De plus, les Lumières vantaient l'individu autonome. Par conséquent, nous vivons dans une culture de chaos moral et de fragmentation dans laquelle de nombreuses questions sont tout simplement impossibles à régler. MacIntyre dit que notre monde contemporain est une forêt plongée dans l’obscurité et que, pour retrouver notre juste chemin, il faudrait créer de nouvelles formes de communauté ».

« L’‘option Benedict’ [‘option Benoît’] fait donc référence à [ceux] qui, dans l’Amérique contemporaine cessent d’identifier la continuation de la civilité et de la communauté morale avec le maintien de l’Empire américain et qui, par conséquent, souhaitent construire des formes de communauté locales en tant que lieux de résistance chrétienne contre ce que représente l'empire. En d’autres termes, l’option Benedict, – ‘BenOp’ – est un terme générique pour les chrétiens [et les conservateurs américains], qui acceptent la critique de MacIntyre sur la modernité ».

Le BenOp n’appelle pas le monachisme. Il est envisagé, en quelque sorte, comme un moyen plus pratique pour les Américains qui ont cette perception fondamentale de gérer la modernité d’aujourd’hui. Et… Où avons-nous entendu quelque chose comme ça auparavant ? Eh bien, dans les réflexions du philosophe politique italien Julius Evola, dans ses réflexions d’un traditionalisme radical de l’après-guerre, – L’homme au milieu des ruines, – dans lequel il plaide pour une défense et une résistance contre le désordre de notre époque. Ce sont les écrits d’Evola et d’autres auteurs du même genre [de défenseurs de la Tradition primordiale] qui ont soutenu les intellectuels russes tout au long de leur période sombre du communisme tardif, puis du néolibéralisme sauvage. Des impulsions largement similaires ont contribué à faire avancer le concept d'eurasianisme (bien que ses racines remontent aux années 1920 en Russie).

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Alastair Crooke
 
Ce dernier point reflète la tendance contemporaine, manifestée plus particulièrement par la Russie, mais allant bien au-delà de la Russie, au soutien du pluralisme (l’axe principal du “populisme” contemporain) ; autrement dit, la “diversité” qui privilégie précisément la culture, les récits nationaux, la religiosité et les liens de sang, de terre et de langue. Cette idée est tout à fait conforme à l'argument de MacIntyre, à savoir que seule la tradition culturelle donne un sens à des termes tels que “bien”, “justice”, etc. « En l'absence de traditions, le débat moral est dissocié et devient un théâtre d'illusions dans lequel la simple indignation et la simple protestation occupent le devant de la scène. »

L’idée est qu’il s'agit plutôt d'un groupe de “nations” et de “communautés”, chacune renouant avec ses cultures et ses identités primordiales, – c'est-à-dire que l'Amérique est “américaine” dans sa propre “voie culturelle” américaine (ou russe, dans sa propre voie), – et se refusant d’être absorbée et dissoute en succombant à la coercition d’un ensemble où les diversités se dissolvent, d’un empire cosmopolite.

Il est clair que cela ne va pas du tout dans le sens de la tendance générale américaine d’un ordre globaliste conforme aux règles de cette dynamique. C’est aussi un rejet catégorique de l’idée que le cosmopolitisme du “melting pot” puisse créer toute identité véritable ou tout fondement moral. En effet, « sans la notion de telos (directionnalité et détermination de la vie humaine) servant de moyen de triangulation morale, les jugements de valeur morale perdent leur caractère factuel. Et, bien sûr, si les valeurs sont privées de “faits” pour les substantiver, aucun appel à des faits ne pourra jamais régler un désaccord sur une valeur ».

Dreher est explicite à propos de cette opposition radicale. Il dit de BenOp : « Vous pourriez même dire que c’est une appréciation des possibilités progressives de la tradition et un retour aux racines, – contre une époque sans racines. »

Et pour ne laisser planer aucune ambiguïté, il est noté que les conservateurs américains qui pensent avoir trouvé un allié “facile” dans MacIntyre montrent qu’« ne parviennent pas à comprendre le type de politique nécessaire pour préserver les vertus [toute qualité requise pour se frayer un chemin dans la vie]. »

« MacIntyre précise que son problème avec la plupart des formes de conservatisme contemporain est que les conservateurs reflètent les caractéristiques fondamentales du libéralisme. L'engagement conservateur envers un mode de vie structuré par un marché libre aboutit à un individualisme, et en particulier à une psychologie morale, aussi antithétique à la tradition des vertus que le libéralisme. En outre, conservateurs et libéraux tentent tous deux d’utiliser le pouvoir de l’État moderne pour soutenir leurs positions d’une manière qui est totalement étrangère à la conception de MacIntyre des pratiques sociales nécessaires au bien commun ».

Ce qui est très intéressant pour un étranger, c’est la façon dont l'auteur de BenOp, Dreher, le situe dans le contexte politique américain :

« Beaucoup d’entre nous de droite qui avons été consternés par le Trumpening(sic) et qui ont été durement frappés par la débâcle de Kavanaugh ont conclu [néanmoins] que nous n’avions d’autre choix que de voter républicain en novembre [2018] par réflexe d’auto défense. »

benedict.jpgMais permettez-moi de citer deux passages de The Benedict Option :

« La gauche culturelle, – c'est-à-dire le courant dominant américain, – n'a pas l'intention de vivre dans la paix d’un après-guerre. Elle entend exercer une pression continue comme si elle exerçait une occupation dure et implacable du pays, aidée en cela par l’inconscience des chrétiens [i.e. ceux qui reflètent le libéralisme], qui ne comprennent rien à ce qui se passe. Ne vous laissez pas berner: la victoire à la présidentielle de Donald Trump nous a au mieux laissé un peu plus de temps pour nous préparer à l’inévitable » [souligné ajouté].

« [Ceux] qui croient que la politique seule suffira ne seront pas préparés à ce qui va se passer lorsque les républicains perdront la Maison Blanche et / ou le Congrès, ce qui est inévitable. Notre politique est devenue si furieuse qu’il y aura une surenchère vicieuse et méchante, et cette surenchère s’exercera principalement contre les conservateurs sociaux et religieux. Lorsque les démocrates reprendront le pouvoir, les chrétiens conservateurs vont connaître des temps extrêmement durs. ».

BenOp, en d’autres termes, est une autre façon de décrire de ce que le professeur Mike Vlahos a décrit comme “un regroupement” pour un prochain chapitre de la “guerre civile” non résolue de l’Amérique : « L’Amérique aujourd’hui est divisée en deux visions du mode de vie futur de la nation : le “Rouge”, dont la vertu est constituée de la continuité de famille et de la communauté au sein d'une communauté nationale affirmée publiquement. La vertu du “Bleu” envisage des communautés choisies individuellement et régies par des médiations déterminées par les relations entre l’individu et l’État. Certes, ces deux visions antagonistes de l'Amérique s’opposent depuis des décennies et contrôlent jusqu'à présent plus ou moins la violence potentielle de cette opposition mais il existe désormais [aujourd’hui] le sentiment de la nécessité de se rassembler de chaque côté pour la lutte finale ».

« Aujourd’hui, deux chemins qui se jugent également vertueux sont enchaînés dans une opposition irréversible… Rouge et Bleu représentent déjà un schisme religieux irréparable, plus profond en termes doctrinaux même que le schisme catholique-protestant du XVIe siècle. Ici, la guerre porte sur la faction qui réussit à conquérir l’étendard des médias sociaux, pour se proclamer comme le véritable héritier de la vertu américaine. Tous deux se considèrent comme des champions du renouveau national, de la purification des idéaux corrompus et de la réalisation de la promesse de l’Amérique. Tous deux croient fermement qu'ils sont les seuls à posséder la vertu. »

Nous pourrions en conclure que cette formule du BenOp n’est qu’une manifestation exclusivement américaine, d’un intérêt réduit pour le reste du monde. Nous aurions tort. Tout d'abord, MacIntyre identifie l’origine de la tradition morale dans la littérature Traditionaliste Homérique (c'est-à-dire jusqu'à ses racines présocratiques) et dans cette “société héroïque” comme dépositaire des appréciations morales liées aux valeurs éternelles. Il s’agit de Grands Récits avec la singulière vertu de s’incarner dans la vie de la communauté qui les chérit, et faisant de cette communauté “un personnage” dans un récit moral historiquement étendu.

En d'autres termes, BenOp n'est pas du tout rattaché exclusivement au christianisme. MacIntyre suggère plutôt que le récit fournit une meilleure explication de l’unité d’une vie humaine particulière. Le moi a une continuité parce qu'il a tenu le rôle du personnage unique et central dans une histoire particulière : c’est le récit de la vie d’une personne. MacIntyre exprime cela de cette façon : « En assumant ces rôles, nous devenons simultanément des sous-parcelles dans les histoires de la vie des autres, tout comme ils deviennent des sous-parcelles dans la nôtre. De cette manière, les histoires de la vie des membres d’une communauté sont enchevêtrées et imbriquées. L’enchevêtrement de nos histoires est le tissu de la vie en commun… Car l’histoire de ma vie est toujours enracinée dans l’histoire de ces communautés dont je tire mon identité. » Ici, nous sommes directement renvoyés à Homère.

Mais deuxièmement, si nous faisions de l’ethnicité et du genre un choix personnel (et par conséquent jamais définitif) il nous manquerait quelque chose d’essentiel qui lie l’impulsion de BenOp à la résistance plus large contre les globalistes millénaires d’aujourd’hui qui fondent leur “rédemption” dans un processus téléologique consistant à “dissoudre” leur identité culturelle.

Cette critique, émanant d’un importante groupe conservateur américain qui vote Trump mais qui est conscient de ses inconvénients, est susceptible de s’étendre plus largement vers d’autres groupes non américains. Comme le note Rod Dreher, qui a lancé cette campagne dès 2006, des membres de ses groupes différents comprennent déjà sa portée plus large. Dreher observe :

« Au fait, je ne suis pas catholique non plus. Et alors? Nous, les orthodoxes, réclamons [Benoît] comme l'un des nôtres, comme le sont tous les saints du pré-schisme. Mais peu importe. [Les chrétiens] doivent approfondir l'histoire de l'Église pour trouver les ressources nécessaires pour résister aux pressions de la modernité. Saint Benoît est l’un d’entre eux. En raison de la diversité de nos ecclésiologies, un BenOp catholique serait différent d'un protestant et un orthodoxe serait également différent. Cela n’importe pas. En fonction de telos de chaque interprétation du BenOp, nous devrions pouvoir travailler ensemble de manière œcuménique. » 

Alastair Crooke

mardi, 05 mars 2019

Edelweiss De Archeo-Futuristische Europese Rijksgedachte aan de hand van Robert Steuckers’ Europa I. Valeurs et racines profondes de l’Europe

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Edelweiss

De Archeo-Futuristische Europese Rijksgedachte aan de hand van Robert Steuckers’ Europa I. Valeurs et racines profondes de l’Europe

(Madrid: BIOS, 2017)

door Alexander Wolfheze

Voorwoord: Slangtong in Zürich

RS-trilogievol1.jpgDe aanstaande Europese verkiezingen, waarmee het globalistisch-eurocratisch regime in Brussels zich nogmaals vier jaar een ‘democratische’ dekmantel wil aanmeten, biedt een goede gelegenheid tot een gedegen heroverweging van het ‘EU project’. De democratische camouflagekleding van het EU keizerrijk is inmiddels echter zodanig afgedragen dat zelfs troonopvolger kandidaat Mark Rutte zich afvraagt of het niet tijd is om het gewoon maar om te kleden in onverhuld totalitaire ‘uniform’ stijl. De titel van zijn op 13 februari 2019 in Zürich uitgesproken - en door analisten als ‘sollicitatiebrief’ nummer zoveel geïnterpreteerde[1] - ‘Churchill Lezing’ spreekt in dit opzicht boekdelen: The EU: from the power of principles towards principles and power.[2] Ofwel: ‘De EU: van de macht van principes naar principes en macht’. ‘Naar machtsprincipe’ zegt hij nog net niet, maar de inhoud windt er geen doekjes om: ‘het gaat in de wereld om macht en macht is geen vies woord’ (lees: de EU heeft machtsmiddelen die onvoldoende worden gebruikt), ‘de EU moet minder naïef zijn en meer realisme tonen’ (lees: het is tijd voor de EU het idealistisch masker laat vallen) en ‘we moeten besluiten over sancties tegen landen voortaan met een gekwalificeerde meerderheid nemen’ (lees: de resterende staatssoevereiniteit van de lidstaten moet nog verder worden verkleind). En inderdaad ontwikkelt de EU zich steeds meer in de richting van een ‘superstaat’: de gestage accumulatie van censuurmaatregelen in de mediale en digitale sfeer met hate speech codes,[3] fake news taskforces[4] en copyright directives[5] neemt inmiddels Orwelliaanse vormen aan. Met de totalitaire finish lijn van het EU project in zicht, is het goed de historische ontwikkeling en ideologische grondslagen ervan nog eens de revue te laten passeren.

Het Verdrag van Maastricht dat de formele grondslag legde voor de huidige Europese Unie werd getekend op 7 februari 1992, zes weken na de formele opheffing van de Sovjet Unie: zo begon de opbouw van het nieuwe cultuurmarxistische Westblok direct na de afbraak van het oude reaalsocialistische Oostblok. Sindsdien heeft de EU zich niet alleen naar buiten toe sterk uitgebreid (met name door de haastige inlijving van de net uit het Oostblok ontsnapte Centraal-Europese natiestaten), maar zij heeft zich ook in rap tempo als proto-totalitair ‘superstaat’ project naar binnen toe ontwikkeld tot een waardige opvolger van de Sovjet Unie. De overeenkomsten zijn in toenemende mate frappant: dezelfde sociale ‘deconstructie’ (Oostblok: hyper-proletarisch collectivisme / Westblok: neo-matriarchale nivellering), dezelfde economische ‘deconstructie’ (Oostblok: ‘dwangcollectivisatie’ / Westblok: ‘rampen kapitalisme’) en dezelfde etnische ‘deconstructie’ (Oostblok: ‘groepsdeportatie’ / Westblok: ‘omvolking’). De tegenstelling tussen het theoretisch discours van het liberaal-normativisme (‘vrijheid’, ‘gelijkheid’, ‘democratie’, ‘rechtsstaat’, ‘mensenrechten’) en de praktische leefrealiteit van maatschappelijke degradatie (sociaal-darwinistische economische tweedeling, sociale implosie, institutionele corruptie, endemische criminaliteit, etnische vervanging) neemt in het huidige Westblok even groteske vormen aan als in het voormalige Oostblok. In zeker opzichten is het Westblok zelfs verder doorgeschoten in de richting van een ‘superstaat’: zo staat de EU vlag in alle lidstaten obligaat naast de nationale vlag - een directe degradatie van nationale waardigheid die zelfs de formeel onafhankelijke Sovjet satellietstaten bespaard bleef.

AFut-1.pngMet deze escalerende discrepantie tussen theorie en praktijk is de heersende klasse van het Westblok - een globalistisch-eurocratisch opererende coalitie tussen het neoliberale grootkapitaal en de cultuurmarxistische intelligentsia - inmiddels verworden tot een regelrecht vijandelijke elite. Haar EU project heeft ontpopt zich tot een voor allen zichtbaar globalistisch anti-Europa project. Voor het overleven van de Europese beschaving en van de Europese inheemse volkeren die deze beschaving dragen is de verwijdering van de vijandelijke elite absolute noodzaak. Daarbij is een fundamentele (cultuurhistorische, politiekfilosofische) kritiek op haar ideologie van essentieel belang. Een belangrijke bijdrage tot deze kritiek is recent geleverd door Belgisch Traditionalistisch publicist Robert Steuckers - een passender ‘verkiezingswijzer’ voor de ‘Europese verkiezingen’ van mei 2019 dan zijn grote trilogie Europa is nauwelijks denkbaar. Dit essay beoogt Steuckers’ analyse van de echte kernwaarden en identitaire wortels van Europa, zoals vervat in het eerste deel van zijn nog niet uit het Frans vertaalde trilogie, onder de aandacht van het Nederlandstalige publiek te brengen. Steuckers’ Europa I biedt meer dan een grondige tegen-analyse van de postmoderne ‘deconstructie’ van Europa’s authentieke waarden en identiteiten: het biedt een heldere formule van een levensvatbaar alternatief: een Archeo-Futuristisch geïnspireerd ‘Europa van de volkeren’ gebaseerd op de complementaire principes van autonome volksgemeenschappen, consistente politieke subsidiariteit en pragmatische confederatieve structuren. Het moet nogmaals gezegd zijn: de patriottisch-identitaire beweging van de Lage Landen is Robert Steuckers grote dank verschuldigd - en een hartelijke felicitatie met een werk dat de gewoonlijk nogal bescheiden intellectuele begrenzingen van onze gewesten verre te boven gaat.

(*) Zoals de voorafgaande ‘Steuckers recensies’[6] is dit essay niet alleen bedoeld als boekbespreking, maar ook als metapolitieke analyse - een bijdrage tot de patriottisch-identitaire tegen-deconstructie van het door de Westerse vijandelijke elite gehanteerde postmoderne deconstructie discours. De kern van dit essay is een samenvatting door Steuckers’ Traditionalistisch geleide exploratie van de Europese identiteit. Die exploratie zet een definitieve punt achter de postmoderne deconstructie van die identiteit en het aldus bewerkstelligde cultuurhistorische tabula rasa stelt de patriottisch-identitaire beweging in staat een revolutionair nieuwe invulling te geven aan het idee ‘Europa’. Een Archeo-Futuristisch Europa ligt daarmee feitelijk binnen intellectueel handbereik.

(**) Dit essay belicht ‘casus Europa’ in drie stappen: het eerste drietal paragraven beoogt diagnostische ‘nulmetingen’, het tweede drietal paragraven geeft therapeutische ‘referentiepunten’ en de zevende paragraaf indiceert een concreet ‘behandelplan’. In eerste en laatste paragraven schetst de recensent het grotere Archeo-Futuristische kader weer waarbinnen Steuckers’ exploratie van de Europese identiteit relevant is voor de patriottisch-identitaire beweging - de eigenlijke ‘recensie’ van Steuckers’ Europa I vindt de lezer in paragraven 2 t/m 6.

(***) Voor een toelichting op de gekozen (ver)taal(vorm) en (voet)noten(last) wordt verwezen naar het voorwoord van de voorafgaande ‘Steuckers recensies’.

1.

Het rode onkruid

(psycho-historische diagnose)

‘Over Your Cities Grass Will Grow’[7]

wells.jpgH.G. Wells’ eeuwig groene meesterwerk The War of the Worlds blijft tot op de dag van vandaag niet alleen een van de grootste werken van het hele literaire science fiction genre: het behoudt ook tot op de dag van vandaag een directe - veelal alleen onderbewust, instinctief erkende - relevantie voor de existentiële conditie van de Westerse beschaving.[8] Wells’ magistrale sfeerimpressie van de Earth under the Martians schetst een wereld waarin de mens alle herkenning- en referentiepunten verliest: de menselijke beschaving wordt weggevaagd door superieure buitenaardse technologie, de mensheid zelf wordt gereduceerd tot slachtvee voor een buitenaardse bezettingsmacht en zelfs de aardse natuur wordt verdrongen door buitenaardse vegetatie. Een griezelig ‘rood onkruid’ - in verwijzing naar de rode kleur van de oorlogsplaneet Mars - overwoekert de ruïnes van de menselijke beschaving en verstikt de restanten van de aardse vegetatie.[9] Literaire analyses van The War of the Worlds erkennen dat Wells’ meesterwerk op aannemelijk wijze kan worden geïnterpreteerd als een serie retrospectieve en contextuele psycho-historische ‘bespiegelingen’. Zo projecteert Wells de in zijn tijd recent afgeronde en sociaaldarwinistisch geïnterpreteerde genocide van ‘primitieve volkeren’ (zoals de inheemse bevolking van Tasmanië)[10] door het ‘blanke meesterras’ op een hypothetische uitroeiing van de mensheid door superieur buitenaards ras. Ook projecteert hij de mensonterende horreur van de in zijn tijd opkomende bio-industrie op een hypothetische ‘slachtvee status’ van de mensheid na een buitenaardse invasie. Waar de meeste literaire analyses zich echter niet mee bezig houden is de voorspellende waarde van Wells’ werk, een waarde die het ontleent aan de voorwaartse projectie van meerdere - en gelijktijdige - technologische en sociologische ontwikkelingstrajecten. Wells’ geniale literaire verpakking van deze projecties geeft zijn ‘wetenschappelijke fictie’ een kwaliteit die in eerdere eeuwen als ‘profetisch’ zou hebben gegolden.

De existentiële breuklijnen die de Moderniteit heeft veroorzaakt in de Westerse beschaving kunnen worden geanalyseerd - en deels ook vooruit geprojecteerd - met verschillende moderne wetenschappelijk modellen: economisch als Entfremdung (Karl Marx), sociologisch als anomie (Emile Durkheim), psychologisch als cognitive dissonance (Leon Festinger) en filosofisch als Seinsvergessenheit (Martin Heidegger). De metapolitieke relevantie van deze analyses voor de Westerse patriottisch-identitaire bewegung ligt niet zozeer in hun - al dan niet ideologisch negatieve - ‘deconstructieve’ capaciteit, als wel in hun simpele diagnostische waarde. Hierin ligt een belangrijke overeenkomst tussen deze moderne wetenschappelijke modellen en moderne artistieke ‘modellen’ zoals Wells’ meesterwerk The War of the Worlds: door ‘maatschappelijke signalen’ te interpreteren dienen ze als metapolitieke ‘verkeersborden’ - en als waarschuwingen. Inmiddels is de accumulatieve impact van de Moderniteit op de Westerse samenlevingen echter zó groot geworden, dat de existentiële conditie van de Westerse volkeren niet langer in termen van authentieke beschavingscontinuïteiten en historische standaardmodellen kan worden beschreven. Wanneer afwijking, aberratie en ontsporing een existentiële conditie volledig bepalen, dan is er immers niet langer sprake van een historische herkenbare ‘standaard’. Wanneer wetenschappelijke ‘waarschuwingsborden’ worden genegeerd, dan komen artistiek ‘voorspelde’ dystopische eindbestemmingen in zicht. Niet voor niets wordt deze fase van de (ex-)Westerse beschavingsgeschiedenis getypeerd als ‘post-modern’: de (ex-)Westerse samenlevingen van nu hebben authentieke beschavingscontinuïteit grotendeels achter zich gelaten en bewegen zich versneld in de richting van existentiële condities die overeenkomsten vertonen die van Wells’ Earth under the Martians.

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De nieuwe ‘globalistische’ heersersklasse van het Westen staat nu in effectief boven en los van de Westerse volkeren, zij is alleen nog ‘verbonden’ met deze volkeren in de uitwerking van haar macht. De vijandelijke elite acht zichzelf nu niet alleen ethisch en esthetisch, maar ook en vooral evolutionair verheven boven de ‘massa’ die zij is ‘ontgroeit’.[11] De consistent negatieve effecten van haar machtsuitoefening - hoofdrichtingen: neo-liberale uitbuiting, industriële ecocide, bio-industriële dierkwellerij, cultuur-marxistische deconstructie, sociale implosie, etnische vervangingsstrategieën - maken haar herkenbaar als een letterlijk vijandelijke elite. Zij kent geen sympathieën – niet voor haar autochtone vijanden, niet voor haar allochtonen dienaren en niet voor haar aardse thuis.  The globalists are at war with humanity as a whole. They seek to eliminate or enslave at will. They care about themselves and themselves alone. They are committed to concentrating all wealth in their hideous hands. In their evil eyes, our only purpose is to serve them and enrich them. Hence, there is no room for racism, prejudice, and discrimination in this struggle. It is not a race war but a war for the human race, all included, a socio-political and economic war of planetary proportions (Jean-François Paradis).[12]

De globalistische en dus anti-Europese geopolitieke strategie van de vijandelijke elite (gericht op industriële delokalisatie, sociale atomisering en culturele ontworteling, verg. Steuckers 223ff.) mag als zodanig - als sociaaleconomische en psychosociale oorlogsvoering - worden erkend door een handjevol patriottisch-identitaire denkers, maar zij wordt door de Westerse volksmassa alleen begrepen in haar uitwerkingen: economische marginalisatie (arbeidsmarktverdringing, kunstmatige werkeloosheid, interetnische tribuutplicht), sociale malaise (matriarchale anti-rechtstaat, gezinsontwrichting, digitale pornificatie) en culturele decadentie (onderwijs ‘idiocratie’, academische ‘commercialisering, ‘politiekcorrecte’ mediaconsensus). Deze economische, sociale en culturele ‘deconstructie’ programma’s worden door de vijandelijke elite kracht bijgezet en onomkeerbaar gemaakt door een zorgvuldig gedoseerd, maar inmiddels kritieke proporties aannemend proces van massa-immigratie. Het proces van etnische vervanging heeft tot doel de Westerse volkeren als etnisch, historisch en cultureel herkenbare eenheden te elimineren door ze als geatomiseerde déracinés ‘op te lossen’ in la boue,[13] de ‘modder’ van identiteitsloze, karakterloze en willoze massamens. Dit proces van etno-culturele, sociaal-economische en psycho-sociale totaal-nivellering beoogt - prioritair richting Europa - de ultieme Endlösung van het kernprobleem van de Nieuwe Wereld Orde, dat wil zeggen van het automatisch anti-globalistisch voortbestaan van authentieke identiteiten op collectief niveau. Concreet wordt deze Endlösung gerealiseerd in totalitair geïmplementeerde etnocidale ‘multiculturaliteit’ en anti-identitaire ‘mobocratie’.

De motivaties en doelstellingen van de vijandelijke elite onttrekken zich feitelijk aan het voorstellingsvermogen van de Westerse volksmassa - ze gaan in zekere opzichten het gewone menselijk verstand ‘te boven’. Hun ‘niet-aardse’ en ‘diabolische’ kwaliteit wordt echter in toenemende mate waarneembaar in hun concrete uitwerkingen.[14] Elders werd de ideologie van de vijandelijke elite gedefinieerd als ‘Cultuur Nihilisme’: een geïmproviseerde ideeëncocktail die zich kenmerkt door militant secularisme, sociaal-darwinistisch hyper-individualisme, collectief geïnternaliseerd narcisme en doctrinair cultuur- relativisme die uitmondt in de vernietiging van alle authentieke Westerse beschavingsvormen.[15] Het feit dat de volksmassa niet in staat het Cultuur Nihilisme als ideologie en programma te begrijpen heeft veel te maken met de opzettelijke ‘ongrijpbaarheid’ ervan: de expliciete motivaties en doelstellingen van de vijandelijke elite zijn intentioneel on-logisch en anti-rationeel. Het enige wat voor de vijandelijke elite telt is haar macht - haar zogenaamde ‘ideeën’ zijn slechts manoeuvres om de macht te krijgen, te behouden en te vergroten: ze dienen te worden begrepen in het kader van cognitieve oorlogsvoering.

Een goed voorbeeld van deze cognitieve oorlogsvoering is het huidige ‘klimaatdebat’: de door de vijandelijke elite uitgestippelde ‘partijkartel lijn’ beroept zich op Gutmensch eco-bewustzijn, maar het op basis van deze lijn via nieuwe ‘klimaatbelastingen’ aan de volksmassa opgelegde ‘straftarief’ wordt exclusief aangewend voor het ‘investeren’ in het commerciële ‘klimaat bedrijf’ – en het subsidiëren van politiek-correcte ‘klimaat clubs’. Het onvermijdbare verzet van de volksmassa wordt vervolgens cognitief ‘weggesluisd’ naar een subrationeel ‘klimaatontkenning’ discours dat wordt toegeschreven aan – en zelfs opportunistisch wordt opgeëist door – de ‘populisten’, activistisch (Frankrijk’s ‘gele hesjes’) dan wel parlementair (Baudet’s ‘0,00007 graden’). De daarbij succesvol bewerkstelligde opgelegde cognitieve dissonantie inzake ‘klimaat’ gaat zover dat men in de volksmassa het verdwijnen van winterijs en het toeslaan van februarilentes instinctief wegredeneert. De balanceerakte van de vijandelijke elite is feilloos: de ‘populistische oppositie’ is blij met een paar extra zeteltjes maar verspeelt haar échte moreel aanzien, de volksmassa is blij nog een paar jaartjes ‘dansen op de vulkaan’ met vakantievliegen en autorijden en de vijandelijke elite is blij dat haar ‘economische groei’ ongestoord oploopt – en met de extra ‘klimaatbelastingen’ die kunnen worden aangewend voor ‘commerciële aanbestedingen’ en, natuurlijk, ‘klimaat vluchtelingen’. Ondertussen loopt de ecocidale klok van antropogene aardopwarming en meteorologische catastrofes gewoon door - naar de final countdown.

wwow.jpgDe Westerse volksmassa erkent per saldo wel instinctief de globalistische grootheidswaanzin van de vijandelijke elite - deze instinctieve erkenning wordt door de elitaire intelligentsia veelal neerbuigend afgedaan als ‘onderbuikgevoel’ en de politieke vertaling ervan wordt al even neerbuigend betiteld als ‘populisme’. Deze ultiem demofobe arrogantie mag lang werken, maar er zal uiteindelijk wel een hoge prijs op staan: de Westerse volkeren ervaren het globalistische regime van de vijandelijke elite nu al in toenemende mate als een regelrechte ‘bezettingsmacht’. Men begint de alles verstikkende macht van de vijandelijke elite te zien voor wat zij is: een wezensvreemd ‘rood onkruid’ dat de Westerse beschaving en het Westerse thuisland versmoort.

I had not realised what had been happening to the world, had not anticipated this startling vision of unfamiliar things. I had expected to see... ruins - I found about me the landscape, weird and lurid, of another planet. For that moment I touched an emotion beyond the common range of men, yet one that the poor brutes we dominate know only too well. I felt as a rabbit might feel returning to his burrow and suddenly confronted by the work of a dozen busy navvies digging the foundations of a house. I felt the first inkling of a thing that presently grew quite clear in my mind, that oppressed me for many days, a sense of dethronement, a persuasion that I was no longer a master, but an animal among the animals, under [alien rule]. With us it would be as with them, to lurk and watch, to run and hide; the fear and empire of man had passed away. - Herbert George Wells, The War of the Worlds

2.

De Europese kata-morfose

(politiek-filosofische diagnose)

Impia tortorum long[o]s hic turba furores sanguinis innocui, non satiata, aluit.

Sospite nunc patria, fracto nunc funeris antro, mors ubi dira fuit,

vita salusque patent.

[Hier voedde een goddeloze en onverzadigbare meute beulsknechten

hun lange waanwoedes met het bloed der onschuldigen.

Pas nu het vaderland veilig is, nu deze moordkelder opengebroken is,

zijn leven en gezondheid weer mogelijk.][16]

Na een halve eeuw systematische sloop van staatsstructuren en volksidentiteiten is het Europese politieke, economische, sociale en culturele landschap nagenoeg onherkenbaar veranderd. Decennialange neoliberale woeker en cultuurmarxistische wildgroei hebben als Europa als een ‘rood onkruid’ in hun greep en vroeger onvoorstelbare ‘maatschappelijke vormen’ zijn ontstaan. Hypermobiel ‘flitskapitaal’ levert kortstondige economische bubbels op waarin zich architecturale, artistieke en modieuze monstruositeiten nestelen, met name in central business districts, leisure time resorts en academic campus environments. Etnische ‘diversiteit’ resulteert in sociaaleconomische netwerken die als ‘invasieve exoten’ de Westerse publieke sfeer overwoekeren: diaspora economieën, drugsmaffia’s, polycriminele subculturen. Deze netwerken worden aangevuld door on-Westerse ‘levensovertuigelijke’ instituties: de door Midden-Oosters oliekapitaal aangestuurde awqāf,[17] de uit belastingtribuut bekostigde ‘asielindustrie’ en de door globalistisch kapitaal aangestuurde systeemmedia. Wat deze door de vijandelijke elite effectief gedoogde en gefaciliteerde netwerken en instituties met elkaar verbindt is hun gemeenschappelijke functionaliteit: hun rol als vervangingsmechanismen ter bewerkstelligen van de Nieuwe Wereld Orde. Hierbij valt een cruciale voortrekkersrol toe aan die schwebende Intelligenz: de cultuur-marxistische intelligentsia die zich opwerpt als globalistische avant-garde. Deze intelligentsia is belast met de bovenruimtelijke en im-materiële deconstructie die voorafgaat aan de ruimtelijke en materiële deconstructie van de Westerse beschaving. Deze ‘spirituele’ en ‘intellectuele’ voorsprekers van het globalistische bezettingsregime ...se nichent dans [l]es trois milieux-clefs - média, économie, enseignement - et participent à la élimination graduelle mais certaines des assises idéologiques, des fondements spirituels et éthiques de notre civilisation. Les uns oblitèrent les résidus désormais épars de ces fondements en diffusant une culture de variétés sans profondeur aucune, les autres en décentrant l’économie et en l’éclatant littéralement par les pratiques de la spéculation et de la délocalisation, les troisièmes, en refusant l’idéal pédagogique de la transmission, laquelle est désormais interprétée comme une pratique anachronique et autoritaire, ce qu’elle n’est certainement pas au sens péjoratif que ces termes ont acquis dans le sillage de Mai 68. [...hebben zich genesteld in [de] drie sleutelposities [van de globalistische macht] - de media, de economie [en] het onderwijs - en zij werken van daar uit aan de langzame maar zekere eliminatie van de ideologische, spirituele en ethische fundamenten van onze beschaving. Sommigen van hen werken aan het wegwissen van de toch al uiteengevallen fundament restanten door een oppervlakkige ‘culturele diversiteit’ te verspreiden. Anderen [werken aan] de ‘decentralisatie’ van de economie door haar letterlijk op te blazen door middel van speculatie en dislokalisatie. Weer anderen [werken aan] de sabotage van het pedagogische ideaal van [culturele] transmissie door [dat ideaal] af te doen als een ‘verouderde’ en ‘autoritaire’ praktijk door [gebruik te maken van] de negatieve betekenis waarmee deze termen zijn belast in de nasleep van mei ’68.] (p. 262-3)

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De globalistische intelligentsia coördineert middels geraffineerde alien audience propaganda strategieën de cognitieve oorlogsvoering van de vijandelijke elite tegen de Westerse volkeren: zij bewerkstelligt de liberaal-normativistische habitus van exclusief ‘economisch denken’ dat de fysieke deconstructie van Westerse beschavingsvormen rechtvaardigt. ...[U]ne économie ne peut pas, sans danger, refuser par principe de tenir compte des autres domaines de l’activité humaine. L’héritage culturel, l’organisation de la médecine et de l’enseignement doivent toujours recevoir une priorité par rapport aux facteurs purement économiques, parce qu’ils procurent ordre et stabilité au sein d’une société donnée ou d’une aire civilisationnelle, garantissant du même coup l’avenir des peuples qui vivent dans cet espace de civilisation. Sans une telle stabilité, les peuples périssent littéralement d’un excès de libéralisme, ou d’économicisme ou de ‘commercialité’... [Een economi[sch model] kan niet ongestraft weigeren rekening te houden met de andere domeinen van menselijke activiteit. De culturele nalatenschap, het medische zorgsysteem en de onderwijstechnische organisatie moeten altijd prioriteit krijgen boven puur economische factoren want zij verschaffen orde en stabiliteit aan een gegeven gemeenschap of beschavingssfeer: zij garanderen namelijk de toekomst van de volkeren die leven binnen die beschavingssfeer. Zonder die stabiliteit sterven d[ie] volkeren letterlijk aan een overdosis van ‘liberalisme’, ‘economisme’ en ‘commercialisme’...] (p. 216-7)

In de Europese context wordt de dubbel neoliberale en cultuurmarxistische deconstructie van de Westerse beschaving en volkeren geïmplementeerd door het in Brussel gebaseerde ‘EU project’. Dit project wordt gekenmerkt door een radicale omkering van alle traditionele noties van pan-Europese samenwerking: in metahistorische zin staat het postmoderne ‘EU project’ in structurele tegenstelling tot de klassieke Europese rijksgedachte. L’Europe actuelle, qui a pris la forme de l’eurocratie bruxelloise, n’est évidemment pas un empire, mais, au contraire, un super-état en devenir. La notion d’‘état’ n’a rien  à voir avec la notion d’‘empire’, car un ‘état’ est ‘statique’ et ne se meut pas, tandis que, par définition, un empire englobe en son sein toutes les formes organiques de l’aire civilisationnelle qu’il organise, les transforme et les adapte sur les plans spirituel et politique, ce qui implique qu’il est en permanence en effervescence et en mouvement. L’eurocratie bruxelloise conduira, si elle persiste dans ses errements, à une rigidification totale. L’actuelle eurocratie bruxelloise n’a pas de mémoire, refuse d’en avoir une, a perdu toute assise historique, se pose comme sans racines. L’idéologie de cette construction de type ‘machine’ relève du pur bricolage idéologique, d’un bricolage qui refuse de tirer des leçons des expériences du passé. Cela implique une négation de la dimension historique des systèmes économiques réellement existants, qui ont effectivement émergé et se sont développés sur le sol européen. [Het huidige ‘Europa’, zoals het vorm wordt gegeven door de Brusselse ‘eurocratie’, is duidelijk geen rijk - het is het omgekeerde: een superstaat-in-wording. De notie van een ‘staat’ staat volledig los van de notie van een ‘rijk’, want een ‘staat’ is [letterlijk] ‘statisch’ en [in zijn essentie] onbewegelijk, terwijl een rijk nu juist alle binnen de erdoor beheerste beschavingssfeer organische vormen incorporeert, omvormt en aanpast aan zijn spirituele en politieke grondslagen: [een rijk] is daardoor nu juist permanent in een staat van gisting en beweging. Als de Brusselse eurocratie voortgaat op de door haar ingeslagen [tegengestelde en] doodlopende weg, dan zal zij uitlopen op een totale ‘verstening’. De Brusselse eurocratie van vandaag ontbeert - en weigert - [elk soort historisch] geheugen, heeft elk [soort] historisch fundament verloren en zet zich af tegen [elk soort historische] worteling. [Haar radicaal] constructivistische en mechanische zelfbegrip berust op een ideologische improvisatie die weigert om uit de lessen en ervaringen van de [Europese] geschiedenis te leren. Dit behelst een ontkenning van de historische dimensie van de [specifieke en volkseigen - althans tot voor kort -] echt bestaande economische systemen die [organisch] zijn voortgekomen en zich hebben ontwikkeld uit de Europese bodem.] (p. 215-6)

In politiek-filosofisch perspectief vertegenwoordigt het essentieel anti-Europese ‘EU project’ niets meer en minder dan een globalistische Machtergreifung. Neo-Jacobijnse radicalen hebben de macht overgenomen en historische precedenten met betrekking tot Jacobijnse machtsexperimenten[18] - met name de Franse en Russische revolutionaire terreur - geven aanleiding tot zorg. Kennis van de Europese historische context van het ‘EU project’ is echter onvoldoende voor een echt begrip van de ogenschijnlijk tegenstrijdige - want zelfdestructieve - anti-Europese doelstellingen van dat project. Zulk begrip vergt inzicht in de grotere doelstellingen van het globalisme - dat inzicht wordt nu in hapklare brokken aangeleverd in Steuckers’ Europa.

3.

Het globalistische anti-Europa

(geo-politieke diagnose)

Soms is de misdaad die men wil begaan zo groot,

dat het niet volstaat haar te begaan namens een volk:

dan moet men haar begaan namens de mensheid.

- Nicolás Gómez Dávila

Steuckers’ panoramische overzicht van de hedendaagse mondiale geopolitiek herleidt de oorsprong van het anti-Europese ‘EU project’ tot het einde van de Tweede Wereld Oorlog. Dit conflict bracht een einde aan de grootmacht status en imperiale hegemonie van de Europese natie-staten: de militaire nederlagen van Frankrijk in 1940, Italië in 1943 en Duitsland in 1945 werden gevolgd door de liquidatie van alle Europese koloniale rijken (Brits Indië in 1947, Nederlands Indië in 1949, Belgisch Congo in 1960, Frans Algerije in 1962 en Portugees Afrika in 1975). De wereldheerschappij werd in kort tijdbestek overgenomen door twee supermachten die beide op een universalistische ideologie en een mondiale geopolitiek inzetten: de Verenigde Staten als voorvechter van het Liberalisme en de Sovjet Unie als voorvechter van het Socialisme. Het fysieke (geografische, demografische, industriële) restbestand ‘Europa’ werd met militaire verdragen (NAVO, Warschau Pact) en economische samenwerkingsverbanden (EEG, Comecon) vervolgens tussen de overwinnaars verdeeld. Het is belangrijk de brute realiteiten van militaire nederlaag, koloniale liquidatie en politieke ontvoogding voor ogen te houden. La Seconde Guerre mondiale avait pour objectif principal, selon Roosevelt et Churchill, d’empêcher l’unification européenne sous la férule des puissances de l'Axe, afin d’éviter l’émergence d’une économie ‘impénétrée’ et ‘impénétrable’, capable de s’affirmer sur la scène mondiale. La Seconde Guerre mondiale n’avait donc pas pour but de ‘libérer’ l’Europe mais de précipiter définitivement l’économie de notre continent dans un état de dépendance et de l’y maintenir. Je n’énonce donc pas un jugement ‘moral’ sur les responsabilités de la guerre, mais je juge son déclenchement au départ de critères matériels et économiques objectifs. Nos médias omettent de citer encore quelques buts de guerre, pourtant clairement affirmés à l’époque, ce qui ne doit surtout pas nous induire à penser qu’ils étaient insignifiants. [Volgens Roosevelt en Churchill was het hoofddoel van de Tweede Wereld Oorlog te verhinderen dat Europa zich verenigde onder leiding van de As mogendheden, om zo te voorkomen dat er een [Europese] economie zou ontstaan die zich op het wereldtoneel als ‘ondoordringbaar’ en ‘onverslaanbaar’ zou kunnen handhaven. [Hun] Tweede Wereld Oorlog had dus niet ten doel om Europa te ‘bevrijden’, maar om de economie van ons continent te doel vervallen tot een staat van afhankelijkheid - en daarin te houden. Daarmee doe ik dus geen uitspraak over de ‘morele’ verantwoordelijkheid voor die oorlog - ik beoordeel [slechts] zijn uitbreken vanuit objectieve materiële en economische doelen. Het feit dat onze media [ook] de vermelding van een aantal andere oorlogsdoelen vermijden die toentertijd duidelijk werden verkondigd moet ons er niet toe brengen te denken dat die [doelen] onbelangrijk waren.] (p.220)

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Na veertig jaar Koude Oorlog beginnen zich midden jaren ’80 de eerste tekenen stressfracturen af te tekenen in de globaal opererende machtsmachines van de twee supermachten. De rampen met de Challenger en Chernobyl (28 januari en 26 april 1986) laten duidelijk zien dat de symptomen van imperial overstretch niet langer te verbergen zijn. Escalerende economische chaos en toenemend politieke gezagsverlies dwingen beide supermachten tot ingrijpende binnenlandse maatregelen: Reaganomics en Perestrojka markeren de geopolitieke vloedlijn van de supermachten. Na de implosie van de Sovjet Unie is de Verenigde Staten de officiële winnaar van de Koude Oorlog maar de Pyrrus-kwaliteit van de formele overwinning blijkt uit het feit dat Amerika onvoorwaardelijk berust in de sensationele opkomst van de Chinese economische supermacht en zich effectief terugtrekt uit de eerder felomstreden Derde Wereld. Na de Amerikaanse nederlaag in Somalië (Black Hawk Down, 1993) vervalt Afrika in failed states en neo-tribale chaos. Na de Amerikaanse evacuatie uit Panama (Canal Zone Handover, 1999) wordt Latijns Amerika overgelaten aan Bolivarianismo en Marea Rosa.[19] De imperiale rat race tussen de soevereine natiestaten die begon met de Zevenjarige ‘Wereld Oorlog Nul’ (1756-63) mag dan zijn geëindigd met Amerika als last man standing, maar het opleggen van een authentiek-imperiale Pax Americana ligt ver buiten het bereik van Amerika’s geopolitieke intenties, ambities en capaciteiten. De met Wilsoniaanse retoriek ingeklede interventies van Bush Senior en Bush Junior in Irak in 1991 en 2003 waren geen exercities in principiële global governance, maar in pragmatische resource control. Na de zelfopheffing van de Sovjet Unie als supermacht concurrent en de afkondiging van de ‘nieuwe wereld orde’ (Bush Senior, 1991) besloot de Amerikaanse heersende klasse dat het ‘einde van de geschiedenis’ (Francis Fukuyama, 1992) gekomen is: zij schakelde over van Amerikanisme naar globalisme. Er ontstond zo een ‘wereld elite’, toegankelijk voor iedereen met heel veel geld en heel weinig moraliteit. Deze elite acht zich ontheven aan alle geopolitieke regels en wetmatigheden: staatsrechterlijke soevereiniteit, culturele eigenheid en etnische identiteit zijn in die optiek definitief achterhaalde fenomenen, obstakels op de door haar ingeslagen snelweg naar een Brave New World. Als geheel definieert zich deze nieuwe ‘globalistische’ elite los van alle etnische religieuze en culturele wortels: vanuit deze zelfgewilde ontworteling keert zij zich meteen tegen de rest van de nog wel gewortelde mensheid - tegen staten die nog soevereiniteit hebben, tegen culturen die nog essentie hebben en tegen volken die nog identiteit hebben. De globalistische vijandelijke elite is geboren.

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Onder de dubbele banieren van neoliberalisme en cultuurmarxisme beschouwt de vijandelijke elite beschouwt het ‘achtergebleven’ menselijke ‘residu’ als weinig meer dan een oneindig ‘maakbare’ massa ‘mensenmateriaal’ dat kan worden gebruikt voor het aanvullen van banksaldi, het invullen van seksuele perversiteiten en het opvullen van existentiële leemtes. [La superclasse... domine à l’ère idéologique du néoliberalisme. Il n’est pas aisé de la définir : elle comporte évidemment les managers des grandes entreprises mondiales, les directeurs des grandes banques, de cheiks du pétrole ou des décideurs politiques voire quelques vedettes du cinéma ou de la littérature ou encore, en coulisses, des leaders religieux et des narcotrafiquants, qui alimentent le secteur bancaire en argent sale. Cette superclasse n’est pas stable : on y appartient pendant quelques années ou pendant une ou deux décennies puis on en sort, avec, un bon ‘parachute doré’. ...[N]umériquement insignifiante mais bien plus puissante que les anciennes aristocraties ou partitocraties, elle est totalement coupée des masses, dont elle détermine le destin. En dépit de tous les discours démocratiques, qui annoncent à cor et à cri l’avènement d’une liberté et d’une équité inégalées, le poids politique/économique des masses, ou des peuples, n’a jamais été aussi réduit. Son projet ‘globalitaire’ ne peut donc pas recevoir le label de ‘démocratique’. [De ‘superklasse’... domineert het tijdperk van de neoliberale ideologie. Het is niet gemakkelijk haar te definiëren: zij bestaat het duidelijkst uit de managers van de gro[ots]te multinationals, de directeuren van de gro[ots]te banken, de oliesjeiken [en bepaalde] politieke leiders, maar ook uit enkele filmsterren, intellectuelen en ‘spirituele leiders’ - en daarnaast uit een schimmiger personeelsbestand van [maffiabazen en] drugsbaronnen die de bankensector voeden met zwart geld. Deze ‘superklasse’ is verre van stabiel: men kan er enkele jaren of decennia toe behoren voordat men er weer uit valt - meestal met een ‘gouden parachute’. ...[N]umeriek is zij zeer klein, maar zij is machtiger dan alle voorafgaande aristocratieën en partitocratieën uit de menselijke geschiedenis. Zij is volledig afgesneden van de [volks]massa’s, waarvan zij het lot bepaalt. Ondanks het [publieke] discours dat continu spreekt over het aanbreken van weergaloze vrijheid en gelijkheid is het politieke [en] economische gewicht van de [volks]massa’s nog nooit [eerder in de geschiedenis] zo klein geweest. Het globalistische project [dat wordt nagestreefd door de ‘superklasse’] kan daarom in geen enkel opzicht ‘democratisch’ worden genoemd.] (p. 291)

De globalistische vijandelijke elite instrumentaliseert de militaire macht en politieke invloed van Amerika: zij wendt Amerikaanse macht en invloed aan voor globalistische doelen en wensen. Zij misbruikt het Amerikaans prestige, het Amerikaans vermogen en het Amerikaanse volk - dit is de diepste reden voor de anti-globalistische en nationalistische reactie die Donald Trump in het Witte Huis brachten. De vijandelijke elite opereert echter boven en achter Amerikaanse instituten als het presidentschap: in Amerika onttrekt de echte macht zich grotendeels aan institutionele controle en democratische correctie. De Washington swamp, de lying press en de deep state bepalen het beleid - het is voor de strijd tegen deze monsters dat het Amerikaanse volk Donald Trump tot president koos. De monsterlijke macht van de vijandelijke elite is echter zo groot dat ook twee jaar na Trump’s verkiezingsoverwinning de publieke sfeer nog steeds wordt gedomineerd door zijn vijanden. De onfatsoenlijke woede en openlijke sabotage waarmee de vijandelijke elite reageert op Trump is begrijpelijk: de globalistische vijandelijke elite valt en staat met haar grip op haar Amerikaanse instrumentarium. Alleen met controle over de Amerikaanse geldschepping, de Amerikaanse krijgsmacht en de Amerikaanse diplomatie is zij in staat de internationale geopolitieke chaos te handhaven waarin haar financiële belangen en ideologische waandenkbeelden gedijen.

Controle over Amerika is voor de globalistische vijandelijke elite vooral van belang voor het blijvend onderdrukken van haar potentieel machtigste vijand: Europa. Europa is een potentieel dodelijk gevaar voor het nihilistische en ontwortelde globalisme omdat het een ongeëvenaarde technologisch-industriële en sociaal-economische capaciteit combineert met authentieke cultuurhistorische en etnische worteling. Met het wegvallen van de Sovjet Unie eindigde de tweehoofdige ‘bewindvoering’ die aan het einde van de Tweede Wereld Oorlog werd opgelegd aan Europa. De geopolitieke opgave om Europa ‘klein te houden’ valt vervolgens toe aan Amerika alleen: de permanente verdragsmatige verzwakking van het verenigde Duitsland (vooral via monetaire convergentie met Frankrijk) en de Amerikaanse militaire expansie naar het oosten (vooral via uitbreiding van de NAVO) zijn basale ingrediënten van deze globalistische strategie. Toch blijkt deze strategie niet waterdicht: militaire aanwezigheid in Europa vergt een aanzienlijke en constante inspanning van een economisch en politiek mondiaal overbelast Amerika en zelfs de via de Europese eenheidsmunt (2002) afgedwongen tribuutplicht blijkt onvoldoende in staat de Duitse sociaaleconomische motor af te remmen. De EU expansie naar het voormalige Oostblok (2004) laat bovendien het gevaar herleven van een door Duitsland geleid semi-autarkisch geopolitiek blok - het tegenwerken van een dergelijk Mitteleuropa project was de hoofdreden van de Balkan ‘dwarsboom’ politiek waarmee de Triple Entente in 1914 de Eerste Wereld Oorlog provoceerde. Dit grotere geopolitieke perspectief geeft een heel andere duiding aan de in Amerika bedachte ‘Financiële Crisis’ van 2008, die leidde tot de economisch desastreuze en politiek destabiliserende ‘Europese Schuldencrisis’ van 2009, en aan de door Amerika geïnstigeerde ‘Arabische Lente’ van 2011, die leidde tot de Europese ‘Migratie Crisis’ van 2015.

NMst.jpgDeze duiding wordt het best verwoordt door Steuckers zelf: La globalisation, c’est... le maintien de l’Europe, et de l’Europe seule, en état de faiblesse structurelle permanente. Et cette faiblesse structurelle est due, à la base, à un déficit éthique entretenu, à un déficit politique et culturel. Il n’y a pas d’éthique collective, de politique viable ou de culture féconde sans ce que Machiavel et les anciens Romains, auxquels le Florentin se référait, appelaient des ‘vertus politiques’, le terme ‘vertu’ n’ayant pas le sens stupidement moraliste qu’il a acquis, mais celui, latin, de ‘force agissante’, de ‘force intérieure agissante’... [De globalisatie betekent dit: ...het gijzelen van Europa - en alleen van Europa - in een staat van permanente [en] structurele zwakte. En die zwakte is in essentie te wijten aan een doorlopend ‘ethisch tekort’ [dat zich vertaalt in] een politiek en cultureel tekortschieten. Een collectieve ethiek, een levensvatbare politiek [en] een vruchtbare cultuur zijn onmogelijk zonder wat Machiavelli, en de oude Romeinen waarop de Florentijn zi[jn denken] baseerde, de ‘politieke deugden’ noemden - waarbij de term ‘deugd’ niet de kortzichtige moralistische lading heeft die hij nu heeft, maar de [oorspronkelijk] Latijnse [betekenis] van ‘acterende kracht’ [en] ‘innerlijk sturende kracht’.] (p. 279-80) Terecht wijst Steuckers op de door globalistische cognitieve oorlogsvoering bewerkstelligde ‘ethisch tekort’ van Europa: het is dit tekort aan politieke deugd, doelbewustheid en daadkracht dat Europa verlamt. Dit tekort maakt psycho-historische catharsis, geopolitieke assertiviteit en decisionistische zelfverdediging onmogelijk: het maakt Europa machteloos tegen de acute existentiële bedreigingen van opzettelijk gestuurde sociale implosie, massa-immigratie en jihadistische terreur. Dit globalistisch ‘anti-European’ Europa verwezenlijkt zich door de verinnerlijking van het cognitieve-dissonante globalistische mainstream media discours van zelfdestructief geïnterpreteerde ‘mensenrechten’, ‘multiculturaliteit’ en ‘diversiteit’. L’arme principale qui est dirigée contre l’Europe est donc un ‘écran moralisateur’, à sens unique, légal et moral, composé d’images positives, de valeurs dites occidentales et d’innocences prétendues menacées, pour justifier des campagnes de violence politique illimitée. [Het voornaamste wapen dat gericht is tegen Europa is een uniek ‘moralistisch [televisie- en beeld]scherm’ dat [specifieke] juridische en morele ‘waarden’ [afdwingt via] het positieve ‘frame’ van zogenaamde ‘westerse waarden’ en gepretendeerde ‘bedreigde onschuld’ voor het goedpraten van een [systematische] campagne van eindeloze politieke terreur.] (p.281)

In Europa wordt dit globalistische discours exemplarisch geïnternaliseerd en prioritair vertegenwoordigd door de soixante-huitard generatie die zich na haar ‘lange mars door de instituties’ het monopolie op de politieke macht heeft toegeëigend. Pendant les années de leur traversée du désert, ...les [utopistes]de [la] génération soixante-huitard] feront... un ‘compromis historique’ qui repose, ...premièrement, sur un abandon du corpus gauchiste, libertaire et émancipateur, au profit des thèses néolibérales, deuxièmement, sur une instrumentalisation de l’idée freudo-sartienne de la ‘culpabilité’ des peuples européens, responsables de toutes les horreurs commises dans l’histoire, et troisièmement, sur un pari pour toutes les démarches ‘mondialisatrices’, même émanant d’instances capitalistes non légitimées démocratiquement ou d’institution comme la Commission Européenne, championne de la ‘néolibéralisation’ de l’Europe, dont le pouvoir n’est jamais sanctionné par une élection. [Gedurende hun jaren in de woestijn... maakten de [utopisten] van de [‘achtenzestig’] generatie... een ‘historisch compromis’ dat berust... op [drie complementaire strategieën:] (1) een verraad van hun linkse [kern]gedachtegoed [van] bevrijding en emancipatie ten gunste van het neoliberalisme, (2) een [politieke] toepassing van het Freudiaans-Sartriaanse idee van de ‘schuld’ van de Europese volkeren, [die zo] verantwoordelijk [worden gehouden] voor alle misdaden van de geschiedenis en (3) een inzet op ‘globaliserende’ processen - zelfs [als die processen] worden gedreven door [on]democratische [en] illegitieme kapitalistische machten of door institutie[s] als de Europese Commissie, die [zich heeft opgeworpen] als kampioen van de ‘neoliberalisatie’ van Europe en waarvan de macht nog nooit door een verkiezing is goedgekeurd.[20]] (p.293) Dit ideologische verraad en globalistische deze collaboratie, de standaard modaliteiten van de Europese vijandelijke elite, hebben de Europese beschaving aan de rand van de afgrond gebracht.

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Steuckers wijst op de functionaliteit van het verraad van de Europese soixante-huitards ten aanzien van de globalistische geopolitiek: dit verraad levert Europa over aan het de facto monsterverbond tussen twee essentieel anti-Europese globalistische krachten: het liberaal-normativisme, gesymboliseerd in het Amerikaanse ‘Puritanisme’, en het islamisme, gesymboliseerd in het Saoedische ‘Wahhabisme’. Aujourd’hui, nous faisons face à l’alliance calamiteuse de deux fanatismes religieux : le wahhabisme, visibilisé par les médias, chargé de tous les péchés, et le puritanisme américain, camouflé derrière une façade ‘rationnelle’ et ‘économiste’ et campé comme matrice de la ‘démocratie’ et de toute ‘bonne gouvernance’. Que nous ayons affaire à un fanatisme salafiste ou hanbaliste qui rejette toutes les synthèses fécondes, génératrice et façonneuses d’empires, qu’elles soient byzantino-islamiques ou irano-islamisées ou qu’elles se présentent sous les formes multiples de pouvoir militaire équilibrant dans les pays musulmans, ou que nous ayons affaire à un fanatisme puritain rationalisé qui entend semer le désordre dans tous ces états de la planète, que ces états soient ennemis ou alliés, parce que ces états soumis à subversion ne procèdent pas de la même matrice mentale, nous constatons que toutes nos propres traditions européennes... sont considérées par ces fanatismes contemporains d’au-delà de l’Atlantique ou d’au-delà de la Méditerranée comme émanations du Mal, comme des filons culturels à éradiquer pour retrouver une très hypothétique pureté, incarnée jadis par les pèlerins du ‘Mayflower’ ou par les naturels de l’Arabie du VIIIe siècle. [In het huidige tijdsbestek hebben we te maken met een rampspoedig [globalistisch, anti-Europees] bondgenootschap tussen twee religieuze fanatismes: het Wahhabisme,[21] zoals gevisualiseerd en als ‘zondig’ bestempeld door de [mainstream] media, en het Amerikaanse puritanisme, gecamoufleerd achter een ‘rationele’ en ‘economische’ façade en voorgesteld als vast referentie ‘frame’ voor ‘democratie’ en ‘behoorlijk bestuur’. Of we nu te maken hebben met vormen van ‘Salafistisch’ of ‘Hanbalitisch’ fanatisme[22] dat een punt zet achter de vruchtbare, creatieve en imperium-scheppende byzantijns-islamitische of iraans-islamitische syntheses, of met vormen van puriteins-gerationaliseerd en militair-hegemoniaal fanatisme dat over de hele wereld chaos schept (bij bevriende zowel als vijandelijke staten, want alle aan die hegemonie onderworpen staten vertegenwoordigen andersoortige mentale werelden): wij moeten constateren dat onze eigen Europese tradities... onverenigbaar zijn die fanatismes van de overzijde van de Atlantische Oceaan en Middellandse Zee. Die hedendaagse fanatismes beschouwen [onze tradities] als incarnaties van het [pure] Kwaad [en] als cultuuruitingen die moeten worden bestreden met het - overigens zeer hypothetische - puurheid die wordt belichaamt in de Pilgrim Fathers van de ‘Mayflower’[23] en de bons sauvages[24] van de 8e eeuwse Arabische binnenlanden]. (p. 261-2)

De totalitair-regressieve fanatismes van het ‘Puristisch’ liberaal-normativisme en het ‘Wahhabistisch’ islamisme zullen emotioneel, intellectueel en spiritueel moeten worden overwonnen als de Europese beschaving en de Europese volkeren de Crisis van het Moderne Westen willen overleven. De therapie die op dit kritieke punt vanuit Traditionalistisch oogpunt momenteel de grootste kans van slagen biedt is een politiek-filosofische ‘noodgreep’: de nooduitgang van het Archeo-Futuristisme. 

4.

Het Archeo-Futuristisch alternatief

(politiek-filosofische therapie)

Lo, all our pomp of yesterday
Is one with Nineveh and Tyre!
Judge of the Nations, spare us yet.
Lest we forget - lest we forget!

- Rudyard Kipling

Het Archeo-Futuristische alternatief voor het globalistische anti-Europese ‘EU project’ is een gelijktijdig teruggrijpen en vooruitprojecten van een Traditionalistisch concept dat lang een vitale rol heeft gespeeld in de Europese geschiedenis en dat weer kan doen: de Europese Rijksgedachte. Het gaat hierbij om een concept dat strikt genomen boven-historisch is daarom te allen tijde kan herleven. Het ideologisch misbruik en de historiografische misinterpretatie van de Europese Rijksgedachte door het 19e en 20e eeuwse (hyper-)nationalisme - meest recent in het ‘Derde Rijk’ - doet niets af aan de boven-historische vitaliteit ervan. Steuckers wijst in dat verband op het essentieel belang van een juist begrip van het Traditionalistische gedachtegoed waarvan de Rijksgedachte deel uitmaakt. Het Traditionalisme stelt namelijk dat alle collectieve (taalkundige, religieuze, etnische, nationale) identiteiten, en de horizontaal (werelds, fysiek) ervaren verschillen daartussen, organisch onderdeel (kunnen, moeten, zullen) zijn van grotere, synergetisch unieke entiteiten met een hogere verticale, transcendent (spiritueel, psychologisch) ervaren, functionaliteit. Deze entiteit kan worden betiteld als Imperium, ofwel ‘Rijk’ - in het Avondland als het ‘Europese Rijk’. Het numineuze karakter ervan is onmiddellijk aantoonbaar in het feit dat het ontzag inspireert in degenen die er zich op natuurlijke wijze deel van voelen - en dat het angst inspireert in degenen die het onwaardig zijn.

Pour résumer brièvement la position traditional[iste],... disons que les horizontalités modernes ne permettent pas le respect de l’Autre, de l’être-autre. Si l’Autre est jugé dérangeant, inopportun dans son altérité, il peut être purement et simplement éliminé ou mis au pas, sans le moindre respect de son altérité, car l’horizontalité fait de tous des ‘riens ontologiques’, privés de valeur intrinsèque. Tel est l’aboutissement de la logique égalitaire, propre des idéologies et des systèmes qui ont voulu usurper et éradiquer la tradition ‘reichique’ : si tout vaut tout dans l’intériorité de l’homme, ou même dans sa constitution physique, cela signifie, finalement, que plus rien n’a de valeur spécifique, et si une valeur spécifique cherche à pointer envers et contre tout, elle sera vite considérée comme une anomalie qui appelle l’extermination. L’intervention fanatique et sanglante de ‘colonnes infernales’. La verticalité, en revanche, implique le devoir de protection et de respect, un devoir de servir les supérieurs et un devoir des supérieurs de protéger les inférieurs, dans un rapport comparable à celui qui existe, dans les sociétés et les familles traditionnelles, entre parents et enfants. La verticalité respecte les différences ontologiques et culturelles ; elle ne les considère pas comme des ‘riens’ qui ne méritent ni considération ni respect. [Om het tradition[alistische] standpunt samen te vatten... kan men stellen dat de modern[istische] horizontaliteit een [waarachtig] respect van de Ander en het anders-zijn onmogelijk maakt. Wanneer de Ander in zijn anders-zijn [slechts] als storend [en] inopportuun wordt beoordeeld, dan kan hij simpelweg worden geëlimineerd of worden weggezet zonder het minste respect voor zijn anders-zijn: de [modernistische] horizontaliteit reduceert immers alle [vormen van authentieke] identiteit tot een ‘ontologisch nulwaarde’ zonder intrinsieke waarde. Dat is het [onvermijdelijke] eindresultaat van de egalitaire logica die ligt achter de ideologieën en systemen die de rijkstraditie willen vervangen en uitwissen. Als alles alleen maar afhangt van het innerlijk van de mens, of zelfs alleen maar van zijn fysieke constitutie, dan blijft er uiteindelijk niets van specifieke waarde over. Wanneer een specifieke waarde in de tegenovergestelde [niet-egalitaire] richting wijst tegen het [‘algemene belang’ in], dan wordt zij al snel gezien als een ‘afwijking’ die moet worden geëlimineerd. Dit [resulteert] in de fanatieke en bloedige interventie van de ‘helse colonnes’[25] [van het modernistische collectivisme]. Daartegenover staat de [Traditionalistische] verticaliteit die uitgaat van de verplichting tot bescherming van en respect voor [de Ander]. [Dat is] de verplichting [van lager gestelden] om hoger gestelden te dienen en de verplichting van hoger gestelden om lager gestelden te beschermen in een verhouding die vergeleken kan worden met die tussen ouders en kinderen in traditionele gemeenschappen en families. Deze verticaliteit respecteert ontologische verschillen en de culturele [uitdrukkingen daarvan]: zij reduceert ze niet tot ‘[ontologische] nulwaarden’ die geen consideratie en respect verdienen.] (p. 157)

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De Traditionalistische Rijksgedachte behelst dus een holistische visie waarin alle collectieve en individuele [authentieke] identiteiten op organische wijze worden ingepast in een groter geheel van synergetische meerwaarde. Il faut enfin... que chaque communauté et chaque individu aient conscience qu’ils gagnent à demeurer dans l’ensemble impéria[ux]au lieu de vivre séparément. Tâche éminemment difficile qui souligne la fragilité des édifices impériaux : Rome a su maintenir un tel équilibre pendant les siècles, d’où la nostalgie de cet ordre jusqu’à nos jours. ...[L]a civitas de l’origine... de l’Urbs, la Ville initiale de l’histoire impériale, ...s’est étendue à l’Orbis romanus. Le citoyen romain dans l’empire signale son appartenance à cet Orbis, tout en conservant sa natio et sa patria, appartenance à telle nation ou telle ville de l’ensemble constitué par l’Orbis. [Het is uiteindelijk noodzakelijk... dat elke gemeenschap en ieder individu zich ervan bewust zijn dat zij er meer bij gebaat zijn vast te houden aan het imperiale geheel dan afzonderlijk te leven. [Dit is] een zeer ingewikkelde opgave die de kwetsbaarheid van [alle] imperiale projecten onderstreept: Rome wist eeuwenlang een dergelijke balans te handhaven - vandaar de nostalgie naar de [Romeinse] orde die voortduurt tot op de dag van vandaag. ...[D]e originele civitas... van de Urbs waaruit [men] stamt, [dat wil zeggen] de Stad vanwaaruit de imperiale geschiedenis zich ontplooide... breidde zich [met het Romeinse rijk] uit tot een Orbis romanus. Onder het [Romeinse] keizerrijk duidde het Romeins burgerschap op een identificatie met die Orbis, met behoud van de eigen natio en het eigen patria, [dat wil zeggen] met een [blijvend] toebehoren aan een bepaalde natie of vaderland binnen het geheel van die Orbis.] (p.129-31) D’abord, il faut préciser que le ‘Reich’ n’est pas une nation, même s’il est porté, en théorie, par un populus (le populus romanus) ou une ‘nation’ (la deutsche Nation) : ...[c’est] n’est pas [une chose] nationaliste, [c’est] même [une chose] anti-nationaliste. [I]l n’a rien contre les sentiments d’appartenance nationale, contre la fierté d’appartenir à une nation. De tels sentiments sont positifs... mais doivent être transcendés par une idée. Cette transcendance conduit à une verticalité, qui oppose à toutes les formes modernes d’horizontalité, ce qui est, par ailleurs, le noyau idéel, de toutes les traditions... [Vooraf moet worden vastgesteld dat een ‘Rijk’ geen natie is, zelfs als het in theorie door een populus ([een ‘volk’ zoals] het populus romanus) of door een natie ([een natie zoals] de deutsche Nation) wordt gedragen: ...[het Rijk] is niet nationalistisch, [het is] zelfs anti-nationalistisch. [H]et heeft niets tegen het identiteit bepalende [collectieve] nationalistisch sentiment [of] tegen de [individuele] trots op het behoren tot een natie. Zulke sentimenten zijn positief... maar dienen te worden overstegen door het [nog hogere imperiale] idee. Deze transcendentie leidt tot een verticaliteit die zich afzet tegen alle moderne vormen van horizontaliteit - deze [verticaliteit] is uiteindelijk de ideële kern van alle [authentieke T]radities.] (p. 156-7)

Het praktische samengaan van collectieve en individuele identiteiten wordt gerealiseerd in de politieke toepassing van het Traditionalistische beginsel van subsidiariteit (een laatste spoor daarvan is in de Nederlandse Traditie terug te vinden in het anti-revolutionaire principe van ‘soevereiniteit in eigen kring’). ...[L]e principe de ‘subsidiarité’, tant évoqué dans l’Europe actuelle mais si peu mis en pratique, renoue avec un respect impérial des entités locales, des spécificités multiples que recèle le monde vaste et diversifié. [...Het beginsel van ‘subsidiariteit’, waaraan men vaak refereert in het hedendaagse Europe maar dat men zelden in de praktijk brengt, kan [nieuw] imperiaal [ondersteund] respect geven aan de lokale gemeenschappen [en] specifieke identiteiten die horen bij de echte wereld van enorme [authentiek-gewortelde] diversiteit.] (p. 139)

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In relatie tot de Rijksgedachte zijn ‘identiteitspolitiek’, ‘multiculturaliteit’ en ‘diversiteit’ non-issues: ze worden organisch ‘opgelost’ door sublimatie in de hogere functionaliteit van het Rijk. L’empire est donc fait de multiplicités, de différences, qui n’ont rien de commun avec la fausse multiculturalité vantée par les médias d’aujourd’hui. Cette multiculturalité, escroquerie idéologique, relève justement de cette horizontalité qui vise à vider tous les hommes, autochtones et allochtones, de leur substance ontologique. Cette multiculturalité tue l’essentiel qui vit en l’homme. Toute politique qui cherche à la promouvoir est une politique criminelle, exterministe... [Een Rijk behelst dus [altijd complexe] meervoudigheden [en] diversiteiten die niets gemeen hebben met de valse ‘multiculturaliteit’ die wordt aangeprezen door de [mainstream] media van vandaag. Deze [namaak-] multiculturaliteit is een ideologisch bedrog dat voortvloeit uit de [modernistische] horizontaliteit die bedoeld is om alle mensen - autochtoon zowel als allochtoon - the ontdoen van hun ontologische substantie. Deze multiculturaliteit doodt de essentie die leeft in de mens. Alle politiek die haar wil bevorderen is een criminele - en etnocidale - politiek...] (p.158) Het is een ironisch feit dat de Traditionalistische Rijksgedachte en Rijksgemeenschap effectief veel meer tolerantie en vrijheid bieden dan de modernistische ‘diversiteit’ en ‘democratie’ dat ooit zouden kunnen.

5.

Sacrum Imperium

(neo-imperiale therapie)

Hier die Manen hehrer Krieger
Seien euch ein Musterbild
Führen euch vom Kampf als Sieger

- Joseph Hartmann Stuntz[26]

De Westerse beschaving is gebaseerd op een kwetsbare balans tussen elkaar aanvullende authentieke identiteiten die samen synergische meerwaarde krijgen via historische interacties. Deze meerwaarde kan worden uitgedrukt in de ‘hyper-boreale’ archetypen van Techne (technische bevrijding), Nomos (juridische bevrijding) en Evangelion (spirituele bevrijding).[27] Maar deze meerwaarde en de beschaving waarop zij is gebaseerd vergen constante bescherming en bewaking - dit is de basis van de Traditionalistisch Europese Rijksgedachte. En Europe, les structures de type impérial sont... une nécessité, afin de maintenir la cohérence de l’aire civilisationnelle européenne, dont la culture a jailli du sol européen, afin que tous les peuples au sein de cette aire civilisationnelle, organisée selon les principes impériaux, puissent avoir un avenir. [In Europa zijn structuren van het imperiale type... onontbeerlijk om de cohesie te beschermen van de Europese beschavingssfeer die is ontsproten aan de Europese grond - en om aan de binnen die beschavingssfeer inheemse volkeren een toekomst[perspectief] te bieden door een haar te [re]organiseren volgens imperiale principes.] (p. 214) Een dubbel idealistische en realistische - Archeo-Futuristische - heroverweging van de Rijksgedachte is van essentieel belang ter bescherming van de Europese volkeren en van hun gezamenlijke beschaving. De uitbreiding van de Europese Rijksgedachte tot de overzeese Europees-stammige volkeren is daarbij een logische volgende stap: deze stap is reeds Archeo-Futuristisch uitgewerkt in het concept van de ‘Boreale Alliantie’. Op globale schaal zou een dergelijke alliantie natuurlijke bondgenoten vinden in de twee andere Indo-Europese Rijksgedachten: de Perzische en Indische: een Archeo-Futuristische exploratie van dit thema is te vinden in Jason Jorjani’s concept van de World State of Emergency. De alternatieve geopolitiek die past bij deze Archeo-Futuristische heroverwegingen wordt al concreet onderzocht in de anti-globalistische Neo-Eurazianistische beweging.[28]

aigle2t.jpgHet is de taak van het Traditionalisme om de gezamenlijke ‘Hogere Roeping’ van de Europese volkeren in herinnering te brengen wanneer deze bedreigd wordt.[29] Steuckers voldoet hieraan door de Traditionalistische visie van Europa eenduidig te neer te zetten: L’Europe, c’est une perception de la nature comme épiphanie du divin... L’Europe, c’est également une mystique du devenir et de l’action... L’Europe, c’est une vision du cosmos où l’on constate l’inégalité factuelle de ce qui est égal en dignité ainsi qu’une pluralité de centres... [C’est] une nouvelle vision de l’homme, impliquant la responsabilité pour l’autre, pour l’écosystème, parce que, ... sur [c]es bases philosophiques, ...l’homme... est un collaborateur de Dieu et un miles imperii, un soldat de l’empire. Le travail n’est plus malédiction ou aliénation mais bénédiction et octroi d’un surplus de sens au monde. La technique est service à l’homme, à autrui... La construction de l’Europe... nécessite de revitaliser une ‘citoyenneté d’action’, où l’on retrouve la notion de l’homme coauteur de la création divine et l’idée de responsabilité. [Het [Traditionalistisch] ‘Europa’ is een visioen waarin de natuurlijke wereld als Goddelijke Epifanie geldt... [Dit] Europa is een mysterie in wording en werking... [Dit] Europa is een kosmisch visioen dat de feitelijke ongelijkheid erkent van alles dat gelijk is in waardigheid en daarmee ook van [cultuurhistorische en geopolitieke] multipolariteit... [Dit] nieuwe visioen van mens-zijn impliceert verantwoordelijkheid voor [alles dat] anders [en] voor het [hele natuurlijke en menselijke] ecosysteem omdat... op de filosofische basis [van dit visioen]... de mens een medewerker is van God - een miles imperii, een soldaat van het [goddelijk ingestelde] Rijk. Hier is werk niet langer vloek of vervreemding,[30] maar een zegen en een octrooi voor [een hoger] verantwoordelijkheidsbesef voor de [hele schepping]. [Hierbij] staat de techniek ten dienste van de mens - [en] van de ander...[31] De constructie van Europa... vereist een herleven van ‘activistisch burgerschap’ waarin men het idee terugvindt van de mens als medewerker aan de Goddelijke Schepping - en het idee van [zijn uit zijn authentieke identiteit voortvloeiende kosmische] verantwoordelijkheid.] (p. 138-9) Het is duidelijk dat de Hogere Roeping van de Europese volkeren niet stopt aan de geografische grenzen van het Europese subcontinent: zij geldt ook voor de Europees-stammige volkeren die zich over deze grenzen heen hebben begeven en zich overzees hebben gevestigd in boreale en australe regionen.

Naar binnen toe vereist dit visioen een individuele zelfdiscipline, een individuele arbeidsethos en een individuele acceptatie van hiërarchische orde - en dus een omkering van de narcistische, hedonistische en collectivistische levenshouding die wordt bevorderd en bestendigd in het liberaal-normativisme dat nu dominant is in het postmoderne Westen. Dit betekent een overgang naar een nieuwe existentiële realiteit die wordt beheerst door authentieke normen en waarden - en door een legitieme Autoriteit. In de Europese Traditie draagt die Autoriteit, in navolging van zijn Romeinse archetype, de titel ‘keizer’.[32] Dans la conception [traditionaliste] hiérarchique des êtres et des fins terrestres... l’empire constituait le sommet, l’exemple impassable pour tous les autres ordres inférieurs de la nature. De même, l’empereur, également au sommet de cette hiérarchie par la vertu de sa titulaire, doit être un exemple pour tours les princes du monde, non pas en vertu de son hérédité, mais de supériorité intellectuelle, de son connaissance ou des ses connaissances. Les vertus impériales sont justice, vérité, miséricorde et constance... [In de [Traditionalistische] hiërarchische opvatting van wereldse wezens en wensen... vertegenwoordigt het Rijk het hoogste doel, het onevenaarbare voorbeeld voor alle lagere natuurlijke ordeningen. Dit betekent dat de keizer, die op grond van zijn titel aan de top van deze hiërarchie staat, een voorbeeld stelt voor alle [overige] prinsen van de wereld - niet op grond van zijn afstamming, maar [op grond] van zijn intellectuele superioriteit en van zijn kundigheid en inzichten. [In hem worden de] imperiale [‘politieke] deugden’ van rechtvaardigheid, waarheid, mededogen en standvastigheid verwezenlijkt]. (p. 136) Vanzelfsprekend is een als zodanig herkenbare legitieme Autoriteit bijna onvoorstelbaar in de huidige Europese context, maar toch is dit ideaalbeeld van deze Autoriteit onontbeerlijk als vast referentiepunt. Ditzelfde geldt tot op zekere hoogte voor de Rijksgedachte zelf: in het huidige politiek-filosofisch discours is deze gedachte eerst en vooral een experiment waarmee een bestemming en een koers kunnen worden bepaald voor de patriottisch-identitaire beweging. Op dezelfde manier dat het ‘Koninkrijk der Hemelen’ als referentiepunt dient voor de Hogere Roeping van het Christendom, zo dient de Europese Rijksgedachte als referentiepunt voor de Europese beschaving – ook als het ideaal nog niet is verwezenlijkt in het hier en nu. De oude Traditionalistische Rijksgedachte dient hierbij als voorbeeld voor een nieuwe Archeo-Futuristische Rijksgedachte. De hiërarchische politieke filosofie van het Neo-Eurazianisme kan ook hierbij een brugfunctie vervullen.

geants1.jpgNaar buiten toe vereist de Traditionalistische Rijksgedachte collectief zelfbewustzijn, collectieve trots en collectieve opofferingsbereidheid. Het is daarbij belangrijk te benadrukken dat de Rijksgedachte, zoals die wordt gehandhaafd door de hoogste bevelsautoriteit, zich positief - als letterlijke meerwaarde - verhoudt tot de verschillende authentieke identiteiten die met subsidiaire waarborgen worden bewaard binnen het Rijk. Een Traditionalistisch gedefinieerd Europees - of groter: Westers - Rijk doet niets af aan de specifieke taalkundige, godsdienstige, culturele en etnische identiteiten die erbinnen blijven bestaan: het voegt een identiteit toe, namelijk een Europese - of zelfs Westerse. Deze identiteit is dan niet dominant naar binnen (in de individuele voorstelling), maar wel naar buiten: naar buiten vertegenwoordigt zij een collectieve wil. Dat wil zeggen: het Rijk vertegenwoordigt naar buiten een absolute standaard, uitgedrukt in fysieke grenzen. De liberaal-normativistische illusie van globalistische ‘universele waarden’ en de ‘open grenzen’ zijn onverenigbaar met de effectieve handhaving van de klassieke beschavingsnormen die worden belichaamd in Traditionalistische Rijksgedachte. L’empire se conçoit comme un ordre, entouré d’un chaos menaçant, niant par là même que les autres puissent posséder eux-mêmes leur ordre ou qu’il ait quelque valeur. Chaque empire s’affirme plus ou moins comme le monde essentiel, entouré de mondes périphériques réduits à des quantités négligeables. L’hégémonie universelle concerne seulement “l’univers qui vaut quelque chose”. Rejeté dans les ténèbres extérieures, le reste est une menace dont il faut se protéger. [Het Rijk concipieert zichzelf als een orde die wordt omgeven door een dreigende chaos - [de Rijksgedachte] ontkent daarmee feitelijk dat andere [beschavingen] zelf een eigen orde met zelfstandige waarde kunnen hebben. Ieder Rijk ziet zichzelf min of meer als een ‘wereld op zich’, omgeven door tot op verwaarloosbare eenheden teruggebrachte ‘perifere werelden’.[33] Universele hegemonie wordt alleen gezocht binnen de sfeer van het als [exclusief] waardevol erkende [eigen] universum. De resterende [realiteit wordt] verstoten naar de Buitenste Duisternis en is niet anders dan een dreiging waartegen men zich moet beschermen.[34]] (p. 129)

6.

Ex oriente lux

(psycho-historische therapie)

 

Wees gegroet, Hoge Prins!

Op de noordwesten wind hebben wij naar u gezocht

Aan u offeren wij nu onze sterfelijkheid

U bent onze Eedhouder!

- vrij vertaald uit Hereditary

Een effectieve Archeo-Futuristische therapie voor de psycho-historische zelfverminking van de Westerse beschaving ligt in de herontdekking en reactivering van haar archetypes.[35] Vanuit meta-historisch perspectief vertegenwoordigt het politieke experiment van het nationalistisch-enggeestige en hyper-biodeterministische ‘Derde Rijk’ een geïmproviseerde poging tot een reactivering van deze archetypes. Door de - feitelijk zeer ver gezochte - associatie van de Traditionalistische Rijksgedachte met het ‘Derde Rijk’ en door de Europese Götterdämmerung van 1945 werden deze archetypes verdrongen uit het Westerse publieke discours. De bij deze archetypes horende idealistische, ridderlijke en ascetische levenshouding - belichaamt in de oude roepingen van Academie, Adel en Kerk - verloor hiermee haar bestaansgrond: het rampzalige verval van de Westerse geesteswetenschappelijke, militaire en kerkelijke instituties vormen hiervan het tastbare bewijs. Deze psycho-historische Untergang is recentelijk zover doorgeschoten dat nu alles wat zelfs maar enigszins verwijst naar ‘aristocratische’, ‘arische’ en ‘mannelijke’ kwaliteit in de publieke sfeer ‘verdacht’ is. Een diep ingezonken conditionering van matriarchale oikofobie en rancuneuze feminisatie hebben de oude Westerse instituten van Academie, Leger en Kerk vernietigd.

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Toch is deze ontwikkeling niet onomkeerbaar - ze kan zelfs worden opgevat als een noodzakelijke fase in een zuiverend ‘dialectisch proces’.[36] Een extreem negatieve polariteit is immers een noodzakelijke voorwaarde voor een extreem positieve energielading. De deconstructie van de geïmproviseerde en oppervlakkige ‘hyper-nationalistische’ en ‘hyper-biodeterministische’ ideologie van het Derde Rijk vormen zo een noodzakelijke voorwaarde voor een her-ontdekking en her-activering van de diepst liggende archetypes van de Indo-Europese Traditie. De Archeo-Futuristische exploratie van deze diepst gelegen archetypes is pas begonnen, maar de richting waarin de nieuwe Gouden Dageraad van het Westen moet worden gezocht ligt al vast - ex oriente lux. Jason Jorjani, de filosofisch pionier van de Archeo-Futuristische Revolutie in de Nieuwe Wereld, is de event horizon van de Westerse Moderniteit reeds overgestoken en hij heeft reeds gerapporteerd welke beschavingscontouren zichtbaar worden in wat als een nieuwe ‘Gouden Dageraad’ kan worden aangeduid. Het kan geen toeval zijn dat Robert Steuckers, de voorman van het Traditionalisme in de Lage Landen, in dezelfde richting wijst. Beiden laten de oudste Indo-Europese archetypes, zoals behouden in de Perzische Traditie, terugkeren naar het Avondland.

La catégorie d’hommes capables d’incarner un ‘Reich’ est née de la tradition persane, laquelle a été longtemps un ‘Orient’ (in modèle sur lequel on s’‘orientait’)... Dans la tradition persane, il est question d’un ‘hiver éternel’, allusion plus que probable au début d’une ère glaciaire particulièrement rude, qui a surpris les premiers peuples européens dans leur habitat premier. Au moment où survient cet ‘hiver éternel’, un roi-héros, Rama, rassemble les tribus et les clans et se dirige, à leur tête, vers le sud, vers le Caucase, la Bactriane et la Perse (les hauts plateaux iraniens). Ce roi-héros fonde les castes, ou, plus exactement, les fonctions que George Dumézil étudiera ultérieurement. Après avoir mené son peuple à bonne destination, pour échapper aux rigueurs de cet ‘hiver éternel’, Rama se retire dans les montagnes. Cette figure héroïque et royale se retrouve dans les traditions avestique et védique où il s’appelle Yama ou Yima. Pour mener cette expédition et cette migration, Rama-Yama-Yima s’est servi de chevaux et de chars et a jeté ainsi les premiers principes d’organisation d’une cavalerie... Plus tard, Zarathoustra codifie les règles qui doit suivre chaque cavalier... La troupe de Zarathoustra, qui doit faire respecter son enseignement pratique, est armée de massues (la ‘Clave’ dans l’œuvre de Julius Evola). Au départ de la troupe des adeptes de Zarathoustra se forme la caste des guerriers, les Kshatriyas de la tradition indienne, une caste opérative ancrée dans le réel politique et géographique, qui domine la caste de prêtres, contemplative et moins encline à exercer sur elle-même une discipline rigoureuse. ...La figure iranienne de Sraosha, qui donnera le Saint-Michel de la tradition médiévale, évolue entre le ciel et la terre, c’est-à-dire entre l’idéal de la tradition et la réalité, va-et-vient qui postule une formation rigoureuse, à l’instar des disciples de Zarathoustra. Ceux-ci, au fur et à mesure que se consolide la tradition iranienne, sont formés à rendre claire leur pensée, à purifier leurs sentiments, à prendre conscience de leur devoir. Armés de ces trois principes cardinaux d’orientation, le disciple de Zarathoustra lutte contre Ahriman, incarnation du mal, c’est-à-dire de la déliquescence des sentiments, qui rend inapte à œuvrer constructivement et durablement dans le réel. Seul les chevaliers capables d’incarner cet idéal simple mais rigoureux se donneront un charisme, un rayonnement, une lumière, la kwarnah. Ils sont liés entre eux par un serment. [De categorie van mensen die in staat zijn een Rijk te personificeren is ontstaan in de Perzische [T]raditie, die [voor het Westen] eeuwenland een Oriëntaals referentiepunt was in de eigenlijke zin van existentiële oriëntatie. In de Perzische [T]raditie is sprake van een ‘eeuwige winter’, een begrip dat waarschijnlijk teruggaat op het begin van een zeer harde IJstijd die de eerste Europese volkeren trof in hun eerste leefgebied. Toen de ‘eeuwige winter’ intrad, bracht een heroïsche koning [genaamd] Rama de[ze] volkeren en stammen bijeen en leidde hen naar het zuiden, naar de Kaukasus, Baktrië en Perzië (de Iraanse hoogvlakten). Deze heroïsche koning was de stichter van [hun] kasten, of preciezer gezegd: van de [sociaalhiërarchische] functionaliteiten die uiteindelijk door Georges Dumézil zijn gereconstrueerd.[37] Na zijn volk uit de ontberingen van de ‘eeuwige winter’ in veiligheid te hebben gebracht, trok Rama zich terug in de bergen. Deze heroïsche en koninklijke persoonlijkheid vinden we [vervolgens] terug in de Avestische en Vedische [T]radities, waar hij Yama of Yima genoemd wordt.[38] Om deze onderneming en deze migratie te volbrengen organiseerde Rama-Yama-Yima paarden en wagens, waarmee hij de fundamenten van een cavalerie organisatie legde... Later werden de regels die elke bereden krijger, [ofwel ‘ridder’,] te volgen heeft vastgelegd door Zarathoestra... De krijgsmacht van Zarathoestra die zich onderwerpt aan zijn praktische onderwijs is bewapend met knotsen (als clava betiteld in het werk van Julius Evola).[39] Uit deze ‘school’ van Zarathoestra ontstaat [vervolgens] de kaste van de krijgers - de Kshatriya’s van de Indische Traditie - die zich in politieke [instituties] en geografische [machtsbereiken] vastlegt en die komt te heersen over de kaste van de priesters, die contemplatief zijn ingesteld en zich niet aan een [dergelijk] rigoureuze discipline wil onderwerpen. ...De Iraanse figuur Sraosja,[40] die in de middeleeuwse [Westerse] Traditie naar voren komt als de Heilige Michaël, neemt [voortdurend opnieuw] gestalte aan tussen hemel en aarde, dat wil zeggen tussen het Traditie ideaal en de [wereldse] realiteit - een ontstaan en vergaan dat [voor aspirant-ridders] een [constant vastgehouden] rigoureuze scholing veronderstelt, net zoals bij de leerlingen van Zarathoestra. [Het gaat daarbij om] diegenen die, naarmate de Iraanse Traditie zich verwezenlijkt, worden opgeleid om hun gedachte[n] en gevoelens te zuiveren en zich bewust te worden van hun [levens]opgave. Bewapend met deze drie hoofdprincipes van [levens]oriëntatie strijdt de leerling van Zarathoestra tegen Ahriman,[41] de personificatie van het kwaad, dat wil zeggen [primair] tegen de gevoelszwakte die het [hem] onmogelijk maakt constructief en duurzaam op de realiteit in te werken. Alleen ‘ridders’ die in staat zijn dit simpele maar rigoureuze ideaal te belichamen verkrijgen het charisma, de stralenglans, het licht[wezen] - de khvarenah.[42]]  (p. 159-60)

ksch.jpgHet Indo-Europese archetype dat het nieuwe Rijk moet vestigen is bovenal de ‘ridder’. Zoals gezegd, wordt oudste uitdrukking daarvan bewaard in de Perzische Traditie: ...le modèle de la chevalerie perse... constitue... pour l’Europe un mode opératif sans égal, de type ‘kshatriyaque’... [que] ne peut être pensé en dehors du projet de ‘nouvelle chancellerie impériale européenne’, énoncé par Carl Schmitt. Celui-ci a évoqué la nécessité de former une instance de ce type, après les catastrophes qui ont frappé l’Europe dans la première moitié du XXe siècle et pour préparer la renaissance qui suivra l’assujettissement de notre sous-continent. ...[het model van de Perzische ridderstand... vertegenwoordigt... voor Europa een kwalitatief ongeëvenaarde modus van het ‘kshatriyaanse’ type... waarzonder men zich geen voorstelling kan maken van het project dat Carl Schmitt voor ogen stond: de ‘nieuwe Europese rijkskanselarij’. [Schmitt] wees op de noodzaak een dergelijke instantie te vormen in de nasleep van de catastrofes die Europa gedurende de eerste helft van de 20e eeuw heeft ondergaan ten einde de wedergeboorte voor te bereiden die zal volgen op de onderwerping van ons subcontinent.[43]] (p. 163) De kroniek van de Perzische Traditie kan de volkeren van Europa hoop geven: zij laat zien hoe de oudste Indo-Europese archetypes zelfs de catastrofe van barbaarse bezetting, etnische vervanging en culturele regressie kunnen overleven. ...[Le] philosophe perse islamisé Sohrawardi, ...dépositaire de la sagesse iranienne originelle, s’insurge, avant la destruction de son pays par les Mongols, contre la bigoterie, le rationalisme étrique qui est son corollaire, et réclame le retour à une attitude noble, lumineuse, archangélique et michaëlienne, qui n’est rien de autre que la tradition perse/avestique des origines les plus lointaines. Sohrawardi réclame une révolte contre la caste des prêtres étriques, et, partant, contre toutes pensées et démarches impliquant des limitations stérilisantes. Cette attitude a toujours paru suspecte aux vastes de prêtres ou d’intellectuels, soucieux d’imposer des corpus figés aux populations qui leur étaient soumises, en Occident comme en Orient. Arthur de Gobineau... a été le premier... à attirer l’attention des Européens... sur le passé lumineux de la Perse antique, modèle plus fécond, à ses yeux, que la Grèce, trop intellectuelle et trop spéculative. Le modèle chevaleresque, dont les traces premières remontent à Rama et à Zarathoustra, induit une pratique de le maîtrise de soi, supérieure, pour Gobineau, à la spéculation intellectuelle des Athéniens. Et, de fait, quand la Perse a été laminée par les Mongols, l’islam tout entier a commencé à sombrer dans le déclin. Le fondamentalisme wahhabite est l’expression de cette décadence, dans la mesure où il est une réaction outrée, caricaturale, au déclin de l’islam, désormais privé de la grande Lumière de la Perse. Les pauvres simagrées wahhabites ne pouvant bien entendu jamais servir d’‘Orient’. [...De geïslamiseerd-Perzische filosoof Sohrawardi,[44] ...drager van de oorspronkelijke Iraanse wijsheid, stond nog voor de Mongoolse verwoesting van zijn land[45] op tegen religieuze kwezelarij en het oppervlakkige rationalisme... - hij eiste een terugkeer naar de adellijke, verlichte, engelachtige en michaëlitische [existentiële] houding die hoort bij de oorspronkelijke Perzische [T]raditie zoals teruggaande op haar oudste historische Avestische [bronnen].[46] Sohrawardi staat voor een opstand tegen de [intellectueel en spiritueel] oppervlakkig priesterkaste en daarmee tegen alle denk[stroming]en en activismen die zich onderwerpen aan steriliserende begrenzingen. Deze houding schijnt altijd verdacht toe aan het priesterlijke en intellectuele establishment dat zowel in het Westen als het Oosten bedacht is op het handhaven van een dogmatische consensus. Arthur de Gobineau[47]... was de eerste die... de aandacht van Europa... vestigde op het lumineuze verleden van het Oude Perzië: [hij achtte het] een veel vruchtbaarder model dan het [Klassieke] Griekenland dat in zijn optiek te intellectueel en te speculatief [was ingesteld]. Het ridderlijke model dat teruggaat op Rama en Zarathoestra bewerkstelligde een zelfdisciplinaire praktijk die voor de Gobineau superieur was aan die van het speculatieve intellectualisme van Athene. Het is inderdaad waar dat de hele Islam[itische wereld] in [culturele] neergang verzonk nadat Perzië door de Mongolen in de as was gelegd. Het Wahhabitische fundamentalisme is de [ultieme] uitdrukking van deze decadentie: het is een uiterste - karikaturale - reactie op het verval van de Islam na het uitdoven van zijn grootse Perzische Licht. De armzalige verwaandheid van de Wahhabieten kan [noch voor het Westen noch voor het Oosten] ter existentiële ‘oriëntatie’ dienen.] (p. 162)

De Indo-Europese archetypes die worden bewaard in de Perzische Traditie zijn via een eeuwenlange wisselwerking doorgegeven aan Avondland: via het [Helleense] Rijk dat werd gesticht door Alexander de Grote, via de Romeinse cavalerietraditie, via de kruisvaarders, via de Oosterse Letteren - en via de filosofie van de Traditionele School (Steuckers, p. 161ff.). Hun kracht berust in hun essentie - een essentie waarop noch pseudo-islamische cultuurbarbarij, noch pseudo-christelijke psychologische regressie, noch cultuur-nihilistische intellectuele deconstructie vat kunnen krijgen. Nietzsche overkwam het moderne Europese nihilisme in een authentieke herbeleving van het Indo-Europese archetype dat vervat ligt in de Perzische profeet Zarathoestra. Hij zocht niet alleen fysieke gezondheid in de hoge Alpen maar ook spirituele gezondheid op deze ijlste top van de Indo-Europese Traditie - daar vond hij zijn geneesmiddel voor het nihilisme.

...wirf den Helden in deiner Seele nicht weg! Halte heilig deine höchste Hoffnung!

- Also Sprach Zarathustra

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7.

Edelweiss-heid

(Archeo-Futuristische medicatie)

Save a spot for me

Among the Edelweiss

- Danielle White

Elke queeste naar het hoogste begint echter bij het laagste: de fundering van de Europese Rijksgedachte kan niet anders dan liggen in de Europese aarde - het grotere Europese Huis kan niet anders dan beginnen bij de kleinste Europese huisjes.

‘Een beter Nederland begint in Kleine Huisjes!’ - zo sprak Koning Willem Alexander ter gelegenheid van het Kerstfeest van 2018. [48] Veel wijsheid ligt in deze eenvoudige woorden: de Vorst wijst op het feit dat het grote begint met het kleine en dat zelfs de grootste reis aanvangt met een eerste kleine stap. Aan een Nieuw Europa gaat dus een Nieuw Nederland vooraf. Het begint zelfs nog dichter bij huis: bij een nieuwe stad, een nieuw dorp, een nieuwe straat - en dan ook nog bij een nieuw zelf. Een Nieuw Europa begint met de basale kwaliteiten die horen bij het Europese mens-zijn: zelfdiscipline, arbeidsethos, natuurlijke hiërarchie en toekomstplanning. Bij eenvoudige zaken als gezinstoewijding en huwelijkstrouw, bij bescheiden looneisen en gewetensvolle arbeid, bij kansen voor jongeren en respect voor ouderen, bij passend ontzag voor hoge geboorte en aangeboren talent, bij maatschappelijke ruimte voor artistieke gave en wetenschappelijke verdienste, bij solidariteit met de minder fortuinlijke volksgenoot en bij ecologisch verantwoordingsbesef. De karakteristieke eigenschappen van het huidige Europa en haar liberaal-normativistische postmoderniteit - collectief narcisme, consumptief hedonisme en kunstmatige klassenstrijd - horen hier dus pertinent niet bij. Ook niet in reactieve zin: een Nieuw Europa is onhaalbaar voor reactief-onwaardige ‘boze witte mannen’. Het is haalbaar wanneer het positief begint bij - en wordt gedragen door - blije blanke mensen. Dus alleen wanneer de Europese - inheems-fenotypisch niet anders dan blank definieerbare - bevolking blij is met zichzelf: de slagzin it’s ok to be white is in dat opzicht niet meer dan een minimaal beginpunt. Dus ook pas wanneer de Europese vrouw blij is met haar specifieke vorm van mens-zijn als Europees en als vrouw - en zich afkeert van de kunstmatige oikofobe en feministische ‘klassenstrijd’ tegen de Europese beschaving en de man. In het Nieuwe Europa - dat een universele beschavingsstandaard herstelt - moet expliciet een plaatsje worden opengehouden voor - een beperkt aantal - goedwillende, hardwerkende en nette (ex-koloniale, aangetrouwde, geassimileerde) niet-Europeanen die zich vereenzelvigen met de Europeaanse Leitkultur. Ook dat hoort bij de Archeo-Futuristische Europese Rijksgedachte: de ‘magnetische’ inwerking van de authentieke Europese Traditie waarvan een existentieel ordenende - dus innerlijk transformatieve - aantrekkingskracht kan uitgaan voor speciaal getalenteerde individuen uit andere culturen. Deze inwerking is echter geen automatisch gegeven: alleen een absoluut dominante Leitkultur garandeert de voor die innerlijke transformatie vereiste polaire hoogspanning. In het falen van deze dominantie ligt meest catastrofale weeffout van het liberaal-normativistisch ‘multiculturalisme’.

Steuckers wijst op het belang van ‘micro-herterritorialisaties’, dat wil zeggen een Reconquista van Europa door middel van een stapsgewijs geplande en minutieus uitgewerkte herovering van de Europese erfenis. Het grotere ‘Europese Huis’ van de Archeo-Futuristische Rijksgedachte begint dus ook voor hem bij ‘Kleine Huisjes’: een Nieuwe Europa begint bij geleefde, beleefde en doorleefde lokale traditie, regionale cohesie en nationale identiteit. Een Nieuwe Europa is onbereikbaar via een nationalistische Einzelgang: de val van Napoleon en Hitler bewijzen het. Wat wel erkend moet worden is dat de Archeo-Futuristische Rijksgedachte in Europa in de eerste plaats zal moeten worden gedragen door het volk - of: de paar volkeren - die een centrale plaats innemen in Europa. Enkele hoofdlijnen in de verwezenlijking van de Archeo-Futuristische Rijksgedachte zijn al duidelijk. De centrale positie van het Duitse volk, het dragende volk van het oude Heilige Roomse Rijk, is een natuurlijk uitgangspunt - een pragmatische anti-globalistische alliantie op de Frans-Duits-Russische as al evenzeer. Gegeven het feit dat de globalistische vijandelijke elite prioritair, via de Macron-Merkel strategie van Umvolkung à l’outrance, inzet op de ‘pyropolitieke’ verwoesting van de Frans-Duitse ruimte zal de herovering van Europa moeten beginnen bij ‘terugvalbasis’ Rusland. De door President Putin begonnen anti-globalistische bevrijding van Rusland is de natuurlijke uitvalsbasis voor een oost-naar-west metapolitiek tegenoffensief. Het door Aleksandr Doegin geformuleerde - confederatieve, multipolaire - Eurazianisme geeft hiertoe een eerste aanzet - ook hier geldt: ex oriente lux.[49]

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Ter afsluiting van dit essay lijkt het passend Steuckers’ pleidooi voor micro-herterritorialisatie te ondersteunen door zijn argument verder uit te werken. Het is namelijk verre van denkbeeldig dat het globalistische ‘EU project’ binnen een aantal jaren implodeert. Het is dan aan de kleinere staten van Europa om direct hun eigen plaats te bepalen in een post-globalistisch Nieuw Europa - zij zullen zich dan direct opnieuw moeten uitvinden en positioneren. Ook voor staten van bescheiden omvang en gering gewicht, zoals de huidige staten van de Lage Landen, is er dan een wereld te winnen. Een Nieuw Europa biedt immers kansen voor het herwinnen van sinds de Tweede Wereld Oorlog verloren en verkwanselde zelfstandigheid: staatssoevereiniteit, volksidentiteit, valuta en welvaartsstaat. Het falen van het globalistische ‘EU project’ en het wegvallen van globalistische controlemechanismen zal de kleinere staten van Europa de vrijheid geven om zich op hun eigen unieke wijze te ontwikkelen.

Op het kleinste niveau wordt dit potentieel geïllustreerd door de nog kleinere Europese microstaten: de ministaatjes San Marino, Andorra, Monaco en Liechtenstein zijn in vele opzichten tussen de mazen van het globalistische net heen geglipt. Zij hebben zich in hun eigen biotoopjes optimaal kunnen ontwikkelen zonder hun eigenheid op te geven. Anders dan in de kleinere EU lidstaten blijft de inheemse bevolking van de microstaten - grosso modo - juridisch geprivilegieerd, economisch beschermd, sociaal dominant en cultureel behouden.[50] Daar krijgt niet zomaar iedere willekeurige ‘arbeidsmigrant’ verblijfsstatus en staatsburgerschap. Daar worden sociale voorzieningen en huisvesting niet zomaar uitgedeeld aan de eerste de beste ‘asielzoeker’. Daar wordt van de inheemse bevolking niet verwacht dat zij berust in de modegrillen van identiteitsondermijnende ‘diversiteit’. Daar is het blijkbaar wél mogelijk moderne technologie en economische welvaart te combineren met een dominante etniciteit en een dwingend cultuurmodel. Zonder de specifieke omstandigheden van deze microstaten te negeren en zonder hun specifieke problemen te vergoelijken kan wel worden gesteld dat de Archeo-Futuristische Revolutie daar in bepaalde opzichten al is begonnen. Met name het Vorstendom Liechtenstein, door Prins Hans-Adam II sinds de democratisch goedgekeurde constitutionele hervorming van 2003 direct en persoonlijk bestuurd, bewijst dat een combinatie van semi-decissionistisch bestuur en beschermde etnische identiteit met een vrije markt mechanisme, grote welvaart en hoge sociaaleconomische ontwikkeling heel goed mogelijk is. Het is misschien geen toeval dat Liechtenstein als laatste legitiem bestuurd overblijfsel van het Heilige Roomse Rijk een eerste beeld laat zien van hoe een Archeo-Futuristisch Europa er uit zou kunnen zien. Het is dit hoog in de Alpen verscholen ‘Edelweiss model’ dat de kleine en middelgrote EU lidstaten kan inspireren tot het verwerpen van het ‘Calimero argument’: het globalistische argument dat ze ‘te klein’ zouden zijn om op eigen benen te staan.

Feitelijk is de situatie van de Europese microstaten vanuit mondiaal perspectief niet essentieel anders dan die van de kleinere EU lidstaten. De veel evenwichtiger sociaaleconomische en etnische politiek van de kleinere en middelgrote staten van de welvarende Pacific Rim - Maleisië, Singapore, Brunei, Taiwan, Zuid-Korea - bewijzen dat het ‘Edelweiss model’ ook op grotere schaal voor herhaling vatbaar is.[51] Het behoud van de Monarchie in een deel van de kleinere EU lidstaten - in Scandinavië en de Lage Landen - geeft hierbij een gunstige uitgangsbasis voor overschakeling naar het Leichtensteiner ‘Edelweiss model’: de Monarchie biedt hier een ‘reserve soevereiniteit’ die een decissionistische reactie mogelijk maakt op het liberaal-normativistische globalisme. Het Nieuwe Europa kan ook beginnen met een ‘Edelweiss positionering’ van het Kleine Huisje geheten Nederland. De afgelopen decennia van neo-liberale kaalslag en cultuur-marxistische deconstructie hebben geleid tot sociale implosie en etnische vervanging: de ‘puinhopen van vijftig jaar paars’[52] bewijzen dat het Kleine Huisje geheten Nederland op de slooplijst staat van het globalistische ‘EU project’. Voor de Lage Landen - België, Nederland, Luxemburg - is het tijd voor beraad op een levensvatbaar alternatief: een subsidiair gedefinieerde en geborgen plaats in een Nieuw Europa, een Europa dat is zich kan inspireren op de Archeo-Futuristische Rijksgedachte en het confederatieve Eurazianisme. Dit is wat de Lage Landen verdienen: een eigen plaats tussen de Edelweiss.

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Nawoord: de Koning als Katechon

De Nederlandse patriottisch-identitaire beweging erkent de Koning als Katechon - als door de Goddelijke Voorzienigheid aangestelde Beschermer van de Nederlandse staat en het Nederlandse volk. Meer dan dat: de Vorst belichaamt de Nederlandse staat in meest letterlijke zin: het feit dat zijn macht door constitutionele scherpslijperij in de loop van de laatste anderhalve eeuw stukje bij beetje is weggesneden door een jaloerse regentenklasse en een wannabe ‘schijnelite van valsemunters’[53] doet daar niets aan af. Door de eeuwen heen heeft het Huis van Oranje, wanneer puntje bij paaltje kwam, altijd voor de belangen van het Nederlandse volk en de gewone man gestaan. De patriottisch-identitaire beweging dient de diepe eerbied en aanhankelijkheid van het Nederlandse volk naar het Huis van Oranje en de Monarchie als institutie te respecteren - en te integreren in haar doen en laten.

Uiteindelijk is het aan de Vorst om te bepalen wat het beste is voor zijn land en zijn volk - het land is immers zijn erfdeel en hij is vader van zijn volk. Het is niet redelijk te denken dat de Vorst ook maar enigszins geneigd zou zijn erfdeel te verkwanselen en zijn volk te verraden - basaal vertrouwen in zijn oordeel hoort bij de eeuwenoude band tussen het Vorst en volk. Zijn woord en zijn wil moeten daarom, binnen de grenzen van wat redelijk is, zeer zwaar wegen - ook als hij de tijd en manier om op te treden tegen het globalisme wellicht (nog) anders inschat dan de meeste van zijn onderdanen. Ook zulk respectvol inschikken in de natuurlijke hiërarchie en de wettelijke orde hoort, binnen de grenzen van wat redelijk is, bij goed burgerschap. Net zoals de wettelijke orde en het politiek proces - hoe onredelijk en onbehoorlijk ze ook feitelijk worden ingevuld - moeten worden gerespecteerd zolang dat nog enigszins mogelijk is. Natuurlijk kan er, gegeven de globalistische ramkoers met de soevereiniteit van de Nederlandse staat en de identiteit op het Nederlandse volk, op den duur een situatie ontstaan waarin dit niet langer mogelijk is, maar die ultieme afweging komt alleen toe aan het volk als geheel - en aan de Vorst, als vader van het volk. Wat de Nederlandse patriottisch-identitaire beweging tot die tijd betaamt, is respectvol in te schikken - en volk en Vorst respectvol te dienen, door een redelijk alternatief aan te dragen voor globalistische deconstructie en door in metapolitieke zin de vervanging voor te bereiden van de vijandelijke elite. De beweging dient, omwille van het volk, ook de Vorst: waar en wanneer nodig, en waar en wanneer gevraagd, moet de Vorst de patriottisch-identitaire beweging aan zijn zijde weten - ook tegen de vijandelijke elite. Diep in het verradershart van de vijandelijke elite - het ziekelijk monsterverbond tussen de crypto-republikeinse ‘regenten klasse’ en de eeuwig-rancuneuze soixante-huitard ‘intelligentsia’ - zit namelijk niet alleen haat voor het volk, maar ook haat voor de Vorst.

De kersttoespraak van de Koning biedt hoop aan alle Nederlanders: zij biedt een veilige afstand tot ‘verre tafels’ en een tijdige herinnering aan de tachtigjarige vrijheidsstrijd van het Nederlandse volk. Niets past de patriottisch-identitaire beweging echter minder dan woorden te leggen in de mond van de Vorst. Dit essay sluit daarom af met diens eigen woorden - woorden van welgemeende zorg en eenvoudige troost, gericht tot ons arme volk:

Tegenover de sterke en brute krachten in de wereld staan gewone mensen machteloos… zo voelt het vaak. Maar zou het niet kunnen dat we onze eigen rol onderschatten? ...U denkt misschien: ‘Wat moeten we met zo’n verklaring? Het klinkt zo ver weg allemaal’. Maar de drijvende kracht erachter - Eleanor Roosevelt dacht daar heel anders over. Zij zei: ‘Waar beginnen mensenrechten? Op plekken dicht bij huis, zó dichtbij en zó klein dat ze op geen enkele kaart zichtbaar zijn.’ Ze legt hiermee een direct verband tussen de straat waarin we wonen en de grote wereld. Vrijheid, gelijkheid en eerlijke kansen voor iedereen zijn óók afhankelijk van de manier waarop wij dagelijks met elkaar omgaan. Een leven zonder angst en onverschilligheid wordt niet alleen bepaald aan verre vergadertafels, hoe onmisbaar die ook zijn. Daar gaan we gelukkig ook zelf over. We zijn minder machteloos dan we denken. Verreweg de meeste Nederlanders voelen zich thuis in een omgeving waarin tegenstellingen niet op de spits worden gedreven en waarin conflicten zo goed mogelijk samen worden opgelost. Vergelijking met andere landen is vaak een bron van troost, zo niet van trots. De bereidheid om rekening met elkaar te houden en samen te werken heeft ons vèr gebracht. Dit was de basis onder ons land, 450 jaar geleden, toen een klein groepje Nederlandse gewesten tegen de verdrukking in de krachten bundelde en met succes zijn eigen weg ging. Zoiets was nog nooit eerder vertoond.... Een beter Nederland begint in Kleine Huisjes! We onderschatten vaak de positieve invloed die we met onze bescheiden mogelijkheden als mens kunnen hebben. Juist dicht bij huis wordt de wereld gewonnen. We kunnen samen niet alles. Maar wel veel... Een mooie toekomst is mogelijk. Mits we het geloof in onszelf en in elkaar vasthouden! [54] - Zijne Majesteit Willem-Alexander, Koning der Nederlanden

Mon Dieu, ayez pitié de ce pauvre peuple

 

Glossarium

 

banlieusard

Frans: ‘buitenwijk bewoner’, speciaal verwijzend naar de overwegend door etnische minderheden bewoonde sociaal huisvesting hoogbouw wijken rond Parijs;

decisionisme

francofoon-anglofone term, neologistisch vertaalbaar als ‘beslisme’:

doctrine van direct-concrete en fysiek-belichaamde beslissingsbevoegdheid, het tegengestelde van indirect-abstract en psychologisch-manipulatie Normativisme (Rex vs. Lex);

éditocratie

ook: mediacratie, intellocratie; heerschappij van de main stream media plus politiek-correcte academisch publicisten;

éristique

Grieks εριστικός: ‘strijdlustig’, ‘strijdvaardig’ ;

mobocratie

ook: ochlocratie;[55] heerschappij van de ‘meute’, de ‘massa’;

partitocratie

politieke kaping van parlementaire instituties door partijbelangen en partijkartels; het mechanisme achter politicide, d.w.z. vernietiging van politieke pluraliteit en invoering van dogmatische politieke-correcte consensus (‘1984’);

pyropolitiek

geopolitieke ‘verschroeide aarde’ strategie waarvan de globalistische vijandelijke elite zich bedient voor het ‘wegbranden’ van multipolaire verzetshaarden tegen haar Nieuwe Wereld Orde;

soixante-huitard

Frans: ‘68-er’; verwijzing naar de Parijse ‘culturele revolutie’ van mei 1968 en naar de door geïnspireerde ‘hippie tot yuppie’ babyboomer generatie die het globalistisme belichaamt in de dubbele na/uitleving van cultuur-marxistische theorie en neo-liberale praktijk, nu voortgezet in een vervolg generatie: de nieuwe feministisch-allochtone machtselite;

 

Noten

[1] https://www.nrc.nl/nieuws/2019/02/13/rutte-eu-moet-meer-v...

[2] https://www.government.nl/documents/speeches/2019/02/13/c...

[3] https://ec.europa.eu/digital-single-market/en/news/counte...

[4] https://ec.europa.eu/digital-single-market/en/fake-news-d...

[5] https://ec.europa.eu/digital-single-market/en/modernisati... - let op de expliciet vermelde invulling van deze maatregelen aan de hand van het op versnelde etnische vervanging gerichte ‘Marrakesh Pact’.

[6] https://www.erkenbrand.eu/artikelen/le-rouge-et-le-noir-i... en http://www.erkenbrand.eu/artikelen/uit-het-arsenaal-van-h...

[7] Een (double entendre) verwijzing naar de titel van de post-modern - en ‘pre-apocalyptische’ - kunst documentaire van Sophie Fiennes (2010).

[8] Voor een beknopte Traditionalistische interpretatie van het science fiction genre - als hierofanie en cryptomnesie - verg. Alexander Wolfheze, The Sunset of Tradition and the Origins of the Great War (Newcastle upon Tyne: Cambridge Scholars, 2018 - https://www.cambridgescholars.com/the-sunset-of-tradition... ) 240ff. Voor een psycho-historische update bij dit thema verg. Alexander Wolfheze, Alba Rosa. Ten Traditionalist Essays about the Crisis in the Modern West (London: Arktos, 2019 - https://arktos.com/product/alba-rosa/ ) 35ff.

[9] Verg. de magistrale illustraties bij Jeff Wayne’s op Wells’ boek gebaseerd musical versie: http://www.thewaroftheworlds.com/

[10] Truganini wordt in de pre-postmoderne wetenschappelijke literatuur beschreven als de laatste volbloed Tasmaniër en de laatste Tasmanische moedertaal spreker. Zij werd rond 1812 geboren als de dochter van het opperhoofd van de inheemse bevolking van het voor de Tasmaanse zuidkust gelegen Bruny Eiland, overleefde de moordpartijen, verkrachting en ‘hervestiging’ van de Britse koloniale ‘omvolking’ van haar moederland en stierf in ballingschap in 1876 - na haar dood werd haar skelet tentoon gesteld als ‘wetenschappelijk curiosum’. Verg. Wolfheze, Sunset, 318ff. 

[11] Voor de ‘techno-filosofische’ uitwerking van deze ‘evolutionaire’ ontwikkeling verg. Jason Jorjani, World State of Emergency (Londen: Arktos, 2017) 69ff.

[12] https://www.geopolitica.ru/en/article/what-white-genocide

[13] Een term uit het anti-multiculturele discours van Frans politiek filosoof Charles Maurras (1868-1952), bekend als voorstander van ‘nationaal integralisme’ en ideoloog van de monarchistische en anti-revolutionaire beweging Action française.

[14] Wolfheze, Alba Rosa, 147ff.

[15] Voor een beknopte weergave van de filosofische en cultuur-historische context van het Cultuur Nihilisme: https://www.erkenbrand.eu/artikelen/de-identitaire-beelde...

[16] Het naar de (proto-globalistische) Franse revolutionaire terreur verwijzende ‘epitaaf’ ontwerp voor de Jacobijnse Club in Parijs, aangehaald in Edgar Allen Poe’s The Pit and the Pendulum.

[17] ‘Afgeschermd bezit’ - een liefdadigheidsinstelling voor publiek gebruik onder Islamitisch Recht (bijv. een moskee, een school, een badhuis).

[18] De Jacobijnse Club, gebaseerd op het Jacobijnen klooster in de Parijse Rue Saint-Honoré, was gedurende de Franse Revolutie een extreem-links georiënteerde partijpolitieke organisatie van vrijmetselaars radicalen, gesticht en aangevoerd door Maximilien Robespierre. Zij beoogde seculiere republiek en sociale revolutie af te dwingen door middel van justitiële moord en staatsterreur. Lenin’s politieke methodiek na de Russische Oktober Revolutie werd direct geïnspireerd door het Jacobijnse experiment.

[19] Verwijzingen naar, resp., de naar de 19e Zuid-Amerikaanse vrijheidsstrijder Simón Bolívar genoemde pan-Hispaans-Amerikaanse, anti-imperialistische en semi-socialistische staatsopvatting zoals geformuleerd door de Venezuelaanse President Hugo Chávez (1954-2013) en het ‘Roze Getij’ van (semi-)anti-globalistische en progressieve politieke hervormingen dat grote delen van Latijns-Amerika domineerde, ongeveer tussen de verkiezing van de Venezuelaanse President Hugo Chávez (1999) en de afzetting van de Braziliaanse Presidente Dilma Roussef (2016).

[20] De Europese Commissie bestaat (na de ‘Brexit’) uit 27 ongekozen ‘Commissarissen’ (let op de nomenclatuur die is overgenomen uit het oude Sovjet systeem) die worden voorgedragen door de regeringen van de lidstaten en die gezamenlijk de uitvoerende macht monopoliseren - naast hun exclusief recht op wetsvoorstellen en hun sterke controle op de wetsuitvoering. De Europese Commissie, sinds 2014 voorgezeten door de Luxemburger Jean-Claude Juncker, heeft daarmee feitelijk dictatoriale macht, ook als zij deze macht vrijwel uitsluitend in negatieve zin uitoefent door haar institutionele begunstiging van laissez faire neo-liberalisme en ‘open grenzen’ cultuur-marxisme. Theoretisch gesproken moet het Europees Parlement de benoemingen goedkeuren en heeft het Parlement het recht de Commissie naar het huis te sturen, maar in de praktijk zijn de benoemingen vrijwel altijd exercities in consensuspolitiek en wordt het afzettingsrecht door parlementaire sabotage gereduceerd tot een dode letter. Een verder democratic deficit ligt natuurlijk in het feit dat de opkomst voor de verkiezingen van het zogenaamd ‘controlerende’ Europese Parlement structureel onder de 50% ligt.

[21] Het Wahhabisme, vernoemd naar Soenni-Islamitisch religieus leider en hervormer Mohammed al-Wahhad (1703-92), is een fundamentalistische en iconoclastische doctrinaire stroming binnen de Hanbali School. De aanduiding ‘Wahhabi’ voor een aanhanger van deze stroming wordt voornamelijk gebruikt door haar tegenstanders: zelf geven aanhangers ervan de voorkeur aan termen als muwahhīd (‘monotheïst’) of Salafist. Het Wahhabisme wordt gekenmerkt door een militant en zelfs agressief purisme dat zich uit in regressieve sociale praktijken naar binnen en institutionele intolerantie naar buiten. Het historisch pragmatische bondgenootschap tussen de Wahhabitische geestelijkheid en het Saoedische koningshuis vertaalt zich in contemporaine geopolitieke realiteiten als ‘Al-Qaida’ en de ‘Islamitische Staat’.

[22] Het Salafisme (salaf, ‘voorgangers, voorvaderen’, concreet: de eerste drie generaties religieuze autoriteiten in Islam) is een door het 18e eeuwse Wahhabisme geïnspireerde Soenni-Islamitische religieuze hervormingsbeweging die ontstond in het 19e eeuwse Egypte ontwikkelde in verzet tegen de maatschappelijke effecten van het Westerse imperialisme. Hoewel deze hele beweging zich verzet tegen secularisme en democratie naar Westers model, is slechts een kleine minderheid van haar aanhangers (de zgn. ‘Jihadisten’) voorstander van de gewapende ‘heilige oorlog’ ter implementatie van de Salafistische maatschappelijke hervorming. De Hanbali maḏab (‘gedragscode’, concreet: doctrinaire ‘school’), gesticht door Ahmad ibn-Hanbal (780-855), is de kleinste van de vier traditionele jurisprudenties van de Soenni-Islam en als dominante leer beperkt tot het Arabische Schiereiland (waar die leer tot wet is verheven in het publieke domein in Saoedi-Arabië en Qatar). De Hanbali School wordt gekenmerkt door een effectieve verwerping van ijmā‘ (‘specialistische consensus’) en ijtihād (‘mentale inspanning’) en een beperkte inzet van qiyās (‘deductieve analogie’) in Islamitische jurisprudentie. Het maatschappelijk conservatisme en financiële slagkracht van de Golfstaten maken de Hanbali School aantrekkelijk als ideologisch basismodel voor islamistische extremisten.

[23] De ‘pelgrim vaderen’ waren de Engelse (grotendeels radicaal-Calvinistische) religieuze dissidenten die in 1609 eerst uitweken naar de Nederlandse Republiek, maar vervolgens met het schip de ‘Mayflower’ emigreerden naar Noord-Amerika, waar zij de Plymouth Colony stichtten (later territoriaal opgenomen in de Massachusetts Bay Colony). Zij worden beschouwd als de grondleggers van de Amerikaanse natie (hier ‘klassiek’ gedefinieerd als White Anglo-Saxon Protestant) en zij worden vaak gezien als de initiators van de Amerikaanse feestdag Thanksgiving Day, ‘Dankzeggingsdag’ (naar verluidt beïnvloed door hun herinnering aan het Leidse Oktoberfeest).

[24] Het concept van de ‘edele wilde’, nog niet ‘gecorrumpeerd’ door de globaal-imperialistisch expansieve maar ‘tegen-natuurlijke’ Westerse beschaving, was een integraal onderdeel van het 18e eeuwse Verlichtingsdenken. De term wordt ten onterechte toegeschreven aan de antropologisch-optimistisch (op een utopische ‘natuur staat’) georiënteerde Frans filosoof Jean-Jacques Rousseau (1712-78). Rousseau’s werk gaf echter wel een ‘proto-oikofobische’ invulling aan de voorliggende archetypische notie van ‘romantisch primitivisme’ (een archetype dat al is terug te vinden in the ‘Enkidoe’ karakter van het Gilgamesj Epos). Voor een Archeo-Futuristische herinterpretatie van het Verlichtingsmotief van de ‘edele wilde’, verg. Wolfheze, Sunset, 318ff.

[25] Een verwijzing naar de semi-genocidale pacificatie campagne van de eerste maanden van 1794 die door het Jacobijnse regime werd gevoerd in de nasleep van de Opstand in de Vendée - deze campagne combineerde de strategieën van verschroeide aarde en ethnic cleansing en kostte tot 40.000 burgers het leven.

[26] Tekst ter gelegenheid van de opening van de Beierse Walhalla Gedenkhal (1842).

[27] Verg. Wolfheze, Alba Rosa, 112ff.

[28] Voor een inleiding op het Eurazianistisch gedachtegoed verg. https://www.erkenbrand.eu/artikelen/le-rouge-et-le-noir-i...

[29] Verg. Wolfheze, Alba Rosa, 200ff.

[30] Verwijzingen naar, resp., de Bijbelse zondeval (specifiek Gen. 3:17), en Karl Marx’ theorie van Entfremdung.

[31] Verg. Wolfheze, Alba Rosa, 55.

[32] Latijn: Caesar, in de Europese Traditie de eretitel van de Imperator, de hoogste bevelsautoriteit, afgeleid van de bijnaam van de Romeinse dictator Gajus Julius (100-44 v. Chr.). Eén van de historisch overgeleverde etymologieën herleidt de bijnaam tot een Noord-Afrikaans woord voor ‘olifant’ (Caesar liet opvallend veel munten slaan met de afbeelding een olifant).

[33] Dit ‘begrenzing’ principe kan worden teruggevonden in de Dasein hermeneutiek van de Duitse filosoof Martin Heidegger (1889-1976) en is recentelijk Archeo-Futuristisch uitgewerkt door de Amerikaans-Perzische filosoof Jason Jorjani (geboren 1981) - verg. Wolfheze, Alba Rosa, 228ff.

[34] Een verwijzing naar de metafysische dimensie van het Traditionalistische begrip ‘Wachter op de Drempel’ zoals recent gereactiveerd door de Russische filosoof Aleksandr Doegin - verg. https://www.erkenbrand.eu/artikelen/de-gebroken-pijl-2/

[35] Verg. Wolfheze, Alba Rosa, 209ff.

[36] Een verwijzing naar de moderne dialectische methode (‘these-antithese-synthese’) ontwikkelt door de Duitse filosoof Friedrich Hegel (1770-1831) en ‘geoperationaliseerd’ door de Duits-Joodse politiek filosoof Karl Marx (1818-83).

[37] Een verwijzing naar de Franse vergelijkende taalwetenschapper Georges Dumézil (1898-1986) die pionerend onderzoek deed naar archaïsche Indo-Europese mythen en sociale structuren, bekend om zijn ‘Trias These’ m.b.t. het oorspronkelijke Indo-Europese kastensysteem.

[38] In latere Perzische taalvarianten en in de Sjāhnāmeh (het nationale epos van Iran, getiteld ‘Het Boek der Koningen’, geschreven door dichter Firdawsī aan het einde van de 10e eeuw AD) wordt deze koning aangeduid als Jamšīd (ofwel ‘Schitterende Yama’), een mythische priester-koning met bovennatuurlijke gaven en de charismatische roeping van de hoogste Katechon.

[39] De Indo-Europese knots wordt als - vaak met goud foelie overtrokken - ceremoniële staf overgenomen als machtssymbool van hoogwaardigheidsbekleders binnen alle Tradities van de Oude Nabije Oosten en de Klassieke Wereld. De symbolische betekenis van de knots is (via cultureel-antropologisch herleidbare structurele opposities) gerelateerd aan die van de scepter (politiek gezag), de toverstaf (spiritueel gezag) en de baton (militair gezag).

[40] De Avestaanse aanduiding voor een van de Zoroastrische Yazata’s (‘vererenswaardige’, vergoddelijkte principes - de term is etymologisch verwant aan het Griekse woord ἅγιος ‘heilig’): het gaat hier om het principe van het ‘Geweten’ dat functioneert als een ‘aartsengel’ en is toegerust met de knots van wereldse macht - in latere Perzische taalvarianten wordt hij aangeduid als Sorūš.

[41] De Middel-Perzische naam Ahriman wordt in het oudere Avestisch weergegeven als Angra Mainyu, ‘Kwade Geest’, de kosmische tegenstrever van de opper- en scheppergodheid Ahura Mazda. Zoals in het Christendom God (Licht, Waarheid, Orde) en de duivel (duisternis, leugen, chaos) tegenover elkaar staan, zo staan in het Zoroastrianisme  Ahura Mazda en Angra Mainyu tegenover elkaar.

[42] Dit charisma wordt in de Christelijke Traditie symbolisch uitgebeeld door middel van een aureool, een halo-effect toegeschreven aan engelen en heiligen. De moderne wetenschap beschrijft dit fenomeen in neurologische termen (bijv. in relatie tot liminele verschijnselen als epilepsie, synesthesie en hallucinatie). Voor de historische context van het concept van de khvarenah verg. Jason Jorjani, World State of Emergency (Londen: Arktos, 2017) 153-92.

[43] Voor Steuckers’ visie van Europa als subcontinentaal deel van de totale Euraziatische ruimte verg. https://www.erkenbrand.eu/artikelen/le-rouge-et-le-noir-i... .

[44] Šihāb ad-Dīn Yahya Sohrawardi (1154-91), bijgenaamd ‘Meester der Verlichting’, baseerde zijn Illuminationisme op de notie van prisca theologia en was zo in staat pre-Islamitische (filosofische concepten en) kennis te integreren in zijn werk. Esoterische symboliek en intellectuele intuïtie zijn essentiële elementen in Sohrawardi’s werk, dat invloed kreeg op het Westerse Traditionalisme door de vertalingen en interpretaties van Henri Corbin (1903-78) en Seyyed Hossein Nasr (geboren 1933).

[45] Een verwijzing naar de verovering van het Chorasmidische Rijk (grosso modo het toenmalige ‘Perzië’) door Dzjengis Khan, beginnend in 1219.

[46] In de Iraanse context kan deze spirituele houding zonder voorbehoud worden omschreven als ‘Arisch’ - het is deze Arische existentiële conditie die door Jason Jorjani wordt onderzocht in zijn werken Prometheus and Atlas en The World State of Emergency.

[47] Joseph Arthur Graaf de Gobineau (1816-82) was een paleo-conservatief Frans denker - vaak genoemd als grondlegger van het laat-19e en vroeg-20e eeuwse ‘wetenschappelijk racisme’ - die tijdens zijn diplomatieke dienst in Perzië een levenslange filosofische, geschiedkundige en mystieke fascinatie voor de Perzische Traditie ontwikkelde.

[48] https://www.koninklijkhuis.nl/documenten/toespraken/2018/...

[49] https://www.geopolitica.ru/en/article/problems-european-s...

[50] Na ‘Brexit’ heeft zelfs in de mainstream media voorzichtige interesse getoond voor de niet-globalistische immigratie politiek van de Europese microstaten. bijv. https://www.theguardian.com/politics/2016/oct/09/liechten...

[51] Modellen die waardevolle elementen bevatten zijn o.a. de etnisch-gebaseerde Community Funds van Singapore en de Bumiputra privileges van Maleisië.

[52] Een schuine verwijzing naar de titel van het boek van Pim Fortuyn, De puinhopen van acht jaar paars (2002).

[53] Een verwijzing naar de titel van het Martin Bosma’ politieke traktaat De schijn-élite van de valse munters (2010), door Bosma zelf vrij toegankelijk gemaakt via https://gratis-boek.nl/martin-bosma-de-schijn-elite-van-d...

[54] https://www.koninklijkhuis.nl/documenten/toespraken/2018/...

[55] Een term die in de Nederlandse publieke sfeer werd geïntroduceerd door de politieke leider van het CDA, Sybrand van Haersma Buma.

Edelweiss De Archeo-Futuristische Europese Rijksgedachte aan de hand van Robert Steuckers’ Europa I. Valeurs et racines profondes de l’Europe

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Edelweiss

De Archeo-Futuristische Europese Rijksgedachte aan de hand van Robert Steuckers’ Europa I. Valeurs et racines profondes de l’Europe

(Madrid: BIOS, 2017)

door Alexander Wolfheze

Voorwoord: Slangtong in Zürich

RS-trilogievol1.jpgDe aanstaande Europese verkiezingen, waarmee het globalistisch-eurocratisch regime in Brussels zich nogmaals vier jaar een ‘democratische’ dekmantel wil aanmeten, biedt een goede gelegenheid tot een gedegen heroverweging van het ‘EU project’. De democratische camouflagekleding van het EU keizerrijk is inmiddels echter zodanig afgedragen dat zelfs troonopvolger kandidaat Mark Rutte zich afvraagt of het niet tijd is om het gewoon maar om te kleden in onverhuld totalitaire ‘uniform’ stijl. De titel van zijn op 13 februari 2019 in Zürich uitgesproken - en door analisten als ‘sollicitatiebrief’ nummer zoveel geïnterpreteerde[1] - ‘Churchill Lezing’ spreekt in dit opzicht boekdelen: The EU: from the power of principles towards principles and power.[2] Ofwel: ‘De EU: van de macht van principes naar principes en macht’. ‘Naar machtsprincipe’ zegt hij nog net niet, maar de inhoud windt er geen doekjes om: ‘het gaat in de wereld om macht en macht is geen vies woord’ (lees: de EU heeft machtsmiddelen die onvoldoende worden gebruikt), ‘de EU moet minder naïef zijn en meer realisme tonen’ (lees: het is tijd voor de EU het idealistisch masker laat vallen) en ‘we moeten besluiten over sancties tegen landen voortaan met een gekwalificeerde meerderheid nemen’ (lees: de resterende staatssoevereiniteit van de lidstaten moet nog verder worden verkleind). En inderdaad ontwikkelt de EU zich steeds meer in de richting van een ‘superstaat’: de gestage accumulatie van censuurmaatregelen in de mediale en digitale sfeer met hate speech codes,[3] fake news taskforces[4] en copyright directives[5] neemt inmiddels Orwelliaanse vormen aan. Met de totalitaire finish lijn van het EU project in zicht, is het goed de historische ontwikkeling en ideologische grondslagen ervan nog eens de revue te laten passeren.

Het Verdrag van Maastricht dat de formele grondslag legde voor de huidige Europese Unie werd getekend op 7 februari 1992, zes weken na de formele opheffing van de Sovjet Unie: zo begon de opbouw van het nieuwe cultuurmarxistische Westblok direct na de afbraak van het oude reaalsocialistische Oostblok. Sindsdien heeft de EU zich niet alleen naar buiten toe sterk uitgebreid (met name door de haastige inlijving van de net uit het Oostblok ontsnapte Centraal-Europese natiestaten), maar zij heeft zich ook in rap tempo als proto-totalitair ‘superstaat’ project naar binnen toe ontwikkeld tot een waardige opvolger van de Sovjet Unie. De overeenkomsten zijn in toenemende mate frappant: dezelfde sociale ‘deconstructie’ (Oostblok: hyper-proletarisch collectivisme / Westblok: neo-matriarchale nivellering), dezelfde economische ‘deconstructie’ (Oostblok: ‘dwangcollectivisatie’ / Westblok: ‘rampen kapitalisme’) en dezelfde etnische ‘deconstructie’ (Oostblok: ‘groepsdeportatie’ / Westblok: ‘omvolking’). De tegenstelling tussen het theoretisch discours van het liberaal-normativisme (‘vrijheid’, ‘gelijkheid’, ‘democratie’, ‘rechtsstaat’, ‘mensenrechten’) en de praktische leefrealiteit van maatschappelijke degradatie (sociaal-darwinistische economische tweedeling, sociale implosie, institutionele corruptie, endemische criminaliteit, etnische vervanging) neemt in het huidige Westblok even groteske vormen aan als in het voormalige Oostblok. In zeker opzichten is het Westblok zelfs verder doorgeschoten in de richting van een ‘superstaat’: zo staat de EU vlag in alle lidstaten obligaat naast de nationale vlag - een directe degradatie van nationale waardigheid die zelfs de formeel onafhankelijke Sovjet satellietstaten bespaard bleef.

AFut-1.pngMet deze escalerende discrepantie tussen theorie en praktijk is de heersende klasse van het Westblok - een globalistisch-eurocratisch opererende coalitie tussen het neoliberale grootkapitaal en de cultuurmarxistische intelligentsia - inmiddels verworden tot een regelrecht vijandelijke elite. Haar EU project heeft ontpopt zich tot een voor allen zichtbaar globalistisch anti-Europa project. Voor het overleven van de Europese beschaving en van de Europese inheemse volkeren die deze beschaving dragen is de verwijdering van de vijandelijke elite absolute noodzaak. Daarbij is een fundamentele (cultuurhistorische, politiekfilosofische) kritiek op haar ideologie van essentieel belang. Een belangrijke bijdrage tot deze kritiek is recent geleverd door Belgisch Traditionalistisch publicist Robert Steuckers - een passender ‘verkiezingswijzer’ voor de ‘Europese verkiezingen’ van mei 2019 dan zijn grote trilogie Europa is nauwelijks denkbaar. Dit essay beoogt Steuckers’ analyse van de echte kernwaarden en identitaire wortels van Europa, zoals vervat in het eerste deel van zijn nog niet uit het Frans vertaalde trilogie, onder de aandacht van het Nederlandstalige publiek te brengen. Steuckers’ Europa I biedt meer dan een grondige tegen-analyse van de postmoderne ‘deconstructie’ van Europa’s authentieke waarden en identiteiten: het biedt een heldere formule van een levensvatbaar alternatief: een Archeo-Futuristisch geïnspireerd ‘Europa van de volkeren’ gebaseerd op de complementaire principes van autonome volksgemeenschappen, consistente politieke subsidiariteit en pragmatische confederatieve structuren. Het moet nogmaals gezegd zijn: de patriottisch-identitaire beweging van de Lage Landen is Robert Steuckers grote dank verschuldigd - en een hartelijke felicitatie met een werk dat de gewoonlijk nogal bescheiden intellectuele begrenzingen van onze gewesten verre te boven gaat.

(*) Zoals de voorafgaande ‘Steuckers recensies’[6] is dit essay niet alleen bedoeld als boekbespreking, maar ook als metapolitieke analyse - een bijdrage tot de patriottisch-identitaire tegen-deconstructie van het door de Westerse vijandelijke elite gehanteerde postmoderne deconstructie discours. De kern van dit essay is een samenvatting door Steuckers’ Traditionalistisch geleide exploratie van de Europese identiteit. Die exploratie zet een definitieve punt achter de postmoderne deconstructie van die identiteit en het aldus bewerkstelligde cultuurhistorische tabula rasa stelt de patriottisch-identitaire beweging in staat een revolutionair nieuwe invulling te geven aan het idee ‘Europa’. Een Archeo-Futuristisch Europa ligt daarmee feitelijk binnen intellectueel handbereik.

(**) Dit essay belicht ‘casus Europa’ in drie stappen: het eerste drietal paragraven beoogt diagnostische ‘nulmetingen’, het tweede drietal paragraven geeft therapeutische ‘referentiepunten’ en de zevende paragraaf indiceert een concreet ‘behandelplan’. In eerste en laatste paragraven schetst de recensent het grotere Archeo-Futuristische kader weer waarbinnen Steuckers’ exploratie van de Europese identiteit relevant is voor de patriottisch-identitaire beweging - de eigenlijke ‘recensie’ van Steuckers’ Europa I vindt de lezer in paragraven 2 t/m 6.

(***) Voor een toelichting op de gekozen (ver)taal(vorm) en (voet)noten(last) wordt verwezen naar het voorwoord van de voorafgaande ‘Steuckers recensies’.

1.

Het rode onkruid

(psycho-historische diagnose)

‘Over Your Cities Grass Will Grow’[7]

wells.jpgH.G. Wells’ eeuwig groene meesterwerk The War of the Worlds blijft tot op de dag van vandaag niet alleen een van de grootste werken van het hele literaire science fiction genre: het behoudt ook tot op de dag van vandaag een directe - veelal alleen onderbewust, instinctief erkende - relevantie voor de existentiële conditie van de Westerse beschaving.[8] Wells’ magistrale sfeerimpressie van de Earth under the Martians schetst een wereld waarin de mens alle herkenning- en referentiepunten verliest: de menselijke beschaving wordt weggevaagd door superieure buitenaardse technologie, de mensheid zelf wordt gereduceerd tot slachtvee voor een buitenaardse bezettingsmacht en zelfs de aardse natuur wordt verdrongen door buitenaardse vegetatie. Een griezelig ‘rood onkruid’ - in verwijzing naar de rode kleur van de oorlogsplaneet Mars - overwoekert de ruïnes van de menselijke beschaving en verstikt de restanten van de aardse vegetatie.[9] Literaire analyses van The War of the Worlds erkennen dat Wells’ meesterwerk op aannemelijk wijze kan worden geïnterpreteerd als een serie retrospectieve en contextuele psycho-historische ‘bespiegelingen’. Zo projecteert Wells de in zijn tijd recent afgeronde en sociaaldarwinistisch geïnterpreteerde genocide van ‘primitieve volkeren’ (zoals de inheemse bevolking van Tasmanië)[10] door het ‘blanke meesterras’ op een hypothetische uitroeiing van de mensheid door superieur buitenaards ras. Ook projecteert hij de mensonterende horreur van de in zijn tijd opkomende bio-industrie op een hypothetische ‘slachtvee status’ van de mensheid na een buitenaardse invasie. Waar de meeste literaire analyses zich echter niet mee bezig houden is de voorspellende waarde van Wells’ werk, een waarde die het ontleent aan de voorwaartse projectie van meerdere - en gelijktijdige - technologische en sociologische ontwikkelingstrajecten. Wells’ geniale literaire verpakking van deze projecties geeft zijn ‘wetenschappelijke fictie’ een kwaliteit die in eerdere eeuwen als ‘profetisch’ zou hebben gegolden.

De existentiële breuklijnen die de Moderniteit heeft veroorzaakt in de Westerse beschaving kunnen worden geanalyseerd - en deels ook vooruit geprojecteerd - met verschillende moderne wetenschappelijk modellen: economisch als Entfremdung (Karl Marx), sociologisch als anomie (Emile Durkheim), psychologisch als cognitive dissonance (Leon Festinger) en filosofisch als Seinsvergessenheit (Martin Heidegger). De metapolitieke relevantie van deze analyses voor de Westerse patriottisch-identitaire bewegung ligt niet zozeer in hun - al dan niet ideologisch negatieve - ‘deconstructieve’ capaciteit, als wel in hun simpele diagnostische waarde. Hierin ligt een belangrijke overeenkomst tussen deze moderne wetenschappelijke modellen en moderne artistieke ‘modellen’ zoals Wells’ meesterwerk The War of the Worlds: door ‘maatschappelijke signalen’ te interpreteren dienen ze als metapolitieke ‘verkeersborden’ - en als waarschuwingen. Inmiddels is de accumulatieve impact van de Moderniteit op de Westerse samenlevingen echter zó groot geworden, dat de existentiële conditie van de Westerse volkeren niet langer in termen van authentieke beschavingscontinuïteiten en historische standaardmodellen kan worden beschreven. Wanneer afwijking, aberratie en ontsporing een existentiële conditie volledig bepalen, dan is er immers niet langer sprake van een historische herkenbare ‘standaard’. Wanneer wetenschappelijke ‘waarschuwingsborden’ worden genegeerd, dan komen artistiek ‘voorspelde’ dystopische eindbestemmingen in zicht. Niet voor niets wordt deze fase van de (ex-)Westerse beschavingsgeschiedenis getypeerd als ‘post-modern’: de (ex-)Westerse samenlevingen van nu hebben authentieke beschavingscontinuïteit grotendeels achter zich gelaten en bewegen zich versneld in de richting van existentiële condities die overeenkomsten vertonen die van Wells’ Earth under the Martians.

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De nieuwe ‘globalistische’ heersersklasse van het Westen staat nu in effectief boven en los van de Westerse volkeren, zij is alleen nog ‘verbonden’ met deze volkeren in de uitwerking van haar macht. De vijandelijke elite acht zichzelf nu niet alleen ethisch en esthetisch, maar ook en vooral evolutionair verheven boven de ‘massa’ die zij is ‘ontgroeit’.[11] De consistent negatieve effecten van haar machtsuitoefening - hoofdrichtingen: neo-liberale uitbuiting, industriële ecocide, bio-industriële dierkwellerij, cultuur-marxistische deconstructie, sociale implosie, etnische vervangingsstrategieën - maken haar herkenbaar als een letterlijk vijandelijke elite. Zij kent geen sympathieën – niet voor haar autochtone vijanden, niet voor haar allochtonen dienaren en niet voor haar aardse thuis.  The globalists are at war with humanity as a whole. They seek to eliminate or enslave at will. They care about themselves and themselves alone. They are committed to concentrating all wealth in their hideous hands. In their evil eyes, our only purpose is to serve them and enrich them. Hence, there is no room for racism, prejudice, and discrimination in this struggle. It is not a race war but a war for the human race, all included, a socio-political and economic war of planetary proportions (Jean-François Paradis).[12]

De globalistische en dus anti-Europese geopolitieke strategie van de vijandelijke elite (gericht op industriële delokalisatie, sociale atomisering en culturele ontworteling, verg. Steuckers 223ff.) mag als zodanig - als sociaaleconomische en psychosociale oorlogsvoering - worden erkend door een handjevol patriottisch-identitaire denkers, maar zij wordt door de Westerse volksmassa alleen begrepen in haar uitwerkingen: economische marginalisatie (arbeidsmarktverdringing, kunstmatige werkeloosheid, interetnische tribuutplicht), sociale malaise (matriarchale anti-rechtstaat, gezinsontwrichting, digitale pornificatie) en culturele decadentie (onderwijs ‘idiocratie’, academische ‘commercialisering, ‘politiekcorrecte’ mediaconsensus). Deze economische, sociale en culturele ‘deconstructie’ programma’s worden door de vijandelijke elite kracht bijgezet en onomkeerbaar gemaakt door een zorgvuldig gedoseerd, maar inmiddels kritieke proporties aannemend proces van massa-immigratie. Het proces van etnische vervanging heeft tot doel de Westerse volkeren als etnisch, historisch en cultureel herkenbare eenheden te elimineren door ze als geatomiseerde déracinés ‘op te lossen’ in la boue,[13] de ‘modder’ van identiteitsloze, karakterloze en willoze massamens. Dit proces van etno-culturele, sociaal-economische en psycho-sociale totaal-nivellering beoogt - prioritair richting Europa - de ultieme Endlösung van het kernprobleem van de Nieuwe Wereld Orde, dat wil zeggen van het automatisch anti-globalistisch voortbestaan van authentieke identiteiten op collectief niveau. Concreet wordt deze Endlösung gerealiseerd in totalitair geïmplementeerde etnocidale ‘multiculturaliteit’ en anti-identitaire ‘mobocratie’.

De motivaties en doelstellingen van de vijandelijke elite onttrekken zich feitelijk aan het voorstellingsvermogen van de Westerse volksmassa - ze gaan in zekere opzichten het gewone menselijk verstand ‘te boven’. Hun ‘niet-aardse’ en ‘diabolische’ kwaliteit wordt echter in toenemende mate waarneembaar in hun concrete uitwerkingen.[14] Elders werd de ideologie van de vijandelijke elite gedefinieerd als ‘Cultuur Nihilisme’: een geïmproviseerde ideeëncocktail die zich kenmerkt door militant secularisme, sociaal-darwinistisch hyper-individualisme, collectief geïnternaliseerd narcisme en doctrinair cultuur- relativisme die uitmondt in de vernietiging van alle authentieke Westerse beschavingsvormen.[15] Het feit dat de volksmassa niet in staat het Cultuur Nihilisme als ideologie en programma te begrijpen heeft veel te maken met de opzettelijke ‘ongrijpbaarheid’ ervan: de expliciete motivaties en doelstellingen van de vijandelijke elite zijn intentioneel on-logisch en anti-rationeel. Het enige wat voor de vijandelijke elite telt is haar macht - haar zogenaamde ‘ideeën’ zijn slechts manoeuvres om de macht te krijgen, te behouden en te vergroten: ze dienen te worden begrepen in het kader van cognitieve oorlogsvoering.

Een goed voorbeeld van deze cognitieve oorlogsvoering is het huidige ‘klimaatdebat’: de door de vijandelijke elite uitgestippelde ‘partijkartel lijn’ beroept zich op Gutmensch eco-bewustzijn, maar het op basis van deze lijn via nieuwe ‘klimaatbelastingen’ aan de volksmassa opgelegde ‘straftarief’ wordt exclusief aangewend voor het ‘investeren’ in het commerciële ‘klimaat bedrijf’ – en het subsidiëren van politiek-correcte ‘klimaat clubs’. Het onvermijdbare verzet van de volksmassa wordt vervolgens cognitief ‘weggesluisd’ naar een subrationeel ‘klimaatontkenning’ discours dat wordt toegeschreven aan – en zelfs opportunistisch wordt opgeëist door – de ‘populisten’, activistisch (Frankrijk’s ‘gele hesjes’) dan wel parlementair (Baudet’s ‘0,00007 graden’). De daarbij succesvol bewerkstelligde opgelegde cognitieve dissonantie inzake ‘klimaat’ gaat zover dat men in de volksmassa het verdwijnen van winterijs en het toeslaan van februarilentes instinctief wegredeneert. De balanceerakte van de vijandelijke elite is feilloos: de ‘populistische oppositie’ is blij met een paar extra zeteltjes maar verspeelt haar échte moreel aanzien, de volksmassa is blij nog een paar jaartjes ‘dansen op de vulkaan’ met vakantievliegen en autorijden en de vijandelijke elite is blij dat haar ‘economische groei’ ongestoord oploopt – en met de extra ‘klimaatbelastingen’ die kunnen worden aangewend voor ‘commerciële aanbestedingen’ en, natuurlijk, ‘klimaat vluchtelingen’. Ondertussen loopt de ecocidale klok van antropogene aardopwarming en meteorologische catastrofes gewoon door - naar de final countdown.

wwow.jpgDe Westerse volksmassa erkent per saldo wel instinctief de globalistische grootheidswaanzin van de vijandelijke elite - deze instinctieve erkenning wordt door de elitaire intelligentsia veelal neerbuigend afgedaan als ‘onderbuikgevoel’ en de politieke vertaling ervan wordt al even neerbuigend betiteld als ‘populisme’. Deze ultiem demofobe arrogantie mag lang werken, maar er zal uiteindelijk wel een hoge prijs op staan: de Westerse volkeren ervaren het globalistische regime van de vijandelijke elite nu al in toenemende mate als een regelrechte ‘bezettingsmacht’. Men begint de alles verstikkende macht van de vijandelijke elite te zien voor wat zij is: een wezensvreemd ‘rood onkruid’ dat de Westerse beschaving en het Westerse thuisland versmoort.

I had not realised what had been happening to the world, had not anticipated this startling vision of unfamiliar things. I had expected to see... ruins - I found about me the landscape, weird and lurid, of another planet. For that moment I touched an emotion beyond the common range of men, yet one that the poor brutes we dominate know only too well. I felt as a rabbit might feel returning to his burrow and suddenly confronted by the work of a dozen busy navvies digging the foundations of a house. I felt the first inkling of a thing that presently grew quite clear in my mind, that oppressed me for many days, a sense of dethronement, a persuasion that I was no longer a master, but an animal among the animals, under [alien rule]. With us it would be as with them, to lurk and watch, to run and hide; the fear and empire of man had passed away. - Herbert George Wells, The War of the Worlds

2.

De Europese kata-morfose

(politiek-filosofische diagnose)

Impia tortorum long[o]s hic turba furores sanguinis innocui, non satiata, aluit.

Sospite nunc patria, fracto nunc funeris antro, mors ubi dira fuit,

vita salusque patent.

[Hier voedde een goddeloze en onverzadigbare meute beulsknechten

hun lange waanwoedes met het bloed der onschuldigen.

Pas nu het vaderland veilig is, nu deze moordkelder opengebroken is,

zijn leven en gezondheid weer mogelijk.][16]

Na een halve eeuw systematische sloop van staatsstructuren en volksidentiteiten is het Europese politieke, economische, sociale en culturele landschap nagenoeg onherkenbaar veranderd. Decennialange neoliberale woeker en cultuurmarxistische wildgroei hebben als Europa als een ‘rood onkruid’ in hun greep en vroeger onvoorstelbare ‘maatschappelijke vormen’ zijn ontstaan. Hypermobiel ‘flitskapitaal’ levert kortstondige economische bubbels op waarin zich architecturale, artistieke en modieuze monstruositeiten nestelen, met name in central business districts, leisure time resorts en academic campus environments. Etnische ‘diversiteit’ resulteert in sociaaleconomische netwerken die als ‘invasieve exoten’ de Westerse publieke sfeer overwoekeren: diaspora economieën, drugsmaffia’s, polycriminele subculturen. Deze netwerken worden aangevuld door on-Westerse ‘levensovertuigelijke’ instituties: de door Midden-Oosters oliekapitaal aangestuurde awqāf,[17] de uit belastingtribuut bekostigde ‘asielindustrie’ en de door globalistisch kapitaal aangestuurde systeemmedia. Wat deze door de vijandelijke elite effectief gedoogde en gefaciliteerde netwerken en instituties met elkaar verbindt is hun gemeenschappelijke functionaliteit: hun rol als vervangingsmechanismen ter bewerkstelligen van de Nieuwe Wereld Orde. Hierbij valt een cruciale voortrekkersrol toe aan die schwebende Intelligenz: de cultuur-marxistische intelligentsia die zich opwerpt als globalistische avant-garde. Deze intelligentsia is belast met de bovenruimtelijke en im-materiële deconstructie die voorafgaat aan de ruimtelijke en materiële deconstructie van de Westerse beschaving. Deze ‘spirituele’ en ‘intellectuele’ voorsprekers van het globalistische bezettingsregime ...se nichent dans [l]es trois milieux-clefs - média, économie, enseignement - et participent à la élimination graduelle mais certaines des assises idéologiques, des fondements spirituels et éthiques de notre civilisation. Les uns oblitèrent les résidus désormais épars de ces fondements en diffusant une culture de variétés sans profondeur aucune, les autres en décentrant l’économie et en l’éclatant littéralement par les pratiques de la spéculation et de la délocalisation, les troisièmes, en refusant l’idéal pédagogique de la transmission, laquelle est désormais interprétée comme une pratique anachronique et autoritaire, ce qu’elle n’est certainement pas au sens péjoratif que ces termes ont acquis dans le sillage de Mai 68. [...hebben zich genesteld in [de] drie sleutelposities [van de globalistische macht] - de media, de economie [en] het onderwijs - en zij werken van daar uit aan de langzame maar zekere eliminatie van de ideologische, spirituele en ethische fundamenten van onze beschaving. Sommigen van hen werken aan het wegwissen van de toch al uiteengevallen fundament restanten door een oppervlakkige ‘culturele diversiteit’ te verspreiden. Anderen [werken aan] de ‘decentralisatie’ van de economie door haar letterlijk op te blazen door middel van speculatie en dislokalisatie. Weer anderen [werken aan] de sabotage van het pedagogische ideaal van [culturele] transmissie door [dat ideaal] af te doen als een ‘verouderde’ en ‘autoritaire’ praktijk door [gebruik te maken van] de negatieve betekenis waarmee deze termen zijn belast in de nasleep van mei ’68.] (p. 262-3)

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De globalistische intelligentsia coördineert middels geraffineerde alien audience propaganda strategieën de cognitieve oorlogsvoering van de vijandelijke elite tegen de Westerse volkeren: zij bewerkstelligt de liberaal-normativistische habitus van exclusief ‘economisch denken’ dat de fysieke deconstructie van Westerse beschavingsvormen rechtvaardigt. ...[U]ne économie ne peut pas, sans danger, refuser par principe de tenir compte des autres domaines de l’activité humaine. L’héritage culturel, l’organisation de la médecine et de l’enseignement doivent toujours recevoir une priorité par rapport aux facteurs purement économiques, parce qu’ils procurent ordre et stabilité au sein d’une société donnée ou d’une aire civilisationnelle, garantissant du même coup l’avenir des peuples qui vivent dans cet espace de civilisation. Sans une telle stabilité, les peuples périssent littéralement d’un excès de libéralisme, ou d’économicisme ou de ‘commercialité’... [Een economi[sch model] kan niet ongestraft weigeren rekening te houden met de andere domeinen van menselijke activiteit. De culturele nalatenschap, het medische zorgsysteem en de onderwijstechnische organisatie moeten altijd prioriteit krijgen boven puur economische factoren want zij verschaffen orde en stabiliteit aan een gegeven gemeenschap of beschavingssfeer: zij garanderen namelijk de toekomst van de volkeren die leven binnen die beschavingssfeer. Zonder die stabiliteit sterven d[ie] volkeren letterlijk aan een overdosis van ‘liberalisme’, ‘economisme’ en ‘commercialisme’...] (p. 216-7)

In de Europese context wordt de dubbel neoliberale en cultuurmarxistische deconstructie van de Westerse beschaving en volkeren geïmplementeerd door het in Brussel gebaseerde ‘EU project’. Dit project wordt gekenmerkt door een radicale omkering van alle traditionele noties van pan-Europese samenwerking: in metahistorische zin staat het postmoderne ‘EU project’ in structurele tegenstelling tot de klassieke Europese rijksgedachte. L’Europe actuelle, qui a pris la forme de l’eurocratie bruxelloise, n’est évidemment pas un empire, mais, au contraire, un super-état en devenir. La notion d’‘état’ n’a rien  à voir avec la notion d’‘empire’, car un ‘état’ est ‘statique’ et ne se meut pas, tandis que, par définition, un empire englobe en son sein toutes les formes organiques de l’aire civilisationnelle qu’il organise, les transforme et les adapte sur les plans spirituel et politique, ce qui implique qu’il est en permanence en effervescence et en mouvement. L’eurocratie bruxelloise conduira, si elle persiste dans ses errements, à une rigidification totale. L’actuelle eurocratie bruxelloise n’a pas de mémoire, refuse d’en avoir une, a perdu toute assise historique, se pose comme sans racines. L’idéologie de cette construction de type ‘machine’ relève du pur bricolage idéologique, d’un bricolage qui refuse de tirer des leçons des expériences du passé. Cela implique une négation de la dimension historique des systèmes économiques réellement existants, qui ont effectivement émergé et se sont développés sur le sol européen. [Het huidige ‘Europa’, zoals het vorm wordt gegeven door de Brusselse ‘eurocratie’, is duidelijk geen rijk - het is het omgekeerde: een superstaat-in-wording. De notie van een ‘staat’ staat volledig los van de notie van een ‘rijk’, want een ‘staat’ is [letterlijk] ‘statisch’ en [in zijn essentie] onbewegelijk, terwijl een rijk nu juist alle binnen de erdoor beheerste beschavingssfeer organische vormen incorporeert, omvormt en aanpast aan zijn spirituele en politieke grondslagen: [een rijk] is daardoor nu juist permanent in een staat van gisting en beweging. Als de Brusselse eurocratie voortgaat op de door haar ingeslagen [tegengestelde en] doodlopende weg, dan zal zij uitlopen op een totale ‘verstening’. De Brusselse eurocratie van vandaag ontbeert - en weigert - [elk soort historisch] geheugen, heeft elk [soort] historisch fundament verloren en zet zich af tegen [elk soort historische] worteling. [Haar radicaal] constructivistische en mechanische zelfbegrip berust op een ideologische improvisatie die weigert om uit de lessen en ervaringen van de [Europese] geschiedenis te leren. Dit behelst een ontkenning van de historische dimensie van de [specifieke en volkseigen - althans tot voor kort -] echt bestaande economische systemen die [organisch] zijn voortgekomen en zich hebben ontwikkeld uit de Europese bodem.] (p. 215-6)

In politiek-filosofisch perspectief vertegenwoordigt het essentieel anti-Europese ‘EU project’ niets meer en minder dan een globalistische Machtergreifung. Neo-Jacobijnse radicalen hebben de macht overgenomen en historische precedenten met betrekking tot Jacobijnse machtsexperimenten[18] - met name de Franse en Russische revolutionaire terreur - geven aanleiding tot zorg. Kennis van de Europese historische context van het ‘EU project’ is echter onvoldoende voor een echt begrip van de ogenschijnlijk tegenstrijdige - want zelfdestructieve - anti-Europese doelstellingen van dat project. Zulk begrip vergt inzicht in de grotere doelstellingen van het globalisme - dat inzicht wordt nu in hapklare brokken aangeleverd in Steuckers’ Europa.

3.

Het globalistische anti-Europa

(geo-politieke diagnose)

Soms is de misdaad die men wil begaan zo groot,

dat het niet volstaat haar te begaan namens een volk:

dan moet men haar begaan namens de mensheid.

- Nicolás Gómez Dávila

Steuckers’ panoramische overzicht van de hedendaagse mondiale geopolitiek herleidt de oorsprong van het anti-Europese ‘EU project’ tot het einde van de Tweede Wereld Oorlog. Dit conflict bracht een einde aan de grootmacht status en imperiale hegemonie van de Europese natie-staten: de militaire nederlagen van Frankrijk in 1940, Italië in 1943 en Duitsland in 1945 werden gevolgd door de liquidatie van alle Europese koloniale rijken (Brits Indië in 1947, Nederlands Indië in 1949, Belgisch Congo in 1960, Frans Algerije in 1962 en Portugees Afrika in 1975). De wereldheerschappij werd in kort tijdbestek overgenomen door twee supermachten die beide op een universalistische ideologie en een mondiale geopolitiek inzetten: de Verenigde Staten als voorvechter van het Liberalisme en de Sovjet Unie als voorvechter van het Socialisme. Het fysieke (geografische, demografische, industriële) restbestand ‘Europa’ werd met militaire verdragen (NAVO, Warschau Pact) en economische samenwerkingsverbanden (EEG, Comecon) vervolgens tussen de overwinnaars verdeeld. Het is belangrijk de brute realiteiten van militaire nederlaag, koloniale liquidatie en politieke ontvoogding voor ogen te houden. La Seconde Guerre mondiale avait pour objectif principal, selon Roosevelt et Churchill, d’empêcher l’unification européenne sous la férule des puissances de l'Axe, afin d’éviter l’émergence d’une économie ‘impénétrée’ et ‘impénétrable’, capable de s’affirmer sur la scène mondiale. La Seconde Guerre mondiale n’avait donc pas pour but de ‘libérer’ l’Europe mais de précipiter définitivement l’économie de notre continent dans un état de dépendance et de l’y maintenir. Je n’énonce donc pas un jugement ‘moral’ sur les responsabilités de la guerre, mais je juge son déclenchement au départ de critères matériels et économiques objectifs. Nos médias omettent de citer encore quelques buts de guerre, pourtant clairement affirmés à l’époque, ce qui ne doit surtout pas nous induire à penser qu’ils étaient insignifiants. [Volgens Roosevelt en Churchill was het hoofddoel van de Tweede Wereld Oorlog te verhinderen dat Europa zich verenigde onder leiding van de As mogendheden, om zo te voorkomen dat er een [Europese] economie zou ontstaan die zich op het wereldtoneel als ‘ondoordringbaar’ en ‘onverslaanbaar’ zou kunnen handhaven. [Hun] Tweede Wereld Oorlog had dus niet ten doel om Europa te ‘bevrijden’, maar om de economie van ons continent te doel vervallen tot een staat van afhankelijkheid - en daarin te houden. Daarmee doe ik dus geen uitspraak over de ‘morele’ verantwoordelijkheid voor die oorlog - ik beoordeel [slechts] zijn uitbreken vanuit objectieve materiële en economische doelen. Het feit dat onze media [ook] de vermelding van een aantal andere oorlogsdoelen vermijden die toentertijd duidelijk werden verkondigd moet ons er niet toe brengen te denken dat die [doelen] onbelangrijk waren.] (p.220)

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Na veertig jaar Koude Oorlog beginnen zich midden jaren ’80 de eerste tekenen stressfracturen af te tekenen in de globaal opererende machtsmachines van de twee supermachten. De rampen met de Challenger en Chernobyl (28 januari en 26 april 1986) laten duidelijk zien dat de symptomen van imperial overstretch niet langer te verbergen zijn. Escalerende economische chaos en toenemend politieke gezagsverlies dwingen beide supermachten tot ingrijpende binnenlandse maatregelen: Reaganomics en Perestrojka markeren de geopolitieke vloedlijn van de supermachten. Na de implosie van de Sovjet Unie is de Verenigde Staten de officiële winnaar van de Koude Oorlog maar de Pyrrus-kwaliteit van de formele overwinning blijkt uit het feit dat Amerika onvoorwaardelijk berust in de sensationele opkomst van de Chinese economische supermacht en zich effectief terugtrekt uit de eerder felomstreden Derde Wereld. Na de Amerikaanse nederlaag in Somalië (Black Hawk Down, 1993) vervalt Afrika in failed states en neo-tribale chaos. Na de Amerikaanse evacuatie uit Panama (Canal Zone Handover, 1999) wordt Latijns Amerika overgelaten aan Bolivarianismo en Marea Rosa.[19] De imperiale rat race tussen de soevereine natiestaten die begon met de Zevenjarige ‘Wereld Oorlog Nul’ (1756-63) mag dan zijn geëindigd met Amerika als last man standing, maar het opleggen van een authentiek-imperiale Pax Americana ligt ver buiten het bereik van Amerika’s geopolitieke intenties, ambities en capaciteiten. De met Wilsoniaanse retoriek ingeklede interventies van Bush Senior en Bush Junior in Irak in 1991 en 2003 waren geen exercities in principiële global governance, maar in pragmatische resource control. Na de zelfopheffing van de Sovjet Unie als supermacht concurrent en de afkondiging van de ‘nieuwe wereld orde’ (Bush Senior, 1991) besloot de Amerikaanse heersende klasse dat het ‘einde van de geschiedenis’ (Francis Fukuyama, 1992) gekomen is: zij schakelde over van Amerikanisme naar globalisme. Er ontstond zo een ‘wereld elite’, toegankelijk voor iedereen met heel veel geld en heel weinig moraliteit. Deze elite acht zich ontheven aan alle geopolitieke regels en wetmatigheden: staatsrechterlijke soevereiniteit, culturele eigenheid en etnische identiteit zijn in die optiek definitief achterhaalde fenomenen, obstakels op de door haar ingeslagen snelweg naar een Brave New World. Als geheel definieert zich deze nieuwe ‘globalistische’ elite los van alle etnische religieuze en culturele wortels: vanuit deze zelfgewilde ontworteling keert zij zich meteen tegen de rest van de nog wel gewortelde mensheid - tegen staten die nog soevereiniteit hebben, tegen culturen die nog essentie hebben en tegen volken die nog identiteit hebben. De globalistische vijandelijke elite is geboren.

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Onder de dubbele banieren van neoliberalisme en cultuurmarxisme beschouwt de vijandelijke elite beschouwt het ‘achtergebleven’ menselijke ‘residu’ als weinig meer dan een oneindig ‘maakbare’ massa ‘mensenmateriaal’ dat kan worden gebruikt voor het aanvullen van banksaldi, het invullen van seksuele perversiteiten en het opvullen van existentiële leemtes. [La superclasse... domine à l’ère idéologique du néoliberalisme. Il n’est pas aisé de la définir : elle comporte évidemment les managers des grandes entreprises mondiales, les directeurs des grandes banques, de cheiks du pétrole ou des décideurs politiques voire quelques vedettes du cinéma ou de la littérature ou encore, en coulisses, des leaders religieux et des narcotrafiquants, qui alimentent le secteur bancaire en argent sale. Cette superclasse n’est pas stable : on y appartient pendant quelques années ou pendant une ou deux décennies puis on en sort, avec, un bon ‘parachute doré’. ...[N]umériquement insignifiante mais bien plus puissante que les anciennes aristocraties ou partitocraties, elle est totalement coupée des masses, dont elle détermine le destin. En dépit de tous les discours démocratiques, qui annoncent à cor et à cri l’avènement d’une liberté et d’une équité inégalées, le poids politique/économique des masses, ou des peuples, n’a jamais été aussi réduit. Son projet ‘globalitaire’ ne peut donc pas recevoir le label de ‘démocratique’. [De ‘superklasse’... domineert het tijdperk van de neoliberale ideologie. Het is niet gemakkelijk haar te definiëren: zij bestaat het duidelijkst uit de managers van de gro[ots]te multinationals, de directeuren van de gro[ots]te banken, de oliesjeiken [en bepaalde] politieke leiders, maar ook uit enkele filmsterren, intellectuelen en ‘spirituele leiders’ - en daarnaast uit een schimmiger personeelsbestand van [maffiabazen en] drugsbaronnen die de bankensector voeden met zwart geld. Deze ‘superklasse’ is verre van stabiel: men kan er enkele jaren of decennia toe behoren voordat men er weer uit valt - meestal met een ‘gouden parachute’. ...[N]umeriek is zij zeer klein, maar zij is machtiger dan alle voorafgaande aristocratieën en partitocratieën uit de menselijke geschiedenis. Zij is volledig afgesneden van de [volks]massa’s, waarvan zij het lot bepaalt. Ondanks het [publieke] discours dat continu spreekt over het aanbreken van weergaloze vrijheid en gelijkheid is het politieke [en] economische gewicht van de [volks]massa’s nog nooit [eerder in de geschiedenis] zo klein geweest. Het globalistische project [dat wordt nagestreefd door de ‘superklasse’] kan daarom in geen enkel opzicht ‘democratisch’ worden genoemd.] (p. 291)

De globalistische vijandelijke elite instrumentaliseert de militaire macht en politieke invloed van Amerika: zij wendt Amerikaanse macht en invloed aan voor globalistische doelen en wensen. Zij misbruikt het Amerikaans prestige, het Amerikaans vermogen en het Amerikaanse volk - dit is de diepste reden voor de anti-globalistische en nationalistische reactie die Donald Trump in het Witte Huis brachten. De vijandelijke elite opereert echter boven en achter Amerikaanse instituten als het presidentschap: in Amerika onttrekt de echte macht zich grotendeels aan institutionele controle en democratische correctie. De Washington swamp, de lying press en de deep state bepalen het beleid - het is voor de strijd tegen deze monsters dat het Amerikaanse volk Donald Trump tot president koos. De monsterlijke macht van de vijandelijke elite is echter zo groot dat ook twee jaar na Trump’s verkiezingsoverwinning de publieke sfeer nog steeds wordt gedomineerd door zijn vijanden. De onfatsoenlijke woede en openlijke sabotage waarmee de vijandelijke elite reageert op Trump is begrijpelijk: de globalistische vijandelijke elite valt en staat met haar grip op haar Amerikaanse instrumentarium. Alleen met controle over de Amerikaanse geldschepping, de Amerikaanse krijgsmacht en de Amerikaanse diplomatie is zij in staat de internationale geopolitieke chaos te handhaven waarin haar financiële belangen en ideologische waandenkbeelden gedijen.

Controle over Amerika is voor de globalistische vijandelijke elite vooral van belang voor het blijvend onderdrukken van haar potentieel machtigste vijand: Europa. Europa is een potentieel dodelijk gevaar voor het nihilistische en ontwortelde globalisme omdat het een ongeëvenaarde technologisch-industriële en sociaal-economische capaciteit combineert met authentieke cultuurhistorische en etnische worteling. Met het wegvallen van de Sovjet Unie eindigde de tweehoofdige ‘bewindvoering’ die aan het einde van de Tweede Wereld Oorlog werd opgelegd aan Europa. De geopolitieke opgave om Europa ‘klein te houden’ valt vervolgens toe aan Amerika alleen: de permanente verdragsmatige verzwakking van het verenigde Duitsland (vooral via monetaire convergentie met Frankrijk) en de Amerikaanse militaire expansie naar het oosten (vooral via uitbreiding van de NAVO) zijn basale ingrediënten van deze globalistische strategie. Toch blijkt deze strategie niet waterdicht: militaire aanwezigheid in Europa vergt een aanzienlijke en constante inspanning van een economisch en politiek mondiaal overbelast Amerika en zelfs de via de Europese eenheidsmunt (2002) afgedwongen tribuutplicht blijkt onvoldoende in staat de Duitse sociaaleconomische motor af te remmen. De EU expansie naar het voormalige Oostblok (2004) laat bovendien het gevaar herleven van een door Duitsland geleid semi-autarkisch geopolitiek blok - het tegenwerken van een dergelijk Mitteleuropa project was de hoofdreden van de Balkan ‘dwarsboom’ politiek waarmee de Triple Entente in 1914 de Eerste Wereld Oorlog provoceerde. Dit grotere geopolitieke perspectief geeft een heel andere duiding aan de in Amerika bedachte ‘Financiële Crisis’ van 2008, die leidde tot de economisch desastreuze en politiek destabiliserende ‘Europese Schuldencrisis’ van 2009, en aan de door Amerika geïnstigeerde ‘Arabische Lente’ van 2011, die leidde tot de Europese ‘Migratie Crisis’ van 2015.

NMst.jpgDeze duiding wordt het best verwoordt door Steuckers zelf: La globalisation, c’est... le maintien de l’Europe, et de l’Europe seule, en état de faiblesse structurelle permanente. Et cette faiblesse structurelle est due, à la base, à un déficit éthique entretenu, à un déficit politique et culturel. Il n’y a pas d’éthique collective, de politique viable ou de culture féconde sans ce que Machiavel et les anciens Romains, auxquels le Florentin se référait, appelaient des ‘vertus politiques’, le terme ‘vertu’ n’ayant pas le sens stupidement moraliste qu’il a acquis, mais celui, latin, de ‘force agissante’, de ‘force intérieure agissante’... [De globalisatie betekent dit: ...het gijzelen van Europa - en alleen van Europa - in een staat van permanente [en] structurele zwakte. En die zwakte is in essentie te wijten aan een doorlopend ‘ethisch tekort’ [dat zich vertaalt in] een politiek en cultureel tekortschieten. Een collectieve ethiek, een levensvatbare politiek [en] een vruchtbare cultuur zijn onmogelijk zonder wat Machiavelli, en de oude Romeinen waarop de Florentijn zi[jn denken] baseerde, de ‘politieke deugden’ noemden - waarbij de term ‘deugd’ niet de kortzichtige moralistische lading heeft die hij nu heeft, maar de [oorspronkelijk] Latijnse [betekenis] van ‘acterende kracht’ [en] ‘innerlijk sturende kracht’.] (p. 279-80) Terecht wijst Steuckers op de door globalistische cognitieve oorlogsvoering bewerkstelligde ‘ethisch tekort’ van Europa: het is dit tekort aan politieke deugd, doelbewustheid en daadkracht dat Europa verlamt. Dit tekort maakt psycho-historische catharsis, geopolitieke assertiviteit en decisionistische zelfverdediging onmogelijk: het maakt Europa machteloos tegen de acute existentiële bedreigingen van opzettelijk gestuurde sociale implosie, massa-immigratie en jihadistische terreur. Dit globalistisch ‘anti-European’ Europa verwezenlijkt zich door de verinnerlijking van het cognitieve-dissonante globalistische mainstream media discours van zelfdestructief geïnterpreteerde ‘mensenrechten’, ‘multiculturaliteit’ en ‘diversiteit’. L’arme principale qui est dirigée contre l’Europe est donc un ‘écran moralisateur’, à sens unique, légal et moral, composé d’images positives, de valeurs dites occidentales et d’innocences prétendues menacées, pour justifier des campagnes de violence politique illimitée. [Het voornaamste wapen dat gericht is tegen Europa is een uniek ‘moralistisch [televisie- en beeld]scherm’ dat [specifieke] juridische en morele ‘waarden’ [afdwingt via] het positieve ‘frame’ van zogenaamde ‘westerse waarden’ en gepretendeerde ‘bedreigde onschuld’ voor het goedpraten van een [systematische] campagne van eindeloze politieke terreur.] (p.281)

In Europa wordt dit globalistische discours exemplarisch geïnternaliseerd en prioritair vertegenwoordigd door de soixante-huitard generatie die zich na haar ‘lange mars door de instituties’ het monopolie op de politieke macht heeft toegeëigend. Pendant les années de leur traversée du désert, ...les [utopistes]de [la] génération soixante-huitard] feront... un ‘compromis historique’ qui repose, ...premièrement, sur un abandon du corpus gauchiste, libertaire et émancipateur, au profit des thèses néolibérales, deuxièmement, sur une instrumentalisation de l’idée freudo-sartienne de la ‘culpabilité’ des peuples européens, responsables de toutes les horreurs commises dans l’histoire, et troisièmement, sur un pari pour toutes les démarches ‘mondialisatrices’, même émanant d’instances capitalistes non légitimées démocratiquement ou d’institution comme la Commission Européenne, championne de la ‘néolibéralisation’ de l’Europe, dont le pouvoir n’est jamais sanctionné par une élection. [Gedurende hun jaren in de woestijn... maakten de [utopisten] van de [‘achtenzestig’] generatie... een ‘historisch compromis’ dat berust... op [drie complementaire strategieën:] (1) een verraad van hun linkse [kern]gedachtegoed [van] bevrijding en emancipatie ten gunste van het neoliberalisme, (2) een [politieke] toepassing van het Freudiaans-Sartriaanse idee van de ‘schuld’ van de Europese volkeren, [die zo] verantwoordelijk [worden gehouden] voor alle misdaden van de geschiedenis en (3) een inzet op ‘globaliserende’ processen - zelfs [als die processen] worden gedreven door [on]democratische [en] illegitieme kapitalistische machten of door institutie[s] als de Europese Commissie, die [zich heeft opgeworpen] als kampioen van de ‘neoliberalisatie’ van Europe en waarvan de macht nog nooit door een verkiezing is goedgekeurd.[20]] (p.293) Dit ideologische verraad en globalistische deze collaboratie, de standaard modaliteiten van de Europese vijandelijke elite, hebben de Europese beschaving aan de rand van de afgrond gebracht.

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Steuckers wijst op de functionaliteit van het verraad van de Europese soixante-huitards ten aanzien van de globalistische geopolitiek: dit verraad levert Europa over aan het de facto monsterverbond tussen twee essentieel anti-Europese globalistische krachten: het liberaal-normativisme, gesymboliseerd in het Amerikaanse ‘Puritanisme’, en het islamisme, gesymboliseerd in het Saoedische ‘Wahhabisme’. Aujourd’hui, nous faisons face à l’alliance calamiteuse de deux fanatismes religieux : le wahhabisme, visibilisé par les médias, chargé de tous les péchés, et le puritanisme américain, camouflé derrière une façade ‘rationnelle’ et ‘économiste’ et campé comme matrice de la ‘démocratie’ et de toute ‘bonne gouvernance’. Que nous ayons affaire à un fanatisme salafiste ou hanbaliste qui rejette toutes les synthèses fécondes, génératrice et façonneuses d’empires, qu’elles soient byzantino-islamiques ou irano-islamisées ou qu’elles se présentent sous les formes multiples de pouvoir militaire équilibrant dans les pays musulmans, ou que nous ayons affaire à un fanatisme puritain rationalisé qui entend semer le désordre dans tous ces états de la planète, que ces états soient ennemis ou alliés, parce que ces états soumis à subversion ne procèdent pas de la même matrice mentale, nous constatons que toutes nos propres traditions européennes... sont considérées par ces fanatismes contemporains d’au-delà de l’Atlantique ou d’au-delà de la Méditerranée comme émanations du Mal, comme des filons culturels à éradiquer pour retrouver une très hypothétique pureté, incarnée jadis par les pèlerins du ‘Mayflower’ ou par les naturels de l’Arabie du VIIIe siècle. [In het huidige tijdsbestek hebben we te maken met een rampspoedig [globalistisch, anti-Europees] bondgenootschap tussen twee religieuze fanatismes: het Wahhabisme,[21] zoals gevisualiseerd en als ‘zondig’ bestempeld door de [mainstream] media, en het Amerikaanse puritanisme, gecamoufleerd achter een ‘rationele’ en ‘economische’ façade en voorgesteld als vast referentie ‘frame’ voor ‘democratie’ en ‘behoorlijk bestuur’. Of we nu te maken hebben met vormen van ‘Salafistisch’ of ‘Hanbalitisch’ fanatisme[22] dat een punt zet achter de vruchtbare, creatieve en imperium-scheppende byzantijns-islamitische of iraans-islamitische syntheses, of met vormen van puriteins-gerationaliseerd en militair-hegemoniaal fanatisme dat over de hele wereld chaos schept (bij bevriende zowel als vijandelijke staten, want alle aan die hegemonie onderworpen staten vertegenwoordigen andersoortige mentale werelden): wij moeten constateren dat onze eigen Europese tradities... onverenigbaar zijn die fanatismes van de overzijde van de Atlantische Oceaan en Middellandse Zee. Die hedendaagse fanatismes beschouwen [onze tradities] als incarnaties van het [pure] Kwaad [en] als cultuuruitingen die moeten worden bestreden met het - overigens zeer hypothetische - puurheid die wordt belichaamt in de Pilgrim Fathers van de ‘Mayflower’[23] en de bons sauvages[24] van de 8e eeuwse Arabische binnenlanden]. (p. 261-2)

De totalitair-regressieve fanatismes van het ‘Puristisch’ liberaal-normativisme en het ‘Wahhabistisch’ islamisme zullen emotioneel, intellectueel en spiritueel moeten worden overwonnen als de Europese beschaving en de Europese volkeren de Crisis van het Moderne Westen willen overleven. De therapie die op dit kritieke punt vanuit Traditionalistisch oogpunt momenteel de grootste kans van slagen biedt is een politiek-filosofische ‘noodgreep’: de nooduitgang van het Archeo-Futuristisme. 

4.

Het Archeo-Futuristisch alternatief

(politiek-filosofische therapie)

Lo, all our pomp of yesterday
Is one with Nineveh and Tyre!
Judge of the Nations, spare us yet.
Lest we forget - lest we forget!

- Rudyard Kipling

Het Archeo-Futuristische alternatief voor het globalistische anti-Europese ‘EU project’ is een gelijktijdig teruggrijpen en vooruitprojecten van een Traditionalistisch concept dat lang een vitale rol heeft gespeeld in de Europese geschiedenis en dat weer kan doen: de Europese Rijksgedachte. Het gaat hierbij om een concept dat strikt genomen boven-historisch is daarom te allen tijde kan herleven. Het ideologisch misbruik en de historiografische misinterpretatie van de Europese Rijksgedachte door het 19e en 20e eeuwse (hyper-)nationalisme - meest recent in het ‘Derde Rijk’ - doet niets af aan de boven-historische vitaliteit ervan. Steuckers wijst in dat verband op het essentieel belang van een juist begrip van het Traditionalistische gedachtegoed waarvan de Rijksgedachte deel uitmaakt. Het Traditionalisme stelt namelijk dat alle collectieve (taalkundige, religieuze, etnische, nationale) identiteiten, en de horizontaal (werelds, fysiek) ervaren verschillen daartussen, organisch onderdeel (kunnen, moeten, zullen) zijn van grotere, synergetisch unieke entiteiten met een hogere verticale, transcendent (spiritueel, psychologisch) ervaren, functionaliteit. Deze entiteit kan worden betiteld als Imperium, ofwel ‘Rijk’ - in het Avondland als het ‘Europese Rijk’. Het numineuze karakter ervan is onmiddellijk aantoonbaar in het feit dat het ontzag inspireert in degenen die er zich op natuurlijke wijze deel van voelen - en dat het angst inspireert in degenen die het onwaardig zijn.

Pour résumer brièvement la position traditional[iste],... disons que les horizontalités modernes ne permettent pas le respect de l’Autre, de l’être-autre. Si l’Autre est jugé dérangeant, inopportun dans son altérité, il peut être purement et simplement éliminé ou mis au pas, sans le moindre respect de son altérité, car l’horizontalité fait de tous des ‘riens ontologiques’, privés de valeur intrinsèque. Tel est l’aboutissement de la logique égalitaire, propre des idéologies et des systèmes qui ont voulu usurper et éradiquer la tradition ‘reichique’ : si tout vaut tout dans l’intériorité de l’homme, ou même dans sa constitution physique, cela signifie, finalement, que plus rien n’a de valeur spécifique, et si une valeur spécifique cherche à pointer envers et contre tout, elle sera vite considérée comme une anomalie qui appelle l’extermination. L’intervention fanatique et sanglante de ‘colonnes infernales’. La verticalité, en revanche, implique le devoir de protection et de respect, un devoir de servir les supérieurs et un devoir des supérieurs de protéger les inférieurs, dans un rapport comparable à celui qui existe, dans les sociétés et les familles traditionnelles, entre parents et enfants. La verticalité respecte les différences ontologiques et culturelles ; elle ne les considère pas comme des ‘riens’ qui ne méritent ni considération ni respect. [Om het tradition[alistische] standpunt samen te vatten... kan men stellen dat de modern[istische] horizontaliteit een [waarachtig] respect van de Ander en het anders-zijn onmogelijk maakt. Wanneer de Ander in zijn anders-zijn [slechts] als storend [en] inopportuun wordt beoordeeld, dan kan hij simpelweg worden geëlimineerd of worden weggezet zonder het minste respect voor zijn anders-zijn: de [modernistische] horizontaliteit reduceert immers alle [vormen van authentieke] identiteit tot een ‘ontologisch nulwaarde’ zonder intrinsieke waarde. Dat is het [onvermijdelijke] eindresultaat van de egalitaire logica die ligt achter de ideologieën en systemen die de rijkstraditie willen vervangen en uitwissen. Als alles alleen maar afhangt van het innerlijk van de mens, of zelfs alleen maar van zijn fysieke constitutie, dan blijft er uiteindelijk niets van specifieke waarde over. Wanneer een specifieke waarde in de tegenovergestelde [niet-egalitaire] richting wijst tegen het [‘algemene belang’ in], dan wordt zij al snel gezien als een ‘afwijking’ die moet worden geëlimineerd. Dit [resulteert] in de fanatieke en bloedige interventie van de ‘helse colonnes’[25] [van het modernistische collectivisme]. Daartegenover staat de [Traditionalistische] verticaliteit die uitgaat van de verplichting tot bescherming van en respect voor [de Ander]. [Dat is] de verplichting [van lager gestelden] om hoger gestelden te dienen en de verplichting van hoger gestelden om lager gestelden te beschermen in een verhouding die vergeleken kan worden met die tussen ouders en kinderen in traditionele gemeenschappen en families. Deze verticaliteit respecteert ontologische verschillen en de culturele [uitdrukkingen daarvan]: zij reduceert ze niet tot ‘[ontologische] nulwaarden’ die geen consideratie en respect verdienen.] (p. 157)

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De Traditionalistische Rijksgedachte behelst dus een holistische visie waarin alle collectieve en individuele [authentieke] identiteiten op organische wijze worden ingepast in een groter geheel van synergetische meerwaarde. Il faut enfin... que chaque communauté et chaque individu aient conscience qu’ils gagnent à demeurer dans l’ensemble impéria[ux]au lieu de vivre séparément. Tâche éminemment difficile qui souligne la fragilité des édifices impériaux : Rome a su maintenir un tel équilibre pendant les siècles, d’où la nostalgie de cet ordre jusqu’à nos jours. ...[L]a civitas de l’origine... de l’Urbs, la Ville initiale de l’histoire impériale, ...s’est étendue à l’Orbis romanus. Le citoyen romain dans l’empire signale son appartenance à cet Orbis, tout en conservant sa natio et sa patria, appartenance à telle nation ou telle ville de l’ensemble constitué par l’Orbis. [Het is uiteindelijk noodzakelijk... dat elke gemeenschap en ieder individu zich ervan bewust zijn dat zij er meer bij gebaat zijn vast te houden aan het imperiale geheel dan afzonderlijk te leven. [Dit is] een zeer ingewikkelde opgave die de kwetsbaarheid van [alle] imperiale projecten onderstreept: Rome wist eeuwenlang een dergelijke balans te handhaven - vandaar de nostalgie naar de [Romeinse] orde die voortduurt tot op de dag van vandaag. ...[D]e originele civitas... van de Urbs waaruit [men] stamt, [dat wil zeggen] de Stad vanwaaruit de imperiale geschiedenis zich ontplooide... breidde zich [met het Romeinse rijk] uit tot een Orbis romanus. Onder het [Romeinse] keizerrijk duidde het Romeins burgerschap op een identificatie met die Orbis, met behoud van de eigen natio en het eigen patria, [dat wil zeggen] met een [blijvend] toebehoren aan een bepaalde natie of vaderland binnen het geheel van die Orbis.] (p.129-31) D’abord, il faut préciser que le ‘Reich’ n’est pas une nation, même s’il est porté, en théorie, par un populus (le populus romanus) ou une ‘nation’ (la deutsche Nation) : ...[c’est] n’est pas [une chose] nationaliste, [c’est] même [une chose] anti-nationaliste. [I]l n’a rien contre les sentiments d’appartenance nationale, contre la fierté d’appartenir à une nation. De tels sentiments sont positifs... mais doivent être transcendés par une idée. Cette transcendance conduit à une verticalité, qui oppose à toutes les formes modernes d’horizontalité, ce qui est, par ailleurs, le noyau idéel, de toutes les traditions... [Vooraf moet worden vastgesteld dat een ‘Rijk’ geen natie is, zelfs als het in theorie door een populus ([een ‘volk’ zoals] het populus romanus) of door een natie ([een natie zoals] de deutsche Nation) wordt gedragen: ...[het Rijk] is niet nationalistisch, [het is] zelfs anti-nationalistisch. [H]et heeft niets tegen het identiteit bepalende [collectieve] nationalistisch sentiment [of] tegen de [individuele] trots op het behoren tot een natie. Zulke sentimenten zijn positief... maar dienen te worden overstegen door het [nog hogere imperiale] idee. Deze transcendentie leidt tot een verticaliteit die zich afzet tegen alle moderne vormen van horizontaliteit - deze [verticaliteit] is uiteindelijk de ideële kern van alle [authentieke T]radities.] (p. 156-7)

Het praktische samengaan van collectieve en individuele identiteiten wordt gerealiseerd in de politieke toepassing van het Traditionalistische beginsel van subsidiariteit (een laatste spoor daarvan is in de Nederlandse Traditie terug te vinden in het anti-revolutionaire principe van ‘soevereiniteit in eigen kring’). ...[L]e principe de ‘subsidiarité’, tant évoqué dans l’Europe actuelle mais si peu mis en pratique, renoue avec un respect impérial des entités locales, des spécificités multiples que recèle le monde vaste et diversifié. [...Het beginsel van ‘subsidiariteit’, waaraan men vaak refereert in het hedendaagse Europe maar dat men zelden in de praktijk brengt, kan [nieuw] imperiaal [ondersteund] respect geven aan de lokale gemeenschappen [en] specifieke identiteiten die horen bij de echte wereld van enorme [authentiek-gewortelde] diversiteit.] (p. 139)

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In relatie tot de Rijksgedachte zijn ‘identiteitspolitiek’, ‘multiculturaliteit’ en ‘diversiteit’ non-issues: ze worden organisch ‘opgelost’ door sublimatie in de hogere functionaliteit van het Rijk. L’empire est donc fait de multiplicités, de différences, qui n’ont rien de commun avec la fausse multiculturalité vantée par les médias d’aujourd’hui. Cette multiculturalité, escroquerie idéologique, relève justement de cette horizontalité qui vise à vider tous les hommes, autochtones et allochtones, de leur substance ontologique. Cette multiculturalité tue l’essentiel qui vit en l’homme. Toute politique qui cherche à la promouvoir est une politique criminelle, exterministe... [Een Rijk behelst dus [altijd complexe] meervoudigheden [en] diversiteiten die niets gemeen hebben met de valse ‘multiculturaliteit’ die wordt aangeprezen door de [mainstream] media van vandaag. Deze [namaak-] multiculturaliteit is een ideologisch bedrog dat voortvloeit uit de [modernistische] horizontaliteit die bedoeld is om alle mensen - autochtoon zowel als allochtoon - the ontdoen van hun ontologische substantie. Deze multiculturaliteit doodt de essentie die leeft in de mens. Alle politiek die haar wil bevorderen is een criminele - en etnocidale - politiek...] (p.158) Het is een ironisch feit dat de Traditionalistische Rijksgedachte en Rijksgemeenschap effectief veel meer tolerantie en vrijheid bieden dan de modernistische ‘diversiteit’ en ‘democratie’ dat ooit zouden kunnen.

5.

Sacrum Imperium

(neo-imperiale therapie)

Hier die Manen hehrer Krieger
Seien euch ein Musterbild
Führen euch vom Kampf als Sieger

- Joseph Hartmann Stuntz[26]

De Westerse beschaving is gebaseerd op een kwetsbare balans tussen elkaar aanvullende authentieke identiteiten die samen synergische meerwaarde krijgen via historische interacties. Deze meerwaarde kan worden uitgedrukt in de ‘hyper-boreale’ archetypen van Techne (technische bevrijding), Nomos (juridische bevrijding) en Evangelion (spirituele bevrijding).[27] Maar deze meerwaarde en de beschaving waarop zij is gebaseerd vergen constante bescherming en bewaking - dit is de basis van de Traditionalistisch Europese Rijksgedachte. En Europe, les structures de type impérial sont... une nécessité, afin de maintenir la cohérence de l’aire civilisationnelle européenne, dont la culture a jailli du sol européen, afin que tous les peuples au sein de cette aire civilisationnelle, organisée selon les principes impériaux, puissent avoir un avenir. [In Europa zijn structuren van het imperiale type... onontbeerlijk om de cohesie te beschermen van de Europese beschavingssfeer die is ontsproten aan de Europese grond - en om aan de binnen die beschavingssfeer inheemse volkeren een toekomst[perspectief] te bieden door een haar te [re]organiseren volgens imperiale principes.] (p. 214) Een dubbel idealistische en realistische - Archeo-Futuristische - heroverweging van de Rijksgedachte is van essentieel belang ter bescherming van de Europese volkeren en van hun gezamenlijke beschaving. De uitbreiding van de Europese Rijksgedachte tot de overzeese Europees-stammige volkeren is daarbij een logische volgende stap: deze stap is reeds Archeo-Futuristisch uitgewerkt in het concept van de ‘Boreale Alliantie’. Op globale schaal zou een dergelijke alliantie natuurlijke bondgenoten vinden in de twee andere Indo-Europese Rijksgedachten: de Perzische en Indische: een Archeo-Futuristische exploratie van dit thema is te vinden in Jason Jorjani’s concept van de World State of Emergency. De alternatieve geopolitiek die past bij deze Archeo-Futuristische heroverwegingen wordt al concreet onderzocht in de anti-globalistische Neo-Eurazianistische beweging.[28]

aigle2t.jpgHet is de taak van het Traditionalisme om de gezamenlijke ‘Hogere Roeping’ van de Europese volkeren in herinnering te brengen wanneer deze bedreigd wordt.[29] Steuckers voldoet hieraan door de Traditionalistische visie van Europa eenduidig te neer te zetten: L’Europe, c’est une perception de la nature comme épiphanie du divin... L’Europe, c’est également une mystique du devenir et de l’action... L’Europe, c’est une vision du cosmos où l’on constate l’inégalité factuelle de ce qui est égal en dignité ainsi qu’une pluralité de centres... [C’est] une nouvelle vision de l’homme, impliquant la responsabilité pour l’autre, pour l’écosystème, parce que, ... sur [c]es bases philosophiques, ...l’homme... est un collaborateur de Dieu et un miles imperii, un soldat de l’empire. Le travail n’est plus malédiction ou aliénation mais bénédiction et octroi d’un surplus de sens au monde. La technique est service à l’homme, à autrui... La construction de l’Europe... nécessite de revitaliser une ‘citoyenneté d’action’, où l’on retrouve la notion de l’homme coauteur de la création divine et l’idée de responsabilité. [Het [Traditionalistisch] ‘Europa’ is een visioen waarin de natuurlijke wereld als Goddelijke Epifanie geldt... [Dit] Europa is een mysterie in wording en werking... [Dit] Europa is een kosmisch visioen dat de feitelijke ongelijkheid erkent van alles dat gelijk is in waardigheid en daarmee ook van [cultuurhistorische en geopolitieke] multipolariteit... [Dit] nieuwe visioen van mens-zijn impliceert verantwoordelijkheid voor [alles dat] anders [en] voor het [hele natuurlijke en menselijke] ecosysteem omdat... op de filosofische basis [van dit visioen]... de mens een medewerker is van God - een miles imperii, een soldaat van het [goddelijk ingestelde] Rijk. Hier is werk niet langer vloek of vervreemding,[30] maar een zegen en een octrooi voor [een hoger] verantwoordelijkheidsbesef voor de [hele schepping]. [Hierbij] staat de techniek ten dienste van de mens - [en] van de ander...[31] De constructie van Europa... vereist een herleven van ‘activistisch burgerschap’ waarin men het idee terugvindt van de mens als medewerker aan de Goddelijke Schepping - en het idee van [zijn uit zijn authentieke identiteit voortvloeiende kosmische] verantwoordelijkheid.] (p. 138-9) Het is duidelijk dat de Hogere Roeping van de Europese volkeren niet stopt aan de geografische grenzen van het Europese subcontinent: zij geldt ook voor de Europees-stammige volkeren die zich over deze grenzen heen hebben begeven en zich overzees hebben gevestigd in boreale en australe regionen.

Naar binnen toe vereist dit visioen een individuele zelfdiscipline, een individuele arbeidsethos en een individuele acceptatie van hiërarchische orde - en dus een omkering van de narcistische, hedonistische en collectivistische levenshouding die wordt bevorderd en bestendigd in het liberaal-normativisme dat nu dominant is in het postmoderne Westen. Dit betekent een overgang naar een nieuwe existentiële realiteit die wordt beheerst door authentieke normen en waarden - en door een legitieme Autoriteit. In de Europese Traditie draagt die Autoriteit, in navolging van zijn Romeinse archetype, de titel ‘keizer’.[32] Dans la conception [traditionaliste] hiérarchique des êtres et des fins terrestres... l’empire constituait le sommet, l’exemple impassable pour tous les autres ordres inférieurs de la nature. De même, l’empereur, également au sommet de cette hiérarchie par la vertu de sa titulaire, doit être un exemple pour tours les princes du monde, non pas en vertu de son hérédité, mais de supériorité intellectuelle, de son connaissance ou des ses connaissances. Les vertus impériales sont justice, vérité, miséricorde et constance... [In de [Traditionalistische] hiërarchische opvatting van wereldse wezens en wensen... vertegenwoordigt het Rijk het hoogste doel, het onevenaarbare voorbeeld voor alle lagere natuurlijke ordeningen. Dit betekent dat de keizer, die op grond van zijn titel aan de top van deze hiërarchie staat, een voorbeeld stelt voor alle [overige] prinsen van de wereld - niet op grond van zijn afstamming, maar [op grond] van zijn intellectuele superioriteit en van zijn kundigheid en inzichten. [In hem worden de] imperiale [‘politieke] deugden’ van rechtvaardigheid, waarheid, mededogen en standvastigheid verwezenlijkt]. (p. 136) Vanzelfsprekend is een als zodanig herkenbare legitieme Autoriteit bijna onvoorstelbaar in de huidige Europese context, maar toch is dit ideaalbeeld van deze Autoriteit onontbeerlijk als vast referentiepunt. Ditzelfde geldt tot op zekere hoogte voor de Rijksgedachte zelf: in het huidige politiek-filosofisch discours is deze gedachte eerst en vooral een experiment waarmee een bestemming en een koers kunnen worden bepaald voor de patriottisch-identitaire beweging. Op dezelfde manier dat het ‘Koninkrijk der Hemelen’ als referentiepunt dient voor de Hogere Roeping van het Christendom, zo dient de Europese Rijksgedachte als referentiepunt voor de Europese beschaving – ook als het ideaal nog niet is verwezenlijkt in het hier en nu. De oude Traditionalistische Rijksgedachte dient hierbij als voorbeeld voor een nieuwe Archeo-Futuristische Rijksgedachte. De hiërarchische politieke filosofie van het Neo-Eurazianisme kan ook hierbij een brugfunctie vervullen.

geants1.jpgNaar buiten toe vereist de Traditionalistische Rijksgedachte collectief zelfbewustzijn, collectieve trots en collectieve opofferingsbereidheid. Het is daarbij belangrijk te benadrukken dat de Rijksgedachte, zoals die wordt gehandhaafd door de hoogste bevelsautoriteit, zich positief - als letterlijke meerwaarde - verhoudt tot de verschillende authentieke identiteiten die met subsidiaire waarborgen worden bewaard binnen het Rijk. Een Traditionalistisch gedefinieerd Europees - of groter: Westers - Rijk doet niets af aan de specifieke taalkundige, godsdienstige, culturele en etnische identiteiten die erbinnen blijven bestaan: het voegt een identiteit toe, namelijk een Europese - of zelfs Westerse. Deze identiteit is dan niet dominant naar binnen (in de individuele voorstelling), maar wel naar buiten: naar buiten vertegenwoordigt zij een collectieve wil. Dat wil zeggen: het Rijk vertegenwoordigt naar buiten een absolute standaard, uitgedrukt in fysieke grenzen. De liberaal-normativistische illusie van globalistische ‘universele waarden’ en de ‘open grenzen’ zijn onverenigbaar met de effectieve handhaving van de klassieke beschavingsnormen die worden belichaamd in Traditionalistische Rijksgedachte. L’empire se conçoit comme un ordre, entouré d’un chaos menaçant, niant par là même que les autres puissent posséder eux-mêmes leur ordre ou qu’il ait quelque valeur. Chaque empire s’affirme plus ou moins comme le monde essentiel, entouré de mondes périphériques réduits à des quantités négligeables. L’hégémonie universelle concerne seulement “l’univers qui vaut quelque chose”. Rejeté dans les ténèbres extérieures, le reste est une menace dont il faut se protéger. [Het Rijk concipieert zichzelf als een orde die wordt omgeven door een dreigende chaos - [de Rijksgedachte] ontkent daarmee feitelijk dat andere [beschavingen] zelf een eigen orde met zelfstandige waarde kunnen hebben. Ieder Rijk ziet zichzelf min of meer als een ‘wereld op zich’, omgeven door tot op verwaarloosbare eenheden teruggebrachte ‘perifere werelden’.[33] Universele hegemonie wordt alleen gezocht binnen de sfeer van het als [exclusief] waardevol erkende [eigen] universum. De resterende [realiteit wordt] verstoten naar de Buitenste Duisternis en is niet anders dan een dreiging waartegen men zich moet beschermen.[34]] (p. 129)

6.

Ex oriente lux

(psycho-historische therapie)

 

Wees gegroet, Hoge Prins!

Op de noordwesten wind hebben wij naar u gezocht

Aan u offeren wij nu onze sterfelijkheid

U bent onze Eedhouder!

- vrij vertaald uit Hereditary

Een effectieve Archeo-Futuristische therapie voor de psycho-historische zelfverminking van de Westerse beschaving ligt in de herontdekking en reactivering van haar archetypes.[35] Vanuit meta-historisch perspectief vertegenwoordigt het politieke experiment van het nationalistisch-enggeestige en hyper-biodeterministische ‘Derde Rijk’ een geïmproviseerde poging tot een reactivering van deze archetypes. Door de - feitelijk zeer ver gezochte - associatie van de Traditionalistische Rijksgedachte met het ‘Derde Rijk’ en door de Europese Götterdämmerung van 1945 werden deze archetypes verdrongen uit het Westerse publieke discours. De bij deze archetypes horende idealistische, ridderlijke en ascetische levenshouding - belichaamt in de oude roepingen van Academie, Adel en Kerk - verloor hiermee haar bestaansgrond: het rampzalige verval van de Westerse geesteswetenschappelijke, militaire en kerkelijke instituties vormen hiervan het tastbare bewijs. Deze psycho-historische Untergang is recentelijk zover doorgeschoten dat nu alles wat zelfs maar enigszins verwijst naar ‘aristocratische’, ‘arische’ en ‘mannelijke’ kwaliteit in de publieke sfeer ‘verdacht’ is. Een diep ingezonken conditionering van matriarchale oikofobie en rancuneuze feminisatie hebben de oude Westerse instituten van Academie, Leger en Kerk vernietigd.

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Toch is deze ontwikkeling niet onomkeerbaar - ze kan zelfs worden opgevat als een noodzakelijke fase in een zuiverend ‘dialectisch proces’.[36] Een extreem negatieve polariteit is immers een noodzakelijke voorwaarde voor een extreem positieve energielading. De deconstructie van de geïmproviseerde en oppervlakkige ‘hyper-nationalistische’ en ‘hyper-biodeterministische’ ideologie van het Derde Rijk vormen zo een noodzakelijke voorwaarde voor een her-ontdekking en her-activering van de diepst liggende archetypes van de Indo-Europese Traditie. De Archeo-Futuristische exploratie van deze diepst gelegen archetypes is pas begonnen, maar de richting waarin de nieuwe Gouden Dageraad van het Westen moet worden gezocht ligt al vast - ex oriente lux. Jason Jorjani, de filosofisch pionier van de Archeo-Futuristische Revolutie in de Nieuwe Wereld, is de event horizon van de Westerse Moderniteit reeds overgestoken en hij heeft reeds gerapporteerd welke beschavingscontouren zichtbaar worden in wat als een nieuwe ‘Gouden Dageraad’ kan worden aangeduid. Het kan geen toeval zijn dat Robert Steuckers, de voorman van het Traditionalisme in de Lage Landen, in dezelfde richting wijst. Beiden laten de oudste Indo-Europese archetypes, zoals behouden in de Perzische Traditie, terugkeren naar het Avondland.

La catégorie d’hommes capables d’incarner un ‘Reich’ est née de la tradition persane, laquelle a été longtemps un ‘Orient’ (in modèle sur lequel on s’‘orientait’)... Dans la tradition persane, il est question d’un ‘hiver éternel’, allusion plus que probable au début d’une ère glaciaire particulièrement rude, qui a surpris les premiers peuples européens dans leur habitat premier. Au moment où survient cet ‘hiver éternel’, un roi-héros, Rama, rassemble les tribus et les clans et se dirige, à leur tête, vers le sud, vers le Caucase, la Bactriane et la Perse (les hauts plateaux iraniens). Ce roi-héros fonde les castes, ou, plus exactement, les fonctions que George Dumézil étudiera ultérieurement. Après avoir mené son peuple à bonne destination, pour échapper aux rigueurs de cet ‘hiver éternel’, Rama se retire dans les montagnes. Cette figure héroïque et royale se retrouve dans les traditions avestique et védique où il s’appelle Yama ou Yima. Pour mener cette expédition et cette migration, Rama-Yama-Yima s’est servi de chevaux et de chars et a jeté ainsi les premiers principes d’organisation d’une cavalerie... Plus tard, Zarathoustra codifie les règles qui doit suivre chaque cavalier... La troupe de Zarathoustra, qui doit faire respecter son enseignement pratique, est armée de massues (la ‘Clave’ dans l’œuvre de Julius Evola). Au départ de la troupe des adeptes de Zarathoustra se forme la caste des guerriers, les Kshatriyas de la tradition indienne, une caste opérative ancrée dans le réel politique et géographique, qui domine la caste de prêtres, contemplative et moins encline à exercer sur elle-même une discipline rigoureuse. ...La figure iranienne de Sraosha, qui donnera le Saint-Michel de la tradition médiévale, évolue entre le ciel et la terre, c’est-à-dire entre l’idéal de la tradition et la réalité, va-et-vient qui postule une formation rigoureuse, à l’instar des disciples de Zarathoustra. Ceux-ci, au fur et à mesure que se consolide la tradition iranienne, sont formés à rendre claire leur pensée, à purifier leurs sentiments, à prendre conscience de leur devoir. Armés de ces trois principes cardinaux d’orientation, le disciple de Zarathoustra lutte contre Ahriman, incarnation du mal, c’est-à-dire de la déliquescence des sentiments, qui rend inapte à œuvrer constructivement et durablement dans le réel. Seul les chevaliers capables d’incarner cet idéal simple mais rigoureux se donneront un charisme, un rayonnement, une lumière, la kwarnah. Ils sont liés entre eux par un serment. [De categorie van mensen die in staat zijn een Rijk te personificeren is ontstaan in de Perzische [T]raditie, die [voor het Westen] eeuwenland een Oriëntaals referentiepunt was in de eigenlijke zin van existentiële oriëntatie. In de Perzische [T]raditie is sprake van een ‘eeuwige winter’, een begrip dat waarschijnlijk teruggaat op het begin van een zeer harde IJstijd die de eerste Europese volkeren trof in hun eerste leefgebied. Toen de ‘eeuwige winter’ intrad, bracht een heroïsche koning [genaamd] Rama de[ze] volkeren en stammen bijeen en leidde hen naar het zuiden, naar de Kaukasus, Baktrië en Perzië (de Iraanse hoogvlakten). Deze heroïsche koning was de stichter van [hun] kasten, of preciezer gezegd: van de [sociaalhiërarchische] functionaliteiten die uiteindelijk door Georges Dumézil zijn gereconstrueerd.[37] Na zijn volk uit de ontberingen van de ‘eeuwige winter’ in veiligheid te hebben gebracht, trok Rama zich terug in de bergen. Deze heroïsche en koninklijke persoonlijkheid vinden we [vervolgens] terug in de Avestische en Vedische [T]radities, waar hij Yama of Yima genoemd wordt.[38] Om deze onderneming en deze migratie te volbrengen organiseerde Rama-Yama-Yima paarden en wagens, waarmee hij de fundamenten van een cavalerie organisatie legde... Later werden de regels die elke bereden krijger, [ofwel ‘ridder’,] te volgen heeft vastgelegd door Zarathoestra... De krijgsmacht van Zarathoestra die zich onderwerpt aan zijn praktische onderwijs is bewapend met knotsen (als clava betiteld in het werk van Julius Evola).[39] Uit deze ‘school’ van Zarathoestra ontstaat [vervolgens] de kaste van de krijgers - de Kshatriya’s van de Indische Traditie - die zich in politieke [instituties] en geografische [machtsbereiken] vastlegt en die komt te heersen over de kaste van de priesters, die contemplatief zijn ingesteld en zich niet aan een [dergelijk] rigoureuze discipline wil onderwerpen. ...De Iraanse figuur Sraosja,[40] die in de middeleeuwse [Westerse] Traditie naar voren komt als de Heilige Michaël, neemt [voortdurend opnieuw] gestalte aan tussen hemel en aarde, dat wil zeggen tussen het Traditie ideaal en de [wereldse] realiteit - een ontstaan en vergaan dat [voor aspirant-ridders] een [constant vastgehouden] rigoureuze scholing veronderstelt, net zoals bij de leerlingen van Zarathoestra. [Het gaat daarbij om] diegenen die, naarmate de Iraanse Traditie zich verwezenlijkt, worden opgeleid om hun gedachte[n] en gevoelens te zuiveren en zich bewust te worden van hun [levens]opgave. Bewapend met deze drie hoofdprincipes van [levens]oriëntatie strijdt de leerling van Zarathoestra tegen Ahriman,[41] de personificatie van het kwaad, dat wil zeggen [primair] tegen de gevoelszwakte die het [hem] onmogelijk maakt constructief en duurzaam op de realiteit in te werken. Alleen ‘ridders’ die in staat zijn dit simpele maar rigoureuze ideaal te belichamen verkrijgen het charisma, de stralenglans, het licht[wezen] - de khvarenah.[42]]  (p. 159-60)

ksch.jpgHet Indo-Europese archetype dat het nieuwe Rijk moet vestigen is bovenal de ‘ridder’. Zoals gezegd, wordt oudste uitdrukking daarvan bewaard in de Perzische Traditie: ...le modèle de la chevalerie perse... constitue... pour l’Europe un mode opératif sans égal, de type ‘kshatriyaque’... [que] ne peut être pensé en dehors du projet de ‘nouvelle chancellerie impériale européenne’, énoncé par Carl Schmitt. Celui-ci a évoqué la nécessité de former une instance de ce type, après les catastrophes qui ont frappé l’Europe dans la première moitié du XXe siècle et pour préparer la renaissance qui suivra l’assujettissement de notre sous-continent. ...[het model van de Perzische ridderstand... vertegenwoordigt... voor Europa een kwalitatief ongeëvenaarde modus van het ‘kshatriyaanse’ type... waarzonder men zich geen voorstelling kan maken van het project dat Carl Schmitt voor ogen stond: de ‘nieuwe Europese rijkskanselarij’. [Schmitt] wees op de noodzaak een dergelijke instantie te vormen in de nasleep van de catastrofes die Europa gedurende de eerste helft van de 20e eeuw heeft ondergaan ten einde de wedergeboorte voor te bereiden die zal volgen op de onderwerping van ons subcontinent.[43]] (p. 163) De kroniek van de Perzische Traditie kan de volkeren van Europa hoop geven: zij laat zien hoe de oudste Indo-Europese archetypes zelfs de catastrofe van barbaarse bezetting, etnische vervanging en culturele regressie kunnen overleven. ...[Le] philosophe perse islamisé Sohrawardi, ...dépositaire de la sagesse iranienne originelle, s’insurge, avant la destruction de son pays par les Mongols, contre la bigoterie, le rationalisme étrique qui est son corollaire, et réclame le retour à une attitude noble, lumineuse, archangélique et michaëlienne, qui n’est rien de autre que la tradition perse/avestique des origines les plus lointaines. Sohrawardi réclame une révolte contre la caste des prêtres étriques, et, partant, contre toutes pensées et démarches impliquant des limitations stérilisantes. Cette attitude a toujours paru suspecte aux vastes de prêtres ou d’intellectuels, soucieux d’imposer des corpus figés aux populations qui leur étaient soumises, en Occident comme en Orient. Arthur de Gobineau... a été le premier... à attirer l’attention des Européens... sur le passé lumineux de la Perse antique, modèle plus fécond, à ses yeux, que la Grèce, trop intellectuelle et trop spéculative. Le modèle chevaleresque, dont les traces premières remontent à Rama et à Zarathoustra, induit une pratique de le maîtrise de soi, supérieure, pour Gobineau, à la spéculation intellectuelle des Athéniens. Et, de fait, quand la Perse a été laminée par les Mongols, l’islam tout entier a commencé à sombrer dans le déclin. Le fondamentalisme wahhabite est l’expression de cette décadence, dans la mesure où il est une réaction outrée, caricaturale, au déclin de l’islam, désormais privé de la grande Lumière de la Perse. Les pauvres simagrées wahhabites ne pouvant bien entendu jamais servir d’‘Orient’. [...De geïslamiseerd-Perzische filosoof Sohrawardi,[44] ...drager van de oorspronkelijke Iraanse wijsheid, stond nog voor de Mongoolse verwoesting van zijn land[45] op tegen religieuze kwezelarij en het oppervlakkige rationalisme... - hij eiste een terugkeer naar de adellijke, verlichte, engelachtige en michaëlitische [existentiële] houding die hoort bij de oorspronkelijke Perzische [T]raditie zoals teruggaande op haar oudste historische Avestische [bronnen].[46] Sohrawardi staat voor een opstand tegen de [intellectueel en spiritueel] oppervlakkig priesterkaste en daarmee tegen alle denk[stroming]en en activismen die zich onderwerpen aan steriliserende begrenzingen. Deze houding schijnt altijd verdacht toe aan het priesterlijke en intellectuele establishment dat zowel in het Westen als het Oosten bedacht is op het handhaven van een dogmatische consensus. Arthur de Gobineau[47]... was de eerste die... de aandacht van Europa... vestigde op het lumineuze verleden van het Oude Perzië: [hij achtte het] een veel vruchtbaarder model dan het [Klassieke] Griekenland dat in zijn optiek te intellectueel en te speculatief [was ingesteld]. Het ridderlijke model dat teruggaat op Rama en Zarathoestra bewerkstelligde een zelfdisciplinaire praktijk die voor de Gobineau superieur was aan die van het speculatieve intellectualisme van Athene. Het is inderdaad waar dat de hele Islam[itische wereld] in [culturele] neergang verzonk nadat Perzië door de Mongolen in de as was gelegd. Het Wahhabitische fundamentalisme is de [ultieme] uitdrukking van deze decadentie: het is een uiterste - karikaturale - reactie op het verval van de Islam na het uitdoven van zijn grootse Perzische Licht. De armzalige verwaandheid van de Wahhabieten kan [noch voor het Westen noch voor het Oosten] ter existentiële ‘oriëntatie’ dienen.] (p. 162)

De Indo-Europese archetypes die worden bewaard in de Perzische Traditie zijn via een eeuwenlange wisselwerking doorgegeven aan Avondland: via het [Helleense] Rijk dat werd gesticht door Alexander de Grote, via de Romeinse cavalerietraditie, via de kruisvaarders, via de Oosterse Letteren - en via de filosofie van de Traditionele School (Steuckers, p. 161ff.). Hun kracht berust in hun essentie - een essentie waarop noch pseudo-islamische cultuurbarbarij, noch pseudo-christelijke psychologische regressie, noch cultuur-nihilistische intellectuele deconstructie vat kunnen krijgen. Nietzsche overkwam het moderne Europese nihilisme in een authentieke herbeleving van het Indo-Europese archetype dat vervat ligt in de Perzische profeet Zarathoestra. Hij zocht niet alleen fysieke gezondheid in de hoge Alpen maar ook spirituele gezondheid op deze ijlste top van de Indo-Europese Traditie - daar vond hij zijn geneesmiddel voor het nihilisme.

...wirf den Helden in deiner Seele nicht weg! Halte heilig deine höchste Hoffnung!

- Also Sprach Zarathustra

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7.

Edelweiss-heid

(Archeo-Futuristische medicatie)

Save a spot for me

Among the Edelweiss

- Danielle White

Elke queeste naar het hoogste begint echter bij het laagste: de fundering van de Europese Rijksgedachte kan niet anders dan liggen in de Europese aarde - het grotere Europese Huis kan niet anders dan beginnen bij de kleinste Europese huisjes.

‘Een beter Nederland begint in Kleine Huisjes!’ - zo sprak Koning Willem Alexander ter gelegenheid van het Kerstfeest van 2018. [48] Veel wijsheid ligt in deze eenvoudige woorden: de Vorst wijst op het feit dat het grote begint met het kleine en dat zelfs de grootste reis aanvangt met een eerste kleine stap. Aan een Nieuw Europa gaat dus een Nieuw Nederland vooraf. Het begint zelfs nog dichter bij huis: bij een nieuwe stad, een nieuw dorp, een nieuwe straat - en dan ook nog bij een nieuw zelf. Een Nieuw Europa begint met de basale kwaliteiten die horen bij het Europese mens-zijn: zelfdiscipline, arbeidsethos, natuurlijke hiërarchie en toekomstplanning. Bij eenvoudige zaken als gezinstoewijding en huwelijkstrouw, bij bescheiden looneisen en gewetensvolle arbeid, bij kansen voor jongeren en respect voor ouderen, bij passend ontzag voor hoge geboorte en aangeboren talent, bij maatschappelijke ruimte voor artistieke gave en wetenschappelijke verdienste, bij solidariteit met de minder fortuinlijke volksgenoot en bij ecologisch verantwoordingsbesef. De karakteristieke eigenschappen van het huidige Europa en haar liberaal-normativistische postmoderniteit - collectief narcisme, consumptief hedonisme en kunstmatige klassenstrijd - horen hier dus pertinent niet bij. Ook niet in reactieve zin: een Nieuw Europa is onhaalbaar voor reactief-onwaardige ‘boze witte mannen’. Het is haalbaar wanneer het positief begint bij - en wordt gedragen door - blije blanke mensen. Dus alleen wanneer de Europese - inheems-fenotypisch niet anders dan blank definieerbare - bevolking blij is met zichzelf: de slagzin it’s ok to be white is in dat opzicht niet meer dan een minimaal beginpunt. Dus ook pas wanneer de Europese vrouw blij is met haar specifieke vorm van mens-zijn als Europees en als vrouw - en zich afkeert van de kunstmatige oikofobe en feministische ‘klassenstrijd’ tegen de Europese beschaving en de man. In het Nieuwe Europa - dat een universele beschavingsstandaard herstelt - moet expliciet een plaatsje worden opengehouden voor - een beperkt aantal - goedwillende, hardwerkende en nette (ex-koloniale, aangetrouwde, geassimileerde) niet-Europeanen die zich vereenzelvigen met de Europeaanse Leitkultur. Ook dat hoort bij de Archeo-Futuristische Europese Rijksgedachte: de ‘magnetische’ inwerking van de authentieke Europese Traditie waarvan een existentieel ordenende - dus innerlijk transformatieve - aantrekkingskracht kan uitgaan voor speciaal getalenteerde individuen uit andere culturen. Deze inwerking is echter geen automatisch gegeven: alleen een absoluut dominante Leitkultur garandeert de voor die innerlijke transformatie vereiste polaire hoogspanning. In het falen van deze dominantie ligt meest catastrofale weeffout van het liberaal-normativistisch ‘multiculturalisme’.

Steuckers wijst op het belang van ‘micro-herterritorialisaties’, dat wil zeggen een Reconquista van Europa door middel van een stapsgewijs geplande en minutieus uitgewerkte herovering van de Europese erfenis. Het grotere ‘Europese Huis’ van de Archeo-Futuristische Rijksgedachte begint dus ook voor hem bij ‘Kleine Huisjes’: een Nieuwe Europa begint bij geleefde, beleefde en doorleefde lokale traditie, regionale cohesie en nationale identiteit. Een Nieuwe Europa is onbereikbaar via een nationalistische Einzelgang: de val van Napoleon en Hitler bewijzen het. Wat wel erkend moet worden is dat de Archeo-Futuristische Rijksgedachte in Europa in de eerste plaats zal moeten worden gedragen door het volk - of: de paar volkeren - die een centrale plaats innemen in Europa. Enkele hoofdlijnen in de verwezenlijking van de Archeo-Futuristische Rijksgedachte zijn al duidelijk. De centrale positie van het Duitse volk, het dragende volk van het oude Heilige Roomse Rijk, is een natuurlijk uitgangspunt - een pragmatische anti-globalistische alliantie op de Frans-Duits-Russische as al evenzeer. Gegeven het feit dat de globalistische vijandelijke elite prioritair, via de Macron-Merkel strategie van Umvolkung à l’outrance, inzet op de ‘pyropolitieke’ verwoesting van de Frans-Duitse ruimte zal de herovering van Europa moeten beginnen bij ‘terugvalbasis’ Rusland. De door President Putin begonnen anti-globalistische bevrijding van Rusland is de natuurlijke uitvalsbasis voor een oost-naar-west metapolitiek tegenoffensief. Het door Aleksandr Doegin geformuleerde - confederatieve, multipolaire - Eurazianisme geeft hiertoe een eerste aanzet - ook hier geldt: ex oriente lux.[49]

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Ter afsluiting van dit essay lijkt het passend Steuckers’ pleidooi voor micro-herterritorialisatie te ondersteunen door zijn argument verder uit te werken. Het is namelijk verre van denkbeeldig dat het globalistische ‘EU project’ binnen een aantal jaren implodeert. Het is dan aan de kleinere staten van Europa om direct hun eigen plaats te bepalen in een post-globalistisch Nieuw Europa - zij zullen zich dan direct opnieuw moeten uitvinden en positioneren. Ook voor staten van bescheiden omvang en gering gewicht, zoals de huidige staten van de Lage Landen, is er dan een wereld te winnen. Een Nieuw Europa biedt immers kansen voor het herwinnen van sinds de Tweede Wereld Oorlog verloren en verkwanselde zelfstandigheid: staatssoevereiniteit, volksidentiteit, valuta en welvaartsstaat. Het falen van het globalistische ‘EU project’ en het wegvallen van globalistische controlemechanismen zal de kleinere staten van Europa de vrijheid geven om zich op hun eigen unieke wijze te ontwikkelen.

Op het kleinste niveau wordt dit potentieel geïllustreerd door de nog kleinere Europese microstaten: de ministaatjes San Marino, Andorra, Monaco en Liechtenstein zijn in vele opzichten tussen de mazen van het globalistische net heen geglipt. Zij hebben zich in hun eigen biotoopjes optimaal kunnen ontwikkelen zonder hun eigenheid op te geven. Anders dan in de kleinere EU lidstaten blijft de inheemse bevolking van de microstaten - grosso modo - juridisch geprivilegieerd, economisch beschermd, sociaal dominant en cultureel behouden.[50] Daar krijgt niet zomaar iedere willekeurige ‘arbeidsmigrant’ verblijfsstatus en staatsburgerschap. Daar worden sociale voorzieningen en huisvesting niet zomaar uitgedeeld aan de eerste de beste ‘asielzoeker’. Daar wordt van de inheemse bevolking niet verwacht dat zij berust in de modegrillen van identiteitsondermijnende ‘diversiteit’. Daar is het blijkbaar wél mogelijk moderne technologie en economische welvaart te combineren met een dominante etniciteit en een dwingend cultuurmodel. Zonder de specifieke omstandigheden van deze microstaten te negeren en zonder hun specifieke problemen te vergoelijken kan wel worden gesteld dat de Archeo-Futuristische Revolutie daar in bepaalde opzichten al is begonnen. Met name het Vorstendom Liechtenstein, door Prins Hans-Adam II sinds de democratisch goedgekeurde constitutionele hervorming van 2003 direct en persoonlijk bestuurd, bewijst dat een combinatie van semi-decissionistisch bestuur en beschermde etnische identiteit met een vrije markt mechanisme, grote welvaart en hoge sociaaleconomische ontwikkeling heel goed mogelijk is. Het is misschien geen toeval dat Liechtenstein als laatste legitiem bestuurd overblijfsel van het Heilige Roomse Rijk een eerste beeld laat zien van hoe een Archeo-Futuristisch Europa er uit zou kunnen zien. Het is dit hoog in de Alpen verscholen ‘Edelweiss model’ dat de kleine en middelgrote EU lidstaten kan inspireren tot het verwerpen van het ‘Calimero argument’: het globalistische argument dat ze ‘te klein’ zouden zijn om op eigen benen te staan.

Feitelijk is de situatie van de Europese microstaten vanuit mondiaal perspectief niet essentieel anders dan die van de kleinere EU lidstaten. De veel evenwichtiger sociaaleconomische en etnische politiek van de kleinere en middelgrote staten van de welvarende Pacific Rim - Maleisië, Singapore, Brunei, Taiwan, Zuid-Korea - bewijzen dat het ‘Edelweiss model’ ook op grotere schaal voor herhaling vatbaar is.[51] Het behoud van de Monarchie in een deel van de kleinere EU lidstaten - in Scandinavië en de Lage Landen - geeft hierbij een gunstige uitgangsbasis voor overschakeling naar het Leichtensteiner ‘Edelweiss model’: de Monarchie biedt hier een ‘reserve soevereiniteit’ die een decissionistische reactie mogelijk maakt op het liberaal-normativistische globalisme. Het Nieuwe Europa kan ook beginnen met een ‘Edelweiss positionering’ van het Kleine Huisje geheten Nederland. De afgelopen decennia van neo-liberale kaalslag en cultuur-marxistische deconstructie hebben geleid tot sociale implosie en etnische vervanging: de ‘puinhopen van vijftig jaar paars’[52] bewijzen dat het Kleine Huisje geheten Nederland op de slooplijst staat van het globalistische ‘EU project’. Voor de Lage Landen - België, Nederland, Luxemburg - is het tijd voor beraad op een levensvatbaar alternatief: een subsidiair gedefinieerde en geborgen plaats in een Nieuw Europa, een Europa dat is zich kan inspireren op de Archeo-Futuristische Rijksgedachte en het confederatieve Eurazianisme. Dit is wat de Lage Landen verdienen: een eigen plaats tussen de Edelweiss.

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Nawoord: de Koning als Katechon

De Nederlandse patriottisch-identitaire beweging erkent de Koning als Katechon - als door de Goddelijke Voorzienigheid aangestelde Beschermer van de Nederlandse staat en het Nederlandse volk. Meer dan dat: de Vorst belichaamt de Nederlandse staat in meest letterlijke zin: het feit dat zijn macht door constitutionele scherpslijperij in de loop van de laatste anderhalve eeuw stukje bij beetje is weggesneden door een jaloerse regentenklasse en een wannabe ‘schijnelite van valsemunters’[53] doet daar niets aan af. Door de eeuwen heen heeft het Huis van Oranje, wanneer puntje bij paaltje kwam, altijd voor de belangen van het Nederlandse volk en de gewone man gestaan. De patriottisch-identitaire beweging dient de diepe eerbied en aanhankelijkheid van het Nederlandse volk naar het Huis van Oranje en de Monarchie als institutie te respecteren - en te integreren in haar doen en laten.

Uiteindelijk is het aan de Vorst om te bepalen wat het beste is voor zijn land en zijn volk - het land is immers zijn erfdeel en hij is vader van zijn volk. Het is niet redelijk te denken dat de Vorst ook maar enigszins geneigd zou zijn erfdeel te verkwanselen en zijn volk te verraden - basaal vertrouwen in zijn oordeel hoort bij de eeuwenoude band tussen het Vorst en volk. Zijn woord en zijn wil moeten daarom, binnen de grenzen van wat redelijk is, zeer zwaar wegen - ook als hij de tijd en manier om op te treden tegen het globalisme wellicht (nog) anders inschat dan de meeste van zijn onderdanen. Ook zulk respectvol inschikken in de natuurlijke hiërarchie en de wettelijke orde hoort, binnen de grenzen van wat redelijk is, bij goed burgerschap. Net zoals de wettelijke orde en het politiek proces - hoe onredelijk en onbehoorlijk ze ook feitelijk worden ingevuld - moeten worden gerespecteerd zolang dat nog enigszins mogelijk is. Natuurlijk kan er, gegeven de globalistische ramkoers met de soevereiniteit van de Nederlandse staat en de identiteit op het Nederlandse volk, op den duur een situatie ontstaan waarin dit niet langer mogelijk is, maar die ultieme afweging komt alleen toe aan het volk als geheel - en aan de Vorst, als vader van het volk. Wat de Nederlandse patriottisch-identitaire beweging tot die tijd betaamt, is respectvol in te schikken - en volk en Vorst respectvol te dienen, door een redelijk alternatief aan te dragen voor globalistische deconstructie en door in metapolitieke zin de vervanging voor te bereiden van de vijandelijke elite. De beweging dient, omwille van het volk, ook de Vorst: waar en wanneer nodig, en waar en wanneer gevraagd, moet de Vorst de patriottisch-identitaire beweging aan zijn zijde weten - ook tegen de vijandelijke elite. Diep in het verradershart van de vijandelijke elite - het ziekelijk monsterverbond tussen de crypto-republikeinse ‘regenten klasse’ en de eeuwig-rancuneuze soixante-huitard ‘intelligentsia’ - zit namelijk niet alleen haat voor het volk, maar ook haat voor de Vorst.

De kersttoespraak van de Koning biedt hoop aan alle Nederlanders: zij biedt een veilige afstand tot ‘verre tafels’ en een tijdige herinnering aan de tachtigjarige vrijheidsstrijd van het Nederlandse volk. Niets past de patriottisch-identitaire beweging echter minder dan woorden te leggen in de mond van de Vorst. Dit essay sluit daarom af met diens eigen woorden - woorden van welgemeende zorg en eenvoudige troost, gericht tot ons arme volk:

Tegenover de sterke en brute krachten in de wereld staan gewone mensen machteloos… zo voelt het vaak. Maar zou het niet kunnen dat we onze eigen rol onderschatten? ...U denkt misschien: ‘Wat moeten we met zo’n verklaring? Het klinkt zo ver weg allemaal’. Maar de drijvende kracht erachter - Eleanor Roosevelt dacht daar heel anders over. Zij zei: ‘Waar beginnen mensenrechten? Op plekken dicht bij huis, zó dichtbij en zó klein dat ze op geen enkele kaart zichtbaar zijn.’ Ze legt hiermee een direct verband tussen de straat waarin we wonen en de grote wereld. Vrijheid, gelijkheid en eerlijke kansen voor iedereen zijn óók afhankelijk van de manier waarop wij dagelijks met elkaar omgaan. Een leven zonder angst en onverschilligheid wordt niet alleen bepaald aan verre vergadertafels, hoe onmisbaar die ook zijn. Daar gaan we gelukkig ook zelf over. We zijn minder machteloos dan we denken. Verreweg de meeste Nederlanders voelen zich thuis in een omgeving waarin tegenstellingen niet op de spits worden gedreven en waarin conflicten zo goed mogelijk samen worden opgelost. Vergelijking met andere landen is vaak een bron van troost, zo niet van trots. De bereidheid om rekening met elkaar te houden en samen te werken heeft ons vèr gebracht. Dit was de basis onder ons land, 450 jaar geleden, toen een klein groepje Nederlandse gewesten tegen de verdrukking in de krachten bundelde en met succes zijn eigen weg ging. Zoiets was nog nooit eerder vertoond.... Een beter Nederland begint in Kleine Huisjes! We onderschatten vaak de positieve invloed die we met onze bescheiden mogelijkheden als mens kunnen hebben. Juist dicht bij huis wordt de wereld gewonnen. We kunnen samen niet alles. Maar wel veel... Een mooie toekomst is mogelijk. Mits we het geloof in onszelf en in elkaar vasthouden! [54] - Zijne Majesteit Willem-Alexander, Koning der Nederlanden

Mon Dieu, ayez pitié de ce pauvre peuple

 

Glossarium

 

banlieusard

Frans: ‘buitenwijk bewoner’, speciaal verwijzend naar de overwegend door etnische minderheden bewoonde sociaal huisvesting hoogbouw wijken rond Parijs;

decisionisme

francofoon-anglofone term, neologistisch vertaalbaar als ‘beslisme’:

doctrine van direct-concrete en fysiek-belichaamde beslissingsbevoegdheid, het tegengestelde van indirect-abstract en psychologisch-manipulatie Normativisme (Rex vs. Lex);

éditocratie

ook: mediacratie, intellocratie; heerschappij van de main stream media plus politiek-correcte academisch publicisten;

éristique

Grieks εριστικός: ‘strijdlustig’, ‘strijdvaardig’ ;

mobocratie

ook: ochlocratie;[55] heerschappij van de ‘meute’, de ‘massa’;

partitocratie

politieke kaping van parlementaire instituties door partijbelangen en partijkartels; het mechanisme achter politicide, d.w.z. vernietiging van politieke pluraliteit en invoering van dogmatische politieke-correcte consensus (‘1984’);

pyropolitiek

geopolitieke ‘verschroeide aarde’ strategie waarvan de globalistische vijandelijke elite zich bedient voor het ‘wegbranden’ van multipolaire verzetshaarden tegen haar Nieuwe Wereld Orde;

soixante-huitard

Frans: ‘68-er’; verwijzing naar de Parijse ‘culturele revolutie’ van mei 1968 en naar de door geïnspireerde ‘hippie tot yuppie’ babyboomer generatie die het globalistisme belichaamt in de dubbele na/uitleving van cultuur-marxistische theorie en neo-liberale praktijk, nu voortgezet in een vervolg generatie: de nieuwe feministisch-allochtone machtselite;

 

Noten

[1] https://www.nrc.nl/nieuws/2019/02/13/rutte-eu-moet-meer-v...

[2] https://www.government.nl/documents/speeches/2019/02/13/c...

[3] https://ec.europa.eu/digital-single-market/en/news/counte...

[4] https://ec.europa.eu/digital-single-market/en/fake-news-d...

[5] https://ec.europa.eu/digital-single-market/en/modernisati... - let op de expliciet vermelde invulling van deze maatregelen aan de hand van het op versnelde etnische vervanging gerichte ‘Marrakesh Pact’.

[6] https://www.erkenbrand.eu/artikelen/le-rouge-et-le-noir-i... en http://www.erkenbrand.eu/artikelen/uit-het-arsenaal-van-h...

[7] Een (double entendre) verwijzing naar de titel van de post-modern - en ‘pre-apocalyptische’ - kunst documentaire van Sophie Fiennes (2010).

[8] Voor een beknopte Traditionalistische interpretatie van het science fiction genre - als hierofanie en cryptomnesie - verg. Alexander Wolfheze, The Sunset of Tradition and the Origins of the Great War (Newcastle upon Tyne: Cambridge Scholars, 2018 - https://www.cambridgescholars.com/the-sunset-of-tradition... ) 240ff. Voor een psycho-historische update bij dit thema verg. Alexander Wolfheze, Alba Rosa. Ten Traditionalist Essays about the Crisis in the Modern West (London: Arktos, 2019 - https://arktos.com/product/alba-rosa/ ) 35ff.

[9] Verg. de magistrale illustraties bij Jeff Wayne’s op Wells’ boek gebaseerd musical versie: http://www.thewaroftheworlds.com/

[10] Truganini wordt in de pre-postmoderne wetenschappelijke literatuur beschreven als de laatste volbloed Tasmaniër en de laatste Tasmanische moedertaal spreker. Zij werd rond 1812 geboren als de dochter van het opperhoofd van de inheemse bevolking van het voor de Tasmaanse zuidkust gelegen Bruny Eiland, overleefde de moordpartijen, verkrachting en ‘hervestiging’ van de Britse koloniale ‘omvolking’ van haar moederland en stierf in ballingschap in 1876 - na haar dood werd haar skelet tentoon gesteld als ‘wetenschappelijk curiosum’. Verg. Wolfheze, Sunset, 318ff. 

[11] Voor de ‘techno-filosofische’ uitwerking van deze ‘evolutionaire’ ontwikkeling verg. Jason Jorjani, World State of Emergency (Londen: Arktos, 2017) 69ff.

[12] https://www.geopolitica.ru/en/article/what-white-genocide

[13] Een term uit het anti-multiculturele discours van Frans politiek filosoof Charles Maurras (1868-1952), bekend als voorstander van ‘nationaal integralisme’ en ideoloog van de monarchistische en anti-revolutionaire beweging Action française.

[14] Wolfheze, Alba Rosa, 147ff.

[15] Voor een beknopte weergave van de filosofische en cultuur-historische context van het Cultuur Nihilisme: https://www.erkenbrand.eu/artikelen/de-identitaire-beelde...

[16] Het naar de (proto-globalistische) Franse revolutionaire terreur verwijzende ‘epitaaf’ ontwerp voor de Jacobijnse Club in Parijs, aangehaald in Edgar Allen Poe’s The Pit and the Pendulum.

[17] ‘Afgeschermd bezit’ - een liefdadigheidsinstelling voor publiek gebruik onder Islamitisch Recht (bijv. een moskee, een school, een badhuis).

[18] De Jacobijnse Club, gebaseerd op het Jacobijnen klooster in de Parijse Rue Saint-Honoré, was gedurende de Franse Revolutie een extreem-links georiënteerde partijpolitieke organisatie van vrijmetselaars radicalen, gesticht en aangevoerd door Maximilien Robespierre. Zij beoogde seculiere republiek en sociale revolutie af te dwingen door middel van justitiële moord en staatsterreur. Lenin’s politieke methodiek na de Russische Oktober Revolutie werd direct geïnspireerd door het Jacobijnse experiment.

[19] Verwijzingen naar, resp., de naar de 19e Zuid-Amerikaanse vrijheidsstrijder Simón Bolívar genoemde pan-Hispaans-Amerikaanse, anti-imperialistische en semi-socialistische staatsopvatting zoals geformuleerd door de Venezuelaanse President Hugo Chávez (1954-2013) en het ‘Roze Getij’ van (semi-)anti-globalistische en progressieve politieke hervormingen dat grote delen van Latijns-Amerika domineerde, ongeveer tussen de verkiezing van de Venezuelaanse President Hugo Chávez (1999) en de afzetting van de Braziliaanse Presidente Dilma Roussef (2016).

[20] De Europese Commissie bestaat (na de ‘Brexit’) uit 27 ongekozen ‘Commissarissen’ (let op de nomenclatuur die is overgenomen uit het oude Sovjet systeem) die worden voorgedragen door de regeringen van de lidstaten en die gezamenlijk de uitvoerende macht monopoliseren - naast hun exclusief recht op wetsvoorstellen en hun sterke controle op de wetsuitvoering. De Europese Commissie, sinds 2014 voorgezeten door de Luxemburger Jean-Claude Juncker, heeft daarmee feitelijk dictatoriale macht, ook als zij deze macht vrijwel uitsluitend in negatieve zin uitoefent door haar institutionele begunstiging van laissez faire neo-liberalisme en ‘open grenzen’ cultuur-marxisme. Theoretisch gesproken moet het Europees Parlement de benoemingen goedkeuren en heeft het Parlement het recht de Commissie naar het huis te sturen, maar in de praktijk zijn de benoemingen vrijwel altijd exercities in consensuspolitiek en wordt het afzettingsrecht door parlementaire sabotage gereduceerd tot een dode letter. Een verder democratic deficit ligt natuurlijk in het feit dat de opkomst voor de verkiezingen van het zogenaamd ‘controlerende’ Europese Parlement structureel onder de 50% ligt.

[21] Het Wahhabisme, vernoemd naar Soenni-Islamitisch religieus leider en hervormer Mohammed al-Wahhad (1703-92), is een fundamentalistische en iconoclastische doctrinaire stroming binnen de Hanbali School. De aanduiding ‘Wahhabi’ voor een aanhanger van deze stroming wordt voornamelijk gebruikt door haar tegenstanders: zelf geven aanhangers ervan de voorkeur aan termen als muwahhīd (‘monotheïst’) of Salafist. Het Wahhabisme wordt gekenmerkt door een militant en zelfs agressief purisme dat zich uit in regressieve sociale praktijken naar binnen en institutionele intolerantie naar buiten. Het historisch pragmatische bondgenootschap tussen de Wahhabitische geestelijkheid en het Saoedische koningshuis vertaalt zich in contemporaine geopolitieke realiteiten als ‘Al-Qaida’ en de ‘Islamitische Staat’.

[22] Het Salafisme (salaf, ‘voorgangers, voorvaderen’, concreet: de eerste drie generaties religieuze autoriteiten in Islam) is een door het 18e eeuwse Wahhabisme geïnspireerde Soenni-Islamitische religieuze hervormingsbeweging die ontstond in het 19e eeuwse Egypte ontwikkelde in verzet tegen de maatschappelijke effecten van het Westerse imperialisme. Hoewel deze hele beweging zich verzet tegen secularisme en democratie naar Westers model, is slechts een kleine minderheid van haar aanhangers (de zgn. ‘Jihadisten’) voorstander van de gewapende ‘heilige oorlog’ ter implementatie van de Salafistische maatschappelijke hervorming. De Hanbali maḏab (‘gedragscode’, concreet: doctrinaire ‘school’), gesticht door Ahmad ibn-Hanbal (780-855), is de kleinste van de vier traditionele jurisprudenties van de Soenni-Islam en als dominante leer beperkt tot het Arabische Schiereiland (waar die leer tot wet is verheven in het publieke domein in Saoedi-Arabië en Qatar). De Hanbali School wordt gekenmerkt door een effectieve verwerping van ijmā‘ (‘specialistische consensus’) en ijtihād (‘mentale inspanning’) en een beperkte inzet van qiyās (‘deductieve analogie’) in Islamitische jurisprudentie. Het maatschappelijk conservatisme en financiële slagkracht van de Golfstaten maken de Hanbali School aantrekkelijk als ideologisch basismodel voor islamistische extremisten.

[23] De ‘pelgrim vaderen’ waren de Engelse (grotendeels radicaal-Calvinistische) religieuze dissidenten die in 1609 eerst uitweken naar de Nederlandse Republiek, maar vervolgens met het schip de ‘Mayflower’ emigreerden naar Noord-Amerika, waar zij de Plymouth Colony stichtten (later territoriaal opgenomen in de Massachusetts Bay Colony). Zij worden beschouwd als de grondleggers van de Amerikaanse natie (hier ‘klassiek’ gedefinieerd als White Anglo-Saxon Protestant) en zij worden vaak gezien als de initiators van de Amerikaanse feestdag Thanksgiving Day, ‘Dankzeggingsdag’ (naar verluidt beïnvloed door hun herinnering aan het Leidse Oktoberfeest).

[24] Het concept van de ‘edele wilde’, nog niet ‘gecorrumpeerd’ door de globaal-imperialistisch expansieve maar ‘tegen-natuurlijke’ Westerse beschaving, was een integraal onderdeel van het 18e eeuwse Verlichtingsdenken. De term wordt ten onterechte toegeschreven aan de antropologisch-optimistisch (op een utopische ‘natuur staat’) georiënteerde Frans filosoof Jean-Jacques Rousseau (1712-78). Rousseau’s werk gaf echter wel een ‘proto-oikofobische’ invulling aan de voorliggende archetypische notie van ‘romantisch primitivisme’ (een archetype dat al is terug te vinden in the ‘Enkidoe’ karakter van het Gilgamesj Epos). Voor een Archeo-Futuristische herinterpretatie van het Verlichtingsmotief van de ‘edele wilde’, verg. Wolfheze, Sunset, 318ff.

[25] Een verwijzing naar de semi-genocidale pacificatie campagne van de eerste maanden van 1794 die door het Jacobijnse regime werd gevoerd in de nasleep van de Opstand in de Vendée - deze campagne combineerde de strategieën van verschroeide aarde en ethnic cleansing en kostte tot 40.000 burgers het leven.

[26] Tekst ter gelegenheid van de opening van de Beierse Walhalla Gedenkhal (1842).

[27] Verg. Wolfheze, Alba Rosa, 112ff.

[28] Voor een inleiding op het Eurazianistisch gedachtegoed verg. https://www.erkenbrand.eu/artikelen/le-rouge-et-le-noir-i...

[29] Verg. Wolfheze, Alba Rosa, 200ff.

[30] Verwijzingen naar, resp., de Bijbelse zondeval (specifiek Gen. 3:17), en Karl Marx’ theorie van Entfremdung.

[31] Verg. Wolfheze, Alba Rosa, 55.

[32] Latijn: Caesar, in de Europese Traditie de eretitel van de Imperator, de hoogste bevelsautoriteit, afgeleid van de bijnaam van de Romeinse dictator Gajus Julius (100-44 v. Chr.). Eén van de historisch overgeleverde etymologieën herleidt de bijnaam tot een Noord-Afrikaans woord voor ‘olifant’ (Caesar liet opvallend veel munten slaan met de afbeelding een olifant).

[33] Dit ‘begrenzing’ principe kan worden teruggevonden in de Dasein hermeneutiek van de Duitse filosoof Martin Heidegger (1889-1976) en is recentelijk Archeo-Futuristisch uitgewerkt door de Amerikaans-Perzische filosoof Jason Jorjani (geboren 1981) - verg. Wolfheze, Alba Rosa, 228ff.

[34] Een verwijzing naar de metafysische dimensie van het Traditionalistische begrip ‘Wachter op de Drempel’ zoals recent gereactiveerd door de Russische filosoof Aleksandr Doegin - verg. https://www.erkenbrand.eu/artikelen/de-gebroken-pijl-2/

[35] Verg. Wolfheze, Alba Rosa, 209ff.

[36] Een verwijzing naar de moderne dialectische methode (‘these-antithese-synthese’) ontwikkelt door de Duitse filosoof Friedrich Hegel (1770-1831) en ‘geoperationaliseerd’ door de Duits-Joodse politiek filosoof Karl Marx (1818-83).

[37] Een verwijzing naar de Franse vergelijkende taalwetenschapper Georges Dumézil (1898-1986) die pionerend onderzoek deed naar archaïsche Indo-Europese mythen en sociale structuren, bekend om zijn ‘Trias These’ m.b.t. het oorspronkelijke Indo-Europese kastensysteem.

[38] In latere Perzische taalvarianten en in de Sjāhnāmeh (het nationale epos van Iran, getiteld ‘Het Boek der Koningen’, geschreven door dichter Firdawsī aan het einde van de 10e eeuw AD) wordt deze koning aangeduid als Jamšīd (ofwel ‘Schitterende Yama’), een mythische priester-koning met bovennatuurlijke gaven en de charismatische roeping van de hoogste Katechon.

[39] De Indo-Europese knots wordt als - vaak met goud foelie overtrokken - ceremoniële staf overgenomen als machtssymbool van hoogwaardigheidsbekleders binnen alle Tradities van de Oude Nabije Oosten en de Klassieke Wereld. De symbolische betekenis van de knots is (via cultureel-antropologisch herleidbare structurele opposities) gerelateerd aan die van de scepter (politiek gezag), de toverstaf (spiritueel gezag) en de baton (militair gezag).

[40] De Avestaanse aanduiding voor een van de Zoroastrische Yazata’s (‘vererenswaardige’, vergoddelijkte principes - de term is etymologisch verwant aan het Griekse woord ἅγιος ‘heilig’): het gaat hier om het principe van het ‘Geweten’ dat functioneert als een ‘aartsengel’ en is toegerust met de knots van wereldse macht - in latere Perzische taalvarianten wordt hij aangeduid als Sorūš.

[41] De Middel-Perzische naam Ahriman wordt in het oudere Avestisch weergegeven als Angra Mainyu, ‘Kwade Geest’, de kosmische tegenstrever van de opper- en scheppergodheid Ahura Mazda. Zoals in het Christendom God (Licht, Waarheid, Orde) en de duivel (duisternis, leugen, chaos) tegenover elkaar staan, zo staan in het Zoroastrianisme  Ahura Mazda en Angra Mainyu tegenover elkaar.

[42] Dit charisma wordt in de Christelijke Traditie symbolisch uitgebeeld door middel van een aureool, een halo-effect toegeschreven aan engelen en heiligen. De moderne wetenschap beschrijft dit fenomeen in neurologische termen (bijv. in relatie tot liminele verschijnselen als epilepsie, synesthesie en hallucinatie). Voor de historische context van het concept van de khvarenah verg. Jason Jorjani, World State of Emergency (Londen: Arktos, 2017) 153-92.

[43] Voor Steuckers’ visie van Europa als subcontinentaal deel van de totale Euraziatische ruimte verg. https://www.erkenbrand.eu/artikelen/le-rouge-et-le-noir-i... .

[44] Šihāb ad-Dīn Yahya Sohrawardi (1154-91), bijgenaamd ‘Meester der Verlichting’, baseerde zijn Illuminationisme op de notie van prisca theologia en was zo in staat pre-Islamitische (filosofische concepten en) kennis te integreren in zijn werk. Esoterische symboliek en intellectuele intuïtie zijn essentiële elementen in Sohrawardi’s werk, dat invloed kreeg op het Westerse Traditionalisme door de vertalingen en interpretaties van Henri Corbin (1903-78) en Seyyed Hossein Nasr (geboren 1933).

[45] Een verwijzing naar de verovering van het Chorasmidische Rijk (grosso modo het toenmalige ‘Perzië’) door Dzjengis Khan, beginnend in 1219.

[46] In de Iraanse context kan deze spirituele houding zonder voorbehoud worden omschreven als ‘Arisch’ - het is deze Arische existentiële conditie die door Jason Jorjani wordt onderzocht in zijn werken Prometheus and Atlas en The World State of Emergency.

[47] Joseph Arthur Graaf de Gobineau (1816-82) was een paleo-conservatief Frans denker - vaak genoemd als grondlegger van het laat-19e en vroeg-20e eeuwse ‘wetenschappelijk racisme’ - die tijdens zijn diplomatieke dienst in Perzië een levenslange filosofische, geschiedkundige en mystieke fascinatie voor de Perzische Traditie ontwikkelde.

[48] https://www.koninklijkhuis.nl/documenten/toespraken/2018/...

[49] https://www.geopolitica.ru/en/article/problems-european-s...

[50] Na ‘Brexit’ heeft zelfs in de mainstream media voorzichtige interesse getoond voor de niet-globalistische immigratie politiek van de Europese microstaten. bijv. https://www.theguardian.com/politics/2016/oct/09/liechten...

[51] Modellen die waardevolle elementen bevatten zijn o.a. de etnisch-gebaseerde Community Funds van Singapore en de Bumiputra privileges van Maleisië.

[52] Een schuine verwijzing naar de titel van het boek van Pim Fortuyn, De puinhopen van acht jaar paars (2002).

[53] Een verwijzing naar de titel van het Martin Bosma’ politieke traktaat De schijn-élite van de valse munters (2010), door Bosma zelf vrij toegankelijk gemaakt via https://gratis-boek.nl/martin-bosma-de-schijn-elite-van-d...

[54] https://www.koninklijkhuis.nl/documenten/toespraken/2018/...

[55] Een term die in de Nederlandse publieke sfeer werd geïntroduceerd door de politieke leider van het CDA, Sybrand van Haersma Buma.

mardi, 26 février 2019

Le progrès, une idéologie d’avenir ?...

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Le progrès, une idéologie d’avenir ?...

par Hervé Juvin

Ex: http://metapoinfos.hautetfort.com

Nous reproduisons ci-dessous un point de vue d'Hervé Juvin, cueilli sur son blog et consacré à l'idéologie du progrès, qui se trouve au cœur de la doctrine politique d'Emmanuel Macron. Économiste de formation, vice-président de Géopragma, Hervé Juvin est notamment l'auteur de deux essais essentiels, Le renversement du monde (Gallimard, 2010) et La grande séparation - Pour une écologie des civilisations (Gallimard, 2013). Candidat aux élections européennes sur la liste du Rassemblement national, il a publié récemment un manifeste intitulé France, le moment politique (Rocher, 2018).

juvin.jpgLe progrès, une idéologie d’avenir ?

Enrôler le progrès à son usage unique ; c’est la grande idée politique d’Emmanuel Macron. Le combat entre progressistes et conservateurs remplacerait le débat entre droite et gauche.Vieillie, dépassée, la confrontation entre socialistes et libéraux ferait place à une confrontation entre l’avenir et le passé, ceux qui avancent et ceux qui bloquent, la lumière et la nuit. On croirait entendre Jack Lang en 1981… Le simplisme a une force politique. L’avenir, qui est contre ?

La pertinence de l’opération pose pourtant question. Car tout se complique dès qu’il s’agit de définir le progrès dont l’avenir doit être porteur, cette valeur supposée positive, à laquelle s’oppose le conservatisme, si aisément jugé négatif. Sauf qu’il n’est pas certain que le progrès, celui que désignent les progressistes, soit exactement le futur ; de même qu’il n’est pas certain que la volonté de conserver, attribuée aux opposants, s’enlise dans le passé. Et si c’était le contraire ? Et si « je maintiendrai » était la formule révolutionnaire du futur ?

La belle route du progrès

L’avenir tel que La République en Marche veut y conduire la France a été écrit en 1990. Libre échange, entreprises mondiales, sociétés multiculturelles, règne du droit et uniformisation du monde sur le modèle américain. La chute de l’empire soviétique promettait l’union planétaire, la démocratie mondiale, et le libéralisme devenait la seule politique possible. C’était la fin de l’histoire, qui s’en souvient ?

Le libre-échange allait bénéficier à tous ; d’ailleurs, aucun économiste ne peut être protectionniste, affirmaient doctement des experts payés pour leurs discours par les banques et les fonds d’investissement. Les multinationales avaient carte blanche ; délocaliser, c’était l’avenir ! Les leçons du XXe siècle étaient tirées ; le nationalisme c’est la guerre, et la Nation, dans ses frontières, était une forme politique dépassée. Le sort des peuples européens se confondait avec l’intégration de l’Europe. L’euro devait donner à l’Europe sa forme fédérale, appelée à attirer toutes les Nations.

hj11.jpgLa société multiculturelle était l’avenir ; elle abolit les frontières ; elle ne connaît la diversité qu’individuelle, et elle nous promet la paix et l’amitié entre tous les hommes unis par le commerce. Ils ne formeront plus des peuples, mais une humanité dans laquelle tous font valoir les mêmes droits, partagent les mêmes désirs, bref, deviennent les mêmes. La croissance allait sauver le monde ; la Chine marchait vers la démocratie à mesure que le bol de riz se remplissait. Le droit et le marché en avaient fini avec la politique ; la puissance, la souveraineté, la Nation, autant de vestiges à mettre au grenier. Ajoutons que le monde est à nous, que nous nous levons chaque matin pour tout changer, que tous les milliardaires du monde n’aspirent qu’à construire un monde meilleur, et que la liberté oublieuse du passé assure que chacune, que chacun se construise lui-même un avenir radieux.

C’étaient les années 90. Un autre monde. C’est toujours la rengaine du progrès telle que l’entonnent celles et ceux qui n’ont rien vu, rien appris, rien compris depuis plus de vingt ans. Et c’est ce que des dirigeants européens autistes, un Président français vieilli avant l’âge, veulent continuer à nous faire croire comme progrès. Ce que la République en Marche veut faire croire à la France. Et pourtant…

L’avenir a changé de route. La zone euro est en panne ; non seulement l’Europe recule par rapport à tous les autres continents, mais en Europe, les pays de la zone euro sont derrière les pays qui ont gardé leur monnaie nationale, à commencer par la Grande-Bretagne. Le commerce international est en recul, depuis que les coûts du transport ont cessé de baisser, depuis que les entreprises redécouvrent que l’éloignement est un facteur de risque.

La part des multinationales dans l’activité mondiale baisse, pour la première fois depuis les années 1980. La dénonciation des pratiques commerciales déloyales est au cœur de tous les débats internationaux, et la hausse des tarifs douaniers, le resserrement des normes et des contrôles, est partout la réponse à des situations où la concurrence est inégale. Plus personne n’oserait dire que « le doux commerce » est la voie de la paix ! Il n’y a pas de marché quand les systèmes de valeurs, les priorités, diffèrent.

Analysant la perspective de voir les États-Unis couper Huawei de ses fournisseurs occidentaux ou taiwanais, même le très libéral The Economist reconnaît que « la technologie ne peut rien contre la politique » ! Dans les cercles internationaux, et même à Davos 2019, le constat s’impose ; la mondialisation a fait quelques milliers de milliardaires, elle a sorti de la pauvreté 1,2 milliard d’Asiatiques, elle a surtout détruit des classes moyennes occidentales qui devaient l’essentiel de leur pouvoir d’achat, non à leur performance individuelle, mais à la solidité du cadre national et des systèmes sociaux en vigueur, des politiques salariales aux mutualisations internes. Et l’individualisme progresse sur fond de désespoir, avec un Japon, une Allemagne, une Corée du Sud, qui découvrent que l’isolement est la première maladie moderne, et que la réussite économique ne donne pas l’envie de vivre.

Le nouveau signe du progrès

Le progrès aujourd’hui n’est pas ce qu’il était en 1990. Les Français l’ont bien compris. Le progrès s’appelle circuits courts, il s’appelle relocaliser, se fournir à proximité, savoir qui produit quoi, et comment. L’avenir est fait d’héritages à conserver et à transmettre, plus beaux, plus riches, plus vivants. Le progrès s’appelle lutter contre l’esclavage et le trafic d’êtres humains qui sont le vrai nom de l’immigration. Le progrès s’appelle frontière, pour ceux qui veulent choisir leurs lois, leurs voisins, et leur destin. Le progrès s’appelle renouer avec l’histoire pour se projeter sans se perdre, il signifie préférer le citoyen à l’individu, parce que lui seul rend possible l’action collective, et que citoyenneté rime avec liberté. Et le progrès s’appelle retour au territoire, retour à la famille, aux liens et aux siens, parce que nul ne survivra seul à l’effondrement de nos sociétés et de la vie.

hj1.jpgL’avenir a changé de sens, et le progrès est l’inverse de ce qu’une politique française entêtée, aveugle et autiste, fait subir aux Français. Partout, l’État Nation est la forme politique de la modernité, et partout, les États Nations cherchent à affirmer leur unité interne, pour mieux faire face aux défis extérieurs qui se multiplient. Partout, la frontière retrouve sa fonction vitale ; faire le tri entre ce qui vient de l’extérieur, qui est utile, choisi, et qui entre, et ce qui est dangereux, toxique, et qui reste à l’extérieur. Partout, l’unité nationale est une priorité.

Partout aussi, l’État est appelé à redécouvrir son rôle ; protéger, promouvoir, préférer les citoyens. Même Henry Kissinger (Le Débat, nov-déc. 2018) appelle les États à prendre le contrôle d’Internet ! Même Davos sent vaciller ses certitudes mondialistes et témoigne du malaise dans ce qui reste du monde global ! Partout, sous des formes et des contours divers, le besoin de dire « nous » l’emporte sur le « je » de l’isolement et de la détresse. Et partout, être respecté, être associé, être représenté, devient plus important que les bénéfices économiques promis par des experts méprisants, distants et absents.

Quand le progressisme se confond avec le bougisme — changer tout, tout le temps et pour rien — le progrès s’appelle demeurer. Quand le progressisme signifie sacrifier au court terme un patrimoine, des infrastructures, des traditions, le progrès s’appelle maintenir. Quand le progressisme s’attaque aux mœurs, aux institutions, aux familles, aux corps et à la vie, le progrès s’appelle préserver. Parlez-en à ceux de l’Est européen, ils savent que conserver, maintenir, défendre et préserver peut être la promesse qui fait se tenir debout et qui ouvre toutes grandes les portes de l’avenir !

Et voilà que la confusion se dissipe. N’en déplaise à Mme Nathalie Loiseau, il n’y a pas et il n’y aura pas de souveraineté européenne parce que la souveraineté est l’apanage des peuples, et qu’il n’y a pas, il n’y aura pas de peuple européen. N’en déplaise à Emmanuel Macron, le libre échange est en recul, comme le commerce mondial, parce qu’ils sont à l’origine de la plus formidable régression sociale que l’Europe ait connue. N’en déplaise à des socialistes qui ont trahi le peuple, les frontières sont de retour parce que leur ouverture détruit les acquis sociaux, le droit du travail et les solidarités nationales plus vite que n’importe quel autocrate illibéral.

N’en déplaise aux européistes de la fuite en avant fédérale, comme aux nostalgiques d’une grande Europe aux ordres du Reich, l’État Nation est la forme politique de la modernité, et les rêves du multilatéralisme, du post-national et de la démocratie mondiale ont fini dans les poubelles de l’histoire. Qu’elles y restent ! Et n’en déplaise aux donneurs de leçons, le dépassement des Droits de l’individu est en cours, des Droits qui n’ont de réalité que quand les citoyens dans une société organisée et grâce à un Etat fort, décident de les honorer.

hj2.jpgVoilà notre situation historique. Un nouvel obscurantisme nous rend prisonniers. Il s’appelle globalisme, multiculturalisme, individualisme. L’idéologie qu’il constitue est rétrograde, elle répète des refrains qui ont trente ans d’âge, et elle nous bouche l’avenir. Nous devons allumer d’autres Lumières pour faire reculer l’obscurité, et nous libérer des mensonges officiels comme des inquisiteurs qui appellent « fake news » ce qui révèle les mensonges de l’oligarchie au pouvoir. Nous devons suivre l’enseignement de Spinoza, de Kant, et nous libérer de la religion laïque de l’économie, qui a remplacé les religions divines sans rien tenir de leurs promesses ! L’avenir s’appelle Nation, s’appelle citoyen, s’appelle frontières. Le changement s’appelle sécurité, autorité, et stabilité. Et le progrès s’appelle demeurer Français, bien chez nous, bien sûr notre territoire, bien dans nos frontières, pour être à l’aise dans le monde.

Il est grand temps que la France se réveille du sommeil de plomb dans lequel le socialisme l’a plongé. Il est plus urgent encore que La République En Marche cesse de mettre la France à reculons, de vendre pour changement une rengaine que personne n’écoute plus, et de nommer progrès ce qui a provoqué un recul français manifeste, douloureux, et continuel depuis trente ans. Nous qui défendons la Nation représentons le progrès, le vrai, celui qui est partagé par tous. Nous représentons les libertés publiques, et la première d’entre elles ; la liberté de choisir qui est Français. Nous voulons que la France reprenne sa place dans le monde ; nous allons faire rentrer la France dans l’histoire ; nous allons rendre à la France son avenir, un avenir choisi, pas celui qu’on nous impose, un avenir voulu, pas celui des gérants de fonds, un avenir qui en finisse avec les vieilles recettes et les vieilles illusions, un avenir que nous aurons choisi !

Hervé Juvin (Blog d'Hervé Juvin, 18 février 2019)

lundi, 25 février 2019

Michel Onfray charge Bernard-Henri Lévy : "Il est le prototype de tout ce que je n'aime pas en philosophie

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Michel Onfray charge Bernard-Henri Lévy : "Il est le prototype de tout ce que je n'aime pas en philosophie

 
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Quand Fabrice Luchini rencontre Michel Onfray

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Quand Fabrice Luchini rencontre Michel Onfray

Le trésor transcendantal de la vérité, de la beauté et de la bienveillance s'estompe face au matérialisme et au postmodernisme

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Le trésor transcendantal de la vérité, de la beauté et de la bienveillance s'estompe face au matérialisme et au postmodernisme

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samedi, 23 février 2019

Ernst Jünger entre modernité technophile et retour au donné naturel

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Robert Steuckers :

Ernst Jünger entre modernité technophile et retour au donné naturel

Le spécialiste des phénoménologies existentialistes et des théories conservatrices et conservatrices-révolutionnaires qu’est le Prof. Michael Grossheim à Rostock a eu le mérite de rappeler, l’année où Jünger fêta son centenaire, que l’ouvrage théorique majeur de notre auteur, Der Arbeiter (= Le Travailleur) avait laissé perplexes bon nombre d’amis de l’écrivain militaire et révolutionnaire, au moment de sa parution en 1932. Pour Grossheim, Ernst Jünger a eu, à cette époque-là de sa longue vie, une attitude très particulière face à la modernité. Le camp conservateur, auquel on le rattachait en dépit de ses sympathies révolutionnaires, qu’elles aient été nationalistes ou bolchevisantes, n’était pas spécialement technophile et regrettait le passé où les moteurs ne vrombissaient pas encore et où la vie ne subissait pas le rythme trépident des machines de tous genres.

Pour Grossheim, l’attitude de Jünger face à la technique, du moins jusqu’au début des années 1930, dérive des expériences de la première guerre mondiale qui a inauguré les terribles batailles de matériels : militaire jusqu’à la moelle, Jünger refuse toute attitude capitulatrice et passéiste face à l’effroyable déchaînement de la puissance technique sur le champ de bataille. Grossheim : « Il a appris à connaître le potentiel démoniaque de la technique mais ne veut pas le fuir ; il se soumet à la réalité (nouvelle) ».

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Derrière cette volonté délibérée de se soumettre à l’implacable puissance des machines de guerre se profile aussi un débat que Grossheim met en exergue : le mouvement conservateur, tel qu’il s’articule à l’époque dans les mouvements de jeunesse issus du Wandervogel, est tributaire, depuis 1913, de la pensée écologique et vitaliste de Ludwig Klages. Celui-ci est résolument anti-techniciste et antirationaliste. Il déplore amèrement le saccage du donné naturel par la pensée hyper-rationalisée et par les pratiques technicistes : déforestation à grande échelle, disparition des peuples primitifs, extermination d’espèces animales. Ernst Jünger ne contredit pas Klages quand ce dernier pose un tel constat et, même, s’alignera bientôt sur de pareilles positions. Cependant, en 1932, au terme d’un engagement révolutionnaire (finalement plus bolchevisant que conservateur) et à la veille de la prise du pouvoir par les nationaux-socialistes, Jünger raisonne sur base d’autres postulats, sans nier le caractère éminemment destructeur du technicisme dominant. Qui est destructeur et total, ce qui revient à dire que le Travail, expression de l’agir à l’ère de la technique, s’insinue en tout, jusque dans l’intimité et les moments de repos et de loisirs de l’homme.  Chez Klages et ses adeptes des mouvements de jeunesse, les âges d’avant la technique sont l’objet d’une nostalgie envahissante et, pour Jünger, incapacitante. Face à ce naturalisme biologisant, Jünger plaide, explique Grossheim, pour un « réalisme héroïque » qui ne veut rien céder aux illusions sentimentales ni demeurer en-deçà de la vitesse nouvelle et inédite que les processus en marche depuis l’hyper-technicisation de la guerre ont imposée.

ejarbeiter.jpgLa phase du « Travailleur » a toutefois été très brève dans la longue vie de Jünger. Mais même après sa sortie sereine et graduelle hors de l’idéologie techniciste , Jünger refuse tout « escapisme romantique » : il rejette l’attitude de Cassandre et veut regarder les phénomènes en face, sereinement. Pour lui, il faut pousser le processus jusqu’au bout afin de provoquer, à terme, un véritablement renversement, sans s’encombrer de barrages ténus, érigés avec des matériaux surannés, faits de bric et de broc. Sa position ne relève aucunement du technicisme naïf et bourgeois de la fin du 19ème siècle : pour lui, l’Etat, la chose politique, le pouvoir sera déterminé par la technique, par la catégorie du « Travail ». Dans cette perspective, la technique n’est pas la source de petites commodités pour agrémenter la vie bourgeoise mais une force titanesque qui démultipliera démesurément le pouvoir politique. L’individu, cher au libéralisme de la Belle Epoque, fera place au « Type », qui renoncera aux limites désuètes de l’idéal bourgeois et se posera comme un simple rouage, sans affects et sans sentimentalités inutiles, de la machine étatique nouvelle, qu’il servira comme le soldat sert sa mitrailleuse, son char, son avion, son sous-marin. Le « Type » ne souffre pas sous la machine, comme l’idéologie anti-techniciste le voudrait, il s’est lié physiquement et psychiquement à son instrument d’acier comme le paysan éternel est lié charnellement et mentalement à sa glèbe. Jünger : « Celui qui vit la technique comme une agression contre sa substance, se place en dehors de la figure du Travailleur ». Parce que le Travailleur, le Type du Travailleur, s’est soumis volontairement à la Machine, il en deviendra le maître parce qu’il s’est plongé dans le flux qu’elle appelle par le fait même de sa présence, de sa puissance et de sa croissance. Le Type s’immerge dans le flux et refuse d’être barrage bloquant, figeant.

Jünger, au nom d’une efficacité technicienne qui est somme toute militaire, combat les peurs qu’engendre la modernisation technicienne. S’immerger dans le flux technique qui s’est amplifié rapidement depuis les grandes batailles de matériels est un service à rendre à la nation, contrairement aux attitudes incapacitantes qui empêcheraient les futures générations de maîtriser les outils techniques les plus performants, ceux qui donnent la victoire ou inspirent la crainte à l’ennemi potentiel. L’homme, devenu « Type », devient alors le chef d’orchestre secret qui gère le flux technique et les machines qu’il produit : ce n’est pas un combat que gagne la machine contre l’homme mais un combat qui se gagne avec des machines. L’homme-type reste le maître final de la situation : c’est lui qui impulse à la machine son mouvement, lui donne un sens, physiquement et spirituellement. L’homme est supérieur à la machine s’il a, face à elle, une attitude altière, dominatrice, pareille à celle du soldat qui a vécu les grandes batailles de matériels. En ce sens, le combattant de la Grande Guerre est bien le prélude de l’humanité « typifiée » de l’avenir.

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Mais, malgré cette grandiloquence techno-futuriste du Jünger de 1932, font surface, dans ses réflexions, le scepticisme et la conscience qu’il est impossible d’éradiquer la force tellurique et naturelle des faits organiques.  Dès les mois qui ont suivi la parution du « Travailleur » (Der Arbeiter), Jünger glissera vers une posture ne réclamant plus l’accélération mais son contraire, la décélération. Pour son exégète actuel, Jan Robert Weber, ce glissement vers une pensée de la décélération (Entschleunigung) se fera en quatre étapes : celle de la découverte des « espaces de résilience » sous une « dictature cacocratique nihiliste » (1933-1939), la nécessité de s’accrocher aux espaces idylliques ou classiques (dont le Paris des années d’occupation) pendant les années de la seconde guerre mondiale, le recours à l’écriture à l’ère où la paix sera de longue durée (1946-1949) et, enfin, la période des refuges méditerranéens (dont la Sardaigne fut un prélude) et/ou tropicaux (visites en Amazonie, en Malaisie, en Afrique et en Indonésie – 1950-1960). Tout cela pour aboutir, écrit J. R. Weber, « au moi apaisé du voyageur de par le monde à l’ère de la posthistoire ».

Robert Steuckers.

Bibliographie :

  • Michael GROSSHEIM, « Ernst Jünger und die Moderne – Adnoten zum ‘Arbeiter’ », in : ünter FIGAL und Heimo SCHWILK, Magie der Heiterkeit – Ernst Jünger zum Hundertsten, Klett-Cotta, Stuttgart, 1995.
  • Andrea SCARABELLI, « Terra Sarda: il mediterraneo metafisico di Ernst Jünger », in : http://blog.ilgiornale.it/scarabelli (10 août 2018).
  • Jan Robert WEBER, Ästhetik der Entschleunigung – Ernst Jüngers Reisetagebücher (1934-1960), Matthes & Seitz, Berlin, 2011.

Ce texte est paru dans le numéro spécial de Livr'arbitres, n°27

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lundi, 18 février 2019

Cioran’s On France: Thriving Amidst Decay

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Cioran’s On France: Thriving Amidst Decay

Emil Cioran
De la France 
Paris: L’Herne, 2015

This is a strange, vile little book as only Emil Cioran [2] knew how to produce. It was only recently published, in both the original Romanian and in French translation,[1] [3] having been written in 1941 and left to languish for decades in some cardboard box in the Cioran archives. Cioran wrote the book in the wake of France’s pathetic defeat in 1940, inspired by his conversations in Parisian cafés and his bicycling through the villages of the French countryside. Contemporary political events are quite understated, however. For Cioran, there is no question of engaging in puerile journalism; in his view, France’s decay was many centuries in the making.

I first read the book some time ago and remembered nothing except a feeling of revulsion. I recently reread it, this time taking notes. As so often with Cioran, when I gather my notes, my initial revulsion gives way as I see the bigger picture and glimmers of hope, and the work ends up being strangely endearing to me.

I don’t know if the author ever meant for the text, which was written in pencil, to be published at all, let alone in its current form. It seems likely it was written in a few inspired bursts of Cioran’s brilliant and morbid Muse. It is a conversion note. Before 1941, Cioran thought in German, had wished he could have been German, and wrote in Romanian, oscillating between despair and the mad hope that a new barbarism could save Romania from irrelevance and Europe from decadence. After 1945, Cioran had settled into his Parisian home and would henceforth write exclusively in French, as a “lucid” aesthete of nihilism and decline.

Why would someone want such an intellectual destiny for oneself? On France explains it. This is a prolonged meditation upon France, her greatness, vanity, and decay, a book-long portrait of the past glories and the steady and pathetic decline of a great nation. Cioran has in fact fallen in love with his adoptive land; it is indeed a love letter. His prose is often overwritten, but quite insightful: “I perceive France rightly by all that is rotten within me” (40). France is decadent, lifeless, and over-intellectual, just like himself. The book opens with an apt anonymous quotation in French: “Collection d’exagérations maladives” (a collection of sickly/obsessive exaggerations). Rest assured there is a point to all of this, if one bears with it.

ecfrance.jpgCioran, like Nietzsche, writes with a kind of visceral identification with human history and the evolution of our consciousness as recorded in our literature and philosophy. For Cioran, how could one live without being part of a great nation? For him, a nation is a social, linguistic, and ethnic reality culminating in a shared psychic reality; a great nation is an agent influencing the course of human history, rather than a collection of individuals. A nation is a kind of conversation, a shared mind, extending across the centuries; at the same time, nations are equally mortal and artificial creations. Hence for Cioran, “France,” “Germany,” and “Romania” are entities which are at once conventional and whose potentialities and defects are intimately felt, about which the stakes could not be higher.

Cioran’s actual observations on France can be stereotypical or overwritten, but they are often on point and insightful. France had been the quintessential nation, a historical agent like no other, “a nation afflicted with good fortune” (28), which had known a stable and “regular” development (unlike the stagnation of the Balkans, or the erratic history of Germany and Russia). France was a nation which had never been “humiliated by comparisons,” whose people had never felt themselves to be “deracinated” by foreign influences, who had never felt the material or psychological need to emigrate (27). France was a world unto itself, psychologically self-sufficient, and in that sense strangely provincial, at the same time setting the tone for the entire world: “France – like ancient Greece – has been a universal province” (24). The nation could happily develop at her own, leisurely pace, for she was the world.

In this sense, all of Europe, and indeed much of the world, existed in France’s shadow. For all those formless populaces which wanted to be nations, France set the tone for what was “normal.” France had been the “soul of Europe,” a cultural and even political hegemon. Cioran delights in the decline of the “Grande Nation”: “From the Frenchmen of the Crusades, they have become the Frenchmen of the kitchen and the bistrot: bien-être and boredom” (53).

I recently had reason to observe that I don’t know what it is like to have been born in a second-rate or failed nation. France’s (and the West’s) standard-setting “normality” is in fact highly exceptional [4].

By the time of the Enlightenment, French confidence was also grounded in a belief in reason and progress. This was an “acosmic” culture not troubled by the sublimity and dread of metaphysics, too comfortable in reason, a formal classicism, and an “anti-Dionysian” (80) culture of the head, not of the heart,[2] [5] and committed to the “sterile perfection” of writing (24). It became the nation of self-satisfied Alexandrianism.

All that was over and done with. In the late Middle Ages, France had wavered “between the monastery and the salon” (17), before decisively opting for the latter. The French, since the Enlightenment and in particular during the Revolution, were a perfect example of the weakness of “reason” as a guide for a people. France had degenerated from a nation into a mere populace of selfish individualists, hence sterile, and long given to chatter, overrefinement, and gastronomy (one appreciates the overgeneralizations here). The French gave no place to the unconscious, they were not “deep,” and they had become skeptical and unwilling to die for any ideal (38). Because at this time Cioran seems to only have cared for intensity of feeling and belief, he sees the only remaining vitality left in France in Communism and the working class, although her “revolutionary career” was probably over, anyway (73; hence also some Slavophile sentiments, since Cioran never really distinguished between Russians and Communism, 41).

visuel-cioran.jpgCioran, a voracious reader with a vast intellectual culture, is extremely critical of French thought and culture throughout history. Cioran foresees a great convergence: France’s bourgeois decadence indicates where all the other nations are heading, and by that decadence she will also really become a “normal” country, as afflicted by doubt and inferiority complexes as all the rest (45, 49). Cioran writes implausibly, “Her decline, obvious for almost a century, has not been opposed by any of her sons with a desperate protest” (63).

By this point, one could fairly accuse the wretch Cioran of sadism. Some kids like to tear the wings off of flies, others just like to watch a once-beautiful flower slowly rot from blight.

Cioran has perhaps only one unambiguously positive thing to say about France, the embrace of fleeting beauty:

France’s divinity: Taste. Good taste.

According to which the world – to exist – must please; must be well-made; consolidate itself aesthetically; have limits; be a graspable enchantment; a sweet flowering [fleurissment] of finitude. (14-15)

He observes that France is “the country of the phenomenon in itself,” of impression, before adding, “If appearances are everything, France is right” (78). Very Zen and very true, no? If life is but a succession of fleeting moments, let them be beautiful.

Cioran luxuriates in France’s decay, and some of the passages are frankly revolting in embellishing – as Alain Soral has complained [6] – spiritual and civilizational rot:

[France] can only live up to [her past] if she accepts her end with style, by masterfully refining a crepuscular culture, by extinguishing herself with intelligence and even with splendor – not without corrupting the freshness of her neighbors or of the world through her decadent infiltrations and dangerous insinuations. (47-48)

There are fecund disintegrations and sterile ones. A great civilization which provincializes itself diminishes its spiritual volume; but, when it spreads the elements of its dissolution, when it universalizes its failure, the twilight retains some symbols of the mind and saves the appearance of nobility. (75)

He also writes, “Of France’s twilight we can only speak in aesthetic terms; we do not feel it, and the French do not feel it either” (59). Well, perhaps a metic could feel this way, but not a Frenchman raised in the knowledge that his country was a great nation among the lights of the world, passed down to us as a sacred patrimony by the sacrifice of millions of French soldiers and peasants. Let us recall Charles de Gaulle’s famous words:

All my life, I have had a certain idea of France. I am inspired in this as much by sentiment as by reason. . . . I instinctively have the impression that Providence has created her for consummate achievements or exemplary misfortunes. If mediocrity marks her deeds and actions, however, I have the feeling of an absurd anomaly, attributable to the faults of the French and not to the genius of the fatherland. But also, the positive side of my mind convinces me that France is only truly herself when she is at the first rank; that only vast enterprises can compensate for the ferments of dispersion which her people carries; that our country, as it is, among the others, as they are us, must, under penalty of death, aim high and stand tall. In short, by my lights, France cannot be France without greatness.

Let it be said that Charles de Gaulle, for all his failures [7], passed this conviction on to the more earnest and impressionable minds of the younger generation through this myth – those who only-too-naïvely took their elders’ words at face value, and who could therefore only be shocked by the nation’s decomposition and slouching into mediocrity. And are de Gaulle’s words not also true, to a great extent, for Europeans in general, who always yearn to dedicate themselves heart and soul to a great cause, without which they are prone to living like dogs? And I cannot tell you how many idealistic young Europeans I have met, who are among the best of our race, who dedicate themselves to the Third World, for there can still be found struggle, sacrifice, and emotional depth and intensity, which can only contrast with the superficiality and barrenness – a rare spiritual oblivion – of coddled life in the post-war West.

I can see a point in Cioran’s musing, but there is also something disgusting – and in some respects simply noxious – for both France and Europe. Cioran, in fact, seems torn: generally favoring belief and fanaticism as the antithesis of decadence (hence sympathy for Hitlerism and Bolshevism), but occasionally observing that perhaps Europe needs a bit of doubt, which France could bring (65).

Cioran is convinced of the catastrophic effects of the illusions of “reason” and “progress.” But if France, the pioneer-nation of the Enlightenment, would cease to believe in such follies . . . surely Western man could finally awaken from these self-satisfied, sterilizing slogans! Or, at least, Cioran believes he, as an “intellectual vampire” (60), could be a lucid and fecund writer in this context. He leapfrogs centuries of history:

Hailing from primitive lands, the Wallachian underworld, with the pessimism of youth, and then arriving in an overly ripe civilization, what a source of shivers before such a contrast! Without a past amidst an enormous past . . . From the pasture to the salon, from the shepherd to Alcibiades! (66)

Hence, Cioran loves France because she has fallen from self-assured greatness into a doubt and pessimism much like his own. Whereas he had previously loved Hitlerian Germany for its irrational faith, he now presents France as a mirror image of himself, an entire nihilist country in which he might be able to achieve the highest lucidity:

An entire country which no longer believes in anything, what an exalting and degrading spectacle! To hear them, from the lowest of citizens to the most lucid, say the obvious with detachment: “La France n’exist plus,” “Nous sommes finis,” “Nous n’avons plus d’avenir, “Nous sommes un pays en décadence,” what a reinvigorating lesson, when you are no longer a devotee of delusions! (69)

ciorantala.jpgFrance is “a consoling space” for Cioran: “With what impatience I have awaited this outcome, so fertile for melancholic inspiration!” (70). The wandering and soon-to-be stateless Cioran wants to limit himself to a particular culture and place: “He who embraces too much falsifies the world, but in the first instance, himself . . . A great soul enclosed in the French forms, what a fecund type of humanity!” (87). France’s comfortable decadence will shield Cioran from his own excesses: “Let her measure cure us of pathetic and fatal wanderings” (32), “A country’s lack of life will protect us against the dangers of life” (88). Crepuscular France will finally give Cioran the opportunity to be in harmony with his time: “Alexandrianism is erudite debauchery as a system, theoretical breathing at the twilight, a moaning of concepts – and the only moment when the soul can harmonize its darkness with the objective unfolding of the culture” (70).

In short, Cioran seizes the opportunity to join a decadent, highly intellectual nation, so as to explore the depths of nihilism and see where one emerges. I can appreciate this kind of personal and philosophical project.

Cioran carves a role out for himself as a fertilizing maggot in the corpse of French civilization. Cioran, not disinterestedly, affirms that the greatness of a nation can be measured by its ability to inspire metics to join and serve it, which I suppose is partly true (92-94). Cioran then foresees his own destiny in this new home:

What would I do if I were French? I would rest in Cynicism. (40)

France needs a pathetic and cynical Paul Valéry, an absolute artist of the void and of lucidity. (48)

My destiny is to wrap myself in the dregs of civilizations. How can I show my strength except by resisting in the midst of rot? The relationship between barbarism and neurasthenia balances this formula. An aesthete of the twilight of cultures, I turn my gaze of storm and dreams upon the dead waters of the mind . . . (65)

To refuse to go extinct, even though we have delighted in the inevitable march towards extinction. (82)

A kind of moribund fury lies in the aesthetes of decadence. (84)

Cioran affirms that decadence can only be overcome, not through sentimental nostalgia or insincere conservatism, but by uncompromisingly going deeper . . . perhaps then nihilism will be transcended? That which is falling ought to be pushed, that which doesn’t kill us, and so on.

On France seems to be a book-long philosophical exercise. There are well-established traditions in this kind of morbid meditation in both Stoicism and Buddhism, schools which strongly resonated with Cioran. In Stoic analysis, one breaks down an object to its most essential, unappetizing forms so as to overcome our desires with objectivity. As Marcus Aurelius wrote in his Meditations:

When you have savories and fine dishes set before you, you will gain an idea of their nature if you tell yourself that this is the corpse of a fish, and that the corpse of a bird or a pig; or again, that fine Falernian wine is merely grape juice, and this purple robe some sheep’s wool dipped in the blood of a shellfish; and as for sexual intercourse, it is the friction of a piece of gut and, following a sort of convulsion, the expulsion of some mucus. Thoughts such as these reach through to the things themselves and strike to the heart of them, allowing us to see them as they truly are. So follow this practice throughout your life, and where things seem most worthy of your approval, lay them naked, and see how cheap they are, and strip them of the pretenses of which they are so vain. (Marcus Aurelius, Meditations, 6.13)

The Buddhists attribute a similar meditative exercise to Gautama: contemplating the various aspects of our being (mind, body, actions, including defecation and urination), breaking down our body into parts, and indeed contemplating our body subject to various degrees of decomposition (notably in the Satipatṭhāna Sutta). By this, one attains a certain objectivity and imperviousness, one is learning to look the truth in the face without flinching.

On France appears to be the fruit of this kind of philosophical exercise. By stripping France of her pretensions and even the usual dignities necessary for a nation or an individual’s self-respect, Cioran sees his new home objectively. This is indeed one of Cioran’s “nay-saying, corrosive books,” a challenge, the overcoming of which will make us stronger.

In the 1920s and ’30s, no one denied the decadence which already afflicted the France of the Third Republic. No one today can deny that all Europe is decadent, unashamed of her impotence and dedicated to the most impoverished materialist and humanitarian principles, consecrated to the Last Man foreseen by Nietzsche, and with no end in sight. Given all this, Cioran’s observations and his challenge remain deeply relevant to us. Cioran is torn, but points to the need for decidedly modern barbarians: “I dream of a culture of oracles in logic, of lucid Pythias . . . and of a man who would control his reflexes with a supplement of life, and not through austerity” (89).

En guise de conclusion, I recall the words of the Buddha:

Just as a sweet-smelling and pleasant lotus grows on a heap of refuse flung on the high road, so a disciple of the Fully Awakened One shines resplendent in wisdom among the blind multitude, the refuse of beings. (Dhammapada, 58-59)

Some translated excerpts from this book will be published at Counter-Currents in the coming days.

Notes

[1] [8] The French edition is incidentally quite elegant and has been printed using blue ink.

[2] [9] Cioran often writes of nations having or lacking vigor “in the blood,” using this word strangely more in a psychological than hereditarian sense.

 

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[2] Emil Cioran: https://www.counter-currents.com/2019/01/cioran-germany-hitler/

[3] [1]: #_ftn1

[4] standard-setting “normality” is in fact highly exceptional: http://www.unz.com/gdurocher/the-convergence-hoax/

[5] [2]: #_ftn2

[6] Alain Soral has complained: https://www.counter-currents.com/2019/01/cioran-aesthete-of-despair/

[7] his failures: http://www.counter-currents.com/2016/04/de-gaulles-failure/

[8] [1]: #_ftnref1

[9] [2]: #_ftnref2

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