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vendredi, 29 janvier 2010

Nation et nationalisme, Empire et impérialisme, dévolution et grand espace

 

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Communication de Robert Steuckers

 

au XXIVième Colloque du GRECE, Paris, le 24 mars 1991

 

Nation et nationalisme, Empire et impérialisme, dévolution et grand espace

 

Mesdames, Mesdemoiselles, Messieurs, Chers amis et camarades,

 

Le thème de notre colloque d'aujourd'hui est à la fois intemporel et actuel.

 

Actuel parce que le monde est toujours, envers et contre les espoirs des utopistes cosmopolites, un pluriversum  de nations, et parce que nous replongerons tout à l'heure à pieds joints dans l'actualité internationale, marquée par le conflit, donc par la pluralité antagonistes des valeurs et des faits nationaux.

Intemporel parce que nous abordons des questions que toutes les générations, les unes après les autres, remettent inlassablement sur le tapis. En traitant de la nation et du nationalisme, de l'Empire et de l'impérialisme, nous touchons aux questions essentielles du politique, donc aux questions essentielles de l'être-homme, puisqu'Aristote déjà définissait l'homme comme un zoon politikon, comme un être ancré dans une polis, dans une cité, dans une nation. Ancrage nécessaire, ancrage incontournable mais ancrage risqué car précisément il accorde tout à la fois profondeur, sens de la durée et équilibre mais provoque aussi l'enfermement, l'auto-satisfaction, l'installation, la stérilité.

 

Devant le retour en Europe de l'Est et de l'Ouest d'un discours se proclamant nationaliste, il est impératif de comprendre ce double visage que peut prendre le nationalisme, de voir en lui cet avantage et ce risque, cette assurance que procure l'enracinement et ce dérapage qui le fait chavirer dans l'enfermement. Quant à la notion d'empire, elle a désigné au Moyen Age le Reich centre-européen, sorte d'agence qui apaisait les conflits entre les diverses ethnies et les multiples corps qui le composait; puis elle a désigné, sous Bonaparte, le militarisme qui tentait d'imposer partout en Europe des modèles constitutionnels marqués par l'individualisme bourgeois, qui méconnaissaient les logiques agrégatrices et communautaires des corps de métier, des «républiques villageoises» et des pays charnels; ensuite, elle a désigné l'impérialisme marchand et thalassocratique de l'Angleterre, qui visait l'exploitation de colonies par des groupes d'actionnaires, refusant le travail parce que, lecteurs de la Bible, ils voyaient en lui une malédiction divine; leur aisance, leur oisivité, ils la tiraient des spéculations boursières.

 

Cette confusion sémantique, qui vaut pour le terme «nation» comme pour le terme «empire», il importe que nous la dissipions. Que nous clarifions le débat. C'est notre tâche car, volontairement, nous parions pour le long terme et nous refusons de descendre directement dans l'arène politicienne qui nous force toujours aux pires compromis. Si nous ne redéfinissons pas nous-mêmes les concepts, si nous ne diffusons pas nos redéfinitions par le biais de nos stratégies éditoriales, personne ne le fera à notre place. Et la confusion qui règne aujourd'hui persistera. Elle persistera dans le chaos et de ce chaos rien de cohérent ne sortira.

Commençons par définir la nation, en nous rappelant ce qu'Aristote nous enseignait à propos du zoon politikon  ancré dans sa cité. Le politique, qui est l'activité théorique surplombant toutes les autres activités de l'homme en leur conférant un sens, prend toujours et partout son envol au départ d'un lieu qui est destin. A partir de ce lieu se crée une socialité particulière, étayée par des institutions bien adaptées à ce paysage précis, forcément différentes des institutions en vigueur dans d'autres lieux. Nous avons donc affaire à une socialité institutionnalisée qui procure à sa communauté porteuse autonomie et équilibre, lui assure un fonctionnement optimal et un rayonnement maximal dans son environnement. Le rayonnement élargit l'assise de la socialité, crée le peuple, puis la nation. Mais cette nation, produit d'une évolution partie de l'ethnos  originel, se diversifie à outrance au cours de l'évolution historique. En bout de course, nous avons toujours affaire à des nations à dimensions multiples, qui se déploient sur un fond historique soumis à tous les aléas du temps. Toute conception valide de la nation passe par une prise en compte de cette multidimensionalité et de ce devenir. Le peuple est donc une diversité sociologique qu'il faut organiser, notamment par le truchement de l'Etat.

 

L'Etat organise un peuple et le hisse au rang de nation. L'Etat est projet, plan:  il est, vis-à-vis de la concrétude nation, comme l'ébauche de l'architecte par rapport au bâtiment construit, comme la forme par rapport à la matière travaillée. Ce qui implique que l'Etat n'a pas d'objet s'il n'y a pas, au préalable, la concrétude nation. Toutes les idéologies statolâtriques qui prétendent exclure, amoindrir, juguler, réduire la concrétude, la matière qu'est la nation, sont des sottises théoriques. Le peuple précède l'Etat mais sans la forme Etat, il ne devient pas nation, il n'est pas organisé et sombre rapidement dans l'inexistence historique, avant de disparaître de la scène de l'histoire. L'Etat au service de la concrétude peuple, de la populité génératrice d'institutions spécifiques, n'est pas un concept abstrait mais un concept nécessaire, un concept qui est projet et plan, un projet grâce auquel les élites du peuple affrontent les nécessités vitales. L'Etat  —avec majuscule—   organise la totalité du peuple comme l'état  —sans majuscule—  organise telle ou telle strate de la société et lui confère du sens.

 

Mais il est des Etats qui ne sont pas a priori au service du peuple: Dans son célèbre ouvrage sur la définition du peuple (Das eigentliche Volk,  1932), Max Hildebert Boehm nous a parlé des approches monistes du concept Etat, des approches monistes qui refusent de tenir compte de l'autonomie nécessaires des sphères sociales. Ces Etats capotent rapidement dans l'abstraction et la coercition stérile parce qu'ils refusent de se ressourcer en permanence dans la socialité populaire, dans la «populité» (= Volkheit),  de se moduler sur les nécessités rencontrées par les corps sociaux. Cette forme d'Etat coupée du peuple apparaît vers la fin du Moyen Age. Elle provoque une rupture catastrophique. L'Etat se renforce et la socialité se recroqueville. L'Etat veut se hisser au-dessus du temps et de l'espace. Le projet d'Etat absolu s'accompagne d'une contestation qui ébauche des utopies, situées généralement sur des îles, elles aussi en dehors du temps et de l'espace. Dès que l'Etat s'isole de la socialité, il ne l'organise plus, il ne la met plus en forme. Il réprime des autonomies et s'appauvrit du même coup. Quand éclate la révolution, comme en France en 1789, nous n'assistons pas à un retour aux autonomies sociales dynamisantes mais à un simple changement de personnel à la direction de la machine Etat. Les parvenus remplacent les faisandés au gouvernail du bateau.  

C'est à ce moment historique-là, quand la nation concrète a périclité, que nous voyons émerger le nationalisme pervers que nous dénonçons. Le discours des parvenus est nationaliste mais leur but n'est pas la sauvegarde ou la restauration de la nation et de ses autonomies nécessaires, de ses autonomies qui lui permettent de rayonner et de briller de mille feux, de ses autonomies qui ont une dynamique propre qu'aucun décret ne peut régenter sans la meurtrir dangereusement. L'objectif du pouvoir est désormais de faire triompher une idéologie qui refuse de reconnaître les limites spatio-temporelles inhérentes à tout fait de monde, donc à toute nation. Une nation est par définition limitée à un cadre précis. Vouloir agir en dehors de ce cadre est une prétention vouée à l'échec ou génératrice de chaos et d'horreurs, de guerres interminables, de guerre civile universelle. Les révolutionnaires français se sont servis de la nation française pour faire triompher les préceptes de l'idéologie des Lumières. Ce fut l'échec. Les nationaux-socialistes allemands se sont servis de la nation allemande pour faire triompher l'idéal racial nordiciste, alors que les individus de race nordique sont éparpillés sur l'ensemble de la planète et ne constituent donc pas une concrétude pratique car toute concrétude pratique, organisable, est concentrée sur un espace restreint. Les ultramontains espagnols se sont servis des peuples ibériques pour faire triompher les actions du Vatican sur la planète. Les banquiers britanniques se sont servis des énergies des peuples anglais, écossais, gallois et irlandais pour faire triompher le libre-échangisme et permettre aux boursicotiers de vivre sans travailler et sans agir concrètement en s'abstrayant de toutes les limites propres aux choses de ce monde. Les jésuites polonais ont utilisé les énergies de leur peuple pour faire triompher un messianisme qui servait les desseins de l'Eglise.

 

Ce dérapage de l'étatisme, puis du nationalisme qui est un étatisme au service d'une abstraction philosophique, d'une philosophade désincarnée, a conduit aux affrontements et aux horreurs de la guerre de Crimée, de la guerre de 1870, de la guerre des Boers, des guerres balkaniques et de la guerre de 1914. Résultat qui condamne les nationalismes qui n'ont pas organisé leur peuple au plein sens du terme et n'ont fait que les mobiliser pour des chimères idéologiques ou des aventures colonialistes. Inversément, cet échec des nationalismes du discours et non de l'action concrète réhabilite les idéaux nationaux qui ont choisi l'auto-centrage, qui ont choisi de peaufiner une socialité adaptée à son cadre spatio-temporel, qui ont privilégié la rentabilisation de ce cadre en refusant le recours facile au lointain qu'était le colonialisme.

Pour sortir de l'impasse où nous ont conduit les folies nationalistes bellogènes, il faut opérer à la fois un retour aux socialités spatio-temporellement déterminées et il faut penser un englobant plus vaste, un conteneur plus spacieux de socialités diverses.

 

Le Saint-Empire du Moyen Age a été un conteneur de ce type. En langage moderne, on peut dire qu'il a été, avant son déclin, fédératif et agrégateur, qu'il a empêché que des corps étatiques fermés ne s'installent au cœur de notre continent. La disparition de cette instance politique et sacrée à la suite de la fatale calamité des guerres de religion a provoqué le chaos en Europe, a éclaté l'œkoumène européen médiéval. Sa restauration est donc un postulat de la raison pratique. A la suite des discours nationalistes fallacieux, il faut réorganiser le système des Etats européens en évitant justement que les peuples soient mobilisés pour des projets utopiques irréalisables, qu'ils soient isolés du contexte continental pour être mieux préparés par leurs fausses élites aux affrontements avec leurs voisins. Il faut donc réorganiser le continent en ramenant les peuples à leurs justes mesures. Ce retour des limites incontournables doit s'accompagner d'une déconstruction des enfermements stato-nationaux, où les peuples ont été précisément enfermés pour y être éduqués selon les principes de telle ou telle chimère universaliste.

 

Le retour d'une instance comparable au Saint-Empire mais répondant aux impératifs de notre siècle est un vieux souhait. Constantin Frantz, le célèbre philosophe et politologue allemand du XIXième siècle, parlait d'une «communauté des peuples du couchant», organisée selon un fédéralisme agrégateur, reposant sur des principes diamétralement différent de ceux de la révolution française, destructrice des tissus sociaux concrets par excès de libéralisme économique et de militarisme bonapartiste.

 

Guillaume de Molinari, économiste français, réclamait à la fin du XIXième siècle la construction d'un «marché commun» incluant l'Allemagne, l'Autriche-Hongrie, la France, la Hollande, la Belgique, le Danemark et la Suisse. Il a soumis ses projets aux autorités françaises et à Bismarck. Lujo Brentano envisage à la même époque une union économique entre l'Autriche-Hongrie et les nouveaux Etats balkaniques. L'industriel autrichien Alexander von Peez, par un projet d'unification organique de l'Europe, entend répondre aux projets américains de construire l'Union panaméricaine, qui évincera l'Europe d'Amérique latine et amorcera un processus d'«américanisation universelle». Gustav Schmoller affirme que toute politique économique européenne sainement comprise ne peut en aucun cas s'enliser dans les aventures coloniales, qui dispersent les énergies, mais doit se replier sur sa base continentale et procéder à grande échelle à une «colonisation intérieure». Jäckh et Rohrbach théorisent enfin un projet de grande envergure: l'organisation économique de l'Europe selon un axe diagonal Mer du Nord/Golfe Persique. L'objectif de la théorie et de la pratique économiques devait être, pour ces deux économistes des vingt premières années de notre siècle, d'organiser cette ligne, partant de l'embouchure du Rhin à Rotterdam pour s'élancer, via le Main et le Danube, vers la Mer Noire et le Bosphore, puis, par chemin de fer, à travers l'Anatolie et la Syrie, la Mésopotamie et le villayat de Bassorah, aboutir au Golfe Persique. Vous le constatez, on retombe à pieds joints dans l'actualité. Mais, ce projet de Jäckh et de Rohrbach, qu'a-t-il à voir avec le thème de notre colloque? Que nous enseigne-t-il quant au nationalisme ou à l'impérialisme?

Beaucoup de choses. En élaborant leurs projets d'organisation continentale en zones germanique, balkanique et turque, les puissances centrales de 1914 réévaluaient le rôle de l'Etat agrégateur et annonçaient, par la voix du philosophe Meinecke, que l'ère des spéculations politiques racisantes était terminée et qu'il convenait désormais de faire la synthèse entre le cosmopolitisme du XVIIIième siècle et le nationalisme du XIXième siècle dans une nouvelle forme d'Etat qui serait simultanément supranationale et attentive aux ethnies qu'elle englobe. L'Entente, porteuse des idéaux progressistes de l'ère des Lumières, veut, elle, refaire la carte de l'Europe sur base des nationalités, ce qui a fait surgir, après Versailles, une «zone critique» entre les frontières linguistiques allemande et russe. Nous découvrons là la clef du problème qui nous préoccupe aujourd'hui: les puissances porteuses des idéaux des Lumières sont précisément celles qui ont encouragé l'apparition de petits Etats nationaux fermés sur eux-mêmes, agressifs et jaloux de leurs prérogatives. Universalisme et petit-nationalisme marchent la main dans la main. Pourquoi? Parce que l'entité politique impérialiste par excellence, l'Angleterre, a intérêt à fragmenter la diagonale qui s'élance de Rotterdam aux plages du Koweit. En fragmentant cette diagonale, l'Angleterre et les Etats-Unis de Wilson brisent la synergie grande-continentale européenne et ottomane de Vienne au Bosphore et de la frontière turque aux rives du Golfe Persique.

 

Or depuis la chute de Ceaucescu en décembre 1989, tout le cours du Danube est libre, déverrouillé. En 1992, les autorités allemandes inaugureront enfin le canal Main-Danube, permettant aux pousseurs d'emmener leurs cargaisons lourdes de Constantza, port roumain de la Mer Noire, à Rotterdam. Un oléoduc suivant le même tracé va permettre d'acheminer du pétrole irakien jusqu'au cœur industriel de la vieille Europe. Voilà les raisons géopolitiques réelles de la guerre déclenchée par Bush en janvier dernier. Car voici ce que se sont très probablement dit les stratèges des hautes sphères de Washington: «Si l'Europe est reconstituée dans son axe central Rhin-Main-Danube, elle aura très bientôt la possibilité de reprendre pied en Turquie, où la présence américaine s'avèrera de moins en moins nécessaire vu la déliquescence du bloc soviétique et les troubles qui secouent le Caucase; si l'Europe reprend pied en Turquie, elle reprendra pied en Mésopotamie. Elle organisera l'Irak laïque et bénéficiera de son pétrole. Si l'Irak s'empare du Koweit et le garde, c'est l'Europe qui finira par en tirer profit. La diagonale sera reconstituée non plus seulement de Rotterdam à Constantza mais du Bosphore à Koweit-City. La Turquie, avec l'appui européen, redeviendra avec l'Irak, pôle arabe, la gardienne du bon ordre au Proche-Orient. Les Etats-Unis, en phase de récession, seront exclus de cette synergie, qui débordera rapidement en URSS, surtout en Ukraine, pays capable de redevenir, avec un petit coup de pouce, un grenier à blé européen auto-suffisant. Alors, adieu les achats massifs de blé et de céréales aux Etats-Unis! Cette synergie débordera jusqu'en Inde et en Indonésie, marchés de 800 millions et de 120 millions d'âmes, pour aboutir en Australie et en Nouvelle-Zélande. Un grand mouvement d'unification eurasienne verrait le jour, faisant du même coup déchoir les Etats-Unis, en mauvaise posture financière, au rang d'une puissance de second rang, condamnée au déclin. Les Etats-Unis ne seraient plus un pôle d'attraction pour les cerveaux du monde et on risquerait bien de voir s'effectuer une migration en sens inverse: les Asiatiques d'Amérique, qui sont les meilleurs étudiants d'Outre-Atlantique, retourneraient au Japon ou en Chine; les Euro-Américains s'en iraient faire carrière en Allemagne ou en Italie du Nord ou en Suède. Comment éviter cela? En reprenant à notre compte la vieille stratégie britannique de fragmentation de la diagonale! Et où faut-il la fragmenter à moindres frais? En Irak, pays affaibli par sa longue guerre contre l'Iran, pays détenteur de réserves pétrolières utiles à l'Europe».

 

La stratégie anglo-américaine de 1919, visant la fragmentation des Balkans et du Proche-Orient arabe et projetant la partition de la Turquie en plusieurs lambeaux, et la stratégie de Bush qui entend diviser l'Irak en trois républiques distinctes et antagonistes, sont rigoureusement de même essence. L'universalisme libéral-capitaliste, avatar des Lumières, instrumentalise le petit-nationalisme de fermeture pour arriver à asseoir son hégémonie.

 

Au seuil du XXième siècle comme au seuil du XXIième, la necessité d'élargir les horizons politiques aux dimensions continentales ont été et demeurent nécessaires. Au début de notre siècle, l'impératif d'élargissement était dicté par l'économie. Il était quantitatif. Aujourd'hui, il est encore dicté par l'économie et par les techniques de communications mais il est dicté aussi par l'écologie, par la nécessité d'un mieux-vivre. Il est donc aussi qualitatif. L'irruption au cours de la dernière décennie des coopérations interrégionales non seulement dans le cadre de la CEE mais entre des Etats appartenant à des regroupements différents ou régis par des systèmes socio-économiques antagonistes, ont signifié l'obsolescence des frontières stato-nationales actuelles. Les énergies irradiées à partir de diverses régions débordent le cadre désormais exigu des Etats-Nations. Les pays riverains de l'Adriatique et ceux qui forment, derrière la belle ville de Trieste, leur hinterland traditionnel, ont organisé de concert les synergies qu'ils suscitent. En effet, l'Italie, au nom de la structure stato-nationale née par la double action de Cavour et de Garibaldi, doit-elle renoncé aux possibles qu'avaient jadis concrétisé l'élan vénitien vers la Méditerranée orientale? La Sarre, la Lorraine et le Luxembourg coopèrent à l'échelon régional. Demain, l'axe Barcelone-Marseille-Turin-Milan fédèrera les énergies des Catalans, des Languedociens, des Provençaux, des Piémontais et des Lombards, en dépit des derniers nostalgiques qui veulent tout régenter au départ de Madrid, Paris ou Rome. Ces coopérations interrégionales sont inéluctables. Sur le plan de la politologie, Carl Schmitt nous a expliqué que le Grand Espace, la dimension continentale, allait devenir l'instance qui remplacera l'«ordre concret» établi par l'Etat depuis Philippe le Bel, Philippe II d'Espagne, François I, Richelieu ou Louis XIV. Ce remplacement est inévitable après les gigantesques mutations de l'ère techno-industrielle. Schmitt constate que l'économie a changé d'échelle et que dans le cadre de l'Etat, figure politique de la modernité, les explosions synergétiques vers la puissance ou la créativité ne sont plus possibles. Le maintien de l'Etat, de l'Etat-Nation replié sur lui-même, vidé de l'intérieur par tout un éventail de tiraillements de nature polycratique, ne permet plus une mobilisation holarchique du peuple qu'il n'administre plus que comme un appareil purement instrumental. Sa décadence et son exigüité appellent une autre dimension, non obsolète celle-là: celle du Grand Espace.

 

Si le Grand Espace est la seule figure viable de la post-modernité, c'est parce qu'on ne peut plus se contenter de l'horizon régional de la patrie charnelle ou de l'horizon supra-régional de l'Etat-Nation moderne. L'horizon de l'avenir est continental mais diversifié. Pour pouvoir survivre, le Grand Espace doit être innervé par plusieurs logiques de fonctionnement, pensées simultanément, et être animé par plusieurs stratégies vitales concomitantes. Cette pluralité, qui n'exclut nullement la conflictualité, l'agonalité, est précisément ce que veulent mettre en exergue les différentes écoles de la post-modernité.

 

Cette post-modernité du Grand Espace, animé par une pluralité de logiques de fonctionnement, condamne du même coup les monologiques du passé moderne, les monologiques de ce passatisme qu'est devenue la modernité. Mais elle condamne aussi la logique homogénéisante de l'impérialisme commercial et gangstériste des Etats-Unis et la monologique frileuse des gardiens du vieil ordre stato-national.

 

Pour organiser le Grand Espace, de Rotterdam à Constantza ou le long de toute la diagonale qui traverse l'Europe et le Proche-Orient de la Mer du Nord au Koweit, il faut au moins une double logique. D'abord une logique dont un volet réclame la dévolution, le recentrage des énergies populaires européennes sur des territoires plus réduits, parce que ces territoires ne seront alors plus contraints de ne dialoguer qu'avec une seule capitale mais auront la possibilité de multiplier leurs relations interrégionales. Ensuite une logique qui vise l'addition maximale d'énergies en Europe, sur le pourtour de la Méditerranée et au Proche-Orient.

L'adhésion à la nation, en tant qu'ethnie, demeure possible. Le dépassement de cet horizon restreint aussi, dans des limites élargies, celles du Grand Espace. L'ennemi est désigné: il a deux visages selon les circonstances; il est tantôt universaliste/mondialiste, tantôt petit-nationaliste. Il est toujours l'ennemi de l'instance que Carl Schmitt appelait de ses vœux.

 

Que faire? Eh bien, il faut 1) Encourager les logiques de dévolution au sein des Etats-Nations; 2) Accepter la pluralité des modes d'organisation sociale en Europe et refuser la mise au pas généralisée que veut nous imposer l'Europe de 1993; 3) Recomposer la diagonale brisée par les Américains; 4) Organiser nos sociétés de façons à ce que nos énergies et nos capitaux soient toujours auto-centrés, à quelqu'échelon du territoire que ce soit; 5) Poursuivre la lutte sur le terrain métapolitique en s'attaquant aux logiques de la désincarnation, avatars de l'idéologie des Lumières.

 

Pour conclure, je lance mon appel traditionnel aux cerveaux hardis et audacieux, à ceux qui se sentent capables de s'arracher aux torpeurs de la soft-idéologie, aux séductions des pensées abstraites qui méconnaissent limites et enracinements. A tous ceux-là, notre mouvement de pensée ne demande qu'une chose: travailler à la diffusion de toutes les idées qui transgressent les enfermements intellectuels, le prêt-à-penser.

Je vous remercie.

 

Robert Steuckers.

 

mardi, 26 janvier 2010

Een Vlaming bij de Nestorianen

Een Vlaming bij de Nestorianen

Ex: http://www.shlama.be/

 

In de late Middeleeuwen reist de Vlaamse monnik Willem Van Rubroek naar Mongolië. Hij zoekt zijn weg door de Aziatische steppe, hij observeert en stelt zijn belevenissen te boek. Een uniek reisverslag over Mongoolse praktijken, ontaarde nestorianen en overdadig drankgebruik. Oosters christendom door een westerse en katholieke bril.   (A. Thiry)  


Reiziger met een missie

Willem Van Rubroek is een franciscaner monnik afkomstig van het dorp Rubroek in Frans-Vlaanderen. In het midden van de 13de eeuw reist hij als boodschapper van de Franse koning Lodewijk IX oostwaarts naar de Mongoolse heerser Mongke. In die tijd beheersen de Mongolen de Zijderoute, ze hebben grote delen van China veroverd en Mongke, een kleinzoon van Djengis Khan, heeft zijn hofhouding in de Mongoolse hoofdstad Karakorum. Willem moet in opdracht van de Franse koning nagaan of Mongke bereid is een bondgenootschap aan te gaan met de christelijke vorsten in het westen. Die machtige alliantie kan de islamieten in het Midden-Oosten in de tang nemen en hun opmars stuiten. Misschien is het zelfs mogelijk de Mongoolse heersers te bekeren tot het ware katholieke geloof.


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Mongoolse ruiters van de horde van de Grote Khan in opmars

In 1254 verblijft Willem Van Rubroek aan het hof van de Grote Khan. Mongke heeft genoeg aan de traditionele Mongoolse gebruiken. Christendom, islam en boeddhisme interesseren hem enkel als het hem goed uitkomt en een verontwaardigde Willem krijgt te horen dat de Franse koning zich moet onderwerpen aan het gezag van de enige wereldheerser, de Grote Khan. Willem denkt er het zijne van en hij schrijft zijn observaties neer in zijn Itinerarium, zijn reisverslag voor de Franse koning. Daarin bericht hij ook over andere christenen die al lang voor hem naar het Verre Oosten zijn getrokken en daar aan missionering hebben gedaan. Ze vertegenwoordigen de Perzische, later de Assyrische, Kerk van het Oosten. Het zijn nestorianen, volgens Willem losbandige ketters die zijn afgedwaald van de Rooms-Katholieke Kerk. Hij schetst een opvallend negatief beeld van hen in zijn Itinerarium. Willem Van Rubroek, Vlaming, katholiek en westerse gezant, schrijft zijn oosterse medechristenen naar de verdoemenis. Daarmee plaatst hij zich in een lange traditie van verkettering en ze zal nog lang na hem standhouden.

Woekeraars en dronkaards

Willem is onderweg naar de Grote Khan. In zijn Itinerarium heeft hij het over de nestorianen. Onbeschrijfelijk hoe die zich gedragen. In 15 Chinese steden zijn er nestorianen. Ze weten niets, ze houden misdiensten met heilige boeken in het Oud-Aramees, maar ze kennen die taal niet eens. Het zijn woekeraars en dronkelappen en sommigen onder hen die met de Tataren samenleven, hebben meerdere vrouwen. Bij het betreden van de kerk wassen ze hun onderlichaam zoals de Arabische islamieten dat doen, en ze eten vlees op vrijdag. Hun bisschop bezoekt hen zelden, en als dat toch gebeurt, wijdt hij alle mannelijke kinderen, ook degenen die nog in de wieg liggen, tot priesters. Die huwen dan later en als hun eerste vrouw overlijdt, nemen ze een andere. De nestoriaanse priesters doen aan simonie, ze laten zich betalen voor elk sacrament dat ze toedienen, en ze bekommeren zich meer om hun eigen welzijn en dat van hun gezin dan om het geloof. Nestorianen voeden de zonen van de Mongoolse edelen op en verkondigen het Evangelie. Maar door hun kwalijke levenswijze en  hebzucht vervreemden ze de jonge Mongolen van het christelijke geloof, want zelfs de Mongoolse heidenen leven volgens Willem vromer dan de nestorianen. 

Feest in de kapel

Eind 1253 bereikt Willem het legerkamp, de ordu, van de Grote Khan. Enkele dagen later wordt hij ontvangen door Mongke. Voorleer hij de tent van de Mongoolse heerser mag betreden, vragen nestoriaanse priesters hem in welke richting hij bidt. Naar het oosten, legt Willem uit. Dat christelijke antwoord bevredigt hen, want omdat hij zijn baard had afgeschoren, hielden ze hem eerst voor een goddeloze boeddhist. Voor alle zekerheid moet hij hen nog de Bijbel uitleggen, en dan mag hij naar binnen. Mongke is een kleine man op een divan. Willem krijgt rijstwijn te drinken, de drank gaat overvloedig rond en tijdens de audiëntie raakt Mongke behoorlijk dronken. Willem geeft vooral zijn ogen de kost en denkt er het zijne van.

 


Tijdens de periode van Driekoningen is Willem getuige van een nestoriaanse eredienst. Voor zonsopgang verzamelen de nestoriaanse priesters zich in de kapel. Ze slaan op het ceremoniële hout en ze zingen plechtig de metten. Dan trekken ze hun kerkgewaden aan en maken het wierookvat klaar. De eerste vrouw van Mongke komt aan met haar kinderen en met andere hofdames. Ze werpen zich ‘op nestoriaanse wijze’ neder ter aarde, hun voorhoofd raakt de grond. Ze beroeren alle afbeeldingen met hun rechterhand, ze kussen die hand en reiken ze aan de omstanders. Dat is de gewoonte bij de nestorianen als ze een kerk betreden. De priesters beginnen te zingen en de edele dame wordt letterlijk bewierookt. Het is al dag geworden als de dame haar hoofdtooi afneemt en Willem haar blootshoofds te zien krijgt. Later verschijnt Mongke zelf. De Grote Khan neemt plaats naast zijn dame voor het altaar en laat zich Willems bijbel en brevier brengen. Hij bekijkt de afbeeldingen en de nestoriaanse priesters leggen hem uit wat die voorstellen. Dan houdt hij het voor bekeken en verlaat de dienst. Zijn dame blijft en deelt geschenken uit aan alle aanwezige christenen. Willem krijgt kostbare stof. Er wordt drank aangebracht, mede, rode wijn en merriemelk. De dame knielt neer met een volle beker in de hand, de nestoriaanse priesters zegenen haar luid zingend en ze ledigt de beker. Willem moet ook voor haar zingen als ze opnieuw wil drinken. Als iedereen al haast dronken is, komt het eten, schapenvlees dat meteen wordt verslonden, en daarna vis. Zo brengen ze de hele dag door. Als de avond valt, hijst de beschonken dame zich in haar wagen en rijdt weg onder het gezang en gejoel van de nestoriaanse priesters.

Geloof en drank in Kakakorum 

Op Palmzondag komt Willem aan in de Mongoolse hoofdstad Karakorum. Met de banier van het Heilige Kruis hoog geheven rijdt hij door het stadsdeel van de moslims naar de kerk van de nestorianen die in processie zijn uitgelopen om hem te begroeten. Het is tijd voor de mis. Door de Mongolen gevangen genomen christenen – Slaven  Georgiërs en Armeniërs – willen de dienst bijwonen, maar de nestorianen eisen dat ze zich eerst door hen laten herdopen. De nestorianen verzekeren Willem dat ze een portie van de olie hebben waarmee Maria Magdalena de voeten van de Heiland heeft gezalfd. Ze beweren dat ze ook wat van het meel bewaren waarvan het brood is gemaakt dat Christus heeft gewijd tijdens het Laatste Avondmaal. Willem stelt vast dat er in Karakorum twaalf boeddhistisch heidense tempels zijn, twee moskeeën ‘waar de wet van Mohammed wordt uitgeschreeuwd’, en één nestoriaans christelijke kerk in de verste uithoek van de stad.
Net voor Pinksteren neemt Willem deel aan een groot religieus debat in Karakorum tussen christenen, islamieten en boeddhisten. Willem verdedigt het christelijke geloof in één almachtige God en haalt het naar eigen zeggen van zijn heidense opponent die vele goden erkent. Hij beschrijft wat volgt, het is een verrassende wending: ‘De nestorianen wilden het woord nemen en ik gaf toe. Maar toen ze wilden redetwisten met de islamieten antwoordden die: “We erkennen dat uw godsdienst waar is en dat wat het Evangelie verkondigt waar is en we willen niet met u redetwisten.” En ze bekenden dat ze in al hun gebeden God smeekten te mogen sterven zoals christenen sterven.’ Waarop de aanwezige christenen en islamieten luidkeels zingen, terwijl de heidense afgodendienaren toekijken en zwijgen. Het eindigt op de wijze die Willem maar al te vertrouwd is: ‘Daarna gingen ze met z’n allen stevig drinken.’

 

Dramatische wending  

In de zomer van 1254 begint Willem Van Rubroek aan de terugreis vanuit Mongolië naar het westen. Hij komt langs de Ararat, de berg met de resten van de ark van Noach. De Armeniërs spreken van de berg Massis en volgens hen mag niemand die beklimmen, want het is de moeder van de wereld. Begin februari 1255 is hij in de Armeense hoofdstad Ani op het hoogplateau aan de rivier de Araks. Willem neemt de oude Armeense eretitel van de stad over, hij noemt Ani de stad van de duizend kerken. Maar hij ziet er ook twee Saraceense synagogen, d.w.z. moskeeën. Verderop steekt hij de vlakte over waar de oprukkende Mongolen het veel grotere ruiterleger van de islamitische Turkse sultan hebben vernietigd. Hij heeft daar zijn bedenkingen bij: ‘In de vlakte waar die moordende veldslag plaatsvond, is door de uitbarsting van een aardbeving een groot meer ontstaan en ik dacht bij mezelf dat het hele land zijn muil had geopend om het bloed van de islamieten te verzwelgen.’

Willem Van Rubroek komt veilig thuis en schrijft zijn belevenissen neer. Hij draagt zijn Itinerarium op een de Franse koning Lodewijk IX. Die had hem naar Mongolië gezonden om er te polsen naar een mogelijke alliantie met de Grote Khan tegen de islamieten. Die Kruistocht op twee fronten is er nooit gekomen. Enkele decennia na de reis van Van Rubroek bekeerden de Mongoolse veroveraars van het Midden-Oosten zich tot de islam. Een dramatische wending, die de ondergang inluidde van de oosterse christenen. Met name de nestorianen moesten het ontgelden en behalve enkele ruïnes, rotsinscripties en grafkruisen is er zo goed als niets overgebleven van hun eens zo invloedrijke aanwezigheid in het Verre Oosten. Het is alsof de Aziatische steppe zich heeft geopend om hen te verzwelgen. Willem Van Rubroek, Vlaamse franciscaan in Franse dienst en reiziger in het ware katholieke geloof, heeft dat niet meer beleefd, maar hij zou er wellicht mee hebben kunnen leven.

 

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Modern times in hedendaags Mongolië
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Mongoolse hoofdstad Karakorum in het binnenland van Mongolië
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Mongkes voorganger Ogadai khan
 




 

lundi, 25 janvier 2010

The Ataman and the Bloody Baron - About Russian warlords and their Assyrian connection

The Ataman and the Bloody Baron

About Russian warlords and their Assyrian connection

Ex: http://shlama.be/

August 1921 somewhere on the Russian-Mongolian border. A lonely warrior on horseback wanders through the endless steppe. He has lost most of his uniform and Mongolian talismans are swaying on his naked chest. It is the last ride of Ungern-Sternberg, the Mad Baron. His Mongolian soldiers will soon seize him and hand him over to the Red cavalry in pursuit of the small army that Ungern has lead from Mongolia into Soviet territory. And so the legend grows – the exploits of Baron Roman von Ungern-Sternberg, the most notorious partner in crime of the Cossack warlord Grigori Semenov in the Siberian Far East during the Russian Civil War.
 
Assyrians and Cossacks
 
In the autumn of 1914 Great-Britain, France and Russia have declared war on Turkey. In the spring of 1915 the Turkish government orders the mass deportation of the Armenians on its territory. The whole Armenian population is driven out of its homeland in eastern Anatolia and an awful number of Armenians is exterminated by Turkish zaptieh and Kurdish bands, while the survivors of these forced marches are left to their fate, without food or shelter in the Syrian desert. 

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Mar Shimun's homeland - Hakkari Mountains
In the summer of 1915 the Assyrian tribes in the Hakkari mountains in SE Turkey come under the sword of Islamic Jihad. Mar Shimun, the patriarch of the Assyrian mountaineers, presides at a general meeting of the Assyrian chieftains. They decide to throw in their lot with the Allied nations against Turkey. Turkish troops and Kurdish irregulars invade the Assyrian homeland. The Assyrians retreat to the high mountains, where they make their last stand. Mar Shimun crosses the passes with a small party and reaches Persian territory that has been occupied by the Russian army. He tries to get support from the Russians and returns to his besieged people in Hakkari.
   The Russians send a small expeditionary force of 400 Cossacks to the Hakkari Mountains. The Cossacks advance towards Oramar, the stronghold of the Kurdish chieftain Soto. Agha Soto is a fierce enemy of the Assyrian mountaineers. He sacks their villages, steals their flocks, he abducts their women and murders the male villagers. The Russian Cossacks are unaware of this. Blinded by Soto’s oriental hospitality, they accept his guides to lead them through the mountain passes. In a deep gorge the Cossacks are ambushed. Soto’s clansmen and other Kurds attack them from all sides and they are slaughtered to the last man. The 18 Cossacks who have stayed behind in Soto’s home as his honoured guests are massacred as well. So much for this Russian attempt to relieve the Assyrians of Hakkari in the summer of 1915.
   The Assyrian mountaineers can only rely on themselves. They break through the enemy lines, they suffer heavy losses when they flee from Hakkari, but the greater part of them survives and most of them become refugees in the Russian occupied northwestern part of Persia. In this region west of Lake Urmia they are among other Christians, Assyrians of the plain, who have been living there for many centuries.
 
Massacre at Gulpashan 
 
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Lake Urmia in northwestern Persia
Even before the arrival of the Assyrians from Hakkari the Assyrian inhabitants of the Urmia plain have endured terrible persecutions from their Muslim neighbours. During the first days of 1915 the Russian armed forces in control of the area suddenly retreat, leaving the Assyrian minority to its fate. Turkish troops occupy Urmia. Thousands of panic-stricken Assyrians of the Urmia region leave their homes and follow the trail of the Russian army, heading north towards the Caucasus. It is a horrendous exodus in midwinter, the weaker ones perish along the way. Those who have stayed behind hope to be spared in their villages or take refuge in the compounds of the British Anglican and the American Presbyterian Missions in Urmia town.  

Gulpashan is one of the most important and prosperous Assyrian villages in the Urmia plain. Paul Shimmon, an Assyrian who has returned to his homeland after his studies in the USA, describes what has happened in Gulpashan. The sister village of Gogtapa has already been plundered and burnt by Muslim mobs, while Gulpashan is at first left in peace. Shimmon mentions that this is probably due to the fact that one of the Assyrian village masters is related to the German consular agent in Urmia. The latter has sent his servant to Gulpashan and Turkish soldiers guard the place.

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Gogtapa - Assyrian graveyard
End February 1915 a band of fanatic Persian Muslims invades the village. They pretend to have come in peace, but then they seize the Assyrian men of Gulpashan, tie them up and drag them to the cemetery. The victims are barbarously butchered and finally the bloodthirsty intruders turn to the village women. After the massacre at Gulpashan American missionaries come from Urmia town to the village to bury the dead. Shimmon concludes: ‘The awful deeds that were perpetrated here were telegraphed to America, whereupon such strong representations were made by the United States Government that an order was given for their cessation.’ Although the Russian army pushes back the Turkish enemy and reoccupies the Urmia region in the early spring of 1915, later events will prove that Shimmon has been too optimistic. 
   In January 1916 Patriarch Mar Shimun, acting as the leader of the united Assyrians, visits the headquarters of the Russian Caucasian Army in Tiflis (Tbilisi), the capital of Georgia. He is received there with great honour by Grand Duke Nicholas, the Tsar’s uncle and the commander in chief of the Russian Caucasian Army. The result of the meeting is that the Russians agree to supply the Assyrians with weapons and ammunition. After Mar Shimun’s return the Russian consul Nikitin, stationed in Urmia, publicly reads the telegram in which Tsar Nicholas II expresses his gratitude towards the Assyrian Patriarch ‘for the help he has rendered in the war and for his willingness to co-operate with us.’
   Soldiers are recruited among Mar Shimun’s mountaineers, they are trained by Russian officers and in the autumn of 1916 two Assyrian battalions are ready for  battle. Russian protection however won’t last much longer. The Tsarist Empire is about to collapse in the turmoil of the revolution of 1917.
 
Enter Semenov and Ungern
 
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Grigori Semenov
Grigori Semenov is a Russian officer of mixed blood. His father was a Siberian Cossack, his mother belonged to the Buryat people living on the steppe east of Lake Baikal, and this distant Transbaikal area is Grigori Semenov’s homeland. When the Fist World War rages at its peak, he serves on the Galician Front that runs through western Ukraine and he distinguishes himself in battle against the Austrian-German enemy. From that period dates his long lasting friendship with a colleague officer, Baron Roman von Ungern-Sternberg.
   The latter has his roots in Baltic Estonia. He is the descendant of German crusaders, the warlike Teutonic Knights, and later on his family builds up a tradition in military service of the Russian Tsarist Empire. His superior, General Wrangel, writes about Ungern in his memoirs: ‘War was his natural element... When he was promoted to a civilised environment, his lack of outward refinement made him suspicious.’
   Semenov and Ungern are reactionary officers, devoted to Russian imperial autocracy and fanatically opposed to all kinds of democratic changes. In other words: the Tsar rules; without his supreme authority chaos is inevitable and Russia will fall apart. It is needless to say that the Russian Revolution of 1917 causes the final and fatal breaking-point in their careers.  
   Towards the end of 1916 Semenov and Ungern request to be posted on the Persian Front. The transfer is granted and in January 1917 they are stationed together in the Urmia region. Semenov joins the Transbaikal Cossacks, the fierce warriors of his Siberian homeland who already serve in that Russian occupied part of Persia, and he becomes the commander of a sotnia or cavalry squadron of the Third Verchne-Udinsk Regiment. That unit has its cantonment ‘in a village close to the shore of Lake Urmia’,  as Semenov puts it. It is Gulpashan, the Assyrian village where about a year before his arrival Persian Muslims have slaughtered a lot of Christian villagers. Bloodshed and massacre – Semenov and Ungern are surrounded by their natural elements. 

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Roman von Ungern-Sternberg
The February Revolution breaks out in Petrograd (Saint Petersburg) and the last Russian emperor, Tsar Nicholas II, abdicates. The Provisional Revolutionary Government issues Army Order 1, which orders the formation of elected soldiers committees. The garrison of Transbaikal Cossacks at Gulpashan elects Semenov as their representative and he leaves for Urmia town where the committee of the Russian Caucasian Army Corps meets. One of the representatives proposes to increase the soldiers’ pay at the expense of the officers’ salary. Such stupid nonsense, Semenov sneers, the revolt of the unleashed rank and file. It gets even worse when Semenov notices that the commander of the Russian army corps in Urmia takes an active part in the public celebration of the revolution.

Semenov and Ungern decide to counter the events with drastic counterrevolutionary action. April 1917 permission is obtained from the local Russian army staff to start recruiting new volunteers among the Assyrians in the Urmia region. They will be trained under the personal command of ‘the exceptionally brave officer Baron RF Ungern-Sternberg’, as Semenov characterizes his companion. 
   The Assyrian volunteers, mainly tribal warriors from the Hakkari mountains, know how to fight, but due to the revolutionary upheaval among the Russian soldiers the efforts of the Assyrian fighters fail to restore military discipline. The Russians are fed up with the war. Domoj! they shout, they want to go home.
 
Guerrilla and Exodus
 
The Russian writer Viktor Shklovsky, who serves in Persia after the February Revolution of 1917, notices that a guerrilla band under the command of the Assyrian general Agha Petros raids the country. Shklovsky writes: ‘The exiled Assyrian mountaineers starved, plundered and aroused the burning hatred of the Persians. They visited the bazaars dressed in small felt caps, multicolored vests and wide pants made from scraps of calico and tied above the ankles with ropes. The Christian religion, which bound the Assyrians together, had long since grown slack and subsisted only as another means of differentiating them from the Muslims.’
   Apparently with the support of Semenov Ungern has trained a tough Assyrian militia, fit for guerrilla fighting and eager to annihilate the enemy. No mercy, raid and kill – it is the kind of warfare Semenov and Ungern will put into practice during the civil war in eastern Siberia. Is it far-fetched to presume that the uncompromising behaviour of the Assyrian warriors has inspired them to some extent?   
  
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Chal castle - Soto's stronghold
Well trained and highly motivated by feelings of revenge, Assyrian militias under the command of Mar Shimun’s brother David and General Agha Petros cross the Persian-Turkish border in the summer of 1917 and march against the Kurdish chieftain Soto at Oramar. Among the Russian Cossack officers who accompany this punitive expedition are neither Semenov nor Ungern. In those days they have already left the Urmia region.
   The Assyrian expeditionary force engages in heavy fighting against the Oramar Kurds. Assyrian warriors conquer and sack Oramar. Soto has fled and the Assyrians hunt him down in his last mountain stronghold at Chal. In a dashing attack they storm the castle and break through its main gate. The Kurdish defenders are slain, others are taken captive and the fortress is burnt to the ground. Soto himself has escaped once more, but the Assyrians have ravaged his territory and back in Urmia they get their reward – Russian military medals for bravery under fire. Viktor Shklovsky cynically  points out the other support the Assyrian fighters have got from their Russian allies: ‘We gave them nothing but rifles and cartridges, and even the weapons supplied were mediocre French three-shot Lebel rifles.’

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Urmia today - Central Square
What follows is sad history. In Russia the Bolsheviks have seized power after the October Revolution of 1917 and in January 1918 the Russians hastily retreat from Urmia. Once again the Assyrians are abandoned and left at the mercy of their enemies. Patriarch Mar Shimun is murdered close to Salmas, during negotiations with the treacherous Kurdish chieftain Simko. Assyrian militias crush a rebellion of Persian bands in Urmia and occupy the town, while Turkish troops are closing in on them. Harsh fighting devastates the region. Agha Petros holds out with his mounted fighters at first, but in plain summer Turkish armed forces break through and invade Urmia.
   The Assyrians have just one option left – a general exodus. The whole Assyrian nation, men, women and children, flee in a desperate attempt to reach the advance guard of a British expeditionary force that is approaching from the south. After the Russian retreat the British have promised to support the Assyrians, but promises is once more the only thing the Assyrians get. They are constantly under attack, there is no food, no shelter, and thousands of Assyrians perish during that awful march of a whole month through the Kurdish mountains of Persia. Those who make it are assembled by the British and taken to a refugee camp north of Baghdad. That summer of 1918 marks the end of the Assyrian nation in the Urmia region. It is also a turning point in the life of Semenov and Ungern, but for them it means the start of their most notorious exploits.
 
Siberian Warlords
 
End 1917 Semenov and Ungern prepare their next move in Manchuli, a gloomy garrison town in eastern Siberia at the Russian-Chinese border. According to them Russia will perish without the Tsar, whose autocratic regime must be restored at all costs. Semenov has been in Petrograd in the summer of 1917, a few months before the Bolshevik October Revolution. He has seen the Petrograd Soviet in action and he is absolutely convinced that the Soviet is dominated by deserters and German agents like Lenin and Trotsky. It is time to stop them.
   The first weeks of 1918 Semenov and Ungern advance from their Manchurian base in northern China with a small force of Buryat cavalry and Russian officers. They engage in guerrilla fighting against the Red Guards along the Trans-Siberian Railroad.  Semenov’s men are pushed back, but in the summer of 1918 anti-Soviet rebellions break out in Siberia. The Bolsheviks are obliged to loosen their grip and Semenov’s Special Manchurian Detachment dashes again into Siberian Russia. He conquers the major railroad centre Chita and makes this town the capital of his territory.
   Civil war with Reds fighting against Whites tears the Russian Empire apart. The former tsarist admiral Kolchak is in full control of the White Siberian government established in Omsk, west of Lake Baikal. The Siberian Far East is set ablaze. Japan has sent a contingent of troops, while an American expeditionary force is about to disembark in Vladivostok. In Transbaikalia, east of Lake Baikal, Semenov pulls the strings with money and weapons he gets from the Japanese. He is promoted ataman, supreme leader, of the Transbaikal Cossacks and that period in Transbaikalia is called the Atamansjtsjina, which means the Ataman’s Reign of Terror. His armoured trains terrorize the area and other trains get the even worse reputation of death trains. They transport Bolshevik prisoners of war to their doom. The Red captives are executed along the way or starved to death and when such a train stops at last on a side track near a station the stench of the corpses in the closed wagons is almost unbearable.

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Ataman Semenov in Soviet jail
Ataman Semonov drinks champagne by the bottle and enjoys the company of a whole bunch of mistresses. Then the Bolsheviks strike back. The Red Army has already defeated Kolchak’s White troops and the next offensive is directed against Semenov’s Transbaikalia. End 1920 the Reds march into Chita. Semenov escapes and flees to Vladivostok. He crosses the Pacific and seeks asylum in the United States. His request is rejected, he is called a criminal of war in the American press and he will have to stand trial. Semenov leaves the States and goes to Japan.
   Finally he settles down in Chinese Manchuria, a puppet state of Japan after 1930, and there he keeps agitating against Soviet Russia as the leader of the White Cossacks. At the end of the Second World War the Soviets invade Manchuria.  Semenov is arrested, put to trial and sentenced to death by a Soviet court. End of August 1946 he is hanged in a basement. The Bolshevik hangmen prolong his agony and shout at him Repent, reptile! And that is how die-hard Cossack warlord Grigori Semenov meets his end.
 
Back to 1920. Semenov still rules in Transbaikal Siberia when Ungern claims his own dominion at the Manchurian border. Russian refugees heading on trains for China are robbed and thank their good fortune if they get through alive. Ungern is equally ruthless towards his own men, a bunch of wild and often sadistic warriors.  Drunkenness and attempts to desert are severely punished. Flogging to death is one of Ungern’s methods. ‘Did you know’, he once said, ‘that men can still walk when their flesh is separated from their bones?’
   In the autumn of 1920, when Semenov is about to leave Transbaikia, Ungern starts his most stunning campaign. He invades Mongolia with a cavalry division of Mongolians, Cossacks and Tibetans, altogether some five thousand troops. The Tibetans have been sent to him by the Thirteenth Dalai Lama, who hopes that Ungern’s army will free Mongolia and Tibet from the Chinese. The first attack of the invaders is driven off, but in February 1921 Ungern’s men storm the Mongolian capital Urga (Ulan-Bator), they massacre the Chinese garrison and sack the city.
   Ancient times of terror and bloodshed revive in Urga during Ungern’s rule. He adopts the features of a militant Buddhist, as appears from his new colourful outfit. In the eyes of his Mongolian followers he is the God of War, the incarnation of Genghis Khan, and he reveals his ultimate plan – restoring the Great Mongolian Empire through fire and sword. He will advance against Soviet Russia and, as he puts it, create a lane of gallows with the corpses of Bolsheviks and Jews.

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Ungern in Mongolia
In the early summer of 1921 Ungern leads his force into Soviet territory. The invaders are crushed by Red Army troops and what is left of Ungern’s ragged mob is scattered in a desperate retreat. Surrender is not an option for the Mad Baron, he urges his men to follow him and strike back from the last stronghold – Tibet. Even extreme madness has its limits, though. The White Russians in his army camp revolt and fire their guns at him. Ungern jumps on his white horse and disappears into the night, looking for his faithful Mongolian outriders. Precisely these men will hand him over to the Red cavalry in pursuit of the invaders.
   In September 1921 he stands trial in a Soviet court in Novosibirsk. When asked by the Bolshevik prosecutor, a Siberian Jew, if he often beat people to death, Ungern answers: I did, but not enough! He is put before a Red firing squad and executed. Legend has it that Baron von Ungern-Sternberg even in better times more than once declared: Ich war ungern von Sternberg. In English: I have always hated being me.
 
Semenov and Ungern – after the Great War Siberian warlords of the worst kind and in the spring of 1917 Russian Cossack officers training Assyrian militias in the Persian Urmia region. The Russian writer Viktor Shklovsky liked the Assyrians, he called them a fantastic people. This may be true, but they have all too often picked the wrong allies. Or maybe these dubious allies picked them. Wrong place, wrong moment and wrong alliances – it seems to be the fate of the small Assyrian nation in history. 
 
Sources: Viktor Shklovsky, Sentimental Journey (Berlin, 1923); James Palmer, The Bloody White Baron (London, 2008); Jamie Bisher, Cossack Warlords of the Trans-Siberian (New York, 2005); Ataman Semenov, O sebe (Moscow, 2002).                                   Text - A. Thiry    

dimanche, 24 janvier 2010

Matthias Corvin, élu roi de Hongrie

Matthias-corvinus-hoesegter-budapest.jpg24 janvier 1458: Le fils du chef hongrois Janos Hunyadi, Matthias Corvin ou Corvinus, est élu roi de Hongrie à la mort de Ladislas. Janos Hunyadi, petit baron de Transylvanie, remarqué par l’Empereur Sigismond pour sa valeur militaire et ses talents d’organisateur, prendra la tête des armées hongroises et fera de son pays le bouclier principal de l’Europe contre les assauts des Ottomans. Pour parfaire ce projet de barrer la route de Vienne et du Danube aux Turcs, Hunyadi réforme l’Etat, le dé-féodalise et crée une armée populaire au départ des masses paysannes magyars. Il sera détesté des magnats, mis à contribution pour financer cette armée nombreuse, seule capable de faire barrage à la puissance ottomane. Son fils Matthias Corvin poursuivra son oeuvre, imposera aux magnats l’efficacité politique conçue par son père et donnera, face aux Ottomans, désormais maîtres de Byzance, une période de paix de plus de 70 ans à la Hongrie. Quand les magnats reprendront le dessus, ils disloqueront l’armée populaire et seront écrasés par les janissaires à Mohacs en 1526, réduisant la Croatie médiévale à des “reliquae reliquarum”, des “résidus de résidus”, et plongeant la Hongrie sous une tutelle ottomane quasi permanente, jusqu’à la fin du 17ème siècle.

 

 

vendredi, 22 janvier 2010

Les néo-socialistes au-delà de la gauche et de la droite

Archives de SYNERGIES EUROPEENNES - 1987

Les néo-socialistes au-delà de la gauche et de la droite

 

par Pierre-Jean Bernard

 

 1) Les néo-socialistes: "ni droite, ni gauche", "néos" et perspectives socialistes.

 

Si la guerre de 14/18 sonne le glas du vieux monde, des vieilles choses, des idées reçues et de la morale bourgeoise, force est de constater les mutations qu'elle entraîne dans les divers courants politiques. Mutations qui s'opèrent parallèlement à l'avènement du monde moderne. Il en est ainsi du "mouvement socialiste", nous devrions plutôt dire des  socialismes qui vont éclore et parfois s'affronter. Certes le public retiendra longtemps l'impact du dernier avatar du marxisme, à savoir le bolchévisme et l'élan que suscita la Révolution d'Octobre 1917. En France, les conséquences en sont l'apparition du PCF et la scission dans le mouvement syndical de la CGT, consécutive à la déchirante révision idéologique née du congrès "historique" de Tours. Mais finalement la conception bolchévique n'est que la "radicalisation" du courant marxiste, accompagnée d'un rejet du jeu parlementaire et légaliste.

 

Or que sait-on des courants néos opposés aux vieilles barbes de la SFIO? Que sait-on des idées de ces militants que le conflit mondial -et donc l'avènement brutal de la "modernité"- a rendu visionnaires, alors que d'autres, atteints de cécité politique, veulent absolument faire croire au public à la réalité éternelle de l'affrontement droite/gauche, hypothétiques blocs hermétiques qui symboliseraient deux conceptions du monde. L'une serait celle d'une gauche porteuse d'espérance et de générosité (mythes qui recouvrent en partie les sentiments de la classe ouvrière européenne dans ces années de capitalisme en plein essor), et l'autre celle d'une droite "fascisante et réactionnaire, ennemie de la démocratie (ce qui est vrai) et bras armé du capital, celui des deux cents familles! Ce qui est aussi partiellement vrai.

 

Mais, en réalité, qui sont donc les hommes qui refusent ce schéma trop simpliste? Leurs noms sont Georges Gressent, dit Valois, Marcel Déat, Henri De Man ou encore Marquet, Lefranc, Albertini, etc. L'absurde chaos de la "Grande Guerre", où ils se sont battus courageusement, parfois comme officiers, parfois comme simples soldats (le cas d'un Drieu la Rochelle), "les joies (sic) des tranchées" et le brassage des classes jeunes (ouvrières, paysannes, bourgeoises) dans les champs sanglants de l'Est et du Nord de la France, les ont enfin décillés. Avec l'absurdité et l'horreur, ils ont aussi connu le sens du sacrifice  -car le mot "devoir" est bien trop faible pour évoquer leur cas-  le sens également de la solidarité, de la camaraderie, rendant ineptes ou dépassés les vieux termes de droite ou de gauche, sanctionnant de manière désormais si désuète les clivages de classe. Et s'ils désapprouvent  "la guerre civile européenne", selon le mot fameux de Valery, ils ont gardé au fond de leur cœur cette mystique de l'"Union sacrée" (mais pas au sens où l'entendaient les minables politiciens bourgeois de la future chambre bleue horizon). "Ni droite, ni gauche" crie le socialiste Albertini, auquel fait écho le "droitiste" Bucard. D'où une volonté de sortir du moule trop bien huilé des partis et des "systèmes", et d'essayer autre chose...

 

 Georges Valois

 

valois.jpgG. Valois  est chronologiquement le premier dans cette série de pionniers. S'il reprend du service à l'Action Française, c'est bien dans l'espoir de voir se perpétuer et s'approfondir le rapprochement des Camelots du Roy avec les cercles proud'honiens et soréliens d'avant-guerre, bref de réconcilier la monarchie des humbles, celle de la justice des peuples, avec l'anarcho-syndicalisme révolutionnaire (cf l'œuvre de Sorel, en particulier ses réflexions sur la violence, et ses matériaux d'une théorie du prolétariat). Mais l'AF, où il occupe dans le journal la place de l'économiste, est un mouvement qui, soit dit en passant, ne "croit" pas à l'économie... (l'"économie politique" est refusée au nom du célèbre postulat maurrassien du "politique d'abord"). Le "vieux maître" de Martigues est maintenant enfermé dans son système d'idées préconçues et confond par trop la "défense" (intellectuelle et morale) de la "monarchie nationale" avec les impératifs tactiques de l'Action française, au point de courtiser la vieille droite "cléricale" et sclérosée, étouffant l'idée royaliste sous un ordre moral "macmahonien", irrespirable pour un bon nombre de jeunes intellectuels (Bernanos en est le plus célèbre, avec Maulnier, Drieu...). Très rapidement, c'est la rupture et la création, par certains anciens militants, du "faisceau" (préfiguration du fascisme français) et vite rebaptisé "fesso" pour la circonstance par le talentueux polémiste L.Daudet, fils du célèbre écrivain Alphonse Daudet, tant les haines et les agressions des fidèles de Maurras et de la tendance réactionnaire du mouvement monarchiste seront virulentes.

 

Mais G. Valois, s'il se réfère au départ à la pensée mussolinienne (celle de la première période), s'écartera assez vite du "modèle" italien (la critique d'un "modèle" de régime ne date pas de l'eurocomunisme...), modèle auquel il reproche son aspect plus "nationaliste" (puis impérialiste) que "socialiste". Le "fascisme" valoisien est précisément l'union de l'"idée nationale" -réalité née de la guerre et des hécatombes meurtrières-  et du courant socialiste français, socialisme non matérialiste, mais d'une inspiration spiritualitste et volontariste, qui doit autant à Charles Péguy qu'à l'idéologie sorélienne. Le socialisme valoisien, qui ne rejette pas les notions "économiques" de profit et de propriété, s'appuie sur une vision organiciste et non-mécaniciste (à rebours du libéralisme) de la société contemporaine. Il ajoute en outre une vériatble "mystique" du travail teintée de christianisme (cf la place qu'il accorde à l'idée de rédemption) dans un culte englobant des valeurs communautaires et "viriles" (le sport comme "pratique politique").

 

Mais la lutte que mènent désormais les partisans de l'Action Française, avec l'appui sans faille des groupes financiers catholiques qui soutiennent parallèlement les ligues d'extrême-droite et les partis droitistes, ne laissera aucun répit ni à Valois, bassement calomnié et injurié par la presse royaliste, selon une technique éprouvée qui fera "florès" lors de l'affaire Salengro, ni à ses troupes isolées. Les "chemises bleues" disparaîtront vite à la fin des années 20, et Valois ira rejoindre les rangs de la SFIO, en attendant de mourir pendant le second conflit mondial dans le camp de Bergen-Belsen, condamné à la déportation par les autorités allemandes pour fait de résistance. Là aussi, dans ce "grand dégoût collecteur", la voix de Valois rejoindra celle d'un Bernanos, celui des "grands cimetières sous la lune"...

 

Henri De Man

 

L'autre personnalité marquante du néo-socialisme est celle du Belge Henri De Man, connu internationalement pour ses critiques originales des théories marxistes, idéologie qu'il connait à fond pour y avoir adhéré dans ses premières années de militantisme. La fin de la première guerre mondiale est, pour De Man, la période des remises en question et des grandes découvertes. En s'initiant aux théories psychanalytiques de Freud et aux travaux du professeur Adler sur la volonté et le "complexe d'infériorité", il fait pour la première fois le lien entre les sciences humaines, donnant une signification de type psychologique, et bientôt éthique, à l'idéologie socialiste. Il s'agit d'une tentative remarquable de dépassement du marxisme et du libéralisme, qui est à l'opposé des élucubrations d'un W. Reich ou d'un H. Marcuse!!

 

Mais dans sa volonté de dépasser le marxisme, De Man en viendra inéluctablement à un dépassement de la "gauche" et s'intéressera aux théories néo-corporatistes et à l'organisation du "Front du Travail" national-socialiste. Cela dit, De Man préconise le recours au pouvoir d'Etat dans le but d'une meilleure régularisation de la vie économique et sociale, des rapports au sein de la société moderne industrielle, et cela grâce à un outil nouveau: le PLAN.

 

DeMan_Henri_1930_15.gifLe "planisme" connaîtra longtemps les faveurs des milieux syndicalistes belges et néerlandais et une audience plus militée en France. Il est alors intéressant de noter que De Man prévoit dans ce but l'apparition d'une nouvelle "caste" de techniciens, ayant pour tâche essentielle d'orienter cette planification. Vision prémonitoire d'une société "technocratique" dans laquelle les "néos" ne perçoivent pas les futurs blocages que l'expérience des quarante dernières années nous a enseignés. On peut également signaler l'importance, à la même époque, des idées appliquées par un certain J.M. Keynes qui verra, dans les années 30, le triomphe de ses théories économiques. Enfin, le planisme de De Man prévoit une application de type corporatiste.

 

En France, à la même époque, des hommes comme Marcel Déat, H. Marquet, M. Albertini, ou encore Lefranc, se situeront résolument dans cette mouvance. Leur insistance à refuser la "traditionnelle" dichotomie entre prolétariat et bourgeoisie (N'y a-t-il pas là une préfiguration de la critique plus récente contre la "société salariale" que Marx, Proudhon et d'autres encore, avaient déjà ébauché...) les place sans aucun doute dans ce courant des néos dont nous parlons ici. Cette division est pour eux d'autant plus dépassée que le prolétariat ne joue plus que partiellement le rôle de "moteur révolutionnaire". L'évolution de la société a enfanté de nouvelles forces, en particulier les "classes moyennes" dont la plupart sont issus. Leur confiance se reportant alors sur ces dernières qui sont les victimes de la société capitaliste cosmopolite. Le "système" rejette les classes moyenes par un mouvement puissant de nivellement des conditions et de rationalisation parcellaire du travail. Taylor est alors le nouveau messie du productivisme industrialiste... Le progrès est un révélateur de ces nouvelles forces, qui participent dorénavant de gré ou de force au mouvement révolutionnaire.

 

Désormais, au sein de la vieille SFIO, déjà ébranlée par la rupture fracassante des militants favorables au mouvement bolchévique, on assiste à une lutte d'influences entre "néos" et guesdistes; parmi ces derniers apparaissent certaines figures de proue: ainsi celle de Léon Blum. Là aussi, comme dans le cas du Faisceau de Georges Valois, les "néos" sont combattus avec violence et hargne par une "vieille garde" socialiste, qui réussit à étouffer le nouveau courant en expulsant ses partisans hors des structures décisionnaires du parti. L'avènement du front populaire sonnera le glas de leur espoir: réunir autour de leur drapeau les forces vives et jeunes du socialisme français. Certains d'entre eux, et non des moindres, se tourneront alors vers les "modèles" étrangers totalitaires: fascisme et national-socialisme allemand. De leur dépit naîtront des formations "fascisantes" ou nationales, et, pour beaucoup, la collaboration active avec la puissance occupante pendant les années 40 (Remarquons au passage que de nombreux militants "néos" rejoindront la résistance, représentant au sein de cette dernière un fort courant de réflexion politique qui jouera son jeu dans les grandes réformes de la libération).

 

En effet, si la grande tourmente de 1945 sera la fin de beaucoup d'espoirs dans les deux camps, celui de la collaboration et celui de la résistance intérieure, le rôle intellectuel des néos n'est pas pour autant définitivement terminé. Sinon, comment expliquer l'idéologie moderniste de la planification "à la française", à la fois "souple et incitative", où collaborent les divers représentants de ce qu'il est convenu d'appeler les "partenaires sociaux"? (cf. le rôle essentiel accordé par les rédacteurs de la constitution de 1958 à un organe comme le "Conseil économique et social", même si la pratique est en décalage évident avec le discours). On peut aussi expliquer pour une bonne part les idées nouvelles des milieux néo-gaullistes. Celles des idéologies de la "participation" ou celle des partisans de la "nouvelle société". La recherche d'une troisième voie est l'objectif souvent non-avoué de ces milieux. Une voie originale tout aussi éloignée des groupes de la "gauche alimentaire" que de la "droite affairiste", et appuyée davantage sur un appel au "cœur" des hommes plutôt qu'à leur "ventre".

 

 2) L'après-guerre: néosocialisme et planification "à la française".

 

La grande crise des années 30 marque dans l'histoire économique mondiale la fin du sacro-saint crédo libéral du libre-échangisme, du "laisser faire, laisser passer", caractérisant ainsi le passage de l'Etat-gendarme à l'Etat-providence, en termes économistes. Et ceci, grâce en partie aux "bonnes vieilles recettes" du docteur Keynes...

L'Etat, nouveau Mammon des temps modernes, est investi d'une tâche délicate: faire pleuvoir une manne providentielle sous les auspices de la déesse Egalité... L'empirisme du "New Deal" rooseveltien fera école. En France, une partie du courant socialiste entrevoit le rôle étatique au travers d'administrations spécialisées et de fonctionnaires zélés (cf. les théories du Groupe X), en fait simple réactualisation d'un saint-simonisme latent chez ces pères spirituels de la moderne "technocratie".

 

On trouve l'amorce de cette évolution dans les cénacles intellectuels qui gravitent autour du "conseil national de la résistance". L'idée se fait jour d'une possible gestion technique et étatique de l'économie dans le cadre d'un plan général de reconstruction du pays en partie ruiné par le conflit. L'idée ne se réfère pas à un modèle quelconque (comme, par exemple, l'URSS dans les milieux du PCF), c'est-à-dire d'un dirigisme autoritaire pesant sur une société collectiviste, mais plutôt à un instrument permettant à l'Etat une "régulation" de l'économie  -dans un système démeuré globalement attaché aux principes de l'économie libérale-  grâce notamment à une planification "incitative", souple, concertée et enfin empirique. De quoi s'agit-il?

 

Pour les générations de la guerre, le traumatisme de la violence  -et des régimes dictatoriaux qui l'ont symbolisée après la défaite des fascismes-  est souvent lié à la grande dépression des années 30. L'objectif est donc de permettre au pouvoir politique, en l'occurence l'Etat comme instance dirigeante, de régulariser les flux et les rapports économiques, donc de contrôler pour une part ses évolutions, afin de favoriser un équilibre nécessaire à une plus forte croissance, mais aussi une plus juste croissance (hausse des revenus les plus défavorisés). Un indice est la création, dès la libération, des premières grandes institutions de Sécurité Sociale. La Constitution française de 1946 intègre officiellement ce souci du "social", où domine de plus en plus l'idée de redistribution égalitaire des revenus. Dans le même temps, les responsables du pays sont confrontés à la tâche écrasante de reconstruire la nation, de moderniser l'outil industriel frappé certes par la guerre, mais aussi par l'obsolescence.

 

facteurs démographiques, commissariat au plan, ENA

 

Cette tâche apparaît difficile si on tient compte que la population française vieillit. Heureusement, ce dernier point sera éliminé dans les années 50, grâce à une vitalité du peuple français assez inattendue (phénomène connu sous le nom de "baby boom"). Cette renaissance démographique aura deux effets directs positifs d'un point de vue économique: augmentation de la demande globale, qui favorise l'écoulement de la production, et croissance de la population active que les entreprises pourront embaucher grâce à la croissance du marché potentiel et réel. Sur cette même scène, s'impose le "géant américain", en tant que vainqueur du conflit (non seulement militaire mais aussi politique et surtout économique) qui se décrète seul rempart face à l'Union Soviétique. Un oubli tout de même dans cette analyse des esprits simples: le monde dit "libre" était déjà né, non pas de l'agression totalitaire des "rouges", mais de l'accord signé à Yalta par les deux (futurs) grands. Les dirigeants français doivent justifier l'aumône "généreusement" octroyée par les accords Blum-Byrnes, et surtout le plan Marshall.

 

C'est donc dans un climat politique gagné pour l'essentiel aux idéaux socialistes (pour le moins dans ses composantes "tripartite", exception faite de quelques conservateurs trop compromis dans les actes du régime de Vichy et qui vont se rassembler autour de A.Pinay), que l'idée de la planification aboutira. Il faut souligner le rôle majeur d'un Jean Monnet, créateur du "commissariat au plan", structure nouvelle composée de techniciens de l'économie, et qui fourniront aux pouvoirs publics le maximum des données indicielles nécessaires aux choix essentiels. On peut en outre noter à la même époque la création par Debré de l'Ecole Nationale d'Administration (ENA), pépinière des futurs "technocrates" et point de départ d'une carrière qui ne passera plus exclusivement par les cursus des élections locales. La carrière de l'énarchie est celle des grands corps de l'Etat.

 

On assiste par ailleurs à la nationalisation des secteurs vitaux de l'économie française (chemins de fer, charbonnage, etc...), qui doivent être le soutien principal d'une politique économique nationale (à l'exception de Renault, nationalisée en régie d'Etat à cause de l'attitude "incivique" de son fondateur pendant l'occupation). Ce mouvement inspirera toutes les lois de nationalisation en France jusqu'en 81.

 

Planification certes, mais fondée sur la souplesse et l'incitation, qui exprime la volonté des pouvoirs publics de rendre plus cohérent le développement économique du pays. Cette volonté est claire: assurer les grands équilibres financiers et physiques, rechercher l'optimum économique qui ne soit pas simplement un assemblage de diverses prévisions dans les secteurs publics et privés. De plus, l'aspect humain n'est pas négligé, loin de là. Plus tard, passé le cap de la reconstruction proprement dite, les secondes étapes seront celles de l'aménagement du territoire et de la régionalisation (à la fin des années 60). Seront ensuite abordés les thèmes essentiels du chômage et de l'inflation. Priorité étant donnée aux thèmes les plus brûlants. Les administrations s'appuieront sur les services de l'INSEE, utilisant un nouvel "outil" privilégié: la comptabilité nationale réactualisée en 1976, puis les moyens plus récents que sont l'informatique et les techniques économétriques (plan FIFI (physio-financier), 6° Plan).

 

Planification concertée et empirique enfin, où les divers partenaires sociaux jouent un rôle non-négligeable au travers d'institutions spéciales telles le "Conseil économique et social". Le plan se veut une "étude de marché"  -sous l'impulsion d'un homme comme P.Massé-  à l'échelle nationale, imposant un axe de développement conjoncturel, éventuellement corrigé par des "indicateurs d'alerte", ou des clignotants (ex: les hausses de prix) dans un but de compétitivité internationale.

 

les risques du néo-saint-simonisme

 

Conclusion. On constate indubitablement une étatisation progressive de l'économie. Mais "étatisation" ne signifie pas obligatoirement, dans l'esprit des réformateurs et dans les faits, "nationalisation" de la production. La bureaucratisation est plutôt le phénomène majeur de cette étatitation. Relire à ce sujet l'ouvrage de Michel Crozier: La société bloquée. Cette "étatisation" se traduit en effet par la lutte de nouveaux groupes de pression: côteries politico-administratives, financières, patronales, syndicales enfin. Chacun de ces groupes étant axés sur la défense d'intérêts "corporatistes" plus que sur le souci d'intérêt national. Le jeu particulier de firmes "nationales" préférant traiter avec des multinationales, relève de cette philosophie de la rentabilité qui rejette le principe précédent.

 

La contestation de Mai 68 a pu jouer le rôle de révélateur de cette réalité. La société française, troublée par une urbanisation anarchique, une pollution croissante, a pris alors conscience de la perte d'une "qualité de vie". Enfin, au plan international, l'interdépendance croissante des économies, la dématérialisation progressive des relations financières victimes du dollar, ont pu montrer la relativité des objectifs poursuivis par les planificateurs français. Aidée en France par un courant saint-simonien de plus en plus puissant, cette évolution a précipité la dilution politique du pays; la collaboration entre les nouveaux gestionnaires et les puissances financières a aggravé incontestablement cette situation. N'y aurait-il pas alors une "divine surprise " des années 80: celle du rapprochement entre les derniers néosocialistes et les nationalistes conséquents (éloignés du pseudo-nationalisme mis en exergue récemment par les média) sous le signe du "Politique d'abord" ...

 

Pierre-Jean BERNARD.

jeudi, 21 janvier 2010

How the West Was Lost

How the West Was Lost

Churchill, Hitler, and “the Unnecessary War”
How Britain Lost Its Empire and the West Lost the World
Patrick J. Buchanan
New York: Crown Publishers, 2008

Patrick J. Buchanan's <i>Churchill, Hitler, and the Uncessary War</i>

Many reviewers of the respectable class become unhinged upon seeing the words “unnecessary war” in the title of a book dealing with World War II—in their minds, the “Good War” to destroy the ultimate evil of Hitler’s Nazism.[1] And, of course, Buchanan was already in deep kimchi on this issue since he had expressed a similar criticism of American entry into World War II in his A Republic, Not an Empire.[2]

With this mindset, most establishment reviewers simply proceed to write a diatribe against Buchanan for failing to recognize the allegedly obvious need to destroy Hitler, bringing up the Holocaust, anti-Semitism, and other rhetorical devices that effectively silence rational debate in America’s less-than-free intellectual milieu. However, Buchanan’s book is far more than a discussion of the merits of fighting World War II. For Buchanan is dealing with the overarching issue of the decline of the West—a topic he previously dealt with at length in his The Death of the West.[3] In his view, the “physical wounds” of World Wars I and II are significant factors in this decline. Buchanan writes: “The questions this book answers are huge but simple. Were these two world wars the mortal wounds we inflicted upon ourselves necessary wars? Or were they wars of choice? And if they were wars of choice, who plunged us into these hideous and suicidal world wars that advanced the death of our civilization? Who are the statesman responsible for the death of the West?” (p. xi). Early in his Introduction, Buchanan essentially answers that question: “Historians will look back on 1914–1918 and 1939–1945 as two phases of the Great Civil War of the West, when the once Christian nations of Europe fell upon one another with such savage abandon they brought down all their empires, brought an end to centuries of Western rule, and advanced the death of their civilization” (p. xvii).

Buchanan sees Britain as the key nation involved in this process of Western suicide. And its own fall from power was emblematic of the decline of the broader Western civilization. At the turn of the twentieth century, Britain stood out as the most powerful nation of the West, which in turn dominated the entire world. “Of all the empires of modernity,” Buchanan writes, “the British was the greatest—indeed, the greatest since Rome—encompassing a fourth of the Earth’s surface and people” (p. xiii). But Britain was fundamentally responsible for turning two localized European wars into the World Wars that shattered Western civilization.

Contrary to the carping of his critics, Buchanan does not fabricate his historical facts and opinions but rather relies on reputable historians for his information, which is heavily footnoted. In fact, most of his points should not be controversial to people who are familiar with the history of the period, as shocking as it may be to members of the quarter-educated punditocracy.

Buchanan points out that at the onset of the European war in August 1914, most of the British Parliament and Cabinet were opposed to entering the conflict. Only Foreign Minister Edward Grey and Winston Churchill, then First Lord of the Admiralty, held that it was necessary to back France militarily in order to prevent Germany from becoming the dominant power on the Continent. In 1906, however, Grey had secretly promised France support in the event of a war with Germany, which, Buchanan implies, might have served to encourage French belligerency in 1914. However, it was only the German invasion of neutral Belgium—the “rape” of “little Belgium” as pro-war propagandists bellowed—that galvanized a majority in the Cabinet and in Parliament for war.

Buchanan maintains that a victorious Germany, even with the expanded war aims put forth after the onset of the war, would not have posed a serious threat to Britain. And certainly it would have been better than the battered Europe that emerged from World War I. Describing the possible alternate outcome, Buchanan writes:

Germany, as the most powerful nation in Europe, aligned with a free Poland that owed its existence to Germany, would have been the western bulwark against any Russian drive into Europe. There would have been no Hitler and no Stalin. Other evils would have arisen, but how could the first half of the twentieth century have produced more evil than it did? (p. 62)

As it was, the four year world war led to the death of millions, with millions more seriously wounded. The utter destruction and sense of hopelessness caused by the war led to the rise of Communism. And the peace ending the war punished Germany and other members of the Central powers, setting the stage for future conflict. The Allies “scourged Germany and disposed her of territory, industry, people, colonies, money, and honor by forcing her to sign the ‘War Guilt Lie’” (p. 97). Buchanan acknowledges that it was not literally the “Carthaginian peace” that its critics charged. Germany “was still alive, more united, more populous and potentially powerful than France, and her people were now possessed of a burning sense of betrayal” (p. 97). But by making the new democratic German government accept the peace treaty, the Allies had destroyed the image of democratic government in Germany among the German people. In essence, the peace left “Europe divided between satiated powers, and revisionist powers determined to retrieve the lands and peoples that had been taken from them” (p. 95). It was “not only an unjust but an unsustainable peace. Wedged between a brooding Bolshevik Russia and a humiliated Germany were six new nations: Finland, Estonia, Latvia, Lithuania, Poland, and Czechoslovakia. The last two held five million Germans captive. Against each of the six, Russia or Germany held a grievance. Yet none could defend its independence against a resurrected Germany or a revived Russia. Should Russia and Germany unite, no force on Earth could save the six” (p. 98). It should be noted that Buchanan’s negative depiction of the World War I peace is quite conventional, and was held by most liberal thinkers of the time.[4]

Buchanan likewise provides a very conventional interpretation of British foreign policy during the interwar period, which oscillated between idealism and Realpolitik and ultimately had the effect of weakening Britain’s position in the world. Buchanan points out that Britain needed the support of Japan, Italy, and the United States to counter a revived Germany, but its diplomacy undercut such an alliance. To begin with, Britain terminated its alliance with Japan to placate the United States as part of the Washington Naval Conference of 1922. Buchanan contends that the Japanese alliance had not only provided Britain with a powerful ally but served to restrain Japanese expansionism.

Britain needed Mussolini’s Italy to check German revanchism in Europe, a task which “Il Duce” was very willing to undertake. However, Britain drove Mussolini into the arms of Hitler by supporting the League of Nations’ sanctions against Italy after it attacked Ethiopia in 1935. “By assuming the moral high ground to condemn a land grab in Africa, not unlike those Britain had been conducting for centuries, Britain lost Italy,” Buchanan observes. “Her diplomacy had created yet another enemy. And this one sat astride the Mediterranean sea lanes critical in the defense of Britain’s Far Eastern empire against that other alienated ally, Japan” ( p. 155).

America, disillusioned by the war’s outcome, returned to its traditional non-interventionism in the 1920s, so it was not available to back British interests. Consequently, Britain would only have France to counter Hitler’s expansionism in the second half of the 1930s.

Buchanan provides a straightforward account of Prime Minister Neville Chamberlain’s and Foreign Minister Halifax’s appeasement policy. The goal was to rectify the wrongs of Versailles so as to prevent the outbreak of war. “They believed,” Buchanan points out, “that addressing Germany’s valid grievances and escorting her back into Europe as a Great Power with equality of rights was the path to the peace they wished to build” (p. 201). Buchanan asserts that such a policy probably would have worked with democratic Weimar Germany, but not with Hitler’s regime, because of its insatiable demands and brutality.

Munich was the high point of appeasement and is conventionally considered one of the great disasters of British foreign policy. Buchanan explains Chamberlain’s reasoning for the policy, which was quite understandable. First, morality seemed to be on Germany’s side since the predominantly German population of the Sudetenland wanted to join Germany. Moreover, maintaining the current boundaries of Czechoslovakia was not a key British interest worth the cost of British lives. Finally, Britain did not have the wherewithal to intervene militarily in such a distant, land-locked country.

Churchill, who represented the minority of Britons who sought war as an alternative, believed that support from Stalinist Russia would serve to counter Hitler. Of course, as Buchanan points out, the morality of such an alliance was highly dubious because Stalin had caused the deaths of millions of people during the 1930s, while Hitler’s victims still numbered in the hundreds or low thousands before the start of the war in 1939. Moreover, Communist Russia would have to traverse Rumania and Poland to defend Czechoslovakia, and the governments of these two countries were adamantly opposed to allowing Soviet armies passage, correctly realizing that those troops would likely remain in their lands and bring about their Sovietization. It should also be added that it was questionable whether the Soviet Union really intended to make war on the side of the Western democracies, because Stalin hoped that a great war among the capitalist states, analogous to World War I, would bring about their exhaustion and facilitate the triumph of Communist revolution, aided by the intervention of the Soviet Red Army.[5]

Buchanan concludes that Chamberlain was right not to fight over the Sudetenland but “was wrong in believing that by surrendering it to Hitler he had bought anything but time,” which he should have used to rearm Britain in preparation for an inevitable war (p. 235). Instead, Chamberlain believed that Hitler could be trusted and that peace would prevail.

While Buchanan faults Chamberlain for not properly preparing for war after the Munich Agreement, he does not believe that Munich per se brought on the debacle of war. What did bring about World War II, according to Buchanan, was the British guarantee to defend Poland in March 1939. This guarantee made Poland more resistant to compromise with Germany, and made any British decision for war hinge on the decisions made by Poland. Moreover, as Buchanan points out, “Britain had no vital interest in Eastern Europe to justify a war to the death with Germany and no ability to wage war there” (p. 263).

Buchanan, while citing several explanations for the Polish guarantee, seems to give special credence to the view that Chamberlain was more of a realist than a bewildered naïf. Buchanan holds that a clear analysis of Chamberlain’s words and intent shows that in the guarantee the Prime Minister had not bound Britain to fight for the territorial integrity of Poland but only for its independence as a nation. “The British war guarantee,” Buchanan contends, “had not been crafted to give Britain a pretext for war, but to give Chamberlain leverage to persuade the Poles to give Danzig back” (p. 270). Chamberlain seemed to be “signaling his willingness for a second Munich, where Poland would cede Danzig and provide a road-and-rail route across the Corridor, but in return for Hitler’s guarantee of Poland’s independence” (p. 270). Hitler, however, did not grasp this “diplomatic subtlety” and believed that a German effort to take any Polish territory would mean war. The Poles did not understand Chamberlain’s intent either, and assumed that Britain would back their intransigence and thus refused to discuss any territorial changes with Germany. Buchanan, however, seems to reverse this interpretation of Chamberlain’s motivation when discussing his guarantees to other European countries in 1939, writing that “Chamberlain had lost touch with reality” (p. 278).

In the end, Britain and France went to war with Germany over Poland without the means to defend her. Poland’s fate was finally sealed when Hitler made his deal with Stalin in August 1939, which, in a secret protocol, offered the Soviet dictator the extensive territory that he sought in Eastern Europe.

Some reviewers have claimed that Buchanan excuses Hitler of blame for the war, but this is far from the truth. Buchanan actually states that Hitler bore “full moral responsibility” for the war on Poland in 1939 (p. 292), in contradistinction to the wider world war, though even here the charge of “full responsibility” would seem to be belied by much of the information in the book. For Buchanan points out that the Germans not only had justified grievances regarding the Versailles territorial settlement, but that, despite Hitler’s bold demands, the German-Polish war might not have happened without Britain’s meddling in 1939. Buchanan’s analysis certainly does not absolve Hitler of moral responsibility for the Second World War (much less palliate his crimes against humanity), but it does show that there is plenty of blame to go around.

Buchanan writes that “had there been no war guarantee, Poland . . . might have done a deal over Danzig and been spared six million dead” (p. 293). It is quite possible that after any territorial deal with Poland, Hitler would have consequently made much greater demands against her. Perhaps he would have acted no differently toward Poland and the Polish Jews than he actually did—but the outcome could not have been worse for the Polish Jews, almost all of whom were exterminated during the World War II. And Polish gentiles suffered far more than the inhabitants of other countries that resisted Hitler less strenuously. In short, a war purportedly to defend Poland was an utter disaster for the inhabitants of Poland. It is hardly outrageous to question whether this was the best possible outcome and to attempt to envision a better alternative.

Buchanan shows how World War II was hardly a “Good War.” The Allies committed extreme atrocities such as the deliberate mass bombing of civilians and genocidal population expulsions. The result was the enslavement of half of Europe by Soviet Communism. “To Churchill,” Buchanan writes, “the independence and freedom of one hundred million Christian peoples of Eastern Europe were not worth a war with Russia in 1945. Why, then, had they been worth a war with Germany in 1939?” (p. 373).

Buchanan holds that had Britain not gone to war against Germany, a war between Soviet Russia and Nazi Germany would have been inevitable, and that such a conflict would have exhausted both dictatorships, making it nigh impossible for either of them to conquer Western Europe. Although this scenario would not have been a certainty, a military stalemate between the two totalitarian behemoths would seem to be the most realistic assessment based on the actual outcome of World War II. Certainly, the Soviet Union relied on Western support to defeat the Nazi armies; and Germany was unable to knock out the Soviet Union during the lengthy period before American military began to play a significant role in Europe.

Buchanan contrasts the lengthy wars fought by Britain, which gravely weakened it, and the relative avoidance of war by the United States, which enabled it to become the world’s greatest superpower. In Buchanan’s view, the United States “won the Cold War—by avoiding the blunders Britain made that plunged her into two world wars” (p. 419). In the post-Cold War era, however, the United States has ignored this crucial lesson, instead becoming involved in unnecessary, enervating wars. “America is overextended as the British Empire of 1939,” Buchanan opines. “We have commitments to fight on behalf of scores of nations that have nothing to do with our vital interests, commitments we could not honor were several to be called in at once” (p. 423). Buchanan maintains that in continuing along this road the United States will come to the same ruinous end as Britain.

Buchanan’s British analogy, unfortunately, can be seen as giving too much to the position of the current neo-conservative war party. Although I think Buchanan’s non-interventionist position on the World Wars is correct, it should be acknowledged that Britain faced difficult choices. Allowing Germany to become the dominant power on the Continent would have been harmful to British interests—though the two World Wars made things even worse. In contrast, today it is hard to see any serious negative consequences resulting from the United States’ pursuit of a peaceful policy in the Middle East. No Middle East country or terrorist group possesses (or possessed) military power in any way comparable to that of Germany under the Second or Third Reichs, and, at least, Iran and Iraq do (did) not have any real interest in turning off the oil spigot to the West since selling oil is the lifeblood of their economies.

Another important aspect of the book is Buchanan’s attack on the cult of Winston Churchill, who has served as a role model for America’s recent bellicose foreign policy, with President George W. Bush even placing a bust of Churchill in the Oval Office. Buchanan maintains that Churchill, with his lust for war, was the individual most responsible for the two devastating World Wars.

In contrast to the current Churchill hagiography, Buchanan portrays the “British Bulldog” as a poor military strategist who was ruthlessly indifferent to the loss of human life, advocating policies that could easily be labeled war crimes. Churchill proposed both the incompetent effort to breech the Dardanelles in 1915, ending with the disastrous Gallipolli invasion, and the bungled Norwegian campaign of April 1940. Ironically, the failures of the Norwegian venture caused the downfall of the Chamberlain government and brought Churchill to power on May 10, 1940.

Churchill supported the naval blockade of Germany in World War I, which in addition to stopping war materiel prevented food shipments, causing an estimated 750,000 civilian deaths. Churchill admitted that the purpose of the blockade was to “starve the whole population—men, women, and children, old and young, wounded and sound—into submission” (p. 391). He successfully proposed the use of poisonous gas against Iraqi rebels in the interwar period and likewise sought the use of poison gas against German civilians in World War II, though the plan was not implemented due to opposition from the British military. Churchill was, however, successful in initiating the policy of intentionally bombing civilians, which caused the deaths of hundreds of thousands. Equally, if not more, inhumane, Churchill’s support for the forcible “repatriation” of Soviet POWs to the Soviet Union and the “ethnic cleansing” of Germans from Eastern and Central Europe involved the deaths of millions of people. And, of course, Churchill was willing to turn over Eastern Europe’s millions to slavery and death under Stalinist rule.

Overall, the Buchanan thesis makes considerable sense—though in some cases it assumes a foresight that would not be possible. For example, the pursuit of containment by the United States in the Cold War period, which Buchanan praises, was a policy largely rejected by the contemporary American Right, of which Buchanan was a member. The American Right held that the policy of containment was a defensive policy that could not achieve victory but instead likely lead to defeat—a position best expressed by James Burnham. And, at least up until Reagan’s presidency, the power of the Soviet Union greatly increased, both in terms of its nuclear arsenal and its global stretch, relative to that of the United States. While Buchanan touts Reagan’s avoidance of war, what most distinguished Reagan from his presidential predecessors and the foreign policy establishment was his willingness to take a harder stance toward the Soviets—a difference that terrified liberals of the time. Reagan’s hard-line stance consisted of a massive arms build-up, and, more importantly, an offensive military strategy (violating the policy of containment), which had the United States supporting a revolt against the Soviet-controlled government in Afghanistan. (The policy was begun under President Carter but significantly expanded under Reagan.) Perhaps, if the United States had launched such a policy in the early years of the Cold War, the Soviet Empire would have unraveled much earlier and not been such a threat to the United States. The Soviet Union was obviously the first country that could destroy the United States, and it achieved this lethal potential during the policy of containment. To this reviewer, it does not seem inevitable that everything would have ultimately turned out for the best.

While Buchanan makes a good case that the two World Wars were deleterious to the West, it would seem that they were only one factor, and probably not the primary one, in bringing about the downfall of Western power—a decline that was observed by astute observers such as Oswald Spengler prior to 1914.[6] (Buchanan himself is not oblivious to these other factors but gives a prominent place to the wars.) Moreover, it is questionable if Britain would have retained its empire any longer than it did, even without the wars, given the spread of nationalism to the non-Western world and the latter’s greater rates of population increase compared to Europe. Also, the growing belief in the West of universal equality obviously militated against European rule over foreign peoples.

In sum, Buchanan’s work provides an excellent account of British diplomacy and European events during the crucial period of the two world wars, which have shaped the world in which we now live. It covers a host of issues and events that are relatively unknown to those who pose as today’s educated class, and does so in a very readable fashion. While this reviewer regards Buchanan’s theses as fundamentally sound, the work provides a fount of information even to those who would dispute its point of view.

Forthcoming in TOQ vol. 9, no. 1 (Spring 2009).


 

<!--[if !supportFootnotes]-->[1] The phrase “The Unnecessary War” is not placed in quotes on the paper jacket or on the hardback cover but is in quotes inside the book, including on the title page. This tends to make the meaning of the phrase unclear. (I owe this insight to Dr. Robert Hickson who has produced a review of this book, along with others, for Culture Wars, though I present a somewhat different take on the subject.) Buchanan quotes Churchill’s use of the phrase in his memoirs (p. xviii). Churchill wrote: “One day President Roosevelt told me that he was asking publicly for suggestions about what the war should be called. I said at once, ‘The Unnecessary War.’ There never was a war more easy to stop than that which has just wrecked what was left of the world from the previous struggle.” But Churchill meant that the war could have been avoided if the Western democracies had taken a harder line, while Buchanan supports, in the main, a softer approach for the periods leading up to both wars.

[2] Patrick J. Buchanan, A Republic, Not an Empire: Reclaiming America’s Destiny (Washington, D.C.: Regnery, 1999). See also Stephen J. Sniegoski, “Buchanan’s book and the Empire’s answer: Fahrenheit 451!” The Last Ditch, October 13, 1999, http://www.thornwalker.com/ditch/snieg7.htm.

[3] Patrick J. Buchanan, The Death of the West: How Dying Populations and Immigrant Invasions Imperil Our Country and Civilization (New York: Thomas Dunne Books/St. Martin’s Press, 2002).

[4] One early critic was the well-known British economist, John Maynard Keynes, The Economic Consequences of the Peace (New York: Harcourt, Brace, and Howe, 1920).

[5] Viktor Suvorov, Icebreaker: Who Started the Second World War? (New York: Viking Press, 1990); Viktor Suvorov, The Chief Culprit: Stalin’s Grand Design to Start World War II (Annapolis: Naval Institute Press, 2008); R. C. Raack, Stalin’s Drive to the West, 19381945: The Origins of the Cold War (Stanford: Stanford University Press, 1995); R. C. Raack, “Stalin’s Role in the Coming of World War II,” World Affairs, vol. 158, no. 4 (Spring 1996), http://www.mtholyoke.edu/acad/intrel/raack.htm; James E. McSherry, Stalin, Hitler, and Europe: The Origins of World War II, 19331939 (Cleveland: World Pub. Co, 1968).

[6] Spengler had developed his thesis of the Decline of the West (Der Untergang des Abendlandes) before the onset of World War I, though the first volume was not published until 1918.

L'itinéraired'Otto Strasser

otto_strasser.jpgArchives de SYNERGIES EUROPEENNES - 1985

L'itinéraire d'Otto Strasser

par Thierry MUDRY

Un jeune universitaire français, Patrick Moreau, a fait paraître en Allemagne en 1985, une version abrégée de sa thèse de doctorat sur la "Communauté de combat national-socialiste révolutionnaire et le Front Noir" (cette thèse de 821 pages, soutenue en 1978 devant l'Université de Paris 1, n'est malheureusement pas diffusée en France). L'ouvrage de Moreau, très documenté et objectif, comporte une biographie (qui s'arrête en 1935) d'Otto Strasser, leader du nazisme de gauche dissident, une histoire du nazisme de gauche de 1925 à 1938 et une analyse des principaux thèmes constitutifs de l'idéologie "national-socialiste révolutionnaire".

 

Moreau dévoile l'existence d'un courant qui, se réclamant d'une authenticité national-socialiste, a résisté à la mainmise hitlérienne sur le parti nazi, résisté à l'Etat hitlerien et combattu vainement pour une Révolution socialiste allemande. L'histoire de ce courant s'identifie au destin de son principal animateur et idéologue : Otto Strasser.

 

Antécédents familiaux

 

Otto Strasser naît le 10 septembre 1897 dans une famille de fonctionnaires bavarois. Son frère Gregor (qui sera l'un des chefs du parti nazi et un concurrent sérieux d'Hitler) est son aîné de cinq ans. L'un et l'autre bénéficient de solides antécédents familiaux: leur père Peter, qui s'intéresse à l'économie politique et à l'histoire, publie sous le pseudonyme de Paul Weger, une brochure intitulée "Das neue Wesen", dans laquelle il se prononce pour un socialisme chrétien et national. Selon Paul Strasser, frère de Gregor et d'Otto: "dans cette brochure se trouve déjà ébauché l'ensemble du programme culturel et politique de Gregor et d'Otto, à savoir un socialisme chrétien et national, qui y est désigné comme la solution aux contradictions et aux manques nés de la maladie libérale, capitaliste et internationale de notre temps". (Cité, p. 12).

 

Otto Strasser social-démocrate

 

Lorsqu'éclate la Grande Guerre, Otto Strasser interrompt ses études de droit et d'économie pour s'engager, dès le 2 août 1914 (il est le plus jeune engagé volontaire de Bavière). Sa brillante con-duite au Front lui vaudra d'être décoré de la Croix de Fer de première classe et d'être proposé pour l'Ordre Militaire de Max-Joseph. Avant sa démobilisation en avril/mai 1919, il participe, avec son frère Gregor, dans le Corps-Franc von Epp, à l'assaut contre la République soviétique de Bavière. Rendu à la vie civile, Otto re-prend ses études à Berlin en 1919 et fonde l'"Association universitaire des an-ciens combattants sociaux-démocrates". En 1920, à la tête de trois "centuries pro-létariennes", il résiste dans le quartier ouvrier berlinois de Steglitz au putsch Kapp (putsch d'extrême-droite). Il quitte peu après la SPD (parti social-démocrate) lorsque celle-ci refuse de respecter l'ac-cord de Bielefeld conclu avec les ouvriers de la Ruhr (cet accord prévoyant la non-intervention de l'armée dans la Ruhr, la répression des éléments contre-révolu-tionnaires et l'éloignement de ceux-ci de l'appareil de l'Etat, ainsi que de la natio-nalisation des grandes entreprises). Otto Strasser s'éloigne donc de la SPD sur la gauche.

 

Otto Strasser retourne en Bavière. Chez son frère Gregor, il rencontre Hitler et le général Ludendorff, mais refuse de se rallier au national-socialisme comme l'y invite son frère. Correspondant de la presse suisse et hollandaise, Otto "cou-vre", le 12 octobre 1920, le Congrès de l'USPD (Parti social-démocrate indépen-dant) à Halle où il rencontre Zinoviev. Il écrit dans "Das Gewissen", la revue des jeunes conservateurs Moeller van den Bruck et Heinrich von Gleichen, un long article sur sa rencontre avec Zinoviev. C'est ainsi qu'il fait la connaissance de Moeller van den Bruck qui le ralliera à ses idées.

 

Otto Strasser rentre peu après au ministère de l'approvisionnement, avant de travailler, à partir du printemps 1923, dans un consortium d'alcools. Entre 1920 et 1925, il s'opère dans l'esprit de Stras-ser un lent mûrissement idéologique sur fond d'expériences personnelles (expé-rience du Front et de la guerre civile, ren-contres avec Zinoviev et Moeller, expé-rience de la bureaucratie et du capita-lisme privé) et d'influences idéologiques diverses.

 

Otto Strasser National-Socialiste

 

Après le putsch manqué de 1923, l'em-prisonnement de Hitler et l'interdiction de la NSDAP qui l'ont suivi, Gregor Stras-ser s'est retrouvé en 1924 avec le général Ludendorff et le politicien völkisch von Graefe à la tête du parti nazi reconstitué. Aussitôt sorti de prison, Hitler réorga-nise la NSDAP (février 1925) et charge Gregor Strasser de la direction du Parti dans le Nord de l'Allemagne. Otto rejoint alors son frère qui l'a appelé auprès de lui. Otto sera l'idéologue, Gregor l'organi-sateur du nazisme nord-allemand.

 

En 1925, une "Communauté de travail des districts nord- et ouest-allemands de la NSDAP" est fondée sous la direction de Gregor Strasser, ces districts mani-festent ainsi leur volonté d'autonomie (et de démocratie interne) face à Munich. En outre, la NSDAP nord-allemande prend une orientation nettement gauchiste sous l'influence d'Otto Strasser et de Joseph Goebbels, qui exposent leurs idées dans un bimensuel destiné aux cadres du Parti, les "National-sozialistische Briefe". Dès oc-tobre 1925, Otto Strasser dote la NSDAP nord-allemande d'un programme radical.

 

Hitler réagit en déclarant inaltérables les vingt-cinq points du programme nazi de 1920 et en concentrant tous les pou-voirs de décision dans le Parti entre ses mains. Il rallie Goebbels en 1926, circon-vient Gregor Strasser en lui proposant le poste de chef de la propagande, puis de chef de l'organisation du Parti, exclut en-fin un certain nombre de "gauchistes" (no-tamment les Gauleiters de Silésie, Po-méranie et Saxe). Otto Strasser, isolé et en opposition totale avec la politique de plus en plus ouvertement conservatrice et pro-capitaliste de Hitler, se résoud fina-lement à quitter le Parti Nazi le 4 juillet 1930. Il fonde aussitôt la KGRNS, "Com-munauté de combat national-socialiste révolutionnaire".

 

Otto Strasser dissident

 

Mais, peu après la scission stras-serienne, deux événements entraînent la marginalisation de la KGNRS: tout d'abord la publication de la "déclaration-pro-gramme pour la libération nationale et sociale du peuple allemand" adoptée par le Parti Communiste allemand. Ce program-me exercera une attraction considérable sur les éléments nationalistes allemands anti-hitleriens et les détournera du Strasserisme (d'ailleurs dès l'automne 1930, une première crise "national-bolchévique" provoque le départ vers le Parti Communiste de trois responsables de la KGRNS : Korn, Rehm et Lorf); ensuite, le succès électoral du Parti Nazi lors des élections législatives du 14 septembre 1930 qui convainc beaucoup de nationaux-socialistes du bien fondé de la stratégie hitlerienne. La KGRNS est minée, en outre, par des dissensions internes qui opposent ses éléments les plus radicaux (natio-naux-bolchéviques) à la direction, plus modérée (Otto Strasser, Herbert Blank et le Major Buchrucker).

 

Otto Strasser essaie de sortir la KGRNS de son isolement en se rappro-chant, en 1931, des S.A. du nord de l'Alle-magne, qui, sous la direction de Walter Stennes, sont entrés en rébellion ouverte contre Hitler1 (mais ce rapprochement, mené sous les hospices du capitaine Ehr-hardt, dont les penchants réactionnaires sont connus, provoque le départ des na-tionaux-bolchéviques de la KGRNS). En octobre 1931, Otto Strasser fonde le "Front Noir", destiné à regrouper autour de la KGNRS un certain nombre d'organisa-tions proches d'elle, telles que le groupe paramilitaire "Wehrwolf", les "Camara-deries Oberland", les ex-S.A. de Stennes, une partie du Mouvement Paysan, le cercle constitué autour de la revue "die Tat", etc.

 

En 1933, décimée par la répression hitlerienne, la KGRNS se replie en Autri-che, puis, en 1934, en Tchécoslovaquie. En Allemagne, des groupes strasseriens clandestins subsisteront jusqu'en 1937, avant d'être démantelés et leurs membres emprisonnés ou déportés (l'un de ces an-ciens résistants, Karl-Ernst Naske, dirige aujourd'hui les "Strasser-Archiv"2).

 

L'idéologie strassérienne

 

Les idées d'Otto Strasser transparais-sent dans les programmes qu'il a élabo-rés, les articles, livres et brochures que ses amis et lui-même ont écrit. Parmi ces textes, les plus importants sont le pro-gramme de 1925 (résumé P.23), destiné à compléter le programme de 1920 du Parti Nazi, la proclamation du 4 juillet 1930 ("Les socialistes quittent la NSDAP" P.41/42), les "Quatorze thèses de la Ré-volution allemande", adoptées lors du pre-mier Congrès de la KGRNS en octobre 1930 (PP. 240 à 242), le manifeste du "Front Noir", adopté lors du deuxième Congrès de la KGRNS en octobre 1931 (pp. 250/251), et le livre "Construction du So-cialisme allemand", dont la première édi-tion date de 1932.

 

Une idéologie cohérente se dégage de ces textes, composée de trois éléments étroitement imbriqués: le nationalisme, l'"idéalisme völkisch" et le "socialisme allemand".

 

* Le nationalisme: Otto Strasser pro-pose la constitution d'un Etat (fédéral et démocratique) grand-allemand "de Memel à Strasbourg, d'Eupen à Vienne" et la li-bération de la Nation allemande du traité de Versailles et du plan Young. Il prône une guerre de libération contre l'Occident ("Nous saluons la Nouvelles Guerre" pp. 245/246), l'alliance avec l'Union sovié-tique et une solidarité internationale an-ti-impérialiste entre toutes les Nations opprimées. Otto Strasser s'en prend aussi avec vigueur aux Juifs, à la Franc-maçon-nerie et à l'Ultramontanisme (cette dé-nonciation des "puissances internatio-nales" semble s'inspirer des violents pamphlets du groupe Ludendorff). Mais les positions d'Otto Strasser vont évoluer. Lors de son exil en Tchécoslovaquie, deux points nouveaux apparaissent: un certain philosémitisme (Otto Strasser propose que soit conféré au peuple juif un statut protecteur de minorité nationale en Euro-pe et soutient le projet sioniste - Patrick Moreau pense que ce philosémitisme est purement tactique: Strasser cherche l'ap-pui des puissantes organisations anti-nazies américaines) et un projet de fédé-ration européenne qui permettrait d'éviter une nouvelle guerre (pp. 185/186). L'anti-occidentalisme et le pro-soviétisme de Strasser s'estompent.

 

- Au matérialisme bourgeois et mar-xiste, Otto Strasser oppose un "idéalisme völkisch" à fondement religieux.

- A la base de cet "idéalisme völ-kisch", on trouve le "Volk" conçu comme un organisme d'origine divine possédant des caractéristiques de nature physique (raciale), spirituelle et mentale.

La "Révolution allemande" doit, selon Otto Strasser, (re)créer les "formes" ap-propriées à la nature du peuple dans le domaine politique ou économique aussi bien que culturel. Ces formes seraient, dans le domaine économique, le fief (Erb-lehen); dans le domaine politique, l'auto-administration du peuple au moyen des "Stände", c'est-à-dire des états - état ou-vrier, état-paysan, etc. (ständische Selbstverwaltung) et, dans le domaine "culturel", une religiosité allemande 3.

 

- Principale expression de l'"idéalisme völkisch": un "principe d'amour" au sein du Volk - chacun reconnaissant dans les au-tres ses propres caractéristiques racia-les et culturelles (pp. 70 et 132) - qui doit marquer chaque acte de l'individu et de l'Etat.

Cet idéalisme völkisch entraîne le re-jet par Otto Strasser de l'idée de la lutte des classes au sein du Volk au profit d'une "révolution populaire" des ouvriers-pay-sans-classes moyennes (seule une toute petite minorité d'oppresseurs et d'exploi-teurs seraient éliminés), la condamnation de l'affrontement politique entre Alle-mands: Otto Strasser propose un Front uni de la base des partis extrémistes et des syndicats contre leur hiérarchie et contre le système (pp.69/70). Cet idéalisme völ-kisch sous-tend l'esprit du "socialisme allemand" prôné par Strasser et inspire le programme socialiste strasserien.

 

Le programme socialiste strasserien comporte les points suivants: la natio-nalisation (partielle) de la terre et des moyens de production, la participation ouvrière, le Plan, l'autarcie et le mono-pole de l'Etat sur le commerce extérieur.

 

Le "socialisme allemand" prétend s'op-poser au libéralisme comme au marxisme. L'opinion d'Otto Strasser sur le marxisme est cependant nuancée: "Le marxisme n'a-vait pour Strasser aucun caractère 'juif' spécifique comme chez Hitler, il n'était pas "l'invention du Juif Marx", mais l'éla-boration d'une méthode d'analyse des con-tradictions sociales et économiques de son époque (la période du capitalisme sauvage) mise au point par un philosophe doué. Strasser reconnaissait à la pensée marxiste aussi bien qu'à l'analyse de l'im-périalisme par Lénine une vérité objec-tive certaine. Il s'éloignait de la Weltan-schauung marxiste au niveau de ses im-plications philosophiques et utopiques. Le marxisme était le produit de l'ère du li-béralisme et témoignait dans sa méthode analytique et dans sa structure même d'une mentalité dont la tradition libérale remontait au contrat social de Rousseau.

 

L'erreur de Marx et des marxistes-lé-ninistes résidait, selon Strasser, en ce qu'ils croyaient pouvoir expliquer le déve-loppement historique au moyen des con-cepts de rapport de production et lutte de classes alors que ceux-ci n'apparais-saient valables que pour la période du ca-pitalisme. La dictature du prolétariat, l'internationalisme prolétarien, le com-munisme utopique n'étaient plus con-formes à une Allemagne dans laquelle un processus d'entière transformation des structures spirituelles, sociales et éco-nomiques était engagé, qui conduisait au remplacement du capitalisme par le so-cialisme, de la lutte des classes par la communauté du peuple et de l'internatio-nalisme par le nationalisme.

 

La théorie économique marxiste de-meurait un instrument nécessaire à la compréhension de l'histoire. Le marxisme philosophique et le bolchévisme de parti périssaient en même temps qu'un libéra-lisme  entré en agonie" (pp 62/63).

 

Le "socialisme allemand" rejette le modèle prolétarien aussi bien que le mo-dèle bourgeois et propose de concilier la responsabilité, l'indépendance et la créa-tivité personnelles avec le sentiment de l'appartenance communautaire dans une société de travailleurs de classes moyen-nes et, plus particulièrement, de paysans (P.135). "Strasser, comme Jünger, rêva d'un nouveau "Travailleur", mais d'un type particulier, le type "Paysan", qu'il soit ouvrier paysan, intellectuel paysan, sol-dat paysan - autant de facettes d'un bouleversement social réalisé par la dislocation de la société industrielle, le démantèlement des usines, la réduction des populations urbaines et les transferts forcés de citoyens vers le travail régé-nérateur de la terre. Pour prendre des il-lustrations contemporaines de la volonté de rupture sociale de la tendance Stras-ser, certains aspects de son projet évo-quent aujourd'hui la Révolution Culturelle chinoise ou l'action des Khmers Rouges au Cambodge" (cf. Patrick Moreau "Socia-lisme national contre hitlerisme" dans La Revue d'Allemagne, tome XVI, n°3, Juillet-septembre 1984, P.493). Otto Strasser veut réorganiser la société alle-mande autour du type paysan. Pour ce fai-re, il préconise le partage des terres, la colonisation des régions agricoles de l'Est peu peuplées et la dispersion des grands complexes industriels en petites unités à travers tout le pays - ainsi naîtrait un type mixte ouvrier-paysan (cette dernière proposition évoque l'expérience des "hauts-fourneaux de poche" dans les com-munes populaires de la Chine commu-niste), PP.134 à 140. Patrick Moreau n'hé-site pas à qualifier Otto Strasser de "con-servateur agraire extrémiste" (article ci-té). Les conséquences de cette réorgani-sation de l'Allemagne (et de la socialisa-tion de l'économie qui doit l'accompagner) seraient: une réduction considérable de la production des biens de consommation du fait de l' "adoption d'un mode de vie spar-tiate où la consommation est réduite à la satisfaction quasi autarcique, au plan lo-cal, des besoins primaires" (article cité) et "l'institution nationale, puis interna-tionale, d'une sorte d'économie de troc" (Ibid.).

 

Le "socialisme allemand" refuse enfin la bureaucratie et le capitalisme privé (Otto Strasser connaît les méfaits des deux systèmes) et propose la nationali-sation des moyens de production et de la terre qui seraient ensuite (re)distribués à des entrepreneurs sous la forme de fiefs. Cette solution conjuguerait, si l'on en croit Strasser, les avantages de la pos-session individuelle et de la propriété collective.

 

Thierry MUDRY.

 

Patrick MOREAU, "Nationalsozialismus von links. Die "Kampfgemeinschaft Revo-lutionärer Nationalsozialisten" und die "Schwarze Front" Otto Strassers 1930-1935", Deutsche Verlags-Anstalt, Stuttgart, 1985, 268 S., 39,80 DM.

 

Notes :

 

1 Sur Walter Stennes : lire "Als Hitler nach Canossa ging" de Charles Drage (Berlin 1982)

 

2          "Strasser Archiv, correspondance : Karl-Ernst Naske, 5350 EUSKIRCHEN-Kreuzweingarten, R.F.A.

 

3 Cfr. "Weder Rom noch Moskau, sondern Deutschland, nichts als Deutschland", article d'Otto Strasser dans "Deutsche Revolution", 5 juillet 1931.

mardi, 19 janvier 2010

Gamelin chargé d'envahir le Caucase

Gamelin.jpg19 janvier 1940: Il est un plan concocté par les Franco-Britanniques en 1940 que l’on oublie généralement de mentionner dans les histoires de la seconde guerre mondiale: celui que Daladier a demandé à Gamelin de mettre au point pour attaquer l’URSS, alors alliée à l’Allemagne dans le cadre du pacte germano-soviétique ou pacte Molotov/Ribbentrop, dans le Caucase, afin de s’emparer des puits de pétrole d’Azerbaïdjan et des oléoducs qui acheminent le brut dans les républiques soviétiques au Sud de la chaîne caucasienne. C’est le 19 janvier 1940 que Daladier convie Gamelin à s’atteler à cette tâche, qui n’aura pas de lendemain mais qui préfigure tout de même toute l’affaire géorgienne d’août 2008. La France, n’ayant été rien d’autre que la réserve continentale de chair à canon pour l’empire britannique, a donc été conviée à lancer une opération destinée à réaliser un vieux voeu de l’impérialisme anglais, conçu avant la première guerre mondiale, mais mis sous le boisseau car Londres avait besoin de la chair à canon russe pour éliminer l’Allemagne, non pas tant celle de Guillaume II, mais celle, plus cohérente, de l’Amiral von Tirpitz, qui entend épauler le développement industriel et commercial allemand dans le monde entier et en Amérique latine en particulier, par une flotte aguerrie, capable de se mesurer aux autres flottes de guerre de la planète. Avant de donner l’ordre à Gamelin de travailler à un plan d’invasion du Caucase méridional, le gouvernement français avait décidé le 8 janvier 1940 de créer une armée d’Orient en Syrie, sous les ordre du Général Weygand, celui-là même qui avait aidé les Polonais à refouler les Soviétiques au-delà de la Ligne Curzon, autre démarcation inventée dans les bureaux londoniens pour élargir au maximum l’espace entre l’Allemagne et la nouvelle URSS, prêtes à s’allier sous la double impulsion de Rathenau et de Tchitchérine qui s’étaient rencontrés à Rapallo en 1922. Il est évident qu’une occupation des champs pétrolifères caucasiens aurait privé également la Wehrmacht allemande de son carburant.

 

lundi, 18 janvier 2010

Caucaso, la frontiera instabile d'Europa

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Caucaso, la frontiera instabile d`Europa

 

Fabrizio Fiorini

L’espressione geografica “Caucaso” ha subito nel corso degli anni una trasposizione per cui, dall’originale denominazione della catena montuosa estesa dal Mar Nero al Mar Caspio, è passata a indicare una vasta area comprendente diversi Paesi e numerose etnie. Fondamentale distinzione d’obbligo è quella tra Transcaucasia e Ciscaucasia: la prima si estende sulle repubbliche post-sovietiche di Georgia, Armenia e Azerbaidžan, nonché sulle neo-indipendenti repubbliche di Abchazija e Ossetija meridionale; la seconda compresa all’interno dei confini meridionali della Federazione Russa e comprendente le repubbliche autonome di Adigezia, Karacai-Cerkessk, Kabarda-Balkarija, Ossetija settentrionale, Cecenia, Ingušcetija e Dagestan.
Non si può stabilire con esattezza il periodo di inizio di una “questione caucasica”, dato che l’area è costantemente stata terreno di scontro politico e religioso, di revanscismo etnico e di istanze indipendentiste nazionali. Le stesse macchinose ma funzionali regole dell’ingegneria istituzionale sovietica difficilmente riuscirono a venire a capo delle questione e a pacificare l’area in modo stabile. Nella sua opera Il marxismo e la questione nazionale e coloniale, Stalin pose le basi del legame tra etnia e territorio; nonostante ciò, l’ordinamento istituzionale dell’Urss (Stato che, tra repubbliche federate, repubbliche autonome, regioni autonome e territori contava ben cinquantatre divisioni amministrative ma in cui le etnie censite erano più del doppio) dovette giocoforza adeguarsi a dei criteri standardizzati al fine della ripartizione amministrativo-territoriale dell’Unione. Tali criteri furono: a) la maggioranza linguistica e culturale di una data regione; b) la necessità di scongiurare il separatismo a favore di Stati confinanti; c) la necessità di dividere al proprio interno etnie che in epoca pre-rivoluzionaria avevano sviluppato un’identità più marcata, al fine di tutelare l’autonomia dello Stato centrale e di assicurare il funzionamento lineare dell’amministrazione periferica1. L’Unione Sovietica, quindi, lontana dal configurarsi come un melting-pot, fu piuttosto una incubatrice di Stati indipendenti che tuttavia si portarono dietro le imperfezioni che caratterizzavano lo stesso sistema che li avrebbe generati.
Tornando al Caucaso dell’epoca sovietica, infatti, alcune contingenze storiche andarono a intaccare la meticolosa prassi amministrativa di Mosca. Una di queste fu, ad esempio, all’indomani della rivoluzione d’ottobre, la ricerca di un alleanza coi turchi: tale asse bolscevico-kemalista, infatti, fece spostare l’ago della bilancia, nella tuttora irrisolta questione dell’Alto Karabakh, a favore dell’Azerbaidžan etnicamente affine e politicamente vicino ai turchi; Stalin in persona si prodigò in tal senso. Un’ulteriore destabilizzazione si ebbe durante il secondo conflitto mondiale quando, per reprimere e punire i popoli che avevano boicottato la guerra sovietica propugnando istanze indipendentiste in nome della propria identità islamica o in nome di una alleanza col Terzo Reich nazionalsocialista2, intere unità amministrative vennero sciolte o degradate a un rango di autonomia inferiore; centinaia di migliaia di cittadini vennero inoltre colpiti dalle deportazioni. Per tutto il secondo dopoguerra, fino allo scioglimento dell’Urss, la questione Caucaso rimase latente e ‘anestetizzata’ dalla classe dirigente locale del Partito. Ma la tensione nelle stanze del potere restava alta, e gli echi dei giochi caucasici di sentivano fino a Mosca, fino a ripercuotersi nel politburo e nel Comitato Centrale.
Poi il disastro dell’era elciniana, con la Federazione Russa che continuava inesorabilmente a disgregarsi sia al proprio interno (tracollo dell’autorità dello Stato, rottura di ogni vincolo sociale tra cittadini e tra questi e il potere, violenta crisi finanziaria, perdita di ogni parvenza di sovranità economica in favore di potentati non autoctoni, declino della produzione industriale, sbandamento delle forze armate e crescita esponenziale della criminalità), sia nel suo ruolo di potenza internazionale e sia sui propri confini meridionali – e segnatamente caucasici – con la disfatta cecena e con la destabilizzazione del Dagestan. Nelle tre repubbliche transcaucasiche, svincolatesi da Mosca, tornavano a bruciare le polveri. Ma il Karabakh (etnicamente armeno ma interno ai confini dell’Azerbaidžan) riusciva a difendersi e a tutelare la propria autonomia; in Georgia fallivano i tentativi del governo di Tbilisi di sottomettere l’Abchazija e l’Ossetija del sud che, da regioni autonome, passarono a conseguire un’indipendenza di fatto; nonostante la difficile situazione in cui si trovava, la Russia fu determinante per l’intermediazione e il mantenimento della pace nella regione per parecchi anni, anche attraverso la conduzione di una missione militare della neo costituita Comunità degli Stati Indipendenti.
Alla riedificazione della Russia e alla riaffermazione della stessa come superpotenza, conseguentemente alla elezione di Putin a guida della Federazione nel 2000, seguì primariamente il ribaltamento della situazione cecena attraverso una serrata campagna militare che permise di ripristinare nella disgraziata repubblica caucasica l’autorità dello Stato e una pur precaria sicurezza civile, a tutt’oggi in fase di consolidamento. Il risultato politico della vicenda aumenta la propria incidenza se si considera il foraggiamento e il sostegno su cui la guerriglia poteva contare dall’estero: dall’appoggio logistico georgiano alle manovre “diplomatiche” di Londra.
Fuori dai confini della Federazione, in Transcaucasia, la situazione era invece ancora lontana dal poter fare ipotizzare una stabilizzazione e una pacificazione. La causa di ciò è da ricercarsi nella - pur contestuale al ripristino dell’azione politica russa - interferenza sempre più marcata degli Stati Uniti nella regione. Interferenza sia di natura politica (accerchiamento della Russia, conquista dello spazio centroasiatico, allargamento del Patto Atlantico, rivoluzioni colorate, ONG, sostegno al separatismo) che di natura economica, riconducibile sostanzialmente alla politica degli oleo-gasdotti. In base a tale politica le vie di transito energetiche sarebbero dovute transitare al di fuori dei confini della Russia e dell’Iran (e dell’Armenia, che con questi ha conservato una vicinanza strategica); esempio ne è stato la costruzione dell’oleodotto Baku-Tbilisi-Cheyan, che riesce quindi a unire il mar Caspio al Mediterraneo transitando solo sul territorio di Paesi politicamente vicini a Washington3.
L’apice del coinvolgimento occidentale nelle vicende caucasiche si è registrato la scorsa estate con il sostegno attribuito alla Georgia nella brutale aggressione della repubblica separatista dell’Ossetija del sud, politicamente vicina a Mosca ed etnicamente affine all’omologa repubblica settentrionale interna ai confini della Federazione Russa. In tale spregiudicata e sprovveduta mossa politica - esasperata dai tamburi della propaganda e dalle armi di Tel Aviv – però, come spesso accade, “i pifferi di montagna andarono per sonare, ma furono sonati”. Non solo: la Russia non si è limitata alla difesa della Repubblica di Ossetija del sud e della sua popolazione, vittima della sproporzionata violenza di Tbilisi, ma ne ha riconosciuta l’indipendenza, unitamente a quella della Repubblica di Abchazija. Verosimilmente Mosca sarebbe stata molto più incline al pragmatismo, almeno fino alla rottura degli schemi internazionali conseguenti l’indipendenza del Kosovo. Verosimilmente avrebbe preferito un governo amico a Tbilisi piuttosto che l’indipendenza forzata dell’Ossetija. Insomma, avrebbe messo in atto la normale, normalissima politica di una superpotenza consapevole del suo peso internazionale, che non si è mai sognata il diritto divino di “esportare la democrazia”. Ma – sembra questo il motto che ha animato l’agenda politica del Cremlino – “dove non vale più la forza della ragione valgano le ragioni della forza”.


16 Novembre 2009 12:00:00 - http://www.rinascita.eu/index.php?action=news&id=8

dimanche, 17 janvier 2010

Robert E. Lee and Stonewall Jackson were Anti-Slavery

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Robert E. Lee and Stonewall Jackson Were Anti-Slavery

 

 

By Chuck Baldwin / http://www.campaignforliberty.com/

Praise For Lee And Jackson

January is often referred to as "Generals Month" since no less than four famous Confederate Generals claimed January as their birth month: James Longstreet (Jan. 8, 1821), Robert E. Lee (Jan. 19, 1807), Thomas Jonathan "Stonewall" Jackson (Jan. 21, 1824), and George Pickett (Jan. 28, 1825). Two of these men, Lee and Jackson, are particularly noteworthy.

Without question, Robert E. Lee and Stonewall Jackson were two of the greatest military leaders of all time. Even more, many military historians regard the Lee and Jackson tandem as perhaps the greatest battlefield duo in the history of warfare. If Jackson had survived the battle of Chancellorsville, it is very possible that the South would have prevailed at Gettysburg and perhaps would even have won the War Between the States.

In fact, it was Lord Roberts, commander-in-chief of the British armies in the early twentieth century, who said, "In my opinion, Stonewall Jackson was one of the greatest natural military geniuses the world ever saw. I will go even further than that--as a campaigner in the field, he never had a superior. In some respects, I doubt whether he ever had an equal."

While the strategies and circumstances of the War of Northern Aggression can (and will) be debated by professionals and laymen alike, one fact is undeniable: Robert E. Lee and Thomas J. Jackson were two of the finest Christian gentlemen this country has ever produced. Both their character and their conduct were beyond reproach.

Unlike his northern counterpart, Ulysses S. Grant, General Lee never sanctioned or condoned slavery. Upon inheriting slaves from his deceased father-in-law, Lee freed them. And according to historians, Jackson enjoyed a familial relationship with those few slaves that were in his home. In addition, unlike Abraham Lincoln and U.S. Grant, there is no record of either Lee or Jackson ever speaking disparagingly of the black race.

As those who are familiar with history know, General Grant and his wife held personal slaves before and during the War Between the States, and, contrary to popular opinion, even Lincoln's Emancipation Proclamation did not free the slaves of the North. They were not freed until the Thirteenth Amendment was passed after the conclusion of the war. Grant's excuse for not freeing his slaves was that "good help is so hard to come by these days."

Furthermore, it is well established that Jackson regularly conducted a Sunday School class for black children. This was a ministry he took very seriously. As a result, he was dearly loved and appreciated by the children and their parents.

In addition, both Jackson and Lee emphatically supported the abolition of slavery. In fact, Lee called slavery "a moral and political evil." He also said "the best men in the South" opposed it and welcomed its demise. Jackson said he wished to see "the shackles struck from every slave."

To think that Lee and Jackson (and the vast majority of Confederate soldiers) would fight and die to preserve an institution they considered evil and abhorrent--and that they were already working to dismantle--is the height of absurdity. It is equally repugnant to impugn and denigrate the memory of these remarkable Christian gentlemen.

In fact, after refusing Abraham Lincoln's offer to command the Union Army in 1861, Robert E. Lee wrote to his sister on April 20 of that year to explain his decision. In the letter he wrote, "With all my devotion to the Union and the feeling of loyalty and duty of an American citizen, I have not been able to make up my mind to raise my hand against my relatives, my children, my home. I have therefore resigned my commission in the army and save in defense of my native state, with the sincere hope that my poor services may never be needed . . ."

Lee's decision to resign his commission with the Union Army must have been the most difficult decision of his life. Remember that Lee's direct ancestors had fought in America's War For Independence. His father, "Light Horse Harry" Henry Lee, was a Revolutionary War hero, Governor of Virginia, and member of Congress. In addition, members of his family were signatories to the Declaration of Independence.

Remember, too, that not only did Robert E. Lee graduate from West Point "at the head of his class" (according to Benjamin Hallowell), he is yet today one of only six cadets to graduate from that prestigious academy without a single demerit.

However, Lee knew that Lincoln's decision to invade the South in order to prevent its secession was both immoral and unconstitutional. As a man of honor and integrity, the only thing Lee could do was that which his father had done: fight for freedom and independence. And that is exactly what he did.

Instead of allowing a politically correct culture to sully the memory of Robert E. Lee and Thomas J. Jackson, all Americans should hold them in a place of highest honor and respect. Anything less is a disservice to history and a disgrace to the principles of truth and integrity.

Accordingly, it was more than appropriate that the late President Gerald Ford, on August 5, 1975, signed Senate Joint Resolution 23, "restoring posthumously the long overdue, full rights of citizenship to General Robert E. Lee." According to President Ford, "This legislation corrects a 110-year oversight of American history." He further said, "General Lee's character has been an example to succeeding generations . . ."

The significance of the lives of Generals Lee and Jackson cannot be overvalued. While the character and influence of most of us will barely be remembered two hundred days after our departure, the sterling character of these men has endured for two hundred years. What a shame that so many of America's youth are being robbed of knowing and studying the virtue and integrity of the great General Robert E. Lee and General Thomas J. "Stonewall" Jackson.

Furthermore, it is no hyperbole to say that the confederated, constitutional republic so ably declared by Thomas Jefferson in the Declaration of Independence of 1776 and codified into statute by the U.S. Constitution of 1787 was, for the most part, expunged at the Appomattox Court House in 1865. After all, it was (and is) the responsibility of the states to be the ultimate vanguard of liberty. Without a tenacious, unrelenting defense of liberty by the sovereign states, we are reduced to ever-burgeoning oppression--which is exactly what we see happening today.

Thankfully, freedom's heartbeat is still felt among at least a few states. State sovereignty resolutions (proposed in over 30 states), Firearms Freedom acts (passed in 2 states--Montana and Tennessee--and being proposed in at least 12 other states), and official letters (Montana), statements (Texas Governor Rick Perry), and resolutions (Georgia and Montana) threatening secession have already taken place.

Yes, freedom-loving Americans in this generation may need to awaken to the prospect that--in order for freedom to survive--secession may, once again, be in order. One thing is for sure: any State that will not protect and defend their citizens' right to keep and bear arms cannot be counted on to do diddlysquat to maintain essential freedom. It is time for people to start deciding whether they want to live free or not--and if they do, to seriously consider relocating to states that yet have a heartbeat for liberty.

I will say it straight out: any State that will not protect your right to keep and bear arms is a tyrannical State! And if it is obvious that the freedom-loving citizens of that State are powerless to change it via the ballot box, they should leave the State to its slaves and seek a land of liberty.

I, for one, am thankful for the example and legacy of men such as Robert E. Lee and Stonewall Jackson. They were the spiritual soul mates of George Washington and Thomas Jefferson. They were men that loved freedom; they were men that loved federalism and constitutional government; and they were men of courage and understanding. They understood that, sometimes, political separation is the only way that freedom can survive. Long live the spirit of Washington, Jefferson, Lee, and Jackson!



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samedi, 16 janvier 2010

L'Europe: une maison commune

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Archives de SYNERGIES EUROPEENNES - 1991

 

L'Europe: une Maison Commune

par Dario DURANDO

 

Pour la première fois dans l'histoire, il n'y a plus d'opposition politique et militaire entre Slaves et Germains en Europe centrale et dans la plaine russe. Envisager une politique unitaire ne relève plus de l'utopie.

 

Un déluge de paroles a envahi les mass-media occidentaux à la suite de la «seconde révolution russe» du 21 août 1991. Mais cette gigantesque logorrhée ne doit pas nous empêcher d'examiner méticuleusement les aspects les plus cruciaux de ces événements, qui déterminent encore et toujours la vie politique de la République russe, héritière de feu l'URSS.

 

Premier aspect à prendre en considération: la réalité proprement politique. Son examen requiert une grande rigueur scientifique. Et sans les moyens d'investigation que nous offre la politologie contemporaine, nous ne pouvons pas véritablement prendre acte de toute la complexité des mécanismes à l'œuvre en Russie aujourd'hui ni apercevoir les embûches que pourrait nous tendre cette «révolution».

 

Second aspect: le problème des nationalités. Ce problème semble aujourd'hui passionner l'opinion publique occidentale, dont l'attention est attirée en permanence par l'émergence de huit ou dix nouveaux Etats.

 

Une approche réaliste, post-idéologique, de ces questions anthropologiques fondamentales, nous oblige à reconnaître que le sens de l'appartenance ethnico-culturelle est, dans une large mesure, «fondateur», puisque l'individu se perçoit comme lié à un lieu dans le monde, comme doté d'une identité propre qui le distingue des «autres». L'ethnie, la culture qui découle de l'appartenance ethnique, les traditions qui s'y réfèrent, en un mot, les «racines», constituent le milieu naturel dans lequel évolue l'homme, dans lequel il agit dans le monde. Ce constat du rôle déterminant des appartenances est, bien sûr, extensible à des milieux d'autre type, comme le milieu professionnel, la classe sociale, la religion. Le mondialisme, idéologie dominante et niveleuse, le cosmopolitisme qui croit pouvoir se passer de racines et est l'expression idéologique naturelle de l'économie de type capitaliste, sont donc destructeurs de différences, de spécificités ethniques, sont des ennemis redoutables des patrimoines culturels où sont imbriqués les individus; en ultime instance, ils déclarent la guerre à la personnalité la plus intime de ceux-ci. Par conséquent, nous devons considérer comme hautement positif le fait que de vastes groupes humains se réapproprient leur identité nationale et réclament, en toute logique, l'autonomie politique et la souveraineté.

 

Bien sûr, ce processus a des limites; il ne doit pas déboucher sur l'agressivité pure, sur une volonté de puissance pathologique; dans ce cas, on ne doit pas parler d'un retour à l'identité mais d'un «nationalisme tribal», dont les tendances conduisent au «micro-impérialisme».

 

Pour donner un exemple: le cas de l'expansionisme grand-serbe (non seulement celui du néo-communiste Milosévic mais aussi celui des monarchistes et des orthodoxes regroupés autour du néo-tchetnik Draskovic). Mais ce jugement négatif à l'égard des Serbes ne nous conduit pas à partager intégralement, sans critique, l'excitation philo-croate qui domine dans l'Italie d'aujourd'hui.

 

Quant à l'ex-empire intérieur soviétique, sa désintégration, l'effondrement du pouvoir central, étaient déjà bien prévisibles  —la soviétologue Hélène Carrère d'Encausse l'avait prévu—  vu l'incorporation par coercition de peuples et de territoires dans l'Union entre 1918 et 1922. La multiplication improvisée de structures étatiques à bases nationales n'est a priori ni négative ni positive. Quels phénomènes doit-on juger négatifs? La balkanisation, la fragmentation de l'espace situé à l'Ouest de l'Oural, qui pourrait conduire à la création d'entités étatiques non viables, parce qu'économiquement non auto-suffisantes. Il est clair, en effet, que l'impossibilité d'un développement autonome, dans le chef de ces nouveaux Etats, provoquera des velléités agressives voire des affrontements violents.

 

Par ailleurs, on peut, du moins sur le plan théorique, émettre l'hypothèse contraire et parier pour le regroupement pacifique des nouvelles entités étatiques au sein d'organisations régionales, inserrées à leur tour dans des structures pan-européennes plus vastes que celles qui existent actuellement. C'est la thèse soutenue à Paris par Pierre Béhar (cf. Autriche-Hongrie, idée d'avenir. Permanences géopolitiques de l'Europe centrale et balkanique, 1991), un germaniste qui enseigne à l'Université de Limoges.

 

Inutile d'ajouter que si la «maison commune européenne» devait se subdiviser en de tels regroupements, il faudrait que les juristes et les constitutionnalistes imaginent une forme suffisamment souple et englobante d'«autonomie régionale», ou, plus précisément, d'«auto-gouvernement» pour les minorités, capable de résoudre les innombrables situations très complexes qui règnent dans les régions ethniquement hétérogènes et qui empêchent les ethnies d'affirmer sans détours leurs specificités. Prenons trois exemples: les 48% de Russes de Lettonie, les 10% de Russes en Ukraine et les 33% de Russes, d'Ukrainiens, de Turcs et de Gagaouzes de Moldavie, une nouvelle république qui n'aspire pas à l'indépendance mais à la fusion avec la «mère-patrie» roumaine. On n'imagine pas qu'au seuil du troisième millénaire on puisse résoudre les problèmes des zones mélangées en expulsant massivement des populations minoritaires. Par conséquent, il faut inventer des instruments politiques et juridiques pour protéger les minorités alloglottes, y compris celles qui sont nombreuses.

 

Le Grand Espace

 

Il s'agit donc, en définitive, d'étendre à l'Europe orientale le concept d'«Europe des autonomies», qui, dans la partie occidentale de notre continent, fait l'objet d'un travail théorique intense, préfigurant le dépassement définitif de l'Etat-Nation de mouture jacobine, tant vers le haut, par le transfert de pans toujours plus importants de souveraineté en direction d'organes supranationaux, que vers le bas, par délégation, à plus ou moins grande échelle, de pouvoirs aux communautés représentatives des cultures locales et aux «micronationalités» (Ecosse, Pays de Galles, Bretagne, Corse, Euzkadi,... et, dans un avenir proche, aux régions de l'Italie septentrionale, qui montrent leur impatience face à une identité italienne officielle qui se veut de plus en plus méditerranéenne).

 

La logique, qui sous-tend le développement de ces nouvelles entités politiques à fondement ethnique, veut se dégager de la cangue idéologique imposée par le nationalisme du XIXième siècle. Cette volonté et ce processus sont bien visibles: un Etat nouveau, régionalisé, va naître, ou une entité politique souveraine nouvelle, de dimensions régionales; ces entités nouvelles, de quelque type qu'elles soient, vont s'inserrer dans des organisations supra-régionales, lesquelles, à leur tour, vont participer à une «confédération», regroupant plusieurs dizaines d'entités supra-régionales de même nature, «confédération» qui sera la grande structure commune pan-européenne, dont l'embryon déjà existant pourrait parfaitement s'identifier à la CSCE. L'objectif étant la collaboration au niveau continental entre les innombrables ethnies et réalités nationales qui composent la mosaïque européenne.

 

Le concept-clef, dans cette logique très actuelle, est évidemment le «continent» ou, plus précisément, le «grand espace». Comme le XIXième siècle a été l'époque des nationalités au sens romantique, comme le XXième siècle a été caractérisé par un cortège de violences justifiées au nom des idéologies et par deux grandes guerres civiles européennes, le XXIième siècle sera le théâtre d'une compétition non guerrière, mais non moins âpre, entre des grands blocs, non plus unis par l'idéologie, mais bien plutôt par les impératifs géopolitiques et géo-économiques.

 

Or, justement, le troisième aspect de la crise soviétique est d'ordre géopolitique et géo-économique.

 

Si l'effondrement cataclysmique du IIIième Reich a discrédité pour toujours une certaine géopolitique instrumentale, manipulée à des fins d'expansion impérialiste et de domination raciale, comme l'atteste le travail formidablement bien documenté de Michel Korinman (Quand l'Allemagne pensait le monde. Grandeur et décadence d'une géopolitique,  Paris, Fayard, 1990), cela ne signifie pas pour autant que les approches géopolitiques, et, partant, géo-économiques, doivent être considérées comme dépassées. Korinman montre comment la corporation des géographes allemands s'est efforcée de marquer la géopolitique du sceau de l'opprobe, démarche expiatoire qu'ils jugeaient nécessaire pour défendre leur discipline contre toutes les accusations de compromissions avec le pouvoir national-socialiste. Et Korinman pose une question opportune: «La réflexion (géopolitique), en tant que telle, peut-elle trouver bénéfice de l'institutionnalisation de ce tabou?» (p. 327). La réponse doit évidemment être «non», puisque la géopolitique et la géo-économie ne sont rien d'autre que l'étude des influences qu'exercent, sur les choix politiques et économiques des Etats et des populations, la position géographique et la configuration morphologique de leurs territoires respectifs. Dans ce cas, la géopolitique n'est rien d'autre que l'un des instruments à la disposition des policy-makers  (et, rétrospectivement, des historiens) pour acquérir des connaissances utiles. En conséquence, l'approche géopolitique de la dynamique des relations internationales peut encore aujourd'hui, au-delà de tout déterminisme d'origine positiviste, s'avérer féconde. J'en veux pour preuve, par exemple, l'utilisation efficace des catégories de la géopolitique que l'on trouve dans le chapitre intitulé précisément «Il fattore geopolitico» (= Le facteur géopolitique) d'un ouvrage récent La politica estera di una media potenza. L'Italia dall'Unità ad oggi,  dû à la plume de Carlo M. Santoro; il y traite du dilemme géo-stratégique fondamental de la politique extérieure italienne: l'Italie est-elle une «île» dans la Méditerranée, appelée, en toute logique, à exercer son hégémonie sur cette mer du milieu, ou, à l'inverse, est-elle un territoire exposé à toutes sortes de menaces venues de diverses directions, ou encore, est-elle une péninsule du continent européen (voire une péninsule du vaste continent eurasien), et, en tant que telle, géopolitiquement périphérique?

 

Dès que l'on affirme la légitimité du recours à des notions géopolitiques ou géo-économiques pour définir les lignes de force dans les processus de réorganisation territoriale et économique qui ont surgi à la suite de l'écroulement de l'imperium soviétique, il est évident que l'espace géopolitique à prendre en considération est le continent eurasiatique dans son ensemble, depuis le Cap Finistère (en Galice ou en Bretagne, au choix, ndt) jusqu'au Détroit de Bering.

 

Notons au passage que l'un des premiers théoriciens de la géopolitique, le Britannique Mackinder (1861-1947), basait sa recherche sur l'intuition d'une dichotomie incontournable, celle qui oppose la terre à la mer, la masse continentale aux ensembles littoraux et maritimes, le Heartland  au Coastland.  En tant que sujet britannique, impliqué dans les affaires et la politique de l'Empire, Mackinder craignait l'apparition et l'affirmation d'une puissance continentale capable de dominer le Heartland,  et donc, en vertu du syllogisme qu'il énonçait, le monde entier.

 

Or, le Heartland,  tel qu'il découle de la réflexion de Mackinder, a changé plusieurs fois de contours, tout en demeurant, fondamentalement, quelque part au milieu du continent eurasiatique, à l'exception de la «péninsule européenne»; ensuite, comme le constate Pierre Gallois dans son très bel ouvrage, Géopolitique. Les voies de la puissance  (Paris, Plon, 1991): «force est de reconnaître que les frontières du "bloc soviétique" ont été presque les mêmes que celles du "Heartland"»  (p. 253).

 

Que peuvent dès lors nous apprendre les conceptions de Mackinder, 80 ou 90 ans après avoir été pensées? Sans nul doute, ceci: en premier lieu, que la dialectique économique et politique entre les espaces continentaux intérieurs et les espaces littoraux ou insulaires océaniques ne peut pas être supprimée par décret ou d'un coup de baguette magique, parce qu'elle est déterminée par la géographie, soit ce qu'il y a de plus permanent et de plus fixe dans la biosphère. En second lieu, que l'Eurasie constitue, géopolitiquement et géo-économiquement parlant, une unité, un seul et unique «continent».

 

Traduite en termes actuels et à la lumière de la disparition de la superpuissance URSS, cette conception géopolitique implique, d'une part, que l'Eurasie se pose nécessairement comme concurrente de l'espace atlantique (l'Amérique) et de l'espace pacifique (le Japon, l'Australie, les pays de l'ASEAN et même la Chine, dont la modernisation économique et politique serait impensable sans une coopération directe avec le Japon), et, d'autre part, que les confins occidentaux du Heartland  ne se trouvent plus sur les rives de la Vistule, comme l'imaginait Mackinder, mais sur le littoral de la Manche, par l'effet du processus d'intégration européenne, qui, sur le plan économique, lie tous les pays de la «péninsule Europe», y compris l'Italie périphérique, à la puissance allemande, aujourd'hui déséquilibrée sur son flanc oriental.

 

Les «unions» à la carte

 

Si l'on examine la situation présente au départ d'une autre perspective, on tirera peu ou prou les mêmes conclusions. Les relations internationales ont évolué au cours de ces dernières années en direction d'un modèle pentapolaire, où les Etats-Unis, l'URSS, la CEE, la Chine et le Japon sont les protagonistes majeurs. L'avenir sera déterminée par cette pentapolarité.

 

Comme nous venons de le voir, il est évident, surtout depuis les événements de la Place Tien An Men en 1989, que la République Populaire de Chine et le Japon ne pourront jouer un rôle mondial que s'ils mettent leurs forces en commun, s'ils intègrent leurs économies respectives parce qu'elles sont complémentaires, les Chinois offrant un marché immense et d'énormes ressources naturelles et les Japonais, une redoutable technologie et des capacités de gestion à toute épreuve. De cette façon, Chinois et Japonais projetteront leur puissance sur tout le Pacific rim.  De même, la disparition de l'URSS force les Russes, peuple porteur de l'impérialité tsariste puis soviétique, s'ils souhaitent demeurer des sujets actifs de l'histoire mondiale et conserver une bonne dose de souveraineté, à accepter et à vouloir une sorte de compénétration avec la deuxième force non asiatique de l'espace eurasien, la CEE (qui, en fin de compte, est synonyme de «Grande Allemagne»).

 

Pour nous résumer: puisque le rideau de fer a été liquidé en peu d'années, puisque la confrontation militaire et la division politique n'existent plus, l'unité de l'Europe «de l'Atlantique à l'Oural», comme le prophétisait le Général De Gaulle  —mais il serait plus juste de dire: l'unité de l'Eurasie de l'Atlantique au Pacifique—  est déjà une réalité! Les peuples de l'ex-imperium soviétique, non seulement ceux de l'Europe centrale mais aussi les Russes, les Biélorusses et les Ukrainiens, sont déjà «revenus à l'Europe». Le grand espace eurasiatique, en tant que concept économique, est déjà en mesure d'orienter, oriente déjà, la politique des investissements pratiquée par les Etats d'Europe occidentale.

 

Peu importe, dans cette optique, si le projet d'union à la carte sera ou non entériné par le Congrès des députés du Peuple de Moscou (l'article date d'octobre 1991, ndt), projet qui prévoit, rappelons-le, un jeu de très lâches confédérations, dispersées au travers de trois cercles concentriques, avec des républiques encore unies à titre fédératif, des républiques confédérées et des républiques associées économiquement; il n'est pas important non plus de savoir si, avec le temps, un pouvoir pan-russe et traditionnel se stabilisera ou non, légitimé par une forme ou une autre de démocratie plébiscitaire et par les capacités mobilisatrices de la renaissance religieuse.

 

Ce qui compte, c'est que toutes les régions habitées ou colonisées par les Slaves, incapables dans les circonstances présentes de parfaire une mission impériale de façon autonome, soient de fait inserrées dans le grand espace économico-social européen, et fassent partie, ainsi, d'une immense unité eurasiatique, qui restera toutefois, dans un premier temps, embryonnaire.

 

Ce «grand espace eurasiatique» naissant ne pourra effectivement représenter une force vive, en mesure d'affronter la politique impérialiste américaine voire la future réédition pacifique de la «sphère de co-prospérité asiatique», que s'il se laisse organiser et structurer sur le plan économique, coordonner et guider, par l'inévitable hégémonie de la Grande Allemagne, à peine sortie de sa division mutilante (avec beaucoup de lucidité, le prof. Franco Cardini l'a souligné, juste avant le putsch d'août 1991 à Moscou, dans Il Sabato,  l'hebdomadaire du mouvement néo-catholique Communione e liberazione  du 13 juillet 1991).

 

Les observateurs les plus fins voient déjà l'émergence d'un grand espace où s'exercera la prédominance économique germanique  —cet espace est en train de se constituer à grande vitesse en Pologne, en Tchécoslovaquie, en Croatie et en Ukraine—  ce qui accélèrera le processus d'intégration des territoires ex-soviétiques dans la «maison commune européenne».

 

Seuls les capitaux allemands, la technologie allemande, la culture organisatrice allemande pourront de fait tirer l'ex-URSS de l'ornière, la sortir de son retard économique et de son sous-développement; en même temps, l'Europe ex-soviétique offre de nouveaux débouchés, une main-d'œuvre potentielle relativement qualifiée et une surabondance de ressources naturelles à l'économie allemande, qui acquiert ainsi un supplément de puissance incalculable.

 

Aujourd'hui donc, en substance, le projet de coopération pan-européen est devenu partiellement et potentiellement une donnée concrète sur l'échiquier mondial, et n'est plus un simple instrument didactique dans le discours de Gorbatchev: il s'incarne dans la réalité européenne autour de son pivot central, autour de l'Allemagne réunifiée, à laquelle feront contrepoids la France à l'Ouest de la «péninsule Europe», la nouvelle Russie nationaliste à l'Est et l'Italie dans le bassin méditerranéen.

 

Si les choses évoluent dans cette direction, le monde sera tel que Mackinder l'entrevoyait dans ses cauchemars: un axe Berlin-Moscou capable de contrôler tout le continent eurasiatique et de menacer l'hégémonie planétaire des puissances maritimes. En réalité, nous n'en sommes pas là et l'alliance potentielle entre Russes et Allemands ne s'est pas constituée pour «conquérir le monde»: ceux qui affirment cela tombent dans la fantasmagorie politique. Un tel scénario est plus qu'improbable, vu que, pendant longtemps encore, confusions et déséquilibres affecteront l'espace sis entre Bonn et Vladivostok.

 

N'oublions pas non plus que c'est la première fois dans l'histoire qu'il n'existe plus d'opposition politique ou militaire entre Slaves et Germains en Europe centrale et dans les plaines russe et ukrainienne. Et qu'il n'existe plus dans ces vastes régions de barrières insurmontables ni dans les Monts Ourals ni en Sibérie. Toutes les conditions sont ainsi réunies pour stabiliser les relations entre les deux pôles de puissance et pour inaugurer une ère de paix durable, entre tous les peuples d'Europe et d'Eurasie. Cette paix ouvrira évidemment une période de progrès économique et social et, potentiellement, permettra l'envol d'un âge d'or culturel pour toutes les ethnies de ce grand continent. Ce qui signifie, si on regarde les choses avec un zeste d'optimisme, un accroissement potentiel de pouvoir pour tous les Etats qui souhaitent agir sur la scène mondiale sans s'assujettir à la volonté des Etats-Unis et sans s'intégrer au «nouvel ordre mondial» de Bush.

 

Cette perspective n'a rien d'utopique: elle relève d'un processus et d'une évolution qui ont lieu maintenant et actuellement, sous nos yeux, et qui dévoileront sans doute tous leurs effets au début du IIIième millénaire; nous avons donc parlé d'un processus qui est à l'œuvre, déterminé par des facteurs irrésistibles d'ordre géopolitique et économique et qui aura une incidence sur le destin et la vie de tous les Européens. La révolution de 1989, et celle de 1991, signifient bien plus que la fin sans gloire du communisme, et bien plus encore que la fin de l'histoire que d'aucuns philosophes imprudents annoncent sur les rives du Potomac!

 

Dario DURANDO.

(texte tiré d'Elementi, n°6, Ottobre 1991; adresse: Elementi, Via Rovere 2A/B, I-41.034 Finale Emilia (Mo), Italie).

vendredi, 15 janvier 2010

15 janvier 1821: les Anglais au Yémen

voyage-yemen-1.jpg15 janvier 1821 : Depuis l’expédition de Bonaparte en Egypte et ses tentatives de prendre pied en Palestine et en Syrie en 1798-99, l’Angleterre s’est faite la protectrice de l’Empire ottoman; elle réitérera cette protection contre l’Egypte de Mehmet Ali en 1839 et contre la Russie, lors de la guerre de Crimée et lors de l’offensive russe vers la Bulgarie et la Thrace en 1877-78, où les armées orthodoxes ont campé aux portes de Constantinople. L’Empire ottoman se situait sur la route des Indes, était bien présent en Méditerranée orientale, d’où la Sainte Ligue n’avait pu le déloger après la bataille de Lépante (1571) ni libérer Chypre; au 17ème siècle, les Ottomans, malgré leur ressac, avaient même pu conquérir la Crète, dernier bastion vénitien. Aucune puissance, aux yeux de l’Angleterre ne peut donc subjuguer cet Empire ottoman en pleine déliquescence ni acquérir des zones stratégiques lui appartenant. Si ces zones demeurent ottomanes, elles sont en quelque sorte neutralisées et ne servent pas de têtes de pont à une puissance européenne capable de rompre les communications entre la Grande-Bretagne et les Indes. Seule l’Angleterre, bien entendu, qui donne sa garantie à la Sublime Porte, mais tente de grignoter les côtes de son empire moribond ou d’occuper les points stratégiques éloignés de Constantinople, difficilement contrôlables et gérés par des potentats locaux, dont la fidélité est assez aléatoire. En 1821, avant que ne se consolide le pouvoir de Mehmet Ali en Egypte et avant que ne se déclenche la révolte grecque que soutiendront finalement, après bien des hésitations, Anglais, Français et Russes, la Royal Navy bombarde le port de Mokka au Yémen du 4 au 20 décembre 1820, afin de faire fléchir l’Imam local. Le 15 janvier 1821, celui-ci accepte les “capitulations” qui lui sont imposées: il doit respecter les “droits du résident anglais” et reconnaître la juridiction britannique sur tous les sujets de Sa Majesté vivant ou circulant au Yémen. En outre, il doit limiter les droits d’entrée de toutes les marchandises anglaises qui arrivent sur son territoire: c’est une application claire et nette des principes de l’ “impérialisme libre-échangiste”, pratiqué par l’Angleterre au 19ème siècle qui vise à lui assurer des débouchés, à briser les résistances locales et les barrières douanières et à garder les monopoles qu’elle a acquis en tant que première puissance industrielle. Quelques mois plus tard, les Anglais placent sous la protection de leur flotte l’Emir de Bahrein. La thalassocratie britannique est dorénavant présente à l’entrée de la Mer Rouge et dans le Golfe; elle en verrouille les accès. Petit à petit, elle se rend maîtresse de l’Océan Indien, océan du milieu, garant, pour qui le contrôle, de la maîtrise du globe. La logique de cet impérialisme, et les pratiques destinées à en assurer la longue durée, seront théorisées tout au début du 20ème siècle par deux géopolitologues: Halford John Mackinder et Homer Lea. Mutatis mutandis, ces règles servent encore pour étayer la stratégie américaine au Moyen Orient, en Afghanistan et au Pakistan, cette fois, sans la maîtrise directe de l’Inde, mais avec la maîtrise d’une île minuscule, celle de Diego Garcia, où se concentrent un arsenal moderne de bombardiers lourds à long rayon d’action et une flotte, épaulée par des porte-avions, véritables îles mobiles capables de frapper l’intérieur des terres sans donner prise à un ennemi dépourvu d’armes de ce genre.

 

 

Entretien avec Hellmut Diwald

hstDiwaldHellmut.jpgArchives de SYNERGIES EUROPEENNES - 1992

Entretien avec Hellmut DIWALD

 

propos recueillis par Irmhild DESCHNER et Peter BOSSDORF

 

Hellmut Diwald, né en 1929 en Moravie méridionale, a passé sa jeunesse à Prague et à Nuremberg. Après avoir achevé des études d'ingénieur en 1950, il obtient un diplôme d'histoire et un autre de philosophie en 1953. Depuis 1965, il enseigne l'histoire moderne et contemporaine à l'Université d'Erlangen-Nuremberg. Hellmut Diwald a acquis la célébrité en 1969, quand il a fait paraître une biographie de Wallenstein, et en 1978, en publiant une Histoire des Allemands (Geschichte der Deutschen),  qui provoqua un grand scandale, qui annonçait, huit ans à l'avance, la célèbre «querelle des historiens». Dans les années 80, Diwald a écrit et publié une quantité d'études, soulignant l'actualité de la question allemande.

 

ID/PB: Professeur, la fin de la guerre froide signifie-t-elle également la fin des problèmes de politique extérieure ou, au contraire, ces problèmes de politique extérieure se posent-ils dorénavant avec une acuité plus intense encore?

 

HD: On peut répondre par l'affirmative à vos deux questions. La fin de la guerre froide transforme globalement la politique internationale. Et la situation nouvelle est, à certains égards, bien plus imprévisible, car le nombre de dangers a cru: on l'a vu notamment quand Ukrainiens et Russes se sont querellés à propos de la flotte de la Mer Noire. Nous assisterons sans doute à l'éclosion de nouveaux conflits ailleurs, vu l'évolution qui se dessine dans le monde musulman. On peut le deviner avec ce qui s'est passé en Algérie.

 

ID/PB: Peut-on dire que les politiques suivies par les nouveaux Etats né sur le sol de l'ex-URSS sont dictées par des motivations nationales ou s'agit-il d'une tentative de faire passer dans le réel les valeurs occidentales?

 

HD: Pour moi, il s'agit surtout d'un retour à soi, à sa propre culture. Je ne parle pas de «valeurs occidentales» quand j'évoque les peuples d'Europe de l'Est ou de la CEI, ou quand je parle de leurs «nationalismes», car je n'oublie pas qu'en Union Soviétique, c'était une idéologie de facture occidentale qui était au pouvoir.

 

ID/PB: Pour nous Allemands, ce retour des peuples de l'Est européen à eux-mêmes, à leurs propres référents culturels, est-ce un signe positif?

 

HD: C'est un signe positif et prometteur. Dans la mesure où nous aussi, après la réunification partielle de l'Allemagne, ne souffrons plus, en tant que peuple ou partie de peuple, de l'étouffante pression marxiste ni de la doctrine d'Etat de l'ex-RDA. Pour nous aussi, la chute du Rideau de fer signifie le retour à une conscience de soi, qui nous apparaît sous des formes nouvelles, que nous avons encore à définir, à préciser.

 

ID/PB: Y a-t-il en Russie des traditions culturelles spécifiques qui peuvent spontanément s'aligner sur les conceptions occidentales de la démocratie et des droits de l'homme?

 

HD: Si ces traditions n'existent pas, ce n'est pas à nous de les imposer. C'est aux Russes à les faire advenir chez eux.

 

ID/PB: Ne court-on pas le danger, vu la disparité des moyens techniques et militaires modernes, que les Etats nationaux basculent dans une dépendance plus grande encore que par le passé?

 

HD: C'est possible, effectivement. Mais le danger de plus grande dépendance guettera surtout les Etats et les peuples de l'ex-URSS. Mais le plus gros problème, pour moi, c'est de savoir comment on va procéder pour imposer l'économie de marché dans ces pays. N'oublions pas que nous avons affaire à un pays où il n'y a jamais eu de classe moyenne, de bourgeoisie (au sens positif et industrieux du terme), pendant des décennies voire des siècles, si l'on inclut l'ère des Tsars. Jamais ces peuples n'ont appris à être autonomes.

 

ID/PB: L'Allemagne doit-elle s'engager politiquement ou économiquement dans ces régions?

 

HD: Economiquement, oui. Mais je reste très dubitatif quant aux chances de succès.

 

ID/PB: Mais n'y a-t-il pas de risques pour l'Allemagne, si elle prend des initiatives dans la CEI ou ailleurs? Par exemple, la prompte reconnaissance de la Slovénie et de la Croatie par l'Allemagne a exposé cette dernière à un risque: s'aliéner les Etats occidentaux.

 

HD: Pour moi, c'est un risque que nous ne devons même pas prendre en considération. Ce que la CEE a fait dans le cas yougoslave relève davantage de la farce que d'une politique précise, qui sait quels sont ses objectifs. Quand des peuples comme les Croates ou les Slovènes mettent si nettement à l'avant-plan leur droit à l'auto-détermination et leur identité et perçoivent ce droit et cette identité comme un droit de la personne humaine, il est normal, pour des motifs tant d'ordre moral que d'ordre politique, que nous ne nous adressions pas à nos voisins, pour leur demander s'ils sont d'accord ou non que nous reconnaissions ces principes. Nous avons toujours trop longtemps attendu avant de donner notre avis. Evidemment, en disant haut et clair son avis, on ne se fait pas toujours des amis. Mais cela n'a aucune importance: l'espace du politique est un espace où personne n'a des amis.

 

ID/PB: Mais ce que vous nous dites là, est-ce de la Realpolitik? Ne doit-on pas, en première instance, se ranger aux côtés des Etats dont on dépend le plus?

 

HD: Dans quelques mois, la situation en Yougoslavie sera telle que l'avait prévue, en pionnier, le gouvernement de la République Fédérale. L'éclatement de la Yougoslavie est désormais un fait acquis: les problèmes actuels, aussi tragiques sont-ils, dérivent d'une contestation globale du tracé des frontières. Et la CEE devra se rendre à l'évidence. Ensuite, nous, Allemands, qui avons toujours été la locomotive de l'Europe, n'avons pas sans cesse à dire: si vous n'êtes pas de notre avis, c'est avec plaisir que nous allons tout de suite nous aligner sur vos positions. Les Hollandais ou les Belges pensent-ils qu'ils vont se heurter à nous, s'ils ne sont pas tout-à-fait sur la même longueur d'onde que nous? Non! Il est dans notre intérêt que les Croates et les Slovènes se considèrent comme des partenaires de l'Allemagne. Alors pourquoi n'aurions-nous pas agi comme nous avons agi?

 

ID/PB: Mais en agissant de la sorte, ne risque-t-on pas de freiner ou de menacer le processus d'intégration à l'œuvre au sein de la CEE?

 

HD: Si le processus d'intégration est menacé par de telles décisions, c'est qu'il ne vaut rien. Par ailleurs, je voudrais tout de même vous signaler que le processus d'intégration européenne est menacé par des dangers pires; la décision allemande de reconnaître la Croatie et la Slovénie a certes été une décision de haute politique, que la RFA a osé, en pionnière, prendre seule, mais c'était aussi une décision que pas un seul Etat européen ne pouvait, à longue échéance, omettre de prendre. Personne ne pouvait indéfiniment se boucher les oreilles et fermer les yeux.

 

ID/PB: Mais l'éclatement de la Yougoslavie ne risque-t-il pas de poser un précédent, que craignent, pour de bonnes raisons, plusieurs Etats de l'Europe de l'Ouest?

 

HD: Ce n'est pas notre problème. L'Allemagne a aussi ses minorités ethniques et elles ne posent pas de problèmes. Prenons l'exemple de la minorité danoise du Nord du pays: elle dispose de droits clairement définis. Et les réglementations qui gèrent cette minorité sont exemplaires; le monde entier pourrait les imiter. Si les Tyroliens du Sud recevaient de Rome ce que nous accordons aux Danois du Slesvig, ils seraient heureux.

 

ID/PB: Dans le Traité qui sanctionne la réunification, on a expressément rénoncé, pour la première fois, aux régions d'Allemagne orientale (Poméranie, Silésie, Prusse orientale, etc.). En 1992, l'Allemagne aura-t-elle encore intérêt à réclamer ces régions devenues sous-développées du point de vue économique et très abîmées sur le plan écologique?

 

HD: La décision politique qui a été prise à Bonn n'est qu'un aspect de la problématique, l'aspect extérieur. Pour moi, qui suis historien, je vois les choses d'une toute autre façon, évidemment. Quand il est question de la Silésie et qu'on me demande qui sont les Silésiens, je ne peux bien sûr pas répondre que ce sont des Polonais qui viennent de Pologne. Vous comprenez bien que ça ne va pas, qu'il est exclu de poser une telle assertion, qui va à l'encontre de toute vérité historique. En revanche, on peut dire: oui, en 1991, ces régions ont été cédées en vertu de plusieurs traités; et j'ajouterais, personnellement: elles ont été cédées par nécessité. On nous a imposé le dilemme suivant: vous ne pourrez vous réunir, si vous ne renoncez pas expressément à ces territoires. Mais, l'histoire étant ce qu'elle est, c'est-à-dire un théâtre où surgit constamment l'imprévu, on ne peut pas encore dire avec certitude ce qu'il adviendra de la partie septentrionale de la Prusse orientale, après l'effondrement de l'URSS.

 

ID/PB: Peut-on encore parler aujourd'hui de sérieux conflits de frontières, mis à part ce qui se passe dans les pays du tiers-monde ou dans les Etats pluri-ethniques en phase de dissolution?

 

HD: A l'intérieur de l'Europe, les questions de frontières ne sont plus aussi importantes qu'elles ne l'ont été: c'est l'un des rares points positifs de l'intégration européenne.

 

ID/PB: Y a-t-il encore place en Europe, aujourd'hui, pour des conceptions ou des projets nationaux-étatiques ou stato-nationaux?

 

HD: Ce que l'on tente de définir comme «régionalisme», n'est rien d'autre qu'une revendication véhémente des groupes ethniques qui affirment ou veulent affirmer leur identité. Pourquoi ces groupes ethniques veulent-ils disposer de leur propre gouvernement? Pourquoi les Croates voudraient-ils leur propre gouvernement, si leur identité ne leur tenait pas à cœur?

 

ID/PB: N'y a-t-il pas là des motivations économiques qui entrent en ligne de compte?

 

HD: Non, ce sont des motivations historiques, religieuses, culturelles. Entre la Serbie et la Croatie, il y avait, jadis, un frontière très significative; la Serbie était perçue comme une zone intermédiaire entre l'Europe et le monde ottoman, tandis que la Croatie et la Slovénie faisaient partie de la monarchie austro-hongroise. Serbes et Croates ont été profondément déterminés par leurs destins historiques, très différents l'un de l'autre. Slovènes et Croates se sentent proches des Allemands, dont ils ont longtemps partagé l'histoire. Les choses se sont compliquées peu avant la première guerre mondiale: les Serbes ont rêvé de construire un royaume grand-serbe, en se soumettant tous les petits peuples ou minorités qui vivaient sur leur territoire ou aux alentours. La question qui se pose: cette volonté correspond-elle à l'idée que nous nous faisons de la justice?

 

ID/PB: Peut-on dès lors parler d'un retour de l'idée stato-nationale classique?

 

HD: Je ne crois pas. Nous n'assistons pas, je pense, au retour de la vieille conception de l'Etat-Nation, doté de droits de souveraineté, au sens classique du terme. Rien que parce qu'il y a imbrication étroite des économies les unes dans les autres, la souveraineté de chaque Etat est considérablement limitée; mais, en même temps, nous constatons que les pouvoirs exécutifs et législatifs sont demeurés intacts. Où trouve-t-on en Europe cette promptitude à renoncer à ses propres droits de souveraineté, que l'on observe chez nous? Evidemment, nous, Allemands, avons toujours trouvés qu'il était facile de renoncer à ses droits de souveraineté parce que depuis 1945, nous n'en avons plus.

 

lhwEinigVaterland.jpgID/PB: Aujourd'hui, une bonne part du travail législatif se fait au niveau européen...

 

HD: Oui mais ce travail législatif concerne essentiellement le domaine économique. Ce n'est pas pour rien que les politiciens de Bonn ont été déçus par les décisions de Maastricht; en effet, pratiquement rien n'a été fait dans le domaine institutionnel. Le gouvernement de Bonn a raconté partout, à grand renfort de publicité, que Maastricht a été un gros succès. Dans le fond, ça a été un bide complet.

 

ID/PB: Néanmoins, l'Allemagne joue un rôle directeur en Europe. Les vaincus de la seconde guerre mondiale sont-ils les vainqueurs de l'après-guerre?

 

HD: On résume souvent la situation par cette formule. A croire que, si une troisième guerre mondiale éclate, il vaudrait mieux se trouver dans le camp des vaincus.

 

ID/PB: La réunification semble donner raison aux adénaueriens et aux «atlantistes» qui préconisaient une politique dure contre l'URSS. Pensez-vous qu'une politique de «neutralisation» de l'Allemagne, comme le voulaient une certaine gauche et une certaine droite nationale, aurait prolongé inutilement la vie de l'URSS moribonde?

 

HD: Je ne crois pas que les atlantistes aient eu raison, ni d'ailleurs les protagonistes de la politique adenauerienne. Ceux qui le pensent interprètent mal les réalités politiques, géopolitiques et militaires. Si l'Allemagne avait opté pour la neutralité, l'URSS n'aurait eu aucun sursis complémentaire. Le système soviétique ne fonctionnait pas, avec ou sans guerre froide. Notre après-guerre a connu des phases de répit, où il n'y a pas eu la moindre course aux armements; pendant ces périodes de répit, l'URSS n'a pas progressé.

 

ID/PB: Après l'effondrement du communisme, peut-on encore parler d'un «ordre mondial»?

 

HD: Non, on assistera peut-être à des esquisses d'ordre mondial, mais non dans le sens où l'on pourrait dire: voilà, ceci est une construction équilibrée et harmonieuse, qui ne pose plus que quelques problèmes en certains points de friction. Observons la réalité contemporaine: l'Amérique est désormais incapable de faire face à ses propres problèmes intérieurs.

 

ID/PB: Et l'Allemagne, parvient-elle à résoudre les siens?

 

HD: Votre question peut nous amener à de très longs développements. Surtout dans le domaine de la consolidation juridique et constitutionnelle de la sphère politique. Je ne suis pas un théoricien de l'Etat. Mais je constate, comme beaucoup de mes concitoyens, que, manifestement, il y a quelque chose qui ne va pas en Allemagne, que nous, citoyens allemands, traitons notre communauté politique à la légère, sans la moindre gravité. J'ai un jour eu une formule ironique: notre rapport le plus intense à l'Etat concerne la législation fiscale, la réglementation de la circulation routière et le service militaire. Tout le reste nous est égal. L'Etat ne semble pas s'intéresser au citoyen individuel concret, car il table sur le citoyen majeur et émancipé. Mais l'Etat n'a jamais clairement défini ce qu'est exactement le citoyen majeur et émancipé, si ce n'est par des formules toute faites. Mais peut-on rencontrer quelque part, cet homme libre, responsable, etc., capable de prendre des décisions en toute sérénité et en toute liberté?

 

ID/PB: Mais n'est-ce pas précisément la rétention de cet Etat qui le rend si attachant?

 

HD: Non. Cette rétention sera exaltée parce qu'elle permet la liberté mais je ne crois pas que cela suffise pour donner à l'Etat une force générant la cohésion sociale.

 

ID/PB: Dans le cadre de la RFA, pensez-vous qu'il y ait encore place pour un parti conservateur ou un parti de droite?

 

HD: Conservateur ou de droite, je n'en sais rien et cela ne m'intéresse pas. Je ne vois pas non plus en quoi ces concepts de conservateur et de droite peuvent nous être encore utiles. En revanche, nous nous trouvons en face d'une quantité de problèmes concrets, qu'il faudrait affronter, de choses à changer et qu'il va falloir changer.

 

ID/PB: Vous vous êtes tenu éloigné de la politique partisane, mais vous ne vous êtes pas entièrement soustrait à elle. Je pense notamment au préambule du programme des Républicains, que vous avez rédigé...

 

HD: D'une part, je l'ai fait pour des raisons d'ordre privé. D'autre part, on peut saluer grosso modo la tentative de Schönhuber, qu'il poursuit d'ailleurs. Dans le fond, toute nouvelle formation politique, qui a l'intention de s'ancrer dans la vie politique, doit être saluée avec respect. Ne doit-on pas constater que les partis sont vieux et pétrifiés, qu'ils sont devenus des facteurs d'immobilisme? C'est un souci qui préoccupe surtout les partis eux-mêmes depuis des années, et pas seulement ceux qui ne sont membres d'aucune formation ou les citoyens engagés dans un parti ou un autre.

 

ID/PB: Après tous les échecs des partis de droite qu'a connus l'Allemagne, y a-t-il encore une chance pour un parti qui se positionnerait à droite de l'Union (le cartel des partis démocrates-chrétiens, ndt)?

 

HD: Oui. Je ne serais pas étonné si nous nous trouvons, dans deux ans, face à un paysage politique complètement modifié.

 

ID/PB: Professeur Diwald, nous vous remercions de nous avoir accordé cet entretien.

(une version légèrement différente de cet entretien est parue dans Junge Freiheit, n°1/2-1992; adresse: JF, Postfach 147, D-7801 Stegen/Freiburg). 

 

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mercredi, 13 janvier 2010

L'insegnamento della Costituzione di Fiume

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L'insegnamento della Costituzione di Fiume

 

Giorgio Emili - Articoli

Scritto da Giorgio Emili   

Ex: http://www.area-online.it/ 

La politica si spezza il cuore a forza di predicozzi e buoni sentimenti, nell’era del conflitto sociale.
La Costituzione dovrebbe fare da collante e i valori in essa contenuti dovrebbero essere totalmente condivisi. La realtà, come bene abbiano visto, è un’altra: addirittura opposta. Lo scontro è aperto, i valori non sono condivisi, aleggia da decenni l’idea non dichiarata di una parte giusta che ha vinto e che reca in sé tutto il bene possibile.

La Costituzione italiana – serve parlar chiaro -  in molte parti nasconde questa realtà.
Per molti aspetti continua a essere la Costituzione del dissenso, prodotta da una frattura della storia italiana.
Le istituzione cercano, giustamente, di evidenziare le note concilianti, il sapore pieno di salvaguardia della democrazia e dei valori innati. L’evidenza dei fatti e la scarsa considerazione, da parte dei comuni cittadini, del tessuto della nostra Costituzione (certo, quanti la conoscono realmente?, quanti hanno approfondito le sue norme?) testimoniano che il passo decisivo verso la reale distensione degli animi non è ancora compiuto. Del resto perché tanti tentativi di riforma, perché tante dichiarazioni sulla necessità di un suo adeguamento?
La fiducia nella Costituzione ha, da sempre, sopito il conflitto, rasserenato gli animi, colmato i buchi di ogni possibile deriva. Questo però, a quanto pare, non basta. Fiducia cieca nella Costituzione, ci mancherebbe, ma è bello ricordare che esiste (è esistito) un modello costituzionale diverso (e per certi versi controverso) che ha un filo conduttore invidiabile.
Da uno scritto di Achille Chiappetti abbiamo scoperto una felice ricostruzione della Carta del Carnaro, la Costituzione di Fiume.
«Lo Statuto della Reggenza italiana del Carnaro, promulgato l’8 settembre del 1920, costituisce da sempre – scrive Chiappetti - un angolo oscuro quasi perduto della coscienza costituzionale del nostro Paese. Il suo testo predisposto dal socialista rivoluzionario Alceste De Ambris rappresenta infatti un insieme di estrema modernità e di inventiva anticipatoria di quelli che sarebbero stati i successivi sviluppi dell’organizzazione economica dello Stato fascista e delle democrazie moderne. Il suo impianto – spiega - fondato sul sistema corporativo e sul valore del lavoro produttivo, come fondamento dell’eguaglianza e della libertà, nonché sul non riconoscimento della proprietà se non come funzione sociale, costituisce un modello che e stato troppo spesso dimenticato». Ma la parte più affascinante di quelle considerazioni sullo statuto fiumano riguarda l’analisi di singole norme, soprattutto se confrontate con le attuali della nostra Costituzione.
«La Reggenza riconosce e conferma la sovranità di tutti i cittadini  - dice lo Statuto -, senza distinzione di sesso, di stirpe, di lingue, di classe, di religione». «Amplia ed innalza e sostiene sopra ogni altro diritto i diritti dei produttori». Ancora: «La Reggenza si studia di ricondurre i giorni e le opere verso quel senso di virtuosa gioia che deve rinnovare dal profondo il popolo finalmente affrancato da un regime uniforme di soggezione e di menzogne». Si respira  - chiosa Achille Chiappetti - «un aria di positività e di concordia quasi da costituzione statunitense e non il clima di tensione e scontro che risuona nelle prime parole della nostra Carta repubblicana».
Le conclusioni hanno forte sapore dannunziano e meritano di essere segnalate. Si innalza, infatti, su tutti l’articolo XIV della Carta del Carnaro: «La vita è bella e degna che veramente e magnificamente la viva l’uomo rifatto intiero dalla libertà».
«È nello Statuto fiumano, dunque, che e possibile trovare l’ispirazione per un concetto di socialità posto in maniera differente e del tutto a-conflittuale che meriterebbe di essere ripreso per dare forza ad un nuovo risorgimento italiano».
Ecco. La felicita nella nostra Costituzione non c’è – dice Chiappetti - . E non solo lui.

mardi, 12 janvier 2010

Bernard Lugan lance sa revue par internet

Bernard Lugan lance sa revue par Internet

Logo couleur [1]

Madame, Mademoiselle, Monsieur,

Je vous annonce la naissance d’une nouvelle revue africaniste, inspirée de l’ancienne Afrique réelle à laquelle certains d’entre vous étiez abonnés entre 1995 et 2005. Cette publication sera mensuelle, soit 12 numéros par an, et sa distribution exclusivement par Internet. Réalisée en couleurs, son approche de l’Afrique se fera par le réel, notamment à partir du milieu et des peuples et dans la longue durée. Elle sera illustrée et comportera une riche cartographie.

Afin de toucher le plus grand nombre, notamment les étudiants, le prix de l’abonnement annuel est de 25 euros (France et étranger), ce qui met le prix du numéro à environ 2 euros. Pour obtenir une copie papier, il suffira de tirer la revue sur l’imprimante de l’ordinateur.

Le premier numéro est en cours de fabrication et je vous en communique un article en SPECIMEN [2]. Tous les numéros comporteront une partie actualité, notamment centrée sur les pays ou les régions en crise et une partie dossier.
Les abonnés recevront le numéro 1 de la revue dans la seconde quinzaine du mois de janvier 2010. Les thèmes principaux qui y sont traités concernent l’analyse en profondeur de la situation en Guinée et la réalité du réchauffement climatique en Afrique. Nous publions un long entretien réalisé peu de temps avant sa mort avec le grand climatologue Marcel Leroux qui fut le chef de file des climato sceptiques.
Les numéros suivants traiteront, entre autres, de l’afro centrisme, de la situation en Afrique du Sud quinze après les débuts du pouvoir noir etc.

Pour vous abonner, vous devez imprimer et renvoyer à l’adresse indiquée le FORMULAIRE D’ABONNEMENT [3].

Pour télécharger le SPECIMEN et le FORMULAIRE D’ABONNEMENT, faites un clic droit avec votre souris sur les fichiers bleus et selectionner « Enregistrer la cible du lien sous» . Si vous rencontrez des difficultés pour afficher ou télécharger ces deux fichiers, vous pouvez envoyer un courriel à contact@bernard-lugan.com, nous vous les transmetterons directement.

Source : Le blog officiel de Bernard Lugan [4]


Article printed from :: Novopress Québec: http://qc.novopress.info

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[1] Image: http://qc.novopress.info/wp-content/uploads/2010/01/Logo-couleur.jpg

[2] SPECIMEN: http://www.mydatanest.com/files/Lugan/44038_gigiy/SPECIMEN.pdf

[3] FORMULAIRE D’ABONNEMENT: http://www.mydatanest.com/files/Lugan/44040_zfl6l/FORMULAIRE.pdf

[4] Bernard Lugan: http://bernardlugan.blogspot.com/

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Quis contra nos? Gabriele d'Annunzio et la Marche sur Fiume

d'aannn.jpgPeter VERHEYEN:

Quis contra nos?

Gabriele d’Annunzio et la Marche sur Fiume

 

Dans l’histoire, nous trouvons bon nombre de figures difficilement classables dans une catégorie proprette et bien définie. Elles nous apprennent que les clivages entre la gauche et la droite, entre le conservatisme et le progressisme ne sont finalement que des clivages entre « concepts conteneurs » aux contours médiocrement balisés, que l’on peut sans doute appliquer aux politicards sans intérêt qui sévissent de nos jours mais qui n’ont aucune pertinence dans la réalité, en dehors des tristes et inutiles baraques à parlottes que sont devenus les parlements. Gabriele d’Annunzio est l’exemple d’un penseur original, de la trempe de ceux que l’on ne rencontre pas tous les jours. Ce poète excentrique, cet aviateur et ce révolutionnaire demeure, encore de nos jours, une personnalité dont on peut s’inspirer ; ce n’est donc pas un hasard si son portrait orne un certain mur de la « Casa Pound » de Rome, le magnifique squat occupé aujourd’hui par des nationaux révolutionnaires dans la capitale italienne. Sa Marche sur Fiume en septembre 1919 et l’occupation de la ville qui s’ensuivit et dura quinze mois, n’a pas seulement été une entreprise toute d’ardeur et de témérité : elle a donné le ton pour d’autres générations de nationalistes révolutionnaires, d’anarchistes et d’autres esprits libres de l’entre-deux-guerres et, même, d’époques ultérieures. Le concept de « Zone Temporaire Autonome », telle que décrite dans les travaux de l’anarchiste Hakim Bey, a finalement été traduit dans le réel, et pour la première fois, à Fiume. La ville est ainsi devenue un microcosme où les rêves les plus radicaux, quels qu’ils soient, ont reçu la chance de se développer. Il serait dès lors dommage de dénigrer la Marche sur Fiume comme un simple précédant de la Marche sur Rome de 1922.

 

Dès son plus jeune âge, d’Annunzio avait lu Shakespeare et Baudelaire et ses premiers pas de poète, il les a faits dans le sillage du poète italien Giosué Carducci. L’influence de Nietzsche fut grande chez lui et le leitmotiv du « surhomme » devint rapidement central dans son œuvre. Il en déduisit un rôle important à accorder à l’héroïsme. Il hissa le culte éthique de la beauté, propre de l’héritage latin antique, au-dessus des fausses valeurs de l’industrialisme et du matérialisme. Il se dressa contre le positivisme et proclama qu’il ne voulait plus entendre de « vérité » mais voulait, plus simplement, posséder un rêve. C’est en ces années de maturation que l’influence de Nietzsche se fit fortement sentir sur d’Annunzio : il en vint à prêcher l’avènement d’une aristocratie spirituelle, arme contre la morale bourgeoise, et à concentrer ses efforts pour faire advenir une ère nouvelle. Avant la première guerre mondiale, sa pensée avait influencé le mouvement futuriste mais le fondateur du futurisme, Tomaso Marinetti, considérait que d’Annunzio était un personnage appartenant au passé. Après avoir séjourné un certain temps en France, il revint en Italie en 1915, en suscitant un énorme intérêt et pour participer aux combats de la guerre. Il avait déjà 52 ans au moment où elle éclata mais cela ne l’empêcha pas de se porter volontaire pour commander une division de cavalerie et la mener au feu, contre les puissances centrales. Il acquis bien vite le statut de héros, notamment en lançant une attaque contre les tranchées ennemies, vêtu d’une longue cape flottante jetée sur ses épaules et armé seulement d’un pistolet. Autre geste héroïque qu’il convient de rappeler : il s’envola un jour, à bord d’un avion, pour lancer des tracts sur Vienne, ce qui lui permit d’obtenir la « médaille d’or », la plus haute décoration honorifique d’Italie.

 

Lors de la conférence préludant au Traité de Versailles en 1919, l’Italie exigea le port de Fiume. Mais le sort de la ville était scellé, semble-t-il. En Italie, un sentiment général prenait le dessus : celui de subir une « victoire mutilée », concept forgé par d’Annunzio lui-même. La situation était devenue explosive, d’autant plus que l’état de l’économie se détériorait considérablement, avec son cortège de millions de chômeurs et l’atmosphère prérévolutionnaire que cette misère impliquait.

 

Les Etats-Unis, la Grande-Bretagne et la France voulaient que Fiume fasse partie du nouvel Etat, né de Versailles : la Yougoslavie unitaire. Les alliés occidentaux occupent le port pour concrétiser leur volonté. En août 1919, les troupes italiennes sont contraintes de quitter la ville après quelques fusillades échangées avec des soldats français. Un petit groupe d’officiers, qui avaient dû quitter le port adriatique, s’est alors adressé à d’Annunzio, pour lui dire : « Nous l’avons juré : ou nous reprenons Fiume ou nous mourrons. Et que faites-vous pour Fiume ? ». Le 12 septembre 1919, pour répondre à ce défi, d’Annunzio, gravement malade, marche sur Fiume à la tête de deux mille légionnaires italiens, qui avaient déserté et s’étaient affublés de chemises noires ; leurs colonnes avancèrent en chantant « Giovinezza » et prirent la ville. Fiume était soudainement devenue le symbole de la liberté qui se dressait contre la lâcheté du temps. En fait, Fiume était devenue non seulement le symbole de la « victoire mutilée », qu’on essayait de réhabiliter, mais aussi le symbole de la « latinité ». En dehors de la ville, d’Annunzio rencontre le général italien Vittorio Emanuele Pittaluga, qui commandait les forces italiennes présentes devant la cité. Il donna l’ordre à d’Annunzio de faire demi-tour, mais le poète-soldat sortit son atout et lui montra fièrement ses médailles. Le général Pittaluga n’eut pas le cœur de faire tirer sur le héros. Ils entrèrent tous deux dans la ville sans qu’un seul coup de feu n’ait été tiré. Les alliés, abasourdis, furent contraints de quitter les lieux et d’Annunzio annonça  qu’il avait l’intention d’occuper la ville jusqu’à ce qu’elle soit annexée à l’Italie. Il prit le titre de « Commandante » et, quelques semaines plus tard, sept mille légionnaires supplémentaires et quatre cent marins vinrent renforcer ses effectifs.

 

Les légionnaires de d’Annunzio se prononçaient en faveur de la liberté des peuples opprimés et tournaient leurs regards vers les expériences du tout jeune régime soviétique. D’Annunzio entra également en contact avec Sean O’Kelly, le futur président de l’Irlande, qui représentait le « Sinn Fein » à Paris ; ensuite, avec des nationalistes égyptiens et avec les autorités soviétiques. Le 28 avril 1920, il met sur pied une « Ligue de Fiume » pour faire contrepoids à la « Société des Nations ». Vladimir Lénine citait d’Annunzio comme « l’un des rares révolutionnaires d’Italie », un compliment qu’il avait préalablement adressé à Mussolini. Ces faits nous montrent que les extrêmes se touchent effectivement, même si d’actuels bourgeois trotskisants ne l’admettront jamais.

 

La « Carta del Carnaro » : base de l’Etat Libre de Fiume

 

L’Etat Libre de Fiume reposait sur des idées proto-fascistes, sur des idées républicaines et démocratiques antiques et sur quelques formes d’anarcho-syndicalisme : en ce sens, il exprimait un éventail bigarré mais intéressant d’idées fortes, issues de trois sphères intellectuelles fort différentes. D’Annunzio et l’anarchiste national-syndicaliste Alceste de Ambris rédigèrent le 27 août 1920 la constitution de Fiume, intitulée « Carta del Carnero » ; elle hissait la musique au rang de principe cardinal de l’Etat. D’après Gabriele d’Annunzio, la musique est un langage rituel, disposant du pouvoir d’exalter les objectifs de l’humanité. Les idées développées dans cette « Carta del Carnero » étaient inspirées du syndicalisme, surtout de ses éléments corporatifs. Les principes d’autonomie, de production, de communauté et de corporatisme y étaient tous importants. Inspirés par l’antiquité, les libérateurs de Fiume firent de la Cité une république, avec un régent comme chef d’Etat, qui, comme sous la république romaine, devait diriger la Cité avec des pouvoirs dictatoriaux si l’époque était soumise à un danger particulièrement extraordinaire. Autre élément important : la décentralisation complète, afin de dégager le politique autant que possible du parlement et de le ramener sur la « piazza », sur la place publique, sur le forum, de façon à ce que les simples citoyens soient tous impliqués dans le fonctionnement de la politique de la cité.

 

Les méchantes langues diront que c’est là du populisme mais, en fait, cette disposition rappelait la démocratie antique où un droit civil positif incitait les citoyens à participer aux débats politiques. Le parlement ne recevait dans cette « Carta » qu’un rôle peu signifiant, tandis que neuf corporations, qui accueillaient l’ensemble des citoyens et étaient basées sur leurs activités économiques, étaient destinées à gouverner véritablement. On créa même une dixième corporation, pour souligner l’importance du facteur spirituel : « … elle sera réservée aux forces mystérieuses du progrès et de l’aventure. Elle sera une sorte d’offrande votive au génie de l’inconnu, à l’homme du futur, à l’idéalisation espérée du travail quotidien, à la libération de l’esprit de l’homme au-delà des efforts astreignants et de la sueur sanglante que nous connaissons aujourd’hui. Elle sera représentée dans le sanctuaire civique par une lampe allumée portant une ancienne inscription en toscan, datant de l’époque des communes, qui appelle à une vision idéale du travail humain ; « Fatica senza fatica » » (article 9, Carta del Carnero).

 

A côté de ces corporations, les citoyens et la commune se voient octroyer, eux aussi, un rôle important. Les citoyens obtiennent leurs droits politiques et civiques dès l’âge de 20 ans. Tous, hommes et femmes, reçoivent le droit de vote (1) et peuvent, par l’intermédiaire d’institutions législatives, lever l’impôt dans le but de mettre un terme à la lutte entre le travail et le capital. La commune, elle, était basée sur le « potere normativo », le « pouvoir normatif », c’est-à-dire le pouvoir de soumettre le législatif aux lois coutumières.

 

La marine de Fiume se nommait « les Uscocchi », d’après le nom de pirates disparus depuis longtemps et qui avaient vécu jadis dans les îles de l’Adriatique, pas très éloignées de Fiume, et prenaient pour proies les bateaux marchands vénitiens et ottomans. Les Uscocchi modernes ont permis ainsi à Fiume de s’emparer de quelques navires bien chargés et de s’assurer de la sorte une plus longue vie. Artistes, figures issues de la bohème littéraire, homosexuels, anarchistes, fuyards, dandies militaires et autres personnages hors du commun se rendirent par essaims entiers à Fiume.

 

Fiume fut une république bizarre et excentrique, que l’on peut aussi qualifier de « décadente ». Chaque matin, d’Annunzio y lisait ses poésies du haut de son balcon et, chaque soir, il organisait un concert, suivi d’un feu d’artifice. Dans la constitution, l’enseignement se voyait attribuer un grand rôle, avec usage fréquent de poésie, de littérature et de musique dans les classes (articles 50 à 54 de la « Carta del Carnero »). Cette légèreté et cette superficialité apparentes exprimaient surtout l’autonomie et la liberté, n’étaient pas signes de décadence. Cependant, les problèmes ne tardèrent pas à survenir : ils se sont manifestés par des divergences idéologiques. Au départ, d’Annunzio voulait rendre Fiume à l’Italie, avait agi pour que Rome annexe la ville portuaire adriatique mais ses compagnons légionnaires ne voyaient pas l’avenir de cette façon. D’Annunzio, tourmenté par le doute, a fini par renoncer, lui aussi, à son idée initiale.  L’un des corédacteurs de la constitution de Fiume, l’anarcho-syndicaliste Alceste de Ambris, plaidait pour une alliance entre les éléments fascistes de gauche et les révolutionnaires de gauche, mais elle ne se concrétisa jamais. L’objectif d’Alceste de Ambris était d’exporter la révolution de Fiume vers l’Italie toute entière mais, comme on le verra par la suite, Mussolini s’y opposait, tout en glissant petit à petit vers des options de droite. Cette mutation dans l’esprit de Mussolini, dira de Ambris, fera de lui « un instrument antirévolutionnaire aux mains de l’établissement bourgeois ».

 

La fin rapide de l’expérience insolite et originale que fut l’Etat Libre de Fiume vint au moment où Giolitti succéda à Nitti au poste de premier ministre en Italie. En novembre 1920, Giolitti signe à Rapallo un traité avec le nouvel Etat yougoslave. Ce traité fixe les frontières définitives entre les royaumes de Yougoslavie et d’Italie. Ce traité était à l’avantage de l’Italie : elle recevait l’Istrie, la région située à l’Est de la Vénétie ; Fiume devenait une ville-Etat indépendante. D’Annunzio, pour sa part, refusait de se retirer de Fiume ; Giolitti décida de faire donner l’armée pour le déloger. L’armée régulière prend la ville. Mussolini déclare : « maintenant l’épine enfoncée dans le flanc de Fiume est ôtée ; la rage de détruire, le feu de la destruction qui avait pris à Fiume n’a pas incendié l’Italie ni même le monde ». Lors des combats, commencés le 24 décembre 1920, il y eu 52 morts. Les trois mille hommes de d’Annunzio, après quatre jours de combat, se rendirent à l’armée régulière, forte de 20.000 hommes. L’Etat Libre de Fiume, qui fut éphémère, représente une révolte héroïque et passionnée contre la modération, incarnée par les autorités officielles de l’Italie. Même si l’on peut considérer que l’expérience de d’Annunzio était dès le départ condamnée à une fin prématurée, il faut dire que le souvenir de Fiume demeurera, comme un espoir général et comme source d’inspiration du futur fascisme.

 

D’Annunzio, effectivement, inspira Mussolini qui reprendra certains de ses emblèmes comme les chemises noires, oripeaux des combattants « arditi » de la première guerre mondiale, ces troupes de choc et d’élite de l’armée italienne ; Mussolini reprendra aussi une bonne part des us et de la terminologie de d’Annunzio. Mais tout cela n’était pas vraiment nouveau. Giuseppe Garibaldi, fondateur de l’Italie moderne, avait déclaré, en insistant, que les Italiens devaient s’habituer à l’idée de porter des chemises de couleur, car elles étaient le symbole de toutes les causes visant l’émancipation. Même le terme « fascio », d’où dérive le mot « fascisme » et qui signifie « groupe » ou « ligue », avait une longue tradition déjà dans la terminologie de la gauche italienne. En 1872, Garibaldi avait fondé un « fascio operaio », un « faisceau ouvrier », et, en 1891, apparaît un groupe d’extrême gauche qui a pour nom « Fascio dei Lavoratori », le « faisceau des travailleurs ». En dehors d’Italie, le mot « fascio » existe et exprime une idée de force, reprise par toutes sortes d’organisations politiques. A l’instar du futur fascisme, d’Annunzio exalte la violence et l’action héroïques et méprise le socialisme et le mode de vie bourgeois. Les marches de masse, dont la Marche sur Fiume fut le modèle initial, étaient considérées par les contemporains comme une réaction disciplinée, héroïque et collective contre le grand anonymat qu’imposait l’idéologie bourgeoise. La rébellion des jeunes hommes de gauche contre un socialisme perçu comme bourgeois et oppresseur, comme mou et antirévolutionnaire, était un trait commun aux légionnaires de Fiume et aux miliciens fascistes. Tous se réclamaient d’une puissance italienne, qui devait s’exprimer sur les plans militaire, culturel et sexuel.

 

Quelle leçon devons-nous tirer aujourd’hui de la Marche sur Fiume ? Tout d’abord, et c’est indubitablement la leçon principale qu’elle nous donne, c’est que la pensée politique ne peut pas, ne peut plus, se limiter aux concepts conteneurs conventionnels que sont le conservatisme, le progressisme, la gauche et la droite, etc. Toute pensée révolutionnaire s’exprime par la parole et par l’action, et ne met jamais d’eau dans son vin. Les compromis sont de simples instruments de la politique politicienne, axée sur les comptabilités électorales ; ils sont toutefois autant de coups de poignard dans les idéaux révolutionnaires. La prise de Fiume et la constitution qui s’ensuivit ont constitué le premier exemple de ville-Etat de facture utopique et poétique dans l’histoire contemporaine. Gabriele d’Annunzio était tout à la fois révolutionnaire, poète, guerrier, chef et philosophe. Fiume nous apprend a élargir notre propre horizon philosophique, lequel ne doit jamais se laisser aveugler par les compromis ni chavirer dans la médiocrité. Dans un régime où ont cohabité l’anarcho-syndicalisme, le proto-fascisme et l’idéal de la démocratie et de la république antiques, il n’y avait pas de place pour le bourgeoisisme passif, celui qui aime tant se laisser enchaîner par le conformisme moral et social et refuse d’emprunter une voie propre et héroïque :

 

Tutto fu ambito

e tutto fu tentato.

Ah perchè non è infinito

Come il desiderio, il potere umano ?

 

Cosi è finito il sogno fiumano.

NON DVCOR, DVCO !

Gridiamo ancora Noi,

per ricordare e per agire !

 

(Nous avons tout voulu,

nous avons tout tenté.

Et pourquoi donc le pouvoir humain

n’est-il pas aussi infini que le désir ?

 

C’est ainsi que finit le rêve de Fiume.

NON DVCOR, DVCO !

crions-nous encore,

pour nous souvenir et pour agir !) (2)

 

Peter VERHEYEN v/o Pjotr,

Scriptor NSV !’09-’10,

Stud. rer. hist..

( branding@nsv.be ).

 

Notes :

(1)     Deux instances constituent le pouvoir exécutif : un Conseil de Sénateurs auquel peuvent appartenir tous les citoyens qui disposent de leurs droits politiques. la deuxième instance est le Conseil des « Provisori », composé de soixante délégués, élus au suffrage universel et selon une représentation proportionnelle. Y siègent des ouvriers, des marins, des patrons d’entreprise, des techniciens, des enseignants, des étudiants et des représentants d’autres groupes professionnels.

 

(2) Texte d’une chanson intitulée « NON DVCOR, DVCO » du groupe italien « Spite Extreme Wing ».

 

lundi, 11 janvier 2010

1941: les Soviétiques préparaient la guerre

Soviet-troops-02.jpgArchives de Synergies Européennes - 1991

 

1941: les Soviétiques préparaient la guerre!

 

par le Dr. Heinz MAGENHEIMER

Professeur à l'Université de Salzbourg,

Membre de l'Académie de la Défense de Vienne

 

Pendant des décennies, l'attaque alle­man­­de contre l'Union Soviétique, com­men­cée le 22 juin 1941, a été considérée comme l'exemple par excellence d'une guerre d'exter­mi­na­tion, préparée depuis longtemps et justifiée par des arguments raciaux. L'histo­rio­gra­phie soviétique qualifiait en outre cette guer­re de «guerre de pillage» et ajoutait que l'Al­le­­magne avait trahi ses promesses, avait rompu la parole donnée. Jusqu'en 1989, le Pac­te Hitler/Staline des 23 et 24 août 1939 a­vait été interprété de cette fa­çon dans l'apo­logétique soviétique. L'observateur des évé­ne­ments était littéra­lement noyé sous un flot d'ar­guments qui vi­saient à étayer au moins deux thèses: 1) La signature du traité a em­pêché Moscou d'être impliqué dans les pre­miers événements de la guer­re européenne, qui aura ultérieure­ment comme victime prin­cipale l'URSS; 2) Le pouvoir soviétique a vu d'avance le plan des «impérialistes» et l'a contre­car­ré; il vi­sait à détourner l'armée al­le­mande vers l'Est. L'Union Soviétique au­rait ainsi été la victime, à l'été 1941, de sa fi­dé­lité à la lettre du pacte et de sa volonté de paix. Cette loyauté, l'URSS l'a payée cher et a failli être complètement détruite sur le plan militaire.

 

Des experts soviétiques réfutent l'interprétation officielle

 

Depuis 1989, cette vision de l'histoire con­tem­poraine a été largement réfutée. Des ex­perts soviétiques, dont V. Dachitchev, esti­ment désormais que le Pacte des 23 et 24 août 1939 a constitué une lourde erreur de la poli­tique étrangère soviétique (cf. Hans-Henning Schröder, Der Zweite Weltkrieg, Piper, Mün­chen, 1989). Bien sûr, on parle encore et tou­jours de la guerre germano-russe comme d'une «guerre d'anéantissement justifiée par une idéologie racialiste», notamment dans les écrits, y compris les derniers, de l'historien Andreas Hillgruber (cf. Zwei­fa­cher Untergang, 1986). Mais les préoccu­pa­tions qui dominent, actuellement, chez les spécialistes de l'histoire contempo­raine, sont celles qui concernent les mul­tiples fa­cet­tes du processus de décision: outre la volonté d'expansion de Hitler, on examine désor­mais la logique, certes subjec­tive, qui a fait que l'Allemagne a choisi la solution mili­taire pour règler le problème que constituait l'URSS dans le contexte stra­tégique du prin­temps 1941. On étudie ensuite ce qui opposait de façon irréconciliable les idéologies au pou­­voir en URSS et dans le Troisième Reich, tout en essayant de com­prendre quelles étaient les arrière-pensées de Staline en ce qui concerne l'Europe. Résultat de ces in­ves­ti­gations: on se de­mande si l'attaque alle­man­de n'a pas été fi­nalement une attaque pré­ventive, vu ce qui s'annonçait à moyen ou long terme. Ernst Topitsch est de cet avis de­puis longtemps et a étayé solidement sa thè­se dans Stalins Krieg (2ième éd., 1986). Quant à Viktor Souvorov, dans Le brise-glace  (Olivier Orban, Paris, 1990), il a illustré cette thèse à grand renfort de preuves.

 

Staline avait le temps pour lui

 

Cela n'aurait guère de sens de revenir sur la vieille querelle quant à savoir si l'attaque de la Wehrmacht a été dictée essentiellement par des considérations d'ordre stratégique et politique ou par des motivations d'ordre idéo­logique. Il me semble plus utile, d'un point de vue historique, de chercher à cerner la rai­son première et fondamentale qui a fait que l'état-major allemand s'est décidé à pas­ser à l'attaque. Cet état-major s'est dit, me semble-t-il, qu'attendre passivement rendait jour après jour le Reich plus dépendant de la politique de Staline; une telle dépendance aurait finalement créé des conditions défa­vorables pour l'Alle­magne dans sa guerre à l'Ouest et en Afrique. Hitler était bien cons­cient du risque énorme qu'il y avait à ouvrir un second front, à parier pour l'offensive: il l'a clairement fait savoir à ses généraux, dont la plupart étaient trop optimistes.

 

Les papiers de Joukov

 

Les historiens qui affirment que les motiva­tions idéologiques à connotations racistes ont été les plus déterminantes, sous-estiment trop souvent les préoccupations stratégiques; en effet, dès le début de l'automne 1940, la si­tuation, pour l'Allemagne, était alar­mante; l'état-major devait le reconnaître, si bien que son chef, le Général Halder crai­gnait, dès a­vril 1941, une attaque préventive des Sovié­ti­ques. Aujourd'hui, après qu'on ait publié les papiers du Maréchal Georgy Joukov et qu'on y ait découvert des docu­ments d'une im­por­tance capitale, non seu­lement on sait que l'Ar­mée Rouge s'était mise en branle, que ses manœuvres avaient un caractère offen­sif, surtout dans les quatre districts mili­tai­res de l'Ouest mais on sait également, d'a­près des sources attestées, que les autorités militaires soviétiques pré­voyaient dès la mi-mai 1941 une attaque pré­ventive limitée, au moins contre la Pologne centrale et la Haute-Silésie.

 

Staline a certes refusé ce plan, mais son exis­tence explique néanmoins pourquoi les Soviétiques ont massé six corps mé­ca­nisés sur des positions en saillie du front (le pre­mier échelon opérationnel sovié­ti­que comp­tait en tout et pour tout treize corps mécani­sés), ont aligné cinq corps aé­roportés, ont réaménagé les installa­tions d'un grand nom­bre de terrains d'a­viation pour bombar­diers et pour chas­seurs à proximité de la fron­tière et ont renoncé à renforcer la Ligne Staline, a­lors qu'elle aurait été excellente pour u­ne bonne défense stratégique du ter­ri­toire soviétique. Les papiers de Joukov nous permettent de comprendre pour­quoi les gran­des unités stationnées dans les régions frontalières n'ont pas reçu l'ordre de cons­trui­re un système défensif en profondeur mais, au contraire, ont été utilisées pour a­mé­liorer les réseaux routiers menant à la fron­tière. Ces indices, ainsi que bien d'au­tres, ont été mis en exergue récemment par des historiens ou des publicistes sovié­tiques, dont Vladimir Karpov. Sur base de ces plans d'opération, le chef de l'état-major général soviétique, Joukov, en accord avec le Minis­tre de la Défense, Timo­chen­ko, voulait attein­dre en trente jours la ligne Ostrolenka, Rive de la Narev, Lowicz, Lodz, Oppeln, Olmütz. Ensuite, Joukov prévoyait de re­tourner ses for­ces vers le Nord et d'attaquer et de défaire le centre des forces allemandes, ainsi que le groupe Nord des armées du Reich, massé en Prusse Orientale.

 

Je souligne ici que ce plan d'opérations ne signifie pas que les Soviétiques avaient défi­nitivement décidé de passer à l'offensive. L'exis­tence de ce plan ne constitue donc pas une preuve irréfutable des intentions offen­sives de Staline à l'été 1941. Mais ce plan nous permet d'expliquer bon nombre de pe­tits événements annexes: on sait, par exem­ple, que Staline a refusé de prendre en consi­dération les informations sérieuses qu'on lui communiquait quant à l'imminence d'une at­taque de la Wehrmacht au printemps 1941. Or il y a eu au moins 84 avertissements en ce sens (cf. Gordievski/Andrew, KGB, 1990). Com­me le prouvent les événe­ments de la nuit du 22 juin, Staline voulait éviter toute provocation; peu de temps avant que le feu des canons al­le­mands ne se mette à tonner au-dessus de la frontière soviétique, il a don­né ins­truction à l'ambassadeur d'URSS à Ber­lin, de s'enquérir des conditions qu'il fal­lait respec­ter pour que les Allemands se tien­nent tran­quilles (cf. Erich E. Som­mer, Das Memorandum, 1981).

 

Staline estime que

l'Armée Rouge n'est pas prête

 

Ce qui nous autorise à conclure que Staline cher­chait à gagner du temps, du moins jus­qu'au moment où le deuxième échelon stra­té­gique, composé de six armées (77 divi­sions), puisse quitter l'intérieur des terres rus­ses. Ce qui étaye également la thèse qui veut que Staline estimait que ses préparatifs offensifs, destinés à réaliser ses projets, n'é­taient pas encore suffisants. Quoi qu'il en soit, au début de la campagne, les Sovié­ti­ques alignaient à l'Ouest, réserves compri­ses, 177 divisions, renforcées par au moins 14.000 chars de combat, environ 34.000 ca­nons et obusiers et à peu près 5.450 avions d'attaque (61 divisions aériennes). Face à ces forces impressionnantes, la Wehrmacht n'a­li­gnait que 148 divisions, trois brigades, 3.580 chars de combat, 7.150 canons et envi­ron 2.700 avions d'attaque.

 

Cette faiblesse des forces allemandes et l'im­provisation dans l'équipement et l'orga­nisa­tion, permettent de soutenir la thèse que la décision d'ouvrir un front à l'Est ne décou­lait pas d'un «pro­gram­me» con­cocté depuis longtemps (cf. Hart­mut Schustereit, Vaban­que, 1988). Beau­coup d'indices semblent prou­ver que Sta­line esti­mait que le conflit ou­vert avec l'Allemagne était inéluctable. En effet, les avantages in­contestables que le Pac­te germano-soviétique offrait à Berlin (cf. Rolf Ahmann, Hitler-Stalin-Pakt 1939, 1989) n'avaient de valeur qu'aussi long­temps qu'ils facilitaient les opérations allemandes à l'Ouest.

 

C'est alors qu'un facteur a commencé à pren­dre du poids: en l'occurrence le fait que les deux camps percevaient une menace qui ne pouvait être éliminée que par des moyens militaires. Les ordres qui lancent déploie­ments ou opérations ne reflètent  —c'est con­nu—  que des jugements d'ordre poli­tique. C'est pourquoi l'observateur se trouve face à une situation historique où les deux prota­go­nistes ne réfléchissent plus qu'au moment opportun qui se présentera à eux pour dé­clen­cher l'attaque. Mais comme dans l'his­toi­re, il n'existe pas d'«inéluctabilité en soi», la clef pour com­prendre le déclenchement de l'«O­pé­ration Barbarossa» se trouve dans une bonne con­naissance de la façon dont les adversaires ont perçu et évalué la situation. De cette fa­çon seulement, l'historien peut «vi­vre ré­trospectivement et comprendre» (com­me le disait Max Weber), le processus de décision. On peut ainsi acquérir un ins­tru­ment pour évaluer et juger les options po­litiques et stra­tégiques qui se sont présentées à Berlin et à Moscou au cours des années 1940 et 1941. L'Allemagne tentait, en pres­tant un effort immense qu'elle voulait uni­que et définitif, de créer un imperium conti­nen­tal inatta­quable; l'URSS tentait de défen­dre à tout prix le rôle d'arbitre qu'elle jouait secrètement, officieusement, en Europe.

 

Dr. Heinz MAGENHEIMER.

(texte issu de Junge Freiheit, juin 1991; adresse: JF, Postfach 147, D-7801 Stegen/Freiburg). 

 

   

dimanche, 10 janvier 2010

Ende der Geschichtlichkeit

nolte_up.jpgEnde der Geschichtlichkeit

Ex: http://rezistant.blogsport.com/
Ich sehe in der Tat eine konkrete Gefahr: dass der völlig entfesselte und die ganze Welt durchherrschende "Kapitalismus" das geistige Vakuum, das er nach sich zieht, von einem "Antifaschismus" ausfüllen lässt, der die Geschichte ebenso amputiert und simplifiziert, wie das ökonomische System die Welt uniformiert. Aber solange eine solche Zukunft noch als Gefahr empfunden werden kann, ist es geboten, ihr entgegenzuarbeiten - nicht, um ein anderes und konkretes Bild der Zukunft durchzusetzen, sondern aus der Überzeugung heraus, dass die Selbstverständigung des Menschen über sich selbst des historischen Nachdenkens bedarf und weder von Computern vollzogen noch durch computerartige Simplismen ersetzt werden kann. So dürfte aus der Situationslosigkeit, die nie vollständig sein kann, eine neue Situationr resultieren, in der die Aneignung der Geschichte einen bedeutenden Stellenwert besitztt, gerade wenn geschichtliche Situationen in dem bisher geläufigen Sinne nicht mehr existieren sollten.

Ernst Nolte, Brief an François Furet vom 11. Dezember 1996, in: "Feindliche Nähe". Kommunismus und Faschismus im 20. Jahrhundert. Ein Briefwechsel, München 1998.

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La "Bulle d'or" est proclamée...

gold-bulle.jpg

 

10 janvier 1356: L’Empereur du Saint Empire Romain de la Nation Germanique, Charles IV,  proclame la “Bulle d’Or”, un édit impérial qui fixe les règles déterminant l’élection des rois germaniques et les droits des princes électeurs (Kurfürsten), sans prévoir un quelconque assentiment du Pape. Les électeurs sont au nombre de huit: les archevêques de Cologne, de Mayence et de Trêves, le roi de Bohème, le comte palatin du Rhin, le Duc de Saxe-Wittemberg, le margrave de Brandebourg.

 

 

samedi, 09 janvier 2010

Mort de l'unique survivant des deux bombardements atomiques sur le Japon

Mort de l’unique survivant des deux bombardements atomiques sur le Japon

Hiroshima

TOKYO(NOVOpress) – Les médias japonais ont annoncé le décès de l’unique personne à avoir miraculeusement survécu à la fois au bombardement de Hiroshima et à celui de Nagasaki. en août 1945.
Tsutomu Yamaguchi, âgé de 93 ans, est mort le 4 janvier 2010 d’un cancer de l’estomac.

La presse japonaise rappelle à cette occasion son extraordinaire histoire :

M. Yamaguchi se rendit en effet en visite d’affaires à Hiroshima le 6 août 1945, jour de l’attaque nucléaire américaine. Grièvement blessé, il passa une nuit à Hiroshima avant de revenir dans sa ville natale, Nagasaki, qui allait subir à son tour un bombardement atomique trois jours plus tard.

Les bombardements atomiques américains et leurs conséquences ont fait 140 000 morts à Hiroshima et 74 000 à Nagasaki. Ces deux bombardements n’avaient pas d’objectifs militaires mais visaient à briser le moral du peuple japonais pour précipiter sa capitulation.

[cc [1]] Novopress.info, 2010, Article libre de copie et diffusion sous réserve de mention de la source d’origine
[
http://fr.novopress. info [2]]


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vendredi, 08 janvier 2010

Catherine II prend la Crimée

crimee-1.jpg

 

8 janvier 1784 : Le Sultan ottoman est contraint de céder la Crimée à la Tsarine Catherine II. Celle-ci avait pour politique principale d’étendre la Russie vers le Sud, vers la Mer Noire et le monde grec. Elle avait tourné le dos à la politique russe antérieure, qui était de prendre la Baltique toute entière et d’affronter, pour y parvenir, le royaume de Suède et la Pologne. Catherine II tourne donc toutes ses forces vers le Sud. L’année précédente, elle avait protégé le khan de Crimée contre ses sujets révoltés, alors que ce khan était vassal de la Sublime Porte. Celle-ci est trop affaiblie pour réagir, et l’ambassadeur de France, Vergennes, dissuade le Sultan de riposter. Vergennes participe à une grande politique continentale : la France n’est plus l’ennemie de l’Autriche, car Louis XVI a épousé Marie-Antoinette ; et Joseph II, Empereur d’Autriche, qui a succédé en 1780 à sa mère Marie-Thérèse, souhaite la paix avec la France et avec la Russie. Implicitement, il existe à l’époque un Axe Paris/Vienne/Saint-Pétersbourg, donc une sorte de bloc eurasiatique ou eurosibérien avant la lettre. Quand Catherine II prend la Crimée, en rêvant d’y réaliser une synthèse russo-germano-grecque, l’Empereur Joseph II gagne pour l’Autriche le droit de faire circuler ses navires dans les Détroits. Contrairement à ce qui va se passer à la fin du 19ème siècle, après l’occupation de la Bosnie par les Autrichiens en 1878, il n’y avait pas, au départ, d’animosité russo-autrichienne, mais un franc partage des tâches, dans une harmonie européenne, que la révolution française, invention des services de Pitt le Jeune, va ruiner.

 

 

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8 janvier 1792: Traité de Jassy

catherine_the_great.jpg8 janvier 1792: Comme les souverains de Prusse et d’Autriche souhaitent mobiliser tous les efforts militaires de l’Europe pour vider le chancre de la révolution française, pure fabrication des services secrets de Pitt le Jeune et non soulèvement populaire et “démocratique” comme le veulent les légendes colportées depuis lors, les Autrichiens sont contraints d’abandonner toutes les conquêtes récentes qu’ils venaient de faire dans les Balkans. A cause des voyous parisiens stipendiés par l’Angleterre, la Russie se retrouve seule face aux Ottomans de Sélim III qui tentent de profiter de l’aubaine pour réaffirmer leur présence en Serbie. Le peuple serbe est l’une des premières victimes collectives du chancre sans-culottes, on l’oublie trop souvent, car les Autrichiens, pour faire face à une France dévoyée ont dû suspendre leur protection et ramener une bonne partie de leurs troupes à l’Ouest, où l’alliance implicite de la France et de l’Autriche, sous Louis XVI et Joseph II, les avait rendues inutiles. Néanmoins, l’armée de la Tsarine Catherine II parvient à écraser les troupes ottomanes à Mashin, le 4 avril 1791. Le Sultan ne peut plus formuler d’exigences. Il devra entériner le Traité de Jassy, signé le 8 janvier 1792.

 

Dans les clauses de ce Traité, les Ottomans acceptent l’annexion de la Crimée à la Russie et la suzerainté russe sur la Géorgie othodoxe, libérée du joug musulman. Le Dniestr devient la frontière entre les empires russe et ottoman. Cette extension russe permet aux Tsars de dominer la Mer Noire, ce qui leur vaudra l’inimitié tenace de l’Angleterre, une inimitié qui se concrétisera lors de la fameuse Guerre de Crimée (1853-1856), où la France sera entraînée. Ensuite, la présence russe sur le Dniestr pèse sur les “Principautés” danubiennes, la Moldavie et la Valachie, que Vienne entendait dominer afin de contrôler l’ensemble du cours du Danube, jusqu’à son delta et d’obtenir ainsi une fenêtre sur la Mer Noire. Le Traité de Jassy jette donc aussi les bases de l’inimitié entre la Russie et l’Autriche, qui compliquera considérablement la diplomatie du 19ème siècle et constituera l’un des motifs de la première guerre mondiale.

 

Si l’on jette un coup d’oeil sur la situation actuelle dans la région, nous constatons que les Etats-Unis ont repris en quelque sorte le rôle de la thalassocratie anglaise: ils sont les protecteurs de la Turquie, en dépit d’une mise en scène où celle-ci fait semblant de branler dans le manche et d’adopter, avec Davutolgu, une diplomatie autonome; en tant qu’héritiers de la politique pro-ottomane de l’Angleterre du 19ème siècle, ils veillent aussi à détacher la Crimée de la sphère d’influence moscovite, en pariant sur le contentieux russo-ukrainien et, aussi, à arracher la Géorgie orthodoxe à l’influence russe. Les Etats-Unis ont pour objectif de défaire les acquis du Traité de Jassy de 1792. Nous constatons également que la frontière sur le Dniestr constitue aujourd’hui aussi un enjeu, avec la proclamation de la  république pro-russe de Transnistrie, face à une Moldavie qui pourrait se joindre à la Roumanie et, ainsi, se voir inféodée à l’OTAN et à l’UE.

 

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mercredi, 06 janvier 2010

Démocratie américaine et dialectique de la liberté

estados-unidos.jpgArchives de SYNERGIES EUROPEENNES - 1990

Démocratie américaine et dialectique

de la liberté

à propos d'un livre de Gottfried Dietze

 

par Hans-Dietrich SANDER

Parmi les livres dignes d'intérêt récemment pa­rus, et soumis à la conspiration du silence, il y a l'ouvrage sur l'Amérique de Gottfried Dietze:

 

Gottfried Dietze, Amerikanische Demokratie — Wesen des praktischen Liberalismus,  Olzog Verlag, München, 1988, 297 S., DM 42.

 

Depuis longtemps déjà, l'auteur n'avait plus pu­blié d'articles dans la Frankfurter Allgemeine Zeitung  et dans Die Welt (Bonn). Il n'est plus membre de la Mount Pelerin Society.  Il s'en est retiré, parce qu'il ne lui a pas été permis de pro­noncer son discours sur Kant en langue alle­mande lors d'une diète de la dite société à Berlin! Mais personne en revanche n'a pu le traiter de «terroriste intellectuel». Gottfried Dietze est pro­fesseur ordinaire de «théorie comparée des pou­voirs» à la John Hopkins University de Baltimore, l'une des cinq universités les plus co­tées aux Etats-Unis (sa faculté occupe d'ailleurs la première place en son domaine). Ses travaux, il les publie en Allemagne chez J.C.B. Mohr (Paul Siebeck) et chez Duncker & Humblot, c'est-à-dire chez les meilleurs éditeurs de matières polito­logiques. La maison Olzog, qu'il a choisie pour éditer son livre sur l'Amérique, ouvrage destiné à un public plus vaste, ne suscite pas davantage les colères des professionnels hystériques qui enten­dent façonner l'opinion publique selon leurs seuls critères. La démocratie ouest-allemande vient manifestement d'atteindre un seuil critique, où, désormais, ceux qui prononcent des paroles libres, claires, transparentes, passent pour des excentriques. Et, «notre démocratie», pour re­prendre les mots de son Président Richard v. Weizsäcker, ne peut pas se permettre des excen­triques politiques.

 

Critique du libéralisme pur et réminiscences tocquevilliennes

 

Dietze passe depuis longtemps déjà pour un ex­centrique dans notre bonne république. Pour être exact, depuis que le Spiegel a découvert, jadis, qu'il servait de conseiller au candidat à la Présidence américaine Barry Goldwater, et cela, au moment où la guerre du Vietnam atteignait son point culminant. Toute évocation de son nom, à l'époque, suscitait la suspicion. Il a tenté de re­venir en Allemagne, en y postulant un poste uni­versitaire. Sans succès. Le dernier des grands théoriciens du libéralisme politique n'est pas le bienvenu dans la République fédérale, acquise pourtant aux principes du libéralisme. Cette si­tuation n'est pas incompréhensible. Elle découle, d'une part, du rapport même que Dietze entretient avec l'idéologie libérale et, d'autre part, de son engagement politique aux côtés de Goldwater. La modestie de Dietze est telle, qu'il n'a pas osé pa­raphraser Kant dans les sous-titres de ses ou­vrages majeurs, Reiner Liberalismus (Le libéra­lisme pur) et Amerikanische Demokratie (La dé­mocratie américaine). Au premier, il aurait parfai­tement pu donner le titre de Kritik des reinen Liberalismus  (Critique du libéralisme pur); au second, Kritik des praktischen Liberalismus  (Critique du libéralisme pratique). Il aurait ainsi imité le grand penseur de Königsberg, avec sa Critique de la raison pure  et sa Critique de la rai­son pratique.

 

Le titre du livre qui me préoccupe ici, Amerikanische Demokratie,  paraphrase pourtant un autre grand théoricien politique, Alexis de Tocqueville, auteur de La démocratie en Amérique. Mais Dietze adopte une perspective critique à l'endroit des idées de Tocqueville. Il cherche à donner d'autres définitions aux con­cepts. Contrairement à Tocqueville, qui, il y a 150 ans, voulait explorer l'essence de la démo­cratie à la lumière de la démocratie américaine, Dietze cerne la démocratie américaine en soi, qui, dans la forme qu'elle connaît aujourd'hui, n'existait pas encore vers 1830-40, sa transfor­mation radicale par Andrew Jackson n'en étant qu'à ses premiers balbutiements. La démocratie américaine, explique Dietze, est fondamentale­ment différente des autres démocraties, ce qui la rend précaire quand elle est imposée à d'autres pays.

 

La néomanie américaine

 

Dietze approche son sujet en analysant les phé­nomènes et les discours de la quotidienneté amé­ricaine, de la banalité quotidienne de l'American Way of Life, qui, soutenu par cette bonne cons­cience typique du «Nouveau Monde», se présente comme une poussée incessante vers la nouveauté (Drang nach dem Neuen), vers tout ce qui est nouveau. Le concept américain de liberté repose sur un fondement problématique: en l'occurrence sur la volonté d'être toujours prêt à réceptionner cette nouveauté. Ensuite, ce concept trouve son apogée dans la notion de Manifest Destiny, du destin et de la mission de l'Amérique, qui est d'apporter cette liberté à tous les autres peuples. Dans la foulée de ses possibilités illimitées, la démocratie américaine n'a pas créé une forme spécifique de libéralisme politique mais des va­riations libérales toujours changeantes.

 

Ce type de démocratie a très fortement marqué le peuple américain et, à l'inverse, le peuple a mar­qué la démocratie américaine. Les origines des Etats-Unis, faites d'émigrations et d'immigrations, se sont transformées en migra­tions et en vagabondages, en manifestations et en agitations. Le résultat: une absence permanente de racines, qui trouve un parallèle saisissant dans le monde juif toujours dé-localisé (ent-ortet). Cette absence de racines est la condition première de la symbiose actuellement dominante. Contrairement aux symbioses d'antan, cette symbiose actuelle ne présente pas une panoplie de négations qui se combinent utilement à des positions données, mais une gamme de négations qui s'imposent sur la scène publique en se créant du tort les unes aux autres.

 

Une pulsion jamais assouvie de liberté jouissive

 

Le pouvoir du peuple en Amérique oscille ainsi de la démocratie élitaire à la démocratie égalitaire, de la démocratie représentative à la démocratie di­recte, de la démocratie limitée à la démocratie il­limitée. Quelle vue d'ensemble cela donne-t-il? Celle d'un «pot-pourri dans le melting pot»; par «melting pot», nous n'entendons pas, ici, le seul mélange des races et des ethnies. Ce jeu chao­tique dérive précisément de cette pulsion inces­sante vers la nouveauté et se maintient par la force intrinsèque dégagée par cette pulsion. Il dérive des droits inaliénables à jouir de la triade life, li­berty and pursuit of happiness, d'une liberté toujours plus grande qui se mesure surtout à la possession de biens matériels et à leur jouissance. Dans une telle optique, le pays n'est rien, l'individu est tout.

 

Ce serait bien là le perpetuum mobile  d'un monde totalement immanent, si la pulsion de li­berté n'était pas pluri-signifiante et à strates mul­tiples. Dans son analyse, Gottfried Dietze déploie une dialectique de la liberté, où sa position vis-à-vis du libéralisme prend des formes socratiques. En effet, le livre, en de longs passages, se lit comme un dialogue, où chaque facette est oppo­sée à son contraire (son négatif), si bien qu'à la fin, on débouche sur des questions ouvertes.

 

La pulsion de liberté du libéralisme pur n'est pas seulement dirigée contre les tyrans: elle s'épuise dans la lutte interne de concurrences diverses aux frais des autres. Cela ne nous mène pas seule­ment à la lutte hobbesienne de tous contre tous, lutte où apparaîtrait juste la crainte de Hegel de voir l'homme considérer qu'une telle liberté au­torise et prône le vol, le meurtre et le désordre, mais aussi à une exploitation despotique de la mi­norité par la majorité, ce qui serait parfaitement conciliable avec le libéralisme, parce qu'il exige plus de liberté pour l'individu sans regard pour les autres.

 

La transposition de cette émancipation dans le domaine de la libido, comme on a pu l'observer au cours de ces dernières décennies en Amérique, fait que cette pulsion, sans regard pour autrui, qui poursuit sa quête insatiable de bonheur conduit à une «jungle sexuelle» que Hobbes n'avait pas pu imaginer.

 

Une symbiose entre

Jefferson et Freund

 

La permissivité engendrée par la lutte concurren­tielle outrancière et la multiplication des contacts sexuels, où la question du bien et du mal n'est plus posée, a forgé une symbiose entre Jefferson et Freud, dont les conséquences excessives ne peuvent surgir qu'en Amérique: «Les idées de Freud, telles qu'elles ont été prises en compte et perçues par les Américains, ont complété celles de Jefferson —du moins dans les interprétations qu'elles avaient acquises au cours du temps; elles les ont complétées de façon telle que le pensée li­bérale ancrée dans ce peuple s'est vue considéra­blement élargie, s'est apurée à l'extrême et s'est détachée de tout contexte axiologique».

 

Sur le plan de la liberté, nous apercevons très vite la différence essentielle entre Tocqueville et Dietze. Tocqueville voyait une démocratie améri­caine liée à l'idée d'égalité, suscitant une tendance générale et progressive à expulser toute notion de liberté. Dietze, au contraire, voit dans la liberté le pôle adverse de la démocratie et de l'égalité; et, pour lui, la liberté est tout aussi illusoire que la démocratie et l'égalité. Ce que Tocqueville crai­gnait jadis, soit de voir advenir une dictature égalitaire de la démocratie, n'a pas eu lieu: la pulsion de liberté s'y est sans cesse heurtée et en a émoussé les contours.

 

La pulsion de liberté, en tant que fondement ul­time du libéralisme à l'américaine, s'est toujours mise en travers de toutes les mesures de contrôle, d'équilibrage et de conservation. Sans ces me­sures, le libéralisme devient un mouvement anti-autoritaire. De ce fait, le despotisme de la majorité et le mouvement anti-autoritaire sont les extrêmes du libéralisme pratique, extrêmes qui se rejoi­gnent dans le libéralisme pur. Prenons deux exemples.

 

Une presse libre qui censure

ce qui ne lui plaît pas

 

Le premier montre comment l'expression «presse populaire» a acquis un sens ambigu. La presse, qui, à l'origine, était un instrument servant à presser des lettres sur du papier, a fini très vite par presser ses vues dans les cerveaux du peuple, à la manière la plus libérale qui soit: «L'ancienne liberté de presse, soit la liberté de la presse vis-à-vis de toute censure étatique, s'est transformée radicalement: elle est devenue liberté pour la presse de censurer, dénoncer et vilipender l'Etat, des citoyens individuels et des groupes précis de la société d'une manière éhontée, nuisant aux cibles infortunées et profitant à ceux qui usent et abusent de cette liberté. Cette situation s'observe dans tous les pays où la presse est libre mais elle est plus frappante encore aux Etats-Unis, écrit Dietze, le plus libéral des pays».

 

Le deuxième exemple nous montre les possibili­tés illimitées que laisse entrevoir le jeu de mot democracy/democrazy,  où le «pouvoir du peuple» apparaît comme l'«enfollement du peuple». Dietze souligne à plusieurs reprises que la quintessence de la démocratie américaine ne permet pas de percevoir cet «enfollement» comme une dégénérescence. Car la quintessence de la démocratie américaine, c'est que son libéralisme est réellement sans principes, dépourvu de tout point de référence éthique et de toute forme de responsabilité.

 

Les déceptions des Européens face à l'extrême versatilité américaine ne sont dès lors pas con­vaincantes: «Vu d'Amérique, vu du lieu où se bousculent toutes les variantes et variations du li­béralisme, il ne peut guère y avoir de déceptions nées du spectacle et du constat de comportements instables, du va-et-vient de la politique améri­caine. On ne peut être déçu que lorsque quelque chose évolue d'une façon autre, pire, que ce que l'on avait prévu. Mais, dans la démocratie améri­caine, qui se rapproche plus du libéralisme pur que n'importe quelle autre démocratie, on ne doit guère s'attendre à une politique constante. Toute constance y disparaît sous la pression des sou­haits et des désirs des individus et du peuple, mus par l'humeur du moment».

 

Anarchie et volonté de simplification outrancière

 

Au point culminant de ses analyses enjouées et sans pitié, qui rappellent celles de Machiavel, Dietze cite le poète irlandais William Butler Yeats: «Things fall apart; the center cannot hold; Mere anarchy is loosed upon the world»  («Les choses se disloquent; le centre ne maintient plus rien; une anarchie brute envahit le monde»). Pour Dietze, Yeats, dans cette phrase résume l'essence du libé­ralisme pur. Quand cette situation d'anarchie est atteinte, toute dialectique de liberté prend fin.

 

Dietze explique ensuite le processus dans son moteur intime et profond: «Bien des signes nous l'indiquent: la complexité croissante de la vie a éveillé une nostalgie du simple, du pur, avec des simplifications outrancières, si bien que la démo­cratie n'apparaît même plus comme une forme politique dans le sens où l'entendaient Locke ou Rousseau mais bien plutôt comme l'entendait Bakounine». La démocratie à l'américaine est le catalyseur de ce courant sous-jacent fondamental: «Sans doute, très probablement, les évolutions du Nouveau Monde, avec la pulsion constante de changement qui règne là-bas, ont accéléré le pro­cessus. Car l'américanisation du monde est un fait que l'on ne saurait ignorer en ce siècle, que les Américains déclarent être le leur, même si le rêve d'une pax americana  est passé depuis long­temps».

 

La question finale que pose le livre de Dietze est la suivante: «Qu'adviendra-t-il de l'Amérique et de l'américanisme? Il faut attendre. L'avenir nous le dira». Question rhétorique ou question ma­cabre? Dietze prononce des vérités que l'on n'aime guère entendre dans la République de Bonn, où l'on considère la démocratie à l'américaine comme une sotériologie, pour ne pas dire comme une vache sacrée, alors que cette dé­mocratie a été instaurée en RFA comme un sys­tème provisoire mais qu'on s'est habitué à consi­dérer comme définitif. Ce sont des vérités que l'on n'aime guère entendre parce qu'elles sonnent justes. On préfère se boucher les oreilles.

 

Après la révolution populaire allemande de RDA, qui fait apparaître la démocratie de Bonn pour ce qu'elle est vraiment, soit un système provisoire, et la remet en question, il n'est pourtant plus possible de se boucher les oreilles. Les Alle­mands devront, en opérant la synthèse de leurs divers systèmes politiques actuels, trouver une réponse adéquate, adaptée à leur histoire, pour dépasser le système de la démocratie à l'amé­ricaine.

 

Hans-Dietrich SANDER.

(recension parue dans Staatsbriefe 1/1990; adresse: Castel del Monte Verlag, Türkenstr. 57, D-8000 München 40).

 

 

 

mardi, 05 janvier 2010

Intégration ou isolement? Le dilemme de la Grande-Bretagne face au continent

Grande_Bretagne_1689.gifArchives de SYNERGIES EUROPEENNES - 1990

Intégration ou isolement?

Le dilemme de la Grande-Bretagne face au continent

 

par Gwyn DAVIES

 

Le samedi 24 février 1990 s'est tenu à Londres le colloque annuel de l'association IONA. Sous la présidence de Mr. Richard Lawson, plusieurs orateurs ont pris la parole: le Prof. Hrvoje Lorkovic, Robert Steuckers, Gwyn Davies et Michael Walker. Vouloir publiera chacune de ces interventions. Nous commençons par celle de Mr. Davies.

 

A une époque de grande fluidité, lorsque des changements soudains bouleversent les modèles devenus conventionnels de la vie quotidienne, il est souvent nécessaire de juguler nos impulsions immédiates qui nous poussent à participer à l'euphorie générale que suscite la nouveauté. Lorsque des concepts jadis tenus pour intan­gibles et immuables s'effritent à une vitesse in­soupçonnée, il est trop facile de se laisser porter par l'effervescence d'une liberté nouvelle. Mais l'homme rationnel doit maintenir une saine dis­tance devant l'immédiateté provocatrice du chan­gement, car le changement per se  n'est pas un but en soi mais un simple catalyseur qui fera ad­venir un but. Les actions prestées à des époques aussi décisives ne doivent pas s'arcbouter sur le rien de l'éphémère mais, au contraire, réfléchir des analyses solides, denses et raisonnées. Car lorsque les pratiques conventionnelles subissent une révision radicale, des décisions doivent être prises rapidement, des choix doivent être posés; dans ces moments où nous sommes confrontés à des dilemmes, les fonctions sélectives de notre intelligence doivent pouvoir travailler à bon es­cient. Si les choses doivent se passer ainsi dans la vie personnelle de chacun d'entre nous, il est d'autant plus impératif qu'elles empruntent la même voie temporisatrice, réfléchie, délibérée, lorsque la destinée des nations est en jeu.

 

Lorsque les constantes rigidifiées de l'orthodoxie politique acceptée par tous sont challengées voire balancées par-dessus bord, lorsque la Grundnorm (la norme fondamentale) du gouver­nement des Etats est minée et affaiblie derrière le paravent de la cohésion structurelle de l'ordre existant, les groupes sociaux qui souhaitent de­venir des pièces influantes sur l'échiquier trans­formé n'enregistreront des succès, ne réaliseront leurs ambitions, que s'ils identifient correctement puis résolvent les questions-clefs que soulève la réalité nouvelle.

 

Susciter de nouveaux foyers d’énergie en Europe

 

Les événements récents qui ont agité la partie orientale de l'Europe au cours de ces derniers mois, ont soulevé l'espoir de voir disparaître la division artificielle du continent. Les deux blocs, aux contours bien distincts, qui se sont regardés en chiens de faïence depuis une quarantaine d'années, abrités derrière leurs retranchements respectifs (d'ordre tant physique que philoso­phique), se sont débarrassé aujourd'hui de leur antipathie mutuelle, au point de permettre à leurs satellites de dévier de leurs orbites préétablies.

 

En effet, avec l'implosion imminente de l'une des composantes du binôme USA/URSS, les liens gravitationnels qui avaient préalablement entravé le mouvement des planètes satellisées pourraient très bientôt se dissoudre. Mais les lois de l'ordre naturel nous enseignent que dans tout univers nouvellement émergé, de nouveaux foyers d'énergie doivent rapidement jaillir du chaos pour imposer de la discipline dans le vide désordonné. En gardant ces lois à l'esprit, il est d'une importance vitale de bien évaluer les mo­dèles émergeants hors de ce bouillonnement de transformations et de forger, sur base de telles données, un concept global pour indiquer à la Grande-Bretagne la marche à suivre dans la dé­cennie tumultueuse qui s'ouvre devant nous.

 

Le contexte historique des relations euro-britanniques

 

Avant de vous livrer notre contribution à l'élaboration de ce concept, il m'apparaît néces­saire de passer en revue le contexte historique des relations euro-britanniques.

 

D'abord, il me semble opportun de constater que les Iles britanniques n'ont pas eu la moindre in­fluence sur la scène européenne avant la conquête normande. L'installation par la force d'une aris­tocratie étrangère a conduit l'Angleterre à partici­per activement aux rivalités et machinations des dynasties de l'Occident chrétien et, plus particu­lièrement, à la longue lutte d'hégémonie avec les Capétiens de France. Le rêve angevin d'un Etat anglo-français faillit réussir après le mariage d'Henri II avec Eléonore d'Aquitaine mais le projet s'enlisa dans une orgie de luttes fratri­cides. Après l'échec de cette union, le Royaume d'Angleterre n'a plus eu la possibilité de jouer un rôle déterminant sur la scène politique euro­péenne et les Français affrontèrent seuls les fai­blesses du Saint Empire et les prétentions fragiles des Hohenstaufen.

 

Dès le début du XIIIième siècle, la Couronne anglaise ne s'engagea plus qu'à la périphérie de l'arène européenne en jouant le rôle d'un agent interventionniste. Beaucoup, sans doute, ne se­ront pas d'accord avec mon affirmation et cite­ront, pour la réfuter, les triomphes d'Edouard III et de Henri V en France et la grandiose participa­tion du Prince Noir dans la querelle pour la suc­cession au trône de Castille. Il n'en demeure pas moins vrai que, malgré les épisodes héroïques de Crécy, Poitiers, Navarette et Azincourt, l'Etat anglais fut incapable de transformer ses succès tactiques en gains stratégiques permanents.

 

Avec le début de la Guerre des Deux Roses (entre les partis de York et de Lancaster), la Guerre de Cent Ans touchait à sa fin et le conflit interne, très sanglant, qui se déroula sur le sol anglais, empêcha toute déviation des forces na­tionales vers des objectifs étrangers.

 

Ce ne fut pas avant le règne de Henri VIII que l'appétit pour les engagements transnationaux revint à la charge, aiguillonné par le tort causé au commerce de la laine flamande par la rivalité entre les maisons de Valois et de Habsbourg. L'intervention théâtrale et sans conséquence du Roi Henri peut être considérée comme la dernière expression de l'ancienne doctrine de l'absolutisme monarchique. Ses royaux succes­seurs ne purent plus se payer le luxe de traiter la politique étrangère comme un instrument au ser­vice de leurs ambitions personnelles.

 

L’ère impériale commence

avec Elizabeth Ière

 

L'ère élizabéthaine ouvrait un âge nouveau. La philosophie du temps s'accomodait parfaitement aux exigences du commerce, dont les demandes pressantes annulaient tous les autres impératifs qui tentaient de s'imposer à la Cour. Le com­merce devint ainsi le premier moteur de l'action royale. La Couronne répondit au défi écono­mique en élargissant ses perspectives et en adoptant une vision impériale, reflet de sa propre gloire et de l'agitation vociférante des princes marchands dont les fortunes aidèrent à asseoir l'ordre intérieur.

 

L'hégémonie monolithique des Habsbourgs d'Espagne sur le commerce avec l'Orient créa un goulot d'étranglement et obligea les négociants britanniques à chercher d'autres voies de com­munication; la royauté marqua son accord tacite pour l'organisation de telles expéditions; des compagnies à participation se mirent à proliférer, tirant profit des découvertes et de leur exploita­tion. Les bénéfices engrangés grâce au trafic d'esclaves et à la piraterie frappant les posses­sions espagnoles dans le Nouveau Monde ont conféré une légitimité officielle à l'idéologie ex­pansioniste. Et comme les raiders et les mar­chands avaient besoin de bases et que les bases demandaient à être défendues, l'Angleterre éla­bora une stratégie coloniale pour protéger et fournir en matériaux divers ses postes d'outre-mer. L'existence même de ces dépendances lointaines postulait l'inévitable développement de colonies, car colons, soldats et artisans débar­quaient sans cesse dans les comptoirs initiaux, processus qui assurait la promotion et l'expansion du commerce.

 

La protection des routes commerciales conduisit l'Angleterre à mener des guerres successives contre les puissances continentales, la Hollande, la France et l'Espagne. Ces guerres induisirent à leur tour la politique de Balance of Power (équilibre de puissance), qui atteindra son abo­minable apex dans les désastres humains de la première guerre mondiale.

 

En résumé, l'approche doctrinale des Britanniques vis-à-vis des querelles continentales était la suivante: soutien politique et militaire au parti ou à l'alliance dont la victoire empêcherait la création d'un bloc unitaire hostile disposant de suffisamment de ressources pour priver l'Etat britannique de l'oxygène du commerce. Les ré­sultats engrangés par ce calcul astucieux ont été énormes; il suffit de se remémorer les triomphes britanniques à la suite de la Guerre de Succession d'Espagne (1701-14) et de la Guerre de Sept Ans (1756-63). A la fin de ce conflit, le continent nord-américain était devenu chasse gardée de la Grande-Bretagne et sa suprématie maritime pou­vait faire face à tous les défis.

 

Arrivé au sommet de sa puissance, le régime des rois hannovriens oublia les prudences d'antan et poursuivit les projets d'outre-mer dans le plus parfait isolement. Mais cet oubli de la politique européenne traditionnelle coûta très cher; il en­traîna la perte des treize colonies américaines re­belles, soutenues par ses alliés européens, trop heureux de porter des coups durs à la vulnérable Albion.

 

La clef de la suprématie britannique: le système des coalitions

 

Mais les leçons de la défaite américaine ont été rapidement assimilées. Les guerres de la Révolution et de l'Empire offrirent l'occasion de remettre en jeu les règles du système des coali­tions. Tandis que les alliés de l'Angleterre rece­vaient de considérables subventions et affron­taient les Français sur terre, les Britanniques agissaient sur mer avec brio, contrôlaient les voies de communication maritimes et purent ainsi survivre au blocus continental napoléonien, fermé au commerce britannique, et à la défaite de toutes les puissances européennes devant les ar­mées de l'Empereur corse.

 

Grande-Bretagne-map.jpgEnsuite, après l'effondrement des rêves bona­partistes de conquête de l'Orient consécutif à la bataille perdue du Nil, les Britanniques purent débloquer des ressources considérables pour as­seoir leur domination aux Indes et s'emparer de colonies étrangères dont le site détenait une im­portance stratégique. Au Congrès de Vienne en 1815, c'est un second Empire britannique, fer­mement établi, qui se présentait face aux autres puissances européennes.

 

Dès le début du XIXième siècle, une destinée impériale prenait son envol et allait occuper toutes les imaginations britanniques pendant près d'un siècle. Les troubles intérieurs qui agitaient les puissances rivales permirent à cette destinée de se déployer sans opposition. L'Europe perdait tout intérêt aux yeux des Anglais. J'en veux pour preuves les abandons successifs d'atouts straté­giques en Europe continentale: la dissolution de l'union avec le Royaume du Hannovre en 1837 et, plus tard, l'abandon d'Héligoland pour obte­nir des réajustements de frontière en Afrique orientale.

 

Les Indes: pièce centrale de l’Empire britannique

 

L'ère de la Splendid Isolation  commençait et les seules menaces qui étaient prises en compte, étaient celles qui mettaient l'Empire en danger, et plus particulièrement les Indes. De là, le souci quasi hystérique qui s'emparait des milieux dé­cisionnaires londoniens lorsque la fameuse «question d'Orient» faisait surface et l'inquiétude qui les tourmentait face à l'expansionisme des Tsars en Asie Centrale. Avec toutes les res­sources de ses vastes domaines d'outre-mer, la Grande-Bretagne se croyait à l'abri de toute at­taque directe et les paroles de Joseph Chamberlain, prononcées en janvier 1902, sont l'écho de cette confiance: «Nous sommes le peuple d'un grand Empire... Nous sommes la nation la plus haïe du monde mais aussi la plus aimée... Nous avons le sentiment de ne pouvoir compter que sur nous-mêmes et c'est pourquoi j'insiste en disant que c'est le devoir de tout homme politique britannique et que c'est le de­voir du peuple britannique de ne compter que sur eux-mêmes, comme le firent nos ancêtres. Je dis bien que nous sommes seuls, oui, que nous sommes dans une splendid isolation, entourés par les peuples de notre sang».

 

Mais au moment même où ces paroles étaient prononcées, les réalités politiques du jour heur­taient de plein fouet cette arrogance. L'alliance anglo-japonaise de 1902 marquait une limite dans le déploiement de la politique étrangère britan­nique: Londres était obligée d'abandonner les «formules obligatoires et les superstitions vieil­lottes» (comme l'affirma Lansdowne à la Chambre des Lords), c'est-à-dire ne plus consi­dérer l'isolement comme désirable et adopter à la place une approche plus active de la scène inter­nationale, avec un engagement limité auprès de certaines puissances pour des objectifs spéci­fiques.

 

L'Allemagne wilhelmienne, aveuglée par les possibilités d'un destin impérial propre, renia, à cette époque, les principes de la Realpolitik, en rejetant toutes les offres d'alliance britanniques. La conséquence inévitable de ce refus fut le rap­prochement anglo-français, avec l'Entente Cordiale de 1904, impliquant la résolution à l'amiable des querelles coloniales qui, jusqu'alors, avaient envenimé les relations entre les deux puissances occidentales. Cette amitié nouvelle fut encore renforcée par les crises suc­cessives au Maroc et par la «conciliation des inté­rêts» entre Russes et Britanniques au détriment de la Perse.

 

La polarisation en Europe était désormais un fait et l'équilibre savamment mis au point par Bismarck pour éviter une tragédie fatale fut re­misé au placard et tous se précipitèrent avec une criminelle insouciance vers la destruction mu­tuelle. L'inutile catastrophe que fut la première guerre mondiale blessa et mutila l'Europe au point que même les puissances victorieuses en sortirent exsangues et épuisées par leur victoire à la Pyrrhus. Non seulement ce conflit inutile sema les graines de misères futures mais tous les pro­tagonistes furent désormais exposés aux usurpa­tions extra-européennes. Les bénéficiaires réels des carnages de la Somme et de l'Isonzo, de Verdun et de Tannenberg, furent des puissances observatrices et opportunistes, des belligérants prudents, comme le Japon et les Etats-Unis. Par le sacrifice de ses soldats dans la Forêt d'Argonne, les Etats-Unis, par le droit du sang versé, demandèrent à siéger à la Conférence de Versailles. Pour la première fois, une ombre transatlantique voilait un soleil européen, pâle et malade. La puissance américaine n'était encore qu'au stade de l'enfance et, bien que ses mar­chands avaient exploité à fond les opportunités laissées par les Européens occupés à s'entre-dé­chirer et avaient systématiquement braconné les anciens marchés réservés de l'Europe sur les autres continents, de vastes zones du globe res­taient à l'abri de la pénétration américaine grâce au protectionnisme colonial.

 

Le premier après-guerre

 

Durant ces années cruciales du premier après-guerre, quand la marée montante des nationa­lismes envahissait les débris d'anciens empires continentaux, la Grande-Bretagne quitta, dépitée, le théâtre européen, pour se vautrer une nouvelle fois dans les délices nostalgiques de sa gloire impériale d'antan. Mais la puissance de l'Empire s'était ternie dès les années 90 du siècle passé, lorsque le principe du Two Power Standard  (équilibre des forces entre, d'une part, la Grande-Bretagne, et, d'autre part, les deux na­tions les plus puissantes du continent) ne s'appliquait plus qu'à la flotte. Dans les années 30, qu'en était-il de ce tigre de papier? N'était-ce plus qu'illusion?

 

Tandis que les Français cherchaient à contrer une Allemagne renaissante en forgeant un jeu d'alliances complexes avec des Etats est-euro­péens et balkaniques, les Britanniques restaient stupidement aveugles. La politique étrangère du gouvernement national-socialiste allemand fonc­tionnait à l'aide du Führerprinzip. Les signes avant-coureurs d'un désastre imminent étaient parfaitement perceptibles. Mais un malaise débili­tant paralysait les ministères britanniques suc­cessifs. La crise tchécoslovaque demeurait, pour ces diplomates, «une querelle dans un pays loin­tain, entre des peuples dont nous ne savons rien». L'arrogance et l'ignorance venaient d'atteindre leur apogée.

 

L'incapacité de Neville Chamberlain à saisir le projet hitlérien dans sa totalité apparaît à l'évidence dans les garanties aussi pieuses que sans valeur que son gouvernement accorda à toute une série d'Etats est-européens instables. Ces gestes vains ne firent rien pour arrêter les ambitions germaniques et ne servirent qu'à en­traîner la Grande-Bretagne dans une guerre où la victoire était impossible et la défaite inévitable.

 

Si la première guerre mondiale avait permis aux Etats-Unis d'entrer dans un club d'élite de «courtiers de puissance» internationaux, la se­conde leur permit d'assumer simultanément les rôles de Président et de trésorier. A la Grande-Bretagne, il ne restait plus qu'à devenir le secré­taire scrupuleux, qui enregistre et annonce les motions décidées par le patron-contrôleur.

 

Les buts de guerre des Etats-Unis

 

Les Etats-Unis ne sont pas entrés dans le conflit à son début, animés par une ferveur libérale, par le feu d'une croisade. Ils sont entrés en guerre à contre-cœur, contraints d'agir de la sorte par une agression japonaise délibérée. Mais dès que leurs forces pesèrent dans la balance, les Etats-Unis décidèrent que leurs sacrifices pour la cause de la liberté ne seraient pas si vite oubliés et que le monde devrait leur en savoir gré. Le prix exigé par les Américains pour la sauvegarde de l'Europe était élevé: c'était le remodelage du Vieux Continent ou, du moins, de sa portion dite «libre». L'Europe devait être à l'image de ses li­bérateurs et le Plan Marshall était l'instrument destiné à provoquer la métamorphose.

 

Il n'est guère surprenant que les Américains aient largement réussi dans la tâche monumentale qu'ils s'étaient assignée, à savoir transformer l'Europe sur les plans culturel et économique. Le Vieux Continent, ébranlé, a été obligé d'embrasser la main tendue qui offrait les moyens de la reconstruction, quelqu'aient d'ailleurs été ces moyens. Les Etats-Unis utilisè­rent l'aide alimentaire et les transfusions de dol­lars pour reconstituer les économies des pays tombés dans leur sphère d'influence. Les Soviétiques utilisèrent, quant à eux, des moyens nettement plus frustes: l'Armée Rouge comme élément de coercition et la mobilisation en masse des forces de travail. Quoi qu'il en soit, l'assistance américaine précipita les bénéficiaires dans un réseau étroit de dépendance économique. Par leur «générosité» magnanime, les Etats-Unis s'assurèrent la domination de leur zone de comptoirs à l'Ouest de l'Elbe pendant quelque deux décennies après la fin de la guerre.

 

Si tel était le magnifique butin ramassé par les Américains, que restait-il aux Britanniques, si­non les fruits amères d'une défaite réelle mais non formelle? Les années d'austérité qui s'étendirent jusqu'à la fin des années 50 ternirent la «victoire» et mirent cruellement en exergue le coût de la guerre. L'Empire se désagrégea lente­ment, malgré la conviction têtue que la nation britannique restait un arbitre dans les affaires du monde. Cette illusion fit que les Britanniques se préoccupèrent d'une stratégie globale, au détri­ment d'une stratégie européenne. L'énorme charge des budgets militaires, due à cette volonté de garder une position en fait intenable, retarda la restructuration économique de la métropole, ce qui provoqua la chute de la livre sterling, devant un dollar qui ne cessait de monter.

 

Et malgré le désir de préserver le statut de super-puissance pour la Grande-Bretagne, la politique des gouvernements successifs ne put nullement ôter aux observateurs objectifs l'impression que notre pays n'était guère plus qu'un pion de l'Amérique. L'opération de Suez, qui sera un fiasco, fut lancée par l'état-major britannique malgré l'opposition de Washington. La réaction négative du State Department suffit à arrêter pré­maturément l'opération, ce qui contribua à aigrir les relations franco-britanniques pendant toutes les années 60. La Grande-Bretagne battit sa coulpe et ne tenta plus aucune intervention unila­térale sans recevoir au préalable l'imprimatur  de son «allié» d'Outre-Atlantique.

 

Les «special relationships»

 

Les fameuses special relationships,  dont on parle si souvent, sont effectivement spéciales, car quel Etat souverain délaisse volontairement ses intérêts légitimes pour satisfaire les exigences stratégiques d'un partenaire soi-disant égal? Le mythe de la dissuasion nucléaire indépendante de la Grande-Bretagne montre le véritable visage de ces «relations spéciales»: car sans la livraison par les Etats-Unis des fusées lanceuses, sans leur coopération dans la conception des bombes, sans leurs matériaux nucléaires, sans les facilités qu'ils accordent pour les essais, sans leurs plate­formes de lancement, sans leurs systèmes de navigation et sans leurs informations quant aux objectifs, où résiderait donc la crédibilité de l'arme nucléaire anglaise?

 

Un tel degré de dépendance à l'endroit de la technologie militaire américaine fait qu'un flux continu de concessions part de Londres pour aboutir à Washington: cela va des arrangements particuliers qui permettent aux forces américaines d'utiliser des bases britanniques d'outre-mer  —ce qui réduit à néant les discours pieux sur l'auto-détermination—  jusqu'aux droits de dé­collage et de survol pour les appareils de l'USAF en route pour attaquer des Etats tiers, sans que le gouvernement britannique ne soit mis au courant! Toutes ces concessions font que les Européens perçoivent de plus en plus souvent la Grande-Bretagne comme un simple pion dans la politique américaine; la promptitude empressée de nos politiciens qui obéissent aux moindres lubies du Pentagone signale qu'ils accordent une pleine confiance aux requêtes de Washington.

 

L'affaire de Suez, au moins, a prouvé la fragilité de l'édifice impérial. La course au désengage­ment qui s'ensuivit conduisit à accorder l'indépendance tant aux colonies qui la désiraient qu'à celles qui ne la désiraient pas. Le «rôle glo­bal» du Royaume-Uni ne se justifiait plus, ne méritait plus les soucis et l'attention qu'on lui avait accordé dans le passé. Pendant ce temps, la situation changeait en Europe.

 

Le défi du Traité de Rome

 

En 1957, les Six signent le Traité de Rome et mettent ainsi sur pied deux corps supra-natio­naux, la CEE et l'EURATOM, destinés à com­pléter la CECA déjà existante. Le but déclaré de ces organisations, c'était de favoriser une plus grande unité entre les Etats participants par l'harmonisation des lois et par une libéralisation des régimes commerciaux. Inutile de préciser que ces changements ne suscitèrent que fort peu d'enthousiasme en Grande-Bretagne; les Traités furent ratifiés avant le discours de Macmillan (Wind of Change),  quand le Royaume-Uni se laissait encore bercer par la chimère de la Commonwealth Preference  (La préférence au sein du Commonwealth). Mais l'institution de tarifs douaniers communs par les Etats membres de la CEE frappait les marchandises d'importation venues de l'extérieur. Il fallait ré­pondre à ce défi et c'est ainsi que le RU devint l'un des principaux signataires du Traité de Stockholm de 1959, établissant l'AELE (Association Européenne du Libre Echange; EFTA en anglais). Cette Association fut créée comme un simple mécanisme destiné à faciliter le commerce et n'avait pas d'objectifs en politique extérieure allant au-delà des buts purement mer­cantilistes.

 

Il apparut très vite que l'adhésion à l'AELE/EFTA n'était pas un substitut adéquat à la pleine adhésion à la CEE. Rapidement, les re­présentants des intérêts commerciaux de la Grande-Bretagne exercèrent une pression cons­tante sur le gouvernement, afin qu'il leur garan­tisse un accès préférentiel aux marchés plus lu­cratifs, c'est-à-dire qu'il demande la pleine ad­hésion du RU à la CEE. Macmillan s'exécuta et la première demande britannique fut soumise en juillet 1961, pour être finalement rejetée par De Gaulle en 1963, à la suite de longues négocia­tions inutiles. L'opposition française n'empêcha pas qu'une seconde demande fut formulée en 1967. L'amertume laissée par l'affaire de Suez était passée. Et la Grande-Bretagne entra finale­ment dans la Communauté le 1 janvier 1973, en même temps que l'Irlande et le Danemark. Un ré­férendum en 1975 donna des résultats en faveur de l'adhésion: 67% des votants ayant émis un avis favorable. Les rapports ultérieurs du RU avec la CEE furent souvent turbulents et diffi­ciles, ce qui trahit la profonde ambiguïté des atti­tudes britanniques à l'égard des principes consti­tutifs de l'eurocentrisme.

 

La Grande-Bretagne reste en marge de l’Europe

 

A tort ou à raison, la Grande-Bretagne se perçoit toujours comme une nation à part, jouissant d'un lien particulier, bien que souvent ambigu, avec les pays associés au Commonwealth, lesquels forment un monde où les affinités historiques ac­quièrent fréquemment plus d'importance que la solidarité interne.

 

L'influence pernicieuse des «relations spéciales» freine le développement d'une approche plus eu­rocentrée des relations internationales. Lorsque les intérêts militaires américains exigent que les politiques nationales de Londres et de Washington soient parallèles, comment cela peut-il être possible, comment la collaboration RU/USA peut-elle s'avérer rentable, si la Grande-Bretagne participe activement à un sys­tème protectionniste eurocentré? Il vaudrait la peine de noter le nombre de fois où le gouverne­ment britannique a résisté aux initiatives commu­nautaires parce qu'elles offusqueraient inutile­ment Washington et provoqueraient une «guerre commerciale» soi-disant au détriment de tous.

 

De plus, malgré que la Grande-Bretagne ait ac­cepté l'Acte Unique Européen, dont le premier article déclare que «les communautés euro­péennes et que la coopération politique euro­péenne auront pour objectif de contribuer en­semble à faire des progrès concrets en direction de l'unité européenne», Londres ne respecte que formellement ces aspirations. Tout ce qui va au-delà des paramètres de pure coopération écono­mique est perçu d'un très mauvais oeil à Westminster et les privilèges locaux et étriqués de la Grande-Bretagne sont défendus fanatique­ment, bec et ongles.

 

Pareilles équivoques ne donnent nullement con­fiance aux autres Européens; la crédibilité de la Grande-Bretagne est ruinée. De plus en plus de voix réclament la construction d'une Europe à deux vitesses avec, d'une part, les Etats récalci­trants relégués à un étage inférieur, de façon à permettre aux éléments plus progressistes de poursuivre le rêve de l'unité sans trop d'entraves. Tandis que la Grande-Bretagne croupit, asservie, sous le régime thatchérien, il semble inconcevable qu'une convergence réelle puisse un jour avoir lieu entre les partenaires eu­ropéens.

 

Alors que notre gouvernement proclame à grands cris l'importance du progrès scientifique et tech­nologique, la contribution britannique à l'Agence Spatiale Européenne est incroyablement basse. Alors que notre gouvernement se déclare le dé­fenseur impavide de la livre sterling, il refuse de participer au mécanisme de stabilisation qu'est le serpent monétaire européen. Voilà qui est abso­lument déconcertant. Si des objectifs éminement conservateurs comme ceux-là ne sont même pas activement poursuivis, pourquoi nous étonne­rions-nous que le gouvernement de Madame Thatcher s'oppose implacablement à l'augmentation des droits des travailleurs grâce à une nouvelle Charte sociale?

 

Dans tous ses domaines, le RU exerce ses préro­gatives pour bloquer et retarder les résolutions de la Communauté et pour satisfaire ses propres objectifs, en fin de compte négatifs pour le salut du continent. Si cette opposition s'appuyait sur une critique tranchante des principes mécanicistes et bureaucratiques qui sous-tendent le processus d'unification européenne porté par les institutions communautaires, la position britannique jouirait d'un certain capital de sympathie. Mais, malheu­reusement, cette hostilité ne consiste pas en une censure permanente et constructive du modus operandi;  au contraire, elle présente toutes les caractéristiques d'un nombrilisme malsain et per­vers. En effet, cet égoïsme étroit, justifié par l'«intérêt national», nous oblige à nous demander si le RU doit demeurer associé au processus d'unification européenne, tant que la seule justi­fication qu'il évoque pour son engagement, re­pose sur la base douteuse de l'expédiant écono­mique.

 

Une orientation européenne sans arrière-pensées pour la Grande-Bretagne

 

Or c'est précisément aujourd'hui, en ces jours décisifs, dans le tourbillon de changements qui balaye ce dualisme moribond auquel nous de­vons la division de notre continent, que les têtes pensantes en Grande-Bretagne doivent se mobili­ser pour construire le futur de l'Europe. Ces têtes pensantes doivent ignorer les événements péri­phériques de l'Afrique du Sud et de Hong Kong, montés en épingle pour les distraire. Ce sont des soucis résiduels, hérité d'un Empire qui est bel et bien mort aujourd'hui. Le seul défi actuel con­siste, pour nous, à définir quelles relations le RU entretiendra avec l'Europe. Cette question cru­ciale nous conduit à un dilemme tranché. En ef­fet, deux voies, qui s'excluent l'une l'autre, s'offrent à notre choix: celle de l'isolement et celle de l'intégration.

 

La première de ces voies ne demande pas un ef­fort particulier de lucidité car la politique actuelle de la Grande-Bretagne accentue déjà la tendance au désengagement en Europe. Cependant, il nous faudra bien mettre en évidence les dangers inhé­rents à ce retrait.

 

Un exemple: combien de temps le programme Inward Investment (Investissement intérieur), tant vanté par Madame Thatcher, survivra-t-il dans un RU découplé? Après tout, le rôle de Cheval de Troie pour les industries japonaise et américaine, que joue notre pays, n'est possible que parce que les investisseurs nippons et yankee considèrent le RU comme une tête de pont vers la CEE, idéale pour les opérations «tourne-vis». Ces opérations seraient rapidement évacuées ail­leurs si disparaissaient les opportunités de péné­trer le marché européen dans sa totalité.

 

Certes, les conséquences économiques d'un repli sur soi seraient catastrophiques. La menace qui pèse sur nous est toutefois plus terrible encore si on l'envisage d'un point de vue plus large. Si le RU prend ses distances par rapport à l'Europe, sans plus avoir d'ancrage de sécurité dans un Empire, il dérivera, erratique, sur la mer des re­lations internationales sans motivation et sans punch. Très rapidement, notre nation se réduirait à un simple appendice des puissants Etats-Unis et perdrait, dans la foulée et sans doute à jamais, tout vestige de son ascendance morale et cultu­relle.

 

Avec un tel destin à l'horizon, la perspective de voir un RU isolé, survivant comme une entité bien distincte au XXIième siècle, s'avère pure illusion. La seule vraie chance de préserver l'héritage culturel unique de nos îles, c'est, para­doxalement, de les immerger dans un idéal euro­péen. Cette solution n'est pas aussi contradictoire qu'elle en a l'air à première vue car l'éthos euro­péen n'exige pas un renoncement total à nos identités (à rebours du modèle américain si vo­race et destructeur). L'éthos européen appelle une synthèse entre l'élément national/ethnique et le projet continental. L'élément national/ethnique acquiert ainsi un sens du contexte civilisationnel, soit un sens vital du destin. Le concept d'Europe peut s'accomoder de la multiplicité de ses com­posantes sans mutiler celles-ci par quelque con­centration artificielle, par quelque corset de con­formisme.

 

Dans cette optique, l'idée d'une «Europe aux cent drapeaux» demeure parfaitement compatible avec l'objectif d'un continent plus fort et plus confédéré. Les progrès dans le sens de l'hété­rogénéité doivent toutefois toujours avancer dans le même sens que la marche à l'unité, si l'Europe veut éviter les pièges des monolithismes de tous ordres.

 

Comme la réunification allemande est désormais davantage une question de calendrier que de conjoncture, il existe un risque réel de voir les faibles économies est-européennes basculées dans une nouvelle Mitteleuropa germanocentrée. Les tentations de se livrer à un paternalisme ger­manique menacent la logique d'une Europe des peuples, car la diversité serait asphyxiée sous une uniformité germano-industrielle, terreau sur lequel pourraient germer de nouvelles idéologies autoritaires. Un tel scénario doit être évité à tout prix, si l'on veut faire l'économie d'un conflit. La Grande-Bretagne ne doit pas fuir ses respon­sabilités et doit participer à la sécurité collective du continent.

 

La notion de Balance of power  est sans doute démodée. Mais sauf si l'on pousse le processus d'unification européenne jusqu'à son ultime conclusion, avec la pleine participation de toutes les nations européennes dans l'enthousiasme, le retour de cette vénérable doctrine serait inévitable pour contrer les prédominances dangereuses. Dans le cas particulier qui nous préoccupe, l'énergie déployée par la ferveur pangermanique ne pourra être canalisée que par le consensus et non par la coercition, de façon à ce que, demain, l'Europe puisse être une et que tous les peuples du Continent puissent prospérer avec une égale vigueur.

 

Nous, peuples des Iles britanniques, devons être prêts à renier l'hypocrisie et la rhétorique propa­gée pendant des siècles de désintérêt hautain puis embrasser avec une conviction venue tout droit du cœur notre identité européenne réelle et con­crète. La barrière illusoire que constitue le Pas-de-Calais a longtemps été plus difficile à traver­ser pour nous que les immensités de l'Atlantique. Toutefois, le retour de la vraie perspective euro­péenne doit recevoir la priorité absolue. Re­connaître notre héritage européen commun, vouloir agir positivement à la lumière de cette évidence, voilà les impératifs vitaux à honorer si nous voulons préserver la paix, si nous voulons résister puis repousser l'avance d'une culture créole globale, faites de bric et de broc.

 

Gwyn DAVIES.  

lundi, 04 janvier 2010

Ecole des cadres: sélections d'articles

Synergies Européennes / Ecole des Cadres / Wallonie (Namur)

 

Liste des articles lus et à lire (2009)

 

revues.jpgHISTOIRE :

Georg BÖNISCH, “Kraftprotz und Spieler”, in: Der Spiegel/Geschichte, Nr. 6, 2009 (sur l’Empereur Maximilien I).

Pierre BRIANT, “L’empire de Cyrus le Grand”, in: L’Histoire, les collections de l’Histoire, n°42, janvier-mars 2009.

Pierre BRIANT, “A la cour du Roi des Rois”, in: L’Histoire, les collections de l’Histoire, n°42, janvier-mars 2009.

Pierre BRIANT, “Alexandre, successeur des Achéménides”, in: L’Histoire, les collections de l’Histoire, n°42, janvier-mars 2009.

Olivier BUARD, “Haute antiquité de la pensée stratégique – La bataille de Qadesh”, in: Défense & sécurité internationale, n°53, novembre 2009.

Anne-Lucie CHAIGNE-OUDIN, “Les relations  franco-libanaises et les compétitions occidentales à l’époque du mandat français (1918-1946), in: Moyen-Orient, n°2, octobre-novembre 2009.

Pierre CHUVIN, “D’où viennent les Turcs?”, in: L’Histoire, les collections de l’Histoire, n°45, octobre 2009.

Philippe CONRAD, “Les Etats-Unis et l’Europe: des relations conflictuelles”, in: La nouvelle revue d’Histoire, n°40, janvier-février 2009.

Philippe CONRAD, “La conquête de la Sibérie”, in: La nouvelle revue d’Histoire, n°43, juillet-août 2009.

Philippe CONRAD, “Du Saint Empire à la réunification”, in: La nouvelle revue d’Histoire, n°45, novembre-décembre 2009.

Etienne COPEAUX & Claire MAUSS-COPEAUX, “Chypre: une île, deux Etats”, in: L’Histoire, les collections de l’Histoire, n°45, octobre 2009.

Fabrice D’ALMEIDA, “L’après-guerre italien ou le risque de la désintégration”, in: Marianne, n°609-610, 20 déc. 2008/2 janv. 2009.

Fabrice D’ALMEIDA, “Après le chah, l’Iran devient un monstre babylonien”, in: Marianne, n°609-610, 20 déc. 2008/2 janv. 2009.

Thérèse DELPECH, “Géopolitique d’une puissance régionale”, in: L’Histoire, les collections de l’Histoire, n°42, janvier-mars 2009.

Emma DEMEESTER, “Quand Thucydide inventa l’histoire”, in: La nouvelle revue d’Histoire, n°40, janvier-février 2009.

François-Georges DREYFUS, “La thèse iconoclaste de Shlomo Sand”, in: La nouvelle revue d’Histoire, n°44, septembre-ocotbre 2009.

Manfred ERTEL, “Zauber der Vokale”, in: Der Spiegel/Geschichte, Nr. 6, 2009 (sur l’Empereur Frédéric III).

Jan FRIEDMANN, “Der Volkserzieher”, in: Der Spiegel/Geschichte, Nr. 6, 2009 (Sur l’Empereur Joseph II).

François GEORGEON, “Atatürk invente la Turquie moderne”, in: L’Histoire, les collections de l’Histoire, n°45, octobre 2009.

Prof. Paul GOTTFRIED, “Legenden um Wilhelm II. – Der letzte deutsche Kaiser im Wandel der Zeitgeschichte”, in: Neue Ordnung, Nr. 03/2009.

Brigitte HAMANN, “Ein Diadem als Krone”, in: Der Spiegel/Geschichte, Nr. 6, 2009 (Sur l’Impératrice Marie-Thérèse).

Nadia HAMOUR, “La mise en place de mandats au Moyen-Orient: une “malheureuse innovation de la paix”?”, in: Moyen-Orient, n°1, août-sept. 2009.

Clarisse HERRENSCHMIDT, “Les disciples de Zarathustra”, in: L’Histoire, les collections de l’Histoire, n°42, janvier-mars 2009.

Bernard HOURCADE, “Iran, les paradoxes d’une grande civilisation”, in: Le Monde/La Vie, hors-série, “L’Atlas des civilisations”, 2009.

Philippe HUYSE, “Le temps des Sassanides”, in: L’Histoire, les collections de l’Histoire, n°42, janvier-mars 2009.

Paul-Yanic LAQUERRE, “La Kantogun, fer de lance de la colonisation nippone”, in: 2° guerre mondiale, n°30, décembre 2009-janvier 2010.

Yann MAHE, “Le Golfe s’embrase ! 1941 – la rébellion irakienne”, in: Ligne de front, n°19, septembre 2009.

Yann MAHE, “L’Iran passe sous la coupe des Alliés – 1941”, in: Ligne de front, n°19, septembre 2009.

Yann MAHE, “1941-1942 – La campagne des Indes néerlandaises – le pétrole, l’un des enjeux de la guerre du Pacifique”, in: Ligne de front, n°19, septembre 2009.

Yann MAHE, “1942: Objectif Bakou – Coups de main dans la Caucase”, in: Ligne de front, n°19, septembre 2009.

Robert MANTRAN, “L’âge d’or de l’Empire ottoman”, in: L’Histoire, les collections de l’Histoire, n°45, octobre 2009.

Gabriel MARTINEZ-GROS, “Une province de l’Islam”, in: L’Histoire, les collections de l’Histoire, n°42, janvier-mars 2009.

Nicolas PONTIC, “Tempête d’août – Blitzkrieg soviétique en Mandchourie”, in: 2° guerre mondiale, n°30, décembre 2009-janvier 2010.

Yves PORTER, “La splendeur des Safavides”, in: L’Histoire, les collections de l’Histoire, n°42, janvier-mars 2009.

Jan PUHL, “Sturm auf den ‘Goldenen Apfel’”, in: Der Spiegel/Geschichte, Nr. 6, 2009 (Sur l’assaut ottoman contre Vienne en 1683).

Yann RICHARD, “L’échec de la modernisation”, in: L’Histoire, les collections de l’Histoire, n°42, janvier-mars 2009.

Jean-Paul ROUX, “La prise d’Ispahan par Tamerlan”, in: L’Histoire, les collections de l’Histoire, n°42, janvier-mars 2009.

Anthony ROWLEY, “Espagne: une tragédie de quinze ans”, in: Marianne, n°609-610, 20 déc. 2008/2 janv. 2009.

Johannes SALTZWEDEL, “Business mit Tradition”, in: Der Spiegel/Geschichte, Nr. 6, 2009 (Sur l’Académie Diplomatique de Vienne, fondée par l’Impératrice Marie-Thérèse).

Raphaël SCHNEIDER, “La guerre italo-turque 1911-1912: la conquête de la Libye”, in: Champs de bataille, n°29, sept./oct. 2009.

Matthias SCHREIBER, “An die Grenzen der Macht”, in: Der Spiegel/Geschichte, Nr. 6, 2009 (Sur Charles-Quint).

Laurent THEIS, “En l’an 1000, un nouvel ordre apparaît”, in: Marianne, n°609-610, 20 déc. 2008/2 janv. 2009.

Vladimir TIKHOMIROV & Irina POPOVA, “Khazar : sur les traces du royaume englouti”, in: Courrier international, n°946-947, 18/31 décembre 2008.

Lucette VALENSI, “les tanzimat ou le temps de la réforme”, ?”, in: L’Histoire, les collections de l’Histoire, n°45, octobre 2009.

Claus-M. WOLFSCHLAG, “Schicksaljahr 1919 – Das Deutsche Reich als Republik”, in: Neue Ordnung, Nr. 03/2009.

Stéphane YERASIMOS, “Pourquoi les Turcs ont pris Constantinople?”, in: L’Histoire, les collections de l’Histoire, n°45, octobre 2009.

Helene ZUBER, “Zitadelle der Einsamkeit”, in: Der Spiegel/Geschichte, Nr. 6, 2009 (Sur Philippe II).

 

LITTERATURE:

Pierre CORMARY / Joseph VEBRET,  “Michel Houellebecq irrécupérable?” – Entretien, in: Le magazine des livres, n°19, septembre-octobre 2009.

Philippe D’HUGUES, “L’étincelante génération Brasillach”, in: La nouvelle revue d’Histoire, n°41, mars-avril 2009.

Vibeke KNOOP RACHLINE, “L’épineux hommage de la Norvège à Knut Hamsun”, in: Lire, octobre 2009.

Claudio MAGRIS, “La littérature possède une dimension morale”, Entretien, propos recueillis par Gérard de Cortanze, in: Le magazine littéraire, n°484, mars 2009.

Paul YONNET, “L’éternel mystère Céline”, Entretien (propos recueillis par Jean-Michel BALDASSARI), in: La nouvelle revue d’Histoire, n°45, novembre-décembre 2009.

A ne pas manquer: Le magazine littéraire, n°492, décembre 2009, consacré à George Orwell (tous les articles de ce dossier sont exploitables pour consolider nos soirées de formation sur Orwell).

 

PHILOSOPHIE:

Olivier ABEL, “L’océan, le puritain, le pirate”, in: Esprit, juillet 2009.

Olivier ABEL, “Essai sur la prise. Anthropologie de la flibuste et théologie radicale protestante”, in: Esprit, juillet 2009.

Karen ARMSTRONG, “Religie is zoals muziek of poëzie”, in: De Morgen, 10 november 2009.

Jean-Michel BALDASSARI, “Maffesoli: l’enchanteur de la postmodernité”, in: La nouvelle revue d’Histoire, n°43, juillet-août 2009.

Thomas DARNSTÄDT, “Physiker der Macht”, in: Der Spiegel/Geschichte, Nr. 5, 2009 (Sur Machiavel).

Thérèse DELPECH, “Le déclin de l’Occident”, in: Le Monde, 22/23 nov. 2009.

Jared DIAMOND, “Le collapsus de l’humanité n’est pas inévitable”, in: Le Monde/La Vie, hors-série, “L’Atlas des civilisations”, 2009.

Antoine GARAPON, “L’imaginaire pirate de la mondialisation, in: Esprit, juillet 2009.

Marcel GAUCHET, “Le refus de la modernité”, Entretien, in: Marianne/L’Histoire, hors-série, août-septembre 2009.

Sophie JORRAND, “Daniel Defoe, les pirates et la littérature”, in: Esprit, juillet 2009.

Debora MacKENZIE, “Disparition à l’horizon?”, in: Courrier international, n°946-947, 18/31 décembre 2008.

Marielle MAYO, “S’adapter ou… disparaître”, in: Les Cahiers de Sciences & Vie, n°109, février-mars 2009.

Olivier MONGIN, “De la piraterie protestante aux piratages contemporains. Ou de la capacité à s’incruster dans les interstices”, in: Esprit, juillet 2009.

Christian NADEAU & Julie SAADA, “Guerre juste, guerre injuste – Pour une évaluation morale des conflits militaires”, in: Diplomatie, n°38, mai-juin 2009.

Walter PAULI, “Oorlog in de modder van de tijd”, in: De Morgen, 10 november 2009 (Sur l’ouvrage que Niall Ferguson a consacré à la première guerre mondiale).

Johannes SALTZWEDEL, “Netzwerker der Wahrheit”, in: Der Spiegel/Geschichte, Nr. 5, 2009 (sur Erasme de Rotterdam).

Maurice SARTRE, “Les intégristes sont nés avec le monothéisme”, in: Marianne/L’Histoire, hors-série, août-septembre 2009.

Yves SCIAMA, “De la crise à l’effondrement”, in: Les Cahiers de Sciences & Vie, n°109, février-mars 2009.

Christophe TOURNU, “Les puritains radicaux de Christopher Hill”, in: Esprit, juillet 2009.

Dominique WEBER, “Le pirate et le partisan – Lecture critique d’une thèse de Carl Schmitt”, in: Esprit, juillet 2009.

Norman YOFFEE, “Les civilisations meurent faute d’idées” – Entretien, in: Les Cahiers de Sciences & Vie, n°109, février-mars 2009.

A ne pas manquer: Le nouvel observateur – hors-série, n°66, juillet-août 2009 -  “Le vrai Machiavel” (pour étayer nos travaux sur la pensée de Machiavel – tous les articles de ce dossier sont exploitables).

 

GEOPOLITIQUE:

Morton ABRAMOWITZ & Henri J. BARKEY, “Turkey’s Transformers”, in: Foreign Affairs, vol. 88, nr. 6, November/December 2009 (sur les transformations à l’oeuvre en Turquie aujourd’hui, leurs potentialités et leurs limites).

Samim AKGÖNÜL & Stéphane de TAPIA, “Carte de Ralph Peters et réactions turques”, in: Diplomatie, n°36, janvier-février 2009.

Jean-Patrick ARTEAULT, “Chronique d’une guerre coloniale annoncée”, in: Terre & Peuple magazine, n°39, 2009.

Christopher S. BOND & Lewis M. SIMONS, “The Forgotten Front”, in: Foreign Affairs, vol. 88, nr. 6, November/December 2009 (sur les fronts oubliés de Thaïlande et des Philippines).

Alain CAGNAT, “Géopolitique de l’Eurasie – Le centre du monde et les intérêts américains”, in: Terre & Peuple magazine, n°39, 2009.

Alain CAGNAT, “Occident ou Eurosibérie?”, in: Terre & Peuple magazine, n°39, 2009.

Jean-Claude CASANOVA, “Le temps est venu pour l’Europe de s’émanciper des Etats-Unis”, in: Le Monde, 17 nov. 2009.

Ayméric CHAUPRADE, “Permanences géopolitiques”, in: La nouvelle revue d’Histoire, n°40, janvier-février 2009 (sur la permanence des objectifs géopolitiques de l’hyperpuissance américaine).

Ayméric CHAUPRADE, “Le choc des civilisations” – Entretien, in: La nouvelle revue d’Histoire, n°41, mars-avril 2009.

Ayméric CHAUPRADE, “Analyse du piège afghan”, in: La nouvelle revue d’Histoire, n°44, septembre-ocotbre 2009.

Wesley K. CLARK & Peter L. LEVIN, “Securing the Information Highway”, in: Foreign Affairs, vol. 88, nr. 6, November/December 2009 (sur la guerre cybernétique et la nécessité de contrôler les autoroutes de l’information – point de vue américain).

Patrick CLAWSON, “Changement de régime en Iran, controverse de la politique étrangère américaine”, in: Moyen-Orient, n°2, octobre-novembre 2009.

Barthélémy COURMONT, “La nouvelle politique iranienne de Washington: révolution ou simple changement de ton?”, in: Moyen-Orient, n°1, août-sept. 2009.

Barthélémy COURMONT, Charlotte KARAGUEUZIAN & Julien SAADA, “La politique d’Obama au Moyen-Orient: des objectifs à la pratique”, in: Moyen-Orient, n°3, décembre 2009/janvier 2010.

Michel FOUCHER, “Géopolitique d’une puissance régionale”, ?”, in: L’Histoire, les collections de l’Histoire, n°45, octobre 2009.

Pascal GAUCHON, “Atouts et faiblesses de la grande puissance”, in: La nouvelle revue d’Histoire, n°40, janvier-février 2009.

Alain JOXE, “L’humanitarisme au service de l’empire”, in: Le Monde/Manière de Voir, n°107, octobre-novembre 2009.

Catherine LE THOMAS, “Le Hezbollah et la communauté chiite au Liban: une adéquation imparfaite”, in: Moyen-Orient, n°2, octobre-novembre 2009.

Meir JAVEDANFAR, “Khamenei fait du pied à la Turquie”, in: Courrier International, n°995, 26 nov./2 déc. 2009. 

Robert D. KAPLAN, “Center Stage for the Twenty-First Century”, in: Foreign Affairs, vol. 88, nr. 2, 2009.

Richard LABEVIERE, “Grand Nord: le réchauffement des cinq frontières…”, in: Géopolitique, n°104, janvier 2009.

Alain LAMBALLE, “L’Inde et la puissance”, in: Diplomatie, n°37, mars-avril 2009.

Gautier LAMY, “Histoire géostratégique de la Crimée”, in: Champs de bataille, n°29, sept./oct. 2009.

Daniel MÖCKLI, “Le conflit israélo-palestinien après la guerre de Gaza”, in: Moyen-Orient, n°1, août-sept. 2009.

Bruno MUXAGATO, “Un parfum de guerre froide en Amérique latine: l’arrivée de la Russie dans le ‘pré carré’ des Etats-Unis”, in: Diplomatie, n°38, mai-juin 2009.

Géraldine NAJA-CORBIN, “Vers une politique spatiale européenne ambitieuse pour répondre aux défis du 21ème siècle”, in: Diplomatie, Hors-série n°9, août-sept. 2009.

Joseph NYE, “Le ‘soft power’ est-il de retour?”, Entretien, propos recueillis par Joel Whitney, in: Courrier international, n°946-947, 18/31 décembre 2008.

Alix PHILIPPON, “Pakistan: l’inconnue de l’équation “Af-pak””?, in: Moyen-Orient, n°3, décembre 2009/janvier 2010. 

Jean-Luc RACINE, “L’Inde et l’Occident”, in: Le Monde/Manière de Voir, n°107, octobre-novembre 2009.

Jean RADVANYI, “Caucase: quand les empires jouent des frontières”, in: Géopolitique, n°104, janvier 2009.

Shri RANJAN MATHAI, “Les questions de sécurité internationale vues par l’Inde”, in: Diplomatie, n°37, mars-avril 2009.

Stéphane de TAPIA, “Un acteur du Grand Jeu – Le ‘monde turc’ (Türk Dünyasi) existe-t-il?”, in: Diplomatie, n°36, janvier-février 2009.

Mehdi TAJE, “Les clefs d’une analyse géopolitique du Sahel africain”, in: Diplomatie, n°38, mai-juin 2009.

Julien THOREX, “Les frontières d’Asie centrale entre ouverture et fermeture”, in: Diplomatie, n°36, janvier-février 2009.

François THUAL, “Pour une génétique des frontières”, in: Géopolitique, n°104, janvier 2009.

Jacques VILLAIN; “Espaces civil et militaire – Le jeu des puissances”, in: Diplomatie, Hors-série n°9, août-sept. 2009.

A ne pas manquer: Questions internationales, n°37, mai-juin 2009 (Thème: “Le Caucase, un espace de convoitises”; tous les textes de ce dossier sont exploitables).

A ne pas manquer: Questions internationales, n°40, novembre-décembre 2009 (Thème: “Mondialisation et criminalité”; tous les textes issus de ce dossier sont exploitables).

 

ECONOMIE:

Wolfgang KADEN, “Vom Berghotel ins Casino”, in: Der Spiegel/Geschichte, Nr. 4, 2009 (sur l’échec de Bretton Woods).

Robert KURZ, “Weltmacht und Weltgeld – Die ökonomische Funktion der US-Militärmaschine im globalen Kapitalismus und die Hintergründe der neuen Finanzkrise”, in: nation24.de, Nr. 04/2008.

Cordula MEYER, “Der Dollar-Orkan”, in: Der Spiegel/Geschichte, Nr. 4, 2009 (sur les prémisses de la crise de l’automne 2008).

Anthony ROWLEY, “De la grande crise de 1929 au choc des Nations”, in: Marianne, n°609-610, 20 déc. 2008/2 janv. 2009.

Jacques SAPIR, “Comprendre la crise actuelle: les leçons des années 30”, in: Géopolitique, n°104, janvier 2009.

Jiro YAMAGUCHI, “Japon: quelle relance après l’alternance?”, in: Le Monde, 14 nov. 2009.

Sylvia ZAPPI, “La crise relance le thème de la décroissance”, in: Le Monde, 15/16 nov. 2009.

 

POLITIQUE/DIVERS:

Jean-Michel BALDASSARI, “Réflexions sur notre drôle de République”, in: La nouvelle revue d’Histoire, n°40, janvier-février 2009 (Sur les thèses de Philippe Nemo à propos de la notion très particulière de “république” en France aujourd’hui).

Steven ERLANGER, “Le petit noir au comptoir, c’est du passé”, in: Courrier international, n°946-947, 18/31 décembre 2008.

Slavoj ZIZEK, “Derrière le Mur, les peuples ne rêvaient pas de capitalisme – L’utopie d’une société juste reste d’une brûlante actualité”, in: Le Monde, 8/9 nov. 2009.

 

EDUCATION / LINGUISTIQUE:

Wilfried STROH, “Anreiz fürs Denken”, in: Der Spiegel/Geschichte, Nr. 1/2009 (sur la nécessité d’apprendre le latin).

 

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