Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

vendredi, 14 novembre 2008

Russie: arrière-cour de l'Europe ou avant-garde de l'Eurasie?

russia_cathedral_2006_06_142.jpg

 

Archives de "Synergies Européennes" - 1995

 

Russie: arrière-cour de l'Europe ou avant-garde de l'Eurasie?

Wladimir WIEDEMANN

 

Intervention lors de la “Freideutsche Sommeruniversität”, août 1995

 

Lorsque nous évoquons la notion d'Empire, nous devons nous rappeler que ce concept, au sens classique, se manifeste sous deux formes historiques légitimées: une forme occidentale (ou “romaine occidentale”) et une forme orientale (ou “romaine orientale”, byzantine). Ainsi, l'idée authentique d'Empire est liée indubitablement à une perspective téléologique: la réunifica­tion finale de deux parties provisoirement séparées d'un Empire originel. Du moins sur le plan des principes. Car il est bien évident que cette “réunification de l'Empire” ne peut se réduire au niveau d'accords politiques purement formels dans l'esprit d'une diplomatie utilitaire et profane. Néanmoins, ce problème peut et doit être discuté par les deux parties concernées au ni­veau d'une idéologie impériale actualisée voire d'une théologie impériale. Mais qu'en est-il de ces deux parties?

 

La dernière héritière des traditions impériales romaines-occidentales a été la Germanie, tandis que la dernière héritière des traditions romaines-orientales ou byzantines a été la Russie. Comme le philosophe allemand Reinhold Oberlercher le re­marque très justement, les Allemands et les Russes sont les deux seuls peuples d'Europe capables de porter à bout de bras de véritables grandes puissances politiques. Dans son ouvrage Lehre vom Gemeinwesen, il écrit: «En tant qu'Empire (Reich) porté par les tribus de souche germanique, la forme politique propre du peuple allemand a pour mission de constituer un Reich englobant tous les peuples germaniques, lequel devra, de concert avec l'Empire des peuples russes (Grands-Russes, Petits-Russiens et Biélorusses), constituer un Axe de sécurité nord-asiatique et établir l'ordre sur la plus grande masse continentale du monde» (1).

 

Permettez-moi d'étudier plus en détail les thèmes de l'idée impériale en son stade actuel et de la politique impériale de la Russie. L'effondrement de l'Etat communiste a conduit en Russie à un vide idéologique, à la perte de toute orientation géné­rale. Mais on sait pourtant que la nature ne tolère aucun vide. Ainsi, l'antique idée impériale, l'idée d'un Empire religieux-or­thodoxe, dans le contexte d'un nouveau sens historique, doté d'un nouveau contenu social et géopolitique, est en passe de re­naître. De quoi s'agit-il?

 

Bien évidemment, la Russie nouvelle, post-communiste, n'est plus la vieille Russie féodale, tsariste, avec son servage. Aujourd'hui, il n'y a en Russie ni aristocratie ni classe moyenne. Il y a toutefois des intérêts historiques, objectifs et nationaux bien tangibles: ce sont les intérêts d'une nation qui compte dans le monde, les intérêts d'un peuple porteur d'Etat, et ces inté­rêts sont clairement délimités: il faut du pain pour le peuple, du travail pour tous les citoyens, de l'espace vital, un avenir as­suré. Mais pour concrétiser ces intérêts, il y a un hiatus de taille: la nomenklatura paléo-communiste demeurée au pouvoir jusqu'ici n'avait aucun projet social “créatif” et ne voulait que se remplir les poches avec l'argent volé au peuple et, pire, placer cet argent sur des comptes à l'étranger, dans des banques fiables. En d'autres mots: ce nouveau capitalisme spéculateur montre les crocs en Russie: il est incarné par cette nomenklatura, liée à la caste corrompue et bigarrée des “hommes d'affaire”, et parasite sans vergogne le corps d'une Russie devenue “libérale-démocrate” et dépouillée de toutes ses protec­tions. Ainsi, depuis le début de la perestroïka, un capital de 500 milliards de dollars américains a quitté le pays. Le gouverne­ment Eltsine ne dit pas un mot sur ce “transfert”, mais dès que quelques misérables milliards sont offerts à titre de crédit par la Banque Mondiale, il fait battre tambour et sonner buccins!

 

Mais le temps est proche où ces crocs mafieux recevront l'uppercut définitif qui les mettra hors d'état de nuire. Ce coup, ce sont les forces intérieures de la Russie qui le porteront et ces forces sont actuellement incarnées par les nouveaux proprié­taires du capital industriel et producteur. Bien entendu, il s'agit ici, en première instance, du complexe militaro-industriel qui se trouvait jusqu'ici, à titre formel sous contrôle étatique. Quelle sera l'intensité du processus de privatisation dans ce domaine? C'est une question de temps et cela dépend aussi des circonstances globales, politiques et économiques, qui détermineront l'histoire prochaine de la Russie. Mais une chose est claire d'ores et déjà: tôt ou tard, le pays générera une classe de véri­tables industriels et c'est à ce moment-là que naîtra la future grande puissance russe.

 

Je voudrais maintenant parler des fondements géopolitiques, économiques et idéologiques de la grande puissance russe. C'est connu: le bien-être du peuple et la puissance réelle d'un Etat dépend des placements en capital domestique, parce que ces placements garantissent la création de nouveaux emplois et augmente le pouvoir d'achat de la population. Ensuite, il est clair qu'au stade actuel de développement de la production, ce ne sont pas les entreprises moyennes et petites qui s'avèreront capables de générer et de placer de tels capitaux. Seules les très grandes entreprises d'envergure internationale sont en me­sure de le faire, car elles peuvent financer une recherche très coûteuse et une formation de personnel adéquate. Ce sont sur­tout les Américains et les Japonais qui possèdent aujourd'hui des sociétés disposant de telles masses de capitaux et sont ca­pables de faire face dans le jeu de la concurrence planétaire. Ces entreprises sont celles qui créent dans le monde la majeure partie des nouveaux emplois, bien rémunérés.

 

Les centres principaux de production de haute technologie moderne se concentrent de plus en plus dans les zones autour des grandes métropoles des côtes pacifiques, parce que la base du développement d'une production de ce type, c'est l'accès au commerce planétaire. Aujourd'hui, dans ce domaine, c'est le commerce maritime qui joue le rôle-clef, dont les voies de communication sont contrôlées par la politique militaire américaine dans toutes les zones stratégiquement importantes. C'est en constatant ce centrage sur le Pacifique qu'est née la thèse du “Pacifique comme Méditerranée du XXIième siècle”, c'est-à-dire du Pacifique comme nouvel espace où se développe actuellement la civilisation du progrès technique. Si les choses con­tinuent à se développer dans ce sens, les conséquences en seront fatales pour tous les pays européens; ceux-ci seront con­traints, sur le plan économique, à se soumettre à l'hégémonie américaine dans toutes les questions-clefs de la dynamique de la production moderne et aussi pour tous les mécanismes socio-politiques. Ce sera également le problème de la Russie. Mais ce sera justement le “facteur russe” qui permettra aux autres Européens de prendre une voie alternative, qui permettra de libérer toutes les initiatives russes et européennes des diktats américains. Cette alternative, c'est le “commerce continen­tal”.

 

Imaginez un instant que les grandes voies de communications du commerce mondial  —ou du moins celles qui relient l'Europe à l'Asie méridionale et à l'Extrême-Orient (surtout l'Inde et la Chine)—  deviennent continentales. Ce serait là un ac­cès direct et alternatif aux grands marchés qui sont déjà prospères aujourd'hui et qui sont potentiellement de longue durée. Cet accès par voie continentale serait d'abord plus rapide et offrirait des avantages non négligeables à certains technologies qui sont en train de se développer. Sur le plan théorique, tout cela semble séduisant, mais, en pratique, l'essentiel demeure ab­sent, c'est-à-dire un système réellement existant de communications transcontinentales.

 

Pourquoi un tel système de communication n'est-il pas déjà disponible? Parce que la politique extérieure de la Russie bol­chévique-stalinienne a commis une erreur fondamentale. En effet, les communistes ont été perpétuellement induits en erreur par un pronostic illusoire d'origine idéologique, prévoyant une évolution sociale conduisant à une révolution mondiale, qui, elle, allait réaliser l'“Idée” sur la Terre. En d'autres mots, au lieu de détruire la société bourgeoise, l'élite révolutionnaire russe au­rait dû la consolider, afin de concentrer les énergies des masses sur la construction réelle du pays et sur l'exploitation “civilisée” de ses espaces et de ses richesses. La chimère de la révolution mondiale a englouti en Russie de colossales ri­chesses, mais, simultanément, son importance géopolitique en tant que puissance continentale ne pouvait être détruite sur l'échiquier international.

 

L'ancien Empire russe avait justement émergé autour d'un axe constitué par une voie commerciale traversant l'Europe orien­tale, soit la voie ouverte par les Scandinaves et “conduisant des Varègues aux Grecs”. Par une sorte de constance du destin, le devenir actuel de la Russie dépend une nouvelle fois  —et directement—  de l'exploitation efficace d'un commerce transconti­nental, de la croissance de marchés intérieurs au Grand Continent eurasien. Ce destin géopolitique, grand-continental et eu­rasien, les forces réellement productrices de la Russie commencent à la comprendre. Ces forces sont potentiellement géné­ratrices d'Empire et peuvent être définie comme telles. Elles commencent aussi à formuler des exigences politiques propres. Et, à ce propos, Sergueï Gorodnikov, qui a consacré beaucoup d'attention à cette problématique, écrit:

 

«Notre besoin est le suivant: nous devons rapidement construire des structures de transport commerciales paneurasiatiques qui relieront toutes les civilisations créatrices; ensuite, notre besoin est de garantir militairement la sécurité de ces civilisa­tions, ce qui correspond aussi complètement aux intérêts de l'Europe, je dirais même à ses intérêts les plus anciens et les plus spécifiques, tant dans le présent que dans l'avenir. C'est la raison pour laquelle le nationalisme russe ne doit pas seule­ment compter sur une neutralité (bienveillante) de l'Europe dans sa politique d'Etat. Mieux, il trouvera en Europe des forces très influentes qui pourront et devront devenir ses alliés. C'est toute particulièrement vrai pour l'Allemagne qui s'est renforcé par sa réunification et désire en secret retrouver toute son indépendance en tant qu'Etat et toute sa liberté de manœuvre» (2).

 

La nouvelle alliance stratégique paneurasiatique entre l'Est et l'Ouest aura pour élément constitutif l'alliance géopolitique inter-impériale entre l'Allemagne et la Russie, les deux détenteurs de la légitimité impériale romaine en Europe. Ce recours à l'antique légitimité romaine est une chose, la tâche actuelle de cette alliance en est une autre: il s'agit pour elle de fédérer les intérêts économiques et politiques dans une perspective de progrès tecnologique global. Il s'agit de rassembler toutes les forces intéressées à développer l'espace économique eurasiatique. Pour réaliser ce programme, il faudra créer des unités économiques suffisamment vastes pour obtenir les moyens nécessaires à développer des projets de telles dimensions et pour se défendre efficacement contre les résistances qu'opposeront les Américains et les Japonais. Construire des entités écono­miques de cette dimension implique une coopération étroite entre les potentiels techniques russes et européens.

 

Le combat qui attend Russes et Européens pour établir un nouvel ordre paneurasiatique sera aussi un combat contre les rési­dus de féodalisme et contre les formes politiques dépassées à l'intérieur même de ce grand continent en gestation, c'est-à-dire un combat contre les forces qui se dissimulent derrière une pensée tribale obsolète ou derrière un fondamentalisme is­lamique pour freiner par une résistance douteuse la progression d'une culture et d'une économie grande-continentale. Comme le développement de notre civilisation postule des exigences globales, ce combat devra être mené avec tous les moyens di­plomatiques et militaires, jusqu'à la destruction totale des forces résiduaires. Seule une lutte sans merci contre les résidus d'un féodalisme millénaire, contre le “mode de production asiatique”, nous permettra de détruire les derniers bastions du vieux despotisme tyrannique et de la barbarie, surtout sur le territoire de la Russie où, aujourd'hui, ces forces se manifestent sous les aspects de la criminalité caucasienne et asiatique, des sombres bandes mafieuses, résultats de cette peste léguée par le bolchevisme: l'absence de toute loi et de tout droit.

 

Sur ce thème, je me permets de citer une fois de plus Sergueï Gorodnikov: «Il est clair qu'une tâche de ce type ne pourra être menée à bien que par un Etat fortement centralisé selon les conceptions civiles. Un tel Etat ne pourra exister que si l'armée marque la politique de son sceau, car l'armée, de par son organisation interne, est la seule institution étatique capable de juger, étape par étape, de la valeur politique des choses publiques et dont les intérêts sont identiques à ceux de la bourgeoisie indus­trielle en phase d'émergence. Seule une alliance étroite entre l'armée et la politique est en mesure de sauver l'industrie natio­nale de l'effondrement, les millions de travailleurs du chômage et de la faim et la société toute entière de la dégradation mo­rale, d'extirper le banditisme et le terrorisme, de faire pièce à la corruption et de sauver l'Etat d'une catastrophe historique sans précédent. L'histoire du monde dans son ensemble a prouvé qu'il en est toujours ainsi, que les efforts d'une bourgeoisie entreprenante et industrielle ne peuvent reposer que sur l'institution militaire; ensuite, dans la société démocratique, il faudra accroître son prestige social au degré le plus élevé possible et l'impliquer dans l'élite effective de la machinerie étatique» (3).

 

Certes, cet accroissement du rôle socio-politique de l'armée, garante de la stabilité globale de l'Etat dans la situation présente, mais aussi de la stabilité de cette société civile en gestation, implique une légitimisation du statut particulier qu'acquerront ainsi les forces armées. En d'autres termes, il s'agit de créer une forme d'ordre politique où les autorités militaires et les au­torités civiles soient des partenaires naturels sur base d'une séparation de leurs pouvoirs respectifs. Ensuite, un tel régime, qui pourrait être défini comme “régime de salut national”, postule l'existence d'une troisième force, une force intermédiaire, investie de la plus haute autorité dans cette tâche aussi important que spécifique consistant à fixer des normes juridiques. Une telle force pourrait s'incarner dans l'institution que serait la puissance même de l'Empereur, exprimant en soi et pour soi, et en accord avec les traditions historiques dont elle provient, l'idée d'un “compromis mobile” entre les intérêts de toutes les couches sociales. Ainsi, la dignité impériale à Byzance, qui s'est également incarnée dans les réalités de l'histoire russe, pré­sentait quatre aspects fondamentaux. Ce qui revient à dire que l'Empereur russe-orthodoxe devrait être:

1) Protecteur de l'Eglise d'Etat en tant qu'institution sociale (C'est le pouvoir de l'Empereur en tant que Pontifex Maximus).

2) Représentant dans intérêts du peuple (Pleins pouvoirs de l'Empereur en tant que tribun populaire).

3) Chef des forces armées (Pleins pouvoirs d'un Proconsul ou du Dictateur au sens romain du terme).

4) Autorité juridique supérieure (Pleins pouvoirs du Censeur).

 

L'autorité et la stabilité d'un véritable pouvoir d'Imperator dépend directement de la fidélité de l'Empereur aux principes fon­damentaux de la Tradition, au sens théologique comme au sens juridique du terme. C'est pourquoi ce pouvoir dans le contexte russe signifie que, d'une part, le rôle social de l'Eglise orthodoxe devra être fixé et déterminé, de même que, d'autre part, les traditions de la société civile. Une particularité de l'idée impériale russe réside en ceci qu'elle a repris à son compte l'idéal byzantin de “symphonie” entre l'Eglise et l'Etat, c'est-à-dire de la correspondance pratique entre les concepts d'orthodoxie et de citoyenneté, sur laquelle se base également la doctrine russe-byzantine d'un Etat éthique qui serait celui de la “Troisième Rome”, d'un nouvel Empire écouménique.

 

Dans quelle mesure ces idéaux sont-ils réalisables à notre époque? Question compliquée, pleine de contradictions, mais que les Russes d'aujourd'hui sont obligés de se poser, afin de s'orienter avant de relancer le traditionalisme russe et d'en faire l'idéologie de la grande puissance politique qu'ils entendent reconstruire. Le retour de ces thématiques indique quelles sont les tendances souterraines à l'œuvre dans le processus de formation de la société civile russe. Si, en Europe, c'est la culture qui a été porteuse des traditions antiques et donc des traditions civiles, en Russie c'est la religion qui a joué ce rôle, c'est-à-dire l'Eglise orthodoxe; c'est elle qui a fait le lien. En constatant ce fait d'histoire, nous pouvons avancer que la renaissance réelle de la société civile en Russie est liée inévitablement au déploiement de l'héritage antique véhiculé par l'Eglise orthodoxe. Il me semble que l'essentiel des traditions politiques antiques réside justement dans les traditions qui sous-tendent la puissance im­périale au sens idéal et qui sont proches du contenu philosophique de l'Etat idéaliste-platonicien.

 

Quelles sont les possibilités d'une restauration concrète de l'idée impériale civile et d'un ordre impérial en Russie? Ce pro­cessus de restauration passera sans doute par une phase de “dictature césarienne”, parce que, comme l'a un jour pertinem­ment écrit Hans-Dieter Sander, on ne peut pas créer un Empire sans un César. En effet, seul un César, élevé légitimement au rang de dictateur militaire, est capable de consolider les intérêts des forces les plus productives de la Nation à un moment historique précis du développement social et d'incarner dans sa personne les positions morales, politiques et socio-écono­miques de ces forces et, ainsi, sous sa responsabilité personnelle en tant que personalité charismatique, de jeter les fonde­ments d'une nouvelle société, représentant un progrès historique.

 

Le but principal en politique intérieure que devrait s'assigner tout césarisme russe serait de préparer et de convoquer une re­présentation de tous les “états” de la nation, en somme une Diète nationale, qui, en vertu des traditions du droit russe, est le seul organe plénipotentiaire qui peut exprimer la volonté nationale génératrice d'histoire. Cette Diète nationale détient aussi le droit préalable de déterminer la structure générale de l'Etat russe et de réclamer l'intronisation de l'Empereur. La Diète natio­nale est ainsi en mesure de légitimer la restauration de l'Empire et, s'il le faut, de constituer un régime préliminaire constitué d'une dictature de type césarien (Jules César avait reçu les pleins pouvoirs du Sénat romain qui avait accepté et reconnu offi­ciellement sa légitimité).

 

Toute restauration cohérente de l'Empire, au sens traditionnel, métaphysique et politique du terme, n'est possible en Russie, à mes yeux, que si l'on accroît le rôle socio-politique de l'armée et de l'Eglise, mais aussi si l'on consolide l'autorité des juges. Car ce sont précisément les juges (et en premier lieu les juges à l'échelon le plus élevé de la hiérarchie et de la magistrature impériales) qui pourront jouer un rôle médiateur important dans la future restructuration totale de la société russe, en travail­lant à créer des institutions juridiques stables. D'abord parce que cette valorisation du rôle des juges correspond à la tradition historique russe, à l'essence même de l'Etat russe (par exemple: dans la Russie impériale, le Sénat était surtout l'instance juridique suprême, disposant de pleins-pouvoirs étendus et normatifs, dans le même esprit que le droit prétorien romain). Ensuite, cette revalorisation du rôle des juges constitue également la réponse appropriée à l'état déliquescent de la société russe actuelle, où règne un nihilisme juridique absolu. Ce phénomène social catastrophique ne peut se combattre que s'il existe au sein de l'Etat une caste influente de juristes professionnels, disposant de pouvoirs étendus.

 

Lorsqu'on évoque une société reposant sur le droit  —ce qui est d'autant plus pertinent lorsque l'on se situe dans le contexte général d'un Empire—  on ne doit pas oublier que tant l'Europe continentale que la Russie sont héritières des traditions du droit romain, tant sur le plan du droit civil que du droit public. Lorsque nous parlons dans la perspective d'une coopération globale entre Européens et Russes, nous ne pouvons évidemment pas laisser les dimensions juridiques en dehors de notre champ d'attention. Le droit romain, dans sa version justinienne, a jeté les fondements de l'impérialité allemande et de l'impérialité russe. C'est donc cet héritage commun aux peuples impériaux germanique et slave qui devra garantir une coopération har­monieuse et durable, par la création d'un espace juridique et impérial unitaire et grand-continental. En plus de cet héri­tage juridique romain, Allemands et Russes partage un autre leg, celui de la théologie impériale. A ce propos, j'aimerai termi­ner en citant un extrait du débat qu'avaient animé le Dr. Reinhold Oberlercher et quelques-uns de ses amis:

OBERLERCHER: «Dans le concept de Reich, le processus de sécularisation n'est jamais véritablement arrivé à ses fins: le Reich demeure une catégorie politico-théologique. Dans la notion de Reich, l'au-delà et l'en-deçà sont encore étroitement liés». Lothar PENZ: «Cela veut donc dire que nous devons retourner au Concile de Nicée!» (approbation générale) (4).

 

Je pense aussi que le Concile de Nicée a effectivement jeté les bases véritables d'une théologie impériale, même si, à l'Ouest et à l'Est celle-ci a été interprétée différemment sur les plans théorique et liturgique. Il n'en demeure pas moins vrai que le lien subtil entre au-delà et en-deçà demeure présent dans l'existence de l'Empire (du Reich) comme un mystère déterminé par Dieu.

 

Vladimir WIEDEMANN.

(texte remis lors de la “Freideutsche Sommeruniversität” en août 1995; également paru dans la revue berlinoise Sleipnir, n°5/95; trad. franç. : Robert Steuckers).

jeudi, 13 novembre 2008

A "tirania mediatica" impoe um carcere de ideologia dominante

A «tirania mediática» impõe um cárcere de ideologia dominante

ex: http://inconformista.info

«Os meios de influência são utilizados pelas elites dominantes para impor uma ideologia de ruptura com as tradições do Passado.
No início do século XX, foram vários os autores que se inquietaram com a Revolta das Massas (Ortega y Gasset). No entanto, é à Revolta das Elites que assistimos nos últimos quarenta anos. Para Christopher Lasch, são as elites económicas, mediáticas e políticas, que impõem aos povos uma ideologia de ruptura com o Passado.
Para nós, a “tirania mediática” impõe um cárcere de ideologia dominante assente em quatro dogmas:
– As vantagens da mundialização;
– A ruptura com a tradição;
– A Esquerda apresentada como ontologicamente superior à Direita;
– O anti-racismo e a culpabilização dos povos.»

Jean-Yves Le Gallou

in "Douze thèses pour un gramscisme technologique"

mercredi, 12 novembre 2008

Obamania: nero, musulmano, socialista?

 

Obamania…

 

Nero, Musulmano, Socialista?

 

Ex: http://www.mirorenzaglia.org/

Dammi tre parole. No, non “sole, cuore, amore”. Dammi le tre parole che hanno dominato la campagna elettorale Usa: “nero, musulmano, socialista“. Tre spettri, tre fantasmi che abitano la perenne cattiva coscienza di quel gigante paranoico che è lo (pseudo)impero statunitense. Tre accuse rivolte al nuovo messia a stelle e strisce. Accuse per il momento rispedite al mittente dai milioni di americani recatisi alle urne con fervido entusiasmo anche grazie alla perenne impresentabilità degli esponenti repubblicani. Accuse respinte, quindi. Eppure c’è da credere che i tre macigni peseranno non poco sulla nuova amministrazione a stelle e strisce.

 

 

Cominciamo dall’”abbronzatura”. Ecco, qui la malafede del pensiero dominante esce completamente allo scoperto. Ancora nessuno l’ha detto, quindi lo faccio io: sostenere un candidato esclusivamente in virtù del colore della sua pelle è, semplicemente, razzismo. E’ razzismo, ci hanno sempre detto, l’articolazione di tre concetti: a) l’idea di razza ha realtà definita, concreta, sostanziale; b) tale concetto è totalizzante nel definire l’essenza di singoli e gruppi umani; c) da tale appartenenza si possono desumere giudizi morali. Ora, sarà abbastanza semplice constatare come l’opinione pubblica mondiale sia caduta in ognuno di questi tre momenti dialettici nel giudicare la formidabile ascesa del buon Barack. Che è nero, quindi buono. Chissà perché - misteri del politicamente corretto - la cosa non ha funzionato con Condoleeza Rice. Non precisamente una svedese,eppure, di fatto, colei che ha mosso i fili della pur universalmente detestata politica estera statunitense nell’era Bush. Beninteso, non ho nessuna simpatia per l’egemonia Wasp e ho sempre trovato affascinante, se è per questo, un personaggio come Malcom X. Ma Obama non è Malcom X.

 

 

Politica estera, si diceva. Le immagini di Barack Hussein Obama con il turbante hanno smosso l’opinione pubblica americana in un momento in cui la crisi finanziaria e l’imbarazzante Sarah Palin non avevano ancora definitivamente compromesso le speranze dei repubblicani di restare alla Casa Bianca. Urgeva - ed urge - mostrare continuità in politica estera. La prima nomina del presidente eletto, in questo senso, lascia poco spazio all’immaginazione. Il nuovo chief of staff (capo di gabinetto) sarà infatti Rahm Emanuel. Uno, per capirci, che aveva il padre nell’Irgun, il gruppo paramilitare che mostrò particolare vivacità a Der Yassin. Da Tel Aviv è presto giunto un sospiro di sollievo: “E’ il nostro uomo alla Casa Bianca”, hanno esclamato i media israeliani. Quanto al vicepresidente eletto, Joe Biden, sappiamo che durante la guerra in Bosnia chiese con forza misure in favore dei pupilli di Washington, ovvero i musulmani bosniaci, dalla fine dell’embargo sulle armi ai raid aerei della Nato alle azioni giudiziarie contro i crimini di guerra. Per il resto dello staff si parla di uomini del giro Kennedy (sì, quello che rase al suolo il Vietnam) e Clinton (sì, quello che fu autore della prima aggressione all’Europa dal 1945 ai danni della Serbia). E lui, il buon Obama? Il primo agosto scorso ha dichiarato: “Noi porteremo avanti una guerra che deve essere vinta. Il primo passo è quello di lasciare il lasciare il campo di battaglia sbagliato in Iraq per spostarci in quello giusto, in Afghanistan e Pakistan. Voglio essere chiaro: su quelle montagne si nascondono i terroristi che hanno ucciso tremila americani e pianificano di colpire ancora. Se abbiamo concrete informazioni d’intelligence su obiettivi terroristici di alto valore e il presidente Musharraf non agisce, lo faremo noi”. Illuminanti, poi, le sue parole a proposito della Russia: «Dobbiamo fornire sostegno morale alla Polonia, all’Estonia e alla Lituana e a tutte le nazioni dell’ex blocco sovietico. Ma dobbiamo anche fornire a questi Paesi un sostegno economico e finanziario per aiutarli a ricostruire le loro economie». Polonia, Estonia, Lituania. Obiettivo: accerchiare lo zar.

 

 

Insomma: tutto cambia, nulla cambia. O forse no, forse qualche cambiamento ci sarà davvero. Stavolta le guerre saranno umanitarie. Con Obama torna a reclamare i suoi diritti il cosiddetto soft power, l’arma mediatico-culturale. Obama significa: rilancio del sogno americano, nuovo inizio per un’egemonia culturale planetaria che sembrava persa. Con la nuova amministrazione ritorna il multilateralismo di facciata per assicurare l’unilateralismo di fatto. Con la sua politica goffa e autistica, Bush aveva aperto la strada ad una riconsiderazione del ruolo degli Usa nel mondo da parte del resto delle nazioni. Con Barack il bello si torna al passato. Con Barack il buono torna la missione di civiltà della guida morale del globo. Con Barack lo sportivo anche i B52 diventano cool. Oh yeah!

 

 

Ma, almeno, il nuovo Martin Luther King sarà “socialista”? Questa, in effetti, fu l’accusa di “Joe l’idraulico”. Intendiamoci: in America “socialismo” non indica quella miscela di Marx e Sorel, scioperi e sindacalismo che conosciamo in Europa. Negli Usa, un ospedale pubblico decente è già socialismo. Roba che fa accapponare la pelle a ogni buon americano. Quanto a Obama, è facile prevedere che, come ogni inquilino della Casa Bianca che si rispetti, suonerà la musica prevista da chi paga l’orchestra. Che, secondo dati diffusi da Peacereporter, ha ricevuto ingenti sovvenzioni da, indovinate un po’: la Goldman Sachs. Proprio loro, sempre i soliti. Obama, in particolare, ha preso - tramite donazioni personali, mai aziendali - 874 mila dollari dalla Goldman Sachs (che a McCain ha dato solo 228 mila dollari), 581 mila dalla JPMorgan Chase (a McCain solo 215 mila), altri 581 mila dalla Citigroup (a McCain solo 296 mila), 454 mila dall’Unione Banche Svizzere (a McCain solo 147 mila) e 425 mila dalla Morgan Stanley (a McCain solo 262 mila). Le banche hanno scelto, quindi. Chissà, magari stavolta è la decisione giusta anche per i popoli.

 

 

Sarebbe la prima volta.

 

 

Adriano Scianca

samedi, 08 novembre 2008

Mircea Eliade et la Garde de Fer

0703031.jpg

 

Mircea Eliade et la Garde de Fer

 

par Giovanni MONASTRA

 

Analyse:

Claudio MUTTI, Mircea Eliade e la Guardia di Ferro,  Ed. All'Insegna del Veltro, Parma, 1989, 57 p., lire 8.000.

 

Au-delà des mythes de signes contraires qui cir­culent sur la Garde de Fer, au-delà des apologies ou des démonisations, on peut affirmer que le mou­vement de Codreanu était profondément lié à la culture et à l'âme de la Roumanie; tentant de se mettre au diapason de cette culture et de cette â­me, d'en épouser toute la complexité, cherchant à s'i­dentifier à elles, le mouvement de Codreanu lut­tait pour faire sortir la nation roumaine de son é­tat de décadence, de ces conditions d'existence ju­gées inférieures et propres aux pays balka­ni­ques marqués par l'esprit levantin. La Roumanie était sujette aux influences extérieures les plus dis­parates, qui aliénaient ses racines les plus an­ciennes, niées purement et simplement par une cer­taine culture de tendance «illuministe» qui s'in­crustait dans une société roumaine aux ré­fle­xes largement ruraux et intacts. L'action de la Gar­de de Fer, dans cette perspective, apparaît com­me une entreprise titanesque, parfois velléi­tai­re, vu la disproportion entre les forces en pré­sen­ce (les ennemis de la Garde de Fer détenaient le pouvoir absolu en Roumanie). Les légionnaires voulaient faire renaître leur peuple en très peu de temps, par le biais d'un activisme radical, portant sur de multiples niveaux: existentiel, éthique, spi­ri­tuel, où la politique n'était, finalement, qu'un ins­trument de surface, utilisé par une stratégie d'u­ne ampleur et d'une épaisseur bien plus vastes et profondes.

 

Dans les faits, la plupart des militants du mouve­ment s'exprimaient dans un style volontariste, en­tendaient témoigner de leur foi, faisaient montre d'un activisme fébrile, parfois aveuglé­ment a­gres­sif: lumières et ombres se superposent inévi­ta­blement dans le phénomène légionnaire. Cepen­dant, la force de ces militants profondé­ment sin­cè­res a attiré la sympathie des intellec­tuels atta­chés à la patrie roumaine, à sa culture nationale et populaire, à sa substance ethnique; parmi ces in­tel­lectuels: Mircea Eliade, un jeune chercheur, spé­cialisé dans l'histoire des religions et du fol­klore.

 

Stefan Viziru, est-il Mircea Eliade?

 

Récemment, la publication posthume en français et en anglais d'une partie des journaux d'Eliade a jeté une lumière nouvelle sur cette période et sur l'attitude du grand historien des religions. Clau­dio Mutti a analysé ces journaux, offrant à ses lecteurs, condensées en peu de pages, de nom­breu­ses informations inédites en Italie. Ce travail était nécessaire parce qu'en effet nous avons tou­jours été confrontés à une sorte de «trou noir» dans la vie d'Eliade, sciemment occulté par l'au­teur du Traité d'histoire des religions. Mutti, pour sa part, croit discerner les indices d'un en­ga­ge­ment dans l'un des romans d'Eliade, La forêt in­ter­dite,  aux accents largement autobiogra­phi­ques, qui se limite toutefois aux années 1936-1948.

 

Le protagoniste principal de l'intrigue du roman, Stefan Viziru, pourrait, d'après Mutti, dissimuler Eliade lui-même, mais sous un aspect qui, au pre­mier abord, n'est pas du tout crédible. Viziru, en effet, se manifeste dans le roman comme un an­ti­fasciste démocratique, bien éloigné des posi­tions de la Garde de Fer, mais qui est néanmoins arrêté pendant la répression anti-gardiste de 1938, parce qu'il a donné l'hospitalité à un légionnaire. Dans un tel contexte, Mutti estime très significatif le ju­gement exprimé par Viziru quand il s'adresse à un autre prisonnier de son camp d'internement: «Vous et votre mouvement accordez une trop gran­de importance à l'histoire, aux événements qui se passent autour de nous. La vie ne mérite­rait pas d'être vécue si, pour nous, hommes mo­dernes, elle ne se réduisait exclusivement qu'à l'histoire que nous faisons nous-mêmes. L'his­toi­re se déroule exclusivement dans le Temps, et, avec tout ce qu'il a de meilleur en lui, l'homme cherche à s'opposer au Temps [...]. C'est pour cette raison que je préfère la démocra­tie, parce qu'elle est anti-historique, je veux dire par là qu'el­le propose un idéal qui, dans une cer­taine me­sure, est abstrait, qui s'oppose au mo­ment de l'histoire». Sous bien des aspects, nous retrou­vons, dans ce jugement de Viziru, tout Eliade, a­vec son refus d'un devenir linéaire, ab­solu, quan­titatif, totalisant.

 

Justement, Mutti nie que l'identification Viziru-Eliade puisse être poussée au-delà d'une certaine limite. Pour appréhender la position réelle d'Elia­de vis-à-vis de la Garde de Fer  —on a af­firmé qu'il lui avait été totalement étranger—   il faut li­re le volume posthume de ses mémoires, concer­nant les années 1937-1960, où Eliade dé­ment ef­fectivement que le héros central de La fo­rêt in­terdite  est son alter ego, tout en donnant d'in­téressantes précisions pour comprendre quelles furent ses positions politiques et idéolo­giques à l'époque. Eliade nous livre en outre d'intéres­san­tes informations sur le climat qui rè­gnait en Rou­manie à la fin des années 30, au moment où le mouvement légionnaire connaissait un véritable triomphe. L'historien des religions nous décrit le sombre tableau des répressions gouvernementales contre la Garde de Fer: le roi et l'élite libérale-con­servatrice au pouvoir cher­chaient, par tous les moyens, à arrêter les progrès du mouvement lé­gion­naire. Pour éviter toute pro­vocation, Co­drea­nu avait choisi la voie de la non-violence, mais le gouvernement, vu l'insuccès électoral des listes qui le soutenaient et vu l'augmentation continue du prestige légionnaire  —comme l'écrit Eliade—  op­te pour le recours à la force: des milliers de mem­bres de la Garde de Fer furent emprisonnés, à la suite de procédures d'une brutalité inouïe, qui semblent propres aux gouvernants roumains de tou­tes tendances, comme l'a prouvé encore l'his­toire récente.

 

Mircea Eliade, assistant

de Nae Ionescu

 

Pendant la répression de 1938, plusieurs intellec­tuels qui avaient adhéré au mouvement de Co­drea­nu furent arrêtés, tandis que le Capitaine était assasiné, la même année, par des sicaires du ré­gime. Parmi les intellectuels embastillés, il y avait Nae Ionescu, un professeur d'université célèbre, dont Eliade était l'assistant. A propos de cette ar­restation, il écrit: «De manière directe ou indi­rec­te, nous étions tous, nous ses disciples et colla­borateurs, solidaires avec les conceptions et les choix politiques du professeur». Cette «syntonie» a duré  —même si Mario Bussagli a dissimulé une divergence de vue précoce entre les deux hom­mes—  car Eliade a prononcé le dis­cours fu­nèbre aux obsèques de son maître en 1940.

 

Au cours de la répression anti-gardiste, Eliade lui-même a été interné dans un camp de concen­tration, mais pour une période assez brève. Il re­fu­sa de signer une abjuration pré-rédigée du mou­ve­ment légionnaire, malgré les fortes pres­sions qui étaient exercées sur les prisonniers (et face aux­quelles un certain nombre d'entre eux cé­daient). Eliade affirme dans ses mémoires: «Je ju­geai qu'il était inconcevable de me dissocier de ma génération en plein milieu de la terreur, quand on poursuivait et persécutait des innocents». Une an­née auparavant, répondant à une question po­sée par le journal légionnaire Buna Vestire,  Elia­de avait déclaré: «Le monde entier se trouve au­jour­d'hui sous le signe de la révolution, mais, tan­dis que d'autres peuples vivent cette révolution au nom de la lutte des classes et du primat de l'é­conomie (communisme) ou de l'Etat (fascisme) ou de la race (hitlérisme), le mouvement légion­naire est né sous le signe de l'Archange Michel et vaincra par la grâce divine [...]. La révolution lé­gionnaire a pour fin suprême la rédemption du peu­ple». Dans cette phrase, transparait une adhé­sion au projet global de la Garde de Fer, qui n'est pas purement épidermique, de même qu'une men­talité bien différente de celle du personnage Stefan Viziru.

 

Après avoir consulté d'autres sources, Mutti sou­tient qu'Eliade a été candidat sur les listes électo­rales du parti de Codreanu et aurait été élu député peu avant la répression de 1938. Cette affirmation nous apparaît étrange, parce que si tel avait été le cas, si, effectivement, Eliade avait occupé un pos­te officiel et public, on l'aurait su depuis long­temps, sans même avoir eu besoin de recou­rir aux informations parues dans des publications jus­qu'ici méconnues et rédigées par des légion­nai­res en exil, publications auxquelles Mutti pou­vait accéder. Parmi les diverses mises au point pré­sentées dans ce petit volume, signalons la par­tie visant à démontrer qu'Eliade était antisémite, ce qui est un mensonge et ne peut servir qu'aux détracteurs fanatiques de sa pensée. Toutes cho­ses prises en considération, le travail de Mutti est équilibré quant au fond, en dépit de certains ex­traits qui idéalisent outrancièrement la Garde de Fer. Nous pouvons considérer que ce livre est une première contribution  —qu'il s'agira d'ap­pro­fondir—  à l'étude d'un segment de la vie d'E­liade, tenue par lui-même dans l'ombre, pour des raisons somme toute bien compréhensibles. D'un segment de vie étroitement lié à l'une des plus tragiques périodes de l'histoire roumaine.

 

Giovanni MONASTRA.

(trad. franç.: Robert Steuckers)

vendredi, 07 novembre 2008

Ook aan het uitkijken naar de Amerikaanse verkiezingen?

elam6760428.jpg

 

Ook aan het uitkijken naar de Amerikaanse verkiezingen?

14:26 Publié dans Actualité | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : europe, politique, etats-unis, amérique, obama | |  del.icio.us | | Digg! Digg |  Facebook

jeudi, 06 novembre 2008

Lo unico seguro con Obama: nada fundamental cambiara

obama_1201801546.jpg

De ganar McCain, nada tampoco habría cambiado

Ex: http://www.elmanifiesto.com/


Ni “gran día histórico”, ni “decisivo cambio para Estados Unidos y el mundo”, ni “los votantes abrazan el llamamiento por el cambio”, como titulan todos los periódicos. Nada de ello tiene que ver con la realidad. Otra cosa es que se lo hayan hecho creer a millones de individuos —y que éstos, encantados de la vida, se lo hayan creído.



Lo único seguro con Obama: nada fundamental cambiará

 

Lo mismo, desde luego, habría sucedido si el candidato conservador se hubiera hecho con la victoria. Algo, sin embargo, habría cambiado quizá en este caso: a peor, como cabía temer sobre todo desde que ese personaje denominado Sarah Palin, expresión del más ñoño conservadurismo, fue nombrada candidata a la Vicepresidencia.

¿Qué es lo que podría cambiar alguien que, en su primer discurso después de la victoria, proclama… lo obvio, lo que todos sabemos: que “llega” (pónganse a temblar los globalizados pueblos del planeta) “un nuevo amanecer de liderazgo estadounidense en el mundo”? Un nuevo amanecer en el curso del cual quedará repuesto y recuperado “el sueño americano” (algunas quiebras —reconoce indirectamente— debió, pues, de sufrir…).
El sueño americano, el american dream…: esa pesadilla de un mundo sin alma y sin sentido, sometido al Mercado, dominado por el Dinero: por esa cosa —lo estamos palpando estos días— que resulta ser un puro engendro financiero, es decir…, virtual.
El sueño americano, el american dream…: esa pesadilla aborrecible, esa visión del mundo que es precisamente lo que se trata de combatir.
El sueño americano, el american way of life…: ese modo de vida, de ser y de sentir, que también Europa, ¡ay!, ha acabado haciendo suyo. A nadie sin embargo —no deja de ser un pequeño, aunque fútil consuelo— se le ocurriría llamar a tal cosa el european way of life

Obama: le choix des minorités ethniques, de l'hyper-classe et des médias

barack-obama-devant-le-capitole_1206907718.jpg

 

Obama : le choix des minorités ethniques, de l'hyper-classe mondiale et des médias

Ex: http://www.polemia.com/

Les Républicains étaient usés : marqués par l’échec de leur politique étrangère néoconservatrice en Irak, en Afghanistan et au Pakistan ; frappés de plein fouet par la crise financière et économique mondiale. L’élection comme président des Etats-Unis de Barack Obama, un métis, considéré comme « Noir » dans la terminologie américaine, n’en est pas moins un événement symbolique particulièrement important.

Explications :

C’est la défaite de l’Amérique traditionnelle et des classes moyennes blanches. Obama a été choisi par les minorités ethniques et l’hyper-classe mondiale. Il s’est imposé à l’ensemble de la population américaine grâce au puissant soutien des médias dont il a bénéficié.

Le choix des minorités ethniques

Obama s’est présenté à l’origine comme un candidat « post-racial » ; mais malgré ses ambiguïtés et grâce à sa femme Michelle (une « sister »), Obama s’est fait reconnaître comme un « frère » par les Afro-Américains. Selon les sondages, il a recueilli de l’ordre de 90% des suffrages des « Noirs », représentant 11 à 12% des électeurs.

Il s’agit là d’un vote « racial », d’autant que, dans la communauté noire, il était quasiment impossible de s’afficher, y compris sur Internet, en faveur de McCain.

Obama a aussi bénéficié du vote d’une majorité des 9 millions d’électeurs hispaniques ; ce sont d’ailleurs les électeurs hispaniques qui ont fait basculer en faveur d’Obama le Nouveau Mexique, le Nevada et la Floride.

Pour séduire les Hispaniques, Obama leur avait adressé (à la différence de McCain) des messages en espagnol, rompant ainsi avec la règle d’unité linguistique des Etats-Unis faisant de l’anglais l’un des marqueurs de l’identité américaine.

La préférence de beaucoup d’Hispaniques a aussi été largement déterminée par des raisons ethniques : cette catégorie sociolinguistique américaine est composée de métis mêlant des sangs blancs, indiens et noirs. Ils ont pu se reconnaître dans Obama, sorte de Lara Croft (1) de la vie réelle.

En outre, beaucoup d’électeurs hispaniques se sentent solidaires des travailleurs clandestins mexicains et sud-américains ; ils s’opposent ainsi aux classes populaires blanches sur la question de l’immigration ; ajoutons que les Hispaniques sont bénéficiaires, comme les Noirs, des mesures de discrimination positive dans l’accès aux universités, aux emplois et au logement (beaucoup de crédits « subprimes » – appelés ironiquement Sanchez – étaient d’ailleurs gagés sur des biens hypothécaires appartenant à des Hispaniques).

Pour les Noirs comme pour les Hispaniques, les motivations du vote ont donc souvent été à la fois ethniques et sociales.

Une autre minorité, la communauté juive, s’est aussi largement prononcée en faveur d’Obama, à 74% selon un sondage préélectoral de Gallup, d’octobre 2008 (2) . Les Etats où la communauté juive est fortement présente – côte est, Californie, Floride – ont d’ailleurs choisi Obama.

A la différence des minorités précédentes, il s’agit là d’une minorité riche puisque ses revenus moyens sont deux fois supérieurs à la moyenne américaine et trois fois supérieurs à ceux des Noirs et des Hispaniques (3) .

L’alliance « progressiste » (« libéral » au sens américain du terme) habituelle des juifs et des Noirs en faveur du parti démocrate s’est donc largement reconstituée derrière Obama ; c’est la fin de l’épisode néoconservateur qui avait vu une partie importante de la communauté juive rejoindre le camp républicain et influencer fortement la politique étrangère de George Bush.

Ces différentes données conduisent à poser en ordre de grandeur l’arithmétique suivante :

– électorat noir : 11% de l’électorat total ; 10% pour Obama, 1% pour McCain ;
– électorat hispanique : 8% de l’électorat total ; 5% pour Obama ; 3% pour McCain ;
– électorat juif : 3% de l’électorat total ; 2% pour Obama, 1% pour McCain.

Dans ces conditions, pour gagner l’élection présidentielle McCain aurait dû impérativement rassembler plus de 58% de l’électorat blanc ou asiatique (4) . Une vraie gageure, compte tenu de la puissance des soutiens financiers et médiatiques d’Obama.

Le choix de l’hyper-classe mondiale

Le sénateur républicain du New Hampshire Judd Creg l’a reconnu : « Il y a à Wall Street un courant de sympathie indéniable pour Obama. C’est en partie lié au fait que nous avons perdu nos racines » (5) .

En tout cas, Obama a bénéficié du soutien affiché des milliardaires Warren Buffett et George Soros et recueilli des fonds des patrons des principales banques d’affaires de Wall Street… avant leur disparition. Et à Chicago, sa base de départ, il a eu comme l’un de ses principaux appuis Kennett Griffin, le patron du fonds spéculatif Citadel Investment.

Et même si les médias ont complaisamment parlé des petits donateurs, l’essentiel des 660 millions de dollars collectés par Obama pour sa campagne électorale (record américain et mondial) l’ont principalement été auprès des Américains les plus fortunés.

Là aussi, l’arithmétique est parlante : des centaines de milliers de donateurs à moins de 100 dollars peuvent, certes, apporter quelques dizaines de millions de dollars mais cela représente moins de 10% du total des sommes collectées.
Le reste des dons provient des secteurs de la finance, des affaires et des lobbyistes (6)  : avec 740.000 dollars, le principal regroupement de dons vient d’ailleurs de la banque d’affaires Goldman Sachs, berceau de l’actuel secrétaire au Trésor Harry Paulson ; ce qui contribue à expliquer que le plan de sauvetage des banques présenté par Paulson a été puissamment soutenu par… Obama.
Cette mobilisation de l’argent des riches en sa faveur a permis à Obama de noyer la campagne publicitaire de John McCain dans un rapport de un à quatre, voire dans certains cas de un à huit, selon le quotidien canadien « Le Devoir  » (7). Elle lui a aussi permis de mettre en œuvre un marketing électoral très agressif sur Internet. Or, dans une élection, c’est souvent celui qui dépense le plus qui gagne !

D’autres secteurs que les milieux d’affaires de l’hyper-classe mondiale ont aussi soutenu Obama : ainsi le monde de la mode s’est engagé en faveur du sénateur de l’Illinois, conduisant le « New York Magazine » à titrer : « La récolte de fonds par la mode pour Barack Obama est en soi un mini défilé. »

Le monde de l’art contemporain et celui du rock se sont aussi engagés pour Obama tout comme la majorité des « peoples », c'est-à-dire des personnages en vue des médias.

Le succès d’Obama, c’est l’alliance de Wall Street et d’Hollywood.

Seule la country music, musique traditionnelle et européenne de l’Amérique profonde, a pris le parti de McCain et Sarah Palin.

Les Etats les plus « huppés » des Etats-Unis ont voté Obama qui a recueilli 67% des suffrages (8) dans le Vermont (lieu de villégiature des « bobos » américains) et de 62% à 63% dans le Rhode Island, le Massachussetts et le Delaware.

Le choix des médias

A la charnière de l’hyper-classe mondiale et du monde médiatique, les deux plus grands journaux financiers mondiaux, le « Wall Street Journal » et le « Financial Times » ont clairement annoncé la couleur : Obama. C’est aussi le cas, selon « Le Figaro », dont l’obamania ne s’est jamais démentie, de 70% des médias américains dont le « New York Times », le « Washington Post », le « Los Angeles Times », le « Boston Globe », le « Chicago Tribune », le « San Francisco Chronicle ».

Cette préférence des médias pour Obama n’a pas seulement été quantitative, elle a été aussi qualitative. Ainsi, selon une étude du Pew Research Center sur les médias (9)  : de début septembre à mi-octobre, 57% des articles et reportages consacrés à McCain étaient négatifs et seuls 29% positifs ; a contrario, Obama a bénéficié de 36% de reportages positifs contre 29% de négatifs.

Il est vrai qu’Obama a été vendu moins comme un candidat que comme une « marque » selon le chroniqueur Christian Salmon ; et qu’à l’occasion d’une « fictionnalisation croissante de la politique américaine », les médias lui ont laissé jouer le rôle du « conteur » et du « griot » (10) .

Dans le cadre d’une campagne parfaitement scénarisée, dont le clou a été la visite à la grand-mère malade à Hawaï, Obama s’est vu attribuer le rôle du « gentil » : à un point tel que les caricaturistes et les satiristes en sont venus à épargner de leurs traits cruels le favori de l’élection, montrant ainsi un singulier conformisme…

L’action des médias a constamment joué dans le sens d’une angélisation de Barack Obama et d’une diabolisation, sinon de McCain, du moins de sa colistière Sarah Palin.

Ainsi, les journalistes d’ « investigation » se sont beaucoup plus intéressés au gouverneur de l’Alaska qu’au sénateur de l’Illinois, pourtant produit par l’appareil démocrate de Chicago, qui n’a pas toujours été un exemple de… moralité.

La diabolisation de Sarah Palin était essentielle pour casser la capacité de McCain à mobiliser la classe moyenne blanche et les milieux chrétiens et conservateurs. A contrario, l’obamania médiatique était, elle, nécessaire pour pousser les soutiens naturels d’Obama (les Hispaniques et les Noirs) non seulement à s’inscrire sur les listes électorales, mais aussi à venir voter. La forte participation électorale du 4 novembre (au regard des habitudes américaines) montre l’efficacité de la pression médiatique.

Non sans raison, la « National Review » a observé : « C’est la fin du journalisme, au profit du média de propagande », le « Boston Herald » estimant, lui, que « le grand perdant des élections était le journalisme objectif ».

L’énorme pression médiatique – à la fois productrice et exploitante des sondages – a contribué à frapper de sidération l’électorat de l’Amérique profonde selon l’équation suivante : qu’un Noir vote Obama, c’est normal ; qu’un Blanc ne vote pas Obama, c’est parce qu’il est « raciste ».

Malgré cela, McCain est resté nettement majoritaire parmi les classes populaires et moyennes blanches : mais pour être élu, il lui aurait fallu recueillir plus de 60% de leurs suffrages : l’énorme pression médiatique en faveur d’Obama rendait une telle performance difficile, sinon impossible.

Certes, McCain a emporté la majorité dans huit des douze Etats où les Blancs représentent encore plus de 90% de la population (11) et c’est dans le Wyoming (66%), l’Utah (61%) et l’Idaho (51%) qu’il a réalisé ses meilleurs scores : mais la victoire dans trois de ces petits Etats (ainsi qu’au Nebraska, au Dakota du Nord, au Kentucky et en Virginie occidentale) ne pouvait évidemment suffire à faire la décision en sa faveur.

Une élection symbolique

Le mondialisme triomphant poursuit depuis longtemps deux objectifs symboliques :

– le couronnement d’un pape sud-américain : l’élection de Benoît XVI en 2005 ne l’a pas permis ;
– l’élection d’un président « noir » aux Etats-Unis : c’est chose faite.

Obama représente l’archétype de l’idéologie mondiale unique (IMU) : métis, mondialiste, social-démocrate, de gauche, « antiraciste ». Il est l’élu de l’Amérique des minorités assistées et de l’hyper-classe mondiale assujettissant les classes moyennes blanches.

Les différents bénéficiaires des « subprimes » ont mêlé leurs votes pour lui : les insolvables qui ne peuvent rembourser leurs prêts, et les financiers qui ont « titrisés » ces dettes pour transférer les défaillances de paiement aux épargnants et aux contribuables de l’Amérique profonde et du monde entier.

De la promesse du changement à la tyrannie du statu quo

Usant d’une figure classique de la rhétorique électorale, Obama a fait campagne sur le thème du changement. Mais il va très vite se heurter à la tyrannie du statu quo.

En politique étrangère, les engagements précis et solennels qu’il a pris devant l’AIPAC (l’American Israel Public Affairs Committee) (12) lui interdisent tout changement notable au Proche-Orient et limitent sa marge de manœuvre sur l’Irak, l’Afghanistan, le Pakistan, la Syrie et l’Iran.

En politique économique, la fuite en avant est aussi inéluctable : comment financer, sinon à crédit, les baisses d’impôts promises (pour tous les Américains gagnant moins de 250.000 dollars annuels) et les dépenses sociales annoncées, pour faire accéder tous les membres des minorités au « rêve américain » ? L’endettement de l’Etat américain d’un côté, de l’Amérique vis-à-vis du reste du monde, de l’autre, va donc se poursuivre. Jusqu’à quand ?

Obama est le premier président américain noir. Mais il n’est pas le premier Noir à exercer de hautes responsabilités politiques aux Etats-Unis. De nombreux maires de grandes villes et des gouverneurs d’Etat sont noirs : prisonnière d’un clientélisme à base d’aide sociale et de militantisme associatif, leur gestion est rarement performante, comme l’a rappelé le cyclone Katrina : les autorités de la Nouvelle-Orléans s’étant révélées particulièrement peu efficaces.

Le risque existe d’une transposition de cette situation au niveau fédéral.

En élisant Obama, les Etats-Unis ont cédé à l’emballement d’une bulle médiatique. L’économiste noir conservateur Thomas Sowell décrit ainsi la situation : « Après le grand pari sur les “subprimes” qui ont conduit à la crise financière actuelle, voilà un pari plus gros encore, consistant à confier les rênes de la nation à un homme qui a pour seule qualification l’égo et la bouche » (13). .

En élisant Obama, les Etats-Unis ont aussi rompu avec ce que Samuel Huntington (14) considère comme des éléments fondamentaux de leur identité : un pays d’origine européenne, de culture anglo-saxonne, de langue anglaise.

Leur puissance y survivra-t-elle ? Les lendemains déchanteront !

Polémia
05/11/08

Notes :
(1)     Personnage de jeux vidéos destinés à être vendus dans le monde entier, Lara Croft synthétise les traits physiques des différentes races humaines.
(2)     http://www.gallup.com/poll/111424/Obama-Winning-Over-Jewi....
(3)     « Les Juifs américains », par André Kaspi, Plon, 2008 :
http://www.polemia.com/article.php?id=1642.
(4)     L’électorat asiatique étant traditionnellement réservé par rapport à la communauté noire, d’autant que les Américains d’origine asiatique sont, comme les Blancs, victimes de la discrimination positive. Le poids des votes de la minorité indienne (1%) et de la minorité arabe (en partie chrétienne) est difficile à apprécier.
(5)     « Pourquoi Wall Street parie sur Obama », « Les Echos », 31 octobre 2008 :
http://elections-americaines.lesechos.fr/article.php?id_a....
(6)     « Le Devoir », 28 octobre 2008 :
http://www.ledevoir.com/2008/10/28/212857.html
(7)     « L’argent fait-il le vote ? » :
http://www.ledevoir.com/2008/10/31/213365.html
(8)     Selon des résultats non encore définitifs.
(9)     http://journalism.org/node/13307.
(10)   Christian Salmon, « La “second life” du politique », « Le Monde », 1er novembre 2008.
(11)   Selon l’infographie du journal « Le Monde ».
(12)   http://www.polemia.com/article.php?id=1690.
(13)   http://townhall.com/columnists/ThomasSowell/2008/10/31/eg....
(14)   « L’identité nationale selon Huntington » :
http://www.polemia.com/article.php?id=1392.

Les Juifs américains par André Kaspi, Plon, 2008,
http://www.polemia.com/article.php?id=1642.

L’électorat asiatique étant traditionnellement réservé par rapport à la communauté noire, d’autant que les Américains d’origine asiatique sont, comme les Blancs, victimes de la discrimination positive. Le poids des votes de la minorité indienne (1%) et de la minorité arabe(en partie chrétienne) est difficile à apprécier.

Pourquoi Wall Street parie sur Obama, Les Échos, 31 octobre 2008,
http://elections-americaines.lesechos.fr/article.php?id_a....

Le Devoir, 28 octobre, 2008, http://www.ledevoir.com/2008/10/28/212857.html

« L’argent fait-il le vote ? » http://www.ledevoir.com/2008/10/31/213365.html

Selon des résultats non encore définitifs.

Christian Salmon, « La "seconde life" du politique », Le Monde, 1er novembre 2008

Selon l’infographie du journal Le Monde.

L’identité nationale selon Huntington, http://www.polemia.com/article.php?id=1392.

 

Polémia

18:36 Publié dans Actualité | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : etats-unis, obama, amérique, politique | |  del.icio.us | | Digg! Digg |  Facebook

dimanche, 02 novembre 2008

Une biographie de Bertrand de Jouvenel

jouvenel.jpg

 

Bertrand de Jouvenel 

de Olivier Dard (Auteur)
Présentation de l'éditeur
 
Homme du monde, journaliste brillant, essayiste à succès, théoricien politique, pionnier de l'écologie, républicain militant tenté par le fascisme, Bertrand de Jouvenel (1903-1987) a eu tant de facettes qu'il semble défier l'analyse. C'est dire tout l'intérêt de cette première biographie, pour laquelle Olivier Dard a pu bénéficier - outre ses livres, ses articles et sa correspondance - des 250 Cahiers tenus par Jouvenel tout au long de sa vie. Cette source inédite, qui tient à la fois du document de travail, d'une chronique du siècle et d'un journal intime, permet de démêler l'écheveau d'une vie où se croisent Colette, Emmanuel Berl, Drieu la Rochelle, Otto Abetz, Pierre Mendès France, Jacques Doriot, Adolf Hitler, Raymond Aron et Friedrich von Hayek.

Biographie de l'auteur

Olivier Dard, professeur à l'université Paul-Verlaine de Metz, est un spécialiste reconnu des années 1920-1960 ; il a notamment publié chez Perrin La Synarchie, le mythe du complot permanent et Voyage au cœur de l'OAS.


 

  • Broché: 526 pages
  • Editeur : Librairie Académique Perrin (28 août 2008)
  • Langue : Français
  • ISBN-10: 2262029164
  • ISBN-13: 978-2262029166

Misère des intellectuels de "droite"

misere-2.jpg

 

ARCHIVES DE SYNERGIES EUROPEENNES - 1997

Misère des intellectuels de “droite”

 

L'option métapolitique de la “nouvelle droite” est, dans l'espace culturel germanique, une importation française. La ND, regroupée autour d'Alain de Benoist, a tenté d'adapter à la droite la théorie du communiste italien Antonio Gramsci, à un moment de l'évolution de cette droite, moment où elle se demandait quels étaient les véritables ressorts de la société. Point de départ de Gramsci: la société n'est mue que partiellement par les groupes politiques visibles, c'est-à-dire les partis. Plus essentielle est la superstructure idéelle de la société, où sont façonnées valeurs, morale et idées. La tâche des “intellectuels organiques” serait alors de mener un combat culturel au sein même de cette superstructure, combat dont le but ultime ne peut être que la révolution. D'après Gramsci, on ne peut donc révolutionner une société que si l'hégémonie culturelle qui la régente est brisée, c'est-à-dire quand les tenants de cette hégémonie ne croient plus en eux-mêmes. C'est alors que les valeurs révolutionnaires prennent le pas sur les valeurs dominantes fragilisées et deviennent graduellement hégémoniques. Le combat culturel mené par les intellectuels devient dans une telle optique la stratégie principale du “révolutionnement” politique de la société.

 

Dieter Stein, le directeur de l'hebdomadaire néo-conservateur berlinois Junge Freiheit, a analysé très justement cette vision gramscienne de la révolution, qui ne survient que par le biais de la culture; au bout de son analyse, il lance un avertissement: une telle vision de la révolution culturelle pourrait déboucher sur une “political correctness” de droite (cf. JF n°8/97). Si je trouve la critique de Stein pertinente, cela ne veut pas dire que je juge le point de vue de Gramsci incorrect. C'est aujourd'hui précisément que nous constatons que la “superstructure intellectuelle”, c'est-à-dire les médias, a acquis une puissance bien trop considérable, tant et si bien que les hommes politiques ne sont plus que des figurants pour les émissions d'actualité. La puissance qu'ont acquises les émissions de “talkshows” est emblématique et révèle un phénomène inhabituel, soit la “pluralisation totale” de la société mais avec pour corollaire paradoxal la réduction de tout aux idéaux du plus grand nombre, du “brave quidam”, du “Gutmensch” (ndt: ce terme est ironique; il a été forgé par les critiques allemands de la “PC”). C'est cette contradiction qui produit la “political correctness” (PC), qui, lorsqu'elle aura atteint son stade idéal, sera une censure bien installée dans l'intériorité même des citoyens. Cette nouvelle intériorité auto-contrôlée produit un discours mortifère, un discours assassin, qui frapperait abruptement toute personne qui, pour une raison ou une autre, serait déclarée non “politiquement correcte”. Tous ceux qui entendent ignorer les gestes symboliques et rituels de la PC, tous ceux qui ne se sentiraient pas “concernés” par ses gestes et ses agitations, tous ceux qui avanceraient un certain type d'arguments non conventionnels seraient purement et simplement “morts”, du moins au sens figuré.

 

Pourtant, à droite, beaucoup de militants souhaiteraient, eux aussi, l'avènement d'une telle “censure intérieure”. Mais qui serait tout simplement de signe opposé. Ceux qui ne détiennent aucune puissance politique développent souvent des fantasmes de toute-puissance, mais d'une toute-puissance basée sur d'autres critères que ceux maniés par la toute-puissance en place. Quoi d'étonnant, dès lors, que le concept narcotique d'“hégémomie culturelle” ait été importé de France en Allemagne par des groupuscules qui ont voulu, dans un premier temps, divulguer les aspects intéressants de la nouvelle droite française, mais se sont enlisés, finalement, dans la prédication d'une “stratégie rédemptrice” et, pire, ont fini par aller faire de la formation dans des groupuscules néo-nazis interdits.

 

La trajectoire du néo-droitisme gramscien est triste, mais cette tristesse provient de plusieurs causes:

1. Il n'existe pas de “nouvelle droite” unitaire.

2. Si, au départ, les intellectuels de droite se voulant gramsciens ont souhaité l'émergence d'un débat, ils se sont rapidement enlisés dans la recherche d'une “Weltanschauung” idéale.

3. La “Révolution conservatrice” n'est pas pour eux une mine de concepts intéressants pour affronter le monde actuel, mais, plus prosaïquement, l'occasion de répéter à satiété un discours invariable, fait d'invocations stériles.

4. Ces intellectuels de droite se sont créé un petit monde, hermétiquement protégé de l'effervescence du réel.

 

Il n'existe pas “UNE” nouvelle droite. C'est pourtant clair: il suffit de comptabiliser tout ce que l'on vend au public sous cette appelation. Dans ce bric-à-brac, il y a toujours quelque chose de “plus neuf”. Dans les années 60, on disait des nationaux-révolutionnaires allemands qu'ils étaient la “nouvelle droite”. Mais, il n'est pratiquement rien resté de cette école nationale-révolutionnaire. Son espace idéologique était à l'intersection de la gauche et de la droite. Les nationaux-révolutionnaires affirmaient qu'ils n'étaient ni de droite ni de gauche: ils n'ont pas survécu sur la scène politique. Hennig Eichberg, qui, à cette époque, était la tête pensante de cette “nouvelle droite”, se considère aujourd'hui comme un homme de gauche. Beaucoup de nationaux-révolutionnaires de ces années 60 se retrouvent aujourd'hui chez les Republikaner.

 

Quant à la “nouvelle droite” la plus récente, elle a fini par démontrer qu'elle était au fond “conservatrice”, mais elle s'adresse à de plus larges catégories sociales que ses ancêtres de la nouvelle droite de 1968 qui tentaient d'apporter une réponse aux intellectuels de gauche et à la sottise de la vieille droite. Plus typés étaient les néo-droitistes  —quelques personnes et quelques journaux—  qui voulaient et veulent faire de leur nouvelle droite un projet de modernisation de l'extrême-droite. Cette catégorie de “néo-droitistes” reste la plus problématique, car, au fond, elle se borne à sortir de la naphtaline la “pensée anti-démocratique” de l'époque de Weimar (telle que l'a définie Kurt Sontheimer). Par cet exercice, elle veut hisser la pensée de l'extrême-droite à l'excellent niveau et à la belle forme, acquis par la “révolution conservatrice” sous Weimar.

 

A côté de ces “requinqueurs” de vieux corpus, s'est regroupée une autre “nouvelle droite”, composée pour l'essentiel de conservateurs (en Allemagne) ou de nationaux-libéraux et de conservateurs (en Allemagne et en Autriche). Ils ont abordé sans complexe la pensée moderne, ils ont, en ce sens, été conséquents, ont modulé leur action sur ce choix et ont investi les territoires politiques assignés par convention sociale à ces idéologies bourgeoises, bien ancrées et établies. Ces entristes, qui ont pénétré dans les rouages de la CDU, de la CSU ou de l'ÖVP, voire de la FDP ou de la FPÖ, sont de braves citoyens, ils sont tout simplement un petit peu à droite que les autres.

 

Si l'on mélange ces deux courants sous l'appelation commune de “nouvelle droite”, on débouche évidemment dans un beau désordre, sinon dans une aporie intellectuelle. Les “nouvelles droites” ancrées dans les diverses formes d'extrémismes droitiers confondent la volonté de débattre intellectuellement avec la proclamation impavide d'une Weltanschaunng ancienne, dont elles ont la nostalgie. Pour sortir de cette impasse, on recourt généralement à deux stratagèmes, dont on use et on abuse:

- soit on recommence à se référer directement aux racines théologiques du politique, en tentant de formuler un nouveau projet de “théologie politique”, dans le sens où l'entendait Carl Schmitt,

- soit on s'efforce de séculariser ce besoin d'absolu.

Dans ce cas, on se tourne vers d'autres certitudes, des certitudes immanentes, comme le “peuple” (Volk), des certitudes idéalistes, comme cette “science des citoyens d'Empire” de facture hégélienne, plus exactement mi-hégélienne-de-gauche, mi-hégélienne-de-droite, à l'usage de citoyens qui ne vivent plus dans un Reich et ne souhaitent certainement pas y revivre, les plages de Torremolinos ou des Baléares ayant pour eux plus d'attraits... Les multiples expressions de ces exercices para-théologiques ou “hégélisants” varient considérablement: les plus “sortables” ne sont “que” autoritaires, mais, dans la plupart des cas, le mode totalitaire est bien vite accepté, illustré et défendu...

 

C'est dans ces recherches et ces tâtonnements qu'il faut replacer l'engouement pour la “révolution conservatrice” de l'entre-deux-guerres. Soyons clairs et honnêtes: cette “révolution conservatrice” est une mine d'or, elle ne cesse de susciter les intérêts des philosophes et des politologues, à juste titre; il est intéressant d'en étudier tous les aspects si l'on veut connaître l'archéologie de certaines pensées aujourd'hui classées à “droite”, si l'on veut se plonger dans des corpus entièrement différents de l'idéologie dominante actuelle, si l'on veut lire de “mauvais livres” au regard des catégories politiques contemporaines. En pratiquant ainsi une forme de transversalité, indubitablement, on se forme l'esprit, on acquiert un sens critique, on aiguise ses intuitions. La “révolution conservatrice” nous apprend que les hommes de droite n'ont pas toujours été bêtes. Mais, en réceptionnant la “révolution conservatrice” de cette sorte, on ne doit pas non plus oublier qu'elle fut un échec. Ni oublier qu'elle fut, en bon nombre de ses aspects, antidémocratique et partiellement extrémiste. Aujourd'hui, notre regard doit se porter sur elle avec le même sens critique que sur les corpus de gauche de la même époque. Malheureusement, pour beaucoup d'hommes de droite actuels, de militants, cette “révolution conservatrice”, dans ses innombrables variantes, n'est que prétexte à répétitions, à dévotions naïves et bigotes, répétitions et dévotions qui remplacent toute intellectualité autonome ou permettent des exercices pénibles comme réitérer une attitude antidémocratique classique en citant des extraits d'auteurs “révolutionnaires-conservateurs”, pour faire intelligent ou pour donner le change.

 

Le résultat de tout cela est lamentable, car une telle nouvelle droite paraît toujours bien vieille, elle parait truffée de science, elle se gargarise de sa belle Weltanschauung  prête-à-porter, mais elle n'est quasi pas branchée sur la réalité. Car la belle Weltanschauung néo-droitiste n'est qu'une construction intellectuelle consolatrice pour tous ceux qui sont laissés-pour-compte dans la société réellement existante. Les plus lucides d'entre eux savent certes que le “peuple” (Volk) de leur idéologie n'est pas le peuple réel qui circule dans les rues d'Allemagne. Mais ce sont les “autres” qui sont coupables de cette inadéquation. Le peuple devrait correspondre à leur image du peuple: nous n'avons plus affaire là à de la nostalgie, à la nostalgie d'une “hégémonie culturelle” de droite, conservatrice, mais la rage de voir partout l'inadéquation génère subtilement une sorte de totalitarisme, camouflé derrière un verbiage conservateur, qui se veut apaisant, moral et “traditionnel”.

 

Au bout du compte, nos intellectuels de la “nouvelle droite” sont soit des modernisateurs de l'extrémisme, soit des bourgeois à un âge où il n'y a plus de bourgeois classiques, cultivés et conventionnels. Cette alternative, dont les deux termes sont également figés, est le résultat de la ghettoïsation des droites. Elles marinent dans leur jus. Alors que reste-t-il de la “nouvelle droite”?

 

Il reste sans doute quelques intellectuels de droite, qui se posent en anarchistes pour ne pas sombrer dans le dogmatisme, pour ne pas se laisser aveugler par les illusions. La réalité prosaïque, c'est qu'il n'y a dans le monde ni consolation ni rédemption. Mais, justement, ce n'est pas la tâche des intellectuels de droite de proposer de la consolation et d'annoncer une rédemption: au contraire, ils devraient se donner pour seule mission de déconstruire systématiquement toute idéologie de la consolation et de la rédemption. Travail difficile: en effet, c'est la meilleure façon de se faire mal aimer de tous; les uns détestent le “déconstructiviste” parce qu'il ne partage par leur illusion et n'apporte donc pas de quoi l'alimenter, de quoi entretenir la consolation; les autres le détestent tout autant parce qu'ils sont de gauche ou libéraux, qu'ils appartiennent à des espaces politico-philosophiques dans lesquels, forcément, le déconstructiviste n'aimera pas aller mariner: au contraire, il aimera les détricoter avec une égale délectation. Le véritable intellectuel de la nouvelle droite devrait être celui qui d'emblée se définit comme l'homme sans aucune illusion.

 

Nos sociétés souffrent d'une absence de créneau critique. Pourtant, aujourd'hui plus qu'auparavant, le terme “critique” est le vocable le plus prisé des hommes de gauche, au point qu'ils identifient les mots “gauche” et “critique”. L'école de Francfort, réservoir idéologique de la gauche, s'est effectivement auto-dénommée “critique”. Mais la gauche ne critique plus, elle accepte le statu quo et gère la crise. Automatiquement, dans un tel contexte, la pratique de la critique incombe alors à la droite. Pire, si un homme de gauche pratique encore la critique, il sera désormais traité de “fasciste” ou de “crypto-fasciste” par ses coreligionnaires (Botho Strauss, même Peter Handke, le cinéaste Fassbinder, le dramaturge Heiner Müller, héritier du théâtre de Brecht).

 

Pour nous, la démarche “critique”, c'est d'affronter les aléas du réel sans s'embarresser de tabous. L'actuelle “political correctness” instaure de nouveaux tabous et aboie son hostilité à l'égard de tout discours, de tout débat, et justifie ces tabous et ces aboiements au nom d'idées de gauche. Forcément, l'homme de droite sera celui qui s'opposera avec énergie à ces tabous et à ces aboiements: il se dira de droite parce que ces tabous et ces aboiements se disent de gauche. Il rejettera la “political correctness” parce qu'elle refuse tout discours et tout débat. Il restaurera le débat par le simple fait de prendre la parole de force, en avançant des arguments de signes nouveaux ou de signes contraires. Cet acte de prise de parole constitue une pluralisation volontaire du discours et place l'homme de droite  —nouveau contestataire radical—  au centre même de la vie sociale en danger de rigidification définitive. Il reconnaît alors que la confrontation des idées n'est possible que dans une société marquée du sceau du pluriel. L'intellectuel de droite prend dès lors position pour un ordre social où règne la liberté et où s'épanouit la diversité. Il défend cette liberté précisément parce que ses idées sont bannies et ostracisées dans une société qui devient de moins en moins plurielle et différenciée. Sa tâche consiste à réfléchir et à chercher. Car celui qui connaît les réponses avant de formuler ses questions, tombe dans le piège du totalitarisme.

 

Que reste-t-il de la “nouvelle droite”? Sans doute un homme de droite qui n'est plus un homme de droite au sens conventionnel du terme. Un homme qui part à l'aventure dans la vie ou dans les épaisses forêts de la pensée, car il sait que rien n'est définitivement sûr, que ce savoir de l'incertitude universelle fait de lui le meilleur critique des conventions figées de la société, mais d'une société dont il connaît les ressorts (organiques), parce qu'il en est issu.

 

Jürgen HATZENBICHLER.

(Correspondant de “Synergies Européennes” en Carinthie, responsable de la chronique politique de Junge Freiheit/Autriche; article paru dans Junge Freiheit, n°16/97; traduction et adaptation françaises de Robert Steuckers).

samedi, 01 novembre 2008

Atlas militaire et stratégique

atlas.jpg

Atlas militaire et stratégique :

Menaces, conflits et forces armées dans le monde

de François Heisbourg (Postface), Bruno Tertrais (Auteur), Alexandre Nicolas (Illustrations), Bruno Racine (Préface)
Présentation de l'éditeur
Le 11 septembre 2001 marque-t-il le "retour de la guerre", comme on a coutume de l'entendre? Certes, le nombre de conflits dans le monde a diminué depuis la fin de la guerre froide en 1991, mais avec les débats autour de la prolifération nucléaire, les dangers des armes de destruction massive, la montée en puissance du terrorisme et les guerres d'Afghanistan et d'Irak, les enjeux stratégiques et militaires sont revenus sur le devant de la scène, attisant les inquiétudes, déclenchant des polémiques, voire des crises internationales. La guerre a changé de nature et de forme. Redessinée par la mondialisation, elle s'est transformée, renouvelée, notamment au rythme des évolutions géopolitiques. De nouvelles puissances émergent (Chine, Inde), bouleversant l'équilibre international; d'autres cherchent à rétablir leur influence (Russie). De nouveaux champs de conflictualité s'ouvrent: l'espace, le cyberespace. Les menaces se diversifient, les acteurs se multiplient, les technologies progressent et les conflits "asymétriques", face à des groupes non étatiques, se font désormais de plus en plus nombreux. La guerre d'aujourd'hui n'a plus grand-chose à voir avec celle d'hier. Pour faire face aux nouveaux défis sécuritaires, les politiques de défense et les stratégies, notamment occidentales, doivent donc s'adapter. Pour la première fois, un atlas présente une expertise technique et géopolitique de ces questions, dressant l'état des lieux des forces, décodant les conflits en cours et augurant ceux à venir, tout en fournissant quelques notions essentielles de stratégie. Il aide ainsi à décrypter un monde sous tensions et à mieux lire l'actualité.

Biographie de l'auteur
Bruno Tertrais est maître de recherche à la FRS. Il a dirigé cet ouvrage écrit par 16 spécialistes. La Fondation pour la recherche stratégique (FRS) est un organisme privé, reconnu d'utilité publique depuis 1993, spécialisé dans les questions de sécurité internationale. Bruno Racine, le préfacier, est président de la Bibliothèque nationale de France. Il préside également le conseil d'administration de la FRS. François Heisbourg, le postfacier, est président de l'International Institute for Strategic Studies de Londres et du Centre de politique de sécurité de Genève. Alexandre Nicolas est cartographe-géomaticien indépendant et officier géographe.

  • Broché: 79 pages
  • Editeur : Editions Autrement (1 octobre 2008)
  • Collection : Atlas/Monde
  • Langue : Français
  • ISBN-10: 2746711206
  • ISBN-13: 978-2746711204

Pour définir les corps concrets de la souveraineté

main_tendue.jpg

Pour définir les corps concrets de la souveraineté

 

Il y a déjà longtemps, depuis des horizons différents, on a reconnu le fait que l'imaginaire moderne s'est constitué en bouleversant de fond en comble et en évidant radicalement le mode traditionnel de comprendre l'homme et sa place dans le monde. Selon ce mode traditionnel, l'homme tire ses qualités d'une appartenance à une communauté et les droits dont il dispose sont l'expression des statuts sociaux et des liens qui y correspondent.

 

Au contraire, pour l'imaginaire moderne, l'individu est par nature libre et auto-suffisant, avant même d'entretenir des relations sociales avec d'autres individus. Une telle (sur)valorisation de l'individu implique un rejet automatique de tous les fondements métaphysiques et religieux structurant l'ordre social et postule l'élimination implicite de tous les liens de dépendance à l'égard de pouvoirs personnels ou sociaux. C'est pour cette raison que la démocratie moderne, avant de représenter un certain régime politique, exprime surtout la force par laquelle se manifestent 1) l'exigence d'égalité des conditions et 2) la reconnaissance de cette égalité fondamentale pour tous les hommes.

 

Si tout cela constitue la conscience moderne telle qu'on la pressent encore aujourd'hui, quoique de façon moins vive, en revanche, on se rend parfaitement compte que l'imaginaire moderne a substitué au lien social l'idée d'un rapport juridique entre les hommes. De par cette substitution, l'individu peut entrer en rapport avec les autres seulement par le biais de lois ou d'un contrat juridiquement sanctionné. Ensuite vient l'“invention” de l'Etat, instance posée comme la représentante de la collectivité et conçue comme autorité abstraite et comme pouvoir impersonnel détenant le monopole légal de la violence. Le droit se pose alors comme le principe organisateur par lequel les individus singuliers entrent dans des rapports de réciprocité officiels, mais, simultanément, en dehors de tels rapports (juridiques), les individus n'entretiennent plus que des relations sociales désormais considérées comme dépourvues de significations et non sanctionnables normativement.

 

La “société des hommes”, en somme, devient une société exclusivement juridique, une société qui s'identifie uniquement à l'institution juridique, laquelle impose des interdits et fixe le rapport qui relie entre elles les volontés individuelles. L'individu moderne peut être entièrement libre, mais seulement à condition qu'il exerce sa liberté sur le modèle de la liberté juridique, c'est-à-dire une liberté d'utiliser dans l'abstrait toutes les normes juridiques. En revanche, il lui est interdit de modifier par la force les conditions matérielles dont il dépend, ce qui a pour effet pratique de l'empêcher d'utiliser réellement ce qui lui est autorisé formellement. Tel est le caractère inédit de la modernité. D'une part, la société n'existe plus officiellement que dans la trame des rapports qui se sont institués par le truchement du droit contractuel. D'autre part, l'égalité juridique ne concrétise plus que la seule parité formelle, mais permet que se reproduisent les disparités économiques et sociales, sous prétexte que celles-ci seraient générées par des rapports privés, dépourvus, en tant que tels, de pertinence juridique.

 

L'égalité moderne, en fait, ne considère les individus que sur le seul plan abstrait et jamais dans leurs déterminations concrètes et particulières. Cela veut dire que l'égalité face à la loi ne garantit pas l'égalité face au pouvoir de disposer des moyens nécessaires à produire des ressources matérielles. Les règles juridiques qui fondent la citoyenneté politique sont  —comme on l'a relevé maintes fois—  des règles exclusivement instrumentales qui ne distribuent nullement des ressources mais définissent seulement des modalités d'action mises en théorie à la disposition de chacun, pour réaliser ses propres fins privées. Cette “systématisation” théorique et fonctionnelle 1) occulte les profondes contradictions qui affectent la démocratie moderne (surtout la contradiction entre son aspiration à l'égalité et le maintien effectif d'une structure sociale qui produit et reproduit continuellement des inégalités) et 2) cache ce processus pervers qui est à l'œuvre et où l'égalité formelle fait continuellement émerger des inégalités substantielles. Conséquence: l'“Etat de droit” est fortement mis en crise, de même que les formes du droit qui corrobore l'égalité et que l'équation sujet égal = droits égaux.

 

de l'égalité formelle à l'égalité substantielle par la participation

 

Dans un tel cadre, l'égalité substantielle trouve toutes les raisons qui lui permettent de se poser comme la finalité de l'ordre juridique et de réclamer la participation égale de tous dans la production des lois. Le formalisme de l'égalité doit dès lors être dépassé et complété par la pratique de la participation de tous aux décisions, de façon 1) à ce que cette participation prenne concrètement le relais de l'idée d'égalité devant la loi et 2) à introduire dans la pratique la participation égale de tous à la production des normes. On ne s'étonnera pas du fait que le problème de la citoyenneté  —et des prérogatives et des contenus qu'elle implique—  est aujourd'hui prêt à exploser et à libérer toutes sortes de tensions. Pour éviter cette explosion, on prétend que la citoyenneté-égalité doit se muer en citoyenneté-participation, une participation directe à la formation de la volonté générale. Parce qu'il est nécessaire que tous se voient attribuer des ressources et des biens nécessaires à leur auto-reproduction, on en arrivera obligatoirement au passage d'une citoyenneté politique à une citoyenneté économique et sociale. Mais seule une théorie de la démocratie-participation permettra aux citoyens d'élaborer et de choisir des fins communes, ce qui, en fait, pourra instituer une juste articulation entre droit et politique ainsi qu'entre droit et justice sociale.

 

Mais est-ce trop demander à ce droit-là, qui n'a jamais réussi qu'à assécher la démocratie, de se dépasser lui-même? Peut-être. Mais nous ne saurions négliger aucune tentative de promouvoir une nouvelle vision de la démocratie, c'est-à-dire une démocratie capable de faire passer la souveraineté du peuple (?) de la dimension abstraite, dans laquelle elle est aujourd'hui confinée, à une “carnalité” citoyenne, qui tienne pleinement compte des spécificités des hommes et de leur concrétude existentielle. Si l'on se souvient brièvement de l'histoire de la souveraineté à l'époque moderne, on constatera qu'elle s'est déployée en deux séquences: elle a d'abord placé le détenteur de la souveraineté dans la personne du Prince, ensuite dans le Peuple. Et a assuré ainsi le passage d'une formulation personnelle et patrimoniale de la souveraineté, typique de l'autorité princière du XVième siècle, à une formulation impersonnelle, inaugurée à la fin du XVIIIième siècle par la révolution française. Mais s'il est vrai qu'en démocratie le peuple n'obéit plus à un roi, il est tout aussi vrai de dire que c'est seulement par un artifice rhétorique qu'en démocratie le peuple obéit à lui-même en obéissant aux lois.

 

En réalité, l'élément “peuple” introduit dans l'histoire de la souveraineté l'autonomie de la loi dans l'Etat. L'Etat justifie son existence par le “peuple” et, par la loi, il justifie l'autorité qu'il exerce sur ce même peuple. Dans un tel contexte, le “corps” par lequel vit la souveraineté, n'est plus celui du roi, mais n'est pas encore celui des citoyens. Formellement, l'Etat est la traduction juridique du peuple, mais cette entité abstraite qu'est le peuple, à ce niveau-ci, se matérialise dans des groupes restreints, des pouvoirs privés, qui confisquent de fait cette souveraineté au peuple, qui est théoriquement son seul dépositaire.

 

citoyenneté effective ou barbarie

 

IL faut dès lors amorcer une nouvelle séquence dans l'histoire de la souveraineté et trouver une nouvelle “figure”, dans laquelle la titularité personnelle et patrimoniale puisse s'incarner, cette fois dans des corps concrets de citoyens. Certes, bon nombre de difficultés surviennent quand on formule un projet de cette sorte. La marge d'aléas est grande, c'est certain, mais si les technocrates voulaient bien investir dans un tel projet une fraction minimale des énergies et du temps qu'ils consacrent à inventer des réformes mortes-nées, ils trouveraient très probablement  —et très vite—  des solutions acceptables aux multiples problèmes que pose la mise en œuvre d'une démocratie participative et substantielle. Il y a urgence. Nous sommes à la croisée des chemins et nous devons choisir: ou bien nous implantons rapidement une citoyenneté effective ou nous sombrons dans la barbarie.

 

Giuliano BORGHI.

(texte paru dans Pagine Libere, n°10/1995; trad. franç. : Robert Steuckers).

jeudi, 30 octobre 2008

Citation de Hubert Lagardelle

b7a0_1_sbl.jpg

L'utopie de la démocratie

"L'utopie de la démocratie a été de dépouiller l'individu de ses qualités sensibles, de le réduire à l'état abstrait de citoyen.  De l'homme concret de chair et d'os, qui a un métier, un milieu, une personnalité, elle a fait un être irréel, un personnage allégorique en dehors du temps et de l'espace, et le même à tous les étages de la société.
Ni ouvrier ni paysan, ni industriel ni commerçant, ni du Nord ni du Midi, ni savant ni ignorant : un homme théorique."

Hubert Lagardelle, janvier 1931.

mardi, 28 octobre 2008

Etat national et subsidiarité

minerva-getty.jpg

Etat national et subsidiarité

 

 

par Germanico GALLERANI

 

Il y a longtemps, à la fin de l'année 1947, Carl Schmitt, le célèbre philosophe allemand du politique, avait clairement pris conscience que l'Etat national cheminait désormais vers un déclin inexorable. La forme “Etat” que Schmitt voyait décliner était celle qui avait caractérisé la grande période historique qui va de Hobbes à Hegel, période à laquelle on peut lier le concept d'“Etat”.

 

Aujourd'hui, si l'on observe les multiples mouvements qui ébranlent les Etats nationaux, on est bien contraint de dire que ces mouvements, dans ce qu'ils ont d'essentiel, s'expriment en dehors du cadre national. L'Etat national, sur le plan intérieur, se lézarde fortement, à cause de l'apparition de nouveaux mouvements sociaux et de la persistance de régionalismes et d'autonomismes qu'il ne réussit plus à intégrer; à tout cela s'ajoutent une prolifération de réseaux associatifs et l'affirmation de nouvelles formes communautaires. C'est précisément ainsi que se reconstruisent les structures intermédiaires de socialité que l'Etat national avait détruites au cours de son processus d'édification. Aujourd'hui, ces structures détruites se reconstituent, reviennent à l'avant-plan et se tournent contre la structure centralisée qu'est l'Etat national. C'est ainsi que s'approfondit sans cesse le fossé qui sépare la société civile de la classe politique et qui a généré le vide de sens dont souffrent les institutions. C'est ainsi également que les demandes les plus intelligentes et les plus conscientes de participation à la vie politique ont été déviées vers d'autres «mondes vitaux», étrangers à l'Etat.

 

Sur le plan extérieur, l'Etat national est en crise parce qu'il se constitue des bureaucraties intergouvernementales, parce qu'il se forme des institutions supranationales, et parce que l'influence des appareils techno-scientifiques internationaux devient de plus en plus forte, de même que les pressions des groupes transnationaux. En somme, l'Etat national en arrive à une situation telle, qu'il est de fait dépassé, du moins pour une large part de ses prérogatives. A cela s'ajoute que l'expansion mondiale du marché, sous l'influence des multinationales, du jeu des opérations boursières, du mouvement financier continu, de la bataille financière artificielle qui se livre sans cesse, extravertit les économies nationales au détriment des marchés internes et induit ce phénomène d'«occupation industrielle», déjà décrit par Carl Schmitt en son temps, une «occupation industrielle» qui consiste à prendre possession de la totalité des moyens de production, selon l'adage cuius industria, eius regio.

 

Contestée à la base comme au sommet, la forme «Etat national» n'est plus capable d'assurer une fonction intégratrice ni de garantir la réglementation des rapports entre une “société politique”, critiquée de toutes parts, et une “société civile”, en voie de fragmentation. La forme «Etat national» semble donc avoir épuisé ses potentialités. Mais si la forme «Etat national», centralisatrice, totalisante, omnia facens,  est véritablement en train de mourir, le «Principe-Etat», lui, en revanche, est toujours bien vivant; c'est ce Principe cardinal du politique qui permet aux choses de tenir, de rester en place, de se maintenir debout (stare),  qui confère stabilité et durée à un ensemble d'éléments qui, autrement, subiraient la dispersion centrifuge.

 

L'Etat, entendu comme principe politique se situant au-delà des particularités, confère totalité  et unité  aux multiples segments dont se compose la société nationale; mais cet Etat n'est pas lié à une forme déterminée une fois pour toutes. Ce n'est pas la société qui confère unité  à l'Etat, mais c'est le principe de pouvoir et de souveraineté, qu'incarne l'Etat, qui rend une  la société nationale. Le Principe-Etat, en somme, se place, dans son essence, sous le signe de l'unité des contraires, où l'unité n'agit pas selon un mode destructeur ou niveleur, en d'autres mots, contre  la multiplicité qui constitue la société.

 

En conséquence, l'Etat est toujours un, même quand sa forme, au lieu de s'inspirer d'un critère d'unitarisme rigide et mécanique, se moule sur une idée d'unité organique, composite, approuvant les autonomies, les décentralisations et la pluralité, en d'autres mots, respectant et reflétant ce qui est la structure naturelle de la société des hommes.

 

Que des structures intermédiaires de socialité se reforment, prennent corps à l'intérieur même de l'Etat national, que des «mondes vitaux» se meuvent dans des directions différentes par rapport à la collectivité, c'est désormais un fait qui nous interpelle dramatiquement: en effet, ce sont là des questions qui ne sont plus évacuables; est-il encore possible de réintégrer en une unité des phénomènes sociaux qui, tout en étant des éléments de vitalité positive, fonctionnent pour le moment dans le sens d'une désarticulation du cadre formel unitaire de l'Etat et remettent en cause la possibilité même d'un consensus civil. Est-il dès lors possible de disposer d'un principe,  simultanément capable de recomposer le tissu des divers autonomismes, en les confinant dans l'espace qui est légitimement leur, et de les articuler dans une unité?  Il nous semble qu'un tel principe,   —qui serait en mesure de restituer au monde social et politique ordre et intelligibilité, dans l'attente que se profile une nouvelle forme-Etat—  pourrait se retrouver dans l'idée de subsidiarité,  remise sur le tapis aujourd'hui par la philosophie sociale chrétienne.

 

Le principe de subsidiarité  est utilisé pour désigner les sociétés articulées, où l'ordre résulte d'un rapport organique entre personnes singulières, entre sociétés mineures et sociétés majeures, d'un rapport centré sur un lien d'aide, sur l'idée de subsidium afferre,  qui ne doit jamais se transformer en absorption ou en élimination de la personne ou de la société aidées. Cela signifie que la société aidante doit s'auto-limiter dans son action, de façon à ne pas envahir la sphère de compétence d'autrui, comme il n'est pas licite d'enlever aux individus ce que ces individus sont capables d'accomplir par leurs propres moyens; une tel acte de confiscation de compétences et de droits représente une entorse gravissime à l'encontre de tout ordre social juste: on ne transfère pas à une société majeure, de grade plus élevé, ce que des sociétés mineures et de grade inférieur sont en mesure d'accomplir de leurs propres forces. Trouvant son origine dans la détermination des fonctions de l'Etat et des limites de son action face aux individus et aux sociétés mineures, le principe de subsidiarité, dans sa formulation entière, vise à dépasser toutes les formes d'individualisme et indique le chemin à suivre pour atteindre un système harmonieux de rapports entre les individus et les communautés existantes et entre les diverses communautés entre elles. Ce principe, en maintenant des espaces politiques décentralisés et des zones de décision jouissant d'une autonomie relative, vise à conserver unis  les multiples segments de la société.

 

Il nous semble utile de rappeler que le principe de subsidiarité ne se pense pas sur le mode de l'abstraction. Au contraire, il se veut une norme spéciale qui, dans le «concret», régle les compétences des personnes singulières et des diverses sociétés naturelles et politiques, et détermine les devoirs qu'ont ces sociétés vis-à-vis de leurs membres. L'organicité de la polis,  qu'implique le principe de subsidiarité, anticipe une forme d'Etat comprenant des fonctions multiples qui conservent leurs caractères spécifiques et une relative autonomie, en se coordonnant, en s'intégrant réciproquement, en convergeant vers une unité supérieure qui ne cesse jamais d'être pré-supposée au niveau de l'idéal. Il y a donc autant d'unité que de multiplicité, il y a gradualité et articulation, mais jamais ce binôme entre un centre et une masse qui lui est soumise, qu'il nivelle. Le principe de subsidiarité, comme critère de la “totalité” sociale, semble être sur la même longueur d'onde que le principe d'unité qui fonde le concept d'Etat.

 

Mais, avant toute chose, le principe de subsidiarité assure que l'autonomisme relatif est un élément essentiel dans tout système organique, au même titre qu'une décentralisation relative; celle-ci pourra être d'autant plus poussée que le centre unifiant saura exprimer unité, souveraineté et autorité.

 

Germanico GALLERANI.

(article issu de Pagine Libere di Azione sindacale, n°2/1993, dossier spécial: «Reinventare la democrazia»; adresse: Via Principe Amedeo 42, I-00.185 Roma; abonnement annuel (six numéros): 40.000 Lire; traduction française: Robert Steuckers).

lundi, 27 octobre 2008

La primera etapa de J. Donoso Cortés

 

JuanDonosoCortez.jpg

De la poesía a la política. La primera etapa de Juan Donoso Cortés

por Gonzalo Larios

El objetivo es señalar los antecedentes que conforman su pensamiento político durante los años previos a su conocido compromiso con la corriente del liberalismo doctrinario. Corresponde el período que ahora nos ocupa al fin de sus estudios universitarios, a su incursión en el ambiente literario y a su incorporación definitiva al mundo de la política. Constituye en sí un peiodo, aunque breve, porque considero que merece la pena distinguirlo dentro de su ideario de juventud, que comúnmente se ha englobado en un todo liberal doctrinario que no siempre corresponde, como en este caso, a la realidad de su pensamiento.

El entorno de su decisión de participar en las lides políticas está marcado por un acontecimiento de la mayor trascendencia para el futuro institucional de la España contemporánea. Me refiero a la cuestión sucesoria que se planteó ante el restablecimiento en 1830 de la pragmática sanción que restauró la sucesión al trono por línea directa, aunque fuera femenina. Su posterior derogación, en septiembre de 1832, y su definitivo restablecimiento, a consecuencia del golpe de Estado ocurrido días después de la anterior revocación, terminan por significar el afianzamiento del régimen político liberal en España.

Es presumible la participación directa de Donoso Cortés en el mencionado golpe acontecido en La Granja [1] . Este fue organizado por sectores de la nobleza, con el apoyo de parte de la alta burguesía liberal. Entre sus ejecutores destacaron el marqués de Miraflores y los condes de Parcent, Puñonrostro y Cartagena, quienes contaron con la activa participación de los cuñados de Donoso, Juan José y Rufino García Carrasco. Sobre todos ellos hay que sumar el apoyo de María Cristina, esposa del, por entonces, moribundo Fernando VII, y además el de la persuasiva Luisa Carlota, hermana de María Cristina y esposa del infante Francisco de Paula, hermano menor del rey y del infante don Carlos. La primera sellaba de esta manera su alianza con el liberalismo, con el objeto de lograr la sucesión al trono de su hija Isabel. La influencia de la segunda, si bien no del todo aclarada, parece decisiva en el súbito cambio de opinión del monarca y en la destitución del Ministerio, asuntos vitales para el éxito del golpe [2] .

La situación política que germina en los sucesos de La Granja, pese a la mejoría temporal de la salud de Fernando VII, quien no fallece sino un año después, supone, en definitiva, el fin del Antiguo Régimen, a través del establecimiento de la Regencia de María Cristina, en espera de la mayoría de edad de su hija Isabel. En lo que corría de siglo, era éste el tercer intento liberal en España por acabar con el Antiguo Régimen. Fue el que finalmente logró su objetivo, no sin tener que resolver por las armas el problema sucesorio que, desde sus orígenes, había planteado el carlismo.

Donoso Cortés se incorpora a la política con decisión y compromiso, en torno a estos significativos "sucesos de La Granja"; reconozcamos, pues, cuál fue, entonces, su  primer aporte intelectual en aquella hora de transición de la monarquía y del fundamento de su soberanía.

Romanticismo

Hemos anotado el ambiente poético y literario en el que se desenvuelve Donoso en su juventud. Ha recibido su formación universitaria en centros pre-románticos como Salamanca y Sevilla. Paralelamente, trató de cerca al poeta Quintana. En todo ello, se puede perfilar el tránsito del sentimiento ilustrado al romántico, fase que se completa en la generación del propio Donoso, la que ha nacido en el siglo XIX. No es fácil precisar el concepto de romanticismo o delimitarlo a una esfera literaria o estética, mucho menos a una política. Parece más bien una forma de enfrentar la vida, un estilo de comportamiento, una acusada mentalidad, que en un afán superador del racionalismo dieciochesco, tiende a valorar desmesuradamente el sentimiento, los instintos, el mero impulso. Así, la actitud propia del romántico es la pasión, el arrebato ligero e idealista que lo mueve a despreciar el análisis racional por considerarlo frío, impersonal, carente de vida. La valoración de la libertad y el sentimiento trágico de la vida, son otras dos características comunes al espíritu romántico, que bien pueden ayudar a entender algunas actitudes donosianas.

Donoso formó parte y dio sus primeros pasos intelectuales junto a la primera generación del romanticismo español. La historiadora Iris M. Zavala lo incluye, en sus inicios, dentro del romanticismo progresista, que abandona durante la decada de los años treinta, para, en la siguiente, influir como pionero del romanticismo conservador junto a Balmes. Para ella, ambos pensadores alimentaron la defensa del altar y del trono, el retorno a las baladas y leyendas populares y la importancia de la religión ante los "extravíos" románticos [3] . Incluso hace hincapié en el ataque donosiano a la soberanía popular -cuando la calificó de absurda, imposible, y atea-, comparándolo con el significado salvífico que ésta había tenido para Larra y Espronceda. Esta distinción ayuda, en opinión de Zavala, a diferenciar ambas corrientes románticas. Lista, Martínez de la Rosa, Alcalá Galiano y el duque de Rivas, evolucionaron hacia esta tendencia literaria conservadora, que contó con exponentes de la talla de Nicomedes Pastor Díaz, Gabriel García Tassara y Joaquín Francisco Pacheco, los tres por entonces, amigos de Donoso. Más tarde incluye en esta corriente a Zorrilla, Navarro Villoslada y José María Quadrado. Si bien no todos compartieron los duros juicios de Donoso sobre la soberanía popular, para Zavala los uniría su común espíritu conservador. Literatura y política tienen en aquella época íntima conexión, son los años en que abunda la figura del político-literato, pero debemos cuidarnos de no diferenciarlas como corresponde.

Con peculiariedad, el estilo y el pensamiento político de Donoso Cortés, tanto como su carácter personal, responden en medida importante a este espíritu romántico. De entre los pocos versos que se conservan, La venida de Cristina  refleja su ánimo romántico ante la llegada de la bella joven y "las felices bodas con el Rey nuestro señor" [4] . Este poema es de felicidad y optimismo ante las perspectivas del nuevo matrimonio Real. Junto a la reina, ve venir la paz, "por la esperanza y el amor llevadas" [5] . No son versos políticos, pero no dejan de reflejar un profundo sentimiento de admiración y respeto por la institución monárquica, incluso un inesperado entusiasmo por lo que podría llegar a suponer para la frustración de la sucesión de don Carlos. Esta inicial simpatía poética llegó a plasmarse, respecto a María Cristina, a lo largo de una vida a su servicio, en una inquebrantable fidelidad.

El régimen liberal que encabeza María Cristina cuenta en Donoso con una de sus principales figuras de apoyo, especialmente a  través de la prensa. Luego, en 1840, tras la caída de la Reina Gobernadora, ésta le solicitará su colaboración personal durante su exilio en Francia.

Es muy probable que Donoso en su primera estancia en Madrid, hacia 1828, recibiera a través de Agustín Durán la influencia del romanticismo schlegeliano, es decir, católico y conservador. De allí pueden provenir sus primeros contactos con las obras de Chateaubriand, M. de Staël y Scott. En su discurso de Cáceres al año siguiente hay palabras de elogio a Durán, cuya posición medievalista debe haber contrarrestado, al menos en parte, los tópicos ilustrados que habría recibido de Quintana. Hacia 1837-38, ya desilusinado del doctrinarismo, se vuelven a hacer notar en sus escritos estas lecturas románticas de matiz conservador y cristiano.

Historia y revolución

De los primeros escritos, generalmente cartas personales de 1828-29, destaca la alta consideración de sí mismo, y la gran estima intelectual que ya le demuestran sus compañeros de estudios. El joven extremeño demuestra en ellas poseer un considerable conocimiento de las tendencias filosóficas del momento, dejándose ver como un liberal optimista, confiado de la trascendencia positiva de los tiempos que corren [6] .

Su Discurso de Apertura en el Colegio de Cáceres (1829), donde apoyado por Quintana comienza a ejercer, no del todo convencido, una cátedra, refleja su fuerte formación ilustrada. Prueba de ello es que la clasificación de la historia que allí utilizó responde al tópico racionalista y liberal apologético en su valoración de la Grecia clásica; recoge asímismo de la Ilustración la despreciativa valoración de la Edad Media como "siglos de barbarie" [7] , y una actitud de sincera admiración  hacia el Renacimiento en las figuras de Dante y Petrarca. No obstante, el joven profesor, nada original hasta el momento, llega a afirmar que el surgimiento de la filosofía de las sensaciones, que origina Bacon en la Inglaterra del siglo XVI y que desarrollaron Locke, Condillac y Helvecio, determinó que desde entonces en Europa todo sea "disputa y agitación" [8] . Esta interpretación histórica la completa en el escrito que se le atribuye y que lleva por título Exposición a Fernando VII en favor de Juan José Carrasco, fechada, sin mayor precisión, entre los años 1831 y 1832. Allí Donoso agrega a su análisis que desde aquel instante de disputa y agitación, fue cuando el mundo entró en un caos:

"Los filósofos quisieron explicar al hombre y constituir la sociedad, y la sociedad y el hombre se han aniquilado entre sus manos" [9] .

Lo explica señalando que fue a partir de entonces cuando se introdujo el germen de la duda en el seno de los pueblos y, con él, el de las revoluciones. Una sociedad, dice Donoso, no puede existir sin una base común de creencia y el principio filosófico, que no es otro  que la duda que origina la disputa, ha combatido el principio religioso, que es, dentro de su ideario, ya constitutivo y civilizador de los pueblos europeos [10] . De esta lucha entre ambos principios, en la que el religioso reúne para conservar y el filosófico individualiza para destruir, han nacido, en su opinión, todos los males de Europa.

En esta interpretación, la Reforma fue el primer resultado de este enfrentamiento, aunque el triunfo de la filosofía no llegó hasta el siglo XVIII, cuando fue capaz de engendrar la revolución que "conduce a la religión al sepulcro" [11] . La sociedad ha perdido, desde entonces, su base común y no logra encontrar un principio que logre serenarla. El ejemplo lo tiene en Francia, en donde ni la República, ni el Imperio, ni la Restauración, ni siquiera aun las convulsiones recientes de julio de 1830, han encontrado un principio que logre dominar la disolución. Esta la explica afirmando que la derrota del principio religioso en Francia lleva consigo tres principios destructores: la destrucción de la unidad de creencia, la destrucción de costumbres y la destrucción del gobierno. Sin la unidad de creencia la sociedad se disuelve, ya que desaparece el principio de unidad y, en su lugar, se entroniza el espíritu de individualización que se apoderará de las masas; la destrucción de las costumbres es fruto de la corrupción que ha invadido todas las clases sociales; un pueblo corrupto, en consecuencia, no puede darse instituciones ya que aparece incapaz de generar estabilidad sin costumbres, o dicho de otra modo, la falta de una creencia disuelve las costumbres y las pasiones no son capaces de organizar instituciones. El problema está en que este desorden social provoca en la práctica:

"la idea anárquica de que todo puede discutirse, de que todos los principios pueden ser falsos si los analiza la razón y de que nada debe respetarse sin haber sufrido el examen de las masas" [12] .

En este temprano análisis encontramos ya el enfrentamiento "revolución contra religión", clave en su pensamiento posterior. El afirmar el triunfo de la primera sobre la segunda lleva consigo la denuncia de las consecuencias, inevitablemente anárquicas, que la sociedad ha de seguir: "si en este pueblo se discuten las grandes teorías de los poderes, si se analizan todas las formas de gobierno, todas las maneras de existencia política y social, el pueblo, que nada respeta, porque nada cree, y nada cree, porque no tiene religión, estará siempre en lucha con el Gobierno que le rige; si la imprenta periódica es la arena donde se combaten todos los principios, el pueblo es el juez que debe decidir sin apelación de la victoria; es decir, que un pueblo que sólo se gobierna por pasiones es llamado a decidir como soberano lo que sólo debiera decidir el tribunal de la conciencia y la razón; cuando el mundo moral ha perdido en este grado su nivel, cuando se han quebrantado de esta manera todas las relaciones de las cosas, cuando se ha organizado de esta manera el desorden en el seno de la sociedad, el Gobierno es una ilusión, la obediencia es un engaño y la sociedad es un abismo. Tal es el estado de la Francia: la discusión aniquiló la religión; la discusión ha aniquilado los Gobiernos" [13] .

Donoso liga directamente el efecto disolvente de la revolución a la acometida de ésta en contra de la religión; la discusión, en una sociedad descreida, en definitiva, es el germen de la anarquía social. Está  aquí presente su crítica a la soberanía popular, en la entrega a discusión de los principios fundamentales de la sociedad a una masa que, sin religión, al perder las costumbres, se regirá por la pasión. En este sentido, la destrucción del principio religioso, en su pensamiento, a diferencia de los filósofos ilustrados, significa una pérdida de análisis racional para hacer frente a los problemas políticos, ya que al final, se someterían únicamente a la resolución "sin apelación" de un pueblo que considera, por descreído, sin costumbres y corrupto. Razón y fe, aparecen ya indisolublemente ligadas en el pensamiento del joven Donoso Cortés. El divorcio de ambas es ya, para él, precisamente la causa de las convulsiones de Francia y el anuncio de catástrofes en toda Europa.

Toda esta interpretación de la historia occidental supone un anticipo a tesis fundamentales de su polémico.Ensayo.(1851) La oposición religión católica-filosofía racionalista esta esbozada en estos poco estudiados escritos, como también su teoría de las revoluciones y, especialmente, la consideración negativa de toda discusión desvinculada de un principio que la ordene. Este Donoso, ciertamente, le debe aún mucho al liberalismo, pero su supuesto racionalismo inicial sufre altos y bajos como lo prueba su siguiente afirmación: "la filosofía por sí sola nada puede... de su divorcio con la religión han nacido todos los males que pesan sobre la Europa" [14] .

El Donoso maduro, católico, enemigo innato de la revolución; aquél que percibe tras toda gran cuestión política un asunto teológico, se anuncia a ratos, pero con inusitada precisión.

Hay quienes han dudado de la sinceridad de estas tempranas afirmaciones donosianas debido al carácter de los escritos en que están incluidas, teniendo en cuenta de que están dirigidos al rey. Sin embargo, la conformidad de ellas con sus posteriores ideas es en muchos casos tan estrecha que, en mi opinión, las liberan, en su mayor parte, de una justificada sospecha de hipocresía.

Continuando con su rápida revisión de la historia, surgen algunas contradicciones. Si el siglo XVI había dado origen a las disputas morales con las ya señaladas repercusiones en la sociedad, el siglo XVIII, que por sus "profundos filósofos y celebres artistas" [15]  lo tenía todo para ser el siglo de las luces fue, no obstante, el de las revoluciones. En este juicio del siglo que lo precedió, combina el reconocimiento de la magnitud de los pensadores que lo moldearon con los resultados sociales que generarían estas ideas en la práctica. Su viraje al interpretar de forma positiva la historia de lo que va corrido de su siglo vuelve a recordar su formación ilustrada y, fruto de ella, su íntima convicción optimista ante el presente y futuro de su siglo. El XIX deberá ser el siglo de las luces, "en el que se encuentran bastante discutidas todas las opiniones que dividieron a los filósofos y que abrazaron las escuelas" [16] . Es el momento, con todo el saber del pasado y la experiencia del presente, de avanzar con paso seguro y esperanzador en la carrera de la ilustración. Nuestro autor demuestra su juvenil entusiasmo ante el momento histórico que vive. Las disputas, no sabemos por qué razón, las siente superadas, como si se tratara de una lección asumida. No cabe duda, sin embargo que en la discusión, ajena a una creencia común, está considerando un aspecto negativo, disolvente de la sociedad, tesis que desarrolló con profundidad durante sus años de madurez [17] .

Su interpretación de la historia es la que por entonces está en boga y que construyó la Ilustración, su juicio negativo del enfrentamiento a partir del siglo XVI de filosofía y religión, rompe el tópico racionalista, anuncia al futuro Donoso, pero no termina de enlazar con el resto de su visión. Nuestro joven intelectual apenas sobrepasa por entonces los veinte años de edad y, como veremos, sus ideas están en continuo desarrollo, no exentas de revisión a través de sus lecturas y en torno a los avatares políticos y sociales de su época. José Alvarez Junco ha creido ver, en estos primeros escritos donosianos, rasgos de un "teocratismo cristiano" al cual "regresará"  tras las revoluciones del 48 [18] .

Las revoluciones, cuyo estudio ya considera de fundamental importancia, son las que establecen el eslabón de los distintos períodos históricos, constituyen la marcha "constante y progresiva" [19]  de los siglos; si bien, en carta a su amigo Gallardo, consideraba que aunque el espíritu humano avance, puede también encontrar retrocesos en su marcha [20] . Este avance progresivo de la historia es una idea muy propia del espíritu decimonónico, del cual Donoso no pretende prescindir, y contrasta con el tono pesimista que se deja ver en su prólogo a El cerco de Zamora (1833), en donde vuelve a perfilarse el último Donoso; en este caso diríamos el de siempre, porque advierte de las consecuencias catastróficas que la supresión de las jerarquías sociales anuncian a la sociedad [21] . Este punto, que ya por entonces llama a meditar, es una de sus constantes: Donoso fue siempre anti-igualitario, porque percibió en las jerarquías una resistencia natural al poder absoluto, a la omnipotencia social  como luego lo denominaría.

La duda ha sido el sepulcro de la razón y de la fe, pero esta situación anárquica, que a través de la revolución Francia extiende por Europa, encuentra en España un duro escollo. Donoso considera que, en su nación, el principio religioso se respeta, de lo que extrae dos inmediatas consecuencias: el trono tiene aun allí hondas raíces y las costumbres sociales, que sobreviven por la ausencia de principios destructores y la presencia del principio religioso, "hacen imposible en España una revolución" [22] . Así, la religión está reconocida ya en su primer pensamiento como requisito de la institución monárquica y  fundamento básico de las costumbres sociales del pueblo español.

Donoso no se detiene en señalar el porqué, a diferencia del caso francés, en España no se produjo el divorcio entre filosofía y religión. Siguiendo la lógica de su interpretación, deberíamos señalar que fue porque, en la península, la razón siguió caminando junto a la fe, ya que las consecuencias que él mismo describiera de la filosofía sensualista y la Reforma no lograron penetrar en el ambiente intelectual español sino varios siglos después, viéndose con ello retrasada la aparición de sus efectos. Fue precisamente la monarquía española la que tomó en sus manos la defensa de la religión católica y colaboró activamente en la llamada Contra-Reforma. Sin embargo, Donoso desconocía por completo, al menos durante su juventud, y muy probablemente por su formación liberal ilustrada, el pensamiento escolástico español. No logra por entonces despegarse de la mentalidad de su tiempo para explicar lo que ya comienza a percibir.

Monarquía y propietarios

Para nuestro pensador los reyes deben depender del "gran movimiento social que se verifica en Europa"  y "no de la voluntad particular de un individuo cualquiera" [23] . El primero es el liberalismo, la segunda, el absolutismo. Sin embargo, hemos visto que Donoso, si es liberal por formación, es conservador por instinto y procedencia. Al liberalismo querrá despojarlo de su espíritu revolucionario, o como lo llamará después, de su ánimo disolvente de la sociedad. Aun si en España germinaran las causas de la revolución, ésta no encontraría el apoyo de los propietarios, quienes por su instinto de conservación tienden a proteger sus intereses. Ellos saben que las revoluciones promovidas por las masas estan escritas con la sangre de los propietarios, pueden "todavía consultar los sepulcros de la revolución francesa y no encontrarán sino los cadáveres de los que tuvieron" [24] .  Esta relación antagónica revolución-propietarios es característica del liberalismo conservador, que surge una vez producida la revolución y trastocada la propiedad. Antes, como sugieren estos escritos del extremeño, parece señal del más mezquino inmovilismo, aquél que sacrifica toda dinámica política a la mera protección de su peculio. Hay, no obstante, que considerar que Donoso, en la cita anterior, está escribiendo a nombre de su cuñado y nada menos que al rey Fernando VII, y, evidentemente, no es el momento de sugerir cambios, ni de hacer críticas al absolutismo. Lo que pretende decir entonces Donoso, es que no se ha de buscar revolucionarios ni conspiradores en los propietarios, entre los que evidentemente estaría su cuñado. Finalizado el golpe de Estado de 1832, nuestro pensador insistirá en esta tesis, dividiendo a los españoles en los partidos"de la legitimidad y la usurpación" [25] . El primero incluye a todo el sector liberal que se ha hecho con el poder, precisamente un amplio grupo de la aristocracia apoyada por la alta burguesía, que más tarde llamará aristocracias legítimas, y que no son otras que las clases propietarias. Por otra parte, los usurpadores, son el bando carlista, donde deben encontrarse los conspiradores y revolucionarios, curiosamente el sector popular y rural, que políticamente califica de inmovilista, por ignorar la gran transformación que se implementa en Europa y pretender, en cambio, retrotraernos al siglo XII.

Donoso proviene de una familia de propietarios terratenientes. Sin embargo, no parece mostrar intereses económicos, ni siquiera en éstos sus comienzos, más allá de los que le permitieran mantener una vida con la dignidad a la que parece acostumbrado. Por otra parte, obtiene el rápido reconocimiento público de sus personales capacidades intelectuales, de lo que sí se muestra orgulloso en esta etapa. Su carrera de funcionario, y el formar parte del selecto ambiente político e intelectual de Madrid, lo mantienen más que satisfecho. Su principal afán será influir a través de sus ideas en la política española e incluso europea. Siempre mantuvo cierto desdén hacia lo material, atributo más propio del ambiente romántico que de su formación liberal.

Busca el extremeño en estos años de transición la liquidación del absolutismo, objetivo que mientras viva Fernando VII no corresponde plantear sino señalando que el rey debe depender del "gran movimiento social que se verifica en Europa", evitando los efectos perturbadores de la revolución. Donoso, como hombre de su siglo, acepta la corriente de su tiempo, un liberalismo superador del anquilosado absolutismo, y en este sentido progresista. Su espíritu se percata inmediatamente de la necesidad de controlar los efectos disociadores de la revolución. Si bien señala las causas de éstos en la pérdida del principio religioso, no alcanza aún a recomendar remedios, sino que trata de hacer ver, poco a poco, a la Iglesia y la religión no como un enemigo a destruir por el liberalismo, sino como una institución que ha sido garantía de libertades y de progreso. Así, en su análisis histórico, también pretende superar una visión negativa de la labor de la Iglesia en relación con el progreso de la economía, al ver en las Cruzadas el germen que introduce el entusiasmo y las virtudes, no por sus resultados políticos o por su carácter de empresa común, que obliga a descuidar la familia y la propiedad, incluso a disponer de la vida por un supuesto ideal religioso, sino porque las Cruzadas generaron un desarrollo del comercio que, a su juicio, ha significado un primer paso hacia la ilustración. El beneficio de las Cruzadas, mediante las cuales sorprende la unidad espiritual de Europa, está, para Donoso, en que permitieron el desarrollo comercial con Oriente y entre los mismos europeos [26] . De esta manera, la religión cristiana ha constituido y civilizado a los pueblos, y su mérito no es otro que el de haber dado impulso al desarrollo comercial. Pareciera querer hacer ver a quienes se rigen por intereses ajenos a la religión que la Iglesia no es una institución negativa, sino que por el contrario, como impulsora del comercio, sería fundamento de la felicidad liberal. Sus primeros escritos son liberales pese a su denuncia del divorcio entre fe y razón y las críticas ocasionales al proceso revolucionario contrario a la religión. No llega, sin embargo, a dilucidar las últimas consecuencias de aquella ruptura, sólo lo hará a partir de 1847. Por el contrario, ahora busca asignar a la religión un papel moderno dentro de su época, forzándole un logro económico como el comercial que acabamos de señalar.

La defensa de la Pragmática

Más allá de adelantarnos algunas consideraciones sobre la monarquía, su Memoria de 1832 buscó la legitimación del golpe del mismo año, incluyendo, para ello, argumentos en pro de la legalidad de la pragmática. Por otra parte supuso afirmar, con decisión, su primera posición política junto a la causa del liberalismo conservador.

Sus duros juicios hacia el carlismo buscan identificarlo como el enemigo político sin cuya amenaza no podría justificarse el golpe de 1832. Más aún, Donoso busca legitimar jurídicamente el golpe afirmando la ilegalidad que constituía la medida impuesta en 1713 por el rey Felipe V, la cual supuso el impedimento a la sucesión femenina del trono de España. Partiendo de esta premisa, quiere reconocer como válida toda acción que busque remediar esta "ilegalidad". Una vez ordenada la anterior situación por Fernando VII mediante la pragmática sanción de 1830, juzga como "usurpadores" a quienes han pretendido ignorar ésta última, por oponerse, en definitiva, al restablecimiento de la tradición y la costumbre.

Su dialéctica es hábil y oportuna, pero no analizaremos aquí la autoridad o validez de sus juicios históricos o jurídicos. Sí, en cambio, nos interesa la intencionalidad de sus argumentos en favor de la precisión de su inicial ideario. Como hemos señalado, su punto de partida sobre la cuestión es la tesis que considera la revocación de Felipe V como "ilegal y nula... concebida por la venganza y sancionada por la fuerza" [27] . Ilegal porque se acabó con una ley que recogía la costumbre: "las primeras leyes de los pueblos son siempre la expresión exacta de sus necesidades, porque son el resultado inmediato de las costumbres que ellas produjeron. Estas leyes deben ser siempre sagradas, porque han recibido la sanción de la experiencia y de los siglos" [28] .

En su opinión, Felipe V, en pos de alejar a la Casa de Austria de la Corona y vengar el agravio de la guerra de sucesión, despojó a las hembras de sus derechos al trono en contra de la costumbre [29] . El asunto es que: "las leyes fundamentales de la Monarquía no pueden trasladarse nunca de una nación a otra, porque una nación no puede existir sino con los elementos que encierra dentro de sí misma. Cuando estas leyes son impuestas y no nacidas espontáneamente en el pueblo que las debe obedecer, ellas son el germen más fecundo de todas las revoluciones" [30] .

En consecuencia, la medida de Felipe V lanzaba a España "al abismo de las revoluciones" [31] , precisamente porque la consideró contraria a sus tradiciones y resistida por sus costumbres. En aval de lo anterior, Donoso señala que, en su día, el Consejo de Castilla la acató por presión real: "es muy difícil que los reyes cuando han expresado su voluntad no encuentren medios de ser obedecidos" [32] . Por otra parte, mientras que en el Consejo "doblaron la cerviz y se sometieron al yugo" [33] , las Cortes de 1713, "sólo sirvieron de máscara para cubrir la ilegalidad de la ley que Felipe V había jurado imponer a la nación que gobernaba" [34] . Su aprobación por ellas careció de validez, para el extremeño, ya que constata y denuncia graves anomalías en su representación. En fin, para Donoso, "la disposición de Felipe V no puede tener fuerza de ley porque no fue libremente aprobada por la nación ni por los grandes Cuerpos del Estado" [35] . Por consiguiente, la pragmática sanción no hace sino colocar las cosas en su lugar.

La argumentación de Donoso fue bien acogida por Fernando VII, quién ordenó su publicación, no sin provocarle al joven extremeño algunos disgustos por la censura a la que fue sometida su Memoria [36] . Fue éste el primer escrito de carácter político que publicó Donoso y mediante el cual, contando con tan sólo veintitrés años de edad, se da a conocer en torno a la Corte. Poco después, fue incorporado como oficial a la Secretaría de Gracia y Justicia, cargo que recibió, siguiendo a sus biógrafos, como recompensa de su hábil defensa de la pragmática.

El joven abogado extremeño ha apoyado a conciencia la sucesión de Isabel, enfrentándose a la del infante don Carlos. Sus argumentos, sean válidos o no, son sí, muy oportunos. Con sagacidad ha defendido la situación que permitirá el establecimiento de un nuevo régimen liberal apelando, más que a la razón o a la inteligencia, a la tradición y la costumbre. Con ello pretende despojar al carlismo de sus títulos y banderas populares. Encasilla como usurpadores a quienes pretenden el trono para don Carlos. Encierra al carlismo en una actitud inmovilista, reflejada en el rechazo a la pragmática de Fernando VII, para calificarlo, finalmente, como revolucionario, por oponerse a lo que establecerían las costumbres y confirmaría la tradición.

La prágmatica sanción de 1830, no obstante, responde, de acuerdo con las circunstancias históricas, más a una interesada presión de la nueva familia del Rey que al restablecimiento de una interrumpida tradición. Es publicada precisamente cuando la reina María Cristina estaba encinta y no antes. Sectores ilustrados, si no la promovieron, la acogieron como una ventana que se abría hacia una nueva liberalización del régimen, posibilidad hasta entonces cerrada por la personal aversión hacia los liberales, tanto de Fernando VII como de su hermano don Carlos, hasta poco después el indiscutible sucesor [37]

Donoso demostró muy joven su habilidad dialéctica. Como lo prueba esta Memoria sobre la Monarquía , comenzó a utilizarla para legitimar su objetivo político. Este, en sus inicios, no fue otro que el apoyar las circunstancias más proclives a la instauración de un régimen liberal, que quiso matizado por un peculiar tinte monárquico y conservador. Su énfasis, al comienzo, no responde en exclusiva a la luz de la razón que pretende imponer un sistema abstracto, sino más bien, y a diferencia de la generalidad de los liberales de su época, a una considerable valoración de las costumbres, la religión y la tradición. Donoso pretende legitimar la llegada del liberalismo, utilizando, paradojicamente, una argumentación más propia del tradicionalismo. Por otra parte, no es menos cierto que a Fernando VII, destinatario de la Memoria , no se le convencería apelando a ideas liberales.

Liberalismo conservador y monarquía

Donoso entra a la política en el mismo sentido en que avanza la corriente ideológica de su tiempo, el liberalismo, que en España tiene aun pendiente el fin del sistema absolutista. Su intención, acabar con el Antiguo Régimen y poder controlar la revolución a través de sus ideas, representa el afán de todo liberal conservador ante el nuevo régimen: acepta sus premisas, advierte sus negativos resultados y se siente capacitado para corregirlos. Valora en más el cambio, la necesidad de superar el absolutismo para marchar con la historia. Es aún optimista ante la revolución, porque se siente capacitado de dominar sus excesos en la medida en que sean sus ideas las que se sustenten desde el poder. Restableciendo un principio, ya distinto al revolucionario, que habría agotado su misión al acabar con el absolutismo, logrará evitar la disolución de la sociedad, estableciendo el orden en la nueva sociedad emancipada y libre. Todo ello debe hacerse desde el poder, requiere, en definitiva, de la monarquía. Análogamente a como en el siglo XVIII los primeros ilustrados se sirvieron del trono para llevar a cabo sus reformas, el liberalismo conservador es conciente de que su cambio deberá producirse desde arriba.

En estos primeros años Donoso puede calificarse como liberal conservador: las características recién señaladas lo confirman. El golpe de Estado de 1832 supone la posibilidad de acabar con el Antiguo Régimen y acceder al poder. El adversario entonces es el carlismo y, por lo tanto, dentro de las filas liberales no es el momento de hacer diferencias, pese a que efectivamente existieron. En su Memoria sobre la Monarquía (octubre de 1832), aún con los sucesos de La Granja muy latentes, Donoso divide a los españoles en sólo dos partidos, los ya mencionados de la "legitimidad" y de la "usurpación". Esta clasificación está distorsionada ante la necesidad de evitar discrepancias y lograr así la unidad del liberalismo frente a la amenaza carlista. El mismo Donoso, unos años más tarde, al referirse en su Historia de la Regencia de María Cristina (1843) a la configuración política ante el golpe de La Granja, ya sin presiones contingentes o al menos no con las mismas, divide, como ya hemos visto, el espectro político español en tres: liberales, carlistas y monárquicos. Expresa aquí Donoso no sólo el problema del liberalismo español decimonónico, su creciente división interna a medida  que se extingue el fenómeno carlista, sino también la estrecha relación del sector que él integra con la institución monárquica [38]  a la que, teóricamente, defiende tanto del liberalismo progresista como del carlismo.

Volviendo a su interesada clasificación inicial, su  Memoria sobre la Monarquía  responde a la necesidad de justificar el golpe de 1832 y el restablecimiento de la pragmática sanción que permite la sucesión femenina; quizás, como ha señalado Carlos Valverde, "para evitar que el vacilante y receloso rey diese otra vez un paso atrás y se retractase de lo hecho y para presentar como magnífica, patriótica y leal la actuación de los liberales" [39] . Esta memoria fue presentada a María Cristina, quien se la dió a conocer al rey, y luego publicada por orden real. De este escrito podemos recoger algunas impresiones con respecto al modelo de monarquía que comienza a sugerir Donoso Cortés. Destaca su insistencia en que el Gobierno requiere unidad en la cima del poder; una unidad que conciba un sistema, que sostenga un principio. Precisamente, en su opinión de lo que carece el partido de la legitimidad, entiéndase todo el liberalismo, es de organización, es decir, de unidad y de sistema. Por ello sugiere al monarca que se rodee de "personas fieles y decididas", unidas entre sí "por los mismos principios" [40] . Está pensando en el grupo que encabezó el golpe, en el sector monárquico del liberalismo, que más tarde se llamará moderado. Son ellos quienes ya han demostrado su decisión, en los mismos sucesos de La Granja, y su unidad debe estar en torno a una idea, a un principio que, precisamente, comienzan a formular. La unidad se requiere para conservar y controlar la espiral revolucionaria: "unamos para conservar; las sociedades no existen si se relajan los vínculos sociales" [41] .

La unión que está en la mente de Donoso no es la del liberalismo exaltado o progresista, que tiene como norte la Francia revolucionaria, sino la de los monárquicos. En su lógica, los primeros disuelven, son los segundos los que conservan. La monarquía es entonces la institución política más útil, indispensable, para llevar a cabo esta labor de conservación. Ahora bien, esta monarquía no debe apoyarse en "las últimas clases" de la sociedad, ya que ello la conduciría al "despotismo oriental", que es como ha calificado al carlismo, o al"abismo de una democracia borrascosa" [42] , donde reconoce ya el destino del liberalismo revolucionario. Donoso esta afirmando que una monarquía que pretende sostenerse únicamente en el pueblo conduce, de forma inexorable, al absolutismo o a la anarquía. Es lo que años mas tarde redondeará, como veremos en su momento, en el concepto de omnipotencia social .

La monarquía, entonces, debe fortalecer las clases intermedias, y buscar en ellas el necesario apoyo que requiere para su funcionamiento [43] . Como vemos, es el propio Donoso quien se encarga de buscar las ideas en torno a las cuales debe cimentarse el nuevo régimen. Aquí ya esta sugerido el gobierno de las clases intermedias que, poco más tarde, al establecer el principio de la soberanía de la inteligencia, llamará de las aristocracias legítimas .

Otra de sus ideas, que en este caso reitera en la Memoria sobre la Monarquía, ya que la viene afirmando desde su Exposición a Fernando VII en favor de Carrasco, es la que establece que la fuerza del monarca deriva de su capacidad de representar todos los intereses de la sociedad [44] . Esta consideración fue una constante en la trayectoria de su pensamiento y fundamento de su posterior crítica a la división del poder. En este momento, sin embargo, este principio se muestra contradictorio con la concepción de una monarquía de clase, como es aquélla a la cual le basta el apoyo específico de las llamadas clases intermedias, a no ser que éstas representen por sí solas, en este momento del ideario donosiano, los intereses de toda la sociedad. Si así fuera, estamos frente a la pretensión de utilizar la monarquía, aceptada por entonces en todos los sectores sociales, para la puesta en práctica del sistema de uno sólo de ellos, el de las clases intermedias.

Creado el sistema y dada la unidad en la cima del poder, Donoso nos hace pasar a la siguiente fase política, a saber,"crear la legalidad y el entusiasmo" [45] . Con ello, primeramente y sin querer, parece reconocer que el régimen que emana del golpe de La Granja carecía hasta entonces de estos atributos, porque de otro modo no sería necesario el llamar a crearlos. Para llevar a cabo esta nueva etapa, nuestro autor recurre a las Cortes. Esta institución es la que "representando la voz de la nación" establece las leyes fundamentales de la monarquía. Ella reviste a la ley "de un carácter sagrado, les da aquella perpetuidad solemne, les imprime la sabiduría de los siglos" [46] . No obstante, sabe bien Donoso que, en la práctica, y a consecuencia del sufragio censitario, a los intereses de las clases intermedias no les faltarán defensores en las Cortes.

El modelo de la monarquía francesa de julio tuvo que estar presente en los sucesos de La Granja y en el proyecto que de ellos emerge. La necesidad de apoyar a la monarquía, como única institución capaz de detener la disolución revolucionaria, en la clase que emerge preponderante y conformar el poder político en torno a las clases intermedias, que consideraron por principio conservadoras, es la vía que escogen para establecer una monarquía que se haga con los beneficios de la revolución, que impida la posibilidad del retorno al absolutismo, como así mismo, que no permita el exceso revolucionario. Donoso pronto percibe que para todo ello finalmente se requiere de un principio político, una nueva concepción de la soberanía. Si los revolucionarios rinden pleitesía a la soberanía popular y la soberanía de derecho divino se entiende superada, necesitan los liberales conservadores establecer una tercera vía de soberanía. Hasta el momento se limita nuestro autor a criticar las dos primeras vías, más adelante recogerá la soberanía de la inteligencia, precisamente, como veremos, de los teóricos franceses de la monarquía de julio. Si han necesitado de la monarquía para reformar la sociedad desde arriba, no pueden afirmar su poder en la soberanía popular. Donoso al menos parece muy consciente de esto; pertenece a la generación post-revolucionaria y, como hemos visto, sus instintos son desde un comienzo conservadores.

El conocido manifiesto a nombre de María Cristina, que es en realidad de Cea Bermúdez como primera cabeza del ministerio desde el golpe de La Granja, está fechado el 4 de octubre  de 1833, días después de morir Fernando VII. Su texto está en buena parte circunscrito a la contingencia de una posible guerra civil, y demuestra este ánimo conservador que no pretende alterar nada sustancial en materia de soberanía real: "Yo mantendré religiosamente la forma y las leyes fundamentales de la Monarquía, sin admitir innovaciones peligrosas... la mejor forma de gobierno para el país es aquella a que está acostumbrado". No obstante, la actitud contraria de Cea a una reunión de Cortes propicia su salida en febrero de 1834. La intervención de los embajadores en torno a María Cristina, en especial el francés y el británico, manifiestan la tendencia a convertirse en no desestimables centros de presión en torno a la Regente y permanecerán como tales largamente durante los inicios del régimen liberal. El inmovilismo político de Cea fue aparente, ya que, junto a las declaraciones citadas, decreta una amplia amnistía y demuestra un afán de profundas reformas administrativas. La amnistía aparece como medida reconciliadora de la Corona ante los antiguos liberales, tan fustigados por Fernando VII luego del trienio, en pro de limar asperezas y fortificar la tan conveniente unidad del bando cristino. Donoso, respecto a esta medida, se refiere luego de unos años, señalando que "vino a abrir las puertas de España a las revoluciones" [47] , y ello porque, al regreso de los exiliados, el partido liberal (entiéndase progresista) tuvo por suya la victoria, ante un partido monárquico que se vió perdido con la llegada para la otra facción de los "capitanes ausentes" . Aún más, Donoso achaca al decreto de amnistía el afianzamiento del carlismo y con ello la prolongación de la guerra, al confirmar la tesis de éste acerca del carácter revolucionario de sus adversarios. No eran, a juicio de Donoso, los tiempos, "revueltos y banderizos" [48] , los oportunos para una amnistía general. Si bien estas consideraciones las realizó en 1843, es decir, diez años después de haberse tomado tal medida, su ininterrumpida denuncia del liberalismo progresista nos llevaría a pensar que en su momento, no debió verla tampoco con buenos ojos [49] . No obstante, sí podemos incluir a Donoso, al menos en parte, junto a aquéllos que propiciaron reformas en la administración. Para Cea éstas constituyeron el norte de su actuación; bien supo recoger el espíritu práctico de los ex-afrancesados, como el de su ministro Javier de Burgos, artífice de la división provincial de España. No se manifiesta  el extremeño - mayormente aún- sobre estas materias, aunque sí asoma su interés por un sistema "sabio de administración" [50] . Su ideario aparece coincidente con los principales objetivos de las reformas. Por un lado, la consolidación del poder central del Estado, que en definitiva debía fortificar la autoridad real, amenazada por los excesos de la revolución. Por otro, las medidas destinadas a favorecer el movimiento de la riqueza, es decir a propiciar el desarrollo de la burguesía, de las clases intermedias que, como hemos visto, ha propuesto como principal sustento social del nuevo régimen, y en especial del trono.

Recapitulando, durante estos años busca Donoso Cortés un principio que organice el nuevo régimen, en el cual colaboró desde su origen. Aunque todavía no lo encuentra, esboza ya la que será su teoría de las aristocracias legítimas e insiste en la necesidad de propiciar un sistema monárquico en torno a una idea nueva, es decir, que supere a las conocidas fórmulas de soberanía.

La herencia de su formación ilustrada conforma sólo en parte su pensamiento en estos inicios, ya que demuestra una tendencia, luego interrumpida durante su paréntesis doctrinario, a no limitarse en un racionalismo meramente abstracto, sino a valorar lo que él llama la entraña de los pueblos: sus costumbres, su religión, el respeto a las jerarquías sociales. El ambiente romántico y su marcado espíritu conservador se sobreponen, en muchos casos, a su educación liberal ilustrada y tienen, p>or consiguiente, un peso considerable en la formación de su pensamiento.

 Gonzalo Larios

[1]  Ver Suárez Verdeguer, Federico: Introducción a Donoso Cortés, Madrid, p.26; Del mismo autor, véase también:"La primera posición política de Donoso Cortés",  p. 79.

[2] Con respecto al golpe de Estado de 1832, ver  Suárez, Federico: Los sucesos de La Granja .

[3] Zavala, Iris M.: "La literatura: romanticismo y costumbrismo", en Historia de España de R. Menéndez Pidal, XXXV-II, Madrid, 1989, p. 147 y ss.

[4] La venida de Cristina (1829), en Obras Completas de don Juan Donoso Cortés, recopiladas por Juan Juretschke, Madrid, BAC, 1946, I, 9.

[5] Ibid, 10.

[6] Dos cartas a Manuel Gallardo (1829), OC, I, pp. 171-178.

[7]   Discurso de Apertura en el Colegio de Cáceres  (1829), OC, I, 184. En Respuesta a una crítica a su ensayo sobre la diplomacia  (1834), define la Edad Media en el mismo sentido con que el racionalismo dieciochesco concibió este concepto: "un período de transición entre la unidad que desapareció con Roma y la unidad que renació con las luces". OC, I, 285.

[8]  Ibid, 199.

[9]  Exposición al Rey Fernando VII en favor de Juan José Carrasco (1831-32), OC, I, 208.

[10]  Ibid, 209.

[11]  Idem.

[12] Ibid, 210.

[13]  Ibid,  209 y  210.

[14]  Ibid,  209.

[15] Discurso de Apertura en el Colegio de Cáceres  (1829), OC, I, 201.

[16] Ibid,  203.

[17] NOTA CON ART´ICULO DE ELIAS DE TEJADA SOBRE DE MAISTRE.

[18] Alvarez Junco, José:"Estudio preliminar" a  Lecciones de Derecho Político  de Juan Donoso Cortés, Madrid, 1984, p. XII. La forma teocrática de gobierno, fue expresamente criticada por Donoso. No me parece el concepto teocratismo cristiano, con el que adjetiviza Alvarez Junco algunos pasajes de la obra donosiana, el preciso para señalar la constatación de la influencia del cristianismo en el devenir político y social de la cultura occidental.

[19] Discurso de Apertura en el Colegio de Cáceres (1829), OC, I, 193.

[20]   Dos cartas a Manuel Gallardo (1829), OC, I, 174.

[21]  Prólogo a su obra Cerco de Zamora (1833), OC, recopiladas por Juretschke, Madrid, 1946, t. I, p. 81 y  82.

[22]  Exposición al Rey don Fernando VII en favor de Juan José Carrasco (1831-32), OC,  I,  211.

[23] Exposición al Rey por don Juan José Carrasco (1831-32), OC, recopiladas por Juretschke, Madrid, 1946, t. I, p. 55.

>[24]  Exposición al Rey don Fernando VII en favor de Juan José Carrasco (1831-32), OC, I,  211.

[25]  Memoria sobre la Monarquía (1832), OC, I, 216.

[26]  Discurso de Apertura en el Colegio de Cáceres (1829), OC, I, 195. La misma idea está expresada también en Exposición a Fernando VII  en favor de Juan José Carrasco (1831-32), OC, I, 207 y 208.

[27] Memoria sobre la Monarquía (1832), OC, I, 221.

[28]  Ibid.  219.

[29]  Históricamente, tiene mayor asidero aquella interpretación de la revocación de Felipe V en orden a despojar a las mujeres de sus derechos a la sucesión, que la relaciona con la conveniencia de evitar la posible unidad de dinastía entre reinos tradicionalmente diferentes, que habría hecho peligrar el inestable equilibrio europeo. Donoso, como fue costumbre en el siglo XIX, utilizó repetidamente la historia como herramienta de sus personales objetivos políticos. De hecho, este argumento que levanta contra la disposición de 1713 podría utilizarse indistintamente también en contra de las constituciones de su tiempo.

[30]  Ibid.  220.

[31]  Idem.

[32]  Idem.

[33]  Ibid.  221.

[34]  Idem.

[35]  Idem.

[36] Ver Querella sobre la Memoria (1832), incluye Carta a Fernando VII e Instancia al Ministro de Gracia y Justicia, OC, I, 224 y  225.

[37]  Ver Suárez, Federico: La crisis política del Antiguo Régimen en España, Madrid, 1958, 171 y ss.

[38] He utilizado un escrito de 1843 porque éste trata precisamente, y con mayor exactitud, asuntos relativos al golpe de 1832.

[39]  Valverde, Carlos: Introducción General a  Obras Completas  de Donoso Cortés , Madrid, BAC, 1970, t. I, p. 39.

[40]  Memoria sobre la Monarquía (1832), OC, I, 219.

[41]  Ibid,  217.

[42]  Ibid,  218.

[43]  Idem.

[44]  Ibid,  216.

[45]  Ibid,  217.

[46]  Ibid,  218.

[47] Historia de la regencia de María Cristina  (1843), OC,  I, 993.

[48]  Ibid,  994.

[49]  No tenemos testimonios de su hipotético rechazo.

[50]  Memoria sobre la Monarquía (1832), OC, I, 219.


00:05 Publié dans Théorie politique | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : politique, espagne, contre-révolution | |  del.icio.us | | Digg! Digg |  Facebook

dimanche, 26 octobre 2008

Les fondements helléniques de la future "Révolution conservatrice" russe

aigle.jpg

 

Les fondements helléniques de la future “Révolution Conservatrice” russe

 

Entretien avec Vladimir Wiedemann

 

Q.: Quand vous avez écrit votre livre “Znaki Imperii”, quelles étaient vos motivations?

 

VW: Après les événements d'octobre 1993, sur les ruines de l'ancien ordre communiste, on n'a pas créé un ordre nouveau. Commence alors pour la Russie une période d'extrême perméabilité, où toutes les tentatives de créer un ordre politico-social nouveau  —de quelque nature que ce soit—  ont eu lieu. C'est dans ce contexte que j'ai décidé d'apporter ma propre contribution, de donner mon propre point de vue et d'indiquer une voie alternative, tout en proposant une interprétation prospective de l'histoire européenne en général mais cette fois d'un point de vue russe: cette interprétation avait déjà été amorcée en son temps par le régime communiste, mais on ignorait ces démarches en Europe occidentale.

 

Q.: Pouvez-vous nous résumer brièvement les principaux arguments de votre livre?

 

VW: Je peux le résumer en dix points principaux, qui figurent d'ailleurs dans mon ouvrage, sous forme d'un chapitre autonome. Il me paraît nécessaire de citer in extenso  au moins un de ces dix points, en commençant par l'envoi de l'Evangile selon St. Jean: «Au départ, il y a le Verbe, et le Verbe est auprès de Dieu et Dieu est le Verbe» (Jean, 1,1). Le Verbe (le Logos) est création de Dieu, son Institution Absolue. L'Institution qui se manifeste par le Verbe est la Hiérarchie qui, en tant que telle, est l'Empire. L'idée d'Empire est sacrée dans l'absolu et est éternelle: elle est la mesure de l'ordre hiérarchique qui précède toute création émanant du Logos. L'idée d'Empire est le fondement créé par Dieu pour ordonner le monde des hommes; l'idée d'Empire est une Forme sanctionnant l'institutionalisation de l'Etre dans l'Histoire, laquelle est le “temps humain” (l'Eon), déterminé par la Providence. L'histoire humaine, qui devrait être déterminée par l'idée d'Empire, s'étend du jour de la création d'Adam jusqu'au jour du Jugement Dernier. Tel est le temps donné pour réaliser l'idée d'Empire, pour parfaire la Genèse de l'être social et de l'ordre des hommes. L'Homme, dans l'absolu, fait partie de la Hiérarchie Céleste et la Porte du Salut et de la Vie éternelle lui est ouverte.

 

La société ordonnée selon des principes absolus est le Règne terrestre, reflet du Régne céleste. Ce Règne de la Vérité dominera la Terre et réalisera la prophétie évangélique du Règne millénaire de Dieu qui sera suivi par le Jugement Dernier, la Fin du Monde, la fin de l'histoire humaine à l'enseigne du Verbe divin.

 

Le premier à avoir annoncé l'idée du Vrai Règne est Jésus Christ: c'est pour cette raison qu'il est le Roi des Rois, le César (Tsar) sacré. A travers sa personne, avec la bénédiction de l'esprit saint, advient la Communion dans l'Ordre supérieur, l'avènement de l'idée d'Empire sous la forme de l'Eglise avec la Hiérarchie Céleste. Le jour où l'esprit saint est descendu sur les Apôtres est le jour où s'est réalisé le testament de la Terre sainte. C'est le jour de la fondation de l'Eglise chrétienne sous la forme d'une communauté apostolique, premier signe de l'incarnation de la Sainte Vérité de l'idée d'Empire, dans l'orbite d'une société et d'un monde marqué par le péché (un monde cosmico-païen). La Communauté apostolique est historiquement la première institution sociale d'ordre divin et humain, constitue le cadre idéal et primordial de l'Eglise écouménique et, simultanément, de l'Empire écouménique. L'orthodoxie est une tradition qui exprime authentiquement une forme institutionnelle de ce type, car elle affirme le culte du Pouvoir impérial, car elle tire sa légitimité de Byzance, où se manifestait la construction symphonique de l'Empire chrétien dans sa forme la plus classique. Byzance constitue en effet l'apparition de l'Ordre hiérarchique du Règne céleste, tel qu'il a été conçu par les premiers chrétiens, mais, sur le plan théologique, l'idée impériale ne se réalisera vraiment qu'à la fin des temps. La Russie est l'héritière de l'idée impériale orthodoxe-byzantine: c'est pourquoi Moscou est perçue comme la “Troisième Rome”, nouveau pôle écouménique des civilisations, ce qui revient à dire que Moscou est pour nous le pôle de l'Esprit actif du droit divin dans l'ordre humain: de l'Harmonie symphonique entre la vérité évangélique et le Droit romain.

 

Q.: En analysant votre point de vue, on peut affirmer que vous désirez le reconstitution d'une Tradition chrétienne-impériale. Mais comment cela pourrait-il être possible, vu le type de vie que vivent les hommes d'aujourd'hui, vu la façon dont on interprète le monde de nos jours, vu les dispositions intérieures de l'homme moderne face à la nature et à la société? Comment sur d'aussi mauvaises bases pourra-t-on reconstruire l'ordre traditionnel que vous envisagez?

 

VW: En Russie, l'Eglise est en train de renaître et elle est bien vivante, tout comme les valeurs traditionnelles qu'elle véhicule: c'est à partir de cette renaissance qu'on pourra tenter une reconquista et une refondation, pour la Russie, d'une identité historique après la parenthèse soviétique. Avec mon livre, je veux aider à promouvoir une telle reconquista, accentuer cette tendance générale vers la traditionalité, vers la recherche d'une authentique identité historique. Cette tendance actuelle vers une restructuration de l'Eglise et de l'Empire russes ne doit pas être interprétée seulement comme une vision conservatrice, mais comme une véritable révolution, une révolution conservatrice qui envisage de façonner l'avenir selon ses principes.

 

Q.: Si votre révolution conservatrice prend forme, elle prendra forcément forme en Russie et donnera naissance à un nationalisme qui sera incompréhensible en Europe occidentale, où on n'imagine plus qu'une société libérale-capitaliste et fondamentalement athée? De votre point de vue, la Russie ne serait pas en mesure de proposer pour l'avenir une vision universelle, acceptable en tant que telle par les Européens catholiques et protestants ou par les populations de la Fédération de Russie qui sont de tradition islamique?

 

VW: Je crois que notre vision orthodoxe pourra séduire Catholiques, Protestants et Musulmans, parce qu'à la base de la culture européenne chrétienne orthodoxe et catholique, voire à la base de nombreux fondements culturels dans l'aire islamique, nous trouvons l'hellénisme qui permet la convergence entre ces trois traditions qui se sont déployées dans l'Eurasie. Déjà avec Alexandre le Grand l'hellénisme a eu la fonction d'agréger les diverses cultures et peuples des Balkans à l'Indus et du Nil à la Sogdiane. Ensuite, l'hellénisme a servi à étayer toutes les constructions philosophiques du christianisme. Il a survécu à la chute de l'Empire romain occidental dans l'Empire byzantin et dans l'Eglise orthodoxe. Enfin, il a influencé de nombreux philosophes islamiques. Moscou, en tant qu'héritière de Byzance, est aussi, en même temps, l'héritière de Rome et d'une vision universelle de l'Empire. Dans ce sens, la voie russe de la révolution conservatrice universelle qui prend appui sur l'Eglise et sur l'Empire, n'est pas une voie qui s'oppose à une voie analogue ouest-européenne mais au contraire une voie qui fait référence aux mêmes fondements helléniques. Je prône donc une révolution conservatrice pour susciter une nouvelle renaissance qui se réfèrera au passé, mais non dans le but de répéter le mode antique. Je veux une révolution pour forger l'avenir! Je pense à une renaissance russe qui ne s'exprimera pas par l'anti-catholicisme mais renouera avec l'héritage byzantin.

 

Q.: Il me semble pourtant, vu l'actuel système économique en vigueur dans le monde entier depuis la chute du soviétisme, que proposer un statut antérieur à celui de 1914, nonobstant le regain d'intérêt pour les valeurs traditionnelles, est une impossibilité pratique et constitue un choix extrêmement dangereux pour l'humanité entière, étant donné le niveau de technicité et d'efficacité des armements modernes. Dans votre vision d'une révolution conservatrice tournée vers l'avenir, quelles sont les solutions économiques qui permettront à tous de se dégager de la cangue du modernisme et de retourner aux valeurs spirituelles antiques et universelles?

 

VW: Nous n'avons pas l'intention de reconstituer un ordre économique semblable à celui qu'il y avait avant 1914! Le nouvel ordre économique devra se baser sur un nouveau droit qui règlera les rapports entre propriété privée et propriété collective. Dans ce droit, l'Eglise, elle aussi, aura un rôle économique à jouer, de même que l'appareil militaire qui, par sa nature même, relève du collectif. Tout cela dans le perspective traditionnelle byzantine de la “symphonie”, de l'union harmonique du peuple, de l'Eglise et du Pouvoir (impérial). Le Pouvoir impérial, incarné par le Tsar, s'exercera à vie et sera élu par ceux qui auront le titre de sénateur, avec l'approbation des hiérarques supérieurs de l'Eglise. Le Tsar n'aura pas le droit de transmettre son titre ni par voie héréditaire ni en vertu de désirs personnels. Le Tsar confirmera l'élection par le Sénat du chef du gouvernement qui aura pour tâche de former le cabinet des ministres. Le Tsar aura le droit de veto contre toute décision prise par le gouvernement et le droit de suspendre celui-ci. Autour du Tsar se constituera un organe de gouvernement, la “Chancellerie de l'Empire” qui comprendra le ministre de l'intérieur, ainsi que celui de la défense, et les membres de la Commission des problèmes immobiliers, la gestion des affaires religieuses et le Conseil supérieur de la Constitution. Le Tsar est le chef militaire absolu, ce qui implique de réorganiser totalement l'appareil militaire avec l'appui de la société et dans la société.

 

Avant d'arriver aux problèmes économiques, je voudrais évoquer cette réforme militaire, que je résumerai aux points suivants:

a) Constitution d'un “fond territorial impérial” qui sera subdivisé en latifundia distribués aux officiers de carrière (y compris ceux qui sont pensionnés) ainsi qu'aux vétérans. Création de latifundia pour les Cosaques et fondation de colonies pour les Cosaques, assorties d'une forme spéciale d'autonomie.

 

b) Création d'une gestion impériale pour tout le complexe de la Défense, en trois secteurs: un secteur productif, un secteur pour les fournitures, un secteur pour la recherche (avec une branche pour l'instruction et une autre pour la spécialisation). Tout travail au sein d'une entreprise axée sur la défense équivaut à un service militaire, cependant, après un long service, cette catégorie de travailleurs ne recevra pas de latifundia, mais une participation équivalente en actions. La fourniture en biens alimentaires pour l'armée et l'industrie de la défense sera la tâche des propriétaires de latifundia émanant du fond territorial impérial. Précisons que ces latifundia, sauf exception, ne seront pas héréditaires.

 

Pour ce qui concerne l'Eglise, les points suivants devront être pertinents sur le plan économique:

a) Création d'un fond spécial de propriété foncière pour l'Eglise et pour les monastères qui sera redistribué à chaque communauté ecclésiale particulière et à chaque monastère.

 

b) Implication de l'Eglise dans la politique sociale de l'Etat. Intronisation d'une magistrature ecclésiastique chargée de contrôler toutes les institutions et les organisations de l'Etat gérant l'assistance publique, comme par exemple, les institutions de l'Etat en charge d'assister les enfants en bas âge, de gérer les cures de revalidation et d'assurer l'assistance sanitaire. L'approvisionnement de toutes ces institutions en biens alimentaires devra être assuré par les fonds agricoles de l'Eglise et des monastères.

 

c) Création de petites manufactures, de services sociaux, de centres culturels et de centres d'instruction populaires sous le contrôle de l'Eglise.

 

d) Implication des représentants de l'Eglise dans l'activité des organes administratifs municipaux et dans toutes les instances des tribunaux (les tribunaux seront mixtes).

 

Entre l'armée et l'Eglise, il faudra assurer le développement d'une caste de petits et de moyens propriétaires. La fonction de l'Empereur, outre celles que nous avons déjà évoquée, sera de garantir l'équilibre harmonieux entre tous ces groupes.

 

Q.: Comme vous le savez, à l'intérieur de la Fédération de Russie vivent de fortes communautés islamiques. L'Islam n'est pas seulement une tradition spirituelle ou religieuse, mais avance également une conception de l'économie et de la société, indissociable de la foi et de la pratique religieuses. Comment voyez-vous le rapport que pourront entretenir ces communautés islamiques avec cette vision byzantine et orthodoxe de l'Empire?

 

VW: Je vois clairement à quelles conceptions du droit et de l'économie en Islam vous faites référence et je pense que les peuples musulmans auront toute la liberté d'appliquer leur forme de droit à l'intérieur de leurs propres communautés islamiques, à condition bien sûr que l'exercice de ce droit ne contribue pas à déstabiliser l'harmonie de l'Empire.

(entretien paru dans Orion n°138-139, 3/4-1996, propos recueillis par Haroun Abdel Nour; trad. franç.: Robert Steuckers).

jeudi, 23 octobre 2008

Slavoj Zizek : l'homme qui ne croit pas aux vertus du capitalisme et de l'ordre américain

Slavoj Zizek : l’homme qui ne croit pas aux vertus du capitalisme et de l’ordre américain

Sur: www.no-media.info 

Slavoj Zizek : l’homme qui ne croit pas aux vertus du capitalisme et de l’ordre américain

L’Etat néo-conservateur comme Etat autoritaire, l’impasse de la gauche qui oublie le peuple et les ouvriers, le caractère inutile et au fond conservateur des émeutes de banlieue, l’Europe en panne de volonté, le tiers-monde divisé et impuissant, toutes ces questions nous importent au plus haut point. Nous ne sommes pas seuls à penser ce que nous pensons. Explications en lisant Slavoj Zizek. 


Slavoj Zizek est un des penseurs les plus pertinents du monde actuel. Quelques extraits d’un entretien (L’Humanité, 25 septembre 2007) le montrent : « La thèse est qu’il y aurait une idéologie suprême consistant à dire ’’ pas d’idéologie ! ‘’. C’est-à-dire ‘’pas d’autre choix que les règles du capitalisme contemporain ‘’. Les seules questions qui restent dès lors admises à la délibération touchent à la tolérance, au multiculturalisme. Il n’y aurait dans le monde actuel qu’un seul grand choix : le capitalisme à l’américaine, de type libéral, ou bien le capitalisme chinois. Ce serait très triste de vivre dans un monde où le seul choix véritable se résumerait à une telle alternative ». « Je crois qu’il y a comme une complicité entre les États-Unis et le tiers-monde. Il existe entre ces deux pôles un rapport de complémentarité. Le problème, pour le nouvel ordre, n’est pas le tiers-monde, mais le deuxième monde : l’Europe. Il n’y a pas vraiment de potentiel dans le tiers-monde, à cause de la structure sociale concrète. L’exploitation et la pauvreté y sont trop brutales, je ne vois pas de chance de ce côté. C’est la vieille sagesse de Marx : je ne crois malheureusement pas qu’on puisse faire la révolution avec le vraiment pauvre. »

Les émeutes de 2005 dans les banlieues de France ont été « ‘’post-politique’’ parce qu’elles sont le strict envers de notre société post-politique. Quand on joue la carte du post-politique, les émeutes elles-mêmes deviennent post-politiques. C’est cela la véritable tragédie, le prix de l’impossibilité même de formuler une alternative. » « L’hégémonie de l’idéologie capitaliste est telle que même la gauche se tourne vers les questions culturelles, la tolérance…, ce qui signifie, en réalité, qu’elle n’ose même pas imaginer une alternative économique concrète. Ainsi, la thèse implicite de toute la gauche multiculturaliste américaine est que l’exploitation des Mexicains, des Noirs serait fondée sur le racisme, et non sur des rapports de classes. » « Parallèlement à cela, la moindre intervention forte dans l’économie est désormais perçue comme irrationnelle, catastrophique. Il y a comme un pacte selon lequel l’économie aurait ses propres règles dépolitisées, le débat ‘’démocratique’’ se limitant finalement aux questions culturelles. La tragédie réside précisément dans cette dépolitisation radicale de l’économie, conjuguée au glissement vers un état d’exception permanent. » « L’État se retire certes de la sphère sociale. Mais si l’on considère les États-Unis post-11 septembre, jamais dans l’histoire de l’humanité il n’y a eu d’État aussi fort. En termes de budget militaire, de contrôle. L’État joue, dans ce système, un rôle absolument crucial. Même le libéralisme le plus sauvage demande de plus en plus d’État. On assiste en réalité à une explosion de tous les appareils d’État. L’État contemporain néoconservateur est un État extrêmement fort. » « (…) je suis sans aucune utopie pour l’Europe, même s’il existe cette volonté de se situer hors de l’axe États-Unis – Chine qui symbolise deux aspects d’un même système. » « Hardt et Negri sont dans une impasse. D’un côté il y aurait l’empire centralisateur, de l’autre la multitude. Mais ils sont forcés d’admettre, pour le dire simplement, que le capitalisme contemporain fonctionne déjà sur le mode de la multitude, de manière réticulaire. » « Il ne s’agirait donc plus de le combattre [ce système] , mais au contraire de collaborer, de contribuer, pourquoi pas, à son dynamisme. Il y a désormais chez Negri une sorte de célébration de ce capitalisme. » «  Je crois que l’une des causes de la vigueur de l’extrême droite [en Europe] est la réticence de la gauche à se référer directement, désormais, à la classe ouvrière. » « La droite et l’extrême droite sont désormais les seules à parler encore le langage de la mobilisation politique. »

mercredi, 22 octobre 2008

Etat des lieux

ETAT DES LIEUX

« Les petits traîtres de l’ex-Gauche Prolétarienne, les briscards trotskistes métamorphosés en sénateurs fabiusiens, en conseillers du patronnat, en patrons de quotidiens du soir ivres de pouvoir et de Bourse, les anciens membres du Parti Communiste qui squattent les soirées histoire d’Arte et la table de Jacques Chirac ne portent que la marque d’une dévaluation morale. Quant aux parcours inverses, ils sont infiniment plus rares, ayant moins à offrir à ceux qui les empruntent. [...] A partir de l’opération marketing idéologique des "nouveaux philosophes", et plus encore de 1986, l’intelligentsia médiatisée a fait son choix : le dernier cri de la subversion est de chanter le militarisme de marché. Ce sera ensuite jeu d’enfants (destiné à des cerveaux mal irrigués de préférence) d’assimiler anti-totalitarisme et défense de l’Occident, défense de l’Occident et redécouverte des vertus de la "main invisible". [...]

 

Monolithique et libéral, le nouveau propos politique des repentis va ainsi glorifier une modernité philo-américaine en rupture simultanée avec le radicalisme de la gauche et le conservatisme de la droite. "Libéral-libertaire" (l’expression fut employée par Serge July dès 1978), yuppie, bourgeois-bohème, la griffe s’est appliquée à nombre de sous-produits idéologiques. Intellectuellement, il n’en reste qu’un vague souvenir de mauvaise soupe et de gueule de bois, de paillettes et de gros contrats, un théâtre de la pensée zéro qu’auraient animé Yves Montand, Anne Sinclair et Bernard Tapie. Politiquement, l’effet fut plus considérable. "Droits de l’homme" et "libre entreprise", modèle américain et "retard français", charité-spectacle, humanitarisme de guerre, glose gélatineuse sur la "société civile", aversion pour les passions collectives : page après page, émission après émission, à la vieille dialectique sociale et politique se substitua l’opposition des archaïques et des modernes, des sectaires et des ouverts, des nationalistes et des nomades. Livres, articles et reportages ressassèrent l’éloge d’un système économique se targuant de flexibilité, de "révolution" et de métissage. La mise en cause de la légitimité d’un pouvoir fondé sur la propriété fut taxée de parti pris idéologique. Progressivement, il deviendrait presque impossible de penser cet impensable-là. [...] Il fallut aussi lustrer son registre de colères. L’audace fut alors constituée d’indignations, de boycotts, de ruptures qui ne coûtent rien, au contraire : soit parce que ceux contre qui on s’adresse ne disposent d’aucun pouvoir de rétorsion là où on se trouve (les communistes, le "populisme", le Mal, l’extrême droite, les "anti-américains") ; soit parce que les imprécations mondaines ainsi que les effets de scène qu’elles induisent demeurent restrospectives – il s’agit de soutenir de hauts faits d’armes à condition qu’ils restent enfouis dans le passé. »

 


Serge Halimi, mars 2003, préface à la "Lettre ouverte à ceux qui sont passés du col Mao auRotary" de Guy Hocquenghem, Agone, 2003, p. 10-11, 12, 16-17, 19

lundi, 20 octobre 2008

Qu'est-ce que le "soft power"?

QU’EST-CE QUE LE SOFT POWER ?

Trouvé sur: http://coterue.over-blog.com

« Concrètement, le soft power atlantique, qu’est-ce que c’est pour le citoyen européen lambda ? C’est quand votre voisine vous parle du dernier épisode de Desesperate Housewifes ou quand vos parents sifflottent une chanson des Beatles qui leur rappelle leur jeunesse, cette jeunesse que l’on envoie comme à l’abattoir de l’intelligence voir le dernier block-buster américain. C’est quand les souvenirs des gens (de nos gens, des nôtres et de nous-mêmes) sont parasités par le vomi constant mais inexorable de la sous-culture utilisée par le vainqueur de la Seconde guerre mondiale, puis de la Guerre froide, comme une arme de guerre, comme une arme de destruction massive, comme une bombe radiologique au rayonnement continu, diffus, permanent et mortel. Comble de l’horreur organisée, le soft power, c’est quand des parents amènent leurs enfants fêter leur anniversaire au fast-food !

 

Et combien de braves gens l’ont fait autour de nous, preuve de la force d’imprégnation et de propagande culturelle modelante qu’a le soft power pour maintenir une hégémonie culturelle et politique. [...] Bref, le soft power, c’est quand l’individu déraciné, post-humain post-moderne, croit qu’il est libre de ses choix, opinions et actes, alors qu’il est justement plus que jamais la proie de l’idéologie de l’individualisme et du narcissisme de masse diffusée par la "puissance douce" mais implacable de la puissance hégémonique actuelle : l’Amérique-Monde, ou l’Occidentalisme, comme l’appelle Zinoviev. »

 

Pierre Vidar, "Guerre cognitive : le concept de soft power", ID Magazine n°11, automne 2007

dimanche, 19 octobre 2008

La volonté d'impuissance

priere_1171717117.jpg

 

Archives de "Synergies Européennes" - 1996

 

 

La volonté d'impuissance

 

Recension: Pascal BONIFACE, La volonté d'impuissance, Seuil, collection «L'histoire immé­diate», Paris, 1996, 203 p., 110 FF.

 

Dénoncée comme perversité par les idéologies modernes, la puissance  —que on définit classiquement comme étant la capacité à faire triompher sa volonté—  n'en est pas moins au cœur des relations inter­nationales. Directeur de l'Institut des relations internationales et stratégiques, Pascal Boniface a pré­cédemment dirigé un ouvrage portant sur cette notion-clé (1). Il prolonge aujourd'hui ces travaux en in­sistant sur les perspectives d'anarchie internationale, autrement plus probables à ses yeux qu'un quel­conque Nouvel ordre mondial (2). La thèse centrale est la suivante. Régi selon une logique paradoxale, le monde post-guerre froide est de plus en plus global sur le plan économique, financier et médiatique, et fragmenté sur le plan géopolitique et stratégique. Ainsi les différents conflits armés qui se déroulent simultanément aux quatre coins de la planète ne sont-ils plus reliés aux puissances centrales du sys­tème-Monde et susceptibles de mener à un embrasement général. Les grands de ce monde peuvent bien manier des rhétoriques universalistes et les intellectuels faire dans le "stratégiquement correct"  —ces derniers ont transféré leurs utopies salvatrices du champ politique interne à l'international—  le chaos n'en est pas moins borné. En conséquence, aucune menace massive ne pesant sur les pays riches, on s'y prend à rêver de “cocooning stratégique”. Loin d'avoir été conjuré par les présidences Reagan et Bush, le fameux “Syndrôme vietnamien” frappe aujourd'hui l'ensemble de l'hémisphère Nord (c'est-à-dire des pays développés à la démographie stagnante). Déjà présentée dans La puissance in­ternationale (cf. note 1), cette thèse est ici développée dans une langue claire et accessible, force exemples à l'appui, et Pascal Boniface se montre convaincant. Quelques griefs cependant. On aurait aimé que l'auteur s'attarde sur les rapports dialectiques existant entre le processus de mondialisation et la fragmentation géopolitique/géostratégique de la planète selon la “loi” édictée par Régis Debray voici quinze ans, mondialisation des objets/tribalisa­tion des sujets (3).

 

De même, on admettera que le thème de la menace-Sud et la version plus intellectualisée du “Clash of Civilizations” formulée par l'Américain Samuel P. Huntington sont par trop simplistes. Le “Nord” et le “Sud” sont des métaphores spatiales ne renvoyant à aucune entité politique identifiable et l'axe isla­mico-confucéen sencé menacer l'“Occident” est une fiction. Doit-on pour autant faire l'impasse sur les possibles conséquences des évolutions divergentes entre les deux rives de la Méditerranée (4)? Enfin, Pascal Boniface n'insiste pas suffisamment, à notre sens, sur le caractère illusoire et dangereux du “rêve helvétique”. On peut préférer la prospérité à la puissance, celle-ci n'en constitue pas moins un impératif. Violence maîtrisée et ordonnée, elle seule peut tempérer Behémoth (l'état de nature).

 

L'ouvrage est agréable à lire et apporte sa contribution au déchiffrement du monde post-guerre froide mais, on le voit, il n'épuise pas le sujet.

 

Louis SOREL.

 

Notes:

(1) Cf. La puissance internationale, IRIS-Dunod, Paris, 1994. Si nombre de contributions méritent d'être lues, on s'attachera particulièrement à l'étude de Hervé Le Bras sur les rapports entre guerre et population.

(2) En l'absence d'un Léviathan international, c'est-à-dire d'un centre de pouvoir disposant effectivement du monopole de la violence physique légitime, la scène mondiale est par nature anarchique. Les perspectives d'anarchie internationale dres­sées par Pascal Boniface renvoient à l'absence, depuis la fin du système Est-Ouest, de puissance hégémonique. Une puis­sance hégémonique est une puissance assumant des responsabilités internationales et dont la domination est par là-même perçue comme légitime par ses alliés. Les Etats-Unis sont aujourd'hui une puissance dominante à la recherche d'avantages unilatéraux.

(3) Cf. Régis Debray, Critique de la raison politique, Gallimard, Paris, 1981 (réédité en 1987).

(4) Dans son dernier ouvrage, Pierre Lellouche, chargé de mission auprès du Président la République française, s'inquiète du “formidable déséquilibre entre une Europe riche et vieillissante qui, ne renouvelant plus ses générations, se suicide len­tement, et un Sud pauvre, politiquement instable, en pleine expansion démographique”. Cf. Pierre Lellouche, Légitime dé­fense. Vers une Europe en sécurité au XXI° siècle, Editions Patrick Banon, 1996.

samedi, 18 octobre 2008

Entretien avec M. Veneziani (1995): démocratie participative

marcello_veneziani.jpg

 

Archives de "Synergies Européennes" - 1995

Pour une nouvelle politique, une démocratie participative, communautaire et décisionniste

 

Entretien avec Marcello Veneziani

 

Q.: Dans votre dernier livre Sinistra e destra (= Gauche et droite), vous accusez le système majoritaire d'avoir enfoncé les partis dans le ”politicantisme”. Mais ce ”politicantisme” n'est-il pas plutôt dû à l'enlisement des idéologies, qui a permis le dialogue civil?

 

MV: Je ne crois pas que le système majoritaire a en soi provoqué cette situation. Je crois en revanche que ce sont les sujets politiques qui ont interprété le système majoritaire de cette façon. Le “politicantisme” naît de la tentative de recentrer les instances de la gauche et de la droite, dans l'espoir d'obtenir un consensus, même dans le ventre modéré de notre paysage politique. Je crois que le “politicantisme” est un échec aujourd'hui, tant sur le plan projectuel (on ne peut plus formuler de projet réel) parce qu'on n'a plus d'idées, que sur le plan concret, parce qu'on est devenu incapable de gouverner. Nous avons débouché sur une phase où la politique reste suspendue entre les idées et les faits et se contente d'images et de paroles.

 

Q.: Quelles sont les perspectives actuelles de créer des idées réalistes et réalisables et de formuler des programmes réels?

 

MV: Je crois que de telles perspectives sont liées à la qualité des classes dirigeantes qui, en ce moment, me semble fort décadentes, ce qui implique, forcément, que les perspectives sont difficiles. Je crois que toutes les “agences civiles”, à commencer par les journaux, devraient se poser la question et proposer des hypothèses, ensuite et surtout, solliciter les forces politiques à présenter des programmes clairs et distincts qui ne sont pas de simples paroles et ne se fondent pas sur de simples slogans. Je pense que c'est sur cette base que l'on pourra attirer l'attention des électeurs sur les idées, même si nous sommes aujourd'hui dans un pays un peu démotivé à la suite de deux années d'espérance révolutionnaire où les concrétisations n'ont pas abouti.

 

Q.: Vous accusez la droite d'être hostile non seulement à la culture de gauche mais à toute forme de culture. Je ne comprends pas votre raisonnement car la droite, et vous-même, s'est donné pour modèle celui de l'intellectuel gramscien...

 

MV: C'est vrai. Mais ce n'est pas là toute la vérité. Il est vrai toutefois que nous avons, voici quelques années, identifier l'intellectuel à l'intellectuel organique de gauche, parce que la droite restait hostile à la libre pensée. La droite a cru que l'idéal de ses militants devait être de croire, d'obéir et de combattre, d'où l'idée que l'on puisse penser, émettre des objections, était incompatible avec cet idéal quiritaire. A travers mes multiples expériences personnelles, je puis effectivement témoigner du fait qu'il est difficile de concilier l'engagement absolu et la défense de sa propre liberté d'expression et son propre esprit critique. Je crois que c'est une tare de la droite de se méfier à ce point de la culture, ce qui, par ailleurs, ne rend pas justice à la richesse des références culturelles que pourrait avancer la droite: ces références mériteraient d'être bien plus amplement défendues et illustrées dans les cadres politiques actuels.

 

Q.: La gauche, écrivez-vous, projette vers l'avenir un modèle de société préconçu, tandis que la droite prend acte de la société telle qu'elle est. Donc, si la droite se met à son tour à formuler des projets futuristes de société, elle perd sa nature, ou est-il possible d'envisager une droite qui propose une nouvelle architecture sociale?

 

MV: La marque la plus profonde de la gauche, c'est la recherche d'un monde meilleur, d'un monde nouveau faisant abstraction des réalités histroriques, concrètes, faisant abstraction des traditions de tous les pays, de tous les peuples. L'idée de “pays normal” qu'envisagent de promouvoir ou de construire des hommes de gauche tels Bobbio, Foa, ou, plus récemment, D'Alema, est en fait une Italie imaginée, une Italie qui doit être faite et non pas une Italie qui est. Je crois effectivement que le trait fondamental de la gauche est cette propension à l'utopie, cette volonté d'avancer l'idée de libération comme émancipation de tous les liens et de toutes les traditions.

 

De l'autre côté, la culture de droite se fonde sur l'enracinement, sur le besoin d'enraciner ses propres expériences politiques ou sa propre existence dans une culture précise, non remise en cause, sur des valeurs civiles ou religieuses léguées. Tels sont à mon sens les grands principes qui divisent la gauche et la droite. Cependant, si on regarde les réalités politiques de plus près, on constatera que le paysage politique est si bouleversé qu'il est possible désormais de découvrir des gauches droitières et des droites gauchisantes, si bien que pour finir, gauches et droites s'acheminent vers l'annulation d'elles-mêmes et finissent par ne plus rien représenter du tout.

 

Q.: Quelles sont les formes politiques de la “Révolution Conservatrice” que vous avez théorisées?

 

MV: Je crois que la révolution conservatrice moderne est l'idée d'une démocratie participative, communautaire et décisionniste, c'est-à-dire d'une démocratie qui, institutionnellement, s'exprime à travers un pacte direct et fiduciaire, à travers un rapport direct entre gouvernants et gouvernés, à travers l'élection directe de l'exécutif mais qui aurait comme équivalent, précisément, ce populisme, que l'on définit toujours péjorativement, et qui devrait être le trait fondamental de la droite moderne, c'est-à-dire la capacité d'interpréter le tissu national et populaire d'un pays en termes modernes.

 

Q.: Vous écrivez aussi que l'ennemi naturel de la droite n'est pas la gauche mais le nihilisme des valeurs qui se profile derrière celle-ci. Ne pensez-vous pas que le libéralisme pur que la droite italienne a adopté sans restriction est une forme de soft-idéologie, donc de nihilisme?

 

MV: L'adoption de ce libéralisme pur procède d'une lacune: la droite politique n'a pas interprété les phénomènes politiques et civils à la lumière d'une tradition culturelle bien ancrée. Si elle accepte la logique bipolaire qui est une logique d'agrégation d'éléments divers, si elle accepte l'idée que le sujet politique Berlusconi représente la variante la plus importante de notre système politique, son discours devient compréhensible. Quand on ne fait pas la distinction entre la plan politique et le plan culturel, on risque de devenir le vecteur sain ou malsain d'une variante floue du nihilisme qui pourrait éventuellement prendre les traits d'un ultra-libéralisme ou d'un libéralisme; parce que le nihilisme, finalement, n'a pas a priori une connotation de droite ou de gauche en soi; son trait essentiel c'est de provoquer la dissolution des identités et de leurs significations, en empruntant le véhicule d'une culture de type progressiste pour déboucher sur une culture globale “modérée”. En bout de course, on vivra la coexistence de formes sociales, politiques et économiques de type capitaliste.

 

Q.: La patrie, les racines, les valeurs communautaires: comment peuvent-elles survivre à notre époque qui rapidement dépasse tout, brûle tout, annulle toutes les valeurs. Dans un tel contexte, faut-il construire ce que Domenico Fisichella a appelé le “droite néo-futuriste”?

 

MV: Justement, si l'on veut éviter la présence de ce “novisme” continuel, on doit construire des contre-poids solides. Ces contre-poids ne peuvent être que les racines qui permettent de gouverner la modernité. Celui qui croit que l'on doit accepter passivement la modernité devient en fait une victime de la modernité et cesse d'être un acteur politique et historique, devient un sujet passif. Je crois qu'il faudra bien vite redécouvrir ce fameux “modernisme réactionnaire”, qu'avait naguère définit un historien des idées américain, en soulignant la capacité de ce complexe idéologique à affronter efficacement la modernité, ses dégâts, mais aussi ses innovations positives. Ce “modernisme réactionnaire” s'est montré capable d'affronter son époque en se basant sur des anticorps solides; en effet, quand il n'y a pas d'anticorps, on ne peut plus affronter et maîtriser cette modernité: on la subit, tout simplement.

 

Q.: Vous nous signalez la présence d'un mal endémique de la politique italienne: l'extrémisme, qui trahit une absence historique de pensée modérée. Comment expliquez-vous ce phénomène?

 

MV: Je tiens à dire, d'abord, que je ne considère pas comme un mal en soi la présence, dans toute notre culture politique, d'une culture “immodérée”, c'est-à-dire rétive aux enfermements de la modération. Car le “modératisme” n'est rien d'autre que le déguisement d'une culture faite d'“arrangements”, de compromis au sens le plus vulgaire du terme. L'“immodératisme” peut donc souvent être positif. On ne peut juger une culture politique au taux de modération qu'elle porte en elle. Je préfère la juger à son taux de vérité, de dignité et de crédibilité. Je n'accorde aucune valeur axiologique au fait d'être modéré ou de ne pas l'être, mais je reste convaincu que l'extrémisme en soi reste, comme le disait Lénine, une “maladie infantile”.

 

Q.: Quels risques court-on de voir s'affirmer les dites “minorités illuminées” dans notre société?

 

MV: Le risque est de voir se créer une nouvelle forme de jacobinisme porté par une secte d'illuminés qui décrètera qui sera normal et qui ne le sera pas, qui valorisera ceux qui se mouvront correctement dans l'esprit du temps et qui condamnera ceux qui resteront incorrectement en opposition à cet esprit, qui appuira seulement ceux qui se placeront dans la logique du présent et du progrès. Tel est le plus grand danger qui nous guette et qui semble prendre forme dans certains cénacles de gauche. Cette volonté de contrôle et d'inquisition est née de la conviction que le peuple n'exprime que des consensus inadéquats dérivés de réflexes et d'instincts frustes, vulgaires, rétrogrades, brutaux et réactionnaires. Et de la conviction que seules les minorités éclairées peuvent stabiliser le pays dans un projet de modernité. Voilà une dérive condamnable, qui nous mènera à l'intolérance la plus rabique, à l'exemple du jacobinisme français. Il convient de dénoncer ce danger.

 

Q.: Nous allons voir. Mais le Mezzogiorno a connu un précédent, notamment la réaction du peuple face à la République Parthénopéenne de 1799, réprésentant le phénomène politique le plus “avancé” de son temps. Dans cette construction révolutionnaire, imitée de la France, le comportement de la minorité éclairée face au peuple confirme votre thèse...

 

MV: En observant cette révolution de 1799, je partage les positions de Vincenzo Cuoco qui affirmait que les révolutions importées, imposées de haut par des sectes éclairées sont surtout des révolutions qui ne durent jamais longtemps parce qu'elles ne s'ancrent pas solidement dans le peuple; ce sont des révolutions soudaines et éphémères, non des révolutions qui s'imbriquent dans les faits. Il me semble important de relier les racines organiques d'un peuple à sa culture et à sa manière de représenter ses humeurs, son art de vivre et ses intérêts matériels. A partir du moment où ce circuit de réciprocité s'interrompt, nous avons affaire à la folie jacobine, où la violence de la minorité éclairée s'exerce sur la majorité; dans une phase ultérieure, quand il y a scrutin, la majorité dégagée exerce alors son pouvoir sans ménagement et fait subir mille et une vexations aux minorités, ce que nous pouvons voir dans les variantes démagogiques des démocraties de masse. Signalons aussi la violence pédagogique exercée par les minorités actives sur la majorité.

 

Q.: Vous affirmez que la liberté n'est pas une valeur, mais la condition qui permet aux valeurs de s'affirmer. Votre affirmation ne pourrait-elle pas servir d'alibi aux liberticides pour mettre un terme à l'exercice de la démocratie sous prétexte que celle-ci ne laisse pas d'espace à l'expression de leurs propres valeurs minoritaires? Ils légitimeraient ainsi leur propre pouvoir de minorité éclairée, ce qui serait un processus totalement négatif, comme vous venez de l'indiquer.

 

MV: Je crois que la liberté court effectivement le danger de tomber entre les mains de ceux qui l'affirment par pure rhétorique, sans jamais définir ce que doit être la démocratie au concret. Je crois que la liberté est une condition de vie et non pas une valeur. La liberté est une condition pour l'exercice des valeurs, pour exprimer sa différence et sa personnalité: une condition indispensable. Si je retiens la liberté comme indispensable, je crois donner à la valeur liberté une importance fondamentale, sans laquelle il est impossible d'avoir une société civile avancée; je perçois un danger chez ceux qui utilisent le terme “liberté” ou “libéralisme” comme une simple étiquette et mettent dans cette coquille vide tous leurs fantasmes, toutes les fables auxquelles il croient.

 

Q.: Qu'y a-t-il au-delà de la droite et de la gauche?

 

MV: Je crois qu'on va redéfinir complètement la droite et la gauche et qu'on leur donnera peut-être de nouveaux noms. Personnellement, je ne me batterai pas pour ces vocables et je ne briserai aucune lance pour les restaurer. Si les prochaines représentations bipolaires se nomment encore gauche et droite, je les nommerai aussi ainsi, mais si elles se nomment autrement, je les nommerai autrement. Je cherche bien plutôt à préciser une opposition entre un type de culture libéral et un type de culture communautaire, en espérant que cette distinction sera de quelque utilité pour comprendre l'avenir.

 

Q.: Si vous deviez créer un parti sur base de vos réflexions comment le réaliseriez-vous? Quelles allures aurait le parti de Marcello Veneziani?

 

MV: Je vous dis tout de suite que je n'ai pas la moindre intention de créer un parti. Ceci dit, je pense que pour faire un parti qui représenterait les besoins et les malaises d'un peuple, il faudrait d'emblée le concevoir comme d'inspiration communautaire et décisionniste tout à la fois. Ce parti devrait aussi représenter les exigences diffuses d'un pouvoir influent, c'est-à-dire d'un pouvoir suffisamment fort et capable de satisfaire correctement, sans recours à la coercition, le besoin du pays en décisions claires et nettes. Et, en même temps, le besoin de le réamarrer aux racines communautaires, en sachant que l'unique légitimation qu'une force politique peut avoir est justement celle d'interpréter l'âme d'un pays selon un mode actuel, non anachronique. A partir du moment où la politique n'incarne plus l'âme d'un pays, on n'a plus besoin de politique, il suffit d'avoir des administrateurs et des technocrates qui assureront sans heurts leurs condominium. Ensuite, il me paraît nécessaire que la politique conserve ce zeste de passion civile sans lequelle elle n'a plus raison d'être.

 

Q.: Que pensez-vous de la droite actuelle? Vous avez eu des mots très durs à son égard.

 

MV: Il faut tenir compte du fait que le niveau de ces personnages de la droite, tant d'un point de vue humain que d'un point de vue stratégique et politique, est plutôt bas. En Italie existe une droite profonde mais je crois que la droite majoritaire l'a supprimée; par ailleurs, il existe une culture de droite qui a ses lettres de noblesse et qui s'est enraciné dans la paysage culturel italien. Au milieu de tout cela, nous avons des sujets politiques qui n'ont pas la moindre attention de les écouter. Je pense qu'aujourd'hui cette force de droitesans profil, sans profondeur ni culture, entre dans une phase de pure jactance où communient et la gauche et la droite, avant de participer sans vergogne aux structures du pouvoir. Elle mobilisent les foules sur les places publiques pour des motifs dépourvus de toute noblesse.

 

Q.: Existe-t-il une véritable culture de droite actuellement? Vous avez opéré des distinctions très nettes entre la droite politique et la droite culturelle.

 

MV: Je pense que la culture de droite existe surtout au niveau des racines; il existe en effet un grand patrimoine culturel de droite mais qui baigne dans l'indifférence la plus totale, auquel la caste politique manifeste de l'hostilité. Un patrimoine qui n'est finalement que peu de chose. Mais pourquoi? Il en subsiste peu de chose à l'état actif car la droite a subi l'hégémonie culturelle de la gauche, soit un pouvoir culturel qui exerçait la contrainte contre tous ceux qui osaient penser différemment. Face à cette terreur, elle a dû pratiquer le mimétisme ou se doter d'un corpus culturel complètement éloigné de la politique, où ses protagonistes vivaient mal leur frustration d'être marginalisés. Mais il faut dire aussi que la droite politique est incapable de penser une politique culturelle; en disant cela, je pense à ce que le communisme de Togliatti a été capable de faire à gauche; les droites qui ont essayé d'imiter cette stratégie payante, en fondant des maisons d'édition, des centres culturels, des revues et des journaux, ne sont pas arrivées à la cheville de leur modèle communiste. Je connais bien l'histoire des revues de droite: c'est une histoire perpétuelle d'homicides et de suicides culturels, causés par ceux qui ne toléraient pas les expressions non aliénées dans le monde de la droite.

(propos recueillis par Matteo Bua et Nino Reina; ex Parolibera, n°3/95; traduction française: Robert Steuckers).

vendredi, 17 octobre 2008

Wallonie: futur nouveau département mosan de la Jacobinie?

2334082959_3fc132f5b4_o.jpg

 

Brecht ARNAERT:

La Wallonie: futur nouveau département mosan de la Jacobinie

 

Le grand titre du “Soir”, le 29 juillet 2008: “Un Wallon sur deux se verrait bien Français”. Jubilation générale dans les cercles flamingants! Moi, qui en fait partie, je n’ai nullement jubilé! Je trouve très triste que les citoyens de Wallonie croient si peu en eux. La Wallonie a tous les atouts qu’il faut pour devenir une république indépendante en Europe  —une population en générale plus jeune, beaucoup d’espace pour les entreprises, un bon paquet de sites attrayants pour les touristes. Et voilà qu’une moitié de cette population choisit le rattachement à la France si la Belgique venait à éclater. Une mauvaise idée...

 

L’idée que la France s’adjoindrait un 101ème département n’est pas vraiment neuve.  L’idée est de fait française à l’origine. Les recherches des historiens ont pu prouver que la France, ou tous les autres sujets politiques qui ont donné le ton dans ce pays à différentes époques de l’histoire, a tenté non moins de cinquante-quatre fois de s’emparer du territoire qui fait aujourd’hui la Belgique. Ces efforts relèvent d’une pensée stratégique à laquelle les Flamands ne comprennent absolument rien: la géopolitique.

 

La ligne directrice que les dirigeants de la France ont suivie au cours de toutes ses années est la volonté de se doter de frontières naturelles. Dans le Sud le processus d’unification de la France s’est arrêté aux Pyrénées; à l’Est, il a buté contre les Alpes et à l’Ouest, forcément, il s’est arrêté à l’Océan Atlantique.  Mais le Nord a toujours posé problème dans ce processus d’unification. Le rêve constant de la France a été de consolider les frontières de son territoire en l’étendant jusqu’au Rhin. D’où la querelle pour la maîtrise de la Lorraine et de l’Alsace, qui n’a été réglé que récemment, ce bloc territorial étant riverain du Rhin sur une distance de 200 km, de Bâle à Karlsruhe.

 

Aux Pays-Bas, l’entreprise a toujours échoué.  Les régions des Pays-Bas ont sans cesse été le théâtre de dizaines de petites et grandes guerres. C’est surtout par l’intervention de l’Angleterre, qui a toujours voulu empêcher la France de s’adjoindre le delta du Rhin, que Paris n’a jamais pu satisfaire ses vieilles ambitions. A la fin du 16ième siècle, les Pays-Bas du Nord ont pu se maintenir en tant que république indépendante, si bien que la France a dû adapter et limiter ses ambitions. Dorénavant, ce ne serait plus le Rhin que l’on viserait directement, mais l’Escaut.

 

Plus tard, l’industrialisation prit son envol. Le sol, en tant que facteur économique, et donc en tant que facteur politique, perdait sans cesse de son importance. Dorénavant, ce n’était plus la superficie d’un pays qui comptait, mais son importance en tant que débouché. Acquérir du territoire, pour devenir plus puissant, n’était plus une nécessité: conquérir des marchés en proposant des produits moins chers, concurrencer des entreprises étrangères ou les reprendre, et, par toutes ces manoeuvres, contrôler l’économie du territoire visé, telles étaient les nouvelles stratégies mises en oeuvre pour annexer subrepticement un pays.

 

C’est dans un tel cadre qu’il faut placer l’histoire de la Belgique. Le pays semble avoir été impossible à conquérir militairement et politiquement pendant des siècles; en revanche, sur le plan économique, il paraissait bien plus vulnérable. Les Wallons l’ont toujours su. La SA Belgique, je veux dire la “Société Générale”, qui, au départ, était une société néerlandaise, a été rapidement infiltrée et noyautée par des éléments français. En accord avec les fondateurs français de la Belgique, du style d’un Charles Rogier, qui fournissaient les licences étatiques pour l’exploitation des mines, la Wallonie a très vite été littéralement pompée et vidée. Par conséquent, nous pouvons dire, à ce stade-ci de notre modeste démonstration, que la Wallonie n’a jamais montré beaucoup de solidarité pour la Flandre et n’a guère délié sa bourse, mais, pour sa défense, on peut dire que nos frères wallons n’ont jamais vraiment été riches.

 

Les bénéfices apportés par le sous-sol wallon ne sont jamais tombés dans la propre escarcelle des Wallons, mais coulaient allègrement vers le centre de l’établissement belge, soit la bourgeoisie bruxelloise qui, par la grâce de ses nouvelles richesses, espérait entrer triomphalement dans le panthéon du gotha français. Jusque tard dans le dix-neuvième siècle, ces milieux demeuraient convaincus que la Belgique, vidée économiquement, dépouillée ainsi de sa réelle indépendance, allait finir annexée par la France. Cette annexion n’a cependant jamais eu lieu car la bourgeoisie bruxelloise francophile a dû compter avec l’émergence de divers mouvements démocratiques et populaires, hostiles à cette perspective. Tandis que cette bourgeoisie si situait elle-même dans le cadre de “l’opinion publique” française, les classes populaires, moins fortunées, développèrent deux opinions publiques différentes, la flamande et la wallonne. La bourgeoisie bruxelloise et une partie importante de la noblesse demeurèrent ainsi des “Français de seconde main”, réchignant devant l’évolution des mentalités au sein du peuple.

 

A l’heure actuelle, il ne faut pas aller chercher bien loin le lien avec la France. La vente de la Société Générale au groupe français Suez en 1988 et la conquête récente d’Electrabel entrent dans ce schéma: la Belgique doit rester la petite soeur de la “Grande Patrie”. Maintenant que le dernier espoir d’obtenir le tout gros pactole est perdu, on s’aperçoit combien l’économie belge est fragile et vulnérable: dans tous les secteurs utilitaires, comme l’eau, le gaz et l’électricité, les décisions sont prises à Paris. Ou alors, y a-t-il une autre explication pour cette augmentation subite de 20% des prix de l’énergie? L’uranium serait-il tout d’un coup devenu 20% plus cher? Ou les centrales d’Electrabel n’étaient-elles quand même pas sorties de la comptabilité? Je pensais le contraire.

 

L’option, que prend la Wallonie sur la France, au cas où la Belgique disparaîtrait, ne me paraît donc pas une bonne idée. Quel intérêt la population wallonne aurait-elle à être gouvernée à nouveau depuis une ville qui se situe en dehors de son propre territoire? Et pourquoi voudrait-elle se rendre dépendante d’une grande puissance qui, dans le passé, et en dépit de sa parenté culturelle et linguistique, l’a toujours exploitée, pompée et vidée, par l’intermédiaire d’une bourgeoisie belge? Namur pourrait tout aussi bien devenir la capitale d’un pays voisin de la Flandre, où il fait bon vivre, avec ses forêts, ses grottes et ses rivières, autant d’atouts touristiques. Et quel pays, mieux que la Flandre, pourra soutenir la Wallonie quand elle se constituera comme le vingt-huitième Etat d’une Europe unie?

 

Brecht ARNAERT.

(article paru dans  la revue “Meervoud”, Bruxelles, n°139 – septembre 2008; trad. franç.: Robert Steuckers).

jeudi, 16 octobre 2008

La société immédiate

9782702138434.jpg
SYNERGIES EUROPEENNES - Ecole des cadres/Wallonie - Lectures/Octobre 2008
La Société immédiate

Paru le 01/2008 - Ed. Calmann-Lévy, 2008 

Sciences Humaines et Essais 01/2008

La communication a connu deux révolutions : celle née de l’invention de l’imprimerie par Gutenberg en 1456 – qui a mis des siècles à concerner le grand public et fut longtemps au service exclusif des élites, véhiculant d’abord des connaissances et des idées –, et la révolution numérique que nous vivons aujourd’hui, foudroyante, sans contrôle, et qui est surtout un moyen de divertissement et de satisfaction rapide des désirs. Dans cet essai percutant, Pascal Josèphe nous démontre que la révolution numérique contient en germe la ruine de la notion de projet, qui suppose la médiation du temps, et lui substitue le culte de l’immédiateté. La technologie et l’économie raccourcissent en effet le délai entre l’expression des besoins ou des désirs et leur satisfaction. En résulte une discordance des temps, c’est-à-dire une dé-synchronisation des temps individuel et social qui fait exploser les rythmes fondant la vie en collectivité. Soumis comme nous le sommes au bombardement incessant des sollicitations externes, nous ne disposons plus des outils référentiels permettant de faire des choix : ni certitudes (religion, idéologie politique), ni lieu, ni temps pour échanger avec les autres. Et Internet ? objectera-t-on. Comble du paradoxe : plus la communication généralisée est exaltée dans notre société postmoderne, moins sa fonction médiatrice est prise en compte. Nous sommes gavés d’information et affamés de sens. Comment dès lors résister aux innombrables tentations dont nous sommes l’objet ? 
L’avènement de l’ère de l’immédiateté ne risque-t-il pas de nous ramener à des temps anté-civilisés ? s’interroge Pascal Josèphe. « Je veux, je prends », « Je mise, je gagne », « J’ai envie, je consomme. » En d’autres termes, n’est-elle pas en train de réveiller la bête qui sommeille en nous et que dix mille ans de civilisation avaient domestiquée ?

Carl Schmitt: Etat, Nomos et "grands espaces"

carl%20schmitt.jpg

 

Carl Schmitt: Etat, Nomos et “grands espaces”

 

La maison d'édition berlinoise Duncker & Humblot, qui publie l'essentiel de l'œuvre de Carl Schmitt, a eu le mérite l'an passé d'avoir publié une anthologie d'articles définitionnels fondamentaux du juriste et polito­logue allemand (CS, Staat, Großraum, Nomos - Arbeiten aus den Jahren 1916-1969), magistralement pré­facés par Günter Maschke. Ce fut sans doute, à nos yeux, le nouveau livre le plus important en philoso­phie politique exposé à la Foire de Francfort en octobre 1995. Mais c'est aussi un livre fondamental pour comprendre dans tous ses rouages le monde d'après la Guerre Froide. Günter Maschke, un des plus grands spécialistes allemands de Carl Schmitt, mérite nos éloges pour avoir annoté avec une remar­quable précision tous ces articles et surtout les avoir resitués dans leur vaste contexte. Maschke fournit en effet au lecteur  —à l'étudiant comme à l'érudit—  des commentaires et des analyses très mé­thodiques et très fouillées. Staat, Großraum, Nomos est divisé en quatre parties: 1. Constitution et dicta­ture; 2. Politique et idée; 3. Grand-Espace et Droit des gens et 4. Du Nomos de la Terre. A notre avis, l'essentiel pour notre monde en effervescence depuis la chute du Mur réside dans les deux dernières par­ties.

 

Cette nouvelle anthologie a l'immense mérite de concentrer toute son attention sur un aspect moins connu, mais toutefois déterminant, de la pensée et de l'œuvre de Carl Schmitt: la géopolitique. Notre “Centre de Recherches en Géopolitique” avait jadis déjà mentionné quelques-uns de ces textes fonda­mentaux, mais le vaste ensemble d'articles et d'essais sélectionnés par Maschke permet de jeter, sur cette géopolitique schmittienne, un regard beaucoup plus synoptique.

 

Le “Grand-Espace”

 

Notre Centre a publié depuis 1988 un certain nombre de textes de géopolitique; depuis 1991, nous réflé­chissons intensément sur le nouvel ordre mondial après l'effondrement de l'Union Soviétique. L'ère nou­velle sera très vraisemblablement marquée par la notion de “Grand-Espace”, toutefois dans un sens peut-être différent de celui que lui donnait Carl Schmitt. Commençons notre analyse par une citation de Joseph Chamberlain qui illustre bien l'intention des géopolitologues et de Schmitt lui-même: «L'ère des petites na­tions est révolue depuis longtemps. L'ère des empires est advenue» (1904). Mais l'effondrement de l'URSS nous enseigne que l'ère des empires traditionnels est elle aussi révolue, si l'on considère toutefois que le dernier des empires traditionnels a été l'Union Soviétique. A la place des empires, nous avons dé­sormais les “Grands-Espaces”. Dans son essai Raum und Großraum im Völkerrecht, Schmitt définit clai­rement le concept qu'il entend imposer et vulgariser: «Le “Grand-Espace” est l'aire actuellement en ges­tation, fruit de l'accroissement à l'œuvre à notre époque, où s'exercera la planification, l'organisation et l'activité des hommes; son avènement conduira au dépassement des anciennes constructions juridiques dans les petit-espaces en voie d'isolement et aussi au dépassement des exigences postulées par les systèmes universalistes qui sont liés polairement à ces petits-espaces».

 

Schmitt cite Friedrich Ratzel et montre, en s'appuyant sur ces citations, comment, à chaque génération, l'histoire devient de plus en plus déterminée par les facteurs géographiques et territoriaux. C'est d'autant plus vrai aujourd'hui pour notre génération, car la bipolarité d'après 1945 fait place à une multipolarité, dont on ne connaît pas encore exactement le nombre de protagonistes.

 

Maschke, dans ses commentaires sur l'article intitulé Völkerrechtliche Großraumordnung mit Interventionsverbot für raumfremde Mächte, mentionne à juste titre la théorie de Haushofer qui envisa­geait de publier un Grundbuch des Planeten, un livre universel sur l'organisation territoriale de la planète. La géopolitique, selon Haushofer, ne devait pas servir des desseins belliqueux  —contrairement à ce qu'allèguent une quantité de propagandistes malhonnêtes—  mais préparer à une paix durable et éviter les cataclysmes planétaires du genre de la première guerre mondiale. Ce Grundbuch  haushoférien devait également définir les fondements pour maintenir la vie sur notre planète, c'est-à-dire la fertilité du sol, les ressources minérales, la possibilité de réaliser des récoltes et de pratiquer l'élevage au bénéfice de tous, de conserver l'“habitabilité” de la Terre, etc., afin d'établir une quantité démographique optimale dans cer­tains espaces. Les diverses puissances agissant sur la scène internationale pratiqueraient dès lors des échanges pour éviter les guerres et les chantages économiques. Certes, on peut reprocher à ce Grundbuch de Haushofer, un peu écolo avant la lettre, d'être utopique et irénique, mais force est de cons­tater que ses idées étaient fondamentalement pacifistes et qu'elles ne coïncidaient pas avec les projets agressifs de l'Allemagne nationale-socialiste. Pourtant, Maschke rappelle que Schmitt et Haushofer ne correspondaient apparemment pas et ne s'étaient jamais vus.

 

Cet article sur le völkerrechtliche Großraumordnung... constituaient une tentative d'introduire en Europe une “doctrine de Monroe” au cours de la seconde guerre mondiale. Dans son commentaire, Maschke rap­pelle les thèses d'un géographe américain, Saul Bernard Cohen, qui a eu le mérite de maintenir à flot les idées géopolitiques avant leur retour à l'avant-plan. Le concept cohenien de “région géopolitique”, déve­loppé depuis les années 60 et actualisé aujourd'hui, s'avère pertinent dans le contexte actuel de “fin de millénaire”. Ces idées de “grand-espace” et de “région géopolitique” se retrouvent également chez les deux experts espagnols de droit international, fortement influencés par Schmitt: Camilo Barcia Trelles et Luis Garcia Arias.

 

L'étude de Schmitt Das Meer gegen das Land (La mer contre la terre) de 1941 contient le noyau essentiel du futur livre de Schmitt Land und Meer. Maschke pense que Schmitt a été influencé par la lecture de Vom Kulturreich des Meeres (1924) de Kurt von Boeckmann, et de Vom Kulturreich des Festlandes (1923) de Leo Frobenius.

 

Une recension écrite par Schmitt en 1949 garde toute sa pertinence aujourd'hui, souligne Maschke. Elle s'intitule Maritime Weltpolitik. Schmitt y écrit: «La domination de l'espace aérien et la possession de moyens de destruction modernes pourront à elles seules s'assurer la domination sur la terre et sur la mer. [Par ces moyens techniques], notre planète est encore devenue plus petite. En comparaison avec les structures qu'érige la technique moderne sur la planète, la Tour de Babel apparaît comme une entreprise très modeste. La Mer a perdu sa puissance en tant qu'élément et notre Terre est devenue un aérodrome» (p. 479 de l'édition de Maschke).

 

Quelques années après la seconde guerre mondiale déjà, Schmitt tire la conclusion: dans le futur, le con­trôle de la planète s'exercera par le biais des communications aériennes (et plus tard spatiales); la Terre et la Mer perdront de l'importance. Le nouvel espace  —jeu de mot!—  sera l'espace.

 

Schmitt mentionne l'œuvre de l'Américain Homer Lea (1876-1913) dans sa recension. Lea avait terminé sa carrière comme conseiller militaire de Sun Yat Sen en Chine. Il avait écrit des livres importants, largement oubliés aujourd'hui: The Day of the Saxon (1912) et The Valor of Ignorance (1909). Le polémologue suisse Jean-Jacques Langendorf, ami et complice de Maschke, avait préfacé une réédition allemande de The Day of the Saxon et prépare actuellement une vaste étude sur le écrits militaires et géopolitiques de Lea.

 

Le Nomos

 

Penchons-nous maintenant sur la quatrième partie de cette anthologie, qui commence par la définition que donne Schmitt du “nomos”: «Il est question d'un Nomos de la Terre. Ce qui signifie: je considère la Terre  ­l'astéroïde sur lequel nous vivons—  comme un Tout, comme un globe et je recherche pour elle un ordre et un partage globaux. Le terme grec “nomos”, que j'utilise pour désigner ce partage et cet ordre fondamental, dérive de la même étymologie que le mot allemand “nehmen” (= prendre). Nomos signifie dès lors en première instance, la “prise”. Ensuite, ce terme signifie, le partage et la répartition de la “prise”. Troisièmement, il signifie l'exploitation et l'utilisation de ce que l'on a reçu à la suite du partage, c'est-à-dire la production et la consommation. Prendre, partager, faire paître sont les actes primaires et fonda­mentaux de l'histoire humaine, ce sont les trois actes de la tragédie des origines» (Maschke, p. 518).

 

Dans une étude datant de 1958 et intitulée Die geschichtliche Struktur des Gegensatzes von Ost und West  (= La structure historique de l'opposition entre l'Est et l'Ouest), Schmitt mentionne quelques-unes des théories géopolitiques de base énoncées par Sir Halford John Mackinder. Il se réfère au géographe britannique quand il affirme que l'opposition entre puissances continentales et puissances maritimes constitue la réalité globale de la guerre froide. Quand il commente cette étude, Maschke commet la seule erreur que j'ai pu trouver dans son travail par ailleurs exemplaire. L'“Ile du monde” selon Mackinder est l'Europe + l'Asie + l'Afrique et non pas l'“hémisphère oriental” comme le dit Maschke (p. 546). Celui-ci af­firme également que Mackinder avait été influencé par le géographe allemand Joseph Partsch. Je ne pré­tends pas être un expert dans l'œuvre de Mackinder, mais c'est bien la première fois que je lis cela...

 

Nous avions déjà eu l'occasion de recenser un ouvrage important de Schmitt, Gespräch über den neuen Raum (= Conversation sur le nouvel espace). C'est l'une des contributions les plus pertinentes de Schmitt à la géopolitique depuis 1945. Le message de Schmitt dans ce travail (et dans d'autres), c'est un appel à la constitution de différents “Grands-Espaces”, ce qui semble advenir aujourd'hui, surtout depuis la Guerre du Golfe. La théorie du pluralisme des Grands-Espaces, Schmitt l'a bien exprimée dans un autre texte figurant dans l'anthologie de Maschke: Die Ordnung der Welt nach dem Zweiten Weltkrieg (= l'Ordre du monde après la seconde guerre mondiale). Schmitt y écrivait: «De quelle manière se résoudra la con­tradiction entre le dualisme de la Guerre Froide et le pluralisme des Grands-Espaces...? Le dualisme de la Guerre Froide s'accentuera-t-il ou bien assistera-t-on à la formation d'une série de Grands-Espaces, qui généreront un équilibre dans le monde et, par là même, créeront les conditions premières d'un ordre paci­fique stable?» (Maschke, p. 607).

 

En 1995, nous connaissons la réponse à la question que posait Schmitt en 1962. Le dualisme n'est plus et nous pouvons assister à l'émergence (timide) de Grands-Espaces, qui pointent à l'horizon. Nous ne pouvons toujours pas deviner quelle sera l'issue de ce processus. Des changements surviendront indubi­tablement dans le cours des choses mais nous pouvons d'ores et déjà penser que l'ALENA et l'UE seront deux de ces Grands-Espaces, et ils coopéreront sans doute avec le Japon. Le Lieutenant-Général William E. Odom de l'US Army, aujourd'hui à la retraite, a lancé quelques éléments dans le débat visant à structurer le système qui prendra le relais de celui de la Guerre Froide dans son ouvrage How to Create a True World Order (= Comment créer un véritable Ordre Mondial?; Orbis, Philadelphia, 1995). La Russie, la Chine, l'Inde, le Sud-Est asiatique et le monde musulman pourraient bien devenir des Grands-Espaces autonomes. L'Afrique continuera à végéter dans la misère, sauf peut-être le Nigéria et l'Afrique du Sud. L'attitude agressive croissante de la Chine aura sans doute pour résultat d'avertir les petites puissances d'Asie; elles prépareront dès lors leur défense contre l'impérialisme chinois à venir.

 

Dans la quatrième partie de l'anthologie de Maschke, nous trouvons encore un texte fondamental, Gespräch über den Partisanen (= Conversation sur la figure du partisan). Au départ, il s'agissait d'un dé­bat radiodiffusé en 1960 entre Schmitt et un maoïste allemand, Joachim Schickel. ce débat était bien en­tendu marqué par la grande question de cette époque: l'insurrection croissante au Vietnam. Il n'en de­meure pas moins vrai que la question de la guerilla (ou du Partisan) demeure. Le Law Intensity Warfare (= la guerre à basse intensité) continuera à faire rage sur la surface du monde et influencera les processus politiques. Résultat: le terme de “Guerre civile mondiale” acquerra sans cesse de l'importance (1).

 

Carl Schmitt n'était pas en première instance un géopolitologue. Il était un expert en droit constitutionnel et international. Toutefois, au moment où nous allons aborder le nouveau millénaire, il est temps, me semble-t-il, de remettre sur le métier les approches schmittiennes en matières géopolitiques et géostra­tégiques globales. Même si Schmitt reste une personnalité controversée (à cause des opinions qu'il a émises au début des années 30), il est devenu impossible de l'ignorer quand on élabore aujourd'hui des scénarii pour l'avenir du monde.

 

Theo HARTMAN.

(«State, Nomos and Greater Space. Carl Schmitt on Land, Sea and Space», in Center for Research on Geopolitics (CRG), Special Report no.4, Helsingborg/Sweden, 1996. Adresse: CRG, P.O.Box 1412, S-251.14 Helsingborg/Suède; traduction française: Robert Steuckers).

 

Références du livre de Maschke: Carl SCHMITT, Staat, Großraum, Nomos. Arbeiten aus den Jahren 1916-1969. herausgegeben, mit einem Vorwort und mit Anmerkungen verse­hen von Günter Maschke, Duncker & Humblot, Berlin, 1995.

 

Note:

(1) Pour une analyse complète de na notion de “Guerre civile mondiale”, cf. le manuscrit impublié de Bertil Haggman, directeur du CRG suédois, intitulé Global Civil War - A Terminological and Geopolitical Study, 1995).

Manuel de géopolitique et de géo-économie

Gauchon.jpg
SYNERGIES EUROPEENNES - Ecole des cadres - Wallonie / Lectures - Octobre 2008
Le livre de références pour nos travaux de géopolitique !!
A acquérir d'urgence !!
A lire le plus attentivement: le chapitre "Pourquoi nous combattons?"
Le monde. Manuel de géopolitique et de géoéconomie (sous la direction de Pascal Gauchon)
Pascal Gauchon (avec Elizabeth Crémieu, Olivier David, André de Séguin, Sylvia Delannoy, Eric Duquesnoy, Yves Gervaise, Dominique Hamon, Anne-Sophie Letac, Maxime Lefebvre, Frédéric Munier, Jean-Luc Suissa, Cédric Tellenne, Patrice Touchard), Le monde. Manuel de géopolitique et de géoéconomie, PUF « Major », 2008.
Le monde change. Le monde tourne. Peut-on suivre la marche du monde sans s’y noyer ? Et comment attraper notre sujet ? Par le global change, la démographie, l’urbanisation, le fossé riches/pauvres, le développement durable, la mondialisation ? A vrai dire, nul ne le sait vraiment, comme tant de paris éditoriaux le montrent. Il faut une commande, un angle de vue. Celui qu’impose une année pleine à des bacheliers de prépa commerciales ou sciences-po offre à treize auteurs réunis par P. Gauchon le défi de tout écrire en écrivant l’essentiel, en 914 pages - tout de même - décoffrées en vingt-trois chapitres pour vingt-trois semaines de labeur. Il suffit aussi d’une focale, ici géopolitique et géoéconomique qui fait s’affronter les Etats sur un champ de bataille plus financier et industriel que militaire ou politique, comme le montre le KO soviétique à la fin de la guerre froide. Faut-il voir le monde avec les géoéconomistes comme une terre de rareté et de valeur ou un regard géopolitique qui préfère le pouvoir, la puissance, l’influence ? De cette vaste analyse émergent quatre questions : les grandes entreprises ont-elles remplacé les Etats-nations ? Les réseaux sont-ils plus actifs que les territoires ? Le quantitatif (les ressources énergétiques, agricoles...) a-t-il cédé la place au qualitatif (main d’œuvre bien formée, technologie) ? Enfin, les conflits seront-ils réglés par l’économie ou la guerre ? P. Gauchon conclut une lumineuse introduction : la géoéconomie décrit le monde nouveau-né de la mondialisation tandis que la géopolitique rappelle les héritages dont nous ne sommes pas débarrassés.

Dans ce livre dense - parce qu’entièrement rédigé, on ne lui reprochera donc aucune facilité -, les auteurs travaillent beaucoup sur des chronologies : celles des phénomènes de globalisation ou de repli ; la montée en puissance d’acteurs géopolitiques et géoéconomiques nouveaux avec leurs leviers d’action : forces armées, monnaies et influence. Les enjeux des conflits sont exposés soigneusement comme des lieux d’affrontement : contrôle des hommes, des terres et des territoires, des ressources et, même, de l’environnement. Un tableau du monde unitaire et divisé rassemble, enfin, certaines données éparses par grandes régions. Il est toujours difficile de bâtir une culture générale du monde à des jeunes bacheliers sans rassembler des données en les coupant et les formatant pour les besoins des exercices. Ce haché menu qui aurait pu être préjudiciable à la réflexion n’a pas d’effets secondaires ici : un réel talent éditorial tire les fils de cette vaste toile qui prend une belle forme à la fois encyclopédique et narrative.

De ce livre, on pourrait reprendre des centaines d’argumentations sans jamais les prendre à défaut d’arguments. Ici, on les éprouve uniquement pour le plaisir de confronter ses lectures à celles des auteurs. Ainsi, la première guerre mondiale n’avait jamais été jusqu’ici envisagée comme un accident reformatant une mondialisation. Chez Grataloup, elle était présentée comme une « guerre civile européenne », alors qu’ici elle « réorganise le système monde ». Il faudrait sans doute rediscuter ce que David et Suissa appellent internationalisation, puis mondialisation et, sans doute, rappeler que ces concepts ne seront peut-être plus opératoires dans quelques décennies.

Passionnante est la seconde partie sur les « maîtres du monde ». On y voit cette sourde lutte d’influence entre deux approches conquérantes des lieux et des hommes : l’Etat et l’entreprise transnationale. Des Etats et des entreprises enchâssées dans des idées auxquelles Anne-Sophie Letac consacre un brillant chapitre, rappelant combien fascisme et communisme seraient liés à « l’âge des foules » (G. Le Bon). Les pages sur les religions sont bienvenues dans ce livre de culture générale. L’Islam y déploie ses accointances avec le capitalisme protestant, une idée qu’on ne croise pas tous les jours... Comme on aurait tout aussi bien pu gloser sur l’inexistence territoriale du Tibet et du Vatican et leur magistère moral universaliste à la hauteur des personnalités du lama Tenzin Gyatso et du pape Ratzinger. On aurait pu voir établies de véritables « religions » que sont devenues la science, l’environnement, les jeux et les loisirs dont le tourisme est l’un des moteurs les plus puissants. La progression du droit - notamment international - constitue un autre épisode de la construction de notre monde actuel, en symbiose - ou en contradiction - avec de multiples réseaux alternatifs diasporiques, « ong »-éiques et mafieux.

Ainsi, toute puissance dispose d’armes que les auteurs ont présentées en parlant de « contraintes » (la guerre), d’« achats » (la monnaie) et d’« influence » (le soft power sur lequel la réflexion de F. Munier est très pertinente). Sur le sens des choses qui mènent le monde, on sera d’accord avec l’idée du « contrôle des hommes », permettant de traiter des migrations. Egalement avec l’idée du « contrôle des terres » et la perle qu’est l’aménagement du territoire. Il est curieux que M. Yunus, prix Nobel de la paix, n’ait pas eu sa place dans un chapitre sur tout ce qui échappe à cette soif à tout prix du contrôle. Et, au contraire, qui prend l’humanité telle qu’elle est, pauvre et désireuse de s’extraire de la fatalité. Que seraient nos pays, nos villes, nos organisations internationales sans la sphère associative et non lucrative ? On relèvera une lacune non pas sur le contrôle des mers et océans qui ont progressé - encore que la surveillance des océans, l’évitement des pollutions soit difficile - mais sur le contrôle de l’espace. Les chercheurs de la Fondation pour la recherche stratégique sont moins en phase avec le grand public qu’avec les armées, mais l’économie mondiale ne serait sans doute pas ce qu’elle est sans les satellites. Enfin, quant aux frontières et au contrôle des lieux stratégiques, la réflexion est très géopolitique et le fait qu’on n’y mentionne pas les émeutes de la faim du printemps 2008 signale un caractère mouvant qui a bien été mis en valeur. De belles pages sur la maîtrise des risques posent les balises d’une « écocitoyenneté » pour le moins discutable.

Un dernier bloc affine les analyses précédentes en les confrontant aux situations régionales : la « résistance des lieux » dans le village planétaire, les héritages du monde de la guerre froide, la « grande fracture » entre riches et pauvres. Peut-être là, aurait-on pu glisser une carte des grandes fortunes du monde pour voir émerger des tycoons en Inde, Chine, Egypte, Indonésie, Mexique et Brésil ? Astucieuse conclusion est une « mondialisation en débats » avec « Pro », « Anti » et « Alter » qui appellent sans doute la construction plus intégrée d’un paysage politique mondial et, donc, d’une gouvernance à cette échelle.

Un livre stimulant, très complet, bourré d’idées et de points de vue, jamais bavard. Un exploit dans notre médiasphère envahie par l’incertain, l’à-peu-près, l’éphémère. Parions - sans prendre de grands risques - que cet opus restera longtemps au-dessus du bruit et de la fureur éditoriale ambiante.

Compte rendu : Gilles Fumey

 

URL pour citer cet article: http://www.cafe-geo.net/article.php3?id_article=1348

mercredi, 15 octobre 2008

Racines de la géopolitique

Daligéopolitique.jpg

Racines de la géopolitique, géopolitique et fascisme, retour de la géopolitique

 

Analyse: Claude RAFFESTIN, Dario LOPRENO, Yvan PASTEUR, Géopolitique et histoire, Paris, Payot, 1995, 175 FF.

 

Au cours des années 70, le déclin intellectuel du marxisme et les affrontements internes du monde communiste se sont conjugués pour rendre nécessaire le recours à la géopolitique. A l'évidence, la seule prise en compte des facteurs socio-économiques et idéologiques ne suffisaient à comprendre et interpréter litiges nationalitaires et territoriaux. Les problématiques espace et puissance ne pouvaient plus être ignorées d'où 1e recours à une géographie comprise comme “science des princes et chefs militaires” (Strabon). Professeur de géographie humaine à l'université de Genève, Claude Raffestin ne l'entend pas ainsi. Avec l'aide de deux chercheurs en sciences sociales, il se fait fort de prouver que la géopolitique n'est pas une science ni même un savoir scientifique (1). “Production sociale marquée du sceau de l'historicité”, la géopolitique ne serait qu'une superstructure idéologique légitimant le nationalisme et l'impérialisme de l'Allemagne du XXième siècle commençant. Pour en arriver à cette affirmation abrupte, Claude Raffestin procéde à une démonstration en trois temps.

 

Dans une première partie (“Racines de la géopolitique”), il décrit et explique le rôle d'intermédiaire joué par Friedrich Ratzel (1844-1904) entre une géographie allemande marquée par les philosophies de Herder et Hegel —la géographie est l'élément de base de l'histoire des peuples, des nations, de Etats— et l'œuvre de Rudolf Kjellen (1864-1922), professeur et parlementaire suédois, créateur du néologisme de “géopolitique” en 1916. Héritier de Humboldt et Ritter, F. Ratzel est à l'origine d'une géographie humaine fortement structurée par une vision darwinienne du monde (vision organiciste de l'Etat, individu géographique; thème de la lutte de l'espèce-Etat pour 1'espace). S'il n'est pas indifférent aux problèmes de son temps, l'ensemble de son travail est tourné vers la connaissance de la Terre et des connexions entre les sociétés humaines et leur milieu de vie. Cette géographie, que l'on peut qualifier d'académique, n'est donc pas de la géopolitique. C'est avec Rudolf Kjellen que se développe une géographie active, applicable aux rapports de puissance du moment (cf. L'Etat comme forme de vie, publié en 1916 et traduit l'année suivante en Allemagne) alors même qu'en Grande-Bretagne Halford John Mackinder (1861-1947), en développant et affinant ses thèses exposée dans sa célèbre conférence de 1904, s'inscrit dans la postérité de l'Américain Alfred T. Mahan (1840-1914). La géopolique naît donc avec la premièr guerre mondiale.

 

La seconde partie, "Géopolitique et fascisme", est construite autour de la personne et l'œuvre de Karl Haushofer (1869-1946). C'est à ce général bavarois qu'il revient de continuer la lignée Ratzel-Kjellen en faisant de la géopolitique une science appliquée et opérationnelle. Après avoir tenté de démonter le travail de réhabilitation de Karl Haushofer, Raffestin montre le peu d'impact de ses efforts intellectuels sur le cours des choses (2). La “saisie du monde” qu'il assigne comme but à la géopolitique laisse place à la propagande. D'habiles constructions graphiques “mettent en carte” les ambitions expansionnistes du IIIième Reich et assurent l'endoctrinement des masses. La Zeitschrift für Geopolitik n'en inspire pas moins les géopolitiques franquiste et mussolinienne caractérisées par le décalage entre leur discours, global et impérial, et la réalité des Etats espagnol et italien.

 

La troisième partie, “Le retour de la géopolitique”, porte sur les recompositions de ce discours dans l'après-deuxième guerre mondiale. Une partie beaucoup trop courte pour emporter la conviction du lecteur. Le pragmatisme anglo-saxon, dont font preuve Nicholas J. Spykman (1893-1943) et de ses successeurs, —Robert Strausz-Hupé est le seul qui soit cité!— ne trouve pas grâce aux yeux de Raffestin. Il n'y voit qu'une resucée de la vieille et infâme Geopolitik. Idem pour les publications de l'Institut international de géopolitique, dirigé par Marie-France Garaud, pour les travaux de la revue Hérodote, emmenée par Yves Lacoste, ou encore ceux de sa consœur italienne Limes, dirigée par Michel Korinman et Lucio Caracciolo. A ce stade du livre, on ne prouve plus quoi que ce soit, on anathémise! Raffestin peut conclure: la géopolitique est le “masque” du nationalisme, de l'impérialisme, du racisme. Il en arrive même à renverser ces rapports de déterminant à déterminé puisqu'en visualisant divers litiges territoriaux, “la démarche de la géopolitique serait très proche de celle d'une prophétie autoréalisatrice” (p. 307-308).

 

Cet ouvrage a le mérite d'adresser de justes critiques à ce que l'on appellera le géopolitisme: regard olympien négligeant les échelles infra-continentales, affirmations péremptoires, proclamation de lois, volonté de constituer la géopolitique en un savoir global couronnant l'ensemble des connaissances humaines. Scientiste et déterministe, cette géopolitique est datée. Elle a déjà fait place à une géopolitique définie non plus comme science mais comme savoir scientifique (cf. note n°1), prenant en compte les multiples dimensions d'une situation donnée et les différents niveaux d'analyse spatiale attentive aux “géopolitiques d'en bas” (celles des acteurs infra-étatiques). Modeste, cette géopolitique post-moderne est celle d'une planète caractérisée par la densité des interactions (flux massifs et divers), par l'hétérogénéité des acteurs du système-Monde (le système interétatique est doublé et contourné par un système transnational: firmes, maffias diverses, églises, sectes groupes terroristes...), et l'ambivalence des rapports entre unités politiques (relations de conflit-coopération, disparition des ennemis et par voie de conséquence des amis désignés). Cette géopolitique est celle d'un système-Monde hyper-complexe, multirisques et chaotique (3). Mais ces renouvellements sont tout simplement ignorés par Raffestin. Parce que son objectif est le suivant: disqualifier à nouveau la géopolitique en pratiquant la reductio ad Hitlerum.

 

Louis SOREL.

 

(1) Selon le géopolitologue Yves Lacoste, directeur de la revue Hérodote, 1a géopolitique n'est pas une science ayant vocation à établir des lois mais un savoir scientifique qui combine des outils de connaissance produits par diverses sciences (sciences de matière, sciences du vivant, sciences humaines) en fonction de préoccupations stratégiques. Sur ces questions épistémologiques, cf. «Les géographes, l'action et le politique», Hérodote n° 33-34, 2°/3° trimestre 1984 (numéro double) ainsi que le Dictionnaire de géopolitique publié sous la direction d'Yves Lacoste chez Flammarion en 1993.

 

(2) Cf. la préface de Jean Klein à Karl Haushofer, De la géopolitique, Fayard, 1986. Lire également les pages consacrées par Michel Korinman à Karl Haushofer in Quand l'Allemagne pensait le monde, Fayard, 1990.

 

(3) Cf. Lucien Poirier, La crise des fondements, Economica/Institut de stratégie comparée, 1994.

00:20 Publié dans Géopolitique | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : livres, géopolitique, politique, théorie politique | |  del.icio.us | | Digg! Digg |  Facebook