lundi, 31 août 2009
Bulletin célinien: spécial Pol Vandromme
numéro spécial consacré à Pol Vandromme (1927-2009)
Hommage à Pol Vandromme
Le Bulletin célinien n°311, Septembre 2009 : Quoi de plus naturel que de rendre hommage à Pol Vandromme qui nous a quittés au printemps ? Il fut l’un des premiers à signer une monographie sur Céline auquel il consacra, par ailleurs, trois autres essais que j’ai édités jadis sous l’égide de La Revue célinienne. Le premier, Robert Le Vigan, compagnon et personnage de L.-F. Céline, parut en 1980. Pol avait alors l’âge que j’ai aujourd’hui. Que l’on m’autorise cette confidence personnelle : le jeune homme que j’étais fut à la fois éberlué et ébloui de se voir proposer par ce grand critique l’édition de son prochain livre. Perplexe aussi car il ne connaissait alors rien à l’édition. Sans doute l’auteur ne fut-il pas mécontent de son éditeur néophyte puisqu’il lui confia le soin d’éditer deux autres livres sur le même sujet : Du côté de Céline, Lili (le premier livre consacré à Lucette) et Marcel, Roger et Ferdinand (sur les relations croisées entre Marcel Aymé, Roger Nimier et Céline). Devaient suivre un livre sur Brassens, un pastiche (célinien), deux pamphlets politiques et la réédition de son unique roman, Un été acide. Oui, Pol est le seul auteur dont j’ai édité huit livres !
Ce fut le début d’une belle amitié qui se manifestait surtout par de longues conversations téléphoniques : Pol Vandromme aimait à me lire des pages de son prochain livre ou commenter l’actualité. Le plus exaltant pour moi était de l’entendre évoquer l’histoire littéraire ou politique de l’avant-guerre à aujourd’hui. Son immense culture et son goût littéraire très sûr avaient assurément de quoi fasciner le béjaune de trente ans son cadet.
Dès le début de sa vie journalistique, Vandromme défendit Céline écrivain. Vint, quelques années plus tard, ce petit essai paru dans une collection consacrée aux « classiques du XXe siècle ». « Quelle était en 1963 la situation de Céline ? », se rappelait-il. « En gros, celle-ci, auprès de l’opinion dominante : ce ne pouvait être un grand écrivain parce que c’était un salaud. Quand Céline fut pris en charge par les glossateurs universitaires qui l’admiraient en linguistes pédants, on recourut au subterfuge d’un manichéisme spécieux : il ne cessait pas d’être un salaud, mais on consentait à reconnaître qu’il ne l’avait pas toujours été, du moins dans son œuvre. Il y avait donc le bon Céline, celui du Voyage et de Mort à crédit, et le mauvais, celui de Bagatelles pour un massacre et de L’École des cadavres. » Précisément, sur ces écrits appelés improprement « pamphlets », Pol donna, la même année, une interprétation originale aux « Cahiers de l’Herne » créés par Dominique de Roux (1).
Celui-ci affirmait qu’il n’existe que trois catégories de critiques : ceux qui ne savent pas lire, ceux qui ne savent pas écrire, et ceux qui ne savent ni lire ni écrire. Pol Vandromme, lui, appartenait à la quatrième : ceux qui savent à la fois lire et écrire. Il nous laisse une impressionnante somme d’essais où l’analyse littéraire prédomine. Mais il est aussi l’auteur de livres plus personnels comme ses souvenirs de jeunesse, puis de journaliste, et des évocations, souvent lyriques, de ce pays hennuyer qu’il a tant aimé (2).
Que ce numéro du BC à lui entièrement consacré suscite le désir de découvrir son œuvre vaste et multiple. Elle le mérite assurément.
Marc Laudelout
Notes
1. « L’esprit des pamphlets », L’Herne, n° 3, 1963, pp. 272-276.
2. À ceux qui ne connaissent pas cette partie de son œuvre, il faut conseiller la lecture d’Une mémoire de Wallonie. Mon pays d’hier à demain (Éditions Racine, 1996), Bivouacs d’un hussard (La Table ronde, 2002), Un garçon d’autrefois. Souvenirs de jeunesse (Éditions du Rocher, 2003) et Libre parcours (Éditions du Rocher, 2005).
Le Bulletin célinien
BP 70
B1000 Bruxelles 22.
Ce numéro, entièrement consacré à Pol Vandromme, 6 €
Chèque à l’ordre de M. Laudelout.
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EEUU renuncia al escudo antimisiles en Polonia y Republica Checa
EEUU renuncia al escudo antimisiles en Polonia y República Checa
La administración del presidente estadounidense, Barack Obama, renunció al despliegue de elementos del escudo antimisiles en Polonia y en República Checa, afirmó este jueves el diario polaco Gazeta Wyborcza, citando varias fuentes de Washington.
“Las señales enviadas por los generales del Pentágono son absolutamente claras: el gobierno de Estados Unidos busca, en lo referente al escudo antimisiles, otras soluciones a las bases en Polonia y en República Checa”, según un miembro del lobby a favor del escudo, Riki Ellison, citado por el diario.
Durante una conferencia de expertos del departamento de defensa hace una semana, “los generales no han mencionado ni una sola vez los planes respecto a Polonia y a la República Checa”, subrayó Ellison.
“Desde hace unas semanas, el gobierno sondea la reacción del Congreso al abandono de los planes de instalación del escudo en Polonia y República Checa”, afirma Gazeta Wyborcza, citando una fuente anónima en el Congreso.
En 2008, Varsovia y Washington alcanzaron un acuerdo sobre el despliegue de aquí a 2013 en Polonia de diez interceptores de misiles balísticos de largo alcance, a lo que se añadía un potente radar en República Checa, un proyecto global al que Rusia se opuso, al considerarlo una amenaza para su seguridad.
La administración de Obama se propone reexaminar el proyecto de escudo antimisiles lanzado por su predecesor, George W. Bush, en respuesta a la amenaza de países como Irán.
Según Gazeta Wyborcza, la administración de Obama desearía instalar misiles interceptores en unos barcos y en bases en Israel y en Turquía, y “quizás en alguna parte de los balcanes”.
Extraído de AFP.
00:23 Publié dans Affaires européennes | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : missiles, etats-unis, impérialisme américain, otan, atlantisme, pologne, république tchèque, europe, géopolitique | | del.icio.us | | Digg | Facebook
Du pouvoir parisien et de sa dérive gauche
Du pouvoir parisien et de sa dérive gauche
À partir des années 1970, le modèle réussi du Sunday Times a incité de nombreux quotidiens européens à faire semblant de copier sa formule. Ils ont créé des suppléments hebdomadaires d'un bonheur inégal. Vendus par une formule de carte forcée, alourdissant le prix du titre et augmentant artificiellement le chiffre d'affaires des entreprises de presse, ils n'ont que bien rarement développé l'audience de leurs supports de références.
On les lit en effet de manière généralement aléatoire. Ils traînent dans les salles d'attente, au gré des salons de coiffure, au hasard des banquettes arrière. Parfois un titre aguichant dissuade de les jeter définitivement. Ainsi le dernier supplément de "La Repubblica" (1) était-il intitulé "Souvenir d'Italie". On ne pouvait se résoudre à ne pas le feuilleter.
Or, une fois tournées les pages consacrées aux "trésors gastronomiques" de la Péninsule, une petite truffe attirait l'attention. On tombait en effet en pages 40 à 44 sur un amusant article consacré à la France. L'auteur, Marco Cicala, y décrit, et cherche à expliquer au public transalpin, ce qu'il appelle la "dérive gauche" du pouvoir présidentiel parisien. Le jeu de mot, imprimé dans notre langue car intraduisible dans celle de Dante Alighieri, ainsi que les nombreuses formules "en français dans le texte", nous console de la disparition ordinaire et non moins désolante de l'intérêt de la Botte pour l'Hexagone. Le texte lui-même, ramène presque ainsi la politique de notre pays au rang de la comédie de boulevard, c'est-à-dire très au-dessous de cette comedia dell'arte du XVIe siècle dont dérivera le théâtre français.
L'explication donnée fait certes sourire : "cherchez la femme".
Mais précisément de quoi s'agit-il ? En médaillon, sous le titre "ont-ils été choisis par elle ?" on aperçoit quelques personnages :
- Frédéric Mitterrand "nommé ministre de la Culture, il a dit : Sarkozy m'a connu grâce à Carla".
- Philippe Val "Suspecte également la nomination du gauchiste Val à la tête de la radio d'État France Inter".
- Maurice Karmitz "ex-maoïste dirige le Conseil pour la Création artistique, toujours, dit-on à Paris, par la grâce de Carla".
- Cesare Battisti "à l'affaire de l'ex terroriste tient beaucoup Valeria, la sœur de Carla, qui cependant nie toute ingérence". [Rappelons ici que la protection accordée à ce personnage scandalise nos voisins et amis].
Voilà qui trouble, à première lecture. Mais peut-on vraiment en déduire, pour citer La Repubblica que "ce couple étrange, elle 42 ans, lui 54 ans, qui se sont mariés à l'Élysée le 2 février 2008", gouvernerait désormais dans un sens contraire à celui promis aux électeurs en 2007, simplement parce que Carla Bruni serait "épidermiquement de gauche" [ces guillemets correspondent en français aux citations du journal].
Ceci nous semble bien superficiel, et presque optimiste. L'avis sollicité de Laurent Joffrin directeur de Libération, qui ne passe pourtant pas pour une lumière, se révèle ici plus mesuré : "Carla Bruni ne conditionne pas les choix politiques de son mari, mais elle l'a transformé mentalement".
Malheureusement d'autres influences, moins gracieuses, orientent dans un sens plus socialiste la politique étatique subie par la France. Certes un Philippe Val réussira peut-être à faire la radio d'État France Inter encore plus basse, encore plus cégétiste et encore plus démago. On apprécie l'exploit à l'avance. M. Jacques Attali, auteur du programme de 300 réformes, ou M. Henri Guaino, inspirateur des discours économiques, n'ont pas attendu le remariage du chef de l'État pour exercer leur nuisance. L'ouverture à gauche, la réconciliation avec ce que représente M. Bernard Tapie, le recrutement de quelques transfuges impénitents du parti socialiste encore moins. Le pouvoir actuel représente une sociale démocratie moins délirante que celle de Mme Royal, et moins acoquinée avec les rogatons du communisme que Mme Aubry. Vaguement tenu par deux ou trois promesses, il a paru clairement, et raisonnablement, "moins pire" en 2007, à 53 % des électeurs et le semble encore. Mais il ne représente ni la droite, ni la liberté, ni l'identité de la France, et certainement pas la fin du fiscalisme.
La question : "faut-il regretter Cécilia ?" n'intéresse que les lecteurs de Gala. La personnalité de l'épouse du président, fût-elle réputée proche de la gauche caviar, ne devrait pas voiler la réalité aux compatriotes de Gramsci. Le pouvoir culturel en France appartient à un secteur de l'opinion coupé du peuple, et cela ne date pas de février 2008.
Arlequin n'a pas attendu Colombine pour maintenir à 54 % de la richesse nationale le niveau de la dépense publique.
Apostilles
- "Il Venerdi di Repubblica" numéro 1116 du 7 août 2009
JG Malliarakis
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Le bouddhisme martial
Le bouddhisme martial
Examinons le rôle que peut parfois jouer le bouddhisme en temps de guerre, en prenant nos exemples dans l’histoire du Japon entre l’annexion de Taïwan (1895) et la défaite de 1945. En général, on va chercher les racines religieuses de l’impérialisme japonais dans le shintô, terme mixte sino-japonais signifiant la “voie des dieux” et dérivé du chinois “shendao”. Le terme japonais exact étant “kami no michi”, où l’on reconnait le terme “kami”, signifiant “dieu”, comme dans “kamikaze”, le “Vent des dieux”, allusion à la tempête qui coula en 1281 la flotte d’invasion mongole. Les pilotes “kamikaze”, prêts à se suicider dans l’action, devaient imiter cette tempête salvatrice en se jettant sur les porte-avions américains. Le “shintô” est en fait l’équivalent japonais du chamanisme, l’art d’entrer en contact avec les esprits. Cette religion, éminemment nationale, rend un culte à la dynastie impériale qu’elle pose comme descendante de la déesse solaire Amaterasu.
Pourtant, le bouddhisme, religion bien plus intellectuelle, a apporté un soutien plus étayé à l’impérialisme japonais que le shintô, religion animiste. Les maîtres connus du bouddhisme zen, comme Suzuki Teitarô, alias Daisetsu (= “Grande Simplicité”), qui allait apporter la culture zen aux Etats-Unis après 1945, et Kodo Sawaki, le maître de Taisen Deshimaru, qui apportera, lui, le zen en Europe, enseignent tous deux la supériorité des Japonais et plaident pour leur droit à dominer les autres. Citons aussi Yamada Mumon, qui exprimera peut-être quelques vagues regrets, mais qui, encore dans ses vieux jours, avait déclaré que les autres pays asiatiques devaient se montrer reconnaissants à l’égard du Japon, parce que celui-ci, par son “auto-sacrifice”, avait ouvert la voie à leur décolonisation. Le bastion de la pensée pro-impérialiste a été l’école de Kyoto, qui combinait le bouddhisme à des éléments de philosophie occidentale.
National-socialisme et bouddhisme
Peut-on avancer l’hypothèse que l’impérialisme bouddhiste a trouvé quelque écho chez l’allié du Japon pendant la seconde guerre mondiale, l’Allemagne national-socialiste? Le régime national-socialiste avait interdit les “sectes” (cette législation inspire aujourd’hui la politique face aux sectes qu’adoptent la France et la Belgique). Contrairement à tous les mythes qui circulent aujourd’hui et qui veulent nous faire croire à des “racines occultes du nazisme”, le régime a fait dissoudre toutes les associations religieuses marginales et excentriques: l’odinisme, la franc-maçonnerie, l’anthroposophie de Rudolf Steiner, les petits clubs d’astrologie et les officines de diseuses de bonne aventure. Tous étaient frappés d’illégalité et, à partir de 1941, leurs adeptes étaient passibles du camp de concentration. Il y avait toutefois une exception: le bouddhisme qui, dans des cercles restreints, pouvait se déployer librement. Certains analystes critiques de cette époque en concluent qu’il y a un lien étroit entre bouddhisme et national-socialisme. Disons plutôt que l’exception faite en faveur du bouddhisme s’explique par un geste diplomatique destiné à ne pas irriter l’allié japonais.
Cependant, les faits l’attestent: il y avait, en Allemagne, à cette époque, un intérêt réel pour les aspects martiaux du bouddhisme, notamment par le biais des travaux d’Eugen Herrigel (“Le zen dans l’art du tir à l’arc”) et du Comte Karlfried von Dürckheim, que l’on trouve encore et toujours dans toute librairie “New Age”. La dimension martiale, mise en exergue dans cette Allemagne des années 30 et 40, n’est pas une simple projection des idées quiritaires, à la mode en Europe à cette époque, sur une tradition d’Extrême Orient. Les maîtres du bouddhisme reconnaissent pleinement qu’une telle dimension martiale existe dans leur religion; par exemple, le livre de Deshimaru, “Zen Way to Martial Arts” nous révèle un bouddhisme pratique, qui table sur la plus extrême simplicité et qui abandonne toute philosophie et toute dévotion; cette variante-là du bouddhisme a été la religion choisie par la caste féodale des samourais. Ce n’est pas un phénomène exclusivement japonais: la Chine avait, elle aussi, une longue tradition d’arts martiaux pratiquée dans les monastères bouddhistes; d’après la légende, cette tradition avait été importée en Chine par un moine venu d’Inde méridionale, Bodhidharma.
La mort n’est pas un événement grave
En quoi consiste le lien entre bouddhisme et arts martiaux, lien qui s’inscrit clairement dans la durée? Bouddha lui-même est issu de la caste des guerriers, mais il renonça à ce statut lorsqu’il opta pour la vie d’ascète. Il se tint alors éloigné de toute forme de violence, notamment quand il n’entreprit rien contre une armée qui s’avançait pour exterminer son propre clan, celui des Shaka. Ou lorsqu’il para à une attaque contre sa personne sans faire usage de la violence, en attirant la brute, qui lui en voulait, dans un débat fécond. Pourtant, indubitablement, cet ascétisme avait une composante martiale. L’institution des ascètes itinérants est clairement dérivée de ces groupes de jeunes gens qui cherchaient l’aventure, en marge de la société établie. Dans ces marges, ils se soumettaient mutuellement à toutes sortes d’épreuves. Ces épreuves constituaient le lien entre l’exercice des arts militaires et les pénitences physiques imposées par la religion. Ce n’est donc pas un hasard s’ils ont attiré des hommes issus de la caste des guerriers comme Vardhamana Mahavira, fondateur du jaïnisme, et Siddhaartha Gautama, le futur Bouddha.
Outre ce lien historique probable, il y a deux éléments fondamentaux du bouddhisme qui rend cette religion intéressante pour les samourais et les autres guerriers. D’abord, premier élément, la méditation aiguise véritablement l’attention sur le “hic et nunc”, sur l’ici et le maintenant. Elle postule le calme et la concentration totale en excluant la peur, les affects et les intérêts. C’est une telle disposition d’esprit dont le guerrier a besoin lorsqu’il fait face au danger et à la mort. Ensuite, deuxième élément, le bouddhisme a apporté la doctrine de la réincarnation en Chine et au Japon. Cette doctrine relativise la mort, car mourir ne signifie finalement pas autre chose que d’ôter ses vieux habits pour revenir demain, revêtu d’autres. Animés par cette idée, les guerriers trouvent plus supportable le souci, l’angoisse, qu’ils éprouvent quand ils s’avancent sur le champ de bataille. Mourir n’est pas vraiment une catastrophe et tuer n’est pas vraiment un crime, car qui meurt aujourd’hui revient quand même demain.
Le bouddhisme zen du beatnik Alan Watts
Caractéristique du “Grand Véhicule”, l’un des trois principaux courants du bouddhisme auquel appartient aussi la tradition zen: l’accent mis sur l’altruisme. D’une doctrine qui se focalise sur la “compassion” et sur la volonté de libérer tous les êtres conscients de leurs souffrances et de leur ignorance, on est passé, par distorsion, par une sorte de chemin de traverse, à une doctrine du sacrifice de soi, comme par exemple, celui du samourai pour son seigneur. Le Japon moderne a interprété cette doctrine comme celle du sacrifice du soldat mobilisé pour son peuple et pour son empereur.
Malgré tout ces antécédents, on s’étonnera de constater que le zen est devenu très à la mode aux Etats-Unis dans les années 50, alors que les Américains venaient de perdre des centaines de milliers de soldats dans la guerre contre le Japon. Ce sera surtout le beatnik Alan Watts qui travaillera à acclimater le zen aux Etats-Unis: le “beat zen” devait constituer une alternative fraîche et joyeuse aux religions alourdies par un ballast dogmatique trop important. Le “beat zen” était pur, était innocent. Cette attitude est typique de la réception favorable qui a toujours été accordée au bouddhisme en Occident moderne.
“Moestasjrik”/ “’t Pallieterke”.
(article tiré de “’t Pallierterke”, Anvers, 30 août 2006; trad. franç.: Robert Steuckers / 2009).
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dimanche, 30 août 2009
"Il faut terminer la révolution libérale"
"Il faut terminer la révolution libérale" |
Trouvé sur : http://unitepopulaire.org/ | |
« "Il faut terminer la révolution libérale" écrit Michel Guénaire, avocat d’affaires internationales basé à Paris, né libéral, éduqué libéral et heureux dans le libéralisme, jusqu’au moment où il a vu le soutènement moral et politique classique de cette pensée s’effondrer. La crise actuelle, et tout ce que l’on peut savoir de ses causes, impose un règlement des comptes. Michel Guénaire s’y lance. Il place le tournant aux alentours des années nonante. La dissolution du système soviétique et la mise au pas économique de tous les pays émergents par les institutions financières internationales ont marqué la victoire mondiale du libéralisme. Celle-ci avait beau être artificielle, plus imposée que choisie, elle n’en fut pas moins totale. Or, dit Guénaire, elle cachait mal ses insuffisances fondamentales : contrairement à ce que croient de très nombreux libéraux, le libéralisme n’est pas capable de susciter un ordre politique. "Economiquement, il offrait un angle sur le ressort que représentait l’intérêt particulier des hommes, non la vision d’ensemble de la création de la richesse des nations." La fin du système communiste "a donné au libéralisme des responsabilités qu’il ne pouvait pas avoir. Les peuples n’ont cessé de le solliciter en voulant, par le miracle de la réforme libérale, obtenir la richesse et la liberté, les facilités supposées de l’économie libérale et les standards affichés de la démocratie libérale. Le libéralisme était l’école de la liberté des hommes. Il est devenu l’interdit de la pensée des hommes." Le constat est sévère, mais il est sérieux. L’auteur, qui réfléchit dans le cadre historique et politique français, considère que le libéralisme s’est perdu quand il s’est éloigné de la politique, quand il l’a combattue comme une ingérence intolérable sur la voie triomphante du marché. "Il fallait s’opposer au pouvoir lorsque celui-ci menaçait la liberté des hommes. Il faut retrouver le pouvoir quand la liberté de l’homme en dépend" écrit Guénaire. Le capitalisme libéral fut longtemps associé au libéralisme politique. Il existait une alliance entre la révolution économique de l’Angleterre du XIXe siècle et l’émancipation promise par le libéralisme politique. L’esprit d’entreprise se nourrissait de la culture libérale et le libéralisme consacrait les institutions où s’épanouissait la liberté d’entreprendre. Mais cette alliance s’est défaite. Le capitalisme libéral s’est affranchi du libéralisme politique, auquel il a imposé ses lois et sa légitimité comme s’il s’agissait d’un ordre naturel. La décision économique, arrêtée selon le seul besoin du marché, s’est ainsi dépouillée de toute valeur d’accompagnement ou de toute valeur correctrice, c’est-à-dire de toute valeur morale. Réglée par le principe concurrentiel et le principe financier, l’économie libérale n’est donc plus au service de la cité. Son idéologie, le libéralisme, est devenue une énigme. Sa querelle avec le marxisme achevée, on ne sait plus ce qu’elle est. "Les marxistes ont perdu dans leur quête de vérité organisatrice et les libéraux gagné dans leur idéal de vérité désorganisatrice. Ces derniers n’ont plus personne à qui s’opposer, mais ils n’ont plus rien à défendre." Pourtant, chevauchant la grande vague de la mondialisation qu’il a lui-même déclenchée, le libéralisme tend à unifier le monde, à structurer les différentes civilisations qui subsistent, à devenir lui-même la civilisation. Une civilisation, hélas, très loin de la culture des peuples et de la nature des hommes, dit Guénaire. La civilisation libérale a engendré "des hommes sans nature" et des hommes "sans origine, sans racine et sans différence". "Le projet libéral n’offre plus de vie continuée sur les fondements du parti philosophique et moral qu’avaient choisi les premiers libéraux, car la liberté et la réclame de la liberté moderne a abouti à un monde sans expression personnelle des hommes." C’est pourquoi, écrit l’auteur, il est urgent "rétablir le pouvoir pour lutter contre le chaos du monde, mais de préserver la liberté pour offrir le bonheur aux hommes." »
Le Temps, 25 juillet 2009 |
00:25 Publié dans Actualité | Lien permanent | Commentaires (1) | Tags : libéralisme, contestation, politique | | del.icio.us | | Digg | Facebook
Short note on the Pacts of August 1939
Short note on the Pacts of August 1939
(The Pact of Mutual Help between UK and Poland
and the Molotov-Ribbentrop Pact)
Tiberio Graziani *
Considering the alliances signed by the insular Great Britain in the frame of their secular anti-European power politics, finalized at containing and defeating the aims of friendship and / or integration among the nations of the European Continent, it is worth mentioning - as an illustrative example - the Pact of Mutual Help between the UK and Poland, signed in London on 25 August 1939.
As known, the Anglo-Polish Friendship Treaty, signed by Lord Halifax and Count Rczynski, was a deliberate violation (1) of the similar Treaty that Germany and Poland had signed on 26 January 1934, and, above all, an explicit interference in the delicate relations between the National Socialist Reich and USSR; Berlin and Moscow, in fact, just two days earlier, on 23 August, had signed a non-aggression treaty, known to history as the Molotov-Ribbentrop Pact, named after their respective foreign ministers.
In this case, the United Kingdom intended to use - as part of a diplomatic-military device, theoretically equal, - the strategic position of Poland as a "splitter" between two continental powers in order to affect, simultaneously, both the creation of a potential axis Moscow -Berlin and the German-Polish agreements, and thereby removing any future potential perspective of welding / integration between the European Peninsula and the Asian continental mass.
The disturbing action devised by London, through a fine texture of diplomatic activities, which U.S. were involved (2), was perfectly consistent with British geopolitical doctrine, whose exploitation of the tensions between the continental nations constituted a key pillar of its equilibrium policy (balance of power).
1. Some months before, on 19 May 1939, a Mutual Help Agreement between France and Poland (probably on U.S. and U.K. request) was signed in Paris by Polish ambassador Juliusz Lukasiewicz and French Minister of Foreign Affairs, Georges Bonnet. For Berlin, and under some aspects for Moscow too, the two Mutual Help Agreement constituted a sort of threat for the continental peace.
2. We refer to meetings among U.S. Ambassador William Christian Bullitt, Jr. and the Polish Ambassadors Potocki and Lukasiewicz, which occurred in France in November 1938 and February 1939; see Giselher Wirsing, Roosevelt et l'Europe (Der Kontinent Masslose), Grasset, Paris, 1942, p. 266.
* Eurasia. Rivista di studi geopolitici (Eurasia. Journal of Geopolitical Studies – Italy)
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Une conspiration anglo-saxonne
UNE CONSPIRATION ANGLO-SAXONNE
Aux Journées du Soleil 2009, dans le Jura, la leçon de la deuxième matinée a été dispensée par Jean-Patrick Arteault. Il l’a intitulée ‘Le mondialisme de l’idée anglophone. Ce n’est en effet que dans sa première phase que l’impérialisme anglo-saxon se limite à fédérer au Royaume-Uni les dominions de l’Empire britannique, Nouvelle-Zélande, Australie, Canada, Afrique du Sud, qu’il convient de réunir naturellement aux Etats-Unis. Dans la phase suivante, le messianisme des protestants (leur surconsommation de la Bible les élève de fait au rang de Juifs de désir) a tôt fait de les investir de la mission d’étendre au monde entier le modèle indépassable de la démocratie anglaise.
Ils s’accommodent par ailleurs d’être des prédestinés, parmi un petit nombre d’élus, pour qui la réussite matérielle et sociale est le signe de l’approbation divine. Pragmatique, cette élite a la sagesse, pour éviter la révolte des masses, de prôner un socialisme non-marxiste. On se souviendra que c’est en observant la scandaleuse exploitation de leur prolétariat par les Anglais que Marx a pu prédire une irrésistible révolution. Pragmatique encore, le mouvement messianique anglo-saxon va s’ordonner à accélérer l’avènement de son règne mondial.
Le mouvement va éclore au XIXe siècle dans le compagnonnage amical d’étudiants des quatre collèges d’Oxford, Oriel, Balliol, New College et All Souls. Ils ont pour initiateur et père spirituel le poète, sociologue et historien d’art John Ruskin (1819-1900). Homme complet, celui-ci a fait le voyage de Rome et l’Italie et le passage des Alpes l’a marqué, lui inspirant une pensée profondément panthéiste. Il est sinon chrétien et socialiste, rattaché en fait dans un premier temps au mouvement chrétien socialiste, qui est un variante anglaise du socialisme non marxiste. Critique d’art, il est fort lié au peintre préraphaélite Dante Gabriel Rossetti. Ardent protecteur du patrimoine architectural, il est opposé à l’idée de Viollet-le-Duc de restituer l’ancien dans son état d’origine.
Professeur à Oxford, John Ruskin éduque des promotions de jeunes disciples, nés de la classe dirigeante, sélection naturellement destinée dans son esprit à gouverner suivant le modèle platonicien. A gouverner dans le souci de sauvegarder la haute culture anglo-saxonne, selon lui le summum de l’évolution humaine, en élevant le niveau de la masse laborieuse, afin d’éviter qu’elle ne détruise dans une révolution cette culture, en même temps que la classe dirigeante.
Le message de Ruskin a été particulièrement bien reçu par un de ses étudiants, un certain Cecil Rhodes (1853-1902), jeune homme attachant, d’autant plus dynamique que, se sachant de santé fragile, il agit toujours avec le sentiment qu’il peut mourir sous peu. Rongé d’asthme, il doit abandonner Oxford pour le climat plus salubre de l’Afrique du Sud, qui se révèlera effectivement excellent pour lui. Il y arrive au moment où on découvre des diamants dans la région et, très entreprenant en affaires, il se charge de fournir les chercheurs en matériel, équipements et subsistance. Alors qu’il n’a encore que dix-sept ans, il fait rapidement fortune. Sa santé s’est rétablie suffisamment pour qu’il reprenne ses études à Oriel College, tout en menant ses affaires minières, qui l’amèneront deux ans plus tard à fonder la De Beers et à contrôler la production du diamant. Il entre alors dans la franc-maçonnerie à Oxford.
A partir de condisciples choisis, avec lesquels il entretient des liens étroits d’amitié, il s’applique à constituer un groupe organisé. Il va bientôt donner à celui-ci la forme d’une société secrète, structurée sur le modèle de la Société jésuite, qu’il entend affecter au service de la Sainte Eglise que constitue pour lui l’Empire britannique. Il est bien sûr le Général de la Société. Assisté d’une Junte de Trois, il vise à réunir et organiser des sujets brillants à placer dans la politique, l’université et le journalisme. Parallèlement au cercle interne de sa Société des élus, il institue, au départ avec le soutien de Nathan Rothschild, un cercle externe, l’Association des bienfaiteurs. Seuls les Elus sont tenus au secret et à l’engagement. Ils sont les seuls à connaître tous les buts de la Société.
La junte est assez réservée à l’égard des rituels d’initiation et de fonctionnement auxquels Rhodes incline. Comme se montrera également réservé Nathan Rothschild, premier baron du noml, qui recommandera même la distance à son gendre, Lord Rosebery, ministre puis premier ministre, qui lui est des Elus. Dans le même temps, pour renforcer la fidélité de ceux-ci, la Société les encourage à créer entre eux des liens familiaux par mariage et elle obtient pour eux des titres nobiliaires. Elle suscite entre eux des activités de club, qui vont donner lieu à la mise en place à Chatham House (du nom de l’Hôtel de William Pitt où il se réunit) du club qui deviendra, en 1919, le RIIA (Royal Institute of International Affairs), avec son pendant américain le CFA (Council on Foreign Relations), organisations non-gouvernementales de politique étrangère. L’une comme l’autre applique, pour préserver la liberté de parole de chacun, la règle de confidentialité selon laquelle il est permis de révéler ce qui s’y est dit, mais pas qui l’a dit. La Société prend le contrôle du quotidien The Times, qui ne tire qu’à 50.000 exemplaires, mais est l’organe officieux du Foreign Office.
Cecil Rhodes, qui comme nombre d’autres personnages marquants de la Société des Elus considère l’argent comme un moyen et non comme un objectif, affectera une partie importante de sa fortune à constituer une fondation qui a comme objet d’accorder à de jeunes Anglais prometteurs, et à de jeunes Américains, une bourse pour étudier à Oxford. La fondation fonctionne toujours. Bill Clinton est un boursier Rhodes comme le Général Wesley Clark, comme le sont également six membres de l’équipe d’Obama.
La première Junte des Trois est constituée par trois personnalités remarquables : Stead, Milner et Brett. Rhodes avait dès l’abord éprouvé un coup de foudre pour le journaliste William T. Stead. Celui-ci, qui a un don évident de prémonition (Il va mourir sur le Titanic après avoir écrit un roman dont le héros est sauvé par le navire Titan d’un naufrage causé par un iceberg !), pense de Rhodes qu’il rêve d’être à la fois César et Ignace de Loyola. Il estime fort, par ailleurs, Milner qu’il juge capable de succéder à Rhodes.
Alfred Milner (1854-1925), qui est d’origine allemande, est pénétré de l’idée qu’il faut réorganiser l’Empire britannique aux fins de développer la vie spirituelle par l’éducation des masses à formater. Il aspire à réaliser l’Union anglo-américaine, avec au besoin sa capitale aux Etats-Unis, qui devra être le modèle d’une fédération mondiale qui regroupera la civilisation autour de la langue anglaise. L’Afrique du Sud servira de laboratoire d’essai de l’opération. Mais Rhodes, qui veut réaliser la liaison ferrée Le Cap-Le Caire, va trouver des Allemands encombrants dans son chemin, comme Milner trouve des Boers réfractaires. Les objectifs hautement moraux de l’un et l’autre viennent heureusement justifier l’immoralité des atrocités de la guerre, ce qui n’ira pas sans frictions internes. Pour réaliser les objectifs de la société, Milner recrute des jeunes gens à qui il confie très vite, avec succès, des postes à responsabilité. On appellera ‘affectueusement’ son groupe le Kindergarten ! Milner met en place une revue-laboratoire d’idées autour de groupes de réflexion : La Table Ronde. Idéologue, il veut installer une fraternité de type religieux unie autour du sens du devoir et du service de l’Etat. Il est significatif qu’il sera un des cinq membres du cabinet de guerre à partir de 1915.
Alfred Brett se charge du bon fonctionnement interne de la Société et de ses relations avec la Couronne. Tout comme Milner, il préfère son influence au sein de l’organisation, plutôt qu’un poste officiel (il déclinera l’offre de devenir Vice-Roi des Indes .
Mais l’idée d’une fédération mondiale est trop lente à percer. Aussi, dès avant 1914, Milner s’applique avec Lionel Curtis, le penseur de loin le plus profond du groupe, à lancer l’idée d’un Commonwealth des Nations, dont la Société des Nations (1919) sera un produit dérivé. L’objectif avoué de Curtis est rien moins que faire mourir l’Empire, pour qu’en renaisse un système mondial intégré, dont l’objet est d’éduquer aux libertés démocratiques et de porter la plupart des populations du globe au niveau de responsabilité de l’homme blanc.
Le groupe Milner va s’adjoindre Alfred Zimmern, un Juif allemand converti qui enseigne à Oxford et pour qui Athènes est le modèle de l’Occident. Mais Athènes a trahi le modèle athénien en devenant brutalement impérialiste, une voie que ne doit pas suivre l’Empire Britannique s’il veut ensemencer le monde avec ses idées démocratiques. Zimmern sera à l’origine de la mise en place du RIIA et de son correspondant américain le CFR, et bientôt par la suite de l’Unesco.
Philippe Kerr, 11e marquis de Lothian, succède à Milner. Ambassadeur du Royaume-Uni aux Etats-Unis, il y a préparé la Charte de l’Atlantique, qui consacre le transfert de l’influence à Washington. Il est l’auteur d’une étude, réalisée avant la guerre de 1914, sur les collectivités noires aux Etats-Unis censée applicable à l’Afrique du Sud.
Robert Henry Brand est l’économiste du Milners Kindergarten. Directeur du Times et de la Lloyd Bank, il rejoint finalement Lazard Brothers & Cy. Il est le beau-frère du financier américain Astor, qui sera fait vicomte. Il exerce une influence sur l’abandon de l’étalon-or. Il sera par ailleurs favorable à la politique d’apaisement avec le Reich.
Leo Amery (journaliste d’origine juive au Times) et Herbert Samuel (1er vicomte Samuel) s’attachent à concilier mondialisme WASP et sionisme, pour éduquer les Arabes à l’anglais. Ils interviendront (Amery surtout) dans la rédaction de la Déclaration Balfour, qui soutient les prétentions des Sionistes à un foyer national juif en Terre Sainte. Samuel sera Haut Commissaire en Palestine.
Walter Lippmann, Juif américain d’origine allemande, est journaliste au New York Herald Tribune. Il est en contact étroit avec Philippe Kerr et avec la Table Ronde dès le premier voyage de Kerr aux Etats-Unis. Il est secrétaire général de The Inquiry, qui est l’équivalent des groupes de réflexion de la Round Table britannique et qui débouchera sur la constitution du CFR. Bien qu’ayant soutenu le candidat Théodore Roosevelt, perdant contre Wilson, il anime le think tank de la politique extérieure américaine avant et durant la première guerre mondiale. Il intervient dans la rédaction des Quatorze Points de Wilson, lesquels sont l’écho des idées de la Round Table, et dans celle du Traité de Versailles. Il participe également à la mise en place de la Société des Nations, mais celle-ci est plutôt l’œuvre de Curtis, et le Traité de Versailles celle de Milner. Communicateur avant la lettre, Lippmann invente la notion de ‘fabrique du consentement’ et, à partir des réactions des soldats des tranchées de 14-18 aux pilonnages d’artillerie, introduit la terreur dans la manipulation des opinions publiques.
Les rejetons ultérieurs du RIIA et du CFR ont nom Groupe de Bilderberg, Commission Trilatérale, Forum de Davos.
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samedi, 29 août 2009
Brief Guillaume Fayes an seine Freunde (1987)
Brief Guillaume Fayes an seine Freunde (1987)
Liebe Freunde,
Als Kadermitglied und Funktionär des GRECEs seit 17 Jahre, habe ich seine Entfaltung, seinen Höhepunkt (1978-1982) und seinen Untergang (1982-1987) miterlebt.
Lange habe ich seinen Zerfall nicht akzeptiert und habe geglaubt, daß die Ursachen dieses Zerfalles konjunkturbezogen waren. Aber in Wirklichkeit sind diese Ursachen eher strukturell und, letzterhand positiv: der GRECE hat seine historische Aufgabe verwirklicht. Heute ist diese Aufgabe beendet. Die Arbeit der GRECE-Bewegung war wirklich grundsätzlich und kann heute befrüchtet werden. Es war eine konstruktive Arbeit, genauer die Rekonstruktion einer Ideologie und einer Weltanschauung. Die Bewegung hat auch Leute ausgebildet, die heute überall in der Zivilgesellschaft aktiv sind.
Deshalb, der dumme Wille, den GRECE “regenerieren” zu wollen, seine Botschaft steril zu wiederkauen und sie ständig so wiederholen, wie sie einst war, scheint mir heute völlig utopisch, unnötig und unmöglich zu sein. Ein solches nostalgisches Verhalten wäre nur eine Rückwärtsbewegung. Der GRECE war ein Erfolg. Es künstlich im Leben zu halten wollen, würde notwendigerweise zu einem Fiasko führen. Der GRECE hat seine metapolitische und kulturelle Aufgabe optimal beendet. Mit den Meilsteinen, die er gelegt hat, können wir uns orientieren, um sein Werk in anderer Form zu vertiefen und für die Zukunft zu gestalten. Eine solche Transformation ist nicht nur notwendig, weil unsere Zeit es fordert, aber auch um die gestrige Arbeit des GRECEs effizient zu machen. Wir müssen diesen geistig-intellektuellen Korpus mehr Potenz und so denkend, ihm organisationell eine andere Gestalt geben.
Hauptaufgabe ist es, die ideologische Erbschaft fruchtbar zu machen. Wir müssen jetzt, ab sofort, zurück zur Wirklichkeit und deshalb eine moderne und interventiongerichtete Strategie entwickeln. Das ist der Grund, warum wir denken, daß das Werk des GRECEs jetzt abgeschlossen ist. Darum, höre ich heute auf, Mitglied des GRECEs zu sein. Und ich hoffe, daß die meisten von euch die gleiche Analyse wie ich machen werden. Obwohl ich nicht mehr Mitglied des GRECEs bin, bleibe ich trotzdem ein treuer Mitkämpfer unseres Kampfgemeinschaft.
Zwei Neuorientierungen scheinen mir interessant: ab 1992 wird Europa anfangen, als eine reale politische Wirklichkeit zu existieren. Die Grenzen werden sich tatsächlich öffnen. Bald wird eine gemeinsame Währung kommen, usw. Wir müssen notwendigerweise diese Möglichkeiten benutzen, die uns unsere Feinde geben. Diese bauen praktisch einen europäischen Großraum für uns und geben uns so die Möglichkeit, eine gesamteuropäische Kampforganisation zu schaffen, die der Kern einer künftigen gesamteuropäischen Gemeinschaft für unsere eigene Weltanschauung sein wird.
Die Ideologie, die wir seit vielen Jahren innerhalb der GRECE-Denkfabrik ausgearbeitet haben, war von einer spezifischen Kernidee im Leben gehalten und diese Idee war die Befreiung des gesamteuropäischen Kontinents, damit an die Schaffung einer gesamteuropäischen Reichsgemeinschaft gearbeitet werden könnte. Aber eine solche Idee hat nie in der Geschichte Wirklichkeit gefunden.
Die Amerikaner leben in einer antiquierten Welt, weil der amerikanische Traum schon da ist, und deshalb, weil er da ist, ist er unwiederruflich alt. Der amerikanische Traum ist eine alte Sache, ist schon volle Wirklichkeit geworden. Aber unser Traum ist hypermodern, weil er noch nicht da ist, liegt vor uns in einer noch relativ fernen Zukunft. Deshalb ist unser Traum jugendhaft.
In diesem Sinn und mit einem Optimismus, die wir von dem Bewußtsein unserer in den GRECE-Jahren erarbeiteten Tradition und unserer langen Gedächtnis geerbt haben, kann unser Projekt entstehen und sich entfalten: wir werden eine flexible Organisation stiften, die nicht nur Frankreich-zentriert sein wird, aber sich überall in allen Ländern des Kontinents entwickeln wird, wir werden in allen möglichen Schichten und Dimensionen der Gesellschaft intervenieren, aber immer mit dem Vorhaben, eine Reichsvision für das künftige Europa zu schmieden.
Die zweite Neuorientierung ist die folgende: die Ideen, die der GRECE verbreitet hat, eben unter den völlig inadequaten Namen der “Neuen Rechten”, leben und verbreiten sich sehr weit über die engen Grenzen aller möglichen rechtskonservativen Denkschulen. Deshalb sollte die post-GRECE-istischen Nachfolger-Bewegung total modernistisch sein, alles, was die soziologische Rechte darstellt, überwinden, sich an allen neuen Impulsen aus der Gesellschaft öffnen, und hauptsächlich die nostalgisch-folkloristische Rechte eine definitive Absage erklären. Diese neue Bewegung wird als Beruf haben, alle Leute aus allen möglichen Horizonten zu gruppieren, wenn sie grundsätzlich unser Programm zustimmen. Zusammen müssen wir entschieden alle Formen der Abhängigkeit und der Unterwerfung, irgendeiner Rechten oder Linken gegenüber, zurückwerfen.
Ziel ist es, die Grundlagen einer Bewegung zu erarbeiten:
- 1. die sich in allen Ländern des Kontinents verbreiten wird;
- 2. die alle alten Schablone und Spaltungen überwindet;
- 3. die die Erbschaft unserer Arbeit in den GRECE-Jahren fruchtbar macht;
- 4. die als Ziel haben wird, konkret eine neue politische und aktive Elite zu schmieden, um positiv in der Zivilgesellschaft intervenieren zu können.
Eine solche Arbeit wird lang, schwer und mühsam sein. Sie ist aber lebenswichtig und soll sofort von jetzt ab angefangen werden. Es wäre auch notwendig und logisch, daß die meisten Mitglieder und Sympathisanten des GRECEs sich in dieser neuen Bewegung einen, weil diese die allein mögliche historische Kontinuität darstellen wird. Natürlich neue Menschen, die aus allen Horizonten zu uns kommen werden, werden sich mit uns in diesem Kampf verbrüdern. Um der realen Welt die Stirn bieten zu können, um in dieser realen Welt Aktion führen zu können, werden wir dringend diese neuen Menschen brauchen.
Auf der juridischen Ebene, ist der Kern dieser neuen Bewegung (die weder eine Partei noch ein Apparat ist!), die dazu bestimmt ist, neue Energie in unserer Bewegung einzufliessen, ist schon gestiftet worden. Er hat die juridische Gestalt einer Stiftung und heißt: EUROPA.
Diese neue Bewegung steht noch in seiner Vorbereitungsphase und wird nur real und konkret auf europäischer Ebene am Anfang des nächsten Uni-Jahres, also im September 1987 existieren. Geburtsstunde wird die Sommeruni 1987 sein, die wir im Region Nivernais Ende August halten werden (wir können über unseren üblichen Versammlungsort in der Provence dieses Jahres nicht verfügen). Während dieser Sommeruniversität werden wir die Grundlagen unserer künftigen Arbeit festlegen.
Es ist notwendig, daß viele von euch sich sofort einschreiben.
Jetzt zur Arbeit, liebe Freunde!
Mit meinen freundlichsten Grüßen,
Ihr, Guillaume Faye, Mai 1987.
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Turquie: l'affrontement entre islamistes et laïcistes
Andreas MÖLZER:
Turquie: l’affrontement entre islamistes et laïcistes
Fin juillet 2009, deux anciens généraux, très haut placés dans la hiérarchie militaire, quelques journalistes et quelques hommes d’affaires comparaissent devant le tribunal en Turquie. Le procureur général de la République leur reproche d’être membres d’une société secrète de droite, l’Ergenekon, et d’avoir, à ce titre, comploté contre le premier ministre islamiste Erdogan. Outre ce procès, qui vient de commencer, d’autres procédures judiciaires sont en cours contre de présumés membres de l’Ergenekon, qui ont tous, à un moment ou un autre de leur existence, occupé des positions influentes au sein de l’Etat turc.
Ces procédures judiciaires n’ont pas pour objectif de vérifier si oui ou non les accusés ont réellement comploté contre Erdogan. Il s’agit plutôt d’un épisode supplémentaire dans la lutte qui oppose en Turquie les islamistes aux laïcistes. Cela démontre que la Turquie est profondément divisée entre ces deux camps. Dans les cercles laïcistes turcs, on entend apparemment résister à outrance aux mesures d’islamisation préconisées par le gouvernement d’Erdogan. Une petite étincelle suffirait pour faire exploser le baril de poudre. Les procès contre l’Ergenekon recouvrent la Turquie d’un nuage sombre, alors que les fanatiques de l’élargissement, qui pontifient à Bruxelles, veulent faire adhérer ce pays d’Asie Mineure à l’UE sans délais ni débats. Erdogan n’a pas pu balayer le soupçon qui pèse sur lui: ces procès n’ont pas tant pour objectif de poursuivre des comploteurs présumés mais bien plutôt, comme le pensent bon nombre d’observateurs turcs, de faire taire des voix critiques dérangeantes. En effet, c’est un secret de polichinelle à Ankara que le chef du gouvernement entretient des relations plutôt conflictuelles avec l’opposition laïque.
Par ailleurs, la position extraordinairement forte qu’occupent les forces armées dans l’appareil de l’Etat en Turquie démontre clairement que ce pays ne fait pas partie de l’Europe, n’en possède pas la culture politique. Si le soupçon des juges se confirmait, si, de fait, des militaires de haut rang et des personnalités importantes issues des sphères politique et économique considéraient que le putsch était un moyen comme un autre de modifier la donne politique, alors les choses seraient claires: on verrait enfin que la Turquie demeure ancrée dans les traditions et les modes de pensée de l’Orient. Ensuite, le silence de l’UE face aux événements d’Ankara est totalement incompréhensible. La Turquie, tout simplement, n’est pas un pays européen et ne le deviendra pas. Voilà pourquoi il faut abandonner toutes les négociations visant son adhésion à l’UE, dès aujourd’hui, sans attendre demain.
Andreas MÖLZER.
(article paru dans “zur Zeit”, Vienne, n°31-32/2009; trad. franç.: Robert Steuckers).
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La chauve-souris turque, sa propagande, sa diplomatie
La chauve-souris turque, sa propagande et sa diplomatie
du pacte germano-soviétique jusqu'à nos jours
"Je suis oiseau voyez mes ailes. Je suis souris vivent les rats". (La Fontaine, fable "La Chauve-souris et les deux Belettes")
D'un naturel optimiste, on imagine volontiers, écrivant à la veille du 70e anniversaire du pacte germano-soviétique, toutes les vérités que nos médiats ne manqueront pas de rappeler autour de ce 23 août 1939. On pense donc aux innombrables et chaleureuses recensions qu'aurait méritées le film de Wajda "Katyn". N'ayant pas été écrites, encore moins publiées par les gros journaux parisiens, elles demeurent en réserve pour cette occasion. Au talent près du cinéaste, l'information de base ne diffère pas.
Quant à moi, m'étant exprimé sur le partage soviéto-hitlérien de la Pologne de 1939, je ne puis ici que renvoyer à l'expression précédente de mes sentiments invariants. (1)
Les lignes qui suivent chercheront seulement à compléter, aujourd'hui, tant soit peu l'information de mes lecteurs, auditeurs, amis et concitoyens, autour d'un aspect particulier de cette fresque tragique de la Seconde guerre mondiale, au travers de la diplomatie turque, et de l'étonnante complaisance de l'occident à son égard. On peut admirer techniquement la continuité de cet État oriental (2).
En occident, il existe une abondante documentation sur tous les événements que nous évoquerons. Physiquement libres d'y recourir, généralement capables de la comprendre, les historiens et commentateurs agréés ne méritent aucune excuse, deux générations plus tard, quand ils se refusent à tenir compte des faits. La nullité intrinsèque des gens qui se disent journalistes ne saurait, non plus, tenir lieu de justification à leur silence servile. Car, en somme, pour eux, dans sa froideur impavide et sélective, la méthode de l'Histoire de la Seconde guerre mondiale de Sir Basil Lidell Hart, monumentale mais partiale et partielle (3), continue de faire secrètement autorité. Voilà un domaine où les choix arbitraires ne se discutent pas.
Pour les bons esprits, l'alliance entre l'occident et l'URSS paraît aller rétrospectivement de soi, et tous les incidents de parcours n'en demeurent que points de détail.
Commençons donc par rappeler que l'alliance initiale entre cette même Union Soviétique, dirigée par Staline, et l'Allemagne nazie a bel et bien fonctionné, à balles réelles, à chaud et à sable, entre 1939 et 1941.
Rendant possible la mainmise de Hitler sur la moitié du continent, elle porte la responsabilité de toutes les conséquences qu'elle a entraînées. Évoquons notamment l'horreur la plus couramment citée : la déportation et l'extermination des Juifs de l'Europe occupée. Tautologie à mémoriser : sans cette occupation, rendue elle-même possible par l'alliance de Staline, le génocide n'aurait jamais eu lieu sur une telle échelle. Souvenons-nous bien aussi qu'on ne sache pas que le mouvement communiste international ait rompu le 22 juin 1941 l'accord de 1939 scrupuleusement respecté par lui. Mais, à la grande surprise du secrétaire général du parti le génial Staline, son déloyal partenaire déclencha l'Opération Barbarossa. On n'est jamais trahi que par les siens.
On ne doit donc pas s'étonner, la réalité globale de cette alliance étant systématiquement occultée, que ni ses causes lointaines, ni ses conséquences particulières ne soient ordinairement tenues pour dignes d'intérêt. Ainsi, devant la rareté des commentaires sur le film Katyn, sachant le silence étouffant le souvenir de l'héroïque guerre d'hiver des Finlandais, mesurant la réprobation dont une propagande post-soviétique continue de poursuivre la résistance au stalinisme de peuples entiers, comment s'étonner de l'obscurité qui entoure, aujourd'hui encore la ligne suivie par le gouvernement turc pendant la Seconde guerre mondiale. Ceux-là même qui feignent de le considérer comme européen, s'obstinent paradoxalement, à ne rien vouloir connaître de l'Histoire contemporaine de cet État.
Ce 19 septembre, on pourra commémorer le 70e anniversaire de la jonction entre les armées de Staline et de Hitler à Brest-Litovsk. Gageons que l'on demeurera généralement plutôt sobre sur ce point oublié.
Les événements périphériques n'en passeront que plus aisément à la trappe.
Varsovie tombe le 27 septembre. Le 28 septembre est signé le traité d'amitié germano-soviétique scellant le partage de la Pologne entre hitlériens et staliniens.
Il se trouve que le même jour exactement on paraphait le traité anglo-franco-turc d'Ankara.
Or les historiens ont pris l'habitude de dater du 19 octobre cet accord tripartite: mais il s'agit de la date de ratification du document. La négociation, préparée de longtemps par les trois diplomaties, se déroule en fait exactement entre la signature de l'alliance entre l'URSS et le Reich, et la prise de la capitale polonaise.
Les papiers Hoppenot (4) en fournissent l'avancée en détail, mais on peut aussi trouver les reflets de la face émergée de cet iceberg dans n'importe quelle collection de l'Illustration, avec photo pleine page du plénipotentiaire français, le général Weygand. On voit jour après jour la progression des tractations. Le légendaire "sauveur de la Pologne" en 1920 (5), se trouve à Ankara en septembre 1939.
À ce même moment la diplomatie turque est dirigée par un personnage essentiel de l'Histoire contemporaine de son pays, Mehmet Sükrü Saradjoglou (6). En juillet 1942, au décès du président du conseil, le Dr Refik Saydam, il prendra les rênes du gouvernement. Et il les conservera jusqu'en août 1946. Les curieux trouveront en annexe (7) de cette chronique le texte publié en 1946 du rapport secret de Von Papen à la Wilhelmstraße relatant leur entretien à Ankara en août 1942.
Le comportement de la Turquie s'est fondé, pendant toute la durée de la guerre, sur une pratique de la "neutralité active" qui se nomme aussi "double jeu".
Dans la fable de La Fontaine "La Chauve-souris et les deux Belettes" la première déclare ainsi : "Je suis oiseau voyez mes ailes. Je suis souris vivent les rats".
Or, à la différence du théoricien et praticien français oublié de ce même "double jeu", Marcel Bucard, qui sera fusillé en 1945, la mémoire de l'habile Saradjoglou s'immortalise dans la pierre, ou plutôt dans le béton précontraint du stade de 50 000 places qui porte son nom et accueille à Istanbul l'équipe de podosphère de Fenerbahce. En effet, dès le 23 février 1945, 10 jours après le bombardement de Dresde et appliquant les dispositions du traité signé en 1939 avec la France et la Grande-Bretagne son gouvernement déclara courageusement la guerre à ce qui restait des puissances de l'Axe.
Qu'on ne se méprenne pas cependant : si Saradjoglou a pu chercher à tromper les Allemands, et notamment l'ambassadeur Von Papen, son propos reposait sur la volonté d'observer la ligne constante du kémalisme. Le fondement en est posé par l'accord soviéto-turc de 1921. Celui-ci avait été théorisé au sein de l'Internationale communiste dès 1920 par Radek et par la conférence de Bakou. Dans la pratique, le soutien léniniste avait permis la victoire définitive de Mustafa Kémal en 1922. Les communistes s'étaient partagé l'Asie mineure et le Caucase avec les kémalistes en 1920-1922 comme ils se partageront l'Europe orientale avec les hitlériens en 1939-1940. Aujourd'hui encore dans la Mémoire officielle de l'État turc on appelle cela guerre de libération. Il s'agit du premier acte du tiers-mondisme.
Ainsi avaient été détruits en 1921 les trois États indépendants du Sud Caucase : l’Azerbaïdjan, l’Arménie et la Géorgie. Le 31 mai, l’Azerbaïdjan est occupé par la 11e Armée rouge. Quatre mois plus tard, l’Arménie doit céder la moitié de son territoire à l’envahisseur turc, le reste passant sous le contrôle de l’Armée rouge. Quant au dernier pays, la Géorgie, bastion occidental entre kémalistes et soviétiques, il tombe à son tour face au projet soviéto-turc pour le Caucase. Les populations grecques d'Asie mineure (Smyrne et son hinterland, Trébizonde et la république du Pont) seront symétriquement éliminées par la "grande catastrophe" de 1922. Au cours de la même année les 3 pays sud-caucasiens sont inclus dans une prétendue "République socialiste fédérative soviétique de Transcaucasie".
Certes, tant qu'il demeura partagé entre l'influence des deux régimes totalitaires de Berlin et de Moscou, le gouvernement Saradjoglou saura faire preuve d'éclectisme. Ainsi au premier il empruntera un souci de liquidation des minorités auquel il ajoutera une notion fiscale inscrite dans la loi 4305 du 12 novembre 1942 établissant un impôt exceptionnel sur le capital au taux différencié selon la religion des contribuables : les musulmans (groupe M) payeront 5 % ; les juifs "dönmeh" convertis à l'islam (groupe D) 20 % ; les chrétiens et les non-musulmans (groupe G comme "giaours" infidèles) 50 % et jusqu'à 236 %; les 8 000 personnes qui ne purent payer furent envoyées en camp de travail près d'Erzurum. On n'a jamais entendu dire ni que le gouvernement d'Ankara ait jamais fait repentance de cette législation discriminatire, ni qu'il ait accepté d'en dédommager les victimes, ni que l'on envisage de débaptiser le stade Saradjoglou. Les critères de Copenhague ne posent d'ailleurs aucune de ces conditions.
En feuilletant les papiers jaunis de septembre 1939, on découvre que Saradjoglou s'était rendu en URSS pour examiner les conséquences du pacte Molotov-Ribbentrop. Il publia une déclaration datée d'Odessa le 24 septembre. À cette date Weygand se trouvait en Turquie, représentant la IIIe république. Une chose préoccupait Saradjoglou. En son absence, mais en son nom, on allait traiter avec les occidentaux. Cet accord devait se révéler extrêmement profitable pour son pays. Le projet comportait l'obligation future d'entrer en guerre (ce que la Turquie fit, en février 1945 comme indiqué plus haut). Mais il fallait ne pas contrarier en quoi que ce soit les accords fondamentaux soviéto-turcs de 1921. Or cette position ne résultait aucunement du secret diplomatique : on la trouve clairement exposée dans "l'Illustration" qui n'y voit rien à redire, lors même que l'URSS s'apprête à dépecer la Pologne, liée à la France et à l'Angleterre, mais aussi la Roumanie, liée à Ankara par les fragiles et incompréhensibles accords balkaniques.
Or on doit se représenter que l'entrée en guerre, contre l'Allemagne mais très tardivement, s'échangeait contre l'annexion par la république kémaliste d'un territoire appelé depuis septembre 1938 république du Hatay. La France avait accepté en juin de le céder aux Turcs comme gage unilatéral d'amitié. Simplement cette actuelle province turque avait, jusqu'en 1936, fait partie de la Syrie confiée à la France puissance mandataire au lendemain de la première guerre mondiale sous le nom de sandjak d'Alexandrette. Cette province constitue aujourd'hui encore une pièce du contentieux turco-syrien. À l'époque, le recensement français donnait sur 220 000 habitants, seulement 85 000 Turcs contre 108 000 Syriens (62 000 alaouites, 24 000 chrétiens et 22 000 sunnites), plus 25 000 Arméniens, 5 000 Kurdes et 1 000 Circassiens. Ce petit district allait donc être abandonné, au mépris du droit des gens, contre l'avis de ses habitants dans le but de faire de la Turquie une alliée.
Or, cette générosité, à sens unique, si bien conseillée par l'Empire britannique, qui lui-même ne cédait rien, se révélait aussi illusoire que déshonorante. La diplomatie turque de la chauve-souris disait aux démocrates occidentaux : "je partage vos valeurs" ; aux puissances totalitaires elle déclarait admirer leurs belles réussites. Toujours : "Je suis oiseau voyez mes ailes. Je suis souris vivent les rats"…
Aujourd'hui elle tient le même discours à l'Union européenne et à l'Organisation de la Conférence islamique auxquelles elle prétend appartenir simultanément. Encore et toujours : "Je suis oiseau voyez mes ailes. Je suis souris vivent les rats".
Car la recette constante de la politique extérieure d'Ankara plus encore que celle de la Sublime Porte, consiste à ne jamais contracter quelque chose qui ressemble à une alliance permanente et générale. Elle ne conclut que des accords ponctuels, limités dans le temps. Strictement souverainiste et jacobine, elle ne peut donc s'identifier à une communauté supranationale, à l'Europe moins qu'aucune autre. Pour cette raison et pour un certain nombre d'autres, on ne peut que récuser la candidature de ce pays à l'Union européenne.
Apostilles
- cf L'Insolent des 8 avril Katyn un film magnifique de Wajda et 9 avril Katyn le poids historique du mensonge et du crime.
- Soulignons qu'il dispose de traditions diplomatiques plus anciennement ininterrompues que celles de l'Angleterre. Ce qui, chez celle-ci remonte à Élizabeth Ire et surtout à Cromwell (XVIIe siècle) s'enracine en Turquie dans un tuf déjà riche et puissant à l'époque de la prise de Constantinople (XVe siècle) dont la Sublime Porte n'a jamais dédaigné non plus de gérer, en partie, l'héritage. À côté de cela, la France, dont chacune des ruptures historiques successives, en 1792, en 1815, en 1879, en 1944, et enfin la décolonisation, a lobotomisé l'intelligence officielle, fait figure d'une enfant naïve et docile.Il devrait aller de soi que la Chine, autrement dit la "république populaire" fondée en 1949, souvent présentée pour État millénaire, supporte encore moins la comparaison : ses élites n'ont de l'Étranger qu'une vision complètement caricaturale et une information à peine supérieure à celle de l'Américain moyen.
- Ce qui figure dans les 729 pages lumineuses de l'édition française passionnera certainement le lecteur mais on s'étonnera aussi de ce à quoi l'auteur ne consacre pas une seule ligne.
- Henri Hoppenot, diplomate français qui rallia la France libre, fit don en 1978 de ses dossiers aux Archives Diplomatiques où ils sont classés à la rubrique "Papiers d'envoyés".
- Le général Weygand fut, entre les deux guerres, considéré comme le "sauveur de la Pologne" par les Français, aux yeux des Polonais le vainqueur de la guerre polono-soviétique s'appelait Pilsudski.
- Mehmet Sükrü Saradjoglou (1887-1953) ancien cadre jeune-turc, siégea dans tous les gouvernements kémalistes de 1924 à 1946. Il présidera jusqu'en 1950 le club de Fenerbahce, et mourra dans son lit en 1953. On orthographiera de préférence à l'ancienne manière, puisqu'elle existe, car elle se révèle plus proche en français de la prononciation du phonème turc. La graphie "Saracoglu", agrémentée de signes diacritiques inconnus de l'orthographe française, prête trop à confusion.
- cf. texte du Rapport secret de Von Papen publié en 1946.
JG Malliarakis
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vendredi, 28 août 2009
Hamsun: francobollo commemorativo
Hamsun: francobollo commemorativo
Come avevo immaginato, non una sola riga è apparsa sui giornali italiani riguardo il centocinquantesimo anniversario di Hamsun.
Intanto ieri in Norvegia è entrato in distribuzione questo francobollo commemorativo da 25 centesimi, stampato in un milione e mezzo di esemplari.
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Association Solidarité Enfants de Beslan
Association Solidarité Enfants de Beslan (ASEB)
Section belge
Chers amis,
Vous avez pu constater au fil des années la profondeur et la constance de notre engagement en faveur des survivants du massacre de Beslan et, de manière générale, contre toutes les actions terroristes qui visent des enfants. Vous savez comment nous nous impliquons dans la pétition européenne pour faire du 1er septembre la Journée européenne de solidarité avec les enfants victimes du terrorisme. Vous savez, d’autre part, comment nous réagissons toujours à la désinformation systématique dont les Russes sont victimes à ce sujet.
Comme l’an dernier, une cérémonie de commémoration du drame de Beslan est prévue le 1er septembre prochain à 19 heures au Centre culturel et scientifique russe, au n°19 de la rue du Méridien à Bruxelles. Nous en avions arrêté le programme avec le directeur du Centre en accord avec l’Ambassadeur de Russie. Sur les six interventions inscrites, nous avions à en assumer une en français et une en néerlandais, les autres étant faites en russe, par l’Ambassadeur et le directeur du Centre et par des représentants des colonies ossète et russe.
Nous sommes à présent avertis que nos amis russes croient préférable de se réserver l’exclusivité de ce programme. Il convient dès lors que vous soyez prévenus que tant Renaissance Européenne, Terre & Peuple et Euro-Rus que l’ASEB ne font plus partie des invitants. Pour ce qui nous concerne, nous allons consacrer à présent toutes nos énergies à participer à la manifestation que l’ASEB organise à la mémoire de la tragédie de Beslan, comme chaque année depuis 2005, le 1er septembre prochain à 19 heures, à Paris, sur l’esplanade du palais du Trocadero.
Dès que nous aurons l’explication de la décision, pour nous incompréhensible, de nos amis russes, nous ne manquerons pas de vous la faire connaître. Nous vous prions de croire en attendant à notre entier dévouement à la cause d’une paix fraternelle sur l’ensemble de l’Eurosibérie, où les enfants feront l’objet d’une protection particulièrement attentive.
Jean-Jacques de Hennin
Georges Hupin
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Les pistes manquées de la "Nouvelle Droite" - Pour une critique constructive
Archives de "SYNERGIES EUROPEENNES" - 1999
Les pistes manquées de la «nouvelle droite»
Pour une critique constructive
Robert STEUCKERS
En avril/mai 1987, Guillaume Faye claquait la porte du GRECE, principale officine du mouvement politico-intellectuel français que les journalistes avaient appelé la «nouvelle droite», histoire de lui donner un nom médiatisable. Faye y était resté pendant près de quinze ans, il avait porté le mouvement à bout de bras à ses heures de gloire. Il en ressortait dégoûté. Dans un texte récapitulatif qu'il a rédigé et qui est paru fin 1998 dans un livre intitulé L’archéofuturisme (éd. L’Æncre, Paris), il exprime clairement son désappointement ; il avait dégagé, dans un mémorandum dont il ne souhaite pas la publication mais qu’il nous avait soumis, les écrasantes responsabilités d'Alain de Benoist dans l'échec de ce mouvement de pensée, fort prometteur au départ, parce qu'il voulait réactiver ce que les idéologies dominantes avaient refoulé et ce que les multiples réductionnismes à l’œuvre dans la société excluaient ou refusaient de prendre en compte. Dans L’archéofuturisme, Faye, avec un langage plus feutré que dans son mémorandum, énonce les tares du mouvement, nous indique quelles ont été les impasses dans lesquelles celui-ci s'est fourvoyé et enlisé (paganisme folklorique, gauchisme révisé, fétichisme pour des mots creux, etc.) . Ensuite, il nous esquisse onze pistes pour relancer une dynamique, qui ne devra pas nécessairement s'appeler la “nouvelle droite”, le concept ayant fait faillite, désormais grevé de trop d'ambigüités.
Les options philosophiques de Faye mettent l'accent sur le futurisme, sur la prospective davantage que sur l'archéologie ou la mémoire, même s'il dit clairement que toute prospective futuriste doit avoir des assises historiques, des référentiels archétypaux. Néanmoins, la lecture de ses textes, l'audition de ses discours montrent que la fulgurante personnalité de Faye n'a nulle envie d'être trop embarrasée, trop incapacitée par le poids d'un héritage, quel qu'il soit. Puisqu'il nous enjoint de pratiquer et de propager un “archéo-futurisme”, sorte de mixte d'hellénité idéale et de fulgurances à la Marinetti —que Faye situe volontiers dans un environnement urbain et architectural mêlant Vitruve et Mies van der Rohe— dressons à notre tour un bilan et esquissons un projet, pour ce volume qui a pour objectif premier d'inaugurer l'ère de la “post-nouvelle-droite”. Notre approche sera peut-être moins “futuriste” que celle de Faye, elle privilégiera les continuités historiques, sans pour autant sombrer dans les archaïsmes qui condamnent à l'inaction et “muséifient” les discours.
Une terminologie ambiguë
Mais avant de passer au vif du sujet, rappelons que le terme de « nouvelle droite » est trop ambigu : le « new right » des pays anglo-saxons s’assimile à un curieux mixte de vieux conservatisme, de néo-puritanisme religieux et de néo-libéralisme offensif (lors de la montée de Reagan au pouvoir) ; la « Neue Rechte » allemande a un passé résolument national-révolutionnaire ; la nouvelle droite française est essentiellement portée par une association de combat métapolitique, le GRECE (Groupement de Recherches et d’Etudes sur la Civilisation Européenne). Nos critiques ne s’adressent pas à la « new right » anglo-saxonne, dont nous ne partageons pas les postulats et qui se déploie dans des aires politiques qui ne sont pas les nôtres, ni, a fortiori, à la « Neue Rechte » allemande dont nous nous sentons très proche, mais au GRECE (dont nous ne nions pas les acquis positifs) et à son « gourou », qui a toujours refusé toute direction collégiale, développé un culte puéril de sa personnalité, et s’est entouré d’hurluberlus dévots et sans culture, dont le cortège aurait inspiré Jérôme Bosch et fait la fortune du Dr. Freud. De club politico-culturel offensif et rupturaliste, le GRECE s’est transformé en une secte étriquée de copains plus ou moins farfelus, animée par un « Chancelier », sorte de gagman sexagénaire, grande gueule toujours occupée à monter des sketches au goût douteux, qui n’ont rien d’élitiste ni de philosophique ni de métapolitique. Triste épilogue…
Pourtant l’affaire GRECE n’avait pas commencé dans le gag (sauf si l’on se réfère à Roland Gaucher) (1). Le GRECE a constitué une réaction salubre contre la mainmise gauchiste-vulgaire sur les esprits dans les années 70. Cette réaction, cette volonté a permis de sortir du refoulement toute une panoplie de thématiques historiques ou organiques, d’introduire dans le débat les thématiques biologisantes ou les découvertes d’une psychologie différencialiste abordées aux Etats-Unis ou en Angleterre (Ardrey, Koestler, Eysenck, etc.). L’exploitation de l’œuvre de Konrad Lorenz et d’Irenäus Eibl-Eibesfeldt explique le franc succès du GRECE, explique aussi pourquoi nous avons été immanquablement attirés vers lui. Les numéros d’Eléments ou de Nouvelle école de 1975 à 1986 restent des sources de références incontournables. Malgré d’inévitables lacunes, dues à la faiblesse des moyens et des effectifs, le corpus prenait forme, lançait des débats, fécondait des esprits. Quelques adversaires de la ND ont reconnu l’importance de ses apports (Raymond Aron, par exemple).
Dans les années fortes de la ND, des dizaines de cadres ont été formés dans la discrétion, qui ont ensuite été injectés à divers niveaux de la vie politique ou culturelle de la France. A l’abri des regards, ces hommes et ces femmes continuent à faire du bon travail, dans des réseaux associatifs, dans des modules de recherches, chez des éditeurs... Mais ils ont abandonné la secte, ne la fréquentent plus, n’influencent malheureusement plus les jeunes qui y cherchent une voie et n’utilisent plus ce langage codé, repérable, stéréotypé, qui révèle une vulgate plutôt qu’une méthode.
La ND : un bon démarrage
Autre apport non négligeable de la ND : avoir contribué à « déculpabiliser » la culture dite de droite, diabolisée depuis 1945. C’est sans doute le principal motif de la haine que voue la gauche établie à la ND et à l’entreprise d’Alain de Benoist. Cette haine s’est déployée avec une férocité pathologique à partir de l’été 1979, quand la ND influençait fortement un hebdomadaire à très gros tirage, le Figaro-Magazine, dirigé par Louis Pauwels. Alain de Benoist y tenait la rubrique des « idées », poste d’avant-garde très efficace pour faire changer les mentalités, indiquer de nouvelles pistes à la culture française. L’idée d’une « école de pensée », formant des cadres en toute autonomie, la volonté de détruire les refoulements de la culture dominante et de proposer du neuf, sans jamais recourir à de vieilles lunes, ont contribué à forger le « mythe ND ». Très rapidement pourtant, l’offensive s’est soldé par un échec : l’idéologie dominante, les vigilants de la république, la gauche parisienne, les dévots d’un catholicisme progressiste ou intégriste se sont ligués contre la nouvelle venue et l’ont contrainte à la retraite. La ND a dû céder face au néo-libéralisme et au culte moralisant des droits de l’homme (couverture des pires dénis de droit que l’histoire ait jamais vécus). Dans les propres rangs de la ND, l’enthousiasme a fait place à l’aigreur. La lucidité a disparu au profit de la paranoïa. Au lieu d’admettre que la ND a battu en retraite, après un très beau combat, parce que les effectifs étaient trop réduits et encore insuffisamment formés, le microcosme néo-droitiste parisien a sombré dans les pleurs et les grincements de dents. Quinze ans après le ressac, malgré l’ouverture opportune de nouvelles pistes (écologie, communautarisme, etc.), aucune réflexion philosophique réelle et profonde n’est venue renforcer les options de départ. Vœux pieux et lamentations anti-technicistes ou anti-libérales ne peuvent tenir lieu de discours critique : nous aurions voulu une étude plus approfondie de Carl Schmitt, de Gramsci, de Hans Jonas, de Sombart, de De Man, etc. Et un plongeon dans le vaste océan de la postmodernité philosophique (Lyotard, Foucault, Deleuze, Guattari, etc.), ce qui aurait été tout naturel pour un mouvement d’origine française.
En juin 1989, lors d’une séance de formation au « Cercle Héraclite », ouvert aux cadres du mouvement, j’avais voulu marquer mon retour au GRECE, après un éclipse de près de six ans, en attirant l’attention des cadres (ou ce qu’il en restait…) sur l’ampleur et la pertinence de la critique contemporaine des philosophes français : je n’ai rencontré qu’indifférence, incompréhension et hostilité (pour lire le texte de cette intervention, cf. « La genèse de la postmodernité », in : Vouloir, n°54/55, 1989). « Je n’ai rien compris », m’a dit un cadre après mon exposé.
De même, les options biologisantes du GRECE avaient besoin —Alain de Benoist ne me contredira pas, même s’il est retourné récemment à sa manie comptable de calculer les quotients intellectuels— d’un solide ravalement. Il me paraissait nécessaire d’ouvrir les recherches de la ND aux théories de la cognition humaine, proposée par les disciples de Konrad Lorenz, encadrés par Riedl et Wuketits, de renouer avec la théorie des systèmes de Ludwig von Bertalanffy et avec son actualisation par le Japonais Maruyama, d’introduire dans les débats français les travaux de l’Allemand Friedrich Vester (cf : mon exposé au séminaire de mai 89 de l’équipe de Vouloir, tenu en Flandre, et visité par une équipe de cadres du GRECE dirigée par Charles Champetier : « Biologie et sociologie de l’“auto-organisation” », in Vouloir, n°56/58, 1989). « Je n’ai rien compris » fut une nouvelle fois la réaction d’un cadre (non, non, ce n’était pas Champetier : il était parti dans les campagnes flamandes à la recherche d’un magasin vendant des cigarettes. Ce toxicomane était en manque… faut comprendre… ).
En février 1991, à Pérouse en Ombrie, lors de mon exposé au colloque des ND française (A. de Benoist), italienne (M. Tarchi & A. Campi) et britannique (M. Walker), j’ai insisté sur une prise en compte de la méthode de Derrida pour éviter de développer une conception figée de l’identité, propre à certains partis nationalistes ou populistes, dont de Benoist lui-même soulignait les insuffisances. J’ai voulu étayer cette critique de de Benoist, en plaçant le débat à un niveau politologique et philosophique, en refusant de le laisser à celui des invectives stériles (cf. « Dévolution, Grand espace et régulation », in : Vouloir, n°73/75, 1991) (2). Cette critique de l’ « identitarisme figé » impliquait une réflexion sur les notions de différAnce et de différEnce chez Derrida. Pour tout commentaire, de Benoist, après mon exposé, m’a demandé pourquoi j’avais parlé de ce « con » de Derrida. Il semblait me prendre pour un fou.
Un refus d’abandonner ses insuffisances…
Ces trois incidents, un peu burlesques, montrent qu’il n’y avait pas, au sein de la ND, une volonté claire de se démarquer de certaines insuffisances ou de certains passéismes ni de consolider ses bonnes intuitions de départ. La ND ne voulait pas d’ouverture à la pensée française contemporaine, alors que tout le débat allemand et américain est profondément empreint des apports de Foucault, Deleuze, Lyotard, Derrida, etc. La ND ne voulait pas répondre sérieusement au reproche inlassablement ressassé de « biologisme » que lui adressaient ses adversaires. Elle aurait dû revendiquer son organicisme biologisant mais en l’étayant d’arguments scientifiques incontestables, au lieu d’être pétrifiée de frousse dès qu’un adversaire lui reprochait de faire de la « biopolitique ». La ND en est arrivée à démoniser elle-même tout discours biologisant-organicisant, avec des arguments boîteux, tirés de doctrines éthiques irréalistes ou d’une lecture un peu courte des critiques traditionalistes formulées à l’encontre du vitalisme. Enfin, les remarques méprisantes d’un Alain de Benoist sur la pensée de « Derridada » sont assez sidérantes, quand on sait que la ND est accusée, encore aujourd’hui, d’avoir fondé un « discours identitaire », repris par l’extrême-droite, accusée à son tour, de développer une vision étriquée et figée de l’identité. Malgré ses discours passionnels contre Le Pen (« le programme du FN me soulève le cœur », répondait-il aux journalistes d’une revue bourrée de fautes d’orthographes monstrueuses), de Benoist ne développe pas une théorie valable de l’identité, qui échappe tout à la fois au fixisme des vieilles droites et aux reproches des professionnels de l’anti-fascisme.
En ce début de l’année 1999, la ND vient de publier son premier manifeste (ouf, enfin, ça y est…). Si les pistes suggérées ou les constats qui y sont formulés rencontrent grosso modo mon approbation, j’estime toutefois que ce manifeste reste au niveau des vœux pieux ou de la protestation moralisante. Il lui manque précisément de bonnes références philosophiques.
Mon auto-critique
Enfin, mes critiques peuvent sembler oiseuses après tant d’années dans le sillage de la ND. En effet, le reproche pourrait aisément fuser : « Qu’as-tu f… là pendant si longtemps ? ». Pour ma défense, je dirais qu’il n’y avait rien d’autre en francophonie, et que mon intérêt pour le GRECE était parallèle à un intérêt pour les initiatives allemandes et italiennes de même nature. Je suis effectivement abonné à Criticón et à Junges Forum depuis 1978, bien avant mon passage au GRECE. Je lisais Linea de Pino Rauti et j’achetais en versions italiennes les livres d’Evola qui n’étaient pas traduits en français. Très tôt, j’ai pu comparer avantages et lacunes des uns et des autres. Ensuite, dès 1976, j’ai suivi de très près les initiatives de Georges Gondinet, à l’époque nullement assimilables à celles du GRECE. J’ai toujours, me semble-t-il, opté pour la pluralité des sources d’information contre le réductionnisme et l’assèchement sectaires. C’est une option qui me parait toujours valable : je demande donc à tout ceux qui s’intéressent à la ND parce qu’ils veulent sortir du ronron dominant de ne pas réduire leurs sources d’information à une et une seule officine, mais de chercher systématiquement la diversité. C’est par une pratique diversifiante et différAnciante (Derrida !) que les « refuzniks » que nous sommes finiront par appréhender et arraisonner le réel dans toutes ses facettes. Et ainsi gagner la bataille métapolitique, promise par de Benoist, avant qu’il n’opère ses replis frileux : peur de la politique, peur des populismes, peur des journalistes qui le critiquent, peur des langages francs et crus, peur de réaffirmer son biologisme, peur d’être traité de fasciste, peur de ne pas être reçu par une huile quelconque. Pas besoin d’être grand philosophe pour condamner et mépriser une telle attitude. Il suffit de se rappeler l’adage : la peur est mauvaise conseillère.
La «nouvelle droite» et l'histoire
Les regards que la «nouvelle droite» française a jetés sur l'histoire de l'Europe ont toujours été flous et ambigus. Quant à la «nouvelle droite» italienne, elle s'est fort préoccupée de redéfinir l'histoire du fascisme (alors que cette tâche était pleinement assumée par Renzo de Felice ou Zeev Sternhell). Redéfinir le fascisme était la tâche de son principal promoteur à l'université, était son boulot de chercheur, et nul parmi nous ne contestara évidemment cette fonction qui fut et reste la sienne.
A Paris, la vulgate ND —en disant « vulgate », je n’incrimine ni de Benoist ni d’autres exposants de la ND, mais une mouvance difficilement définissable que l’on a, à tort, assimilée à la ND et qui compénètre tout le champs des droites françaises— n’a pas développé une vision de l’histoire cohérente : tout au plus perçoit-on chez elle un vague mixte de vision décadentiste et de nordicisme (indo-européen), où les accents pessimistes de Gobineau (mal lu) et de Spengler (mal digéré) se mêlent aux accents « normandistes » et pessimistes du dernier Drieu. Chacun de ces auteurs est passionnant en soi. Chacun d’eux nous livre une œuvre aux strates multiples :
- Gobineau, notamment, outre son nordicisme (qui lui est vivement reproché) réhabilite le rôle de la Perse dans le rayonnement des peuples indo-européens et critique l’intellectualisme hellénistique (source de déclin) ; la Perse nous lègue notamment une éthique guerrière et chevaleresque, dont héritera, après bien des détours et à travers un filtre chrétien, les chevaliers médiévaux ; toute une historiographie et maints ragots colportés font de Gobineau l’inventeur d’un racisme hargneux devant à terme déboucher sur « l’impensable » ; en réalité Gobineau fut un grand voyageur ouvert à l’Islam iranien et à l’Orient, méprisant les « petits crevés » (comme il appelait les nullités des beaux quartiers de Paris) et ne prenant pas l’Europe pour « l’ombilic de l’univers l’univers » (cf. Jean Boissel, Gobineau (1816-1882). Un Don Quichotte tragique, Hachette, 1981 ; cf. également Alexis de Tocqueville, Œuvres Complètes, Tome IX, Correspondance d’A . de Tocqueville et d’A. de Gobineau, Gallimard, 1959). Gobineau est celui qui a ouvert la pensée française aux mystiques panthéistes de la Perse, qui a, bien avant Derrida, réclamé une ouverture de notre pensée à cet univers intellectuel.
- Spengler, avec sa notion de pseudo-morphose des civilisations, avec son mythe touranien, sa classification des cultures (faustienne, magique, etc.) ;
- Drieu, avec expérience de combattant de 1914, son passage à Dada (et sa participation à titre de témoin à décharge au « procès Barrès »), sa carrière d’écrivain parisien, ses tentations politiques (Doriot, etc.), ses réflexions sur les traditions, notamment sur Guénon, découvertes tardivement lors de la parution de son Journal.
Ces trois auteurs peuvent être interprétés de manières très diverses. Ils échappent ou devraient échapper à toute vulgate et à tout réductionnisme interprétatif.
Une pitoyable vulgate
Par ailleurs, une bonne part des militants de la mouvance de la “nouvelle droite” parisienne se percevaient comme les héritiers de ce complexe idéologique plus mystique que politique, plus idéaliste que concret, un complexe que l'on cultivait en ghetto à l'exclusion de tout autre et qui mêlait le “fascisme français” et les “écrivains maudits de la collaboration”. Ils mêlaient simultanément ce corpus complexe au filon nordiciste, issu d’une lecture très partielle de Gobineau voire de Vacher de Lapouge (3), où l'histoire était perçue comme l'amenuisement continu de l'influence physique et métaphysique des peuples germaniques en Europe, dont la France, leur pays, n'était que très partiellement l'héritière, une héritière, qui plus est, qui avait explicitement rejeté cet héritage depuis l'Abbé Siéyès.
Grosso modo, disons que, avant l'aggiornamento des années 90, dans les premières décennies de l'histoire de la ND, consciemment ou inconsciemment, l'accent était mis sur le filon Gobineau-Drieu la Rochelle, reprise des pamphlets anti-fascistes et anti-racistes, mais cette option, chez les camarades pseudo-nationalistes et néodroitistes, était revendiquée avec chromos brekeriens en prime; ce filon était détaché de tous contextes politiques réels puis simplifié en une vulgate assez étriquée, suscitant la commisération de tous ceux qui vivent quotidiennement les assauts du monde réel, sous quelque forme que ce soit. Dans les corridors et les coulisses de la ND parisienne, on avait l'impression d'errer dans une utopie irréelle, sous une bulle de verre où étaient voués aux gémonies tous les faits de vie réelle qui contrariaient l'image idéale du monde, des hommes et des Français, rêvée par ces petits étudiants ratés ou ces médiocres employés de banque subalternes, au profil psychologique instable et, qui, à cause de ce handicap, parce qu'ils ressentaient ces lacunes et ces tares en eux-mêmes, s'étaient recyclés, pour se donner une importance toute fictive, dans une “lutte métapolitique planétaire”.
Appuyés par tout un commerce de colifichets frappés du logo du GRECE, les tenants de la vulgate balbutiaient ou gribouillaient des fragments aussi oniriques que décousus de ce fatras nordico-fascisto-parisien; ces fragments, ils les faisaient dériver de ce filon pseudo-gobinien et les exprimaient en textes ou en images ou en discours avinés après le dessert, puis les ressassaient à l'infini, sans le moindre esprit critique en les mêlant à des interprétations naïves et juvéniles des mondes ouraniens-olympiens et des chevaleries idéales, décrits par Evola dans Révolte contre le monde moderne. Critiques du catholicisme populaire, volontiers blasphémateurs à l'égard des chromos, des crucifix, des vierges et des Saintes-Rita à la mode de Saint-Sulpice, les galopins du GRECE répétaient sous d'autres signes les mêmes travers que les chaisières et les bigotes des paroisses d'arrière-province.
L'anti-fasciste professionnel sans profession bien établie, l'ineffable “René Monzat”, a eu beau jeu de dénoncer cette bimbeloterie dans Le Monde, le 3 juillet 1993. Ce triste garçon, dont la jugeotte n'a certainement pas la fulgurance pour qualité principale, concluait au “nazisme fondamental” du GRECE, parce que de Benoist, qui n'est ni nazi ni rien d'autre que lui-même, rien d'autre que sa propre égoïté narcissique, s'était copieusement “sucré” en vendant des “tours de Yule” en terre cuite —modèle SS-himmlérien— à ses ouailles, en multipliant le prix de base de son grossiste allemand par dix!
Un scandinavisme irréel et onirique
Mais le nordicisme/germanisme de Gobineau s'inscrit dans une histoire plus complexe, dont la ND n'a jamais véritablement rendu compte: elle a contribué à pétrifier ce filon, surtout à le ridiculiser définitivement (Dumézil l'avait compris!), sans en avoir extrait les potentialités toujours vives, sans avoir dégagé, par exemple, l'apport géopolitique et géostratégique du monde nordico-scandinave dans l’histoire générale des peuples européens: ouverture des voies maritimes nord-atlantiques, exploitation de l'axe Baltique/Mer Noire, ouverture du commerce eurasien via le comptoir de Bulgar dans l'Oural, organisation du commerce fluvial sur le Dniepr, le Don et la Volga, ouverture de la Caspienne et accès du commerce européen à la Perse et à la Mésopotamie: autant de routes qui restent, aujourd'hui plus que jamais, d'une brûlante actualité. Non: pour la clique d'esprits bornés qui sautillaient et s'agitaient autour du gourou de Benoist (qui assurément ne partageait pas leurs simplismes), les Scandinaves du IXième au XIième siècles n'étaient ni des techniciens hors ligne de la navigation ni des commerçants audacieux qui ouvraient l'Europe au monde: ils étaient décrits comme des espèces de cannibales chevelus et moustachus qui pillaient les couvents ou, pire, comme des ruraux simplets, vivotant en dehors des tumultes du monde, confectionnant avec de la terre cuite des luminaires disgrâcieux (qui font rétrospectivement frémir Monzat et ses commanditaires du Monde) plutôt qu'étudiant la résistance des bois à la mer et au vent, la carte du ciel pour s'orienter en haute mer, l'aérodynamisme des coques de navires pour se lancer dans des expéditions hardies. Etre technicien ou commerçant, dans la vision du monde des débiles adeptes du grincheux gourou néo-droitiste, c'était déchoir dans la “troisième fonction”, c'est-à-dire la fonction du travail, de la production, jugée mineure par ces oisifs qui ne commandaient rien, qui ne produisaient rien, qui vivaient d'allocations ou de postes de fonctionnaire, mais qui croyaient, dur comme fer, qu'ils étaient potentiellement les souverains de la future “grande Europe”. Les Vikings imaginaires des milieux néo-droitistes n'étaient pas admirés pour ce qu'ils avaient été, des explorateurs, des marins et des négociants, mais parce qu'on leur prêtait des canons physiques stéréotypés: une blondeur et une vigueur qui étaient absentes, dans la plupart des cas, chez ces vikingomanes d'Auteuil-Neuilly-Passy. On sort ici de la politique, de la métapolitique, pour entrer de plein pied dans la psychopolitique voire la psychiatrie tout court.
Restaurer la « virtù » des Romains et des Germains
Revenons à l'histoire: le mythe nordiciste qui traverse l'historiographie européenne depuis les humanistes italiens du XVième siècle est surtout l'expression idéalisée de deux soucis récurrents dans la pensée politique de notre continent: la disparition de la virtù politique, de la force de façonner le politique pour le bien de la Cité, où la virtù était d'abord posée comme le propre du peuple et du Sénat de l'Urbs romana, puis par translatio imperii, comme le propre des peuples germaniques. Cette virtù est une idée républicaine au sens étymologique du terme, comme nous l'a explicité Machiavel dans son Prince. Elle s'oppose, en tant que telle, au césaro-papisme du Vatican qui, au XVième siècle, montre ses limites et s'enlise dans une impasse; elle s'oppose aussi aux tentatives de centraliser les Etats monarchiques au détriment des corps concrets qui composent la Cité. Dans ce sens, l'amenuisement de l'influence des peuples germaniques n'est rien d'autre que l'amenuisement de la virtù dans les corps politiques d'Europe et non pas la déperdition d'un quelconque système coercitif. L'assomption de la virtù équivaut à la perte d'autonomie des corps concrets de la Cité, à la dévitalisation des sociétés civiles. La vision de Gobineau n'est jamais qu'une manifestation tardive —à l'ère romantique qui est à l'évidence traversée par un spleen qui, risque, chez les esprits faibles, de s’avérer incapacitant— de ce souci récurrent de la virtù dans l'histoire des idées politiques en Europe; Gobineau n'a pas infléchi sa démarche dans un sens juridique et concret, alors même que le XIXième siècle s'interrogeait sur les sources du droit (Savigny, Ihering, de Laveleye, Wauters, etc.); il a, malgré lui et pour le malheur de sa propre postérité, jeté les bases d'un discours tissé de lamentations sur l'amenuisement du germanisme.
Dans la même veine pessimiste, Hippolyte Taine a été un penseur beaucoup plus concret et méthodique: la ND ne l'a jamais abordé. De même, rien n'a jamais été fait sur la problématique des races en France, qui a agité tout le débat du XIXième siècle, en opposant celtisants (Augustin et Amédée Thierry, H. Martin, Guérard, le “génie celtique de J. de Boisjoslin), germanisants (le mythe “franc” chez Chateaubriand, Guizot, Mignet, Gérard, Montalembert, de Leusse) et romanisants (Littré). Ce débat ne portait pas seulement sur la définition de la “race” et n'était nullement une anticipation des réductions caricaturales du national-socialisme, mais portait sur le droit, sur la manière de façonner la Cité, de répartir les tâches entre les classes. Taine parlait d'un “réalisme à connotation populaire et raciale”. Pour la ND, l'onirique a primé sur le réalisme que Taine appelait de ses vœux. Pourquoi ce refus ?
Drieu la Rochelle, écrivain dans le Paris décadent d'après 1918, après son comportement héroïque pendant la Grande Guerre et sa fréquentation des dadaïstes et des surréalistes, perçoit les enjeux du monde avec une remarquable lucidité, mais celle-ci est estompée par son pessimisme, par un décadentisme finalement assez pitoyable et par un spleen que révèlent pleinement les pages de son Journal (par ailleurs mine inépuisable de renseignements de toutes sortes). Après la défaite de l'Axe en 1945 et le suicide de Drieu, ce pessimisme et ce spleen sont d'autant plus incapacitants pour qui veut construire une véritable alternative philosophique, idéologique et politique. Plutôt qu’au Drieu triste, il faut retourner au Drieu visionnaire !
Echec de l’Axe, faillite de la « métaphysique occidentale »
Car 1945 n'est pas simplement l'échec de l'Axe: il est l'échec de toute la métaphysique et de la civilisation occidentales. Les Alliés ont gagné cette guerre sur le terrain, incontestablement, mais ils n'ont rien proposé d'autre que du “réchauffé”, comme le prouve, presque a contrario, le succès indéniable de la philosophie “déconstructiviste”, née en Amérique et chez Derrida dans le sillage de Heidegger. Ce dernier a perçu en germe de réelles potentialités dans la “révolution allemande” (en 1934 pendant la parenthèse de son “rectorat”), mais aussi de terribles impasses dans son volontarisme outrancier, où la volonté poussée à son paroxysme rompait les liens de l'homme avec les continuités qui le nourrissent spirituellement et politiquement et son constitutives de son identité profonde. Mais, en constatant les impasses du national-socialisme, Heidegger n'a pas davantage opté pour les visions américaniste et bolchéviste de la société et du monde. Face à cet éventail de faits et de pensées, face à ce triple rejet de la part de Heidegger, la ND aurait pu et dû:
- abandonner les pessimismes incapacitants;
- renouer au-delà de Gobineau avec le républicanisme de Machiavel, avec la notion de virtù, présente dans la Rome antique et, par translatio imperii, chez les peuples germaniques (comme l'avait bien vu la lignée des observateurs de Tacite aux humanistes italiens et de ceux-ci à Montesquieu, ce dernier étant une référence incontournable pour toute pensée démocratique sérieuse, c'est-à-dire pour toute pensée démocratique qui refuse d'accorder le label “démocratique” à tout ce qui se présente comme tel aujourd'hui en Europe occidentale).
- être attentive plus tôt, dès le départ, à la démarche de Heidegger; au lieu de lui avoir consacré une attention méritée dès le début de son itinéraire, la ND, vers la fin des années 60 et au début des années 70, mue par une sorte de paresse philosophique, a préféré parier pour une vulgate anti-philosophique tirée de la philosophie anglo-saxonne (une caricature malhabile de l'“empirisme logique”) pour qui les questions métaphysiques ou axiologiques, le langage métaphysique et l'énoncé de valeurs, sont vides de sens.
- dans la foulée d'une réception de Heidegger, la ND aurait pu embrayer sur le filon “déconstructiviste”, poursuivre une critique serrée de la “métaphysique occidentale” et ne pas laisser l'arme du déconstructivisme à ses adversaires! Cet abandon de l'arme du “déconstructivisme” condamne la ND à du sur-place, puis, inéluctablement, au déclin et au pourrissement. Sans une bonne utilisation de l’arme « déconstructiviste », la ND ne peut développer une critique crédible des institutions en place ou des fausses alternatives (gauchistes). Elle risque alors de passer pour un simple appendice intellectuel, un salon où l’on cause, un havre pour oisifs argentés, juste en marge du pouvoir.
Déconstructivisme et France rabelaisienne
Ensuite, la ND aurait pu faire advenir une pratique de la déconstruction permanente dans le champ de l'histoire. Je m'explique: surplombé par une métaphysique particulière (platonico-chrétienne), l'Occident a agi sur le terrain de l'histoire d'une certaine façon, c'est-à-dire d'une façon que déplorent les contestataires radicaux de cette métaphysique, de cet Occident et de cette histoire. La métaphysique occidentale, sur le terrain, a fait des dégâts, comme le constatait Heidegger. Ont été effacés de l'espace occidental, au nom d'une métaphysique particulière: les ressorts des communautés naturelles d'Europe, un processus qui est à l'œuvre, inexorablement, depuis la centralisation du Bas-Empire romain décadent jusqu'à une christianisation manu militari, en passant par la mise au pas des âmes par l'Inquisition, par la philosophie politique de Bodin qui ne laisse pas de place aux corps intermédaires de la société (c'est-à-dire aux corps concrets de la souveraineté populaire), par les déismes et les rationalismes hostiles à toutes originalités et tous mystères, par l'éradication des fêtes populaires, des fêtes de jeunesse, de l'espace de liberté des goliards et des vagantes, de l'univers dionysiaque-rabelaisien. Jamais la ND ne s'est branchée sur ces filons pluri-millénaires, jamais elle n'a utilisé ses atouts et ses entrées dans le monde journalistique français pour promouvoir les écrits de ceux qui faisaient le constat de cette éradication pluriséculaire, en dehors de tout encadrement politicien, idéologique ou “clubiste”. Si elle l'avait fait, jamais personne n'aurait pu lui reprocher de camoufler derrière un discours modernisé, une volonté de “réchauffer” la vieille soupe nationale-socialiste.
Parallèlement à cette négligence du filon rabelaisien, la ND n'a pas davantage revalorisé les luttes paysannes et populaires contre les Etats, expressions politiques de cette métaphysique occidentale. Elle a refusé cette démarche, malgré les appels incessants d'un Thierry Mudry notamment, parce qu'elle était prisonnière d'un seul mot: l'inégalitarisme. Alain de Benoist, soucieux de sa vocation pontificale au sein du microcosme néo-droitier, a développé pendant sa carrière dans la grande presse (Valeurs actuelles, Le Spectacle du Monde, Le Figaro-Magazine, partiellement, Magazine-Hebdo) tout un discours, somme toute assez boîteux, sur l'“inégalité”, avec des calculs de QI, des dérivées et des asymptotes comparant l'intelligence des Pygmées et des Suédois, des Mongols d'Oulan Bator et des Equatoriens de Quito, laissant entrevoir, peut-être même à son insu, un modèle pyramidal où il aurait trôné très haut, au sommet de la pyramide, avec le monde entier à ses pieds d’auguste membre de la MENSA (le club français qui recrute des gens dont le QI est supérieur à la moyenne, mais dont on ne jauge pas l'état psychologique avant de les admettre au bar select de l'association). Telle est sans doute la vision onirique qui traverse les rêves du Pape de la “nouvelle droite”. Tout cela est bien divertissant, mais où est l’intérêt (méta)politique d’une telle posture ?
Ignorance des révoltes populaires
L'option “inégalitaire” de la ND, illustrée avec une opiniâtreté quasi monomaniaque, interdisait de se pencher sur les luttes populaires, sous prétexte que Marx, Engels, Bloch, etc. s'étaient intéressés à la “Guerre des Paysans” du début du XVIième siècle et qu'un mouvement qui choisissait le label de “droite” ne pouvait évidemment frayer avec des “marxistes” (!!!!!!???), retentissante sottise qui a laissé ce terrain fécond des luttes et des révoltes populaires à des socialistes ou à des communistes qui, par ailleurs, étaient, eux aussi, prisonniers de la “métaphysique occidentale”, à cause de leur matérialisme figé (mécaniciste et physicaliste) et de leur rationalisme étriqué (acceptant les acquis de ce rationalisme more geometrico qui a commencé à mutiler les corps concrets de la souveraineté populaire dès la Renaissance). De même, les dimensions populaires des révoltes françaises du XVIIième siècle, des révoltes populaires et paysannes contre la monarchie et contre la république à la fin du XVIIIième, les petites jacqueries du XIXième (étudiées par l'historien Hervé Luxardo) (4), n'ont malheureusement pas eu de place dans les réflexions de la ND.
L'option anti-chrétienne, le rejet des structures dérivées de la “métaphysique occidentale” ne devrait pas déboucher sur le refus de s'identifier aux luttes des peuples réels contre les pays légaux, des concrétudes charnelles contre les abstractions juridiques et rationalistes, refus qui condamne la ND à n'être qu'un salon de précieux bavards aux ambitions limitées, sans connexions utiles avec le monde extérieur. Les professions de foi “organicistes” ne sont que purs discours si elles ne suggèrent pas une politique organique concrète. Les “intellectuels organiques” sont toujours à la tête du peuple réel ou, au moins, commandent un fragment du peuple réel, fût-il dispersé au travers de réseaux divers (professions, syndicats, partis, clubs, etc.). A terme, un club de pensée à vocation métapolitique et/ou politique doit rallier sous une seule bannière nouvelle des citoyens dispersés dans de multiples structures en voie d'obsolescence, car l’obsolescence est la loi de l'histoire pour les structures, quelles qu'elles soient. La ND ne peut plus parfaire un tel travail de rassemblement car les vieux droitismes figés qu'elle ne cesse de véhiculer (anti-égalitarisme rédhibitoire débouchant sur un anti-populisme incapacitant), malgré ses dénégations, l'empêchent paradoxalement de se brancher sur les quelques gauches organiques à vocation contextualiste (qui proclament et démontrent que le cadre, le contexte social, économique et politique doivent être respectés en tant que tels dans la théorie et dans la pratique, contrairement aux universalismes traditionnels des gauches; en France, une telle gauche est représentée par le MAUSS, c'est-à-dire le «Mouvement Anti-Utilitariste dans les Sciences Sociales», que de Benoist courtise en vain, à coup des viles flatteries, depuis tant d'années).
Un piètre personnel subalterne
Enfin, il y a une autre démarche de la ND qui est condamnée à l'impasse: par son parisianisme, par son repli frileux autour de son gourou, elle s'est révélée incapable de disperser les centres dynamiques du mouvement sur tout le territoire français; ensuite, elle a été handicapée par sa frilosité à sortir des frontières de l'Hexagone et, à cause de la piètre qualité intellectuelle de son personnel subalterne à penser véritablement l'Europe, à apprendre les dynamiques politiques, culturelles et sociales à l'œuvre en Italie, en Allemagne, en Espagne, dans le Bénélux, en Scandinavie, etc., et à agir efficacement dans un contexte européen (ce qui implique de maîtriser plusieurs langues, d'accepter que l'Autre parle la sienne et non pas le français exclusivement, d'écouter poliment un exposé en allemand, en italien ou en anglais sans éprouver le besoin pressant de sortir pour fumer un clope dans le patio ou pour descendre une pils au comptoir, etc.). Les tentatives plus récentes de la ND parisienne de sortir des frontières de France se heurtent au même ballast structurel: recrutement d'autodidactes spécialisés en bricolages idéologiques, de vieux copains sans qualifications précises, de marginaux sans originalité et bourrés de fantasmes, de caractériels repêchés dans les poubelles des partis identitaires qui les ont exclus pour incapacité sur tous plans pratiques.
Ensuite, la ND parisienne n'a cessé d'être obnubilée par les “débats” parisiens dont tout le monde se fout à 30 km de la capitale française, ce qui lui a interdit de susciter un nouveau mouvement de contestation global, organique, dans tout l'Hexagone. Certes, Alain de Benoist —rendons-lui justice— a eu la volonté de se brancher sur les débats philosophiques américains, allemands, italiens, mais il n'a pas enseigné à ses ouailles la façon de maîtriser les sources non françaises d'information et de documentation qui auraient permis de renforcer dans le discours quotidien de la ND ce “poumon extérieur”, apportant en permanence des bouffées d'arguments neufs et de les déployer avant ses adversaires. De plus, comme d'habitude, de Benoist a eu l'art de recruter des étudiants ratés, des jojos hauts en couleurs ou tristes comme des ados coincés, incapables de lui porter ombrage (pour lui, c'était l'essentiel...) mais tout aussi incapables de maîtriser ne fût-ce qu'un basic English. Ils se coupaient du même coup de toute une documentation utile pour la révolution culturelle à laquelle ils étaient censés participer, dans le laboratoire de pointe qu'of course le GRECE prétendait être! De Benoist a voulu s'ouvrir sur l'Allemagne, jamais il n'a péché dans le sens d'un nationalisme français fermé sur lui-même, hostile au monde entier, rejetant l'Europe en construction, peuplé de “rancuneux” (cette belle expression, que mentionne encore le Littré a été réintroduite dans le discours politique par Michel Winock). Cette attitude de bon Européen, chez de Benoist, a suscité mon respect et ma sympathie, du moins au départ. Mais tandis qu'il était européiste, sans arrière-pensée, il a laissé la bride sur le cou à des pseudo-théoriciens d'un nationalisme français irréaliste dans ses expressions héroïcisantes et naïves, que le lecteur pantois, habitué à des analyses plus fines, a trouvé dans éléments n°38 (intitulé: «Pourquoi la France?»). Ensuite, il n'a cessé de fréquenter un certain Philippe de Saint-Robert (la particule serait fictive!), apôtre d'un hexagonalisme de droite et d'un anti-européisme navrant, rêvant de reconstituer la France aux 130 départements de Napoléon (5). Ces démarches délirantes ont empêché la fusion du corpus néo-droitiste et des revendications régionales en France, fusion qui aurait permis une évolution graduelle vers une constitution fédérale de modèle allemand, espagnol ou helvétique. La ND aurait dû indiquer dans son programme l'objectif qu'elle s'assignait pour la France et pour le bien des peuples de l'Hexagone: faire advenir dans les esprits une constitution fédérale pour une VIième République française, rompant de la sorte avec l'étatisme fermé d'inspiration bodinienne que n'avaient jamais abandonné les factions nationalistes françaises de diverses moutures. Le travail de la ND aurait dû être de préparer l'avènement à terme de cette VIième République, de façon à ce que la France ait une constitution en harmonie avec les autres pays de l'Europe en voie d'unification, de façon à ce qu'il y ait homogénéité constitutionnelle dans tous les Etats de l'Union avant l'unification monétaire et avant la suppression des frontières. Aujourd'hui, nous avons presque l’une et l’autre, mais sans homogénéité constitutionnelle, ce qui est une hérésie et une aberration: la ND aurait pu prévoir cette imposture et suggérer une alternative crédible. En ne le faisant pas à temps, elle n'a pas assumé sa responsabilité historique. Elle n’a pas respecté sa promesse d’être une instance de « première fonction » (instance incarnant la souveraineté et le droit selon Dumézil). On peut se demander pourquoi…
Régionalisme et critique de l’Etat bodinien
Si elle avait forgé sur le terrain une alliance durable avec les mouvements régionaux sérieux, la ND aurait travaillé à l'élaboration concrète de cette constitution fédérale pour l'Hexagone, niant du même coup les formes étatiques de la “métaphysique occidentale” qui ont oblitéré les sociétés françaises de François Ier au jacobinisme. Pour parfaire cette alliance ND/régionalismes, le club métapolitique d'Alain de Benoist aurait dû développer une vision non-bodinienne de l'Etat, une conception symbiotique des corps intermédiaires (qui sont, ne cessons jamais de le rappeler, les véritables corps concrets de la souveraineté populaire), permettant de coupler régionalismes et revendications sociales et populaires concrètes, en nouant cette idée symbiotique aux combats syndicalistes, en se débarrassant de son discours néo-libéral (ante litteram) sur l'égalitarisme et l'inégalité, qui ont fait qu'elle a été accusée sans interruption de “social-darwinisme” (de Benoist a eu beau s'en défendre par la suite, ce stigmate lui est resté collé à la peau).
Enfin, un mouvement métapolitique comme le GRECE, qui prétend dans son sigle même, vouloir appréhender l'ensemble des dynamiques à l'œuvre dans la civilisation européenne, n'a jamais raisonné sur les grandes forces historiques et géopolitiques qui ont traversé les régions d'Europe. Comme beaucoup de visions non dynamiques de l'histoire, le GRECE semble avoir cultivé lui aussi une vision figée de l'histoire, où des figures hiératiques, fortement typées, répéteraient inlassablement le même drame, sans imprévus autres que ceux prévus par le scénariste, avec, pour toile de fond, une tragédie réitérée en boucle sous la détestable impulsion des mêmes tricksters. Le gourou du GRECE aimait à se dire “spenglérien”, mais aucun lecteur de Spengler ne se reconnaîtra dans sa “vision” (bigleuse et non plus faustienne) de l'histoire européenne.
Dans l'officine néo-droitiste parisienne, peu de choses ont finalement été dites sur les lignes de force de l'histoire suédoise, allemande, russe, balkanique, hispanique, sur les dynamiques géopolitiques effervescentes le long des grands axes fluviaux d'Europe, sur les enjeux territoriaux, comme si ces tumultes millénaires allaient tout d'un coup s'apaiser, dès que le gourou déciderait, du haut de sa magnificence, de prendre la parole. Sa germanolâtrie, qui n'est rien d'autre qu'une coquetterie parisienne, ne parvient pas à s'articuler en Allemagne, où les nouvelles droites (très diverses) sont bien en prise avec les problèmes d’histoire et d’actualité. Le gourou de la ND est balourd dans le débat allemand. Son Allemagne de fillettes à longues tresses nouées, de ruraux coiffés de petits chapeaux bavarois, de soldats altiers et perdus, n'est qu'une Allemagne de chromos: l'Allemagne réelle est une Allemagne d'ingénieurs méticuleux, de philosophes précis et rigoureux, de philologues pointilleux, d'industriels efficaces, de techniciens chevronnés, de négociants redoutables, de révolutionnaires radicaux, de moralistes jusqu'au-boutistes, de syndicalistes combatifs, de juristes tenaces. Mais de cette Allemagne-là, il n'en a pas parlé, sans doute auraient-elles effrayé ses ouailles, donné des cauchemars aux petits garçons fragiles qui l'admirent tant. Pensez-vous, ils auraient dû cesser de rêver, et commencer à travailler.
Refus de l’histoire réelle et images d’Epinal
Lors d'un face-à-face avec la presse russe, à Moscou le 31 mars 1992, où deux journalistes de la revue moscovite Nach Sovremenik me demandaient quelle était ma position dans la nouvelle crise balkanique et face à la Serbie de Milosevic, j'ai répondu en rappelant des événements importants de l'histoire européenne comme la Guerre de Crimée, le Traité de San Stefano (1878), l'aide apportée par les Russes à la Serbie, la Roumanie et la Bulgarie au XIXième siècle et leur désir de voir une paix s'instaurer entre Serbes et Bulgares, etc. Pendant que je répondais à cette question, importante pour les Russes qui ont la mémoire historique longue, au contraire des Occidentaux, en m'engageant sur un terrain qui n'intéressait pas de Benoist, le bougre m'enjoignait de me taire sans mettre de bémol à sa voix, tirait sur les pans de mon veston en cachant son bras derrière le large dos d'Alexandre Douguine, sans se rendre compte qu'il était tout à la fois grossier pour les journalistes qui me mettaient sur la sellette et ridicule en pleurnichant de la sorte parce qu'il n'était plus le seul à pouvoir parler (6). Outre le narcissisme époustouflant du gourou, cet incident burlesque montre bien le refus néo-droitiste de l'histoire réelle; lourde tare, car si l'on ne prend pas le pouls de l'histoire au-delà des clivages politiciens et au-delà du clivage binaire gauche/droite, si on ne lit pas l'histoire à travers les textes des traités qui l'ont jalonnée, on agit sous la dictée de “représentations platoniciennes”, autrement dit d'“images d'Epinal”, artificielles, arbitraires, déconnectées du réel. Or les “images d'Epinal” sont toujours classées quelque part, étant par définition figées, non mouvantes parce que non vivantes. En maniant ses fantasmes esthétiques et éthiques (son obsession à vouloir édicter une “morale”...), de Benoist a énoncé un discours en marge du fonctionnement réel des Etats de notre continent, il s'est soustrait au jeu dramatique de l'histoire, par désintérêt, délibérément ou par peur de l'engagement. Grave péché contre l'esprit. Pire, une telle démarche relève de la médiocrité et, en disant cela, je songe à une réplique dans le Malatesta de Montherlant: «En prison, en prison, monsieur. Pour médiocrité!».
L'incapacité de la “nouvelle droite” à énoncer un corpus de droit cohérent
D'emblée, le propos de la “nouvelle droite” n'est pas de discourir sur le droit (l’aventure de la petite revue Hapax, torpillée par de Benoist, a malheureusement été trop éphémère, pour qu’on l’analyse ici). Pourtant, question légitime, peut-on penser le destin d'une civilisation, peut-on s'engager pour la défense et l'illustration d'une culture sans jamais penser le droit qui doit la structurer? La ND a voulu faire remonter les racines de l'Europe à la matrice indo-européenne. Volonté légitime, exprimée notamment par Emile Benvéniste dans son Vocabulaire des institutions indo-européennes. Dans cet ouvrage fondamental, véritable exploration en profondeur du vocabulaire indo-européen, Emile Benvéniste jetait les bases d'une recherche fondamentale. En effet, le vocabulaire institutionnel indo-européen révèle l'origine de toutes nos pratiques juridiques; les racines linguistiques les plus anciennes se répercutent toujours dans notre vocabulaire juridique et institutionnel, tout en véhiculant un sens précis qui ne peut guère être effacé par des manipulations arbitraires ou être enfermé dans des concepts trop étroits. Une bonne connaissance de cette trajectoire et surtout de ces étymologies est impérative.
L'idéologie dominante en France a jeté un soupçon systématique sur ce type de recherches, sous prétexte qu'il entretient des liens inavoués et occultes avec le national-socialisme. La ND a été accusée de relancer la thématique nationale-socialiste des “aryens” en se référant aux recherches indo-européanisantes. D'où un ensemble de quiproquos navrants qui ont la vie dure et qui font les choux gras de quelques petits graphomanes “anti-fascistes”, dûment stipendiés par de mystérieuses officines ou carrément par l'argent du contribuable. Pourquoi une telle situation? Le droit positif actuel, avec ses référents mécanicistes issus de la pensée matérialiste du XVIIIième siècle et d'un jusnaturalisme moderne qui se voulait détaché de tout contexte historique, ne peut tolérer, sous peine d'accepter à terme sa propre disparition, une recherche féconde et profonde sur les archétypes du droit en Europe. Un retour systématique à ces archétypes ruinerait également les assises politiques de la France (et d'autres pays), qui sont de nature coercitive en dépit du discours “démocratique” qu'ils tiennent à titre de pure propagande.
Dans le contexte français, la ND, par les maladresses de de Benoist et par sa manie des iconographies d'inspiration nationale-socialiste dont il truffait ses journaux, a permis aux vigilants de l'ordre jacobin et républicain de continuer à jeter le soupçon sur toutes les recherches indo-européanisantes. Il leur suffisait de dire: “voyez cet éditeur de chromos nazis dans des revues intellectuelles qui ne cessent de parler des Indo-Européens, il n'y a tout de même pas de fumée sans feu...”. En effet, dans le contexte des années 70, la confluence possible de certains linéaments contestataires de la “pensée 68” (chez Deleuze et Foucault) et d'un recours aux archétypes du droit, aurait pu contribuer à fonder un droit de rupture, tout à la fois futuriste et archétypal, en dépit de l'anti-juridisme fondamental de Foucault. En ultime instance, cet anti-juridisme foucaldien n'est rien d'autre qu'un anti-positivisme dans la mesure où le positivisme s'était entièrement emparé du droit surtout en France mais aussi ailleurs en Europe. Le positivisme avait édulcoré et figé le droit, qui était ainsi devenu mécanique et légaliste, suscitait une inflation de lois et de règlements, n'acceptait plus de modifications souples et d'adaptations, sous prétexte que la “loi est la loi”. En jetant un discrédit total sur les études indo-européennes (parce qu'elles contenaient en germe une contestation de l'ordre juridique positiviste de la République), en posant systématiquement l'équation « études indo-européennes = nouvelle droite = néonazisme », les journalistes-laquais du régime bloquent à titre préventif toute contestation des structures archaïques de la France républicaine. L'histoire devra établir si de Benoist a oui ou non joué sciemment le rôle de la “tête de Turc”, pour permettre cet exorcisme permanent et donner du bois de rallonge à la vieille république...
Ignorance de l’héritage de Savigny
Carl Schmitt s'est insurgé contre le positivisme et le normativisme juridiques, contre leur rigidité et leur fermeture à toute rénovation: sa position se veut “existentialiste”. Ainsi le droit, l'Etat, une constitution, une institution sont autant de corps ou d'entités vivantes, animées de rythmes lents, qu'il s'agit de capter, d'accepter, de moduler et non d'oblitérer, de refuser et d'éradiquer. Ces rythmes dépendent du temps et de l'espace, de l'histoire et de la tradition. Schmitt s'inspire ici de Friedrich Carl von Savigny. Ce juriste allemand du début du XIXième siècle, spécialiste du droit romain, voyait dans le droit un continuum, légué par les ancêtres (mos majorum), sur lequel on ne pouvait intervenir au hasard et subjectivement sans provoquer de catastrophes. Savigny concevait le droit comme un héritage et rejetait les manies modernes à vouloir imposer un droit, des lois et des constitutions inventées ex nihilo, au départ d'a priori idéologiques, de préceptes moraux ou éthiques adoptés en dehors et en dépit de la continuité historique du peuple. Savigny s'est opposé au code napoléonien, d'essence révolutionnaire, et aux constitutions écrites qui figeaient le flux vivant du Volksgeist (cf. Friedrich Karl von Savigny. Antologia di scritti giuridici, a cura di Franca De Marini, Il Mulino, Bologna, 1980).
Savigny, ses maîtres Gustav Hugo et Philipp Weis, partaient du principe que toute codification constituait une fausse route, était susceptible de déboucher sur l'arbitraire et la tyrannie. Le droit vit de l'histoire et ne peut être créé arbitrairement par des législateurs-techniciens au gré des circonstances ni imposé de force au peuple. Le droit se forme par un long processus organique, propre à chaque peuple. Toute intervention arbitraire dans le continuum du droit interrompt le processus naturel de son développement; même dans une phase de déclin, quand le pouvoir est obligé de recourir à des décrets coercitifs, la codification est dangereuse car elle fige et stabilise un droit corrompu, désormais privé de force vitale. La fixation et la stabilisation du droit en phase de décadence perpétuent des régimes foireux voire iniques. Carl Schmitt écrit dans son célèbre texte qui rend hommage à Savigny et déclare que son œuvre est “paradigmatique”: «Le droit en tant qu'ordre concret ne peut être détaché de son histoire. Le véritable droit n'est pas posé (gesetzt) [comme une loi], mais émerge d'un développement non intentionnel (absichtslos) ... Le positivisme, venu ultérieurement, ne connaît plus ni origine ni patrie (Heimat). Il ne connaît plus que des causes ou des normes fondamentales posées comme si elles étaient des hypothèses. Il veut le contraire d'un droit dépourvu d'intentionnalité; son intention ultime est de dominer et d'obtenir en tout la “calculabilité”».
Pour Ulrich E. Zellenberg, qui s'inscrit aujourd'hui dans le sillage de Savigny et Schmitt, le droit «s'exprime dans les mœurs de la communauté, qui sont perçus comme corollaires de la volonté de Dieu. Le droit et la justice sont dès lors une seule et même chose. Il n'y a pas de différence entre le droit positif et le droit idéal. Comme le Prince et le juge ne sont pas appelés à créer un droit nouveau, mais à garantir le droit déjà existant, les revendications individuelles, les décisions à prendre dans les cas concrets et les innovations de fait se légitimisent comme des recours au droit ancien, ou comme le rétablissement de son sens propre» (cf. Ulrich E. Zellenberg, « Savigny », in : Caspar von Schrenck-Notzing, Lexikon des Konservativismus, Stocker, Graz, 1996).
Défense de la « societas civilis » et droit de résistance
Le droit historique, acquis à la suite d'une longue histoire et non fabriqué par des légistes professionnels, implique a) la défense de la societas civilis et b) le droit de résistance à l'arbitraire et à la tyrannie. La volonté du positivisme de légiférer à tout crin met le droit à la disponibilité des seuls légistes professionnels. Conséquence: le droit devient l'instrument d'une minorité cherchant à asseoir son pouvoir, par ingénierie sociale. Même les “institutions” comme la famille, le mariage, etc. sont à la merci des interventions arbitraires d'une caste isolée de la societas civilis. Pour Schmitt, les “ordres concrets”, les institutions anthropologiques (selon la définition qu'en donne Gehlen), sont des bastions de résistance contre la frénésie légiférante des législateurs positivistes; ces “ordres concrets” imposent des limites à l'ingénierie sociale et juridique, mettent un frein au flux normatif et obligent les légistes à accepter les règles des ordres concrets sous peine de les détruire. La rage légiférante des légistes positivistes (Schmitt: “les législateurs motorisés”) détruit la confiance des citoyens dans le droit, qui perd toute autorité et toute légitimité.
Sur le plan historique, la réaction de Savigny s'oppose tout à la fois à l'école philosophique de Christian Wolff (1679-1754), qui inspire l'absolutisme rationalisant, et aux partisans de l'adoption systématique du code napoléonien (Anton Thibaut, 1774-1840). Le droit germanique prévoit le droit de résistance à la tyrannie: au moyen-âge, ce droit s'inscrit dans les obligations réciproques du seigneur et du vassal, puis dans le droit des états de la société de s'opposer à la violence arbitraire du Prince. Avec Althusius, le droit de résistance est le droit de la societas civilis à s'opposer à l'absolutisme.
Cette brève esquisse des principes de droit de la pensée dite “conservatrice” montre que le discours de la ND aurait dû s'infléchir vers une défense tous azimuts de la liberté populaire contre les instances bodiniennes, coercitives et jacobines de la République française. Sur le plan culturel, cette démarche, renouant avec la défense conservatrice, anti-absolutiste et anti-révolutionnaire de la societas civilis, aurait dû recenser, commenter et glorifier toutes les étapes et les manifestations de révolte populaire en France contre l'arbitraire de l'Etat. De même, la ND aurait dû participer à la définition d'un droit ancré dans l'histoire, comme Savigny l'avait fait pour l'Allemagne. Pour un mouvement qui prétendait mettre la culture au-dessus de la routine politicienne, de l'économie ou même du social, il est tout de même étonnant de ne jamais avoir rien publié sur la notion de Kulturstaat chez Ernst Rudolf Huber, partiellement disciple de Schmitt car il était fasciné par la notion d'“ordre concret”. Le Kulturstaat de Huber est un Etat qui tire son éthique (sa Sittlichkeit) et ses normes d'une culture précise, héritage de toutes les générations précédentes. Cette culture est une matrice prolixe, ouverte, fructueuse: elle est une “source” organique inépuisable tant qu'on n'attente pas à son intégrité (Savigny et, à sa suite, Schmitt insistaient énormément sur cette notion de “source”/“Quelle”, sur l'image parlante de la “source” en tant que génératrice du droit). La notion de source chez Savigny et Schmitt, la notion de “culture” chez Huber interdisent de voir dans le droit et dans l'Etat de pures intances instrumentales. Le Kulturstaat n'est pas un Zweckstaat (un Etat utilitaire, sans continuité, sans ancrage territorial, sans passé, sans projet). Le rôle de l'Etat est de protéger l'intégrité de la “source”, donc de la culture populaire. Telle est la première de ses tâches. Par suite, la culture n'est pas quelque chose qui relève de l'“esprit de fabrication”, de la “faisabilité” comme on dit aujourd'hui, elle génère des valeurs intangibles, lesquelles à leur tour fondent l'idée de justice et justifient l'existence de secteurs non marchands, comme l'éducation (cf. Max-Emanuel Geis, Kulturstaat und kulturelle Freiheit. Eine Untersuchung des Kulturstaatskonzepts von Ernst Rudolf Huber aus verfassungsrechtlicher Sicht, Nomos-Verlagsgesellschaft, Baden-Baden, 1990).
Sur base de cette approche du droit, que possèdent les écoles conservatrices allemande, autrichienne, italienne et espagnole, la ND aurait pu :
- développer une critique des instances révolutionnaires institutionalisées en France et dans les pays influencés et meurtris par le républicanisme révolutionnaire et l'impact du code napoléonien;
- aligner ce pays sur les préoccupations politiques de son environnement européen (car l'organicisme se répercute finalement sur l'ensemble des familles idéologiques, au-delà des clivages politiciens);
- préparer au niveau européen une contre-offensive organique bien étayée;
- élaborer des correctifs contre les miasmes de la centralisation, de l'utilitarisme anti-culturel, de la déconstruction des secteurs non-marchands au niveau eurocratique, etc.
Savigny, école historique, Bachofen
Schmitt, dans son plaidoyer pour un recours aux principales idées-forces de Savigny (cf. «Die Lage der europäischen Rechtswissenschaft», in: Verfassungsrechtliche Aufsätze, Berlin, 1973), fait explicitement le lien entre la démarche de Savigny dans le domaine du droit, d'une part, et celle de Gustav von Schmoller et de son “école historique” en économie, d'autre part. En outre, Schmitt annonce la nécessité de se replonger dans l'étude de la Tradition, en évoquant notamment Bachofen et l'approfondissement des études de philologie classique. Celles-ci nous donnent une image désormais très précise de la plus lointaine antiquité européenne. Les sources les plus antiques du droit nous apparaissent dans toute leur densité religieuse. Grâce aux efforts des philologues, les visions édulcorées de l'antiquité classique qu'un certain humanisme scolaire avait véhiculées, disparaissent dans les poubelles de l'histoire. Schmitt écrit: «Il ne s'agit nullement aujourd'hui de revenir en arrière à la façon des réactionnaires, mais de conquérir une immense richesse de connaissances nouvelles, qui pourront s'avérer fructueuses pour le présent dans le domaine des sciences du droit; nous devons nous emparer de ces richesses et les mettre en forme» (op. cit., p. 416). Dans cet appel de Schmitt, le lien entre les sciences juridiques et la nouvelle philologie classique, considérablement enrichie depuis Bachofen, est clairement établi. Schmitt légitimise dans le discours politologique le recours à la Tradition. L'héritage philologique est mobilisé dans le but de donner à la Cité un droit correspondant à son histoire et à ses origines, à ses sources. La ND a mal utilisé cet héritage philologique, surtout en répétant et en paraphrasant Dumézil, en le mêlant à certaines intuitions d'Evola, lui-même inspiré par Bachofen, mais sans jamais le mobiliser pour proposer un autre droit, pour opposer, au droit républicain et révolutionnaire institutionnalisé, un droit véritablement conforme aux sources européennes du droit. Alain de Benoist a raté le coche: il a fait de son pur discours culturel (cultureux!) un but en soi. Il a failli à sa mission. Il a trahi. Il a servi l'adversaire. Par ses maladresses et son absence de suite dans les idées, par sa négligence du message de Carl Schmitt, il a servi les ennemis de la population française, les ennemis de l'Europe, les ennemis des peuples européens.
Schmitt, en réclamant une recherche bi-disciplinaire, unissant le droit et la philologie d'après Bachofen, entendait donner un instrument à l'élite future de l'Europe: si le droit est demeuré coutumier en Angleterre mais reste aux mains des possédants de la société civile, si le droit est aux mains de fonctionnaires-légistes en France, auxquels fait face la société civile aidée de ses avocats trop souvent impuissants, l'Allemagne, dans l'esprit de Savigny, doit aligner une phalange de professeurs de droit et de philologues, capables de juger selon le sens du droit et non selon les formes et les règles abstraites. Cette phalange de juristes traditionnels et de philologues remplacerait l'ancienne “Chancellerie impériale”, chargée d'arbitrer les diversités du Saint-Empire. Schmitt appelait ainsi de ses vœux une “première fonction” souveraine, organisée selon le projet de Savigny. Cette “première fonction” utiliserait les méthodes organicistes et historiques. La ND, si elle avait été dirigée par des hommes compétents, aurait eu la chance de devenir une telle élite. Malheureusement, elle ne s'est pas concentrée sur les tâches que Schmitt assignait à celle-ci. Elle a pratiqué un occasionalisme systématique et ridicule, où toutes les occasions de “faire le malin” étaient bonnes, de briller dans les salons parisiens peuplés d'imbéciles aux cerveaux pourris par les folies révolutionnaires et jacobines, par l'“esprit de fabrication” (Joseph de Maistre !), par les slogans les plus absurdes, dont Bernard-Henri Lévy et toute la clique des vedettes médiatisées ont donné un bel exemple lors de la crise bosniaque. Tel était l’objectif prioritaire de de Benoist : réussir des coups médiatiques sans lendemain. Face à cette basse-cour parisienne, la ND n'a pas opposé un projet clair: au contraire, elle a présenté un véritable “mouvement brownien” de brics et de brocs d'idées diverses, sans liens apparents entre elles. Du coup, elle ne faisait pas le poids devant ceux qui avaient une longueur d'avance sur elle dans le monde “intellectuel” (?) parisien.
Un droit familial et collégial
Le recours aux études indo-européennes aurait également pu dépasser le clivage qui avait ruiné la postérité de Savigny en Allemagne: l'opposition stérile entre romanistes et germanistes, c'est-à-dire entre partisans du droit romain et partisans du droit germanique. Aujourd'hui, la philologie et les études indo-européennes indiquent au contraire une source commune, plus ancienne, propre à toutes les grandes traditions populaires européennes, et se situant au-delà de ce clivage artificiel romanité/germanité. Tel a été l'apport d'Emile Benveniste, du Géorgien Thomas V. Gamkrelidze, du Russe Vjaceslav V. Ivanov, de Dumézil et de Bernard Sergent. Dans tous ces travaux qui révèlent à nos contemporains les matrices culturelles du monde indo-européen, une part importante de ces volumes respectables traite des “institutions”. Gamkrelidze et Ivanov sont très précis pour tout ce qui concerne les liens sociaux, base du droit privé et du droit public, de l'antiquité à nos jours. Si la ND s'était référée à ces corpus, plutôt que de tirer de Dumézil une sorte de sous-mythologie guerrière, tout juste digne des jeux de rôle pour adolescents désorientés, elle n'aurait jamais essuyé le reproche de “national-socialisme”.
Avec un apport philologique solide, la ND aurait été mieux armée face à ses adversaires. Le droit primitif indo-européen est familial et collégial, il implique la liberté, le droit de résistance à la tyrannie, la délibération démocratique: la ND aurait eu beau jeu de ruiner les arguments de ses adversaires républicains en France. En critiquant tout apport philologique, ceux-ci se rangeaient automatiquement dans le camp des partisans de l'absolutisme, de la coercition, de la rupture entre société civile et appareil d'Etat. La ND aurait arraché leurs masques avec délectation: ces faux démocrates sont de vrais terroristes et le républicanisme institutionalisé n'est pas démocratique, il est même le pire des contraires de la démocratie. La ND aurait pu confisquer pour elle seule le label de “démocratie”. Schmitt conseillait même d'appeler Tocqueville à la rescousse... Effectivement, devant la phalange regroupant Savigny, Tocqueville, Schmoller, Schmitt et les philologues indo-européanisants, le discours républicain serait bien rapidement apparu pour ce qu'il est: un bricolage sans consistance.
Enfin, la notion de Volksgeist apparait certes comme typiquement allemande. Les savants allemands ont étudié en profondeur, de Herder aux frères Grimm, les tréfonds de l'âme populaire germanique. Mais, en dehors de la sphère culturelle et linguistique germanique, les philologues slaves ont pris le relais et ont exploré à fond les coins et les recoins de l'âme slave. Une telle demarche a été entreprise pour la France par quelques esprits aussi hardis que brillants (Van Gennep), mais cet acquis doit à son tour être politisé et instrumentalisé contre les partisans républicains de la “cité géométrique” (ce terme est de Georges Gusdorf, autre penseur capital qui a été totalement ignoré par de Benoist ; on peut légitimement se poser la question ; pourquoi cet ostracisme ?).
Entrelacs très dense de juridictions et de traditions
L'ancienne France n'avait peut-être pas de constitution, mais elle n'était pas un désert juridique. Au contraire: l'histoire des droits communaux ou municipaux, les structures juridiques des paroisses des provinces de France, les assemblées organisées ou non par des syndics permanents ou élus, la diversité des instances de justice, le régime de la milice populaire, l'assistance publique et l'organisation des hôpitaux et des maladreries, la fonction des prudhommes, les protections accordées à l'agriculture, sont autant de modèles, certes complexes, qui expriment la vitalité du petit peuple et sont les garants de ses droits fondamentaux face au pouvoir.
C'est dans ces entrelacs très denses de juridictions et de traditions juridiques que s'est épanouie la France rabelaisienne, la fameuse gaîté française (cf. Albert Babeau, Le village sous l'Ancien Régime, rééd., Genève, 1978, éd. or., Paris, 1878). Plutôt que d'encourager les fantasmes douteux et vikingo-germanolâtres de certains adolescents fragiles (ou de gâteux précoces...), la ND française aurait dû renouer avec cette France joyeuse des libertés villageoises, même si le type du gai Gaulois, païen, paillard et libertaire ne correspond pas au personnage sinistre, lugubre, grognon et tyrannique qui orchestre aujourd’hui cette ND moribonde, tenaillé par un ressentiment hargneux de vieille femme délaissée. Le recours à la vieille France rabelaisienne aurait été détonnant si la ND l'avait couplé à une exploitation idéologique efficace de cette distinction capitale qu'avait opérée l'ethnologue Robert Muchembled entre la “culture du peuple” et la “culture des élites”. La culture du peuple est fondamentalement païenne (c'est-à-dire paysanne et tournée vers les rythmes naturels auxquels nul ne peut échapper), elle est axée sur la diversité du réel et sur les innombrables différences qui l'animent. La culture des élites est étriquée, schématisée, géométrique avant la lettre, répressive, “surveillante et punissante” (pour reprendre les expressions favorites de Michel Foucault), en un mot, scolastique. Le pari pour la culture populaire rabelaisienne impliquait aussi de prendre parti
- pour les révoltes régionales contre la “cité géométrique” montée par Siéyes et les révolutionnaires ;
- pour la diversité des expressions populaires dans les anciennes provinces de France ;
- pour les révoltes populaires en général, que ces révoltes soient paysannes, régionalistes, syndicales ou ouvrières.
Cette triple prise de parti permettait de renouer avec la notion de “droit de résistance”.
Mais hélas: l'option droitière, le désir irrépressible (mais jamais réalisé!) de “manger à la table des puissants”, de servir de mercenaires aux droites du pouvoir, de débiter inlassablement des discours anticommunistes ineptes, de s'allier avec des politiciens droitiers véreux qui étalent leur prose dans la presse bourgeoise, de vouloir à tout prix collaborer à cette presse (parce qu'elle paie bien), empêchaient de jouer cette double carte de la défense et de l'illustration de la vieille France populaire et rabelaisienne, de revendiquer le droit de résistance de la societas civilis, de défendre le peuple réel contre ses oppresseurs, légistes ou militaires. Mais les puissants n'ont pas accepté le mercenariat proposé, le gourou de la ND a été remercié; c'est alors que l'on a assisté à un aggiornamento de la ND, à une tentative de s'ouvrir sur la gauche intellectuelle, ses cénacles, ses salons. Mais comment entrer dans ce monde-là, quand on revient piteusement d’en face, quand on a voulu se faire le gendarme intellectuel d'une fausse droite qui n'est jamais rien d'autre que la vraie gauche républicaine institutionnalisée?
Créer une « chancellerie impériale »
Schmitt, dans son projet de reconstituer une sorte de “chancellerie impériale” en créant son élite de juristes traditionnels et de philologues, gardiens du plus ancien passé de l'Europe, n'entendait pas jeter brutalement tout l'édifice juridique révolutionnaire-institutionalisé à terre. Il jetait un soupçon sur la validité et surtout sur la légitimité de cet édifice, il constatait que l'inflation de lois et de réglements, que la fixation sur les normes avaient conduit à un totalitarisme insidieux, à une tyrannie des normes, à l'émergence d'une cage d'acier institutionnelle rendant aléatoires les changements et les adaptations nécessaires. Or, en France, le gaullisme des années 60, pourtant héritier du républicanisme français, gère une constitution, celle de la Vième République, qui a reçu indirectement, via René Capitant, l'influence de Schmitt et de l'école décisionniste allemande. L'influence de Schmitt a parfois été considérée comme “étatiste”; on a dit qu'elle servait à soutenir les vieux Etats de modèle occidental et leurs appareils de contrôle et de répression. C'est là une interprétation schématisante de son œuvre. Nous l'avons vu en analysant son plaidoyer pour un retour à la démarche de Savigny. La societas civilis et ses ordres concrets sont, pour Schmitt, des instances et des valeurs d'ordre et de discipline, sont les réceptacles de vertus créatrices. Les constitutionnalistes de la Vième République, en suivant la logique de Schmitt, ont dû parvenir au même constat. Et admettre que le républicanisme français et ses imitateurs en Europe généraient une coupure problématique et perverse entre la societas civilis et les appareils d'Etat. Dans les années 60, les politologues gaulliens ont réfléchi à la question: le hiatus entre societas civilis et appareils d'Etat devait être surmonté par trois innovations réellement fécondes: a) la participation dans le domaine économico-industriel, b) la création d'un Sénat des professions, hissant l'élite de la societas civilis au plus haut niveau de l'Etat et de la représentation politique; c) la création d'un Sénat des régions, permettant de redonner à tous les territoires de l'Hexagone une représentation directe sur une base locale, contournant ce que Gusdorf avait appelé l'“ivresse géométrique de la France en carrés” (in La conscience révolutionnaire. Les idéologues, Paris, 1978).
Malgré ses dénégations, malgré ses déclarations réitérées de vouloir sortir du ghetto de l'extrême-droite, de Benoist n'a jamais cessé d'être accroché par toutes sortes de fils à la patte à ses petits copains de l'ex-OAS qui faisaient de l'anti-gaullisme un dogme et étaient tellement aveuglés par leurs ressentiments qu'ils ne constataient pas les mutations positives du gaullisme dans les années 60. Certes, de Benoist a un jour écrit un bon article dans le Figaro-Magazine, où il affirmait être gaullien plutôt que gaulliste. Mais la transition qu'il semblait annoncer par cet article en est restée là... Seul Europe, Tiers-Monde, même combat constitue une tentative d’Alain de Benoist de sortir concrètement du duopole de la Guerre Froide, mais, hélas, ce livre n’a pas eu de suite, n’a pas été remis à jour après 1989. Armin Mohler avait enjoint les Allemands à parier sur l’alliance française et l’appui aux « crazy states » hors d’Europe. Alain de Benoist lui a emboîté le pas. Mais où est la recette pour l’après-perestroïka ? Quelle théorie sur la Russie ? Alain de Benoist est fidèle à sa maladie : rien que les idées abstraites et les éthiques désincarnées, ses pièces de meccano. Pour le reste, fuite hors de l’histoire, fuite hors du monde.
Droit de résistance et citoyenneté active
Enfin, si la ND avait renoué avec la notion —pourtant éminemment conservatrice— de “droit de résistance”, elle n'aurait eu aucune peine à déployer un projet de citoyenneté active (et participative), et à défendre les secteurs non-marchands (éducation, secteur médical) battus en brèche par l'économicisme ambiant. Aujourd'hui, les quelques références à une citoyenneté active dans les textes de la nouvelle droite semblent tomber du ciel, semblent n'être qu'une manie et qu'un caprice passager, que les vrais partisans de la citoyenneté active ne prennent pas au sérieux. Mais nous, Sampieru, Mudry et moi-même, qui avions revendiqué très tôt cette orientation vers le peuple réel, étions traités par le gourou de “trotskistes” ou d'“écolos”, de lecteurs de la revue Wir Selbst, jugée à l'époque dangereusement “gauchiste”. Aujourd'hui, le gourou est lui-même devenu, paraît-il, un “trotskiste” et un “écolo”, il flatte bassement mais sans résultat le directeur de Wir Selbst, alors, pour dédouaner ses anciennes injures, il a fait écrire à l'un de ses serviteurs italiens une lettre insultante qui nous campait comme les “teste matte della Mitteleuropa” (les têtes brûlées de la Mitteleuropa). Vouloir la subsidiarité, le rétablissement du droit de résistance, vouloir un droit plongeant dans l'humus de l'histoire, être fidèles à Carl Schmitt, est-ce un programme capable de séduire des “têtes brûlées”? (7).
Lacunes économiques et géopolitiques
Enumérer les multiples errements de la ND française exigerait un livre entier. En guise de conclusion, signalons encore que l'économie a été une parente pauvre de la “révolution métapolitique” de la secte GRECE. Rien de sérieux n'a été entrepris pour faire connaître dans un public large les thèses des économistes hétérodoxes. En matière de géopolitique, on a vaguement évoqué un binôme franco-allemand (insuffisant dans l'Europe actuelle) et répété un anti-américanisme incantatoire, plus éthique que pratique. Alain de Benoist n'a jamais reproché aux Américains de fabriquer des “traités inégaux” avec toutes les autres puissances de la planète, n'a jamais analysé sérieusement le déploiement de la puissance américaine depuis l'indépendance des Etats-Unis: lors d'un colloque du GRECE, devant le public abasourdi, son argument principal ne fut-il pas de dire: “la sodomie entre époux est passible des tribunaux dans certains Etats de l'Union”. Et de Benoist, immédiatement après avoir prononcé cette phrase historique, regardait son public, semblait attendre une réaction. Les participants regardaient leurs chaussures d'un air géné. Et de Benoist a continué à parler, passant de la sodomie à autre chose, comme les polygraphes passent de la physique nucléaire à la bande dessinée. L'argument obsessionnel et pathologique de la sodomie épuise-t-il toute critique de l'américanisme?
Les litanies anti-américaines, justifiées par l'esthétisme, par l'éthique guerrière européenne, par l'hostilité au christianisme en général et au christianisme protestant américain en particulier, par la volonté obsessionnelle de défendre la liberté de se sodomiser en rond n'apportent rien de concret. Ligues de vertu puritaines et hystériques et cénacles pansexualistes et promiscuitaires ne servent jamais que de dérivatifs: pendant que les uns et les autres vocifèrent et s'agitent, ils ne se mêlent pas du fonctionnement de la Cité, au vif plaisir des dominants. La CIA peut dormir sur ses deux oreilles.
La CIA peut dormir sur ses deux oreilles…
La ND, qui se pose en théorie comme un mouvement pour la défense et la sauvegarde de l'Europe, n'a jamais formulé une géopolitique continentale d'un point de vue français. On connait les visions mitteleuropéennes de la géopolitique allemande, voire les projets de Kontinentalblock dérivés de la pensée de Haushofer. Jamais la ND française n'a vulgarisé les acquis de la géopolitique française contemporaine: aucun texte n'a été publié sur les ouvrages de Hervé Coutau-Bégarie, de Pascal Lorot, de François Thual, de Jacques Sironneau, d'Yves Lacoste (un “gauchiste”...), de Michel Foucher (un méchant qui a travaillé pour Globe...), de Zaki Laïdi (un “Arabe”...), de Michel Korinman, etc. alors que, dans toute l'Europe, ces travaux sont pionniers et inspirent les écoles géopolitiques en place. Pire, jamais la ND n'a emboîté le pas à Jordis von Lohausen qui demandait aux Français et aux Allemands de défendre l'Europe “dos à dos”, ce qui impliquait un engagement français sur l'Atlantique, une défense de la marine française, traditionnellement européiste et vaccinée contre les excès de germanophobie qui ont souvent agité les milieux militaires. La ND parisienne a-t-elle défendu les marins français et leurs projets, a-t-elle recommandé la lecture des écrits théoriques de l'amirauté? Non. La CIA peut dormir sur ses deux oreilles. La Navy League aussi. La germanophilie et l'européisme germanisant de la ND de de Benoist sont des leurres, des attrape-nigauds, des miroirs aux alouettes. Une politique germanophile et européiste en France est une politique de soutien à la marine du pays et implique un engagement civil et militaire dans l'Atlantique; l'Allemagne réorganise la continent avec la Russie; la France garde la façade atlantique. Dos à dos, disait Lohausen.
En philosophie, les carences de la ND sont effrayantes. Alors qu'en Allemagne, terre par excellence de la philosophie, tous recourent aux philosophes français contemporains pour court-circuiter les routines qui affligent la pensée allemande d'aujourd'hui, que des fanatiques tenaces cherchent à aligner sur les critères les plus étriqués de la “political correctness”, la ND parisienne a délibérément ignoré les grands philosophes français contemporains. J'ai même entendu dire et répéter dans les rangs de la ND qu'il n'y avait plus de “grands philosophes” aujourd'hui, mis à part de Benoist, bien sûr, le génie d'entre les génies! On ne saurait être plus à côté de la plaque!
Enfin, une stratégie métapolitique ne saurait être purement esthétique, ni virevolter au gré de tous les vents ni présenter ses arguments dans le désordre à la façon du “mouvement brownien” des particules. Une stratégie métapolitique ne peut se placer en-deçà de l'effervescence politicienne et partisane, que
- si elle se donne pour tâche de retrouver et de renouer des fils conducteurs,
- si elle capte et repère des forces dans le grouillement du réel ;
- si elle procède à un travail d'archéologie des institutions.
Les méthodes d'un tel travail, les philosophes français nous les ont léguées. Encore faut-il ne pas les avoir ignorés...
En bref, pour nous, entre autres textes de référence pour orienter notre travail, nous avons choisi celui de Schmitt, commenté dans cet exposé. Ensuite, nous posons des objectifs clairs, nous ne percevons pas le travail théorique comme un jeu de salon. Ces objectifs sont:
- restauration d'un droit européen basé sur ses racines et ses sources les plus anciennes (référence à Savigny).
- restauration des droits des communautés réelles qui font le tissu de l'Europe.
- restauration d'une “chancellerie impériale” capable d'harmoniser cette diversité juridique, corollaire de la diversité européenne (et cette chancellerie impériale doit compter des hommes et des femmes de toutes nationalités, capables de maîtriser plusieurs langues européennes).
- maintenir les systèmes de droit ouverts, afin d'éviter les fanatismes normativistes et toute forme de “political correctness”.
- prévoir une instance décisionnelle en cas de danger existentiel pour l'instance politique (nationale ou européenne).
- étude systématique des traditions d'Europe, comme Schmitt nous l'a demandé.
- coupler cette restauration juridique et cette méthode historique à un programme hétérodoxe en économie (la référence que fait Schmitt à l'école historique de Gustav von Schmoller).
Les remarques de Kowalski
Ce programme est vaste et interpelle quasiment toutes les disciples du savoir humain. Mais ce progamme ne saurait en aucun cas s'abstraire du mouvement de l'histoire. Et s'encombrer du ballast inutile des fantasmes, des images d'Epinal, des vanités personnelles... Pour terminer, signalons tout de même une hypothèse sur la ND, formulée par un politologue allemand, Wolfgang Kowalsky (in: Kulturrevolution? Die Neue Rchte im neuen Frankreich und ihre Vorläufer, Opladen, 1991). Kowalsky, après avoir analysé l'évolution des idéologies politisées en France, de mai 68 à l'avènement de Mitterrand, après avoir examiné le rôle de la ND dans cette longue effervescence, concluait en disant que la “métapolitique” de la ND, plus exactement son programme de “révolution culturelle”, était une arme contre la société civile (Kulturrevolution als Barriere gegen die Zivilgesellschaft). Certes, l'argumentation de Kowalsky est confuse, il confond allègrement ND et FN, croit en un “partage des tâches” entre ces deux formations (ce qui est une lubie des enquêteurs anti-fasciste professionnels sans profession définie). Néanmoins, la question de Kowalsky doit être posée, mais différemment: vu l'absence totale de consistance des discours de la ND sur le droit, l'économie, la géopolitique, les relations internationales, la staséologie (l'étude des mouvements sociaux; ce néologisme est de Jules Monnerot), l'histoire, l'organisation de la santé, les projets pratiques en écologie et en approvisionnement énergétique, etc., nous sommes bien obligés, à la suite de Kowalsky, de constater que la societas civilis, espace réel de la civilisation ou de la culture européenne, ne trouve dans la ND aucun argument pour assurer sa défense contre l'emprise croissante d'un monde politique totalement dévoyé, qui n'a plus d'autre projet que de se perpétuer, en s'auto-justifiant à l'aide d'arguments vieux de deux ou trois siècles, en pillant la societé civile par une fiscalité délirante, en la contrôlant par la presse et les médias stipendiés, en surveillant et en punissant ceux qui osent contester ce pouvoir inique (emprisonnement de fédéralistes français, poursuites judiciaires contre des indépendants contestant le système de sécurité sociale, contrôle de la fonction médicale, etc., toutes pratiques que l'on trouve évidemment dans d'autres pays). Kowalsky exagère sans nul doute en suggérant que de Benoist a construit pour toute la France une barrière contre la société civile, pour protéger et perpétuer le système bodinien, en place depuis Richelieu et les jacobins. Le rôle de de Benoist, s'il a vraiment été un dérivatif, a été plus modeste: empêcher que dans les milieux dits de “droite”, des argumentaires en faveur de la décentralisation, du fédéralisme, de la défense de la société civile, de la réforme juridique, judiciaire et constitutionnelle, qu'un retour aux projets gaulliens de participation et de sénat des professions et des régions (oubliés depuis le départ et la mort du Général), ne se cristallisent et ne se renforcent, afin de défier sérieusement le système en place et d'opter pour une révolution européenne armée d'un programme cohérent. La “métapolitique” selon de Benoist n'a été qu'un rideau de fumée, qu'un dérivatif, n'a servi qu'à désorienter de jeunes étudiants en ne les mobilisant pas pour un travail juridique, économique, sociologique et philosophique politiquement fécond à long terme. Pistes perdues... Rendez-vous manqués… Aveuglement ou sabotage ? L’Histoire nous l’apprendra…
Robert STEUCKERS,
Forest, février 1998.
(1) Roland Gaucher, qui reconnaît pleinement les mérites du GRECE, lui reprochant toutefois une méconnaissance de la stratégie de Gramsci, sait aussi croquer avec humour les travers que nous dénonçons par ailleurs : « Je me souviens ici d’une intervention d’Alain de Benoist, qui m’avait frappé lors d’un colloque organisé par l’Institut d’études occidentales. Quand vint son tour de parler, partant du fond de la salle, il s’avança, raide et gourmé, un rouleau de papier à la main. Ses partisans se levèrent pour l’acclamer — il n’était, à l’époque, guère connu mais il avait déjà su constituer sa clique et sa claque. Je n’ai pas retenu grand chose de son intervention, sinon l’expression d’un rejet radical de l’histoire de Job sur son fumier. Selon lui, elle ne nous touchait pas. Elle était radicalement étrangère à la cultue européenne » (Roland Gaucher, « Les Nationalistes en France, tome 1, La traversée du désert (1945-1983), p. 157). Plus loin, Gaucher se fait plus caustique encore : « J’en finirai sur cette aspect du GRECE avec une anecdote qui me fut un jour contée par le regretté Bonomo aujourd’hui décédé, excellent reporter, d’origine pied-noir. Bonomo, il y a une quinzaine d’années (peut-être à l’époque de la création du « Fig-Mag ») avait servi de pilote à Alain de Benoist et à un de ses amis pour un raid vers le Cap Nord. Bonomo conduisait la voiture, les deux autres étaient assis à l’arrière. Et au fur et à mesure que le temps passait, il était clair que se développait chez ces deux Nordiques un sérieux complexes de supériorité à l’égard de ce Méditerranéen, poisson de second choix. On parvint enfin au terme du voyage, en un point X… que la tradition nordico-païenne avait sans doute désigné : - Alors, raconte Bonomo, de benoist et son pote jaillissent de la voiture. Et, frappant de leurs petits poings leurs maigres bréchets ils avancent jusqu’au bord de la falaise et ils crient, extasiés, le visage levé vers le soleil pâle : « Père ! Père ! C’est nous ! Nous sommes revenus ! Nous t’adorons ! ». Bref, c’était gentil papa Soleil ! (op. cit., pp. 157-158).
(2) Près de Pérouse en février 91, Alain de Benoist était assis au fond de la salle de conférence, une salle magnifique de cet ancien couvent transformé en centre de séminaires, avec un parquet du XVIIIième parfaitement restauré. Il était interdit de fumer pour ne pas abîmer ce parquet. Alain de Benoist fumait, sale et dépenaillé, avec son costume fripé, sa chemise souillée et ses pompes qui n’avaient plus vu de cirage depuis des lunes. Une auréole de fumée s’élevait au-dessus de son crâne et de celui de sa maîtresse, vêtue d’un jeans troué et effiloché aux niveaux du genou et de la fesse gauche, curieux contraste avec toutes les dames italiennes présentes, dont l’élégance, ce jour-là, était véritablement époustouflante. Les copains parisiens ramenaient des bords de la Seine le look clodo. «Le style, c’est l’homme », disait Ernst Jünger et Alain de Benoist aimait à répéter cette phrase. Je l’ai aussi méditée, en le regardant, ce jour-là. Vers la moitié de mon exposé, il s’est levé pour aller fumer dehors, rappelé à l’ordre par le concierge. Il est revenu à l’entracte pour me dire : « Pourquoi t’as parlé de Derridada ?».
(3) Cette lecture partielle est une lecture anti-fasciste de Gobineau. Bon nombre d’hurluberlus de droite ont repris telles quelles les calomnies répandues sur Gobineau en France par les tenants d’un anti-racisme vulgaire, qui feraient bien mieux de s’inspirer des expériences de Gobineau en Orient pour développer un anti-racisme cohérent. Force est de constater que les vulgates anti-racistes et racistes partagent la même vision tronquée sur l’œuvre magistrale de l’orientaliste Gobineau.
(4) Cf. Hervé Luxardo, « Les paysans. Les républiques villageoises. 10ème-19ème siècle », Aubier, Paris, 1981 ; Hervé Luxardo, « Rase campagne. La fin des communautés paysannes », Aubier, Paris, 1984.
(5) et, du même coup, de refaire de Hambourg le chef-lieu du département des “Bouches-de-l'Elbe”. Fantasme qui avait déjà valu au bonhomme quelques ennuis, quand il était en poste à Bruxelles et rêvait de commencer sa marche vers l'Elbe, en conquérant la Wallonie et les Fourons.
(6) Il fallait le voir! Il aurait fait les délices d'un caricaturiste primesautier, avec ses sourcils tombant tristement, comme la chute des moustaches d'un Tarass Boulba de fête foraine, la bouche ouverte, la mâchoire pendouillant misérablement comme s'il venait d'essuyer un uppercut, les bajoues agitées de convulsions nerveuses, la lippe inférieure tremblotante, retenant à peine, grâce à la forte viscosité d'une salive nicotinée, son éternel bout de clope à moitié éteint et pestilentiel!
(7) Et que faut-il penser de la clique des vikingomanes de Paris et des environs, du fameux Chancelier du gourou, pied-noir et grande gueule, s'époumonant à hurler les pires inepties lors des universités d'été du GRECE, s'agitant à formuler un grossier paganisme de bazar oriental, et que faut-il penser de cette maîtresse vulgaire et illettrée qui faisait naguère, la clope au bec et l'invective sur la lippe, la pluie et le beau temps dans les bureaux du gourou, et que faut-il penser du Président actuel de la secte qui grenouillait dans les années 60 dans un groupe ultra-raciste (à faire pâlir Julius Streicher!) exclu avec fracas par Jean Thiriart de “Jeune Europe” à Bruxelles, d'un Président qui nous lance une fatwah du haut de sa tribune, lors du dernier colloque du GRECE, en prétendant que nous sommes de « dangereux extrémistes » ? Non, ceux-là ne sont pas des “teste matte”: c'est, paraît-il, l'avant-garde de l'élite européenne. Mais est-ce bien cette élite-là que Schmitt appelait de ses vœux? Je me permets d'en douter.
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vendredi, 14 août 2009
Qui est Jean-Claude Michéa?
Qui est Jean-Claude Michéa ? |
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« Je me définirais, pour commencer, comme un socialiste, au sens que ce mot avait au début du XIXe siècle, dans les écrits de Pierre Leroux ou du jeune Engels. En d’autres termes, je demeure fidèle au principe d’une société sans classe, fondée sur les valeurs traditionnelles de l’esprit du don et de l’entraide. Je suis par conséquent définitivement opposé à tous ces programmes de modernisation ou de rationalisation de l’existence humaine qui conduisent, sous une forme ou sous une autre, à privilégier le calcul égoïste et les formes antagonistes de la rivalité (car en tant qu’amoureux du sport je pense, bien sûr, qu’il existe aussi des formes positives d’émulation). Je me définirais ensuite – ce n’est naturellement pas incompatible – comme un démocrate radical, c’est-à-dire comme quelqu’un qui pense que la démocratie ne saurait être réduite aux seuls principes du gouvernement représentatif. Ce dernier, en effet, conduit inévitablement à déposséder le peuple de sa souveraineté au profit d’une caste de politiciens professionnels et de prétendus experts. […] Si la démocratie désigne le gouvernement du peuple, par le peuple et pour le peuple, il est évident que les gouvernements représentatifs modernes n’en constituent qu’une version extrêmement appauvrie, voire purement formelle. De ce point de vue, il serait philosophiquement plus juste de les définir comme des "oligarchies libérales", pour reprendre l’expression proposée par Castoriadis. […] Comme l’écrivait Debord, les droits dont nous disposons sont, pour l’essentiel, les droits de l’homme-spectateur. En d’autres termes, nous sommes globalement libres de critiquer le film que le système a décidé de nous projeter, mais nous n’avons strictement aucun droit d’en modifier le scénario, et cela que nous apportions nos voix à un parti de droite ou à un parti de gauche. »
Jean-Claude Michéa, interviewé par A Contretemps n°31, mai 2009 |
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jeudi, 13 août 2009
Thierry Maulnier: pour une philosophie économique
POUR UNE PHILOSOPHIE ÉCONOMIQUE
(Thierry Maulnier, Mythes socialistes, Paris : Gallimard, 1936, pp. 237-246.)
Il ne faut pas se lasser de le dire, le problème économique, n’est pas un problème séparé. On ne le résoudra pas, si l’on ne résout préalablement le problème politique dont il dépend. Toute réorganisation d’une société humaine suppose d’abord réglée la question du réorganisateur, c’est-à-dire la question du gouvernement. Et, de même qu’il est impossible d’éliminer du problème économique ses composantes politiques, de même il est impossible d’en éliminer les composantes sociales, intellectuelles, humaines. Le libéralisme du dix-neuvième siècle d’abord, le marxisme ensuite, sont nés d’une philosophie qui considérait la science économique comme la science des sciences, l’activité économique comme l’activité-mère de toutes les autres, comme un domaine intangible et sacré. Tout cela nous a coûté assez cher pour que nous ayons cessé de croire à la panacée de l’économie pure. Mais là n’est pas la question.
Les solutions économiques comportent des conditions politiques ; elles doivent se soumettre aux exigences de la justice, de l’ordre, de l’homme. Mais si l’on ne peut résoudre seul le problème économique, on peut affirmer, du seul point de vue de l’économie’ que certains régimes tendent naturellement à l’anarchie, à la misère et à la ruine ; que d’autres régimes peuvent créer l’harmonie et la prospérité. Ceux qui ont soumis la vie sociale tout entière aux exigences de l’économie pure nous ont fait beaucoup de mal. Mais ceux qui ont fait de l’économie avec les préjugés de partis ou de classes, le sentiment, la morale, nous en ont fait tout autant. N’en voit-on pas, aujourd’hui, engager jusqu’à leur religion dans les contestations sur la propriété et le travail, comme ils l’engagent dans les contestations sur la forme du gouvernement? Gardons-nous de donner à l’économie trop d’indépendance : gardons-nous aussi de lui ôter son autonomie. L’économie pas plus que la politique, n’a droit au gouvernement exclusif des hommes. Mais l’économie, comme la politique, est un domaine propre de l’activité humaine, et soumis à des lois qui ne se commandent point. Qu’on le veuille ou non, ces lois, comme celles de la biologie ou de la physique, ces lois sont pures, elles font l’objet d’une science pure, et toutes les confusions métaphysiques du monde n’y pourront rien changer.
Ceci posé, nous n’en sommes que plus à l’aise pour affirmer que le politique et l’économique, s’ils peuvent être séparés dans la méthode, ne peuvent l’être dans l’action. De même que la biologie et la psychologie, qui sont des sciences séparées, ne peuvent être pensées intégralement et dans toutes leurs composantes de façon séparée, puisqu’elles sont deux parties d’une même vie, de même en est-il de la politique et de l’économique. Vouloir restaurer l’ordre politique sans se soucier de l’ordre économique ou l’ordre économique sans l’ordre politique, est absurdité pure. L’ordre politique dans l’anarchie économique est tyrannie, puisqu’il met la force de l’État, la police, l’armée, au service d’un désordre où les faibles sont écrasés, où les abus et les spoliations restent possibles. L’ordre économique sans ordre politique est impossible, puisque lui manque la force impérative qui seule peut plier à l’intérêt commun les intérêts particuliers. La première de ces deux vérités a été trop oubliée par des conservateurs libéraux qui ont vu dans l’autorité politique le moyen de résister par la force aux revendications souvent légitimes des classes les moins favorisées ; la seconde, par les socialistes marxistes qui ont considéré l’État politique comme un instrument de lutte des classes au service de la classe dominante alors qu’il est la condition même de l’équilibre des forces sociales, et que l’harmonie sociale, loin de permettre sa disparition, exige au contraire son autorité. Le problème politique et le problème économique ne doivent pas être confondus à la légère (des erreurs comme l’économie dirigée ou le syndicalisme politique en sont la preuve), ils ne doivent pas être arbitrairement séparés.
Parlant de l’ordre économique, M. E. Bélime, dans une remarquable étude récemment parue, définit en termes clairs et ses limites et sa nécessité : « Posant tout entier sur le plan matériel, écrit-il, il ne promet pas à l’homme ce bien spirituel qu’est le bonheur. Les besoins et les désirs auxquels répond la production caractérisent son matérialisme, un matérialisme dont il connaît ainsi la relativité et les limites. Il sait que l’homme a d’autres besoins et d’autres désirs, mais il sait aussi son impuissance à les manifester librement, lorsque ses aspirations inférieures l’obsèdent. Dans l’espace étroit qu’il s’est tracé, il s’en tient aux humbles besognes qu’il s’est assignées et dont l’exact achèvement est la condition souvent nécessaire, sinon toujours suffisante, de l’accession de l’homme aux bien spirituels. »
Nous voilà prémunis en même temps contre les deux grandes causes du malaise social actuel : l’idéalisme libéral et le matérialisme collectiviste qui en a été la conséquence, méritée et fatale comme les punitions antiques. Le libéralisme du dernier siècle a consacré le divorce monstrueux, la séparation par consentement mutuel de l’esprit et du monde. Les intellectuels ont peu à peu accepté d’oublier l’étroite dépendance où l’esprit est tenu par les réalités physiques qui s’affolent, s’insurgent et l’écrasent dès qu’il cesse de les régir ; ils les ont considérées comme indignes de leur regard. Un des plus grands paradoxes de notre histoire, aux yeux de l’avenir, sera ce dédain des intellectuels pour le monde en une de ses phases de plus grave transformation, cette prétention de l’intellectuel à ne s’occuper que de soi. Qu’on le remarque bien : il ne s’agit pas ici de métaphysique. Il ne s’agit pas de faire le procès de l’idéalisme métaphysique, critique de la connaissance, doute à l’égard du monde extérieur ; mais il faut condamner sans pitié l’idéalisme pratique, la tour d’ivoire, la renonciation de l’esprit au monde des faits. Libre à chacun d’admettre que le monde physique ne soit qu’apparence : mais c’est dans cette apparence que se meut toute vie. Celui qui dédaigne les apparences, bon gré mal gré, se met au service de la mort. Marx a criblé de ses attaques cette position insensée de l’idéalisme moderne, ce superbe dédain de l’esprit, dépouillé de la direction du monde social, à l’égard de la guerre, de la misère et de l’anarchie. On ne se lassera pas de répéter que Marx et ses sarcasmes avaient raison.
Mais l’intellectuel, enfermant l’esprit en lui-même, abandonnait la direction de la société humaine au théoricien du monde matériel, à l’économiste. Pendant que l’intellectuel érigeait en principe le dédain de l’esprit à l’égard du monde social, l’économiste affirmait le dédain du monde social à l’égard de l’esprit. L’économie libérale, née au dix-huitième siècle, concevait la vie des sociétés comme celle des forces de production et des courants d’échange, attribuait aux marchands la puissance motrice de l’évolution humaine, et confondait l’histoire de l’homme et l’histoire des prix. La vie économique apparaissait peu à peu comme un monde sacré, intangible, soumis à des lois naturelles auxquelles l’homme ne pouvait prétendre imposer son autorité sans désastre. La politique, dans son ordre, gardait le droit de faire appel à l’organisation, à la prévision, à la raison ; dans le heurt des forces politiques, l’harmonie, on le reconnaissait, ne naissait pas d’elle-même. Mais, dans l’activité économique, — humaine elle aussi, pourtant, — toute intervention constructrice et régulatrice de la raison et de la volonté était sacrilège. L’ordre naissait du libre déchaînement des forces, des intérêts, des instincts. Dans l’économie, dans l’économie seule, le libre jeu de la nature n’avait nul besoin d’être corrigé par la civilisation et l’intelligence. Au progrès, à la prospérité, à l’harmonie des plus complexes sociétés humaines, l’économiste, seul souverain dans son domaine, a exigé qu’on appliquât les principes de la lutte pour la vie, de l’élimination des faibles, du laisser-faire ; les principes mêmes qu’en tous domaines la société des hommes a mission de combattre par le gouvernement, l’arbitrage et le droit ; les principes mêmes de la barbarie.
On sait les résultats présents de cette liberté forcenée donnée au producteur et au marchand par le libéralisme. Avant la réaction des faits, la réaction des hommes s’est produite, le socialisme marxiste a protesté violemment contre une pensée idéaliste, systématiquement impuissante en face des réalités humaines ; il a déclaré inadmissibles l’oppression et l’exploitation des faibles par les forts dans l’ordre de l’économie. La tentative philosophique de Marx est celle d’un nouveau réalisme, où l’esprit, détourné de la terre par l’abstraction idéaliste, se réconcilierait avec le monde physique pour reprendre son rôle puissance efficace et d’acteur dans le développement de l’histoire. Mais si, dans le principe, l’effort tenté par Marx pour atteindre, dans un monde dissocié, une nouvelle synthèse de la pensée humaine et de la réalité était parfaitement justifiable, les moyens qu’il a employés pour réaliser cette synthèse apparaissent infiniment incomplets et superficiels.
Le sociologue allemand n’a pas su se libérer du culte libéral de l’économie. Au moment où il parvient à ses conclusions principales, l’étrange cancer de l’économie libérale, abandonné à lui-même, alimenté par l’équipement technique et par la concurrence, s’accroît déjà de jour en jour sur le corps de la société humaine. Marx fonde toute sa philosophie sur cette déviation de l’histoire, au lieu de chercher et de retrouver la ligne directrice de l’histoire. II construit sur l’accident libéral comme sur un fait humain essentiel et permanent. Bien mieux, il analyse l’histoire tout entière en fonction, et à la lumière de la période libérale — ce qui le conduit, entre autres erreurs, à considérer la lutte des classes, fait propre à l’économie libérale, comme un phénomène constant, et à la retrouver dans les époques mêmes où, de toute évidence, elle n’existait pas. Ainsi, dès son principe, le réalisme marxiste entre dans le jeu des économistes libéraux dont il combat les formules ; il accepte d’eux la notion d’une Économie autonome, fait humain fondamental et n’obéissant qu’aux lois internes de son propre développement. Marx proclame que les principes du laisser-faire et de la concurrence, érigés en lois suprêmes par l’économie naturaliste, conduisent d’eux-mêmes à une autre forme de société, qui est collectiviste et donne le pouvoir au prolétariat ; mais, pas une seconde, il ne nie le principe même de l’économie naturaliste. Au contraire. Il ne fait qu’accroître l’importance et l’empire de l’économie dans la société.
Pour la pensée libérale, la vie économique se suffisait à elle-même, elle obéissait à ses propres lois, elle se comportait dans le monde humain comme un univers autonome. Mais elle n’envahissait pas les autres domaines, ceux de la politique, de la culture, des mœurs, des croyances. Marx sait que la pensée même d’une telle autonomie de l’économique, qu’une telle séparation de l’homme et de l’une de ses activités essentielles est inadmissible. Les actions et les réactions de l’économie, commerce, moyens d’échange, travail, niveau d’existence, habitat, sur toutes les formes de la vie et de la pensée sont évidentes, plus évidentes que jamais en un temps où l’essor économique semble modifier de fond en comble toutes les formes de la vie. Contre les économistes, Marx affirme donc le lien essentiel qui unit l’économie à toutes les formes de la vie sociale et individuelle. Mais, contre les idéalistes, il affirme en même temps la subordination des « superstructures » individuelles, intellectuelles, morales, de la politique, de la culture, des croyances, de la raison, de la personnalité, aux conditions collectives de la vie matérielle, c’est-à-dire à l’état économique de la société. Ainsi, par un paradoxe extraordinaire, Marx ne parvient à rendre à l’esprit sa puissance active et sa valeur créatrice qu’en le soumettant à ce qu’il y a de plus matériel dans le monde physique : il ne parvient à rétablir les rapports essentiels, niés par le libéralisme, entre la vie économique et les formes les plus complexes de la vie sociale et personnelle qu’en étendant au monde humain tout entier la royauté de l’économie jusque là bornée par les libéraux au monde proprement économique. C’est à l’économie elle-même que le marxisme demande d’affranchir l’homme des oppressions économiques. L’ordre économique était, pour les libéraux, autonome, dépendant de lui-même : il devient, pour les marxistes, souverain de toute la société humaine. Le marxisme consomme ce que le libéralisme avait commencé.
Pour rendre la pensée humaine et la réalité, la personnalité et la vie matérielle collective à leurs rapports naturels, c’est l’effort inverse qu’il convient de faire. L’indépendance monstrueuse acquise par les faits économiques dans la société moderne doit être non transformée en souveraineté absolue, mais réduite et maîtrisée. L’économie doit être considérée comme ce qu’elle est : c’est-à-dire une des formes de la vie sociale, une de ses formes les plus importantes, non son fondement et son principe. Nous devons non pas lui soumettre la vie sociale tout entière, mais au contraire la faire rentrer dans sa subordination naturelle à l’ensemble de la vie sociale. Les rapports économiques ne créent pas les rapports sociaux, ils en dérivent, l’échange des produits, la division des travaux supposant déjà par eux-mêmes l’instinct social existant et la vie sociale constituée. Toute critique valable du marxisme doit partir de ce fait essentiel que les faits économiques ne sont pas déterminants mais déterminés. Ils supposent l’existence de la personnalité humaine et de la solidarité humaine, de la vie sociale humaine dans toute sa complexité. Loin d’absorber en eux toute la vie sociale des êtres humains, ils doivent donc se soumettre aux lois naturelles de cette vie sociale, aux exigences, aux limitations, aux règlements, au gouvernement que suppose la vie des hommes en société. S’il y a un déterminisme historique, il est social au sens le plus complexe et le plus complet du terme, et non purement économique. Dans l’ordre de la pensée comme dans l’ordre pratique, le véritable recours contre le naturalisme libéral consiste à proclamer non la souveraineté mais la subordination de l’économie. La réconciliation demandée par Marx de l’homme et de la réalité, de la pensée et du monde n’est possible que si les lois du développement humain, ramenées illégitimement par l’auteur du Capital à une activité partielle de l’homme, sont découvertes et respectées dans leur complexité véritable : il est dans l’existence personnelle et dans l’existence sociale de l’homme des lois plus primitives, plus déterminantes encore que celles du régime du travail ou des échanges : celles de la vie humaine elle-même, — qui est plus que la vie économique — dans sa totalité : c’est sur le respect de celles-là que s’appuie l’ordre économique véritable, comme tout l’ordre civilisé.
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mercredi, 12 août 2009
Escudé y la identitad iberoamericana
Escudé y la identitad iberoamericana
Alberto Buela
La pregunta por la identidad es una de las más reiteradas en la ecúmene iberoamericana. Las razones de tamaña reiteración son muchas y variadas, como lo son las respuestas y los autores.
En Argentina han descollado sobre el tema autores conocidos como Borges y desconocidos como Murena, ingeniosos como Castellani y torpes como Martínez Estrada, nacionalistas como Gálvez y liberales como Massuh, religiosos como Marechal y antirreligiosos como Raurich pero lo que no había ocurrido hasta ahora era que hombres con carencia de enjundia intelectual se ocuparan del tema, como es el caso del artículo de Carlos Escudé (*) La identidad hispanoamericana aparecido en La Nación diario el 5/8/09.
La tesis del autor es en Nuestra América se habla castellano porque Gutemberg en 1455
inventó la imprenta.
Y además agrega la siguiente genialidad: “Que Argentina y Chile jamás han liberado una guerra (por hablar en castellano). En cambio desde que nosotros somos independientes Francia y Alemania han protagonizado tres…El origen de la diferencia fue la presencia o ausencia de la imprenta al momento de producirse los colapsos imperiales que hicieron posible el nacimiento de estos Estados”.
En nuestros largos años de lecturas pocas veces pudimos encontrar en un breve párrafo tanta cantidad de sandeces y errores. Y sobre todo proviniendo de un politólogo renombrado y publicitado por uno de los diarios más reconocidos de lengua castellana como La Nación.
En primer lugar Chile y Argentina no liberaron nunca una guerra porque la diferencia exponencial entre uno y otro es inconmesurable. Y los chilenos lo saben y los argentinos también. Chile no va a iniciar una aventura bélica que en principio puede serle favorable (en 24 hs. podría instalarse en San Rosa) pero sabe que finalmente fracasa, y Argentina no tuvo ni tiene ninguna necesidad geopolítica de invadir Chile.
En segundo lugar es falso que desde 1810 hasta el presente no hayamos tenido guerras los Estados de lengua castellana en América. Para limitarnos a América del Sur, nosotros tuvimos la guerra del Pacífico entre Chile(1879-1884) por un lado y Bolivia y Perú por el otro; la guerra de la Triple Alianza(1864-1870) que enfrentó al Paraguay contra Argentina y Brasil y la guerra del Chaco(1932-1935) donde lucharon Bolivia contra Paraguay. Peor aún, la guerra de la Triple Alianza es considerada como la primera guerra vae victis de la modernidad.
En tercer lugar, en el siglo XV, momento de aparición de la imprenta, España está por entrar en su plenitud imperial y no en su colapso.
Vaya un pequeño comentario, para no gastar pólvora en chimangos, como comúnmente se dice cuando el tema no da para más.
España descubre América 37 años después del nacimiento de la imprenta y ya en 1472 comienza con la edición de sus primeros libros. En América la primera imprenta se establece en 1536 en México y al poco tiempo se funda la primera universidad en 1538 en Santo Domingo. Y el mayor trabajo de las imprentas americanas fue la publicación de catecismos y textos religiosos en las lenguas indígenas. Al respecto en un brillante artículo de Vittorio Messori América: ¿lenguas cortadas? Afirma: “ En el virreinato más importante, el de Perú, en 1596 en la Universidad de Lima se creó una cátedra de quechua, la «lengua franca» de los Andes, hablada por los incas. Más o menos a partir de esta época, nadie podía ser ordenado sacerdote católico en el virreinato si no demostraba que conocía bien el quechua, al que los religiosos habían dado forma escrita. Y lo mismo pasó con otras lenguas: el náhuatl, el guaraní, el tarasco...”
Hay que saber que en el momento de nuestra independencia, alrededor de 1810, solo cinco millones de americanos hablaban castellano.
En realidad la imposición del castellano como lengua obligatoria nace a partir de esta fecha por parte de las oligarquías criollas ilustradas y afrancesadas. Hay que decirlo con todas las letras, la monarquía católica española tomó muy en serio la evangelización de América y por eso obligó al esfuerzo de predicar el evangelio en las lenguas de los aborígenes, mientras que por el contrario son los filósofos de la ilustración y la masonería inglesa y francesa que ejercen influencia total sobre las oligarquías locales para dejar de lado la inculturación del evangelio y con ello mismo, abandonar el uso de las lenguas telúricas.
Como vemos estas tesis de Escudé no solo son erróneas sino totalmente infundadas. Es una pena que el empobrecido Estado argentino gaste dinero a través del Conicet en semejante papanatas. Es de desear, ahora que se convirtió, sea el Estado de Israel, que tiene más dinero que el nuestro, quien lo beque o le pague el sueldo.
(*) Politólogo, cuyo rasgo distintivo no es su producción en ciencias políticas sino el haberse convertido al judaísmo. ¿Cómo deben de sentirse “los paisanos serios” con semejante conversión?
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Une nouvelle approche de la tourmente du III° siècle
Une nouvelle approche de la tourmente du III° siècle
« Dans les temps de crise que nous vivons, en ce début d’année 2009, il est agréable de se dire qu’à un moment de leur histoire des hommes ont été heureux… » Nous sommes au IIe siècle. Les Antonins ont fait de Rome une puissance insurpassable. La stabilité politique des institutions d’essence monarchique assure aux peuples de l’Empire, au moins jusqu’à Commode (180-192), sécurité et prospérité. La « Pax romana » règne partout. Elle dispose d’un instrument de fer : de 350.00 à 400.000 soldats, dont quelques 150.000 légionnaires postés pour l’essentiel aux frontières, face aux Barbares. Et c’est pourtant en pleine gloire, au faîte de sa puissance, que l’Empire romain va être touché au cœur.
Crise militaire, crise globale
La crise du monde romain au IIIe siècle est avant tout militaire. C’est l’affaiblissement de l’institution centrale de l’empire qui provoque en chaîne, et se nourrit par la même occasion, des crises politique, économique, financière, sociale et même religieuse – la « quête de sens » étant une constante des périodes troublées. Si tous les historiens s’accordent sur cet enchaînement des causes et des conséquences, rares sont les chercheurs à avoir tenté d’expliquer « comment un corps aussi solidement bâti que l’armée romaine a pu recevoir des coups aussi violents, être secoué dans d’aussi terribles difficultés ». C’est à ce choc initial, cette matrice de toutes les crises, que s’attache Yann Le Bohec avec le talent, l’érudition et l’humour qu’on lui connaît. Son ouvrage, pour être savant, est passionnant parce qu’il s’agit d’une véritable enquête dont la victime – l’Empire romain – et les auteurs – Germains et Iraniens pour l’essentiel – sont connus, mais les faits trop souvent ignorés à force d’être considérés comme acquis, et donc secondaires.
En s’attachant à proposer « une explication militaire pour une crise militaire », jusque dans les soubresauts des nombreuses « guerres civiles » induites, Le Bohec renouvelle en profondeur notre vision de cette époque, et n’hésite pas au passage à bousculer quelques certitudes historiographiques trop facilement admises.
Surtout, Le Bohec va à l’essentiel. Il ausculte, assume et revendique la gravité de la crise étudiée en réhabilitant « les trois conceptions du temps, court, moyen et long » de l’enseignement de Braudel, « ainsi que les liens qui unissent l’histoire à la géographie ». Son ouvrage est donc politique. Parce que l’essence même du politique réside finalement dans les questions de défense, comme l’ont bien compris depuis des générations les historiens anglo-saxons et l’illustre plus près de nous De Gaulle : « Quand on ne veut pas se défendre, ou bien on est conquis par certains, ou bien ou est protégés par d’autres. De toute manière, on perd sa responsabilité politique… ». Et parce que l’essence même du politique, parfaitement illustrée par Carl Schmitt cette fois, réside dans la désignation – et donc la connaissance – de l’ennemi. Et c’est l’apport principal de cette « armée romaine dans la tourmente » que de s’attacher aux ennemis de celle-ci, en soulignant leur nombre, leur diversité, la nouvelle puissance issue de leur vitalité démographique, de leurs systèmes d’alliance (Quinquegentanei en Afrique, Pictes en Ecosse, Francs, Alamans et Goths en Europe continentale), et des progrès accomplis sur le plan militaire surtout, dans les domaines de l’armement et de la tactique face à des légions dont l’apogée capacitaire est définitivement atteint sous Septime Sévère (193-211).
Quand l’histoire éclaire le présent
L’ouvrage de Le Bohec est ainsi d’une criante actualité. Les analogies sont nombreuses avec les temps de confusions qui sont aussi les nôtres.
Il est certes tenant d’esquisser un parallèle entre les empires romain et étatsunien. Et il sera sans doute un jour daté que la fin de l’empire américain a débuté dans les villes d’Irak, comme autrefois l’empire romain dans les sables de Mésopotamie. « Rome ne s’interdisait jamais de passer à l’offensive, pour mener une guerre préventive ou de représailles, ou pour affaiblir un ennemi potentiel, ou encore tout simplement pour piller. Au cours du IIIe siècle, l’offensive n’eut jamais cours qu’en réaction contre une agression ; on ne connaît que des contre-offensives »…
Mais le choc du IIIe siècle reste, à l’image de l’Empire romain lui-même, une pièce maîtresse et indéfectible de l’histoire européenne. Il annonce les formidables mutations que vont affronter les peuples d’Europe, et les ruses dont l’Histoire aime à user : « Après avoir atteint le fond du gouffre, l’armée romaine a su s’en sortir. L’explication est sans doute double. Les ennemis sont devenus moins agressifs, parce qu’ils étaient fatigués de la guerre et parce que de nouveaux problèmes se posaient à eux, avec d’autres arrivées de barbares. L’armée romaine s’est mieux adaptée à la situation. Ce fut, si l’on en croit la critique, l’œuvre des empereurs illyriens ». La sortie de la crise est en effet attestée sous Dioclétien (284-305), mais l’Empire ne s’en remettra jamais. Au point de s’effondrer définitivement à peine un siècle et demi plus tard. La crise, aussi violente que profonde, apparaît dès lors comme une première alerte.
Une histoire à méditer. Parce que c’est la nôtre. Et que nous ne sommes qu’au IIe siècle…
GT
14/07/2009
Source: Polémia
©Polémia
L’armée romaine dans la tourmente. Une nouvelle approche de la crise du IIIe siècle, Yann Le Bohec, Editions du Rocher, collection L’Art de la Guerre, mars 2009, 315 p., 21 euros.
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mardi, 11 août 2009
Les communistes belges dans la collaboration jusqu'au 22 juin 1941
Les communistes belges dans la collaboration jusqu'au 22 juin 1941
Beaucoup plus important avant la guerre et dans l'immédiat après- guerre que dans les années 50, 60 et 70, le PCB, aujourd'hui disparu, qui n'a plus ni journaux ni parlementaires, était, comme son «grand frère» français, totalement inféodé à la politique de Moscou. C'était Bereï, délégué à Bruxelles de l'URSS, qui commandait, qui décidait, qui dictait les lignes de conduite. Dès la signature du pacte Ribbentrop-Molotov d'août 1939, l'anti-nazisme est mis au placard. De l'Allemagne, les militants journalistes ne disent plus ni du bien ni du mal. Le Professeur Jacques Willequet a repéré, dans son livre (1), toutes les tirades en faveur du bloc germano-russe qu'ont publiées les organes communistes La Voix du Peuple, Uilenspiegel, Clarté, Espoir, Temps Nouveaux, Jeunesse Nouvelle, Drapeau Rouge, Liberté, De Strijd, Het Vlaamsche Volk. «Commencer la guerre pour anéantir l'hitlérisme, c'est accepter une politique de sottise criminelle» (Het Vlaamsche Volk, 14 oct. 39). Les alertes de novembre 39 et de janvier 40, où les Allemands testent les capacités de l'armée belge et de sa DCA, sont qualifiées «d'invention des services secrets britanniques». La Finlande, qui résiste héroïquement aux armées de Staline pendant l'hiver 39-40, est la «patrie des gardes blancs» et sa défaite, une victoire du prolétariat. Les journaux communistes accueillent la victoire allemande de mai-juin 1940 comme une délivrance. Le député communiste liégeois Julien Lahaut circule dans le sud de la France, dans une grosse voiture prêtée par les services allemands, pour récupérer les Belges dispersés par l'exode ou internés dans les camps français, après avoir été arrêtés par la Sûreté du Royaume (parmi eux: anarchistes, communistes, rexistes et nationalistes flamands, ces derniers étant largement majoritaires). A ceux qui l'écoutent, Julien Lahaut déclare, d'après Léon Degrelle, lui-même détenu, et selon l'historien officiel de l'Ecole Royale Militaire, Henri Bernard: «Le national-socialisme réalise toutes nos aspirations démocratiques» (dans un discours prononcé à Villeneuve-sur-Lot, fin juin 40). Le journal La Voix du Peuple, organe des communistes bruxellois, ressuscite dès le lendemain de la prise de Bruxelles, mais est interdit le 23 juin; à Anvers, Uilenspiegel paraît dès le 2 juin 1940 et ne disparaît que le 1er mars 1941. La spécialité des jounraux communistes, fidèles aux clauses du pacte germano-soviétique, sera de fulminer contre les Anglais. Le gouvernement exilé en Angleterre est un ramassis de «laquais de la Cité de Londres et des 200 familles», qui, de srucroît, «ont souillé le blason du Roi» (ce qui, sous la plume d'un militant communiste, est assez étonnant, puisque les communistes s'opposeront avec la dernière énergie au retour du monarque après 1945 et que Julien Lahaut criera «Vive la République!», au moment de la prestation de serment de Baudouin 1er; Lahaut sera mystérieusement assassiné par des inconnus, sur le pas de sa porte, quelques semaines plus tard...). Le 16 juin 1940, Uilenspiegel se félicite de l'entrée des troupes de Mussolini dans les Alpes françaises: «cela hâtera la débâcle des impérialistes». Le même journal, le 21 juillet 40, applaudit aux propositions de paix de Hitler, en concluant: «Plus vite les boutefeux occidentaux seront battus, mieux cela vaudra». En septembre 1940, La Vérité se félicite du fait que l'URSS ait supprimé «ce foyer de guerre né de Versailles qu'était la Pologne des seigneurs»; et il ajoute: «Les fauteurs de guerre anglo-français et leurs valets, les chefs de la social-démocratie, rejetèrent dédaigneusement les propositions allemandes appuyées à l'époque par l'URSS». Le 15 janvier 1941, Clarté insulte les troupes belges recrutées à Londres: c'est une «Légion Etrangère» destinée à servir «les magnats britanniques auxquels [le gouvernement Spaak-Pierlot de Londres] a déjà livré le Congo» (et voilà les communistes défendant le colonialisme belge, pourtant ultra-capitaliste dans ses pratiques!). Liberté et Drapeau Rouge se félicitent de la révolte anti-britannique de Rachid Ali en Irak, des mouvements indépendantistes indiens qui sabotent le recrutement de troupes aux Indes, de la disparition de la Yougoslavie, et de l'occupation de la Grèce (qui avait eu le tort d'abriter des troupes britanniques «menaçant l'URSS»!) (éditions de mai 1941).
Mais ces vigoureuses tirades pro-allemandes et anti-britanniques se feront moins enthousiastes pour plusieurs motifs: 1) les autorités d'occupation sont conservatrices et refusent toutes concessions d'ordre social; 2) les Allemands se servent des stocks belges de vivres et de matières premières, accentuant la précarité dans les couches les plus pauvres de la population; 3) les divergences entre Allemands et Soviétiques se font sentir; ce qui conduit certains chefs communistes à suivre les mots d'ordre consignés dans un article prémonitoire, paru avant mai 40, de Temps Nouveaux (n°2, 1940), où on lit: «Ce qu'il faut souhaiter, c'est une paix juste et durable, par un accord entre les deux plus fortes puissances du globe: les Etats-Unis et l'URSS». Finalement, la presse communiste affirmera que «l'avenir n'appartient ni à Hitler ni à Churchill». Ou, comme l'exprime un titre sans ambigüité de Liberté (14 avril 41): «Churchill ou Hitler? Les travailleurs ne choisissent pas entre la peste et le choléra»; 4) Les communistes, tout comme les socialistes de l'UTMI, sont furieux de voir que les Allemands donnent les postes-clef aux militants des partis autoritaires de droite, Nationalistes flamands du VNV et Rexistes de Degrelle. Les Rouges se sentent floués.
Le 22 juin 1941, le pacte germano-soviétique a vécu. Les communistes poursuivront dès lors les mots d'ordre parus dans Temps Nouveaux: alliance avec Roosevelt et Staline, contre les vieilles puissances européennes.
Raoul FOLCREY.
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lundi, 10 août 2009
La gauche et la collaboration en Belgique: De Man, les syndicats et le Front du Travail
De Man (debout) avec Emile Vandervelde avant la guerre
La gauche et la collaboration en Belgique
De Man, les syndicats et le Front du Travail
par Raoul FOLCREY
La collaboration de gauche en Belgique? Elle prend son envol avec le manifeste que Henri De Man, chef de file du Parti Ouvrier Belge (POB), publie et diffuse dès le 28 juin 1940. De Man (1885-1953) a été agitateur socialiste dès l'âge de 17 ans, polyglotte, correspondant en Belgique de la social-démocratie allemande et des travaillistes britanniques avant 1914, volontaire de guerre, diplomate au service du Roi Albert 1er, professeur à Francfort avant le nazisme, initiateur du mouvement planiste en Europe dans les années 30, ministre, président du POB; avec une telle biographie, il a été sans conteste l'une des figures les plus marquantes du socialisme marxiste européen. Hérétique du marxisme, sa vision du socialisme n'est pas matérialiste, elle repose sur les mobiles psychologiques des masses frustrées, aspirant à la dignité. Le socialisme, dans ce sens, est une formidable revendication d'ordre éthique. Ascète, sportif, De Man, issu de la bonne bourgeoisie anversoise, n'a jamais aimé le luxe. Le socialisme, déduit-il de cette option personnelle, ne doit pas embourgeoiser les masses mais leur apporter le nécessaire et les rendre spartiates.
Avec son fameux Plan du Travail de Noël 1933, De Man donne au socialisme une impulsion volontariste et morale qui séduira les masses, les détournera du communisme et du fascisme. Les intellectuels contestataires français, ceux que Loubet del Bayle a nommé les «non-conformistes des années 30», s'enthousiasmeront pour le Plan et pour ses implications éthiques. Pour l'équipe d'Esprit (regroupée autour d'Emmanuel Mounier), d'Ordre Nouveau (Robert Aron et A. Dandieu), de Lutte des Jeunes (Bertrand de Jouvenel), de l'Homme Nouveau (Roditi), De Man devient une sorte de prophète. Côté socialiste, en France, ce sera surtout le groupe «Révolution Constructive» (avec Georges Lefranc, Robert Marjolin, etc.) qui se fera la caisse de résonnance des idées de Henri De Man. Pierre Ganivet, alias Achille Dauphin-Meunier, adopte également le planisme demanien dans sa revue syndicaliste révolutionnaire L'Homme réel. Au sein du parti, Léon Blum craint le Plan du Travail:
- parce qu'il risque de diviser le parti;
- parce qu'il implique une économie mixte et tend à préserver voire à consolider le secteur libre de l'économie;
- parce qu'il crée une sorte de «régime intermédiaire» entre le capitalisme et le socialisme;
- parce que la critique du parlementarisme, implicite chez De Man, rapproche son socialisme du fascisme.
Pour Déat, les idées planistes, exposées notamment par De Man à l'Abbaye de Pontigny (septembre 1934), reflètent un pragmatisme de la liberté, une approche de l'économie et de la société proche du New Deal de Roosevelt, et ne relèvent nullement du vieux réformise social-démocrate. Le planisme, avait affirmé Déat dans l'Homme Nouveau (n°6, juin 1934), n'impliquait aucune politique de compromis ou de compromissions car il était essentiellement révolutionnaire: il voulait agir sur les structures et les institutions et les modifier de fond en comble. Presqu'au même moment, se tenait un Congrès socialiste à Toulouse: la plupart des mandats de «Révolution Constructive» s'alignent sur les propositions de Blum, sauf deux délégués, parmi lesquels Georges Soulès, alias Raymond Abellio, représentant le département de la Drôme. Georges Valois, proudhonien un moment proche de l'AF, est hostile à De Man, sans doute pour des motifs personnels, mais accentue, par ses publications, l'impact du courant para-planiste ou dirigiste en France.
Or, à cette époque, pour bouleverser les institutions, pour jouer sur les «structures», pour parfaire un plan, de quelque nature qu'il soit, il faut un pouvoir autoritaire. Il faut inaugurer l'«ère des directeurs». Pratique «directoriale», planification, etc. ne sont guère possible dans un régime parlementaire où tout est soumis à discussion. Les socialistes éthiques, ascètes et spartiates, anti-bourgeois et combatifs, méprisaient souverainement les parlottes parlementaires qui ne résolvaient rien, n'arrachaient pas à la misère les familles ouvrières frappées par le chômage et la récession. Dans son terrible livre, La Cohue de 40, Léon Degrelle croque avec la férocité qu'on lui connaît, un portrait du socialisme belge en déliquescence et de De Man, surplombant cet aréopage de «vieux lendores adipeux, aux visages brouillés, pareils à des tartes aux abricots qui ont trop coulé dans la vitrine» (p. 175). De Man, et les plus jeunes militants et intellectuels du parti, avaient pedu la foi dans la religion démocratique.
Dès le déclenchement des hostilités, en septembre 1939, De Man opte personnellement contre la guerre, pour la neutralité absolue de la Belgique, proclamée par le Roi dès octobre 1936. Fin 1939, avec l'appui de quelques jeunes militants flamands, dont Edgard Delvo, il fonde une revue, Leiding (Direction), ouvertement orientée vers les conceptions totalitaires de l'époque, dit Degrelle. Il serait peut-être plus juste de dire que le socialisme planiste y devenait plus intransigeant et voulait unir, sans plus perdre de temps, les citoyens lassés du parlementarisme en un front uni, rassemblé derrière la personne du Roi Léopold III.
Après l'effondrement de mai-juin 1940, De Man publie un «manifeste aux membres du POB», où figurent deux phrases qui lui ont été reprochées: «Pour les classes laborieuses et pour le socialisme, cet effondrement d'un monde décrépit, loin d'être un désastre, est une délivrance»; «[le verdict de la guerre] est clair. Il condamne les régimes où les discours remplacent les actes, où les responsabilités s'éparpillent dans le bavardage des assemblées, où le slogan de la liberté individuelle sert d'oreiller à l'égoïsme conservateur. Il appelle une époque où une élite, préférant la vie dangereuse et rapide à la vie facile et lente, et cherchant la responsabilité au lieu de la fuir, bâtira un monde nouveau».
Ces phrases tonifiantes, aux mâles accents, étaient suivies d'un appel à construire le socialisme dans un cadre nouveau. Cet appel a été entendu. De toutes pièces, De Man commence par créer un syndicat unique, l'UTMI (Union des Travailleurs Manuels et Intellectuels), officiellement constitué le 22 novembre 1940, après d'âpres discussions avec le représentant du Front du Travail allemand, le Dr. Voss. De Man, ami du Roi, voulait sauvegarder l'unité belge: son syndicat serait dès lors unitaire, ne serait pas scindé en une aile flamande et une aile wallonne. Le Dr. Voss, visant l'éclatement du cadre belge en deux entités plus facilement absorbables par le Reich, impose la présence des nationalistes flamands du VNV dans le comité central composé de socialistes, de démocrates-chrétiens, de syndicalistes libéraux. Edgard Delvo, ancien socialiste, auteur d'un ouvrage préfacé par De Man et paru à Anvers en 1939, collaborateur de Leiding, la revue neutraliste hostile à toute participation belge aux côtés des Anglais et des Français, théoricien d'un «socialisme démocratique» ou plutôt d'un populisme socialiste, est l'homme du VNV au sein de ce comité. En 1942, poussé par les services du Front du Travail allemand, Delvo deviendra le maître absolu de l'UTMI. Ce coup de force des nationalistes provoque la rupture entre De Man et son syndicat: l'ancien chef du POB quitte Bruxelles et se réfugie en Haute-Savoie, grâce à l'aide d'Otto Abetz. Il sera désormais un «cavalier seul». Les socialistes, les libéraux et les jocistes quittent l'UTMI en 1942, laissant à Delvo les effectifs nationalistes flamands et wallons, peu nombreux mais très résolus.
En Wallonie, dès la parution du Manifeste du 28 juin 1940, plusieurs journalistes socialistes deviennent du jour au lendemain des zélotes enragés de la collaboration. Ainsi, le Journal de Charleroi, organe socialiste bon teint depuis des décennies, était édité par une société dont l'aristocratique famille Bufquin des Essarts étaient largement propriétaire. Dès les premiers jours de juin 40, un rédacteur du journal, J. Spilette s'empare du journal et le fait paraître dès le 6, avant même d'avoir créé une nouvelle société, ce qu'il fera le 8. En novembre 1940, Spilette, avançant ses pions sans sourciller, s'était emparé de toute la petite presse de la province du Hainaut et augmentait les ventes. Els De Bens, une germaniste spécialisée dans l'histoire de la presse belge sous l'occupation, écrit que l'influence de De Man était prépondérante dans le journal. Spilette défendait, envers et contre les injonctions des autorités allemandes, les positions de De Man: syndicat unique, augmentation des salaires, etc. Spilette baptisait «national-socialisme» la forme néo-demaniste de socialisme qu'il affichait dans son quotidien. Ensuite, rompant avec De Man, Spilette et ses collaborateurs passent, non pas à la collaboration modérée ou à la collaboration rexiste/degrellienne, mais à la collaboration maximaliste, regroupée dans une association au nom évocateur: l'AGRA, soit «Amis du Grand Reich Allemand». L'AGRA, dont le recrutement était essentiellement composé de gens de gauche, s'opposait au rexisme de Degrelle, marqué par un héritage catholique. Les deux formations finiront par s'entendre en coordonnant leurs efforts pour recruter des hommes pour le NSKK. Le 18 octobre 1941, le Journal de Charleroi fait de la surenchère: il publie un manifeste corsé, celui du Mouvement National-Socialiste wallon, où il est question de créer un «Etat raciste» wallon. Spilette appelle ses concitoyens à rejoindre cette formation «authentiquement socialiste».
A Liège, le quotidien La Légia, après avoir été dirigé par des citoyens allemands, tombe entre les mains de Pierre Hubermont, écrivain, lauréat d'un prix de «littérature prolétarienne» à Paris en 1931, pour son roman Treize hommes dans la mine. Les Allemands ou Belges de langue ou de souche allemandes, actionnaires de la société ou rédacteurs du journal, entendaient germaniser totalement le quotidien. Pierre Hubermont entend, lui, défendre un enracinement wallon, socialiste et modérément germanophile. Cette option, il la défendra dans une série de journaux culturels à plus petit tirage, édités par la «Communauté Culturelle Wallonne» (CCW). Parmi ces journaux, La Wallonie, revue culturelle de bon niveau. Dans ses éditoriaux, Hubermont jette les bases idéologiques d'une collaboration germano-wallonne: défense de l'originalité wallonne, rappel du passé millénaire commun entre Wallons et Allemands, critique de la politique française visant, depuis Richelieu, à annexer la rive gauche du Rhin, défense de l'UTMI et de ses spécificités syndicales.
Fin 1943, les services de la SS envoient un certain Dr. Sommer en Wallonie pour mettre sur pied des structures censées dépasser le maximalisme de l'AGRA. Parmi elles: la Deutsch-Wallonische Arbeitsgemeinschaft, en abrégé DEWAG, dirigée par un certain Ernest Ernaelsteen. Ce sera un échec. Malgré l'appui financier de la SS. DEWAG tentera de se donner une base en noyautant les «cercles wallons» de R. De Moor (AGRA), foyers de détente des ouvriers wallons en Allemagne, et les «maisons wallonnes», dirigée par Paul Garain, président de l'UTMI wallonne, qui pactisera avec Rex.
Quelles conclusion tirer de ce bref sommaire de la «collaboration de gauche»? Quelles ont pu être les motivations de ces hommes, et plus particulièrement de De Man, de Delvo et d'Hubermont (de son vrai nom Joseph Jumeau)?
La réponse se trouve dans un mémoire rédigé par la soeur d'Hubermont, A. Jumeau, pour demander sa libération. Mlle Jumeau analyse les motivations de son frère, demeuré toujours socialiste dans l'âme. «Une cause pour laquelle mon frère restait fanatiquement attaché, en dehors des questions d'humanisme, était celle de l'Europe. Il était d'ailleurs Européen dans la mesure où il était humaniste, considérant l'Europe comme la Patrie de l'humanisme (...) Cette cause européenne avait été celle du socialisme depuis ses débuts. L'internationalisme du 19° siècle n'était-il pas surtout européen et pro-germanique? L'expérience de 1914-1918 n'avait pas guéri les partis socialistes de leur germanophilie (...). ... la direction du parti socialiste était pro-allemande. Et, au moment de l'occupation de la Ruhr, ..., [mon frère] a dû aligner son opinion sur celle de Vandervelde (ndlr: chef du parti socialiste belge) et de De Brouckère (ndlr: autre leader socialiste), qui étaient opposés aux mesures de sanctions contre l'Allemagne. Le peuple (ndlr: journal officiel du POB), jusqu'en 1933, c'est-à-dire jusqu'à la prise du pouvoir par Hitler, a pris délibérément et systématiquement fait et cause pour l'Allemagne, dans toutes les controverses internationales. Il a systématiquement préconisé le désarmement de la France et de la Belgique, alors que tout démontrait la volonté de l'Allemagne de prendre sa revanche. Mon frère (...) n'avait pu du jour au lendemain opérer le retournement qui fut celui des politiciens socialistes. Pour lui, si l'Allemagne avait été une victime du traité de Versailles avant 1933, elle l'était aussi après 1933 (...). Et si la cause de l'unité européenne était bonne avant 1933, lorsque Briand s'en faisait le champion, elle l'était toujours après 1933, même lorsque les Allemands la reprenaient à leur compte (...). [Mon frère] partait de l'idée que la Belgique avait toujours été le champ de bataille des puissances européennes rivales et que la fin des guerres européennes, que l'unification de l'Europe, ferait ipso facto la prospérité de la Belgique».
Tels étaient bien les ingrédients humanistes et internationalistes des réflexes partagés par De Man, Delvo et Hubermont. Même s'ils n'ont pas pris les mêmes options sur le plan pratique: De Man et Hubermont sont partisans de l'unité belge, le premier, ami du Roi, étant centraliste, le second, conscient des différences fondamentales entre Flamands et Wallons, étant fédéraliste; Delvo sacrifie l'unité belge et rêve, avec ses camarades nationalistes flamands, à une grande confédération des nations germaniques et scandinaves, regroupées autour de l'Allemagne (ce point de vue était partagé par Quisling en Norvège et Rost van Tonningen aux Pays-Bas). Mais dans les trois cas, nous percevons 1) une hostilité aux guerres inter-européennes, comme chez Briand, Stresemann et De Brinon; 2) une volonté de créer une force politique internationale, capable d'intégrer les nationalismes sans en gommer les spécificités; une inter-nationale comportant forcément plusieurs nations solidaires; Delvo croira trouver cet internationalisme dans le Front du Travail allemand du Dr. Ley; 3) une aspiration à bâtir un socialisme en prise directe avec le peuple et ses sentiments.
De Man connaîtra l'exil en Suisse, sans que Bruxelles n'ose réclamer son extradition, car son procès découvrirait la couronne. Delvo sera condamné à mort par contumace, vivra en exil en Allemagne pendant vingt-cinq ans, reviendra à Bruxelles et rédigera trois livres pour expliquer son action. Hubermont, lourdement condamné, sortira de prison et vivra presque centenaire, oublié de tous.
Raoul FOLCREY.
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dimanche, 09 août 2009
El genocidio de Hiroshima
El genocidio de Hiroshima
Hace 64 años el presidente Truman ordeno lanzar la primera bomba atomica contra la humanidad, cometiendo un genocidio que aun no se ha juzgado en ningun tribunal internacional
El 6 de agosto de 1945 Estados Unidos asesino a mas de 200.000 civiles en la ciudad de Hiroshima, lanzando contra ella la primera bomba nuclear utilizada como arma de guerra en la historia de la humanidad, y tres dias despues sucedio lo mismo en Nagasaki. Se estima que hacia finales de 1945, las bombas habían matado a 140.000 personas en Hiroshima y 80.000 en Nagasaki, aunque solo la mitad había fallecido los días de los bombardeos y el resto por heridas incurables o enfermedades atribuidas al envenenamiento por radiación.
El presidente Harry S. Truman, quien ordeno el bombardeo, no lo hizo para acabar con la guerra y la escasa resistencia de Japon. Los mismos japoneses estaban intentando negociar la paz, y habian pedido la mediacion a Stalin. Antes de que la URSS pudiera aceptarla, EE.UU. se encargo de que las negociaciones de paz no tuvieran lugar y Japon se entregara a una rendicion incondicional. Japon ya estaba practicamente vencido, y la escusa de que la bomba se lanzo para evitar “mas muertes de civiles”, como cinicamente aseguro Truman, se desarma cuando miramos los miles de japoneses inocentes que murieron con los lanzamientos. En ningun caso hubieran muerto tantos si la guerra hubiera durado dos meses mas.
Estados Unidos demostro con el uso de la bomba atomica la calidad humana de sus dirigentes, su personalidad genocida. La Segunda Guerra Mundial pasara a la historia no solo por el holocausto perpetrado por los nazis, contra judios, gitanos, comunistas y homosexuales (entre otros), sino tambien por la extrema crueldad de Estados Unidos, que entonces demostro que la vida humana no le importa lo mas minimo, actitud que ha continuado de diversas formas asesinas hasta hoy dia.
El genocidio de Hiroshima y Nagasaki no ha sido juzgado por ningun tribunal internacional todavia, porque los genocidas fueron los vencedores en esta ocasion. No hubo Tribunal de Nuremberg para Truman y sus secuaces. Pero la historia, a pesar de las justificaciones que han inventado los medios de comunicacion actuando de silenciador moral, no deja de mostrarnos lo horrible de los actos de los que son capaces de utilizar cualquier metodo para lograr sus fines materiales.
Con una hipocresia que hiela toda capacidad de sentimiento, que indigna hasta a las piedras, los EEUU han venido acusando a todos sus enemigos de asesinos, crueles genocidas, o tiranos, mientras que ellos, tras el silenciador de la opinion publica, creada por los escribanos y voceros del sistema, muy bien pagados, continuan orgullosos de sus crimenes y ejecutándolos, de una manera u otra, hasta el presente y a lo largo de todo el planeta.
Aunque de sus horrendos y continuos crimenes el asesinato de 220.000 japoneses de un golpe, (sin contar las secuelas radioactivas producidas en los pocos supervivientes), el genocidio producido por el lanzamiento de las dos unicas bombas nucleares lanzadas hasta hoy contra la humanidad, es, si cabe, el mas ilustrativo de la verdadera naturaleza criminal del imperio yankee y del corazon podrido de sus primeros peones, los presidentes de Estados Unidos (independientemente del color de su piel).
Jose Luis Forneo
Extraído de CuestiónateloTodo.
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Entretien avec G. Maschke: le mensonge de la guerre permanente pour la paix perpétuelle
Entretien avec Günter Maschke:
Le mensonge de la guerre permanente pour la paix perpétuelle
Propos recueillis par Sven Beier
Q.: Monsieur Maschke,vous venez de publier récemment un vaste recueil d’écrits de Carl Schmitt sur le droit des gens, sous un titre apparemment paradoxal: “Frieden oder Pazifismus?” (= “La paix ou le pacifisme?”). Les pacifistes seraient-ils des acteurs politiques qui ne veulent pas la paix?
GM: Aucune des variantes du pacifisme n’aspire à la paix en tant que non recours à la guerre, aucune d’entre elles n’aspire à une paix qui serait conclue après une guerre menée contre un ennemi que l’on reconnaîtra comme tel; les pacifistes dans toutes leurs variantes veulent abolir la guerre, dans la mesure où ils nient son droit à exister. Ils considèrent que la guerre est un crime et entendent l’interdire par le droit; le pacifisme armé, qui détermine le droit des gens depuis le Diktat de Versailles de 1919, rend possibles les sanctions, les mesures de maintien de la paix, les occupations pacifiques, les mandats solidement étayés, les interventions humanitaires, ce qui équivaut, quels que soient les concepts camouflants utilisés, à des actions militaires contre tous ceux qui “brisent la paix”, contre les “agresseurs”. Par conséquent, tous les acteurs de l’échiquier doivent veiller à ne pas passer pour “agresseurs”. L’agresseur apparent doit pouvoir être montré comme tel, être littéralement construit de toutes pièces, ce qui signifie qu’il faudra provoquer l’ennemi pour qu’il commette des actes d’agression. De ce fait, le véritable agresseur est celui qui, en vertu de sa force et de sa position géographique, est en mesure de provoquer l’acte d’agression. “L’agresseur est celui qui force son adversaire à recourir aux armes”, disait déjà Frédéric le Grand. Celui qui se laisse provoquer se laissera passer un corde autour du cou, une corde qui n’est pas seulement d’ordre juridique, car il devra inévitablement songer aux conséquences de sa défaite éventuelle (c’est-à-dire celle qu’il devra accepter après une “capitulation sans condition”) et, subséquemment, luttera jusqu’à ce qu’il sera saigné à blanc. Ensuite, comme autre conséquence de ce pacifisme, nous repérons la tendance à éliminer toutes les règles du droit de la guerre; contre celui qui a eu recours à la guerre, tout sera dès lors permis. Quant aux autres, les crimes qu’ils auront commis n’entreront pas en ligne de compte. Le chemin qui mène du pacifisme, en tant que négation du droit à faire la guerre, à la guerre “totale” et “juste” est très court: “perpetual war for perpetual peace” (“guerre permanente pour la paix perpétuelle”). Or les notions de guerre et de paix sont en corrélation; le concept de paix présuppose toujours qu’il y a eu des hostilités préalables. Mais ceux qui pensent que ces hostilités sont par définition d’ordre criminel et que tout ennemi est, par voie de conséquence, un criminel, ne peuvent jamais faire de paix véritable. Car, justement, opérer une telle discrimination à l’encontre de la guerre et de l’ennemi, revient à ôter l’un des deux piliers qui soutiennent le droit des gens, en l’occurrence le pilier de la guerre, pour ne laisser que le pilier de la paix, ce qui ne permet évidemment aucune stabilité, donc aucune paix véritable. On ne peut faire la paix qu’avec un ennemi que l’on reconnaît(ra). La paix est un “état de droit”, une “situation de droit” et, en tant que telle, ne peut être obtenue que si la guerre, à son tour, possède un statut juridique. Le pacifisme s’avère ainsi un obstacle à la paix, tandis qu’un monde sans guerre ne serait pas pour autant un monde de paix, mais aurait besoin de s’auto-décrire à l’aide de tout nouveaux concepts.
Q.: Affirmeriez-vous que Carl Schmitt est un théoricien mobilisable aujourd’hui pour expliciter le droit des gens actuellement en vigueur ainsi que la situation internationale?
GM: Le droit des gens moderne ferait bien mieux de se préoccuper de savoir s’il doit ou non se mettre à la remorque de Carl Schmitt et non le contraire, chercher à mettre Carl Schmitt à la remorque du monde actuel. Ce droit des gens n’est pas innocent dans tous les désastres qui se sont succédé depuis 1919. Après chaque catastrophe, les doctrinaires du droit des gens moderne ont accentué encore plus la discrimination qui frappe la guerre et octroyé à la politique de puissance en vigueur —et toujours en place— la possibilité de déployer des manoeuvres de diversion et des “voilements”, des occultations, de plus en plus subtils; il suffit de songer aux innombrables possibilités qui existent d’interpréter le Pacte Kellogg de 1928 et la Doctrine Stimson de 1932. La belligérance proprement dite est dès lors devenue de plus en plus brutale, surtout parce qu’une défaite finale s’avèrerait encore plus terrible qu’auparavant. Entre 1919 et 1939, on a cherché à pallier l’interdiction de faire la guerre car on craignait les sanctions; on a dès lors procédé à des “occupations pacifiques”, à des “représailles”, etc. Typique de cette façon de procéder: le conflit sino-japonais. L’abolition du concept de “guerre” et son remplacement par celui de “conflit armé”, suivi de l’interdiction générale de tout recours à la violence, n’ont rien amélioré; on a simplement utilisé à profusion et à satiété le concept d’“auto-défense”. Les Etats-Unis prétendent “se défendre” en Irak, laquelle petite puissance les aurait menacé de manière décisive. L’impuissance possible du droit des gens face à certaines réalités est une chose; accorder à ces réalités l’apparence du droit ou célébrer des massacres par le truchement de la haute technologie comme des “mesures préventives” ou comme des “préludes” à l’avènement d’un droit civil universel (comme le veut le grand prêtre de l’humanisme actuel, Jürgen Habermas) en est une autre.
Q.: Dans quelle mesure est-ce réaliste de parler d’un rapport direct entre espace (Raum) et droit (Recht), comme le fait Carl Schmitt, de façon à ce que la guerre et la paix soient des réalités qui visent la réalisation d’un “ordre naturel”? A notre époque de flux migratoires et de flux de marchandises, où la population est devenue “multiculturelle”, on ne peut pas faire grand chose sur base de ce rapport espace/droit, pour régler la coexistence entre de telles “populations”, du moins si cette coexistence est encore organisée par un Etat?
GM: Les flux migratoires et les flux de marchandises se portent vers des espaces précis, organisés politiquement; ils ne s’écoulent pas au petit bonheur la chance sur une Terre qui ne serait pas subdivisée en entités étatiques. Dans certains cas jugés urgents, on va même jusqu’à construire des barrières, que ce soit sur la frontière entre les Etats-Unis et le Mexique ou sur celle qui sépare les zones de peuplement juif des zones administrées par l’autorité palestinienne. C’est justement à cause de ces flux que le contrôle politique et militaire d’espaces s’avère aujourd’hui plus important qu’hier. D’autres facteurs le prouvent également: la lutte de plus en plus âpre pour l’accès aux matières premières, la militarisation de l’espace circumterrestre, les tentatives d’encercler la Russie ou de fractionner certains Etats en en détachant des composantes par le truchement de l’idéologie des droits de l’homme. Il y a déjà longtemps que l’on parle du “retour de l’espace” et les jours de la géographie politique et de la gépolitique ne sont pas encore comptés, loin de là! Même si les cercles les plus conventionnels et les plus conformistes de l’université allemande le souhaiteraient!
Q.: Le modèle d’ordre, que préconise Schmitt dans sa vision du droit des gens, avec sa fixation sur la notion de sol et sur l’idéal d’un peuple homogène, qui s’est approprié ce sol et l’a rentabilisé, n’est-il pas désormais archaïque parce que “folciste” (= “völkisch”), comme on l’a souvent reproché à Schmitt; “folciste” et donc aujourd’hui obsolète?
GM: Le droit des gens selon Schmitt a essuyé pas mal de critiques sous le national-socialisme, justement parce qu’il présentait, disaient ses adversaires partisans du régime, un déficit de “folcicité”. Par ailleurs, l’idée de “folcicité” ne me paraît pas obsolète aujourd’hui, vu l’agressivité de la globalisation: elle devient au contraire de plus en plus importante. J’en veux pour preuve la tendance actuelle à constituer de plus en plus souvent des Etats nouveaux et petits, n’englobant, si possible, qu’une seule ethnie. On évite bien entendu d’utiliser les termes “folciste” ou “ethnique”, voire “racial”, parce qu’ils sont chargés de connotations historiques, mais cela n’empêche pas que l’on lutte plus âprement aujourd’hui qu’hier pour faire triompher l’idéal “folciste”. Schmitt, lui, ne se préoccupait pas de la question “folciste” mais visait la constitution de “grands espaces” (Grossräume) contre la notion de “One World”, qui est issue de l’idéalisme désincarné et ne cherche pas à faire advenir un monde où les sujets du droit des gens seraient mis sur pied d’égalité mais, au contraire, seraient tous soumis à une et une seule superpuissance impérialiste. Le droit des gens de Carl Schmitt, que l’on accuse à tort d’être un “étatiste”, se place résolument au-delà de tout étatisme et repose surtout sur l’observation attentive d’un fait bien patent, que Washington veut ignorer: que le monde sera toujours plus grand que les Etats-Unis et ne pourra pas sempiternellement être taillé à la mesure des idées et des conceptions bizarres qui sont nées dans des cerveaux américains.
Q.: L’idéal schmittien du droit des gens semble avoir été plus ou moins réalisé dans le petit univers des Etats européens entre la Paix de Westphalie et la première guerre mondiale, avec des Etats souverains, délimités chacun par des frontières, se livrant quelques fois des “guerres de forme”, sorte de duels guerriers qui se terminaient par des traités de paix aux effets finalement restreints. N’a-t-on pas affaire, ici, à un mythe personnel cultivé par Schmitt, avec lequel il est parti en guerre contre la guerre totale qui sévissait au 20ème siècle? En partant du principe que les guerres-duels ont réellement existé, Schmitt n’a tout de même pas imaginé sérieusement qu’on pouvait y retourner? Et vous-même, y voyez-vous davantage qu’une réminiscence historique, une simple alternative à la tentative de fonder une paix sur les valeurs de l’universalisme de la “révolution mondiale démocratique”, à laquelle appelait George W. Bush en novembre 2003?
GM: La guerre limitée, ou “guerre des formes”, a bel et bien existé: elle repose sur la distinction claire entre guerre et paix, entre intérieur et extérieur, entre combattant et non combattant, etc. Même si l’on ne peut plus revenir à de telles distinctions, peut-on pour autant soutenir la notion de “guerre totale” ou l’état de “perpetual war for perpetual peace”, en propageant le mensonge d’une “paix indivisible” et en affirmant tout de go que toute guerre particulière concerne le monde tout entier, c’est-à-dire cette “communauté des peuples” (Völkergemeinschaft), qui existe soi disant réellement mais qui est, dans les faits, une “société d’Etats” (Staatengesellschaft)? En raisonnant de la sorte, peut-on contribuer à préparer pour l’avenir une sorte de “soft law” pour faciliter et légitimer l’interventionnisme impérialiste? Quand un sot prononce une phrase stupide, dans le genre “la liberté allemande (sur l’essence ou sur la réalité présente de laquelle, je refuse de m’exprimer ici pour demeurer poli) se défend aussi dans l’Hindou Kouch”, ou quand un autre handicapé de la dure-mère nous déclare que les Etats-Unis seraient davantage “sécurisés”, si l’Irak était sauvé tout en étant détruit, je constate que de telles assertions sont possibles uniquement parce que l’on croit aux principes du droit des gens tel qu’il s’applique depuis 1919. Et pire: même ceux qui critiquent les deux types d’assertion que je viens d’énoncer, pour m’en moquer, croient à ces principes de 1919! Ces gens peuvent, par exemple, critiquer le Traité de Versailles, mettre en doute la validité du Tribunal de Nuremberg, condamner les motivations qui ont conduit à la guerre du Vietnam, tout en célébrant l’avènement des droits de l’homme ou la défense préventive des “valeurs occidentales” ou toute autre sublime philosophade de cet acabit! Beaucoup de ceux qui s’insurgent contre les entorses faites au droit des gens par le gouvernement des Etats-Unis, oublient simultanément que ces entorses ne sont que la conséquence logique de l’évolution même de la pensée juridique aux Etats-Unis, une évolution qui a commencé plus ou moins vers 1880 et qui a donné pour résultat, in fine, le droit des gens de 1919. Mais cela donnerait quoi, cette “démocratie mondiale” ou ce qui en tient lieu? Une “démocratie” est par définition le “kratos”, le pouvoir, détenu par un “demos”, par un peuple particulier, et ne peut donc pas s’étendre au “monde” ou à l’humanité. Ensuite, la démocratie n’est qu’une méthode pour produire le droit et, en tant que méthode, ne présuppose aucun contenu; tout contenu éventuel, qui viendrait l’étoffer, s’ajouterait ultérieurement. L’Occident parle sans cesse de “démocratie”, mais ôte à cette même “démocratie” toute valeur quand les résultats d’une consultation démocratique lui déplaisent; dans cette optique, songeons simplement à la victoire électorale du “Front Islamique du Salut” en Algérie en décembre 1991; l’Occident a constaté, avec une joie à peine dissimulée, qu’un putsch a mis un terme à l’ascension du FIS. Songeons aussi aux élections iraniennes de 2005. La “révolution démocratique mondiale” est-elle une révolution fabriquée et imposée de force par les dirigeants des lobbies pétroliers qui lisent Leo Strauss pendant leurs temps de loisir? Mais qui agissent selon la devise de Schumpeter: “La démocratie, c’est le pouvoir par le mensonge”?
Q.: Vu les efforts que déploie la dernière superpuissance en piste, les Etats-Unis, pour faire advenir le “One World”, ne peut-on pas dire que le “nomos de la Terre”, espéré par Carl Schmitt, avec son pluriversum de “grands espaces” (Grossräume), est à reléguer au département des antiquités?
GM: Les Etats-Unis peuvent briguer l’avènement d’un “One World” mais, à l’évidence, on sait depuis longtemps qu’ils ne réussiront pas l’opération. Les tentatives de construire réellement de “grands espaces” sont patentes aujourd’hui, notamment en Amérique latine. Les pertes enregistrées par les Etats-Unis dans les secteurs de la production et de la finance sont incontestables. A cela s’ajoute, l’endettement pharamineux (et absurde) des Etats-Unis vis-à-vis de l’étranger et les risques que comporte cet endettement. Sur le plan militaire, les Etats-Unis se heurtent rapidement à leurs limites: ils ne disposent pas de troupes étrangères en suffisance, qui, elles, seraient prêtes à mourir pour une cause. On pourrait approcher l’idéal d’une paix mondiale, si les Etats-Unis devenaient à leur tour l’objet d’un “containment”, d’un endiguement, et si la volonté unie de tous les autres mettait un terme à leurs tentatives de contrôler l’espace arabe (et, par là même, une bonne part des sources d’approvisionnement de l’Europe), de pénétrer la “Terre du Milieu” ou l’espace centre-asiatique et d’encercler la Russie. Cet endiguement des Etats-Unis et l’union des volontés alternatives n’est pas un projet sans perspective...
Q.: La tentative d’empêcher par tous les moyens l’avènement de cet “Etat mondial” n’est-elle pas un combat à la Don Quichotte, contre des moulins à vent, vu la dynamique à l’oeuvre aujourd’hui et que l’on appelle la “globalisation”, laquelle procède par la constitution de plus en plus dense de réseaux économiques et communicationnels? Et cette lutte inutile à la Don Quichotte n’était-elle pas déjà obsolète du temps de Carl Schmitt lui-même?
GM: Un “Etat mondial”? Cela ne peut aboutir. Tout au plus arrivera-t-on à une “Fédération mondiale” fonctionnant selon le principe de subsidiarité, mais c’est assez utopique. Si l’on aboutit un jour à une “unité du monde”, sous quelle que forme que ce soit, alors nous aurions sûrement un résultat d’ores et déjà prévisible: les guerres, ou les “conflits armés”, continueront à exister mais sous la forme de guerres civiles. On peut déjà clairement entrevoir ce que cela signifie, en observant les simulations actuelle d’une “unité mondiale”, où les Etats-Unis jouent un rôle qu’on ne leur a pas demandé de tenir: celui de “policier global”. L’augmentation ininterrompue de la mise en réseau de l’économie ne constitue pas une garantie de paix; souvenons-nous que l’intégration économique de l’Europe était bien plus avancée en 1914 qu’aujourd’hui! L’intégration croissante de l’économie et du droit ne génère pas d’ordre politique. Si l’Etat perd de la légitimité, alors, simultanément, l’intégration économique et l’interdépendance croissante ont des effets déstabilisants voire bellogènes. On peut affirmer que le droit international actuel est l’enfant morbide d’une alliance fatidique: celle qui unit les idéaux de la révolution française aux conceptions anglaises du droit maritime. Et qui donne les maux suivants: impérialisme des droits de l’homme et rééducation d’une part, pan-interventionnisme couplé aux propagandes haineuses, étranglement de l’économie de l’adversaire et estompement de la distinction entre guerre et paix, d’autre part. On croit donc aujourd’hui, sur la planète entière, que par l’application des principes de la révolution française et de ceux du thalassocratisme anglais, qui ont pourtant eu pour résultat de déstabiliser le monde, on finira par faire éclore la stabilité de demain. Vous allez me dire que je simplifie à outrance! Et vos questions alors, ne procèdent-elles pas de simplifications pires encore?
Q.: Joschka Fischer, qui exerce encore actuellement les fonctions de ministre des affaires étrangères en Allemagne, a récemment osé un pronostic sur le développement du nouvel ordre mondial: ou bien les Etats-Unis réussissent, dans le cadre de l’ONU, à créer une “république mondiale” dominée par eux-mêmes et par l’UE, leur partenaire; ou bien, ils entreront dans une concurrence accrue avec la Chine, ce qui n’exclut pas, à terme, une confrontation sino-américaine future pour l’hégémonie globale. Pour éviter cela, l’avènement d’un “One World” sous domination américaine n’est-il pas la voie vers un avenir de paix?
GM: Les Etats-Unis n’entendent pas agir dans le cadre de l’ONU, comme on le sait. Quant à l’Europe qu’ils contrôlent et qui est divisée, ce n’est pas pour eux un partenaire mais un idiot utile. La concurrence avec la Chine sera de plus en plus aigüe, c’est inévitable. Une “république mondiale” par la grâce des Etats-Unis? Que cela signifierait-il? Poursuivre des actions criminelles comme l’agression américaine contre l’Irak et les soutenir? Participer à des guerres de prédation, pardon, à des guerres privatisées? Soutenir des Etats si proches des “valeurs occidentales” comme l’Egypte, le Pakistan ou l’Arabie Saoudite, voire la Colombie, ou aller y jouer un rôle médiateur pour faire croire urbi et orbi qu’on y respecte les droits de l’homme? Rendre plausible le projet de premières frappes nucléaires “préventives”?
Q.: Mais l’esprit du temps, le “Zeitgeist”, n’est-il pas un allié puissant de tous les projets qui promettent une “paix mondiale”, esprit du temps que l’on retrouve in nuce dans les esquisses d’un “Etat mondial” proposées par David Held ou Otfried Höffe? Toute critique basée sur Carl Schmitt ne s’avère-t-elle pas impuissante, si elle se borne à dénoncer de telles promesses de paix comme de simples travestissements juridiques, humanitaires et idéologiques d’un interventionnisme impérialiste?
GM: Kierkegaard aimait à dire: “Celui qui épouse le Zeitgeist deviendra vite veuf”. La “paix mondiale”, l’ “Etat mondial”, la “Fédération mondiale” (avec subsidiarité), ou quelle que soit la dénomination dont peuvent se parer ces rêves, qui ne sont pas si beaux (laissons de côté ici les distinguos), ne sont que des impossibilités, qui, de plus, sont incongrus sur le plan éthique. “Le futur, c’est le massacre”, et le massacre n’est pas anobli parce qu’il est “high tech” ou perpétré au nom de la “démocratie”. En politique, il faut s’en tenir aux probabilités et non aux voeux pieux. Première probabilité: après le 20ème siècle, nous en aurons encore pour notre argent! Au lieu de fantasmer sur un “Etat mondial”, ou sur quelque dérivation vermoulue du même genre, nous devrions, nous les Allemands, nous rappeler qu’après 1991, nous avons payé 13 milliards de DM pour que 150.000 Irakiens soient tués et que 300.000 enfants d’Irak meurent de faim ou de privations à cause de l’embargo imposé à leur pays, alors que l’Irak ne nous a jamais menacés, ni nous ni l’Occident. Evidemment, nous les Allemands, nous nous y connaissons en matière de refoulement... Le tableau de désolation que nous offre l’Irak aurait tout de même dû nous faire réfléchir aux conséquences de nos alliances, nous indiqué une nouvelle manière d’agir. Il est bien possible qu’une critique basée sur l’oeuvre de Schmitt s’avère impuissante face à certaines réalités actuelles, mais elle demeure néanmoins percutante contre l’idéologie qui les recouvre. Et j’ajouterais ceci: la destruction d’une réalité commence toujours par une attaque contre sa superstructure! Par vos questions, vous suggérez que rien ne peut s’opposer à un impérialisme interventionniste. Comment en arrivez-vous à une telle conclusion? Pour mourir, on a toujours bien le temps, mais certaines formes de “sacrificio dell’intellettto” (de sacrifice de l’intelligence) sont incurables!
(entretien paru dans “Junge Freiheit”, n°38/2005; traduction française: Robert Steuckers; avec l’aimable autorisation de G. Maschke)
A lire:
Günter MASCHKE (Hrsg.), “Carl Schmitt. Frieden oder Pazifismus? Arbeiten zum Völkerrecht und zur internationalen Politik 1924-1978”, mit einem Vorwort und mit Anmerkungen versehen. Duncker u. Humblot, Berlin, 2005, XXX u. 1010 seiten, gebunden, 98 euro.
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samedi, 08 août 2009
1979: Guerres secrètes au Moyent Orient
1979: Guerres secrètes au Moyen Orient
L’incroyable année 1979 a vu se succéder des événements qui ont changé le cours de notre histoire : révolution iranienne, accords de Camp David, prise d’otages de La Mecque et de l’ambassade américaine à Téhéran, et enfin, invasion soviétique de l’Afghanistan… Voici comment, pendant cette période, la France a cru pouvoir manipuler l’ayatollah Khomeiny et prendre en Iran la place des Américains, comment le Mossad a organisé, en pleine révolution islamique, l’exode clandestin de dizaines de milliers de Juifs iraniens, et comment le royaume saoudien a fait appel au GIGN français pour libérer les lieux saints de l’islam occupés par des terroristes avec, à la clé, une récompense inattendue. On lève ici le voile sur les complicités occidentales qui ont permis au Pakistan, bien avant l’Iran, de mettre sur pied le premier programme nucléaire islamique et l’on découvre de quelle manière les services de renseignement saoudiens et pakistanais ont organisé les réseaux de financement et d’armement d’intégristes prêts à se retourner contre l’Occident. Les services secrets de tous bords – CIA, Sdece, Mossad… – et les présidents Carter et Giscard d’Estaing ont joué dans cette époque agitée un rôle crucial et parfois trouble, entraînant une série de réactions en chaîne. En quelques mois, le Moyen-Orient a basculé, et le monde entier avec lui, favorisant l’avènement d’un islamisme radical aujourd’hui florissant.
Yvonnick Denoël est éditeur et historien. Il a notamment publié Le livre noir de la CIA (Nouveau Monde éditions, 2007).
Disponible sur Amazon
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The Terror of the Hyperreal
http://www.theoccidentalobserver.net/authors/Sunic-Communication.html#TS
The Terror of the Hyperreal
Tom Sunic
July 28, 2009
One of the secret lies of liberal democracy is the dogma of free speech. The word 'propaganda' has obtained over the last six decades a nasty flavor; hence the need to use the word 'communication.' However, as much as everybody in modern society craves to communicate, traditional community ties, or in-group ties, are more than ever before subject to the process of disintegration. It is worth recalling that etymologically the terms "community" and "communication" are of the same origin. But how can one communicate if community no longer exists?
To provide a make-believe image of absolute freedom of speech, the media and the modern Prince resort to a hyperbolic language filled with hyperreal metaphors and qualifiers. This is especially true regarding the terms 'democracy' and 'human rights'. These terms have assumed the emotional role in rallying political allegiance formerly reserved for terms evoking nationhood and patriotism. Opinion makers in Europe and America are not so much concerned with the content of their language, but rather with the appropriate packaging of the language and its emotional impact on the masses.
For effective communication a modern politician (or the modern Prince?) is required to use images with a cheerful setting and a happy ending scenario. His looks are important too. An aspiring presidential candidate must be concerned more with his dentures than with his deontology. A well-fitting Armani suit and polished Gucci shoes are far more important than his IQ. The image is essential since it does not encourage reflection, but obliterates all reflection. The hyperreal image on TV screens with all the trappings of wealth, power, and personal appeal is ideal for propagating new political lies and, by extension, for instituting horrendous political censorship.
For a European or American politician who aspires to high office, the ritual of repentance has become de rigueur.
The exception, of course, is President Obama who capitalizes on his Black identity to induce guilt in his audience.
Not long ago Europeans were proud of their colonial exploits. Not long ago the exclusion of the Other (Blacks, Jews, Arabs) was perceived as a normal thing - typical of human societies from time immemorial. Today the exclusion of the Other is replaced by the hatred of oneself. Ceaseless national-masochistic sermons about Euro-American real or surreal crimes bear witness to a quasi-pathological desire to cleanse oneself of a past that evokes guilt rather than pride.
Public language must be "soft" and didactic - conveying a self-deprecating message and requiring the modern Prince to formulate his statements in the conditional tense - or by using evasive sentences starting with adverbs such as "admittedly," "considerably," "presumably," etc. No politician wishes to stick out his neck by using affirmative sentences that would clearly enunciate his value judgments or depict his potential foe. After reading mainstream newspaper editorials, a student of political semiotics is struck with convoluted locutions such as 'one could say, 'one might say,' 'one should consider bombing Iran,' or 'help democracy become transparent in East Timor.' Such vague locutions provide a safe retreat for the liberal ruling class, as they signify nothing and everything at the same time.
Political language must be neutral or neutered; it must reflect the desire for a world of stasis - not of global liberal metastasis. The only exceptions are modern heretics who must endure the most violent epithets. Thus the $PLC, a principal architect and enforcer of modern discourse on race and immigration, likes to use expressions preceded by the noun 'hate,' or followed by the adjective 'extremist': 'hate groups', 'hate speech', 'hate crimes'; 'White extremists,' 'political extremism', etc. Contemporary politicians and their media watchdogs love to compare absolute Evil to absolute Good, using words that are loaded with emotional significance, such as "fascism" vs. "antiracism": the horrors of the Auschwitz on the one hand versus the Hollywood-like fantasy of multicultural conviviality.
Nothing new under the sun, as the old Latins used to say. This idea is well captured by the late Christopher Lasch, the best American visionary and the theorist of narcissistic democracy. He noted a long time ago in his book The True and Only Heaven that "Liberals' obsession with fascism ... leads them to see fascist tendencies or 'proto-fascism' in all opinions unsympathetic to liberalism."
As much as Lasch was right he was also wrong. Today he would be accused of "fascist, revisionist tendencies" by the masters of political discourse - thus giving further credit and credence to the paranoid liberal mind. Historically, both the fascist and communist temptations did not drop from the moon. They were logical responses to the failures of liberalism - to the "democratic deficit" of the liberal experiment. Therefore one must not rule out the revival of the fascist temptation, albeit in a new garb, as a third option in our late postmodenity: If a good man in a village is constantly and publicly called a crook, he will eventually embody those accusations. White nationalism, which is on the rise in the US and the EU, is the logical response to the chaotic policies of the liberal class and its promotion of all ethnic prides world-wide - except for white Europeans.
In postmodernity, political messages are transmitted by visual images and the sound bite - not the written word. Rėgis Debray, the ex-leftist guerrilla who ascended to high office in the French Ministry of Foreign Affairs - and probably the best observer of the perverse nature of liberal democracy, notes that the traditional 'graphosphere' has been completely devoured by the "videosphere." Books and prose are relics; the virtual video message has become omnipresent. It is no accident that a dissident or a violent radical no longer dreams of storming the Prince's palace, but rather contemplates the seizure of the TV tower.
Postmodern political imagery does not reflect the lack of reality, but rather mirrors the excess of reality. Henceforth any political debate on a TV screen is not designed to hide the truth, but ironically, to hide the absence of all truth. Everywhere the media and the modern Prince simulate fictitious events such as terrorist attacks as if they wish to have them happen, while at the same time they try to prevent them from happening. The bogeymen of the left -"hate groups" and "extremists" - appear to be nowhere near the horizon. Yet, as was the case in the ex-Soviet Union, they must be reinvented over and over again in order to provide legitimacy and solid funding to groups like the $PLC who love to dress up in the apparel of "tolerance" and "humanity." Everything is stage-managed as if everything were true.
What we are witnessing today in the West, in all spheres of official political discourse, is a gigantic display of lies - far worse than in the notorious totalitarian despotisms of the 20th century which the postmodern liberal pretends to abhor.
Political Metastasis
In his recent editorial in the quarterly Elėments (summer 2009), under the title "Une époque de basses eaux" - literally translated as "An epoch of low tide," or loosely and metaphorically as "Stalemate Times" - Alain de Benoist gives us a bleak picture of the forthcoming darkness:
In the catalogue of the ephemeral and the superficial, images and noise are following one after the other. Their goal is to capture attention and distract, and to make us think about other things, or more precisely, to make us cease to think altogether. The insignificant becomes a general rule. What comes to mind is the world depicted by the Wachowski brothers in the movie, Matrix (1999). In the movie everybody takes for real what is actually inauthentic; everybody is manipulated from the very moment he imagines himself to be free. Never have people thought to be able to do what they wish, yet never ever have they been subject to so many regulations. In fact they do not really know what they desire because it is the system that formulates their desires.
The biggest victory of the system is to have persuaded everybody not of its qualities, but of its fatal character. The system does not claim to be perfect; it claims that there are no other alternatives. Hence, if one cannot dream of a better world, then there is nothing that can be done.
High politics follows the same hyperreal lead. There is no longer any need to await disasters or the proclamation of a state of emergency, since they are constantly evoked and artificially provoked -creating thereby the genuine feeling of a state of emergency and impending disasters and setting the stage perfectly for a judicial or police clamp down. The security checks that one must endure at all airports in the West inevitably give the feeling of a creeping state of emergency. Depictions of catastrophic images on fictional television drama shows inevitably influence people's perceptions of real catastrophic events. The image no longer follows reality; it precedes reality. Modern politics is the show of hyper-reality - as witnessed for the first time during the recent ex-Yugoslav and Iraqi wars, which were getting bloodier and bloodier the more they were shown on TV.
The Books of the Dead
The same applies to modern historiography and to the sudden surge among Third World nations for the resurrection and beatification of their dead. The more dead they manage to hold up as icons of Western evil the better able they are to affirm their own ethnic identity. One of the best theoreticians of political hyper-reality, the late Jean Baudrillard, describes Auschwitz "not as a site of annihilation, but the site of dissuasion" (The Evil Demons of Images, 1988, p. 24). It is no longer a site of suffering; it is a site of deterrence and didactics, designed to be the ultimate symbol of postmodern Western culture as psychotherapy for Europeans.
The Jewish narrative regarding the "singular" and "unique" historical event of the Holocaust has already given birth to similar "singular" and "unique" narratives among other peoples, notably Armenians and (ironically) the Palestinians, with dozens more nations waiting in the wings.
Diversity obliges. Soon our postmodernity will be forced to open up post-graduate studies on political necrology or (more precisely) political necrophilia, as more and more groups clamor for their forgotten real or hyperreal dead. However, political necrophilia carries its own dangers for groups that see themselves solely through the lens of victimhood. In attempting to avoid the repetition of disaster, the Jewish narrative of "never again" does exactly the opposite: By focusing solely on a decontextualized event of persecution, it runs the risk of failing to rationally comprehend Jewish history - with unforeseen consequences.
Almost thirty years ago, Baudrillard wrote memorable words to illustrate the metastasis of liberal democracy:
The energy of the public sphere, the energy that creates social myths and dogmas is gradually disappearing. The social arena turns obese and monstrous. It grows like a mammal and glandular corpse. Once it was illustrated by its heroes but today it refers to its handicapped, its weirdos, its degenerates, its asocial persons - and all of this in a gigantic effort of therapeutic maternity. (Les strategies fatales, 1983) (Fatal Strategies.)
The system puts forward the transparency of evil by parading images of evil in the form of maladaptive individuals. The ruling class and its mediacracy need to display the proof of their power by showing that those who transgress the most basic values of the multicultural zeitgeist are psychologically deranged - literally insane. Proverbial 'revisionists, 'bigoted anti-Semites,' and 'Nazi pseudo-scholars,' are cherished demon images of liberal democracy. They need to be constantly put on exhibition in public places - like wayward Puritans of old - in order to lend further credibility to the eroding system.
Americans and Europeans are constantly put on false alerts by the media about pending terrorist threats. The invocation of terrorism is often fictitious, yet it engages the media machinery in a gigantic show of lies and mendacity. The purpose of the negative imagery is to scare the masses into submission. In a world that encourages narcissism and extreme individualism, one is not only the victim of the image. One becomes the image himself at the price of deforming his own tragic reality.
Tom Sunic www.tomsunic.info; http://doctorsunic.netfirms.com/) is an author, former political science professor in the USA, translator and former Croat diplomat. He is the author of Homo americanus: Child of the Postmodern Age ( 2007). Email him.
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vendredi, 07 août 2009
Bientôt la révolution aux Etats-Unis?
Bientôt la révolution aux Etats-Unis?
Gérald Celente, l’homme qui a prédit le krach boursier de 1987 de même que la chute de l’Union Soviétique prévoit maintenant que surviendra une révolution aux États-Unis de même que des émeutes de la faim et des rébellions contre les impôts. Le tout, d’ici 4 ans et il souligne que d’ici 2012, avoir de la nourriture sur la table sera une préoccupation beaucoup plus important que l’achat de cadeaux de Noël. Un texte datant de 2008 mais qui est toujours d’actualité (NLDR).
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jeudi, 06 août 2009
Russie/Chine: grandes manoeuvres sur le front oriental
Russie/Chine: grandes manoeuvres sur le front oriental
22 juillet 2009: la “Mission de Paix 2009” vient de commencer. Il s’agit de manoeuvres militaires russo-chinoises qui se poursuivront dans les territoires les plus orientaux des deux pays jusqu’au 26 juillet. Les opérations ont été planifiées pour 1300 militaires russes et autant de Chinois. Cent soixante véhicules blindés, dont des chars d’assaut, des avions et des hélicoptères participeront aux exercices. Ces manoeuvres ont pour but de renforcer la coopération entre les forces armées de Moscou et de Beijing, qui seront peut-être appelées à affronter les menaces du monde contemporain: le terrorisme et l’extrémisme. C’est ce qu’a déclaré le 22 juillet le chef d’état-major russe, le général Nikolaï Makarov. Mais ces manoeuvres n’ont pas été organisées à titre préventif seulement. Les protagonistes veulent faire entendre au monde un message bien précis par la voix du Général Makarov: “Les exercices militaires de ‘Mission de Paix 2009’ doivent démontrer à la communauté internationale que les forces armées de la Russie et de la Chine ont bel et bien la capacité d’assurer la stabilité et la sécurité dans la région”. En clair: cela signifie que les adversaires du “Groupe de Shanghai” doivent se retirer du Turkestan oriental (Sinkiang), de l’Asie centrale et, aussi, bien sûr, de l’Abkhazie et de l’Ossétie du Sud.
(article paru dans “Rinascita”, Rome, 23 juillet 2009, trad. franç.: Robert Steuckers).
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