dimanche, 21 novembre 2010
Repolitizar la Economia
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"Le crépuscule d'une idole" de Michel Onfray
Le crépuscule d'une idole (M. Onfray)
« Le crépuscule d’une idole » est une charge de Michel Onfray contre Freud. Nous lui devons le distrayant spectacle de la secte psychanalytique en émoi. Toutefois, au-delà du côté ridicule de cette bataille d’intellos et sous-intellos (1), il y a le texte.
Note de lecture, donc. Histoire de savoir de quoi on parle.
*
D’emblée, notons que le rapport d’Onfray à la psychanalyse est… psychanalytique. Il l’avoue, sans faire de chichi : pour lui, Freud, c’est important. Le petit Michel, voyez-vous, a subi l’orphelinat (avec prêtre pédophile en option gratuite et automatique, d’après ce qu’il dit – d’où, sans doute, sa rage antichrétienne).
Trois auteurs l’aident à s’évader de cet « enfer » : Marx, Nietzsche, Freud. Alors soyons clair : il est évident que pour Onfray, flinguer Freud est une manière de liquider ce qu’il y a de psychanalytique dans sa propre pensée. Onfray réglant ses comptes avec Freud, c’est un peu l’intello français anticatholique de base faisant un choix. Nietzsche, et pas Freud (2). Avec la répudiation discrète de Marx, auquel il dit maintenant préférer Proudhon, Onfray achève de définir une identité idéologique. Une quête identitaire qui, visiblement, nourrit depuis pas mal de temps la démarche de cet intello français typique, perpétuellement à la recherche de maîtres. Des maîtres qu’il va idolâtrer, puis brûler – et bien sûr il faut qu’il les idolâtre, pour ensuite les brûler.
Très classique, tout ça : quand on analyse le parcours de nos intellos, on trouve souvent, très souvent, un traumatisme dans l’enfance, au départ de ce qui va devenir leur « raison », et qui est, d’abord, la rationalisation de leur sensibilité. Celle d’Onfray est caractérisée par un très fort individualisme (doublé d’un hédonisme revendiqué), une volonté d’indépendance intellectuelle farouche (d’où l’appétit de rupture avec toute « classe sacerdotale ») et, d’une manière générale, un enfermement non su dans les catégories modernes. Vraiment, une caricature d’intellectuel français. Ce que les héritiers des Lumières françaises, imprégnés malgré eux d’une culture catholique détestée mais intériorisée, et en outre un tantinet enfermés dans leur narcissisme intellocrate par l’héritage de mai 68, peuvent comprendre de Nietzsche : voilà, en gros, la pensée d’Onfray.
Le côté positif du personnage est sa capacité à produire une pensée iconoclaste. Onfray déboulonnant une idole, c’est logique, c’est dans la nature du bonhomme.
Or donc, le jour est venu où, ayant fini de déboulonner « l’idole » judéo-chrétienne, notre intello français s’avisa qu’il convenait à présent de déboulonner une idole juive, ou réputée telle. Et notre intello, donc, s’attaqua au bon docteur Sigmund…
C’est là que les ennuis du philosophe commencèrent, mais c’est aussi là qu’il devint vraiment iconoclaste – puisque, par les temps qui courent, on obtient son diplôme d’hérétique en attaquant la psychanalyse, et certes pas en décochant un coup de pied rageur au catholicisme européen, ce corps immense et moribond.
Cette inscription dans la catégorie des hérétiques du moment vaudra à Onfray de figurer parmi les auteurs commentés sur ce modeste blog – ce sera notre humble contribution à son excommunication par les cléricatures dominantes.
*
Onfray analyse l’œuvre de Freud comme un travail avant tout autobiographique. En gros, il ne nie pas que les constats du bon docteur aient été justes le concernant, lui, personnellement. Il nie que ces constats soient vrais pour l’ensemble de l’humanité. Pour Onfray, Freud n’est pas un scientifique : c’est un philosophe à la rigueur. Et, en outre, un philosophe de seconde zone.
Démonstration.
Freud a menti sur sa biographie, ou en tout cas, disons qu’il l’a fortement arrangée. Pourquoi ? Parce que, nous dit Onfray, il éprouvait un besoin pathologique qu’on parle de lui en bien. Il ne supportait pas la critique. Et Onfray, ici, de suggérer que le bon docteur, toute sa vie, a cherché à donner de lui-même une image conforme à celle que sa mère se faisait de lui (la dénonciation du rôle de la mère juive n’est pas loin, mais Onfray s’arrange pour frôler le précipice sans y tomber). Exemple caricatural : Freud est cocaïnomane, donc la cocaïne permet de guérir certaines pathologies – voilà la méthode freudienne.
Pour dissimuler les conditions dans lesquelles il a bâti son système, Freud, à 29 ans, a brûlé tous ses papiers. Objectif selon Onfray : présenter la psychanalyse comme un « coup de génie », nier qu’elle soit le résultat d’une démarche à la scientificité douteuse.
D’où encore, selon Onfray, la volonté de Freud de « détruire Nietzsche » : il s’agit avant tout de dissimuler que la psychanalyse est née dans le contexte intellectuel créé par Nietzsche (un meurtre du père, en somme !). Idem pour Schopenhauer : si Freud l’a rejeté, c’est pour ne pas avouer que sa théorie du refoulement n’est qu’une resucée du « monde comme volonté et comme représentation ». Idem, au fond, pour toute la philosophie : Freud prétend s’en être détourné à cause de son caractère « abstrait » : en réalité, ce qu’il veut cacher, c’est le caractère abstrait de son œuvre à lui.
Pourquoi cette imposture ? Parce que Freud est un aventurier, obligé de dissimuler qu’il est un aventurier. La thèse d’Onfray a le mérite de la clarté : Freud ne veut pas la vérité scientifique, il veut les honneurs, l’argent, la célébrité. Mais pour avoir les honneurs, l’argent, la célébrité, il doit prétendre avoir découvert une vérité scientifique qu’il a longuement cherchée (l’inconscient), et trouvée à l’issue de travaux très sérieux. Cette vérité, en réalité, était déjà toute entière dans Nietzsche (la volonté de puissance), Schopenhauer (le vouloir vivre), et quelques autres (l’inconscient de Hartmann, et même, déjà, le conatus de Spinoza). Simplement, Freud l’habille d’un vernis de fausse scientificité, pour la revendre au meilleur prix. Si, au passage, il faut assassiner la philosophie, nier qu’elle possède une valeur spécifique, pour tout ramener à une catégorie naissante des « sciences humaines », tant mieux : une main lavera l’autre, la destruction de la filiation permettra de cautionner l’imposture. Freud est un médiocre philosophe, qui se déguise en grand médecin. Et donc, la psychanalyse n’est pas une science, c’est la philosophie d’un petit philosophe.
Après cette première salve d’artillerie à longue portée, Onfray part à l’assaut pour l’attaque à la baïonnette. Et là, c’est du corps à corps, on achève le blessé au couteau de tranchée.
La philosophie de Freud se résume, nous dit Onfray, à une banale pathologie de la relation au père, à la fois humilié (donc castré) et humiliant (donc castrateur). Le complexe d’Œdipe n’est pas une vérité universelle, mais tout simplement une pathologie spécifique à la famille du petit Sigmund, qui prend son cas pour une généralité. On nage, chez Freud, dans l’autobiographie vaguement hystérique d’un adulte qui n’est jamais parvenu à échapper à une mère fusionnelle, qui n’a pas pu construire son identité sexuelle normalement (collision des générations dans la famille), et qui, pour se dissimuler qu’il est un fils à maman, va présenter sa pathologie comme une règle générale. Onfray consacre une centaine de page à l’analyse des pathologies freudiennes ; un ami à moi, menuisier de son état, sait très bien résumer ça en une phrase définitive : ça sent le slip de pédé.
Toute la pensée de Freud, nous explique Onfray, tourne autour de sa pathologie propre. Il veut tuer Moïse, créateur de la religion où il fut élevé, parce que Moïse est assimilé à la figure paternelle (Freud interdit à sa femme, fille de rabbin, d’élever leurs enfants dans la religion). Il déteste le président Wilson au seul motif que celui-ci a pris son père en modèle. Il y a, chez Freud, une rage anti-patriarcale qui a plus à voir avec la névrose qu’avec la méthode scientifique.
Voilà, à très grands traits et sans entrer dans les détails, la théorie d’Onfray sur Freud. C’est un carnage.
*
La théorie est étayée par une analyse approfondie des méthodes du bon docteur Sigmund. Où l’on apprend en vrac :
- Que Freud s’est vanté de guérisons imaginaires, les patients en cause ayant généralement fait des rechutes (limite de l’effet placebo),
- Qu’il a lui-même présenté sa théorie du « père de la horde originaire » comme un « mythe scientifique » (soit un aveu du caractère non-scientifique de la théorie),
- Qu’il a lui-même présenté la psychanalyse comme l’incarnation de « l’esprit du nouveau judaïsme », c'est-à-dire non comme une science, mais comme une religion qui se substitue à une autre religion (ici, Onfray fait une remarque inattendue et intéressante : Freud aurait-il été ami de l’Egypte, et ennemi de Moïse, précisément parce que la terre des Pharaons fut une des rares civilisations connues pour pratiquer l’inceste à grande échelle ? – Onfray va jusqu’à parler d’un antisémitisme latent chez Freud, au-delà d’un antijudaïsme évident),
- Que les patients de Freud et de certains de ses disciples immédiats ont une fâcheuse tendance à se suicider après quelques années d’analyse (dont, entre autres, Marilyn Monroe, qui, en léguant une partie de sa fortune à la Fondation Anna Freud, a beaucoup fait pour les finances de la secte),
- Que le bon docteur a beaucoup écrit sous l’emprise de la cocaïne, ce qui, on l’admettra, n’est pas franchement un gage d’objectivité scientifique (au passage, on peut remarquer que Freud a si bien soigné un patient à grands coups de cocaïne par injection… que ledit patient en est mort !),
- Que Freud annonça avoir renoncé à l’hypnose à cause de son caractère « mystique », mais que ce renoncement arriva comme par hasard après qu’il se fut avéré qu’il était mauvais hypnotiseur,
- Qu’il a ouvertement reconnu avoir abandonné la balnéothérapie parce qu’elle n’était pas rentable financièrement,
- Etc. etc.
Plus intéressant que ce dossier à charge lourd mais anecdotique au regard des enjeux réels, Onfray attaque le freudisme, et pas seulement Freud. Et bien sûr, c’est là qu’est le vrai débat : au fond, que le bon docteur n’ait été qu’un charlatan n’a aucune importance ; ce qui est important, c’est de savoir si l’impact de sa pensée est positif ou négatif. Un charlatan médical peut très bien être un philosophe de grande portée ; est-ce le cas de Freud ?
Onfray accuse Freud d’avoir plongé l’esprit occidental dans un rapport magique au monde. Sa philosophie est caractérisée par une dénégation inconsciente du corps, dont le primat accordé au psychisme n’est que le masque. Ce déni du corps traduit, en profondeur, un refus de l’incertitude, une volonté obstinée de ne pas concéder à l’humain sa part de mystère : l’inconscient freudien est une pure abstraction, qui se révèle par des phénomènes que l’existence de cette abstraction permet de relier arbitrairement. Le discours freudien est donc celui d’une reconstitution artificielle d’un monde parallèle, où le pouvoir du mage transcende les limites de la connaissance humaine. C’est une pensée magique, et, plus grave, c’est le point de départ d’un univers sectaire : le monde freudien, déconnecté du réel, fournit en réalité un placebo à des malades eux-mêmes atteints d’une semblable déconnexion. Le psychanalyste ne guérit pas, il cautionne la maladie, il la rend acceptable par son patient. Fondamentalement, c’est de la magie noire.
Cette magie, explique Onfray, est dangereuse parce qu’elle repose sur un ensemble de mythes agissants. Si vous vivez dans un monde où l’on vous dit que tout est sexe, au bout d’un moment, dans votre esprit, tout sera effectivement sexe (surtout si ce discours vous libère d’un puritanisme étouffant). Si vous vivez dans un monde où l’on analyse toute relation comme perverse, alors toute relation deviendra effectivement perverse (surtout si vous vivez dans un monde dont les structures socio-économiques sont réellement perverses). Et si en plus, vous vivez dans un monde où les tenants des thèses en question pratiquent l’intimidation à l’égard de quiconque ne partage pas leurs certitudes, vos réflexes d’obédience viendront renforcer l’impact pathogène du discours sectaire dans lequel votre société est enfermée. Ne perdons pas de vue qu’à travers le Comité Secret de la Société psychologique et ses ramifications à travers toute l’Europe, la psychanalyse s’est, très tôt, organisée comme une franc-maçonnerie particulièrement sectaire, dont les affidés chassaient en meute – d’où la dictature intellectuelle des milieux freudiens dans les intelligentsias.
Sous cet angle, on sort de la lecture d’Onfray avec en tête une hypothèse : Freud se rattache peut-être à la catégorie des faiseurs « d’horribles miracles », pour parler comme René Girard – il crée une peste, la répand dans la société en jouant sur les mimétismes, et se vante ensuite de pouvoir guérir du mal qu’il a lui-même créé. C’est en effet ainsi, explique Girard dans « Je vois Satan tomber comme l’éclair », que procédaient les thaumaturges du paganisme tardif – dans les catégories chrétiennes, Freud serait donc un faux prophète, un antéchrist.
Qu’Onfray n’ait pas anticipé la formulation de cette hypothèse, parmi les réactions possibles de son lecteur, se laisse bien voir à la dernière partie de son livre, où il nous présente le Freud « réactionnaire » – rappelons ici que Freud réaffirme, à travers la théorie de la sublimation, un interdit de l’inceste (fût-ce pour y voir la source de toutes les névroses). Et, à juste titre, Onfray nous fait remarquer que cette manière de poser le problème débouche, mécaniquement, sur une vision du monde très noire : rares seront les hommes heureux, car rares seront les hommes qui sauront accorder leurs désirs et leurs possibilités, donc la règle est la compétition pour le peu de bonheur disponible, presque un concours de bites, au fond, et que le meilleur gagne ! (sous cet angle il est évident que le freudisme est en partie une idéologie bourgeoise, voire un proto-fascisme, et en tout cas un nihilisme).
Et cependant, on sort de cette cinquième partie avec un sentiment d’inachevé…
En fait, Onfray passe à côté de la conclusion qui aurait dû couronner sa charge. On soupçonne ici que, pour dire les choses simplement, l’intello d’Argentan ne s’est jamais remis de son passage chez les curés (pédophiles d’après lui, et qui en outre lui auraient interdit de se branler). Résultat : chez Onfray, il manque l’essentiel.
Onfray ne peut condamner l’instrumentalisation du désir qu’au nom du désir, parce qu’il ignore, ou en tout cas néglige, la notion d’Amitié (au sens aristotélicien). C’est pourquoi, à ses yeux, il ne peut y avoir que deux camps : ceux qui veulent réprimer le désir (où il range Freud), et ceux qui veulent le libérer (où il se range). Puisque Freud décourage les hédonistes, c’est que Freud est un réac : voilà la conclusion d’Onfray – qui montre ici les limites de son positionnement, et passe donc complètement à côté de la question où, pourtant, son travail aurait dû l’amener : est-ce que le fond du problème, chez Freud, ce ne serait pas tout simplement une certaine incapacité à aimer ? A s’oublier soi-même ? Et si, pour sortir de la névrose, il ne fallait tout simplement admettre que l’on doit s’occuper d’autre chose que de soi ?
Autant de questions qu’Onfray, profondément individualiste, irréductiblement moderne, ne peut pas poser, parce qu’il ne peut pas les penser. Pour Onfray, le monde se réduit à un face-à-face entre phallocratie et libération sexuelle : il n’a pas remarqué que ce ne sont là, fondamentalement, que deux figures possibles d’une même réduction de l’Agapè à l’Eros. En quoi, et il l’avoue d’ailleurs à demi-mots dans sa conclusion, Onfray ne peut pas, à ce stade, se libérer vraiment de l’emprise de Freud…
( 1 ) Les lecteurs désireux de se détendre pourront se régaler de ce morceau de bravoure, offert par un « psy » tellement caricatural qu’on a peine à croire au premier degré : voici l’impossible remix de « Freud est grand et je suis son prophète » sur un sampling d’Offenbach, la vie parisienne, « Yé choui bréjilien y’ai dé l’or » (ne pas manquer).
( 2 ) Sur le sous-nietzschéisme d'Onfray, à lire très bientôt sur ce blog un résumé de la critique de Nietzsche par Lukacs. Qu'il soit bien entendu que cette note de lecture ne vaut pas approbation de la position d'Onfray dans l'absolu.
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Prima che Nietzsche venisse: Giacomo Leopardi
Prima che Nietzsche venisse: Giacomo Leopardi
Alessandra COLLA - http://www.alessandracolla.net/
Archives: 1994
Negli scritti di Nietzsche, è stato detto, si può trovare tutto e il contrario di tutto. Questa pretesa contraddizione interna del grande pensatore ha fornito materiale in quantità per molte opere — talvolta critiche talvolta denigratorie — che hanno accompagnato negli anni la fortuna del filosofo senza, peraltro, mai scalfirne il nòcciolo.
In mezzo alla feconda complessità dei temi trattati, emergono però alcuni aspetti interessanti e solitamente poco noti ai più. Vogliamo qui accennarne qualcuno, almeno per suggerire nuove curiosità.
L’UOMO CHE VISSE DIETRO LA SIEPE
… questa siepe, che da tanta parte
dell’ultimo orizzonte il guardo esclude.
(G. Leopardi, L’infinito, 1819)
Il XVIII secolo sta per finire quando, nel 1798, nasce a Recanati Giacomo Taldegardo Francesco Leopardi, figlio del conte Monaldo e della marchesa Adelaide Antici. Autentico bambino prodigio, all’età di undici anni Giacomo si ritrova senza precettore: sa già tutto quello che c’è da sapere, e non c’è nessuno in grado di seguirlo negli studi. Con la beata incoscienza della sua età, il primogenito di casa Leopardi continua da solo. Da solo impara il greco, l’ebraico, il francese, l’inglese e lo spagnolo; padrone, a soli quindici anni, di tante lingue vive e morte, sviluppa a quest’età l’amore per gli studi filologici: le grammatiche e le sintassi non hanno più per lui alcun segreto, ed ora è finalmente libero di cogliere nella loro pienezza i tesori che si celano dietro l’aridità apparente delle forme verbali e delle declinazioni.
Il 1816 segna una svolta di importanza capitale nella vita e nel pensiero di Leopardi: è in quest’anno, infatti, che il giovane scopre le lettere e la poesia, sulle quali riversa la passione finora consacrata all’erudizione e alla disciplina filologica. Dello stesso anno è anche la prima, e non la più grave, delle molte crisi fisiche e nervose che travaglieranno la sua breve vita: con orrore e certo senza rassegnazione, Giacomo intuisce di aver definitivamente minato la sua già gracile costituzione con un’applicazione mentale eccessiva. Ad aggravare la situazione psicologica del giovane sopraggiunge, sul finire dell’anno, il breve soggiorno in casa Leopardi della bella cugina Gertrude Cassi sposata Lazzari: scoppia la prima infatuazione amorosa, tutta platonica e ovviamente unilaterale, di Giacomo, che recita qui per la prima volta il copione dell’amore illuso e deluso — lo ripeterà per tutta la vita.
Il suo stato d’animo non migliora affatto. In una celebre, drammatica lettera all’amico scrittore Pietro Giordani, datata 2 marzo 1818, Leopardi lascia sgorgare senza pudori tutta la sua amarezza profonda e inconsolabile: «[…] in somma io mi sono rovinato con sette anni di studio matto e disperatissimo in quel tempo che mi s’andava formando e mi si doveva assodare la complessione. E mi sono rovinato infelicemente e senza rimedio per tutta la vita, e rendutomi l’aspetto miserabile, e dispregevolissima tutta quella gran parte dell’uomo, che è la sola a cui guardino i più; e coi più bisogna conversare in questo mondo». Nel settembre dello stesso anno il Giordani, allarmato dalle parole del giovane, lo raggiunge a Recanati per condurlo con sé a Macerata: un viaggio di ben pochi chilometri — il primo in assoluto di Giacomo, allora ventenne. L’impatto con una dimensione estranea a quella del sonnolento “borgo natio” e la consapevolezza di un mondo vasto e sconosciuto destinato a restare fuori dalla sua portata non fanno che aumentare l’inquietudine di Leopardi, che si sente (e sa di essere davvero) profondamente diverso dagli altri, e anela alla gloria.
Nella primavera del 1819 la sua già malferma salute va peggiorando: un esaurimento fisico generale lo prostra, e si manifestano i primi disturbi agli occhi che gli impediscono di leggere per quasi un anno e che, d’ora in poi, lo accompagneranno per tutta la vita. Questo episodio rientra a pieno titolo fra i motivi scatenanti di quel pessimismo assoluto che diverrà cifra e referente del pensiero leopardiano (1).
Corollario inevitabile di questo crollo di ogni illusione è la perdita della fede religiosa; per compensare la quale il Leopardi si getta nell’elaborazione di un suo sistema filosofico — una sorta di materialismo pessimistico radicale sull’onda, paradossalmente, delle suggestioni illuministiche. Se infatti l’illuminismo tracciava il disegno grandioso di un progresso inarrestabile volto a condurre l’umanità intera verso luminosi e necessari destini, per il Leopardi le istanze deterministiche e la constatazione di uno “stato di natura” suggeriscono piuttosto l’idea di un decadimento dell’uomo dalle altezze dell’età antica alle bassure di quella moderna; e la civiltà, lungi dal rappresentare il punto d’arrivo dell’evoluzione umana, si configura invece come l’allontanamento dell’uomo dalla beata condizione naturale, unica e sola in grado di garantire la felicità — cioè l’assenza o la cessazione del dolore (secondo la scuola stoica prediletta dal poeta-filosofo). Il grande passo è compiuto: da qui in avanti il Leopardi alternerà meditazioni filosofiche a composizioni poetiche, per approdare, dopo un silenzio durato cinque anni (dal 1823 al 1828), alla sublime fusione di sostanza filosofica e forma poetica. Sempre più minato nel fisico, trascinerà un’esistenza sofferente, alleviata soltanto dalle cure assidue e affettuose di pochi amici, fino alla morte, sopravvenuta il 14 giugno 1837 a Napoli, in casa dell’amico Antonio Ranieri.
IL POETA E IL FILOSOFO: AFFINITÀ ELETTIVE
È un destino singolare, come si vede, quello che accomuna Giacomo Leopardi e Friedrich Nietzsche: entrambi sono stati mutilati dalla critica, contemporanea e successiva, in gran parte della loro opera — si sa che il Leopardi è noto, apprezzato e studiato come poeta, ma per lo più ignorato come filosofo, mentre Nietzsche è giudicato a buon diritto un gigante del pensiero ma poco più che un semplice dilettante nel campo delle arti. Eppure, come pochi ormai si azzardano a negare, la verità è molto diversa.
Ma le somiglianze non finiscono qui. Sia l’italiano inquieto che il riservato tedesco iniziano il loro percorso intellettuale sui testi di filologia, anche se per motivi dìversi: il piccolo Giacomo perché la pur nutrita biblioteca paterna non era in grado di offrire più niente a un bambino così sorprendentemente dotato; il giovane Federico perché la formazione ricevuta nel prestigioso istituto di Pforta gli aveva rivelato le immense possibilità speculative legate allo studio del mondo classico e delle sue lingue. Inoltre, entrambi furono costretti a viaggiare molto, ed entrambi per questioni di sopravvivenza, soggiornando addirittura negli stessi luoghi; entrambi furono di salute assai cagionevole, soffrendo persino degli stessi disturbi; entrambi trovarono l’ultimo conforto nella vicinanza di amici fedeli e disinteressati; e, per finire, il pensiero di entrambi è stato spesso snaturato e stravolto così da renderli invisi non soltanto a generazioni di studenti, ma anche a molti seri studiosi irrimediabilmente viziati nell’interpretazione dei loro testi.
La complementarità dei loro destini li rende simili al di là delle differenze oggettive, portandoli verso un unico sentire e un’identica visione della vita, tanto che sarà proprio Leopardi ad anticipare alcune delle più brillanti e rivoluzionarie intuizioni di Nietzsche.
Il pensatore di Röcken conosceva, almeno in parte, il Leopardi: sappiamo che nella biblioteca di Nietzsche figuravano due traduzioni tedesche di Leopardi, ad opera dello Hamerling e dello Heyse; sicuramente vi erano compresi i Canti, che il poeta italiano scrisse a partire dal 1818, lo Zibaldone e molto probabilmente le Operette morali. Ed è lo stesso Nietzsche a menzionare il Leopardi, anche se di passata e in modo non proprio lusinghiero: «Gli infelici raffinati, come Leopardi, che dalla loro sofferenza traggono orgogliosamente vendetta su tutta l’esistenza, non si accorgono come il divino mezzano dell’esistenza rida di loro: proprio così essi ora berranno di nuovo dalla sua coppa; infatti la loro vendetta, il loro orgoglio, la loro inclinazione a pensare tutto quanto soffrono, la loro arte nel dirlo: tutto questo non è di nuovo — dolce miele?» (2).
Alla luce di un’attenta lettura del poeta italiano e del filosofo tedesco, è innegabile che le influenze del primo sul secondo esistano, e siano ben documentabili. Confrontiamo, ad esempio, Il sabato del villaggio e La sera del dì di festa (composte entrambe nel settembre 1829) con un frammento di Nietzsche. Il Leopardi scrive:
«[…] intanto riede alla sua parca mensa,
fischiando, il zappatore,
e seco pensa al dì del suo riposo.
Poi, quando intorno è spenta ogni altra face,
e tutto l’altro tace,
odi il martel picchiare, odi la sega
del legnaiuol, che veglia
nella chiusa bottega alla lucerna,
e s’affretta, e s’adopra
di fornir l’opra anzi il chiarir dell’alba.
Questo di sette è il più gradito giorno,
pien di speme e di gioia:
diman tristezza e noia
recheran l’ore, ed al travaglio usato
ciascuno in suo pensier farà ritorno» (3).
E ancora:
«[…] Ahi, per la via
odo non lunge il solitario canto
dell’artigian che riede a tarda notte,
dopo i sollazzi, al suo povero ostello;
e fieramente mi si stringe il core,
a pensar come tutto al mondo passa,
e quasi orma non lascia. Ecco è fuggito
il dì festivo, ed al festivo il giorno
volgar succede, e se ne porta il tempo
ogni umano accidente. […]» (4).
Quello che segue, invece, è il testo nietzscheano:
«Il pomeriggio del sabato si deve passare per un villaggio, se si vuol vedere sui volti dei contadini la vera quiete del dì di festa: allora essi hanno ancora indelibata davanti a sé la giornata di riposo e si industriano a far ordine e pulizia in suo onore con una specie di piacere anticipato, quale non sarà raggiunta dal piacere stesso. La domenica è già quasi lunedì» (5).
Oppure si paragonino questi due brani:
«Ogni grande amore porta con sé il crudele pensiero di uccidere l’oggetto dell’amore, perché sia sottratto una volta per tutte al sacrilego giuoco del mutamento: giacché di fronte al mutamento l’amore inorridisce più che di fronte alla distruzione»;
«Il veder morire una persona amata, è molto meno lacerante che il vederla deperire e trasformarsi nel corpo e nell’animo da malattia (o anche da altra cagione)».
Il primo è di Nietzsche (6), mentre il secondo è di Leopardi (7).
Con un minimo di attenzione, è facilissimo trovare, sparsi qua e là nello Zibaldone senza un ordine fisso, ma sull’onda di meditazioni e concatenamenti apparentemente confusi che fanno delle elaborazioni leopardiane un autentico “pensiero in movimento” destinato ad arrestarsi soltanto con la morte, intuizioni e abbozzi di teorie poi ripresi e sviluppati compiutamente da Nietzsche nell’arco di pochi decenni, e che nella prosa densa del Leopardi spiccano in tutta la loro grandezza.
Così alcuni notevoli passi che anticipano la Genealogia della morale sono del 4-5 settembre 1821: «La legge naturale varia secondo le nature. Un cavallo che non è carnivoro giudicherà forse ingiusto un lupo che assalga e uccida una pecora, l’odierà come sanguinario, e proverà un senso di ribrezzo e d’indignazione abbattendosi a vedere qualche sua carnificina. Non così un lione. Il bene e il male morale non ha dunque nulla di assoluto. Non v’è altra azione malvagia, se non quelle che ripugnano alle inclinazioni di ciascun genere di esseri operanti: né sono malvage quelle che nocciono ad altri esseri, mentre non ripugnino alla natura di chi le eseguisce» (8); «Si suol dire che tutte le cose, tutte le verità hanno due facce, diverse o contrarie, anzi infinite. Non c’è verità che prendendo l’argomento più o meno da lungi, e camminando per una strada più o meno nuova, non si possa dimostrar falsa con evidenza ec. ec. ec. Quest’osservazione (che puoi molto specificare ed estendere) non prova ella che nessuna verità né falsità è assoluta, neppure in ordine al nostro modo di vedere e di ragionare, neppur dentro i limiti della concezione e ragione umana?» (9); «Da ciò che si è detto della legge pretesa naturale, risulta che ne vi è bene né male assoluto di azioni; ci queste non sono buone o cattive fuorché secondo le convenienze, le quali son stabilite, cioè determinate dal solo Dio ossia, come diciamo, dalla natura; che variando le circostanze, e quindi le convenienze, varia ancora la morale, né v’è legge alcuna scolpita primordialmente ne’ nostri cuori; che molto meno v’è una morale eterna e preesistente alla natura delle cose, ma ch’ella dipende e consiste del tutto nella volontà e nell’arbitrio di Dio padrone sì di stabilire quelle determinate convenienze che voleva […]. Da tutto ciò resta spiegata la differenza fra la legge che corse prima di Mosè, quella di Mosè, e quella di Cristo. […] L’antica legge Ebraica permetteva il concubinato, fuorché colle donne forestiere ec. L’odio del nemico costituiva lo spirito delle antiche nazioni. Ecco le leggi di Mosè tutte patriottiche, ecco santificate le invasioni, le guerre contro i forestieri, proibite le nozze con loro, permesso anche l’odio del nemico privato. E Gesù comandando l’amor del nemico, dice formalmente che dà un precetto nuovo. Come ciò, se la morale è eterna e necessaria? Come è male oggi, quel ch’era forse bene ieri? Ma la morale non è altro che convenienza, e i tempi avevano portato nuove convenienze. Questo discorso potrebbe infinitamente estendersi generalizzando sullo stato del mondo antico e moderno, e sulla differente morale adattata a questi diversi stati. L’uomo isolato non aveva bisogno di morale, e nessuna ne ebbe infatti, essendo un sogno la legge naturale. Egli ebbe solo dei doveri d’inclinazione verso se stesso, i soli doveri utili e convenienti nel suo stato. Stretta la società, la morale fu convenienza, e Dio la diede all’uomo appoco appoco, o piuttosto ora una ora un’altra, secondo i successivi stati della società: e ciascuna di queste morali era ugualmente perfetta, perché conveniente; e perfetto è l’uomo isolato, senza morale» (10).
Un rilievo del 1823 sembra attagliarsi perfettamente a certe considerazioni contenute nell’Anticristo: «Persone imperfette, difettose, mostruose di corpo, tra quelle che non arrivano a nascere e […] tra quelle che son tali dalla nascita […]; quelle che così nate vivono e […] quelle finalmente che tali son divenute dopo la nascita […]; sommando dico e raccogliendo tutti questi individui insieme, si vedrà a colpo d’occhio e senza molta riflessione che il loro numero nel solo genere umano, anzi nella sola parte civile di esso, avanza di gran lunga non solamente quello che trovasi in qualsivoglia altro intero genere d’animali, non solamente eziandio quello che veggiamo in ciascheduna specie degli animali domestici, che pur sono corrotti e mutati dalla naturale condizione e vita, e da noi in mille guise travagliati e malmenati; ma tutto insieme il numero degl’individui difettosi e mostruosi che noi veggiamo in tutte le specie di animali che ci si offrono giornalmente alla vista, prese e considerate insieme. La qual verità è così manifesta, che niuno, io credo, purché vi pensi un solo momento e raccolga le sue reminiscenze, la potrà contrastare. Simile differenza si troverà in questo particolare fra le nazioni civile e le selvagge, e proporzionatamente fra le più civili e le meno, secondo un’esatta scala» (11). Di questa lunga citazione merita, a nostro avviso, sottolineare anche l’accenno agli animali, che è una costante del Leopardi: la sua attenzione nei confronti della natura e degli esseri viventi è continua e delicata, comprendendo ogni forma di vita nel mistero del dolore universale e del pessimismo cosmico. Anche questo è un tratto (e non dei minori) che lo accomuna a Nietzsche.
Sempre nell’Anticristo, troviamo invece una frase illuminante del filosofo tedesco: «Se si avesse nel petto una qualche misura, anche esigua, di religiosità, un Dio che cura al momento giusto il raffreddore o che ci fa salire in carrozza nel preciso istante in cui si scatena un acquazzone dovrebbe essere per noi tanto assurdo, che occorrerebbe eliminarlo anche nel caso in cui esistesse. Un Dio come domestico, come portalettere, come venditore d’almanacchi — una sola parola, in fondo, per indicare la specie più stupida tra tutte le circostanze fortuite…» (12). Il riferimento alla celebre operetta morale che il Leopardi scrisse nel 1832, e intitolata appunto Dialogo di un venditore di almanacchi e di un passeggere, ci sembra assolutamente fuor di dubbio: nel Dialogo, il poeta immagina l’incontro fra un “passeggere” e un venditore di calendari che propone al passante l’acquisto di un calendario per l’anno nuovo. Il passante si informa se l’anno nuovo sarà o no migliore del precedente, e il venditore risponde di sì; ma il passante incalza, e vuole sapere a quale degli ultimi vent’anni potrebbe essere paragonato l’anno nuovo in quanto a bontà; il venditore annaspa, travolto dalla stupidità dei luoghi comuni che il passante gli sciorina uno dietro l’altro, e il dialogo si conclude col timido “speriamo…” del venditore che non può fare altro che rifilare al passante un calendario qualsiasi, nell’illusione che il futuro sarà comunque migliore del passato. Eccolo qua, il Dio schernito da Nietzsche: un Dio buono per tutte le stagioni, che porterà il sole al villeggiante e la pioggia al contadino, la pace a chi combatte e la guerra al mercante d’armi — proprio un Dio che, se davvero esistesse, andrebbe eliminato.
Non sono — ovviamente — tutti qui i paralleli fra il poeta-filosofo e il filosofo-poeta. L’argomento meriterebbe ben più di qualche cenno frettoloso, ma sappiamo che l’insofferenza di troppi per la poesia leopardiana non è certo né il minore né l’ultimo dei guasti fatti dalla scuola italiana. Per chiudere in bellezza, scegliamo l’insegnamento supremo di Zarathustra il Distruttore: «Uomini superiori, imparatemi - a ridere!» (13), adombrato in uno degli ultimi appunti dello Zibaldone: «Terribile e awful è la potenza del riso; chi ha il coraggio di ridere, è padrone degli altri, come chi ha il coraggio di morire» (14).
(testo apparso originariamente sulla rivista “Origini”,
numero monografico su Friedrich Nietzsche, 1994)
NOTE
(1) Lui stesso descriverà così l’avvenuto mutamento, in un’annotazione datata 1 luglio 1820: «Sono stato sempre sventurato, ma le mie sventure d’allora erano piene di vita, e mi disperavano perché mi pareva […] che m’impedissero la felicità, della quale gli altri credea che godessero. […] La mutazione totale in me […] seguì […] nel 1819 dove privato dell’uso della vista, e della continua distrazione della lettura, cominciai […] a divenir filosofo di professione (di poeta ch’io era), a sentire l’infelicità certa del mondo» (Giacomo Leopardi, Zibaldone, Oscar Mondadori, Milano 1972, vol. 1, p. 118).
(2) Friedrich Nietzsche, Umano, troppo umano (e scelta di frammenti postumi), Oscar Mondadori, Milano 1976, vol. II, fr. 38 [2], p. 273.
(3) G. Leopardi, Il sabato del villaggio, vv. 28-42.
(4) Idem, La sera del dì di festa, vv. 24-33.
(5) F. Nietzsche, Umano…, cit., fr. 45 [3], p. 286.
(6) Ivi, fr. 280. p. 95.
(7) G. Leopardi, Zibaldone, cit., p. 290 (8 gennaio 1821).
(8) Idem, Zibaldone, cit., vol. II, p. 582 (4 settembre 1821).
(9) Ivi, p. 585 (5 settembre 1821).
(10) Ivi, pp. 587-589 (5 settembre 1821).
(11) Ivi, p. 844 (28 luglio 1823).
(12) F. Nietzsche, L’Anticristo. Maledizione del cristianesimo, Adelphi, Milano 1977, par. 52, p. 75.
(13) F. Nietzsche, Così parlò Zarathustra, Adelphi, Milano 1973, p. 359 (“Dell’uomo superiore” - 20, 25).
(14) G. Leopardi, Zibaldone, cit., vol. II, p. 1160 (23 settembre 1828).
(© Alessandra Colla, Prima che Nietzsche venisse, 1994, in “Origini - Nietzsche”, 2006)
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vendredi, 19 novembre 2010
L'administration de la peur (Paul Virilio)
L'administration de la peur (P. Virilio)
Ex: http://www.scriptoblog.com/

Jadis, rappelle Virilio, grandir, c’était dépasser ses peurs. A cette aune, on peut se demander, continue-t-il, si nos contemporains ne sont pas infantiles. L’angoisse chimérique est, apparemment, à la mode. Pire, elle fait figure de propédeutique : passe pour sage celui qui a peur, et l’avoue. La peur, principe heuristique, méthode pour penser le monde à l’heure où l’Homme détient le pouvoir de se détruire entièrement ? Virilio, en attendant, fait observer que cette progression de la peur traduit, concrètement, un affaiblissement de la confiance en la perfectibilité du genre humain.
D’où vient cet affaiblissement ? – Voilà sa question. Comment y remédier ? – Voilà son projet.
*
La peur, nous dit en substance Virilio, est l’un des deux grands modes d’administration des citoyens par l’Etat (l’autre est la promesse, la rétribution). La peur permet, en particulier, à des Etats qui n’ont plus grand-chose à promettre (fin des Trente Glorieuses) de continuer à justifier leur existence : si les citoyens ont peur, ils cherchent une protection ; et cette protection, c’est l’Etat qui peut l’offrir.
Or, l’Etat contemporain est, justement, un bon administrateur de peur – en ce sens qu’il dispose de moyens formidables pour instiller l’angoisse, propager la crainte, généraliser la méfiance. Le facteur décisif en la matière, c’est la vitesse : vitesse de transmission de l’information, qui permet de saturer le destinataire, de l’entretenir dans l’angoisse parce qu’il ne peut plus traiter l’information transmise ; mais aussi vitesse des évolutions potentielles, si rapides, si soudaines, qu’on ne peut plus les anticiper. La discontinuité engendre la peur : si tout est possible, alors le pire est possible.
Virilio prend ensuite l’exemple de l’équilibre de la terreur, tel qu’il s’est maintenu pendant toute la guerre froide. C’est pour lui l’image parfaite du processus qui fait de l’Etat moderne un grand administrateur de peur : une catastrophe est en surplomb, elle tétanise les peuples ; mais l’Etat apporte la contre-force qui permet de suspendre indéfiniment cette catastrophe, de la maintenir en surplomb, comme une épée de Damoclès. Il est logique que les complexes militaro-industriels, un peu partout, aient fini par prendre tout ou partie du pouvoir : ils sont le pouvoir, l’incarnation du pouvoir contemporain. Le pouvoir de suspendre indéfiniment un mouvement dont la vitesse est telle qu’elle terrorise.
Le terrorisme contemporain, inséré dans cette grille de lecture, prend un sens bien précis : il est l’instrument d’un déséquilibre de la terreur menaçant constamment de rompre l’équilibre par suspension du mouvement. En ce sens, il constitue la figure aboutie du pouvoir contemporain : je ne sers plus à rien, dit le pouvoir, mais si vous me supprimez, qui sait ce qui arriverait ? L’impossibilité de répondre à cette question du « qui sait ? » fonde la nouvelle légitimité du pouvoir : le pouvoir de ne rien faire, le pouvoir de faire en sorte que rien ne se passe.
Pour Virilio, ce pouvoir d’un type nouveau s’incarnera, demain, commence même déjà à s’incarner, dans l’intériorité des individus. Le seul moyen de faire face à la vitesse toujours croissante induite par la technique, c’est de se techniciser soi-même ; seul un homme transformé en automate peut suivre le rythme des robots.
Plutôt que l’extinction du réel et le simulacre, les concepts de Baudrillard, Virilio propose donc la dissolution de l’espace, de tous les espaces, y compris le corps humain, comme clef de lecture de notre temps. L’avantage est, évidemment, que cette clef de lecture souligne davantage le caractère automatique des implications de l’univers technicisé à outrance ; c’est aussi l’inconvénient : on perd de vue la stratégie autonome du pouvoir, ici, il s’agit de se représenter l’évolution de la structure sociale comme une dynamique favorisant le pouvoir, mais qu’il n’enclenche pas.
Virilio le sait, et c’est pourquoi il souligne que, plus que le progrès en lui-même, c’est la propagande du progrès qui engendre la panique. Il veut dire par là que l’Etat, le pouvoir au sens large, ne crée certes pas cet univers de la vitesse, porteur de toutes les peurs, mais qu’il entretient délibérément, par contre, les individus et les groupements intermédiaires dans l’illusion qu’il n’est pas possible d’anticiper collectivement, de construire une intelligence humaine partagée qui permettrait, précisément, de penser ensemble à la vitesse du progrès.
D’où son projet : construire une dissuasion civile.
Il entend par là, en substance, la constitution d’une société des individus postmodernes. Il s’agit d’inventer une manière d’être collective qui permet, justement par le collectif, de rendre à nouveau le monde prévisible, non en réduisant la vitesse (qu’on ne maîtrise plus), mais en augmentant la vision latérale de chacun, par le partage des visions. En effet, si la vision latérale augmente, le risque de surgissement d’un objet inattendu dans le champ de vision central diminue.
En somme, pour Virilio, c’est donc par la construction d’une intelligence collective, capable de penser un monde imprévisible, que le pouvoir sera contrebattu : si mon voisin partage sa vision latérale avec moi, alors il n’est plus un corps étranger qui participe, par son mouvement trop rapide, à l’incertitude angoissante de mon habitat ; il devient au contraire un partenaire de mon habitat, contre l’incertitude d’un monde trop rapide.
Il s’agit, fondamentalement, de refaire des lieux. Virilio ne refuse pas le localisme ; sa définition de l’impérialisme contemporain, c’est l’abolition de la géographie. Sa définition de la lutte anti-impérialiste, c’est la défense de la géographie : il doit exister des lieux, où des hommes mettent en commun leur destin, et pour cette raison, « partagent leur vision latérale ». Refaire du sens, en somme, pour bâtir cette dissuasion civile, indépendante du pouvoir, c’est, d’abord, recréer des sujets collectifs.
Cette conclusion n’est évidemment pas originale. Mais Virilio a le mérite, au moins, de proposer une grille de lecture stimulante, de mettre en perspective ce projet. Quand on le lit sur les raves, dans lesquelles il voit une simulation d’intelligence collective enfin adaptée au règne de la vitesse, on se dit qu’il y a quelque chose à tirer de sa perception.
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mercredi, 17 novembre 2010
Remembering René Guénon
Remembering René Guénon
Edouard RIX
Ex: http://www.counter-currents.com/
Translated by Greg Johnson
Editor’s Note:
This essay and the one that follows are presented in commemoration of René Guénon’s birth on November 15, 1886.
On January 7th, 1951, the Frenchman René Guénon, one of the principal representatives of Traditional thought in the 20th century, died in Cairo.
From Occultism to Esotericism
Guénon was born in Blois, on November 15, 1886, to a strongly Catholic family. In 1904, after a pilgrimage to Lourdes, he went to Paris to continue his education. A dawdler, he only obtained his license when he was 29, then at 32 he failed his aggregation in philosophy when his doctoral thesis, devoted to “A General Introduction to the Study of Hindu Doctrines,” was rejected.
Parallel to his studies, Guénon frequented, from his arrival in the capital, the occultist milieu, launching himself headlong into a series of affiliations and initiations. He entered the Hermetic School, was received into the Martinist Order, attended various occultist Masonic organizations, was initiated in the Tebah Lodge of the Grand Lodge of France. In 1908, he was secretary of Second Spiritualistic and Masonic Congress and became Sovereign Grand Commander of the Order of the Renovated Temple. At the age of 23, he was consecrated “bishop of Alexandria” of the Gnostic Church of France, under the name of Palingénius and became editor of La Gnose, “the monthly review devoted to the study of esoteric sciences.”
After several disappointing experiences in the occultist milieu, he turned to the East to find the right path, that of “initiatory Knowledge.” After being interested in Taoism, he was initiated in 1912 into Sufism, an Islamic initiatory current, without embracing the Islamic religion, as he would later explain to a correspondent. Having learned Chinese and Arabic, reading the original texts, he tried to work with initiates in each tradition.
While giving his own lessons and courses of philosophy, René Guénon wrote many articles for Catholic publications like the Revue universelle du Sacré-Cœur Regnabit and Traditionalist publications like the Le Voile d’Isis (Veil of Isis), which became Etudes traditionnelles. He also published books.
The Tradition Against the Modern World
In his Introduction to the Study of Hindu Doctrines (1921), and the Man and His Becoming According to the Vedanta (1925), he defined the criteria of universal traditional metaphysics. For Guénon, Tradition means the whole of “metaphysical” knowledge of order: it admits a variety of forms, while remaining one in its essence.
He insists on the idea, already formulated before him by Joseph de Maistre and Fabre d’ Olivet, of a primordial Tradition, which goes back to a supreme Center, the repository of all spiritual knowledge, which diffuses it by the means of “initiatory chains” present in the various religious paths. In Perspectives on Initiation (1946), he defended the need to attach oneself to a “chain,” to a “regular organization,” but hardly offers an alternative to those who refuse to defer, like him, to Muslim or Oriental ones. But in all fairness, he recognizes that in spite of its degeneration Freemasonry remains in theory a conduit of genuine initiation.
The most interesting aspect of Guénon’s work lies in his radical criticism of the modern world, to which he opposes the world of Tradition as a positive foil. According to him, traditional civilization,which was realized in the Orient as well as the West—India, Medieval Catholicism, Imperial China, the Islamic Caliphate—rests on metaphysical foundations. It is characterized by the recognition of an order higher than anything human and the authority of elites which draw from this transcendent plane the principles necessary to found an articulated social organization.
This rests on the division of society into four castes or functional classes: at the top representatives of spiritual authority, then a warlike aristocracy, a middle-class of the merchants and craftsmen, and finally the toiling masses. This concept of caste refers obviously to the Hindu, Indo-Aryan system, divided between the Brahmins, Kshatriyas, Vaishyas, and Shudras. In the same way, ancient Iran, Greece, and Rome also had somewhat analogous social organizations, which one finds, moreover, in the political doctrines of Plato. The ultimate revival of this system in the West was the feudal Middle Ages, the clergy corresponding to the Brahmins, the nobility to the Kshatriyas, the third estate with the Vaishyas, and the serfs with the Shudras.
The polar opposition of the world of the Tradition is held to be modern civilization, which is characterized by desacralization, ignorance of all that is higher than man, materialism, frenzied activity.
Two major books, The Crisis of the Modern World (1927) and The Reign of Quantity and the Signs of the Times (1946) contain the essence of this critique, to which one can add East and West (1924), which holds that the only remaining Traditional civilizations are in the East. This led Guénon to move to Cairo in 1930, where he took the identity of Sheik Abdel Wahid Yahia.
The Regression of the Castes
René Guénon was never politically active, although he moved in the Parisian circles of Action française, because he believed that “at present, there is no movement deserving one’s adherence.”
For him, we are at the end of a cycle, in the Kali Yuga or “Dark Age” of the ancient Hindu texts or Hesiod’s “Iron Age.” His interpretation of the course of History as decline, resolutely anti-Marxist and reactionary, rests on the idea of the “regression of the castes.” In quasi-mythical times, society is ruled by sacred Kings ruling by divine right selected from the first caste. This is followed by the reign of the warlike caste, secular monarchs, military chiefs, or lords of temporal justice, which comes about in Europe with the decline of great monarchies. Then comes rule by the third estate, the middle-class, aristocracy giving way to plutocracy. Finally comes rule by the last caste, the working class, which finds its logical conclusion in Communism and Sovietism.
The idea of the regression of the castes was taken up by Julius Evola in his masterpiece, Revolt Against the Modern World, published in 1934. Guénon, moreover, allowed the publication of his writings in the cultural page edited by Evola from 1934 to 1943 in the daily newspaper Il Regime Fascista.
Knowledge and Action
Although Evola is indebted to Guénon in many ways, they differ on one point: the relationship of spiritual authority and temporal power, i.e., priesthood and royalty. In its book Spiritual Authority and Temporal Power published in 1929, Guénon affirms the primacy of the priesthood over royalty. For him, the Brahmin is higher than the Kshatriya because knowledge is higher than action and the “metaphysical” domain higher than the “physical.” Even if the members of the sacerdotal caste no longer appear worthy of their function, the validity in principle of their superiority cannot be denied lest one risk the disintegration of the socio-political system. Evola, however, who thought that Western culture is rooted in a “tradition of warriors,” defends the opposite thesis, claiming that Guénon’s reasoning is marked by “brahmanico-sacerdotal point of view of an Oriental.”
Faithful to his nature as a Brahmin, as a sage, René Guénon was more a witness of the Tradition than an actor in his time, contrary to the Kshatriya, the warrior Julius Evola, the 20th century’s only true rebel against the modern world.
Source: “Un témoin de la Tradition: René Guénon,” http://www.voxnr.com/cc/ds_tradition/EpZpkZVVlAJuBArRHD.s...
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mardi, 16 novembre 2010
The Primordial Tradition: A Tribute to Ananda Coomaraswamy
The Primordial Tradition:
A Tribute to Ananda Coomaraswamy
by Ranjit Fernando
Ex: http://www.freespeechproject.com/
Ananda Coomaraswamy once suggested that Buddhism has been so much admired in the West mainly for what it is not; and he said of Hinduism, that although it had been examined by European scholars for more than a century, a faithful account of it might well be given in the form of a categorical denial of most of the statements that have been made about it, alike by European scholars and by Indians trained in modern modes of thought.
In the same way, it could perhaps be said of Coomaraswamy himself, that he is admired in Lanka, as in India, almost entirely for what he was not, and that a true account of his ideas might well take the form of a denial of most of the statements made about him in the land of his birth.
Coomaraswamy has long been presented, both in India and in Lanka, as a patriot, a famous indologist and art historian, an eminent scholar and orientalist; it would be as well to examine the validity of these widely-held beliefs about a man who was undoubtedly one of the greatest figures of our time.
The subject matter of all Coomaraswamy's mature writings can be placed under one heading, namely, Tradition. The Tradition that he writes about has little to do with the current usage of this term to mean customs or social patterns that have prevailed for some time. Coomaraswamy's theme is the unchanging Primordial and Universal Tradition which, as he shows, was the source from which all the true religions of the present as well as the past came forth, and likewise the forms of all those societies which were molded by religion.
The particular aspect of Tradition which Coomaraswamy chose as his own specialty -- the one best suited to his own talents -- was, of course, the traditional view of art, now mainly associated with the East, but once universally accepted by East and West alike, as also by the civilizations of antiquity and, indeed, by those societies which we are pleased to call primitive. Coomaraswamy never tired of demonstrating that the traditional view of life and of art was always the universal and normal view until the Greeks of the so-called classical period first introduced a view of life and of art fundamentally at variance with the hitherto accepted view.
In his aversion to what has been called 'the Greek miracle', Coomaraswamy is at one with Plato whose attitude to the changes that were taking place in his time was, to say the least, one of the strongest disapproval. Coomaraswamy shows, as Plato did, that the view of life and of art invented and glorified by the Greeks, and subsequently adopted by the Romans was, in the context of the long history of mankind, an abnormal view, an aberration; and that although this view lost its hold on men's minds with the rise of Christendom in the Middle Ages, it was to re-establish itself with greater force at the Renaissance thus becoming responsible for the fundamental ills of the modem world.
In all traditional societies, quite apart from his ability to reason, man was always considered capable of going further and achieving direct, intuitive knowledge of absolute truth which, as the traditionalist writer, Gal Baton says, "carries with it an immediate certainty provided by no other kind of knowledge."
"In the modem world," he continues, "we think in terms of "intellectual progress", by which we mean a progress in the ideas which men formulate with regard to the nature of things; but, from the point of view of traditional knowledge, there can be no progress, except in so far as particular individuals advance from ignorance to reflected or rational know ledge, and from reason to direct intuitive knowledge which, we might add, by its nature cannot be defined, but which, nevertheless stands over and above all other forms of knowledge being nothing less than knowledge itself.
From a traditional point of view, the fault of the Greeks lay in their substitution of the rational faculty for the supra-rational as the highest faculty of man, and in the words of Coomaraswamy's distinguished colleague, Rene Guenon, "it almost seems as if the Greeks, at a moment when they were about to disappear from history, wished to avenge themselves for their incomprehension by imposing on a whole section of mankind the limitations of their own mental horizon." Since the Renaissance, as Baton points out, the modem world has, of course, gone much further than did the Greeks in the denial even of the possibility of a real knowledge which transcends the narrow limits of the individual mentality." Moreover, as we are all aware, that which, from a traditional point of view, appears to be a serious narrowing of horizons, is seen from our modem point of view as an unprecedented intellectual breakthrough!
While it is hardly possible in a brief summary, such as this, to further discuss the issues involved, we might usefully ponder on Plato's story of the subterranean cave where some men have been confined since childhood. These men are familiar only with the shadows cast by a fire upon the dark walls of the cave, which they have all the time to study, and about which they are most knowledgeable. They know nothing of the outside world and therefore do not believe in its existence.
Coomaraswamy, like Plato, would have us realize that we, too, are in darkness like these men, and that we would do well to seek the light of another world above by concerning ourselves with those things, which our ancestors knew and understood so well. He constantly points out, that modem or anti-traditional societies are shaped by the ideas men develop by their own powers of reasoning, there finally being as many sets of ideas as there are men; he also tries to show that traditional societies, on the other hand, were based on perennial ideas of quite another order -ideas of divine origin and revealed -- whereby all the aspects of a society were determined.
A recurrent theme in Coomaraswamy's writings was the traditional view of art. When referring to European art, he repeatedly stressed that Graeco-Roman art and Renaissance art, like all the more modern schools of European art, were of earthly inspiration and therefore of human origin like the philosophies that went with them, whereas traditional art, like traditional philosophy, was related to the metaphysical order and therefore religious in character and divine in origin.
We now see that in his earliest works such as the monumental Medieval Sinhalese Art, Coomaraswamy did not as yet fully understand the difference between these two contrasting points of view which were to form the basis of his later and more significant work; in his early writings, his profound understanding of the traditional arts of Greater India, as indeed his already considerable grasp of the true meaning of religion, was a little clouded with modernistic prejudice, the outcome, no doubt, of his early academic training in England which was of a kind that he had, even then, begun to despise. But later, following his association with the French metaphysician, Rene Guenon, Coomaraswamy's writings assumed the complete correctness of exposition and the great authority, which we associate with his most mature work.
Insofar as we are able to see that a universalist approach to the study of the world's religions, coupled with an understanding of the true meaning of Tradition, have, at the present time, a special importance for the modern world, we shall also see that two men, the Frenchman, Rene Guenon, and Sri Lanka's Ananda Coomaraswamy, stand out as the greatest thinkers of the first half of this century. A great gulf separates their thought from the thought of nearly all their contemporaries. The second half of this century has witnessed the emergence of a whole school founded on their pioneering work and on the Perennial Philosophy, a movement which has found acceptance in many parts of a confused and bewildered world.
It will now be apparent that, if we are to regard Coomaraswamy as an eminent orientalist and art historian, it must first be clearly understood that he stands apart from almost all those other scholars who can be similarly described, in that while they approach the life and art of traditional societies from a modern standpoint {which is both "skeptical and evolutionary", to use his own words), Coomaraswamy, like his few true colleagues and collaborators, takes the view that takes the view that Tradition can only be understood by a careful consideration of its own point of view however inconvenient this may be. Once this is realized, it would certainly be true, not only to say that Coomaraswamy was an eminent scholar but, as Marco Pallis has said, a prince among scholars.
Coomaraswamy saw that a feudal or hierarchical society based on metaphysical principles is essentially superior to the supposedly egalitarian systems held in such high esteem today. Like Plato, he maintained that democracy was one of the worst forms of government, nor did he view any other materialistic system with more favour. His enthusiasm for such institutions as caste and kingship was based, not on sentiment, but on a profound understanding of the vital relationship between spiritual authority and temporal power in society and government. He would hardly have approved of the road which India and Lanka have taken since achieving their so-called independence, although he would have regarded it as inevitable.
It is well known that, from the very beginning, Coomaraswamy deplored the influence of the West on Eastern peoples, and especially the consequences of British rule in Greater India. He has therefore been placed alongside those who in India and Lanka have been regarded as national leaders in the struggle for independence. But here again, a complete difference of approach separates Coomaraswamy from his contemporaries, for it was not imperialism or the domination of one people by another that he was concerned about, but rather the destruction of traditional societies by peoples who had abandoned sacred forms. It was what the British stood for and not the British that he detested; on the contrary, there is no doubt that he loved England because he knew another, older England which in form as well as spirit was so much like the oriental world he understood so well.
It would, in conclusion, be appropriate to quote the words of that highly respected English artist-philosopher, Eric Gill, who in his autobiography paid Coomaraswamy this great tribute:
"There was one person, to whose influence I am deeply grateful; I mean the philosopher and theologian, Ananda Coomaraswamy. Others have written the truth about life and religion and man's work. Others have written good clear English. Others have had the gift of witty exposition. Others have understood the metaphysics of Christianity and others have understood the metaphysics of Hinduism and Buddhism. Others have understood the true significance of erotic drawings and sculptures. Others have seen the relationships of the true and the good and the beautiful. Others have had apparently unlimited learning. Others have loved; others have been kind and generous. But I know of no one else in whom all these gifts and all these powers have been combined. I dare not confess myself his disciple; that would only embarrass him. I can only say that I believe that no other living writer has written the truth in matters of art and life and religion and piety with such wisdom and understanding."
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lundi, 15 novembre 2010
El neoliberalismo, la derecha y lo politico
El neoliberalismo, la derecha y lo político
Jéronimo MOLINA
Ex: http://www.galeon.com/razonespanola/
1. Aquello que con tanta impropiedad como intención se denomina «a la derecha» se ha convertido, como el socialismo utópico y el liberalismo político en el siglo XIX, en el chivo expiatorio de la política superideologizada que se impuso en Europa desde el fin de la I guerra mundial. Entre tanto, «la izquierda», como todo el mundo sabe, se ha erigido en administradora «urbi et orbe» de la culpa y la penitencia del hemisferio político rival. La izquierda, consecuentemente, ha devenido el patrón de la verdad política; así pues, imperando universalmente la opinión pública, su infalibilidad no puede tomarse a broma. Por otro lado, la retahíla de verdades establecidas y neoconceptos políticos alumbrados por el «siglo socialista» no tiene cuento.
Removidas en su dignidad académica las disciplinas políticas polares (el Derecho político y la Filosofía política), caracterizadas por un rigor y una precisión terminológicas que hoy se nos antojan, al menos de momento, inigualables, el problema radical que atenaza al estudioso de la Ciencia política tiene una índole epistemológica, pues las palabras fallan en lo esencial y ni siquiera alcanzan, abusadas, a denunciar realidades. Agotado hasta la médula el lenguaje político de la época contemporánea, nadie que aspire a un mínimo rigor intelectual debe apearse del prejuicio de que «ya nada puede ser lo que parece». En esta actitud espiritual, dolorosamente escéptica por lo demás, descansa probablemente la más incomprendida de las mentalidades políticas, la del Reaccionario, que casi todo el mundo contrapone equívocamente al vicio del pensamiento político conocido como progresismo.
2. En las circunstancias actuales, configuradoras, como recordaba no hace mucho Dalmacio Negro, de una «época estúpida», lo último que se debe hacer, por tanto, es confiar en el sentido inmaculado de las palabras. Todas mienten, algunas incluso matan o, cuando menos, podrían inducir al suicidio colectivo, no ya de un partido o facción, sino de la «unidad política de un pueblo». Hay empero raras excepciones en la semántica política que curiosamente conducen al pensamiento hacia los dominios de la teología política (politische Theologie) cultivada por Carl Schmitt, Alvaro d'Ors y unos pocos más escritores europeos. Parece que en dicha instancia todavía conservan los conceptos su sentido. De la importancia radical de lo teológico político, reñida con la consideración que estos asuntos merecen de una opinión pública adocenada, pueden dar buena cuenta los esfuerzos del llamado republicanismo (Republicanism) para acabar con toda teología política, uno de cuyos postulados trascendentales es que todo poder humano es limitado, lo detente el Amigo del pueblo, el Moloch fiscal, la Administración social de la eurocracia de Bruselas o los guerreros filantrópicos neoyorquinos de la Organización de las Naciones Unidas. Este nuevo republicanismo, ideología cosmopolítica inspirada en el secularismo protestante adonde está llegando en arribada forzosa el socialismo académico, no tiene que ver únicamente con el problema de la forma de gobierno. Alrededor suyo, más bien, se ha urdido un complejo de insospechada potencia intelectual, un internacionalismo usufructuario de los viejos poderes indirectos, cuya fe se abarca con las reiterativas y, como recordaba Michel Villey, antijurídicas declaraciones universales y continentales de derechos humanos. Todo sea para arrumbar la teología política, reducto ultramínimo, junto al realismo y al liberalismo políticos tal vez, de la inteligencia política y la contención del poder. Ahora bien, este republicanismo cosmopolítico, que paradójicamente quiere moralizar una supuesta política desteologizada, no es otra cosa que una política teológica, íncubo famoso y despolitizador progeniado por Augusto Comte con más nobles intenciones.
3. A medida que el mito de la izquierda, el último de los grandes mitos de la vieja política, va desprendiéndose del oropel, los creyentes se ven en la tesitura de racionalizar míticamente el fracaso de su religión política secular. Una salida fácil, bendecida por casi todos, especialmente por los agraciados con alguna canonjía internacional, encuéntrase precisamente en el republicanismo mundial y pacifista, sombra ideológica de la globalización económica. Vergonzantes lectores del Librito Rojo y apóstatas venales de la acción directa predican ahora el amor fraternal en las altas esferas supraestatales y salvan de la opresión a los pueblos oprimidos, recordando a Occidente, una vez más, su obligación de «mourir pour Dantzig!». Estas actitudes pueden dar o acaso continuar el argumento de las vidas personales de los «intelectuales denunciantes», como llamaba Fernández-Carvajal a los «soixante huitards», mas resultan poca cosa para contribuir al sostenimiento de la paz y la armonía mundiales. Tal vez para equilibrar la balanza se ha postulado con grande alarde la «tercera vía», postrera enfermedad infantil del socialismo, como aconsejaría decir el cinismo de Lenin. Ahora bien, esta prestidigitante herejía política se había venido configurando a lo largo del siglo XX, aunque a saltos y como por aluvión. Pero no tiene porvenir esta huida del mito hacia el logos; otra cosa es que el intelectual, obligado por su magisterio, lo crea posible. Esta suerte de aventuras intelectuales termina habitualmente en la formación de ídolos.
Aunque de momento no lo parezca, a juzgar sobre todo por los artistas e intelectuales que marcan la pauta, la izquierda ha dejado ya de ser sujeto de la historia. ¿Cómo se explica, pues, su paradójica huida de los tópicos que constituyen su sustrato histórico? ¿A dónde emigra? ¿Alguien le ha encomendado a la izquierda por otro lado, la custodia de las fronteras de la tradición política europea? La respuesta conduce a la inteligencia de la autoelisión de la derecha.
Suena a paradoja, pero la huida mítico-política de la izquierda contemporánea parece tener como meta el realismo y el liberalismo políticos. Este proceso, iniciado hace casi treinta años con la aparición en Italia de los primeros schmittianos de izquierda, está llamado a marcar la política del primer tercio del siglo XXI. No cabe esperar que pueda ventilarse antes la cuestión de la herencia yacente de la política europea. Ahora bien, lo decisivo aquí, la variable independiente valdría decir, no es el derrotero que marque la izquierda, pues, arrastrada por la inercia, apenas tiene ya libertad de elección. Como en otras coyunturas históricas, heraldos de un tiempo nuevo, lo sustantivo o esencial tendrá que decidir sobre todo lo demás.
El horizonte de las empresas políticas del futuro se dibuja sobre las fronteras del Estado como forma política concreta de una época histórica. El «movimiento», la corrupción que tiraniza todos los asuntos humanos, liga a la «obra de arte» estatal con los avatares de las naciones, de las generaciones y, de manera especial, a los de la elite del poder. La virtud de sus miembros, la entereza de carácter, incluso el ojo clínico político determinan, como advirtió Pareto, el futuro de las instituciones políticas; a veces, como ha sucedido en España, también su pasado.
4. Precisamente, el cinismo sociológico paretiano -a una elite sucede otra elite, a un régimen otro régimen, etcétera- ayuda a comprender mejor la autoelisión de la derecha. La circulación de las elites coincide actualmente con el ocaso de la mentalidad político-ideológica, representada por el izquierdismo y el derechismo. En términos generales, la situación tiene algún parangón con la mutación de la mentalidad político-social, propia del siglo XIX. Entonces, las elites políticas e intelectuales, atenazadas por los remordimientos, evitaron, con muy pocas excepciones, tomar decisiones políticas. Llegó incluso a considerarse ofensivo el marbete «liberal», especialmente después de las miserables polémicas que entre 1870 y 1900 estigmatizaron el liberalismo económico. Son famosas las diatribas con que el socialista de cátedra Gustav Schmoller, factótum de la Universidad alemana, mortificó al pacífico profesor de economía vienés Karl Menger. Así pues, aunque los economistas se mantuvieron beligerantes -escuela de Bastiat y Molinari-, los hombres políticos del momento iniciaron transición al liberalismo social o socialliberalismo. La defección léxica estuvo acompañada de un gran vacío de poder, pues la elite europea había decidido no decidir; entre tanto, los aspirantes a la potestad, devenida res nullius. acostumbrados a desempeñar el papel de poder indirecto, que nada se juega y nada puede perder en el arbitrismo, creyeron que la política era sólo cuestión de buenas intenciones.
El mundo político adolece hoy de un vacío de poder semejante a aquel. La derecha, según es notorio, ha decidido suspender sine die toda decisión, mientras que la izquierda, jugando sus últimas bazas históricas, busca refugio en el plano de la «conciencia crítica de la sociedad». En cierto modo, Daniel Bell ya se ocupó de las consecuencias de este vacío de poder o «anarquía» en su famoso libro Sobre el agotamiento de las ideas políticas en los años cincuenta (1960). Al margen de su preocupación por la configuración de una «organización social que se corresponda con las nuevas formas de la tecnología», asunto entonces en boga, y, así mismo, con independencia de la reiterativa lectura de esta obra miscelánea en el sentido del anuncio del fin de las ideologías, Bell se aproximó a la realidad norteamericana de la izquierda para explicar su premonitorio fracaso. El movimiento socialista, del que dice que fue un sueño ilimitado, «no podía entrar en relación con los problemas específicos de la acción social en el mundo político del aquí y del ahora, del dar y tomar». La aparente ingenuidad de estas palabras condensa empero una verdad política: nada hay que sustituya al poder.
6. El florentinismo político de la izquierda, que en esto, como en otros asuntos, ha tenido grandes maestros, ha distinguido siempre, más o menos abiertamente, entre el poder de mando o poder político en sentido estricto, el poder de gestión o administrativo y el poder cultural, espiritual o indirecto. La derecha, en cambio, más preocupada por la cuestiones sustanciales y no de la mera administración táctica y estratégica de las bazas políticas, ha abordado el asunto del poder desde la óptica de la casuística jurídica política: legitimidad de origen y de ejercicio; reglas de derecho y reglas de aplicación del derecho; etcétera. La izquierda, además, ha sabido desarrollar una extraordinaria sensibilidad para detectar en cada momento la instancia decisiva y neutralizadora de las demás -pues el dominio sobre aquella siempre lleva implícito el usufructo indiscutido de la potestad-. De ahí que nunca haya perdido de vista desde los años 1950 lo que Julien Freund llamó «lo cultural».
En parte por azar, en parte por sentido de la política (ideológica), la izquierda europea más lúcida hace años que ha emprendido su peculiar reconversión a lo político, acaso para no quedarse fuera de la historia. Lo curioso es que este movimiento de la opinión se ha visto favorecido, cuando no alentado, por la «autoelisión de la derecha» o, dicho de otra manera, por la renuncia a lo político practicada sin motivo y contra natura por sus próceres.
La izquierda europea, depositaria del poder cultural y sabedora de la trascendencia del poder de mando, permítese abandonar o entregar magnánimamente a otros el poder de gestión o administrativo, si no hay más remedio y siempre pro tempore, naturalizando el espejismo de que ya no hay grandes decisiones políticas que adoptar. Resulta fascinante, por tanto, desde un punto de vista netamente político, el examen de lo que parece formalmente una repolitización de la izquierda, que en los próximos años, si bien a beneficio de inventario, podría culminar la apropiación intelectual del realismo y del liberalismo políticos, dejando al adversario -neoliberalismo, liberalismo económico, anarcocapitalismo- que se las vea en campo franco y a cuerpo descubierto con la «ciencia triste». Aflorarán entonces las consecuencias del abandono neoliberal de lo político.
Jerónimo Molina
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dimanche, 14 novembre 2010
El organicismo de Maetzu
El organicismo de Maeztu
Pedro Carlos Gonzàlez Cuevas
Ex: http://www.galeon.com/razonespanola/
1. EL CORPORATIVISMO INGLESEn 1912, Maeztu había empezado a interesarse por las ideas sindicalistas y corporativistas que comenzaban a dominar en algunos círculos intelectuales europeos. No encontró, desde luego, el sindicalismo revolucionario de raíz soreliana un simpatizante en Maeztu, quien rechazó de plano sus actitudes violentas y, sobre todo, un irracionalismo tomado de Bergson; era «antiintelectual y antiinteligente», heredero de la «sofistería moderna»1. Se equivocaban, además, Sorel y sus acólitos en la percepción de la realidad social, al sostener, como el marxismo, la visión dicotómica de las clases sociales; lo que suponía, tanto a nivel teórico como práctico, una enorme simplificación, que prescindía de sectores tan decisivos como el campesinado y toda la clase media -comerciantes, industriales, pequeños rentistas, intelectuales, etc.-. El fundamento real del sindicalismo, por el contrario, era la pluralidad de las clases sociales, que, a través de sus organizaciones sindicales, se disponían a defender sus intereses. «Se funda en que las clases sociales son muchas. Y en esta multiplicidad de intereses de clase es necesario precisar y concretar los de la clase obrera, si ha de evitarse que los trabajadores tomen por propios los intereses de otras clases sociales2.
Al lado del sindicalismo revolucionario existía otro, de carácter conservador, defendido en Gran Bretaña por Hilaire Belloc y los hermanos Chesterton; en Francia por León Duguit. Maeztu consideraba a esta tendencia mucho más seria que la anterior. No obstante, rechazaba, por entonces, los planteamientos de Duguit, cuyo «solidarismo» tanto influiría en la gestación de La crisis del humanismo. El corporativismo de Duguit significaba, para el Maeztu todavía liberal, un intento de retorno a la Edad Media, ya que pretendía reducir al individuo a una mera dimensión profesional, aboliendo la individual y política, es decir, la subjetividad, producto de la emancipación lograda desde el Renacimiento3. Chesterton y Belloc eran comparables a Charles Maurras y León Daudet4.
Con todo, tanto los sindicalistas revolucionarios como los conservadores incidían en aspectos reales de la vida social; en particular su insistencia en el carácter objetivo de las clases sociales como portadoras de intereses materiales específicos, que los parlamentos de las sociedades liberales, anclados todavía en una filosofía social profundamente individualista, se obstinaban en ignorar, incluso en marginar: «La idea política se trueca en retórica que cubre un interés; el interés rapaz se cubre con piel de cordero. Todo por no reconocer al hombre su doble carácter de profesional y de hombre, de miembro de una clase y de miembro de la comunidad»5.
Como ya habían propugnado los krausistas, el corporativismo podía servir de correctivo al individualismo liberal; y, por otra parte, a la racionalización del pluralismo social. En ese sentido, Maeztu abogaba por un sistema de tipo bicameral, que diera asiento diferenciado a la representación corporativa. Una de las cámaras se organizaría mediante el sufragio universal; mientras que la otra se basaría en la representación por clases, profesiones y grupos de interés, «hacendados, industriales, comerciantes, labradores, obreros, abogados, médicos, personal pedagógico, etc»6.
A este tipo de corporativismo tampoco era ajeno su contacto con los intelectuales reunidos en torno a la revista «The New Age», que dirigía el antiguo fabiano Alfred Richard Orage; quien, con la ayuda económica del dramaturgo Bernard Shaw, había logrado sacarla a la luz en 19077. «The New Age» se convirtió en el órgano doctrinal del socialismo guildista, iniciado bajo la inspiración de William Morris y John Ruskin; y cuyo origen más próximo se encontraba en los escritos del arquitecto Arthur Joseph Penty, sobre todo en The Restoration of the guild system, en donde abogaba por el retorno del artesanado, y la producción simple bajo la inspiración reguladora de los «gremios». Dos miembros de «The New Age» Samuel George Hobson y Alfred Richard Orage -su director- aprovecharon las ideas de Penty, que también colaboraba en la revista, convirtiéndolas en algo diferente. Ninguno de ellos compartía el medievalismo de Penty; y eran partidarios de las nuevas formas de producción y concebían los gremios como grandes agencias democráticamente controladas para encargarse de la industria8.
El «guildismo» se oponía tanto al marxismo como al socialismo de raíz fabiana, cuyo estatismo rechazaba. Sobre la base de empresas organizadas en cooperativas de producción elevaba un sistema social que confiaba al Estado un papel subsidiario, es decir, el cuidado de las funciones de interés general, dejando la solución de los otros problemas a las comunidades inferiores. Así, las funciones que abandonaba el Estado eran ocupadas por la guilda, que era, en la concepción de Hobson, una asociación de todos los trabajadores, de todas las categorías de la administración, de la dirección y de la producción en la industria. Dentro de la revista existían, sin embargo, diferentes orientaciones y tendencias. Mientras Hobson y Orage defendían una estructura gremial que controlase y organizase la producción bajo la inspección del Estado; otros, como Cole, se mostraban contrarios a la idea de Estado soberano y proponían la doctrina del «pluralismo», basada en el principio de «función»9.
Esta teoría, sobre la que Maeztu edificaría su doctrina de la sociedad defendida en La crisis del humanismo, suponía indudablemente un desafío a las ideas dominantes sobre el sistema demoliberal y el gobierno representativo y, según reconocería el propio Cole, podía armonizarse perfectamente tanto con el liberalismo como con un ideario de carácter antiliberal10.
Para Maeztu, el guildismo era, y así lo expresó en una carta a su amigo Ortega, un auténtico reto intelectual, dado que aún no estaba suficientemente teorizado, tarea que él se proponía abordar: «El socialismo gremial tiene una ventaja y una desventaja. No está aún pensado. Hay que inventarlo»11.
«The New Age» se convirtió en un importante centro de discusión sobre temas económicos, sociales y filosóficos, donde acudían y colaboraban intelectuales de distinta militancia política e ideológica. Allí conoció al poeta Ezra Pound12, a los hermanos Chesterton, Percy Widham Lewis, Hilaire Belloc, Orage, Penty, etc. Maeztu simpatizó con Orage, a quien consideraba un pensador carente de originalidad, pero de gran capacidad de divulgación, que «pulió, fijó y dio esplendor a cuantas percibió y le parecían interesantes por ser nuevas»13. La influencia de Penty fue mucho mayor en Maeztu, sobre todo, por sus críticas a la civilización industrial. Penty le enseñó «la necesidad de restaurar la supremacía del espíritu sobre el culto supersticioso de las máquinas a que fian los modernos sus esperanzas de un mundo mejor»14.
De la misma forma, el «distributismo» de Belloc, que insistía como Penty, en la restauración de la pequeña propiedad, del artesanado y de los gremios, mediante la creación de juntas de oficios y profesiones, tuvo influencia en la ulterior trayectoria política e intelectual de Maeztu. Se trataba del «mayor enemigo que ha encontrado en Inglaterra la propaganda socialista y el defensor más brillante de la única alternativa democrática al colectivismo, a saber: el Estado distributivo, es decir, un Estado en que la riqueza se halle distribuida entre la inmensa mayoria de los ciudadanos»15.
Mención aparte merece, por su impronta en Maeztu, la figura de otro de los colaboradores de «The New Age», el escritor y filósofo Thomas Ernst Hulme. Miembro de una comoda familia, Hulme había nacido en Endon, en 1883; y se educó en prestigiosos colegios de Cambridge, de donde fue expulsado por su carácter pendenciero y bohemio. Luego, residió en Canadá y Bruselas. Amigo de Henri Bergson, gracias a su ayuda logró la readmisión en Cambridge16. Hulme era conocido entonces como traductor de las obras de su amigo Bergson y de las Reflexiones sobre la violencia de George Sorel. Amigo de Ezra Pound y colaborador de «The New Age», su perspectiva ideológica era deudora del intuionismo de Bergson, de las ideas estéticas de Charles Maurras y Pierre Lasserre, y de las críticas de Sorel al hedonismo y relativismo característicos de la sociedad finisecular. Hulme sostenía que la cultura moderna, cuyos orígenes se encontraban en el Renacimiento, llevaba a la Humanidad hacia un callejón sin salida. El humanismo renacentista supuso la eliminación radical del distanciamiento medieval del hombre con la civitas terrena y del mundo natural con respecto al sobrenatural. Y, en consecuencia, su principal error consistió en destruir la objetividad de los valores, interpretándolos «en términos de categorías de vida»; lo que conducía a un peligroso relativismo ético17. Por contra, el pensamiento medieval, a diferencia del humanismo, tenía por base la objetividad de los valores y la imperfección radical del hombre; y ello en virtud de los principios religiosos que le servían de fundamento. A la luz de los principios religiosos, el hombre aparecía, no como la medida de todas las cosas, sino como un ser radicalmente imperfecto, lastrado por el pecado original, al que solo mediante la disciplina y la religión podía conseguirse algo de valor. Ello tenía su manifestación en el arte, en las diferencias entre la vitalidad del arte renacentista y la tendencia a la abstracción del medieval. El resurgir de la abstracción, con su simbolismo geométrico y desantropomorfizado, presagiaba el ocaso del humanismo y la vuelta a los principios tradicionales de servidumbre a supuestos suprahumanos.
Tanto el humanismo como la ética medieval habían sufrido, a lo largo del XVIII y XIX, una renovación, que llevaba a una contínua confrontación entre el romanticismo, como concreción estética y política del sinuoso proceso de desarrollo de la subjetividad que arranca del Renacimiento, y el clasicismo, con su perspectiva pesimista, que llevaba a supuestos políticos de carácter conservador, como habían propugnado Charles Maurras y Pierre Lasserre. En ese sentido, Hulme estaba convencido de que se iba gestando en el interior de la cultura contemporánea un profundo cambio ideológico que llevaba a un renacimiento del espíritu clásico frente a los supuestos relativistas del proyecto de la modernidad; y ello era visible en los escritos de George Sorel: «Hay muchos -señalaba- que empiezan a estar desilusionados de la democracia liberal y pacifista, aunque huyan de la ideología opuesta a causa de sus asociaciones reaccionarias. Para estas gentes, Sorel, revolucionario en economía, pero clásico en ética, puede resultar un liberador»18.
Fiel a sus ideas, Hulme murió luchando en Francia durante la Gran Guerra, cerca de Newport el 28 de septiembre de 1917. Comentando la huella que Hulme dejó en su pensamiento, Maeztu afirmó que su influencia no se redujo al ámbito doctrinal y filosófico; fue importante también su ejemplo de heroismo y valor cívico «sobreponiéndose a las flaquezas de la carne»19.
La huella de Hulme fue perceptible igualmente en figuras cimeras de la intelectualidad inglesa: T.S. Eliot, Ezra Pound, David H. Lawrence, etc20.
2. «LA CRISIS DEL HUMANISMO», O EL APOCALIPSIS DE LA MODERNIDAD
Así, el estallido de la Gran Guerra sorprendió a Maeztu en plena evolución ideológica. Su opción, sin embargo, no fue dudosa, y a pesar de su admiración intelectual por Alemania, estuvo en todo momento a favor de Inglaterra. El vasco nunca dudó de la victoria final de Gran Bretaña y sus aliados: «Inglaterra -dirá a Ortega en una carta- ha estado dormida en estos años, pero empieza a despertar. Y, no lo dude usted, acabará por ganar la guerra»21. No obstante, celebraba que España permaneciese neutral en el conflicto; hecho que atribuyó a la presión de los intelectuales y de las clases populares frente «a la germanofilia de las clases conservadoras22»
Su progresivo cambio de perspectiva ideológica tuvo su concreción en la fundamentación religiosa-católica de su militancia aliadófila. Alemania era la representante de la «herejía germánica», consecuencia directa de la Reforma protestante y su doctrina de la justificación por la fe, frente a la doctrina católica del pecado original y la justificación por las obras. El luteranismo había afirmado la dominación del sujeto en lo relativo a la capacidad de atenerse a sus propias intelecciones; y en consecuencia, dejó al hombre libre de ataduras de orden ético y moral. La consecuencia lógica de aquel proceso fue la independencia del Estado en relación a la autoridad ética de la Iglesia, debido a los principios subjetivistas que le servían de base. Libre de cualquier poder ajeno a sí mismo, se convirtió con Hegel en un valor completamente autónomo; lo cual explicaba la crueldad de los alemanes a lo largo del conflicto23.
Pero la guerra no era sólo producto de esa mentalidad religiosa; y mucho menos de las disputas entre imperios rivales. Ni Francia, ni Gran Bretaña, ni Rusia habían amenazado el poder de Alemania. El estallido de la guerra había sido, muy al contrario, producto de la voluntad de la nobleza, el Ejército y el Kaiser para conservar su hegemonía en el interior de Alemania frente al empuje de la burguesía, los intelectuales y la clase obrera24.
Enviado como corresponsal al frente, Maeztu se mostró, en algunas de sus crónicas, entusiasmado por el espectáculo de la guerra. Y es que pensaba que las consecuencias sociales del conflicto podían ser, a la larga, positivas, porque la convivencia en las trincheras contribuiría poderosamente al establecimiento de vínculos permanentes entre las distintas clases sociales. Además, la guerra enseñaría a «trabajar mejor y más deprisa, y con mejor organización, disciplina y solidaridad25. El propio Ejército se había convertido en el modelo de sociedad jerárquica, estable y disciplinada: «No es lo justo que los hombres desiguales sean tratados como iguales. Lo justo es que se dé lo suyo a cada uno y el respeto a todos. Aquí, en el Ejército, el soldado es soldado y el general es general». Al mismo tiempo, volvía a aparecer en sus escritos el elemento nietzscheano de su juventud. La guerra era incluso un factor de regeneración moral, tanto a nivel individual como colectivo, porque suscitaba el impulso heroico: «El cañoneo entiende la sangre. Se vive como un redoble permanente. Se recupera el sentido de la aventura. Las historias dejan de ser historias. Se es uno mismo historia. Y aunque no se vea nada desde nuestro agujero, se siente uno mismo centro de la Historia»26.
Bajo la impresión del desarrollo del conflicto, Maeztu redactó en 1916, a partir de una serie de escritos publicados en «The New Age» y otros diarios y revistas, Autority, liberty and function in the light of the war, traducido posteriormente, en 1919, al español con el título de La crisis del humanismo. Los principios de autoridad, libertad y función a la luz de la guerra27.
El punto de partida de la obra era la dramática situación en la que se debatían las sociedades europeas, cuya raíz se encontraba en el subjetivismo y relativismo característicos de la modernidad. En el Renacimiento se había generado un sentimiento fuertemente mundano del hombre, que comenzaba a hallarse confinado en la esfera y dimensión de lo puramente corporal, en los acontecimientos vitales; y, en consecuencia, tuvo lugar la aparición de un nuevo tipo de hombre, seguro de su individualidad, que lo define todo, y, por lo tanto, cada vez más alejado de la transcendencia. La individualidad se encontró libre de frenos, y la ética se antropoformizó, relativizándose. El hombre se convirtió, pues, en «un esclavo de sus propias pasiones». Y en este relativismo ético se encuentra la génesis de los dos errores característicos de la modernidad, dominante en las sociedades contemporáneas: el liberalismo y el socialismo. El liberalismo tenía como sustrato el individualismo atomista que no contemplaba otra fuente de certeza y de moralidad que el individuo aislado; sobre la cual era imposible fundamentar una sociedad bien organizada. De la misma forma, el socialismo, a pesar de sus diferencias ideológicas con el liberalismo, tenía su raíz última en el relativismo subjetivista, sustituyendo la arbitrariedad individual por la del Estado, error en el que igualmente habían caído Hegel y la mayoría de la intelligentsia alemana. El proyecto socialista convertía en el único propietario de los medios de producción al Estado, que, de esta forma asumía en relación a la sociedad civil las funciones de juez y parte, encarnados en una burocracia despótica, cuya situación era, en el fondo, análoga, incluso más tiránica, a la de la vieja oligarquía del dinero.
Frente a todo ello, Maeztu propugnaba la superación del relativismo inherente al proyecto de la modernidad, mediante el retorno al principio de la «objetividad de las cosas». Continuando su evolución ideológica iniciada en su interpretación de la filosofía kantiana, en la que, como sabemos, encontró los supuestos absolutos que transcienden a la relatividad asociada al mundo empírico, Maeztu se decide por el intento de renovación de la vieja pretensión ontológica de entender el mundo bajo el signo de un idealismo objetivo y de volver a ensamblar metafísicamente los momentos de la razón disociados en la evolución cultural del mundo moderno, como medio para poner coto a la desintegración de la jerarquía de los valores comúnmente aceptados. Como ya hizo Hulme. Maeztu toma, para ello, de George E. Moore la noción de «bien objetivo», de valor intrínseco de la objetividad de los principios morales. La objetividad de las cosas abre a los hombres el acceso al mundo suprahistórico. Cuando Maeztu hace referencia a la «primacía de las cosas» se refiere a los valores eternos, que se encuentran por encima de la subjetividad y del mundo material, tales como la Verdad, la Justicia, el Amor y el Poder, cuya unidad se encarna en Dios. Desde esta perspectiva, se llega a la conclusión de que el hombre no se encuentra en el mundo para seguir su personal arbitrio, sino como servidor de esos valores objetivos. Tal es el supuesto en el que descansa el «clasicismo cristiano», debelador del romanticismo y del humanismo, de su ilusoria creencia, sobre todo, en la bondad natural del hombre. El catolicismo era consciente de que el optimismo antropológico conducía a la disolución social; y sólo mediante la autoridad que domeñara su naturaleza corrupta, consecuencia del pecado original, podía conseguirse la armonía y la estabilidad.
Sobre la base de esté moral objetiva, era posible edificar una teoría objetiva de la sociedad. Maeztu se sirve para ello, de las aportaciones de León Duguit, en cuanto éste negaba la noción de derecho subjetivo individual y admite los derechos objetivos, nacidos de la función de cada uno en el conjunto social. La organización de la sociedad en torno al principio de «función» puesta al servicio de los valores objetivos conduce a una estructura gremialista. El conflicto entre autoridad y libertad, individuo y sociedad es superado mediante la restauración de los gremios, que servirían de corrección tanto al individualismo anárquico de los liberales como a la burocracia despótica de los socialistas y estatistas.
Maeztu entiende por «gremio» una asociación autónoma e independiente del Estado, en la que se encuentran organizadas todas las clases sociales y grupos de interés. La razón de ser del gremialismo es la pluralidad de clases sociales y sus respectivos intereses. El principio «funcional» comprende todas las actividades del hombre y sanciona cada una de ellas con los derechos correspondientes a la «función». En el reparto de funciones y competencias se encuentra la garantía de las libertades reales. Maeztu se inclina por las tesis propias del «pluralismo» británico frente al concepto de soberanía estatal. No había razón alguna para dar por buena la tesis del poder soberano del Estado, ni nadie que mirara con los ojos la realidad social podía admitir la existencia de la voluntad general de Rousseau o la estatolatría de Hegel. Antes al contrario, la sociedad ofrecía el espectáculo de una multitud de grupos y corporaciones, dueños cada uno de su propia esfera y servidores de sus diversos fines y funciones. De esta forma, Maeztu se muestra partidario de una cierta forma de anarquismo legal, es decir, de la relativa disolución de los poderes del Estado, donde pueden ser ejercidos directamente por los ciudadanos y las instituciones gremiales.
El contenido de La crisis del humanismo en modo alguno pasó inadvertido para sus contemporáneos. Quizá fue Salvador de Madariaga, amigo de Maeztu por aquel entonces e igualmente relacionado con los escritores de «The New Age»28, el primer comentarista de la obra, que no dudó en calificar de «excelente»29. En un sentido igualmente elogioso, se manifestó el escritor catalán Eugenio d'Ors, que vio en La crisis una «excelente y nueva teorización del gremialismo»30. Años después, Antonio Sardinha, líder intelectual del Integralismo Lusitano, la consideró breviario de pensamiento tradicionalista, por su insistencia en el principio del pecado original y en la instauración de un sistema gremial31.
La crisis del humanismo despertó igualmente el interés de los católicos. No era para menos; dado que hasta entonces Maeztu había sido uno de los representantes del liberalismo intelectual en España. Pero la valoración de sus contenidos fue, en gran medida, ambivalente. Así, Rafael García y García de Castro -futuro obispo de Granada- vio en ella el afortunado abandono por parte de Maeztu de los principios liberales; pero también le reprochó una insuficiente asimilación de la dogmática católica. Maeztu valoraba en mayor medida los factores menos transcendentes del catolicismo, es decir, la jerarquía, el culto y la propagación de los sentimientos de identidad y de comunidad. En el fondo, parecía que para Maeztu la religión brotaba más de una «necesidad de coherencia social» que de «las relaciones del hombre con Dios»32.
La crítica de las izquierdas fue más dura. Luis Araquistain le reprochó sus objeciones al socialismo. Lejos de configurar un absolutismo de Estado, era un absolutismo de la sociedad. No obstante, la idea más combatida por Araquistain fue la de objetividad de las cosas y su primacía, cuya consecuencia podía ser, a su juicio, una regresión hacia un sistema de carácter teocrático, «a una civilización como la china, o a una sociedad tan estéril y terrible como algunas congregaciones religiosas»33. Otro socialista, Fernando de los Ríos, se apresuró a dejar bien claro que su interpretación del Renacimiento -sustentada en su obra El sentido humanista del socialismo- era por entero diferente a la de Maeztu. Por otra parte denunciaba el principio de «función» como puramente «formalista», sin contenido real, pues resultaba incompatible tanto con el sistema capitalista como con el socialista34.
Con mayor acritud se expresó el discípulo de Giner de los Ríos e institucionista de pro, Francisco Rivera Pastor, quien, recordando la anterior compenetración de Maeztu con el pensamiento moderno, consideró La crisis como una regresión intelectual. Ahora, Maeztu aparecía como un auténtico tradicionalismta negador del progreso y defensor del pecado original; todo lo cual equivalía políticamente al «ruralismo, a los arcaicos latifundios patriarcalistas, a la concepción pseudoaristocrática de una decadente república platónica…»35.
Más recientemente, La crisis del humanismo ha sido vista, al menos por algunos historiadores del pensamiento español contemporáneo, como precedente ideológico del fascismo e incluso del régimen del general Franco. Así, José María de Areilza calificó la obra como «lejana predicción de los fascismos europeos»36. Posterioremente, Salvador de Madariaga -cuyas alabanzas a La crisis del humanismo ya conocemos- sostendrá una tesis semejante en su discutible ensayo España. La obra de Maeztu era «una de las primeras y mejores definiciones del Estado autoritario funcional que se ha escrito en Europa»; y llama al escritor vasco «precursor del falangismo y aún quizás del fascismo»37. En la misma línea, el historiador marxista Manuel Tuñón de Lara afirma que Maeztu, se adelanta a Mussolini en la concepción de una «sociedad sindicalista»38.
¿Qué decir de tales aseveraciones? Ante todo, destacar su superficialidad. En el caso de Areilza, su opinión era comprensible en un momento, como 1941, de exaltación totalitaria, tras el final de la guerra civil. Madariaga, por su parte, fue siempre un historiador sumamente superficial, que, salvo en su célebre biografía de Bolívar, no pasó del afán divulgativo39. La opinión de Tuñón de Lara, como de costumbre en la obra de este autor, era más política que propiamente historiográfica. Se trataba, en el fondo, de interpretar a Maeztu como fascista; y con él al sistema político nacido de la guerra civil.
En ninguno de los casos, hubo un análisis mínimamente serio de la obra. Y es que, a diferencia de lo sustentado por estos autores, la concepción corporativista de Maeztu dista mucho de ser favorable a cualquier forma de totalitarismo, pues uno de sus aspectos centrales consiste en la limitación del poder estatal, que se reduce, en la práctica, a la función de armonizar la vida social. De hecho, uno de los grandes teóricos del totalitarismo, Carl Schmitt, vio en el guildismo y en el pluralismo británicos, base de la concepción social de Maeztu, una teoría que encubría el dominio político de los «poderes indirectos» frente a la soberanía estatal40.
Por otra parte, las reflexiones de Maeztu se inscribían claramente en la crisis del Estado liberal de Derecho característica del período posterior a la Gran Guerra, que implicó la creación de nuevos marcos institucionales de distribución de poder que llevaban a un desplazamiento en favor de las fuerzas sociales organizadas de la economía y la sociedad en detrimento de un parlamentarismo debilitado41. Como en el resto de Europa, la sociedad española -si bien con cierto retraso, dado su menor desarrollo económico- comenzó a articularse en organizaciones que representaban, desde distintos prismas ideológicos, los diversos grupos e intereses sociales. Este proceso de «corporativización» fue clave tanto por el desarrollo que experimentaron como por el protagonismo que lograron las distintas asociaciones42.
Pedro Carlos González Cuevas
00:10 Publié dans Philosophie, Théorie politique | Lien permanent | Commentaires (1) | Tags : espagne, théorie politique, philosophie, sciences politiques, politologie, conservatisme, droite, droite espagnole | |
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jeudi, 11 novembre 2010
Réflexions archéofuturistes inspirées par la pensée de Giorgio Locchi
Réflexions archéofuturistes inspirées par la pensée de Giorgio Locchi
par Guillaume FAYE
Ex: http://guillaumefayearchive.wordpress.com/
« Ils reviendront ces dieux que tu pleures toujours,
Le temps va ramener l’ordre des anciens jours. »
Gérard de Nerval
J’ai eu deux inspirateurs principaux : Nietzsche et Giorgio Locchi. Le premier, je ne l’ai jamais rencontré, le second, si.
Il est certain que je n’aurais pas pu, dans mes divers ouvrages, de 1980 à 1986, puis surtout depuis 1998, développer certaines vues et expliciter une certaine conception du monde, sans l’étincelle que m’a communiquée Giorgio Locchi, à travers nos très nombreuses conversations et la lecture de ses textes concis et explosifs, dans lesquels, comme chez tout grand maître, chaque mot pèse lourd et demande un temps d’arrêt.
La plupart des intellectuels (à l’apogée de la “nouvelle droite” franco-italienne aujourd’hui pratiquement disparue) qui fréquentaient Giorgio n’ont pas vraiment compris son discours. Ou plutôt, je pense qu’ils ne voulaient pas le comprendre. Ils ne voulaient pas franchir le Rubicon, pénétrer dans ce dangereux territoire de la dissidence absolue. Il n’y a pas que la légendaire paresse intellectuelle parisienne ou les subtils stratagèmes de l‘intelligentsia italienne qui expliquent ce fait, mais une véritable peur d’apparaître comme un délinquant intellectuel.
Car la position posthume de Locchi est étrange. J’ai entendu nombre de ses “disciples” lui décerner de prestigieux lauriers, mais se dérobant toujours quand il s’agissait d’aborder le fond de sa pensée, trop brûlante sans doute. Un philosophe ? Un journaliste ? Un publiciste ? Un penseur ? Pas assez de tout cela. Giorgio Locchi est un éveilleur et un dynamiteur.
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Je pèse mes mots : sans Giorgio Locchi et son oeuvre, qui se mesure à son intensité et non point à sa quantité, et qui reposa aussi sur un patient travail de formation orale, la véritable chaîne de défense de l’identité européenne serait probablement rompue.
Ce bref texte de Giorgio Locchi, d’une exceptionnelle densité conceptuelle, d’une richesse philosophique que peuvent lui envier bien des candidats au statut de “penseur”, présente l’avantage de dévoiler un des centres nerveux de ses analyses. Il parle du “fascisme” non pas comme d’une simple nébuleuse politique, mais comme d’une conception-du-monde totalisante ; non pas comme d’un phénomène circonscrit dans le passé, mais comme d’une sorte de feu allumé dans l’histoire européenne et certainement pas près de s’éteindre. Pour lui, l’essence du fascisme, son moteur intérieur, c’est le renversement historique de l’Égalitarisme au profit de ce qu’il nomme le Surhumanisme.
Il commence par remarquer que le fascisme, militairement vaincu, a toujours été jugé d’un point de vue moral et politiquement peccamineux par ses vainqueurs, mais pratiquement jamais sous un angle historique, philosophique et spirituel, (« vision du monde et référence spirituelle » ainsi que « système de valeurs ») ce qui est pourtant le plus important, sachant que « le “phénomène fasciste” est surtout présent en tant que fantasme de ses adversaires ». Pour Locchi, on peut dire que le fascisme se dépasse lui-même et signifie bien davantage pour le destin européen que les péripéties de mouvements politiques divers. Cette signification du “phénomène fasciste” est un tel tonnerre philosophique pour l’éthique occidentale en décomposition d’aujourd’hui qu’il est totalement occulté.
Pour Locchi, comme pour Adriano Romualdi, l’origine du phénomène fasciste se trouve dans Nietzsche (« la “matrice” du phénomène fasciste [ est] dans le discours de Nietzsche ».) A l’image de ce dernier qui associe mémoire ancestrale pré-chrétienne et avenir audacieux et révolutionnaire, le fascisme, partie constitutive de la Révolution conservatrice, est à la fois « repli sur les origines et projet d’avenir ».
Cette analyse de Locchi m’a frappé, car il m’a semblé que le fascisme était très exactement archéofuturiste, du nom de ce néologisme que j’ai forgé pour intituler un de mes derniers livres. Le fascisme est archéofuturiste parce qu’il veut s’appuyer sur l’archè , le commencement fondateur pré-chrétien des peuples indo-européens, afin de construire une vision du monde et un projet d’avenir post-chrétiens pour notre civilisation.
Pour Locchi, le fascisme est la première expression incarnée du Surhumanisme, dont l’origine remonte principalement à Nietzsche et à Wagner, opposition absolue à l’Égalitarisme des temps modernes, produit déspiritualisé du christianisme et cause principale de la décadence de l’oecoumène européen. Le mouvement fasciste n’a évidemment rien de matérialiste ou de politicien : il vise à instaurer une nouvelle spiritualité (donc communautaire et populaire), une nouvelle forme-de-vie a-chrétienne dans l’avenir, conforme à l’esprit archaïque des anciens cultes grecs, romains ou germaniques ; en opposition radicale, absolue, irréconciliable avec le grand cycle égalitaire commencé avec le christianisme, début de la sémitisation de l’Europe.
On ne peut qu’être frappé par la pertinence de ces vues puisque c’est bel et bien le caritarisme humanitaire et égalitaire chrétien, qu’il soit laïcisé dans la social-démocratie européenne ou encore un peu religieux dans les Églises chrétiennes modernes, qui est le principal ferment de la dégénérescence de l’identité et de la volonté des Européens.
Locchi démontre que le fascisme est, à l’échelle historique, le seul mouvement révolutionnaire et qu’Horkheimer, un des fondateurs du marxisme dissident de l’École de Francfort, avait bien raison d’affirmer que « la révolution ne peut être que fasciste ».
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Locchi inclut le national-socialisme et d’autres mouvements de l’époque dans l’orbe fasciste et ne limite pas celle-là à la doctrine impériale “néo-romaine” de Mussolini ; de même, il estime que, plus ou moins consciemment, depuis Nietzsche et Wagner, avec plus ou moins de pureté et de compromission, les principes généraux du fascisme ont essaimé dans toute l’Europe dans la première moitié du XXe siècle, sous des formes politiques mais aussi métapolitiques et culturelles.
Locchi entend donc l’appellation de “phénomène fasciste”, non pas, étroitement, comme un mouvement politique italien repris dans d’autres pays d’Europe et vaincu par la Seconde guerre mondiale, mais comme un mouvement global de portée historiale, comme le retour transfiguré, métamorphique, d’une conception-du-monde qui s’exprime dans tous les domaines humains, culturels, esthétiques, philosophiques, spirituels, et évidemment sociaux, économiques géopolitiques et politiques. Cette conception-du-monde, à la fois radicalement nouvelle et ancestrale, est en même temps une rupture absolue avec l’Égalitarisme – jugé ferment de décomposition à la manière d’un virus – et une volonté de projeter, de construire dans le présent si possible, mais surtout dans l’avenir un autre monde ; ce dernier, à l’inverse des utopies égalitaires (communistes, libérales, chrétiennes, etc) qui se veulent “rationnelles” mais dont les mondes projetés ne sont que des chimères impraticables qui se terminent en putréfaction et en catastrophes, n’est nullement le fruit d’un ubris “irrationnelle” mais, par le biais du mythe mobilisateur, la réappropriation par les Européens sous des formes nouvelles de leur âme oubliée — et non point perdue. Locchi est le découvreur de ce mythe surhumaniste, rappel aux vrais Européens de leur identité profonde. Cet ultra-monde auquel vise le fascisme est donc à la fois un fantastique défi historique, mais aussi une visée réalisable, à l’inverse des vaticinations anti-vitales (et de ce fait condamnées d’avance par le Tribunal de l’Histoire) de toutes les variations de l’idéologie égalitaire.
Le fascisme est donc une reconstruction métamorphique d’une conception-du-monde et d’une forme de civilisation dont les Européens ont été dépossédés par le virus égalitaire, siècle après siècle, depuis la christianisation de Rome. Sa portée est donc immense et dépasse (bien qu’il l’inclue) le champ des “programmes” politiques.
L’objet du fascisme est en effet bel et bien un changement de civilisation et pas seulement de régime. Il envisage le politique comme une véritable forme d’esthétique historique, la fonction souveraine ayant en charge de modeler sur le long terme et pour l’avenir un destin pour le peuple et un projet pour sa civilisation.
Le fascisme – avec les idéologies qu’il contient – est la seule vision du monde qui s’oppose diamétralement, et sur tous les points, dans les analyses comme dans les visées et les idéaux, à toutes les autres idéologies, qu’elles soient chrétiennes, libérales, sociales-démocrates, marxistes, etc.
Locchi démontre que ces idéologies ne divergent entre elles que superficiellement mais s’accordent sur l’essentiel, l’Égalitarisme, avec ses conséquenses connues : cosmopolitisme, universalisme, individualisme, économisme, pan-mixisme, etc. Elles forment un véritable “parti unique”, articulé en pseudopodes, innervé par la même “pensée unique” ; et le clivage politique, idéologique et philosophique en Europe depuis les années 30 ne sépare nullement la “droite” de la “gauche” (la droite n’étant qu’une gauche modérée et la gauche qu’une droite dissimulée) mais oppose explicitement ou implicitement l’ensemble des familles politiques du Système hégémonique et les courants fascistes avoués ou inavoués. Les conflits entre les droites et les gauches ne sont qu’électoralistes tandis que le conflit entre ces dernières et le fascisme est global et porte sur l’ensemble des valeurs et des visées de civilisation. Seul contre tous, tel est le destin du fascisme. Situation normale puisqu’il est le seul porteur d’un contre-projet radical.
Même s’il ne l’avoue pas toujours, le Système en est parfaitement conscient, puisque depuis les années 30 jusqu’aujourd’hui on voit fort souvent, à chaque crise politique, se constituer des “fronts antifascistes”, nommés en France “Fronts républicains”.(1)
Et c’est bien – entre autres causes – ce qui permet au fascisme de perdurer ; puisqu’il bénéficie de cette situation unique de monopole de l’opposition, qui, en dépit de la diabolisation dont font l’objet les mouvements soupçonnés d’appartenir à cette caverne maudite et peccamineuse, lui confère malgré tout un prestige et une puissance d’attraction secrète (et de recours, surtout en période troublée), qui n’auraient pas existé si le Système se fût abstenu de jeter des anathèmes quasi-religieux sur tout ce qui est supposé être infecté par le Mal fasciste.
Cette diabolisation du fascisme trouve sa cause première dans les atrocités auxquelles se serait livrée l’Allemagne nationale-socialiste avant sa défaite militaire. Mais l’argument tient mal puisque bien d’autres idéologies et systèmes politiques (les régimes communistes, les États-Unis, Israël, l’islamisme, etc.) ont perpétré et commettent des “crimes contre l’humanité” ou des “crimes de guerre” bien avérés, cette fois-ci, et jamais reconnus comme tels, jamais sources de diabolisation. L’anathème contre le fascisme date en réalité des années trente, avant les prétendues “atrocités” allemandes, et fut initié par la Guépéou soviétique, immédiatement relayée par les régimes “démocratiques” occidentaux. Troisièmement, le régime mussolinien n’a été reconnu par les vainqueurs coupable d’aucune exaction satanique, et pourtant il n’échappe pas à l’excommunication.
D’où vient donc cette démonisation du fascisme ? En réalité – et c’est là la cause seconde – elle provient de son idéologie même, en ce qu’elle réfute radicalement les axiomes de l’Égalitarisme et surtout élabore un projet de civilisation considéré comme diabolique et pervers par la cléricature du Système. Il est tout-à-fait normal que l’Égalitarisme s’émeuve et fasse donner son artillerie lourde contre une entreprise politique et civilisationnelle qui ne vise rien moins qu’à mettre fin à son règne plus que millénaire. La conception-du-monde véhiculée par le fascisme est ressentie par les élites du Système non seulement comme un défi majeur, comme une démoniaque tentation à laquelle pourraient succomber les peuples européens (intrinsèquement pécheurs), mais – sincèrement – comme une malédiction, l’incarnation du Mal, barbarie ressurgie du fonds des âges. Les courants fascistes ne sont pas, pour les partis égalitaires, des adversaires strictement politiques qui joueraient le sympathique sport de l’”alternance”, mais – à juste titre – une entreprise séculaire décidée à les éliminer définitivement du champ historique ; et une entreprise qui est déclarée hors-civilisation, c’est-à-dire hors de la civilisation occidentale qui se pense comme la seule digne de ce nom. (2)
L’explication est simple : comme l’a décelé Locchi, l’ensemble des courants égalitaires – même athées – exprime les valeurs et les utopies du christianisme, tandis que, dans la lignée de Nietzsche, l’ensemble des courants du fascisme – même s’ils absorbent des Églises chrétiennes – entend implicitement en revenir à une sensibilité spirituelle et philosophique européenne pré-chrétienne, réactualisée et durcie. Or rien n’est plus fort, plus cristallisateur de haines que les oppositions de nature religieuse ou para-religieuse. La démonisation des courants fascistes par le Système s’apparente assez exactement à la démonisation des cultes païens pendant le Bas-Empire et le Moyen Âge. L’objet du fascisme est plus ou moins consciemment ressenti comme une tentative de rétablir une éthique pré-chrétienne pour un monde post-chrétien à construire ; ce qui constitue une abomination, tant les valeurs de l’égalitarisme chrétien ont été intégrées, digérées, aborbées par l’establishment des pays européens et toute la bourgeoisie “occidentale”.
L’Égalitarisme a parfaitement perçu dans le phénomène fasciste l’ennemi absolu ; il a bien compris que l’ambition du fascisme était de même ampleur que la sienne : devenir la nouvelle conception-du-monde hégémonique en Europe ( en divorçant de manière révolutionnaire les notions d’”Europe” et d’”Occident”) Locchi ne le cache pas et comprend parfaitement cette guerre totale menée au fascisme, en évitant intelligemment de s’en plaindre.
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Quelles sont les principales valeurs partagées par tous les mouvements de la “sphère fasciste” depuis les années trente, et qui font entrer en transes les gardiens du Temple et les gourous de la pudibonderie égalitaire ?
On retiendra :la reconnaissance de l’inégalité de valeur entre les hommes, le différentialisme hiérarchisant entre les peuples, la recherche de l’homogénéité ethnique des nations et le refus des métissages (3 ), l’autarcie économique, l’éthique de l’honneur, l’esthétique codée comme fondement de l’art, l’éducation disciplinaire, le principe de sélection aux mérites et aux talents étendu à toute la société, l’interdiction du capitalisme spéculatif et mondialisé, l’éradication des déviances et des pathologies sociales ou sexuelles (non pas au nom d’une métaphysique mais de principes d’hygiène biologique et éthologique) ( 4), et enfin, plus ou moins consciemment formulée, le recours à la Volonté de Puissance, principe vitaliste de dépassement inégalitaire de la condition humaine, totalement incompatible avec l’humanisme chrétien fondé sur la monade métaphysique de l’Homme ou l’universalisme moral de Kant.
Mentionnons aussi la relativisation du Bien et du Mal et le dynamitage de cette dualité, opérés par Nietzsche, dans la lignée des systèmes moraux de l’Antiquité européenne.
Fascisme : pensée de la totalité, explique Locchi. Car la totalité de la vie du citoyen, dans ses aspects privés, biologiques et lignagiers, festifs et communautaires, professionnels, etc. sont rassemblés en une seule force, au sein de l’énergie commune de son Peuple, entité non plus quantitative et présentiste mais assimilée à un être historique
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Locchi relève qu’aujoud’hui la sphère fasciste, même si elle ne peut dire son nom, est condamnée au silence médiatique, aux persécutions, à l’exclusion. La “barbarie” fasciste n’est pas autre chose que son audace à commettre un crime de lèse-majesté contre les racines de l’humanisme égalitaire, contre sa sôtériologie et son eschatologie, péché capital que jamais le communisme (la vraie barbarie, cette fois-ci) n’avait osé commettre.
Sur le fascisme, en poursuivant la pensée de Locchi, le Règne égalitaire de l’Occident porte le même regard que les chrétiens triomphants du IVe siècle portaient sur la résistance païenne de Julien l’Apostat, que l’Église portait sur les idolâtres amérindiens ou que les Imams portent toujours sur le polythéisme vivant de l’Inde : le Mal absolu, le négationnisme obstiné de la Vérité et du Sens sacré et linéaire-ascendant de l’Histoire, l’hérésie de rejeter la doctrine du Salut – directement chrétienne ou “christianomoprphe” et laïcisée.
L’antifascisme relève donc très exactement de l’anathème, ce qui exclut toute discussion rationnelle et – par effet antidialectique – mine de l’intérieur ce discours antifasciste en conférant en creux au fascisme la légitimité de la contestation, de l’anti-dogmatisme, c’est-à-dire les vertus de la rationnalité grecque (nullement incompatibles avec la mythe), toujours tentantes pour l’âme européenne. Le doute porté par le Surhumanisme sur l’Égalitarisme, par la sphère fasciste sur le Système, est ressenti comme un ébranlement, un coup de poignard, une véritable profanation. Car l’Égalitarisme, lui, n’avait jamais douté de son triomphe. L’antifascisme n’est donc nullement une réaction politique rationnelle, mais une réaction religieuse et métaphysique.
A ce point, deux autres réflexions surgissent. Il s’agit d’abord d’expliquer les causes pour lesquelles le fascisme, issu comme l’a vu Locchi de l’initiation wagnérienne et nietzchéenne, a, dès le départ, été combattu avec une violence désespérée et acharnée par l’Occident égalitaire (dont l’asymptote fut la coalition occidentalo-communiste de la Seconde guerre mondiale). C’est parce que, pour la première fois dans son histoire, depuis la chute de l’authentique Rome impériale, l’ Égalitarisme a vu ressurgir , d’un coup, sans prévenir, comme une horrible surprise, l’Ennemi absolu qu’il croyait mort et enterré. «Le Grand Pan est de retour », écrivait significativement Montherlant dans Le solstice de Juin, au lendemain de la défaite française de juin 1940, dans laquelle il voyait la victoire de la « roue solaire » sur « le Galiléen » ; c’est-à-dire, bien au delà d’un péripétie militaire (car après tout, ce n’était pas la première fois que la France était battue militairement par un voisin), la défaite d’un «principe »(terme locchien) contre un autre que l’on croyait disparu.
Ensuite, demandons-nous pourquoi cette “sphère fasciste” est beaucoup plus combattue, censurée, pénalement poursuivie depuis les années 90 que dans l’immédiat après-guerre où le souvenir de la lutte titanesque et mythifiée contre les fascismes incarnés était encore brûlant.
Première explication : depuis la chute du communisme historique, les deux branches clônées de l’Égalitarisme n’en forment plus qu’une seule, celle du cosmopolitisme capitaliste. Cette dernière ne considère pas l’Islam comme “nouvel ennemi principal”, puisqu’il est lui aussi égalitaire, universaliste et sémitomorphe (5). Reste donc le fascisme, qui redevient le péril principal, bien qu’aucun mouvement ne s’en réclame et bien que les partis soupçonnés de s’en inspirer n’aient pas de prise sur les gouvernements européens.
Ce qui se passe aujourd’hui conforte toutes les prévisions de Locchi. A partir du moment où le Système n’a plus son frère ennemi intérieur communiste, dans les années 90, le fascisme est de nouveau désigné comme le danger absolu. Bien qu’il soit virtuel , il est soupçonné de pouvoir redevenir réel à tout moment, de pouvoir de nouveau mordre sur l’esprit public populaire des Européens de souche, toujours tenus sous surveillance, toujours inculpés de tentation d’hérésie, hantés par le retour à la “barbarie” fasciste. Certains accusent là l’idéologie dominante de “fantasmes”, mais ils se trompent. L’idéologie dominante est perspicace et elle a parfaitement raison de craindre le scénario d’un retour de flammes du fascisme, comme nous le verrons plus loin.
C’est pourquoi l’arsenal juridique sans cesse renforcé, l’assommoir de la propagande médiatique incessante, le martellement d’imprécations culpabilisatrices dirigées contre toute trace de fascisme dans l’Union européenne constituent un imposant appareil de prévention du retour de ce dernier sous une forme nouvelle. Il ne faut pas prendre les maîtres du Système pour des imbéciles.
Et cela nous indique la seconde raison de la reconstitution du “front antifasciste” par les droigauches européennes : car de fait, l’idéologie hégémonique a parfaitement décelé dans la naissance et les percées électorales de divers partis et mouvements identitaires en Europe un inquiétant signal d’alarme. Marginal, circonscrit, contrôlé dans un microscopique bouillon de culture au fond d’un bocal soigneusement caoutchoucté jusque dans les années 80, le virus fasciste, au yeux du Système, a réussi à s’évader de sa prison stérile et prophylactique pour réinfecter des partis et mouvements qui ont pignon sur rue et un début d’accès aux médias (TV notamment) ; et ce, bien que lesdits partis ou mouvements identitaires se gardent de toute référence explicite aux doctrines politiques italiennes et allemandes d’avant-guerre, et prennent la précaution dans leurs programmes (jugée parfaitement hypocrite par les maîtres du Système) d’intégrer des éléments de la vulgate égalitaire.
Le Système, par cet alourdissement des dispositions et propagandes antifascistes, vise également à s’assurer ce que j’appelle une légitimation négative. Un gouvernement se légitime “positivement” lorsqu’il convainc l’électorat de ses mérites, réalisations concrètes, améliorations des conditions de vie, etc. L’entreprise est difficile aujourd’hui pour les gouvernements européens qui peuvent de moins en moins cacher que tous les voyants sont au rouge : situation économique qui s’aggrave, insécurité croissante, colonisation migratoire massive, effondrement des repères culturels autochtones, désastres écologiques divers, soumission humiliante au suzerain américain, etc.
Les gouvernements tentent alors frénétiquement (spécialement en France) de se légitimer “négativement” : c’est nous ou le déluge, c’est notre bonne vieille “démocratie” – certes imparfaite – ou l’Hydre fasciste, la Bête immonde, la pornographie politique et morale, le saccage du Temple des Droits de l’Homme, bref, la Tyrannie aggravée par le péché mortel de l’abomination raciste. De son point de vue, le Système n’a aucun autre moyen que cette légitimation négative (binôme propagande moralisante et culpabilisante / répression judiciaire et exclusion socio-économique des Pécheurs) pour maintenir son pouvoir.
Par “Système”, il ne faut pas entendre seulement les gouvernements et appareils d’État, mais aussi les médias, les Églises, les associations subventionnées, les syndicats, l’Université, le pouvoir judiciaire, les instances culturelles, l’industrie du spectacle, les firmes capitalistes, les pouvoirs financiers etc., tous ligués contre un péril qu’ils estiment à juste titre global : celui d’une vision du monde et d’un mouvement historique qui menace l’ensemble de leurs positions sociales, de leurs idéaux, mais aussi de leurs intérêts.
Une hypothèse eût été que l’Égalitarisme appliquât au fascisme cette célèbre maxime romaine, de minimis non curat praetor, “ le préteur n’a cure des peccadilles”. Mais il ne le pouvait pas, car le fascisme n’est pas une “chose minime”. Giorgio Locchi expose dans son texte qu’il ne vise à rien moins, dans la perspective de l’”énigme” nietzschéenne, qu’« à régénérer l’histoire elle-même en provoquant le Zeitumbruch, la “cassure du temps historique” ».
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Dans son combat antifasciste, le Système se heurte à une délicate contradiction : fondé sur la “démocratie”, il doit mettre plus ou moins entre parenthèses ses grands principes démocratiques pour barrer la route à un éventuel néo-fascisme. Car ce n’est pas la bourgeoisie qui est soupçonnée de constituer l’assise du fascisme, mais bel et bien les peuples autochtones européens des classes moyennes et inférieures, rebaptisées “populace”. Ce qui constitue une rupture avec, par exemple, les analyses des antifascistes de gauche des années trente. D’où une double stratégie : d’une part, abolir concrètement la démocratie (au profit de la technocratie) au niveau de l’Union européenne, qui contrôle déjà 40% des réglementations de tous ordres ; d’autre part, “changer de peuple”, selon la formule de Berthold Brecht : c’est-à-dire submerger les classes moyennes et inférieures européennes autochtones sous un flot de migrants, nouvel électorat qui n’aura plus les tentations peccamineuses d’un “retour aux origines et à l’identité”. Un peuple de mulâtres sans mémoire ni projection d’avenir : voilà l’habile contre-feu allumé par l’Égalitarisme, voila le contre-poison qu’il a logiquement trouvé.
Cette stratégie, reconnaissons-le, est assez bien vue. Le seul problème est qu’elle peut prendre du temps et qu’il s’agit d’une course de vitesse. Oui, une course de vitesse entre l’arrivée à un point de rupture et de basculement où les masses européennes, encore largement majoritaires chez elles, pourront verser dans un post-fascisme de reconquête intérieure, et le moment où une certaine proportion du “peuple” ne sera plus d’origine européenne, donc absoute de toute tentation et privée de toute possibilité de porter sur le trône un avatar du fascisme.
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Mais, se demandera-t-on : pourquoi parler au présent du fascisme et jamais au passé, comme s’il était toujours vivant ? Mais parce qu’il est toujours vivant, et plus que jamais. Locchi l’énonce dans le texte que vous allez lire avec cette notion énigmatique, mais au fond tonitruante de clarté, de catacombes, sur laquelle je vais revenir.
Car il est tout de même extraordinaire qu’un mouvement, écrasé par la guerre, interdit, qui a formellement disparu, continue de faire tant parler de lui et si peur au Système. S’agirait-il d’une sorte de mort-vivant, de fantôme ou d’ectoplasme prêt à se rematérialiser ? De Phénix renaissant de ses cendres ? Le spectre du fascisme hante les gardiens du Temple. Et ils n’ont pas nécessairement tort… D’ailleurs, ses pires ennemis n’ont pas si mal compris que cela sa nature : ils ont bien vu que sa menace existait toujours, que le défunt n’était qu’un ensommeillé en catalepsie, que la chaleur des braises était toujours intacte ; dans la langue de bois inquiète des prêtres du Système, à la fois haineuse et angoissée, on répète depuis plus de cinquante ans ce leitmotiv, d’évidente inspiration biblique : « il est toujours fécond, le ventre de la Bête Immonde ». Cet anathème – qui assimile le fascisme à l’Antéchrist de l’Apocalypse, même chez les penseurs communistes athées – trahit tout de même une certaine lucidité historique.
Car les conditions qui ont présidé à sa naissance au début du XXe siècle, loin de s’atténuer, se sont exacerbées. La progression du virus égalitaire a été telle dans les dernières décennies que la situation des peuples européens se rapproche de ce que les mathématiciens adeptes de la “théorie des catastrophes” (René Thom) appellent le “point de basculement”..
La grande angoisse du Système est qu’il se produise, dans les prochaines années, un cocktail explosif beaucoup plus corsé que dans les années trente qui, par retour du courrier, donnera lieu en Europe à la réémergence d’un second fascisme, nécessairement plus pondéreux que le premier…Cette angoisse, totalement absente jusque dans les années 80, hante aujourd’hui tous les débats idéologiques en Europe de l’ouest.
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L’optimisme tragique de Locchi, qui me fut confirmé en lisant ce bref essai, rejoint parfaitement les positions que j’ai récemment défendues. Pour lui, le fascisme était prématuré et n’était pas mûr parce que la décomposition du système occidental-égalitaire et son niveau de décadence (dans les années Trente) n’était rien par rapport à ce que nous connaissons aujourd’hui et allons vivre.
Il se demande si « les régimes fascistes de la première moitié du XXe siècle [ ne sont pas ] apparus trop tôt, prématurément » et ne doivent pas leur surgissement à « des circonstances fortuites qui, en apparence et seulement en elle, anticipaient le futur prévu par Nietzsche. » Ce dernier, explique Locchi, estimait que son “mouvement” (Bewegung) de subversion (Umwertung) des valeurs égalitaires « ne pouvait s’affirmer que sur les ruines du système social et culturel existant », ce qui n’était pas du tout encore le cas dans les années trente, car « nous savons que le système égalitaire était en réalité encore fort et que, du point de vue nietzschéen, il était loin d’avoir épuisé ses ressources spirituelles et matérielles ».
Aujourd’hui, avec l’accélération du processus viral de dégénérescence, nous percevons que le point de rupture du système égalitaire n’est peut-être plus très loin, ce que j’ai plusieurs fois qualifié de “convergence des catastrophes”. A ce moment là seulement, un vrai fascisme serait mûr et pourrait se déployer dans l’Histoire européenne. Il serait une réponse à la mesure de la tragédie que nous allons peut-être vivre (et que l’Europe n’a encore jamais affrontée), l’ultime et la seule alternative à la pure et simple disparition de notre civilisation.
Bien entendu, un nouvel âge du fascisme ne prendra sans doute pas cette dernière dénomination. Et son visage sera très différent des mouvements des années 20 et 30. Mais l’inspiration et la vision du monde demeureront évidemment les mêmes.
Il se peut que le scénario se déroule comme je l’ai expliqué dans plusieurs de mes ouvrages récents. En ce cas, le fascisme historique ou premier fascisme n’aura été qu’une répétition générale, un premier acte, et nullement un crépuscule des dieux. Locchi : « la position extrême se fait “nihilisme positif” et veut reconstruire sur les ruines de l’Europe un “ordre nouveau” en donnant la vie au “troisième homme” ». Ce troisième homme serait, selon un mouvement de rebondissement dialectique, l’apparition métamorphique et surhumaine (du moins dans ses élites) de l’homme des paganismes gréco-hélléno-germaniques, en dépassement et en négation de l’homme décadent – et abattu par ses propres virus égalitaires, développés lentement dans la longue macération du christianisme.
Autre point, très intempestif mais fort actuel : Locchi, dans cet essai, estime que « depuis 1945, le “fasciste” qui veut conduire une action politique est obligé de la mener sous un faux drapeau et doit renier publiquement les aspects fondamentaux du “discours fasciste”, en sacrifiant verbalement aux principes de l’idéologie démocratique ». C’était vrai jusqu’à une date récente. Ce le sera de moins en moins, compte tenu de l’aggravation des circonstances. On pourra, plus qu’auparavant, critiquer ouvertement les principes du Système – en pleine faillite –, à condition qu’on ait l’intelligence de ne pas faire de références explicites (ou pire, folklo-iconograhiques) aux mouvements fascistes historiques.
Les temps s’approchent où l’on pourra tenir un discours inégalitaire, surhumaniste, révolutionnaire, débarassé de tout attribut visible des fascismes historiques. La censure du Système est beaucoup moins habile et perspicace que l’on croit, parce qu’elle s’attache aux formes plus qu’au fond, qui n’est plus maîtrisé.
Autre réflexion qui va dans le même sens : Locchi a magistralement décelé la cause profonde de l’antifascisme, qui n’a rien de politique, mais tout de philospophique : « [ce] qui commande au camp égalitaire la répression absolue du “fascisme”, [ c’est que ] le “fasciste” ne veut pas cette fin de l’histoire proposée par l’égalitarisme et il agit pour la rendre impossible. » En effet, Locchi fut le premier à mettre en lumière ce qui semble banal aujourd’hui à beaucoup d’intellectuels “identitaires”, mais ne l’était pas du tout auparavant, à savoir que la grande famille égalitaire (judéo-chrétienne, libérale, marxiste, gauchiste et, évidemment musulmane) est cimentée par sa conception escatologique et sôtériologique de l’Histoire, cette dernière étant une ligne segmentaire se dirigeant vers un point final (jugement dernier), terrestre ou metempsychique, où le Bien triomphera.
Tout à l’inverse, la vision surhumaniste de l’Histoire, exprimée par Nietzsche et ressentie par les fascismes, est aléatoire. Locchi est le seul qui l’ait formulée comme « sphérique » ( et non point “cyclique”), en ayant, le seul, compris la notion nietzschéenne d’ « éternel retour du même » – et non pas de l’”identique”. Or, le Système, avec la chute du communisme, voyait enfin approcher cette fin de l’histoire. Et c’est l’inverse qui se produit, en ce début de XXIe siècle. L’argument de diabolisation de la vision du monde fasciste, accusée d’ historicisme, d’anti-progressisme, de refus du Salut, se trouve singulièrement troublé par les événements observables, qui infirment tous l’angélisme eschatologique du Système et le projet égalitaire : l’histoire planétaire (re)devient un chaudron des sorcières et non plus un long fleuve tranquille qui coule vers la mer, Mare Tranquillitatis… La sagesse démocratique, kantienne, d’une société apaisée, multiethnique, etc.mì, n’est pas au rendez-vous. La rationalité égalitaire se dévoile comme utopie irréaliste et l’”irrationalité” fasciste comme conforme au réel.
Parce que ce nouveau siècle s’avère déjà en totale opposition avec tous les projets de l’Égalitarisme ; il sera un siècle de fer, de feu, de sang, de lutte des peuples et des civilisations entre elles, du ressurgissement des mémoires assoupies en forces formidables (regardez l’Islam…), bref il corroborera la conception-du-monde et l’intuition du fascisme au sens large, disons du nietzschéenne, et rendra stupides les rêveries des Pères de l’Église et obsolètes celles de Kant et de ses successeurs des XIXe et XXe siècles (6).
Le XXIe siècle verra, à mon sens, s’effondrer de l’intérieur la branche occidentale de l’Égalitarisme, comme a implosé son rejeton communiste. Un étroit passage sera donc laissé au Surhumanisme européen, où à autre chose qui ne sera plus du tout européen, et menace déjà… Comme dit le proverbe : ça passe ou ça casse . En optimiste tragique, Giorgio Locchi remarque que les héritiers du fascisme vivent encore aujourd’hui « dans les catacombes », mais il laisse entendre qu’on sort aussi des catacombes, comme le fit en son temps le premier christianisme… Chacun son tour.
*************
Je vous demande de conserver précieusement ce texte de Giorgio Locchi, de le lire, le relire, de le faire lire et de le ruminer. Cette préface comme l’introduction et les notes de mon très cher ami Stefano Vaj, ne sont que des écrins, des cadres où s’insère le tableau central. Car la parole de Giorgio Locchi s’écoute ou se lit lentement . On s’en imprègne, on y décèle toujours quelque chose d’imprévu, d’inquiétant, de vrai. Giorgio Locchi ne parle jamais du passé en tant que tel, comme objet mort, mais il a toujours ce clin d’œil vers l’avenir, On découvre chez lui de nouvelles lumières, comme lorsque que l’on regarde attentivement une toile de maître, des lueurs d’aube, des raisons d’espérer. Et de combattre.
Guillaume Faye
NOTES de la PRÉFACE
(1) Le discours de ces “Fronts républicains” est de désigner comme “fascistes” des forces qui dénient farouchement avoir la moindre accointance avec les fascismes historiques, ce qui est sociologiquement et philosphiquement faux, mais évidemment impossible à avouer. C’est là le “drôle de jeu” de cache-cache et de simulacres qui se joue depuis 1945 et qui aboutit à ce que le vocable “fasciste” ne survit que parce que ses plus farouches adversaires l’entretiennent comme un indispensable “chapeau sémantique” afin de ne pas perdre de vue l’ennemi mortel.
Rappelons que le mot “fascisme”, néologisme italien, renvoie aux “faisceaux des licteurs”, gardes-du-corps des magistrats romains (faisceaux de tiges de bois liées par des bandelettes et maintenant un fer de hache au sommet). Ce symbole était aussi présent dans les armoiries républicaines françaises après la Révolution, par référence à la république romaine. Par ce néologisme de “fascisme”, les révolutionnaires italiens voulaient signifier que la nation ne formait plus qu’un seul corps, qu’un seul esprit organiquement liés, rassemblés comme un faisceau d’armes, en une volonté et un destin totalisants.
(2) Même dans les traités de science politique qui se veulent descriptifs et objectifs, le phénomène fasciste est jugé de manière affective, émotionnelle, religieuse. En guise d’anthologie du genre, voici ce qu’on lit sous la plume de Philippe Nemo (Histoire des idées politiques, PUF), mêlant vérité et lucidité historique à des délires métaphysiques (soulignés) : les fascismes représentent des « pratiques anthropologiques radicalement anti-chrétiennes et anti-civiques, qui sont un rejet total non seulement des valeurs et institutions démocratiques et libérales, mais de la civilisation occidentale elle-même […] Ces monstruosités n’étaient viables que quelques décennies, puisque, quand on entend recréer le type même de lien social qui caractérisait les sociétés tribales ou archaïques, on ne peut que régresser vers le niveau de performance de ces dernières. On se place en mauvaise posture pour rester dans la course au progrès scientifique, technologique et économique, etc. » Cette vision libérale, juste sur le caractère anti-chrétien et anti-occidental du fascisme, sombre dans l’idiotie et l’absence de sens critique : car c’est précisément dans les domaines techniques et économiques que les fascismes furent plus performants et futuristes que les démocraties occidentales !
(3) La “nouvelle droite” parisienne a brouillé les cartes du discours “inégalitaire” qu’elle prétendait incarner, par l’invention du concept superficiel d’”ethnopluralisme” et par une interprétation erronée de la notion d’”Empire” (imperium), pas-de-clercs dont Giorgio se gaussait avec un mépris discret.
L’”ethnopluralisme” était de plus en plus entendu (et l’est toujours) par ces intellectuels comme l’utopique cohabitation “communautariste” d’ethnies venues du monde entier en Europe. Ce qui aboutit inévitablement à ce que H.S. Chamberlain appelait le chaos ethnique, projet dissolvant situé en plein cœur de la thématique de l’ Égalitarisme. La seule définition acceptable de l’”ethnopluralisme” eût été celle du “chacun chez soi”, et encore, cette vision fait l’impasse sur l’idée de hiérarchie qualitative entre les peuples qui, qu’on le veuille ou non, est omniprésente dans la conception-du-monde dite “fasciste”.
De même, l’idée d’”Empire” défendue par les intellectuels précités (semblable à celle de l’imperium romanum christianisé) renvoie à un amalgame de peuplades hétérogènes sans liens ethniques, à l’exact opposé de l’idée impériale européenne que défendait Giorgio Locchi et, qu’à sa suite, je poursuis : un rassemblement de peuples apparentés par les liens du sang, de l’histoire et de la culture, unis par une auctoritas supérieure en un destin commun. Les fascismes, dans leur idée d’homogénéité ethnique ne faisaient qu’appliquer le concept rationnel de philia d’Aristote : parenté ethno-culturelle comme fondement de la Cité.
Toutes ces confusions faites par les intellectuels de la mouvance franco-italienne “ND” étaient jugées par Giorgio Locchi, dans les conversations que nous eûmes, – et avant même que cette dérive ne s’aggrave comme aujourd’hui – comme le pathétique effort de gens affectivement et romantiquement tentés et marqués par certains aspects du “fascisme”, pour récupérer les concepts centraux de l’Égalitarisme, pourtant incompatibles ; et ce, dans un but – d’ailleurs manqué – de bienséance politique et sociale. Cette dérive, prévue par Giorgio Locchi, donne aujourd’hui toute sa mesure puisque les intellectuels italiens et français précités se sont constitués objectivement en opposition interne et factice au Système, alignés sur les positions “antimondialistes” simulées de la gauche, muets sur la colonisation migratoire et l’emprise de l’Islam (ou parfois même sournoisement favorables), bref récupérés tout en étant toujours exclus .
(4) Le “racisme”, au sens actuel de doctrine accordant une grande importance à l’anthropologie biologique dans la formation des civilisations et de recherche politique d’une homogénéité ethno-biologique optimale, dont on nous fait croire qu’il était pratiquement l’unique axe doctrinal des fascismes, était en fait depuis le milieu du XIXe siècle très répandu dans beaucoup de courants de toutes tendances. Disraëli, Marx, Engels, Renan étaient parfaitement racistes au sens actuel. On trouve chez Hegel (in Leçons sur la philosophie de l’histoire) des développements sur l’inégalité des races et l’impasse historique des mixages, et chez Voltaire (Dictionnaire philosophique) l’idée constante d’une hiérarchie qualitative des races, qui lui paraissait parfaitement naturelle.
D’ailleurs, sans parler de Gobineau ou de Lapouge, c’est en France (et non pas dans l’Allemagne d’après Fichte) que les théories racistes ont pris naissance, comme corpus structuré. Le mot “race”, au sens contemporain, a été créé par François Bernier en 1684 et le “racisme”, comme contestation de l’unité de l’espèce humaine, date des zoologues Linné, Maupertuis et Buffon. Bref, tout cela pour dire que le “fascisme”, notamment dans sa version allemande, n’à, à aucun moment, inventé doctrinalement le racisme – même chez des auteurs comme Rosenberg et Darré. Bernard-Henry Lévy dans l’Idéologie française l’avait très bien vu et les agités du chauvinisme “républicain” (“La France des Droits de l’Homme au dessus de tout soupçon”) avaient eu tort de le contester. Les concepts fondamentaux dudit racisme ont été élaborés (et notamment au début du XXe siècle, par les Dr Jules Souris et René Martial, de l’Université de Montpellier) par des savants ou théoriciens français, qui étaient en parfaite contradiction avec la prétentieuse posture cosmopolite et universaliste de la “Grande Nation”, mais qui, il est vrai, étaient tous des anti-cléricaux athées donc, quelque part, des non-chrétiens…C’est là toute l’ambiguité de l’”idéologie française”.
D’autre part qui sait ou qui dit que l’interdiction des mariages mixtes n’a été abolie dans 42 États qu’en 1967 par la Cour surprême américaine ? Etc.
Bref, le discours et la pratique raciales ne constituent pas l’originalité monopolistique du phénomène fasciste mais une simple composante.
(5) Certains estiment que l’Islam est un “fascisme vert”, parce qu’il serait inégalitaire. D’où l’attirance exercée par cette religion idéologique sur plusieurs courants égarés des mouvements identitaires, et ce, depuis longtemps (Siegried. Hunke, Claudio Mutti, René Guénon, etc.).
L’Islam, de fait, subordonne la femme à l’homme, soumis le non-converti (dhimmi) au musulman, l’esclave au maître. Mais cet inégalitarisme est parfaitement trivial, esclavagiste, mécaniciste. Il faut être inconséquent pour y voir un quelconque rapport avec le Surhumanisme européen.
L’Islam appartient tout entier au grand courant égalitaire : il vise le Califat universel, l’homogénéité de l’humanité dans une seule “foi”, il prône rigoureusement la même conception du finalisme historique que le christianisme, le judaïsme, le marxisme, le libéralisme, fondée sur la gnôse du Salut. Il professe aussi la croyance en un Bien et un Mal absolus.
(6) On touche là un grand paradoxe : les courants de pensée égalitaires et démocratistes occidentaux et communistes, se réclamant de la rationalité et de la sagesse (vaste imposture et récupération de la philosophie grecque), ont toujours sombré dans l’erreur historique, l’échec utopique, la prédiction jamais réalisée, la furie de la déraison, le dogme et la méconnaissance des faits, des observations anthropologiques et historiques. Tandis que les “fascismes”, accusés d’irrationalité barbare (chamanisme ?) et régressive, ont développé des principes parfaitement observables et conformes à l’expérience : la récurrence des conflits, l’antagonisme ethno-culturel des peuples, l’inégalité des formes de vie, l’homogénéité ethnique comme fondement de la permanence des formes politiques, etc.
Je peux me tromper, évidemment, mais il se pourrait que l’intuition de Giorgio Locchi fût que les «principes » fascistes, en tant que photographies réalistes et sereines de la réalité du monde, n’eussent rien à craindre du Tribunal de l’Histoire et qu’ils triompheront obligatoirement contre l’Égalitarisme. Mais – car il y a un “mais” – vaincre l’Égalitarisme ne suffit pas puisqu’il risque de s’effondrer de lui-même, ce qui a déjà commencé d’ailleurs. Ce n’est pas pour cela que le Surhumanisme, l’intuition nietzschéenne, vaincra dans l’histoire des Européens. Voici le fond de ma pensée : le “phénomène fasciste” aura bientôt le champ libre pour s’imposer, puisque son ennemi héréditaire s’épuise, rongé de l’intérieur par son manque de carburant. Son ennemi ne sera plus que sa propre absence de Volonté de Puissance face aux forces génésiques et conquérantes d’autres peuples. Je crois qu’il faut en revenir à une certaine simplicité de principes, par delà le bien et le mal. Il m’est assez difficile d’en dire plus.
00:05 Publié dans Nouvelle Droite, Philosophie, Réflexions personnelles | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : philosophie, nouvelle droite, guillaume faye, giorgio locchi, nietzschéisme | |
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dimanche, 07 novembre 2010
A Forgotten Thinker On Nation-States vs. Empire
A Forgotten Thinker On Nation-States vs. Empire
Paul Gottfried
Ex: http://www.freespeechproject.com/
German legal theorist Carl Schmitt (1888-1985[!]) has enjoyed a widespread following among European academics and among that part of the European Right that is most resistant to Americanization. In the U.S. it is a different matter. Outside of the editors and readers of Telos magazine, which has heavily featured his work, Schmitt's American groupies are becoming harder and harder to find.
My intellectual biography of this thinker, which Greenwood Press published in 1990, has sold rather badly. An earlier, much denser biography, by Joseph W. Bendersky, put out by Princeton in 1983, obtained a broader market. In the eighties, academically well-connected commentators, including George Schwab, Ellen Kennedy, Gary Ulmen, and Bendersky, built up for Schmitt a scholarly reputation on these shores by trying to relate his thought to then-contemporary political issues. This caused so much concern among American global democrats that The New Republic (August 22, 1988) published a grim tirade by Stephen Holmes against the Schmittian legacy. An echo could be found in the New York Review of Books (May 15, 1997), in a screed by another neoconservative, Mark Lila. Though the Schmitt scholars sent in responses, the New York Review would not publish any of them. Apparently the political conversation in Midtown Manhattan is not broad enough to include non-globalists.
Schmitt is properly criticized for having joined the Nazi Party in May 1933. But he clearly did so for opportunistic reasons. Attempts to draw a straight line between his association with the Party and his writings of the twenties and early thirties, when he was closely associated with the Catholic Center Party, a predecessor of the Christian Democrats, ignore certain inconvenient facts. In 1931 and 1932, Schmitt urged Weimar president Paul von Hindenburg to suppress the Nazi Party and to jail its leaders. He sharply opposed those in the Center Party who thought the Nazis could be tamed if they were forced to form a coalition government. While an authoritarian of the Right, who later had kind words about the caretaker regime of Franco, he never quite made himself into a plausible Nazi. From 1935 on, the SS kept Schmitt under continuing surveillance.
There are two ideas raised in Schmitt's corpus that deserve attention in our elite-decreed multicultural society. In The Concept of the Political (a tract that first appeared in 1927 and was then published in English in 1976 by Rutgers University) Schmitt explains that the friend/enemy distinction is a necessary feature of all political communities. Indeed what defines the "political" as opposed to other human activities is the intensity of feeling toward friends and enemies, or toward one's own and those perceived as hostile outsiders.
This feeling does not cease to exist in the absence of nation-states. Schmitt argued that friend/enemy distinctions had characterized ancient communities and would likely persist in the more and more ideological environment in which nation-states had grown weaker. The European state system, beginning with the end of the Thirty Years War, had in fact provided the immense service of taming the "political."
The subsequent assaults on that system of nation-states, with their specific and limited geopolitical interests, made the Western world a more feverishly political one, a point that Schmitt develops in his postwar magnum opus Nomos der Erde (now being translated for Telos Press by Gary Ulmen). From the French Revolution on, wars were being increasingly fought over moral doctrines - most recently over claims to be representing "human rights." Such a tendency has replicated the mistakes of the Age of Religious Wars. It turned armed force from a means to achieve limited territorial goals, when diplomatic resources fail, to a crusade for universal goodness against a demonized enemy.
A related idea treated by Schmitt is the tendency toward a universal state (a “New World Order”?). Such a tendency seemed closely linked to Anglo-American hegemony, a theme that Schmitt took up in his commentaries during and after the Second World War.
German historians in the early twentieth century had typically drawn comparisons between, on the one side, Germany and Sparta and, on the other, England (and later the U.S.) and Athens - between what they saw as disciplined land powers and mercantile, expansive naval ones. The Anglo-American powers, which relied on naval might, had less of a sense of territorial limits than landed states. Sea-based powers had evolved into empires, from the Athenians onward.
But while Schmitt falls back, at least indirectly, on this already belabored comparison, he also brings up the more telling point: Americans aspire to a world state because they make universal claims for their way of life. They view "liberal democracy" as something they are morally bound to export. They are pushed by ideology, as well as by the nature of their power, toward a universal friend/enemy distinction.
Although in the forties and fifties Schmitt hoped that the devastated nation-state system would be replaced by a new "political pluralism," the creation of spheres of control by regional powers, he also doubted this would work. The post-World War II period brought with it polarization between the Communist bloc and the anti-Communists, led by the U.S. Schmitt clearly feared and detested the Communists. But he also distrusted the American side for personal and analytic reasons. From September 1945 until May 1947, Schmitt had been a prisoner of the American occupational forces in Germany. Though released on the grounds that he played no significant role as a Nazi ideologue, he was traumatized by the experience. Throughout the internment he had been asked to give evidence of his belief in liberal democracy. Unlike the Soviets, in whose zone of occupation he had resided for a while, the Americans seemed to be ideologically driven and not merely vengeful conquerors.
Schmitt came to dread American globalism more deeply than its Soviet form, which he thought to be primitive military despotism allied with Western intellectual faddishness. In the end, he welcomed the "bipolarity" of the Cold War, seeing in Soviet power a means of limiting American "human rights" crusades.
A learned critic of American expansionists, Schmitt did perceive the by-now inescapably ideological character of American politics.
In the post-Cold War era, despite the irritation he arouses among American imperialists, his commentaries seem fresher and more relevant than ever before.
Paul Gottfried is Professor of Humanities at Elizabethtown College, PA. He is the author of After Liberalism and Carl Schmitt: Politics and Theory.
05:05 Publié dans Droit / Constitutions, Philosophie, Révolution conservatrice, Théorie politique | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : droit, philosophie, révolution conservatrice, carl schmitt, théorie politique, sciences politiques, politologie, weimar, etat-nation, grands espaces, géopolitique | |
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samedi, 06 novembre 2010
La solitudine del cittadino globale
La solitudine del cittadino globale
Bauman, Zygmunt, La solitudine del cittadino globale
Feltrinelli, Milano, traduzione dall’inglese di Giovanna Bettini, 2000, 6a ed. 2003, pp. 224, ISBN 88-07-10287-0
(v.o. In search of Politics, Cambridge, Polity Press, 1999)
Recensione di Daneila Floriduz
Le politiche neoliberiste si avvalgono degli attuali processi di globalizzazione per incrementare in maniera pressoché illimitata le libertà personali, di associazione, di pensiero, di espressione. Ma, si chiede Bauman, «quanto è libera la libertà?» (p. 69)?
Parafrasando Isaiah Berlin, Bauman sostiene che la libertà propugnata dal mercato sia negativa, intesa cioè come assenza di limiti e di costrizioni, come deregolamentazione, come «riduzione, sul piano legislativo, dell’interferenza politica nelle scelte umane (meno Stato, più denaro in tasca)» (p. 77). Il mercato non è invece in grado di costruire una «libertà attiva fondata sulla ragione» (ivi), strettamente connessa alla responsabilità individuale, atta a fungere da criterio di scelta e da guida per l’azione, una libertà che sappia coraggiosamente incidere sulla realtà ed elaborare (concettualmente e concretamente) il significato di bene comune. Dopo la caduta del muro di Berlino, il capitalismo si presenta come un dogma, come il paradigma economico vincente perché privo di alternative reali e praticabili. Ne deriva una progressiva erosione della politica a vantaggio dell’economia: come sostiene Bauman, «al centro della crisi attuale del processo politico non è tanto l’assenza di valori o la loro confusione generata dalla loro pluralità, quanto l’assenza di un’istituzione rappresentativa abbastanza potente da legittimare, promuovere e rafforzare qualunque insieme di valori o qualunque gamma di opzioni coerente e coesa» (p. 79).
Ciò conduce a una generalizzata apatia da parte delle istituzioni e dei singoli cittadini, che hanno rinunciato alla prospettiva e alla promessa di “cambiare il mondo”, ad ogni dimensione progettuale, a ogni interrogazione del presente e vivono la «solitudine del conformismo» (p. 12). Tale atteggiamento di indifferenza, sfociante spesso nel cinismo e nel nichilismo, a ben guardare, si fonda su un generalizzato sentimento di disagio esistenziale che può essere sintetizzato con il termine tedesco Unsicherheit, traducibile in inglese in una vasta gamma semantica, che va dall’uncertainty (incertezza), all’insecurity (insicurezza) e unsafety (precarietà). Come si vede, in italiano questi tre sostantivi risultano pressoché sinonimici, mentre per Bauman designano tre tipologie di esperienza piuttosto diverse, pur se convergenti nel terreno comune dell’angoscia e dell’incomunicabilità.
Il termine unsecurity viene esplicitato da Bauman attraverso l’ossimoro «sicurezza insicura» (p. 26): «L’insicurezza odierna assomiglia alla sensazione che potrebbero provare i passeggeri di un aereo nello scoprire che la cabina di pilotaggio è vuota» (p. 28). E’ la situazione che si avverte nel mondo del lavoro, in cui dominano la flessibilità, i contratti a tempo determinato, in cui le aziende chiudono o convertono la produzione ed è impossibile per l’individuo spendere le proprie competenze in un mercato in continua evoluzione e specializzazione. Di qui la sfiducia nella politica, come testimonia il crescente astensionismo che accompagna le consultazioni elettorali nella maggior parte dei Paesi occidentali: la politica interessa solo quando emergono scandali che riguardano personaggi famosi, ma è una politica/spettacolo, non uno spazio pubblico partecipato e sentito dalla collettività. Di qui anche l’inautenticità vissuta nei rapporti con gli altri e con se stessi: citando Milan Kundera, Bauman ricorda come un tempo l’amicizia fosse sacra, eroica, possibile anche tra uomini appartenenti per necessità a schieramenti nemici (I tre moschettieri). Oggi un amico non può salvare l’altro dalla disoccupazione. Anche a livello di identità personale, l’incertezza lavorativa costringe gli uomini a dislocarsi in tanti ruoli o a rifugiarsi nella sfera del virtuale (si pensi alle chat, nelle quali è possibile nascondersi dietro nomi fittizi). Bauman usa, a tal proposito, la metafora dell’uomo modulare: al pari dei mobili componibili, la nostra identità non è determinata alla nascita, ma mutevole, multiforme, sempre aperta a nuove possibilità, sicché l’uomo di oggi «non è senza qualità, ne ha troppe» (p. 160).
La certezza incerta (uncertainty) riguarda i meccanismi stessi del liberismo: «Contrariamente a quanto suggerisce il supporto metafisico della mano invisibile, il mercato non persegue la certezza, né può evocarla, e tanto meno garantirla. Il mercato prospera sull’incertezza (chiamata, di volta in volta, competitività, flessibilità, rischio e ne produce sempre più per il proprio nutrimento» (p. 38). Mentre il temerario giocatore d’azzardo sceglie il rischio come un fatto ludico, l’economia politica dell’incertezza oggi imperante lo impone a tutti come destino ineluttabile. L’uncertainty riguarda «la paura diffusa che emana dall’incertezza umana e il suo condensarsi in paura dell’azione; […] la nuova opacità e impenetrabilità politica del mondo, il mistero che circonda il luogo da cui gli attacchi provengono e in cui si sedimentano come resistenza a credere nella possibilità di opporsi al destino e come sfiducia nei confronti di qualunque proposta di modo di vita alternativo» (p. 176). La precarietà (unsafety) è riconducibile all’intrinseca mortalità propria della condizione umana. «Il viaggiatore non può scegliere quando arrivare né quando partire: nessuno ha scelto di essere inviato nel mondo, né sceglierà il momento in cui partire. L’orario degli arrivi e delle partenze non è compilato dai viaggiatori, e non c’è nulla che essi possano fare per modificarlo» (p. 42). Dalla capacità di reagire e di trovare risposte alla precarietà esistenziale deriva il grado di autonomia che un individuo o una società possono conseguire.
In passato i «ponti per l’eternità» sono stati, di volta in volta, ravvisati nella religione, nella famiglia, nella nazione, intesi come totalità durevoli, capaci di dotare di significato l’esistenza dell’uomo comune che dopo la morte poteva, per così dire, perpetuare la propria esistenza dando la vita per la patria o generando i figli. Le politiche della globalizzazione, imperniate sulla crescita delle multinazionali, tendono a rendere superflui i controlli da parte degli Stati tradizionali e delle amministrazioni locali perché «il capitale fluisce senza vincoli di spazio e tempo, mentre la politica resta territoriale, globale» (p. 123), per cui si potrebbe parlare di «fine della geografia, piuttosto che di fine della storia» (ivi). Se è vero che la nazione, a partire dal Romanticismo, era intesa come un’entità innata, spirituale, come un fatto di sangue, un’appartenenza quasi biologica, è anche vero che questa appartenenza doveva essere rivitalizzata quotidianamente da parte dell’individuo: ciò è richiamato dal celebre detto di Renan, secondo cui «la nazione è il plebiscito di ogni giorno».
Contrariamente a quanto si potrebbe pensare, il nazionalismo è stato funzionale al liberalismo poiché è servito a rimediare alle sue carenze: infatti, laddove il liberalismo «chiude gli occhi di fronte all’atomizzazione prodotta da una libertà personale non completata dall’impegno dei cittadini a ricercare il bene comune dalla loro capacità di agire in conformità con quell’impegno» (p. 168), il nazionalismo chiama invece a raccolta gli individui, parlando loro, ad esempio, di etica e di giustizia, realtà relegate dal liberalismo alla sfera privata.
Anche la famiglia non è più un’istituzione durevole, si sgretola con facilità e, «ormai emancipata dalla sua funzione riproduttiva, l’unione sessuale non dà più la sensazione di una via per l’eternità tracciata dalla natura, di uno strumento per costruire la comunità o di un modo per sfuggire alla solitudine, ma una sensazione diversa, tanto piacevole quanto fugace, destinata a essere consumata in un istante insieme ad altre sensazioni nel succedersi degli episodi che scandiscono la vita del solitario collezionista di sensazioni» (p. 48).
L’io, dunque, non può aspirare più ad alcuna pretesa di immortalità, anzi, si sente vulnerabile, in esubero, sostituibile, incapace di influenzare il corso naturale delle cose. Questo ridimensionamento dell’io è testimoniato dal mutamento semantico subìto dal termine greco psyché, che designa ora la personalità, la mente, l’ego, mentre originariamente indicava l’anima e, dunque, una realtà spesso immortale e trascendente.
Quali spazi di autonomia può, allora, rivendicare un soggetto così depotenziato? Per Bauman l’autonomia odierna ha a che fare piuttosto con l’autoreferenzialità, con una concezione monadologica degli individui, poiché alla privatizzazione sfrenata vigente in economia corrisponde l’autarchia dei sentimenti e del disagio. «Occupati come siamo a difenderci o a tenerci alla larga dalla varietà sempre più ampia di alimenti avvelenati, di sostanze ingrassanti, di esalazioni cancerogene, e dagli innumerevoli acciacchi che minacciano il benessere del corpo, ci resta ben poco tempo [….] per rimuginare tristemente sulla futilità di tutto questo» (p. 50). Si spiega così la fortuna dei prodotti dietetici e delle terapie di gruppo dimagranti (weight watchers) molto diffuse in America: questi gruppi sono comunità che condividono analoghi rituali, ma che affidano all’individuo la risoluzione dei suoi problemi. Questo dimostra che, «una volta privatizzato e affidato alle risorse individuali il compito di affrontare la precarietà dell’esistenza umana, le paure esperite individualmente possono solo essere contate, ma non condivise e fuse in una causa comune e rimodellate nella forma di azione congiunta» (p. 54).
Analoga situazione si verifica nei talk-show: la televisione ha invaso la sfera privata irrompendo come un’intrusa nelle pieghe più intime degli individui per esibirle al vasto pubblico (synopticon); tuttavia «gli individui assistono ai talk-show soli con i loro problemi, e quando lo spettacolo finisce sono immersi ancora di più nella loro solitudine» (p. 71). Il paradosso sta nel fatto che gli individui ricercano queste effimere forme di aggregazione proprio per vincere l’isolamento e invece assistono alla spettacolarizzazione di modelli che si sono affermati a prescindere dalla società: il motto kantiano sapere aude, che è considerato l’atto di nascita dell’Illuminismo, viene tradotto attualmente nell’esaltazione del self-made man.
Questa complessiva carenza di autonomia riverbera le sue lacune nella sfera della cittadinanza. L’epoca della globalizzazione del capitale considera i cittadini quasi unicamente come consumatori, i cui desideri sono creati ad hoc dalla pubblicità e dal mercato. Le società occidentali sono paragonabili ad un negozio di dolciumi, poiché il sovraccarico di bisogni indotti e facilmente appagabili dal consumismo rende la vita «punteggiata di attacchi di nausea e dolori di stomaco» (p. 29), anche se i consumatori «non si curano di un’altra vita – una vita piena di rabbia e autodisprezzo – vissuta da quelli che, avendo le tasche vuote, guardano avidamente ai compratori attraverso la vetrina del negozio» (Ivi). Il consumismo produce nuove povertà: sempre meno persone hanno pari opportunità di istruzione, alimentazione, occupazione. Ci si rivolge ai poveri con compassione e turbamento, si tenta di esorcizzarne le ribellioni, la povertà compare spesso nelle piattaforme programmatiche dei vertici fra le potenze occidentali. In realtà, anche la povertà è funzionale al mercato, perché rappresenta, per così dire, la prova vivente di che cosa significhi essere liberi dall’incertezza, per cui «la vista dei poveri impedisce ai non poveri di immaginare un mondo diverso» (p. 181). Ma Bauman osserva che la parte più ricca della società non può essere liberata «dall’assedio della paura e dell’impotenza se la sua parte più povera non viene affrancata: non è questione di carità, di coscienza e di dovere morale, ma una condizione indispensabile (benché soltanto preliminare) per trasformare il deserto del mercato globale in una repubblica di cittadini liberi» (p. 179). Poiché il lavoro viene inteso esclusivamente come lavoro retribuito, il mercato non si pone la questione del reddito minimo garantito, mentre esso permetterebbe a tutti, non solo ai poveri, di migliorare la qualità della vita dedicandosi anche all’otium, «determinerebbe nuovi criteri etici per la vita della società» (p. 186).
I poveri invece sono spesso criminalizzati, insieme agli stranieri, secondo i riti della ben nota mitologia del capro espiatorio (Girard). La socialità, secondo Bauman, si estrinseca, infatti, «talora in orge di compassione e carità», talaltra in scoppi di aggressività smisurata contro un nemico pubblico appena scoperto» (p. 14). L’ansia collettiva, in attesa di trovare una minaccia tangibile contro cui manifestarsi, si mobilita contro un nemico qualunque. Lo straniero viene identificato tout-court con il criminale che insidia l’incolumità personale dei cittadini e i politici sfruttano questo disagio a fini elettorali. In America la pena di morte è ancora vista come il deterrente principale alla criminalità, sicché «l’opposizione alla pena capitale significa il suicidio politico» (p. 21). Ciò ha condotto al «raffreddamento del pianeta degli uomini» (p. 60): il tessuto della solidarietà umana si sta disgregando rapidamente e le nostre società sono sempre meno accoglienti.
Bauman individua quale strategia risolutiva a questa situazione di disagio il recupero dello spazio privato/pubblico dell’agorà, la società civile. È «lo spazio in cui i problemi privati si connettono in modo significativo, vale a dire non per trarre piaceri narcisistici o per sfruttare a fini terapeutici la scena pubblica, ma per cercare strumenti gestiti collettivamente abbastanza efficaci da sollevare gli individui dalla miseria subita privatamente» (p. 11). Solo nell’agorà è possibile costruire una società autonoma, capace di autocritica, di autoesame, di discussione e ridefinizione del bene comune. «La società autonoma ammette apertamente la mortalità intrinseca di tutte le creazioni e di tutti i tentativi di derivare da quella fragilità non scelta l'opportunità di un'autotrasformazione perpetua, magari anche di un progresso. L'autonomia è uno sforzo congiunto, concertato, di trasformare la mortalità da maledizione in benedizione… Oppure, se si vuole, l'audace tentativo di utilizzare la mortalità delle istituzioni umane per dare vita eterna alla società umana» (p. 88). Gli intellettuali dovrebbero riappropriarsi della politica, inseguire le «tracce di paideia» (p. 104) disseminate qua e là all’interno della società civile, riformare, educare, stimolare, evitando di arroccarsi in una filosofia lontana dall’uso comune del linguaggio e del logos.
La riconquista dell’autonomia deve passare attraverso gli individui poiché «non esiste autonomia sociale senza quella dei singoli membri di una società» (p. 140). In un’epoca in cui le ideologie, sia in senso settecentesco che marxista sono in crisi, in un’epoca in cui la stessa idea di crisi non designa più, secondo l’originario significato medico, un’evoluzione cruciale positiva o negativa, ma un disagio complessivo della civiltà, è necessario che le istituzioni recuperino il potere decisionale che spetta loro. Solo nell’agorà è possibile recuperare il valore delle differenze: spesso, infatti, si confonde la crisi dei valori con la loro molteplicità e abbondanza, ma «se la molteplicità dei valori che richiedono un giudizio e una scelta è il segno di una crisi dei valori, allora dobbiamo accettare che tale crisi sia una dimora naturale della moralità: soltanto in quella dimora la libertà, l’autonomia, la responsabilità e il giudizio […] possono crescere e maturare» (p. 153). La globalizzazione ha sostituito l’universalismo e la reciprocità tra le nazioni; d’altra parte appare fuorviante anche il termine multiculturalismo, spesso usato dai sociologi, perché «suggerisce che l’appartenenza a una cultura non sia una scelta, ma un dato di fatto […] implica tacitamente che essere inseriti in una totalità culturale è il modo naturale, e dunque presumibilmente sano, di essere-nel-mondo, mentre tutte le altre condizioni – lo stare all’incrocio delle culture, l’attingere contemporaneamente a differenti culture o anche soltanto l’ignorare l’ambivalenza culturale della propria posizione – sono condizioni anomale» (p. 200). L’agorà non è nemica della differenza, non esige di abdicare alla propria identità culturale. Solo all’interno dell’agorà è possibile acquisire il valore della diversità come arricchimento dell’identità individuale e sociale.
Bibliografia citata
- Berlin Isaiah, Two Concepts of Liberty, in Four Essays on Liberty, Oxford, Oxford UP, 1982
(tr. it. in Quattro saggi sulla libertà, Feltrinelli, Milano 1989)
- Girard, René, Le bouc missaire, Paris, Editions Grasset & Pasquelle, 1982.
(tr. it., Il capro espiatorio, Adelphi, Milano, 1987)
- Kundera, Milan, L’identité, Milan Kundera, Paris, 1997
( tr. it., L’identità, Milano, Adelphi, 1997)
Indice
Ringraziamenti - Introduzione
1. In cerca dello spazio pubblico: Un tipo sospetto si aggira nei dintorni; Il calderone dell'Unsicherheit; Sicurezza insicura; Certezza incerta; Incolumità a rischio; Paure che cambiano; Il raffreddamento del pianeta degli uomini.
2. In cerca di rappresentanze: Paura e riso; Quanto è libera la libertà?; La decostruzione della politica; Dove privato e pubblico si incontrano; L'attacco all'agorà: le due invasioni; Tracce di paideia.
Primo excursus. L'ideologia nel mondo postmoderno; Il concetto essenzialmente controverso; La realtà essenzialmente controversa; Il mondo non più essenzialmente controverso.
Secondo excursus. Tradizione e autonomia nel mondo postmoderno. Terzo excursus. La postmodernità e le crisi morale e culturale
3. In cerca di modelli: La seconda riforma e l'emergere dell'uomo modulare; Tribù, nazione e repubblica; Democrazia liberale e repubblica; Un bivio; L'economia politica dell'incertezza; La causa dell'uguaglianza nel mondo dell'incertezza; Le ragioni del reddito minimo garantito; Richiamare l'universalismo dall'esilio; Multiculturalismo - o polivalenza culturale?; Vivere insieme nel mondo delle differenze
Note - Postfazione di Alessandro Dal Lago - Indice analitico
L'autore
Zygmunt Bauman è professore emerito di Sociologia nelle Università di Leeds e Varsavia. Tra le sue opere recenti tradotte in italiano: Modernità e Olocausto (1992), Il teatro dell'immortalità Mortalità, immortalità e altre strategie di vita (1995), Le sfide dell'etica (1996), La società dell'incertezza (1999), Dentro la globalizzazione. Le conseguenze sulle persone (1999), Modernità liquida (2002), La società individualizzata (2002).
Link
www.alice.it/news/news/n20030911.htm
Sito in lingua italiana, contiene interviste allo stesso Bauman, ma anche a scrittori quali Grossman e Arundhati Roy
Siti in lingua inglese, tracciano un profilo dell’attività sociologica di Bauman:
www.tcd.ie/Sociology/readinglist/sfsociologicalimagination.htm
www.inter-disciplinary.net/mso/dd/dd2/s2.htm
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Ezra Pound and the Occult
Ezra Pound and the Occult
Brian Ballentine
In 1907, when Ezra Pound was still teaching Romance languages at Wabash
College in Indiana, he completed the poem "In Durance":
I am homesick after mine own kind
And ordinary people touch me not.
Yea, I am homesick
After mine own kind that know, and feel
And have some breath for beauty and the arts (King 86).
Pound left America and its "ordinary people" behind for Europe shortly after. When he arrived in London in 1908, Pound wasted no time becoming a part of the community of writers which he considered his "own kind." He was quickly running among the more prestigious of London’s literary society including members from the Rhymer’s Club and W. B. Yeats’s publisher Elkin Mathews. Of course, it was Yeats’s association that Pound truly desired and successfully sought out. In Poetry 1, Pound begins his "Status Rerum" by declaring that he found "Mr. Yeats the only poet worthy of serious study" (123). Pound would eventually be content to condense his esoteric community of cutting edge writers down to two men: himself and Yeats. In 1913 he wrote Harriet Monroe proclaiming that London’s writers are divided into two groups: "Yeats and I in one class, and everybody else in the other" ("Status Rerum" 123).When Pound first met Yeats, the older poet was heavily involved and experimenting with theurgy, or magic, that is performed with the aid of beneficent spirits. This form of occult study was not at all of interest to Pound. Shortly after their introduction, it was arranged for Pound to serve as Yeats’s "secretary" at the winter retreat Stone Cottage. Not trying to hide his skepticism , Pound wrote this letter to his mother just prior to his first winter with Yeats at Stone Cottage:
My stay at Stone Cottage will not be in the least profitable. I detest
the country. Yeats will amuse me part of the time and bore me to
death with psychical research the rest. I regard the visit as a duty to
posterity (Paige 25).
The purpose of this research is to expose the various types of occultism that were prevalent during Pound's life and determine what elements of the occult he subscribed to. Although there are signs of an occult influence all the way through his later writing, Pound’s own stance on the occult is difficult to pin down. Pound’s own belief in the occult was one that was constantly being rethought and revised. There are moments when Pound was on the brink of exploration into Yeats’s world of spirits as well as moments when he was ready to abandon the occult altogether. Pound’s exploration of "retro-cognition," his revitalization
of the Greek idea of the "phantastikon," his pursuit of gnosis or what he termed a "crystal" state, and his associations with some of London’s premiere occultists provide evidence for the former. The latter is demonstrated in his revisions on the original 1917 Three Cantos and his apparent desire to be disassociated with the "pseudo-sciences" of the occult. Much of the occult element that dominated the original publication has been edited entirely out of the final and existing copy. In any case, much of Pound’s writing is indebted to an occult influence and it will be explored in this paper.
In his essay "Ezra Pound’s Occult Education," Demetres Tryphonopoulos warns other critics not to view Pound’s skeptical letter to his mother as a rejection towards all forms of the occult. He states that "it is only theurgy and spiritualism that Pound rejects" (76). These "pseudo-sciences" are what Tryphonopoulos believes to be "the areas of human interest which many true occultists would reject as involving the degradation of humanity" ("Occult Education" 74). Yeats’s other interests in astrology and numerology, both of which were popular in the early twentieth century, are also included among the "pseudo-sciences." Occult studies such as gnosticism and theosophy are understood as legitimate pursuits by scholars like Tryphonopoulos. Gnosis, an esoteric form of knowledge that made possible the direct awareness of the Divine, was one of Pound’s major interests with the occult. James Longenbach argues that Pound labored over creating a "priest-like status" for himself and his work (92). The quest for becoming as close to God as possible led Pound on a long exploration of occult texts. According to Walter Baumann, Pound’s quest drove him to "provide further ingredients for [his] own vision of Paradise" (311). These esoteric components or "ingredients" then become the source of much difficulty in understanding Pound’s work. To date only a few scholars have made the occult element in Pound’s work more accessible and in the past only people "deeply steeped in occult literature" could successfully navigate his writing (Baumann 318). Pound never came so far around as to accept Yeats’s interests in what he considered less useful facets of the occult, but he would humor Yeats. The older poet was also interested in astrology and asked Pound for his birth date so he could determine his horoscope. In a letter to Dorothy Shakespear Pound exclaimed:
The Eagle [Yeats] is welcomed to my dashed horoscope tho’ I
think Horace was on the better track when he wrote
"Tu ne quaesaris, scire nefas, quem
mihi quem tibi
Finem dii dederunt" (Litz 113).
[Ask not, we cannot know, what ends the gods have set for me, for thee]
Despite Pound’s show of pessimism, he provided Yeats with all of the necessary information, which included writing a letter to his mother for the exact time of his birth. He told his mother that "half a million people, some of them intelligent, who still believe in the possibility of planetary influences . . . When astrology is taken hold of systematically by modern science there will be some sort of discoveries. In the meantime there is no reason why one should not indulge in private experiment and investigation (Paige 152).A subject of particular interest to both men is something that psychologists today have termed "retro-cognition." Yeats, Pound and the rest of England received their introduction to this phenomenon when Anne Moberly and Eleanor Jourdain published An Adventure in 1911. On August 10, 1901 the two women claimed to have been strolling through the Versailles gardens and found themselves transported back into the eighteenth century. Apparently, neither of them had realized what had occurred at the time but recounted the experience in a narrative:
We walked briskly forward, talking as before, but from the moment we left the lane an
extraordinary depression had come over me. . . In front of us was a wood, within which,
and overshadowed by trees, was a light garden kiosk, circular and like a small bandstand,
by which a man was sitting. There was no greensward, but the ground was covered by
rough grass and dead leaves as in a wood. The place was so shut that we could not see
beyond it. Everything suddenly looked unnatural, therefore unpleasant; even the trees
behind the building seemed to have become flat and lifeless, like a wood worked in a
tapestry (41).
Ten years of research in the French National Archives led them to believe that all the things they saw that day existed not in 1901 but in 1789. Also, they determined the person Moberly saw by the terrace, who is referred to as a "man" in the narrative, to be Marie Antoinette (Longenbach 222-23).Shortly after the publication of An Adventure, Yeats completed two essays for Lady Gregory’s Visions and Beliefs in the West of Ireland. In his essays, Yeats references An Adventure, making it highly probable that the two men had possession of the book during the Stone Cottage years if not sooner. An Adventure became an important beginning for the work of Pound and how the artist can relate to the spirit of his ancestors. The key to these relations with the past is the soul. Pound borrowed from a lot of different sources to derive his own theories on the human soul. He used Cicero’s idea of the "immortality of the soul" in De Senectute (Longenbach 222-23).He also borrowed from Plato and the Phaedrus in the Spirit of Romance: "And this is the recollection of those things which our souls saw when in company with God-when looking down from above on that which we now call being, and upward toward the true being" (140-41). Pound himself claimed to have had two experiences with retrocognition which were extremely important to him. As Longenbach writes, "Pound’s poetic goal was the cultivation of ‘adventures,’ the soul’s visionary memories of the paradise or the past it once knew" (229).Pound recounts his own experiences with retrocognition in an essay on Arnold Dolmetsch published in 1914. "So I had two sets of adventures. First, I perceived a sound which was undoubtedly derived from the Gods, and then I found myself in a reconstructed century- in a century of music, back before Mozart or Purcell, listening to clear music, to tones clear as brown amber" (Eliot 433). Pound was drawing on or participating in what he determined to be the soul’s eternal memory. His essay begins with a description of his first adventure:
I have seen the God Pan and it was in this manner: I heard a bewildering and pervasive music moving from precision to precision within itself. Then I heard a different music, hollow and laughing. Then I looked up and saw two eyes like the eyes of a wood- creature peering at me over a brown tube of wood. Then someone said: Yes, once I was playing a fiddle in the forest and I walked into a wasps’ nest. Comparing these things with what I can read of the Earliest and best authenticated appearances of Pan, I can but conclude that they relate to similar experiences. It is true that I found myself later in a room covered with pictures of what we now call ancient instruments, and that when I picked up the brown tube of wood I found that it had ivory rings upon it. And no proper reed has ivory rings on it, by nature. . . .Our only measure of truth is, however, our own perception of truth. The undeniable tradition of metamorphoses teaches us that things do not remain always the same. They become other things by swift and unanalysable process (Eliot 431).
Pound’s own understanding of truth and what he perceived to be his reality are bold advancements from what was presented in the original An Adventure. The visionary’s experience becomes the sole measure of reality and therefore Pound’s encounter with Dolmetsch as Pan becomes factual. In his essay, "Psychology and Troubadours," Pound draws a parallel between himself and early visionaries who had no way of differentiating imaginary visions from a "real" environment: "These things are for them real" (Spirit of Romance 93). Also, although Pound’s adventures and experiences cannot technically be affirmed in any way, they "stand in a long tradition of similar experiences recorded in the literature of folklore, mythology, and the occult" (Longenbach 230). In the essay on Dolmetsch, Pound works to place himself in this tradition when he writes: "When any man is able, by a pattern of notes or by an arrangement of planes or colours, to throw us back into the age of truth, everyone who has been cast back into that age of truth for one instant gives honour to the spell which has worked, to the witch-work or the art-work, or whatever you like to call it" (Eliot 432). Like Moberly and Jourdain, who had peered into the past and subsequently took ten years to write about it, Pound was wrestling with putting his visions into poetry. The "arrangement of planes or colours," the "art-work" which "throws us back into the age of truth" is what Pound wanted to create with the early Cantos. Pound began writing the first of the Cantos around 1910 but did not pursue them in earnest until 1915. It was during this time that Pound is documented in his letters as having read Robert Browning’s poem "Sordello" out loud to Yeats at Stone Cottage. Although Pound had read the poem before, it was not until he read it to Yeats that "Sordello" became a major influence. He praises the poem in a letter to his father on December 18, 1915: "It is probably the greatest poem in English. Certainly the best long poem since Chaucer. You’ll have to read it sometime as my big long endless poem that I am now struggling with starts out with a barrel full of allusions to ‘Sordello’" (Bornstein 119-20). However, the original support Pound relied on from Browning would soon be replaced with occult references. In the June, July and August 1917 edition of Poetry Magazine, Pound published his Three Cantos. These three were supposed to be the beginning of his existing long work The Cantos. Even after the highly positive review of Browning’s poem to his father, Pound would have nothing to do with Browning’s style. The original opening, which served more or less as a dialogue with Browning, is deceiving. Pound makes no effort to sustain Browning’s technique through his poem. It does not function in a lyric mode, rather it is an "apologia for the lyric mood" (Nassar 12). Pound began to question Browning’s elaborate metaphor for the stage and his character’s acting on it. Pound did not hide his "aesthetic and philosophic problems" (Nassar 13) that he had with Browning when he wrote:
. . . what were the use
Of setting figures up and breathing life upon them,
Were’t not our life, your life, my life extended?
I walk Verona. (I am here in England.)
I see Can Grande. (Can see whom you will.)
You had one whole man?
And I have many fragments, less worth? Less worth?
Ah, had you quit my age, quit such a beastly age and
cantankerous age?
You had some basis, had some set belief (Poetry, June 1917, 115).
As if to answer his own question, and provide Browning with proper examples, Pound continued with passages in the mode of An Adventure. The only way to contain the "beastly and cantankerous age" in which one lived was to tap into the past as Moberly and Jordain had done.
Sweet lie!-Was I there truly? . . .
Let’s believe it . . .
No, take it all for lies
I have but smelt this life, a wiff of it-
. . . And shall I claim;
Confuse my own phantastikon,
Or say the filmy shell that circumscribes me
Contains the actual sun;
confuse the thing I see
With actual gods behind me?
Are they gods behind me?
How many worlds we have! If Botticelli
Brings her ashore on that great cockle-shell-
His Venus (Simonetta?),
And Spring and Aufidus fill the air
With their clear outlined blossoms?
World enough.
(Poetry, June 1917, 120-21)
Eugene Nassar claims that Pound demonstrated the "mind circumscribed by its diaphanous film-its limits-[which] imagines gods when in the presence of beauty . . . The mind as ‘phantastikon’ may be intuiting transcendent truths" (12). Pound wrestled with the "truth" about his occult link to the past in his revisions on Three Cantos all the way up until its republication in 1925. The once long opening addressed to Browning was reduced to the opening four lines of Canto II:
Hang it all, Robert Browning, There can be but the one Sordello. But Sordello and my Sordello? Lo Sordels si fo di Mantovana" (6).Following the address to Browning, Pound presents his vision of his characters or in this case "Ghosts" that "move about me / Patched with histories" (Poetry 116). There is no need for Pound to go "setting up figures and breathing life into them" because his characters were already part of a living past. Pound’s "fragments" are in fact not "less worth" because together they form a more complete whole than Browning’s characters. Pound sees these apparitions hovering over the water at Lake Garda. As with his Imagist poetry, these early portions of the Cantos reflect Pound’s attention to presenting the clearest possible picture of his experience:
And the place is full of spirits.
Not lemures, not dark and shadowy ghosts,
But the ancient living, wood white,
Smooth as the inner bark, and firm of aspect,
And all agleam with colors-no, not agleam,
But colored like the lake and like the olive leaves (Poetry June 1917, 116).
Pound used specific people and places, such as Lake Garda, to set up a desired historical backdrop. Often with Pound, the more oblique source was championed. The names are obscure and esoteric, leaving "ordinary people" in the dark just as Pound intended. Pound’s references to antiquated places, his use of foreign language, all in addition to his occult content, contribute to a higher level of difficulty in his poetry:
‘Tis the first light-not half light-Panisks
And oak-girls and the Maenads
Have all the wood. Our olive Sirmio
Lies in its burnished mirror, and the Mounts Balde and Riva
Are alive with song, and all the leaves are full of voices (Poetry June 1917,118).
The visionary experiences that Pound recreates in the Three Cantos are matched with these areas to "emphasize their origin in the meeting of a particular consciousness with a particular place" (Longenbach 232). This association was a technique that Pound had already begun experimenting with in some of his writing such as "Provincia Deserta." Yeats put it into his own words in a portion of his prose piece Per Amica Silentia Lunae: "Spiritism . . . will have it that we may see at certain roads and in certain houses old murders acted over again, and in certain fields dead huntsmen riding with horse and hound, or in ancient armies fighting above bones or ashes" (354). The spirits that haunt Pound’s Cantos are ones which he spent much time excavating from history during his reading at Stone Cottage. Also, Pound used specific names and places from his research to create a sense of locality. In the first Canto it was places such as Sirmio, and in the second there were others such as the Dordogne valley in France:
So the murk opens.
Dordogne! When I was there,
There came a centaur, spying the land,
And there were nymphs behind him.
Or going on the road by Salisbury
Procession on procession-
For that road was full of peoples,
Ancient in various days, long years between them.
Ply over ply of life still wraps the earth here.
Catch at Dordoigne (Poetry July 1917, 182).
At the same time that Pound was struggling with the original Three Cantos, Yeats was preparing his own take on An Adventure. The older poet was busy formulating what he called the "doctrine of the mask" (Autobiography 102). According to Yeats, this doctrine "which has convinced [him] that every passionate man . . . is, as it were, linked with another age, historical or imaginary, where alone he finds images that rouse his energy" (Autobiography 102). Yeats’s link to the past came in a voice which he claimed to have heard for awhile but ignored. The voice even provided him with information leading to its identity. Yeats discovered that he was communicating with a Cordovan Moor named Leo Africanus. However, he did not take Leo seriously until a seance conducted on July 20, 1915. After the seance, Yeats began to consider the possibility of an anti-self existing from another period of time. Communication with this opposite personality would lead to a more complete existence as well as a better understanding of the self. Yeats began writing letters to Leo and in turn would write letters back to himself believing that Leo’s intentions could be conveyed through him. Now that Yeat’s theory had advanced to a stage where his opposite existed in another century, his idea advanced from one that was grounded in psychology to a theory that had just as much to do with history (Longenbach 190-91). There is no documented proof of Pound ever participating in one of Yeats’s seances. Despite Pound’s lack of involvement, it is impossible to overlook the parallels between the two poets work at the time. Pound was using his own ghosts and their historical associations in his early Cantos. In his final winter at Stone Cottage, Pound took interest in the seventeenth-century Neo-Platonic occult philosopher John Heydon. In 1662, Heydon published his Holy Guide. Although Pound enthusiastically read Heydon’s book, he presented a mixed image of him with Heydon’s debut in the original Three Cantos . In the final version of the original Three Cantos III, Pound introduces Heydon in a fashion that is somewhere between mockery and praise:
Another’s a half-cracked fellow-John Heydon,
Worker of miracles, dealer in levitation,
In thoughts upon pure form, in alchemy,
Seer of pretty visions (‘servant of God and secretary of nature’);
Full of a plaintive charm, like Botticelli’s,
With half-transparent forms, lacking the vigor of gods. . .
Take the old way, say I met John Heydon,
Sought out the place,
Lay on the bank, was ‘plunged deep in the swevyn;’
And saw the company-Layamon, Chaucer-
Pass each his appropriate robes; (Poetry Aug, 1917, 248)
Walter Bauman refers to Heydon as Pound’s "spiritual brother" (314). Despite the not-so flattering introduction of Heydon, Pound would appear to agree with Bauman. One possible explanation for Pound’s harsher opening remarks on Heydon could be that many people of Heydon’s own time did not think highly of his work. To many, Heydon was simply "a charlatan trifling with occult lore" (Bauman 306). In any case, Pound seems to make a point of acknowledging Heydon’s uncertain past before citing him as a credible source. Pound begins to spell out exactly what one could obtain by reading Heydon in a section of his prose piece Gaudier-Brzeska: A Memoir. In section 16, Pound writes positively about artists like Brzeska, Wyndham Lewis and Jacob Epstein who were on the forefront of the new movement Vorticism. Here he discusses the power a work of art can have:
A clavicord or a statue or a poem, wrought out of ages of knowledge, out of fine perception and skill, that some other man, that a hundred other men, in moments of weariness can wake beautiful sound with little effort, that they can be carried out of the realm of annoyance into the realm of truth, into the world unchanging, the world of fine animal life, the world of pure form. And John Heydon, long before our present day theorists, had written of the joys of pure form . . . inorganic, geometrical form, in his "Holy Guide" (157).
Pound also closes the section with a final reminder to read "John Heydon’s ‘Holy Guide’ for numerous remarks on pure form and the delights thereof" (Gaudier-Brzeska: A Memoir 167). There are several facets of the occult found in Pound’s memoir. He infers that the perfect work of art is layered with history. It is hundreds of years and hundreds of men in the making. The "realm of truth" is reached when the mind, as Nassar previously described it, has the ability to imagine "gods when in the presence of beauty." The "transcendent truths," that are a conglomeration of the past, can then be tapped as a source for the pure form Pound is describing (Nassar 12).Much of Pound’s desire for a pure truth goes hand in hand with his quest to be close to the Divine and obtain his "priest-like status." His use of Heydon becomes clearer as one reads that Heydon pondered questions such as "if God would give you leave and power to ascend to those high places, I meane to these heavenly thoughts and studies (Heydon 26). Pound borrows almost verbatim from Heydon and then cites him in "Canto 91":
to ascend those high places
wrote Heydon
stirring and changeable
‘light fighting for speed’ (76).
Heydon continues stating that people involved with studies such as his should realize that "their riches ought to be imployed in their own service, that is, to win Wisdome" (31). This "Wisdome" was something Pound wanted to make certain the masses or the "ordinary people" would not be privy to. It was exactly the divine wisdom, or gnosis, that Pound was in search of. Pound was asking the same questions and desiring the same answers that Heydon was asking hundreds of years earlier: "let us know first, that the minde of man being come from that high City of Heaven" (33). With these overt connections to Heydon, Pound’s opening remarks on him as a "half-cracked fellow" remain puzzling. Again, it is likely that Pound was initially shy about such overt references to a less-than-favorable occultist just as he was with some of Yeats’s mysticism. As it turns out, the title "Secretary of Nature" was actually Heydon’s and was printed on the title page of Holy Guide. Pound was respectful enough to include the title. Also in the Cantos, Heydon is in the company of men such as Ocellus, Erigena, Mencius and Apollonius. Pound appears to have thought much higher of Heydon than his opening remarks lead a reader to believe. In total, over half a dozen quotes are taken from Heydon’s work adding to the "crystal clear" quality of Pound’s Cantos (Davie 224).
From the green deep
he saw it,
in the green deep of an eye:
Crystal waves weaving together toward the gt/healing
Light compenetrans of the spirits
The Princess Ra-Set has climbed
to the great knees of stone,
She enters protection,
the great cloud is about her,
She has entered the protection of crystal . . .
Light & the flowing crystal
never gin in cut glass had such clarity
That Drake saw the splendour and wreckage
in that clarity
Gods moving in crystal
(Canto 91, 611)
In this selection, the "Pricess Ra-Set" has completed a journey that has allowed a metamorphosis to take place about her. The crystal which has encompassed her represents Heydon’s "pure form" that Pound was himself searching for. Inside this crystal protection "gods are manifest, whatever their ontological status outside" (Nassar 110). Pound’s metaphor shows up in several places. In "Canto 92," Pound describes "a great river" with the "ghosts dipping in crystal" (619). Also, in "Canto 91," Pound wrote:
"Ghosts dip in crystal,
adorned"
. . . A lost kind of experience?
scarcely,
Queen Cytherea,
che ‘l terzo ciel movete
[who give motion to the third heaven]
Pound already knew the answer to his own question about experience when he asked it. Crystal was chosen not only for its clarity to represent the pureness of form but it is hard and durable as well. The experience was not lost in the protection of this divine state that is the "crystal."
There are several individuals who were contemporaries of Pound that had a large influences on Pound and exposed him to their own ideas about the occult. People such as Yeats, A. R. Orage, Allen Upward, Dorothy Shakespear, and Olivia Shakespear all had their own occult interests. However, the largest occult influence on Pound, even greater than that of Yeats, was G. R. S. Mead. Mead became a member of Madame Blavatsky’s Theosophical Society in 1884. In 1889 he was Blavatsky’s private secretary and kept that position until her death in 1891. He served as the society’s editor for their monthly magazine but branched off and quit the society altogether in 1909. Blavatsky’s writings and practices aligned themselves more with the "pseudo-sciences" that Pound would not have approved of. Oddly enough, in Mead’s essay "‘The Quest’ - Old and New:
Retrospect and Prospect," he apparently does approve of Blavatsky’s ways either:I had never, even while a member, preached the Mahatma - gospel of H. P. B. [Blavatsky], or propagandized Neo-theosophy and its revelations. I had believed that "theosophy" proper meant the wisdom-element in the great religions and philosophies of the world (The Quest 296-97).
This passage represents thinking that was in line with Pound’s ideas on gnosis and his own pursuit of wisdom. Mead is considered by some to be "the best scholar the Theosophical Society ever produced" (Godwin 245).Pound’s assessment of what he experienced in his visionary episodes as well as his readings was heavily influenced by the writings and teachings of Mead. Pound met him at one of Yeats’s "Monday Evenings" at 18 Woburn Building in London which Mead regularly attended. On October 21, 1911, Pound wrote to his parents: "I’ve met and enjoyed Mead, who’s done so much research on primitive mysticism - that I’ve written you at least four times." [1] In another letter to his parents dated February 12, 1912, Pound praises Mead writing: "G. R. S. Mead is about as interesting - along his own line - as anyone I meet"(Beinecke 238). In a letter to his mother dated September 17, 1911, Pound relays that Mead had asked him to write a publishable lecture. Pound discusses the task with his more skeptical side of the occult: "I have spent the evening with G. R. S. Mead, edtr. of The Quest, who wants me to throw a lecture for his society which he can afterwards print. ‘Troubadour Psychology,’ whatever the dooce that is" (Beinecke 223). Pound did go on to give the lecture which gave birth to his essay "Psychology and the Troubadours." In this essay Pound wrote that "Greek myth arose when someone having passed through delightful psychic experience tried to communicate it to others" (92). Again Pound was referring to an occult "adventure" similar to that of Moberly and Jourdain. Once an individual has undergone this event "the resulting symbol is perfectly clear and intelligible" (Longenbach 91). Pound also endeavors to explain further his idea of the Greek "phantastikon." According to Pound, "the consciousness of some seems to rest, or to have its center more properly, in what the Greek psychologists called the phantastikon. Their minds are, that is, circumvolved about them like soap-bubbles reflecting sundry patches of the macrocosmos" (92). In April of 1913, Pound wrote a letter to Harriet Monroe attempting to clarify this element of his essay: "It is what Imagination really meant before the term was debased presumably by the Miltonists, tho’ probably before them. It has to do with the seeing of visions."
Pound’s phantastikon became his link to tapping into the purest form of "real symbolism." Dorothy Shakespear requested that Pound explain to her the difference between this symbolism and aesthetic or literary symbolism. He wrote her stating:
There’s a dictionary of symbols, but I think it immoral. I mean that I think a superficial acquaintance with the sort of shallow, conventional, or attributed meaning of a lot of symbols weakens - damnably, the power of receiving an energized symbol. I mean a symbol appearing in a vision has a certain richness and power of energizing joy - whereas if the supposed meaning of the symbol is familiar it has no more force, or interest of power of suggestion than any other word, or than a synonym in some other language (Pound/Shakespear 302).
Of course, the ability to perceive these symbols was not within the reach of everyone. It was only for those who have set sail in the pursuit of higher wisdom. Those in pursuit of gnosis "possess the key to the mysteries of its symbolism and establish themselves as priests - divinely inspired interpreters to whom the uninitiated public must turn for knowledge" (Longenbach 91). From here, the possibilities are endless according to Pound:
"All is within us", purgatory and hell,
Seeds full of will, the white of the inner bark
the rich and the smooth colours,
the foreknowledge of trees,
sense of the blade in seed, to each its pattern.
Germinal, active, latent, full of will,
Later to leap and soar,
willess, serene,
Oh one could change it easy enough in talk.
And no one vision will suit all of us.
Say I have sat then, the low point of the cone,
hollow and reaching out beyond the stars,
reaches and depth, the massive parapets,
Walls whereon chariots went by four abreast (Longenbach 237).
Pound made it a habit to not only read Mead’s article’s and books but he also religiously attended his lectures outside the "Monday Evenings." In another letter to his parents he wrote: "I’m going out to Mead’s lecture. And so on as usual. This being Tuesday" (Beinecke 271). From these readings and lectures, Pound most likely got his inspiration for the beginning of his revised Cantos:
the passing into the realms of the dead, while living, refers to the initiation of the soul of the candidate into the states of after- death consciousness, while his body was left in a trance. The successful passing through these states of consciousness removed the fear of death, by giving the candidate an all sufficing proof of the immortality of the soul and of its consanguinity with the gods (Taylor 319).
The "initiation" process of the soul was one that Pound decided must begin his entire Cantos. "Canto 1" starts with: "And then went down . . ." which initiates a descent that is the beginning of this journey (3). Pound made it clear in "Canto 1" that the Odysseus figure was alive during his descent just as Mead required the figure to be "living." Also, in a blatant attempt to achieve the "consanguinity with the gods," Pound’s character drank the blood of the sheep that was sacrificed to them.
The process that Pound is discussing is palingenesis, or the birth and the growth of the soul. The ultimate goal of the entire process, as Pound saw it, was "the expansion of the initiand’s consciousness into a state where he awakes to his relationship with the gods, and participates in their world" (Celestial Tradition 107). At this initial stage the initiate knows nothing except that he is on a quest for gnosis. As Pound wrote in Canto 47: "Knowledge the shade of a shade, / Yet must thou sail after knowledge / Knowing less than drugged beasts" (30).
The completion of the journey is the passage into what was previously described as "the crystal." This stage is the graduation from the ephemeral world of man to the realm of the gods. The soul has passed "from fire" of the "Kimmerian lands" of "Canto 1" "to crystal / via the body of light" (Canto 91,61). Pound put it much more bluntly when he stated that one must "bust thru" to this realm of understanding but he made his point (Celestial Tradition 107). Although he makes references to the exceptions, Tryphonopoulos contends that "Scholarly comment on Pound’s relation to the occult is virtually nonexistent" ("Occult Education" 75). The difficulty in analyzing Pound’s occult studies is that his reading and influences are so vast. From his amassed material Pound would piece together a detailed mosaic. This method provided a coherence for his presentation. In this fashion, structure begins to surface in even his most dense work The Cantos. Tryphonopoulos understands The Cantos to be a "collection of fragments gathered according to a predetermined plan for the purpose of validating the author’s original value system" (1). Pound seems to be speaking of this in the very late "Canto 110" when he writes: "From times wreckage shored / these fragments shored against ruin" (781). These elements pulled from the rubble of history and which Pound tiles together are what make the picture complete.
00:05 Publié dans Littérature, Philosophie | Lien permanent | Commentaires (1) | Tags : littérature, littérature américaine, lettres, lettres américaines, etats-unis, ezra pound, occultisme, usure, usurocratie, philologie, philosophie | |
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vendredi, 05 novembre 2010
Il n'y a que la mauvaise presse qui sauve ou Philippe Muray ressuscité
Il n'y a que la mauvaise presse qui sauve ou Philippe Muray ressuscité
«Par ailleurs, il devient facile de reconnaître un écrivain conformiste : c’est celui, tout simplement, qui se flatte le plus haut et le plus fort d’être politiquement incorrect.»
Philippe Muray.
À propos de Philippe Muray, Essais (Éditions Les Belles Lettres, 2010).
Nous ne sommes jamais assez durs avec les journalistes, c'est peut-être ce que découvrit aussi, avec un peu de stupeur tout de même, Elias Canetti. Leur médiocrité est toujours un cran au-dessus (ou au-dessous, c'est affaire de perspective) de celle que, par compassion plus qu'ignorance, nous avions cru être le maximum qu'un être humain pût supporter sans se dissoudre instantanément. Comme les créatures des très grandes profondeurs sous-marines, les journalistes se sont adaptés à des pressions extrêmes, n'ont pas besoin de lumière, se nourrissent des déchets qui lentement glissent vers leurs petites bouches translucides et, pour certains, parviennent même à écrire sans avoir, une seule fois, pris la peine de remuer leurs branchies atrophiées.
Tous ont beau ne pas être les résidents de la fosse dite de Marianne, ils n'en sont pas moins extrêmophiles, comme disent les biologistes qui paraissent tous les jours découvrir de nouvelles espèces de ces monstres mous habitués à l'obscurité la plus impénétrable. Vivants, ils sont morts car, à de pareilles profondeurs, toute dépense d'énergie inutile peut être létale. Ils végètent, ils planctonnisent, ils regardent parfois, de leurs gros yeux globuleux et aveugles, le ciel impénétrable et très profondément noir qui tend sa gueule au-dessus d'eux.
Vivants, s'agitant, ils sont déjà morts et se nourrissent de la chair de certains morts, mille fois plus vivants qu'eux.
Voyez-les, tous ces imbéciles claironnants et demi-soldes boulevardiers qui découvrent Philippe Muray quelques années seulement, ce n'est déjà pas si mal me dira-t-on, après sa mort, et encore, pressés qu'ils sont d'écrire leurs petits articulets navrants et incultes pour ne pas paraître en reste de ceux de leurs confrères, bluettes elles-mêmes incultes et creuses, voyez-les qui rédigent des papiers tellement originaux que le plus scrupuleux des experts en faux ne pourrait établir aucune différence entre eux. Ils s'agitent. Ils frétillent. Ils bavardent. Ils ne créent rien, car ils sont morts bien que vivants, et le règne des morts-vivants est une constante mais inéluctable pétrification, comme nous le voyons dans l'étonnant conte de Michel Bernanos. Il y a plus de différences entre deux ouvrières d'une termitière japonaise qu'entre deux journalistes qui partagent la même table de restaurant, rêvent de partager la même maîtresse et, quoi qu'il en soit, défendent les mêmes idées, c'est-à-dire celles qui sont l'émanation de l'air du temps.
Même le très gauchi et bientôt centenaire Jean Daniel, m'a-t-on dit, s'est subitement mis à trouver du génie à son illustre cadet contempteur, Philippe Muray, promettant à son fantôme ironique de sonner l'hallali, le derrière vissé sur sa bréhaigne, pour une cavalcade poussive de quelques centimètres sur les pâtures du lieu commun. Il ne sera pas dit que l'illustre Jean Daniel a méprisé, du moins après son trop court séjour sur terre, Philippe Muray.
Élisabeth Lévy elle-même, inflexible Cassandre du marronnier réactionnaire plutôt que du scoop véritable, causeuse lassante y compris même lorsqu'elle consent à vous laisser parler, journaliste point trop inintéressante tout de même lorsqu'elle écrit plutôt qu'elle bavarde, ronchonneuse professionnelle qui a réussi à faire reconnaître aux services de l'État la profession de mouche du coche, moderne incarnation d'une Amazone de toute éternité contrariée et peut-être même de tous les dangers réunis de la sauvage Amazonie ou de ce qu'il en reste, walkyrie miniaturisée du verbe journalistique qui ne rate jamais une occasion de se prétendre femme jusqu'aux bouts de ses flèches enduites de curare et d'affirmer qu'elle ne doit rien aux hommes (pas même sa propre naissance, référence faite à une conversation animée, désormais ancienne, en présence de Maurice G. Dantec), Élisabeth Lévy en personne n'a pas eu assez de mains et de pieds pour serrer tous ceux de ses collègues journalistes masculins lors de telle récente soirée privée (ce mardi 21 septembre vers 18 heures, au Lucernaire, un restaurant naguère fréquenté par Muray) où elle but les paroles de Fabrice Luchini, pas franchement dupe du cirque qui l'entourait et même, bien que disert et aimable, étrangement réservé.
Bien évidemment, unique couac (ou peu s'en faut) dans cette magnifique symphonie en culbute majeure, j'aurais quelque mauvaise grâce à ne point saluer le mystérieux regain d'intérêt dont paraissent (restons prudents) bénéficier les livres (en l'occurrence, ses exorcismes spirituels, regroupés en un seul beau volume préparé par Vincent Morch pour les Belles Lettres) de Muray mais enfin, nul ne m'en voudra je l'espère de jeter quelque sonde soupçonneuse dans la flache de cette subite attention, ni même de gentiment moquer le fait que le meilleur livre de cet auteur, le livre même qu'il n'a fait que décliner ou répéter jusqu'à sa mort, je veux bien sûr parler du XIXe siècle à travers les âges, est tout aussi étonnamment absent des meilleures ventes de la rentrée, catégorie essais comme il se doit.
Gageons même que cette si propitiatoire période de ventes d'ouvrages de qualité soit elle-même affublée d'une tare que Philippe Muray avait caractérisée de la façon suivante : «Il n’y a pas de lucidité sans séparation. Il n’y a pas non plus de littérature sans conflit et sans aggravation de conflit» (1).
Nous pouvons tirer deux postulats de cette constatation trempée, comme l'acier, dans un bain d'eau froide. D'abord, puisque nous voici plongés dans la mélasse la plus indifférenciée où gauche et droite se disputent la dépouille aimablement désagréable d'un mort et tentent de convoquer au-dessus de leur table barbante son mauvais génie posthume, le phénomène auquel nous assistons est tout ce que l'on voudra sauf le témoignage d'une miraculeuse prise de conscience, pour ne point évoquer, comme Muray le fait, quelque lucidité qui n'est tout de même pas la vertu la mieux partagée par nos contemporains, surtout s'ils exercent la profession immodeste de journaliste.
Ensuite, puisque ce remarquable et sans contestation possible mélodique accord sur la portée des œuvres de Muray nous a plongés dans le sucre candi des bons sentiments qui creusent, comme des larves de mouches, leur nid douillet dans la dépouille d'un auteur qui fut un redoutable vivant, il y a fort à craindre que la littérature soit, de nouveau l'absente des bouquets de toutes ces fiancées froides qui pleurent la mort d'un fiancé et même celle d'un véritable père, d'un père plus intensément père en ceci qu'il ne présente aucun lien de parenté avec les intéressées.
Pardon, vous me dites qu'il n'y a, encore elle, qu'Élisabeth Lévy qui menace de faire monter le niveau de la Seine à force d'ouvrir les vannes cyclopéennes de ses conduits lacrymaux ? J'ai cru qu'elles étaient au moins un bon millier, ces Antigones s'arrachant de douleur les cheveux et criant sur tous les toits, sur tous les plateaux de télévision, sur toutes les ondes radiophoniques que c'était bel et bien le corps maltraité de leur propre malheureux frère qui était laissé sous les soleils corrupteurs des flashs des photographes qui, par conscience professionnelle sans doute, se déclarent près à déterrer un cadavre pour voir si sa texture réactionnaire l'a affublé de particularités anatomiques troublantes.
Non, il n'y a sur scène, vérification faite auprès du metteur en scène de notre impeccable et si actuelle tragédie, qu'Élisabeth Lévy mais celle-ci, phénomène qui devrait passionner et intriguer les physiciens de l'étrange et même les frères Bogdanoff, semble posséder la particularité d'être sur plusieurs plateaux d'émissions télévisées en même temps, à seule fin d'y délivrer son message aussi convenu que le bruit d'un coucou d'horloge suisse, prêt-à-consommé de crieuse et gouaille vulgaire de cabaretière éraillée rendant grâce au père, maître, intercesseur, modèle et bientôt bienheureux Philippe Muray d'avoir irrigué de sa sève polémistique les plates-bandes où poussent ses quelques navets journalistiques de si pâle couleur qu'on les confond avec des feuilles de gélatine.
La si brillante et versicolore réacosphère, ce mélange improbable de petits frontistes se planquant derrière des pseudonymes, de gros beaufs avinés commentant, comme le matin ils sont accoudés au zinc et le ballon de blanc faisant cercle sur un exemplaire de SAS, les communiqués immondes, suintant la haine et la peur la plus ignoble, la crispation identitaire autour de belles valeurs gersoises qu'hélas ces lamentables vivandiers de l'action politique véritable n'illustrent guère par leurs écrits, émis, avec un sérieux d'un grotesque inégalé, par le ridicule Parti de l'In-nocence de Renaud Camus, cette si probe congrégation d'évanescents ectoplasmes appartenant, par leur seul corps astral, à la Nouvelle Droite, ce maigre raout de puceaux proches de la quarantaine qui croient sans rire que Kierkegaard, Chesterton, Unamuno et peut-être même le Christ en personne leur soufflent à l'oreille les phrases suintantes de prétention et de vulgarité qui composent leur catéchisme névrosé et enfin ce bordel bien sous tout rapport composé de vieilles demi-mondaines confondant hostie et godemiché et ne se rendant pas compte qu'elles risquent une déchirure anale plutôt qu'une excommunication papale, la réacosphère donc, mutualisation de talents nanométriques et de prétentions himalayesques adore, mais alors là vraiment adore, paraît-il, les textes d'Élisabeth Lévy.
Ce doit donc être, hypothèse la plus sobre, un fameux signe d'excellence. Il est vrai que cette même réacosphère aime immodérément Philippe Muray, qu'elle ne cite d'ailleurs jamais très précisément, se contentant de tirer, sur sa face blême et maladive, un peu de la lumière crue que Muray dirige toujours, avec une cruauté raffinée, sur ses cibles fuligineuses.
Revenons au texte de Muray, qui poursuit, dans le même ouvrage : «Un critique, plutôt que de perdre son temps à analyser tous les romans de néo-sacristains, tous ces livres rédigés avec un style directement trempé dans le préservatif, pourrait s’amuser à les rapprocher de slogans publicitaires connus, montrer qu’ils se ramènent tous à l’une ou l’autre des injonctions récentes de la pub» (p. 13).
Un bon critique, colligeant donc les différents titres qui ont récemment fleuri à propos de la découverte, par de hardis paléontologues, d'un nouveau type humanoïde baptisé Homo festivus festivus (en somme, le sursinge qui prend conscience du fait qu'il fait la fête) en hommage à celui qui en avait théorisé le chaînon clinquant, Philippe Muray, pourrait donc montrer qu'ils ne sont que la forme la plus récente, et déjà parfaitement obsolète, de l'éternelle hydre publicitaire, dont voici quelques têtes sans beaucoup de cerveau : Exorcismes spiritueux pour Philippe Lançon (Libération Livres du 24 juin) qui commence nullement par un «Être de son époque, c'est savoir la détester», Désaccord parfait pour Laurent Lemire (Livres Hebdo du 16 septembre) qui, encore plus stupidement, n'a pas peur de faire hurler de rire ses lecteurs en calant dès son point de badinage : «Il y avait quelque chose de vrai chez Philippe Muray (1945-2006), c'est ce qu'il pensait», Le mieux-disant pour l'inégalable Aude Lancelin (Le Nouvel Observateur, semaine du 22 au 28 juillet), qui bavarde sur Fabrice Luchini, cet interprète de la Modernité qui, non content d'avoir mis Paris à ses pieds, a bel et bien réussi l'exploit de faire courber la nuque si raide de quelques journalistes après leur avoir déclaré qu'il n'était pas plus de droite que de gauche. Quoi d'autre encore, puisqu'il est vrai que même le canard le plus déplumé de France et de Navarre y est allé de sa petite bluette admirative pour Muray, histoire de ne pas rater la curée journalistique et peut-être même, qui sait, d'être repéré par les grosses légumes parisiennes ? Le petit-fils naturel de Georges Bernanos, Sébastien Lapaque, le sobre François Taillandier pour Le Figaro ou sa déclinaison en revue, le si mélomane Benoît Duteurtre (Marianne du 25 septembre) qui fait mine de s'extasier sur les rythmes délicieusement reggae du très oubliable Ce que j'aime ou l'intrusion de Léon Bloy dans la comptine pré-natale, tandis que Pierre Bottura (Philosophie Magazine du mois d'octobre) nous révèle, bien conscient qu'il prend des risques peut-être exagérés, que Philippe Muray était «romancier, essayiste et critique d'art», travail d'enquête tout de même moins poussé que celui de Tristan Savin (pour Lire du mois d'octobre), lequel rend grâce à l'histrion Luchini d'être un histrion. Subtile fausse note, celle émise par Alain Finkielkraut, l'autre père spirituel et intellectuel de notre chère Élisabeth, encore elle, note grinçante bien évidemment recueillie par l'antenne d'Arecibo d'une extrême finesse qu'est notre impénitente journaliste (Causeur numéro du mois de septembre) qui remet le couvert pour Le Point (du 16 septembre) où elle nous apprend que, chez Muray, «jubilation et exécration sont sœurs».
Si je n'avais pas connu les livres de Muray depuis quelques années, ces poussées hormonales imprimées sur papier recyclable m'auraient-elles donné envie de me jeter sur eux ?
Je ne crois pas.
Je suis même certain que non.
Il n'y a pas seulement, hélas, dans la canonisation actuelle dont Philippe Muray est la victime muette, que dévaluation du verbe, ce qui ne doit point nous étonner puisqu'il s'agit là de la plus constante et habituelle production des bouches mécaniques que sont les journalistes. En effet, si, selon notre redoutable polémiste, l'histoire de la littérature est celle des «prospérités de l'irrespect» (p. 250), nous ne pouvons que constater que Philippe Muray n'est point salué comme un véritable écrivain mais, tout au plus, comme un penseur réactionnaire, c'est-à-dire peu ou prou comme un fâcheux en perpétuelle colère contre le monde entier et nageant à contre-courant du fleuve tranquille où la France finit de noyer son ennui vertueux de n'être plus rien.
Puisque le fantôme de Muray est ces derniers temps très sollicité, j'oserai abuser quelque peu de son temps et poursuivre la lecture d'un de ses recueils de textes. Qu'est-ce qu'un bon critique selon Philippe Muray qui doit décidément se tordre de rire en nous observant du coin de l'œil ? C'est en tout premier lieu un esprit qui s'écarte de la foule et ne salue, dans un livre, que son essence la plus profondément romanesque, rien, donc, qui puisse ressembler au charlatanisme actuel consistant à mélanger pseudo-verve et acrimonies habituelles contre l'air du temps. Qu'est-ce dire ? Que Muray place la tâche du critique à une magnifique hauteur, la leste d'une lourde responsabilité. La critique est, ni plus ni moins, une œuvre qui répond à une œuvre. Non point un Du Bos, ni même un Thibaudet ou un Sainte-Beuve mais, tout simplement, tout impossiblement, un Conrad, un Joyce, un Faulkner, un romancier extravagant, un romancier sans roman, un maître du langage second cher à Foucault qui n'aurait pour seule mission que celle de pénétrer les romans qu'il n'a pas écrits, qu'il ne peut pas écrire, avec la souveraine vision de leur propre créateur.
C'est quelqu’un donc, ce critique idéal sinon rigoureusement surhumain, qui ne se considérerait pas comme «un agent culturel destiné à signaler au public des produits culturels (les livres), quelqu’un qui serait donc également un bon critique de la société [apte à devenir] un spécialiste de toute la consternante fantasmagorie qui tend socialement à rendre le roman impossible» (pp. 4-5).
Et Muray de poursuivre en écrivant que : «La connaissance de l’ennemi, la science de l’ennemi des romans, c’est-à-dire de presque tout ce qui se met en place, aujourd’hui, sous nos yeux (y compris dans certains romans, dans ceux que je viens d’évoquer par exemple, les livres de la nouvelle Bibliothèque rose universelle, les romans de l’École des sacristains), voilà ce qui pourrait être le propre de la critique, d’une critique faite dans l’intérêt de l’art romanesque, et non dans le dessein de s’auto-célébrer, de justifier sa propre existence ou carrément de nuire, comme les deux charlatanismes critiques, l’universitaire et le médiatique […]» (p. 14).
Curieux que nul, à ma connaissance du moins, n'ait songé à commenter cette célébration si spontanée et post-mortem du génie de Philippe Muray en l'éclairant par la seule lumière qui en révélerait la part d'ombre. Nous sommes ainsi parvenus au cœur de notre sujet, comme le fantôme de Muray d'ailleurs ne manque pas de nous le confirmer d'un sourire à peine esquissé.
C'est d'ailleurs, une fois de plus, l'auteur lui-même qui nous donne la clé de ce rituel propitiatoire autour d'une tombe encore fraîche, clé qui nous fait retrouver la magnifique ligne de basse qui cimente l'architecture du XIXe siècle à travers les âges. Cette clé est fort commune, qui ouvre pourtant toutes les portes, y compris celles qui sont réputées être les plus inviolables. Lisons Muray puisque c'est ce que ne font pas, jamais, nos amis les journalistes : «La Révolution française, mouvement de panique contre cette sortie du religieux, sursaut de révolte contre la mort des dieux, tentative de retrouver par la terreur (et d’abord par l’exécution d’un roi de «droit divin», reprise modernisée des rituels sacrificiels de rétablissement de l’ordre social dans les communautés primitives) la légitimité transcendante volée au peuple par le souverain et son clergé, bruits et clameurs contre la désertification de l’espace magique (restauration des fêtes de la Fertilité universelle), ne pouvait donc pas voir le jour dans un pays protestant, par exemple, pour la bonne raison que la Réforme y avait déjà opéré le réancrage rationnel et social du religieux et que les liens de parenté y avaient été énergiquement renoués contre la Rome vaticane déréalisante, déterritorialisante, désubstantifiante» (p. 344).
Les festivités qui ont depuis quelques semaines lieu autour de la dépouille de Philippe Muray sont donc liées à une cérémonie propitiatoire, voire fertilisante, sur laquelle Jeanne Favret-Saada a mené ses patientes enquêtes qui toutes ont révélé le fait que, à l'insu bien sûr de celles et ceux qui en constituent les participants enfiévrés, les prestiges secrets du sacré ne s'exposent jamais mieux que dans les mouvements de foule. La ruse de notre âge est de remplacer par une fausse spontanéité l'évidence charnelle tout autant que symbolique de gestes parfois incompris, transmis néanmoins pieusement au fil des générations, qu'il s'agisse de rites impies ou de survivances de croyances païennes. L'âge de la masse a étendu la surface sur laquelle le sacré va agir, faisant lever la pâte du présent insignifiant, parce que cet âge sans âme ni cœur est incapable de totalement le détruire : de quelques personnes vivant en vase clos, communautés religieuses fanatisées ou petits villages gagnés par les démangeaisons de l'interdit, nous voici face à des océans d'être indifférenciés dont les pensées, toutes semblables, paraissent agitées d'un lent mouvement cauchemardesque.
Un mort attire toujours les vivants, pas besoin de lire Monsieur Ouine pour nous en convaincre. Un mort permet aux vivants de se croire plus vivants qu'ils ne le sont en vérité. Ainsi, le consternant spectacle que nous avons sous les yeux est-il le contraire même d'une œuvre critique qui, pour sa part, tenterait de redonner vie, à l'abri des regards curieux, au fantôme qu'est Philippe Muray. Les journalistes se nourrissent d'un mort formidable, eux qui ne vivent pas. Le véritable critique doit rendre Muray à la vie, commander à Lazare de sortir de son tombeau puant, lui redonner chair et réelle présence, en montrant que ses textes ont parfaitement sondé les reins de notre époque, en montrant que Philippe Muray est plus vivant que ses zélateurs nécrophages et ses livres plus réels que leur propre langue saponifiée.
Notre seul guide, dans ce petit exercice de lecture ? Philippe Muray, encore, jamais aussi passionnant que lorsqu'il utilise son flair infaillible pour déterrer l'unique truffe qui fait rêver tous nos cochons : «La connaissance et l’analyse théologiques passeraient donc aujourd’hui par des formes inconnues des pères de l’Église et qui les surprendraient plutôt ? Oui, et il me paraît démontrable, par exemple, que l’enquête accomplie dans ses romans ou nouvelles par quelqu’un comme Flannery O’Connor en plein Sud américain, au cœur même de l’occultisme yankee halluciné, cet autre western hérétique et chamanique mettant en scène des prêcheurs ambulants, des révérends délinquants, des baptistes fous, des guérisseurs échappés d’asile poursuit à sa façon les extraordinaires reportages de saint Irénée de Lyon ou de saint Épiphane sur les officines gnostiques des premiers siècles chrétiens…» (pp. 259-260).
Dans un texte intitulé Il n’y a que la mauvaise foi qui sauve datant de 1985, dont ma note a du reste parodié le titre, Philippe Muray affirme encore que : «La fiction, toute la fiction, toute la nécessité du roman, sortent du coup de théâtre du péché, de l’intuition d’une impureté ou au moins d’un malentendu de base, d’une racine sombre et gluante au fond du fond, d’une Défaite terrible à l’heure du big-bang» (p. 256).
Spécifiquement religieux ou tout simplement utilisant la ruse de l'oraison qu'est le sacré aux milliers de visages, le Verbe ne peut en finir d'épuiser sa cargaison de signes incompréhensibles pour qui refuse de braquer son regard sur un horizon bruissant de révélations.
La conclusion de cette note que l'on affirmera être, dans le meilleur des cas, discordante, est une prière, comme toute conclusion qui se respecte : «Un écrivain religieux, loin du bornage de nos repères plombés, esquisse un vol nomade insaisissable, transversalement, au-dessus des frontières. Un écrivain religieux ne peut être que le véritable nomade de notre temps sans religion, mais plein du bruit et de la fureur de sa mort ressassée» (p. 191).
Un écrivain lucide aussi, cher Philippe Muray.
Notes
(1) Philippe Muray, Rejet de greffe (Exorcismes spirituels, 1) (Les Belles Lettres, 2006), p. X. Les références entre parenthèses renvoient à cet ouvrage, bien évidemment recueilli dans le fort volume récemment publié par Les Belles Lettres. La citation placée en exergue de cette note provient de ce même volume, p. 376 (originellement : La mondification (Autopsie du pacifisme), L’Esprit libre, n°12, 1995).
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Dentro la globalizzazione: le conseguenze sulle personne
Dentro la globalizzazione: le conseguenze sulle personne
Bauman, Zygmunt, Dentro la globalizzazione. Le conseguenze sulle persone
Laterza, 2002, pp. 152, Euro 6,5, ISBN 88-420-6258-8,
Recensione di Carmen Dal Monte
“A voler scovare il suo significato più profondo, l’idea di globalizzazione rimanda al carattere indeterminato, ingovernabile e autopropulsivo degli affari mondiali, ancora, fa pensare all’assenza di un centro, di una sala comando, di un consiglio di amministrazione, di un ufficio di direzione.” Questa affermazione di Bauman, che si trova a circa metà (pag. 67) del suo saggio sintetizza la confusione, non solo terminologica, che l’autore sottolinea nell’introduzione. “Globalizzazione” è parola che più che chiarire, confonde e annulla le distinzioni; nell’introduzione Bauman cerca di spiegare come il fenomeno “globalizzazione” si presenti negli aspetti più diversi e all’apparenza inconciliabili. Se, nell’accezione più in voga, globalizzazione e localizzazione sembrano fenomeni opposti, l’analisi del sociologo polacco mostra come in realtà siano due facce della stessa medaglia; la globalizzazione, nei suoi aspetti finanziari ed economici, che sono i suoi aspetti principali, si nutre della localizzazione e della debolezza degli stati nazionali. La distinzione in classi parte dalla divisione degli spazi, chi è separato dallo spazio reale (il capitale finanziario, gli azionisti) ha perso anche le responsabilità che, in qualche modo, segnavano la vita e le azioni del capitalismo moderno: “diversamente da quanto accadeva ai proprietari terrieri assenteisti agli albori dei tempi moderni, i capitalisti e gli intermediari tardo-moderni, grazie alla nuova mobilità delle loro risorse, ormai liquide, non devono fronteggiare limiti sufficientemente reali – solidi, duri, resistenti – che dall’esterno impongano loro linee di condotta.”(p.14). Il mondo si divide, quindi, in globali e locali, in un’élite che vive svincolata dai vincoli spaziali e una maggioranza di persone che ha perso gli spazi caratteristici della formazione della pubblica opinione, e questa distinzione sembra essere molto proficua ai fini della corretta comprensione del mondo contemporaneo.
La prima traccia di questo binomio può essere colta nella “mobilità”, divenuta fattore di prestigio che, al tempo stesso, unifica e divide, creando due classi sociali ben separate, da un lato le élites di potenti e dall’altro la grande massa dei “locali” che non solo incide sempre meno sulla vita e sulla società, ma che ne ha perso – secondo Bauman dai primi anni ottanta – anche il diritto. E il concetto di spazio, al quale viene dedicato il secondo capitolo, viene rivisto a partire dalla sua storia moderna, con le costruzioni spaziali degli utopisti e degli architetti e attraverso la lente predisposta da Foucault; il controllo dello spazio, e degli spazi dell’elaborazione sociale, della pubblica opinione, della politica è la battaglia della formazione dello stato moderno e oggi, la sconfitta degli stati di fronte al fenomeno della globalizzazione, si misura anche sottolineando la scomparsa degli spazi locali e cittadini di formazione dell’opinione: “ «L’economia», il capitale, cioè il denaro e le altre risorse necessarie a fare delle cose, e ancor più denaro e più cose, si muove rapidamente; tanto da tenersi sempre un passo avanti rispetto a qualsiasi entità politica (come sempre, territoriale) che voglia contenerne il moto e farne mutare direzione. […] Qualsiasi cosa che si muova a una velocità vicina a quella dei segnali elettronici è praticamente libera da vincoli connessi al territorio all’interno del quale ha avuto origine, verso il quale si dirige, attraverso il quale passa” (pag. 63). E così, in quella che Bauman chiama “la nuova espropriazione” si manifesta la trasformazione delle prerogative classiche dello stato nazione: il ruolo dello stato è divenuto solo quello dell’esecutore di forze che non è in grado di controllare; la nascita di nuove entità territoriali, sempre più deboli, va a favore delle nuove forze economiche; la redistribuzione del potere è già avvenuta, dagli stati nazione alla finanza globalizzata.
Integrazione e parcellizzazione, scrive Bauman, globalizzazione e territorializzazione sono processi complementari, anzi, sono due facce dello stesso processo, che sta ridistribuendo su scala mondiale sovranità, potere e libertà d’azione, (pag. 78).
Bauman individua in questo contesto due tipologie di persone: “Turisti e vagabondi”, cui egli dedica il quarto capitolo del suo studio. Partendo dalla considerazione, ormai nota, della nostra importanza come consumatori piuttosto che come produttori, Bauman coglie un elemento particolare: la necessaria transitorietà anche dei consumi, e dei desideri. Lo scopo del gioco del consumo, sintetizza Bauman, non è tanto la voglia di acquisire e di possedere, né di accumulare ricchezze in senso materiale, tangibile, quanto l’eccitazione per sensazioni nuove, mai sperimentate prima, (pag. 93). Questi nuovi consumatori sono i turisti, per i quali muoversi nello spazio non pone più vincoli e resta solo la dimensione temporale, che ha assunto la forma dell’eterno presente; i vagabondi, al contrario, vivono nello spazio, uno spazio dal quale sono scacciati, uno spazio che ha confini invisibili ma invalicabili. Per le merci e le élites – finanziarie, accademiche, manageriali – non esistono vincoli di territorio, per i “vagabondi” il mondo è a vivibilità limitata, limitati dai quartieri delle metropoli a controllo elettronico, dalle frontiere, dalle leggi sull’immigrazione, dalla “tolleranza zero.
L’esplicitazione delle conseguenze della globalizzazione sulle persone, promessa dal titolo del testo, consiste quindi nella divisione tra turisti e vagabondi, con i vagabondi che hanno, come unico sogno, quello di essere turisti, di entrare a far parte dell’élite del consumo immediato e dell’extraterritorialità. Turista e vagabondo sono uno l’alter ego dell’altro; turista e vagabondo sono entrambi consumatori, con la differenza che il vagabondo è un consumatore pieno di difetti, non essendo di grado di sostenere il ritmo di consumi al quale aspira. Se il vagabondo invidia la vita del turista e vi aspira, a sua volta il turista, nella sua fascia media, ha il terrore che il suo status, del tutto precario, possa cambiare all’improvviso. Il vagabondo, scrive Bauman, è l’incubo del turista, “mentre pretende che il vagabondo sia nascosto sotto il tappeto, fa bandire il mendicante e il barbone dalla strada, confinandolo in lontani ghetti dove «non si va», chiedendone l’esilio o l’incarcerazione, il turista cerca disperatamente, ma tutto sommato invano, di cancellare le sue proprie paure” (pag. 108).
L’ultimo capitolo è la conclusione, quasi obbligata, di un’analisi lucida e spietata; Bauman mostra come lo stato-nazione abbia, quasi come unica prerogativa, quella di mantenere l’ordine, garantendo ad alcuni un’esistenza ordinata e sicura e utilizzando a questo scopo, sugli altri la forza della legge. Lo stesso concetto di “flessibilità” del lavoro, in apparenza “neutro”, “economico”, nasconde la redistribuzione del potere: flessibilità vuol dire offrire al capitale la possibilità di muoversi, escludendo i locali dalla stessa possibilità. Mobilità e assenza di mobilità sono i due lati della questione, e lo stato ha il compito determinato dalla globalizzazione, di “gestire il locale”. E qui, attraverso le riflessioni di Pierre Bourdieu, si torna alla storia della società di Foucault: da sempre, il gioco dello stato nel controllo dell’ordine pubblico si estrinseca attraverso la restrizione degli spazi, la reclusione. E, sottolinea Bauman, uno dei maggiori problemi negli Stati Uniti, senza dubbio l’esempio più maturo della globalizzazione, è proprio quello relativo alle prigioni.
Dal Panopticon di Bentham, non a caso esempio del Settecento, secolo in cui, secondo Bauman, comincia la globalizzazione, fino al progetto della prigione di Pelican Bay in California (interamente automatica, in cui i reclusi non hanno contatti né con le guardie né con gli altri reclusi) il cerchio sembra chiudersi. Dalle case di lavoro dei secoli passati a Pelican Bay dove ai prigionieri non è concessa nessuna attività, perché nessuna attività è richiesta dal mercato. La “rieducazione” e il dibattito intorno ad essa, avevano un senso in un mondo in cui l’economia richiedeva forza lavoro, certamente non in una economia globalizzata. E le prigioni sono entrate nell’era che Bauman definisce “post correzionale”, in cui le paure della gente portano a chiedere ai governi risposte sempre più dure: costruire nuove prigioni, inasprire le pene, introdurre nuovi reati sono la cartina di tornasole per mostrare che il potere politico si muove, agisce, ha sotto controllo il territorio. Ma nel mondo della finanza globale “ai governi è attributo un ruolo non molto più ampio di quello assegnato a questure o commissariati di polizia” (pag. 132). Il libro di Bauman ben si inserisce nel dibattito sulla globalizzazione, sia perché sposta l’analisi dal campo economico a quello politico e sociale, sia perché riesce, in un saggio breve e lucido, a fare il punto sulle ambiguità e gli equivoci che il termine “globalizzazione” porta con sé e lo fa affrontandone i problemi più importanti legati sia ai diritti degli individui sia alle particolari situazioni esistenziali che ne derivano come conseguenza.
Indice
Introduzione
1. Tempo e classe - I proprietari assenti: la versione dei nostri giorni; Libertà di movimento e «costituzione» delle società civili; Nuova velocità, nuova polarizzazione
2. Guerre spaziali: una cronaca - La battaglia delle mappe; Dalla cartografia alla progettazione dello spazio; L'agorafobia e il rinascimento della località; C'è una vita dopo il Panopticon?
3. E dopo lo stato-nazione? - Diventare universali o lasciarsi globalizzare?; La nuova espropriazione: stavolta dello stato; La gerarchia globale della mobilità
4. Turisti e vagabondi - Consumatori nella società dei consunti; Divisi muoviamo; Attraversare il mondo o vederselo passare accanto; Uniti nella buona e nella cattiva sorte
5. Legge globale, ordini locali - Fabbriche di immobilità; Le prigioni nell'era post-correzionale; Sicurezza: un mezzo tangibile per un fine elusivo; I disadattati
Note
Indice dei nomi
L'autore
Zygmunt Bauman è nato in Polonia nel 1925; nel 1939 fugge in Unione Sovietica con la famiglia e durante la guerra fa parte di una formazione partigiana. E’ professore di Sociologia nelle Università di Leeds e Varsavia. In italiano sono stati pubblicati i seguenti testi: Memorie di classe. Preistoria e sopravvivenza di un concetto, Einaudi, 1987; La decadenza degli intellettuali. Da legislatori a interpreti, Bollati Boringhieri, 1992; Il teatro dell'immortalità. Mortalità, immortalità e altre strategie di vita, Il Mulino, 1995; Le sfide dell'etica, Feltrinelli, 1996; Modernità e olocausto, Il Mulino, 1999; La società dell'incertezza, Il Mulino, 1999; Il disagio della postmodernità, Bruno Mondadori, 2000; Dentro la globalizzazione. Le conseguenze sulle persone, Laterza, 2000; La Libertà, Città Aperta, 2002; La solitudine del cittadino globale, Feltrinelli, 2000; Voglia di comunità, Laterza, 2001; Modernità liquida, Laterza, 2002; La società individualizzata. Come cambia la nostra esperienza, il Mulino, 2002; Società, etica, politica. Conversazione con Zygmunt Bauman, Raffaello Cortina, 2002; Intervista sull'identità, Laterza, 2003.
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What did Ezra Pound really say?
WHAT DID EZRA POUND REALLY SAY?
by Michael Collins Piper
From 1945 through 1958 America's iconoclastic poet--the flamboyant Ezra Pound, one of the most influential individuals of his generation--was held in a Washington, D.C. mental institution, accused of treason. Pound had merely done what he had always done--spoken his mind. Unfortunately for Pound, however, he had made the error of criticizing the American government in a series of broadcasts from Italy during World War II. For that he was made to pay the price. Was Pound a traitor--or a prophet? Read his words and judge for yourself.
American students have been taught by scandalized educators that famed American poet and philosopher Ezra Pound delivered "treasonous" English-language radio broadcasts from Italy (directed to both Americans and to the British) during World War II. However, as noted by Robert H. Walker, an editor for the Greenwood Press: "Thousands of people have heard about them, scores have been affected by them, yet but a handful has ever heard or read them." This ignorance of Pound's most controversial political rhetoric is ironic, inasmuch as: "No other American--and only a few individuals throughout the world--has left such a strong mark on so many aspects of the 20th century: from poetry to economics, from theater to philosophy, from politics to pedagogy, from Provencal to Chinese. If Pound was not always totally accepted, at least he was unavoidably there." One critic called Pound's broadcasts a "confused mixture of fascist apologetics, economic theory, anti-Semitism, literary judgment and memory" Another described them as "an unholy mixture of ambiguity, obscurity, inappropriate subject matters [and] vituperation," adding (grudgingly) there were "a few pearls of unexpected wisdom."
Despite all the furor over Pound's broadcasts--which were heard between January of 1941 through July of 1943--it was not until 1978 that a full-length 465-page compendium of transcriptions of the broadcasts was assembled by Prof. Leonard Doob of Yale University in association with aforementioned Greenwood Press. Published under the title "Ezra Pound Speaking"--Radio Speeches of World War II, the volume provides the reader a comprehensive look at Pound's philosophy as it was presented by the poet him self in what Robert Walker, who wrote the foreword to the compendium, describes as "that flair for dramatic hyperbole."
What follows is an attempt to synthesize Pound's extensive verbal parries. Most of what is appears here has never been printed anywhere except in the compendium of Pound's wartime broadcasts. Thus, for the first time ever--for a popular audience--here is what Pound really had to say, not what his critics claim he said. When he was broadcasting from Italy during wartime, Pound evidently pondered the possibility of one day compiling transcriptions of his broadcasts (or at least expected--quite correctly--that one day the transcripts would be compiled by someone else). He hoped the broadcasts would show a consistent thread once they were committed to print. Pound recognized relaying such a massive amount of information about so many seemingly unrelated subjects might be confusing listeners less widely read than he. However, the poet also had very firm ideas about the need of his listeners to be able to synthesize the broad range of material that appeared in his colorful lectures.
Pound was sure his remarks on radio were not seditious, but were strictly informational and dedicated to traditional principles of Americanism--including the Constitution, in particular. In response to media claims that he was a fascist propagandist, Pound had this to say: "If anyone takes the trouble to record and examine the series of talks I have made over this radio it will be found I have used three sorts of material: historical facts; convictions of experienced men, based on fact; and the fruits of my own experience. The facts . . . mostly antedate the fascist era and cannot be considered as improvisations trumped up to meet present requirements. Neither can the beliefs of Washington, John Adams, Jefferson, Jackson, Van Buren, and Lincoln be laughed off as mere fascist propaganda. And even my own observations date largely before the opening of the present hostilities. "I defend the particularly American, North American, United States heritage. If anybody can find anything hostile to the Constitution of the U.S.A. in these speeches, it would greatly interest me to know what. It may be bizarre, eccentric, quaint, old-fashioned of me to refer to that document, but I wish more Americans would at least read it. It is not light and easy reading but it contains several points of interest, whereby some of our present officials could, if they but would, profit greatly." Pound's immediate concern was the war in Europe--"this war on youth--on a generation" --which he described as the natural result of the "age of the chief war pimps." He hated the very idea that Americans were being primed for war, and on the very day of Pearl Harbor he denounced the idea that American boys should soon be marching off to war: "I do not want my compatriots from the ages of 20 to 40 to go get slaughtered to keep up the Sassoon and other British Jew rackets in Singapore and in Shanghai. That is not my idea of American patriotism," he added. In Pound's view, the American government alliance with British finance capitalism and Soviet Bolshevism was contrary to America's tradition and heritage: "Why did you take up with those gangs?" he rhetorically asked his listeners. "Two gangs. [The] Jews' gang in London, and [the] Jew murderous gang over in Moscow? Do you like Mr. Litvinov? [Soviet ambassador to Britain Meyer Wallach, alias Litvinov, born 1876.--Ed.] "Do the people from Delaware and Virginia and Connecticut and Massachusetts . . . who live in painted, neat, white houses . . . do these folks really approve [of] Mr. Litvinov and his gang, and all he stands for?" There was no reason for U.S. intervention abroad, he said: "The place to defend the American heritage is on the American continent. And no man who had any part in helping [Franklin] Delano Roosevelt get the United States into [the war] has enough sense to win anything . . . The men who wintered at Valley Forge did not suffer those months of intense cold and hunger in the hope that . . . the union of the colonies would one day be able to stir up wars between other countries in order to sell them munitions."
What was the American tradition? According to Pound: "The determination of our forbears to set up and maintain in the North American continent a government better than any other. The determination to govern ourselves internally, better than any other nation on earth. The idea of Washington, Jefferson, Monroe, to keep out of foreign shindies." Of FDR's interventionism, he declared: "To send boys from Omaha to Singapore to die for British monopoly and brutality is not the act of an American patriot." However, Pound said: "Don't shoot the President. I dare say he deserves worse, but . . . [a]ssassination only makes more mess." Pound saw the American national tradition being buried by the aggressive new internationalism.
According to Pound's harsh judgment: "The American gangster did not spend his time shooting women and children. He may have been misguided, but in general he spent his time fighting superior forces at considerable risk to himself . . . not in dropping booby traps for unwary infants. I therefore object to the modus in which the American troops obey their high commander. This modus is not in the spirit of Washington or of Stephen Decatur." Pound hated war and detected a particular undercurrent in the previous wars of history. Wars, he said, were destructive to nation-states, but profitable for the special interests. Pound said international bankers--Jewish bankers, in particular--were those who were the primary beneficiaries of the profits of from war. He pulled no punches when he declared: Sometime the Anglo-Saxon may awaken to the fact that . . . nations are shoved into wars in order to destroy themselves, to break up their structure, to destroy their social order, to destroy their populations. And no more flaming and flagrant case appears in history than our own American Civil War, said to be an occidental record for size of armies employed and only surpassed by the more recent triumphs of [the Warburg banking family:] the wars of 1914 and the present one.
Although World War II itself was much on Pound's mind, the poet's primary concern, referenced repeatedly throughout his broadcasts, was the issue of usury and the control of money and economy by private special interests. "There is no freedom without economic freedom," he said. "Freedom that does not include freedom from debt is plain bunkum. It is fetid and foul logomachy to call such servitude freedom . . .Yes, freedom from all sorts of debt, including debt at usurious interest." Usury, he said, was a cause of war throughout history. In Pound's view understanding the issue of usury was central to understanding history: "Until you know who has lent what to whom, you know nothing whatever of politics, you know nothing whatever of history, you know nothing of international wrangles. "The usury system does no nation . . . any good whatsoever. It is an internal peril to him who hath, and it can make no use of nations in the play of international diplomacy save to breed strife between them and use the worst as flails against the best. It is the usurer's game to hurl the savage against the civilized opponent. The game is not pretty, it is not a very safe game. It does no one any credit."
Pound thus traced the history of the current war: "This war did not begin in 1939. It is not a unique result of the infamous Versailles Treaty. It is impossible to understand it without knowing at least a few precedent historic events, which mark the cycle of combat. No man can understand it without knowing at least a few facts and their chronological sequence. This war is part of the age-old struggle between the usurer and the rest of mankind: between the usurer and peasant, the usurer and producer, and finally between the usurer and the merchant, between usurocracy and the mercantilist system . . . "The present war dates at least from the founding of the Bank of England at the end of the 17th century, 1694-8. Half a century later, the London usurocracy shut down on the issue of paper money by the Pennsylvania colony, A.D. 1750. This is not usually given prominence in the U.S. school histories. The 13 colonies rebelled, quite successfully, 26 years later, A.D. 1776. According to Pound, it was the money issue (above all) that united the Allies during the second 20th-century war against Germany: "Gold. Nothing else uniting the three governments, England, Russia, United States of America. That is the interest--gold, usury, debt, monopoly, class interest, and possibly gross indifference and contempt for humanity."
Although "gold" was central to the world's struggle, Pound still felt gold "is a coward. Gold is not the backbone of nations. It is their ruin. A coward, at the first breath of danger gold flows away, gold flows out of the country." Pound perceived Germany under Hitler as a nation that stood against the international money lenders and communist Russia under Stalin as a system that stood against humanity itself.
He told his listeners: "Now if you know anything whatsoever of modern Europe and Asia, you know Hitler stands for putting men over machines. If you don't know that, you know nothing. And beyond that you either know or do not know that Stalin's regime considers humanity as nothing save raw material. Deliver so many carloads of human material at the consumption point. That is the logical result of materialism. If you assert that men are dirty, that humanity is merely material, that is where you come out. And the old Georgian train robber [Josef Stalin--ed.] is perfectly logical. If all things are merely material, man is material--and the system of anti-man treats man as matter." The real enemy, said Pound, was international capitalism. All people everywhere were victims: "They're working day and night, picking your pockets," he said. "Every day and all day and all night picking your pockets and picking the Russian working man's pockets." Capital, however, he said, was "not international, it is not hyper-national. It is sub-national. A quicksand under the nations, destroying all nations, destroying all law and government, destroying the nations, one at a time, Russian empire and Austria, 20 years past, France yesterday, England today."
According to Pound, Americans had no idea why they were being expected to fight in Britain's war with Germany: "Even Mr. Churchill hasn't had the grass to tell the American people why he wants them to die, to save what. He is fighting for the gold standard and monopoly. Namely the power to starve the whole of mankind, and make it pay through the nose before it can eat the fruit of its own labor." As far as the English were concerned, in Pound's broadcasts aimed at the British Isles he warned his listeners that although Russian-style communist totalitarianism was a threat to British freedom, it was not the biggest threat Britain faced: You are threatened. You are threatened by the Russian methods of administration. Those methods [are not] your sole danger. It is, in fact, so far from being your sole danger that I have, in over two years of talk over this radio, possibly never referred to it before.
Usury has gnawed into England since the days of Elizabeth. First it was mortgages, mortgages on earls' estates; usury against the feudal nobility. Then there were attacks on the common land, filchings of village common pasture. Then there developed a usury system, an international usury system, from Cromwell's time, ever increasing." In the end, Pound suggested, it would be the big money interests who would really win the war--not any particular nation-state--and the foundation for future wars would be set in place: "The nomadic parasites will shift out of London and into Manhattan. And this will be presented under a camouflage of national slogans. It will be represented as an American victory. It will not be an American victory. The moment is serious. The moment is also confusing. It is confusing because there are two sets of concurrent phenomena, namely, those connected with fighting this war, and those which sow seeds for the next one." Pound believed one of the major problems of the day--which itself had contributed to war fever--was the manipulation of the press, particularly in the United States: "I naturally mistrust newspaper news from America," he declared. "I grope in the mass of lies, knowing most of the sources are wholly untrustworthy." According to Pound: "The United States has been misinformed. The United States has been led down the garden path, and may be down under the daisies. All through shutting out news.
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jeudi, 04 novembre 2010
Un libre penseur: Pierre-André Taguieff
Un libre penseur: Pierre-André Taguieff
Ex: http://unitepopulaire.over-blog.com/
« [Dans] "Contre-réactionnaires – le Progressisme entre Illusion et Imposture" paru il y a six mois, Pierre-André Taguieff fustigeait le pavlovisme d’une certaine gauche qui n’a plus que l’exhortation contre un fascisme imaginaire pour croire en sa vocation – livre qui a d’ailleurs subi l’ostracisme dévolu aux ouvrages mal-pensants. Il est vrai que Pierre-André Taguieff ne s’est pas fait que des amis dans un milieu où la peur d’être blâmé tient parfois lieu d’unique ligne de conduite. Auteur de près d’une vingtaine d’ouvrages, l’intellectuel illustre, à sa manière, l’évolution d’une partie de l’intelligentsia de gauche vers une forme de conservatisme mâtiné de souverainisme, ce qui lui vaudra d’être la cible, avec d’autres, comme Alain Finkielkraut, de campagnes virulentes. [...]
Né en 1946 d’une famille d’immigrés d’Europe centrale, ayant fait ses études à la faculté de Nanterre dans les années 60, Taguieff sera, durant sa jeunesse, un compagnon de route de la mouvance situationniste. Libertaire fasciné par le surréalisme, le jeune homme croit trouver une patrie parmi ces milieux parfois talentueux, mais aussi sectaires et dogmatiques. Très dur à l’encontre de Guy Debord, qu’il considère aujourd’hui comme un gourou aussi sentencieux que nihiliste, il sera néanmoins reconnaissant aux "situs" de lui avoir inspiré de la méfiance à l’endroit des sectes maoïstes et trostkistes qui vont essaimer en France dans le sillage de Mai 68. Devenu enseignant de philosophie dans les années 70, puis directeur de recherche au CNRS, l’homme allait se passionner pour des philosophes de gauche en rupture de ban avec le marxisme comme Claude Lefort, célèbre initiateur, dans les années 60, du groupe Socialisme et Barbarie. [...]
Tout en devenant un expert de ce que les médias ont nommé "populisme" pour qualifier un mouvement protestataire qui monte dans toute l’Europe, Taguieff va critiquer avec virulence la doxa libérale-libertaire ambiante à travers plusieurs livres, notamment "Résister au Bougisme", "Démocratie Forte contre Mondialisation Techno-marchande" ou "L’Effacement de l’Avenir". Il va aussi critiquer sévèrement l’idéologie du métissage, qui n’est que l’inversion de la xénophobie en xénophilie. »
Michel Rival, La Nouvelle Revue d’Histoire n°34, janvier-février 2008
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Visages de l'archéofuturisme
Après la « Grande Catastrophe » qui a vu sombrer dans le chaos l’ancien système politico-économique du fait de la convergence de désastres de toutes natures, ont subsisté des bulles de survie, sortes de baronnies qui se sont ensuite rapprochées les unes des autres. La nouvelle structure regroupait dans une Communauté des Etats Européens, les anciennes régions de l’Europe Occidentale dotées d’une très large autonomie. Mais de graves problèmes internationaux resurgirent avec de nouvelles menaces. La Russie et ses pays satellites proposèrent alors à la Communauté des Etats européens de fusionner pour assurer l’unité et la défense des « peuples apparentés »: la Fédération Eurosibérienne était née.
La Fédération comporte 125 états autonomes comme les Etats autonomes de Bretagne ou d’Ile de France, la République Romaine et le Royaume d’Albanie, etc. qui s’entendent sur les « questions principales »: quel est l’ennemi commun ? Quel est l’ami commun ? Ils sont représentés face au Gouvernorat impérial installé à Bruxelles, par le Directorat central de la Fédération.
Les litiges internes entre les États de la Fédération sont résolus par un Conseiller plénipotentiaire auprès du Tribunal-Inter-États de Saint Petersbourg et son Prévôt auquel il doit rendre compte, et qui dépend aussi du Gouvernorat impérial de Bruxelles où sont ses bureaux.
Dans la Fédération, on tente de concilier deux principes: l’autorité absolue et la rapidité de décision de l’autorité politique centrale, le Gouvernorat élu par le Sénat Impérial; et une grande liberté d’organisation laissée aux Régions-Etats.
Chacune des Régions-Etats autonomes est libre dans les domaines où elle n’est pas soumise aux compétences du Gouvernorat Impérial, d’organiser ses institutions comme elle l’entend. Elle doit simplement, par les moyens qu’elle désire, désigner un nombre de députés fixé en proportion de sa population au Sénat Fédéral d’Empire.
L’ idéologie officielle de la Fédération est le « constructivisme vitaliste ».
La nouvelle économie techno-scientifique n’est plus, comme autrefois au XXe siècle, destinée à toutes les zones de la Terre ni à tous les humains. Seulement 10 % de l’ humanité en bénéficient, en général regroupés dans les villes, beaucoup moins étendues et peuplées qu’autrefois. Dans la fédération, 20% de la population vit dans une économie industrielle techno-scientifique; ce qui a permis de repeupler les zones rurales désertées et résolu les problèmes de pollution et de gaspillage énergétique.
L’innovation scientifique est très dynamique bien qu’elle ne repose plus sur un énorme marché mondial et ne concerne donc qu’une minorité de la population, les autres étant revenus à une économie rurale, artisanale et pastorale de type médiéval. L’explication de ce dynamisme est simple: le volume global de l’investissement et des budgets publics et privés n’ont plus à se préoccuper des besoins de toutes natures de 80% de la population vivant dans des communautés néo-traditionnelles, selon un système socio-économique archaïque, qui se débrouillent seules et librement pour leur production et leurs échanges, et pour nombre desquelles le solstice d’été est un moment fort
La Fédération Eurosibérienne pratique le libre-échange intérieur, mais ses frontières extérieures sont protégées par des barrières douanières très élevées. Les flux financiers et spéculatifs internationaux n’existent plus.
Dans l’élite, 18% des naissances sont assurées par l’ingénierie génétique: gestations en incubateurs, sans grossesse pour les femmes, avec « amélioration programmée du génome ». Mais cette technique est rigoureusement prohibée dans les communautés néo-traditionnelles et, ailleurs, soumise à l’approbation du Comité Eugénique Impérial. Les enfants issus de cette procréation artificielle sont souvent consacrés « pupilles d’Empire » et placés dans des centres d’éducation qui les transforment en cadres ultra-performants. Seuls les dirigeants et les cadres de la Fédération ont accès au réseau d’informations, l’ EKIS « Euro Kontinent Information Service ». Le système des médias, ouvert à tous, en cours au XXe siècle, a entièrement disparu car, pense-t-on, il aboutissait paradoxalement à la désinformation, à la désagrégation de l’esprit public et créait des paniques.
Les véhicules électriques sont généralisés, les automobiles interdites aux particuliers avec retour aux tractions hippomobiles, prohibition des véhicules à moteur dans les communautés rurales néo-traditionnelles, abandon des autoroutes sur le tracé desquelles ont été construites des lignes de chemin de fer classiques rapides pour le transport des camions et des containers (« ferroutage »), limitation progressive des transports aériens au profit des planétrains, introduction de dirigeables-cargos pour le fret et les transports civils, restauration du réseau des canaux, utilisation mixte des énergies nucléaires et éoliennes pour les transporteurs maritimes, etc.
(dessins de Schuiten)
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El Manifiesto de Unamuno

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mardi, 02 novembre 2010
Un esprit libre: Slavoj Zizek
Un esprit libre: Slavoj Zizek
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« Ce philosophe, issu d’un pays encore plus improbable que la Pologne d’Ubu Roi, la Slovénie, est un dur, aux antipodes des essayistes tièdes dont la France s’est fait une manière de spécialité. Mais sa dureté est bardée d’humour. [...] Marxisme et christianisme, qui ont été chats et chiens avant d’être copains comme cochons ont aujourd’hui un ennemi commun : les "nouvelles spiritualités", c’est-à-dire, en langage politiquement incorrect, la bétise bleu ciel. "L’héritage chrétien authentique est bien trop précieux pour être abandonnés aux freaks intégristes" insiste avec vigueur et jubilation Zizek. [...] Confrontant l’amour (la charité chrétienne) à la loi (la prescription judaïque), et défaisant la première par la seconde à partir des épîtres de Saint Paul, comme l’avait déjà fait son maître Alain Badiou, Zizek montre avec brio que les droits de l’homme sont en réalité des droits autorisant la violation des dix commandements. L’ONU ne descend pas du Sinaï, elle le contourne. [...] Aussi rappelle-t-il comment [en Slovénie] la régression ethnique et nationaliste a été vécue par ceux qui s’y étaient éclatés comme une formidable libération vis-à-vis d’une société postmoderne mondialisée, permissive et hédoniste en apparence, corsetée de restrictions et d’interdits en réalité, et donnée comme indépassable partout. Les démocraties occidentales ont tout faux lorsqu’elles s’imaginent que toutes les libertés sont de leur côté et toutes les servitudes de l’autre. »
Christian Godin, "Slavoj Zizek : sauver le christianisme... et le marxisme !", Marianne, du 16 au 22 février 2008
Sur la Suisse :
« Je l’aime beaucoup et je déteste les gauchistes qui la trouvent trop aseptisée. Au moment de son indépendance, le rêve de la Slovénie était d’ailleurs de devenir une autre Suisse. D’une certaine manière, elle a réussi : on est anonyme, personne ne sait qui est notre premier ministre... »
Sur la liberté et l’ordre :
« Je suis absolument hostile à l’idée selon laquelle l’ennemi serait l’autorité ou l’ordre. La liberté suppose d’abord que les choses fonctionnent. Aujourd’hui, dès que vous dites discipline ou sacrifice, ou vous répond fascisme ou goulag. La gauche devrait rejeter ce chantage et se réapproprier l’ordre et l’héroïsme. »
Sur la société hédoniste :
« Les psychanalystes constatent qu’on se sent coupable lorsqu’on ne peut pas jouir. La jouissance est littéralement élevée au rang de devoir. La formule libérale est : ton devoir est de jouir. La formule autoritaire : tu dois jouir de ton devoir. Cet hédonisme radical est hégémonique. [...] Le destin de la psychanalyse se joue là : est-ce qu’elle va nous apprendre à nous libérer de ce surmoi obscène qui nous contraint à la jouissance ? »
Sur la gauche :
« Qu’est devenue la gauche ? Quand j’étais jeune, on parlait de socialisme à visage humain. Aujourd’hui, tout ce que la gauche est capable d’imaginer, c’est le capitalisme à visage humain, avec plus d’écologie, un peu plus de respect pour le tiers-monde... Mais on reste devant le même horizon : tout le monde considère qu’on ne peut pas penser au-delà du capitalisme associé à la démocratie libérale. »
Sur le marxisme :
« Je ne suis pas un marxiste en quête de révolution, je suis plutôt un marxiste pessimiste qui observe les contradictions du capitalisme global. [...] Nous ne sommes pas devant une alternative entre le capitalisme sous sa forme actuelle et autre chose. Dans quelques décennies, il est clair que cela sera autre chose. »
Slavoj Zizek, L’Hebdo, 6 mars 2008
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jeudi, 28 octobre 2010
Carlo Michelstaedter: Far di se stesso fiamma
Fonte: fondazionecarigo.it
Nel centenario del suicidio apre una mostra sul giovane autore goriziano
Il 17 ottobre 1910 un filosofo di ventitré anni muore suicida a Gorizia. Dopo pochi mesi i suoi compagni di studio pubblicano a loro spese le sue opere. Nel corso dei decenni successivi il suo nome diventa sempre più noto. Passa il secolo, passa il millennio e i testi di Carlo Michelstaedter vengono tradotti nelle principali lingue europee e pubblicati in vari continenti.
Perché le sue opere e la sua vicenda personale sono diventati materia di studi e di tesi di laurea? Perché la sua tesi di laurea, diventata poi il libro La persuasione e la rettorica, ormai è considerato uno dei contributi più originali alla filosofia del Novecento?
Credo che l’esame spietato della condizione umana di Carlo Michelstaedter riassuma in sé tutti i problemi, tutte le potenzialità di talento, creatività, immaginazione, onestà, capacità di lavoro, voglia di vivere dei giovani di questi ultimi cento anni.
Ma qual è stato il contesto, l’humus peculiare in cui si è formata la figura di Carlo Michelstaedter? Nel primo decennio del Novecento erano sorti in Europa movimenti d'avanguardia assai significativi, il cui intento di fondo era quello di contrapporsi al passato, di superarlo con nuove e rivoluzionarie visioni del mondo e della vita. Essi costruiscono il loro pensiero scoprendo e trasmettendo quella grandissima cultura europea che diagnostica e porta a effetto la crisi del sapere e della sua organizzazione. Ibsen, forse il più grande poeta di quest'intuizione nichilista del conflitto fra la vita e la rappresentazione, appare come tragico demistificatore della “megalomania della vita” – com'egli diceva – che non permette la realizzazione dell'individuo e lo rende colpevole di quest'impossibilità.
Ma che cosa sappiamo di questo giovane uomo, della sua vita, di ciò che l’ha portato al suicidio? La mostra di Gorizia, curata da Sergio Campailla, grazie anche ai molti documenti che la famiglia ha conservato, ce ne fornisce importanti testimonianze.
Suddivisa in quattro percorsi fondamentali, la mostra è composta da oltre 250 pezzi che raccontano il mistero di una vocazione esuberante e tragica attraverso una rassegna straordinaria di dipinti, schizzi, fotografie, documenti, manoscritti, edizioni, cimeli, in parte inediti.
Il percorso comincia da Gorizia, la “Nizza austriaca”, una città-giardino a misura d'uomo, circondata da dolci alture e sovrastata dal castello, sede di una comunità ebraica ristretta ma fiorente.
La seconda parte del percorso è dedicata a Firenze dove Michelstaedter frequenta l'Istituto di Studi Superiori venendo a contatto con professori famosi e colti condiscepoli. Si scoprono le prime relazioni sentimentali e amorose di Carlo, rimaste sino ad ora in ombra.
Nella terza parte il discorso ci riconduce a Gorizia dove Michlstaedter rientra definitivamente e, consegnata la tesi si laurea, il 17 ottobre 1910, si toglie la vita.
La rassegna chiude con l'esposizione dei libri provenienti dalla biblioteca di Michelstaedter e con le edizioni postume dei suoi scritti.
Carlo Michelstaedter. Far di se stesso fiamma
17 ottobre 2010 - 27 febbraio 2011
Sala Espositiva della Fondazione Cassa di Risparmio di Gorizia
Via Carducci, 2 - Gorizia
Orario: da martedì a venerdì 10:00 – 13:00 e 16:00 – 19:00,
sabato e domenica orario continuato 10 – 19
www.fondazionecarigo.it
Tante altre notizie su www.ariannaeditrice.it
00:05 Publié dans Philosophie | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : philosophie, carlo michelstaedter, italie | |
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mercredi, 27 octobre 2010
Ortega y Gasset: Europa y la revolucion conservadora
ORTEGA Y GASSET: EUROPA Y LA REVOLUCIÓN CONSERVADORA
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mardi, 26 octobre 2010
La psico-antropologia de L. F. Clauss
LA PSICO-ANTROPOLOGÍA DE L.F. CLAUSS:
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lundi, 25 octobre 2010
Néolibéralisme et euthanasie des classes moyennes
Néolibéralisme et euthanasie des classes moyennes
Ex: http://www.mecanopolis.org/
Par Bernard Conte
Pendant que le néolibéralisme fait son travail de sape, nos élites complices, grassement rémunérées, tentent de détourner l’attention des populations. À l’instar des prestidigitateurs, elles pointent des faits, des « évidences », des idées, des théories… pour mieux dissimuler la réalité et manipuler les opinions.
Après avoir longtemps nié le phénomène du laminage des classes moyennes en Occident, les néolibéraux – de « gauche », comme de « droite »2 [1] – l’admettent, au moins implicitement, aujourd’hui. Mais pour eux, ce phénomène serait tout à fait « naturel », car il se doublerait de l’apparition et de l’essor de classes moyennes au Sud et plus particulièrement dans les pays émergents.
Quoi de plus équitable ? Les pays du Sud n’ont-ils pas un « droit » inaliénable au développement et leurs populations ne peuvent-elles prétendre à « s’embourgeoiser » à leur tour ? La mondialisation néolibérale, tant décriée, aurait des effets positifs sur les classes moyennes au Sud. Face à la dynamique inéluctable de délocalisation des classes moyennes au Sud, les réactions égoïstes des « petits » bourgeois du Nord visant à protéger leur niveau de vie – en s’attachant à leurs privilèges, en revendiquant, en manifestant dans les rues, par exemple – seraient aussi vaines qu’inutiles, voire, à la limite, racistes.
Ce discours est totalement biaisé car la dynamique des classes moyennes suit un cycle au cours duquel elle passe par une phase de croissance, suivie d’une période de décroissement. Ces périodes sont déterminées par la nature des liens entre les classes moyennes et le capital. Pendant la phase ascendante, la classe moyenne prospère parce qu’elle est « l’alliée » du capital. Lorsqu’elle devient son « ennemie », la classe moyenne périclite. Dans les deux cas, c’est l’État, entre les mains de la classe politique, qui gère la production ou la destruction de la classe moyenne.
La dynamique cyclique des classes moyennes : entre densification et éclaircissement
Au cours des Trente glorieuses au Nord et pendant la période du développement introverti3 [2] au Sud, la classe moyenne s’est densifiée, avec plus ou moins d’intensité, dans de nombreuses zones de la planète. L’adoption de politiques néolibérales, de désinflation compétitive au Nord et d’ajustement structurel au Sud, a inversé la tendance en éclaircissant les rangs des classes moyennes. Cette évolution donne à penser que la dynamique des classes moyennes suit une trajectoire cyclique.
L’évolution de la classe moyenne en Afrique : l’exemple de la Côte d’Ivoire
L’expérience de la Côte d’Ivoire, pendant et après le « miracle » économique, illustre bien cette dynamique. Sous l’égide de son Président, Félix Houphouët-Boigny, la Côte d’Ivoire a mis en œuvre un modèle de développement « au caractère libéral et ouvert officiellement affirmé, devait présenter trois étapes successives : le capitalisme privé étranger, le capitalisme d’État, avant la relève par le capitalisme privé national, encouragé par un processus de rétrocession. La stratégie industrielle retenue était la substitution des importations. La politique industrielle s’est appuyée sur l’État et les intérêts français dont les profits étaient garantis par le code des investissements promulgué en 1959 et par la protection du marché interne4 [3] ».
Il s’agissait, pour l’État, de susciter l’apparition d’une classe « motrice », moyenne et supérieure, qui puisse prendre en main le développement national. À cette fin, l’État a mis en œuvre une stratégie multiforme notamment fondée sur :
- l’éducation – formation : « en 1960, l’État consacrait 22% de son budget à la formation ; cette proportion passait à 33% en 1973, pour atteindre 54,9% en 19835 [4] ».
- l’ivoirisation du capital et de l’emploi (et particulièrement des cadres) par la relève des étrangers dans la fonction publique, dans le secteur de l’immobilier et des PME et dans les grandes entreprises (le plus souvent filiales de sociétés transnationales) ainsi que par l’extension de l’appareil d’État et du secteur public6 [5].
« L’appareil d’État sert de précurseur, de trait d’union et de tremplin à l’intégration des nationaux aux postes économiques. L’État joue le rôle d’agent moteur, créant les conditions de l’accès aux participations économiques, ne se substituant jamais à l’initiative privée là où elle existe, et toujours de manière à ce que ces initiatives soient compatibles avec les orientations du passé. La promotion des nouvelles initiatives tend à se faire dans des secteurs réservés7 [6] ».
Ainsi, grâce à l’action publique, les classes moyennes émergent. Par exemple, « avec un effectif de 78 000 emplois en janvier 1978, l’Administration est le premier employeur du pays. Comme le secteur parapublic représente pour sa part 61 000 emplois (y compris les sociétés d’économie mixte) c’est près de 40 % de l’emploi moderne qui est, directement ou indirectement, contrôlé par l’État8 [7] ». De même, dans son étude sur l’emploi en Côte d’Ivoire, Françoise Binet dénombre, en 1978, 4 832 patrons d’entreprises à Abidjan dont 41,2 % sont ivoiriens9 [8]. Ces chiffres traduisent l’émergence et la densification progressive de classes moyennes salariées et entrepreneuriales au cours des Vingt glorieuses (ou du miracle ivoirien), aussi marquées par un taux de croissance du PIB réel d’environ 7 % par an en moyenne, une performance qui a engendré l’entrée de la Côte d’Ivoire dans la catégorie des pays à revenu intermédiaire selon la classification de la Banque mondiale. Dans les années 1970, la Côte d’Ivoire bénéficie du niveau de vie le plus élevé d’Afrique de l’Ouest.
Le tournant se situe au début des années 1980 avec la chute des cours internationaux du cacao et du café, principales exportations de la Côte d’Ivoire. A partir de 1981, s’ouvre la période de l’ajustement. En raison de l’intangibilité revendiquée de la parité du franc CFA vis-à-vis du franc français, l’ajustement sera tout d’abord désinflationniste (en termes réels ), puis en 1994, il comportera la dévaluation de 50 % du CFA. Les mesures d’abaissement de la dépense publique, de réduction des effectifs de la fonction publique, la privatisation, la disparition pure et simple d’entreprises publiques ou d’entreprises liées à l’industrialisation par substitution des importations… vont se traduire par un appauvrissement de la majorité de la population avec un creusement des inégalités. En considérant l’indice du PIB réel par habitant égal à 100 en 1980, sa valeur n’était plus que de 79,7 en 198810 [9]. La réduction des emplois publics grossit les rangs du secteur informel et inverse le flux de l’exode rural: « en ce début des années 1990, nombre d’autochtones, montés dans les villes car ayant bénéficié du programme gouvernemental de 1978, dit d’ivoirisation de la fonction publique, sont forcés de revenir dans leurs villages d’origine suite à la suppression de nombreux emplois administratifs11 [10] ». Ces populations, appartenant à la classe moyenne « ajustée », « compressée », sont victimes d’un déclassement. On assiste à « l’extension de la pauvreté et à l’accroissement des inégalités12 [11] ». L’augmentation de la pauvreté, qui en « 2008 a atteint un seuil critique de 48,9 % contre seulement 10 % en 198513 [12] », traduit le fait que la classe moyenne se paupérise.
En Côte d’Ivoire, de l’indépendance à la fin des années 1970, la classe moyenne s’est constituée dans le cadre du modèle de développement mis en œuvre par Félix Houhpouët-Boigny. Cette classe a vu ses rangs s’éclaircir progressivement avec les programmes d’ajustement structurel néolibéraux. On observe cette même dynamique sous d’autres cieux.
Argentine : « la classe moyenne est détruite14 [13] »
En Amérique Latine, l’exemple de l’Argentine révèle que la période des ajustements a délité la classe moyenne nombreuse qui s’était constituée auparavant. En effet, jusqu’à la fin des années 1970, « l’Argentine était une société relativement bien intégrée – tout au moins si on la compare aux autres pays d’Amérique Latine – caractérisée par une vaste classe moyenne, résultat d’un processus de mobilité sociale ascendante dont la continuité n’avait jamais été remise en cause15 [14] ». A partir des années 1980, la classe moyenne se délite. « On observe notamment l’entrée dans le monde de la pauvreté d’individus issus de la classe moyenne : il s’agit des « nouveaux pauvres » dont le nombre a cru de 338 % entre 1980 et 199016 [15] ». Cette tendance s’est poursuivie, si bien qu’en janvier 2002, le Président argentin nouvellement élu, Eduardo Duhalde, révélait « qu’en 2001, la classe moyenne [avait] perdu 730 000 argentins, venus grossir les rangs des 15 millions de pauvres, soit 40 % de la population du pays17 [16] ». A cette occasion, le Chef de l’État déclarait : « la classe moyenne est détruite18 [17] ».
La fin du « miracle » asiatique et le laminage des classes moyennes
En Asie du Sud-Est, de 1970 à 1995, les pays émergents ont enregistré une forte croissance économique, si bien que l’on a parlé de « miracle ». Au cours de cette période, une classe moyenne essentiellement urbaine a progressivement émergé. La grave dépression de 1997-1998 a fortement impacté « la classe moyenne des pays du Sud-Est asiatique [qui] a payé le prix fort de cette crise : de nombreuses personnes ont perdu simultanément leur emploi et les économies de plusieurs années19 [18] ». Le phénomène tend à se poursuivre avec la crise actuelle. En Corée du Sud par exemple, la crise actuelle (2008) « évoque celle de 1998. Du coup, les jeunes se ruent vers les sociétés d’État, où les emplois sont plus stables. En une décennie, la classe moyenne coréenne a diminué de 10 %. Beaucoup forment aujourd’hui une nouvelle classe de pauvres20 [19] ».
Au Nord : l’euthanasie progressive des classes moyennes
Au Nord, depuis le début des années 1980, on assiste à « l’euthanasie » de la classe moyenne constituée pendant les Trente glorieuses21 [20]. Aux États-Unis, « s’il existe un point sur lequel les années 1980 ont réussi à créer un accord (de toute façon a posteriori) entre des économistes de différentes tendances, c’est précisément sur la diminution quantitative de la classe moyenne : « the big squeeze » de l’économie domestique située au niveau des revenus intermédiaires, la mobilité vers le bas des « cols blancs », les dumpies (downwardly mobile professionals selon la définition de Business Week) ont remplacé les yuppies plus connus du début des années 198022 [21] ». La tendance au délitement a été masquée, jusqu’à la crise des « sous-primes », grâce à « un accès au crédit excessivement laxiste » qui « a permis à une grande partie des ménages moins nantis de maintenir un niveau de vie aisé » et qui « a généré ce qu’on pourrait appeler une ‘fausse classe moyenne’ aux États-Unis23 [22] ». En Allemagne, selon une étude scientifique récente de l’institut DIW, au cours des dix dernières années, « les classes moyennes se sont « rétrécies24 [23] » car elles sont « les perdantes des transformations qu’a subi la répartition des revenus au cours de la dernière décennie25 [24] ». En France, la dynamique d’atrophie des classes moyennes est moins perceptible, en raison de l’existence initiale d’un État-providence renforcé et de sa plus lente destruction. Louis Chauvel montre que, pendant les Trente glorieuses, l’ascenseur social a permis à un grand nombre de jeunes, issus du milieu agricole ou ouvrier, d’accéder à la classe moyenne qui s’est développée rapidement au cours de cette période26 [25]. C’était l’âge d’or de la classe moyenne en France. Mais, à partir du début des années 1980, la situation se détériore progressivement. « Sans nier l’importance des difficultés des classes populaires et de ceux qui font face à la marginalisation sociale, c’est au tour des catégories centrales de la société d’expérimenter une forme de précarité civilisationnelle27 [26] ».
Il apparaît que les classes moyennes se sont développées dans des lieux et à des moments différents, pendant des périodes de durée variable, mais caractérisées par une croissance économique relativement élevée. Lorsque l’environnement s’est révélé moins favorable, ces classes moyennes sont entrées en crise. La dynamique des classes moyennes semble suivre une chronologie caractérisée par une période de croissance, prolongée par une phase de décroissement.
Dans cette hypothèse, il est utile de s’interroger sur les facteurs explicatifs de la dynamique cyclique des classes moyennes.
Quelques pistes de réflexion sur les déterminants de la dynamique cyclique des classes moyennes
Notre hypothèse suggère que l’on assiste, dans le temps, à une montée des classes moyennes suivie de leur décrue. Une raison de cette trajectoire pourrait se situer dans le rôle ambigu des classes moyennes dans le processus de développement. En effet, les classes moyennes apparaissent à la fois comme un facteur de développement économique et comme un frein à la croissance des profits. Le cheminement cyclique pourrait s’expliquer par un échelonnement différencié dans le temps des effets précités. Dans tous les cas, il apparaît que l’évolution de la classe moyenne est intimement liée à l’intervention de l’État. C’est l’État (ou plutôt les élites politiques au pouvoir) qui décide de (dé)règlementer et de légiférer pour promouvoir ou enrayer le développement de la classe moyenne. La loi est (presque) toujours instrumentalisée pour servir les intérêts du capital qui peuvent coïncider avec ceux de la classe moyenne à un moment donné et en diverger à une autre période. En cas de convergence d’intérêts, la loi favorise la densification de la classe moyenne, en cas de divergence, la loi organise l’euthanasie de la classe moyenne jugée inutile, hostile et coûteuse pour le capital.
La classe moyenne « alliée » du capitalisme industriel
Dans certaines circonstances, la classe moyenne apparaît comme un facteur de développement de par son impact sur l’offre et sur la demande. Par exemple, au cours de la période des Trente glorieuses, la classe moyenne (intégrant une bonne partie de la classe ouvrière) a largement participé au bon fonctionnement du système fordiste, caractérisé par la production de masse et la consommation de masse. Pour son développement, le capitalisme industriel avait besoin d’un grand marché ainsi que de capacités productives résidentes pour l’approvisionner.
La classe moyenne a tenu un rôle important dans la création et le soutien de la demande tant sur le plan quantitatif que qualitatif. Grâce à un pouvoir d’achat en progression régulière, elle a consommé des quantités croissantes de biens et de services standardisés, mais elle a aussi accepté de payer un prix plus élevé pour la « qualité », ce qui a stimulé l’investissement pour l’innovation, la différenciation et la commercialisation de nouveaux biens et services28 [27].
Du côté de l’offre, certains considèrent la classe moyenne comme un vecteur important de l’entrepreneuriat et de l’innovation des petites entreprises. La classe moyenne s’est aussi constituée à partir de la main-d’œuvre qualifiée dont les entreprises et l’État (l’État providence) avaient besoin pour leur développement. Grâce à l’effort d’éducation – formation, ladite classe a fourni le capital humain nécessaire tout en permettant à une masse d’individus issus de milieux modestes de rejoindre ses rangs. Au total, « la classe moyenne apparaît comme la source de tous les intrants requis pour assurer la croissance en termes d’économie néoclassique – idées nouvelles, accumulation du capital physique et accumulation du capital humain29 [28] ».
Ainsi, les Trente glorieuses ont scellé un compromis (une « alliance ») temporaire entre la classe moyenne, essentiellement salariée, et le capital industriel. La superposition géographique des aires de production et de consommation était un élément décisif du compromis. Grosso modo, ce qui était essentiellement produit au Nord était consommé au Nord. Ce faisant, la fraction de la valeur ajoutée à laquelle les capitalistes renonçaient dans le processus productif, pour la verser sous forme de salaire direct et indirect, revenait dans leur escarcelle lors de l’achat des biens et services par les salariés. En d’autres termes, le salaire était à la fois un coût et un vecteur de profit pour l’entreprise. La coïncidence géographique de la production et de la consommation engendrait un cercle vertueux conduisant au développement autocentré.
Dans une certaine mesure, on a constaté la mise en place de compromis similaires dans les pays du Sud, au cours de la période du nationalisme – clientéliste, notamment caractérisé par l’industrialisation par substitution des importations. En Côte d’Ivoire, par exemple, le compromis initiateur de la classe moyenne était fondé sur la redistribution de la rente agricole issue des filières cacao-café, sur le développement du secteur industriel ainsi que sur les apports d’aide extérieure30 [29]. Le capital international récupérait la rente par le biais des importations et de la production nationale qu’il assurait majoritairement.
Lorsque le contexte évolue, les intérêts des protagonistes peuvent se mettre à diverger et le compromis peut être remis en cause. Dans ce cas, la classe moyenne et le capital deviennent ennemis.
La classe moyenne « ennemie » du capitalisme financier
La survenance d’une série d’évènements va graduellement modifier le contexte de l’économie mondiale : la fin du système de taux de change fixes en 1971, les chocs pétrolier de 1973 et de 1979, la stagflation, la crise de la dette des pays du Sud en 1982, la chute du mur de Berlin et l’implosion du bloc soviétique. L’évolution va permettre l’accélération et l’approfondissement de la mondialisation néolibérale, financière et économique.
Le capitalisme se financiarise et la production industrielle est relocalisée principalement sur le continent asiatique qui dispose d’une main d’œuvre à très bas salaires. La désindustrialisation frappe les pays du Nord31 [30], mais également les pays du Sud32 [31] qui avaient, dans le cadre du nationalisme – clientéliste, adopté des stratégies d’industrialisation par substitution des importations.
Le libre-échange permet d’inonder les marchés de produits à bas prix qui concurrencent (de façon déloyale ?) les productions nationales, révélant leur défaut de « compétitivité ». (Re)devenir compétitif33 [32] implique l’abaissement des coûts de production directs et indirects. Cette démarche passe par la réduction des salaires réels, des avantages sociaux… et, plus généralement, des dépenses « clientélistes » (assimilées à de la corruption) et des dépenses liées à l’État providence (présentées comme inéquitables, car essentiellement corporatistes).
Sous prétexte de concurrence, il s’agit de rehausser les profits. Pour ce faire, il convient d’ajuster les structures économiques et sociales nationales aux règles du « laisser-faire » – « laisser-passer », étendu à l’ensemble de la planète. « Parmi la population, comme les pauvres le sont trop et que les riches sont exemptés34 [33], c’est sur la classe moyenne que reposera l’essentiel de la charge de l’ajustement35 [34] ».
Ainsi, la classe moyenne devient « l’ennemie » du capitalisme financiarisé car son existence injustifiée – puisque sous d’autres cieux, des populations assurent les mêmes tâches productives à moindre coût – réduit les profits. Le capitalisme dénonce le compromis conclu précédemment et fait procéder à l’euthanasie de la classe moyenne parasite. Pour ce faire, l’intervention de l’État, guidée par les élites politiques complices, apparaît indispensable.
La classe moyenne produite ou détruite par l’État
L’intervention de l’État est impérative pour assurer le développement de la classe moyenne ou son euthanasie, car c’est lui qui légifère, règlemente, incite, réprime… contrôlant ainsi, plus ou moins directement, une large part de la production et de la redistribution des richesses. L’État prend et donne, fait et défait, tricote et détricote… Par le biais de la loi, du secteur public, de la fiscalité – redistribution…, l’État façonne, corrige et adapte la structure sociale nationale. Les élites politiques (issues du suffrage universel en démocratie) assurent la direction de l’État, proposent et votent les lois. Ce sont donc lesdites élites politiques nationales qui portent la responsabilité de la densification ou de l’éclaircissement de la classe moyenne.
Durant la phase ascendante du cycle, le compromis entre le capital et la classe moyenne autorise les élites politiques à œuvrer en sa faveur. L’État intervient pour assurer un bien-être accru par la loi et la réglementation, pour créer des emplois, pour mettre en place des services publics de qualité…, ce qui a pour effet de densifier la classe moyenne36 [35] tout en permettant au capital de se valoriser pleinement. On assiste à la construction de l’État providence et de l’État nationaliste – clientéliste. Au cours de cette phase, dans les pays du Sud, une bonne partie du surplus dégagé sur le territoire national, principalement sous forme de rente (agricole, minière, énergétique…), est mobilisé par l’État et distribué sur place. C’est la période des « Pères de la nation » (Houphouet-Boigny, N’Krumah, Nyerere…). Au Nord, le fordisme permet la croissance autocentrée, génératrice de surplus largement redistribué. Sur le plan politique, le climat est assez serein. En effet, en démocratie, les élites politiques émanent, pour une large part, de la classe moyenne. Elles fondent leur discours sur les concessions, obtenues ou à négocier avec les capitalistes37 [36], au profit de la classe moyenne essentiellement. De ce fait, la classe politique se trouve relativement en phase avec l’électorat38 [37].
Au cours de la période descendante du cycle, qui coïncide avec la divergence des intérêts du capital et de la classe moyenne, l’État œuvre à la destruction de cette dernière. Cela signifie la défaisance39 [38] des dispositifs mis en place au cours de la période précédente : l’État providence au Nord et l’État nationaliste – clientéliste au Sud. En régime démocratique, cette démarche présente un risque majeur pour les élites dirigeantes qui doivent mettre en œuvre des politiques contraires aux intérêts de leur électorat traditionnel40 [39]. Le contournement de cet obstacle politique implique l’atomisation du pouvoir de l’Etat central41 [40], l’organisation de la démocratie virtuelle42 [41], la promotion de l’idéologie du marché, la manipulation de l’opinion publique, le changement des élites par leur internationalisation43 [42]… Les élites, au pouvoir ou susceptible d’y accéder, réunies autour du projet néolibéral (monétariste ou ordolibéral) qu’elles déclinent avec le vocabulaire propre à leur position « officielle » sur l’échiquier politique, produisent un discours étriqué et peu différencié, qui tente de cacher la réalité de la dynamique de paupérisation du plus grand nombre, imposée par le capitalisme financiarisé. Le fossé se creuse entre la classe politique et les électeurs qui expriment leur désintérêt par une abstention massive aux scrutins électoraux. Malgré cela, les élites s’impliquent de plus en plus au service du capital contre les populations et particulièrement contre la classe moyenne. Pour elles, les règles du marché qui sont censées récompenser les prudents44 [43] et sanctionner les téméraires ne s’appliquent pas aux capitalistes financiers. La crise de 2008, montre que les élites ont fait en sorte que « les téméraires semblent être les bénéficiaires de la crise qu’ils ont provoquée, tandis que le reste de la société [et particulièrement la classe moyenne] porte le fardeau de leur insouciance45 [44] ». L’instrumentalisation de l’État et des institutions supranationales au service du capitalisme financiarisé engendre une crise globale de légitimité des élites, qu’elles soient nationales ou internationales.
Au total, selon que la classe moyenne sert ou dessert le capital, les élites utilisent l’État pour en densifier ou pour en éclaircir les rangs.
Conclusion
De nombreux scientifiques et commentateurs ont souligné l’importance des classes moyennes dans le processus de développement. Les performances des pays du G7 qui, de 1965 à 2004 ont représenté une part quasi stable de 65 % du PIB mondial peuvent être, en grande partie, attribuées à une classe moyenne nombreuse46 [45]. « Ce sont les classes moyennes qui ont bâti l’économie française du XXème siècle ; elles en ont été les plus grandes bénéficiaires47 [46] ». Plus généralement, « sur le long terme (200 ans), l’économie de marché occidentale a resserré les inégalités entre les classes sociales [et] ce sont les classes moyennes qui ont le plus bénéficié de ce resserrement des inégalités48 [47] ». La tendance s’inverse à partir de la fin des années 1970 avec la mondialisation néolibérale qui lamine progressivement les classes moyennes. Face à ce constat, d’aucuns49 [48] avancent que la « réduction » des classes moyennes dans certaines zones géographiques serait surcompensée par la densification de ces mêmes classes dans d’autres zones du globe.
On s’interroge sur l’apparition et la densification des classes moyennes dans les pays émergents (Chine, Inde…). Selon notre analyse, dans un contexte de mondialisation néolibérale, de libre-échange, de déréglementation, de libre mouvement des capitaux… et de non-intervention incitatrice et protectrice de l’État, les classes moyennes ne seront qu’un phénomène éphémère. En effet, le marché mondial mettant en concurrence tous les peuples, les revenus sont forcément plafonnés par la nécessité de rester compétitifs par rapport aux nouveaux entrants sur ledit marché (par exemple : la Chine par rapport au VietNam…, etc). Dans ces conditions, une classe moyenne ne peut se développer durablement. Dès que, dans un pays, les revenus atteignent un certain seuil, les coûts de production deviennent trop élevés pour affronter la concurrence tant sur le marché national que mondial. Les productions concernées sont alors délocalisées vers des pays ou des régions plus compétitives, où se créent des embryons de classe moyenne au « détriment » de celle du pays d’origine. Il s’agit d’une sorte de jeu à somme nulle où l’un gagne ce que l’autre perd50 [49].
Pour se densifier durablement, la classe moyenne a besoin de l’intervention incitatrice et protectrice de l’État qui ne peut intervenir dans un contexte de mondialisation néolibérale. Il faut donc réhabiliter l’État. De plus, les élites politiques à la tête de l’État (ou susceptibles de l’être) doivent privilégier les intérêts de la classe moyenne par rapport à ceux du capital.
Depuis de nombreuses années, l’expérience nous montre qu’au niveau mondial – à quelques rares exceptions près51 [50] – les élites au pouvoir, au capital social internationalisé, semblent plutôt être à la solde du capital financier. Cela signifie que l’avenir radieux des classes moyennes implique le changement des élites qui ne se fera certainement pas sans violence52 [51].
Benard Conte, pour Mecanopolis [52]
Bernard Conte est économiste politique et maître de conférences à l’Université Montesquieu-Bordeaux IV
Visiter le blog de Bernard Conte [53]
Notes :
1 [54] Cet article est une version épurée d’une communication [55] présentée au Congrès des études africaines en France, CEAN – IEP de Bordeaux, septembre 2010.
2 [56] En France, on les nomme : droite « bling bling » et gauche « caviar », sur le plan des idées politiques, une épaisseur de moins d’un cheveu les sépare.
3 [57] Au Sud pendant cette période, « de nombreux pays optent pour un développement introverti en mettant en œuvre des stratégies d’industrialisation par substitution des importations (ISI), aptes à lutter contre la détérioration des termes de l’échange (DTE). Il s’agit de remplacer progressivement les importations de produits manufacturés par la production nationale dans une stratégie de remontée de filière. Pour ce faire, le marché domestique doit être protégé (au moins temporairement) et l’État joue un rôle majeur dans la mise en œuvre de ladite stratégie (state-led-development) », Bernard Conte, Clientélisme, ajustement et conflit [58], Bordeaux, CED, DT n° 101, 2004, p. 1.
4 [59] Bernard Conte, Clientélisme, ajustement et conflit, op. cit. p. 5.
5 [60] Bernard Conte, La division internationale du travail et le développement interne : le cas de la Côte d’Ivoire, op. cit. p. 359.
6 [61] Ibidem, p. 321-376.
7 [62] Bonnie Campbell, « Quand l’ivoirisation secrète une couche dominante », Le Monde diplomatique, novembre 1981.
8 [63] République de Côte d’Ivoire, Ministère du plan, Plan de développement économique social et culturel, 1981-1985, Abidjan, 1982, p. 744.
9 [64] Bilan national de l’emploi en Côte d’Ivoire, Ministère des relations extérieures, Etudes et documents, n° 47, Paris, mai 1982, p. 132.
10 [65] Jean-Paul Azam, La faisabilité politique de l’ajustement en Côte d’Ivoire (1981 – 1990), (version révisée n°3) études du Centre de développement, OCDE, Paris, 1994, p. 71.
11 [66] « Cote d’Ivoire, compétition capitaliste aigüe autour de la répartition de la rente issue de l’exploitation des ressources naturelles », La lettre de mouvement communiste, n° 15 ; janvier 2005, http://www.mouvement-communiste.com/pdf/letter/LTMC0515.pdf [67] consulté le 19 août 2010.
12 [68] Denis Cogneau et Sandrine Mesplé-Somps, L’économie ivoirienne, la fin du mirage ? Dial, Paris, Document de travail DT/2002/18, Décembre 2002, p. 88.
13 [69]Afrik.com, « Côte d’Ivoire : la pauvreté atteint le seuil critique de 48,9 % », 6 janvier 2009,
http://www.afrik.com/breve15294.html [70] consulté le 19 août 2010.
14 [71] Gabriel Kessler, « L’expérience de paupérisation de la classe moyenne argentine », Cultures & Conflits, 35, 1999, http://www.conflits.org/index173.html [72] Consulté le 17 juillet 2010. Le délitement de la classe moyenne s’observe aussi au Brésil, cf. par exemple : Larissa Morais, « La classe moyenne brésilienne », Jornal do Brasil, 12 mai 2004, traduction Elizabeth Borghino pour Autres Brésils, http://www.autresbresils.net/spip.php?article73 [73] consulté le 8 août 2010.
15 [74] Gabriel Kessler, « L’expérience de paupérisation de la classe moyenne argentine », art.cit.
16 [75] Idem.
17 [76] Latinreporters.com, « Argentine: le péroniste Eduardo Duhalde, 5e président en deux semaines », http://www.latinreporters.com/argentinepol020102.html [77] , consulté le 1er août 2010.
18 [78] Idem. Le délitement de la classe moyenne s’observe aussi au Brésil, cf. par exemple : Larissa Morais, « La classe moyenne brésilienne », Jornal do Brasil, 12 mai 2004, traduction Elizabeth Borghino pour Autres Brésils, http://www.autresbresils.net/spip.php?article73 [73] consulté le 8 août 2010.
19 [79] Geneviève Brunet, « Crise des pays émergents. De bons élèves lourdement punis », L’Hebdo, http://www.hebdo.ch/crise_des_pays_emergents_de_bons_elev... [80] consulté le 1er août 2010. Voir aussi : John Evans, « Impact social de la crise asiatique. » Le Monde diplomatique, mai 1998, pp. 3.
20 [81] Alain Wang, « Asie : la crise frappe les classes moyennes », », Courriercadres.com http://www.courriercadres.com/content/asie-la-crise-frapp... [82] 19 mars 2009, consulté le 2 août 2010.
21 [83] Cf. Bernard Conte, La Tiers-Mondialisation de la planète [84], Bordeaux, Presses universitaires de Bordeaux, 2009.
22 [85] Christian Marazzi, « Middle-class confusion de terme, confusion de concept », Collectif d’analyse politique, http://cap.qc.ca.edu/a-la-redecouverte-du-concept-de-clas... [86] Première publication en juillet 1994, Mise en ligne le lundi 7 juillet 2003, consulté le 2 août 2010.
23 [87] Marc-André Gagnon, « La ‘fausse classe moyenne’ piégée », Le journal des alternatives, http://www.alternatives.ca/fra/journal-alternatives/publications/archives/2009/vol-15-no-8-mai-2009/article/la-fausse-classe-moyenne-piegee 30 avril 2009 [88], consulté le 2 août 2010.
24 [89] « Elles constituent désormais moins des deux tiers de la société », Cf. note suivante.
25 [90] Cidal, « L’érosion des classes moyennes se poursuit en Allemagne », Centre d’information et de documentation sur l’Allemagne, Paris, http://www.cidal.diplo.de/Vertretung/cidal/fr/__pr/actual... [91] , publié le 17/06/2010, consulté le 4 août 2010. L’étude est disponible à cette adresse : http://www.diw-berlin.de/documents/publikationen/73/diw_0... [92]
26 [93] Louis Chauvel, Les classes moyennes à la dérive, Paris, Seuil, 2006.
27 [94] Louis Chauvel, « Classes moyennes, le grand retournement », Le Monde, 3 mai 2006. p. 24.
28 [95] Kevin Murphy, Andrei Shleifer et Robert Vishny, “Income Distribution, Market Size and Industrialization,” Quarterly Journal of Economics, (août 1989), p. 537-564.
29 [96] Homi Kharas, The emerging middle class in developing countries [97], Working Paper n° 285, Paris, OCDE, Development Centre, janvier 2010, p. 7. Traduction de l’auteur.
30 [98] Cf. Bernard Conte, « Côte d’Ivoire : du clientélisme ‘éclairé’ au clientélisme ‘appauvri’ », Strategic-Road.com, 19/04/2003, http://www.strategic-road.com/pays/pubs/cote_divoire_clie... [99] consulté le 27 août 2010.
31 [100] « [En France], de 1997 à 2007, la part de l’industrie dans le PIB est passée de 18,4% à 12,1% et les emplois industriels ont diminué de 2 millions en trente ans », Pascal Salin, « Faut-il craindre la désindustrialisation ? », La Tribune, 10/03/2010.
32 [101] « L’ajustement structurel a contribué, contrairement à ce que laisse entendre le FMI, à la désindustrialisation de l’Afrique », Joseph Stiglitz, « L’Afrique doit compter davantage sur elle-même », Les Afriques, 08/02/2010, http://www.lesafriques.com/actualite/joseph-stiglitz-l-af... [102] consulté le 26/08/2010.
33 [103] La compétitivité devient obsessionnelle. Cf. par exemple : T. Biggs, M. Miller, M. Otto, C. et G. Tyler, « Africa Can Compete! Export Opportunities and Challenges for Garments and Home Products in the European Market, » World Bank – Discussion Papers 300, World Bank. 1996.
34 [104] Les riches sont les seuls censés produire de la croissance, il faut les protéger, par exemple grâce à un « bouclier » fiscal.
35 [105] Bernard Conte, « Le oui irlandais débloque l’Europe ordolibérale », Contre Info.info, 10/10/2009, http://contreinfo.info/article.php3?id_article=2835 [106] consulté le 27/08/2010.
36 [107] Au Chili, « les couches moyennes ont joui d’une redistribution favorable – à l’intérieur de l’ensemble des salariés – des dépenses publiques dans les domaines de la santé, de l’éducation et surtout du logement, sous les différents gouvernements démocratiques qui ont précédé la dictature », Rosa Jimenez et René Urbina, « Les avatars des couches moyennes dans le Chili d’aujourd’hui [108] », in. Tiers-Monde, 1985, tome 26, n° 101. Classe moyenne : la montée et la crise, p. 154-174. citation p. 161.
37 [109] Il semble que les capitalistes soient prêts à accorder la majorité des concessions, car elles vont dans le sens de la marche du fordisme et du nationalisme – clientéliste.
38 [110] Les promesses électorales peuvent être globalement tenues.
39 [111] C’est à dessein que j’emploie le terme du vocabulaire financier « défaisance », car il s’agit d’une exigence du capitalisme financier.
40 [112] En régime « moins » démocratique, la démarche peut conduire au conflit, éventuellement armé. Cf. Bernard Conte, « Afrique de l’Ouest : clientélisme, mondialisation et instabilité », Paris, Encyclopaedia Universalis, 2004, p. Du même auteur : « La responsabilité du FMI et de la Banque mondiale dans le conflit en Côte d’Ivoire [113] », Etudes internationales, vol. XXXVI, n° 2, juin 2005. p. 219-228.
41 [114] Cf. Bernard Conte, La Tiers-Mondialisation de la planète, op. cit. p. 194-199.
42 [115] Ibidem, p. 199-203.
43 [116] Cf. Yves Dezalay et Bryant G. Garth. La mondialisation des guerres de palais. Paris, Le Seuil, 2002 ; Zbigniew Brzezinski, Between Two Ages : America’s Role in the Technetronic Era, New York, Viking Press, 1970.
44 [117] Ceux qui prennent des risques « calculés » par opposition à ceux qui prennent des risques « inconsidérés ».
45 [118] George Friedman, “The Global Crisis of Legitimacy”, Stratfor, global intelligence, 4 mai 2010. http://www.stratfor.com/weekly/20100503_global_crisis_leg... [119] consulté le 19 août 2010. Traduction libre.
46 [120] “Underpinning the performance of the G7, and indeed driving the global economy, is a large middle class”, Homi Kharas, The emerging middle class in developing countries, op. cit.
47 [121] Xavier Théry, « Comment les classes moyennes ont divorcé des élites », Marianne 2, 27/09/2009, http://www.marianne2.fr/Comment-les-classes-moyennes-ont-... [122] consulté le 30/08/2010.
48 [123] Ibidem.
49 [124] Les néolibéraux évidemment.
50 [125] Par contre, le capital est toujours gagnant.
51 [126] On peut citer le Venezuela.
52 [127] Les révolutions ont souvent eu pour origine la classe moyenne.
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Swami Vivekananda e il suo tempo, tra modernità e tradizione
Swami Vivekananda e il suo tempo, tra modernità e tradizione
Elena BORGHI
Ex: http://www.eurasia-rivista.org/

Il quadro storico
Il periodo storico in cui visse ed operò Swami Vivekananda, la seconda metà dell’Ottocento, fu per l’India un momento particolarmente intenso.
Sul piano politico, caratterizzò questi anni il passaggio del governo dell’India dalla Compagnia delle Indie Orientali alla Corona inglese, che assunse il controllo diretto del Paese nel 1858, a seguito del Mutiny. Considerato da alcuni il primo scoppio del fervore nazionalista ed indipendentista, questo evento ebbe come principali conseguenze un’ondata terribile di violenze e la deriva ancor più autoritaria del governo inglese in India. Certamente, la rivolta fu indicativa del carattere predatorio della Compagnia e del livello di esasperazione da essa indotto nella popolazione, che cominciava a mal sopportare il peso del dominio inglese. Se, infatti, il regime coloniale trasformava gradualmente l’India in una nazione moderna – introducendo infrastrutture, reti di comunicazione, organizzazione della burocrazia e della società civile – d’altro canto il Paese pagava un prezzo altissimo in termini economici, sociali e politici.
Sul piano economico, l’India subì in questo periodo la devastazione causata dai legami sproporzionati tra centro e periferia dell’impero, che distrussero la preesistente economia, anche se, per quanto sfrenato, lo sfruttamento economico dell’India garantiva alla Gran Bretagna guadagni complessivamente piuttosto limitati. L’apporto fondamentale della colonia, infatti, rimase sempre la sua funzione di bacino potenzialmente inesauribile di reclutamento di uomini per l’esercito inglese in India, per l’apparato burocratico coloniale e per l’indentured labour, il sistema di “lavoro a contratto” che sostituì gli schiavi africani con migliaia di contadini e braccianti indiani, trasferiti nelle piantagioni e nelle miniere dei luoghi più disparati, legati a contratti che mascheravano uno stato di effettiva schiavitù.
Questi erano tra gli aspetti che, naturalmente, contribuivano a disintegrare il tessuto sociale indiano; vi si aggiungeva il portato del bagaglio ideologico introdotto dal regime coloniale, che cooperò enormemente alla cristallizzazione delle differenze castali e religiose e, dunque, alla frammentazione della società indiana in una miriade di blocchi contrapposti ed ostili, chiusi a livello endogamico, regolati da criteri gerarchici e definiti su basi di purezza razziale e rituale.
I movimenti di riforma
Di pari passo con il potere coloniale, cresceva lo scontento ed il senso di inadeguatezza di alcune categorie, perlopiù intellettuali di classe media ed estrazione urbana, figli di un’educazione di stampo occidentale, dalla cui iniziativa scaturì quel processo di rinnovamento sociale e culturale – nonché di ridefinizione identitaria, presa di coscienza nazionale e critica del regime coloniale – che investì l’India nel periodo in esame.
Si trattò di un periodo di fermento culturale e di tentativi di riforma sociale e religiosa, volti a ripensare le pratiche considerate più aberranti della tradizione hindu (come la sati, l’immolazione delle vedove sulla pira del marito, o il matrimonio infantile), a diffondere un’istruzione di tipo moderno, a ridiscutere la condizione femminile. Motore e scopo ultimo di questi movimenti era l’acquisizione di strumenti atti ad affrontare «l’esibita superiorità dell’Occidente cristiano nei confronti della cultura e delle religioni indiane»1, come dimostrarono, in particolare, le misure a favore dell’istruzione femminile. Auspicate dai riformatori per motivi che poco avevano a che fare con il reale desiderio di apportare miglioramenti alla generale condizione delle donne, queste misure si rivelarono, in realtà, necessarie ad altri scopi: confutare le teorie europee – secondo le quali la discriminazione cui erano sottoposte le donne in India e la loro condizione erano immagine dell’arretratezza del Paese in generale –, dando prova dell’adeguatezza dell’India all’autogoverno; creare “nuove donne indiane” capaci di essere mogli e madri più adatte alle necessità (pratiche, ma anche identitarie e d’immagine) della classe emergente, e di socializzarne i valori e le aspirazioni, pur entro i confini della tradizione patriarcale, che restava per i riformatori un punto fermo e indiscutibile.2
In ambito religioso, la riforma si concretizzò nelle figure di alcuni pensatori e nella fondazione di istituzioni, volte a rivedere le più grandi tradizioni indiane – hindu e musulmana – alla luce di uno spirito più moderno e razionale.
È tra questi riformatori che si colloca Vivekananda, al secolo Narendranath Datta, nato in quella Calcutta all’epoca centro della vita politica e culturale del Paese, e in una famiglia di scienziati e pensatori illustri.
Fin da bambino profondamente interessato ai temi dell’Hinduismo e della meditazione e dotato di un carisma e di una passione per la ricerca della verità inusuali per la sua età, Narendranath ricevette un’istruzione di stampo occidentale, appassionandosi in particolare alla filosofia, e coltivando allo stesso tempo lo studio della poesia sanscrita, dei testi sacri e degli scritti del riformatore suo contemporaneo Rammohan Ray.
Razionale, dedito al ragionamento logico e sprezzante dei dogmi religiosi tradizionali, Narendranath si avvicinò al Brahma Samaj, l’istituzione fondata a Calcutta nel 1828 da Rammohan Ray al fine di operare una trasformazione dello Hinduismo in senso moderno, depurando la religione dalle pratiche più barbare ed introducendo nello studio della stessa il principio di ragione. Narendranath, affascinato dalle arringhe dei riformatori che facevano parte del movimento, sembrava destinato ad una carriera del tutto simile, borghese e socialmente impegnata, fino a quando un incontro introdusse nel suo percorso un cambiamento di rotta.
Da Narendranath a Vivekananda
Era il 1880, quando Narendranath incontrò per la prima volta Ramakrishna, il sacerdote officiante di un tempio situato a Dakshineshwar, un sobborgo di Calcutta, e dedicato ad una forma del dio Shiva, che veniva lì adorato insieme alla dea Kali. Brahmano di estrazione contadina, con un’istruzione limitata cui sopperivano buon senso, mitezza e profonda devozione, costui era un rinunciante di eccezionale spessore, un rappresentante della corrente mistica della bhakti, la “devozione”, e un punto di riferimento per gli intellettuali bengalesi, affascinati dalla schiettezza dei suoi insegnamenti.
Quell’incontro provocò un imponente cambiamento nella vita del giovane Narendranath, che in pochi anni, durante i quali proseguì nel tentativo di conciliare il materialismo delle scienze occidentali e lo spiritualismo in cui lo precipitavano i momenti a Dakshineshwar, divenne il discepolo prediletto di Ramakrishna. Come il suo Maestro, divenne un Advaitavedantin, un sostenitore dell’indirizzo dottrinale del non-dualismo, che predicava l’unità tra Sé individuale e Assoluto. Da questi insegnamenti Narendranath avrebbe in seguito derivato la convinzione della divinità degli esseri umani, dunque la considerazione di tutte le forme dell’esistenza quali manifestazioni dello spirito divino.
Nel 1886 Ramakrishna, dopo aver iniziato i discepoli alla loro nuova condizione di sanyasin3, indicò Narendranath come loro guida. Fu così che egli divenne Vivekananda, “colui che ha la beatitudine della discriminazione spirituale”. Due anni più tardi Vivekananda cominciò la sua vita di parivrajaka, “monaco errante”, partendo per un pellegrinaggio che durò anni, un viaggio solitario compiuto a piedi sulle strade polverose dell’India, dallo Himalaya fino a Kanyakumari. Questa esperienza fornì a Vivekananda una conoscenza profonda del Paese, quale non aveva mai posseduto. Alla fine del viaggio, quando finalmente raggiunse Kanyakumari, Vivekananda rifletté su tutto quello che aveva visto: «Un Paese dove milioni di persone vivono dei fiori della pianta mohua, e un milione o due di sadhu e circa cento milioni di brahmani succhiano il sangue di queste persone, senza fare il minimo sforzo per migliorare la loro condizione, è un Paese o l’inferno? È quella una religione, o la danza del diavolo?»4
Partito con l’obiettivo di portare unità tra le varie sette e confessioni indiane, radunandole sotto l’ombrello del messaggio vedantico, Vivekananda comprese che al suo Paese servivano istruzione e cibo, più che insegnamenti religiosi. Ripensò a quel che aveva sentito dire alcuni mesi prima, circa l’organizzazione a Chicago del World’s Parliament of Religions, un congresso che avrebbe ospitato rappresentanti di ogni religione del mondo; Vivekananda decise che si sarebbe recato negli Stati Uniti, per predicare il messaggio vedantico e chiedere in cambio il sostegno economico necessario a fondare in India istituzioni educative e caritative per le classi più svantaggiate.
Pochi mesi più tardi ebbe inizio la sua missione in Occidente, che lo vide tenere innumerevoli conferenze e radunare intorno a sé molti sostenitori.
Un pensiero moderno e rivoluzionario
Attualizzando gli aspetti religioso-filosofici della dottrina vedantica, all’interno di un pensiero in cui la speculazione teorica e dogmatica veniva costantemente riportata alle necessità pratiche del suo tempo e del suo luogo – percepite come urgenti ed imprescindibili –, Vivekananda divenne l’esempio di una nuova tipologia di riformatore, capace di coniugare gli insegnamenti ancestrali del pensiero vedantico con l’attualità dell’India più comune. Questa narrazione, dunque – a differenza di quelle costruite da altri riformatori, che auspicavano un ripensamento, quando non un distacco, della “tradizione” sociale e religiosa, sentita come ostacolo al “progresso” –, non presupponeva una revisione in chiave filo-occidentale del bagaglio culturale e religioso indiano, bensì glorificava quel passato, proponendolo come la chiave che avrebbe aperto all’India le porte della giustizia sociale, dell’istruzione, dello sviluppo materiale e spirituale.
«La società più grande è quella in cui le verità più alte diventano concrete»5, sosteneva Vivekananda, facendo riferimento alla necessità di costruire una società strutturata in modo da permettere la realizzazione della divinità umana. Da questa convinzione di base, derivata dalla filosofia vedantica, egli ricavò il suo progetto di società utopica, che si sarebbe retta sul pilastro dell’uguaglianza tra gli uomini. Il fatto che egli ritenesse necessarie all’avverarsi di questa idea da un lato la diffusione dell’istruzione – che doveva diventare di massa, affinché gli strati più svantaggiati acquisissero forza e coscienza del proprio valore – e, dall’altro, la soppressione di ogni privilegio – politico, economico o religioso che fosse – dimostra il carattere rivoluzionario del pensiero di Vivekananda. Diversamente da molti suoi contemporanei, egli non era disposto a prevedere risultati parziali; eppure, l’imponenza di questo progetto e il suo carattere utopico non compromettevano in alcun modo la fede di Vivekananda nella sua realizzabilità.
«Pane! Pane! Non credo in un Dio che non riesce a darmi il pane in questo mondo, mentre mi promette la beatitudine eterna nei cieli! Bah! L’India deve essere affrancata, i poveri devono essere nutriti, l’istruzione deve essere diffusa, e la piaga del potere sacerdotale deve essere eliminata».6
Anche nel suo rapporto ideale con l’Occidente Vivekananda differiva dal resto dei riformatori: non prevedendo né una forma di riverente assimilazione ai suoi valori, né il rifiuto astioso di essi, egli auspicava una sorta di collaborazione e di mutuo scambio di eccellenze: «Direi che la combinazione della mente greca, rappresentata dall’energia dell’Europa, e della spiritualità hindu darebbe origine a una società ideale in India. […] L’India deve imparare dall’Europa la conquista del mondo esteriore, e l’Europa deve imparare dall’India la conquista del mondo interiore. Allora non ci saranno hindu ed europei: ci sarà un’umanità ideale, che ha conquistato entrambi i mondi, quello esterno e quello interno. Noi abbiamo sviluppato una parte dell’umanità, e loro un’altra. È l’unione delle due ciò cui dobbiamo aspirare».7
Ancora, la modernità del pensiero di Vivekananda si espresse nella sua considerazione del gesto filantropico che, come in ambito cristiano, fino a quel momento era stato reputato dal sistema hindu tradizionale una questione privata tra donatore e beneficiario. Egli fu il primo a proporre un’etica del seva (il “servizio”) istituzionalizzata – così come è divenuta la filantropia, un po’ ovunque nel mondo, in tempi recenti –, con lo scopo di garantire una ripartizione equa e il più possibile estesa di azioni di solidarietà nei confronti di persone bisognose: “Fare del bene agli altri è l’unica grande religione universale”8, sosteneva Vivekananda, accordando alla pratica del seva un significato che andava ben oltre la semplice azione filantropica. Teorizzò, inoltre, che la figura sociale più autorevole in India – e dunque più adatta a diffondere un pensiero in certo modo rivoluzionario – era quella del sanyasin. Mentre i suoi contemporanei proponevano modelli borghesi, di uomini d’alta casta colti e mondani, o figure eroiche della tradizione storica e religiosa indiana, Vivekananda individuava nel monaco, nell’asceta e nel rinunciante la sede della saggezza e della credibilità presso il popolo; era a queste figure, estranee ai meccanismi del potere, all’avidità e al perseguimento dell’interesse personale, che Vivekananda avrebbe affidato il compito di diffondere il messaggio, dimostrando ancora una volta l’intransigenza che guidava il suo pensiero.
Su questi pilastri poggiava la Ramakrishna Mission, istituita da Vivekananda a fine secolo quale organizzazione impegnata in ambito sociale e strettamente connessa alla vita del monastero dell’Ordine di Ramakrishna, i cui monaci fondevano nella propria esperienza quotidiana lavoro sociale e pratica spirituale – due aspetti che, completandosi a vicenda, fungevano l’uno da motore dell’altro. Intervenendo inizialmente soprattutto in ambito educativo e nella lotta alla povertà, la Ramakrishna Mission cominciò così in quegli anni il suo servizio all’India, che Vivekananda descriveva in termini angosciati:
«Fiumi ampi e profondi, gonfi e impetuosi, affascinanti giardini sulle rive del fiume, da fare invidia al celestiale Nandana-Kanana; tra questi meravigliosi giardini si ergono, svettanti verso il cielo, superbi palazzi di marmo, decorati da preziose finiture; ai lati, davanti e dietro, agglomerati di baracche, con muri di fango sgretolati e tetti sconnessi […]; figure emaciate si aggirano qua e là coperte di stracci, con i volti segnati dai solchi profondi di una disperazione e di una povertà vecchie di secoli […]; questa è l’India dei nostri giorni!
[…] Devastazione causata da peste e colera; malaria che consuma le forze del Paese; morte per fame come condizione naturale; carestie mortali che spesso danzano il loro macabro ballo; un kurukshetra di malattie e miseria, un enorme campo per le cremazioni disseminato dalle ossa della speranza perduta.
[…] Un agglomerato di trecento milioni di anime, solo apparentemente umane, gettate fuori dalla vita dall’oppressione della loro stessa gente e delle nazioni straniere, dall’oppressione di coloro che professano la loro stessa religione e di coloro che predicano altre fedi; pazienti nella fatica e nella sofferenza e privati di ogni iniziativa, come schiavi, senza alcuna speranza, senza passato, senza futuro, desiderosi solo di mantenersi in vita in qualche modo, per quanto precario; di natura malinconica, come si confà agli schiavi, per i quali la prosperità dei loro simili è insopportabile. […] Trecento milioni di anime come queste brulicano sul corpo dell’India come altrettanti vermi su una carcassa marcia e puzzolente. Questo è il quadro che si presenta agli occhi dei funzionari inglesi».9
Costituito inizialmente da appena una dozzina di monaci, nei cento e più anni che ci separano dalla sua fondazione l’Ordine di Ramakrishna è oggi un movimento transnazionale di proporzioni enormi, simbolo di pace ed ecumenismo, fondato sulla pratica del servizio disinteressato come metodo per la realizzazione del divino e caratterizzato da un approccio razionale alla religione – considerata non un apparato ritualistico ma una scienza dell’essere e del divenire –, da una tradizione colta e dall’efficacia dei suoi interventi in campo sociale.
Definiscono Ramakrishna Mission e Ramakrishna Math (rispettivamente la componente pratica del movimento e l’organizzazione monastica) le tre caratteristiche che sono state segni distintivi di Vivekananda e del suo operato e che, risultando a tutt’oggi innovative, dimostrano la statura di un riformatore illuminato, rivoluzionario per il tempo e il luogo in cui visse: la modernità – che si esprime nell’attualizzazione dei principi vedantici, e nel collocare nel presente il pensiero guida dell’operato di queste istituzioni; l’universalità – data dal rivolgersi non ad un unico Paese o ad uno specifico gruppo di persone, ma all’umanità intera; e la concretezza – che risiede nel porre i principi teorici e spirituali a servizio del miglioramento delle quotidiane condizioni di vita delle persone.
* Elena Borghi, dottoressa in Studi linguistici e antropologici sull’Eurasia e il Mediterraneo (Università “Ca’ Foscari” di Venezia), è autrice di Sai Baba di Shirdi. Il santo dei mille miracoli (Red, Milano 2010) e Vivekananda. La verità è il mio unico dio (Red, Milano 2009)
1 Torri, M., Storia dell’India, Editori Laterza, Roma-Bari 2000, p. 453.
2 Jayawardena, K., Feminism and Nationalism in the Third World, Zed Books, Londra 1986.
3 Asceta errabondo, che ha rinunciato ad ogni piacere mondano e ad ogni forma di possesso materiale ed umano, per dedicarsi unicamente al conseguimento della liberazione, il moksha. Il monaco rinunciante trascorre la propria vita in solitario cammino, elemosinando il cibo, coltivando il silenzio e il raccoglimento, inaccessibile ad ogni desiderio e ad ogni umana debolezza. La contemplazione dello Spirito supremo, il distacco, la disciplina e la meditazione profonda sono i suoi compiti, che lo preparano ad abbandonare per sempre la dimora terrena ed il corpo mortale, liberandolo dal ciclo di rinascita e rimorte.
4 The complete Works of Swami Vivekananda, Mayavati Memorial Editing, Advaita Ashrama, Calutta 1992-95, vol. VI, p. 254.
5 Ibid., vol. II, p. 85.
6 Ibid., vol. IV, p. 368.
7 Ibid., vol. V, p. 216.
8 Ibid., vol. IV, p. 403.
9 Ibid., vol. V, p. 441-442.
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dimanche, 24 octobre 2010
Israël et la régression intellectuelle de la civilisation occidentale
Israël et la régression intellectuelle de la civilisation occidentale
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Par Manuel de Diéguez
Les Etats et les Eglises ne se décident à ouvrir les yeux qu’à l’heure où il ne leur reste d’autre ressource que de retirer le bandeau qu’ils s’étaient mis sur les yeux. La cloche des évidences est-elle proche de sonner au beffroi de l’histoire ? Car enfin, jamais encore l’histoire du genre humain n’avait pris la tournure d’une farce planétaire.
Certes, il y avait longtemps qu’on se frottait les yeux au spectacle des négociations fantasmagoriques qui se déroulaient entre Israël et la Palestine et l’on n’en revenait pas de ce que des tractations condamnées à demeurer fictives pussent tenir en haleine des chancelleries médusées et une presse mondiale ébahie, on n’en croyait pas ses oreilles qu’une tragi-comédie de cette envergure pût un jour trouver place dans les livres d’histoire. Comment la raconter demain aux enfants sur les bancs de l’école si les adultes y jouaient, eux aussi, le rôle de spectateurs en bas âge?
Et voici que les bras vous en tombent de découvrir que ce théâtre d’ombres et de songes n’était pas encore allé au terme de sa puérilité et que l’on verrait un fantoche, un paltoquet, une marionnette débouler des coulisses sur la scène et saluer le public d’acte en acte. Quelle pièce jouait-on, à quel répertoire inconnu était-elle empruntée, quel en était l’auteur? L’histoire cache dans ses archives de nombreuses effigies d’une condition humaine titubante. Mais qui aurait pu imaginer qu’un Président de Etats-Unis adresserait au Premier Ministre d’un Etat étranger une lettre officielle dont les termes lui auraient été dictés au préalable par le destinataire et selon laquelle, primo, le locataire de la Maison Blanche mettrait son veto « à toute résolution concernant Israël, d’où quelle vienne, durant la période des négociations, laquelle est fixée à un an« , secundo, que la « dotation militaire annuelle des Etats-Unis à Israël, de trois milliards de dollars, serait augmentée » et que Tel-Aviv pourrait « avoir accès à de nouvelles armes et à des systèmes de surveillance satellitaires« , tertio, qu’Israël demeurerait maître de sa prédéfinition unilatérale des « exigences de sa sécurité« , c’est-à-dire de la formulation aussi solitaire qu’incontrôlée de ses ambitions politiques et militaires sous le couvert traditionnel de l’évocation de la « sécurité » du pays; quarto, que durant l’ année que dureraient les négociations imaginaires appelées à monter en volutes vers le ciel des anges, Israël disposerait d’une totale impunité, puisqu’aucune résolution ne pourra se trouver adoptée par le Conseil de Sécurité, quel que soit le comportement peu séraphique de son armée sur le champ de bataille; quinto, que le futur pseudo Etat palestinien sera privé d’armée et sera si peu souverain qu’il devra ouvrir tout grand son territoire et sans jamais rechigner aux mouvements des troupes israéliennes stationnées à ses frontières, sexto, qu’en retour Israël ne prolongerait que de deux mois la suspension de son expansion territoriale en Cisjordanie, après quoi il en reprendrait le cours inexorable, sauf à obtenir de nouveaux bénéfice tangibles en échange de l’ascension dans les airs d’un nouveau nuage de fumée.
Pourquoi les Etats-Unis ont-ils signé un marché de dupes de ce calibre? Pourquoi le parti démocrate a-t-il accepté de payer d’un ridicule immortel et d’un effondrement sans remède du poids de l’Amérique dans le monde l’avantage éphémère de perdre un peu moins cruellement les élections de mi-mandat de novembre 2010? Un désastre politique aussi indélébile ne s’explique que par le ligotage et le bâillonnement pur et simple de M. Barack Obama. Comme je l’ai écrit le 4 juin 2009 en prévision du discours du Caire du 6 juin, le garrottement politique de ce chef d’Etat résulte de son refus de se laisser héroïquement assassiner, donc de la dérobade de ce faux héros devant le destin sacrificiel auquel la vocation d’un vrai Président des Etats-Unis l’appelle aujourd’hui.
En raison de la désertion piteuse de la victime, déjà l’immolateur s’approche de l’autel. Est-il un tueur ou un délivreur ? Ce qui est sûr, c’est qu’un nouvel équilibre des forces vient d’ores et déjà démontrer que la nature a horreur du vide et qu’un locataire de la Maison Blanche réduit à un mannequin dont Israël tire les ficelles aux yeux du monde entier enfantera un nouvel équilibre des forces , qui remettra les rênes du monde à la Chine, à la Turquie, à l’Iran, à la Syrie, à la Russie, au Brésil. Du coup, le déclin de l’Europe deviendra irréversible pour s’être rangée jusqu’au bout aux côtés d’un empire agonisant.
Mais, depuis la plus haute antiquité, les sacrifices cultuels sont ambigus. Peut-être l’Europe saisira-t-elle cette occasion de sortir de son sépulcre. De toutes façons, cette tragédie deviendra, me semble-t-il, un peu plus intelligible à la lumière de la science historique et politique dont je tente d’exposer les fondements anthropologiques depuis près de dix ans.
A l’écoute des dernières péripéties et rebondissements de l’histoire d’Israël, je rappelle ci-dessous les paramètres d’une mutation des offertoires de la politique internationale. La vocation d’une politologie critique l’appelle à déchiffrer l’histoire d’une espèce auto-sacrificielle de naissance.
1 – Les fondements anthropologiques de l’intelligibilité de l’Histoire
Dans quelques mois au plus tard et peut-être déjà dans quelques semaines, un thème de fond va occuper la presse, les médias et surtout les quelques commentateurs de la politique internationale encore attachés non point à flâner en promeneurs désœuvrés dans les coulisses de l’actualité planétaire, mais à descendre en spéléologues hardis dans les arcanes de la politique et de l’histoire.
On peut lire, dans le Monde du 10 août 2010: « Un tremblement de terre moral ». Pas moins. C’est la formule utilisée, dimanche 8 août, par Yediot Ahronot, le quotidien le plus lu en Israël, pour décrire la dernière nouvelle qui embarrasse l’armée. De quoi s’agit-il ? De la destruction du village bédouin d’Al-Farasiya, dans la vallée du Jourdain, qui a transformé une centaine de paisibles paysans en sans-abri ? Du fait que le ministère de la défense et la Cour suprême aient interdit à une jeune habitante de Gaza d’aller étudier les droits de l’homme en Cisjordanie ? »
Non, en Israël ce genre d’information, reléguée en bas de page, ne soulève guère d’indignation. L’émoi des médias trouve son origine dans le dernier épisode de la » guerre des généraux ».
C’est dire qu’aucun événement digne de faire la une des journaux n’aura stupéfié l’opinion publique mondiale au point d’alerter tout subitement la conscience journalistique endormie sur les cinq continents. Et pourtant, dans les profondeurs, la science de la mémoire aura été ébranlée au point que la problématique et la méthodologie politique mondiale en sera bouleversée.
Pourquoi cela? Parce que ce sont les contradictions internes du géocentrisme, les défis à la logique interne de la phlogistique, l’incohérence interne de la physique classique, l’irrationalité interne de la psychologie dite « des facultés » qui ont contraint l’héliocentrisme, la chimie de Lavoisier, la relativité générale, la psychanalyse à faire exploser les présupposés immanents aux sciences antérieurement validées par une grille de lecture erronée. C’est dire que la science historique est longtemps parvenue à éluder la question centrale du statut anthropologique de son axiomatique et de sa problématique, donc à se dérober à la réflexion sur la validité de l’enceinte même dans laquelle Clio déplace les pions du jeu. Mais l’accumulation d’évènements allogènes à l’échiquier classique favorise l’examen critique et la mise en cause des coordonnées des anciens joueurs.
Il en sera de même des interprétations politiques et historiques traditionnelles du destin d’hier, d’aujourd’hui et de demain d’Israël parce que les prolégomènes approximatifs ou partiels qui permettent d’interpréter le parcours de cette nation au sein de la civilisation semi rationnelle d’aujourd’hui répondent à un code vieilli de l’intelligibilité des événements. Chaque fois qu’une science se conquiert une organisation cérébrale plus englobante que la précédente, donc un système de navigation qui lui permet de transcender les critères convenus de la compréhensibilité en usage à son époque, son armure méthodologique change radicalement de voltage et de pilotage de ses signifiants, donc de balisage mental. Il en sera nécessairement de même de la révolution de la science des Etats et des relations que leur logique interne entretient avec le récit historique de demain, parce que la nécessité s’imposera de changer entièrement de dialectique. Comment enserrerons-nous le présent et l’avenir d’Israël dans une trame moins anachronique et plus explicative que l’ancienne?
2 – Une parturition rousseauiste
Il s’agira d’insérer dans le tissu d’une anthropologie critique un Etat né d’une décision rousseauiste, celle de tous les pays de la terre de déverser soudainement et d’un seul coup une ethnie déterminée et reconnue dans sa singularité depuis trois mille ans sur un étroit territoire du Moyen Orient et de lui demander de cultiver gentiment son Eden en miniature. Mais comment lui faire paître ses moutons blancs sur le modèle bucolique dont Adam se prélassait dans le jardinet originel de l’humanité?
Jamais un régime d’assemblée privé de la lanterne de Diogène n’avait tenté de fonder une nation sur un modèle aussi pseudo-séraphique. Mais l’archétype biblique brutalement plaqué sur le Moyen Orient était censé avoir peuplé un désert de sable et non point une terre vrombissante de créatures. Certes, les historiens ont démontré qu’en 1948, le vote majoritaire des Paul et Virginie de la démocratie rassemblés dans l’enceinte des Nations Unies en faveur d’une répétition de l’Exode avait été obtenu avec le secours des méthodes de prévarication habituelles; les voix censées inspirées par un ciel de bergerie sont presque toujours achetées à prix d’or. Mais un adage latin dit que « nous sommes impuissants à changer le passé », ce que le français traduit par l’expression: « Ce qui est fait est fait ».
L’Etat d’Israël existe donc bel et bien; et s’il n’a pas encore la tête sur les épaules, il a déjà les pieds sur terre. L’historien des songes incarnés tente donc de rendre compte d’une existence à la fois onirique et dûment concrétisée. Du coup, il constate que les paramètres chantonnants sur lesquels repose encore la science évangélique des Etats n’éclairent en rien le paysage, parce que le verdict des urnes ne saurait s’inscrire dans une logistique de type eschatologique, même si cette théologie politique se trouve aussitôt bousculée par les nouveaux marchands du temple. Du coup, une science du temps des nations qui ne se vissera à l’œil que la loupe du quotidien rendra le paysage incompréhensible à l’observateur, tellement les narrations patentées par un long usage se révèleront étrangères à l’histoire biblique que le mythe bénisseur sera censé raconter sur ses pâturages et qui paraîtra dicter ses péripéties à l’histoire en chair et en os.
Comment le récit traditionnel dont les ongles et les crocs s’ appellent l’histoire va-t-il se trouver anéanti et jeté aux oubliettes à l’heure où les relations « objectives » des Etats entre eux ne répondent plus au code sentimental élaboré tout au long des siècles par une histoire artificiellement euphorisée du monde?
3 – Les vêtements religieux du temps
Un seul exemple : en août 2010, l’Arabie Saoudite entend acheter des avions de guerre américains baptisés F15. Mais la puissance du mythe biblique sur les imaginations est redevenue si grande que les Etats-Unis ne sauraient conclure un contrat rationnel de ce genre avec aucun Etat arabe sans avoir reçu l’autorisation « théologique » d’Israël. Ce sera en grand secret que les négociations para religieuses entre Washington et Tel Aviv seront menées. Comment expliquer les relations célestiformes qu’un Etat microscopique entretient avec l’empire le plus puissant du monde? Il sera supposé vital, pour les successeurs des Hébreux, de simuler une fragilité et même une précarité d’origine et de nature mythologiques, afin de donner au monde entier l’illusion que la nation biblique se trouve aussi menacée de mort sous les coups de ses ennemis que sous Pompée ou Vespasien. Or, il en est paradoxalement ainsi, mais sur d’autres chemins, et cela pour les mêmes raisons théologiques d’apparence qu’il y a deux mille ans.
Que disent aujourd’hui les Isaïe de la démocratie libératrice? Que la civilisation de la rédemption par la justice et le droit ne saurait faire de sa sotériologie décolonisatice une conséquence logique, donc universelle, de la religion du salut par la Liberté, puis se réfuter elle-même à légitimer la conquête armée, puis la vassalisation systématique d’un autre peuple. La réfutation du culte des droits de l’homme et du citoyen exige une eschatologie inversée selon laquelle une idole aurait légitimé de toute éternité un propriétaire prédestiné à occuper un sol déterminé. Les partis religieux d’Israël le savent et le disent haut et fort : « Si cette terre, confessent-ils, ne nous avait pas été expressément octroyée par le roi du cosmos, nous ne serions que des brigands. »
Mais il se trouve qu’au début du IIIe millénaire, la science psychologique sait depuis longtemps que les dieux iréniques ou sanglants sont là pour porter sur leurs larges épaules les pires forfaits de leurs chétives créatures et qu’ils ne se contentent pas de rendre payant le sang des sacrifices qu’on leur présente sur leurs offertoires, mais à glorifier l’hémoglobine des immolations qu’on leur donne à humer. C’est pourquoi les profanateurs, les blasphémateurs et les saints iconoclastes qu’on appelle des prophètes et qu’Israël a tués en chaîne ne cessent de rappeler que le « vrai Jahvé » a horreur des meurtres sacrés sur les parvis de son temple et que, depuis trois mille ans les narines du génie d’Israël ont rendez-vous avec une civilisation irénique.
Mais si les habillages messianiques de la guerre échappent à la lecture laïque du monde – Clio se trouve encore privée des clés d’une interprétation anthropologique du temps de l’histoire – comment l’étude du profane accèderait-elle à une intelligibilité réfléchie? Pour que la science historique classique accède à la connaissance des secrets du temps mythologique dans lequel un peuple prétend dérouler le tapis de sa durée, il faut une épistémologie capable d’expliquer les propitiatoires, donc conquérir un regard de haut et de loin sur le globe oculaire dont nos ancêtres usaient à l’égard de notre espèce.
4 – Les cités et leur mythe
Israël n’est pas le seul peuple à vivre sa propre histoire dans le temps du mythe. Le monde hellénique est né du débarquement d’une expédition navale dans un univers littéraire appelé à devenir celui de la civilisation mondiale. La cité de Priam opposait ses murailles aux mâtures de la flotte de Ménélas. Les dieux décidèrent de se mettre de la partie. Les flèches de l’arc d’or d’Apollon vont venger Calchas, le devin outragé du dieu du soleil. Iphigénie est sacrifiée au dieu du vent. Ulysse et Achille vont se partager les premiers rôles. Un poète entre en scène. Il en tire deux légendes, celle du siège d’une cité fortifiée et celle du voyage initiatique d’un marin et de ses compagnons sur le chemin du retour au pays. La Grèce du symbolique a trouvé sa voix et son destin. Que serait-il advenu de la civilisation d’Eschyle et d’Archimède, de Platon et d’Aristophane, des mathématiques et de la tragédie si une guerre mythique n’avait pas vivifié la civilisation mondiale sur les cinq continents? Le Vieux Monde attend un nouvel Homère. Quelles sont les relations que les peuples entretiennent avec le nectar et l’ambroisie de leur immortalité? Comment un peuple de navigateurs a-t-il fondé la première civilisation de l’alliance de la parole avec le sacrifice?
Rome n’est née de la voix de Virgile que sur le tard : à l’origine, le berceau mythique de la ville se réduisait à la légende d’une louve qui aurait nourri de son lait les jumeaux Rémus et Romulus. Mais l’histoire réelle s’est trop hâtée de débarquer dans le récit fabuleux: Rémus sera assassiné par son frère de lait, lequel mourra de la main des patriciens. Et déjà le sacré est de retour. Les ambitieux sont aussi de malins comploteurs: ils vont s’entendre entre eux pour faire descendre le trépassé du haut des nues. Pour fonder la République, il leur faut mettre dans la bouche d’un mort l’annonce de la future grandeur de l’empire romain. Néanmoins la première civilisation des armes et des lois gardera une mémoire tenace et rancunière de la modestie de son mythe originel – celui de l’apparition d’une victime dont Tite-Live raconte le trucage et qui deviendra un classique de l’autel dans le monothéisme redevenu sacrificiel des chrétiens – l’islam s’en est tenu à la brebis d’Abraham. Sous Tibère encore, les prétentions religieuses de plusieurs cités de l’empire seront rognées par un Sénat soucieux de ne pas laisser supplanter son mythe fondateur par un Olympe plus illustre et plus généreux que le sien. Et puis, le culte romain des ancêtres ne s’était même pas procuré des dieux vivants et visibles: les édiles sont allés chercher des statues de divinités antiques et prestigieuses à Athènes et ils les ont installées en grande pompe dans l’enceinte de la ville, tellement l’Enéide faisait pâle figure auprès de l’Iliade et de l’Odyssée des Grecs.
5 – De l’universalité du sacré
Pour comprendre comment Israël s’est coulé dans le moule de son épopée biblique, il faut observer que les peuples forgent leur mythe à l’école de leur sainteté et que le naufrage des dieux antiques dans le monothéisme a seulement modifié le creuset antique du sacré. La France monarchique a entretenu avec une divinité plus unifiée que les précédentes les relations éloquentes et clairement énoncées qui permettaient d’élever les rois au rang de frères de Jésus-Christ. Puis, le songe de la délivrance universelle et définitive du simianthrope par l’assassinat d’un seul homme sur un autel planétaire a déserté les fonts baptismaux d’une révélation ciblée et que les scribes d’un ciel localisé avaient circonscrite avec précision afin de se forger sur l’enclume d’une Révolution dont Robespierre disait: « Une nation n’a pas accompli sa tâche véritable quand elle a renversé les tyrans et chassé des esclaves, ainsi faisaient les Romains, mais notre œuvre à nous, c’est de fonder sur la terre l’empire inébranlable de la justice et de la vertu. »
A l’instar de celui des Anciens, le royaume du ciel panoptique des démocraties s’arrime à des territoires autonomes. Certes, le ciel nouveau se trouve seulement dans un état de latence ici-bas ; mais il ne va pas tarder à se transporter sur les arpents du salut et de l’innocence providentiellement retrouvées – les lopins du Nouveau Monde serviront de territoire à une résurrection plus globale de l’Eden. Le fossé qui s’est creusé entre les patries bénies par le Dieu récent des chrétiens et l’Olympe vieilli des Anciens n’est pas si difficile à combler. La prière rituelle « Dieu bénisse l’Amérique » s’est mondialisée : un finalisme religieux commun à la Rome d’autrefois et à l’ubiquité chrétienne a illustré l’appel à l’universalité du droit et de la justice déjà perceptibles chez Horace, Pline le Jeune, Cicéron.
Toute la scolastique du Moyen Age et de saint Thomas d’Aquin lui-même, demeuré le « docteur angélique » de l’Eglise – même à la suite du faux séisme de 1962 – n’est-elle pas la copie du Sénèque qui programmait les travaux futurs des théologiens chrétiens en ces termes: « Oui, je rends surtout grâces à la nature lorsque, non content de ce qu’elle montre à tous, je pénètre dans ses plus secrets mystères; lorsque je m’enquiers de quels éléments l’univers se compose; quel en est l’architecte ou le conservateur ». Du coup, il s’agit déjà de savoir « ce que c’est que Dieu. Est-il absorbé dans sa propre contemplation ou abaisse-t-il parfois sur nous ses regards ».
Autre difficulté: on ne sait s’il crée « tous les jours ou s’il n’a créé qu’une fois ; s’il fait partie du monde ou s’il est le monde même, si, aujourd’hui encore, il peut rendre de nouveaux décrets et modifier les lois du destin ou si ce ne serait pas descendre de sa majesté et s’avouer faillible que d’avoir à retoucher son œuvre ». Et puis, quel casse-tête, pour la sagesse d’ « aimer toujours les mêmes choses »; car « Dieu ne saurait aimer que les choses parfaites et cela non point qu’il soit, pour autant, moins libre ni moins puissant, car il est lui-même sa nécessité. Ah, si l’accès à ces mystères m’était interdit, aurait-ce été la peine de naître! »
Saint Anselme se fera le logicien d’un ciel plus unifié encore que celui de Sénèque. Si Dieu n’existait pas, dit la première prémisse de son raisonnement, il ne serait pas parfait, puisque l’existence est un attribut sine qua non de la perfection; et puisque Dieu est nécessairement parfait par nature et par définition, dit la seconde branche du syllogisme, il s’ensuit qu’il existe par la puissance invincible de la logique syllogistique qui inspire ses démonstrateurs. C’est dire que si la République n’était pas parfaite, elle n’existerait pas. Or, elle est visiblement imparfaite, donc elle n’existe que dans la tête de ses fidèles argumenteurs. Quelle est donc la sorte d’existence bancale de l’Etat d’Israël en tant que République à la fois juive et idéale dans la tête de M. Benjamin Netanyahou ou de M. Avigdor Lieberman? Qu’en est-il des personnages tout ensemble terrestres et cérébraux? C’est demander quelle était la spécificité de l’existence de Zeus dans l’encéphale des Grecs en chair et en os. Pour l’apprendre, il faudrait également préciser la double nature de Gulliver, de don Quichotte ou de Robinson Crusoé. A ce titre, quelle est la nature de l’existence cérébrale et physique de la civilisation européenne dans la tête des Européens si, à l’exemple du dieu universel de Sénèque, de saint Anselme, de saint Thomas d’Aquin ou de saint Augustin, le Vieux Continent n’existe que dans les âmes et les cerveaux et si toute la difficulté est de la faire partiellement débarquer sur la terre?
On voit que la question du statut psycho-physique du sacré est politique par définition, et même tellement politique que les civilisations qui ne se sont pas encore ancrées dans une interprétation salvatrice de leur propre historicité n’en sont pas moins lovées dans une politique de leur destin eschatologique et sotériologique: le culte d’un empereur tenu pour le fils du soleil figure le cœur glorieux de la civilisation nippone et la Chine elle-même, la seule civilisation à n’écouter que les leçons d’un grand sage, Confucius, expédie néanmoins un dragon rédempteur peupler un vide habité hier de statues d’airain, de bois ou de fer, aujourd’hui de statues mentales dressées dans les encéphales en l’honneur des idéalités devant lesquelles les démocraties se prosternent.
6 – « Dieu » est une île intérieure
Mais, dira-t-on, si Israël conduit la science historique moderne à se pencher en anthropologue sur la boîte osseuse du singe théologisé depuis le paléolithique, existerait-il cependant des civilisations entièrement dépourvues d’un symbole et d’une effigie de leur existence physico-eschatologique? Ne dira-t-on pas que l’Angleterre, par exemple, n’honore aucun héros mythique qui « donnerait corps » à son existence psychique? Mais l’insularité est un focalisateur naturel des âmes, l’insularité jaillit d’un feu identitaire physique. Cette génitrice change Neptune en compagnon d’une nation enserrée dans le corset de l’identité maritime qui l’isole du reste du monde et qui fait, de son autonomie océane, une autorité bénédictionnelle. Tout mythe sacré glorifie la solitude qu’il féconde. L’insularité psychique voit la géographie elle-même courir au secours de son soleil.
Mais que ferons-nous de l’identité mythique des civilisations évanouies? Le passé est un vivant appelé à jouer le même rôle que les dieux. C’est à la fontaine de leur trépas que les vivants boivent l’eau pure de leur histoire intérieure. Athènes respire encore dans la postérité d’Homère, l’Egypte entre-ouvre encore un œil sur l’immortalité de son souffle – celui qu’elle a inscrit dans la pierre des Pyramides.
Et la France ? Que restera-t-il de son âme et de sa tête quand elle se sera débranchée de son ascendance dans la folie de son rêve de justice? Le « Dieu » de la France serait-il son île intérieure, celle que féconde l’esprit de justice du simianthrope? Mais alors, quel est l’esprit de justice qui rend vivant à leur tour don Quichotte, Gulliver ou Robinson Crusoé, quel est l’esprit de justice qui fait d’une civilisation un personnage intérieur, quel est l’esprit de justice qui fait de l’Europe un héros en attente de son Homère? Israël donne du fil à retordre au verbe exister dont la science historique et la politique du XXIe siècle tentent de trouver le mode d’emploi.
7 – L’identité mythico-terrestre du simianthrope
La face cachée des « sanglantes ténèbres » de l’Histoire qu’évoquait Robespierre pose à une civilisation mondiale désormais mise à l’épreuve et au banc d’essai de sa schizoïde cérébrale la question, anthropologique en diable, de la nature de son propre déchirement intrérieur entre la pieuvre de l’abstrait et les floralies du singulier; car notre espèce se révèle irréductible à la fois aux tentacules d’une logique universelle et aux piquets mémorables de l’instant.
Un peuple juif à la fois ligoté à son sol et errant rappelle à l’Europe qu’elle se situe, elle aussi, dans son double enracinement cérébral. La question de l’identité délocalisée et pourtant fichée en terre des fuyards dédoublés de la simiologie que nous sommes demeurés se placerait-elle au cœur de la politique internationale contemporaine, donc au cœur de l’histoire biface de la planète? Dans ce cas, l’horloge de la pensée et de l’action conjuguées en appelleraient à l’anthropologie critique de demain; et cette science déboucherait sur la connaissance rationnelle d’un animal condamné, à l’instar d’Israël, à réfuter le sacré et à en vivre. Comment manier ensemble le glaive et le songe, l’épée et le totem, le poignard et les ciboires?
Notre civilisation des nouveaux crucifix cloue les idéalités de la démocratie sur la potence de l’histoire du monde. Nos banderoles des « droits de l’homme » sont aussi ensanglantées que les aigles romaines. Où sont passés les Bossuet de la démocratie séraphique? On cherche les orateurs qui monteraient en chaire pour dénoncer le sacrifice d’une ville d’un million cinq cent mille habitants, on cherche les dénonciateurs dont l’éloquence clouerait une tribu de Judée au pilori. Où est-elle passée, l’île intérieure qui donnerait une âme à l’Europe? Voyez comme ce continent se scinde entre la prudence de la Rome des papes, dont la foi a renoncé depuis deux millénaires à universaliser les Evangiles et la diplomatie, bifide à son tour, du Dieu du Nouveau Monde; voyez la loyauté semi évangélique du protestantisme du nord et l’attentisme de la Russie et de la Chine, de l’autre; voyez l’angoisse des peuples du monde entier face aux exploits du ciel des Hébreux . Comment domicilier Jahvé en Judée et donner le pain de son ciel à manger à un Dieu sans domicile fixe?
8 – Où faire passer la frontière entre la théologie et la politique ?
Qu’est-ce donc que le « pain du ciel » des mystiques et dans quel four faire monter ce pain-là ? Pour l’apprendre, observons pourquoi Israël se plaint si fort de ce que les F15 se trouvent dotés de missiles à longue portée et de haute précision. Tel-Aviv sue sang et eau à rendre crédible l’intention de l’Arabie saoudite de pulvériser le peuple juif. Impossible d’expliquer cette diplomatie théologique à la lumière des interprétations de la science historique traditionnelle: il faudra, disais-je, en passer par une anthropologie critique entièrement inédite, dont la méthode intronisera une mutation de la notion même de raison au sein de la science historique traditionnelle. Celle-ci s’imagine que Clio pourra, longtemps encore, se passer allègrement d’une science psychologique et généalogique de la « rationalité » des guerres de religion du XVIe siècle, pour ne citer que cet exemple.
Et pourtant, si l’on ignore allègrement les raisons anthropologiques pour lesquelles la rationalité théologique de la foi catholique, entend faire consommer aux fidèles la chair crue et ingurgiter le sang frais de la victime qu’elle est censée immoler physiquement le dimanche sur ses autels, on ignorera plus joyeusement encore les raisons psychobiologiques pour lesquelles la science historique moderne se garde bien de scanner les entrailles du messianisme sanglant que les peuples hébreu et chrétien se partagent depuis deux millénaires. Par bonheur, si je puis dire, cette histoire ne peut s’écrire qu’à l’école d’une anthropologie critique qui mettra la civilisation bicéphale dite des droits de l’homme face à la schizoïdie de sa prétendue sainteté.
Car enfin, Israël parvient, comme il est dit plus haut, à rendre crédible le scénario absurde et barbare selon lequel l’Arabie Saoudite serait le successeur attitré de Pompée et de Titus. Où le Président des Etats-Unis a-t-il la tête ? Mais qu’on ne s’y trompe pas, l’habillage théologique de l’histoire des glaives n’a jamais fait quitter davantage à Clio les planches du théâtre de l’inexorable qu’à Israël les vêtements religieux de ses relations avec le peuple palestinien. Quelle est donc la clé sacerdotale de ce marché simoniaque? On sait que ce contrat, si doctrinal qu’il paraisse, devra recevoir l’approbation politique des biblistes qui siègent en rangs serrés à la Chambre trans-océane des Représentants du peuple américain. Or, le suffrage de ces derniers n’est pas aussi confessionnel qu’il y paraît: on sait qu’il se trouve entre les mains des groupes de pression dont dispose Israël à Washington et qu’ils y jouissent du même statut que les autres entreprises nationales installées sur le territoire des Etats-Unis – ce qui signifie qu’ils s’y trouvent régis par un droit américain fondé, en l’espèce, sur un encouragement légalement adressé aux citoyens juifs du pays de se mettre au service des intérêts d’un Etat étranger, situation à laquelle le sénateur Robert Kennedy a tenté de faire obstacle au cours d’un combat inutile de plus de vingt ans .
Aussi, les « inquiétudes » ou les « craintes » militaires simulées de Tel Aviv ont-elles été « apaisées » par l’engagement solennel de l’administration américaine de livrer à l’Arabie Saoudite des F15 sous-équipés, donc privés du système « Standoff » qui seul permet des tirs précis et à longue portée. Le contrat ainsi amputé et devenu humiliant pour l’acheteur comme pour le vendeur portera sur quatre-vingt quatre appareils pour une durée de dix ans et d’un montant de trente milliards de dollars.
9 – Un Graal à plusieurs convois
Mais pourquoi seule l’anthropologie historique et critique fournit-elle la problématique et la méthodologie susceptibles de rendre scientifiquement intelligible un marché des sacrifices simulés? Certes, on comprend que l’industrie américaine de l’armement nourrisse l’ambition commerciale légitime d’étendre la vente de sa technologie au Moyen Orient. Mais si vous n’introduisez pas des paramètres messianiques et bibliques, donc une axiomatique de l’irréel dans la problématique mondiale du savoir historique bi-dimensionnel d’aujourd’hui, jamais vous n’expliquerez pourquoi Washington feint d’exorciser un autre danger encore, non moins biblique que le précédent, celui que les descendants de Cyrus et d’Artaxerxès sont désormais censés faire courir à la planète entière des marchands . Car ces déments sont prêts, n’est-ce pas, à recevoir l’ordre exprès d’Allah de se ruer tête baissée et sans armes contre un Etat nucléaire, Israël, lequel dispose, lui, de plus de deux cents ogives hautement exterminatrices. Dès le mois prochain, le Congrès autorisera donc la Maison Blanche à livrer des appareils sous-armés et dévalués à l’Arabie Saoudite en échange de la promesse secrète d’Israël de ne pas faire voter par le Congrès l’interdiction pure et simple de la vente des armes sus-dites, ce qui irait de surcroît, à l’encontre des intérêts électoraux d’un Président des Etats-Unis réduit au rang d’otage pitoyable d’un Etat étranger aux yeux du monde entier. (voir préambule)
On voit que le mythe biblique est un fusil à plusieurs canons: il faut que les Etats arabes soient perçus comme des Pompée potentiels afin que l’Iran, le Hamas, Gaza, Damas, Beyrouth et même Moscou soient censés menacer Israël dans sa survie – sinon, la planète entière des mythes sacrés actuels cesserait de se trouver dirigée par Jahvé. C’est cela qui contraindra une politologie mondiale devenue anachronique à conquérir les instruments de la connaissance rationnelle d’une humanité au cerveau onirique – connaissance sans laquelle l’histoire biblique contemporaine deviendrait la tragédie pleine de bruit et de fureur racontée par un idiot qu’évoquait un anthropologue célèbre de la fin du XVIe siècle et du début du XVIIe siècle.
Afin de ne pas fatiguer l’attention du lecteur par un texte trop long, je poursuivrai la semaine prochaine l’analyse anthropologique du destin mi-terrestre, mi-mythologique d’Israël, afin de mettre davantage en évidence la mutation des méthodes de la science historique classique qu’appelle la mise en évidence planétaire de la dimension schizoïde d’une espèce livrée à ses dieux bicéphales.
Manuel de Diéguez, le 17 octobre 2010
Manuel de Diéguez est un philosophe français d’origine latino-américaine et suisse.
Visiter le site de Manuel Diéguez [2]
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