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vendredi, 18 mars 2011

Japan-Folge: Ersatzteile werden knapp

Japan-Folge: Ersatzteile werden knapp

Udo Ulfkotte

Japanische Fahrzeuge, japanische Kopierer, japanische Fernseher, japanische Kameras – unser Leben wird maßgeblich von japanischen Geräten bestimmt. Doch jetzt sind viele Ersatzteillager und Fabriken zerstört, die Logistikketten unterbrochen. Japan ist die drittgrößte Volkswirtschaft der Welt. Japanische Ersatzteile werden jetzt teuer und knapp. Und sie müssen auf Radioaktivität hin untersucht werden.

Fast alle großen japanischen Fabriken sind auf absehbare Zeit geschlossen. In weiten Teilen des Landes ist der Strom rationiert. Das hat unmittelbare Folgen auch für jeden Europäer: Weil die Ersatzteillieferungen für in Japan produzierte Geräte nun bis auf Weiteres erst einmal ausfallen, können nur noch die geringen Bestände abverkauft werden, die es in europäischen Lagern gibt.

Mehr: http://info.kopp-verlag.de/hintergruende/enthuellungen/ud... 

mercredi, 09 mars 2011

Tancrède Josseran: "L'AKP veut faire de l'islam le ciment du futur pacte social"

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Tancrède Josseran : "L'AKP veut faire de l'Islam le ciment du futur pacte social"

 

Tancrède Josseran, Directeur de l’Observatoire du monde turc et des relations euro-turques, chercheur en géopolitique et auteur de La nouvelle puissance turque - L'adieu à Mustapha Kemal répond aux questions de Scripto.

Tancrède Josseran l'affirme: aujourd'hui déjà et peut-être demain plus encore la Turquie sera une grande puissance avec laquelle il faudra compter.

Entretien réalisé par Maurice Gendre


 

*

Quels sont les éléments qui ont favorisé une réislamisation de la Turquie ?

La fin de la Seconde guerre mondiale laisse la Turquie dans une situation difficile. Dés le Printemps 1945, Ankara doit faire face à des revendications soviétiques. Moscou exige une révision du régime des détroits et la restitution des vilayets orientaux de Kars et Ardahan. Vestige de l’Europe autoritaire des années trente, l’Etat kémaliste, en raison de sa prudente neutralité lors du conflit, est très isolé.

Accablés par la menace soviétique, les dirigeants turcs comprennent qu’ils sont condamnés à faire des concessions. Exigé par les Alliés lors de la Conférence de San Francisco, le passage du parti unique au multipartisme entérine une rupture avec le volontarisme républicain des origines. Une cassure qui marque une régression du mouvement de laïcisation du pays. Dés lors, suivant la logique de l’alternance, les forces politiques et religieuses que l’on croyait annihilées par vingt-cinq ans d’autoritarisme, ressurgissent comme si de rien n’était.

En 1950, le Parti Démocrate arrive au pouvoir. Ces dirigeants, Celal Bayard, Adnan Menderes, bien qu’issus du sérail républicain, savent parfaitement exploiter le sentiment d’exaspération de la population envers une élite bureaucratico-militaire engoncée dans ses privilèges et à la rhétorique abstraite. Critiquant l’absence de libertés et la place disproportionnée de l’Etat, les dirigeants démocrates bâtissent une synthèse où libéralisme politique, économique et religieux s’alimentent réciproquement. Cette formule demeure plus d’un demi-siècle une constante des partis de droite libéralo-conservateurs ou religieux en Turquie. Le multipartisme a fait de l’islam un enjeu électoral. Les partis conservateurs et islamistes ont su parler la même langue que le peuple, d’où leurs succès.

Par ailleurs, dans un contexte de guerre froide, l’islam sert de ciment à l’unité nationale. Ce processus est encouragé par l’ensemble de l’arc politique, désireux d’allumer des contre feux contre le péril rouge. Ainsi, très paradoxalement, c’est l’armée qui après le coup de force du 12 septembre 1980, réintègre l’islam  dans le continuum de l’histoire nationale.

Selon, la synthèse islamo-nationaliste, la religion est l’essence de la culture et  la culture est imprégnée par la religion. L’islam a transcendé la culture turque qui sans lui aurait dépéri ; et inversement, la civilisation turque a sauvegardé la foi du Prophète qui sans elle aurait disparu sous les coups de boutoir des croisés au XI siècle. A la différence de l’islam politique, l’islam promu par l’armée est un moyen, non une fin en soi. Il s’agit d’enraciner des valeurs nationales et conservatrices : la famille, l’armée, la mosquée pour barrer la route à la subversion gauchiste.

Cruel dilemme, les militaires prennent le risque d’asseoir le nouvel « Etat national » sur la base de forces religieuses qui immanquablement chercheront à un moment ou un autre à s’émanciper. L’Etat ayant pris comme référent identitaire la religion, il est en somme naturel que le parti le plus proche de ses aspirations apparaisse à un moment ou à un autre comme un recours et s’impose comme force prépondérante.

De plus, le fonctionnement même du système laïc turc est équivoque dans la mesure où il autorise une certaine forme de prosélytisme. Il s’agit d’une laïcité concordataire. Il n’existe pas stricto sensu de séparation entre l’Etat et la mosquée. Au contraire, la mosquée est encasernée par l’Etat à travers le Ministère des cultes, le Dinayet. Les desservants des cultes obéissent aux règles de la fonction publique. Seule l’Islam sunnite de rite hannafite est reconnu à l’exclusion des autres branches de l’islam turc comme l’alévisme (branche hétérodoxe du chiisme). Le sermon est prononcé au nom de la République. Dans la constitution (article 24) est inscrite l’obligation des cours de religion dans le cursus scolaire.

Mais la réislamisation ne peut se comprendre, si l’on fait abstraction des bouleversements de la société turque. A partir de 1950, la mécanisation de l’agriculture et le début de l’industrialisation provoquent un mouvement d’exode rural. Ces mouvements migratoires entraînent un changement radical du substrat de population mais  aussi des implications politiques. Ils concourent à bouleverser le kémalisme institutionnel. Jusqu’à cette date, l’appareil d’Etat était encore largement dominé par les héritiers de la bureaucratie ottomane souvent originaire des Balkans.

Faute de réelle politique urbaine, les migrants squattent les terrains vagues disponibles. Ils y vivent en toute illégalité dans un habitat précaire ou gecekondu (maison construite la nuit). Dans les années 1980, 70% de la population d’Ankara vivait dans des bidonvilles. Cette proportion atteint 55% à Istanbul, Izmir, Adana. Le conflit qui éclate dans le Sud-Est de l’Anatolie en 1984 amplifie l’exode rural. En quête de normalisation et d’accès aux services, les habitants de ces quartiers deviennent un enjeu électoral déterminant pour les partis politiques religieux ou conservateurs.

A ce stade, les nouveaux arrivants se raccrochent à l’islam comme fil conducteur de leur vie de tous les jours. Pour celui qui se demande d’où il vient et qui il est, la religion apporte une consolation et une assurance sur les fins dernières. Les croyants forment de petites communautés sociales identiques à celles que l’exode rural a fait disparaître. La mosquée offre aux nouveaux arrivants un point de repère. Entre 1973 et 1999, le nombre de mosquée passe de 45 000 à 75 000. La religion donne à ces déclassés une identité propre et des certitudes dans un monde en proie aux distorsions sociales et économiques.

Quel événement ou quel phénomène provoqua le basculement décisif vers l’islam ?

En Turquie, les élites au pouvoir depuis 1923 sont le fruit d’un processus révolutionnaire et non le produit d’un consensus global. L’Etat kémaliste s’est construit au corps défendant de la société et celle-ci ne s’est jamais identifiée à ses élites perçues  comme lointaines, impies, étrangères. La grande crainte des cercles laïcs et militaires a toujours été de voir la société s’émanciper de la tutelle étatique pour acquérir les moyens d’engendrer ses propres élites en dehors du cadre républicain.

A ses débuts, la République turque s’oriente résolument vers une économie dirigiste. Ce volontarisme se traduit par une politique autarcique de substitution des exportations. A la fin des années 70, ce modèle commence à montrer des signes d’essoufflement. Le pays est au bord de la banqueroute. L’Etat turc ne peut plus honorer ses créanciers. La livre perd la moitié de sa valeur. L’inflation explose et atteint les 120%.

Cette crise débouche en septembre 1980 sur le coup d’Etat militaire. En échange du rééchelonnement de la dette extérieure et d’un apport en argent frais, la junte au pouvoir s’engage à ouvrir les frontières, libéraliser les prix, geler les salaires, laisser flotter les taux d’intérêt. La victoire inattendue de Türgüt Özal en 1983 à l’occasion des premières élections libres, s’apparente à un vote sanction. Prisonnier du « politique d’abord », les militaires turcs ne comprennent pas tout de suite que le libéralisme économique dont se prévaut avec leur appui le nouveau Premier ministre, ne pourra un jour manquer de se manifester de manière politique. Proche de la confrérie des Nakshibendis et lié à la finance islamique, Özal regroupe avec l’appui discret des confréries autour du Parti de la mère patrie, l’essentiel de la droite turque. Ses différents mandats sont marqués par une ouverture sans précédent au marché mondial, à la concurrence et à son cortège de déréglementations.

Le développement d’un tissu dynamique de PMI-PME est le premier objectif de la politique d’Özal. Appelés communément les « Tigres anatoliens », ces nouveaux entrepreneurs jouent un rôle déterminant dans l’ouverture à la mondialisation de nombreuses villes d’Anatolie. Les relations étroites que ces entrepreneurs généralement liés à des groupes confrériques entretiennent avec les pétromonarchies du Golfe, permettent l’afflux de capitaux. Ces nouveaux acteurs rassemblent des entrepreneurs du BTP, des restaurateurs, des artisans commerçants.

Beaucoup de ces entreprises sont familiales et maintiennent d’autant plus activement des valeurs conservatrices et paternalistes. Cette petite bourgeoisie trouve dans l’éthique religieuse la confiance nécessaire pour affronter la concurrence des lourds conglomérats du patronat laïc. Les associations d’entrepreneurs musulmans à l’exemple du MÜSIAD, offrent à leurs membres un réseau efficace qui leur permet de peser de manière concertée sur les pouvoirs publics. L’émergence d’une bourgeoisie anatolienne a progressivement constitué un contrepoids à l’alliance traditionnelle entre l’Etat et le capitalisme classique d’Istanbul.

Loin de se laisser absorber par le maelström urbain, les migrants ayant réussi en ville ont maintenu de solides liens avec leurs villes ou leurs villages d’origine. Pris en charge par des foyers étudiants Nurcu ou Nakshibendis à l’occasion de leurs études universitaires, les nouveaux entrepreneurs ont intériorisé une très forte conscience religieuse très éloignée du seul conformisme social. Ces élites sont conscientes d’être musulmanes parce qu’elles choisissent délibérément de vivre, travailler, en accord avec leur conception profonde du monde.

Dans ce processus, les ordres soufis ont fonctionné comme des réseaux informels. La croissance économique des années 1980 transforme les classiques réseaux religieux en un instrument de mobilité sociale. En dehors des instances gouvernementales, c’est une véritable alter-société qui se met en place.

L’islam social contourne la laïcité et libère l’expression publique de convictions qui jusqu’alors restaient confinées dans la sphère du privé. Les fondations religieuses investissent les domaines profanes. Grâce à l’apport en capital de la bourgeoisie islamiste, des maisons d’édition sont crées, des journaux édités, des chaînes de TV et de radio voient le jour. Situé hors de la tutelle étatique, ces médias permettent l’éclosion d’une nouvelle génération d’intellectuels musulmans et l’émergence d’une véritable contre-culture de masse. De proche en proche, les modes de vie et de pensée se modifient et c’est toute la société qui au final se reconstruit sur des valeurs religieuses.

En 1996, le Parti de la Prospérité de Necemettin Erbakan arrive au pouvoir. La formation islamiste opte pour une stratégie de rupture globale avec l’ordre établi comme la levée de l’interdiction du port du voile. Dans le domaine de la politique étrangère, Erbakan très hostile à Bruxelles qu’il considère comme un club chrétien, tourne le dos à l’Union européenne avec l’idée de lui substituer un marché commun musulman dont la Turquie serait le point de ralliement. Rapidement, la situation se tend avec l’armée et les élites traditionnelles. Autant pour des raisons de pouvoir que d’idéologie, l’armée intervient le 28 février 1997 via le Conseil national de sécurité. Le Conseil accule Erbakan par une série de recommandations à la démission.

L’intermède gouvernemental du Refah va amener l’aile réformatrice du parti à repenser les termes et les moyens de l’action politique. Un constat s’impose, la rupture a échoué. Le parti islamiste dénué d’appui et condamné à la stratégie du seul contre tous s’est retrouvé totalement marginalisé aussi bien sur la scène nationale qu’internationale.

Parmi les jeunes rénovateurs, un homme se distingue, il s’agit de Recep Tayip Erdogan. Diplômé d’un lycée d’imams et économiste de formation, il est élu maire d’Istanbul en 1994. Plébiscité pour sa gestion d’Istanbul. Erdogan crée en 2001 le Parti de la Justice et du développement (Adalet Kalkinma partisi-AKP).

Rejetant l’opposition frontale, Erdogan opte pour une ligne réformiste d’apaisement, il élude du programme les aspects les plus polémiques. Refusant le qualificatif d’islamiste, il définit son mouvement comme fondé sur une approche «  démocrate et conservatrice ». Le parti prône l’intégration à l’Union Européenne, l’économie de marché et la défense des valeurs traditionnelles, synonyme habile pour désigner l’islam.

La victoire de l’AKP en 2002 (34%) révèle le vote sanction d’une population turque exaspérée par les scandales politico-financiers à répétition d’une élite occidentalisée coupée du pays. Profitant de l’effondrement des partis de centre droit qui avaient fixé des années 1950 à 1990 l’électorat conservateur et musulman, c’est toute la droite turque qui se retrouve rassemblée sous la baguette de l’AKP.

Le recours à des intermédiaires choisis en dehors de la mouvance islamiste, patronat occidentalisé, intellectuels libéraux, Etats-Unis, Union Européenne, explique la réussite d’Erdogan.

Peut-on parler d’une politique néo-ottomane ?

Le grand architecte de la politique étrangère de la Turquie est Ahmet Davutoglu. Longtemps conseiller diplomatique d’Erdogan, il occupe depuis 2009 le poste de ministre des Affaires étrangères. Davutoglu défend une approche civilisationnelle des relations internationales. La Turquie appartient hiérarchiquement à trois ensembles distincts :

-Le monde musulman au sud.

-L’Eurasie à l’Est

-L’Occident à l’Ouest.

Le retard pris à tous points de vue par le monde musulman est une préoccupation récurrente de ses écrits. La Turquie est l’éclaireur du monde islamique sur les routes de la mondialisation. Davutoglu ne rejette pas l’orientation vers l’Occident mais les autres options ne doivent pas être sacrifiées à son seul bénéfice. De Sarajevo à Bagdad en passant par Istanbul et Grozny, une même communion d’âme existe : l’Islam et le souvenir de l’Empire ottoman. A la tête du monde islamique écrit Davutoglu dans son ouvrage majeur, Stratejik derinlik (Profondeur stratégique) :

« Le califat représente l’union politique et spirituelle…où les limites intérieures entre les communautés  n’existent pas et où les communautés musulmanes au-delà des frontières sont sous la responsabilité de l’Etat ottoman ».

Une lobotomie culturelle a fait perdre à la Turquie son identité profonde. Un retour dans la trajectoire du monde islamique s’impose. Emprisonnée derrière les barreaux étroits de
l’Etat-nation, Ankara est condamnée à renouer avec son environnement culturel et historique. Seulement à cette condition expresse elle sera capable de tirer le meilleur parti de la mondialisation.

Pour Davututoglu : « La guerre froide avec son statisme obligatoire formait un obstacle au développement de la profondeur géographique et historique. Avec sa fin, les facteurs géopolitiques, économiques, culturelles sont revenus sur le devant de la scène et influencent les relations internationales. L’exemple des Balkans démontre que la guerre froide n’a caché qu’un cour moment le chaos inhérent à la région ».

Ce néo-ottomanisme entre en collision avec les conceptions traditionnelles de la République : « Paix dans le monde, paix dans le pays ». Se contenter du statu quo d’une politique isolationniste serait dans l’esprit du Ministre assigner la Turquie à un rôle périphérique, la rendant otage des luttes entre puissance terrestre et maritime. La Turquie est la future puissance centrale, nouvel empire du milieu aux convergences des routes Nord-Sud.

Avec quels autres pays la Turquie entretient-elle les meilleurs rapports ? Et les plus mauvais ?

Opposé à la guerre en Irak, Davutoglu milite en faveur d’une politique étrangère garante des intérêts nationaux. Il ne s’agit plus uniquement de servir de relais à la politique de Washington et de l’OTAN dans la région :

-          La Turquie en raison de son emplacement est apte à jouer un rôle de médiateur. En assumant, son passé ottoman et sa stature de grande puissance islamique, Ankara veut créer un environnement propice à une redéfinition des rapports de force au Moyen-Orient.

-          En se présentant comme la sentinelle des routes énergétiques dans la région (Mer Noire, Caucase, Bosphore, Mer Egée) Ankara ambitionne de devenir un collecteur énergétique. Point de passage obligé des pipelines et gazoducs (Blue stream, Nabucco, BTC)  reliant les bassins producteurs d’Asie Centrale, de la Caspienne et les bassins consommateurs de l’ouest.

-          En dernier lieu, la Turquie estime qu’elle est en raison de sa capacité à concilier foi, démocratie et économie de marché, la mieux à même de proposer un modèle pour les Etats de la région. Ce projet d’islam modéré est sous tendu par le constat que face à des systèmes de gouvernement autoritaire discrédités et d’élites laïques en perte de vitesse (Egypte, Tunisie, Algérie), une démocratie musulmane aux solides assises sociales est l’antidote idéal contre le terrorisme djihadiste.

Hâtivement taxée d’antiaméricaine par certains observateurs, les orientations stratégiques de Davutoglu sont moins manichéennes. Le fait que la Turquie puisse s’affranchir ponctuellement de la tutelle américaine n’est pas forcément nuisible. La Turquie est ainsi plus écoutée ; elle devient à la fois une porte ouverte sur l’ouest et un exemple à suivre. En somme, les Etats-Unis devraient encourager la société turque dans ses mutations et, sans interférer, laisser Ankara par le dialogue attirer l’ensemble des pays de la région dans son sillage. Le récent rapprochement turco-syrien peut amener Damas à ouvrir des pourparlers de paix avec Israël mais aussi le régime baasiste à évoluer de l’intérieur.

Cependant, cette politique multidirectionnelle à des revers. La volonté d’être présent partout comme le prouve l’ouverture de nombreuses représentations dans les pays d’Afrique noire entraîne une dispersion des moyens. D’autre part, Davutoglu est perçu par nombre d’observateurs comme un hyperactif, faisant des déclarations à l’emporte pièce d’un pays à l’autre dans le seul but de satisfaire l’interlocuteur du moment.

Deux pays illustrent parfaitement la nouvelle donne diplomatique  turque : Israël et l’Iran.

-          Depuis le début des années 2000, une dégradation sensible des relations entre Tel-Aviv et Ankara et perceptible. Ce relâchement s’explique par la volonté turque d’apparaître comme une puissance islamique crédible aux yeux de la rue arabe. D’autant que depuis 2004, la Turquie préside l’Organisation de la Conférence Islamique. En raison de son rapprochement avec la Syrie, Israël a perdu de son importance stratégique pour Ankara. Jusqu’alors, elle faisait office d’alliance de revers contre Damas.  Néanmoins, l’AKP a conscience des lignes rouges à ne pas dépasser. Le fait d’entretenir des relations « civilisées » avec Israël est un formidable passeport de respectabilité pour des islamistes qui ne se privent pas de le rappeler continuellement aux Occidentaux. Dépourvu de lobby puissant aux Etats-Unis au contraire des Grecs et des Arméniens, les Turcs sont obligés de recourir aux groupes de pressions pro-israélien au Congrès pour contrecarrer les résolutions visant à reconnaître le génocide arménien. L’unicité de la Shoah est souvent mise en avant pour justifier ces positions.

-          Inversement, les rapports entre la Turquie et l’Iran se sont considérablement améliorés. Malgré les vives réserves émises par les Etats-Unis, les deux pays oeuvrent depuis 2007 à la constitution d’un partenariat énergétique. Un oléoduc reliant les réserves de gaz et d’hydrocarbures de la Caspienne est en passe de matérialiser ce projet. Face au jeu trouble de Washington qui instrumentalise les factions kurdes, Ankara et Téhéran développent une intense coopération dans la lutte contre le terrorisme. Cette politique a trouvé son aboutissement dans l’accord tripartite Iran /Brésil/ Turquie en juin 2010 au sujet du nucléaire. Toutefois, la propension de Davutoglu à ménager systématiquement Téhéran en refusant le vote de nouvelles sanctions aux Nations-Unies, soulève des interrogations jusque dans les couloirs du ministère des affaires étrangères à Ankara. Traditionnellement issus des élites occidentalisées, le corps diplomatique turc estime être instrumentalisé par Téhéran dans l’espoir  de gagner du temps. En outre, l’acquisition de capacité nucléaire civile, puis militaire obligerait Ankara à moyen ou long terme à marcher sur les brisées des Iraniens.

Quelles sont les principales lignes de fractures idéologiques, ethniques, confessionnelles qui traversent le pays ?

La chape uniformisatrice et égalisatrice de la République turque dissimule quelques 47 groupes minoritaires aux dénominateurs identitaires très variés (ethniques, religieux, linguistiques). Pourtant, les seules minorités que l’Etat turc reconnaisse officiellement sont celles inscrites dans le traité de Lausanne de 1923 (grecque, juive, arménienne). Si l’on reprend la définition retenue par les Nations Unies et admise par l’UE, la Turquie compterait entre quinze à vingt millions de Kurdes, douze à vingt millions d’Alévis (chiites duodécimains), plusieurs millions de Turcs originaires de l’ancien espace ottoman (Tcherkesses, Bosniaques, Bulgares, Albanais, Abkhazes, Arabes, Circassiens), quelques centaines de milliers de minoritaires chrétiens (Arméniens, Grecs orthodoxes, Assyro-chaldéens, protestants). Ce qui inquiète l’establishment militaro-laïc dans ce genre de recension, c’est qu’en définitive, les minoritaires rassembleraient entre 32 et 45 millions d’individus sur les 74 millions d’habitants du pays. Dans cette situation, les Turcs sunnites, c’est-à-dire le reste de la population, se retrouveraient dans une situation précaire  à l’image des Serbes de Yougoslavie ou des Arabes sunnites d’Irak.

Outre les clivages ethniques et religieux, il existe des clivages sociaux-culturelles. La Turquie est un pays Janus. A l’instar du dieu romain, elle regarde dans deux directions opposées. Ce dualisme se répercute dans la population. Jusqu’à une époque récente les strates supérieures de la société étaient dominées par les Turcs blancs. Ils reflètent l’homme nouveau appelé par Kemal : laïque, progressiste. Les Turcs noirs en revanche sont à l’image du pays réel, plus pauvres, plus croyants, plus conservateurs, plus nombreux.

Tant que les Turcs noirs restaient confinés au bas de la hiérarchie sociale, le pouvoir des élites occidentalisées n’était pas véritablement menacé. Tout à changé lorsque l’Etat, en retirant son emprise de la sphère économique, a libéré les énergies et a permis à ceux qui se trouvaient au bas de l’échelle sociale d’escalader un à un les barreaux. Sans difficulté, les Turcs noirs plébiscitent cette nouvelle élite qui leur ressemble. Leurs aptitudes à assimiler les règles de la mondialisation et à transformer l’argent en puissance politique et la puissance politique en argent, terrifient les vieilles élites kémalistes. Dépossédés de leur emprise économique, les Turcs blancs voient le parapluie étatique s’étioler sous les coups de boutoir conjuguer de la mondialisation et du processus d’adhésion à l’Union Européenne.

Les dirigeants de l’AKP conçoivent ce combat autant sous le prisme d’une lutte de classe que celui d’une guerre culturelle. La classe moyenne montante, tout en s’élevant, ne renonce pas à ses anciennes valeurs ; elle se contente juste de les redéfinir à l’aune de la modernité technique. L’AKP ne vise pas à l’élimination de ses adversaires mais à l’amener à se transformer de l’intérieur, à adopter une nouvelle conception de l’organisation sociale et politique. La conquête éthique des strates supérieures de la société est la meilleure manière d’enraciner durablement une assise. L’hégémonie culturelle est censée amener au final un changement global de régime.

Pouvez-vous nous éclairer sur les réseaux Ergenekon ? Qui sont les hommes qui se cachent derrière cette appellation ? Y avait-il un ou plusieurs Etats derrière eux ?

Au sud de la forêt sibérienne, les monts désolés de l’Altaï abritent le berceau originel des premiers turcs. Ces espaces désertiques occupent une place à part dans l’imaginaire national. Ils sont indissociables de la légende de l’Ergenekon. Une louve au pelage gris-bleu aurait recueilli et nourri deux enfants, les derniers survivants d’une tribu turque disparue. Le symbole a été par la suite repris par la droite radicale et l’Etat turc lui-même. Il figure sur les armes de la « République turque de Chypre ». Depuis le milieu des années 1990, le terme d’Ergenekon est associé à l’Etat profond (Derin Devlet).

L’Etat profond renvoie à l’existence d’un groupe formé de hauts fonctionnaires, de militaires, de membres des différents services de sécurité, agissant en marge du gouvernement pour œuvrer à la protection des intérêts nationaux, y compris par des moyens illégaux. L’organisation d’armées occultes remonte à l’époque ottomane. Mustapha Kemal utilise ces réseaux au cours de la guerre d’indépendance. En 1950, ces groupes sont organisés sous l’appellation d’Unité de guerre spéciale (Özel Harp Dairesi). Mission leur est confiée, dans l’hypothèse d’une invasion soviétique, d’organiser la résistance derrière les lignes ennemies. Après l’effondrement de l’URSS, l’activité de ces réseaux se déplace vers le Sud-Est du pays. Ils assurent l’élimination des membres du PKK et la collecte des renseignements. Le recrutement inclut d’anciens repentis du PKK, les Itirafci, et des militants de la droite radicale, proches des Loups Gris. Pourtant, les activités des différentes cellules n’ont jamais été contrôlées de manière centralisée. Les autorités laissent faire sans intervenir. A la fin des années 1990, les succès contre le PKK mettent en sommeil une partie des réseaux de contre-guérilla. D’autres basculent vers le banditisme. Si quelques-uns uns sont restés en relation avec les membres de l’appareil de sécurité et de l’Etat-major, il s’agit avant tout de contacts personnels très cloisonnés.

En réalité, c’est à l’occasion de l’arrivée au pouvoir de Necmettin Erbakan et surtout d’Erdogan que ces réseaux vont connaître une mue. L’anticommunisme avait vu l’arrivée d’un grand nombre de recrues séduites par la synthèse islamo-nationaliste. Avec la dénonciation du danger islamiste par l’armée, cette frange religieuse se trouve en porte à faux avec les nouveaux mots d’ordre de lutte. Il a donc fallu recentrer le vivier de recrutement en dehors des seuls rangs de la droite radicale.

Conséquence  des milieux laïques « respectables », universitaires, journalistiques sont jetés dans la fournaise de la lutte clandestine sans réelle préparation. Autre problème, le Parti d’Action Nationaliste (MHP-Milli Hareket Partisi) en quête de respectabilité renâcle à fournir les cadres nécessaires aux opérations comme elle faisait précédemment avec sa branche jeune (les Loups gris).

Dés lors, les recruteurs sont obligés de se rabattre sur la mouvance nationaliste autonome, moins formée et sans bases arrière véritables. Trop sûrs d’eux, ces réseaux ont eu la certitude que le fait d’agir  pour le bien de la patrie, même à son corps défendant, leur vaudrait l’impunité. Or, à la différence des décennies précédentes, il ne s’agit plus de lutter contre un ennemi subversif en marge de l’Etat, mais contre le gouvernement légitime sorti des urnes. En outre, à la différence de la guerre froide, ces réseaux ne bénéficient plus d’appui à l’étranger. Certes la presse islamiste a pointé du doigt les relations de certains des conjurés avec les cercles eurasistes russes (Alexandre Douguine) ou la mouvance néo-conservatrice américaine la plus radicale (Zeyno Baran). Mais d’un côté comme de l’autre, il s’agit  d’échanges de vues non de la mise en place d’un plan concerté. D’autant que la police fer de lance dans la lutte contre l’Ergenekon est  massivement infiltrée par la confrérie de Fethullah Gülen dont les liens avec la CIA sont avérés.

Mais ces unités de contre-guérilla ne sont pas l’Etat profond en lui-même, tout au plus ses exécutants ponctuels. Dans son extension large, l’Etat profond désigne l’armée. Cette idée est avancée par l’ancien Premier ministre Süleyman Demirel : « L’Etat profond, c’est l’Etat lui-même. L’Etat profond, c’est l’armée. La République est une émanation de l’armée qui a toujours craint l’effondrement de celle-ci. Le pays a besoin de l’Etat profond, sans lui il est désorienté, il y est soudé ».

La crainte majeure de l’Etat profond est de voir passer l’Etat civil sous l’emprise d’organisations  partisanes étrangères à son corpus de valeurs. C’est aujourd’hui le cas avec l’AKP. L’armée souhaite conserver le monopole du politique  par l’Etat. Défendre l’Etat, c’est bloquer l’accès des corps intermédiaires (partis, confréries religieuses) à la formation de la volonté politique.

Le rôle de l’armée est-il vraiment réduit à une peau de chagrin désormais ou n’est-ce qu’une simple illusion ?

La République est indissociablement liée à l’institution militaire. En 1923, l’armée pose les fondements de l’Etat, et l’Etat engendre la nation. Au XIX e siècle après le massacre des Janissaires, l’armée est l’une des rares institutions où l’élément turc domine sans partage. Les élites militaires se sentent naturellement investies de l’identité nationale. L’homogénéité contre l’hétérogénéité, tel est l’enjeu du processus de construction nationale initié par les militaires. Laïcité et intégrité du territoire sont les deux piliers. Sans laïcité, pas de lien national possible, mais sans unité, pas de cohésion politique, et par conséquent pas de laïcité. L’armée est politique puisqu’elle est l’Etat. Contre les antagonismes religieux, ethniques, religieux, sociaux, l’armée assure la sauvegarde de l’Etat et sa continuité à travers le temps.

Avec l’adhésion à l’Union Européenne, cette magistrature politique est directement remise en question. Le dépassement du stade national implique la neutralisation de son gardien : l’armée. Le Conseil de sécurité national est redéfini comme un organe consultatif. Ces recommandations n’ont plus de valeurs  impératives. Sa présidence est confiée à un civil et son secrétariat ouvert aux non militaires. L’ordre du jour des sujets abordés n’est plus fixé arbitrairement. La présence de membre du Conseil dans les  instances de contrôle des universités (YÖK) et de l’information (RTÜK) est éliminée. En matière de justice, l’armée perd ses privilèges. Les tribunaux civils sont habilités à juger les militaires en temps de paix.

L’AKP a parfaitement intégré l’avantage qu’il pouvait tirer du processus d’adhésion et entend bien utiliser « les standards de l’Union Européenne » comme levier d’Archimède. L’armée forme la quadrature du cercle du système républicain. Abaisser l’institution militaire, c’est casser l’Etat autoritaire, libérer l’expression religieuse, briser le rigide corset jacobin, exploser les dernières traverses sur la route de Bruxelles. Erdogan a compris que la laïcité autoritaire est soluble dans l’Europe. Les islamistes et l’UE se rejoignent pour renvoyer l’armée dans ses casernes.

Il existe un très fort malaise dans les forces armées turques. La découverte des projets de complots comme l’opération Balyoz (marteau) qui projetait après une série de provocations (attentats dans les grandes mosquées d’Istanbul, incident aérien avec la Grèce) de renverser l’AKP, a considérablement écorné l’image de l’institution militaire. Les dénégations maladroites et démagogiques de l’Etat-major n’ont pas arrangé les choses. Elles ont au contraire renforcé l’irritation des cadres subalternes qui estiment que l’échelon supérieur a failli à la tache et est incapable de préserver le pays d’un changement de régime.

Les réseaux sociaux de l’armée se font régulièrement l’écho de cette mauvaise humeur. A la pointe de la contestation contre l’AKP se trouve la gendarmerie. En lutte avec la police infiltrée depuis des années par les islamistes, elle voit ses prérogatives rognées les unes après les autres. Longtemps omniprésente dans les campagnes, la figure du gendarme turc est indissociable de la République. Véritable armée intérieure, elle a été pendant des années en première ligne de la révolution kémaliste. Dans les années 20, elle n’hésitait pas à passer par les armes les récalcitrants à l’interdiction du port du fez. Par la suite, elle a été en première ligne dans la lutte contre le séparatisme kurde et la collecte de renseignements sur la réaction religieuse. Il n’est donc nullement fortuit de constater l’implication  du service de renseignement de la gendarmerie, le JITEM,  dans le dossier Ergenekon.

A contrario, d’autres armes apparaissent plus perméable aux changements. L’armée de l’air serait  en proie à l’entrisme des confréries religieuses. Par ailleurs, le fait que régulièrement des plans d’opération ou des rapports d’Etat-major sortent dans la presse, indique que l’institution est contaminée. Les regards se tournent avec insistance en direction de la confrérie de Fethullah Gülen qui s’est faite remarquée dans le passé par des campagnes de prosélytisme dans les lycées militaires.

Les militaires ont conscience de la popularité de l’AKP, véritable incarnation du pays réel. Cependant, l’armée n’a pas renoncé à intervenir dans le champ politique. Elle attend le moment propice pour apparaître comme un recours face au désordre. La stratégie de la crise permanente orchestrée par l’AKP, a pour conséquence, de dresser les institutions les unes contre les autres (police contre armée, gouvernement contre haute-magistrature, gouvernement contre médias indépendants). Aussi, à l’occasion d’un faux pas des islamistes pris de démesure, elle pourrait se présenter comme la  garante de la paix civile et de la séparation des pouvoirs. Cela ne prendrait pas la forme d’un pronunciamiento classique avec parades des chars dans les rues d’Ankara, mais plutôt celle d’un communiqué symbolique en soutient à l’opposition laïque comme en 2007 au moment de l’élection présidentielle. Cependant, cette technique a prouvé à cette occasion ses limites. Sûr de l’appui des Américains et des Européens, plébiscité triomphalement par les urnes, l’AKP avait passé outre l’ultimatum.

Un retour au kémalisme est-il encore jouable ? Si oui, comment et pourquoi ?

Le sociologue italien Vilfredo Pareto remarque que les mêmes idéaux qui sont une force pour l’élite montante, deviennent pour l’élite en place une source de faiblesse quand elle les accepte par mauvaise conscience ou sentimentalisme. Le soutient d’une fraction du patronat laïc et des intellectuels libéraux au processus de démantèlement de l’Etat autoritaire au nom de la démocratisation et de l’intégration à la mondialisation libérale, est symptomatique de cet état d’esprit. L’élite au pouvoir se laisse aller à une forme d’autodénigrement qui finit par saper sa légitimité. Or, si certaines franges de l’establishment laïc ont abandonné le combat, d’autres, à l’image de l’appareil bureaucratique et militaire, s’accrochent avec l’énergie du désespoir à leur rente.

Le problème est que le paradigme kémaliste des anciennes élites est entré en phase terminale. Trop souvent la rhétorique laïque a servi à justifier la domination des Turcs blancs, le pays légal, sur le pays réel, les Turcs noirs. De plus, avec la mondialisation, le processus d’intégration à l’Union Européenne, le projet anglo-saxon d’islam modéré, c’est l’idée même d’Etat-nation, et donc sa religion civique, la laïcité qui est battue en brèche.

Conscients de ces évolutions, les intellectuels kémalistes essayent de réactiver la matrice nationaliste révolutionnaire composante essentielle du kémalisme originel. Cette réhabilitation du concept de nation, passe par de nouvelles convergences. On assiste depuis plusieurs années à travers le mouvement souverainiste (ulusaci) à un rapprochement entre la droite radicale et la gauche kémaliste. Les tenants de cette synthèse (Suat Ilhan, Dogru Perincek, Ümit Özdag, Vural Savas) conjuguent le rejet de l’impérialisme occidental avec celui de l’affirmation d’une identité nationale et étatique forte. Hostiles au processus d’adhésion à l’UE, favorables à la constitution d’un axe continental eurasiatique avec Moscou, rejetant le libéralisme transnational, ce courant fait également appel aux grands canons du kémalisme traditionnel : refus des alliances militaires inégales et donc sortie de l’OTAN, insistance sur l’idée d’une voie particulière au monde turc.
Alternative à l’Union Européenne, l’Eurasisme, rencontre une large audience dans les rangs de l’armée. Mais elle se heurte aux réalités. Tout d’abord, l’armée turque peut difficilement se passer du soutient logistique de Washington. De plus, les deux tiers des échanges commerciaux sont réalisés avec l’Europe. Cependant, le fait que les cercles eurasistes soient directement impliqués dans le dossier Ergenekon laisse transparaître que la lutte entre l’AKP et l’armée masque deux orientations géopolitiques antagonistes.

Comment l’Europe doit-elle se positionner par rapport à cette « nouvelle » Turquie ? Quelle est la meilleure conduite à tenir ?

L’adhésion sincère de l’AKP aux principes de Copenhague ne peut masquer le fait que le processus de démocratisation soit d’abord utilisé à des fins internes. En dehors de la rhétorique convenue sur les Droits de l’homme, le discours européen de l’AKP manque de consistance. Le principal argument utilisé est que « les civilisations ont tout à gagner à échanger entre elles ».

En réalité, le discours de l’AKP essentialise la notion de civilisation. L’Europe n’est pas un club chrétien mais un carrefour, une mosaïque de civilisations bien distinctes. C’est la conclusion à laquelle est arrivée une note de synthèse du Milli Görus (matrice idéologique de tous les partis islamistes turques) : « Lorsque la Turquie sera membre à part entière de l’Union Européenne, l’Europe sera un mélange de beaucoup de cultures et de religions ».

En dehors de l’attachement aux valeurs universelles du droit et de la démocratie libérale, l’Union Européenne n’a pas à affirmer d’identité propre. Cette neutralité culturelle est la condition préalable pour permettre à chacun d’affirmer pleinement son identité. Les Turcs sans complexe jouent la carte de la civilisation, de son côté l’Union européenne continue à vivre dans l’amnésie de sa tradition. Un contraste à méditer !

Comment jugez-vous les dirigeants de l’AKP ? A commencer par Erdogan.

L’une des raisons clefs du succès de l’AKP réside dans la personnalité charismatique de ses leaders. Croyant, d’extraction modeste, en retrait du système kémaliste, l’électorat populaire peut sans peine s’identifier à Tayip Erdogan et Abdulhah Gül. Ils correspondent à deux idéaux types profondément ancrés dans l’imaginaire collectif : Gül le Magdur, Erdogan le Kabadayi. Gül devient Magdur (celui qui a subi une injustice) à l’occasion des élections présidentielles de 2007, suite au veto initial mis à sa candidature par l’armée. Un Kabayi est « un coq de village ». Autoritaire, paternaliste, il  construit sa réputation sur un sens de l’honneur affirmé. Il est le protecteur des faibles contre les puissants qui en échange lui doivent allégeance.

Erdogan est né en 1954 à Rize au bord de la Mer Noire. Alors qu’il est âgé de treize ans, sa famille déménage à Istanbul dans le quartier populaire de Kasimpasa. Un quartier bigarré où s’entassent migrants des campagnes anatoliennes, gitans et caïds de la pègre locale. Erdogan est le cadet d’une fratrie de cinq enfants. Dés l’âge de seize ans, il conjugue son engagement politique au sein de la branche jeune du Parti du salut national avec sa passion pour le football. A partir du collège, il suit une scolarité dans un établissement religieux. A l’origine, les écoles imam hatip, coiffées par le ministère de l’Education ont pour mission la formation du futur desservant du culte. Mais en 1973, elles sont autorisées à préparer leurs élèves à l’enseignement supérieur. Les élèves sont socialisés dans une atmosphère où prime avant tout l’adhésion aux normes islamiques. A l’exception de ces aspects techniques, le processus d’occidentalisation y est sévèrement critiqué. Encore aujourd’hui, Erdogan ne manque jamais une occasion de rappeler ce qu’il doit à son éducation.

Une fois diplômé, Erdogan commence à travailler pour l’organisme public de transport public de la municipalité d’Istanbul, emploi qu’il abandonne rapidement pour le secteur privé à la suite d’un incident avec l’un de ses supérieurs qui lui reprochait sa barbe. Il travaille pour la grande firme de l’agroalimentaire, Ülker, proche de la mouvance islamiste. En 1984, le Parti de la prospérité a pris la suite du Parti du salut national interdit par les militaires. Erdogan devient responsable pour le quartier de Beyoglu (l’un des plus occidentalisés de la ville).

Il se fait remarquer dès cette époque pour sa plasticité. Il utilise des jeunes filles non voilées pour faire du porte à porte chez les particuliers. Cette stratégie élastique s’avère payante puisqu’il est élu en 1994 comme maire d’Istanbul.

A la tête d’un ensemble de plusieurs millions d’habitants, Erdogan fait preuve de qualités de gestionnaire reconnues, y compris par ses adversaires politiques. A cet échelon, la politique est une question de solutions pratiques. Il faut d’abord répondre aux besoins élémentaires de la population en matière de services. Cette méthode sera transposée au niveau national avec succès à partir de 2002. Symbole fort, il réhabilite le passé ottoman de l’ancienne capitale impériale et fait du jour de la chute de Constantinople (Fetih-29 mai 1453) un événement culturel majeur.

La vision de l’islam d’Erdogan est triple : la religion est un ciment identitaire, le vecteur d’un réseau social, un capital spirituel dont les exigences peuvent être réinvesties en politique.

En 1998, Erdogan est condamné à une peine de prison ferme pour incitation à la haine parce qu’il a déclamé en public un an auparavant à Sirt, dans le Sud-Est anatolien, un poème de Ziya Gökalp (père du nationalisme turc) : « Les minarets sont nos baïonnettes, les mosquées nos casernes ». Dans ce discours controversé, Erdogan se démarquait des nationalismes ethniques et vantait l’islam comme lien commun aux Kurdes et aux Turcs. L’identité nationale dans l’esprit d’Erdogan, c’est l’islam.

Cette césure avec la conception traditionnelle de l’Etat-nation marque la ligne de partage des eaux avec les nationaux-républicains du CHP et les nationaux-radicaux du MHP. Elle explique en grande partie l’approche plus souple de l’AKP sur le dossier kurde et chypriote. La détention d’Erdogan a fait de lui aux yeux de la frange conservatrice de l’opinion une victime de l’arbitraire d’un système. Beaucoup de Turcs vivant en marge de la légalité (construction illégale, économie informelle, croyance, style de vie) s’identifient sans peine à cet homme comme eux en rupture de ban.

Comment voyez-vous évoluer la situation turque dans les dix ans ?

Il est très périlleux de faire des prévisions précises mais depuis trois décennies des tendances lourdes sont perceptibles. A partir des années 1980, la mondialisation associée à la libéralisation de l’économie, l’adhésion à l’Union Européenne, ouvrent la Turquie. Les échelles sont progressivement brouillées. Le cadre national se retrouve compressé entre le local et le global.

A la différence de l’élite laïque aux rigides conceptions jacobines, les élites islamistes se sont coulées dans la nouvelle donne. Une classe entrepreneuriale est née. La Turquie expérimente un double et simultané processus d’intégration et de polarisation. Alors que le fossé entre ville et campagne, masses conservatrices et Etat, s’est réduit, les secteurs les plus laïcs sont expulsés des couloirs des instances dirigeantes. Entre 1999 et 2006, le segment de la population se définissant d’abord comme musulman est passé de 36 à 45%. Bousculant le triptyque Etat-laïc, Etat-unitaire, Etat-nation, les valeurs traditionnelles alliées à l’économie de marché ont remporté la bataille culturelle. Cette éthique entrepreneuriale (tüccar siyaseti) se propage. L’individu s’enrichit et en fait bénéficier la communauté. Loin des foudres de l’Etat kémaliste, les groupes confrériques nakshibendis ou nurcu ont su investir, les réseaux de l’information ou de l’éducation. La société civile prend le relais de l’Etat providence et le retrait de l’Etat devient synonyme de renouveau spirituel.  Ces changements vont de pair avec une approche moins pessimiste de l’existence ; la richesse engendrée par la libération des énergies ruisselle sur la société et prévient la tentation nihiliste.

Avec le soutien d’Européens candides  et d’Américains manipulateurs (même si des nuances existent entre les diplomates favorables à l’AKP et le Pentagone plus sceptique), la Turquie est en train d’opérer une véritable révolution conservatrice et de basculer. Synonyme d’archaïsme social, d’obscurantisme religieux, l’islam était le miroir négatif de l’identité turque. Aujourd’hui, l’AKP veut en faire le ciment du futur pacte social. Les premiers cercles du pouvoir sont solidement tenus en main par des islamistes formés dans le moule du Milli Görus. Les organes de sécurité : police, services de renseignements sont tombés dans l’escarcelle des confréries. Le parcours du nouveau directeur du MIT ( Milli Istihbarat Teskilati-service national de renseignement) est à cet égard éloquent. Un deuxième cercle  constitué de ralliés et de décideurs économiques soutient le noyau dur par opportunisme et intérêt bien compris.

La démocratie est le dernier pilier de cette Turquie nouvelle. Elle légitime l’expression des aspirations profondes du pays réel, jusqu’alors brimé par le pays légal. La démocratie passe avant la satisfaction des besoins de l’Etat, par conséquent elle prend le pas sur la laïcité.

Propos recueillis par Maurice Gendre

samedi, 12 février 2011

Taliban en al-Qaida hebben geen ideologische banden

taliban1111.jpg

Taliban en al-Qaida hebben geen ideologische banden (rapport)
       
WASHINGTON 07/02 (AFP) = De Afghaanse taliban en al-Qaida worden ten
onrechte beschouwd als ideologische bondgenoten. Het zou zelfs mogelijk zijn
om de taliban ervan te overtuigen het terroristische netwerk niet
meer te steunen. Dat blijkt uit een rapport van Amerikaanse
deskundigen, zo staat te lezen in de New York Times.
   

Er waren al wrijvingen tussen de leiders van de taliban en al-Qaida
voor de aanslagen van 11 september 2001 en die zijn sindsdien enkel
sterker geworden, zo luidt het in "Separating the Taliban from Al
Qaeda: The Core of Success in Afghanistan", een rapport van Alex Strick
van Linschoten en Felix Kuehn van de universiteit van New York.

Beide mannen hebben jaren in Afghanistan gewerkt en merken op dat
de intensivering van de militaire operaties tegen de taliban een
oplossing wel heel moeilijk zou kunnen maken.

Het rapport legt uit dat het uitschakelen van leiders van de
taliban leidt tot hun vervanging door jongere en radicalere strijders, wat
de invloed van al-Qaida enkel verhoogt. De onderzoekers raden de VS
aan zo snel mogelijk een dialoog op te starten met de ouderlingen
onder de taliban, alvorens die hun invloed verliezen. 

De auteurs zijn niet gekant tegen de Navo-aanvallen in Afghanistan,
maar ze vragen dat er parallel onderhandelingen gevoerd worden. "Er
is een politiek akkoord nodig, anders zal het conflict escaleren",
luidt het.

http://www.nytimes.com/2011/02/07/world/asia/07afghan.htm...
arating%20&st=cse

Report Casts Doubt on Taliban’s Ties With Al Qaeda

By CARLOTTA GALL
Published: February 6, 2011

KABUL, Afghanistan — The Afghan Taliban have been wrongly perceived as close
ideological allies of Al Qaeda, and they could be persuaded to renounce the
global terrorist group, according to a report to be published Monday by New
York University.

The report goes on to say that there was substantial friction between the
groups’ leaders before the attacks of Sept. 11, 2001, and that hostility has
only intensified.

The authors, Alex Strick van Linschoten and Felix Kuehn, have worked in
Afghanistan for years and edited the autobiography of a Taliban diplomat,
many of whose ideas are reflected in the report. The authors are among a
small group of experts who say the only way to end the war in Afghanistan is
to begin peace overtures to the Taliban.

The prevailing view in Washington, however, is “that the Taliban and Al
Qaeda share the same ideology,” said Tom Gregg, a former United Nations
official in Afghanistan and a fellow at the Center on International
Cooperation at N.Y.U., which is publishing the report. “It is not an
ideology they share; it is more a pragmatic political alliance. And
therefore a political approach to the Taliban ultimately could deliver a
more practical separation between the two groups.”

Some American officials have argued that the military surge in Afghanistan
will weaken the Taliban and increase the incentive to negotiate. But the
report cautions that the campaign may make it harder to reach a settlement.

The report, “Separating the Taliban from Al Qaeda: The Core of Success in
Afghanistan,” says attacks on Taliban field commanders and provincial
leaders will leave the movement open to younger, more radical fighters and
will give Al Qaeda greater influence. The authors suggest that the United
States should engage older Taliban leaders before they lose control of the
movement.

The authors do not oppose NATO’s war, but suggest that negotiations should
accompany the fighting. A political settlement is necessary to address the
underlying reasons for the insurgency, they write. Otherwise, they warn, the
conflict will escalate.

The report draws on the authors’ interviews with unnamed Taliban officials
in Kabul, Kandahar and Khost, and on published statements by the Taliban
leadership. The authors indicate that Taliban officials fear retribution if
they make on-the-record statements opposing Al Qaeda.

Nevertheless, Taliban leaders have issued statements in the last two years
that indicate they are distancing their movement from Al Qaeda. The report
says the Taliban will not renounce Al Qaeda as a condition to negotiations,
but will offer to do so in return for guarantees of security.

The report reflects many of the arguments put forward by Mullah Abdul Salam
Zaeef, whose autobiography, published in English as “My Life With the
Taliban,” the authors edited. Mullah Zaeef lives under a loose house arrest
in Kabul after being held at Guantánamo Bay, Cuba, and has been an
intermediary between the Afghan president, Hamid Karzai, and the Taliban.

The report argues that Taliban leaders did not know of the Sept. 11 attacks
in advance and that they appeared to have been manipulated by Osama bin
Laden, who then lived in Afghanistan.

In November 2002, the report says, senior Taliban figures gathered in
Pakistan and agreed to join a process of political engagement and
reconciliation with the new government of Afghanistan. Yet the decision came
to nothing, since neither the Afghan government nor the American government
saw any reason to engage with the Taliban, the report says.

A member of the Haqqani family, which leads what American officials regard
as the most dangerous Taliban group, came to Kabul in 2002 to discuss
reconciliation, but he was detained and badly treated, the report states.

Bruce Riedel, a former C.I.A. officer who prepared a strategic policy review
on Afghanistan and Pakistan for President Obama in 2009, places the Afghan
Taliban alongside Al Qaeda in the “syndicate of terrorists” threatening the
United States. Mullah Mohammad Omar, the Taliban leader, has maintained an
“alliance, even friendship” with Mr. bin Laden that “seems to have remained
intact to this day,” Mr. Riedel writes in his book “Deadly Embrace:
Pakistan, America and the Future of the Global Jihad.”

Yet others say that there is a clear ideological divide between the two
groups and that the Taliban are not engaged in international terrorism.

“Al Qaeda is an organization that has a clearly articulated vision of global
jihad, and that is not the case with the Haqqanis and the Taliban,” Mr.
Gregg said. “Their focus is on Afghanistan, the country they are from.”

mercredi, 02 février 2011

Mishima: A Life in Four Chapters

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Mishima: A Life in Four Chapters

Trevor LYNCH

Ex: http://www.counter-currents.com/

Similar things happen in the United States too: an alienated, bookish radical right-winger takes up weight-lifting and martial arts, creates a private militia, dreams of overthrowing the government, then dies in a spectacular, suicidal, and apparently pointless confrontation with the state. In the United States, however, such people are easily dismissed as “kooks” and “losers.” However, when it happened in Japan, the protagonist, Yukio Mishima, was one of the nation’s most famous and respected novelists.

Director Paul Schrader’s 1985 movie, Mishima: A Life in Four Chapters, is an excellent introduction to Mishima’s life and work. It is by far the best movie about an artist I have ever seen. It is also surely the most sympathetic film portrayal of a figure who was essentially a fascist, maybe since Triumph of the Will.

Paul Schrader, of German Calvinist descent, is famous as the writer or co-writer of the screenplays of Martin Scorsese’s Taxi Driver, Raging Bull, The Last Temptation of Christ, and Bringing Out the Dead. His other screenplays include Brian De Palma’s Obsession, Peter Weir’s The Mosquito Coast, and his own American Gigolo. Other movies directed by Schrader include the remake of Cat People and the brilliant Auto Focus, a biopic about a very different sort of artist, Bob Crane. It is so creepy that I will never watch it again, even though it is a masterpiece.

Mishima, however, is Schrader’s best film. He also co-wrote the screenplay with his brother Leonard. (The score, moreover, is the best thing ever written by Philip Glass.)

The narrative frame of the movie is Mishima’s last day, which is filmed in realistic color. The story of his life is told in black and white flashbacks, inter-cut with dramatizations of parts of three of Mishima’s novels, The Temple of the Golden Pavilion, Kyoko’s House, and Runaway Horses, which are filmed on unrealistic stage sets in lavish Technicolor.

Yukio Mishima was a very, very, very sensitive child. Born Kimitake Hiraoke in 1925 to an upper middle class family with Samurai ancestry, he was taken from his mother by his grandmother, who kept him indoors, told him that he was physically fragile, prevented him from playing with other boys, and made him her factotum until she died when he was twelve. Then he returned to his parents.

Highly intelligent and convinced of his physical frailty, Mishima became bookish and introverted: a reader and a writer, a poet and a dreamer. He wrote his first short stories at age 12. Denied an outlet for healthy, boyish aggression, be became a masochist. He was also homosexual.

Imbued with Samurai tradition, he longed to fight in the Second World War and die for the emperor, but he was rejected as physically unfit for duty, a source of life-long self-reproach. He had a cold when he reported for his physical, and he later claimed that out of cowardice he exaggerated his symptoms so the doctor thought he had tuberculosis.

Mishima’s first book was published when he 19. He wrote at least 100 books—40 novels, 20 collections of short stories, 20 plays (including a screenplay and an opera libretto), and 20-odd book-length essays and collections of essays—before his death at age 45. He also dabbled in acting and directing.

The Temple of the Golden Pavilion

Schrader’s dramatization of Mishima’s 1956 novel The Temple of the Golden Pavilion focuses on the author’s Nietzschean exploration of the role of physiognomy and will to power in the origin of values. Nietzsche believed that all organisms have will to power, even sickly and botched ones. In the realm of values, will to power manifests itself particularly in a desire to think well of oneself. A healthy organism affirms itself by positing values that affirm its nature. The healthy affirm health, strength, beauty, and power. They despise the sickly, weak, and ugly.

But sickly organisms have will to power too. They affirm themselves by positing values based on their natures, values that cast them in a positive light and cast healthy organisms in a negative light. This is the origin of ascetic and “spiritual” values, as well as the Christian values of the Sermon on the Mount, which Nietzsche calls “slave morality.”

The Temple of the Golden Pavilion is loosely based on the burning of the Reliquary (or Golden Pavilion) of Kinkaku-ji in Kyoto by a deranged Buddhist acolyte in 1950. In Mishima’s story, the arson is committed by Mizoguchi, an acolyte afflicted with ugliness and a stutter. The acolyte recognizes the beauty of the Golden Pavilion, but also hates it, because its beauty magnifies his deformities.

Mizoguchi’s clubfooted friend Kashiwagi tries to teach Mizoguchi to use is disabilities to arouse women’s pity and exploit it to get sex. Kashiwagi can use his disability because he lacks pride and will to power. Mizoguchi, however, cannot enjoy beauty by means of self-abasement. He cannot own his imperfections. The vision of the Golden Pavilion prevents him. He can like himself only if the Golden Pavilion is destroyed, thus he sets it ablaze.

In Nietzsche’s terms, the destruction of the Golden Pavilion is an act of transvaluation. The beauty that oppresses Mizoguchi must be destroyed. For Nietzsche, this act of destruction serves to create a space for new values that will allow him to affirm his disability, just as the destruction of aristocratic values creates a space for slave morality.

Schrader includes this dramatization of The Temple of the Golden Pavilion to illustrate Mishima’s exploration of his own youthful nihilism. Short even by Japanese standards (5’1”), skinny, physically frail, Mishima envied and eroticized the bodies of healthier boys, an eroticism that Mishima’s Confessions of a Mask clearly indicates was tinged with masochistic self-hatred and sadistic fantasies of brutality and murder. (Mishima first became sexually aroused at a photograph of a painting of the martyrdom of Saint Sebastian.)

Self-Transformation

The Temple of the Golden Pavilion, however, is a look backwards, at paths Mishima could understand but could not follow. Unlike Kashiwagi, Mishima could not own his physical imperfections. Unlike Mizoguchi, he could not annihilate the ideal of beauty to feel good about himself. This left Mishima with only one choice: to remake his body according to the ideal of physical beauty. Thus in 1955, Mishima started lifting weights, with impressive results. He also took up kendo and karate.

Mishima documented his physical transformation with a very un-Japanese exhibitionism. He posed frequently for photographers, producing a book, Ordeal by Roses (1963), in collaboration with photographer Eikoh Hosoe. Mishima also posed in Young Samurai: Bodybuilders of Japan and OTOKO: Photo Studies of the Young Japanese Male by Tamotsu Yatō. His acting work was also an extension of this exhibitionism, as was his dandyism. When he wasn’t posing nude or in a loincloth, his clothes were exclusively Western. He dressed up like James Bond and dressed down like James Dean.

In 1958, his body and self-confidence transformed, Mishima married Yoko Sugiyama. It was an arranged marriage. They had two children. (Among Mishima’s requirements for a wife was that she have no interest in his work and that she be shorter than him. As an indication of his social circles, Mishima had earlier considered Michiko Shōda as a possible bride. She went on to marry Crown Prince Akihito and is now Empress of Japan.)

In 1959, Mishima built a house in an entirely Western style. Following the Nietzschean principle that every authentic culture has an integrity and unity of style, Mishima rejected multiculturalism, including mixing Japanese and Western lifestyles. Since he could not live in an entirely Japanese house, he chose to live in an entirely Western one, where he could “sit on rococo furniture wearing Levis and an aloha shirt.”

Kyoko’s House

The second Mishima novel Schrader dramatizes is Kyoko’s House (1959), which cries out for an English translation. According to the literature, Kyoko’s House is an exploration of Mishima’s own psyche, aspects of which are concretized in the four main characters: a boxer, who represents Mishima’s new-found athleticism; a painter, who represents his creative side; a businessman, who lives an outwardly conventional life but rejects postwar Japanese society; and an actor, who represents his narcissism.

Schrader focuses only on the story of the actor, who takes up bodybuilding when humiliated by a gangster sent to intimidate his mother, who was in debt to loan-sharks. The moneylender turns out to be a woman. She offers to cancel the loan if the actor sells himself to her.

The narcissist, whose sense of reality is based on the impression he makes in the eyes of others, realizes that even his newly acquired muscles are not real to him. The realization comes when his lover, on a sadistic whim, cuts his skin with a razor. In physical pain, he finds a sense of reality otherwise unavailable due to his personality disorder. Their sexual relationship takes a sadomasochistic turn that culminates in a suicide pact—foreshadowing Mishima’s own end.

Having put so much of himself into Kyoko’s House, Mishima was deeply wounded by its commercial and critical failure. Schrader had first wanted to dramatize Mishima’s Forbidden Colors, his novel about Japan’s homosexual subculture, but Mishima’s widow refused permission. (She denied that Mishima had any homosexual proclivities.) But it is just as well. From what I can gather, Kyoko’s House is a far better novel than Forbidden Colors.

Schrader did not dramatize the story of the boxer in Kyoko’s House, but it also foreshadows Mishima’s life as well. After one of his hands is shattered in a fight, the boxer becomes involved in right-wing politics. Mishima makes it quite clear that the boxer’s political commitment is not based on ideology, but on a physically ruined man’s desire for an experience of self-transcendence and sublimity.

The businessman’s outlook is also important for understanding Mishima’s life and outlook. He thinks postwar Japan is a spiritual void in which prosperity, materialism, peace, and resolute amnesia about the war years have sapped life of authenticity, which requires that one face death, something that was omnipresent during the war.

Authenticity through awareness of death, pain as an encounter with reality, and right wing politics as a form of self-transcendence (or therapy): Kyoko’s House maps out the trajectory of the rest of Mishima’s life.

Mishima’s Political Turn

Mishima, like many Western right-wingers, saw tradition as a third way between capitalism and socialism, which are essentially identical in their materialistic ends and their scientific and technological means. He always had right-wing tendencies, but his writings in the 1940s and 1950s were absorbed (self-absorbed, truth be told) with personal moral and psychological issues.

Like many Japanese, however, Mishima became increasingly alarmed by the corruptions of postwar consumer society. He saw the Samurai tradition as an aristocratic alternative to massification, a spiritual alternative to materialism. He saw the Japanese military and the emperor as guardians of this tradition. But these guardians had already made too many compromises with modernity. Mishima was particularly critical of the emperor’s renunciation of divinity at the end of the Second World War. In his writings and actions in the last decade of his life, Mishima sought to call the emperor and the military back to their mission as guardians of Japanese tradition.

In the fall of 1960, Mishima wrote “Patriotism,” a short story about the aftermath of the “Ni Ni Roku Incident” of February 1936, an attempted coup d’état by junior officers of the Imperial Army who assassinated several political leaders. The officers wished the government to address widespread poverty caused by the world-wide Great Depression. The coup was cast as an attempt to restore the absolute power of the emperor, but he regarded it as a rebellion and ordered it crushed.

Mishima’s story focuses on Lieutenant Shinji Takeyama and his young wife, Reiko. The Lieutenant did not take part in the coup but was friends with the participants. He is ordered to help suppress it. Torn between loyalty to the emperor and loyalty to his friends, he chooses to commit suicide by self-disembowelment after a night of love-making. Reiko joins him in death.

Mishima published “Patriotism” in 1961. In 1965, he directed and starred in 28-minute film adaptation which he first released in France. The film of Patriotism is erotic, chilling, and cringe-inducingly graphic (people regularly fainted when they saw it in theaters). In retrospect, it seems like merely a rehearsal for Mishima’s eventual suicide. The music, fittingly, is the Liebestod (Love-Death) from Wagner’s Tristan and Isolde. Mishima’s widow locked up the film after her husband’s death. After her death, it was released on DVD by the Criterion Collection. (Mishima also committed suicide on screen in Hideo Gosha’s 1969 film Tenchu!)

Schrader shows bits of the filming of Patriotism and also dramatizes a very similar episode from Runaway Horses (1969), the second volume of Mishima’s The Sea of Fertility quartet (1968–1970). The Sea of Fertility is a panorama of Japan’s traumatic crash course in modernization, spanning the years 1912 to 1975, narrating the life of Shigekuni Honda, who becomes a wealthy and widely-traveled jurist.

Runaway Horses, set in 1932–1933, is the story of Isao Iinuma, a right-wing student who seeks the alliance of the military to plot a rebellion in 1932. The goal is to topple capitalism and restore absolute Imperial rule by simultaneously assassinating the heads of industry and the government and torching the Bank of Japan. The plot is foiled, but when Isao is released from prison, he carries out his part of the mission anyway, assassinating his target. The assassination, of course, is politically futile, but Isao feels honor-bound to carry out his mission. He then commits hari-kiri.

Isao’s plot is clearly based on the Ni Ni Roku Incident of 1936. The novel also tells the story of the Samurai insurrection in Kunamoto in 1876. But it would be a mistake to conclude that Mishima put his hope in a successful military coup as the most likely path to a renewal of Japanese tradition. Mishima’s focus was on the ritual suicides of the defeated rebels.

The Way of the Samurai

Japan had 300 years of peace under the Tokugawa Shogunate. Conflict had been outlawed; history in the Hegelian sense had been ended. Yet the arts and culture flourished, and the Japanese had not been reduced to a mass of dehumanized and degraded producer-consumers. The cause of this was the persistence of the Samurai ethic.

The Samurai, of course, like all aristocrats, prefer death to dishonor, and when prevented from demonstrating this on the battlefield, they demonstrated it instead through ritual suicide. They also demonstrated their contempt of material necessity through the cultivation of luxury and refinement. The cultural supremacy of the ideal of the honor suicide served as a bulwark protecting high culture against degeneration into bourgeois consumer culture, which springs from an opposing hierarchy of values that prizes life, comfort, and security over honor.

Mishima’s cultural-political project makes the most sense if we view it not as an attempt to return to militarism, but as an attempt to uphold or revive the Samurai ethic in postwar Japan so that it could play the same conservative role as it did under the 300-year peace of the Shogunate. (Mishima’s outlook would then be very similar to that of Alexandre Kojève, who in his Introduction to the Reading of Hegel claimed that Japan under the Shogunate showed how we might retain our humanity at the end of history through an aristocratic culture that rested on the cultural ideal of a “purely gratuitous suicide.”)

Mishima produced a spate of political books and essays in the 1960s, most of which have remained untranslated. Two of the most important, however, are available in English. In 1967, Mishima published The Way of the Samurai, his commentary on the Hagakure (literally, In the Shadow of the Leaves), a handbook authored by the 18th-century Samurai Tsunetomo Yamamoto. In 1968, Mishima published Sun and Steel, an autobiographical essay about bodybuilding, martial arts, and the relationship of thought and action which also discusses ritual suicide. (In 1968, Mishima also published a play, My Friend Hitler, about the Röhm purge of 1934. He was coy about his true feelings toward Hitler. In truth, he was more a Mussolini man.)

Mishima the Activist

But Mishima did more than write about action. He acted. In 1967, Mishima enlisted in the Japanese Ground Self-Defense Force (GSDF) and underwent basic training. In 1968, Mishima formed the Tatenokai (Shield Society—Mishima was pleased that the English initials were SS), a private militia composed primarily of right-wing university students who studied martial arts and swore to protect Japanese tradition against the forces of modernization, left or right.

In 1968 and 1969, when leftist student agitators had the universities in chaos, Mishima participated in debates and teach-ins, criticizing Marxism and arguing that Japanese nationalism, symbolized by loyalty to the Emperor, should come before all other political commitments.

On November 25, 1970, after a year of planning, Mishima and four members of the Shield Society visited the Icigaya Barracks of the Japanese Self-Defense force and took the commander hostage. Mishima demanded that the troops be assembled so he could address them. He had alerted the press in advance. He stepped out onto a balcony in his uniform to harangue the assembled troops, calling them to reject American imposed materialism and to return to the role of guardians of Japanese tradition.

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The speech was largely drowned out by circling helicopters, and the soldiers jeered. Mishima returned to the commander’s office, where he and one of his followers, Masakatsu Morita, committed seppuku, a ritual suicide involving self-disembowelment with a dagger followed by decapitation with a sword wielded by one’s second.

Mishima’s stunt is often referred to as a “coup-attempt,” but this is stupid. Mishima had been talking about, writing about, rehearsing, and preparing for suicide for years. He had no intention of surviving, much less taking power. His death was an attempt to inspire a revival of Samurai tradition. In Samurai fashion, he wanted a death that mattered, a death of his choosing, a death that he staged with consummate dramatic skill.

Mishima also wished to avoid the decay of old age. Having come to physical health so late in life, he had no intention of experiencing its progressive loss. (His last novel, The Decay of the Angel, paints a very bleak portrait of old age.)

Schrader’s depiction of Mishima’s suicide is far less graphic than Patriotism but every bit as powerful. He saves the climaxes of The Temple of the Golden Pavilion, Kyoko’s House, and Runaway Horses to the very end, inter-cutting them with Mishima’s own suicide, to shattering effect.

This is a great movie, which will leave a lasting impression.

Mishima’s Legacy

In the end, though, what did Mishima’s death mean? What did it matter? What did it accomplish?

It would be all too easy to dismiss Mishima as a neurotic and a narcissist who engaged in politics as a kind of therapy. Right wing politics is crawling with such people (none of them with Mishima’s talents, unfortunately), and we would be better off without them. If a white equivalent of Mishima wished to write for Counter-Currents/North American New Right, we would welcome his work (as we would welcome translations of Mishima’s works!). But we would also keep him at arm’s length. Such people should be locked in a room with a computer and fed through a slot in the door. They should not be put in positions of trust and responsibility.

But Mishima is safely dead, and the meaning of his death cannot be measured in terms of crass political “deliverables.” Indeed, it is a repudiation of the whole calculus of interests that lies at the foundation of modern politics.

Modern politics is based on the idea that a long and comfortable life is the highest value, to be purchased even at the price of our dignity. Aristocratic politics is based on the idea that honor is the highest value, to be purchased even at the price of our lives.

The spiritual aristocrat, therefore, must be ready to die; he must conquer his fear of death; he even must come to love death, for his ability to choose death before dishonor is what raises him above being a mere clever animal. It is what makes him a free man, a natural master rather than a natural slave. It is ultimately the foundation of all forms of higher culture, which involve the rejection or subordination and stylization of merely animal desire.

A natural slave is someone who is willing to give up his honor to save his life. Thus modern politics, which exalts the long and prosperous life as the highest value, is a form of spiritual slavery, even if the external controls are merely soft commercial and political incentives rather than chains and cages.

Thus Mishima’s eroticization of death is not a mental illness needing medication. By ceasing to fear death, Mishima became free to lead his life, to take risks other men would not have taken. By ceasing to fear death, Mishima could preserve his honor from the compromises of commerce and politics and the ravages of old age. By ceasing to fear death, Mishima entered into the realm of freedom that is the basis of all high culture. By ceasing to fear death, Mishima struck a death-blow at the foundations of the modern world.

In my review of Christopher Nolan’s The Dark Knight, I argued that the Joker is Hollywood’s image of a man who is totally free from modern society because he has fundamentally rejected its ruling values—by overcoming the fear of death. An army of such men could bring down the modern world.

Well, Yukio Mishima was a real example of such a man. And, as usual, the truth is stranger than fiction.

Afterword

In my reviews of Christopher Nolan’s Batman Begins and Guillermo del Toro’s Hellboy and Hellboy II: The Golden Army, I argued that somebody in Hollywood and the comic book/graphic novel industry must be reading up on Traditionalism, for the super-villains in these movies can be seen as Traditionalists. Since Traditionalism is the most fundamental rejection of the modern world, weaponized Traditionalists make the most dramatically potent foils for liberal, democratic, humanistic superheroes like Hellboy and Batman.

Well, shortly after I wrote that, Savitri Devi’s Impeachment of Man was ordered by someone at one of the major comics companies.

I can see it all now. Somewhere down the line, Hellboy will be squaring off against the Cat Lady of Calcutta and her fleet of Zündelsaucers, and Batman will face his new arch-nemesis . . . a five-foot Samurai with spindly legs in tights.

lundi, 31 janvier 2011

Japan wird herabgestuft

Japan wird herabgestuft

Michael Grandt

Die Finanzkrise trifft jetzt auch den Fernen Osten: Die Ratingagentur Standard & Poors stufte heute die Kreditwürdigkeit von Japan wegen steigender Staatsschulden herab.

Erstmals seit 12 Jahren wurde die Kreditwürdigkeit Japans um eine Note herabgestuft und liegt damit nun bei »AA-«, also bereits drei Stufen unter der Bestnote. Die Agentur schätzt die Aussichten zudem düster ein, denn der Gipfel der Verschuldung werde erst Mitte der 2020er Jahre erreicht werden. Die Märkte reagierten sofort: Der Yen gab nach und die Kosten für die Kreditausfallversicherung stiegen.

Der japanische Wirtschaftsminister Kaoru Yosanu bedauerte die Herabstufung. Bei Experten war dies jedoch schon seit Längerem erwartet worden, denn die Staatsverschuldung summiert sich bereits auf das Doppelte der Wirtschaftsleistung. Damit ist der japanische Schuldenberg so hoch wie in keinem anderen Industrieland der Welt und die Haushaltslage die schlechteste aller Industrienationen.

Finanzminister Yoshihiko Noda wertete die Senkung der Bonitätsnote als Warnung an die Regierung, die endlich aktiv werden müsse, sonst stehe Japan irgendwann vor einem größeren Problem als Europa.

 

Mehr: http://info.kopp-verlag.de/hintergruende/enthuellungen/mi...

dimanche, 30 janvier 2011

Afghanistan - "Totenacker der Imperien"?

Afghanistan – »Totenacker der Imperien«?

Gedanken zur Verlängerung des Afghanistan-Mandates

Wolfgang Effenberger

 

Mitte Januar 2011 beschloss die Bundesregierung, das Afghanistan-Mandat vorerst bis Ende 2011 zu verlängern. Dann soll der Abzug beginnen, sofern »die Lage dies erlaubt«. Weder dürften die verbleibenden deutschen Soldaten, noch die »Nachhaltigkeit des Übergabeprozesses» gefährdet werden. Die seit Jahren übliche Rhetorik, die üblichen Worthülsen. Diese schwammigen Formulierungen sind eine Farce. Viel wichtiger als der Beginn eines scheinbaren Abzuges – man erinnere sich an den »Abzug« der US-Kampfbrigaden im Irak im Sommer 2010 (1) – ist das definitive Ende mit der Rückkehr des letzten Soldaten. Diesen Mut hat die Sowjetunion bewiesen und den Rückzug aus Afghanistan fest terminiert: Am 15. Februar 1989 überquerte mit General Boris Gromow der letzte sowjetische Soldat die Termez-Brücke am Grenzfluss Amu Darja.

Mehr: http://info.kopp-verlag.de/hintergruende/deutschland/wolf...

 

 

 

Quelle: http://gesellschaftsspiegel.de/wordpress/wp-content/uploads/brz158.jpg

jeudi, 27 janvier 2011

La semaine des révélations en Turquie

La semaine des révélations en Turquie

par Jean-Gilles MALLIARAKIS

Ex: http://www.insolent.fr/

110122

JG Malliarakis

Apostilles

  1. AKP = "Adalet ve Kalkinma Partisi" (en turc : le parti de la justice et du développement, fondé et dirigé par l'actuel premier ministre Erdogan actuellement majoritaire au parlement en attendant les résultats des élections de juin 2011).
  2. Ce nom de Bayloz correspond à l'appellation turque. Le nom anglais "Sledgehammer" apparaît couramment dans la presse. En français ce mot se traduit par "masse" [du forgeron] ; nous dirions plutôt : "massue" [avec un "e"…].
  3. MGK = "Milli Guvenlik Kurulu" (en turc : le Conseil de sécurité nationale)
  4. cf. Une scène bouleversante du très beau film "En attendant les nuages" ("Bulutlari beklerken") de la réalisatrice Yesim Ustaoglu.
  5. Voir à ce sujet les images de la manif meurtrière. Pas besoin d'avoir étudié la langue d'Omar Pamuk pour comprendre…
  6. Sur ce point, la fable de la défense des Chypriotes-Turcs contre les [très méchants] Grecs est balayée par la réalité même de la zone nord occupée, où les autochtones, devenus minoritaires dans leur propre réduit, souvent émigrés au Royaume-Uni, n'exercent plus qu'un pouvoir de façade.
  7. Ne pas confondre avec le général Çetin Dogan, ancien chef de la première armée turque et principal accusé du complot "Bayloz".
  8. PKK = "Partiya Karkerên Kurdistan" (en kurde : parti des travailleurs du Kurdistan")
  9. On se reportera à à mon petit livre sur "La Question turque et l'Europe".
  10. Voir son transport en chaise roulante au moment de ses premiers aveux en octobre 2010.
Au 4e anniversaire du meurtre, commis le 19 janvier 2007, du journaliste arménien Hrant Dink, on doit constater que le terrain judiciaire a permis à une certaine vérité d'avancer. Cela s'est surtout concrétisé d'une manière paradoxale, sans doute imprévue. Car cette affaire se rattache à un nombre impressionnant de crimes du même ordre, commis depuis plusieurs années.


Ils ont été perpétrés notamment, mais pas seulement, contre les chrétiens.

Au fil du temps, on a pu découvrir que l'intention des instigateurs s'inscrit dans le cadre d'une politique intérieure généralement mal comprise des Européens et, encore moins, des Américains. Autrefois un vieil adage du mépris de fer britannique considérait que "les nègres commencent à Calais". Heureusement les Occidentaux ont rompu avec cette erreur. Ils en commettent cependant une autre, pensant que le caractère formel des institutions démocratique de la Turquie en fait un pays en tous points semblable aux leurs.

À Istanbul et Ankara la presse que l'on qualifiera de gouvernementale, les journaux pro-AKP (1), classés à droite, mais également aussi quelques journaux de gauche, parviennent désormais à mettre en cause, et à démontrer, l'hypothèse de réseaux militaro-mafieux, stigmatisés dans ce pays sous le nom "d'État profond".

L'interminable procès du réseau serpent de mer appelé "Ergenekon" divise fortement la Turquie en deux camps. À lire respectivement "Zaman" et "Hürriyet", on en arrive à considérer que deux vérités, peut-être même deux nations se confrontent.

Le premier groupe se situe sur la défensive. Il se retrouve sur le ban des accusés du complot "Ergenekon". S'y a été ajouté le dossier du projet de coup d'État appelé "Bayloz" (2) : en tout, les officiers supérieurs, généraux, amiraux et colonels impliqués atteignaient fin 2010 le nombre de 400. Ils s'identifient au parti de la laïcité, désireuse de s'opposer à la "réaction". Mais n'oublions pas que, dans un tel pays, les militaires représentent aussi un poids économique et social considérable : avec 790 000 hommes sous les drapeaux, le taux de militarisation de la Turquie n'est dépassé dans le monde que par celui de la Corée du nord et, par ricochet, le taux de son adversaire du sud. Or, rappelons-le, contrairement aux deux parties du pays du Matin Calme, la république kémaliste n'est entourée que de petits pays. N'inversons pas les rôles : ce n'est pas la Grèce, effectivement contrainte de déployer un très coûteux effort militaire, qui menace le "pays voisin".

Depuis la rédaction de la constitution de 1982, imposée par les auteurs du coup d'État de septembre 1980, et jusqu'à l'arrivée au pouvoir de l'AKP en 2003, le pouvoir suprême était détenu par le MGK (3). Dans cet exercice, l'État-major d'Ankara, recruté par cooptation, pouvait compter aussi sur le soutien de la haute magistrature. À celle-ci l'attachaient ces tendres liens qu'on appelle "philosophiques" dans des quotidiens tels que la "Nouvelle République" de Tours, la "Dépêche" de Toulouse" ou "l'Est républicain" de Nancy. En Turquie comme en France, le jacobinisme et le laïcisme s'appuient toujours sur les mêmes réseaux.

En face d'eux se trouvent des gens, ceux du parti au pouvoir "AKP", mais également du mouvement islamo-moderniste de Fethullah Gûlen, que l'on qualifie ordinairement, mais peut-être abusivement, en tout cas vaguement, sans que les mots aient été préalablement définis, d'islamistes. À terme, ces musulmans militants et confrériques représenteraient si d'aventure leur pays entrait dans l'Europe, un danger certes beaucoup plus grand que leurs compatriotes kémalistes ou leurs coreligionnaires salafistes.

Constatons que dans le court terme, leur action a permis de mettre en lumière les faces d'ombres de l'Histoire contemporaine de leur pays.

Les occidentaux de ma génération, par exemple, avaient été bercés de la légende de ce qu'on appelait l'helléno-turquisme, les "frères ennemis Grecs et Turcs", réconciliés depuis le gouvernement de Venizelos (1928-1932). Cette rumeur optimiste prospéra jusqu'aux jours noirs de septembre 1955. Les Grecs de Constantinople furent alors victimes de violences inacceptables. Ils durent quitter une Ville, leur Ville, la Ville, que l'on disait "Immortelle", vieille comme l'Histoire humaine, et pourtant d'une beauté toujours étincelante, aujourd'hui encore sous son nom définitivement turc d'Istanbul.

Sans s'étendre sur cette page sombre et lamentable, retenons que jusqu'à une date très récente, ceux qui la connaissaient, bien peu nombreux en France, pays qui ne se connaît pas d'ennemis, en rendaient responsable le gouvernement d'Adnan Menderes. Et celui-ci avait été renversé, et pendu par les militaires kémalistes en 1961.

Or tous les documents publiés par les journaux officieux, à la faveur de la lutte entre le gouvernement civil de l'AKP et les comploteurs d'Ergenekon, prouvent le contraire de ce que nous pensions jusque-là. Tous ces crimes avaient été provoqués par "l'État profond" en vue d'une politique machiavélique.

Notre interprétation superficielle résulte précisément de la désinformation. Elle avait été fabriquée par le jacobinisme local et propagée par ses cercles de confraternité en Europe occidentale et aux États-Unis.

Le régime bipartisan avait été institué en 1946 dans le contexte de la guerre froide et du plan Marshall. Cette apparence, renforcée par l'adhésion à l'OTAN en 1952, allait certes permettre au parti démocrate de récupérer une partie du public musulman, légitimement heurté par la laïcisation à marche forcée de la République à l'époque de son fondateur.

Mais les limites de la liberté sont demeurées, cependant, étroitement surveillées par des équipes adverses, "républicaines", animées d'un nationalisme militaire ombrageux et même obsidional. "Le Turc entouré d'ennemis, inculquent-ils dès l'enfance aux petits écoliers, trahis par les siens, doit faire face et remporter la victoire". (4)

Leur habileté avait consisté à se présenter pour les sous-traitants indispensables du pacte atlantique et de la stratégie occidentale dans la région. En bons serviteurs de l'idée qu'ils se font de leur intérêt national, et d'un destin géopolitique "de l'Adriatique à la muraille de Chine", ils se préoccupent, de toute évidence, comme d'une guigne de l'Atlantique et de l'Occident. Qu'ils aient pu apparaître comme les alliés des Israéliens hier, comme les protecteurs des Arabes aujourd'hui, donne à sourire. La défunte Yougoslavie a cru aussi les compter au nombre de ses amis.

Même la Commission européenne commence à prendre conscience du sens réel des négociations. Elles ne se déroulent pas en vue de l'adhésion et ne peuvent pas aboutir à en faire vraiment un État-Membre. Elles ne sont pas menées en vue de cette fin. Les équipes rivales de l'AKP ont hérité du dossier en 2003. Elles en tirent parti, depuis, dans le sens des réformes internes, plus ou moins libérales, qu'elles souhaitent mettre en œuvre, pour des raisons spécifiques à leur islam confrérique.

Le danger à long terme que représente leur démarche réside en ceci : elle organise, beaucoup plus efficacement que ses concurrentes arabes, saoudiennes, marocaines ou égyptiennes, la propagande, le matraquage et le chantage en vue d'une reconnaissance de l'islam comme "l'une des religions de l'Europe", voire même la "deuxième religion de France". Et ces énormes mensonges s'installent peu à peu.

La thèse de l'accusation dans les procès "Ergenekon" comme dans le sous-dossier "Bayloz" tend à donner une explication commune à tous ces faits qui s'apparentent à l'assassinat de Hrant Dink, soit aussi bien :
- les persécutions du reliquat de populations chrétiennes,
- les actions directes contre les missionnaires, évalués par le MGK comme un danger stratégique pour le pays depuis 2001, et présentés comme tels par une partie de la presse,
- ainsi que les tensions perpétuelles et provocatrices avec la Grèce,
- la fermeture des frontières de l'Arménie depuis 1993,
- le refus d'une solution acceptable à Chypre depuis 1974,
- ou même la mise à mort de 37 alevis à Sivas par une foule où se mêlaient à la fois les intégristes islamistes et les loups gris (5),
- ou l'assassinat mystérieux d'un journaliste comme Ugur Mumcu :
… tout cela résultait donc d'un propos délibéré, protégé par "l'État profond".

Il s'agit, au bout du compte, de maintenir la Turquie sous le joug militaire, de présenter leur intervention comme "barrage à l'islamisme".

Les quatre coups d'État réitérés de 1960 à 1997, aux applaudissements de l'occident, trouveraient leur origine dans cette perspective ainsi que l'invasion de Chypre en 1974 et le maintien d'un régime d'occupation dans le nord de l'île. (6) Ce boulet pèse lourd, sans aucun profit pour la Turquie.

Face à cette authentique "stratégie de la tension" le fameux mot d'ordre du ministre des affaires étrangères "pas de problème avec nos voisins" remplit dès lors une fonction à usage interne.

Tout cela demeurait masqué, voilé, mis en doute par la défense des comploteurs, sûrs d'eux.

Coup de théâtre la semaine écoulée, qui correspondait au 4e anniversaire de meurtre de Hrant Dink.

Les audiences du 17 et du 18 janvier du procès ont, ainsi, mis en relief une personnalité bien significative : celle du olonel de gendarmerie en retraite Arif Dogan. (7) En septembre 2010 on apprenait ses implications dans des crimes que l'on attribue désormais à Jitem, service secret illégal de la gendarmerie turque.

Jitem, rappelons-le, correspond à une structure parallèle fonctionnant à la fois comme service de renseignement et comme "service action" exécuteur des basses besognes. En particulier, à partir des années 1980, une guerre impitoyable a ravagé le sud-est anatolien sous le drapeau du PKK, organisation marxiste-léniniste "parti des travailleurs" (8) se réclamant du Kurdistan. À la même époque l'utilisation du mot même de "Kurde" était sanctionnée par des peines très dures. Il fallait user d'un euphémisme tel que "Turc de la Montagne". En face de cette situation de négation de leur identité culturelle, les populations considérées ont représenté, dès le début de la république, et après une très courte période d'entente avec Kemal, un foyer permanent de rébellions.

Celles-ci ont pris toutes les colorations, notamment celle d'une résistance, qualifiée de féodaliste et obscurantiste. Les excès antireligieux du gouvernement d'Ankara, plaisaient beaucoup en Europe occidentale, en Union Soviétique, en Amérique et, bien entendu, au grand-orient de France.

La dernière force de révolte en date a été fondée en 1978 par un militant gauchiste appelé Abdullah Ocalan. Elle invoque, au contraire des précédantes, une idéologie révolutionnaire que l'iconographie des affiches collées dans les villes d'Europe où le PKK est implanté confirme à l'évidence. Son organisation prit les armes à partir de 1984. Le conflit doit avoir fait 44 000 victimes en un quart de siècle. Il s'agissait, il s'agit encore puisque le terrorisme a repris, d'une vraie guerre.

On ne doit donc pas s'étonner que tous les moyens pour réduire cette affaire aient semblé légitimes aux forces locales du maintien de l'ordre. Et à plusieurs reprises les "protecteurs de villages", recrutés officiellement, ont été dénoncés par les gens qui imaginent de réduire cet État aux critères de l'Europe bien-pensante et consommatrice. (9)

Dans un tel contexte, il a été révélé par le colonel Arif Dogan lui-même que, dès 1986 les réseaux du service secret turc ont suscité et armé un mouvement terroriste kurde rival lui-même, le "Hizbullah" dirigé par Husseÿn Velioglu. Ce dernier mourra en définitive, après 15 ans de violences, sous les balles de la police turque en 2000, dans le cadre d'un kidnapping qu'il avait organisé.

L'idée de recruter ainsi des musulmans fanatiques au sein de la population kurde pour servir aux fins de l'ordre turc n'a certes pas été découverte par le colonel Arif Dogan. Elle avait déjà connu une certaine notoriété à l'époque des premières exactions massives commises à l'encore des Arméniens à la fin du XIXe siècle. Fondée en 1890 sous le règne de Abdul-Hamid II l'unité de cavalerie ottomane "Hamidiyé" passe même pour avoir représenté les précurseurs, dans les années 1895-1896, du génocide de 1915. Mais la différence reste considérable entre une unité répressive d'inspiration légale et un groupe terroriste.

Or l'audience des 17 et 18 janvier a permis au colonel de se justifier, et de le faire d'une manière extrêmement violente. Tel un vieil homme usé, aosr qu'il n'est âgé que de 65 ans (10), il accédait difficilement à la barre. Mais il a explosé et rompu avec le système de défense de tout le camp kémaliste. Depuis le début, celui-ci se voulait "serein". Il nie l'existence du complot : "un simple wargame (en français : kriegspiel), une étude d'école, la réplique purement théorique du coup d'État du général Evren en septembre 1980, etc." Toutes les accusations dont nous faisons état relèveraient d'une propagande odieuse, mensongère, et, horresco referens pour les temps qui courent "islamiste". "Ergenekon" ? Une "légende urbaine" !

Patatras, ayant dirigé pendant 8 ans une lutte antiterroriste, le colonel Arif Dogan s'est mis à hurler qu'il avait défendu son pays. Effectivement. Le président lui demanda donc de se calmer. Mais la révélation était faite : oui, le Jitem avait bien orchestré une activité illégale, oui il avait suscité le Hizbullah kurde de Turquie, oui ce Hizbullah était conçu comme un "Hizb-kontra" sur le mode des "contras" latino-américains, oui ces soi-disant parangons de la laïcité et de l'intégrité du territoire avaient embrigadé des islamistes séparatistes. Sympa le colonel. Il ne restera plus à ses compagnons d'hier que la ressource de faire circuler sa photo et de nous persuader que "toute vieillesse est un naufrage".

Et puis le 19 janvier, vint le tour de l'assassin effectif de Hrant Dink. Incarcéré depuis les faits ce jeune idéaliste de 17 ans ne semble pas avoir trop souffert de son incarcération. Il semble même qu'il ait "été fêté [et nourri] comme un héros national". Or ce jour-là, Ogün Samast a reconnu avoir été envoyé vers sa victime, et encouragé dans son intention meurtrière, par des officiers de gendarmerie.

Si l'on devait croire la "fameuse" encyclopédie Wikipedia, qui ne donne guère d'autres détails à son sujet, le jeune activiste aurait eu de bonnes raisons de liquider Hrant Dink. Il prête en effet à sa victime une déclaration un peu surprenante, dont Wikipedia ne donne évidemment pas la référence : "vider un jour ce sang turc empoisonné et de remplir avec le sang neuf de l’Arménie qui après l’indépendance paraît comme l’avenir des Arméniens du monde entier". Que, quatre ans après le meurtre, Wiki demeure encore alimentée par de tels bobards, en dit long sur la source dominante des gens qui fabriquent et amplifient les rumeurs mondiales.

Rappelons aux lecteurs qu'officiellement, en Turquie, tout le monde a condamné moralement ce crime. Si ce courageux journaliste, qui se savait menacé avait prononcé une phrase pareille, aussi provocatrice, très peu de gens, y compris dans les milieux arméniens eussent pris sa défense, et il serait allé directement en prison, en application du code pénal.

La décision de le liquider semble avoir été prise à partir de 2003. Hrant Dink représentait, dans son journal "Agos", un symbole insupportable. Pour la première fois depuis les événements tragiques qui ont purgé en 1915 la Turquie de l'essentiel de sa population arménienne, puis en 1922 de l'essentiel de sa population grecque, un représentant des survivants de ces minorités osait écrire librement, revendiquant son identité sans pour autant renoncer à sa citoyenneté. Dans tous les systèmes autoritaire clos, la dissidence intérieure appuyée sur le droit, est considérée comme pire que l'exil, pire que la trahison.Quatre ans plus tard, le quotidien Zaman, proche du gouvernement, reconnaît que "Hrant Dink a été victime de la fumée".

Nous dirions plus crûment en France : de l'enfumage systématique.

Autrement dit : les inspirateurs de ses assassins ont bénéficié des puissants instruments de désinformation mis en place et protégés par la complaisance occidentale depuis l'installation en 1946 d'un bipartisme apparent. Jusqu'à l'arrivée au pouvoir de l'AKP en 2003, ce régime avait été limité par divers putschs militaires. Et ceux-ci ont jalonné l'Histoire de ce demi-siècle, y compris le coup d'État dit postmoderne de février 1997.

Comme dans d'autres pays musulmans d'ailleurs, la dictature policière glauque a produit le fumier qui permet à l'islamisme de fleurir.

La semaine des révélations en Turquie

La semaine des révélations en Turquie

par Jean-Gilles MALLIARAKIS

Ex: http://www.insolent.fr/

110122Au 4e anniversaire du meurtre, commis le 19 janvier 2007, du journaliste arménien Hrant Dink, on doit constater que le terrain judiciaire a permis à une certaine vérité d'avancer. Cela s'est surtout concrétisé d'une manière paradoxale, sans doute imprévue. Car cette affaire se rattache à un nombre impressionnant de crimes du même ordre, commis depuis plusieurs années.

Ils ont été perpétrés notamment, mais pas seulement, contre les chrétiens.

Au fil du temps, on a pu découvrir que l'intention des instigateurs s'inscrit dans le cadre d'une politique intérieure généralement mal comprise des Européens et, encore moins, des Américains. Autrefois un vieil adage du mépris de fer britannique considérait que "les nègres commencent à Calais". Heureusement les Occidentaux ont rompu avec cette erreur. Ils en commettent cependant une autre, pensant que le caractère formel des institutions démocratique de la Turquie en fait un pays en tous points semblable aux leurs.

À Istanbul et Ankara la presse que l'on qualifiera de gouvernementale, les journaux pro-AKP (1), classés à droite, mais également aussi quelques journaux de gauche, parviennent désormais à mettre en cause, et à démontrer, l'hypothèse de réseaux militaro-mafieux, stigmatisés dans ce pays sous le nom "d'État profond".

L'interminable procès du réseau serpent de mer appelé "Ergenekon" divise fortement la Turquie en deux camps. À lire respectivement "Zaman" et "Hürriyet", on en arrive à considérer que deux vérités, peut-être même deux nations se confrontent.

Le premier groupe se situe sur la défensive. Il se retrouve sur le ban des accusés du complot "Ergenekon". S'y a été ajouté le dossier du projet de coup d'État appelé "Bayloz" (2) : en tout, les officiers supérieurs, généraux, amiraux et colonels impliqués atteignaient fin 2010 le nombre de 400. Ils s'identifient au parti de la laïcité, désireuse de s'opposer à la "réaction". Mais n'oublions pas que, dans un tel pays, les militaires représentent aussi un poids économique et social considérable : avec 790 000 hommes sous les drapeaux, le taux de militarisation de la Turquie n'est dépassé dans le monde que par celui de la Corée du nord et, par ricochet, le taux de son adversaire du sud. Or, rappelons-le, contrairement aux deux parties du pays du Matin Calme, la république kémaliste n'est entourée que de petits pays. N'inversons pas les rôles : ce n'est pas la Grèce, effectivement contrainte de déployer un très coûteux effort militaire, qui menace le "pays voisin".

Depuis la rédaction de la constitution de 1982, imposée par les auteurs du coup d'État de septembre 1980, et jusqu'à l'arrivée au pouvoir de l'AKP en 2003, le pouvoir suprême était détenu par le MGK (3). Dans cet exercice, l'État-major d'Ankara, recruté par cooptation, pouvait compter aussi sur le soutien de la haute magistrature. À celle-ci l'attachaient ces tendres liens qu'on appelle "philosophiques" dans des quotidiens tels que la "Nouvelle République" de Tours, la "Dépêche" de Toulouse" ou "l'Est républicain" de Nancy. En Turquie comme en France, le jacobinisme et le laïcisme s'appuient toujours sur les mêmes réseaux.

En face d'eux se trouvent des gens, ceux du parti au pouvoir "AKP", mais également du mouvement islamo-moderniste de Fethullah Gûlen, que l'on qualifie ordinairement, mais peut-être abusivement, en tout cas vaguement, sans que les mots aient été préalablement définis, d'islamistes. À terme, ces musulmans militants et confrériques représenteraient si d'aventure leur pays entrait dans l'Europe, un danger certes beaucoup plus grand que leurs compatriotes kémalistes ou leurs coreligionnaires salafistes.

Constatons que dans le court terme, leur action a permis de mettre en lumière les faces d'ombres de l'Histoire contemporaine de leur pays.

Les occidentaux de ma génération, par exemple, avaient été bercés de la légende de ce qu'on appelait l'helléno-turquisme, les "frères ennemis Grecs et Turcs", réconciliés depuis le gouvernement de Venizelos (1928-1932). Cette rumeur optimiste prospéra jusqu'aux jours noirs de septembre 1955. Les Grecs de Constantinople furent alors victimes de violences inacceptables. Ils durent quitter une Ville, leur Ville, la Ville, que l'on disait "Immortelle", vieille comme l'Histoire humaine, et pourtant d'une beauté toujours étincelante, aujourd'hui encore sous son nom définitivement turc d'Istanbul.

Sans s'étendre sur cette page sombre et lamentable, retenons que jusqu'à une date très récente, ceux qui la connaissaient, bien peu nombreux en France, pays qui ne se connaît pas d'ennemis, en rendaient responsable le gouvernement d'Adnan Menderes. Et celui-ci avait été renversé, et pendu par les militaires kémalistes en 1961.

Or tous les documents publiés par les journaux officieux, à la faveur de la lutte entre le gouvernement civil de l'AKP et les comploteurs d'Ergenekon, prouvent le contraire de ce que nous pensions jusque-là. Tous ces crimes avaient été provoqués par "l'État profond" en vue d'une politique machiavélique.

Notre interprétation superficielle résulte précisément de la désinformation. Elle avait été fabriquée par le jacobinisme local et propagée par ses cercles de confraternité en Europe occidentale et aux États-Unis.

Le régime bipartisan avait été institué en 1946 dans le contexte de la guerre froide et du plan Marshall. Cette apparence, renforcée par l'adhésion à l'OTAN en 1952, allait certes permettre au parti démocrate de récupérer une partie du public musulman, légitimement heurté par la laïcisation à marche forcée de la République à l'époque de son fondateur.

Mais les limites de la liberté sont demeurées, cependant, étroitement surveillées par des équipes adverses, "républicaines", animées d'un nationalisme militaire ombrageux et même obsidional. "Le Turc entouré d'ennemis, inculquent-ils dès l'enfance aux petits écoliers, trahis par les siens, doit faire face et remporter la victoire". (4)

Leur habileté avait consisté à se présenter pour les sous-traitants indispensables du pacte atlantique et de la stratégie occidentale dans la région. En bons serviteurs de l'idée qu'ils se font de leur intérêt national, et d'un destin géopolitique "de l'Adriatique à la muraille de Chine", ils se préoccupent, de toute évidence, comme d'une guigne de l'Atlantique et de l'Occident. Qu'ils aient pu apparaître comme les alliés des Israéliens hier, comme les protecteurs des Arabes aujourd'hui, donne à sourire. La défunte Yougoslavie a cru aussi les compter au nombre de ses amis.

Même la Commission européenne commence à prendre conscience du sens réel des négociations. Elles ne se déroulent pas en vue de l'adhésion et ne peuvent pas aboutir à en faire vraiment un État-Membre. Elles ne sont pas menées en vue de cette fin. Les équipes rivales de l'AKP ont hérité du dossier en 2003. Elles en tirent parti, depuis, dans le sens des réformes internes, plus ou moins libérales, qu'elles souhaitent mettre en œuvre, pour des raisons spécifiques à leur islam confrérique.

Le danger à long terme que représente leur démarche réside en ceci : elle organise, beaucoup plus efficacement que ses concurrentes arabes, saoudiennes, marocaines ou égyptiennes, la propagande, le matraquage et le chantage en vue d'une reconnaissance de l'islam comme "l'une des religions de l'Europe", voire même la "deuxième religion de France". Et ces énormes mensonges s'installent peu à peu.

La thèse de l'accusation dans les procès "Ergenekon" comme dans le sous-dossier "Bayloz" tend à donner une explication commune à tous ces faits qui s'apparentent à l'assassinat de Hrant Dink, soit aussi bien :
- les persécutions du reliquat de populations chrétiennes,
- les actions directes contre les missionnaires, évalués par le MGK comme un danger stratégique pour le pays depuis 2001, et présentés comme tels par une partie de la presse,
- ainsi que les tensions perpétuelles et provocatrices avec la Grèce,
- la fermeture des frontières de l'Arménie depuis 1993,
- le refus d'une solution acceptable à Chypre depuis 1974,
- ou même la mise à mort de 37 alevis à Sivas par une foule où se mêlaient à la fois les intégristes islamistes et les loups gris (5),
- ou l'assassinat mystérieux d'un journaliste comme Ugur Mumcu :
… tout cela résultait donc d'un propos délibéré, protégé par "l'État profond".

Il s'agit, au bout du compte, de maintenir la Turquie sous le joug militaire, de présenter leur intervention comme "barrage à l'islamisme".

Les quatre coups d'État réitérés de 1960 à 1997, aux applaudissements de l'occident, trouveraient leur origine dans cette perspective ainsi que l'invasion de Chypre en 1974 et le maintien d'un régime d'occupation dans le nord de l'île. (6) Ce boulet pèse lourd, sans aucun profit pour la Turquie.

Face à cette authentique "stratégie de la tension" le fameux mot d'ordre du ministre des affaires étrangères "pas de problème avec nos voisins" remplit dès lors une fonction à usage interne.

Tout cela demeurait masqué, voilé, mis en doute par la défense des comploteurs, sûrs d'eux.

Coup de théâtre la semaine écoulée, qui correspondait au 4e anniversaire de meurtre de Hrant Dink.

Les audiences du 17 et du 18 janvier du procès ont, ainsi, mis en relief une personnalité bien significative : celle du olonel de gendarmerie en retraite Arif Dogan. (7) En septembre 2010 on apprenait ses implications dans des crimes que l'on attribue désormais à Jitem, service secret illégal de la gendarmerie turque.

Jitem, rappelons-le, correspond à une structure parallèle fonctionnant à la fois comme service de renseignement et comme "service action" exécuteur des basses besognes. En particulier, à partir des années 1980, une guerre impitoyable a ravagé le sud-est anatolien sous le drapeau du PKK, organisation marxiste-léniniste "parti des travailleurs" (8) se réclamant du Kurdistan. À la même époque l'utilisation du mot même de "Kurde" était sanctionnée par des peines très dures. Il fallait user d'un euphémisme tel que "Turc de la Montagne". En face de cette situation de négation de leur identité culturelle, les populations considérées ont représenté, dès le début de la république, et après une très courte période d'entente avec Kemal, un foyer permanent de rébellions.

Celles-ci ont pris toutes les colorations, notamment celle d'une résistance, qualifiée de féodaliste et obscurantiste. Les excès antireligieux du gouvernement d'Ankara, plaisaient beaucoup en Europe occidentale, en Union Soviétique, en Amérique et, bien entendu, au grand-orient de France.

La dernière force de révolte en date a été fondée en 1978 par un militant gauchiste appelé Abdullah Ocalan. Elle invoque, au contraire des précédantes, une idéologie révolutionnaire que l'iconographie des affiches collées dans les villes d'Europe où le PKK est implanté confirme à l'évidence. Son organisation prit les armes à partir de 1984. Le conflit doit avoir fait 44 000 victimes en un quart de siècle. Il s'agissait, il s'agit encore puisque le terrorisme a repris, d'une vraie guerre.

On ne doit donc pas s'étonner que tous les moyens pour réduire cette affaire aient semblé légitimes aux forces locales du maintien de l'ordre. Et à plusieurs reprises les "protecteurs de villages", recrutés officiellement, ont été dénoncés par les gens qui imaginent de réduire cet État aux critères de l'Europe bien-pensante et consommatrice. (9)

Dans un tel contexte, il a été révélé par le colonel Arif Dogan lui-même que, dès 1986 les réseaux du service secret turc ont suscité et armé un mouvement terroriste kurde rival lui-même, le "Hizbullah" dirigé par Husseÿn Velioglu. Ce dernier mourra en définitive, après 15 ans de violences, sous les balles de la police turque en 2000, dans le cadre d'un kidnapping qu'il avait organisé.

L'idée de recruter ainsi des musulmans fanatiques au sein de la population kurde pour servir aux fins de l'ordre turc n'a certes pas été découverte par le colonel Arif Dogan. Elle avait déjà connu une certaine notoriété à l'époque des premières exactions massives commises à l'encore des Arméniens à la fin du XIXe siècle. Fondée en 1890 sous le règne de Abdul-Hamid II l'unité de cavalerie ottomane "Hamidiyé" passe même pour avoir représenté les précurseurs, dans les années 1895-1896, du génocide de 1915. Mais la différence reste considérable entre une unité répressive d'inspiration légale et un groupe terroriste.

Or l'audience des 17 et 18 janvier a permis au colonel de se justifier, et de le faire d'une manière extrêmement violente. Tel un vieil homme usé, aosr qu'il n'est âgé que de 65 ans (10), il accédait difficilement à la barre. Mais il a explosé et rompu avec le système de défense de tout le camp kémaliste. Depuis le début, celui-ci se voulait "serein". Il nie l'existence du complot : "un simple wargame (en français : kriegspiel), une étude d'école, la réplique purement théorique du coup d'État du général Evren en septembre 1980, etc." Toutes les accusations dont nous faisons état relèveraient d'une propagande odieuse, mensongère, et, horresco referens pour les temps qui courent "islamiste". "Ergenekon" ? Une "légende urbaine" !

Patatras, ayant dirigé pendant 8 ans une lutte antiterroriste, le colonel Arif Dogan s'est mis à hurler qu'il avait défendu son pays. Effectivement. Le président lui demanda donc de se calmer. Mais la révélation était faite : oui, le Jitem avait bien orchestré une activité illégale, oui il avait suscité le Hizbullah kurde de Turquie, oui ce Hizbullah était conçu comme un "Hizb-kontra" sur le mode des "contras" latino-américains, oui ces soi-disant parangons de la laïcité et de l'intégrité du territoire avaient embrigadé des islamistes séparatistes. Sympa le colonel. Il ne restera plus à ses compagnons d'hier que la ressource de faire circuler sa photo et de nous persuader que "toute vieillesse est un naufrage".

Et puis le 19 janvier, vint le tour de l'assassin effectif de Hrant Dink. Incarcéré depuis les faits ce jeune idéaliste de 17 ans ne semble pas avoir trop souffert de son incarcération. Il semble même qu'il ait "été fêté [et nourri] comme un héros national". Or ce jour-là, Ogün Samast a reconnu avoir été envoyé vers sa victime, et encouragé dans son intention meurtrière, par des officiers de gendarmerie.

Si l'on devait croire la "fameuse" encyclopédie Wikipedia, qui ne donne guère d'autres détails à son sujet, le jeune activiste aurait eu de bonnes raisons de liquider Hrant Dink. Il prête en effet à sa victime une déclaration un peu surprenante, dont Wikipedia ne donne évidemment pas la référence : "vider un jour ce sang turc empoisonné et de remplir avec le sang neuf de l’Arménie qui après l’indépendance paraît comme l’avenir des Arméniens du monde entier". Que, quatre ans après le meurtre, Wiki demeure encore alimentée par de tels bobards, en dit long sur la source dominante des gens qui fabriquent et amplifient les rumeurs mondiales.

Rappelons aux lecteurs qu'officiellement, en Turquie, tout le monde a condamné moralement ce crime. Si ce courageux journaliste, qui se savait menacé avait prononcé une phrase pareille, aussi provocatrice, très peu de gens, y compris dans les milieux arméniens eussent pris sa défense, et il serait allé directement en prison, en application du code pénal.

La décision de le liquider semble avoir été prise à partir de 2003. Hrant Dink représentait, dans son journal "Agos", un symbole insupportable. Pour la première fois depuis les événements tragiques qui ont purgé en 1915 la Turquie de l'essentiel de sa population arménienne, puis en 1922 de l'essentiel de sa population grecque, un représentant des survivants de ces minorités osait écrire librement, revendiquant son identité sans pour autant renoncer à sa citoyenneté. Dans tous les systèmes autoritaire clos, la dissidence intérieure appuyée sur le droit, est considérée comme pire que l'exil, pire que la trahison.Quatre ans plus tard, le quotidien Zaman, proche du gouvernement, reconnaît que "Hrant Dink a été victime de la fumée".

Nous dirions plus crûment en France : de l'enfumage systématique.

Autrement dit : les inspirateurs de ses assassins ont bénéficié des puissants instruments de désinformation mis en place et protégés par la complaisance occidentale depuis l'installation en 1946 d'un bipartisme apparent. Jusqu'à l'arrivée au pouvoir de l'AKP en 2003, ce régime avait été limité par divers putschs militaires. Et ceux-ci ont jalonné l'Histoire de ce demi-siècle, y compris le coup d'État dit postmoderne de février 1997.

Comme dans d'autres pays musulmans d'ailleurs, la dictature policière glauque a produit le fumier qui permet à l'islamisme de fleurir.

JG Malliarakis
2petitlogo


Apostilles

  1. AKP = "Adalet ve Kalkinma Partisi" (en turc : le parti de la justice et du développement, fondé et dirigé par l'actuel premier ministre Erdogan actuellement majoritaire au parlement en attendant les résultats des élections de juin 2011).
  2. Ce nom de Bayloz correspond à l'appellation turque. Le nom anglais "Sledgehammer" apparaît couramment dans la presse. En français ce mot se traduit par "masse" [du forgeron] ; nous dirions plutôt : "massue" [avec un "e"…].
  3. MGK = "Milli Guvenlik Kurulu" (en turc : le Conseil de sécurité nationale)
  4. cf. Une scène bouleversante du très beau film "En attendant les nuages" ("Bulutlari beklerken") de la réalisatrice Yesim Ustaoglu.
  5. Voir à ce sujet les images de la manif meurtrière. Pas besoin d'avoir étudié la langue d'Omar Pamuk pour comprendre…
  6. Sur ce point, la fable de la défense des Chypriotes-Turcs contre les [très méchants] Grecs est balayée par la réalité même de la zone nord occupée, où les autochtones, devenus minoritaires dans leur propre réduit, souvent émigrés au Royaume-Uni, n'exercent plus qu'un pouvoir de façade.
  7. Ne pas confondre avec le général Çetin Dogan, ancien chef de la première armée turque et principal accusé du complot "Bayloz".
  8. PKK = "Partiya Karkerên Kurdistan" (en kurde : parti des travailleurs du Kurdistan")
  9. On se reportera à à mon petit livre sur "La Question turque et l'Europe".
  10. Voir son transport en chaise roulante au moment de ses premiers aveux en octobre 2010.

dimanche, 16 janvier 2011

Ayméric Chauprade: l'Europe et la Turquie


Ayméric Chauprade: l'Europe et la Turquie

mercredi, 05 janvier 2011

Sur la Chine

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Robert STEUCKERS :

 

Sur la Chine

 

Conférence prononcée à Gand, le 21 avril 2010, àla tribune de l'association étudiante KASPER

 

Mesdames, Messieurs, Chers amis,

 

Je suis un peu honteux de venir prononcer ici une brève conférence sur la Chine, alors que dans l’espace linguistique néerlandais, nous avons deux éminents spécialistes de la question : le Professeur Koenraad Elst et Alfred Vierling. Tous deux auraient accepté votre invitation et vous auraient fourni une conférence passionnante. Ce sont eux qui auraient dû se trouver à ma place ce soir. Vous me dites qu’ils sont indisponibles et que je dois les remplacer : je tenterai donc de faire du mieux que je puis en vous donnant les clefs nécessaires pour comprendre les ressorts philosophiques, idéologiques et politiques de ce géant qui défie aujourd’hui la superpuissance américaine. Pour donner corps à mes arguments, je me référerai aux ouvrages de Jean-François Susbielle, géopolitologue français contemporain, auteur de plusieurs ouvrages, dont Les Royaumes combattants – Vers une nouvelle guerre mondiale (First Editions, 2008). Dans ce livre consacré aux grandes puissances effectives et émergentes (dont le Brésil), Susbielle décrit de manière particulièrement didactique les linéaments profonds de l’histoire chinoise, le passage de la Chine maoïste à celle de Deng Xiaoping, prélude au formidable développement économique chinois auquel nous assistons aujourd’hui. Je serai donc, ce soir, le simple porte-paroles de Susbielle, dont je recommande vivement trois ouvrages consacrés à la Chine ou aux rapports entre la Chine et les autres puissances mondiales : celui que je viens de citer puis Chine-USA : la guerre programmée et La morsure du dragon.

 

La première chose qu’il convient de dire en parlant de la Chine, c’est qu’elle possède une histoire très longue, qui s’étend sur une période entre trois et cinq millénaires. La mémoire chinoise est donc très profonde, bien plus profonde que celle de l’Occident, qui a trop souvent érigé l’oubli et l’amnésie historique au rang de vertus. Ma tâche n’est donc pas aisée et il va falloir me montrer très succinct.

 

« La Chine, c’est quoi ? »

 

Première question : la Chine, c’est quoi ?

C’est un monde en soi, bien balisé, parfois volontairement hermétisé par rapport à son environnement. Ce monde souvent clos, qui pratique l’ouverture seulement quand ses intérêts immédiats le postulent, est doté de quelques valeurs bien spécifiques, mises en exergue par une historienne des religions, Karen Armstrong, dont l’ouvrage The Great Transformation s’est inspiré de la méthode du philosophe allemand Karl Jaspers (1). Ce dernier avait forgé le concept de « période axiale » de l’histoire (Achsenzeit der Geschichte). Toute « période axiale » de l’histoire est une période, selon Karl Jaspers et Karen Armstrong, où émergent les valeurs structurantes et impassables d’une civilisation, celles qui lui donnent ses caractéristiques principales. Pour la Chine, selon Karen Armstrong, ces principales caractéristiques sont :

-          le culte des ancêtres, donc de la continuité, chaque Chinois se sentant dépositaire d’un héritage qu’il doit conserver ou enrichir, sous peine de perdre la face devant ses ascendants, qui le jugent depuis un au-delà ;

-          la centralité de la Chine dans le monde (2) ;

-          une culture essentiellement paysanne, où les sciences et les technologies ne jouent qu’un rôle secondaire ;

-          l’absence de toute vision linéaire de l’histoire : tout recommence ou recommencera un jour pour répéter une fois de plus ce qu’il y a toujours eu auparavant ; la Chine ne connaît donc pas de ruptures brutales, de césures irréversibles dans le temps, en dépit des apparences, des radicalités révolutionnaires comme la révolte de Tai Ping, le mouvement des Boxers, la révolution moderniste de Sun Ya Tsen, la prise du pouvoir par les communistes de Mao ou la révolution culturelle des années 60, suivie par la rupture tout aussi radicale, bien que plus douce, de Deng Xiaoping face à l’établissement maoïste.

 

Toujours pour répondre à notre question initiale, « La Chine, c’est quoi ? », passons maintenant aux caractéristiques géopolitiques de la Chine en tant qu’espace géographique sur la planète Terre. Pour le général autrichien Jordis von Lohausen, la Chine, c’est :

Sur le plan géographique :

-          la masse géographique la plus compacte d’Asie orientale ;

-          la plaque tournante entre a) le Japon et l’Inde ; b) entre la Russie et l’Australie ; c) entre le désert de Mongolie et l’archipel malais ;

Sur le plan stratégique, elle est une forteresse naturelle entre :

-          la forêt vierge au sud ;

-          les glaciers du Tibet ;

-          les déserts du nord et de l’ouest ;

-          l’océan à l’est ;

Cette situation particulière dans l’espace est-asiatique explique pourquoi la Chine demeure inchangée dans le fond, en dépit des transformations superficielles de nature idéologique. Elle a en permanence à faire face aux défis que lance cet espace naturel.

 

Sur le plan politique, la Chine est (ou était) :

-          la principale puissance représentant la race jaune dans le monde ;

-          la puissance prépondérante des peuples de couleur qui défiaient l’ordre mondial blanc, au temps de Mao (et aujourd’hui, sous d’autres oripeaux idéologiques, en Afrique noire) ;

-          la puissance principale du tiers-monde (aujourd’hui la notion de « tiers-monde » n’a plus la même signification que dans les années 60 ou 70 du 20ème siècle) ;

-          la puissance sur le territoire de laquelle se déroulait la « révolution villageoise » (au nom de l’idée de « civilisation paysanne » née à la période axiale de l’histoire chinoise).

Aujourd’hui, la Chine ne revêt plus entièrement cet aspect de puissance principale des races non blanches ou du tiers-monde. Elle représente un capitalisme dirigé (différent du capitalisme du libre marché tel qu’on le connaît dans l’américanosphère occidentale), expurgé de toutes velléités d’interpréter ou de déformer le monde tel qu’il est par le biais d’une idéologie trop rigide ou trop caricaturale, que cette idéologie soit le marxisme à la Mao ou l’idéologie américaine et cartérienne des « droits de l’homme ». L’exagération maoïste en matière de slogans idéologiques a été corrigée par le pragmatisme confucéen de Deng Xiaoping : la Chine ne vise plus à transformer les structures traditionnelles des peuples, en plaquant sur des réalités non chinoises des concepts maoïstes ; elle ne cherche pas non plus à imiter les Américains qui veulent imposer leur propre vision de la « bonne gouvernance » à tous les peuples du monde. La Chine laisse à chacun le soin de gérer son pays à sa guise : elle se borne à entretenir des rapports diplomatiques de type classique et à avoir de bonnes relations commerciales avec un maximum de pays dans le monde. La Chine est désormais sevrée des messianismes d’inspiration communiste ou de ce que l’on appelait dans les années 60 et 70 du 20ème siècle, des messianismes du tiers monde.

 

Pour définir la Chine et répondre encore une fois à notre question initiale, mettons en exergue la différence majeure entre l’Europe et la Chine :

-          L’Europe est une entité centrifuge, sans unité durable, tiraillée entre une multitudes de pôles régionaux ; elle est devenue un espace civilisationnel privé de valeurs « orientantes » communes ;

-          La Chine est une unité, protégée par la nature : face à la Russie, des montagnes et des déserts la protègent ; face au Sud indien (également centrifuge), des montagnes et une zone de forêts vierges la protègent ; face à l’Amérique, c’est l’immensité de l’Océan Pacifique qui la protège, tout autant que sa propre profondeur territoriale, une profondeur territoriale que ne possédait pas le Japon lors de sa confrontation aux Etats-Unis pendant la seconde guerre mondiale.

 

Une succession de grandes dynasties

 

Dans ce pays protégé par la nature, une histoire particulière va se dérouler.

L’histoire de la Chine est surtout l’histoire de grandes dynasties, comme le souligne très opportunément Jean-François Susbielle.

Au début de l’histoire chinoise, nous n’avons pas d’unité mais une juxtaposition conflictuelle de « royaumes combattants » qui s’affrontent dans des guerres interminables (comme en Europe !). Cette période s’étend de 500 à 221 avant J.C. C’est à cette époque, comme en Grèce ou en Judée, qu’émerge la fameuse « période axiale » de l’histoire chinoise, selon Karen Armstrong. C’est aussi l’époque où trois grands penseurs chinois écrivent leurs œuvres :

-          Confucius (Kong Fuzi) qui dit que la vertu doit régner et qu’un Etat fonctionne de manière optimale s’il favorise une véritable méritocratie (il n’y a dès lors pas de système de classes dans l’idéal de Confucius) ;

-          Lao Tzi (Lao Tsö), fondateurs des filons taoïstes et auteur du Tao Te King ;

-          enfin, Sun Tzu, auteur de l’Art de la guerre, préconisant la ruse.

On oublie généralement Han Fei, auteur d’un manuel pour le Prince. Les principales valeurs de la société chinoise émergent à cette époque, avant l’apparition de l’empire proprement dit, en réaction au chaos généré par les hostilités permanentes entre « royaumes combattants ». Ce chaos et cette désunion seront dès lors les modèles négatifs à ne pas imiter, à proscrire. Notons, avec Karl Jaspers et Karen Armstrong, que la période axiale de l’histoire chinoise est contemporaine de Socrate et de Platon en Grèce et de Bouddha en Inde. La République de Platon et les conseils de Han Fei au Prince méritent une lecture parallèle.

 

Après la période anarchique des « royaumes combattants », le premier empereur surgit sur la scène chinoise : Qin Shi Huang Di (-221 à -207). Il donne son nom à la Chine : « Qin » se prononce « Tchine ». Son œuvre est d’avoir uni les sept royaumes combattants, d’avoir commencé les travaux de la Grande Muraille, d’avoir introduit l’écriture et un système de poids et de mesures, d’avoir énoncé les premières lois. Il s’oppose aux disciples de Confucius, dont il fait brûler les textes, exactement comme le feront les adeptes de Mao lors de la « révolution culturelle » dans les années 60 du 20ème siècle.

 

De -207 à 220 après J.C., vient la période Han. Ce seront 400 années d’expansion, où la Chine atteindra les dimensions qu’elle a actuellement, excepté le Tibet et le Sinkiang. Après cette période de développement, viennent quatre siècles d’anarchie, sans plus aucune unité. C’est le retour des « royaumes combattants ».

 

Carte_Chine_Tang.gifLa restauration vient avec la dynastie Tang, de 618 à 907, véritablement âge d’or de la civilisation chinoise. Les empereurs sont alors les alliés des Ouïghours contre les autres peuples turcs. L’influence chinoise s’étend jusqu’en Ouzbékistan. Elle s’exerce aussi sur la Corée, le Vietnam et le Cambodge. De 907 à 960 survient une nouvelle période de chaos, mais qui ne sera que de courte durée.

 

En 960, par un coup d’Etat, les Song arrivent au pouvoir, rétablissent l’unité et inaugurent une ère de prospérité généralisée, où les sciences chinoises inventent la machine à imprimer, la boussole et certains navires de haute mer. La Chine a bien failli devenir une puissance maritime dès cette époque. En 1279, cette ère de prospérité prend fin par l’invasion mongole.

 

china-yuan-large.pngDe 1279 à 1368, c’est la domination d’une dynastie mongole, les Yuan. Pékin devient la capitale de l’empire sous Qubilaï Khan. Entre 1274 et 1281, les Mongols avaient tenté d’inclure le Japon dans leur orbe mais les vents du Pacifique, les kamikazes, s’étaient levés et avaient détruit la flotte mongole en mer, évitant au Japon une conquête violente et préservant, du coup, sa spécificité en Asie orientale. Les Mongols douteront dorénavant de leur propre invincibilité et les Japonais acquerront un sentiment d’invulnérabilité qu’ils garderont jusqu’en 1945.

 

Après la dynastie mongole des Yuan, vient la dynastie des Ming (1368-1644). Elle acquiert le pouvoir suite à une révolte paysanne contre les Mongols, donc à une insurrection de la substance han autochtone face à un pouvoir étranger. Ming, chef de cette insurrection générale des populations rurales chinoises, devient empereur et règne sur environ 100 millions de sujets. Comme il n’y a plus de danger qui vient du Nord, la Chine des Ming se tourne alors vers la mer : Yong Ze envoie l’Amiral Zheng He sur les mers en 1405. Ce Zheng He est un géant de deux mètres de haut ; il est musulman et eunuque. Les arsenaux de l’Empire lui fournissent des navires de 150 mètres de long (ceux de Colomb n’en avaient que 30). L’objectif est-il la conquête de terres ? Non. C’est une entreprise de « relations publiques » : Zheng He doit présenter la Chine et ses richesses dans le vaste monde. Cette orientation maritime sera de courte durée : dès 1433, l’Empereur décide d’interdire la construction de navires. Car les Mongols reviennent à la charge : toutes les ressources de l’Empire doivent dès lors être mobilisées pour conjurer ce danger venu du nord.

 

Carte_Chine_Ming.gifLes fonds alloués aux immenses navires de Zheng He sont consacrés à la Grande Muraille, à l’agriculture, aux champs de riz, à l’irrigation, aux canaux. La Chine n’aura plus de grands projets mondiaux : elle revient à ses valeurs paysannes, nées lors de la période axiale de son histoire. Durant l’ère Ming, des contacts auront lieu entre Européens et Chinois par l’intermédiaire de l’Ordre des Jésuites. Matteo Ricci, jésuite italien, amorce une politique de conversion, faisant, dès ce moment-là, du christianisme un facteur qui compte en Chine. C’est aussi l’époque où notre compatriote, le Père Verbist, deviendra le principal astronome de la cour chinoise. Pour convertir la Chine, il aurait fallu forger un syncrétisme. Le Pape a refusé. L’Empereur n’a pas compris ce refus pontifical. Le christianisme sera interdit en 1724.

 

Le siècle de la honte

 

Après les Ming, ce sera la dynastie Qing qui règnera sur la Chine, de 1644 à 1911. Les Qing sont Mandchous. Ils font fermer les ports pour mettre la Chine à l’abri des pirates du Pacifique. La Chine se ferme en même temps à tout commerce extérieur. En 1800, elle compte déjà 350 millions d’habitants. Elle connaît pour la première fois dans son histoire le problème de la surpopulation, entrainant des tensions sociales et infléchissant le pays dans son ensemble vers une phase de déclin. Le 19ème siècle sera ainsi, pour les Chinois, le « siècle de la honte ». En 1793, Georges III d’Angleterre veut inaugurer des relations avec l’Empire chinois : il envoie un certain Lord MacCartney pour négocier à Pékin. Mais cet ombrageux Ecossais refuse de se prosterner devant l’Empereur, qui, ensuite, refuse d’entretenir des relations avec l’Angleterre. Les Anglais vont venger l’affront fait à la dignité de leur ambassadeur en faisant entrer de l’opium en contrebande en Chine, où la consommation de cette drogue était interdite. L’objectif était de briser la volonté chinoise d’autarcie en pourrissant la population, en lui ôtant tout ressort. Les Anglais vendent tant d’opium qu’une majorité de Chinois sombre dans la toxicomanie. Petit à petit la balance commerciale penche en faveur de la Grande-Bretagne. En 1839, les Chinois réagissent : le haut fonctionnaire impérial Lin Zexu fait détruire les stocks d’opium qui se trouvent à Canton et fait arrêter des négociants étrangers : les Anglais déclarent la guerre. Ce sera la première guerre de l’opium. Elle durera trois ans et se soldera par une victoire britannique. En 1842, Hong Kong est cédé pour 99 ans à la Couronne britannique. Celle-ci se ménage également des facilités dans un grand port comme Shanghai (où le quartier européen jouit d’extra-territorialité). En 1858, Français et Anglais mènent la deuxième guerre de l’opium, forçant, après leur victoire, la Chine à libéraliser son commerce et à s’ouvrir aux missions catholiques françaises (nous ne sommes pas encore à l’époque de la IIIème République maçonnique). Les soldats des deux puissances européennes pillent le palais d’été de Pékin et détruisent la bibliothèque impériale. 

 

Taiping2.png

Pour affaiblir encore le pouvoir impérial, Français et Anglais favorisent le soulèvement des Tai Ping. De 1853 à 1864, à l’appel d’un leader converti à une sorte de christianisme protestant, de larges strates de la population se soulèvent contre les empereurs mandchous, entendent abolir toutes les formes d’esclavage et toutes les modes jugées désuètes (comme l’atrophie des pieds des filles et les longs cheveux pour les hommes) et introduire comme idéologie d’Etat un fondamentalisme chrétien et protestant. Cette guerre civile fera vingt millions de morts, soit 5% de la population. En fin de compte, les Français et les Anglais volent au secours de l’Empereur, dès le moment où le pouvoir éventuel des révolutionnaires s’avère anticipativement plus dangereux que celui, écorné, de la dynastie mandchoue. Les Occidentaux abandonnent leur golem. Plus tard, les Boxers reprennent le relais : ils ne sont plus chrétiens, comme les adeptes de Tai Ping, ils s’adonnent aux arts martiaux chinois et cultivent une xénophobie sourcilleuse, y compris contre les importations utilitaires des Européens, comme le chemin de fer et le télégraphe. La Chine ne connaît pas une « Ere Meiji » comme le Japon à partir de 1868. En 1911, la Chine devient une république, mais l’avènement de cette république sera suivi de trente-sept années de chaos, de guerres civiles, sur fond d’occupation japonaise. Les nationalistes s’opposeront aux communistes, mais tous s’entendront pour se débarrasser du dernier représentant de la dynastie mandchoue, Pu Yi.

 

 

 

 

 

De la prise du pouvoir par les communistes à l’alliance américaine

 

En 1949, la Chine devient communiste sous la houlette de Mao Tse Toung, qui met un terme aux luttes entre factions, en exilant les derniers partisans de Tchang Kai Tchek sur l’île de Formose, qui deviendra Taiwan. En 1958, les troupes de Mao envahissent définitivement le Tibet dont la conquête progressive avait commencé quelques années plus tôt. 1958 est aussi l’année de la rupture avec l’Union Soviétique. Le pouvoir de Mao étant battu en brèche par d’autres forces à l’intérieur du PC chinois, le « Grand Timonier » déclenche une « révolution culturelle » en 1966, qui s’inspire partiellement de la révolte de Tai Ping (les maoïstes disent « oui » à ses tentatives de modernisation mais « non » à son christianisme) et de la révolte des Boxers (les maoïstes refusent l’anti-modernisme technophobe des Boxers mais acceptent leur refus de toute influence étrangère). En 1968 et 1969, les armées chinoises s’opposent aux armées soviétiques en Mandchourie, le long du fleuve Amour. Les Chinois ont le dessous et songent à changer d’alliance : les Soviétiques sont accusés systématiquement de « révisionnisme », de propager un marxisme édulcoré, dépouillé de sa vigueur révolutionnaire. En 1972, la Chine renoue avec les Etats-Unis et devient l’alliée de revers de Washington contre l’URSS de Brejnev. Les règles de la géopolitique triomphent dès cette année-là des discours idéologiques.

 

Les problèmes actuels de la Chine sont :

1)     Le Tibet, qui fut, à certains moments de l’histoire, un grand empire qui comprenait également de vastes territoires han, dans l’est de la Chine proprement dite. Le Tibet possède donc une identité différente de la Chine et celle-ci recèle dans ses provinces orientales des éléments qui ne sont pas purement han.

2)     Le Sinkiang, ou « Turkestan chinois », où vivent les Ouïghours turcophones et musulmans, anciens alliés des empereurs Tang, aujourd’hui ennemis du pouvoir établi à Pékin (qui considère dès lors cette volteface ouïghour comme une trahison  à l’endroit de l’histoire chinoise).

Les problèmes du Tibet et du Sinkiang sont des problèmes réels, indubitablement, mais ils servent surtout, dans le contexte actuel, à miner la cohésion de la partie centrale de l’Eurasie. L’indice le plus patent de cette stratégie de fractionnement est la présence d’agitateurs fondamentalistes wahhabites au Sinkiang. Le conflit entre les Etats-Unis et les réseaux de Ben Laden est peut-être réel dans la péninsule arabique ou en Afghanistan mais complètement fictif ailleurs, quand il s’agit d’affaiblir la Russie, la Chine ou leurs alliés en Asie centrale. En Tchétchénie, au Daghestan et au Sinkiang, les réseaux wahhabites travaillent bel et bien pour la stratégie de balkanisation de l’Eurasie, voulue par Washington. C’est potentiellement le cas en Tatarie et en Bachkirie aussi.

 

La réforme de Deng Xiaoping : une perestroïka sans glasnost

 

Le sinologue et géopolitologue français Jean-François Susbielle analyse le rôle de Deng Xiaoping dans le renouveau chinois, après la parenthèse maoïste. Dès 1977, Deng Xiaoping tolère que s’expriment des voix critiques et abolit le culte de la personnalité qui avait quelque peu ridiculisé le maoïsme. Deng Xiaoping se veut surtout un pragmatique. Jugeons-en par ces quelques citations que Susbielle met en exergue :

« Il n’est pas important que le chat soit blanc ou gris : il doit capturer les souris ». Cette citation montre que Deng Xiaoping ne juge pas l’idéologie importante : seules comptent la pratique et l’efficacité.

« La pratique est le seul critère de vérité ».

« Pas de débat : c’est là mon invention ».

« Il faut traverser la rivière en tâtant chaque pierre du pied ».

Sun Tzu : « Dissimuler ses intentions et ses forces ».

 

L’entrée de la Chine dans l’ère postcommuniste est différente que celle qu’avait préconisé Gorbatchev en URSS, rappelle fort opportunément Susbielle. Celui-ci avait annoncé la « glasnost » (la transparence) et la « perestroïka » (la restructuration). La Chine, elle, a opté pour la « perestroïka » sans la « glasnost ». Par conséquent, elle a échappé à la crise russe qui a sévi pendant dix ans avant que Poutine ne prenne les choses en mains. Les Chinois semblent meilleurs disciples de Carl Schmitt que les Russes : ils évitent toute culture stérile du débat, de la discussion interminable (Donoso Cortès), et maintiennent les arcanes de leur politique à l’abri des regards (le secret selon Schmitt). L’objectif de Deng Xiaoping est de revenir à la situation optimale de la Chine à la fin du 18ème siècle. A cette époque, la Chine, l’Inde et le Japon comptaient à trois pour 50% de l’économie mondiale. La Chine, en outre, représentait 35% de la population mondiale et 28% de la production.

 

Deng-Xiaoping.jpgAtteindre l’objectif que s’est fixé Deng Xiaoping passe par une restructuration des relations entre peuples de la masse continentale eurasienne. L’instrument de cette restructuration est le « Groupe de Shanghai », d’une part, et le BRIC (Brésil, Russie, Inde, Chine), d’autre part. Face à ces relations inter-eurasiennes ou eurasiennes/latino-américaines, l’américanosphère table sur une instrumentalisation militante et offensive de l’idéologie des droits de l’homme. Pour l’idéologie occidentale, qui s’estime affranchie de toute croyance de nature religieuse, les droits de l’homme sont des principes intangibles au même titre que ceux des théologiens fondamentalistes chrétiens ou musulmans. En réalité, derrière cette nouvelle religion occidentale, rigide parce que refusant toute interprétation différente ou toute adaptation pragmatique, se profile un cynisme mu par des intérêts économiques et géopolitiques. Le Président américain Jimmy Carter avait recréé cette idéologie de toutes pièces pour miner la cohésion de l’URSS ou pour subvertir tous les Etats hostiles aux Etats-Unis et tous les régimes insuffisant dociles. La Chine a toujours bien perçu cette nouvelle idéologie occidentale comme un instrument d’immixtion permanente dans les affaires des autres pays. Elle a riposté en estimant que chaque aire dominée par un hégémon particulier (ou chaque espace civilisationnel) devait pouvoir interpréter les droits de l’homme à sa manière, selon ses propres critères et donc, in fine, selon des critères nés lors de la « période axiale » de l’histoire spécifique de cette aire civilisationnelle. La Chine a opté pour le polycentrisme des valeurs et pour la pluralité des interprétations des droits de l’homme. Ceux-ci ne peuvent servir à subvertir les fondements des civilisations autres que l’Occident.

 

Dans l’Océan Pacifique, la Chine nouvelle du capitalisme dirigé cherche à s’emparer de Formose (Taiwan) et des îles de la Mer de Chine méridionale : elle risque là une confrontation directe avec l’Amérique. Face à l’Inde, autre géant économique potentiel au marché intérieur immense, la Chine garde un contentieux dans l’Himalaya. En 1962, une guerre sino-indienne avait tourné à l’avantage des Chinois, maîtres du Tibet, qui occupent depuis lors une partie du territoire indien, située très haut dans la chaine de l’Himalaya. L’Inde, quand elle était entièrement dominée par le Parti du Congrès, était un allié tacite de l’URSS, qui lui fournissait des armes contre le Pakistan musulman allié des Etats-Unis et contre la Chine, hostile au « révisionnisme » soviétique. L’Inde reçoit toujours des armes russes mais elle commence depuis peu à en recevoir des Etats-Unis. Le Pakistan, ennemi héréditaire de l’Inde, reste un allié de la Chine même si le fondamentalisme islamiste menace les intérêts chinois dans le Sinkiang. En Afrique, la Chine risque aussi une confrontation directe avec les Etats-Unis, car les deux puissances briguent les richesses minérales du continent noir et les richesses halieutiques de ses mers (dont l’Europe a également besoin). Avec la Russie, tout va bien pour le moment mais il y a un risque potentiel : la conquête progressive de l’espace sibérien par le trop-plein démographique chinois. Certes, la Chine et la Russie subissent un déclin démographique ; la Chine n’a jamais eu l’intention de conquérir la Sibérie mais la donne peut changer sous la pression des faits.

 

Sur le plan économique, l’accroissement démesuré de l’industrie chinoise crée une pollution de grande ampleur, contraire à l’éthique chinoise traditionnelle de gestion optimale et mesurée de l’environnement. Actuellement la Chine pollue plus que les Etats-Unis. Pour l’Europe, le danger chinois vient de la délocalisation et du dumping qui en découle. Mais là la balle est dans notre camp : c’est à nous à prendre des mesures contre les délocalisations (en Chine et ailleurs), contre ceux qui les pratiquent au détriment de nos propres tissus sociaux.

 

Conclusion : l’histoire de la Chine démontre la récurrence potentielle de tous les problèmes qui peuvent affecter une civilisation. L’histoire de la Chine est centripète, tandis que celle de l’Europe est centrifuge. Malgré ses faiblesses passagères, comme celle qui l’a marquée profondément pendant le « siècle de la honte », la Chine a tous les réflexes mentaux pour retomber sur ses pattes. L’Europe est dépourvue d’une telle force. L’anarchie et le chaos règnent dans les esprits en Europe. L’Europe attend toujours son Qin Shi Huang Di. Il aurait pu être Charles-Quint mais ce ne fut pas le cas car l’Empereur né en 1500 dans les murs de cette bonne ville de Gand a été torpillé par son rival François I, par les émeutiers protestants et les manigances du pape Clément. En attendant, malgré l’illusion que procure une UE sans projet, l’Europe n’a toujours pas dépassé le stade des guerres entre « duchés combattants ».

 

Robert STEUCKERS.

 

Notes :

(1)    Karl Jaspers patronnera également la thèse d’Armin Mohler sur la « révolution conservatrice » allemande entre 1918 et 1932. Armin Mohler parle, tout comme le promoteur de sa thèse de doctorat, de « période axiale » de l’histoire, où les valeurs dominantes, en l’occurrence celles de la révolution française et des Lumières qui l’ont précédée, sont battues en brèche par de nouvelles valeurs, qui appelle de nouvelles formes politiques.

(2)    La centralité de la Chine dans le monde implique que les Chinois estiment ne pas avoir d’ancêtres dans d’autres parties du monde. Sur le plan de la raciologie, cette prise de position actuelle, découlant tout naturellement de l’idée de la centralité de la Chine née à la période axiale de l’histoire chinoise, implique le polygénisme. Les Chinois n’acceptent donc pas la théorie monogéniste de l’émergence de l’homme en Afrique, au départ de « Lucy ».

 

Bibliographie :

-          Jean-François SUSBIELLE, Les royaumes combattants – Vers une nouvelle guerre mondiale, First Editions, Paris, 2008.

-          Jordis von LOHAUSEN, Mut zur macht – Denken in Kontinenten, Vowinckel, Berg am See, 1979.

-          Karen ARMSTRONG, The Great Transformation – The World in the Time of Buddha, Socrates, Confucius and Jeremiah, Atlantic Books, London, 2006.

-          SPIEGEL SPECIAL, China – Die unberenchenbare Supermacht, Nr. 3/2008.

-          COURRIER INTERNATIONAL, n°995 (26/11 au 02/12 2009).

dimanche, 02 janvier 2011

Russie/Inde: énergie nucléaire et clairvoyance géopolitique

Pietro FIOCCHI :

Russie/Inde : énergie nucléaire et clairvoyance géopolitique

 

La Russie est favorable à un siège indien au Conseil de Sécurité de l’ONU

 

Medvedev_in_India.jpgLe chef du Kremlin, Dimitri Medvedev s’est rendu récemment à Nouvelle Delhi pour une visite de quelques jours durant lesquels, disent les sources gouvernementales indiennes, les partenaires russes et indiens signeront de nombreux contrats, pour une valeur totale de 30 milliards de dollars, surtout dans les domaines de la défense et de l’énergie nucléaire.

 

La Russie et l’Inde ont conclu divers accords relatifs à la construction de deux réacteurs nucléaires de technologie russe, qui seront installés dans l’Etat de Tamil Nadu. Le porte-paroles du ministère indien des affaires étrangères, Vishnu Prakash, a déclaré « qu’il ne s’agissait pas d’un simple accord commercial, car les parties contractantes cherchent à développer des projets liés à la recherche, au développement et à la production commune ». Le ministre des affaires étrangères indien, S. M. Krishna, a indiqué que, parmi les thèmes inscrits à l’ordre du jour, il y a également la lutte contre le terrorisme et la situation dans la région actuellement en ébullition, à cheval sur l’Afghanistan et le Pakistan.

 

Sur le plan plus strictement politique, une nouveauté émerge, qui était déjà dans l’air : la Russie, désormais, est entièrement favorable à un siège indien permanent au Conseil de Sécurité de l’ONU. Medvedev, à la fin d’une cérémonie tenue à l’occasion de la signature de onze accords et memoranda bilatéraux, a déclaré que « l’Inde mérite pleinement d’être candidate à un siège permanent au Conseil de sécurité de l’ONU, dès que l’on aura pris la décision de réformer cet organisme ».

 

La visite de Medvedev en Inde coïncide avec le dixième anniversaire de la Déclaration de Delhi, qui avait consacré le partenariat stratégique entre les deux pays. Une période pendant laquelle « les liens entre les deux Etats ont permis d’atteindre de nouveaux stades, y compris sur le plan des principes », a dit Aleksandr Kadakin, ambassadeur russe en Inde. Les liens ont sextuplé en l’espace d’une décennie et le niveau désormais atteint par les échanges économico-commerciaux est notable. Cette fois-ci, cependant, le bond en avant ne doit être attribué aux échanges de matières premières mais à toutes les innovations qu’autorise une coopération accrue.

 

Les exportations russes consistent principalement en armes de haute technologie, à des infrastructures destinées au lancement de satellites et à des équipements pour centrales atomiques. Les projets de haute technologie, comme celui des avions de chasse de la cinquième génération ou celui du système de navigation satellitaire Glonass, sont le fruit de recherches conjointes entre Russes et Indiens. A cela s’ajoute un accroissement de la coopération entre les deux pays en matière de recherche spatiale, notamment de projets lunaires, de missions spatiales habitées et d’un satellite baptisé « Youth Sat ». Tous ces projets ne sont que les fleurons de la coopération industrielle entre Nouvelle Delhi et Moscou.

 

Pietro FIOCCHI.

( p.fiocchi@rinascita.eu ; article tiré de « Rinascita », Rome, 22 décembre 2010 ; http://www.rinascita.eu/ ). 

Peter Scholl-Latour über Demokratie und Willkür

 

Peter Scholl-Latour über Demokratie und Willkür

vendredi, 31 décembre 2010

Türkei und China auf Schmusekurs

Türkei und China auf Schmusekurs

MIchael WIESBERG

Ex: http://www.jungefreiheit.de/

China-Tuerkei.jpgDie Türkei war jahrzehntelange Hätschelkind der US-Außenpolitik, das die Vereinigten Staaten zu gerne auch als EU-Mitgliedsstaat gesehen hätten. Jetzt wird die Entwicklung des kleinasiatischen Staates jenseits des Ozeans mit steigendem Mißmut betrachtet.

Ein Grund dafür ist die chinesisch-türkische Annäherung, die Michael Auslin, Leiter für Japanstudien am American Enterprise Institute, in einem Artikel für die  einflußreiche, als konservativ und wirtschaftsliberal geltende Tagezeitung Wall Street Journal unter dem bezeichnenden Titel analysiert: „Kommt eine türkisch-chinesische Achse? Ankara wendet sich von Israel ab und schmeichelt sich bei China ein“.

Ausgangspunkt der Betrachtungen Auslins sind die Folgen der seit einiger Zeit gestörten israelisch-türkischen Beziehungen und die Hinwendung der Türkei zu „aufstrebenden, selbstbewußten Regimen“, darunter eben auch China, das nicht nur bemüht sei, im entlegenen Afrika eine größere Rolle zu spielen, sondern auch in anderen geopolitisch wichtigen Staaten.

Die türkisch-israelische Kooperation

Auslin gibt dann einen Überblick über die Entwicklung der israelisch-türkischen Beziehungen, angefangen bei der Anerkennung des Staates Israel durch die Türkei im Jahre 1948, bis hin zur Kooperation der beiden Staaten in Sicherheitsfragen, zum Beispiel gegenüber Staaten wie dem Iran und Syrien, in den Achtziger und Neunziger Jahren; dazu gehörte auch die Unterstützung Israels bei der Modernisierung türkischer Waffensysteme. Israel konnte im Gegenzug zum Beispiel türkische Luftwaffenstützpunkte nutzen.

Wendepunkt Gaza-Hilfsflotte

All das ist mittlerweile Geschichte: Zwar habe der türkische Premierminister Recep Tayyip Erdoğan anfänglich mit Israel kooperiert, so Auslin, dann aber begann er sich Staaten wie Syrien oder dem Iran zuzuwenden. Als Argumente für die sich abkühlenden Beziehungen zu Israel gab Erdoğan dessen Vorgehen im Gazastreifen im Jahre 2008 und vor allem die Vorgänge um die „Gaza-Hilfsflotte“ Mitte des Jahres an, bei der acht türkische Staatsbürger durch israelische Einwirkung ums Leben kamen. Seitdem liegen die Beziehungen zwischen der Türkei und Israel auf Eis.

Konsequenzen für die NATO

Erdoğans Annäherung an eine weitere „autoritäre Macht“, gemeint ist China, tangiere nun allerdings auch die Interessen der USA, konstatiert Auslin, und zwar spätestens seit der Einladung Ankaras an die chinesische Luftwaffe, am Luftwaffenstützpunkt Konya gemeinsame Manöver abzuhalten. Damit erwüchsen ernste Zweifel daran, ob es bei den engen Beziehungen der Türkei zu „liberalen Nationen“ wie den USA und Israel bleibe.

In diesem Zusammenhang spiele nicht nur eine Rolle, daß die „strategische Partnerschaft“, die Erdoğan und Chinas Staatspräsident Hu Jintao vereinbart hätten, eine Steigerung des Handelsvolumens von derzeit 17 Milliarden Dollar auf 100 Milliarden Dollar im Jahre 2020 vorsehe.

Viel schwerwiegender seien die Konsequenzen für die NATO. Wie weit nämlich könnte die chinesisch-türkische Zusammenarbeit gehen? Auslin nennt hier ein konkretes Beispiel: Die Türkei gehört unter anderem zu einem Konsortium, das am Bau des ersten Tarnkappen-Mehrzweckkampfflugzeuges Lockheed Martin F-35 Lightning II beteiligt ist. Wird die Türkei China einladen, dieses Flugzeug zu inspizieren oder gar Probe zu fliegen? Welche anderen Waffengeschäfte könnte die Türkei mit China vereinbaren?

Türkei droht Isolation

Es sei jedenfalls eine Notwendigkeit, das westliche Analytiker damit begönnen, sich nicht nur mit den Auswirkungen der chinesisch-türkischen Annäherung, sondern auch mit dem wachsenden Netzwerk antiwestlicher Staaten zu beschäftigen. Mit Blick auf Erdoğan konstatiert Auslin, falls der türkische Premier weiter Alliierte bei den „autoritären Staaten“ suche, werde er die Türkei von der liberalen westlichen Welt isolieren.

Das Gewicht der Türkei vergrößern

Auslins Artikel ist in mancherlei Hinsicht instruktiv: So spiegelt er zum Beispiel die Irritation der USA im Hinblick auf das Ausgreifen Chinas in Regionen, die die USA als ihre angestammte Einflußsphäre betrachten. Erdoğan sieht sich in der angenehmen Lage, aufgrund der Heraufkunft des neuen „global players“ China mit dem geopolitischen Pfund der Türkei zu wuchern. Der Konsens der „westlichen Wertegemeinschaft“ interessiert ihn dabei herzlich wenig; sein Ziel besteht ganz offensichtlich darin, das internationale Gewicht der Türkei weiter zu erhöhen.

Mit der Türkei bekommen die USA ganz konkret vorgeführt, daß ihre Position als „einzige Supermacht“ Geschichte ist. Ab jetzt steht mit China ein ernsthafter Herausforderer im Ring, der jede Schwachstelle, die die westliche Führungsmacht bietet, nutzen wird. Zu diesen Schwachstellen gehört, das zeigt sich mehr und mehr, die einseitige Option für Israel.

mercredi, 29 décembre 2010

Russie, Chine, Inde: une voie trilatérale vers un monde multipolaire

Russie, Inde, Chine : une voie trilatérale vers un monde multipolaire

Ex: http://fortune.fdesouche.com/

Une semaine après que le président américain Barak Obama eut annoncé son soutien à l’Inde qui revendique un siège permanent au Conseil de sécurité de l’ONU, les ministres des Affaires étrangères de la Russie, de l’Inde et de la Chine (RIC) se sont réunis à Wuhan en Chine, les 14 et 15 novembre.

Les réformes de l’ONU faisaient partie des questions internationales les plus pressantes abordées par S.M. Krishna (Inde), Yang Jiechi (Chine) et Sergei Lavrov (Russie). Mais New Delhi est resté sur sa faim : la rencontre s’est clôturée par un communiqué conjoint en faveur des réformes mais n’allant pas au-delà d’une « appréciation positive du rôle joué par l’Inde dans les affaires internationales » .

La Russie a fortement appuyé la candidature indienne à un siège permanent, mais la Chine a refusé de clarifier sa position, mettant ainsi en évidence une compétition d’ambitions et de projets entre les deux membres pourvus du droit de véto au Conseil de sécurité – Chine et Russie – et le pays qui aspire à les rejoindre à la grande table.

Ces dissonances sur les questions décisives versent de l’eau au moulin des sceptiques qui considèrent que la RIC n’est qu’un club de parlote de plus. Cette conclusion est pourtant erronée. Ce qui compte ici, c’est l’importance croissante de la consultation au sein du trio des puissances émergentes qui détiennent les clés de l’ordre changeant du XXIe siècle.

 

De façon significative, la dixième rencontre trilatérale à Wuhan s’est tenue une semaine après que l’Association des nations de l’Asie du Sud-Est (ANASE [ou ASEAN]) eut approuvé l’admission des États-Unis et de la Russie au sommet de l’Asie orientale. Au lendemain aussi d’une rencontre entre les dirigeants indiens et chinois à Hanoï, dans un contexte tendu.

Pour conclure, la triade a réitéré son appel à un ordre mondial multipolaire, tout en insistant, dans le même mouvement, qu’ « aucun pays tiers » n’était visé (un euphémisme pour les États-Unis).

L’Inde, la Russie et la Chine ont manifesté des inquiétudes communes à propos de l’Afghanistan, mais leur coopération sur ce point n’a pas avancé. La triade a résolu d’intensifier la coopération antiterroriste mais il semble que Pékin ait bloqué la proposition indienne d’inclure une référence à l’élimination des « refuges » pour les terroristes, allusion au Pakistan pour son rôle en Afghanistan.

Ces différences d’approche et de point de vue des trois puissances émergentes sont naturelles, et c’est exactement pour cela que l’idée de cette triade avait été proposée il y a plus de dix ans par le Premier ministre russe Evgueny Primakov, afin de contrebalancer l’hégémonie de Washington.

La triade encourage aussi l’approfondissement de la coopération dans des domaines divers : agriculture, santé, changements climatiques, catastrophes naturelles et problèmes économiques mondiaux, qui peuvent transformer la vie des populations. La proposition de relier les centres d’innovation des trois grandes économies (Bangalore et Skolkovo par exemple), noyau de la croissance mondiale, est l’une de ces idées qui mêle l’ambition d’une renaissance nationale partagée par les trois pays à leur désir collectif d’avoir plus de poids dans les questions internationales.

Trois, c’est peut-être un de trop, mais dans ce cas-ci, le trio n’a d’autre choix que de gérer ses divergences car chacun des trois pays a plus d’intérêts que de désavantages dans les progrès réalisés par les deux autres. Alors que l’idée d’un G2 est une chimère et tandis que la réforme du Conseil de sécurité de l’ONU reste une perspective à long terme, le RIC représente un microcosme d’une ère asiatique en gestation qui accentue la nécessité de renforcer la confiance entre les trois piliers d’un monde multipolaire.

La Russie d’Aujourd’hui

mardi, 28 décembre 2010

Peter Scholl-Latour : Krieg ohne Ende

 

Peter Scholl-Latour: Krieg ohne Ende

Una nuova geopolitica indiana?

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Una nuova geopolitica indiana?

Daniele GRASSI

Ex: http://www.eurasia-rivista.org/

Una delle maggiori novità sullo scenario geopolitico degli ultimi due decenni è certamente rappresentata dall’India.

Sebbene l’ascesa della Cina abbia come effetto quello di mettere in secondo piano ogni altra realtà, non si può affatto trascurare il percorso che ha portato New Delhi a proporsi come una delle maggiori economie globali in termini assoluti.

Certo, i numeri aiutano e non poco. L’India infatti, con i suoi 1.2 miliardi di abitanti costituisce il paese più popoloso al mondo e ciò fa sì che ogni suo passo getti una lunga ombra su gran parte del globo. Non bisogna dimenticare infatti, che il suo tasso di crescita economica annua, dal 1997 ad oggi, è di circa il 7% ed è secondo solo a quello cinese.

Tuttavia, l’India resta il paese col maggior numero di gente che vive sotto la soglia di povertà, vale a dire, circa il 25% della sua popolazione.

Ci vorranno dunque, tassi di crescita molto elevati per almeno altri due decenni perché la condizione della popolazione più disagiata subisca dei miglioramenti veri e propri.

 

 

 

La politica estera indiana dopo l’indipendenza

 

Il percorso di crescita indiano è cominciato ad inizio anni Novanta, quando si è proceduto alla liberalizzazione di molti settori economici ed il Paese si è aperto all’economia di mercato.

La trasformazione economica ha proceduto di pari passo con un radicale cambiamento riguardante la politica estera.

 

L’idea di Nehru era quella di dare vita ad un grande paese che perseguisse una politica di pacifica coesistenza con gli altri attori regionali e globali.

Il suo profondo idealismo si scontrò ben presto con una realtà che non lasciava spazio a velleità neutralistiche e richiedeva prese di posizione nette.

Le tensioni col Pakistan circa il controllo del territorio del principato kashmiro sfociarono in diversi conflitti armati, il primo dei quali nel primo anno dell’indipendenza dei due Paesi, il 1947.

Ciò però non distolse Nehru dal suo intento di percorrere una strada di non allineamento e di guidare gli altri Paesi che volessero intraprendere il medesimo percorso.

Nei primi anni della sua esistenza, New Delhi tentò di sganciarsi dal confronto bipolare alleandosi con Pechino, ma questo tentativo sfociò in una delle maggiori umiliazioni della storia indiana: la sonora sconfitta subita proprio da parte della Cina nel 1962.

 

Il risultato fu un sostanziale isolamento a cui l’India tentò di porre rimedio avvicinandosi progressivamente alle posizioni del blocco sovietico.

Questa politica la danneggiò tanto in termini economici, quanto a livello geopolitico. Il Pakistan infatti, approfittò di questa situazione per proporsi come maggiore alleato degli Stati Uniti nella regione sud-asiatica, ricevendo enormi benefici in termini di aiuti finanziari e soprattutto militari.

Islamabad si fece anche mediatore tra Washington e Pechino e fu l’artefice dell’incontro avvenuto nel 1972 tra Nixon e Mao Zedong, il quale pose fine alla politica americana delle “due Cine”.

Il tutto si tradusse in un isolamento ancora più accentuato dell’India, che sarebbe terminato solo nei primi anni Novanta.

 

 

L’asse Washington-New Dehli-Tel Aviv

Il crollo dell’Unione Sovietica ed una profonda crisi economica spinsero infatti New Delhi a rivolgersi al Fondo Monetario Internazionale per ottenere un prestito che l’aiutasse a superare il momento difficile che stava attraversando. In cambio, all’India fu chiesto di liberalizzare la propria economia e di aprirsi ai mercati internazionali.

Non è una caso che fu proprio in quegli anni che il Pressler Amendment pose fine agli aiuti economici che Washington si era impegnata a fornire al Pakistan, interrompendo una collaborazione che si era intensificata durante l’invasione sovietica dell’Afghanistan.

Gli Stati Uniti decisero di fare dell’India il loro maggiore alleato nell’Asia meridionale e ciò ebbe inevitabilmente ripercussioni negative sul rapporto con Islamabad, storica rivale di New Delhi.

 

La politica estera indiana è stata da allora contraddistinta dallo stretto legame con Washington, il quale ne ha fortemente condizionato l’andamento e continua tuttora a farlo.

L’India rappresenta, col Giappone ed altri Stati della regione asiatica, una delle armi usate dagli Stati Uniti per contenere l’ascesa della Cina. L’obiettivo americano è infatti quello di impedire che Pechino assurga al ruolo di leader incontrastato dell’area e New Delhi costituisce un alleato fondamentale per la buona riuscita di questa strategia.

La crescente collaborazione tra l’India ed Israele rientra proprio in questo progetto di contenimento della Cina e si è tradotto, specie negli ultimi anni, in un legame molto stretto soprattutto dal punto di vista militare.

New Delhi e Tel Aviv sono infatti impegnate in attività congiunte di lotta al terrorismo e l’India rappresenta ormai il più importante mercato di sbocco per gli armamenti prodotti in Israele.

Tutto ciò ha delle importanti ricadute a livello geopolitico e l’asse Washington – New Delhi – Tel Aviv costituisce ormai una realtà capace di influenzare le dinamiche interne all’Asia e al Medio-Oriente, producendo inevitabili ricadute sulla politica globale.

 

 

 

Riposizionamento strategico?

 

Tuttavia, la posizione indiana si sta facendo sempre più complicata e richiede un’analisi piuttosto complessa.

Le vicende afghane degli ultimi 3 decenni hanno avuto ripercussioni importanti sulla politica estera indiana e continuano a produrre effetti di non poco conto.

L’ascesa dei talebani a metà anni ’90 ebbe come risultato quello di avvicinare New Delhi a Teheran e Mosca, paesi molto attivi nel sostegno alla cosiddetta Alleanza del Nord, fazione non-pashtun che si opponeva al dominio talebano.

In seguito all’occupazione afghana da parte degli USA e dei suoi alleati nell’ottobre del 2001, l’India è stata uno dei paesi più attivi nella ricostruzione dell’Afghanistan e figura attualmente tra i maggiori donatori del governo di Kabul.

I buoni rapporti col governo guidato da Karzai, il quale ha effettuato i suoi studi proprio in India e conserva legami personali con questo Paese, e l’implementazione di numerosi progetti infrastrutturali hanno fondamentalmente come obiettivo, quello di dar vita ad un’alleanza in grado di contenere l’influenza esercitata dal Pakistan su Kabul.

La presenza indiana in Afghanistan rappresenta dunque una delle maggiori preoccupazioni per Islamabad e ha avuto un peso molto importante nel delineare la politica adottata dal Pakistan nel Paese confinante. Il timore di un governo filo-indiano insediato a Kabul dopo il ritiro delle truppe straniere, ha infatti spinto Islamabad a supportare con decisione gruppi di militanti che hanno proprio nella regione occidentale del Pakistan, le loro basi operative.

Lo scopo è quello di utilizzare questi gruppi come assets strategici, una sorta di asso nella manica da tirar fuori al momento opportuno.

Quel momento sembra oggi essere giunto e il tentativo del governo Karzai di negoziare coi talebani sta dando ragione alla strategia pakistana.

L’ammissione dell’amministrazione Obama di non poter fare a meno del supporto di Islamabad per porre fine al conflitto che da anni sta dilaniando l’Afghanistan, suona infatti come una sorta di resa e apre importanti spazi per la politica estera pakistana.

L’avvicinamento degli ultimi mesi tra Zardari e Karzai costituirebbe un’ulteriore prova di quel che sta accadendo oggi a Kabul.

Gli Stati Uniti hanno ormai compreso di non poter conseguire una vittoria effettiva sui talebani e hanno così deciso di intraprendere la strada dei negoziati e non possono dunque fare a meno del sostegno delle forze armate e di intelligence pakistane.

La promessa fatta da Obama al governo indiano di impegnarsi affinché New Delhi consegua un seggio permanente al Consiglio di Sicurezza delle Nazioni Unite, suona un po’ come un contentino, peraltro difficilmente realizzabile, per mettere a freno le crescenti ansie indiane.

 

Le vicende afghane stanno facendo emergere una verità con cui gli Stati Uniti dovranno fare i conti nei prossimi anni: l’estrema difficoltà di intrattenere rapporti di cooperazione sia con l’India che col Pakistan.

L’incapacità di risolvere la questione kashmira richiede, da parte di Washington, un continuo barcamenarsi tra le richieste indiane e quelle pakistane, spesso inconciliabili tra di loro.

Col tempo diventerà sempre più difficile mantenersi in equilibrio tra Islamabad e New Delhi e, a meno di un improbabile avvicinamento tra i due Paesi, gli Stati Uniti potrebbero essere chiamati a compiere una scelta di campo definitiva.

Il Pakistan e l’India sono consapevoli di ciò e stanno entrambi tentando di acquisire un maggiore potere negoziale nei confronti di Washington.

 

 

 

L’India strizza l’occhio all’Iran

 

Mentre Islamabad è impegnata ad approfondire i suoi legami storici con Pechino, specie dal punto di vista militare, l’India sta cercando di trovare una posizione di maggiore indipendenza per quel che concerne la sua politica estera.

Sebbene sia ben lungi dal trovarla, alcuni segnali di ciò sono già ravvisabili nei suoi rapporti con l’Iran.

Risalgono, ad esempio, allo scorso 28 ottobre le dichiarazioni del governo indiano circa una presunta volontà di volere riprendere il dialogo con Teheran per la realizzazione di un gasdotto che dovrebbe collegare Iran, Pakistan ed India.

La strenua opposizione di Washington nei confronti di questo progetto, ed i problemi che caratterizzano la regione pakistana del Baluchistan, hanno finora frenato la sua realizzazione.

Tuttavia, i crescenti bisogni energetici dell’India potrebbero spingerla ad esplorare strade affatto gradite all’amministrazione americana.

 

La recentissima notizia dell’accordo raggiunto dai governi turkmeno, afghano, pakistano e indiano per la realizzazione del gasdotto TAPI, sembrerebbe andare in direzione contraria rispetto a quanto detto, ma i dubbi circa l’effettiva capacità del Turkmenistan di pompare gas a sufficienza, oltre ai problemi di sicurezza che attanagliano il territorio afghano, potrebbero comportare notevoli ritardi di realizzazione, costringendo i paesi dell’Asia meridionale a cercare percorsi alternativi.

 

La collaborazione tra New Delhi e Teheran riguarda diversi altri progetti e non si ferma dunque all’IPI.

Il porto iraniano di Chabahar risulta centrale nell’ottica di tale cooperazione. Progettato e finanziato proprio dall’India, questo porto detiene un valore strategico molto importante.

L’importanza di Chabahar è legata, ad esempio, alla sua capacità di fare da sbocco per le risorse energetiche della regione centro-asiatica, permettendo all’India di rafforzare le sue relazioni commerciali con questi paesi ritenuti di fondamentale importanza ai fini dello sviluppo economico.

Inoltre, tramite Chabahar, l’India è in grado di aggirare il Pakistan ed esportare le proprie merci in Afghanistan e negli altri Paesi dell’area. Il nuovo accordo di transito siglato da Afghanistan e Pakistan infatti, non permette a New Delhi di utilizzare il territorio pakistano per il trasporto dei beni da esportazione e Chabahar rappresenta la migliore alternativa possibile.

L’Iran soddisfa circa il 15% del fabbisogno energetico indiano, una percentuale piuttosto bassa se si considerano le enormi potenzialità del patrimonio gassifero iraniano.

Tuttavia, è ancora presto perché l’India adotti posizioni non gradite a Washington e per il momento, New Delhi è impegnata in un’azione di mediazione tra l’Iran e gli Stati Uniti.

Nonostante l’opposizione indiana all’acquisizione del nucleare da parte di Teheran, il Paese sud-asiatico si sta impegnando affinché non vengano adottate nuove sanzioni nei confronti dell’Iran.

Complici gli importanti interessi economici nutriti da molte compagnie indiane, New Delhi sta cercando di ammorbidire la posizione americana sull’argomento ed ha come obiettivo ultimo, quello di sottrarre l’Iran all’isolamento in cui si trova attualmente, in modo da poter sviluppare ulteriormente le enormi potenzialità di un’eventuale cooperazione economica e politica.

Gli interessi che legano i due Paesi sono infatti numerosi e vanno dall’energia all’Afghanistan, senza dimenticare che l’India ospita la più numerosa comunità sciita al mondo dopo l’Iran.

Sono troppe le variabili in gioco per poter azzardare, al momento, previsioni circa le dinamiche geopolitiche che caratterizzeranno il futuro prossimo.

I segnali che ci giungono oggi sono talvolta contrastanti e ancora troppo soggetti alla volatilità del presente e dunque suscettibili di smentite ed inversioni di rotta.

Quel che però è certo è che in Asia si sta assistendo ad una netta ridefinizione degli equilibri di forza e nessuno degli attori coinvolti lascerà nulla di intentato per spuntarla sugli altri.

* Daniele Grassi è dottore in Scienze Politiche e specializzando in “Relazioni Internazionali” presso la LUISS Guido Carli. Attualmente è impegnato in uno stage di ricerca presso lo “Strategic Studies Institute” di Islamabad.

China und Russland schaffen den Dollar ab

China und Russland schaffen den Dollar ab

Michael Grandt

Ex: http://info.kopp-verlag.de/

 

China und Russland haben beschlossen, den US-Dollar als Sicherheit für den bilateralen Handel aufzugeben und auf ihre eigenen Währungen zurückzugreifen. Zudem will Peking Russland helfen, sich wieder als Großmacht zu etablieren.

Chinesische Experten sagten aus, dass die engeren Beziehungen zwischen Peking und Moskau nicht gegen den Dollar gerichtet seien, sondern die eigenen Volkswirtschaften schützen soll.

Im Zuge von Handelsvereinbarungen hatten die beiden Staaten unlängst beschlossen, auf ihre eigenen Währungen zurückzugreifen. Im chinesischen Interbankenmarkt wurde bereits damit begonnen, den Yuan gegen den russischen Rubel zu handeln; umgekehrt soll dies mit der chinesischen Währung auch bald in Russland möglich sein.

Beide Länder hatten ihren bilateralen Handel bisher hauptsächlich mit dem Dollar getrieben. Doch im Zuge der Finanzkrise begannen hochrangige Beamte beider Länder, andere Möglichkeiten zu eruieren.

Sun Zhuangzhi, leitender Forscher an der chinesischen Akademie der Sozialwissenschaften, stellte fest, der neue Modus der Geschäftsabwicklung zwischen China und Russland folge einem globalen Trend, nachdem die Finanzkrise die Fehler eines vom Dollar dominierten Weltfinanzsystems aufgezeigt habe. Pang Zhongying, die in der Renmin University of China auf internationale Politik spezialisiert ist, sagte, der Vorschlag fordere den Dollar nicht heraus, sondern richte sich auf die Vermeidung der Risiken, die der Dollar darstelle.

Die neue Zusammenarbeit zwischen China und Russland soll vor allem in den Bereichen Luftverkehr, Eisenbahnbau, Zoll, Schutz des geistigen Eigentums und der Kultur stattfinden. Inoffiziellen Verlautbarungen nach will Peking zudem zwei Atomreaktoren aus Russland kaufen.

Der chinesische Ministerpräsident Jiabao Wen sagte, die Partnerschaft zwischen Peking und Moskau habe »ein beispielloses Niveau« erreicht und versprach, die beiden Länder »werden sich nie mehr verfeinden. China wird dem Weg der friedlichen Entwicklung folgen und die Renaissance Russlands als Großmacht unterstützen«.

Peking ist außerdem bereit, mit Moskau in Zentralasien und der asiatisch-pazifischen Region zusammenzuarbeiten. Ebenso soll in den wichtigen internationalen Organisationen und Mechanismen eine »faire und vernünftige, neue Ordnung« in der internationalen Politik und Wirtschaft angestrebt werden.

 

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Quelle:

http://www.chinadaily.com.cn/china/2010-11/24/content_115...

lundi, 27 décembre 2010

L'incubo geopolitico di Washington: Russia e Cina piu vicine

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L’incubo geopolitico di Washington: Russia e Cina più vicine

Fonte: “

Reseau Voltaire [1]

Qualsiasi siano i conflitti in corso all’interno delle mura del Cremlino fra Medvedev e Putin, ci sono ultimamente chiari segnali che sia Pechino sia Mosca si stiano muovendo con decisione, dopo un lungo periodo di esitazione, al fine di rafforzare la cooperazione strategica economica a fronte del palese sgretolarsi del ruolo d’unica superpotenza degli USA. Se questa tendenza si rafforzasse, si verificherebbe il peggiore incubo geopolitico di Washington: una massa continentale eurasiatica riunita, in grado di sfidare l’egemonia economica globale dell’America.


Parafrasando il proverbio cinese, potremmo affermare di vivere senza dubbio in «tempi interessanti». Non appena sembrava che Mosca si stesse avvicinando a Washington nel corso della Presidenza di Medvedev, accettando di cancellare la vendita all’Iran di un controverso sistema di difesa missilistica S-300 e iniziando a cooperare con Washington sui progetti della NATO, incluso forse lo scudo antimissile, Mosca e Pechino si sono accordati su una serie di misure che possono avere grosse implicazioni geopolitiche, non ultime per il futuro della Germania e quello dell’Unione Europea.

Nel corso d’incontri di vertice tenutisi a San Pietroburgo, il primo ministro cinese Wen Jiabao e la sua controparte russa, Vladimir Putin, hanno fatto una serie d’annunci passati relativamente inosservati nei principali mezzi di comunicazione occidentali, temporaneamente ossessionati dai dubbi scandali legati a “Wikileaks”. È già la settima volta che i dirigenti dei due paesi si incontrano quest’anno, e certamente questo significa qualcosa.

Ad oggi non ci sono stati molti investimenti cinesi nel mercato russo e quelli che si sono verificati, avevano forma prevalente di prestiti. Il valore degli investimenti diretti e di portafoglio in progetti concreti rimangono insignificanti, così come il livello di investimento della Russia in Cina: la situazione è destinata però a cambiare. Alcune società russe sono già quotate alla Borsa di Hong Kong ed esiste un numero di progetti di investimento russo-cinesi per la creazione di tecnoparchi sia in Russia sia in Cina.

Lasciando cadere il dollaro

I due Primi Ministri hanno annunciato, fra l’altro, di aver raggiunto un accordo per rinunciare al dollaro nel loro commercio bilaterale utilizzando al suo posto le proprie valute. Inoltre hanno raggiunto accordi potenzialmente di vasta portata su energia, commercio e modernizzazione economica delle remote regioni del vasto spazio euroasiatico dell’Estremo Oriente russo.

Fonti cinesi hanno rivelato alla stampa russa che questa mossa rifletterebbe relazioni più strette fra Pechino e Mosca e lo scopo non sarebbe quello di sfidare il dollaro. Putin ha allegramente annunciato: «Per quanto riguarda la compensazione commerciale, abbiamo deciso di usare le nostre valute». Egli ha aggiunto che la moneta cinese yuan ha cominciato ad essere scambiata col rublo russo nel mercato interbancario cinese, mentre il renminbi, fino ad ora solo moneta domestica e non convertibile, avrà presto una parità col rublo in Russia.

Ad oggi il commercio fra i due paesi avveniva in dollari. In seguito allo scoppio della crisi finanziaria nel 2007 e l’estrema volatilità del dollaro e dell’euro, entrambe le nazioni hanno cercato nuovi modi di evitare l’uso della valuta statunitense nel commercio, tentativo potenzialmente importante per il futuro della stessa. Al fine di ottimizzare lo sviluppo e la struttura del commercio, i due governi hanno creato la Camera di Commercio russo-cinese per i macchinari e prodotti tecnologici. Il Greenwood World Trade Center a Mosca, attualmente in costruzione da una società cinese, sarà nel 2011 un centro espositivo e commerciale di prodotti cinesi in Russia e servirà da piattaforma per incrementare gli scambi non governativi tra i due paesi.

Allo stato attuale il commercio fra Russia e Cina è in rapida crescita. Nei primi 10 mesi di quest’anno, il volume del commercio bilaterale ha raggiunto circa 35 miliardi di euro, un incremento su base annua del 45%. Quest’anno si prevede che gli scambi totali supereranno i 45 miliardi, portandosi così vicini al livello precedente alla crisi finanziaria. Entrambe le parti hanno intenzione di aumentare il volume degli scambi in maniera significativa nei prossimi anni e alcuni analisti russi credono che potrebbe anche raddoppiare nel giro d’un triennio. L’esclusione del dollaro non è cosa da poco e, se seguita da altri Stati dell’Organizzazione per la Cooperazione di Shanghai (il gruppo di sei paesi eurasiatici instaurato da Cina e Russia nel 2001) potrebbe indebolirne il ruolo di valuta di riserva mondiale.

Dal Trattato di Bretton Woods nel 1944 il dollaro è stato posto al centro del sistema di commercio globale e l’egemonia statunitense si è basata su due pilastri indispensabili: il dominio degli Stati Uniti come potenza militare insieme al ruolo esclusivo del dollaro come valuta di riserva mondiale. La combinazione di potenza militare e ruolo di riserva della propria valuta per tutto il commercio di petrolio, altre materie prime essenziali e prodotti finanziari, ha permesso a Washington di finanziarsi concretamente le sue guerre per il dominio globale col “denaro degli altri”.

Cooperazione energetica

Accordi interessanti sono stati siglati anche nell’ambito della cooperazione energetica bilaterale. È chiaro che i due colossi euroasiatici hanno in programma di espandere il commercio bilaterale al di fuori del dollaro in modi interessanti, includendo in maniera significativa l’energia, dove la Cina ha enormi deficit e la Russia enormi sovrappiù e non solo nel petrolio e nel gas.

Le due parti espanderanno la cooperazione nell’energia nucleare a partire dall’aiuto offerto dalla Russia alla Cina per la costruzione di centrali nucleari e di progetti congiunti russo-cinesi al fine di arricchire l’uranio in linea con le normative AIEA e produrlo in paesi terzi ed inoltre per costruire e sviluppare una rete di raffinerie petrolifere in Cina. È già in essere il primo progetto, Tianjin. Un accordo prevede l’acquisto di due reattori nucleari russi da parte della centrale nucleare cinese di Tianwan, il complesso più avanzato di energia nucleare in Cina. Così pure l’esportazione del carbone dalla Russia alla Cina dovrebbe superare i 12 milioni di tonnellate nel 2010, ed è destinata ad aumentare.

Le compagnie petrolifere cinesi forniranno anche gli investimenti necessari per aggiornare i progetti per l’esplorazione e lo sviluppo dei giacimenti d’idrocarburi e la raffinazione del petrolio, in joint venture con società statali e private russe. In aggiunta, un gasdotto russo-cinese diventerà operativo a fine anno. Un punto importante ancora da sistemare è l’ammontare del prezzo del gas russo alla Cina: l’accordo è previsto nei prossimi mesi. La Russia chiede un prezzo per la fornitura di gas Gazprom che sia uguale a quello per i clienti europei, mentre Pechino richiede uno sconto.

I maggiori progetti di sviluppo industriale

Ci saranno intensi e reciproci investimenti industriali nelle remote regioni lungo i 4200 km di frontiera in comune, in particolare fra la Siberia e l’Estremo Oriente russi ed il Dungbei cinese, dove negli anni ’50 e ’60, prima dell’incrinarsi delle relazioni fra Unione Sovietica e Cina, l’URSS aveva costruito centinaia di impianti industriali leggeri e pesanti. Quest’ultimi sono stati modernizzati e rimpiti di nuove tecnologie cinesi o d’importazione, ma le solida fondamenta industriali d’epoca sovietica sono ancora là.

Questo – sostengono alcuni analisti russi – conferirà alla cooperazione regionale un livello tecnologico più elevato, soprattutto fra i territori di Chabarovsk e Primor’e, le regioni di Čita e Irkutsk, la Transbaikalia, tutta la Siberia, l’Heilongjiang ed altre province cinesi.

Nel 2009 Cina e Russia firmavano un programma con scadenza 2018 per lo sviluppo congiunto di Siberia, Estremo Oriente russo, e province nord orientali della Cina, attraverso un chiaro piano d’azione che comprendeva dozzine di progetti di cooperazione tra le specifiche regioni per sviluppare 158 strutture nelle aree di confine, nel settore del legno, chimica, infrastrutture stradali e sociali, agricoltura e diversi progetti di esportazione di energia.

Il viaggio di Wen segue la visita di tre giorni del Presidente Medvedev in Cina a settembre, durante la quale assieme al presidente Hu Jintao ha lanciato il da tempo discusso gasdotto trans-frontaliero da Skovorodino, nella parte orientale della Siberia, a Daqing, nel nord est della Cina. Entro la fine del 2010 il petrolio russo inizierà a fluire verso la Cina al ritmo di 300.000 barili al giorno per i prossimi vent’anni, grazie ad un accordo di tipo “credito in cambio di petrolio” da 20 miliardi di euro, stipulato lo scorso anno.

La Russia sta cercando di espandersi all’interno del crescente mercato energetico asiatico e in particolar modo in quello cinese, e Pechino vuole migliorare il suo approvvigionamento energetico diversificando rotte e fonti. Il gasdotto raddoppierà l’esportazione di petrolio russo in Cina, oggi trasportato principalmente tramite una lenta e costosa rotta ferroviaria, e farà della Russia uno dei suoi primi tre fornitori di greggio alla Cina, assieme a Arabia Saudita e Angola; un importante realizzo geopolitico per entrambi.

Il premier cinese Wen durante una conferenza stampa a San Pietroburgo ha affermato che la partnership fra Pechino e Mosca ha raggiunto «livelli di cooperazione senza precedenti» e ha promesso che i paesi «non diventeranno mai nemici». È dalla rottura sino-sovietica durante la Guerra Fredda che la geopolitica di Washington cerca di creare una profonda spaccatura tra i due paesi per rafforzare la sua influenza sul vasto dominio eurasiatico.

Come ho affermato in precedenza, l’unica potenza del pianeta che in teoria potrebbe ancora offrire un deterrente nucleare credibile a Washington è la Russia, per quanti problemi economici possa avere. La capacità militare cinese è ancora distante anni da quella russa, ed è principalmente difensiva. Sembra essere la Cina l’unica potenza economica in grado di rappresentare una sfida per il declinante gigante statunitense. La complementarità fra i due sembra essere stata pienamente compresa. Forse le prossime rivelazioni di Wikileaks “scopriranno” dettagli imbarazzanti su questa cooperazione; dettagli convienti per l’agenda geopolitica di Washington. Per il momento, però, la crescente cooperazione economica sino-russa rappresenta il peggior incubo geopolitico di Washington in un momento in cui la sua influenza globale è chiaramente in declino.

(Traduzione di Eleonora Ambrosi)


* F. William Engdahl, economista e co-direttore di “Global Research”, fa parte del Comitato Scientifico di “Eurasia”.

Article printed from eurasia-rivista.org: http://www.eurasia-rivista.org

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vendredi, 24 décembre 2010

Anche Mishima a volte ritorna nel futuro...

Anche Mishima a volte ritorna nel futuro...

di Errico Passaro

Fonte: secolo d'italia


mishimawwwwww.jpgYukio Mishima è un intramontabile della cultura mondiale, oggetto di ripubblicazioni a getto continuo, convegni di studio, rappresentazioni teatrali e altre forme di tributo. Un omaggio inconsueto ed inaspettato alla figura dello scrittore giapponese viene dal romanzo vincitore dell'ultimo Premio Urania, Lazarus di Alberto Cola (Mondadori, pp. 317, € 4,20).  
 

 

Cola ci porta in una Tokyo futuristica, dove gli scienziati del progetto Lazarus hanno "resuscitato" Mishima per farlo diventare vessillo di una parte politica, quella dei "nostalgici", nelle elezioni politiche alle porte; il simulacro dello scrittore, dotato del suo stesso corpo e dei suoi stessi ricordi, ma destinato ad una vita effimera come i replicanti di Blade Runner, si ritrova comparsa di una sofisticata messinscena, che arriva alla ricostruzione fedele del quartiere dove aveva vissuto la sua prima vita.

 

Mishima, tuttavia, sfugge al suo destino con l'aiuto della setta segreta dei Mistici, in un viaggio verso la "bella morte" intriso di atmosfere crepuscolari, fino ad un epilogo carico di una sovrumana serenità. Uno dei punti di forza del romanzo è la verosimiglianza dei personaggi. Su tutti svetta Gabriel, il Virgilio di Mishima nella sua nuova vita, dominato dal potere della Pulsazione, che gli consente di agire sulla mente degli altri, ma che lo lascia alla merce del Mostro dentro di lui, governabile solo a forza di dosi di droga: lo seguiamo per flashback nella sua formazione marziale e nella sua iniziazione al potere parapsicologico, fino alla sua trasformazione in «un ronin moderno, un samurai senza padrone… un uomo sull'onda… uno strumento senza fine». Intorno a Gabriel, ruotano antagonisti e comprimari: dalla parte dei "cattivi", Hitasura, padrone dello "zaibatzu" che gestisce il progetto Lazarus e che ingaggia Gabriel per recuperare il Mishima in fuga, e Yasuwara, il corrotto capitano della Polizia del Pensiero in combutta con Hitasura; dalla parte dei "buoni", solo per citare i principali, la tenutaria Madame Ho, l'allibratore Kano, Mama-San e Tori, le mentori di Gabriel nella Setta dei Mistici e, soprattutto, Miko, la compagna di casa non vedente di Gabriel, apparentemente indifesa, ma in realtà detentrice di un segreto che emergerà solo nel finale del romanzo. A parte, il "rigenerato" Mishima, «figlio dell'unione illecita tra illusione e tecnologia», spaesato, malinconico, esangue, diverso da quello spudorato e tonitruante consegnato alle cronache letterarie e politiche della storia reale, più vicino all'intimismo delle Confessioni di una maschera che alla belluinità di altre sue opere, un soggetto «attirato dal lato estetico di una sensibilità superiore», «perfetta fusione fra lotta e sacrificio, impeto e amore».

 

Una virtù del romanzo è, poi, la sua qualità stilistica. In Cola colpisce, soprattutto, il tratto preciso nella descrizione dei gesti, inusuale nella letteratura di genere; i suoi toni smussati; la tendenza all'introspezione, allo scavo psicologico, alla costruzione di una biografia credibile dei suoi attori. Un ulteriore pregio della narrazione di Cola è la ricostruzione del contesto futuro. La prima parte si svolge nella metropoli nipponica, sottoposta al controllo asfissiante dei rilevatori di onde cerebrali: davanti allo sguardo del lettore, si accavallano immagini di «una città sempre più puttana in cui è difficile conservare la memoria», fitta di grattacieli occupati abusivamente, bordelli, case di gioco, ring di sumo clandestini e tutta una serie di luoghi seminterrati, ambigui, formicolanti di un'umanità disumana, dove perfino gli alberi sono geneticamente modificati. La seconda parte del romanzo, invece, è ambientata fra campagna e mare, in un luogo che sembra anche un tempo diverso, aria pulita e lanterne invece che smog e neon. Il romanzo si segnala, ancora, per la sua attenzione al fattore sociale, di cui si fa portavoce Mishima stesso: «Vivevo in un Paese che era pieno di contraddizioni» dice «ed ero una delle sue espressioni».

Lo scrittore è costretto a vivere per una seconda volta ciò che, nella sua incarnazione naturale, aveva combattuto, prima, e rifiutato, poi, con l'estremo gesto del suicidio rituale: lo svilimento dei valori, il carrierismo sociale, l'arroganza della burocrazia, l'aggressività della speculazione economica, la corruzione della politica, che rendevano la sua amata-odiata Patria un mondo di relazioni inautentiche. Ma quello che è il vero tratto distintivo di Lazarus rispetto a tanti romanzi consimili e coetanei, anche non di filone, è la predominanza della riflessione filosofica, non di rado affidata a citazioni tratte dall'opera di Mishima. Tutta la vicenda umana dei protagonisti è impregnata di misticismo orientale e si svolge in uno stato di mezzo fra vita e morte, sogno e realtà, passato e presente; ma l'esperienza spirituale non rimane circoscritta alla prossimità con la dimensione sovrannaturale, ma si sostanzia in una serie di valori-guida cardinali: la "bellezza" e la "morte", come nell'etica e nell'estetica decadente; il dovere morale del giri («È la traccia che ci rende unici, che ci rende uomini…ciò che il giri richiede è lo spirito di un guerriero, cioè qualcosa di fiero e puro»); il koha («…la smania di affrontare prove spirituali di virilità») e il ninkyo («il codice d'onore personale»); la tensione al futuro («Quale futuro può attenderci se si vive nella continua nostalgia del passato?»), il potere dell'esempio («Ai miei tempi lottavo con la forza delle idee, e con l'azione dettata dall'esempio»), la forza dell'arte («La realtà trova sempre il modo di bloccare i tentativi dell'uomo di trasformare la vita in un attimo di poesia»), la critica al culto della memoria («La memoria è uno specchio capriccioso, perché le immagini riflesse ci illudono. È lo specchio degli inganni») e della vittoria («La sconfitta non è tale se è volta ad un ideale, e la si può tramutare in un seme di gloria futura»). Dopo tanti meritati complimenti, una sommessa critica: siamo sicuri che "rigenerare" un'icona non valga a distruggerla? Un mito, antico o moderno che sia, non vive forse della sua irraggiungibilità? Creare doppioni di personaggi archetipici non è come mettere in circolazione caricature dell'originale, parodie lontane anni-luce dal potere di attrazione e suggestione della matrice? Il romanzo sembra, invece, alludere ad un potere fascinatorio che, nel processo di duplicazione, non si perderebbe e continuerebbe a magnetizzare le masse. E di questo noi, nel nostro piccolo, ci permettiamo di dubitare.

 

 

 

 

 

 

 

 


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jeudi, 23 décembre 2010

Peter Scholl-Latour: La Turquie, grande puissance régionale

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La Turquie en marche pour devenir une grande puissance régionale face à une Europe affaiblie !

 

 

Entretien avec Peter SCHOLL-LATOUR

 

Propos recueillis par Bernhard TOMASCHITZ

 

Q. : Dr. Scholl-Latour, la Turquie s’affiche de plus en plus comme une puissance indépendante, consciente d’elle-même, de sa destinée et de son histoire ; elle s’affirme ainsi sur la scène internationale. A-t-elle les potentialités nécessaires pour devenir une grande puissance régionale au Proche-Orient ?

 

PSL : La Turquie possède indubitablement de telles potentialités : elle dispose d’une armée conventionnelle qui est probablement plus forte que la plupart des armées européennes ; qui plus est, une nouvelle islamisation s’est emparée de la Turquie, ce qui confère à l’Etat de nouvelles orientations géopolitiques. Il est possible que les Turcs et Erdogan n’aient pas encore reconnu les chances réelles dont ils disposent, des chances qui ne pourront être saisies si la Turquie s’associe trop étroitement à l’Europe. Lorsque, dans des conversations avec des Turcs, on mentionne le fait qu’ils sont les héritiers d’un grand empire et non pas l’appendice d’une Union Européenne qui marine dans le vague, on rencontre tout de suite leur approbation. Et, de fait, ce serait bien le rôle de la Turquie, et non pas d’une autre puissance, de créer un minimum d’ordre dans l’espace moyen-oriental qui menace actuellement de sombrer dans le chaos.

 

Q. : Quel est le rapport qu’entretient la Turquie avec ses voisins ?

 

PSL : Les Turcs ont bien sûr un rapport tendu avec l’Irak parce que dans le Nord de l’Irak, les Kurdes, qui y forment la population majoritaire de souche, sont devenus quasiment indépendants du gouvernement de Bagdad et que cette quasi indépendance pourrait constituer un précédent pour les Kurdes de Turquie. Mais jusqu’à présent les Kurdes d’Irak, et surtout leur leader Barzani, se sont comportés de manière très adéquate et très subtile. Par ailleurs, la Turquie a accompli un grand pas en avant en direction de la Syrie, avec laquelle elle cultivait une longue inimitié : aujourd’hui les rapports ente la Syrie et la Turquie sont bons. En revanche, les rapports avec Israël, qui, auparavant, étaient excellents sur les plans de la coopération militaire et technologique, se sont considérablement détériorés. Ce fut sans doute la grande erreur des Israéliens qui n’ont rien fait pour contrer cette évolution ; on constate dès lors qu’en Turquie, hommes politiques et hommes de la rue convergent dans des attitudes nettement anti-israéliennes.

 

Ensuite, et c’est l’essentiel pour la Turquie, il y a le Caucase et l’Asie centrale. Dans le Caucase, les Azéris, habitants de l’Azerbaïdjan, sont chiites alors que les Turcs sont sunnites. Mais les deux peuples sont purement turcs de souche et parlent des langues très similaires. La zone occupés par des peuples turcs (turcophones) comprend le Turkménistan, le Kazakhstan et s’étend à tout le territoire centre-asiatique jusqu’à la province occidentale de la Chine, peuplée d’Ouïghours, également locuteurs d’une langue turque. Ce sont tous ces facteurs-là qui font que la Turquie, sur le plan culturel comme sur le plan religieux, dispose d’un potentiel très important.

 

Q. : Vous venez de nous parler des Etats turcophones d’Asie centrale : dans quelle mesure les intérêts économiques jouent-ils un rôle dans l’accroissement possible de la puissance turque ?

 

PSL : Ce sont les Américains, les Russes, les Chinois et les Européens qui convoitent les richesses de ces régions. L’Asie centrale possède de riches gisements de pétrole et de gaz naturel et les dirigeants des Etats turcophones sont passés maîtres dans l’art stratégique. Le Kazakhstan a certes proposé la construction d’un système d’oléoducs et de gazoducs qui passerait par les pays du Caucase du Sud pour aboutir en Turquie et déboucher en Méditerranée, tout en contournant et la Russie et l’Iran mais, par ailleurs, les Kazakhs ont été suffisamment futés pour conclure des accords similaires avec les Russes.

 

Q. : Et quel rôle jouent les Turcs dans les Balkans ?

 

PSL : Dans les Balkans, nous n’avons pas très bien perçu le jeu des Turcs jusqu’ici. Ce jeu se joue bien entendu, avant tout, dans les Etats qui possèdent des populations musulmanes autochtones, notamment les Albanais, représentés également au Kosovo et en Macédoine où un tiers de la population est d’ethnie albanaise. La Macédoine, dans un tel contexte, connaît déjà des tensions entre les Slaves chrétiens orthodoxes et les Albanais musulmans et deviendra sans doute une poudrière dans l’avenir. La Turquie y avancent ses pions avec grande prudence, en se posant comme l’Etat protecteur et a contribué à une ré-islamisation de la Bosnie, alors que cette région de l’ex-Yougoslavie avait été, sous Tito, complètement détachée de l’orbe musulmane.

 

Conséquence : dans tout règlement interne des Balkans, nous devons désormais prendre la Turquie en considération et tenir compte de son point de vue.

 

Q. : Quels obstacles pourraient survenir qui freineraient la montée en puissance de la Turquie ?

 

PSL : Jusqu’ici le premier ministre turc Erdogan a déployé sa stratégie de manière très raffinée et a forgé des liens étroits entre son pays et l’Iran. Cette stratégie a ceci de remarquable que la Turquie est un pays essentiellement sunnite tandis que l’Iran est majoritairement chiite, ce qui avait conduit dans le passé à une longue inimitié. Aujourd’hui un rapprochement est en train de se produire et, chose curieuse, la Turquie et l’Iran ont, de concert avec le Brésil, cherché à aplanir le conflit qui oppose l’Occident à l’Iran au sujet de son projet atomique. Ni les Américains ni les Européens n’ont réagi !

 

Q. : La Turquie, membre de l’OTAN, se rapproche de l’Iran ; cela pourra-t-il conduire à une rupture avec les Etats-Unis et avec l’Occident en général ?

 

PSL : Il n’y a que deux Etats stables dans la région : la Turquie et l’Iran. Face à ces deux pôles de stabilité, le Pakistan est au bord du chaos et est fortement sollicité par la guerre en Afghanistan. Il est aussi intéressant de constater qu’à Kaboul, où je me suis encore rendu récemment, on discute du retrait des troupes de l’OTAN et des Américains. Le retrait des Américains devrait se passer dans un contexte digne, sans que la grande puissance d’Outre Atlantique ne perde la face comme ce fut le cas au Vietnam : or la seule puissance capable de gérer ce retrait de manière pacifique et honorable, c’est la Turquie, parce qu’elle est membre de l’OTAN tout en étant un pays musulman. Les soldats turcs stationnés en Afghanistan y jouissent d’une sympathie relative.

 

Q. : La Turquie veut devenir une plaque tournante dans la distribution d’énergie. Comment jugez-vous cette volonté ?

 

PSL : Je n’aime pas beaucoup cette théorie de la « plaque tournante ». L’Europe, qui en parle continuellement, veut constituer avec la Turquie une union économique et politique étroite, alors qu’il y aura bientôt cent millions de Turcs ! Que restera-t-il alors de l’Europe, avec sa population en plein déclin démographique ? Ensuite je crois que les Turcs se sont aperçu qu’une adhésion à l’UE ne va pas vraiment dans le sens de leurs intérêts.

 

Ensuite viennent les exigences européennes en matière de respect des droits de l’homme, tel que le prévoit la Charte européenne. Si elle respecte la teneur de cette Charte, la Turquie devra accorder aux quinze millions de Kurdes, qui vivent dans le pays, une autonomie culturelle et politique. Cela conduira à de formidables tensions, voire à une guerre civile sur le territoire turc. En conséquence, les Turcs se diront qu’il est plus raisonnable de ne pas adhérer pleinement à cette Union Européenne, qui exige d’eux tant de devoirs. Mis à part cela, la Turquie, si on la compare à d’autres Etats européens, est une grande puissance.

 

Q. : Comment perçoit-on la montée en puissance de la Turquie dans les Etats qui firent jadis partie de l’Empire ottoman ?

 

PSL : De manière très différente selon les Etats. En Irak, la question kurde handicape considérablement les rapport turco-irakiens, mais il faut prendre en considération que les Chiites forment désormais la majorité au sein de l’Etat irakien et que les Chiites d’Iran s’entendent bien, aujourd’hui, avec les Turcs. J’avais rappelé tout à l’heure l’ancienne inimitié qui opposait la Syrie à la Turquie parce que les Turcs avaient annexé en 1939 la région d’Iskenderum, dont la population était majoritairement arabe. La Syrie a oublié aujourd’hui cette querelle ancienne et cherche, auprès de la Turquie, une certaine protection face à Israël. Les relations avec l’Iran se sont considérablement améliorées et Ankara cherche maintenant à étendre la Ligue islamique au Pakistan. Mais c’est là un très vaste projet et on ne pourra vraiment le prendre en considération que si les problèmes de l’Afghanistan sont résolus.

 

(entretien paru dans « zur Zeit », Vienne, n°49/2010, http://www.zurzeit.at/ ).  

dimanche, 19 décembre 2010

Wetterleuchten in Asien - steigt die Kriegsgefahr?

Wetterleuchten in Asien – steigt die Kriegsgefahr?

Wolfgang Effenberger

Ex: http://info.kopp-verlag.de/

 

Genau vor 60 Jahren tobte vom 26. November bis 13. Dezember 1950 die Schlacht um den nordkoreanischen Changjin-Stausee. Chinesische Truppen waren überraschend über den Yalu-Fluss, den Grenzfluss zur Mandschurei, vorgedrungen und zwangen die US-Verbände zum hastigen Rückzug aus den nur Wochen zuvor gewonnenen Stellungen in Nordkorea. Der Angriff der etwa 300.000 Mann starken chinesischen »Freiwilligenarmee« endete mit einer der spektakulärsten Niederlagen des US-Militärs in seiner gesamten Geschichte. Um ein unter US-amerikanischem Einfluss vereinigtes Korea zu vermeiden, hatte China mit einer zunächst 300.000 Soldaten umfassenden »Freiwilligenarmee« Nordkorea zu unterstützen begonnen.

 

 

Es folgte ein sich lange hinziehendes Patt, das erst mit dem im Juli 1953 erklärten Waffenstillstand endete. Der Krieg hatte annähernd vier Millionen Menschen das Leben gekostet; die meisten davon waren koreanische Zivilisten. (1) Sechs Jahrzehnte nach den erbitterten Kämpfen amerikanischer und chinesischer Truppen streben die Spannungen auf der koreanischen Halbinsel offenbar wieder auf einen neuen Höhepunkt zu. Angeheizt durch einen sich zuspitzenden Großmachtkonflikt zwischen Washington und Beijing?

Die Ankunft einer US-Kriegsflotte im Gelben Meer unter Führung des atomgetriebenen Flugzeugträgers USS George Washington scheint eine weitere Eskalation der augenblicklichen Krise zu bestätigen. Den Marschbefehl erhielt die Flotte angeblich unmittelbar nach dem Beschuss der Insel Yeonpyeong durch Nordkorea am 23. November 2010. Für die meisten der westlichen Medien stand zweifelsfrei der Schuldige fest: Die unprovozierten Nordkoreaner hatten erneut den Waffenstillstand gebrochen und einen Bündnispartner der USA angegriffen. Pflichtgemäß berichtete ABC News von Präsident Obamas »Empörung« über die Provokation und dessen Willen, mit Südkorea »Schulter an Schulter zu stehen«. (2)

In der folgenden Flut von Artikeln und Medienberichten meldete sich auch Zbigniew Brzezinski zu Wort. Der alte Geostratege hatte als Jimmy Carters Sicherheitsberater die Mudschahedin bewaffnet, um die Sowjetunion in das afghanische Abenteuer zu locken. Nun sah er in dem Beschuss ein Zeichen dafür, »dass das nordkoreanische Regime einen Punkt des Wahnsinns erreicht hat«. Die rational kaum zu ergründenden Handlungen zeigen Brzezinski, »dass das Regime außer Kontrolle ist.« (3) So einfach scheint es aber nicht zu sein. Nur einen Tag vor der nordkoreanischen Provokation hatte Südkorea unter dem Codenamen »Hoguk« rund 70.000 Soldaten für ein Manöver mit »scharfem Schuss« in diesem umstrittenen Grenzgebiet zusammengezogen. An dieser jährlichen Militärübung nahmen Dutzende von südkoreanischen und US-Kriegsschiffen und rund 500 Flugzeuge teil. (4) Ursprünglich war auch die Teilnahme von US-Truppen geplant, die aber offenbar im letzten Augenblick absagten. (5) Anstatt unreflektiert auf Nordkorea zu verweisen, hätte eine verantwortliche Berichterstattung die Hintergründe aufhellen beziehungsweise eine neutrale Untersuchung for-dern müssen. Muss nicht auch das südkoreanische Manöver »Hoguk« in einem umstrittenen Grenzgebiet als Provokation angesehen werden? Die Insel Yeonpyeong liegt in unmittelbarer Nähe des nordkoreanischen Festlandes. Einseitig hatte Ende des Koreakrieges im Jahr 1953 US-General Mark Clark die umstrittene Grenzziehung zu Nordkoreas Nachteil festgelegt. Nordkorea hat diese Seegrenze nie anerkannt.

Nun scheint die Krise mit der überraschenden Dienstreise des Stabschefs der US-Armee, Admiral Mike Mullen, zu einem Besuch nach Seoul weitere Kreise zu ziehen.

Die Spannungen zwischen Nord- und Südkorea oszillieren im Weltmachtpoker. Bereits einige Tage vor Obamas Besuch in Japan demonstrierten Anfang November 2009 über 20.000 Japaner in Ginowan gegen den weiteren Ausbau der US-Militärstützpunkte und den Neubau eines der modernsten Einsatz- und Kampfführungszentren auf der Insel Okinawa – Fertigstellung bis 2013. Weiter verlangten sie die Schließung der in der Nähe ihrer Stadt gelegenen amerikanischen Marine-Corps-Futenma-Air-Base. Unter dem Beifall der Demonstranten rief der Bürgermeister von Ginowan, Yoichi Iha, dem japanischen Premierminister Yukio Hatoyama zu, Präsident Obama zu sagen, »dass Okinawa keine US-Basen mehr braucht.« Abschießend forderte der Bürgermeister vom Premier »eine tapfere Entscheidung zu treffen und mit der Last und Qual von Okinawa Schluss zu machen.« (6) Schon früher hatte die Opposition gegen die Anwesenheit einer strategisch bedeutenden US-Militärbasis in Japan Stellung bezogen. Sind doch von diesem »unsinkbaren Flugzeugträger der Vereinigten Staaten« China, Taiwan und Nordkorea leicht zu erreichen. Japan als östliches Einfallstor nach Eurasien.

Am Mittwoch hatte Clinton zusammen mit US-Verteidigungsminister Robert Gates bei einem ungewöhnlichen Besuch des innerkoreanischen Grenzorts Panmunjom schärfere Strafen gegen Pjöngjang verkündet, um dessen »nuklearen Bestrebungen Einhalt zu gebieten«.

Am 21. Juli besuchte US-Außenministerin Hillary Clinton zusammen mit US-Verteidigungsminister Robert Gates die entmilitarisierte Zone des innerkoreanischen Grenzorts Panmunjom. Dort verkündete sie schärfere Strafen gegen Pjöngjang, um dessen »nuklearen« Bestrebungen Einhalt zu gebieten. Der demonstrative Charakter dieses »Besuches« offenbarte auch das weitere Gepäck der US-Außenministerin: neue Wirtschaftsembargos gegen Nordkorea und die Ankündigung von der Zunahme der gemeinsamen Militärmanöver mit Südkorea in den kommenden Monaten. Das hatte der Pressesekretär des Pentagons, Jeff Morrell, bereits auf der Pressekonferenz am 14. Juli ausgeführt: »Auch werden gemeinsame Militärmanöver bei den Verhandlungen 2+2 [zwischen Nord- und Südkorea sowie China und den USA] zur Sprache gebracht. Zu denen gehören neue See- und Luftmanöver im japanischen Meer und Gelben Meer.« Weiter führte Morell aus: »All diese Manöver sind defensiver Natur, aber sie geben Nordkorea eine klare abschreckende Botschaft und demonstrieren unsere unerschütterliche Verpflichtung zur Verteidigung Südkoreas.« (7)

Von Seoul flog die US-Außenministerin nach Hanoi zur asiatischen Sicherheitskonferenz. Dort warf Hillary Clinton der Regierung in Pjöngjang ein »provokatives, gefährliches Verhalten« vor. Daraufhin kündigte ein Sprecher der nordkoreanischen Delegation eine »physische Antwort« an und sprach von »Kanonenbootdiplomatie« und einer Bedrohung der nationalen Souveränität. (8)

Nur drei Tage später kreuzten 20 Marineschiffe und 200 Kriegsflugzeuge aus Südkorea und den USA, darunter der eigens nach Korea geschickte Flugzeugträger »George Washington« vier Tage lang zwischen Südkorea und Japan. Weitere Militärübungen wurden für August geplant.

Mit der Verschärfung ihres Kurses reagieren die USA auf die schwache Resolution des Weltsicherheitsrats. Der hatte den Untergang der südkoreanischen Korvette »Cheonan« im März verurteilt, ohne den angeblichen Angreifer Nordkorea zu erwähnen.(9)

Peking hatte eine schärfere UN-Resolution verhindert und sich »tief besorgt« über die südkoreanisch-amerikanischen Manöver geäußert. Sie würden die Spannungen in der Region weiter anheizen.

Laut südkoreanischen Presseberichten haben die USA bereits seit Juni bei rund zehn Banken in Südostasien, Südeuropa und dem Nahen Osten heimlich etwa 100 Konten einfrieren lassen, über die Nordkorea angeblich illegale Geschäfte abwickeln soll. (10)

Warum heizt die US-Administration gerade jetzt das Koreaproblem an? Sollen hier die Chinesen gebunden werden, um mehr Handlungsfreiheit gegen den Iran zu bekommen?

Trotz – oder aufgrund? – aller wirtschaftlichen, politischen und militärischen Schwierigkeiten scheinen die USA an ihren globalen Plänen und der per Gesetz verankerten Seidenstraßenstrategie (11) festzuhalten. Die Stützpunkte im zentralen US-Militärkommando CENTCOM – vom kaspischen Raum bis zum Horn von Afrika – werden weiter ausgebaut. Ebenso wie im Osten Eurasien wird im Westen und zwar in Wiesbaden das Pendant zu Ginowan auf der Insel Okinawa gebaut.

Völlig unspektakulär war in der US-Armeezeitung Stars & Stripes am 20. Oktober 2009 vom Umzug des Hauptquartiers der US Army/Europe (USAREUR) von Heidelberg nach Wiesbaden zu lesen. (12) Auf dem dortigen US-Airfield Erbenheim soll bis 2013 das neue Europa-Hauptquartier der US Army entstehen. 68 Jahre nach dem Ende des Zweiten Weltkrieges und nach elf US-Präsidenten seit Harry Truman (1945–1953) sollen von einem amphitheaterähnlichen Einsatz- und Kampfführungszentrum aus die militärischen Geschicke Europas gesteuert werden. Das 84 Millionen Dollar teure dreistöckige Zentrum wird auf ca. 26.500 Quadratmetern mit den neuesten Kommunikations- und Planungsgeräten ausgestattet und zur modernsten US-Militäreinrichtung in Europa ausgebaut. Den Grund für den Neubau erläuterte der Operationschef der USAREUR, Brigadegeneral David G. Perkins: »Bisher ist das Hauptquartier der USAREUR weder dazu ausgelegt, noch technisch oder personell so ausgestattet, dass es als Kriegsführungshauptquartier dienen könnte.« Welche neuen Kriege sollen von hier aus ab 2013 geführt werden?

 

Anmerkungen:

 

(1) R. J. Rummel: »Statistics of North Korean Democide Estimates, Calculations and Sources«, STATISTICS OF DEMOCIDE, Chapter 10, unter http://www.mega.nu/ampp/rummel/sod.chap10.htm [09.12.10]

(2) White House: »President Obama ›Outraged‹ by North Koreas Attack«, November 23, 2010, 12:32 PM, unter http://blogs.abcnews.com/politicalpunch/2010/11/white-hou...

(3) Zbigniew Brzezinski, »America and China’s first big test«, Financial Times, 23. November 2010.

(4) Gregory Elich: »Spiralling out of Control: The Risk of a New Korean War«, in Global Research vom 4. Dezember 2010

(5) Justin Raimondo: »Latest incident a provocation – but by whom?«, vom 24. November 2010, http://original.antiwar.com/justin/2010/11/23/korean-conu...

(6) Zitiert aus »Japanese protest US base before Obama visit« in yahoo news, http://news.yahoo.com/s/afp/20091108/wl_asia_afp/japanusd...

(7) http://german.irib.ir/analysen/kommentare/item/113405-hil...

(8) Martin Fritz: »US-Sanktionen gegen Nordkorea. Kalter Krieg wird heißer«, taz vom 23. Juli 2010, http://www.taz.de/1/politik/asien/artikel/1/kalter-krieg-... [09.12.10]

(9) Eine südkoreanische Untersuchung hatte ein Torpedo des Nordens als Ursache für den Tod von 46 Seeleuten identifiziert. Nordkorea bestreitet dies jedoch.

(10) Martin Fritz: »US-Sanktionen gegen Nordkorea. Kalter Krieg wird heißer«, taz vom 23. Juli 2010, http://www.taz.de/1/politik/asien/artikel/1/kalter-krieg-... [09.12.10]

(11) Seidenstraßen-Strategie-Gesetz

Silk Road Strategy Act of 1999 (H.R. 1152-106th Congress)

Offizieller Titel: To amend the Foreign Assistance Act of 1961 to target assistance to support the economic and political independence of the countries of the South Caucasus and Central Asia.

Im Mai 2006 modifiziert:

Silk Road Strategy Act of 2006 (S. 2749-109th Congress)

Offizieller Titel: A bill to update the Silk Road Strategy Act of 1999 to modify targeting of assistance in order to support the economic and political independence of the countries of Central Asia and the South Caucasus in recognition of political and economic changes in these regions since enactment of the original legislation.

(12) Mark Patton: »Contract awarded for Wiesbaden USAREUR center«, in: Stars and Stripes, European edition, 20. Oktober 2009, http://www.stripes.com/article.asp?section=104&articl...

 

mercredi, 08 décembre 2010

Cina e Russia, addio al dollaro tra politica ed economia

Cina e Russia, addio al dollaro tra politica ed economia

Yuan e rubli negli scambi bilaterali. Paolo Manasse: "Ricerca di stabilità e di autonomia da Washington. Ma non è guerra delle valute"

Cina e Russia hanno deciso di effettuare le transazioni commerciali bilaterali nelle proprie valute (yuan-renminbi e rublo), rinunciando al dollaro come moneta universale di scambio.
L'anno scorso, il commercio tra i due Paesi è stato stimato attorno ai quaranta miliardi di dollari. Si pensa che a fine 2010 ammonterà a sessanta miliardi.
Nell'accordo siglato da Vladimir Putin e Wen Jiabao a San Pietroburgo il 24 novembre, molti hanno visto un capitolo di quella "guerra delle valute" che agita sia i mercati finanziari sia la geopolitica mondiale, con il rinnovato interesse dell'amministrazione Obama per l'Estremo Oriente e la crescita record della Cina, nuova superpotenza.
PeaceReporter ha chiesto un parere a Paolo Manasse, professore di Macroeconomia e di Politica Economica Internazionale all'Università di Bologna, docente di Macroeconomia all'Università Bocconi di Milano.

Come si spiega la decisione di Russia e Cina?

C'è un motivo economico e ce ne è uno politico.
Dal punto di vista economico, siamo in un periodo di volatilità dei cambi legato alla crisi. Quando si parla di volatilità, ci si riferisce soprattutto al rapporto tra euro e dollaro. La Russia ha un grande volume di scambi con l'Europa, idem la Cina che ce l'ha anche con gli Usa, quindi sono esposte ai rischi di questa volatilità. E' probabile che almeno nello scambio bilaterale vogliano tutelarsi dai rischi di cambio delle valute, utilizzando le proprie.
L'aspetto politico sta nel fatto che soprattutto la Cina, così facendo, afferma la propria sovranità anche valutaria, mostrando di poter fare a meno del dollaro, cioè contrastando il privilegio tutto statunitense di battere moneta. Può essere letto in chiave di sfida.

C'entra con la cosiddetta "guerra delle valute"?

La guerra delle valute dura da anni. Muove dall'accusa Usa secondo cui la Cina terrebbe la propria moneta artificialmente bassa per guadagnare competitività. Nei meccanismi di mercato, alla domanda molto alta di merci cinesi dovrebbe corrispondere anche una domanda molto alta di yuan per pagarle. La conseguenza naturale dovrebbe essere la crescita di valore della moneta cinese e il deprezzamento del dollaro. Qui invece interviene la banca centrale cinese comprando dollari e vendono yuan per calmierarne il prezzo. Le conseguenze sono il valore basso dello yuan e un accumulo di dollari nelle riserve cinesi.
E' comunque una faccenda che riguarda soprattutto gli Usa, perché sono loro ad avere un enorme deficit commerciale con la Cina. L'Europa molto meno.
Tecnicamente, la scelta di Russia e Cina non c'entra molto con la guerra delle valute.
Anzi, potrebbe avere come effetto la riduzione della domanda di dollari e quindi l'indebolimento della valuta Usa. Chiaramente, non è scontato che ci sia un simile effetto, dipende da quali saranno i volumi degli scambi tra Cina e Russia. Ma comunque l'accordo non può essere visto come un tassello della guerra delle valute.

C'è anche il tentativo di diversificare le proprie riserve valutarie, riducendo la parte in dollari?

Il monopolio del dollaro come moneta di riserva [cioè la valuta con cui le banche centrali dei diversi Paesi accumulano le proprie riserve, date generalmente dal surplus commerciale, ndr] è già finito con l'avvento dell'euro. In genere le banche centrali tengono un portafoglio abbastanza bilanciato, diversificato, per evitare che fluttuazioni nel mercato dei cambi provochino problemi. Non si punta mai al cento per cento su una sola valuta.
In questo caso, mi sembra che si punti più a evitare l'impatto delle fluttuazioni sulle transazioni, sul commercio. A parte la valutazione politica, certo, cioè l'affermazione di indipendenza da parte della Cina.
Se un cinese esporta merci facendosi pagare in dollari o euro, e una delle due monete crolla, ci perde un sacco di soldi. Dal momento in cui si fanno le transazioni al momento in cui vengono liquidate, si rischia. Di solito ci si assicura con il mercato a termine: uno vende i dollari di domani a un prezzo che conosce oggi. Ma se fa gli scambi con la moneta nazionale, ha risolto il problema alla radice.

Gabriele Battaglia

lundi, 06 décembre 2010

The Hermit Kingdom

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The Hermit Kingdom

Matt PARROTT

Ex: http://www.counter-currents.com/

North Korea is perhaps more than any other nation on Earth, completely out of step with our global cosmopolitan overlords. On some level, the fascination in racialist circles is understandable, as the regime is defiantly rejecting foreign influence, celebrating their shared identity, and (most importantly for us) embracing their racial heritage. It’s certainly presented in a distorted light by our government and media.

But North Korea really sucks. Kim Jong-il is hardly a fascist ruler in the Western tradition, with habits and hobbies more reminiscent of Mugabe than Mussolini. He’s a terrible steward of his people, indulging in the sort of material excess that Puff Daddy’s entourage would find embarrassing. For instance, when traveling through Russia on his own private train, he takes breaks for airlifted lobster dinners.

For all the talk of rejecting modernity, he’s a basketball fanboy who delighted in receiving a basketball signed by Michael Jordan on a state visit from Madeleine Albright. He’s seen more mainstream American movies than any of us have. His family’s attempt to replace his country’s traditional beliefs with a bizarre “cult of personality” is about as far from any Tradition as one can get.

However, as awful as North Korea is, and it’s about as awful as it gets, it has managed to retain its ethnic identity intact. It’s hard to say how much of this is actually due to ideology (his cultural tastes leave me skeptical). I suspect it’s for the same reason that my hometown has remained ethnically homogeneous: poverty.

Just as God strikes his favored females with ugliness to protect their virginity, he strikes his favored communities with poverty to protect their racial purity. Had the good people of Michigan chased Henry Ford out of the state with pitchforks and burned their factories to the ground, the state would still be a safe and solvent replica of its original settlers’ Nordic homeland.

South Korea, Japan, Taiwan, and China are increasingly under pressure to solve their “demographic problem” of growing old by swallowing the spider of third world immigration. North Korea has been under no such pressure. Even African war refugees would rather starve in a tent city in a tropical climate among their own than starve in North Korea.

As awful as North Korea is, the rising tide of color will part like the Red Sea around it. As awful as North Korea is and as maniacal as Kim Jong-il is, a nation that doesn’t do away with itself can redeem itself later. It can have a future. Fortunately, there’s no dichotomy here. We can borrow the one thing that North Korea’s doing right, then abandon our colonial holdings in Japan, South Korea, and Taiwan so the Chinese won’t feel the need to prop up this madman and his buffer state.

samedi, 04 décembre 2010

Mishima, l'eterna giovinezza di un samurai

Mishima, l'eterna giovinezza di un samurai

Quarant’anni fa moriva lo scrittore giapponese

Lo ricorda un ex ragazzo che crebbe nel suo mito

Strumenti utili
mishimacccvvvv.jpgLe parole non bastano. Così parlò Yukio Mishima, e il 25 novembre del 1970 si uccise davanti alle telecamere col rito tradizionale del seppuku. Alle parole seguì il gesto e la scrittura debordò nella vita per compiersi nella morte. Il suicidio eroico di Mishima scosse la mia generazione, versante destro. Era il nostro Che Guevara, e sposava in capitulo mortis la letteratura e l’assoluto, l’esteta e l’eroe, il Superuomo e la Tradizione. Lasciò un brivido sui miei quindici anni. Poi diventò un mito a diciassette, quando uscì in Italia Sole e acciaio, il suo testamento spirituale. È uno di quei libri che trasforma chi lo legge; gustato riga per riga, non solo letto ma vissuto, come un libro d’istruzioni per montare la vita, pezzo per pezzo. Altro che Ikea, il pensare si riversava nell’agire. Le parole non bastano.

Andammo in palestra, dopo quel libro, tra i manubri e i pesi, sulla scia di Mishima e del suo acciaio per scolpire il corpo all’altezza dei pensieri e per dare una vita ardita a un’indole intellettuale. Correvamo a torso nudo d’inverno con alcuni pazzi amici per andare incontro al sole. Dopo una corsa di dieci chilometri c’era un ponte che era la nostra meta finale perché sembrava che corressimo verso il cielo. Arrivavamo sfiniti ma a testa alta, con uno scatto finale, e una benda rossa sulla fronte. Pazzi che eravamo, illusi di gloria. Ridicoli. Vedevamo il sole come obbiettivo, non guardavamo sotto, all’autostrada, che banalmente scorreva sotto il ponte. Eravamo nella via del Samurai, mica sull’asfalto. Inseguivamo il mito. Un mito impolitico, che ci portava lontano dall’impegno militante e ci avvicinava a quella comunità eroica che Mishima aveva fondato due anni prima di darsi la morte. Mishima diventò col tempo il nostro Pasolini, disperato cantore di un mondo antico contro il mondo moderno e le sue macerie spirituali, l’americanizzazione e i consumi. Oggi di Mishima non è più proibito parlare, tutte le sue trasgressioni restano vietate, eccetto una che però basta a glorificarlo agli occhi del nostro tempo: Mishima era omosessuale. Sposato, ma omosessuale. E così viene oggi celebrato dai media e riabilitato.

Su Radio3 è andato in onda qualche giorno fa un bel programma a lui dedicato di Antonella Ferrera. Ho scritto più volte di lui, accostandolo al Che, d’Annunzio e Pasolini. Fu grande gioia ripubblicare, con un mio saggio introduttivo, Sole e acciaio, dieci anni dopo la sua prima lettura. Avevo ventisette anni ma avevo un conto in sospeso con la mia giovinezza, e fui felice di onorarlo. Il peggior complimento che ricevetti fu da un professore che allora mi disse: è più bella la tua introduzione del testo. Mi piace ricevere elogi, non nego la vanità. Ma quell’elogio fu peggio di un insulto, disprezzava il breviario della nostra gioventù. Come poteva paragonare un saggetto giovanile e letterario a un testamento spirituale così denso e forte? L’ho riletto dopo svariati anni, quel piccolo libro; non era un libro sacro, d’accordo, ma lo trovai ancora bello e teso, spirituale e marziale.

Poi c’era Mishima romanziere, gran letterato, ma poco rispetto al testimone dell’Assoluto. Certo, Mishima soffriva di narcisismo eroico, c’era in lui una componente sadomaso e molto di quel che lui attribuiva allo spirito dell’antico Giappone imperiale proveniva in realtà dalla letteratura romantica d’occidente e dalle sue letture. Mishima era stato lo scrittore più occidentale del Giappone, era di casa in America, veniva in Italia, amava Baudelaire e d’Annunzio, Keats e Byron, perfino Oscar Wilde. Faceva il cinema, scriveva per il cinema e per il teatro moderno, amava i film di gangster, era amico di Moravia. E c’era in lui quell’intreccio di vitalismo e decadentismo comune agli esteti nostrani. La stessa voluttà del morire di d’Annunzio, lo stesso culto della bella morte degli arditi e poi di alcuni fascisti di Salò...

Ma il miracolo di Mishima fu proprio quello: ritrovare nella modernità occidentale il cuore antico del suo Giappone, il culto dell’imperatore, la via del samurai, il pazzo morire; il nostro pensiero e azione che diventano in Giappone il crisantemo e la spada. Ribelle per amor di Tradizione. Certo, dietro il suicidio non c’è solo il grido disperato e irriso verso lo spirito che muore; c’è anche il gusto del beau geste clamoroso e c’è soprattutto l’orrore della vecchiaia, del lento e indecoroso morire nei giorni, negli anni. Dietro il samurai c’era Dorian Gray. Ma colpisce la sua cerimonia d’addio, vestito di bianco come si addice al lutto in Giappone, e prima il suo congedo in scrittura. Saluto gli oggetti che vedo per l’ultima volta... Mi siedo a scrivere e so che è l’ultima volta... Poi il pranzo dai genitori alla vigilia, la ripetizione fedele delle abitudini, come se nulla dovesse accadere. E il giorno dopo conficcarsi una lama nel ventre e farsi decapitare, dopo aver gridato tra le risa dei soldati, l’occhio delle telecamere e il ronzio degli elicotteri, il suo discorso eroico caduto nel vuoto.

Quell’immagine ti resta conficcata dentro, come una spada, capisci che l’unica morale eroica è quella dell’insuccesso, pensi che il successo arrivi quando il talento di uno si mette al servizio della stupidità di molti; diffidi delle vittorie e accarezzi la nobiltà delle sconfitte. E leggi Morris e la Yourcenar che a Mishima dedicò uno splendido testo, per accompagnare con giuste letture il suo canto del cigno. Su quegli errori si fondò la vita di alcuni militanti dell’assoluto, alla ricerca di una gloria sovrumana che coincideva con la morte trionfale, la perdita di sé nel nome di una perfetta eternità... Perciò torno oggi in pellegrinaggio da Mishima e porto un fiore di loto ai suoi 45 anni spezzati, e ai nostri quindici anni spariti con lui.

vendredi, 03 décembre 2010

Un coup d'Etat civil pro islamique à Ankara...

Un coup d'État civil pro islamique à Ankara...

Par Jean-Gilles Malliarakis

Ex: L'Insolent

  

Les conséquences de la réunion de l'Otan à Lisbonne directes et indirectes, ne manquent pas de se faire sentir. Et cela commence par l'un des principaux alliés, la Turquie. Les années 1946-1950 avaient vu la mise en place, dans ce pays, de gouvernements démocratiques formellement civils. Plusieurs coups d'État les ont renversés successivement. Or pour la première fois depuis 60 ans, deux ministres (1) ont pris la décision d'y mettre à pied trois généraux. (2) Ceux-ci se trouvent impliqués dans le cadre du complot Bayloz remontant à 2003. Le chef du parti laïc de gauche CHP soutient de façon significative les trois putschistes, qui font appel aux tribunaux spéciaux. Cela s'est produit la semaine écoulée, qui suivait immédiatement la rencontre de l'alliance occidentale.

S'agissant de tout autre pays, on trouverait cette situation critique du point de vue journalistique et conjoncturel. L'événement serait couvert de façon dramatique par les gros moyens d'information. Et on jugerait aussi cette normalisation, sur le fond, parfaitement conforme aux principes de la gouvernance mondiale.

Il n'en va pas de même dans une société où l'élément militaire joue, ou plutôt jouait jusqu'à une date très récente, un rôle central dans tous les réseaux de pouvoir. Rappelons ainsi que le poids économique de la couche dirigeante de l'armée issue du kémalisme, en fait le principal partenaire apprécié en France par les milieux se disant de gauche et non moins laïcistes.

Les dirigeants civils, eux-mêmes disciples de l'islam moderniste (3), ont obtenu à Lisbonne de la part des Américains et des autres alliés une concession qu'ils jugent essentielle. On leur a accordé que l'Iran ne soit pas explicitement mentionné comme adversaire dans le cadre de la mise en place du bouclier anti-missiles de l'Alliance atlantique. Dans ce contexte, ils se sentent en mesure de rogner un peu plus les prérogatives des militaires laïcs.

On pourrait donc aboutir au renversement complet du rapport de forces établi par les jeunes-turcs en 1909, puis par le kémalisme en 1923, un concept paradoxal : un "coup d'État" civil.

En apparence, formellement, si cette évolution aboutit, elle ne rencontrera que des approbations, au moins dans un premier temps, sur la scène internationale.

Pour le moment d'ailleurs un seul pays, pratiquement, semble s'y opposer, émettre des réserves, agiter et alerter plus ou moins discrètement ses propres éléments d'influence. Il s'agit de l'État qui avait tissé depuis le début des années 1950 des liens très solides de coopération avec l'armée d'Ankara. Pour le moment, en effet, le gouvernement israélien actuel redoute à plus ou moins juste titre une coalition régionale des pays musulmans. Ceci ne s'était jamais produit depuis la fondation d'Israël. L'État hébreu, de guerre en guerre, et pendant ces périodes intercalaires que l'on appelle, un peu imprudemment peut-être, "la paix" avait toujours su séparer les deux puissances musulmanes régionales non arabes, l'Iran comme la Turquie, et s'employer efficacement à diviser les Arabes entre eux. Sur ce dernier terrain il n'a pas rencontré trop de difficultés.

Dans sa chronique de Zaman Today du 27 novembre M. Ergun Babahan prend à cet égard à partie l'ancien ambassadeur américain en Turquie M. Eric Edelman. Il en fait à la fois le porte-parole à Washington d'une certaine coulisse et il l'accuse de "vivre dans un monde virtuel", de se montrer "coupé du réel". Le vrai reproche porte sur l'évaluation de la durée, que ses partisans jugent illimitée, du gouvernement turc actuel.

De ce dernier point de vue nous ne disposons à vrai dire d'aucune boule de cristal. Nous les laissons au Quai d'Orsay. Contentons-nous des faits.

Lors de la sortie très spectaculaire de Erdogan à Davos en janvier 2009, puis encore lors des incidents de la flottille Mavi Marmara en mai 2010, on a pu remarquer que le gouvernement d'Ankara ne craignait pas désormais de s'aliéner les réseaux pro-israéliens du monde entier. Aux Etats-Unis, où il réside, remarquons d'ailleurs que Fethullah Gülen tient des propos apaisants. Certains observateurs mal informés ou naïfs, comme M. Gurfinkel dans Valeurs actuelles, les prennent ou tentent de les faire prendre à leurs lecteurs pour argent comptant.

Or, désormais, le quotidien officieux Zaman est monté d'un cran dans la séparation : on y met en accusation l'influence sioniste en Amérique du nord. Personne ne peut croire inconscients de la gradation, les professionnels de la communication qui fabriquent ce journal, très proche du pouvoir et techniquement très bien fait. Y compris dans l'usage des mots, il ne nomme plus d'ailleurs désormais ses adversaires pour "sionistes", il revient à un registre sémantique qui servait beaucoup à la charnière des XIXe et XXe siècles.

Or, parallèlement, les dirigeants d'Ankara haussent également le ton dans leurs négociations avec l'Europe. Ils jugent en effet que la défense du continent a été confirmée ces dernières semaines comme dépendant intégralement du bon vouloir de Washington. Plusieurs longues analyses officieuses confirment ce fait, pour tout observateur lucide, malheureusement évident. (4) Il semble pour nous humiliant, mais pour les Turcs réconfortant, que l'Union "européenne", les guillemets me paraissent désormais s'imposer, persiste à ne penser son destin qu'en tant que grosse patate consommatique.

Représentée au plan international par les glorieux Barroso, Van Rompuy et Lady Ashton l'organisation bruxelloise des 27 petits cochons roses se préoccupe plus de sauver ses banquiers que de défendre ses ressortissants.

Le projet "Eurabia" a été décrit (5) comme préparant pour les prochaines décennies, au nord de la Méditerranée la situation de dhimmitude que subissent depuis des siècles les chrétiens d'orient. Ce processus de domestication des peuples par la trahison de leurs élites économiques semble donc en bonne voie.

Les ennemis de la liberté si actifs contre notre continent s'y emploient dans les coulisses de Bruxelles.

En professionnels de la conversion par conquête, je ne doute pas que les islamistes turcs observent leurs proies, qu'ils l'hypnotisent par leurs mots d'ordre et qu'ils se régalent de leurs faiblesses. On peut cependant encore s'y opposer. (6)

 

Notes

 

1.                   Il s'agit des ministres de l'intérieur Bechir Atalay et du ministre de la Défense Vecdi Gönül

2.                   Les militaires limogés sont un général de gendarmerie, du général Abdullah Gavremoglou et du major Gürbüz Kaya.

3.                   Nous donnons à ce sujet quelques précisions dans L'Insolent du 23 novembre "Les dirigeants turcs vrais islamistes et faux bisounours".

4.                   cf. les analyses publiées dans Zaman les 24 et 27 novembre

5.                   cf. le livre de Bat Ye'or "Eurabia, the Euro-Arab Axis" 2005 ed. Farleigh Dickinson University Press, version française "Eurabia, l’axe euro-arabe" 304 pages 2006 éd. Jean-Cyrille Godefroy.

6.                   J'aurais le plaisir de signer mon livre "La question turque et l'Europe" au prochain salon du livre d'Histoire le dimanche 5 décembre. Mais vous pouvez aussi dès maintenant l'acquérir directement sur le site des Éditions du Trident. Rappel : il est plus courtois vis à vis des organisateurs, pour les personnes qui se rendraient à ce salon d'acquérir les ouvrages sur place.