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lundi, 25 octobre 2010

Néolibéralisme et euthanasie des classes moyennes

Néolibéralisme et euthanasie des classes moyennes

Ex: http://www.mecanopolis.org/

Par Bernard Conte

Pendant que le néolibéralisme fait son travail de sape, nos élites complices, grassement rémunérées, tentent de détourner l’attention des populations. À l’instar des prestidigitateurs, elles pointent des faits, des « évidences », des idées, des théories… pour mieux dissimuler la réalité et manipuler les opinions.

Après avoir longtemps nié le phénomène du laminage des classes moyennes en Occident, les néolibéraux – de « gauche », comme de « droite »2 [1] – l’admettent, au moins implicitement, aujourd’hui. Mais pour eux, ce phénomène serait tout à fait « naturel », car il se doublerait de l’apparition et de l’essor de classes moyennes au Sud et plus particulièrement dans les pays émergents.

Quoi de plus équitable ? Les pays du Sud n’ont-ils pas un « droit » inaliénable au développement et leurs populations ne peuvent-elles prétendre à « s’embourgeoiser » à leur tour ? La mondialisation néolibérale, tant décriée, aurait des effets positifs sur les classes moyennes au Sud. Face à la dynamique inéluctable de délocalisation des classes moyennes au Sud, les réactions égoïstes des « petits » bourgeois du Nord visant à protéger leur niveau de vie – en s’attachant à leurs privilèges, en revendiquant, en manifestant dans les rues, par exemple – seraient aussi vaines qu’inutiles, voire, à la limite, racistes.

Ce discours est totalement biaisé car la dynamique des classes moyennes suit un cycle au cours duquel elle passe par une phase de croissance, suivie d’une période de décroissement. Ces périodes sont déterminées par la nature des liens entre les classes moyennes et le capital. Pendant la phase ascendante, la classe moyenne prospère parce qu’elle est « l’alliée » du capital. Lorsqu’elle devient son « ennemie », la classe moyenne périclite. Dans les deux cas, c’est l’État, entre les mains de la classe politique, qui gère la production ou la destruction de la classe moyenne.

La dynamique cyclique des classes moyennes : entre densification et éclaircissement

Au cours des Trente glorieuses au Nord et pendant la période du développement introverti3 [2] au Sud, la classe moyenne s’est densifiée, avec plus ou moins d’intensité, dans de nombreuses zones de la planète. L’adoption de politiques néolibérales, de désinflation compétitive au Nord et d’ajustement structurel au Sud, a inversé la tendance en éclaircissant les rangs des classes moyennes. Cette évolution donne à penser que la dynamique des classes moyennes suit une trajectoire cyclique.

L’évolution de la classe moyenne en Afrique : l’exemple de la Côte d’Ivoire

L’expérience de la Côte d’Ivoire, pendant et après le « miracle » économique, illustre bien cette dynamique. Sous l’égide de son Président, Félix Houphouët-Boigny, la Côte d’Ivoire a mis en œuvre un modèle de développement « au caractère libéral et ouvert officiellement affirmé, devait présenter trois étapes successives : le capitalisme privé étranger, le capitalisme d’État, avant la relève par le capitalisme privé national, encouragé par un processus de rétrocession. La stratégie industrielle retenue était la substitution des importations. La politique industrielle s’est appuyée sur l’État et les intérêts français dont les profits étaient garantis par le code des investissements promulgué en 1959 et par la protection du marché interne4 [3] ».

Il s’agissait, pour l’État, de susciter l’apparition d’une classe « motrice », moyenne et supérieure, qui puisse prendre en main le développement national. À cette fin, l’État a mis en œuvre une stratégie multiforme notamment fondée sur :

  1. l’éducation – formation : « en 1960, l’État consacrait 22% de son budget à la formation ; cette proportion passait à 33% en 1973, pour atteindre 54,9% en 19835 [4] ».
  2. l’ivoirisation du capital et de l’emploi (et particulièrement des cadres) par la relève des étrangers dans la fonction publique, dans le secteur de l’immobilier et des PME et dans les grandes entreprises (le plus souvent filiales de sociétés transnationales) ainsi que par l’extension de l’appareil d’État et du secteur public6 [5].

« L’appareil d’État sert de précurseur, de trait d’union et de tremplin à l’intégration des nationaux aux postes économiques. L’État joue le rôle d’agent moteur, créant les conditions de l’accès aux participations économiques, ne se substituant jamais à l’initiative privée là où elle existe, et toujours de manière à ce que ces initiatives soient compatibles avec les orientations du passé. La promotion des nouvelles initiatives tend à se faire dans des secteurs réservés7 [6] ».

Ainsi, grâce à l’action publique, les classes moyennes émergent. Par exemple, « avec un effectif de 78 000 emplois en janvier 1978, l’Administration est le premier employeur du pays. Comme le secteur parapublic représente pour sa part 61 000 emplois (y compris les sociétés d’économie mixte) c’est près de 40 % de l’emploi moderne qui est, directement ou indirectement, contrôlé par l’État8 [7] ». De même, dans son étude sur l’emploi en Côte d’Ivoire, Françoise Binet dénombre, en 1978, 4 832 patrons d’entreprises à Abidjan dont 41,2 % sont ivoiriens9 [8]. Ces chiffres traduisent l’émergence et la densification progressive de classes moyennes salariées et entrepreneuriales au cours des Vingt glorieuses (ou du miracle ivoirien), aussi marquées par un taux de croissance du PIB réel d’environ 7 % par an en moyenne, une performance qui a engendré l’entrée de la Côte d’Ivoire dans la catégorie des pays à revenu intermédiaire selon la classification de la Banque mondiale. Dans les années 1970, la Côte d’Ivoire bénéficie du niveau de vie le plus élevé d’Afrique de l’Ouest.

Le tournant se situe au début des années 1980 avec la chute des cours internationaux du cacao et du café, principales exportations de la Côte d’Ivoire. A partir de 1981, s’ouvre la période de l’ajustement. En raison de l’intangibilité revendiquée de la parité du franc CFA vis-à-vis du franc français, l’ajustement sera tout d’abord désinflationniste (en termes réels ), puis en 1994, il comportera la dévaluation de 50 % du CFA. Les mesures d’abaissement de la dépense publique, de réduction des effectifs de la fonction publique, la privatisation, la disparition pure et simple d’entreprises publiques ou d’entreprises liées à l’industrialisation par substitution des importations… vont se traduire par un appauvrissement de la majorité de la population avec un creusement des inégalités. En considérant l’indice du PIB réel par habitant égal à 100 en 1980, sa valeur n’était plus que de 79,7 en 198810 [9]. La réduction des emplois publics grossit les rangs du secteur informel et inverse le flux de l’exode rural: « en ce début des années 1990, nombre d’autochtones, montés dans les villes car ayant bénéficié du programme gouvernemental de 1978, dit d’ivoirisation de la fonction publique, sont forcés de revenir dans leurs villages d’origine suite à la suppression de nombreux emplois administratifs11 [10] ». Ces populations, appartenant à la classe moyenne « ajustée », « compressée », sont victimes d’un déclassement. On assiste à « l’extension de la pauvreté et à l’accroissement des inégalités12 [11] ». L’augmentation de la pauvreté, qui en « 2008 a atteint un seuil critique de 48,9 % contre seulement 10 % en 198513 [12] », traduit le fait que la classe moyenne se paupérise.

En Côte d’Ivoire, de l’indépendance à la fin des années 1970, la classe moyenne s’est constituée dans le cadre du modèle de développement mis en œuvre par Félix Houhpouët-Boigny. Cette classe a vu ses rangs s’éclaircir progressivement avec les programmes d’ajustement structurel néolibéraux. On observe cette même dynamique sous d’autres cieux.

Argentine : « la classe moyenne est détruite14 [13] »

En Amérique Latine, l’exemple de l’Argentine révèle que la période des ajustements a délité la classe moyenne nombreuse qui s’était constituée auparavant. En effet, jusqu’à la fin des années 1970, « l’Argentine était une société relativement bien intégrée – tout au moins si on la compare aux autres pays d’Amérique Latine – caractérisée par une vaste classe moyenne, résultat d’un processus de mobilité sociale ascendante dont la continuité n’avait jamais été remise en cause15 [14] ». A partir des années 1980, la classe moyenne se délite. «  On observe notamment l’entrée dans le monde de la pauvreté d’individus issus de la classe moyenne : il s’agit des « nouveaux pauvres » dont le nombre a cru de 338 % entre 1980 et 199016 [15] ». Cette tendance s’est poursuivie, si bien qu’en janvier 2002, le Président argentin nouvellement élu, Eduardo Duhalde, révélait « qu’en 2001, la classe moyenne [avait] perdu 730 000 argentins, venus grossir les rangs des 15 millions de pauvres, soit 40 % de la population du pays17 [16] ». A cette occasion, le Chef de l’État déclarait : « la classe moyenne est détruite18 [17] ».

La fin du « miracle » asiatique et le laminage des classes moyennes

En Asie du Sud-Est, de 1970 à 1995, les pays émergents ont enregistré une forte croissance économique, si bien que l’on a parlé de « miracle ». Au cours de cette période, une classe moyenne essentiellement urbaine a progressivement émergé. La grave dépression de 1997-1998 a fortement impacté « la classe moyenne des pays du Sud-Est asiatique [qui] a payé le prix fort de cette crise : de nombreuses personnes ont perdu simultanément leur emploi et les économies de plusieurs années19 [18] ». Le phénomène tend à se poursuivre avec la crise actuelle. En Corée du Sud par exemple, la crise actuelle (2008) « évoque celle de 1998. Du coup, les jeunes se ruent vers les sociétés d’État, où les emplois sont plus stables. En une décennie, la classe moyenne coréenne a diminué de 10 %. Beaucoup forment aujourd’hui une nouvelle classe de pauvres20 [19] ».

Au Nord : l’euthanasie progressive des classes moyennes

Au Nord, depuis le début des années 1980, on assiste à « l’euthanasie » de la classe moyenne constituée pendant les Trente glorieuses21 [20]. Aux États-Unis, « s’il existe un point sur lequel les années 1980 ont réussi à créer un accord (de toute façon a posteriori) entre des économistes de différentes tendances, c’est précisément sur la diminution quantitative de la classe moyenne : « the big squeeze » de l’économie domestique située au niveau des revenus intermédiaires, la mobilité vers le bas des « cols blancs », les dumpies (downwardly mobile professionals selon la définition de Business Week) ont remplacé les yuppies plus connus du début des années 198022 [21] ». La tendance au délitement a été masquée, jusqu’à la crise des « sous-primes », grâce à « un accès au crédit excessivement laxiste » qui « a permis à une grande partie des ménages moins nantis de maintenir un niveau de vie aisé » et qui « a généré ce qu’on pourrait appeler une ‘fausse classe moyenne’ aux États-Unis23 [22] ». En Allemagne, selon une étude scientifique récente de l’institut DIW, au cours des dix dernières années, « les classes moyennes se sont « rétrécies24 [23] » car elles sont « les perdantes des transformations qu’a subi la répartition des revenus au cours de la dernière décennie25 [24] ». En France, la dynamique d’atrophie des classes moyennes est moins perceptible, en raison de l’existence initiale d’un État-providence renforcé et de sa plus lente destruction. Louis Chauvel montre que, pendant les Trente glorieuses, l’ascenseur social a permis à un grand nombre de jeunes, issus du milieu agricole ou ouvrier, d’accéder à la classe moyenne qui s’est développée rapidement au cours de cette période26 [25]. C’était l’âge d’or de la classe moyenne en France. Mais, à partir du début des années 1980, la situation se détériore progressivement. « Sans nier l’importance des difficultés des classes populaires et de ceux qui font face à la marginalisation sociale, c’est au tour des catégories centrales de la société d’expérimenter une forme de précarité civilisationnelle27 [26] ».

Il apparaît que les classes moyennes se sont développées dans des lieux et à des moments différents, pendant des périodes de durée variable, mais caractérisées par une croissance économique relativement élevée. Lorsque l’environnement s’est révélé moins favorable, ces classes moyennes sont entrées en crise. La dynamique des classes moyennes semble suivre une chronologie caractérisée par une période de croissance, prolongée par une phase de décroissement.

Dans cette hypothèse, il est utile de s’interroger sur les facteurs explicatifs de la dynamique cyclique des classes moyennes.

Quelques pistes de réflexion sur les déterminants de la dynamique cyclique des classes moyennes

Notre hypothèse suggère que l’on assiste, dans le temps, à une montée des classes moyennes suivie de leur décrue. Une raison de cette trajectoire pourrait se situer dans le rôle ambigu des classes moyennes dans le processus de développement. En effet, les classes moyennes apparaissent à la fois comme un facteur de développement économique et comme un frein à la croissance des profits. Le cheminement cyclique pourrait s’expliquer par un échelonnement différencié dans le temps des effets précités. Dans tous les cas, il apparaît que l’évolution de la classe moyenne est intimement liée à l’intervention de l’État. C’est l’État (ou plutôt les élites politiques au pouvoir) qui décide de (dé)règlementer et de légiférer pour promouvoir ou enrayer le développement de la classe moyenne. La loi est (presque) toujours instrumentalisée pour servir les intérêts du capital qui peuvent coïncider avec ceux de la classe moyenne à un moment donné et en diverger à une autre période. En cas de convergence d’intérêts, la loi favorise la densification de la classe moyenne, en cas de divergence, la loi organise l’euthanasie de la classe moyenne jugée inutile, hostile et coûteuse pour le capital.

La classe moyenne « alliée » du capitalisme industriel

Dans certaines circonstances, la classe moyenne apparaît comme un facteur de développement de par son impact sur l’offre et sur la demande. Par exemple, au cours de la période des Trente glorieuses, la classe moyenne (intégrant une bonne partie de la classe ouvrière) a largement participé au bon fonctionnement du système fordiste, caractérisé par la production de masse et la consommation de masse. Pour son développement, le capitalisme industriel avait besoin d’un grand marché ainsi que de capacités productives résidentes pour l’approvisionner.

La classe moyenne a tenu un rôle important dans la création et le soutien de la demande tant sur le plan quantitatif que qualitatif. Grâce à un pouvoir d’achat en progression régulière, elle a consommé des quantités croissantes de biens et de services standardisés, mais elle a aussi accepté de payer un prix plus élevé pour la « qualité », ce qui a stimulé l’investissement pour l’innovation, la différenciation et la commercialisation de nouveaux biens et services28 [27].

Du côté de l’offre, certains considèrent la classe moyenne comme un vecteur important de l’entrepreneuriat et de l’innovation des petites entreprises. La classe moyenne s’est aussi constituée à partir de la main-d’œuvre qualifiée dont les entreprises et l’État (l’État providence) avaient besoin pour leur développement. Grâce à l’effort d’éducation – formation, ladite classe a fourni le capital humain nécessaire tout en permettant à une masse d’individus issus de milieux modestes de rejoindre ses rangs. Au total, « la classe moyenne apparaît comme la source de tous les intrants requis pour assurer la croissance en termes d’économie néoclassique – idées nouvelles, accumulation du capital physique et accumulation du capital humain29 [28] ».

Ainsi, les Trente glorieuses ont scellé un compromis (une « alliance ») temporaire entre la classe moyenne, essentiellement salariée, et le capital industriel. La superposition géographique des aires de production et de consommation était un élément décisif du compromis. Grosso modo, ce qui était essentiellement produit au Nord était consommé au Nord. Ce faisant, la fraction de la valeur ajoutée à laquelle les capitalistes renonçaient dans le processus productif, pour la verser sous forme de salaire direct et indirect, revenait dans leur escarcelle lors de l’achat des biens et services par les salariés. En d’autres termes, le salaire était à la fois un coût et un vecteur de profit pour l’entreprise. La coïncidence géographique de la production et de la consommation engendrait un cercle vertueux conduisant au développement autocentré.

Dans une certaine mesure, on a constaté la mise en place de compromis similaires dans les pays du Sud, au cours de la période du nationalisme – clientéliste, notamment caractérisé par l’industrialisation par substitution des importations. En Côte d’Ivoire, par exemple, le compromis initiateur de la classe moyenne était fondé sur la redistribution de la rente agricole issue des filières cacao-café, sur le développement du secteur industriel ainsi que sur les apports d’aide extérieure30 [29]. Le capital international récupérait la rente par le biais des importations et de la production nationale qu’il assurait majoritairement.

Lorsque le contexte évolue, les intérêts des protagonistes peuvent se mettre à diverger et le compromis peut être remis en cause. Dans ce cas, la classe moyenne et le capital deviennent ennemis.

La classe moyenne « ennemie » du capitalisme financier

La survenance d’une série d’évènements va graduellement modifier le contexte de l’économie mondiale : la fin du système de taux de change fixes en 1971, les chocs pétrolier de 1973 et de 1979, la stagflation, la crise de la dette des pays du Sud en 1982, la chute du mur de Berlin et l’implosion du bloc soviétique. L’évolution va permettre l’accélération et l’approfondissement de la mondialisation néolibérale, financière et économique.

Le capitalisme se financiarise et la production industrielle est relocalisée principalement sur le continent asiatique qui dispose d’une main d’œuvre à très bas salaires. La désindustrialisation frappe les pays du Nord31 [30], mais également les pays du Sud32 [31] qui avaient, dans le cadre du nationalisme – clientéliste, adopté des stratégies d’industrialisation par substitution des importations.

Le libre-échange permet d’inonder les marchés de produits à bas prix qui concurrencent (de façon déloyale ?) les productions nationales, révélant leur défaut de « compétitivité ». (Re)devenir compétitif33 [32] implique l’abaissement des coûts de production directs et indirects. Cette démarche passe par la réduction des salaires réels, des avantages sociaux… et, plus généralement, des dépenses « clientélistes » (assimilées à de la corruption) et des dépenses liées à l’État providence (présentées comme inéquitables, car essentiellement corporatistes).

Sous prétexte de concurrence, il s’agit de rehausser les profits. Pour ce faire, il convient d’ajuster les structures économiques et sociales nationales aux règles du « laisser-faire » – « laisser-passer », étendu à l’ensemble de la planète. « Parmi la population, comme les pauvres le sont trop et que les riches sont exemptés34 [33], c’est sur la classe moyenne que reposera l’essentiel de la charge de l’ajustement35 [34] ».

Ainsi, la classe moyenne devient « l’ennemie » du capitalisme financiarisé car son existence injustifiée – puisque sous d’autres cieux, des populations assurent les mêmes tâches productives à moindre coût – réduit les profits. Le capitalisme dénonce le compromis conclu précédemment et fait procéder à l’euthanasie de la classe moyenne parasite. Pour ce faire, l’intervention de l’État, guidée par les élites politiques complices, apparaît indispensable.

La classe moyenne produite ou détruite par l’État

L’intervention de l’État est impérative pour assurer le développement de la classe moyenne ou son euthanasie, car c’est lui qui légifère, règlemente, incite, réprime… contrôlant ainsi, plus ou moins directement, une large part de la production et de la redistribution des richesses. L’État prend et donne, fait et défait, tricote et détricote… Par le biais de la loi, du secteur public, de la fiscalité – redistribution…, l’État façonne, corrige et adapte la structure sociale nationale. Les élites politiques (issues du suffrage universel en démocratie) assurent la direction de l’État, proposent et votent les lois. Ce sont donc lesdites élites politiques nationales qui portent la responsabilité de la densification ou de l’éclaircissement de la classe moyenne.

Durant la phase ascendante du cycle, le compromis entre le capital et la classe moyenne autorise les élites politiques à œuvrer en sa faveur. L’État intervient pour assurer un bien-être accru par la loi et la réglementation, pour créer des emplois, pour mettre en place des services publics de qualité…, ce qui a pour effet de densifier la classe moyenne36 [35] tout en permettant au capital de se valoriser pleinement. On assiste à la construction de l’État providence et de l’État nationaliste – clientéliste. Au cours de cette phase, dans les pays du Sud, une bonne partie du surplus dégagé sur le territoire national, principalement sous forme de rente (agricole, minière, énergétique…), est mobilisé par l’État et distribué sur place. C’est la période des « Pères de la nation » (Houphouet-Boigny, N’Krumah, Nyerere…). Au Nord, le fordisme permet la croissance autocentrée, génératrice de surplus largement redistribué. Sur le plan politique, le climat est assez serein. En effet, en démocratie, les élites politiques émanent, pour une large part, de la classe moyenne. Elles fondent leur discours sur les concessions, obtenues ou à négocier avec les capitalistes37 [36], au profit de la classe moyenne essentiellement. De ce fait, la classe politique se trouve relativement en phase avec l’électorat38 [37].

Au cours de la période descendante du cycle, qui coïncide avec la divergence des intérêts du capital et de la classe moyenne, l’État œuvre à la destruction de cette dernière. Cela signifie la défaisance39 [38] des dispositifs mis en place au cours de la période précédente : l’État providence au Nord et l’État nationaliste – clientéliste au Sud. En régime démocratique, cette démarche présente un risque majeur pour les élites dirigeantes qui doivent mettre en œuvre des politiques contraires aux intérêts de leur électorat traditionnel40 [39]. Le contournement de cet obstacle politique implique l’atomisation du pouvoir de l’Etat central41 [40], l’organisation de la démocratie virtuelle42 [41], la promotion de l’idéologie du marché, la manipulation de l’opinion publique, le changement des élites par leur internationalisation43 [42]… Les élites, au pouvoir ou susceptible d’y accéder, réunies autour du projet néolibéral (monétariste ou ordolibéral) qu’elles déclinent avec le vocabulaire propre à leur position « officielle » sur l’échiquier politique, produisent un discours étriqué et peu différencié, qui tente de cacher la réalité de la dynamique de paupérisation du plus grand nombre, imposée par le capitalisme financiarisé. Le fossé se creuse entre la classe politique et les électeurs qui expriment leur désintérêt par une abstention massive aux scrutins électoraux. Malgré cela, les élites s’impliquent de plus en plus au service du capital contre les populations et particulièrement contre la classe moyenne. Pour elles, les règles du marché qui sont censées récompenser les prudents44 [43] et sanctionner les téméraires ne s’appliquent pas aux capitalistes financiers. La crise de 2008, montre que les élites ont fait en sorte que « les téméraires semblent être les bénéficiaires de la crise qu’ils ont provoquée, tandis que le reste de la société [et particulièrement la classe moyenne] porte le fardeau de leur insouciance45 [44] ». L’instrumentalisation de l’État et des institutions supranationales au service du capitalisme financiarisé engendre une crise globale de légitimité des élites, qu’elles soient nationales ou internationales.

Au total, selon que la classe moyenne sert ou dessert le capital, les élites utilisent l’État pour en densifier ou pour en éclaircir les rangs.

Conclusion

De nombreux scientifiques et commentateurs ont souligné l’importance des classes moyennes dans le processus de développement. Les performances des pays du G7 qui, de 1965 à 2004 ont représenté une part quasi stable de 65 % du PIB mondial peuvent être, en grande partie, attribuées à une classe moyenne nombreuse46 [45]. « Ce sont les classes moyennes qui ont bâti l’économie française du XXème siècle ; elles en ont été les plus grandes bénéficiaires47 [46] ». Plus généralement, « sur le long terme (200 ans), l’économie de marché occidentale a resserré les inégalités entre les classes sociales [et] ce sont les classes moyennes qui ont le plus bénéficié de ce resserrement des inégalités48 [47] ». La tendance s’inverse à partir de la fin des années 1970 avec la mondialisation néolibérale qui lamine progressivement les classes moyennes. Face à ce constat, d’aucuns49 [48] avancent que la « réduction » des classes moyennes dans certaines zones géographiques serait surcompensée par la densification de ces mêmes classes dans d’autres zones du globe.

On s’interroge sur l’apparition et la densification des classes moyennes dans les pays émergents (Chine, Inde…). Selon notre analyse, dans un contexte de mondialisation néolibérale, de libre-échange, de déréglementation, de libre mouvement des capitaux… et de non-intervention incitatrice et protectrice de l’État, les classes moyennes ne seront qu’un phénomène éphémère. En effet, le marché mondial mettant en concurrence tous les peuples, les revenus sont forcément plafonnés par la nécessité de rester compétitifs par rapport aux nouveaux entrants sur ledit marché (par exemple : la Chine par rapport au VietNam…, etc). Dans ces conditions, une classe moyenne ne peut se développer durablement. Dès que, dans un pays, les revenus atteignent un certain seuil, les coûts de production deviennent trop élevés pour affronter la concurrence tant sur le marché national que mondial. Les productions concernées sont alors délocalisées vers des pays ou des régions plus compétitives, où se créent des embryons de classe moyenne au « détriment » de celle du pays d’origine. Il s’agit d’une sorte de jeu à somme nulle où l’un gagne ce que l’autre perd50 [49].

Pour se densifier durablement, la classe moyenne a besoin de l’intervention incitatrice et protectrice de l’État qui ne peut intervenir dans un contexte de mondialisation néolibérale. Il faut donc réhabiliter l’État. De plus, les élites politiques à la tête de l’État (ou susceptibles de l’être) doivent privilégier les intérêts de la classe moyenne par rapport à ceux du capital.

Depuis de nombreuses années, l’expérience nous montre qu’au niveau mondial – à quelques rares exceptions près51 [50] – les élites au pouvoir, au capital social internationalisé, semblent plutôt être à la solde du capital financier. Cela signifie que l’avenir radieux des classes moyennes implique le changement des élites qui ne se fera certainement pas sans violence52 [51].

Benard Conte, pour Mecanopolis [52]

Bernard Conte est économiste politique et maître de conférences à l’Université Montesquieu-Bordeaux IV 

Visiter le blog de Bernard Conte [53]

Notes :

1 [54] Cet article est une version épurée d’une communication [55] présentée au Congrès des études africaines en France, CEAN – IEP de Bordeaux, septembre 2010.
2 [56] En France, on les nomme : droite « bling bling » et gauche « caviar », sur le plan des idées politiques, une épaisseur de moins d’un cheveu les sépare.
3 [57] Au Sud pendant cette période, « de nombreux pays optent pour un développement introverti en mettant en œuvre des stratégies d’industrialisation par substitution des importations (ISI), aptes à lutter contre la détérioration des termes de l’échange (DTE). Il s’agit de remplacer progressivement les importations de produits manufacturés par la production nationale dans une stratégie de remontée de filière. Pour ce faire, le marché domestique doit être protégé (au moins temporairement) et l’État joue un rôle majeur dans la mise en œuvre de ladite stratégie (state-led-development) », Bernard Conte, Clientélisme, ajustement et conflit [58], Bordeaux, CED, DT n° 101, 2004, p. 1.
4 [59] Bernard Conte, Clientélisme, ajustement et conflit, op. cit. p. 5.
5 [60] Bernard Conte, La division internationale du travail et le développement interne : le cas de la Côte d’Ivoire, op. cit. p. 359.
6 [61] Ibidem, p. 321-376.
7 [62] Bonnie Campbell, « Quand l’ivoirisation secrète une couche dominante », Le Monde diplomatique, novembre 1981.
8 [63] République de Côte d’Ivoire, Ministère du plan, Plan de développement économique social et culturel, 1981-1985, Abidjan, 1982, p. 744.
9 [64] Bilan national de l’emploi en Côte d’Ivoire, Ministère des relations extérieures, Etudes et documents, n° 47, Paris, mai 1982, p. 132.
10 [65] Jean-Paul Azam, La faisabilité politique de l’ajustement en Côte d’Ivoire (1981 – 1990), (version révisée n°3) études du Centre de développement, OCDE, Paris, 1994, p. 71.
11 [66] « Cote d’Ivoire, compétition capitaliste aigüe autour de la répartition de la rente issue de l’exploitation des ressources naturelles », La lettre de mouvement communiste, n° 15 ; janvier 2005, http://www.mouvement-communiste.com/pdf/letter/LTMC0515.pdf [67] consulté le 19 août 2010.
12 [68] Denis Cogneau et Sandrine Mesplé-Somps, L’économie ivoirienne, la fin du mirage ? Dial, Paris, Document de travail DT/2002/18, Décembre 2002, p. 88.
13 [69]Afrik.com, « Côte d’Ivoire : la pauvreté atteint le seuil critique de 48,9 % », 6 janvier 2009,
http://www.afrik.com/breve15294.html [70] consulté le 19 août 2010.
14 [71] Gabriel Kessler, « L’expérience de paupérisation de la classe moyenne argentine », Cultures & Conflits, 35, 1999, http://www.conflits.org/index173.html [72] Consulté le 17 juillet 2010. Le délitement de la classe moyenne s’observe aussi au Brésil, cf. par exemple : Larissa Morais, «  La classe moyenne brésilienne », Jornal do Brasil, 12 mai 2004, traduction Elizabeth Borghino pour Autres Brésils, http://www.autresbresils.net/spip.php?article73 [73] consulté le 8 août 2010.
15 [74] Gabriel Kessler, « L’expérience de paupérisation de la classe moyenne argentine », art.cit.
16 [75] Idem.
17 [76] Latinreporters.com, « Argentine: le péroniste Eduardo Duhalde, 5e président en deux semaines », http://www.latinreporters.com/argentinepol020102.html [77] , consulté le 1er août 2010.
18 [78] Idem. Le délitement de la classe moyenne s’observe aussi au Brésil, cf. par exemple : Larissa Morais, «  La classe moyenne brésilienne », Jornal do Brasil, 12 mai 2004, traduction Elizabeth Borghino pour Autres Brésils, http://www.autresbresils.net/spip.php?article73 [73] consulté le 8 août 2010.
19 [79] Geneviève Brunet, « Crise des pays émergents. De bons élèves lourdement punis », L’Hebdo, http://www.hebdo.ch/crise_des_pays_emergents_de_bons_elev... [80] consulté le 1er août 2010. Voir aussi : John Evans, « Impact social de la crise asiatique. » Le Monde diplomatique, mai 1998, pp. 3.
20 [81] Alain Wang, « Asie : la crise frappe les classes moyennes », », Courriercadres.com http://www.courriercadres.com/content/asie-la-crise-frapp... [82] 19 mars 2009, consulté le 2 août 2010.
21 [83] Cf. Bernard Conte, La Tiers-Mondialisation de la planète [84], Bordeaux, Presses universitaires de Bordeaux, 2009.
22 [85] Christian Marazzi, « Middle-class confusion de terme, confusion de concept », Collectif d’analyse politique, http://cap.qc.ca.edu/a-la-redecouverte-du-concept-de-clas... [86] Première publication en juillet 1994, Mise en ligne le lundi 7 juillet 2003, consulté le 2 août 2010.
23 [87] Marc-André Gagnon, « La ‘fausse classe moyenne’ piégée », Le journal des alternatives, http://www.alternatives.ca/fra/journal-alternatives/publications/archives/2009/vol-15-no-8-mai-2009/article/la-fausse-classe-moyenne-piegee 30 avril 2009 [88], consulté le 2 août 2010.
24 [89] « Elles constituent désormais moins des deux tiers de la société », Cf. note suivante.
25 [90] Cidal, « L’érosion des classes moyennes se poursuit en Allemagne », Centre d’information et de documentation sur l’Allemagne, Paris, http://www.cidal.diplo.de/Vertretung/cidal/fr/__pr/actual... [91] , publié le 17/06/2010, consulté le 4 août 2010. L’étude est disponible à cette adresse : http://www.diw-berlin.de/documents/publikationen/73/diw_0... [92]
26 [93] Louis Chauvel, Les classes moyennes à la dérive, Paris, Seuil, 2006.
27 [94] Louis Chauvel, « Classes moyennes, le grand retournement », Le Monde, 3 mai 2006. p. 24.
28 [95] Kevin Murphy, Andrei Shleifer et Robert Vishny, “Income Distribution, Market Size and Industrialization,” Quarterly Journal of Economics, (août 1989), p. 537-564.
29 [96] Homi Kharas, The emerging middle class in developing countries [97], Working Paper n° 285, Paris, OCDE, Development Centre, janvier 2010, p. 7. Traduction de l’auteur.
30 [98] Cf. Bernard Conte, « Côte d’Ivoire : du clientélisme ‘éclairé’ au clientélisme ‘appauvri’ », Strategic-Road.com, 19/04/2003, http://www.strategic-road.com/pays/pubs/cote_divoire_clie... [99] consulté le 27 août 2010.
31 [100] « [En France], de 1997 à 2007, la part de l’industrie dans le PIB est passée de 18,4% à 12,1% et les emplois industriels ont diminué de 2 millions en trente ans », Pascal Salin, « Faut-il craindre la désindustrialisation ? », La Tribune, 10/03/2010.
32 [101] « L’ajustement structurel a contribué, contrairement à ce que laisse entendre le FMI, à la désindustrialisation de l’Afrique », Joseph Stiglitz, « L’Afrique doit compter davantage sur elle-même », Les Afriques, 08/02/2010, http://www.lesafriques.com/actualite/joseph-stiglitz-l-af... [102] consulté le 26/08/2010.
33 [103] La compétitivité devient obsessionnelle. Cf. par exemple : T. Biggs, M. Miller, M. Otto, C. et G. Tyler, « Africa Can Compete! Export Opportunities and Challenges for Garments and Home Products in the European Market, » World Bank – Discussion Papers 300, World Bank. 1996.
34 [104] Les riches sont les seuls censés produire de la croissance, il faut les protéger, par exemple grâce à un « bouclier » fiscal.
35 [105] Bernard Conte, « Le oui irlandais débloque l’Europe ordolibérale », Contre Info.info, 10/10/2009, http://contreinfo.info/article.php3?id_article=2835 [106] consulté le 27/08/2010.
36 [107] Au Chili, « les couches moyennes ont joui d’une redistribution favorable – à l’intérieur de l’ensemble des salariés – des dépenses publiques dans les domaines de la santé, de l’éducation et surtout du logement, sous les différents gouvernements démocratiques qui ont précédé la dictature », Rosa Jimenez et René Urbina, « Les avatars des couches moyennes dans le Chili d’aujourd’hui [108] », in. Tiers-Monde, 1985, tome 26, n° 101. Classe moyenne : la montée et la crise, p. 154-174. citation p. 161.
37 [109] Il semble que les capitalistes soient prêts à accorder la majorité des concessions, car elles vont dans le sens de la marche du fordisme et du nationalisme – clientéliste.
38 [110] Les promesses électorales peuvent être globalement tenues.
39 [111] C’est à dessein que j’emploie le terme du vocabulaire financier « défaisance », car il s’agit d’une exigence du capitalisme financier.
40 [112] En régime « moins » démocratique, la démarche peut conduire au conflit, éventuellement armé. Cf. Bernard Conte, « Afrique de l’Ouest : clientélisme, mondialisation et instabilité », Paris, Encyclopaedia Universalis, 2004, p. Du même auteur : « La responsabilité du FMI et de la Banque mondiale dans le conflit en Côte d’Ivoire [113] », Etudes internationales, vol. XXXVI, n° 2, juin 2005. p. 219-228.
41 [114] Cf. Bernard Conte, La Tiers-Mondialisation de la planète, op. cit. p. 194-199.
42 [115] Ibidem, p. 199-203.
43 [116] Cf. Yves Dezalay et Bryant G. Garth. La mondialisation des guerres de palais. Paris, Le Seuil, 2002 ; Zbigniew Brzezinski, Between Two Ages : America’s Role in the Technetronic Era, New York, Viking Press, 1970.
44 [117] Ceux qui prennent des risques « calculés » par opposition à ceux qui prennent des risques « inconsidérés ».
45 [118] George Friedman, “The Global Crisis of Legitimacy”, Stratfor, global intelligence, 4 mai 2010. http://www.stratfor.com/weekly/20100503_global_crisis_leg... [119] consulté le 19 août 2010. Traduction libre.
46 [120] “Underpinning the performance of the G7, and indeed driving the global economy, is a large middle class”, Homi Kharas, The emerging middle class in developing countries, op. cit.
47 [121] Xavier Théry, « Comment les classes moyennes ont divorcé des élites », Marianne 2, 27/09/2009, http://www.marianne2.fr/Comment-les-classes-moyennes-ont-... [122] consulté le 30/08/2010.
48 [123] Ibidem.
49 [124] Les néolibéraux évidemment.
50 [125] Par contre, le capital est toujours gagnant.
51 [126] On peut citer le Venezuela.
52 [127] Les révolutions ont souvent eu pour origine la classe moyenne.


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Swami Vivekananda e il suo tempo, tra modernità e tradizione

Swami Vivekananda e il suo tempo, tra modernità e tradizione

Elena BORGHI

Ex: http://www.eurasia-rivista.org/

Swami Vivekananda e il suo tempo, tra modernità e tradizione

Il quadro storico

Il periodo storico in cui visse ed operò Swami Vivekananda, la seconda metà dell’Ottocento, fu per l’India un momento particolarmente intenso.

Sul piano politico, caratterizzò questi anni il passaggio del governo dell’India dalla Compagnia delle Indie Orientali alla Corona inglese, che assunse il controllo diretto del Paese nel 1858, a seguito del Mutiny. Considerato da alcuni il primo scoppio del fervore nazionalista ed indipendentista, questo evento ebbe come principali conseguenze un’ondata terribile di violenze e la deriva ancor più autoritaria del governo inglese in India. Certamente, la rivolta fu indicativa del carattere predatorio della Compagnia e del livello di esasperazione da essa indotto nella popolazione, che cominciava a mal sopportare il peso del dominio inglese. Se, infatti, il regime coloniale trasformava gradualmente l’India in una nazione moderna – introducendo infrastrutture, reti di comunicazione, organizzazione della burocrazia e della società civile – d’altro canto il Paese pagava un prezzo altissimo in termini economici, sociali e politici.

Sul piano economico, l’India subì in questo periodo la devastazione causata dai legami sproporzionati tra centro e periferia dell’impero, che distrussero la preesistente economia, anche se, per quanto sfrenato, lo sfruttamento economico dell’India garantiva alla Gran Bretagna guadagni complessivamente piuttosto limitati. L’apporto fondamentale della colonia, infatti, rimase sempre la sua funzione di bacino potenzialmente inesauribile di reclutamento di uomini per l’esercito inglese in India, per l’apparato burocratico coloniale e per l’indentured labour, il sistema di “lavoro a contratto” che sostituì gli schiavi africani con migliaia di contadini e braccianti indiani, trasferiti nelle piantagioni e nelle miniere dei luoghi più disparati, legati a contratti che mascheravano uno stato di effettiva schiavitù.

Questi erano tra gli aspetti che, naturalmente, contribuivano a disintegrare il tessuto sociale indiano; vi si aggiungeva il portato del bagaglio ideologico introdotto dal regime coloniale, che cooperò enormemente alla cristallizzazione delle differenze castali e religiose e, dunque, alla frammentazione della società indiana in una miriade di blocchi contrapposti ed ostili, chiusi a livello endogamico, regolati da criteri gerarchici e definiti su basi di purezza razziale e rituale.


I movimenti di riforma

Di pari passo con il potere coloniale, cresceva lo scontento ed il senso di inadeguatezza di alcune categorie, perlopiù intellettuali di classe media ed estrazione urbana, figli di un’educazione di stampo occidentale, dalla cui iniziativa scaturì quel processo di rinnovamento sociale e culturale – nonché di ridefinizione identitaria, presa di coscienza nazionale e critica del regime coloniale – che investì l’India nel periodo in esame.

Si trattò di un periodo di fermento culturale e di tentativi di riforma sociale e religiosa, volti a ripensare le pratiche considerate più aberranti della tradizione hindu (come la sati, l’immolazione delle vedove sulla pira del marito, o il matrimonio infantile), a diffondere un’istruzione di tipo moderno, a ridiscutere la condizione femminile. Motore e scopo ultimo di questi movimenti era l’acquisizione di strumenti atti ad affrontare «l’esibita superiorità dell’Occidente cristiano nei confronti della cultura e delle religioni indiane»1, come dimostrarono, in particolare, le misure a favore dell’istruzione femminile. Auspicate dai riformatori per motivi che poco avevano a che fare con il reale desiderio di apportare miglioramenti alla generale condizione delle donne, queste misure si rivelarono, in realtà, necessarie ad altri scopi: confutare le teorie europee – secondo le quali la discriminazione cui erano sottoposte le donne in India e la loro condizione erano immagine dell’arretratezza del Paese in generale –, dando prova dell’adeguatezza dell’India all’autogoverno; creare “nuove donne indiane” capaci di essere mogli e madri più adatte alle necessità (pratiche, ma anche identitarie e d’immagine) della classe emergente, e di socializzarne i valori e le aspirazioni, pur entro i confini della tradizione patriarcale, che restava per i riformatori un punto fermo e indiscutibile.2

In ambito religioso, la riforma si concretizzò nelle figure di alcuni pensatori e nella fondazione di istituzioni, volte a rivedere le più grandi tradizioni indiane – hindu e musulmana – alla luce di uno spirito più moderno e razionale.

È tra questi riformatori che si colloca Vivekananda, al secolo Narendranath Datta, nato in quella Calcutta all’epoca centro della vita politica e culturale del Paese, e in una famiglia di scienziati e pensatori illustri.

Fin da bambino profondamente interessato ai temi dell’Hinduismo e della meditazione e dotato di un carisma e di una passione per la ricerca della verità inusuali per la sua età, Narendranath ricevette un’istruzione di stampo occidentale, appassionandosi in particolare alla filosofia, e coltivando allo stesso tempo lo studio della poesia sanscrita, dei testi sacri e degli scritti del riformatore suo contemporaneo Rammohan Ray.

Razionale, dedito al ragionamento logico e sprezzante dei dogmi religiosi tradizionali, Narendranath si avvicinò al Brahma Samaj, l’istituzione fondata a Calcutta nel 1828 da Rammohan Ray al fine di operare una trasformazione dello Hinduismo in senso moderno, depurando la religione dalle pratiche più barbare ed introducendo nello studio della stessa il principio di ragione. Narendranath, affascinato dalle arringhe dei riformatori che facevano parte del movimento, sembrava destinato ad una carriera del tutto simile, borghese e socialmente impegnata, fino a quando un incontro introdusse nel suo percorso un cambiamento di rotta.


Da Narendranath a Vivekananda

Era il 1880, quando Narendranath incontrò per la prima volta Ramakrishna, il sacerdote officiante di un tempio situato a Dakshineshwar, un sobborgo di Calcutta, e dedicato ad una forma del dio Shiva, che veniva lì adorato insieme alla dea Kali. Brahmano di estrazione contadina, con un’istruzione limitata cui sopperivano buon senso, mitezza e profonda devozione, costui era un rinunciante di eccezionale spessore, un rappresentante della corrente mistica della bhakti, la “devozione”, e un punto di riferimento per gli intellettuali bengalesi, affascinati dalla schiettezza dei suoi insegnamenti.

Quell’incontro provocò un imponente cambiamento nella vita del giovane Narendranath, che in pochi anni, durante i quali proseguì nel tentativo di conciliare il materialismo delle scienze occidentali e lo spiritualismo in cui lo precipitavano i momenti a Dakshineshwar, divenne il discepolo prediletto di Ramakrishna. Come il suo Maestro, divenne un Advaitavedantin, un sostenitore dell’indirizzo dottrinale del non-dualismo, che predicava l’unità tra Sé individuale e Assoluto. Da questi insegnamenti Narendranath avrebbe in seguito derivato la convinzione della divinità degli esseri umani, dunque la considerazione di tutte le forme dell’esistenza quali manifestazioni dello spirito divino.

Nel 1886 Ramakrishna, dopo aver iniziato i discepoli alla loro nuova condizione di sanyasin3, indicò Narendranath come loro guida. Fu così che egli divenne Vivekananda, “colui che ha la beatitudine della discriminazione spirituale”. Due anni più tardi Vivekananda cominciò la sua vita di parivrajaka, “monaco errante”, partendo per un pellegrinaggio che durò anni, un viaggio solitario compiuto a piedi sulle strade polverose dell’India, dallo Himalaya fino a Kanyakumari. Questa esperienza fornì a Vivekananda una conoscenza profonda del Paese, quale non aveva mai posseduto. Alla fine del viaggio, quando finalmente raggiunse Kanyakumari, Vivekananda rifletté su tutto quello che aveva visto: «Un Paese dove milioni di persone vivono dei fiori della pianta mohua, e un milione o due di sadhu e circa cento milioni di brahmani succhiano il sangue di queste persone, senza fare il minimo sforzo per migliorare la loro condizione, è un Paese o l’inferno? È quella una religione, o la danza del diavolo?»4

Partito con l’obiettivo di portare unità tra le varie sette e confessioni indiane, radunandole sotto l’ombrello del messaggio vedantico, Vivekananda comprese che al suo Paese servivano istruzione e cibo, più che insegnamenti religiosi. Ripensò a quel che aveva sentito dire alcuni mesi prima, circa l’organizzazione a Chicago del World’s Parliament of Religions, un congresso che avrebbe ospitato rappresentanti di ogni religione del mondo; Vivekananda decise che si sarebbe recato negli Stati Uniti, per predicare il messaggio vedantico e chiedere in cambio il sostegno economico necessario a fondare in India istituzioni educative e caritative per le classi più svantaggiate.

Pochi mesi più tardi ebbe inizio la sua missione in Occidente, che lo vide tenere innumerevoli conferenze e radunare intorno a sé molti sostenitori.


Un pensiero moderno e rivoluzionario

Attualizzando gli aspetti religioso-filosofici della dottrina vedantica, all’interno di un pensiero in cui la speculazione teorica e dogmatica veniva costantemente riportata alle necessità pratiche del suo tempo e del suo luogo – percepite come urgenti ed imprescindibili –, Vivekananda divenne l’esempio di una nuova tipologia di riformatore, capace di coniugare gli insegnamenti ancestrali del pensiero vedantico con l’attualità dell’India più comune. Questa narrazione, dunque – a differenza di quelle costruite da altri riformatori, che auspicavano un ripensamento, quando non un distacco, della “tradizione” sociale e religiosa, sentita come ostacolo al “progresso” –, non presupponeva una revisione in chiave filo-occidentale del bagaglio culturale e religioso indiano, bensì glorificava quel passato, proponendolo come la chiave che avrebbe aperto all’India le porte della giustizia sociale, dell’istruzione, dello sviluppo materiale e spirituale.

«La società più grande è quella in cui le verità più alte diventano concrete»5, sosteneva Vivekananda, facendo riferimento alla necessità di costruire una società strutturata in modo da permettere la realizzazione della divinità umana. Da questa convinzione di base, derivata dalla filosofia vedantica, egli ricavò il suo progetto di società utopica, che si sarebbe retta sul pilastro dell’uguaglianza tra gli uomini. Il fatto che egli ritenesse necessarie all’avverarsi di questa idea da un lato la diffusione dell’istruzione – che doveva diventare di massa, affinché gli strati più svantaggiati acquisissero forza e coscienza del proprio valore – e, dall’altro, la soppressione di ogni privilegio – politico, economico o religioso che fosse – dimostra il carattere rivoluzionario del pensiero di Vivekananda. Diversamente da molti suoi contemporanei, egli non era disposto a prevedere risultati parziali; eppure, l’imponenza di questo progetto e il suo carattere utopico non compromettevano in alcun modo la fede di Vivekananda nella sua realizzabilità.

«Pane! Pane! Non credo in un Dio che non riesce a darmi il pane in questo mondo, mentre mi promette la beatitudine eterna nei cieli! Bah! L’India deve essere affrancata, i poveri devono essere nutriti, l’istruzione deve essere diffusa, e la piaga del potere sacerdotale deve essere eliminata».6

Anche nel suo rapporto ideale con l’Occidente Vivekananda differiva dal resto dei riformatori: non prevedendo né una forma di riverente assimilazione ai suoi valori, né il rifiuto astioso di essi, egli auspicava una sorta di collaborazione e di mutuo scambio di eccellenze: «Direi che la combinazione della mente greca, rappresentata dall’energia dell’Europa, e della spiritualità hindu darebbe origine a una società ideale in India. […] L’India deve imparare dall’Europa la conquista del mondo esteriore, e l’Europa deve imparare dall’India la conquista del mondo interiore. Allora non ci saranno hindu ed europei: ci sarà un’umanità ideale, che ha conquistato entrambi i mondi, quello esterno e quello interno. Noi abbiamo sviluppato una parte dell’umanità, e loro un’altra. È l’unione delle due ciò cui dobbiamo aspirare».7

Ancora, la modernità del pensiero di Vivekananda si espresse nella sua considerazione del gesto filantropico che, come in ambito cristiano, fino a quel momento era stato reputato dal sistema hindu tradizionale una questione privata tra donatore e beneficiario. Egli fu il primo a proporre un’etica del seva (il “servizio”) istituzionalizzata – così come è divenuta la filantropia, un po’ ovunque nel mondo, in tempi recenti –, con lo scopo di garantire una ripartizione equa e il più possibile estesa di azioni di solidarietà nei confronti di persone bisognose: “Fare del bene agli altri è l’unica grande religione universale”8, sosteneva Vivekananda, accordando alla pratica del seva un significato che andava ben oltre la semplice azione filantropica. Teorizzò, inoltre, che la figura sociale più autorevole in India – e dunque più adatta a diffondere un pensiero in certo modo rivoluzionario – era quella del sanyasin. Mentre i suoi contemporanei proponevano modelli borghesi, di uomini d’alta casta colti e mondani, o figure eroiche della tradizione storica e religiosa indiana, Vivekananda individuava nel monaco, nell’asceta e nel rinunciante la sede della saggezza e della credibilità presso il popolo; era a queste figure, estranee ai meccanismi del potere, all’avidità e al perseguimento dell’interesse personale, che Vivekananda avrebbe affidato il compito di diffondere il messaggio, dimostrando ancora una volta l’intransigenza che guidava il suo pensiero.

Su questi pilastri poggiava la Ramakrishna Mission, istituita da Vivekananda a fine secolo quale organizzazione impegnata in ambito sociale e strettamente connessa alla vita del monastero dell’Ordine di Ramakrishna, i cui monaci fondevano nella propria esperienza quotidiana lavoro sociale e pratica spirituale – due aspetti che, completandosi a vicenda, fungevano l’uno da motore dell’altro. Intervenendo inizialmente soprattutto in ambito educativo e nella lotta alla povertà, la Ramakrishna Mission cominciò così in quegli anni il suo servizio all’India, che Vivekananda descriveva in termini angosciati:

«Fiumi ampi e profondi, gonfi e impetuosi, affascinanti giardini sulle rive del fiume, da fare invidia al celestiale Nandana-Kanana; tra questi meravigliosi giardini si ergono, svettanti verso il cielo, superbi palazzi di marmo, decorati da preziose finiture; ai lati, davanti e dietro, agglomerati di baracche, con muri di fango sgretolati e tetti sconnessi […]; figure emaciate si aggirano qua e là coperte di stracci, con i volti segnati dai solchi profondi di una disperazione e di una povertà vecchie di secoli […]; questa è l’India dei nostri giorni!

[…] Devastazione causata da peste e colera; malaria che consuma le forze del Paese; morte per fame come condizione naturale; carestie mortali che spesso danzano il loro macabro ballo; un kurukshetra di malattie e miseria, un enorme campo per le cremazioni disseminato dalle ossa della speranza perduta.

[…] Un agglomerato di trecento milioni di anime, solo apparentemente umane, gettate fuori dalla vita dall’oppressione della loro stessa gente e delle nazioni straniere, dall’oppressione di coloro che professano la loro stessa religione e di coloro che predicano altre fedi; pazienti nella fatica e nella sofferenza e privati di ogni iniziativa, come schiavi, senza alcuna speranza, senza passato, senza futuro, desiderosi solo di mantenersi in vita in qualche modo, per quanto precario; di natura malinconica, come si confà agli schiavi, per i quali la prosperità dei loro simili è insopportabile. […] Trecento milioni di anime come queste brulicano sul corpo dell’India come altrettanti vermi su una carcassa marcia e puzzolente. Questo è il quadro che si presenta agli occhi dei funzionari inglesi».9

Costituito inizialmente da appena una dozzina di monaci, nei cento e più anni che ci separano dalla sua fondazione l’Ordine di Ramakrishna è oggi un movimento transnazionale di proporzioni enormi, simbolo di pace ed ecumenismo, fondato sulla pratica del servizio disinteressato come metodo per la realizzazione del divino e caratterizzato da un approccio razionale alla religione – considerata non un apparato ritualistico ma una scienza dell’essere e del divenire –, da una tradizione colta e dall’efficacia dei suoi interventi in campo sociale.

Definiscono Ramakrishna Mission e Ramakrishna Math (rispettivamente la componente pratica del movimento e l’organizzazione monastica) le tre caratteristiche che sono state segni distintivi di Vivekananda e del suo operato e che, risultando a tutt’oggi innovative, dimostrano la statura di un riformatore illuminato, rivoluzionario per il tempo e il luogo in cui visse: la modernità – che si esprime nell’attualizzazione dei principi vedantici, e nel collocare nel presente il pensiero guida dell’operato di queste istituzioni; l’universalità – data dal rivolgersi non ad un unico Paese o ad uno specifico gruppo di persone, ma all’umanità intera; e la concretezza – che risiede nel porre i principi teorici e spirituali a servizio del miglioramento delle quotidiane condizioni di vita delle persone.


* Elena Borghi, dottoressa in Studi linguistici e antropologici sull’Eurasia e il Mediterraneo (Università “Ca’ Foscari” di Venezia), è autrice di Sai Baba di Shirdi. Il santo dei mille miracoli (Red, Milano 2010) e Vivekananda. La verità è il mio unico dio (Red, Milano 2009)


1 Torri, M., Storia dell’India, Editori Laterza, Roma-Bari 2000, p. 453.

2 Jayawardena, K., Feminism and Nationalism in the Third World, Zed Books, Londra 1986.

3 Asceta errabondo, che ha rinunciato ad ogni piacere mondano e ad ogni forma di possesso materiale ed umano, per dedicarsi unicamente al conseguimento della liberazione, il moksha. Il monaco rinunciante trascorre la propria vita in solitario cammino, elemosinando il cibo, coltivando il silenzio e il raccoglimento, inaccessibile ad ogni desiderio e ad ogni umana debolezza. La contemplazione dello Spirito supremo, il distacco, la disciplina e la meditazione profonda sono i suoi compiti, che lo preparano ad abbandonare per sempre la dimora terrena ed il corpo mortale, liberandolo dal ciclo di rinascita e rimorte.

4 The complete Works of Swami Vivekananda, Mayavati Memorial Editing, Advaita Ashrama, Calutta 1992-95, vol. VI, p. 254.

5 Ibid., vol. II, p. 85.

6 Ibid., vol. IV, p. 368.

7 Ibid., vol. V, p. 216.

8 Ibid., vol. IV, p. 403.

9 Ibid., vol. V, p. 441-442.

samedi, 23 octobre 2010

La crise de la laïcisation et le retour de la théologie politique

La crise de la laïcisation et le retour de la théologie politique

Ex: http://www.mecanopolis.org

Par Paolo Becchi

Un des piliers de l’Occident moderne a été décrit de manière exemplaire par Max Weber comme un processus de rationalisation et de désenchantement du monde. Ce modèle d’identité laïque du monde moderne n’a pas seulement entraîné l’éclatement de la métaphysique en diverses sciences mais également la relégation au domaine privé de la conscience individuelle de la religion et, d’une ma­nière plus générale, des valeurs et des normes. Parallèlement à l’apparition du positivisme scientiste axé sur le paradigme rationnel d’une science axiologiquement neutre, on a assisté à la perte de la dimension publique de la religion qui, comme l’éthique, a été réduite à une affaire privée. Contrairement à la rationalité de la science et de la technique, les choix éthiques et religieux reposent sur des décisions individuelles issues de sentiments personnels, et finalement irrationnels.

 

Depuis longtemps, l’éthique essaie de se détacher de ce schéma. Mentionnons ici John Rawls et sa théorie de la justice, Hans Jonas et son principe de responsabilité et Karl-Otto Appel et son éthique de la discussion. C’est chez ces auteurs que les efforts pour trouver une ultime justification rationnelle ont atteint leur point culminant. Leurs tentatives de réhabiliter la philosophie pratique (en partie seulement chez Jonas) rencontraient un horizon dépourvu de transcendance. Il semblait que le bon Dieu eût perdu sa fonction et le paradigme de Weber, du moins en ce qui concerne la religion, devait continuer à ne pas être mis en doute. L’éthique pouvait sans difficulté devenir publique mais la religion restait dans le domaine privé.

Cependant en raison du fait incon­testable que, ces dernières années, le sentiment religieux avait pénétré sous diverses formes dans le domaine public, cette façon de penser est entrée en crise. Ce phénomène nouveau a produit ce qu’on peut appeler une «réhabilitation de la théologie politique». Pour beaucoup de personnes, cela signifie un dangereux retour en arrière, voire un grand danger pour la démocratie. Mais à mon avis, la démocratie est aujourd’hui menacée par tout autre chose, par exemple quand il suffit à une agence de notation américaine d’élever la voix pour ­mettre l’Union européenne à genoux. Quoi qu’il en soit, il ne se passe pas de jour sans que la presse ne publie un plaidoyer en faveur de la raison laïque, lequel fait renaître un fatras idéologique néo-rationaliste tout à fait inapte à permettre de comprendre la réalité. Mais la question principale reste la suivante: L’Occident est-il sérieusement menacé par la théologie politique ou le paradigme de la laïcisation poussé à ses extrémités est-il au bord de l’effondrement? Voici quelques idées à ce sujet.

L’absence de Dieu, ou du moins sa relégation loin des événements humains, doit être remplacée par le report de sa toute-puis­sance sur l’homo creator. C’est la dernière étape audacieuse de la laïcisation. La vo­lonté humaine devient une copie de la volonté di­vine.

La recherche obstinée d’une libération de toute dépendance extérieure, caractéristique du monde moderne, se révèle actuellement être l’illusion d’une liberté absolue créant les monstres d’une quête de pouvoir qui se dresse non seulement contre la nature extérieure mais aussi contre la nature intérieure, c’est-à-dire la nature humaine. Le fait de se libérer de la transcendance, le caractère absolu donné à l’immanence ont pour conséquence paradoxale un avilissement de ­l’homme. Et pour citer Nietzsche, «il semble que l’homme soit arrivé à une pente qui descend, – il roule toujours plus loin du centre…». De sujet dominateur qu’il était, il est devenu un objet dominé, un instrument passif et sans dé­fense servant à réaliser des expériences techniques de plus en plus sophistiquées et consternantes.

Il s’agit là du projet du génie génétique et de ses nombreux partisans, projet qui représente le plus grand danger de notre ­époque car il remet véritablement en question la survie de l’homme sur Terre. Nous sommes tous reliés les uns aux autres mais prisonniers de ce réseau. Présents partout et nulle part, nous avons déjà perdu le sens de l’espace et nous sommes sur le point de perdre le sens du temps. L’espèce humaine semble avoir atteint le point final de son évolution et une nouvelle réalité se prépare déjà: la création d’une espèce nouvelle, post-humaine, grâce à une intervention directe dans le code génétique de l’espèce actuelle. Peut-on faire quelque chose contre cette évolution insensée vers le néant?

A cet égard, l’éthique et le droit montrent leur faiblesse: Dans les époques de grand danger, on a besoin d’un antidote plus efficace. Et je ne pense pas à la théologie poli­tique au sens d’un instrumentum regni, c’est-à-dire à une reconquête de la religion en tant que simple servante du pouvoir politique. L’ouverture à la transcendance, refoulée et pourtant toujours présente, pourrait peut-être se révéler une importante force motivante. En effet, l’intangibilité de l’homme peut-elle être fondée autrement que par une redécouverte, éventuellement sous forme de théologie négative, cette catégorie du sacré dont on s’est débarrassé trop vite?

Avant qu’il ne devienne un sujet avec Descartes, l’homme n’avait jamais trouvé sa mesure en lui-même, dans le fundamentum inconcussum de sa propre assurance, mais dans l’espace religieux. Afin d’éviter qu’aujourd’hui le processus d’absolutisation de l’homme, le mythe du surhomme, ne se transforme paradoxalement en son anéantissement total, nous devrions redécouvrir le sens religieux de nos limites et le frisson éprouvé devant le sacré en tant qu’ultime horizon du sens. La rationalité ne suffit pas, elle doit se nourrir de quelque chose qu’elle ne peut pas produire elle-même.

Certes, il serait naïf de penser qu’on peut combattre le nihilisme qui gagne du terrain grâce à une synthèse entre la foi et la connaissance. Dans les premiers siècles de notre culture, c’est effectivement la synthèse, réa­lisée par la théologie, entre le christianisme et le platonisme qui l’a emporté sur le premier nihilisme (celui de la gnose). Mais, après le scepticisme radical de ­Nietzsche et de ­Heidegger, cela paraît maintenant impos­sible. Nous devons nous accommoder de l’ab­sence de Dieu, de la présence de cette ab­sence. Mais cela ne signifie de loin pas que «tout soit possible», que l’évolution soit maintenant entre les mains de la volonté de puis­sance d’un homme qui, pour prendre la place de Dieu, irait jusqu’à mettre en jeu son propre avenir. Cela signifie plutôt que nous ne pouvons pas nous empêcher de vivre dans une perspective de doute radical dans lequel il n’y a pas de certitudes et de garanties métaphysiques ultimes mais uniquement une quête de sens permanente. Ce sens n’est pas introduit dans les choses par l’homme mais il existe et l’homme est seul à pouvoir le découvrir.

Dieu ne nous a pas légué son rôle de créateur mais a créé l’homme «à son image» et lui a par là même prêté une dignité transcendante grâce à laquelle il a pu occuper une place particulière dans la nature. Avant toute valeur et au-delà, la référence à la spécificité de la condition humaine, c’est-à-dire à sa signification ontologique, nous permettra peut-être de freiner, voire de stopper la course folle de la société biotechnologique vers l’autodestruction. Cela représente peut-être un espoir pour les générations futures: nous n’avons pas le droit de les priver de la dignité qui nous caractérise et de faire de l’espèce humaine une antiquité dans l’histoire de l’évolution.

Paolo Becchi

Traduction : Horizons et Débats [2]

Paolo Becchi est chargé de cours de philosophie du droit à l’Université de Gênes depuis 1999. Depuis octobre 2006, il est titulaire de la chaire de philosophie du droit et de l’Etat à l’Université de ­Lucerne.

Ses nombreuses activités de chercheur et d’intervenant lors de congrès l’ont mis en contact constant avec la culture juridique de langue allemande. Aussi a-t-il traduit en italien des ouvrages de Hegel, de Hans Jonas et de Kurt Seelmann. Il est membre de l’Istituto Italiano di Bioetica, de la Hans-Jonas-Gesellschaft, de la direction de l’Institut für angewandte Ethik (Grünstadt), de l’Interdisziplinäres Zentrum Medizin-Ethik-Recht de l’Université Martin-Luther de Halle-Wittenberg, du comité scientifique des Rechtsphilosophische Hefte et rédacteur de la revue Ragion Pratica. Ses principaux domaines de recherches sont la philosophie du droit de Hegel, celle des Lumières, l’histoire de l’élaboration des codes aux XVIIIe et XIXe siècles, et certains sujets de bioéthique et de droit de la médecine.

 


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La Laïcité décérébrée de la France et l'avenir politique de l'Europe

La laïcité décérébrée de la France et l’avenir politique de l’Europe

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Par Manuel de Diéguez

 Face au messianisme conquérant d’une démocratie placée sous le joug d’un empire planétaire de la « liberté » et de la « justice », l’Europe asservie oppose depuis bientôt trois quarts de siècle un repli stratégique illusoire. Triste camp retranché, en vérité, qu’une apologie désespérée des simples « cultures », piteuse retraite dans la multiplicité et la diversité des folklores censés opposer la barrière infranchissable des régions à l’expansion apostolique et vassalisatrice d’un empire victorieux ! Toutes les civilisations vaincues recourent au stratagème d’un panégyrique éploré et stérile de leur passé glorieux. On croit repousser les Tamerlan de l’histoire à seulement cultiver des fleurs de grand prix, on croit terrasser les barbares à les enivrer de parfums qu’ignorent leurs narines. Les trésors pillés du musée de Bagdad fleurent bon dans les foires et sur les marchés du Nouveau Monde. L’Occident oubliera-t-il que la seule civilisation insubmersible est née à Athènes ?

 

Elle n’avait pas de joyaux somptueux à étaler aux regards ; son seul glaive était celui de la raison. Alors, les premières victoires des argumentations rigoureuses ont couronné les enchaînements de la dialectique, alors le diadème de la logique est devenu pour toujours le casque et la tiare de la civilisation mondiale. La pensée rationnelle de demain triomphera-t-elle des cultures décérébrées de notre temps?

Les premiers architectes du discours raisonné avaient compris que la démocratie serait philosophique ou ne serait pas. Les théocraties ne pensent pas – leurs dieux savent tout – tandis que le pouvoir des masses populaires combat un ennemi plus difficile à vaincre que les idoles – l’opinion publique. Du moins les prêtres disposaient-ils d’un noyau dur de l’entendement politique dont ils avaient reçu l’armure en héritage et dont les ancêtres avaient fait étinceler les cuirasses, tandis que la démocratie guerroie avec le chaos cérébral du plus grand nombre, ce qui la condamne à demeurer à jamais minoritaire et désarmée sur l’agora.

Parmi les capitulations cérébrales des civilisations qu’entraîne leur chute dans la servitude politique, la première est celle de la laïcité française, qui a renoncé au scalpel de la pensée critique et qui donnera demain à une France en voie de décérébration une place de choix au musée des « arts premiers » du quai Branly.

C’est au cœur de ce naufrage de la raison que je me suis demandé si l’Europe vassalisée par la  » doxa  » du clergé des modernes quittera l’horticulture culturelle dans laquelle elle s’est peureusement réfugiée. J’ai donc imaginé un dialogue serré entre la laïcité au bistouri d’un apprenti-philosophe et celle d’un républicain culturaliste, afin de tenter d’illustrer la tragédie du dépérissement de l’encéphale de la France.

1- La laïcité et les croyances religieuses

Le fantassin de la laïcité nationale: Voyez-vous, Monsieur, la ruine de la République de l’intelligence tient à l’asthénie politique de la laïcité. Comment voulez-vous fonder l’unité morale et intellectuelle d’un pays dont le culte de la raison avait pourtant bâti les premiers autels, comment voulez-vous convertir aux droits et aux pouvoirs de la méthode le peuple des logiciens de 1789 si nous renonçons à former les générations montantes à l’école d’un discours raisonné? Hélas, notre pauvre éducation nationale n’initie plus les enfants aux principes qui guidaient la droiture de l’intelligence française – elle se contente de charger leur mémoire de savoirs tout bêtement exacts.

Le philosophe : Fort bien, Monsieur, mais comment définissez-vous la laïcité?

Le fantassin : La laïcité, c’est la tolérance à l’égard de toutes les religions de la terre, la laïcité, c’est le respect que professe notre civilisation à l’égard de toutes les croyances sacrées qui rendent désormais le monde aussi providentiellement divers que du temps du polythéisme, la laïcité c’est la substitution de la bénédiction républicaine à la bénédiction apostolique. Tous les catéchismes et tous les mythes sacrés en bénéficieront dorénavant – et, dans le même temps, quel élan unanime du genre humain vers la compréhension rationnelle du monde si la laïcité, c’est également et tout à la suite la proclamation sans ambages de la séparation radicale des catéchèses ecclésiales et des Etats rationnels!

Le philosophe : Je crains de rencontrer la résistance d’une première casemate fortifiée sur le chemin de l’œcuménisme que suivra votre raison en promenade; car je doute de la cohérence cérébrale d’une laïcité que vous placez maintenant sur la même route fleurie que la théologie prospère des Eglises. Qu’est-ce que votre tolérance équitablement partagée entre les droits de la logique d’Euclide et celle de la Révélation? Par quel raisonnement d’une rigueur exemplaire, je l’espère, fondez-vous le rayonnement de la France rationnelle dans le monde sur un postulat philosophique contradictoire par nature et par définition? Car vous nous présentez les attraits d’une tolérance complaisante aux dieux dont un long usage de leurs bénédictions a certifié la pédagogie. Mais leurs doctrines se trouvent en guerre les unes avec les autres. Comment votre tolérance se présentera-t-elle, dans le même temps, en porte-parole assermenté de la vigueur et de la cohérence de la pensée républicaine? La logique universelle dont la raison véritable est armée déploiera-t-elle par centaines les banderoles d’une légitimation générale des usages et des traditions les plus absurdes?

Le fantassin : Tout Etat responsable se fonde sur une raison responsable. Comment défendez-vous une laïcité politiquement irresponsable et, par conséquent, incivique?

Le philosophe : Fort bien: vous avouez que votre tolérance n’est pas philosophique pour un sou, mais seulement politique en diable; vous avouez que les démocraties l’ont adoptée pour le seul motif qu’elles l’ont jugée payante, donc de nature à défendre l’ordre public à peu de frais. Mais alors, comment annoncerez-vous tout à trac aux croyants les plus convaincus, donc aux citoyens persuadés de la pertinence de leur orthodoxie religieuse , que la République consent non point à valider franchement, mais seulement à « tolérer » hypocritement leur erreur et qu’elle met beaucoup d’habileté politique à plaquer le masque de la charité sur le visage d’une France devenue tartufique des pieds à la tête?

Si vous avez affaire à des cervelles pour lesquelles deux et deux font cinq, pourquoi renoncez-vous si vite à réfuter leur aberration? Tout simplement, parce que vous savez bien que les croyances religieuses sont tenaces et même indéracinables, de sorte que vous vous dites qu’il appartient à tout Etat de sens rassis de les accepter du bout des lèvres, donc de renoncer à faire régner de force les théorèmes des géomètres de la condition humaine dans les têtes rebelles à en écouter les prémisses et les conclusions. Mais c’est assurer seulement la paix civile que d’édicter l’interdiction pure et simple de débattre sérieusement de la nature des dieux. En politique, ce n’est pas la logique, mais seulement la politique qui dit ce qui est rationnel et ce qui ne l’est pas. Votre tolérance est donc feinte et contrefaite du seul fait qu’elle n’est pas honnêtement légitimable dans l’ordre des sciences et des savoirs reconnus, votre laïcité décérébrée n’est rien de plus que la forme du machiavélisme que l’éducation nationale des démocraties a lovée au cœur d’une Liberté rendue secrètement acéphale, mais fière de la vacuité cérébrale de son civisme.

2 – La laïcité et la logique

Le fantassin : Ne savez-vous pas que la séparation de l’Eglise et de l’Etat commence sur les bancs de l’école et qu’elle repose entièrement sur l’enseignement, dès le plus jeune âge, des droits de la raison, donc sur l’initiation des enfants aux pouvoirs de l’argumentation logique? Comment la France de notre génération déverserait-elle les principes d’une logique cacochyme dans les têtes innocente de la génération suivante?

Le philosophe : Dans ce cas, dites-moi, je vous prie, comment vous édifiez sans le dire et en catimini une République que vous avez amputée en coulisses de l’esprit de logique de la France, dites-moi, je vous prie, ce qu’il en est d’une nation que vous ne prétendez laïque que pour rire? Quel sens faut-il donner à votre refus masqué, mais catégorique d’exercer pleinement les droits de la pensée rationnelle? L’autorité régalienne qu’exerce votre laïcité retorse et contrefaite, vous en déguisez non moins pieusement la doctrine que l’Eglise fait monter le pain de sa dogmatique dans le four de sa sainteté. Mais qu’est-ce qu’un Etat tellement illogique qu’il renoncera non moins fermement qu’une tyrannie cauteleuse ou une théologie impérieuse à convaincre l’adversaire par des démonstrations serrées et conduites en bon ordre? Que vous placiez l’autorité de votre despotisme sur un trône terrestre ou céleste, ce sera toujours à un maître que vous obéirez. Croyez-vous vraiment que la France laïque pourra s’offrir longtemps le luxe de jeter la pensée logique par-dessus bord, croyez-vous vraiment que la République fera de l’irrationnel le levain de sa foi aussi aisément que l’Eglise reçoit la manne de la Révélation dans ses ciboires?

Le fantassin : L’arbitraire s’accompagne toujours d’une oppression. Je ne vois pas de quelle oppression les croyants auraient à se plaindre au sein de notre République. Ce sont la Monarchie de Juillet, la Restauration et le second Empire qui ont mis en place une dictature catéchétique, si j’en crois une éducation nationale qui me l’a enseigné sur les bancs de l’école laïque.

Le philosophe : Imaginez un instant une France dans laquelle la religion catholique, apostolique et romaine aurait retrouvé dans leur plénitude, primo, l’exercice de la puissance publique, secundo, l’autorité du clergé sur la société civile, tertio, les moyens de la hiérarchie sacerdotale de régner sur les esprits dont elle disposait sous la monarchie; puis, imaginez que cet Etat armé de nouveau et jusqu’aux dents des droits de son ciel, que cet Etat, dis-je, daigne vous accorder une grâce particulière, celle de vous damner de votre propre chef; imaginez, de surcroît, que ce sceptre d’une fausse liberté soit censé vous élever au rang d’élu d’un Dieu résigné – celui que le progrès continu des savoirs rationnels dans le siècle contraindrait, de son propre aveu, à vous décorer des insignes de son propre accommodement aux prétentions effrontées du profane. Dans ce cas, ne s’agirait-il pas exclusivement, pour les représentants assermentés de leurs dogmes aux abois, de sauvegarder bon gré mal gré les apparences d’un ordre public et d’une unité théologiques de la nation, alors que celle-ci serait censée avoir chu dans les affres du temporel et se trouverait livrée aux tortures de la damnation aux yeux du Saint Siège? Que diriez-vous de tant de bienveillance et de bénignité apparente d’une Eglise de ce genre à votre égard, de tant de clémence et de condescendance du Vatican pour votre hérésie, de tant de mépris de Rome sous l’affichage benoît de sa charité?

Et maintenant, prenez la situation inverse, celle d’une République devenue maîtresse des lieux. Ne sera-t-elle pas contrefaite à son tour, une laïcité frappée de l’interdiction doctrinale de réfuter le péché d’ignorance et de sottise dans les écoles publiques, ne sera-t-elle pas hypocrite, elle aussi, une raison républicaine dont le refus de raisonner se parera d’une sagesse politique souveraine ? Mais croyez-moi, les fidèles ne sont pas dupes des gages de votre fausse bonté. Ils préfèreraient que vous tiriez le fer que d’assister au spectacle de vos dérobades sous l’apprêt de vos bénédictions laicisées.

3 – La laïcité respectueuse

Le fantassin : Je ne vois pas comment la laïcité respecterait les croyances religieuses de bonne foi si elle leur infligeait l’humiliation de les réfuter sur le pré. Les bons républicains n’ont pas d’autre choix que de laisser l’ épée au fourreau.

Le philosophe : Dans ce cas, je vois se dessiner à l’horizon une difficulté morale de plus forte taille encore que la difficulté cérébrale, celle de la définition du respect. Est-ce respecter les peuplades primitives de s’incliner bien bas devant leurs grigris? Est-ce respecter un interlocuteur que de demeurer bouche cousue devant lui, mais de n’en penser pas moins? Est-ce respecter un ignorant que de juger inguérissable sa sottise? Voyez le coup de force inavoué que vous cachez sous les dehors trompeurs de votre respect: vous laissez l’illettré croupir dans son trou, mais vous tranchez les armes à la main de l’étendue des pouvoirs intellectuels et politiques que vous concédez à son idole. Ce sera à votre seule initiative que le totem se verra signifier votre interdiction pure et simple de se mêler de politique au sein de la République. Vous réduisez les apanages de l’amulette du ciel au droit que vous lui accordez de dresser l’oreille aux prières de ses adorateurs; mais ces derniers, vous les parquez dans leurs demeures ou leurs temples et vous ratatinez les prérogatives de leur culte au point de leur interdire de jamais se manifester au grand jour et sur la voie publique. Mais, dans le même temps, vous renoncez prudemment à convaincre les croyants de l’inanité de leur théologie.

Le fantassin : La République ne réfute les dieux que dans la mesure où la nécessité s’en impose aux démocraties rationnelles. Les juifs ont réfuté les idoles des païens, non point jusqu’à les proclamer inexistantes, mais seulement en tant qu’impuissantes, donc inutiles, puisque non profitables à leur politique; les chrétiens sont allés un peu plus loin – les dieux trop anthropomorphes à leurs yeux étaient ridicules et ne pouvaient exister. Mais leurs connaissances psychologiques des dieux rentables n’allait pas jusqu’à psychanalyser la politique de l’idole panoptique qu’ils s’étaient donnée. Pourquoi voulez-vous que la République réfute une divinité autrefois omnipotente et omnisciente, mais qui n’est plus enseignée ni dans les écoles publiques, ni dans les écoles confessionnelles, puisque les manuels scolaires ont été déniaisés dans les deux institutions et que tous les enseignants reconnus sont désormais habilités par des diplômes laïcs?

Le philosophe : Que voilà un beau prétexte pour mettre un terme à la conquête de la connaissance scientifique du genre simiohumain! A ce compte, nous ne saurons jamais ni pourquoi les ancêtres ont cru en leurs faux dieux pendant trois millénaires, alors qu’ils excellaient déjà dans les arts et les sciences, ni pourquoi nous croyons encore en trois fantômes qui trépasseraient aussitôt dans l’ordre politique si nous leur retirions leurs fourches du diable et leurs marmites infernales – ce dont les Eglises se gardent bien.

Quelle est la solidité de votre prétendue science de tous les dieux ou d’un seul si elle vous interdit encore de vous mêler résolument de leurs affaires dans la cité et de leur fermer le caquet? Elle est infirme, votre anthropologie critique si elle vous autorise à ne condamner les idoles que superficiellement, donc sans oser les citer à comparaître devant votre tribunal, faute, me semble-t-il, de vous trouver en mesure de rédiger l’acte d’accusation qui répondrait à la question de savoir pourquoi l’encéphale des évadés de la zoologie sécrète des dieux ; elle est manchote, votre science du simianthrope si elle n’ose prêter une oreille même distraite au Céleste enraciné au plus secret de l’inconscient du singe vocalisé. Mais si votre judicature n’est pas suffisamment légitimée à vos propres yeux, comment pouvez-vous prétendre respecter un ciel auquel vous interdisez pourtant d’autorité de mettre le nez dans les affaires de votre République? Pourquoi ne daignez-vous pas réduire sa folie a quia ? Les chrétiens ont osé ridiculiser les autels des païens et anéantir leurs simulacres sacrés. Pourquoi reculez-vous devant la superbe des trois dieux uniques qui vous font délirer, alors qu’ils ne se chamaillent qu’avec les atouts que vous leur avez mis entre les mains? Comment se fait-il que vous les saluiez d’un hochement de tête et que vous poursuiviez votre chemin en détournant les yeux? Craignez-vous d’en apprendre davantage sur l’homme et sur la politique qu’à réfuter Neptune ou Apollon?

Et puis, votre laïcité au petit pied a-t-elle seulement des titres à se proclamer citoyenne si vous vous contentez de remplacer les fausses allégations de Jupiter par la prosternation des Français et de leur Ministère de l’éducation nationale devant le mutisme apeuré de l’intelligence de la France? Qu’avez-vous fait du cerveau de la nation depuis 1905? Puisque nous savons, nous, que l’idole à trois têtes devant laquelle notre espèce continue de s’agenouiller n’a d’autre domicile que les boîtes osseuses en folie des déments qui les adorent, l’honnêteté qui inspire l’esprit de logique de la République exige pour le moins que nous consentions à les extraire des cervelles et à en exposer les effigies sur les places publiques.

4 – La République aux cent têtes

Le fantassin : Si Périclès avait ordonné la séparation de l’Eglise et de l’Etat, il lui aurait bien fallu sauver les apparences de la foi à Athènes; et comment les aurait-il sauvées sans imposer le silence, du moins en public, aux prêtres de Zeus, d’Athéna, de Mars et de Poséidon ? Allez-vous redonner à l’Eglise de France le droit de haranguer et même d’ameuter les citoyens dans la rue ? Nous avons mis deux siècles à seulement limiter quelque peu le pouvoir immense dont disposait l’Eglise sous la monarchie et qui lui permettait d’égarer le faible entendement des foules de l’époque ; et maintenant vous prétendez tout subitement redonner au clergé gallican le droit de tromper les sots, et cela sous le prétexte, absurde par définition, selon lequel le droit naturel des dévots devenus républicains serait de nous faire entendre leurs arguties avec la même docilité pieuse qu’ils doivent, eux, à leur ignorance et à leur naïveté ! Mais vous savez bien que si vous mettez face à face un savant et un ignorant et si vous demandez au public de les départager, ce sera toujours le plus bavard et le plus malin qui se verra couronné des lauriers du vainqueur. Si l’astrologie était enseignée dans nos écoles, la moitié des Français croiraient à l’astrologie. Comment pouvez-vous redonner tous leurs droits aux idoles, et cela au nom même de la laïcité?

Le philosophe : Tiens, tiens, vous voilà tout allumé d’une saine indignation philosophique , vous voilà monté sur le pont d’une raison plus logicienne! Mais vous éludez encore la vraie question, qui n’est pas de combattre sur le front des droits de l’ignorance et de la sottise, mais de préciser ce qu’il en coûtera à la raison incohérente du XXIe siècle que vous nous préparez, vous qui videz la laïcité du contenu qui la définit, vous qui la rendrez si fièrement irrationnelle à son tour qu’elle vous reconduira tout droit à la même capitulation de la pensée logique que la théologie du Moyen Age. Savez-vous que, plus d’un siècle après la séparation de l’Eglise et de l’Etat, un tiers des Français croit encore dur comme fer en l’existence du paradis et de l’enfer? Vous estimez qu’il n’est pas digne d’une République de la raison de perdre son temps à réfuter des totems. Mais savez-vous que les concepts se totémisent à leur tour et qu’on ne devient un spéléologues des profondeurs de l’inconscient de la « raison » elle-même que si l’on a appris à observer les idoles verbifiques qui trônent dans les têtes?

Le fantassin : Sachez , Monsieur le philosophe, que la République ne viole pas les consciences, sachez que la démocratie compte sur les progrès constants de la raison dans le monde, même si ces progrès doivent se révéler d’une lenteur désespérante, sachez que la France refuse tout net de fonder les droits de la pensée rationnelle sur le recours à la force.

Le philosophe : Mais, mon bon Monsieur, qui vous parle de faire appel à la force des baïonnettes ? Votre laïcité faussement revêtue des apanages d’une République d’avant-garde, mais engagée sur le front de bataille de la raison totémisée du monde actuel, votre laïcité, dis-je, refuse avec persévérance d’honorer les droits attachés depuis Voltaire à l’exercice de la pensée critique; et votre refus de décrypter la totémisation rampante de la raison des modernes et d’en connaître la généalogie suffira grandement à fonder votre espèce de liberté intellectuelle sur un obscurantisme condamné à ignorer les ressorts anthropologiques de vos idéalités sacralisées. Vous avez beau jeu de vous faire une gloire de garder vos gendarmes dans leurs casernes si votre pacification cérébrale de la France repose sur votre censure des conquêtes de la postérité du siècle des Lumières. Je vois les mâchoires discrètement sacerdotalisées de votre République verbifique dévorer à belles dents les « hérésies » de la raison combattante de demain.

Qu’en est-il de la raison de la France rousseauiste dont vous bénissez encore les ciboires et les cierges ? Vous êtes les nouveaux naturistes ; c’est pourquoi vous croyez n’avoir pas à vous mettre sur la piste de la divinité même fatiguée de votre temps. Vous ne refusez que les théologiens qui ont minutieusement recensé les traits de leur idole à l’école de deux millénaires de leur doctrine. Vous avez seulement dépassé les théoriciens du ciel qui vous dessinaient les contours abrupts ou amollis de leur roi dans les nues et sur la terre. Ceux-là, pourquoi se tueraient-ils à faire semblant d’apprendre les secrets d’une idole dont ils prétendent connaître les arcanes en long et en large et depuis tant de siècles? Mais vous, pourquoi n’avez-vous pas connaissance des rouages du dieu Liberté qui rôde dans les couloirs de votre République et qui fait fumer vos sacrifices sur les autels du langage devant lesquels votre démocratie ensanglantée se prosterne?

5 – La quête de la raison

Le fantassin : Où voulez-vous en venir?

Le philosophe : Vous le savez bien : si la République se prélassait dans les aîtres d’ une raison accomplie, donc arrivée à bon port, croyez-vous que la France demeurerait un Etat intellectuellement vivant? La pensée suit son chemin de croix. Il lui est interdit de prendre place sur le bateau ivre que sa rivale, la théologie, croit conduire d’une main sûre. Jamais le paradis de la vérité rationnelle ne rivalisera à armes égales avec celui d’une mythologie exercée, elle, à s’enfermer de génération en génération et de siècle en siècle dans des fortins inattaquables. Mais s’il appartient à la République de la raison de poursuivre inlassablement son voyage, comment fonderiez-vous l’ordre public sur une forme nouvelle de la paresse d’esprit, celle que vous avez baptisée la tolérance au pays d’Alice? Sous le masque de votre tolérance, j’y reviens, je vois un refus sacerdotal de faire progresser la connaissance des secrets redoutables du genre humain, je vois l’orgueil et la peur à travers les trous du manteau de votre parcelle de raison.

Le fantassin : J’ai foi en l’avenir de la science, Monsieur, j’ai foi en l’élan naturel que la révolution française a donné à l’intelligence dans le monde entier. Comment ne vaincrait-elle pas un adversaire tapi derrière les murailles fissurées de ses dogmes? Comment ne terrasserait-elle pas les régiments de la peur à l’école des légions aguerries d’une logique dont rien ne saurait arrêter la marche?

Le philosophe : Que voilà un beau stratège! J’ai déjà dit que les religions n’ont pas à fortifier sans relâche leurs châteaux forts, puisqu’elles ont disqualifié d’avance et à jamais les armes présentes et futures de leurs agresseurs. Est-il une stratégie plus assurée de l’emporter à tous coups que de n’avoir en rien à réfuter des arguments? Mais voyez comme nous sommes à la peine: si nous n’allons pas défier l’ennemi dans ses retranchements, si nous n’ouvrons pas une brèche dans ses rangs, si nous suspendons un seul instant nos assauts sur un champ de bataille qui nous est étranger, si nous n’observons pas la rouille qui menace sans cesse nos propres armes, si nous ne fortifions pas sans relâche nos propres campements à l’école des dangers de la pensée vivante, donc faillible, nous tomberons dans la même léthargie cérébrale qui, depuis l’âge des premiers singes raisonneurs, donne à la foi la citadelle inviolable de sa somnolence pour trésor. Ce ne sont pas des légions sous les armes que nous combattons, c’est le sommeil du genre humain. Croyez-moi, cet ennemi-là dispose de ressources dont vous mesurez mal l’étendue. Si vous n’y prenez garde, une laïcité à l’usage de Paul et Virginie et que vous croyez encore habile à naviguer entre les récifs périra beaucoup plus rapidement que la paresse d’esprit des croyances dont les Bernardin de Saint Pierre de la démocratie auront renoncé à combattre les ténèbres, parce qu’il est dans la nature d’une raison bucolique de périr corps et biens dans la stagnation, tandis que les religions prospèrent à servir de havres tranquilles à une humanité avide de s’engourdir.

Le fantassin : Monsieur, ne pensez-vous pas que votre philosophie d’une laïcité périlleuse et sans cesse au combat conduira l’humanité tout entière à l’anarchie? « De l’audace, encore de l’audace et toujours de l’audace », disait Danton. Mais quels Etats et quelles sociétés peuvent-ils se condamner à faire progresser sans fin leur apostolat? Ne vaut-il pas mieux administrer prudemment la boîte osseuse de la France et des Français, quitte à la laisser faire escale dans une rade trop tranquille, s’il est mortel de la livrer précipitamment aux risques de la navigation en haute mer? Car enfin, si la République socratique que vous appelez de vos vœux était vouée à approfondir sans relâche la connaissance la plus angoissante des secrets du genre humain et si la science de notre évolution en panne se révélait de plus en plus mortelle pour la cité, n’en viendrions-nous pas à nous demander pourquoi il existe des religions messianiques, donc pourquoi notre espèce se forge des dieux prometteurs, donc pourquoi elle s’enivre de songes tour à tour euphoriques et terrifiants, donc pourquoi les évadés de la nuit animale se montrent bien souvent, je vous le concède, plus prêts à prendre les armes pour défendre les rêves qui comblent leurs attentes que leurs pauvres lopins sur la terre ? Est-il de sage politique finaliste, Monsieur, d’expédier la sotériologie républicaine et la démocratie édénique siéger dans le royaume du salut par le savoir si, décidément, les extases du vrai savoir sont incompatibles avec les exigences de l’action?

6 – Le regard sur le Dieu des singes

Le philosophe : Je ne vous le fais pas dire! Voyez-vous, depuis la parution de L’origine des espèces de Darwin en 1859 et de l’Interprétation des songes de Freud en 1900, ce n’est plus l’astronomie minusculisée de Copernic qui se voit frappée d’interdit par tous les Etats du monde, mais la spectrographie anthropologique du Dieu de la délivrance que nos ancêtres adoraient. Au XVIIIe siècle, c’était encore le récit de la création qui commençait de se trouver réfuté par les encyclopédistes ; aujourd’hui, c’est la croyance en l’existence même d’une idole soi-disant rédemptrice, mais aux châtiments sauvages et aux récompenses trompeuses, d’une idole de la délivrance qui se révèle scindée entre trois cervelles calculatrices, trois morales intéressées, trois théologies harponneuses, trois clergés gros et gras, trois hameçons catéchétiques, trois codes pénaux en lambeaux, une idole qui se révèle un totem aussi sanglant que stupide et que nos anthropologues relèguent dans le paléolithique. Votre laïcité sera bonne à jeter aux orties si, cent six ans après la loi de séparation de l’Eglise et de l’ Etat, elle n’ose pas davantage démontrer les duperies du ciel que Descartes ne s’est risqué à défendre l’héliocentrisme quatre-vingts ans après la parution du De Revolutionibus du grand Polonais. Qu’en est-il de l’animal politique coincé entre ses béatitudes et ses tortures infernales et que nous appelons « Dieu »?

Le fantassin : Vous allez un peu fort ! Vous avez de la chance que la République ait aboli la sainte inquisition et ses bûchers!

Le philosophe : La raison est à l’école des blasphèmes et des sacrilèges. Voyez dans quel abîme de l’ignorance et de la sottise vous vous précipitez si, près d’un demi-millénaire après le procès de Galilée, vous prétendez priver la République des saintes profanations de la raison de demain. Car vous allez substituer aux pouvoirs d’un ciel abêti et cruel les apanages, régaliens à leur tour, des Etats auto- idéalisés à l’école des artifices de leur propre verbiage. Si vous vous décidez à faire débarquer dans nos écoles la connaissance anthropologique de la sauvagerie de tous les dieux, quel portrait de la barbarie de nos ancêtres que le spectacle du monstre céleste qui se faisait offrir leur chair et leur sang sur ses offertoires et auquel nos malheureux ascendants payaient le tribut de la rédemption de leurs squelettes! Si la République devenait le nouvel Isaïe de la raison du monde, comme nous jetterions allègrement aux orties le garant de l’éternité de nos ossatures! Voyez comme nous sommes loin du petit séisme astronomique qui a bouleversé la boîte crânienne des théologiens du cosmos il y a un demi-millénaire, voyez comme notre siècle sera celui du chambardement de la science du fonctionnement cérébral de notre espèce ou ne sera pas. Souvenez-vous de ce que les décadences sont toujours liées aux paniques de la pensée. Ce sera au prix de la décadence de la civilisation mondiale de l’intelligence que vous porterez votre laïcité acéphale sur les fonts baptismaux des formes nouvelles de l’ignorance du monde. Mais peut-être la vraie France fécondera-t-elle la conque osseuse d’une humanité encore en devenir.

7 – L’homme et l’imaginaire

Le fantassin : Comment démontrez-vous l’inexistence, sous quelque forme spatiale que ce soit, du Dieu des sacrifices sanglants dans un univers devenu multidimensionnel? Et puis, même si l’idole n’existait que dans les esprits, songez qu’un Dieu privé de ses foudres et de sa chambre des tortures désarmerait la République des châtiments. Retirerez-vous son glaive dans l’imaginaire à la France dite « des armes et des lois »?

C’est pourquoi je me demande si la République, elle, se trouve ailleurs que dans le cerveau des Français. Je vous défie de jamais rencontrer ce personnage au coin de la rue; mais si vous soutenez qu’il se cacherait dans les articles de la Constitution, qu’il se ferait voir davantage en chair et en os sur les bancs de l’Assemblée nationale, que son corps serait visible sous l’uniforme des agents de la force publique, que les robes noires des magistrats et des ténors du Barreau manifesteraient sa réalité physique, vous me répondrez que la France et son Etat ne sont présents que sous l’os frontal des habitants de ce pays et que la géographie se refuse à porter secours aux attentes de l’esprit et du cœur. La question se réduit donc, me semble-t-il, à celle de savoir pourquoi les dieux ont eu d’abord des bras et des jambes, puis se sont réduits à un souffle dans l’éther, alors que la France ne se gêne pas de donner le change et de faire croire qu’elle existe indépendamment de la foi de ses fidèles et qu’elle aurait donc besoin de l’étoffe de ses drapeaux et des rubans de ses décorations pour bien montrer qu’elle n’arbore des signes et des signaux que pour se prouver à elle-même qu’elle n’est ni une vapeur, ni un simple acteur de l’esprit.

Mais ne pensez-vous pas que l’humanité a besoin de substantifier des personnages mentaux et que la politique veut rencontrer son propre corps collectif et le concrétiser dans l’imaginaire afin de s’en faire un interlocuteur public? Mais alors, ne pensez-vous pas que le dieu des cierges et des ciboires est construit sur le même modèle? Voyez comme il a besoin de cérémonies, de rites, de chasubles, de crosses d’évêques et de régiments de prêtres pour exister, lui aussi, à l’exemple de la France!

Le philosophe : Vous voyez bien que la dissection anthropologique de « Dieu » nous éclaire sur la vie des Etats et des hommes dans l’imagination patriotique et religieuse confondues! Songez que le simianthrope est un animal né social et que, de la fourmi aux abeilles et aux loups, les animaux socialisés par la nature se révèlent hiérarchisés, donc placés par leur capital psychogénétique sous les ordres d’un chef à la fois réel et imaginaire, de sorte qu’ils se sentent appelés par leur propre dédoublement cérébral à se ranger docilement sous un sceptre bicéphale et à en respecter les commandements bifaces avec une docilité ou une indocilité qu’ils appellent leur liberté ou leur servitude. Puis le lent grossissement de la conque osseuse du singe évolutif au cours des âges l’a nécessairement conduit à se demander ce qu’il adviendrait de ses chefferies physiques et mentales s’il n’avait pas de harpon pour capturer et domestiquer l’air, la mer et les étendues célestes.

C’est pourquoi une simiohumanité devenue peu ou prou post-zoologique à la rude école d’apprentissage des millénaires de ses songes s’est donné dans les nues des maîtres fabuleux et de plus en plus proportionnés à l’extension de son environnement oculaire et mental. Mais comment retirer leur casquette aux idoles si je suis un animal dédoublé entre son corps et ses songes ? Quand la difficulté de séparer Poséidon de la mer et Apollon du soleil est devenue plus difficile que de séparer Hermès du commerce, il nous a bien fallu reléguer Zeus dans un au-delà du monde visible, mais sans lui retirer pour autant les cordes qui nous rattachent à lui. Nous en avons profité pour attribuer au glaive sanglant de la justice de Zeus des qualités morales et politiques de plus en plus incompatibles avec sa fonction de président de nos tribunaux et de garde-chiourme de nos prisons. Depuis lors, trois idoles carcérales et séraphiques à souhait sont devenues les étais, les poutres de soutènement et les recours du singe qu’épouvante le vide et le silence de la geôle de l’immensité dans laquelle il se trouve enfermé.

Le fantassin : Vous vous demandez donc comment nous allons désensauvager l’idole des singes sans la réduire à une potiche politique.

Le philosophe : Je me demande avant tout comment nous arracherons la République aux griffes d’un empire étranger si notre laïcité en était réduite à recourir aux armes de la raison rudimentaire des ancêtres. Etes-vous sûr que votre laïcité acéphale se révèlera l’instrument d’un asservissement moins complaisant de la France et de l’Europe à l’empire américain qu’une idole trop hâtivement désarmée? Autrement dit, sommes-nous condamnés à retourner aux dieux primitifs pour survivre ou bien allons-nous nous donner un Dieu de l’intelligence? Mais ce Dieu-là, comment le ferons-nous « exister »?

Le fantassin : Fort bien, fort bien ; mais pourquoi croyez-vous que Socrate a bu dans un esprit patriotique la ciguë mortelle dont les archontes de la ville ont jugé de sage politique de lui tendre la coupe? Ne pensez-vous pas que ce philosophe indocile a compris le danger pour la philosophie elle-même de tomber dans une misanthropie incivique si elle ne scellait pas une alliance docilement patriotique et indissoluble avec les Etats de son temps ? Votre « Dieu » de l’intelligence, sur quelle balance pèserez-vous la supériorité de son encéphale?

8 – La sainteté de la raison

Le philosophe : Vous admettez donc que si la sagesse politique la plus médiocre était l’âme véritable de la laïcité, il nous faudrait négocier la bancalité cérébrale de la République d’aujourd’hui avec les archontes . Mais ne croyez-vous pas que les vrais guerriers de la laïcité se mettent à l’école et à l’épreuve de la ciguë socratique?

Le fantassin : Bon, entrons encore davantage dans les sacrilèges de votre dialectique de la sainteté de la raison: certes, la France socratique ne saurait rendre la raison de notre siècle aussi ignorante et aveugle que la bonne et sotte théologie de nos ancêtres. Mais si nous lui fournissions des arguments acérés, croyez-vous que nous nous serons mis à l’abri pour si peu? Qui nous assurera que nous ne courrons pas à bride abattue vers l’autre danger que vous avez évoqué, celui de tomber dans un second Moyen Age? Comment les peurs qu’on prend pour des garde-fous ou des sauve-qui-peut protègeraient-ils les démocraties des audaces fécondes, donc selon vous, des blasphèmes créateurs que prononcera la raison? Vous dites que si une Liberté fondée sur le refus d’accorder ses droits à la pensée critique devait se rendre aussi catéchétique dans les coulisses que sa rivale dans le ciel, le tour serait venu, pour la fille aînée d’une raison privée de votre bistouri, d’enfanter un obscurantisme du XXIe siècle. Vous dites que cet obscurantisme de la dernière cuvée se prétendra faussement laïc et démocratique à souhait. Mais comment démontrez-vous que seul le scalpel d’une laïcité résolument pensante protègera la France des attraits du faux messianisme de la démocratie américaine. Comment démontrez-vous qu’une laïcité timide serait l’arme d’une vassalisation irrésistible de l’Europe?

Le philosophe: Ne voyez-vous pas que le culte d’une raison démocratique amputée conduira le monde moderne à un tartuffisme de la liberté politique aussi contrefait que le culte précédent, qui livrait les vaincus à leur vainqueur sous les couleurs d’une divinité faussement irénique et toujours complice du plus fort, ne voyez-vous pas que votre France se prosternera devant les idoles du langage forgées sur l’enclume des idéalités politiques du Nouveau Monde, ne voyez-vous pas que les totems du triomphateur se révèleront non moins redoutables que les grigris dont la monarchie fleurissait ses autels, ne voyez-vous pas que votre République d’une laïcité décérébrée armera de pied en cap un clergé bureaucratique auquel sa piété docile servira d’échine aussi flexible que celle du clergé chrétien, ne voyez-vous pas que votre scolastique des droits de l’homme enfantera une classe dirigeante fière de sa demi « raison » politique, ne voyez-vous pas que votre sacerdoce de la Liberté distribuera les nouveaux bénéfices ecclésiastiques dont la fonction publique déversera la manne et le pactole, ne voyez-vous pas que le nouvel esprit d’orthodoxie qui s’imposera au cœur de l’Etat de demain sera forgé sur l’enclume des idéaux de la démocratie américaine?

9 – Un double examen de conscience

Parvenus à cette auberge, le dialogue entre nos deux bretteurs a marqué une pause. Le fantassin se disait que si la guerre entre une laïcité devenue acéphale sur les autels des idéalités de la République devait mettre en danger la sainteté toute verbale des démocraties de la Liberté, le genre humain se vaporiserait dans des abstraction pseudo rédemptrices et que le danger de se prosterner devant des idoles verbales forgées par les démocraties auto-idéalisées serait aussi grand que de retourner au vocabulaire du Moyen Age. De son côté, le philosophe s’interrogeait maintenant avec angoisse sur le sort politique qui menaçait la science anthropologique encore au berceau dont il rêvait. Le tribunal des idéalités était-il appelé à se changer en un nouveau saint office? La censure idéologique interdirait-elle de formuler les méthodes de décryptage des secrets théologiques du singe rêveur? L’évolution cérébrale dangereusement pseudo rationnelle de l’animal parlant le reconduirait-elle à châtier les nouveaux blasphèmes de la pensée?

Certes, la généalogie critique de l’espèce de raison que sécrète l’encéphale simiohumain allait permettre de spectrographier les personnages verbaux que les semi évadés de la zoologie encensent dans leur tête et dans leur cœur. Mais une République tolérante à l’égard du sacrilège socratique accepterait-elle la déconfiture du  » Dieu  » mimétique qui se regardait depuis tant de siècles dans le miroir que sa créature lui tendait? La France n’était pas près de jeter à la casse l’idole vieillie qui conduisait l’Europe à la décadence; au contraire, elle jugeait préférable de la requinquer un instant afin qu’elle renforçât les chaînes que le conquérant lui avait attachées aux chevilles.

Et pourtant il était bien évident que les Etats européens condamnés à se refléter dans leurs identités collectives magnifiées par le ciel de leur servitude politique et religieuse seraient conduits à la dissolution pure et simple. Certes, un continent qui demeurerait sous la tutelle de ses songes sacrés allait tomber dans l’ignorance et la sottise des vassaux qui proclament toujours que leur défaite serait l’expression de la volonté impénétrable de l’idole de leur vainqueur; mais une humanité indocile et qui saurait qu’elle n’a décidément jamais eu d’autre interlocuteur qu’elle-même serait-elle encore de taille à fonder l’éthique de sa résurrection sur son abandon dans le vide de l’immensité ? Le fantassin de la laïcité se tourna vers son ami le philosophe:

- Ne pensez-vous pas, Monsieur, lui dit-il, que si la République et le cosmos n’avaient plus de gouvernail à se partager, nous ferions naufrage ensemble?

Le philosophe lui répondit :

- Je ne me résignerai jamais à boiter sans fin entre les félicités de la bêtise et les désespoirs de l’intelligence.

Et le dialogue reprit pour quelques instants encore.

10 – Comment pousser Dieu dans le dos ?

Le fantassin : Je vous concède que « Dieu » n’était qu’un malheureux apprenti pédagogue. Nos ancêtres encore dans l’enfance s’échinaient de siècle en siècle à la double tâche de porter humblement sa casaque dans leurs prières et à le déniaiser à l’école de leur intelligence naissante; et il est vrai qu’ils l’ont éduqué avec suffisamment de succès d’une époque à l’autre qu’ils l’ont rendu au moins égal en esprit aux plus sages de ses créatures. Mais où puisaient-ils les ressources cérébrales qui leur permettraient de lui attribuer peu à peu des qualités morales et intellectuelles en progrès sur les précédentes? Quand le flair politique de leur créateur mythique, fort médiocre à l’origine, eut appris peu à peu à égaler celui de tous les Machiavel de sa théologie , quand sa science de l’avenir cérébral de sa créature eut fait pâlir d’envie les plus grands docteurs de son Eglise, pourquoi ne s’est-on pas demandé de quelle intelligence ses prophètes nourrissaient leurs performances cérébrales et quelles étaient les armes du bord qui leur avaient permis d’installer progressivement dans le cosmos une divinité capable de se perfectionner lentement?

Le philosophe : Réjouissez-vous, Monsieur, c’est précisément sur ce modèle que la République fonctionne en réalité dans les têtes. La démocratie, elle aussi, tente sans relâche de porter remède à ses infirmités. Les sachant inguérissables par nature, cette théologienne invétérée gesticule sur les planches d’un théâtre croulant sous les détritus. Mais si vous mettez en parallèle les ahanements respectifs d’un « Dieu » fatigué et d’une République calquée sur les progrès poussifs de son intelligence, ne disposerez-vous pas d’un programme transcendant aux soubresauts irrationnels de l’Histoire?

11 – L’intelligence ascensionnelle

Le philosophe se disait maintenant qu’un regard de l’intelligence ascensionnelle du simianthrope pourrait faire aller de l’avant et parallèlement l’encéphale du créateur fabuleux d’autrefois et la matière grise de sa malheureuse créature; car celle-ci demeurait obstinément emboîtée dans son propre effigie dûment célestifiée. Qu’en était-il d’une idole et d’une République tellement calquées l’une sur l’autre qu’on les voyait courir de conserve parmi les ruines du monde et rivaliser d’ambition à lui donner une direction? Certes, « Dieu » n’avait jamais été qu’une idole à dégrossir dans les laboratoires du devenir; et si on la plaçait au-dessus de ses adorateurs, c’était seulement afin d’apprendre plus facilement à se regarder progressivement du dehors. Mais n’est-ce pas devenir « divin », si je puis dire, que d’apprendre à porter un regard de haut et de loin sur les animaux sacrés dont nos ancêtres avaient peuplé le cosmos et qu’ils appelaient des dieux? Quand on a su qu’il s’agissait d’idoles à décoder, on est parvenu à courir à leurs côtés, puis à surplomber leurs ateliers. Si la laïcité enfantait un regard toujours provisoire sur l’infirmité cérébrale et morale des trois dieux uniques, ne deviendrait-elle pas l’Isaïe des modernes?

Imaginons donc une République future et qui se serait armée d’un télescope dont le miroir réfléchirait ensemble le tortionnaire souterrain et le vaporisateur de nos ancêtres. Quelle comète de l’intelligence de l’humanité ! Nos ancêtres peuplaient les nues d’animaux politiques sauvages et difformes. Quels forgerons d’un « Dieu » bancal sommes-nous inconsciemment demeurés au sein d’une République à laquelle Socrate enseigne un « Connais-toi » perpétuellement ouvert – celui que la philosophie ne cessera jamais de demeurer à elle-même. A nous de savoir si nous délivrerons ce diamant de sa gangue.

Quand le fantassin de la laïcité pensante et le philosophe se séparèrent, le premier était armé d’un regard d’anthropologue sur les abysses des Républiques, le second d’une spéléologie du genre simiohumain plus inachevable que jamais.

Manuel de Diéguez, le 3 octobre 2010

Manuel de Diéguez est un philosophe français d’origine latino-américaine et suisse.

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vendredi, 22 octobre 2010

A qui profite le terrorisme?

A qui profite le terrorisme ?

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La guerre menée par le terrorisme, telle qu’elle est présentée par les responsables gouvernementaux, par les médias, par les forces de polices et par les terroristes eux-mêmes contre leurs adversaires déclarés, est tout à fait invraisemblable.

 

L’exaltation idéologique peut conduire à toutes sortes de crimes, et l’héroïsme individuel comme les assassinats en série appartiennent à toutes les sociétés humaines. Ces sortes de passions ont contribué depuis toujours à construire l’histoire de l’humanité à travers ses guerres, ses révolutions, ses contre-révolutions. On ne peut donc être surpris qu’un mitrailleur, un kamikaze ou un martyre commettent des actes dont les résultats politiques seront exactement opposés à ceux qu’ils prétendent rechercher, car ces individus ne sont pas ceux qui négocient sur le marché des armes, organisent des complots, effectuent minutieusement des opérations secrètes sans se faire connaître ni appréhendés avant l’heure du crime.

Quoiqu’elle veuille s’en donner l’allure, l’action terroriste ne choisit pas au hasard ses périodes d’activités, ni selon son bon plaisir ses victimes. On constate inévitablement une strate périphérique de petits terroristes, dont il est toujours aisé de manipuler la foi ou le désir de vengeance, et qui est, momentanément, tolérée comme un vivier dans lequel on peut toujours pécher à la commande quelques coupables à montrer sur un plateau : mais la « force de frappe » déterminante des interventions centrales ne peut-être composée que de professionnels ; ce que confirment chaques détails de leur style.

L’incompétence proclamée de la police et des services de renseignements, leurs mea-culpa récurrent, les raisons invoquées de leurs échecs, fondées sur l’insuffisance dramatique de crédits ou de coordination, ne devraient convaincre personne : la tâche la première et la plus évidente d’un service de renseignements est de faire savoir qu’il n’existe pas ou, du moins, qu’il est très incompétent, et qu’il n’y a pas lieu de tenir compte de son existence tout à fait secondaire. Pourtant, ces services sont mieux équipés techniquement aujourd’hui qu’ils ne l’ont jamais été.

Tout individu notoirement ennemi de l’organisation sociale ou politique de son pays, et, d’avantage encore, tout groupe d’individus contraint de se déclarer dans cette catégorie est connu de plusieurs services de renseignements. De tels groupes sont constamment sous surveillance. Leurs communications internes et externes sont connues. Ils sont rapidement infiltrés par un ou plusieurs agents, parfois au plus haut niveau de décision, et dans ce cas aisément manipulables. Cette sorte de surveillance implique que n’importe quel attentat terroriste ait été pour le moins permis par les services chargés de la surveillance du groupe qui le revendique, parfois encore facilité ou aidé techniquement lorsque son exécution exige des moyens hors d’atteinte des terroristes, ou même franchement décidé et organisé par ces services eux-mêmes. Une telle complaisance est ici tout à fait logique, eu égard aux effets politiques et aux réactions prévisibles de ces attentats criminels.

Le siècle dernier, l’histoire du terrorisme a démontré qu’il s’agit toujours, pour une faction politique, de manipuler des groupes terroristes en vue de provoquer un revirement avantageux de l’opinion publique dont le but peut être de renforcer des dispositifs policiers pour contrer une agitation sociale, présente ou prévisible, ou de déclancher une opération militaire offensive, et son cortège d’intérêts économiques, à laquelle s’oppose la majorité de la nation.

Allemagne 1933 : Hitler

Le 30 janvier 1933, Hitler est nommé chancelier d’Allemagne et chef du pouvoir exécutif. Pourtant, deux adversaires potentiels sont encore devant lui : le Reichstag, qui vote les lois, arrête le budget et décide la guerre, ainsi que le parti communiste allemand, qui, dans le marasme économique de l’époque, pouvait se relever inopinément et constituer un dangereux concurrent. Le 22 février, Goering, alors président du Reichstag attribue aux SD (Sicherheitsdienst : Service de renseignements de sûreté) des fonctions de police auxiliaire. Le 23, la police perquisitionne au siège du parti communiste et y « découvre » un plan d’insurrection armée avec prises d’otages, multiples attentats et empoisonnements collectifs. Le 27 février, un militant gauchiste s’introduit sans difficultés dans le Reichstag et, avec quelques allumettes, y provoque un incendie. Le feu s’étend si rapidement que le bâtiment est détruit. Tous les experts, techniciens et pompiers, ont témoigné qu’un tel incendie ne pouvait être l’œuvre d’un seul homme. Bien après la guerre, d’anciens nazis confirmeront le rôle des SD dans cet attentat. Dès le lendemain de l’incendie, plusieurs milliers d’élus et de militants communistes sont arrêtés, l’état d’urgence décrété, le parti communiste interdit. Quinze jours plus tard les nazis remportent les élections au Reichstag, Hitler obtient les pleins pouvoirs et, dès juillet 1933, interdit tous les autres partis.

Italie 1970 : les Brigades rouge

Au cours des années septante, l’Italie était au bord d’une révolution sociale. Grèves, occupations d’usines, sabotages de la production, remise en question de l’organisation sociale et de l’Etat lui-même ne semblaient plus pouvoir être jugulé par les méthodes habituelle de la propagande et de la force policière. C’est alors que des attentats terroristes, destinés à provoquer de nombreuses victimes, et attribués à un groupe « révolutionnaire », les Brigades Rouges, sont venu bouleverser l’opinion publique italienne. L’émotion populaire permit au gouvernement de prendre diverses mesures législatives et policières : des libertés furent supprimées sans résistance, et de nombreuses personnes, parmi les plus actives du mouvement révolutionnaire, furent arrêtées : l’agitation sociale était enfin maîtrisée. Aujourd’hui, les tribunaux eux-mêmes reconnaissent que la CIA était impliquée, de même que les services secrets italiens, et que l’Etat était derrière ces actes terroristes.

USA 1995 : Timothy Mc Veigh

Le 19 avril 1995, un vétéran de la première guerre du Golfe, Timothy Mc Veigh, lance contre un bâtiment du FBI, à Oklahoma City, un camion chargé d’engrais et d’essence. Le bâtiment s’effondre et fait cent soixante-huit victimes. Au cours de l’instruction, Mc Veigh a déclaré avoir été scandalisé par l’assaut donné par le FBI, deux ans plus tôt, à une secte d’adventiste à Wacco, dans le Texas. Assaut au cours duquel périrent plus de quatre-vingt membres de la secte, dont vingt-sept enfants. Révolté par ce crime, Mc Veigh était donc parti en guerre, seul, contre le FBI. Et au terme de son procès, largement médiatisé, il a été exécuté, seul, par une injection mortelle, devant les caméras américaines.

Après l’attentat, 58 % des Américains se sont trouvés d’accord pour renoncer à certaine de leur liberté afin de faire barrage au terrorisme. Et dans l’effervescence populaire entretenue par les médias, le président Clinton du signer le consternant antiterrorism Act autorisant la police à commettre de multiples infractions à la constitution américaine.

Au vu des ravages causés par l’attentat, Samuel Cohen, le père de la bombe à neutrons, avait affirmé : « Il est absolument impossible, et contre les lois de la physique, qu’un simple camion remplis d’engrais et d’essence fassent s’effondrer ce bâtiment. » Deux experts du Pentagone étaient même venu préciser que cette destruction avait été « provoquée par cinq bombes distinctes », et avaient conclu que le rôle de Mc Veigh dans cet attentat était celui de « l’idiot de service ».

Au cours de son procès, Mc Veigh a reconnu avoir été approché par des membres d’un « groupe de force spéciales impliquées dans des activités criminelles ». Le FBI ne les a ni retrouvés, ni recherchés. Mais dans cette affaire, la police fédérale a dissimulé tant d’informations à la justice qu’au cours de l’enquête, l’ancien sénateur Danforth a menacé le directeur du FBI d’un mandat de perquisition, mandat qu’il n’a pu malheureusement obtenir. L’écrivain Gore Vidal affirme, dans son livre La fin de la liberté : vers un nouveau totalitarisme, sans hésiter : « Il existe des preuves accablantes qu’il y a eu un complot impliquant des milices et des agents infiltrés du gouvernement afin de faire signer à Clinton l’antiterrorism Act ».

USA : 11/9

La situation mondiale exige l’ouverture continuelle de nouveaux marchés et demande à trouver l’énergie nécessaire pour faire fonctionner la production industrielle en croissance constante. Les immenses réserve des pays arabes, et la possibilité des se les approprier, d’acheminer cette énergie à travers des zones contrôlées, font désormais l’objet de conflits entre les USA, décidés à asseoir leur hégémonie, et les autres pays d’Europe et d’Asie. S’emparer de telles réserves aux dépends du reste du monde exige une suprématie militaire absolue et d’abord une augmentation considérable du budget de la défense. Mesures que la population américaine n’était, il y a quelques années encore, aucunement disposée à entériner. Le 11 janvier 2001, la commission Rumsfeld évoquait qu’un « nouveau Pearl Harbour constituera l’évènement qui tirera la nation de sa léthargie et poussera le gouvernement américain à l’action.»

Les services de renseignements américains, qui prétendaient tout ignorer de l’attentat du 11 septembre, étaient si bien averti dans les heures qui ont suivi, qu’ils pouvaient nommer les responsables, diffuser des comptes rendus de communications téléphoniques, des numéros de cartes de crédit, et même retrouver inopinément le passeport intact d’un des pilotes terroristes dans les ruines fumantes des deux tours, permettant ainsi de l’identifier ainsi que ses présumés complices. La version des autorités américaines, aggravée plutôt qu’améliorée par cent retouches successives, et que tous les commentateurs se sont fait un devoir d’admettre en public, n’a pas été un seul instant croyable. Son intention n’était d’ailleurs pas d’être crue, mais d’être la seule en vitrine.

Le pouvoir est devenu si mystérieux qu’après cet attentat, on a pu se demander qui commandait vraiment aux Etats-Unis, la plus forte puissance du monde dit démocratique. Et donc, par extension, on peut se demander également qui peut bien commander le monde démocratique ?

Démocratie : Etat et Mafia

La société qui s’annonce démocratique semble être admise partout comme étant la réalisation d’une perfection fragile. De sorte qu’elle ne doit plus être exposée à des attaques, puisqu’elle est fragile ; et du reste n’est plus attaquable, puisque parfaite comme jamais société ne fut. Cette démocratie si parfaite fabrique elle-même son inconcevable ennemi : le terrorisme. L’histoire du terrorisme est écrite par l’Etat, elle est donc éducative. Les populations ne peuvent certes pas savoir qui se cache derrière le terrorisme, mais elles peuvent toujours en savoir assez pour être persuadées que, par rapport à ce terrorisme, tout le reste devra leur sembler plutôt acceptable, en tout cas plus rationnel et plus démocratique.

On se trompe chaque fois que l’on veut expliquer quelque chose en opposant la Mafia à l’Etat : ils ne sont jamais en rivalité. La théorie vérifie avec efficacité ce que toutes les rumeurs de la vie pratique avaient trop facilement montré. La Mafia n’est pas étrangère dans ce monde ; elle y est parfaitement chez elle, elle règne en fait comme le parfait modèle de toutes les entreprises commerciales avancées.

La Mafia est apparue en Sicile au début du XIXe siècle, avec l’essor du capitalisme moderne. Pour imposer son pouvoir, elle a du convaincre brutalement les populations d’accepter sa protection et son gouvernement occulte en échange de leur soumission, c’est-à-dire un système d’imposition directe et indirecte (sur toutes les transactions commerciales) lui permettant de financer son fonctionnement et son expansion. Pour cela, elle a organisé et exécuté systématiquement des attentats terroristes contre les individus et les entreprises qui refusaient sa tutelle et sa justice. C’était donc la même officine qui organisait la protection contre les attentats et les attentats pour organiser sa protection. Le recours à une autre justice que la sienne était sévèrement réprimé, de même que toute révélation intempestive sur son fonctionnement et ses opérations.

Malgré ce que l’on pourrait croire, ce n’est pas la Mafia qui a subvertit l’Etat moderne, mais ce sont les Etats qui ont concocté et utilisé les méthodes de la Mafia. Tout Etat moderne contraint de défendre son existence contre des populations qui mettent en doute sa légitimité est amené à utiliser à leur encontre les méthodes les plus éprouvées de la Mafia, et à leur imposer ce choix : terrorisme ou protection de l’Etat.

Mais il n’y a rien de nouveau à tout cela. Thucydide écrivait déjà, 400 ans avant Jésus-Christ, dans La guerre du Péloponnèse : « Qui plus est, ceux qui y prenaient la parole étaient du complot et les discours qu’ils prononçaient avaient été soumis au préalable à l’examen de leurs amis. Aucune opposition ne se manifestait parmi le reste des citoyens, qu’effrayait le nombre des conjurés. Lorsque que quelqu’un essayait malgré tout des les contredire, on trouvait aussitôt un moyen commode des les faire mourir. Les meurtriers n’étaient pas recherchés et aucune poursuite n’était engagée contre ceux qu’on soupçonnait. Le peuple ne réagissait pas et les gens étaient tellement terrorisés qu’ils s’estimaient heureux, même en restant muet, d’échapper aux violences. Croyant les conjurés bien plus nombreux qu’ils n’étaient, ils avaient le sentiment d’une impuissance complète. La ville était trop grande et ils ne se connaissaient pas assez les uns les autres, pour qu’il leur fût possible de découvrir ce qu’il en était vraiment. Dans ces conditions, si indigné qu’on fût, on ne pouvait confier ses griefs à personne. On devait donc renoncer à engager une action contre les coupables, car il eût fallut pour cela s’adresser soit à un inconnu, soit à une personne de connaissance en qui on n’avait pas confiance. Dans le parti démocratique, les relations personnelles étaient partout empreintes de méfiance, et l’on se demandait toujours si celui auquel on avait à faire n’était pas de connivence avec les conjuré ».

Aujourd’hui, les manipulations générales en faveur de l’ordre établi sont devenues si denses qu’elles s’étalent presque au grand jour. Pourtant, les véritables influences restent cachées, et les intentions ultimes ne peuvent qu’être assez difficilement soupçonnées, presque jamais comprises.

Notre monde démocratique qui, jusqu’il y a peu, allait de succès en succès, et s’était persuadé qu’il était aimé, a du renoncer depuis lors à ces rêves ; il n’est aujourd’hui plus que l’arme idéologique d’un nouvel ordre mondial.

Publié sur Mecanopolis [2] le 18 octobre 2010

 


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mercredi, 20 octobre 2010

Carl Schmitt, pensador liberal

Carl Schmitt, pensador liberal: a modo de introducción

por Giovanni B. Krähe

Ex: http://geviert.wordpress.com/
 

Una de las tesis consolidadas en los estudios schmittianos es el anti-liberalismo de Carl Schmitt. Conservadores, monárquicos, católicos, filo-schmittianos “de Weimar”,  anti-schmittianos de wikipedia, ocasionalistas pro-dictadura, antifascistas etc., todos, en familia, están de acuerdo con esta tesis: Schmitt fue un anti-liberal. En este preciso punto, ambos bandos de apologetas y anti-schmittianos se demuestran de acuerdo. La pregunta que queremos poner en este post es: ¿Pero de cuál liberalismo señores? ¿contra cuál liberalismo Schmitt desarrolla su crítica? A continuación retomanos una respuesta que se dió en este blog a modo de introducción sumaria al tema.

Entre revolución nacional y religión: las cuatro tradiciones de la Sonderweg alemana

En Alemania se desarrollan cuatro diferentes tradiciones políticas: conservadora, liberal, católica y socialista. Todas nacen y se desarrollan mucho antes de la fundación del Reich alemán por Bismark (1871). Las cuatro tradiciones poseen un curioso elemento pre-estatual, pre-societario, comunitario y anti-contractualista. Estas características no las convierten en tradiciones “prematuras” o “tardías” (H. Plessner) en relación a la formación de los Estados en USA, Inglaterra o Francia. Muy al contrario. En efecto, a las características mencionadas se añaden otros dos factores históricos muy interesantes que se desarrollarán transversalmente a las cuatro tradiciones mencionadas. Estos dos factores determinarán la denominada “vía particular” (Deutscher Sonderweg):  la revolución nacional y la religión. Siempre a modo de sinopsis, mencionaremos una diferencia curiosa ulterior: el denominado “absolutismo iluminado” de los prusianos (S. XVIII). Los prusianos introducen reformas estructurales a diferentes niveles (la tolerancia religiosa por ejemplo) que la “reina de las revolución continental”, la revolución francesa, conocerá tan sólo posteriormente. Se puede notar entonces un Estado alemán de facto, ya maduro en diferentes frentes, que le faltaba únicamente la forma política del aparato estatal en su sentido moderno con soberanía única, monopolio de la fuerza y territorio unificado. Mientras en los demás casos nacionales europeos los primeros partidos asumirán el rol de la socialización política, en Alemania, en cambio, los primeros agentes de socialización política no son “partidos”, sino asociaciones (Vereine) de creyentes, dado que no hay “Estado” como unidad política hasta 1871. El fenómeno de las asociaciones (religiosas) alemanas es un fenómeno europeo  de tipo cooperativo-comunitario muy interesante para los estudios de historia comparada.

Socialización política entre imperio y reino: los movimientos nacionales de creyentes

Estos agentes de socialización política serán más bien movimientos religiosos y nacionales, en parte “aglutinados” bajo una identidad negativa (el enemigo francés), pero curiosamente forjados a partir de una sutil “ambigüedad” constitutiva muy particular: una continuidad latente con el Sacro Romano Imperio Germánico. Debido a esta continuidad, al interior de las cuatro tradiciones mencionadas todos los agentes desarrollarán un visión fuertemente a favor del modelo del Reich como unidad indivisible y fuertemente pro-unitaria. Esto último se explica en parte debido a la ausencia misma de una forma estatal. No se olvide que el Sacro Romano Imperio era casi una “forma federal” sui generis, por lo tanto las “partes” hacen referencia a un imperio, no a una forma de estados relativamente autónomos, como afirmaría la actual teoría federal por ejemplo. Tal caracter pro-unitario y pro-imperio no será, entonces, unitario únicamente en terminos de la unidad del “Estado-nación” (que no existía), sino de cada uno de estos agentes en relación a sí mismo y al Reich.  En efecto, la etimología de la palabra alemana “partido” (Partei), tuvo siempre un significado íntimamente negativo para todos los agentes que entraban por primera vez en la area política de la revolución nacional. En esta revolución nacional, no se podía ser egoísticamente “de parte” frente a la comunidad. Se cumple, según las máximas de la ética prusiana de la época, un preciso rol, se brinda un preciso servicio (Dienst), según una precisa llamada (Beruf, profesión), para ejercer una función en un preciso ámbito (Be-Reich) al interior de la comunidad espiritual del Reino (Reich). Estos agentes que las cuatro tradiciones ideológicas canalizan a través de la idea de nación y religión, generarán ese futuro sistema de partidos fuertemente orientado al formato imperial de la comunidad del Reich. Será también la misma peculiaridad que llevará a la fuerte polarización inter-partidaria que se verá después de la Primera guerra Mundial, cuando el modelo configurante del II Reich desaparece.

Esta tendencia religiosa nacional-comunitaria, basada en la defensa del Estado como principio, la comunidad política y la identidad colectiva, no es únicamente una peculiaridad de la tradición alemana católica y conservadora, como se podría imaginar rápidamente. Será también un rasgo emblemático de las otras dos familias idelógicas, la liberal y la socialista, incluída la radicalización posterior de esta última, la comunista (en su ala no internacionalista atención). Esta curiosa convergencia se debió a la tendencia general pro-unificación del Estado en su sentido moderno, que era un objetivo y tendencia transversal a las cuatro familias ideológicas. Sólo el comunismo, variante externa y espuria del socialismo alemán, asumirá una contratendencia crítica a través del internacionalismo (por lo tanto será visto como el primer enemigo). Con la derrota de la primera Guerra, los partidos que representaban estras cuatro tradiciones ideológicas (más la novedad comunista) se verán, entonces, tal cual por primera vez, es decir en términos modernos: simplemente “partidos”, organizaciones “de parte” dentro de un Estado democrático frágil. La respuesta será insólita: Ese elemento partidario fuertemente inclusivo y pro-Reich (más aún en el revanchismo de la  derrota) regresará otra vez con el totalitarismo monopartidario del Nacionalsocialismo. El temor que Schmitt ya habia previsto venir desde antes de la primera Guerra, es decir, la completa eliminación de la distinción entre Estado y cuerpo social, se cumple finalmente. Nuevamente re-emerge, entonces, de sus cenizas la tendencia pro-Reich perdida. Este perfil fuertemente de estado-partido – mutatis mutandis – no desaparecerá después de la guerra. Es el caso del denominado “Estado-de-partidos” del sistema político alemán. Este sistema posee una fuerte hegemonía de coaliciones inter-partídarias (2 partidos centrales+3 satélites) excluyentes (se habla de Alemania actual como una “democracia blindada”).

Pietismo y Reforma

Estos agentes de socialización política se irán forjando entonces al interior de una tradición política nacional-religiosa madura, cuya mencionada “ambigüedad” constitutiva se continuará reflejando especularmente ya sea a nivel de la Liga alemana (1815-16) como del pacto militar de la liga “alemana del norte” (1866), oscilante entre “liga de estados” y el “Estado unitario”. Al interior del elemento religioso mencionado no podemos olvidar un factor histórico decisivo muy anterior obviamente, pero no menos incisivo, no sólo en Alemania: los efectos políticos de la Reforma. A esta se añadirá otro factor silencioso dentro de la Reforma misma, no menos decisivo, sobre todo a nivel de los mencionados agentes de socialización política nacional-religiosos, transformados en el tiempo en  movimientos “nacional-sociales”, en cuanto agentes de socialización política . Esto último debido al increiblemente rapido proceso de modernización industrial (casi a la par sino superior a Inglaterra). Tal factor silencioso interno no menos decisivo es el Pietismus, movimiento de creyentes evangélicos anti-iluministas y anti-dogmáticos que desarrollan una mística comunitaria transversal a la Reforma, en el tiempo convertida en “religión de Estado”. El Pietismus fue una corriente evangélica “transversal”, fuertemente comunitaria (fundaban ciudades (!) de creyentes) al dogma reformista. Su núcleo más íntimo es exquisítamente místico.

El nacional-liberalismo alemán de Carl Schmitt

Dados estos elementos histórico-ideológicos weltanschaulich, se puede deducir entonces que  la tradición del liberalismo alemán que surge de este contexto es una tradición con fuertes elementos religiosos en sus primeras formas sociales, y nacional-comunitarios en su vínculo con el Estado. Este liberalismo alemán no será, por lo tanto, confundido con el liberalismo anglosajón (tal vez con la tradición conservadora whig). No hay ni un “individuo” por defender ni libertades negativas por asegurar ante un Estado (no existía tal cual). Luego de la fundación del Reich (1871) el vínculo del nacional-liberalismo alemán a favor de la forma estatal aumentará más aún: En efecto, la peculiaridad del nacional-liberalismo alemán no es la defensa del individuo, sino la defensa de la relación entre la comunidad política y el Estado. En la historia del liberalismo europeo, el liberalismo alemán será sucesivamente catalogado como una “idealización” (Sartori), a través de Hegel, del Estado moderno. Este liberalismo alemán será considerado finalmente como un modelo “estado-céntrico”, para diferenciarlo del liberalismo inglés (que sería individualista-utilitarista). Bajo esta precisa tradición nacional-liberal se formará Schmitt, no menos que Max Weber. El joven Schmitt recibirá además la influencia del mencionado Pietismus, elemento que lo llevará luego a descubrir el misticismo de Franz v. Baader y los anti-iluministas franceses (Louis Claude de Saint Martin). Tales elementos “esotéricos” no serán tampoco extraños a Max Weber.

primera conclusión (tesis):

1) Como ya intuído por la escuela de Leipzig (H. Schelsky en particular), la crítica de Carl Schmitt al liberalismo es una crítica al liberalismo inglés desde la peculiaridad del nacional-liberalismo alemán (H.Preuss, Von Stein) . En la historia de la doctrinas políticas se tiene limitadamente en mente una tradición liberal anglo-americana y se desconoce la peculiaridad del liberalismo continental alemán. Desde esta perspectiva limitada, cualquier crítica no-comunista al liberalismo pasa entonces como mero anti-liberalismo,  asi como cualquier anti-comunismo, es decir, cualquier crítica no-liberal al comunismo, pasa como Fascismo. lo mismo sucede con la falacia del “anti-liberalismo” de Schmitt a secas. A partir de esta ignorancia (porque ignorancia es), se cataloga a Carl Schmitt como un pensador anti-liberal. Nosotros afirmamos: sí,  Schmitt es un pensador anti-liberal, pero contra el liberalismo inglés. El nacional-liberalismo de Schmitt podría catalogarse como una “tercera vía” hegeliana de derecha, como ya desarrollado en una traducción de un artículo de Schmitt al respecto.

mardi, 19 octobre 2010

Messianismus mit verheerenden Folgen

obama_messie.jpg

Dr. Tomislav SUNIC:

 Messianismus mit verheerenden Folgen

Ex: http://www.deutsche-stimme.de/

Ein Kapitel Hintergrundpolitik: Nutznießer und Drahtzieher der US-Kriege im Irak und Afghanistan

Statt der Frage »Wem nutzt der Krieg in Afghanistan und Irak« kann man auch die Frage stellen: »Wer war der Anstifter dieser beiden Kriege?« Diese direkte Frage klingt aber nicht sachlich und stellt außerdem eine Fundgrube für Verschwörungstheoretiker dar.

Wilde Spekulationen über die wahren Motive dieser Kriege interessieren uns hier nicht, abgesehen von der Tatsache, wenngleich manche auch stimmen mögen. Was uns interessiert ist die Bilanz dieser Kriege, wie diese Kriege sprachlich und völkerrechtlich gerechtfertigt werden und wer von diesen Kriegen am meisten profitiert.

 


Übrigens sind Verschwörungstheorien keinesfalls Kennzeichen sogenannter »Rechtsradikaler« – wie liberalistische Medien oft unterstellen. Laut neuer liberaler Sprachregelung nutzt die herrschende Klasse im Westen gegen ihre politischen Feinde und Gegner auch Verschwörungsvokabeln, die auf Verteufelung und Kriminalisierung abzielen. Auch benutzen die Systempolitiker zur Rechtfertigung ihrer eigenen militärischen Aggressionen durchaus Verschwörungstheorien. Monate vor der Invasion Iraks hatten viele amerikanische Politiker und Medienleute mit vollem Ernst über die »irakischen Massenvernichtungswaffen« schwadroniert. Es stellte sich bald heraus, daß die Iraker keine derartigen Waffen hatten, wie später von denselben Politikern auch zugegeben wurde.


Ähnliche Sprachregelungen sind heute im Wortschatz der EU-Systempolitiker zu bemerken, die freilich ihre politischen Mythen und Vorstellungen nicht mit dem Wort »Propaganda«, sondern mit den Vokabeln »Kulturarbeit« und »Menschenrechte« tarnen.

Feldzugsplan aus der Schublade

Im Falle des Irak und Afghanistans ist es wichtig zu analysieren, wie die Systempolitiker und die Kriegshetzer mit der Sprache umgehen. Einerseits hört man Horrorvokabeln wie »Kampf gegen den Terror«, »Islamofaschismus«, »Al Kaida-Terroristen«, und andererseits vernimmt man sentimentale Sprüche wie »Kampf für die Menschenrechte« »Multikulti-Toleranz« oder »Freiheit für afghanische Frauen«.
Die deutsche Kanzlerin klang dabei auch nicht glaubwürdig, als sie vor kurzem in Bezug auf den deutschen Einsatz in Afghanistan erklärte: »Unsere gefallenen Soldaten haben ihr Leben für Freiheit, Rechtsstaatlichkeit und Demokratie gegeben.« Ihre Worte stellen eine typisch theatralische Metasprache nach kommunistischer Machart dar.
Außer dieser hypermoralischen Seite aus dem liberalen Lexikon sind die empirischen Belege und Beweise für die vorgenannten Angaben, Aussagen und Wunschvorstellungen der Systempolitiker bezüglich des Irak und Afghanistans spärlich, wenn nicht völlig abwesend.
Zunächst eine Bilanz: Der Krieg in Afghanistan wurde drei Wochen nach dem Terroranschlag in New York am 11. September 2001 begonnen. Eine langfristige militärische Strategie für Afghanistan kann man nicht innerhalb von drei Wochen formulieren. Der Plan zum Sturz der Regime in Afghanistan und Irak war schon lange Zeit vorher medial und akademisch in Amerika vorbereitet worden. Die ersten Hinweise auf den kommenden Krieg im Nahen Osten hatten amerikanische Medien und pro-zionistische Kulturkreise in Amerika schon Anfang neunziger Jahren gegeben, nämlich nach dem unentschiedenen ersten Golfkrieg von 1991.
Viele pro-israelische Kreise in Amerika sowie bekannte amerikanisch-jüdische Akademiker und Journalisten entwarfen damals einen langfristigen Plan für die Umorganisation des Nahen Osten und Asiens. Besonders wichtig war die Rolle einer sogenannten Denkfabrik wie dem »American Enterprise Institute« und die Aufstellung des »Projektes für das neue amerikanische Jahrhundert« (PNAC).
Sehr bedeutende Namen waren unter diesem Firmenschild beteiligt. Diese sind unter der Selbsteinschätzung »Neokonservative« bekannt und pflegten dabei ihre eigenen fixen Wahnideen zur Weltverbesserung. Der 11. September kam ihnen wie von Gott gesandt.
Ein entscheidender Kulturkampf, oder in der heutigen Sprache ausgedrückt: eine Erfolgspropaganda, muß in der Regel immer den großen politischen Umwälzungen vorangehen. Der Krieg in Afghanistan und Irak begann zuerst als akademische Auseinadersetzung, die von den neokonservativen Intellektuellen in Amerika bestimmt wurde. Aber das soll nicht heißen, daß sich die Akademiker und die Befürworter dieser Kriege nicht irren konnten. Die ganze völkerrechtliche Architektur der Irakkriege ist heute brüchig geworden.

Schwache Europäer, korrupte Kommunisten

Die US-Neokonservativen wollten seit langem die irakische und iranische Regierung beseitigen. Auch die angebliche Terrorgruppe Al Kaida war eine nebulöse Unterstellung, an der vielleicht etwas dran sein kann, die aber auch falsch sein kann. Wir haben nämlich keine genauen Beweise dafür, daß diese Terrorgruppe wirklich existiert. Aber solche Unterstellungen, ob wahr oder falsch, sind oft ein perfektes Mittel zur Rechtfertigung endloser Kriege. Schlimmer noch: Sie sind heute ein ideales Alibi für die Errichtung eines Überwachungssystems.
Nach neun Jahren Krieg in Afghanistan, nach sieben Jahren im Irak, hat sich das Sicherheitsklima im Nahen Osten und in Afghanistan sowie in der ganzen Welt nicht verbessert, sondern verschlechtert. Darin stimmen fast alle Politiker in Europa und Amerika überein. Heute gibt es einer größere Terrorismusgefahr als vor acht oder neun Jahren. Man kann sagen, daß die Terrorismusgefahr in Europa seitens radikaler Islamisten in dem Maße steigt, wie der Krieg in Irak und Afghanistan andauert.
Und was geschah mit den Europäern? Natürlich brauchten die Amerikaner 2001 die Zustimmung ihrer Verbündeten für die beiden Kriege. In Westeuropa war es dieses Mal ein bißchen schwieriger, da die meisten Systempolitiker in Europa, abgesehen von ihrer sonstigen Anbiederungspolitik gegenüber Washington, wußten, daß diese Kriege keine raschen Resultate erbringen würden. Das offizielle Deutschland war skeptisch, da es mehr muslimische Einwanderer beherbergt als die USA. Aber als europäisches NATO-Mitglied war es nicht leicht, den Amerikanern zu trotzen.

Politische Theologie der Amerikaner

Im Gegensatz zu Deutschland und Frankreich hatten die Amerikaner keine Probleme, Befürworter für ihre Expeditionen in Afghanistan und Irak in Osteuropa zu finden. Einer der Gründe dafür war, daß fast alle Etablierten und Akademiker vom Baltikum bis zum Balkan Überreste oder der Nachwuchs ehemaliger Kommunisten sind. Um ihre eigene kriminelle Vergangenheit aus den kommunistischen Terrorzeiten zu decken, müssen sie jetzt päpstlicher als der Papst sein, also amerikanischer als die Amerikaner selbst.
Die ersten Nutznießer der beiden Kriege waren, zumindest am Anfang der Kriege, wie schon erwähnt, die Neokonservativen und Israel. Aber es ist falsch zu behaupten, daß der Krieg nur von den amerikanischen Neokonservativen gerechtfertigt wurde. Um die wirklichen Motive der amerikanischen Außenpolitik zu begreifen, muß man die amerikanische politische Theologie gut verstehen, insbesondere die Überzeugung vieler amerikanischen Politiker von einer besonderen politischen Auserwähltheit. Die Nutznießer und die Architekten der Kriege sind ein tagespolitisches Phänomen, aber der Zeitgeist, der ihnen die Kriege rechtfertigt ist ein geistesgeschichtliches Phänomen. Dies kann man nicht voneinander trennen.
Uri Avnery, ein linker israelischer Schriftsteller, hat vor kurzem gesagt, daß »Israel ein kleines Amerika und die USA ein großes Israel« seien. Seit einhundert Jahren hat Amerika seine politischen Begriffe aus dem Alten Testament. Im Zuge dessen haben viele amerikanische Politiker ihre Mentalität von den alten Hebräern übernommen. Es ist auch kein Zufall, daß sich Amerika als Gottesbote mit einer universalistischen Botschaft für die ganze Welt wahrnimmt.
Vor 150 Jahren waren es die sezessionistischen Staaten des Südens, die das Sinnbild des absolut Bösen darstellten; später, Anfang des 20. Jahrhunderts, wurde das Sinnbild des »bösen Deutschen« bzw. »der Nazis« zum allgemeinen Feindbild; dann, während des Kalten Krieges, war eine Zeitlang der böse Kommunist in der Sowjetunion das Symbol des absolut Bösen. Heute gibt es keine Kommunisten, Konföderierten oder Faschisten mehr. Deswegen mußten die amerikanischen Weltverbesserer ein Ersatzfeindbild finden: nämlich den »Islamo-Faschisten« oder den islamistischen Terroristen.
In diese Kategorie des Bösen soll man die palästinensische Hamas, die libanesische Hisbollah und manche »Schurkenstaaten« wie Irak oder Iran einstufen. Geopolitisch sind diese Staaten von keinerlei Bedeutung für Amerika. Aber Amerikas religiös-ideologische Beziehungen zu Israel verpflichten die amerikanischen Politiker, Israels Feinde als ihre eigenen Feinde zu behandeln.
Es ist völlig falsch, nur die Israelis oder die Neokonservativen für die Kriege der USA verantwortlich zu machen. Sie sind zwar eindeutig die Nutznießer, aber die wahren Architekten dieser Weltverbesserungsideologie sind die Millionen amerikanischer christlicher Zionisten, die eine außerordentliche Rolle in Amerika spielen. Es ist auch falsch, über angebliche amerikanische »Heuchelei« zu reden, wie es oft üblich ist. Aufgrund ihres alttestamentarischen Geistes glauben viele amerikanische Christzionisten tatsächlich, daß Amerikas Militäreinsätze für alle Völker gut seien.

Die Verantwortung der Messianisten

Aus dieser Positionierung entspringt auch die Ideologie der »Menschenrechte«, die wir heute als etwas Selbstverständliches und Humanes hinnehmen. Aber gerade im Namen der Menschenrechte kann man ganze Völker bzw. viele nonkonformistische Intellektuelle kurzerhand auslöschen. Wenn jemand über »Menschenrechte« spricht, sollte man ihn immer fragen, was mit jenen passieren sollte, die nicht in die Kategorie der vorgesehenen Menschen passen. Das sind dann nämlich meist Bestien und Tiere, die nicht nur umerzogen, sondern kurzerhand physisch liquidiert werden sollten.
Fragen wir uns, welche Gedanken durch die Köpfe der amerikanischen Piloten gingen, die Köln oder Hamburg im Jahr 1943 niederbrannten. Ihrem Selbstverständnis nach waren sie keine Kriminellen. Sie hatten keine Gewissensbisse, da dort unten nach ihrer Auffassung keine Menschen, sondern die Verkörperung ganz besonders gefährlicher Tiere lebten.
Die amerikanischen Christ-Zionisten und viele andere biblische Fanatiker tragen die größte Verantwortung für die meisten der amerikanischen Kriege unserer Zeit. Der Außerwähltheitsgedanke führt nicht zu mehr Völkerverständigung, sondern zu endlosen Kriegen.

Unser Autor Dr. Tomislav (Tom) Sunic ist Schriftsteller und ehemaliger US-Professor für Politikwissenschaft. (www.tomsunic.info) Er ist Kulturberater der American Third Position Party. Sein neustes Buch erschien in Frankreich: La Croatie; un pays par défaut? (Ed Avatar, Paris, 2010)

Ordo ordinans: il carattere istitutivo del termine nomos

Ordo ordinans: il carattere istitutivo del termine nomos

Giovanni B. Krähe / Ex: http://geviert.wordpress.com/

26092631128.jpgCome sappiamo, dalla dissoluzione dell’ordinamento medioevale sorse lo Stato territoriale accentrato e delimitato. In questa nuova concezione della territorialità – caratterizzata dal principio di sovranità – l’idea di Stato superò sia il carattere non esclusivo dell’ordinamento spaziale medioevale, sia la parcellizzazione del principio di autorità (1).

Parallelamente, l’avvento dell’epoca moderna mise in atto un’autentica rivoluzione nella visione dello spazio. Questa fu caratterizzata dal sorgere, attraverso la scoperta di un nuovo mondo, di una nuova mentalità di tipo globale. In questo senso, l’evolversi del rapporto fra ordinamento e localizzazione introdusse un nuovo equilibrio tra terra ferma e mare libero, ‘‘fra scoperta e occupazione di fatto’’ (2). A questo punto ci sembra importante mettere in evidenza la specificità del rapporto che caratterizza un particolare ordine spaziale. Questo non è, come si può dedurre da una prima lettura dell’opera schmittiana, il semplice mutamento dei confini territoriali prodotto dallo sviluppo del dominio tecnico sulle altre dimensioni spaziali (terra, mare, aria o spazio globale complessivo). Ogni mutamento nei confini di queste dimensioni può determinare il sorgere di un nuovo ordinamento, di un nuovo diritto internazionale, ma non necessariamente istituire quest’ordinamento. Qui si colloca il concetto di sfida (Herausforderung) a partire dal quale, per Schmitt, una decisione politica fonda un nuovo nomos, che si sostituisce al vecchio ordinamento dello spazio (3).

Su questa via, possiamo considerare il concetto di ‘politico’ come un approccio teorico in risposta alla sfida aperta lasciata dalla fine della statualità in quanto organizzazione non conflittuale dei gruppi umani. Allo stesso modo possiamo cogliere, attraverso le trasformazioni del concetto di guerra, la proposta teorica schmittiana di una possibilità di regolazione della belligeranza. È vero poi che una decisione politica può anche risolversi in un mero rapporto di dominio egemonico, tutto centrato nella propria autoreferenzialità della sua politica di potenza. Non si può parlare in questo caso dell’emergere di un nuovo nomos in quanto il problema della conflittualità non si presenta più nei termini di una possibilità di regolazione. In questo senso, tale problema, se riferito alla guerra nell’epoca moderna, caratterizzata dalla ambiguità del principio di self-help, diventa fonte interminabile di nuove inimicizie :

“Le numerose conquiste, dedizioni, occupazioni di fatto (…) o si inquadrano in un ordinamento spaziale del diritto internazionale già dato, oppure spezzano quel quadro e hanno la tendenza – se non sono soltanto dei fugaci atti di forza – a costituire un nuovo ordinamento spaziale del diritto internazionale”(4).

Abbiamo detto che dal rapporto fra ordinamento e localizzazione può emergere un determinato ordine spaziale. La possibilità aperta di fondare, nel senso della sfida accennata da Schmitt, un nuovo ordine dipende dal carattere istitutivo della decisione politica. Il potere costituente, che da questa decisione emerge, problematizza nei suoi capisaldi il rapporto considerato implicito fra atti costituenti e istituzioni costituite, fra nomos e lex. Nella scontata sinonimia di queste due categorie fondamentali, l’autore introduce una distinzione radicale. Questa distinzione che considera l’atto fondativo di un determinato ordine spaziale attraverso la specificità pre-normativa della decisione politica è il carattere istitutivo del termine nomos (5). Questa caratteristica pre-normativa del nomos non va intesa nel senso di un diritto primitivo anteriore all’ordinamento della legalità statale, ma all’interno di una pluralità di tipi di diritto. In questa prospettiva, la norma, che c’è alla base del diritto positivo – costituito, a sua volta, sull’effetività materiale di un spazio pacificato – si colloca, all’interno di questa pluralità.

Per Schmitt, tuttavia, il nomos “è un evento storico costitutivo, un atto della legittimità che solo conferisce senso alla legalità della mera legge” (6). Di questa opposizione tra nomos e lex ripresa più volte dall’autore non ci occupiamo in questa sede, in quanto essa puó essere intesa come un unico processo a carattere ordinativo. Questo processo che viene generalmente operato dalla norma, è già, tra l’altro, implicito nello stesso nomos (7) . Piuttosto, ció che ci interessa sottolinerare all’interno di questo processo ordinativo è la collocazione del concetto di guerra. Cosí, in termini moderni, se il carattere istitutivo del termine nomos – nel senso di un ordo ordinans imperiale o federale come accennato da A. Panebianco – determina l’inizio di un unico processo strutturante fra ordinamento e localizzazione, allora la conflittualitá puó essere regolamentata, se collocata all’interno di questo processo. In questo senso, le odierne categorie del diritto internazionale sorte dal principio dello jus contra bellum (come, ad esempio, i crimini di guerra oppure i crimini contro l’umanitá) non solo non risolvono il problema dichiarando la guerra “fuori legge”, ma riducono le regolazioni della belligeranza a meri atti di polizia internazionale.

Note

(¹) La non esclusività risiedeva nella sovrapposizione di diverse istanze politico-giuridiche all’interno di uno stesso territorio. Cfr. John Gerard Ruggie, Territoriality and beyond: problematizing modernity in international relations, in “International Organization”, n. 47, 1, Winter 1993, p. 150.

(2) Carl Schmitt, Il nomos della terra (1950), Adelphi, Milano, 1991, p. 52.

(3) Cfr. ivi, p.75; vedi inoltre Carl Schmitt, Terra e Mare, Giuffrè, Milano, 1986, pp. 63-64 e pp. 80-82; sul concetto di sfida vedi la premessa (1963) a Id., Le categorie del ‘politico’, cit., pp. 89-100 in: Carl Schmitt:  Il concetto di ‘politico’ (1932), in Id., Le categorie del ‘politico’, a cura di G. Miglio e P. Schiera, Il Mulino, Bologna, 1972.

(4)  Carl Schmitt, Il nomos della terra, cit., p. 75; sul ruolo dell’America fra egemonia e nomos cfr. lo scritto Cambio di struttura del diritto internazionale (1943), pp. 296-297 e L’ordinamento planetario dopo la seconda guerra mondiale (1962), pp. 321-343 in Carl Schmitt, L’unità del mondo e altri saggi a cura di Alessandro Campi, Antonio Pellicani Editore, Roma, 1994.

(5) Sulla distinzione schmittiana tra nomos e lex si veda Carl Schmitt, Il nomos della terra, cit., pp. 55-62. La problematicità che introduce questa distinzione, per quanto riguarda l’ordinamento giuridico interno allo Stato, è stata sviluppata dall’autore in Legalità e legittimità, in Id., Le categorie del ‘politico’ cit., p. 223 ss.

(6) Carl Schmitt, Il nomos della terra, cit., p. 63.

(7) Sul carattere processuale specifico del termine nomos si veda Appropiazione/Divisione/Produzione (1958), in C. Schmitt, Le categorie del ‘politico’ cit., p. 299 ss., e Id., Nomos/Nahme/Name (1959), in Caterina Resta, Stato mondiale o Nomos della terra. Carl Schmitt tra universo e pluriverso. A.Pellicani Editore, Roma, 1999.

samedi, 16 octobre 2010

Maurice ALLAIS (1911-2010)

 Maurice ALLAIS (1911-2010)

(vertaald door Frederik Ranson : Ex: http://n-sa.be/ )

AllaisMauH2.jpgMaurice Allais, die op 9 oktober op 99-jarige leeftijd overleed, was een Nobelprijswinnaar die waarschuwde tegen de "casino"-praktijken op de aandelenmarkt die uiteindelijk hebben geleid tot de huidige wereldwijde financiële crisis; hij beweerde ook Einsteins algemene relativiteitstheorie te hebben weerlegd.

In de jaren 1990 verheugde hij de eurosceptici door zijn verzet, bijna uniek onder de Franse economen, tegen de Europese eenheidsmunt; eurofoben waren minder enthousiast toen hij onthulde dat hij ertegen was omdat de invoering van de munt had moeten worden voorafgegaan door een Europese politieke unie op grote schaal.

Hij won zijn Nobelprijs voor de Economie in 1988. Maar hij had ook kandidaat kunnen zijn voor die in de Natuurkunde, een vakgebied waarin hij het best bekend was voor zijn ontdekking dat zwaartekracht van de aarde lijkt te stijgen tijdens een zonsverduistering.

In 1954 experimenteerde hij met een zelf uitgevonden "paraconische" slinger en hij merkte dat, wanneer de maan voor de zon passeerde, de slinger een beetje sneller bewoog dan hij zou moeten hebben gedaan. Zijn verklaring, uiteengezet in L'Anisotropie de l'espace (1997), was dat ruimte andere eigenschappen vertoont langs verschillende assen en dit als gevolg van beweging door een ether die gedeeltelijk wordt beïnvloed door planetaire lichamen.

Schommelingen zijn inmiddels gemeten tijdens een twintigtal totale zonsverduisteringen, maar de resultaten zijn nog niet overtuigend en het "Allais-effect" (zoals het bekend staat) blijft voor verwarring zorgen onder wetenschappers. Allais zelf twijfelde er niet aan dat het effect een fout in Einsteins relativiteitstheorie aangaf. Inderdaad, hij had weinig tijd voor Einstein, die volgens hem het werk van eerdere wetenschappers zoals Lorentz en Poincaré had geplagieerd in zijn geschriften van 1905 over de speciale relativiteitstheorie en E=mc2.

Als econoom had Allais reden om te klagen dat anderen erkenning hadden gekregen die hem toekwam. In zijn eerste grote werk, A la Recherche d'une discipline économique (1943), bewees hij wiskundig dat een efficiënte markt kan worden bereikt via een systeem van economisch evenwicht (wanneer de prijzen zorgen voor een evenwicht tussen de vraag en wat kan worden geleverd).

Het bleek van vitaal belang in het sturen van de beslissingen over investeringen en prijzen die genomen werden door jongere economen, werkzaam voor de staatsmonopolies die zich uitbreidden in het West-Europa van na de Tweede Wereldoorlog – en voor de overheden die private sectorale monopolies reguleerden in een tijdperk van denationalisering.

Hij werd bekroond met de Nobelprijs voor zijn "baanbrekende bijdragen aan de theorie van de markten en een efficiënt gebruik van middelen", maar de onderscheiding kwam laat. Zijn werk is gunstig vergeleken met dat uitgevoerd op hetzelfde ogenblik of later door de Amerikaan Paul Samuelson en de Britse econoom John Hicks, die beiden Nobelprijzen wonnen in de jaren ‘70. Allais’ werk diende ook als basis voor de analyse van de markten en maatschappelijke efficiëntie uitgevoerd door een van zijn voormalige leerlingen, Gérard Debreu, die de Nobelprijs voor de Economie won in 1983 (nadat hij Amerikaanse staatsburger was geworden) en Kenneth Arrow, die de prijs in 1972 won.

De belangrijkste reden waarom Allais zo lang over het hoofd werd gezien lijkt te zijn dat hij niet in het Engels publiceerde tot laat in zijn carrière en als gevolg daarvan niet de internationale erkenning kreeg die hem toekwam. Paul Samuelson vond dat als Allais’ vroege werken in het Engels waren geweest, "een generatie van economische theorievorming een andere koers zou hebben genomen".

Maurice Allais werd geboren als zoon van de eigenaar van een kaaswinkel in Parijs op 11 mei 1911. Nadat zijn vader tijdens de Eerste Wereldoorlog in krijgsgevangenschap overleed, werd hij opgevoed door zijn moeder in moeilijke omstandigheden.

Als een briljante student aan het Lycée Louis-le-Grand werd Allais opgeleid als ingenieur aan de Ecole Polytechnique en hij werkte enkele jaren als mijningenieur. Hij wendde zich tot de economie na geschokt te zijn door het leed dat hij zag tijdens een bezoek aan de Verenigde Staten tijdens de Grote Depressie. Hij schoolde zichzelf in het onderwerp en begon al snel te les te geven aan de Ecole Nationale Superieure des Mines de Paris, waarbij hij een wiskundige strengheid invoerde in het Franse vakgebied, dat op dat ogenblik voornamelijk niet-kwantitatief was.

Allais’ belangrijkste bijdragen aan de economische theorie werden geformuleerd tijdens de Tweede Wereldoorlog, toen de Franse academici – werkend onder Duitse bezetting – grotendeels van de buitenwereld afgesneden waren.

John Hicks, een van de eerste geallieerde economen in Parijs na de bevrijding, herinnerde zich dat hij zich een weg moest banen naar een zolder waar – eens zijn ogen zich aan het duister hadden aangepast – hij een groep met mijnwerkerslampen op hun hoofd kon zien luisteren naar een leraar voor een bord. Die leraar was Allais en hij was aan het spreken over het feit of de rente nul procent zou moeten zijn in een economie zonder groei. Dit was de voorbode van zijn tweede grote publicatie, Economie et interêt (1947), een enorm werk over kapitaal en rente dat de basis heeft gevormd voor de zogenaamde "gouden regel van de accumulatie". Daarin staat dat om het reële inkomen te maximaliseren de optimale rente gelijk moet zijn aan de groei van de economie.

Allais’ boek bevatte ook de suggestie dat het bij het stimuleren van een economie nuttig is om een eenvoudig model, bestaande uit twee generaties (jong en oud), te gebruiken. Bij elke stap sterft de oude generatie, wordt de jonge generatie ouder en verschijnt een nieuwe jonge generatie. Het model – nu bekend als het overlappende-generatiesmodel – kreeg weinig aandacht op dat ogenblik, maar meer dan een decennium later introduceerde Paul Samuelson  hetzelfde idee onafhankelijk van Allais.

Allais' werk hadden meer dan een theoretisch belang. Toen Frankrijk zijn economie in een combinatie van staatsdirigisme en markteconomie heropbouwde, leverde Allais het theoretische kader dat de planners nodig hadden om het korte-termijndenken van politici te kunnen weerstaan en optimale prijs- en investeringsstrategieën op te stellen.

Tijdens de jaren 1950 bedacht hij als eerste een nieuwe aanpak toen hij, tijdens onderzoek naar hoe mensen reageren op economische prikkels, een groep vroeg om te kiezen tussen bepaalde gokken en vervolgens hun beslissingen onderzocht. Hij ontdekte dat de proefpersonen handelden op manieren die in strijd waren met de standaardtheorie over nut, die voorspelt dat mensen zich zullen gedragen als rationele economische wezens. Als gevolg daarvan bedacht hij de "Allais-paradox", een vergelijking die reacties op risico's voorspelt.

Allais, die werkte als directeur van het Franse Nationale Centrum voor Wetenschappelijk Onderzoek, bleef actief en onafhankelijk denkend tot ver in zijn tachtigerjaren. Kort voor de beurskrach van 1987 schreef hij een opstel waarin hij schreef dat de situatie "drie fundamentele gelijkenissen (vertoonde) met dat wat de Grote Depressie van 1929-1934 voorafging: een bovenmatige ontwikkeling van schuldbewijzen, koortsachtige speculatie en een daaruit voortvloeiende mogelijke instabiliteit in kredietmechanismen, dat wil zeggen: de financiering van investeringen op lange termijn met korte-termijndeposito's".

In 1989 waarschuwde hij dat Wall Street een "waar casino" was geworden, met losse kredietpraktijken, onvoldoende margevereisten en een gecomputeriseerde handel op een non-stop wereldmarkt – die allen bijdragen tot een gevaarlijk wispelturig financieel klimaat.

In een recent artikel betoogde hij dat een "rationeel protectionisme tussen landen met een zeer uiteenlopende levensstandaard niet alleen gerechtvaardigd is, maar zelfs absoluut noodzakelijk".

Allais was een productieve schrijver, zowel in de lengte van zijn stukken (zijn boeken hadden dikwijls 800 à 900 pagina’s) als in de verscheidenheid van onderwerpen die hij behandelde. Naast werken over economische theorie en natuurkunde schreef hij ook boeken over geschiedenis.

Maurice Allais werd benoemd tot officier van het Legion d'honneur in 1977 en Grootofficier in 2005. Hij werd bevorderd tot het Grootkruis van het Legion d'honneur eerder dit jaar.

Zijn vrouw, Jacqueline, overleed in 2003 en hij wordt overleefd door hun dochter.

Bron: Telegraph

vendredi, 15 octobre 2010

Absurdistan - A State of Mind

Absurdistan

A State of Mind

 
 
 
Absurdistan
 

The Pentagon has begun field testing for a new and devastating experimental weapon still shrouded under a cloak of secrecy. A spin-off of anti-gravity technologies, the highly anticipated platform operates on the latest developments in the realm of “anti-logic”. Its use will enable our information warriors to defy reason and intellect, paralyzing an opponent with unrelenting streams of contradiction as well as sheer nonsense.

DOD’s anti-logic weapon underwent its first trial run this summer, as it was rushed into action amidst the Koran-burning controversy. An obscure Florida pastor’s plan to barbecue the Muslim holy book on September 11th was foiled, one suspects, largely due to the intervention of General David Petraeus, commander of U.S. and Coalition forces in Afghanistan. Deploying the anti-logic technology, Petraeus spoke against such an act, since it would “endanger troops” in his theater of responsibility. While the wisdom of the pastor’s step was very doubtful, Petraeus in his victory managed to obliterate truth and standards of reason. After all, the actual threat to U.S. troops stems not from a small Florida church’s play at publicity, but from occupying Afghanistan.

In the Postmodern Empire, news serves not so much to inform, but to blind, distract and intimidate. Our much-celebrated information age is defined by an incoherence that permeates society. Welcome to Absurdistan.

 

Russian traditionalist and science-fiction author Natalya Irtenina accurately diagnoses this disorder as the logical outcome of a culture’s flight from the Transcendent into revolutionary fantasies of liberty, equality and progress. She goes on to analyze the anti-traditional worldview and its manifestations, specifically within the domain of mass media.

 

Contemporary information technologies are founded, as a rule, on the rejection of

1) Principles of hierarchy, i.e. division of information into categories of important, secondary and negligible;

2) Principles of binary logic- the very significance of the antithesis “important – unimportant”, “necessary- unnecessary”, etc. is lost, and in the applications of mass media these concepts are made meaningless;

3) Unique connections- any information can undergo endless transformations and interpretations, thereby creating various pictures of the world, and any fact can be replaced by any other- the field of possibilities is limitless, and cultural conventions allow for it.

The collapse of values and ideas into an endless net-like structure can be viewed not only as the triumph of relativism, but also as a culminating moment of the liberal project. Where absurdity envelops what is left of a civilization, wars to impose democracy and today’s fashion tips enjoy equal value. The most varied images and sounds emanate through our televisions and internet newsfeeds in transitory fragments, and just as quickly they disintegrate into our subconscious. Western managerial elites wield data flows not to impart knowledge, but rather to impress certain emotions upon readers and viewers for profit and political control.

This jarring discontinuity surprises no one and registers with few, and perhaps nowhere is it more evident than in America’s spiral of decadence and imperial decline. President Obama chats up the women of a day-time talk show, The View, and perhaps within only hours of his appearance approves the movements of U.S. forces positioned across the world. GOP presidential hopeful Sarah Palin recites talking points on the sacred cause of Washington’s global supremacy, and then appears with her celebrity-seeking daughter on the program Dancing with the Stars. The surreal has swallowed our civilization, and any remaining distinctions between parody and public life melt away.

Discourse shifts within seconds from the sexual narcissism of average Americans to scenes of death and destruction abroad, and back. The latest market research, for example, has determined that women feel “sexy” when carrying Victoria’s Secret handbags; only a click away is a report on ongoing U.S. efforts to suborn Kandahar. We learn in passing that sixteen American soldiers have been killed in the course of operations there, and that a number of Taliban fighters and Pashtun villagers in Pakistan’s northwest were recently blown apart by Predator drones. Conservative, God-fearing Fox News tells us the CIA is carrying out these strikes to disrupt a plot by terror cells across Europe. Simultaneously Fox, the flagship of Rupert Murdoch’s News Corporation conglomerate, hoists a ringing endorsement of pornography and masturbation underneath the terrorism story. Fellow-citizens take daily excursions into what Irtenina terms our virtual apocalypse, where endurance of the Last Judgment is swapped out for a record total of kills in a game or the successful resolution to a sitcom.

For an observer of only moderate discretion, the rapidity and volume of what amounts to a continuous tidal wave of trivia and garbage is striking. Even more crucial is to recognize its underlying function. The self-isolating liberation of desire in individuals both drives and facilitates U.S. Empire, at least for a time. And the profligacy and consumption lifestyle so intensively marketed to Americans by Wall Street are directly related to the quest to lock down energy resources in Eurasia.

Facing Muslim militancy from the sands of the Maghreb to the peaks of Afghanistan, Washington capitalizes on the situation by expanding its sphere of control. The ideological justification given for this is the call to share the Gospel of the Open Society, with science diplomacy and generous foreign aid to outright bombardment, invasion and occupation the methods of proselytism.

Like Marxism-Leninism, liberal democracy has a universal mandate- it must spread to the ends of the Earth or perish. The regnant ideology behind American power allows for no higher value than platitudes on “free nations, open markets and social progress”, and even the frenzy of missionary wars and so-called institution-building cannot conceal the gaping meaninglessness beneath it all. Any substantive opposition rooted in religious faith, culture and ethnic identity must be delegitimized and wiped out, as the Serbs experienced just over a decade ago under the shadow of NATO cruise missiles.

Also ironically akin to Soviet Communism, the Open Society could be meeting the beginning of its end in the treacherous valleys of the Hindu Kush. Why are U.S. troops sent to foster “good governance” in Helmand Province and elsewhere, besides effectively running protection for pederast warlords who make a killing in the global heroin trade?

The answer to this question is multifaceted but rather straightforward. U.S. interventions in the Islamic world will continue so that our deluded nations may prolong the liberal dream, that the Brave New World will overcome any and all resistance from the East or West. So that Muslim demographics and power in our lands will only grow in strength, with churches made into mosques, death threats to cartoonists in hiding and interminable terror alerts. So that the emptying-out of the Western soul may proceed, that the bearers of our blessed and honorable heritage are condemned to dissolution, and that the chaos at the hollow core of the Postmodern Empire shall overrun us. And all of this will doubtless be covered in real-time on Fox & Friends, with today’s scoreboard highlights brought to you by Cialis.

Absurdistan is not just a label for one of Washington’s trillion-dollar carnage-laden adventures in the wilds of Central Asia; it is a state of mind. We are all in some degree subject to its power, but duty-bound to resist its seductions and lies. By lies and fantasies the regime may sustain itself, yet under their weight it will also implode. The struggle to affirm Truth will hasten that day.

jeudi, 14 octobre 2010

Dead Right : The Infantilization of American Conservatism

Dead Right

The Infantilization of American Conservatism

 
 
 
Dead Right
 

Commentaries published on this website, most notably by Richard Spencer and Elizabeth Wright, have underlined the problems with the Tea Party movement and its most prominent representatives. These pointed observations about Glenn Beck, Rand Paul, Sarah Palin, and Christine O’ Donnell have all been true; and if I have more or less defended some of these figures in the past, I’ve done so, while conceding most of the argument made against them. I agree in particular with Elizabeth Wright’s brief against Rand Paul’s stuttering attempt to object to the public accommodations clause in the Civil Rights Act and her withering attack on Glenn Beck’s recent “carnival of repentance” in Washington.

Elizabeth concludes that such soi-disant critics of the Left cannot bring themselves to find fault with any excess in the Civil Rights movement -- and especially not with its far leftist icon Martin Luther King. “Conservatives” are so terrified of being called “racists” or for that matter, sexists or homophobes, that they devote themselves tirelessly to showing they are just as sensitive as the next PC robot. Indeed, they often go well beyond anyone on the left in genuflecting before leftist icons. This was the purpose of the Martin Luther King-adoration rally held by Beck in Washington.

And even more outrageously, such faux conservatives accuse long-dead Democratic presidents, who were well to the right of the current conservative movement, of being more radical than they actually were. It would be no exaggeration to say that Wilson and FDR were far more reactionary than any celebrity in the Tea Party movement. One could only imagine what such antediluvian Democrats would have said if they had heard last year’s “Conservative of the Year,” chosen by Human Events, Dick Cheney, weeping all over the floor about not allowing gays to marry each other. And what would that stern Presbyterian and Southern segregationist Wilson have thought about the cult of King or the attempts by Tea Party leaders Palin and McDonnell to impose feminist codes of behavior on business and educational establishments. Wilson had to be dragged even into supporting the extension of the franchise to women.

The Tea Party sounds so often like the Left because it is for the most part a product of the Left. Its people were educated in public schools, watch mass entertainment, and have absorbed most of the leftist values of the elite class, to whose rule they object only quite selectively. From the demonstrators’ perspective, that elite isn’t patriotic enough in backing America’s crusades for human rights and in looking after the marvelous welfare state we’ve already built. The Tea Party types are understandably upset that their entitlements may be imperiled, if the current administration continues to run up deficits. This is the essence of their anti-government rant. And above all they don’t want more illegals coming into the country who may benefit from the social net and who may be receiving tax-subsidized medical care.

But this, we are assured, has nothing to do with race or culture. In fact the Tea Party claims to be acting on behalf of blacks and legally resident Latinos, in the name of Martin Luther King and all the civil rights saints of the past. It just so happens that almost all these activists are white Christians. Nonetheless, they are also people, as Elizabeth perceptively notices, who would like us to think they’re acting in the name of other ethnic groups, even if those groups don’t much like them. As four “young conservatives” explained to the viewers of the Today show last week, the Right wishes to lower taxes, specifically “to make jobs available to black Americans.” Unfortunately black Americans loathe those reaching out to them, presumably as a gesture of repentance as well as in pursuit of votes.

Those “conservatives” who want a moderate but not excessive welfare state and who act in the name of blacks, Latinos and dead leftist heroes, are fully tuned in to the conservative establishment. According to polls, these folks love FOX-news and avidly read movement conservative publications. Palin, Sean Hannity and Karl Rove, all FOX contributors, are among their favored speakers; and the Tea Party’s likely candidate for president, Sarah Palin, is now surrounded by such predictable neocon advisors as Randy Scheuermann and Bill Kristol. Even with her insipid, ungrammatical phrases about reducing the size of government, Palin already looks like an updated, feminine and feminized version of what the GOP has been running for president for decades, with neocon approval.

Actually one shouldn’t expect anything else from the Tea Party. In the 1980s the conservative movement witnessed a monumental sea change, when the neoconservatives assumed full power and proceeded to kick out dissenters. This development shaped the future of the Right, and its effects are still with us. The neoconservatives not only neutralized any real Right but also managed to infantilize what they took over. An entire generation of serious conservative thinkers were bounced out and replaced by either lackeys or by those who were essentially recycled liberal Democrats. The latter had recoiled from the anti-Zionist stands of the leftwing of the Democratic Party and then were given as a consolation prize carte blanche to swallow up the conservative movement.

Afterwards the establishment Right began to move in the direction of the Left, and it did so while limiting the range of disagreement with its opponents to a few acceptable talking points. The emphasis was on Middle Eastern intervention, disciplining anti-Semitic nations, and spreading “democratic values.” Internally the neocon Herrenklasse had no real interest, except for being able to do favors for corporations that financed them and for the Religious Right, which is fervently Zionist. The notion the neocons bestowed depth on the conservative movement may be the most blatant lie ever told. What they brought was agitprop, of the kind practiced by Soviet bureaucrats, and armies of culturally illiterate adolescents to turn out their party propaganda.

In all fairness, it must be said that the master class tolerated other points of view, for example from Catholic Thomists or Evangelicals, as long as these religiously inspired positions didn’t interfere with what counted for the neocons. Those who called the shots would also occasionally demand from their dependents certain favors, in return for subsidies and publicity, e.g., stressing the compatibility of Christian theology with neocon policies. Freeloading intellectuals could only be tolerated for so long.

This hegemony had two noticeable effects on the current Right, aside from the unchanged role of the neocons as the main power-players. The rightwing activists shown on TV and those they support in elections include badly educated duds, and these are individuals who often don’t sound like anything an historian might recognize as conservative. Their yapping about human rights (supposedly there is now a human right to own a gun) and their outpouring of the politics of guilt, as noted by Elizabeth Wright, are just two of their weird characteristics. About ten years ago I gaped with astonishment when I read a commentary by Jonah Goldberg explaining that the Catholic counterrevolutionary Joseph de Maistre was really a far leftist. It seems that Maistre questioned the idea of universal human rights und dared to note that human beings were marked by different national and ethnic features. These quirks, according to Goldberg, belong exclusively to the left, like “liberal fascism.” When the intellectual Right can come up with such nonsense and then parley it into a fortune, it is hard to imagine any lower depths of cultural illiteracy to which it could sink.

The “conservative wars” of the 1980s, which involved mostly a mopping up operation, also led to a hard Right that is unrelated to any other American intellectual Right. Those associated with this Right wish to have nothing to do with the failed or decimated Old Right that was smashed decades ago. It has found its home among the thirty-some generation and even more, among younger conservatives who are not part of the DC neocon network. One finds among these militants an almost primitive counterrevolutionary mentality. It is one that has taken form as an impassioned reaction to the Left’s masquerading as the Right, which began with the neoconservatives’ ascendancy to total domination. Although I have my reservations about what I’m describing, it must be seen as a spirited response to a fraud as well as to something that is intellectually and aesthetically vulgar.

Clearly this youthful Right is in no way influenced by Russell Kirk or by other “cultural conservatives” of an earlier generation. Its advocates reject a Right that was co-opted by the neocons and by those who are thought to have failed to resist that fateful takeover. Nor would most of those in the “culturally conservative” camp (Jim Kalb may be the exception here) feel comfortable with the exuberant reactionaries of the rising generation. Many of them sound like neo-pagans because they are convinced that the Western religious tradition has given rise to what they condemn as “the pathology of egalitarianism.” The French New Right, Nietzsche, and Carl Schmitt have all shaped this still inchoate youthful American Right. In their case Europe has cast its shadow on the US, unlike the multicultural Left, which, as I have argued in several books, is our poisonous gift to the Europeans.

The emergence of this anti-egalitarian Right and the infantilization of movement conservatism indicate what can not be undone. The American Right has changed irreversibly because of what occurred during the Reagan years and in the ensuing decade. We shall continue to live with the consequences.  

mardi, 12 octobre 2010

Carl Schmitt: A Dangerous Man

Carl Schmitt (part IV)

 A Dangerous Man

by Keith PRESTON
 
 
Carl Schmitt (part IV)
 

When Hitler first came to power, Carl Schmitt hoped that President von Hindenburg would be able to control him, and dismiss him from the chancellor’s position if necessary. But within days of becoming chancellor, Hitler invoked Article 48 and began imposing restrictions on the freedoms of speech, press, and assembly. Within a month, all civil liberties had essentially been suspended. Within two months, a Reichstag dominated by the Nazis and their allies (with the communists having been purged and subject to repression under Hitler’s emergency measures) passed the Enabling Act, which, more or less, gave Hitler the legal right to rule by decree. The Enabling Act granted Hitler actual legislative powers, beyond the emergency powers previously provided for by Article 48. Schmitt regarded the Enabling Act as amounting to the overthrow of the constitution itself and the creation of a new constitution and a new political and legal order.

The subsequent turn of events in Schmitt’s life remains the principal, though certainly not exclusive, source of controversy regarding Schmitt’s ideas and career as a public figure and intellectual. Schmitt remained true to his Hobbesian view of political obligation that it is the responsibility of the individual to defer to whatever political and legal authority that becomes officially constituted. On May 1, 1933, Carl Schmitt officially joined the Nazi Party.

Despite his past as an anti-Nazi, Schmitt’s prestigious reputation as a jurist and legal scholar heightened his value to the party. Herman Goering appointed Schmitt to the position of Prussian state councilor in July, 1933. He then became leader of the Nazi league of jurists and was appointed to the chair of public law at the University of Berlin. While occasionally including a racist or anti-Semitic comment in his writings and lectures during this time, Schmitt also hoped to strike a balance between Nazi ideology and his own more traditionally conservative outlook.

Schmitt’s hopes for such a balance were dashed by the Night of the Long Knives purge on June 30, 1934. Not only were hundreds of Hitler’s potential rivals within the party killed, but so were a number of prominent conservatives, including Schmitt’s former associate, General Kurt von Schleicher. Even Papen, who had initially been vice-chancellor under the Hitler regime, was placed under house arrest.

In response to the purge, Schmitt published the most controversial article of his career, “The Fuhrer Protects the Law.” On the surface, the article was merely a sycophantic and opportunistic effort at defending Hitler’s brutality and lawlessness. While Schmitt likely regarded the killing of rival Nazis as little more than a dishonorable falling out among thugs, he also included within the article subtle references to unjust murders that had been committed during the course of the purge, meaning the killing of his friend General Schleicher and others outside Nazi circles, and urged justice for the victims. The wording of the article pretended to absolve Hitler of responsibility while dropping very discreet and coded hints to the contrary.

Though Schmitt enjoyed the protection afforded to him by his associations with Goering and Hans Frank, he never exerted any influence over the regime itself. The purge of the SA leadership had the effect of empowering within the Nazi movement one of its most extreme elements, the SS. The SS soon concerned itself with the presence of “opportunists” and the ideologically impure elements, which had joined the party only after the party had seized power for the sake of being on the winning side. These elements included many middle-class persons and ordinary conservatives whose actual commitment to the party’s ideology and value system were questionable.

Schmitt was a prime example of these. His efforts to revise his theories to make them somewhat compatible with Nazi ideology were subject to attacks from jurists committed to the Nazi worldview. Further, former friends, professional associates, and students of Schmitt who had emigrated from the Third Reich were incensed by his collaboration with the regime and began publishing articles attacking him from abroad, pointing out his anti-Nazi past during his association with Schleicher, his prior associations with Jews, his Catholic background, and the fact that he had once referred to Nazism as “organized mass insanity.”

Schmitt attempted to defend himself against these attacks by becoming ever more virulent in his anti-Semitic rhetoric. When the Nuremberg Laws were enacted in September of 1935, he defended these laws publicly. His biographer Bendersky described the political, ethical, and professional predicaments Schmitt found himself in during this time:

No doubt at the time he tried to convince himself that he was obligated to obey and that as a jurist he was also compelled to work within the confines of these laws. He could easily rationalize his behavior with the same Hobbesian precepts he had used to explain his previous compromises. For he always adhered to the principle Autoritas, non veritas facit legem (Authority, not virtue makes the law), and he never tired of repeating that phrase. Authority was in the hands of the Nazis, their racial ideology became law, and he was bound by these laws.

Schmitt further attempted to counter the attacks hurled at him by both party ideologues and foreign critics by organizing a “Conference on Judaism in Jurisprudence” that was held in Berlin during October of 1936. At the conference, he gave a lecture titled “German Jurisprudence in the Struggle against the Jewish Intellect.” Two months later, Schmitt wrote a letter to Heinrich Himmler discussing his efforts to eradicate Jewish influence from German law.

Yet, the attacks on Schmitt by his party rivals and the guardians of Nazi ideology within the SS continued. Schmitt’s public relations campaign had been unsuccessful against the charges of opportunism, and Goering had become embarrassed by his appointee. Goering ordered that public attacks on Schmitt cease, and worked out an arrangement with Heinrich Himmler whereby Schmitt would no longer be involved with the activities of the Nazi party itself, but would simply retain his position as a law professor at the University of Berlin. Essentially, Schmitt had been politically and ideologically purged, but was fortunate enough to retain not only his physical safety but his professional position.

For the remaining years of the Third Reich, Schmitt made every effort to remain silent concerning matters of political controversy and limited his formal scholarly work and professorial lectures to discussions of routine aspects of international law or vague and generalized theoretical abstractions concerning German foreign policy, for which he always expressed outward support.

Even though he was no longer active in Nazi party affairs, held no position of significance in the Nazi state, and exercised no genuine ideological influence over the Nazi leadership, Schmitt’s reputation as a leading theoretician of Nazism continued to persist in foreign intellectual circles. In 1941, one Swiss journal even made the extravagant claim that Schmitt had been to the Nazi revolution in Germany what Rousseau had been to the French Revolution. Schmitt once again became fearful for his safety under the regime when his close friend Johannes Popitz was implicated and later executed for his role in the July 20, 1944, assassination plot against Hitler (though, in fact, Schmitt himself was never in any actual danger.)

When Berlin fell to the Russians in April 1945, Schmitt was detained and interrogated for several hours and then released. In November, Schmitt was arrested again, this time by American soldiers. He was considered a potential defendant in the war crimes trials to be held in Nuremberg and was transferred there in March 1947. In response to questions from interrogators and in written statements, Schmitt gave a detailed explanation and defense of his activities during the Third Reich that has been shown to be honest and accurate. He pointed out that he had no involvement with the Nazi party after 1936, and had only very limited contact with the party elite previously. Schmitt provided a very detailed analysis and description of the differences between his own theories and those of the Nazis. He argued that while his own ideas may have at times been plagiarized or misused by Nazi ideologists, this was no more his responsibility than Rousseau had been responsible for the Reign of Terror. The leading investigator in Schmitt’s case, the German lawyer Robert Kempner, eventually concluded that while Schmitt may have had a certain moral culpability for his activities under the Nazi regime, none of his actions could properly be considered crimes warranting prosecution at Nuremberg.

Schmitt’s reputation as a Nazi, and even as a war criminal, made it impossible for him to return to academic life, and so he simply retired on his university pension. He continued to write on political and legal topics for another three decades after his release from confinement at Nuremberg, and remained one of Germany’s most controversial intellectual figures. For some time, his pre-Nazi works were either ignored or severely misinterpreted. A number of prominent left-wing intellectuals, including those who had been directly influenced by Schmitt, engaged in efforts at vilification.

An objective scholarly interest in Schmitt began to emerge in the late 1960s and 1970s, even though Schmitt’s reputation as a Nazi apologist was hard to shake. Interestingly, the framers of the present constitution of the German Federal Republic actually incorporated some of Schmitt’s ideas from the Weimar period into the document. For instance, constitutional amendments that alter the basic democratic nature of the government or which undermine basic rights and liberties as outlined in the constitution are forbidden. Likewise, the German Supreme Court may outlaw parties it declares to be anti-constitutional, and both communist and neo-Nazi parties have at times been banned.

Schmitt himself returned to these themes in his last article published in 1978. In the article, Schmitt once again argued against allowing anti-constitutional parties the “equal chance” to achieve power through legal and constitutional means, and expressed concern over the rise of the formally democratic Eurocommunist parties in Europe, such as those in Italy and Spain, which hoped to gain control of the state through ordinary political channels.

 

Schmitt’s Contemporary Relevance

 

The legacy of Schmitt’s thought remains exceedingly relevant to 21st-century Western political and legal theory. His works from the Weimar period offer the deepest insights into the inherent weaknesses and limitations of modern liberal democracy yet to be discussed by any thinker. This is particularly significant given that belief in liberal democracy as the only “true” form of political organization has become a de facto religion among Western political, cultural, and intellectual elites. Schmitt’s writings demonstrate the essentially contradictory nature of the foundations of liberal democratic ideology. The core foundation of “democracy” is the view that the state can somehow be a reflection of an abstract “peoples’ will,” which, somehow, rises out of a mass society of heterogeneous individuals, cultural subgroups, and political interest groups with irreconcilable differences.

This is clearly an absurd myth, perhaps one ultimately holding no more substance than ancient beliefs about emperors having descended from sun-gods. Further, the antagonistic relationship between liberalism and democracy recognized by Schmitt provides a theoretical understanding of the obvious practical truth that as democracy has expanded in the West, liberalism has actually declined. The classical liberal rights of property, exchange, and association, for instance, have been severely comprised in the name of creating “democratic rights” for a long list of social groups believed to have been excluded or oppressed by the wider society. The liberal rights of speech and religion have likewise been curbed for the ostensible purpose of eradicating real or alleged “bigotry” or “bias” towards former out-groups favored by proponents of democratic ideology.

The contradictions between liberalism and democracy aside, Schmitt’s work likewise demonstrates the ultimately self-defeating nature of liberalism taken to its logical conclusion. A corollary of liberalism is universalism, yet liberal universalism likewise contradicts itself. Liberalism, as Westerners have come to understand it, is a particular value system rooted in historic traditions and which evolved within a particular civilization and was affected by historical contingencies (the Protestant Reformation, the Enlightenment, and Modernism being only the most obvious.)

Schmitt’s definition of the essence of the political as the friend/enemy dichotomy simultaneously exposes the limitations of liberalism’s ability to sustain itself. Robert Frost’s quip about a liberal being someone who is unable to take his own side in a fight would seem to apply here. The principal weakness of liberalism is its inability to recognize its own enemies. Even in the final months of the Weimar republic, liberals, socialists, and even Catholic centrists held so steadfastly to the formalities of liberalism that they were unable to perceive the imminent destruction of liberalism that lurked a short distance ahead.

This insight of Schmitt would seem to go a long way towards explaining the behavior of many present day zealots of Liberal Democratic Fundamentalism. It is currently the norm for liberals to react with a grossly exaggerated, almost phobic, sense of urgency concerning the supposed presence of elements espousing “racism,” “fascism,” “homophobia,” and other illiberal or ostensibly illiberal ideas in their own societies. In virtually all Western countries, elements espousing the various taboo “isms” and “phobias” with any degree of seriousness are marginal in nature, often merely eccentric individuals, tiny cult-like groups, or politically irrelevant subcultures.

And yet, liberals who become hysterical over “fascism,” typically express absolutely no concern about the importation of unlimited numbers of persons from profoundly illiberal cultures into their own nations. Indeed, criticizing such things has itself become a serious taboo among liberals, who somehow believe that such values as secularism, feminism, and homosexual rights can never be threatened by the mass immigration of those from cultures with no liberal tradition, where theocratic rule is the norm, or where the political and social status of women has not changed in centuries or even millennia, where there is no tradition of free speech, where capital punishment is regularly imposed for petty offenses, and where homosexuality is often considered to be a capital crime.

A related irony is that liberals have embraced “Green” consciousness in a way comparable to the enthusiasm and adulation shown to pop music stars by teenagers, while remaining oblivious to the demographic and ecological consequences of unlimited population growth fueled by uncontrolled immigration.

Schmitt’s steadfast opposition to legal formalism as a method of constitutional interpretation and as an approach to legal theory in general is also interesting when measured against the standard complaints about “judicial activism” found among “mainstream” American conservatives. Schmitt’s view that laws, even constitutional law itself, should be interpreted according to the wider essence or deeper substance of the laws and constitutions in question and according to the concrete realities of specific political situations would no doubt make a lot of American conservatives uncomfortable. Of course, an important distinction has to be made between Schmitt’s seemingly open-ended approach to legal theory and the standard ideas about a “living constitution” found among American liberal jurists. Schmitt was concerned with the very real and urgent question of the need to preserve civil order and political stability in the face of severe social and economic crisis, civil unrest, and threats of revolution, whether through direct violence or cynical manipulation of ordinary political and legal processes. The various legal theories involving a supposed “living constitution” or “evolving standards” advanced by American liberals represents the far more dubious project of simply replacing the traditional Montesquieu-influenced American constitution with an ostensibly more “progressive” democratic socialist one.

That said, one has to wonder if it would not be appropriate for American anti-liberals to initiate an ideological move away from advocating strict adherence to the principle of legal or judicial neutrality towards a perspective that might be called “defensive judicial activism,” e.g. the advocacy of the use of the courts at every level to resist the encroachments of the present therapeutic-managerial-multiculturalist-welfare state in the same manner that liberals have used the courts to impose their own extra-legislative agenda. This would be an approach that is more easily discussed than implemented, of course, but perhaps it is still worthy of discussion nevertheless.

The political theory of Carl Schmitt likewise aids the development of a more thorough understanding of the nature of the state itself. Contrary to the prevailing view that political rule can be rooted objectively in sets of formal legal rules and institutional procedures, or that the state can be a mere reflection of the idealized abstraction of “the people,” Schmitt recognized that ultimately political rule is based on the question of “Who decides?” Ideological pretenses to the contrary, there will be a “sovereign” (whether an individual or a group) who possesses final authority as to what the rules will be and how they will be interpreted or applied.

Schmitt’s friend/enemy thesis likewise contains the recognition that the prospect of lethal violence defines the essence of politics. Political rule is about force, and about possessing the ability to exercise the necessary amount of physical violence to maintain a system of rule. The truth of these observations and of Schmitt’s broader critique of liberalism and democracy do not by themselves eliminate the problematical nature of Schmitt’s own Hobbesian outlook. Clearly, Schmitt’s own life and career illustrate the limitations of such a view. Indeed, after his purge by the Nazis, Schmitt reflected on Hobbes more extensively and modified his views on political obligation somewhat. He concluded that political obligation must be reciprocal in nature. Hobbes taught that the individual was obligated to obey political authority for the sake of his own protection. Schmitt argued in light of the Nazi experience that the individual’s obligation of obedience is negated when the state withdraws its protection. Schmitt’s concern with the primacy of order and stability could well be summarized by the Jeffersonian principle that “prudence, indeed, will dictate that governments long established should not be changed for light and transient causes.”

Yet, there is the wider question of the matter whereby the malignant nature of a particular state is such that the state not only fails to provide protection for the individual but threatens the wider culture and civilization itself, a situation for which Dr. Samuel Francis coined the term “anarcho-tyranny.” Clearly, in such a scenario, it will seem that the obligation of political obedience, individually or collectively, becomes abrogated.

Keith Preston

 

La influencia de la Nueva Derecha en los partidos "neopopulistas" europeos

 

LA INFLUENCIA DE LA NUEVA DERECHA EN LOS PARTIDOS "NEOPOPULISTAS" EUROPEOS

Joan Antón Mellón
Profesor de Ciencia Política de la UB
INTRODUCCIÓN
Los partidos neopopulistas europeos han consolidado su posición electoral ensus respectivos sistemas de partidos, e incluso en Italia la (LN) o en Austria el (FPÖ) han alcanzado el poder en coalición con otros partidos de derecha. Al respecto es ilustrativo los 5,5 millones de votos obtenidos por J.Mª Le Pen en la primera vuelta de las elecciones presidenciales francesas del 2002 o el 26,6% de votos obtenidos por el partido neopopulista suizo UDC en las elecciones parlamentarias de octubre del 2003. Su banderín de enganche es la xenofobia: «preferencia nacional» defienden los franceses FN y MNR; «Austria primero» propugna el FPÖ; hundir a cañonazos las embarcaciones de los emigrantes ilegales es la «propuesta política» que expuso en un mitin Umberto Bossi, líder de la LN italiana y ministro del gobierno italiano de S. Berlusconi; pero su influencia va más allá de su directa capacidad en las labores de gobierno o en la oposición, están influyendo decisivamente en las propuestas de otras subfamilias políticas de derechas1 al competir por la misma posible clientela electoral en unos mismos mercados políticos, es la denominada lepenización de los espíritus2. En última instancia rentabilizada políticamente por las organizaciones neopopulistas que se presentan como el original de las propuestas y no como remedos vergonzantes de éstas. Las organizaciones neopopulistas europeas han sido bien estudiadas en susvertientes sociológicas, organizativas e ideológicas. En mi opinión las tesis más incisivas y reveladoras se deben a las investigaciones de H.G. Betz, P.Perrineau, N. Mayer y R. Griffin, con una modesta contribución de quien escribe estas líneas3. Del profesor británico R. Griffin destaquemos su brillante análisis de que las propuestas neopopulistas pueden ser calificadas de «liberalismo etnocrático» y que constituyen una inteligente reconversión adaptativa (en una época de hegemonía de los valores democráticos) de los clásicos idearios de la extrema derecha. Sabemos quién vota a estas formaciones políticas y bastante del porqué, sin embargo está bastante inexplorado el terreno de cuáles son los referentes filosófico-ideológicos de los presupuestos xenofóbicos de las organizaciones neopopulistas. A esta relevante cuestión esta dedicado el presente artículo, si sabemos a partir de qué parámetros piensan los partidos xenofóbicos podremos contrarrestar su discurso desmontando sus argumentos base. He aquí nuestro objetivo central.
La Nueva Derecha Europea son los ideólogos que han actualizado los caducos discursos fascistas y ultranacionalistas del primer tercio del siglo XX. Son los revolucionarios conservadores del siglo XXI. Proporcionan, como veremos, legitimidad ideológica, entre otras, a las formaciones políticas neopopulistas.
I. ¿QUÉ Y QUIÉNES SON LA NUEVADERECHA EUROPEA?
La Nueva Derecha Europea (ND) está constituida por asociaciones cultural-políticas que se crean a imitación de la francesa Groupement de Recherche et dÉtudes pour la Civilisation Européenne (GRECE). Desde su fundación en1968 la ND francesa ha sido el faro teórico de sus homólogas europeas y su «maître à penser» Alain de Benoist el líder intelectual indiscutido. Dado que el combate de la ND es metapolítico, cultural los buques insignia de la flota de la ND siempre son revistas y, derivadas de ella, editoriales. En Francia la revista oficial es Éléments pour la culture européenne, en Italia, Trasgressioni, liderada por el politólogo Marco Tarchi, en Bélgica, Vouloir, dirigida por R.Steuckers, en el Reino Unido, Scorpion, con su hombre fuerte M. Walker y en España el alto funcionario del Ministerio de Educación Javier Esparza, director entre 1993 y 2000 (fecha del último número) de Hespérides. Todos ellos comparten unos mismos criterios culturales y políticos y, por ello, sus artículos más emblemáticos son intercambiados, traducidos y publicados por sus respectivas revistas. El núcleo central de sus convicciones radica en que tienen una visión de la naturaleza humana radicalmente opuesta a la tradición ilustrada. Para la ND el hombre es naturalmente desigual, agresivo, territorial y jerarquizado. No nace libre sino que la libertad es una conquista sólo alcanzable por los mejores, los cuales deben dirigir a la comunidad. Y ésta forja su destino en un combate constante contra todo tipode adversidades. Se es libre por superación personal y por pertenecer a una determinada comunidad que ha logrado preservar su soberanía. Para la ND los protagonistas de la Historia son los pueblos étnicamente homogéneos. De ahí que el enemigo principal, superado un visceral anticomunismo calificado de juvenil, sea el cristianismo por sus concepciones igualitarias y universalistas y el liberalismo por su radical visión individualista y anti-holística 4 del hombre. EE.UU como líder occidental mundial y potencia única, tras 1989, es el demonio a vencer, mientras que, en un terreno más abstracto, los Derechos Humanos son el gran objetivo a derribar.
En su opinión, obsoleta la frontera clásica entre la derecha y la izquierda, la nueva división radica entre los colaboradores y/o funcionarios del Sistema o tecno-estructura mundial y los partidarios de la recuperación de las raíces culturales de los diferentes pueblos del mundo para superar la decadencia y anomia actuales. En este heroico combate el papel que se otorga a si misma la ND es metapolítico, ser un laboratorio de ideas, agitar culturalmente y disputar al Sistema la hegemonía 5 ideológica (en cualquiera de las formas que adopta) para preparar unos nuevos planteamientos políticos rupturistas. Europa y el Tercer Mundo frente a EE.UU. Todo ideario político articulado elabora una utopía en la que se ven reflejados sus objetivos. La utopía de la ND sería una Europa libre de inmigrantes (o residiendo éstos temporalmente como ciudadanos sin acceso ala nacionalidad). Un mundo plural, heterogéneo, formado por comunidades homogéneas. Recuperada de la catástrofe igualitaria del cristianismo y su laicización racionalista ilustrada en cualquiera de sus manifestaciones: humanismo, liberalismo, marxismo 6; que se reconociera en su pasado indoeuropeo precristiano para decidir, libremente, su glorioso destino al recuperar su espiritualidad y su afán de lucha, sepultada por siglos de hegemonía de los valores mercantiles burgueses (materialistas y prosaicos) e igualitaristas.Fiel a estos planteamientos metapolíticos la ND se mantiene alejada de la lucha política partidista e incluso marca distancias y descalifica muchas de las propuestas de las formaciones políticas que más tienen en cuenta sus criterios de base: las formaciones políticas neopopulistas. Evidenciándose con ello queen el terreno de las ideas políticas es más relevante el uso político que se hacede ellas que las propias ideas.
II. ¿CUÁLES SON LOS OBJETIVOS DE LA ND?
La ND europea nace en Francia en la década de los sesenta del pasado siglo como un intento de reformulación del tradicional ultranacionalismo francés, traumatizado por las derrotas de los procesos de descolonización y deslegitimado por el colaboracionismo de Vichy. Además, sus planteamientos iniciales están también condicionados por la explosión ideológica y cultural de Mayo del 68 (7) y por la luz europeista que continua proyectando el Nacionalsocialismo en el universo ideológico de la extrema derecha y derecha radical, a pesar de su desaparición como régimen político en 1945. El ideario del Fascismo Clásico alemán proyecta su luz de estrella muerta igual que la proyecta el magma cultural que hizo posible, entre otros factores, su toma del poder en 1933 y su legitimación ideológico-cultural. Perdida la capacidad de seducción de los derrotados mitos fascistas es necesario substituirlos por otros. Es necesario una nueva Revolución Conservadora adaptada a una muy dura realidad para las Extremas Derechas y Derechas Radicales europeas: La Europa que resurge de sus cenizas despuésde 1945 se construye a partir de valores y criterios políticos antifascistas y profundamente democráticos; y la revelación propagandística de los horrores de los campos de exterminio ha evidenciado la intrínseca perversidad de los idearios fascistas.8 Dicha nueva Revolución Conservadora asume la radical crítica de la modernidad efectuada por los revolucionarios conservadores alemanes del primer tercio del Siglo XX: desprecian a Kant tanto como admiran a Nietzsche 9 y leen detenidamente los conservadores planteamientos metafísicos deHeidegger. Pero no sólo leen estos autores, sino todo aquello que pueda ser útil 10 ante su enorme tarea: redefinir la modernidad, ya que eso supone, en la segunda mitad del siglo XX, redefinir los conceptos de libertad y democracia en contra de las hegemónicas acepciones liberal-democráticas y socialdemócratas. En un largo proceso de estrategias y tácticas metapolíticas de destilación de ideas, alambicamiento de análisis 11 y proceso sincrético de síntesis global. Teniendo como objetivo que una cosmovisión alternativa a la ilustrada-burguesa se imponga en el mundo 12 y como medio el combate cultural-ideológico, en una muy inteligente, en mi opinión, utilización de un sistema ecléctico de disonancia cognitiva cultural. Se asume todo aquello que apoya,«demuestra» o «legitima» una determinada concepción del hombre y de la naturaleza y de las potencialidades de los seres humanos. Juzgados en su esencia como unos entes esencialmente: comunitarios, desiguales, agresivos, jerárquicos y territorializados. Condicionados por sus características biológicas, socialbiológicas y etnoculturales, pero libres para forjar su destino sino renuncian a su voluntad de poder como comunidades e individuos. La amplitud del objetivo estratégico de la ND (redefinición de la modernidad) y de la opción táctica escogida (intervención metapolítica) comportan una renuncia a la actividad política directa. Pueden permanecer puros, fieles a sus ideas. Dedicados a leer pensar y propagar. Algunos se cansan en este largo viaje, pero los auténticos representantes de las esencias de la ND como A. de Benoist, M. Tarchi o J. Esparza permanecen y no ingresan en los partidos neopopulistas o liberal-conservadores que, desde un primer momento, los esperan con los brazos abiertos, ávidos de intelectuales solventes. E incluso la ND francesa se permite despreciar al FN en general y a su líder J.Mª Le Pen de forma pública desde 1990 en particular por su populismo y su asunción del liberalismo.13 Tanto da; como la clase política sabe muy bien -y así lo apuntábamos previamente- más importante que las propias ideas es el uso político que se hace de ellas. En este sentido, conceptos como el «Derecho a la Diferencia»; planteamientos políticos como la «necesidad» de la creación de amplios movimientos comunitarios superadores de factores ideológicos y de clase; su visión del capitalismo como un sistema de producción idóneo si se lo supedita a control político; su óptica patriarcal; el planteamiento estratégico-táctico ninista (definirse como ni de derechas ni de izquierdas); la distinción jurídica entre ciudadano y nacional, entre otros factores, son asumidos de una determinada manera, política, por quienes los asimilan en sus planteamientos programáticos. De ahí que el mencionado «Derecho a la Diferencia» de la ND se convierte en la propagandística consigna del FN y el MNR «Preferencia Nacional».14 Al defenderse posturas radicales diferencialistas y antimulticulturales se potencia un racismo espiritual que se vulgariza en la xenofobia de los planteamientos políticos, culturales y jurídicos de las organizaciones neopopulistas. O la crítica radical de la ND al conjunto deideologías 15 se transforma, en su adaptación política de las organizaciones neopopulistas, en el rechazo de éstas a los otros partidos políticos en bloque,descalificando así la consustancial pluralidad de la democracia representativa.Son las concepciones nucleares de una Derecha Radical renovada, adaptada a las cambiantes realidades de los inicios del siglo XXI. La ND, por tanto, no ha transversalizado a la derecha y a la izquierda, «superándolas». Este análisis encierra, ideológicamente, una intencionalidad política que es más un deseo que una realidad: su análisis es que el fin tecnocrático de las ideologías (en la postmodernidad de un mundo globalizado) ha permitido resucitar una visión alternativa a la modernidad liberal- burguesa a la vez tradicional (pagana e indoeuropea) y futurista, aristocrática y armonicista. Una tercera vía 16 capaz de reconciliar, como la Ilustración no ha podido hacer, pares antagónicos.
La lúcida crítica que efectúan a las miserias de las sociedades occidentales (por ejemplo el papel mundial que juega lo que denominan Tecno-estructura, el déficit democrático, el anómico egotismo o la infantilización de la sociedad) no debe obnubilar nuestra capacidad de análisis del ideario de la ND francesa y de sus más débiles sucursales europeas. Denuncian y rechazan cualquier totalitarismo17 (cuyo origen, en su opinión, es el monoteísmo) pero lo hacen desde una perspectiva de superhombre nietzscheano, más allá del bien y el mal. Creen, como sus padres espirituales, que la sangre vale más que el oro; que la «forma de estar en el mundo» legitima cualquiera de sus actos, más allá del bien y el mal; que la libertad es un concepto práctico y político y que la voluntad de poder, como ley universal de la vida, establece quien es superior capaz y quien es débil e impotente.18 Y todo esto es lo que el antifascismo ha considerado como fascismo. Por tanto, mientras se escuchen ideas fascistas habrá que levantar la bandera del antifascismo y convencer a P.A. Taguieff recordándole que es suyo el siguiente análisis, tras comentar la ruptura explícita entre GRECE y el FN a partir de 1990 al calificar Benoist al FN de Extrema Derecha tradicional: «(...) cette rupture nimplique pas lannulation de limprégnation «greciste» du discours de certains responsables du Front National, formés dans la mouvance de la «Nouvelle droite».19 Igual opina M.Florentín: « (...) el Frente Nacional francés ha bebido muchos principios ideológicos en las fuentes del GRECE (...)» 20 A la ND no le gustarán las políticas que propugnan los partidos neopopulistas pero muchos de los cuadros neopopulistas comparten la cultura política de las publicaciones de la ND. Las ideas abstractas todo el mundo entiende que hay que darles forma y contenido para que puedan concretarse. Lo selecto se convierte en práctico no selecto al intentarse aplicarlas a la realidad. Por eso, inspirándonos en una reflexión de R. Griffin, podríamos preguntarnos si todo el inmenso horror de lo sucedido recientemente en la ex-Yugoslavia ¿no es el intento de construir sociedades etnicamente homogéneas, mediante una férrea y combativa voluntad de poder de una comunidad que recuerda su mítico pasado y quiere forjarse un destino como comunidad? 21 En última instancia la vieja propuesta del fascismo clásico de conseguir la armonía mediante una revolución cultural, espiritual y «nacional» es la propuesta, renovada, de la ND. Aunque ahora se acepte incluso la democracia, redefinida. Lo importante es acabar con la hegemonía del universalismo y del igualitarismo. De ahí que las propuestas liberales etnocráticas de las organizaciones neopopulistas sean la concreción política real de estas propuestas metapolíticas.22 El ideario de la ND, por tanto, es la filosofía política de la Derecha Radical europea actual, como en su día las concepciones de la Revolución Conservadora Alemana fueron uno de los decisivos basamentos ideológicos del ideario nazi. La misma inmensa diferencia que se dio entre E.Jünger y A. Hitler es la inmensa diferencia que existe hoy entre A. de Benoisty J.Mª Le Pen o B.Mégret. Todos ellos compartían y comparten una visión del mundo alternativa a la concepción ilustrada-liberal-socialista que afirma que es una verdad por sí misma que los hombres nacen iguales.
NOTAS:
1Véase Hainswort, P.: The Politics of the Extreme Right, Tiper, Londres, 2000.
2Véase Tevain, P. y Tissot, S.: Dictionaire de la Lépenisation des esprits, LEsprit Frappeur,2002.
3Antón Mellón, J.: «El neopopulismo en Europa occidental. Un análisis programáticocomparado: MNR (Francia), FPÖ (Austria) y LN (Italia), en Antón Mellón, J.(edit.): Las ideaspolíticas en el siglo XXI, Ariel, Barcelona, 2002.
4Las doctrinas holísticas propugnan que el todo es superior a la suma de las partes y poseecaracterísticas que le son propias.
5En el sentido en que da a este término el filósofo marxista italiano A. Gramsci.
6Recordemos al respecto que en capítulo 11 de Mi lucha A. Hitler descalifica como ideas modernas tanto al liberalismo como la democracia y el socialismo.
7La editorial de GRECE Le Labyrinthe ha publicado una obra al respecto: Le mai 68 de laNouvelle Droite.
8Por eso ha aparecido la corriente historiográfica denominada Negacionismo. Negando laexistencia del Holocausto se reafirma la no maldad intrínseca del ideario nazi.
9El objetivo general de Nietzsche y de la ND es idéntico: la substitución de los valores aluso, hegemónicos en Occidente, por otros que se creen superiores.
10«Practicando una lectura extensiva de la historia de las ideas, la ND no duda en recuperar aquellas que le parecen acertadas en cualquier corriente de pensamiento.» Benoist, A. de y Champetier, Ch.: Manifiesto: la Nueva Derecha en el año 2000.
11Por ejemplo para la ND el racismo (que denuncian en paralelo a una defensa de los inmigrantes aunque propugnan su regreso a sus países de origen) es un producto patológico delideal igualitario.
12Se pretende que lo espiritual predomine sobre lo material; lo idealista/altruista sobre lopragmático; lo heroico sobre lo prosaico; la generosidad sobre el cálculo constante; locomunitario sobre lo individual; el sacrificio sobre el hedonismo; el espíritu de aventura sobrela comodidad; el ánimo guerrero sobre el pacifismo; la jerarquía sobre la igualdad.
13Véase las publicaciones francesas Le Choc du mois, nº31(1990) y Les Dossiers delHistoire, nº82(!992).
14Analogía que ofrece pocas dudas. « (...) les formulations récents du national-populisme sonttributaires de lidéologie de la différence mise au point par la Nouvell droite.» Taguieff, P.A.:Sur la Nouvelle droite, Descartes, Paris,1994, p. 98.
15«Del marxismo al conservadurismo ultraliberal, pasando por todas las variedades del centrismo y de la socialdemocracia, uno se encuentra en presencia de la misma visión de lasociedad, del Estado y del hombre.» Benoist, A. de y Faye, G.: Las ideas de la Nueva Derecha,Ediciones Nuevo Arte Tor, Barcelona, 1986, p. 450.
16«(el Estado (...) dirige políticamente la economía sin intervenir administrativamente en sugestión. Esta concepción de una «economía dirigida» constituye la tercera vía entre el liberalismo del Estado mínimo y el socialismo del Estado nacionalizador y poli-intervencionista.» Benoist,A. de y Faye, G.: Las ideas de la Nueva Derecha, Op. Cit. 387.
17Véase Benoist, A.de: Communisme et nazisme 25 réflexions sur le totalitarisme au Xxesiècle(1817-1989). Le Labyrinthe, París,1989.
18En palabras del propio Nietzsche: «Aquí resulta necesario pensar a fondo y con radicalidady defenderse contra toda debilidad sentimental: la vida misma es esencialmente apropiación,ofensa, avasallamiento de lo que es extraño y más débil, opresión, dureza, imposición de formaspropias, anexión y al menos, en el caso más suave, explotación».Apud Tugendhat, Problemas,Gedisa, Barcelona, 2002, p. 86.
19Taguieff, P. A.: Sur la Nouvelle droite, Op. Cit. 346.
20Florentín, M.: Guía de la Europa Negra, Op.Cit.,82.
21Con independencia del hecho que, probablemente, S. Milosevic nunca haya leído nada deA. de Benoist.
22«Es necesario replantear el mundo en términos de conjuntos orgánicos de solidaridad real:de comunidades de destino continentales, de grupos nacionales coherentes y ópticamentehomogeneos por sus tradiciones, su geografía y sus componentes etnoculturales (...) Estas asociaciones de naciones son geopolíticamente posibles y supondrían la destrucción del marco económico-estratégico actual.» Faye, G.: «Pour en finir avec la civilisation occidentale», Éléments, núm. 34 (1980), 8-9.

dimanche, 10 octobre 2010

La critica alla democrazia in Henri de Man

La critica alla democrazia in Henri de Man

Ex: http://fralerovine.blogspot.com/ 

La democrazia come forma di dominio borghese

Il giovane De Man è ancora fedele al marxismo ortodosso, in linea con la Seconda Internazionale, ma già si delineano alcuni temi che saranno centrali nel suo pensiero. In particolare, in “L’era della democrazia” (1907) emergono tre punti fondamentali. In primo luogo, il suo socialismo ha una base volontaristica, secondo cui lotta di classe e istinto di sopravvivenza – “volontà di potenza” per usare un termine nietzscheano” – coincidono. In secondo luogo – e qui viene ribadita la sua linea radicale e non riformista –, il proletariato dovrà essere attento a non cedere agli inganni della borghesia, bensì mantenersi puro e intransigente per conquistare il potere. Egli, infatti, riconosce il carattere precedentemente rivoluzionario della borghesia, ma ammonisce a non confondere la rivoluzione borghese con quella proletaria.

 

1. La crescita parallela dei movimenti socialisti dei lavoratori e del movimento democratico di parte della borghesia, come abbiamo visto negli ultimi anni, in particolare da noi in Francia, Inghilterra, Olanda e Belgio, ha portato molti membri del nostro partito alla conclusione che, siccome entrambi i fenomeni sono portati avanti dalla medesima causa e per lo stesso scopo (la “democrazia” che infine diverrà “socialista”), così il progresso della democrazia e quello del movimento dei lavoratori sarà simile, combinato, inseparabile. Bene, questa conclusione è erronea, questa conclusione è falsa, questa conclusione è pericolosa.

 

In terzo luogo, però, il proletariato, man mano che acquisterà coscienza di classe, sarà in grado di vincere la borghesia con le proprie forze, sfruttando le stesse condizioni della democrazia borghese.

 

2. Sarebbe il peggior tipo di pessimismo concludere che non dobbiamo aspettarci immediati miglioramenti politici, che dobbiamo fermarci e riporre tutta la nostra speranza nel sovvertimento rivoluzionario della società capitalista. No; la democrazia politica – cioè, un minimo di diritti politici e legalità – è la condizione assolutamente indispensabile per il successo della rivoluzione sociale […]. Ma il proletariato sarà sempre più l’unica forza a sostenere tutte le battaglie per la democrazia e dovrà dipendere sulle sue risorse per la realizzazione della democrazia. Man mano che la democrazia diventa più indispensabile per il proletariato, diviene più pericolosa per la borghesia, e man mano che la lotta per ogni frammento di libertà e legalità diventa più difficile, sempre più s’avvicina a quella lotta finale in cui non ci sarà quartiere, dove la posta sarà il controllo del potere politico, la stessa esistenza dello sfruttamento capitalistico e della democrazia a uno e a un medesimo tempo.

 

Fin dall’inizio, quindi, il rapporto con la democrazia borghese, in quanto sistema politico reale e quotidiano in cui ci si trova ad operare e che occorre affrontare, risulta fondamentale nell’opera di De Man, il quale però ammonisce che la democrazia può spianare la strada al proletariato ma non è in sé una condizione sufficiente, tale da condurre automaticamente al socialismo.

 

3. Dunque, nella nostra lotta, non lasciamo che illusioni sulla misericordia della borghesia, né fiducia nella sincerità delle loro convinzioni democratiche, confondano la consapevolezza di classe del proletariato. La posta della battaglia è ben maggiore che un po’ di legalità o solo una riforma, ben più grande di quanto una rivoluzione borghese abbia mai tentato. E il proletariato ha un’arma molto più forte e formidabile di quanto la borghesia ne abbia mai usate. Non l’ha forgiata a partire dall’idea democratica – e dal fraseggio di un impotente classe in declino. Come il giovane eroe nel Sigfrido di Wagner, vede ciò con distacco […]. E forgerà la sua spada per salvare il mondo a partire dalla forte organizzazione di classe e con eroica coscienza di classe.

 

Infatti, approfondendo la sua preparazione teoretica e la sua conoscenza della democrazia liberale, De Man sarà sempre più cauto e guardingo relativamente all’attrazione del liberalismo e del riformismo sul proletariato. Particolarmente interessanti sono le sue lettere da London, pubblicate nel 1910 sul “Leipziger Vokszeitung” come “Lettere di viaggio socialiste”, laddove egli descrive come il partito laburista sia del tutto integrato in quello liberale e, perciò, funzionale agli stessi interessi borghesi, mentre invece quelli dei proletari sono ignorati o calpestati.

 

4. È del tutto ovvio che la natura della competizione elettorale tra i due grandi partiti borghesi, che almeno a Londra monopolizza quasi il campo di battaglia, è una competizione per catturare i voti del lavoratore attraverso trucchi pubblicitari da poco, così che il partito che ha meno scrupoli e più denaro vincerà. Perché alla fine, l’essenza del senso politico nel sistema elettorale inglese è questo: trasformare il potere finanziario delle classi proprietarie in potere politico in modo che il diritto di voto dei lavoratori sia reso un modo di preservare la loro dipendenza intellettuale e politica dai partiti borghesi.

 

L’analisi e la critica del sistema democratico inglese prosegue toccando altri punti fondamentali, quali la legge elettorale in sé, la quale esclude il voto femminile, riduce l’elettorato ai soli possidenti o affittuari benestanti, garantisce il voto plurale a laureati e proprietari terrieri, ed è basata su un sistema maggioritario, per cui in ogni collegio è eletto solo il singolo candidato che ottiene la maggioranza relativa. Inoltre, egli descrive la conduzione della campagna elettorale presso i lavoratori con distribuzione gratuita di alcoolici, propaganda di massa e addirittura l’organizzazione delle masse stesse al voto. Il termine che meglio descrive l’atteggiamento delle classi dominanti verso la classe operaia è “condiscendenza”.

 

5. Il movimento socialista operaio è trattato dalla classe dominante in Inghilterra in completo contrasto con il socialismo e con il movimento operaio. Mi esprimerò più chiaramente: il socialismo come teoria sociale e filosofica non appare come minaccioso per il corpo della borghesia, finché esso non trova sostenitori nei circoli intellettuali borghesi […]. In breve, il socialismo qui è ancora socialmente accettabile, come non lo è stato per lungo tempo in Germania. La borghesia inglese molto tempo fa ha fatto pace con il movimento dei lavoratori a patto che non fosse socialista, cioè, con il movimento sindacale di vecchio stampo.

 

Tuttavia, come fa notare De Man, alla “carota” viene affiancato il “bastone”: i metodi repressivi non sono meno assenti nella democrazia liberale, semplicemente essi sono usati con maggiore parsimonia e oculatezza. Questo è particolarmente evidente nel modus operandi della polizia inglese, in realtà non molto dissimile da quella prussiana, nonostante la differenza di regime, in linea teorica.

 

6. Alla fine il parallelo tra i “bobbies” e i “Bleus” riflette fondamentalmente quello tra le due forme di governo, il borghese liberale e lo Junker reazionario, in generale. Queste sono le due forme democratiche di oppressione politica del proletariato nell’era capitalista; la prima è la più ragionevole, la seconda la più brutale. Questo non significa che la polizia di Londra non possa e non si sia comportata in modo brutale. Ma questo ha luogo non regolarmente ma solo in circostanze straordinarie, cioè, quando è considerato davvero indispensabile.

 

In sintesi, il giovane De Man prende una posizione molto dura verso la democrazia borghese, liberale o autoritaria che sia. Se da una parte, infatti, riconosce che all’interno di essa è possibile trovare gli strumenti per portare avanti la lotta di classe, pure è consapevole che a un certo punto sarebbe risultata inevitabile la rivoluzione.

La democrazia come tappa intermedia

Nel 1914, con l’invasione del Belgio da parte tedesca, questa visione secondo cui non c’era differenza tra i vari regimi borghesi e imperialisti doveva cambiare radicalmente. Le democrazie occidentali parevano, infatti, garantire maggiori possibilità ai movimenti operai rispetto agli imperi centrali. Altrettanto importanti furono le sue esperienze di viaggio in Unione Sovietica e negli Stati Uniti, che lo convinsero della necessità di un ordinamento democratico come tappa intermedia tra il capitalismo e il socialismo. In quest’ottica egli arrivò a contrapporre all’URSS, che egli accusava di eccessiva furia nel tentare d’imporre le conquiste del socialismo a un proletariato ancora impreparato, gli Stati Uniti, dove invece vedeva quasi compiute le basi democratiche del socialismo.

Henri De Man, ne traccia una sintesi nell’articolo “La lezione della guerra”, comparso su “Le Peuple” nel 1919. Egli è però attento a sottolineare come la sua posizione non fosse stata immediatamente interventista come molti altri socialdemocratici e socialisti europei, bensì meditata alla luce degli eventi da lui vissuti tra il 1915 e il 1918, e frutto di una coscienza tormentata dalla consapevolezza delle contraddizioni.

 

7. Al fine di evitare ogni incomprensione, devo dichiarare che, anche se io ero un ufficiale associato all’azione del governo durante la guerra con due missioni ufficiali all’estero – in Russia nel 1917 e negli Stati Uniti nel 1918 – non sono mai stato tra quelli che hanno perso la loro autonomia morale per l’intossicazione del patriottismo ufficiale e dello sciovinismo militarista. Io ero un socialista antimilitarista e internazionalista prima della guerra. Credo di esserlo ancora di più ora. Forse lo sono in modo differente, ma certamente non in misura meno profonda o meno sentita. È precisamente perché io considero il socialismo una realtà urgente e ancora più ineluttabile che mai che esso mi appare da una prospettiva differente dalle mie opinioni del 1914. La revisione delle mie idee è dovuta soprattutto al fatto che per tre anni sono state letteralmente sottoposte alla prova del fuoco.

 

De Man propone in queste pagine però una svolta di entità non indifferente, anzi una vera e propria revisione del marxismo, dovuta ad esperienze che traspaiono come traumatiche. Egli trasvaluta tutti i valori, alla ricerca di una dottrina politica che gli consenta di comprendere davvero gli eventi.

 

8. Non penso più che possiamo capire i nuovi fatti della vita sociale con l’aiuto di una dottrina stabilita sulla base di fatti precedenti e differenti. Non penso più che la toeria che vede le guerre contemporanee unicamente come il risultato di conflitti economici tra governi imperialisti sia giusta. Non penso più che i soli fenomeni economici possano fornirci la trama di tutta l’evoluzione storica. Non penso più che il socialismo possa essere realizzato indipendentemente dallo sviluppo della democrazia politica. Non penso più che al socialismo basti fare appello agli interessi di classe del proletariato industriale, disdegnando il supporto che certi interessi e ideali comuni all’intera nazione o a tutta l’umanità possono darci. Non penso più che la lotta di classe proletaria, che rimane il mezzo principale per la realizzazione del socialismo, possa condurre ad esso senza ammettere certe forme di collaborazione di classe e di partito. Non credo più che il socialismo possa consistere semplicemente nell’esproprio dei mezzi di produzione di base da parte dello Stato, senza una profonda trasformazione dei processi amministrativi per portare allo sviluppo illimitato della produttività sociale. Non penso più che una società socialista possa essere sostenuta domani se rinuncia allo stimolante che oggi è fornito dalla competizione d’imprese private e di un ineguale frutto del lavoro, proporzionato alla sua produttività sociale. Credo in un socialismo più a portata di mano, più pragmatico, più organico – in una parola, più umano.

 

Egli spiega poi le sue motivazioni di contro al marxismo internazionalista, adducendo come tappa necessaria sul cammino verso il socialismo l’autonomia nazionale e la democrazia politica, entrambe ancora da raggiungere nelle due grandi nazioni europee dove era stata tentata la rivoluzione bolscevica, ovvero Russia e Germania, in quanto nazioni ancora rette da una monarchia di diritto divino. In quest’ottica, la guerra delle potenze dell’Intesa era giustificata anche da un punto di vista socialista proprio perché portava a termine quella rivoluzione borghese di cui parlava Marx. De Man continua a fare riferimento al filosofo di Treviri, anche se ne critica l’economicismo.

 

9. Il metodo del materialismo storico fondato da Marx ci ha abituati troppo a vedere solo il lato economico dei fatti della vita sociale. D’altra parte, il marxismo è stato represso troppo fortemente dal socialismo di Germania e Russia, due Paesi dove la mancanza d’istituzioni democratiche e, quel che è peggio, di tradizioni democratiche ha necessariamente avuto ripercussioni sul punto di vista dei lavoratori.

 

Egli ha ben presente che non è stata una guerra rivoluzionaria socialista, ma nondimeno è stata una guerra rivoluzionaria democratica. Passando poi a confrontare Stati Uniti e Russia, sottolinea le migliori condizioni del primo Paese, in confronto al secondo dove il proletariato, mancando di un’educazione democratica, non è stato in grado di gestire il potere conquistato.

 

10. In Russia, ho visto socialismo senza democrazia. In America, ho visto democrazia senza socialismo. La mia conclusione è che, per parte mia, preferirei, se dovessi scegliere, vivere in una democrazia senza socialismo che in un regime socialista senza democrazia. Questo non significa che io sia più democratico che socialista. Molto semplicemente significa che la democrazia senza socialismo è pur sempre democrazia, mentre il socialismo senza democrazia non è nemmeno socialismo. La democrazia, essendo il governo della maggioranza, può condurre al socialismo, se la maggioranza è a favore di esso; il socialismo, se non è basato sul governo della maggioranza, è un regime dispotico, il che significa o guerra civile o stagnazione.

 

Per risolvere questo problema, il proletariato dovrebbe includere non solamente gli operai, ma anche i tecnici e gli intellettuali, i quali vendono anch’essi la loro forza lavoro, sia pure più specializzata, il che fa di loro dei proletari.

 

11. Non sarei un socialista se non credessi che questa capacità si può trovare in nuce nel proletariato – a condizione che l’espressione includa oltre ai lavoratori manuali coloro, come i tecnici, i colletti bianchi, gli ingegneri, gli studiosi e gli artisti, che oggi vendono la loro forza lavoro intellettuale sul mercato del mondo capitalista. Ma poiché questo nucleo possa svilupparsi e rendere più che non solo vantaggi temporanei, un lungo periodo di adattamento della classe lavoratrice ai nuovi compiti di gestione sociale deve aver luogo.

 

Questa collaborazione tra le classi inferiori, sostiene De Man, ha già in realtà visto in parte la luce nelle trincee, laddove la maggioranza dei combattenti erano appunto proletari (in questo senso allargato). Qui sono state poste le basi sociali per un socialismo democratico, del tutto differente dal socialismo dittatoriale del bolscevismo sovietico.

Riguardo agli Stati Uniti, troviamo interesse nella “Lettera d’America” comparsa, sempre su “Le Peuple”, l’anno successivo. Ciò che l’autore sottolinea, sono le ottime condizioni materiali dei lavoratori americani, in particolare i contadini, rispetto a quelli europei. E a queste si accompagna una superiore istruzione e dunque una vera e propria coscienza di classe, che porrebbe le basi per un movimento socialista di successo.

 

12. Questo è un Paese che dimostra che non è la povertà che crea la più vigorosa coscienza di classe, e che un regime di sfruttamento capitalistico è più minacciato dove la gente comune ha acquisito il più alto grado di benessere materiale ed istruzione, come nel Far West americano. Tutto questo Paese è proprio ora lo sfondo di una grande rinascita della coscienza di classe, sia tra la popolazione rurale, sia tra i lavoratori urbani. È un fenomeno sorprendente, specialmente per un periodo immediatamente successivo a una guerra. La sua espressione più caratteristica è l’alleanza dei sindacati e delle organizzazioni agrarie per sostenere un programma esplicitamente collettivista.

 

La democrazia nel planismo

Il successivo percorso di studio di De Man lo portò a toccare e ad approfondire ben altri argomenti, in particolare relativamente alla critica e al superamento del marxismo da un punto di vista psicologico, come espresso in “Psicologia del socialismo” (1926). La sua critica del marxismo è funzionale però a una radicalizzazione del movimento socialista. Secondo l’autore, infatti, è nella dottrina di Marx che devono essere rintracciati quei tratti filosofici positivisti come il meccanicismo, il razionalismo, l’edonismo materialista, che favoriscono l’imborghesimento dei movimenti marxisti. Un altro problema è la tendenza alla divisione, specie nei partiti di stampo bolscevico, tra dirigenti attivi e masse passive (“Masse e capi”, 1932). Il lato più propriamente psicologico è poi approfondito in “La lotta per la gioia del lavoro” (1927), laddove esamina i moventi psicologici che influenzano positivamente il lavoratore, ovvero principalmente l’utilità sociale, l’interesse personale, e il senso dell’obbligazione sociale; e quelli che lo influenzano negativamente, come l’insicurezza e la precarietà delle condizioni di vita e di lavoro o l’impossibilità di promozione sociale.

Con “L’idea socialistica” (1933) viene finalmente approfondito un altro tema cruciale, quello dell’imborghesimento del proletario. De Man ricostruisce prima storicamente il passaggio da una borghesia lavoratrice a una borghesia proprietaria e sfruttatrice e poi osserva il processo analogo nel proletariato contemporaneo. Secondo lui, indubbiamente, ha un forte peso il miglioramento delle condizioni di vita, ma il fattore cruciale, che mina a suo parere il marxismo alla base, è il materialismo: la classe operaia lotta non per il bene dell’umanità, ma egoisticamente per il proprio benessere, mirando essenzialmente a rovesciare il dominio borghese e sostituirvisi. In questo senso, riprendendo il pensiero di Spengler e Sombart, il marxismo non è tanto un movimento opposto al capitalismo, quanto interno ad esso. Il socialismo invece doveva prescindere dagli interessi specifici della classe operaia, che a suo parere avrebbero potuto anche essere soddisfatti dal capitalismo, come negli Stati Uniti.

È proprio su queste premesse, che De Man scriverà il “Piano del lavoro” nel 1933, come programma pragmatico di riforma dello Stato dal punto di vista tanto sociale quanto economico.

 

13. L’obiettivo di questo piano è una trasformazione economica e politica del Paese, consistente in: 1) L’istituzione di un sistema economico misto che includa, oltre a un settore privato, un settore nazionalizzato che comprenda il controllo del credito e delle principali industrie che sono già monopolizzate di fatto; 2) La sottomissione dell’economia nazionale così riorganizzata a lle direttive del benessere comune mirante all’allargamento del mercato interno così da ridurre la disoccupazione e da creare condizioni che portino a un’accresciuta prosperità economica; 3) La realizzazione all’interno della sfera politica di una riforma dello Stato e del sistema parlamentare tale da creare le basi per una vera democrazia sociale ed economica.

 

Scendendo in maggiori dettagli riguardanti quest’ultimo punto, che delineino come sia mutata la concezione della democrazia propugnata da De Man, occorre consultare la settima e ultima parte del piano.

 

14. Per rinforzare le basi della democrazia e per preparare istituzioni parlamentari per la realizzazione delle trasformazioni economiche che sono delineate, la riforma dello Stato e del sistema parlamentare deve soddisfare le seguenti condizioni: 1) Tutti i poteri derivano dal suffragio universale non adulterato; 2) L’esercizio delle libertà costituzionali è pienamente garantito a tutti i cittadini; 3) Il sistema politico ed economico assicurerà l’indipendenza e l’autorità dello Stato e del potere pubblico rispetto al potere finanziario; 4) il potere legislativo sarà esercitato da una singola camera, di cui tutti i membri siano eletti con suffragio universale; 5) questa camera, i cui metodi di lavoro saranno semplificati e adattati alle necessità della moderna organizzazione sociale, saranno assistiti nell’elaborare leggi da consigli consultativi, i cui membri saranno scelti in parte fuori dal Parlamento, sulla base della loro riconosciuta competenza; 6) per evitare i pericoli dello statalismo, il Parlamento darà alle agenzie responsabili per legge della gestione dell’economia quei poteri d’implementazione indispensabili alla rapidità d’azione e alla focalizzazione delle responsabilità.

 

Nelle successive tesi di Pontigny del 1934, stabilirà il ruolo del partito all’interno della pianificazione qui delineata, ovvero la piena partecipazione, all’interno del sistema legale e politico democratico alla riforma dello Stato. Questo interventismo, unito alla delusione per l’inerzia del regime borghese e democratico sarà alla base della sua scelta, nel 1940, di appoggiare il fascismo, sperando che potesse compiere quella riorganizzazione dello Stato che né il socialismo né la democrazia erano stati in grado di intraprendere.

samedi, 09 octobre 2010

Het Solidarisme als Derde Weg en filosofie

Het solidarisme als Derde Weg en filosofie

Ex: http://www.kasper-gent.org/

In deze tekst trachten wij een inleiding te geven tot de onderliggende filosofie van het solidarisme en de veruiterlijking van het solidarisme als Derde Weg tussen kapitalisme en socialisme.

Begin van de analyse: de morele crisis in de hedendaagse samenleving.

1058443.jpgDe hedendaagse samenleving heeft te kampen met een morele crisis. In tijden waar de technologische en wetenschappelijke ontwikkeling een blijvende groei kent en de materiële levensstandaard van de mensen zichtbaar vooruit gaat, heeft men de indruk in het quasi hoogste stadium van menselijke en sociale ontwikkeling te leven. Echter, men vergeet men de gigantische crisis van deze moderniteit doormaakt: een morele- en geloofscrisis van nooit geziene omvang.

Terwijl materiële toestand van de mens verbeterde, kon men een omgekeerd evenredig verband vaststelling met de morele identiteit van de mens. De traditionele katholieke waarden werden de laatste decennia vernietigd, maar ze werden niet vervangen door een nieuwe morele ordening. De nieuwe orde is onder invloed van het liberalisme en individualisme de orde van het individu geworden. Het gevolg is een gigantisch moreel vacuüm, leidende tot een moreel verval dat we vandaag de dag welig zien tieren. Fundamentele menselijke en christelijke waarden – zoals liefde, gezin en solidariteit – werden gedevalueerd tot uitwendige verschijnselen zonder innerlijke basis. Deze uitwendige verschijnselen worden nu zelfs door sommigen in vraag gesteld. Zo staat de rol van het traditionele gezin als hoeksteen van de samenleving en de solidariteit met volksgenoten onder een steeds groeiende druk. Seksualiteit werd losgemaakt van liefde. Men gelooft enkel nog in zichzelf, in het eigen individu. De groep, het volk en de maatschappij waartoe men behoort lijkt niet meer van belang.

Wat zijn de oorzaken van deze crisis? Wat is de basis waarop de politieke, economische en sociale structuren steunen die ons volk naar deze afgrond geleid hebben? Waarom is ons volk niet in staat om materiële ontwikkeling te koppelen aan morele en geestelijke ontwikkeling?

In reactie op deze vragen trachten wij de fundamentele oorzaken bloot te leggen. Vervolgens trachten wij een antwoord te bieden op deze crisis. Wij trachten de socio-economische en politieke denkwijze bloot te leggen die ervoor moet zorgen dat ons volk de brug kan maken naar een samenvallende materiële, morele en geestelijke ontwikkeling. Het antwoord op deze vraag zal steunen op de Derde weg van het solidarisme.

Op weg naar een Derde Weg …

De belangrijkste oorzaak van de crisis in de hedendaagse samenleving is het ontbreken van harmonie tussen het individuele en maatschappelijke niveau. In de volgende alinea’s verklaren wij waarom.

Economisch werd de mens gereduceerd tot een consument en productie-eenheid binnen het kapitalisme. In dit systeem ontstaat aldus een maatschappelijke dualiteit tussen werknemer en werkgever. Deze dualiteit vormt de perfecte basis voor menselijke vervreemding van het volk en de medemens: men consumeert en produceert als individu. Volk en medemens worden van ondergeschikt belang in de economische logica. Dit terwijl economische vooruitgang toch het hele volk zou moeten dienen en niet enkel de zakken van de aandeelhouders en werkgever moet vullen, is het niet?

Zij die zich bewust zijn van deze maatschappelijke dualiteit volgen vaak de algemeen geldende paden, echter deze zijn ziek in hetzelfde bedje. Enerzijds zijn er zij die zich terugplooien op (vaak reactionair) nationalisme, maar nationalisme blijft een containerbegrip dat door alle ideologieën aangewend kan worden. Wat zien wij? Quasi alle hedendaagse en zelfverklaarde nationalisten blijven het kapitalisme verdedigen als economisch systeem, alsook de liberale en individualistische vrijheid-blijheid denkwijze. Anderzijds zijn er zij die zich terugplooien op socialisme en communisme, maar zij verdedigen het volks-euthanaserende multiculturalisme en kijken vaak vol bewondering naar massamoordenaars en totalitairen zoals Ché Guevara.
Allen verdedigen de demo-liberale chaos van het parlementarisme en partijpolitiek. Dit zijn systemen die menselijk en maatschappelijk egoïsme in de hand werken en kortetermijnbelangen nastreven. Een langetermijnvisie bereik je niet tijdens een regeerperiode van vier jaar. Een langetermijnbeleid bereik je niet door partijbelangen te verdedigen en te streven naar behoud van het eigen postje.
Geen van allen blijkt in staat de brug te maken naar de morele verloedering van onze samenleving en geen van allen blijkt aldus een permanente morele en intellectuele basis te kunnen leggen voor een samenvallende organische groei van zowel mens, volk en maatschappij.

Onze oplossing bestaat erin te streven naar een harmonische en organische ordening der dingen. Sociale conflicten – van alle aard – kunnen niet opgelost worden door de heersende wij-zij mentaliteit die liberalisme, kapitalisme, socialisme, communisme, parlementarisme en partijpolitiek ons voorschotelen. Zij streven allen naar macht over de andere, maar zij ontbreken de harmonie om tot gemeenschappelijke doelstellingen te komen gekaderd binnen een hogere morele ordening in de samenleving. Indien er wel een schijnbaar gemeenschappelijk doel is kijken de deelnemers aan een akkoord enkel naar hun eigen doelstelling en de mate waarin deze verwezenlijkt kan worden. Dit zien wij onder andere terug in het sociaal overleg binnen ondernemingen. Van een echte sociale overlegcultuur tussen de sociale partners is al lang geen sprake meer. De vakbonden zijn er alleen maar voor hun eigen werknemers en dienen enkel de individuele belangen van deze werknemers. Dienen zij het volk en dienen zij economische groei die ten dienste moet staan van mens, staat, volk en maatschappij? Neen.

Enkel door de hogere morele ordening te herinstalleren kan een organisch gemeenschapsideaal en permanente sociale vrede bewerkstelligd worden. Alles begint immers met de morele waarden die men uitdraagt, bewust én onbewust. De noodzakelijkheid van een Derde Weg te midden van deze chaos komt duidelijk naar voor …

 

De grondslag van het solidarisme

Het solidarisme bepleit de noodzakelijke organische ordening van de samenleving. In zijn filosofische grondslag beschouwt het solidarisme de wereld als een verticale structuur: het materiële, bio-organische, psychische, het sociale en het geestelijke. In tegenstelling tot de materialistische filosofie, die eigen is aan het liberalisme en kapitalisme, kunnen de hogere niveaus niet afgeleid worden van de lagere niveaus. Alle niveaus vormen in de solidaristische filosofie een organisch geheel. Ook in horizontale zin verschaft het solidarisme een organische visie waarbij het principe ‘eenheid in verscheidenheid’ heerst.

 

Individu en collectiviteit versus solidarisme

Het solidarisme beschouwt de verhoudingen tussen mensen onderling, de mens en de groep, en groepen onderling. Conflicten worden opgelost door solidariteit en harmonisch evenwicht.

Deze visie staat rechtlijnig tegenover het vandaag heersende individualisme. Dit individualisme vormt de grondslag van het liberalisme en de liberale democratie, en het rechtvaardigt kapitalisme en egoïsme op individueel en groepsniveau. Het individu staat in deze visie boven het maatschappelijke. In de individualistische filosofie is er geen basis voor individuele diensten ten bate van de gemeenschap, enkel ten dienste van zichzelf als individu. De uitspraak ‘de vrijheid van het ene individu stopt waar die van de andere begint’ symboliseert de negatieve opvatting van vrijheid in het individualisme. Deze filosofie gaat aldus rechtlijnig in tegen de organische basisfilosofie van het solidarisme. Helaas groeit deze visie dag per dag verder in Europa.

De solidaristische visie staat eveneens rechtlijnig tegenover het collectivisme, zoals gepropageerd door socialisme en communisme. Ontstaan uit reactie tegen de tekortkomingen van het individualisme beschouwt het collectivisme iedereen als deel van de collectieve gemeenschap waarbij het collectieve voorop staat op het individuele. In het collectivisme worden persoonlijk initiatief en creativiteit onderdrukt ten voordele van het collectieve doel, en dit in een allesomvattende conformistische maatschappijvisie. Ook hier zien we dus het rechtlijnig conflict met de solidaristische filosofie.

 

Tegenover deze twee verwerpelijke systemen staat onze Derde Weg: het solidarisme. Deze visie erkent de basiswaarden van het individu en het recht op individuele vrijheid. Dit is een positieve geïnterpreteerde vrijheid ten dienst van hogere waarden zoals waarheid, goedheid, schoonheid, het absolute. Persoonlijk egoïsme is echter volledig ondergeschikt aan deze hogere waarden. Individu en gemeenschap dienen samen te werken ter verwezenlijking van deze hogere waarden, en dit complementair. Individu en gemeenschap zijn aldus niet tegengesteld aan elkaar, maar wederzijds versterkend! De gemeenschap zorgt voor de materiële en morele middelen om de individuele vrijheid uit te oefenen. Dit is het principe van personalisme, een begrip dat volledig los staat van individualisme en een noodzakelijke uiting is van een visie op basis van de solidaristische filosofie. Het begrip personalisme impliceert verder dat een individu een volk dient vanuit zijn sociale bewustzijn tot de volksgemeenschap te horen. Naast het bewustzijn van het ‘ik’ bestaat er dus ook een bewustzijn van het ‘wij’ in de solidaristische visie!

Zoals ondertussen duidelijk zal is: zowel het volledig egoïstische individu (liberalisme), alsook het individu opgelost in de collectiviteit (socialisme), is vreemd aan de solidaristische filosofie. Verder vergelijkt men solidarisme vaak met nationaalsocialisme. Uit bovenstaande beschouwingen is het duidelijk dat dit een volledig onterechte begripsverwarring is: het collectivisme dat aan de grondslag ligt van het socialisme staat immers rechtlijnig tegenover het solidarisme op basis van personalisme. De extra toevoeging van een nationaal element verandert hier maar weinig aan.

 

Solidarisme, volk en gemeenschap

In de solidaristische visie bestaat het doel van sociale inzet door het individu in o.a. culturele en politieke verenigingen er niet in het collectief te dienen, maar wel het individu zelf. Dit individu, dat zich door zijn sociale inzet individueel verrijkt, stelt zich vervolgens ten dienste stelt van de organische gegroeide groep waartoe bij behoort: familie, regio en volk. In het solidarisme dient dus een duidelijk conceptueel onderscheid gemaakt worden tussen een vereniging met collectief doel en een groep. Een groep en volksgemeenschap waartoe iemand behoort worden gedetermineerd door geboorte. Men zal niet geboren worden in een vereniging met collectief doel, bijvoorbeeld een politieke partij.
Verder zien we dat de volksgemeenschap het individu determineert, maar dat het omgekeerde niet volledig waar is. Hoewel de som van individuen hoe dan ook een belangrijk gedeelte van de karakteristieken van de volksgemeenschap bepaalt, is er door de som van individuen geen volledige bepaling van de volksgemeenschap. Haar karakteristieken worden immers ook bepaald door het grotere organische geheel van het Europese Rijk en de Europese culturen. Niet alleen op intra-volksgemeenschappelijke basis is er dus een organisch geheel, maar ook op Europees niveau bestaat dit geheel.

Deze visie heeft enkele duidelijke implicaties. De eerste stap in het verwezenlijken van de solidaristische visie is het nastreven van het solidarisme in de eigen omgeving en volksgemeenschap: de aloude Nederlanden. Op een volgend niveau beschouwen wij de Europese volkeren als een organische volkerenfamilie, waarbinnen cultuur en welvaart de noodzakelijke voorwaarden vormen die elke volksgemeenschap toekomen.

 

Integrale mensontwikkeling

Het solidarisme streeft tevens een integrale mensontwikkeling na. In de personalistische visie (zie supra) werd het belang van de mens in het solidarisme al duidelijk gemaakt. De integrale mensontwikkeling bepaalt dat de mens niet eenzijdig ontwikkeld dient te worden richting een consument en productie-eenheid in de kapitalistische consumptiemaatschappij, of tot wezen zonder creativiteit en eigenbelang in een socialistische/communistische maatschappij.

Het uitsluitend naleven van materiële welvaart, zoals vandaag de standaard, is niet organisch en streeft absoluut geen integrale mensontwikkeling na. Laat staan ontwikkeling van een volk op langere termijn. In de solidaristische filosofie dient de mens alle waarden op de sociale ladder na te streven: naast materiële welvaart dient er dus ook geestelijke, sociale en maatschappelijke ontwikkeling nagestreefd te worden. Zoals eerder werd geïllustreerd dienen deze verschillende niveaus op een gelijkwaardige manier nagestreefd te worden.

 

Noodzakelijke band tussen katholicisme en solidarisme

Het solidarisme wordt al eens vlug afgedaan als ‘de katholieke sociale leer’. Dit is deels correct. Het solidarisme stroomt rechtstreeks voort uit de Pauselijk encycliek Rerum Novarum. Anderzijds is deze visie deels niet correct, gezien de katholieke sociale leer verder ontwikkeld werd in opvolgende encyclieken, en vanaf de hervorming van Vaticanum II ook delen van liberalisme omarmt. Dit is een spijtige vaststelling, maar een vaststelling die niet aan de basis van de solidaristische filosofie raakt.

Het solidarisme is geïnspireerd is op de Katholieke moraal, op het begrip van het hoogst te dienen ideaal. Dit ideaal projecteert men langs de Derde Weg van het solidarisme op het sociale leven. Het solidarisme vormt het sociale minimum van christendom op aarde. Wie gelooft in God, maar anderzijds meezeult met sociale systemen die onverschilligheid, vijandschap, onrechtvaardigheid en a-socialiteit bevorderen, werkt niet mee aan het verwezenlijken van het Rijk Gods op aarde. Het principe Christus Rex (Christus Koning) dient geen dood principe te zijn. Bijgevolg is enkel de katholieke sociale leer, in overeenstemming met de solidaristische filosofie, een sociale leer.

Conclusie

Het solidarisme propageert geen dualiteit en tegenstelling zoals kapitalisme en communisme dat doen. Het solidarisme propageert samenwerking en solidariteit tussen volksgenoten en volkeren onderling. Het solidarisme is een vrijheidsidee, waarin personele vrijheid en maatschappelijke vrijheid in organisch verband en zonder onderlinge hiërarchie nagestreefd worden. Het solidarisme is noch links, noch rechts. Economisch links (socialisme) en rechts (liberalisme) propageren elkaar te bestrijden, maar in werkelijkheid bestrijden zij de mens en de maatschappij. Het solidarisme vormt de Derde Weg, een noodzakelijk weg, een uitweg uit de chaos en het moreel verval in onze samenleving.

Thomas B.

Dit artikel verscheen in Confiteor!, Zomer 2010

mardi, 28 septembre 2010

Jean Thiriart, the Machiavelli of United Europe

Jean Thiriart, the Machiavelli of United Europe

Ex: http://www.counter-currents.com/

Translated by Greg Johnson

Our picture: one of the last photographs of Thiriart alive, taken in August 1992 with Alexander Dughin in Moscow

x_24e1ab05.jpgA diligent reader of Hobbes, Machiavelli, and Pareto, the Belgian Jean Thiriart (1922–1992), founder of the pan-European Jeune Europe (Young Europe), is the theorist of a Greater Europe from Galway to Vladivostok.

Born in 1922 to a liberal family in Liege, Belgium, Jean Thiriart was a young militant in the ranks of the Marxist extreme left as part of the Unified Socialist Young Guard and the Socialist Antifascist Union. He greeted the Molotov-Ribbentrop pact of 1939 with enthusiasm: “The most beautiful, the most exciting part of my life, I admit, was German-Soviet pact.”[1] Because, for him, “National Socialism was not an enemy of Communism, but a competitor.”[2]

 

From One War to Another

In 1940, at the age of 18, he joined the Amis du Grand Reich allemand (AGRA–Friends of the Greater German Reich), the association in occupied French-speaking Belgium of secular and socialist supporters of collaboration, not Rexists. He also belonged to the Fichte Bund, a movement based in Hamburg that emerged from the National Bolshevik current. Condemned to three years of prison after the liberation, he gave up all political activity.

He became reengaged only in 1960, at the age of 38, during the decolonization of the Belgian Congo, taking part in the foundation of the Comité d’action et de défense des Belges d’Afrique (CADBA—Committee of Action and Defense of the Belgians of Africa). Quickly, the defense of the Belgians of the Congo transformed into a fight for the European presence in Africa, including the French in Algeria, and CADBA turned into the Mouvement d’action civique (MAC—Movement of Civic Action). Thiriart, assisted by Paul Teichmann, transformed this Poujadist inflected group into a revolutionary structure that effectively organized Belgian support networks for the OAS [L'Organisation armée secrète, the Secret Army Organization—the French resistance to the decolonization of Algeria—Ed.].

On March 4th, 1962, at a meeting in Venice under the aegis of Sir Oswald Mosley, the leaders of MAC, the Movimento Sociale Italiano (MSI—Italian Social Movement), the Union Movement, and the Reichspartei moved to found a “National European party centered on the idea of European unity.” But nothing concrete came of it. Vowing to create a true European revolutionary party, in January 1963 Jean Thiriart transformed MAC into Young Europe, a transnational European movement under the sign of the Celtic cross. Although established in 6 countries, it never had more than 5,000 members in all of Europe, and this, even Thiriart admitted, “only by scraping the bottom of the barrel.” Of the total, two thirds were concentrated in Italy. In France, because of its support of the OAS, Young Europe was banned, which forced the movement to remain semi-clandestine and explains its weak influence, its manpower not exceeding 200 members.

 

The National European Communitarian

In 1961, in Le Manifeste à la Nation Européenne (Proclamation of the European Nation), Jean Thiriart declared himself for “a united powerful, communitarian Europe . . . opposed to the Soviet and US blocs” [3]. He presented his ideas at greater length in a book published in 1964, Un Empire de 400 millions d’hommes : L’Europe (An Empire of 400 Million Men: Europe). Quickly translated into the seven principal European languages, this work—which was supplemented in 1965 by a booklet of 80 pages, La Grande Nation, L’Europe unitaire de Brest à Bucarest (The Great Nation, United Europe from Brest to Bucharest), deeply influenced the cadres of the European extreme right, particularly in Italy.

The originality of Young Europe lies in its ideology, National European Communitarianism, that Thiriart presents as a “European and elitist socialism,” de-bureaucratized and given a spine by European nationalism. Challenging the romantic concept of the nation inherited from the nineteenth century, which falls under a determinism that is ethnic, linguistic, or religious, he prefers the concept of a dynamic nation: moving, becoming, corresponding to the nation/community of destiny described by José Ortega y Gasset. Without rejecting the common past completely, he thinks that “this past is nothing compared to the gigantic common future . . . What makes the Nation real and viable is its unity of historical destiny” [5].

Describing himself as a “Greater European Jacobin,” he wanted to build a united nation and advocated the “fusion state,” centralized and transnational, the political, legal, and spiritual heir of the Roman Empire, which will give all its inhabitants European omni-citizenship. In 1989, he summarized: “The main axis of my politico-historical thought is the unitary state, the centralized political state, and not the racial state, the nostalgic state, the historical state, the religious state.” Nothing is more foreign for him than the “Europe of a hundred flags” of Yann Fouéré or the “Europe of the carnal fatherlands” dear to Saint-Loup.

Thiriart’s nationalism is based solely on geopolitical considerations. According to him, the only nations that have a future are those of continental scale like the United States, the USSR, or China. Petty traditional nationalisms are obstacles, even anachronisms manipulated by the great powers. Thus to return to grandeur and power, Europe should be unified.

Unification would take place under the aegis of a European Revolutionary Party, organized on the Leninist model of democratic centralism, which would organize the masses and select the elites. A historical party, following the example of Third World experiments like the FLN in Algeria or the FNL in Vietnam, it would be an embryonic state developing into the united European state. It would have to carry out the national liberation struggle against the American occupation, its dedicated collaborators, thousands of “Quislings” from the System parties, and the colonial troops of NATO. Thus Europe would be liberated and unified from Brest to Bucharest, 400 million strong, and would then be able to conclude a tactical alliance with China and the Arab states to break the American-Soviet condominium.

In spite of their geopolitical lucidity, Thiriart’s theses, rationalist and materialist to the extreme, are perplexing in their eminently modern character. As the traditionalist Claudio Mutti, a former militant of Giovane Europa, stressed: “the limit of Thiriart consisted precisely in his secular nationalism, supported by a Machiavellian worldview and deprived of any justification of a transcendent nature. For him, historical confrontations were resolved by brute power relations, while the state is nothing more than incarnated Nietzschean Will to Power in service of a project of European hegemony marked by an exclusivist, blind, and conceited pride” [7].

On the economic plane, Thiriart offered, as an alternative to “the profit economy”—capitalism—and the “utopian economy”—Communism—an “economy of power,” whose only viable dimension is European. Taking as a starting point the economists Fichte and List, he recommended “the autarky of great spaces.” Europe would have to leave the IMF, adopt a single currency, protect itself by tariff barriers, and work to preserve its self-sufficiency.

From Young Europe to the European Community Party

After 1963, dissensions in connection with Haut-Adige [South Tyrol—Ed.] caused a radical schism, which led to the birth of the Europa Front in Germanic countries like Germany, Austria, and Flanders.

However, the year 1964 marks the militant apogee of the movement, which played a leading role, thanks to Doctor Teichmann, in the strike of Belgian doctors opposed to the nationalization of their profession, and took part in communal elections in Quiévrain. Its working class members organized themselves as the Syndicats communautaires européens (SCE—European Community Trade Unions). In August 1964, the journalist Emile Lecerf and Doctor Nancy resigned because of ideological differences with Thiriart. Lecerf went on to head the Révolution européenne group, more or less aligned with the positions of Europe-Action in France, a “nostalgic” and “literary” movement according to Thiriart. The departure of this historic leader, followed in December 1964 by that of Paul Teichmann, caused the militant decline of the organization.

In 1965, Young Europe became the Parti communautaire européen (PCE—European Community Party). Doctrinal concerns then distracted it from militant activism. The theoretical review the European Community came out monthly while Young Europe’s weekly publication became semi-monthly. After October 1965 the party’s Cadre Schools took place across Europe, Thiriart having worked out a “physics of politics” based on the writings of Machiavelli, Gustave Le Bon, Serge Tchakhotine, Carl Schmitt, Julien Freund, and Raymond Aron.

Moreover, the party published, between 1965 and 1969, a monthly magazine in French, La Nation Européenne, and Italian, Nazione Europea, which offered a counter-current to the traditional extreme right by placing the continental unit above the nation, opposing NATO and promoting the autonomous deterrent force wanted by De Gaulle, denouncing in America as the new Carthage, sees in the regimes of Eastern Europe a kind of national Communism, and taking an interest in the liberation struggles of the Third World to the point of describing Cuba, the Arab countries, and North Vietnam as allies of Europe! The magazine, distributed by the NMPP in France, had 2,000 subscribers and printed 10,000 copies of each issue.

In June 1966, Jean Thiriart met in Bucharest with the Chinese prime minister Chou en Lai on the initiative of Ceausescu. Beijing then spoke about a “tri-continental” struggle. Thiriart  advocated a  “quadri-continental” struggle, proposing to foment a Vietnam within Europe. For that, he envisaged creating “European brigades” on the Garibaldian model, which, after having fought in the Middle East or in Latin America, would return to fight a war of liberation in Europe.

It should be noted that following this discussion, the Italian militants of Giovane Europa carried out united actions with local Maoists, unified by a minimal common program of hostility to the two superpowers, rejection of the Yankee occupation of Europe, anti-Zionism, and support for Third World liberation struggles). This fundamental collaboration was not without consequences. Various National European cadres ultimately joined the Maoist ranks. Thus in 1971 Claudio Orsoni, nephew of the fascist leader Italo Balbo and a founding member of Giovane Europa, would create the Center for the Study and Application of Maoist Thought. In 1975, Pino Bolzano, the last director of La Nazione europea, went on to lead the daily paper of the extreme left group Lotta Continua [The Struggle Continues—Ed.] Renato Curcio would join the Marxist-Leninist Italian Communist Party before founding . . . the Red Brigades!

Young Europe had supporters in certain countries in Eastern Europe and the Middle East. Thus, on August 1st, 1966, Thiriart published an article in Serbo-Croatian, entitled “Europe from Dublin to Bucharest,” in the official diplomatic review of the Yugoslav government Medunarodna Politika.  Ferociously anti-Zionist, the Belgian leader was in contact with Ahmed Shukeiri, predecessor of Arafat as the head of the PLO, and the first European to fall with weapons in hand at the side of the Palestinians was a French engineer and member of Young Europe, Roger Coudroy.

Thiriart also had ties to Arab secular-socialist regimes. In  the autumn of 1968, he made a long voyage to the Middle East at the invitation of the governments of Iraq and Egypt. He had discussions with several ministers, gave interviews to the press, and took part in the congress of the Arab Socialist Union, the party of Nasser, whom he met on this occasion. Disappointed by the lack of concrete support from these countries, in 1969 he renounced militant combat, causing the breakup of Young Europe.

The Euro-Soviet Empire

He would continue, however, his rich theoretical reflections. When Washington approached Beijing in the 1970s, he suggested a Euro-Soviet alliance against the Sino-American axis, in order to build a “very large Europe from Reykjavik to Vladivostok,” which he thought was the only way to resist the new American Carthage and billion-strong China. This is what led him to declare in 1984: “If Moscow wants to make Europe European, I preach total collaboration with the Soviet enterprise. I will then be the first to put a red star on my cap. Soviet Europe, yes, without reservations” [8].

Thiriart’s dream of a Euro-Soviet Empire, which he described as a “hyper-nation state equipped with a de-Marxified hyper-communism”[9], merges with Eurosiberia: “Between Iceland and Vladivostok, we can join together 800 million men . . . and find in the soil of Siberia all our strategic and energy needs. I say that Siberia is the economically most vital power for the European Empire” [10]. He then worked on two books: The Euro-Soviet Empire from Vladivostok to Dublin: After-Yalta and, in with José Cuadrado Costa, The Transformation of Communism: Essay on Enlightened Totalitarianism, which remained on the drawing board because of the sudden collapse of the USSR. He left his political exile only in 1991 to support the creation of the Front européen de libération (FEL—European Liberation Front). In 1992, he went to Moscow with a delegation of the FEL and died of an heart attack shortly after his return to Belgium, leaving a controversial but original body of theoretical work, which inspires to this day Guillaume Faye, the preacher of Eurosiberia, and Alexander Dugin, the prophet of Eurasia.

Notes

1. C. Bourseiller, Extrême-droite. L’enquête (F. Bourrin, 1991), p. 114,.
2. Ibid.
3. Nation-Belgique, no. 59, September 1, 1961.
4. J. Thiriart, La Grande Nation. L’Europe unitaire de Dublin à Bucarest (1965).
5. Ibid.
6. C. Bourseiller, p. 119.
7. Notes complémentaires de C. Mutti à G. Freda, “La désintégration du système,” supplément to Totalité, no. 9 (1980).
8. Conscience Européenne, no. 8, July 1984.
9. Ibid.
10. J. Thiriart, “L’Europe jusqu’à Vladivostok,” in Nationalisme & République, no. 9, September 1992.

 

Source : Réfléchir & Agir, no. 21, Fall 2005, pp. 44–47.

Online source here, articles by Jean Thiriart here

lundi, 27 septembre 2010

Les ravages de l'esprit révolutionnaire

Les ravages de l'esprit révolutionnaire

Ex: http://www.polemia.com/

 

Sansculottes.jpgUne critique politique de la révolution et de l’esprit révolutionnaire est souvent à courte vue. Le phénomène de la révolution est multiforme. La révolution peut être violente comme celles de Robespierre ou de Lénine. Elle peut aussi se dérouler sans violence apparente mais bouleverser la société en profondeur. Les Canadiens parlent de « la révolution silencieuse » des années soixante où la pratique religieuse a diminué, le taux de natalité s’est effondré, la délinquance a augmenté, etc… On a bien eu dans les années 68 comme on dit en France, une sorte de révolution dans les mœurs (au sens large) qui a été reprise notamment par le parti socialiste et qui n’a pas fini d’avoir de l’influence, y compris sur la vie politique.

L’une des analyses les plus profondes de l’esprit révolutionnaire a été faite par le philosophe allemand existentiel Martin Heidegger. Dans son livre « que veut dire penser ? » (« Was heisst denken ?») il a montré que cet esprit ne procédait ni de la politique ni de la morale, mais bien de la métaphysique. La métaphysique ignore la différence entre l’être et l’étant. Elle ne connaît que l’étant et l’homme moderne, déterminé par la pensée métaphysique sans même le savoir, vit « le nez dans le guidon » accroché aux objets immédiats et à l’instant présent. Il oublie l’être sans lequel les étants n’existeraient pas.

Cet homme moderne correspond au « dernier homme » décrit par Nietzsche dans « Ainsi parlait Zarathoustra ». Ce dernier homme n’a plus d’idéal, il est matérialiste et utilitariste.

« Qu’est ce que l’amour ? Qu’est ce que la création ? Qu’est ce que la nostalgie ? Qu’est ce qu’une étoile ? » Ainsi demande le dernier homme et il cligne de l’œil. « Nous avons inventé le bonheur disent les derniers hommes, et ils clignent de l’œil ». Dans les quatre questions posées, le dernier homme montre :

  • - sa froideur envers les hommes considérés comme des matières premières interchangeables (l’égalitarisme a pour but de faciliter cette interchangeabilité avec de beaux objectifs affichés) ;
  • - son scepticisme envers un Dieu créateur ;
  • - son mépris du passé (c’est un trait fondamental comme on le verra) ;
  • - son rejet de tout idéal (l’étoile).

Le dernier homme est persuadé d’avoir inventé le bonheur : c’est typique de tous les esprits révolutionnaires. Et il va chercher à l’imposer. « Il cligne de l’œil » veut dire qu’il se sent supérieur et qu’il croit que ses jugements de valeur ont une validité universelle.

Nietzsche va loin car il découvre que la réflexion la plus profonde dont est capable le dernier homme est fondée sur « l’esprit de vengeance ». Dans le chapitre sur « les Tarentules », il explique que l’égalitarisme n’est pas autre chose que de la volonté de puissance qui prend la forme de la vengeance sous le masque de la justice. Nietzsche dit que l’on ne pourra dépasser le dernier homme que si l’on est capable de se libérer de cet esprit de vengeance, donc de l’égalitarisme. Cet homme libéré de l’esprit de vengeance, il l’appelle le surhomme, dont il donne une définition : « César avec l’âme du Christ » !

La métaphysique moderne, observe Heidegger, identifie l’être avec la volonté. La volonté veut commander à tout : c’est la définition même de l’esprit révolutionnaire. Or, quel est l’obstacle invincible contre lequel la volonté ne peut rien ? C’est le temps et plus particulièrement le passé. Le temps est ce qui passe. On ne peut pas revenir sur ce qui est passé. Et Nietzsche définit la nature de cette vengeance métaphysique : c’est la vengeance à l’égard du temps qui passe, la vengeance à l’égard du passé.

C’est bien ce que l’on trouve chez tous les révolutionnaires : Robespierre comme Lénine comme les animateurs de Mai 68 : ils ont la haine du passé. Le passé est à détruire, c’est lui qui bloque l’accès au bonheur. Pour la métaphysique, l’être, c’est l’instant, ce n’est ni ce qui est passé, ni ce qui est à venir. Autrement dit, l’être n’est autre que l’étant, les objets (y compris les hommes) que l’on a sous la main.

Mais la métaphysique commet plusieurs erreurs : l’être n’est pas l’étant mais à la fois le passé, le présent et l’avenir. Le temps lui-même ne peut être réduit à l’instant. Le temps est durée : passé, présent et avenir. C’est en cela qu’être et temps sont inséparables.Toute la civilisation est fondée sur la prise en compte de ce temps long. Le révolutionnaire qui veut tout ici et maintenant n’aboutit qu’à détruire et à tuer.

C’est l’enfant ou le sauvage qui n’est pas capable de prendre en compte le temps, d’investir dans le temps et de faire fructifier dans l’avenir l’héritage du passé.

L’esprit révolutionnaire est bien parmi nous et il exerce ses ravages. Chaque fois que la facilité conduit à ne voir que l’avantage dans l’instant, cet esprit conduit à détruire notre avenir et à gaspiller l’héritage du passé. La responsabilité de l’adulte est justement de savoir prendre des décisions dans la durée. La propriété, la famille sont des institutions qui justement poussent l’homme vers plus de sens des responsabilités. Le citoyen propriétaire aura toujours une vue plus responsable que le gérant élu pour un temps court : c’est sur cette idée qu’est fondée la démocratie directe des Suisses. T

outefois, pour Heidegger, Nietzsche avait fait un bon diagnostic mais n’a pas trouvé le remède. Il le trouve dans l’éternel retour de l’identique. Mais on ne voit pas comment cet éternel retour supposé nous délivre vraiment de l’esprit de vengeance. Pour cela, il faut aller au-delà de la métaphysique. Il ne faut plus considérer le temps exclusivement comme ce qui s’enfuit, donc comme un ennemi. Le temps, c’est aussi, ce qui advient, donc c’est un don qui nous est fait par l’être. Le don, s’il est perçu, nous conduit non à la vengeance mais à la gratitude. Alors, nous sortons totalement de l’esprit révolutionnaire et de son esprit de vengeance égalitaire, nous en sommes délivrés.
 

Yvan Blot
0I/09/2010

Correspondance Polémia - 04/09/2010

Conservadurismo revolucionario frete a neoconservadurismo

 CONSERVADURISMO REVOLUCIONARIO FRENTE A NEOCONSERVADURISMO

ReCons versus NeoCons

SEBASTIAN J. LORENZ
fidus-schwertwache.jpgBajo la fórmula “Revolución Conservadora” acuñada por Armin Mohler (Die Konservative Revolution in Deutschlan 1918-1932) se engloban una serie de corrientes de pensamiento contemporáneas del nacionalsocialismo, independientes del mismo, pero con evidentes conexiones filosóficas e ideológicas, cuyas figuras más destacadas son Oswald Spengler, Ernst Jünger, Carl Schmitt y Moeller van den Bruck, entre otros. La “Nueva Derecha” europea ha invertido intelectualmente gran parte de sus esfuerzos en la recuperación del pensamiento de estos autores, junto a otros como Martin Heidegger, Arnold Gehlen y Konrad Lorenz (por citar algunos de ellos), a través de una curiosa fórmula retrospectiva: se vuelve a los orígenes teóricos, dando un salto en el tiempo para evitar el “interregno fascista”, y se comienza de nuevo intentando reconstruir los fundamentos ideológicos del conservadurismo revolucionario sin caer en la “tentación totalitaria” y eludiendo cualquier “desviacionismo nacionalsocialista”.
Con todo, los conceptos de “revolución conservadora” y de “nueva derecha” no son, desde luego, construcciones terminológicas muy afortunadas. Por supuesto que la “revolución conservadora”, por más que les pese a los mal llamados “neconservadores” (sean del tipo Reagan, Bush, Thatcher, Sarkozy o Aznar), no tiene nada que ver con la “reacción conservadora” (una auténtica “contrarrevolución”) que éstos pretenden liderar frente al liberalismo progre, el comunismo posmoderno y el contraculturalismo de la izquierda. Pero la debilidad de la derecha clásica estriba en su inclinación al centrismo y a la socialdemocracia (“la seducción de la izquierda”), en un frustrado intento por cerrar el paso al socialismo, simpatizando, incluso, con los únicos valores posibles de sus adversarios (igualitarismo, universalismo, falso progresismo). Un grave error para los que no han comprendido jamás que la acción política es un aspecto más de una larvada guerra ideológica entre dos concepciones del mundo completamente antagónicas.
Tampoco la “nueva derecha” representa un nuevo tipo de política conservadora frente a la ya tradicional economicista, gestionaria y demoliberal, sino que se sitúa en algún lugar “neutro” (no equidistante) entre la derecha y la izquierda (extramuros de la política), como se desprende inmediatamente de la antología de textos de Alain de Benoist publicada por Áltera (“Más allá de la derecha y de la izquierda”). Recordemos que, cuando a Drieu La Rochelle le preguntaron por su adscripción política, jugando con la posición que ocupan en los parlamentos los distintos grupos políticos a la derecha o a la izquierda del presidente de la cámara, el pensador francés se situaba, precisamente, justo por detrás de éste. Toda una declaración de principios.
El propio Alain de Benoist, en la citada antología, se pregunta cuáles son las razones del retraimiento progresivo de la interferencia entre las nociones de derecha y de izquierda, precisando que «desde luego que la derecha quiere un poco más de liberalismo y un poco menos de política social, mientras que la izquierda prefiere un poco más de política social y un poco menos de liberalismo, pero al final, entre el social-liberalismo y el liberalismo social, no podemos decir que la clase política esté verdaderamente dividida» Y citando a Grumberg: «El fuerte vínculo entre el liberalismo cultural y la orientación a la izquierda por un lado, y el liberalismo económico y la orientación a la derecha por otro, podrían llevar a preguntarnos si estos dos liberalismos no constituyen los dos polos opuestos de una única e igual dimensión, que no sería otra que la misma dimensión derecha-izquierda.»
Pero seguramente ha sido Ernst Jünger (“El Trabajador”) quien mejor ha descrito estos conceptos políticos. El conservador genuino –escribe Jünger- no quiere conservar éste o aquél orden, lo que quiere es restablecer la imagen del ser humano, que es la medida de las cosas. De esta forma, «se vuelven muy parecidos los conservadores y los revolucionarios, ya que se aproximan necesariamente al mismo fondo. De ahí que sea siempre posible demostrar la existencia de ambas cualidades en los grandes modificadores, en las que no sólo derrocan órdenes, sino que también los fundan». Jünger observaba cómo se fusionan de una manera extraña las diferencias entre la “reacción” y la “revolución”: «emergen teorías en las cuales los conceptos “conservador” y “revolucionario” quedan faltamente identificados …, ya que “derecha” e “izquierda” son conceptos que se bifurcan a partir de un eje común de simetría y tienen sentido únicamente si se los ve desde él. Tanto si cooperan como si lo hacen al mismo tiempo, la derecha y la izquierda dependen de un cuerpo cuya unidad tiene que hacerse visible cuando un movimiento pasa del marco del movimiento al marco del estado.» Sin comentarios.
Por todo ello, queremos subrayar aquí que, con la denominación de “Nueva Derecha” –aunque no nos agrade tal calificación y optemos por la de “Conservadurismo Revolucionario”--, se hace referencia a un estilo ético y estético de pensamiento político dirigido al repudio de los dogmatismos, la formulación antiigualitaria, el doble rechazo de los modelos capitalista y comunista, la defensa de los particularismos étnicos y regionales, la consideración de Europa como unidad, la lucha contra la amenaza planetaria frente a la vida, la racionalización de la técnica, la primacía de los valores espirituales sobre los materiales. El eje central de la crítica al sistema político “occidental” lo constituye la denuncia del cristianismo dogmático, el liberalismo y el marxismo, como elementos niveladores e igualadores de una civilización europea, perdida y desarraigada, que busca, sin encontrarla, la salida al laberinto de la “identidad específica”. En el núcleo de esta civilización europea destaca la existencia del “hombre europeo multidimensional”, tanto al nivel biológico, que en su concepción sociológica reafirma los valores innatos de la jerarquía y la territorialidad, como al específicamente humano, caracterizado por la cultura y la conciencia histórica. Constituye, en el fondo, una reivindicación de la “herencia” –tanto individual como comunitaria-, fenómeno conformador de la historia evolutiva del hombre y de los pueblos, que demuestra la caducidad de las ideologías de la nivelación y la actualidad de la rica diversidad de la condición humana. Un resumen incompleto y forzado por la tiranía del espacio digital, pero que sirve al objeto de efectuar comparaciones.
Entre tanto, el “Neoconservadurismo” contrarrevolucionario, partiendo del pensamiento del alemán emigrado a norteamérica Leo Strauss, no es sino una especie de “reacción” frente a la pérdida de unos valores que tienen fecha de caducidad (precisamente los suyos, propios de la burguesía angloamericana mercantilista e imperialista). Sus principios son el universalismo ideal y humanitario, el capitalismo salvaje, el tradicionalismo académico, el burocratismo totalitario y el imperialismo agresivo contra los fundamentalismos terroristas “anti-occidentales”. Para estos neconservadores, Estados Unidos aparece como la representación más perfecta de los valores de la libertad, la democracia y la felicidad fundada en el progreso material y en el regreso a la moral, siendo obligación de Europa el copiar este modelo triunfante. En definitiva, entre las ideologías popularizadas por los “neocons” (neoconservadores en la expresión vulgata de Irving Kristol) y los “recons” (revolucionarios-conservadores, de mi cosecha) existe un abismo insalvable. El tiempo dirá, como esperaban Jünger y Heidegger, cuál de las dos triunfa en el ámbito europeo de las ideas políticas. Entre tanto, seguiremos hablando de esta original “batalla de las ideologías” en futuras intervenciones.
[Publicado por "ElManifiesto.com" el  20/08/2010]

dimanche, 26 septembre 2010

Carl Schmitt: The End of the Weimar Republic

Carl Schmitt (part III)

The End of the Weimar Republic

Ex: http://www.alternativeright.com/

Carl Schmitt (part III)  
 
 Adolf Hitler Accepts the Weimar Chancellorship From President Paul von Hindenburg, January 30, 1933

Carl Schmitt accepted a professorship at the University of Berlin in 1928, having left his previous position at the University of Bonn. At this point, he was still only a law professor and legal scholar, and while highly regarded in his fields of endeavor, he was not an actual participant in the affairs of state. In 1929, Schmitt became personally acquainted with an official in the finance ministry named Johannes Popitz, and with General Kurt von Schleicher, an advisor to President Paul von Hindenburg.

Schleicher shared Schmitt’s concerns that the lack of a stable government would lead to civil war or seizure of power by the Nazis or communists. These fears accelerated after the economic catastrophe of 1929 demonstrated once again the ineptness of Germany’s parliamentary system. Schleicher devised a plan for a presidential government comprised of a chancellor and cabinet ministers that combined with the power of the army and the provisions of Article 48 would be able to essentially bypass the incompetent parliament and more effectively address Germany’s severe economic distress and prevent civil disorder or overthrow of the republic by extremists.

Heinrich Bruning of the Catholic Center Party was appointed chancellor by Hindenburg. The Reichstag subsequently rejected Bruning’s proposed economic reforms so Bruning set about to implement them as an emergency measure under Article 48. The Reichstag then exercised its own powers under Article 48 and rescinded Bruning’s decrees, and Bruning then dissolved the parliament on the grounds that the Reichstag had been unable to form a majority government. Such was the prerogative of the executive under the Weimar constitution.

In the years between 1930 and 1933, Carl Schmitt’s legal writings expressed concern with two primary issues. The first of these dealt with legal matters pertaining to constitutional questions raised by the presidential government Schleicher had formulated. The latter focused on the question of constitutional issues raised by the existence of anti-constitutional parties functioning within the context of the constitutional system.

Schmitt’s subsequent reputation as a conservative revolutionary has been enhanced by his personal friendship or association with prominent radical nationalists like Ernst Jünger and the “National Bolshevist” Ernst Niekisch, as well as the publication of Schmitt’s articles in journals associated with the conservative revolutionary movement during the late Weimar period. However, Schmitt himself was never any kind of revolutionary. Indeed, he spoke out against changes in the constitution of Weimar during its final years, believing that tampering with the constitution during a time of crisis would undermine the legitimacy of the entire system and invite opportunistic exploitation of the constitutional processes by radicals. His continued defense of the presidential powers granted by Article 48 was always intended as an effort to preserve the existing constitutional order.

The 1930 election produced major victories for the extremist parties. The communists increased their representation in the Reichstag from 54 to 77 seats, and the Nazis from 12 to 107 seats. The left-of-center Social Democrats (SPD) retained 143 seats, meaning that avowedly revolutionary parties were now the second and third largest parties in terms of parliamentary representation. The extremist parties never took their parliamentary roles seriously, but instead engaged in endless obstructionist tactics designed to de-legitimize the republic itself with hopes of seizing power once it finally collapsed. Meanwhile, violent street fighting between Nazi and communist paramilitary groups emerged as the numbers of unemployed Germans soared well into the millions.

In the April 1932 presidential election, Hitler stood against Hindenburg, and while Hindenburg was the winner, Hitler received an impressive thirty-seven percent of the vote. Meanwhile, the Nazis had become the dominant party in several regional governments, and their private army, the SA, had grown to the point where it was four times larger than the German army itself.

Schmitt published Legality and Legitimacy in 1932 in response to the rise of the extremist parties. This work dealt with matters of constitutional interpretation, specifically the means by which the constitutional order itself might be overthrown through the abuse of ordinary legal and constitutional processes. Schmitt argued that political constitutions represent specific sets of political values. These might include republicanism, provisions for an electoral process, church/state separation, property rights, freedom of the press, and so forth. Schmitt warned against interpreting the constitution in ways that allowed laws to be passed through formalistic means whose essence contradicted the wider set of values represented by the constitution.

Most important, Schmitt opposed methods of constitutional interpretation that would serve to create the political conditions under which the constitution itself could be overthrown. The core issue raised by Schmitt was the question of whether or not anti-constitutional parties such as the NSDAP or KPD should have what he called the “equal chance” to assume power legally. If such a party were to be allowed to gain control of the apparatus of the state itself, it could then use its position to destroy the constitutional order.

Schmitt argued that a political constitution should be interpreted according to its internal essence rather than strict formalistic adherence to its technical provisions, and applied according to the conditions imposed by the “concrete situation” at hand. On July 19, 1932, Schmitt published an editorial in a conservative journal concerning the election that was to be held on July 31. The editorial read in part:

Whoever provides the National Socialists with the majority on July 31, acts foolishly. … He gives this still immature ideological and political movement the possibility to change the constitution, to establish a state church, to dissolve the labor unions, etc. He surrenders Germany completely to this group….It would be extremely dangerous … because 51% gives the NSDAP a “political premium of incalculable significance.”

The subsequent election was an extremely successful one for the NSDAP, as they gained 37.8 percent of the seats in the parliament, while the KPD achieved 14.6 percent. The effect of the election results was that the anti-constitutional parties were in control of a majority of the Reichstag seats.

On the advice of General Schleicher, President Hindenburg had replaced Bruning as chancellor with Franz von Papen on May 30. Papen subsequently took an action that would lead to Schmitt’s participation in a dramatic trial of genuine historic significance before the supreme court of Germany.

Invoking Article 48, the Papen government suspended the state government of Prussia and placed the state under martial law. The justification for this was the Prussian regional government’s inability to maintain order in the face of civil unrest. Prussia was the largest of the German states, containing two-thirds of Germany’s land mass and three-fifths of its population. Though the state government had been controlled by the Social Democrats, the Nazis had made significant gains in the April 1932 election. Along the way, the Social Democrats had made considerable effort to block the rise of the Nazis with legal restrictions on their activities and various parliamentary maneuvers. There was also much violent conflict in Prussia between the Nazis and the Communists.

Papen, himself an anti-Nazi rightist, regarded the imposition of martial law as having the multiple purposes of breaking the power of the Social Democrats in Prussia, controlling the Communists, placating the Nazis by removing their Social Democratic rivals, and simultaneously preventing the Nazis from becoming embedded in regional institutions, particularly Prussia’s huge police force.

The Prussian state government appealed Papen’s decision to the supreme court and a trial was held in October of 1932. Schmitt was among three jurists who defended the Papen government’s policy before the court. Schmitt’s arguments reflected the method of constitutional interpretation he had been developing since the time martial law had been imposed during the Great War by the Wilhelmine government. Schmitt likewise applied the approach to political theory he had presented in his previous writings to the situation in Prussia. He argued that the Prussian state government had failed in its foremost constitutional duty to preserve public order. He further argued that because Papen had acted under the authority of President Hindenburg, Papen’s actions had been legitimate under Article 48.

Schmitt regarded the conflict in Prussia as a conflict between rival political parties. The Social Democrats who controlled the state government were attempting to repress the Nazis by imposing legal restrictions on them. However, the Social Democrats had also been impotent in their efforts to control violence by the Nazis and the communists. Schmitt rejected the argument that the Social Democrats were constitutionally legitimate in their legal efforts against the Nazis, as this simply amounted to one political party attempting to repress another. While the “equal chance” may be constitutionally denied to an anti-constitutional party, such a decision must be made by a neutral force, such as the president.

As a crucial part of his argument, Schmitt insisted that the office of the President was sovereign over the political parties and was responsible for preserving the constitution, public order, and the security of the state itself. Schmitt argued that with the Prussian state’s failure to maintain basic order, the situation in Prussia had essentially become a civil war between the political parties. Therefore, imposition of martial law by the chancellor, as an agent of the president, was necessary for the restoration of order.

Schmitt further argued that it was the president rather than the court that possessed the ultimate authority and responsibility for upholding the constitution, as the court possessed no means of politically enforcing its decisions. Ultimately, the court decided that while it rather than the president held responsibility for legal defense of the constitution, the situation in Prussia was severe enough to justify the appointment of a commissarial government by Papen, though Papen had not been justified in outright suspension of the Prussian state government. Essentially, the Papen government had won, as martial law remained in Prussia, and the state government continued to exist in name only.

During the winter months of 1932-33, Germany entered into an increasingly perilous situation. Papen, who had pushed for altering the constitution along fairly strident reactionary conservative lines, proved to be an extraordinarily unpopular chancellor and was replaced by Schleicher on December 3, 1932. But by this time, Papen had achieved the confidence of President von Hindenburg, if not that of the German public, while Hindenburg’s faith in Schleicher had diminished considerably. Papen began talks with Hitler, and the possibility emerged that Hitler might ascend to the chancellorship.

Joseph Bendersky summarized the events that followed:

By late January, when it appeared that either Papen or Hitler might become chancellor, Schleicher concluded that exceptional measures were required as a last resort. He requested that the president declare a state of emergency, ban the Nazi and Communist parties, and dissolve the Reichstag until stability could be restored. During the interim Schleicher would govern by emergency decrees. …

This was preferable to the potentially calamitous return of Papen, with his dangerous reform plans and unpopularity. It would also preclude the possibility that as chancellor Hitler would eventually usurp all power and completely destroy the constitution, even the nature of the German state, in favor of the proclaimed Third Reich. Had Hindenburg complied with Schleicher’s request, the president would have denied the equal chance to an anti-constitutional party and thus, in Schmitt’s estimate, truly acted as the defender of the constitution. … Having lost faith in Schleicher, fearing civil war, and trying to avoid violating his oath to uphold the constitution, Hindenburg refused. At this point, Schleicher was the only leader in a position to prevent the Nazi acquisition of power, if the president had only granted him the authorization. Consequently, Hitler acquired power not through the use of Article 48, but because it was not used against him.

[emphasis added]

The Schleicher plan had the full support of Schmitt, and was based in part on Schmitt’s view that “a constitutional system could not remain neutral towards its own basic principles, nor provide the legal means for its own destruction.” Yet the liberal, Catholic, and socialist press received word of the plan and mercilessly attacked Schleicher’s plan specifically and Schmitt’s ideas generally as creating the foundation for a presidential dictatorship, while remaining myopically oblivious to the immediate danger posed by Nazi and Communist control over the Reichstag and the possibility of Hitler’s achievement of executive power.

On January 30, 1933, Hitler became chancellor. That evening, Schmitt received the conservative revolutionary Wilhelm Stapel as a guest in his home while the Nazis staged a torchlight parade in Berlin’s Brandenburg Gate in celebration of Hitler’s appointment. Schmitt and Stapel discussed their alarm at the prospect of an imminent Nazi dictatorship and Schmitt felt the Weimar Republic had essentially committed suicide. If President von Hindenburg had heeded the advice of Schleicher and Schmitt, the Hitler regime would likely have never come into existence.

Carl Schmitt: The Concept of the Political

Carl Schmitt (Part II)

The Concept of the Political

 
 
Carl Schmitt (Part II) Carl Schmitt, circa 1928

It was in the context of the extraordinarily difficult times of the Weimar period that Carl Schmitt produced what are widely regarded as his two most influential books. The first of these examined the failures of liberal democracy as it was being practiced in Germany at the time. Schmitt regarded these failures as rooted in the weaknesses of liberal democratic theory itself. In the second work, Schmitt attempted to define the very essence of politics.

Schmitt's The Crisis of Parliamentary Democracy was first published in 1923.* In this work, Schmitt described the dysfunctional workings of the Weimar parliamentary system. He regarded this dysfunction as symptomatic of the inadequacies of the classical liberal theory of government. According to this theory as Schmitt interpreted it, the affairs of states are to be conducted on the basis of open discussion between proponents of competing ideas as a kind of empirical process. Schmitt contrasted this idealized view of parliamentarianism with the realities of its actual practice, such as cynical appeals by politicians to narrow self-interests on the part of constituents, bickering among narrow partisan forces, the use of propaganda and symbolism rather than rational discourse as a means of influencing public opinion, the binding of parliamentarians by party discipline, decisions made by means of backroom deals, rule by committee and so forth.

Schmitt recognized a fundamental distinction between liberalism, or "parliamentarianism," and democracy. Liberal theory advances the concept of a state where all retain equal political rights. Schmitt contrasted this with actual democratic practice as it has existed historically. Historic democracy rests on an "equality of equals," for instance, those holding a particular social position (as in ancient Greece), subscribing to particular religious beliefs or belonging to a specific national entity. Schmitt observed that democratic states have traditionally included a great deal of political and social inequality, from slavery to religious exclusionism to a stratified class hierarchy. Even modern democracies ostensibly organized on the principle of universal suffrage do not extend such democratic rights to residents of their colonial possessions. Beyond this level, states, even officially "democratic" ones, distinguish between their own citizens and those of other states.

At a fundamental level, there is an innate tension between liberalism and democracy. Liberalism is individualistic, whereas democracy sanctions the "general will" as the principle of political legitimacy. However, a consistent or coherent "general will" necessitates a level of homogeneity that by its very nature goes against the individualistic ethos of liberalism. This is the source of the "crisis of parliamentarianism" that Schmitt suggested. According to the democratic theory, rooted as it is in the ideas of Jean Jacques Rousseau, a legitimate state must reflect the "general will," but no general will can be discerned in a regime that simultaneously espouses liberalism. Lacking the homogeneity necessary for a democratic "general will," the state becomes fragmented into competing interests. Indeed, a liberal parliamentary state can actually act against the "peoples' will" and become undemocratic. By this same principle, anti-liberal states such as those organized according to the principles of fascism or Bolshevism can be democratic in so far as they reflect the "general will."

The Concept of the Political appeared in 1927. According to Schmitt, the irreducible minimum on which human political life is based.

The political must therefore rest on its own ultimate distinctions, to which all action with a specifically political meaning can be traced. Let us assume that in the realm of morality the final distinctions are between good and evil, in aesthetics beautiful and ugly, in economics profitable and unprofitable. […]

The specific political distinction to which political actions and motives can be reduced is that between friend and enemy. … In so far as it is not derived from other criteria, the antithesis of friend and enemy corresponds to the relatively independent criteria of other antitheses: good and evil in the moral sphere, beautiful and ugly in the aesthetic sphere, and so on. 

These categories need not be inclusive of one another. For instance, a political enemy need not be morally evil or aesthetically ugly. What is significant is that the enemy is the "other" and therefore a source of possible conflict.

The friend/enemy distinction is not dependent on the specific nature of the "enemy." It is merely enough that the enemy is a threat. The political enemy is also distinctive from personal enemies. Whatever one's personal thoughts about the political enemy, it remains true that the enemy is hostile to the collective to which one belongs. The first purpose of the state is to maintain its own existence as an organized collective prepared if necessary to do battle to the death with other organized collectives that pose an existential threat. This is the essential core of what is meant by the "political." Organized collectives within a particular state can also engage in such conflicts (i.e. civil war). Internal conflicts within a collective can threaten the survival of the collective as a whole. As long as existential threats to a collective remain, the friend/enemy concept that Schmitt considered to be the heart of politics will remain valid.

Schmitt has been accused by critics of attempting to drive a wedge between liberalism and democracy thereby contributing to the undermining of the Weimar regime's claims to legitimacy and helping to pave the way for a more overtly authoritarian or even totalitarian system of the kind that eventually emerged in the form of the Hitler dictatorship. He has also been accused of arguing for a more exclusionary form of the state, for instance, one that might practice exclusivity or even supremacy on ethnic or national grounds, and of attempting to sanction the use of war as a mere political instrument, independent of any normative considerations, perhaps even as an ideal unto itself. Implicit in these accusations is the idea that Schmitt’s works created a kind of intellectual framework that could later be used to justify at least some of the ideas of Nazism and even lead to an embrace of Nazism by Schmitt himself.

The expression "context is everything" becomes a quite relevant when examining these accusations regarding the work of Carl Schmitt. This important passage from the preface to the second edition of The Crisis of Parliamentary Democracy sheds light on Schmitt’s actual motivations:

That the parliamentary enterprise today is the lesser evil, that it will continue to be preferable to Bolshevism and dictatorship, that it would have unforeseen consequences were it to be discarded, that it is 'socially and technically' a very practical thing-all these are interesting and in part also correct observations. But they do not constitute the intellectual foundations of a specifically intended institution. Parliamentarianism exists today as a method of government and a political system. Just as everything else that exists and functions tolerably, it is useful-no more and no less. It counts for a great deal that even today it functions better than other untried methods, and that a minimum of order that is today actually at hand would be endangered by frivolous experiments. Every reasonable person would concede such arguments. But they do not carry weight in an argument about principles. Certainly no one would be so un-demanding that he regarded an intellectual foundation or a moral truth as proven by the question, “What else?”

This passage indicates that Schmitt was in fact wary of undermining the authority of the republic for its own sake or for the sake of implementing a revolutionary regime. Clearly, it would be rather difficult to reconcile such an outlook with the political millenarianism of either Marxism or National Socialism. The "crisis of parliamentary democracy" that Schmitt was addressing was a crisis of legitimacy. On what political or ethical principles does a liberal democratic state of the type Weimar establish its own legitimacy? This was an immensely important question, given the gulf between liberal theory and parliamentary democracy as it was actually being practiced in Weimar, the conflicts between liberal practice and democratic theories of legitimacy as they had previously been laid out by Rousseau and others and, perhaps most importantly, the challenges to liberalism and claims to "democratic" legitimacy being made at the time by proponents of revolutionary ideologies of both the Left and the Right.

Schmitt observed that democracy, broadly defined, had triumphed over older systems, such as monarchy, aristocracy and theocracy, by trumpeting its principle of "popular sovereignty." However, the advent of democracy had also undermined older theories on the foundations of political legitimacy, such as those rooted in religion ("divine right of kings"), dynastic lineages or mere appeals to tradition. Further, the triumphs of both liberalism and democracy had brought into fuller view the innate conflicts between the two. There is also the additional matter of the gap between the practice of politics (such as parliamentary procedures) and the ends of politics (such as the "will of the people").

Schmitt observed how parliamentarianism as a procedural methodology had a wide assortment of critics, including those representing the forces of reaction (royalists and clerics, for instance) and radicalism (from Marxists to anarchists). Schmitt also pointed out that he was by no means the first thinker to recognize these issues, citing Mosca, Jacob Burckhardt, Hilaire Belloc, G. K. Chesterton, and Michels, among others.

A fundamental question that concerned Schmitt is the matter of what the democratic "will of the people" actually means, and he observed that an ostensibly democratic state could adopt virtually any set of policy positions, "whether militarist or pacifist, absolutist or liberal, centralized or decentralized, progressive or reactionary, and again at different times without ceasing to be a democracy." He also raised the question of the fate of democracy in a society where "the people" cease to favor democracy. Can democracy be formally renounced in the name of democracy? For instance, can "the people" embrace Bolshevism or a fascist dictatorship as an expression of their democratic "general will"?

The flip side of this question asks whether a political class committed in theory to democracy can act undemocratically (against "the will of the people"), if the people display an insufficient level of education in the ways of democracy. How is the will of the people to be identified in the first place? Is it not possible for rulers to construct a "will of the people" of their own through the use of propaganda?

For Schmitt, these questions were not simply a matter of intellectual hair-splitting but were of vital importance in a weak, politically paralyzed liberal democratic state where the commitment of significant sectors of both the political class and the public at large to the preservation of liberal democracy was questionable, and where the overthrow of liberal democracy by proponents of other ideologies was a very real possibility.

Schmitt examined the claims of parliamentarianism to democratic legitimacy. He describes the liberal ideology that underlies parliamentarianism as follows:

It is essential that liberalism be understood as a consistent, comprehensive metaphysical system. Normally one only discusses the economic line of reasoning that social harmony and the maximization of wealth follow from the free economic competition of individuals. ... But all this is only an application of a general liberal principle...: That truth can be found through an unrestrained clash of opinion and that competition will produce harmony.

For Schmitt, this view reduces truth to "a mere function of the eternal competition of opinions." After pointing out the startling contrast between the theory and practice of liberalism, Schmitt suggested that liberal parliamentarian claims to legitimacy are rather weak and examined the claims of rival ideologies. Marxism replaces the liberal emphasis on the competition between opinions with a focus on competition between economic classes and, more generally, differing modes of production that rise and fall as history unfolds. Marxism is the inverse of liberalism, in that it replaces the intellectual with the material. The competition of economic classes is also much more intensified than the competition between opinions and commercial interests under liberalism. The Marxist class struggle is violent and bloody. Belief in parliamentary debate is replaced with belief in "direct action." Drawing from the same rationalist intellectual tradition as the radical democrats, Marxism rejects parliamentarianism as a sham covering the dictatorship of a particular class, i.e. the bourgeoisie. “True” democracy is achieved through the reversal of class relations under a proletarian state that rules in the interest of the laboring majority. Such a state need not utilize formal democratic procedures, but may exist as an "educational dictatorship" that functions to enlighten the proletariat regarding its true class interests.

Schmitt contrasted the rationalism of both liberalism and Marxism with irrationalism. Central to irrationalism is the idea of a political myth, comparable to the religious mythology of previous belief systems, and originally developed by the radical left-wing but having since been appropriated in Schmitt’s time by revolutionary nationalists. It is myth that motivates people to action, whether individually or collectively. It matters less whether a particular myth is true than if people are inspired by it.

At the close of Crisis, Schmitt quotes from a speech by Benito Mussolini from October 1922, shortly before the March on Rome. Said the Duce:

 

We have created a myth, this myth is a belief, a noble enthusiasm; it does not need to be reality, it is a striving and a hope, a belief and courage. Our myth is the nation, the great nation which we want to make into a concrete reality for ourselves.

Whatever Schmitt might have thought of movements of the radical Right in the 1920s, it is clear enough that his criticisms of liberalism were intended not so much as an effort to undermine democratic legitimacy so much as an effort to confront its inherent weaknesses with candor and intellectual rigor.

Schmitt also had no illusions about the need for strong and decisive political authority capable of acting in the interests of the nation during perilous times. As he remarks,

If democratic identity is taken seriously, then in an emergency no other constitutional institution can withstand the sole criterion of the peoples' will, however it is expressed.

In other words, the state must first act to preserve itself and the general welfare and well-being of the people at large. If necessary, the state may override narrow partisan interests, parliamentary procedure or, presumably, routine electoral processes. Such actions by political leadership may be illiberal, but they are not necessarily undemocratic, as the democratic general will does not include national suicide. Schmitt outlined this theory of the survival of the state as the first priority of politics in The Concept of the Political. The essence of the "political" is the existence of organized collectives prepared to meet existential threats to themselves with lethal force if necessary. The "political" is different from the moral, the aesthetic, the economic, or the religious as it involves, first and foremost, the possibility of groups of human beings killing other human beings.

This does not mean that war is necessarily "good" or something to be desired or agitated for. Indeed, it may often be in the political interests of a state to avoid war. However, any state that wishes to survive must be prepared to meet challenges to its existence, whether from conquest or domination by external forces or revolution and chaos from internal forces. Additionally, a state must be capable of recognizing its own interests and assume sole responsibility for doing so. A state that cannot identify its enemies and counter enemy forces effectively is threatened existentially.

Schmitt's political ideas are, of course, more easily understood in the context of Weimar's political situation. He was considering the position of a defeated and demoralized German nation that was unable to defend itself against external threats, and threatened internally by weak, chaotic and unpopular political leadership, economic hardship, political and ideological polarization and growing revolutionary movements, sometimes exhibiting terrorist or fanatical characteristics.

Schmitt regarded Germany as desperately in need of some sort of foundation for the establishment of a recognized, legitimate political authority capable of upholding the interests and advancing the well-being of the nation in the face of foreign enemies and above domestic factional interests. This view is far removed from the Nazi ideas of revolution, crude racial determinism, the cult of the leader, and war as a value unto itself. Schmitt is clearly a much different thinker than the adherents of the quasi-mystical nationalism common to the radical right-wing of the era. Weimar's failure was due in part to the failure of the political leadership to effectively address the questions raised by Schmitt. 

______________

 

 

*The German title -- Die geistesgeschichtliche Lage des heutigen Parlamentarismus -- literally means “the historical-spiritual condition of contemporary parliamentarianism.” The common rendering, “The Crisis of Parliamentary Democracy,” is certainly more euphonious, though it is problematic since one of Schmitt’s central points in the book is that parliamentarianism is not democratic.   

Carl Schmitt - Weimar: State of Exception

Carl Schmitt (Part I)

Weimar: State of Exception

 
 
 
Carl Schmitt (Part I) Carl Schmitt, the Return of the German Army Following World War I (photo: BBC)

Among the many fascinating figures that emerged from the intellectual culture of Germany’s interwar Weimar Republic, perhaps none is quite as significant or unique as Carl Schmitt. An eminent jurist and law professor during the Weimar era, Schmitt was arguably the greatest political theorist of the 20th century. He is also among the most widely misinterpreted or misunderstood.

The misconceptions regarding Schmitt are essentially traceable to two issues. The first of these is obvious enough: Schmitt’s collaboration with the Nazi regime during the early years of the Third Reich. The other reason why Schmitt’s ideas are so frequently misrepresented, if not reviled, in contemporary liberal intellectual circles may ultimately be the most important. Schmitt’s works in political and legal theory provide what is by far the most penetrating critique of the ideological and moral presumptions of modern liberal democracy and its institutional workings.

Like his friend and contemporary Ernst Junger, Schmitt lived to a very old age. His extraordinarily long life allowed him to witness many changes in the surrounding world that were as rapid as they were radical. He was born in 1888, the same year that Wilhelm II became the emperor of Germany, and died in 1985, the year Mikhail Gorbachev became the final General Secretary of the Communist Party of the Soviet Union. Schmitt wrote on legal and political matters for nearly seven decades. His earliest published works appeared in 1910 and his last article was published in 1978. Yet it is his writings from the Weimar period that are by far the most well known and, aside from his works during his brief association with the Nazis, his works during the Weimar era are also his most controversial.

Not only is it grossly inaccurate to regard Schmitt merely as a theoretician of Nazism, but it is also problematical even to characterize him as a German nationalist. For one thing, Schmitt originated from the Rhineland and his religious upbringing was Catholic, which automatically set him at odds both regionally and religiously with Germany’s Protestant and Prussian-born elites. As his biographer Joseph Bendersky noted, Schmitt’s physical appearance was “far more Latin than Germanic” and he had French-speaking relatives. Schmitt once said to the National-Bolshevik leader Ernst Niekisch, “I am Roman by origin, tradition, and right.”

At age nineteen, Schmitt entered the prestigious University of Berlin, which was exceedingly rare for someone with his lower middle-class origins, and on the advice of his uncle chose law as his area of specialization. This choice seems to have initially been the result of ambition rather than specificity of interest. Schmitt received his law degree in 1910 and subsequently worked as a law clerk in the Prussian civil service before passing the German equivalent of the bar examination in 1915. By this time, he had already published three books and four articles, thereby foreshadowing a lifetime as a highly prolific writer.

Even in his earliest writings, Schmitt demonstrated himself as an anti-liberal thinker. Some of this may be attributable to his precarious position as a member of Germany’s Catholic religious minority. As Catholics were distrusted by the Protestant elites, they faced discrimination with regards to professional advancement. Schmitt may therefore have recognized the need for someone in his situation to indicate strong loyalty and deference to the authority of the state. As a Catholic, Schmitt originated from a religious tradition that emphasized hierarchical authority and obedience to institutional norms.

Additionally, the prevailing political culture of Wilhelmine Germany was one where the individualism of classical liberalism and its emphasis on natural law and “natural rights” was in retreat in favor of a more positivist conception of law as the product of the sovereign state. To be sure, German legal philosophers of the period did not necessarily accept the view that anything decreed by the state was “right” by definition. For instance, neo-Kantians argued that just law preceded rather than originated from the state with the state having the moral purpose of upholding just law. Yet German legal theory of the time clearly placed its emphasis on authority rather than liberty.

Schmitt’s most influential writings have as their principal focus the role of the state in society and his view of the state as the essential caretaker of civilization. Like Hobbes before him, Schmitt regarded order and security to be the primary political values and Schmitt has not without good reason been referred to as the Hobbes of the 20th century. His earliest writings indicate an acceptance of the neo-Kantian view regarding the moral purpose of the state. Yet these neo-Kantian influences diminished as Schmitt struggled to come to terms with the events of the Great War and the Weimar Republic that emerged at the war’s conclusion.

Schmitt himself did not actually experience combat during the First World War. He had initially volunteered for a reserve unit but an injury sustained during training rendered him unfit for battle; Schmitt spent much of the war in Munich in a non-combatant capacity. Additionally, Schmitt was granted an extended leave of absence to serve as a lecturer at the University of Strassburg.

As martial law had been imposed in Germany during the course of the war, Schmitt’s articles on legal questions during this time dealt with the implications of this for legal theory and constitutional matters. Schmitt argued that the assumption of extraordinary powers by military commanders was justified when necessary for the preservation of order and the security of the state. However, Schmitt took the carefully nuanced view that such powers are themselves limited and temporary in nature. For instance, ordinary constitutional laws may be temporarily suspended and temporary emergency decrees enacted in the face of crisis, but only until the crisis is resolved. Nor can the administrators of martial law legitimately replace the legislature or the legal system, and by no means can the constitutional order itself be suspended.

Carl Schmitt was thirty years old in November of 1918 when Kaiser Wilhelm II abdicated and a republic was established. To understand the impact of these events on Schmitt’s life and the subsequent development of his thought, it is necessary to first understand the German political culture from which Schmitt originated and the profoundly destabilizing effect that the events of 1918 had on German political life.

Contemporary Westerners, particularly those in the English-speaking countries, are accustomed to thinking of politics in terms of elections and electoral cycles, parliamentary debates over controversial issues, judicial rulings, and so forth. Such was the habit of German thinkers in the Wilhelmine era as well, but with the key difference that politics was not specifically identified with the state apparatus itself.

German intellectuals customarily identified “politics” with the activities surrounding the German Reichstag, or parliament, which was subordinated to the wider institutional structures of German statecraft. These were the monarchy, the military, and the famous civil service bureaucracy, with the latter headed up primarily by appointees from the aristocracy. This machinery of state stood over and above the popular interests represented in the Reichstag, and pre-Weimar Germans had no tradition of parliamentary supremacy of the kind on which contemporary systems of liberal democracy are ostensibly based.

The state was regarded as a unifying force that provided stability and authority while upholding the interests of the German nation and keeping in check the fragmentation generated by quarrelling internal interests. This stability was eradicated by Germany’s military defeat, the imposition of the Treaty of Versailles, and the emergence of the republic.

The Weimar Republic was unstable from the beginning. The republican revolution that had culminated in the creation of a parliamentary democracy had been led by the more moderate social democrats, which were vigorously opposed by the more radical communists from the left and the monarchists from the right.

The Bolshevik Revolution had taken place in Russia in 1917, a short-lived communist regime took power in Hungary in 1919, and a series of communist uprisings in Germany naturally made upwardly mobile middle-class persons such as Schmitt fearful for their political and economic futures as well as their physical safety. During this time Schmitt published Political Romanticism where he attacked what he labeled as “subjective occasionalism.” This was a term Schmitt coined to describe the common outlook of German intellectuals who sought to remain apolitical in the pursuit of private interests or self-fulfillment. This perspective regarded politics as merely the prerogative of the state, and not as something the individual need directly engage himself with. Schmitt had come to regard this as an inadequate and outmoded outlook given the unavoidable challenges that Germany’s political situation had provided.

Schmitt published Dictatorship in 1921. This remains a highly controversial work and subsequent critics of Schmitt who dismiss him as an apologist for totalitarianism or who attack him for having created an intellectual framework conducive to the absolute rule of the Fuhrer during the Nazi period have often cited this particular work as evidence. However, Schmitt’s conception of “dictatorship” dealt with something considerably more expansive and abstract than what is implied by the term in present day popular (or often academic) discourse.

For Schmitt, a “dictatorship” is a situation where a particular constitutional order has either been abrogated or has fallen into what Schmitt referred to as a “state of exception.” As examples of the first kind of situation, Schmitt offered both the Leninist model of revolution and the National Assembly that had constructed the constitutional framework of Weimar. In both instances, a previously existing constitutional order had been dismissed as illegitimate, yet a new constitutional order had yet to be established. A sovereign dictatorship of this type functions to

represent the will of these formless and disorganized people, and to create the external conditions which permit the realization of the popular will in the form of a new political or constitutional system. Theoretically, a sovereign dictatorship is merely a transition, lasting only until the new order has been established.

By this definition, a “sovereign dictatorship” could include political forces as diverse as the Continental Congresses of the period of the American Revolution to the anarchist militias and workers councils that emerged in Catalonia during the Spanish civil war to guerrilla armies holding power in a particular region where the previously established government has retreated or collapsed during the course of an armed insurgency. Schmitt also advanced the concept of a “commissarial dictatorship” as opposed to a “sovereign dictatorship.”

Schmitt used as an illustration of this idea Article 48 from the Weimar constitution. This article allowed the German president to rule by decree in states of emergency where threats to the immediate security of the state or public order were involved. As he had initially suggested in his wartime articles concerning the administration of martial law, Schmitt regarded such powers as limited and temporary in nature and as rescinded by the wider constitutional order once the emergency situation has passed. Contrary to the image of Schmitt as a totalitarian apologist, Schmitt warned of the inherent dangers represented by the powers granted to the president under Article 48, noting that such powers could be used to attack and destroy the constitutional order itself.

The following year, in 1922, Schmitt published Political Theology. This work advanced two core arguments. The first of these was a challenge to the legal formalism represented by German jurists of the era such as Hans Kelsen. Kelsen’s outlook was not unlike that of contemporary American critics of “judicial activism” who regard law as normative unto itself and insist legal interpretation should be restricted to pure law as derived from constitutional texts and statutory legislation, irrespective of wider or related political, sociological or moral concerns. Schmitt considered this to be a naïve outlook that failed to consider two crucial and unavoidable matters: the reality and inevitability of political and social change, and exceptional cases. It was the latter of these that Schmitt was especially concerned with. It was the question of the “state of exception” that continued to be a preoccupation of Schmitt.

Exceptional cases involved situations where emergencies threatened the state itself. For Schmitt, the maintenance of basic order preceded constitutional norms and legal formalities. There is no constitution or law if there is chaos. The important question regarding exceptional cases was the matter of who decides when an emergency situation exists. Schmitt regarded this decision-making power as the prerogative of the sovereign. Within the constitutional framework of Weimar, sovereignty was held jointly by the Reich president and the Reichstag, meaning that the president could legitimately declare a state of emergency and temporarily rule by decree if the Reichstag agreed to grant him such powers.

While Schmitt was certainly a thinker of the Right, it is a mistake to group him together with proponents of the “conservative revolution” such as Moeller van den Bruck, Oswald Spengler, Edgar Jung, or Hugo von Hofmannsthal. There is no evidence of him having expressed affinity for the views of these thinkers or joining any of the organizations that emerged to promote their ideas. Schmitt’s conservatism was squarely within the Machiavellian tradition, and he counted Machiavelli, Hobbes, Jean Bodin and conservative counterrevolutionaries such as Joseph De Maistre and Juan Donoso Cortes as his influences.

During the Weimar era, Schmitt expressed no sympathy for the mystical nationalism of the radical Right, much less the vulgar racism and anti-Semitism of the Nazi movement. He was closer to the anti-liberal thinkers that James Burnham and others subsequently labeled as “the neo-Machiavellians.” These included Vilfredo Pareto, Robert Michels, Gaetano Mosca, and Georges Sorel along with aristocratic conservatives like Max Weber. These thinkers expressed skepticism regarding the prospects of liberalism and democracy and emphasized the role of elites, the irrational, and the power of myth with regards to the political. Though Schmitt never joined a political party during the Weimar era, within the spectrum of German politics of the time he can reasonably be categorized as something of a moderate. He had admirers on both the far Right and far Left, including sympathizers with the Conservative Revolution as well as prominent intellectuals associated with the Marxist Frankfurt School, such as Walter Benjamin, Franz Neumann, and Otto Kirchheimer.

Schmitt’s own natural affinities were mostly likely closest to the Catholic Center Party, which along with the Social Democrats who had led the revolution of 1918 were the most consistently supportive of the republic and the constitutional order, and which represented the broadest cross-section of economic, class, regional, and institutional interests of any of the major parties during Weimar.

Like Hobbes before him, Schmitt was intensely focused on how order might be maintained in a society prone to chaos. Both economic turmoil and political instability continually plagued the republic. Successive political coalitions failed in their efforts to create a durable government and chancellors came and went. The Reichstag was immobilized by the intractable nature of political parties representing narrow class, ideological, or economic interests and possessing irreconcilable differences with one another. Additionally, many of the political parties that formed during the Weimar era, including those with substantial representation in the Reichstag, possessed little or no genuine commitment to the preservation of the republican order itself. Extremist parties, most notably the German Communist Party (KPD) and the National Socialist German Workers Party (NSDAP), or the Nazis, as they came to be called, openly advocated its overthrow. Terrorism was practiced by extremists from both the right and left. Crisis after crisis appeared during the Weimar period, and the parliament was each time unable to deal with the latest emergency situation effectively. The preservation of order subsequently fell to the president. Article 48 of the constitution stated in part:

If a state does not fulfill the duties imposed by the Reich constitution or the laws of the Reich, the Reich president may enforce such duties with the aid of the armed forces. In the event that public order and security are seriously disturbed or endangered, the Reich president may take the necessary measures in order to restore public security and order, intervening, if necessary, with the aid of the armed forces. To achieve this goal, he may temporarily suspend entirely or in part, the stipulated basic rights in articles 114, 115, 117, 118, 123, 124, and 153. All measures undertaken in accordance with sections 1 or 2 of this article must be immediately reported to the Reichstag by the Reich president. These measures are to be suspended if the Reichstag so demands.

As an indication of the unstable nature of the Weimar republic, Article 48 was invoked more than two hundred and fifty times by successive presidents during the republic’s fifteen years of existence.

vendredi, 24 septembre 2010

Samir Amin et la notion de "déconnexion"

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Archives de SYNERGIES EUROPEENNES - 1986

Samir Amin et la notion de "déconnexion"

Les thèses de l'économiste égyptien Samir AMIN, dont la réputation internatio- nale est désormais un fait acquis, demeurent objets de débat de fond. Ce qui indique leur importance. Dans La déconnexion, livre essentiellement consacré aux différentes hypothèses sérieuses de "sortie" hors du système mondial, Samir AMIN passe en revue les différentes expériences de "déconnexion" tentées dans plusieurs régions du Tiers Monde et nous propose une grille analytique inspirée du marxisme.

 

Il ne s'agit pas, pour l'auteur, de plaquer sur la diversité du réel une grille théorique et dogmatique. Comme Alain LIPIETZ, Samir AMIN ne croit pas que le marxisme soit une idéologie réductrice de la réalité à des déterminismes socio-économi- ques. Autrement dit, appuyant ses réflexions sur les écrits des "papes" du marxisme (MARX, LENINE mais aussi et surtout MAO ZEDONG), AMIN nie que, selon le principe orthodoxe bien connu, "l'économie, ce soit le destin".

 

La prise en compte nécessaire des cri- tères quantitatifs que sont les faits économiques et sociaux (investissements productifs, capital financier international, niveau de développement des nations selon les indices mondiaux que sont le PNB, le revenu par tête, etc.) ne signifie pas que l'on débouche obligatoirement sur un réductionnisme économique. Comme chez LIPIETZ, le "marxisme" de Samir AMIN est une méthodologie. Bien évidemment, nous ne suivrons pas l'économiste égyptien quand il affirme que le "matérialisme historique" est une clef essentielle d'appréhension du réel. Pourtant, il est utile de bien lire l'évolution de cette école "néo-marxiste" (eux-mêmes préférant se proclamer vrais continuateurs du marxisme-léninisme) qui tend à intégrer de nouveaux champs dans la tentative de compréhension du réel.

 

Un des champs nouveaux explorés par cette école est celui des peuples et des nations. Selon eux, il est autant impossible de faire l'impasse sur l'existence de communautés humaines structurées par une histoire et une langue commune, qu'il peut être indispensable de souligner l'hétérogénéi- té culturelle positive de ces peuples. Le "marxisme" orthodoxe refusait cette prise en compte au nom d'une démonie de l'économie qui, selon les néo-marxistes, était "anti-scientifique".

 

En appuyant ses recherches sur cette nouvelle réflexion, AMIN tente donc de faire le bilan des diverses voies choisies pour échapper au système de mondialisation économiste. Critiquant avec vigueur certaines écoles d'obédience marxiste, il constate que le capitalisme a engendré deux phénomènes apparemment contradictoires mais au fond analogues dans leurs effets: d'une part, un phénomène dit "d'hétérogénéi- sation" qui tend à diviser le monde en deux groupes économiques et humains différents et, d'autre part, un phénomène "d'homogé- néisation" ou encore de "mondialisation".

 

La première tendance est la conséquence du phénomène de "dualisation" du monde. D'un côté, un hémisphère développé économiquement, où les niveaux de vie moyens des citoyens assurent la satisfaction non seulement des besoins essentiels (nourriture, soins, éducation) mais de besoins plus artificiels (possession de biens de con- sommation à moyenne valeur ajoutée et à rapide obsolescence: télévisions, voitures automobiles à large diffusion, etc...). Cet hémisphère, Samir AMIN le nomme "euro- péen", puisque le capitalisme a été et reste encore synonyme de l'expansion européenne et du néo-colonialisme. Nous préférons, pour notre part, en nous référant à d'autres séries de critères, le nommer occidental. L'Europe fait bien sûr partie des régions ayant un très haut niveau de vie, et ayant quasi totalement éliminé les grands risques de misère collective à grande échelle que subissent encore les populations du Tiers Monde.

 

Mais d'un autre point de vue, l'Europe est aussi partie intégrante de ce même "Tiers Monde". Si on veut bien refuser le critère exclusivement économique, ou même le critère racial, les Européens sont autant victimes de la croissance du capitalisme mondial que les peuples exploités du Tiers Monde. Prenons, par exemple, le critère culturel. L'éradication des cultures autochtones au profit d'une conception "civilisatrice" mondialisée, véhiculée par les médias occidentaux, touche autant les peuples européens que ceux du Tiers Monde. La manipulation médiatique constitue même une étape supérieure de colonisation que ne connaissent pas tous les citoyens des peuples moins avancés (PMA), en ce sens que les réseaux de diffusion et d'alphabétisation limitent encore cette stratégie de pénétration culturelle par les grandes firmes de production transnationalisées.

 

Face à ce premier hémisphère, une nébuleuse unie par une même situation de dépendance économique et financière: le Tiers Monde. La volonté déclarée pour ces derniers d'assurer à leurs peuples un niveau de vie décent leur permettant la satisfaction des besoins minimaux à chaque être humain, induit les dirigeants des pays concernés à choisir une politique de libération nationale. La décolonisation opérée dans les années 50 et 60 en est l'exemple historique le plus évident. Mais cette étape "politique" de conquête de l'indépendance nationale est-elle suffisante? Non, répond AMIN. Elle est l'étape préliminaire, mais ne résoud aucun des vrais problèmes qui se posent dans notre économie-monde.

 

En effet, l'interdépendance croissante entre les Etats indépendants (juridiquement parlant) assure une nouvelle forme de domination sur les peuples pauvres par les firmes transnationales et les Etats capitalistes d'Occident. Le vrai problème qu'il faut alors résoudre est d'intégrer ou de déconnecter par rapport à ce système dominant qui est précisément le système capitaliste.

 

Intégration qui peut signifier soit surexploitation des forces de travail (les stratégies de délocalisation se justifient alors en termes de coût) soit surexploitation des richesses locales (les profits sont en général transférés à l'extérieur et profitent très médiocrement à l'expansion locale) soit, enfin, augmentation réelle du niveau de vie des habitants (le cas des pays semi-industrialisés comme la Corée du Sud ou Singapour). En fait, les cas d'espèces se traduisent en général par les deux premières hypothèses. Le pouvoir politique local peut alors se tourner vers trois hypothèses majeures: dans un premier cas, il peut "jouer le jeu" du système; on constate alors le développement d'une bourgeoisie locale et quelquefois même de classes moyennes. Il y a aussi, concomittant à ce fait, aggravation des inégalités, augmentation de la migration rurale vers les villes et phénomènes indirects de "mondialisation" culturelle, en particulier consommatoires. Le pouvoir peut ensuite tenter de prendre le contrôle des richesses nationales afin de mieux répartir les bénéfices de la croissance. Selon AMIN, il ne s'agit pas encore de "construire le socialisme" mais de mieux équilibrer la croissance. La bourgeoisie devient alors "nationaliste" et prétend représenter les intérêts du peuple. Loin de condamner cette tendance nationale et populaire de certains Etats et dirigeants du Tiers Monde (NASSER en Egypte, SOEKARNO en Indonésie, etc.) au nom d'un marxisme pur et dur, AMIN considère cette étape comme globalement positive et réfute les critiques dogmatiques portées à leur encontre. A ce propos, il ne se prive pas de critiquer les thèses de "marxistes occidentaux" qui, tel Bill WARREN, ont une position hostile à tout mouvement national, au nom d'une orthodoxie idéologique et qui, AMIN le souligne, rejoint bizarrement les thèses mondialistes des ultra-conservateurs néo-libéraux des dirigeants des organismes financiers internationaux (FMI, Banque Mondiale, etc...).

 

Enfin, les dirigeants peuvent décider la déconnexion. Celle-ci n'est pas une rupture brutale, pas plus d'ailleurs qu'un régime strict d'autarcie absolue. La déconnexion se présente comme la création politique d'une économie autocentrée et autorégulée. La rupture est le résultat de cette volonté de ne plus se plier aux règles établies par les bénéficiaires du système capitaliste. Par exemple en substituant à la loi de la valeur internationale la loi de la valeur nationale. A ce titre, Samir AMIN donne en exemple la voie maoïste. La déconnexion opérée pendant de nombreuses années par le gouvernement chinois a permis à la société chinoise de mettre en pratique un principe essentiel: ne compter que sur ses propres forces. Pour MAO, la révolution soviétique de Russie avait commis une grossière erreur: elle avait refusé de s'appuyer sur le binôme campagnes/villes en suivant une politique planifiée de ponctions sur la production rurale. D'où, selon MAO, la tendance dite "révisionniste" du soviétisme, qui assurait la prédominance de la ville sur la campagne.

 

Enfin, Samir AMIN propose une analyse sur quelques tentatives selon lui incohérentes de déconnexion: le mouvement des Verts en RFA et la révolution populaire islamique. On regrettera la faiblesse et la légereté avec lesquelles ces deux sujets sont ici traités. Mais, globalement, le livre d'AMIN est richissime en pistes idéologiques.

 

Ange SAMPIERU.

 

Samir AMIN, La déconnexion. Pour sortir du système mondial, Editions La Découverte, Paris, 1986, 120 FF.

 

jeudi, 23 septembre 2010

Scruton over de Natiestaat, Nation-Building en Wagner

Scruton over de Natiestaat, Nation-Building en Wagner

roger-scruton.jpgOp vrijdag 23 juni jl. gaf de conservatieve filosoof Roger Scruton een lezing over de crisis die het multiculturele dogma in onze samenleving heeft veroorzaakt. Net voor de lezing had ik een kort gesprek met Scruton over de natiestaat, nation-building in Irak en de opvoering van Wagners Ring-cyclus door de Vlaamse opera.

U noemt de natiestaat de grootste Europese verwezenlijking. De Europese Unie heeft dat erfgoed weggegooid. Waarom gelooft u niet dat economische samenwerking conflicten tussen Europese naties zal voorkomen?

Economische samenwerking heeft nooit conflicten voorkomen in het verleden, nietwaar? Natuurlijk is economische samenwerking een goede zaak op zich, maar conflicten hebben hun oorsprong in allerlei rivaliteiten die niets met economie hebben te zien: immigratie en emigratie, bedreigde grenzen, taalverschillen, religieuze verschillen, enz. Het volstaat niet om te zeggen dat we mensen gaan aanmoedigen om handel te drijven met elkaar. Samenwerking tussen a en b is enkel mogelijk indien a zich onderscheidt van b. Indien het onderscheid van de natiestaat verloren gaat, verlies je ook ondernemingen.

Uw verdediging van de natiestaat wordt bekritiseerd door diegenen die menen dat de geschiedenis van de Europese natiestaat samenvalt met de donkerste periode van de Westerse beschaving: kolonialisme, imperialisme, fascisme en nationaal-socialisme. Wat zegt u daarop?

Eerst en vooral, wat is er verkeerd met kolonialisme en imperialisme? Wat is de Europese Unie, als het geen imperialisme is? Empire is een natuurlijk iets voor mensen en het is een manier om conflicten te overwinnen. Over fascisme zou ik zeggen dat het uiteraard gaat om een verminkte vorm van de natiestaat. De natiestaat bestaat in Engeland op zijn minst sinds Shakespeare’s verheerlijking ervan. En de donkerste periode in de Europese geschiedenis werd veroorzaakt door een pathologische vorm van Duits nationalisme, niet door de natiestaat.

Menig islamitisch immigrant kent geen territoriale loyaliteit welke een voorwaarde is voor burgerschap in de natiestaat. Wat te doen met diegenen die niet willen assimileren?

Het correcte beleid tegenover diegenen die niet willen assimileren is hen de optie te geven om elders te gaan waar ze dat wel kunnen, zoals bijvoorbeeld, waar ze vandaan komen.

Er wordt nu veel gepraat over een Amerikaans imperium. Hoe kijkt u daar tegen aan?

Het gaat niet om imperialisme van de oude stempel. Natuurlijk gebruiken de Amerikanen hun macht om – in hun overtuiging – overal ter wereld democratische regeringen te stichten omdat zij denken dat democratie de enige weg naar stabiliteit is. Welke andere vorm van stabiliteit is er in deze moderne wereld? Ik zeg niet dat de Amerikanen het recht hebben om hun macht op deze wijze te gebruiken. Niettemin, dat is hoe ze het doen. Het is niet hetzelfde als imperialisme. Integendeel, het is een poging om onafhankelijke staten te creëren door dictators te verwijderen.

Irak is met zijn met artificiële grenzen een product van het kolonialisme. Zijn de Amerikanen niet gedoemd om te falen in hun nation-building aldaar?

Ik hoop het niet maar het is wel waarschijnlijk voor de redenen waarnaar je verwijst. Irak is een volkomen artificiële staat net zoals België. In een regio die de natiestaat niet heeft gekend is het zeer onwaarschijnlijk om te slagen. Mijn eigen mening is dat de correcte benadering tegenover Irak is om het op te splitsen in een Koerdisch, Sjiitisch en Soennitisch gedeelte.

U bent Wagner-kenner. De Vlaamse Opera gaat Wagners ‘Der Ring des Nibelungen’ (de Ring-cyclus) opvoeren. Momenteel wordt Das Rheingold vertoond. De regisseur heeft echter de context van de Germaanse mythologie overboord gegooid en plaats de opera in een geglobaliseerde internetgemeenschap. Wat denkt u van zo’n interpretatie?

De gewoonte om de opera’s van Wagner te verminken is nu zodanig diep in onze cultuur verankerd dat men niet kan hopen dat ze vertoond zullen worden zoals hij het bedoeld heeft. Indien men de Ring-cyclus ontdoet van de openbaring van de natuur, de jager-verzamelaar gemeenschap, de akkerbouw en de rol van de goden daarin, dan neem je de structuur van het muziekdrama weg. De Ring-cyclus heeft vele betekenissen maar het heeft deze omdat het ook een letterlijke betekenis heeft. Als je de letterlijke betekenis vernietigt, vernietig je ook al de andere.

De regisseur [Ivo Van Hove] zal zich waarschijnlijk verdedigen door te stellen dat hij Wagner vertaalt naar de moderne wereld van vandaag.

De Ring-cyclus is een schitterend portret van de moderne wereld, net omdat het gesitueerd is in mythische tijden. Door deze mythische tijden te creëren maakt Wagner het mogelijk om onze eigen toestand te zien. Als je het vastpint op het huidige moment van de internetcultuur, dan verlies je die mythische tijd en verlies je die eerste moderne betekenis zodat het morgen al verouderd zal zijn.

 
 
Scruton in het Nederlands:

Roger Scruton heeft een uitzonderlijk hoogstaand oeuvre van meer dan 30 boeken geschreven waarbij hij diepgang combineert met breedte: of hij nu schrijft over de dreiging van de islam, over Westerse filosofie, over het conservatisme, over esthetica, over moderne cultuur en zelfs over seksuele begeerte, het is steeds met een professionalisme dat de specialist versteld doet staan.

De betekenis van het conservatisme (Edmund Burke Lezing I, Aspekt, 2001)

Voor de Edmund Burke Stichting sprak Scruton over zijn eigen conservatieve overtuiging en zijn ervaring met mei ’68. Een ideale inleiding met bibliografie.

Het Westen en de islam – Over globalisering en terrorisme (Houtekiet, 2003)

De botsing met de islam dwingt ons, aldus Scruton, om grondig na te denken over de fundamenten van onze politieke ordening.

Moderne cultuur – Een gids voor kritische mensen (Agora, 2003)

Tegenover de richtingloze moderne cultuur plaatst Scruton het spirituele houvast dat onze traditie biedt en houdt hij een warm pleidooi voor ‘hoge cultuur’.

Andere: Filosofisch denken – Een handleiding voor nieuwsgierige mensen (Bijleveld, 2000). In de reeks ‘Kopstukken Filosofie’ verschenen tevens vertalingen van zijn werken over Spinoza en Kant (Lemniscaat, 2000).

 
Meer informatie op Scrutons website.

 

Serge Latouche et le refus du développement

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Archives de SYNERGIES EUROPEENNES - 1986



Serge Latouche et le refus du développement

La problématique, universelle, du développement économique et social des pays faisant partie de ce que l'on appelle le Tiers Monde, constitue, depuis maintenant plusieurs décennies, un champ de débats et de controverses interminables. Deux écoles se présentent. L'une prétend que, dans une vision linéaire occidentale de l'histoire des peuples, la voie du développement est le passage obligé de tous les peuples sur le chemin de leur "évolution". Cette vision regroupe dans une conclusion commune les émules de l'école libérale (favorable non seulement au développement d'un marché mondial mais aussi à la liberté totale des échanges de biens et marchandises) et une partie de l'école marxiste, issue partiellement des mêmes doctrines propres aux économistes du XVIIIème siècle. L'autre école ne présente pas la même cohérence. Globalement, elle nie que le développement soit le résultat d'une série de mécanismes socio-économiques répétitifs et affirme même que les formes du développement "à l'occidentale" ne sont pas nécessairement positives en soi, ne favorisent pas obligatoirement le bien-être de ces peuples et ne contribuent pas automatiquement à la préservation de leurs identités.

 

Serge LATOUCHE, spécialiste du Tiers Monde, épistémologue des sciences sociales, est aussi professeur d'économie politique. Sa démarche se présente, dès le départ, comme un refus de l'école matérialiste orthodoxe, que ce soit dans sa version libérale ou marxiste. Pour lui, l'idéologie du développement constitue d'une part une idéologie de camouflage et, d'autre part, une négation plus ou moins avouée des identités ethno-culturelles. Idéologie de camouflage: l'idée de développement cache médiocrement un paradigme essentiel de la pensée issue de la matrice judéo-helléni- stique. Il y a probablement une forme de "ruse de la raison occidentale" qui assure ainsi son pouvoir de domination, pouvoir colonial proprement dit, sur les pays dits "sous-développés" ou "moins avancés" (la variété des catégories de dénomination de ces pays révèlent bien le caractère idéologique des analyses et non la neutralité du langage prétendument scientifique).

 

Qu'est-ce que le développement? Une approche vulgaire répondrait sans hésitation: le bien-être des masses et un "niveau de vie" élevé (équivalent au moins à l'American Way of Life). Cette réponse constituerait une fois de plus un camouflage du véritable discours idéologique qui sous-tend cette déclaration de principe aussi simpliste qu'intéressée. Serge LATOUCHE nous le rappelle: jusqu'à présent, toutes les expériences de politiques de développement ont échoué... Toutes les techniques ont fait la preuve de leur inefficacité... D'ailleurs face à ces échecs répétés, certains ont pu parler de "mythe du développement" (Cf. Celso FURTADO ou Candido MENDES). Le résultat de ces tentatives est catastrophique: exode rural massif, qui a entraîné non seulement une désertification des campagnes (avec des effets explicites comme la baisse de la capacité de production agricole du pays, donc l'aggravation de la dépendance alimentaire et, en même temps, la dégradation des conditions écologiques sur les terres laissées à l'abandon) mais aussi une "clochardisation" monstrueuse des paysans dans les périphéries des grandes cités occidentalisées (le phénomène des bidonvilles dans les mégalopoles comme Mexico, le développement de la criminalité juvénile comme à Rio de Janeiro ou certaines grandes villes africaines, l'augmentation des activités économiques parallèles à l'économie mondiale localisée, etc..). Phénomène aussi de destructions des tissus locaux de production s'inscrivant dans une logique mondialisée de division et de délocalisation des tâches (Cf. les stratégies des firmes transnationales).

 

Dans un certain nombre de ces pays, les recettes nouvelles procurées par l'exploitation des ressources locales, soit directement exploitées par l'Etat (version post-nassérienne en Egypte, par ex.) soit concédées à des entreprises étrangères (Cf. le cas d'Elf Aquitaine, multinationale pétrolière française, au Gabon), ces profits réalisés par cette rente naturelle, furent réutilisés dans le sens d'un mode de développement copié des modes des pays du centre du système. La construction d'énormes complexes industriels (Nigéria, par ex.), qui exigeait d'énormes investissements et dont les profits espérés en termes de développement industriel national et d'implantation sur les marchés mondiaux, fut refusée malgré les espoirs des dirigeants locaux. Ces investissements furent surtout l'occasion, pour les entreprises étrangères (bâtiments et travaux publics comme Bouygues en France), de réaliser de substantiels chiffres d'affaires sur les chantiers ouverts. Parallèlement à ces recettes, on constate que le système bancaire occidental, alléché par ce "développement" des pays du Tiers Monde, pratique alors une politique de crédit très large, dépassant même souvent les règles de sécurité généralement admises en la matière par les professionnels eux-mêmes. D'où, dans les années 80, l'affolement du système bancaire occidental face au montant de la dette internationale, surtout aggravé par l'insolvabilité évidente des pays endettés (la crise pétrolière de 1973 est aujourd'hui passée et on peut constater sans aucun effort que le marché pétrolier est aujourd'hui victime d'une crise des prix à la baisse). La rente n'est plus le gage certain d'une solvabilité.

 

Pour E. MORIN, cette crise du développement, c'est à la fois la crise de l'idéologie occidentale sous la forme de deux de ses mythes fondateurs (conquête de la nature-objet par l'homme souverain et triomphe de l'individu atomisé bourgeois) et "le pourrissement du paradigme humanistico-rationnel de l'homo sapiens/faber"...

 

Par ailleurs, Serge LATOUCHE pose ensuite la question fondamentale, valable pour toute idéologie universaliste: "Y a-t-il un niveau de bien-être quantitativement repérable et ayant une signification dans l'absolu?" (p.9). Cette "absolutisation", dans le temps et dans l'espace, des valeurs occidentales, tant au niveau des valeurs fondamentales que dans les pratiques concrètes de réalisation, se pose aussi dans la remise en question des idéaux occidentaux: 1) idéologie des droits de l'homme (qui ne sont plus les droits que l'on peut concevoir dans un système de valeurs spécifiques comme celles qui président à l'Habeas Corpus des cultures anglo-saxonnes) à prétention universaliste et impérialiste (Reagan prétend justifier ses multiples agressions dans le monde au nom d'une vague référence à cette idéologie), 2) système de "démocratie représentative" idéologiquement et politiquement hégémo- nique (cette valorisation absolue impliquant aussi une dévalorisation des autres systèmes, de tous les autres systèmes politiques), etc... Le paradigme occidental du développement se traduit en fait dans ce que Serge LATOUCHE nomme une "objectivation du social".

 

Cette objectivation, qui passe par l'acquisition théorique des formes de vie occidentales (possession des biens de consommation utiles) se conjugue avec une utilisation neutralisée de la technique. Cette dernière est alors perçue comme purement "naturelle", moyen objectif de maîtrise, donc sans caractère culturel et "engagé". Serge LATOUCHE ajoute: "L'objectivation du développement est la source de la conception "technique" des stratégies de développement". La question, précise-t-il afin de parer à toute fausse critique (du style: "c'est trop facile de refuser le développement quand on en bénéficie soi-même"), n'est pas de dire non à une augmentation des conditions matérielles d'existence des hommes, mais de traduire le développement dans un schéma qui respecte et tienne compte des spécificités culturelles de chaque peuple. Le développement ne doit pas, en sus d'une paupérisation des peuples, favoriser le phénomène majeur de déculturation. L'auteur précise que le tort provoqué par le développement aux peuples est bien celui-là et que sa nature est d'être radical. En effet, le développement est  -il faut le souligner-  un "paradigme occiden- tal". Il s'agit d'une expérience historique liée à un ensemble de valeurs propres à une aire culturelle, globalement judéo-chrétienne. LATOUCHE écrit: "Le développement, c'est un regard sur le monde qui vise à valoriser celui dont il émane et à dévaloriser l'autre". Il ajoute que proposer cette expérience en modèle universel indépassable est un "maquillage" de l'impérialisme de l'Occident. Certains, plus précis, préfèrent parler de "néo-colonialisme".

 

Nous ne prétendons pas épuiser toute la richesse des réflexions économiques et culturelles de ce livre. Les analyses des principes d'autodynamisme du capital, le débat sur l'antériorité du capitalisme sur l'impérialisme (thèse léniniste classique) contesté par Serge LATOUCHE, sont quelques-uns des éléments de ce livre magistral. Citons, en guise de conclusion, ces quelques phrases: "Finalement, par des voies différentes, libéraux et marxistes se rejoignent sur ce même "diagnostic réaliste". Ils communient dans la même vision occidentale d'une histoire unidimensionnel- le". "En limitant dans le résultat du mouvement de leur analyse théorique la portée des destructions à leur portée strictement économique, les marxistes réduisent le sous-développement des pays victimes à un recul des forces productives et non à la destruction des bases d'une autre forme d'épanouissement historique. L'équation 'sous-développement = retard' n'est tautologique que si le champ du possible est réduit à une ligne d'évolution unique, sur laquelle on ne peut effectivement qu'être en avance ou en retard".

 

Deux citations qui résument la position de Serge LATOUCHE: refuser les analyses purement économiques pour introduire les paramètres culturels et politico-historiques, non pas comme critères exogènes, de pure extériorité par rapport à un soi-disant "système" infrastructurel de nature quantitative et économique, mais comme sujets actifs de la réflexion analytique. Une indépendance intellectuelle que tous nos lecteurs apprécieront.

 

Ange SAMPIERU.

 

Serge LATOUCHE, Faut-il refuser le développement?, PUF, Paris, 1986, 135 FF.

lundi, 20 septembre 2010

Gnose et politique chez Jacob Taubes

Archives de SYNERGIES EUROPEENNES - 1986

 

Gnose et politique chez Jacob Taubes

 

taubes.gifGnose et politique. Apparamment deux do- maines sans rapports aucuns l'un avec l'autre. La Gnose, c'est la théologie, la religion de la fuite hors des vanités de ce bas monde. La Gnose, c'est le refus de l'histoire, donc l'exact opposé du politique qui, lui, est immersion totale dans l'imma- nence de la Cité, dans le grouillement des passions et des intérêts. Pour Jacob TAUBES, pourtant, il est possible d'interpré- ter historiquement le déploiement des idéaux gnostiques, de repérer les traces que le mental gnostique a laissé, par le truchement du christianisme, dans les idéologies politiques. Ce travail de recherche, il l'a entrepris lors d'un colloque de la Werner-Reimers-Stiftung, tenu à Bad Homburg en septembre 1982. Les actes de ce colloque sont désormais disponibles sous forme de livre (références infra).

 

Le thème central, celui de la Gnose comme phénomène religieux, a déjà été abondem- ment exploré. Mais uniquement en tant que phénomène religieux de la fin de l'antiquité. Lors du colloque de Bad Homburg, la plupart des participants ont d'ailleurs abordé la Gnose sous l'angle strictement théologique, relatant ses avatars antiques. La Gnose n'est pourtant pas morte; elle s'est infiltrée dans le discours politique moderne. Odo MARQUARD définit la Gnose comme suit: "La Gnose est la positivisation de la Weltfremdheit (le fait d'être étranger au monde) et la négativisation du monde". Selon MARQUARD, la Gnose génère une conception eschatologique de l'histoire qui juge mauvais le monde tel qu'il est et valorise du même coup toute marginalité affichée par rapport à lui. Le Moyen Age jugule les débordements de l'eschatologisme, en posant un Dieu "bon", créateur d'un monde globalement positif. Ce monde, produit d'un créateur bon, ne peut en conséquence qu'être bon, conforme à sa bonté infinie. Le Moyen Age met donc un terme à la Weltfremdheit de la Gnose et revalorise la création. L'Augustinisme part du principe que cette "bonne création", ce "bon monde" a été perverti(e) par l'homme qui a abusé de sa liberté et s'est servi des richesses de cette création pour satisfaire des appétits de puissance. Le "bon monde", comme le "Bon Dieu", sont victimes de la "malifacture" de l'homme. Pour MAR- QUARD comme pour le théologien et philosophe Hans BLUMENBERG, le nomina- lisme constitue un retour de la Gnose en restituant au "Bon Dieu" une totale liberté d'action et donc une irresponsabilité vis-à-vis de ses créations qui, automatiquement, ne sont plus globalement considérées comme positives.

 

Cette "maléfaction" du monde provoque l'âge des révolutions populaires, des contestations sociales, des guerres de religions, parce que les hommes veulent abattre le monde tel qu'il est pour le remplacer par un monde idéal. A la suite de ces querelles, de ces guerres civiles perma- nentes, l'Europe connaîtra un deuxième dépassement du mental gnostique grâce à la "neutralisation" (Carl SCHMITT en parlera abondemment, dans le sillage de ses études sur HOBBES). L'Etat hobbesien neutralise ainsi les querelles religieuses; il valorise le monde régi par le Prince. Un siècle plus tard, LEIBNIZ parlera du meilleur Dieu, créateur du meilleur des mondes possibles. Dans cette optique, l'immanence acquiert à nouveau une valeur positive. La réalité de l'existence est acceptée telle quelle par les Lumières anglo-saxonnes. Le monde est acceptée mais, simultanément, dépourvu de tout caractère sensationnel.

 

A cette disparition du merveilleux et de l'enthousiasme eschatologique, succédera iné- vitablement la récidive gnostique, avec le pessimisme de ROUSSEAU et le concept marxiste d'aliénation. Pour MARQUARD, cette récidive gnostique recèle un danger très sérieux: celui de ne plus tenir compte des réalités complexes du monde immanent (jugées reflets du mal en soi) et d'engendrer une praxis du politique reposant sur le tout-ou-rien.

 

L'objet du colloque de Bad Homburg était d'accepter cette interprétation de l'histoire des idées politiques en Europe ou de la réfuter. Pour le professeur berlinois Richard FABER, pourfendeur génial de la notion d'Occident (Cf. Orientations no.5), le chemi- nement de MARQUARD est typiquement libéral, rattachable aux Lumières anglo-saxonnes, qui biffent des esprits les enthousiasmes et les fureurs révolutionnaires. Le Dieu "bon" des Lumières anglo-saxonnes, mais aussi de LEIBNIZ, est, pour MARQUARD, mort sous les coups de la récidive gnostique et du romantisme comme le signale un autre participant au colloque, Ioan P. CULIANU. Pour FABER, les thèses de MARQUARD expriment ipso facto un néo-conservatisme rigide, à mettre en parallèle avec la renaissance des thèses néo-libérales anti-révolutionnaires de HAYEK et de von MISES. L'alibi de MARQUARD, affirme FABER, est son "polythéisme", en tant qu'acceptation des diversités du monde. Mais ce polythéisme, ajoute encore FABER, minimise la fonction politique, qui est par définition transformatrice et quasi-prophéti- que. Les dieux du polythéisme marquardien sont "la science, la technique et l'économie" qui engendreront la neutralisation dont notre époque, héritière directe des gnoses romantique et marxiste, aurait rudement besoin.

 

Dans une seconde contribution au colloque de Bad Homburg, FABER s'attaque au théologien et philosophe germano-américain Eric VOEGELIN. Si MARQUARD et BLUMENBERG valorisaient essentiellement l'anti-gnosticisme des Lumières anglo-saxon- nes, VOEGELIN valorise, lui, la neutralisation médiévale de l'eschatologisme gnostique. Il y voit le véritable génie de l'Occident car, dans le libéralisme philoso- phique du XVIIIème siècle et dans le positivisme comtien, se cache l'idée d'une révolution permanente, d'une incomplétude du monde qui se "guérit" par de petites interventions chirurgicales. Le monde n'est pas accepté, dans ces philosophies sociales et politiques, comme globalement "bon". Dans les débats politiques, cela engendre une praxis marquée d'indécision voire un chaos non violent. Pour FABER, pourtant, VOEGELIN, BLUMENBERG et MARQUARD doivent être renvoyés dos à dos comme produits "occidentaux" qui refusent de percevoir le monde comme tissu conflictuel incontournable.

 

On le constate: le débat est sans fin, il interpelle toute l'histoire spirituelle et intel- lectuelle de l'Europe. Le politique véhicule nécessairement la gnose et nier les éléments gnostiques correspond à une négation partielle du politique.

 

Autre trésor que nous avons découvert dans les actes de cet époustouflant colloque, qui nous ouvre de vastes horizons: un essai d'Ekkehard HIERONIMUS sur le dualisme et la Gnose dans le mouvement völkisch allemand et plus précisément dans les cénacles qui ont adhéré au national-socialisme. Nous y reviendrons dans une prochaine contribution...

 

Robert STEUCKERS.

 

Jacob TAUBES, Gnosis und Politik, (Religionstheorie und Politische Theologie, Band II), Wilhelm Fink Verlag / Verlag Ferdinand Schöningh, München/Paderborn, 1984, 306 S., 78 DM.