Em relação às formas totalitárias do organicismo, que levaram-se à prática na Europa do entreguerras e que na Espanha e Portugal prolongaram-se até a década de 70, revestiram diversas formas e estiveram regidas por muitos princípios ordenadores diversos, pelo que é muito difícil referir-se genericamente a elas. O fascismo italiano recolhe em sua idéia de Estado a noção do "Estado Ético" e da "societas in interiore homine", desenvolvida pelo mais importante filósofo italiano da primeira metade do século passado, Giovanni Gentile. Este Estado, esta sociedade não "entre homens", senão "no interior dos homens", na qual o trabalho (no mais amplo sentido da palavra) nega o particularismo e o individualismo liberal e situa o homem em sua dimensão universal, traduz-se no Estado corporativo fascista, desenvolvido em sua versão mais depurada na fase republicana do fascismo (1943 - 1945). Porém já em 1921, o fascismo define a Nação e o Estado desde uma perspectiva orgânica: "A Nação não é somente uma soma de habitantes do território, nem um instrumento que cada partido possa empregar para o logro de seus objetivos, senão um organismo que abraça uma série ilimitada de gerações, e dentro do qual cada indivíduo é somente um membro contingente e transitório; a Nação é a síntese suprema de todas as energias materiais e morais da Raça. O Estado é a expressão da Nação". O Estado é para o fascismo a única exteriorização do conteúdo inteiro da Nação. Desde logo, proscreve o fascismo toda forma de vida social ou coletiva alheia ao Estado: "Tudo no Estado, nada contra o Estado; nada fora do Estado" (Mussolini). Segundo a expressão de Rocco, "o indivíduo é tão somente um elemento transitório e infinitamente pequeno dentro de um todo orgânico".
dimanche, 13 novembre 2011
Da "Ordem Natural" à "Auto-Organização" ou a Vigência da Idéia Orgânica
Em relação às formas totalitárias do organicismo, que levaram-se à prática na Europa do entreguerras e que na Espanha e Portugal prolongaram-se até a década de 70, revestiram diversas formas e estiveram regidas por muitos princípios ordenadores diversos, pelo que é muito difícil referir-se genericamente a elas. O fascismo italiano recolhe em sua idéia de Estado a noção do "Estado Ético" e da "societas in interiore homine", desenvolvida pelo mais importante filósofo italiano da primeira metade do século passado, Giovanni Gentile. Este Estado, esta sociedade não "entre homens", senão "no interior dos homens", na qual o trabalho (no mais amplo sentido da palavra) nega o particularismo e o individualismo liberal e situa o homem em sua dimensão universal, traduz-se no Estado corporativo fascista, desenvolvido em sua versão mais depurada na fase republicana do fascismo (1943 - 1945). Porém já em 1921, o fascismo define a Nação e o Estado desde uma perspectiva orgânica: "A Nação não é somente uma soma de habitantes do território, nem um instrumento que cada partido possa empregar para o logro de seus objetivos, senão um organismo que abraça uma série ilimitada de gerações, e dentro do qual cada indivíduo é somente um membro contingente e transitório; a Nação é a síntese suprema de todas as energias materiais e morais da Raça. O Estado é a expressão da Nação". O Estado é para o fascismo a única exteriorização do conteúdo inteiro da Nação. Desde logo, proscreve o fascismo toda forma de vida social ou coletiva alheia ao Estado: "Tudo no Estado, nada contra o Estado; nada fora do Estado" (Mussolini). Segundo a expressão de Rocco, "o indivíduo é tão somente um elemento transitório e infinitamente pequeno dentro de um todo orgânico".
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mardi, 08 novembre 2011
La Germania dionisiaca di Alfred Bäumler
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mardi, 01 novembre 2011
Piet Tommissen, gardien des sources
Robert Steuckers:
Piet Tommissen, gardien des sources
La communauté académique connait Pïet Tommissen comme un grand spécialiste de Vilfredo Pareto et surtout de Carl Schmitt, depuis la parution régulière de la collection “Schmittiana” chez Duncker & Humblot à Berlin. Comment l’oeuvre précise et minutieuse de cet homme a-t-elle pu voir le jour, comment a-t-elle émergé idiosyncratiquement? De son cheminement personnel, Piet Tommissen nous livre un récit émouvant, tendre, autobiographique en une langue néerlandaise naturelle et spontanée. Malheureusement, ce beau récit sera trop souvent négligé par la communauté scientifique, qui suivra ses traces, car les écrits en néerlandais ne sont que rarement pris en compte par ceux qui ne maîtrisent pas cette langue. A la fin de sa vie, dans son charmant petit appartement d’Uccle, près de Bruxelles, Piet Tommissen a rédigé deux courts volumes de souvenirs, intitulés “Een leven vol buitenissigheden” (= “Une vie pleine d’extravagances”). Ils nous livre la clef de l’oeuvre, le fil d’Ariane d’une quête que notre professeur disparu a menée jusqu’à son dernier souffle. La première de ces plaquettes évoque une jeunesse sans histoire, passée à Turnhout en Campine, une région de landes de bruyère, assez aride, en lisière de la frontière néerlandaise, où son père était fonctionnaire des douanes et accises. Il y terminera pendant la seconde guerre mondiale ses études secondaires au Collège Saint Victor. Après la guerre, il occupe un premier emploi dans la petite localité de Baulers, près de la belle ville de Nivelles en Brabant wallon. C’est une époque où il se rend fréquemment à Bruxelles pour visiter libraires et bouquinistes et pour acquérir les principales revues intellectuelles françaises de l’époque, comme “Les temps modernes” ou “Synthèses”.
“La petite fleur en papier doré”
Au cours d’une de ces promenades bibliophiliques dans le Bruxelles de la fin des années quarante, en 1947 plus précisément (car la mémoire des dates est proverbiale chez Tommissen), il pousse la porte d’un des plus charmants estaminets de la ville, qui porte encore et toujours aujourd’hui le nom poétique de “La petite fleur en papier doré”, rue des Alexiens. Cet estaminet était le lieu de rendez-vous des surréalistes bruxellois autour de Magritte, Scutenaire, Mariën et les autres. L’exploitant de l’époque était collectionneur d’art et tenait une galerie: il se nommait Geert van Bruaene. Quand Tommissen entre dans le local sombre et agréable de cet extraordinaire bistrot, chauffé par un poêle de charbon, c’est van Bruaene qui sert les bières aux clients: dans la conversation qu’il entame, il parle au nouveau venu du théoricien avant-gardiste flamand Paul Van Ostaijen. Quasi inconnu en dehors des Flandres et des Pays-Bas, ce jeune révolutionnaire des années 20 avait rédigé un manifeste avant-gardiste, où il préconisait, outre une certaine écriture automatique (comme le fera plus tard Henry Michaux, côté wallon), un retour aux sources de toutes les formes de mystique religieuse dans les cadres nationaux et linguistiques: pour rompre avec la modernité positiviste et rationaliste, il faut retourner, disait Van Ostaijen, aux pensées mystiques que les peuples avaient développées aux stades antérieurs de leur histoire. Ce recours aux formes mystiques n’était pas une simple nostalgie ni une volonté passéiste de revenir à une sorte de moyen âge intellectuel car, pour Van Ostaijen, la mystique est “anarque” par excellence: elle balaie par la hauteur, la fraîcheur, la simplicité et la puissance de sa pensée les lourdeurs des systèmes et les banalités des périodes triviales dans l’histoire des peuples et des sociétés. Les Flamands, pour Van Ostaijen, doivent revenir à leurs mystiques médiévales, avec le mouvement des béguines, Soeur Hadewych et surtout Ruusbroec l’Admirable, dont Maurice Maeterlinck, Prix Nobel de littérature en 1911, avait réalisé une traduction française, tout en indiquant que ce mystique médiéval, retiré à Groenendael dans la Forêt de Soignes en lisière de Bruxelles, représentait la quintessence des aspirations mystiques flamandes et brabançonnes, tout comme, sans nul doute, Maître Eckhart représentait en Rhénanie la quintessence des aspirations mystiques allemandes. Piet Tommissen venait de découvrir le monde des “avant-gardes”, qui restera toujours présents chez lui, derrière sa façade officielle de “Schmittien”. Un monde d’avant-gardes qui n’était toutefois pas fermé aux aspirations religieuses.
Urbain Van de Voorde, Leo Picard, Wies Moens
En fréquentant van Bruaene et les joyeux convives de “La petite fleur en papier doré”, Piet Tommissen finit par faire connaissance avec Urbain Van de Voorde, responsable des pages littéraires du quotidien flamand “De Standaard”. Il écrit: “Les conversations que j’ai eues avec Van de Voorde, à cette époque et plus tard, ont été enrichissantes à tous points de vue. J’ai entendu pour la première fois prononcer les noms de Gottfried Benn, d’August Stramm, de Guillaume Apollinaire, d’André Breton, de Michel de Ghelderode, etc. D’où, je puis dire avec sérénié que Van de Voorde et quelques autres, ..., sont à la base de mon intérêt pour les ‘ismes’ de l’histoire de l’art, qui se sont déployés en Europe avant et après la première guerre mondiale”(p. 32). Piet Tommissen devint ainsi collaborateur occasionnel des pages littéraires du “Standaard”. Il prend le goût d’écrire, le goût de la recherche aussi, du détail piquant qui explique la genèse d’une oeuvre, d’un poème ou d’une toile, d’une esquisse ou d’une somme philosophique. Dans le cadre de ses activités au “Standaard”, il rencontre l’historien flamand Leo Picard (qu’on ne confondra pas avec le leader socialiste belge Edmond Picard). Leo Picard avait été le disciple préféré de Henri Pirenne, dont on se souvient partout en Europe pour ses thèses sur l’histoire médiévale et sur l’époque carolingienne. Mais Pirenne opte pour une vision “nationale” de l’histoire belge. Pour cette vision pirennienne, la Belgique est née, du moins sur le plan territorial, de la reconquête des Pays-Bas du Sud par les armées royales espagnoles; elle est, depuis 1598, affirme-t-il, détachée de ses environnements septentrional (la Hollande calviniste devenue indépendante) et oriental (l’Allemagne en tant que Saint Empire fragmenté par la Kleinstaaterei). Leo Picard critique cette vision, estime que les liens avec le Nord et l’Est ont toujours subsisté et que la Belgique indépendante de 1830 a été dominée par une bourgeoisie sans autre idéologie qu’un mixte confus de positivisme et de cosmopolitisme, une bourgeoisie qui a coupé tous liens organiques avec le peuple, surtout avec sa composante flamande. La dimension socio-économique de la vision flamande de Picard mérite toujours le détour en Flandre et nourrit sans doute secrètement, ou par les multiples avataras qu’elle a suscités, les contestations radicales de l’établissement économique belge dans les cercles du patronat et des PME (= “petites et moyennes entreprises”) en Flandre, parmi lesquels sans doute le “Marnixkring”, dont Tommissen fut longtemps le zélé secrétaire. Notons qu’il y a passerelle entre l’écriture positiviste de l’historien Leo Picard, formé par Pirenne, et l’idéal organique et “expressionniste” d’un autre poète avant-gardiste flamand, Wies Moens, auquel Tommissen consacrera plusieurs études. Picard examine les structures du pouvoir et constate qu’il y a “placage” d’un pouvoir inorganique sur l’organisme national flamand; Wies Moens exalte pour sa part (et dans le sillage de Camille Lemonnier) la vigueur d’un peuple flamand appelé à secouer le joug de l’établissement. L’idéal que se forge Piet Tommissen à la fin des années 40 repose sur ce double pilier intellectuel: d’une part, l’analyse organique et positiviste de Picard, un homme formé par Pirenne; d’autre part, les idéaux vigoureux, expressionistes et mystiques (Moens et Van Ostaijen) des avant-gardes flamandes, réclamant l’avènement d’un populisme révolutionnaire et organique, traduction politique d’un certain expressionnisme.
Vesperkring, Erasmusgenootschap, Aristo-Groep
En dépit de cette marque très particulière, très vernaculaire flamande, difficilement communicable en dehors de l’espace linguistique néerlandais, Tommissen ne demeure nullement sourd, bien sûr, aux grands courants intellectuels qui traversent l’Europe en général et la France en particulier. La fin des années 40 et le début des années 50 sont marqués à Paris par l’existentialisme des Sartre, Camus et de Beauvoir, dont Tommissen suit les avatars via la revue “Les Temps modernes” mais le bon petit virus qui est en lui et qui lui a été communiqué par van Bruaene, lui-même “contaminé” par le manifeste de Van Ostaijen, a créé des garde-fous contre toutes les dérives abstraites et extrémistes, contre toutes les bouffoneries de l’existentialisme parisien/sartrien. Dans ses mémoires, Tommissen confesse avoir été marqué par la lecture des écrits existentialistes français mais conclut en disant que, pour lui, et pour ses compagnons des avant-gardes flamandes et de l’équipe du “Standaard” autour d’Urbain Van de Voorde, il était impossible de dissocier l’essence de l’existence, le corps de l’âme. Le personnalisme d’Emmanuel Mounier et de la revue “Esprit” rencontre sans doute davantage d’approbation, catholicisme oblige, mais c’est dans des cercles flamands ou néerlandais aujourd’hui disparus ou oubliés par les historiographes que Tommissen va parfaire sa formation intellectuelle et spirituelle: il cite, dans ses mémoires, le “Vesperkring” (= “Cercle Vesper”) du Père Kallist Fimmers de l’Abbaye de Tongerloo, l’ “Erasmusgenootschap” (= “Le Compagnonnage Erasme”) animé à Gand par le poète Johan van Mechelen et l’ “Aristo-Groep” (= Le “Groupe Aristo”) du fascinant prêtre hollandais Wouter Lutkie. Celui-ci, fils de négociant en peaux, est au départ un militant espérantiste, qui consacre son temps à toutes sortes d’oeuvres caritatives complètement dépolitisées, puis devient un prêtre “démocrate chrétien” animé par le principe de charité et par les encycliques de Léon XIII, pour lesquelles il faut agir avec dévouement et humilité sans développer d’idées politiques abstraites et séditieuses. Disciple des Français Léon Bloy et Ernest Hello, Lutkie en vient, dans une phase ultérieure de son itinéraire, à dénoncer, comme eux, les hypocrisies de la démocratie bourgeoise: celle-ci n’a rien à voir avec les vertus morales (qu’elle proclame bruyamment), avec les efforts en matières éthiques et caritatives préconisés par l’Evangile ou avec la religion tout court. La démocratie bourgeoise, disent Bloy et Lutkie, a basculé dans le mensonge, s’est muée en une “idéolâtrie du nombre”. Lutkie fait alors du zèle à la Bloy, fustige le “démocratisme” avec une langue au vitriol: l’évêque de ’s Hertogenbosch le démet de ses fonctions de chanoine. Il s’installe alors dans un “cottage” du village de Nuland, où il oeuvrera comme “prêtre-publiciste”, activité qui conduira à la création de l’Aristo-Groep. Deux autres prêtres philosophes, les frères Walgrave, influenceront l’itinéraire intellectuel de Tommissen; rappellons aussi que J. H. Walgrave fut en Flandre le seul grand hispaniste qui nous ait laissé une étude magistrale sur José Ortega y Gasset (tout en étant un grand spécialiste de l’oeuvre du Cardinal Newman). Cette errance fructueuse dans les cercles intellectuels flamands permettent à Tommissen d’amorcer son oeuvre: pour le compte de ces cercles, il écrit dans diverses publications à modestes tirages mais de haute voltige intellectuelle. Nous avions, à la charnière des années 40 et 50, un catholicisme exceptionnel, d’une densité intellectuelle inégalée, aujourd’hui disparu sous les coups du consumérisme et de l’américanisme généralisés, d’une vulgate démocratiste chrétienne marquée d’anti-intellectualisme, des positions démissionnaires de Vatican II et de ses multiples avatars “modernistes”.
Avec Armin Mohler à Bâle et à Zürich
Mais c’est la rencontre avec l’oeuvre d’Ernst Jünger qui sortira Tommissen d’un ancrage exclusivement flamand. Fidèle à sa mémoire des dates, Tommissen nous rappelle que c’est le 30 janvier 1949 qu’il acquiert à Anvers, chez le bouquiniste Moorthaemers, un exemplaire de “Der Krieg als inneres Erlebnis” (= “La guerre comme expérience intérieure”). Sur le trajet Anvers/Baulers, notre homme lit ce livre d’une seule traite. Enthousiasmé et bouleversé par la lecture de cet ouvrage, il veut impérativement rencontrer l’auteur. Via Van de Voorde et la rédaction du “Standaard”, il apprend qu’Ernst Jünger vit dans le Würtemberg. Tommissen écrit: il jette sa petite bouteille à la mer... Armin Mohler, alors secrétaire d’Ernst Jünger, lui répond. Le contact est pris. Et le 25 octobre 1950, Tommissen monte dans le train de nuit pour Bâle. Arrivé au petit matin dans la métropole alémanique, il est reçu par la chère Edith Weiland, la future épouse d’Armin Mohler. Le lendemain, il s’embarque pour Zürich, où Mohler avait organisé une causerie sur Oswald Spengler. Dans les débats qui s’ensuivirent, un des participants évoque la figure de Carl Schmitt. Tommissen avait entendu parler de ces deux géants de la “Konservative Revolution” allemande dans les monographies que leur avaient consacré le Professeur Victor Leemans et d’autres exposants de la “Politieke Akademie” de Louvain. Piet Tommissen a rendu hommage à maintes reprises au travail de cette “Politieke Akademie”, dont il entendait pérenniser ou ressusciter l’esprit.
C’est à la suite de ce voyage à Zürich que Piet Tommissen entamera sa longue quête schmittienne. Il quitte au même moment l’entreprise qui l’employait à Baulers. Pendant de longues journées, au fil des semaines, Piet Tommissen va travailler à la Bibliothèque Royale de Bruxelles pour extraire toutes les informations possibles et imaginables sur l’oeuvre et la personnalité de Carl Schmitt, méritant, dès cette étape de sa vie, le surnom dont l’affublait avec tendresse Armin Mohler: “l’écureuil des Flandres”, qui glâne avec fébrilité des notes, recense des articles, cherche dates de naissance et de décès, comme le rongeur roux de nos chênaies ramasse glands ou noisettes. Chaque découverte est aussitôt envoyée à Carl Schmitt, qui, heureux que l’on fasse ce travail pour lui, le proscrit de la nouvelle Allemagne, répond toujours chaleureusement et finit par inviter Tommissen et son épouse Agnes à Plettenberg dans le Sauerland. Le couple y restera deux semaines. Le destin de Tommissen est scellé. Il deviendra et demeurera le fidèle disciple.
A Plettenberg pour le premier “Liber Amicorum” des amis de Carl Schmitt
Cette double expérience suisse et allemande fait de lui le porte-paroles en Flandre de ce qui subsiste de la “Révolution Conservatrice” dans les pays germanophones. C’est au sein de la revue “De Tafelronde” d’Ivo Nelissen (un ancien du “Vesperkring”) qu’il s’exprimera sur ces sujets. Les discussions avec l’abondante rédaction de la revue, et surtout, rappelle Tommissen, avec Koen Van den Bossche, portaient sur tous les thèmes de cette “Révolution Conservatrice”. En juillet 1953, l’ “Academia Moralis”, qui regroupe les amis de Carl Schmitt, ceux qui entendent l’aider dans le besoin et la détresse de l’immédiat après-guerre, décide de publier un “Liber Amicorum”, à l’occasion des 65 ans du grand juriste. Pour marquer le coup au jour de cet anniversaire, l’ “Academia Moralis” sort également de presse une première bibliographie de Carl Schmitt, fruit du travail de Tommissen à la Bibliothèque Royale de Bruxelles. Le jour de la remise officielle du “Liber Amicorum” à Schmitt, chaque participant, face à un Tommissen rouge de confusion et de bonheur, reçoit un exemplaire de cette bibliographie. Victor Leemans est présent, avec l’éditeur anversois Albert Pelckmans; il dit à Tommissen: “Ta bibliographie est plus précieuse pour la recherche ultérieure que le Liber Amicorum lui-même”. Leemans présente alors à Tommissen le philosophe “révolutionnaire-conservateur” Hans Freyer auquel le professeur louvaniste avait consacré avant-guerre une courte monographie dans le cadre de la “Politieke Akademie”. C’est ainsi que l’on a pu dire, qu’après la disparition de Leemans, Piet Tommissen a été le véritable vulgarisateur des thèses de la “révolution conservatrice” allemande en Flandre.
Force est de dire que l’esprit politique schmittien n’a pas trop imprégné la pensée politique flamande contemporaine, même dans ses marges censées demeurer germanophiles: en effet, les modes de pensée en sociologie et en sciences politiques sont désormais calquées sur leurs équivalents anglo-saxons, notamment à cause du recul général de l’enseignement de l’allemand et de l’omniprésence de l’anglais (le même phénomène s’observe en philosophie et en théorie littéraire). Plusieurs étudiants flamands m’ont déclaré que de jeunes assistants en sciences politiques à Louvain, dans les années 90, ignoraient jusqu’au nom de Carl Schmitt! Cette ignorance doit certes être en recul aujourd’hui, vu l’abondance de publications sur Schmitt en français et en anglais. En revanche, il est exact que les nombreux articles de Tommissen, qui introduisaient le lecteur flamand aux thèmes et aux figures de la “Révolution Conservatrice”, publiés dès le début des années 50, ont permis de maintenir un intérêt général pour ces thématiques. Mais l’exemple que nous lègue Tommissen, son inlassable engagement pour défendre et illustrer l’oeuvre de Carl Schmitt ou pour rappeler l’excellence des travaux de la “Politieke Akademie” de Victor Leemans, est celui d’une fidélité. Mais d’une fidélité à quoi? Aux “sources”.
Sources politiques et sources mystiques
Reste à déterminer quelles sont ces sources pour Piet Tommissen. Elles se répartissent en deux catégories: d’une part, les idées et les lectures que fait naître dans l’esprit d’un jeune adulte le sentiment de vivre dans un Etat qui n’est pas harmonieux, qui constitue une sorte de “cacocratie” en dysfonctionnement permanent et ne tient pas compte des aspirations profondes du peuple ou d’une majorité du peuple, objectivement discernable par l’appartenance ethno-linguistique; pour mettre un terme à la domination de cette forme “cacocratique”, il faut oeuvrer à proposer sans relâche des formes nouvelles et positives, qui n’ont pas la négativité des idéaux habituellement classés comme “révolutionnaires” (les oeuvres d’Orwell et de Koestler nous indiquent clairement quels sont les vices rédhibitoires voire criminels du totalitarisme “révolutionnaire” des gauches européennes de l’entre-deux-guerres). D’autre part, les individualités inclassables, qui peuplent le monde sympathique des avant-gardes, proposent des provocations qui se veulent dissolvantes de l’ordre établi; mais toute dissolution volontaire d’un ordre établi postule de ne pas tomber ou retomber dans les schémas froids du révolutionnisme des gauches: dans l’aventure du surréalisme belge (et surtout bruxellois), l’équipe dominante, autour de Scutenaire, Mariën et Magritte, ajoutait à ses provocations avant-gardistes une adhésion a-critique et provocatrice au communisme, affichée bruyamment sans être concomittante d’une réflexion profonde et véritablement politique. Par le fait de cette lacune, cette posture du groupe surréaliste bruxellois est parfaitement qualifiable de “poncif”, selon la terminologie même adoptée par les surréalistes qui s’inscrivaient dans le sillage d’André Breton. Paul Van Ostaijen, lui, propose une nouvelle immersion dans l’héritage mystique, sans doute suite aux travaux de Maerterlinck sur le mystique médiéval brabançon, Ruusbroec l’Admirable: il n’aura qu’un disciple parmi la première équipe des surréalistes de Bruxelles, l’ami de Tommissen, le peintre Marc. Eemans. Dans ses travaux philosophiques, celui-ci réhabilitera d’abord la mystique flamande Soeur Hadewych, provoquant l’ire des surréalistes engoncés dans leurs poncifs rationalistes et “révolutionnistes”: pour eux, Eemans sombrait dans les bondieuseries et s’excluait ipso facto du cercle des “vrais révolutionnaires”.
Au cours des années 30, Marc. Eemans et son compagnon René Baert éditeront la revue philosophique “Hermès” qui suggèrera, par la publication de premiers textes introductifs, de réamorcer une étude systématique de l’héritage mystique médiéval de Flandre et de Rhénanie. Aujourd’hui, le “Davidsfonds”, fondation culturelle flamande de très haut niveau liée à l’Université Catholique de Louvain (KUL), propose à ses lecteurs diverses études sur Ruusbroec, dues à la plume de philosophes et de médiévistes patentés, comme Paul Verdeyen. Aux Pays-Bas, Geert Warnar a publié chez l’éditeur Athenaeum/Polak-Van Gennep, un ouvrage très pointu sur Ruusbroec: ce sont là des études bien plus fouillées que les textes pionniers de la revue “Hermès”. De même, Jacqueline Kelen, en France, vient de publier un premier ouvrage sur Soeur Hadewych. Une lacune a été comblée, mais, hélas, dans le désintérêt général de la culture aujourd’hui dominante.
Hugo Ball et Ruusbroec l’Admirable
L’intérêt de Tommissen pour les avant-gardes, ou pour des peintres comme Propser De Troyer, Edgard Tytgat ou Alfred Kubin, relève évidemment d’un intérêt esthétique général, que l’on comparera utilement au rapport qui a existé entre Carl Schmitt et Hugo Ball. On sait que l’ancien dadaïste allemand Hugo Ball, pacifiste pendant la première guerre mondiale parce qu’il critiquait l’évolution négative qu’avait suivie l’Allemagne depuis Luther jusqu’au militarisme post-prussien du Kaiser Guillaume II, à l’instar des cabarettistes bavarois d’avant 1914. Sa critique du complexe protestantisme/prussianisme, qui n’avait pas l’aval de Carl Schmitt qui y voyait un “occasionalisme” sans aucune rigueur, l’avait amené à se replonger dans un catholicisme vigoureux (comparable à celui de Bloy) et à briser quelques bonnes lances pour défendre, d’une manière fort originale, les positions théologico-politiques du Schmitt du début des années 20. Eemans, lui, partira de la mystique flamande, à l’instigation du manifeste de Van Ostaijen, pour déboucher, à la fin des années 70 dans l’étude de l’oeuvre de Julius Evola, lui aussi ancien dadaïste dans l’entourage de Tristan Tzara. Tommissen s’intéressera également à Evola, dont il analysera surtout la vision de la décadence, au moment où son ami Julien Freund consacrait un livre entier, et solidement charpenté, à ce sujet.
Pour Tommissen, la fusion entre les notions politiques schmittiennes ou “révolutionnaires-conservatrices” (surtout Spengler et Freyer) et l’héritage religieux (catholique en l’occurrence) se trouvait toute entière dans les travaux de la “Politieke Akademie”, également édités par le “Davidsfonds” avant 1940. La “Politieke Akademie” du Prof. Victor Leemans n’avait pas voulu suivre une tendance fâcheuse, observable dans le corps académique après 1918: celle d’abandonner tout contact avec la pensée allemande pour lui substituer des modes françaises ou anglo-saxonnes. Elle avait résolument pris le parti d’étudier et de vulgariser, à l’intention des étudiants de première année, les grands thèmes de la pensée non libérale et non marxiste qui germaient en Allemagne. Victor Leemans, pour résumer ses thèses de manière didactique et pour léguer une sorte de manifeste, avait publié en 1938 un opuscule intitulé “Hoogland”, qui se voulait sans doute une sorte de calque flamand de la revue catholique allemande “Hochland” (celle-là même où Hugo Ball avait publié son maître-article sur Schmitt en 1925). Le texte de ce manifeste fourmille de phrases clefs pour comprendre le milieu dans lequel Tommissen s’est inséré après la seconde guerre mondiale. Victor Leemans plaide pour que la priorité soit sans cesse donnée aux hommes (et aux peuples dont ils émanent) et non aux idéologies, pures constructions intellectuelles procédant de l’esprit de fabrication (Joseph de Maistre), déplore la “politisation” —au sens trivial du terme— de la vie sociale en Belgique, exhorte les intellectuels et les universitaires à communier avec le peuple, pour l’élever moralement, en passant d’un socialisme de société à un socialisme de communauté (Tönnies). Rien de ce texte, 73 ans après sa publication ne pourrait être incriminé ni rejeté: il est un témoignage de sérénité et de charité, un véritable code de déontologie pour le candidat à la vie politique. Et là, nous revenons à Ruusbroec, maître spirituel qui enseigne la sérénité; en parlant des apôtres, Ruusbroec écrivait: “Ils vivent dans l’esprit sans crainte, sans peur ni souci, sans chagrin. Ils savent en leur esprit, qui procède de l’esprit de Dieu, qu’ils sont les fils choisis de Dieu. Cette assurance, personne ne peut la leur ôter. Car ils sentent la vie éternelle en leur esprit” (cf. G. Warnar, p. 278). Piet Tommissen a géré les matières jugées explosives des doctrines “révolutionnaires-conservatrices” et schmittiennes avec cette sérénité exprimée par Ruusbroec. En quelque sorte, la boucle, qui va de Van Ostaijen à Schmitt, est bouclée: la matière schmittienne a été traitée avec la sérénité préconisée par Ruusbroec. Ou pour oser une hypothèse: avec la quiétude que recherchait Ball après les tumultes et soubresauts de sa vie agitée d’avant-gardiste?
Le doctorat sur Pareto
Sans diplôme autre que celui de ses études secondaires à Saint Victor de Turnhout, Tommissen ne pouvait faire valoir à fond le fruit de ses innombrables recherches. Son entourage l’exhorte à passer tous les examens requis pour ensuite présenter une thèse de doctorat. C’est le Professeur Ernst Nolte qui induira directement Piet Tommissen à franchir le Rubicon; de Berlin, il ne cessait de lui envoyer des doctorants (sur le rexisme, sur Pierre Drieu La Rochelle, etc.). Pour gagner en crédibilité, Tommissen avait besoin d’un diplôme universitaire: il commence par suivre un cours de langues anciennes (latin et grec) puis par s’inscrire à la “Handelshogeschool Sint-Aloysius” (“Haute Ecole Saint Aloïs”) à Bruxelles, où il obtiendra avec brio, au bout de cinq ans, le titre belge de “Licencié” (équivalant à quatre ou cinq ans d’études universitaires). Tommissen, âgé de près de quarante ans, travaillait le jour et suivait les cours après 17 heures, avec la bénédiction et les encouragements de son épouse Agnès: on admirera au passage le courage, l’opiniâtreté et l’abnégation de notre homme. Il sera ensuite le premier docteur reçu par la nouvelle Université d’Anvers, l’UFSIA, avec sa thèse sur “l’épistémologie économique de Vilfredo Pareto”. Piet Tommissen pouvait commencer sa carrière universitaire.
De 1973 à 1976, il publie une revue en français avec Marc. Eemans, “Espaces”, qui consacrera notamment un numéro entier à la figure de Paul Van Ostaijen. Piet Tommissen, en dépit de ces cinq années d’isolement universitaire et du travail considérable qu’avait exigé sa thèse de doctorat, demeurait fidèle à son engouement pour les avant-gardes.
“Gardien des sources”
Dans ses “Verfassungsrechtliche Aufsätze”, Schmitt rend hommage à Savigny et appelle à la défense d’un droit comme expression d’un “ordre concret”, inséparable de l’histoire en laquelle il a émergé, s’est déployé et dont il procède. Il conteste simultanément le “monopole de légalité” que s’arroge l’Etat légaliste (ou nomocratique), fustige aussi les “Setzungs-Orgien” (les “orgies légiférantes” ou la multiplication anarchique des réglements) qui sont le propre des “pouvoirs législatifs déchaînés”. Schmitt évoque alors Jacob Bachofen (dont on connaît l’influence sur Julius Evola et sur quantité d’autres auteurs dont Ludwig Klages) et écrit cette phrase capitale à mes yeux: “Il ne s’agit pas aujourd’hui de donner un tour de vis de nature réactionnaire (en lisant Bachofen et ses émules, ndt) mais de conquérir une richesse incroyable de connaissances nouvelles, qui pourraient s’avérer fécondes pour les sciences juridiques actuelles et dont nous devons nous emparer en les travaillant et les façonnant. En vue de cette tâche à accomplir, nous pouvons laisser le positivisme mort du 19ème siècle enterrer ses morts” (p. 416). Et Schmitt conclut: “Savigny argumente en évoquant l’enfance, la jeunesse et la maturité des peuples. Il perçoit comme signe de la jeunesse d’un peuple le fait que la science (des sources, des racines, ndt) guide la vie du droit et garde les sources. Savigny pose cette science du droit comme autonome, tant contre la théologie et la philosophie que contre le pur artisanat qu’est cet art de fabriquer des lois. C’est là que réside le sens de sa démarche ‘historique’ et de son retour au droit romain et aux sources pures” (p. 420). Ne peut-on pas inscrire la démarche de nos avant-gardistes (Van Ostaijen, Eemans, etc.) et celle de nos “académiciens politiques” (Leemans, Tommissen, etc.) dans le cadre que posent implicitement ces citations de Schmitt? C’est en ce sens que Tommissen, à la suite de Leemans et d’Eemans, a été un “gardien des sources”.
Après le décès prématuré de son épouse Agnès, Piet Tommissen se retirera dans un appartement à Uccle, au sud de Bruxelles, où il rédigera plusieurs opuscules et plaquettes, notamment sur bon nombre de sujets que nous avons évoqués dans le présent hommage, ainsi que les deux précieux petits volumes autobiographiques, qui abondent en renseignements divers sur la vie culturelle flamande entre 1945 et 1965, dans le sillage de Victor Leemans. Nous mesurons par là tout ce que les générations ultérieures, dont la mienne, ont perdu en intensité et en qualité. Mais dans ce récit autobiographique, qui rend hommage aux maîtres et aux compagnons de jadis, je crois déceler un appel un peu angoissé: ces matières, ces revues et cercles, ces hommes, ces prêtres de la trempe des frères Walgrave ou de Lutkie, seront-ils oubliés, définitivement, sans qu’un “Master” (en langage de Bologne) ou un doctorant ne se penche jamais sur leurs oeuvres? La part de travail de Tommissen est achevée. Celle des autres doit commencer. Tout de suite.
Robert Steuckers,
Forest-Flotzenberg, 29 octobre 2011.
Sources:
Piet TOMMISSEN, Een leven vol buitenissigheden, I, APSIS, La Hulpe, 2009.
Piet TOMMISSEN, Een leven vol buitenissigheden, II, APSIS, La Hulpe, 2010.
Adresse des éditions APSIS: koenraad.tommissen@2bhunt.eu
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lundi, 24 octobre 2011
Who's a Fascist?
Who's a Fascist?
by Paul Gottfried
Ex: http://www.lewrockwell.com/
Having participated this weekend in an Internet discussion courtesy of Paul Craig Roberts, it seems to me that "fascist" is bandied about on the right in the same careless way as one finds on the left. Note that the anti—New Deal American Right in the thirties fell over themselves denouncing FDR and his minions as American Mussolinians. The Old Right associated the fascists with a corporatist economy, welfare programs, and military rearmament, all of which they despised. The fact that the New Republic and other American leftist organs then raved about the virtues of Latin fascism and often considered it soft Communism may have contributed to the illusion that big-government boosters at home were fascists in a state of denial. Recently the Old Right has revived the same charge of fascism and hurled it at the neoconservatives. Because neocons are imperialists, militarists, and enthusiasts for centralized government (all of which they admittedly are), they must also be fascists. After all, didn't Mussolini teach his nation to do everything for the state and nothing against it? How is this different from Bill Kristol's view that to be an American patriot one must love the American state?
While Kristol's "state" does not differ from Mussolini's fascist creation by being truly lovable (God knows it is not!), it may be possible to point out certain palpable differences between the two forms of state worship. Neoconservatives and fascists do not share the same historical context; nor are they reacting against the same enemies. Fascism was an interwar phenomenon and one bound up with a reaction against the revolutionary Left in Italy, Spain, Austria, and other European countries. It was also profoundly reactionary, in the sense that it valued certain classical conservative principles, like hierarchy, patriarchy and the restoration of antiquity, but believed it was only possible to bring about what it wanted through a constructivist project. Therefore Mussolini and his counterparts created a neoclassical version of a pre-bourgeois society, which was cobbled together with Roman republican and Spartan models. Fascists also stressed the organic unity of the nation, something that points to the semantic problem incurred by critics of the neoconservatives who wish to see them as "multicultural" fascists. Although not all fascists were racialists (the German case was the lunatic exception), most of them were avowed anti-internationalists and would not have approved of anything as destabilizing as immigration expansion. In the 1930s the Italian fascist government even tried to make sure that government workers would marry ethnic Italians.
Peter Brimelow was correct to observe in last weekend's Internet chat that neoconservatives believe not in fascism but in "Goldbergism" when they push for open borders and an aggressive foreign policy in the name of human rights. Jonah Goldberg, one of their major political theorists, has explained on NROnline that European conservatives like Joseph de Maistre were really on the left, seeing that they rejected "human rights," which is the essence of a conservative belief system. No matter how silly Goldberg's interpretation may seem, what he enunciates is the current neoconservative dogma that justifies imperial expansion. And it is hard to grasp anything fascist about Goldberg's redefinition of conservatism. Goldberg arrives at his view from reading the English social democratic historian Isaiah Berlin, who plays up the derivation of fascist thinking from Maistre's attack on the universalism and abstract ideals of the French Revolution. Although Berlin overstates this connection, he is nonetheless justified in perceiving the fascists as being connected to European counterrevolutionary traditions. The neoconservatives are not only not connected in any way to such traditions but are clearly on the side of what Michael Ledeen calls the "creative destruction" of the social and cultural traditions of other peoples.
Without judging the merits of this project, it seems that those who pursue it are not definable as fascists. They may in fact be far more destructive but are not a subgenus of interwar fascists who have landed up in our society. Depicting them as such depends on an underdetermined definition that serves strictly polemical ends. Just because all modern Western industrial states have large administrations that socialize the family and feature public education does not make them "fascist." Fascists took advantage of a political paradigm they shared with non-fascist modern governments, in order to achieve in some cases counterrevolutionary ends. But they did not initiate the welfare state, which flourished without the fascists, on the Euro-American left. Nor were the fascists unique in having military dictators and wars of expansion. Both Tom Woods's The Politically Incorrect Guide to American History and Tom DiLorenzo's study of the Great Emancipator as state-builder provide illustrations of Lincoln's authoritarian manner that show bad European habits could crop up here as well. But that happened generations before there was a fascist movement.
It is not accurate to refer to Abraham Lincoln as a "fascist," because he applied military force to quell the Southern secession and ruled as a military dictator. Political leaders can do things that are open to condemnation without being fascists. It would also not be irrelevant to cite the case of one of Lincoln's precursors, Oliver Cromwell, who also slaughtered secessionists, to reunite the United Kingdom, and whom the young Lincoln saw as someone he wished to emulate. Yet curiously the two men, long viewed as being alike in their nationalist fervor, connection to an Anglo-Saxon Protestant culture, and role as social modernizers, have contributed to very different cults. After being identified for centuries with republicanism and Protestant sectarians, Cromwell became a hero for rightwing English nationalists, including the fascist followers of Sir Oswald Mosley in the late thirties. Lincoln, by contrast, has become a god figure for the Left, from the communist Abraham Lincoln Brigade fighting in the Spanish Civil War down to the civil rights movement and his current apotheosis, as the incarnation of global democratic ideals. My friend Tom Di Lorenzo has made this last point clear by debating Lincoln-admirers, who invariably bring with them leftist agendas. But neither Cromwell nor Lincoln produced the twentieth-century cults that sprang up around their putative achievements. The Irish are certainly entitled to dislike Cromwell and his son-in-law for devastating their land during the English Civil War and like Paul Craig Roberts, I cannot find any sane reason for a Southerner whose family suffered during Lincoln's invasion of the South to revere this brutal nationalist. But neither figure belonged to the twentieth century or to its ideological wars; and both have been co-opted to symbolize battles that are no longer theirs. Like Cromwell, Lincoln was neither a fascist nor a neocon.
Paul Gottfried [send him mail] is Horace Raffensperger Professor of Humanities at Elizabethtown College and author of, most recently, Multiculturalism and the Politics of Guilt.
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dimanche, 23 octobre 2011
La tolleranza di Voltaire non è che la maschera di una nuova e più feroce intolleranza
di Francesco Lamendola
Fonte: Arianna Editrice [scheda fonte]
Abbiamo già visto come il gran padre del liberalismo, John Locke, abbia proclamato, fin dal 1689 (l’anno della “Glorious Revolution” inglese) il sacro principio della tolleranza universale; escludendone, però, per ragioni di fatto e di principio, tutta una serie di categorie umane e specialmente religiose: guarda caso, i non inglesi, i non protestanti, i non cristiani, i non religiosi (cfr. il nostro articolo «Locke auspica tolleranza religiosa per tutti, ma invoca la persecuzione di cattolici islamici e atei», apparso sul sito di Arianna Editrice in data 10/02/2011).
Ci resta da vedere come il suo legittimo successore in terra di Francia, Voltaire, abbia a sua volta ripreso ed esposto le proprie idee in fatto di tolleranza, questo roboante slogan dell’Illuminismo che, nel 1793, non varrà a risparmiare la vita di forse un milione di Vandeani, cattivi cittadini che non vorranno accogliere con il berretto frigio e l’Albero della Libertà le deliziose parole d’ordine: libertà, fraternità, uguaglianza, ma che preferiranno farsi massacrare, potenza dell’ignoranza e della superstizione, in difesa del loro re, della loro Chiesa e dei loro signori.
Per farsi un’idea dell’estensione che Voltaire accorda al suo soggetto, basta andare a cercare il codicillo, l’avvertenza, la specificazione in cui esplicitamente, come già aveva fatto il padre nobile Locke, vengono esposte le categorie di cittadini immeritevoli di godere anch’essi dei benefici della tolleranza, perché non sono veramente esseri umani, ma “lupi”: e con i lupi, si sa, non bisogna mostrare alcuna pietà, perché la pietà sarebbe un crimine verso gli altri, cioè verso i “bravi” cittadini, rispettosi dei Lumi della ragione e di tutto l’armamentario liberale.
Ecco dunque cosa afferma Voltaire, nel capitolo XVIII del suo «Trattato sulla tolleranza» del 1763, circa ottant’anni dopo quello di Locke, che in realtà, era stato scritto nel 1685-86 (titolo originale: «Traité sur la tolérance à l’occasion de la mort de Jan Calas»; traduzione italiana di Glauca Michelini, Demetra Editrice, 1995, pp. 79-80; capitolo intitolato esplicitamente: «I soli casi in cui l’intolleranza è di diritto umano»):
«Perché un governo non abbia il diritto di punire gli errori degli uomini è necessario che questi errori non siano delitti; essi sono delitti solo quando turbano la società: e la turbano non appena ispirano il fanatismo. È necessario dunque che gli uomini comincino col non essere fanatici per meritare la tolleranza.
Se alcuni giovani gesuiti, sapendo che la chiesa ha in orrore i reprobi, che i giansenisti sono condannati da una bolla papale e che sono perciò dei reprobi, vanno ad appiccare il fuoco ad una casa dei Padri dell’Oratorio perché l’oratoriano Quesnel era giansenista, è chiaro che si sarà costretti a punire questi gesuiti.
Nello stesso modo, se hanno diffuso massime delittuose, se il loro istituto è contrario alle leggi del regno, non si può fare a meno di sciogliere la loro compagnia e abolire i gesuiti per trasformarli in cittadini, cosa che in fondo è un male immaginario, e per loro un bene reale, perché che cosa c’è di male nel portare un abito corto invece che una sottana, e nell’essere liberi invece che schiavi? Tranquillamente si riformano reggimenti interi, che non se ne lamentano: perché i gesuiti lanciano così alte grida quando li si sottopone a riforme per ottenere la pace?
Se i francescani, trasportati a sacro zelo per la Vergine Maria, andassero a demolire la chiesa dei domenicani, che sono convinti che Maria è nata nel peccato originale, si sarebbe allora obbligati a trattare i francescani quasi come i gesuiti.
Si dirà la stessa cosa dei luterani e dei calvinisti. Avranno un bel dire: “Noi seguiamo i moti della nostra coscienza, è meglio obbedire a Dio che agli uomini; siamo il vero gregge, dobbiamo sterminare i lupi”. È evidente che allora sono lupi anche loro.
Uno degli esempi più singolari di fanatismo è stato quello di una piccola seta in Danimarca, i cui fondamento era il migliore del mondo. Costoro volevano procurare la salute eterna ai loro fratelli; ma le conseguenze che ricavano da questo principio fondamentale erano singolari.
Sapeva che tutti i bambini che muoiono senza battesimo sono dannati, e che tutti quelli che hanno la fortuna di morire subito dopo aver ricevuto il battesimo godono del la gloria eterna: andavano quindi sgozzando i bambini e le bambine appena battezzati che incontravano. Era senza dubbio un modo di fare loro il più grande bene possibile: li si preservava dal peccato, dalle miserie di questa vitae dall’inferno; li si mandava infallibilmente in cielo. Ma queste caritatevoli persone non consideravano che non è permesso fare neppure un piccolo male in vista di un grande bene; che non avevano alcun diritto sulla vita di questi bambini; che la maggior parte dei padri e delle madri è abbastanza materialista da preferire di avere con sé i propri figli e le proprie figlie anziché vederli sgozzare per mandarli in paradiso; che, in una parola, il magistrato deve punire l’omicidio, anche se commesso con buone intenzioni.
Sembra che gli Ebrei abbiano più diritto degli altri di derubarci e di ucciderci: infatti, benché ci siano cento esempi di tolleranza nell’Antico Testamento, tuttavia vi sono anche esempi e leggi di rigore. Dio ordinò loro talvolta di uccidere gli idolatri, e di risparmiare solo le figlie nubili: essi ci considerano idolatri, e anche se noi oggi li tollerassimo, potrebbero bene, se fossero loro a comandare, non lasciar al mondo che le nostre figlie.
Sarebbero soprattutto assolutamente obbligati ad assassinare tutti i Turchi, cosa ovvia; infatti i Turchi posseggono i territori degli Etei, dei Gebusei, degli Amorrei, dei Gersenei, degli Evei, degli Aracei, dei Cinei, degli Amatei, dei Samaritani. Tutti questi popoli furono colpiti da anatema: il loro paese, che si estendeva per più di venticinque leghe, fu donato agli Ebrei con successivi patti. Essi devono rientrare in possesso dei loro beni: i maomettani ne sono gli usurpatori da più di mille anni.
Se gli Ebrei ragionassero così, è chiaro che non ci sarebbe altro modo di rispondere loro che mandandoli in galera.
Questi sono i soli casi, all’incirca, in cui l’intolleranza sembra ragionevole.»
Questa pagina di prosa è notevole perché in essa si concentrano tutte le principali caratteristiche di Voltaire “filosofo”; se mai è lecito parlare di filosofia a proposito di una delle menti più eminentemente antifilosofiche nella storia del pensiero europeo, se mai ve ne fu una.
L’esordio è una tipica professione di fede nel Vangelo dei “diritti naturali” e della concezione dello Stato liberale come semplice strumento di tutela affinché il singolo cittadino possa esercitare i suoi diritti: i quali coincidono con la libertà di fare tutto ciò che, non potendosi qualificare come crimine, non incorre nei rigori della legge. In altri termini, la legge è quell’insieme di norme coercitive che colpiscono il crimine e di altro non si interessa; anche se vi sono molti comportamenti che, pur non essendo criminali, danneggiano gravemente la società, per Voltaire solo il delitto la turba e quindi solamente esso va punito.
Non solo: per Voltaire pare che un solo crimine turbi la società, il fanatismo; ecco allora che, per non incorrere nei rigori della legge, bisogna astenersi dal fanatismo: solo a questa condizione gli uomini diventano meritevoli di tolleranza.
A questo punto la tolleranza non risulta più l’atteggiamento fondamentale dell’uomo verso il suo simile e dello Stato verso il cittadino, bensì il prerequisito per meritare di essere trattati, a propria volta, con tolleranza: se non si è tolleranti, si è fanatici e se si è fanatici, non si merita alcuna tolleranza né dagli altri uomini, né, tanto meno, dalla società organizzata secondo i dettami della ragione, vale a dire dallo Stato.
Ovviamente, il primo esempio di fanatismo immeritevole di tolleranza che viene in mente al Nostro è quello dei gesuiti, i quali, come tutti sanno, impiegano la maggior parte del loro tempo andandosene in giro ad appiccare il fuoco alle chiese dei giansenisti: dunque, nessuna tolleranza con essi, ma, al contrario, il pugno di ferro dello Stato: nessuna pietà per quanti sono anatema rispetto al Vangelo del fondamentalismo illuminista.
Subito dopo Voltaire passa dal caso particolare al generale e insinua che i gesuiti, essendo seminatori di dottrine velenose, meritano che il loro ordine venga sciolto e che essi siano ridotti allo stato laicale. Di fatto, i Gesuiti erano stati espulsi da tutti gli Stati europei entro il 1767, per cui, quando Voltaire scriveva il suo “pamphlet”, la cosa era già avvenuta; anzi poco dopo, nel 1773, il papa Clemente XIV procedette allo scioglimento della Compagnia di Gesù.
Subito dopo, con il suo solito ghigno derisorio, Voltaire si abbandona a una pesantissima ironia, affermando che la cosa migliore, per i gesuiti, è proprio quella di essere ridotti allo stato laicale, perché, in tal modo, lo Stato li spoglia di un bene immaginario e dona loro un bene reale: infatti li trasforma da schiavi in uomini liberi e da portatori di sottana, in cittadini dal vestito corto, come tutti gli altri.
Ci vuole una bella faccia tosta per parlare così, vantando la violenza statale come un atto di generosità e deridendo il sentimento religioso altrui, anzi, facendosene beffe nella maniera più triviale: parlando di bene immaginario, infatti, egli butta nel cestino della carta straccia ciò che per migliaia di esseri umani è stato una ragione di vita e prefigura quel che accadrà con la Costituzione civile del clero durante la Rivoluzione francese, allorché migliaia di sacerdoti, di frati e di monache dovranno scegliere se accettare il sopruso oppure rimanere fedeli ai loro ideali, andando incontro al carcere, alla deportazione o alla morte sulla ghigliottina.
Poi, per fare sfoggio d’imparzialità, Voltaire se la prende con i francescani, con i luterani, con i calvinisti, con i giudei; ma il suo particolare, astioso malanimo verso il cattolicesimo e verso i gesuiti, traspare dal fatto che egli afferma che se altri, per esempio i francescani, dovessero comportarsi con altrettanto fanatismo dei membri della Compagnia fondata da Ignazio di Loyola, allora essi meriterebbero di essere trattati “quasi” - quasi, si badi - come questi ultimi.
Il brano dedicato ai Giudei è particolarmente interessante perché Voltaire, che pure si proclama loro difensore e loro estimatore, sottolinea che tutti i non ebrei, per questi ultimi, sono “infedeli” e che probabilmente verrebbero sterminati, qualora i rapporti di forza si capovolgessero; aggiunge pure che gli Ebrei, se tornassero padroni della Palestina, sterminerebbero migliaia e migliaia di musulmani. Il tutto in un crescendo di tale intensità, da mettere seriamente in crisi l’assioma secondo il quale l’antisemitismo sarebbe stato coltivato da tutti, tranne che dagli illuministi, perché questi ultimi, essendo i campioni della libertà e della tolleranza, non POTEVANO essere antisemiti (cfr. Il nostro recente articolo «Ma quanti contorsionismi per giustificare l’antisemitismo dell’”illuminato” Lichtenberg», apparso sul sito di Arianna Editrice il 26/09/2011).
La considerazione finale di Voltaire, secondo il quale, se tutti gli Ebrei ragionassero da nemici degli altri popoli e delle altre fedi, meriterebbero di essere “mandati in galera”, suona particolarmente sinistra, perché un popolo intero non si potrà mai mandare in galera, ma solo nei campi di concentramento, il che è precisamente quanto accadrà durante la seconda guerra mondiale; e, anche in quel caso, la motivazione dell’inumana decisione sarà di tipo difensivo: poiché gli Ebrei tramano contro la razza ariana, della quale sono divenuti mortali parassiti, allora è necessario metterli in condizioni di non nuocere, costi quel che costi…
E così, chi lo avrebbe detto, ecco che il campione della tolleranza universale assume le vesti, alquanto inquietanti, di un precursore dello sterminio del popolo ebreo, nonché di tutte le pratiche che il totalitarismo ha sempre prediletto per sbarazzarsi dei propri oppositori, dopo averli dipinti come nemici del genere umano, come nemici della pace e della tolleranza: perché, una volta che l’avversario sia stato trasformato non solo in un nemico irriducibile, come insegna Carl Schmitt, ma addirittura in un lupo feroce, che altro rimane da fare, se non abbatterlo senza pietà, come una fiera irrimediabilmente feroce e pericolosa?
Tolleranza per tutti, dunque: tranne che per chi non s’inchina alla Buona Novella della ragione.
Vengono in mente quei gesuiti del Paraguay che vennero espulsi dal marchese di Pombal, al solo scopo di “liberare” i poveri indios dall’odioso fanatismo cattolico e non certo perché i latifondisti portoghesi potessero farli schiavi impunemente: ma quando mai, questi sono solo cattivi pensieri…
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jeudi, 20 octobre 2011
Autour de la Fête de la Fédération
Autour de la Fête de la Fédération
par Georges FELTIN-TRACOL
Le 25 juin 2011 se tenait à Paris un colloque consacré à un grand moment de la Révolution française bien oublié aujourd’hui : la Fête de la Fédération.
Co-organisé par le Comité La Fayette, le Carrefour des Acteurs sociaux et La Fédération – Mouvement fédéraliste français, cette manifestation a rassemblé des historiens, des philosophes, des hauts fonctionnaires (comme le légitimiste Daniel de Montplaisir) et des personnalités telles le prince Jean d’Orléans. Les actes de ce colloque viennent de paraître. Comme il est de règle pour ce genre d’ouvrage, l’ensemble est inégal. Il faut néanmoins en saluer la publication.
Certaines contributions méritent cependant quelques critiques. Par exemple, Emmanuel Le Roy Ladurie évoque, à la suite de Fernand Braudel, l’incroyable diversité linguistique de la France. Après avoir traité du basque, du breton, du flamand, de l’alsacien, de l’occitan, du corse, des parlers d’oïl, il en arrive à « une étrange région qui n’a pas de véritable identité : la région franco-provençale puisque personne ne vous dira : “ je suis Franco-Provençal ”. On vous dira : “ je suis Savoyard, je suis Dauphinois ” et pourtant cela correspond à peu près à Rhône-Alpes, un peu élargi, avec en plus la Suisse romande qui n’est pas “ française ”, plus le Sud de la Franche-Comté, plus le Velay, le Forez et le Nord des Alpes du Sud : tout sur des bases essentiellement linguistiques (p. 14) ». Il soutient que « la franco-provençalité est une poly-ethnie extrêmement bizarre, centrée sur Rhône-Alpes […]. Il s’agit, hors de la Bourgogne proprement dite, d’une sorte d’identité qui fut burgonde, mais qui ne l’est plus qu’à titre mémoriel. […] La vague unité de l’ensemble se disperse, comme les pièces d’un miroir brisé, en une infinité de dialectes un peu français, un peu provençaux, unifiés les uns aux autres sans le savoir et parfois en le sachant (p. 19) ». L’historien de Montaillou semble méconnaître que le synonyme de « franco-provençal » est arpitan, d’où l’Arpitanie pour désigner ce territoire qui inclut le Val d’Aoste en Italie, mais pas le Velay dont le dialecte est haut-languedocien, donc occitan. Outre des considérations linguistiques et la référence haut-médiévale à la Burgondie, l’aire arpitane correspond en partie à la partie gauloise du Saint-Empire romaine germanique. À la Renaissance, une part non négligeable de ces territoires arpitans appartiennent au domaine de cette haute personnalité européenne, couverte d’opprobes par une historiographie hexagonale officielle et stupide, qu’est le Connétable de Bourbon…
Il n’est pas anodin que parmi les co-organisateurs figure « le Mouvement fédéraliste français “ La Fédération ” [qui] œuvre depuis plus de 65 ans, dans la discrétion, pour l’émergence du principe fédéraliste dans tous les domaines de notre société; en particulier par l’application du principe de subsidiarité, dans ses dimensions tant verticale (commune, pays, région, nation, continent, monde) qu’horizontale, par la reconnaissance et le développement des corps intermédiaires (familles, associations, entreprises, syndicats, églises…) (p. 6) », explique son président Laurent Grégoire.
Genèse d’une fête civique
Le colloque ne débat pas que la la seule Fête de la Fédération. Les interventions portent aussi sur la pertinence de l’idée fédérale. Il ne faut toutefois pas se méprendre sur la signification du mot « Fédération ». En 1790, la France n’est pas devenue une entité fédérale. Certes, les départements ont remplacé et rationalisé les anciennes généralités, subdélégations d’intendance, provinces (ou gouvernements militaires), pays d’État et pays d’élection, mais la « Nation » demeure unitaire, malgré une large décentralisation départementale, de district (futur arrondissement), cantonale et municipale. La Fédération que les Parisiens célèbrent ce 14 juillet 1790 n’est pas la fédération des « collectivités territoriales », mais celle des milliers de membres des gardes nationales des localités. Cette manifestation civique marque l’aboutissement d’un mouvement spontané, « partant des communes, petites ou grandes, venant de tous les horizons, du Dauphiné à la Bretagne, de l’Alsace au Languedoc, signale François Cailleteau. Partout des rassemblements de gardes nationaux s’opèrent quasi spontanément, parfois massifs, 10 000 à Valence en janvier, 50 000 à Lyon en mars, où l’on répète le serment français ou civique de fidélité à la nation, à la loi et au roi, l’ordre de ces trois fidélités étant d’une radicale nouveauté (p. 10) ».
L’expression même de « fédération » n’est pas surprenante pour l’époque si l’on en croît Benoît Lagarde : « Dans la correspondance ministérielle, reçue et expédiée par des militaires, il n’apparaît pas un terme unique, fixe, réglementaire. On parle avec libéralité de fédération patriotique, acte de fédération, pacte fédératif, fédération générale, confédération. Jusqu’à la période qui nous intéresse, ce sont des termes absents des rassemblements militaires dans le royaume de France. Ce sont des termes popularisés par les Insurgents de la Guerre d’Indépendance américaine; ce sont des termes qui engagent le militaire dans un processus civique, pour ne pas dire politique. Dans tous les cas le caractère de dualité partagé entre le législatif et l’exécutif est répété : la fédération est décrétée par l’Assemblée nationale et proclamée par le Roi; la loi et le roi seront présents lors de cette fête; reste à convoquer la Nation (p. 38) ». Jacques-Olivier Boudon ajoute, pour sa part, qu’« il faut […] mesurer le chemin parcouru depuis l’été 1789 quand s’organisent les premières fédérations locales, et le mois de juillet 1790. Le mouvement naît, dès le début du mois d’août, dans la région de Millau, dont le maire est un certain Louis de Bonald. Se forme alors une “ Confédération avec les villes de Rodez et de Villefranche et toutes autres villes qui voudraient y adhérer ”. D’autres villes font de même. Puis en janvier 1790, une autre étape est franchie quand se réunissent à Pontivy les milices de 69 villes et bourgs de Bretagne (p. 23) ». Quant à Emmanuel de Waresquiel, il insiste sur le fait que « l’idée de fraternité reprise autant du message évangélique que des Encyclopédistes et de Rousseau est à l’œuvre dès les débuts de la Révolution même si elle ne figure pas explicitement dans la Déclaration des droits du 26 août 1789. Cette confédération fraternelle du peuple français est souhaitée dès les derniers mois de 1789 par nombre de communes du royaume, comme celle de Dijon qui le 3 décembre lance le projet d’un “ traité fédératif ” censé faire respecter les décrets de l’Assemblée et l’autorité du roi. À partir du mois de janvier 1790, les fédérations se multiplient dans les départements, à Pontivy, Dôle, Lyon, Strasbourg (p. 32) ». À ce phénomène s’intègre la mode de l’Antiquité gréco-romaine. La référence à l’âge classique est si présente que « dans le serment du 14 juillet 1790, […] certains témoins de la scène trouveront à juste titre que la cérémonie rappelait plutôt “ une fête de l’ancienne Grèce qu’une cérémonie de l’Église chrétienne ”. On est là déjà quelque part entre les anciennes fêtes de la monarchie et les fêtes laïques de la république (p. 31) ».
François H. Briard considère, lui, que « le fédéralisme est surtout une pratique, avant d’être une théorie, une pratique qui rend vivante dans une communauté humaine la tension entre unité et diversité. Ensuite, le fédéralisme ne saurait survivre sans une dose de “ nationalisation ”, sans le développement d’un niveau supplémentaire de légitimité (p. 102) ». Est-ce la raison qu’« actuellement, l’Union européenne est une Union d’États qui revêt un caractère fédéral et qui évolue vers un nouveau type de fédéralisme (p. 89) », se demande-t-il ? Or il prévient plus loin qu’« on ne saurait parler de ” Fédération ” à propos de l’Union européenne, au sens classique du terme, dans la mesure où celle-ci ne connaît pas d’intégration politique (p. 91) ».
Chantal Delsol estime, quant à elle, que « l’Europe a été faite à l’envers en raison du problème de souveraineté qui s’est posé à juste titre d’ailleurs; c’est-à-dire que les compétences des entités inférieures ont été dévolues en haut alors que les entités inférieures étaient parfaitement capable et en revanche il n’y a pas eu véritablement d’organisation des compétences pour lesquelles les entités inférieures étaient insuffisantes (p. 104) ». Georges-Henri Soutou tente, pour sa part, de mieux cerner le fédéralisme. Il remarque d’abord que « les États fédéraux présentent des caractéristiques communes. Tout d’abord les parties constituantes (États, Länder, cantons…) ont des pouvoirs clairement définis, et sont dans beaucoup de domaines incontournables : pour des pans entiers et importants des prérogatives régaliennes tout passe par eux et non pas par le centre. Les Länder, les States, les cantons jouissent d’une personnalité législative; dans le cas suisse, pour prendre un exemple frappant, la nationalité helvétique n’existe pas de façon immédiate en tant que telle mais est la conséquence de la possession de la combourgeoisie d’un canton. La souveraineté est réellement partagée, les éléments constitutifs en détiennent une partie. Cependant dans un certain nombre de domaines clés le pouvoir central dans les États fédéraux est fort : aux États-Unis, en R.F.A., en Suisse, en ce qui concerne les affaires étrangères, la défense, la monnaie, et un certain nombre de domaines et d’institutions bien choisis, le centre décide seul. Il ne faut pas identifier fédéralisme et dilution du pouvoir : l’organisation gouvernementale des trois pays cités en exemple ici est très cohérente et ramassée sur l’essentiel (p. 80) ». Le fédéralisme sait s’adapter aux spécificités culturelles de chaque pays, d’où sa grande plasticité. Ainsi, « le système fiscal est beaucoup plus centralisé en R.F.A. qu’en Suisse ou qu’aux États-Unis, avec une forte péréquation des ressources entre les Länder. Dans la pratique, cela se traduit par une cogestion entre les Länder et le Bund, avec des rapports de force changeants (p. 81) ». Il en conclut que, « pour qu’une fédération se maintienne, il faut qu’elle dispose d’un pouvoir central stable et puissant, et que les divisions entre les composantes ne soient pas trop fortes, en particulier ne soient pas uniquement selon des lignes ethniques. C’est le cas des États-Unis, de la R.F.A. et même de la Suisse, malgré la division entre Romands et Alémaniques (mais on notera que la carte des cantons, d’ailleurs nombreux, ne se superpose pas avec celle des ethnies existant en Suisse) (p. 81) ». Georges-Henri Soutou considère par conséquent que « le projet européen se trouve […] en quelque sorte coincé entre le niveau inférieur (le régionalisme) et le niveau supérieur (le mondialisme) (p. 83) ».
On retrouve la faiblesse inhérente d’un certain fédéralisme qui est le refus, explicite ou non, de la limite géographique, territoriale ou géopolitique. Soutou rappelle que, « pour les Pères fondateurs, nourris par la réflexion des courants européanistes depuis les années 20, la réponse était évidente : l’Europe reposait sur une unité de civilisation, une histoire partagée et désormais réconciliée, et sur des valeurs communes (dont la démocratie, la liberté et l’État de droit). Cette vision a perduré jusqu’aux années 1980. Si les traités de Rome de 1957 disaient seulement que “ tout État européen ” pouvait être candidat, et ne définissaient pas ce qu’était un pays européen, pour les responsables européens des années 60 et 70 les choses étaient cependant très claires. Comme le disait le préambule du Plan Fouchet d’union politique dans sa version de janvier 1962, l’Europe reposait sur une “ civilisation ”, sur un “ patrimoine spirituel ”, sur les “ principes de la démocratie ” et sur les “ droits de l’homme ”. Et la Déclaration sur l’identité européenne adoptée par les chefs d’État ou de gouvernement des Neuf à Copenhague le 14 décembre 1973 ne disait pas autre chose : “ nécessités européennes fondamentales ”, “ civilisation commune ”, “ valeurs d’ordre juridique, politique et moral ”, “ principes de la démocratie représentative, du règne de la loi… ”. On avait là une Europe clairement définie, qui reposait certes sur des valeurs universelles (ou qui se prétendent telles) comme la démocratie et les droits de l’homme mais qui affirmait clairement sa spécificité comme espace géographique, historique et de civilisation. Or à cette Europe clairement définie et donc délimitée par l’histoire et la civilisation, s’est progressivement substitué à partir des années 1980 une notion de l’Europe beaucoup plus abstraite et vague, et sans rivages. C’est ainsi que le préambule du traité de Maastricht de 1992 ne soulignait plus comme ciment de l’Europe que la démocratie, les droits de l’homme et l’État de droit. Et désormais c’était le discours admis dans les enceintes européenne : l’Europe, c’était la démocratie, les droits de l’homme et l’État de droit. Il n’était plus question d’une civilisation commune et d’une histoire partagée, qui marqueraient une spécificité européenne. Cette évolution récente correspond bien entendu à une évolution parallèle dans nos différents pays : on est passé un peu partout d’une vision historique, spirituelle et culturelle de la Nation comme de l’Europe à une conception “ civique ” reposant uniquement sur la démocratie, l’État de droit et les droits de l’Homme (p. 84) ». Si, pour Aristote, la démocratie tend vers l’anarchie, le fédéralisme risque, lui, de verser dans le confusionnisme, le chaos ethnique de grande ampleur et le nivellement culturel. En parlant de la France, Jean-Paul Gourévitch avance que « nous sommes une nation diverse. 7,7 millions de personnes d’origine étrangère (les immigrés et leurs descendants directs) soit 12,5 % de la population vivent sur le territoire de la métropole. Le fait qu’un certain nombre d’entre eux aient choisi la nationalité française et que d’autres l’obtiendront automatiquement à 13, 16 ou 18 ans sans la demander en vertu du droit du sol n’est pas suffisant pour que chacun se sente partie prenante de la communauté nationale. Ceci d’autant plus qu’il existe en métropole deux communautés très fortes – 3,4 millions d’originaires du Maghreb, 2,4 millions originaires de l’Afrique subsaharienne sans compter les Turcs, les originaires de la Péninsule balkanique ou de l’Extrême-Orient – qui ne partagent pas toujours les valeurs qu’on veut leur imposer (p. 107) ». Le fédéralisme est-il encore viable dans ces conditions ? On n’en a pas l’impression. Les auteurs ne semblent pas voir le fédéralisme passer d’une pratique moderne à des modalités nouvelles, post-modernes, fondées sur le retour des communautés, un fédéralisme communautaire/communautarienne.
De la Fédération à l’Empire en passant par Mistral
L’alternative à la France unitaire et à la non-Europe actuelle serait logiquement une fédération de communautés populaires organiques. En d’autres temps et en d’autres lieux, cette fédération s’appellerait l’Empire. La référence à l’Empire traditionnel est peu ou mal abordé par les participants. Concernant la monarchie danubienne des Habsbourg, Soutou lance, contre toute évidence historique, que « l’Autriche-Hongrie n’a pas été assassinée, elle est morte toute seule, certes après avoir été affaiblie par la guerre et la défaite (p. 81) ». N’a-t-il donc jamais lu Requiem pour un empire défunt (1988) de François Fejtö qui apporte de façon définitive les preuves de cet assassinat ?
Jacques-Olivier Boudon rapporte une anecdote peu connue qui devrait faire réfléchir les Français. « Un membre non identifié de la Société des Jacobins, avait le 17 juin [1790] suggéré qu’à l’occasion de la manifestation du 14 juillet, les représentants de la nation substituent au “ Vive le roi un vive Louis empereur ”, ajoutant : “ Ce titre nouveau conviendrait parfaitement au nouvel ordre des choses ”, avant de convoquer le souvenir de Charlemagne. “ Louis XVI doit donc reprendre un titre d’honneur que les rois fainéants ont laissé passer chez nos voisins. Effaçons les noms de roi, de royaume, de sujets, qui ne s’unirent jamais bien avec le mot de liberté. Les Français qui ont la souveraineté et qui l’exercent, sont soumis à la loi et ne sont sujets de personne. Le prince est leur chef, non leur maître : Imperat, non regit. Qu’il revienne donc du Champ de Mars la couronne impériale sur la tête; et que son auguste épouse soit, comme sa nièce, saluée du nom d’Impératrice ”. Cette proposition est rapidement balayée, mais elle montre que l’idée d’un retour à l’empire ne naît pas ex nihilo en 1804 (p. 24) ». En consultant les archives, on sait qu’à partir du règne de Louis XVI, le terme « Empire » signifie dans les documents administratifs officiels « État » et désigne le royaume de France. Quant au titre d’« empereur des Français » de Napoléon Ier, il doit se comprendre comme « chef de l’État des citoyens français ».
L’idée impériale rejaillit indirectement avec le fédéralisme régionaliste dans l’allocution de Martin Motte consacrée à Frédéric Mistral. Prix Nobel de littérature en 1905, Mistral est le grand défenseur de la langue provençale. « Remarquons l’insistance du poète à souligner que toutes les écoles font la guerre au provençal, la privée comme la publique; de ce fait, sa défense transcende les clivages partisans, remarque Martin Motte. Sous-jacente à toutes ces propositions, on retrouve l’idée fédérale : la Provence est née d’une fédération de races; le combat pour sa langue est le seul thème fédérateur qui puisse imposer silence aux haines politiques; quant à la poésie, elle est la forme de littérature la plus fédératrice parce qu’elle s’adresse aux strates profondes du psychisme humain, non aux couches superficielles où sévit l’esprit de parti (p. 56). » Il rappelle que Mistral a soutenu le Second Empire, surtout dans sa période libérale (1860 – 1870) : « Mistral prend ici acte d’une divine surprise : en faisant du principe des nationalités l’axe de sa politique extérieure, le Second Empire réalise les promesses de 1848. Encore faudrait-il qu’il se montrât aussi libéral à l’intérieur, ce pour quoi le poète l’appelle à respecter “ le vieux parler roman ” de Provence. La langue est en effet la première des libertés, “ car, face contre terre, qu’un peuple tombe esclave, s’il tient sa langue, il tient la clef qui le délivre de ses chaînes ”. De la reconnaissance du provençal en France et du catalan en Espagne, Mistral espère la résurrection d’une communauté culturelle “ des Alpes aux Pyrénées ” qui préfigurera un temps où l’on verra “ l’amour seul joindre les races ”. En somme, l’identité régionale forme la thèse du poème, l’identité nationale son antithèse et l’idée fédérale sa synthèse (p. 58). » C’est en toute logique qu’il appuie l’Union latine, puis prône une Confédération latine entre la France, l’Espagne et l’Italie.
En 1871, Frédéric Mistral s’oppose à la Commune qui pervertit, selon lui, le fédéralisme régional. Son fédéralisme entend « soustraire les esprits au nivellement technicien comme aux sirènes du socialisme, celui-ci se nourrissant de celui-là et tous deux conduisant au nihilisme; réinscrire l’homme dans ses cercles de sociabilité réels, à commencer par la commune et la région; donner à ces dernières les moyens de traiter la question sociale à la base et désamorcer par là même les menaces de guerre civile, tels étaient les défis de l’heure (p. 59) ». Pour Mistral, « par sa nature même, le fédéralisme permettait le dépassement du clivage droite – gauche. Il avait d’ailleurs le vent en poupe dans le débat politique français en tant que carrefour des diverses oppositions : on l’avait vu dès le boulangisme, auquel Mistral avait été attentif, on le revit avec Barrès et son journal La Cocarde (1894 – 1895), auquel collaborèrent Maurras et Amouretti et qui fut le lieu par excellence d’une synthèse entre nationalisme et fédéralisme. Mistral n’eut aucun mal à se reconnaître dans cette synthèse, autour de laquelle ses intuitions tournaient depuis longtemps. C’est donc tout naturellement que, l’affaire Dreyfus venue, il adhéra à la Ligue de la Patrie française (p. 63) ».
Martin Motte mentionne fort à propos une combinaison nationaliste – fédéraliste – régionaliste qui conduira à l’« Union sacrée » de 1914. « En octobre 1913, souligne-t-il, Raymond Poincaré, de passage en Provence, voulut apporter à Mistral l’hommage de la nation française tout entière : il vint le prendre lui-même à Maillane pour l’emmener déjeuner à bord du train présidentiel. Amplement médiatisé, l’événement avait une finalité politique très précise : Poincaré, désireux de mobiliser les énergies du pays dans un contexte international tendu, venait sceller l’alliance du nationalisme et de “ ce régionalisme dans lequel notre France aura […] son rajeunissement ”. Mistral lui répondit que la province était en effet la “ mère des paysans et des soldats de France ”, et qu’à cet égard au moins elle méritait qu’on ne la négligeât pas (p. 65). »
Malgré les disparités propres à ce type de livre collectif, La Fête de la Fédération du 14 juillet 1790. Histoire et héritage apporte un éclairage intéressants autour des notions de fédéralisme régional, national et européen. Marc Bloch écrivait qu’« il est deux catégories de Français qui ne comprendront jamais l’histoire de France : ceux qui refusent de vibrer au souvenir du sacre de Reims; ceux qui lisent sans émotion le récit de la fête de la Fédération ». Le jugement est abrupte et partial. Plutôt qu’avoir des émotions, préférons la nostalgie d’un événement manqué.
Georges Feltin-Tracol
• Georges-Henri Soutou (sous la direction de), La Fête de la Fédération du 14 juillet 1790. Histoire et héritage, Actes du colloque du 25 juin 2011, Paris, 117 p., 18 €, à commander par chèque bancaire à l’ordre du Carrefour des Acteurs Sociaux, 103, avenue Parmentier, F – 75011 Paris, France.
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mardi, 18 octobre 2011
L'Occident, un crime contre l'imaginaire européen
L'OCCIDENT, UN CRIME CONTRE L'IMAGINAIRE EUROPEEN
Jure Georges Vujic, un écrivain „contre-bandier“ d'idées
A propos du livre „Un Ailleurs européen -Hestia sur les rivages de Brooklyn“
Avatar Editions, mai 2011
„La tradition est inversée. L’Europe ne raconte plus l’Occident. C’est l’Occident qui comte l’Europe. La marche en avant des proto-iraniens, peuples de cavaliers vers leur foyer « européen », la « hache barbare » du peuple des demi-dieux hyperboréens, Alexandre, Charlemagne, Hoffenstaufen, Charles Quint, Napoléon ne font plus rêver. L’Occident hyperréel sublimé, le mirage du « standing », du bonheur à la carte est le songe éveillé et névrotique du quart-monde favellisé, d’un imaginaire tiers-mondiste « bolly-woodisé ». Il n’y a plus de grand métarécit européen faute de diégèse authentiquemment européenne. La « mimesis vidéosphérique » occidentale dévoile, déshabille, montre et remontre dans l’excès de transparence. Loin des rivages de l’Hellade, Hestia s’est trouvé un nouveau foyer sur les bords de Brooklyn, aussi banal et anonyme que les milliers d’« excréments existentiels » qui jonchent les rivages de Long Island.“
C'est sur ce constat pessimiste que l'on pourrait très bien résumer le dernier livre de Maitre Jure Georges Vujic, (écrivain franco-croate), intitulé „ Un Ailleurs européen-Hestia sur les rivages de Brooklyn ». Ce livre qui sort aux éditions Avatar, pourrait très bien être autobiographique, l'auteur y mêlant avec un langage á la fois lapidaire, incisif et au style hermétique, á la fois des éléments mémorialistes et anthologiques, mais aussi analytiques qui rendent très bien compte de l'état de la crise á la fois politique , spirituelle et identitaire que traverse aujourd'hui l'Europe. Au fil d'une méditation et d'une réflexion personnelle que l'auteur qualifie de „contrebandière“ „transversale“ et „asymétrique „ Vujic se livre á un défrichage intellectuel des contradictions et de maux internes qui accablent l'Europe contemporaine. Dans le cadre de cette réflexion, il l'oppose l'idée d’Europe, éminemment spirituelle, aristocratique, organique et plurielle á l'occidentisme contemporain mercantile, néolibéral, techniciste americanocentré contemporain. Selon lui : « L’Europe d’après 1945 et l’Europe de nos jours ne sont guère différentes et présentent des similitudes flagrantes ou plutôt portent les mêmes stigmates « décadentistes » de la « fin d’un monde », . Depuis la guerre froide jusqu’au monde unipolaire américanocentré de nos jours, l’Europe semble inéluctablement engagée dans une lente agonie á la fois « festives « et « hyper-réelle » caractérisée par un climat généralisé de déliquescence, la corruption des « idées » et mœurs, l’anomie généralisée, l’absence de « sens et de principes métaphysiques », l’irresponsabilité et la pusillanimité des démocraties parlementaires, l’imposture libérale et le déclin de la notion de souveraineté. La blessure et l’humiliation infligées à l’Europe au lendemain de 1945 ne cessèrent de grandir et d’affecter les organismes vivants que sont les peuples européens : d’est en ouest les mêmes maux accablent l’Europe d’hier comme celle d’aujourd’hui, et je persiste à croire que les mêmes remèdes restent indispensables pour une renaissance authentiquement européenne. »
Il convient de reconnaitre á l’auteur le mérite et l’audace de vouloir á travers cette démonstration littéraire concilier les thèses et les pensées d’écrivains et penseurs de la « droite révolutionnaire » ou de la « tradition »« » tels que Jünger, Évola, Bardèche, Salomon, avec des penseurs contemporains « post-structuralistes » et « dé-constructivistes » classés à gauche, tels que Derrida, Deleuze, Guattari, Cacciari, Foucault ou Baudrillard. Vujic prône une reconquête de cet esprit européen originel mais sans tomber dans le carcan d’un discours passéiste et néoromantique antimoderniste. »Remonter à l’essence, à la source spirituelle de la pensée européenne, c’est reconnaître que dans sa solidarité comme dans sa diversité. Cette Europe « plurielle » et « buissonnière » apparaissait ainsi dès le XIXe siècle aux plus hauts et sages de nos penseurs à un Goethe, un Renan. Michelet, Proudhon, Quinet, fils de 1789 et militants de la génération de 1848, traitaient déjà des thèmes socialistes et nationaux : respect de la force, critique de la démocratie, culte du travail et de la patrie, contre-religion. La génération de 14 et la « camaraderie » de 1945 feront entendre la même mélodie martiale : reconquête de la virilité, fidélité à la fraternité des tranchées, exaltation de l’héroïsme guerrier ; Péguy, E. von Salomon, Moeller Van den Bruck, E. Jünger, Georges Sorel apportaient un bain de jouvence révolutionnaire à la pensée nationale. La pensée de Vujic est manifestement « oecuménique « et reflète bien son idiosyncrasie personnelle, qui tente dedépasser la simple dimension réactive d’une pensée hétéroclite et à la fois cohérente, pour en extraire les matrices constantes et stables qui imprègnent les diverses chapelles de pensées dites de « droite » ou de « gauche », le plus souvent dispersées voire rivales.
En abordant la question du devenir de l’Europe, l’auteur rend compte des mutations du „monde européen“ contemporain dans le sens symbolique, essentialiste et métaphysique, asphyxié sous l’empire d'un „occidentalo-centrisme“ mécaniciste qui l'a indéniablement absorbé et consumé, est qui du reste constitue son degré zéro de la puissance symbolique. Il constate que l'Europe actuelle s'est mise aux couleurs de l’Occident qui, dans ses excès, dans son absurdité, produit une fatale réversion pour se transformer en son exact contraire : un extrême-occident impérialiste et mortiphère. Au de la de toute pensée passéiste , a l’opposé des formules réactionnaires et restauratrices, Vujic fait preuve d’une extrême lucidité en appelant á constater le monde en soi, l’Europe contemporaine « en soi » c'est-à-dire par ce qu'elle nous offre de plus concret. Cette approche qui nous rappelle l’attitude d’un Jünger ( réalisme tragique), le gai savoir d’un Nietzche et « l’être au monde » d’un Merleau-Ponty, conduit l’auteur á la réflexion su « l’ailleurs européen » le miroir- inversion, la version spéculaire d’une Europe « kidnappée » par l’occidentisme contemporain. » Défendre le passé d'une Europe „originelle“, intact et mythique consisterait en une opération tautologique qui tendrait á s'opposer á son propre devenir et de défendre son propre „simulacre“, car il faut partir du simple constant que l'esprit prométhéen européen a bel et bien depuis l'antiquité enfanté l'occidentisme hypermoderne actuelle. L'Europe d'hier s'est irrmédiablement retournée en son contraire, l'Occident contemporain. » C’est ce qui l fait dire a l’auteur que l’Europe actuelle est en proie « au jeu de simulacres ». « La « simulacr-isation » de l’Europe sous forme de produits consuméristes, d’images d’épinal, d’archétypes culturels, de stéréotypes touristiques ne fait que simuler d'autres simulacres sois-disants « évènementiels » « rétrospectifs » ou « ostensibles » . Toute méta-narration incantatoire, tout grand-récit, toute notion de « grande politique » á la fois « vectorielle » et « vertêbrante », d'une œuvre originale, d'un événement authentique, d'une réalité première a disparu, pour ne plus laisser la place qu'au jeu des simulacres ». En ceci, Vujic rejoint l'analyse nietzschéenne de la vérité comme voile, et de la pudeur de la féminité, ensemble de voiles qui ne font que voiler d'autres voiles. Ôtez tous les voiles, et il ne reste plus rien. ». Pour lui l’occident contemporain est « avant tout un paysage sociétal, de « landscape » virtuel. Souffrant d’un vide identitaire et d’une absence de paternité, L'Europe s'est peu á peu transformer en super-usine occidentale qui produit á l’excès une idéologie économiciste de marché, des valeurs exclusivement consuméristes , une prolifération sans frein de développement technologique, de progrès infini, et s'est fait le porte drapeau d’une morale totalitaire planétaire, qui 'est donnée pour but de réaliser le rêve utopique d'une „unite intégrale“ mondiale.
La structure du livre quasi-photographique pourrait très bien être celle d’un scénario de Godart alors que le séquençage rappelle les actes du théâtre antique- La méprise, la Forclusion, ect… au nombreuses références de la mythologie grecque. Le style de l’auteur est á la fois baroque et dépouillé, et témoigne d’une curieuse « sérendipité » comme l’aime l’appeler l’auteur qui nous plonge dans un récit dystopique, métapolitique et philosophique qui n’en finit pas d’interroger au gré des chapitres.
Le parcours narratif de l’auteur, est hanté par la présence du personnage parabolique et métaphorique d’Hestia, une sorte de déesse postmoderne du foyer et de l’identité, mi-démon mi-ange, qui au gré du cheminement réflexif de l’auteur, rôde telle une vagabond en quête de sens sur les rivages de Brooklyn, comme leitmotiv d’un Occident désoeuvré, spirituellement ravagé et vidé, un peu comme dans un film noir, mêlant les accents d’un Kerouac ou d’un Céline.
„Que faire ? Hestia devra-t-elle chevaucher ce nouveau paysage extrême-occidental, c’est-à-dire faire en sorte que ce paysage devienne le centre de l’aventure d’une nouvelle extension métaidentitaire ? Faire l’expérience d’une nouvelle déconstruction identitaire par « l’archipélisation » ? La tâche de Hestia est celle du poète qui s’efforce de diffuser la totalité dans son lieu, trouver et inscrire « l’Ailleurs » dans « l’Ici ». Faire d’un territoire hostile et rival un lieu commun. Le génie « européen » qui avait pensé sensiblement le monde, qui l’avait dompté et conquis en l’accaparant dans la raison instrumentaire et intelligible avait fini par être consumé par la res cogitans occidentale, un « Nouveau monde » qui l’avait pulvérisé dans la sphère de l’intelligible et la surreprésentation excessive. En un mot l’esprit européen avait lui-même enfanté une image criminelle de lui-même. Et si c’était vrai ? Si l’Occident n’avait été que ça : un crime contre l’imaginaire ? S’il n’était rien d’autre qu’une machine à sublimer qui n’a cessé de servir le plus sournois des cultes de la représentation et de la raison discursive ? L’Occident en tant que processus de désenchantement irréversible ?“
La question reste ouverte, l’auteur ne nous offre pas des réponses toutes faites, L’intertextualité et les thèses critiques de Vujic sont éminemment politiquement incorrect, contestataires et « réfractaires », mais aussi pédagogiques et anticipatrices ouvrant diverses pistes de réflexions, de nouvelles lignes de fuites dans la pensée unique. Le grand mérite de ce livre est de mettre en exergue et d’offrir au de lá des schémas de critique « binaire »,« un archipel de « litteralité » qui regroupe des pensées de générations différentes
C’est pourquoi , dans le contexte de la pensée unique dominante, Vujic fait incontestablement preuve d’un liberté de pensée indéniablement subversive car l’acte de penser librement et en toute indépendance est indéniablement « subversif », acte non pas illégal mais a-légal, qui se situe en amont du systémisme et du positivisme dominant. Le livre est á recommander á tous les esprits épris de sens et d’amour pour une certaine idée de l’Europe. On parle de la fameuse quête du sens en oubliant que la question du sens est inséparable de la mise en question du sens établi.
Edouard Largny
Journaliste et critique littéraire
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vendredi, 14 octobre 2011
Questions à Raymond Abellio sur sa vision de l’Occident
Questions à Raymond Abellio sur sa vision de l’Occident
(Revue Question De. No 4. 1974)
Vers la fin d’un certain ésotérisme
Q. Quelle place accordez-vous à ce que chacun aujourd’hui nomme « l’ésotérisme » ? Voyez-vous dans l’ésotérisme une situation radicalement nouvelle de la vie sociale et religieuse, un signe de transformation de l’Histoire présente ? Est-ce une révolte, le dernier soubresaut d’un monde en train de disparaître ou l’annonce d’une renaissance spirituelle ? Vous avez d’ailleurs intitulé votre dernier ouvrage « la fin de l’ésotérisme ». Qu’entendez-vous par là ?
R. Bien entendu, j’ai choisi un titre provocant, la provocation étant un moyen de communication utile aujourd’hui. Il faut secouer les gens pour qu’ils s’éveillent. Il est bien évident que l’ésotérisme, de par son essence, ne peut pas avoir de fin, dans la mesure où l’on admet que la connaissance en soi est toujours inachevée et inachevable, étant donné que c’est une question d’intensité. Mais « fin » signifie aussi que nous sommes dans une période de désoccultation et qu’il convient de réagir contre une certaine tendance des ésotéristes traditionnels à s’enfermer dans ce qu’ils appellent le secret. Certes, l’ésotérisme, en tant que corps de connaissance, aura toujours une frange secrète, ou plutôt un noyau secret (puisqu’encore une fois il est d’une intensité inachevable) ; mais le secret, en tant que forme moralisatrice de protection d’un corps de doctrine dont on ne connaît d’ailleurs pas le développement, me paraît quelque chose de très dégradé comme conception. C’est contre cela, finalement, que j’ai voulu être provocant. Attaquer les ésotéristes qui se servent dans leurs livres de ces formules : « Je connais beaucoup de choses, mais je ne peux pas les dire », « Je ne veux pas les dire ». Mais qu’ils n’écrivent pas de livres, alors ! Ce qu’on sait, on le sait, et l’on doit le dire. Pourquoi craindre le danger ? Les mots « danger » et « décadence », je ne les emploie pas ou je les mets entre guillemets.
Q. Mais je pense que, pour les ésotéristes qui sont, je crois, beaucoup plus occultistes qu’ésotéristes, il s’agit d’intéresser à tout prix par un pseudo-secret, par des points d’interrogation, par des conditionnels en succession infinie. Alors on voit apparaître dans ce sens de nombreuses collections d’ouvrages qui sont effectivement la fin d’un certain ésotérisme, qui sont l’extrême du vulgaire. Par contre, on peut entendre aussi la fin de l’ésotérisme comme étant son accomplissement.
R. Parfaitement. C’est ainsi que je l’entends, dans le sens supérieur. Quand je parle de désoccultation, il est certain que c’est d’un accomplissement qu’il s’agit. C’est le besoin qu’a tout être qui cherche la connaissance, d’être illuminé par elle, et il est incontestable que l’illumination est un accomplissement. C’est assurément une fin, fin toute relative, bien entendu, que vous ressentez comme un absolu et dont vous savez bien que vous retomberez, quitte ensuite à rechercher une intensité supérieure. Mais il est certain que, chez les ésotéristes dont nous parlons, se développe aujourd’hui une sorte de « décadence ». Par exemple, le mépris qu’ils témoignent à l’Occident, à l’effort scientifique de l’Occident, est quelque chose d’incompréhensible.
Q. Le mépris de René Guénon à l’égard de l’Occident en est le meilleur exemple.
R. Il est très provocant, injuste. Mais Guénon vivait à une époque où il était nécessaire de détruire le scientisme.
Q. Guénon ne pouvant se convertir à l’hindouisme, se convertit à l’islam. Tout plutôt que l’Occident ! Partant de là, il échafaude des théories qui sont en soi assez discutables, celles de la Tradition primordiale. Celle-ci est reléguée dans un temps historique indéterminé, où les hommes sont parfaits, purs et connaissants. Il énonce alors ses idées sur l’initiation. Qu’en pensez-vous ?
R. Les moyens de communication que ces hommes pouvaient avoir avec le monde supérieur, avec le monde invisible, les forces divines ? Je crois qu’il est préférable de ne pas en parler, parce qu’on ne peut pas en parler. Alors, faire de ces êtres du début des temps de la Tradition, des êtres purs, omniscients, etc., cela ne fait pas très sérieux.
Q. Non seulement cela ne fait pas très sérieux, mais on retrouve tout un courant qui est pris chez Saint-Yves d’Alveydre et chez quelques autres, et la tradition de l’Aggartha n’est pas de Guénon.
R. Enfin, ces yeux tournés vers le passé, vers une sorte d’âge d’or perdu, non ! Ce n’est pas conforme à la vocation de l’Occident.
Le rôle de l’initiation
Q. Comment vous situez-vous par rapport aux doctrines « initiatiques » ? Pensez-vous qu’il y ait une initiation possible pour l’homme, la réalisation du « passage », faire mourir le vieil homme et renaître à la vie transcendante ? Qu’est-ce que l’initiation pour vous, et que pensez-vous des ordres initiatiques ?
R. Il se peut très bien qu’à une certaine époque historique, mal déterminée, les rites aient été un mode de communication nécessaire et privilégié, dans la mesure où l’on n’en connaissait pas la signification exacte : une sorte de magie que l’on retrouve dans certaines peuplades d’Afrique. Je crois que les rites d’initiation, tels que les conçoit Guénon, ont eu leur nécessité en Occident à une époque où, justement, la conceptualisation n’avait pas atteint le degré de nécessité et de clarté qu’elle peut atteindre aujourd’hui : de même que, dans certaines peuplades d’Afrique noire, la magie joue un rôle que joue en Europe la science. Je me rappelle l’histoire que me racontait un de mes amis. Il avait été désigné par je ne sais quelle société savante américaine pour faire une enquête auprès de peuplades primitives. Il voit, un jour, une vieille femme qui était en train de regarder le feuillage d’un arbre qui bougeait. Il dit : « Qu’est-ce que vous faites ? » Elle répondit : « Je passe » un message à mon petit-fils qui est à l’école et à qui j’ai oublié de dire ce matin de me rapporter du café. Je lui passe un message par le vent des arbres. » Il s’étonna, bien qu’il fût là pour faire des études sur la télépathie. Il demanda des explications. La femme était très gênée ; elle disait : « Vous êtes très forts, vous êtes de grands magiciens, vous avez le téléphone. » Elle considérait le téléphone comme un instrument de magie plus perfectionné. Le rite est simplement un medium de magie, moins perfectionné que le medium scientifique. C’est tout. Et l’on comprend que, selon les époques, les besoins de rites d’initiation diffèrent.
Q. Ce qui semblerait indiquer qu’aujourd’hui, selon vous, les rites d’initiation, l’appartenance à des sociétés secrètes, choses tant prônées par les milieux ésotériques de la fin du siècle dernier, ne représentent plus que l’ultime chatoiement d’un monde en voie de disparition.
R. C’est en ce sens, d’ailleurs, que j’ai parlé de la fin de l’ésotérisme — la fin d’un certain ésotérisme.
Le Renouveau de l’Occident
Q. Votre recherche politique se fonde sur une double connaissance : connaissance du monde spirituel traditionnel et connaissance de la technocratie moderne. Dès après la Seconde Guerre mondiale, vous avez entrepris une pénétrante méditation sur le rôle de l’Europe dans la politique future.
R. Depuis la guerre, l’Europe ne joue plus de rôle politique, ou, si elle essaie d’en jouer un, vous voyez au milieu de quelles difficultés et à quel niveau inférieur ! Actuellement, l’Europe, par l’intermédiaire des sociétés multinationales, est colonisée par l’aire américano-russe. De même, sur le plan de la recherche intellectuelle, palle marxisme russe. Nous avons à présent une aire américano-russe occidentale et une aire tibéto-chinoise. C’est dans ce sens que je donne à l’absorption du Tibet par la Chine une signification sacrée. Il y a là une véritable « théophagie ». Et c’est cela qui donne toute son amplitude au conflit est-ouest maintenant. L’Orient apparaît, de nos jours, devant la dégénérescence des religions occidentales, comme le porteur d’une puissance spirituelle par la révolution culturelle. Mais ce n’est là qu’une vision profane.
Q. Alors, selon vous, la Chine ne pourrait pas nous apporter, à nous Occidentaux, un renouveau des forces ordonnées face à une évidente dégénérescence des croyances judéo-chrétiennes et à un retour brutal des formes les plus frustes du paganisme ?
R. Je ne crois pas. Je crois que la révolution culturelle chinoise est une révolution collectiviste. Il est incontestable qu’en Chine, par exemple, les problèmes de l’homme intérieur ne sont pas posés. Le problème du sexe, celui de l’art, le problème métaphysique de la mort et de la religion sont éludés par le marxisme chinois. Or ce sont ces problèmes-là qui, dans l’invisible, commandent l’activité de la « prêtrise » occidentale à venir.
Les nouveaux prêtres… et les hippies
Q. Cette « prêtrise » invisible est-elle la suite moderne de l’antique caste des brahmanes védiques ? Voyez-vous en cela un renouveau possible à l’idée de castes ?
R. Absolument pas. Les prêtres invisibles sont des hommes qui passent au-delà des castes. Alors que les hommes de connaissance, les brahmanes, veulent institutionnaliser la connaissance, c’est-à-dire l’enfermer dans des églises, les prêtres invisibles refusent de se laisser institutionnaliser. Eux seuls sont les prêtres de la fin des temps, les nouveaux prophètes.
Q. Il est bon alors de rappeler qu’aux trois castes le plus communément admises prêtres, guerriers, agriculteurs vous opposez une vision nettement plus équilibrée de la société avec une division en quatre castes. Ces quatre castes seraient sommairement ordonnées comme suit : hommes de connaissance, de puissance, de gestion, d’exécution. Mais se pose à nouveau aujourd’hui le problème des hors-castes, les hippies et autres contestataires modernes.
R. Vous avez raison, et je suis persuadé que la mauvaise conception actuelle des quatre castes conduit à une méconnaissance de la hors-caste : celle d’en-bas disons les hippies — mais également celle d’en haut, les prêtres invisibles. Il y a incontestablement la caste des hippies qui refusent justement d’être des hommes d’exécution, de travail, mais qui ne sont pas, bien entendu, des « brahmanes ». Ils sont dans une hors-caste indéfinissable, et je crois cependant que leur rôle est capital, car c’est là que germent, dans ce terreau d’humus indifférencié, les nouvelles générations de castes. De ce point de vue, on peut même imaginer toute une sorte de géographie sacrée qui préciserait les zones de l’hémisphère occidental où apparaissent ces castes.
La notion de géographie sacrée
Q. L’existence de certaines zones privilégiées, de régions chargées de forces, d’énergies particulières, c’est pour vous, je crois, la géographie sacrée ou, tout au moins, sa structure de base. Ainsi, dans cette conception du monde, vous accordez à la Californie un rôle déterminant dans l’évolution et le développement des nouvelles hors-castes.
R. Oui, pour moi, sur un plan symbolique, la Californie est une ligne qui marque la limite à l’extrême ouest de l’Occident. Elle s’oppose à l’Amérique ; la Californie n’est pas du tout l’Amérique. Et c’est justement ce qui m’a conduit à penser qu’il y avait un symbolisme considérable dans la révolte des étudiants de Berkeley en 1964, qui a été la première manifestation dans le monde de la révolte des étudiants.
Q. Si la Californie n’est pas l’Amérique, mais l’Extrême-Occident, l’Occident n’est pas l’Europe. Je crois même que vous faites une différence fondamentale qui est, en quelque sorte, l’assise de votre géographie sacrée.
R. La distinction entre l’Europe et l’Occident est, pour moi, fondamentale. Dans notre cycle de temps, nul lieu au monde n’eut plus que l’Europe l’illusion de faire naître l’Histoire. L’Europe s’est vue comme déterminant et écrivant l’Histoire tout entière du cycle terrestre actuellement en cours, et une Histoire de plus en plus dense et dramatique. Je fais de la distinction Europe-Occident une clef fondamentale. Ainsi, l’Europe est construite, l’Occident est constitué. L’Est est le support d’une infinité passée, l’Ouest celui d’une infinité à venir : l’Occident est, entre eux, celui d’une infinité présente. Mais c’est justement parce que l’homme européen est pris actuellement dans l’implication infinie des liaisons historiques, et qu’il y est pris seul, qu’il est, à l’état naissant, le porteur de l’être occidental capable de transcender l’Histoire, de la vider de ses événements isolés et passagers et de faire émerger, ici et maintenant, une nouvelle conscience dans le monde. L’Occident est d’abord vision absolue du monde et de lui-même par la découverte d’une structure absolue. L’Europe vit en mode d’ampleur, l’Occident en mode d’intensité. L’Europe veut progresser en mode de sédimentation, l’Occident se résout en mode de cristallisation.
Q. Quel sens donnez-vous à cette opposition ?
R. Un sens dialectique. Ainsi l’Europe se livre au temps tandis que l’Occident lui échappe. L’Europe paraît fixe dans l’espace, c’est-à-dire dans la géographie, tandis que l’Occident y est mobile et déplace son épicentre terrestre selon le mouvement des avant-gardes civilisées. L’Europe est provisoire, l’Occident est éternel. Un jour, l’Europe sera politiquement effacée des cartes, mais l’Occident vivra toujours. L’Occident est partout où la conscience devient majeure.
Révélation et illumination
Q. Vous accordez une importance fondamentale à la notion de révélation dans toute votre œuvre. Vous acceptez l’idée qu’une connaissance peut venir subitement, sans apport intellectuel ; cette connaissance résume alors des formes très diverses du savoir. Elle est la gnose à l’état pur, une réalité universelle qui, soudain, relie l’homme à l’infini.
R. Tous, autant que nous sommes, nous avons eu des moments où la certitude en nous se passait de preuves. Ma propre certitude, à certains moments de ma vie, a été totale, immédiate, fulgurante. C’est ainsi que je puis vous dire, et de façon très précise, que j’ai reçu la révélation de ma clef numérique de la Kabbale le 5 avril 1946 à dix heures du matin, le Vendredi saint de cette année-là. La liste des valeurs ésotériques des nombres m’est venue globalement, sans nuance. Elle m’est tombée dessus comme un coup de tonnerre, à tel point que, pendant trois heures, je suis resté paralysé, dans un état d’immobilité absolue. Je brûlais et j’avais l’impression que ma tête allait éclater. Quand j’ai enfin pu me déplacer, je suis allé me coucher sous une tente qui était au fond du jardin. Pendant ce repos, chaque fois que j’essayais de deviner le sens précis de ma révélation, j’avais l’impression que tout pouvait sauter en moi. Une idée de plus, et mon cerveau sautait ; c’était bien un court-circuit qui s’était produit entre deux univers, le mien, celui de l’homme, et l’autre, celui de la révélation, du savoir infini, de la gnose abrupte. La notion de choc dans la révélation est, pour moi, très importante ; car je l’ai reçue comme un coup de bâton, direct, sans pitié, sans faiblesse. Mais il est, je crois, bien inutile de vous dire qu’au moment où j’ai reçu cette connaissance subite, je n’avais qu’une idée très vague de ce que la révélation m’apportait. Disons que je venais d’accrocher l’idée centrale. Ensuite, j’ai dû procéder aux applications intellectuelles. La révélation est comme un objet brut ; le stade de l’exégèse intellectuelle est celui du raffinement.
Q. Considérez-vous la découverte abrupte, la révélation comme la vérité absolue ?
R. Pas nécessairement. La certitude, aussi forte soit-elle, n’est pas forcément la vérité, même si elle s’accompagne de phénomènes étranges qui s’apparentent à ce que communément l’on nomme « Révélation ». La révélation n’est pas, pour autant, un terrain vague, une certitude reçue à travers un voile, le donné abstrait à partir duquel on tirera des élucubrations plus ou moins confuses. Elle est, au contraire, parfaite et précise ; elle s’apparente totalement à la gnose, c’est vrai ; or la gnose, c’est le domaine de la certitude absolue, instantanée et totale, sinon celui de la vérité.
Q. Du reste, dès que l’on se situe à ce niveau de la perception spirituelle, le mot « vérité », tel qu’il est communément utilisé, ne veut plus rien dire. La révélation transmise à l’homme qui vit dans le temps, dans les dimensions de l’espace, se heurte évidemment à un mur, le mur du temps. La connaissance ou la certitude intemporelles sont récupérées par des êtres qui vivent dans le temps. Ce glissement de l’intemporel au temporel affaiblit sans doute la révélation, lui fait perdre cette force immédiate, totale, instantanée et infinie qu’elle possède en elle-même.
R. Vous avez raison. Mais c’est la force de la loi du progrès : la loi de l’homme. La loi étant historique, soumise à la succession du temps, nous n’avons pas la prétention de tout vivre, de tout assumer, de tout comprendre, même nos propres moments de certitude, de révélation. Nous vivons cependant à certains moments dans des rapports privilégiés avec l’étincelle éternelle, avec l’Un informel : c’est alors la réalisation de l’homme intérieur, l’homme intérieur qui est en assomption tout au long des siècles, une assomption qui trouve sa plénitude, sa pleine réalité à chaque instant éternel de la révélation.
***
MEDITATION POUR LES DERNIÈRES FOIS
Heureux celui qui sait ne pas donner de raisons vaniteuses à ses défaites. Et encore plus heureux celui qui sait qu’il n’est pas de défaites.
Partout où nous irons désormais nous porterons en nous ce monde horizontal. Il est celui des ténèbres extérieures.
Mais la grande nouveauté est celle-ci : Ce monde ne sera plus jamais trop grand pour nous, c’est nous qui sommes devenus trop grands pour lui. Jamais plus nous ne pourrons dire comme Moïse : Je verrai la terre promise et je mourrai.
Nous avons déjà vu toutes les terres promises et nous survivons.
Ce soir, je rêve d’Archimède, insensible au tumulte des guerres et traçant sur le sable, du bout de sa canne, les figures géométriques de son énigme intérieure, tandis que le soldat, irrité, l’interpelle et se prépare à le tuer. Nous sommes voués comme lui à une connaissance et une immobilité infinies. En elles se tiennent toute dévotion, tout amour, toute adoration, tout accomplissement, tout service.
Et même si le sens de ce dernier mot nous échappe car il englobe tous les sens, et si, plus encore qu’à nous, il échappe aux Barbares, que ces derniers au moins, quand ils viendront, nous trouvent d’abord attentifs à notre art.
Rien ne peut sauver les corps. Mais on peut rêver d’un regard si plein de connaissance humaine que les corps tout entiers se perdent dans ce regard. Un jour, en rencontrant les yeux de l’homme immobile, l’assassin le moins capable de retour sur soi saura que cet assassiné était plus grand que lui. Au cœur le plus sensible de l’Europe, à l’endroit d’où elle se croit le plus absente, s’accumulent ce comble de refus et ce comble d’attention qui, par la réversibilité mystérieuse du rachat, constituent au contraire sa vraie présence.
Le goût des formes et des bavardages, la hâte du présent et la déception du lendemain, les petits brigandages politiques, le cynisme sans risques, la vulgarité des riches et la soumission des pauvres, et, par-dessus tout, l’impuissante nostalgie d’une beauté qui se refuse et d’une vérité qui se perd, composent une sorte de cri profond qui monte des plaines d’Europe, mais qui stagne dessus comme un brouillard d’hiver.
Ce désordre est trop grand. Comment en démêler les fils ? On peut aujourd’hui donner une sorte de curiosité fraternelle à ceux qui veulent mettre de l’ordre dans ce qu’on appelle le monde, et qui se jettent dans la foule.
Mais il y a temps pour tout sous le soleil.
Aujourd’hui, ce n’est pas dans ce monde qu’il faut mettre de l’ordre, mais dans nos pensées. Nous avons fait dans le monde assez d’expériences, et ce n’est pas en vain que nous en avons traîné le poids si haut. Le monde est ici, pas ailleurs.
J’essaie d’imaginer ce que pourront être ces heures de la transfiguration, quand les guerriers se feront prêtres, et, n’ayant plus rien à défendre qui ne soit détruit, se découvriront les hommes les plus riches du monde.
Extrait de l’Assomption de l’Europe (Paris, Flammarion, 1953).
POUR MIEUX CONNAÎTRE RAYMOND ABELLIO
De son vrai nom Georges Soulès, Raymond Abellio est ne le 11 novembre 1907 d Toulouse.
De 1930 à 1932, il est élève de l’École des ponts et chaussées. Ingénieur enfin, il commence une carrière qui le conduit dans la Drôme. C’est là qu’il prend contact avec le monde politique. Des 1932, il est nommé secrétaire fédéral adjoint de la S.F.I.O. En 1935, il est un des dirigeants de la dissidence socialiste connue sous le nom de Gauche révolutionnaire. A Paris, en 1936, il entre au cabinet de Jules Much. A partir de 1937, il est un des dirigeants du Parti socialiste, tout en gardant très évidente son optique Gauche révolutionnaires, que développent encore ses études marxistes et trotskystes.
Au cours des combats de 1940, il est fait prisonnier à Calais et se retrouve, pour quelque temps, dans un camp d’internement en Allemagne. Cette triste période sera occupée par quantité de réflexions. Il se lie avec différents officiers cagoulards qui partagent la même captivité. Ses options politiques sont remises en cause. Le marxisme, qu’il considéra toujours comme valable du point de vue de l’analyse économique et comme philosophie réflexive, l’a déçu, au moment de la guerre d’Espagne et du pacte Staline-Laval.
Pendant la guerre
En 1941, il est libéré et rentre en France. Il s’inscrit au Mouvement social révolutionnaire de Deloncle, dont il devient l’adjoint. Les rapports avec l’occupant restent tendus, malgré l’apparente reconnaissance du Mouvement social révolutionnaire par le nazisme.
L’année suivante, en 1942, un fait va déterminer le cours de l’évolution intellectuelle de Georges Soulès : sa rencontre avec Pierre de Combas. Ce dernier a une connaissance remarquable des grandes philosophies et doctrines traditionnelles, du judaïsme à l’hindouisme. Il a étudié les mouvements occultes et ésotériques occidentaux par ailleurs, il possède une excellente documentation sur les différents mystiques.
C’est Pierre de Combas qui, notamment, déterminera son évolution critique en face de la pensée de René Guénon.
La découverte de Husserl
Georges Soulès est bien à la recherche de tout autre chose. Son but : découvrir le véritable cheminement qui irait de la Tradition jusqu’à l’exploitation de toutes les ouvertures scientifiques offertes par le monde moderne. C’est dans ce sens, la découverte de Husserl et de la phénoménologie, découverte qui restera un des premiers événements de sa vie spéculative. La tradition hébraïque lui apporte, avec la Kabbale, les éléments du savoir religieux initiatique, tandis que la phénoménologie lui permet d’acquérir une méthode prospective et une charpente méthodique qui manquent aux traditions étudiées comme telles.
Dès cette époque sont en gestation les thèmes fondamentaux qui formeront la trame philosophique de ses livres. Selon lui, le politicien moderne est loin de représenter une vision réelle de ce que devrait être la politique authentique. Celle-ci serait, selon Soulès, appuyée à la fois sur un organisme de sociétés secrètes recelant des connaissances traditionnelles et sur un développement scientifique des facultés métapsychiques, afin d’influer, sans autres moyens que la réalisation mentale, sur les foules. La géopolitique occupe également une place dans la construction de son système. Les différents États, les continents eux-mêmes sont, certes, des réalités évidentes. Mais celles-ci ne sont quand même que les jouets de forces cosmiques et telluriques dont une plus exacte connaissance serait indispensable, afin d’accéder à la parfaite réalisation d’un pouvoir à la fois occulte et politique.
Après la guerre
En 1944, sa position devient de plus en plus difficile. Bientôt, on le recherche, et il doit se cacher.
En 1945, ce sont les gaullistes qui, à leur tour, le poursuivent. Commence alors pour lui une vie de traqué et de vagabond. Enfin, il quitte la France A la fin de février 1947. La Suisse sera son lieu d’exil jusqu’en 1951, époque à laquelle, à la suite d’un non-lieu, il rentre à Paris.
Ses années de fuite et d’exil furent les plus fructueuses, spirituellement. Sa vision du monde atteint un aspect prophétique. En 1946, il fait paraître, sous le pseudonyme d’Abellio, son premier livre. C’est un roman, Heureux les pacifiques, qui sera suivi de Les yeux d’Ezéchiel sont ouverts ; enfin, beaucoup plus tard, de la Fosse de Babel. Ces trois livres forment une trilogie romanesque sur laquelle il fonde la partie la plus publique de son œuvre. Parallèlement, il développera des recherches, avec la Bible, document chiffré, Vers un nouveau prophétisme, Assomption de l’Europe et la Structure absolue (1965).
Ce dernier ouvrage, véritable somme philosophique, est une recherche fondée sur l’ésotérisme et la phénoménologie afin de cerner la clé universelle de l’être et du devenir, des situations et des mutations.
Le monde futur
Vers un nouveau prophétisme est un « essai sur le rôle du sacré et la situation de Lucifer dans le monde moderne ». L’Occident — et l’Europe en particulier — n’a pas terminé son rôle sur la grande scène de l’Histoire. L’ultime Occident est à naître, « quand les guerriers se feront prêtres et, n’ayant plus rien à défendre qui ne soit détruit, se découvriront les hommes les plus riches du monde » (Abellio, Assomption de l’Europe).
Abellio reconnaît que nous vivons la fin d’un cycle, les dernières saccades de l’agonie. Mais cette agonie est à la mesure de notre formidable destin luciférien. L’Europe accède à son assomption et le monde entier se développe et vit et meurt selon nos concepts, nos religions, nos hérésies et nos systèmes politiques.
Une situation retient tout particulièrement son attention : celle de la Chine, Abellio ne cache pas un certain pessimisme qui s’accompagne de visions apocalyptiques dans la Fosse de Babel.
OEUVRES DE RAYMOND ABELLIO
Aux éditions Flammarion :
« Heureux les. Pacifiques », roman
« Assomption de l’Europe », essai
« La fin de l’ésotérisme », essai
Aux éditions Gallimard :
« Les yeux d’Ezéchiel sont ouverts », roman
« Vers un nouveau prophétisme », essai
« La Bible, document chiffré », 2 vol., essai
« La fosse de Babel », roman
« La structure absolue », essai
« Ma dernière mémoire », récit, le tome I est, jusqu’à présent, seul paru
« Un faubourg de Toulouse »
Dans une âme et un corps », Journal de l’année 1971
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L’Europe transfigurée de Raymond Abellio
L’Europe transfigurée de Raymond Abellio
par Daniel COLOGNE
En 1978, l’éditorialiste du Figaro-Magazine constate la désuétude du clivage idéologique Droite-Gauche. Louis Pauwels appelle de ses vœux une « redistribution des cartes », une recomposition des familles de pensée selon des critères « métapolitiques ». Un de ces critères est la vision de l’histoire.
La même année, dans le sillage de son exact contemporain Mircea Eliade (1907 – 1986), Georges Soulès alias Raymond Abellio (1) observe que « les anciennes conceptions linéaires et progressistes de l’histoire font place à des conceptions cycliques » (2).
La représentation circulaire du mouvement historique se réfère à la géométrie plane. Du point de vue de la géométrie dans l’espace, c’est en toute rigueur la « sphéricité » qu’il convient d’opposer à la « linéarité » (p. 64).
Dans la vision abellienne de l’écoulement du devenir s’enchevêtrent deux spirales, l’une montante, l’autre descendante : « la double torsion du temps » (p. 342).
La spirale ascendante se caractérise par un passage de l’ampleur à l’intensité. L’intensification est synonyme de transfiguration. Elle est notamment illustrée, au VIe siècle av. J.C., par le prophétisme juif, auquel la « Latinité » sert de relais ultérieur. Abellio désigne les Latins comme les « successeurs des Juifs à l’extrême pointe de la fonction d’analyse » (p. 105), tout en plongeant les racines de sa réflexion philosophique dans le riche terreau de la pensée germanique : Maître Eckhart, Spinoza, Nietzsche, Husserl (3).
La « Latinité de Marie » (p. 340) appelle quelques réserves, même si les hauts lieux de culte de la Vierge s’échelonnent de Fatima à Banneux en passant par Lourdes et de Garabandal à Beauraing en passant par San Damiano. Il ne faut pas oublier Medzugorje ni Chestokowa, ni surtout l’importance de la mariologie dans toute l’Église orthodoxe d’Europe orientale.
On peut aussi regretter l’inachèvement d’une cyclologie sacramentale limitée au baptême et à la communion. Abellio allèche le lecteur en prétendant « fonder une symbolique historique des sacrements » (p. 13), mais elle reste malheureusement à l’état d’esquisse. Elle ouvre pourtant d’intéressantes perspectives. La décadence d’une civilisation pourrait correspondre au sacrement de l’extrême-onction, l’apogée de sa caste sacerdotale à celui de l’ordination.
Un ouvrage d’une rare densité
Assomption de l’Europe renferme 352 pages d’une rare densité. Un quart de siècle sépare la première mouture de la seconde édition. Celle-ci ne comporte cependant qu’onze notes infra-paginales. Il y est peu question de l’Islam, dont le réveil sonne un an plus tard avec la révolution iranienne (1979). Il était difficile à l’auteur de prévoir la décomposition du marxisme, dont il proclame la « perpétuité » (p. 261), la chute du Mur de Berlin et la réunification de l’Allemagne. Aussi cette dernière est-elle jugée politiquement « morte » (p. 7), au mieux « épuisée » (p. 9).
Plus clairvoyante s’avère la critique abellienne de l’américanisme et du soviétisme. L’un et l’autre sont renvoyés dos à dos comme de pitoyables dérives de théories économiques initialement européennes. L’Europe exporte vers l’Est « le socialisme libertaire et égalitaire » (p. 171) qui se « dénature » en « communisme dictatorial et niveleur » (p. 172). Elle propage vers l’Ouest « le capitalisme libéral et hiérarchisant » (p. 171) qui dévie « en productivisme monopoliste et planifié » (p. 172).
« Aux limites extrêmes de l’Ouest et de l’Est », Raymond Abellio discerne des « lieux d’évasion » (p. 187). La Californie et le Tibet sont comme des digues où « la vague d’activisme venue d’Europe » atteint son « maximum d’ampleur » (p. 145), se brise et épouse in fine un mouvement de « reflux » : le New Age et les révoltes étudiantes des années 60. Le Mai 68 de Paris est précédé par la contestation universitaire de Berkeley (1964). L’Europe tombe sous le charme d’un courant où se mêlent l’apologie de l’élan vital et l’éloge du lamaïsme d’Extrême-Asie (Ibid., note infra-paginale).
Mais remontons avec l’auteur à l’une des principales sources de « l’activisme européen » : la conquista des Amériques du Sud et centrale. Elle a vidé ces régions « de toute sève et de toute richesse pour en gorger l’Europe du moment, en sorte que les nations ibériques faillirent en mourir de pléthore et de paresse et furent même de ce fait écartées pour longtemps de l’activisme européen » (p. 233). A présent mûre pour un « futur engrossement » (p. 234), disponible pour accueillir une « migration du germe occidental » (p. 230), l’Amérique dite « latine » peut former avec l’Europe un des grands axes géopolitiques de demain, une sorte d’empire transocéanique reposant sur une puissante symbolique.
La direction Sud-Ouest correspond en effet à des moments clefs du cycle annuel et du cycle journalier. « Trois heures de l’après-midi », moment présumé de la Crucifixion de Jésus, « indique exactement l’heure du Sud-Ouest » (p. 232). Au cœur de l’été de l’hémisphère Nord, à mi-chemin entre le solstice de juin (Sud) et l’équinoxe de septembre (Ouest), dans le signe de feu du Lion que la tradition astrologique tient pour le domicile du Soleil, le calendrier festif catholique situe la Transfiguration (6 août) et l’Assomption (15 août). C’est un 6 août qu’explose la bombe atomique sur Hiroshima. L’humanité reçoit alors un « sacrement de sang » (p. 197).
Le destin spirituel de l’Europe
Dans ce genre d’évocation, l’écriture d’Abellio est saisie d’un lyrisme somptueux. « J’essaie d’imaginer ce que pourront être ces heures de la transfiguration, quand les guerriers se feront prêtres, et, n’ayant plus rien à défendre qui ne soit détruit, se découvriront les hommes les plus riches du monde » (p. 348, c’est nous qui soulignons).
Les Européens sont « des hommes qu’un siècle et demi de guerres a rejetés d’une aventure géante et pathétique » (p. 10). Quel destin leur convient-il ? Certes pas celui de « confédérés juridiques, bâtards de l’histoire » (Ibid.). Encore moins celui d’un pseudo-redressement qui se réduirait « à la réorganisation d’une maison de commerce mal tenue » (p. 11). Même « de l’Europe politique, il nous faut sortir » (p. 12), si la politique n’est plus que « dévergondage sentimental » de « boutiquiers » accoudés à leur « comptoir de chimères et de prébendes » (p. 11).
L’État de droit et l’économie de marché ne sont certes pas les apsides de « l’axe du bien », pour reprendre le sous-titre d’un livre récent. Une « politique de puissance » est-elle pour autant une judicieuse alternative ? L’auteur de cet ouvrage pense que non et estime opportun de rappeler que, pour l’Europe, « prendre conscience de son rôle sur la scène internationale » ne sera jamais « synonyme de projection de force ». L’actuelle Union européenne « a été fondée pour surmonter le jeu désastreux des politiques de puissance des États-nations. Elle ne pourrait donc pas, sans préjudice pour sa propre intégrité et pour la paix, mener à l’extérieur une politique contraire à sa nature même » (4).
La « nature » de l’Europe n’est ni marchande ni guerrière. L’Europe porte en elle le germe d’une révolution spirituelle, à condition de ne pas confondre la spiritualité avec le religieux ou le sacré. La nouvelle prêtrise évoquée par Abellio n’est pas un clergé de type médiéval ou une caste chamanique de mages ensorceleurs. C’est une aristocratie de savants dont la « longue mémoire » garantit la maîtrise de l’avenir, pour paraphraser Nietzsche. C’est une élite analogue à ces cosmographes chaldéens qui prétendaient détenir « des archives astrales s’étendant sur les 300.000 années écoulées » (p. 293).
L’Occident, devenir de l’Europe
Raymond Abellio nomme « Occident » ce germe spirituel enfermé au cœur de l’Europe. Dans l’acception abellienne du terme, l’Occident n’est donc nullement l’ensemble transatlantique euraméricain. Il ne s’identifie pas davantage à des États-Unis imbus de leur cocktail mercantiliste-belliciste, dont l’Europe devrait se distancier au nom du droit international ou de la primauté du spirituel. Pour Abellio, l’Europe doit devenir Occident pour se transfigurer. L’Occident, c’est l’Europe sublimée.
L’auteur d’Assomption de l’Europe avertit d’emblée : « Nous distinguerons fondamentalement l’Europe et l’Occident » (p. 29). Il confirme un peu plus loin : « L’Europe vit en mode d’ampleur, l’Occident en mode d’intensité » (p. 32). « Soumise au temps, c’est-à-dire à l’histoire », paraissant « fixe dans l’espace, c’est-à-dire dans la géographie » : telle est l’Europe. En revanche, l’Occident échappe au temps et à l’espace, il est méta-historique et méta-géographique, il est « mobile » et il « déplace son épicentre terrestre selon le mouvement d’avant-gardes civilisées » (p. 33). « Un jour l’Europe sera effacée des cartes, l’Occident vivra toujours » (Ibid.).
De préférence aux vocables « Orient » et « Occident » les dénominations « Est » et « Ouest » sont réservées au bloc communiste et aux États-Unis. Se référant aux travaux de l’astrologue André Barbault (5), Raymond Abellio écrit que « le couple Est-Ouest des U.S.A. et de Russie apparaît comme livré à la dialectique Uranus-Neptune » (p. 195). Certes, « les astrologues rattachent symboliquement Uranus aux U.S.A. » (Ibid., note infra-paginale) et à l’individualisme. Dans leur esprit, Uranus – « je cultive ma différence » – s’oppose à Neptune – « j’approfondis ma communion ». Pourtant, « ce fut toujours l’Est, le premier levé, qui défendit son originalité contre l’Ouest par des murailles de Chine ou des rideaux de fer » (p. 128). Derrière cette apparente contradiction se cache le secret de la « structure absolue » et une des clefs de la vision abellienne de l’histoire.
La « structure absolue » est l’inversion d’inversion en tant que processus intensificateur. Les valeurs symboliques des découvertes d’Uranus (1781) et de Neptune (1846) résident dans leur respective coïncidence avec les révolutions libérales bourgeoises et l’éclosion des mouvements ouvriers. Invertissant l’Ancien Régime, l’individualisme uranien est à son tour inverti par le collectivisme neptunien. Mais ce dernier intensifie le facteur Uranus sous la forme du culte de la personnalité propre à tous les régimes totalitaires : Führer, « père des peuples », « grand timonier », autant de variétés de l’archétype du « chef oriental » (p. 154).
Le collectivisme neptunien englobe une part d’Uranus (le culte du chef) tout comme l’aspiration uranienne « à commencer orgueilleusement l’avenir sans passé » (p. 121) renferme une part de Neptune (dieu des océans), qui réside peut-être dans l’utopisme démocratique des thalassocraties de l’Ouest. A l’opposé de celui-ci, l’Est « n’aspire qu’à recommencer vainement le passé sans avenir » (Ibid.). Le « fatalisme » de l’Est entre ainsi en rapport dialectique avec l’« optimisme » de l’Ouest. L’optimisme de l’Ouest n’est toutefois que « méconnaissance de sa folie ». Chaque principe porte en lui son contraire, à la manière du vieux symbole chinois de la non-dualité où la moitié blanche du yang entoure un petit point noir et la moitié noire du yin un petit point blanc.
Décadence de l’astrologie
Raymond Abellio ne se fait aucune illusion quant à l’astrologie « banale » et « vulgaire » (p. 292), dont il stigmatise « la diffusion croissante et charlatanesque » (p. 293). Mais il n’est guère plus complaisant envers les « savants profanes » aux « conceptions causalistes » qui, ignorant « l’implication indéfinie des corrélations » (p. 193), isolent le drame humain du drame cosmique, avec lequel il est pourtant en constante interaction. Depuis l’édit de Colbert (1666) et le Diktat de Marie-Thérèse d’Autriche (1756) expulsant l’astrologie des universités européennes, il ne subsiste plus, de l’antique art de la Muse Uranie, qu’une dérisoire parodie (contre-tradition) tout aussi ridiculement vilipendée par une « science moderne » (anti-tradition) limitée « depuis trois siècles » à une « quantification des faits » (p. 59). Rejoignant le diagnostic de René Guénon (1886-1951), Raymond Abellio condamne les « sciences européennes en crise » à « l’apprentissage sans fin de la multiplicité » (p. 31). Il place dans l’Europe transfigurée, qu’il nomme « Occident », l’espoir de « l’expérience unique de l’infinité » (Ibid., c’est nous qui soulignons).
L’Europe transfigurée en Occident suppose une révolution au niveau de la vision du monde. À « la durée linéaire et univoque des causes et des fins particulières » doit se substituer « la permanence sphérique d’une interaction globale dépourvue de cause et de fin » (p. 31). Ainsi tout « problème géopolitique » devient « un problème des hauteurs célestes » (p. 192).
Mais ailleurs, Raymond Abellio confesse que « jamais les situations célestes ne sont répétitives » (p. 62). Chassée par le grand portail du palais de la pensée, la « ligne du temps » rentre subrepticement par la porte de service, et l’on comprend pourquoi elle hante l’inspiration des Prix Nobel (Ilya Prigogine) et des académiciens (Jean d’Ormesson). La vision abellienne du monde est in fine non-dualiste. Elle illustre le propos de Leibniz, cité par René Guénon (6) : « Tout système est vrai en ce qu’il affirme et faux en ce qu’il nie ». Ainsi se résume peut-être l’essence de l’esprit européen.
Daniel Cologne
Notes
1 : Né à Toulouse en 1907, mort à Nice en 1986, Raymond Abellio est principalement connu pour son essai La Structure absolue, Paris, Gallimard, 1965.
2 : Assomption de l’Europe, Paris, Flammarion, 1978, p. 176. Toutes les citations suivies d’un numéro de page sont extraites de ce livre.
3 : Le Je transcendantal d’Edmund Husserl (1859-1938) est l’exemple – type d’intensification abellienne par rapport au Moi ordinaire.
4 : Louis Michel, Horizons. L’axe du bien, Bruxelles, Éditions Luc Pire, 2004, p. 72.
5 : André Barbault (né en 1920) a publié récemment un ouvrage de synthèse : Introduction à l’astrologie mondiale, Monaco, Éditions du Rocher, 2004.
6 : Le Règne de la Quantité et les Signes des Temps, Paris, Gallimard, 1970.
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Il Dio di Ezra Pound
di Luca Leonello Rimbotti
Fonte: mirorenzaglia [scheda fonte]
Il contraltare di Evola, dal punto di vista di una lettura “pagana” del Fascismo, fu certamente Ezra Pound. Se il primo del regime mussoliniano intese fare un risultato moderno delle virtù guerriere ario-romane, un’epifania della potenza, il secondo ne scorse i connotati di religione agreste, la cui continuità sarebbe stata garantita – più che non ostacolata – da forme di cristianesimo non dogmatiche, legate alle credenze arcaiche relative alla sacralità della terra. Se Evola vide nel movimento dei fasci una rinascenza del fato di gloria, qualcosa dunque di “uranico”, Pound rimase colpito invece dalla natura tellurica, diremmo quasi Blut-und-Boden, del comunitarismo fascista del suolo e del seme. Il significato è comunque, nei due casi, quello di una continuità ininterrotta, ben rappresentata dal particolare tipo di imperialismo veicolato dal Fascismo, tutto incentrato sull’idea di redenzione del suolo, di lavoro dei campi, di civilizzazione attraverso la coltivazione e la valorizzazione della terra.
Ezra Pound è stato probabilmente il maggiore e più profondo cesellatore del ruralismo fascista, che giudicò elemento direttamente proveniente dagli arcaici riti latini legati alla fertilità e ai cicli di natura. La “battaglia del grano”, l’impresa delle bonifiche, la celebrazione del pane quale simbolo di vita santificato dalla fatica quotidiana, non sarebbero stati, per il poeta americano, che altrettanti momenti in cui gli antichi misteri pagani tornavano a parlare al popolo, e sotto la sollecitazione ideologica di un regime che fu allo stesso tempo quanto mai attento alla modernità. E che registrò il passaggio dell’Italia a nazione più industriale che agricola, con un numero di operai che per la prima volta nel 1937 superò quello dei contadini.
Questo doppio registro, tipico del Fascismo, di portare avanti insieme i due comparti, senza deprimerne uno a vantaggio dell’altro, questa simmetrica capacità di operare lo sviluppo industriale e quello agricolo, iniettando la modernizzazione nelle tecniche di coltura ma rinforzando l’attaccamento atavico al suolo, fu la formula adottata da Mussolini per promuovere il progresso senza intaccare – ma anzi rinsaldandolo – il patrimonio immaginale legato alla terra, e per di più abbinandolo ad un reale incremento della capacità produttiva, affidata alla scelta autarchica. Della terra, con costante perseveranza, si celebrò la sacralità, facendo del suolo patrio, quello da cui il popolo ricava la fonte di vita, una vera e propria religione di massa. Questa religione popolare fascista, riscoperta intatta dall’antichità e dotata di moderne applicazioni anti-utilitariste ed anti-speculative, ebbe in Pound un cantore geniale.
La recente uscita del libro di Andrea Colombo Il Dio di Ezra Pound. Cattolicesimo e religioni del mistero (Edizioni Ares) ce ne fornisce un nuovo attestato. In questo agile ma importante lavoro noi riscopriamo tutta la profondità di una concezione del mondo incentrata su ciò che Pound definitiva “economia sacra”. Come già fatto da Caterina Ricciardi nel 1991, nella sua antologia di scritti giornalistici di Pound, anche Colombo sottolinea questa impostazione del poeta che, forte della sua recisa ostilità al mondo liberista del profitto finanziario e nemico giurato dell’usura, vide nella sana e naturale economia fascista un preciso riverbero di ancestrali tendenze sacrali. In una serie di articoli pubblicati sul settimanale “Il Meridiano di Roma” fra il 1939 e il 1943, Pound andò indagando le origini italiche, perlustrandone la vena religiosa relativa ai misteri e ai riti di fertilità. In tal modo, «Roma è Venere, l’antica dea dell’amore che ritorna a restituire il sogno pagano agli uomini», realizzando il contatto vivente fra l’antichità e il presente moderno: «E Mussolini, il Duce della bonifica e della battaglia del grano, diventa per il poeta il riesumatore dell’antica cultura agraria, la religione fondata sul mistero sacro del grano, mistero di fertilità».
Entro questi grandi spazi ideologici di rinascita moderna delle logiche arcaiche, Pound ingaggiò la sua personale lotta contro quel mondo di speculatori, affaristi privi di scrupoli e autentici criminali da lui individuato nei governanti angloamericani, che in nome dell’usura finanziaria e dell’idolatria dell’oro non avevano esitato a scatenare contro i popoli a economia organica la più distruttiva delle guerre. Proveniente per nascita egli stesso dal pericoloso milieu presbiteriano, come Colombo ricorda, Pound ben presto se ne distaccò, avvicinandosi ad una interpretazione del cristianesimo come continuità pagana sotto specie devozionale ai santi locali, alle varie Madonne, alle processioni popolari d’impronta rurale. Convinto – e a ragione – di una netta presenza neoplatonica nella stessa teologia cattolica, Pound finì col considerare la religione di Cristo come una forma neopagana di accettazione del mistero della vita. Egli contestava alla radice la filiazione del cristianesimo dall’ebraismo, affermando che invece ciò che si doveva stabilirne era la continuità con l’ellenismo e con il politeismo in auge nell’Impero romano, al cui interno il cristianesimo poté inserirsi senza traumi particolari, in virtù della sua sostanza di religione dapprima solare, erede del mitraismo, poi anche tellurica, erede delle venerande liturgie agresti.
Pound conobbe gli scritti di Frazer e di Zielinski, allora famosi, ma noi possiamo aggiungere che questa lettura poundiana, tutt’altro che peregrina, ha trovato conferma in molti studiosi di religione anche molto importanti, da Cumont a Wind, da Seznec fino a Wartburg: il cristianesimo, ed ivi compreso talora anche il papato, veicolavano sostanziose dosi di neoplatonismo pagano. L’interesse di Pound per figure come Gemisto Pletone o Sigismondo Malatesta – esemplari del neopaganesimo rinascimentale – furono il lato filosofico di un mondo ammirato profondamente da Pound, quello dell’etica economica medievale e proto-moderna, coi suoi fustigatori dell’interesse e della speculazione: un San Bernardino, ad esempio, che combatté tutta la vita l’usura, in forme anche violente e non meno anticipatrici di certi argomenti moderni.
Pound nel paganesimo, e di nuovo nel cristianesimo francescano (notoriamente di ispirazione neoplatonica), vide l’antefatto di quella guerra aperta alla schiavitù dell’interesse che solo con il Fascismo, e con la sua ideologia corporativa del “giusto prezzo”, divenne movimento mondiale di lotta al disumano profitto liberista. Il prezzo della merce, quando stabilito dalla mano pubblica, dà garanzie di giustizia, è regolato dal potere politico, ha veste legale, è insomma pretium justum; quando invece è affidato al gioco incontrollato degli interessi privati, come accade nelle economie liberiste, fornisce l’evidenza di una guerra belluina fra speculatori, a tutto danno del popolo e del suo lavoro.
Questi concetti Pound li martellò in scritti e discorsi alla radio italiana durante la guerra, e sono massicciamente presenti anche nei Cantos. E questo gli costò, come noto, l’infamia della gabbia e del manicomio, cui lo destinarono i “democratici” vincitori. Questa di Pound fu una battaglia a difesa del lavoro onesto contro la bolgia degli speculatori. A difesa della sacralità dell’economia – che è lavoro del popolo – e contro quanti al denaro attribuiscono un demoniaco potere assoluto.
Pound era in prima fila, non faceva l’intellettuale ben ripagato e ben protetto, magari pronto a cambiare bandiera al primo vento contrario. Propagandava idee, lanciava fulmini e saette contro l’ingiustizia sociale e la speculazione, come un moderno Bernardino da Feltre ci metteva la faccia del predicatore intransigente e la parola infiammata del profeta che vede prossimo l’abisso. La sua condanna dell’usura e dell’usuraio ebbe aspetti di radicalismo medievale in piena guerra mondiale.
Quest’uomo vero fu pronto a pagare di persona, senza mai rinnegare una sola parola. Si esponeva senza remore. E parlava chiaro e forte. Come ad esempio in quella lettera – riportata da Colombo – indirizzata a don Calcagno (il sacerdote eresiarca fondatore di “Crociata Italica” durante la RSI e vicino a Farinacci) nell’ottobre 1944, in cui si scagliò contro la doppiezza vaticana di Pio XII: «Credete che un figlio d’usuraio, venduto e stipendiato, o indebitato agli ebrei sia la persona più adatta a “portare le anime a Cristo”? La Chiesa una volta condannava l’usura».
Ezra Pound non era un sognatore fuori dal mondo, e nemmeno un visionario ingenuo, come hanno cercato di farlo passare certi suoi non richiesti ammiratori antifascisti. Era un perfetto lettore della realtà e un geniale interprete dell’epoca in cui visse. Ebbe chiarissima davanti a sé l’entità della prova che si stava svolgendo con la Seconda guerra mondiale. Comprese come pochi che quella era la lotta decisiva fra l’usuraio e il contadino, e che difficilmente per il vinto ci sarebbe stata una rivincita. Quando la guerra piegò verso il trionfo degli usurai – allorché, come scrisse, «i fasci del littore sono spezzati» – partecipò fino in fondo all’esperienza tragica della Repubblica Sociale, consapevole di vivere, come dice Colombo, «l’età apocalittica della fine».
L’uomo europeo deve molto a Pound. Gli deve una grande passione ideale e una formidabile attrezzatura ideologica, che è grande poesia e a volte anche grande prosa. Proprio mentre l’usura universale sta facendo a pezzi un popolo dietro l’altro, proprio mentre infuria la volontà di scannare i popoli per arricchire piccole oligarchie di speculatori apolidi, quella di Pound appare come una gigantesca opera di profezia e di riscatto.
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jeudi, 13 octobre 2011
Pericles & the Athenian Ideal
Pericles & the Athenian Ideal
By Troy Southgate
Ex: http://www.toqonline.com/
There is already much discussion in our circles about the example of Sparta, not least as a result of the recent Hollywood blockbuster 300 [1] which was rather loosely based on the exploits of King Leonidas, but in this article I intend to examine Sparta’s chief rival Athens.
The Athenian statesman, Pericles (495 – 429 BCE) once claimed that his city was an educational role model for the whole of Greece, but how far was this really true?
Pericles’ boast is part of his funeral oration recorded by Thucydides (460 – 395 BCE) in his The Peloponnesian War [2]. The aim of Pericles’ oration is to establish that Athens was a society worth dying for. Thus the speech is designed to exploit in his listeners deep-seated feelings of local pride and identity, inviting them to recall the glory of Athenian growth and prosperity. His verbal tapestry begins by lauding Athenian ancestry, emphasizing the fact that the people’s “courage and virtues have handed on to us, a free country.”
He mentions “the constitution and the way of life that has made us great” and points to certain social improvements such as power being democratically channeled into the hands “of the whole people,” the fairness and “equality before the law” and the fact that, in terms of social classification, status is not determined by “membership of a particular class, but the actual ability which the man possesses.” Pericles was also careful to mention the prevailing moral ethos which underpinned fifth-century Athenian society, that of sovereign, “unwritten laws which it is an acknowledged shame to break.”
Then Pericles lists what he considered to be the noblest attributes of his native city, with particular reference to the cultural activities that provided “recreation for our spirits.” This tactic was designed to pave the way for a contrasting description of the traditional enemy, Sparta.
Pericles then polemically denounced Spartan militarism and the rigorous training to which it “submitted” its youth, lauding the Athenian educational system by contrast. He also praised Athens for apparently maintaining a confident superiority above and beyond all other Greek states, emphasizing the importance of thought before action.
When Pericles finally describes Athens as “an education to Greece,” he explains precisely why he considers this to be the case. Athens stands for the freedom of the citizen, who is “rightful lord and owner of his own person.” Because of its constitution, Athens has waxed powerful: “Athens, alone of the states we know, comes to her testing time in a greatness that surpasses what was imagined of her . . . future ages will wonder at us, as the present age wonders at us now.” But with greatness comes peril: “it is clear that for us there is more at stake than there is for others who lack our advantages.”
Pericles then offers an inspiring account of the necessity of personal sacrifice. The slain warriors, in whose honor the funeral had been held, were depicted as heroes who had lain down their very lives for the continuation of Athenian culture, heritage and tradition, itself “a risk most glorious.” Pericles then challenges the living to emulate the honored dead, making “up your minds that happiness depends on being free, and freedom depends on being courageous . . . for men to end their lives with honor, as these have done, and for you honorably to lament them: their life was set to a measure where death and happiness went hand in hand.”
But can Athens really can be considered to have been a role model for the whole of Greece, or was Pericles merely deluding himself and his contemporaries? Let us examine the historical record.
Pericles is renowned for the prominent role he played in the democratization of the Athenian political system, which itself had “been fixed by Cleisthenes (570 – 507 BCE) and further reformed after the battle of Marathon” (J. B. Bury, A History of Greece to the Death of Alexander the Great [3] [Macmillan, 1951], 346).
After overthrowing Thucydides and assuming the leadership of the people, Pericles and Ethialtes (d. 461 BCE) set about reducing the power of the judiciary in the Areopagus. At this time, the archons or chief magistrates were appointed by lot, but only from a select number of pre-elected candidates. Pericles abolished this system with the result that the archons themselves became “appointed by lot from all the eligible citizens [who now] had an equal chance of holding political office, and taking part in the conduct of political affairs” (Bury, 349). This system was also extended to the Boule, or Council of the Five Hundred.
In addition, Pericles effectively dismantled the hereditary powers of the traditionally oligarchic Areopagus completely, restricting its activities in order to redefine its role as little more than a “supreme court for charges of murder” (A. R. Burn, Pericles and Athens [4] [English Universities Press, 1964], 46). In 462 BCE, Pericles also initiated a scheme whereby jurors and those holding offices of state received payment for their services to the city, “a feature which naturally won him popularity with the masses” (Bury, 349).
This very popularity, in fact, had been deliberately engineered by Pericles himself in order to counteract the large support that Cimon (510 – 450 BCE), an accomplished naval hero, was able to command from the Athenian nobility. Although Pericles was himself an aristocrat, he “decided to attach himself to the people’s party and to take up the cause of the poor and the many instead of that of the rich and the few, in spite of the fact that this was quite contrary to his own temperament”(Plutarch, The Rise and Fall of Athens: Nine Greek Lives [5] [Penguin, 1960], 171).
Indeed, Thucydides attacked Periclean reforms and labeled them “democracy in name, but in practice government by the first citizen” (Plutarch, 173). So what began as Greek democracy under Cleisthenes around 500 BCE had become a dictatorship under Pericles by 430 BCE.
Despite all the speculation surrounding Pericles motives for initiating democratic reforms, in terms of her constitution and statecraft Athens undoubtedly stood far ahead of her rivals.
One measure of the seriousness of Athenian democratization was the introduction of new political technologies, such as allotment-machines, water-clocks, juror’s ballots, and juror’s tickets.
Another sign of Athenian political acumen is the transfer of the headquarters and treasure of the Delian league from Delos to Athens in 454 BCE. The Delian League was a crucial alliance of 150 Greek city-states established prior to the Peloponnesian wars to defend Hellas from the Persians. The transfer of its headquarters to Athens gave the Athenians enormous political and economic influence over the member states.
Sparta had an entirely different political structure. In Bury’s words, Sparta was imbued with a “conservative spirit.” The Spartan constitution, unlike its continually revised and reformed counterpart in Athens, had remained virtually the same since its inception.
Sparta had a mixed constitution with monarchical, aristocratic, and democratic elements. Sparta was ruled nominally by kings, an order going back to the times of Homer. The aristocratic element was the Council of Elders, or Gerusia, which consisted of thirty men who were elected for life and chosen by acclamation in the general assembly of citizens. Membership was described as a prize for virtue. However, the Spartan Assembly of the People, or Apella, contained only males over thirty years of age who decided matters of state purely on the basis of a particular speaker receiving the loudest cheers from those in attendance. Theoretically, the Spartan constitution was democratic, but if the elders and magistrates did not approve of the decision of the majority, they could annul the proceedings by refusing to proclaim the decision.
The Athenians were always very keen to stress the political differences between themselves and their Peloponnesian rivals. Many island states — often artificially created by colonial means — usually followed the example of Athens rather than Sparta. Athenian democracy, unlike the American variety, was not spread around the world at gunpoint. Instead, the states that adopted the Athenian system seemed genuinely inspired by her example.
Sparta, on the other hand, had few imitators, and the states that did resemble Sparta did not appear to imitate her. So as far as Athenian politics was concerned, at least, Pericles was right to claim that Athens was the educator of Greece.
Athens was an example to Greece in politics. But what about the economic and cultural realms?
According to Plutarch, Athens became fantastically wealthy after Themistocles (524 – 459 BCE) had directed the revenue of the city’s lucrative silver mines at Laurium towards the construction of a strong navy, including a new fleet of triremes, which made possible the reconquest of Athens after its inhabitants had been forced to flee from the invading Persians.
When Athens became host to the treasury of the Delian League in 454 BCE, Pericles used its funds for the rebuilding of Athenian temples, claiming they had been destroyed by the Persians in the common cause of Greece, thus it was appropriate that they be rebuilt from the common funds.
In 449 BCE, a pan-Hellenic Congress was proposed to raise funds for further projects. This plan met with fierce opposition from Thucydides among others. According to Plutarch, Pericles answered his critics by declaring that “the Athenians were not obliged to give the allies an account of how their money was spent, provided that they carried on the war for them and kept the Persians away.” Pericles had effectively plundered the common treasure of Greece and turned it into the adornment of Athens.
Athenian trade also began to flourish during the rule of Pericles, and Themistocles’ fortification of the Piraeus made Athens one of the greatest ports in Greece. The decline of merchant cities in Ionia also contributed greatly to the Athenian economy.
But the most striking developments in fifth-century Athens took place in the cultural sphere.
Although Greek philosophy began in Ionia, it flourished in Athens. Because of her wealth, political power, and cultural refinement, she attracted the best minds from all over Greece. The Sophists, in particular, contributed much to the development of political theory, rhetoric, and logic and stimulated the thought of Athens’ native geniuses Socrates and Plato.
Athens is also renowned for her great architecture, a matter in which Pericles himself played a prominent role. Pericles enlisted Pheidias (480 – 430 BCE) to be the director of his building program, assisted by such skilled architects as Callicrates, Ictinus, Coroebus, and Metagenes. Among their projects were the Parthenon, the Temple of Athena, the adornment of the Acropolis, the Odeon, the Concert Hall, and the temples of Eleusis and Hephaistos.
When Pericles was attacked for his lavish use of public funds, he offered to pay for the construction work himself, if he could take all the glory. This did the trick. Even Pericles’ most zealous critics wished to share in his renown, so they insisted that he complete the buildings at public expense.
Pericles’ construction projects were remarkable not merely for their expense, but also for their artistry, craftsmanship, and good taste, which no other Greek states were able to match, least of all Sparta. In fact, C. M. Bowra wrote that the “remains of Sparta are so humble that it is hard to believe that this was the power which for many years challenged and finally conquered Athens” (Periclean Athens [Wiedenfeld and Nicolson, 1971], p. 180). But although Pericles’ construction program clearly was an “education” to the rest of Greece, it was no safeguard against eventual Spartan conquest.
What we call ancient Greek drama is better deemed ancient Athenian drama. The great tragedians Aeschylus, Sophocles, and Euripedes were Athenians, as were the comic playwrights Aristophanes and Menander. Sparta had its share of talented poets — among them Tyrtaeus during the mid-seventh century BCE — but they could not compete with the new trends being set in Athens. As Bury put it, when a stranger visited Sparta he must have experienced “a feeling of being transported into an age long past, when men were braver, better, and simpler, unspoiled by wealth, undeveloped by ideas” (p. 134).
The social status of women in Athens was far lower than it was in Sparta. Athenian women took no part in public life and were instructed solely in domestic arts. In his Funeral Oration, Pericles said that women should merely aim “to be least talked about by men, whether they are praising you or criticising you.” In Sparta, however, women were permitted to engage in gymnastic training and “enjoyed a freedom which was in marked contrast with the seclusion of women in other Greek states” (Bury, p. 133). So as far as respect for women was concerned, Athens could not really claim to have exported an policy worthy of emulation, although Ionia also shared the fundamental Athenian weakness of excluding women from education.
Religious and sporting festivals were much the same throughout Greece and, although it is always the Athenians who are remembered for their gods and sporting heroes, most other Greek states were equally advanced.
Thus when Pericles declared that Athens was “an education to Greece.” he was, on the whole, making an accurate observation. This is not to say that Athens was superior to Sparta in every respect, of course, and her democratic system left much to be desired.
Although other Greek states shared some Athenian political, social and economic principles, it remains the case that Athens gave birth to some of the finest Greek accomplishments. These accomplishments, moreover, provided key elements for the development of European art, architecture, drama, philosophy, rhetoric, and politics for 2500 years. Thus Athens continues to serve not only as an “education” for Greece, but for the world.
Troy Southgate
Troy Southgate is from Crystal Palace in South London and has been a Revolutionary Nationalist activist and writer for almost 25 years. He has also been involved with more than twenty music projects. He is a founder of National Anarchism and author of Tradition and Revolution (Aarhus, Denmark: Integral Tradition).00:05 Publié dans Histoire, Théorie politique | Lien permanent | Commentaires (1) | Tags : histoire, théorie politique, sciences politiques, politologie, philosophie, grèce, grèce antique, antiquité, antiquité grecque, périclès, athènes | | del.icio.us | | Digg | Facebook
dimanche, 09 octobre 2011
Eléments nietzschéens pour une critique des biotechnologies
Eléments nietzschéens pour une critique des biotechnologies
http://www.granarolo.fr/textes | |
Philippe GRANAROLO [ Article publié pour la première fois dans l’ouvrage collectif Génétique, biomédecine et société, sous la direction de Philippe Pedrot, Presses Universitaires de Grenoble, 2005]
La philosophie de Nietzsche contient, comme chacun sait, une thématique majeure : celle du dépassement de l’humain, auquel Zarathoustra nous exhorte sitôt redescendu de sa caverne. Un siècle et quelques décennies plus tard, ce dépassement est présenté par bon nombre de nos biologistes comme l’un des axes fondamentaux de leurs programmes de recherche, quand ce n’est pas comme l’un des principaux chantiers d’ores et déjà ouverts. Dans un ouvrage de vulgarisation largement commenté, le professeur Bernard Debré annonce comme inéluctable la prochaine apparition des types biologiques qui prendront la relève de l’ « homo sapiens » [1]. La parenté entre ces programmes et la pensée nietzschéenne semble évidente pour la plupart, même si tous les commentateurs ne partagent pas nécessairement les certitudes provocatrices d’un Peter Sloterdijk dont les « règles pour le parc humain » [2] ont suscité de très vives polémiques.
Il est certes incontestable que, sorties de leur contexte, d’innombrables maximes nietzschéennes semblent se prêter aisément à une reprise et à une adoption par les partisans de l’application à l’humain des biotechnologies. Au-delà des simples formules, Nietzsche et les biologistes du XXIème siècle ont en commun, nous ne saurions le dissimuler, un certain nombre de convictions que nous commencerons par mettre en évidence. Mais s’arrêter là, n’est-ce pas gommer scandaleusement toute l’entreprise généalogique de Frédéric Nietzsche ? N’est-ce pas, en particulier, accorder à la techno-science, aussi bien qu’aux institutions politiques chargées de mettre en œuvre ses programmes, une puissance créatrice que le philosophe leur a refusée ? Il nous faudra donc, dans un deuxième temps de notre exposé, mettre à jour les éléments qui interdisent, selon nous, de faire de Nietzsche le philosophe des biotechnologies. Ce serait néanmoins le trahir que de durcir cette opposition pour faire de lui un adversaire éternel et irréductible des transformations que rendent possibles les biotechnologies. Nous terminerons donc notre recherche en nous interrogeant à la fois sur ce que l’on nous autorisera à dénommer un « principe nietzschéen de précaution », et sur les conditions qui pourraient un jour rendre acceptables la naissance d’une « biurgie » [3] s’inscrivant dans la perspective de la surhumanité.
I) Nietzsche eugéniste ?
1) L’homme comme figure transitoire
Le premier texte philosophique écrit par Nietzsche alors qu’il avait à peine dix-sept ans (Fatum et histoire) inscrit ses premières intuitions dans le cadre de ce qu’il convient de qualifier d’évolutionnisme, aussi ambigu que soit ce terme. Pour preuve ces quelques interrogations : « L’homme ne pourrait-il pas être seulement le développement de la pierre à travers le médium de la plante et de l’animal ? Aurions-nous alors déjà atteint ici la perfection, n’y aurait-il pas ici aussi une histoire ? Ce devenir éternel ne prend-il jamais fin ? » [4], interrogations qui ne le quitteront jamais plus. Vingt ans plus tard, son porte-parole Zarathoustra chantera l’au-delà de l’humain. Soixante ans après, le théoricien de l’eugénisme George Vacher de Lapouge s’exprimera en ces termes en 1921 lors du second congrès international d’eugénisme : « Américains, il dépend de vous, je l’affirme fortement, de sauver la civilisation et de faire de vous un peuple de demi-dieux ». Ce peuple de demi-dieux, dont les eugénistes du début du XXème siècle annoncent la venue, ne fait-il pas écho au rêve nietzschéen du Surhumain ? Comment ne pas classer Nietzsche dans la tribu des eugénistes dont la techno-science du XXIème siècle viendrait combler les vœux ?
2) La désacralisation de la nature
Un second thème nietzschéen s’inscrit dans la même perspective : celui de la désacralisation de la nature. Arrachée à tout providentialisme, livrée au jeu du hasard sans qu’aucune finalité ni qu’aucune téléologie ne mènent le bal, la nature conçue par Nietzsche, et au sein de cette nature, l’ensemble de la biosphère, semblent bien s’identifier à une simple matière première dont notre puissance créatrice va s’emparer. Lorsque Gilbert Hottois écrit : « L’humanité n’apparaît plus comme un donné à servir et à parfaire, mais comme une matière indéfiniment plastique » [5], ne reprend-il pas, jusque dans son vocabulaire, ces propos de Par-delà Bien et Mal : « L’homme est matière, fragment, superflu, glaise, fange, non-sens, chaos ; mais l’homme est aussi créateur, sculpteur, dur marteau, spectateur divin et repos du septième jour : comprenez-vous cette différence ? » [6]. Un autre aspect de cette désacralisation du vivant consiste à dénoncer le scandale que représente le décalage entre les soins mis par nos ancêtres à améliorer l’animal et l’anarchie qui règne sur la plan de la procréation humaine, le scandale de l’opposition frappante entre la passion des hommes pour l’amélioration des espèces animales et le désintérêt qu’ils portent au perfectionnement de l’espèce humaine. Libérée de l’emprise du divin par le déclin des croyances religieuses, la procréation humaine n’a pas pour autant suscité nos préoccupations. Il nous faut cependant remarquer que depuis les écrits de Cabanis au XVIIIème siècle, ce scandale n’a cessé d’être très régulièrement dénoncé dans le camp matérialiste, et qu’à l’époque de Nietzsche une telle dénonciation était d’une grande banalité. Tout comme était dans l’air du temps l’inquiétude d’une dégénérescence de l’espèce humaine, dont Herder, Gobineau, Vacher de Lapouge furent quelques-uns des plus célèbres pourfendeurs : Nietzsche, quand épisodiquement il fustige à son tour les dangers d’une possible dégénérescence de l’espèce humaine, exprime moins une pensée personnelle qu’il ne se fait l’écho de cette préoccupation alors extrêmement répandue.
3) L’âge des expériences
Quant aux textes prophétiques des années 1878-1881, ils sont nombreux à dresser le panorama d’une civilisation à venir en laquelle l’humanité acquérra la maîtrise de son devenir biologique, maîtrise fondée sur les acquis de la science. Nietzsche ne voit pas comment la maîtrise prévisible de la terre pourrait ne pas s’accompagner d’une exploitation scientifique de tous les moyens d’améliorer l’espèce humaine. La libération de l’esprit rendra peu à peu intolérables les hasards de la procréation, et il ne saurait faire de doute que, d’une manière ou d’une autre, l’humanité à venir voudra réguler cette loterie qui, depuis la nuit des temps, a dû multiplier à l’infini les numéros pour laisser apparaître quelques billets gagnants. S’il lui arrive de tenir sur ces questions des propos naïfs ou inquiétants, imaginant par exemple des transplantations de population destinées à éradiquer certaines maladies héréditaires [7], c’est tout simplement qu’à l’instar de ses contemporains, il sous-estime la puissance de la science et n’a pas la moindre intuition des possibilités manipulatoires que commence à nous apporter aujourd’hui une biologie devenue génie génétique.
Notons toutefois que s’il est possible de qualifier, au sens large, ces prophéties d’ « eugénistes », elles ne prennent jamais la forme d’une transformation planifiée et politiquement organisée. Qu’en particulier à aucun moment on ne saurait y repérer la moindre coloration raciste, le philosophe considérant même que cette application de la biologie à l’amélioration de l’humain contribuera puissamment à réduire « la vieille pleutrerie des races, des luttes raciales, des fièvres nationales » [8]. Nietzsche semble surtout intéressé par les progrès de la connaissance que rendront possibles ces expérimentations. Certaines de ses annonces sont d’une étonnante actualité. Je ne retiendrai ici que la suivante : « L’époque des expérimentations ! Les affirmations de Darwin sont à vérifier – par des expérimentations ! De même la naissance d’organismes supérieurs à partir des plus bas. Il faut inaugurer des expérimentations pour plusieurs millénaires ! Eduquer des singes pour en faire des hommes ! » [9]. Si nous avons qualifié ce type de textes de « prophétiques », c’est qu’il ne s’agit en effet de rien d’autre que d’annonces concernant les prochains siècles, de rien d’autre que de l’énonciation de ce qui résultera nécessairement des capacités que l’humanité est en train d’acquérir. « L’humanité peut d’ores et déjà faire absolument d’elle-même ce qu’elle veut », affirme avec la plus grande netteté en 1879 un aphorisme d’Opinions et sentences mêlées [10].
II) Eléments critiques
Enonciation de ce qui ne manquera pas de résulter de nos capacités, venons-nous de dire. Mais dans quelle direction seront-elles mises en œuvre ? « Libre pour quoi ? », se demande Zarathoustra [11], une fois qu’il a pris la mesure de ce dont l’homme s’est libéré. Laissons la parole à Pierre-André Taguieff, qui, préfaçant le récent ouvrage de Catherine Bachelard-Jobard, L’eugénisme, la science et le droit, que l’on peut considérer dès à présent comme un texte de référence, s’interroge en ces termes : « Que peut et que doit faire l’espèce humaine de ce pouvoir d’auto-transformation dont elle semble désormais dotée ? » [12]. Oublier la présence, dans l’œuvre nietzschéenne, des multiples interrogations préfigurant celle de Taguieff et de certains de nos contemporains, c’est mutiler scandaleusement la pensée nietzschéenne. C’est parce que Nietzsche est aussi prophète que ses commentateurs prennent trop souvent le factuel de la prévision pour une projection de la volonté.
1) L’antifinalisme nietzschéen
Au premier chef, ce qu’oublient ceux qui veulent trouver chez Nietzsche les plus anciens appels aux manipulations biologiques de l’humain, c’est la constante et rigoureuse dénonciation de tout finalisme d’un bout à l’autre de son œuvre. L’humanité, répète-t-il, n’a à ce jour aucun but au service duquel elle pourrait consacrer ses capacités transformatrices. On trouvera en particulier dans Aurore plusieurs aphorismes présentant le mixte caractéristique de l’époque qui s’ouvre, mélange de libération liée à la destruction des impératifs anciens et d’incapacité radicale d’une orientation téléologique. « C’est seulement si l’humanité avait un but universellement reconnu que l’on pourrait proposer : «il faut agir comme ceci ou comme cela ». Pour l’instant il n’existe aucun but de ce genre » [13]. Cette absence, si elle déstabilise, comme cela est généralement compris, toute prétention moralisante, contribue tout autant à interdire de supposer la présence chez notre philosophe d’un appel à mettre notre savoir au service d’une amélioration planifiée de l’espèce humaine.
Ce qui rendrait plus dérisoire encore un tel appel, c’est l’incapacité où nous sommes, selon Nietzsche, de prétendre à la possession d’un critère de perfection qui nous servirait d’étalon dans nos entreprises transformatrices. Les fragments non publiés abondent en paragraphes fustigeant la prétention philosophique à dessiner l’horizon vers lequel l’humanité chemine, que cette prétention prenne la forme de la philosophie hégélienne de l’histoire, ou celle, plus modeste en apparence, de la téléologie kantienne. Parmi ces fragments, ces quelques lignes de l’automne 1881 : « L’humanité n’a pas plus de but que n’en avaient les sauriens, mais elle a une évolution : c’est-à-dire que son terme n’a pas plus d’importance qu’un point quelconque de son parcours ! Par conséquent on ne saurait définir le bien en en faisant le moyen d’atteindre le « but de l’humanité ». Serait-ce ce qui prolongerait l’évolution le plus longtemps possible ? Ou ce qui la porterait à son point le plus haut ? Mais cela présupposerait derechef un critère pour mesurer ce point le plus haut ! Et pourquoi le plus longtemps possible ? Ou le minimum de déplaisir dans l’évolution ? C’est à cela qu’aujourd’hui tout aspire – mais cela signifie aussi l’évolution la moins puissante possible, un auto-affaiblissement général, un terne adieu à l’humanité antérieure, jusqu’au point limite où les animaux redeviennent nos maîtres ! » [14]. Tout aussi incapable de proposer un critère de perfection qu’à l’époque de Nietzsche, nos contemporains biologistes ne savent imaginer qu’une possible addition de propriétés nouvelles en guise de perfectionnement. Bernard Debré, déjà cité, envisage que l’on pourrait un jour « améliorer l’homme en lui greffant un gène de la vue de la chouette pour voir la nuit, ou de l’ouïe du dauphin pour percevoir des ultrasons » [15] ? Qu’il nous permette de lui recommander la lecture de Nietzsche qui l’a de loin précédé, en présentant la rencontre de son Zarathoustra avec une créature réduite à l’état d’oreille, mais d’une très performante oreille [16], préfiguration ironique de l’homme-dauphin du professeur Debré.
2) Science, Etat et uniformisation
Autre oubli, plus mutilant encore, celui de la mise en évidence par Nietzsche, en ses analyses les plus originales, du mouvement général de l’histoire comme mouvement uniformisant. Présentes dans l’œuvre publiée, ces analyses sont souvent plus radicales encore dans l’œuvre posthume. En 1878, Nietzsche écrit dans ses cahiers : « Le développement à peu près uniforme de la raison et du sentiment est le but de la civilisation […] C’est là que réside la signification de puissances mondiales comme l’Empire romain, le christianisme, avant tout la science […] L’histoire est le récit des moyens, des canalisations et des voies de communication menant peu à peu à l’uniformité » [17].
La science, visée ici, est inscrite pleinement, depuis son origine socratique repérée à l’époque de La naissance de la tragédie, dans cette dynamique standardisante, ce qui conduit fréquemment Nietzsche à la qualifier de « barbare » dans ses textes de jeunesse [18]. Nous sommes ici en présence de l’un des invariants les plus remarquables d’une philosophie trop souvent dénoncée comme contradictoire. Sitôt qu’il entrera en possession du concept de nihilisme, c’est ce concept qu’il utilisera pour diagnostiquer les forces dominantes qui s’expriment dans la science. Recourons, là encore, à l’œuvre non publiée ; en 1881 s’inscrit dans les cahiers de Nietzsche l’une des expressions les plus nettes de ce nihilisme de la science, même si le concept de nihilisme n’est pas encore dans les bagages du philosophe : « Une formidable cruauté a existé depuis le début de la vie organique, éliminant tout ce qui « ressentait » autrement – La science n’est peut-être qu’un prolongement de ce processus éliminatoire, elle est totalement inconcevable si elle ne reconnaît pas l’ « homme normal » en tant que la « mesure » suprême, à maintenir par tous les moyens » [19]. L’instinct qui anime la science moderne est l’aboutissement provisoire de l’instinct de normalisation qui a guidé pendant des millénaires l’humanité archaïque, et avant même l’apparition de l’homme la vie sous toutes ses formes. Au terme du parcours, terme probable même s’il n’est pas inéluctable, le « sable de l’humanité » [20] : c’est en effet par la métaphore du sable que le philosophe illustrera le plus souvent cette fin angoissante qu’il ne nous présente que pour nous exhorter à y échapper.
Un examen, qui ne pourra ici qu’être des plus sommaires dans le cadre de ce bref exposé, suffira à vérifier la pertinence du soupçon nietzschéen. Ainsi que nous l’avons déjà entrevu, la « perfection » que prétendent atteindre les biotechnologies renvoie nécessairement à un modèle. Dès à présent, les avortements thérapeutiques, les analyses prénatales, le diagnostic préimplantatoire, bref l’arsenal biologique qui ira grandissant, sont mis en œuvre au service d’un eugénisme négatif qui répugne à dire son nom. Quant à l’eugénisme positif encore timide, ses récentes manifestations nous indiquent clairement à partir de quels paramètres sera élaboré le modèle de la perfection recherchée. « Enfant parfait », « homme parfait », « santé parfaite » marquent bien, comme le signale entre autres Pierre-André Taguieff, « le retour de l’imaginaire eugéniste » [21]. Ces perfections, conçues comme éradication du mal, du négatif, de la souffrance, ne relèvent-elles pas de l’hôte nihiliste si inquiétant dont Nietzsche a le premier dessiné le visage ? Ainsi le diagnostic préimplantatoire multiplie de façon exponentielle, comme le fait remarquer Jacques Testard, l’exclusion d’enfants potentiels que permet le diagnostic prénatal. Un risque évident de normalisation se profile, car rien ne permet de dire où s’arrêtera la liste des éléments testés par ces diagnostics. Prétendre, comme le font certains, que nous ne serions nullement en présence d’un eugénisme, puisque les décisions relèvent de la responsabilité individuelle, c’est bien sûr « ignorer délibérément le poids énorme des conformismes, la pression sociale qui pousse chacun à se plier aux modèles en vigueur à un moment donné », ainsi que le remarque fort justement Jean-Claude Guillebaud [22]. Jugement renforcé par les pressions économiques allant dans la même direction. Les forces uniformisantes sont donc hypocritement ignorées de ces discours pseudo-libéraux renvoyant à la seule responsabilité individuelle. Or Nietzsche est par excellence le philosophe qui a consacré ses efforts à repérer et à mesurer ces forces. Lorsqu’elle se demande si « les possibilités actuelles […] ne risquent pas de mener progressivement vers la normalisation de l’individu, voire de l’espèce humaine » [23], Catherine Bachelard-Jobard nous semble bien timide. Ce risque de normalisation n’a rien d’un possible, il relève de la logique même de la science. Nietzsche nous a aidés à comprendre que ce mouvement a toujours été présent dans l’histoire, et nous pouvons nous appuyer sur ses analyses pour percevoir que la techno-science n’est rien d’autre qu’un nouvel instrument au service de l’uniformisation. Ce qui pourrait faire de cet instrument un outil plus puissant que ses prédécesseurs, ce n’est peut-être rien d’autre que la domination peu à peu sans partage des forces réactives.
Que le diagnostic à la fois informé et prudent de Catherine Bachelard-Jobard ne lui interdise pas d’évoquer une « marche vers la normalisation », un « courant d’hypernormativité ambiante », confirme notre soupçon à propos de la direction que prennent et que prendront plus encore demain les applications à l’homme des biotechnologies. Peut-on se contenter de la conclusion interrogative de l’ouvrage L’eugénisme, la science et le droit : « Il reste à savoir si les parents peuvent encore choisir de mettre au monde un enfant différent et si l’on ne se dirige pas vers un monde d’enfants parfaits. Les barrières posées par le législateur sont-elles suffisantes ? A cette question, seul l’avenir répondra » [24] ? Venons-en en effet au travail du législateur. Ne peut-on pas reprocher une certaine naïveté à François Dagognet qui ne prend guère le temps, aussi fouillée et pertinente que soit son approche de ces questions, d’interroger sérieusement la capacité de la puissance politique à conduire la maîtrise du vivant ? Affirmer ex abrupto que « seul l’Etat et son administration peuvent mettre en application ce qui aura été jugé « le meilleur » [25], n’est-ce pas asseoir sur un postulat des plus contestables la rationalité de cette maîtrise ? Sans aller nécessairement jusqu’à considérer à la manière de Nietzsche la classe politique des démocraties modernes comme « un ensemble d’individus avisés de type grégaire » [26], lui prêter sans précautions la capacité de conduire ce que Dagognet nomme avec bonheur la « biurgie » des temps à venir nous semble fort contestable.
3) L’égypticisme des biotechnologies
Une dernière dominante de la philosophie nietzschéenne est gommée par ceux qui tentent de le récupérer au service des manipulations de l’humain : il s’agit de la conception de la temporalité, centrale dans sa pensée. Défini comme « péché originel des philosophes » [27], le manque de sens historique caractérise en fait la totalité de l’idéologie moderne. Nietzsche est par excellence le penseur qui ne cesse d’insister sur le lien qui nous unit inconsciemment au passé immémorial de nos ancêtres, et au-delà des humains qui nous ont précédés, de la totalité de l’aventure de la vie terrestre. Il s’exprime souvent à la première personne pour indiquer à quel point la saisie de ce lien définit une part essentielle de sa pensée, ainsi qu’il le fait dans le paragraphe 54 du Gai Savoir, texte majeur en lequel nous trouvons ces mots : « J’ai découvert pour ma part que la vieille humaine animalité, voire la totalité des temps originels et du passé de tout être sensible continuaient en moi à poétiser, à aimer, à haïr, à construire des déductions … ». Lorsque A. Giudicelli, après avoir rappelé que la vie terrestre a des milliards d’années, que la vie de l’espèce humaine au moins trois millions d’années, se demande « ce qui qualifierait notre génération ou la suivante à transformer notre espèce », il ouvre un chemin interrogatif déjà remarquablement balisé par la méditation nietzschéenne.
Toujours en ce qui concerne la temporalité, en notant que « l’idée eugénique s’intègre dans le projet platonicien de la Cité idéale » [28], Catherine Bachelard-Jobard pointe à juste titre la haine du devenir qui anime tout eugénisme. Ce que le Crépuscule des Idoles nomme avec subtilité l’ « égypticisme » du platonisme et à sa suite de toute la philosophie occidentale, est-il absent des fantasmes de nos biologistes ? Tout nous amène à le nier. Dans « le rêve d’éradiquer définitivement de l’humanité toute malformation congénitale » se manifeste à n’en pas douter un égypticisme scientifique qui, prétendant éliminer le hasard, tend à éliminer par là même la temporalité différenciante de la procréation. Quand elle remarque à ce propos qu’ « à chaque génération, des accidents modifient gènes et chromosomes» et que ces accidents rendent dérisoire ce rêve [29], Catherine Bachelard-Jobard soulève deux séries de questions. D’une part, elle soupçonne à juste titre les biotechnologies d’avoir pour fin d’immobiliser le devenir, d’autre part elle pronostique l’échec inévitable de ce projet. Sur ce second point, elle semble oublier que la combinaison probable de la thérapie germinale et du diagnostic préimplantatoire, dont elle repère séparément les risques, pourrait un jour prochain permettre sinon d’atteindre ce but, du moins de s’en rapprocher. Or le risque d’une immobilisation de l’humanité est très présent dans les écrits nietzschéens : ce qui différencie le plus nettement l’homme de l’animal est pour le philosophe le fait que l’homme est l’animal non encore fixé, qu’il est essentiellement promesse. Le mouvement de la civilisation, couronné par la puissance de la science, pourrait ravaler l’homme au rang de l’animal. « Je doute que cet homme durable », écrit-il par exemple, « que produirait finalement l’utilitarisme de la sélection de l’espèce, parvienne à un niveau beaucoup plus élevé que le Chinois […] le but est de rendre l’homme aussi régulier que cela s’est produit pour la plupart des espèces animales » [30]. Sous les promesses séduisantes des biologistes, n’est-ce pas le « dernier homme » et son clin d’œil qui se dessine en filigrane ?
III) Les conditions d’une rencontre
1) Un principe nietzschéen de précaution
Un abîme sépare à l’heure actuelle les annonces un peu terrifiantes de certains scientifiques, tel Bernard Debré, et la prudence de la plupart des philosophes et des juristes. La thérapie germinale rencontre de très fortes résistances, et un vaste consensus s’accorde avec l’interdit énoncé par exemple par Noëlle Lenoir qui affirme catégoriquement qu’ « on n’a pas le droit de prendre le risque, fût-ce pour des motifs thérapeutiques, de modifier l’homme, valeur inestimable en soi, voire de transformer le genre humain » [31]. Cet interdit, dont Jean-Claude Guillebaud a esquissé la légitimation dans son livre Le principe d’humanité [32], est-il acceptable d’un point de vue nietzschéen ? La réponse est oui, même si la connivence qui en résulte entre un humanisme à fondement religieux et l’iconoclaste philosophe du soupçon pourrait au départ nous inquiéter. Ce n’est pas, bien sûr, parce que le type atteint aléatoirement par l’homme serait intouchable et revêtu d’une quelconque sacralité, qu’on s’appropriera l’interdit énoncé. Rien d’immuable, et pas la moindre origine transcendante, dans l’humain tel que le devenir de la vie terrestre en a à ce jour dessiné les contours. Nous allons y revenir. Mais prendre le risque de modifications irréversibles en un moment historique où « toutes les formes d’originalité ont pris mauvaise conscience », modifier le patrimoine génétique de l’espèce à l’heure où « l’horizon des meilleurs est devenu encore plus sombre » [33], c’est prendre le risque insensé d’assurer au nihilisme un triomphe définitif. Si Nietzsche ne s’est pas trompé en considérant que nous sommes entrés dans le nihilisme pour les trois ou quatre siècles à venir, on peut sans scrupule se réclamer de sa pensée pour redonner aux hommes de notre temps le sens du temps biologique et cosmique, et tenter de les arracher à une précipitation que le philosophe n’a cessé de dénoncer d’un bout à l’autre de son œuvre. « Tenir en réserve », comme le préconise François Dagognet, « les essences qu’on a momentanément écartées » [34], est une précaution élémentaire, une précaution qu’il va falloir imposer à la biologie. Mais concernant l’homme, une telle « réserve » ne saurait suffire. Ajouter à notre Déclaration des droits de l’homme, comme le suggère le professeur Jean Dausset, un article qui proclamerait les droits de l’homme face aux manipulations génétiques, pourrait être, sans bien sûr s’illusionner sur la force du Droit, une manifestation nette de ce principe nietzschéen de précaution.
2) Une biurgie au service de la différence
« Parce que de cimes elle a besoin, elle a besoin de degrés et de contradiction entre les degrés et ceux qui les gravissent » [35] : ce propos de Zarathoustra, parmi bien d’autres, exprime la conception différentialiste du vivant qui caractérise la pensée de Nietzsche. Une standardisation accomplie au nom de la perfection immobiliserait un jeu dont nous ne constituons qu’une étape sans doute éphémère. Il est certainement plus conforme à la vision nietzschéenne de revendiquer un droit à la différence qui pourrait prendre par exemple la forme du « droit à la maladie » , que d’accompagner le génie génétique dans son rêve d’une « santé parfaite », utopie dénoncée il y a quelques années par L. Sfez [36]. Si la « biurgie », troisième âge de la biologie selon François Dagognet, prolonge l’enrichissement des formes que le philosophe croit inscrit dans la logique du vivant, s’il ne s’agit que d’une maîtrise palliant les échecs de la vie dans « sa recherche de la maximalité et de l’ampleur », si effectivement la techno-science se contente de prolonger la « polyphénoménalité sans frein » de la nature et de « favoriser son déploiement » [37], on ne voit pas au nom de quel principe une philosophie se réclamant de Nietzsche pourrait s’opposer à cette « biurgie ». Rien n’interdit même de laisser à nos spécialistes en biurgie l’initiative de produire un jour à partir de la souche humaine de nouvelles espèces. Quand Tristram H. Engelhardt, cité par Gilbert Hottois, écrit ces lignes : « A long terme […] il n’y a pas de raison de penser qu’une seule espèce sortira de la nôtre. Il pourrait y avoir autant d’espèces qu’il y aura d’opportunités invitant à remodeler substantiellement la nature humaine … » [38], nous ne saurions trouver dans le corpus nietzschéen un élément d’opposition radicale à un tel projet. A condition toutefois d’accentuer les premiers mots de la phrase : « à long terme », en effet, et en fonction d’un projet qu’aujourd’hui la techno-science est totalement incapable de construire. Faute de ce but, elle ne pourrait qu’investir ses instruments dans un programme uniformisant gelant peut-être définitivement l’aventure de la vie terrestre.
3) Une place pour le chaos
Que l’évolution biologique ait laissé émerger des formes nouvelles aboutissant, de mutations en mutations, à ce terme provisoire qu’est l’homme, il serait aussi vain qu’aberrant de le nier. Mais que ces émergences expriment la logique du vivant, comme le répète François Dagognet, c’est beaucoup plus contestable. Pour Nietzsche, lointain ancêtre de Jacques Monod, la logique de la vie est une logique répétitive et uniformisante, dont on peut simplement constater qu’elle a laissé, à travers ses failles, émerger de nouvelles formes. De même la sélection darwinienne est moins lutte pour la prééminence que pression uniformisante exercée sur tous les membres d’une espèce. Nietzsche est sur ce plan profondément antidarwinien : la lutte, nous dit-il, « se termine au détriment des forts, des privilégiés, des heureuses exceptions ! Ce n’est pas en perfection que croissent les espèces. Les faibles l’emportent de plus en plus sur les forts » [39]. Le darwinisme est pour le philosophe un avatar de l’hégélianisme, un providentialisme habillé aux couleurs du discours objectif.
Même si François Dagognet tient des propos différentialistes qui ont pu apparaître nietzschéens à certains de ses lecteurs, son différentialisme ne rejoint que dans ses conclusions le nietzschéisme, à partir de prémisses qui sont aux antipodes de la conception nietzschéenne de la vie. Les textes de Nietzsche qui exigent le plus grand effort de lecture sont ceux dans lesquels il met en évidence le caractère aléatoire de l’apparition de la supériorité. Quand L’Antéchrist, résumant d’innombrables formules des cahiers non publiés, affirme que la question fondamentale est celle de savoir « quel type d’homme il faut élever, il faut vouloir … », pour conclure que « ce type d’homme d’une valeur supérieure s’est déjà bien souvent présenté, mais à titre de hasard heureux, à titre d’exception, jamais parce que voulu » [40], une lecture au premier degré repère dans ce genre de formules un appel évident à la maîtrise et à la prise en mains par l’humanité de son devenir biologique. Faut-il approuver une telle lecture ? Nous ne le pensons pas. D’une part ce serait négliger totalement le soupçon nietzschéen à l’égard de la volonté, dont le Crépuscule des idoles rappelle qu’elle n’est « qu’un mot » [41]. D’autre part et surtout, ce serait prêter naïvement à l’homme un pouvoir créateur dont toute l’histoire des civilisations démontre la faiblesse. Si l’exception a surgi au sein d’une histoire dominée par les forces uniformisantes, c’est malgré la volonté des hommes. Par-delà Bien et Mal l’affirme avec une particulière netteté : « Les hommes ordinaires […] ont été et sont toujours avantagés ; l’élite, les plus raffinés, les plus singuliers, les plus difficiles à comprendre demeurent souvent seuls, succombent aux accidents du fait de leur isolement et se perpétuent rarement. Il faut une prodigieuse force adverse pour contrecarrer ce naturel, trop naturel progressus in simile qui cantonne l’existence humaine dans le semblable, l’ordinaire, le médiocre, le grégaire, - le commun » [42]. Les appels à vouloir un type supérieur d’humanité doivent donc être entendus très modestement comme une exhortation à ne pas capituler sans condition devant la logique de la vie et de la civilisation, comme un encouragement à veiller à sauvegarder, dans la trame de la nécessité, les déchirures chaotiques d’où naissent périodiquement les étoiles dansantes.
Conclusion
Partons, pour conclure, de cette formule de Maurice Bellet, affirmant que « l’humain de l’humain n’est pas évident, c’est une formidable et improbable émergence au sein de l’univers » [43], formule que Nietzsche aurait faite sienne. Et remplaçons le mot « humain » par le mot « surhumain ». Face à une conception figée de l’homme, et aux pièges d’une philosophie occidentale enfermée dans l’égypticisme platonicien, Nietzsche prêche pour le Surhumain. Mais le Surhumain ne saurait résulter d’un programme de fabrication confiée à une techno-science essentiellement animée par les forces uniformisantes. Le Surhumain résultera, s’il doit un jour advenir comme ont pu émerger tous les vivants qui l’ont précédé, d’un jeu que nul ne peut prétendre maîtriser, d’un jeu issu du chaos, d’une petite part non encore stabilisée tapie au cœur de nos cellules, « dernier petit fragment du monde où quelque chose de nouveau se combine » [44].
Que les biotechnologies tiennent une place, encore difficile à évaluer, dans l’ensemble des conditions d’émergence de la surhumanité, cela ne semble guère douteux. Mais confier à la techno-science du XXIème siècle le soin de programmer la construction de l’homme supérieur, c’est franchir un pas dont tout nous porte à croire qu’il contredirait les options les plus essentielles de la pensée nietzschéenne. Il nous faut accepter, même si cela s’oppose à nos naïves illusions de maîtrise, que nous vivons un âge expérimental et que les échafaudages que nous construisons sont comme en attente d’un édifice que nul ne peut voir aujourd’hui. Nietzsche a préféré à cette image architecturale une métaphore botanique, celle que Le voyageur et son ombre nous offre en 1879 : « On n’a pas le droit de juger trop sévèrement les ouvriers du présent s’ils décrètent à grand bruit que le mur et l’espalier sont à eux seuls la fin et le but dernier ; c’est qu’en effet personne ne voit encore le jardinier et les arbres fruitiers pour lesquels l’espalier est là » [45]. Les prochaines générations auront-elles la force que suppose une telle modestie ?
NOTES
[1] Bernard DEBRE, La grande transgression, Paris, Michel Lafon, 2000.
[2] Peter SLOTERDIJK, Règles pour le parc humain, tr. fr. Olivier Mannoni, Paris, Mille et une
nuits, 2000.
[3] Terme que j’emprunte à François DAGOGNET auquel je me réfère un peu plus loin. Voir en
particulier La maîtrise du vivant, Paris, Hachette, 1988.
[4] Fatum et histoire, in Ecrits autobiographiques 1858-1869 , tr. fr. Marc Marcuzzi, Paris, P.U.F.,
1994, p. 191.
[5] Gilbert HOTTOIS, « Ethique et technoscience : entre humanisme et évolutionnisme »,
in Science et éthique, Bruxelles, Editions de l’Université de Bruxelles, 1987.
[6] Par-delà Bien et Mal, § 225, O.C. de Nietzsche, tome VII, Paris, Gallimard, 1971, p. 144.
[7] Cf. Le voyageur et son ombre, § 188, O.C. de Nietzsche, tome III, volume 2, Paris, Gallimard,
1968, p. 236-237.
[8] Fragment posthume, Printemps-automne 1881, f.p. 11 [276], O.C. de Nietzsche, tome V, Paris,
Gallimard, 1982, p. 414.
[9] F.P. 11 [177], ibidem, p. 376.
[10] Opinions et sentences mêlées, § 179, O.C. de Nietzsche, tome III, volume 2, op. cit., p. 84.
[11] Ainsi parlait Zarathoustra, première partie, « De la voie du créateur », O.C. de Nietzsche,
tome VI, Paris, Gallimard, 1971, p. 76.
[12] Catherine BACHELARD-JOBARD, L’eugénisme, la science et le droit, Paris, P.U.F., 2001,
p. XIII.
[13] Aurore, § 108, O.C. de Nietzsche, tome IV, Paris, Gallimard, 1970, p. 87.
[14] Fragment posthume, automne 1880, f.p. 6 [59], O.C. de Nietzsche, ibidem, p. 488.
[15] Bernard DEBRE, La grande transgression, op. cit., p. 122.
[16] Ainsi parlait Zarathoustra, seconde partie, « De la rédemption », op. cit., p. 159.
[17] Fragment posthume, automne 1878, f.p. 32 [24], O.C. de Nietzsche, tome III, volume 2,
op. cit., p. 378-379.
[18] Par exemple dans les deux premières Considérations inactuelles ou dans Le livre du
philosophe.
[19] Fragment posthume, Printemps-automne 1881, f. p. 11 [252], O.C. de Nietzche, tome V,
op. cit., p. 404.
[20] Entre autres occurrences, fragment posthume printemps 1880, f. p. 3 [98], O.C. de Nietzsche,
tome IV, op. cit., p. 356.
[21] L’eugénisme, la science et le droit, préface, op. cit., p. IX.
[22] Jean-Claude Guillebaud, Le principe d’humanité, Paris, Seuil, 2001, p. 257.
[23] L’eugénisme, la science et le droit, op. cit., p. 4.
[24] Ibidem, p. 304.
[25] François DAGOGNET, La maîtrise du vivant, op cit., p. 10.
[26] Par-delà Bien et Mal, § 199, op. cit., p. 111.
[27] Humain trop humain, § 2, O.C. de Nietzsche, tome III, volume 1, Paris, Gallimard, 1968, p. 24.
[28] L’eugénisme, la science et le droit, op. cit., p. 15.
[29] Ibidem, p. 120.
[30] Fragment posthume, Printemps-automne 1881, f. p. 11 [44], O.C. de Nietzsche, tome V,
op. cit., p. 329.
[31] Cité par Catherine BACHELARD-JOBARD, L’eugénisme, la science et le droit, op. cit., p. 119.
[32] Jean-Claude GUIILLEBAUD, Le principe d’humanité, op. cit.
[33] Aurore, § 9, O.C. de Nietzsche, tome IV, op. cit., p. 25.
[34] François DAGOGNET, La maîtrise du vivant, op cit., p. 193.
[35] Ainsi parlait Zarathoustra, seconde partie, « Des tarentules », op. cit., p. 118.
[36] Lucien SFEZ, La santé parfaite, critique d’une nouvelle utopie, Paris, Seuil, 1995.
[37] François DAGOGNET, La maîtrise du vivant, op cit., p. 69, p. 145, etc.
[38] Cité par Gilbert HOTTOIS, Essais de philosophie bioéthique et biopolitique, Paris, Vrin,
1999.
[39] Crépuscule des Idoles, « Divagations d’un inactuel », § 14, O.C. de Nietzsche, tome VIII,
volume 1,
Paris, Gallimard, 1974, p. 116.
[40] Antéchrist, § 3, O.C. de Nietzsche, tome VIII, volume 1, ibidem, p. 162.
[41] Crépuscule des Idoles, « La « raison » dans la philosophie », § 5, O.C. de Nietzsche,
tome VIII, volume 1, ibidem, p. 78.
[42] Par-delà Bien et Mal, § 268, op. cit., p. 194.
[43] Maurice Bellet, revue « Etudes », décembre 2000.
[44] Fragment posthume, Printemps-automne 1881, f. p. 11 [121], O.C. de Nietzsche, tome V,
op. cit., p. 354.
[45] Le voyageur et son ombre, § 275, O.C. de Nietzsche, tome III, volume 2, op. cit., p. 269.
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samedi, 08 octobre 2011
Sobre el continente/incontinente o el hombre común
Sobre el continente/incontinente o el hombre común
Alberto Buela (*)
A los estudiosos de Aristóteles en lengua castellana
En la medida en que pasan los años y uno va leyendo y releyendo, aprendiendo y enseñando, los textos correspondientes a la filosofía práctica de Aristóteles: Protréptico, Ética eudemia, Ética nicomaquea, Gran ética y Sobre las virtudes y los vicios, más vamos llegando al convencimiento de que el realismo del Estagirita está asentado sobre lo verosímil, lo contingente y lo voluble del obrar humano.
El realismo contundente de su Metafísica con la primacía de to on h on, se transforma en los escritos sobre el obrar en un realismo amable, sutil, dúctil que invita a su realización. Principios como: “no hay que buscar la exactitud de la misma manera en todo, sino que en cada caso lo que la materia admite” (1098ª 26) y “no investigamos para saber qué es la virtud sino para hacernos buenos” (1103b 27) muestran la vigencia perenne del realismo antropológico frente al cual han fracasado todas las ideologías modernas y postmodernas.
Muchas veces nos hemos preguntado por el por qué en la Nicomaquea Aristóteles pasa luego de estudiar la felicidad, la naturaleza de la virtud, los actos voluntarios y sus contrarios, las virtudes éticas e intelectuales y la justicia, a estudiar la continencia (egkráteia) y su contrario, la incontinencia (akrasía). Cuando él podía haber seguido, naturalmente, estudiando las consecuencias de la virtud como la amistad y la felicidad.
Sin embargo, se detiene en lo humano, “demasiado humano”, hablando como Nietzsche, de la continencia/incontinencia.
Y pasa lo mismo en la Ética eudemia cuando termina el libro II hablando de lo voluntario y de lo involuntario. Y lo mismo en la Magna Moralia cuando en el último libro luego de la equidad empieza a hablar de la continencia/incontinencia.
Es decir, hay en Aristóteles una tendencia natural a hablar de lo que sucede al hombre común, al hombre de a pie, en orden al obrar humano diario, antes de llegar a los frutos o consecuencias de la virtud, como son la amistad y la felicidad.
En primer lugar hay que señalar que la teoría de la continencia/incontinencia=Egkrateia/ Akrasia, funda la doctrina de la responsabilidad moral de todo hombre respecto de su obrar. Si entendemos por continencia o continente aquel que sabe qué es lo correcto y tiene la tendencia de hacer lo contrario, pero finalmente termina gracias a la razón forzando al deseo. Es por eso que la continencia no es una virtud como la templanza sino “una especie de mezcla” (1128 b 34). Una semi virtud, que se da en la mayoría (hoi polloi) de los hombres. Esa mezcla de Museta y de Mimi como dice el tango, ese ser “mistongo” que es el hombre, ni tan dios ni tan bestia. Por eso inmediatamente trata de la theriótes=bestialitas y de su contrario, la virtud heroica y divina=théios (1145ª 20).
Si la continencia no llega a ser una virtud como la templanza (el templado no recibe las solicitaciones de los deseos que recibe el continente), por la misma razón la incontinencia no llega a ser un vicio, sino que ambos, continente e incontinente, “representan estados intermedios y conflictivos en el campo de la moralidad humana” [1].
Esta batalla que se libra en el interior del hombre entre lo que desea y lo correcto, entre lo bueno que le cuesta y la tendencia a realizar lo menos trabajoso. Este dominio político, siempre laborioso y no despótico, de la razón sobre los deseos y apetitos: esto es el hombre común (hoi polloi) y lo que es estudiado a través de la continencia/incontinencia.
El incontinente actúa porque desea no porque elija, el continente, por el contrario, actúa porque elije, no porque desea. Existe una diferencia sutil entre el continente (egkartos) y el moderado (sophrón) y es que en este último los deseos están en concordancia con la razón y entonces no los padece como el continente
El incontinente al obrar a sabiendas mal por causa y dominio de su pasión, pues no la puede dominar por la razón, ejerce su libertad: mal, pero la ejerce. El continente, por el contrario, domina las solicitaciones de su pasión (epithymía) a través de su razón. Pero, unos y otros son el hombre, por lo tanto, estamos obligados a inculcar el ejercicio de la virtud o excelencia en todo hacer y en todo obrar. Hay que actuar y hay que obrar bien, esto es, en forma perfecta y acabada, de acuerdo a la materia sobre la que se actúa y según la recta razón (orthos lógos).
Contrariamente a lo que opinaba nuestro Sarmiento “las cosas hay que hacerlas, mal o bien, pero hacerlas”, Aristóteles nos viene a enseñar que las cosas hay que hacerlas bien, en forma acabada y perfecta, porque es la única manera en que la acción se aquieta, en que la acción descansa.
Este desgarramiento en el interior del hombre, esta tensión permanente entre “lo que veo como mejor y lo apruebo, pero sigo lo peor” como lo vio el poeta latino Ovidio, pinta al hombre real de carne y hueso con todas sus limitaciones.
Es el concepto de continencia/incontinencia el que lleva obligatoriamente a Aristóteles a rechazar la tesis de Sócrates y Platón, de que el mal se realiza por ignorancia y en forma involuntaria. Porque él lo ha sabido extraer de la realidad de la vida misma, del obrar histórico situado de la Grecia de su tiempo. Contra la tesis socrato-platónica va a levantar su propuesta: que está en el dominio del hombre el ser malo o bueno y ahí aparece la concupiscencia para mostrarnos que gracias a ella el acto se hace voluntario antes que involuntario.
De modo que el incontinente sabe que actúa mal pero lo hace por carecer del dominio de sus pasiones o deseos, y por el hecho de saber, podemos además afirmar que la incontinencia no es un vicio pues el vicioso, en general, no tiene conciencia de su vicio.
La incontinencia se relaciona más con los placeres del tacto y el gusto como los sexuales y los de la comida y bebida.
El estudio de la continencia/incontinencia, si bien recorre toda la ética aristotélica, encuentra su tratamiento específico en el libro VII de la Ética nicomaquea y allí comienza afirmando que existen tres formas de conductas morales o tipos de caracteres (perí ta éthe) que hay que evitar: el vicio o maldad (kakía), la incontinencia y la bestialidad o brutalidad (theriótes) a las que contrapone tres formas contrarias: la virtud, la continencia y la virtud sobrehumana, heroica y divina.
Ello lo hace para ubicar el marco de la discusión que está por iniciar sobre la continencia/incontinencia, en medio de dos extremos a rechazar: la maldad y la bestialidad y de dos extremos a seguir: la virtud y la heroicidad cuasi divina como la de Héctor que “No parecía ser hijo de un hombre mortal, sino de un dios”.. Pero como es muy raro encontrar tanto un varón divino como un hombre bestial, se va a ocupar de lo que se presenta en la mayoría de los casos: el hombre común.
Lo primero que hace es vincular la continencia con la perseverancia (kartería) y la incontinencia con la flaqueza (malakía) y la molicie (tryphé), una especie de debilidad frente a las dificultades. Mientras que el que huye del trabajo es, propiamente, el haragán.
¿Para qué ha de beber agua el que está atragantado con agua? (1146 a 33). Que es como decir: ¿cómo se podría convencer al incontinente de lo que es correcto si ya lo sabe?. La conclusión es que: “el agua buena de la persuasión no lo ayuda, sino que lo sofoca, afirma de Aquino en su Comentario 1325, in fine.
Entonces, ¿es el incontinente incorregible?. Esta es la cuestión principal que intenta resolver a lo largo de la primera mitad del libro VII.
La continencia y la incontinencia se aplican a los mismos objetos que el desenfreno o intemperancia y la templanza o moderación, pero la diferencia estriba en que el incontinente actúa sin elección deliberada persiguiendo los placeres necesarios (los que se refieren al cuerpo y atañen a la alimentación y el comercio sexual) mientras que el desenfrenado o intemperante actúa por elección. Tanto a las conductas bestiales, básicamente antinaturales, como al que actúa en estado enfermo no se les puede aplicar el término de incontinentes, pues están, en cierta medida, más allá de lo humano. Pero la bestialidad es un mal menor que el vicio o la maldad porque en el hombre vicioso hay una corrupción del principio superior que es el intelecto (nous) de ahí que: “el hombre malo puede hacer diez mil veces más mal que la bestia o el hombre bestial” (1150 b 8) porque su “entendimiento torcido”, para hablar como Jaime Balmes, puede concebir muchas y diversas maldades.
Llega así al capítulo VII donde fija límite de la terapéutica de la virtud: “el incapaz de arrepentirse es incurable” (1150 b 22) y ése es el intemperante, desenfrenado o licencioso, cuya actitud es continua, mientras que el incontinente es curable porque puede arrepentirse dado que su malicia no es continua sino intermitente. Siguiendo con esta terapéutica vemos como de las dos especies de incontinencia la que es más fácil de curar es la de los incontinentes por temperamento excitable y no la de aquellos que deliberan bien pero no perseveran en ello. Además son más curables los incontinentes por costumbre que por naturaleza, porque es más fácil cambiar la costumbre que la naturaleza.
Esto empuja a Aristóteles a enunciar el principio de su teoría de la acción según el cual “el principio en las acciones es el fin por el cual se obra o dicho de otra manera, en las acciones la causa final es el principio”. Y los principios del obrar no se muestran por el razonamiento sino por medio del hábito de la virtud, natural o adquirida por la costumbre, alcanzando así el hombre, el recto sentido al obrar. “El principio-en el obrar- es el hecho (to hoti) y si este se pone suficientemente de manifiesto, no habrá necesidad de estudiar la causa (to dióti)” (1095 b 7-8). Así, los principios del obrar, que se caracteriza por ser una experiencia (empeiría) guiada por la costumbre, son conocidos por la virtud en los hechos mismos y no por el razonamiento.
De difícil arrepentimiento son los obstinados, pertinaces o testarudos que se mantienen en su opinión propia contra viento y marea, son de difícil convivencia con los demás y se asimilan más a los incontinentes que a los continentes. A su vez la diferencia de estos con los moderados es que los continentes padecen malos apetitos y los templados no. El continente se deleita más allá de la razón pero el moderado no. Pero ninguno de los dos es conducido por la pasión.
Termina acá el estudio de la continencia/incontinencia y pasa a partir del capítulo XI hasta el final del libro VII a ocuparse del tema del placer o deleite y del dolor o tristeza. Tema que retomará en los cinco primeros capítulos del libro X y último de la EN.
Conclusión
La Ética nicomaquea puede interpretarse como una teoría de los tipos de caracteres que se expresan a través de una ética de las virtudes, cuya finalidad no es conocer o saber sino hacernos buenos, creando en nosotros hábitos de carácter para que podamos realizar acciones buenas.
De modo tal que es una falsedad, es un sofisma de eruditos al ñudo, pretender distinguir en la EN una teoría de la acción por un lado y una teoría de los caracteres por otro. Los eruditos, aquellos especialistas de lo mínimo, de lo cual los comentaristas ingleses de la EN son especialistas, no pueden ver el todo. Tiene una ceguera axiológica para ello. Y Platón se encarga de decirles que no son filósofos pues: “dialéctico es el que ve el todo, y el que no, no lo es ”(Rep. 537 c 10-15).
Ver el todo en el tema de la continencia/incontinencia es ver al hombre como un ser deficiente, un ser no del todo completo, un ser a completarse. Como dice la chacarera “el hombre es el único animal que se tropieza dos veces con la misma piedra”. La incontinencia no es “una debilidad moral” como afirman los eruditos ingleses (G. Lloyd, y compañía), la incontinencia es una instancia en el despliegue y desarrollo moral de todo hombre. Salvo casos excepcionales como la de los hombres bestiales o los poseedores de la virtud sobrehumana o divina.
Cuando al principio de esta exposición trajimos a cuenta el apotegma de Ovidio en Metamorfosis, VII, 8 21 “video meliora proboque deteriora sequor” quisimos mostrar todo el realismo que el derecho romano le debe a Aristóteles y al mismo tiempo recuperar para nosotros, hombres del siglo XXI, la vigencia de un pensamiento perenne por realista y por verdadero.
De qué nos sirve a nosotros, de qué le sirve a la filosofía que nos atiborremos de citas y de citaciones eruditas sobre mínimos detalles (p.ej.: si el incontinente no usa la premisa menor en el silogismo práctico, H.H. Joachim. Rackham et allii dixint )[2]. ¿ Llegará un día en que la filosofía pueda leer como un todo los temas y problemas de la ética?. No sabemos. El búho de Minerva sale a volar al atardecer, cuando ya ocurrió lo que tenía que ocurrir, pero lo cierto es que para nosotros es una realidad de vida la filosofía y sobre todo la ética, que nos ha permitido ser mejores de lo que naturalmente éramos. De modo que encaramos los estudios clásicos bajo dos premisas: como una respuesta siempre actual a los problemas del presente y tratando que se venga abajo el andamiaje de la erudición para que aflore aquello que es cultura de verdad.
arkegueta, eterno comenzante, mejor que filósofo
UTN (universidad tecnológica nacional)
[2] Además en el texto esto se presenta como obvio, lo que agrega estulticia a los eruditos al ñudo, pues Aristóteles afirma explícitamente: “Nada impide que alguien aún cuando posea ambas (la premisa universal y la particular) actúe en contra de su ciencia si utiliza la universal y no la particular, pues las acciones posibles son las particulares”(1147 a 1-3). Y luego pone un ejemplo, que como todo ejemplo es rengo. Esto es el que complica la clara explicación que dio, pues al afirmar “a todo hombre le convienen los alimentos secos”, “yo soy hombre” o “tal alimento es seco” plantea dos silogismos. Uno que dice: El alimento seco es bueno para todos los hombres, y como yo soy hombre, el alimento seco es bueno para mí. Y otro que dice: El alimento seco es bueno para mí, este pedazo de pan es alimento seco, luego es bueno para mí.
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Les idées claires et la République européenne
Les idées claires et la République européenne
Entretien avec Pierre Le Vigan
Jean-Marie Soustrade : Quel est la réception de votre dernier livre La tyrannie de la transparence ?
Pierre Le Vigan : J’ai de bons échos d’un certain type de public : les gens qui aiment les idées claires, loin de tous les excès de l’intellectualisme à la Derrida mais qui veulent aller au bout des idées claires. L’homme aime bien mettre en place, dit Clément Rosset, « des stratégies pour obscurcir des vérités simples ». Il faut faire le contraire, remettre de la clarté là on a mis du brouillard. Sans pour autant s’illusionner sur la simplicité toute relative des choses.
J.-M.S. : Vous abordez des sujets variés mais qu’est ce qui fait l’unité de votre démarche ?
P.L.V. : Ce qui en fait l’unité, c’est tout d’abord l’unité de l’auteur, mais c’est aussi – et on me l’a fait remarquer – le fait que mon sujet, c’est en fait la société tout entière ou encore le monde moderne tout entier. La variété d’angles de vue qui sont les miens n’est qu’une façon de remettre sur le métier la même interrogation : comment peut-on encore « faire société » dans une société où les valeurs les plus essentielles sont soit niées soit relativisées : aimer sa patrie serait affaire de goût, ou de simple préférence culinaire, le bien commun ne serait que la somme des intérêts particuliers voire n’existerait pas, etc.
J.-M.S. : Vous citez souvent Tocqueville dans La tyrannie de la transparence. Vous n’êtes pourtant pas connu pour être un libéral ?
P.L.V. : Il y a une ambiguïté du mot « libéral ». Pour moi, la liberté de l’individu ne peut être le critère principal de l’organisation d’une société. C’est d’ailleurs une évidence et c’est pourquoi les libéraux radicaux disent que « la société n’existe pas; il n’existe que des individus », une formule qui est de Margaret Thatcher. Ce qui veut dire non pas seulement que le tout n’est que la somme des parties mais que le tout n’existe pas. À l’inverse de ce point de vue, je pense que la notion de bien commun doit primer. Ceci étant, je suis bien entendu pour la liberté et surtout, très concrètement, pour les libertés. Mais dans le domaine économique, les libertés ne peuvent être absolues, il y a des impératifs qui doivent primer : des impératifs politiques, l’indépendance nationale et européenne, et des impératifs sociaux, la cohésion sociale, et la justice sociale, ou encore l’équité. Je ne suis pas convaincu dans ce domaine que l’on puisse faire l’impasse sur John Rawls, qui n’est pas exactement un libéral, à moins d’avoir une conception très extensive du libéralisme.
Il faut d’ailleurs penser ensemble certaines analyses communautariennes et celle de Rawls. Ce qui est sûr c’est qu’on ne reviendra pas sur l’individu-sujet et que l’immersion communautaire holiste n’est plus de ce monde, qu’on le regrette ou non (le regretter est au demeurant totalement dépourvu de sens puisque personne de contemporain ne l’a connu sauf peut-être des anciens des « kibboutz », un mot qui veut dire « ensemble » ou « assemblée »).
J.-M.S. : Vous parlez avec sympathie d’une République européenne. Mais encore ?
P.L.V. : L’Europe doit évoluer vers une République européenne, mais aussi encore un Empire républicain. En quel sens républicain ? Républicain pour la dimension unitaire : défense commune, politique extérieure commune, égalité des citoyens face à la loi, politique économique européenne autocentrée. La République, c’est aussi l’élitisme républicain contre la communautarisation au nom de la « diversité » et contre la politique des quotas, et au fond contre la reproduction sociale de la super-classe mondiale au service de la finance.
Pourquoi aussi un Empire républicain ? Un « Empire » pour le respect de certaines différences : il peut y avoir une monnaie commune mais pas forcément unique, les réglementations peuvent être différentes dans certains domaines, les langues nationales et régionales doivent être préservées. C’est la notion d’Empire, mais pas au sens d’impérialisme : ni l’Empire éphémère et artificiel de Napoléon, ni le Reich pangermaniste et raciste de Hitler, ni l’Amérique expansionniste et liberticide de Bush ne sont un modèle, bien au contraire. C’est l’Empire au sens d’un équilibre entre unité et autonomies, entre universalité et différences, comme l’Empire austro-hongrois, à qui il ne manquait guère que de devenir un Empire austro-tchéco-hongrois en donnant toute sa place à la Bohème-Moravie, ou comme le Brésil, qui conjugue unité et diversité de ses peuples, fut un Empire et est une République fédérale.
L’Empire républicain, c’est au plan constitutionnel un fédéralisme, mais avec une dimension qui va au-delà du patriotisme constitutionnel, car l’Empire, c’est aussi une idée unificatrice, un certain type de civilisation à aimer, à défendre, à vivre. Une certaine idée de nous même à affirmer. La vie sociale avant le productivisme, la solidarité avant l’enrichissement sans frein, la relocalisation et non la mondialisation. Le reterritorialisation et non le nomadisme.
J.-M.S. : Quels sont vos auteurs favoris ?
P.L.V. : Il faudrait toujours demander « en ce moment », car s’il y a des permanences, il y a aussi des inflexions dans les lectures de chacun. Je suis assez inconditionnel de Clément Rosset, de Frédéric Schiffter, de philosophes moraux comme vous le voyez.
J.-M.S. : Quel est le domaine de la pensée le plus important pour vous ?
P.L.V. : Le plus important, je ne sais pas répondre à cette question, mais le plus fascinant, c’est pour moi la cosmologie. Il y a en effet trois domaines de la philosophie : la morale, c’est-à-dire comment se tenir, la philosophie politique, c’est-à-dire comment se gouverner ensemble, et la vision du monde, qui inclue la cosmologie et même, en un sens, la morale et la politique.
• Propos recueillis par Jean-Marie Soustrade.
• Pierre Le Vigan, La tyrannie de la transparence, Paris, L’Æncre, coll. « À nouveau siècle, nouveaux enjeux », 2011, 177 p., préface d’Arnaud Guyot-Jeannin, diffusé sur Internet par Librad et disponible à la Libraire Primatice : 10, rue Primatice, 75013 Paris.
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Au temps de la Méduse
Au temps de la Méduse
par Georges FELTIN-TRACOL
En 2009, Pierre Le Vigan avait publié Le front du Cachalot, un épais ouvrage de réflexions, d’analyses et de notes de lectures. Il récidive avec un nouveau volume plein de fureur et de jubilation, La tyrannie de la transparence.
Collaborateur aux magazines Éléments, Flash, Le Spectacle du Monde, ainsi qu’aux sites L’Esprit européen, Vox N.-R. et, bien sûr, Europe Maxima, Pierre Le Vigan scrute, dissèque, démonte les tares de notre époque. Il s’attaque tout particulièrement au désir artificiel de transparence de nos congénères. Hormis le port du vêtement, tout devrait être mis à nu afin que tout un chacun puisse épier son prochain depuis sa bulle ! « Cette transparence devenue obligatoire, je l’associe à un animal bien particulier. […] La méduse est un animal marin sans os qui prolifère particulièrement en notre époque, sans doute en liaison avec les transformations de la planète dues à l’homme. Il n’est pas interdit de voir dans la prolifération de cet animal quasi-transparent et invertébré […] tout un symbole (pp. 11 – 12). » C’est aussi une allusion évidente à la célèbre Gorgone de la mythologie antique dénommée la Méduse qui pétrifiait de son regard les inconscients venus la défier.
Par des textes relativement courts qui se rapprochent des aphorismes, Pierre Le Vigan montre qu’il est un grand lecteur et un cinéphile averti. Il examine l’influence intellectuelle des Lumières et du P.C.F. de Marchais, salue les grands acteurs français des années 1920 – 1930, cite Montherlant et Michéa, disserte sur le film La traversée de Paris de Claude Autant-Lara, réfléchit sur les œuvres de Rousseau, de Benjamin Constant et de Tocqueville, ce critique précoce du nihilisme alors naissant, etc. Il nous rappelle aussi le courage héroïque, fort peu connu de nos jours, des troupes françaises lors de la campagne de France en mai – juin 1940. On ne partage pas toujours toutes ses appréciations. Sur Giorgio de Chirico par exemple. Sur Talleyrand « un traître intelligent (p. 96) ». Certes, du 14 juillet 1790 à son décès en 1838, l’ancien évêque d’Autun, le « Diable boiteux » a servi tous les régimes afin de préserver ses intérêts lucratifs. Néanmoins, il ne faut pas oublier que le diplomate en chef qu’il fut permit au jeune Consulat d’être accepté sur la scène internationale et qu’il atténua, en 1815 après les Cent-Jours, le second traité de Paris… Malgré tous ses défauts, ses vices même, un tel personnage nous manque, surtout si on le compare à Philippe Douste-Blazy, Bernard Kouchner ou Alain Juppé.
Une grande méfiance envers une croissance prédatrice qui tend vers la démesure incite ce connaisseur de Serge Latouche et de Pierre Rabhi à « louer le sens de la mesure, chercher à la retrouver, redécouvrir le bienfait d’une certaine rareté des biens pour le bénéfice possible de l’abondance des savoirs et du geste sans cesse renouvelable de l’exercice plein et entier des cultures, ce qui suppose leur réenracinement (p. 39) ».
L’ami Le Vigan appartient donc aux « objecteurs de croissance », non par idéalisme, mais par réalisme et parce qu’il côtoie dans sa vie courante les méfaits de cette croissance. À diverses reprises dans La tyrannie de la transparence reviennent les questions d’habitat, d’architecture et d’urbanisme. Et pour cause ! Sa profession le confronte à la souffrance existentielle dans les grands ensembles et au travail segmenté, précarisé, jetable. Il dénonce la « dictature de la santé (p. 59) » et l’avènement de Big Mother – l’État thérapeute omniscient – qui remplace le dorénavant désuet Big Brother au point que « notre société est […] de l’économique – la loi de la jungle – tempéré par du juridique (p. 75) ».
Pierre Le Vigan constate qu’à l’heure actuelle, « les partis politiques sont à la remorque des associations, ce qui est beaucoup plus grave que les problèmes posés par l’existence même des partis politiques (p. 142) », ce qui dévalorise la politique. Dans sa sympathique préface, Arnaud Guyot-Jeannin le décrit comme un « homme de droite de gauche (p. 10) ». Pourquoi lui appliquer ce schéma convenu et dépassé, lui qui sait que « dans de nombreux domaines, on ne peut même plus renvoyer dos à dos la droite et la gauche car tout simplement il n’y a plus de pensée de droite et pas non plus de pensée de gauche (p. 115) » ? Lucide, il explique que « la gauche a longtemps été vue par elle-même comme le contraire de la droite. […] Maintenant, la gauche (une certaine gauche bien sûr) est le laboratoire de recherche de la droite. Elle explore, au nom de la “ liberté ” libertaire, ce que seront les champs possibles, demain, de la marchandisation (pp. 57 – 58) ».
Cette situation résulte de la domination d’une nouvelle idéologie mortifère. Il faut « caractériser notre époque comme celle d’un nouveau totalitarisme post-démocratique. L’obscurantisme et l’inculture ont eu raison de la démocratie. L’immigration a déplacé le terrain des débats idéologiques. La pensée a suivi une pente primitiviste. L’idéologie des droits de l’homme est devenue un nouvel obscurantisme pseudo-démocratique qui tue à petit feu le droit et la démocratie. Malgré l’usage inflationniste du terme “ citoyen ”, plus rien ne renvoie à la réalité de ce mot, et l’homme abstrait et interchangeable a supplanté le citoyen (p. 19) ». Pierre Le Vigan développe une autre approche du droit des hommes. En effet, « tant qu’on n’aura pas compris que les droits de l’homme ne peuvent être qu’une conséquence des droits des peuples, les droits des peuples à exister, à perdurer, à avoir leur terre, leur langue, leur autonomie, leur identité, leurs mœurs, leur façon d’écrire leur histoire et ainsi tout simplement leur avenir, on ne fera jamais avancer concrètement les droits humains. Car l’homme concret appartient à un peuple. C’est par la mise en œuvre des droits des peuples – le droit notamment de contrôler leurs ressources -, de s’émanciper de la dictature mondiale des marchés, de l’empire de la finance – que les droits humains peuvent être pris en compte. L’homme est d’abord un être social, un être en communauté, un être politique (p. 36) ».
Arnaud Guyot-Jeannin qualifie Pierre Le Vigan de « républicain subsidiariste, démocrate organiciste et socialiste populiste, […] attaché au(x) peuple(s) de façon charnelle. Son populisme, jamais démagogique, est exigeant, aristocratique et anagogique. Il s’agit d’un aristo-populisme (p. 9) ». C’est bien vu, d’autant que « P.L.V. » encourage une combinaison inédite et originale des formes participative et représentative de la démocratie. Mieux, en réponse au débat lancé à la fin des années 1980 par Régis Debray entre « républicains » et « démocrates », il déclare clairement : « je crois que la République – et la distinction citoyen – étranger, et la nécessaire existence de critères pour passer d’un statut à un autre -, est la condition de la démocratie. La République ce ne sont pas des frontières infranchissables – ce serait alors des murailles – mais c’est le sens des frontières. En ce sens, je suis républicain avant tout – mais non pas “ à la place ” – d’être démocrate. Je suis républicain comme condition pour être démocrate (pp. 65 – 66) ».
Pierre Le Vigan se proclame en outre Européen. Son Europe n’est pas celle de Bruxelles, de Maastricht et de Lisbonne. Elle n’est pas non plus euro-régionaliste. Pour lui, « L’Europe aux cent drapeaux (Yann Fouéré), c’est l’Europe aux cent Kossovo. C’est une zone de faiblesse où s’engouffreraient plus encore les vents de l’impérialisme (p. 129) ». L’Europe qu’il souhaite serait une organisation politique politique des nations européennes à vocation impériale ultime. Mais « l’Empire doit être républicain, avant même d’être démocratique (avant, pas à la place de, car la République est la condition de la démocratie) (p. 126) ». Il rappelle qu’entre 1804 et 1808, « les monnaies françaises portaient l’inscription : “ République française. Napoléon Ier Empereur ” (p. 126) ». Certes, l’article Ier du sénatus-consulte du 28 floréal an XII (18 mai 1804) proclame : « le gouvernement de la République est confié à un Empereur ». Paradoxal ? Non, car l’oncle et le neveu portent le titre d’empereurs des Français comme Louis XVI lors de l’expérience de monarchie constitutionnelle en 1791 – 1792 et Louis-Philippe Ier sous la Monarchie de Juillet (1830 – 1848) sont rois des Français. Dans les quatre cas, et les textes institutionnels sont formels, ils tiennent leur fonction de la nation et, par conséquent, de la souveraineté nationale. Or peut-on bâtir une communauté européenne cohérente à partir de la souveraineté nationale ? Très certainement pas, surtout que le précédent napoléonien d’unification européenne est loin d’être pertinent et probant… Et la souveraineté populaire ? Peut-être, à la condition sine qua non de redéfinir ce que sont les peuples et non ces masses agglomérées et individualisées gavées de télévision.
Cette redéfinition essentielle nécessitera une libération des esprits de l’idéologie du bonheur matérialiste. « Reconstruire des patries et des peuples se fera en sortant du règne de l’argent (p. 173). » Mieux, à l’indispensable impératif géopolitique, il est primordial que l’idée impériale soit « une idéologie alternative à l’imaginaire marchand. Il faut l’idée, et même le mythe, d’un ordre nouveau en Europe. Un ordre post-productiviste et post-consumériste (p. 26) ». Ce nouvel ordre révolutionnaire devra être territorial. Vient alors le dilemme entre l’Eurosibérie et l’Eurasie. Hostile à la conception ethnosphérique blanche de l’Eurosibérie, Pierre Le Vigan opte pour la vision grand-continentale de l’Eurasie. Mais une telle immensité est-elle compatible avec la démocratie organique interne des communautés de peuples autochtones ? Voilà un bien beau débat en perspective, en toute transparence, bien sûr…
Georges Feltin-Tracol
Pierre Le Vigan, La tyrannie de la transparence, Paris, L’Æncre, coll. « À nouveau siècle, nouveaux enjeux », 2011, 177 p., préface d’Arnaud Guyot-Jeannin.
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mercredi, 05 octobre 2011
Emil Cioran - Un siècle d'écrivains (1999)
Emil Cioran - Un siècle d'écrivains (1999)
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dimanche, 02 octobre 2011
"Der Orgasmus steht rechts, das ist die Schlüsselerfahrung der Postmoderne"
Warum macht man sich eigentlich die Mühe und seziert das Gedankengut eines philosophischen Vielschreibers, wenn eigentlich alles Wesentliche in einem Satz gesagt werden kann.
Im FOCUS-Archiv bin ich auf ein Interview mit Peter Sloterdijk aus dem Jahr 1997 gestoßen, daß als ein Bericht über die Leichtigkeit von metaphorischen Gegenwartsanalysen gelesen werden muß:
FOCUS: Der heutige Sexualstil sei „medikalisiert, versportlicht, diätisch“, haben Sie geschrieben, und: „Der Orgasmus steht rechts, das ist die Schlüsselerfahrung der Postmoderne.“ Warum?
Sloterdijk: Weil Genießen etwas ist, was Menschen extrem privat und idiotisch werden läßt, und ein gewisser idiotischer Privatismus auch im Kern von reaktionärer oder rechter Politik steht. Die Unfähigkeit zur Generosität, die fanatische Entschlossenheit, eine Politik zu betreiben, die den eigenen Vorteil über alles stellt: Das sind Kriterien der ewigen Rechten.
Der Interviewer stellt nun die nachvollziehbare Frage, was dann eigentlich die 68er-Sexrevolution gewesen ist. Oder mit einem Reaktionär gesprochen: “Devise für den jungen Linken: Revolution und Fotze.” (Nicolás Gómez Dávila in: Einsamkeiten)
FOCUS: Was Sie idiotischen Genuß nennen, kann man auch mit dem im Schwange befindlichen Begriff Hedonismus bezeichnen – und das ist ein Hauptschimpfwort der Konservativen, wenn sie gegen die linksliberale Spaßkultur zu Felde ziehen.
Sloterdijk: Man muß hier unterscheiden. Es gab vor langer Zeit einmal einen asketischen Konservatismus, der hinsichtlich seiner sozialen Energie viel potenter war als die sogenannte hedonistische Linke. Es gab eine aus dem alten Adel herkommende Gesinnung, sich für den Staat zu verbrauchen und dabei die eigenen Genußansprüche zurückzustellen. Aber diese Selbstopferkultur ist untergegangen. Im Augenblick führen alle Begründungen von Lebensentwürfen letztendlich in den Selbstgenuß der letzten Menschen. Die Orgasmusdebatte, wenn sie auch skurril anfängt, ist in letzter Instanz sinnvoll, weil sie den Horizont einer projektlosen Gesellschaft beschreibt, die keine Zukunft kennt, sondern nur die Vorspannung auf die nächste Entladung. Die letzten Menschen sind an der Macht.
Oh, Nietzsche also …
FOCUS: Die letzten Menschen haben, laut Nietzsche, das kleine Glück für jedermann erfunden – und das sollen tendenziell Rechte sein?
Sloterdijk: Insofern als die anthropologische Wette der hedonistischen Linken, daß der sexuell und kulinarisch genießende Mensch der sozial nützlichere sei, verloren ist. Die Lebensverbesserung der einzelnen hat keinen Überlauf ins Allgemeine. Die Vermehrung der Privatvergnügen macht die Gesellschaft als ganze nicht froh – auch das war ein Teil der alten linken Utopie. Es entsteht vielmehr eine Frustrationsklassengesellschaft, eine rasende Neidgesellschaft.
Wir lernen: Die hedonistische Frustrationsklassengesellschaft ist gescheitert und trotzdem verbleiben wir in diesem Modus, weil wir keinen Ausweg wissen. Aber der Sloterdijk, der Philosoph, weiß doch sicher einen … Oder doch nicht? Na dann machen wir weiter im Fragebogenstil.
FOCUS: War Ernst Nolte taktlos?
Sloterdijk: Er hat intuitiv exakte Taktlosigkeiten begangen und damit gegen ein linksliberales Kartell verstoßen. Wer überhaupt einen Sinn für die Funktion eines intellektuellen Feldes besitzt, der muß mit Bestürzung beobachten, daß man gegenüber einer Person wie Nolte nicht argumentative, sondern exorzistische Methoden anwendet. Es wäre mir übrigens lieber, man müßte solche Plädoyers für Linke halten statt für Rechtsintellektuelle. Was auf dem Spiel steht, ist die Würde des intellektuellen Feldes im ganzen. Darum müßten jetzt auch die deutschen Intellektuellen eine Amnestie für Toni Negri* fordern!
FOCUS: Würden Sie bitte zu den folgenden Personen je einen Satz sagen: Michael Jackson.
Sloterdijk: Der erste perfekte Mutant. Ich bin von ihm fasziniert, weil er wie noch nie jemand vor ihm es fertiggebracht hat, für eine absolute Lächerlichkeit vergöttert zu werden.
FOCUS: Ernst Jünger.
Sloterdijk: Ich bin bereit, ihn auf einer kalten Ebene bedeutend zu finden.
FOCUS: Joseph Ratzinger.
Sloterdijk: Auf die Gefahr hin, daß das hochmütig klingt: Er gehört zu den Menschen, die mir auf eine bestimmte Art leid tun. Er spielt in einer Komödie mit, wo Männer in Frauenkleidern durch große Gebäude laufen und so tun, als würden sie kochen. Der Priester ist ja ein Koch des Heils, der an einem Tisch steht, ein Gericht zubereitet und einer angeblich hungrigen Menge verabreicht – aber er versteht nie, daß das kein Drei-Sterne-Restaurant ist.
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La fabrique du temps nouveau
« La fabrique du temps nouveau » de Jean de Maillard
Ex: http://fortune.fdesouche.com/
Jean de Maillard, inspecteur du travail dans les années 1970 puis magistrat spécialisé dans la criminalité financière, répond dans « La fabrique du temps nouveau » aux questions de Karim Mahmoud-Vintam, éditeur de Temps présent.
Une analyse en profondeur de la mondialisation financière dans ces attendus et ses conséquences.
La fabrique du temps nouveau est une généalogie du néo-libéralisme (que l’auteur ne distingue pas de l’ultralibéralisme ou encore du mondialisme, en tant que système) – replacé dans le temps long de l’Histoire, ce temps long dont Dominique Venner dit qu’il est la seule mesure pertinente de l’évolution des sociétés humaines.
Il est aussi manifestement une autopsie anticipée de l’humanité de l’homme.
Pour Jean de Maillard, le néolibéralisme est en effet une arme de destruction massive de l’ensemble des entités naturelles qui ont porté la conception traditionnelle de la nation, telle que Renan l’a définie dans sa fameuse conférence de 1882 : « Une nation est une âme, un principe spirituel (…) une grande solidarité, constituée par le sentiments de sacrifices qu’on a faits et de ceux qu’on est disposé à faire encore (…) Une grande agrégation d’hommes, saine d’esprit et chaude de coeur, crée une conscience morale qui s’appelle une nation ».
La socialisation horizontale remplace l’héritage et la transmission
La société qui émerge est pour Jean de Maillard une société de réseaux, qu’il qualifie également de fractale – par analogie avec ces objets mathématiques dont chaque partie est isomorphe au tout -. Cette société de connexion, façonné par le néolibéralisme, est en rupture radicale avec la société traditionnelle, fondée sur la transmission. « On peut relire les évolutions contemporaines, écrit l’auteur, comme le passage d’une société verticale, intergénérationnelle, reposant sur des institutions qui en quelque sorte évoluent à l’intérieur et transmettent un savoir vivre ensemble, à une socialisation horizontale, reposant sur l’instantanéité de la connexion des réseaux, des individus, des choses, à la place de la mémoire et de la transmission ».
La société d’avant était ainsi celle de l’héritage. De génération en génération, se transmettaient un savoir, une culture, une histoire. Ce qui supposait un socle immémoriel fondé sur la famille, le peuple, l’identité, la langue, la culture, la nation… Depuis l’après-guerre, le travail de sape néo-libéral a substitué à cet ordre qui semblait immuable une société sans mémoire collective et sans racine. Une société qui se veut cosmopolite et non discriminante. Tout individu est ainsi, virtuellement, citoyen du monde, un monde sans frontière ni hiérarchie, du moins en droit et en apparence. Car si aucune barrière ne saurait être reconnue comme pertinente entre les individus qui la compose, ni linguistique, culturelle ou sociale, ni – encore moins – ethnique ou raciale, les inégalités sociales, quant à elles, explosent. [...]
Dictature du devoir de mémoire et du politiquement correct
L’inconscient collectif, précise Jean de Maillard, est l’ensemble des croyances auxquels adhèrent les membres d’une même société. Il s’articule autour de principes réputés transcendants sur lesquels tout questionnement est intempestif, voire scandaleux. [...] Explosion des inégalités et des communautarismes, perte du sens et du lien social, dictature du devoir de mémoire et du politiquement correct, fin de l’espace public comme lieu d’expression d’individus libres, obligation d’absolue transparence, d’absolue équivalence… « Finalement, s’interroge Jean de Maillard, la question n’est-elle pas celle-ci : nous vivons dans une société ouverte, qui a perdu toute unité, et si nous n’avions pas cet inconscient et cet imaginaire pour nous obliger à la supporter [c’est nous qui soulignons], ne risquerions-nous pas de la rejeter avec une telle violence que nous pourrions voir ressurgir de nouveaux pogroms ? ». [...]
De même, fort prudemment, Jean de Maillard rejette toute téléonomie humaine dans la manière dont la convergence néolibérale s’est opérée : « [S]ans qu’il existe une quelconque coordination, et moins encore de volonté ni même de perception de cette complémentarité, tout va se mettre à peu près en même temps, et dans une direction qui va permettre la constitution d’un nouvel ordre logique et cohérent, mais sans lien visible entre toutes ces mutations ». Difficile, à vrai dire, de suivre l’auteur dans ce discours irénique et croire que la mutation néolibérale n’est que le fruit d’une succession de hasards. Chaque avènement d’un « nouvel ordre » mondial est le résultat d’un long travail de groupes de pression au sein des élites dirigeantes.
Les politiques par lesquelles, depuis un demi-siècle, les peuples de la vieille Europe ont été invités à réprimer leur identité profonde et à s’approprier l’impératif du métissage et du multiculturalisme – puissants marqueurs du néolibéralisme en acte – paraissent trop efficaces pour ne pas résulter d’une stratégie mûrement réfléchie de puissants groupes d’intérêt mondiaux. En matière d’idéologie, il ne saurait y avoir de génération spontanée…
La finance internationale réseau sanguin de la mondialisation
Le déclin du capitalisme fordien et la montée du capitalisme financier articule le passage du libéralisme au néolibéralisme, marqué par la financiarisation de l’économie. « La finance internationale est un peu le réseau sanguin de la mondialisation, et peut-être de tout le système économique de la mondialisation », souligne Jean de Maillard. Cette virtualisation des échanges nécessite elle-même une virtualisation des individus. L’auteur évoque à ce propos la réduction de ces derniers au rang de monades leibnitziennes, qui sont autant de noeuds d’un réseau totalement désincarné, au comportement égoïste, versatile et veule : « [L]‘homme post-moderne (…) n’accepte plus que les solidarités qu’il crée lui-même, quitte d’ailleurs à les briser à sa guise si elle ne lui conviennent plus ». Le travail ne crée plus de lien social, car chaque « agent de marché », plongé dans une « démocratie de marché » (Clinton), en concurrence continuelle avec tous les autres, simple « entrepreneur de lui-même » (Schumpeter) doit perpétuellement se réinventer s’il veut rester compétitif sur le marché du travail.
« Virtualisation » des individus, contractualisation et marchandisation des rapports sociaux
Les institutions – famille, école, justice… – qui constituaient autant de matrices de la socialisation, laissent place à une contractualisation des rapports sociaux, en symbiose avec l’essence-même du néolibéralisme. « Aujourd’hui, remarque l’auteur, tout se passe comme si l’enfant avait implicitement passé un contrat avec ses parents : si les parents ne remplissent pas le contrat, un tiers peut juger les parents selon différentes modalités – jugement pénal, jugement civil – et éventuellement leur retirer la garde de l’enfant (…) Aujourd’hui, les justiciables peuvent attaquer la personne du juge en déposant plainte contre lui. Il a perdu sa position transcendante (…)
[L]‘institution scolaire elle-même a banni l’asymétrie du rapport enseignant-enseigné au profit d’une contractualisation de la relation entre le professeur et l’élève, [qu'elle a] marchandisé (…) On pourra en dire de même du rapport entre hommes et femmes (…) l’homme était celui qui assurait le rapport de la famille avec l’extérieur, un rapport dominant certes, mais qui ne plaçait pas pour autant la femme dans un simple état de domination, puisqu’elle était l’élément structurant à l’intérieur de la famille ». La récente introduction de la théorie du genre dans l’enseignement des Sciences de la Vie et de la Terre au lycée est à cet égard symptomatique : cette théorie déconnecte en effet sexe et genre. Si le sexe est un fait de nature, l’appartenance à un genre est, quant à elle, le résultat d’un contrat passé entre l’individu et la société…
Les systèmes de surveillance se substituent au lien social Si l’homme de la post-modernité n’accroche plus son char à la moindre étoile, il désire néanmoins encore quelque chose, du fond de son égoïsme et de sa solitude : la sécurité. D’où l’explosion toute rhétorique des « droits à » (droit au travail, droit à la paresse, droit au logement…, avec ce résultat antinomique que « tous les droits = aucun droit »), et, plus concrètement, de la surveillance. « Ce n’est pas un État totalitaire de surveillance qui se met en place, prévient Jean de Maillard, mais une surveillance généralisée parce que tout le monde a peur de tout le monde. La société post-moderne, c’est la surveillance de tout le monde par tout le monde ». Si, comme l’affirme Jean de Maillard, « la généralisation des systèmes de surveillance [compense] la disparition du lien social », on pourra également remarquer que l’insécurité est une modalité de la bonne gouvernance néo-libérale : des individus qui ont peur sont en effet des individus dociles au système.
L’homme post-moderne, monade néo-libérale, noeud d’un vaste réseau déshumanisé, est profondément athée. Il ne rêve plus non plus de Progrès ni encore moins de Révolution. Cet absolu désenchantement du monde avait été prophétisé par Nietzsche, qui, dans le prologue de son Zarathoustra, décrit l’avènement du dernier des hommes. « Dieu est mort, mais Hegel aussi », ironise Jean de Maillard. On referme son livre avec un fort sentiment de désespérance. Si les analyses de Jean de Maillard sont fondées, les voies par lesquelles l’homo occidentalis pourrait échapper à ce destin annoncé passent nécessairement par l’effondrement du capitalisme financier, un effondrement cataclysmique dont nous pressentons les prémisses, et dont il serait illusoire de croire qu’il sera indolore…
Henri Dubost
Jean de Maillard, La fabrique du temps nouveau – Entretiens sur la civilisation néolibérale, Collection Racines & ruptures, Éditions Temps présent, 2011, 234 pages
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vendredi, 30 septembre 2011
Eustace Mullins e i segreti del poeta
Eustace Mullins e i segreti del poeta
Washington DC – primavera del 1949, St. Elizabeths Hospital in una camera del Mental Health Department un illustre “ospite”: Ezra Pound
di Gian Paolo Pucciarelli
Ex: http://www.rinascita.eu/
Eustace Mullins ha un rispettabile impiego alla Library of Congress, una laurea alla Washington University e un vivo interesse per le avanguardie europee del primo Novecento.
Lo attraggono i dipinti di Picasso e di Kandinski e in genere il Modernismo.
La Biblioteca del Congresso è la più grande del mondo (ventotto milioni di volumi).
Monumentale compendio dell’intero scibile umano e (con qualche disagio) campionario assortito di crisi e fulgori della cultura occidentale. Di quest’ultima un semplice bibliotecario può comprendere ambiguità e contraddizioni, a stento nascoste sotto il peso dell’architettura neoclassica, della tradizione liberale e della memoria di un presidente.
L’imponente Jefferson Building, appunto. E tutto quello che c’è dentro.
Ubicazione: 101 Independence Avenue – Washington – DC, qualche minuto a piedi dalla Casa Bianca, mezz’ora d’autobus e due secoli d’inutile fuga dall’oscurantismo per raggiungere il 1100 dell’Alabama Avenue e il… “Nido del Cuculo”.
La storia dei manicomi, vero o falsa che sia, lascia concrete tracce d’archetipi. Uno di questi si trova su una lieve altura, in direzione sud-est, quasi alla confluenza del Potomac con l’Anacostia.
Il punto in cui sostano gli uccelli migratori in cerca della giusta rotta e sbagliano… nido.
Ottanta piedi d’altezza, linee tardogotiche in segno d’austerità e non trascorsi orrori, sovrapposti ai tanti frantumi del sogno americano, in modo che ne risulti un sinistro edificio. (L’ispirazione è di Milos Foreman che venticinque anni più tardi, tenterà di spiegare le terapie psichiatriche in uso negli States, con buoni appoggi di Upjohns, Roche e le Multinazionali delle benzodiazepine).
Nome ufficiale: St. Elizabeths Hospital.
A causa di ben note imprecisioni nel distinguere la follia individuale da quella collettiva, i cartelli indicatori all’ingresso del nosocomio non recano la scritta “Mental Health”. Anche perché non è bene si sappia che fra gli 8.000 “ospiti” dell’Ospedale sono selezionati i “forensic patients” da sottoporre al test della lobotomia.
I Civils “beneficiano” invece di quotidiane terapie… elettroconvulsive.
Le visite ai ricoverati non sono concesse facilmente. Per via del lezzo di urina secolare misto ai vapori dell’acido ipocloroso, causa di svenimenti e complicazioni polmonari.
Poi perché non sono ancora tanto lontani i tempi in cui Mr. Donovan, già Chief dell’ O.S.S., inaugurò al St. Elizabeth l’uso della scopolamina per farne il siero della verità.
Nel complesso di edifici dell’Alabama Avenue si conservano in formaldeide 1.400 cervelli umani e corre voce che vi sia finito anche quello di Mussolini (ritenuto d’interesse sociale e utile un domani a chi intendesse esaminare le cellule del Capo del Fascismo a scopi didattici, misurando gli effetti dell’irrazionalità delle masse sui lobi cerebrali del Duce).
Eustace Mullins ha appena varcato i cancelli del St. Elizabeth, dopo aver ottenuto il “passi” e non prima di aver svuotato la propria vescica urinaria. Fra tante amenità, recentemente apprese, mentre s’incammina lungo il viale che attraversa un ampio prato fino all’entrata principale, sente l’irrefrenabile impulso di affondare una mano nella tasca dei pantaloni per tastarsi ripetutamente i testicoli. Gesto salvifico, anche se irrispettoso, per la vicinanza di Mrs. Dorothy che, pur mesta e pensosa, con lui procede, affiancandolo.
Poco dopo, preda dell’emozione e degli scongiuri, Mullins si guarda intorno circospetto, avvertendo invisibili presenze di spettri in divisa.
Sono i fantasmi dei 500 Soldati Blu (e Grigi) sepolti nell’area circostante, vittime della guerra civile e dell’oblio. I loro poveri resti giacciono dispersi per sempre nel sottosuolo, mentre ignari tagliaerba, ordinando il prato che li sovrasta senza alcun segno tombale, continuano a cancellarne la memoria. Mullins sembra udire grida di vendetta, soffocate da metri di terra e fastidiosi ronzii di tagliatrici. Ma è solo un’impressione. Non gli resta che accennare un sorriso, sul quale si protende un filo di persistente amarezza.
Appare il cartello Mental Health Department. Prima di varcarne l’ingresso, il “visitatore” guarda il lontano e quasi immobile Potomac, da cui sembra levarsi il frastuono delle battaglie combattute novant’anni prima. L’illusione sonora s’interrompe, per via delle voci, quasi irreali, che provengono dall’interno. Mullins, controllando a stento la propria emozione, si affida a Mrs. Dorothy che lo accompagna alla camera di un illustre “ospite” del dipartimento: Ezra Pound.
Fuori, lo struttural-funzionalismo alla Talcott Parsons propone tregua ai conflitti sociali, solidale col noto impostore che raccomanda “Società Aperte” senza far uso di volantini.
Bastano l’abbaglio del benessere e l’abitudine a invisibili moltiplicatori del debito pubblico.
La cella del St. Elizabeth in cui “alloggia” Pound è occupata da un maleodorante giaciglio e un tavolo di metallo, su cui si ammucchiano quaderni di appunti. Lo spazio esiguo della cella consente di ospitarvi il solo recluso, esempio del trattamento riservato alle vittime della moderna inquisizione. Sebbene Mrs. Dorothy cerchi di tranquillizzare Mullins, si fa presto strada in lui la tentazione di concludere la visita con un rapido, liberatorio congedo, ancor prima che si proceda con le presentazioni. L’ambiente è impressionante. Il Poeta del resto, poco incline ai convenevoli, esclusi quelli strettamente di rito, dopo un breve scambio di parole, non sembra propenso al dialogo. Lunghi silenzi, interrotti da brevi domande sullo stato di salute del recluso, restano senza risposta, con evidente imbarazzo di Mullins, che più volte rivolge lo sguardo a Mrs. Dorothy, mentre gli occhi di Pound, seminascosti da cispose sopracciglia, lo fissano con insistenza.
“Lei ha fatto la guerra?” Chiede il Poeta. E la domanda riduce l’impaccio del bibliotecario, ma ne aumenta comunque la sudorazione corporea.
“Sì. Ho prestato servizio nell’US Army, e nel 1945 facevo parte delle Forze di occupazione in Baviera.”
“ Si è mai chiesto perché?”
“Come?”
“Perché?”
“Perché ho servito la mia Patria.”
“No. No. Si è mai chiesto perché è scoppiata la guerra?”
Mullins impallidisce.
“Si è mai chiesto che cosa rappresentano gli enormi e profondi crateri di Hiroshima, scavati e modellati nella calda estate del 1945?”
“Lei sa che cos’è la Federal Reserve Bank?”
“La Banca Centrale degli Stati Uniti.”
“Non esattamente. E’ la responsabile della Prima e della Seconda Guerra Mondiale!”
Mullins ascolta attonito.
Nel linguaggio di Pound ricorre la parola Usura, che vuol dire International Loan System, rete dei prestiti pubblici organizzata dall’Investment Banking, cui spetta il diritto di intermediazione su ogni scambio internazionale. La memoria di un passato non più recente, ma incancellabile, emerge, imperiosa e sgradita, componendo immagini che velocemente si sovrappongono per ricordare ferite inguaribili, inflitte nel profondo dell’animo.
Tempi e luoghi diversi evocano il lungo soggiorno europeo e il passo dell’esule, cadenzato sui ritmi poetici del Cavalcanti e l’Alighieri, per tradurlo nel linguaggio, illuminante e faticoso dei Cantos. Parigi e la Bella Signora Italia, più volte violentata e offesa. Venezia, la Riviera. Il 1945 è anno cruciale. Oltre all’arresto del cittadino americano “traditore” che osò denunciare i responsabili di due guerre mondiali, si segnalava nei pressi del lago di Como, la presenza di un britannico obeso, con l’orecchio all’ascolto di sempre più fievoli eco, disperse nel vuoto, fino alla decisa pressione d’uno scarpone militare straniero; un brindisi di compiacimento per festeggiare la morte di Radio Roma e i trionfi del Dio della Guerra.
Un’analisi retrospettiva è essenziale, dice il Poeta, non certo per convincere chi baratta la libertà con la miopia, ma per… vederci chiaro. La sorpresa non manca, quando Pound afferma che in quella occasione l’agenda di Winston Churchill non valeva meno dei diari di Mussolini e di una cartella marrone, contenente carte compromettenti.
Il premier inglese era solito annotarvi date importanti, usando la matita rossa, come per esempio “Yalta – 4 febbraio 1945”.
Per Dresda preferiva il colore blu, che ricorda le bombe al fosforo, stilando di suo pugno le note su quanto sarebbe avvenuto nella città tedesca undici giorni dopo.
Perché mai la Conferenza economica di Bretton Woods ebbe luogo un mese dopo lo sbarco in Normandia? Una direttiva del “War Production Board”, o un ordine preciso del “Pool” di Banche Internazionali che finanziavano le industrie di armamenti? Chi aveva voluto la guerra, manovrando astutamente “dietro le quinte”? Chi pretendeva il controllo della finanza mondiale?
Mullins è impressionato.
Pound continua…
Provincia di Como, Giulino di Mezzegra e dintorni – 28 aprile 1945
Lo stesso signore sovrappeso, calvo e vestito di scuro, la matita rossa e blu nel taschino, pronta a scrivere luoghi e date, e a tracciare una bella “X” trasversale sopra un nome importante e troppo scomodo. Che cosa fa costui, quando gli Alleati sono alle porte e il Cln combatte la “sua” guerra di ritorsione? Dipinge mediocri acquarelli sulle rive del lago.
Alle creazioni artistiche assistono a breve distanza i suoi attenti custodi, agenti del Secret Operations Executive (SOE).
Fra i cadaveri, che entro poche ore penderanno a testa in giù in Piazzale Loreto, ci sarà anche quello dell’uomo che voleva difendersi e sapeva troppe cose.
Il signore obeso, vestito di scuro, che non conosce le sventure di Mani, l’eretico, né l’orrenda fine di Dioniso, o del Paracleto consolatore, due volte crocifisso, traccia due “X” in rosso su quel nome e riprende a pasticciare acquarelli.
Nelle orecchie risuonano i primi sette versi del Canto Pisano 74, (scritti su carta igienica, all’interno di una gabbia per animali, esposta alle intemperie in aperta campagna).
Lì si apprende che rischia la condanna a morte chiunque raccomandi la “moneta a scadenza” di Silvio Gesell, le teorie monetarie del Maggiore Douglas e osi maledire il “putrido” gold standard e i Banchieri usurai. Ma dal ventoso viale di Washington, dove si aprono i portali della Suprema Corte giunge l’eco della sentenza, nella severa voce di un giudice che si appresta a decretare insanità mentali.
Il “folle” avrebbe fatto anche l’uomo in gabbia per manifestare i tormenti del secolo breve e il grande inganno, di cui il mondo sarebbe stato vittima, senza il bisogno di cercare conferme fra gli appunti di Winston Churchill.
In America intanto i sondaggi già tendono a far crescere l’ottimismo, mentre di fatto la vita continua fra incertezze e paure.
Per altro, nessuno crede più alla casualità di quel che accade in politica. Né alle stime che confermano il prevalere degli “accidentalisti” sui “cospirazionisti”. Ma chi se la sentiva allora di smentire il compianto Presidente, Franklin Delano Roosevelt, autorevole pedina di Wall Street, e quanto egli avrebbe confidato al proprio ambasciatore a Londra, Joseph (Joe) Kennedy: “ In politics nothing happens by chance, if it happens you may bet it was planned that way”?
Nel grande Paese della Libertà si vive intanto l’età dell’ansia, da secoli sofferta e pianificata per i decenni a venire.
“The Age of Anxiety” è, fra l’altro, poema fresco di stampa, che guadagna il Pulitzer, la buona fama di W.H. Auden e crea non pochi equivoci nella società americana del dopoguerra, più incline a ingoiare ansiolitici che a leggere versi (ignorando che le strade della follia spesso non portano al manicomio).
Pound si congeda, pregando Mrs. Dorothy di accompagnare il visitatore all’uscita.
Al commiato, un biglietto di 10 dollari si protende verso Mullins ed è accettato volentieri. Rimborso spese settimanali per svolgere una piccola inchiesta.
Dove? Alla Library of Congress, naturalmente. Lì c’è tutto quello che occorre sapere sul Vreeland-Aldrich Act, e molto altro ancora. Per esempio quanto accadde in una stazione ferroviaria del New Jersey durante una sera d’autunno del 1910.
Il bibliotecario intanto accetta l’incarico che gli costerà, subito dopo, il posto di lavoro.
23 Settembre 2011 12:00:00 - http://rinascita.eu/index.php?action=news&id=10489
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jeudi, 29 septembre 2011
Der Staat in interiore homine: Die Staatskonzeption Giovanni Gentiles
Der Staat in interiore homine: Die Staatskonzeption Giovanni Gentiles
Giovanni B. Krähe
http://geviert.wordpress.com
Giovanni Gentile war bereits in den Jahren um den Ersten Weltkrieg eine Leitfigur des italienischen Geisteslebens. Als der Faschismus zum Regime wurde, wurde er im ersten Kabinett Mussolinis Erziehungsminister (Oktober 1922 – Juni 1924) und führte eine tiefgreifende Reform der Schulen und Universitäten durch (Canistraro 1982; Fossati 1998; Ragazzini 1998). Als persönlicher Vertreter Mussolinis verfasste Gentile die faschistische Staatslehre (Dottrina del Fascismo, 1928-1929) und leitete L’istituto fascista di cultura (1925), so dass er lange Zeit die führende Persönlichkeit der Intellektuellen blieb, die sich für den Faschismus entschieden hatten. Als die militärische Niederlage des Faschismus bereits offensichtlich war, hielt Gentile dem Regime Treue und nahm an der von Mussolini gegründeten Repubblica di Salò (1943-1945) teil, bis er am 15. April 1944 von kommunistischen Partisanen erschossen wurde. Nach Campi (2001) war der gewaltsame Tod von Gentile für die Kommunistische Partei Italiens notwendig, wenn sie eine neue politische Hegemonie nach dem Sturz des Faschismus durchführen wollte. Dieses hegemonische Projekt „era finalizzato ad imprimere al Partito comunista Italiano una base ideologica nazionale ed a sostituire l’egemonia crociano-gentiliana con quella marx-gramsciana …” (Campi 2001: 152). Die theoretische Grundlage der Staats-philosophie Gentiles und damit die Ideen über die Rolle des Staats als politische Institution wurden aber von Gentile formuliert, bevor der Faschismus als solcher existierte. Tatsächlich schrieb Gentile seine ersten politischen Schriften während des Ersten Weltkriegs. Seine Überlegungen über den Zusammenhang zwischen Philosophie und Politik hatten damals einen besonderen Stellenwert in Gentiles politischem Denken:
La realtà nota alla filosofia moderna è lo spirito inteso come quella realtà appunto che il filosofo attua filosofando … E però filosofare è precisamente conoscere (e quindi costruire) non una generica personalità politica e il sistema al quale essa può appartenere, ma la propria personalità attuale nel sistema della politica del proprio paese. E soltanto attraverso la determinatezza di questa individualità storica si fa strada l’universalità del concetto, a cui la filosofia oggi aspira (Gentile 1918d: 153-154).
Der Krieg, an dem Italien seit 1915 auf Seiten der Entente teilnahm, wurde von Gentile nicht als der Sieg oder die Niederwerfung konkurrierender Nationen, sondern als symbolisches Ereignis sowie moralische Pflicht aufgefasst, der sich niemand entziehen durfte. Der politische und geistige Zusammenschluss der Italiener, der in Friedenszeiten nicht möglich wäre, wurde nach Gentile durch die außergewöhnliche Anstrengung der Kriegszeit erreicht: „Politisches Endziel bleibt die Verpflichtung aller auf das nationale Interesse und insoweit die Schaffung einer einheitliche Gemeinschaft im Gegensatz zu einer zersplitterten Gesellschaft“ (Schattenfroh 1999: 101). Diese totalisierende Konzeption des Kriegsereignisses, die den Anstoß, so Gentile, zu einer politisch-moralischen Erneuerung des Lebens in Italien gibt, übernimmt eine integrative Funktion, indem das Schicksal jedes Einzelnen mit dem Schicksal der Nation verflochten wurde: Der Bürger wird mit seinem Staat durch den starken Charakter des Kriegserlebnisses politisch identifiziert und der Staat wird gleichzeitig durch Ontologisierung zum Garanten dieses Identitätsprinzips. Darin, dass Gentile dieses Identitätsprinzip mit dem Kriegserlebnis als moralischer Pflicht gleichsetzt, liegt die erste Grundlage des Staatsbewusstseins als Garanten der Einheit zwischen Gesellschaft und Staat, d.h. als Stato etico (ethischer Staat) (vgl. Gentile 1918b: 13). Sowohl die Nationsidee als transzendente Einheit aller politischen Fraktionen (Gentile 1919a, 1919b), als auch die Tendenzen zum aktiven Veränderungswillen als Handlungsmodell setzen sich in den ersten philosophischen Überlegungen Gentiles fort (vgl. Gentile 1918b: 17; 1918c).
In Gegensatz zur klassischen liberalen Staatskonzeption, die in der modernen gesellschaftlichen Entwicklung eine unterscheidbare sowie autonome Zivilgesellschaft sieht, integriert Gentile die Staatlichkeit als organische Leitidee in das Bewusstsein des Individuums. Daraus aber resultiert, dass der faktische Staat als politische Institution und damit sein Machtapparat den Einzelwillen nicht auflöst, insofern als der Staat als verinnerlichte soziale Institution ein Lebenszweck des Individuums wird:
Lo Stato non è inter homines, come pare, ma in interiore homine: non è niente di materiale, ma una realtà spirituale, che è in quanto vale; e vale nella coscienza del cittadino. Il quale non riconosce fuori di sé la società, di cui è parte, se non in quanto la instaura dentro di se medesimo, come parte essa stessa, della sua vita morale (Gentile 1919c: 113 Hervorhebung von mir).
Die These der Identität von Staat und Bürger leitet sich aus den philosophischen Grundlagen der aktualistischen Ethik Gentiles ab. Die „Philosophie des Akts“ bzw. „der aktualistischen Idealismus“, kurz „Aktualismus“, fokussiert das Interesse auf die Struktur des menschlichen Geistes, der als Denkprozess betrachtet wird (Gentile 1987).
Auf einer erkenntnistheoretischen Ebene folgert Gentile tatsächlich alle Wirklichkeit aus der Tätigkeit des Denkens, indem die Außenwelt dem menschlichen Geist in Form des „absoluten Ichs“ zugesprochen wird (Gentile 1987: 18 ff.). Die Außenwelt als Produkt des menschlichen Geists wird aber in einem Subjektivismus nicht aufgelöst, insofern als das Verhältnis zwischen absolutem Ich und Individuum nicht unmittelbar ist. In Gegensatz zu den philosophischen Voraussetzungen des klassischen Idealismus, erweist sich der Aktualismus „als eine totalisierende Philosophie des menschlichen Tuns an sich“ (Schattenfroh 1999: 64), insofern als sich die Tätigkeit des denkenden Ichs nicht auf das Objekt, sondern auf den praktischen Akt des Willens, auf den „pensiero pensante“, stützt (Gentile 1987: 44).
Durch die zentrale Stellung des „reinen“ Akts als philosophisches Prinzip entsteht aber ein spezifisches Verhältnis zwischen dem „absoluten Ich“ Gentiles und dem Individuum: Das „absolute“ Ich kann sich als Tätigkeit des Denkens eines partikulären Individuums nicht erweisen – wenn ja, würde daraus resultieren, dass die Erkenntnis der Außenwelt nicht total durch den Akt, sondern partial durch das relativistische Verhältnis Objekt-Subjekt, wie beim klassischen Idealismus geschehen würde. Im Vordergrund der Begriffsbildung Gentiles steht also der Mensch als solcher, nicht die konkreten Individuen. Gentile nennt individualistische Konzeptionen sowie ihre politischen Erscheinungsformen – Liberalismus und Sozialismus – unterschiedslos „Materialismus“, da sowohl eine abstrakt-theoretische Einheit (die Pluralität von Individuen), als auch ein Telos (der Kommunismus) von beiden Denkströmungen monistisch vorausgesetzt werden:
L’idealismo assoluto e il materialismo storico sono tutti due monismi e per la forma e per la sostanza. Tutto è continuo divenire: monismo della forma. Tutto è essenzialmente idea … o materia, monismo della sostanza (Gentile 1957: 148).
Auf einer sozialphilosophischen Ebene sieht also Gentile nicht im dialektischen Prozess der verschiedenen individuellen Akte, sondern im Moment des menschlichen Willens als Akt des absoluten Subjekts die Entstehung der Gesellschaft. Am Ausgangspunkt der Staatskonzeption Gentiles wird die Pluralität von Personen ausgeklammert, da die Gesellschaftlichkeit mit der Universalität des aktualistischen Willens als überindividueller Wille gleichgesetzt wird. Die Individuen werden durch diesen überindividuellen Willen als Staat in interiore homine aufgelöst, der Spiegelbild des faktischen Staates ist.
Der faktische Staat ist aber für Gentile ständiger Prozess eines nie ganz vollendeten idealen Staates. Auf der Tendenz zur Einheit von Einzel- und Gemeinschaftswillen durch ein normatives Staatsmodell – den ethischen Staat - beruht der politische Charakter der Pädagogik Gentiles und dadurch die Rolle der kulturellen Sphäre in der Gesellschaft (Gentile 1925a, 1927). Der Zusammenhang zwischen Politik und Kultur, zwischen politischen Institutionen und gesellschaftlichen Zeichenpraktiken beruht auf der Möglichkeit, dass ein vollendeter ethischer Staat zu einem Erzieherstaat werden kann. Nach Gentile kann der Staat Bestand haben, wenn er ein kollektiv-einheitliches politisches Bewusstsein durch ein politisch-edukatives Programm ermöglicht (vgl.Gentile 1925b). In Gegensatz zum klassischen Liberalismus, der die freie individuellen Entfaltungsmöglichkeiten betont, hebt Gentile die Überwindung der Trennung von subjektivistisch-individueller sowie entpolitisierter „Kultivierung des Geistes“ und überindividuellem Willen als idealer Kulturstaat in interiore homine hervor:
E noi, in mezzo al popolo italiano e tra le scuole in cui esso ha incominciato a rinnovarsi e temprarsi al nuovo ideale della vita nazionale, vogliamo levare una bandiera che possa richiamare e raccogliere intorno a sé uomini di pensiero e uomini di azione in una società che faccia sentire al pensiero la sua immanente responsabilità pratica e all’azione la sua segreta scaturigine nei sentimenti che il pensiero educa e alimenta (Gentile 1925a: 65; vgl. dazu 1918a).
Im Erzieherstaat als Schöpfer jeder Semantik in der Gesellschaft erschienen klar die hegemonischen Elemente von Gentiles Staatsideen. Durch die Überwindung der Trennung von Kultur und Politik/Staat wurde so das politisch-edukative Programm Gentiles zur Hegemoniekonzeption des italienischen Faschismus.
Fossati, Roberta (1998): Giovanni Gentile. In: Alberto di Bernardi/ Scipione Guarracino (Hrsg.): Il Fascismo. Dizionario di storia, personaggi, cultura, economia, fonti e dibattito storiografico. Milano: Mondadori.
Ragazzini, Dario (1998): Riforma Gentile. In: Alberto di Bernardi/ Scipione Guarracino (Hrsg.): Il Fascismo. Dizionario di storia, personaggi, cultura, economia, fonti e dibattito storiografico. Milano: Mondadori.
Schattenfroh, Sebastian (1999): Die Staatsphilosophie Giovanni Gentiles und die Versuche ihrer Verwirklichung im faschistischen Italien. Frankfurt a.M.: Peter Lang Verlag.
Gentile, Giovanni/Mussolini, Benito/ Volpe, Gioacchino (1932): Dottrina del Fascismo. In: Enciclopedia Italiana di scienze, lettere ed arti. Bd. XIV. Roma: Treccani. S. 847-884.
Gentile, Giovanni (1918a): L’unità della cultura. In: Giovanni Gentile: Fascismo e cultura. Hrsg. von Istituto nazionale fascista di cultura. 1928. Milano: Fratelli Treves Editori. S. 1-15.
- (1918b): Il significato della vittoria. In: Giovanni Gentile: Dopo la vittoria. Opere. Bd. XLIV. 2., erweit. Aufl. 1989. Firenze: Le Lettere. S. 5-18.
- (1918c): Lo spettro bolscevico. In: Giovanni Gentile: Dopo la vittoria. Opere. Bd. XLIV. 2., erweit. Aufl. 1989. Firenze: Le Lettere. S. 27-30.
- (1918d): Politica e filosofia. In: Giovanni Gentile: Dopo la vittoria. Opere. Bd. XLIV. 2., erweit. Aufl. 1989. Firenze: Le Lettere. S. 138-158.
- (1919a): Stato e categorie. In: Giovanni Gentile: Dopo la vittoria. Opere. Bd. XLIV. 2., erweit. Aufl. 1989. Firenze: Le Lettere. S. 69-72.
- (1919b): Ordine. In: Giovanni Gentile: Dopo la vittoria. Opere. Bd. XLIV. 2., erweit. Aufl. 1989. Firenze: Le Lettere. S. 31-34.
- (1919c): L’idea monarchica. In: Giovanni Gentile: Dopo la vittoria. Opere. Bd. XLIV. 2., erweit. Aufl. 1989. Firenze: Le Lettere. S. 108-118.
- (1919d): Liberalismo e liberali. In: Giovanni Gentile: Dopo la vittoria. Opere. Bd. XLIV. 2., erweit. Aufl. 1989. Firenze: Le Lettere. S. 120-131.
- (1925a): Discorso inaugurale dell’istituto nazionale fascista di cultura. In: Giovanni Gentile: Fascismo e cultura. Hrsg. von Istituto nazionale fascista di cultura. 1928. Milano: Fratelli Treves Editori. S. 17-37.
- (1925b): Contro l’agnosticismo della scuola. In: Giovanni Gentile: Fascismo e cultura. Hrsg. von Istituto nazionale fascista di cultura. 1928. Milano: Fratelli Treves Editori. S. 39-43.
- (1927): I propositi dell’istituto. In: Giovanni Gentile: Fascismo e cultura. Hrsg. von Istituto nazionale fascista di cultura. 1928. Milano: Fratelli Treves Editori. S. 77-81.
- (1957): La filosofia di Marx. Studi critici [zuerst 1899]. In: Giovanni Gentile. Opere. Bd. XVIII. Firenze: Sansoni.
- (1987): Teoria generale dello spirito come atto puro [zuerst 1916]. 7., bearb. Aufl. In: Giovanni Gentile. Opere. Bd. III. Firenze: Le Lettere. S. 1-86.
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Masa y Poder: Ezra Pound pedagogo
Presentación del libro de Ezra Pound; Guía de la Kultura, Capitán Swing, Madrid, 2011
“I was twenty years behind the Times”
(Ezra Pound, ‘Contemporania’, 1913)
Masa y Poder: Ezra Pound pedagogo
Por Nicolás González Varela
http://geviert.wordpress.com
“GUÍA DE LA CULTURA. Título ridículo, truco publicitario. ¿Desafío? Guía debería significar ayuda a otra persona a llegar a un sitio. ¿Debemos de despreciarlo? Tiros de prueba.”[1] El único libro del economista-poeta Ezra Loomis Pound que salió en el annus memorabilis de 1938[2] fue una anomalía desde todo punto de vista. Su título: Guide to Kulchur (GK). En sus páginas puede disfrutarse del mejor Pound vanguardista, que como Minerva nace armado con su método ideogramático, un Pound sin temor ni temblor a fundir en una nueva síntesis, en una Summa de su pensamiento, nada menos que a Jefferson, Mussolini, Malatesta, Cavalcanti y Confucio. Pound vive en la Italia fascista desde fines de 1924, ha vivido la consolidación, estabilización y maduración del regimen fascista, desde cuyas fórmulas políticas e instituciones económicas, cree con fervor, puede plantearse una terza via entre el capitalismo liberal en bancarrota y el socialismo burocrático de Stalin. También son los años en que Pound, demostrando su estatura intelectual, pasa de las preocupaciones estéticas a las éticas. El libro tiene su propia historia interna, una poco conocida tortured history: en febrero de 1937 Pound inicia una correspondencia con el playful in-house editor Frank Morley (a quién Pound llamaba cariñosamente por su tamaño Whale, ballena), de la editorial inglesa Faber&Faber. Pound le informa acerca de un nuevo libro revolucionario de prosa. Estaría muy bien, le contestaba Morley, que en lugar de escribir algo similar a su ABC of Reading, de 1934, publicara sus ideas sobre lo que entiende por la Cultura con mayor extensión y profundidad. Inmediatamente Pound le contesta que pensaba en primer lugar en una obra que se llamaría The New Learning (El nuevo Aprendizaje), luego sugirió el nombre de Paideuma, pero desde el principio el editor Morley lo consideraría, más que como un Hauptwerk exhaustivo sobre el tema, como una introducción o guía, por lo que surgió el nombre de Guide to Cultur, que llevaría un subtítulo curioso luego desechado “The Book of Ezro”: “un libro que pueda funcionar como una educación literaria para el aspirante a todas las excavaciones y que desea hacer volar el mundo académico antes que hacer su trabajo.”[3] Morley además le aseguraba que para un popular textbook como del que hablaba, existía un amplio mercado potencial de lectores. En una carta dirigida al editor Pound en febrero de 1937 describía el proyecto como “lo que Ez (Ezra) sabe, todo lo que sabe, por siete y seis peniques” (y en tamaño más portable que el British Museum)[4], y le explicaba que introduciría algunos contrastes entre la decadencia de Occidente y Oriente y que también mencionaría los aspectos “raciales” de la Cultura. Además describía el esqueleto de su futura obra en tres grandes bloques: I) Método (basado en las Analectas de Confucio); II) Filosofía (en tanto una exposición y a la vez crítica de la Historia del Pensamiento) y III) Historia (genealogía de la acción o los puntos cruciales del Clean Cut).[5] Finalmente se firmó el contrato formal entre ambas partes y el libro se denominaba en él como Ez’ Guide to Kulchur.
GK fue publicada entonces por la editorial Faber&Faber[6] en el Reino Unido en julio de 1938 y por la editorial New Directions, pero bajo el título más anodino de Culture, en noviembre de 1938 en la versión para los pacatos Estados Unidos. Pound la escribió de corrido en un mes durante la primavera de 1937 (marzo-abril), bajo un estado anímico al que algunos biógrafos como Tytell denominaron “a sense of harried desperation”.[7] Como saben los que conocen su vida y obra, cada movimiento que propugnaba lo tomaba como un asunto de emergencia extrema y límite. Según el irónico comentario del propio Pound “el contrato de la editorial habla de una guía DE la cultura no A TRAVÉS de la cultura humana. Todo hombre debe conocer sus interioridades o lo interno de ella por sí mismo.” y efectivamente no defraudó a sus editores en absoluto. El libro (si podemos denominarlo así) era un escándalo antes de ver la luz. Aparentemente nadie de la editorial leyó en profundidad el manuscrito en su contenido polémico y cercano al libélo. Ya había ejemplares encuadernados, listos para entregar al distribuidor, cuando la editorial inglesa Faber&Faber decidió que, posiblemente, algunos pasajes eran radicalmente difamatorios. Al menos, según cuentan especialistas y biógrafos confiables, se arrancaron quince páginas ofensivas, se imprimieron de nuevo y se pegaron con prisa; también se imprimieron nuevos cuadernillos de páginas para los ejemplares que no habían sido encuadernados todavía.[8] No nos extraña: sabemos que Pound como crítico “jamás experimentó el temor de sus propias convicciones”, en palabras de Eliot. Quod scripsi scripsi. Lo extraño y maravilloso es que el libro como tal haya sobrevivido a semejante desastre editorial. GK fue finalmente publicado el 21 de julio de 1938, estaba dedicada “A Louis Zukofsky y Basil Bunting luchadores en el desierto”. Zukofsky era un mediocre poeta objetivista neyorquino, autodefinido como communist, al que Pound adoptó como discípulo y seguidor de sus ideas[9]; a su vez Bunting era un poeta británico, conservador e imperialista, que Pound ayudó con sus influencias intelectuales y el mecenazgo práctico.[10] Pound mismo consideraba GK, circa 1940, como la obra en la que había logrado desarrollar su “best prose”[11], además la ubicaba, junto a The Cantos, Personae, Ta Hio, y Make It New, en el canon de sus opera maiorum. También lo consideraba uno de sus libros más “intensamente personales”, una suerte de ultimate do-it-yourself de Ezra Pound. Su amigo, el gran poeta T. S. Eliot afirmó que tanto GK como The Spirit of Romance (1910) debían ser leídos obligatoriamente con detenimiento e íntegramente. Aunque puede considerarse el más importante libro en prosa escrito por Pound a lo largo de su vida[12], sin embargo Guide to… no cuenta con el favoritismo de especialistas y scholars de la academia (a excepción de Bacigalupo, Coyle, Davie, Harmon, Lamberti, Lindberg y Nicholls).[13] El mejor y más perceptivo review sobre el libro lo realizó su viejo amigo el poeta Williams Carlos Williams, en un artículo no exento de críticas por sus elogios desmesurados a Mussolini titulado “Penny Wise, Pound Foolish”. En él, Williams señalaba que a pesar de todas su limitaciones o errores involuntarios, GK debía ser leído por el aporte de Pound en cuanto a revolucionar el estilo, por su modo de entender la nueva educación de las masas y por iluminar de manera quirúrgica muchas de las causas de la enfermedad de nuestro presente.[14] En cambio nosotros no consideraremos a GK ni como un libro menor, ni como un divertido Companion a su obra poética, ni como un torso incompleto, ni siquiera como un proyecto fallido. En realidad GK es una propedeútica al sistema poundiano, su mejor via regia, un acceso privilegiado a lo que podríamos denominar los standard landmarks[15] de su compleja topografía intelectual: la doctrina de Ch’ing Ming, el famoso método ideogramático, su libro de poemas The Cantos entendido como un tale of the tribe, la figura de la rosa in steel dust,[16] la forma combinada de escritura paratáctica[17], el uso anti y contrailustrado de la cita erudita, su deriva hacia el modelo fascista (la economía volicionista y su correspondiente superestructura cultura)[18], la superioridad en el conocimiento auténtico de la Anschauung[19] como ars magna y el concepto-llave de Paideuma. GK puede ser además considerado un extraordinario postscript a su opera maiorum, hablamos de la monumental obra The Cantos, en especial a los poemas que van del XXXI al LI, publicados entre 1934 y 1937. Pound se propone incluso romper con su propia prosa pasada: “Estoy, confío de manera clara, haciendo con este libro algo diferente de lo que intenté en Como leer, o en el ABC de la Lectura. Allí estaba tratando abiertamente de establecer una serie o un conjunto de medidas, normas, voltímetros; aquí me ocupo de un conjunto heteróclito de impresiones, confío que humanas, sin que sean demasiado descaradamente humanas.”[20]
En primer término, y por encima de todo, debemos señalar al lector ingenuo que Ezra Loomis Pound ha sido un pedagogo y un propagandista antes que nada y se propone nada más ni nada menos que GK sea un Novum Organum, al mejor estilo baconiano[21], de la época incierta que se abre ante sus pies. Llamarlo Kulchur tiene su explicación filosófica y política: Pound quería referirse al concepto alemán de Cultura (Kultur) pero para diferenciarlo del tradicional que utiliza la élite (irremediablemente lastrado de connotaciones clasistas, nacionalistas y raciales), lo escribe según la pronunciación; y al mismo tiempo anula la indicación tradicional que tiene el concepto Cultur en inglés. Este sesgo nuevo y revolucionario a lo que entendemos en la Modernidad por Cultura es el primer paso para la tarea de un New Learning de masas y la posibilidad histórica de un nuevo Renacimiento en Europa, ya que “las democracias han fallado lamentablemente durante un siglo en educar a la gente y en hacerle consciente de las necesidades totalmente rudimentarias de la democracia. La primera es la alfabetización monetaria.” Su significado temático revolucionario, intentar comprender de otro modo al Hombre, la Naturaleza y la Historia, debemos señalarlo, excede el mero ejercicio de escribir poesía. Es una vigorosa reacción contra la Aufklärung, que para Pound es una período de lenta decadencia, la verdadera Dark Age de Occidente, signado por la subsunción de toda la Cultura a la usura y el mercantilismo más brutal (institucionalizados en una forma perversa: la banca): “Hemos ganado y perdido cierto terreno desde la época de Rabelais o desde que Montaigne esbozó todo el conocimiento humano.”[22] Como Nietzsche, Pound rescata de las Lumiéres tan solo a Bayle y Voltaire y si Nietzsche intentó este nuevo desaprendizaje-aprendizaje contra la Modernidad desde la forma literario-política del aforismo, Pound lo intentará desde el ideograma y el fragmento citacional, buscando el mismo efecto pedagógico en las masas, en el hombre sin atributos, que había experimentado en persona en la Mostra della Rivoluzione Fascista[23] inaugurada en el Palazzo delle Esposizioni de Roma en 1932.
¿El libro es en realidad un enorme ideograma de acceso a la verdadera Kulchur? Recordemos que para Pound Cultura con mayúsculas es cuando el individuo ha “olvidado” qué es un libro, o también aquellos que queda en el hombre medio cuando ha olvidado todo aquello que le han enseñado.[24] Y que entonces de alguna manera la auténtica Cultura se correlaciona con una forma privilegiado de relación entre el sujeto y el objeto, la Anschauung, opuesta sin posibilidad de cancelación con el Knowledge de la Modernidad, un producto amnésico y totalitario (en sentido gestáltico, no político) prefabricado a través de un enfoque deficiente de el Arte, la Economía, la Historia y la Política. La Anschauung es superior, tanto epistémica como políticamente: “La autoridad en un mundo material o salvaje puede venir de un prestigio acumulado, basado en la intuición. Confiamos en un hombre porque hemos llegado a considerarle (en su totalidad) como hombre sabio y bien equilibrado. Optamos por su presentimiento. Realizamos un acto de fe.”[25] Siempre hay que subrayar que Pound no tiene como propósito exclusivamente el regodeo narcisista de transmitir “descubrimientos”, ni progresar en algún tipo de carrerismo académico, sino que su pathos radical presionaba a que sus tesis deben ser llevadas a la práctica, y por ello él mismo nos muestra el camino y custodia con celo la senda adecuada para tal traducción material: “Y al llegar aquí, debemos hacer una clara diferencia entre dos clases de «ideas». Ideas que existen y/o son discutidas en una especie de vacío, que son como si fueran juguetes del intelecto, e ideas que se intentan poner en «acción» o guiar la acción y que nos sirven como reglas (y/o medidas) de conducta.”[26] La distinción de Pound fijada en el concepto técnico de “Clean Cut” entre ideas in a vacuum y las ideas in action (básicas como reglas de conducta) es crucial en este sentido.[27] Pound decía que al final GK no era más que “su mapa de carreteras, con la idea de ayudar al que venga detrás a alcanzar algunas pocas de las cimas, con menos trabajo que el que uno ha tenido…” Para lograr una educación profunda y postliberal, decía Pound que el alumno debía dominar las siguientes bases mínimas: todo Confucio (en chino directamente o en la versión francesa de M. G. Pauthier), todo Homero (en las traducciones latinas o en la francesa de Hughes Salel), Ovidio, Catulo y Propercio (utilizando como referencia la Metamorfosis de Golding y los Amores de Marlowe), un libro de canciones provenzales (que al menos incluya a los Minnesingers y a Bion), por supuesto Dante (además treinta poemas de sus contemporáneos, en especial de Cavalcanti), “algunos otros temas medievales… y algún esbozo general de la Historia del Pensamiento a través del Renacimiento, Villon, los escritos críticos de Voltaire (incluyendo una pequeña incursión en la prosa contemporánea), Stendhal, Flaubert (y por supuesto los hermanos Goncourt), Gautier, Corbière y Rimbaud.”[28] GK es la Guía Baedeker, que puede superar en un solo mandoble las limitaciones tanto de la Modernidad liberal como el Comunismo de sello staliniano[29], a través de una nueva genealogía basada en lo que denomina the Best Tradition, o en palabras de Pound “En lo esencial, voy a escribir este nuevo Vademécum sin abrir ningún otro volumen, voy a anotar en la medida de lo posible solamente lo que ha resistido a la erosión del tiempo y al olvido. Y en esto hay un poderoso argumento. Cualquier otro camino significaría que me vería obligado a tener que citar un sinnúmero de historias y obras de referencia.”[30]
El primer efecto del método poundiano en el lector ingenuo y tradicional es la desorientación en el maremagnum de las yustaposiciones y la interrupciones en la ilación lógica. Además es evidente que Pound “juega” con el diseño gráfico de la página, trasciende la linearidad del texto, subvierte las normas establecidas de signos y morfología, trascendiendo el contenido a través de imágenes: reproducción de ideogramas, partituras musicales, fragmentos citacionales de temas diversos, citaciones ad verbatim, déjà-vus semánticos, formas coloquiales anónimas et altri. Esto efectos no son meramente buscados en busca de algún efecto visual “vanguardista”, “lúdico” o “creativo”, en absoluto (aunque co-existan en GK como efectos de composición) sino de crear un nuevo soporte, mitad estilo mitad icónico, capaz de vehicular, de soportar como medio comunicativo eficaz, la nueva sensibilidad que reclama Occidente en decadencia: “El lector con prisas puede decir que escribo en clave y que mis afirmaciones se deslizan de un punto a otro sin conexión u orden. La afirmación es, sin embargo, completa. Todos los elementos están ahí, y el más perverso de los aficionados a los crucigramas debería ser capaz de resolverlo o de verlo.”[31] Pound reclama en GK su idea de One-Image Poems, paradigma poético-icónico, o incluso podemos llamarlo una suerte de “lenguaje mosaico”, que como hemos señalado, se eleva sobre el sólido fundamento de la yuxtaposición paratáctica de texto e imágenes diversas, creando una suerte de espacio acústico.[32] El aspecto formal del método ideogramático es muy importante para Pound, y uno de sus componentes centrales es su propia definición de imagen como una presencia compleja que implica tanto lo intelectual como lo puramente emocional en una simultaneidad: “an Image is that which presents an intellectual and an emotional complex in an instant of time.”[33] Una definición totalmente bergsoniana: la inmediata, la interacción intuitiva inmediata con la imagen, el mismo instante del tiempo en que esta interacción se produce, el espontáneo crecimiento formativo por la presencia del élan vital, el retorno a los horned Gods y la libertad total con respecto de los límites “normales” que determinan el cuadro perceptivo burgués, tienen directa contraparte con el concepto de evolución creadora de la filosofía de Henri Bergson.
GK es concebido por Pound para las grandes masas, el gran público amorfo de la infernal sociedad industrial-mercantilista[34], el despreciado uomo qualunque, al cual el poeta intenta re-educar en un modo revolucionario, polémico y de mortal enfrentamiento con el sistema institucional y académico burgués y para sobrevivir a la sobre información generada por la opinión pública moderna: “Estoy, en el mejor de los casos, tratando de suministrar al lector medio unas pocas herramientas para hacer frente a la heteróclita masa de información no digerida con que se le abruma diaria y mensualmente, y lista a enmarañarle los pies por medio de libros de referencia.”[35] La hipótesis no explícita de Pound es el reconocimiento de la irrupción irreversible en la Historia de una nueva “masa”, heterogénea y segmentada (aunque tanto el tardoliberalismo como el burocratismo soviético intentarán homogeneizarla y uniformarla), que empuja a revisar axiomas y arcani imperii consolidados: estado, economía, política, cultura, organismo social, poder. Es a esta masa, que soporta el efecto reaccionario de los new media, es el objeto privilegiado de intervención al que se dirige GK con la ideología a la que adhiere Pound, tanto en lo personal (las nuevas teorías económicas de Gesell, el confuso antisemitismo)[36] como en lo corporativo (el Stato totale de la Italia fascista como anticipación)[37]. El método ideogramático se coloca así como una refinadísima actividad de agitprop, con la capacidad de retomar fuentes de la tradición culta (consciente y críticamente seleccionadas)[38], elementos literarios como la voz y la autoridad autoral (que le otorga credibilidad e identidad al texto), para refundirlos con los nuevas necesidades de consenso y reproducción que han generado en el sustrato popular los nuevos medios de comunicación (¡de masas!) de la esfera pública burguesa, así como las modalidades de consumo y ocio. Y es por ello la importancia hoy de volver a leer GK como un laboratorio que lleva a sus límites la propia Weltanschauung tardomodernista, en esa experimentación entre desarrollo formal y la voluntad de generar nuevos “efectos” que van más allá de lo meramente poético en el uso de herramientas retóricas.
Pound persigue regenerar un Total Man, pero revulsivo y de signo inverso al de la ideología demo-liberal, que puede realizar una conversión y metamorfosis de tal magnitud que le permita “conversar” con los grandes filósofos y generar buenos líderes. Esta “regeneración”, por supuesto, es incompleta y unilateral si no se logra que los vórtices del Poder y los vórtices de la Cultura coincidan[39], por lo que la efectividad de GK sólo podrá verse reflejada cuando la forma estado en Occidente tienda hacia el Stato totale[40] de la Italia fascista. Y del elemento corporativo deberían aprender con humildad las deficientes y corruptas democracias liberales, en especial Reino Unido y los Estados Unidos de América, ya que “NINGUNA democracia existente puede permitirse el pasar por alto la lección de la práctica corporativa. El ‘economista’ individual que trate de hacerlo, o bien es un tonto o un sinvergüenza o un ignoramus.” En otro polémico libro, Jefferson and/or Mussolini, Pound lo describe de esta manera: “Un buen gobierno es aquel que opera de acuerdo con lo mejor de lo que se conoce y del pensamiento. Y el mejor gobierno es el que traduce el mejor pensamiento más rápidamente en acción.”[41] De igual manera lo expresa mucho más pristínamente en GK: “El mejor gobierno es (¿naturalmente?) el que pone a funcionar lo mejor de la inteligencia de una nación.”[42] Es esa simultaneidad expresada en un Best Government es la que abrirá la puerta en Europa a un nuevo Renacimiento, a una Era of Brillance libre de la Ley del valor capitalista (explotación) y de su efecto más funesto: la usura: “Si el amable lector (o el delegado a una conferencia internacional económica de U.S.A.) no puede distinguir entre su sillón y la orden de un alguacil, que permita a este último secuestrar dicho sillón, entonces la vida le ofrecerá dos alternativas: ser explotado o ser más o menos alcahuete, mimado por los explotadores, hasta que le llegue el turno de ser explotado.”[43] La nueva Kulchur debería ser una arma masiva y práctica contra la explotación, una arma que trasciende tanto la burocrática proletarskaya kultura de la URSS como la falsa meritocracia del sistema demo-liberal anglosajón, cuya alma oculta es el mecanismo de la usura. La usura, un tema omnipresente en la obra de Pound, es definida en su libro The Cantos, en una nota bene al canto XLV como: “Usura: gravamen por el uso del Poder adquisitivo, impuesto sin relación a la producción, a veces sin relación a las posibilidades de la producción (de ahí la quiebra del banco de los Medici)”.[44] Para Pound, como para muchos intelectuales no-conformistas de los 1930’s, el mundo se dividía, no en proletariado y capitalistas, sino en una peculiar lucha de clases entre productores y usurers. La única posibilidad epocal de superación de este estado contra naturam del hombre, dominado por el finance Capitalism, era la coincidencia de la Paideuma con un regimen autoritario-corporativo. Y para ello era necesario un salto en la conciencia de las masas por medio de una acción pedagógica militante. Pound siempre sostuvo un compromiso con los temas educativos y una pasión vocacional por la pedagogía, hasta tal punto de planificar literary kindergartens. Se podría decir que GK es un esfuerzo más en el ideal de una sociedad basada en un nuevo aprendizaje y en medios educativos revolucionarios.
Merece un párrafo su especial relación intelectual ambivalente con Karl Marx, del cual pueden verse rescoldos en GK. La formación económica de Pound se realizó íntegramente a través de de economistas heterodoxos, algunos importantes aún hoy en día, como el economista anarquista Silvio Gesell (discípulo de Proudhon) y otros que han pasado al justo olvido, como C. H. Douglas u Odon. Ya en pleno fascismo italiano Pound dio conferencias sobre economía planificada y la base histórica de la economía en la Universidad de Milán a partir de 1933. Al inicio del ‘900 en sucesivos artículos Pound defiende las reformas socialistas llamadas Social Credit, en clave proudhonnistes y sus economistas de cabecera es siempre Douglas y Gesell, de quienes decía habían lograda acabar con the Marxist era. Como muchos pre fascistas, Pound cree que modificando la esfera de la circulación y la distribución podría nacer una nueva sociedad sin tocar las estructuras sociales y políticas, sin tocar el derecho de propiedad básico. El Fascismo es el único, entre el Comunismo y el detestable capitalismo liberal, de llevar a buen término, la justicia económica. Pound se percibe con muchas afinidades con Marx, valora su figura de social Crusader, alaba la noble indignación tal como surge en la retórica de Das Kapital, sabemos que Pound pudo leerlo en traducción italiana, pero una indignación que sin embargo es como una nube que confunden al lector. Además Marx esta en una siniestra genealogía filonietzscheana que desde la Ilustración radical desemboca en una nueva forma de décadence. Para Pound la verdad de lo que denomina Marxism materialist está en sus resultados prácticos en Lenin y Stalin, en la burocracia soviética y el Gulag: “El fango no justifica la mente. Kant, Hegel, Marx terminan en OGPU. Algo faltaba.”[45] Pound también comparte con Marx que las relaciones económicas materiales son fundamentales para la comprensión exacta de la dinámica social, y adhiere completamente a la crítica de la avaricia y la crueldad del British industrialism. Siguiendo en esto a Gesell, Pound cree que el Marxismo qua ideología fijada en un estado en realidad no significa ningún desafío al capitalismo liberal, al bourgeois demo-liberal: “Los enemigos de la Humanidad son aquellos que fosilizan el pensamiento, esto es lo MATAN, como han tratado de hacerlo los marxistas en nuestra época, lo mismo que un sin número de tontos y de fanáticos han tratado de hacerlo en todos los tiempos, desde la cadencia musulmana, e incluso antes. HACEDLO NUEVO”[46] La doctrina de Marx murió en 1883, el mismo día de su muerte: solo quedan sus acólitos construyendo un nuevo y esclerótico dogma. Del mismo Gesell, Pound tomará acríticamente su endeble crítica a la teoría de la moneda y de la ley del valor marxiana. Por ello Marx jamás podrá dañar definitivamente al Capital: “El error de la izquierda en las tres décadas siguientes fue que querían usar a Marx como el Corán. Supongo que la verdadera apreciación, esto es, el verdadero intento de apreciar el mérito verdadero de Marx empezó con Gesell y con la afirmación de Gesell de que Marx nunca ponía en duda el dinero. Lo aceptó buenamente tal como lo encontró.”[47] Sabemos que sus conocimientos de Marx son pocos y fragmentados, centrados literariamente en el capítulo VIII de Das Kapital, que se ocupa de la lucha por la jornada laboral.[48]
¿Podía calificarse a Pound de nietzscheano? Aunque se discute si existe algún elemento de nietzscheanismo difuso en Pound, es evidente que conceptos-llave de su Weltanschauung, están derivados o de Nietzsche o de seguidores, inclusive el mismo término Paideuma acuñado por Frobenius está inspirado en última instancia de un nietzscheano radical auténtico como Oswald Spengler. Se puede hablar de afinidades electivas y de influencias indirectas del Nietzschéisme en la conformación del paradójico Aristocratism side del individualismo metodológico de Pound sin lugar a dudas.[49] Pound ya utilizaba terminus technicus nietzscheanos, como Over Man (Superhombre) a inicios del ‘900, aunque producto de una lectura fragmentada y a tirones, o como él mismo confesaba en un poema I believe in some parts of Nietzsche/I prefer to read him in sections.[50] Incluso llega a aceptar como válida las consecuencias biológicas de la filosofía de Nietzsche y su oposición intransigente a toda conclusión cooperativa o colectivista: “I, personally, may prefer the theory of the dominant cell, a slightly Nietzschean biology, to any collectivist theories whatsoever.”[51] En un poema-funerario dedicado a su admirado amigo Gaudier-Brzeska titulado “Reflection”, Pound hace otro acto de fe hacia Nietzsche: “I know what Nietzsche said is true…”[52] La afinidad electiva es más que obvia, los une pasión pedagógica y una hybris reactiva: Nietzsche también estuvo obsesionado por la Paideia como base del estado, por la cuestión formativa y las reformas educativas que pudieran detener la decadencia burguesa de Occidente.[53] También como en Nietzsche, como en Mann o como en Heidegger, Pound sostiene la creencia que el stress de los costos extras de la dominación burguesa, que implica la constante revolución de las fuerzas productivas y el avance tecnológico, es insostenible, decadente y alienante. Coexisten en Pound el interés por la alta o nueva tecnología con el pesimismo sobre la interrupción vital de la fluidez de la imaginación, la negra posibilidad de la hegemonía del hombre sin atributos y sus consecuencias en la Cultura. Es la típica ambivalencia ideológica del Modernismo a la que no escapa Pound: mientras la techné es celebrada como una extensión proteica de la voluntad de poder del hombre en la máquina, el efecto total debido a la forma de dominio bourgeois es ácidamente atacada como una totalidad falsa, despersonalizada, inauténtica y vacía. Contra este gigantesco movimiento milenario de decadencia y empobrecimiento es que Pound levanta su New Learning, su revolucionaria Guía a la Cultura, y por ello afirma sin hesitar que sus ojos are geared for the horizon.[54]
La obra de Pound tanto poética como en prosa es difícil o de imposible lectura, decía sabiamente Borges, aunque reconocía la obligatoriedad de su lectura, ya que con él la literatura norteamericana y la ensayística universal había tocado las alturas más temerarias. Invitamos al lector al desafío de sumergirse en uno de las mejores ensayos del siglo XX, ahora disponible en una exquisita edición crítica y completa.
[1]Ezra Pound; Guía de la Kultura, Capitán Swing, Madrid, 2011, p. 195.
[2] En su Guide to… Pound coloca la fecha exacta de su urgente escritura: “16 de marzo anno XV Era Fascista”. Desde 1931 Pound utilizaba el nuevo calendario fascista. Los biógrafos creen que la ansiedad de Pound se debía a las consecuencias inmediatas de la crisis de Münich, el Tratado de Rapallo y la posibilidad de una guerra europea catastrófica. No estaba equivocado en absoluto.
[3] Morley le afirmaba que “seeryus & good sized home university library for the seeryus aspiring & highminded youth… a book that would function as… litry education for the aspirant with all the excavations you wish blowing up what it is the academics do instead of their job.”, en: Pound Papers, February, 1937, Yale Collection of American Literature, Beinecke Rare Book and Manuscript Library, New Haven, Connecticut; parcialmente on-line: http://beinecke.library.yale.edu/digitallibrary/pound.html
[4] Pound decía: “Wot Ez knows, or a substitute (portable) fer the Bruitish museum”, en: ibidem, February, 1937. Lo de “Bruitish” una ironía bien poundiana.
[5] Un esquema básico que mantendrá en GK: “Ningún ser viviente sabe lo suficiente para escribir: Parte I. Método; Parte II. Filosofía, la historia del pensamiento; Parte III. Historia, o sea, la acción; Parte IV. Las Arles y la Civilización.”, en: Ezra Pound; Guía de la Kultura, Capitán Swing, Madrid, 2011, p. 57.
[6] La editorial Faber fue la editorial en inglés más importante en la difusión de la entera obra de Pound, llegando a editar más de veinte títulos entre 1930 y 1960; en ella trabajaba como primary literary editor su amigo, el poeta T. S. Eliot.
[7] Tytell, John; Ezra Pound: The Solitary Volcano, Anchor P, New York, 1987, p. 247.
[8] Stock, Noel; Ezra Pound; Edicions Alfons El Magnànim, Valencia, 1989, p. 441 y ss. Pound conservó como un tesoro cinco ejemplares de GK no expurgados. Lo señala también Gallup en su definitiva obra bibliográfica: Gallup, Donald; A Bibliography of Ezra Pound. 1963, edición revisada y ampliada: Ezra Pound: A Bibliography, University Press of Virginia, Charlottesville, 1983, quién enumera en detalle las modificaciones finales. Como dato curioso: desapareció de la versión final el nombre del vilipendiado poeta español Salvador de Madariaga.
[9] Véase la voz “Zukofsky, Louis (1904-1978)”, en: Adams, Stephen J./ Tryphonopoulos, Demetres P. (Editors); The Ezra Pound Encyclopedia, Greenwood Press, Westport, 2005, p. 309.
[10] Véase la voz “Bunting, Basil (1900–1985)”, en: ibidem, p. 22.
[11] La carta con la autointerpretación sobre GK en: Norman, Charles; Ezra Pound; Funk &Wagnalls, New York, 1968, p. 375.
[12] Los numerosos libros de prosa de Pound, algunos poco conocidos y agotados, son en orden cronológico: The Spirit of Romance (1910) Gaudier-Brzeska. A Memoir (1916), Pavannes and Divisions (1918), Instigations. . . Together with an Essay on the Chinese Written Character (1920), Antheil and the Treatise on Harmony (1924), How to Read (1931), ABC of Economics (1933), ABC of Reading (1934), Make It New (1934), Jefferson and/or Mussolini (1935), Social Credit: An Impact (1935), Polite Essays (1937), Guide to Kulchur (1938) y Literary Essays (ed. T. S. Eliot, 1954).
[13] Bacigalupo, Massimo. The Formed Trace: The Later Poetry of Ezra Pound, Columbia University Press, New York, 1980; Coyle, Michael; Ezra Pound, Popular Genres, and the Discourse of Culture, University Park: Pennsylvania State UP, 1995; Davie, Donald. Studies in Ezra Pound. Manchester, Carcanet, 1991; Lamberti, Elena; “’Guide to Kulchur’: la citazione tra sperimentazione modernista e costruzione del Nuovo Sapere”, en: Leitmotiv, 2, 2002, pp. 165-179; Lindberg, Kathryne V.; Reading Pound Reading: Modernism after Nietzsche, Oxford UP, New York:, 1987; Nicholls, Peter; Ezra Pound: Politics, Economics, and Writing: A Study of The Cantos, Humanities Press, Atlantic Highlands, 1984. El rechazo in toto de la academia sería para Pound justamente un elogio indirecto a su método heterodoxo de aprendizaje y educación radicalmente revolucionario.
[14] Williams, William Carlos; “Penny Wise, Pound Foolish”, en: The New Republic, 49, 28, june, 1939, pp. 229-230. Williams llamaba en la recensión a Pound “a brave Man” por su honestidad intelectual y valentía política. La única crítica de Pound a Mussolini en GK es que en su mente todavía quedan residuos de Aristóteles: “… an Aristotelic residuum…”, e: Ezra Pound; Guía de la Kultura, Capitán Swing, Madrid, 2011, p. 305.
[15] Pound los denomina nuclei, sus núcleos.
[16] Dice bellamente Pound: “La forma, el inmortal concetto, el concepto, la forma dinámica que es como el dibujo de la rosa hundido en las muertas limaduras de hierro por el imán, no por contacto material con el imán mismo, sino separado del imán. Separados por una capa de cristal, el polvo y las limaduras se levantan y se ponen en orden. Así la forma, el concepto resucita de la muerte.”, en: Ezra Pound; Guía de la Kultura, Capitán Swing, Madrid, 2011, p. 166.
[17] Parataxis: se entiende como una construcción de dos oraciones sintácticamente independientes que están en una relación de subordinación implícita en virtud de lo que se conoce como una “curva melódica” común, que hace innecesario el uso de la conjunción, uniéndolas en una relación íntima de dependencia. Véase: Mounin, Georges (Dirigido por); Diccionario de Lingüística, Labor, Barcelona, 1979, p. 139-140. Estilísticamente puede decirse que mientras la hipotaxis (relación explícita mediante un signo funcional) señala un discurso meditado y racional, incluso de cierta “distinción” social en el nivel cultural de quién la emplea, la parataxis, propia de la expresión de emociones, es de un lenguaje más popular y llano. Pound: “The Homeric World, very human”, en: GK, p. 38.
[18] Además en GK se muestra claramente, como en Cantos, el milieu intelectual fascista en el cual se mueve Pound alrededor de los círculos romanos de Edmondo Rossoni, ministro de Agricultura del Duce y editor de la influyente revista cultural La Stirpe: “Eran personalidades serias, como las que Confucio, San Ambrosio o su Excelencia Edmondo Rossoni podrían y desearían reconocer como personalidades serias.”; en esta edición, vide infra, p. Sobre Pound y el Fascismo italiano, véase: Redman, Tim; Ezra Pound and Italian Fascism, Cambridge University Pres, Cambridge, 1991.
[19] Pound utiliza la palabra alemana Anschauung, un erkenntnistheoretischer Begriff introducido por Kant aunque ya utlizado por místicos como Notker o Meister Eckhart, para referirse a la superioridad epistemológica de la inducción y la intuición: “…la facultad que le permite a uno «ver» que dos líneas rectas no pueden encerrar una superficie, y que el triángulo es el más sencillo de todos los polígonos posibles.” Por ejemplo, el pedagogo iluminista Pestalozzi lo utilizó en un contexto operativo educativo, tal como pretende re-utilizarlo Pound. En esta revalorización de la Anschauung Pound aquí coincide no casualmente no sólo con Nietzsche sino con el neokantismo, Husserl y Heidegger, y en sus comentarios críticos a Aristóteles (Arry), Pound ubica a la intuición por encima de la sophia.
[20] Ezra Pound; Guía de la Kultura, Capitán Swing, Madrid, 2011, p. 217.
[21] Pound dixit: “Bacon. No creo que la coincidencia con mis puntos de vista sea debida a memoria inconsciente, dos hombres en momentos diferentes pueden observar que los caniches tienen el pelo rizado sin necesidad de referirlo o derivarlo de una «autoridad» precedente.”
[22]Ezra Pound; Guía de la Kultura, Capitán Swing, Madrid, 2011, p. 57.
[23] La Mostra… fue realizada con motivo del décimo aniversario de la Toma del Poder por Mussolini, tras la marcha fascista sobre Roma. Fue una idea de Dino Alfieri, futuro ministro de Cultura Popular. Pound visitó la Mostra… en diciembre de 1932, poco después de su inauguración oficial, quedando impresionado como la organización anti-museo Risorgimiento de iconografía, objetos cotidianos (el propio escritorio de Mussolini en el diario Il Popolo d’Italia) y collages de imágenes promovía la incitación del visitante a la acción. Sobre la Mostra… y su formato conservador-revolucionario, véase: Andreotti, Libero; “The Aesthetics of War: The Exhibition of the Fascist Revolution”, en: Journal of Architectural Education, 45.2, 1992, pp. 76-86; finalmente el trabajo de Jeffrey Schnapp: Anno X. La Mostra della Rivoluzione fascista del 1932: genesi-sviluppo-contesto culturale-storico-ricezione. With an afterword by Claudio Fogu, Piste – Piccola biblioteca di storia 4, Istituti Editoriali e Poligrafici Internazionali, Rome-Pisa, 2003 y su artículo: “Fascism’s Museum in Motion”; en: Journal of Architecture Education 45.2, 1992, pp. 87-97. Pound elogiará el aspecto radical y pedagógico de la Mostra… en su Cantos, el número XLVI, publicado en 1936. No es de extrañar: arquitectos liberales como Le Corbusier o un nietzscheano de izquierda como Georges Bataille también tuvieron una impresión profunda de la Mostra…
[24] Pound dice: “when one HAS ‘forgotten-what-book’ ” (GK 134) y más adelante: “what is left after man has forgotten all he set out to learn” (GK 195); véase: Ezra Pound; Guía de la Kultura, Capitán Swing, Madrid, 2011, p. 151 y 197.
[25] Ezra Pound; Guía de la Kultura, Capitán Swing, Madrid, 2011, p. 178.
[26] Ibidem, , p. 76.
[27] En GK, p. 34. Un ejemplo concreto de esta “limpieza directa” sería la obra de Gaudier-Brzeska.
[28] El famoso “Pound’s Pentagon”, su canon clásico y la superestructura cultural de un estado noble, lo constituye las Odas de Confucio, los Epos de Homero, la Metamorfosis de Ovidio, la Divina Comedia de Dante y las obras teatrales de Shakespeare.
[29] “El Comunismo como rebelión contra los ladrones de cosechas fue una tendencia admirable. Como revolucionario, me niego a aceptar una pretendida revolución que intenta inmovilizarse o moverse hacia atrás.”; en: Ezra Pound; Guía de la Kultura, Capitán Swing, Madrid, 2011, p. 202.
[30] Ibidem, p. 65.
[31]Ezra Pound; Guía de la Kultura, Capitán Swing, Madrid, 2011, p. 78. No es casualidad que Pound indique formalmente al lector placentero del diario burgués típico.
[32] Pound había estudiado en detalle el método similar de sobreposición y parataxis que funciona en el Haiku japonés a través de los trabajos de Fenellosa.
[33] Pound, E.; “A Few Don’ts By an Imagiste”; en: Poetry, 1, 1916.
[34] “This book is not written for the over-fed. It is written for men who have not been able to afford a university education or for young men, whether or not threatened with universities, who want to know more at the age of fifty than I know today, and whom I might conceivably aid to that object.”, en: GK, p. 6.; en esta edición, vide infra, p. Pound consideraba, en una particular estadística personal, que en la sociedad burguesa podía encontrarse un lector reflexivo y serio por cada 900 lectores ingenuos o masificados.
[35] Ezra Pound; Guía de la Kultura, Capitán Swing, Madrid, 2011, p. 57.
[36] Sobre el controversial antisemitismo ad hoc de Pound en GK, véase: Chace, William M.; The Political Identities of Ezra Pound & T. S. Eliot, Stanford University Press, Stanford, 1973, Chapter Five, “A Guide to Culture: Antisemitism”, p. 71 y ss.
[37] “El genio de Mussolini era ver y afirmar repetidamente que había crisis no EN, sino DE sistema. Quiero decir que lo vio claro y temprano. Muchos lo vemos ahora.”
[38] “¿Y qué hay sobre anteriores guías a la Kulchur o Cultura? Considero que Platón y Plutarco podrían servir, que Herodoto sentó un precedente, que Montaigne ciertamente suministró una guía tal en sus ensayos, lo mismo que lo hizo Rabelais y que incluso Brantôme podría tomarse como una guía del gusto.”; en: Ezra Pound; Guía de la Kultura, Capitán Swing, Madrid, 2011, p. 216.
[39] Dice Pound: “When the vortices of power and the vortices of culture coincide, you have an era of brilliance”.
[40] Pound en realidad llama a esta Océana ideal de su filosofía política Regime Corporativo.
[41] Pound, Ezra; Jefferson and/or Mussolini, Stanley Nott, New York, 1935, p. 96: “A good government is one that operates according to the best that is known and thought. And the best government is that which translates the best thought most speedily into action.”
[42] “The best Government is (naturally?) that which draws the best of the Nation’s intelligence into use.”, en: Ezra Pound; Guía de la Kultura, Capitán Swing, Madrid, 2011, p. 266.
[43] Ibidem, p. 247.
[44] Dice Pound: “Usury: A charge for the use of purchasing power, levied without regard to production; often without regard to the possibilities of production.” Es una conclusión extraída de las enseñanzas sobre el Social Credit del economista Douglas.
[45] En: Ezra Pound; Guía de la Kultura, Capitán Swing, Madrid, 2011, p. 183.
[46] Ibidem, p. 278.
[47] Pound nunca llegó a conocer los escritos juveniles de Marx, donde se analiza a fondo el papel del Dinero, por ejemplo.
[48] Amplias citas de Das Kapital en su obra The Cantos, en particular en el canto XXXIII.
[49] Véase el trabajo de Kathryine V. Lindberg: Reading Pound Reading: Modernism After Nietzsche, Oxford University Press, New York & Oxford, 1987. Lindberg analiza la larga influencia del reaccionario pensamiento nietzscheano en la ideología y estética del Modernismo hasta el Postestructuralismo. De Gourmont recibió además Pound el impacto de la ideología derivada de Lamarck
[50] Pound, Ezra; “Redondillas, or Something of That Sort”, en: Ezra Pound: Poems and Translations, ed. by Richard Sieburth, Library of America, New York, 2003, pp. 175–182 (la stanza se encuentra en la p. 181). El poema “Redondillas…” es de mayo de 1911 y en él Pound también reconoce que lee a Nietzsche con la devoción con la que un cristiano se enfrenta a la sagrada Biblia.
[51] Pound, Ezra; “The Approach to Paris, III”, en: New Age, 13, Nº 21, 18 September 1913, pp. 607-609. Ahora en: Ezra Pound’s Poetry and Prose, 11 vols, Garland, London, 1991, I, C-95, pp. 156-159.
[52] Pound, Ezra; “Reflection”, en: Smart Set, 43, Nº 3, july, 1915, p. 395. Ahora en: Ezra Pound: Poems and Translations, ed. by Richard Sieburth, Library of America, New York, 2003, p. 1179.
[53] Sobre Nietzsche como pedagogo y reformador educativo, un aspecto infravalorado por los estudios y hagiografías, nos permitimos remitir al lector a nuestro libro: Nietzsche contra la Democracia, Montesinos, Mataró, 2010, capítulo V, “Pathein Mathein: la educación reaccionaria y ¿racista? del Futuro”, p. 173 y ss.
[54] Ezra Pound; Guía de la Kultura, Capitán Swing, Madrid, 2011, p. 84.
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Les illusions de la « protection »
Les illusions de la « protection »
par Michel GEOFFROY
ex.: http://www.polemia.com/
Les Français vivent sous une double ombre tutélaire : celle de Big Brother et celle de Big Mother. Big Brother leur dit ce qu’il faut penser ; Big Mother veille à les protéger. Ainsi tous les discours officiels tournent autour de la « protection » : une défense maternisante du système en place couplée avec une présentation anxiogène des propositions alternatives. Avec humour Michel Geoffroy montre les faux-semblants du discours de « protection ».
Polémia
L’euro nous protège et nous rend plus fort : mais quand même ce n’est pas tout à fait le cas pour la Grèce, pour l’Italie, pour l’Espagne et sans doute aussi pour le Portugal. Un Etat de la zone euro ne peut pas faire faillite : mais quand même, le défaut de la Grèce est désormais de l’ordre du possible.
L’Union européenne nous protège : mais le secrétaire d’Etat au Trésor M. Geithner a quand même déclaré que « l’Europe doit agir plus vigoureusement pour susciter la confiance dans sa capacité à résoudre la crise et dans sa volonté de le faire ».
Les traités européens nous protègent : mais pour tenter d’enrayer la crise financière, il faut quand même que la BCE finance la dette des Etats, ce qui lui était interdit jusqu’en 2008, et il faudrait que la Grèce abandonne la zone euro, ce qui n’est pas prévu non plus par les traités européens. Des Etats réclament aussi de rétablir des contrôles aux frontières en contradiction avec l’espace Schengen. Conclusion : les traités européens nous protègent de mieux en mieux.
Les gouvernements comptent sur la croissance pour nous protéger du chômage : mais les prévisions de croissance pour la zone euro ont quand même encore été révisées à la baisse : 1,6% contre 2% pour 2011 et 1,1% contre 1,7% pour 2012. Et le président de la BCE, M. Trichet, a quand même déclaré le 8 septembre que « le message principal dans ce domaine c’est l’incertitude ».
Un peu d’efforts et de rigueur et tout ira mieux : mais quand même ni en Grèce ni en Grande-Bretagne la rigueur ne parvient à diminuer la dette souveraine.
Les dépôts dans les banques sont protégés et « quels que soient le scénario grec et les provisions à passer, les banques françaises ont les moyens d’y faire face » (F. Baroin le 12/9/11) : mais quand même les banques européennes ont perdu 200 Mds € avec la crise des dettes souveraines selon le FMI (Les Echos du 22/9/2011). Le commissaire européen M. Barnier a pour sa part évoqué des pertes de 400 Mds € le 22 septembre 2011, soit deux fois plus ; depuis le 22 juillet les valeurs de la Société Générale, du Crédit Agricole et de BNP Paribas ont quand même perdu respectivement 60, 55 et 53 points (Les Echos du 23 septembre 2011).
Les révolutions arabes leur ont apporté la « démocratie » et N. Sarkozy a « protégé » les Libyens d’un méchant dictateur ennemi du genre humain : mais quand même les partis islamistes vont donc pouvoir démocratiquement être portés au pouvoir, et les Palestiniens n’ont pas droit à la même protection ; ils ne réclament qu’un Etat.
Les contribuables seront « protégés ». Il n’y aura pas de hausse d’impôts, a déclaré N. Sarkozy le 16/11/2010 : mais quand même il y aura une réduction des « niches fiscales » et une augmentation des taxes.
Les citoyens sont protégés et l’insécurité recule. D’ailleurs, les caméras de vidéosurveillance s’appellent désormais caméras de « vidéoprotection » : mais quand même les cambriolages ont augmenté de 17,8% en un an (Le Monde du 22/9/2011).
Michel Geoffroy
24/09/2011
Voir aussi :
Correspondance Polémia – 25/09/2011
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mercredi, 28 septembre 2011
Carisma político, éxtasis, orgía: descubrir al Weber oculto
Ahí,
donde los gritos ancestrales
pueblan el jacinto de vida.
Sofía Tudela Gastañeta
Carisma político, éxtasis, orgía: descubrir al Weber oculto
Por Giovanni B. Krähe
http://geviert.wordpress.com/
Urmensch und Spätkultur (1956) de Arnold Gehlen es uno de los textos claves y necesarios para cualquier compresión o teoría moderna de las instituciones. Las ciencias sociales alemanas reconocen, en efecto, la importancia de la antropología filosófica gehleniana para la teoría institucionalista. En Urmensch, Gehlen nos invita a considerar con suma atención la sociología de la religión de Max Weber. Esta parte de la obra de Weber, menos conocida o limitada únicamente al debate sobre la ética protestante, es, como para Carl Schmitt, el lugar de la intuición que fundamenta la antropología de las instituciones de Gehlen. Según éste, Max Weber nos da los elementos necesarios para la compresión de la génesis de las instituciones, de la forma institucional. Para el autor de Urmensch, el fundamento de la forma institucional es el mito: dos elementos esenciales forman parte de cualquier estructura o sistema mítico (Mythenssystem). El primer elemento es la orgía (Orgiastik), el segundo es la mímesis (cfr. Gehlen, prefacio a Urmensch; Weber, Sociología de la religión, 105 ss.). Veamos brevemente el segundo elemento. El rito imitatorio, circular, mecánico del culto animista pre-cristiano, tiene su fundamento en la realización de una idea de representación como conducta, como forma de conducta (Verhaltensform). Esta inmanencia entre representación (idea) y conducta (forma), a través de la mímesis cultual, es posible gracias a la completa y necesaria ausencia de cualquier contenido espurio o idea de trascendencia. Según Weber, el culto animista primitivo es extraño a cualquier idea de trascendencia en su sentido cristiano, monoteísta. Se podrá notar fácilmente que esta premisa modifica radicalmente el significado del espacio cultual para el rito mimético: el lugar no será un ámbito religioso definitivo dedicado a un abstracto deus absconditus, sino simplemente cualquier lugar consagrado en cuanto únicamente separado del resto (de donde deriva el término sacer, sacro). En la visión del mundo pre-cristiana, cualquier lugar y cualquier circunstancia hacen posible el advenimiento y la ausencia del Dios, que no es único (se piense en los numina en Roma). La relación con los objetos rituales y cotidianos cambia radicalmente, gracias a una relación diferente que se tiene con la tierra y finalmente con la materia misma. Ya una fina autora como Marie-Louise von Franz afirmó que el núcleo más íntimo de la religiosidad pre-cristiana no está en la compresión de un corpus abstracto de divinidades colocadas en una trascendencia indeterminada e idealizada en el sueño poético-pastoral (según la lectura moderna del mito), sino únicamente en la compresión del vínculo religioso e in-mediato entre dos aspectos fácticos evidentes: mito y materia. Ninguna trascendencia o tardía miseria escatológica ocupa el espacio inmanente entre el mito y la materia. Tampoco algún tipo de práctica simbólica. En efecto, en la mímesis no hay símbolo, solo acto puro (Weber, p. 107, Cfr el concepto de uno actu en Gehlen). Para Weber, la génesis de aquello que modernamente es entendido corrientemente como símbolo, contenido simbólico, acto simbólico, simbología y demás combinaciones culturológicas, es tardía, no pertenece al mito en los dos aspectos que hemos señalado, la orgía y la mímesis. De la misma forma es tardío aquel pensamiento abstracto que manipula símbolos. La manipulación obsesiva y viciosa de conceptos a través de la denominada “reflexión” (acto autístico por antonomasia) tampoco pertenece al acto mimético-religioso. Todos estos bagajes del individuo y la modernidad son extraños a la forma de conducta mimético-religiosa en su relación con la representación. En efecto, aquello que ahora es entendido modernamente como una mera disposición mental-ideacional (Mannheim) o peor, categorial-conceptual (el moderno concepto de representación, el representarse algo mentalmente, intelectualmente, reflexivamente, hermenéuticamente), es recuperado y completamente depurado por Weber en su forma originaria de acto y forma de conducta según su análisis idealtípico de las religiones primitivas.
¿De qué tipo de forma de conducta nos habla Weber exactamente? Se trata de una forma de conducta religiosa que se relaciona con la materia en una forma específica (el culto mimético), determinando un vínculo directo con el espacio que ha sido escogido para el acontecimiento religioso. Tal vínculo no es religioso en el sentido de una presunta re-ligio trascendente o soteriológica, plagada de viciosos dualismos (cuerpo/alma, espíritu/materia y símiles). Tampoco está fundado en esquemas dogmáticos o escatológicos según una supuesta y espuria ideología de la redención á la Rosenzweig: la forma de la conducta mimético-religiosa que Weber nos quiere mostrar es stricto sensu de carácter ordinario, “mundano”, fáctico (Weber, Cap. V). En esta “mundanidad” que Weber observa, los aspectos racionales de la conducta mimético-religiosa (la repetición circular, el ritmo acústico del rito, la búsqueda del espacio consagrado, el obsequio, el don, la maravilla) están completamente engarzados en la re-presentación (es decir, en su permamente reiteración en el presente) de una idea que es completamente irracional (1). La racionalidad del rito mundano (sus reglas) permite, entonces, la re-presentación, permite re-introducir la irracionalidad de la idea en el mundo ordinario del tiempo humano y la materia. La forma de conducta mimético-religiosa repite circularmente la irrupción de aquello que será re-presentado en el culto, “prepara” el cuerpo comunitario a la irrupción de la idea que será representada cultualmente en el mundo. Este tipo particular de “mundanidad inmanente”, “ordinaria”, relacionada con la forma de conducta mimético-religiosa, es ordinaria porque simplemente distingue el momento sacro a través de la separación del espacio consagrado. Gehlen llamará a este mundo ordinario Transzendenz ins Diesseits (trascendencia mundana). Este término es introducido por Gehlen para marcar una diferencia neta con el concepto tardío de transcendencia extra-mundana, monoteísta, judeo-cristiana (Transzendenz ins Jenseits). Para Gehlen, no se trata de recuperar un “materialismo religioso” o debatir con la crítica clásica del “naturalismo” pre-cristiano, sino más bien de observar qué tipo de forma de conducta religiosa se relaciona (y es adecuada) con el ámbito de los eventos de la physis y en la physis no fuera de ella. Se trata, entonces, más precisamente, de un ejercicio de comprensión fisiológica (la primera filosofía) dirigido a esta forma de conducta mimético-religiosa. Por el lado del participante a la mímesis cultual, se note, a su vez, que la forma de conducta mimético-religiosa no significa el desarrollo de una supuesta “interioridad” psicológica, personal en su relación con lo divino (ese deísmo sofisticado, timorato y ocasionalista del “dios privado” de los posmodernos). Porque, en efecto, en la mímesis, en la reproducción automática y circular del acto mimético-cultual, no hay ni persona, ni conciencia. Un gran estudioso del mito como Walter F. Otto añadirá: mito es solo la realización de un simple acto ritual como porte y disposición corpórea (Haltung).
Según Weber, aquel que cultiva un tipo de conducta ritual, mimético-religiosa, en el ámbito de una realidad que hemos denominado “mundana” y ordinaria (porque es simplemente in-mediata, irreflexiva), se distingue inmediatamente en la comunidad por su virtud. Tal persona que vive en esta realidad ordinaria se caracteriza poco a poco por poseer un don extra-ordinario que cultiva y posee. Con estas comparaciones terminológicas (ordinario/extra-ordinario), Weber quiere introducir el rol de la magia al interior de las primeras formas sociales (!) de conducta mimético-religiosa (p. 116). Se note que, según nuestro breve análisis, estamos entrando ahora en el ámbito de una forma de conducta mimético-religiosa de tipo social, colectiva. A este don extra-ordinario que es de tipo mágico en el sentido propio del término, don que puede ser innato o producto de un relación particular con la materia (la gratia infusa), Weber le pondrá el nombre de Carisma. El rito mimético religioso mencionado hace posible, entonces, una forma social de conducta particular al interior del culto y de la vida ordinaria: se trata de la conducta carismática de la guía, del mana, orenda (derivado del iraní, mago, mágico). Aquel que posee el mencionado carisma y lo cultiva, hace posible socialmente la reiteración comunitaria, en el tiempo, del rito mimético-religioso mencionado, conferiéndole el carácter de rito mimético colectivo. Por este motivo, el carisma, el carácter carismático – en cualquiera de las acepciones psicologistas que se le quiera dar al término – siempre es socialmente reconocido y aceptado como expresión virtuosa de la persona que lo posee ( en la práctica social de la adivinación, por ejemplo). El moderno carisma que conocemos como mero perfil psicológico es, pues, un residuo (en la terminología del gran elitista Vilfredo Pareto) de esta primera forma social de conducta mimético-religiosa. Una forma de conducta carismático-comunitaria que todavía es evidente, según Weber, en el fenómeno secular del carisma político, típico de las democracias plebiscitarias. Weber creará e introducirá un término nuevo (sumamente polémico entre los habermasianos y el debate alemán interno) para comprender el nexo entre este tipo de carisma y la dimensión de la política: plebizistäre Führerdemokratie (democracia plebiscitaria del líder). La dimensión de esta nueva relación social que se instaura, cada vez, como nueva forma extra-individual, posee dos momentos interelacionados entre sí, a saber (1) la forma de conducta mimética y el carisma como don, por un lado y, por el otro, (2) el carisma mismo, pero como ejercicio de un rol público en la comunidad cultual propiamente dicha (el mago, el sacerdote, el líder carismático). Según Weber, esta nueva forma extra-individual de mímesis colectiva tiene un nombre específico: éxtasis (p.107).
Tenemos, entonces, una forma de conducta mimético-religiosa (la mímesis) que es carismática, por el lado de su guía religioso, y extática, por el lado de la praxis religioso-comunitaria de sus miembros. Intentemos unir estas dos relaciones con la siguiente pregunta: en esta caso ¿cuál sería la correspondiente forma que re-representaría a esta específica experiencia colectiva de carácter extático, señalada por Weber? ¿Cuál es el rito mimético-religioso correspondiente que conservaría y mantendría el culto en el tiempo de este nuevo vínculo extático-comunitario? Según Weber, la primera forma pre-institucional o proto-institucional si se quiere – en cuanto se trata de la primera definición social de roles y vínculos extra-individuales al interior de la praxis religiosa y cultual, hasta llegar al concepto de representación en su significado político más moderno - es la orgía (Weber, p. 107). A partir de aquí, Gehlen notará cómo estos dos elementos weberianos claves – la orgía, como primera forma social extra-individual, pre-institucional y la mímesis, como forma de conducta social bajo la guía del carisma – formarán parte, en su desarrollo tardío, secularizado y despolitizado, de la génesis de las instituciones modernas.
(1) la idea de la irracionalidad como elemento formante del acto racional será desarrollada por Weber en su famoso texto sobre la ética protestante y el espíritu del capitalismo. La forma de conducta que Weber observará ideltípicamente, en este caso, es la ética intra-mundana puritana, calvinista. Su forma económico-social correspondiente será lo que Weber denominará conjuntamente como el “espíritu del capitalismo”. Schmitt, por su lado, hará lo mismo paralelamente, tomando la misma intuición y método, explicando en su caso la génesis del espíritu de la política (parafraseando a Weber) según la forma del catolicismo romano. “Catolicismo romano y forma política”, al igual que la “teología política” de Schmitt, son textos en diálogo (crítico) con su maestro Weber.
Textos recomendados:
Arnold Gehlen: Urmensch und Spätkultur. Frankfurt/M.: Klostermann, 1956.
Max Weber: Economía y sociedad, cualquier edición (cap. V, sociología de la religión y tipos de comunidad religiosa).
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Contre la dictature des chiffres : le monde n’est pas une addition
Contre la dictature des chiffres : le monde n’est pas une addition
par Pierre LE VIGAN
Tous les jours des chiffres. Même dans le secteur social et humain, il est question de quantitatif. Quelle est le chiffre de votre « file active » ? Combien de contrats d’insertion par mois ? C’est la tyrannie du nombre. Et plus encore la tyrannie du calcul. Tout se compte, s’évalue en nombre. Le corps se réduit à son poids, l’intelligence se réduit à la mesure de sa performance. Isabelle Sorente, polytechnicienne, femme de théâtre et aussi amateur de voltige aérienne a consacré un livre à ce phénomène. « Compter, toujours compter, les heures, les minutes, c’est ce qui nous perd ». Le titre du livre : addiction générale. Un titre un peu trompeur. On croira qu’il s’agit d’un livre sur les addictions, les dépendances excessives en d’autres termes. Ce n’est pas tout à fait cela. C’est un livre sur la dépendance aux chiffres. La dépendance aux additions. La volonté de tout chiffrer. Même les malheurs du monde. Peut-être pour les exorciser. « Nous nous trouvons dans la même situation que les hommes du dix-huitième siècle, face au défi de réhabiliter la raison, non pas devant un Dieu mais devant une croyance réductrice, addictive, un obscurantisme aussi toxique pour l’individu que pour son environnement, ce mythe naïf qui veut qu’un chiffre fasse le bonheur. Il est temps d’en finir avec cette superstition » dit Isabelle Sorente (entretien à R.F.I., 3 juillet 2011). L’imitation de la machine calculante a remplacé pour les esprits modernes l’Imitation de Jésus-Christ, note-t-elle encore.
La pensée calculante remplace l’expérience
Calculer est souvent nécessaire mais calculer seulement c’est plus souvent encore ne pas comprendre et ne pas ressentir. La pensée calculante remplace l’expérience. Le res cogitans est rabattu sur le res extensa, le non mesurable sur le mesurable. D’où une dichotomie néfaste à l’équilibre humain : dans le travail, tout est calcul mais l’homme étant ce qu’il est, on lui concède de se « lâcher » ailleurs, dans un cadre bien précis : clubs, vacances, … « On nous force à avoir des affects séparés de la raison » remarque très justement Isabelle Sorente. Comme s’il fallait compenser un abrutissement par un autre. Face à cela, il faut réhabiliter plusieurs choses. Il s’agit d’abord de la compassion. « J’appelle compassion ce déplacement élémentaire de l’esprit humain, qui permet de s’imaginer à la place d’un autre. » La compassion n’est pas la pitié. C’est bien plutôt le complément de la sympathie chez David Hume (Traité de la nature humaine, 1740). « La compassion est la seule façon de penser notre relation bien réelle d’interdépendance au reste du monde, de la penser sans romantisme ni naïveté. Elle n’est pas réservée aux croyants, aux psychanalystes ou âmes sensibles. […] La compassion est ce qui distingue la raison multidimensionnelle, créatrice, humaine, d’un calcul linéaire, compulsif, largement insuffisant à penser les mutations technologiques et écologiques que nous sommes en train de vivre » (entretien d’Isabelle Sorente avec Fraterphilo, 19 février 2011). La compassion ne suffit pas à faire une politique mais elle y entre pour une part : c’est la pensée du « care », c’est-à-dire du soin. « Celui qui veut retrouver la raison doit pouvoir se mettre à la place d’une bête. » Le « care » est une idée qui a été développée par le sociologue Carol Dilligan, elle est en rapport avec une justice proche de l’équité telle que John Rawls l’a défendue dans Théorie de la justice. On est bien sûr loin de Rousseau et de ses rêves sympathiques mais sans doute impraticables de souveraineté populaire absolue. Deuxième valeur : retrouver la distance à soi. C’est précisément parce que la compassion n’est pas la pitié ni la fusion que la distance à soi et aux autres est nécessaire pour retrouver le meilleur de l’individuation, à savoir l’autonomie du sujet, être social et politique : jamais sans les autres mais jamais non plus noyé dans les autres. Bonne antidote contre les totalitarismes, non seulement ceux d’hier mais aussi ceux d’aujourd’hui, particulièrement pernicieux car avançant masqués : masque de l’hygiénisme, du politiquement correct, etc. Au moment où l’individualisme se réduit à des choix marchands (se distinguer des autres par sa voiture ou son écran de télé), la distance à soi est le moyen de retrouver les vertus de l’individu sujet raisonnant et sensible à la fois, non plus arraisonné par les machines et par une société machinale. Comme l’avait bien vu Marcuse, l’homme n’est pas unidimensionnel. Il est pluridimensionnel. C’est pourquoi il faut sortir à la fois du calcul et de la dictature de l’urgence que notre société génère. C’est pourquoi il faut retrouver la bonne distance aux autres : « Trop loin, l’autre n’existe pas plus qu’un passant sans visage. Confondu à moi, nous nous perdons ensemble dans le délire fusionnel » écrit Isabelle Sorente. « L’ami présent en cas de coup dur ne nous remonte pas seulement le moral, il nous fait aussi retrouver la raison. » Sortir donc du « tout tout-de-suite ». Réhabiliter la raison contre les superstitions modernes de la maîtrise de tout, y compris de l’espace et du temps. Ne pas croire que la maladie ou l’échec vient forcément d’erreurs de calcul dans le programme de la vie mais d’une erreur plus fondamentale : croire que la vie est un programme.
Éloge de la sobriété
Compassion, distance, mais aussi une troisième valeur : la sobriété. Savoir se limiter. Trouver les chemins de la sobriété heureuse, comme dit Pierre Rabhi. « Nous vivons dans une société qui n’a mis aucune limite à la recherche de satisfaction de nos besoins réels et imaginaires » dit Pierre Rabhi. » La modernité, dans son principe premier et ses intentions originelles, aurait pu, en s’appuyant sur la révolution industrielle, être une chance pour l’humanité. Mais elle a commis une erreur fatale, dont nous commençons seulement à mesurer les conséquences désastreuses avec la grande crise d’aujourd’hui : elle a subordonné le destin collectif, la beauté et la noblesse de la planète Terre dans sa globalité à la vulgarité de la finance. » De là s’impose la nécessité de se recentrer sur l’essentiel. Un programme à engager de suite mais en prenant son temps : l’avenir dure longtemps.
Pierre Le Vigan
Isabelle Sorente, Addiction générale, J.-C. Lattes, 2011, 220 p., 17 €.
Pierre Rabhi, Vers la sobriété heureuse, Actes Sud, 2010, 140 p., 15 €.
Article printed from Europe Maxima: http://www.europemaxima.com
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mardi, 27 septembre 2011
Summer 1942, Winter 2010: An Exchange
Summer 1942, Winter 2010: An Exchange
By Michael O'Meara
Ex: http://www.counter-currents.com/
In the Summer of 1942 — while the Germans were at the peak of their powers, totally unaware of the approaching fire storm that would turn their native land into an inferno — the philosopher Martin Heidegger wrote (for a forth-coming lecture course at Freiberg) the following lines, which I take from the English translation known as Hölderlin’s Hymn “The Ister”:[1]
“The Anglo-Saxon world of Americanism” — Heidegger noted in an aside to his nationalist/ontological examination of his beloved Hölderlin – “has resolved to annihilate Europe, that is, the homeland, and that means: [it has resolved to annihilate] the commencement of the Western world.”
In annihilating the commencement (the origins or breakout of European being) – and thus in annihilating the people whose blood flowed in American veins — New World Europeans, unknowingly, destroyed the essence of their own being — by disowning their origins – denigrating the source of their life-form, denying themselves, thus, the possibility of a future.
“Whatever has commencement is indestructible.”
Americans destined their self-destruction by warring on their commencement – by severing the root of their being.
But Europe — this unique synergy of blood and spirit — cannot be killed, for her essence, Heidegger tells us, is the “commencement” — the original — the enowning — the perpetual grounding and re-asserting of being.
Europe thus always inevitably rises again and again — like she and her bull from under the waters, which sweep over her, as she undauntedly plunges into what is coming.
Her last stand is consequently always her first stand — another commencement — as she advances to her origins — enowning the uncorrupted being of her beginning – as she authenticates herself in the fullness of a future which enables her to begin over and over.
* * *
The opposite holds as well.
America’s annihilation of her commencement revealed her own inherent lack of commencement.
From the start, her project was to reject her European origins — to disown the being that made her who she was — as her Low Church settlers pursued the metaphor of Two Worlds, Old and New.
For Heidegger, America’s “entry into this planetary war is not [her] entry into history; rather, it is already, the ultimate American act of American ahistoricality and self-devastation.”
For having emerged, immaculately conceived, from the jeremiad of her Puritan Errand, America defined herself in rejection of her past, in rejection of her origins, in rejection of her most fundamental ontological ground — as she looked westward, toward the evening sun and the ever-expanding frontier of her rootless, fleeting future, mythically legitimated in the name of an ‘American Dream’ conjured up from the Protestant ethic and the spirit of capitalism.
Americans, the preeminent rational, rootless, uniform homo oeconomics, never bothered looking ahead because they never looked back. Past and future, root and branch – all pulled up and cut down.
No memory, no past, no meaning.
In the name of progress — which Friedrick Engels imagined as a ‘cruel chariot riding over mounds of broken bodies’ – American being is dissolved in her hurly-burly advance toward the blackening abyss.
Yet however it is spun, it was from Europe’s womb that Americans entered the world and only in affirming the European being of their Motherland and Fatherhood was there the possibility of taking root in their “New” World – without succumbing to the barbarians and fellaheen outside the Mother-soil and Father-Culture.
Instead, America’s founders set out to reject their mother. They called her Egyptian or Babylonian — and took their identity – as the ‘elect’, the ‘chosen’, the ‘light to nations’ — from the desert nomads of the Old Testament — alien to the great forests of our Northern lands — envious of our blue-eye, fair-hair girls – repelled by the great-vaulted heights of our Gothic Cathedrals.
The abandonment of their original and only being set Americans up as the perpetual fixers of world-improvement — ideological champions of consummate meaninglessness – nihilism’s first great ‘nation’.
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While Heidegger was preparing his lecture, tens of thousands of tanks, trucks, and artillery pieces started making their way from Detroit to Murmansk, and then to the Germans’ Eastern front.
A short time later, the fires began to fall from the sky — the fires bearing the curse of Cromwell and the scorched-earth convictions of Sherman — the fires that turned German families into cinders, along with their great churches, their palatial museums, their densely packed, sparkling-clean working-class quarters, their ancient libraries and cutting-edge laboratories.
The forest that took a thousand years to become itself perishes in a night of phosphorous flames.
It would be a long time — it hasn’t come yet — before the Germans — the People of the Center — the center of Europe’s being — rise again from the rubble, this time more spiritual than material.
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Heidegger could know little of the apocalyptic storm that was about to destroy his Europe.
But did he at least suspect that the Führer had blundered Germany into a war she could not win? That not just Germany, but the Europe opposing the Anglo-American forces of Mammon would also be destroyed?
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“The concealed spirit of the commencement in the West will not even have the look of contempt for this trial of self-devastation without commencement, but will await its stellar hour from out of the releasement and tranquility that belong to the commencement.”
An awakened, recommencing Europe promises, thus, to repudiate America’s betrayal of herself — America, this foolish European idea steeped in Enlightenment hubris, which is to be forgotten (as a family skeleton), once Europe reasserts herself.
In 1942, though, Heidegger did not know that Europeans, even Germans, would soon betray themselves to the Americans, as the Churchills, Adenauers, Blums — Europe’s lickspittle — rose to the top of the postwar Yankee pyramid designed to crush every idea of nation, culture, and destiny.
That’s Europe’s tragedy.
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Once Europe awakes – it will one day – she will re-affirm and re-assert herself – no longer distracted by America’s glitter and tinsel, no longer intimidated by her hydrogen bomb and guided missiles – seeing clearly, at last, that this entertainment worthy of Hollywood conceals an immense emptiness — her endless exercises in consummate meaninglessness.
Incapable therefore of beginning again, having denied herself a commencement, the bad idea that America has become is likely, in the coming age of fire and steel, to disintegrate into her disparate parts.
At that moment, white Americans will be called on, as New World Europeans, to assert their “right” to a homeland in North America — so that there, they will have a place at last to be who they are.
If they should succeed in this seemingly unrealizable fortune, they will found the American nation(s) for the first time – not as the universal simulacrum Masons and deists concocted in 1776 — but as the blood-pulse of Europe’s American destiny.
“We only half-think what is historical in history, that is, we do not think it at all, if we calculate history and its magnitude in terms of the length . . . of what has been, rather than awaiting that which is coming and futural.”
Commencement, as such, is “that which is coming and futural” — that which is the “historical in history” — that which goes very far back and is carried forward into every distant, unfolding future – like Pickett’s failed infantry charge at Gettysburg that Faulkner tells us is to be tried again and again until it succeeds.
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“We stand at the beginning of historicality proper, that is, of action in the realm of the essential, only when we are able to wait for what is to be destined of one’s own.”
“One’s own” — this assertion of ourselves — Heidegger contends, will only come if we defy conformity, convention, and unnatural conditioning to realize the European being, whose destiny is ours alone.
At that moment, if we should succeed in standing upright, in the way our ancestors did, we will reach ahead and beyond to what is begun through every futuristic affirmation of who we European-Americans are.
This reaching, though, will be no ‘actionless or thoughtless letting things come and go . . . [but] a standing that has already leapt ahead, a standing within what is indestructible (to whose neighborhood desolation belongs, like a valley to a mountain).”
For desolation there will be — in this struggle awaiting our kind – in this destined future defiantly holding out a greatness that does not break as it bends in the storm — a greatness certain to come with the founding of a European nation in North America – a greatness I often fear that we no longer have in ourselves and that needs thus to be evoked in the fiery warrior rites that once commemorated the ancient Aryan sky gods, however far away or fictitious they have become.
–Winter 2010
Note
1. Martin Heidegger, Hölderlin’s Hymn ‘The Ister’, trans W. McNeill and J. Davis (Bloomington: Indiana University Press, 1996), p. 54ff.
Article printed from Counter-Currents Publishing: http://www.counter-currents.com
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