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dimanche, 15 mars 2009

L'économique: réflexions du Prof. Julien Freund

L'économique: réflexions du Professeur Julien Freund

 

Le terme “économie” désigna, pendant des temps immémoriaux, «tout ensemble d'éléments organisé en vue d'un résultat harmonieux» (1), accompagné de l'idée que cette économie atteint sa perfection par... l'économie des moyens. D'où l'ambigüité soulignée par l'historien Jean-Claude Perrot, entre l'administrateur et le “grippe-sous”. Lorsque Montchrétien emploie le titre “Traité de l'économie politique” en 1615, il accole pour la première fois des termes traditionnellement isolés. Le vocabulaire reste cependant limité jusqu'au XVIIIième siècle où commencent les grands débats sur le luxe, la population, le commerce, l'impôt, l'équilibre de la balance.

 

Montchrétien trace un domaine qui définit l'économie “en extansion”. Partant de la production domestique et de la division du travail, l'économie politique traite du commerce et des échanges internationaux, des biens et services et de la monnaie, propose des règles de politique économique. Depuis, on aborde l'économie à partir des divers actes ou opérations qui constituent l'objet de sa recherche. L'activité économique d'une société se définit par l'ensemble des opérations par lesquelles ses membres produisent, répartissent, consomment des biens et des services.

 

L'approche “en extension” soulève trois remarques:

- On emploie le terme “extension” pour souligner que l'économie est présentée à partir d'un domaine d'activités particulières: actes de production, répartition, consommation, énumérés dans un ordre correspondant à une certaine logique.

- Les activités économiques sont liées aux autres activités sociales. Toute activité sociale implique l'échange et l'usage de biens et de services. En ce sens, chacune relève, pour partie, de l'analyse économique.

- La définition oriente vers une réflexion sur les seules activités. Elle demeure insuffisante.

 

Une définition alternative, “en compréhension”, présente l'histoire de l'activité économique comme celle d'une lutte contre les conditions naturelles et la rareté des biens et services. L'objet de l'économie politique est d'expliquer la manière dont les hommes organisent leurs efforts en vue de satsifaire leurs besoins individuels et collectifs. Selon cette définition, trois notions sont à prendre en considération: l'effort et le travail organisé; les besoins; la lutte contre la rareté. On se heurte ici à deux limites:

- L'obligation de rejeter dans les ténèbres la macroéconomie keynésienne et l'œuvre de Marx. La première traite de l'emploi du facteur travail en situation d'excédent: les chômeurs. La seconde, “critique de l'économie politique”, accuse celle-ci d'être l'idéologie d'un système socio-économique. Thème que Necker avait déjà abordé dans son traité Sur la législation et le commerce des grains où il notait: «Il n'est que trop fréquent de voir confondre l'intérêt des propriétaires avec celui de l'agriculture... l'intérêt des négociants avec celui du commerce... autant d'objets qu'il est nécessaire de distinguer... Les propriétaires, de très bonne foi, célèbrent au nom du bien public toutes les lois qui ne sont faites que pour eux... Il est des libertés derrière lesquelles est placé l'esclavage de la multitude (2)».

 

- La légitimité sociale de certains désirs et de préférences particulières est posée explicitement par la notion de besoin. Un vêtement est simultanément une protection contre les intempéries, un élément de pudeur (ou d'impudeur), un signe de statut social, un outil d'ostentation, un matériau d'esthétique, etc. Un code culturel en précise l'usage, en sorte que les besoins sont imbriqués à une perception plus vaste de la place d'une personne dans la société.

 

Le domaine économique est donc difficile à définir. De grands auteurs, tels Schumpeter dans son Histoire de l'analyse économique, préfèrent, admettre d'emblée l'existence de phénomènes économiques, sans les circonscrire. La comparaison des sociétés dans le temps et dans l'espace sera toujours difficile, car s'il existe obligatoirement un aspect économique dans chaque société, il ne commence ni ne finit au même niveau.

 

Les obstacles rencontrés dans la recherche d'une définition suggèrent d'aborder la question sous un autre angle: une conceptualisation aussi rigoureuse que possible. Par là, nous entendons qu'il faut dégager le concept d'économie de tout emploi où il pourrait subsumer des éléments contradictoires. Une présentation sémantique très claire est proposée par Julien Freund dans le cadre de la théorie des essences et des dialectiques qui s'efforce de caractériser les activités humaines sur la base de leurs implications intrinsèques.

 

L'ESSENCE DE L'ÉCONOMIQUE (3)

 

Existe-t-il des critères permettant de repérer l'économique dans n'importe quelle société, indépendamment de son immersion dans les diverses activités pratiques liées à une époque ou à un espace? Les conditions préalables de l'activité économique, ou présupposés, sont ce qui lui est essentiel et qui permettent de la repérer dans la complexité des péhnomènes sociaux. Au-delà, l'essence d'une activité désigne «une réalité qui dure à travers le temps et qui ne disparaît pas sous l'action de circonstances» (4). Ce qui ne disparaît pas avec le temps ou les circonstances et contribue à faire l'histoire des hommes doit être ancré dans la nature humaine. On est fondé alors de parler d'une donnée, quelque chose d'inhérent à l'homme en tant que tel et qui ne peut se transformer en autre chose. La pratique d'une activité économique répond enfin à un but, une finalité spécifique irréductible aux autres dimensions de la nature humaine et de la trame sociale. La finalité spécifique de l'économie s'accompagne de moyens particuliers auxquels on ne peut éviter de faire appel pour la réaliser.

 

Au total, pour caractériser l'essence de l'économique, il faut en extraire trois dimensions: la donnée, les présupposés, la finalité. La donnée définit le fondement de l'activité, ses tenants. La finalité précise l'aboutissement, le but que se fixent les hommes lorsqu'ils s'adonnent à la pratique de l'économie. Les présupposés caractérisent les conditions d'exercice de l'activité économique. Le trilogie: donnée, présupposés, finalité, définit la logique interne de l'économique par rapport à l'homme.

 

1. La Donnée

 

La donnée de l'économie, son fondement, réside dans le besoin, même si la notion n'est pas explicitée par la plupart des auteurs qui se gardent bien de rien dire sur la nature du besoin et se cantonnent à une représentation purement formaliste, quoique deux courants aient consacré des développements substantiels à la notion: l'école marginaliste, dans la seconde moitié du XIXième siècle; Marx et les marxistes.

 

Un phénomène tel que le besoin ne se comprend pas à travers la question indécidable de savoir si les hommes agissent par intérêt, mais en observant la diversité et la permanence d'une notion qui se compose de deux dimensions: psychophysiologique; philosophique (5).

 

- Au plan psychophysiologique, le besoin exprime un manque accompagné d'une tendance à y faire face. On rencontre une tension entre l'intérieur de l'homme et son environnement qui se traduit par diverses manifestations et par exemple la lassitude. Dès le niveau psychosociologique émerge l'ambivalence du besoin. Le manque est indissociable de son contraire: la satiété. Les deux pôles, inséparables, entraînent les mêmes effets: violence, fatigue, etc.

 

- Au plan philosophique, le besoin, manifestation vitale, éveille l'attention vis-à-vis de la totalité de la vie. Il sort de la dimension quantitative pour entrer dans le champ de la conscience où il prend la forme du désir soumis aux châtoiements de l'évaluation. La manière de satisfaire les désirs met en branle la gamme des sentiments et l'intensité de la volonté. Le sage qui cherche à supprimer les désirs pour réduire son insatisfaction agit sur les besoins eux-mêmes et exerce sa volonté pour les moduler de façon à n'éprouver plus que ceux qu'il est effectivement possible de satisfaire. Le besoin est toujours satisfait dans un univers doté d'objets et de relations: institutions, rites, culture, etc. L'analyse du besoin est indissociable d'une bonne connaissance de l'environnement dans ses multiples dimensions.

 

Le besoin est une contrainte. En tant que donnée, il est la réalité non économique qui fonde l'économie. Le premier fait de l'histoire humaine est que l'homme mange. Mais la simple jouissance d'un objet, comme le ferait un cueilleur de fruits dormant à la belle étoile et s'abreuvant au cours d'eau, ne fonde pas l'activité économique. Celles-ci prend naissance dans l'effort et le travail nécessaire à la production. Il faut du désir pour accepter de s'astreindre à une activité conduisant à la satsifaction.

 

2. Les présupposés

 

Les présupposés sont au nombre de trois:

- La relation de la rareté et de l'abondance;

- La relation de l'utile et du nuisible;

- La relation de maître à esclave.

 

* Relation rareté/abondance. L'économie ne part pas d'une abondance donnée. Son rôle est de la produire. La plasticité des besoins donne à l'abondance le statut de problème éternel. L'abondance peut exister pour certains biens ou caractériser la vie de quelques groupes humains. Mais d'autres raretés existent ou naissent et des populations baignent dans la pénurie.

 

Les relations caractéristiques de ce présupposé sont l'échange, relation égalitaire par l'intermédiaire du prix, et la hiérarchie, en particulier celles des pouvoirs d'achat, pouvoir dans le système des échanges. La nature de l'échange importe peu. Entre individus ou organisations, de statut privé ou collectif, l'essentiel réside dans la relation.

 

* Relation utile/nuisible. L'utilité de chaque chose désigne le point de vue subjectif de l'homme: son appréciation. Mais l'économie n'est pas commandée par l'usage ou la jouissance. L'utilité à considérer est celle qui nécessite un effort pour obtenir le bien satisfaisant un besoin. Dès lors elle est relative, différentielle, car l'ascète par exemple dénie toute utilité à divers biens. Le superflu, le luxe, le gaspillage, sont du domaine économique au même titre que le non rentable, les prestations multiples telles que loisirs, vacances, protection, etc. Toutes ces dimensions font appel à l'idée d'effort d'acquisition, de comparaison entre avantages et inconvénients de leur recherche ou d'un renoncement. De plus, ils font vivre des secteurs entiers.

 

* Relation maître/esclave. Aristote fut le premier à soulever le caractère indépassable de cette relation. Il est impossible d'élaborer une économie concrète sans exploitation de l'homme par l'homme, sans servitude. La relation maître/esclave correspond à la hiérarchie présente dans toute activité organisée. Seigneur comparé à serf, patron comparé à employé, la hiérarchie est interne aux activités économiques et dépend de la division du travail, phénomène croissant avec la spécialisation technique. La question de fond: pourquoi faut-il produire? met en mouvement l'organisation du travail, l'innovation technique, la gestion efficace, les prélèvements sur l'environnement. La relation hiérarchique est le fondement de la production.

 

3: La finalité

 

Le but spécifique de l'économie est le bien-être, à distinguer des finalités abstraites et générales, atemporelles et absolues: bonheur et justice, égalité. Les fins ultimes mettent en œuvre d'autres caractéristiques de l'homme et de la société. Un but est concret et réalisable, dans un temps et sur un espace précis. Dès lors, l'idée de bien-être est une variable historique liée au niveau de développement économique d'une société. La notion prend un sens dépendant des possibilités du moment, des conditions de sa réalisation, de la représentation que nous nous en faisons. Le niveau de bien-être sera fonction de la multiplicité des besoins que nous pouvons satisfaire selon nos goûts personnels et de l'intensité des efforts à fournir pour bénéficier des moyens de satisfaire nos besoins du moment. La mesure du bien-être est donc relative aux personnes ou aux groupes, et on ne peut définir, de façon uniforme ou autoritaire, ce que doit être le bien-être pour chacun. Créer les conditions favorables est le seul but auquel peut prétendre l'économie.

 

Frédéric VALENTIN.

 

Notes:

(1) Jean-Claude PERROT, Une histoire intellectuelle de l'économie politique, Editions de l'EHESS, 1992, p.68.

(2) Jean-Claude PERROT, op. cit., p. 93.

(3) Julien FREUND, L'essence de l'économique, Presses Universitaires de Strasbourg, 1993, 160 p.

(4) Julien FREUND, Philosophie et sociologie, Cabay, Louvain-la-Neuve, 1984, p. 24.

(5) Julien FREUND, «Théorie du besoin», in: Politique et impolitique, Sirey, 1987, Chap. 23.

vendredi, 13 mars 2009

Interventie van F. Ranson ("Fête des Identitaires")

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Interventie van Frederic Ranson ("Fête des identitaires", Sint-Pieters-Leeuw, 28 februari 2009)

 

Ik heb de eer u vandaag het manifest van het nieuw-solidarisme voor te stellen. In het licht van het onderwerp van vandaag zou ik er twee ideeën in het bijzonder uit willen onthouden, ter overweging door het publiek. Eerst en vooral zou ik de deelnemers en de organisatoren willen bedanken voor hun bijdrage aan een soort gedachtewisseling die men elders in Vlaanderen niet meer kent, ondanks de veel gunstigere voorwaarden dan in Franstalig België. Identitairen die zich vandaag om sociale vraagstukken bekommeren, is al een goede manier om de nieuw-solidaristen te omschrijven.

 

In het kort gesteld is de crisis die we nu beleven deze van meer dan dertig jaar Angelsaksisch neoliberalisme. De naoorlogse internationale financiële architectuur is door de Verenigde Staten en hun hoge bankwezen altijd zodanig uitgedacht dat de lusten voor zichzelf zijn en de lasten voor de rest van de wereld. Sinds de jaren zeventig dient het neoliberalisme als nieuw instrument om hun financiële belangen veilig te stellen. De liberalisering van hun financiële markten heeft hun toegelaten de dollarheerschappij te bestendigen. Vervolgens zijn het Verenigd Koninkrijk en later de Europese Unie hen gevolgd. Het eerste gevolg ervan was dat de “sociale kapitalen” – geaccumuleerd gedurende decennia – getransfereerd zijn naar een geglobaliseerde financiële markt. Het tweede gevolg ervan was de ontwikkeling van de financiële derivaten, tegengewicht voor de risico’s op een gedereguleerde markt. De omvang van de financiële crisis is een goede indicator voor de graad van amerikanisering en globalisering.

 

Men moet goed beseffen op welke manier niet alleen de economische of financiële voorwaarden, maar daardoor evenzeer de politieke voorwaarden zijn veranderd. Ja, ze zetelen nog, onze parlementairen, maar ze zijn bijna gedegradeerd tot gemeenteraadsleden in het grote “werelddorp”. Het nationale kader, basis van ons sociale model en van de consensus arbeid-kapitaal, is bezig te verdwijnen, ondermijnd door het neoliberalisme en de vrijhandel. De verburgerlijking van rechts en links heeft hen totaal onbekwaam gemaakt om alternatieve oplossingen voor te stellen. Tegenover hun onbekwaamheid en tegenover die nieuwe voorwaarden dringen nieuwe antwoorden zich op. De huidige crisis vormt een breuk. Ofwel ziet men in deze crisis een nieuwe fase van concentratie en globalisering. Ofwel ziet men er een gelegenheid in om een legitieme volkswoede te organiseren en alternatieven te formuleren.


Het eerste idee dat ik graag wil onderstrepen is de hernationalisering van sectoren van de staat en de economie, zowel de financiële als de reële economie, van Fortis tot Opel. In de huidige toestand – waarin we worden misleid met eurocratische en andersglobalistische voorstellen die elkaar afwisselen, waarin het eenheidsdenken een “socialisme van de bankiers” aanprijst, enzovoort – is die eis reeds een revolutionaire daad. Het tweede idee om te onthouden, is dat van de monetaire soevereiniteit, wat een herdefiniëring van ons gebruikelijke begrip over geld inhoudt. Ik kom hierop terug bij wijze van kort antwoord aan de heer Robert. De ideale synthese van de tweede ideeën zou de overeenstemming zijn tussen de reële en de financiële economie. Dus: geen zeepbellen meer, geen inflatie, geen deflatie, maar een “euflatie” (neologisme van Antonio Miclavez). Helaas, dat is niet het beleidsdoel van onze centrale banken, die slechts semi-publiek zijn. Zij handelen in het belang van de bankiers en niet in het belang van de volkeren. Dezelfde kritieken – in de traditie van het populisme –  tegen de Amerikaanse Federal Reserve zijn van toepassing op de Europese Centrale Bank. De eerste banken die genationaliseerd zullen moeten worden zijn dus de centrale banken zelf!


De heer Robert heeft net het “economische mirakel” van het nationaal-socialistische Duitsland toegeschreven aan zijn minister van Economie, Schacht, en diens “politiek die zeer veraf stond van het 25-Puntenprogramma”. Anderen zullen het toeschrijven aan Keynes. Welnu, wat was het geheim van dat mirakel? De openbare werken en de Duitse herbewapening werden respectievelijk betaald met Mefo- en Öffa-wissels, dus alternatief of aanvullend geld, uitgegeven zonder de openbare schuld te doen toenemen, dat wil zeggen: gebaseerd op het begrip monetaire soevereiniteit. Deze wissels of bonnen waren op zijn minst een hybride idee, omdat ze effectief al werden voorgesteld in het 25-Puntenprogramma, onder de naam “Staatskassengutscheine” (schatkistbonnen). Vanzelfsprekend gingen de ideeën van zijn auteur, Gottfried Feder, nog veel verder. Zijn ideeën stonden zeer dicht bij de antieke en scholastieke principes die vandaag nog aanwezig zijn in het islamitische financieren. Schacht, ten gronde een bankier, heeft uiteindelijk zelfs de verdere emissie van dat geld zonder schuld geweigerd, zoals een andere beruchte bankier, Necker, méér dan een eeuw vóór hem, de emissie van assignaten had geweigerd. Is alternatief geld een utopie vandaag de dag? Nee! Wie kent bijvoorbeeld niet de dienstencheques of de maaltijdcheques, die eenvoudigweg vormen van alternatieve verloning zijn?


Misschien lijken die enkele voorstellen nog voorbarig of futuristisch, maar wij zijn er zeker van dat de verergerende situatie hen steeds meer aanvaardbaar en aanvaard zal maken. Het is dus vooral belangrijk om deze afspraak met de 21ste eeuw niet te missen of de versterking van het systeem te ondergaan door een toegenomen “global governance” die reeds gemeengoed gemaakt wordt door het eenheidsdenken. Ik dank u voor uw aandacht.

Archives: les "Grünen", quinze ans d'existence et où reste l'écologie?

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Archives de SYNERGIES EUROPEENNES - 1995

 

Les Grünen: quinze ans d'existence et où reste l'écologie?

 

«Personne ne pourra plus empêcher notre succès, sauf nous-mêmes!». C'est par ces mots que le Dr. Herbert Gruhl a ouvert le congrès de fondation du parti «Die Grünen», le samedi 12 janvier 1980. Le jour de ce congrès était un jour d'effervescence, un moment de réelle euphorie, une date historique: le mou­vement écologique, semblait-il, venait de trouver son véritable instrument, un parti qui pouvait sans crainte marcher aux élections, prendre d'assaut la forteresse de la société industrielle.

 

Quinze ans plus tard, après cette fondation qui avait été fêtée dans la joie par tous les amis de l'environnement, que reste-t-il du souci central, du souci écologique? L'espoir exprimé par le Dr. Gruhl dans son discours inaugural, «que l'esprit de l'histoire souffle dans notre direction, que le grand tournant s'annonce enfin», ne s'est pas accompli. Après que les gauchistes radicaux aient bétonné le parti, im­posé leur programme et leurs cadres, lors de la diète du parti à Dortmund en juin 1980, la plupart des con­servateurs ont quitté le parti.

 

Des “conservateurs’ chez les Verts? Est-ce possible? Qui se souvient encore et sait que ce sont des forces conservatrices qui ont joué un rôle dominant dans la phase de construction du parti vert? Herbert Gruhl, qui fut pendant les années 70 le porte-paroles en matières d'environnement pour la fraction parle­mentaire CDU/CSU, était la personnalité la plus importante de cet aréopage. En 1978, il avait quitté la CDU et fondé la «Grüne Aktion Zukunft», dont le programme avait été élaboré par des esprits conservateurs comme Christa Mewes et le Prof. Bernhard Grzimek. De même, les premières «Listes Vertes», apparues en 1977 en Basse-Saxe, à Hambourg et dans le Schleswig-Holstein, avaient pour pères fondateurs des “conservateurs” plus ou moins radicaux comme Carl Beddermann et Baldur Springmann.

 

Les origines conservatrices (un conservatisme axiologique et non pas institutionnel, ndt) de l'écologie politique allemande n'étonnent que ceux qui avaient adopté, dans le cadre de la droite régimiste, les posi­tions de Franz-Joseph Strauss qui, trente ans auparavant, avait abandonné les positions originales et initiales de l'idéologie et de l'axiologie conservatrices et avait décidé de «marcher à la tête du progrès (technique)». Le mouvement écologique demeure, par ses origines et par les attitudes qu'il préconise, un mouvement conservateur bien tranché, dont les racines rejoignent celles des associations de protection de la nature et des terroirs, nées sous l'Allemagne de Guillaume II. Les hommes intelligents de la gauche ne l'ont pourtant pas oublié. Ainsi, Peter Glotz, théoricien de la social-démocratie, auteur de thèses perti­nentes sur la “neue Rechte” et homme de dialogue, a mille fois raison quand il dit que le camp conserva­teur s'est fait “chiper” le fleuron des bijoux  de son arsenal conceptuel en perdant l'écologie au profit de la gauche.

 

Le noyau conservateur de l'écologie ne peut effectivement être nié: le primat de “ce qui a eu une crois­san­ce organique” sur “ce qui a été fait ou fabriqué”, la propension à accepter l'ascèse et la vie mo­deste, la pensée en termes de générations, une vision sceptique de l'homme, la protection de la famille en tant que plus petite cellule naturelle parmi les communautés humaines, la critique à l'endroit des supersti­tions aveugles du progressisme et du technicisme, le souhait de décentralisation, le vœu de voir advenir des structures politico-administratives proches du peuple, la préférence pour les formes vitales alterna­tives, rurales et traditionnelles à la place de la civilisation urbaine caractérisée par la froideur des senti­ments: tout cela, ce sont des points de convergence où se rencontrent les idéologies conservatrices et écologiques. Enfin, ce complexe d'idées comprend également l'attachement à la petite patrie, attache­ment que les écologues n'interprètent pas dans un sens nationaliste, mais à la lettre, comme protection de l'environnement, du terroir.

 

En se revendiquant d'une «Europe des Régions», le mouvement vert, lors des élections européennes de 1979, reprenait à son compte l'héritage conservateur du fédéralisme. Aujourd'hui, ces conceptions régio­nalistes ont disparu du programme des Verts: à leur place, on trouve une profession de foi à l'endroit des structures multinationales. Plus personne, chez les “alternatifs de la gauche verte”, ne semble choqué que de telles allégeances permettent non seulement l'avénement d'un Eldorado pour les tenants d'une économie débridée visant l'expansion infinie, mais consacrent aussi la fin des exigences originelles du mouvement vert qui voulait, jadis, la décentralisation et la transparence du pouvoir. Lorsqu'on demande aux élus ou aux cadres verts d'aujourd'hui, ce qu'ils comptent mettre en œuvre pour sauver nos terroirs et notre environnement, on ne reçoit plus que des réponses condescendantes.

 

Examinons maintenant les raisons internes qui ont fait que les forces conservatrices du mouvement écologique aient été si rapidement évincées. C'est à cause de leur absence de discipline qu'elles ont été si vite démantelées au moment de la fondation des Verts; pour le dire en une formule plus lapidaire: les cadres expérimentés issus des divers groupes d'action communistes se sont avérés nettement supé­rieurs, dans le maniement des armes politiques que sont les compositions, rédactions et présentations des ordres du jour dans les diètes et les réunions d'un parti, aux masses de braves petits bourgeois qui partaient au combat sans règle. L'histoire des Verts est aussi l'histoire d'une tentative conservatrice avortée.

 

Aujourd'hui, les Verts sont un parti-mouvement situé dans le milieu des alternatifs de gauche. Dans les communes rurales, et même dans de nombreux conseils communaux, on trouve encore beaucoup de mili­tants environnementalistes parfaitement compétents et travailleurs, dont l'idéologie ne se situe pas né­cessairement à gauche, mais qui se retrouvent, peut-être un peu malgré eux, au service des Verts. Aux niveaux de la direction du parti, toutefois, on ne trouve plus que des activistes issus de groupes protesta­taires de l'extrême-gauche qui avaient jadis colonisé le milieu des sous-cultures urbaines dans les grandes villes. Ce sont eux qui déterminent les orientations fondamentales du parti.

 

Ce qui est tragique dans cette évolution, c'est que les Verts commencent à enregistrer des succès au ni­veau parlementaire, au moment où ils s'éloignent de leur noyau idéologique originel. Exiger par exemple une immigration illimitée est en contradiction flagrante avec l'idée écologique du départ qui critiquait et re­fusait l'occupation effrénée du pays, la sur-sollicitation du sol agraire et l'augmentation exponentielle de la consommation. Le philosophe Robert Spaemann constate avec pertinence: «L'idéal émancipateur (propre des “Lumières”, ndt) est incompatible avec l'assertion fondamentale de l'écologie. L'idéologie émancipatrice, que traînent les Verts à leurs basques, est tout simplement le modernisme, qui nous a conduit à l'actuelle situation de crise écologique: c'est en effet l'expansion illimitée des désirs humains sans égard pour les lois de la vie, auxquelles l'homme est irrémédiablement soumis, qui nous a conduit où nous sommes. Dans la mesure où les Verts tentent de poursuivre les objectifs de cette idéologie et veu­lent la radicaliser à l'extrême, l'idée écologique de l'origine s'effondre».

 

Si l'on tient compte de ce paradoxe philosophique et pratique, on ne s'étonne plus que la plupart des véri­tables écologues, des vrais amoureux de l'environnement, ne s'intéressent plus aux résultats électoraux des Verts et restent indifférents aux faits qu'ils mordent sur l'électorat libéral ou qu'ils soient en mesure de former de “nouvelles majorités”. De fait, que peuvent bien signifier ces résultats? Tout, sauf un succès des véritables idées écologiques! Robert Spaemann nous tient des propos sans enthousiasme, qui pour­raient bien déprimer plus d'un militant écologique. Mais son analyse autorise tout de même l'espoir: si les Verts poursuivent leur chemin dans le cul-de-sac du progressisme, ils créeront automatiquement un vide politique, où pourront s'engouffrer les partisans de l'«écologie pure». Les conservateurs parmi les défen­seurs de l'environnement doivent dès aujourd'hui se rendre compte qu'une chance s'offrira très bientôt à eux. Herbert Gruhl disait en 1988: «La droite et la gauche appartiennent au passé. Il s'agit désormais de lutter pour la sauvegarde et la perpétuation de la Vie sur cette Terre ou d'accepter son anéantissement rapide. La combat décisif entre les Préservateurs et les Destructeurs a commencé depuis longtemps. Pourquoi les Préservateurs ne s'appelaeraient-ils pas “conservateurs”?».

 

Heinz-Siegfried STRELOW.

(Article paru dans Criticón, n°145, janv.-mars 1995).

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mercredi, 11 mars 2009

A propos du décisionnisme

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ARCHIVES DE SYNERGIES EUROPEENNES - 1995

A propos du décisionnisme

 

Le décisionnisme est, comme son nom l'indique, une pensée en termes de décision. Le décisionniste est l'homme politique qui veut décider, aboutir à une décision, c'est-à-dire à un acte de volonté qui a ses res­sorts en lui-même et qui est vierge de toute compromission. Le décisionniste, en conséquence, s'oppose à toutes les formes de compromis que permet le libéralisme. Carl Schmitt, catholique et conservateur, est sans nul doute celui qui, parmi les tenants de la “révolution conservatrice”, a pensé le décisionnisme de la manière la plus conséquante. Chez les penseurs nationaux-révolutionnaires de la même époque, on trouve également des décisionnistes.

 

Pour Carl Schmitt, ce qui est important, c'est «que dans la simple existence d'une autorité réellement au­toritaire, il y ait de la décision, et que toute décision soit valable et valide, car dans les choses les plus essentielles [du politique], il est plus imoportant de savoir que quelqu'un décide, que de savoir comment cette décision est décidée» (1). Il s'agit donc de poser une “décision” en soi, en pleine souveraineté. L'Etat, à l'époque de Carl Schmitt, du moins dans le domaine du politique, est le moyen le plus approprié pour poser de telles décisions; c'est lui qui incarne la souveraineté qui est, en fait, rien d'autre que le “monopole de la décision” (2). Il s'agit de reconnaître le bien-fondé, l'utilité pratique, l'excellence, de la décision absolue, c'est-à-dire de la décision pure, non raisonnée, qui n'est pas le produit d'une discus­sion, qui n'a nul besoin de se justifier, qui jaillit du néant (3). L'essence de l'Etat apparaît ici clairement, parce qu'il est le vecteur premier de la décision, devient de la sorte le moyen le plus précieux pour contrer, à l'intérieur, la guerre civile que déclenchent les idéologies et les intérêts contradictoires. «L'essence de l'Etat réside en ceci, qu'il y ait [par lui] une décision» (4).

 

La particularité de Carl Schmitt, dans le cadre de cette “révolution conservatrice” mise en exergue par Armin Mohler, c'est, qu'en tant que penseur catholique, il voit toujours Dieu trôner au-dessus de tout. D'où son constat: «Tous les concepts prégnants des doctrines modernes de l'Etat sont des concepts théolo­giques sécularisés» (5). Toutefois, le Règne de Dieu n'est pas de ce monde, où c'est l'homme qui gou­verne, où c'est l'homme qui est le fondateur des valeurs. Mais comment réalise-t-on concrètement les valeurs, comment établit-on les lois? Schmitt ne cesse de citer l'Anglais Thomas Hobbes, en acceptant ses théorèmes: «Auctoritas, non veritas facit legem» (6). L'autorité est la source des lois, car le pouvoir lui en donne la force, c'est elle qui pose les décisions qui génèrent les lois. C'est au départ de cette con­ception de Hobbes, que la “révolution conservatrice” allemande a opté pour les systèmes autoritaires, parce qu'ils éliminent les querelles intérieures et les bannissent de la “communauté organique”.

 

Chez les nationaux-révolutionnaires, que Mohler classe aussi dans la “révolution conservatrice”, il y a donc aussi des décisionnistes. Le concept de décision a fasciné cette gauche non-conformiste, si bien que l'hebdomadaire du mouvement “Widerstand” (= Résistance) d'Ernst Niekisch portait le titre d'Entscheidung (= Décision). Ce n'est pas un hasard. Chez Niekisch, par d'arrière-plan théologique, au contraire de Schmitt. Le décisionnisme de Niekisch découle d'une position fondamentaliste absolue. Niekisch exige la “décision permanente”, car l'“idéologie de Widerstand” équivaut à une “protestation al­lemande” contre le “romanisme”, à une option pour l'Est contre l'Ouest, pour l'éthique prussienne du ser­vice contre le libéralisme (7). Cette protestation tous azimuts, incessante, permanente, exige, selon Niekisch, une “nouvelle attitude humaine”, une promptitude à accepter et à supporter un “destin hé­roïque”. Pour généraliser cette attitude contestatrice permanente, il faut recruter des hommes qui soient “déjà saisis par l'esprit du futur” (8). Niekisch accuse et brocarde l'éternelle indécision allemande: «Il existe une lenteur, une lourdeur, une faiblesse typiquement allemandes, qui, sans cesse, cherche, en louvoyant, à échapper à la décision nécessaire» (9). Mais le devoir éthique de trancher, donc de décider, de prendre littéralement le taureau par les cornes, personne ne peut l'éviter, le refuser.

 

Sur le plan littéraire, l'exigence de décision se retrouve, à un degré de radicalité encore plus élevé, chez Ernst Jünger, qui, à cette époque, appartenait encore aux cercles nationaux-révolutionnaires, et était une figure de proue du “nouveau nationalisme”. Il écrivait: «C'est pourquoi cette époque exige une vertu entre toutes: celle du décisionnisme. Il s'agit de pouvoir vouloir et de pouvoir croire, sans se référer au contenu que cette volonté et cette foi se donnent» (10). Cet appel de Jünger est un appel à la “décision en soi”. Chez Jünger, la décision est couplée à un désir ardent de nouveauté, au désir d'une révolution, d'où les éléments de nihilisme ne sont pas totalement absents. Chez lui, la décision est toute imprégnée de l'esprit des “orages d'acier”: elle est quasi synonyme de “mobilisation totale”. «Notre espoir repose sur les hommes jeunes, qui souffre de fièvre, parce qu'ils sont dévorés par le pus verdâtre du dégoût, notre es­poir repose dans les âmes saisies par la grandezza, dans les âmes que nous voyons errer dans les si­nuosités de l'ordre des auges. Notre espoir repose en une révolution qui s'opposerait à la domination du confort, en une révolution visant à détruire le monde des formes, en une révolution qui a besoin d'explosifs pour nettoyer et vider notre espace vital, afin qu'il y ait la place pour une nouvelle hiérarchie» (11).

 

Le décisionnisme est en tant que tel une méthode, plus exactement une méthode de critique sociale, une méthode finalement assez proche de la théorie critique utilisée par les gauches nouvelles. Mais il peut bien entendu étoffer l'arsenal d'une nouvelle droite, qui devrait en être l'héritière et la continuatrice, car de larges segments de la “neue Rechte” allemande sont d'ores et déjà influencés par Carl Schmitt. En effet, la critique du déclin du politique à l'ère du libéralisme, formulée par Carl Schmitt en 1922, reste d'une éton­nante actualité: «Aujourd'hui rien n'est plus moderne que la lutte contre le politique. Les financiers améri­cains, les techniciens de l'industrie, les socialistes marxistes, les révolutionnaires anarcho-syndica­listes, s'unissent pour exiger que soit éliminée la domination immatérielle du politique sur la matérialité de la vie économique. Il ne devrait plus y avoir que des tâches organisationnelles, techniques, économiques et sociologiques, mais il ne pourrait plus y avoir de problèmes politiques. Le mode aujourd'hui dominant de la pensée économico-technique n'est déjà plus capable de percevoir la pertinence d'une idée politique. L'Etat moderne semble être vraiment devenu ce que Max Weber voyait se dégager de lui: une grande en­treprise. En général, [dans ce contexte libéral], on ne comprend une idée politique que lorsque ses te­nants sont parvenus à prouver à une certaine catégorie de personnes qu'elles ont un intérêt économique direct et tangible à l'instrumentaliser à leur profit. Si, dans ce cas d'instrumentalisation, le politique dispa­raît et sombre dans l'économique, ou dans le technique ou l'organisationnel, par ailleurs, il s'épuise dans les intarissables discours ressassant à l'envi les banales généralités que l'on ne cesse d'ânonner sur la “culture” ou sur la “philosophie de l'histoire”, discours définissant au nom de critères esthétiques l'air du temps tantôt comme classique, tantôt comme romantique ou comme baroque, en hypnotisant les “beaux esprits”. Ce basculement dans l'économique ou ce discours [“cultureux”], passe à côté du noyau réali­taire de toute idée politique, de toute décision qui, en tant que décision, est toujours d'une plus haute élé­vation morale. La signification réelle que revêtent en fait les philosophes de l'Etat contre-révolutionnaires, réside entièrement dans la dimension conséquente de leur démarche, laquelle repose sur la décision, [baigne dans l'incandescance de la décision]. Ces philosophes contre-révolutionnaires mettent si fort l'accent sur l'instant intense de la décision qu'ils annulent finalement l'idée de légitimité, à partir de la­quelle, pourtant, ils avaient amorcé leurs réflexions» (12).

 

Le déclin du politique découle de l'évitement systématique des décisions. La modernité passe de fait à côté de la décision essentielle, de la décision qui fonde le concept du politique, c'est-à-dire de la décision qui aboutit à la désignation de l'ami et de l'ennemi. «C'est ainsi que Carl Schmitt définit la modernité: elle est oublieuse du politique. Dans cette perspective, le communisme et le capitalisme apparaissent pour ce qu'ils sont: les deux pôles complémentaires d'une même positivité impolitique, qui constitue le terminus ad quem d'une objectivisation mécaniciste du social, à l'œuvre depuis le XVIIième siècle» (13).

 

Jürgen HATZENBICHLER.

(traduction française: Robert STEUCKERS).

 

Notes:

(1) Carl SCHMITT, Politische Theologie, Berlin, 1990, p. 20.

(2) Ibid., p.71.

(3) Ibid., p.83.

(4) Ibid., p.71.

(5) Ibid., p.49.

(6) Ibid., p.44.

(7) Ce nom dérive de celui du mensuel Widerstand, dirigé par Niekisch.

(8) cf. Uwe SAUERMANN, Ernst Niekisch und der revolutinäre Nationalismus, München, 1985, pp. 173 & ss.

(9) Ernst NIEKISCH, cité par Friedrich KABERMANN, Widerstand und Entscheidung eines deutschen Revolutionärs, Köln, 1973, p. 165.

(10) Ernst NIEKISCH, Widerstand, Krefeld, 1982, p. 164.

(11) Ernst JÜNGER, Das abenteurliche Herz - Erste Fassung, Stuttgart, 1987, p. 110.

(12) E. JÜNGER, ibid., pp. 113 & ss.

(13) C. SCHMITT, ibid., pp. 82 & ss.

mardi, 10 mars 2009

Peron y el socialismo nacional

Perón y el socialismo nacional

Ex: http://elfrentenegro.blogspot.com/



Juan Domingo Perón y el socialismo nacional:
LA EMPRESA PARA QUIEN LA TRABAJA
por Javier Iglesias

El texto que sigue ha sido reeditado en Barcelona (1998) por la Asociación Alternativa Europea. Su autor, de origen español, era dirigente del peronismo, lider del Movimiento de los Sin Techo bonaerense cuando, en septiembre de 1996, fue asesinado en la capital argentina en una emboscada tendida por la policía menemista.

Introducción

Las realizaciones y conquistas sociales del Peronismo en su primera etapa de gobierno (1946-1955), son tantas y tan importantes que, entre los propios seguidores de dicho Movimiento, es común interpretarlas como el fruto de una Revolución totalmente realizada; una especie de "Edad de Oro" de los trabajadores y del Pueblo argentino que, con algunas variaciones de detalle, puede y debe recuperarse mediante la organización y la lucha.

Paradójicamente esa versión del Peronismo como una Revolución "concluida" que hay que repetir y recuperar, no coincide en lo más mínimo con lo que pensaban aquellos que la llevaron a cabo en el pasado, ni mucho menos y en especial, con los planteamientos del mismo General Juan Domingo Perón. Para todos ellos, la riquísima experiencia política, económica y social del periodo 1943-1955 es apenas el inicio de una transformación revolucionaria mucho más profunda y, por lo que se refiere a lo económico, el verdadero comienzo de un proceso de gradual socialización de los medios de producción.

Que ese objetivo socializante es afirmado explícitamente y desde un principio por importantes sectores del Movimiento Peronista, puede probarse con la simple lectura de los estatutos de la CGT aprobados en su Congreso Extraordinario de abril de 1950. En su Preámbulo, después de afirmar que "la Doctrina Peronista, magistralmente expuesta por su creador, el General Juan Perón, define y sintetiza las aspiraciones fundamentales de los trabajadores argentinos y les señala la verdadera doctrina, con raíz y sentido nacional, cuya amplia y leal aplicación ha de forjar una Patria Justa, Libre y Soberana", fundamentan esa definición ideológica en el hecho de que:
"El proceso de realización tiende hacia la gradual socialización de los medios de producción y en cambio impone al proletariado el deber de participar y gravitar desde el terreno sindical para afianzar las conquistas de la Revolución Peronista, para consolidarlas en el presente y ensancharlas en el futuro". [1]

La inequívoca definición del Movimiento Obrero Argentino -calificado habitualmente por el General Perón como la "columna vertebral" del Peronismo- no es, por otra parte, una simple declaración sectorial. En ocasión tan importante como el 1º de mayo de 1952, en su alocución a los legisladores argentinos con motivo de la inauguración del 86º periodo ordinario de sesiones del Congreso Nacional, el propio Líder justicialista también afirma tajantemente:

"Así como la clase de los hombres que trabajan va substituyendo a los representantes del individualismo capitalista en el panorama político, también la clase de los hombres que trabajan va substituyendo progresivamente a las empresas individualistas, con las nuevas organizaciones de tipo cooperativo. Ello significa que los trabajadores, por la natural evolución económica de nuestro sistema, van adquiriendo progresivamente la propiedad directa de los bienes capitales de la producción, del comercio y de la industria. Este camino, por el que avanzan ya los trabajadores argentinos, tiene un largo pero fecundo recorrido y posibilitará el acceso del pueblo a la conducción de su propia economía. El viejo ideal del pueblo, en la plena posesión de sus derechos políticos, sociales y económicos, se realizará entonces, y en aquel momento la justicia social alcanzará la cumbre de sus objetivos totales y la doctrina peronista será la más bella y absoluta de las realidades". [2]

Que el Peronismo fundacional aspiraba a la total socialización de "los bienes capitales de la producción, del comercio y de la industria" resulta, pues, irrefutable, más allá del ritmo de esa socialización; ritmo que, como es natural, depende más de la cambiante relación de fuerzas nacional e internacional que de cuestiones ideológicas o esquemas teoricistas de salón.
Tercera Posición

Cuando, a partir de los propios textos peronistas, afirmamos que el Peronismo apunta hacia la socialización de los medios de producción, ¿estamos coincidiendo con la acusación del "nacionalismo" fascistizante y antiperonista según la cual el Justicialismo sería "un movimiento que sale del capitalismo y camina hacia el comunismo"? [3] Obviamente no. Los creadores de la Doctrina Peronista siempre recalcaron su carácter de "Tercera Posición"; sus postulados anticapitalistas pero, a la vez, diferentes de los del colectivismo totalitario y burocrático marxista. En el ya citado discurso del 1º de mayo de 1952 es también Perón el que recalca magistralmente ese "tercerismo" económico peronista:

"Para el capitalismo la renta nacional es producto del capital y pertenece ineludiblemente a los capitalistas. El colectivismo cree que la renta nacional es producto del trabajo común y pertenece al Estado, porque el Estado es propietario total y absoluto del capital y del trabajo. La doctrina peronista sostiene que la renta del país es producto del trabajo y pertenece por lo tanto a los trabajadores que la producen." [4]

El Peronismo no confunde, por lo tanto, socialización con estatización. Es anticapitalista pero pretende, a diferencia del marxismo, no la entrega de los medios de producción a un gigantesco Estado-Patrón dictatorial sino directamente a los propios trabajadores. Se trata de una concepción con mucha semejanza con lo que posteriormente será conocido como "socialismo autogestionario" [5] aunque también puede considerarse emparentada a las posiciones del anarcosindicalismo y del "sindicalismo revolucionario" europeo anterior a la Segunda Guerra Mundial; algo que han destacado recientes estudios ideológicos imparciales como los de Cristián Buchruker: "Más que del socialismo clásico, el peronismo en gestación adoptó ideas fundamentales del anarcosindicalismo hispano-francés, el cual ya tenía una tradición no despreciable en el gremialismo argentino. Se trata aquí de dos exigencias: a) el directo protagonismo político del sindicato (no por mediación del partido) sobre todo a través de la huelga general como instrumento de acción; y b) el objetivo lejano de una administración de los medios de producción por los sindicatos mismos." [6].

Postmarxismo revolucionario

Debe destacarse, por otra parte, que el "tercerismo" peronista no implica necesariamente "equidistancia" con respecto al capitalismo y al comunismo. En ello es igualmente diáfano Perón:
"Pensamos que tanto el capitalismo como el comunismo son sistemas ya superados por el tiempo. Consideramos al capitalismo como la explotación del hombre por el capital y al comunismo como la explotación del individuo por el Estado. Ambos 'insectifican' a la persona mediante sistemas distintos. Creemos más; pensamos que los abusos del capitalismo son la causa y el comunismo el efecto. Sin capitalismo el comunismo no tendría razón de ser, creemos igualmente que, desaparecida la causa, se entraría en el comienzo de la desaparición del efecto." [7]

Es decir: el objetivo del Peronismo no es otro que hacer desaparecer el capitalismo -la "causa" de todos los problemas económicos, políticos y sociales- lo que, por si mismo, impedirá que surja un "efecto" indeseado: el capitalismo estatal "insectificante" comunista. Esta distinción es enormemente importante porque hoy, ante el pase de las burocracias ex-comunistas de la URSS y Europa del Este al bando capitalista encabezado por los archibandidos yanquis, no faltan pícaros supuestamente "peronistas" que declaran "superada" la Tercera Posición y "recomiendan" la "aceptación del triunfo capitalista". A esos proveedores de coartada de la claudicación y el más infame renunciamiento, les conviene repasar las luminosas enseñanzas de Perón y la compañera Evita: "El peronismo no puede confundirse con el capitalismo, con el que no tiene ningún punto de contacto. Eso es lo que vió Perón, desde el primer momento. Toda su lucha se puede reducir a esto: en el campo social, lucha contra la explotación capitalista." [8].

El Peronismo, por lo tanto, se enfrenta implacablemente al capitalismo más allá de si el comunismo existe o no. Su rivalidad con el marxismo es en el terreno de la eficacia revolucionaria: ver quién consigue derribar finalmente al injusto sistema capitalista. De ahí las precisas orientaciones del General Perón: "Nosotros somos la cabeza del movimiento nacional revolucionario. A ningún partido o movimiento se le debe permitir colocarse en una actitud más 'revolucionaria' que la nuestra. El día que eso ocurriera, habríamos perdido nuestra 'razón de ser' como movimiento, al ser reemplazados en la conducción popular. A los justicialistas que se coloquen en actitudes 'conformistas' o 'conciliadoras' para con el sistema imperante en nuestra patria, hay que expulsarlos del Movimiento sin miramientos. Son enemigos del pueblo y por lo tanto, enemigos nuestros." [9].

La deserción de las cúpulas marxistas -ya sean socialdemócratas o comunistas- del frente revolucionario al que supuestamente pertenecían, resuelve en la práctica el pleito entre Peronismo y marxismo al probar que el único anticapitalismo y antiimperialismo posible en la actualidad es el corporizado en Movimientos Nacional-Populares y Terceristas de Liberación: auténtico Peronismo argentino, bolivarianos de Venezuela, fundamentalismo revolucionario islámico de las naciones y pueblos musulmanes, resistencia armada torrijista panameña, etc. Los escasos núcleos que, con mejores deseos que resultados, aún intentan seguir aferrados a la vieja liturgia tradicional comunista, antes o después abandonarán las marchitas y superadas banderas del comunismo para integrarse lisa y llanamente a las pujantes fuerzas del nacionalismo popular revolucionario y de la Tercera Posición.

Proceso de socialización

Siendo el General Perón el conductor de un proceso revolucionario real y no un utopista de gabinete, es lógico que el grueso de su producción teórica más que dedicarse a teorizar sobre la sociedad futura se concentre en los problemas prácticos de un gobierno de liberación nacional y social o, tras la contrarrevolución oligárquica de 1955, en la lucha concreta para la recuperación del poder por parte del pueblo argentino. Eso no significa que el proceso de socialización por el propugnado sea tan a largo plazo que se convierta en una simple e inoperante expresión de deseos o fórmula retórica. De hecho el máximo dirigente justicialista expone en forma constante y repetida las fórmulas específicas que, a su juicio, revestirá ese proceso de socialización no estatista. Un interesante aporte doctrinario en ese sentido es el vertido en una larga conferencia concedida en 1970 al periodista uruguayo Carlos María Gutiérrez, corresponsal de Prensa Latina. Ante la pregunta "¿usted cree que además habría de ir, en el caso de la toma del poder, a la destrucción de ese tipo de estructuras burguesas; digamos, de la libre empresa, para emplear el término corriente? ¿Ir más allá de lo que se fue entre 1950 y 1955?", Perón responde sin la menor duda: "Nosotros lo estábamos haciendo, pero lo estábamos haciendo a través de un sistema. Que ya había empresas... Las cervecerías del país estaban todas en manos de una cooperativa del sindicato de cerveceros. Yo pensaba hacer lo mismo con los ferrocarriles, en cuanto suprimiera el déficit; entregarlos al sindicato de los ferrocarriles. Y había fábricas, como... De la Lanera del Sur... la... no me acuerdo cómo se llama, que ya estaban sobre ese sistema.
La concepción es ésta: un promotor de empresa emplea cien millones para promover una empresa. Hasta que él ha retirado esos cien millones más su interés, esa empresa debe ser exclusivamente de él. Pero cuando ha retirado su capital, más un interés razonable, esa empresa ya no es de él; es de todos los que la trabajan. Esa es la concepción cooperativista de la empresa. Por ese sistema, usted va llevando todo hacia cooperativas; cooperativas donde trabajan patrones, obreros y todos, pero que trabajan en la producción.
Ahora, si eso no se hace en todas las empresas, el Estado, al final tendrá que hacerse cargo de aquellas donde no se ha realizado." [10].

Se trata de una cita tan extensa como instructiva que nos muestra un modo (no el único propuesto por Perón) de llegar gradual e incruentamente a la entrega de los bienes de producción a los trabajadores; recalca la concepción cooperativista-sindical de ese proceso de socialización y, a la vez, recuerda ejemplos concretos con los que el Peronismo en el poder avanzó en ese sentido.

Cooperativas y Peronismo

La concepción de las formas cooperativistas de propiedad como uno de los medios principales de socialización no estatista de la economía es lógica "porque -como recalca Perón- es un ideal justicialista que todo el proceso económico quede en manos de los 'hombres que trabajan' y el sistema cooperativo tiende a ello." [11].

Que no se trata de una mera declaración retórica salta a la vista si comparamos, por ejemplo, las cifras relativas al cooperativismo argentino entre 1946 y 1951. Entre esas fechas, el número de cooperativas pasa de 1.299 a 2.400, el número de asociados de 500.000 a 800.000, el capital suscrito (en millones de m$n) de 95 a 350, y las operaciones efectuadas (también en m$n) de 361 a 2.000. O dicho sea de otro modo: en apenas cinco años el sector cooperativo aumenta en un 100% en su número, en un 60% en asociados, en un 260% del capital suscrito, y en un 440 por ciento de las operaciones realizadas.

Este gigantesco salto se profundiza aún más a partir de 1952 y, sobre todo, con la promulgación del Segundo Plan Quinquenal. En su exposición del 1º de mayo de ese año, el General Perón muestra esa línea estratégica en lo económico: "Las cooperativas agrarias han merecido nuestro total apoyo, como que ellas son, en la economía social de la doctrina peronista, unidades de acción económica que realizan el acceso de los hombre que trabajan a la posesión total del instrumento y del fruto de sus esfuerzos. La ayuda crediticia a las cooperativas alcanzó en el quinquenio a la suma de 1.000 millones de pesos y va en progresivo aumento. Señalo como norma tendida hacia el futuro la de preferir en el crédito a las organizaciones cooperativas sobre las empresas de carácter individual. Llegaremos progresivamente a dejar en manos de la organización cooperativa agraria todo el proceso económico de la producción. No debe haber en el país un sólo agricultor que no sea cooperativista, porque la organización cooperativa es al trabajador agrario lo que la organización sindical es al trabajador industrial, sin que esto signifique que la industria no pueda organizarse en forma cooperativa." [12].

La cooperativización-socialización total de los medios de producción es, por lo tanto, un objetivo explícito del Peronismo. Esa cooperativización se concentra en un principio sobre todo en el terreno agrario, por ser ésta un área económica de más fácil socialización y donde, además, existe una notable tradición de organizaciones cooperativas previa al Justicialismo, pero se expande hasta lograr el fin señalado por Juan Domingo Perón: las "cooperativas como unidades básicas justicialistas para la organización nacional de la producción, la industria y el comercio." [13].

Estado Revolucionario

La defensa que el Peronismo hace del modelo cooperativo de organización económica, no puede ni debe confundirse con las fantasías reformistas que sobre las cooperativas tienen grupos pequeñoburgueses como los diversos desprendimientos del Partido Socialista del reputado gorila Juan B. Busto. El Movimiento Nacional de Liberación creado por Perón, al contrario que dichos grupos socialdemócratas, sabe que, aunque parezca una perogrullada recordarlo, el sistema capitalista está creado para que triunfen los capitalistas y, por tanto: "Los fracasos del cooperativismo, en tiempos de la economía capitalista, son explicables y perfectamente lógicos: una cooperativa, exponente perfecto de economía social, no podía conciliar sus intereses ni podía enfrentarse con los monopolios del capitalismo." [14]. Para evitar eso hace falta un ordenamiento político y social, un Estado, que cambie las "reglas de juego" capitalistas y las sustituya por otras de tipo revolucionario, popular, anticapitalista y pro-cooperativista, ya que "indudablemente el movimiento cooperativo no puede ir adelante sin el apoyo del Gobierno. En todas las partes del mundo las cooperativas han fracasado cuando han tenido en contra al Gobierno." [15].

En concreto, ello implica:

1º) Arrebatar a la oligarquía el control sobre los sectores claves de la economía. Según la Constitución Justicialista de 1949, en su artículo 40, esos sectores clave son la importación y exportación, minerales, caídas de agua, yacimientos de petróleo, de carbón y de gas, y las demás fuentes naturales de energía, con excepción de los vegetales, así como los servicios públicos. Corresponde su propiedad, en un principio, al Estado aunque, como ya vimos, a medida que avanza el proceso revolucionario parte de esas actividades pueden pasar a manos de los trabajadores del sector por medio de sus cooperativas obreras o sindicatos. Es posible también, como muestra el caso de SEGBA, la existencia de formas intermedias de cogestión obrero-estatal así como empresas con conducción tripartita: Estado-trabajadores-usuarios.

2ª) Una planificación indicativa que, sin caer en los errores centralistas burocráticos de la planificación de tipo estatista-comunista, impida que con el viejo cuento del "mercado libre" acaben manipulando la economía un puñado de grandes empresas extranjeras o nativas: "La cacareada 'libertad de la economía' no ha pasado nunca de ser una ficción, desde que, a la economía o la dirige el Estado o la hacen, en su lugar, los grandes consorcios capitalistas, con la diferencia de que el primero puede hacerlo en beneficio del pueblo; en cambio, los segundos lo hacen generalmente en su perjuicio." [16].

3º) Formas de apoyo directo del Estado a las cooperativas y empresas sindicales, lo que incluye desde apoyo crediticio preferencial hasta la contratación directa por parte del Estado en aquellas tareas que éste suele descargar en las empresas capitalistas. Aquí conviene recordar una directísima afirmación del General Perón ante miembros del Comité Central y delegados regionales de la CGT que visitaron la Residencia Presidencial de Olivos el 9 de agosto de 1950: "El Gobierno está dispuesto a dar a las cooperativas obreras la oportunidad para que hagan negocios que les permitan ganar mucho dinero; en lugar de dárselos, como se hacía antes, a entidades capitalistas.".

4º) El combate en el terreno ideológico contra las supervivencias de la mentalidad individualista burguesa, fomentando el conocimiento de las formas de economía social y cooperativista, especialmente entre la juventud. El Segundo Plan Quinquenal, por ejemplo, en su apartado IV.G.14 sostiene: "La difusión de los principios del cooperativismo y la constitución de cooperativas escolares y estudiantiles serán auspiciadas por el Estado a fin de contribuir a la formación de la conciencia nacional cooperativista y prestar servicios útiles a los alumnos." [17].

Socialización integral

Cuando anteriormente recordábamos que para el General Perón las cooperativas debían tender a convertirse en las "unidades básicas justicialistas para la organización nacional de la producción, la industria y el comercio", queda claro que la socialización-cooperativización que el Peronismo propugna no se reduce al nivel de cada empresa o unidad económica de producción. Esto es así porque si bien la entrega de todas las empresas a sus propios técnicos y trabajadores autoorganizados en cooperativas, impide tanto la explotación del hombre por el hombre (capitalismo), como la explotación del hombre por el Estado (comunismo) no por ello resuelve todos los problemas de la economía. Para empezar, no asegura la igualdad de oportunidades puesto que existen sectores económicos más productivos que otros y, dentro de cada sector económico, empresas más grandes y más chicas, más modernas y más atrasadas, etc. Tampoco se garantiza una real solidaridad nacional desde el momento en que si esas empresas cooperativizadas se desenvuelven en el marco de una economía de mercado necesariamente se provocará una brutal competencia entre las empresas, considerando cada colectivo obrero o cooperativa un rival en la búsqueda del beneficio a los otros colectivos obreros cooperativos.
Para evitar esos posibles efectos negativos el General Perón impulsa no cooperativas aisladas sino "la unversalización de la organización cooperativa" [18] mediante la Federación de Cooperativas de cada rama de producción. Éstas, estructuradas democráticamente y desde abajo hacia arriba, permiten que cada empresa sea gestionada de un modo directo y sin burocracias externas por sus propios técnicos y trabajadores, pero, a la vez, crea canales solidarios de redistribución de los beneficios generales para apoyar a aquellas cooperativas obreras asociadas que, por diversas razones, tienen que sufrir desventajas objetivas ajenas al trabajo o la gestión de su colectivo laboral: implantación en provincias alejadas del circuito comercial, catástrofes naturales...

Hay que resaltar que, como detalla Perón el 13 de octubre de 1952 en una exposición ante representantes de las cooperativas agropecuarias, esas Federaciones de Cooperativas no engloban sólo a una rama económica sino que participan de un modo directo en todo el proceso productivo y de comercialización. En el caso de esas mismas cooperativas agrarias, Perón propugna concretamente los siguientes campos de acción: "El gobierno aspira a que las cooperativas agropecuarias constituyan las unidades básicas de la economía social agraria y participen, primero: en el proceso colonizador y en la acción estatal tendiente a lograr la redistribución de la tierra en unidades económicas sociales adecuadas. Segundo: que participen en el proceso productivo mediante la utilización racional de los elementos básicos del trabajo agropecuario: maquinaria agrícola, galpones ferroviarios, silos, elevadores de granos, semillas, etc., etc. Tercero: que participen también en el proceso interno de comercialización de las cosechas de sus asociados, para lo cual el Estado auspiciará el acceso de los productores organizados a los centros de consumo, mercados oficiales, proveedurías, etc. Cuarto: que participen en el proceso de la industrialización regional primaria de la producción agropecuaria de sus asociados. Sexto: que participen en la acción estatal tendiente a suprimir toda intermediación comercial innecesaria. Séptimo: que participen en la fijación de precios básicos y precios diferenciales que se fijarán a favor de las cooperativas agropecuarias. Octavo: que participen en la redistribución de los márgenes de utilidad que se obtengan con motivo de la comercialización. Noveno: que participen en la acción social directa a cumplirse en forma integral en beneficio de los productores agropecuarios; y, décimo: el Estado auspicia la organización de un sistema nacional unitario de cooperativas de productores agropecuarios que represente a todos los productores del país y defienda sus intereses económicos y sociales." [19].

Se trata, por lo tanto, de una estructuración integral de la economía que, partiendo de las cooperativas autónomas y descentralizadas, engloba el proceso de producción en su conjunto, racionalizando ese mismo proceso productivo, abaratando costos e impidiendo que cada sector de la cadena productiva y de comercialización compita con los otros. Con decir que para el Líder Justicialista "el gobierno está dispuesto a prestar la ayuda más extraordinaria para que las cooperativas instalen sus propias fabricaciones de herramientas y maquinarias agrarias" [20], está todo dicho. Cada Federación de Cooperativas o "Sistema Nacional Unitario de Cooperativas" además de englobar a todas las cooperativas de ese sector económico, coordina el proceso de producción en su conjunto: desde la producción propiamente dicha a la comercialización, pasando por el transporte y hasta la fabricación de bienes y elementos necesarios.

Empresas sindicales

Las cooperativas federadas no son el único método de socialización impulsado por el Peronismo. En la antes citada entrevista concedida por el General Perón a Carlos María Gutiérrez, el creador del Peronismo menciona un tipo especial de cooperativas: la cooperativa de sindicatos. En éstas, la coordinación de las distintas empresas cooperativizadas se da mediante la organización sindical que, de un modo natural, alcanza a toda la rama de producción. Se alcanza así la vieja tesis del sindicalismo revolucionario, que tanta influencia tuviera en el Movimiento Obrero pre-peronista, y que desde la Carta de Amiens (1916) había proclamado que "el sindicato actualmente nada más que un grupo de resistencia, será en el futuro responsable de la producción y distribución, bases de la organización social" [21]. Como ese modelo de cooperativización sindicalista es más fácil de aplicar en la industria, sector más importante de la economía argentina, es por ello lógico que sea ese mismo modelo el que tienda a predominar en el ideario peronista de tal manera que Perón llega a definir al Estado Peronista futuro como un "Estado Sindicalista" [22].

Las cooperativas o empresas sindicales han sido denominadas a veces también como "Empresas Comunitarias". En "Fundamentos de Doctrina Nacional Justicialista", texto de la "Escuela Superior de Conducción Política del Movimiento Nacional Justicialista" (entre paréntesis, entidad nada sospechosa de "desviaciones izquierdistas") se define de la siguiente forma a la Empresa Comunitaria:
"Considerada en su aspecto funcional, la empresa es una comunidad jerarquizada de productores, diversamente especializados, que aúnan esfuerzos para fabricar determinado artículo o prestar determinado servicio, valiéndose para ello de las herramientas o máquinas que impone la técnica moderna. Considerada, por el contrario, en su aspecto legal, esta misma empresa no pasa, hoy en día, de un mero capital que compra máquinas, materias primas y trabajo. Pura ficción. Pues si con un golpe de varita mágica se suprimieran los dueños del capital, la empresa seguiría funcionando sin la menor perturbación, mientras que pararía y desaparecería si se eliminasen los productores. No basta, por lo tanto, mejorar el nivel de vida del proletariado. No basta dar al productor el lugar que le corresponde en la Comunidad. No resuelve nada cambiar el sistema capitalista sustituyendo la oligarquía burguesa por una oligarquía burocrática. Lo que hace falta es suprimir el salariado, devolviendo a la empresa, aprehendida en su realidad orgánica, la posesión y, de ser posible, la propiedad de su capital, así como la libre disposición del fruto de su trabajo. Cualquier ente social -individuo, grupo o comunidad- tiene el derecho natural de poseer los bienes que le son imprescindibles para subsistir y realizarse plenamente. El municipio, por ejemplo, tiene naturalmente derecho a la propiedad de la vía pública o de la red de alumbrado. El municipio en sí, no la suma de sus habitantes. Cuando alguien viene a instalarse en una ciudad, no tiene que comprar su parte de calle ni de usina; ni la vende cuando se va. La empresa es también un ente social independiente de sus integrantes individuales del momento. Es ella la que tiene que ser dueña de su capital, al que encontrará y usufructuará el productor entrante y dejará para sucesor el productor saliente. Esto vale tanto para la empresa industrial como para la empresa agropecuaria. Los reformistas pequeños burgueses que quieren lotear las unidades orgánicas de nuestro campo fomentan el minifundio y la miseria. La tierra debe ser de quienes la trabajan, como las máquinas de quienes trabajan con ellas. Tal principio no supone, en absoluto, el parcelamiento de la propiedad de los instrumentos de la producción, sino la supresión de la propiedad individualista de bienes que otros -individuos o grupos- necesitan. O sea la supresión del parasitismo en todas sus formas. Eliminado el parasitismo capitalista, las clases desaparecerán 'ipso facto'. No habrá más burgueses ni proletarios, sino productores funcionalmente organizados y jerarquizados en sus empresas. El gremio perderá entonces el carácter clasista que le ha impuesto una lucha necesaria cuya responsabilidad no lleva y volverá a convertirse en una federación de empresas comunitarias, con el patrimonio asistencial que necesita y los poderes legislativo y judicial que definirán sus fueros. En cada gremio, un banco distribuirá el crédito entre las empresas, dentro del marco de la planificación y conducción económica del Estado nacional. La Revolución Justicialista no busca, pues, llegar a una componencia entre capitalismo individualista y capitalismo estatal, ni 'mejorar las relaciones entre capital y trabajo'. Repudia íntegramente cualquier forma de explotación del hombre por el hombre y quiere volver, en todos los campos, al orden social natural. Es éste el sentido de nuestra Tercera Posición." [23].

Las cooperativas sindicales o empresas comunitarias, por lo tanto, coinciden con las cooperativas "tradicionales" en que la propiedad no pertenece a un capitalista individual burgués o al Estado-patrono, pero, a la vez, se diferencian de esas mismas cooperativas en que la propiedad no es divisible ya que pertenece íntegramente a la comunidad laboral de técnicos y trabajadores que las componen. Además, volvemos a recalcarlo, la solución peronista no es sólo a nivel microeconómico (socialización de la empresa) sino también a nivel macroeconómico (socialización global de la economía).

Conducción económica de la Nación

Lo que denominamos socialización "global" o "integral" de la economía es otro de los rasgos que diferencia al Peronismo tanto del capitalismo como del comunismo. Para el General Perón:
"La doctrina económica que sustentamos establece claramente que la conducción económica de un país no debe ser realizada individualmente, que esto conduce a la dictadura económica de los trusts y monopolios capitalistas. Tampoco debe ser realizada por el Estado, que convierte la actividad económica en burocracia, paralizando el juego de sus movimientos naturales. El Justicialismo, siempre en su tercera posición ideológica, sostiene que la conducción económica de la Nación debe ser realizada conjuntamente por el gobierno y por los interesados, que son los productores, comerciantes, industriales, los trabajadores y aun los consumidores; ¡vale decir, por el gobierno y por el pueblo organizado! Mientras esto no se realice plenamente, el gobierno cometerá los errores propios de toda conducción unilateral y arbitraria por más buena voluntad que tenga." [24].

Estas indicaciones, que se refieren a la etapa de transición del Peronismo (cuando aún existe un importante sector económico privado), no suponen, ni mucho menos, que el Líder de la Revolución Nacional argentina oculte el objetivo final anticapitalista de su proyecto. De ahí que, a continuación de lo anterior, aclare: "Nosotros queremos compartir con los intereses privados la conducción económica de la República, pero exigimos que esos intereses se coloquen en la línea peronista que apunta a nuestros dos grandes objetivos económicos: la economía social y la independencia económica, porque ellos son mandato soberano que el pueblo nos ha impuesto y que nosotros tenemos que cumplir de cualquier manera: con la colaboración de las fuerzas económicas si es posible, o enfrentándolas, si ellas no quieren compartir con nosotros el mandato del pueblo soberano. En esta tierra no reconocemos, señores, más que una sola fuerza soberana: la del pueblo. Todas las demás están para servirla. Cualquiera que intente invertir este valor fundamental está, por ese solo hecho, atentando contra el primero, básico y esencial principio del peronismo; atenta, por lo tanto, contra el pueblo y está, por otra parte, fuera de la Constitución Nacional que rige el derrotero de la República (...) Es necesario que nadie se llame a engaño: la economía capitalista no tiene nada que hacer en nuestra tierra. Sus últimos reductos serán para nosotros objeto de implacable destrucción." [25].

La conclusión es que, ya sea con la participación de las organizaciones empresariales (en la etapa de transición) o sin ellas (cuando el Peronismo ha logrado su objetivo económico de entregar los medios de producción a los propios trabajadores autoorganizados), existe una planificación democrática e indicativa en la que participan el gobierno, los trabajadores (mediante los sindicatos, federaciones de cooperativas y de empresas comunitarias), organizaciones de usuarios de servicios y consumidores y todo tipo de organizaciones libres del Pueblo. Se evitan así los errores burocráticos de una planificación burocrática y ultracentralizada como la comunista y, por otro lado, se da un margen de maniobra relativamente grande al mercado [26].

Estado Sindicalista

Pero no sólo el Estado Justicialista va delegando gradualmente funciones económicas en las organizaciones de trabajadores. De hecho el Peronismo apunta a la socialización de la economía y del poder por lo que esas mismas organizaciones de trabajadores, federadas democráticamente desde la empresa hasta subir a nivel nacional, acaban asumiendo la representación y control político gradual del país: "La representación política tiene una función esencial que cumplir en el juego de la verdadera democracia que nosotros propugnamos. Pero también sostengo, como un principio indiscutible que emana de la experiencia política de los últimos tiempos, entre nosotros y en el mundo entero, que tan esenciales como las organizaciones políticas son, en el juego de la verdadera democracia, las organizaciones sindicales. No existe contradicción en nuestra doctrina cuando afirmamos que éste indudablemente es un momento de transición de los Estados políticos a los Estados de estructura sindical (...) La afirmación del derecho a la cooperación con el gobierno del país que nosotros reconocemos, propugnamos y realizamos para las organizaciones sindicales no excluye el derecho de ningún otro argentino; pero en la misma medida en que todos los ciudadanos del país vayan integrando la única clase de argentinos que debe existir en esta tierra: la clase de hombres que trabajan, la representación política dejará de serlo en el antiguo y desprestigiado sentido de la palabra, para adquirir el nuevo sentido peronista de su dignidad." [27].

La socialización de la economía y del poder, por lo tanto, van íntimamente ligadas y, como sagazmente afirmará Perón en un texto de 1968, ambos aspectos no se pueden jamás desligar ya que, en última instancia, los partidos demoliberales (instrumentos burgueses de deformación y control de la voluntad popular) son una consecuencia del capitalismo y, por lo tanto, sin acabar con el capitalismo es imposible sustituirlos por un nuevo y más efectivo tipo de democracia de los trabajadores: "Los que saben 'tomar el rábano por las hojas' y son partidarios de erradicar la política, suelen intentar hacerlo por decreto, sin percatarse que es muy difícil 'matar a nadie por decreto' cuando las causas siguen generando sus efectos, porque poca importancia tiene la existencia legal cuando está sometida la existencia real. Para que desaparezcan las entidades demoliberales, es preciso que antes desaparezca el demoliberalismo. En el mundo de nuestros días, al desaparecer paulatinamente el sistema capitalista, vienen desapareciendo también los partidos demoliberales, que son su consecuencia. Resulta lo más anacrónico cuando se atenta contra esas formaciones políticas mientras por otro lado se trata de afirmar por todos los medios el sistema que los justifica. La intención de dejar a los pueblos sin ninguna representación no es nueva ni es original porque todas las dictaduras lo intentan, pero la Historia demuestra elocuentemente que, cuando ello se produce, las consecuencias suelen ser funestas para las mismas dictaduras que lo promueven." [28].

Al contrario que el demoliberalismo capitalista y burgués, el Peronismo busca "una democracia directa y expeditiva" [29], pero a ella no se llega por dictaduras totalitarias de tipo fascista o marxista, sino por la profundización de esa misma democracia política y su extensión al terreno económico mediante la socialización directa (y no estatista) de los medios de producción. Se trata evidentemente, de un proceso largo, complejo y gradual del que, con sincera modestia, Perón reconoce haber iniciado tan sólo los primeros pasos: "Entre lo político y lo social el mundo se encuentra en un estado de transición. Tenemos la mitad sobre el cuerpo social y la otra mitad sobre el cuerpo político. El mundo se desplaza de lo político a lo social. Nosotros no estamos decididamente ni en un campo ni en el otro; estamos asistiendo al final de la organización política y al comienzo de la organización social (...) Es decir, todo ese proceso se va realizando. Yo no puedo abandonar el partido político para reemplazarlo por el movimiento social. Tampoco puedo reemplazar el movimiento social por el político. Los dos son indispensables. Si esa evolución continúa, nosotros continuaremos ayudando a la evolución. Cuando llegue el momento propicio le haremos un entierro de primera, con seis caballo, al partido político y llegaremos a otra organización. Pero estamos en marcha hacia el Estado Sindicalista, no tengan la menor duda." [30].

La democracia fabril y la autogestión de la economía irá, por lo tanto, sustituyendo gradualmente a los partidos políticos que no tienen porqué ser prohibidos o ilegalizados ya que, dejados de lado por los ciudadanos-productores, lanquidecerán y desaparecerán como cáscaras vacías.

¿Utopía Peronista?

¿Hasta qué punto puede llegar esa socialización de la economía y el poder propugnada por el Peronismo? De hecho el General Perón, y con él la mayoría de teóricos justicialistas, se han negado siempre a elaborar complejísimas elucubraciones al respecto por ser revolucionarios y no utopistas o futurólogos. Además: "La apelación a la utopía es, con frecuencia, un cómodo pretexto cuando se quiere rehuir las tareas concretas y refugiarse en un mundo imaginario; vivir en un futuro hipotético significa deponer las responsabilidades inmediatas. También es frecuente presentar situaciones utópicas para hacer fracasar auténticos procesos revolucionarios. Nuestro modelo político propone el ideal no utópico de realizar dos tareas permanentes: acercar la realidad al ideal y revisar la validez de ese ideal para mantenerlo abierto a la realidad del futuro." [31].

Desde esa perspectiva, desde la visión de un modelo "ideal" al que acercar la realidad y a revisar a la luz de esa misma realidad, puede ser de cierto interés la descripción que del socialismo nacional peronista hace, en la década de los 70, la hoy desaparecida "Tendencia Nacional y Popular del Peronismo":

"El socialismo nacional es el proyecto dentro del cual el pueblo argentino ejercerá un poder decisivo por sí y ante sí en los niveles del Estado, la empresa y la universidad a través del control obrero de los medios de producción, de comunicación y de educación. Es un socialismo de autogestión en el que cada fábrica, cada taller, cada laboratorio, aula o biblioteca se transforma en una célula política con poder de crítica y de control sobre la planificación nacional y la acción política interior y exterior. El socialismo nacional es la democratización absoluta del aparato informativo y la apertura integral de la capacitación técnica a la masa obrera. Es la formación de un partido capaz de emitir todos los impulsos ideológicos necesarios para que en cada momento del proceso el pueblo esté presente, real e intensamente, en la elaboración de las supremas decisiones nacionales. Es la asamblea del pueblo que transforma esos impulsos en leyes populares. Es el Estado técnico-planificador que concierta toda la actividad informativa y prospectiva desde y hacia las estructuras sociales y económicas descentralizadas. Socialismo nacional significa plena vigencia de la opinión comunitaria a través de consejos de producción, servicios y educación. Es la empresa bajo control del colectivo obrero. Es la universidad gobernada por profesores revolucionarios, investigadores y estudiantes. Es la alianza de la universidad y la empresa socializada y sometida al régimen de autogestión. Socialismo nacional es, en suma, participación total, justicia para los trabajadores y dominio del pueblo de todos los resortes de acción política." [32].

Peronismo de los trabajadores

Críticas de detalle al margen, el texto anterior puede considerarse una interesante aproximación a una economía peronista plenamente realizada aunque, volvemos a repetirlo, si en el Peronismo no abundan descripciones detalladas de ese tipo es porqué, a imitación de su fundador, la tarea esencial es imponer en la práctica un modelo político, económico y social que parta de la realidad actual para crear esa realidad nueva. Una realidad que, en un principio, no es aún socialista sino nacional y popular ya que la Argentina preperonista (como reconoce el propio Lenin en su célebre "El Imperialismo, Etapa Superior del Capitalismo" [33]) era una virtual "colonia comercial" británica. Por ello mismo, y sin necesidad de basarse en textos extranjeros, Perón afirma tajantemente que la tarea previa de cualquier revolucionario no era y no es otra que lograr quebrar esas cadenas imperialistas y recuperar la autodeterminación nacional, ya sea frente al imperialismo inglés del pasado o el imperialismo yanqui actual, que recolonizó la Argentina precisamente a partir del derrocamiento militar del Gobierno Popular Peronista en 1955:
"La felicidad de nuestro Pueblo y la felicidad de todos los pueblos de la tierra, exigen que las naciones cuya vida constituyen sean socialmente justas. Y la justicia social exige, a su vez, que el uso y la propiedad de los bienes que forman el patrimonio de la comunidad se distribuyan con equidad. Pero mal puede distribuir equitativamente los bienes de la comunidad un país cuyos intereses son manejados desde el exterior por empresas ajenas a la vida y al espíritu del Pueblo cuya explotación realizan. ¡La felicidad del Pueblo exige, pues, la independencia económica del país como primera e ineludible condición!" [34].

Consecuencia lógica del carácter antiimperialista de la revolución argentina durante su primera etapa es que la contradicción central no es "socialismo o capitalismo" sino "Patria o colonia", "Nación o Imperio", "Liberación o Dependencia". Sectores patrióticos y antiimperialistas, aunque no necesariamente defensores de un socialismo nacional tal cual lo entendía el General Perón, pueden y deben participar activamente en ese verdadero Movimiento Nacional de Liberación que es el Peronismo. Más aún, toda la historia del Peronismo puede reducirse a un esfuerzo doble, genialmente ejemplificado por la conducción de Perón: de un lado ampliar al máximo el Peronismo y su campo político y social de influencia; de otro lado generar los "anticuerpos" organizativos e ideológicos de masas suficientes como para que esa misma amplitud no acabe generando desviacionismos de "derecha" o de "izquierda", o frenando el impulso revolucionario del Movimiento de masas. Y aquí viene como anillo al dedo recordar una de las más conocidas cartas del General Perón a la Juventud Peronista: "No intentamos de ninguna manera sustituir a un hombre por otro; sino un sistema por otro sistema. No buscamos el triunfo de un hombre o de otro, sino el triunfo de una clase mayoritaria, y que conforma el Pueblo Argentino: la clase trabajadora. Y porque buscamos el poder, para esa clase mayoritaria, es que debemos prevenirnos contra el posible 'espíritu revolucionario' de la burguesía. Para la burguesía, la toma del poder significa el fin de su revolución. Para el proletariado -la clase trabajadora de todo el país- la toma del poder es el principio de esta revolución que anhelamos, para el cambio total de las viejas y caducas estructuras demoliberales. (...) Si realmente trabajamos por la Liberación de la Patria, si realmente comprendemos la enorme responsabilidad que ya pesa sobre nuestra juventud debemos insistir en todo lo señalado. Es fundamental que nuestros jóvenes comprendan, que deben tener siempre presente en la lucha y en la preparación de la organización que: es imposible la coexistencia pacífica entre las clases oprimidas y opresoras. Nos hemos planteado la tarea fundamental de triunfar sobre los explotadores, aun si ellos están infiltrados en nuestro propio movimiento político." [35].

La Tercera Posición justicialista no es, por lo tanto, un pálido capitalismo reformista "de rostro humano" ni una mezcla arbitraria de capitalismo y marxismo. Es una solución revolucionaria e integral: "El objetivo central de la 'Tercera Posición' puede resumirse así: 'Socializar sin disolver la personalidad, socializar sin extinguir la independencia de la conciencia individual frente al estado, socializar sin confundir totalmente individuo y sociedad, sociedad y estado." [36].

El General Perón, con su lenguaje siempre más sencillo y comprensible, lo sabrá decir de otra forma: "No todo es pan en esta vida. El trabajador debe no sólamente sembrar el trigo y amanasar el pan sino conquistar una posición, desde la cual puede dirigir la plantación y la fabricación del pan." [37].

Vigencia revolucionaria del Peronismo

En 1983, a poco de recuperar la democracia política en la Argentina, un estudioso del Justicialismo aseguraba con notable perspicacia sobre el Movimiento Peronista:
"En el aspecto ideológico se presentan, en términos sintéticos, tres grandes opciones: a) la de la alvearización bajo el modelo de un partido de inspiración social-cristiana o laborista, ésta última con cierta tradición en el Movimiento; b) la opción por el partido de vanguardia, contenida en las formulaciones del proyecto foquista guerrillero; c) la orientación hacia una democracia autogestionaria de los trabajadores que parte de las experiencias de lucha del justicialismo para articular democracia, lucha obrera y cuestión nacional." [38].

Dichas opciones, a grosso modo, se corresponden con tres interpretaciones históricas diferentes sobre la Doctrina Peronista:

a) Aquellos que se conforman con una reedición más o menos actualizada del periodo 1944-55, es decir: un capitalismo nacional autónomo, independiente con respecto al imperialismo, con fuertes rasgos democrático-populares y altamente distributivo. En esta visión que podríamos denominar "histórica" o "tradicional" del Peronismo deben ubicarso no sólo las fracciones "social-cristiana", "socialdemócrata" o "laborista", sino también ciertas corrientes "nacionalistas", incluso "fascistizantes" (que desdeñan los aspectos democráticos del pensamiento de Perón) o el autodenominado "nacionalismo popular revolucionario peronista", formalmente más "izquierdista" y en la práctica más combativo pero que, respecto a sus objetivos finales, no supera los límites de todo este espacio peronista.

b) El Peronismo fuertemente "heterodoxo" continuador de la pequeña burguesía peronizada en la decada del '60 y que, en diferentes grados y proporciones intenta amalgamar Peronismo y elementos ideológicos extraños a la tradición justicialista: planteamientos filocastristas o maoizantes, foquismo, "nueva izquierda" de los '60, etc. Esta corriente, hoy muy debilitada tras la derrota montonera, intenta ir más allá de la experiencia de 1945-55 pero el Socialismo Nacional que propugna tiene excesiva influencia marxista por lo que choca con la "lógica" del grueso del Peronismo que, generalmente con razón, tiende a visualizarlo como excesivamente en los bordes del Peronismo, con un pié dentro y otro en dirección a las sectas antiperonistas.

c) Quienes entienden que el desarrollo natural del Peronismo es una "democracia autogestionaria de los trabajadores" surgida no por introducción de una ideología o construcción teórica ajena al Peronismo sino como desarrollo de los planteamientos teóricos del propio General Perón y de la experiencia y memoria histórica del conjunto del Movimiento (y no sólo de fracciones internas "de vanguardia"). Esta corriente, por su mismo apego al "sentido común" de las bases y cuadros históricos del Peronismo y, además, ante la bancarrota histórica del marxismo (que salpica a la "izquierda peronista") neo o postmoderna, es la única que, hoy por hoy, puede hegemonizar a la militancia más combativa y consecuente del Movimiento, impidiendo la reedición de enfrentamientos fraticidas internos como los de la década del '70. Más aún, como esta corriente "revolucionaria ortodoxa" o "revolucinaria tercerista" (por reivindicar explícitamente el anticapitalismo del Peronismo, pero también su antimarxismo) surge de la "profundización" del Peronismo "tradicional" y no, como en el caso del montonerismo, de su negación, su posibilidad de desarrollo es enorme; en especial porqué ante una camarilla liberal que usurpa la conducción del Justicialismo pero niega todos sus postulados históricos (nos referimos, obviamente al menemismo) todos los sectores del Peronismo pueden actuar en conjunto durante un largo tiempo más allá de sus matices: "laboristas", "social-cristianos", "socialdemócratas", "nacionalistas", "nacionalistas populares revolucionarios" y "terceristas revolucionarios". El crecimiento de esta última tendencia depende, por lo tanto, más que de la prédica diferenciadora e ideologista, de la conducción práctica de todas y cada una de las luchas y su resultado organizativo.

Notas

1. Este Preámbulo puede consultarse en Julio Godio, El Movimiento Obrero Argentino (1943-1955), Ed. Legasa, Bs. As., 1990, pp. 211 y ss.
2. Juan Domingo Perón, Mensaje del Presidente de la Nación Argentina General Juan Domingo Perón al inaugurar el 86º Periodo Ordinario de Sesiones del Honorable Congreso Nacional, Subsecretaría de Informaciones de la Presidencia de la Nación, 1952, pp. 125-126.
3. Julio Meinville, Política Argentina 1949-1956, p. 284 (artículo del 29 de junio de 1951).
4. Juan Domingo Perón, op. cit., p. 47.
5. El término "autogestión" fue introducido en Francia a fines de los años 60 para designar un modo de socialismo no estatista, caracterizado por la "gestión directa" de la empresa por sus propios trabajadores, y no por los capitalistas privados o el Estado. Junto a esa concepción "restringida" de la autogestión (económica y reducida a nivel de empresa) existe otra concepción más amplia, y también más próxima al pensamiento del General Perón, que entiende la autogestión no sólo en el plano económico sino también, y a la vez, en el terreno político; socialización de la economía y el poder. La autogestión "integral" tiene entre sus antecedentes a diversas expresiones no marxistas del Movimiento Obrero europeo (asociacionismo de Proudhon, socialismo utópico de Fourier, anarcosindicalismo y sindicalismo revolucionario español, italiano y francés, guildismo inglés), corrientes marxistas diferenciadas del stalinismo y el trotskismo (consejistas, "titismo" yugoeslavo), pensadores revolucionarios cristianos (Mounier, Lebret) y ciertos Movimientos de Liberación del Tercer Mundo (el Frente de Liberación Nacional argelino durante la etapa de Ben Bella, la "Ujamaa" de Nyerere en Tanzania, la Revolución Nacional de Velasco Alvarado en Perú, determinados planteamientos del General Torrijos en Panamá, etc.). Se tratan, en todo caso, de diversos modelos nacionales que, hasta el momento, no se han consolidado por razones de orden político: relación de fuerzas nacional e internacional, etc.
6. Cristián Buchrucker, Nacionalismo y Peronismo, Ed. Sudamericana, Bs. As., 1987, p. 318.
7. J.D. Perón, La Fuerza es el Derecho de las Bestias, 1958, p. 14.
8. Eva Perón, "Historia del Peronismo" (curso de 1951), en Clases y Escritos Completos (1946-1955), Ed. Megafón, Bs. As., 1987, Tomo III, p. 98.
9. Juan Domingo Perón, Breve Historia de la Problemática Argentina, Ed. Claridad, Bs. As., 1989, p. 151 (transcripción de una serie de entrevistas concedidas a Eugenio P. Rom en 1967).
10. Juan Domingo Perón en Carlos María Gutiérrez, Reportaje a Perón. Diálogo sobre la Argentina Ocupada, Schapire Editor, Bs. As., 1974, p. 79.
11. Juan Domingo Perón, Mensaje del Presidente..., op. cit., p. 83.
12. Ibid., pp. 82-83.
13. Ibid., p. 57.
14. Ibid., p. 38.
15. Juan Domingo Perón, discurso ante horticultores bonaerenses en la Casa de Gobierno, 21 de septiembre de 1951.
16. Juan Domingo Perón, Los Vendepatria. Las pruebas de una Traición, Ed. Freeland, Bs. As., 1974, p. 166 (la primera edición es de 1957)
17. 2º Plan Quinquenal, Subsecretaría de Informaciones de la Presidencia de la Nación, Bs. As., 1953, p. 89.
18. Juan Domingo Perón, discurso ante representantes de cooperativas agrarias, 13 de octubre de 1952. Reproducido íntegramente en Mundo Peronista, Bs. As., n. 33, 15 de noviembre de 1952, p. 44.
19. Ibid., pp. 44-45.
20. Ibid., p. 45.
21. La progresiva "nacionalización" del Movimiento Obrero Argentino en el periodo de la "Década Infame" y su posterior influencia en el naciente Peronismo puede comprobarse en Hiroshi Matsushita, Movimiento Obrero Argentino (1930- 1945), Hyspamérica, Bs. As., 1983.
22. Sobre la influencia de la doctrina sindicalista revolucionaria en el Peronismo y el concepto de "Estado Sindicalista" en el General Perón ver la segunda parte del presente estudio: Sindicalismo Revolucionario Peronista, Ed. Guerra Gaucha, Bs. As.
23. Escuela Superior de Conducción Política del Movimiento Nacional Justicialista, Fundamentos de Doctrina Nacional Justicialista, Eds. Realidad Política, Bs. As., 1985, pp. 103-104.
24. Juan Domingo Perón, Mensaje del Presidente..., op. cit., p. 67.
25. Ibid. pp. 68-69.
26. No se trata, obviamente, del delirio liberal-menemista de la "economía popular de mercado", versión disfrazada de la "economía social (?) de mercado" del infame Alsogaray. Sin embargo, en experiencias socialistas autogestionarias bastante desarrolladas, como es el caso de la Yugoslavia de Tito, la práctica demostró la imposibilidad de una planificación total y la necesidad, dentro de una planificación indicativa, de ciertas formas de mercado libre que, al no existir grandes monopolios ni diferencias económicas destacadas, es realmente eso: libre. Ver D. Bilandzic y S. Tokovic, Autogestión (1950-1976), El Cid Editor, Bs. As., 1976.
27. Juan Domingo Perón, Mensaje al Presidente..., op. cit.. pp. 122-123.
28. Juan Domingo Perón, La Hora de los Pueblos, Ed. Distribuidora Baires, Bs. As., 1974, p. 130 (la primera edición es de 1968).
29. "Por otra parte, la democracia de nuestro tiempo no puede ser estática, desarrollada en grupos cerrados de dominadores por herencia o por fortuna, sino dinámica y en expansión para dar cabida y sentido a las crecientes multitudes que van igualando sus condiciones y posibilidades a las de los grupos privilegiados. Esas masas ascendentes reclaman una democracia directa y expeditiva que las viejas ya no pueden ofrecerles", Ibid., p. 14.
30. Juan Domingo Perón, discurso ante escritores asociados a la Confederación Argentina de Intelectuales, reproducido por Hechos e Ideas, Bs. As., n. 77, agosto de 1950.
31. Juan Domingo Perón, Modelo Argentino para el Proyecto Nacional, Ediciones Realidad Política, Bs. Aires, 1986, p. 88 (esta obra es el discurso pronunciado el 1º de mayo de 1974 por el General Perón ante la Asamblea Legislativa al inaugurar el 99º periodo de sesiones ordinarias del Congreso, así como el proyecto que presentó al mismo).
32. Este manifiesto, de junio de 1972, se encuentra reproducido como anexo en varios autores, Peronismo: de la Reforma a la Revolución, A. Peña Lillo Editor, Bs. As., 1972, pp. 187 y ss.
33. "No sólo existen los dos grupos fundamentales de países -los que poseen colonias y las colonias-, sino también, es característico de la época, las formas variadas de países dependientes que desde un punto de vista formal, son políticamente independientes, pero que en realidad se hallan envueltos en las redes de la dependencia financiera y diplomática. A una de estas formas de dependencia, la semicolonia, ya nos hemos referido. Un ejemplo de otra forma lo proporciona la Argentina.", V. I. Lenin, El Imperialismo, Etapa Superior del Capitalismo, Ed. Anteo, Bs. As., 1975, pp. 105-106. La edición original es de 1916.
34. Juan Domingo Perón, Mensaje del Presidente..., op. cit., p. 31.
35. Carta de Juan Domingo Perón a la Juventud Peronista, octubre de 1965. Reproducida en Roberto Baschetti, Documentos de la Resistencia Peronista (1955-1970), Puntosur Eds., Bs. As., 1988, pp. 222-223.
36. Salvador Ferla, La Tercera Posición Ideológica y Apreciaciones Sobre el Retorno de Perón, Ed. Meridiano, Bs. As., 1974, p. 23.
37. Juan Domingo Perón, discurso ante representantes obreros, 24 de febrero de 1949. Citado en Habla Perón (selección de textos), Ed. Realidad Política, Bs. As., 1984, p. 106.
38. Jorge Luis Bernetti, El Peronismo de la Victoria, Ed. Legasa, Bs. As., 1983, pp. 210-211. Por "alverización" se entiende un proceso de "domesticación" e integración al Sistema, similar al que Alvear realizará con la Unión Cívica Radical a la muerte de Hipólito Yrigoyen.

samedi, 07 mars 2009

Année 2008 : l'effondrement du modèle individualiste

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Année 2008 : l’effondrement du modèle individualiste [1]

Par Olivier Carer

La faillite de Lehman Brother le 15 septembre 2008 et l’écroulement du frauduleux château de cartes Madoff auront signifié pour l’ordre marchand ce que l’effondrement des Tours jumelles du World Trade center représenta pour l’Empire états-uniens.

Le krak mou qui aspira en quelques mois l’adiposité des fortunes les plus installées, de même que la déconfiture des usuriers ou la ruine de leurs malheureux clients ont scellé la fin du mythe de l’argent facile fondé sur une pyramide spéculative, sur des montages financiers incompréhensibles ou même souvent sur des manipulations mirobolantes. L’immoralité des spéculateurs névrotiques, la perversité de systèmes de rémunérations des traders ou des banquiers, la complaisance d’agences de notation consanguines ont accompagné la généralisation d’agissements collectifs illégaux pour lequel le médiatique Kerviel servit un temps de bouc émissaire utile.

Mais cette analyse technique de la crise de l’automne 2008, somme toute assez classique, ne laisse apparaître que l’écume de la vague. Car sous les soubresauts boursiers, un mouvement tellurique de grande ampleur ébranle tout un système de valeurs. C’est une véritable déflagration à laquelle nous assistons. Elle vient saper les fondements d’un ordre marchand que le vaticinateur Jacques Attali décrivait avec une provocante délectation dans sa « Brève histoire de l’avenir ».

La bataille de l’homme invisible avec lui même

Avec un à-propos salvateur, une intelligence invisible est venue menotter « la main invisible du marché » et faire sortir de ses rails la globalisation marchande et la financiarisation de l’économie qui se voulaient inéluctables. Ce déraillement de la locomotive mondialiste a surtout renvoyé à la figure d’une élite mondiale anthropocentrée qui a cru pouvoir revendiquer le meurtre de Dieu, les règles de l’ordre naturel.

La revanche du réel

L’économie qui relève moins d’une science prédictive que d’une méthode d’analyse de phénomènes passés, feint depuis peu d’opportunes indignations !

Comment réclamer 12% de rendement garanti lorsque la richesse effectivement produite ne dépasse pas 3%? Comment les banques ont-elles pu s’écarter des règles prudentielles en acceptant d’investir dans un système de titrisations risquées enrobé dans une opacité entretenue ? Pourquoi aucun organisme de contrôle privé ou étatique n’est intervenu comme régulateur d’un petit monde financier devenu fou ? Comment professer qu’un prêt puisse être accordé au delà des capacités propres de remboursement de l’emprunteur? Comment les états ont-ils pu croire que l’overdose de crédits allait pouvoir masquer indéfiniment l’érosion du pouvoir d’achat des ménages ? Comment imaginer un seul instant que la planète pouvait supporter la généralisation du modèle de consommation américaine pour les milliards d’humains à venir?

Le retour sur terre est effroyable. L’univers « champagne» où les financiers naviguaient dans un océan de liquidités et de bulles, s’est brutalement asséché. Les bulles boursières, du crédit, de l’immobilier, et récemment celle des matières premières ont explosé faisant de nombreuses victimes. On ne peut dépenser que la richesse que l’on a réellement créée. On ne peut engager nos économies que sur des risques que l’esprit humain est capable de mesurer. On ne peut rembourser qu’avec des revenus effectifs et non supposés car personne n’est riche de crédits garrotteurs. Enfin, la terre ne peut satisfaire la promesse mondialiste de l’accès à un salut de l’homme ici-bas par la consommation planétarisée. Dans un monde purement matérialiste où le seul moteur collectif est la consommation, lorsque le mirage des écrans plats et des gadgets informatiques qui servait de but ultime de la vie s’évapore, il ne reste rien que le désarroi. En 1951, l’économiste François Perroux proclamait déjà avec justesse: « les biens les plus précieux et les plus nobles dans la vie des hommes, l’honneur, la joie, l’affection, le respect d’autrui, ne doivent venir sur aucun marché ».

La revanche du grégaire

La conception d’un monde « nomade », du règne de la jouissance éphémère et immédiate qu’avec Bernard Attali, les mondialistes appelaient de ses vœux sombre dans le grand tourbillon bancaire et financier. Nous vivons le discrédit d’un paradigme cosmopolite qui annonçait l’avènement de l’homme nouveau « libéré » de ses attaches territoriales, historiques ou identitaires et devait voir la naissance d’un être de consommation, ne vivant que pour lui, n’agissant que pour satisfaire son égocentrisme, ne connaissant de loyauté qu’envers ses propres intérêts.
En cette fin d’année, cette utopie dangereuse rejoint le communisme au cimetière des idéologies cannibales.

Ce cataclysme bienfaisant qui balaye « le nouvel ordre mondial » devenu subitement ancien, déverrouille les portes d’un monde qui situe l’homme dans sa communauté et dans la chaine des générations. L’hétéronomie a désormais vocation à effacer progressivement la tyrannie de l’autonomie qui reconnaissait à l’homme un droit absolu de s’affranchir de tout mode de pensée héritée, de toute référence à une norme collective. Dans une économie qui ne doit être une fin en soi, ce mouvement rappelle à nous les valeurs des peuples sédentaires, celles des hommes qui construisent les murets de la montagne sur plusieurs générations pour eux-mêmes mais aussi pour leurs descendants. Refusant l’éphémère, le superficiel et l’individualisme prédateur, ils œuvrent dans la durée, dans le souci du futur et le respect de la nature.

Ce mouvement plein d’espoir pour l’avenir, vient donner à Barrès et à Péguy une nouvelle modernité.


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Qui a peur de la géopolitique?

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Archives de SYNERGIES EUROPEENNES - 1994

 

Qui a peur de la géopolitique?

 

Un spectre hante l'Europe d'aujourd'hui. Des conseillers politiques de la Maison Blanche, d'anciens agents du KGB cherchant à se recycler, des publicistes libéraux défendant de troubles et occultes inté­rêts réactionnaires, des professeurs gauchistes amateurs de liaisons dangereuses avec les droites, ten­tent désespérément d'en trouver la trace. Ce spectre, c'est la géopolitique.

 

Eh oui, elle revient au grand galop, cette géopolitique condamnée à une damnatio memoriae depuis la fin de la seconde guerre mondiale, dont on a nié la validité sans lui permettre de se défendre et d'apporter les preuves de sa pertinence, que l'on a réduite au silence pendant toute la guerre froide qui avait imposé au monde une lecture strictement idéologique et socio-économique des conflits. Pour satisfaire au rituel du langage dominant, il fallait dire qu'elle était une “pseudo-science”, fondée par deux pères historiques: l'embarrassant Friedrich Ratzel, auteur, entre 1882 et 1991, d'une Anthropogeographie évolutionniste et déterministe (que l'on a longtemps considérée comme l'antécédent wilhelmien du racisme hitlérien) (1), et le général, diplomate et érudit Karl Haushofer, qui avait caché Rudolf Hess dans sa maison après le putsch raté de Munich en 1923 et dont le fils, poète ésotérique, fidèle, comme son père, à l'idée d'une al­liance nord-européenne entre l'Allemagne et l'Angleterre, sera massacré par la police nazie le 23 avril 1945 à l'âge de 42 ans.

 

Les noms de Ratzel et de Haushofer ont servi à démoniser la géopolitique, considérée pendant trop long­temps comme une “fausse science”, dont le but aurait été de chercher le rapport existant entre les cir­constances géographiques d'un pays et les choix politiques du peuple qui l'habite. Mais force est bien de noter que les géopolitiques de Ratzel et de Haushofer, en réalité, ont constitué une géographie politique fonctionnelle, à l'ère des grands impérialismes et des entreprises coloniales, entre 1870 et 1914, quand ont eu lieu les affrontements entre la France et l'Allemagne, entre l'Autriche et la Russie, entre la Russie et la Turquie.

 

En cela, plutôt que d'être une rupture par rapport au passé, les grands impérialismes ont montré qu'ils étaient les héritiers directs des conflits du 19ième et de l'idéologie évolutionniste: «La géographie est une donnée immuable qui conditionne la vie des peuples» aimait à dire le condottiere Mussolini, oubliant ainsi l'autre aspect du problème: les peuples manipulent et modifient très souvent les scenarii géographiques.

 

Même si sont encore bien ancrés tous les “a priori” idéologiques mis en place pour interpréter les conflits selon un schéma “scientifique”, mettre au rencart  les “vieilleries” ethniques et religieuses, légitimer l'unique mode explicatif toléré, c'est-à-dire celui qui évoque la raison socio-économique, depuis la fin de la guerre froide, bon nombre de signes avant-coureurs nous annonçaient le retour de conflits qui ne pou­vaient s'expliquer que par d'autres motivations que celles que retenait comme seules plausibles le con­formisme idéologique. Mieux: rien n'est revenu et un fait est certain, les tensions et les conflits à carac­tère ethnique et religieux ont toujours existé, rien n'est venu les atténuer, au contraire, les retombées tu­multueuses du colonialisme et de l'hégémonisme européens les ont exaspérés. Il suffit de penser au Kurdistan qui, par l'effet de la politique de containment  forcenée qu'ont pratiquée les Anglais et les Français au Moyen-Orient entre 1917 et 1920, est devenu un facteur de déstabilisation. Ou à la “guerre oubliée” entre l'Irak et l'Iran, et à ses rapports complexes avec la guerre civile en Afghanistan, ou encore, au front composite de la résistance afghane en lutte contre l'Armée Rouge.

 

Les temps sont mûrs, pourtant, pour dresser l'ébauche d'une nouvelle géopolitique, comprise non plus comme une “science” ou une “pseudo-science” mais plutôt comme une méthode proprement interdiscipli­naire  —dans laquelle convergeraient la géographie, l'histoire, la politologie, l'anthropologie, etc.—  visant à comprendre et à expliquer rationnellement les tensions à l'œuvre sur certains territoires. Cette méthode se distancierait bien entendu de toutes les formes de moralisme, sans pour autant observer une “neutralité axiologique” rigide et incapacitante: cette méthode existe, elle a déjà été hissée au niveau scientifique, elle a été forgée au milieu des années 70 par les animateurs de la revue parisienne Hérodote  et par le groupe de chercheurs rassemblés autour du géographe Yves Lacoste. En Italie, un groupe d'intellectuels de gauche vient de fonder la revue Limes (titre schmittien!) et s'aligne sur Hérodote;  à ce corpus géopolitique de base, qui, sous bien des aspects, constitue une “anthropopolitique” (ou une “géoanthropologie”?), le célèbre philosophe Massimo Cacciari propose d'ajouter une fascinante “géophilosophie de l'Europe”, dont il a jeté les fondements en publiant un livre chez l'éditeur Adelphi. L'Europe, à ses yeux, est une idée  —et un continent— “malade” au sens nietzschéen, instable, incertain sur ses confins, qui ne peut progresser qu'à coup de “décisions” fatidiques, un continent sur lequel pèse le poids d'innombrables impondérables et d'hérédités mêlées, entrecroisées.

 

Les assises et la structure du monde pèsent évidemment sur le destin des hommes. Mais les hommes, à leur tour, posent des choix et imposent des géostratégies. Quand, en 1867, le gouvernement américain achète au gouvernement russe les terres de l'Alaska, le Secrétaire d'Etat William Seward déclare: «L'Océan Pacifique deviendra le grand théâtre des événements du monde... le commerce européen, la pensée européenne, la puissance des nations européennes sont destinés à perdre leur importance». C'est ainsi que les Etats-Unis ont lancé l'idée d'un “Occident”, non plus synonyme mais bien antonyme de l'idée d'“Europe”. Or, sur ce chapitre, un pas nouveau vient d'être franchi avec le sommet des pays du Pacifique tenu en novembre 1993 à Blake Island près de Seattle: on y a esquissé les grandes lignes d'une nouvelle stratégie américaine, visant à faire du Japon un “Extrême-Occident” et à recentrer sur le Pacifique une intense activité dirigée vers la Chine, le Japon et l'Australie, impliquant l'exploitation inten­sive des mers, des fonds marins, du sous-sol de l'Océan, afin d'acquérir des protéines (à partir du planton) ou d'exploiter de nouveaux gisements de pétrole ou de gaz naturels.

 

Reste à savoir comment réagira le bloc “eurasiafricain” face à cette hégémonie nouvelle, à ce continent immense et richissisme qui va de l'Alaska à l'Australie et de la Chine à la Californie, qu'a parfaitement conceptualisé le bon génie du MIT (Massachussets Inbstitute of Technology), Noam Chomsky, qui pré­voit un isolement définitif de l'Eurasie par rapport au “Centre de l'Empire” américain? Allons-nous vers un nouveau brigandage déterministe et planétaire, vers une nouvelle entreprise impérialiste qui, comme toutes les entreprises impérialistes, ne rougit pas en se définissant comme “nécessaire”?

 

Franco CARDINI.

(article extrait de L'Italia Settimanale, n°34/1994).

 

(1) Pour nuancer ce jugement et découvrir la grande variété de l'œuvre de Ratzel, cf. Robert Steuckers, «Friedrich Ratzel», in Encyclopédie des Œuvres philosophiques,  PUF, Paris, 1992.

vendredi, 06 mars 2009

Verkiezingen: De Periodieke Supersoap

Verkiezingen: De Periodieke Supersoap

 

DemocratieHet begin van weer eens een verkiezingsronde in dit land is volop begonnen. Dat is niet te merken aan de lawine ideeën en ideologische inzichten door het politieke profitariaat naar onze hoofden geslingerd. Neen, het is alleen te merken aan hoe de kopstukken van de respectieve partijen zichzelf aan het verkiezen zijn om zo zichzelf en hun naaste vrienden (of familieleden) op topplaatsen te wringen. Dat noemen die politieke creaturen dan de eerste stap in een democratisch proces: "Hoe wring ik mezelf op een verkiesbare plaats?" Het is meteen een van de belangrijkste fasen van de partijwerking geworden als men de kranten erop naleest.

Alle nieuwkomers hebben daarbij zo te zien een snelcursus genomen in hoe de oude militanten beter een valse stoot te verkopen. En "Hoe schop ik tijdens lijstvorming een medestander in de vernieling?" is haast uitgeroepen tot een olympische discipline, in zoverre dat die nog niet verheven is tot de enige politieke activiteit die partijkopstukken in het parlementaire circus beoefenen. Die kunst bestaat er ook in (met name voor de slapjanussen die in de partijen tweede viool spelen) zich zo geruisloos mogelijk te verstoppen achter de tapkast van de parlementaire bar en dat liefst gedurende de volledige legislatuur. Het enige wat de ja-knikkers binnen de partijen moeten doen is kijken hoe de kop beweegt van hun voorman. Ze moeten dan vooral hun kop in dezelfde richting bewegen als die verlichte leiders. Dat is alleszins een succesformule die de meeste parlementairen behoorlijk onder de knie hebben. In platbroekerij zijn die parlementairen behoorlijk geschoold. En na een tijdje is niks doen en je vol vreten op kosten van de gemeenschap een tweede natuur geworden voor dat politiek personeel van de tweede garnituur. De bazen, die de grote partijen exploiteren als een soort veredelde bordelen, waar verkozenen zich openlijk prostitueren, zijn dan ook maar wat gewillig om die ongevaarlijke nullen rond zich te tolereren en hun zelfs een mooie carrière in ruil voor bewezen diensten aan te bieden. Inderdaad, politieke hoeren, je moet ze huren en betalen, en ze woekeren meestal in achterkamertjes en louche cafés.

Voor de kopstukken is het van het grootste belang om zichzelf aan te top van de lijsten te plaatsen, want dat is de enige manier om aan de geldpomp van het systeem te kunnen blijven hangen. Al hun mooie manieren en praatjes moeten verbergen dat ze er gewoon op uit zijn weer een periode van vaste vergoedingen en staatsgegarandeerd inkomen te verwerven. En maak je geen illusies: de Dewevers en de Dewinters zijn ook niet te beroerd zichzelf te verkopen om die smerige Belgische euro's van de Belgische staat in hun vette pootjes te nemen. Geld heeft geen naam, en in Europa heeft het zelfs geen volk dat dat  beheert of controleert, maar wie maalt daar nu om? Toch zeker niet de bijna slimste mens en de - op Dedecker na - luidruchtigste? De partijbonzen kijken met bewondering naar iemand als Rudy Aernoudt, hoe deze man zich een weg knort en wroet om ook in de troch te geraken is gewoonweg bewonderenswaardig. Bij zo iemand herkennen ze de fijne kneepjes van het vak!

Terwijl het volk in een steeds vlugger tempo aan het verarmen is en ons economisch en sociaal stelsel zowat implodeert, hebben die partijfeestneuzen zichzelf weer goed in de kijker gezet. Voor het N-SA is deze hele verkiezingbedoening echter een non-event en men zou het beter de 'pak-de-poen show voor onbenullen en maatschappelijk gestoorden' noemen, uitgezonden in een format met Walter Grootaers. Daar hebben die politieke clowns toch al een pak ervaring mee. Zolang er geen hervormingen van het politiek bestel op de agenda staan, is elke verkiezing nutteloos en waardeloos. Het is een bestendiging van het profitariaat, met als enige bedoeling weer enkele jaren een vaste wedde zonder werken binnen te halen. Het zijn parasieten in een parasitair systeem.

U zult deze smeerlapperij toch niet verder ondersteunen met uw goedkeuring in de vorm van een stem? Ik in elk geval niet.


Eddy Hermy
Hoofdcoördinator N-SA

jeudi, 05 mars 2009

Turkije en de Koerden

Turkije en de Koerden

Geplaatst door yvespernet

Wilt Turkije in de EU worden opgenomen als volwaardigd lid, moeten aan bepaalde sociale, economische en politieke voorwaarden worden voldaan. Met het toelaten van landen als Bulgarije is ondertussen gebleken dat dit voor sommige landen te snel gebeurd is en dat de controle op het naleven van die voorwaarden tekort schiet. Één van die voorwaarden, in het geval van Turkije, is het verbeteren van de huidige bewust achtergestelde toestand van de Koerden. Dat dit nog gebreken vertoont, kan volgend “incident” goed illustreren;

http://edition.cnn.com/2009/WORLD/europe/02/24/turkey.television.kurdish.party/index.html

ISTANBUL, Turkey (CNN) — The head of a Kurdish nationalist party in Turkey addressed his party members Tuesday in the Kurdish language — which is illegal — prompting the national broadcaster to pull the plug on the live broadcast. In

 

his address, Democratic Society Party leader Ahmet Turk began his speech in Turkish, addressing the value of a “multilingual culture” and decrying the fact that the Kurdish language is not protected under Turkey’s constitution. ”We have no objection to Turkish being the official language, yet we want our demands for the lifting of the ban on Kurdish language to be understood as a humanitarian demand,” he said.

Turk then announced he would deliver the rest of his speech in Kurdish and, at that point, state broadcaster TRT cut the broadcast. ”Since no language other than Turkish can be used in the parliament meetings according to the constitution of the Turkish Republic and the Political Parties Law, we had to stop our broadcast,” the TRT announcer stated. “We apologize to our viewers for this and continue our broadcast with the next news item scheduled.”

Binnen nu en een paar decennia zal bijna de helft van de inwoners van Turkije bestaan uit Koerden. Koerden migreren ook meer en meer naar de Turkse steden in plaats van op het platteland te blijven. Dit kan wel eens een zeer gevaarlijke cocktail worden…

NATO Defence College reviews Dmitry Rogozin's book "Enemy of the People"

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The NATO Defence College review of the book ‘Enemy of the People’ by Dmitry Rogozin

 

http://natomission.ru/en/society/article/society/artbews/...

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The curious reader might do well to start Ambassador Dmitri Olegovich Rogozin’s book by looking at the comments about him which the author has chosen to include as an annex - essentially abuse from prominent Russian political figures, including the leader of the LDPR, Vladimir Zhirinovsky (whose father Rogozin pointedly identifies as being named Edelshtein): “Rogozin is an agent three times over - of the Kremlin, the KGB and the Comintern. He is a villain three times over.” Anatoli Chubais, formerly head of electricity monopoly RAO UES, and whom Rogozin identifies as the “spiritual guru” of the liberal SPS party and author of the concept of “voucher privatization”, describes Rogozin as a National Socialist. The author records other attacks on him by some of his favourite targets of abuse.

It would be natural to suppose that these quotations were recorded by Rogozin in a spirit of irony. It would also be wrong. There is so far as I could teil no trace of irony or self doubt in what Rogozin writes in this account of his political development and ideas. He means every word. It is natural enough that an autobiography should centre on its subject’s actions. This one is deeply personal. The only people mentioned in it who come out consistently well are Rogozin himself, and why not, for it is his story; Rogozin’s distinguished military father (General-Lieutenant Oleg Konstantinovich Rogozin, Hero of Socialist Work, Doctor of Technical Sciences and professor); and Vladimir Putin - who has yet to earn Rogozin’s despair. The introduction to the fourth edition of the book, sent for publication as Rogozin was about to take up his appointment as Russian Ambassador to NATO in January 2008, records his view that Rodina “won” the 2003 Duma elections (Rogozin’s word, presumably implying a moral victory since the party did not come near to winning a majority of the recorded votes, even if its showing was better than the Kremlin had anticipated). Since then, he says, vital elements of Rodina’s programme have been adopted by the Russian government. Putin’s real convictions, (page 5) says Rogozin, are those of the patriotic opposition. His book is dedicated to President Putin, as he then was.

The first set of Rogozin’s ideas would not al! be easy to square with Putin’s actions as President or Prime Minister, though some arguably have elements in common with Putin’s sentiments. Rogozin complains at various points in his book of the way that the media are constrained, the legal system is manipulated and elections are fixed. In so doing, he draws on personal experience. “The ability to lie to your face is the visiting card of power (vlast) today.” (An apt quotation from page 14). His writing is even more impassioned in his attacks on the “thieves” who have stolen, and steal, from Russia, whether bureaucrats or ‘oligarchs’. But then, “Bonapartism is always and everywhere partnered by stealing from the treasury…the consolidation of the Vertical of power’ has led to a real epidemic of theft.” Much of the book is a cry of pain for what has happened to Russia since Stalin’s death in 1953, and particularly since 1991, with the failure of the August putsch that year. Rogozin’s admiration for Stalin is for what the author sees as his success as a national leader who instilled discipline, not as the builder of’socialism in one country’.
The remedy sketched by Rogozin for Russia’s present ills is not what might be expected from his attacks on the way the present state of affairs rests on arbitrary controls. It is for the power of the centre to be increased, under the condition that the exercise of absolute power be governed by absolute responsibility, borne personally by the leader himself. He does not explain exactly what this might mean. He would no doubt be enraged by the suggestion that it is a doctrine that notorious figures of the middle of the 20th Century would instantly accept.
Rogozin argues for increased national ownership of critical economic factors. He does not explain how such a system could work, or how it would prevent what he sees as the treachery and incompetence which brought the USSR to needless and tragic collapse being repeated under another centrally directed government of Russia. His domestic policy prescriptions are however often declarative rather than analytical, for instance in his lengthy and agonised account of Russia’s demographic problems. Russia should be, he writes at one point, aiming at a population of 500 million, without giving a clear idea of how this degree of reproductive fervour could be brought about
That should not be read as a sneer. Rogozin’s despair at what he sees as his country’s fall deserves better than that. He records his academic achievements, but his book is not that of an educated sceptic. In one striking passage, following on Rogozin’s account of the Chechen mentality, he tells of an interview with Putin in which he offered to go to Grozny as Presidential Representative. The President’s response, which Rogozin saw as “very significant” was that Putin wanted him to stay for the time being in the Duma. That, thought Rogozin, was a missed opportunity. Had he taken charge in Grozny the bloodshed would have been minimal. It does not seem to have occurred to him that the President may have been less confident than Rogozin of the latter’s ability to sort things out Putin’s ability to keep others under the impression that he sympathises with their aspirations even when he does not is again illustrated at other points in Rogozin’s account.

The heart of Rogozin’s book, whether he is recording his efforts as a dogged and immovable defender of his country’s true interests, or setting out his political creed, is the need to revive Russian national feeling, and thereby to restore Russia to her rightful status, as he would see it, as a Great Power. He makes it very clear, though not in a consistently specific manner, that this aim entails Russia’s borders enlarging to include all the territories that have been hers over the course of Russian history. He refers on page 145 to the national idea enshrining the right for Russians to be the formers of the state not just in the present territory of the Federation but also “inherently Russian lands beyond its borders. Crimea, Little Russia, Belorussia, the Cossack steppes of Kazakhstan, TransDniestra, the PriBaltic - these are the native lands of the Russian nation.” Russians brought civilisation to the peoples who fell under her control, and they now share her destiny as a beneficent result. “It is inadmissible to remain silent while the country that gave you life is robbed and humiliated. If even a drop of Russian blood runs in our veins we should be readying ourselves to fight….It is on our bones that Europe prospers today” (page 443). And so on throughout the book- often.
Rogozin’s political programme is mystical rather than practical, despite the fact that he recounts his involvement in many of the political dramas over the last couple of decades of his country’s history. He vents his frustration at being balked of the success he is sure was his in Duma and Moscow elections. The administrative barriers in the way of setting up independent parties are excoriated. He nonetheless sees the revival and channeling of Russian nationalism as essential to the nation’s survival, and achievable through disciplined action by a committed elite. He seems to take it for granted that the restoration of true patriotic feeling, and the direction of affairs by true patriots, would restore harmony as well as greatness to his country, and that it would be thoroughly democratic too.
This is all disputable, and the*fenguage in which it is conveyed is in places disreputable too. But Rogozin’s book is honest in its efforts to convey what he really thinks, and innocent of guile. There are many other Russians, and decent ones too, that share his prejudices to a greater or lesser degree, and who reach too readily for the language of abuse when others do not accept them: a Pravda inheritance, maybe. Many Russians for instance seem genuinely to believe that they have a better sense of what other formerly Soviet people - and particularly those of Slavonic origin - truly want and need than what these people choose for themselves through their elected leaders. When Rogozin says that Sevastopol is “ours”, and that that is a “fact” (page 129), he is only giving more emphatic expression to a view that others of greater authority than he have set out more cautiously. When he laments the treatment accorded to Russia by her enemies, internal or external, he is giving his own version of the sense of national(ist)
grievance that has developed so strongly in recent years. There was a contrast to be drawn in the 90s between Serbia’s haunted sense of wrong and Russia’s efforts to make a new and post imperial start. The parallels between Serbian nationalism then and Russian feelings now, as illustrated by Rogozin’s book, can be uncomfortably close.

The aim of restoring, as its advocates term it, Russia’s status as a Great Power runs beyond the “patriotic opposition” invoked by Rogozin. It is deeply felt to be legitimate, and necessary, by Russians who are far more liberal in their outlook than Rogozin, and has been articulated in various forms by the highest leadership, including by the former and current Presidents. But while there is no doubting its emotional appeal to many Russians, if to few of their neighbours, Rogozin in his book has been no more able than others to set out exactly what it means. If Russia is a Great Power, then presumably there are others, and presumably they have parallel rights. No one knows exactly who these other “Great Powers” might turn out to be. It would also seem to follow that “Great Powers” have greater rights than lesser ones, a proposition that is contrary to the Charter of the United Nations, and unacceptable to those relegated to the second or perhaps third division. The aspiration to be recognised as a Great Power, which runs so clearly throughout Rogozin’s book, in short, is a lament for past glory to return, not a practical guide to policy. It is not however the less compelling for those who would pursue it because it is incapable of definition, or perhaps even of cure.

ON THE NATO DEFENCE COLLEGE REVIEW OF THE BOOK 
‘ENEMY OF THE PEOPLE’ BY DMITRY ROGOZIN

The very fact that a major agency of NATO’s educational system got down to reading such an alien book dedicated to Russian domestic affairs means a lot. The author of the review has taken the reading seriously, and building upon his knowledge he made an attempt to analyze what was written by Dmitry Rogozin. There is no doubt that NATO is primarily interested in political views of the ambassador it is dealing with rather than Russian domestic policy as such.

It is quite another matter that it is a tough job for a Westerner to give a fair assessment of those views; the temptation to slide down to stereotypes (Putin as the sole ruler of the country, patriotic views as an extreme form of xenophobia, etc.) is too big. The author of the review attempts to disregard details about Russian domestic policy, however, he delightfully quotes Rogozin’s criticism of the Russian bureaucracy and in the end he reduces everything to the ‘favourite’ common denominator of Western analysts – that Russia is yet again aspiring to become an empire and a great power, while it lacks either rights or good reasons for that. In the author’s opinion, such an aspiration lacks “legitimacy”, and he notes that Rogozin is just one among many Russians who want to see their country regain its greatness. The author argues that allegedly there is no ‘cure’ for this concept that has basically become the ideology Russian policy is guided by. Apparently, neither is there a cure for the aspiration of the Westerners to not let Russia become a great country again, just as for any form of maniacal schizophrenia. He particularly bridles at Rogozin’s ideas of uniting inherently Russian lands, and the role of the Russian nation as a civilization factor triggers nothing more than an ironic smile.

Nevertheless, this review seems in general to be quite well balanced and serious. The author admires Rogozin’s sincerity and consistency, his concerns over the present situation in the country, even though the style he chooses does not always seem justified to the author.

mercredi, 04 mars 2009

E. Todd: "Le protectionnisme est l'antidote à la guerre"

EMMANUEL TODD : « LE PROTECTIONNISME EST L’ANTIDOTE A LA GUERRE »


C'est l'Europe qui doit être le moteur de ce nouveau projet économique. Le continent européen a une économie relativement saine. Il produit ce qu'il faut d'exportations pour financer ses importations de matières premières. Le protectionnisme est la meilleure manière de se protéger – ce n'est pas un gros mot – de la pression exercée par les salaires des pays émergents. Et ce, pour permettre en Europe une relance des salaires et de la demande. (...)


Le centre de gravité économique dans le monde a repassé l'Atlantique. Il est en Europe, et plus particulièrement en Allemagne. Or les Européens ne font pas preuve de responsabilité face à cette mission qui est la leur. Ils ont le prétexte de la division, mais en vérité ils sont aussi dans un état de manque de réflexion économique, qui est probablement encore pire que celui des Américains. Ils se comportent comme des enfants qui ne veulent pas devenir adultes. Ils ne peuvent pas se contenter de mettre en place un protectionnisme européen à moyen et long terme, ils doivent s'accepter en tant que régulateurs hégémoniques dans le monde sur le plan économique. (...)


La crise de 1929 a produit le Front populaire en France, le New Deal aux Etats-Unis, le nazisme en Allemagne, un conservatisme un peu mou en Angleterre. On devrait assister, compte tenu d'une certaine dérive oligarchique, avec beaucoup d'inégalités des revenus, à l'émergence d'un mélange de lutte des classes et des générations. On a vu la crise des banlieues en France, et aujourd'hui les événements de Grèce. »



Emmanuel Todd, interviewé par Le Matin, 14 décembre 2008


LE LIBRE-ECHANGE OU LA DÉMOCRATIE : IL FAUT CHOISIRLA FIN D’UN CYCLELE RÉVEIL EN FORCE DU PROTECTIONNISME CHINOIS

mardi, 03 mars 2009

La mort du leadership américain

Un pays discrédité et en faillite/La mort du leadership américain

ex: http://polemia.org/ 

Une fois encore, Paul Craig Roberts présente une analyse pessimiste sur l’avenir américain. Il ne voit pas comment les Etats-Unis retrouveraient leur leadership et il ne peut s’empêcher d’observer l’ancien rival pour se demander si le monde n’assiste pas à l’avènement d’une nouvelle ère « Poutine ». Polémia

Un nombre incroyable de personnes, aux Etats-Unis et à l’étranger, espère que le Président Obama mettra fin aux guerres illégales de l’Amérique, qu’il mettra un terme au soutien de l’Amérique aux massacres de Libanais et de Palestiniens commis par Israël et qu’il punira, au lieu de les récompenser, les banquiers gangsters (ou les « banksters escrocs »), dont les instruments financiers frauduleux ont détruit l’économie et imposé une souffrance massive à tous les gens dans le monde. Si les nominations d’Obama sont une indication, tous ces gens qui espèrent vont être déçus. (…)

Ce qui est décourageant est le fait que, même confronté à une crise économique et à une crise de politique étrangère, le système politique américain est incapable de produire le moindre leadership. Nous nous trouvons dans la pire crise économique de toute une vie, peut-être de notre histoire, et à la veille d’une guerre au Pakistan et en Iran, alors que la guerre en Afghanistan s’escalade. Et tout ce que nous obtenons est un gouvernement constitué de ces mêmes personnes qui nous ont amenés ces crises.

L’ère du leadership américain est révolue. Le système financier d’escrocs de l’Amérique a plongé le monde entier dans la crise économique. Les guerres d’agression de l’Amérique sont vues comme servant d’autres buts, comme l’enrichissement des industries militaires associées à Dick Cheney. Le monde est à la recherche d’un autre leadership.

Vladimir Poutine a bien joué à Davos pour endosser ce rôle. Son discours, lors de la cérémonie d’ouverture, était le plus intelligent de tout l’évènement. Poutine a rappelé au Forum Economique Mondial que les délégués américains qui s’exprimaient depuis cette tribune, il y a tout juste un an, avaient insisté sur la stabilité fondamentale de l’économie américaine et ses perspectives limpides. Aujourd’hui, les banques d’investissement, la fierté de Wall Street, ont virtuellement cessé d’exister. En 12 mois exactement, elles ont publié des pertes excédant les profits qu’elles ont réalisés au cours des 25 dernières années

Poutine a défendu l’idée selon laquelle le système financier existant, basé sur le dollar et l’hégémonie financière américaine, avait échoué.

Poutine a démontré que sa compréhension de l’économie était supérieure à celle de l’équipe d’Obama, lorsqu’il a déclaré que créer plus de dettes venant s’ajouter à des « dettes inextricables », comme le fait Obama, « prolongerait la crise ».

Dans une autre pique visant le leadership économique raté de l’Amérique, Poutine a déclaré qu’il est temps de se débarrasser de l’argent virtuel, des faux rapports financiers et des notations de crédit douteuses. Poutine a proposé un nouveau système de devise de réserve pour « remplacer le concept mondial unipolaire obsolète. » Poutine a dit qu’un monde en sécurité nécessitait la coopération, qui elle-même nécessite la confiance. Il a bien fait comprendre que les Américains avaient prouvé qu’on ne peut pas leur faire confiance.

Ce fut un message puissant qui a été beaucoup applaudi..

Par Paul Craig Roberts
CounterPunch, 3 février 2009
article original : "The Death of American Leadership"
Traduction : [JFG-QuestionsCritiques]
http://questionscritiques.free.fr/

Correspondance Polémia
12/02/09

La "diversité" au service des inégalités

LA "DIVERSITE" AU SERVICE DES INEGALITES


united colors of nowheristan« Au cours des 30 dernières années, les pays comme la France, les Etats-Unis, le Royaume-Uni et le Canada sont devenus de plus en plus inégalitaires, économiquement parlant. Et plus ils sont devenus inégalitaires, plus ils se sont attachés à la diversité. C'est comme si tout le monde avait senti que le fossé grandissant entre les riches et les pauvres était acceptable du moment qu'une partie des riches sont issus des minorités. Les gens se sont de plus en plus attachés à un modèle libéral de justice, dans lequel la discrimination – racisme, sexisme, homophobie, etc. – est le pire de tous les maux. Si ça marche, c'est à la fois parce que c'est vrai – la discrimination est évidemment une mauvaise chose – et parce que ça ne mange pas de pain – le capitalisme n'a pas besoin de la discrimination. Ce dont le capitalisme a besoin, c'est de l'exploitation.


Il est évident que la diversité ne réduit pas les inégalités économiques. Si vous prenez les 10% de gens les plus riches (ceux qui ont en fait tiré le plus de bénéfices de l'explosion néolibérale des inégalités) et que vous vous assurez qu'une proportion correcte d'entre eux sont noirs, musulmans, femmes ou gays, vous n'avez pas généré plus d'égalité sociale. Vous avez juste créé une société dans laquelle ceux qui tirent avantage des inégalités ne sont pas tous de la même couleur ou du même sexe. Les avantages en termes de gouvernance sont assez évidents, eux aussi. L'objectif du néolibéralisme, c'est un monde où les riches peuvent regarder les pauvres et leur affirmer (à raison) que personne n'est victime de discrimination, leur affirmer (tout autant à raison) que leurs identités sont respectées. Il ne s'agit pas, bien sûr, de les rendre moins pauvres, mais de leur faire sentir que leur pauvreté n'est pas injuste. (...)


Aux Etats-Unis, les Noirs radicaux se sont battus à la fois contre le racisme et le capitalisme. Des gens comme le Black Panther Bobby Seale ont toujours estimé qu'on ne peut pas combattre le capitalisme par le capitalisme noir, mais par le socialisme. Mais avec l'ère du marché triomphant débutée sous Reagan et Thatcher, l'antiracisme s'est déconnecté de l'anticapitalisme et la célébration de la diversité a commencé. Bien entendu, il n'y a rien d'anticapitaliste dans la diversité. Au contraire, tous les PDG américains ont déjà eu l'occasion de vérifier ce que le patron de Pepsi a déclaré dans le New York Times il y a peu: "La diversité permet à notre entreprise d'enrichir les actionnaires". De fait, l'antiracisme est devenu essentiel au capitalisme contemporain. Imaginez que vous cherchiez quelqu'un pour prendre la tête du service des ventes de votre entreprise et que vous deviez choisir entre un hétéro blanc et une lesbienne noire. Imaginez aussi que la lesbienne noire est plus compétente que l'hétéro blanc. Eh bien le racisme, le sexisme et l'homophobie vous souffleront de choisir l'hétéro blanc tandis que le capitalisme vous dictera de prendre la femme noire. Tout cela pour vous dire que même si certains capitalistes peuvent être racistes, sexistes et homophobes, le capitalisme lui-même ne l'est pas. (...)


Ces quarante dernières années, les étudiants des universités américaines ont changé, et de deux façons. Premièrement, ils se sont beaucoup diversifiés. Deuxièmement, ils sont toujours plus riches. Cela signifie qu'alors que les universités américaines se sont autoproclamées de plus en plus ouvertes (à la diversité), elles se sont en réalité de plus en plus fermées. Ça ne veut pas seulement dire que les jeunes issus de milieux modestes ont du mal à payer leur scolarité, ça signifie aussi qu'ils ont reçu un enseignement si bas de gamme dans le primaire et le secondaire qu'ils n'arrivent pas à passer les examens d'entrée à l'université. Donc, la première chose à faire lorsqu'on décide de mettre en place une politique de discrimination positive, c'est de le faire par classes et non par races. La seconde – mais de loin la plus importante – chose à faire serait de commencer à réduire les inégalités du système éducatif américain dès le primaire. Tant que ça ne sera pas fait, les meilleures universités américaines continueront à être réservées aux enfants de l'élite comme le sont, pour l'essentiel, les meilleures grandes écoles françaises. (...)


Du point de vue de la justice économique, Obama, c'est juste un Sarkozy noir. Bien sûr, ce n'est pas un problème pour Sarkozy, mais c'est un problème pour tous les gens qui se disent de gauche, qui aiment Obama et pensent que l'engagement dans la diversité dont il est le produit va également produire une société plus égalitaire. Le thème central de La Diversité contre l'Egalité, c'est qu'ils se trompent ; la diversité est au service du néolibéralisme, et non son ennemie. »



Walter Ben Michaels, auteur de "La Diversité contre l’Egalité" (Liber, 2009), interviewé par Marianne, 21 février 2009

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Néo-nationalisme et "Neue Rechte" en RFA de 1946 à 1988

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Archives de SYNERGIES EUROPEENNES - 1988

 

Néo-nationalisme et «Neue Rechte» en RFA de 1946 à 1988

par René LAUWERS

Placer la "Nouvelle Droite" allemande sous la loupe n'est pas une chose aisée; d'abord parce que le terme n'est ni utilisé ni revendiqué par les hommes et les regroupements que les journalistes rangent arbitrairement sous cette étiquette. En effet, le vocable "Neue Rechte" est une création de journalistes, une paresseuse commodité de vocabulaire qui désigne les tentatives d'innovation idéologique et pratique qui sont survenues dans le camp "nationaliste" en RFA. Récemment, Margret Feit a tenté de mener une enquête dans ce landernau et il en est sorti un livre, épais de 244 pages qui foisonnent d'informations utiles mais aussi, hélas, de commentaires incongrus et de simplifications abusives.

La raison de ces déraillements est simple: Margret Feit est une militante anti-fasciste professionnelle, une de ces Don Quichotte qui, quarante après l'effondrement spectaculaire du Reich de Hitler, passe son temps à harceler des fantômes de plus en plus poussiéreux. Mais la variante de son donquichottisme diverge un peu de celle de ses collègues francophones de la bande à Article 31  (Paris) ou à Celsius  (Bruxelles); ceux-ci s'emmêlent les pinceaux, fabriquent des complots rocambolesques où l'on voit, par exemple, le Ministre de la Justice belge Jean Gol, libéral et israëlite, planifier, dans un arrière-restaurant bruxellois, l'émergence d'un gigantesque réseau para-militaire avec l'ancien chef du mouvement Jeune Europe, Jean Thiriart, et un représentant du Président zaïrois, Mobutu Sese Seko! Margret Feit ne pousse pas la plaisanterie aussi loin.

Pourquoi lire ce livre?

Si les gugusses d'Article 31, deCelsius,  leur copain flamand qui sévit au Morgen  et le non moins inénarrable Maurice Sarfatti, alias Serge Dumont, plumitif au Vif/L'Express  dont les collègues se gaussent en privé en disant, poliment, "Il est resté un grand adolescent...", relèvent tous de la fantaisie charmante, de l'incurable gaminerie des fils à papa des Golden Sixties,  Margret Feit effectue un travail plus sérieux; elle est de la variante masochiste, celle qui traque (mal) ses propres fantasmes mais collectionne quand même les documents authentiques afin de dénoncer, croit-elle, un véritable réseau, perclus de méchanceté et prêt à se jeter sur la pauvre démocratie comme le loup de la fable sur l'agneau tendrelet. Mais Dame Feit est archiviste, elle cite ses sources et c'est pourquoi son livre vaut une note, même s'il ne contient pas d'index et si le canevas des chapitres qui se veulent une analyse du contenu intellectuel de la "Neue Rechte" est purement et simplement repris d'un livre utile et bien fait, paru en 1975 (il y a 14 ans!) et dû à la plume de Günter Bartsch (1).

Il vaut plus d'une note si on le débarrasse de ses fantasmes, certes traqués, mais qui reviennent à chaque paragraphe au grand galop, pour être sans cesse repoussés par l'énergie terrible que déploie le désir quasi névrotique de Margret Feit d'acquérir tout de même un brin de respectabilité scientifique. Considérons donc que ce livre à une certaine valeur, qui demeure cachée derrière des broussailles de fantasmes, et qu'il faut savoir le lire avec l'adresse d'un défricheur professionnel.

Le camp nationaliste avant l'avènement de la "Neue Rechte"

Dès 1946, apparaît la DReP (Deutsche Rechts-Partei; = Parti Allemand du Droit), fusion de la DKoP (Deutsche Konservative Partei) et de la DAP (Deutsche Aufbau-Partei; = Parti Allemand de la Reconstruction), deux formations nées en 1945. La DReP, dirigée par Fritz Dorls et Fritz Rößler, était trop hétérogène pour pouvoir durer; l'aile conservatrice se sépara de l'aile socialisante qui, avec les deux chefs de file, forme en 1949, la SRP (Sozialistische Reichs-Partei). En octobre 1952, le gouvernement interdit ce parti, sous la pression des alliés, inquiets parce qu'il avait fait preuve d'un certain dynamisme (1951: 11% des voix en Basse-Saxe et 16 sièges). Le parti s'était opposé à la politique pro-occidentale d'Adenauer, luttait pour une Allemagne réunifiée dans la neutralité et concurrençait sérieusement les "gauches" grâce à son programme social audacieux. Margret Feit ne souffle mot de cet engagement résolument non droitier... L'interdiction oblige les militants à changer de sigle et à modifier le style de leur propagande. Ce sera, notamment, la DRP (Deutsche Reichs-Partei) qui prendra le relais en enregistrant encore un certain succès en Basse-Saxe (8,1%, plus que les libéraux de la FDP). Le redressement économique joue cependant en faveur des partis confessionnels et de la SPD.

Du nationalisme étatique au nationalisme plébiscitaire et "basisdemokratisch"

A la suite de l'échec et de l'interdiction de la SRP et de la stagnation de la DRP, les milieux nationalistes opèrent une sorte de retour sur eux-mêmes. Les plus audacieux rejettent toutes formes de pro-occidentalisme et choisissent un neutralisme ou une forme allemande de gaullisme. Mais les critiques se portent essentiellement contre les reliquats d'étatisme bismarckien que véhiculaient encore les dirigeants du "vieux nationalisme" de la SRP et de la DRP. Le noyau organisationnel de cette révision hostile à l'étatisme centralisateur, ce fut la DG (Deutsche Gemeinschaft; = Communauté Allemande) d'August Haußleiter, issu de la CSU bavaroise. Cette DG était nationale-neutraliste et anti-libérale dans le sens où l'entendaient les principaux protagonistes de la "konservative Revolution" du temps de Weimar. L'Etat auquel aspirait cette formation se légitimerait, non sur la puissance d'un parti qui gagnerait les élections, mais sur la volonté populaire, génératrice d'une harmonie et d'une convivialité populaires. D'emblée, avec un tel programme, annoncé pour les deux républiques allemandes et pour l'Autriche, les militants de la DG ont pris le parti des peuples colonisés en lutte pour l'acquisition de leur indépendance (Egypte nassérienne, FLN algérien, etc.) car ces combats sont à mettre en parallèle avec la volonté des Allemands d'obtenir, eux aussi, leur propre auto-détermination.

En mai 1965, alors que les restes de la DRP venaient de se rassembler au sein d'une nouvelle formation, la NPD (National-Demokratische Partei Deutschlands), fondée en novembre 1964, la DG, avec le DFP (Deutsche Freiheits-Partei; = Parti Allemand de la Liberté) et la VDNV (Vereinigung Deutsche National-Versammlung; = Association pour le Rassemblement national-allemand), se mue en AUD (Aktionsgemeinschaft Unabhängiger Deutsche; = Communauté d'Action des Allemands Indépendants). Un clivage net se forme immédiatement: les vieux-nationalistes, étatistes, se retrouvent à la NPD, tandis que la gauche des nationaux, avec les principaux intellectuels, se retrouve à l'AUD.

De l'AUD à l'ouverture aux mouvements de gauche et à l'écologisme

Notons que la VDNV comptait dans ses rangs Wolf Schenke, fondateur d'une conception de "troisième voie" et partisan de la neutralité, et l'historien Wolfgang Venohr (cf. Orientations  n°3). L'AUD, fidèle à son refus des vieilles formules étatistes et fascisantes et à sa volonté populiste et organique, s'ouvrira à l'APO (Außerparlamentarische Opposition; = Opposition extra-parlementaire) gauchisante et fera sienne quantité d'arguments pacifistes et néo-démocratiques (dont l'objectif est l'édification d'une démocratie au-delà des partis et des familles idéologiques traditionnelles). Les pourparlers engagés avec l'APO échoueront (bien que plusieurs responsables de l'APO et du SDS, son organisation étudiante, se retrouveront dans les années 80 dans le camp néo-nationaliste) et les militants de l'AUD investiront les cercles d'écologistes, au nom d'un idéologème organique, de tradition bien romantique et germanique: la protection de la Vie (Lebensschutz).  Plusieurs de ces militants fonderont, avec des éléments plus gauchistes, le fameux "Parti des Verts" que nous connaissons aujourd'hui.

Les Strassériens: "Troisième Voie", Solidarisme, Européisme

Les Strassériens, regroupés autour d'Otto Strasser, constituent une composante supplémentaire du néo-nationalisme d'après 1945. Dès l'effondrement du IIIème Reich, Otto Strasser, depuis son exil canadien, envoie massivement des "Rundbriefe für Deutschlands Erneuerung" (= Circulaires pour le Renouveau Allemand) à ses sympathisants. Ces circulaires évoquent une réunification allemande sur base d'une "troisième voie européenne", axée sur un solidarisme qui renverrait dos à dos le capitalisme libéral occidental et le socialisme à la soviétique. Ce solidarisme abolirait les clivages de classe, tout en forgeant une élite dirigeante nouvelle. L'unité allemande, vue par Strasser, implique un neutralisme armé, noyau militaire futur d'une Europe indépendante qui doit devenir une puissance politique égale, sinon supérieure, aux USA et à l'URSS. Cette Europe serait l'alliée du Tiers-Monde, car les pays de ce Tiers-Monde devront fournir les matières premières à la "Fédération Européenne" en gestation.

Pour soutenir et diffuser ce programme, les Strasseriens ouest-allemands fondent en 1954 la DSU (= Deutsche Soziale Union). Plusieurs militants nationaux-révolutionnaires y ont fait leurs premières armes, notamment Henning Eichberg entre 1956 et 1959. En 1961, il passe à la VDNV de Venohr et Schenke (cf. supra). Ce passage implique un abandon de l'étatisme et du centralisme néo-strassériens et une adhésion au démocratisme populiste, dont l'AUD allait se faire le champion.

Auto-gestion ouvrière et nationalisme de libération

Dans cette même mouvance, apparaissent les "Vötokalisten" autour d'E. Kliese. Ce cercle politique élabore une théorie nouvelle de l'auto-gestion ouvrière, dérivée des principes du "socialisme allemand" (cf. Orientations  n°7 et Trasgressioni  n°4), seule véritable rénovation du marxisme en ce siècle. Cette théorie de l'auto-gestion formera le noyau de la doctrine sociale de l'UAP (= Unabhängige Arbeiter Partei), autre formation qui se crée au début des années soixante et qui se veut "la formation de combat pour un socialisme libertaire et démocratique de la nation allemande". Vötokalisten  et militants de l'UAP se réclament de Ferdinand Lassalle, fondateur de la social-démocratie allemande et admirateur de l'œuvre de Bismarck. Le lecteur francophone constatera ici combien proches de la social-démocratie sont les différentes variantes du néo-nationalisme allemand.

Ce socialisme allemand, à connotations lassalliennes, s'oppose tant à la NPD, jugé droitière, qu'aux communistes et à la SPD, jugés traîtres à l'idéal socialiste. Un personnage important apparaît dans cette mouvance: Wolfgang Strauss, ancien militant du parti libéral est-allemand (LDPD) et ancien forçat de Vorkhuta. Strauss se fait l'avocat d'un socialisme populaire et d'un nationalisme de libération, dont le modèle dérive, entre autres, de la résistance ukrainienne, du solidarisme russe et de la révolution hongroise de 1956. Le nationalisme est conçu, dans cette optique, comme le levain sentimental qui fera naître un socialisme proche du peuple, résolument anti-impérialiste, hostile aux super-gros, ethno-pluraliste.

Le déclin de la NPD

Malgré quelques succès initiaux lors des élections dans les Länder, la NPD ne parvint jamais à dépasser le score de 4,3% (en 1969) pour le scrutin fédéral. Le parti s'est divisé entre idéalistes et opportunistes, tandis que la mouvance du nationalisme démocratique, néo-socialiste et pré-écologique attire davantage les intellectuels et les étudiants. Cette strate sociologique est effectivement porteuse des principales innovations idéologiques du néo-nationalisme allemand à la veille de l'agitation de 68. Si l'on s'intéresse à cette germination constante plutôt qu'aux structures fixes, une analyse des associations étudiantes qui se sont créées en marge de la NPD (et souvent en opposition directe à elle) se révèlera très utile.

Plusieurs initiatives se succèderont dans le monde universitaire. Parmi elles, le BNS (= Bund Natio-na-ler Studenten; Ligue des Etudiants Nationaux) en 1956, sous l'impulsion de Peter Dehoust, l'actuel directeur de la revue Nation Europa  (Cobourg). De-houst et ses compagnons voulait appuyer le combat proprement politique des nationaux par une in-ter-ven-tion tous azimuts dans le domaine de la "culture", ce qui, dans le langage politique allemand, s'appelle en--gager un nouveau "Kulturkampf". Les disci-pli-nes que privilégiait ce "Kulturkampf" étaient bien en-tendu l'histoire et la biopolitique. Le BNS a assu-ré-ment constitué un modèle d'organisation bien conçu, mais son message idéologique était, sous bon nom-bre d'aspects, plus conservateur que le pro-gram-me et les intentions de la DG qui, plus tard, donnera l'AUD.

Les organisations qui prendront le relais dans les années soixante, entre la mise sur pied de la NPD et l'effervescence de 67-68, seront, elles, plus fidèles au populisme révolutionnaire et assez hostiles aux derniers linéaments d'étatisme. En octobre 1964, Sven Thomas Frank, Bodo Blum et Fred Mohlau fondent à Berlin l'IDJ (= Initiative der Jugend; Ini-tia-tive de la Jeunesse), qui, en 1968, fusionera avec quelques autres organisations militantes pour for-mer l'APM (= Außerparlamentarische Mitarbeit; Coopé-ra-tion extra-parlementaire); cette nouvelle ini-tia-tive était à l'évidence calquée sur l'APO (= Außer-par-la-mentarische Opposition) gauchiste. L'APM vi-sait à regrouper les nationaux, ceux qui ne re-non-çaient pas à l'idée d'une réunification allemande et ne cessaient de considérer Berlin comme la capitale unique de tou-te l'Allemagne.

Rudi Dutschke et Bernd Rabehl glissent vers une forme de nationalisme

Günther Bartsch souligne très pertinemment, au con--traire de Margret Feit, que, malgré le clivage ini-tial induit par la

question nationale, les groupes d'é-tudiants glissaient tous, gauchistes comme natio-na-listes, vers une forme nouvelle, militante et re-ven-dicatrice de nationalisme. Bartsch rappelle que les deux leaders gauchistes du Berlin de 68, Rudi Dut-schke et Bernd Rabehl, ne posaient pas du tout l'é-quation éculée: "nationalisme = fascisme". Au contraire, très tôt, Rabehl, dans plusieurs textes théo-ri-ques, insista sur le fait que les motivations natio-na-listes avaient joué un rôle de premier plan dans les révolutions française, russe, yougoslave et chinoise.

Dialectiquement, selon Rabehl, le natio-na-lisme re-cè-le une utilité progressiste; il dynamise le pro-cessus de l'histoire et provoque l'accélération des conflits de classe, donc le déclenchement des ré-vo-lutions so-cialistes. L'idéologie nationale permet de don-ner un discours unificateur aux différentes com-posantes de la classe ouvrière. A l'échelle du globe, poursuit Ra-behl, un néo-nationalisme allemand, por-té par la clas-se ouvrière, permettrait d'ébranler le condomi-nium américano-soviétique, incarnation de la réac-tion, de l'immobilisme, au XXème siècle, tout com-me le "système Metternich", issu du Congrès de Vienne de 1815, l'avait été au début du XIXème.

Dutschke, avec tout son charisme, appuya ce glis-sement entamé par son camarade Rabehl. Il alla mê-me plus loin: il écrivit que le XXème siècle alle-mand avait connu trois formes de socialisme ouvrier et révolutionnaire: la SPD socialiste, la KPD com-mu-niste et... la NSDAP de Hitler (à qui il re-prochait toutefois certaines compromissions et orien-ta-tions diplomatiques). Cette réhabilitation (très) partielle du rôle historique de la NSDAP démontre à l'évidence que l'anti-fascisme manichéen, qui fait rage de nos jours, n'avait déjà plus droit de cité chez les théo-ri-ciens gauchistes sérieux des années 60. Margret Feit ne souffle évidemment mot de ce glissement et évite, dogmatiquement, de se pencher sur la valeur théo-rique de cet argu-men-taire commun à la "Nouvelle Gauche" et à la "Nouvelle Droite". Bartsch constate que les mili-tants de gauche et les jeunes nationalistes avaient bon nombre d'idées en commun, notam-ment:

- le refus de l'establishment;

- la critique de la société de consommation;

- l'hostilité à l'encontre des manipulations média-ti-ques;

- le refus de l'hyper-spécialisation;

- l'attitude anti-technocratique à connotations écolo-gi-ques;

- l'anticapitalisme et la volonté de forger un nouveau socialisme;

- le mythe de la jeunesse rénovatrice;

- l'anti-bourgeoisisme où marxisme et niétzschéisme se mêlaient étroitement;

- la volonté de remettre absolument tout en question.

Pourquoi nationalistes et gauchistes n'ont-ils pas mar-ché ensemble contre le système, puisque leurs po--sitions étaient si proches? Bartsch estime que c'est parce que les nationalistes véhiculaient encore de ma---nière trop patente des imageries et des références du passé, tandis que la gauche maniait la théorie "cri--tique" avec une dextérité remarquable et béné-fi-ciait de l'impact retentissant du livre de Marcuse, L'homme unidimensionnel.  La césure entre les "sty---les" était encore insurmontable.

"Junges Forum" et "Junge Kritik": un laboratoire d'idées à Hambourg

La revue Junges Forum, fondée en 1964 à Ham-bourg, envisageait d'emblée de "jeter les bases théo-riques d'une pensée nouvelle". La volonté qui ani-mait cette intention, c'était de sortir du ghetto stric-te-ment politique, où se percevait une nette stagna-tion quant au recrutement de militants nouveaux, et de sug-gérer aux citoyens dépolitisés un message neuf, sus-ceptible de les intéresser et de les sortir de leur tor-peur. Ceux que Margret Feit nomme les "têtes pen-santes" de la "Neue Rechte" ont publié articles et manifestes dans les colonnes de Junges Forum. Par-mi elles: Wolfgang Strauss, Lothar Penz, Hans Am-hoff, Henning Eichberg et Fritz Joß. Les thèmes abor-dés concernaient: le renouveau intellectuel, la re-cherche d'une forme de démocratie plus satisfai-san-te, l'élaboration d'un socialisme organique, la réu-ni-fi-cation allemande, l'unité européenne, l'ébauche d'un ordre international basé sur les principes de l'or-ganicité, l'écologie, le régionalisme, le solida-ris-me, etc.

En 1972, le comité de rédaction de la revue publie un manifeste en 36 points, dont l'objectif avéré est de poser les bases d'un socialisme populaire et orga-nique, capable de constituer une alternative cohé-ren-te aux idéologies libérale et marxisante alors do-mi-nan-tes (le texte, sans les notes, est reproduit in ex-ten-so en annexe du livre de Bartsch). Ce manifeste exer-cera une influence relativement modeste chez nous, notamment dans certains cercles proches de la Volksunie, chez les solidaristes flamands, chez les régionalistes, chez quelques néo-socialistes et/ou so-lidaristes bruxellois, notamment dans la revue ly-céenne Vecteurs  (1981) dont il n'est jamais paru qu'un seul numéro, lequel reproduisait une tra-duc-tion adaptée du programme de Junges Forum,  par Chris-tian Lepetit, militant de l'AIB (Anti-Impe-rialistische Bond; Ligue Anti-Impérialiste) para-maoïs-te. Robert Steuckers diffusait ce mes-sage dans l'or-bi-te de la revue Pour une renaissance européenne, organe du GRECE-Bruxelles, dirigé par Geor-ges Hupin.

Nationalisme européen, nouvel ordre économique, philosophie et politique

Parallèlement à la revue paraissait une collection de pe-tits livres de poche, dénommée Junge Kritik.  Da-van--tage encore que les cahiers de Junges Forum,  les textes de réflexions alignés dans les pages des trois volumes de Junge Kritik  constituent la base es-sen-tielle d'une rénovation totale de la pensée natio-na-liste à l'aube des années 70 (la parution des trois premiers fascicules s'étend de 1970 à 1973). Mar-gret Feit, évidemment, ne s'intéresse pas à l'évo-lu-tion des idées: elle préfère fabriquer un puzzle de connections réelles ou imaginaires pour étayer une Xième théorie du complot.

L'objectivité nous oblige à recourir directement aux textes. Dans le volume n°1 (Nationalismus Heute; = Le Nationalisme au-jour-d'hui), les jeunes leaders Hartwig Singer (pseu-donyme d'Henning Eichberg), Gert Waldmann et Mi-chael Meinrad entonnaient un plaidoyer pour une européanisation du nationalisme et, partant, pour une libération de l'ensemble de notre sous-continent des tutelles américaine et soviétique. Le nationalisme rénové serait dès lors "progressiste" puisqu'il im-pli-querait, non la conservation de structures mortes (comme le suggère la vieille historiographie libé-ra-le/marxiste), mais la libération de nos peuples d'u-ne oppression politique et économique, fonctionnant à deux vitesses (l'occidentale et la soviétique), ce qu'a--vaient déjà envisagé les "dutschkistes" berli-nois.

Dans le second volume de Junge Kritik,  intitulé Leis-tungsgemeinschaft  (= communauté de presta-tion), Meinrad, Joß et Bronner développent le pro-gramme économique du néo-nationalisme: solida-rité des strates laborieuses de toutes les nations, pro-prié-té des moyens de production pour tout ceux qui pres--tent, limitation drastique des concentrations ca-pitalistes. Hartwig Singer, pour sa part, y publiait un Manifest Neue Rationalität  (= Manifeste pour une nouvelle rationalité), où le parallèle avec les ef-forts d'Alain de Benoist à la même époque saute aux yeux. Singer et de Benoist, en effet, voulaient, par le biais de l'empirisme logique anglo-saxon et de l'in--terprétation que donnait de celui-ci le Français Louis Rougier, lancer une offensive contre l'essen-tia-lisme des idéologies dominantes de l'époque. Singer ajoutait toutefois à ce message empiriste et rougiérien l'apport de Marx, pour qui toute idéologie cache des intérêts, et de Max Weber, théoricien du processus de rationalisation en Occident. Singer, s'ins-crivant dans un contexte allemand nettement plus révolutionnaire que le contexte franco-parisien, grèvé d'un anti-marxisme trop littéraire, osait mo-bi-liser le Marx dur et réaliste contre le Marx abstrait et faux des néo-moralistes. Ce qui permettait de corri-ger l'apoli-tisme de Rougier qui conduisait à un con-ser-vatisme BCBG, incapable de briser les incohé-ren-ces prati-ques du libéralisme ambiant de l'Oc-ci-dent.

Le néo-nationalisme est "progressiste"

Dans le troisième volume, qui eut pour titre Euro-päischer Nationalismus ist Fortschritt  (= Le Na-tio-na-lisme Européen, c'est le progrès!), Meinrad, Wald--mann et Joß reprenaient et complétaient leurs thèses, tandis que Singer, dans sa contribution ("Lo-gischer Empirismus"),  accentuait encore le modernis-me conceptuel de Junge Kritik;  la proximité de sa démarche par rapport à celle d'Alain de Benoist dans Nouvelle Ecole  en 1972-73 apparaît plus évidente encore que dans le texte Manifest Neue Rationalität. Singer non seulement cite abondamment Nouvelle Ecole  mais incite ses camarades à lire Monod, Rus-sell, Rougier et Heisenberg, quatre auteurs étudiés par Nouvelle Ecole. Singer ajoute que, de cette qua-druple lecture, il est possible de déduire un socia-lis-me de type nouveau (Monod et Russell), un néo-na-tionalisme (Heisenberg) et une nouvelle "conscience européenne" (Rougier). Rougier, en effet, avait dé-mon-tré que le génie européen était le seul génie ou-vert sur le progrès, capable d'innovation et d'adapta-tion. La rationalité européenne, selon Rougier, de Be-noist et Singer, transcendait largement les idéaux orientaux contemplatifs que la vogue hippy,  dans le sillage de 68 et de la contestation américaine contre la guerre du Vietnam, injectait dans l'opinion pu-blique. Le néo-nationalisme apparaissait dès lors com-me progressiste, car ouvert aux sciences moder-nes, tout comme il apparaissait progressiste aux yeux de Dutschke et Rabehl car il pouvait briser, par son énergie, l'oppression représentée par une aliéna-tion macro-politique: celle instaurée à Yalta.

Ce tandem philosophique germano-français ne dure-ra pas: quelques années plus tard, la revue Eléments, organe du GRECE et proche d'Alain de Benoist, attaque la mouvance écologique, dans laquelle les Al-le-mands se sentent directement engagés. Sur le plan de la défense nationale, les Français appuyent l'ar-mement atomique national, démarche dans laquelle les Allemands ne se sentent pas concernés. Ce n'est qu'à partir de 1982, quand Alain de Benoist tranche nettement en faveur du neutralisme allemand, que les positions respectives des Allemands et des Français se rejoignent une nouvelle fois.

L'apport flamand

En Flandre, le pays où, en dehors de l'Allemagne, Junges Forum  compte le plus d'abonnés, le soli-da-risme et le régionalisme de la revue hambourgeoise ont éveillé beaucoup d'intérêt, si bien que bon nombre d'écrivains (méta)politiques flamands ont contribué à l'effort de Junges Forum.  Citons, pêle-mêle: Jos Vinks (Le nationalisme flamand, 1977; Le pacifisme du mouvement flamand, 1981; La langue afrikaans, 1987), Roeland Raes (Le régionalisme en Europe, 1979), Willy Cobbaut (L'alternative solida-riste, 1981), Frans de Hoon (Approche positive de l'anarchisme, 1982), Piet Tommissen (Le con-cept de "métapolitique" chez Alain de Benoist, 1984), Robert Steuckers (Henri De Man, 1986). A l'oc-ca-sion du 150ième anniversaire de la Belgique, en 1980, Jos Vinks, Edwin Truyens, Johan van Her-re-weghe et Pieter Moerman expliquent, d'un point de vue flamand, les racines historiques et la si-tuation de la querelle linguistique en Belgique. La contribution française se limite, en 1984, à un texte d'Alain de Benoist définissant la "Nouvelle Droite" et à un essai de Jacques Marlaud sur la théorie grams-cienne de la métapolitique et sur son appli-cation pratique par la "Nouvelle Droite".

On imagine ce qu'aurait pu donner, en Europe, une fusion du "dutschkisme", du néo-européisme et de la praxis gramscienne  -ce qu'a-vaient espéré les quelques lycéens bruxellois fran-cophones, regrou-pés autour de Christian Lepetit et Eric Delaan, avant que la dispersion universitaire et le service militaire ne les séparent... La mésaventure furtive de Lepetit et de Delaan mérite l'attention car elle montre que le néo-nationalisme néo-socialiste et régionaliste, pré-co-nisé par les Allemands, pouvaient séduire, au-delà des frontières, des garçons qui militaient dans la mouvance anti-impérialiste du maoïsme en pleine li-qué-faction.

Les "groupes de base" nationaux-révolutionnaires

Parallèlement à l'entreprise Junges Forum,  qui se pour-suit toujours aujourd'hui et qui fêtera ses 24 ans en 1988, la mouvance néo-nationaliste allemande s'est constituée en "groupes de base" (Basis-grup-pen). Le terme est issu du vocabulaire de la con-tes-tation gauchiste. Les organisations étudiantes de gau--che avaient débordé le cadre universitaire et en-va-hit les lycées et les usines. L'émergence du "grou-pe de base" si-gnifie que, désormais, il existe une im-brication des révolutionnaires nationaux dans toutes les couches de la société. Cette diversification pos-tule une décentralisation et une relative auto-no-mie des groupes locaux qui doivent être prêts à intervenir à tout moment et très vite dans leur ville, leur lycée, leur usine, sans devoir s'adresser à une instance centrale.

                                                        

Agitation à Bochum

La stratégie des "groupes de base" se manifestera de la façon la plus spectaculaire à l'Université de la Ruhr à Bochum. Un groupe d'activistes néo-natio-na-listes y militait efficacement et y avait fondé un jour-nal, le Ruhr-Studenten-Anzeiger.  Autour de cet-te feuille militante, s'organise en 1968 un "Repu-bli-kanischer Studentenbund" (RSB; = Ligue des Etu-diants Républicains) qui se propose de devenir un con-tre-poids au SDS gauchiste. L'affrontement n'al-lait pas tarder: les militants du RSB reprochaient au SDS d'organiser des grèves sans objet afin d'asseoir leur pouvoir sur les masses étudiantes. Au cours d'un blocus organisé par les gauchistes, le RSB prend l'université de Bochum d'assaut et proclame, avec un langage marxiste-populiste, son hostilité aux "ex-ploiteurs" et aux "bonzes" du SDS, devenus par--ties prenantes d'un néo-establishment, où le gau-chisme avait désormais sa place. Les proclamations du RSB, rédigées par Singer, étaient truffées de ci-tations de Lénine, de Marx et de Mao. Singer se ré-fé-rait également aux discours tenus par les agitateurs ouvriers berlinois contre les fonctionnaires commu-nistes d'Ulbricht, lors du soulèvement de juin 1953. Les révoltés insultaient les fonctionnaires est-alle-mands de la SED, marionnettes des Soviétiques, de "singes à lunettes", de "patapoufs adipeux" et de "ronds-de-cuir réactionnaires". Cette annexion du vo---cabulaire marxiste et de la verve berlinoise de 53 irritait les gauchistes car, ipso facto, ils perdaient le monopole du langage-choc militant et entrevoyaient une possible intrusion des NR dans leurs propres milieux, avec le risque évident du débauchage et de la contre-séduction...

Les bagarres de 1968 et l'adoption par les natio-na-listes d'un langage puisé dans l'idéologie marxiste, bien qu'elles aient surpris le SDS, n'eurent guère d'échos en dehors de la Ruhr et durent affronter la cons-piration du silence. Le RSB et le Ruhr-Stu-den-ten-Anzeiger   disparurent, sans pour autant entraîner la disparition totale d'une agitation nationaliste de gauche à Bochum. Ainsi, au début des années 70, les nationalistes participent aux manifestations de la gau-che contre la spéculation immmobilière et l'augmentation des loyers et reprennent à leur comp-te le slogan des groupes trotskystes: "La division de l'Allemagne, c'est la division du prolétariat alle-mand!". L'aventure du RBS est en ceci significative pour l'évolution ultérieure du néo-nationalisme alle-mand (que Margret Feit nomme abusivement "Neue Rechte"), qu'elle marque sa transition définitive vers la gauche, sa sortie hors du microcosme para-droi-tier dans lequel, du fait de l'existence de la NPD, il demeurait incrusté. La faillite et la stérilité historique du "droitisme" y sont proclamées et l'accent est mis résolument sur le socialisme, la rationalité critique, l'athéisme militant et le futurisme.

Munich et Bielefeld

Après Bochum, d'autres "groupes de base" voient le jour et chacun d'eux développe une originalité pro-pre. Ainsi, à Munich, Wolfgang Strauss forme un comité pour jeunes travailleurs, lycéens et étu-diants, dont l'objectif est de donner une culture mi-litante, basée sur la littérature et la science politique. Strauss nomme son groupe "Club Symonenko", du nom d'un poète ukrainien, Wasyl Symonenko, dé-cé-dé en 1963, après avoir subi la répression so-vié-tique. Ce comité exige la libération de l'historien ukrai-nien Valentin Moro, organise des soirées avec l'écrivain polonais exilé Zygmunt Jablonski et des matinées du 17 juin, en souvenir du soulèvement ouvrier berlinois de 1953, distribue des tracts bilin-gues en faveur de l'IRA irlandaise et fonde un "cer-cle de travail" James Connolly, en hommage au syn-dicaliste militant et nationaliste irlandais, qui savait puiser ses arguments dans la mythologie celtique. Les références allemandes étaient le poète Georg Büch-ner, fondateur au XIXème siècle de la "Société des droits de l'Homme" et le poète romantique Theo-dor Körner, engagé dans le "Corps Lützow" (Cf. la musique de Weber) pour chasser l'oppres-seur bonapartiste et ses troupes de pillards hors d'Al-lemagne. Strauss réussit à la veille des années 70 à jeter les bases d'une culture politique originale, puisant dans le corpus des nationalismes populaires et libertaires slaves et celtiques et à réveiller l'en-thousiasme des jeunes allemands pour leurs poètes nationalistes, libertaires, anarchisants et radicalement anti-bourgeois du début du XIXème. Ce corpus se main-tiendra tel jusque dans les colonnes de la revue Wir Selbst,  au début des années 80 (cf. infra).

Si en Sarre et en Rhénanie-Westphalie, les "groupes de base" finissent par choisir une inféodation à la NPD  —qui ne cessa jamais d'être problématique et d'engendrer des conflits idéologiques graves—  à Bielefeld, le groupe "NJ-Stadtverband" (= Groupe urbain de la jeunesse nationaliste), proche des Berlinois de l'APM, parvient à organiser une agitation mo-derne, avec disques de chants protestataires com-posés par Singer, et à tirer un journal, Wendepunkt, à 4500 exemplaires! Du jamais vu! La tactique édi-toriale était de rassembler un maximum de textes et d'informations, émanant directement des militants, et de les aligner dans les colonnes du journal; d'au-tres "groupes de base" suivent la même stratégie, ce qui permet de former un cadre solide, grâce à une bonne division du travail et à une masse concentrée d'informations militantes. Le militantisme devenait ain-si vivant donc rentable.

Cinq types d'action

La coordination entre les groupes doit s'étendre à l'échellon national, pensait Meinrad, et éliminer la NPD droitière et désuète. Les groupes doivent comp-ter de 15 à 20 activistes locaux auto-financés grâce à des cotisations relativement élevées, et mener régulièrement cinq types d'action, explique Bartsch:

1) Les commémorations, notamment celle du 17 juin 1953 et du 13 août 1961, date à laquelle fut érigé le Mur de Berlin.

2) Les actions écologiques; le groupe Junges Forum de Hambourg y excella. Il organisa des Bürger-ini-tiativen   (= Initiatives de Citoyens) contre la construction d'une autoroute en plein milieu de la ville. Le nationalisme, dans cette perspective, c'était de protéger l'intégrité naturelle du biotope populaire.

3) Les actions sociales: elles sont essentiellement di-rigées contre la spéculation immobilière, l'augmen-tation des loyers et l'augmentation des tarifs des trans-ports en commun. Ces actions visent aussi à ex-pliquer l'irrationalité du fonctionnement de la ma-chine étatique, qui prétend être une démocratie par-faite.

4) Les actions de solidarité: elles visent à soutenir les nationalismes contestataires est-européens, car, pen-sent les activistes néo-nationalistes ouest-allemands des années 70, l'unité allemande ne pourra se réali-ser que si un bouleversement majeur s'effectue en Europe de l'Est.

5) Les actions de résistance: il s'agit surtout de cha-huts contre la visite de personnalités est-allemandes à l'Ouest dans le cadre de l'Ostpolitik  de Willy Brandt.

Vers l'unité: la NRAO ("Nationalrevolutionäre Aufbauorganisation")

L'ensemble des "groupes de base" ne forme pas un parti, structuré de façon rigide, mais un mouvement dynamique qui intègre sans cesse des informations et des faits nouveaux. Sa non-rigidité et sa diversité le mettent au dia-pason de l'actualité et empêchent tout encroûtement, tout repli sur soi et/ou sur un cor-pus figé. Le politique ne se joue pas seulement aux élec-tions, mo-ments furtifs, mais se déploie et s'insi-nue sans cesse dans la vie quo--tidienne. Mieux: il s'in-cruste dans les conscien-ces grâce à une agitation constante, laquelle implique que cha-que militant ait à cœur de se former personnellement chaque jour en lisant la presse et les livres, ceux qui con--fortent ses références culturelles essen-tiel-les et spontanées et ceux écrits par ses adver-sai-res, afin de bien con-naî-tre les clivages idéologiques qui s'articulent dans le pays.

Afin d'amplifier l'action de ces "groupes de base" bien imbriqués dans les villes et dans les universités allemandes, plusieurs figures de proue de cette mou-vance néo-nationaliste (ou nationale-révolutionnaire) décident en mars 1974 de créer une "organisation de coordination" qui prendra le nom de NRAO ou "Na-tionalrevolutionäre Aufbauorganisation" (= Organi-sa-tion de Construction nationale-révolutionnaire). Plu--sieurs réunions seront nécessaires pour mettre au point une stratégie commune. Au cours de la pre-mière, qui eut lieu les 2 et 3 mars 1974 à Würzburg, trois orateurs jetèrent les bases du renouveau: Alexan--der Epstein (alias Sven Thomas Frank), Lo-thar Penz et Hans Amhoff.

Le discours d'Epstein

Le discours tenu par Epstein révélait, entre autres cho--ses, une volonté de combattre les "ennemis de l'in-térieur", de réfuter le patriotisme ersatz  ouest-euro-péen (l'intégration-CEE vendue comme une pa-nacée par les amis d'Adenauer), de jouer, en poli-tique in-ter-nationale, la carte chinoise contre les deux super-gros. Epstein intégrait de cette façon la théorie maoïste des "trois mondes" dans le corpus doctrinal NR. En outre, il pose le mouvement NR comme le seul mouvement authentiquement national, puisque la SED est-allemande et la DKP ouest-allemande sont à la solde de l'URSS, tandis que les partis bour-geois, la SPD, la FDP et la CDU/CSU cons-ti-tuent les garants de la présence américaine, malgré l'aile gauche de la SPD, favorable à une Ostpolitik  démissionnaire. Dans ce schéma, la NPD, par son droitisme incurable, se place à la droi-te de la CSU bavaroise. Seul, le petit microcosme maoïste berli-nois, éditeur de la prestigieuse revue Befreiung,  trou-vait grâce aux yeux d'Epstein qui, du coup, se faisait l'avocat d'une coopération tacite et courtoise en-tre maoïstes et NR.

Epstein, comme Penz et Amhoff, pensait que la stra-tégie à suivre ne pouvait nullement être clan-destine ou illégale; comme seuls les NR réclamaient de façon cohérente la réunification du pays, leur pro-gram-me était conforme au mot d'ordre inscrit dans le préambule de la constitution démocratique de la RFA, mot d'ordre qui demandait aux citoyens de mo-biliser tous leurs efforts pour redonner l'unité et la liberté à l'Allemagne. Ensuite, toujours à l'occa-sion de ce rassemblement de Würzburg, Penz pré-ci-se sa vision sociale "biohumaniste" et Amhoff ex-plicite sa définition rénovée du nationalisme moder-ne de libération, anti-impérialiste dans son essence.

La création de "Sache des Volkes"

La dispersion géographique des groupes, les modes de travail différenciés que chacun d'entre eux avait acquis et quelques divergences idéologiques firent en sorte qu'aucun centralisme ne pouvait plus cha-peau-ter la diversité propre au mouvement NR. Dès le 31 août 1974, Epstein (= S.T. Frank), Waldmann et Amhoff convoquent un millier de militants NR pour leur faire part de nouveaux projets: embrayer sur la contestation écologique parce que le massacre du paysage est l'œuvre d'un capitalisme apatride et dé-raciné; ébaucher un socialisme solidaire, po-pu-lai-re, enraciné, à la mode des socialismes adoptés par les peuples opprimés du tiers-monde; construire l'au-to-gestion ou-vriè-re à la façon yougoslave, etc. Le mou-vement "Sache des Volkes" (en abrégé, SdV; = Cause du Peuple), qui est issu de ce ras-semblement, se veut partie d'un mouvement mon-dial diffus qui lutte, partout dans le monde, contre le ca-pitalisme et le so-cialisme étatisé à la soviétique.

Hartwig Singer va donner corps à ce double refus, auquel adhéraient également les militants NR fran-çais (notamment ceux du CIPRE et de "Lutte du Peu-ple" de Yannick Sauveur et les militants proven-çaux du CDPU) et les Italiens et les Belges de Jeune Europe et de ses divers avatars. Dans le discours qu'il envoie aux congressistes et qui leur sera lu, il rap-pelle l'abc qu'est le refus de Moscou comme de Wa-shington, mais explique aussi qu'il est nécessaire de tenir compte de faits nouveaux: l'ennemi principal n'est plus le capitalisme localisé, à base nationale, mais le capitalisme multinational qui a fait de l'US Army et de l'Armée Rouge ses deux instances po-licières sur l'ensemble du globe. Singer désignait dès lors un ennemi plus précis, unique: le capital mul-ti--na-tional, dont les impérialismes classiques, ins-tallés de-puis Yalta, ne sont que les instruments. La po--litique de la détente, dans cette op-tique, n'aurait pour objectif que de permettre au capitalisme occidental multinational d'ouvrir des marchés à l'est.

SdV s'est exprimée de 1978 à 1988 dans la revue Neue Zeit   qui continue de paraître à Berlin, tandis qu'une série de feuilles ont ponctué la vie militante du mouvement comme Laser  (Düsseldorf), Ideo-lo-gie und Strategie, Rebell  et Der Nationalre-vo-lu-tionär  à Vienne; cette dernière paraît toujours sous la direction d'Helmut Müller.

Solidaristische Volksbewegung (SVB)

Tandis que les éléments les plus jeunes de la mou-vance NR calquaient leur stratégie offensive sur celle des gauchistes, les militants de Hambourg, regrou-pés autour de la revue Junges Forum  et de la per-son-nalité de Lothar Penz, optaient pour un "so-li-da-risme" plus positif que le discours critique, offensif et révolutionnaire de SdV. De ce désaccord pratique, naîtra un mouvement parallèle, la "Solidaristische Volksbewegung" (= Mouvement Solidariste du Peu-ple), dont l'organe de presse sera SOL.  En 1980, la SVB devient le BDS ("Bund Deutscher Soli-da-ris-ten"; = Ligue des Solidaristes Allemands), après avoir téléguidé la GLU écologiste ("Grüne Liste Umweltschutz"; = Liste Verte pour la Protection de l'Environnement). En janvier 1981, SOL  fusionne avec Neue Zeit, qui devient ipso facto l'organe commun de SdV et du BDS.

"Wir Selbst" et NRKA

Les deux formations perdent au début des années 80 le monopole de la presse NR, à cause de l'apparition de deux nouveaux facteurs: la création par Siegfried Bu-blies de la presti-gieuse revue Wir Selbst  (Cob-lence) et l'émergence d'un nouveau réseau coor-do-nateur, le NRKA ("Na-tio-nal-revolutionärer Koordi-na-tionsausschuß"; = Com-mission de Coordination NR), appuyé par la revue Aufbruch.  Né à Düs-sel-dorf dans le sillage de la revue Laser  préalablement in-féodée à SdV, le NRKA veut d'emblée rompre avec Neue Zeit  pour aborder les questions sociales dans une perspective plus "progressiste" et pour ac-centuer encore la critique anti-capitaliste du mouve-ment NR.

Cette mutation provient du fait que les nouveaux membres de la cellule de Düsseldorf ne sont plus ex-clusivement issus de la filière néo-nationaliste clas-sique de notre après-guerre mais viennent sou-vent du marxisme-léninisme. Ces éléments nou-veaux en-tendaient rester fidèles à la "quintuple révolution" prônée par SdV, dans son manifeste de 1974. Quin-tuple révolution qui devait s'opérer aux niveaux na-tio-nal, social, écologique, démocratique et cultu-rel. La critique lancée par les militants du NRKA est le fait d'une "deuxième génération" NR, dont le mi-litantisme récent empêche de retomber dans les "er-rements" du paléo-nationalisme droitier.

De nouveaux vocables et concepts apparaissent, no-tamment celui d'une "démocratie des conseils" (Rä-tedemokratie)  autogestionnaire, celui de la "dé-con-nexion" à l'albanaise ou à la nord-coréenne, etc. Ce sont aussi de nouvelles figures qui animent les cer-cles et les revues de cette "deuxième génération": H.J. Ackermann, S. Fadinger, P. Bahn, Armin Krebs (que l'on ne confondra pas avec le Français Pierre Krebs, qui fonde en 1985 la revue Elemente, sœur jumelle d'Eléments,  la revue du GRECE).

Fin 1979, le jeune activiste nationaliste Siegfried Bu-blies fonde la revue Wir Selbst  (= Nous-mêmes; traduction allemande du gaëlique irlandais "Sinn Fein") où, très tôt, l'influence de Henning Eichberg (= Hartwig Singer) se fera sentir. Celui-ci reprend la plume pour réclamer, dans une optique de réno-va-tion révolutionnaire partagée par les Verts, la "dé-mo-cratie de base" (Basisdemokratie),  la révolution cul-turelle, l'instauration d'un ordre économique dé-cen--tralisé, un socialisme à visage humain (basé sur les thèses de l'économiste tchèque du "printemps de Prague", Ota Sik), une approche de la vie en accord avec l'écologie et l'ethnopluralisme, pierre angulaire de la vision anthropologique du néo-nationalisme al-le-mand. Bublies trouve en outre une formule qui ex-plique succinctement le sens de son combat: Für na-tionale Identität und internationale Solidarität,  c'est-à-dire pour l'identité nationale et la solidarité inter-na-tionale. Bublies cherche ainsi à préserver les iden-ti-tés de tous les peuples et à solidariser, au-delà des cli-vages idéologiques, raciaux et religieux, tous ceux qui, dans le monde, luttent pour la préservation de leur originalité.

"Wir Selbst": une tribune remarquée pour les débats politiques allemands

Mais les essais politico-philosophiques demeurent minoritaires dans la revue qui, rapidement, devient la tribune de tous ceux qui cherchent à aborder la question allemande, toujours non résolue, d'une manière neuve. Wir Selbst   ouvre ainsi ses colonnes à des personnalités n'ayant jamais appartenu à la mouvance nationaliste stricto sensu: l'urbaniste éco-logiste Konrad Buchwald, l'historien Helmut Di-wald, l'ancien haut fonctionnaire est-allemand Wolf-gang Seiffert, le producteur de télévision Wolf-gang Venohr (ancien de la VDNV), le jour-naliste Se-bas-tian Haffner (anti-hitlérien émigré à New York pen-dant la guerre et revenu au nationalisme dans les an-nées 80), l'artiste provocateur Joseph Beuys (ancien de l'AUD), le Prof. Schweißfurth (membre influent de la SPD), etc.Plus récemment, les généraux e.r. Lö-ser et Kießling (cf. Vouloir  n°30) ont abordé dans les colonnes de Wir Selbst   les problèmes de la défense du territoire et de la réorganisation des for-ces armées dans une perspective démocratique et po-puliste.

La revue de Bublies, dont la maquette et la pré-sen-ta-tion générale sont de qualité, réussit ainsi à se po-si-tion-ner com-me un forum où peuvent débattre en tou-te liberté des hommes venus d'horizons divers. L'an-née 1987 a connu un ralentissement du rythme des parutions, du fait que la revue cherche à se donner définitivement un ton, qui ne soit plus celui du militantisme activiste de SdV et qui ne soit pas une pâle copie du militantisme marxiste. Quant au NRKA, il s'est d'abord mué en NRKB ("NR-Koordinationsbüro"; = Bureau de Coordination NR), avant de se nommer plus simplement "Po-litische Offensive". Il est encore trop tôt pour tirer toutes les conclusions de cette mutation. Il est certain que les militants NR de la "deuxième génération" sont tiraillés entre, d'un côté, une fidélité à l'héritage de SdV et, de l'autre côté, une volonté de rompre tous les ponts avec le "droitisme" anti-marxiste des NR de 68. Il semble que les "nationaux-marxistes", derrière Stefan Fadinger, veulent se séparer des "NR traditionnels de la deuxième génération", re-groupés derrière Markus Bauer, éditeur d'Aufbruch, nouvelle mouture. D'autres figures, comme Peter Bahn, Karlheinz Prö-huber et Werner Olles, pré-fè-rent garder une neutra-lité dans ce débat interne et s'ex-primer dans Wir Selbst.

La mouvance NR entre les surfeurs et les militants

Vingt ans après 68, le militantisme connaît un ressac dans toute l'Europe. Guy Hocquenghem disait à Pa-ris que les "cols Mao" s'étaient recyclés au Ro-tary; Lévy et Glücksmann renient allègrement leurs enga-ge-ments antérieurs, etc. En Allemagne, la gauche mar-xisante connaît une crise réelle, tout comme les NR. Tous les mouvements hyper-politisés doivent faire face à la dépolitisation croissante et à l'hé-mor-ra-gie des militants. La contestation, la volonté de cons-truire l'alternative a fait place à la farniente des surfeurs, les barricades ont cédé le pas aux sé-duc-tions du "sea, sex and sun", du moins jusqu'au jour où la catastrophe boursière ne pourra plus être enra-yée ni freinée.

NR et marxistes soixante-huitards ont exploité un uni-vers de valeurs qui, qu'on le veuille ou non, de-meu-re immortel, même s'il enregistre aujourd'hui une inquiétante assomption. C'est pourquoi, des pa-no-ramas globaux, restituant le fil conducteur histo-rique d'une mouvance, ont une utilité: celle de pré-pa-rer le terrain pour la prochaine offensive qui, inéluctablement, surviendra.

                                                      

Quelques conclusions

Les livres de Günter Bartsch et de Margret Feit nous permettent de saisir l'évolution du néo-nationalisme allemand depuis 1945. Ils nous permettent aussi de cer-ner les grandes options philosophiques de cette mou-vance politique; citons, pêle-mêle: une théorie de la connaissance scientiste et européo-centrée (du moins dans la phase initiale qui revalorisait la scien-ce et la rationalité européennes, avec l'appoint de l'em-pirisme logique et des travaux de Rougier, Mo-nod et Heisenberg; Français et Allemands parta-geaient à ce moment les mêmes préoccupations), le biohumanisme oscillant entre l'anthropologie orga-ni-que/biologisante et le matérialisme biologique, le nomi-nalisme ethnopluraliste, le socialisme national et en-raciné (le modèle irlandais de James Connolly et les populismes slaves), le nationalisme de libération et l'idée d'un espace européen.

Une hétérogénéité que Margret Feit ne veut pas apercevoir

La dénomination "Neue Rechte" laisse sous-en-ten-dre que les mouvements allemands que Margret Feit qualifie de la sorte sont des frères jumeaux de la "Nou-velle Droite" française. Le chercheur sérieux per--cevra pourtant bien vite l'hétérogénéité de ces deux mondes, malgré les chevauchements évidents, che-vauchements que l'on pourrait tout aussi bien constater entre Dutschke et Eichberg (alias Singer) ou entre le GRECE et le CERES socialiste d'un Chevènement. La pseudo-"Neue Rechte" allemande se profile sur un arrière-plan plus militant, moins mé-tapolitique, et exploite des domaines de l'esprit différents de ceux exploités en France par de Benoist et ses amis. S'il faut chercher une influence directe et sans détours du GRECE en Allemagne, c'est chez Pierre Krebs, directeur d'Elemente,  chez Armin Moh-ler qui a révélé au public de Criticon  l'existence de la ND française ou dans les traductions éparses des textes néo-droitistes français.

Sur le plan doctrinal, les Allemands n'ont pas trop insisté sur l'égalitarisme, cheval de bataille de la ND française; seul Lothar Penz, théoricien NR du so-lida-risme biohumaniste, a inclu quelques réflexions sur les hiérarchies biologiques dans sa vision de l'homme et de la Cité. Ensuite, l'impact du paga-nisme esthétisant, hellénisant voire celtisant est très réduit en Allemagne, bien que beaucoup d'activistes NR soient adeptes de l'"unitarisme" de Sigrid Hun-ke, dont l'ouvrage La vraie religion de l'Europe  a été traduit en France par les éditions Le Labyrinthe en 1985, sous les auspices d'Alain de Benoist.

Si Bartsch avait objectivement limité son enquête à la mouvance nationale-révolutionnaire et avait bien mon--tré son souci de ne pratiquer aucun amalgame, Margret Feit, elle, mélange les genres et inclut dans son analyse de la "Neue Rechte" (terme pour le moins impropre) des organisations ou des journaux appartenant à la droite nationale classique, comme Mut,  la revue de Bernhard Wintzek, ou le mensuel Nation Europa  de Peter Dehoust. Elle pousse l'a-malgame encore plus loin en incluant, dans ce qu'el-le estime être un complot, la revue conservatri-ce Cri-ticon  de Caspar von Schrenck-Notzing, pro-che, par cer-tains aspects, de la CSU bavaroise. La lec-ture de ces diverses revues révèle que les thèmes choisis et les options philosophiques prises par cha-cune d'en-tre elles sont différents, malgré des re-coupe-ments, dus, bien évidemment, à l'actualité lit-té-raire, philo-so-phique et politique. Chaque revue pos-sède son ori-ginalité et ne tient pas à la perdre.

L'aventure brève de l'ANR

La confusion entretenue par Margret Feit entre la mou-vance NR et les droites nationales classiques pro-vient de l'observation partiale d'un phénomène datant de 1972. En janvier de cette année, une dis-si-dence survient au sein de la NPD bavaroise, sous l'impulsion d'un certain Dr. Pöhlmann. Celui-ci demande quelques conseils à Singer tout en n'avalisant pas son anti-américanisme. De cette dissidence nait un groupement activiste, l'ANR ("Aktion Neue Rech-te"; = Action pour une Nouvelle Droite), qui rassemble les jeunes mécontents de la NPD, repro-chant à leur parti d'être socialement et politiquement trop conservateur. L'aventure durera jusqu'en no-vem-bre 1973 quand l'ANR se fractionne en plu-sieurs groupes:

1) les nationaux-conservateurs, qui formeront l'AJR ("Aktion Junge Rechte"; = Action pour une Jeune Droite);

2) les "hitléromaniaques" (d'où sont issus, en par-tie, les farfelus friands en déguisements bruns et noirs, avec cuirs et clous, que l'on entend parfois beugler des slogans, notamment à Dixmude et dans les bistrots louches des grandes villes, et qui, dans certains cas, se sont recyclés dans une homosexua-lité ridicule où les corps "aryens" et juvéniles sont érigés en objets de culte);

3) ceux qui retournent au bercail qu'est, pour eux, la NPD;

4) ceux qui évoluent vers l'idéologie NR.

Ce fait divers que fut l'ANR et la présence en son sein de quelques idiots compromettants, perpétuelle-ment ivres et rapidement éconduits, permet à des mo-ralisateurs en chambre de conclure au "nazisme" de toute une école de pensée qui véhicule, fina-le-ment, une idéologie de synthèse, exerçant une réelle séduction sur les esprits libres de la gauche militan-te. Le vocable "Neue Rechte" est ainsi erronément appliqué à la sphère NR. La tactique de Margret Feit est grossière: c'est celle de la pars pro toto. La frange de l'ANR qui évolue vers le nationalisme révo-lutionnaire finit par donner son nom à tous les mou-ve-ments nationalistes, même ceux de gauche, qui lui ont été contemporains. L'objectif de cet amalgame est évident: associer les braillards bottés (média-ti-sa-bles) aux intel-lectuels modernistes, de façon à ce que ceux-ci ne puissent plus influencer les esprits libres et larges de la gauche dutschkiste et para-dutsch-kiste ou, en France, souder en un bloc idéologique instru-mentalisable les analyses du GRECE et du CERES.

On perçoit évidemment, à la lumière de ces faits, quel-le erreur tactique ont commis certains respon-sa-bles du GRECE en acceptant et en revendiquant l'étiquette "Nouvelle Droite" que leur ont accolée les journalistes provocateurs de la bourgeoisie gau-chi-sante parisienne. L'opération de diversion de Mar-gret Feit s'en est trouvée ultérieurement confortée: la pseudo-"Neue Rechte" est amalgamée sans nuance à la "Nouvelle Droite" alors qu'il s'agit de mouve-ments assez distincts.

Impacts en Flandre et en Wallonie

En Flandre, la tentative de syn--thèse qu'ont essayée Pol Van Caeneghem et Chris--tian Dutoit, notamment avec le groupe "Ar-beid" et les revues Meervoud  et De Wesp,  a malheureusement viré au gauchisme stérile, de même que les brillantissimes synthèses de Mark Cels-Decorte et Freddy Seghers (un moment proche de Wir Selbst)  au sein de la Volksunie et des VUJOs (Cf. les volumes de propagande intitulés In-tegraal Federalisme  -1976- et Integraal Federalisme 2  -1980). Tandis qu'en Wallonie, "Jeune Europe" —dont le leader Jean Thiriart avait esquissé d'ex-cel-lents projets d'alliances géopolitiques avec les Etats non alignés du Tiers-Monde, avec la Chine et avec les militants noirs américains—  restait prisonnière d'une pensée politique latine rigide et impropre à sus-citer un dynamisme rénovateur, son syndicat em-bryonnaire et rapidement dissident, l'USCE ("U-nion des Syndicats Com--munautaires Européens"), sous la direction de Jean Van den Broeck, Claude Lenoir et Pierre Ver-has, opte pour une organisation régionaliste de notre continent et se distancie offi-ciel-lement dès 1969 de "tout ce qui est de droite".

L'USCE publiera d'abord Syndicats Européens  et, en-suite, L'Europe Combat, qui paraîtra jusqu'en 1978. Cette expérience fut la seule tentative NR sérieuse en Wallonie après l'é-chec de "Jeune Europe", quand Thiriart n'a pas su in---culquer son anti-améri-canisme à son public droi-tier, lequel s'est empressé de le trahir. Aujourd'hui, une synthèse sympathique voit le jour à gauche, à proximité de l'idéologie éco-logiste, dans les colon-nes de la revue W'allons-nous.

De  "Jeune Europe" au néant

Avatar de "Jeune Europe" qui a évolué vers un phi-losoviétisme non instrumentalisable, le PCN du Carolorégien Luc Michel, issu, pour son malheur, des grou-puscules extrê-me-droitistes et néo-nazillonneurs les plus rocamboles-ques, ne parvient pas à décoller po-litiquement (et pour cause!) et son entreprise édi-to-riale, très instruc-tive pour les spécialistes et les his-toriens (Cf. Vou-loir  n°32-33-34), stagne parce qu'elle ne traite pas de problèmes qui intéressent di-rec-tement un public mi-litant. La revue Conscience Eu-ro-péenne,  qui a récemment consacré de bons numéros sur la guerre économique entre les USA et l'Eu-rope et sur l'illusion de la détente, a subi une dissidence en 1984 qui a donné le jour à Volonté Européenne  et au "Cercle Copernic", dirigé par Ro-land Pirard, un individu quelque peu bizarre qui chan-ge de pseudonyme à tour de bras (Bertrand Tho-mé, Roland Van Hertendaele, Roland Brabant, etc.) et rêve naïvement de fonder un "ordre de chevalerie" néo-teutonique! Si Luc Michel effectue un tra-vail documentaire utile et fournit des analyses très intéressantes, malgré la langue de bois, la dissidence Pirard sombre dans un burlesque complet, renforcé par une rédaction épouvantablement négligée et par des analyses d'une confondante médiocrité, où sur-gissent de temps à autre des prurits hitléroma-nia-ques, mâtinés d'un néo-stalinisme et d'un pro-kho-meinysme d'une lourdeur telle qu'en comparaison, la langue de bois soviétique s'avère superlyrique. Au-cun es-poir donc que le dynamisme de "Jeune Eu-ro-pe" et de son héritier français, le CIPRE de Yannick Sauveur et d'Henri Castelferrus, ne renaisse à Bruxelles ou en Wallonie.    

En conclusion, nous pourrions dire que la mou-vance NR allemande a constitué une synthèse qui s'est si-tuée à la charnière du gauchisme et du natio-nalisme et qu'elle recèle bien des potentialités pour les mili-tants sincères, ceux qui ont vraiment le souci de la Ci-té. Qui plus est, quand on observe la synthèse opé--rée par Cels-Decorte et Seghers au sein de la Volk-s-unie entre 1975 et 1981, on voit qu'une syn-thèse comparable est davantage possible dans nos pays, en de-hors de toute marginalité. Il faut y réflé-chir.

René LAUWERS.

Margret FEIT, Die "Neue Rechte" in der Bundes-republik. Organisation - Ideologie - Strategie, Campus, Frankfurt a.M., 1987, 242 S., DM 36.

Bibliographie complémentaire:

Günter Bartsch, Revolution von rechts? Ideologie und Organisation der Neuen Rechten, Herder-bücherei, Freiburg i.B., 1975, 287 S., DM 7,90.

Karl-Heinz Pröhuber, Die nationalirevolutionäre Be-wegung in Westdeutschland,  Verlag deutsch-euro-päischer Studien, Hamburg, 1980, 228 S., DM 22.

Nous livrerons à nos lecteurs tout autre ren-seigne-ment d'ordre bibliographique.

 

lundi, 02 mars 2009

Quand j'entends le mot "culture"....

QUAND J’ENTENDS LE MOT "CULTURE", JE SORS MON HAMBURGER !


La culture étatisée se voulait un élitisme pour tous : elle n’a abouti qu’à une usine à gaz dont seuls les petits malins, les propagandistes, les copains et les coquins, les fumistes, les nullités et les fonctionnaires des arts peuvent comprendre les arcanes. Nous sommes entraînés, avec la masse, dans des expositions temporaires et médiatisées, aux longues queues et à la contemplation du dos et des crânes de nos concitoyens, ce qui, à vrai dire, ne nous change guère de l’univers des fast food. De même, qui n’a pas admiré les théories blasées des publics captifs en tout genre, allant pérégriner dans les lieux "évènementiels", découvrant avec perplexité les inventions géniales de nos installateurs et autres conceptualistes ? Les chiffres occultent la réalité plus sordide d’une société consumériste de moins en moins sensible aux créations profondes, et de moins en moins éduquée à la délectation artistique. Le nombre d’entrées aux musées et autres "espaces" culturels, dont les statistiques sont aussi pertinentes que l’étaient celles de l’industrie soviétique, est inversement proportionnel à ce qui reste de happy few dans une société abêtie par la télévision et cyniquement mercantile.


Mario Resca en tire les conséquences : les nations européennes sont des entreprises dont le patrimoine est le capital qu’ont légué les ancêtres. Il faut le faire fructifier, d’autant plus que l’art contemporain nous a habitués à une connivence intime entre la création et le monde de l’argent. On peut dire par là que Berlusconi achève le processus d’annihilation de l’identité italienne, donc, en grande partie, européenne. »



Claude Bourrinet, "Quand j’entends le mot culture, je sors mon hamburger", VoxNR, 5 février 2009


LE LIBERALISME CONTRE LA CULTURE ET LA MEMOIRE : L’EXEMPLE DE L’ITALIE

samedi, 28 février 2009

Mondialisme et Nouvel Ordre Mondial

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Mondialisme et Nouvel Ordre Mondial

 

Voici un siècle, l’empire Victorien, le plus vaste empire de l’Histoire, dominait déjà le monde. Par leurs alliances avec les familles de l’élite wasp (White, Anglo-saxon, Pro­tes­tant), les élites dirigeantes britanniques de cet em­pi­re favorisèrent l’émergence des Etats-Unis sur la scène mon­diale, entrés délibérément en guerre en 1898 contre l’Es­pagne après l’explosion (très suspecte) du cuirassé amé­ricain Maine dans le port de La Havane. Alors déjà, les di­ri­geants des Etats-Unis camouflaient leur cynique soif d’hé­gé­monie et leurs brutales ambitions impériales derrière un discours qui instrumentalisait en les magnifiant, la Démo­cratie, la Liberté et le Droit, comme les principes humani­taires, ainsi que le rappelle Henry Kissinger dans son der­nier ouvrage intitulé Diplomatie.

 

Début du nouvel empire mondial: la création de la banque centrale en 1913

 

Ce sont ces mêmes élites anglo-saxonnes qui, après avoir or­ganisé la panique monétaire de 1907 aux Etats-Unis (com­me le révèle le pris Nobel Milton Friedman), jetèrent les ba­­ses de leur nouvel empire mondial en imposant à l’o­pi­nion publique en 1913 la création de la banque cen­trale des Etats-Unis, le Federal Reserve System, dont elles con­servent toujours depuis lors le contrôle étroit.

 

Elles créèrent en outre à cette même époque, sur les mo­dèles de la Round Table et de la Fabian Society de l’empire Victorien, de nombreuses organisations, réunissant discrè­te­ment les personnes des milieux financiers, politiques, médiatiques, industriels, syndicaux, intellectuels et univer­sitaires, les plus puissantes de la planète : elles fondèrent ainsi entr’autres, sous la houlette du ²colonel² Edward Mandel House, mentor du Président Woodrow Wilson, le Council of Foreign Relations (CFR) à New-York, et le Royal Institut of International Affairs (Chattam House) à Lon­dres, qui essaimèrent par la suite en d’autres organisations similaires dans bien d’autres pays.

 

A l’issue du premier conflit mondial, c’est encore la ²di­plo­matie² des Etats-Unis qui imposa largement aux Etats euro­péens les nouveaux découpages des empires centraux vain­cus, abrités derrière les fameux ²quatorze points², attri­bués, pour les innombrables naïfs, au Président W. Wilson. Un quart de siècle plus tard, le CFR et le RIIAA ont pu à nou­veau exercer leurs influences lors du partage de l’Eu­ro­pe et du monde qui a prévalu lors des conférences de Yalta et de Postdam, après l’écrasement des puissances de l’Axe. Les ouvrages du professeur américain Caroll Quigley (cf. par exemple Tragedy and Hope ou The Anglo-American Establishment) auquel le Président Bill Clinton a rendu pu­bli­quement hommage lors de son allocution d’investiture, font désormais autorité sur le sujet.

 

Bien que toujours inconnu du grand public, le CFR de New-York, associé à son homologue britannique, le RIIA de Lon­dres, continue de gérer depuis les premières décennies du siècle le destin et la vie politique des Etats-Unis, et pré­tend à présent régenter le monde entier en imposant son Nouvel Ordre Mondial, conforme aux conceptions, et sur­tout aux intérêts et à la soif de puissance de leurs chefs. Ces organisations ont du reste, depuis une trentaine d’an­nées, essaimé en de multiples cercles ²externes² transna­tionaux, dont certains, tels le Groupe Bilderberg (en 1954), la Commission Trilatérale (en 1973) ou le Forum de Davos (en 1978), commencent désormais à être connues du grand public, les médias n’acceptant que maintenant seulement, d’en parler peu à peu à l’occasion.

 

Dans son allocution inaugurale à la session de juin 1991 du Bilderberg Group, en effet,  M. David Rockefeller, prési­dent de la Chase Manhattan Bank, fils du grand John Da­vison Rockefeller, l’un des fondateurs du CFR, que lui, son fils, préside aujourd’hui, lui-même fondateur et actuel pré­sident de la Commission Trilatérale,  n’accueillait-il pas ain­si à Baden-Baden les personnalités venues du monde en­tier participer aux travaux : “Nous remercions le Washing­ton Post, le New-York Times, Time Magazine et les autres gran­des publications dont les directeurs ont assisté à nos réu­nions et respecté leurs promesses de discrétion pen­dant au moins quarante ans… Il eut été impossible pour nous de développer notre place mondiale si nous avions été l’objet d’une publicité quelconque pendant ces an­nées-là. Mais le monde est aujourd’hui vraiment plus so­phi­stiqué et préparé à marcher vers un gouvernement mon­dial. La souveraineté supranationale d’une élite intel­lec­tuelle et des banquiers mondiaux est certainement pré­fé­rable aux décisions nationales qui se pratiquent depuis des siècles… ”

 

Des champions du malthusianisme

 

Soulignons en passant que les Rockefeller, père et fils, se sont par ailleurs, depuis au moins les années 1930, consti­tués les champions du malthusianisme mondial, et de la lut­te contre la fécondité humaine. A la suite des recher­ches qu’ils ont financées avec persévérance, ce sont leurs firmes qui possèdent aujourd’hui les premiers brevets des pi­lules contraceptives à œstrogènes, ainsi que ceux des pre­­miers stérilets abortifs. Leurs immenses richesses et les multiples fondations privées exemptées d’impôts, dont le Po­pulation Council, qu’ils ont créées aux Etats Unis, leur ont en outre permis d’exercer depuis les années 1950 dans ce domaine, un véritable magistère sur les organisations in­ternationales, en particulier sur le système des Nations U­nies. Cette influence prend aujourd’hui tout son sens en Europe, dont les peuples sous-féconds sont désormais lar­gement engagés depuis 25 ans dans un processus cu­mu­latif mortel d’implosion démographique qui renverse leurs pyramides des âges.

 

Tous ces groupes, dont les dirigeants aujourd’hui détermi­nent déjà largement de facto les affaires mondiales, ten­tent d’unir leurs efforts pour imposer maintenant à tous les peuples du monde l’émergence et la construction de jure d’un gouvernement mondial qui se substitue aux nations, et spécialement aux états nations historiques, appelés à être dissous, qui subsistent encore. Et les textes des traités eu­ropéens récents imposés aux opinions publiques euro­péen­nes, tels l’Acte Unique (1986), le traité de Maastricht (1992) et celui d’Amsterdam (1998), prennent alors tout leur sens sous cet éclairage, en constituant l’étape décisive de la quête de cet objectif : Un gouvernement mondial de­vant très vite disposer d’une monnaie mondiale (l’euro, dé­jà presque à parité avec le dollar, étant appelé à fusion­ner avant dix ans dans une monnaie unique transatlan­ti­que), et d’une police mondiale dévolue à l’OTAN, bras ar­mé des maîtres mondialistes, qui s’essaie aujourd’hui à son nouveau rôle en détruisant la Serbie, alliée traditionnelle de la France, pour imposer par la force et la terreur le Nou­vel Ordre Mondial des Rockefeller and Co. aux peuples ré­calcitrants.

 

Même si les opinions publiques en sont toujours tenues dans l’ignorance, cet état de chose des affaires du monde n’est plus, bien sûr, au-delà des cercles des initiés, totalement inconnu d’un public averti. Ainsi Le Figaro a-t-il fait écho ré­cemment dans sa page Opinions à des positions qui fai­saient des allusions précises sur ce sujet : le 30 mars 1999, l’historien Dominique Venner y publiait un court article sur la guerre à la Serbie sous le titre éloquent : “ Qui com­man­de le monde ? ” ; mais surtout le 18 janvier 1999, dans un ar­ticle intitulé “°Vers une Europe américaine, Amsterdam est l’aboutissement d’une politique hégémonique destinée à faire disparaître les nations européennes°”, l’ancien Am­bassadeur de France Albert Chambon, révélait le dessous des cartes du traité d’Amsterdam en impliquant directe­ment l’action du CFR et de la Trilatérale.

 

Il est particulièrement révélateur d’observer que, en ré­pon­se à l’article de M. l’Ambassadeur Albert Chambon qui brisait ainsi l’Omerta en révélant dans la grande presse à l’opinion française le rôle moteur du CFR et de la Trila­té­rale dans l’élaboration du traité d’Amsterdam, ce fut le po­lono-américain, Zbigniew Brzezinski, conseiller de M. Da­vid Rockefeller et de plusieurs Présidents des Etats-Unis, qui s’est senti tenu de publier dans les mêmes colonnes du Figaro, le 26 janvier 1999, un article intitulé : “ Défense de la Trilatérale. Il n’y a aucun ²complot² ”. Or c’est ce mê­me personnage qui, quelques mois plus tard, à la une du jour­nal Le Monde du samedi 17 avril 1999, sous le titre “ Guer­re totale contre Milosevic ! ” (expression employée pour la première fois par Joseph Goebbels), rapportait avec arrogance les dernières consignes des vrais dirigeants, en rap­pelant le Président de la République française, Jacques Chirac, et son Premier Ministre, Lionel Jospin, ainsi que les di­rigeants français, à la fidélité à leurs obligations, après près d’un mois de bombardements aériens de l’OTAN sur la Serbie.

 

Les drames, les atrocités et les crimes de guerre en tous genres qui ont accompagné la dislocation de l’ex-Yougo­slavie depuis 1991, en Bosnie serbo-musulmane, en Kraïna et Slavonie serbo-croates d’abord, et qui sévissent aujour­d’hui au Kosovo albano-serbe, masquent utilement aux o­pinions publiques des “ grandes démocraties ” occiden­ta­les les véritables enjeux géopolitiques de ces événe­ments, enjeux qui visent en réalité l’avenir de l’indé­pen­dance et de la liberté en Europe face aux diktats des di­rigeants mondialistes américains et à leurs appétits de puis­sance.

 

L'avertissement d'Attali à la France

 

Depuis deux ans déjà pourtant, nous en étions, nous Fran­çais, solennellement avertis : alors que M. Felix Ro­ha­tyn, l’un des dirigeants du Groupe Lazard Brothers de New-York, et l’un des gestionnaires de fonds les plus puis­sants sur le Stock Exchange de New-York, acceptait de s’é­loigner de ses bureaux de Manhattan pour remplacer l’Am­bassadeur des Etats-Unis à Paris, Mme Pamela Harriman, qui venait tout juste de décéder subitement, M. Jacques At­tali, lui-même très proche du groupe Lazard et de M. Fe­lix Rohatyn, ancien conseiller (et sherpa) du Président fran­çais, François Mitterrand, aujourd’hui dirigeant d’un ca­binet de conseil international financé par le groupe La­zard, venait de signer un article fracassant dans le journal Le Monde du 4 mars 1997 sous le titre “ Géopolitique de l’immigration ”. Lui aussi, avec arrogance, fidèle écho des volontés des ²cénacles² supérieurs, mettait ainsi sévère­ment en garde les responsables français : “ Si la France et l’Europe décidaient de s’affirmer comme un club chré­tien, elles devraient se préparer à l’affrontement avec un milliard d’hommes, à une véritable ²guerre de civili­sations². Avec, en prime, en France, une guerre civile. Car la France, en raison de ses choix géopolitiques anté­rieurs, est une nation musulmane : l’Islam est la religion de plus de deux millions de citoyens français et du tiers des immigrés sur son sol. ”. M. Attali tenait soigneusement ce­pendant le lecteur de son article du Monde dans l’igno­rance de la contribution essentielle qu’il venait d’apporter, sous le titre “ For a New Political Order ”, au numéro spé­cial winter 1996 que la revue américaine Time Magazine ve­nait de consacrer quelques mois auparavant à l’Europe et à son avenir. Il y exposait, avec condescendance, les vues mondiales et mégalomanes pour les 50 prochaines années des vrais dirigeants des affaires du monde, son article, paru ensuite dans Le Monde à l’usage des seuls lecteurs français, apparaissant dès lors n’être plus qu’une simple application localisée et provinciale de l’exposé général du grand des­sein et du grand œuvre des nouveaux maîtres du monde. Parmi ces aperçus admirables et impératifs, on relèvera sous la plume de M. Attali la stricte obligation américaine faite aux Etats membres de l’Union Européenne d’inté­grer dans un avenir très proche la Turquie, alliée stra­tégique des Etats-Unis, comme membre à part entière de l’Union, obligation dont, du reste, le Président de la Ré­publique, M. Jacques Chirac, qui s’en était, depuis quel­ques années déjà, constitué le champion, apparaît au­jourd’hui le premier et le plus zélé porte-parole en Europe.

Comme l’expose du reste sans détour, avec un cynisme in­génu, M. Zbigniew Brzezinski, en page 68 de son livre, pu­blié en France en 1997 sous le titre : “ Le grand échiquier : l’Amérique et le reste du monde ”, livre que tous les cito­yens des pays européens se devraient d’avoir lu méticu­leu­sement et de méditer, quand il identifie les conditions du maintien pour le prochain demi-siècle de l’hégémonie mon­diale à laquelle les Etats-Unis sont aujourd’hui parvenus : “ Cette approche géopolitique n’a de sens qu’autant qu’e­lle sert les intérêts de l’Amérique, c’est-à-dire, à court terme, le maintien de son statut de superpuis­san­ce planétaire et, à long terme, l’évolution vers une co­opéra­tion mondiale institutionnalisée[1]…(..)…Les trois grands impératifs géostratégiques se résumeraient ainsi : éviter les collusions entre vassaux et les maintenir dans l’état de dépendance que justifie leur sécurité ; cultiver la docilité des sujets protégés ; empêcher les barbares de former des alliances offensives. ”. On peut mesurer à quel point les sacro-saints principes de Démocratie, des Droits de l’Homme et autres Droits des peuples à disposer d’eux-mêmes, ainsi que les fondements solennels de la Charte des Nations Unies sont ici oubliés, voire niés, car devenus alors par trop inopportuns.

 

Couper l'Europe des richesses de la Russie-Sibérie et chasser les Européens de leurs positions africaines

 

En réalité l’hégémonie américaine n’a pu s’établir au XXème siècle, et ne peut se perpétuer à l’avenir, qu’en coupant délibérément l’Europe, principal réservoir mondial des res­sources humaines culturelles, scientifiques et techniques, des gigantesques réservoirs mondiaux de matières pre­miè­res que constituent la Russie-Sibérie d’une part, et l’Afri­que d’autre part, toutes deux géographiquement limitro­phes ou proches de l’Europe. Historiquement, ce sont les deux premiers conflits mondiaux, qui, en plongeant la Rus­sie dans la paralysie du communisme, puis en séparant l’Eu­rope par le rideau de fer, la coupant ainsi des richesses de l’Est, ont assis la domination des Etats-Unis sur notre continent au cours de ce siècle. On mesure ici ce que l’hé­gémonie américaine actuelle doit à l’instauration du com­mu­nisme et aux deux guerres mondiales.

 

Le soutien des Etats-Unis à la décolonisation d’après guer­re, qui plonge aujourd’hui le continent africain dans le ma­rasme et les guerres ethniques, le financement qu’ils ont assuré au FLN algérien dans leur lutte contre la France dans les années 50, leurs menées actuelles en Afrique Centrale et Australe, illustre bien leur souci constant de chasser l’Eu­rope de ses positions africaines, pour la couper de ces réservoirs de matières premières.

 

Cependant l’effondrement interne du communisme à l’Est, et la désagrégation récente de l’empire soviétique, en dé­pit des efforts désespérés de la diplomatie du Président a­mé­ricain Georges Bush et de son allié le Président Mikhaïl Gorbatchev, constitue désormais une menace, de nature à re­mettre en cause à terme la suprématie actuelle des diri­geants des Etats-Unis sur le monde, et susceptible de rui­ner, lors même qu’ils semblent enfin accessibles, leurs rê­ves mondialistes.

 

Le livre, paru il y a deux ans sous la signature d’Alexandre del Valle, “ Islamisme et Etats-Unis, une alliance contre l’Europe[2] ”, jette une lumière crue sur la stratégie de re­change, engagée déjà depuis une vingtaine d’années par les dirigeants mondialistes américains pour faire face à ce nouvel état de choses. Il constate que, de l’Irak à l’Afgha­nistan, en passant par l’Iran et le Pakistan, ainsi que dans d’au­tres pays musulmans, en particulier en Afrique du Nord, la politique et la diplomatie américaines, sous cou­vert des menées de l’Arabie Saoudite, leur protégée, s’in­génient à susciter et à promouvoir délibérément les régimes islamiques les plus rétrogrades, faciles à contrô­ler par la corruption de leurs dirigeants impliqués dans les tra­fics internationaux de drogues, et à détruire les régi­mes laïques de ces pays fondés sur l’idée nationale, exci­tant ainsi potentiellement les islams les plus extrémistes contre les chrétientés européennes et slaves, dont ils sont géographiquement proches. Appelée, bien sûr, à ga­gner les pays musulmans d’Afrique, cette hostilité poten­tielle est de nature à couper un peu plus l’Europe des ri­chesses naturelles de l’Afrique.

 

Mitterrand avait vu juste: l'Amérique nous mène une guerre à mort

 

Dans un livre paru la même année, “ Le Syndrome de l’or­to­lan ”, où il explicitait la stratégie médiatique d’aveugle­ment des opinions publiques européennes, Arnaud-Aaron Upinsky rappelait opportunément cette citation impres­sionnante, tirée d’un entretien du Président François Mit­ter­rand accordé au journaliste Georges Marc Benamou[3], : “ La France ne le sait pas, mais nous sommes en guerre avec l’Amérique. Oui, une guerre permanente, une guer­re vitale, une guerre économique, une guerre sans morts. Apparemment…(..)…Oui, ils sont très durs les A­mé­ricains, ils sont voraces, ils veulent un pouvoir sans par­tage sur le monde. Une guerre inconnue, une guerre permanente, sans morts apparemment, et pourtant, une guerre à mort…(..)…Les Américains voulaient envoyer les Turcs bombarder les Serbes. ”

 

Dans la traduction française de son livre “ Le choc des civi­lisations ”, paru également la même année, le professeur américain Samuel P. Huntington insistait, quant à lui, lon­guement sur les opportunités géopolitiques qu’offre le cli­va­ge historique et culturel qui sépare la chrétienté eu­ro­péenne entre les peuples slaves et orthodoxes d’une part, et les pays catholiques et protestants d’autre part.

 

La destruction de la Serbie était programmée depuis longtemps

 

Dès lors s’éclaire la stratégie des cénacles mondialistes amé­ricains et leurs intentions dans les Balkans. Mme Ma­deleine Albright, leur porte-parole dans le gouvernement Clinton, tchèque d’origine et très liée à M. Brzezinski, exi­ge impérieusement aujourd’hui de la part de leurs affidés européens, la destruction de la Serbie, planifiée déjà de­puis plusieurs années à Washington, qui fait obstacle à la réa­lisation de leurs plans, destruction de la Serbie par l’U­nion Européenne et l’OTAN qui leur permettrait d’un seul coup d’atteindre plusieurs objectifs :

 

En effet, la destruction délibérée de la Serbie sous les bom­bes de l’OTAN, suivie de l’engagement des contingents euro­péens sur le sol serbe, programmé sans doute pour l’été prochain, au moment où les populations des “ grandes dé­mo­craties ” gagnent les plages de leurs vacances annuel­les, anesthésiant ainsi les opinions publiques occidentales, permettrait d’abord de creuser un fossé irrémédiable en­tre les peuples slaves et orthodoxes d’une part et ceux de l’Europe occidentale d’autre part, coupant en parti­cu­lier la France des alliés traditionnels de sa diplomatie à l’Est. En outre, ce fossé rétablirait la coupure que le com­munisme avait autrefois établie en Europe, qui inter­disait à celle-ci l’accès aux richesses de l’empire Russe.

 

La destruction impitoyable de la Serbie devrait en outre ser­­vir d’exemple pour dissuader les peuples européens de toutes velléités de retour à leur ancienne indépen­dan­ce nationale, au moment où se parachève l’Union Euro­péen­ne fédérale, sous protectorat des Etats-Unis, base dé­cisive de la construction du rêve mondialiste de leurs diri­geants.

 

Les dirigeants américains

veulent ré-islamiser les Balkans

 

L’écrasement de la Serbie aurait en outre pour effet d’a­bais­ser la Grèce dans la région, et de lever l’obstacle grec à l’entrée de la Turquie dans l’Union Européenne.

 

Comme le dénonce, avec autant d’obstination que de per­tinence, le Général Pierre-Marie Gallois, auquel le Géné­ral De Gaulle avait naguère confié le soin d’élaborer la doc­trine d’emploi de la force de dissuasion française, auteur des deux livres “ Le sang du pétrole : tome I, l’Irak, tome II, la Bosnie ” et qui a préfacé “ Islamisme et Etats-Unis ”, les dirigeants américains veulent ré-islamiser les Bal­kans. Les accords de Dayton leur ont déjà permis d’établir en Bosnie, après en avoir largement chassé les Serbes, la première République Islamique en Europe, dirigée par le fon­damentaliste musulman Izetbegovic. La destruction de la Serbie leur permettra de réaliser prochainement une grande Albanie islamique, placée sous leur protectorat, et sur le territoire de laquelle, comme chez leur protégée mu­sulmane du Golfe, l’Arabie Saoudite, ils pourront dispo­ser de larges bases militaires navales et terrestres perma­nentes, y installant, comme en Arabie Saoudite, du ma­té­riel lourd, et des troupes à demeure.

 

Ces républiques islamiques, ainsi installées dans les Bal­kans, deviendraient les “ clientes ” naturelles de la Tur­quie, prochain membre, de par la volonté américaine, de l’U­nion Européenne, le reste des Balkans restant sous in­fluence allemande, l’ensemble de la zone, ainsi que les al­liés privilégiés turcs et allemands des Etats-Unis, de­meurant sous le contrôle de ces derniers au sein de l’Union Européenne.

 

Neutraliser définitivement la Russie

 

Cette présence Turco-islamique au cœur de l’Europe, é­troitement sous contrôle des dirigeants mondialistes des Etats-Unis, garantirait à ces derniers la pérennité de leur suprématie mondiale pour le prochain demi-siècle : De nature, en effet, à maîtriser l’incertitude russe, que, dans son livre, M. Brzezinski appelle “ le trou noir ”, en neu­tra­lisant définitivement la Russie, cette installation de son en­nemi historique et culturel turc sur ses frontières du Sud-Ouest, complèterait son encerclement au sud par les répu­bliques musulmanes turcophones, où les diplomaties amé­ricaine et israélienne, attirées par la richesse de leur sous-sol et de leur position stratégique, sont déjà très actives.

 

De plus, la Turquie, devenue Etat membre de l’Union, pourrait très vite peser d’un poids décisif sur la politique migratoire et sur l’ouverture des frontières européennes aux mondes musulmans des Proche et Moyen Orient et d’Afrique, alors même que les effectifs des populations de la chrétienté européenne et du monde orthodoxe ont dé­jà amorcé leur déclin. Après plus de 25 ans d’une fécon­dité toujours plus éloignée du seuil de remplacement des générations, ces populations européennes autochtones, à présent en cours de vieillissement rapide, se sont ainsi en­ga­gées en effet dans un processus d’implosion démogra­phi­que bientôt irréversible. Elles ont déjà largement entamé le renversement de leurs pyramides des âges appelé à s’accélérer au cours des trois prochaines décennies. Au cours de la même période, de Dakar à Alma-Ata, les jeu­nes populations musulmanes, proches de l’Europe et de la Russie, vont au contraire connaître l’apogée de leur croissance démographique en doublant leurs effectifs.

 

Persévérance

de la croisade malthusienne

 

Les dirigeants mondialistes des Etats-Unis, qui, par la per­sé­vérance de leur croisade malthusienne depuis une cinquantaine d’années, ont poussé les peuples euro­péens dans ce processus d’implosion démographique en passe de devenir maintenant incontrôlable, tirent à pré­sent un parti cynique de cette nouvelle donne géostra­tégique, parfaitement prévisible, qui bouleverse le face à fa­ce entre les chrétientés européennes et slaves et les mon­des musulmans d’Afrique et du Moyen Orient, en ac­com­pagnant aujourd’hui délibérément l’islamisation ra­pi­de de l’Europe et de la Russie au cours du premier tiers du siècle qui s’ouvre, pour tenter de la canaliser au mieux de leurs intérêts et de leurs projets.

Ce nouvel état de chose garantissant à ces dirigeants, pour plus d’une génération encore, la maîtrise sans partage des affaires du monde, est de nature à leur ouvrir la perspec­tive prochaine de réaliser enfin leur rêve d’imposer à tous les peuples du monde un gouvernement mondial dont ils pourraient espérer conserver le contrôle au cours du siècle qui s’ouvre, sous réserve de parvenir à convaincre ra­pidement les dirigeants de la Chine et de l’Inde de s’y as­socier. Du moins est-ce là la vision générale de ces diri­geants mondialistes, telle qu’elle ressort de la lecture des li­vres et articles récents de leurs principaux porte-parole.

 

Philippe BOURCIER de CARBON,

Démographe, Ancien Auditeur de l’IHEDN, Président du Comité d’honneur de La Voix des Français (Renaissance 95)

 



[1] Bien évidemment dominée par les actuels dirigeants mondialistes anglo-américains du CFR et du RIIA (commentaire de l’auteur de cet article).

[2] Et, devrait-on ajouter, contre la Russie.

[3] “ Le dernier Mitterrand ”, Georges-Marc Benamou, 1995.

vendredi, 27 février 2009

Introduction à la novlinguistique

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Métapolitique - Introduction à la novlinguistique

par Georges Feltin-Tracol - http://www.europemaxima.com


Depuis sa création en 2002, la fondation Polémia animée par Jean-Yves Le Gallou mène un combat permanent contre la pensée conforme et la volonté mondialiste d’indifférenciation des peuples, des cultures, des États, des personnes et des traditions.

N’hésitant pas à braver les oukases du politiquement correct, Polémia conduit une véritable guérilla métapolitique dont bien des actions détonnent sur le champ de bataille des idées. Pour preuve, la parution dernière du Dictionnaire de novlangue accompagné de La Bataille du vocabulaire. Disponible à la fois en format informatique et en fascicule, l’essai dénonce le détournement des mots et l’abêtissement de nos compatriotes qui s’en suit.

Achevé en janvier 2009, ce Dictionnaire connut un premier succès cet été quand certaines définitions furent publiées sur le site Novopress. La réussite de la première journée d’étude sur la réinformation du 25 octobre 2008 a incité Polémia à le publier. Saluons cette nouvelle arme dans la guerre culturelle en cours !

Novlangue est un clin d’œil à l’expression d’Orwell dans son célèbre roman 1984 ; c’est aussi un appel au réveil des Français d’Europe contre l’insidieux conditionnement sémantique ambiant. Il faut comprendre que « le novlangue, essentiellement une “ langue parlée ”, pour ne pas dire un sabir incompréhensible pour tout non-initié, est en permanence évolutif et ne demande qu’à grandir au détriment de la belle langue française si riche en nuances au service de l’écrit et de l’oral ». Il se combine souvent à l’anglicisme, voire au franglais, afin de donner à son message un air de modernité et de sophistication.

Pourquoi est-il si important de s’intéresser à cette novlinguistique ? Comme le rappelle La Bataille du vocabulaire, « le taux d’exposition des citoyens aux médias est élevé et tend à augmenter ». Le Français moyen passe environ trois heures par jour devant la lucarne allumée. Et il faut maintenant comptabiliser le temps passé devant l’écran d’ordinateur non pas pour consulter l’excellent site de Polémia ou Europe Maxima (ou d’autres sites amis), mais plus sûrement pour aller sur des sites commerciaux quand il ne s’agit pas de sites porno !

Le sens des mots est primordial dans un combat culturel et identitaire, spécialement quand le discours officiel proclame la fin des idéologies. En fait, « nous vivons dans un monde idéologique, c’est-à-dire façonné par l’idéologie dominante qui définit seule la normalité. L’idéologie dominante est au service de la super-classe mondiale et de son projet, en particulier du projet qu’elle a pour les peuples européens. Le fait qu’elle ait progressivement presque éliminé toute expression contraire pourrait donner à penser que cette idéologie n’en est pas une et qu’elle traduit tout simplement “ la vérité ” ».

Décrypter la portée exacte des mots de la novlangue (la brochure emploie le masculin, nous le féminin, preuve de son caractère profondément indifférencié) contribue à contester cette vérité univoque et totalitaire.

Comment donc procéder ? Cinq catégories lexicales servent de repères :

« - les mots trompeurs, qui ont changé de sens et qui signifient souvent le contraire de ce qu’ils exprimaient auparavant ; » (l’un des plus anciens et des plus connus n’est autre que le fameux énervement qui signifie le contraire de ce qu’on croît aujourd’hui) ;

« - les mots subliminaux, qui sont utilisés pour produire certains effets de répulsion ou d’approbation chez le récepteur ;

— les mots marqueurs, qui expriment l’idéologie dominante et traduisent le fait que celui qui les emploie fait partie de la classe dominante ;

— les mots tabous, qui correspondent à des concepts que l’idéologie dominante s’efforce de supprimer ;

— les mots sidérants, qui visent à disqualifier les adversaires du Système ».

Voici un petit échantillon :

• « BLOND, BLONDE. Qualificatif subliminal dévalorisant aux yeux de la nouvelle classe dominante, qui préfère les Noirs et les métis ; curieusement les histoires anti-blondes ne gênent pas les féministes ni les antiracistes professionnels. »

Ajoutons que ces histoires « blondophobes » s’apparentent aux fameuses blagues belges qui pourraient être jugées pour le moins xénophobes et discriminatoires. À quand donc une législation pour réprimer ces manifestations de racisme ? Gageons que féministes extrémistes et antiracistes alimentaires y verraient une atteinte à la liberté d’expression et au droit à l’humour…

• « CITOYEN. Mot trompeur : ce substantif, devenu adjectif, caractérise ce qui se conforme à l’idéologie dominante (ex. : trier ses déchets est un “ comportement citoyen ”) (trad. : moutonnier, docile). »

On peut se demander si, de nos jours, Panurge n’aurait pas troqué son troupeau pour des citoyens

• « INGÉRENCE. Terme marqueur : connoté positivement désormais dès lors qu’elle prétend se faire au nom de “ l’humanitarisme ” ou du “ maintien de la paix ” (trad. : violation). »

On continuerait ainsi la lecture des quelques trois cents définitions tout aussi coruscantes les unes que les autres. Par cette brochure, Polémia éclaire le travestissement et la mutation de la sémantique par l’idéologie dominante dont les mots d’ordre (de désordre plutôt) sont ensuite repris et répercutés par les médias, les entreprises, l’école, le sport…

Saluons enfin la volonté de l’opuscule de s’inscrire dans notre époque et non au siècle dernier. À l’article « droite, gauche », on lit en effet avec plaisir : « Termes trompeurs ayant perdu toute pertinence à la fin du XXe siècle depuis que la gauche socialiste et communiste s’est ralliée à l’économie de marché et que la droite a adopté l’idéologie égalitaire et cosmopolite des socialistes. Ne désigne plus que des itinéraires personnels et des ancrages locaux différents (trad. : partis au pouvoir). » Ce clivage politicien et électoraliste est désormais désuet, d’autant que l’idéologie dominante, elle, « emprunte à la fois à la mémoire de gauche (égalitarisme, cosmopolitisme, ingénierie sociale) ; et à la doctrine libérale anglo-saxonne (discours sur la dérégulation [aïe ! bonjour l’anglicisme pour « déréglementation » !], la réduction de l’État, la mondialisation, l’ouverture des sociétés, la volonté de substituer la morale et le pouvoir des juges à la souveraineté politique). […] On notera que cette idéologie correspond parfaitement à la sociologie du monde médiatique qui est intellectuellement de gauche […] lié à l’univers marchand ».

Dorénavant et pour les prochaines décennies, la ligne de fracture s’organisera autour des notions d’identité et de mondialisme, d’altérité et d’uniformité. Pour le camp identitaire, c’est un impératif de maîtriser le vocabulaire, car son âme en dépend. Le Dictionnaire de novlangue est donc un auxiliaire précieux.

Georges Feltin-Tracol

Polémia, Dictionnaire de novlangue suivi de La Bataille du vocabulaire, 2009, 63 p., 10 €, à télécharger sur son site (www.polemia.com) ou à commander pour 15 € (port inclus) à Polémia, 60 ter, rue Jean-Jacques-Rousseau, F - 92 500 Rueil-Malmaison, France.

jeudi, 26 février 2009

Le monde comme système

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Archives de Synergies européennes - 1990

 

Le Monde comme Système

«Mondes nouveaux» (Géographie universelle dirigée par Roger Brunet, T. I)

 

Livre II Le système Monde

Olivier Dollfuss

Hachette/Reclus, 1990.

 

Si le substantif de géopolitique n'est pas la simple contraction de géographie politique, cette méthode d'approche des phénomènes politiques s'enracine dans la géographie; elle ne peut donc se désintéresser de l'évolution. Réputée inutile et bonasse (1), la géographie est un savoir fondamentalement politique et un outil stratégique. Confrontée à la recomposition politique du monde, elle ne peut plus se limiter à la description et la mise en carte des lieux et se définit comme science des types d'organisation de l'espace terrestre. Le premier tome de la nouvelle géographie universelle, dirigée par R. Brunet, a l'ambition d'être une représentation de l'état du Monde et de l'état d'une science. La partie de l'ouvrage dirigée par O. Dollfuss y étudie le Monde comme étant un système, parcouru de flux et structuré par quelques grands pôles de puissance.

 

O. Dollfuss, universitaire (il participe à la formation doctorale de géopolitique de Paris 8) et collaborateur de la revue «Hérodote», prend le Monde comme objet propre d'analyses géographiques; le Monde conçu comme totalité ou système. Qu'est-ce qu'un système? «Un système est un ensemble d'éléments interdépendants, c'est-à-dire liés entre eux par des relations telles que si l'une est modifiée, les autres le sont aussi et par conséquent tout l'ensemble est transformé» (J. Rosnay).

 

Nombre de sciences emploient aujourd'hui une méthode systémique, les sciences physiques et biologiques créatrices du concept, l'économie, la sociologie, les sciences politiques… mais la démarche est innovante en géographie.

 

Le Monde fait donc système. Ses éléments en interaction, sont les Etats territoriaux dont le maillage couvre la totalité de la surface terrestre (plus de 240 Etats et Territoires), les firmes multinationales, les aires de marché (le marché mondial n'existe pas), les aires culturelles définies comme espaces caractérisés par des manières communes de penser, de sentir, de se comporter, de vivre. Les relations entre Etats nourrissent le champ de l'international (interétatique serait plus adéquat) et les relations entre acteurs privés le champ du transnational. Par exemple, les flux intra-firmes qui représentent le tiers du commerce mondial. Ces différents éléments du système Monde sont donc «unis» par des flux tels qu'aucune région du monde n'est aujourd'hui à l'abri de décisions prises ailleurs. On parle alors d'interdépendance, terme impropre puisque l'Asymétrie est la règle.

 

L'émergence et la construction du système Monde couvrent les trois derniers siècles. Longtemps, le Monde a été constitué de «grains» (sociétés humaines) et d'«agrégats» (sociétés humaines regroupées sous la direction d'une autorité unique, par exmple l'Empire romain) dont les relations, quand elles existaient, étaient trop ténues pour modifier en profondeur les comportements. A partir du XVI° siècle, le désenclavement des Européens, qui ont connaissance de la rotondité de la Terre, va mettre en relation toutes les parties du Monde. Naissent alors les premièrs «économies-mondes» décrites par Immanuel Wallerstein et Fernand Braudel et lorsque toutes les terres ont été connues, délimitées et appropriées (la Conférence de Berlin en 1885 achève la épartition des terres africaines entre Etats européens), le Monde fonctionne comme système (2). La «guerre de trente ans» (1914-1945) accélèrera le processus: toutes les humanités sont désormais en interaction spatiale.

 

L'espace mondial qui en résulte est profondément différencié et inégal. Il est le produit de la combinaison des données du milieu naturel et de l'action passée et présente des sociéts humaines; nature et culture. En effet, le potentiel écologique (ensemble des éléments physiques et biologiques à la disposiiton d'un groupe social) ne vaut que par les moyens techniques mis en œuvre par une société culturellement définie; il n'existe pas à proprement parler de «ressources naturelles», toute resource est «produite».

 

Et c'est parce que l'espace mondial est hétérogène, parce que le Monde est un assemblage de potentiels différents, qu'il y a des échanges à la surface de la Terre, que l'espace mondial est parcouru et organisé par d'innombrables flux. Flux d'hommes, de matières premières, de produits manufacturés, de virus… reliant les différents compartiments du Monde. Ils sont mis en mouvement, commandés par la circulation des capitaux et de l'information, flux moteurs invisibles que l'on nomme influx. Aussi le fonctionnement des interactions spatiales est conditionné par le quadrillage de réseaux (systèmes de routes, voies d'eau et voies ferrées, télécommunications et flux qu'ils supportent) drainant et irriguant les différents territoires du Monde. Inégalement réparti, cet ensemble hiérarchisé d'arcs, d'axes et de nœuds, qui contracte l'espace terrestre, forme un vaste et invisible anneau entre les 30° et 60° parallèles de l'hémisphère Nord. S'y localisent Etats-Unis, Europe occidentale et Japon reliés par leur conflit-coopération. Enjambés, les espaces intercalaires sont des angles-morts dont nul ne se préoccupe.

 

L'espace mondial n'est donc pas homogène et les sommaires divisions en points cardinaux (Est/Ouest et Nord/sud), surimposés à la trame des grandes régions mondiales ne sont plus opératoires (l'ont-elles été?). On sait la coupure Est-Ouest en cours de cicatrisation et il est tentant de se «rabattre» sur le modèle «Centre-Périphérie» de l'économiste égyptien Samir Amin: un centre dynamique et dominateur vivrait de l'exploitation d'une périphérie extra-déterminée. La vision est par trop sommaire et O. Dollfuss propose un modèle explicatif plus efficient, l'«oligopole géographique mondial». Cet oligopole est formé par les puissances territoriales dont les politiques et les stratégies exercent des effets dans le Monde entier. Partenaires rivaux (R. Aron aurait dit adversaires- partenaires), ces pôles de commandement et de convergence des flux, reliés par l'anneau invisible, sont les centres d'impulsion du système Monde. Ils organisent en auréoles leurs périphéries (voir les Etats-Unis avec dans le premier cercle le Canada et le Mexique, au delà les Caraïbes et l'Amérique Latine; ou encore le Japon en Asie), se combattent, négocient et s'allient. Leurs pouvoirs se concentrent dans quelques grandes métropoles (New-York, Tokyo, Londres, Paris, Francfort…), les «îles» de l'«archipel métropolitain mondial». Sont membres du club les superpuissances (Etats-Unis et URSS, pôle incomplet), les moyennes puissances mondiales (anciennes puissances impériales comme le Royaume-Uni et la France) et les puissances économiques comme le Japon et l'Allemagne (3); dans la mouvance, de petites puissances mondiales telles que la Suisse et la Suède. Viennent ensuite des «puissances par anticipation» (Chine, Inde) et des pôles régionaux (Arabie Saoudite, Afrique du Sud, Nigéria…). Enfin, le système monde a ses «arrières-cours», ses «chaos bornés» où règnent la violence et l'anomie (Ethiopie, Soudan…).

 

La puissance ds «oligopoleurs» vit de la combinatoire du capital naturel (étendue, position, ressources), du capital humain (nombre des hommes, niveau de formation, degré de cohésion culturelle) et de la force armée. Elle ne saurait être la résultante d'un seul de ces facteurs et ne peut faire l'économie d'un projet politique (donc d'une volonté). A juste titre, l'auteur insiste sur l'importance de la gouvernance ou aptitude des appareils gouvernants à assurer le contrôle, la conduite et l'orientation des populations qu'ils encadrent. Par ailleurs, l'objet de la puissance est moins le contrôle direct de vastes espaces que la maîtrise des flux (grâce à un système de surveillance satellitaire et de misiles circumterrestres) par le contrôle des espaces de communication ou synapses (détroits, isthmes…) et le traitemebn massif de l'information (4).

 

Ce premier tome de la géographie universelle atteste du renouvellement de la géographie, de ses méthodes et de son appareil conceptuel. On remarquera l'extension du champ de la géographicité (de ce que l'on estime relever de la discipline) aux rapports de puissance entre unités politiques et espaces. Fait notoire en France, où la géographie a longtemps prétendu fonder sa scientificité sur l'exclsuion des phénomènes politiques de son domaine d'étude. Michel Serres affirme préférer «la géographie, si sereine, à l'histoire, chaotique». R. Brunet lui répond: «Nou n'avons pas la géographie bucolique, et la paix des frondaisons n'est pas notre refuge». Pas de géographie sans drame!

 

Louis Sorel

 

1) Cf. Yves Lacoste, «La géographie, ça sert, d'abord à faire la guerre», petite collection Maspero,1976.

2) Cf. I. Wallerstein, «The Capitalist World Economy», Cambridge University Press, 1979 (traduction française chez Flammarion) et F. Braudel, «Civilisation matérielle, Economie et Capitalisme», Armand Colin, 1979. Du même auteur, «La dynamique du capitalisme» (Champs Flammarion, 1985) constitue une utile introduction (à un prix poche).

3) I. Ramonet, directeur du Monde diplomatique, qualifie le Japon et l'Allemagne de «puissances grises» (au sens d'éminence…). Cf. «Allemagne, Japon. Les deux titans», Manières de voir n°12, le Monde diplomatique. A la recherche des ressorts communs des deux pays du «modèle industrialiste», les auteurs se déplacent du champ économique au champ politique et du champ politique au champ culturel tant l'économique plonge ses racines dans le culturel. Ph. Lorino (Le Monde diplomatique, juin 1991, p.2) estime ce recueil révélateur des ambiguïtés françaises à l'égard de l'Allemagne, mise sur le même plan que le Japon, en dépit d'un processus d'intégration régionale déjà avancé.

4) Les «îles» de «l'archipel-monde» (le terme rend compte tout à la fois de la globalité croissante des flux et des interconnexions et de la fragmentation politico-stratégique de la planète) étant reliée par des mots et des images, Michel Foucher affirme que l'instance culturelle devient le champ majeur de la confrontation (Cf. «La nouvelle planète, n° hors série de Libération, déc. 1990). Dans le même recueil, Zbigniev Brzezinski, ancien «sherpa» de J. Carter, fait de la domination américaine du marché mondial des télécommunications la base de la puissance de son pays; 80% des mots et des images qui circulent dans le monde proviennent des Etats-Unis.

 

mardi, 24 février 2009

Proudhon: Etre gouverné...

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Être gouverné

“Être gouverné, c’est être gardé à vue, inspecté, espionné, dirigé, légiféré, réglementé, parqué, endoctriné, prêché, contrôlé, estimé, apprécié, censuré, commandé, par des êtres qui n’ont ni titre, ni la science, ni la vertu…

Être gouverné, c’est être à chaque transaction, à chaque mouvement, noté, enregistré, recensé, tarifé, timbré, toisé, coté, cotisé, patenté, licencié, autorisé, admonesté, empêché, réformé, redressé, corrigé.
C’est sous prétexte d’utilité publique et au nom de l’intérêt général être mis à contribution, exercé, rançonné, exploité, monopolisé, concussionné, pressuré, mystifié, volé ; puis, à la moindre réclamation, au premier mot de plainte, réprimé, amendé, vilipendé, vexé, traqué, houspillé, assommé, désarmé, garrotté, emprisonné, fusillé, mitraillé, jugé, condamné, déporté, sacrifié, vendu, trahi, et pour comble, joué, berné, outragé, déshonoré.

Voilà le gouvernement, voilà sa justice, voilà sa morale ! Et qu’il y a parmi nous des démocrates qui prétendent que le gouvernement a du bon ; des socialistes qui soutiennent, au nom de la liberté, de l’égalité et de la fraternité, cette ignominie ; des prolétaires qui posent leur candidature à la présidence la République !”

Pierre-Joseph Proudhon, “Idée générale de la révolution au XIXe siècle”

lundi, 23 février 2009

Le secret américain de Nicolas Sarközy

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Le secret américain de Nicolas Sarkozy

 

Par Philippe Bourcier de Carbon*

Ex: Journal du chaos 7, 2009

Dans les coulisses du pouvoir, il y a ceux mis au devant de la scène, ceux qui restent dans l’ombre
et, surtout, ceux des tréfonds que nul n’entrevoit jamais. Qui connaît Frank George Wisner ? Ce
senior américain, diplomate et homme de réseaux, pourrait bien être la clé pour expliquer
l’ascension fulgurante de Nicolas Sarkozy. Le chef de l’Etat français bénéficie là du meilleur
conseiller occulte pour jouer un rôle dans la marche du monde. A condition que le Président
continue de servir avant tout les intérêts de l’Empire américain, que celui-ci soit dirigé par Bush ou
Obama.

« Un néoconservateur américain à passeport français » : la formule cinglante d’Eric Besson au sujet de
Nicolas Sarkozy, formulée en vue de la campagne électorale de 2007, demeure d’une lucidité
implacable. Le nouveau ministre chargé de l’immigration n’ira sans doute plus remettre en question
le patriotisme de son mentor. Il n’en demeure pas moins que le mystère du succès rapide dans la
conquête du pouvoir suprême par Nicolas Sarkozy passe par l’analyse de son rapport personnel
aux Etats-Unis.

A cet égard, le destin peut s’avérer facétieux lorsqu’il veut avantager un jeune ambitieux désireux
d’atteindre les sommets. C’est vers la fin des années 70 que le jeune loup du RPR saura tirer profit
d’une fortune incomparable : le remariage de sa belle-mère, Christine de Ganay, avec un
personnage prometteur de la vie politique américaine, Frank George Wisner.

Celui-ci avait déjà hérité d’une charge lourde : le patronyme et la carrière sulfureuse d’un homme
exceptionnel, dans ses coups d’éclat comme dans sa folie, Frank Gardiner Wisner (1909-1965),
cofondateur de la CIA. Le père Wisner, impliqué dans les renversements du pouvoir au Guatamala
et en Iran, restera célèbre pour l’opération Mockingbird (un noyautage réussi des médias
américains par des agents de la CIA), avant de se suicider en 1965, victime de démence. Né en
1938 à New York, diplômé de Princeton, le jeune Frank George ne marchera pas exactement dans
les pas de son père mais suivra plus habilement un tracé parallèle : la diplomatie, dont on connaît
les passerelles avec le monde de l’espionnage. Il apprendra ainsi l’arabe au Maroc dans son
détachement effectué pour le compte du Département d’Etat avant un bref passage par Alger
après l’indépendance et un long séjour au Vietnam. De retour à Washington en 1968, il sera chargé
des affaires tunisiennes. Plus tard, après la spécialisation dans les questions asiatiques et arabes,
Frank George Wisner exerça le poste d’ambassadeur en Zambie, en Egypte, aux Philippines et en
Inde.

Derrière ces honorables activités, qui ont culminé par un poste de sous-secrétaire d’Etat sous
Clinton et, plus récemment, dans sa médiation pour la Troïka dans le règlement de la crise au
Kosovo, Frank G. Wisner demeure, selon ses détracteurs, la clé de voûte dans l’exécution de
l’espionnage économique pour le compte de la CIA. Mieux encore, l’homme est la caricature du
personnage multicartes et influent, présent dans tous les centres réels ou fantasmés du pouvoir
parmi lesquels les fameux Council on Foreign Relations ou le groupe Bilderberg. Mais c’est en 1997
qu’un tournant s’opère : après avoir longtemps manoeuvré dans le monde feutré de la diplomatie et
des renseignements, Wisner se risque à mélanger encore plus les genres en rejoignant, au sein de
son conseil d’administration, l’entreprise Enron, la célèbre compagnie énergétique qui fera scandale
quatre ans plus tard et dont la gigantesque fraude en Californie, portant sur des milliards de
dollars, ne sera jamais exactement détaillée, « grâce » à la disparition des milliers de pages
caractérisant la fraude fiscale dans la destruction des bureaux de la SEC, gendarme américain des
opérations boursières , lors de la chute de la Tour 7 du World Trade Center.

Ironie du sort, ou étrange coïncidence, la sécurité de ce gratte-ciel (effondré alors qu’il ne fut pas
percuté par un avion en ce jour du 11 Septembre 2001) relevait de la compagnie Kroll Associates,
qui appartenait alors à l’AIG, assureur dont Wisner est le vice-président . S’il est vrai que les
entreprises prestigieuses sont souvent interconnectées de par leurs administrateurs, il est notable
de constater la récurrence curieuse de Wisner dans les anomalies du 11 Septembre. Ainsi, pour
résumer, l’homme, spécialiste du monde musulman et de l’espionnage économique, responsable
haut placé de Enron et de l’AIG, échappe à toute poursuite judiciaire lors du scandale Enron, jamais
complètement décrypté de par la destruction des détails compromettants lors de la chute
controversée d’un immeuble du World Trade Center qui abritait également, autre heureuse
coïncidence, les bureaux de la CIA dédiés précisément à l’espionnage économique…
Quel rapport dès lors entre ce personnage sulfureux et Nicolas Sarkozy, mis à part le lien familial
d’antan ?

A priori, il serait logique de présumer que le temps et la distance géographique auront
naturellement creusé le fossé entre le chef de l’Etat et la famille de l’ancienne belle-mère. Il n’en est
rien. Pour preuve, la campagne électorale de l’UMP qui a porté triomphalement au pouvoir, et dès
la première tentative, Nicolas Sarkozy, disposait dans ses rangs d’un acteur discret, responsable de
la section anglophone, mais dont le nom est suffisamment éloquent : David Wisner. Celui-ci semble
également reprendre le flambeau de la lignée Wisner puisqu’il a intégré le Département d’Etat en
septembre dernier, après des études d’arabe.

Et au-delà du légitime renvoi d’ascenseur du chef de l’Etat envers le fils de son parrain d’outreatlantique,
un autre fait passé inaperçu mérite d’être évoqué, non comme la preuve mais plutôt
comme l’indice de la volonté présidentielle d’occulter l’existence et les agissements troubles de
Wisner. S’il s’avère à l’avenir que les fameux délits d’initiés opérés à la veille du 11-Septembre ont
été le fait de citoyens américains avertis, dont le point commun serait d’être à la jonction du
renseignement et de la finance, alors il ne serait guère étonnant de voir figurer sur la liste de ces
personnes au vent d’un « attentat terroriste imminent » un certain Frank George Wisner. Outre
qu’il ait bénéficié de la destruction du dossier fiscal Enron tout en étant dans le même temps
responsable de la sécurité du World Trade Center via Kroll Associates ( détenue par AIG), une
réçente réaction de Nicolas Sarkozy pourrait laisser penser que le silence en la matière doit
s’imposer.

En effet, selon le Canard Enchaîné du 24 septembre 2008, le Président avait vivement critiqué le
Pdg de la chaîne info internationale, France 24, pour avoir organisé un débat sur la « théorie du
complot » autour du 11-Septembre. Cette réaction de Nicolas Sarkozy pourrait prêter à sourire si
elle venait simplement confirmer sa propension légendaire à tout régenter, y compris la
programmation audiovisuelle. Mais compte tenu de l’implication éventuelle d’un de ses proches
dans les coulisses logistiques et financières de l’attentat du World Trade Center, la colère
présidentielle prend une tout autre tournure. De par le signal qu’il envoie ainsi aux journalistes
mainstream tentés d’évoquer à l’antenne la question des zones d’ombre du 11-Septembre, le
message relève plus de la censure tacite d’un sujet grave que de l’irritation d’un téléspectateur
capricieux. Sans aller jusqu’à faire de Wisner un des instigateurs du 11-Septembre, il est plus
vraisemblable de supposer que sa position et ses relations l’ont idéalement avantagé pour faire

partie de ceux à avoir, « au mieux » anticipé l’événement, au pire participé par une quelconque
assistance matérielle, en l’occurrence la mise à disposition de la gestion de la sécurité électronique
des 3 tours effondrées, de par l’implosion de bombes pré-installées selon certains scientifiques
spécialistes de la démolition contrôlée.

Au-delà des inévitables spéculations sur le rôle exact de Wisner dans l’opération à multiples
facettes du 11-Septembre, force est de constater que l’homme dispose des diverses relations
accumulées depuis près de 50 ans dans les élites dirigeantes des Etats-Unis et les cercles
internationaux pour pouvoir, si besoin est, favoriser le jeune politicien impétueux que son épouse
française affectionne. Nicolas Sarkozy doit beaucoup à Jacques Chirac pour son maillage lent et
progressif du corps électoral français. Il doit sans doute davantage encore à Frank George Wisner
pour avoir obtenu l’assentiment et la faveur de l’hyper-puissance occidentale.
Les parrains occultes du Président et méconnus du citoyen sont souvent les plus redoutables.

* Philippe Bourcier de Carbon est démographe à l'Ined (Institut national des études démographiques).

vendredi, 20 février 2009

Freiheitskonservativismus is overleden

Freiheit Konservatismus is overleden
Uit: Nieuwsbrief Deltastichting nr. 22 - Februari 2009

De publicist Caspar von Schrenck-Notzing is overleden. Meer dan wie ook blijft zijn naam verbonden met hét Europese conservatieve tijdschrift bij uitstek Criticon. Het niveau was jarenlang toonaangevend voor zovele andere Europese tijdschriften.
 
Caspar Freiherr von Schrenck-Notzing werd geboren op 23 juni 1927 in een van de oudste patriciërsfamilies van München – een familie mét wapenschild trouwens. Zijn overgrootvader was industrieel en nationaal-liberaal lid van de Rijksdag, Gustav von Siegle. Zijn grootvader, Albert von Schrenck-Notzing, was een parapsycholoog. Een familie met naam en faam. Freiherr Caspar studeerde geschiedenis en sociologie, hij was aandeelhouder van WMF en BASF, en zou de eenmanszaak, die Criticon was, leiden van 1970 tot 1998.
 
Hij slaagde erin om een conservatieve politieke – en vooral meta-politieke – strekking opnieuw wortel te laten schieten in Duitsland. Geen evidentie, waar elke rechtse of conservatieve filosoof, politicoloog of politicus sowieso ad infinitum gecompromitteerd leek met het regime van de nationaal-socialisten. Von Schrenck-Notzing slaagde erin de conservatieve beweging opnieuw te intellectualiseren, terug van een intellectuele bagage te voorzien. Hij stond hierin niet alleen: Armin Mohler, Winfried Martini en Mohammed Rassem stonden hem gedurende vele jaren bij. Conservatief-revolutionair gedachtengoed sloeg zelfs opnieuw aan bij heel wat non conformistische jongeren. Junge Freiheit, Sezession en het Institut für Staatspolitik zijn wel bijzonder schatplichtig aan dit herlevend conservatisme dat in zijn talrijke uiteenlopende facetten zijn neerslag vond in het tijdschrift van von Schrenck-Notzing.
 
De taak van een rechtse, conservatieve beweging was in die jaren (jaren 50 en 60 van de vorige eeuw) niet gemakkelijk en totaal anders dan 30 jaar geleden. Kon ze in een vroeger tijdsgewricht de staat, het leger, het gerecht en de kerk als traditiegebonden instellingen verdedigen, schragen en uitdragen, dan bleken ze in de jaren 60 en 70 van de vorige eeuw steeds meer aangetast door het liberalisme en het egalitarisme. Zo schreef Caspar von Schrenck-Notzing: “We leven in een tijdperk van een wereldwijd ineenstorten van alle Europese posities”.
 
Vanuit zijn opleiding had von Schrenck-Notzing vooral interesse voor en was hij verontrust door de steeds grotere manipuleerbaarheid van de burgers. Hij publiceerde over dit onderwerp verschillende populaire werken zoals Charakterwäsche (1965 – over het door Amerika ingevoerde en gestuurde Reeducation), Zukunfsmacher (1968 – over nieuw links) en Demokratisierung (1972 – over het democratiebegrip van nieuw links).
 
Criticon droeg de naam van een boek van de jezuïet Baltasar Gracian, El Criticon. Vooral het liberalisme, waarmee de auteur aansluiting vond bij bepaalde tussenoorlogse moderne conservatieve bewegingen, werd door de uitgever als het grote, fundamentele gevaar voor Europa beschreven. Niet evident op een moment dat rechts in Europa zich vooral anticommunistisch opstelde. In Criticon kon men ook in die jaren ook bijdragen lezen die het liberalisme eigenlijk in hetzelfde kamp plaatsten als het communisme. Voorwaar visionair.
 
In 1998 gaf de Freiherr zijn tijdschrift uit handen, in de overtuiging dat twee jonge auteurs voldoende talent in huis hadden om zijn Criticon verder op het goede spoor te houden. Helaas, het blad ontwikkelde zich tot een (puur economisch) tijdschrift voor zelfstandigen, dat het zelfs nodig vond regelmatig vrij platte pro-Amerikaanse bijdragen te publiceren, zonder enige ruimte voor nuancering. Even later verdween het tijdschrift zelfs helemaal. De mythe Criticon leeft echter verder. Zo schreef de uitgever van Junge Freiheit, Dieter Stein, zelf een jonge publicist die gevormd werd door Criticon: “Tijdschriften zijn kristallisatiepunten van het geestelijk leven van een natie. Aan Criticon konden de edelste kristallen van het naoorlogse conservatisme groeien”.
 
Criticon in handen nemen en lezen was puur intellectueel genot. Von Schrenck-Notzing was, in tegenstelling tot wat men bij zijn naam zou kunnen denken, geen warme voorstander van de oude geld- en grondadel. Aristocraat zijn was voor hem een levenshouding. “Afstand nemen, ook tegenover zichzelf” was het motto dat hij zijn vrienden en zijn gezin steeds voorhield. Zijn ironische commentaren, ondertekend met zijn pseudoniem Critilo, zullen we ook in de komende jaren met veel genoegen herlezen.
 
Von Schrenck-Notzing was een echte Britse gentleman, hoe Duits en Europees zijn wortels ook waren. Dankzij Caspar von Schrenck-Notzing werden ook heel wat Vlamingen en Nederlanders ertoe aangezet hun blik onbevooroordeeld in de richting van Groot-Brittannië en de Angel-Saksische traditie te wenden en er kennis te maken met een rijke conservatieve, literaire en politieke, oogst. Freiherr von Schrenck-Notzing heeft zijn sporen getrokken, zoveel is duidelijk.

(Peter Logghe)

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In Memoriam: Caspar von Schrenck-Notzing und "Criticon"

Caspar von Schrenck-Notzing und Criticón

von Karlheinz Weißmann am 4. Februar 2009 - http://www.sezession.de/

schrenck

 [1]Heute wird Caspar von Schrenck-Notzing in München zu Grabe getragen. Damit geht auch ein Abschnitt in der Geschichte des deutschen Nachkriegskonservatismus zu Ende. In allen Würdigungen und Nachrufen wurde darauf hingewiesen, daß Schrenck-Notzing mit der Gründung der Zeitschrift Criticón die Tribüne für die rechte Intelligenz der siebziger und achtziger Jahre geschaffen hatte: von den katholischen Traditionalisten über die Adenauer-Fraktion und die Klassisch-Liberalen bis zu den Nominalisten und Nationalrevolutionären.

Geplant war das ursprünglich nicht. Datiert auf „Ammerland, im Mai 1970″ ging ein hektographierter Rundbrief ins Land, der das Erscheinen der ersten Ausgabe von Criticón ankündigte. Einleitend hieß es: „Bei dem Schwimmen gegen den Strom fällt es immer schwerer, aus der Sturzflut des Gedruckten jene Publikationen herauszufinden, die für die grundlegende und laufende Orientierung über Zeitfragen wesentlich sind.“ Deshalb sei es nötig, eine „Sammelstelle“ zu schaffen, die das Material sichte und den Leser auch auf das hinweise, was eventuell am Rande stehe. Die Nummer 1 war denn auch ein gerade zwölf Seiten umfassendes Heft ohne Umschlag im Format DIN A 4, dessen Schwerpunktthema das Denken Arnold Gehlens bildete (einleitender Text über Moral und Hypermoral von Armin Mohler, Autorenportrait von Gehlens Schüler Hanno Kesting), während man ansonsten nur Rezensionen und kurze Hinweise auf Organisationen, Veranstaltungen oder andere Zeitschriften fand.

Seine spätere Gestalt mit den auffallend farbigen Umschlägen, auf denen eben kein deutscher Adler, sondern ein Hahn in gallischer Manier prangte, nahm Criticón allerdings schon im Laufe des zweiten Erscheinungsjahrs an. Auch die Gliederung der einzelnen Nummer ergab sich frühzeitig. Die Autorenportraits bildeten über die Zeit hinweg eine Art Enzyklopädie der konservativen Meisterdenker, wobei Schrenck-Notzing großzügig jede Fraktion der geistigen Rechten zur Geltung kommen ließ, außerdem gab es theoretische wie aktuelle Aufsätze deutscher und ausländischer Autoren, sowie ein politisch-metapolitisches Editorial, das Schrenck-Notzing unter dem Pseudonym „Critilo“ – der „Kritische“ verfaßte.

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[2]Critilo gehörte zu den Figuren des allegorischen Romans El Criticón des spanischen Jesuiten Baltasar Gracián, nach dem Schrenck-Notzing seine Zeitschrift benannt hatte. Gracián war einer jener „Machiavellisten“, die die Freiheit liebten und deshalb die Macht der Gegen-Aufklärung einsetzten, um sich Einsicht in die tatsächlichen Weltzusammenhänge zu verschaffen. Das erklärt etwas von dem hohen analytischen und prognostischen Wert, den viele der in Criticón veröffentlichten Texte hatten. Zusammenfassend schrieb Schrenck-Notzing dazu: „Schwerpunkte von Criticón waren das russische Dissidententum (vor dem Nobelpreis für Solschenizyn), der amerikanische Konservatismus (vor der Wahl Reagans), der britische Konservatismus (vor der Wahl von Mrs. Thatcher), die Emigrationen der Ostblockstaaten (vor deren Zusammenbruch), die deutsche Identität (vor der Wiedervereinigung), Parteien und Medien (vor dem Ausufern des Parteien- und Medienstaates).“

Man muß sich dabei vergegenwärtigen, daß Criticón trotz oder gerade wegen dieser Qualität isoliert in der deutschen Zeitschriftenlandschaft stand. Selbst die Springer-Presse hatte kaum mehr als Häme für die „konservativen Standartenträger“ (Die Welt) übrig. Ein Sachverhalt, der auch durch vermehrte Anstrengungen nicht zu ändern war. Das ließ sich vor allem an den Überlegungen Schrenck-Notzings in den achtziger Jahren ablesen, mit Criticón aktuell einen eigenen, alle drei Wochen erscheinenden Nachrichtendienst herauszubringen. Ein Versuch, der bereits im Ansatz scheiterte. Kurze Zeit später mußte auch die Erscheinungsweise Criticóns von zweimonatlich auf vierteljährlich umgestellt werden.

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[3]Der Einsatzbereitschaft von Schrenck-Notzing ist es zu verdanken, daß Criticón trotzdem die damalige Krise des konservativen Zeitschriftensegments überstand, dessen Publikationen nach und nach verschwanden, weil die Verlegerpersönlichkeit, die sie getragen hatte, nicht mehr da war (Herderbücherei Initiative), aufgab (Mut), sich von der CSU umarmen ließ (Zeitbühne, Epoche) oder ihr Milieu verlor (Konservativ heute). Es war deshalb tragisch, daß die Auswahl eines Nachfolgers zu einem immer drängenderen Problem wurde und Schrenck-Notzings Wahl – Gunnar Sohn, ein langjähriger Mitarbeiter von Criticón – sich als Fehlentscheidung erwies. Die gewisse Häme, mit der die Neue Zürcher Zeitung im Frühjahr 2000 einen Artikel über das „neue Criticón“ betitelte mit „Kapitulation vor dem bösen alten Feind“ war ein Signal dafür, daß Sohn nach kurzem Lavieren, das Erbe, das er angetreten hatte, verriet. Das hatte auch mit objektiven Schwierigkeiten zu tun, die Zeitschrift wie bisher fortzuführen, hing aber vor allem mit der Inkompetenz Sohns zusammen.

Und das ist das erstaunliche: Criticón ist eine konservative Zweimonatsschrift, ein Blatt der rechten Intelligenz, sowohl nach seinem Selbstverständnis wie im Urteil der Kritiker. – Claus Leggewie 1987

Schrenck-Notzing wird diese Entwicklung mit Bitterkeit verfolgt haben, wenngleich er sich das niemals anmerken ließ. Durch die Zeitschrift Agenda, die seine Förderstiftung Konservative Bildung und Forschung (FKBF) mit einigen Nummern erscheinen ließ, versuchte er noch einmal zu den Anfängen von Criticón zurückzukehren und ein konservatives Rezensionsorgan zu schaffen. Geglückt ist das nur im Ansatz. Es war offenbar Zeit für etwas Anderes, und das Erscheinen der Sezession ist von Freund wie Feind als Versuch betrachtet worden, die Linie Schrenck-Notzings unter den gegebenen Umständen fortzusetzen.


Artikel ausgedruckt von Sezession im Netz: http://www.sezession.de

Adresse zum Artikel: http://www.sezession.de/caspar-von-schrenck-notzing-und-criticon.html

Adressen in diesem Beitrag:

[1] Bild: http://www.sezession.de/wp-content/uploads/2009/02/schrenck.jpg

[2] Bild: http://www.sezession.de/wp-content/uploads/2009/02/img4881.jpg

[3] Bild: http://www.sezession.de/wp-content/uploads/2009/02/img4891.jpg

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jeudi, 19 février 2009

Marc-Edouard nabe résiste à l'Obamania

MARC-EDOUARD NABE RESISTE A L’OBAMANIA


Tout le monde adore Obama, alors forcément je suis contre... Quel rabat-joie ! Je suis bien bête de ne pas profiter de cette joie mondiale. C’est peut-être à cause de tout ce que j’entends comme conneries...Vincent Cassel dit que "tout à coup, on a envie de vivre aux États-Unis". Rama Yade minaude : "Nous sommes tous Américains, cette fois, on peut le dire dans le sens positif." Le roi du storytelling, Christian Salmon, se pâme : "Avec lui, l’Amérique qu’on aime est de retour ! ". Quant à Dorothée Werner, laide éditorialiste de Elle, elle danse carrément la samba dans sa cuisine : "Comment résister à l’euphorie qui gonfle le monde ? " D’ailleurs, pour toutes les mouilleuses du Elle, Obama c’est Cassius Clay + Robert Redford + Steve McQueen. Pourquoi ne pas ajouter James Dean et Gérard Philippe ? De plus en plus blanc à force d’additions ! Ce qu’elles veulent dire, ces blanchâtres, c’est que, dans leur idéal de Noir, Obama est une somme de soustractions : c’est Malcolm X – George Jackson – Frantz Fanon – Bobby Seale – Angela Davis... Le pompon a été décroché par Philippe Val affirmant sans rire qu’avec Obama élu, c’est enfin le XXIe siècle qui commence ; Ben Laden et son 11-Septembre, c’était encore du XXe ! D’accord, mais que des sans-couilles l’adorent ne suffit pas à expliquer que je ne bande pas. (...)


En France, le racisme est à peine caché sous l’antiracisme consensuel et les tollés des faux-derches franchouillards qui se cabrent au moindre mot de travers. En France, les racistes sont avant tout ceux qui se réjouissent qu’un Noir soit élu du moment qu’il est noir, parce que pour eux tous les Noirs se ressemblent. (...) Fin du racisme, tu parles ! Comme si les Noirs n’allaient plus être persécutés grâce à l’élection d’Obama ! On a vu comment les Arabes vivent sous le règne de Rachida Dati ! Dès qu’un métèque a un petit pouvoir, il ne pense qu’à une chose : faire du zèle contre sa race, pour montrer aux Blancs qu’il n’est pas un métèque justement, et qui paie les pots cassés ? Les autres métèques, ceux sans pouvoir ! Classique. Au pays des antiracistes auto-éblouis, le seul qui reste mesuré dans son obamania, c’est le président... Vexé comme un pou. Obama démode Sarko, Michelle écrase Carla . Premier président juif français, c’est bien. Premier président noir américain, c’est mieux. Sarkozy, qui pensait en 2007 innover dans le genre jeune loup vulgos libéralo-people s’est fait doubler un an et demi après. Comment rattraper le retard soudain pris ? En foutant des Noirs partout ! "Ne me cachez plus ces minorités visibles qu’en temps normal je n’aurais su voir..." (...)


"Obama a réalisé enfin le rêve de Martin Luther King ! " Le hic, c’est que dans son I have a dream, King disait textuellement qu’il ne voulait pas que "les gens soient jugés pour la couleur de leur peau, mais pour le contenu de leur personne". Pour quoi d’autre est jugé Barack Obama aujourd’hui ? Ce sont ses deux grands-mères qui le définissent le mieux. La première est une grosse mama qu’on a vu danser de joie en boubou dans son bidonville de Kogelo... le drapeau yankee flottant sur le Kenya. Le Kenya, terre de safaris pour beaufs, est un des rares pays d’Afrique qui ne présente aucune espèce d’intérêt. Seule la Centrafrique est plus nulle encore. Rien ne peut sortir de bon du Kenya, à part quelques Massaï qui d’ailleurs n’en sortent pas. La seconde grand-mère d’Obama, une Blanche, a toute sa vie tremblé de peur en croisant des Noirs dans les rues de Kansas City. Elle est morte la veille de son élection. Quand elle a senti que c’était inéluctable, mémé a préféré mourir... Elle ne voulait pas voir ça : un négro à la Maison Blanche, fût-ce son petit-fils !


C’est son programme peut-être qui me débecquette... Sa gestion de la crise financière ne laisse aucun doute : monsieur ne pense qu’à subventionner les banques, il veut réparer le capitalisme lui aussi, mais à l’avantage des riches. Sa priorité : rassurer les gros portefeuilles provisoirement à sec. Comme tout pratiquant du capitalisme, il est à genoux devant les banques avec l’excuse que la Banque n’est pas plus démocrate que républicaine, elle est la Banque. C’est comme Dieu, il n’est ni de gauche ni de droite, il est Dieu. Et aujourd’hui, Dieu, ce sont les trusts. Sur le dollar, il y aura bientôt écrit : In Trust we trust. C’est le pantin de l’Usure. Obama veut "sauver l’économie", c’est-à-dire les firmes et entreprises, avec la même rengaine fredonnée partout depuis le krach de septembre 2008 : "Sauvons les patrons et ils vous trouveront du boulot !" sauf que une fois que les pauvres auront aidé les riches à se renflouer, Obama et les autres chefs leur diront : "Sorry ! Il ne reste plus rien pour vous, chers pauvres... Next time ! " Pauvres pauvres !


Sur le plan international, Obama va être pire que Bush. Il suffit de voir son équipe. Tout ce qu’il a trouvé, c’est Hillary Clinton et Mme Albright, toutes les deux hyper contre Saddam, faiseuses d’anges irakiens, archi pour les guerres de 1991 et de 2003... Obama a même poussé le vice jusqu’à vouloir engager Colin Powell ! Oui la salope de l’anthrax ! Juste parce qu’il est noir, soi-disant... Pourquoi pas Condoleezza Rice ? Elle aussi est bronzata, comme dirait Berlusconi. Quel raciste, cet Obama ! Sans arrêter de sourire, il enverra plus de Noirs sur la chaise électrique, histoire qu’on ne l’accuse pas de chouchoutage... Obama va aussi travailler avec les mecs de McCain et prendre comme conseiller Joseph Biden, le stratège de John Kerry... James Jones à la Sécurité, Robert Gates à la Défense, Timothy Geithner au Trésor... Jolis messieurs ! Ce n’est plus de l’ouverture, c’est de la béance... Et ça prouve bien que dans son esprit de collabo, la politique c’est bonnet noir, noir bonnet. Tout l’espoir d’une "nouvelle Amérique" a été absorbé par sa stupéfaction d’avoir élu un Noir. Il n’y aura plus de place pour un autre "changement". Ça m’étonnerait beaucoup que le nouveau président annule le Patriot Act. À la limite, il fermera Guantanamo, qu’est-ce que ça peut lui foutre puisque d’autres pénitenciers arbitraires s’ouvriront ailleurs, directement dans les pays ennemis. Il parle déjà de rayer l’Iran de la carte. (...)


L’Irak. Obama annonce un retrait définitif des troupes pour 2011. Évidemment, ce sera reculé à 2012 où il sera remplacé par un autre salaud qui, lui, les maintiendra ! Pour le reste, son objectif est avoué dès le début : capturer Ben Laden ! Oui, cet abruti d’Hawaïen en est resté là. L’Afghanistan. Obama va y envoyer bien plus de soldats encore que Bush et ceux-là seront prélevés en Irak. Vases communicants ! Et s’il n’y en a pas assez, il en tapera à ses chers alliés qui ne pourront rien refuser à un Noir président de l’Amérique, ce pays exemplaire ! Pour finir, son directeur de cabinet est déjà nommé : Rahm Emmanuel, un engagé volontaire dans l’armée israélienne en 1991... Soyons clair : une rampouille sioniste à se damner. Pendant toute sa campagne, Obama a réitéré son soutien indéfectible à Israël. Il veut une Jérusalem israélienne, et des renforts de troupes sur le saint terrain occupé par ces sales Palestiniens... Tout pour Israël ! 78 % de Juifs Amerloques ont voté pour lui. On peut leur faire confiance: ils n’auraient pas élu un nègre s’ils n’avaient pas été sûrs qu’il soit leur man ... Non, tout ça, c’est encore du procès d’intention...


Ça y est. J’ai trouvé. Ce qui me gêne chez Obama, c’est que grâce à lui l’Amérique va redorer son blason de merde ! Yes he can, ce con. J’ai compris à quoi il va servir, ce faux Noir. L’Amérique reprend du poil de la bête, autant dire qu’elle va bientôt s’arracher les cheveux puisque la bête, c’est elle. "L’Amérique se réconcilie avec elle même et avec le monde ! " Ah, bon ? Je connais des milliards d’individus qui n’ont pas du tout envie de se réconcilier avec ce pays d’ordures... Pour en arriver à élire un Noir, c’est que les Yankees étaient à bout... Obama n’a pas été élu parce qu’il était Noir, mais parce que les Blancs au pouvoir ont compris qu’en mettant un Noir devant, l’Amérique allait pouvoir revenir au 1er rang en effaçant ses saloperies. Son image était tellement noircie par ses crimes qu’il fallait bien un Noir pour la nettoyer. Obama blanchit l’Amérique. Obama ne s’en cache pas : il veut redonner "la stature morale" de l’Amérique. En a-t-elle déjà eu une depuis le premier jour où les Espagnols débarquant ont tiré à l’arquebuse sur les Indiens venus leur apporter des fleurs sur la plage ? L’Amérique sera toujours porteuse de guerre et de mort. Kafka avait tout compris: au début de son roman L’Amérique (1911), ce n’est pas un flambeau que le héros voit dans la main de la statue de la Liberté, mais un glaive...


L’Amérique se fout d’Obama, ce qu’elle voulait, c’est faire semblant aux yeux des autres de se laver de Bush alors qu’elle l’a plébiscité deux impardonnables fois. Ne pas oublier que les pires bushistes sont ceux-là mêmes qui ont voté Obama. Logiquement, il ne devrait pas y avoir assez d’oreilles pour mettre toutes les puces dedans. Personne ne semble trouver anormal que les néoconservateurs pro-Bush se soient métamorphosés en obamiens de la vingt-cinquième heure. Il y a pourtant une raison à cela : pour mieux ré-enculer le monde, il fallait à l’Amérique un nouveau gode. Une rédemption de l’Amérique par un Noir ? Je n’y crois pas une seconde. C’est le plus mauvais cadeau fait aux vrais Afro-Américains. (...)


Il va déculpabiliser l’Amérique à peu de prix, car on s’extasie qu’il ait pu devenir président, mais qu’est-ce que c’est qu’être président des États-Unis ? C’est rien comme honneur dans le monde, c’est minable comme fonction, c’est la grosse honte ! Le plus beau jour de la vie d’un Noir, c’est d’entrer à la Maison Blanche, c’est ça le summum de la gloire ? C’est encore se soumettre en esclave, se faire reconnaître par le maître blanc, lui prouver qu’on est respectable comme lui, qu’on est son égal. Il n’était pas esclave, il vient de le devenir. Il a l’air ravi d’être enfin devenu l’esclave de l’Amérique. Le métis avait un complexe de n’être pas un bon nègre au service du maître. "Oncle Tom cherche Oncle Sam ! " Le Destin a répondu à sa petite annonce. Je sais maintenant pourquoi ce Noir me laisse froid. »



Marc-Edouard Nabe, 20 janvier 2009 (ce texte a été placardé sur les murs de Paris sous forme d’une grande affiche, selon la grande tradition révolutionnaire du pamphlet)


en savoir plus sur Marc-Edouard Nabe

dimanche, 15 février 2009

De la théologie politique américaine

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Nikolaj-Klaus von Kreitor:

De la théologie politique américaine


«C’est un paradoxe flagrant de l’histoire de voir comment un nationalisme précis (et particulièrement puissant) se déclare non seulement “prophétique” mais aussi universel, tout en se matérialisant dans de nombreux actes d’expension ou d’interventionnisme».

Anders Stephenson*


L’éminent juriste allemand Carl Schmitt a ca­rac­térisé l’idéologie de l’expan­sion­nisme et de l’im­périalisme américains comme une théolo­gie politique, qui est en même temps totali­tai­re, dogmatique et pseudo universaliste, et qui s'in­gé­nie à faire l'équation —avec le zèle et la fer­veur d’un Torquemada— entre l’in­térêt in­ter­national particulier des Etats-Unis et l’in­té­rêt du genre humain.


Hans Morgenthau remarque que l’universa­lis­me est une idéologie qui répond aux besoins de l’impéria­lis­me et de l’expansionnisme. L’ex­pansionnisme est sans cesse en opposition avec l’ordre international dominant et le statu quo existant. L’expansionnisme doit prouver que le statu quo qu’il cherche à vaincre mérite d’être vaincu et que la légitimité morale qui, dans l’esprit de beaucoup, est attachée aux cho­ses telles qu'elles sont, sera finalement ob­ligée de céder face à un principe de plus gran­de moralité, tout en faisant appel à une nou­velle distribution de pouvoir (1). «Jusqu’à pré­sent, vu que les idéologies typiques de l’impé­ria­lisme utilisent des concepts de droit, elles ne peuvent faire référence de manière correcte au droit international positif, c’est-à-dire au droit in­ternational tel qu’il existe aujourd’hui. Dans le do­mai­ne du droit, c’est la doctrine du droit naturel, c’est-à-dire du droit comme il de­vrait être [et non pas tel qu'il est, ndt], qui répond aux besoins idéo­lo­giques de l’im­péria­lisme… Lorsque la politique impé­rialiste expan­sionniste n’est pas dirigée contre un sta­tu quo en particulier, fruit d’une guerre perdue, mais tend à s'accroître à l'appel d'un vide de pou­voir qui invite à la conquête, elle avance tout un arsenal d’idéologies morales / moralisantes qui ont évidem­ment pour corollaire de rem­pla­cer le simple appel à un “droit naturel juste” contre “un droit positif in­juste” par le devoir, inévitable, de conquérir le pays récalcitrant (2).


La doctrine de la “destinée manifeste”


L’objectif principal de l’idéologie impérialiste est de faire l'équation entre les aspirations po­litiques d’une nation précise, d'une part, et les lois morales qui gou­vernent l’univers, d'autre part; nous avons là une idéologie spécifique­ment anglo-saxonne pour habiller les aspi­ra­tions particulières et les actions impérialistes d'un objectif moral, qui correspondrait aux lois de l’univers. Cette idéologie a d'abord été ty­pi­quement britannique, mais elle a été perfec­tion­née et absoluisé par les Etats-Unis. «Le fait que savoir que les nations soient soumises à la loi mo­rale est une chose, mais prétendre sa­voir avec as­surance ce qui est bon et mauvais dans les relations entre les nations, est d’un au­tre ressort. Il y a un mon­de de différence en­tre la croyance que toutes les nations sont sous le couvert du jugement de Dieu, impéné­trable au genre humain, et la conviction blas­phé­matrice que Dieu est toujours de son côté et que ce que cette puissance alliée à Dieu veut pour elle-même ne peut pas connaître l'é­chec, parce que cette volonté est aussi celle de Dieu» (3).


L'exemple d'école d’un tel blasphème se re­trou­ve dans l’assertion du Président McKinley qui affirmait que l’annexion des Philippines (et la série de mas­sacres de civils qui s'ensuivit) était un signe de la providence divine. Cette con­quête et ces massacres avaient été entre­pris après que le président ait reçu un signe de la Providence. L’Amiral Dewey reven­di­quait le fait que la conquête des Philippines était un ga­ge d’approbation divine. «Je devrais dire que la main de Dieu y était pour quelque cho­se» (4).


Les arguments avancés pour justifier la con­quê­te des Philippines se concentraient sur des thèmes re­ligieux. «Ces thèmes s'exprimaient par les mots de­voir et destinée. Selon le pre­mier terme, refuser l’annexion des Philippines au­rait signifié omettre d'ac­complir une obliga­tion divine et solennelle. Selon le second ter­me, l’annexion des Philippines en parti­culier et l’expansion en général étaient inévitables et ir­ré­sistibles» (5); dans cette optique, l’expan­sion­nis­me impérial américain était une “desti­née manifeste” sous le signe de la Providence.


Une doctrine calviniste


La doctrine calviniste devient ainsi une arme idéo­lo­gique pour la guerre d’agression et l’ex­pansion­nis­me. «Les victoires rapides gagnées par les forces américaines ont renforcé les po­si­tions psycholo­gi­ques des impérialistes. L’im­pres­sion de commettre un acte répréhensible ne se renforce que si l’action contestable est suivie de revers. Inversement, la mauvaise cons­cience diminue ipso facto si le projet est exécuté avec brio. L'échec s'interprète comme une punition de la Providence; mais la réus­si­te, telle que la décrit le schéma calviniste, se perçoit comme le signe extérieur d’un état de grâce intérieur… Le «devoir», disait le Pré­si­dent McKinley, «détermine la destinée». Tandis que le devoir signifie que nous avons une obli­gation morale, la destinée signifie que nous al­lons certainement remplir cette obligation, que la capacité à le faire nous est inhérente. Notre histoire a toujours été une histoire ininterrom­pue d'expansion; notre pays était toujours par­­venu autrefois à s'étendre, ainsi il était cer­tain qu'il réus­sirait de la même façon dans le fu­tur. La force d’ex­pansion est un héritage na­tio­nal et “racial”, un be­soin intérieur, irrésis­ti­ble et profond… La Providence a été vraiment in­dulgente envers nous en nous pro­curant des réussites si fructueuses que nous com­met­­trions un péché si nous n’acceptions pas les res­ponsabilités que l’on nous a demandé d’as­sumer» (6).


L’impérialisme américain a développé une puis­­­sante théologie de l'élection. L’idée améri­caine d'élection historique ou providentielle, in­hérente à la doctrine de la Destinée Mani­fes­te, a fait en sorte que Dieu et la géopolitique fu­sionnent en un tout parfaitement instrumen­ta­lisable; la doctrine procure ainsi la «légi­ti­mi­té» à la conquête et l’expansionnisme.


Un charabia moraliste et religieux


Le charabia moral et religieux de la doctrine de la Destinée Manifeste, tellement américain dans son sens primitif profond, est facile à éva­cuer car elle n'est qu'un bric-à-brac idéo­logique. Malgré sa nature de bric-à-brac, cet abominable bricolage est devenu l'assise de la théologie politique et de la politique étrangère américaines. L’expansionnisme impéria­lis­te se voyait élevé au rang d’obligation positive, au rang de devoir. Plus l’expansionnisme était im­pi­toyable, plus on le justifiait par une appro­ba­tion divine. La volonté des impérialistes amé­ricains était d’égaler la volonté de Dieu. L’im­pé­rialisme est de­venu «une vertu dérivée de l’ap­pel de Dieu». Rester en deçà équivalait à «re­jeter la guidance divine». Le Sénateur Al­bert J. Beveridge déclara un jour que «Dieu n’a pas passé son temps pour rien durant un millier d’années à préparer les peuples anglo­pho­nes pour qu'ils ne se livrent à rien d'autre qu'une vaine et ridicule auto-contemplation et au­to-admiration. Non! Il a fait de nous les maî­tres-organisateurs du monde pour établir des systèmes ordonnés là où régnait le chaos. Il a fait de nous des virtuoses de la bonne gou­vernance pour que nous puissions, le cas é­chéant, gérer la politique chez les peuples sau­vages et les peuples séniles» (7).


Pris dans la spirale du destin

Le thème de la destinée était un corollaire du thè­me du devoir. A maintes reprises, on a dé­cla­ré que l’ex­pansion était le résultat d’une «tendance cosmique», que «c’était le destin», que c’était «la logique ine­xorable des événe­ments», etc. La doctrine qui affir­me que l’ex­pan­sion est inévitable a bien sûr été long­temps familière aux Américains; nous savons ô com­bien la Destinée Manifeste a été invoquée au cours du 19ième siècle. Albert Weinberg souli­gne, toutefois, que cette expression prend un nouveau sens dans les années 90. Auparavant, destinée si­gnifiait, dans son sens premier, que l’ex­pansion a­mé­ricaine, quand on le voulait, pou­vait être con­tre­carrée par d'autres qui pou­vaient se mettre en tra­vers de notre chemin. Au cours des années 90, le sens de cette no­tion de “Destinée Manifeste” a lé­gèrement é­vo­lué; elle finit pas vouloir signifier que “les A­méricains ne pouvaient pas, par leur propre volonté, refuser cette expansion”, car ils é­taient pris, qu'ils le veuillent ou non, dans la spi­rale du destin. Nous faisions montre d'une cer­taine réti­cence. Ce n’était pas tout à fait ce que nous voulions faire; c’était ce que nous de­vions faire. Notre politique agressive se vo­yait implicitement définie comme obligatoire, com­me le fruit, non pas de nos propres envies, mais d’un besoin objectif (ou de la volonté de Dieu) (8). La destinée a toujours eu une desti­na­tion, et la destination correspondait à l’ex­pan­sion­nisme géopolitique; ainsi la source de l’impé­ria­lisme américain était le désir de Dieu don­né aux élus pour destinée.


La mythologie politique de la Doctrine de Monroe


Kenneth M. Coleman définit le corollaire politi­que (et géopolitique) de la doctrine de la Des­tinée Manifes­te, soit la doctrine Monroe, com­me une mythologie po­litique : «Une mytholo­gie politique a émergé par­mi les Nord-Amé­ri­cains pour justifier la réalité de leur hégémonie dans les Amériques. La doctrine Mon­roe con­sti­tue un exemple quasi paradigmatique de la création d'un mythe politique accompagnant la création de l’empire américain. Il apparaissait néces­saire, à l'époque, de trouver une sorte de vé­hicule rhétorique par lequel on puisse sug­gé­rer non pas une intention expansionniste, mais une auto-abné­gation… Dès ses débuts, la doctrine Monroe a été un artifice rhétorique con­çu pour réconcilier les valeurs affirmées, c'est-à-dire celles qui évoquent le désin­té­res­se­ment et l'abnégation des Américains, avec leurs intentions expansionnistes réelles qui vi­sent à réaliser leurs intérêts stratégiques et éco­nomiques majeurs. Ainsi la première carac­té­ri­stique dans la définition d'une mythologie po­litique est son actua­lité… L’hégémonie, tout comme l’Empire, postule la création d’une my­tho­logie légitimante… Dans le cas d'un Empire, la mythologie doit faire raisonner les Améri­cains comme suit : «Nous vous dirigeons parce qu’il est dans votre intérêt que ce soit nous qui le fassions»… Dans le cas d'une hégémonie, la my­thologie doit générer la croyance que les re­lations existantes sont bénéfiques aux parte­nai­res et que ceux qui ne les perçoivent pas comme telles sont malavisés ou intrinsèque­ment mauvais...» (9).


Le message normatif de la Doctrine de Monroe


La mythologie politique, qui sous-tend les di­ver­ses formes d'hégémonie, se distingue des au­tres mytho­lo­gies, dans le sens où elle nie l’existence de la do­mination politique et éco­no­mique. Elle est similaire à la mythologie de l’im­périalisme parce qu'elle affirme que les re­la­tions existantes sont justes, appropriées, i­né­vitables, ou défendables de manière sur le plan des normes… La doctrine Monroe ren­fer­me un mes­sa­ge normatif… qui dit que les cau­ses actuelles, dé­fendues par l'Amérique, sont ju­stes, moralement dé­fendables, et en accord avec les plus grands prin­cipes d’un ordre poli­ti­que supérieur à d’autres ordres politiques (10) et que l’impérialisme américain sert un but moral plus élevé, celui de la Destinée Ma­ni­feste laquelle a été préalablement fixée par Dieu lui-même. Kenneth M. Coleman cite Sal­va­dor de Ma­da­riaga qui décrit la nature de la doctrine Monroe selon les termes suivants: «Je sais seulement deux choses à propos de la doc­trine Monroe: l’une est qu’aucun Américain que j’ai rencontré ne sait ce que c’est; l’au­tre est qu’aucun Américain que j’ai rencontré ne consentirait à ce que l'on tergiverse à son pro­pos… J’en conclus que la doctrine Monroe n’est pas une doctrine mais un dogme… pas un seul dogme, mais bien deux, à savoir: le dogme de l’in­faillibilité du Pré­sident américain et le dog­me de l’immaculée con­ception de la politique étrangère américaine» (11).


Les intérêts des Etats-Unis sont les intérêts de l'humanité toute entière


Croire que les Américains sont un peuple choisi par Dieu, pour amorcer une expansion sans fin, était in­hérent tant à la doctrine de la Des­ti­née Manifeste qu'à la doctrine de Monroe. «Le terme qui a servi à prendre ce sens de moral, du moins sur le plan de l’expansion géo­graphique, est celui de “Destinée Ma­ni­fes­te”; il révèle la certitude calviniste avérée : Dieu révélera au monde ceux qui assureront Sa grâ­ce et les rendra prospères». Si les Etats-Unis re­pré­sentent la Terre Promise du Peuple Choisi, alors « il est absolument impossible de concevoir une si­tua­tion dans laquelle les in­té­rêts du genre humain ne sont pas tout à fait iden­tiques à ceux des Etats-Unis. En faisant mon­tre d'une telle présomption, l’oppo­si­tion à la Destinée Manifeste (des Etats-Unis) n’était pas une simple opposition politique —elle ne re­pré­sentait pas une quelconque différence d’o­pinion et se posait plutôt comme une hé­ré­sie, en révolte contre les gens choisis par Dieu lui-même… Si les autorités des Etats-Unis —les autorités choisies par les gens favorisés par Dieu lui-même— étaient en faveur d'u­ne politi­que donnée, alors critiquer la justice ou la mo­­ra­lité de cette politique s'avérait moralement im­possible» (12).


Dans cette optique, il faut se souvenir de la con­clu­sion de Werner Sombart qui disait que «le calvi­nis­me est la victoire du judaïsme sur la chrétienté» et que «l’Amérique est la quin­tessence du judaïsme». L’immoralité politique de la doctrine de la “Destinée Manifeste”, l’ex­pansionnisme géopolitique, sous la for­me d'u­ne conquête de territoires, telle que la re­ven­­dique la doctrine de Monroe, et l’impérialisme économique, tel qu'il se manifeste sous la for­me de la politique des “portes ouvertes” (Open Doors Po­licy), deux options qui ont été fusion­nées par la suite sous la dénomination de “wil­so­nisme” (Doctrine de Wilson), sont en fait des traductions simplistes et mal­veillantes de la vieil­le immoralité talmudique, re­pérable dans l'his­toire.


Carl Schmitt a souligné que la transformation de la doctrine de Monroe, à partir d’un Gross­raum ("grand espace") concret, en un principe universel, c’est-à-dire la “théologisation” d’un im­périalisme américain spécifique et particu­lier, en une doctrine mondialiste universelle, qui doit inéluctablement déboucher sur une puis­sance-monde unique et absolument domi­nante, une “Capital Power”, laquelle “servirait” les intérêts du genre humain. Cette trans­for­ma­tion d'un impérialisme particulier en un mon­­dialisme sans al­ter­native est aussi le com­men­cement de la “théo­lo­gisation” des objectifs politiques étrangers améri­cains (13). Ce pro­ces­sus de “théologisation” a débu­té au cours de la présidence de Théodore Roosevelt, mais le Président Woodrow Wilson fut le premier à élever la doctrine de Monroe au rang d'un prin­cipe mon­dial, à véritablement “mondialiser” une doctrine qui, auparavant, était censée se li­miter au seul hé­misphère occidental, pana­mé­ricain. Dans la moralité calviniste, talmudi­que et axée sur la Prédestination de Woodrow Wilson, l'idée-projet de la domination mondiale de l'Amérique devient la substance même de son plaidoyer pour une doctrine de Monroe à ap­pliquer au monde entier.


L'immoralité foncière de Wilson le “moraliste”


Un cas à mentionner : le slogan américain de la «De­s­tinée Manifeste» a servi à accroître l'ai­re d'ap­pli­cation de la doctrine de Monroe par le biais du prin­cipe de l'autodétermination des peuples qu’a uti­lisé le Président Wilson lors de la Conférence de Paix de Paris (Versailles), pour accroître de fait —et sub­tilement— les sphè­res d'influence anglo-saxonne et pour créer un Cordon Sanitaire autour de l’Alle­ma­gne et de la Russie Soviétique en Europe, un Cordon Sanitaire composé d’Etats tampons. Évi­demment, le Président Wilson, dans son em­pressement à faire va­loir en Europe le droit à l’autodétermination, n’a jamais dénoncé la doc­trine de Monroe qui incarnait, à son épo­que, dans l'hémisphère américain, la né­ga­tion absolue de ce droit qu’il proclamait au bénéfice des petits peuples des anciens môles impé­riaux d'Eu­­rope centrale et orientale. En fait, ce qu’il a vou­lu dire en parlant du droit à l'auto­dé­termination était clairement démontré en 1914 déjà, lorsque l’Améri­que, renversant le gou­vernement élu au Mexique, a bombardé la vil­le mexicaine de Vera Cruz, tuant ain­si des cen­taines de civils. Après le bombardement qui, par la suite, a conduit à la chute du gou­ver­ne­ment mexicain et à l’installation d’un fan­toche à la solde des Etats-Unis, le Président Wil­son, en mettant l’accent sur la soi-disant iden­tité entre la politique américaine et la jus­tice universelle, a convaincu le mon­de que «les Etats-Unis ont renversé le pouvoir mexicain pour rendre service à l'humanité» (14) (sic!). Le Président Wilson croyait sincèrement au rô­­le providentiel, désigné par Dieu, des Etats-U­nis pour diriger le monde.


Aujourd’hui, si l’on regarde la situation de la You­go­slavie, on peut constater qu’une fois en­co­re le prin­cipe pseudo-universel du droit à l’au­todétermination a été utilisé comme un mo­yen idéologique pour ren­verser un statu quo existant, via un règlement fron­talier en Europe, alors que les frontières euro­péennes a­vaient été définitivement reconnues et ac­ceptées comme telles par les Accords d’Hel­sin­ki. De même, ce fameux droit à l'autodéter­mi­nation, in­ven­té jadis par Wilson, a servi à lé­gi­timer les atrocités musulmanes lors de la guer­re en Bosnie d’abord, puis celles, innom­ma­bles, des bandes armées isla­mistes, ter­roristes et mafieuses des Albanais du Ko­sovo; en fait, ces bandes d'irréguliers musulmans sont l’équivalent européen des “Contras” du Ni­cara­gua, armés, entraînés et subsidiés par les Etats-U­nis. L'Europe est désormais traitée de la même ma­nière que les anciennes ré­pu­bliques latino-amé­ri­cai­nes.[ndt : Pire, dans le cas de la Bosnie et du Ko­sovo, les dirigeants des principales puissances euro­péennes ont ap­plaudi et participé à ces horreurs, en po­sant, via les relais médiatiques, les assassins bos­niaques et albanais comme des héros de la li­berté ou des défenseurs des droits de l'hom­me].


Quand l'Allemagne hitlérienne reprenait à son compte les concepts forgés par Wilson


Ironie historique : l’Allemagne nazie avait em­prun­té, en son temps, de nombreux concepts idéo­logiques venus d'Amérique. Ainsi, l’Allema­gne nazie fondait ses requêtes pour réviser le statu quo du Traité de Versailles, d'abord sur le principe d’égalité que le Traité de Versailles avait violé. Les juristes alle­mands ont pris cons­­cience que le droit international en place n’était rien d’autre que l’universalisation de l’hé­gémonie anglo-saxonne, et, partant, la “théo­lo­gi­sation” de l’intérêt national américain en par­ticulier. Ces juristes allemands se sont donc mis à parler d’un nouveau droit interna­tio­nal qui servirait l’intérêt national allemand, comme le droit en place servait les intérêts na­tio­naux américains. Ce nouveau droit, favo­ra­ble aux intérêts allemands, utiliserait égale­ment le concept d'un “nouvel ordre mondial juste” destiné à justifier l’expansionnisme ger­ma­nique et à préparer le renversement du sta­tu quo international, qui s'était établi après la guerre de 14-18.


Les principes de bases de la théologie politique a­mé­ricaine peuvent se résumer comme suit:

◊ a) L’intérêt national des Etats-Unis s'univer­sa­lise dans le but de devenir l’intérêt universel du genre humain ou de la communauté inter­na­tio­nale. Par conséquent, l’expansionnisme im­périaliste américain est alors vu comme un avancement de la race hu­maine, une promo­tion de la démocratie, luttant con­tre le totalita­ris­me, etc. Les intérêts américains, le droit in­ter­national, et la moralité internationale de­vien­nent équivalents. Ce qui sert les intérêts a­mé­ri­cains est posé, avec une incroyable ef­fron­terie, com­me des actes visant ou poursui­vant les desseins de la morale et du droit, dans tous les cas de figure (15).


Délégitimer les intérêts nationaux des autres pays


b) Par conséquent, l’universalisation de l’inté­rêt na­tio­nal américain, sa légitimation transna­tio­nale —u­ne façade allant au-delà de toutes les légitimités concrètes— conduit à délégiti­mer les intérêts natio­naux des autres pays. A travers la doctrine de Mon­roe, les pays latino-américains se voyaient refuser l'ex­pression de leurs intérêts nationaux, du moins ceux qui dif­féraient de ou s'opposaient à l’intérêt na­tio­nal américain. Quoi qu'il en soit, une analyse his­torique objective montre clairement que l’intérêt na­tio­nal authentique des pays latino-a­méricains s'op­po­sent, en règle générale et par nécessité, à l’intérêt national des Etats-Unis. L’effet de la doctrine de Mon­roe était que les pays latino-américains cessent d’exister po­li­tiquement, en devenant des protecto­rats et des nations captives au sens propre du ter­me.


c) Avec le Pacte Briand-Kellog, les Etats-Unis amor­cèrent l'étape suivante dans la globalisa­tion de leur théologie politique. Les guerres me­nées au départ d’intérêts nationaux diffé­rents de ceux des Etats-Unis se voyaient éti­que­tées comme des “guerres d'agression”, tan­dis que les guerres agressives me­nées par les Etats-Unis étaient considérées comme des “guerres justes”. Les réserves émises par les E­tats-Unis quant au Pacte de Kellog revêtent une im­portance particulière : les Etats-Unis se ré­servent le droit d’être seuls juges de ce qui constitue une guer­re d’agression. La doctrine américaine de reconnais­sance et de non-re­con­naissance des Etats est éga­le­ment signifi­ca­tive : les Etats-Unis se réservent le droit d’ê­tre les seuls juges pour décider quel Etat doit être reconnu ou non et quels sont les motifs qui les amènent à reconnaître un Etat ou non. Ces mo­tifs équivalent à l’intérêt national des Etats-Unis. Pour voir à quels dangers et quelle absurdité grotes­que, cette équivalence peut me­ner s'observe dans l’exemple historique de la non-reconnaissance par les Etats-Unis de la Chine après 1949, alors qu'ils re­connaissaient le régime fantoche de Tchang Kai Tchek, qu'ils avaient installé et qu'ils contribuaient à main­te­nir. Les Etats-Unis ont utilisé leur doctrine de non-reconnaissance, bloquant l’admission de la Chi­ne aux Nations Unies, dans le but précis de sa­boter les Nations Unies et aussi pour s’assu­rer, par cet ar­tifice, deux sièges au Conseil de Sé­curité des Na­tions Unies, la Chine de Tchang Kai Tchek leur étant dévotement inféodée.


d) L’utilisation idéologique du concept de guer­re —et les principes de reconnaissance et de non-recon­naissance— mène également à la dés­hu­manisation médiatique des adversaires de l'Amérique : l'ennemi n'est plus un ennemi qui défend à égalité ses inté­rêts nationaux, mais un paria international.


e) La conséquence finale du développement de la théo­logie politique américaine est l’identifi­ca­tion du droit international —le Droit des Na­tions— avec le sy­stème de l’impérialisme amé­ri­cain. La source de ce droit international n'é­tant, dans un tel contexte de "nouvel ordre mondial", plus rien d'autre que la volonté géo­politique et stratégique des Etats-Unis. Un tel "droit international" (?) n’est vraiment plus le Droit des Nations, au sens classique et habi­tuel du terme, mais bien le droit du pays le plus fort, l’in­car­nation de l’hégémonie et de l’ex­pansionnisme amé­ricains. L’intérêt national des Etats-Unis reçoit un sta­tut d'universalité dans le "nouvel ordre mondial" et passe pour re­présenter l’intérêt de la commu­nau­té inter­na­tionale. En outre, les Etats-Unis eux-mê­mes de­viennent un sujet omnipotent et transna­tio­nal, s'universalisent, sans cesser d'être eux-mê­mes et rien qu'eux-mêmes, représentant sans médiation la communauté mondiale tout entière.


Les autres Etats n'existent plus que comme entités non politiques


La théologie politique américaine est incom­pa­tible en soi, non seulement avec le principe de l’égalité des Etats et avec celui de leur souve­rai­neté individuelle, mais aussi avec toute or­ganisation qui se prétend ê­tre une orga­nisa­tion internationale réelle comme les Nations U­nies. Dans le "nouvel ordre mondial", les E­tats ne peuvent exister que comme entités non-po­li­tiques; les prérogatives de toute instance po­li­tique et territoriale concrète et réelle, telle que nous les trouvons énumérées et définies dans et par la ter­mi­nologie de Carl Schmitt, sont réservées uniquement aux Etats-Unis, de même que le droit y afférent, de les exercer. Et une organisation internationale ne peut exister que si elle n'est plus rien d'autre qu'un équivalent fonctionnel de l'Organisation des E­tats A­méricains (OAS), c’est-à-dire qu'une telle organisa­tion internationale ne peut plus être au­tre chose qu'une façade multilatérale pour lé­gitimer le désir hé­gémonique américain. L’hi­sto­rien britannique Ed­ward Hallet Carr re­mar­que, dans son livre, The Twen­ty Years' Crisis - 1919-1939, publié à l’origine en 1939, que, ju­ste un peu avant l’entrée des Etats-Unis dans la première guerre mondiale, dans un dis­cours au Sénat sur les objectifs de la guerre, le Pré­sident Wilson expliquait que les Etats-Unis, ja­dis, a­vaient été «fondés pour le bien de l’hu­ma­nité» (16) (sic!). Wilson affirmait catégori­que­ment: «Ce sont des principes américains, ce sont des politiques amé­ricaines… Ce sont les principes du genre humain et ils doivent pré­dominer» (17). Carr souligne que «les dé­cla­rations de ce personnage viennent es­sen­tiel­lement d’hommes d’Etat anglo-saxons et d'é­cri­vains. Il est vrai, ajoute Carr, que lors­qu’un natio­nal-socialiste important certifiait que «tout ce qui est profitable au peuple al­lemand est juste, tout ce qui fait du mal au peu­ple allemand est mauvais», il pro­posait qua­siment la même équation entre l’intérêt na­tional et le droit universel, équation qui a­vait déjà été établie par Wilson pour les pays de langue an­glaise».


Les deux explications de Carr


Carr a donné deux explications alternatives à ce pro­ces­sus d'universalisation de l’intérêt na­tional particu­lier. La première explication se re­trouve fréquem­ment dans la littérature poli­ti­que des pays continen­taux : elle avance que les peuples de langue anglai­se sont de vieux maîtres dans l’art de concevoir leurs intérêts na­tionaux égoïstes comme l'expression pure et sim­ple du bien général, et que ce genre d’hy­­po­crisie est une particularité spéciale et carac­té­ristique de la façon de penser des Anglo-Sa­xons. La seconde explication était plus sociolo­gi­que : les théo­ries sur la moralité sociale sont tou­jours le pro­duit d’un groupe dominant, qui s’i­dentifie d'emblée à la communauté prise dans son ensemble et qui pos­sède des moyens que ne possèdent pas les groupes ou individus subordonnés pour imposer leur point de vue sur la vie dans la communauté. Les théories de la moralité internationale sont, pour les mê­mes rai­sons et en vertu du même processus, le produit des nations hégémoniques et/ou des groupes de nations dominantes. Durant les cent dernières années, et plus particulièrement de­puis 1918, les nations de lan­gue anglaise ont formé le groupe dominant dans le monde; les théories actuelles de la moralité inter­na­tio­na­le ont été choisies par eux pour perpétuer leur suprématie et se sont généralement d'a­bord ex­primées dans l’idiome qui leur est pro­pre (18).


Le vocabulaire de l'émancipation


Autre aspect important de la théologie politi­que : la pratique de mythifier et d'idéaliser l’ex­pansionnisme américain pour en faire une mo­ralité internationale u­ni­verselle. Quelles sont les caractéristiques de la my­thologie uni­ver­saliste? C’est de transformer la si­gni­fication de la réalité politique classique (ndt : ari­sto­té­li­cienne et nationale-étatique) pour n'en faire qu'une illusion chimérique, de facture répres­sive, et, en conséquence, de neutraliser et de dé­lé­gitimer le langage politico-étatique (natio­nal) ou tout acte de ré­sistance contre l'uni­ver­salisme américain. En d’au­tres termes, la my­tho­logie politique de facture uni­ver­saliste con­siste toujours à confisquer le réel, à l'é­liminer et l'évacuer. Dans ce contexte, le langage ar­­ticulé de l'ère étatique nationale, ou les actes de ré­sistance, affirmés par ceux qui refusent cette logi­que universaliste, offrent peu de ré­sistance, car leur contenu se voit neutralisé par la théologie politique universaliste. Pour pa­raphraser Roland Barthes (19), la théologie politique est expansive; elle s’invente el­le-mê­me sans cesse. Elle tient compte de tout; de tous les aspects des relations internationales, de la di­plomatie, du droit international. Les pays opprimés ne sont rien : ils ne produisent qu'un langage, le cas échéant, celui de leur é­mancipation, or cette éman­cipation a déjà été dé­légitimée à l'avance. L’oppres­seur, en l'oc­cur­rence les Etats-Unis, sont tout, leur langage politico-théologique a été élevé au rang de dog­me. En d’autres termes, dans le cadre de la théo­logie politique, les Etats-Unis ont le droit exclu­sif de produire le méta-langage qui vi­se à pérenniser l’hégémonie américaine. La théo­logie politique, en tant que mythe, nie le caractère empirique de la réa­lité politique; ain­si la résistance à cette théologie hégémonique doit viser à recréer et à émanciper la réalité em­pirique.


Un méta-langage qui accepte pour argent comptant les slogans de la propagande


Durant la marche en avant de l’expansion­nis­me a­mé­ricain, déjà tout entière contenue dans la doctrine de Monroe et dans ses nombreuses extensions, en particulier durant la Guerre Froi­de avec sa justifi­ca­tion idéologique, on pou­vait lire dans des documents tels le NSC-68, qu'une destruction et une idéolo­gi­sation du langage politique devaient s'accomplir et l'ont été. L’histoire de la Guerre Froide a débouché sur le fait que les Américains anglophones sont tom­bés dans le jargon propagandiste de l'ancienne idéo­logie et pratique panaméri­cai­nes, avec sa propen­sion à accepter pour ar­gent comptant les slogans, les simplifications, les mensonges et les clichés pom­peux tels que le "totalitarisme", la "défense de la dé­mo­cra­tie", le "péril rouge", etc.


L’expansionnisme américain et les machina­tions co­lo­niales d’une Amérique perfide ont pré­cisément in­clus de force des sémantèmes nou­veaux dans le lan­gage, des sémantèmes dont Washington avait be­soin pour exprimer ou camoufler vaille que vaille sa sauvagerie, déguisée en universalisme au service du genre humain; l'objectif préventif est de délégitimer toute résistance potentielle et légitimer à l'a­van­ce la conquête et l’hégémonie. Les Etats-Unis ont imposé une subversion planétaire du lan­gage et c'est sur la base de cette gigan­tes­que falsification que l’Améri­que contemporaine a été éduquée.


Un gigantesque mur de mythes


Pour paraphraser George Steiner, les diri­geants de l’Amérique construisent entre l’es­prit américain et la réalité empirique un gigan­tesque "mur de mythes". Au fur et à mesure, les mots ont perdu leur sens ori­ginel et ont acquis les contenus sémantiques propres de la théologie politique universaliste, manipulée par Washington. Le langage est devenu une falsi­fi­cation générale, à tel point qu'il n’est plus ca­pable de saisir ou d’exprimer la vérité. Les mots sont devenus des instruments de men­son­ge et de désinformation, des convoyeurs de fausseté, servant à bétonner l’hégé­monie. «Le langage n’était pas seulement infecté par ces colossales bêtises, il était sommé d'imposer les in­nombrables mensonges [de la propagande]» (20), d’endoctriner et de persuader les Amé­ricains que les nombreux actes visant à mettre des nations entières hors jeu, ainsi que le droit international, que les a­gressions militaires et les crimes de guerre en Co­rée, au Vietnam et, plus récemment, au Panama et en Irak, ont ser­vi la cause des grands principes "hu­manitai­res". La subversion du langage par la théo­logie politique américaine fait en sorte que la vérité empirique ne puisse plus être dite, et érige un mur de silence et de mensonge, qui a pour résultat inat­tendu l’effondrement de la langue anglaise, héritée de l'histoire, au profit du jar­gon panaméricain, pure fabrication récente. Et lorsque la langue « a été pi­quée de menson­ges, seule la vérité la plus crue peut la puri­fier» (21).


Des torrents de parlottes moralisantes


Il est un phénomène américain très étrange que l’on ne retrouve pas en Europe : un Hom­me de Dieu —d’ordinaire un prêtre— qui s’a­vère charlatan. Eh bien, dans l’arène politique, après la fin de la pre­mière guerre mondiale, le Président Wilson était un de ces "Hommes de Dieu" qui voilait l’expansionnis­me américain par des torrents de parlottes morali­santes. Pour Wilson, les Etats-Unis détenaient un rôle, que leur avait dévolu la Providence, celui de di­riger le monde. Le wilsonisme était l’origine et la per­sonnification du totalitarisme améri­cain universa­liste. A présent, dans l’après-Guer­re Froide et l’a­près-Yalta, nous avons af­faire à un nouveau Wilson, un petit Wilson, soit le Président Clinton, qui, à son tour, ré­veil­le le torrent de parlottes moralisantes de son prédécesseur; lui aussi se pose comme "Hom­me de Dieu", et a pris sa place dans la cour­se à l’ex­pan­sionnisme universaliste, de fac­ture néo-wilsonienne, en utilisant la même vieille notion de Destinée Ma­nifeste et la mê­me théologie politique, cette fois sous les ori­peaux du "nouvel ordre mondial". Mais une fois de plus, les concepts de la théologie poli­ti­que universaliste américaine se dévoilent pour ce qu'ils sont : l’opium de la communauté in­ter­na­tio­nale.


Nikolaj-Klaus von KREITOR.

(http://mid.diplomat.ru/wwwb/main/messages/1220.html... ; trad. fr. : LA).


notes :

*Anders Stephenson Manifest Destiny. American expansion and the Empire of Right (Hill and Wang, New-York, 1995).

(1) Hans J. Morgenthau, Politics Among Nations (Alfred A. Knopf, New-York, 1948) p. 64.

(2) Hans J. Morgenthau, Politics Among Nations, ibid., p. 65.

(3) Hans J. Morgenthau, Politics Among Nations, aux édi­tions Stanley Hoffman; Contemporary Theory in Inter­natio­nal Relations (Prentice Hall, Inc, Englewood Cliffs, 1960) p. 61.

(4) Louis A. Coolidge, An Old Fashioned Senator: Orville H. Platt (New-York, 1910) p. 302.

(5) Richard Hofstadter, The Paranoid Style in American Poli­tics (The University of Chicago Press, Chicago, 1965) p. 174.

(6) Richard Hofstadter, ibid. pp. 175, 176, 177.

(7) Claude G. Bowers, Beveridge and the Progressive Era (New-York, 1932)

p. 121.

(8) Richard Hofstadter, ibid. p. 177.

(9) Kenneth M. Coleman, The Political Mythology of the Monroe Doctrine:Reflection on the Social Psychology of Domination, pp. 99, 100, 110

(10) M. Coleman, ibid. pp. 97, 103.

(11) M. Coleman, ibid. p. 102. Coleman quotes after Salvado de Madariaga Latin America Between the Eagle and th eBear (Praeger, New-York, 1962) p. 74

(12) Coleman, ibid. pp. 105, 109.

(13) Carl Schmitt, Grossraum gegen Universalismus in Position und Begriffe im Kampf mit Weimar-Genf-Versailles 1923-1939 (Duncker & Humblot, Berlin, 1988) pp. 295-303.

(14) Edward Hallet Carr, The Twenty Year’s Crisis 1919-1939 (Harper Torchbooks, New-York, 1964) p. 78; aussi R.S. Baker Public Papers of Woodrow Wilson: The New Democracy.

(15) Voir sur ce sujet: Kenneth W. Thompson, Toynbee and the Theory of International Poitics, aux editions Hoffman, Contemporary Theory in International Relations, ibid., p. 97.

(16) Editions R. S. Baker, Public Papers of Woodrow Wilson: The New Democracy pp. 318-319.

(17) Edward Hallet Carr, The Twenty Year Crisis, ibid. p. 79; aussi Toynbee, Survey of International Affairs, 1936, p. 319.

(18) Edward Hallet Carr, ibid., pp. 79, 80.

(19) Roland Barthes, Mythologies (Hill and Wang, New-York, 1987) pp. 131, 148, 149.

(20) Georg Steiner, A Reader, (Oxford University Press, New-York, 1984), p. 212.

(21) Georg Steiner, ibid. p. 219.



 

mardi, 10 février 2009

Angriff der neuen Linke

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Schwab, Jürgen
Angriff der neuen Linken
[200 216]
€ 19,80

Eine Herausforderung für die nationale Rechte



368 Seiten
Klappenbroschur
53 Abbildungen
Personenverzeichnis
ISBN-13: 978-3-89180-082-9

Kurztext:

Der frühere SPD-Vorsitzende Oskar Lafontaine hat mit der aus der SEDNachfolgepartei PDS hervorgegangenen ›Die Linke.PDS‹ gemeinsame Sache gemacht. Er wirkt nun – oft mit nationalen Tönen – als Türöffner für die Altkommunisten Gysi und Bisky in Westdeutschland und hat bei den letzten Landtagswahlen der neuen Linken bereits zum Einzug in mehrere westdeutsche Landtagsparlamente verholfen.

Die immer mehr in Armut abgleitenden Deutschen werden verstärkt nach politischen Alternativen suchen. Für die Parteien der nationalen Opposition wird es darum gehen, vor allem die Täuschungen der Linkspartei zu entlarven und die Wähler, die dorthin abgewandert sind, wieder zurückzugewinnen.

Hierzu müssen diese Wähler erkennen, daß sich die sozialstaatlichen Versprechungen von Lafontaine, Gysi und Bisky nicht in einem ›Weltstaat‹ oder in einer ›internationalen Ordnung‹ erreichen lassen, sondern nur in einem deutschen Nationalstaat, der in einen autarken europäisch-russischen Großraum einzubinden ist.

Klappentext:

Die neue Partei DIE LINKE hat sich 2007 durch eine Vereinigung aus ›Linkspartei.PDS‹ und ›Wahlalternative Arbeit und soziale Gerechtigkeit‹ (WASG) gebildet. Sie versucht, sich nun auch im Westen der Republik auszubreiten. Mit dem Einzug in die Landesparlamente von Bremen, Hamburg, Niedersachsen und Hessen konnten Lafontaine & Co. bereits erhebliche Erfolge verbuchen, wenn sie auch in Bayern mit 4,4 Prozent der abgegebenen Stimmen an der 5-Prozent-Hürde scheiterten. Aber 2009 stehen die Chancen gut für einen Erfolg der neuen Linken bei der Landtagswahl im Saarland, wo Oskar Lafontaine ihr Spitzenkandidat sein wird, der die Angst der Wähler vor den Kommunisten in der Partei aufheben soll.

Die neue Linkspartei stößt in die programmatische Lücke vor, die vor Jahren noch von der SPD ausgefüllt war. Nachdem unter der Kanzlerschaft von Gerhard Schröder (SPD) der umfassendste Sozialabbau in der Geschichte der Bundesrepublik zu verzeichnen war – man denke an ›Agenda 2010‹ und ›Hartz-IV‹ –, stellt sie sich nun geschickt um so mehr als die neue soziale Partei und als Wahlalternative für den ›kleinen Mann‹ vor, der sich nach dem goldenen sozialdemokratischen Zeitalter von Willy Brandt oder nach der sozialen Sicherheit der DDR zurücksehnt. Doch das ist von seiten der immer noch tonangebenden Kommunisten Gysi und Bisky Täuschung des Wählers. Lafontaine hat sich diesen Leuten verbunden, die ihn für die Gewinnung nationaler und wertkonservativer Wähler einsetzen.

Viele Wähler der sozialen Unterschicht, die ihren Protest gegen die internationalen Kapitalisten äußern wollen, schwanken nun zwischen einer Stimmabgabe für NPD oder DVU einerseits oder Linkspartei andererseits. Für sie kritisiert Lafontaine hin und wieder die vorherrschende Ausländerpolitik und wettert gegen den Turbokapitalismus. Bei Hartz IV-Empfängern und Geringverdienern kommt es gut an, wenn Linkspolitiker die Vermögenssteuer und Erbschaftssteuer erhöhen wollen und die Börsenumsatzsteuer einzuführen gedenken. Dabei entsteht der falsche Eindruck, daß solche nationalen Forderungen innerhalb der neuen linken Partei mehrheitsfähig seien oder in deren Programm stünden. Dies ist ebenso wenig der Fall, wie es keine allgemeine Zustimmung zu gewissen Äußerungen zur Familienpolitik von Lafontaine-Gattin Christa Müller gibt, die 2008 von der Mehrheit ihrer Genossen auf dem Bundesparteitages in Cottbus abgelehnt wurden. In Wirklichkeit steht die Linkspartei insgesamt für eine inländerfeindliche Politik, tritt für weitere ›Zuwanderung‹ und gegen eine Familienpolitik für Deutsche ein.

Notwendig ist mehr als bisher, die soziale Frage als die der Wiederherstellung nationalstaatlicher Souveränität in der Öffentlichkeit zu vertreten: »Sozial geht nur national!« Lafontaine bildet eine große Herausforderung für die nationale Rechte. Diese hat jetzt zu beweisen, ob sie die Zeichen der Zeit erkannt hat: Allein ein moderner, weltoffener Nationalismus kann aus den Sackgassen der EU und des US-Imperialismus hinausführen.

Inhaltsverzeichnis

Vorwort: Warum dieses Buch? 7

1. Woher kommt die Linkspartei? 11
Zur Geschichte der Linkspartei 11
Das schwierige Erbe der DDR 14

2. Wo steht die Linkspartei? 24
Die Vision von der Einheit der Linken 24
Zwei sozialdemokratische Parteien? 39
Regierungsbeteiligung als strategische Falle 48
Linker Spagat zwischen SPD und Kommunisten 58
Was ist links? 66

3. Was will die Linkspartei? 75
Lafontaine – ein Populist? 75
Partei ohne Programm? 96
Weltanschauliche Grundsätze 98
Lafontaine – ein Jünger der Aufklärung 103
Gregor Gysi über die Aufklärung 112
Liberaler oder linker Fortschritt? 115
Interessenwahrer des Ostens 121
Linke Kämpfer gegen den Neoliberalismus 125
Gregor Gysis Verhältnis zum Neoliberalismus 125
Lafontaine: Soziale Geborgenheit statt Neoliberalismus 133
Die Sozialpolitik der Linkspartei 143
Die Bildungspolitik der Linkspartei 156
Die Umweltpolitik der Linkspartei 162
Gregor Gysi über Umweltzerstörung 167
Die Wirtschaftspolitik der Linkspartei? 170
Lafontaine über den Keynesianismus 176
Die Linkspartei zur Eigentumsfrage 198
Lafontaine – ein Sozialist? 202
Der ›Sozialismus‹ des Gregor Gysi 217
Lafontaines Verhältnis zum Nationalstaat 222
Die Linke – Partei der multikulturellen Gesellschaft 245
Lafontaine: Ausländer sind Konkurrenten! 248
Die Frauen- und Familienpolitik der Linkspartei 260
Die Familie – Müller gegen Marx 265
Der Pazifismus der Linkspartei 281
Linkspartei möchte Globalisierung gerecht gestalten 286
Die Weltgesellschaft als revolutionäres Ziel 287
Vom Pazifismus zum Menschenrechtshellizismus 290
Linker Antiimperialismus und Antiamerikanismus 305
Die Existenz Israels als »deutsche Staatsräson« (Gysi) 315
Der Antizionismus des Norman Paech (MdB) 321
Das Verhältnis der Linkspartei zur EU 330
EU-Beitritt der Türkei – die Linke gespalten 333

4. Wie soll die nationale Rechte auf die Linkspartei reagieren? 336
Linke Herausforderung für die nationale Rechte 336
Lafontaines Scheinalternative 345
Nachwort: Querfront – Vision oder Utopie? 352

5. Ein Ausblick in die Zukunft 369

Personenverzeichnis 372

Über den Autor:

JÜRGEN SCHWAB, geboren 1967 in Miltenberg/Main. Diplom-Germanist und Publizist, studierte deutsche Sprach- und Literaturwissenschaften, Kommunikations- und Politikwissenschaft an der Universität Bamberg. Aus seiner Feder stammen die Bücher: Die Meinungsdiktatur – wie ›demokratische‹ Zensoren die Freiheit beschneiden (Coburg 1997), Deutsche Bausteine – Grundlagen nationaler Politik (Stuttgart 1999). Er ist Mitherausgeber von 1848 – Erbe und Auftrag (Graz 1998). Jürgen Schwab fühlt sich der nationalrevolutionären Tradition der Deutschen Burschenschaft (DB) verpflichtet.

00:30 Publié dans Actualité | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : allemagne, gauche, socialisme, extrême gauche, politique | |  del.icio.us | | Digg! Digg |  Facebook