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mercredi, 01 avril 2009
Letribunal administratif suspend la d&écision du ministre contre Ayméric Chauprade
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Le tribunal administratif suspend la décision du ministre contre Aymeric Chauprade
SOURCE : SECRET DEFENSE
Le tribunal administratif de Paris, saisi dans le cadre d'un référé-liberté, a suspendu ce lundi après-midi la décision du ministre de la Défense (ndlr : Hervé Morin, en photo) mettant fin à la collaboration d'Aymeric Chauprade avec les organismes de formation, en particulier le Collège interarmées de défense (CID). La justice demande au ministère d'organiser une procédure disciplinaire contradictoire. "C'est une belle victoire", se réjouit Aymeric Chauprade.
Le 5 février dernier, cet enseignant de géopolitique a été congédié par le ministre de la Défense à la suite d'un article paru dans Le Point. Chauprade est l'auteur d'un livre, "Chronique du choc des civilisations", dans lequel il présente avec complaisance les thèses qui attribuent les attentats du 11 septembre à un complot américano-israélien. Chauprade, qui se définit comme appartenant à la "droite conservatrice", enseignait au CID depuis dix ans.
Un premier référé avait été rejeté au début du mois, au motif que la décision ne portait pas une "atteinte grave à son niveau de revenu". Ce jugement se basait sur les déclarations orales du ministre, mais Aymeric Chauprade a reçu, le 25 février, un courrier officiel du ministère de la Défense lui annonçant la suppression de toutes ses vacations. Chauprade n'enseignait pas qu'au CID, mais dans de nombreuses autres institutions de la Défense : Cesa, Ensom, Gendarmerie, Marine, etc. Il estime que cela représente près des deux tiers de ses revenus.
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Entretien sur Céline avec Philippe Alméras
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Entretien avec Philippe Alméras
Philippe Alméras est un personnage controversé dans le petit monde des céliniens. Nous avons déjà dit ici ce que nous pensions de sa biographie de Céline qui n’est assurément pas un modèle d’équanimité. Au moins lui reconnaîtra-t-on une puissance de travail peu commune. Ainsi c’est entièrement seul qu’il a rédigé un Dictionnaire Céline, coiffant ainsi au poteau les autres céliniens qui nourrissaient ce projet. Nous l’avons rencontré pour lui poser quelques questions sur un sujet qui l’occupe depuis quarante ans et dont ce dictionnaire est l’aboutissement.
Comment vous est venue l'idée de ce Dictionnaire Céline ?
Accidentellement : j'avais oublié mon ordinateur portable dans le train de Paris. Aussitôt signalée, la perte a été déclarée irréparable : « On ne retrouve jamais les ordinateurs ». J'en ai donc acheté un autre. Fourni sans la moindre notice d'instruction, naturellement. Pour apprendre à m'en servir, découvrir par exemple la touche qui mange le texte, j'ai eu l'idée de transcrire mes notes, fiches, entretiens, tout cela vieux souvent de trente ans et plus. Et l'ordre alphabétique allait de soi.
Habituellement, ce genre d'ouvrage est le résultat d'un travail d'équipe. La tâche ne vous a pas paru colossale pour un seul homme ?
À vrai dire, je ne me suis rendu compte de ce que je faisais qu'après 200 ou 300 pages. Si je m'étais mis en tête de réunir un Dictionnaire de 850 pages, le « colossal » de la chose m'aurait probablement inhibé et nous en serions encore au projet.
Si cela avait été possible, auriez- vous souhaité travailler dans une équipe ou préférez-vous, somme toute, le cavalier seul ?
Il y avait, lorsqu'une indiscrétion a révélé mon travail en cours, deux ou trois projets similaires. Quelqu'un a proposé une conjonction des données et des talents. Cela ne s'est pas fait. Je le regrette et je ne le regrette pas : ce que ce Dictionnaire aurait gagné en précision, il l'aurait sans doute perdu en spontanéité. Est-ce vraiment un hasard si ce genre de travail est toujours la responsabilité d'un seul et si les œuvres collectives aboutissent souvent à des mishi-mashi de cotes mal taillées ? Tu me laisses ceci, je t'accorde cela.
Comment avez-vous conçu ce Dictionnaire ?
Il s'est façonné de lui-même chemin faisant. Une entrée en appelait une autre, un dépouillement d'autres dépouillements. J'avais intégré les témoignages reçus, ils ont failli disparaître lorsque tel éditeur candidat les a jugés diffamatoires ou futiles.
Les céliniens vous ont souvent reproché une trop grande partialité à l'égard de votre sujet. Pensez-vous que ce Dictionnaire soit susceptible de provoquer à nouveau ce type de critiques ?
Cette partialité m'a été pour ainsi dire laissée en lot, les autres ne parlant que sources, références, tours de mains, etc. Mon premier travail visait à décrire le passage de Mort à crédit aux Bagatelles, du « roman » au « pamphlet ». Devant l'impossibilité de le faire recevoir ou même lire, je me suis obstiné à présenter mes petites trouvailles, et certains disent avec raison : la problématique de Céline a changé.
Cela dit, et cela dépassé, la forme du Dictionnaire est en soi objectivante. Elle oblige à aborder chaque chose sous ses angles divers et la promenade d'une entrée à l'autre fait le reste. Le fait même de pouvoir retrouver tel fait et telle citation et de les comparer à tels autres est en soi instructif. J'ai beaucoup appris à le faire. D'ailleurs, je ne suis pas resté seul longtemps même si le fait de dire qu'il s'agissait d'un travail personnel et subjectif a protégé l'entreprise qui ne manquait pas de concurrents.
Les notices de ce Dictionnaire ne sont pas seulement consacrées à des personnages mais aussi à des thèmes. Sur quels critères se sont fondés vos choix ?
Le premier critère était de faire figurer tout ce dont nous disposons aujourd'hui. Le second de traiter sa production sans exclusive comme cela se fait souvent au nom des bonnes mœurs ou des bons sentiments. Céline en trente ans d'activité a abordé des thèmes et des genres différents selon une progression et des modalités dont la continuité n'apparaît pleinement qu'après 1961. Au Dictionnaire de mettre cela à jour.
En quoi Céline est-il, selon vous, un grand écrivain ?
Je pourrais vous dire, comme tel autre, que le fait d'être publié dans La Pléiade est une garantie. Ce serait peut-être un peu court. Répondre qu'on le trouve prodigieusement doué, avec son goût des « diamants du langage parlé » ne serait même pas suffisant. Il ne faut pas oublier que ce qu'il dit – juste ou faux – est au moins aussi intéressant que la façon dont il le dit. Dans sa langue de prédilection – celle de la pré-Renaissance – on faisait la distinction entre « matire » et « sen ». C'est la combinaison qui fait bien sûr Céline : sans tabous ni précautions, il cite son temps comme le toréador cite le taureau. Ce n'est pas la meilleure des métaphores s'agissant de l'homme de tous les égards et de toutes les tendresses envers les animaux, mais je n'en vois dans la minute pas d'autre.
Comme le pays (lui avec) s'est refait une mémoire littéraire et historique à l'automne 44, il reste le seul à parler de ce dont il est convenu jusqu'à nouvel ordre de ne plus parler. C'est, après érosion, comme ces témoins de pierre des grands déserts d'Anatolie : indestructible.
Le fait que le Dictionnaire soit l'œuvre d'un seul auteur en fait quelque chose de très personnel : un Dictionnaire certes, mais en même une sorte de « Céline vu par Alméras ». Récusez-vous cette façon de considérer votre travail ?
Le « Céline vu par Alméras » reste encore à écrire. Il faudra que je le définisse d'abord. Ce Dictionnaire est à cette date mon travail le moins personnalisé. J'y ai rassemblé les pièces disponibles du puzzle célinien en m'efforçant d'envisager tous les angles et en donnant la parole à tout le monde. Nommément, ce qui devrait fournir à chacun l'occasion de répondre pour corriger ce qui lui paraîtra encore trop interprété. Cela devrait favoriser le rapprochement des diverses obédiences. Les clivages entre céliniens me paraissent dus à la particularité des parcours et aux options politiques prêtées à l'autre. Sur les faits tout le monde se rejoint.
En quoi ce Dictionnaire est-il aussi redevable au journaliste que vous fûtes ?
J'ai utilisé certainement des approches apprises à Réalités-Entreprise où je m'étais fait une spécialité paresseuse des portraits de dirigeants. Il existe une technique de l'interview. Dans le journalisme j'ai aussi appris le devoir absolu de ne pas ennuyer à mort le lecteur ou l'auditeur. Mais à ce compte une bonne partie des céliniens sont journalistes d'autant que tous ou à peu près tous ont interrogé les témoins du temps. Moi, quand je me suis rendu compte que je n'obtiendrais pas par cette voie la réponse à la question posée (quelles était la vision du monde et les opinions de Céline entre 1927 et 1936 ?), ce sont les textes que j'ai interrogés, et c'est le chartiste qui a découvert que – pour citer un exemple marquant – ce que Céline avait vraiment écrit dans telle lettre à Élie Faure, ce qui libérait la datation des « mauvaises idées ». Joie lorsque les photocopies ont confirmé ma radiographie. Et certitude dès lors d'aller dans la bonne direction.
La manière dont vous considérez l'homme Céline n'a pas toujours été empreinte de la plus grande bienveillance. Mais ne considérez-vous pas qu'il s'agit en l'occurrence d'une personnalité très ambivalente ? Tour à tour radin et généreux, méfiant et imprudent, courageux et timoré, cynique et sentimental, etc.
Il était effectivement tout ce que vous dites, et tout à la fois mais n'est-ce pas notre sort à tous si nous sortons du type : l'avare, le malade imaginaire, Don Juan… et si nous entrons dans la carrière sans plan à la main ? Cette question de « bienveillance » me reste toujours aussi peu compréhensible. C'est un effet du Céline entre haines et passion où j'ai mis à jour tout ce que je savais alors de la vie de Céline. M'entendre dire que j'avais écrit un livre haineux ou me voir décrit à d'innocents étrangers comme « l'auteur d'une biographie extrêmement hostile à Céline » me déconcerte alors comme maintenant. S'il s'était agi de témoigner devant un tribunal, l'exercice serait différent. Je mentirais avec l'accusé. Céline ne risque plus sa peau. Céline ne faisait pas dans l'eau tiède et rarement dans la bienveillance. Il avait le regard aigu et la dent dure. Ceux qui lui veulent le plus de mal sont à mon sens ceux qui occultent, travestissent son œuvre et font de lui un délirant : « Céline the fou » décrit dans les endroits les plus inattendus. J'ai conscience pour ma part de lui avoir rendu la santé mentale et des dents : est-ce malveillant ?
Commentant votre biographie, Henri Godard a écrit qu’on avait l’impression de lire la vie d’un second Drumont (et donc que l’accent n’était pas suffisamment mis sur l’écrivain). Que pensez-vous de cette observation ?
Êtes-vous sûr qu'il a écrit cela ? Et que cela a été imprimé ? Je ne l'ai pas lu. La seule biographie de Drumont que je connaisse est celle de Bernanos que Céline a pu lire en 1932. En voilà un qui n'hésitait pas. Il faut supposer que Godard a voulu me flatter, ce qui n'est pourtant pas son genre. Il est vrai que le lyrisme mystico-patriote de Bernanos n'est pas non plus le mien. Peut-être aussi est-ce la « grande peur » que Godard dit lui-même éprouver qui a amené Drumont sous ses doigts. Passons.
Comment jugez vous les travaux de vos confrères céliniens ? Quels ont été, de votre point de vue, les apports décisifs ?
Ils ont tous eu leur importance ou leur intérêt même si je m'attache plus aux coups de projecteurs et aux apports factuels qu'aux paraphrases et aux commentaires. Merci à ceux qui ont apporté des documents (Lainé les lettres à Garcin, Nettelbeck les lettres à Cillie Pam, Pécastaing les lettres à Zuloaga et ainsi de suite). Celui qui a fait le travail documentaire le plus important est évidemment Jean-Pierre Dauphin. On peut regretter le coup de sang ou le point d'honneur qui lui a fait quitter la partie dont il s'exagérait à mon avis les dangers et les enjeux.
Pour vous, le « fil rouge » de l’œuvre de Céline est ce racisme biologique que vous voyez apparaître très tôt et qui est présent jusque dans l’ultime Rigodon. Même si cet aspect de l’œuvre n’est pas négligeable, n’avez-vous pas l’impression d’avoir tellement mis l’accent sur ceci qu’il semble que, pour Céline lui-même, son travail d’écrivain était subordonné à cette préoccupation ?
Ce fil, c'est vous qui le voyez. Céline, personne ne le nie, a cru au corps, à la santé du corps, au dépassement du corps, comme tout le monde aujourd'hui (sport, beaux enfants, pas d'alcool), mais comme on ne le faisait pas alors. D'où les effets de rupture.
Il a ensuite étendu au groupe (aux « communautés ») la prescription aux individus. Est-ce unique ?
Comment ces conceptions qu’on dit maintenant temporaires, sans portée littéraire et donc à oublier, entrent dans l'écriture, la sous-tendent et l'orchestrent, voilà ce qu'il est permis de se demander. « L’homme, c’est le style », disait Céline et cela peut autoriser à aller de l'homme au style... Au moins le temps de voir. Surtout si, comme lui, on ne croit pas à la Littérature en soi.
Quelles sont les éventuelles critiques auxquelles vous vous attendez au sujet de ce travail ?
Vous les avez anticipées : trop personnel, trop désinvolte, trop copieux, trop léger. On chicanera des dates et des virgules. Je ne parle pas des « signes diacritiques » sans lesquels Céline nous reste imperméable. Jean-Pierre Dauphin avait eu l'idée d'assortir ses calepins de bibliographie de pages blanches ou chacun inscrivait ses apports. Si ce Dictionnaire n'avait pas déjà atteint la taille critique, j'aurais bien voulu l'imiter. Chacun aurait pu inscrire son apport, celui qu'il garde jalousement par devers lui. Les exemplaires auraient été disponibles en solde au bout de quatre ou cinq ans, on les aurait collationnés et l'on aurait « Le Dictionnaire Céline » dont nous rêvons tous : impeccable, exhaustif, unanime.
(Propos recueillis par Marc LAUDELOUT)
Comment j'ai commencé à travailler sur Céline
par Philippe Alméras
Quand j’ai commencé à « travailler sur Céline », il y en avait deux : celui d’avant 1937 et celui d’après, que certains vouaient d’ailleurs à la poubelle.
Plus le temps a passé et plus les Céline se sont multipliés. Les Anglo-Saxons parlent des neuf vies du chat. Le chat Céline en a eu bien plus, surtout si l’on ajoute celles qu’il s’est fabriquées à celles qu’on lui a prêtées.
Il a été successivement l’enfant du Passage et de la rue Marsollier, le stagiaire en langues d’Allemagne et d’Angleterre, l’apprenti commerçant, le cuirassier de Rambouillet, le combattant d’août 14, l’agent consulaire de Londres, le colon du Cameroun, le grouillot-journaliste d’Eurêka, le propagandiste antituberculeux de la Fondation Rockefeller, le bachelier éclair, l’étudiant en médecine tout aussi pressé, le mari et le père temporaire, l’hygiéniste itinérant de la SDN, le médecin en clientèle, le consultant du dispensaire à Clichy, l’auteur de théâtre, le pharmacien visiteur médical, le rédacteur de Voyage au bout de la nuit, Goncourt raté et événement littéraire de l’année 1933, le héros d’une légende misérabiliste, l’explorateur des enfances de Mort à crédit, le polémiste engagé des « pamphlets », le prophète vérifié un temps (1940-1944), l’émigré d’Allemagne puis du Danemark, le prisonnier de la Vestre Fængsel, le rural malgré lui de Korsør, le banlieusard de Meudon et l’auteur d’un come back qui n’allait pas de soi, l’écrivain restauré. Soit trois fois neuf vies de chat. Et l’enchaînement des œuvres dans une langue indéfiniment renouvelée.
À ces métamorphoses s’ajoutent les images qu’un lectorat multiple s’est faites de lui. Si les céliniens ne s’aiment guère en règle générale, c’est qu’ils ont chacun leur Céline. En 1932, Daudet le monarchiste et Descaves le nostalgique de la Commune se rejoignent certes dans l’admiration pour le Voyage, mais pas pour les mêmes raisons. L’étudiant Lévi-Strauss le voit socialiste. Bernanos le catholique lit le roman de la déréliction d’un monde sans Dieu. Décor, philosophie, tout renvoyant au peuple, certains croient à un Céline peuple et donc populiste, et c’est d’ailleurs sous cette forme que, génération après génération, il trouve chez les jeunes ses nouvelles recrues. Aujourd’hui le Voyage en poche serait encore le plus « fauché », le plus « chouré », le plus volé des livres dans un temps où les livres se volent de moins en moins. (…)
Philippe ALMÉRAS
(extrait de la préface du
Dictionnaire Céline)
Philippe Alméras, Dictionnaire Céline. Une œuvre, une vie, Plon, 2004, 880 pages.
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lundi, 30 mars 2009
"The Independent dresse un portrait à charge de Sarkozy
The Independant dresse un portrait à charge de Sarkozy
"Quand il a rendu visite au Président italien, en une demi-heure, le téléphone de Sarkozy a sonné quatre fois. A chaque fois Sarkozy a répondu. (...) Le Président autrichien s'est senti honoré. Durant leur rencontre, il n'y a eu que deux appels. (...)Lors des préparations de sa visite d'Etat en Grande Bretagne, les services diplomatiques de deux pays partageaient la même anxiété. Pouvait-on faire confiance au Président pour éteindre son portable ? S'il sonnait pendant le banquet officiel et qu'il réponde, que ferait le Prince Philip ?
"Le français est la langue des diplomates. (...) Quand les éminences diplomatiques ont su comment leur Président s'était comporté, elles ont eu honte."
"Il est faux de dire que le Président consacre tous ses soins à Carla Bruni. En plus de sa frivolité et de son manque de tact, le Président épuise son équipe par son hyper-activité. Cela pourrait être une qualité à une condition : que cela corresponde à une stratégie. Mais il n'y a pas de stratégie."
"Un diplomate français désespéré résume le régime Sarkozy : "Il n'y a plus de Cinquième République. C'est Louis XV et Madame du Barry."
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samedi, 28 mars 2009
Hommage à Emil Cioran

Archives de SYNERGIES EUROPEENNES - 1995
Hommage à Emile Cioran
Au beau milieu de notre société de consommation et de plaisir, il était le héraut du déclin et du doute. L'écrivain roumain Emile Cioran est mort à Paris, à l'âge de 84 ans, le 20 juin 1995. Rien que les titres de ses livres, Précis de décomposition, Syllogismes de l'amertume ou De l'inconvénient d'être né, pourraient déclencher une dépression. Face à un homme comme Cioran, qui, selon sa propre confession, considère que toute rencontre avec un autre homme est une sorte de “crucifixion”, on est en droit de se poser la question que Nietzsche lui-même nous a suggérée: comment est-il devenu ce qu'il était?
Déjà à l'âge de dix ans, Cioran a vécu une sorte d'exclusion du Paradis. Il a dû quitter le monde de son enfance pour s'en aller fréquenter le lycée de Sibiu. Cioran décrit ce grand tournant de sa vie d'enfant: «Quand j'ai dû quitter ce monde j'avais le net pressentiment que quelque chose d'irréparable venait de se produire». Cet “irréparable” était très étroitement lié au monde simple des paysans et des bergers de son village natal. Plus tard, Cioran s'est exprimé sans ambigüité sur le monde de son enfance: «Au fond, seul le monde primitif est un monde vrai, un monde où tout est possible et où rien n'est actualisable».
Autre expérience décisive dans la vie de Cioran: la perte de la faculté de sommeil à l'âge de 20 ans. Cette perte a été pour lui “la plus grande des tragédies” qui “puisse jamais arriver à un homme”. Cet état est mille fois pire que purger une interminable peine de prison. Voilà pourquoi son livre Sur les cîmes du désespoir a été conçu dans une telle phase de veille. Cioran considérait que ce livre était le “testament d'un jeune homme de vingt ans” qui ne peut plus songer qu'à une chose: le suicide. Mais il ne s'est pas suicidé, écrit-il, parce qu'il ne pouvait exercer aucune profession, vu que toutes ses nuits étaient blanches. Elles ont été à l'origine de sa vision pessimiste du monde. Et jamais, dans sa vie, Cioran n'a été contraint de travailler. Il a accepté toute cette “peine”, cette “précarité”, cette “humiliation” et cette “pauvreté” pour ne pas devoir renoncer à sa “liberté”. «Toute forme d'humiliation» est préférable «à la perte de la liberté». Tel a été le programme de sa vie, aimait-il à proclamer.
Avant d'émigrer en France en 1937, Cioran écrivait Larmes et Saints, un livre qu'il considérait être le résultat de sept années d'insomnie. Ce que signifie l'impossibilité de dormir, Cioran l'a exprimé: la vie ne peut “être supportable” que si elle est interompue quotidiennement par le sommeil. Car le sommeil crée cet oubli nécessaire pour pouvoir commencer autre chose. Ceux qui doivent passer toutes leurs nuits éveillés finissent par segmenter le temps d'une manière entièrement nouvelle, justement parce que le temps semble ne pas vouloir passer. Une telle expérience vous modifie complètement la vie. Tous ceux qui veulent pénétrer dans l'œuvre de Cioran, doivent savoir qu'il a été un grand insomniaque, qu'il en a profondément souffert.
Les nuits de veille de Cioran sont aussi à l'origine de son rapport particulier à la philosophie. Celle-ci ne doit pas aider Cioran à rendre la vie “plus supportable”. Au contraire, il considère que les philosophes sont des “constructeurs”, des “hommes positifs au pire sens du terme”. C'est la raison pour laquelle Cioran s'est surtout tourné vers la littérature, surtout vers Dostoïevski, le seul qui aurait pénétré jusqu'à l'origine des actions humaines. La plupart des écrivains de langues romanes ne sont pas parvenu à une telle profondeur, écrivait Cioran. Ils sont toujours resté à la surface des choses, jamais ils n'ont osé s'aventurer jusqu'aux tréfonds de l'âme, où l'on saisit à bras le corps le “démon en l'homme”.
1937 a aussi été l'année où Cioran a dû reconnaître que la voie religieuse et mystique lui était inaccessible. Comme il le constatait rétrospectivement, il n'était tout simplement “pas fait pour la foi”. Car avoir la foi était au fond un don, écrivait Cioran, et on ne peut pas vouloir croire, ce serait ridicule.
Quand on prend connaissance de cet arrière-plan, on ne s'étonnera pas que Cioran revient sans cesse sur son expérience du “néant”, du “néant” qui ne devient tangible que par l'ennui. Du point de vue de Cioran, on ne peut supporter la vie que si l'on cultive des illusions. Et si l'on atteint la “conscience absolue”, une “lucidité absolue”, alors on acquiert la “conscience du néant” qui s'exprime comme “ennui”. Cependant, l'expérience de l'ennui découle d'un doute, d'un doute qui porte sur le temps. C'est à ce sentiment fondamental que pensait Cioran quand il disait qu'il s'était “ennuyé” pendant toute sa vie.
On ne s'étonne pas que Cioran avait un faible pour les cimetières. Mais ce faible n'a rien à voir avec les attitudes prises aujourd'hui par les Grufties. Pour notre auteur, il s'agissait surtout d'un changement de perspective. C'est justement dans une situation de douleur de l'âme, d'une douleur qui semble immense, démesurée, que le changement de perspective constitue la seule possibilité de supporter la vie. Quand on adopte la perspective du “néant”, tout peut arriver. Dans une certaine mesure, on en arrive à considérer comme parfaitement “normal” la plus grande des douleurs, à exclure toutes les “déformations par la douleur” qui conduisent au “doute absolu”.
Au cours des dernières années de sa vie, Cioran n'a plus rien écrit. Il ne ressentait plus l'“impérativité de la souffrance” qui fut toujours le moteur de sa production littéraire. Peut-être a-t-il tiré les conséquences de ses propres visions: nous vivons effectivement dans une époque de surproduction littéraire, surproduction absurde, totalement inutile.
Michael WIESBERG.
(trad. franç.: Robert Steuckers).
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dimanche, 22 mars 2009
Atlantisme, occidentalisme. Pourquoi N. Sarkozy veut que la France réintègre le commandement de l'OTAN
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Le Général de Gaulle se retourne dans sa tombe. 43 ans après sa décision de retirer Paris du commandement militaire intégré de l'Organisation du Traité de l'Atlantique Nord (OTAN, créée en 1949, 22.000 employés et 60.000 militaires permanents), son dangereux successeur à l'Elysée multiplie les déclarations (1) pour que la France y reprenne désormais "toute sa place". "Toute sa place" est une formule qui, dans l'approche de Nicolas Sarkozy, signifie clairement un engagement sans réserve aux côtés des Etats-Unis. Fidèle à sa méthode autocratique du "J'écoute mais je ne tiens pas compte", il fait fi des voix de plus en plus nombreuses qui s'opposent à sa décision (2) et fait dire qu'il n'y aura ni référendum ni même de vote au Parlement sur la question.
Il entend bien concrétiser seul son choix stratégique et balayer d'un coup d'un seul un demi-siècle de politique étrangère et d'indépendance française dès les 3 et 4 avril prochain, lors des cérémonies du 60e anniversaire de l'OTAN à Strasbourg et Kehl.
Histoire de confirmer sa volonté d'intégrer la France dans les hautes sphères politico-militaires de l'OTAN, Nicolas Sarkozy a d'ores et déjà pris l'année dernière deux initiatives très applaudies par son ami George W. Bush. Un, il a doublé la présence militaire française en Afghanistan en envoyant un millier de soldats combattre avec les américains contre les Taliban, alors que chacun sait que cette guerre est déjà perdue et que l'enlisement des troupes y est assuré (le nombre de soldats français morts sur le terrain depuis est déjà suffisamment éloquent).
Deux, il a soutenu activement le projet de déployer un bouclier antimissile américain en Europe centrale, quitte à braquer sérieusement la Russie (Heureusement Barack Obama semble être en train de déminer cette énième provocation bushiste aux relents de Guerre froide). La récente volonté affichée de rapprocher Paris et Londres, principal allié des Etats-Unis dans ses guerres en Irak et en Afghanistan, est également un signe plus discret, mais tout aussi fort, d'allégeance à Washington.
Seule contrariété pour le néo-conservateur de l'Elysée, ce n'est plus son ami fauteur de guerres George W. Bush qui est au pouvoir, mais Barack Obama, à l'évidence moins enclin à semer la terreur partout dans le monde au nom de la lutte anti-terroriste.
Cette rupture dans la politique d'indépendance de la France se drape bien entendu d'arguments à usage médiatique du type "Amis, alliés, mais non inconditionnels", ou "nécessaire rénovation car nous ne sommes plus en 1966", ou encore "La France ne perdra rien de sa souveraineté" (3). Nicolas Sarkozy dit vouloir développer avec l'OTAN une "Europe de la Défense efficace". Depuis son élection, il ne cesse de répéter qu'une Europe de la Défense indépendante et l'ancrage atlantique sont les deux volets d'une même politique de sécurité. Mais quelle OTAN, pour quelle mission de défense européenne ? et la France a-t-elle quelque chose à gagner à réintégrer le commandement militaire de l'organisation, avec lequel elle coopère déjà très bien ? Elle fournit déjà 2.800 soldats pour l'occupation de l'Afghanistan, et maintient actuellement 36.000 soldats dans divers autres pays (Kosovo, Côte d'Ivoire, etc.).
Il est bien illusoire d'imaginer que les Etats-Unis donneront plus de place aux Européens et aux Français dans la nouvelle Alliance. Jaap De Hoop Scheffer a d'ailleurs bien précisé le 12 février 2009 à Paris que, si la France réintégrait le Commandement militaire intégré de l'Alliance atlantique, ce serait de toutes façons toujours à lui qu'il revenait "de gérer les choses au sein de l'OTAN, comme la position française au sein des structures de commandement, les généraux, etc". Tout au plus les Etats-Unis accorderont-ils quelques commandements militaires sans importance à un ou deux généraux français -- on parle vaguement d'un poste à Norfolk (Virginie, USA) ou à Lisbonne (Portugal) -- sans que cela puisse réellement permettre à la politique européenne de sécurité et de défense (PESD) de s'affirmer et de de peser significativement sur les décisions de l'OTAN.
Dans tous les conflits (Afghanistan, Serbie, Kosovo, etc) où la France s'est retrouvée engagée aux côtés des militaires américains, ce sont systématiquement ces derniers qui décident et contrôlent de façon unilatérale toutes les opérations, en particulier les frappes, reléguant la France et les autres pays alliés au rang de simples exécutants. On ne les imagine guère se plier aux décisions des français dans l'avenir. Il n'est d'ailleurs pas inutile de rappeler que si de Gaulle est sorti de l'OTAN, c'est notamment parce qu'il demandait un directoire partagé de l'Organisation, ce que les Américains lui ont refusé.
Et la suite a montré que la France, puissance moyenne disposant de l'arme nucléaire et d'un siège au Conseil de sécurité de l'ONU, existait finalement plus à l'échelle mondiale en s'affirmant de façon autonome qu'en s'effaçant dans ce qu'il appelait le "machin" atlantiste.
Autre risque, la réintégration de Paris dans une OTAN qui sert de plus en plus de caution et de bras armé à l'impérialisme américain, sera sans nul doute perçu dans les grandes capitales du monde non-occidental comme un affaiblissement et un alignement sur les Etats-Unis, ce qui lui fera perdre le peu d'influence qui lui reste encore.
Quant à la "Voix de la France", qui selon Nicolas Sarkozy deviendrait plus forte dans le concert des Nations si elle réintègre l'OTAN, elle semble jusqu'à présent avoir moins souffert des discours et des choix du Général de Gaulle -- ou même de ceux de Jacques Chirac et Dominique de Villepin, par exemple en 2003 à l'ONU lors du refus de la France de suivre les Etats-Unis dans l'invasion de l'Irak -- que ceux des "caniches" européens de George W. Bush (Tony Blair, José Manuel Barroso, Nicolas Sarkozy, José-Maria Aznar,...).
Mais l'essentiel n'est pas là.
Le projet de Nicolas Sarkozy, cet anti de Gaulle, ne consiste pas en un renforcement de la défense européenne, ou du moins pas pour lui donner plus de pouvoir et d'indépendance comme il le prétend. A travers ses choix diplomatiques et stratégiques il est à l'évidence tout à sa "vision" purement occidentaliste de la France et de l'Europe. Pour lui, la France doit s'affirmer "dans sa famille occidentale" et dans "les valeurs occidentales qui sont pour elle essentielles" (Discours de janvier 2008 devant le corps diplomatique français). Il partage avec son mentor George W. Bush une idéologie qui se fonde avant tout sur la défense d'une civilisation occidentale qui serait aujourd'hui attaquée par le monde islamiste. Lorsqu'il déclare faire en sorte que "Paris et l'ensemble des capitales occidentales parlent désormais toutes d'une seule voix", c'est surtout pour défendre les causes occidentales que les discours et les aventures guerrières de Bush "contre l'Axe du Mal et la Barbarie" ont totalement galvaudées: la Démocratie, la Liberté, l'universalisme des Droits de l'Homme, la lutte contre le terrorisme.
Comme George W. Bush et comme tous les néo-conservateurs islamophobes, Nicolas Sarkozy est dans une logique de guerre contre tout ce qui ne relève pas des "valeurs occidentales" judéo-chrétiennes, tant en matière d'économie que de politique et de religion. Il exècre et ne cesse de diaboliser les partis islamistes qualifiés de terroristes comme le Hezbollah ou le Hamas, n'imaginant pas que son propre occidentalisme est à l'Occident ce que le fondamentalisme islamiste est à l'Islam.
Il est au plus près des cercles israélo-américains d'extrême-droite qui, afin de "garantir la paix et la sécurité", prônent une domination occidentale du monde, quitte pour cela à passer à l'offensive et à se lancer dans une guerre de civilisation "globale". Pour Nicolas Sarkozy il s'agit de défendre mais aussi désormais d'imposer par tous les moyens, et notamment par la guerre, un nouvel ordre occidental soi-disant "moral" (comprendre surtout "néo-libéral") qui doit régner sur l'ensemble de la planète.
Cette idéologie d'autodéfense agressive se nourrissant du conflit avec l'islamisme autorise ainsi l'OTAN -- qui à l'origine n'a qu'une mission de défense limitée aus territoires occidentaux -- à aller porter la guerre aux confins de la planète pour défendre des intérêts géostratégiques essentiellement américains, quand ce n'est pas parfois purement israéliens, à titre d'une soi-disant "légitime défense" contre le terrorisme islamiste. De hauts stratèges et chefs d'état-major de l'OTAN planchent même actuellement sur de réjouissantes nouvelles options militaires.
Ces docteurs Folamour réclament en effet le droit d'effectuer des frappes préventives, y compris avec l'arme nucléaire, sans autorisation du Conseil de sécurité de l'ONU. Lorsque l'on connaît le désir insensé des Israéliens et de leurs amis américains -- Même avec Barack Obama, il y a peu de chances que les Etats-Unis modifient leur politique de soutien inconditionnel à l'Etat d'Israël -- d'aller bombarder l'Iran, on imagine aisément à quoi la sainte alliance transatlantique risque bientôt de servir.
C'est avec cette "vision" guerrière et occidentaliste du monde, ruineuse et extrêmement dangereuse pour la France, que Nicolas Sarkozy entend jouer un rôle international. En infléchissant la doctrine militaire française pour mieux s'aligner sur la politique étrangère américaine, dont on connaît pourtant les errements et l'agressivité aussi inefficace que désastreuse, il commet une erreur diplomatique et stratégique majeure.
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Notes
1) Annoncé dès la campagne électorale de 2007, ce projet sarkozyste n'a cessé d'être remis sur la table, tant par Nicolas Sarkozy que par Bernard Kouchner (Ministre des Addaires étrangères) et Hervé Morin (Ministre de la Défense) afin d'y "préparer l'opinion", notamment pour le Président de la République à travers le Discours de janvier 2008 devant le corps diplomatique français, lors du Sommet de l'OTAN à Bucarest en avril 2008 et la semaine dernière encore lors d'une conférence sur la sécurité à Munich.
2) Parmi les responsables politiques qui s'opposent à la décision autocratique de Nicolas Sarkozy, on note celles de François Bayrou pour qui la réintégration dans le commandement militaire de l'OTAN serait "une défaite pour la France" et un "un aller sans retour" [...] "En nous alignant, nous abandonnons un élément de notre identité, une part de notre héritage, et nous l'abandonnons pour rien". Il demande que le choix fait par le Général de Gaulle en 1966 "ne soit pas bradé et jeté aux orties", ajoutant qu'un tel choix ne peut aujourd'hui être modifié "que par un référendum du peuple français". Dans un entretien au Nouvel Observateur, François Bayrou précise sa pensée. Pour lui, en réintégrant l'OTAN, la France se range "aux yeux du monde" dans un "bloc occidental" [...] "euro-américain d'un côté, le reste du monde de l'autre. Ceci, pour la France et son histoire, son universalité, est un renoncement". Il affirme que "ce que nous sommes en train de brader, ce n'est pas seulement notre passé mais aussi notre avenir, une partie du destin de la France et de l'Europe". Pour le Parti Socialiste, qui demande un débat et un vote parlementaire sur la question, "Aucune explication recevable n'est apportée sur l'intérêt pour la France de ce retour" et les "conditions et contreparties de cette réintégration ne sont pas connues". Jean-Marc Ayrault, chef de file des députés PS, estime que "La France doit garder son autonomie de décision" et que celle-ci "ne peut pas être prise par le président seul". Les anciens ministres socialistes de la Défense Paul Quilès et Jean-Pierre Chevènement ont également publié des tribunes dans la presse pour exprimer leur rejet de cette décision "très dangereuse pour la sécurité de la France". [...] "Nous ne devons pas nous laisser entraîner dans des guerres qui ne sont pas les nôtres", affirment-ils. "Si la France entre dans l'OTAN, il n'y a plus d'espoir de politique étrangère et de sécurité commune, plus d'Europe de la défense", affirme également le socialiste Jean-Michel Boucheron. La réintégration "limiterait notre souveraineté et serait le signe d'un alignement sur l'administration américaine qui banaliserait la singularité de la France", estiment pour sa part le Parti Communiste. Du côté de l'UMP, une partie des députés exprime aussi son opposition: Jacques Myard proteste contre ce "retour qui va lier les mains de la France et l'arrimer à un bloc monolithique occidental dirigé par les Etats-Unis" tandis que Lionnel Luca explique que "Pour un grand nombre de pays arabes, le fait que la France soit dans l'OTAN est un mauvais signal". Jean-Pierre Grand regrette cet "arrimage plein et entier aux Etats-Unis". "Il y a dans le monde entier des pays qui attendent de la France qu'elle demeure une transition, une passerelle, et qu'elle ne s'aligne pas sur les Etats-Unis", renchérit Georges Tron. Le gaulliste ex-UMP Nicolas Dupont-Aignan s'engage lui dans une quasi campagne contre le projet et exige un débat parlementaire. Daniel Garrigue, député ex-UMP de la Dordogne, s'est de son côté fendu d'une tribune intitulé "Bonjour, messieurs les traîtres !". Pour lui, "Rien ne justifie le retour de la France dans l'Organisation du traité de l'Atlantique Nord et la remise en cause de l'un des rares consensus forts de notre pays -- voulu en l'occurrence par le général de Gaulle avec la sortie de l'Otan en 1966 et confirmé par ses successeurs, y compris par le socialiste François Mitterrand. Nous y perdrons la considération que nous avions sur la scène internationale et particulièrement notre capacité à être entendus dans un certain nombre de conflits, notamment au Proche et au Moyen-Orient. [...] "Pour tous ceux qui croient en la France et en la construction de l'Europe, cette décision de rejoindre l'Otan qui n'a été ni concertée, ni discutée, ni approuvée par les Français ou par le Parlement, constitue bien une véritable trahison". Alain Juppé, ancien Premier Ministre de Jacques Chirac, renouvelle lui aussi ses critiques en demandant si la France n'était pas en train de "faire un marché de dupes en rentrant sans conditions" dans le commandement de l'OTAN. Mais le plus farouche opposant à Droite est l'ancien Premier Ministre Dominique de Villepin. Pour lui, la France "va se trouver rétrécie sur le plan diplomatique" et sera plus vulnérable au terrorisme. "Alors que le Sud est en train de s'affirmer, dans un monde qui est en train de basculer, faut-il donner le sentiment de se crisper sur une famille occidentale ?", s'interroge-t-il. Comme François Bayrou, il estime que si la France avait été intégrée aux structures de commandement de l'OTAN en 2003, elle aurait été obligé de suivre les Etats-Unis de Geoorge W. Bush dans la guerre contre l'Irak.
3) Discours de Jaap De Hoop Scheffer, Secrétaire général de l'OTAN, devant les parlementaires français le 12 février 2009.
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*http://www.republique-des-lettres.fr/journal.php
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Zemmour, une élite comme les autres?
Zemmour, une élite comme les autres ?
Par Karl Hauffen
En lisant la dernière brève de Zemmour dans laquelle il se félicite de la mort des régions françaises, j’ai soudain pris conscience de la béance qui me séparait de ce patriote de plume. Car si la mort de ses régions est une chance pour la France, on est bien en droit alors de se demander ce que revêt exactement le terme de France. Qu’est-ce que la France pour Zemmour et avec lui, pour l’ensemble de l’intelligentsia intra-muros qui postillonne à longueur de temps le mot France comme d’autres celui d’Europe.
On aimerait qu’il nous explique une bonne fois pour toute ce qu’est au juste la France ? Un roman de Balzac ? Une poésie de Victor Hugo ? Napoléon et son code civil ? De Gaulle et sa grandiloquence de brave papi ? Un peu tout ça à la fois sans doute… Difficile donc de ne pas réprimer un certain pincement ironique devant cette vision proprement désincarnée et cérébrale de la nation. Dans ce fatras poussiéreux de bibliothèque, on cherche avec peine un corps vivant doté d’une âme. L’intelligent Zemmour nous offre-là la figure parfaite de l’idiot-savant - cette particularité dont seules les grandes écoles d’État parisiennes ont la recette - qu’il aime pourtant tant à fustiger par ailleurs. Inutile alors de discourir à longueur d’émissions sur le déclin de la France. Car une nation qui n’a pas d’autres points d’ancrage identitaire qu’une liste de bouquins, un carton rempli de textes administratifs et, encadrées de dorure, des photos d’hommes d’État illustres dans de ridicules costumes de parade est forcément une nation condamnée. Ce qu’aime et veut sauver Zemmour, ce n’est pas la France, mais son musée, ou plus exactement son mausolée.
La France meurt de son centralisme bureaucratique et des relations incestueuses qu’entretiennent entre elles les élites parisiennes. Elle meurt à petit feu d’être représentée par un aréopage de parvenus, élus mais sans pouvoir, intarissables bavards mais dénués de la moindre liberté d’initiative. Qui décide ? Les conseillers du président et les hauts-fonctionnaires au crâne d’œuf grouillant dans les couloirs des ministères aux nominations ronflantes et aux compétences à rallonge. Qui les a élus ? Personne. Ils sont là depuis des décennies et survivent inlassablement aux alternances gouvernementales, leurs mille projets de loi à tiroirs sous le bras. Cette caste d’idiots-savants est si savamment idiote qu’on connait à l’avance les solutions qu’elle proposera, que notre président s’appelle Mitterrand, Chirac ou Sarkozy. Pour combler les déficits ? Créons un nouvel impôt. Pour lutter contre le chômage ? Créons une subvention. Pour lutter contre l’insécurité ? Créons une commission. Pour lutter contre la dérive communautariste qu’induit une politique migratoire inconsidérée ? Créons un observatoire ou mieux encore, une Haute autorité de lutte quelconque.
La France de Zemmour est pourrie de la tête, une tête bouffie qu’une thrombose bureaucratique ne fait que rendre plus hideuse encore. La France qui travaille, celle silencieuse qui ne rappe pas, celle industrieuse des ouvriers, des petites gens, des petits entrepreneurs, cette France-là ne circule pas en vélib dans Paris intra-muros, ne lit pas Balzac et n’éprouve aucun orgasme particulier de la lecture emphatique des textes administratifs qu’on oppose quotidiennement à ses velléités de liberté. L’antimondialiste Zemmour qui se plait à moquer l’Europe désincarnée de Bruxelles rêve une France autant désincarnée, si ce n’est même plus. Que tout ceci est tragi-comique ! C’est en aimant la France de cette façon-là, que la petite bande des souverainistes autorisés, celle des Max Gallo, des Henri Guaino et des Villepin, contribue à en aggraver l’agonie. Zemmour ne déroge donc pas à la règle. Ne lui en déplaise, mais la France d’après, celle qui aura définitivement tué ses pays charnels, ne sera ni ce mausolée auquel il rêve, ni même cette ultime tentative de rester fidèle au souvenir du premier consul.
Sans ses régions, la France ne sera qu’une tête décapitée sanguinolente posée sur son propre cadavre en putréfaction. Un État lancé sans entrave sur la voie totalitaire avec tout en haut, un pouvoir qui aura définitivement retiré à ses couches populaires leur dernier outil de contrôle démocratique. La région, on le voit partout en Europe, est le premier espace d’adhésion et d’expression politique. Elle est la première brique sociale par laquelle la collectivité des hommes doit nécessairement passer pour se retrouver et se mettre en situation d’amorcer une action politique. Entre régionaux, on se comprend, on utilise les mêmes mots avec les mêmes accents. Quand on sait y lire, un Alsacien en dit plus en un regard que Zemmour en deux heures d’émission. S’organiser au niveau de la région devient alors plus simple, coule de source. Qu’attend donc Zemmour de ce découpage administratif qui refusera d’entendre les revendications d’hommes de même culture, de même souche sociale, conditionnés par le même contexte économique et moulés par des mœurs communes qui n’ont rien à voir avec celles apprêtées qui se pratiquent dans le monde clos du show-biz parisien ?
La France meurt chaque jour un peu plus de son incapacité à connecter une élite arrogante avec une population réduite au silence et Zemmour, dont on apprécie souvent par ailleurs les analyses pertinentes et affutées, nous dit sans rire que tout ceci est bel et bon. Comment ensuite le croire lorsqu’il prétend aimer la France ? En cela, il nous démontre qu’il fait bien partie, ni plus, ni moins, du même cercle fermé des élites autorisées, malgré le fait qu’il ait fait métier de les brocarder. S’il aime la France, il nous avoue son indifférence pour les Français, c’est-à-dire ce fragile assemblage de peuples européens qui composent la France. Zemmour est tombé amoureux d’un portait, mais il s’interdit d’en regarder l’incarnation vivante dans toute sa nudité. Car la France n’est pas seulement une idée, elle est avant tout une réalité organique complexe et diverse.
[cc] Novopress.info, 2009, Dépêches libres de copie et diffusion sous réserve de mention de la source d’origine
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Le Loup et l'Agneau ou la tentation sophistique
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Le Loup et l'Agneau ou la tentation sophistique
Chacun sait que le plaisir de l'écrivain réside dans l'incertitude et la difficulté. La Fontaine est un auteur difficile.
Le Loup et l'Agneau est exemplaire en ceci qu'il vient à contre-temps des autres fables du recueil, que le système de la logique fabuliste et moraliste (histoire et leçon de l'histoire) a été tourné en dérision par celui même qui s'en faisait le champion, détournant du même coup la loi morale, qui se voudrait pourtant le fondement et la direction du récit. Ce système de pensée vient évidemment en opposition à la puissante croyance officielle, et je m'en remets aux sermons et aux oraisons funèbres de Bossuet, en la divine Providence, principe de cohésion historique et personnel. L'ouverture de la Fable est avant tout un coup de théâtre, ou un coup de force: double renversement: dans la topologie du discours, la morale, contrairement à ce que l'on observe dans la majorité des Fables, ne se trouve pas à la fin, comme la déduction suit la réflexion, mais en tête. Comme s'il s'agissait d'une induction, d'une intuition. Le préfixe latin in- signifiant “dans”, la “morale” se trouverait en embryon dans l'histoire, comme pré-établie. Première surprise.
La Fontaine commence donc: “La raison du plus fort est toujours la meilleure”, mettant sur un même plan deux notions traditionnellement opposées: la force et la raison. Au premier renversement d'une fable à l'envers, s'ajoute la surprise d'une fable à rebours, par l'évocation d'une anti-morale, d'une contre-morale. L'opinion commune admet que la raison l'emporte sur la force —en tout cas dans une société policée, comme l'était celle de Louis le Grand—; a contrario, avec le fabuliste, la force est supérieure à la raison. Et l'histoire de la Fable ne le démontre pas, elle le montre.
Le seul argument du loup, c'est la faim. Et pourtant la pudeur, si chère aux contemporains de La Fontaine et si chère à la littérature galante, précieuse ou érotique, la fardera. Ce qui excusera cette appétance obscène et la légitimera, c'est l'art de la circonvolution rhétorique. Seulement l'agneau la dénichera au terme du clair-obscur de la série argumentation/réfutation. On pourrait ici démonter le mécanisme du dialogue à la fois si théâtral et si drôle, mais aussi et combien inquiétant. Le loup en serait comme un Tartuffe de la logique. Car quelle belle critique de la raison faite en ces temps de Descartes et de classicisme —le premier recueil de Fables ayant été rédigé trente ans après le Discours de la méthode... La raison érigée en escroquerie. La raison, insinue La Fontaine, est ce que l'on veut bien en faire, ce que la force veut bien faire d'elle.
Sans ignorer le point de vue sexuel de la Fable (Le petit chaperon rouge de Perrault est sur ce terrain bien comparable), La Fontaine aborde la morale et la fable à l'imitation des Anciens, mais dans une perspective sophistique. Qu'implique alors cette induction? Que la raison peut tout démontrer (qu'elle est un outil, qu'elle n'est pas une fin). Que la raison ne fait que justifier, elle n'est qu'une excuse à nos faiblesses. On en est exactement à ce que démontraient les sophistes, réputés pour soutenir sur la place publique un jour une thèse et le lendemain l'inverse: non point l'absurde de l'humaine condition —qui est postérieur, mais ce qui est rationnel est aussi affectif, que la rationalité n'est qu'une bizarrerie d'affectivité. Et plus loin: le savoir, les connaissances ne sont qu'un cumul d'affectivité “objectivée”.
Cela nous ramène à un La Fontaine inquiétant, dont se méfiait Rousseau, à juste titre, un La Fontaine libertin non-voilé (de mœurs et de pensées) où perce sous l'auteur des Fables l'auteur des Contes en vers, l'écrivain du règne des sens, du trouble et de l'irrationnel.
Le Loup et l'Agneau, Fable 10, Livre 1 (publication: 1668).
Jean-Charles ANGRAND.
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vendredi, 20 mars 2009
Sarkozy battles General De Gaulle's NATO retreat
Sarkozy battles General de Gaulle's NATO retreat
16 March, 2009, http://russiatoday.ru/
French President Nicolas Sarkozy has gone against the late General Charles de Gaulle’s decision in 1966 to remove France from NATO, but that move promises to be something of a public relations disaster.
Intensive security measures are planned as tens of thousands of anti-NATO demonstrators plan to block the summit during the military organization’s 60th Anniversary conference in Strasbourg in April.
Sarkozy is pulled in different directions over reintegrating with the NATO military machine. He believes France needs US friendship to do business worldwide and wants to benefit from the US military umbrella. He has worked hard to overcome the violent hostility to France that dates back to the quarrel over the war in Iraq, which saw Americans pouring French wine into the Potomac River, but he also wants a European defence policy for Europe and does not want to follow the US into Vietnam style quagmire in Afghanistan.
Above all, the French want to keep their independence and have no intention of seeming to become the next British style US poodle. Yet much of the world sees NATO as the military arm of US foreign policy. Sarkozy thinks that he can achieve these contradictory aims from within the alliance but the result is that different levels of the French government are giving off conflicting messages.
The administration is playing up two opinion polls that show a small majority of French people in favour of reintegration. Much of the press have dutifully echoed the result. Little attention has been paid to the high figure of 21% of ‘don’t knows’. Equally the French press has ignored completely the Angus Reid poll that shows that only a tiny 12% of French people think that the engagement in Afghanistan boosted by Sarkozy, ‘has been mostly a success’ – the lowest figure for six comparable western European nations.
Faced with this President Sarkozy has appointed a personal envoy to Afghanistan and Pakistan, Pierre Lellouche. In so doing he reinforces France’s diplomatic presence in the region at a time when policy is under review by the United States and its NATO allies. The move follows similar appointments by Britain and Germany, which in turn were triggered by the appointment of the veteran diplomat Richard Holbrooke to head up a similar US diplomatic mission. For the moment, despite US pressure, there is no question of sending more troops.
It is likely that the appointment of Lellouche has been made after consultation with the Americans. His career path confirms this. He has close links with America and achieved a doctorate in law at Harvard University. In his political career he has specialised in foreign relations and in particular NATO. He is President of the French parliamentary delegation to NATO and was President of the NATO Parliamentary Assembly from 2004 -2006. Last year he conducted a cross-party parliamentary enquiry into conditions in Afghanistan. He worked with Holbrooke in Bosnia in the 1990s.
The importance of the appointment of Holbrooke, linked to that of his French, German and British counterparts, to a hard pressed President Obama is clear from the fact that it came only two days into his presidency. Any support for him by France is welcome. President Sarkozy has appointed an envoy very much to the taste of his allies and has talked of staying in Afghanistan ‘as long as is necessary’. However, in Washington, recently his Minister of Defence Hervé Morin put it differently:
“We will have to stay as long as is needed… Our aim is not to stay there for ever. That is what the President of the Republic has reminded us several times.”
And he went so far as to pose the question: “Why not set, quite rapidly, a date for the beginning of the withdrawal of the alliances forces?”
Lellouche himself was more blunt:
“It is right that we operate as co-pilots in the international strategy in Afghanistan. There must not be a repetition of unilateral excesses of the Bush era, which provoked a deep gulf between the United States and its NATO allies”.
He said that the French government would ‘test’ the dialogue proposed by President Obama. “Let us hope that it works. We will not stay in Afghanistan indefinitely”. He stressed that the conflict there “was a war and not an international police operation. The proof is that France spends nearly €200 million a year on its army in Afghanistan whilst spending only €11 billion on civilian aid”. He pin pointed the withdrawal of all but 7,000 US troops at the time of the invasion of Iraq in 2003, as the main cause of the deterioration of the allied position in Afghanistan. But he said “The game is not lost. Studies show that if there is a lack of support for the Karzai government, the people do not want a return to the rule by the Taliban.”
By fully rejoining NATO, France removes a thorn from the US diplomatic flesh and adds the full support of the world’s second biggest diplomatic service backed up by Western Europe’s only genuinely independent nuclear deterrent plus experienced and respected military forces. Even so, quite how much influence France will really have over policy in Afghanistan, with a total of only 3,300 troops deployed, remains to be seen. The United States now has 38,000 present with a further 15-30 thousand to arrive shortly.
The point is underlined by the announcement that French troops there are now to come directly under US command whereas before they operated as an independent unit. This will be grist to the mill of those in France who claim NATO reintegration means loss of national control. It will not help Prime Minister François Fillon, who after some hesitation, decided to call for a vote of confidence on the question in the French National Assembly. By putting the survival of the government on the line he will win easily and it gives him a chance to counter the arguments of those within his own party and in the opposition who oppose the move.
Despite this neat political manoeuvre, the reality is that the French President is confronted by real opposition from many in the French political class over NATO reintegration and in particular involvement in Afghanistan. They argue, often privately, that this is more a colonial war to control pipeline routes from central Asia to the sea coast of Pakistan than about democracy. Worse they suggest it may be an excuse to establish a long term presence in the region with no other real military aim.
They point to the coincidence that the US led invasion followed one month after the award by the Taliban government of a key energy contract to an Argentinean company rather than American Unocal and that before becoming President, Hamid Karzai was an oil consultant to Chevron in Kazakhstan. The same Afghan President requires a twenty four hour a day American body guard of over 100 men to stay alive, unlike his much criticised Communist predecessor.
They question why after seven years, the US security services that employ 100,000 people and spend an astounding $50 billion a year, cannot find Osama Bin Laden. They note that Afghanistan has become the world’s biggest producer of heroin under Western occupation.
Finally they do not think the war can be “won” in any meaningful sense. They echo the view of Canadian Prime Minister Stephen Harper, who told CNN:
“Quite frankly, we are not going to ever defeat the insurgency. Afghanistan has probably had – my reading of Afghanistan history is – it’s probably had an insurgency forever of some kind.” The Canadian parliament has voted to withdraw all troops by 2011.
Despite all this there are indications that President Sarkozy will eventually take the risk of sending more troops. Under the French constitution it is his decision alone, but this will not happen before the controversial NATO summit in Strasbourg in April and the vote in parliament. In any event he will do what he can to prevent the alliance from failing in Afghanistan because he believes that such an outcome would damage NATO credibility perhaps fatally. This is especially the case in the light of the recent humiliation of Western financial institutions.
All this leaves the United States and its NATO allies confronting the classic military dilemma well summarized by Winston Churchill over a hundred years ago:
“It is one thing to take the decision not to occupy a position. It is quite another to decide to abandon it once occupied.”
More troops may just make it possible in one form or another to ‘declare a victory and go home’ to the great relief of the French electorate and government. This process is likely to be accelerated by the bankrupt finances of the NATO governments.
Robert Harneis for RT
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jeudi, 19 mars 2009
Chauprade: refonder un monde multipolaire
![]()
Chauprade : "refonder un monde multipolaire" |
Ex: http://unitepopulaire.org/ | |
« Mes détracteurs cherchent à faire de moi un complotiste. Or, je ne suis pas plus complotiste que ceux qui défendent la version officielle [des attentats du 11 Septembre]. […] Ne perdons pas de vue que le monde est partagé entre deux représentations de ces attentats. En Chine, en Russie, dans le monde arabe, en Amérique latine, bref dans l’écrasante majorité du monde non occidental, on ne croit pas à la version officielle. Je ne dis pas qu’il faut reprendre à son compte ces doutes, je dis simplement que cela fait partie de la réalité géopolitique du monde. […] Je revendique le droit de douter. C’est là le fondement de la recherche scientifique. En histoire et en géopolitique, cela consiste à s’interroger sur la vérité de tel ou tel événement historique, de la confirmer, de la nuancer ou de l’infirmer, si elle est inexacte dans sa formulation. C’est cela qu’on nous refuse. Car au-delà de mon cas, ce qui est remis en question, c’est le droit élémentaire de douter, de s’interroger. Je ne suis pas le seul. Beaucoup d’autres ont été frappés avant moi. Ce qui montre qu’il y a un resserrement des libertés dans notre pays. […] Dès le moment où un Etat, en l’occurrence les Etats-Unis, a délibérément menti sur les armes de destruction massive pour justifier son attaque contre l’Irak, je ne vois pas ce qui justifierait de prendre pour parole biblique la version qu’il donne du 11 Septembre. […] Le point de départ du mondialisme est la finance new-yorkaise, qui n’a cessé d’accroître son emprise sur le monde. Elle fait de la géopolitique depuis l’entrée en guerre des Etats-Unis dans la Première Guerre mondiale. Or, la finance est entrée en crise, et avec elle le projet mondialiste. Le moment est venu de refonder un monde multipolaire. Ma crainte, c’est que les Européens soient absents de cette refondation. On voit les Russes, les Chinois, les Sud-Américains. On ne voit pas émerger de conscience européenne, ni de réveil des peuples européens. L’Europe semble être tombée en léthargie au lendemain de la Deuxième Guerre mondiale. Or, la paix découle d’équilibres entre les puissances. Dès lors que l’une d’entre elles s’affaiblit dans son identité, dans ses capacités militaires, dans sa faculté à se penser, elle s’expose à disparaître, broyée par des civilisations fières de leur identité, qui ont le nombre avec elles. […] J’invite mes amis à rester discrets. Moi je suis sorti et je vais continuer le combat à l’extérieur. Eux doivent rester pour le mener à l’intérieur. Que mes amis ne s’inquiètent pas pour moi. Ils vont voir mon combat redoubler en intensité. »
Aymeric Chauprade, interviewé par Le Choc du Mois, février 2009
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dimanche, 15 mars 2009
Drieu La Rochelle. Il mito dell'Europa
Drieu La Rochelle. Il mito dell’Europa

Pierre Drieu La Rochelle (Parigi, 3 gennaio 1893 – Parigi, 15 marzo 1945)
Questo libro, edito nel lontano 1965, poi ristampato nel 1981, ed ormai reperibile nel migliore dei casi in sbiadite fotocopie, rivelò al distratto pubblico italiano la figura di Pierre Drieu La Rochelle. A questa lacuna, aveva in parte rimediato un libro di Paul Serant (Romanticismo fascista) uscito qualche anno prima, ma fu solo con questo piccolo saggio che esplose la passione per questo “poeta maledetto” del Novecento. Contemporaneamente alla scoperta in Italia della figura del “collaborazionista” La Rochelle, in Francia cominciavano ad essere ristampati i suoi testi, come in una timida, comune, primavera del pensiero anticonformista brutalmente azzittito con la sconfitta nella Seconda Guerra Mondiale.
La Rochelle è sicuramente una personalità forte, uno scrittore dal temperamento d’acciaio, ma anche un polemista dalle grandi capacità di romanziere. Questa sua grande sensibilità fu probabilmente dovuta all’esperienza tragica nella Prima Guerra Mondiale (in cui fu ferito tre volte), e all’estrazione borghese della sua famiglia, rovinata da crisi economiche e sentimentali.
Sicuramente Drieu sapeva che non si potevano servire due “padroni”, la verità e la notorietà, scegliendo così di essere compreso bene, ma da pochi. Non a caso gli autori del libro, sottolineano la figura di questo poeta come quella del miglior Nietzsche: un’inattuale appunto, che ha lasciato fosse il fluire del tempo a dispiegare tutta la sua attualità e profeticità.
L’analisi del pensiero di La Rochelle segue così per ognuno dei tre autori una prospettiva differente: se Romualdi ne analizza la personalissima Weltanschauung, il suo esempio, identificato come militia per l’Europa, è il contributo di Giannettini, mentre Prisco si sofferma sulla storia “personale” di questo.
Dopo la crisi del ‘29, mentre tutti i suoi amici d’infanzia scelgono di abbracciare le sorti dell’Internazionale comunista, Drieu fa una scelta impopolare: egli comincia a proclamarsi apertamente fascista. Il suo fascismo è però quello di chi non può fare a meno di denunciare i mali della decadenza, di elaborare una personale rivolta contro quel “tramonto dell’occidente” già raccontato da Spengler, e dagli autori tedeschi della Rivoluzione Conservatrice.
Per questo, Drieu non fu solo un “intellettuale fascista”, come qualcuno ha voluto etichettarlo un po’ troppo semplicisticamente. Fu uno scrittore che credette di trovare una risposta alle sue domande e alle sue speranze nel fascismo o, meglio, in una certa immagine del fascismo che si era creato. Particolare fondamentale, poiché se non si tiene conto di ciò, si rischia di non capire la sua critica e lucida analisi dei regimi di Mussolini e di Hitler, e quell’atteggiamento anticonformista (appunto “maledetto”) che gli attirò le antipatie sia delle destre che delle sinistre dell’epoca.
La sua Europa non è un’Europa “neutra”: aborto esangue ed intellettuale dei federalisti di Strasburgo o d’altri democratici tout court. La sua Europa è invece quella volontà unica e formidabile, già narrata da Nietzsche, che nel sacrificio e nella stirpe, trova la sua ragion dessere. Non aveva allora torto Drieu La Rochelle, a scrivere poco prima di morire che le generazioni future si sarebbero chinate, incuriosite, sui suoi libri per cogliere un suono diverso da quello solito.
Drieu, però, a differenza di molti altri “redenti” o fascisti “pentiti”, volle pagare sino in fondo, dimostrando che ancora oggi le parole possono essere scritte «con il sangue e non solo con l’inchiostro». Avrebbe potuto fuggire come molti, starsene tranquillo per un po’ e ritornare in patria dopo qualche anno. No. Sarebbe stato troppo facile, troppo moderno per lui. Drieu La Rochelle moriva perciò suicida, il 15 Marzo 1945 nel momento della “liberazione”.
* * *
A. Romualdi, M. Prisco, G. Giannettini, Drieu La Rochelle. Il mito dell’Europa, Edizioni del Solstizio, 1965.
[Tratto da “il Borghese”, n.8, Agosto 2008]
Andrea Strummiello
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jeudi, 12 mars 2009
La fin de la singularité française dans l'OTAN
La fin de la singularité française dans l'Otan
La France doit-elle reprendre « toute sa place » dans l'Otan en retournant dans son commandement intégré, qu'elle avait quitté en 1966 ? Ou doit-elle conserver sa position actuelle, présente dans l'organisation, militairement engagée dans des opérations au Kosovo et en Afghanistan sous drapeau otanien mais sans participer à ses organes de commandement pour maintenir son autonomie de décision ? Le débat fait - du moins en apparence - rage dans la classe politique française. Dans quelques semaines, le sommet de Strasbourg et Kehl des 3 et 4 avril prochain, doit en principe célébrer le soixantième anniversaire de l'organisation qui, paradoxalement, a survécu au décès du Pacte de Varsovie et l'annonce du retour complet de l'enfant terrible français au sein de sa « famille » euro-atlantique.
Ce dernier geste, très attendu aussi bien à Washington qu'à Berlin, est pourtant, en grande partie, symbolique. Certes, la France pourrait obtenir deux commandements : l'un basé à Norfolk en Virginie (Etats-Unis) chargé de la conduite des transformations de l'alliance, et un autre à Lisbonne, qui accueille le QG de la force de réaction rapide (Nato Response Force, ou NRF). Le dossier n'est cependant pas totalement bouclé, car ce retour signifie une très forte augmentation du nombre d'officiers français à l'Otan et, donc, d'une réduction concomitante des contingents britannique et allemand. Et l'assentiment des 25 autres alliés. Si tous les feux verts sont obtenus, cette montée en puissance pourrait s'étaler sur trois à quatre ans.
Mais au-delà de caractéristiques techniques, ce retour scelle avant tout, symboliquement, le dernier maillon d'un rapprochement avec l'Amérique et la communauté atlantique, amorcé par Jacques Chirac. Car depuis 1995 la France, et cela en dépit de la violente controverse sur l'Irak avec George W. Bush, a déjà fait une grande partie du chemin en acceptant de participer à des missions militaires et en devenant l'un des principaux contributeurs de forces, notamment au sein de la NRF. Au lendemain des attaques terroristes du 11 septembre 2001, la France n'avait d'ailleurs pas hésité à se ranger du côté de tous les alliés pour évoquer la clause de solidarité collective avec les Etats-Unis, selon laquelle une attaque contre l'un des membres est une attaque contre tous.
Mais ce sont souvent les symboles qui sont le plus sujets à polémique, surtout lorsqu'ils touchent à des concepts comme l'indépendance de la politique étrangère de la France et sa souveraineté. Des concepts qui étaient d'ailleurs au coeur de la décision du général de Gaulle dans sa lettre du 7 mars 1966 au président américain Lyndon Johnson. Pour la France, il s'agissait alors « de recouvrer sur son territoire l'entier exercice de sa souveraineté, actuellement entamée par la présence permanente d'éléments militaires alliés ». Ce qui avait conduit notamment à l'évacuation des états-majors de l'Otan de Versailles et Fontainebleau un an après. Mais Paris avait d'autres soucis : conserver toute son autonomie de décision sur la force de frappe nucléaire six ans après la première explosion d'une bombe atomique française et refuser de suivre les Etats-Unis dans toutes leurs aventures militaires à l'étranger. Cela au moment même où ils s'engageaient lourdement dans la guerre du Vietnam.
Aujourd'hui, le contexte a profondément changé. D'une part, le monde n'est plus divisé en deux blocs. C'est d'ailleurs aussi pour se placer en dehors de cette politique de blocs et à un moment où s'amorçait une certaine détente que le général de Gaulle avait choisi de se retirer du commandement intégré, lui ouvrant ainsi la voie à un dialogue avec l'URSS et la Chine. La fin de la Guerre froide - et en dépit des nouvelles tensions avec la Russie - a une autre conséquence : celle d'avoir mis un terme à l'équilibre de la terreur entre les deux blocs par le feu nucléaire. Ce qui réduit évidemment la portée de la question de l'autonomie de la force de frappe nucléaire française vis-à-vis de l'Amérique.
Pourtant, il ne faut pas se faire d'illusions. Le retour total dans l'Otan de la France soulève au moins deux autres interrogations : quid de l'Europe de la défense ? Certes, tout est fait pour expliquer que les Américains reconnaissent enfin cette dimension européenne, mais elle restera un élément complémentaire de l'organisation atlantique, et non « autonome ». L'autre question est très simple. Le président Barack Obama ne peut que se féliciter du choix de Nicolas Sarkozy, car ce qu'il souhaite aujourd'hui le plus de la France comme de tous ses alliés, c'est l'envoi de troupes supplémentaires de leur part en Afghanistan. Il s'agit de savoir si alors Paris pourra lui dire « non ». Le mur de Berlin est tombé. La singularité française est en train de suivre. Mais jusqu'à quel point ?
Jacques HUBERT-RODIER
Source : LES ECHOS
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mercredi, 11 mars 2009
Soutien tunisien à Ayméric Chauprade
Le soutien des Tunisiens : "Choc de civilisations" et liberté de penser
Si toute histoire n'est que narration, l'Histoire, la grande, elle aussi est une narration. Elle est faite d'agencement causal d'évènements avec la prétention de dire le réel (les évènements) et le vrai (l'agencement causal).
L'Histoire ainsi faite influe sur le futur et détermine les rapports de forces actuels.
Les attentats du 11 septembre 2001 n'échappent pas à cette logique. La restitution qu'en ont faite les autorités américaines dès les premiers jours a constitué non seulement une version officielle, mais aussi une légitimation pour des actions futures (les guerres d'Afghanistan et d'Irak) et une nouvelle politique mondiale : la lutte contre le terrorisme avec le camp du Bien et l'axe du Mal...
Et si la version officielle du 11 Septembre n'était qu'une vulgaire manipulation destinée à légitimer une nouvelle politique définie bien avant ces évènements ? C'est ce qu'on appelle habituellement "la thèse du complot", largement répercutée par la fiction américaine. Nombreux sont les films et les romans où l'on voit de sombres personnages, de préférence de la CIA ou du FBI, ourdir les machinations les plus rocambolesques pour atteindre des objectifs tortueux, un peu comme un coup d'échec, en apparence sans aucune utilité, mais qui prépare une attaque fatale une dizaine de coups plus tard.
Il y a beaucoup de points d'ombre dans la version officielle du 11 Septembre. Il y a ceux qui relèvent de la science (l'effondrement total des deux tours jumelles et d'une autre tour, la tour 47, pour des raisons assez inexplicables) et ceux relatifs à l'enquête elle-même. Il y a aussi l'imbrication prouvée
des services de renseignements israéliens dans l'environnement humain des jihadistes d'Al Qaïda chargés d'accomplir les attentats. L'important, aujourd'hui, n'est pas de statuer définitivement
sur la véracité de la version officielle et des versions "alternatives", mais de ne pas verrouiller ce champ d'investigation...
Et c'est justement de cela dont il s'agit, et en France, pays de Descartes et de Voltaire ! Aymeric Chauprade est un expert en géopolitique connu et reconnu. Il a enseigné les dix dernières années dans la prestigieuse Ecole de Guerre, dépendant du Ministère de la Défense français. Il a publié en janvier 2009 un livre "Chronique du choc des civilisations" qui lui a valu, presqu'immédiatement d'être congédié par le ministre de la Défense lui-même. Son "crime" ? C'est celui d'avoir consacré son premier chapitre à l'exposition des principales réserves sur la version officielle du 11 Septembre (Voir les bonnes feuilles du livre en page 14).
Le Professeur Chauprade n'est pas un auteur farfelu qui cherche la notoriété à n'importe quel prix. C'est un expert en géopolitique et un homme de science. Il se définit lui-même comme un conservateur classique (voir l'entretien qu'il nous a accordé en page 13). Chauprade n'adhère pas à la thèse du complot, mais il trouve que les arguments présentés contre la version officielle ne manquent pas de pertinence.
Il est évident que ce qui a aggravé le "cas Chauprade" auprès de certains grands médias français est l'implication, qui reste à déterminer, des services de renseignements israéliens dans l'entourage humain des kamikazes du 11 Septembre.
La célérité de la réaction du ministre de la Défense français est vraiment curieuse. Est-il interdit de douter dans le pays de Descartes ? Les idées émises dans le livre de Chauprade sont-elle délictueuses ? A le lire, on n'y voit ni racisme, ni diffamation, ni antisémitisme. Comment comprendre la réaction massive des grands médias pour défendre le magazine français qui a repris les caricatures danoises considérées blasphématoires par de nombreux Musulmans et le lynchage à échelle réduite d'Aymeric Chauprade ?
Y a-t-il des vérités sacrées et d'autres pas ? Le livre de Chauprade est prémonitoire, non pas à cause de ses doutes sur la version officielle du 11 Septembre, mais du titre même "Chronique du choc des civilisations" qui rappelle le célèbre livre de Samuel Huntington "Le choc des civilisations". Les intellectuels libres peuvent de moins en moins penser contre leur communauté ou leur civilisation. Un intellectuel occidental qui attaque l'Islam, même s'il frise le racisme et même si son argumentation est basée sur de fausses informations, trouve immédiatement des réseaux de solidarité et tous les grands médias revendiqueront sa liberté de penser.
Mais s'il s'attaque à certaines "vérités officielles" qui fondent la conscience occidentale, la machine médiatico-politique le broiera. Encore faut-il rappeler que la situation de l'intellectuel libre en terre d'Islam est loin d'être reluisante. Lui ne risquera pas l'omerta des médias et l'infamie publique seulement, mais aussi son intégrité physique et parfois sa vie.
Qu'on le souhaite ou qu'on le déplore, le "Choc des civilisations" est en ordre de bataille. Ses premières victimes sont la liberté de penser et les intellectuels indépendants.
Zyed KRICHEN
00:40 Publié dans Actualité | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : france, censure, totalitarisme, liberté d'expression, europe, affaires européennes, maghreb, afrique du nord, liberté de penser, choc des civilisations | |
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mardi, 10 mars 2009
P. Quilès: le retour de la France dans le commandement militaire intégré de l'OTAN est inutile et dangereux
Paul Quilès : Le retour de la France dans le commandement militaire intégré de l'OTAN est inutile et dangereux
Le 7 mars 1966, le général de Gaulle retirait la France du commandement militaire intégré de l'OTAN, c'est-à-dire des comités et des groupes où prenait corps l'intégration des forces armées des pays de l'Alliance atlantique. Les forces françaises étaient déliées des contraintes de la planification militaire commune et n'avaient plus à occuper des positions prédéterminées dans le dispositif de défense allié. Notre pays restait cependant tenu par les obligations de l'article 5 prévoyant une clause d'assistance mutuelle en cas d'agression.
Durant les années 90, si la France a réintégré le comité militaire, où se réunissent les ministres de la défense des pays membres de l'Alliance, elle est restée à l'écart de trois structures :
- le comité des plans de défense, où s'élabore la planification de défense, c'est à dire les objectifs de forces à atteindre en fonction des missions et des scénarios ;
- le commandement militaire permanent intégré, qui comprend la chaîne de commandement permanente et où s'élabore la planification opérationnelle ;
- le groupe des plans nucléaires, où les pays non‑nucléaires sont informés de la politique nucléaire suivie par les Etats‑Unis et la Grande Bretagne dans le cadre de l'OTAN.
Ce qui est annoncé aujourd'hui, c'est le retour dans ces organisations, à l'exception du groupe des plans nucléaires. Déjà en 1997, J. Chirac avait tenté sans succès cette opération, les Américains refusant de céder à un général français le commandement opérationnel de Naples.
Pour justifier son choix du retour dans le commandement militaire intégré, N. Sarkozy invoque trois arguments :
1- L'influence de la France ne serait pas à la hauteur de son engagement militaire et financier et ce retour lui permettrait de gagner de l'influence, notamment pour transformer et « européaniser » l'Alliance.
Il se trouve que l'influence dans l'Alliance est liée aux capacités militaires et non au statut par rapport au commandement militaire intégré. On l'a vu en 1999, lorsque, au moment du conflit du Kosovo, la France avait plus de poids que l'Allemagne dans les décisions prises par l'Alliance.
Quant au poste de « commandant suprême allié transformation », envisagé pour la France, il peut sembler prestigieux, mais il est dans les faits secondaire. Localisé à Norfolk, en Virginie, actuellement occupé par un général américain, il a pour mission de faire évoluer le dispositif militaire de l'Alliance, pour le rendre apte à des opérations lointaines, mais ce n'est pas un commandement opérationnel. En réalité, ce sont les Etats-Unis qui détiennent l'essentiel de l'expertise et du pouvoir de décision en matière de réorganisation des forces et d'actualisation des doctrines militaires dans l'OTAN, ce qui explique la localisation de ce commandement.
Le commandement opérationnel suprême est détenu par le Saceur, dont personne n'envisage qu'il soit détenu par un autre militaire que le commandant des forces américaines en Europe. Son adjoint, le deputy Saceur, a une mission importante, puisqu'il commande les opérations de l'Europe de la défense, quand l'UE fait appel aux moyens de l'OTAN en activant les accords dits « Berlin plus », mais il est traditionnellement britannique ou allemand, par rotation. En dessous de ces commandements, on trouve celui de Brunssum, également britannique ou allemand, et surtout celui de Naples, traditionnellement dévolu aux Américains, qui conduit les opérations en Méditerranée orientale, c'est à dire en direction du Proche-Orient. C'est celui de Lisbonne, d'importance nettement moindre, qui reviendrait à un Français.
La véritable question n'est pas celle de l'influence dans l'OTAN, mais celle de la capacité d'influencer les Américains pour faire évoluer l'OTAN, ce qu'ils n'ont pas fait depuis 1989, en maintenant une structure très lourde de 15 000 militaires. Quant à espérer influencer le processus de planification de défense, c'est tout simplement illusoire, parce que cette planification est en fait dictée par la doctrine d'emploi de l'armée américaine. L'européanisation de l'Alliance est donc un leurre, à l'image de la politique pratiquée par Tony Blair, qui a échoué, alors que celui-ci pensait influer sur la politique des Américains en étant leur allié le plus fidèle.
2 - le retour dans le commandement intégré serait une condition posée par nos partenaires européens pour faire progresser l'Europe de la défense.
N. Sarkozy a annoncé ce retour de manière implicite lors du « discours aux ambassadeurs » en août 2007. Depuis lors, tous nos partenaires considèrent que la décision est prise et qu'il n'est donc pas nécessaire de faire des concessions à la France pour ce qui concerne la défense européenne.
C'est pour cela que la France n'a pas pu obtenir la création d'un état-major de commandement permanent pour la PESD (politique européenne de sécurité et de défense), à laquelle se sont opposés les Britanniques. Sans cet état-major, la défense européenne n'a pas d'autonomie et dépend de la planification et des moyens collectifs de l'OTAN pour les opérations lourdes. Depuis lors, les Britanniques essaient de pousser l'idée d'une harmonisation des planifications de défense de l'OTAN et de la PESD, ce qui enlèverait toute autonomie et donc tout intérêt au processus de construction de l'Europe de la défense.
Au total, on voit que la perspective de retour de la France dans l'OTAN, loin de renforcer la PESD, l'a affaiblie et peut être même compromise définitivement.
3 - Le retour dans le commandement intégré serait un gage de la réconciliation transatlantique et permettrait à la France d'établir avec les Etats-Unis des relations de meilleure compréhension, dans le respect des intérêts de chacun.
Militairement parlant, ce retour n'a pas d'importance. Quand la France participe à une opération, des officiers français sont intégrés dans les chaînes de commandement opérationnel.
Politiquement parlant, il n'en va pas de même. L'appartenance au commandement intégré introduit une présomption de disponibilité des forces françaises « assignées » à l'OTAN. Pour une mission militaire donnée, la participation française sera supposée acquise et le rôle du contingent français largement prédéterminé. La capacité de la France à infléchir la conduite de la mission -dans une interposition au Proche-Orient, par exemple- serait réduite d'autant. On ne voit pas en quoi cette situation réduirait les « malentendus transatlantiques ».
Symboliquement surtout, l'effet serait considérable. Jusqu'ici, le statut spécifique de la France dans l'OTAN était vu, notamment dans les pays arabes, comme le symbole d'une certaine indépendance de la France par rapport aux Etats-Unis et comme la preuve d'une volonté d'autonomie de la PESD. Cette perte d'image risque donc d'affaiblir la France et l'Europe et de déséquilibrer davantage encore la relation transatlantique.
Faire le pari d'une rupture majeure de la politique étrangère des Etats-Unis, qui laisserait plus d'autonomie à l'Europe et s'engagerait vers un multilatéralisme de compromis, est hasardeux. Rien n'indique que la nouvelle administration américaine ait décidé de renoncer aux privilèges de son « leadership ». Tout en promettant les plus larges consultations au sein de l'Alliance, le Vice-président Biden ne vient‑il pas de déclarer à Munich que « les Etats-Unis agiraient en partenariat chaque fois qu'ils le pourraient, mais seuls quand ils le devraient » ? Quant à la mission de l'OTAN en Afghanistan, s'il paraît aujourd'hui acquis que les Etats-Unis demanderont aux Européens d'y contribuer plus largement, il ne semble pas qu'ils envisagent de les associer davantage aux décisions essentielles. En revenant dans les structures intégrées de l'OTAN, la France ne serait pas dans la meilleure position pour faire prévaloir, conjointement avec ses partenaires européens, les voies d'une solution politique au conflit afghan, si jamais les Etats-Unis espéraient venir à bout de la rébellion en ayant principalement recours à l'action militaire.
La décision de N. Sarkozy est donc dangereuse, parce que porteuse de risques pour la qualité des relations transatlantiques. Elle est de plus inutile, alors même que le statut de la France dans l'OTAN était accepté par les Etats-Unis et ne nuisait en rien à la relation franco‑ américaine.
Paul Quilès
Ministre socialiste de la Défense (1985-1986)
Président de la Commission de la défense nationale et des forces armées de l'Assemblée nationale (1997-2002)
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samedi, 07 mars 2009
L. F. Céline: la grande attaque contre le Verbe
Louis-Ferdinand Céline : La grande attaque contre le Verbe
Il faut, dit-il, sortir les phrases de leur sens usuel, d'un écart très léger comme on déplace une porte hors de ses gonds:
"Le style, il est fait d'une certaine façon de forcer les phrases à sortir légèrement de leur signification habituelle, de les sortir des gonds pour ainsi dire, les déplacer, et forcer ainsi le lecteur à lui-même déplacer son sens."
Ce "labeur" exige beaucoup de doigté. Céline enchaîne immédiatement sur sa "grande attaque contre le Verbe":
"Vous savez, dans les Ecritures, il est écrit : "Au commencement était le Verbe" Non! Au commencement était l'émotion..."
Tecniquement parlant, l'auteur décrit, par l'image, les procédés grâce auxquels il fait passer le langague parlé à travers l'écrit, pour atteindre, dit-il ailleurs, "cette espèce de prose versifiée (...) de dentelle" toute "en émotion et en violence" (1), un travail aussi "éreintant" que celui du médium en transe. Il faut gauchir, "tordre la langue tout en rythme, cadence, mots"(2). "C'est transposé dans le domaine de la rêverie entre le vrai et le pas vrai." (3)
Les gonds et la porte sont aussi un archétype très ancien. En posant son Verbe magique en rival de celui des Ecritures, Céline ne pouvait guère faire l'impasse sur ce point. L'idée d'axe du monde, de cycle, d'ouverture et de fermeture des portes solsticiales, tout ceci est contenu dans l'image de la porte et des gonds, nommés dans l'Antiquité par le même mot "cardo", d'où dérive le terme "cardinalis" servant à désigner les quatre directions de l'espace. Dans la symbolique romane les portes désaxées figurent une atteinte à l'âme du monde et à celle de l'homme. Le Christ, que l'Evangéliste désigne par le Verbe est dit "la Vraie Porte".
[...] La "grande attaque contre le Verbe" menée par Céline a bien d'autres finalités qu'un simple retour à la pureté des origines émotives du langage. Le métro célinien est tellement contre-nature que le colonel Réséda, à l'esprit si lent, finit par céder à la panique :
"il voit le métro sur le boulevard!... là, sur le boulevard Sébastopol!... il se cramponne... (...) Les rails!... qu'il crie, lui (...) traître! les rails!... il a dévissé tous les rails!... (...) au secours! au secours! (...) il a mis des soupirs partout!... monstre anarchiste!... vendu!... traître!... traître!..."
La vision n'est pas si délirante. Elle énonce le remède. Le colonel hurle:
"C'est le métro! (...) c'est le métro!" "Sauvez-moi! sauvez-moi tous!" "Un taxi pour l'amour de Dieu!"
Dans son accès de démence, Réséda propose une sortie du métro, au jour, il achète des fleurs, "les lys, les glaïeuls, les roses", véritable antidote. La fable ne saurait se contenter de cette fin : Réséda perd ses lys; hypocritement Céline les ramasse, mais le coeur n'y est pas :
"C'est vrai, il perdait ses fleurs!... (...) il en perd encore!... j'en ramasse..."
Récapitulons: Les Entretiens avec le Professeur Y constituent une véritable parabole de l'oeuvre célinienne, de ses tropismes, et de l'envoûtement qu'elle exerce sur le lecteur. L'auteur y livre rétrospectivement la théorie et la pratique de ses écrits, tout particulièrement leur phase "au noir" constituant sa grande période créatrice. Le renversement des valeurs diurnes, symboliquement la Surface - avec majuscule - la chute active, accélérée vers le "bout de la nuit" sont exprimés par la métaphore du métro Pigalle.
L'écrivain fera basculer ses fables pseudo-biographiques dans cet "Espace Pigalle" ainsi que toute la matière substancielle de ses romans.
Le choix dit Pascalien de Céline témoigne d'une sacralité inversive. Descendre au gouffre par le "Nord-Sud", à toute vapeur, s'y boucler avec les voyageurs en un trajet strictement nocturne analogue à la navigation des morts, signifie un renversement caractéristique de substitution de la nuit au jour. Telle est la politique qui sera celle de Céline dans Voyage au bout de la nuit, métaphoriquement et intuitivement comme Monsieur Jourdain faisait de la prose sans le savoir, puis, bien plus tard, consciemment dans les Féerie dont les allégories offrent un véritable florilège de tous les gestes de l'Oeuvre au noir, première époque célinienne.
Les Entretiens considèrent l'état mental des voyageurs-lecteurs entraînés dans l'abîme : vivre dans les ténèbres substituées au jour sous la dictature du magicien-inventeur-ferroviaire est une situation inviable, à plus forte raison si l'auteur réussit, comme il l'a fait dans Voyage, à faire passer pour naturelle cette chute aux enfers. Céline ajoute dans un entretien avec A. Zbinden :
"Et pour tout avouer, si je me suis mis tant de gens à dos, l'hostilité du monde entier, je ne suis pas certain que ce ne soit pas volontairement. (...) Je me suis isolé, pour ainsi dire. Isolé, c'est pour être plus en face de la "chose".
[...] Il avait de quoi s'isoler volontairement face à la "chose", la redouter, lui attribuer tous les malheurs, estimer qu'ils remontent à Voyage, "le seul livre vraiment méchant" de sa carrière... (4) C'est peut-être dans cette magie noire du Verbe qu'il faut chercher le trouble que Céline inspire. C'est peut-être la perversité, le malaise, la délectation du pacte forcé avec la nuit que certains lecteurs lui pardonnent le moins.
Source : Denise Aebersold, Goétie de Céline, SEC, 2008.
Notes
1- Lettre de Céline au Dr Camus du 24 mai 1950, citée par P. Alméras, in Dictionnaire Céline, pp 802-803.
2- Lettre du 16 avril 1947 à Milton Hindus.
3- Entretien avec Claude Sarraute, Le Monde, 1/6/1960, Cahiers Céline 2.
4- Préface à une réédition de Voyage au bout de la nuit, 1949.
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vendredi, 06 mars 2009
Retour dans l'OTAN: Bayrou réclame un référendum
Retour dans l'Otan : Bayrou réclame un référendum
Le président du Modem François Bayrou a déclaré ce dimanche, lors du lancement de sa campagne pour les européennes, que le projet de réintégrer la France dans l'Otan, serait une "défaite" pour la France et l'Europe. Il juge que c'est aux Français de trancher cette question.
François Bayrou, président du Mouvement Démocrate (MoDem), a qualifié dimanche 8 février de "défaite" pour la France et pour l'Europe le projet de réintégration de la France dans le commandement de l'Otan, défendu par Nicolas Sarkozy, jugeant qu'un tel sujet exigeait un référendum.
Tout comme l'ancien premier ministre Dominique de Villepin, François Bayrou se dit opposé au retour de la France dans le commandement de l'Otan. Lors d'une conférence nationale du MoDem à Paris, il a demandé que le choix qui avait été fait en 1966 par le général de Gaulle, de quitter la structure militaire intégrée de l'Alliance atlantique, "ne soit pas bradé, pas jeté aux orties".
Une réintégration serait "un aller sans retour", a-t-il prévenu. "Parce qu'il n'est pas imaginable qu'un grand pays comme le nôtre, à chaque alternance, entre et sorte du commandement intégré".
"Un tel choix, aussi lourd, ne peut pas se faire par les autorités politiques seules, encore moins par le président de la République. Ce choix ne peut se faire que par un référendum du peuple français", a déclaré M. Bayrou, interrogé par la presse à l'issue de la réunion.
"C'est un changement de cap radical, qui porte atteinte au patrimoine historique et diplomatique de la France, et un tel choix ne peut pas se faire en catimini, simplement par entente au sein d'une majorité passagère. Il faut que ce soit une décision majeure du peuple français", a-t-il ajouté.
En réintégrant cette structure, "nous lâchons la proie pour l'ombre", a également déclaré M. Bayrou à la tribune. "En nous alignant, nous abandonnons un élément de notre identité dans le concert des nations, y compris dans le concert des nations européennes".
"C'est une défaite pour la France", et "c'est une défaite pour l'Europe", a-t-il affirmé. "Nous abandonnons une part de notre héritage, et nous l'abandonnons pour rien".
"Quand on est intégrés, on ne compte plus", a assuré le député des Pyrénées-Atlantiques. "On peut être indépendants en étant alliés, on ne peut pas être indépendants en étant intégrés".
L'ex-candidat à la présidentielle s'en est pris également au ministre de la Défense Hervé Morin, qui fut un de ses lieutenants du temps de l'UDF.
"Il a dit : 'il faut arrêter de barguigner'. Et il a ajouté: 'notre position d'indépendance aujourd'hui, elle est purement symbolique'", a cité M. Bayrou. "Innocent !" s'est-il exclamé. "On peut en dire des bêtises, en deux phrases!".
Le président Nicolas Sarkozy a fait un nouveau pas samedi, devant la conférence sur la sécurité de Munich (sud de l'Allemagne), vers un retour complet de Paris dans l'Otan.
Source : L'EXPRESS
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Lucien Combelle
Lucien Combelle
...Voici bientôt quinze ans qu’il nous a quittés. Je n’ai dû le rencontrer qu’une ou deux fois, rue Monge où il habitait alors. C’était en compagnie de Laurence Granet qui avait soutenu, quelques années auparavant, une thèse de doctorat sur « L’idéologie fasciste dans les œuvres de Brasillach, Drieu La Rochelle, Rebatet ». Le souvenir de ces conversations s’est effacé. Je me souviens seulement du jour où, en public, il évoqua, au risque de lui nuire, son « éditeur fasciste » [sic] qui publia au début des années quatre-vingts ses souvenirs de prison. Cette sortie ne fut pas sans choquer un ami célinien qui fit cette réflexion : « Tout de même, il exagère, c’est lui qui a été fasciste ! ». Longtemps, j’ai cru que, dans son journal Révolution nationale, il s’était montré partisan d’un fascisme « libéral », je veux dire moins radical que celui prôné par ses confrères de la presse parisienne. Jusqu’à cet été 1988 où, pour annoter la correspondance que lui adressa Céline sous l’Occupation, je dépouillai, à la Bibliothèque Royale (de Belgique), la collection complète de cet hebdomadaire. Comme l’a également montré Jeannine Verdès-Leroux, qui s’est livrée au même exercice, Lucien Combelle était, bien au contraire, partisan d’un collaborationnisme sans concessions. C’est dire si Vichy n’était pas ménagé, surtout quand le régime prenait l’initiative, approuvé en cela par l’Église, de censurer en zone non occupée des écrivains jugés délétères : « Valéry, Fargue interdits. Demain Gide et Proust. Et Céline et Marcel Aymé. Et Montherlant. La France officielle semble vouloir retrouver sa beauté en avalant la jouvence de l’abbé Soury, et soigner ses blessures avec de l’eau bénite »¹. On n’est donc pas étonné de le voir dénoncer ensuite l’une des plus hautes autorités du clergé français, « Mgr Gerlier, primat des Gaules – quelle fâcheuse consonance ! – qui se permet de jouer au conseiller d’État et se mêler aux affaires de César. Monseigneur n’aime point l’antisémitisme. Monseigneur n’est pas révolutionnaire. (…) Il est démocrate et pluraliste, comme on dit. Bref, Monseigneur est, à sa manière, un dissident » ². Fustigeant le chef de l’Action française, Combelle n’y allait pas davantage de main morte : « M. Maurras a été antisémite et antidémocrate pour son bonheur et pour le nôtre. Mais, pour son malheur et pour celui de la France, M. Maurras reste germanophobe. La France, pour lui, c’est le félibrige » ³. « Révolution » est sans doute le mot qui revient alors le plus souvent sous sa plume : « Nous sommes, ou les acteurs, ou les témoins, selon une bonne ou une mauvaise fortune, d’une révolution mondiale, d’une révolution qui est née très exactement sur notre continent, dans cette Europe qui, pour notre orgueil, continue à étonner le monde » 4. « Grand garçon, intelligent, très cultivé, avec l’esprit caustique, bon avec les copains, plutôt désagréable avec ceux qui lui avaient fait dans les bottes, Combelle cultivait une pointe de cynisme » 5 : c’est ainsi que le décrit Henry Charbonneau, venu, comme lui, de l’Action française.
Après la guerre, Lucien Combelle présentera naturellement un profil nettement moins tranché. Ainsi, lors de l’émission « Apostrophes » (1978), il évoqua le « jeune fasciste sincère, de bonne foi et naïf » qu’il fut. C’est seulement chez le juge d’instruction, ajouta-t-il, qu’il découvrit ce qu’est la responsabilité des intellectuels. Philippe Alméras, qui l’avait rencontré, lui aussi, dans les années quatre-vingts, garde le souvenir de sa grande prudence : « Comme tous les ébouillantés de la Libération, il craignait l’eau froide 6 ». Céline entretint avec lui une relation du même type (un peu paternelle) que celle qu’il noua avec Henri Poulain, le secrétaire de rédaction de Je suis partout. D’une vingtaine d’années leur aîné, il ne craignait pas de les morigéner dès que paraissait dans leur journal respectif un article qu’il désapprouvait. Ainsi, à propos de cet éditorial sur (ou plutôt contre) Maurras : « Combelle fait l’enfant. Il sait aussi bien que moi l’origine de l’horreur de Maurras pour l’Allemagne – le Racisme 7. » Ou à propos d’un compte rendu du livre, Pétition pour l’histoire, d’Anatole de Monzie : « Tu dédouanes Monzie à présent et son histoire ? La merde est à ton goût ! Rien de plus pourri que ce vieux pitre – membre de la Ligue des Droits de l’Homme – membre de la Lica – grand ami de Lecache et Jean Zay ! » 8. Les exemples sont nombreux… Contrairement à Poulain, exilé en Suisse, Combelle reverra Céline. C’est seulement à la parution d’Un château l’autre qu’il reprit contact. « Tout ceci ne nous rajeunit pas ! » 9, lui répond Céline, une dizaine d’années après la tourmente qui les vit embastillés l’un à Copenhague, l’autre à Fresnes.
Marc LAUDELOUT
Notes
1. Lucien Combelle, « Avec ou sans prières », Révolution nationale, 22 août 1942.
2. Id., « Où en sommes-nous ? », Révolution nationale, 26 septembre 1942.
3. Id., « La France de M. Maurras », Révolution nationale, 31 mai 1942.
4. Id., « Ceci commande cela », Révolution nationale, 8 mai 1943.
5. Henry Charbonneau, Les mémoires de Porthos, La Librairie française, 1981 (rééd.).
6. Philippe Alméras, « Lucien Combelle relaps », Le Bulletin célinien, janvier 2006.
7. Lettre du 31 mai 1942 in L’Année Céline 1995, Du Lérot-Imec Éditions, 1996, p. 122.
8. Lettre du 21 août 1942, Ibidem, p. 127.
9. Lettre du 12 août 1957, Ibid., p. 154.
Bibliographie
Lucien Combelle est l’auteur de six livres : Je dois à André Gide (Frédéric Chambriand, 1951) ; Chansons du Mirador (Frédéric Chambriand, 1951) ; Prisons de l’espérance (ETL, 1952) ; Louis Renault ou un demi-siècle d’automobile française (La Table ronde, 1954) [signé d’un pseudonyme : Lucien Dauvergne] ; Péché d’orgueil (Olivier Orban, 1978) et Liberté à huis clos (La Butte aux cailles, 1983). Sous le titre « Céline, le pérégrin », il a préfacé un recueil de textes de Céline (Le style contre les idées, Complexe, 1987). Il a également écrit le scénario d’une bande dessinée de José Fernandez Bielsa, Quand les héros étaient des dieux (Dargaud, 1969). Au début des années 80, il avait l’intention d’écrire, en collaboration avec Laurence Granet, un Panorama des écrivains de l’Occupation ; le projet n’a pas abouti. En 1997, Pierre Assouline lui a consacré un livre, Le fleuve Combelle (Calmann-Lévy). L’année suivante, Lucien Combelle lui accorda une série de cinq entretiens dans le cadre de l’émission À voix nue sur les ondes de France-Culture (25-29 juillet 1998). Le 1er décembre 1978, à l’occasion de la parution de son livre de souvenirs, Péché d’orgueil, il participa – aux côtés de Henri Amouroux, Raymond Bruckberger, Jean-Luc Maxence et Dominique Desanti – à l’émission Apostrophes de Bernard Pivot sur le thème « Les intellectuels et la collaboration ». Il donna également son témoignage dans le film documentaire d’Alain de Sédouy et Guy Seligmann, Paris l’outragée (Antenne 2, 1989). On trouvera dans L’Année Céline 1995 (Du Lérot, 1996) la correspondance que lui adressa Céline, présentée et annotée par Éric Mazet. Plusieurs ouvrages retracent brièvement son itinéraire : Dictionnaire Céline de Philippe Alméras (Plon, 2004), Dictionnaire commenté de la Collaboration française de Philippe Randa (Jean Picollec, 1997) et Histoire de la Collaboration de Dominique Venner (Pygmalion, 2000). Sur son activité sous l’Occupation, on lira le livre de Jeannine Verdès-Leroux, Refus et violences. Politique et littérature à l’extrême droite des années trente aux retombées de la Libération (Gallimard, 1996), qui s’appuie sur une lecture de ses articles de l’Occupation.
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mercredi, 04 mars 2009
L'Alsace en Europe
L’Alsace en Europe: Rives du Rhin ou plateau lorrain, il faut choisir!
Parmi les mesures qui devraient être rendues publiques figurerait le regroupement - sur des bases à priori volontaires - de quelques-unes des 22 régions actuelles qui ne devraient plus à l’avenir en former que 15 dans le but de leur donner “une dimension européenne”.
C’est ainsi que serait envisagé le regroupement des actuelles régions Alsace et Lorraine au sein d’une super région du Grand Est.
Une telle proposition reflète le tropisme franco-parisien de ses auteurs tout comme la méconnaissance des réalités régionales et européennes.
L’observation de ce qui se passe chez nos proches voisins européens nous montre au contraire que la viabilité d’une région, d’un Land allemand ou d’un canton suisse, n’est pas fonction de l’importance de sa superficie ni de sa population, mais de son homogénéité et des atouts liés à sa situation géographique comme à la présence sur son territoire d’activités économiques à forte valeur ajoutée, et à son rayonnement culturel.
C’est le cas de la Freie und hansestadt Hamburg, la ville libre et hanséatique de Hambourg, qui avec ses 1,8 M d’habitants et ses 755 km² est le premier des 16 Länder allemands pour le PIB par habitant.
Plus grand port d’Allemagne et deuxième port européen, la Ville-Etat d’Hambourg a su depuis la fin de la guerre se spécialiser dans les domaines de la chimie, de la construction aéronautique et navale, et est devenu un leader en matière de technique médicale et de biotechnologie, tout en développant un fort secteur des services.
Plus proche de nous la prospérité du canton de Bâle-Ville, le plus petit des cantons suisses avec ses 190 000 habitants et ses 37 km², vient encore contredire le raisonnement du Comité Balladur.
Vouloir noyer l’Alsace dans un hypothétique Grand Est reviendrait en fait à nous couper de l’espace du Rhin Supérieur qui est notre espace de vie et de développement naturel et historique, et à nous éloigner du centre économique européen qui court de l’Italie du Nord jusqu’à Londres en passant par la vallée du Rhin et la Ruhr sous la dénomination de Banane Bleue.
Il est urgent que ces réalités reviennent à l’esprit des grands élus alsaciens et que la dimension régionale et européenne de l’Alsace l’emporte sur la logique nationale.
La clé de la prospérité de l’Alsace et son avenir se trouvent sur les deux rives du Rhin, pas sur le plateau lorrain.
Article printed from :: Novopress.info Alsace / Elsass: http://alsace.novopress.info
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mercredi, 25 février 2009
Zeev Sternhell, historiographe du fascisme
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SYNERGIES EUROPÉENNES - CRITICON (Munich) - IDHUNA (Genève) - Août 1986
Armin MOHLER:
Zeev Sternhell, nouvel historiographe du fascisme
Un livre, paru à Paris en 1983, a complètement bouleversé l'historiographie du fascisme. Ce livre porte le titre de: Ni droite ni gauche. L'idéologie du fascisme en France. Gros de 412 pages, il est publié par les éditions du Seuil, maison pourtant connue pour ses tendances de gauche.
L'auteur, Zeev Sternhell, professeur de politologie à l'Université Hébraïque de Jérusalem, est né en Pologne en 1935. Il est actuellement le Directeur du "Centre d'Etudes Européennes" et, peu avant la parution de Ni droite ni gauche, il avait fondé le Centre Interdisciplinaire de Recherche sur la Civilisation Française.
Son livre est très dense. Il abonde en outre de répétitions car, ce qui importe pour Sternhell, homme au tempérament fougueux, c'est d'inculquer au lecteur certains jugements inhabituels. Mais il serait erroné de lui reprocher l'emploi de "concepts vagues". A l'opposé du spécialiste jusqu'ici accrédité de l'étude du fascisme, Ernst Nolte, Sternhell n'a pas reçu de formation philosophique. Il est un authentique historien qui se préoccupe de recenser le passé. Pour lui, chaque réalité historique est "irisable", on ne peut la ramener à un seul concept, il faut en considérer les diverses facettes. Dès lors, contrairement à Nolte, Sternhell ne construit pas un schéma abstrait du fascisme, dans lequel il conviendra d'enserrer ensuite les phénomènes concrets. Il renvoie de préférence ces phénomènes à toute une variété de concepts qu'il puise toutefois dans le vocabulaire politique traditionnel, afin de les cerner et de les localiser.
S'il entre dans notre propos de résumer ici un ouvrage aussi complexe, notre exposé ne pourra cependant pas remplacer la lecture de ce livre. Il en est plutôt l'introduction.
1. Qui est Zeev Sternhell?
1.1. Indubitablement, il est un authentique homme de gauche. Le journal Le Monde (14.1.1983) déclare à son sujet: Sternhell entra en mai 1977, après la victoire électorale de Begin et la chute du Parti Travailliste, dans la vie politique israëlienne. Il créa le Club 77, un rassemblement d'intellectuels de l'aile d'extrême-gauche du Parti Travailliste. Ce Club s'engagea dans une politique de modération envers le monde arabe et milita pour l'évacuation de la Cisjordanie; en matière de politique interne, il chercha à favoriser une politique aussi "socialiste" que possible, c'est-à-dire accordant le maximum d'égalité. Au sein du Parti Travailliste, Sternhell fait partie d'une minorité, tout en étant membre du Comité Exécutif".
1.2. Sternhell est un "gramsciste". A l'instar de toute la gauche revendicatrice et contestatrice de sa génération, il s'est libéré de l'orthodoxie marxiste. Il rejette expressément la conception matérialiste de l'histoire (pp.18-19).
A la suite de Gramsci (et a fortiori de l'inspirateur de ce communiste italien, Georges Sorel), Sternhell se rallie à la conception historiographico-philosophique qui veut que les idées ne soient pas le reflet des réalités, mais l'inverse.
1.3. Le point de départ de la démarche de Sternhell: le révisionnisme. Le fait que Sternhell se soit consacré à l'étude du fascisme s'explique sans aucun doute par son intérêt pour la biographie des révisionnistes, ceux qui ont tenté de changer et de réformer le marxisme orthodoxe. De Ni droite ni gauche, il ressort que le révisionnisme de "droite" (p.35) ou révisionnisme "libéral" (p.81), qui mène à des alliances et des compromissions avec le libéralisme bourgeois et qu'incarne un Eduard Bernstein (en France, Jaurès) fascine moins Sternhell que le révisionnisme de "gauche" (p.290), mouvement amorcé par Sorel et les syndicalistes révolutionnaires qui refusaient les "ramollissements" du socialisme et passèrent ultérieurement au fascisme. Sternhell s'intéresse en particulier à un nouveau courant socialiste d'alors qui, dépassant l'opposition Sorel/Bernstein, vit le jour au lendemain de la Grande Guerre: le révisionnisme "planiste" ou "technocratique" (p.36) du socialiste belge Henri De Man et du néo-socialiste français Marcel Déat. Ce révisionnisme-là aboutit directement au fascisme.
1.4. Sternhell contre le fascisme de salon. L'orientation "socialiste", qui sous-tend l'étude de Sternhell sur la problématique du fascisme, se traduit par le peu d'intérêt marqué pour les formes de fascismes philosophiques ou littéraires. Trait caractéristique: Sternhell ne mentionne nulle part les deux écrivains les plus importants appartenant au fascisme, Céline et Rebatet. Et Sternhell néglige encore d'autres aspects du fascisme de salon, du fascisme des penseurs "qui finissent leur vie en habit vert" (p.22). Vu les multiples facettes du fascisme français (et européen)(p.21), Sternhell s'adjuge le droit de poser une analyse pars pro toto: il prétend se consacrer en ordre principal à l'étude de secteurs négligés jusqu'ici (p.9).
2. La France, modèle du fascisme?
2.1. Pourquoi la France? Le livre de Sternhell veut développer une définition du "fascisme" en se basant sur l'exemple français. Cette intention peut étonner. La France, en effet, si l'on excepte l'intermède de l'occupation allemande, n'a jamais connu un régime qualifiable de "fasciste". L'Italie, l'Allemagne voire l'Espagne seraient à cet égard de meilleurs exemples. Mais Sternhell, nous allons le voir, déploie de très sérieux arguments pour justifier son choix.
2.2. Les études antérieures de Sternhell. Ces arguments, pour nous, ne sauraient se déduire des travaux antérieurs de Sternhell, qui portaient tous sur la France. Dès le départ, il orienta son attention vers le fascisme, même s'il l'on peut supposer qu'un changement de perspective aurait pu se produire et lui faire choisir un autre territoire de recherches. Ce que Sternhell découvrit très tôt dans ces secteurs délaissés par la recherche qu'il se trouvait sur la bonne voie. Deux livres aussi copieux avait précédé Ni gauche ni droite. Le premier s'intitulait Maurice Barrès et le nationalisme français (1972). Le second, La droite révolutionnaire 1885-1914. Les origines françaises du fascisme (1978), traitait de la même époque historique, mais le grand thème de Sternhell, le fascisme, apparaissait pour la première fois dans le sous-titre. La recherche a imméditament considéré ces deux ouvrages comme des classiques. Les sujets de ces livres sont à la fois plus sectoriels et plus généraux que la thématique du troisième, que nous commentons ici. Dans Ni gauche ni droite, Sternhell cherche à forger un classification globale et détaillée du phénomène fasciste qu'il entend maîtriser conceptuellement.
2.3. La France a inventé le fascisme. Le premier argument de Sternhell, pour situer le champ de ses recherches en France, c'est que ce pays a vu naître le fascisme vingt ans avant les autres, notamment vers 1885 (p.41). Sternhell n'emploie qu'occasionnelle- ment le terme de "pré-fascisme" pour qualifier les événements entre 1885 et 1914 (p.21). Une figure comme celle de Maurice Barrès portait déjà en elle les germes de tout le fascisme ultérieur. Et quand j'ai énoncer la même hypothèse en 1958, je me suis heurté à une surprenante incompréhension de la part des experts français...
2.4. La France comme contre-modèle. Le second argument qu'avance Sternhell est plus complexe. Il contourne deux écueils. Parmi les grands pays de l'Europe continentale, la France est celui où la position dominante de l'idéologie et de la praxis politique du libéralisme a été la moins menacée, du moins jusqu'à la défaite militaire de 1940 (p.41). Sternhell souligne (p.42) le fait que la révolution libérale la plus importante et la plus exemplaire de l'histoire s'est déroulée dans ce pays et attire notre attention sur les phénomènes du "consensus républicain" (p.43) et du "consensus centriste" (p.52) qui sont les clés de voûte de l'histoire française contemporaine. C'est précisément à cause de ces inébranlables consensus que Sternhell opte pour la France comme champ d'investigation. Car le fascisme, en France, n'est jamais parvenu au pouvoir (p.293) et, écrit Sternhell, "le fascisme n'y a jamais dépassé le stade de la théorie et n'a jamais souffert des compromissions inévitables qui faussent toujours d'une façon ou d'une autre l'idéologie officielle d'un régime. Ainsi on pénètre sa signification profonde et, en saisissant l'idéologie fasciste à ses origines, dans son processus d'incubation, on aboutit à une perception plus fidèle des mentalités et des comportements. Et on comprend mieux, semble-t-il, la complexité des situations et l'ambiguïté des attitudes qui font le tissu des années trente". C'est là, de toute évidence, un principe heuristique, dérivé d'une option radicalement gramsciste qui pose le primat des idées et réfute celui des contraintes factuelles.
3. Les problèmes de "périodisation"
3.1. Impossibilité de poser des datations exactes. Comme doit le faire tout véritable historien, Sternhell fait varier légèrement les dates. Mis à part pour les événements ponctuels, il n'est pas aisé de fournir des dates précises, bien délimitées dans le temps, pour désigner l'émergeance ou l'assomption d'un courant d'idées politiques. C'est pourquoi Sternhell examine le phénomène "fasciste" dans l'espace d'un demi-siècle.
3.2. Continuité entre 1885 et 1940. Fait essentiel pour Sternhell: cette période est "dans l'histoire de l'Europe, une période véritablement révolutionnai- re". Et il poursuit: "En moins d'un demi-siècle, les réalités sociales, le mode de vie, le niveau technologique et, à beaucoup d'égards, la vision que se font les hommes d'eux-mêmes changent plus profondément qu'à aucun autre moment de l'histoire moderne" (p.45). Dès lors, cette période forme une unité, si toutefois l'on met entre parenthèses les quatre années de la Grande Guerre (pp.19 et 290). Et Sternhell l'écrit expressément: "Au cours de ce demi-siècle, les problèmes de fond n'ont guère varié" (p.60).
3.3. Trois générations. Bien qu'il soit conscient de cette continuité, Sternhell procède cenpendant à des subdivisions dans le temps; ainsi, par exemple, quand il parle des "fascistes de 1913" comme des fascistes d'un type particulier. Il distingue trois générations de fascistes (cf. pp. 30, 52 et 60): d'abord les boulangistes et les anti-dreyfusards de la fin des années 80; ensuite, avant 1914, ceux de la "deuxième génération", celle du mouvement des "Jaunes" dans le monde ouvrier et de l'Action Française de Maurras, qui atteint alors son apogée; en finale, il évoque, comme troisième génération, le "fascisme d'après-guerre".
3.4. Le poids d'une époque. Il est à remarquer que Sternhell accorde nettement plus de poids aux premières décennies de l'époque qu'il étudie. Pour lui, sur le plan qualitatif, les années qui précèdent la Grande Guerre revêtent davantage d'importance que les décennies qui les suivirent car, dans cette avant-guerre, tout ce qui est essentiel dans l'élaboration du fascisme doctrinal a été dit et mis en œuvre.
4. Prolégomènes du fascisme
4.1. Refus de prendre en considération les groupuscules excentriques. Sternhell s'intéresse aux "propagateurs d'idées". Il ne ressent aucune envie de perdre son temps à étudier ce fascisme folklorique de quelques illuminés qui jouent aux brigands, fascisme caricatural dont les médias font leurs choux gras. Il n'a que mépris pour ceux qui axent leurs recherches sur ce type de phénomènes marginaux (p.9): "A l'époque déjà, quand un groupe de la Solidarité française se fait photographier à l'entraînement au pistolet, toute la presse de gauche en parle pendant des semaines: un quelconque défilé de quelques dizaines de "chemises bleues" soulève alors beaucoup plus d'intérêt que le patient travail de sape d'un Thierry Maulnier ou d'un Bertrand de Jouvenel...".
4.2. Le fascisme, une idéologie comme les autres. Sternhell parle de la "banalité du fascisme" (p.296): "Dans les années trente, le fascisme constitue une idéologie politique comme les autres, une option politique légitime, un état d'esprit assez courant, bien au-delà des cercles restreints qui assument leur identité fasciste...". Selon Sternhell, le fascisme était "un phénomène possédant un degré propre d'autonomie, d'indépendance intellectuelle" (p.16). Il s'élève contre "le refus fondamental de voir dans le fascisme autre chose qu'un accident de l'histoire européenne" (p.18). Pour Sternhell donc, c'est une erreur de ne considérer le fascisme que comme "une simple aberration, un accident, sinon un accès de folie collective..." (p.18). A la fin de son ouvrage (p.296), Sternhell nous met en garde contre ceux qui propagent l'opinion que les fascistes n'étaient que des "marginaux". Nombreux sont les "fascistes" qui ont été jugés, par leurs contemporains, comme les "plus brillants représentants de leur génération" (Luchaire, Bergery, Marion, de Jouvenel).
4.3. Les courroies de transmission. "L'idéologie fasciste constitue, en France, un phénomène de loin plus diffus que le cadre restreint et finalement peu important des adhérents aux groupuscules qui s'affublent de ce titre" (p.310). Deux pages plus loin, Sternhell explique comment il s'est fait que "l'idée fasciste" ait pu se propager dans un milieu si prêt à recevoir son message: "Les fascistes purs furent toujours peu nombreux et leurs forces dispersées. Leur influence véritable s'exercera par une contribution continue à la cristallisation d'un certain climat intellectuel; par le jeu des courroies de transmissions secondaires: des hommes, des mouvements, des revues, des cercles d'études,..." (p.312).
4.4. Difficulté de situer sociologiquement le fascisme. Sternhell insiste sur le fait que le fascisme "prolifère aussi bien dans les grands centres industriels de l'Europe occidentale que dans les pays sous-développés d'Europe de l'Est" (p.17). Et il aime se moquer de ceux qui croient pouvoir ranger le fascisme dans des catégories sociales bien déterminées. Il est significatif que Sternhell attire notre attention sur une constante de l'histoire des fascismes: "le glissement à droite d'éléments socialement avancés mais fondamentalement opposés à la démocratie libérale" (p.29). Si cette remarque se vérifie, elle s'opposera à toutes les tentatives de rattacher l'idéologie fasciste à des groupes sociaux trop bien définis.
4.5. Pour expliquer le fascisme: ni crises économiques ni guerres. Ce qui m'a frappé aussi chez Sternhell, c'est l'insistance qu'il met à montrer la relative indépendance du fascisme vis-à-vis de la conjoncture (pp.18 et 290). Il ne croit pas que la naissance du fascisme soit due à la pression de crises économiques et, assez étonnamment, estime que la première Guerre mondiale (ou tout autre conflit) a eu peu d'influence sur l'émergence du phénomène. En ce sens, Sternhell s'oppose à la majorité des experts ès-fascisme (pp.96 et 101). C'est dans cette thèse, précisément, que se manifeste clairement l'option "gramsciste" de Sternhell, nonobstant le fait que jamais le nom de Gramsci n'apparaît dans l'œuvre du professeur israëlien. Sternhell ne prend les "crises" au sérieux que lorsqu'il s'agit de crises morales, de crises des valeurs ou de crise globale, affectant une civilisation dans son ensemble.
4.6. "Auschwitz" en tant qu'argument-massue n'apparaît nulle part. Sternhell fait preuve d'une étonnante objectivité, ce qui est particulièrement rare dans les études sur le fascisme. Mais une telle attitude semble apparemment plus facile à adopter en Israël qu'à New York ou à Zurich. Ainsi, Sternhell n'hésite pas à reconnaître au fascisme "une certaine fraîcheur contestataire, une certaine saveur de jeunesse" (p.80). Il renonce à toute pédagogie moralisatrice. Mais il est très conscient du "problème de la mémoire", mémoire réprimée et refoulée; il l'évoquera notamment à propos de certaines figures au passé fasciste ou fascisant qui, après 1945, ont opté pour la réinsertion en se faisant les porte-paroles du libéralisme: Bertrand de Jouvenel (p.11), Thierry Maulnier (p.12) et surtout le philosophe du personnalisme, fondateur de la revue Esprit , Emmanuel Mounier (pp 299 à 310).
5. La formule du fascisme chez Sternhell
5.1. Les carences du libéralisme et du marxisme. Après cette introduction, nous sommes désormais en mesure d'expliciter l'alchimie du fascisme selon Sternhell. Pour cet historien israëlien, le fascisme s'explique en fonction d'un préliminaire historique, sans lequel il serait incompréhensible: l'incapacité du libéralisme bourgeois et du marxisme à assumer les tâches imposées par le XXème siècle.Cette incapacité constitue une carence globale, affectant toute notre civilisation, notamment toutes les institutions, les idéologies, les convictions qu'elle doit au XVIIIème, siècle du rationalisme et du mécanicisme bourgeois. Libéralisme et marxisme sont pour Sternhell les deux faces d'une même médaille. Inlassablement, il souligne que la crise de l'ordre libéral a précédé le fascisme, que cette crise a créé un vide où le fascisme a pu se constituer. Fallait-il nécessairement que ce fascisme advienne? Sternhell ne se prononce pas, mais toute sa démonstration suggère que cette nécessité était inéluctable.
5.2. Révisionnistes de gauche et nationalistes déçus. Généralement, pour expliquer la naissance du fascisme, on évoque la présence préalable d'un nationalisme particulièrement radical et exacerbé. Sternhell, lui, trouve cette explication absurde. D'après le modèle explicatif qu'il nous suggère, l'origine du fascisme s'explique bien davantage par le fait qu'aux extrémités, tant à gauche qu'à droite, du spectre politique, des éléments se sont détachés pour se retrouver en dehors de ce spectre et former un troisième et nouvel élément qui n'est plus ni de gauche ni de droite. Dans la genèse du fascisme, Sternhell n'aperçoit aucun apport appréciable en provenance du centre libéral. D'après lui, le fascisme résulte de la collusion de radicaux de gauche, qui n'admettent pas les compromis des modérés de leur univers politique avec le centre mou libéral, et de radicaux de droite. Le fascisme est, par suite, un amalgame de désillusionnés de gauche et de désillusionnés de droite, de "révisionnistes" de gauche et de droite. Ce qui paraît important aux yeux de Sternhell, c'est que le fascisme se situe hors du réseau traditionnel gauche/centre/droite. Dans l'optique des fascistes, le capitalisme libéral et le socialisme marxiste ne s'affrontent qu'en apparence. En réalité, ils sont les deux faces d'une même médaille. L'opposition entre la "gauche" et la "droite" doit disparaître, afin qu'hommes de gauche et hommes de droite ne soient plus exploités comme chiens de garde des intérêts de la bourgeoisie libérale (p.33). C'est pourquoi la fin du XIXème siècle voit apparaître de plus en plus de notions apparemment paradoxales qui indiquent une fusion des oppositions en vigueur jusqu'alors. L'exemple le plus connu de cette fusion est la formule interchangeable: nationalisme social / socialisme national. Sternhell (p.291) insiste sur la volonté d'aller "au-delà", comme caractéristique du climat fasciste. Le terme "au-delà" se retrouve dans les titres de nombreux manifestes fascistes ou préfascistes: "Au-delà du nationalisme" (Thierry Maulnier), "Au-delà du marxisme" (Henri De Man), "Au-delà du capitalisme et du socialisme" (Arturo Labriola), "Au-delà de la démocratie" (Hubert Lagardelle). Ce dernier titre nous rappelle que le concept de "démocratie" recouvrait le concept de "libéralisme" jusque tard dans le XXème siècle. Chez Sternhell également, le concept de "capitalisme libéral" alterne avec "démocratie capitaliste" (p.27).
5.3. L'anti-ploutocratisme. L'homme de gauche qu'est Sternhell prend les manifestations sociales-révolutionnaires du fascisme plus au sérieux que la plupart des autres analystes, historiens et sociologues de son camp. Si Sternhell avait entrepris une étude plus poussée des courants philosophiques et littéraires de la fin du XIXème, il aurait découvert que la haine envers la "domination de l'argent", envers la ploutocratie, participait d'un vaste courant à l'époque, courant qui débordait largement le camp socialiste. Cette répulsion à l'encontre de la ploutocratie a été, bien sûr, un ferment très actif dans la gestation du fascisme. De nombreux groupes fascistes s'aperçurent que l'antisémitisme constituait une vulgarisation de cette répugnance, apte à ébranler les masses. L'antisémitisme, ainsi, offrait la possibilité de fusionner le double front fasciste, dirigé simultanément contre le libéralisme bourgeois et le socialisme marxiste, en une unique représentation de l'ennemi. Parallèlement, cette hostilité envers la ploutocratie pré-programmait très naturellement le conflit qui allait opposer fascistes et conservateurs.
5.4. La longue lutte entre conservateurs et fascistes. Vu la définition du fascisme qu'esquisse Sternhell, il n'est guère étonnant qu'il parle d'une "longue lutte entre la droite et le fascisme" (p.20) comme d'une caractéristique bien distincte, quoiqu'aujourd'hui méconnue, de l'époque et des situations qu'il décrit. Et il remarque: "Il en est d'ailleurs ainsi partout en Europe: les fascistes ne parviennent jamais à ébranler véritablement les assises de l'ordre bourgeois. A Paris comme à Vichy, à Rome comme à Vienne, à Bucarest, à Londres, à Oslo ou à Madrid, les conservateurs savent parfaitement bien ce qui les sépare des fascistes et ils ne sont pas dupes d'une propagande visant à les assimiler" (p.20). Aussi Sternhell s'oppose-t-il (p.40) clairement à la classification conventionnelle de la droite française, opérée par René Rémond, qui l'avait répartie en trois camps: les ultras, les libéraux-conservateurs et les bonapartistes. Il n'y a, en fait, jamais eu que deux camps de droite, les libéraux et les conservateurs, auxquels se sont opposés les révolutionnaires, les dissidents et les contestataires.
5.5. A la fois révolutionnaires et modernes. Avec ces deux termes, utilisés par Sternhell pour désigner le fascisme, l'historien israëlien a choqué ses collègues politologues. Pour lui, en effet, le fascisme est un phénomène réellement révolutionnaire et résolument moderne. "Une idéologie conçue comme l'antithèse du libéralisme et de l'individualisme est une idéologie révolutionnaire". Plus loin (p.35), Sternhell expose l'idée, d'après lui typiquement fasciste, selon laquelle le facteur révolutionnaire qui, en finale, annihile la démocratie libérale est non pas le prolétariat, mais la nation. Et il ajoute: "C'est ainsi que la nation devient l'agent privilégié de la révolution" (p.35). Les passages évoquant le modernisme du fascisme sont tout aussi surprenants. A propos d'un de ces passages (p.294), on pourrait remarquer que cette attribution de modernisme ne concerne que les fascismes italien et français:"Car le fascisme possède un côté moderniste très développé qui contribue à creuser le fossé avec le vieux monde conservateur. Un poème de Marinetti, une œuvre de Le Corbusier sont immédiatement adoptés par les fascistes, car, mieux qu'une dissertation littéraire, ils symbolisent tout ce qui sépare l'avenir révolutionnaire du passé bourgeois". Un autre passage s'adresse clairement au fascisme dans son ensemble: "L'histoire du fascisme est donc à beaucoup d'égard l'histoire d'une volonté de modernisation, de rajeunissement et d'adaptation de systèmes et de théories politiques hérités du siècle précédent aux nécessités et impératifs du monde moderne. Conséquence d'une crise générale dont les symptômes apparaissent clairement dès la fin du siècle dernier, le fascisme se structure à travers toute l'Europe. Les fascistes sont tous parfaitement convaincus du caractère universel du courant qui les guide, et leur confiance dans l'avenir est dès lors inébranlable".
6. Eléments particuliers de l'idéologie fasciste
6.1. L'anti-matérialisme. Puisque, pour Zeev Sternhell, le fascisme n'est pas simplement le produit d'une mode politique, mais une doctrine, il va lui attribuer certains contenus intellectuels. Mais comme ces contenus intellectuels se retrouvent également en dehors du fascisme, ce qui constitue concrètement le fascisme, c'est une concentration d'éléments souvent très hétérogènes en une unité efficace. Citons les principaux éléments de cette synthèse. Sternhelle met principalement l'accent sur l'anti-matérialisme (pp. 291 & 293): "Cette idéologie constitue avant tout un refus du matérialisme, c'est-à-dire de l'essentiel de l'héritage intellectuel sur lequel vit l'Europe depuis le XVIIème siècle. C'est bien cette révolte contre le matérialisme qui permet la convergence du nationalisme antilibéral et antibourgeois et de cette variante du socialisme qui, tout en rejetant le marxisme, reste révolutionnaire...Tout anti-matérialisme n'est pas fascisme, mais le fascisme constitue une variété d'anti-matérialisme et canalise tous les courants essentiels de l'anti-matérialisme du XXème siècle...". Sternhell cite également les autres éléments de l'héritage auquel s'oppose le fascisme: le rationalisme, l'individualisme, l'utilitarisme, le positivisme (p.40). Cette opposition indique que cet anti-matérialisme est dirigé contre toute hypothèse qui voudrait que l'homme soit conditionné par des données économiques. C'est quand Sternhell parle de la psychologie que l'on aperçoit le plus clairement cette opposition. Ainsi, il relève (p. 294) que les "moralistes" Sorel, Berth et Michels "rejettent le matérialisme historique qu'ils remplacent par une explication d'ordre psychologique". "Finalement", poursuit Sternhell, "ils aboutissent à un socialisme dont les rapports avec le prolétariat cessent d'être essentiels".Et il insiste: "Le socialisme commence ainsi, dès le début du siècle, à s'élargir pour devenir un socialisme pour tous, un socialisme pour la collectivité dans son ensemble,..." (p. 295). Plus explicite encore est un passage relatif au révisionnisme de Henri De Man, qui, lui, cherche la cause première de la lutte des classes "moins dans des oppositions d'ordre économique que dans des oppositions d'ordre psychologique".
6.2. Les déterminations. Il serait pourtant faux d'affirmer que, pour le fascisme, l'homme ne subit aucune espèce de détermination. Pour les intellectuels fascistes, ces déterminations ne sont tout simplement pas de nature "mécanique"; entendons par là, de nature "économique". Comme l'indique Sternhell, le fasciste ne considère pas l'homme comme un individu isolé, mais comme un être soumis à des contraintes d'ordres historique, psychologique et biologique. De là, la vision fasciste de la nation et du socialisme. La nation ne peut dès lors qu'être comprise comme "la grande force montante, dans toutes ses classes rassemblées" (p. 32). Quant au socialisme, le fasciste ne peut se le représenter que comme un "socialisme pour tous", un "socialisme éternel", un "socialisme pédagogique", un "socialisme de toujours", bref un socialisme qui ne se trouve plus lié à une structure sociale déterminée (Cf. pp. 32 & 295).
6.3. Le pessimisme. Sternhell considère comme traits les plus caractéristiques du fascisme "sa vision de l'homme comme mu par des forces inconscientes, sa conception pessimiste de l'immuabilité de la nature humaine, facteurs qui mènent à une saisie statique de l'histoire: étant donné que les motivations psychologiques restent les mêmes, la conduite de l'homme ne se modifie jamais". Pour appuyer cette considération, Sternhell cite la définition du pessimisme selon Sorel: "cette doctrine sans laquelle rien de très haut ne s'est fait dans le monde" (p. 93). Cette définition rappelle en quoi consiste le véritable paradoxe de l'existentialité selon les conservateurs: la perception qu'a l'homme de ses limites ne le paralyse pas, mais l'incite à l'action. L'optimisme, au contraire, en surestimant les potentialités de l'homme, semble laisser celui-ci s'enfoncer sans cesse dans l'apathie.
6.4. Volontarisme et décadence. Sternhell, qui n'est pas philosophe mais historien, n'est nullement conscient de ce "paradoxe du conservateur". Il constate simplement la présence, dans les fascismes, d'une "énergie tendue" (p. 50) et signale sans cesse cette volonté fasciste de dominer le destin (pp. 65 & 294). Sternhell constate que le problème de la décadence inquiète le fasciste au plus haut point. C'est la raison pour laquelle celui-ci veut créer un "homme nouveau", un homme porteur des vertus classiques anti-bourgeoises, des vertus héroïques, un homme à l'énergie toujours en éveil, qui a le sens du devoir et du sacrifice. Le souci de la décadence aboutit à l'acceptation de la primauté de la communauté sur l'individu. La qualité suprême, pour un fasciste, c'est d'avoir la foi dans la force de la volonté, d'une volonté capable de donner forme au monde de la matière et de briser sa résistance. Sternhell se livre à de pareilles constatations jusqu'à la dernière ligne de son ouvrage; ainsi, à la page 312: "Dans un monde en détresse, le fascisme apparaît aisément comme une volonté héroïque de dominer, une fois encore, la matière, de dompter, par un déploiement d'énergie, non seulement les forces de la nature, mais aussi celles de l'économie et de la société".
6.5. La question de la vérité. D'une part, le pessimisme; d'autre part, le volontarisme. Pour une pensée logique, ce ne pourrait être là qu'un paradoxe. Mais le fascisme se pose-t-il la question de la vérité? Voyons ce que Sternhell déclare à propos de l'un des "pères fondateurs" du fascisme: "Pour un Barrès par exemple, il ne s'agit plus de savoir quelle doctrine est juste, mais quelle force permet d'agir et de vaincre" (p. 50). Comme preuve du fait que le fascisme ne juge pas une doctrine selon sa "vérité", mais selon son utilité, Sternhell cite Sorel au sujet des "mythes" qui, pour l'auteur des Réflexions sur la violence, constituent le moteur de toute action: "...les mythes sont des "systèmes d'images" que l'on ne peut décomposer en leurs éléments, qu'il faut prendre en bloc comme des forces historiques... Quand on se place sur le terrain des mythes, on est à l'abri de toute réfutation..." (pp. 93 & 94).
En résumé...
Nous n'avons pu recenser le livre de Sternhell que dans ses lignes fondamentales. Nous avons dû négliger bien des points importants, tels son allusion à la "nouvelle liturgie" comme partie intégrante du fascisme (p. 51), à son anti-américanisme latent (même avant 1914) (p. 290); nous n'avons pas approfondi sa remarque signalant que, pour le fascisme, la lutte contre le libéralisme intérieur a toujours été plus importante que la lutte menée contre celui-ci pas certains dictateurs... (p. 34). En tant que recenseur, je me permets deux remarques, pouvant s'avérer utiles pour le lecteur allemand. D'abord, l'Allemagne n'est que peu évoquée chez Sternhell. En fait de bibliographie allemande, il ne cite que les livres de Nolte traduits en français; on peut dès lors supposer qu'il ne maîtrise pas la langue de Goethe. Ma seconde remarquer sera de rappeler au lecteur allemand ma tentative de redonner une consistance au concept de "fascisme", en le limitant à un certain nombre de phénomènes historiques (Cf. Der faschistische Stil, 1973; trad.franç.: Le "style" fasciste, in Nouvelle Ecole, n°42, été 1985). Sternhell, pour sa part, a donné au terme "fascisme" une ampleur énorme. Son effort est justifiable, dans la mesure où sa vaste définition du "fascisme", au fond, correspond à ce que je désignais sous l'étiquette de "révolution conservatrice". Bref, on peut dire du livre de Sternhell qu'il a envoyé au rebut la plupart des travaux consacrés jusqu'ici à l'étude du fascisme...
Armin MOHLER.
(recension tirée de la revue Criticón, Munich, n°76, mars-avril 1983; traduction française d'Elfrieda Popelier).
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lundi, 23 février 2009
Le secret américain de Nicolas Sarközy
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Le secret américain de Nicolas Sarkozy
Par Philippe Bourcier de Carbon*
Ex: Journal du chaos 7, 2009
Dans les coulisses du pouvoir, il y a ceux mis au devant de la scène, ceux qui restent dans l’ombre
et, surtout, ceux des tréfonds que nul n’entrevoit jamais. Qui connaît Frank George Wisner ? Ce
senior américain, diplomate et homme de réseaux, pourrait bien être la clé pour expliquer
l’ascension fulgurante de Nicolas Sarkozy. Le chef de l’Etat français bénéficie là du meilleur
conseiller occulte pour jouer un rôle dans la marche du monde. A condition que le Président
continue de servir avant tout les intérêts de l’Empire américain, que celui-ci soit dirigé par Bush ou
Obama.
« Un néoconservateur américain à passeport français » : la formule cinglante d’Eric Besson au sujet de
Nicolas Sarkozy, formulée en vue de la campagne électorale de 2007, demeure d’une lucidité
implacable. Le nouveau ministre chargé de l’immigration n’ira sans doute plus remettre en question
le patriotisme de son mentor. Il n’en demeure pas moins que le mystère du succès rapide dans la
conquête du pouvoir suprême par Nicolas Sarkozy passe par l’analyse de son rapport personnel
aux Etats-Unis.
A cet égard, le destin peut s’avérer facétieux lorsqu’il veut avantager un jeune ambitieux désireux
d’atteindre les sommets. C’est vers la fin des années 70 que le jeune loup du RPR saura tirer profit
d’une fortune incomparable : le remariage de sa belle-mère, Christine de Ganay, avec un
personnage prometteur de la vie politique américaine, Frank George Wisner.
Celui-ci avait déjà hérité d’une charge lourde : le patronyme et la carrière sulfureuse d’un homme
exceptionnel, dans ses coups d’éclat comme dans sa folie, Frank Gardiner Wisner (1909-1965),
cofondateur de la CIA. Le père Wisner, impliqué dans les renversements du pouvoir au Guatamala
et en Iran, restera célèbre pour l’opération Mockingbird (un noyautage réussi des médias
américains par des agents de la CIA), avant de se suicider en 1965, victime de démence. Né en
1938 à New York, diplômé de Princeton, le jeune Frank George ne marchera pas exactement dans
les pas de son père mais suivra plus habilement un tracé parallèle : la diplomatie, dont on connaît
les passerelles avec le monde de l’espionnage. Il apprendra ainsi l’arabe au Maroc dans son
détachement effectué pour le compte du Département d’Etat avant un bref passage par Alger
après l’indépendance et un long séjour au Vietnam. De retour à Washington en 1968, il sera chargé
des affaires tunisiennes. Plus tard, après la spécialisation dans les questions asiatiques et arabes,
Frank George Wisner exerça le poste d’ambassadeur en Zambie, en Egypte, aux Philippines et en
Inde.
Derrière ces honorables activités, qui ont culminé par un poste de sous-secrétaire d’Etat sous
Clinton et, plus récemment, dans sa médiation pour la Troïka dans le règlement de la crise au
Kosovo, Frank G. Wisner demeure, selon ses détracteurs, la clé de voûte dans l’exécution de
l’espionnage économique pour le compte de la CIA. Mieux encore, l’homme est la caricature du
personnage multicartes et influent, présent dans tous les centres réels ou fantasmés du pouvoir
parmi lesquels les fameux Council on Foreign Relations ou le groupe Bilderberg. Mais c’est en 1997
qu’un tournant s’opère : après avoir longtemps manoeuvré dans le monde feutré de la diplomatie et
des renseignements, Wisner se risque à mélanger encore plus les genres en rejoignant, au sein de
son conseil d’administration, l’entreprise Enron, la célèbre compagnie énergétique qui fera scandale
quatre ans plus tard et dont la gigantesque fraude en Californie, portant sur des milliards de
dollars, ne sera jamais exactement détaillée, « grâce » à la disparition des milliers de pages
caractérisant la fraude fiscale dans la destruction des bureaux de la SEC, gendarme américain des
opérations boursières , lors de la chute de la Tour 7 du World Trade Center.
Ironie du sort, ou étrange coïncidence, la sécurité de ce gratte-ciel (effondré alors qu’il ne fut pas
percuté par un avion en ce jour du 11 Septembre 2001) relevait de la compagnie Kroll Associates,
qui appartenait alors à l’AIG, assureur dont Wisner est le vice-président . S’il est vrai que les
entreprises prestigieuses sont souvent interconnectées de par leurs administrateurs, il est notable
de constater la récurrence curieuse de Wisner dans les anomalies du 11 Septembre. Ainsi, pour
résumer, l’homme, spécialiste du monde musulman et de l’espionnage économique, responsable
haut placé de Enron et de l’AIG, échappe à toute poursuite judiciaire lors du scandale Enron, jamais
complètement décrypté de par la destruction des détails compromettants lors de la chute
controversée d’un immeuble du World Trade Center qui abritait également, autre heureuse
coïncidence, les bureaux de la CIA dédiés précisément à l’espionnage économique…
Quel rapport dès lors entre ce personnage sulfureux et Nicolas Sarkozy, mis à part le lien familial
d’antan ?
A priori, il serait logique de présumer que le temps et la distance géographique auront
naturellement creusé le fossé entre le chef de l’Etat et la famille de l’ancienne belle-mère. Il n’en est
rien. Pour preuve, la campagne électorale de l’UMP qui a porté triomphalement au pouvoir, et dès
la première tentative, Nicolas Sarkozy, disposait dans ses rangs d’un acteur discret, responsable de
la section anglophone, mais dont le nom est suffisamment éloquent : David Wisner. Celui-ci semble
également reprendre le flambeau de la lignée Wisner puisqu’il a intégré le Département d’Etat en
septembre dernier, après des études d’arabe.
Et au-delà du légitime renvoi d’ascenseur du chef de l’Etat envers le fils de son parrain d’outreatlantique,
un autre fait passé inaperçu mérite d’être évoqué, non comme la preuve mais plutôt
comme l’indice de la volonté présidentielle d’occulter l’existence et les agissements troubles de
Wisner. S’il s’avère à l’avenir que les fameux délits d’initiés opérés à la veille du 11-Septembre ont
été le fait de citoyens américains avertis, dont le point commun serait d’être à la jonction du
renseignement et de la finance, alors il ne serait guère étonnant de voir figurer sur la liste de ces
personnes au vent d’un « attentat terroriste imminent » un certain Frank George Wisner. Outre
qu’il ait bénéficié de la destruction du dossier fiscal Enron tout en étant dans le même temps
responsable de la sécurité du World Trade Center via Kroll Associates ( détenue par AIG), une
réçente réaction de Nicolas Sarkozy pourrait laisser penser que le silence en la matière doit
s’imposer.
En effet, selon le Canard Enchaîné du 24 septembre 2008, le Président avait vivement critiqué le
Pdg de la chaîne info internationale, France 24, pour avoir organisé un débat sur la « théorie du
complot » autour du 11-Septembre. Cette réaction de Nicolas Sarkozy pourrait prêter à sourire si
elle venait simplement confirmer sa propension légendaire à tout régenter, y compris la
programmation audiovisuelle. Mais compte tenu de l’implication éventuelle d’un de ses proches
dans les coulisses logistiques et financières de l’attentat du World Trade Center, la colère
présidentielle prend une tout autre tournure. De par le signal qu’il envoie ainsi aux journalistes
mainstream tentés d’évoquer à l’antenne la question des zones d’ombre du 11-Septembre, le
message relève plus de la censure tacite d’un sujet grave que de l’irritation d’un téléspectateur
capricieux. Sans aller jusqu’à faire de Wisner un des instigateurs du 11-Septembre, il est plus
vraisemblable de supposer que sa position et ses relations l’ont idéalement avantagé pour faire
partie de ceux à avoir, « au mieux » anticipé l’événement, au pire participé par une quelconque
assistance matérielle, en l’occurrence la mise à disposition de la gestion de la sécurité électronique
des 3 tours effondrées, de par l’implosion de bombes pré-installées selon certains scientifiques
spécialistes de la démolition contrôlée.
Au-delà des inévitables spéculations sur le rôle exact de Wisner dans l’opération à multiples
facettes du 11-Septembre, force est de constater que l’homme dispose des diverses relations
accumulées depuis près de 50 ans dans les élites dirigeantes des Etats-Unis et les cercles
internationaux pour pouvoir, si besoin est, favoriser le jeune politicien impétueux que son épouse
française affectionne. Nicolas Sarkozy doit beaucoup à Jacques Chirac pour son maillage lent et
progressif du corps électoral français. Il doit sans doute davantage encore à Frank George Wisner
pour avoir obtenu l’assentiment et la faveur de l’hyper-puissance occidentale.
Les parrains occultes du Président et méconnus du citoyen sont souvent les plus redoutables.
* Philippe Bourcier de Carbon est démographe à l'Ined (Institut national des études démographiques).
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dimanche, 22 février 2009
Affaire Chauprade: lettre ouverte à Hervé Morin
Lettre ouverte à Hervé Morin,
ministre de la Défense euro-atlantiste
par Georges Feltin-Tracol - http://www.europemaxima.com/
Monsieur le ministre de la Défense de l’Occident,
Je m’autorise de vous interpeller avec un titre erroné puisque, renouant avec une mauvaise habitude pratiquée sous le septennat giscardien, le terme « nationale » a été supprimé de l’intitulé officiel de votre ministère. Permettez-moi par conséquent de vous désigner tour à tour comme le ministre de la Défense euro-atlantiste ou celui de la Défense de l’Occident, tant ces deux appellations me paraissent vous convenir à merveille.
Si je vous adresse aujourd’hui la présente algarade, sachez au préalable que je ne vise nullement l’élu local normand que vous êtes par ailleurs. L’adhérent au Mouvement Normand que je suis, soutient, tout comme vous, l’indispensable (ré)unification normande des deux demi-régions. Notre désaccord concerne l’avenir de la France, de son armée et de l’Europe de la défense.
Je vous dois d’être franc. Quand en mai 2007, vous avez été nommé au ministère de la rue Saint-Dominique, j’ai immédiatement pensé à une erreur de recrutement : vous n’êtes pas fait pour occuper ce poste, faute d’une carrure suffisante. Comment cela aurait pu être autrement avec un Premier ministre qui, lui, est un fin connaisseur de la chose militaire depuis de longues années ? Il s’agissait surtout de vous récompenser pour avoir abandonné (trahi, diraient de mauvaise langues) entre les deux tours de la présidentielle votre vieil ami François Bayrou et rallié le futur président.
D’autres, tout aussi non préparés aux fonctions de ce ministère éminemment régalien, auraient acquis au contact des militaires une stature politique afin de viser, plus tard, bien plus haut. Hélas ! Comme l’immense majorité de vos prédécesseurs depuis 1945, voire depuis l’ineffable Maginot, et à l’exception notable d’un Pierre Messmer, d’un Michel Debré ou d’un Jean-Pierre Chevènement, vous êtes resté d’une pâleur impressionnante. Pis, depuis votre nomination, vous avez démontré une incompétence rare qui serait risible si votre action ne nuisait pas aux intérêts vitaux de la France et de l’Europe.
À votre décharge, je concède volontiers qu’il ne doit pas être facile de diriger un tel ministère à l’ère de l’« omniprésidence omnipotente » et de sa kyrielle de conseillers, véritables ministres bis. Faut-il en déduire qu’une situation pareille vous sied et que vous jouissez en fait des ors de la République ?
Je le croyais assez jusqu’à la survenue d’un événement récent. Depuis, j’ai compris que loin d’être indolent, vous effectuez un véritable travail de sape, pis une œuvre magistrale de démolition systématique qui anéantit quarante années d’indépendance nationale (relative) au profit d’une folle intégration dans l’O.T.A.N. américanocentrée, bras armé d’un Occident mondialiste globalitaire.
Vous vous dîtes partisan de la construction européenne alors que vous en êtes l’un de ses fossoyeurs les plus déterminés. L’Europe, sa puissance sous-jacente, ses peuples historiques vous indiffèrent, seule compte pour vous cette entité despotique de dimension planétaire appelée « Occident ».
Qu’est-ce qui m’a dessillé totalement les yeux en ce 6 février 2009 ? Tout simplement votre décision inique et scandaleuse de congédier sur le champ Aymeric Chauprade de son poste de professeur au Collège interarmées de Défense (C.I.D.). Brillant spécialiste de géopolitique, Aymeric Chauprade présente, dans un nouvel ouvrage Chronique du choc des civilisations, des interprétations alternatives à la thèse officielle des attentats du 11 septembre 2001. Exposer ces théories « complotistes » signifie-t-il obligatoirement adhérer à leurs conclusions alors qu’Aymeric Chauprade, en sceptique méthodique, prend garde de ne pas les faire siennes ?
Peu vous chaut l’impartialité de sa démarche puisque, sur l’injonction du journaliste du Point, Jean Guisnel, auteur d’un insidieux article contre lui, vous ordonnez son exclusion immédiate de toutes les enceintes militaires de formation universitaire. Mercredi dernier - 11 février -, l’infâme Canard enchaîné sortait une véritable liste d’épuration en vous enjoignant d’expulser d’autres intervenants rétifs au politiquement correct. Auriez-vous donc peur à ce point (si je puis dire) de certains scribouillards pour que vous soyez si prompt à leur obéir, le petit doigt sur la couture du pantalon ? Faut-il comprendre que Jean Guisnel et autres plumitifs du palmipède décati sont les vrais patrons de l’armée française ?
Avez-vous pris la peine de lire l’ouvrage incriminé ? Votre rapidité de réaction m’incite à répondre négativement. Il importe par conséquent de dénoncer votre « attitude irresponsable, irrespectueuse et indigne », car « nier la réalité est une attitude particulièrement inquiétante pour un ministre et qui n’atteste pas du courage que chacun est en droit d’attendre d’un haut responsable politique ». Qui s’exprime ainsi ? M. Jean-Paul Fournier, sénateur-maire U.M.P. de Nîmes, irrité par la fermeture de la base aéronavale de Nîmes - Garons, cité par Le Figaro (et non Libé, Politis ou Minute) du 9 février 2009. Le sénateur Fournier a très bien cerné votre comportement intolérable et honteux.
Aymeric Chauprade interdit de tout contact avec le corps des officiers d’active, vous agissez sciemment contre l’armée française, contre la France. En le renvoyant, vous risquez même de devenir la risée de l’Hexagone. En effet, le 12 juillet 2001, Aymeric Chauprade publiait dans Le Figaro un remarquable plaidoyer en faveur d’un « bouclier antimissile français ». Et que lit-on dans Le Figaro du 13 février 2009 ? « La France se lance dans la défense antimissile »… Certes, nul n’est prophète en son pays, mais quand même, ne peut-il pas y avoir parfois une exception ?
Votre action injuste me rappelle d’autres précédents quand l’Institution militaire sanctionnait des officiers coupables de penser par eux-mêmes et de contester ainsi le conformisme de leur temps : le général Étienne Copel, le colonel Philippe Pétain, le lieutenant-colonel Émile Mayer, le commandant Charles de Gaulle.
Anticonformiste, Aymeric Chauprade l’est avec talent et intelligence ; il s’inscrit dans la suite prestigieuse des Jomini, Castex et Poirier. Voilà pourquoi le réintégrer au C.I.D. serait un geste fort pour l’indispensable réarmement moral d’une armée qui en a grand besoin.
Je doute fort, Monsieur le ministre de la Défense euro-atlantiste, que ma missive vous fera changer d’avis. Qu’importe ! Libre à vous de rester insignifiant et de figurer dans les chroniques comme le Galliffet de la réflexion stratégique.
Recevez, Monsieur le Ministre, mes salutations normandes.
Georges Feltin-Tracol,
rédacteur en chef du site Europe Maxima,
membre du Mouvement Normand,
signataire de la pétition de soutien à Aymeric Chauprade.
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B. Lugan: pour en finir avec la colonisation
Pour en finir avec la colonisation
Ce livre montre que durant la brève parenthèse coloniale, les pays colonisateurs n’ont pas pillé l’Afrique et que les colonies étant un boulet économique, politique et social, la décolonisation était une urgente et impérieuse nécessité ; les Européens d’aujourd’hui et à plus forte raison ceux de demain n’ont de dette ni à l’égard de l’Afrique ni des Africains ; le mythe de la culpabilité coloniale est une arme permettant de désarmer moralement l’Europe face à la contre-colonisation de peuplement qu’elle subit actuellement et que la culture de repentance-soumission risque de faire des Français, de nouveaux ” colonisés “. Ce livre montre également que la colonisation fut d’abord une grande idée de gauche reposant sur les idéaux universalistes de 1789. Il souligne aussi que pour résoudre les insolubles problèmes liés à l’immigration venue de nos anciennes colonies, seules sont proposées les recettes éculées d’assimilation-intégration qui y furent inapplicables et les mêmes impératifs du toujours plus de subventions qui firent capoter toutes les politiques de développement. Or, ce qui a échoué hier en Afrique échoue déjà dans les banlieues où il est impossible de procéder par amputation territoriale comme l’avait fait le général de Gaulle. Ce livre montre enfin que l’histoire n’est jamais écrite. Les Français après 130 ans de présence en Algérie, les Portugais après 400 ans en Angola et les Arabes après 700 ans en Espagne, tous ont appris à leurs dépens que la colonisation n’est pas éternelle dès lors que les indigènes ne sont plus disposés à la subir. Ce livre est illustré de nombreuses cartes et contient un index.
Bernard Lugan est docteur ès Lettres et enseigne l’histoire de l’Afrique à l’université de Lyon III. Il fut professeur à l’université nationale du Rwanda de 1972 à 1983. Il est conférencier au CHEM (Centre des hautes études militaires à Paris), à l’IHEDN (Institut des hautes études de la défense nationale à Paris) et au CID (Collège interarmées de défense à Paris). Il est expert auprès du Tribunal pénal international pour le Rwanda (TPIR), ONU.
Article printed from :: Novopress Québec: http://qc.novopress.info
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vendredi, 20 février 2009
La Nymphe de Maillol

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jeudi, 19 février 2009
Marc-Edouard nabe résiste à l'Obamania
MARC-EDOUARD NABE RESISTE A L’OBAMANIA
Par Unité Populaire : http://unitepopulaire.org/
« Ça m’étonne. Moi, si passionné par les Noirs américains et si fanatique de l’Afrique en général, je reste de marbre face à l’élection historique de Barack Obama... Ça ne me fait strictement rien. Aucune émotion, pas un tressaillement de bonheur. Suis-je devenu insensible ? Normalement, ça aurait dû me faire plaisir que le petit Blanc McCain se fasse mettre par le grand Noir Obama, je ne comprends pas... Je regarde autour de moi, ce sont des torrents de larmes. Un Noir enfin à la Maison Blanche ! Les plus durs à cuire fondent d’extase. Les incrédules sont à genoux en train de remercier le Ciel, les défaitistes chantent victoire, les revenus de tout y repartent. Pour les uns, l’élection d’Obama, c’est plus fort que le premier homme qui a marché sur la Lune. Pour les autres, c’est plus constructif que la destruction du mur de Berlin. (...)
Tout le monde adore Obama, alors forcément je suis contre... Quel rabat-joie ! Je suis bien bête de ne pas profiter de cette joie mondiale. C’est peut-être à cause de tout ce que j’entends comme conneries...Vincent Cassel dit que "tout à coup, on a envie de vivre aux États-Unis". Rama Yade minaude : "Nous sommes tous Américains, cette fois, on peut le dire dans le sens positif." Le roi du storytelling, Christian Salmon, se pâme : "Avec lui, l’Amérique qu’on aime est de retour ! ". Quant à Dorothée Werner, laide éditorialiste de Elle, elle danse carrément la samba dans sa cuisine : "Comment résister à l’euphorie qui gonfle le monde ? " D’ailleurs, pour toutes les mouilleuses du Elle, Obama c’est Cassius Clay + Robert Redford + Steve McQueen. Pourquoi ne pas ajouter James Dean et Gérard Philippe ? De plus en plus blanc à force d’additions ! Ce qu’elles veulent dire, ces blanchâtres, c’est que, dans leur idéal de Noir, Obama est une somme de soustractions : c’est Malcolm X – George Jackson – Frantz Fanon – Bobby Seale – Angela Davis... Le pompon a été décroché par Philippe Val affirmant sans rire qu’avec Obama élu, c’est enfin le XXIe siècle qui commence ; Ben Laden et son 11-Septembre, c’était encore du XXe ! D’accord, mais que des sans-couilles l’adorent ne suffit pas à expliquer que je ne bande pas. (...)
En France, le racisme est à peine caché sous l’antiracisme consensuel et les tollés des faux-derches franchouillards qui se cabrent au moindre mot de travers. En France, les racistes sont avant tout ceux qui se réjouissent qu’un Noir soit élu du moment qu’il est noir, parce que pour eux tous les Noirs se ressemblent. (...) Fin du racisme, tu parles ! Comme si les Noirs n’allaient plus être persécutés grâce à l’élection d’Obama ! On a vu comment les Arabes vivent sous le règne de Rachida Dati ! Dès qu’un métèque a un petit pouvoir, il ne pense qu’à une chose : faire du zèle contre sa race, pour montrer aux Blancs qu’il n’est pas un métèque justement, et qui paie les pots cassés ? Les autres métèques, ceux sans pouvoir ! Classique. Au pays des antiracistes auto-éblouis, le seul qui reste mesuré dans son obamania, c’est le président... Vexé comme un pou. Obama démode Sarko, Michelle écrase Carla . Premier président juif français, c’est bien. Premier président noir américain, c’est mieux. Sarkozy, qui pensait en 2007 innover dans le genre jeune loup vulgos libéralo-people s’est fait doubler un an et demi après. Comment rattraper le retard soudain pris ? En foutant des Noirs partout ! "Ne me cachez plus ces minorités visibles qu’en temps normal je n’aurais su voir..." (...)
"Obama a réalisé enfin le rêve de Martin Luther King ! " Le hic, c’est que dans son I have a dream, King disait textuellement qu’il ne voulait pas que "les gens soient jugés pour la couleur de leur peau, mais pour le contenu de leur personne". Pour quoi d’autre est jugé Barack Obama aujourd’hui ? Ce sont ses deux grands-mères qui le définissent le mieux. La première est une grosse mama qu’on a vu danser de joie en boubou dans son bidonville de Kogelo... le drapeau yankee flottant sur le Kenya. Le Kenya, terre de safaris pour beaufs, est un des rares pays d’Afrique qui ne présente aucune espèce d’intérêt. Seule la Centrafrique est plus nulle encore. Rien ne peut sortir de bon du Kenya, à part quelques Massaï qui d’ailleurs n’en sortent pas. La seconde grand-mère d’Obama, une Blanche, a toute sa vie tremblé de peur en croisant des Noirs dans les rues de Kansas City. Elle est morte la veille de son élection. Quand elle a senti que c’était inéluctable, mémé a préféré mourir... Elle ne voulait pas voir ça : un négro à la Maison Blanche, fût-ce son petit-fils !
C’est son programme peut-être qui me débecquette... Sa gestion de la crise financière ne laisse aucun doute : monsieur ne pense qu’à subventionner les banques, il veut réparer le capitalisme lui aussi, mais à l’avantage des riches. Sa priorité : rassurer les gros portefeuilles provisoirement à sec. Comme tout pratiquant du capitalisme, il est à genoux devant les banques avec l’excuse que la Banque n’est pas plus démocrate que républicaine, elle est la Banque. C’est comme Dieu, il n’est ni de gauche ni de droite, il est Dieu. Et aujourd’hui, Dieu, ce sont les trusts. Sur le dollar, il y aura bientôt écrit : In Trust we trust. C’est le pantin de l’Usure. Obama veut "sauver l’économie", c’est-à-dire les firmes et entreprises, avec la même rengaine fredonnée partout depuis le krach de septembre 2008 : "Sauvons les patrons et ils vous trouveront du boulot !" sauf que une fois que les pauvres auront aidé les riches à se renflouer, Obama et les autres chefs leur diront : "Sorry ! Il ne reste plus rien pour vous, chers pauvres... Next time ! " Pauvres pauvres !
Sur le plan international, Obama va être pire que Bush. Il suffit de voir son équipe. Tout ce qu’il a trouvé, c’est Hillary Clinton et Mme Albright, toutes les deux hyper contre Saddam, faiseuses d’anges irakiens, archi pour les guerres de 1991 et de 2003... Obama a même poussé le vice jusqu’à vouloir engager Colin Powell ! Oui la salope de l’anthrax ! Juste parce qu’il est noir, soi-disant... Pourquoi pas Condoleezza Rice ? Elle aussi est bronzata, comme dirait Berlusconi. Quel raciste, cet Obama ! Sans arrêter de sourire, il enverra plus de Noirs sur la chaise électrique, histoire qu’on ne l’accuse pas de chouchoutage... Obama va aussi travailler avec les mecs de McCain et prendre comme conseiller Joseph Biden, le stratège de John Kerry... James Jones à la Sécurité, Robert Gates à la Défense, Timothy Geithner au Trésor... Jolis messieurs ! Ce n’est plus de l’ouverture, c’est de la béance... Et ça prouve bien que dans son esprit de collabo, la politique c’est bonnet noir, noir bonnet. Tout l’espoir d’une "nouvelle Amérique" a été absorbé par sa stupéfaction d’avoir élu un Noir. Il n’y aura plus de place pour un autre "changement". Ça m’étonnerait beaucoup que le nouveau président annule le Patriot Act. À la limite, il fermera Guantanamo, qu’est-ce que ça peut lui foutre puisque d’autres pénitenciers arbitraires s’ouvriront ailleurs, directement dans les pays ennemis. Il parle déjà de rayer l’Iran de la carte. (...)
L’Irak. Obama annonce un retrait définitif des troupes pour 2011. Évidemment, ce sera reculé à 2012 où il sera remplacé par un autre salaud qui, lui, les maintiendra ! Pour le reste, son objectif est avoué dès le début : capturer Ben Laden ! Oui, cet abruti d’Hawaïen en est resté là. L’Afghanistan. Obama va y envoyer bien plus de soldats encore que Bush et ceux-là seront prélevés en Irak. Vases communicants ! Et s’il n’y en a pas assez, il en tapera à ses chers alliés qui ne pourront rien refuser à un Noir président de l’Amérique, ce pays exemplaire ! Pour finir, son directeur de cabinet est déjà nommé : Rahm Emmanuel, un engagé volontaire dans l’armée israélienne en 1991... Soyons clair : une rampouille sioniste à se damner. Pendant toute sa campagne, Obama a réitéré son soutien indéfectible à Israël. Il veut une Jérusalem israélienne, et des renforts de troupes sur le saint terrain occupé par ces sales Palestiniens... Tout pour Israël ! 78 % de Juifs Amerloques ont voté pour lui. On peut leur faire confiance: ils n’auraient pas élu un nègre s’ils n’avaient pas été sûrs qu’il soit leur man ... Non, tout ça, c’est encore du procès d’intention...
Ça y est. J’ai trouvé. Ce qui me gêne chez Obama, c’est que grâce à lui l’Amérique va redorer son blason de merde ! Yes he can, ce con. J’ai compris à quoi il va servir, ce faux Noir. L’Amérique reprend du poil de la bête, autant dire qu’elle va bientôt s’arracher les cheveux puisque la bête, c’est elle. "L’Amérique se réconcilie avec elle même et avec le monde ! " Ah, bon ? Je connais des milliards d’individus qui n’ont pas du tout envie de se réconcilier avec ce pays d’ordures... Pour en arriver à élire un Noir, c’est que les Yankees étaient à bout... Obama n’a pas été élu parce qu’il était Noir, mais parce que les Blancs au pouvoir ont compris qu’en mettant un Noir devant, l’Amérique allait pouvoir revenir au 1er rang en effaçant ses saloperies. Son image était tellement noircie par ses crimes qu’il fallait bien un Noir pour la nettoyer. Obama blanchit l’Amérique. Obama ne s’en cache pas : il veut redonner "la stature morale" de l’Amérique. En a-t-elle déjà eu une depuis le premier jour où les Espagnols débarquant ont tiré à l’arquebuse sur les Indiens venus leur apporter des fleurs sur la plage ? L’Amérique sera toujours porteuse de guerre et de mort. Kafka avait tout compris: au début de son roman L’Amérique (1911), ce n’est pas un flambeau que le héros voit dans la main de la statue de la Liberté, mais un glaive...
L’Amérique se fout d’Obama, ce qu’elle voulait, c’est faire semblant aux yeux des autres de se laver de Bush alors qu’elle l’a plébiscité deux impardonnables fois. Ne pas oublier que les pires bushistes sont ceux-là mêmes qui ont voté Obama. Logiquement, il ne devrait pas y avoir assez d’oreilles pour mettre toutes les puces dedans. Personne ne semble trouver anormal que les néoconservateurs pro-Bush se soient métamorphosés en obamiens de la vingt-cinquième heure. Il y a pourtant une raison à cela : pour mieux ré-enculer le monde, il fallait à l’Amérique un nouveau gode. Une rédemption de l’Amérique par un Noir ? Je n’y crois pas une seconde. C’est le plus mauvais cadeau fait aux vrais Afro-Américains. (...)
Il va déculpabiliser l’Amérique à peu de prix, car on s’extasie qu’il ait pu devenir président, mais qu’est-ce que c’est qu’être président des États-Unis ? C’est rien comme honneur dans le monde, c’est minable comme fonction, c’est la grosse honte ! Le plus beau jour de la vie d’un Noir, c’est d’entrer à la Maison Blanche, c’est ça le summum de la gloire ? C’est encore se soumettre en esclave, se faire reconnaître par le maître blanc, lui prouver qu’on est respectable comme lui, qu’on est son égal. Il n’était pas esclave, il vient de le devenir. Il a l’air ravi d’être enfin devenu l’esclave de l’Amérique. Le métis avait un complexe de n’être pas un bon nègre au service du maître. "Oncle Tom cherche Oncle Sam ! " Le Destin a répondu à sa petite annonce. Je sais maintenant pourquoi ce Noir me laisse froid. »
Marc-Edouard Nabe, 20 janvier 2009 (ce texte a été placardé sur les murs de Paris sous forme d’une grande affiche, selon la grande tradition révolutionnaire du pamphlet)
00:35 Publié dans Actualité | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : obama, etats-unis, france, lettres françaises, littérature française, littérature, lettre, politique | |
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lundi, 16 février 2009
Chauprade porte plainte
CID : Chauprade porte plainte contre Morin pour "discrimination" devant la Cour de Justice de la République
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Se définissant lui-même comme appartenant à la "droite conservatrice", très hostile au courant "néo-conservateur", Aymeric Chauprade affirme que "ses opinions politiques et ses convictions religieuses déplaisaient à Hervé Morin. Croyant plaire à l’entourage du Président de la République, monsieur Morin, qui n’a pas caché que sa décision avait été prise en considération de ce que monsieur Chauprade, de religion catholique, était critique à l’égard de la politique américaine devra répondre de son comportement devant la juridiction compétente" peut-on lire dans un communiqué qu'il publie ce matin. Il ajoute qu'Hervé Morin "a manqué à ses devoirs de ministre, au mépris des principes élémentaires qui gouvernent notre droit public, notamment le droit au débat contradictoire".
Par ailleurs, Chauprade devrait attaquer Le Point en diffamation. La décision du ministre a été prise à la suite de la lecture d'un article de Jean Guisnel sur le site Défense ouverte du Point.fr. Cette affaire devrait également avoir un volet devant le tribunal administratif.
Source
A écouter :
>>> Aymeric Chauprade sur Radio-Courtoisie
11:35 Publié dans Actualité | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : censure, france, géopolitique, liberté d'expression, discrimination, 11 septembre 2001 | |
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dimanche, 15 février 2009
Pourquoi N. Sarközy veut que la France réintègre le commandement de l'OTAN
Pourquoi Nicolas Sarkozy veut que la France réintègre le commandement de l’OTAN
Le Général de Gaulle se retourne dans sa tombe. 43 ans après sa décision de retirer Paris du commandement militaire intégré de l’Organisation du Traité de l’Atlantique Nord (OTAN, créée en 1949, 22.000 employés et 60.000 militaires permanents), son dangereux successeur à l’Elysée multiplie les déclarations (1) pour que la France y reprenne désormais “toute sa place”.
“Toute sa place” est une formule qui, dans l’approche de Nicolas Sarkozy, signifie clairement un engagement sans réserve aux côtés des Etats-Unis. Fidèle à sa méthode autocratique du “J’écoute mais je ne tiens pas compte”, il fait fi des voix de plus en plus nombreuses qui s’opposent à sa décision (2) et fait dire qu’il n’y aura ni référendum ni même de vote au Parlement sur la question. Il entend bien concrétiser seul son choix stratégique et balayer d’un coup d’un seul un demi-siècle de politique étrangère et d’indépendance française dès les 3 et 4 avril prochain, lors des cérémonies du 60e anniversaire de l’OTAN à Strasbourg et Kehl.
Histoire de confirmer sa volonté d’intégrer la France dans les hautes sphères politico-militaires de l’OTAN, Nicolas Sarkozy a d’ores et déjà pris l’année dernière deux initiatives très applaudies par son ami George W. Bush. Un, il a doublé la présence militaire française en Afghanistan en envoyant un millier de soldats combattre avec les américains contre les Taliban, alors que chacun sait que cette guerre est déjà perdue et que l’enlisement des troupes y est assuré (le nombre de soldats français morts sur le terrain depuis est déjà suffisamment éloquent). Deux, il a soutenu activement le projet de déployer un bouclier antimissile américain en Europe centrale, quitte à braquer sérieusement la Russie (Heureusement Barack Obama semble être en train de déminer cette énième provocation bushiste aux relents de Guerre froide). La récente volonté affichée de rapprocher Paris et Londres, principal allié des Etats-Unis dans ses guerres en Irak et en Afghanistan, est également un signe plus discret, mais tout aussi fort, d’allégeance à Washington. Seule contrariété pour le néo-conservateur de l’Elysée, ce n’est plus son ami fauteur de guerres George W. Bush qui est au pouvoir, mais Barack Obama, à l’évidence moins enclin à semer la terreur partout dans le monde au nom de la lutte anti-terroriste.
Cette rupture dans la politique d’indépendance de la France se drape bien entendu d’arguments à usage médiatique du type “Amis, alliés, mais non inconditionnels”, ou “nécessaire rénovation car nous ne sommes plus en 1966″, ou encore “La France ne perdra rien de sa souveraineté” (3). Nicolas Sarkozy dit vouloir développer avec l’OTAN une “Europe de la Défense efficace”. Depuis son élection, il ne cesse de répéter qu’une Europe de la Défense indépendante et l’ancrage atlantique sont les deux volets d’une même politique de sécurité. Mais quelle OTAN, pour quelle mission de défense européenne ? et la France a-t-elle quelque chose à gagner à réintégrer le commandement militaire de l’organisation, avec lequel elle coopère déjà très bien ? Elle fournit déjà 2.800 soldats pour l’occupation de l’Afghanistan, et maintient actuellement 36.000 soldats dans divers autres pays (Kosovo, Côte d’Ivoire, etc.).
Il est bien illusoire d’imaginer que les Etats-Unis donneront plus de place aux Européens et aux Français dans la nouvelle Alliance. Jaap De Hoop Scheffer a d’ailleurs bien précisé le 12 février 2009 à Paris que, si la France réintégrait le Commandement militaire intégré de l’Alliance atlantique, ce serait de toutes façons toujours à lui qu’il revenait “de gérer les choses au sein de l’OTAN, comme la position française au sein des structures de commandement, les généraux, etc”. Tout au plus les Etats-Unis accorderont-ils quelques commandements militaires sans importance à un ou deux généraux français — on parle vaguement d’un poste à Norfolk (Virginie, USA) ou à Lisbonne (Portugal) — sans que cela puisse réellement permettre à la politique européenne de sécurité et de défense (PESD) de s’affirmer et de de peser significativement sur les décisions de l’OTAN. Dans tous les conflits (Afghanistan, Serbie, Kosovo, etc) où la France s’est retrouvée engagée aux côtés des militaires américains, ce sont systématiquement ces derniers qui décident et contrôlent de façon unilatérale toutes les opérations, en particulier les frappes, reléguant la France et les autres pays alliés au rang de simples exécutants. On ne les imagine guère se plier aux décisions des français dans l’avenir. Il n’est d’ailleurs pas inutile de rappeler que si de Gaulle est sorti de l’OTAN, c’est notamment parce qu’il demandait un directoire partagé de l’Organisation, ce que les Américains lui ont refusé. Et la suite a montré que la France, puissance moyenne disposant de l’arme nucléaire et d’un siège au Conseil de sécurité de l’ONU, existait finalement plus à l’échelle mondiale en s’affirmant de façon autonome qu’en s’effaçant dans ce qu’il appelait le “machin” atlantiste.
Autre risque, la réintégration de Paris dans une OTAN qui sert de plus en plus de caution et de bras armé à l’impérialisme américain, sera sans nul doute perçu dans les grandes capitales du monde non-occidental comme un affaiblissement et un alignement sur les Etats-Unis, ce qui lui fera perdre le peu d’influence qui lui reste encore.
Quant à la “Voix de la France”, qui selon Nicolas Sarkozy deviendrait plus forte dans le concert des Nations si elle réintègre l’OTAN, elle semble jusqu’à présent avoir moins souffert des discours et des choix du Général de Gaulle — ou même de ceux de Jacques Chirac et Dominique de Villepin, par exemple en 2003 à l’ONU lors du refus de la France de suivre les Etats-Unis dans l’invasion de l’Irak — que ceux des “caniches” européens de George W. Bush (Tony Blair, José Manuel Barroso, Nicolas Sarkozy, José-Maria Aznar,…).
Mais l’essentiel n’est pas là. Le projet de Nicolas Sarkozy, cet anti de Gaulle, ne consiste pas en un renforcement de la défense européenne, ou du moins pas pour lui donner plus de pouvoir et d’indépendance comme il le prétend. A travers ses choix diplomatiques et stratégiques il est à l’évidence tout à sa “vision” purement occidentaliste de la France et de l’Europe. Pour lui, la France doit s’affirmer “dans sa famille occidentale” et dans “les valeurs occidentales qui sont pour elle essentielles” (Discours de janvier 2008 devant le corps diplomatique français). Il partage avec son mentor George W. Bush une idéologie qui se fonde avant tout sur la défense d’une civilisation occidentale qui serait aujourd’hui attaquée par le monde islamiste. Lorsqu’il déclare faire en sorte que “Paris et l’ensemble des capitales occidentales parlent désormais toutes d’une seule voix”, c’est surtout pour défendre les causes occidentales que les discours et les aventures guerrières de Bush “contre l’Axe du Mal et la Barbarie” ont totalement galvaudées: la Démocratie, la Liberté, l’universalisme des Droits de l’Homme, la lutte contre le terrorisme. Comme George W. Bush et comme tous les néo-conservateurs islamophobes, Nicolas Sarkozy est dans une logique de guerre contre tout ce qui ne relève pas des “valeurs occidentales” judéo-chrétiennes, tant en matière d’économie que de politique et de religion. Il exècre et ne cesse de diaboliser les partis islamistes qualifiés de terroristes comme le Hezbollah ou le Hamas, n’imaginant pas que son propre occidentalisme est à l’Occident ce que le fondamentalisme islamiste est à l’Islam. Il est au plus près des cercles israélo-américains d’extrême-droite qui, afin de “garantir la paix et la sécurité”, prônent une domination occidentale du monde, quitte pour cela à passer à l’offensive et à se lancer dans une guerre de civilisation “globale”. Pour Nicolas Sarkozy il s’agit de défendre mais aussi désormais d’imposer par tous les moyens, et notamment par la guerre, un nouvel ordre occidental soi-disant “moral” (comprendre surtout “néo-libéral”) qui doit régner sur l’ensemble de la planète.
Cette idéologie d’autodéfense agressive se nourrissant du conflit avec l’islamisme autorise ainsi l’OTAN — qui à l’origine n’a qu’une mission de défense limitée aus territoires occidentaux — à aller porter la guerre aux confins de la planète pour défendre des intérêts géostratégiques essentiellement américains, quand ce n’est pas parfois purement israéliens, à titre d’une soi-disant “légitime défense” contre le terrorisme islamiste. De hauts stratèges et chefs d’état-major de l’OTAN planchent même actuellement sur de réjouissantes nouvelles options militaires. Ces docteurs Folamour réclament en effet le droit d’effectuer des frappes préventives, y compris avec l’arme nucléaire, sans autorisation du Conseil de sécurité de l’ONU. Lorsque l’on connaît le désir insensé des Israéliens et de leurs amis américains — Même avec Barack Obama, il y a peu de chances que les Etats-Unis modifient leur politique de soutien inconditionnel à l’Etat d’Israël — d’aller bombarder l’Iran, on imagine aisément à quoi la sainte alliance transatlantique risque bientôt de servir.
C’est avec cette “vision” guerrière et occidentaliste du monde, ruineuse et extrêmement dangereuse pour la France, que Nicolas Sarkozy entend jouer un rôle international. En infléchissant la doctrine militaire française pour mieux s’aligner sur la politique étrangère américaine, dont on connaît pourtant les errements et l’agressivité aussi inefficace que désastreuse, il commet une erreur diplomatique et stratégique majeure.
Noël Blandin, pour la République des Lettres
Notes
1) Annoncé dès la campagne électorale de 2007, ce projet sarkozyste n’a cessé d’être remis sur la table, tant par Nicolas Sarkozy que par Bernard Kouchner (Ministre des Addaires étrangères) et Hervé Morin (Ministre de la Défense) afin d’y “préparer l’opinion”, notamment pour le Président de la République à travers le Discours de janvier 2008 devant le corps diplomatique français, lors du Sommet de l’OTAN à Bucarest en avril 2008 et la semaine dernière encore lors d’une conférence sur la sécurité à Munich.
2) Parmi les responsables politiques qui s’opposent à la décision autocratique de Nicolas Sarkozy, on note celles de François Bayrou pour qui la réintégration dans le commandement militaire de l’OTAN serait “une défaite pour la France” et un “un aller sans retour” [...] “En nous alignant, nous abandonnons un élément de notre identité, une part de notre héritage, et nous l’abandonnons pour rien”. Il demande que le choix fait par le Général de Gaulle en 1966 “ne soit pas bradé et jeté aux orties”, ajoutant qu’un tel choix ne peut aujourd’hui être modifié “que par un référendum du peuple français”. Dans un entretien au Nouvel Observateur, François Bayrou précise sa pensée. Pour lui, en réintégrant l’OTAN, la France se range “aux yeux du monde” dans un “bloc occidental” [...] “euro-américain d’un côté, le reste du monde de l’autre. Ceci, pour la France et son histoire, son universalité, est un renoncement”. Il affirme que “ce que nous sommes en train de brader, ce n’est pas seulement notre passé mais aussi notre avenir, une partie du destin de la France et de l’Europe”. Pour le Parti Socialiste, qui demande un débat et un vote parlementaire sur la question, “Aucune explication recevable n’est apportée sur l’intérêt pour la France de ce retour” et les “conditions et contreparties de cette réintégration ne sont pas connues”. Jean-Marc Ayrault, chef de file des députés PS, estime que “La France doit garder son autonomie de décision” et que celle-ci “ne peut pas être prise par le président seul”. Les anciens ministres socialistes de la Défense Paul Quilès et Jean-Pierre Chevènement ont également publié des tribunes dans la presse pour exprimer leur rejet de cette décision “très dangereuse pour la sécurité de la France”. [...] “Nous ne devons pas nous laisser entraîner dans des guerres qui ne sont pas les nôtres”, affirment-ils. “Si la France entre dans l’OTAN, il n’y a plus d’espoir de politique étrangère et de sécurité commune, plus d’Europe de la défense”, affirme également le socialiste Jean-Michel Boucheron. La réintégration “limiterait notre souveraineté et serait le signe d’un alignement sur l’administration américaine qui banaliserait la singularité de la France”, estiment pour sa part le Parti Communiste. Du côté de l’UMP, une partie des députés exprime aussi son opposition: Jacques Myard proteste contre ce “retour qui va lier les mains de la France et l’arrimer à un bloc monolithique occidental dirigé par les Etats-Unis” tandis que Lionnel Luca explique que “Pour un grand nombre de pays arabes, le fait que la France soit dans l’OTAN est un mauvais signal”. Jean-Pierre Grand regrette cet “arrimage plein et entier aux Etats-Unis”. “Il y a dans le monde entier des pays qui attendent de la France qu’elle demeure une transition, une passerelle, et qu’elle ne s’aligne pas sur les Etats-Unis”, renchérit Georges Tron. Le gaulliste ex-UMP Nicolas Dupont-Aignan s’engage lui dans une quasi campagne contre le projet et exige un débat parlementaire. Daniel Garrigue, député ex-UMP de la Dordogne, s’est de son côté fendu d’une tribune intitulé “Bonjour, messieurs les traîtres !”. Pour lui, “Rien ne justifie le retour de la France dans l’Organisation du traité de l’Atlantique Nord et la remise en cause de l’un des rares consensus forts de notre pays — voulu en l’occurrence par le général de Gaulle avec la sortie de l’Otan en 1966 et confirmé par ses successeurs, y compris par le socialiste François Mitterrand. Nous y perdrons la considération que nous avions sur la scène internationale et particulièrement notre capacité à être entendus dans un certain nombre de conflits, notamment au Proche et au Moyen-Orient. [...] “Pour tous ceux qui croient en la France et en la construction de l’Europe, cette décision de rejoindre l’Otan qui n’a été ni concertée, ni discutée, ni approuvée par les Français ou par le Parlement, constitue bien une véritable trahison”. Alain Juppé, ancien Premier Ministre de Jacques Chirac, renouvelle lui aussi ses critiques en demandant si la France n’était pas en train de “faire un marché de dupes en rentrant sans conditions” dans le commandement de l’OTAN. Mais le plus farouche opposant à Droite est l’ancien Premier Ministre Dominique de Villepin. Pour lui, la France “va se trouver rétrécie sur le plan diplomatique” et sera plus vulnérable au terrorisme. “Alors que le Sud est en train de s’affirmer, dans un monde qui est en train de basculer, faut-il donner le sentiment de se crisper sur une famille occidentale ?”, s’interroge-t-il. Comme François Bayrou, il estime que si la France avait été intégrée aux structures de commandement de l’OTAN en 2003, elle aurait été obligé de suivre les Etats-Unis de Geoorge W. Bush dans la guerre contre l’Irak.
3) Discours de Jaap De Hoop Scheffer, Secrétaire général de l’OTAN, devant les parlementaires français le 12 février 2009.
00:50 Publié dans Affaires européennes | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : actualité, europe, otan, atlantisme, france, sarkozy, gaullisme | |
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