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vendredi, 19 février 2021

Game Stop et Grand Reset: Le Décryptage de Raoul Weiss

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Café Noir N.11

Game Stop et Grand Reset:

Le Décryptage de Raoul Weiss

Café Noir – Un Autre Regard sur le Monde.
Émission du Vendredi 19 Février 2021
Avec Pierre Le Vigan, Gilbert Dawed & leur invité Raoul Weiss.
 
Cafe Noir N.09 – Réseaux Sociaux, Bourse et 5e Pouvoir https://youtu.be/xgwkTJHYcqo
 

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jeudi, 18 février 2021

Quand le coronavirus ressuscite Foucault

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Quand le coronavirus ressuscite Foucault

Par Javier Barraycoa

(ex : postmodernia.com )

Être confiné chez soi, soumis à la pression du télétravail qui oblige à des autorégulations disciplinaires, ou à la séparation volontaire d'un mètre de ses semblables quand on sort faire ses courses dans des rues à moitié vides, ne peut que nous rappeler la pensée de Michel Foucault. Il fut l’auteur d'innombrables ouvrages consacrés à expliquer le passage des sociétés traditionnelles aux sociétés qui contrôlent, soit aux sociétés disciplinaires. Son oeuvre nous semble d'une actualité effrayante. Autant on voudrait éviter les théories conspirationnistes sur l'apparition de ce nouveau coronavirus, autant un frisson nous parcourt la colonne vertébrale, lorsque nous voyons comment, en quelques jours, au prix d'une pandémie, les "plaques tectoniques" de la géopolitique se déplacent à la vitesse de l'éclair. Mais il vaut peut-être mieux laisser cela pour une autre fois.

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Pour l'instant, nous ne reprendrons que quelques brèves réflexions de Foucault et nous verrons que son cadre théorique s'inscrit parfaitement dans la situation que nous vivons. Comme nous l'avons dit, la pensée de notre auteur a marqué une étape importante dans le changement de la vision que nous avons du pouvoir. La modernité du XVIIIe siècle avait développé un système de contrôle typique d'un état absolu, dont le référent était le panopticon : une structure spatiale qui permettait aux surveillants de surveiller sans être vu par les contrôlés. Le mécanisme, conçu par Bentham, pouvait être utilisé pour contrôler une prison ainsi bien qu'une usine. L'œil qui voit tout était une représentation de la déification de l'État.

Cependant, au XIXe siècle, ce pouvoir souverain est devenu obsolète en soi et a dû se développer, et concurrencer les nouvelles formes de contrôle social. Ce fut l'émergence de sociétés disciplinaires, où les dispositions spatiales et le contrôle jouent à nouveau un rôle fondamental. Mais cette fois, ce n'est pas une idéologie de l'État souverain qui légitime le pouvoir, mais des ‘’micro-idéologies’’ (des "savoirs" selon Foucault) qui se superposent les unes aux autres, créant des "espaces" où le corps est discipliné. D'où ses analyses approfondies des hôpitaux, des écoles, des prisons, des asiles, en tant qu'"espaces" où s'applique la connaissance/pouvoir (une connaissance technologique du corps et de l'esprit), qui permet le développement de ce qu'il appelle les "technologies du soi", c'est-à-dire la construction de l'identité du soi par la connaissance scientifique ou les "savoirs" (essentiellement les idéologies) et l'acquisition de processus comportementaux prédéterminés.

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Foucault, dans la dernière phase de son travail intellectuel, a tenté de démontrer que la société disciplinaire qui avait été créée (les comportements actuels de consommation en seraient une expression de plus) ne remplaçait pas ou ne s'opposait pas au pouvoir souverain, mais plutôt le complétait. De ces frictions, une nouvelle modalité de pouvoir/discipline émergerait qui ne s'occuperait plus du contrôle disciplinaire des sujets, mais de celui des populations. Il a appelé ce fait l'apparition de la biopolitique, du biopouvoir. Avec ces termes, il a tenté d'expliquer le souci du pouvoir de contrôler la "population" (un concept qui correspond au sujet du biopouvoir). Pour l'État, il devient aussi important d'exercer imperceptiblement son pouvoir sur les sujets individuels par le développement de disciplines de maîtrise de soi, que de contrôler un sujet - pris dans son ensemble - qui est la population. D'où la préoccupation des États pour la maîtrise des naissances, de l'espérance de vie, de l'accroissement de la population, de son vieillissement, en bref de ses paramètres en tant qu'être vivant.

Le génie de Foucault réside peut-être dans la description de la disjonction entre le pouvoir souverain, les techniques disciplinaires et le biopouvoir. Cette inévitable discordance entre les différentes formes d'exercice du pouvoir, serait résolue de la manière la plus surprenante et la plus actuelle. Le déclencheur de tout cela serait la sécularisation de la modernité. Dans une société où le transcendant est présent, le pouvoir - d'une certaine manière - n'a pas de limites ni de discontinuités. Mourir signifie passer de la soumission à l'État souverain à la juridiction d'un Dieu souverain. Par conséquent, en présence du pouvoir, elle était maintenue (même si elle était dans l'imaginaire particulier) au-delà de la mort. Mais la sécularisation et l'immanentisation de la vie mettent une limite au pouvoir. Il ne peut être exercé qu'en temps historique. Ceci, selon un Foucault, philosophe clairvoyant, obligerait à une resacralisation du pouvoir temporel. Mais il est difficile, voire impossible, de le rendre explicite dans une société moderne ou contemporaine.

photomichelfoucault.pngLe besoin de resacralisation et d'une charnière pour s'adapter aux trois formes de pouvoir que nous avons exposées, se résout avec la "sacralisation" d'une des disciplines développées dans la modernité : la clinique. Foucault voit dans la médicalisation de la société (omniprésence des thérapies, des protocoles médicaux, présomption que nous sommes tous malades et avons besoin d'être soignés), dans la légitimité auto-accordée de l'État à contrôler cette thérapeutique et dans les mécanismes de contrôle de la population, la survie du pouvoir. Dans la modernité, l'État ne se préoccupe pas des personnes, il se préoccupe des statistiques. C'est pourquoi, une fois l'exercice des modalités du pouvoir dans l'au-delà rendu impossible, l'État - affirme Foucault - ne se préoccupe pas de la mort, mais de la mortalité.

Nous ne pouvons pas oublier comment les premières études de notre philosophe sur le biopouvoir ont cherché leurs fondements dans le contrôle des espaces dans les villes face aux épidémies. Les grandes épidémies ont conduit à recréer l'espace des villes (en créant des rues plus larges, en éliminant les quartiers fermés, ...) qui à leur tour ont permis un meilleur contrôle policier et politique. Aujourd'hui, en ces temps d'épidémie globale/locale, même si nous sommes dirigés par un gouvernement plus que maladroit, on ne peut s'empêcher de remarquer comment les observations du penseur français se concrétisent. Nous avons des gouvernements qui ne se soucient pas des morts (parce qu'ils sont condamnés à mourir en isolement), mais des statistiques quotidiennes de mortalité et d'infections. Presque automatiquement, bien que paresseusement, les mécanismes de contrôle spatial ont déjà été mis en route, retournant à la réclusion déguisée en auto-confinement volontaire. Le pouvoir, à travers ses médias, nous aide dans le contrôle de l'autodiscipline dans nos maisons ou dans les protocoles de déplacement. Et tout cela avec la conviction que le pouvoir est le garant de notre salut.

Si Foucault devait être ressuscité, il sourirait probablement et se tairait.

https://grupominerva.com.ar

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Eurocrate et atlantiste : Draghi dicte la nouvelle politique étrangère de l'Italie

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Eurocrate et atlantiste : Draghi dicte la nouvelle politique étrangère de l'Italie

Par Lorenzo Vita

Ex : https://it.insideover.com

Un gouvernement eurocratique et atlantiste. Avec ces mots, Mario Draghi définit la politique étrangère de son gouvernement et envoie un message adressé non seulement aux alliés du gouvernement, mais aussi à ceux qui se trouvent hors d'Italie. Il y a un pays, l’Italie, qui, pour Draghi, doit confirmer les lignes directrices qui ont caractérisé la diplomatie de Rome depuis des décennies. Et Draghi répond aux attentes d'un exécutif qui est clairement né avec la bénédiction de Washington et de Berlin (et de Bruxelles). Les deux capitales de l'Occident politique, celle de l'Amérique et celle de l'Europe, regardent très attentivement ce qui se passe au Palazzo Chigi, conscientes que l'Italie est un pays que personne ne peut ou ne veut perdre. Les États-Unis pour des questions stratégiques, l'Allemagne pour des raisons économiques et donc politiques.

Ces dernières années, l'Italie est apparue très erratique sur les questions clés de sa politique étrangère. Ce n'est pas nécessairement un défaut, mais ce n'est pas non plus une vertu. Très souvent, le fait d'être ambigu est pris pour une forme de politique non alignée ou pour un signe d'indépendance. Cependant, ce qui semble presque être un appel à une diplomatie de type "primo-public" cache très souvent (et dissimule) l'incapacité à suivre une certaine voie qui conduirait à des avantages évidents. Giuseppe Conte, en changeant de majorité, a certes modifié profondément sa façon de faire de la politique étrangère : mais cela n'a pas suffi à donner des garanties aux pouvoirs qui se portent garants de l'Italie sur la scène internationale. Une question qui a pesé comme un roc dans la politique d'un gouvernement déjà miné par des problèmes internes.

Draghi est arrivé au Palazzo Chigi avec un arrière-plan précis. Et les lignes qu'il dicte révèlent encore plus la faveur avec laquelle il est revenu à Rome. L'axe entre le Palazzo Chigi et le Quirinal, qui a façonné ce gouvernement né des cendres de la coalition jaune-rouge, repose sur une ligne programmatique qui s'articule autour de trois éléments clés : l'OTAN, l'Union européenne et l'idée d'un pays qui représente ces blocs en tant que pilier méditerranéen. Les propos du Premier ministre confirment cette ligne par une phrase qui ne laisse aucun doute : "Dans nos relations internationales, ce gouvernement sera résolument pro-européen (eurocratique) et atlantiste, en accord avec les ancrages historiques de l'Italie : l'Union européenne, l'Alliance atlantique, les Nations unies".

Sur le front européen, il est clair que le gouvernement Draghi est né dans un système profondément lié à la vision unitaire de l'Europe. Le curriculum de Draghi, dans ce sens, ne peut certainement pas être sous-estimé étant donné qu'en tant que président de la Banque centrale européenne, il a sauvé l'euro d'une crise potentiellement explosive et a répété, dans son discours au Sénat, qu’il fallait considérer l'euro comme irréversible. Ces orientations économiques et financières vont également de pair avec une politique étrangère au sein de l'UE qui apparaît immédiatement très précise, et qui ne doit pas être sous-estimée. L'idée d'affirmer que la France et l'Allemagne sont les premiers référents au sein du continent, en distinguant clairement Paris et Berlin des autres gouvernements méditerranéens (expressément l'Espagne, Malte, la Grèce et Chypre) construit une frontière bien définie du réseau stratégique italien. Avec la France et l'Allemagne, on a l'impression qu'ils veulent créer des canaux sûrs et directs qui impliquent une entrée progressive de l'Italie dans les choix communautaires, ce que le politologue Alain Minc, conseiller de Macron, a également rappelé dans son interview au journal La Repubblica. En effet, Minc a également lancé une blague sans surprise sur la déception espagnole face à l'arrivée de Draghi, étant donné que l'objectif de Madrid est de saper la position de Rome en tant que troisième capitale de l'UE.

Ces piliers européens, ainsi que les piliers atlantiques, représentent la position diplomatique du gouvernement lancée ces dernières semaines. Des lignes rouges qui ouvrent la porte à un scénario de repositionnement également vis-à-vis de la Chine, jamais mentionnée dans le texte alors même qu’elle est un partenaire fondamental du pays. La Russie et la Turquie ont certes été mentionnées – mais une seule fois pour parler des tensions dans leurs environnements et en Asie centrale. Un choix qui ne peut pas être seulement dialectique : pour Draghi, l'Italie n'a qu'une seule appartenance, qui est celle de l'aire atlantique et de l'Europe eurocratique. La Chine est un partenaire commercial inévitable, mais en évitant d'en parler dans son discours programmatique, il montre aussi clairement qu'elle n'a aucune valeur stratégique au contraire de l'Amérique, de l’Union européenne et de pays avec lesquels l'Italie a une profonde connaissance économique, politique, d'intelligence et de contrôle de la Méditerranée.

Par conséquent, s'il est clair que, pour Rome, les relations avec Berlin et Paris restent essentielles pour renforcer un projet européen qui implique également notre gouvernement, en évitant qu'Aix-la-Chapelle ne dicte totalement la ligne sur les changements en Europe, l'Italie se tourne également vers la Méditerranée, étant donné que le Premier ministre a affirmé au Sénat qu'il voulait "consolider la collaboration avec les États avec lesquels nous partageons une sensibilité méditerranéenne spécifique".

Cette question est particulièrement importante car elle permet également de comprendre comment la géopolitique italienne évolue dans une période de transition aussi complexe dans la zone euro-méditerranéenne. Pour les États-Unis et l'Union européenne, la Méditerranée représente une ligne de faille qui divise un monde occidental affaibli par la crise et une zone de chaos (la revue géopolitique Limes la définit notamment comme Chaoslandia) qui comprend une grande partie de l'Afrique du Nord et du Moyen-Orient et où plusieurs puissances moyennes et grandes sont impliquées. L'Italie est au centre, la dernière bande d'un bloc en quête de sa nouvelle vocation après l'effondrement de l'URSS et avec une Amérique qui tente de se recentrer sur la Chine tout en évitant d'abandonner le théâtre européen et moyen-oriental. Cette condition implique que Rome doit choisir ses meilleurs alliés avec le plus grand soin, car il est clair que dans ce jeu il n'y a pas de tirage au sort : il y a des gagnants et des perdants, qu'ils soient entrants ou sortants. L'axe pro-européen et atlantiste défini par Draghi dirige l'Italie dans le sillage de ceux qui la considèrent comme la tranchée creusée face à cette frontière brûlante de l'ordre libéral international. Et cela implique clairement aussi un rôle précis cadrant dans ce schéma : à partir de la Méditerranée élargie elle-même. La Libye, le Levant et les Balkans sont des régions vers lesquelles l'Italie ne peut pas refuser de tourner les yeux. Et en attendant des gestes précis de l'administration Biden, qui a déjà fait savoir qu'elle appréciait les nouvelles orientations de l’Italie, on a l'impression que le Palazzo Chigi, le Quirinal et la Farnesina (qui est en fait "commandée" par la ligne Draghi-Mattarella) ont désormais un horizon parfaitement en ligne avec les mouvements de l'OTAN et de l'UE.

La suprématie des peuples de bien...

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La suprématie des peuples de bien...

par Peter Columns

Ex: http://metapoinfos.hautetfort.com

Nous reproduisons ci-dessous un point de vue de Peter Columns consacré à la question de la recherche de la suprématie. Entrepreneur, Peter Columns est un ingénieur spécialisé dans les technologies de l’Intelligence Artificielle. Il anime le site Science et Remigration et tient un blog personnel.

La suprématie des peuples de bien

Ces dernières années, l’expression de suprémacisme blanc a commencé à fleurir un peu partout pour désigner ceux désirant lutter contre la submersion migratoire et la tiers-mondisation des pays européens. Parce que l’accusation de racisme est tombée en désuétude, on accuse désormais les gens d’être des suprématistes. Cette accusation recouvre plusieurs degrés:

• D’abord, l’accusation de volonté d’hégémonie mondiale. Même si l’Occident ne conquiert plus de territoires depuis des siècles, il reste néanmoins cette accusation que ce serait le monde qu’il faudrait “décoloniser”, car forgé par la suprématie occidentale durant des siècles. Par exemple, les industries culturelles européennes, ayant une portée mondiale, devraient représenter la diversité de l’humanité plutôt que de mettre en avant des Européens. En d’autres termes, l’excellence occidentale, dépassant les frontières de l’Occident, nous obligerait à représenter ce qui n’est pas occidental.

• Ensuite, l’accusation de volonté d’hégémonie nationale. Il s’agit de la pensée que l’homogénéité ethnique des sociétés occidentales serait révolue, que les Européens ne seraient plus réellement chez eux, et que toute volonté de bloquer les flux migratoires, de les inverser, révèlerait la volonté de maintenir une société blanche. Cela va avec l’idée que les sociétés européennes seraient fondamentalement construites pendant des siècles par des blancs et qu’une “décolonisation” serait là aussi nécessaire, sur le propre sol des peuples européens.

• Et enfin, l’échelle locale. C’est à dire le fait que les Européens devraient être dépossédés du droit de pouvoir vivre entre Européens, toute volonté de se préserver voudrait dire exclure les autres et faire donc preuve d’une suprématie ethnique sur un territoire quelconque. C’est à dire que la diversité devrait être présente en tout temps, en tout lieu, en quantité très importantes, dès qu’une société européenne se constituerait.

• Pourtant, de toutes ces définitions du suprémacisme blanc, aucune ne semble juste. Il ne s’agit ni plus ni moins toujours que de supprimer des libertés aux peuples européens. Celle de pouvoir exprimer leur génie sans qu’il ne soit universel. Celle de pouvoir continuer à exister en tant que nations, de posséder des sociétés qui nous représentent. Celle de la liberté d’association en pouvant décider avec qui nous voulons vivre et construire un avenir commun.

Derrière toute cette confusion sémantique, la question du suprémacisme reste pourtant fondamentale pour déterminer:

  • Quelles valeurs vont dominer sur un territoire?
  • Qu’est-ce qui garantit la liberté d’un peuple contre la force coercitive d’autrui?
  • Peut-on se maintenir sans volonté de suprématie, militaire hier, culturelle, technologique ou économique aujourd’hui?

La suprématie est un revolver unique dont l’existence est inéluctable, qu’il vaut mieux confier aux peuples les plus bienveillants

Qu’est ce que faire le bien? Si on devait m’accuser d’être un suprémaciste blanc, je répondrais que je suis pour la suprématie des peuples de bien.

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Je préfèrerais toujours une domination occidentale, portée sur le progrès, la dignité humaine et la liberté, qu’une domination chariatique arabe, tribaliste noire, communiste chinoise, etc. Les valeurs de la civilisation occidentale sont les meilleures. 97% des découvertes et inventions sont du fait des peuples européens. Ils sont ceux qui ont sorti l’humanité de la triste condition dont elle était issue. Ils auraient pu garder tous ces bienfaits pour eux, mais ce n’est pas ce qu’ils ont fait. Ils ont tenu à en faire profiter tout le monde entier, et ils en ont été bien mal remerciés.

Dans la logique actuelle, tous les suprémacismes se valent. De fait, nous sommes passés d’une criminalisation du “racisme”, comme opposition à la submersion migratoire, à la criminalisation du “suprémacisme”, comme opposition au projet de “décolonisation” des pays occidentaux. Ce glissement sémantique ne témoigne en vérité que d’un insupportable relativisme. Qu’il soit d’extrême-gauche, considérant les valeurs du tiers-monde comme supérieures à celles du monde développé, ou bien du centre, parlant de tenaille identitaire, mettant la cause des remplacés à égalité avec celle des remplaçants.

S’il existe toujours une suprématie, qui doit forcément appartenir à quelqu’un, il existe des suprémacismes. Quel serait le rapport par exemple entre un suprémacisme blanc qui souhaite préserver sur leur propre sol des peuples millénaires inventifs et bienveillants, et le suprémacisme islamique qui vient dans d’autres pays commettre des exactions, imposer sa culture à l’étranger et remplacer démographiquement d’autres populations? Les peuples ne se valent pas. Les cultures ne se valent pas. Les immigrations ne se valent pas. Les idéologies ne se valent pas. De la même façon, les suprémacismes ne se valent pas.

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Faire le bien, consiste à donner de la force à ceux qui sont des personnes de bien. Et d’abord et avant tout la force pour qu’elles se préservent elles-mêmes. De fait, elles sont souvent les plus sujettes à se remettre en question, à éprouver de la culpabilité, à douter d’elles-mêmes. Ne pas leur donner cette force, c’est donner la suprématie au pire.

Par l’aide au développement et l’immigration de masse, c’est exactement ce que nous avons fait. Nous avons donné à des sociétés profondément viciées la possibilité de se développer géographiquement de façon exponentielle, avec même l’avènement de crimes de masse comme les viols collectifs de Telford ou de Rotherham sur le sol de pays qui étaient pourtant civilisés.

Souvent, lorsqu’il est question de l’expulsion d’un violeur, l’argument opposé est que le violeur qu’il soit en France ou en Algérie continuerait de commettre des exactions. Mais c’est avec ce genre de raisonnement épouvantable que tous les pays civilisés se transforment en terres de culture du viol. La criminalité ne se transvase, en effet, pas uniquement d’un pays vers un autre. Dans les faits, nous permettons à des cultures criminogènes de se répandre, de se nourrir, et de dominer.

De la même façon, les institutions internationales, dans toute leur efficacité très relatives, ne sont garantes des Droits de l’Homme que parce que les peuples européens ont encore un certain poids. Les Droits de l’Homme sont le devoir de l’Européen. Avec des Hommes de plus en plus nombreux, et des Européens de moins en moins. Nous avons aboli l’esclavage, nous avons reconnu l’auto-détermination des peuples, nous avons posé des barrières au pouvoir des États sur les individus, nous avons reconnu aux personnes de toutes origines, races, confessions le droit à une dignité. Qui nous reconnaitra tous ces droits? Personne sinon nous-mêmes. Qui se soucie aujourd’hui même de l’environnement, des inégalités, du sort des animaux?

Le procès des peuples européens

Systématiquement, toujours pour diminuer un risque de suprématie, il sera fait le procès des peuples européens, en mentionnant toutes leurs exactions réelles ou imaginaires. Pourtant, les exactions des peuples ne peuvent être jugées indépendamment des moyens à leur disposition, et de la suprématie qu’ils pouvaient avoir sur autrui. Un peuple peut ne pas avoir commis de crimes pour la simple raison qu’il n’en avait pas les moyens. Un peuple peut avoir commis beaucoup de crimes, mais que cela reste infinitésimal par rapport à ce qu’il était réellement en capacité de commettre. Les vrais peuples bienveillants sont ceux qui avaient les moyens de commettre le mal, et qui ne l’ont pas fait.

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De la même façon, il est trop facile de considérer comme bienveillants des peuples qui n’ont rien accompli. Toujours, réaliser des choses, avoir une histoire riche, implique son lot de conflits, de choix difficiles, d’erreurs qu’il ne fallait pas commettre. On reprochera ainsi toujours à ceux qui font, et jamais à ceux qui se drapent dans la pureté de l’inaction, voire de l’extinction. De ce point de vue, encore une fois, la contribution européenne a sorti l’humanité de sa condition originelle qui était épouvantable. Était-ce faire le bien que de s’éteindre?

La liberté ne dépend que de celui qui possède la suprématie

De fait, nous ne pouvons pas échanger notre liberté contre une autre. Nous ne pouvons pas céder notre pouvoir pour le bien de tous, car c’est avec ce pouvoir que nous garantissons les droits de chacun. C’est parce que nous avons la suprématie, que nous pouvons imposer de bonnes valeurs. Cette liberté a été acquise dans le sang, oui, et elle n’aurait jamais pu être acquise autrement. C’est parce que nous voulions être forts et que nous étions épris de liberté, que nous sommes devenus libres, et que les autres sont devenus libres aussi.

La liberté ne peut pas aller sans le suprémacisme. C’est la volonté constante en tant que peuple de devenir plus fort qui fait que nous nous maintenons au-dessus de ce qui voudrait bien nous asservir. Et pour un monde en paix, le mieux reste de militer pour la suprématie des peuples de bien. C’est l’adage bien connu si vis pacem, para bellum. Si pour avoir la paix, il faut préparer la guerre, encore faut-il avoir la volonté de dominer en cas de conflit.

L’histoire de la suprématie a été violente, oui. Mais ce n’est que parce que nous avons gagné à ce jeu, que nous avons pu instaurer un monde qui soit plus paisible, où la suprématie se joue sur le territoire économique et technologique. Absolument rien ne garantit que les règles resteront les mêmes une fois que nous ne serons plus les plus influents. Les Européens ont tellement été au dessus de tout durant des siècles qu’ils ont fini par penser que leurs propres dogmes étaient universels. Et lentement, ils réapprennent les véritables règles du jeu.

Si nous devenons minoritaires, si nous devenons faibles, cette liberté ne dépendra que d’autrui. Cet autrui qui génocide sans sourciller les minorités quand il est majoritaire, qui envahit le pays d’à coté juste parce qu’il le peut, qui considère la femme comme un butin, qui pratique l’esclavage encore, qui rêve de mettre le monde à la merci de la charia ou bien du Parti.

La volonté de suprématie est le feu intérieur d’un peuple

Parler de suprémacisme blanc sur le sol occidental, n’a qu’un seul effet concret: démoraliser encore un peu plus les Européens, leur interdire les rêves de grandeur, leur refuser le droit de faire grandir tout ce qu’ils aiment sur leur propre sol, après leur avoir refusé le droit de se préserver. C’est tirer une balle dans la tête de toutes les valeurs positives occidentales.

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C’est parce que nous avons un rêve de grandeur, parce que nous voulons accomplir des choses, parce que nous voulons être une puissance économique et technologique, parce que nous voulons avoir la population la plus érudite, que nous allons de l’avant, que nous restons compétitifs, que notre travail de tous les jours trouve un sens. C’est parce que nous pouvons avoir une identité, et que cette identité débouche sur des accomplissements, que nous pouvons trouver une cohésion. Sans suprémacisme, sans identité, nous avons la liberté sans rien pouvoir en faire. En attendant qu’on nous prenne la liberté tout court.

Par conséquent, il revient de poser une question simple: si vous n’êtes pas pour la suprématie des peuples européens, si garantir leur force dans l’équilibre mondial ne vous apparait pas comme une nécessité, si vous ne voulez pas voir les valeurs et les réalisations occidentales grandir avec le temps, qu’est-ce qui doit selon vous dominer à la place ?

Peter Columns (Blog de Peter Columns, 3 février 2021)

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mercredi, 17 février 2021

Avec Michel Drac: Bilan 2020 et perspectives pour 2021

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Avec Michel Drac: Bilan 2020 et perspectives pour 2021

➤ Mon contenu exclusif: https://join.autonomie-resilience.com...
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➤ Mes livres: https://www.cultureetracines.com Préparez-vous !
 
 

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L’obsession des États-Unis pour leurs narratives vont les faire entrer en collision avec la réalité

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L’obsession des États-Unis pour leurs narratives vont les faire entrer en collision avec la réalité

Ex: Moon of Alabama

Le cirque qu’a été cette mise en scène de « l’impeachment de Trump » se termine et la réalité peut maintenant reprendre sa place :

Maintenant que le procès pour la destitution de son prédécesseur est terminé, le 
président Biden va rapidement faire pression pour faire adopter son plan d'aide
aux victimes du coronavirus, d'un montant de 1 900 milliards de dollars, avant
de passer à un programme encore plus important au Congrès qui comprend les
infrastructures, l'immigration, la réforme de la justice pénale, le changement
climatique et les soins de santé. Après le spectacle qu’a été ce conflit constitutionnel, le nouveau président
"occupe maintenant le devant de la scène d'une manière que les premières
semaines n'ont pas permis"
, a déclaré Jennifer Palmieri, qui a été directrice
de la communication de l'ancien président Barack Obama. Selon elle, la fin
du procès signifie que "2021 peut enfin commencer".

« Attendez ! » crie l’industrie médiatique. Cela ne correspond pas à notre scénario. Le côté « gauche » des médias est là pour accuser Trump chaque minute qui passe et le côté « droit » est là pour condamner constamment la « gauche » pour s’en prendre à Trump. Au cours des cinq dernières années, ce système a produit des taux d’audience record pour tout le monde.

Wolf Blitzer @wolfblitzer - 16:11 UTC - Feb 15, 2021

Le procès Trump est terminé, mais les enquêtes locales, étatiques et fédérales 
se poursuivent. Il pourrait y avoir une commission de type 11 septembre. Les
organisations de presse continuent d'enquêter. Et @realBobWoodward travaille
à un livre sur les derniers jours de Trump. En résumé : nous allons en apprendre
beaucoup plus.

« Je vous ai entendu », répond Nancy Pelosi. Et quel meilleur moyen de cacher que Biden poursuivra les mêmes politiques que Trump (mais saupoudrées de quelques charlataneries LBGTQWERTY) plutôt que de prolonger le cirque narratif :

Le Congrès va créer une commission indépendante pour enquêter sur l'attaque du 
Capitole le 6 janvier, y compris sur les faits "relatifs à l'interférence avec
le transfert pacifique du pouvoir"
, a annoncé lundi la présidente du Parlement

californien, Nancy Pelosi. ... Les appels se sont multipliés en faveur d'une enquête bipartite et indépendante
sur les manquements de l'administration et des forces de l'ordre qui ont conduit
à la première violation du Capitole depuis deux siècles, en particulier après
que le Sénat ait acquitté l'ancien président Donald J. Trump dans son procès
de destitution pour incitation aux émeutes. Pour certains législateurs, une
telle commission offre la dernière grande occasion de tenir M. Trump pour
responsable.

Oui Nancy, enquêtons sur cette question et sur d’autres du même genre : Pourquoi la demande du chef de la police du Capitole  du renfort d’une garde nationale a-t-elle été refusée avant l’émeute ? demandent les républicains à Nancy Pelosi.

Garder un œil sur Trump est bien sûr le meilleur moyen de garantir que les Républicains continueront à s’en tenir à son récit et qu’il reviendra :

Bien que les primaires de 2024 soient encore loin, qui sait ce qui se passera 
avec Trump dans trois mois, et encore plus dans trois ans ? - il est actuellement
en train d'écraser tout rival potentiel. 53 % des Républicains ont déclaré qu'ils
voteraient pour Trump si la primaire avait lieu aujourd'hui. Tous les autres espoirs Républicains sont dans le bas de l'échelle, à part Mike

Pence, qui a obtenu 12 % des voix. Marco Rubio, Tom Cotton, Mitt Romney, Kristi
Noem, Larry Hogan, Josh Hawley, Ted Cruz, Tim Scott et Rick Scott ont tous des
intentions de vote en dessous de 5 %. Seuls Donald Trump Jr. et Nikki Haley ont
obtenu 6 %.

Une enquête plus approfondie sur l’invasion du Capitole lors du Mardi Gras contribuera également à faire adopter de nouvelles lois sur le « terrorisme intérieur ». On sait déjà vers qui elles seront dirigées :

Thomas B. Harvey @tbh4justice 17:56 UTC - 15 février 2021  

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Le FBI arrête un manifestant BLM, affirmant que ses messages sur les médias 
sociaux montrent qu'il est "sur la voie de la radicalisation". Un juge a
déterminé qu'il est dangereux à cause de ces posts et a ordonné sa détention
sans caution. C'est vers cela que nous nous dirigeons si nous acceptons cette
histoire de terrorisme intérieur : Le FBI a mis en garde contre les attaques d'extrême droite. Ses agents arrêtent
un ex-soldat de gauche.

Bienvenue à l’ère du capitalisme de surveillance, où chaque diatribe que vous aurez publiée et qui ne correspond pas au récit officiel peut (et sera) utilisée contre vous :

Cela représente clairement une toute autre ampleur de "contrôle" - et lorsqu'il 
est allié aux techniques anti-insurrectionnelles occidentales de détournement
du récit "terroriste", mises au point pendant la "Grande Guerre contre le
terrorisme"
- il constitue un outil formidable pour freiner la dissidence,

tant au niveau national qu'international. Mais il présente cependant une faiblesse fondamentale. Tout simplement, parce qu’à cause du fait d'être si investi, si immergé, dans
une "réalité" particulière, les "vérités" des autres ne sont plus - ne peuvent
plus - être entendues. Elles ne peuvent plus fièrement se distinguer au-dessus

de la morne plaine du discours consensuel. Elles ne peuvent plus pénétrer dans
la coquille durcie de la bulle narrative dominante, ni prétendre à l'attention
d'élites si investies dans la gestion de leur propre version de la réalité. La "faiblesse fondamentale" ? Les élites en viennent à croire leurs propres récits
- oubliant que ce récit a été conçu comme une illusion, parmi d'autres, créée pour
capter l'imagination au sein de leur société (et non celle des autres). .... Les exemples sont légion, mais la perception de l'administration Biden selon

laquelle le temps a été gelé - à partir du moment où Obama a quitté ses fonctions
- et en quelque sorte dégelé le 20 janvier, juste à temps pour que Biden reprenne
tout à cette époque antérieure (comme si ce temps intermédiaire n’existait pas),
constitue un exemple de croyance en son propre mème. La stupéfaction - et la colère -
de l'UE, qui a été décrite comme "un partenaire peu fiable" par Lavrov à Moscou,
est un exemple de plus de l'éloignement des élites du monde réel et de leur captivité
dans leur propre perception. L'expression "l'Amérique est de retour" pour diriger et "fixer les règles du jeu"
pour le reste du monde peut être destinée à faire rayonner la force des États-Unis,
mais elle suggère plutôt une faible compréhension des réalités auxquelles les
États-Unis sont confrontés : Les relations de l'Amérique avec l'Europe et l'Asie

étaient de plus en plus distantes bien avant l'entrée de Biden à la Maison Blanche
- mais aussi avant le mandat (volontairement perturbateur) de Trump. Pourquoi alors les États-Unis sont-ils si systématiquement dans le déni à ce sujet ?

Les États-Unis – ou du moins leurs « élites » – ont besoin de se réveiller, de sortir de leur monde narratif et de revenir à la réalité.

L’alternative est une collision violente avec les réalités que d’autres, nationaux ou étrangers, perçoivent.

Moon of Alabama

Traduit par Wayan, relu par Jj pour le Saker Francophone

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L’échec du populisme de gouvernement

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L’échec du populisme de gouvernement

par Georges FELTIN-TRACOL

Ex: http://www.europemaxima.com

Le 17 octobre 2020 se tenaient en Nouvelle-Zélande des élections législatives. Depuis trois ans, le Premier ministre travailliste, Jacinta Ardern, gouvernait en coalition avec New Zealand First (NZF) de Winston Peters, un parti populiste nationaliste modéré. Pour bénéficier d’une réelle stabilité, Jacinta Ardern avait aussi noué un accord complémentaire avec les Verts, habituels adversaires de NZF, qui apportaient leur soutien au cas par cas.

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En tant que vice-Premier ministre, Winston Peters (photo) a exercé pendant près de six semaines la fonction de chef du gouvernement par intérim quand s’achevait la grossesse de Jacinta Ardern. Au cours de ces trois années de coopération, les neuf députés de NZF ont souvent avalé des couleuvres, voire des boas, comme la limitation du port d’arme, la réglementation plus stricte de la vente des dites-armes et la surveillance des opinions sur Internet. Il a résulté de cette expérience ministérielle que NZF perde tous ses sièges d’élus et ne réalise que 2,66 % des suffrages.

Porté par la nouvelle icône planétaire de la gauche féministe, égalitaire et multiculturaliste, le Parti travailliste recueille 49,10 % des suffrages, soit une hausse de 12,20 points, et gagne dix-huit sièges. Avec soixante-quatre députés, Jacinta Ardern obtient la majorité absolue dans le cadre d’un mode de scrutin largement proportionnel. En progrès de 1,3 point, les Verts gagnent deux sièges, soit dix élus et 7,57 %. Les deux derniers enseignements de ce scrutin sont, d’une part, l’échec cinglant du Parti national de centre-droit (trente-cinq députés, soit une perte de vingt-et-un sièges, 26,81 % et 17,60 points de moins) et, d’autre part, l’apparition d’une formation libérale centriste, l’ACT New Zealand de David Seymour (7,98 % et dix sièges). Ainsi, même à l’autre bout de la Terre, le globalisme, le mondialisme et le gendérisme s’implantent-ils avec facilité.

Les élections néo-zélandaises démontrent une nouvelle fois que le national-populisme ne peut pas souscrire à un accord gouvernemental en tant que partenaire minoritaire sous peine de perdre élus et électeurs. Il y a vingt ans, le conservateur autrichien Wolfgang Schlüssel s’alliait avec Jörg Haider, le charismatique dirigeant du parti national-libéral FPÖ. Tout l’Univers s’éleva contre la nomination de six ministres FPÖ ! Jamais à court d’idées néfastes, le calamiteux Jacques « Sniff-Sniff » Chirac suggéra aux autres membres de l’Union dite européenne d’ostraciser les ministres autrichiens.

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Malgré ces pressions inacceptables et grâce au soutien constant de la CSU bavaroise, le chancelier fédéral autrichien Schlüssel mèna une politique libérale-conservatrice qui séduisit ministres et notables du FPÖ. Aux législatives de 2002, le bilan fut effroyable pour la droite nationale. Le FPÖ stagna à 10,01 % pour dix-huit députés (moins 16,90 points et une perte de trente-quatre sièges). Reconduit dans ses fonctions de chancelier, Schlüssel poursuivit son alliance avec les nationaux-libéraux. Puis, en 2005, Haider et ses partisans abandonnèrent le FPÖ et lancèrent le BZÖ (Mouvement pour l’avenir de l’Autriche). Aux législatives de 2006, avec 4,10 %, le BZÖ gagna sept sièges. Deux ans plus tard, il réalisa son meilleur résultat (10,70 % et vingt-et-un députés) avant de s’effondrer dès 2013 (3,50 %).

Le « populisme de gouvernement » a aussi échoué en Italie avec la rupture de l’alliance entre la Ligue de Matteo Salvini et le Mouvement Cinq Étoiles. Cette alliance était prometteuse si le M5S n’était pas aussi hétéroclite sur le plan des idées et des pratiques politiques. Gérée par une mairesse Cinq Étoiles, Rome reste dans un état de délabrement avancé. La municipalité préfère avantager les non-Italiens aux Romains. En Norvège, le Parti du Progrès, à l’origine hostile à la fiscalité, et en Finlande, les Vrais Finlandais, ont eux aussi noué des ententes ministérielles qui se caractérisèrent ensuite par des revers électoraux cinglants au point que les Vrais Finlandais se scindèrent entre « modérés » et « radicaux ». Pour couler les formations populistes, les inviter à gouverner semble une tactique plus efficace que les maintenir au-delà d’un stupide « cordon sanitaire ». Toutefois, cette tactique commence à montrer ses limites.

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C’est la raison pour laquelle il faut suivre avec attention les événements politiques à venir outre-Quiévrain. Fruit d’une alliance incongrue entre sept partis (!), le gouvernement fédéral belge ne dispose que d’une majorité relative en Flandre. Les sondages présentent les républicains indépendantistes du Vlaams Belang en tête aux prochaines élections générales devant les autonomistes conservateurs-libéraux de la NVA (Nouvelle Alliance flamande) du maire d’Anvers Bart De Wever qui ont appartenu à une précédente coalition ministérielle fédérale entre 2014 et 2018 avec le très falot Charles Michel. Cela n’empêcha pas ce dernier d’appliquer un programme globaliste pro-migrants. La montée en puissance en Wallonie de la gauche radicale du Parti du Travail de Belgique rendra les prochaines négociations gouvernementales à l’échelle fédérale problématiques.

Le populisme médiatique ne doit donc pas compter sur une illusoire « union des droites ». Son espérance d’occuper quelques strapontins ministériels paraît encore bien lointaine. Il est temps de se tourner vers une aristocratie de militants formés, convaincus et dévoués.

Georges Feltin-Tracol

• « Chronique hebdomadaire du Village planétaire », n° 201, mise en ligne sur TVLibertés, le 9 février 2021.

mardi, 16 février 2021

Le Pokémon et la crétinisation technologique en 1880

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Le Pokémon et la crétinisation technologique en 1880

par Nicolas Bonnal

L'autre jour à Madrid, par quarante degrés centigrades et sur la plaza del sol, « des milliers » (comme on dit) de jeunes professionnels et autres étudiants prometteurs se sont réunis en tongues, short et T-Shirt pour une réunion Pokémon qui promettait beaucoup. Ils se réunissaient donc pour chasser le Pokémon devant les médias émerveillés qui en rendaient compte, et qui affirmaient qu'enfin les jeux vidéo ne sédentarisent pas (pourquoi leur chercher des poux dans la tête ? T'es facho ?), qu'enfin une action japonaise (Nintendo) montait autant qu'à Wall Street (où elles sont toutes achetées, comme Hillary, par les robots de la Fed insatiable), qu'enfin surtout soixante-cinq millions de zombies qui, comme dans un roman de Phillip K. Dick, faisaient la même chose (la chasse à une électro-bestiole donc) au même moment, c'était, c'est fantastique. Quel signe de modernité, tralala.

Nous sommes tombés bien bas mais, comme dit un allègre ami franco-algérien, qui n'a pourtant pas de permis camion, nous creusons encore ! Car enfin, souvenez-vous que du temps de nos aïeux, pour paraphraser Corneille, nous ne valions guère mieux. Nous avions déjà une technologie de choix pour nous ahurir, enfants de ce règne de la quantité et de la révolte des masses...

La seule et vraie révolution politique française, c'est 1870, et la seule grande révolution technologique, c'est l'électricité. C'est Villiers de l'Isle-Adam qui a le mieux perçu l'air du temps, qui est à la sottise entretenue, créée et chouchoutée par la benoite technologie. Le recueil des Contes cruels contient bien des perles qui calmeront les grincheux du web : nous étions alors crétinisés par l'avènement de la lumière et du reste. C'était pour reprendre le bon mot de Philippe Béchade l'inintelligence artificielle au berceau. Je ferai mon distinguo entre technique et technologie : la première sert et soutient le corps, la deuxième s'attaque à l'âme. La première vous transporte, la deuxième vous occupe.

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La force de Villiers, qui intéressera PhG, est de relier le phénomène de la technologie à celui du chauvinisme qui nous enverra à Verdun et ailleurs. Voyez ces mots qui en annoncent d'autres (de maux) :

« Autour de lui, sous les puissantes vibrations tombées du beffroi, − dehors, là−bas, au−delà du mur de ses yeux −, des piétinements de cavalerie, et, par éclats, des sonneries aux champs, des acclamations mêlées aux salves des Invalides, aux cris fiers des commandements, des bruissements d'acier, des tonnerres de tambours scandant des défilés interminables d'infanterie, toute une rumeur de gloire lui arrivait (1) ! »

Tout cela très lié donc au militaire festif et ludique, comme la guerre allemande du futur, qui enchante le Kaiser ou même le bien jeune Thomas Mann. Le mégaphone (revoyez le Dictateur de Chaplin pour comprendre) et la fée électricité annoncent les massacres qu'ils inspirent et encensent :

« Son ouïe suraiguë percevait jusqu'à des flottements d'étendards aux lourdes franges frôlant des cuirasses. Dans l'entendement du vieux captif de l'obscurité, mille éclairs de sensations, pressenties et indistinctes, s'évoquaient ! Une divination l'avertissait de ce qui enfiévrait les cœurs et les pensées dans la Ville (2). »

La guerre fraîche et joyeuse est d'abord une guerre électrique, une guerre de conditionnement donc. Macluhan a bien parlé de l'imprimerie pour la révolution puritaine en Angleterre (révolution si j'ose dire du peuple du Livre et de la livre...).

Après Villiers lance le grand débat auquel personne ne répond jamais : les membres du docte public moderne, les gens donc, sont-ils abrutis par la technologie ou sont-ils ahuris naturellement ? Céline était clair : pour lui le populo n'est pas victime, il est collabo, et il n'apprécie que le faux et le chiqué :

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« Que demande toute la foule moderne ? Elle demande à se mettre à genoux devant l'or et devant la merde !... Elle a le goût du faux, du bidon, de la farcie connerie, comme aucune foule n'eut jamais dans toutes les pires antiquités... Du coup, on la gave, elle en crève... Et plus nulle, plus insignifiante est l'idole choisie au départ, plus elle a de chances de triompher dans le cœur des foules... mieux la publicité s'accroche à sa nullité, pénètre, entraîne toute l'idolâtrie (3)... »

Autrement dit la technologie révèle la bêtise humaine, elle ne la fabrique pas ; elle la répand, elle ne la provoque pas. Medium is not message. Quelques milliers de Happy Few chaque jour pour Dedefensa.org, un milliard pour Lady Gaga et son Twitter (sans oublier le million de commentaires par chanson, - voyez YouTube et vous saurez de combien de zombis vous êtes entourés), qui aplatit pape, Trump, Clinton, tout « le flot de purin mondiale » qu'a dénoncé notre bon Francis Ponge.

Moins agressif, mais aussi misanthrope que Céline ou Léautaud, Villiers ajoute :

« Car le public raffole, remarquez ceci, de l'Extraordinaire ! Mais, comme il ne sait pas très bien en quoi consiste, en littérature (passez−moi toujours le mot), ce même Extraordinaire dont il raffole, il s'ensuit, à mes yeux, que l'appréciation d'un portier doit sembler préférable, en bon journalisme, à celle du Dante (4). »

Villiers écrit que dans la société du spectacle il ne faut pas faire semblant d'être bête (c'est trop difficile) : il faut l'être.

« Mais le pire, c'est que vous laissez pressentir dans l'on ne sait quoi de votre phrase que vous cherchez à dissimuler votre intelligence pour ne pas effaroucher le lecteur ! Que diable, les gens n'aiment pas qu'on les humilie (5) ! »

Et on a bien fait de détrôner ces rois qui avaient des goûts élitistes. Ils préféraient Phèdre et le roi Lear à American pie ou Taxi.

« Les rois, tout ennuyeux qu'ils soient, approuvent et honorent Shakespeare, Molière, Wagner, Hugo, etc. ; les républiques bannissent Eschyle, proscrivent le Dante, décapitent André Chénier. En république, voyez−vous, on a bien autre chose à faire que d'avoir du génie ! On a tant d'affaires sur les bras, vous comprenez (6). »

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Certes on a notre classe moyenne relookée en bobo qui adore se presser aux expos. Mais comme elle ne fait pas la différence entre Turner et Rothko, entre Memling et Dubuffet, elle accomplit le mot de mon ami Paucard sur la crétinisation par la culture (7).

Puis notre écrivain maudit (il mourut de faim ou presque, ce descendant de croisé, après avoir épousé sa bonne) énonce la loi d'airain du système ploutocratique, démocratique et technologique moderne (loi que dénonçaient aussi bien Poe ou Thoreau) : dépenser beaucoup et fabriquer beaucoup d'effets spéciaux pour vendre... rien du tout ou presque. La camelote...

« On voit d'ici ce mouvement, cette vie, cette animation extraordinaire que les intérêts financiers sont seuls capables de donner, aujourd'hui, à des villes sérieuses. Tout à coup, de puissants jets de magnésium ou de lumière électrique, grossis cent mille fois, partent du sommet de quelque colline fleurie, enchantement des jeunes ménages, − d'une colline analogue, par exemple, à notre cher Montmartre ; − ces jets lumineux, maintenus par d'immenses réflecteurs versicolores, envoient, brusquement, au fond du ciel, entre Sirius et Aldébaran, l'Oeil du taureau, sinon même au milieu des Eyades, l'image gracieuse de ce jeune adolescent qui tient une écharpe sur laquelle nous lisons tous les jours, avec un nouveau plaisir, ces belles paroles : On restitue l'or de toute emplette qui a cessé de ravir (8)! »

Eh oui, il faut faire les courses et surtout se faire rembourser si on n'est pas content. Notez que Zola écrit la même chose ou presque dans son Bonheur des dames. Sauf qu'il adore lui le système. La femme va au bruit, dit-il...

« Il professait que la femme est sans force contre la réclame, qu’elle finit fatalement par aller au bruit (9). »

Enfin, bien avant le culte hollywoodien (peu avant en fait, car enfin il a écrit sur Edison), Villiers décrit une tordante machine à gloire – car on veut tous être célèbre comme Andy Warhol, Woody Allen ou les ayatollahs.

« Le rendement de sa machine, c'est la GLOIRE ! Elle produit de la gloire comme un rosier des roses ! L'appareil de l'éminent physicien fabrique la Gloire. Elle en fournit. Elle en fait naître, d'une façon organique et inévitable. Elle vous en couvre ! N'en voulût−on pas avoir : l'on veut s'enfuir, et cela vous poursuit (10). »

Et si un public par trop assoupi ne répond pas assez vite, qu'on lui botte le derrière, comme aux émissions dites de divertissement ! Il faut qu'il applaudisse le célèbre.

auguste-villiers-de-lisle-adam-fb1b9c9b-f9f7-44f5-af75-bea59e6c370-resize-750.jpg« Ici, la Machine se complique insensiblement, et la conception devient de plus en plus profonde ; les tuyaux de gaz à lumière sont alternés d'autres tuyaux, ceux des gaz hilarants et dacryphores. Les balcons sont machinés, à l'intérieur : ils renferment d'invisibles poings en métal − destinés à réveiller, au besoin, le Public− et nantis de bouquets et de couronnes (11). »

Tout cela pour dire que finalement le Pokémon n'est pas si grave !

On laisse Villiers nous amuser une dernière fois, et hélas plus qu'un Alphonse Allais :

« Témoin le délicieux Appareil du professeur Schneitzoëffer (junior), de Nürnberg (Bayern), pour l'Analyse chimique du dernier soupir. Prix : un double thaler − (7 fr. 95 avec la boîte), − un don ! ... − Affranchir. Succursales à Paris, à Rome et dans toutes les capitales. − Le port en sus. − Eviter les contrefaçons. Grâce à cet Appareil, les enfants pourront, dorénavant, regretter leurs parents sans douleur ... C'est à se demander, en un mot, si l'Age d'or ne revient pas (12). »

Car l'âge d'or a la vie dure !

Nicolas Bonnal

Notes

1.) Villiers, Contes cruels, Ed. Garnier, conte Vox populi.

2.) Ibid.

3.) Céline, Bagatelles pour un massacre, p.33.

4.) Villiers, op.cit., Deux augures.

5.) Ibid.

6.) Ibid.

7.) Alain Paucard, la crétinisation par la culture, l'Age d'Homme.

8.) Villiers, op.cit., l'affichage céleste.

9.) Zola, Au bonheur des dames, chapitre IX.

10.) Villiers, op.cit., la machine à gloire.

11.) Ibid.

12.) Villiers, op.cit., L'appareil pour l'analyse chimique du dernier soupir.

lundi, 15 février 2021

La guerre "off limits" des Colonels Qiao Liang et Wang Xiangsui (1999) et le "rêve chinois" (2010) du Colonel Liu Mingfu

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La guerre "off limits" des Colonels Qiao Liang et Wang Xiangsui (1999) et le "rêve chinois" (2010) du Colonel Liu Mingfu

Irnerio Seminatore

 

Un dépassement du concept militaire de guerre?

Si dans la tradition occidentale la guerre comme "poursuite de la politique par d'autres moyens" (Clausewitz), associe à la finalité, conçue par la politique (Zweck), des actes de violence pour imposer à l'autre notre volonté, le concept décisif de la violence étatique et de l'action guerrière sont-ils toujours essentiels à la rationalité politique du conflit belliqueux dans la pensée militaire chinoise?

Avec le concept stratégique de "guerre sans limites" et de défense active, élaboré par les deux Colonels chinois Qiao et Wang en 1999, avons nous surmonté le concept militaire de guerre? Avons nous touché au "sens" même de la guerre, comme soumission violente de l'un par l'autre? Sommes nous passés d'une civilisation de la guerre violente et sanglante, à une ère dans laquelle l'importance de l'action non guerrière influence à tel point la finalité de la guerre comme lutte (kampf) que l'esprit, dressé contre les adversités parvient à remplacer la force par la "ruse" et à atteindre ainsi le but de guerre (Zweck)? A ce questionnement il faut répondre que, dans le manuel des Colonels Qiao-Wang nous sommes restés au niveau de la méta-stratégie et donc à l'utilisation d'armes et de modalités d'action qui distinguent en Occident, la défense passive de la défense active. Une posture stratégique n'est au niveau géopolitique qu'un mode asymétrique pour ne pas céder et ne pas se soumettre et, au niveau opérationnel et doctrinal, de mettre en œuvre un stratégie anti-accès.

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Le Général Qiao Liang.

Le livre des deux colonels de l'armée de l'air a été reçu par les analystes occidentaux comme un examen des failles de la force américaine de la part des spécialistes chinois et comme la recherche de ses talons d' Achille, à traiter par les biais de la "ruse". La "guerre hors limites" inclut, dans une conception unitaire, la guerre militaire et la guerre non-militaire et comprend tout ce qu’on a pu parfois désigner sous le terme d’opérations autres que la guerre. Dans une acception très extensive, la guerre économique, financière, terroriste, présentées avec une vision prémonitoire et anticipatrice. La guerre informatique et médiatique y fait figure de champs d'innovation ouvrant à de nouveaux théâtres d’opération, qui nécessitent d'un dépassement des objectifs de sécurité traditionnels. Dans cette "guerre omnidirectionnelle", la guerre ne sera même plus la guerre classique, car "ni l’ennemi, ni les armes, ni le champ de bataille ne seront ce qu’ils furent". Le jeu politique et militaire a changé. Dans cette situation aux incertitudes multiples, il va falloir définir une nouvelle règle du jeu (…), un produit hybride…" (Qiao-Wang), seule certitude, l’incertitude. Une recommandation toutefois pour tous! Savoir combiner le champ de bataille et le champ de non bataille, le guerrier et le non guerrier. Les préceptes de cette réflexion sont-ils encore valables aujourd’hui? (février 2021)

Du point de vue général, en aucun cas les conseils dispensés à l'époque n'ont conduit à une remise en cause de la notion de pouvoir/puissance, puisque la doctrine et la stratégie militaires de la Chine demeurent, depuis la parution de ce manuel, celles de ses principaux rivaux et visent la maîtrise de secteurs-clés des technologies avancées pour acquérir la supériorité dans une guerre locale et parvenir à une solution négociée, évitant que le risque assumé ne dégénère en conflit ouvert. Or le succès de la stratégie chinoise de contrôle des "secteurs clés" d’une campagne militaire repose sur un principe décisif: l’initiative. Cependant une succincte conclusion conduit à la considération que le "concept d'asymétrie" de la pensée et du programme de modernisation militaire chinois se situe sur le plan opérationnel et se concentre sur la capacité de saisir la supériorité dans le domaine de l'information et de l'exploitation du réseaux informatique et guère au niveau de la théorie politique ou militaire. En effet le centre de gravité des interrogations repose sur la question de fond pour la défense et la sécurité chinoise. Comment faire face à la superpuissance américaine La modernisation de l'Armée Populaire de Libération n'a pas débuté après les réformes économiques de Deng Tsiao Ping et elle n'a pas concerné la dissuasion nucléaire, qui structure étroitement la relation entre stratégie et pouvoir, mais sur les réponses à donner à la modernisation des armées, en vue d'un combat conventionnel et fut conçue comme un moyen de combler le retard et les lacunes accumulés à partir de la première guerre du Golfe (1991). Ce livre reflète les idées d'un des courants, le plus radical, qui s'est imposé dans le débat sur la modernisation des forces armées comme expression d'un pouvoir unique.

Pouvoir unique et plusieurs théâtres

Il prôna l'inutilité de songer à rattraper les États-Unis dans le domaine conventionnel et il est parvenu à la conclusion de concevoir une stratégie asymétrique et sans règles (ruse conceptuelle), pour s'opposer et réagir à la supériorité des moyens et des forces des États-Unis. La multiplication des foyers de conflit, des théâtres de confrontation et des alliances militaires dans un monde à plusieurs pôles de pouvoir, assure-t-elle encore la pertinence d'une telle analyse? Le concept de défense active, jugé insuffisant, n'a t-il pas infléchi le deux notions de Soft et de Hard Power et, par voie de conséquence, la rigidité ou la souplesse interne et extérieure du régime? Par ailleurs, dans une vision non militaire du rapport mondial des forces ne faut il pas prendre en considération, comme potentiel de mobilisation, les nouvelles routes de la soie, comme extension des moyens et d'emploi d'une autonomie stratégique globale et dépendante d'un pouvoir unique, utilisant la force et la ruse, la séduction et l'autorité? Et comment une philosophie et une  culture de l'esquive à la Sun-Tzu peut elle se traduire en posture et doctrine active, de pensée et d'action dans un contexte d'hypermodernité technologique? En revenant à l'analyse des deux Colonels chinois, la modernisation de l'ALP, envisagée dans l'hypothèse d'une confrontation avec les États-Unis, a exigé une observation attentive des avancées militaires et des talons d'Achille de la superpuissance américaine. Considérant que l'évolution de l'art de la guerre s'étend bien au delà du domaine de la pure technologie et de ses applications militaires, sur lesquelles tablent les américains, le domaine de la guerre est devenu le terrain d'une complexité brownienne, qui combine plusieurs enjeux et plusieurs objectifs, différenciant ainsi les buts de guerre. La frontière entre civil et militaire s'efface, de telle sorte que les composantes et les formes non militaires de l'affrontement, sont intégrées et annexées dans un effort beaucoup plus important, qui modifie non pas le "sens" ou la "logique (politique) de la guerre, mais sa "grammaire".

Liu Mingfu et le"Rêve Chinois" (Zhongguo meng)

imagesliumingfu.pngCe livre est par ailleurs l'illustration d'un courant nationaliste, qui n'exclut aucune hypothèse, y compris une confrontation avec les États-Unis. Cette hypothèse s'inscrit d'une part dans l'analyse des tendances stratégiques contemporaines et de l'autre dans le débat sur le destin national chinois, permettant d'accorder, au moins théoriquement, la "montée pacifique" du pays, avec la conception d'un "monde harmonieux"(ou d'un ordre politique juste et bienveillant) Cependant son point d'orgue repose sur l'idée de profiter d'une grande "opportunité stratégique", à l'ère post-américaine, dont témoigne le texte le "Rêve Chinois" du Colonel Liu Mingfu, prônant la consolidation de la puissance chinoise et le rattrapage de l'Occident. En effet le rétablissement du rôle central de la Chine dans les affaires internationales, régionales et mondiales, opère dans une période d'affaiblissement des États-Unis (années 2010). Dans ce début de millénaire, l'Amérique ne serait plus "un tigre un papier", comme à l'époque de Mao Zedong, mais "un vieux concombre peint en vert" (Song Xiao JUn), de telle sorte que la Chine ne peut plus se contenter d'une "montée économique" et a besoin "d'une montée militaire".

Ainsi elle doit se tenir prête à se battre militairement et psychologiquement, dans un affrontement  pour la "prééminence stratégique". C'est "le moment ou jamais", pour le Colonel Liu Mingfu, puisque le but de la Chine est de "devenir le numéro un dans le monde", la version moderne de sa gloire ancienne, une version exemplaire, car "les autres pays doivent apprendre de la Chine- dit Liu Mingfu dans une interview en 2017 au New York Times, mais la Chine a également besoin d'apprendre d'eux. D'une certaine manière, tous les pays sont les professeurs de la Chine!

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Le Colonel Liu Mingfu.

Depuis 1840, la Chine est la meilleure élève du monde. Nous avons analysé la Révolution française ; la dynastie Qing a mené de grandes réformes en suivant l'exemple du Royaume-Uni ; nous avons étudié le marxisme de l'Occident, le léninisme et le stalinisme de l'Union soviétique ; nous avons également regardé de très près l'économie de marché des États-Unis, du Royaume-Uni et de la France. C'est grâce à cette soif d'apprendre que, à terme, la Chine dépassera les États-Unis. Les États-Unis, eux, ne cherchent pas à s'inspirer des autres pays... et surtout pas de la Chine. Ma conviction c'est que les États-Unis manquent d'une grande stratégie et de grands stratèges. J'ai écrit sur ce sujet, de 2017, un livre intitulé "Le Crépuscule de l'hégémonie", qui a d'ailleurs été traduit en anglais. Le New York Times m'a interviewé à ce moment-là. Voici ce que j'ai dit au journaliste qui m'interrogeait." De façon générale, la revendication d'un statut de puissance mondiale de la part de la Chine, s'accompagne, depuis le livre "La Guerre hors limites" des Colonels Quiao et Wang, jusqu'au "Rêve Chinois" du Colonel Liu Mingfu, du sentiment historique d'un "but grandiose", celui d'une grande mission à poursuivre contre un ordre politique international injuste et amoral.

Bruxelles 15 février 2021

Source: http://www.ieri.be/fr/publications/wp/2021/f-vrier/la-gue...

dimanche, 14 février 2021

Pourquoi la Russie rend l’Occident fou

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Pourquoi la Russie rend l’Occident fou

 
 
par Pepe Escobar
Ex: http://www.zejournal.mobi

Le pivot de Moscou vers l’Asie pour construire la Grande Eurasie a un air d’inévitabilité historique qui met les États-Unis et l’UE à l’épreuve.

Les futurs historiens pourraient l’enregistrer comme le jour où le ministre russe des Affaires étrangères Sergueï Lavrov, habituellement imperturbable, a décidé qu’il en avait assez :

« Nous nous habituons au fait que l’Union Européenne tente d’imposer des restrictions unilatérales, des restrictions illégitimes et nous partons du principe, à ce stade, que l’Union Européenne est un partenaire peu fiable ».

Josep Borrell, le chef de la politique étrangère de l’Union européenne, en visite officielle à Moscou, a dû faire face aux conséquences.

Lavrov, toujours parfait gentleman, a ajouté : « J’espère que l’examen stratégique qui aura lieu bientôt se concentrera sur les intérêts clés de l’Union Européenne et que ces entretiens contribueront à rendre nos contacts plus constructifs ».

Il faisait référence au sommet des chefs d’État et de gouvernement de l’UE qui se tiendra le mois prochain au Conseil européen, où ils discuteront de la Russie. Lavrov ne se fait pas d’illusions : les « partenaires peu fiables » se comporteront en adultes.

Pourtant, on peut trouver quelque chose d’immensément intrigant dans les remarques préliminaires de Lavrov lors de sa rencontre avec Borrell : « Le principal problème auquel nous sommes tous confrontés est le manque de normalité dans les relations entre la Russie et l’Union Européenne – les deux plus grands acteurs de l’espace eurasiatique. C’est une situation malsaine, qui ne profite à personne ».

Les deux plus grands acteurs de l’espace eurasiatique (mes italiques). Que cela soit clair. Nous y reviendrons dans un instant.

Dans l’état actuel des choses, l’UE semble irrémédiablement accrochée à l’aggravation de la « situation malsaine ». La chef de la Commission européenne, Ursula von der Leyen, a fait échouer le programme de vaccination de Bruxelles. Elle a envoyé Borrell à Moscou pour demander aux entreprises européennes des droits de licence pour la production du vaccin Spoutnik V – qui sera bientôt approuvé par l’UE.

Et pourtant, les eurocrates préfèrent se plonger dans l’hystérie, en faisant la promotion des bouffonneries de l’agent de l’OTAN et fraudeur condamné Navalny – le Guaido russe.

Pendant ce temps, de l’autre côté de l’Atlantique, sous le couvert de la « dissuasion stratégique », le chef du STRATCOM américain, l’amiral Charles Richard, a laissé échapper avec désinvolture qu’il « existe une réelle possibilité qu’une crise régionale avec la Russie ou la Chine puisse rapidement dégénérer en un conflit impliquant des armes nucléaires, si elles percevaient qu’une perte conventionnelle menaçait le régime ou l’État ».

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Ainsi, la responsabilité de la prochaine – et dernière – guerre est déjà attribuée au comportement « déstabilisateur » de la Russie et de la Chine. On suppose qu’elles vont « perdre » – et ensuite, dans un accès de rage, passer au nucléaire. Le Pentagone ne sera qu’une victime ; après tout, affirme STRATCOM, nous ne sommes pas « enlisés dans la Guerre froide ».

Les planificateurs du STRATCOM devraient lire le crack de l’analyse militaire Andrei Martyanov, qui depuis des années est en première ligne pour expliquer en détail comment le nouveau paradigme hypersonique – et non les armes nucléaires – a changé la nature de la guerre.

Après une discussion technique détaillée, Martyanov montre comment « les États-Unis n’ont tout simplement pas de bonnes options actuellement. Aucune. La moins mauvaise option, cependant, est de parler aux Russes et non en termes de balivernes géopolitiques et de rêves humides selon lesquels les États-Unis peuvent, d’une manière ou d’une autre, convaincre la Russie « d’abandonner » la Chine – les États-Unis n’ont rien, zéro, à offrir à la Russie pour le faire. Mais au moins, les Russes et les Américains peuvent enfin régler pacifiquement cette supercherie « d’hégémonie » entre eux, puis convaincre la Chine de s’asseoir à la table des trois grands et de décider enfin comment gérer le monde. C’est la seule chance pour les États-Unis de rester pertinents dans le nouveau monde ».

L’empreinte de la Horde d’Or

Bien que les chances soient négligeables pour que l’Union européenne se ressaisisse sur la « situation malsaine » avec la Russie, rien n’indique que ce que Martyanov a décrit sera pris en compte par l’État profond américain.

La voie à suivre semble inéluctable : sanctions perpétuelles ; expansion perpétuelle de l’OTAN le long des frontières russes ; constitution d’un cercle d’États hostiles autour de la Russie ; ingérence perpétuelle des États-Unis dans les affaires intérieures russes – avec une armée de la cinquième colonne ; la guerre de l’information perpétuelle et à grande échelle.

Lavrov affirme de plus en plus clairement que Moscou n’attend plus rien. Les faits sur le terrain, cependant, continueront de s’accumuler.

Nord Stream 2 sera terminé – sanctions ou pas – et fournira le gaz naturel dont l’Allemagne et l’UE ont tant besoin. Le fraudeur Navalny, qui a été condamné – 1% de « popularité » réelle en Russie – restera en prison. Les citoyens de toute l’UE recevront Spoutnik V. Le partenariat stratégique entre la Russie et la Chine continuera de se renforcer.

Pour comprendre comment nous en sommes arrivés à ce gâchis russophobe malsain, une feuille de route essentielle est fournie par le Conservatisme russe, une nouvelle étude passionnante de philosophie politique réalisée par Glenn Diesen, professeur associé à l’Université de la Norvège du Sud-Est, chargé de cours à l’École supérieure d’Économie de Moscou, et l’un de mes éminents interlocuteurs à Moscou.

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Diesen commence en se concentrant sur l’essentiel : la géographie, la topographie et l’histoire. La Russie est une vaste puissance terrestre sans accès suffisant aux mers. La géographie, affirme-t-il, conditionne les fondements des « politiques conservatrices définies par l’autocratie, un concept ambigu et complexe de nationalisme, et le rôle durable de l’Église orthodoxe » – impliquant une résistance au « laïcisme radical ».

Il est toujours crucial de se rappeler que la Russie n’a pas de frontières naturelles défendables ; elle a été envahie ou occupée par les Suédois, les Polonais, les Lituaniens, la Horde d’Or mongole, les Tatars de Crimée et Napoléon. Sans parler de l’invasion nazie, qui a été extrêmement sanglante.

Qu’y a-t-il dans l’étymologie d’un mot ? Tout : « sécurité », en russe, c’est byezopasnost. Il se trouve que c’est une négation, car byez signifie « sans » et opasnost signifie « danger ».

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La composition historique complexe et unique de la Russie a toujours posé de sérieux problèmes. Oui, il y avait une étroite affinité avec l’Empire byzantin. Mais si la Russie « revendiquait le transfert de l’autorité impériale de Constantinople, elle serait forcée de la conquérir ». Et revendiquer le rôle, l’héritage et d’être le successeur de la Horde d’Or reléguerait la Russie au seul statut de puissance asiatique.

Sur la voie de la modernisation de la Russie, l’invasion mongole a non seulement provoqué un schisme géographique, mais a laissé son empreinte sur la politique : « L’autocratie est devenue une nécessité suite à l’héritage mongol et à l’établissement de la Russie comme un empire eurasiatique avec une vaste étendue géographique mal connectée ».

« Un Est-Ouest colossal »

La Russie, c’est la rencontre de l’Est et de l’Ouest. Diesen nous rappelle comment Nikolai Berdyaev, l’un des plus grands conservateurs du XXe siècle, l’avait déjà bien compris en 1947 : « L’incohérence et la complexité de l’âme russe peuvent être dues au fait qu’en Russie, deux courants de l’histoire du monde – l’Est et l’Ouest – se bousculent et s’influencent mutuellement (…) La Russie est une section complète du monde – un Est-Ouest colossal ».

Le Transsibérien, construit pour renforcer la cohésion interne de l’empire russe et pour projeter la puissance en Asie, a changé la donne : « Avec l’expansion des colonies agricoles russes à l’est, la Russie remplace de plus en plus les anciennes routes qui contrôlaient et reliaient auparavant l’Eurasie ».

Il est fascinant de voir comment le développement de l’économie russe a abouti à la théorie du « Heartland » de Mackinder – selon laquelle le contrôle du monde nécessitait le contrôle du supercontinent eurasiatique. Ce qui a terrifié Mackinder, c’est que les chemins de fer russes reliant l’Eurasie allaient saper toute la structure de pouvoir de la Grande-Bretagne en tant qu’empire maritime.

Diesen montre également comment l’Eurasianisme – apparu dans les années 1920 parmi les émigrés en réponse à 1917 – était en fait une évolution du conservatisme russe.

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L’Eurasianisme, pour un certain nombre de raisons, n’est jamais devenu un mouvement politique unifié. Le cœur de l’Eurasianisme est l’idée que la Russie n’était pas un simple État d’Europe de l’Est. Après l’invasion des Mongols au XIIIe siècle et la conquête des royaumes tatars au XVIe siècle, l’histoire et la géographie de la Russie ne pouvaient pas être uniquement européennes. L’avenir exigerait une approche plus équilibrée – et un engagement avec l’Asie.

Dostoïevski l’avait brillamment formulé avant tout le monde, en 1881 :

« Les Russes sont autant asiatiques qu’européens. L’erreur de notre politique au cours des deux derniers siècles a été de faire croire aux citoyens européens que nous sommes de vrais Européens. Nous avons trop bien servi l’Europe, nous avons pris une trop grande part à ses querelles intestines (…) Nous nous sommes inclinés comme des esclaves devant les Européens et n’avons fait que gagner leur haine et leur mépris. Il est temps de se détourner de l’Europe ingrate. Notre avenir est en Asie ».

Lev Gumilev était sans aucun doute la superstar d’une nouvelle génération d’Eurasianistes. Il affirmait que la Russie avait été fondée sur une coalition naturelle entre les Slaves, les Mongols et les Turcs. « The Ancient Rus and the Great Steppe », publié en 1989, a eu un impact immense en Russie après la chute de l’URSS – comme je l’ai appris de mes hôtes russes lorsque je suis arrivé à Moscou via le Transsibérien à l’hiver 1992.

Comme l’explique Diesen, Gumilev proposait une sorte de troisième voie, au-delà du nationalisme européen et de l’internationalisme utopique. Une Université Lev Gumilev a été créée au Kazakhstan. Poutine a qualifié Gumilev de « grand Eurasien de notre temps ».

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Diesen nous rappelle que même George Kennan, en 1994, a reconnu la lutte des conservateurs pour « ce pays tragiquement blessé et spirituellement diminué ». Poutine, en 2005, a été beaucoup plus clair. Il a souligné :

« L’effondrement de l’Union soviétique a été la plus grande catastrophe géopolitique du siècle. Et pour le peuple russe, ce fut un véritable drame (…) Les anciens idéaux ont été détruits. De nombreuses institutions ont été démantelées ou simplement réformées à la hâte. (…) Avec un contrôle illimité sur les flux d’information, les groupes d’oligarques ont servi exclusivement leurs propres intérêts commerciaux. La pauvreté de masse a commencé à être acceptée comme la norme. Tout cela a évolué dans un contexte de récession économique des plus sévères, de finances instables et de paralysie dans la sphère sociale ».

Appliquer la « démocratie souveraine »

Nous arrivons ainsi à la question cruciale de l’Europe.

Dans les années 1990, sous la houlette des atlantistes, la politique étrangère russe était axée sur la Grande Europe, un concept basé sur la Maison européenne commune de Gorbatchev.

Et pourtant, dans la pratique, l’Europe de l’après-Guerre froide a fini par se configurer comme l’expansion ininterrompue de l’OTAN et la naissance – et l’élargissement – de l’UE. Toutes sortes de contorsions libérales ont été déployées pour inclure toute l’Europe tout en excluant la Russie.

Diesen a le mérite de résumer l’ensemble du processus en une seule phrase : « La nouvelle Europe libérale représentait une continuité anglo-américaine en termes de règle des puissances maritimes, et l’objectif de Mackinder d’organiser la relation germano-russe selon un format à somme nulle pour empêcher l’alignement des intérêts ».

Pas étonnant que Poutine, par la suite, ait dû être érigé en épouvantail suprême, ou « en nouvel Hitler ». Poutine a catégoriquement rejeté le rôle pour la Russie de simple apprentie de la civilisation occidentale – et son corollaire, l’hégémonie (néo)libérale.

Il restait néanmoins très accommodant. En 2005, Poutine a souligné que « par-dessus tout, la Russie était, est et sera, bien sûr, une grande puissance européenne ». Ce qu’il voulait, c’était découpler le libéralisme de la politique de puissance – en rejetant les principes fondamentaux de l’hégémonie libérale.

411rXFGcgZL._SX310_BO1,204,203,200_.jpgPoutine disait qu’il n’y a pas de modèle démocratique unique. Cela a finalement été conceptualisé comme une « démocratie souveraine ». La démocratie ne peut pas exister sans souveraineté ; cela implique donc d’écarter la « supervision » de l’Occident pour la faire fonctionner.

Diesen fait remarquer que si l’URSS était un « Eurasianisme radical de gauche, certaines de ses caractéristiques eurasiatiques pourraient être transférées à un Eurasianisme conservateur ». Diesen note comment Sergey Karaganov, parfois appelé le « Kissinger russe », a montré « que l’Union soviétique était au centre de la décolonisation et qu’elle a été l’artisan de l’essor de l’Asie en privant l’Occident de la capacité d’imposer sa volonté au monde par la force militaire, ce que l’Occident a fait du XVIe siècle jusqu’aux années 1940 ».

Ce fait est largement reconnu dans de vastes régions du Sud global – de l’Amérique latine et de l’Afrique à l’Asie du Sud-Est.

La péninsule occidentale de l’Eurasie

Ainsi, après la fin de la Guerre froide et l’échec de la Grande Europe, le pivot de Moscou vers l’Asie pour construire la Grande Eurasie ne pouvait qu’avoir un air d’inévitabilité historique.

La logique est implacable. Les deux pôles géoéconomiques de l’Eurasie sont l’Europe et l’Asie de l’Est. Moscou veut les relier économiquement en un supercontinent : c’est là que la Grande Eurasie rejoint l’Initiative Ceinture et Route chinoise (BRI). Mais il y a aussi la dimension russe supplémentaire, comme le note Diesen : la « transition de la périphérie habituelle de ces centres de pouvoir vers le centre d’une nouvelle construction régionale ».

D’un point de vue conservateur, souligne Diesen, « l’économie politique de la Grande Eurasie permet à la Russie de surmonter son obsession historique pour l’Occident et d’établir une voie russe organique vers la modernisation ».

Cela implique le développement d’industries stratégiques, de corridors de connectivité, d’instruments financiers, de projets d’infrastructure pour relier la Russie européenne à la Sibérie et à la Russie du Pacifique. Tout cela sous un nouveau concept : une économie politique industrialisée et conservatrice.

Le partenariat stratégique Russie-Chine est actif dans ces trois secteurs géoéconomiques : industries stratégiques/plates-formes technologiques, corridors de connectivité et instruments financiers.

Cela propulse la discussion, une fois de plus, vers l’impératif catégorique suprême : la confrontation entre le Heartland et une puissance maritime.

Les trois grandes puissances eurasiatiques, historiquement, étaient les Scythes, les Huns et les Mongols. La raison principale de leur fragmentation et de leur décadence est qu’ils n’ont pas pu atteindre – et contrôler – les frontières maritimes de l’Eurasie.

La quatrième grande puissance eurasiatique était l’empire russe – et son successeur, l’URSS. L’URSS s’est effondrée parce que, encore une fois, elle n’a pas pu atteindre – et contrôler – les frontières maritimes de l’Eurasie.

Les États-Unis l’en ont empêchée en appliquant une combinaison de Mackinder, Mahan et Spykman. La stratégie américaine est même devenue connue sous le nom de mécanisme de confinement Spykman-Kennan – tous ces « déploiements avancés » dans la périphérie maritime de l’Eurasie, en Europe occidentale, en Asie de l’Est et au Moyen-Orient.

Nous savons tous à présent que la stratégie globale des États-Unis en mer – ainsi que la raison principale pour laquelle les États-Unis sont entrés dans la Première et la Seconde Guerre mondiale – était de prévenir l’émergence d’un hégémon eurasiatique par tous les moyens nécessaires.

Quant à l’hégémonie américaine, elle a été conceptualisée de façon grossière – avec l’arrogance impériale requise – par le Dr Zbig « Grand Échiquier » Brzezinski en 1997 : « Pour empêcher la collusion et maintenir la dépendance sécuritaire entre les vassaux, pour garder les affluents souples et protégés, et pour empêcher les barbares de se rassembler ». Le bon vieux « Diviser pour mieux régner », appliqué par le biais de la « domination du système ».

C’est ce système qui est en train de s’effondrer – au grand désespoir des suspects habituels. Diesen (photo) note comment, « dans le passé, pousser la Russie en Asie reléguait la Russie dans l’obscurité économique et éliminait son statut de puissance européenne ». Mais maintenant, avec le déplacement du centre de gravité géoéconomique vers la Chine et l’Asie de l’Est, c’est un tout nouveau jeu.

glenn-disen-e1581866530918.jpgLa diabolisation permanente de la Russie-Chine par les États-Unis, associée à la mentalité de « situation malsaine » des sbires de l’UE, ne fait que rapprocher la Russie de la Chine, au moment même où la domination mondiale de l’Occident, qui dure depuis deux siècles seulement, comme l’a prouvé Andre Gunder Frank, touche à sa fin.

Diesen, peut-être trop diplomatiquement, s’attend à ce que « les relations entre la Russie et l’Occident changent également à terme avec la montée de l’Eurasie. La stratégie hostile de l’Occident à l’égard de la Russie est conditionnée par l’idée que la Russie n’a nulle part où aller et qu’elle doit accepter tout ce que l’Occident lui offre en termes de « partenariat ». La montée de l’Est modifie fondamentalement la relation de Moscou avec l’Occident en permettant à la Russie de diversifier ses partenariats ».

Il se peut que nous approchions rapidement du moment où la Russie de la Grande Eurasie présentera à l’Allemagne une offre à prendre ou à laisser. Soit nous construisons ensemble le Heartland, soit nous le construisons avec la Chine – et vous ne serez qu’un spectateur de l’histoire. Bien sûr, il y a toujours la possibilité d’un axe inter-galaxies Berlin-Moscou-Pékin. Des choses plus surprenantes se sont produites.

En attendant, Diesen est convaincu que « les puissances terrestres eurasiatiques finiront par intégrer l’Europe et d’autres États à la périphérie intérieure de l’Eurasie. Les loyautés politiques se déplaceront progressivement à mesure que les intérêts économiques se tourneront vers l’Est et que l’Europe deviendra progressivement la péninsule occidentale de la Grande Eurasie ».

Voilà qui donne à réfléchir aux colporteurs péninsulaires de la « situation malsaine ».

Traduit par Réseau International

***

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«Qui veut la paix prépare la guerre»: la Russie annonce être prête en cas de rupture des relations avec l'UE

La Russie est prête à rompre ses relations diplomatiques avec l’Union européenne si cette dernière adopte des sanctions créant des risques pour les secteurs sensibles de l‘économie, a déclaré ce vendredi le chef de la diplomatie russe, Sergueï Lavrov, sur la chaîne YouTube Soloviev Live.

« Nous y sommes prêts. [Nous le ferons] si nous voyons, comme nous l’avons senti plus d’une fois, que des sanctions sont imposées dans certains secteurs qui créent des risques pour notre économie, y compris dans des sphères sensibles. Nous ne voulons pas nous isoler de la vie internationale mais il faut s’y préparer. Qui veut la paix prépare la guerre ».

De nouvelles sanctions en vue

Cette semaine, le chef de la diplomatie de l’Union européenne Josep Borrell a annoncé, après sa visite à Moscou, la possibilité de nouvelles sanctions. Il s’est dit préoccupé par les « choix géostratégiques des autorités russes ».

Condamnant les autorités pour avoir emprisonné en janvier l’opposant Alexeï Navalny et les qualifiant de « sans pitié », Josep Borrell a notamment indiqué dans son blog que sa visite avait conforté son opinion selon laquelle « l’Europe et la Russie s’éloignaient petit à petit l’une de l’autre ».

Les propos tenus à Moscou

Lors de sa visite dans la capitale russe du 4 au 6 février, Josep Borrell avait vanté le vaccin Spoutnik V, le qualifiant de « bonne nouvelle pour l’humanité ». Il avait en outre espéré que l’Agence européenne pour les médicaments l’enregistrerait.

Il avait également dit qu’il y avait des domaines dans lesquels la Russie et l’UE pouvaient et devaient coopérer, et que Bruxelles était favorable au dialogue avec Moscou, malgré les difficultés.

Anastassia Verbitskaïa - Sputnik

Cancel & Woke: Bras Armés du Fondamentalisme Féministe

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Cafe Noir N.10

Cancel & Woke: Bras Armés du Fondamentalisme Féministe

Café Noir – Un Autre Regard sur le Monde.
Émission du Vendredi 12 février 2021 avec Pierre Le Vigan & Gilbert Dawed.
 
Gina Carano (Cara Dune), The Mandalorian, Lucas Film, Walt Disney, Hollywood, Marlène Schiappa, Féminicide, etc.
 
Les livres de Pierre Le Vigan sur Amazon: https://tinyurl.com/27qypp3w
 
NB. Dans la vidéo c'est Camille Paglia féministe contre la Cancel culture
 

samedi, 13 février 2021

De Mao au monde multipolaire : l'évolution de la doctrine militaire chinoise

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De Mao au monde multipolaire: l'évolution de la doctrine militaire chinoise

Par Lorenzo Ghigo

Ex : https://geopol.pt

Suite à la crise du modèle international unipolaire et à son énorme croissance économique et technologique, la République populaire de Chine (RPC) est le grand prétendant à l'hégémonie internationale aujourd’hui exercée par les États-Unis. Cette volonté chinoise s’exprime également au niveau militaire. La présence croissante des États-Unis en Asie, la crise persistante à Hong Kong et les relations avec Taïwan ont conduit le gouvernement chinois à abandonner l'isolationnisme qui caractérisait sa politique étrangère au début des années 2000, au profit d'une politique plus affirmée.

La stratégie de la Chine est basée sur la défense et la poursuite des intérêts nationaux, en assurant la sécurité intérieure et extérieure, la souveraineté nationale et le développement économique. Sous le gouvernement de Xi Jinping, le progrès technologique est considéré comme une occasion importante de relancer la nation chinoise et son rôle sur la scène internationale. Au cœur du projet du dirigeant chinois se trouve la création d'un nouvel ordre sinocentrique fondé, au moins formellement, sur des relations d'égalité avec les autres États et visant à la constitution d'"une Asie harmonieuse".

518cB6uGp7L.jpgLa nouvelle doctrine militaire chinoise est à toutes fins utiles une redécouverte et une extension des théories de L'Art de la guerre de Sun Tzu. L'objectif tactique est de conditionner l'esprit et la volonté de l'ennemi dans un cadre stratégique en constante évolution en profitant de situations favorables grâce à divers stratagèmes et tromperies. La pensée militaire chinoise se caractérise par une approche indirecte, il existe chez les Chinois une vision holistique des objectifs qui, contrairement à l'Occident, ne se concentre pas sur une cible spécifique mais sur l'ensemble du système, et le recours à la force doit être utilisé dans le cadre d'une stratégie à long terme en intégrant les sphères militaire et civile, en utilisant la guerre hybride et la cyberguerre dans la conduite des opérations de guerre traditionnelles. L'Armée populaire de libération est en effet en train de développer des capacités opérationnelles et technologiques incroyables dans le cyberespace, non seulement en ce qui concerne l'espionnage et l'acquisition d'informations sensibles, mais aussi en ce qui concerne les attaques sur les infrastructures critiques pendant les conflits armés. La RPC considère le contrôle du cyberespace comme une prérogative essentielle pour affirmer son pouvoir national.

L'armée n'est plus appelée à préparer des guerres menées à grande échelle sur le territoire chinois, mais plutôt des guerres limitées, tant sur le plan de l'entité des objectifs politiques que sur celui de l'intensité de la violence, soit des guerres à mener dans des zones périphériques et circonscrites, principalement des conflits régionaux à forte informatisation.

L'approche maoïste de la guerre semble avoir été définitivement abandonnée, les forces armées sont dépolitisées et, bien que l'influence du parti communiste chinois soit encore forte, on ne peut plus parler d'une armée populaire, mais d'une armée d’élite spécialisée et professionnelle dans les opérations militaires. De plus, en consolidant ses frontières, la Chine a renoncé à une défense stratégique en profondeur, en utilisant une stratégie de projection de forces sur les mers, et d'influence politique dans d’autres pays asiatiques.

Le texte Unristricted Warfare publié par les colonels Qiao Liang et Wang Xiangsui a apporté une contribution notable à la nouvelle doctrine stratégique de la RPC. Cet ouvrage, qui dans l'édition américaine prend le sous-titre de China's Master Plan to Destroy America, prescrit les règles et les stratégies de conduite des conflits contemporains dans le but de défendre les intérêts nationaux en exploitant les nouvelles possibilités offertes par la mondialisation et l'évolution technologique. Le concept de guerre sans restriction prévoit une multiplication de nouveaux types d'armes et que chaque endroit peut devenir un champ de bataille. L'armée, pour faire face aux nouveaux conflits, doit mener des batailles adaptées à ses armes et adapter ses armes à la nouvelle bataille.

Dans le manuel Zhànlüè xué (Science de la stratégie), compilé par le département de recherche stratégique de l'Académie des sciences militaires, il est affirmé que "les champs de bataille sur terre, sur mer, dans les airs, dans l'espace extra-atmosphérique, dans l'espace électromagnétique ne font qu'un ; les combats et les opérations sur chaque champ de bataille sont des conditions pour les combats et les opérations sur les autres".

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Cette vision est basée sur des actions de guerre hybride, qui impliquent non seulement des capacités militaires mais aussi l'application d'un concept holistique de défense nationale par la coopération des secteurs civil et militaire. Les stratèges chinois développent également la doctrine Shashou Jian ("club de fer"), qui vise à dominer l'espace physique et cybernétique en désarmant l'ennemi et en l'empêchant d'être une menace pour l'intérêt national. Ce concept repose sur la nécessité de développer une capacité militaire capable de désarmer l'adversaire avant qu'il ne puisse frapper. L'utilisation d'armes hautement technologiques, de missiles, de cyberarmes, de bombes intelligentes, de drones, est finalisée pour annuler la puissance de feu ennemie.

Toujours à la lumière des conséquences dramatiques de la récente pandémie, la Chine doit se préparer à un scénario international incertain et indéterminé, caractérisé par de nouveaux types de conflits, de nouvelles menaces, de nouvelles technologies, de nouveaux champs de bataille et de nouvelles stratégies.

Publié à l'origine dans Osservatorio Globalizzazione

L'Iran, Biden sur les traces de Trump, pas d'Obama

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L'Iran, Biden sur les traces de Trump, pas d'Obama

par Alberto Negri

Sources : Il Manifesto et https://www.ariannaeditrice.it

Dans une interview télévisée, le nouveau président confirme les mesures restrictives contre Téhéran, voulues par Trump. Elles demeureront donc. Après tout, Biden a été un ardent exportateur de "démocratie" pour qui la République islamique reste le sacrifice à offrir aux Saoudiens et aux Israéliens.

Aux prises avec l'Iran, et aussi avec la Chine et la Russie (le dossier le plus épineux des affaires étrangères), Biden confirme l'ordre du jour de Trump et prend même un peu de recul par rapport à Obama. Sa recette est la suivante : d'abord, l'habituel double standard du pacte d'Abraham, hérité du tycoon malgré sa seconde mise en accusation. Nous verrons très bientôt le suite.

Dans l’échange qui a eu lieu avec le Guide suprême Khamenei, qui a demandé la levée, au moins partielle, des sanctions avant de négocier sur le nucléaire, le nouveau président américain n'a pas hésité : il a choisi de dire "non" et durement.

La médiation européenne avancée par l'omniprésent Macron semble hésitante et encore à venir. Hésitante parce que la France, qui dans ses investissements a écarté le Qatar, sponsor des Frères musulmans, au profit des Saoudiens, était la puissance européenne qui en 2015, précisément à cause de ses affaires en cours avec Riyad, a soulevé les plus grandes objections à l'accord américain avec l'Iran : il suffit de demander à Mogherini et à Zarif des informations sur les négociations qui se tinrent à l'époque.

La substance est toujours la même : les Européens vendent des armes à Israël, aux Emirats, aux Saoudiens, au Qatar, à l'Egypte et à la Turquie, et non à l'Iran des ayatollahs. Ils sont donc des membres non déclarés mais super actifs du Pacte d'Abraham et de l'"OTAN arabe" avec les États-Unis, Israël, les Émirats, Bahreïn, le Soudan et le Maroc.

Sans oublier qu'Israël vient de rejoindre le CentCom (Commandement central) avec les Arabes, c’est-à-dire le commandement militaire américain au Moyen-Orient. Avec son inclusion dans le CentCom et le déploiement d'Iron Dome sur des bases américaines, Israël devient une autorité déléguée que Washington utilisera pour gérer la région, même à distance.

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C'est pourquoi le sénateur Renzi, à qui l'on attribue des ambitions car il vise le poste de secrétaire général de l'OTAN, clame que Mohammed bin Salman est comme Laurent le Magnifique, le prince héritier d'une nouvelle renaissance dans les sables de la péninsule arabique, où, toutefois, les journalistes sont littéralement taillés en pièces et les opposants pourrissent en prison.

Nous aimerions savoir, un jour, ce que Draghi en pense. Mais nous le soupçonnons déjà : avec l'élection de Biden, la "fenêtre américaine" s'est ouverte en novembre et le bulldozer Renzi, à commencer par l'attentat contre la délégation de services aux mains de Conte, a ouvert la voie au "sauveur de l'euro", très estimé par l'establishment américain où il a été l'élève de Stanley Fisher, ancien député de la Fed et ancien directeur de la Banque centrale d'Israël.

Les Iraniens ne peuvent pas mordre à l'hameçon que constituent les propos doucereux de Biden qui se distancie de la guerre saoudienne et émiratie au Yémen et retire les Houthis de la liste noire des groupes terroristes. A Téhéran, ils se penchent sur le fond et lors de la prochaine élection présidentielle, si les choses restent en l'état, on peut imaginer que l'aile la plus dure de la République islamique pourrait prendre le dessus sur des modérés comme le président sortant Hassan Rohani.

L'année dernière, les Américains et les Israéliens ont éliminé un de leurs généraux, Qassem Soleimani, et un éminent scientifique comme Mohsen Fakrizadeh. Les États-Unis et l'État juif n'ont jamais cessé de bombarder les Pasdaran iraniens en Syrie et sont prêts à brouiller encore les eaux libanaises déjà passablement boueuses pour porter quelques coupssupplémentaires aux alliés du Hezbollah pro-iranien qu'ils voudraient expulser du Levant et du Moyen-Orient.

Sans compter que les États-Unis, dans la panoplie de leurs sanctions et par l'embargo pétrolier sur Téhéran, continuent à maintenir des dizaines de milliards de dollars gelés sur les comptes étrangers de l'Iran, au point d'empêcher la République islamique de négocier récemment un approvisionnement en vaccins anti-Covid avec la Corée du Sud.

Mais les Etats-Unis, insiste M. Biden, sont une démocratie et l'Iran n’en est pas une, donc ils peuvent punir qui ils veulent, comme ils veulent. Un argument un peu brutal, car la façade démocratique brillante des États-Unis a certainement été ternie par l'assaut contre le vénérable bâtiment du Congrès.

Mais Biden est un exportateur convaincu de la démocratie américaine, ce n'est pas pour rien qu'il a voté en 2003 en faveur de l'attaque contre l'Irak et qu'il s'est maintenant lancé dans d’agressives diatribes contre la Russie de Poutine sous prétexte de l'affaire Navalny.

Biden est un peu moins virulent contre la Chine car avec Xi Jinping, qu'il connaît bien, il est convaincu de s'entendre alors que les banques d'investissement de Wall Street, qui l'ont soutenu dans la campagne électorale, débarquent en force à Pékin. Bref, chacun a ses propres banquiers, qui ont très souvent travaillé pour le même maître.

Il est dommage que le visage démocratique de Biden, si impétueux avec l'Iran des ayatollahs, disparaisse lorsqu'il s'agit d'examiner les relations avec les satrapes du Golfe, les monarchies absolues et les ennemis des droits de l'homme, ou les dictateurs comme Al Sissi qui reçoit l'aide militaire américaine et peut faire ce qu'il veut sans la moindre objection de Washington.

Le gel temporaire des fournitures militaires américaines à Riyad vise en fait non pas tant à montrer que les États-Unis ont l'intention de s'entendre avec Téhéran qu'à convaincre les Saoudiens d'accélérer la reconnaissance d'Israël et, par suite logique, d'adhérer au Pacte d'Abraham. Puis la boucle sera bouclée avec la célébration du sanguinaire Laurent le Magnifique, Prince des sables.

 

vendredi, 12 février 2021

L'immaturité de la diplomatie européenne

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L'immaturité de la diplomatie européenne

Par Ricardo Teixeira da Costa

Ex : https://geopol.pt

L'Union européenne a une fois de plus fait preuve de son immaturité diplomatique, et mis en évidence ses maillons faibles, en déclarant hier à l'unisson trois diplomates russes personae non grata.

Après le premier voyage désastreux de Josep Borrell à Moscou, où il s'est révélé être un bien piètre diplomate face au colossal Lavrov, l'Allemagne, la Pologne et la Suède ont décidé de prendre une revanche digne d’un jardin d’enfant et ont retiré les lettres de créance de trois diplomates russes de leurs territoires.

Sans invoquer aucune raison juridique pour de telles décisions, démontrant que leur diplomatie est guidée par des instincts risibles et non par des critères rationnels, ils ont même précisé que l'action était coordonnée entre les trois et obéissait au principe de réciprocité, en représailles à une décision "similaire" de Moscou quelques jours plus tôt.

Moscou n'a pas retiré ses lettres de créance suite à un déchaînement d'émotions, mais parce que les diplomates européens en question étaient impliqués dans des activités illégales sur son territoire. Mais l'UE, qui ressemble de plus en plus aux États-Unis, ne connaît pas le principe de non-intervention. Elle suppose qu'elle peut agir sur le territoire russe comme elle ne l'admettrait jamais sur le sien.

Peut-on imaginer la réaction de Berlin si des diplomates russes devaient participer à des manifestations de rue non autorisées contre Mme Merkel ? Eh bien, renversons les événements, soyons honnêtes et regardons l'énorme hypocrisie que révèle ce feuilleton, dont le seul motif est un citoyen russe condamné par la justice russe pour fraude et corruption sur le territoire russe.

Qu'implique donc toute cette escalade perpétrée par des technocrates bruxellois et par la presse occidentale à l'heure actuelle ? Je suppose qu'il s'agit d'une escalade délibérée dans certains secteurs, et qu'elle sert d'entrée en matière pour le Conseil européen de mars, au cours duquel les dirigeants de l'UE jetteront les bases de leurs futures relations avec la Russie. Nous savons que la question énergétique, l'Ukraine et le Belarus sont des points chauds et qu'il y a des intérêts majeurs à boycotter un accord entre l'Europe occidentale et le géant eurasien.

Étant donné que, de l'autre côté de l'Atlantique, la nouvelle administration progressiste a déjà fait savoir qu'elle "n'hésitera pas à augmenter les coûts pour la Russie", il faut s'attendre à ce que l'UE soit incitée à se tourner vers Joe Biden, où les nostalgiques des années Obama et de son humanitarisme mondial ne manqueront pas, comme en témoignent le coup d'État en Ukraine et les bombardements en Afghanistan, en Irak, au Yémen, en Syrie, en Libye, en Somalie et au Pakistan, ainsi que les vagues de réfugiés qui en ont résulté. Est-ce là ce qu'ils veulent pour l'Europe dans le monde ?

En tant que Portugais, et avec notre influence limitée, il est souhaitable que nous fassions savoir clairement que nous insistons sur la voie diplomatique et que nous croyons en la bonne foi de nos collègues à l'autre bout du continent, notamment parce que l'Europe n'est pas seulement une réalité géographique, mais surtout une réalité civilisationnelle, et que la compréhension entre l'Est et l'Ouest est une nécessité et n'est qu'une question de temps.

Nord Stream II : La rivalité franco-allemande affaiblit l’Europe et profite aux Etats-Unis

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Nord Stream II : La rivalité franco-allemande affaiblit l’Europe et profite aux Etats-Unis

Il y a de l’eau dans le gaz franco-allemand.

Le gouvernement français s’est dit opposé à la poursuite du projet de gazoduc Nord Stream II. La France a pourtant déjà investi plus d’un milliards dans la projet au travers de la compagnie énergétique ENGIE . Pour quelles raisons le gouvernement Macron s’est t-il positionné ainsi ?

Il s’agit avant tout d’une conséquence de la rivalité géopolitique franco-allemande dans l’UE

Contrairement à ce qui est souvent mis en avant dans le projet européen, c’est autant

la rivalité qui est au coeur du projet et qui détermine la dynamique de l’UE, que l’objectif  de créer une alliance pour  compter vis à vis des puissances extérieures

Le « couple franco-allemand », représentation géopolitique, est une stratégie assumée qui reste une réalité incontournable tant que l’on reste dans le paradigme de l’intégration européenne en raison du rôle de charnière géographiques de la France et de l’Allemagne. C’est une stratégie de pouvoir  consciente qui a pour d’une part objectif du point  de vue des Français de  montrer une parité géopolitique franco-allemande, malgré le déséquilibre depuis l’unification allemande et du point de vue de  l’Allemagne, de masquer son rôle de puissance centrale, Enfin le « couple » se positionne au centre du pouvoir de l’UE.    

L’existence même du projet européen est la résultante de cet enjeu franco-allemand dont la finalité  est d’encadrer  cette rivalité, d’où les neutralisations réciproques entre les deux partenaires qui ne partagent pas les mêmes finalités géopolitiques européennes

L’affaire du gazoduc  Nord Stream II en est un bon exemple.

Cette posture s’explique d’abord par le changement de président aux Etats-Unis, et le gouvernement Macron cherche à plaire au président Biden, pour contrebalancer l’Allemagne devenue la puissance centrale de l’UE. C’est récurrent chez les atlantistes français de s’allier avec les Etats-Unis par méfiance de l’Allemagne  pour lui ravir le statut de meilleur allié.  C’est au détriment d’une alliance franco-allemande et ne fait que renforcer le tropisme occidental des Allemands qui  privilégient l’axe germano-américain sur le couple franco-allemand (c’est apparu clairement depuis le traité de Elysée en 1963).  

La position du gouvernement français n’est pas réellement une surprise, car la présidence Macron avant déjà exprimé  ses doutes vis à vis du projet Nord Stream en 2019, et exigé que  la Commission européenne, sceptique aussi vis à vis du projet, supervise le projet. Une manière pour la France de montrer quelle refuse le rôle dominant de l’Allemagne sur l’avenir énergétique de l’Europe. Pour la France, les questions énergétiques sont des instruments de la géopolitique, tandis que l’Allemagne met surtout en avant l’enjeu économique (la géopolitique allemande est implicite).  La fuite en avant vers un transfert de pouvoir vers les institutions européennes  pour contrôler l’Allemagne est la doctrine de base des européistes français, depuis Jean Monnet jusqu’à aujourd’hui. En ce qui concerne l’avenir énergétique de l’Europe la France mise encore sur le nucléaire tandis que l’Allemagne est sortie du nucléaire et a besoin du gaz russe. L’Allemagne consomme deux fois plus de gaz que la France, L’Allemagne est aussi sortie unilatéralement du nucléaire, d’où la rancœur de la France, qui n’est pas ravie à l’idée de voir en plus l’Allemagne devenir le hub énergétique de l’UE en matière d’importation er de réexportation de gaz. L’idéologie verte du gouvernement Macron, qui a fait de la lutte contre le changement climatique la priorité de sa politique étrangère, n’est pas étrangère à cette opposition  à l’augmentation des importations de gaz russes à l’avenir. 

L’opposition de la France au projet Nord Stream est aussi un acte de représailles contre l

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’Allemagne à propos des questions de défense. L’Allemagne d’Angela Merkel  a en réalité  torpillé le projet d’autonomie stratégique de l’Europe proposé par Emmanuel Macron, y compris le projet d’Europe de la défense qui a baissé en ambition notamment avec le nouveau  plan de relance européen. On se souvient de la saillie récente de la ministre de la défense Annegret Kramp-Karrenbauer.  En ce qui concerne le projet de coopération en matière de défense, la France souhaitait à l’origine une coalition restreinte des  Etats plus capables en matière de défense tandis que l’Allemagne a exigé d’y associer le plus grand nombre de membres de l’UE, diluant de facto le projet avec les Etats-membres atlantistes. La chancelière Angela  Merkel a aussi publiquement exprimé son désaccord l’idée d’une nouvelle architecture européenne avec la Russie, réduisant à néant la déjà très timide ouverte de la France vis à vis de la Russie. On se souvient enfin des pressions allemandes en 2014 pour l’abandon de la livraison des navires porte-hélicoptères Mistrals construits par la France pour la Russie à la suite de la crise en Ukraine. La France avait lamentablement capitulé au détriment de la relation franco-russe

Le gouvernement Allemand ne conçoit pas l’UE autrement que comme un sous-ensemble de l’espace euro-atlantique et donne priorité à l’OTAN. La France est héritière de la vision gaullienne d’une Europe, mais ne la défend plus que de manière déclamatoire, velléitaire et déformée (la « souveraineté européenne » remplace l’Europe des patries).       

Après les déboires du président Macron et ses projets irréalistes (l’UE est irréformable par la négociation, c’est un choc à la de Gaulle qui conviendrait, la chaise vide, une menace de sortie de l’UE, des coalitions restreintes en dehors de l’UE notamment bilatérales, comme un axe franco-russe, y compris face à l’opposition de toute l’UE et OTAN. Rappelons nous la fermeté du général Gaulle et son veto contre l’élargissement de la CEE au Royaume-Uni).

Pour résumer l’Allemagne a torpillé le projet d’autonomie stratégique de l’Europe en matière de défense proposé par la France qui souhaitait réduire la  dépendance de l’UE vis à vis des Etats-Unis, et en représailles, la France cherche à torpiller l’alliance énergétique germano-russe. La thématique  énergétique est portant l’un des seuls domaines ou l’Allemagne refuse l’hégémonie des Etats-Unis qui cherche à réduire la coopération entre l’UE et  la Russie pour maintenir sa suprématie  er exporter son gaz de schiste.

Au final, ces neutralisations réciproques renforcent la dépendance des Européens  vis à vis des Etats-Unis, non seulement sur les questions géostratégiques mais aussi  énergétiques. De plus, si l’Allemagne reste ferme sur ses positions pour le projet Nord Stream soit mené à son terme,   la posture du gouvernement Macron aura été non seulement inutile mais aussi contreproductive  pour atteindre une plus grande indépendance vis à vis des Etats-Unis mais aussi pour la relation franco-russe qui est pourtant nécessaire à l’équilibre géopolitique européen.  C’est la rivalité  franco-allemande qui est au cœur des crises multiples de l’UE. Cette épisode démontre encore une fois que le préalable à la transformation du projet européen en Europe géopolitique est le rééquilibrage géopolitique franco-allemand.

jeudi, 11 février 2021

Libération autochtone : sortir du triangle de Karpman

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Libération autochtone : sortir du triangle de Karpman

par Antonin Campana

Ex: http://www.autochtonisme.com

« Le triangle dramatique de Karpman consiste à réduire le discours politique à trois places : le bourreau, la victime et le sauveur » (Lucien Cerise, Neuro-Pirates, Réflexion sur l’ingénierie sociale, Kontre Kulture, 2016. Un livre fondamental que tout Réfractaire devrait avoir dans sa bibliothèque).

On sait qu’utiliser le vocabulaire de l’adversaire revient à s’inscrire dans son système de pensée. Dans un même ordre d’idée, consentir au triangle de Karpman orchestré par une entité ennemie revient à accepter une manipulation dont on ne peut sortir indemne.  Dans un triangle de Karpman, le sommet du triangle est généralement tenu par un acteur dont les motivations réelles sont masquées derrière la confiance ou l’indifférence qu’il suscite. Cet acteur furtif échappe aux radars des deux autres acteurs qui vont ainsi accepter le récit manipulatoire qu’il développe sournoisement et qui très souvent vise en fait à les opposer pour qu’ils se neutralisent mutuellement à son profit. 

Prenons un exemple.

Qui est responsable des attentats islamistes ? A première vue, évidemment… les islamistes. Pourtant, en creusant un peu, nous voyons bien que sans les politiques d’immigration massives que nous subissons depuis quarante ans, il n’y aurait pas eu d’islamistes au milieu de nous. Donc la responsabilité incombe en premier lieu au régime qui a initié les politiques d’immigration et à l’Etat qui les a mise en œuvre méthodiquement. Quand un chimiste provoque une explosion en mélangeant deux produits incompatibles on n’accuse pas l’un ou l’autre des produits. On accuse le chimiste, ici, donc, le régime et l’Etat. Or qu’observe-t-on ? 

Une narration triangulée qui pourrait être schématisée de la manière suivante :

Les attentats islamistes

Victime : la population

Persécuteur : les terroristes

Sauveur : le régime en place

=>  Le régime gagne

La narration dominante (celle du régime) oppose donc une population pacifique à des terroristes qui lui font la guerre. La population traumatisée se tourne spontanément vers l’Etat, qui se montre évidemment protecteur. Pourtant c’est bien lui, l’Etat, qui a placé la population en situation de grande insécurité. C’est bien lui, l’Etat, qui est le véritable persécuteur. Même si le terrorisme n’est pas directement le fait de l’Etat (encore que, parfois…), on peut parler d’un « terrorisme d’Etat » dans la mesure où le terrorisme procède directement de son action. L’Etat est donc responsable du terrorisme, et l’on devrait objectivement avoir une conflictualité à deux acteurs seulement, du type :

Etat / population autochtone

Or, la narration triangulée est précisément mise en œuvre pour que la population ne fasse pas une telle réflexion, n’accuse pas l’Etat et se jette au contraire dans ses bras salvateurs. Le régime peut tranquillement faire progresser son entreprise d’ingénierie sociale et, sans opposition notable, augmenter son contrôle… de la population (loi sur le renseignement, caméras de surveillance, contrôles bancaires, fichage…) ! Nous l’avons dit : « le régime gagne ». Et donc nous perdons !

Cette narration triangulée peut avoir plusieurs variantes, avec la même finalité manipulatoire.

 Par exemple :

Victime : les valeurs de la République (la laïcité)

Persécuteur : les islamistes

Sauveur : Le vivre-tous-ensemble

=> Le régime gagne

Toute orchestration d’un triangle de Karpman dénote donc une volonté de manipulation au profit de celui qui se place furtivement au sommet du triangle, soit comme victime, soit comme sauveur, et au détriment des deux autres côtés, placés dans une situation qui les met en opposition.

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La capacité à mettre en scène un triangle de Karpman dépend essentiellement de la puissance de communication de celui qui veut occuper le sommet du triangle. Cette capacité est aujourd’hui concentrée entre quelques mains hostiles qui en usent et en abusent au dépend des Autochtones. Prenons quelques autres exemples de narrations triangulées :

  • Les Gilets Jaunes

Victime : l’ordre public (syndrome « Arc de Triomphe »)

Persécuteur : les Gilets Jaunes

Sauveur : les Forces de l’ordre

=> Le régime gagne

Encore une fois, la mise en scène du triangle de Karpman est celle du régime. Les Gilets Jaunes n’ont pas la puissance de communication nécessaire pour imposer un triangle du type :

Victime : la France qui peine

Persécuteur : le régime en place

Sauveur : les Gilets Jaunes

=> Les Gilets Jaunes gagnent

  •  Le racisme 

Victime : les allochtones

Persécuteur : les Autochtones

Sauveur : les valeurs de la République

=> Le régime gagne

Ce triangle dramatique se fonde sur un système d’avilissement des Blancs, que nous avons nommé « antijaphétisme » (Japhet étant l’ancêtre des peuples européens selon la Bible, comme Sem est celui des Sémites. Pour une analyse de l’antijaphétisme institutionnel voyez par exemple ici). Ce triangle (artificiellement construit par l’accueil étatique de millions d’allochtones) oppose allochtones et Autochtones, tout en mettant sur le compte du racisme héréditaire des Blancs l’échec du modèle républicain de « vivre-tous-ensemble » (ce qui permet de ne pas remettre en question la validité de ce modèle). L’objectif de la triangulation antijaphite est donc de protéger les principes mondialistes de société ouverte, donc le régime politique qui les met en œuvre (la République). Les Autochtones ne sont pas en capacité d’imposer un triangle du type :

Victime : le peuple autochtone

Persécuteur : le régime politique en place

Sauveur : un Etat national autochtone

Ou bien :

Victime : le peuple autochtone

Persécuteur : l’Etat mondialiste immigrationniste

Sauveur : l’Etat autochtone remigrationniste

  • La Crise sanitaire

Victime : la population

Persécuteur : le virus

Sauveur : le gouvernement

=> Le régime gagne

Une autre variante, très en vogue :

Persécuteur : le complotisme

Victime : le gouvernement

Sauveur : le Conseil scientifique (la "Science")

=> Le régime gagne

  • Le Progressisme sociétal (LGBT, féminisme, antiracisme…)

Victime : les « minorités »

Persécuteur : l’hétéronormativité, le patriarcat, le privilège blanc…

Sauveur : l’Etat de droit égalitaire

=> Le régime gagne

=> Les minorités gagnent

Dans ce cas de figure deux triangles de Karpman se superposent et se soutiennent mutuellement. D’une part celui du régime, qui fait progresser son agenda mondialiste en opposant les minorités persécutées à la majorité persécutrice, tout en se posant comme seul et unique recours des premières contre la seconde. D’autre part, celui des minorités qui opposent la majorité à l’Etat de droit, faisant ainsi pression sur celui-ci pour qu’il fasse usage de son arsenal législatif répressif contre la majorité.   

Et une petite dernière, d’un point de vue gauchiste :

Persécuteur : les faits

Victime : le progressisme

Sauveur : la « post-vérité »

=> Les gauchistes gagnent (puis les faits s’imposent, et alors ils perdent)

On aura compris le schéma général. Se laisser enfermer dans un triangle de Karpman est « dramatique » car cela revient à accepter une logique qui mène à notre persécution. Si le seul recours que vous trouvez face à l’islamisation se trouve dans les « valeurs de la République », alors vous aurez encore plus d’islam car ce sont ces « valeurs » qui fondent la société ouverte. Si vous comptez sur le gouvernement pour vous protéger des virus, alors vous aurez toujours moins de libertés, sans avoir davantage de sécurité. Si vous pensez que la couleur de votre peau fait de vous un persécuteur et un « privilégié », alors l’égalité républicaine fera de vous un esclave (ce que vous êtes sans doute déjà).

Mais comment sortir d’un triangle de Karpman ?

Imaginons une femme dont l’époux prend des libertés avec son serment de fidélité (on pourrait bien sûr inverser la problématique !). Nous avons une relation triangulée assez simple : l’épouse trompée, le mari volage, la maîtresse accueillante. Chaque membre du trio pourra développer une narration triangulée qui minimise son propre rôle (il s’efface alors de la problématique) et oppose les deux autres acteurs.

Comment l’épouse trompée peut-elle sortir de cette relation triangulée ?

Elle aura essentiellement trois solutions :

1. Faire semblant d’ignorer la relation triangulée, au risque de la subir un jour brutalement (« j’ai toute confiance en mon mari »)

2. Révéler le triangle de Karpman (« c’est elle ou moi »)

3. Sortir du triangle de Karpman (« puisque c’est comme ça, je pars ») 

Les Autochtones ignorent depuis quarante ans les triangles dramatiques qui les enferment. On en voit les conséquences avec le « Grand Remplacement ». Refouler les réalités n’est donc pas un bon choix. 

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Ce petit blog et d’autres sites tentent en vain, depuis plusieurs années, de dénoncer les triangles de Karpman qui nous oppriment. Tous ces efforts n’ont servi à (presque) rien. Les raisons sont simples : nous n’avons pas la puissance de communication nécessaire pour révéler et briser les manipulations triangulées (ceux, en revanche, qui disposent de cette puissance peuvent aisément nous faire passer pour des « complotistes »). 

Reste donc la troisième solution. L’Etat a été infidèle au peuple autochtone, ce qui lui enlève sa légitimité et nous libère. Il lui préfère désormais sa maîtresse multiethnique et ne reviendra jamais en son foyer historique. Comme une épouse trompée, notre peuple doit maintenant envisager de « refaire sa vie ».  Il nous faut donc divorcer, nous séparer, faire sécession.

Pour le coup, il n’y a pas d’autre solution : soit nous restons dans le schéma triangulé pervers, qui fait de nous des monstres racistes et dont la logique aboutira inexorablement à notre extermination, soit nous nous libérons du triangle par la sécession !

Nous ne pouvons contester médiatiquement le système d’avilissement qui justifie notre oppression. Nous ne pouvons l’ignorer non plus. Il nous faut donc à la fois le dénoncer auprès de ceux qui ont des oreilles, un cerveau et quelques tripes ; et nous extraire des rivalités triangulées en poursuivant nos propres buts. Pour cela, il nous faudra passer outre les conflictualités artificielles et les narrations qu’on nous propose. 

Comment ? Nous en revenons toujours à notre idée de départ : notre but doit être de créer un Etat national autochtone qui boutera l’Etat infidèle hors de France et hors d’Europe. Nous avons longtemps espéré que des personnalités représentatives du courant réfractaire, unies dans une sorte de CNR, finiraient par proclamer la formation d’un Etat parallèle autochtone articulé sur une société autochtone organisée. Visiblement, cela ne se produira pas. D’autres solutions, moins pyramidales, sont probablement possibles. Nous devons désormais y réfléchir.  

Antonin Campana

Le concept d'Empire dans la pensée de Jiang Shigong

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Le concept d'Empire dans la pensée de Jiang Shigong

Par Daniele Perra

Ex : http://osservatorioglobalizzazione.it

Néo-maoïste, schmittien, nationaliste, socialiste conservateur, interprète de la pensée de Xi Jinping, le philosophe politique chinois Jiang Shigong a été défini de différentes manières mais personne ne le décrit vraiment de façon complète. Ce qui est évident, c'est le fait que sa pensée est totalement "illibérale". Dans cet article, nous allons tenter de l'analyser à partir d'un concept central dans son élaboration théorique : l'idée de l'empire comme acteur principal de l'histoire du monde.

L'histoire mondiale est l'histoire des affrontements et de la concurrence pour l'hégémonie entre les différents empires et l'histoire de l'évolution des formes impériales. L'État-nation est un produit relativement récent et moderne, et ses activités politico-économiques ont toujours été garanties par des formes d'ordre impérial.

Sur la base de cette hypothèse, Jiang Shigong, professeur à la faculté de droit de l'université de Pékin, propose de réexaminer l'histoire du monde dans une perspective impériale et en dépassant l'idéologie de l'État-nation. Une telle perspective est déjà en total contraste avec une forme de pensée particulièrement en vogue en "Occident" ces dernières années, qui a trouvé sa plus grande expression dans l'œuvre du théoricien israélien Yoram Hazony.

En fait, Hazony, dans son livre, The Virtues of Nationalism, avance l'idée que "le nationalisme est aussi vieux que l'Occident" (un concept, à vrai dire, assez obscur si l'on ne précise pas à quelle réalité "occidentale" on se réfère, étant donné que l'"Occident", tel que nous le connaissons aujourd'hui, est le produit d'une construction idéologique assez récente) et que le premier prototype de l'État-nation était représenté par le Royaume biblique d'Israël. Ce qui est surprenant dans la théorie de Hazony, c'est qu'elle (peut-être aussi pour éviter une confrontation directe avec la pensée schmittienne) se tient bien à l'écart de l'examen du processus concret de création de l'État dans l'Europe moderne. Les Etats-nations par excellence, dans la pensée de l'idéologue israélien, sont en fait les Etats-Unis et l'Etat d'Israël actuel [1]. Il va sans dire qu'une telle approche, derrière le désir de morcellement du monde, cache le principe impérialiste traditionnel du "diviser pour régner" et la volonté d’assurer la domination de l'État fort sur l'État faible. Au contraire, Shigong, à l'instar du géopolitologue français François Thual [2], se demande combien d'États parmi les plus de 200 existants sont réellement souverains et si l'ordre mondial issu de la Seconde Guerre mondiale et de la fin de la Guerre froide est réellement constitué d'une multitude d'entités politiques ayant les mêmes droits dans la sphère internationale ou non. La réponse à ces questions ne peut être séparée d'une analyse du concept d'empire tel que le conçoit le penseur chinois.

L'empire comme forme universelle

Shigong utilise le terme "empire" comme un concept sociologique et intellectuel descriptif. L'Empire, moteur de tous les grands changements et développements de l'histoire, est le système politique qui régit les "grands espaces"[3]. L'idée impériale est toujours universelle mais, historiquement, elle a toujours été limitée dans l'espace et le temps. Ce n'est qu'avec l'accélération de la mondialisation au cours des dernières décennies que s'est développée l'idée d'une civilisation mondiale fondée sur les valeurs de l'empire qui est sorti victorieux du choc entre les formes impériales aux aspirations mondiales : le modèle libéral-démocrate nord-américain et le modèle communiste soviétique.

À cet égard, il est bon de rappeler la particularité intrinsèque de la forme impériale nord-américaine imprégnée de messianisme par l'idéal du "destin manifeste". Cette idée a été amplement étudiée par Anders Stephanson qui, en observant les différences et les similitudes entre le modèle nord-américain et les formes impériales du passé, est arrivé à la conclusion que tous, plus ou moins indistinctement, ont conservé leur propre unicité et, par certains aspects, ont prétendu avoir été consacrés par un ordre supérieur. Cependant, ce n'est que dans le cas nord-américain que cette idée de "consécration" a été présentée comme entraînant le droit de transformer le monde à sa propre image et ressemblance dans le but d'atteindre ce qui est correctement défini comme la "fin de l'histoire"[4].

Cinq formes d'empire pour cinq civilisations

Aujourd'hui, Shigong identifie cinq civilisations impériales qui ont historiquement distingué la masse continentale eurasienne : la civilisation sino-confucéenne, la civilisation hindoue, la civilisation islamique, la civilisation chrétienne de l'Europe et la civilisation des steppes dont est issue l'entité impériale tsariste. Tous étaient indistinctement des civilisations impériales "terrestres", du moins jusqu'à l'âge d'or de la navigation transocéanique.

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La civilisation européenne chrétienne a toujours perçu les civilisations islamique et russe comme des menaces pour le simple fait que celles-ci, situées à mi-chemin entre l'Ouest et l'Est de l'espace eurasien, bloquaient la voie européenne vers l'Inde et l’Orient, voire l’Inde et l'Extrême-Orient. Les relations étroites entre la civilisation islamique et l'Orient, selon Shigong, ont permis à ce dernier de maintenir une supériorité militaire et intellectuelle substantielle sur l'Europe tout au long du Moyen Age. Cependant, l'équilibre des pouvoirs a changé lorsque les Européens, contraints de prendre la route des océans, ont "découvert" le Nouveau Monde et ont commencé à naviguer autour de l'Afrique.

Avec la colonisation du "Nouveau Monde" a également commencé la compétition au sein de l'Europe et le processus de formation de l'État-nation en tant qu'entité moderne en contraste ouvert avec les modèles impériaux "datés" (Russie, Empire ottoman et Chine). Mais la concurrence à l'intérieur de l'Europe est projetée une fois de plus comme une compétition entre différents modèles d'empire colonial. Les modèles ibériques "inclusifs" (chaque "Indien" était de toute façon considéré comme un sujet de la Couronne), toujours imprégnés des caractéristiques traditionnelles des empires terrestres, étaient contrastés par les modèles britanniques et néerlandais "exclusifs" et racistes (la population indigène des Amériques, également en vertu d'un modèle de colonisation idéologique centré sur le mythe puritain du nouvel exode biblique, était considérée comme digne d'être anéantie), centrés sur la puissance commerciale maritime.

Le modèle nord-américain, qui est sorti victorieux de la confrontation entre les nouvelles formes impériales au cours du XXe siècle, est l'héritier du modèle britannique, mais possède également ses propres caractéristiques. Il s'agit d'un système mondial global qui ne se maintient qu'en termes relatifs par l'occupation militaire (limitée uniquement à des zones spécifiques d'intérêt stratégique). L'empire mondial nord-américain est fondé sur la domination scientifique, technologique et commerciale (sur le rôle du dollar en tant que monnaie d'échange internationale qui permet d'imposer des sanctions unilatérales aux pays "dissidents"), sur des institutions internationales plus ou moins hétéro-dirigées par Washington et sur l'utilisation extensive et abusive du droit international lui-même. En fait, les relations entre la Chine (pays exportateur de biens et importateur de la dette nord-américaine) et les États-Unis ont continué jusqu'à ce que les Chinois commencent à menacer sérieusement la puissance technologique de Washington qui, dans le passé, avait déjà écrasé les tentatives japonaises et européennes dans le même domaine.

Selon M. Shigong, la Russie et la Chine évoluent toutes deux au sein du système impérial mondial des États-Unis et non en dehors de celui-ci. Leur défi part donc de l'intérieur de ce système, même s'il vise à le surmonter. Il va sans dire qu'une telle conception démasque ouvertement la tromperie de la dichotomie politique "occidentale" globalisme/souverainisme. Le choc politique entre "souverainistes" et "mondialistes" s'inscrit à nouveau dans un ordre mondial qui existe déjà et tous deux visent à rester dans cet ordre et non à en sortir (les souverainistes qui aspirent tout au plus à une souveraineté sous la protection de Washington), voire à le renforcer encore davantage (les mondialistes). Et, par conséquent, il n'est pas surprenant que la Chine, avec son objectif de construire un nouveau "nomos de la terre", soit alternativement vitupérée par les deux parties.

Maintenant, dans la perspective de Shigong, le système impérial nord-américain est en crise parce qu'il a essayé d'imposer une uniformité totale à l'échelle mondiale, uniformité basée sur son propre système idéologique, alors que la force de l'empire a toujours résidé dans la possibilité ouverte d'une hétérogénéité féconde au sein d'un grand espace. Un grand ordre politique, en effet, doit nécessairement agir comme un scénario pour le développement de modèles locaux qui, à leur tour, ne peuvent exister en dehors du même ordre. Un empire, s'il veut avoir des aspirations mondiales, doit être capable de fournir un mécanisme de coordination à l'échelle planétaire qui permette une concurrence productive et une coexistence pacifique entre les différents modes d'organisation politique et économique.

L'"Occident", au contraire, a essayé de surmonter l'antagonisme par une uniformité idéologico-politique (plus ou moins forcée selon les scénarios). Mais l'idéologie politique de l'"Ouest" dirigé par l'Amérique du Nord, intrinsèquement décadent dans son libéralisme politique et culturel, a conduit ce même "Ouest" à la crise actuelle et au début d'une implosion du centre impérial qui, à l'époque, avait déjà été prédite par un autre penseur chinois et aujourd'hui conseiller de Xi Jinping : Wang Huning, auteur du livre L'Amérique contre l'Amérique.

imageswang.jpgFace à l'effondrement rapide du système, la Chine, en tant qu'État dissident au sein de l'empire, si elle veut assumer un rôle de premier plan dans la construction de ce qui a été défini par Schmitt comme le "nouveau nomos de la terre", devra fournir une solution capable de faire coexister différentes instances ; une "harmonie sans uniformité" (ou "unité dans la multiplicité"). Le concept d'"harmonie sans uniformité" occupe une place centrale dans la pensée traditionnelle chinoise. Cette pensée, en fait, n'a jamais été "unipolaire". La représentation chinoise de l'Univers lui-même n'a jamais été moniste. Elle s'inspire traditionnellement de l'idée que l'ensemble est réparti en groupements différents et hiérarchisés différemment. Le ciel est un et la terre est multiple. Le Dieu du Ciel, selon la cosmogonie sinique, a été conçu d’emblée comme une seule personne, fragmentée en différentes hypostases. Et ces hypostases tiraient leurs attributs des particularités des régions terrestres auxquelles elles étaient affectées.

Les racines de la pensée chinoise

En ce sens, la pensée traditionnelle chinoise, incapable de saisir le mode de pensée occidental qui distingue "sujet" et "objet" (ou en termes hégéliens la dichotomie maître/esclave), est déjà en soi multipolaire et anti-impérialiste. Mais si la Chine veut vraiment travailler à un dépassement du modèle unipolaire nord-américain, sur la base de sa propre Tradition, selon Shigong, une "volonté constante et terrible" sera nécessaire.

Il est un fait que depuis quelque temps déjà, la Chine ne s'inspire plus d’idées d'origine "occidentale". La pensée chinoise du XXe siècle, comme l'a déclaré un autre intellectuel chinois "schmittien", Liu Xiaofeng, s'est développée en réaction à la pénétration coloniale et culturelle de l'Occident, et a trouvé dans le marxisme-léninisme un instrument pour la combattre [5]. Mais le maoïsme, en même temps, a réussi à transcender le préjugé matérialiste du marxisme-léninisme. Le marxisme, en Chine, a fusionné avec le principe traditionnel de la "connaissance du cœur". La culture chinoise a insufflé au communisme une capacité spirituelle entièrement nouvelle [6]. Et dans ce sens, la pensée de Xi Jinping, en tant qu'évolution du maoïsme et opérant un renouveau du socialisme en regardant en arrière, se caractérise comme une intégration de la pensée traditionnelle et de la théorie du communisme.

L'interprétation de Shigong du rapport de Xi Jinping au 19e Congrès du PCC est particulièrement intéressante [7]. En effet, ce rapport positionne l'ère Xi dans l'histoire de quatre manières différentes.

Tout d'abord, il convient de préciser que l'utilisation des divisions historiques pour exprimer la pensée politique est une méthode traditionnellement employée par la culture chinoise. Ainsi, l'histoire récente de la Chine a été divisée selon un schéma générationnel (ère Mao, ère Deng, etc.) axé sur le principe hiérarchique confucéen qui met l'accent sur la primauté des anciens sur les jeunes. Ainsi, selon Shigong, Xi Jinping, en partie pour contrer les tentatives internes de ceux qui cherchaient à mettre ces périodes en opposition les unes avec les autres, a d'abord accompagné le schéma générationnel d'un système de périodisation en différentes étapes : s'élever, s'enrichir, devenir fort.

Deuxièmement, Xi Jinping souligne le passage de l'approche nationaliste du "socialisme à caractéristiques chinoises" à la recherche d'un rôle global de la Chine pour surmonter le modèle nord-américain. À cet égard, l'erreur occidentale a toujours été de comparer (pour des raisons évidentes liées à des stratégies précises de maintien de l'hégémonie idéologique) la montée de la Chine à celle de l'Allemagne nazie (comme le fait encore l'économiste américain Clyde Prestowitz en 2021) ou à la menace soviétique (idée largement diffusée dans les milieux néoconservateurs). Au contraire, l'idée chinoise, purement multipolaire, ne s'oppose pas ouvertement au libéralisme occidental. L'"Occident", s'il le juge bon, est libre de maintenir son modèle et de le renforcer (si nécessaire). Toutefois, elle ne peut en aucun cas prétendre l'imposer à d'autres.

Xi Jinping ne parle jamais de "modèle chinois" mais de "solution chinoise" ou de "sagesse chinoise". Cette "solution chinoise" n'est qu'une possibilité à adopter : une option possible pour tous les pays qui veulent accélérer leur développement tout en essayant de conserver leur indépendance.

Troisièmement, la Chine ne suit pas dogmatiquement les idées développées et produites par l'expérience occidentale du socialisme. Le socialisme chinois a des caractéristiques proprement chinoises en raison de la tradition chinoise. On y trouve une intégration entre l'État de droit (le nouveau code civil inspiré du droit romain est fondamental à cet égard) et l'État des vertus d'origine clairement confucéenne. Et elle ne s'est pas effondrée, comme le modèle soviétique, car Mao a été le premier à identifier cette voie en critiquant le révisionnisme de Khrouchtchev. Dans ce système, le Parti et le Congrès représentent les deux corps du peuple au sein d'une structure étatique qui comprend la politique, le droit, la culture et l'idéologie. Le Parti, en même temps, incarne et représente la constitution non écrite de la Chine. Le pays de l'Extrême-Orient se transforme ainsi en une unité organique où rien d'individuel n'est aliéné du collectif. Il s'agit d'un ensemble organique et spirituel. Shigong écrit : "Le communisme n'est pas seulement la promesse d’une belle vie future mais il est aussi et surtout la condition spirituelle des membres du Parti dans la pratique de la vie politique [...] dans le contexte de la tradition culturelle chinoise, la compréhension de cet idéal suprême n'est plus celle de Marx dont la pensée dépendait de la tradition théorique occidentale mais est intimement liée à la Grande Union de Tianxia, de tradition culturelle chinoise".

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Le concept traditionnel de Tianxia ("tout ce qui est sous le ciel") conduit directement au dernier point et à la "grande union" comme "unité dans la multiplicité" des nouveaux nomos de la terre. Le modèle impérial chinois a toujours été très hétérogène et axé sur la recherche d'une coexistence pacifique dans le respect des différences de chacun (un modèle similaire aux modèles achéménide et romain). Sur la base de cette idée traditionnelle, la Chine devrait être en mesure de proposer un système mondial dans lequel les antagonismes naturels sont surmontés par la pratique et la recherche d'une coopération constructive.

À la lumière de ce qui a été dit jusqu'à présent, il n'est pas surprenant que Shigong accorde une attention particulière à la situation de Hong Kong. En fait, la ville représente le banc d'essai de la capacité des Chinois à expérimenter un ordre capable de coordonner plusieurs systèmes (ou même de les opposer) au sein d'un même système. Hong Kong, dans la perspective de Shingong, est le point d'appui avec lequel l'"Occident" peut donner vie aux nouveaux nomos de la terre mentionnés plus haut. S'attaquer au problème de Hong Kong signifie s'attaquer au renouvellement de la civilisation chinoise et sanctionner le succès potentiel ou non de la "solution chinoise". C'est pourquoi le théoricien politique chinois croit fermement que Pékin doit agir avec une extrême circonspection dans ce domaine[8].

Notes :

[1]    Y. Hazony, Le virtù del nazionalismo, Guerini e Associati, Milano 2019, pp. 22-33.

[2]    Voir F. Thual, Il mondo fatto a pezzi, Edizioni all’insegna del Veltro, Parma 2008.

[3]    Pour approfondir ultérieurement ce concept d’empire dans la pensée de Jiang Shigong voir The internal logic of super-sized political entities: empire and world order, www.aisixiang.com.

[4]    A. Stephanson, Destino manifesto. L’espansionismo americano e l’impero del bene, Feltrinelli, Milano 2004, p. 18.

[5]    Pour approfondir la pensée de Liu Xiaofeng voir Sino-Theology and the philosophy of history. A collection of essays by Liu Xiaofeng, Brill, Boston 2015.

[6]    Sur la fusion entre doctrine communiste et pensée traditionnelle chinoise, les Quaderni del Veltro ont publié en 1973 un bref texte anonyme intitulé Maoismo e Tradizione. Ce texte a été récemment republié dans le numéro 1/2021 de la revue “Eurasia. Rivista di studi geopolitici”.

[7]    Voir Jiang Shigong, Philosophy and history: interpreting the Xi Jinping era through Xi’s report to the nineteenth National Congress of CCP, www.aisixiang.com.

[8]    A ce propos, voir le texte de Jiang Shigong China’s Hong Kong: a political and cultural perspective (Chinese Academic Library 2017).

 

mercredi, 10 février 2021

Le monde change, la diplomatie s'adapte

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Le monde change, la diplomatie s'adapte

Une discussion avec les experts de l'IERI et d'IMEMO RAS a eu lieu en Belgique dans le cadre des "Points de contact"

Quelques jours avant la Journée des diplomates russes, le Centre russe de Bruxelles a organisé ce 4 février une discussion intitulée « Les défis de la diplomatie au XXIe siècle » dans le cadre du projet « Точка соприкосновения » (« Totchka soprikosnovenia », littéralement « point de contact »). Plusieurs spécialistes ont participé à cette discussion, dont Irnerio Seminatore, président de l’IERI (l’Institut européen des relations internationales de Bruxelles) et Sergueï Outkine, chef du groupe d’évaluation stratégique et directeur de recherches du Centre d’analyse situationnelle de l’IMEMO (l’Institut de l’économie mondiale et des relations internationales) E. M. Primakov de l’Académie des sciences de Russie.

Vera Bounina, directrice du Centre russe de Bruxelles, a ouvert la discussion. Dans son discours, elle a parlé des origines de la Journée des diplomates russes et a souligné les dates importantes de l’histoire de la diplomatie russe. La Journée des diplomates, qui est célébrée en Russie le 10 février depuis le décret présidentiel de 2002, « témoigne de la grande reconnaissance de la profession de diplomate ». Vera Bounina a également rappelé que l’école diplomatique russe est reconnue dans le monde entier et que beaucoup de brillants diplomates, d’actuels ministres de différents pays et de présidents de gouvernements étrangers sont diplômés de l’Institut d’Etat des relations internationales de Moscou auprès des Affaires étrangères de la Fédération de Russie et de l’Académie diplomatique du ministère des Affaires étrangères de la Fédération de Russie.

Les spécialistes ont discuté des systèmes internationaux et de la fonction de la diplomatie, de la numérisation des relations internationales et des nouvelles sphères que les diplomates doivent maîtriser. Ils ont également discuté du moment opportun pour ouvrir un compte sur TikTok et du développement de leurs connaissances sur l’agenda climatique et le développement durable, des solutions pour survivre à l’époque de la guerre du numérique, de la « diplomatie publique », de Greta Thunberg, de la visite de Josep Borrell en Russie, et de bien d’autres sujets.

Irnerio Seminatore a donné un aperçu du développement de la diplomatie du point de vue des relations internationales et des intérêts nationaux. En parlant de la relation entre la diplomatie et la politique, il a rappelé que « un bon diplomate aide à prendre des décisions politiques, qui seront approuvées par les hommes politiques ». 

Le rapport de Irnerio Seminatore se trouve ci-dessous.

Sergueï Outkine a présenté les nouveaux défis auxquels la diplomatie est confrontée : la numérisation de notre espace, le besoin de nouvelles compétences pour les diplomates, la « transparence » de l’environnement diplomatique et de l’accès aux données, le rôle changeant des chefs d’Etat, qui deviennent des ministres des Affaires étrangères à part entière au vu de leur agenda international actif, ainsi que le nombre grandissant de négociations internationales et de rencontres au sommet. Sergueï Outkine a souligné « le monde change, mais la diplomatie s’adapte à ces changements. » 

En étudiant l’avenir des relations entre la Russie et l’Europe, Irnerio Seminatore a conclu que l’Europe et tous les pays indépendants de l’Europe occidentale sont intéressés par la possibilité de réaliser l’autonomie stratégique et l’indépendance politique du continent, ce qui est possible grâce à l’implication de la Russie dans ce processus.

Vera Bounina a remercié tous les participants pour cette intéressante discussion et pour la participation du public. Elle a ensuite paraphrasé les mots du patron de la diplomatie russe, le Prince Alexandre Nevski, dont nous célébrons le 200èmeanniversaire cette année : « La diplomatie non pas dans la force, mais dans la vérité ». Elle souhaité à tous de réussir dans leurs projets et a de nouveau souhaité une bonne fête à toutes les personnes concernées par la Journée des diplomates.

Le thème de cette discussion s’est révélé très populaire et a attiré un grand nombre de participants. De nombreuses personnes de Belgique et d’autres pays européens ont participé à cette discussion. Une interprétation simultanée, nouveauté importante, a été mise en place lors de cette réunion. Les événements du Centre russe sont désormais plus accessibles.

Vous pouvez visionner l’enregistrement de la réunion sur le site du Centre russe. Nous avons hâte de vous retrouver lors d’autres événements du Centre russe.

Guerre économique sur le gaz russe

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Guerre économique sur le gaz russe

par Pierre-Charles Hirson

Ex: https://www.ege.fr

Rapports de Force

Les Etats-Unis sont en train de mener une guerre économique sans merci contre la Russie sur l’approvisionnent en gaz de l’Europe, avec pour cible le projet Northstream 2 et l’Europe comme champ de bataille. Les américains n’hésitent à piétiner la souveraineté européenne en appliquant l’extraterritorialité de leur droit sur le territoire européen, aux entreprises européennes qui participent à ce projet. C’est un gazoduc reliant la Russie (Vyborg) à l’Allemagne (Greifswald) en passant par la mer Baltique traversant les eaux finlandaises, suédoises et danoises. Projet avoisinant 10 milliard d’euros. Il est financé à 51% par Gazprom et le reste entre ENGIE (France), OMV (Autriche), Shell (anglo-néerlandais), Uniper (groupe E.ON - Allemagne) et Wintershall Dea (groupe BASF - Allemagne) allant de 9% à 15%.

L’enjeu ici porte sur l’influence et l’accroissement de puissance via la dépendance de la relation Client / Fournisseur, avec l’Europe dans le rôle du client. La Russie est un partenaire incontournable car elle fournit la plus grande partie du gaz européen, presque 40% en 2018. L’Europe, entre recherche de dépendance énergétique et sécurité d’approvisionnements va tantôt pousser les américains à exporter leur gaz GNL (Gaz Naturel Liquifié) par méthanier, tantôt financer et autoriser des projets de gazoduc entre la Russie et l’Europe : Yamal-Europe, Northstream 1 et 2, Turkistream. Cependant la politique énergétique européenne est largement tributaire des choix politiques nationaux et individualistes de ses Etats membres. C’est ainsi que l’Europe se trouve divisée entre pays favorables et opposants au projet. Les acteurs européens majeurs sont l’Allemagne, seule grande bénéficiaire de ce projet, la Pologne, l’Ukraine et les Pays Baltes comme principaux opposants. Profitant des dissensions européennes, les Etats-Unis vont trouver des relais intra-européens pour justifier leur ingérence. Ils réclament l’annulation le projet Northstream 2 dans le but de protéger l’Europe et d’empêcher la Russie d’utiliser le gaz comme moyen coercitif. Nous allons voir comment se mets en place le piège américain et comment l’étau va se resserrer progressivement sur les entreprises européennes participant au projet.

Un enjeu de puissance américain

Les raisons de l’acharnement américain pour stopper le projet germano-russe Northstream 2 peut être vu de deux angles. L’un économique et l’autre sous une politique d’influence.

Economique, car rappelons-le, c’est bien L’Europe qui sollicite les Etats-Unis pour diversifier son approvisionnement. En 2015, un « paquet » de la Commission Européen lance les bases d’une « Union de l’Energie »  qui trace un axe de diversification des fournisseurs de gaz via un recourt accru au GNL. La livraison de GNL par méthanier a l’avantage d’être flexible et présente une grande diversité de fournisseur, mais est plus cher que le gaz russe par gazoduc. Le rapport préconise également que la Commission fasse son possible pour « lever les obstacles aux importations de GNL en provenance des Etats-Unis ». Cela sera réalisé en 2015 et les premières exportations de GNL américain vers l’Europe se feront en 2016. Proche de l’autosuffisance grâce la révolution du gaz et pétrole de schiste amorcée en 2007, les Etats-Unis ont détrôné en 2009 la Russie en tant que premier producteur de gaz, et l’Arabie Saoudite depuis 2018 en tant que premier producteur de pétrole. La sécurité énergétique du pays est assurée et les sociétés privées américaines peuvent maintenant se lancer à l’assaut des marchés internationaux, avec la bénédiction de leur gouvernement, quitte à leur donner quelques coups de pouce.

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Politique d’influence, car une Europe dépendante et sous emprise Russe, notamment la première puissance européenne qu’est l’Allemagne et nation cadre de l’OTAN qui plus est, serait une perte d’influence inacceptable pour Washington. La réorientation de la politique énergétique américaine se fait au service de sa politique de puissance, car livrer du gaz à l’Europe permet de réduire le déficit de la balance commerciale américaine vis-à-vis de celle-ci, de desserrer l’étau russe sur le marché du gaz européen, d’augmenter son potentiel d’influence dans la région comme fournisseur d’énergie.

Stratégie et ciblage des lois américaines à porter extraterritoriales

L’enchainement des sanctions américaines suit une gradation étonnante. Les premières datent de 2014, sous la mandature du président Obama suite à la crise de Crimée et elles se poursuivent sous le président Donald Trump notamment en 2017 avec le « Countering America's Adversaries Through Sanctions Act » (CAATSA) (contrer les adversaires de l’Amérique par des sanctions) qui visent l’Iran, la Corée du Nord et la Russie.

Le début des sanctions contre la Russie :

Les différents trains de sanctions entre 2014 et 2018 sont de portés larges en visant des hommes politiques, des hommes d’affaires, des secteurs stratégiques comme l’énergie ou la défense, des restrictions financières et l’exportation de matériel technologique. L’objectif global est de pénaliser le développement de secteurs stratégiques russes. Cependant, le projet Northstream 2 et les sociétés européennes ne sont pas encore visées directement. Comme un pied de nez à l’administration américaine, le consortium signe en avril 2017 l’accord de financement. Washington est de plus en plus critique vis-à-vis du projet et se fait menaçant envers les européens. Lors du sommet de l’OTAN en juillet 2018, le président Trump déclare que « l’Allemagne est prisonnière de la Russie » et lui demande d’abandonner le projet. La pose des premiers tuyaux commence en septembre 2018 et par cet acte les Européens montrent qu’ils n’ont pas l’intention de laisser les Américains s’ingérer dans leurs affaires.

Les contraintes américaines entravent le développement des projets gaziers russes au sens large, mais le Northstream 2 avance et le développement d’usines de liquéfaction de gaz dans l’Arctique russe se font en partie avec des financements chinois. Les sanctions américaines manquent d’efficacité. Ils doivent revoir leur stratégie en visant des objectifs précis pour torpiller le Northsteam 2. Une course contre la montre s’enclenche avant que la pose des canalisations soit complète.

L’arme extraterritoriale niveau 1 : cible européenne – la société « Allsea »

La pièce maitresse du projet Northstream 2 est son bateau de pose de canalisation, le « Pioneering Spirit » de la société Suisse Allsea. Sans bateau d’installation, pas de pose de tuyaux au fond de l’eau et le projet s’arrête. Les Américains vont appliquer l’extraterritorialité de leur droit à une société européenne, dans les eaux européennes. C’est une première et cela va marcher. Le vote en décembre 2019 dans la loi du “Protecting Europe’s Energy Security Act of 2019 (PEESA) (Protéger la sécurité énergétique européenne) vise directement la société Allsea en « imposant des sanctions sur les bâtiments de constructions sur les pipelines d’exportation russe, et pour d’autres utilisations ». La société suisse s’exécute en suspendant son activité en décembre 2019 par crainte de sanctions américianes éventuelles.

L’arme extraterritoriale niveau 2 : cibler les sociétés russes de la pose de tuyaux

Les Etats-Unis anticipent le fait que la pose de canalisation reprendra tout ou tard avec des sociétés russes, hors de portées des lois américaines actuelles. C’est la raison pour laquelle le chef de la diplomatie américaine, Mike Pompéo annonce en Juillet 2020 un durcissement des sanctions en incluant le projet Northstream 2 dans le « Countering America's Adversaries Through Sanctions Act  (Caatsa) » de 2017. Cela permet de poursuivre les sociétés russes participant à la construction de ce projet. 

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Effectivement, loin de renoncer au projet, les Russes travaillent sur la modification et l’achat de bateau de pose via les sociétés russes KVT-RUS pour le « Fortuna » et Gazprom avec le « Akademik Tscherski » pour reprendre l’activité abandonnée par la société suisse. Le chantier reprendra le 11 décembre 2020, soit après un an d’arrêt, afin de finir la pose des 6% de tuyaux restant soit 120 km dans les eaux danoises et 30 km dans les eaux allemandes.

L’arme extraterritoriale niveau 3 : Cibler les activités de support à la pose de canalisation

C’est une première victoire pour les Américains et leurs alliés européens. Le projet a été retardé d’un an. Ce temps précieux gagné va permettre aux Américains de préparer la suite. En anticipant les activités de pose par des sociétés russes, il faut trouver un autre angle d’attaque pour les empêcher de travailler. La stratégie est de cibler les sociétés en assistances de ces bateaux. Depuis Juin 2020 des sénateurs américains se penchent sur le sujet. Un « Act » est préparé et sera intégré  au  « National Defense Autorization Act »  voté le 1er Janvier 2021. Celui-ci sanctionne toutes sociétés ou individus qui fourniraient des services et assurances à tout bateau de pose, des installations de soudage, des services de test et d’inspection pour les pipes du projet Northstream 2. En d’autres termes, c’est un encerclement juridique de sanction sur toutes activités et services liés aux bateaux russes. Le 13 Janvier 2021, le gouvernement américain avertit officiellement les entreprises européennes concernées en leur enjoignant de se retirer avant qu’il ne soit trop tard…. Le groupe norvégien de certification DNV GL se retire début Janvier 2021, et le groupe Zurich Insurance Group aurait lui aussi jeter l’éponge.

La stratégie américaine est pensée, redoutable, et les sanctions chirurgicales car ciblant des activités critiques à chaque fois. Les entreprises européennes abandonnent les unes après les autres de peur de sanctions, mais aussi peut-être par manque de soutien et de solutions judiciaires européennes les protégeant. Le champ des sanctions américaines s’adapte au fur et à mesure que les Russes et les Européens trouvent des solutions. Preuve pour ceux qui en doutaient de l’extraterritoriale du droit américain comme une arme de guerre économique, au service de la politique de puissance étatsunienne.

Le projet s’enlise mais continue toujours, l’Allemagne et la Russie poursuivant le projet malgré les contraintes. Mais le coup fatal pourrait bien venir d’ailleurs : de l’échiquier politique et sociétal Allemand. La nécessité du projet est de plus en plus critiquée ainsi que les violations répétées des droits de l’hommes du partenaire Russe.

Guerre informationnelle et encerclement cognitif en Allemagne

Depuis Obama en passant par Trump, les Etats-Unis n’ont fait qu’accroitre les sanctions sur la Russie en exploitant les affaires Skripal et Navalny. Il faut se remémorer qu’Alexeï Navalny, opposant au Kremlin, a été transporté de Russie en Allemagne pour y être soigné en août 2020. Cela s’est fait grâce à la médiation d’une petite ONG allemande « Cinema for peace» dont il serait intéressant d’étudier les ramifications. Cette affaire va être utilisée comme biais cognitif pour diviser la société et la classe politique allemande. Lier deux affaires visiblement sans rapport :  le projet Northstream 2 et l’affaire Navalny en y incluant son arrestation dès son retour en Russie en Janvier 2021 et la répression des manifestants qui s’ensuivit. Le biais pourrait être résumé ainsi : l’Allemagne doit-elle et peut-elle faire confiance à la Russie, qui empoissonne ses opposants et réprime avec violence ses manifestants, en lui confiant une large part de sa sécurité énergétique. L’idée fait son chemin dans la classe politique allemande, mais la chancelière refuse de lier les deux affaires pour le moment, mais n’exclut pas des sanctions européennes à l’égard de la Russie. Cependant la question a été posée, et la graine a germé : droit de l’homme contre projet politico-économique.

Un autre relais d’influence puissant en Allemagne est le lobby écologique. C’est un puissant relais d’opinion qui est mobilisé depuis le départ contre le projet, mais au nom de la protection de l’environnement. Si le projet est suffisamment retardé, le sujet sera au menu des prochaines l’élections fédérale allemande de septembre 2021, dont le parti des verts d’Annalena Baerbock, de plus en plus populaire, sera certainement un membre influent du nouveau gouvernement. Il y aura fort à parier que cela se fera au détriment du projet. Annuler le projet pour des raisons écologiques pourrait être une porte de sortie honorable pour l’Allemagne, sans remettre en cause l’autorité américaine et l’extraterritorialité de son droit.

Intérêts divergents et divisions européennes

La Russie souhaite avec ce projet pérenniser ses parts de marché en Europe face à la concurrence du GNL, et ainsi maintenir son modèle économique de rente gazière. Elle souhaite aussi se positionner sur le marché européen du gaz dont les importations sont prévues à la hausse pour faire face à la baisse de la production intra-européenne. La Russie développe également une offre GNL, avec ses champs gaziers arctiques, pour diversifier ses débouchés vers l’Asie, mais aussi pour offrir à l’Europe mode de livraison plus souple et moins contraignant qu’un tuyau physique. Cependant l’Europe, qui capte la majeure partie des exportations russes, reste son premier marché (90% en 2016), tandis que le développement vers l’Asie est très concurrentiel. C’est un projet politique pour le Kremlin, mais aussi économique car c’est une rentrée d’argent importante pour une économie russe toujours fragile.

L’Allemagne a fait le choix politique, quoi qu’en disent ses dirigeants, de réaliser ce projet malgré les réticences de ses partenaires, malgré les alternatives possibles, malgré l’intérêt économique discutable et malgré les deux récents gazoducs la reliant à la Russie : Yamal-Europe en 2006 et Northstream1 en 2012. Est-ce une conséquence de l’ « Ostpolitk » allemande, axe politique repris par le chancelier Gerald Schröder qui est à l’origine des deux projets Northstream ou une dérive d’une partie de la classe politique et industrielle allemande ? On peut se poser la question lorsqu’on retrouve à la tête de Nord Stream AG, le "reconverti" Gerald Schröder, à la tête du consortium Nord Stream AG 2 Matthias Warnig ancien de la Stasi et proche du Kremlin, et nos deux compères au comité exécutif de Rosneft. De même pour la finance et l’industrie allemande. On va retrouver la Deutsche Bank, le KfW (Établissement de crédit pour la reconstruction) et la Dresdner Bank. La Dresdner Bank avec Matthias Warnig pour conseiller Gazprom lors des grandes manœuvres de consolidation des entreprises énergétiques russes dans les années 2000. Il serait intéressant d’étudier les liens entre les sociétés allemandes E.ON, RWE, BASF et Gazprom avec le jeu des actions par filiales et les nominations à ces conseils d’administration et voir s’il existe des liens unissant ses acteurs en montrant les intérêts communs pour ces projets. Un jeu d’acteurs et d’intérêts troubles pas forcement au profit de l’Allemagne, ni de l’Europe.

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L’Allemagne a fait un choix individualiste qui pouvait paraitre stratégiquement intéressant sur le long terme. En se positionnant comme hub gazier régional avec un afflux de gaz russe pour accroitre sa puissance. Un hub, c’est une rente sur le transit gazier assurée et c’est avoir la main sur le robinet. De quoi avoir des arguments autour d’une table de négociation en face de ses partenaires européens. Cette stratégie se retourne contre elle par la force des événements, et explique certainement le manque de solidarité de ses autres partenaires.

L’Europe s’indigne, proteste et conteste, vigoureusement certes, de l’ingérence américaine. L’UE avait cru bien trouver un compromis tout technocrate pour calmer le courroux américain en Février 2019 en incluant le projet Northstream 2 dans « la réglementation européenne du gaz ». Cela oblige Gazprom et ses associées de dissocier les activités de fournisseur et producteur, et aussi de partager les installations avec d’autres fournisseurs / producteurs potentiels. C’est une perte de rentabilité énorme pour le consortium. Cependant le texte laisse la porte ouverte à des exemptions, et rien n’a été encore fait pour s’y conformer. Les Américains, ne se laissant pas noyer dans les méandres de la législation européenne, restent cohérents avec leur ligne de départ en exigeant l’arrêt pur et simple du projet. La Pologne aussi utilise son droit comme une arme économique pour infliger une amende de 6,5 milliards d’euro à Gazprom et sanctionne les cinq autres partenaires. De son côté Paris a appelé Berlin, début février à stopper le projet et ce malgré l’implication d’Engie.

Le GNL russe et sa montée en puissance dans l’arctique dans le collimateur américain

La Russie développe ses champs gaziers arctiques de Yamal et Gydan ainsi que des technologies liées au GNL. Les acteurs majeurs de ce développement sont la société privée russe Novatek, et des sociétés européennes (Total, Technip, Saipem, autres), chinoises (CNPC, Silk Road Fund, CNOOC) et japonaises. La Russie ambitionne de devenir un acteur majeur dans le GNL au vu de ses ressources, mais aussi de développer un savoir-faire de ces technologies. Cela lui permettrait de diminuer les risques de sanctions occidentales sur l’importation de technologie, car les sanctions américaines incluent déjà l’entreprise Novatek, ainsi que l’exportation de technologie et service pour des activités offshore dans l’Arctique.

Le réchauffement climatique rend possible l’exploitation de ces ressources et la navigation via la route du nord, malgré les conditions extrêmes. Cette route offre un avantage stratégique car elle est plus courte de 15 jours pour relier l’Atlantique au Pacifique sans passer par le canal de Suez. L’autre avantage stratégique est l’énorme avance russe avec ses 39 brise-glaces. Les Etats-Unis n’en possèdent qu’un en état de fonctionnement. Un volet de la stratégie américaine est de limiter le développement russe en Arctique en déployant des mesures coercitives sur la navigation via les organismes internationaux au nom de la protection de l’environnement. En novembre 2020, « L’International Maritime Organizations » (IMO) interdit la navigation des navires transportant du mazout lourd en Arctique, visant ainsi la flotte russe.

Les Etats-Unis sont devenus le troisième exportateur de GNL derrière l’Australie et le Qatar. La Russie est le quatrième et à de nombreux projets pour augmenter ses capacités, en exploitant les ressources importantes de l’Arctique qui repose sur la navigabilité de la route du nord. Les Etats-Unis essayent de contenir un compétiteur sur le marché du GNL, mais aussi la monté stratégique russe en Arctique, région qui est d’ores et déjà un enjeu géopolitique.

Implications et conséquences 

Au-delà du bien-fondé ou non du projet Northstream 2, ou de l’intérêt américain de fournir du GNL aux européens, l’enjeu s’est maintenant déplacé sur la souveraineté européenne. Les Etats-Unis ont franchi le Rubicon. C’est au cœur de l’Europe, sur le territoire européen, que les Etats-Unis veulent sanctionner les entreprises européennes grâce à l’extraterritorialité supposée de leur droit. Le changement de locataire à la Maison Blanche qui déclare que l’Amérique est de retour et qu’elle est prête à conduire le monde, ne rassure en rien. De plus, faut-il y voir un hasard du destin lorsque Joe Biden choisit Anthony Blinken comme nouveau secrétaire d’Etat, lui qui a écrit « Ally versus ally », dont le sujet est la crise de 1982 entre la France, l’Allemagne, l’URSS et les Etats-Unis au sujet … d’un gazoduc sibérien. Les Etats-Unis avaient alors infligé des mesures de rétorsions aux Européens et à leurs entreprises, mais ils avaient su réagir en prenant des contre-mesures. Les sanctions seront abandonnées et le projet se fera. Preuve que l’Europe est capable de faire plier le géant américain pour défendre ses intérêts. Les ingérences américaines dans la vie européenne ne sont pas nouvelles, y compris dans le domaine de l’énergie, mais en revanche l’utilisation de leur droit sur le territoire européen en est une. C’est une complète violation de la souveraineté européenne qu’il faut voir comme les prémices de l’affrontement Chine / Etats-Unis. Si elle est piétinée par notre allié dans une période encore relativement calme, alors quel traitement nous attendra dans les zones de turbulences à venir... De l’autre côté, la Chine ne sera certainement pas plus enclin à respecter ni la souveraineté et ni les valeurs européennes.

Pierre-Charles HIRSON
Auditeur de la 35ème promotion MSIE

mardi, 09 février 2021

Réflexions sur un perpétuel coup d’Etat

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Réflexions sur un perpétuel coup d’Etat

par Charles Gave
Ex: https://echelledejacob.blogspot.com

Toute ma vie, j’ai essayé de comprendre la réalité et les contraintes qu’elle imposait à mes actions.

Et quand je croyais avoir compris, je pouvais prendre des décisions qui s’imposaient « en connaissance de cause », ce qui me permettait d’atteindre -parfois- le but que j’ai m’étais fixé.

Je commençais par un état des lieux, un diagnostic, je me fixais un but et enfin, je réfléchissais à la façon la plus raisonnable d’aller de mon état des lieux à mon but.

Dans le langage courant, cela se traduisait par la formule « la réflexion précède l’action ».

Et dans mes analyses, je faisais souvent l’hypothèse que le gouvernement (ou l’Etat) choisirait toujours la solution qui favoriserait la majorité, ne serait-ce que pour être réélu

Eh bien, j’ai eu tort, au moins en ce qui concerne ce dernier point.

Depuis 2000, les gouvernements, un peu partout dans le monde développé, choisissent les solutions qui accroissent leur pouvoir et non pas le bien commun, et au diable la prospérité générale ou la Démocratie. La Mafia ne s’est jamais préoccupée du bien être des Siciliens, mais simplement de préserver son contrôle sur l’ile. Le but est de rester au pouvoir, et c’est tout.

Et donc, pour arriver à leur fin, une grande partie de ceux qui nous gouvernent en Europe et aux Etats-Unis ont développé un nouveau « Logos » qui leur permet de nous voler comme au coin du bois sans avoir à nous rendre de comptes.

Et ce nouveau Logos, le voici.

  • La réalité n’existe pas, ou plutôt, il n’en existe que des perceptions individuelles et chacune de ces perceptions est aussi valable qu’une autre.
  • Étudier cette réalité ne sert donc à rien puisque n’importe quelle perception en vaut une autre.
  • Et donc, une réalité généralement acceptée par tout le monde ne saurait imposer la moindre contrainte ni à mes actions, ni au chemin que je dois emprunter pour arriver à mes fins.
  • Ma liberté « subjective » l’emporte donc sur tout, puisque la réalité « objective » n’existe pas.
  • Et quiconque s’oppose à ma foucade du moment au nom de la réalité ou de la Science m’agresse de façon odieuse et j’ai donc le droit, que dis-je le devoir, de lui taper dessus.

Notre société est passée de la formule « Ma liberté s’arrête là où commence celle des autres » à « ma liberté ne peut pas être limitée par la réalité ».

Et le rôle des gouvernements n’est plus de prendre des décisions qui satisfassent la majorité, mais de protéger les minorités contre la tyrannie de cette majorité, car la Démocratie serait une forme de totalitarisme.

Vérifions comment ils utilisent ce nouveau Logos pour nous amener là où ils veulent.

Commençons par la notion même de « Vie ».

Gouverner, comme le disait de Gaulle, ce n’est pas choisir entre une bonne et une mauvaise solution, mais entre deux mauvaises. Nous venons de subir une épidémie qui a un certain nombre de caractéristiques et ou des décisions ont être prises.

Rappelons que les vieux (>de 80 ans) sont les plus touchés, que sur les jeunes elle n’a guère d’impact, que la mortalité pour ceux qui l’ont attrapé est d’environ 3/ 1000, ce qui est au niveau d’une mauvaise grippe annuelle et que des traitements médicamenteux semblent exister si le diagnostic est fait suffisamment tôt.

Une approche rationnelle de la crise, comme en Suède, aurait préconisé de demander aux vieux de rester chez eux et de minimiser les visites, de pousser au maximum les mécanismes de détection précoces, et d’expérimenter de façon scientifique quels étaient les traitements médicamenteux qui marchaient et ceux qui ne marchaient pas, ce que nous avions toujours fait jusque-là dans l’histoire.

Au lieu de cela, nous déclarons que chaque vie « n’a pas de prix «, ce qui est une imbécillité logique : qu’est qu’on fait s’il faut choisir entre deux vies ?  La solution retenue puisqu’il ne fallait pas choisir fût d’empêcher tout contact entre êtres humains, en fermant l’économie et les transports, ce qui va faire beaucoup plus de morts que l’épidémie, de tout miser sur un hypothétique vaccin et d’autoriser les Etats à supprimer toutes nos Libertés Fondamentales, ce qui transforme une épidémie somme toute assez classique en un désastre mondial sans précèdent.

Derrière cette politique, une décision de refuser de choisir entre deux mauvaises décisions en faisant passer ce choix raisonnable pour un dilemme moral inacceptable, refusant ainsi toute solution qui ne serait pas attentatoire au droit des gens.

Remarquons cependant que cette décision a eu pour effet principal d’augmenter massivement le pouvoir de l’Etat, c’est-à-dire celui de ceux qui ont refusée de choisir entre les deux mauvaises options et que cela n’est peut-être pas un hasard.

Passons à un deuxième exemple, celui du sexe de chaque citoyen, tout un chacun dans le nouveau Logos étant libre de choisir son sexe puisque le sexe biologique n’existerait pas.

Comme le disait Simone de Beauvoir « On ne nait pas femme, on le devient ».

Et donc, si un individu est « né » homme mais se « sent » femme, alors il est une femme… Hélas, il ne pourra jamais être enceint (?), n’étant pas vraiment équipé pour ça.

Loin de moi l’idée de minimiser la souffrance de ceux qui sont dans cette situation, mais je me retrouve ramené au problème précèdent : Ce n’est pas en mentant à ceux qui sont dans cette situation qu’on les aidera.  Au contraire, en entretenant leurs illusions, on risque de les pousser vers le suicide, ce qui est abominable.

Et quelle a été la première décision de monsieur Biden une fois élu ?

Autoriser à nouveau dans l’armée américaine la réintégration des conscrits « transgenre », ce qui avait été interdit par le Président précèdent.

Or, le rôle de l’armée est de défendre la nation et non pas de servir à des expérimentations sociales. Encore une fois, au nom de la protection d’une toute petite minorité, le pouvoir a choisi celle qui favorise la minorité au détriment de la majorité mettant ainsi en danger la survie même de la collectivité ainsi que le moral de l’institution militaire.

Et cette décision, qui sera sans doute suivie par une tentative d’abolir le deuxième amendement de la Constitution Américaine (celui qui permet aux citoyens de porter des armes), augmentera à terme le pouvoir des classes dirigeantes sur la population.

Avec ces exemples, nous commençons à voir émerger le même processus : entre deux décisions, « ils » ne choisiront pas en fonction des intérêts de la population mais en fonction de ce qui accroit LEUR pouvoir.

41O8g7bF7eL.jpgC’est le processus qu’a fort bien décrit Bertrand de Jouvenel dans son immense livre « Du Pouvoir » : chaque décision du corps étatique n’a qu’un but : faire croitre le Léviathan, c’est-à-dire le pouvoir politique au détriment du peuple.

Il ne s’agit donc pas d’un « complot » mais d’une dérive normale de gens qui veulent d’abord garder le pouvoir en utilisant tous les moyens mis a leur disposition qu’ils soient légaux ou …moins légaux.

Il s’agit donc d’un processus parfaitement normal, qui existe depuis le début des temps et dont nul ne peut nier l’existence, et à la manœuvre cette fois ci sont les « technocrates » alliés aux « ploutocrates, propriétaires des media ».

Cette tentative de domination par les élites a commencé aux USA à la fin du siècle précèdent, avec Bill Clinton qui inventa la fameuse triangulation, les très riches et les très pauvres s’alliant contre le ventre mou de l’électorat.

Analysons maintenant un processus similaire mais en Europe et cette fois ci et dans le domaine de la monnaie.

J’ai souvent expliqué dans ces lignes qu’elle était un bien commun a une population qui voulait vivre ensemble, c’est-à-dire a une Nation.

Chacun sait cependant que depuis bien longtemps existe en Europe une caste dont la volonté constante a été de briser ces communautés qui veulent vivre ensemble pour ne laisser que des individus face aux pouvoirs publics européens a qui toutes les souverainetés auraient été transférées et dont le pouvoir exécutif n’aurait pas besoin d’être élu.

Pour arriver à ce résultat, « ils » ont créé l’Euro, qui se révèle être un désastre sans précèdent pour les nations européennes. Mais ce désastre, une fois de plus les amène à avoir de plus en plus de pouvoir puisqu’ils ont acquis la possibilité d’acheter à leur profit ou au profit de ceux qui les soutiennent, avec de la monnaie qu’ils impriment librement tous les actifs crées par les citoyens européens depuis des siècles.

L’Euro a permis de fait le plus grand transfert de richesse qui ait jamais eu lieu dans l’histoire, de ceux qui travaillent vers ceux qui nous gouvernent, c’est-à-dire la plus grande spoliation de tous les temps, très supérieure à ce que les communistes firent en Russie en 1917.

Et ces spoliations risquent de s’accélérer avec le Covid ou l’on échange de la monnaie qui ne coute rien à produire contre de vrais « actifs ».

Vérifions avec les taux d’intérêts à zéro ou négatifs.

Imaginons que dans un pays il y ait trois populations

  1. La classe dirigeante, constituée des technocrates, ploutocrates et des media.
  2. Leurs clients, au sens Romain du terme, c’est-à-dire ceux qui vivent au crochet de l’Etat.
  3. Le reste de la population.

Pour pouvoir continuer à transférer de l’argent à leurs « clients » la classe dirigeante doit faire continuer à faire baisser le niveau de vie de la troisième population puisqu’il faut dégager de l’argent frais pour entretenir les clients.

Pour ce faire, il faut qu’elle explique qu’elle n’a pas le choix, que la situation est désespérée, et qu’il lui faut reformer les retraites, par exemple car elle sait fort bien qu’il ne faut pas qu’elle touche aux prébendes de la population numéro 2, qui pourrait soit se révolter, soit cesser de voter pour eux. Et donc la dernière chose que la population 1 veuille serait que l’on ouvre une enquête sur les malversations du type fraude à la sécurité sociale dénoncée par Charles Pratt. Mettre les taux d’intérêts à zéro c’est continuer à permettre le pillage de ceux qui travaillent, au profit des « clients », sans que la classe qui domine ait quoi que ce soit à payer. Les intérêts que devraient toucher les épargnants sont simplement versées aux « clients… » et tout est pour le mieux sans le meilleur des mondes.

En termes Marxistes, il existe donc une collusion objective entre première et deuxième « classes » pour continuer à piller la troisième, et le nouveau « Logos » permet de justifier « moralement » cette complicité au nom de la lutte au profit des minorités.

Et bien entendu, tout sera fait pour empêcher que la troisième classe s’organise politiquement, ce que Mitterrand réussit à faire en créant le danger Le Pen de toutes pièces et  ce que les media ont réussi à faire contre Trump.

Conclusion

Nos états sont tombés sous la coupe de forces délétères qui ne veulent en aucun cas le bien commun mais la seule préservation de leur pouvoir. Or la seule façon de virer cette classe parasitaire, c’est par le vote et donc la meilleure solution est pour les technocrates et ploutocrates de faire monter le plus possible le vote de nouveaux « dépendants » tels les nouveaux immigrés. Car le problème devient insurmontable si les chefs (la classe 1) et leurs clients (la classe 2) constituent ensemble plus de 50 % de ceux qui votent. C’est ce qui existe en Argentine ou au Venezuela depuis longtemps et qui rend un changement par le vote illusoire.

Et la longue agonie de la Nation peut alors commencer…

Il me semble qu’en ce qui concerne notre pays, qu’après 2022, tout retour démocratique au profit de la majorité historique deviendra…difficile, mais je suis peut-être trop pessimiste.

Charles Gave

Source

Les origines de la culpabilité blanche

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Les origines de la culpabilité blanche

par Tom Sunic, Ph.D.

Il existe plusieurs approches différentes pour étudier la pathologie de la culpabilité chez les Blancs, notamment les approches linguistiques, historiques et religieuses. Il faut toutefois commencer par examiner d'un œil critique cette construction verbale branlante, une construction qui est apparue pour la première fois en Amérique il y a plusieurs décennies et qui a été défendue dans les médias et les universités depuis lors.

À première vue, l'expression "White guilt" défie les règles lexicales de l'anglais standard.  Si l'on accepte cette expression comme un outil valable de communication sociale et politique, on pourrait tout aussi bien remplacer l'adjectif "white" par les adjectifs "brown", "yellow" ou "black". Jusqu'à présent, cependant, aucun universitaire, aucun journaliste ne s'est jamais aventuré à utiliser les expressions "Black Guilt" ou "Brown Guilt", pour la simple raison que, du point de vue sémantique, ces expressions colorées sonnent ridicules dans la langue anglaise standard. La même règle lexicale ne s'applique cependant pas à la culpabilité blanche, une expression qui fait désormais partie du langage courant. En outre, d'un point de vue éducatif, l'expression "White Guilt" est conçue un guide prescriptif pour rééduquer et reprogrammer les Blancs, ou, en deçà, pour faire en sorte que les Blancs expient leurs péchés réels ou présumés de racisme. Inversement, toutes les autres catégories raciales non blanches sont automatiquement exonérées de tout sentiment de culpabilité et donc de toute nécessité de pénitence politique.

La difficulté de traiter le concept de "culpabilité des Blancs" est encore aggravée par l'impossibilité de le faire traduire correctement dans les langues non anglaises en Europe. Au cours des quatre-vingts dernières années, les départements de sciences sociales des universités américaines, contrôlés pour la plupart par des universitaires crypto-communistes, ont été à l'avant-garde de l'élaboration de termes politiques bizarres et de la création de nouveaux concepts politiques qui, une fois traduits et transposés dans les médias et les programmes scolaires européens, semblent étranges. En outre, des constructions verbales américaines mal définies, telles que "discours de haine", "formation à la sensibilité ethnique", "diversité", "suprématie blanche", "action positive", sont désormais devenues un élément essentiel de l'éducation et de la législation américaines. Ces expressions, lorsqu'elles sont utilisées dans d'autres langues européennes, produisent souvent des équivalents verbaux et juridiques inintelligibles.

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Bien sûr, l'Europe a concocté ses propres expressions bizarres, surtout lorsqu'elles sont utilisées dans le cadre de procédures judiciaires contre des dissidents nationalistes devant des tribunaux locaux. Un exemple en est le nom composé abstrait et très envahissant de l'allemand actuel qui figure en bonne place dans le code pénal allemand, par exemple au paragraphe 130, qui porte le sous-titre diabolique "Volksverhetzung". Ce nom composé de la langue allemande sonne très lourd et est un cas flagrant de barbarie linguistique, qui a déjà donné naissance à des dizaines de traductions anglaises erronées (incitation populaire, sédition, etc.). C'est aussi un mot qui, lors des audiences du tribunal, ne désigne jamais explicitement l'appartenance ethnique de l'accusé. Ce mot, que les procureurs allemands ont lancé depuis le début des années 1990 pour poursuivre les personnes socialement indésirables, a jusqu'à présent envoyé des milliers d'Allemands en prison pour des durées variables.

La question épineuse pour de nombreux citoyens américains et européens, quelles que soient leurs convictions politiques, est qu'ils prennent souvent ces expressions comme un indice de haute érudition, sans jamais prendre la peine d'examiner leur étymologie. Ou pire encore, ils n'examinent jamais le cas des personnes qui ont été les premières à mettre ces mots en circulation. L'expression "culpabilité blanche", ainsi que les centaines de termes similaires mal définis qui ont vu le jour aux États-Unis au cours des cinquante dernières années, n'est qu'un avatar enjolivé du défunt langage soviétique, qui contenait également une myriade de noms surréalistes et de phrases alambiquées similaires, tels que "démocratisation", "terroristes fascistes nationaux", "lutte antifasciste", "lutte socialiste contre les tendances bourgeoises contre-révolutionnaires", "autogestion économique", "coexistence pacifique", "tolérance interethnique", etc. Le système libéral aux États-Unis et dans l'Union européenne, ainsi que ses apparatchiks juridiques et universitaires, est maintenant dans le processus tardif d'actualisation de ce vieux jargon bolchevique.

Le cadre historique de la culpabilité des Blancs

La revue américaine The Occidental Quarterly a déjà dûment documenté la trajectoire historique et les principaux architectes de cette nouvelle révision verbale dont l'objectif final est la dépossession des peuples blancs. Il faut d'abord prendre en considération la période qui commence en 1945 et qui se poursuit après, une période qui a non seulement apporté un nouvel ordre politique, mais qui a aussi marqué le début de l'utilisation d'un nouveau vocabulaire politique aseptisé et diabolisant. L'Allemagne vaincue a fait les frais de cette nouvelle notion de la politique, bien que les citoyens des États-Unis et du Royaume-Uni victorieux aient rapidement emboîté le pas avec leur propre rhétorique auto-flagelante. Des mots tels que "colonialisme", "ségrégation", "éloignement racial", "apartheid" et "fascisme" sont rapidement devenus les métaphores du mal absolu, le "fascisme" désignant désormais à peu près tout ce qui se trouve à droite du centre. Au cours des soixante-quinze dernières années, l'Occident s'est lancé dans un jeu de passion pénitentielle dont les effets peuvent être observés aujourd'hui dans la plupart des médias. Soit dit en passant, la destitution du président Donald Trump par le Système était en grande partie due au fait que la rhétorique de Trump sur les "fausses nouvelles" était incompatible avec le message d'amour universel des médias qui a inspiré le récit de l'après-guerre tel que prêché par le Système.

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Ce que l'on oublie souvent, cependant, c'est que la culpabilisation des Blancs dans le domaine politique s'est développée parallèlement à une criminalisation progressive de leur héritage culturel. Le rôle destructeur de l'Ecole de Francfort et de ses érudits, pour la plupart juifs et marxistes, dans l'inculcation du concept de culpabilité des Blancs a été amplement démontré dans de multiples études, bien que le lavage de cerveau des Blancs d'après-guerre ne puisse en aucun cas être attribué aux seuls érudits et militants juifs. J'ai essayé, il y a quelque temps, de résumer l'histoire des purges intellectuelles en Europe, qui ont commencé immédiatement après la fin de la seonde guerre mondiale et qui ont progressivement entraîné la croissance exponentielle du langage de la culpabilité, conduisant ensuite à l'abnégation suicidaire de millions d'étudiants et de politiciens blancs en Europe et aux États-Unis.  Comme je l'ai noté dans Homo Americanus,

  • Le traitement réservé par les Alliés aux enseignants et aux universitaires allemands était particulièrement dur. Comme l'Allemagne nationale-socialiste bénéficiait d'un soutien important parmi les enseignants et les professeurs d'université allemands, il fallait s'attendre à ce que les autorités américaines chargées de la rééducation commencent à filtrer les intellectuels, les écrivains, les journalistes et les cinéastes allemands. Après avoir détruit des dizaines de grandes bibliothèques en Allemagne, avec des millions de volumes partis en flammes, les puissances occupantes américaines ont eu recours à des mesures improvisées afin de donner un semblant de normalité à ce qui allait devenir plus tard "l'Allemagne démocratique". [i]
  • De même, la vie intellectuelle française de 1944-1950 a été épurée et des centaines d'intellectuels anticommunistes et nationalistes ont été soupçonnés de collaboration fasciste, dont beaucoup sont devenus des objets de honte publique.

Dominique Venner écrivait :

  • De toutes les catégories professionnelles, ce sont les journalistes et les écrivains qui ont été le plus durement touchés. Cela souligne le caractère idéologique du conflit et des purges qui en découlent. La proportion d'écrivains et de journalistes qui ont été abattus, emprisonnés et interdits d'exercer leur profession dépasse toutes les autres catégories professionnelles. Faut-il rappeler l'assassinat d'Albert Clément, de Philippe Henriot, de Robert Denoël, le suicide de Drieu La Rochelle, la mort de Paul Allard en prison avant les audiences et les exécutions de Georges Suarez, Robert Brasillach, Jean Luchaire [...] [ou] la condamnation à mort par contumace ou la commutation de peine de Lucien Rebatet, Pierre-Antoine Cousteau, etc. [ii]

Ironiquement, c'est grâce à la menace du communisme soviétique pendant la guerre froide que de nombreux penseurs et universitaires européens, auparavant interdits, ont réussi à réactiver leur carrière. Cela n'a pas duré longtemps. De 1950 à 1990, les agences de renseignement occidentales, avec les États-Unis en tête, ont dû s'appuyer fortement sur les compétences d'éminents universitaires et scientifiques anticommunistes et nationalistes blancs dans un effort pour contenir la menace soviétique telle qu’elle était perçue. La guerre froide terminée, avec la mort de l'Union soviétique en 1990, le Système, c'est-à-dire l'État profond, a commencé à retrouver son propre visage crypto-communiste répressif, répression frénétique qui a atteint son sommet ces dernières semaines, bien que couverte par le Covid, et dont la grande finale a été vue le 20 janvier 2021, lors du coup d'État du Système à Washington DC.

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Le cadre religieux de la culpabilité des Blancs

Il n'est que partiellement correct de rejeter la faute sur les médias libéraux et les professeurs de collèges crypto-communistes d’avoir généré la culture de la culpabilité chez les Blancs. Pour tenter d'obtenir une réponse convaincante quant à la pathologie de la culpabilité des Blancs, il faut soulever quelques questions rhétoriques sur les enseignements chrétiens. Pourquoi les peuples chrétiens blancs, contrairement aux autres peuples d'autres races et d'autres religions sur Terre, sont-ils plus enclins à un altruisme excessif envers les groupes marginaux non blancs ? Pourquoi les sentiments de culpabilité sont-ils pratiquement inexistants chez les peuples non blancs ? Une réponse à ces questions peut être trouvée dans les enseignements chrétiens qui ont constitué un pilier important de la civilisation occidentale au cours des siècles. Au cours des cent dernières années, les élites libérales et communistes modernes ont agressivement promu ce même sentiment de culpabilité des Blancs, bien que sous leurs propres modalités athées, laïques et "multiculturelles". On doit légitimement rejeter les palabres des libéraux ou des Antifa sur la culpabilité des Blancs, mais le fait est que le Vatican, la Conférence des évêques catholiques des États-Unis, la Conférence des évêques allemands, ainsi que toutes les autres confessions chrétiennes d'Europe et des États-Unis sont aujourd'hui les plus grands promoteurs de l'immigration de non-blancs en Europe et en Amérique, ainsi que les plus fervents défenseurs de la culpabilité des Blancs. La prédication œcuménique de l'Église faisant miroiter l’avènement d’une cité mondiale sous un seul dieu, comprenant toute l'humanité, est pleinement conforme au dogme chrétien primitif sur la chute de l'homme et son éventuelle rédemption.

Il faut souligner que les premiers apôtres, évangélistes et théologiens chrétiens qui ont imposé le dogme de la culpabilité de l'homme étaient tous de naissance et sans exception des non-Européens (St Augustin, Tertullien, St Paul, Cyprien, etc.) d'Afrique du Nord, de Syrie, d'Asie Mineure et de Judée. Compte tenu de cela, le fait de considérer l'Islam ou le Judaïsme comme les seuls porteurs d'une idéologie anti-blanche agressive non européenne, comme le font de nombreux nationalistes blancs, tout en omettant de tenir compte du lieu de la première émergence du Christianisme au Moyen-Orient, ne peut être un signe de cohérence morale et intellectuelle. Le poète romain Juvénal décrit de façon très imagée, dans ses satires, la Rome de la fin du premier siècle, une époque où la ville grouillait d’une multitude de ribauds syriens, de Chaldéens adorateurs d'étoiles, d'escrocs juifs et d'escrocs éthiopiens, tous suggérant aux crédules de tous genres une rapide chevauchée vers le salut éternel pour les uns et une damnation éternelle pour les autres. Des croyances messianiques et rédemptrices similaires sur l'avenir radieux, sous la direction d'importants agitateurs bolcheviques primitifs, pour la plupart d'origine juive, ont trouvé leur nouvelle place, deux millénaires plus tard, parmi des intellectuels naïfs et des masses avides d'égalité. Après la chute du communisme, la même volonté messianique de punir les coupables qui défient la scolastique libérale et multiculturelle moderne a trouvé son porte-parole le plus bruyant parmi les néoconservateurs et les inquisiteurs antifa américains.

Ce n'est pas le lieu pour ressasser les propres divagations émotionnelles de Friedrich Nietzsche à l'égard des chrétiens, ni pour citer des dizaines de penseurs et d'universitaires qui avaient précédemment décrit le lien psychologique entre les premiers fanatiques juifs et chrétiens de la Rome du premier siècle et les commissaires communistes du début du XXe siècle. Les temps ont changé, mais l'obsession de savoir comment extirper ou rééduquer ceux qui doutent des mythes du Système n'a pas changé d'un iota. Le profil psychologique des fanatiques antifa américains des temps modernes et des professeurs d'université qui les soutiennent ressemble beaucoup à celui des masses chrétiennes déracinées, largement métissées et efféminées de la fin de l'empire romain. Le Juif Saül de Tarse, dit (Saint) Paul, et plus tard le Nord-Africain Augustin - à en juger par leur propre contrition convulsive - suggèrent qu'ils souffraient tous deux de troubles bipolaires. L'Épître de Paul aux Romains (7:18) peut être la clé pour saisir la version moderne des névrosés qui haïssent les Blancs, présentée aujourd'hui par d'éminents présentateurs de nouvelles télévisées et professeurs de sciences humaines : "Et je sais que rien de bon ne vit en moi, c'est-à-dire dans ma nature pécheresse. Je veux faire ce qui est bien, mais je ne peux pas. Je veux faire ce qui est bien, mais je ne peux pas. Je ne veux pas faire ce qui est mal, mais je le fais quand même".

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Walter F. Otto, un helléniste renommé qui a écrit des pages sublimes sur les dieux de la Grèce antique [iii] et l'un des érudits les plus cités en ce domaine de la mythologie, décrit les différences entre la notion grecque antique et la notion chrétienne du sacré. Il note que les anciens Grecs païens mettaient l'accent sur les sentiments de honte, ignorant la signification des sentiments de culpabilité. Dans son livre encore non traduit, qui traite de la spiritualité chrétienne par rapport à la spiritualité grecque ancienne, il écrit:

  • Des malades mentaux étaient leurs chefs ; les faibles se bornaient à les suivre. L'impulsion de ce grand mouvement (chrétien) est venue de l'apôtre Paul, c'est-à-dire d'une de ces âmes tourmentées qui portent en elles une blessure incurable. Sa haine furieuse et sanguinaire de la nouvelle foi (chrétienne), ensuite son engagement tout aussi furieux pour la faire triompher, son expérience extatique qui l'a fait passer d'un seul coup du statut de bourreau des chrétiens à celui de leur champion le plus fanatique - tout cela montre à quel point le [christianisme] était fondamentalement terrifiant et ce qu'il fallait attendre de sa spiritualité[iv].

À un moment donné, les Blancs devront réaliser que guérir de leurs sentiments de culpabilité présuppose une réévaluation critique de leurs origines d'inspiration judéo-chrétienne. Si les Blancs, dont les descendants vivent aujourd’hui en Europe et aux États-Unis, étaient autrefois tous désireux d'adopter la notion sémitique de péché originel, il n'est pas étonnant que deux mille ans plus tard, ils soient également bien programmés pour soutenir les diverses victimes nécrophiles de la Seconde Guerre mondiale, ainsi que pour écouter les fausses nouvelles diffusées par leurs politiciens. À terme, les Blancs devront prendre une décision quant au lieu où ils choisiront l'emplacement de leur identité. À Athènes ou à Jérusalem.

NOTES :

[i] T. Sunic, Homo americanus ; Child of the postmodern Age (Londres : Arktos, 2018), p. 75-76.

[ii] Ibid, p. 88. (Traduit et cité dans Dominique Venner, Histoire de la collaboration (Paris : Pygmallion, 2000), p. 515-516).

[iii] Walter F. Otto, The Homeric Gods (traduit par Moses Hadas) (Londres : Thames & Hudson, 1954).

[iv] Walter F. Otto, Der Geist der Antike und die christliche Welt (Bonn : Verlag F. Cohen, 1923), p. 44.

Alexei Navalny: une croisade sans foi et sans idées

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Alexei Navalny: une croisade sans foi et sans idées

Irnerio Seminatore

Navalny n'est ni Lénine ni Kravchenko ni Soljénitsyne. Il ne porte ni la promesse révolutionnaire du premier, ni la dénonciation de la tyrannie et la quête de liberté du deuxième, ni encore la voix du goulag et l'âme profonde de la vieille Russie du troisième. Il ne s'élève pas contre les vices éternels du pouvoir et de leurs occupants éphémères, mais contre la vanité d'un autocrate, Poutine. Il ne combat pour une autre idée du régime, mais contre un Prince, qu'il accuse d'être vindicatif et corrompu.

Faible argumentation d'un opposant, qui n'évoque l'idée du pouvoir et de ses luttes internes et extérieures, ni l'image du pays qu'il veut démolir pour le guider. Sans idées pas d'idéal! Pas de bataille contre le vice sans une complicité avec la corruption d'un système, dont l'opposition est partie. Pas de crise de légitimité du pouvoir établi, sans une volonté de déstabilisation du pouvoir émergent. Jusqu'ici l'autocrate du Kremlin a combattu avec succès le globalisme destructeur des souverainetés nationales et Navalny ne doit ignorer le proverbe ancien: "Les amis de mon ennemi sont mes ennemis". Ils défendent l’État de droit et les droits universels,ouvrant la voie, dans le monde, à la révolte de la tradition et du passé.

Dans sa vocation moderniste et dans son mode de communication, Navalny est le combattant énigmatique de l'élargissement de la démocratie, comme vision utopique et rationalisante de l'Histoire, indifférente, voire contraire à l'évolution des régimes politiques selon leur propre loi et selon leur propre individualité culturelle et historique.

Après une longue période d'utopie totalitaire, issue des idées rationalistes, le réveil du vieux pays, la Russie de l'absolutisme et de l'anarchie, s'est fait sur la base du retour de l'autorité, de la hiérarchie et de l'ordre, sous peine de disparition et d’effondrement définitifs. Navalny n'a pas à cœur son pays, ni sa liberté, mais le vice personnel du Prince. Ceci est il suffisant pour bâtir une opposition effective à Poutine?

L'Occident qui soutient le droit à la liberté d'un contestataire déterminé mais sans programme politique, est-il en droit de pratiquer une politique d'ingérence, aux termes du traité de Westphalie (1648), qui l'interdit? L'Occident ne fait il pas plutôt de la politique "Smart" ou sélective, définie par Joseph Nye et rendue publique par Hillary Clinton les 6-8 février 2009 à Berlin?

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Peut-on comparer le retour de Navalny de Londres au retour de Lénine de Suisse en 1917, pour accélérer la révolution et stopper la guerre des Empires centraux à l'Est?

On est effectivement en droit de se poser des questions sur le soutien politique et financier à Navalny et à son mouvement pour leur campagne de dénigrement et de déstabilisation, orientée au du Chef de l' État? N'y a-t-il pas de doute et d'équivoque dans la conception de la démocratie, invoquée comme référent universel et si mal représentée dans leurs modèles de référence?

Il est bien plus probable que nous soyons à la fin d'un cycle, qui bouleverse les catégorie et les paradigmes de la connaissance, dans lesquels on ne reconnaît plus la réalité et qui, partant de la Realpolitik, vise à créer désordre, chaos et instabilité permanente à l'Est, poussant vers un rapprochement de la Russie à la Chine, dans l'hypothèse d'une confrontation finale sino-américaine.

Du point de vue interne, le crédit accordé par Mme Merkel à la thèse de l'empoisonnement du "patient de Berlin", fait jouer à celle-ci le rôle de la pyromane, car il politise un cas douteux et ne facilite pas les relations euro-russes, ni celles internes entre le pouvoir et la société civile. Au contraire, le soutien occidental à des mouvements de contestation freine l'émergence d'un courant pro-européen crédible et conduit à deux résultats contre-productifs, le durcissement du "pouvoir russe" et l'aliénation de l'opposition du consensus populaire. Par ailleurs "la diabolisation de Poutine ne peut tenir lieu de politique: elle fournit simplement un alibi à l'absence de politique" comme l'écrivait déjà Kissinger dans Spiegel en 2015. Après la visite infructueuse du Haut Représentant de l'UE pour les affaires étrangères et la politique sécurité, Mr Josep Borrel, et sa demande, inopportune et refusée, de rencontrer un homme en jugement et "en détention", la Russie a procédé à l'expulsion de trois diplomates européens, ce qui entérine un camouflet pour la tentative d'ingérence dans l'espace politique d'un autre État et une nouvelle tension entre Moscou et l'Europe, décrédibilisée et affaiblie.

Qui aime la liberté dans sa conception inconditionnelle et individuelle, celle de l'Occident, peut il accepter la conception de la liberté dirigée ou spécifique à chaque groupe culturel comme en Russie? Pour Ivan Ylyine, inspirateur de Poutine, la liberté pour la Russie doit être entendue comme l'unité de toutes les composantes culturelles du pays, menacées d'ingérence de la part de nombreux pays euro-atlantiques, qui refusent les principes et l’identité traditionnelle, venant saper l'indépendance de l’État et la cohésion nationale. En effet selon Ylyine "la Russie n'est pas menacée par le trône, mais par la dissolution de la nation, à laquelle travaillent les partis révolutionnaires"..et, nous dirions, ceux qui combattent la "voie russe" et son projet eurasiatique.

Bruxelles, 7 février 2021

Laurent Ozon: Souveraineté : puissance, légitimité et liberté...

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Laurent Ozon: Souveraineté : puissance, légitimité et liberté...

Vous pouvez découvrir ci-dessous un exposé de Laurent Ozon diffusé sur son canal d'expression Odyssée, "Les topos de Laurent Ozon", et consacré à la question de la souveraineté.

Essayiste et analyste politique, tenant d'une écologie localiste et identitaire, premier promoteur de l'idée de remigration, Laurent Ozon est l'auteur de l'excellent essai intitulé France, années décisives (Bios, 2015).

lundi, 08 février 2021

La méfiance de Vladimir Poutine à l’égard des réseaux sociaux occidentaux

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La méfiance de Vladimir Poutine à l’égard des réseaux sociaux occidentaux

L’Etat doit protéger la liberté sur l’Internet

Le Président russe Poutine a abordé tout récemment un des thèmes les plus importants de e 21ème siècle : celui de la toute-puissance grandissante des médias sociaux. Dans un discours adressé aux gagnants d’un concours tenu dans l’ensemble du territoire russe, « L’enseignant de l’année », Poutine a souligné que le rôle de l’Etat était de défendre la liberté d’expression sur l’Internet, face aux prétentions de Facebook, WhatsApp, etc. Pour le chef du Kremlin, ces entreprises contrôlent toujours davantage, par le biais de la censure, la conscience des gens

Poutine a mis ses interlocuteurs en garde, en leur rappelant que les consortiums médiatiques décident seuls et arbitrairement en matière de censure des contenus, sans tenir compte des conséquences de leurs décisions. Les plateformes n’étant finalement, a-t-il ajouté, que des « entreprises ».

Il a poursuivi : « Et quel est le souci premier de toute entreprise ? Faire du profit. Cela leur est bien égal que tel ou tel contenu lèse les gens auxquels il s’adresse. Ces entreprises modernes de TI commencent à contrôler de plus en plus la conscience des hommes ».

Poutine, ensuite, a toutefois bien signalé qu’il y a certes de bonnes raisons de limiter l’accès à certains contenus mais, simultanément, il a aussi constaté que les dirigeants de la Russie se devaient de réfléchir à la question et de réagir. Il a précisé qu’aucune décision ne devait être prise qui conduirait à limiter les libertés des gens, surtout la liberté de voter selon sa conscience et la liberté d’expression.

Les paroles de Poutine n’ont pas été prononcée au hasard. Plus récemment encore, il avait abordé la thématique dans son discours du Forum Economique International de cette année 2021. On peut considérer que c’est là une réaction aux véritables orgies d’effacement et de bannissement que venaient de commettre les plateformes médiatiques et les réseaux sociaux américains, visant tout particulièrement le président sortant Donald Trump. Les consortiums justifiaient leurs actions inquisitoriales en prétendant se soucier d’une expansion probable de la violence aux Etats-Unis.

Bon nombre de voix russes avaient manifesté leur inquiétude face à ce précédent commis par ces grands consortiums. La porte-paroles du ministère russe des affaires étrangères, Maria Sakharova avait dit que de telles actions inquisitoriales équivalaient « à une explosion nucléaire dans le cyberspace ». Elle avait ajouté que cette démarche constituait une attaque contre les valeurs démocratiques dont se réclame l’Occident.

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Pavel Durov, le fondateur russe du réseau social VKontakt et du service de messagerie Telegram, avait fait part de son souci quant à l’avenir de la liberté d’expression. Le duopole Apple-Google constitue une menace pour la liberté d’expression car, selon Durov, « il pouvait causer des bannissements complets, peu importe quelles applications on utilise ». Durov faisait évidemment allusion à l’interdiction et au sabordage de « Parler », chassé de l’ « iOS-store » après que les partisans de Trump ont quitté les autres réseaux sociaux pour aller s’exprimer sur « Parler ».

Article paru sur : https://zuerst.de

Poutine, le philosophe Ivan Iline et «L’ascension jusqu’aux sommets des meilleurs»

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Poutine, le philosophe Ivan Iline et «L’ascension jusqu’aux sommets des meilleurs»

https://www.politiquemagazine.fr

Sur quels fondements philosophiques s’appuient la politique nationale et internationale de Vladimir Poutine ? Découvrir et lire Ivan Iline, théoricien de l’unité et de la spécificité russe.

Le 3 octobre 2005, le cinéaste russe Nikita Mikhalkov, ami proche du président de la Fédération de Russie Vladimir Poutine, est parvenu, étant à la tête du Fonds pour la culture russe, à faire transférer au monastère Donskoï à Moscou, en même temps que les cendres du général Anton Denikine, celles d’un quasi inconnu en Russie (sauf de quelques intellectuels, en particulier Soljenitsyne) – bien que ses œuvres complètes aient été enfin publiées [1]. On murmure que c’est le fils d’un avocat filleul d’Alexandre II et d’une luthérienne convertie, tous deux inscrits sur la Table des rangs qui, depuis Pierre le Grand, précise le degré des serviteurs de l’État. Son nom ? Ivan Alexandrovitch Iline. Mort en Suisse en 1954.

Le 12 décembre 2013, Vladimir Poutine, dans son adresse à l’Assemblée fédérale, se réfère à Nicolas Berdiaev lorsqu’il veut préciser ce qu’il entend par un conservatisme qui refuse la révision systématique des valeurs, la famille au premier chef : « Le sens du conservatisme n’est pas d’empêcher d’aller de l’avant vers le haut, mais d’empêcher de reculer et de retomber dans le chaos obscur et l’état primitif[2] ». Conserver pour défendre, défendre pour avancer, mais sur une voie propre, les concepteurs de « l’idée russe » au XIXe, au XXe, y voient pour la Russie le salut. Dont Ivan Iline.

Début janvier 2014, quelques semaines avant l’entrée en Crimée de troupes « pro-russes » non identifiées, hauts fonctionnaires, cadres supérieurs, gouverneurs des régions de la Fédération reçoivent en cadeau de Nouvel An La philosophie de l’inégalité de Nicolas Berdiaev (1918), La justification du bien de Vladimir Soloviev (1897) et Nos tâches, d’Ivan Iline (1956), où l’on trouve ceci : « Si le choix de ces nouveaux hommes russes réussit et se réalise rapidement, alors la Russie se relèvera et renaîtra en l’espace de quelques années. Si ce n’est pas le cas, la Russie tombera du chaos révolutionnaire dans une longue période de démoralisation postrévolutionnaire, de déclin et de dépendance envers l’extérieur[3]. »

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Au Forum de la Jeunesse « Tauride » du 10 au 20 août, qui se tient en Crimée six mois après le référendum du 16 mars grâce auquel Moscou a constitué comme nouveaux sujets de la Fédération de Russie la république de Crimée et la ville de Sébastopol, Boris Mejouev, rédacteur aux Izvestia, philosophe, politilogue, insiste sur le fait que la Russie doit « s’édifier comme une civilisation séparée ». Dans quelles conditions ? C’est là qu’il est utile de se remémorer Ivan Iline, hanté par le démembrement de son pays ; pour lui la défense des valeurs traditionnelles ne se sépare pas de l’idée d’un État solide, qui défend son unité par la force si nécessaire ; en quoi il s’opposait à Tolstoï, qui prônait le pacifisme[4]. L’identité nationale est vue comme un rempart contre la standardisation culturelle, déjà à l’œuvre, de fait, dans le libéralisme occidental.

Février 2015, le philosophe et journaliste français Michel Eltchaninoff publie chez Actes Sud Dans la tête de Vladimir Poutine, un essai dont le mérite est aussi de faire le point, à l’occasion des événements de Crimée, sur les influences d’ordre philosophique qui pourraient déterminer ou infléchir la politique du président de la Fédération de Russie. L’ouvrage, récompensé par le Prix de la Revue des deux mondes, apporte éclaircissements et nuances. S’il est vrai que la philosophie inspire davantage nombre de « têtes pensantes » autour de Poutine, dont Vladimir Iakounine, plutôt que Poutine lui-même, dont la passion va au judo – pourtant les références implicites ou explicites à Ivan Iline se multiplient dans ses discours. Elles sont particulièrement saillantes lors de ses interventions au club Valdaï[5]. Qui est Ivan Iline ?

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Une pensée de l’État dans l’exil

Une formation de juriste lui ouvrit un temps une carrière de professeur de droit. Puis une vie décentrée dans l’exil, en Allemagne (Stettin) et en Suisse (Zollicon), et ce après condamnation à mort, commuée en embarquement sur ce « bateau des philosophes » où Berdiaev s’est trouvé aussi, en 1922. Une pensée politique hantée par la dislocation de l’État russe, tentée mais un moment seulement par le national-socialisme[6], finalement plus bienveillante à l’égard de Mussolini. Pensée qui se construit autour de trois notions : le sens de l’État (et non du parti) ; le respect du droit (non comme lettre froide mais disposition intimement incarné) ; le patriotisme (plutôt que le nationalisme). Voilà résumé l’essentiel. L’œuvre d’Ivan Iline compte environ cinquante livres et mille articles, en russe, en allemand, en français. Elle prend sens pour nous si on l’approche sous un angle qui paraîtra à première vue paradoxal : les libertés – l’angle le plus pertinent à en croire l’essayiste Ivan Blot[7].

La plus importante est la souveraineté, entendue au sens de la non-dépendance d’un État à l’égard de quelque autre dans les domaines considérés comme vitaux, où l’unité historique de la nation, sa sécurité présente, son devenir prochain risqueraient d’être engagés. C’est la leçon de la guerre civile qui parle : celle de Russie, de 1917 à 1922. Mais il me souvient aussi comment le président Hollande, qui proposait en 2012 à Poutine une conversation à propos des anti-missiles, s’est vu opposer une fin de non-recevoir immédiate : tant que la France serait sur ce point tributaire des États-Unis, aucune conversation ne serait ouverte avec elle.

Autre liberté majeure aux yeux d’Ivan Iline, celle de cultiver son identité nationale, au sein d’un ensemble où l’unité reste assurée par l’élément ethnique et culturel russe, par opposition au relativisme absolu qui a mené l’Europe à oublier ses origines et à perdre, en même temps que ses traditions, son identité, au bénéfice d’un multiculturalisme qui en outre l’affaiblit. Voici ce que dit Poutine au club Valdaï en septembre 2013 : « La Russie a toujours évolué au sein d’une “complexité florissante” en tant qu’État-civilisation, consolidé par son peuple russe, le langage russe, la culture russe, l’Église orthodoxe russe et les autres religions traditionnelles du pays. C’est précisément le modèle d’État-civilisation qui a formé notre entité étatique. Il a toujours cherché à s’accommoder souplement à la spécificité ethnique et religieuse de territoires particuliers, afin d’assurer la diversité dans l’unité[8] ».

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La réalité d’une inspiration

Même si c’est au moine et diplomate Constantin Leontiev (1831-1891) que Poutine fait explicitement référence – cet autre champion d’une Russie messianique sous réserve qu’elle crée une civilisation slavo-asiatique propre, distincte de l’européenne, et centrée sur Constantinople –, le propos renvoie à toute la hantise d’Ivan Iline de sauvegarder l’unité en respectant les « libertés locales ». La diversité naturelle du monde est « une donnée de Dieu », dit encore Poutine ; mais surtout les émeutes à caractère xénophobe de 2006 (Carélie), 2009 et 2013 (Moscou) sont passées par là.

C’est, avec cette citation, le moment de marquer deux limites à l’influence qu’ont pu avoir tel ou tel philosophe sur le virage que Poutine, au lendemain de son élection de 2012, est censé avoir pris. D’une part il est avant tout un homme d’action, d’autre part, Ivan Iline, on l’a compris, est loin d’avoir l’exclusivité. Outre Léontiev, il faudrait citer le panslaviste Nikolaï Danilevski (1822-1885), qui insiste sur le fait que la Russie et les Slaves composent un ensemble culturel unique ; le philosophe converti Vladimir Soloviev (1853-1900), convaincu que la recherche de la perfection, qui est la fin de notre espèce, s’incarne dans la famille et la patrie ; le naturaliste Lev Goumiliev (1912-1992), pour qui l’énergie vitale qui fait défaut en Occident surabonde en « Eurasie » ; ou le métropolite de Pskov, Tikhon Chevkounov, présumé confesseur de Poutine, pour qui il en est de la Russie d’aujourd’hui comme de Byzance : toutes sortes de dangers la pressent de toutes parts.

Illustration : « Le guide sert au lieu de faire carrière, combat au lieu de faire de la figuration, frappe l’ennemi au lieu de prononcer des mots vides, dirige au lieu de te vendre aux étrangers. » Ivan Iline

[1]. De 1998 à 2003.

[2]. Berdiaev, De l’inégalité, 1918.

[3]. Chapitre La tâche principale de la Russie.

[4]. La résistance au mal par la force, 1925.

[5]. Cercle de réflexion créé en 2004 près du lac Valdaï, région de Novgorod, par l’agence Ria Novosti.

[6]. Auquel il deviendra vite suspect, étant même arrêté par la Gestapo.

[7]. Conférence au cercle de l’Aréopage du 21 juin 2016.

[8]. Discours à Valdaï – 19 septembre 2013, http://en.kremlin.ru/events/president/news/19243.