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SYNERGIES EUROPÉENNES - VOULOIR (Bruxelles) - Novembre 1988
Les clefs du succès japonais: polythéisme et homogénéité
par Eric BAUTMANS
Kuwabara Takeo nous propose, dans ce recueil d'essais et de conférences, une hypothèse très intéressante: selon lui, les facteurs fondamentaux du suc-cès industriel japonais, issu de la restauration Meiji de 1867, sont l'homogénéité culturelle du peu-ple nippon et le polythéisme ambiant, profondément ancré dans le mental japonais.
Cette dernière hypothèse contraste fortement avec cel-le de Max Weber, pour qui l'éthique protestante est le fondement même du capitalisme moderne. Ku-wabara Takeo prend position sur cette problématique: "Jeunes, nous pensions que seule l'élimination du bouddhisme assurerait l'amélioration du Ja-pon. Mais à l'heure actuelle, il me semble que les religions monothéistes, qu'il s'agissent du christia-nis-me ou de l'Islam, dans leur recherche d'une division claire et nette entre noir et blanc, ennemi et ami, sont sur le point de nous entraîner vers une guerre nuclé-aire. A la lumière d'une telle menace, nous avons besoin d'admettre l'existence d'autres dieux, de dieux de l'ouverture, de la co-existence pacifique" (p. 151).
Non seulement le monothéisme se trouve être into-lé-rant d'un point de vue idéologique mais il s'est sou-vent opposé à la science moderne. Au Japon, par con-tre, une longue tradition unanime de respect en-vers la science a toujours existé. Cette attitude a, bien évidemment, facilité l'adoption de la technologie européenne.
L'Ere Togukawa
Une des qualités du peuple japonais, selon Kuwa-ba-ra Takeo, est sa séléctivité. Le Japonais n'est pas un imitateur inconditionnel. Ainsi, malgré tous les ef-forts des missionaires chrétiens (1), à partir du XVIè-me siècle, seule une infime minorité de Japo-nais se convertirent.
En 1614, début de l'ère Togukawa, le Japon se fer-me. Seul le comptoir de Nagasaki reste ouvert aux Eu-ropéens. Les dernières innovations en matière d'ar-mements, de mathématiques et de médecine con-ti-nuent à pénétrer au Japon. On trouve également à Na-gasaki une école des Etudes Hollandaises qui tra-duit la majorité des ouvrages de référence techniques publiés en Europe. Il est intéressant de noter que ces aspects sont limités à la sphère scientifique ou techno-logique, le Japon ne s'intéresse pas à la pen-sée politique ou philosophique occidentale.
Pendant ce temps, le confucianisme, code moral de tou-te la nation, permet à l'autorité centrale de mainte-nir l'ordre féodal et de préserver la paix grâce à une politique d'autocentrage longue de deux siècles et de--mi. Au fur et à mesure que la connaissance des clas--siques chinois et japonais se répand à travers tout le pays se forge une culture raffinée partagée par tous.
"Durant le règne des Togukawa, le Japon s'est repo-sé - je ne dirais pas qu'il a dormi. Le pays profita de cet intermède pour ce préparer jusqu'à ce que la né-cessité l'oblige à mobiliser son ingéniosité et sa for-ce pour s'adapter à la civilisation occidentale moder-ne. Nos aïeux ont souffert (2), ils ont travaillé dur et très vite, car ils savaient que leur survie et celle du Japon dépendait du succés de leur entreprise. C'est une révolution culturelle née de l'effort du peuple ja-po-nais tout entier" (p. 77).
La Révolution Meiji
Notre auteur insiste sur le fait qu'il s'agit bien d'une ré-volution, la révolution Meiji, et non d'une restau-ration comme on l'appelle souvent. "Une révolution ne veut pas dire amélioration de ce qui existe déjà, mais le renversement d'un coup brutal de tout ce qui existait. En 1871, l'empereur Meiji proclame une loi en-courageant la consommation de viande et l'adop-tion de la coiffure et de l'habillement occidental" (p.162). D'autres décrets suivirent: abolition (impo-pu--laire) de la vente de jeunes filles, interdiction de se promener nu en public, de porter les sabres dictinc-tifs des samouraïs, etc... Un code civil de type euro-péen fut introduit, une armée de paysans levée, une nou-velle constitution adoptée. Tous ces change-ments cataclysmiques modifièrent de fond en comble la vie du pays.
On a souvent vu des pays sous-developpés, soumis par une invasion ou une colonisation, forcés d'ac-cep-ter une culture et un mode de vie différents des leurs. Ceci ne s'est jamais produit au Japon. D'un point de vue économique, l'Empire du Soleil Levant était sous-développé, au début de l'ère Meiji, mais une culture sophistiquée avait profondément pénétré le peuple. Par la suite, les Japonais se sont mis à ab-sor-ber délibérément des éléments d'autres cultures, tout en maintenant leur indépendance culturelle et po--litique, et réussirent de la sorte à moderniser leur na-tion à une vitesse étonnante.
Homogénéité et citoyenneté
"L'homogénéité qui domina les îles japonaises pen-dant des millénaires, combinée à une société orga-ni-que, rendait toute intervention officielle dans la vie pri--vée des individus plutôt non problématique. Cette tra-dition autoritaire se prolongea au cours de l'ère Mei-ji et propulsa le Japon dans son effort de moder-ni-sation" (p 138).
"En fait, c'est l'holisme —et non le totalitarisme— qui caractérisa et continue à caractériser la société ja-po-naise; on ne demande pas aux gens d'en faire à leur gré. Dans cette tradition, il n'est pas souhaitable de voir des individus sortir de la norme; c'est, bien sûr, un principe extrêmement utile quand il devient né-cessaire d'entreprendre une tâche collective. Parmi les facteurs expliquant sans doute le mieux la réus-si-te rapide du Japon, il faut citer l'élément holiste et vo-lontariste" (p. 151).
Les paroles d'un ami de Kuwabara Takeo permettent de mieux comprendre l'état d'esprit des Japonais au début de l'époque révolutionnaire: "Yanagito Kunio (1875-1962) m'a dit que, dans sa jeunesse, le mot Ji-yû (liberté) était utilisé dans le sens de Jiyû Katte ou "fait ce qui te plaît", ce qui était équivalent à Wa-gamama (égoïsme)" (p. 149).
De même, au Japon, le plus insigne des honneurs qu'un homme puisse porter est celui de citoyen. "Ain--si nommer quelqu'un Shominteki (citoyen, ci-ta-din) est une marque de respect, c'est lui signifier qu'il est un ami du peuple et en partage ses préoc-cu-pa-tions. Feu le Dr Tomanaga, Prix Nobel de physi-que, était aimé du public japonais et, à ce titre, était ap-pelé Shominteki, parce qu'il avait la qualité de par-tager les goûts populaires. Au Japon, il existe des différences de niveau social lié à la profession ou à la richesse, mais la culture japonaise pénètre toutes les couches sociales" (p. 183).
Toutes les révolutions réussissent-elles?
"Toutes les révolutions ne réussissent pas. Ainsi, en Afghanistan, le roi Amanullah Khan (règne de 1919-1929) tenta de moderniser par le haut son pays. Mais il se heurta à une telle opposition qu'il dut ab-diquer et fuir" (p.61). On peut également s'étonner du fait que le Japon connut une révolution industriel-le et culturelle au XIXième siècle et non son voisin la Chine, elle aussi en contact avec l'Europe. Kuwa-bara Takeo déclare plus loin, à ce sujet, que "l'exis-tence au Japon d'un Institut des Etudes Hollandaises illustre parfaitement la différence entre les attitudes de la Chine et du Japon envers les civilisations euro-péennes. La Chine, une des plus anciennes civilisations du globe, a été envahie à maintes reprises par des nomades, mais sa culture n'a jamais été réelle-ment menacée. C'est sans doute leur conviction iné-bran-lable dans la supériorité de leur civilisation qui fit en sorte que les Chinois ne ressentirent pas le be-soin de s'intéresser aux innovations occidentales" (p. 129). Rappelons la phrase de Confucius: "Les bar-bares de l'Est et du Nord, malgré leurs chefs avi-sés, sont encore inférieurs aux Chinois privés de tout chef".
Sans conteste cette morgue intellectuelle, encouragée par la dynastie réactionnaire Mandchoue, est en gran-de partie responsable du retard chinois. Rappe-lons également la taille du pays, le centralisme po-li-tique de l'administration et l'intérêt vorace des puis-san-ces occidentales (et ironie du sort, par la suite, du Japon lui-même). Chacun de ces facteurs joua en défa-veur de la Chine.
Mais, "des nombreux facteurs qui expliquent la ra-pi-dité de la modernisation japonaise, je pense que l'é-lé-ment holiste est un des plus importants. Mis à part No--bunaga, il y eut très peu de dictateurs dans l'his-toire du Japon et il n'y en avait pas vraiment besoin car le pays était relativement facile à unir sous un leadership sans devoir recourir à une utilisation ex-ces-sive de la force" (p. 151).
Pour résumer, quels semblent donc, selon Kuwa-ba-ra Takeo, les principaux ingrédients du succès nip-pon? Le polythéisme (la réceptivité), le nationalisme, source de la volonté de progrès (le Japon doit assu-rer son indépendance nationale) et de la force qui sou--tient son effort de redressement et enfin, l'homo-généité ethnoculturelle: le Japon, libre de tout conflit social, culturel ou ethnique, put se consacrer à sa tâ-che de rénovation.
Le Japon et sa spécificité actuelle
Il ne faut pas conclure de ce qui précède que Kuwa-bara Takeo n'est qu'un nostalgique invétéré. "Il y a long-temps, la culture japonaise était symbolisée par le Wabi et le Shioki, qui signifient tous deux quel-que chose comme "un goût de la simplicité et de la quié-tude". Cet état d'esprit a disparu depuis belle lurette" (p. 93).
Tout en respectant le théâtre Nô (4) et un peu moins l'art de l'Haïku (5), il se présente surtout comme un partisan d'une tradition vivante. D'après lui, il est plus important aujourd'hui pour comprendre la spé-ci-fi-cité japonaise de se pencher sur sa culture actuel-le: celle de la télémanie, de l'excursion de masse, du bis-trot japonais, du journal à énorme diffusion, de la culture de masse; il est plus important de se pencher sur ces aspects que d'étudier les classiques.
Dans son troisième essai, "Tradition contre Modernisation", Kuwabara Takeo nous énonce ses raisons pour ne pas prendre en modèle l'Occident contemporain. Pour lui, chaque culture a ses propres défauts et qualités. Modernisation ne rime pas (ou plus) né-ces-saire-ment avec occidentalisation.
Depuis la fin des années septante, Kuwabara Takeo a insisté sur l'importance de la puissance globale, commerciale, industrielle et financière qui, selon lui, sera comparable, dans le futur, à celle des secteurs militaire ou économique.
Homogénéité et apport culturel
Kuwabara Takeo, par ses thèses holistes et organi-cis-tes, se rapproche de l'école de Kinji Imanishi, le célèbre anthropologue (6), de Tadao Limesao (7) et de Takeshi Umehara (8). L'ancien premier ministre Na-kasone s'inscrit également dans le même mouve-ment: lors d'une allocution prononcée en septembre 86 (9), celui-ci a, en effet, déclaré que le niveau d'é-du-cation au Japon était plus élevé que celui des Etats-Unis, parce que les Japonais forment une race ho-mogène, alors qu'aux Etats-Unis toute une série de minorités se côtoient, avec tous les troubles so-ciaux et raciaux que cela entraîne.
Kuwabara Takeo démontre amplement dans son li-vre que métissage ou apport culturel n'implique pas mé--tissage ou apport racial. Certains (10), pendant la ré--volution Meiji, avaient préconisé le métissage ra-cial, y voyant une panacée apte à résoudre les pro-blèmes du Japon de l'époque. D'aucuns, aujourd'hui enco-re, dans des pays civilisés, tiennent un dis-cours d'une niaiserie aussi navrante, en refusant de pren-dre acte des réalisations spectaculaires d'un Ja-pon qui manifeste depuis 120 ans une volonté bien arrêtée de conserver son homogénéité.
Eric BAUTMANS.
KUWABARA Takeo, Japan and Western Civilisa-tion, University of Tokyo Press, 1986, 205 pages, ¥ 3800.
Notes
(1) Les Portugais atteignirent le Japon en 1542. C'est alors que fut tentée l'évangilisation du pays avec le voyage de St. Fran-çois-Xavier (1549). En 1614, le Japon se ferma aux étran-gers et les chrétiens furent persécutés. Le nombre total de chré-tiens était d'environ 600.000 (chiffres des Jésuites). A par-tir de 1858, de nouveaux missionaires furent accueillis. Il y eut même lors de l'occidentalomanie de l'ère Meiji naissante des propositions émanant de personnes et de journaux impor-tants (par exemple, Jiji Shimpo), recommandant la conversion du pays au christianisme.
(2) De très grands maîtres de la peinture classique, Kano Ho-gai et Hoshimoto Gaho, par exemple, mourraient de faim dix ans après la révolution.
(3) En 1957, date de la conférence de Kuwabara.
(4) "Le drame Nô, pour utiliser un exemple classique, n'est pas mort mais il n'est ni contemporain ni classique" (p. 180).
(5) Voir plus particulièrement son onzième essai: "L'art mi-neur du Haïku moderne".
(6) Agé de 85 ans, presque complètement aveugle, il ne reven-dique plus le titre d'anthropologue. Il s'est rendu célèbre par ses études sur les primates. C'est un féroce anti-darwinien. D'a-près Imanishi, l'unité d'évolution ne serait pas l'individu mais l'espèce. Sa thèse sur la ségrégation de l'habitat est très originale.
(7) Directeur du musée d'ethnologie à Osaka.
(8) Anthropologue, responsable de l'établissement d'un centre d'études japonaises à Kyoto.
(9) "M. Nakasone et les Omajiri (métis)" in Le Soir, 26/ XII/86.
(10) Tokahashi Yoshio, publia en 1884 un livre intitulé L'amélioration de la race japonaise. Il y recommandait le mé-tis-sage entre Occidentaux et Japonais afin d'améliorer la race nippone - le sang européen constituant une "richesse" pour le Ja-pon.
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par Alexandre LATSA - http://www.agoravox.fr Après la domination espagnole (XVIIIe siècle) et anglaise (XIXe siècle), l’Amérique va entrer au XXe siècle dans un première phase de recomposition territoriale (unification après la guerre de Sécession, récupération de l’Alaska aux Russes, victoire sur les Espagnols, victoire sur les Britanniques...), puis se lancer dans un maillage intense de son territoire via des voies de chemin de fer qui stimuleront l’activité et le commerce et préfigureront sa position économique dominante pour le siècle suivant.
C’est le début du siècle américain, de la thalassocratie transatlantique et transpacifique et du nouvel ordre mondial.
La grande guerre civile européenne de trente ans (1914-1945) laisse l’Europe (et le monde) divisé en deux pôles concurrents, le pôle « américano-occidental » et le pôle « soviétique ». La guerre froide durera quarante-cinq ans, jusqu’en 1991, année qui verra la disparition d’un des pôles et l’instauration pratique du nouvel ordre mondial. Dans les vingt-cinq années qui suivirent, le monde entra dans une fiction de courte durée, pendant laquelle on crut que l’extension de l’Otan (parapluie étoilé protecteur) et du nouvel ordre économique mondial (FMI, OMC, BERD, Communauté européenne, OCDE, European Round Table, club de Rome, Forum de Davos...) assurerait la pérennité et la sécurité a jamais. Pour la première fois dans l’Histoire, un « empire » semblait avoir la velléité et les moyens d’imposer ses règles à la planète entière. On parla même de fin de l’Histoire. D’autres affirmèrent même que demain tous seraient Américains. La Chine s’éveillait doucement, l’Inde également, le monde musulman semblait abasourdi par la frappe irakienne de 1991, la construction européenne prenait son envol sur les parallèles de l’Otan pendant que le cœur du défunt concurrent soviétique se mourrait. En 1999, le dernier grain de sable à « l’extension Est » (la Yougoslavie) fut anéantie. La Serbie (qui était à la Yougoslavie ce que la Russie était à l’URSS) fut anéantie en 78 jours et y fut construite la plus grande base militaire américaine de l’étranger, sur le flanc Est-oriental de l’Europe. La présence militaire américaine dans le monde à l’entrée du XXIe siècle était plus importante qu’aucune puissance ne l’avait jamais fait dans l’Histoire (Cf Listes des bases américaines). Néanmoins l’accalmie fut de courte durée : le 11 septembre 2001, des pirates de l’air proches des mouvances islamistes radicales lancèrent la première version du jihad aérien en détournant des avions de ligne pour les écraser sur des infrastructures aux État-Unis. L’empire était frappé au cœur. Ce fut la fin du nouvel ordre mondial tel que certain nous l’avait promis, il n’avait duré que trente ans. L’Amérique déclara alors une guerre planétaire au terrorisme que, sept ans plus tard, elle n’a toujours pas vaincu, enlisée avec l’Otan dans des conflits à basse intensité et sur des territoires incontrôlables et incontrôlés (Irak, Afghanistan, Somalie...).
Pourtant cet élément qui modifia l’Histoire n’était pas une surprise pour tous les spectateurs du théâtre des opérations. Certains avaient préconisé ce choc à venir entre les « civilisations » et notamment entre le Sud (musulman) et le Nord (Occident). Ceux-là préconisaient aussi que le monde était « divisé » en grands espaces, différents, et résolument adversaires, ou ennemis. Cette théorie des « civilisations en conflit » avait même ses défenseurs, au cœur du dispositif atlantiste. Ceux-là avaient déjà affirmé que l’Est et l’Ouest étaient deux mondes différents, voir opposés. Curieusement, la frontière entre ces deux Europe (« catholique-protestante » et « orthodoxe ») se situait sur l’ancienne délimitation de l’Europe post-soviétique et de l’Europe de l’Ouest (americano-occidentale). Pour les stratèges américains, après le contrôle des mers (effectif à la fin de la guerre froide), restait le contrôle des terres, notamment celles que les stratèges visaient depuis le début du siècle : le Heartland.
Le XXe siècle a vu l’Amérique passer du statut isolationniste à celui de puissance impérialiste et dominante. Cette expansion hors frontières de l’Amérique s’est faite en deux étapes principales, la prise de contrôle des mers tout d’abord, puis la prise de contrôle des terres.
Tout d’abord l’expansion maritime (principe du contrôle des mers et du développement de la marine militaire pour protéger les échanges commerciaux). Ces théories ont été très clairement exposées par de nombreux stratèges américains à la fin du siècle dernier, dont Alfred Mahan qui énonça l’intérêt pour l’Amérique d’acquérir une marine aussi puissante que l’Angleterre afin d’acquérir une suprématie militaire et commerciale aussi importante. Cette théorie influencera grandement Théodore Roosevelt notamment au début du XXe siècle après la guerre russo-japonaise.
Cette prise de contrôle des mers effective, la guerre froide laissa néanmoins l’Amérique dans une position géopolitique difficile. Deux des plus grands stratèges en géopolitique, Nicolas Spykman et Halford John Mckinder de ce siècle vont en effet développer la théorie selon laquelle l’Amérique de par sa position insulaire éloignée ne peut, si elle veut rester aux commandes du monde (refus du déclin de la puissance américaine chez les néo-conservateurs) être éloignée du grand continent, du cœur des terres émergées, le Heartland eurasien. Le monde serait constitué selon ces stratèges d’un Heartland ou Continent géant (Europe-Asie), d’un océan géant (Atlantique-Pacifique) et d’un anneau d’îles (Amérique, Australie ou Outlyings Islands).
La maîtrise de ce cœur continental est donc essentielle. De la même façon, elle devait se méfier des alliances entre puissances de la terre, notamment entre les deux grandes puissances terrestres et continentales, l’Allemagne et la Russie (empêcher l’émergence d’une puissance rivale chez les néo-conservateurs). Pour ce faire, la Seconde Guerre mondiale sera l’occasion tragique et inespérée pour l’Amérique de prendre position sur le continent, pour y empêcher toute alliance qui pourrait exclure l’Amérique des affaires du monde. Pour les stratèges américains en effet, la fin de la guerre froide n’est que l’opportunité à saisir pour mettre pied en Europe (anciennement majoritairement sous contrôle soviétique) et pouvoir ainsi grignoter toujours plus à l’Est et au Sud-Est vers le contrôle de continent, cette zone située au cœur de l’Eurasie.
Le point commun entre les « défenseurs du choc inévitable des civilisations », « les partisans de la conquête de l’Est, et du Heartland » ? Un courant idéologique propre à l’Amérique qui a contribué à accélérer la politique interventionniste américaine dans le monde, une nouvelle idéologie qui s’est rapidement propagée dans toutes les sphères de direction américaine (politiques, militaires, économiques...). Elle a pris à contre-courant les anciennes idéologies pour devenir en quelque sorte la raison d’être de l’Amérique, comme le sang l’est à tout être humain. Cette idéologie projette l’Amérique comme point central de l’humanité, d’aujourd’hui et demain. Le « néo-conservatisme » nous dit Wikipédia : « se distingue du conservatisme traditionnel et du néo-libéralisme. Anticommuniste et antifasciste, le néo-conservatisme est né sur le principe de « plus jamais Auschwitz ». Ils défendent la puissance militaire des États républicains dans les relations internationales afin d’asseoir un nouvel ordre international. Cela passe par quelques grands axes, notamment le refus du déclin de la puissance américaine (première puissance républicaine du monde) ; empêcher l’émergence d’une puissance rivale ; la fin de la complaisance envers les dictatures ; et la revalorisation de l’outil militaire pour répondre aux agressions.
Pour les « néo-conservateurs » l’Amérique est le modèle de civilisation le plus abouti. Elle a vaincu les grandes idéologies (le nazisme et le communisme) et se prépare à affronter son troisième ennemi (tout au moins celui qu’elle a déclaré comme tel) à savoir l’islamisme radical. Pour eux, le monde doit être modelé par les démocraties républicaines, selon ce modèle de civilisation via le démocratisme imposé, militairement s’il le faut. Le cœur de cette pensée est donc un interventionnisme très fort à l’extérieur du territoire américain, que l’on peut qualifier d’impérialisme idéologique.
Aux États Unis, récemment, un conseiller du président Carter a théorisé et remodernisé les théories post-guerre froide pour les distiller dans les mouvances néo-conservatrices influentes et au pouvoir. Ce dernier, Zbigniew Brzezinski a grandement influencé la création de mouvements d’opinions, les fameux thinks tanks, destinés a promouvoir la politique américaine dans le monde (Cf. Le Grand Échiquier en 1997 et Le Vrai Choix en 2004). En 1989, Brezinski devient l’éminence des cerveaux démocrates pour l’Eurasie (son fils Markl étant le conseiller de Barak Obama) dont il est certain qu’elle sera la zone concurrente essentielle de l’Amérique. En effet, cette gigantesque zone eurasiatique serait le cœur des masses humaines et surtout des ressources énergétiques (pétrole, gaz, minerais stratégiques) ainsi que de leur voies d’acheminements. Ces théories de maîtrise du Heartland se couplent généralement à une maîtrise de l’océan Arctique (voir l’article lié) tout aussi important au niveau énergétique. (voir la carte la). Brezinski reprendra dans Le Grand Échiquier le projet de démembrement en trois de la Fédération russe (Moscovie, Oural, Sibérie), un projet déjà défini dans les années 1940 par le nazi Rosenberg. Cette théorie sera développée à la même époque en Pologne sous le nom de Prométhéisme qui fera son chemin pendant la Seconde Guerre mondiale en Allemagne, en France, en Turquie et en Allemagne, puis en Amérique. Curieux hasard ( ?) du destin, il s’agit des plus grandes puissances mondiales d’aujourd’hui et des piliers de l’Otan. Autre hasard, Brezinski est lui aussi d’origine Polonaise tout comme Joseph Pilsudski, fondateur du Prométhéisme.
Brzezinski va alors se consacrer à la lutte pour prévenir la réémergence de la Russie comme superpuissance et pour conquérir l’Eurasie. Il développe « un plan pour l’Europe » qui passerait par l’extension de l’Otan aux Républiques baltes, prônera le projet d’oléoduc Bakou-Tblissi-Ceyhan. Ce projet représente pour lui la meilleure concrétisation de ses ambitions qui visent à empêcher la Russie de se relever. Parallèlement, il préside dès 1999 le Comité américain pour la paix en Tchétchénie (American Committee for Peace in Chechnya), installé dans les locaux de l’association Freedom House. Cette union des extrêmes (indépendantistes musulmans et activistes américains) n’est que la continuité - sous sa variante anti-Russe - de l’alliance du même genre existant pendant la guerre froide, à l’époque où la CIA entraînait et finançait les Mujhaidins contre l’URSS.
Les armes des Atlantistes pour la conquête énergétique
Après la chute du mur et la fin de l’URSS, l’Amérique se retrouve sans ennemie, elle se lance alors dans une logique de conquête absolue des zones nécessaires au maintien de son hégémonie embryonnaire et notamment l’Eurasie. L’extension de l’Europe comme alliée indéfectible, l’adhésion de ces États à l’Otan et leur participation aux interventions armées à l’étranger en est le fil conducteur. L’Europe continentale de l’Ouest offre servilement à l’Amérique les moyens de sa domination planétaire. Lorsque l’Amérique créa en 1949 l’Otan pour répondre au pacte de Varsovie, celui-ci n’avait d’objectifs que défendre le monde occidental contre une éventuelle attaque soviétique. À l’effondrement de cette dernière, l’Otan ne disparut pas pour autant. Bien au contraire, il devint l’élément-clé de l’extension pan-occidentale, le porteur des messages préliminaires tout autant que le bourreau et le justicier des réfractaires. L’Otan devint l’arme destiné à faire plier les régimes non alignés, tout autant qu’à marquer la fin de la complaisance avec les « dictatures ». En 2001 néanmoins, les Américains ont commencé à prendre conscience de l’erreur tactique essentielle qu’ils avaient fait à utiliser les Moujahidines contre la Russie soviétique, les premiers retournant leur savoir (acquis par les stratèges de la CIA avec la bénédiction du Pentagone) contre leurs anciens maîtres.
Évidemment, la construction européenne qui marche main dans la main avec l’Otan s’est déjà sabordée. En étant incapable d’avoir ses propres systèmes de défense ou sa propre armée, en participant à des conflits qui ne la concernent pas, et n’ont pour conséquence que d’augmenter le ressenti de nombre d’États à son égard, cette dernière s’est fait entraîner dans une logique infernale de partage des dépendances américaines, en énergie tout autant qu’en besoin de protection.
Comme je l’expliquais dans un précédent article : pourquoi partager la croisade lancée contre le monde arabo-musulman à des fins énergétiques en nous aliénant des centaines de millions de musulmans dans le monde, alors qu’un partenaire disponible et fiable, la Russie, est à nos portes. Réponse toute simple : l’Amérique ne veut pas d’une alliance Europe-Russie qui constituerait une puissance concurrente. Pour preuve récente l’opposition violente de Zbigniew Brezinski au « Russo-Allemand » North Stream.
Les opérations militaires ne sont pourtant pas partout évidentes, ni pratiques. Les stratèges ont bien compris la grande difficulté de créer une entreprise de désinformation comme cela a été le cas pour la désintegration de la Yougoslavie (dès 1991) et la campagne violemment serbophobe qui a suivie. Parfois même les opérations militaires ne sont pas suffisantes. Voir injustifiées. Les stratèges vont développer une méthode de révolution pacifique, dite colorée, qui a le mérite de mieux passer au yeux de l’opinion internationale (toujours critique quant aux actions militaires). Experimentée en Serbie en 2001 (la campagne militaire n’ayant pas suffit à faire tomber Milosevic), elle consiste à lever une partie de la « société civile » contre le pouvoir, via des relais dans le pays, en fait officines de la CIA. Le schéma est toujours le même, utiliser des mouvements de jeunesses pour feindre le côté spontané. Le projet est de faire tomber un pouvoir politique jugé « hostile » pour le remplacer par un candidat démocrate, c’est-à-dire « aux ordres » de Washington. L’État concerné passe ainsi dans le giron « occidental » sans intervention militaire. Autre avantage : le changement passe pour une légitime révolution populaire d’une population lasse du « tyran » qui la gouverne. Pourtant en y regardant de plus près, ces mouvements de jeunesse révolutionnaires, que cela soit Zubr en Bielorussie, Otpor en Serbie, Kmara en Géorgie, Pora en Ukraine, Mjaft en Albanie ou encore Oborona en Russie ne sont pas des émanations spontanées de la « société civile », mais au contraire des fabrications sponsorisées à millions de dollars par les relais de l’ingérence états-unienne dans les points chauds qui concernent directement l’Europe (Balkans, le Caucase, l’anneau circulaire de l’Eurasie (voir cette carte !). Leurs membres ont été entraînés, dressés au bazar de rue et à l’agit-prop politico-médiatique pour intervenir au moment opportun, recevoir la publicité des médias occidentaux et délégitimer les pouvoirs en place. Sur la base des théories dites de la « guerre civilisée » du Pr Gene Sharp (Albert Einstein Institution, ancien de la John Hopkins University), ces groupes naguère formés dans de grands hôtels de Budapest et de Sofia, conduisent des opérations de déstabilisation ciblées qui relèvent de la guerre psychologique et de la guerre civile et non d’une action pacifique ou de simple lobbying comme on voudrait nous le faire croire. (NB : lire cette analyse ici ou encore la).
Quant aux relais de ces mouvements révolutionnaires financés par la CIA, ce sont ces associations civiles du nom de USAID, National Endowment for Democracy (NED), Open Society Institute (Fondation Soros),le German Marshall Fund of the United States, Freedom House, la fondation héritage, ou encore la jamestownfondation, la fondation Carnégie, ou encore le mémorial des victimes du communisme, ces associations travaillant sous l’égide de quelques organisations plus importantes comme le PNAC, le CFR, la trilatérale,l’American institute.ou encore l’ICG , officie « publique »de la CIA (dirigé un temps par Morton Abramowitz l’homme qui livra naguère les missiles Stinger au moudjahidine afghan proches d’Osama Ben Laden) ! Nous sommes là au cours du dispositif d’ingérence américain en Eurasie. Ces mouvements ne sont pas seuls. On a fabriqué aussi pour les besoins de la cause une série de sites internet chargés de renforcer la propagande virtuelle, et des instituts de sondage (comme le CeSID en Serbie) qui « accompagnent » les élections des pays-cible, c’est-à-dire désignent à l’avance les vainqueurs et influencent psychologiquement les votes en donnant des résultats que n’ont pas encore les commission électorales.
Cette alliance de suprématie militaire et d’associations faussement civiles n’ont en fait qu’un but : encercler la Russie et prendre le contrôle des zones essentielles que sont les Balkans (anciennes colonies soviétiques et vitales à l’extension Est de l’Europe), le Caucase (avec la Caspienne) et enfin l’anneau de contour eurasien. La preuve ? Les États du Guam, visés par les révolutions colorées ceinturent la Russie. Le but ? Éloigner la Russie de l’Europe, la repousser au Nord et à l’Est pour lui couper l’accès aux mers et aux ressources énergétiques d’Asie centrale et faire cesser son influence sur la région centro-asiatique. N’oublions pas que la lutte pour cette région (tout comme pour le Nord arctique) l’est principalement pour des raisons énergétiques. (NB : cette révolutionnite aiguë ne frappe pas que l’Eurasie, mais également l’Amérique du Sud et le Venezuela de Chavez). Lorsque le 31 décembre 1999, Boris Eltsine laisse les rênes à Vladimir Poutine, la décrépitude eurasienne est totale. L’URSS s’est effondrée, les Républiques se fragmentent, les communautés religieuses s’affrontent, le chaos est total. Dès sa prise de pouvoir, Vladimir Poutine va restaurer l’autorité et la souveraineté de l’État sur le territoire russe, ce qui passe par reprendre le pouvoir y crompris à des hommes d’affaires enrichis et devenus plus puissants que les élus eux-mêmes : les oligarques. L’histoire est connue, Vladimir Poutine va chasser un à un ces oligarques qui succédèrent aux « innombrables mafias » qui pillèrent la Russie dans les années 1990. Ceux qui affirmaient contrôler à une douzaine l’économie et le pouvoir russe durent répondre de leurs actes devant une justice réaffirmée. C’est en 2003, lors de l’arrestation du plus fameux d’entre eux que les atlantistes (néo-conservateurs) comprirent la détermination réelle du pouvoir russe. L’arrestation de M.Khodorkovski a ouvertement déclenché une contre-offensive néo-conservatrice qui dure encore à ce jour. Pourquoi ? Le réseau Voltaire nous donne quelques précisions (lisez cet article c’est à tomber par terre, ici)... La prise de contrôle de Yukos par Khodorkovski s’est faite par le biais du système de « prêts contre actions » organisé par Vladimir Potanine au gouvernement de Viktor Tchernomyrdin en 1995. Les oligarques ont ainsi pu racheter des entreprises pour des bouchées de paille, voire les posséder par de simples promesses d’investissements ! Celui-ci organise ensuite un système de sociétés off-shores pour s’auto-racheter du pétrole et des matières premières à très bas prix et le revendre sur le marché international. Simultanément, le géant bradait son pétrole à l’Amoco Eurasia Petroleum Company. Les sur-revenus générés lui permirent, une fois blanchis de prendre le contrôle politique de nombreux partis dont le Parti communiste, l’Union des forces de droite (SPS), Labloko et « Unité ». En 2003, Khodorkovski décida se présenter à l’élection présidentielle. Il essayait déjà de dicter ses vues au gouvernement concernant la guerre en Irak à laquelle il était favorable, comme en économie ou en politique intérieure. À cette même époque, Khodorkovski était sur le point de vendre la moitié de Yukos à Exxon Mobil. Il entendait aussi construire un réseau privé d’oléoducs assurant sa totale indépendance. Les liens entre Yukos et le monde de la finance et du renseignement anglo-saxon étaient déjà bien établis, les États-Uniens avaient compris que tant que le gouvernement contrôle les tuyaux, il est le seul à décider de la quantité de brut qu’il veut mettre sur le marché. Charles Ryan, le leader du United Financial Group, et d’autres investisseurs appelaient de tout cœur à une « Yukosization » de la Russie, en fait à une destruction de l’État, seul obstacle sur le chemin des vastes richesses russes. En lien avec Henry Kissinger et George Soros, il aurait trahi son pays et aurait préparé un renversement de Vladimir Poutine après avoir soudoyé des cadres de l’armée, la décision de son arrestation aurait été prise in extremis pour empêcher un « quasi-coup d’État », elle eut lieu le 25 octobre 2003, à Novossibirsk. Khodorkovski était devenu un maillon-clé du dispositif visant à mettre à genoux le géant russe. Devenu membre du Carlyle group, celui-ci se préparait à mettre une bonne partie des ressources pétrolières russes entre les mains des États-Unis. On comprend mieux en effet la colère des « chacals » du Pentagone, lancés dans une guerre en Irak et privés des ressources eurasiatiques. Leur réponse ne s’est pas fait attendre, ceux-ci ont lancé une offensive de grande ampleur contre le pouvoir russe, la plus terrible étant la tragédie de Beslan (3 septembre 2004) que l’opinion internationale bien manipulée par la presse aux ordres continue d’attribuer à Poutine, tandis que les théoriciens néo-conservateurs affirmaient que la Russie n’échapperait pas à une guerre des civilisations, elle non plus, et devait donc rejoindre la croisade lancée par l’Otan. Pourtant, comme l’a très bien résumé Mikhail Alexandrov, un expert de l’institut CIS de Moscou dans le journal du ministère russe de la Défense, Krasnaya Zvezda : « La situation en Ossétie du Nord doit être appréhendée dans le contexte de la bataille croissante pour le contrôle de la Transcaucasie entre la Russie et les puissances anglo-saxonnes. Les Anglo-Saxons prétendent expulser la Russie de la Transcaucasie et ont besoin pour cela de déstabiliser le nord du Caucase et la Russie en général. » (lire ici sur la responsabilité anglo-saxonne à Beslan ou encore les liens étroits entre les Américains et les Tchétchènes).
L’affaire Beslan est un déclencheur fondamental puisque, à la suite de cette affaire, un « comité des 115 » se créa pour dénoncer la politique du gouvernement Poutine, jugé « responsable » de la prise d’otage de Beslan. Cette lettre ouverte, signée par 115 personnalités atlantistes, a été adressée, mardi 28 septembre 2004, « aux chefs d’État et de gouvernement de l’Union européenne et de l’Otan » avec copie à l’agence Reuters. Les auteurs affirment « qu’il est temps de repenser les modalités et les limites de notre engagement avec la Russie de Poutine ». Véritable déclaration diplomatique de guerre, il est tout à fait intéressant de lire le texte même de la lettre et les signataires de cet appel (ici et la). Lire à ce sujet la réponse aux intellectuels atlantistes du Pr Viatcheslav Dachitchev.
Comme l’explique très bien Alexandre Douguine en 2005 : « le complot contre Vladimir Poutine est en marche depuis qu’il a été élu. L’entourage de Eltsine ne s’attendait pas à ce que Poutine renforce les pouvoirs du gouvernement aux dépens des minorités libérales, oligarchiques ou pro-états-uniennes. Désormais, les opposants ont décidé de le faire sauter où au moins d’affaiblir sa position au maximum. C’est une forme de complot où agissent deux centres, un pour l’extérieur à Washington et Londres, et un pour l’intérieur constitué par les groupes oligarchiques et les libéraux au gouvernement. La zone de contact se trouve être dans certains pays de la CEI comme l’Ukraine ou la Géorgie. Pour moi, Mikhail Khodorkovsky a mené une véritable campagne contre la souveraineté de notre pays par l’intermédiaire de corporations transnationales et des États-Unis. »
La déstabilisation tchétchène a néanmoins connu deux coups d’arrêts en 2005 (liquidation de Maskhadov) et en 2006 (liquidation de Bassaiev), n’en déplaise aux intéressés dont les troupes sont enlisées dans les sables d’Irak et les montagnes d’Afghanistan.
Nous l’avons vu, le réveil russe, maintien essentiel de l’équilibre en Eurasie, est la clé d’un monde multipolaire, ou tout du moins bipolaire en ce qu’il empêche l’Amérique de prendre contrôle du continent eurasiatique. La Russie, tout comme les « grands en devenir » de ce monde, l’Inde et la Chine, entendent maintenir sur le continent, et dans le monde, une approche multilatérale et multipolaire des problèmes, basée sur le dialogue et le consensus.
Pour l’élite russe, la Russie doit tracer une nouvelle voie entre l’orientation pro-occidentale et libérale et la nostalgie du passé communiste, tout en évitant les excès démagogiques du populisme extrémiste et du nationalisme étroit. Pour ce faire, a notamment été créée l’OCS, l’Organisation de la coopération de Shanghai, une gigantesque alliance militaire continentale regroupant plus d’un humain sur deux… Il est pourtant coutume d’entendre que la Russie a recours à des méthodes et des rhétoriques dignes de la “guerre froide”, mais que devait-on attendre comme réaction de la part de la Russie après que l’Europe laisse l’Amérique installer des bases militaires, des systèmes d’écoutes et des batteries missiles à ces frontières ? Que devrait-elle penser alors que ceux-la mêmes adhèrent à la théorie de détruire la Russie pour en faire trois Etats (Moscovie, Oural, Sibérie), tout comme ils ont fait de la Yougoslavie (devenue Serbie, Croatie, Slovénie) ? La vérité, c’est que la réciprocité logique au déploiement militaire à l’Est de l’Europe serait le déploiement militaire russe aux frontières américaines, par exemple à Cuba, ce que vient précisément d’évoquer le président Medevedev ! Enfin, un détail, mais sans doute d’importance, l’extension de l’Europe vers l’Est et l’obsession des Etats-Unis à y intégrer la Turquie (Seconde armée de l’Otan et pays non européen) sont bien les preuves de souhait d’inféodation totale à l’Otan d’une Europe qui n’a plus d’européenne que son appellation. Vladimir Poutine n’a-t-il pas cessé d’appeler les Européens à quitter l’Otan ? |
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« Ce fut une soirée remarquable, un tournant. Inger s'était écartée longtemps du droit chemin, et il avait suffi de la soulever un instant pour l'y faire rentrer. Ils ne parlèrent pas de ce qui s'était passé. Isak s'était senti honteux d'avoir agi de la sorte à cause d'un thaler, qu'il finirait par donner parce qu'il serait lui-même content de l'envoyer à Eleseus. Et puis, cet argent, n'était-il pas à Inger aussi bien qu'à lui ? Au tour d'Isak de se sentir humble !
Inger avait encore changé. Elle renonçait à ses manières raffinées et redevenait sérieuse : une femme de paysan, sérieuse et réfléchie, comme elle était auparavant. Penser que la rude poigne d'un homme pouvait accomplir de telles métamorphoses ! Il devait en être ainsi ! Une femme robuste et saine, mais gâtée par un long séjour dans une atmosphère artificielle, s'était heurtée à un homme qui se tenait solidement sur ses pieds. Il ne s'était pas laissé écarter un instant de sa place naturelle sur la terre, de son lopin. »
Knut Hamsun, « L'éveil de la glèbe »
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Télévision, grande régression et « âge storyque »
« La télévision n’est pleine que du vide que la vie, en s’en allant, a laissé derrière elle. Tout l’effort épuisant de ses animateurs innombrables et successifs a consisté à faire croire qu’elle était encore remplie de vivants, alors qu’elle n’est agitée que de ce qui leur a succédé et qui est personne. ‘Loft Story’, en France, est la première émission à ne pas essayer de mentir à ce sujet (…). Avec ‘Loft Story’ la télévision, enfin, ne cache plus rien du rien qu’elle met froidement en scène (…). Ce que la télévision montre, c’est le processus de la grande Régression anthropologique à laquelle nous sommes désormais en proie ».
« ‘Loft Story’ est un événement, mais ce n’est pas non plus un événement de l’Histoire ; c’est un événement de la Story. Après l’Histoire, la Story ? Oui. On vient de la voir naître. A cette période où nous entrons, et qui est si pleine de mystères avec son mélange d’exhibition, de déréalisation, de fiction en direct et de vérité fabriquée, il faudrait pouvoir donner le nom ‘d’âge storyque’ pour la différencier de toutes celles qui l’ont précédée et qui viennent de tomber dans le passé ».
Philippe MURAY, in « Exorcismes spirituels III », Les Belles Lettres, 2002, p. 406.
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SYNERGIES EUROPÉENNES - ORIENTATIONS (Bruxelles)- JUILLET 1988
Autarcie et économie de "grand-espace"
Recension: Eckart Teichert, Autarkie und Großraumwirtschaft in Deutschland 1930-1939. Außenwirtschaftspolitische Konzeptionen zwischen Wirtschaftskrise und Zweitem Weltkrieg, Oldenbourg, München, 1984, 390 S.
Partisan de l'idéologie économique libérale, Teichert soumet la politique d'autarcie allemande sous le régime national-socialiste à une critique sévère. De cette critique ressortent néanmoins les grandes lignes conceptuelles de la tradition autarcique allemande, bien implantée dans l'arc idéologique conservateur, nationaliste et völkisch. Les concepts d'autarcie et de Großraumwirtschaft (= économie de grand espace) sont flous, explique Teichert, et permettent d'englober des aspirations et des intérêts très divers, ce qui, par la suite, leur permet de fonctionner à vitesses diverses, c'est-à-dire souplement. Plus tard, en 1943, le théoricien Henke parlera d'un "concept idéal mouvant", conteneur de possibles divers et sans cesse en mutation, qui peut agir conformément aux impératifs du temps, sans s'encombrer de principes rigides et dans une dimension résolument volontariste. L'histoire économique allemande de 1930 à 1939 s'est déroulée en deux phases selon Teichert: la première, s'étendant de 1930 à 1934, favorise l'établissement de liens bilatéraux dans un espace homogène et continu (raumgebunden); la seconde phase, de 1934 à 1938, vise, elle, à la constitution d'un espace économique qui échapperait à tout blocus en cas de guerre. Ce projet se couple à une volonté de couvrir les besoins stratégiques à l'importation, au détriment d'une conquête ou d'une consolidation néo-colonial(ist)e des débouchés extérieurs. L'Anschluß, le démembrement de la Tchécoslovaquie et le traité signé avec la Roumanie en mars 1939 font avancer ce projet et correspondent —Teichert ne l'explique pas— à la volonté d'autarcie impériale de Chamberlain en Angleterre (ce qui fait que le Premier anglais accepte Munich). En revanche, elle s'oppose à la volonté de Roosevelt de pénétrer, au profit de l'économie américaine, les marchés européens et extrême-orientaux. Problématique que l'on voit réapparaître aujourd'hui dans les guerres économiques entre les USA et la CEE et à l'annonce de l'échéance 1992.
(Robert STEUCKERS).
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par Alexandre LATSA - http://alexandrelatsa.blogspot.com
Le Financial Times du 25 août 2008 notait amèrement que «Washington en est réduit à regarder d'autres puissances modifier le réel ». Dans une édition du Financial Times de 1991, une telle assertion aurait sans doute seulement trouvé sa place dans une rubrique "scénario catastrophe pour l'avenir " ou "science fiction". Il est vrai que la presse américaine de 1991 titrait sur d'autres evènements : l'URSS venait de s'écrouler, et avec elle le mur de Berlin. Dans les sables d'Irak, Bush père promettait a l'humanité un « Nouvel Ordre Mondial », juste, merveilleux et surtout unilatéral sous protection de la bannière étoilée pendant que l'Europe entamait son processus de réunification. Nous étions rentrés dans l'ère soit disant éternelle de la « Pax Americana » avec tous ces corrolaires, qu'ils soient militaires, financiers ou encore économiques. Certains nous prédirent meme la fin de l'histoire, l'histoire nous appris qu'ils se trompaient. La « saison unipolaire » fut pourtant de courte durée. Il ne fallut que 10 ans pour qu'un improbable attentat de grande ampleur survienne sur le territoire Américain. De la, l'empire déclencha deux conflits militaires en Afghanistan et en Irak, au nom de l'OTAN, entrainant au nom de la lutte contre le terrorisme la plupart des nations Européennes. Europe qui par deux fois, en 2004 et 2005, paya le prix lourd pour sa « collaboration » avec l'OTAN.
00:35 Publié dans Géopolitique | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : géopolitique, eurasisme, eurasie, russie, etats-unis, politique, politique internationale | |
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La télévision, ennemi numéro un de l’éducation
« Ce qui fait de la télévision l’ennemi public (ou privé) numéro un de l’éducation, c’est qu’elle parvient à dissuader les enfants et leurs parents de toute velléité de curiosité et de conquête en rendant ce qui n’est pas déjà vu et connu indigne de leur effort intellectuel. Elle parvient à disqualifier la quête de l’inconnu en matraquant à longueur d’émissions le déjà-vu, le déjà-su ».
Alain BENTOLILA, in « Le Monde, », 20 décembre 2004.
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L'anarchisme de droite dans la littérature contemporaine
par Jacques d'ARRIBEHAUDE
A l'origine d'un esprit de révolte qu'il analyse ici re-marquablement, François Richard évoque les baro-ques et les libertins du XVIème et du XVIIème sièc-les, diversement suspects aux pouvoirs en place et dé-jà "non conformes". Il signale à juste titre la "Sa-ti-re Ménippée", mais, très vite, en vient à son vrai sujet, qui tient à l'esprit et au rôle de ceux qu'il ran-ge parmi les anarchistes de droite de la fin du siècle dernier à nos jours. "En fait, écrit-il, l'anarcho-droi-tis-me se révolte contre la montée et la tentative d'in-car-nation des idéaux démocratiques, mais cette op-po-sition n'englobe pas sa pensée dans son entier. El-le n'en est qu'un des aspects: sur cette humeur ré-tive, ce refus viscéral, croît et se développe une atti-tude philosophique globale qui, dans sa lucidité, sa vio-lence et son appétit de liberté, a engendré l'un des flamboiements littéraires les plus contestés et les plus impressionnants de ce temps".
Soutenu par un excellent choix de citations, le livre s'ar-ticule en six chapîtres de lecture aisée et capti-van-te, qui vont du "refus de la démocratie" à la "chas-se à l'absolu". Il est évident que la révolution de 89, dont les masses se voient sommées, à leurs pro-pres frais de contribuables, de célébrer le bicente-naire, est ici une charnière, un point de rupture fon-damental. Parmi beaucoup d'autres, on peut retenir cette appréciation de Léautaud: "Au total, une bande de coquins et d'imbéciles sans en excepter un seul... Voilà pourtant ce qu'on glorifie, voilà les créateurs de la France, de la France d'aujourd'hui, les précur-seurs des bavards et des sots qui nous gouver-nent...". Drumont avait déjà parfaitement constaté que "la Société fonctionnant en mode subversif, tout ce qui semblerait devoir protéger les honnêtes gens concourait en réalité à assurer aux gros voleurs le succès d'abord, l'impunité ensuite". La caractéristi-que de tous ces hommes que leur forte individualité sé-pare et rend parfois hostiles les uns aux autres, c'est le refus des mots creux, des abstractions gro-tes-ques imposées comme valeurs suprêmes du Pro-grès à majuscule et d'une république considérée par Léon Bloy comme "le droit divin de la médiocrité absolue". C'est aussi, dans un siècle où l'idéal se ré-duit de plus en plus à "la même chose pour tout le monde", l'appel spontané à la contradiction et la vo-lonté farouche de rejeter les crédos de plus en plus suspects, les vulgates les plus agressivement niaises d'une intelligentsia aussi sotte que perverse en ses pe-sants rabâchages. On conçoit dans ces conditions le cri de Nimier et de quelques autres, qui eurent vingt ans en 45. "Plus l'Apocalypse s'est rappro-chée de l'Allemagne et plus elle est devenue ma pa-trie". On conçoit aussi que, dans l'asphyxie du confor-misme ambiant, étayé d'un appareil judiciaire et po-licier parfaitement au point, appuyé à tous les cré-neaux possibles par des aboyeurs médiatiques, des enseignants abrutis et l'armée socialisante d'une plé-tho-rique fonction publique où nul ne semble avoir jamais vu l'ombre d'un prolétaire, le moindre pro-pos d'un Drumont, d'un Céline, d'un Rebatet, et, plus près de nous, d'un Nabe ou d'un Micberth, soit aussitôt perçu comme une menace intolérable. A l'Est, il y a pour ces criminels les fameux "asiles psy-chiatriques". Dans nos démocraties de progrès, de tolérance et de droits de l'homme, c'est tout simplement l'assassinat par étouffement, piqures d'é-pin-gle, inquisition fiscale, persécutions admi-nistra-tives, incarcération sur motifs fabriqués, le tout dans "ce grand silence de l'Abjection" si bien évoqué ja-dis par Châteaubriand.
De Gobineau à Micberth en passant par Drumont, Bloy, Darien, Léautaud, Daudet, Céline, Rebatet, Mar-cel Aymé, Bernanos et bien d'autres, François Ri-chard éclaire à merveille le talent, la vigueur po-lé-mique et la fécondité d'un courant qui, en dépit de toutes les censures, de tous les éteignoirs, et de l'im-mense peur des bien-pensants de tous bords, appa-raît "comme l'une des tendances politiques, morales et intellectuelles les plus stimulantes de notre moder-ni-té".
Où l'auteur de cette excellente étude s'égare un peu, me semble-t-il, c'est lorsqu'il cite Louis Pauwels en bonne place parmi ces irréductibles briseurs de ta-bous dont il souligne pourtant bien, par ailleurs, le ca-ractère irrécupérable. Certes Pauwels est honni et abreuvé d'injures par les tout puissants foutriquets de ce qu'il nomme si justement la "gauche caviar", qui ne sauraient lui pardonner ses ricanements à pro-pos du "sida mental" dont il les voit atteints. Mais Pauwels est une institution qui se recommande, tout comme ses adversaires et détracteurs, de la démo-cra-tie, de la République, et de l'épilepsie moralisante de nos cardinaux judéo-chrétiens. Je distingue mal le rap-port avec Barbey d'Aurevilly, Léon Bloy, Da-rien, Rebatet, Micberth, etc. Je regrette, en revan-che, que François Richard ait omis de citer Brigneau, Gripari, Marc-Edouard Nabe, Willy de Spens, d'autres peut-être, qui appartiennent, sans conteste, par l'éclat, le talent et le caractère, à cette flamboyante aristocratie de réprouvés qu'il s'est atta-ché à dépeindre. Mais ne boudons pas notre satis-faction dès lors qu'il s'agit là du premier ouvrage sérieux sur un sujet pratiquement tabou jusqu'à ce jour.
Jacques d'ARRIBEHAUDE.
François RICHARD, L'anarchisme de droite dans la littérature contemporaine, PUF (coll. "Littératures mo-dernes"), Paris, 1988, 244 pages, 130 FF.
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Obama fait décoller ses "faucons"
Trouvé sur : http://resistancenationale.blogspot.com
Mon premier a voté en 2002 pour l'invasion de l'Irak. Mon second y a dirigé l'"escalade" (le "surge") qui a permis aux forces d'occupation américaines de briser les reins de l'insurrection. Mon troisième a commandé le corps d'élite des armées, approuvé l'invasion de l'Irak et l'escalade, et ne cache pas son amitié pour l'ex-candidat conservateur à la présidence, le faucon John McCain.
Mon tout - Hillary Clinton, Robert Gates et James Jones - constitue le "cabinet de guerre" que le futur président démocrate des États-Unis, Barack Obama, a présenté lundi matin dans son fief de Chicago. On se souvient qu'il a été élu, il y a un mois à peine, en dénonçant l'invasion et l'occupation de l'Irak, en affirmant que l'"escalade" y était vouée à l'échec, et en battant le républicain McCain qu'il dénonçait comme un dangereux belliciste décidé à poursuivre la guerre.
Après avoir promis aux Américains "le changement", le président élu Obama leur offre donc d'abord "la continuité", garantie par ce qui est décrit par tous les experts comme "le cabinet le moins idéologique et le plus pragmatique" de l'histoire du pays.
En faisant de la sénatrice de New York, Hillary Clinton, sa secrétaire d'État (ministre des Affaires étrangères), le poste de numéro deux de son administration, du général quatre étoiles (à la retraite) James Jones son conseiller à la Sécurité nationale, et en conservant le républicain Robert Gates, nommé par Bush, au poste-clé de secrétaire à la Défense, Barack Obama a mis en pratique un principe inspiré par celui qu'il revendique pour son modèle, Abraham Lincoln : en période de crise, le président met en place "une équipe de rivaux", au nom de l'unité et de la sécurité nationale "qui n'est pas une question partisane".
Le pragmatisme pour idéologie
Le choix d'Obama fait bien entendu hurler la gauche démocrate, qui avait vu en lui son champion et a joué un rôle décisif dans sa campagne victorieuse. Il lui assure l'approbation des conservateurs dont le candidat a mordu la poussière, mais dont les idées s'imposent par la simple vertu de la réalité. Les États-Unis font la guerre sur deux fronts, Irak et Afghanistan. Ils sont exposés à la menace terroriste, et doivent tenter d'éviter une déstabilisation générale par des crises régionales comme vient de le rappeler l'attaque lancée probablement depuis le Pakistan contre la capitale économique de l'Inde, Bombay (Mumbai). L'administration démocrate va également devoir trouver le moyen de désamorcer les tensions que provoquent les ambitions nucléaires de l'Iran et de la Corée du Nord, et les rêves de restauration impériale de la Russie.
Dans ce contexte, Obama entend signifier, à destination des Américains amis aussi du reste du monde, que sa seule idéologie est le pragmatisme, et qu'il privilégie l'expérience (qu'il avait pourtant moquée pendant la campagne électorale) et la compétence sur la nouveauté. Même si cela lui commande de ne pas changer grand-chose, ou de ne le faire que très progressivement, aux politiques de George W. Bush, et de s'entourer des vieux routiers et experts de Washington qu'il accusait d'avoir mené la politique étrangère des États-Unis dans l'impasse.
Le retour triomphal d'Hillary Clinton (et de son mari, l'ex-président dont on cite le nom comme possible envoyé spécial d'Obama pour tenter d'apaiser la crise dans le sous-continent indien) hérisse bien sûr la gauche démocrate qui avait bataillé tout autant contre le "centrisme" des Clinton que contre Bush. "L'électorat a voté pour toute autre chose", s'indigne Matt Stoller, un "obamaphile" militant qui écrit pour le site OpenLeft.com. "En s'entourant des suspects usuels, (Obama) trahit ses électeurs... Les technocrates qui nous ont menés dans le bourbier ne peuvent pas nous en sortir."
"Ils viennent tous des cercles centristes ou conservateurs proches du Pentagone", renchérit Robert Dreyfuss sur le site de l'hebdomadaire de gauche The Nation . "Pas un seul, pas un seul ne représente l'aile antiguerre du parti démocrate." L'amertume est d'autant plus grande que l'équipe économique mise en place par Obama a elle aussi exactement le même profil "centriste", modéré et issu de l'ère Clinton qui garantit la continuité plutôt qu'une rupture radicale. Du coup, Eli Pariser, qui dirige le très puissant réseau progressiste MoveOn.org, se fait menaçant : "Attendons de voir, dit-il. Si toutes ses nominations sont aussi décevantes, nous aurons trois ans pour forcer les portes de la Maison-Blanche."
Approbation unamine à droite
Dans le domaine de la sécurité nationale, un changement soudain de politique est d'autant plus improbable que tous les hommes en place à la direction du Pentagone sous Bush vont demeurer. Gates va continuer de travailler avec le chef d'état-major interarmées, l'amiral Mike Mullen et le chef du commandement Centre, responsable des opérations en Irak et en Afghanistan, mais aussi de l'Iran et du Pakistan, le général David Petraeus, architecte du succès politico-militaire qui a permis de redresser la situation à Bagdad depuis 2007. Obama a clairement indiqué lundi que sa promesse de campagne de retirer toutes les troupes américaines d'Irak dans les seize mois qui suivront son entrée en fonctions le 20 janvier était en réalité soumise aux "recommandations" qui lui seront soumises par les chefs militaires sur le terrain et l'évolution de la situation en Irak même, et s'inscrira dans le cadre de l'accord américano-irakien, qui vient d'être voté par le Parlement de Bagdad et qui prévoit une présence militaire américaine jusqu'en 2011 (au moins).
Cette modération et ce pragmatisme expliquent l'approbation unanime à droite des nominations d'Obama. "Le triumvirat Clinton, Gates, Jones à la tête de l'équipe de sécurité nationale d'Obama est de nature à susciter une grande confiance dans le pays comme à l'étranger" a déclaré le sénateur républicain John Warner. Ses collègues Richard Lugar et Lindsey Graham (ami le plus proche de McCain) ont déjà fait savoir qu'ils voteraient pour confirmer ces nominations. Le président élu a déjà répondu aux critiques qui lui reprochent, alors qu'il avait promis de "changer Washington", d'avoir été "changé par Washington" avant même d'y avoir mis les pieds. Il entend avant tout éviter l'erreur qui été fatale à ses prédécesseurs démocrates, Jimmy Carter et Bill Clinton. Ceux-ci s'étaient entourés de fidèles sans expérience et de novices choisis pour leur proximité idéologique, ce qui avait rapidement paralysé leur action et les avait empêchés de mettre en action leurs idées.
Son administration, a-t-il expliqué, entend au contraire combiner "une approche nouvelle avec l'expérience", mais il a précisé : "La vision du changement viendra de moi, c'est mon boulot." Tous ses collaborateurs, a-t-il insisté lundi, Hillary Clinton la première, "partagent [sa] vision fondamentale", qui est de "préserver les armées les plus puissantes de la planète" tout en "combinant la force armée à la diplomatie". Il s'agit, a-t-il conclu, de "restaurer le leadership de l'Amérique" en redonnant toute sa place au "soft power" des idéaux et de l'aide, en partant de la réalité de l'interdépendance croissante dans un monde multipolaire. Mais aussi d'"en finir avec la menace du terrorisme" y compris par l'usage de la force armée, sans jamais perdre de vue que la priorité doit toujours aller à la défense "musclée" des intérêts nationaux des États-Unis.
source : Le Point
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Archives de "Synergies Européennes" - 1999
Que l’on ne se fasse pas d’illusions : la guerre dans les Balkans n’est qu’un début. Les « interventions humanitaires », comme celle qui vient d’avoir lieu en Yougoslavie seront monnaie courante dans l’avenir. Ces interventions tous azimuts constituent vraisemblablement la nouvelle doctrine de l’OTAN, qui fête ainsi son cinquantième anniversaire. Pourtant, il y a un demi siècle, l’Alliance Atlantique se voulait exclusivement un pacte de défense, fondé pour contrer la menace communiste. Aujourd’hui ce principe de défense est caduc, faute de communisme. Les nuées de chars d’assaut de l’Est, prompts, disait-on, à foncer vers l’Atlantique en 48 heures, n’existent plus. Que fait l’OTAN, devant cette nouvelle donne ? Elle se mue en gendarme du monde !
Le principe de défense n’est plus qu’une référence marginale dans la nouvelle doctrine de l’OTAN. Les stratèges de Bruxelles et du Pentagone pensent désormais en de nouvelles catégories et élaborent de nouveaux scénarii. Pour l’avenir, il suffira de constater des « actes de terreur », des « sabotages », une « interruption dans le trafic de ressources vitales » ou des « mouvements incontrôlés de grands nombres de personnes, surtout s’ils sont la conséquence de conflits armés », pour mobiliser l’Alliance. Dans le futur, l’OTAN entend entrer en action pour « éviter » et « apaiser » des situations de crise. Mieux : la simple « stabilisation et la sécurité de l’espace euro-atlantique » suffisent comme motifs d’intervention. C’est un blanc-seing pour intervenir dans tous les coins du globe. Rien de plus, rien de moins.
Jusqu’ici, il fallait, du moins formellement, un mandat des Nations-Unies pour autoriser l’intervention de l’Alliance. Cette restriction est désormais également caduque. Dans le texte fondant la nouvelle stratégie de l’OTAN, présenté à Washington en avril, les interventions de l’Alliance doivent simplement se référer aux principes de bases de la Charte de l’ONU et être en accord avec ceux-ci. Mais cette stipulation n’est pas contraignante. L’ONU ou l’OSCE ne doivent plus servir que comme « baldaquin » à des opérations communes, selon les cas qui se présentent. L’important, c’est que tous les pays membres de l’OTAN marquent leur accord. En conséquence de quoi, l’Alliance, en pratique, peut frapper à tout moment n’importe quel pays-cible. A juste titre, l’irénologue de Hambourg, Hans J. Giessmann, écrit dans le quotidien berlinois taz, que « le glas a sonné pour l’ONU » et avertit ses lecteurs : «Ceux qui affaiblissent le baldaquin juridique qu’est l’ONU, sont co-responsables des conséquences. L’OTAN (…) pourra certainement empêcher certains Etat de faire ce qu’elle se réserve, elle, le droit de faire. Si la naissance de la nouvelle OTAN signifie l’enterrement de l’ONU, la conséquence, pour le monde, c’est qu’il n’y aura pas davantage de sécurité au niveau global, mais moins ».
On peut en conclure que l’objectif actuel de l’OTAN n’est pas d’augmenter la sécurité sur la surface de la planète. Partout où l’OTAN est intervenue ces dix dernières années sous l’impulsion déterminante des Etats-Unis, nous n’avons pas un bonus en matière de sécurité, mais un malus ; la stabilité est en recul, l’insécurité en croissance. Quant aux « droits de l’homme », prétextes de la guerre en Yougoslavie, il vaut mieux ne pas en parler.
Prenons l’exemple de l’Irak : ce pays était l’un des plus progressistes du monde arabe ; il possédait un excellent système d’enseignement et une bonne organisation de la santé ; le régime baathiste était laïc et le régime de Saddam Hussein accordait davantage de libertés citoyennes que les autres pays arabes. Depuis que le pays est sous curatelle de l’ONU et est bombardé chaque semaine par l’aviation américaine (sans que l’opinion publique mondiale y prête encore attention), rien de ces acquis positifs n’a subsisté. Cette ancienne puissance régionale est tombée au niveau d’un pays en voie de développement, où règnent le marché noir, la corruption et l’état d’exception. Vous avez dit « droits de l’homme » ? Vous avez dit « stabilité » ?
Prenons l’exemple de la Yougoslavie : lors de son intervention dans ce pays, l’OTAN, appliquant sans retard sa nouvelle doctrine, a renoncé dès le départ à tout mandat de l’ONU et a bombardé pendant des mois un pays européen souverain, faisant ainsi reculer son niveau de développement de plusieurs décennies. Ici aussi apparaît l’ectoplasme des « droits de l’homme », que l’on défend soi-disant. On nous transmet des images de ponts détruits, de fabriques, de chemins de fer, de stations de radio et d’innombrables bâtiments civils bombardés, pulvérisés par les bombes ou les missiles de l’OTAN. Même CNN n’est plus en mesure de « retoucher » les photos ou les films. Début mai 98, à l’aide de nouvelles bombes au graphite, les pylônes de haute tension et les usines d’électricité de Belgrade et des environs ont été détruits, coupant l’électricité et l’eau à de larges portions du territoire serbe. A Bruxelles, les porte-paroles de l’Alliance annonçaient avec un effroyable cynisme que l’OTAN était en mesure d’allumer et d’éteindre la lumière en Yougoslavie. On peut se demander quels ont été les objectifs militaires poursuivis par l’Alliance dans ces coupures d’électricité ? Les porte-paroles de l’OTAN ne répondent à cette question que par le silence. L’armée yougoslave, elle, dispose de ses propres générateurs qui, à l’instar des carburants militaires, sont profondément enterrés dans le sol, comme en Suisse. Seule la population civile subit des dommages.
Jamais plus la Yougoslavie ne sera la même après la guerre du Kosovo. Son appareil militaire sera affaibli (ce qui réjouira sans nul doute deux pays voisins : la Croatie et la Hongrie), mais aussi son économie et ses infrastructures. On évalue d’ores et déjà que la Yougoslavie a été ramenée au niveau qu’elle avait immédiatement après la seconde guerre mondiale. Les planificateurs de l’OTAN songent déjà à haute voix à détacher le Kosovo de la Serbie et à occuper cette province, à installer là-bas un protectorat avec la présence d’une armée internationale. Or la République fédérative de Yougoslavie est un Etat souverain…
Dans les Balkans, après l’intervention de l’OTAN, la paix ne reviendra pas et la stabilité politique sera profondément ébranlée. Répétons-le : il ne nous semble pas que la stabilité et la paix soient dans l’intérêt des stratèges de l’OTAN. Quel est alors l’enjeu réel ?
On aperçoit les premiers contours de l’ordre politique qui devra régner dans les Balkans sous la férule de l’OTAN. Parallèlement à l’élimination de la puissance régionale qu’était la Serbie, les Etats-Unis reviennent en Europe par le Sud-Est. Cette démarche est impérative pour les Etats-Unis, car sur la côte pacifique du bloc continental eurasien, les Américains reculent. Des penseurs stratégiques comme Henry Kissinger et Pat Buchanan ont constaté que la Chine, renforcée, sera le futur concurrent de Washington dans cette région. Les pertes en Asie doivent dès lors être compensées par une avancée stratégique en Europe.
Ensuite : les nouveaux partenaires junior des Etats-Unis sont (outre les satrapies européennes habituelles, dont l’Allemagne), les Turcs. Un contingent turc est présent au sein de la force internationale de « paix » au Kosovo. En ayant mis hors jeu la puissance orthodoxe serbe, l’Islam se voit renforcé dans le Sud-Est de l’Europe. Washington joue à ce niveau un jeu clair : si l’Europe réussi son intégration, si l’espace économique européen s’avère viable, elle acquerra, bon gré mal gré, une puissance géostratégique qui portera ombrage aux Etats-Unis. Situation inacceptable pour le Pentagone. Dans les tréfonds du subconscient européen, la menace islamique-ottomane dans le Sud-Est du continent n’est pas vraiment oubliée. Délibérément, les Américains la réinstallent en Europe pour déstabiliser le processus d’unification européen : ironie et cynisme de l’histoire.
La carte turque est un atout majeur des stratèges américains, également dans le domaine des approvisionnements énergétiques. Dans la partie de poker qui se joue en Asie centrale, l’enjeu est le pétrole, entre autres matières premières. Les futures zones d’exploitation se situent sur les rives de la Mer Caspienne et dans les ex-républiques soviétiques de l’Asie centrale musulmane et turcophone. Dans un tel contexte, on ne s’étonnera pas que l’OTAN, depuis quelques années, s’intéresse à toute coopération militaire et économique avec les Etats de la CEI dans le Sud de l’ex-URSS. L’an dernier, les troupes de l’OTAN ont participé pour la première fois à des manœuvres au Tadjikistan. Ce n’est plus qu’une question de temps, mais, si le processus actuel se poursuit, les anciennes républiques musulmanes et turcophones du « ventre mou » de l’ex-URSS appartiendront en bloc à la sphère d’influence atlantiste, tout comme les anciens pays du Pacte de Varsovie et l’Ukraine.
On le voit clairement : l’Alliance atlantique s’est fixé de nouveaux objectifs planétaires. L’ancienne doctrine purement défensive (en théorie…) est un boulet au pied de l’Alliance actuelle. En conséquence, l’Alliance se transforme en un système interventionniste global.
Quoi qu’il en soit : la sécurité ne sera pas de la partie au début du XXIième siècle. Les prochains conflits sont déjà programmés : avec la Chine, avec la Russie (complètement désavouée), avec toute une série de « méchants Etats » régionaux, que la propagande américaine dénoncera quand cela s’avèrera opportun et oubliera tout aussi vite. Hier, c’était l’Afghanistan et le Soudan, aujourd’hui, c’est la Yougoslavie. Et demain ?
Peut-être sera-ce le Sud de la France ou les nouveaux Länder de l’Est de l’Allemagne. Je ne blague pas. Comme l’écrivait l’hebdomadaire d’information américain Time, il y a quelques mois, dans un numéro spécial, les stratèges de l’OTAN se soucient déjà de futurs « foyers de crise » en Europe. L’ancienne RDA et quelques villes du Sud de la France sont des cibles potentielles, car elles sont soupçonnées d’être d’ « extrême-droite ». Au Kosovo, l’OTAN bombarde parce que les « droits de l’homme » y seraient bafoués. Mais en Turquie, en Israël, à Timor-est, en Indonésie, les droits de l’homme sont bafoués depuis des décennies, sans que l’Alliance n’intervient. Qui décide où tomberont les prochaines bombes ?
La réponse est simple. Pendant cinquante ans, l’Alliance a été un instrument destiné à sécuriser les intérêts stratégiques des Etats-Unis. Rien ne changera dans l’avenir. En revanche, ce qui est nouveau, c’est que le Grand Frère d’Outre-Atlantique définit ses intérêts au niveau global sans vergogne depuis la disparition de l’ennemi soviétique. Cela continuera tant que le monde acceptera ses manières de cow-boy.
Pourtant la résistance à la nouvelle doctrine de l’OTAN s’organise. Le Président de l’Académie russe des sciences militaires, le Professeur Machmoud Gareïev exprime ses réserves de manière succincte et concise : « Un nouvel ordre mondial apparaît : une petite communauté d’Etats occidentaux sous l’égide américaine entend dominer et dicter le cours des événements. Le message que cette communauté nous lance est clair : ne dérangez pas notre cercle ». Le député socialiste allemand (SPD), Hermann Scheer, manifeste son scepticisme face aux ambitions globales de l’Alliance occidentale. Il écrit à propos des zones de conflit qui se dessinent en Asie : « Les Etats-Unis tentent de contrôler politiquement cette région riche en ressources ; l’Alliance doit dès lors devenir l’escorte militaire des consortiums pétroliers et gaziers (…). L’élargissement de l’OTAN en Asie a une odeur de poudre. Nous devrions ne pas nous en mêler ».
Conclusion : la force des uns repose toujours sur la faiblesse des autres. L’hégémonie mondiale que concocte l’OTAN est possible parce que le reste du monde ne s’en est pas soucié. Pour cette raison, il nous apparaît urgent de forger des alternatives à la domination américaine et de leur donner une assise politique. Avec les élites établies, infectées par les virus de la banque et de l’idéologie mondialiste, un tel projet ne sera pas possible. En revanche, si des hommes et des femmes à la pensée claire, capables de tirer les conclusions qui s’imposent, agissant de Madrid à Vladivostok, l’alternative sera parfaitement possible. L’Internationale des peuples libres : voilà le projet qu’il faudra élaborer pour le XXIième siècle.
Karl RICHTER.
(Nation-Europa, 6/1999; trad. franç. : Robert Steuckers).
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ex: http://metapoinfos.hautetfort.com/
Un inédit de Jean-Claude Michéa, intitulé La double pensée et composé par plusieurs entretiens et textes indépendants, sort dans la collection Champs Flammarion au mois d'octobre.
On notera que la "nouvelle droite" est citée dès la première du livre comme l'"inventeur" de l'expression "la pensée unique" !
"Le libéralisme est, fondamentalement, une pensée double: apologie de l'économie de marché, d'un côté, de l'Etat de droit et de la "libération des mœurs" de l'autre. Mais, depuis George Orwell, la double pressée désigne aussi ce mode de fonctionnement psychologique singulier, fondé sur le mensonge à soi-même, qui permet à l'intellectuel totalitaire de soutenir simultanément deux thèses incompatibles. Un tel concept s'applique à merveille au régime mental de la nouvelle intelligentsia de gauche. Son ralliement au libéralisme politique et culturel la soumet, en effet, à un double bina affolant. Pour sauver l'illusion d'une fidélité aux luttes de l'ancienne gauche, elle doit forger un mythe délirant: l'idéologie naturelle de la société du spectacle serait le "néoconservatisme", soit un mélange d'austérité religieuse, de contrôle éducatif impitoyable, et de renforcement incessant des institutions patriarcales, racistes et militaires. Ce n'est qu'à cette condition que la nouvelle gauche peut continuer à vivre son appel à transgresser toutes les frontières morales et culturelles comme un combat "anticapitaliste". La double pensée offre la clé de cette étrange contradiction. Et donc aussi celle de la bonne conscience inoxydable de l'intellectuel de gauche moderne. "
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Etats-Unis : Robert Gates reste à la tête du Pentagone… Les obamolâtres qui attendaient de l’accession de leur idole à la magistrature suprême une nouvelle donne en matière de politique étrangère américaine pourraient rapidement ressentir comme un diffus sentiment de cocufiage. Le président nouvellement élu a en effet choisi de garder le Républicain Robert Gates à la tête du Pentagone… CHICAGO (NOVOpress) - Gates, dont le nom a été mêlé au scandale Iran-Contra (ventes secrètes d’armes à l’Iran pour financer la guérilla des Contras au Nicaragua), a été de 1989 à 1991 conseiller du président G.H.W. Bush (« Bush père ») au sein du Conseil national de sécurité. Il est ensuite nommé à la tête de la CIA où il restera jusqu’à la fin du mandat du président Bush, en 1993. Il y travaillera avec Condoleezza Rice. De 1999 à 2001, il est nommé doyen de la George Bush School of Government and Public Service au sein de l’Université du Texas. Bush fils le nommera en décembre 2006 à la tête du Pentagone, en remplacement de Donald Rumsfeld. Gates a été ou est membre du conseil d’administration d’un certain nombre d’entreprises, dont VoteHere, une société produisant des machines à voter électroniques, de celles qui ont tellement rendu service à son mentor George « W » Bush lors de la présidentielle de 2000… Depuis 1987, Gates est membre du Council on Foreign Relations, l’un des think tanks où s’élaborent – sans distinction d’appartenance partisane, Républicain et Démocrates s’y côtoyant en toute fraternité… – la politique étrangère des Etats-Unis. Il y co-présidera, avec le très marqué neocon Zbigniew Brzezinski un groupe d’étude sur les relations américano-iraniennes. Sur le dossier de l’Afghanistan, Gates est en accord total avec le futur patron de la Maison-Blanche : nos deux compères sont partisans d’y renforcer le contingent américain et d’y livrer « une guerre globale au terrorisme ». Sur l’Irak, Obama est partisan d’un calendrier de retrait des troupes de la coalition en Irak – au plus tard dans 16 mois – Pour Gates au contraire, un retrait total, qui plus est programmé, aurait pour nécessaire conséquence de livrer l’Irak à al-Qaïda et d’anéantir 10 années d’effort de guerre. Gageons que des événements ne manqueront pas de se produire qui sauront convaincre Obama du bien-fondé des vues de son secrétaire d’Etat à la Défense… Sur l’Iran enfin, il sera difficile au nouveau locataire de la Maison Blanche – outre le dossier du nucléaire militaire toujours pendant – de s’accommoder de la politique expansionniste de Téhéran, qui entend consolider son contrôle sur le « Grand arc chiite », depuis les frontières ouest du Pakistan jusqu’au Liban dominé par le Hezbollah et le Hamas, en passant par l’Irak et la Syrie… Le New York Times s’est récemment fait l’écho des convergences entre Démocrates et Républicains en faveur de l’option militaire. Dès après son investiture, Obama pourrait rapidement décider de frappes majeures contre l’Iran. « Nous ne pouvons tolérer un monde dans lequel des innocents sont tués par des extrémistes, a vertueusement déclaré Barack Obama lundi, lors d’une conférence de presse à Chicago, saisissant au vol les très opportuns attentats de Bombay. Nous devons recourir à la force totale de notre puissance, pas seulement militaire, mais aussi diplomatique et politique, pour répondre à ces menaces ». Un message qui a le mérite d’être limpide.
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ARCHIVES DE "Synergies Européennes" - 1999
Quand les alliés des Etats-Unis sont aussi (et surtout) leurs concurrents : le rôle d’espionnage universel d’ « ECHELON »
Début 1998, Steve Wright, membre d’OMEGA, une association britannique pour les droits des citoyens basée à Manchester, constate dans un rapport qu’il adresse au Parlement Européen, que tous les courriers électroniques, les conversations téléphoniques et les fax sont enregistrés par routine par le service de renseignement américain NSA (National Security Agency). La NSA fait suivre toutes ces données récoltées en Europe à l’adresse du Quartier Général de la NSA aux Etats-Unis, à Fort Meade dans le Maryland. Avec raison, Wright conclut que la NSA a installé un système de surveillance global, dont le but est de sonder les satellites par lesquels transite la plus grande partie des communications internationales. A la différence des systèmes de surveillance électroniques, utilisés lors de la guerre froide pour sonder des organismes militaires, le système de surveillance « ECHELON » sert essentiellement à espionner des cibles civiles : des gouvernements, des organisations de toutes sortes ou des entreprises commerciales ou industrielles.
Quatre pays, explique Wright, se partagent, avec les Etats-Unis, les résultats de cet espionnage global : la Grande-Bretagne, le Canada, la Nouvelle-Zélande et l’Australie. Les services secrets de ces quatre pays n’agissent en fait que comme fournisseurs subalternes de renseignements. En d’autres termes : seuls les Américains contrôlent complètement le réseau d’espionnage ECHELON. Ensuite, dans le rapport de Wright, on apprend également que la plus grande station d’écoute du monde se trouve à Menwith Hill, en Angleterre dans le Comté du Yorkshire. Cette station serait en mesure d’écouter la plupart des communications en Europe et dans les pays de l’ex-URSS.
Dans ce rapport de Wright, pour la première fois, on apprend officiellement dans l’UE qu’un système d’écoute global et électronique, dont le nom est ECHELON, existe ! Pendant des années, seules des informations fortuites et superficielles circulaient à propos d’ECHELON. Le premier à avoir parler du concept même d’ECHELON a été le journaliste britannique, spécialisé dans les affaires d’espionnage, Duncan Campbell. Dans un article pour le magazine New Statesman du 12 août 1988. Il y a onze ans, Campbell révélait qu’ECHELON permettait de surveiller toutes les communications venant et arrivant en Grande-Bretagne, à la condition que cette surveillance serve l’intérêt national ou favorise l’économie britannique. Récemment, Campbell a lui-même rédigé un rapport à la demande d’un groupe de travail de l’UE, le STOA (Scientific and Technological Options Assessments). Le titre de son rapport : Interception Capabilities 2000 (soit : Etat des techniques d’écoutes en l’an 2000). Il traitait en détail d’ECHELON.
Campbell montre notamment dans son rapport que chaque Etat, participant à ECHELON, a autorisé ses services secrets ou certains ministères, de consulter tout matériel récolté ayant une importance d’ordre économique ou de les commander. Grâce aux informations ainsi engrangées, des objectifs très divers peuvent être poursuivis. Campbell ajoute que la décision d’exploiter ou d’utiliser ces informations acquises par espionnage ne relève pas des services secrets impliqués mais des gouvernements.
Ce rapport ne manque pas de piquant : en effet, la Grande-Bretagne est membre de l’UE et participe à l’espionnage généralisé de tous ses partenaires. Rappelons à ce propos deux faits : le journal anglais The Independant du 11 avril 1998 constate, vu la participation de la Grande-Bretagne à ECHELON, que celle-ci participe à un consortium de services électroniques de renseignements, qui espionne systématiquement les secrets économiques et commerciaux des Etats de l’UE. Le journal citait l’avocat français Jean-Pierre Millet, spécialisé en criminalité informatique. Les partenaires de la Grande-Bretagne, disait Millet, auraient raison d’en vouloir aux Britanniques, parce que ceux-ci n’ont pas abandonné leur coopération avec les Américains. Disons aussi en passant que la France, en matière d’espionnage économique, n’est pas un enfant de chœur. Ainsi, par exemple, l’ancien chef des services secrets français, Pierre Marion, avait déclaré que la guerre faisait toujours rage, y compris entre pays alliés, dès qu’il s’agissait d’affaires (cf. Spectator, 9 avril 1994). La grogne des Français, dans ce contexte, se justifiait non pas tant parce que la Grande-Bretagne faisait partie du cartel d’ECHELON, mais parce que la France ne pouvait pas participer à cette gigantesque machine globale à fouiner.
Le nom de code ECHELON découle du terme militaire français « échelon ». ECHELON a été au départ conçu par les services de renseignements pour surveiller l’Union Soviétique. Après l’effondrement de celle-ci, ce projet, qui a coûté des milliards, devait servir à combattre officiellement le terrorisme international. Mais cette justification n’est qu’un rideau de fumée, destiné à dissimuler le véritable objectif. D’après les informations dont on dispose, on peut désormais affirmer qu’ECHELON a bel et bien été conçu prioritairement pour l’espionnage industriel et économique à grande échelle.
Dans un rapport du 29 mars de cette année, Der Spiegel évoquait que les termes-clefs, avec lesquels ECHELON fonctionne, proviennent avant tout du domaine économique américain. Indice supplémentaire que les Américains ne se gênent nullement pour combattre les concurrents étrangers de leurs entreprises par tous les moyens, même illicites. Cela leur est complètement égal de savoir si la firme espionnée appartient à un pays allié ou ennemi. Deux auteurs ont bien mis cela en exergue, Selig S. Harrison et Clyde V. Prestowitz, dans un article du périodique Foreign Policy (79/90) : les alliés militaires des Etats-Unis sont ses ennemis économiques. Il est fort probable que les Etats-Unis nieront qu’une rivalité fondamentale les oppose aux autres puissances occidentales sur les plans des relations commerciales internationales, ce qui les empêchera, par la même occasion, de réagir adéquatement au niveau des règles de la concurrence.
L’ancien directeur du FBI, William Sessions, voit les choses de la même façon : dans un entretien, il a expliqué qu’aujourd’hui déjà, et, a fortiori dans l’avenir, une puissance est ou sera l’alliée ou l’ennemie des Etats-Unis non seulement selon les nécessités militaires, mais aussi et surtout selon les résultats des observations que les Etats-Unis obtiendront de leurs services de renseignement dans les domaines scientifiques, technologiques, politiques et économiques (cf. Washington Times, 30 avril 1992) (ndlr : autrement dit, aucune puissance européenne ou asiatique ne pourra désormais développer un programme de recherches scientifiques ou technologiques, et réussir des applications pratiques, sans risquer d’encourir les foudres des Etats-Unis et d’être décrite dans les médias comme « totalitaire », « dictatoriale », « communiste » ou « fasciste », ou « rouge-brune »).
Philip Zelikov est encore plus clair dans son ouvrage American Intelligence and the World Economy (New York, 1996). La victoire dans la bataille pour être compétitif sur les marchés du monde est le premier point à l’ordre du jour dans l’agenda de la sécurité américaine. Même vision chez Lester Thurow, célèbre économiste américain du MIT (Massachusetts Institute of Technology), auteur de Head to Head : The Coming Battle between Japan, Europe and America (New York, 1992). Sans s’embarrasser de circonlocutions, Thurow écrit que les Etats qui dominent les plus grands marchés définissent également les règles. Il en a toujours été ainsi. Raison pour laquelle les Américains refusent même aux Etats qui participent au réseau ECHELON d’accéder à toutes les données récoltées. Ce genre de restriction est également habituel. Ainsi, par exemple, Mark Urban, dans son livre UK Eyes Alpha. The Inside Story of British Intelligence (Londres, 1996), évoque la coopération entre les services secrets britannique et américain et constate que les Américains n’ont jamais cessé de retenir des informations, de les garder pour eux seuls. Il s’agissait surtout des informations relatives aux affaires commerciales.
Ce détail et cette pratique de rétention expliquent les véritables motivations des Américains et de leurs partenaires dans le réseau d’écoute global ECHELON. Pourtant il serait inexact et insuffisant d’affirmer que le seul but d’ECHELON est l’espionnage économique. Comme auparavant, l’intelligence militaire et politique occupe une large part des activités de ce réseau. En priorité, ECHELON sert à faire valoir ses propres intérêts de manière plus efficace.
D’après les explications du Néo-Zélandais Nicky Hager, qui, avec son livre Secret Power. New Zealand’s Role in the International Spy Network (1996), a permis de mieux savoir comment fonctionnait ECHELON, ce système d’espionnage n’est pas agencé de façon à contrôler et à copier chaque courrier électronique ou chaque télécopie. Le système vise plutôt à trier et à sonder de grandes quantités de communications électroniques. Les ordinateurs d’ECHELON filtrent au départ de mots-clefs ou de concepts-clefs, consignés dans des « dictionnaires » et, à partir de la masse d’informations récoltées, trient ce qui est intéressant pour les divers services de renseignement.
Dans cette pratique, écrit Hager dans son article du magazine Covert Action Quarterly (56/96-97), le système de filtrage « Memex », élaboré par la firme britannique Memex Technology, joue un rôle primordial. Memex est en mesure de rechercher de grandes quantités de données au départ de concepts-clefs. Ces concepts-clefs englobent les noms de certaines personnalités, d’organisations, de désignations de pays ou de termes scientifiques ou spécialisés. Parmi ces concepts-clefs, on trouve les numéros de fax et les adresses électroniques de certains individus, d’organisations ou d’institutions étatiques.
Une chaîne mondiale d’installations d’écoute (comme, par exemple, Menwith Hill ou Bad Aibling en Bavière) a été placée tout autour du globe, pour pomper les réseaux internationaux de télécommunications. ECHELON relie entre elles toutes ces installations d’écoute, qui permettent aux Etats-Unis et à leurs alliés de surveiller une bonne part des communications qui s’effectuent sur la Terre.
Ce qui est substantiellement nouveau dans ECHELON n’est pas tant le fait que des ordinateurs sont utilisés pour exploiter des renseignements électroniques à l’aide de certains concepts-clefs (car c’était déjà possible dans les années 70), mais c’est surtout la capacité d’ECHELON et de la NSA de pouvoir placer en réseau tous les ordinateurs mis en œuvre et cela, à grande échelle. Cette mise en réseau permet aux diverses stations d’écoute de travailler comme autant de composantes d’un système global intégré. La NSA, le service secret néo-zélandais GCSB (Government Communications Security Bureau), le service secret britannique GCHQ (Government Communications Head Quarters), le service secret canadien CSE (Communications Security Establishment) et le service secret australien DSD (Defence Signals Directorate) sont les partenaires contractuels de l’UKUSA Signals Intelligence, un pacte entre les divers services de renseignements des puissances anglo-saxonnes. Cette alliance explique par ses origines : elle date de la coopération entre ces services pendant la seconde guerre mondiale. Au départ, elle visait à faire surveiller l’URSS par les services de renseignement.
Grosso modo, ECHELON poursuit trois objectifs. D’abord contrôler les satellites permettant les communications internationales qu’utilisent les sociétés téléphoniques de la plupart des Etats du monde. Un anneau de tels satellites entoure la Terre. En règle générale, ces satellites sont positionnés à hauteur de l’Equateur. D’après ce que nous en dit Nicky Hager, cinq stations d’écoutes du réseau ECHELON servent à pomper ce que contiennent ces satellites.
Deuxième objectif : espionner les satellites qui n’appartiennent pas à Intelsat. Il s’agit surtout de satellites russes, mais aussi d’autres satellites régionaux de communications. Les stations qui surveillent ces satellites-là sont, d’après Hager, Menwith Hill (Angleterre), Shoal Bay (Australie), Bad Aibling (Bavière/RFA), Misawa (Nord du Japon) et Leitrim (Canada). Cette dernière s’occupe principalement des satellites latino-américains.
Enfin, troisième objectif d’ECHELON : coordonner les stations qui s’occupent des systèmes de communications terrestres. Celles-ci sont spécialement intéressantes car elles s’effectuent par l’intermédiaire de câbles transocéaniques et d’une technique de haute fréquence, et véhiculent d’énormes quantités de communications officielles, commerciales ou gouvernementales.
La station d’écoute très puissante de Menwith Hill dans le Nord de l’Angleterre disposerait de 22 stations satellitaires de réception. Menwith Hill sert en première instance la NSA, en tant que station terrestre des satellites-espions américains. Ceux-ci surveillent les télécommunications à rayon réduit comme par exemple les émetterus militaires ou les « walkie talkies ». Les stations terrestres d’Alice Springs (Australie) et de Bad Aibling (Bavière) ont une fonction analogue.
En Allemagne, les autorités officielles ne veulent rien entendre de tout cela. Ainsi, l’ancien Secrétaire d’Etat Eduard Lintner (CSU), en poste au ministère de l’intérieur de Bonn, a répondu le 30 avril 1998 à une question écrite, posée par le député socialiste Graf, portant sur les activités de la NSA, que le gouvernement fédéral allemand ne savait rien de plus que ce qu’avait dit la presse à ce sujet !
En d’autres termes : le gouvernement fédéral allemand ne sait officiellement rien de cette incursion massive et de cette grave entorse à l’intégrité des Etats nationaux et des individus. Mais cette attaque vient d’ « Etats amis » de l’Allemagne. C’est tout dire…
Michael WIESBERG.
(article paru dans Junge Freiheit, n°26/99 ; redaktion@jungefreiheit.de
Site : http://www.jungefreiheit.de ; traduction française : Robert Steuckers)
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Ex: http://metapoinfos.hautetfort.com
Une citation tirée de La double pensée de Jean-Claude Michéa (Champs Flammarion, 2008) :
"[L'] uniformité idéologique [du paysage médiatique contemporain] atteint son degré d'intensité maximal chaque fois que les institutions capitalistes sont confrontées à une menace réelle (par exemple lors des référendums sur le traité de Maastricht et sur le projet de Constitution européenne), ou même simplement fantasmée (par exemple lors des élections présidentielles d'avril 2002). Le synchronisme absolu des commentaires politiques, l'ampleur des mensonges diffusés et l'inévitable mobilisation des artistes officiels peuvent alors être comparés, sans la moindre exagération, à la propagande normale des Etats totalitaires. C'est d'ailleurs dans ces moments privilégiés - quand chacun est tenu de hurler avec les loups et que les derniers masques tombent - qu'on peut se faire une idée précise du courage personnel, de la probité intellectuelle et de la valeur morale des professionnels des médias et du spectacle."
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Une immigration toujours plus forte
Concernant la situation de l’immigration sur le continent européen, le rapport confirme les prévisions émises par certains mouvements politiques comme le Front national. Selon lui, en 2025, la part des « minorités extra-européennes pourraient atteindre des proportions significatives - 15 % ou plus - dans presque tous les pays d’Europe de l’ouest » et ces populations auront une « structure d’âge substantiellement plus jeune que la population de souche ».
Plus loin, le document affirme que d’ici 2025, « l’Europe est devenue la destination de choix pour plus d’un million de migrants chaque année et le foyer de plus 35 millions d’individus nés à l’étranger - beaucoup provenant de pays à majorité musulmane, en Afrique du nord, au Moyen-Orient et en Asie du sud ».
Concernant spécifiquement la « population musulmane d’Europe de l’ouest », un encadré leur est consacré. Il indique que la population française comporte actuellement la plus forte proportion de musulmans en Europe (5 à 6 % de la population totale soit 5 millions de personnes). Ces derniers seraient 3,5 millions en Allemagne et 1,8 millions au Royaume-Uni. Il assure que « si les modèles actuels de l’immigration et de la fécondité des populations musulmanes, supérieure à la fécondité moyenne, continuent », alors, « l’Europe de l’ouest pourraient comporter 25 à 30 millions de musulmans d’ici 2025 ».
Des conséquences graves
Le rapport détaille les répercussions de cette immigration : « étant donné le mécontentement grandissant envers la proportion actuelle d’immigrés parmi les européens de souche, de telles augmentations [du nombre d'immigrés] intensifieront probablement les tensions ».
De plus, « les pays avec un nombre grandissant de musulmans, connaîtront un rapide changement dans leur composition ethnique, particulièrement autour des aires urbaines », ce qui « compliquera potentiellement les efforts » entrepris pour « faciliter l’assimilation et l’intégration ». Le document poursuit : en l’absence d’un nombre suffisant « d’emplois convenables », cette « concentration grandissante [dans les aires urbaines] pourraient mener à plus de tensions et de situations instables, telles que les émeutes de 2005 dans les banlieues parisiennes ». En outre, toujours selon le rapport : « en dépit d’une couche sociale non négligeable de musulmans intégrés, un nombre grandissant - conduit par un sens de la séparation, de la rancune, et de l’injustice - va probablement attacher d’avantage d’importance à l’isolement de zones qui auront des pratiques religieuses et culturelles spécifiques à l’Islam ».
Les implications politiques sont également expliquées dans le rapport : « l’immigration et la politique d’intégration » ainsi que « les affrontements avec les musulmans conservateurs sur l’éducation, les droits des femmes et le rapport entre l’État et la religion, vont probablement renforcer les formations politiques de centre-droit, et scinder les coalitions politiques de centre-gauche qui furent utiles dans la construction et le maintien des systèmes de protection sociale des pays européens ».
Enfin, le document du NIC souligne que « même si les communautés immigrées n’obtiendront probablement pas une représentation parlementaire suffisante pour dicter la politique intérieure ou étrangère d’ici 2025, les sujets relatifs aux musulmans soulèveront une attention croissante sur la scène politique européenne ». Concernant la politique étrangère, et c’est bien là ce qui inquiète les Américains : « les tensions continues, sociétales et politiques, à propos de l’intégration des musulmans, rendront probablement les responsables européens plus sensibles aux répercussions potentielles intérieures qu’engendreront leurs politiques étrangères au Moyen-Orient », comme par exemple un « alignement trop important sur la politique [étrangère] américaine vue comme pro-israélienne ».
L’entrée de la Turquie dans l’Union européenne
Selon le rapport, les « doutes croissants à propos des chances de la Turquie [de rentrer dans l'UE] vont sans doute ralentir la mise en œuvre de ses réformes sur les droits de l’homme ». En forme d’avertissement, le document poursuit : « tout refus catégorique risque d’avoir de larges répercussions, renforçant les arguments du monde musulman - y compris des minorités musulmanes d’Europe - à propos de l’incompatibilité entre l’Occident et l’Islam ».
L’Union européenne, un « géant boiteux »
Une bonne nouvelle tout de même, selon ce rapport, l’Union européenne aura fait en 2025 des « progrès limités dans la réalisation du rêve des leaders et des élites européennes [à savoir] : un acteur global cohérent, intégré et influant ». L’UE aura alors toujours « besoin de combler un fossé démocratique entre Bruxelles et les citoyens européens » et ses dirigeants auront du mal à « convaincre le public sceptique, des bénéfices d’une plus grande intégration économique, politique, et sociale ».
Il est à noter que toutes ces prévisions restent hasardeuses tant il est vrai que les peuples peuvent encore changer l’orientation politique de leur pays s’ils le décident. Et cela passe en premier lieu par le vote aux élections européennes de juin prochain.
Les passages entre guillemets sont une traduction libre depuis l’anglais, effectuée par NP Info.
Consulter le rapport complet (120 pages en anglais, au format pdf)
Les articles de NP Info sont libres de copie et de diffusion sous réserve de mention de la source d’origine http://www.nationspresse.info/
00:35 Publié dans Affaires européennes | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : immigration, europe, union européenne, etats-unis | |
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" L'obésité n'est que le résultat d'un modèle de développement devenu fou, privatisé au bénéfice d'une oligarchie. Il ne s'agit donc pas de stigmatiser les obèses, mais de voir dans leur corps martyrisé la métaphore du capitalisme terminal. L'accumulation des calories ne faisant que refléter l'accumulation du capital. Obésité de la population, boulimie des marchés financiers, hypertension boursière, bulle immobilière. C'est tout un système menacé d'infarctus et d'éclatement."
Gabriel Rivière, Opération Globésité, in Le Choc du mois n°26 (octobre 2008)
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Gentile/Evola: une liaison ami/ennemi
Stefano ARCELLA
Evola n'a jamais émis que des jugements âpres et sévères sur Giovanni Gentile, le philosophe de l'actualisme. Pourtant, il a entretenu avec une lui une correspondance cordiale et a collaboré à l'Enciclopedia Italiana, monument culturel commandité par le régime de Mussolini et placé sous la houlette de Gentile. Nous avons découvert les preuves de cette étrange relation, occultée jusqu'ici...
Les rapports entre Evola et Gentile ont toujours été perçus sous l'angle conflictuel, sous l'angle des différences profondes entre les orientations philosophiques respectives des deux hommes. Evola, dans sa période spéculative (1923-27), avait élaboré une conception de l'individu absolu, représentant un dépassement décisif de la philosophie idéaliste dans ses multiples formulations, dont, notamment, l'idéalisme de Croce et l'actualisme de Gentile. Evola, en arrivant au bout de ses spéculations, approchait déjà ce point de passage vers la Tradition, comprise et perçue comme ouverture à la transcendance, et vers l'ésotérisme (en tant que voie expérimentale pour la connaissance et la réalisation du moi). Sa période spéculative à été donc une étape nécessaire dans son cheminement vers la Tradition.
Pourtant, dans l'histoire des rapports entre les deux penseurs, il y a un élément demeuré totalement inconnu jusqu'ici: si on en prend connaissance, on acquiert une vision plus claire, plus directe et plus complète du lien qui a uni les deux hommes, en apparence ennemis. Cet élément, c'est la correspondance entre Evola et Gentile, que l'on peut consulter désormais, grâce à la courtoisie dont fait montre la Fondazione Gentile. Cette correspondance date des années 1927-1929, à l'époque où Evola dirigeait la revue Ur, publication visant à mettre au point une science du Moi, et qui fut, par la suite, sous-titrée «revue des sciences ésotériques».
C'est à la même époque que Gentile, avec ses collaborateurs, préparait une œuvre de grande importance scientifique: l'Enciclopedia Italiana, dont il fut le premier directeur. Le premier volume de cette œuvre gigantesque, commanditée par le régime mussolinien, est paru en 1929. Les tomes suivants paraissaient à un rythme trimestriel.
La lettre la plus significative, du moins sous l'angle historico-culturel, est celle qu'Evola adresse à Gentile le 2 mai 1928 (année où fut publié Imperialismo pagano). Cette lettre est sur papier à en-tête de la revue Ur; elle remercie vivement Gentile d'avoir donné suite à son désir de collaborer à l'Enciclopedia Italiana —et Evola, dans la foulée, fait référence à son ami Ugo Spirito— pour les domaines qui pourraient être de sa compétence.
Cette collaboration est confirmée dans une lettre du 17 mai 1929, dans laquelle Evola rappelle à Gentile que celui-ci a confié la rédaction de quelques entrées à Ugo Spirito, qui, à son tour, les lui a confiées. Dans cette lettre, Evola ne spécifie pas de quelles entrées il s'agit exactement, ce qui rend notre travail de recherche plus difficile. Actuellement, nous avons identifié avec certitude une seule entrée, relative au terme “Atanor”, signée des initiales “G.E.” (Giulio Evola).
Ces notes peuvent être vérifiées dans le volume Enciclopedia Italiana. Come e da chi è stata fatta, publiée sous les auspices de l'«Istituto dell'Enciclopedia Italiana» à Milan en 1947. Dans la liste des collaborateurs, Evola est mentionné (“Evola Giulio”, p. 182) et on mentionne également les initiales qu'il utilisaient pour signer les “entrées” de sa compétence (“G. Ev.”), de même que le domaine spécialisé dans lequel se sont insérées ses compétences: «l'occultisme». Ce terme désigne la spécialisation du penseur traditionaliste et non une entrée de l'Encyclopédie. De plus, les mentions, que signale ce petit volume introductif à côté de la matière traitée, indiquent le tome auquel Evola a collaboré plus spécialement: soit le tome V, publié en 1930, dont la première entrée était “Assi” et la dernière “Balso”.
Actuellement, on cherche à identifier précisément les notes préparées par Evola lui-même, pour ce volume. On tient compte du fait que bon nombre d'entrées ne sont pas signées et que le matériel préparatoire de l'Encyclopédie doit sans cesse être reclassé et mis en ordre, sous les auspices de l'«Archivio Storico dell'Enciclopedia Italiana», parce que ces masses de documents ont été dispersées au cours de la seconde guerre mondiale. En effet, une partie de la documentation avait été transférée à Bergamo sous la “République Sociale”.
Un autre élément nous permet de vérifier la participation d'Evola à cette œuvre de grande ampleur: Ugo Spirito mentionne dans un texte de 1947 le nom d'Evola parmi les rédacteurs de l'Encyclopédie dans les domaines de la philosophie, de l'économie et du droit. Des indications identiques se rencontrent dans le tome V de 1930.
Sur base de ses données, d'autres considérations s'imposent. Le fait qu'Evola écrive à Gentile sur du papier à en-tête d'Ur, le 2 mai 1928, n'est pas fortuit.
Evola n'était pas un homme qui agissait au hasard, surtout quand il fallait se mettre en relation avec un philosophe du niveau de Gentile, figure de premier plan dans le panorama culturel italien de l'époque. Evola ne s'est donc pas présenté au théoricien de l'actualisme à titre personnel, mais comme le représentant d'un filon culturel qui trouvait sa expression en Ur, revue dont il était le directeur. Evola tentait de la sorte d'officialiser les études et les sciences ésotériques dans le cadre de la culture dominante, au moment historique où triomphait le fascisme mussolinien. Ce dessein se devine tout de suite quand on sait que la discipline attribuée tout spécialement à Evola dans l'Encyclopédie a été l'«occultisme».
Gentile accepte donc la collaboration d'Evola, ce qui constitue, de fait, une reconnaissance avouée des qualifications du théoricien de l'individu absolu, ainsi qu'un indice de l'attention portée par Gentile aux thématiques traitées dans Ur, au-delà des convictions qui opposaient les deux hommes et des différences irréductibles d'ordre philosophique qui les séparaient. La collaboration d'Evola à l'Encyclopédie dirigée par Gentile prouve que ce dernier l'acceptait parmi les scientifiques de haut rang, dont le prestige culturel était incontestable dans l'Italie de l'époque. De ces rapports épistolaires entre Evola et Gentile, nous pouvons déduire, aujourd'hui, un enseignement que nous lèguent de concert les deux philosophes: ils se montrent tous deux capables d'intégrer harmonieusement des cohérences qui leur sont étrangères, des cohérences qui contrarient leurs propres principes, ce qui atteste d'une ouverture d'esprit et d'une propension au dialogue, à la confrontation fertile et à la collaboration, même et surtout avec ceux qui expriment une forte altérité de caractère et d'idées. La cohérence est une force positive: elle n'est pas la rigidité de celui qui s'enferme dans un isolement stérile. Un fair play qu'il convient de méditer à l'heure où d'aucuns réclament à tue-tête l'avénement d'une nouvelle inquisition.
Depuis cinquante ans, on assiste à une démonisation a-critique, fourvoyante et infondée de nos deux penseurs, on constate un fossé d'incompréhension, des barrières qu'heureusement on peut commencer à franchir aujourd'hui, vu les processus de transformation qui sont à l'œuvre dans le monde culturel. Il n'empêche que l'avilissement du débat culturel dans le sillage de l'anti-fascisme ou de l'esprit de parti est une réalité malheureuse de notre époque. Pour inverser la vapeur, il convient de remettre en exergue ces liens entre Evola et Gentile, entre deux philosophes appartenant à des écoles totalement différentes et opposées, afin de relancer un débat à l'échelle nationale italienne, de réexaminer les racines de notre histoire récente, de récupérer ce qui a été injustement étouffé après 1945 et gommé de nos consciences à cause d'une fièvre aigüe de damnatio memoriae.
En conclusion, outre la piste que nous offre la consultation des Archives Laterza pour explorer les rapports entre Croce et Evola, nous devrions aussi compulser les lettres de Croce, mais, hélas, les Archives Croce nous ont textuellement dit que «ces lettres-là ne sont pas consultables». C'est une politique diamétralement différente de celle que pratique la Fondazione Gentile, qui permet, elle, de consulter sans difficultés les lettres dont je viens de vous parler.
Stefano ARCELLA.
(traduction française : Robert Steuckers).
00:05 Publié dans Traditions | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : traditionalisme, italie, fascisme, philosophie, actualisme, années 20, années 30 | |
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Les historiens français se sont rarement intéressés à ces corsaires turcs qui bénéficièrent de la bienveillance contre nature du roi François 1er.
Considérant l'alliance sacrilège du roi Très-chrétien avec le sultan Soliman le Magnifique, l'historiographie traditionnelle en cherche la justification dans le souci de desserrer l'étau constitué par les possessions de son rival, Charles Quint, empereur d'Allemage, roi d'Espagne, suzerain des Pays-Bas et grand-duc d'Autriche.
Le grand historien médiéviste Jacques Heers tord le cou à cette interprétation complaisante. La réunion sur la tête de Charles Quint de la couronne impériale et de la couronne d'Espagne a été moins un atout qu'une faiblesse, comme le montre le fait qu'au terme d'un long règne semé de déconvenues, il n'a rien trouvé de mieux que de séparer ses possessions, laissant l'Espagne à son fils Philippe et le Saint Empire romain germanique à son frère Ferdinand.
Dans les faits, François 1er, peu soucieux de protéger le pré carré capétien, a poursuivi toute sa vie les chimères d'outre-monts. Il a usé ses forces à tenter de conquérir l'Italie et c'est pour cela qu'il a combattu Charles Quint et noué des relations avec les Turcs.
Au lendemain de la défaite de Pavie, en 1525, sa mère Louise de Savoie envoie des émissaires auprès du sultan, lequel s'empare de la Hongrie l'année suivante et arrive aux portes de Vienne sans que la France ne s'en soucie outre mesure.
Dans le même temps, les Français encouragent les corsaires turcs basés à Alger dans leurs attaques contre le littoral italien. Au célèbre Kheir ed-Din, alias Barberousse, allié de François 1er, s'oppose le Gênois Andrea Doria, un corsaire du camp autrichien.
Leur champ de bataille est la Méditerranée occidentale. Razzias ( *) des villages côtiers, attaques des navires marchands, et surtout rafles de prisonniers par milliers et dizaines de milliers.
Les prisonniers, hommes, femmes et enfants, sont vendus comme esclaves sur les marchés ou rétrocédés contre rançon à l'image de Miguel Cervantès, le futur auteur de Don Quichotte.
Jacques Heers fait ressortir le caractère inexpiable de ces guerres méditerranéennes, où s'affrontent indistinctement musulmans et chrétiens. L'historien souligne leur différence d'avec les guerres féodales de l'Europe septentrionale, encadrées par un code chevaleresque assez strict.
En 1535, l'empereur Charles Quint en personne dirige une expédition pour venir au secours du bey musulman de Tunis, menacé par les corsaires turcs d'Alger (on commence à utiliser à propos de ces derniers le terme impropre et fantaisiste de Barbaresques).
Tunis devient pour quelques années un protectorat de l'empereur. Le roi de France, quant à lui, ne renonce pas à ses ambitions italiennes.
En 1543, au terme de bizarres tractations, Barberousse promet à François 1er l'appui de ses hommes pour de nouvelles attaques dans la péninsule.
En attendant, il obtient de s'établir à Toulon. C'est ainsi que pendant les longs mois de l'hiver 1543-1544, les habitants du port et de ses environs vont devoir cohabiter avec... 30.000 corsaires musulmans de toutes origines.
La cathédrale Sainte-Marie-Majeure est pour l'occasion convertie en mosquée. Tout cela pour rien. Les corsaires ne se battront pas pour le roi de France et celui-ci, lassé de leur présence, verse une rançon pour précipiter leur départ.
La bataille de Lépante voit la défaite de la flotte turque face aux galères espagnoles mais les corsaires n'en continuent pas moins d'écumer la mer Méditerranée. Au XVIIe siècle, les galères du roi Soleil, Louis XIV, sous le commandement d'Abraham Duquesne, attaquent leurs repaires d'Afrique du nord. Mais c'est seulement avec la conquête d'Alger en 1830 que s'achève leur douteuse épopée.
Jacques Heers a écrit un essai passionnant autour de cette Histoire méconnue, pleine de bruit et de fureur. Le récit est dense, argumenté, riche d'anecdotes vivantes et épiques. Pour tous les amoureux de la grande Histoire.
00:24 Publié dans Histoire | Lien permanent | Commentaires (1) | Tags : méditerranée, monde arabe, europe, empire ottoman, turquie, afrique du nord, algérie | |
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Claude Lévi-Strauss à l’honneur au Musée du Quai Branly - Ex: http://fr.novopress.info/Lectures, projections et visites guidées thématiques gratuites seront au programme de la journée du vendredi 28 novembre que le Musée du Quai Branly consacre à Claude Lévi-Strauss à l’occasion de son centième anniversaire.
Une centaine de personnalités ont été conviées à lire des textes de Claude Lévi-Strauss, parmi lesquelles l’écrivain et journaliste Patrick Poivre d’Arvor et son frère Olivier (prix Renaudot des lycéens 2008), la ministre de la Recherche Valérie Pécresse, la ministre de la Culture Christine Albanel ainsi que l’inévitable philosophe Bernard-Henri Lévy. Les radios d’Etat France Culture et RFI seront présentes au Musée des arts premiers et diffuseront des dossiers spéciaux au cours de la journée. Quant à la chaîne ARTE, elle a diffusé jeudi de nombreux documentaires consacrés à l’auteur de Tristes tropiques. Célébrer le centenaire de Lévy-Strauss au musée du Quai Branly n’est pas un choix anodin. En effet, l’anthropologue a toujours soutenu le projet cher à Jacques Chirac – « depuis son origine » dira-t-il –, malgré les scandales liés au mode de collectes des pièces exposées. Il était d’ailleurs à la cérémonie d’ouverture du lieu le 20 juin 2006. Nul doute que parmi les nombreuses citations du grand homme qu’on verra çà et là fleurir dans la grosse presse, on ne trouvera nulle trace de celle-ci : « On ne peut mettre dans la même catégorie, ni attribuer automatiquement au même préjugé, l’attitude de certains individus ou groupes que leur attachement à certaines valeurs rend totalement ou partiellement insensibles à des valeurs différentes. Il n’y a rien d’inadmissible dans le fait de placer un mode de vie au-dessus de tous les autres, ou de ne pas être attiré par des individus ou des groupes dont le mode de vie, respectable en soi, est très éloigné du système auquel on est traditionnellement attaché. C’est “peut-être le prix à payer pour que soit préservé le système de valeurs de chaque communauté ou de chaque famille spirituelle, et pour qu’il trouve en lui-même les ressources nécessaires à son renouvellement » Une déclaration identitaire très décomplexée que Claude Lévy-Strauss a faite en 1971 à la tribune des Nations Unis, et qui vaudrait maintenant à son auteur les foudres des boutiquiers de l’antiracisme institutionnel… |
00:20 Publié dans Philosophie | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : philosophie, anthropologie, ethnologie, événement, hommage | |
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AFP 20/11/2008 : "Un rare collier en or datant de l'âge de Fer, d'une valeur estimée à 350.000 livres (414.000 euros), a été découvert dans un champ du centre de l'Angleterre par un chercheur de métaux amateur, a rapporté jeudi le Guardian.
Présenté par un expert comme la plus belle découverte d'un objet de cette époque depuis un demi-siècle, ce collier vieux de 2.200 ans se trouvait dans un champ. [...] "C'est quelque chose de fabuleux, la plus belle découverte datant de l'âge de Fer depuis 50 ans", a estimé JD Hill, responsable de la section consacrée à cette période au British Museum. "Ce qui est fascinant, c'est qu'il a été trouvé dans un endroit où aucun torque (ndlr collier métallique ancien) n'est censé se trouver", a-t-il ajouté. "Le moins qu'on puisse dire, c'est que la région de Newark n'est pas réputée pour être un haut-lieu des découvertes de l'âge de Fer".
00:15 Publié dans archéologie | Lien permanent | Commentaires (1) | Tags : angleterre, âge du fer, protohistoire, british museum | |
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Simplicité volontaire, plus que jamais...
"Avec le temps, la consommation et la production à la chaîne rétrécissent l'individu, au sens où ses facultés inexprimées s'atrophient et le rendent moins capable de diversité, d'originalité, d'adaptation et d'autosuffisance. Sa dépendance aux biens fabriqués et à des services de plus en plus diversifiés grandit. Sa confiance en ses capacités diminue ; devant le moindre problème, il fait appel aux experts. Il laisse la conduite des affaires publiques aux politiciens, votant tantôt pour un parti, tantôt pour l'autre, mais sans avoir l'impression d'y changer grand chose. Finalement, il ne arrive à avoir si pu confiance en lui et en ses possibilités d'influer sur le cours des choses qu'il est désabusé. Le sentiment d'impuissance qui l'envahit l'empêche d'envisager même la possibilité que la situation change. Et quand on se sent ainsi, il faut taire sa conscience; car la conscience des injustices dans le monde, des menaces à la vie, de l'inutilité même de sa vie en même temps que le sentiment d'impuissance devant les possibilités d'y changer quoi que ce soit s'avère une situation intolérable."
Serge MONGEAU, La simplicité volontaire, plus que jamais, Montréal, Ecosociété, p.49-50.
00:10 Publié dans Philosophie | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : ecologie, consommation | |
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La dictature libérale
Analyse de l'ouvrage de Jean-Christophe Rufin (La dictature libérale. Le secret de la toute puissance des démocraties au 20° siècle, J.C. Lattès, Paris, 1994, 313 pages, 119 FF)
Frédéric KISTERS
Imaginez-vous la démocratie comme une jeune vierge craintive, égarée dans une antre peuplées de dépravés? Croyez-vous sa vertu menacée de toutes parts par des êtres lubriques qui ne désirent que son avilissement et sa mort? Craignez-vous qu'elle ne succombe sous les coups d'une horde de barbares ignares et belliqueux? Détrompez-vous!
Le dernier livre de Jean-Christophe Rufin vous démontrera, au travers d'une relecture de l'histoire de ce siècle finissant, que la démocratie libérale, quoiqu'elle se déclare toujours faible et menacée, est en fait aussi puissante que retorse.
En effet, la démocratie libérale présente l'apparence d'un système labile, peu apte aux décisions, déchiré par des tensions et divisions internes. Si ce visage décomposé correspondait à une réalité, nous serions en droit de nous demander par quel miracle une organisation aussi débile aurait non seulement survécu à deux guerres mondiales, ainsi qu'à de multiples séismes socio-économiques, et se serait, de plus, imposée dans la plupart des pays développés?
Les systèmes totalitaires paraissent plus robustes que les démocraties, parce que les pouvoirs de décisions sont concentrés et que la société semble plus homogène et ordonnée. Au contraire, la démocratie libérale possède une multiplicité de centres de décision et elle est agitée par des courants d'opinion contradictoires. En fait, la violence dont font montre les dictatures est le symptôme de la maladie qui les rongent irrémédiablement: ces sociétés, fondées sur l'adhésion inconditionnelle à une idéologie (aussi floue soit-elle), s'épuisent à discipliner leurs citoyens. A l'éradication d'un groupe d'opposants, que les média du pouvoir totalitaire qualifieront de “victoire”, correspond en fait une perte de substance vive, celle d'un groupe d'élite qui avait le courage de se révolter. Les sociétés totalitaires sont, en quelque sorte, masochistes et autophages... tandis que la contradiction anime la démocratie, elle disloque la dictature.
La polymorphie des démocraties constitue un second avantage par rapport aux dictatures: comme Protée, elles peuvent se présenter tour à tour sous des jours divers, en fonction des forces qu'elles rencontrent. Font-elles face à des communistes révolutionnaires, qu'elles enverront des émissaires puisés dans leurs partis communistes nationaux; font-elles face à une dictature d'extrême-droite, qu'elles délégueront l'un ou l'autre chantre de l'ordre; font-elles face à une théocratie musulmane, qu'elles choisiront des immigrés provenant de ces pays ou quelque intellectuel converti à l'Islam. Dans n'importe quelle situation, elles se trouveront toujours des collaborateurs, à l'intérieur d'elles-mêmes ou chez l'ennemi. Par contre, un gouvernement totalitaire est condamné à une certaine franchise, aussi machiavéliques soient ses dirigeants. Un Etat communiste peut se vouloir révolutionnaire et agressif, ou accomodant et pacifique, il demeurera un Etat communiste. Il peut arranger sa mise mais non pas remodeler son visage. Protée, lui, se transforme au gré des circonstances, ou plutôt, du fait de sa structure extrêmement complexe et mobile, il présentera son aspect le plus convenable à son interlocuteur.
Le problème immémorial que les démocraties ont toujours eu à résoudre est celui de la contradiction de la liberté individuelle des citoyens avec la cohésion de la société. La réponse habituelle fut l'instauration d'un contrat social qui mettait fin à l'état de nature en soumettant les hommes à une loi qui bornait leur liberté; le contrat étant garanti par la crainte de la loi. Mais ce système, dérivé de la pensée de Hobbes, oscille sans cesse de l'anarchie au despotisme. En ce sens, la Russie communiste en est un parfait exemple: issue d'une guerre civile, elle se reconstitue sous la férule de Staline, puis régresse et retourne au chaos primordial. En effet, dès que le contrat social est instauré, les hommes s'en vont jouir de la paix et oublient peu à peu les affres de l'état de nature. Ils deviennent nostalgiques et, un jour, désirent retrouver leur paradis perdus comme les écologistes.
L'avatar du Léviathan, la démocratie libérale, a trouvé la parade à ce paradoxe: l'indifférence.
La démocratie libérale ne propose aucune valeur positive, aucun projet; elle se contente de dénoncer les travers de ses adversaires et de proposer à ses sujets la “liberté”, le bien-être matériel, la paix, une réelle immobilité sous une apparente agitation. Dans ce système sans valeurs, et donc sans contrainte, l'homme peut jouir de sa liberté, comme dans l'état de nature. On comprend pourquoi les “droits de l'Homme” ont pris une telle importance dans nos sociétés: ils servent de substitut aux valeurs positives et assurent une cohésion minimale. «La Déclaration des droits de l'Homme, elle, est un socle acceptable. Elle assure à chacun la reconnaissance de son droit au processus de personnalisation, sa capacité d'être un individu et de former quelque regroupement que ce soit avec les autres. Elle est reconnaissance du droit de posséder, de jouir, d'être toujours semblable aux autres et égal, cependant qu'on s'active à être toujours différent et si possible supérieur. La Déclaration des droits de l'Homme permet à la dispersion sociale de s'opérer sans barrière. Le principe de souveraineté du peuple la complète car il permet de réintégrer, le moment venu, cette dispersion par la grâce de majorités numériques» (pp. 274-275).
Si les dictatures nient l'opinion publique, les démocraties, elles, feignent de l'ignorer. La démocratie étant indifférente par rapport aux citoyens, ceux-ci, sentant qu'ils n'ont plus aucune prise sur le système, s'en détachent et recherchent des solidarités de remplacement plus proches d'eux: l'ethnie, la secte, la minorité d'opinion, l'association caritative, etc. La société se subdivise en une nébuleuse de sous-groupes, plus ou moins autonomes, disposant chacun de leur propre “culture”, qui va de la stricte idéologie de certaines sectes, à celle, beaucoup plus diffuse, du “pop/tagg”. Bien sûr, chacun demeure libre de participer à plusieurs de ces mini-sociétés... Toutefois, malgré cette apparente liberté débridée, chaque monade reste liée à l'ensemble. Aussi, «le marginal devient central». Les média ne portent leur attention que sur l'anormal, l'extraordinaire, le déréglé. La crise de la solitude, l'alcoolisme, la drogue, l'aliénation, la délinquence, les émeutes de banlieue, etc. ne sont pas les symptômes d'une maladie mortelle pour la démocratie, mais des signes de son fonctionnement normal! Chaque fois que les média évoquent ces phénomènes marginaux, ils les réintègrent au centre même de la démocratie. La machine fonctionne comme une immense pompe aspirante-refoulante.
Dans l'Empire romain, l'essentiel de l'armée stationnait aux frontières pour contenir les barbares. Lorsqu'une crise politique interne survenait, tels généraux d'armée se muaient en prétendants au trône impérial et l'on voyait bientôt deux, trois ou quatre colonnes armées converger vers Rome, le cœur de l'Empire, que personne ne défendait. Le vainqueur accédait au trône en gravissant quelques tas de cadavres et, ayant ainsi renouveler l'élite dirigeante par un apport de sang neuf, perpétuait le principat.
Dans nos démocraties libérales, les groupes révolutionnaires habitent aussi dans les confins de la société, mais il n'existe pas de centre géographique vers lequel les armées pourraient marcher triomphalement, point de citadelle à prendre d'assaut, juste un vaste et morne marécage où s'enlise tout véritable idéal, où l'homme révolté ne peut qu'errer sans jamais trouver le moindre exutoire à sa rage. Par contre, sa simple existence entretient le mythe de la menace.
A cette indifférence interne aux nations s'ajoutent l'internationalisation du monde libéral. Tant du point de vue économique que du point de vue politique, les centres de décision tendent à se déplacer vers des organismes internationaux voire «universels», alors que les peuples ne peuvent agir qu'au niveau national. Le pouvoir leur échappe encore un peu plus. Sur ce point, il nous semble que Rufin simplifie le processus: jusqu'à présent, ces institutions (UNESCO, GATT, CEE, ALENA, etc.) n'existent que par délégation; les décisions sont prises par les représentants des Etats qui y siègent; les finances sont des subsides octroyés et non des ressources propres; les soldats de l'ONU sont des militaires des armées nationales affublés d'un casque bleu. Par contre, il est vrai, et fréquent, qu'un gouvernement national peut faire passe une loi en prétextant qu'elle est la conséquence d'une décision émanant d'une institution “supérieure”, dans laquelle il possède un poid et des voix. Les organismes internationaux ne décident de rien, il servent de caution.
La démocratie vit de la menace qui masque sa force. Elle en a besoin pour maintenir sa cohésion. Au lendemain de la seconde guerre mondiale, les Etats-Unis, qui possédaient à eux seuls la moitié de la richesse mondiale et contrôlaient la moitié du globe, firent pourtant mine de craindre l'URSS, qui sortait exténuée du conflit. Cette URSS constituait un partenaire idéal, juste assez fort pour effrayer, juste assez effrayant pour que peu d'Occidentaux y adhérassent. Le monstre joua bien son rôle durant les années 50, mais à la fin de la décennie suivante, il devint évident qu'il s'essoufflait, surtout du point de vue économique. Les démocraties libérales maintinrent encore durant quelques années ce précieux ennemi en vie, sous perfusion (du blé et de l'argent). Pour palier à son anémie, on sortit divers opposants des goulags afin qu'ils témoignassent en Occident des horreurs du régime. Lorsque l'ours défuncta définitivement, les démocraties libérales se mirent en quête d'une menace de remplacement.
Elles se tournèrent d'abord vers un élément pré-existent, qu'elles avaient jusque là tenter d'assimiler au marxisme: l'écologie politique. En effet, celle-ci, à ses débuts, vitupérait contre le société de consommation et réclamait une «croissance zéro». Elle s'attaquait, comme le marxisme, à un rouage essentiel de la machine libérale: le marché. La convergence des discours écologistes et communistes sur la paix, favorisait aussi cet amalgame. Les écologistes se disaient prêts à accepter une capitulation au nom de la paix («Plutôt rouge que mort»). Plus tard, l'écologie renvoya capitalistes et marxistes dos à dos, en dénonçant leur culte commun de la production.
Mais, peu à peu, le libéralisme réussit à substituer l'idée de «croissance propre» à celle de «croissance zéro». Nos savants proposèrent des solutions pour limiter la consommation de matières premières, recycler les déchets, diminuer les rejets dans l'atmosphère... La technologie venait au secours de l'écologie. La «science» redevenait une valeur positive et l'écologie devenait une science. Il n'était plus nécessaire de renoncer au «progrès» ni de retourner aux mœurs de nos ancêtres cavernicoles. Dès lors, les écologistes se scindèrent en deux tendances: les réalistes et les radicaux; les premiers consentaient à s'allier avec les classes dirigeantes, les seconds demeuraient des activistes. Les radicaux conservaient un rôle utile en tant qu'ils maintiennent l'image de l'Apocalypse écologique, aidés en ce sens par les médias, toujours férus de sensationnel. Mais le mouvement, affaibli par cette saignée, n'était plus dangereux. On avait déjà assisté au même phénomène de scission avec les communistes entre les deux guerres, les moins virulents formant les partis «sociaux-démocrates» désireux autant d'amender le système que d'y participer; la minorité se regroupant dans des partis communistes, interdits de pouvoir et trop faibles pour renverser le régime (surtout qu'ils avaient les mains liées par l'URSS elle-même, pour des raisons tactiques).
Néanmoins, cette nouvelle menace ne comblait pas à elle seule le vide laissé par l'URSS. On y joignit donc le «Sud» et l'«exclusion».
L'image du Sud comme ennemi s'est formé bien avant l'effondrement de l'URSS. Durant la guerre froide, certains de ces pays étaient devenus communistes, d'autres menaçaient l'Occident d'embargo sur le pétrole, tandis que quelques-uns produisaient de la drogue, poison nécessaire aux marginaux engendrés par la société libérale. A cela s'ajouta, plus tard, la menace islamique. L'Islam domine d'importantes populations à la démographie galopante, son avant-garde s'est déjà infiltrée dans nos pays aux frontières poreuses, certains des gouvernements islamiques soutiennent des mouvements terroristes, dont ils négocient l'activité avec les démocraties. Mais ce nouvel ennemi manque de crédibilité, aux yeux de Rufin; son unité politique n'est pas encore réalisée et il ne possède pas d'armement de haute technologie.
Enfin, il reste la menace de l'exclusion, de la marginalité que nous avons évoqué plus haut. Les trois remplacent tant bien que mal celle de l'URSS.
Ainsi, ce système qui tire son nom du mot “liberté” «s'impose à ceux-là mêmes qui la refusent le plus sans pourtant les empêcher d'agir contre elles. La plus extrême révolte y est possible: elle n'en nourrit pas moins le système qu'elle est censée détruire. Toutes les oppositions en démocratie sont tournées à son profit et ceux qui visent à sa plus radicale destruction sont les plus utiles ouvriers de son développement» (p. 20). C'est «une dictature dans la mesure où elle s'impose à tous, y compris ceux qui la refusent» (p. 301). Aussi le danger qui menace réellement la démocratie n'est pas de ceux que nous venons d'égréner... La démocratie risque de mourir par manque d'idéal et non pas de périr assassinée par des révolutionnaires. Rufin en conclut que la seule fonction éthique est la dissidence, l'utopie, car la révolte anime le système.
Les révolutionnaires doivent donc savoir que s'ils gagnent la bataille ou s'ils meurent sous les coups de la répression, ils auront contribué à une création.
Néanmoins, l'assertion de Rufin appelle trois remarques. Premièrement, même si le système libéral est un des plus résistant que l'Histoire ait connu, il n'est pas immortel. Deuxièmement, comme le remarque l'auteur lui-même, il existe des systèmes idéologiques inassimilables par la démocratie. Rufin cite l'Allemagne nazie qui ne faisait pas un bon partenaire menaçant parce qu'elle était à la fois trop proche et trop éloignée du système démocratique: contrairement à l'URSS, elle conservait le dynamisme économique du capitalisme, mais son aspect nationaliste, belliqueux et instable l'éloignait irrémédiablement du libéralisme. Enfin, si un jour, pour les ennemis radicaux de ce système, qu'ils soient écologistes, fascistes, communistes, etc. rassemblaient leurs forces éparses, ils lui asséneraient un coup mortel, car, jusqu'à présent, le libéralisme contrôle ses menaces en les divisant. C'est pourquoi, sans doute, les journalistes parisiens s'effraient tant à l'idée d'une alliance «brune-rouge» (mais ils ont oublié le «vert»...).
Frédéric KISTERS.
00:05 Publié dans Théorie politique | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : libéralisme, france, lettres françaises, politique, libéralisme, démocratie | |
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ABM: le Sénat tchèque approuve le déploiement d’un radar US
Le Sénat tchèque (chambre haute du parlement) a approuvé jeudi, par 49 voix sur 81, le déploiement d’un radar antimissile américain sur le territoire tchèque.
Les sociaux-démocrates et les communistes ont voté contre le projet, présenté jeudi au Sénat par le premier ministre tchèque Mirek Topolanek.
Washington envisage de déployer en Europe de l’Est des éléments de son bouclier antimissile pour parer à d’éventuelles attaques venant d’Iran ou de Corée du Nord. Les Etats-Unis comptent ainsi installer un radar en République tchèque et dix missiles intercepteurs en Pologne. Moscou, se sentant menacé, a exprimé à plusieurs reprises son hostilité envers ce projet malgré les tentatives américaines visant à rassurer la Russie.
Malgré le feu vert du Sénat, c’est toutefois à la Chambre des députés (chambre basse du parlement) qu’incombe l’essentiel du processus de ratification, qui pourrait se prolonger jusqu’au printemps prochain.
Les projets de déploiement d’une base ABM américaine en République tchèque ont divisé la classe politique en deux camps. A la Chambre des députés, la ratification est soutenue par le Parti démocrate civil au pouvoir dans le pays, mais qui ne bénéficie pas de la majorité au parlement. Une partie des Verts, membres de la coalition dirigeante, s’opposent également au déploiement du radar. Le Parti social démocrate tchèque, principale force d’opposition, votera contre l’installation du radar. Les communistes tchèques se proposent également de voter “contre” et exigent de tenir un référendum sur cette question.
Selon les résultats de sondages d’opinion, les deux tiers de la population de la République tchèque sont hostiles à l’installation du radar ABM américain dans le pays.
00:50 Publié dans Affaires européennes | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : république tchèque, etats-unis, otan, atlantisme, guerre froide | |
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