Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

mardi, 22 septembre 2015

Cartographie de l'anti-américanisme

anti.jpg

Cartographie de l'anti-américanisme

par Georges FELTIN-TRACOL

L’édition française sort à rythme régulier des ouvrages sur l’anti-américanisme tels L’Ennemi américain. Généalogie de l’anti-américanisme français (Le Seuil, 2002) de Philippe Roger ou L’Anti-américanisme. Critique d’un prêt-à-penser (Robert Laffont, 2004) du libéral et atlantiste Pierre Rigoulot. Si ces titres étaient réédités, ils évoqueraient probablement le nouvel essai du journaliste Martin Peltier qui donne 20 bonnes raisons d’être anti-américain.

 

La curiosité pour la grande puissance d’outre-Atlantique n’est pas neuve puisque dès 1991, le philosophe catholique de tradition d’origine hongroise et exilé aux États-Unis, Thomas Molnar, rédigea L’Américanologie. Triomphe d’un modèle planétaire ? (L’Âge d’Homme). Avec Martin Peltier, cette nouvelle discipline – l’américanologie – trouve enfin son vulgarisateur. En effet, à un moment où le virus de l’américanisme contamine tous les continents et colonise les esprits, en particulier l’imaginaire européen, Martin Peltier recense avec brio tous les méfaits de la Barbarie yankee. À la fois très informé et parfois polémique, l’essai explique que les États-Unis – qu’il ne faut surtout pas confondre avec les peuples du continent américain (Boliviens, Costaricains, Argentins, etc.) -, nuisent à l’avenir de l’Europe.

 

Le péril yankee se décline en menaces multiformes. L’une des plus redoutables concerne l’enjeu linguistique. « En tendant à détruire le français ou à le corrompre, elle amène un affaiblissement de la culture et de la pensée (p. 80). » Certes, des peuples francophones résistent à ce flot dévastateur. Si les Québécois se montrent sourcilleux sur la préservation de leur patrimoine linguistique, cela ne les empêche pas de se soumettre au Diktat du politiquement correct et de l’extrême féminisme en violant leur langue par de grotesques féminisations telles « sapeuses pompières »…

 

bonnesraisons.jpgDéfendre sa langue n’est pas un acte anodin; c’est le combat essentiel. Primordial même parce qu’« avec la langue anglaise, les États-Unis répandent leur manière de penser, ce qui leur donne un avantage en tout, dans le commerce comme dans les sciences, et ils accompagnent ce mouvement par le “ social learning ”, c’est-à-dire l’imposition de leurs normes éducatives, sociales, morales, politiques – en quelque sorte le progrès comme ils le voient, leur Weltanschauung (p. 83) ». Les sots anglicismes qui prolifèrent dans nos phrases témoignent d’une invasion mille fois plus préoccupante qu’une occupation militaire classique. La présente invasion migratoire de notre sol ancestral n’impacte pas notre civilisation, elle l’affecte prodigieusement. Il est d’ailleurs caractéristique que les groupuscules antifa et les mouvements socio-politiques issus d’une immigration extra-européenne adoptent la langue de l’envahisseur atlantiste anglo-saxon.

 

Didactique, 20 bonnes raisons d’être anti-américain expose des faits indéniables. L’auteur n’évoque pas les ignominies prévues par le détestable Traité transatlantique. Il préfère ausculter les fondements théologiques des USA et en dresse leur généalogie intellectuelle. Comme le relevait déjà notre ami Tomislav Sunic dans son excellent Homo americanus. Rejeton de l’ère postmoderne (Éditions Akribeia, 2010), les États-Unis possèdent un puissant arrière-plan religieux. Construits par les descendants de protestants dissidents qui ont fui un Vieux Monde qu’ils exècrent et maudissent, les États-Unis bénéficièrent de la bénédiction du puritanisme réformé, de la franc-maçonnerie et, un peu plus tard, du judaïsme politique. Le « messianisme était commun aux sectes protestantes, au judaïsme et à la maçonnerie (p. 145) ». Cette vocation délirante continue à imprégner tout le spectre politico-intellectuel, y compris chez les adversaires conservateurs des tarés néo-conservateurs. Outre les Noirs et les juifs, sait-on que le Ku Klux Klan vomit les catholiques ? Ainsi, le catholique J.F. Kennedy fut-il mal perçu par maints de ses compatriotes. Dans la même veine existaient les Know Nothing, une société secrète nativiste anglo-saxonne au milieu du XIXe siècle, hostiles aux arrivants irlandais de confession romaine. Ce nativisme WASP demeure toutefois paradoxal de la part d’une population d’origine européenne qui a volé les terres de peuples indigènes génocidés.

 

Il est très dommage que Martin Peltier n’évoque point le sort horrible des autochtones américains exterminés, chassés de chez eux et trahis par des traités jamais appliqués par la Maison Blanche (sinistres précédents pour les pseudo-traités euro-ricains à venir…). Il aurait pu signaler que les États-Unis détiennent aujourd’hui le plus vieux prisonnier politique du monde, l’activiste amérindien âgé de 70 ans, Leonard Peltier (sans rapport de parenté avec l’auteur !) condamné à la perpétuité en 1976, suite à une machination orchestrée par le FBI, cette véritable police politique secrète d’État.

 

Le destin tragique des vrais Américains préfigure celui des Européens et du monde. Les Étatsuniens sont imbus de la « destinée manifeste » (décennie 1840) qui leur assurerait le devoir moral d’imposer partout leur funeste mode de vie et de penser. Tous les moyens sont dès lors mobilisés pour réussir cette injonction quasi-mystique. Co-responsable du tribunal de Nuremberg vilipendé en son temps par le courageux Maurice Bardèche, Washington devient le berceau « de la religion de la Shoah (p. 133) » et en fait « la mère et la garantie ultime du politiquement correct occidental à vocation mondiale (p. 138) ».

 

L’auteur dénonce bien sûr ce pitoyable moralisme en des termes forts et incisifs : « La religion de la Shoah ne fonde pas seulement la solidarité de l’empire du bien, elle vise plus gravement encore à habituer tous les esprits du monde à la bêtise. Elle tue l’esprit critique, l’histoire, la vraie mémoire, elle déshabitue de la réflexion, elle détache de l’identité. La religion de la Shoah est la pire vérole et le meilleur instrument de la mondialisation, elle fait du cerveau qu’elle a lavé un numéro prêt à tout gober, et c’est une raison de plus de combattre, sans relâche, les États-Unis (p. 140). » Ce lavage de cerveau collectif made in USA arase l’ethno-diversité propre aux races humaines.

 

Déplorons que le malheureux roi Louis XVI ait commis la mortelle erreur de soutenir la racaille américaine en sédition contre son souverain George III de Hanovre, par ailleurs usurpateur du trône légitime des Stuarts. Loin des sempiternelles odes à la soi-disant amitié franco-américaine, Martin Peltier cite un conflit naval guère connu dans l’Hexagone : la Quasi-Guerre (1798 – 1800) qui vit l’affrontement des marines française et US. Il insiste aussi sur les milliers de Français qui périrent en 1944 – 45 sous les bombes yankees (bombes qu’on découvre encore en masse non explosées sept décennies plus tard) censées les libérer… Quant au crétin de Roosevelt, il « voulait placer la France après la guerre sous mandat de l’AMGOT, c’est-à-dire un gouvernorat direct de l’occupant américain (p. 29) ». En 1870, un autre président, Ulysse Grant, poivrot étoilé et expert notoire dans le pot-de-vin, télégraphia ses plus vives félicitations à Bismarck pour sa victoire sur le Second Empire français.

 

Ces exemples historiques avérés sont occultés par le déversement dans le monde d’images produites par Hollywood qui promeut des États-Unis oniriques et virtuels… La réalité est plus cauchemardesque avec les horreurs quotidiennes d’une société multiraciale, pluri-ethnique et multiconflictuelle en cours de fragmentation. « On se représente souvent le choc des civilisations comme un conflit international, avec une ligne de front, mais dans cet État-monde que sont les États-Unis, le choc des civilisations a lieu tous les jours au bout de la rue et à la télé, dans les concours de beauté et les réclames pour pop corn, c’est un choc de civilisation intérieure, domestique, comme on dit là-bas (p. 77). » Le Système étatsunien – ou plus exactement son puissant et redoutable « État profond » – tend à y palier en célébrant sur tous les médiats massificateurs un mirifique « vivre ensemble » alors que, libéralisme aidant, on constate l’impitoyable guerre de tous contre tous… Connaît-on en Europe l’incroyable sujétion des classes moyennes au crédit bancaire qui les enchaîne durablement ? L’endettement élevé des ménages et son corollaire – le manque d’épargne – empêche toute éventuelle rébellion préjudiciable à la bonne marche des affaires. L’auteur prévient cependant que « le marché n’est pas le maître, mais juste un contremaître, pas un dieu, juste une marionnette dans la main des prêtres mondialistes (p. 70) ».

 

Martin Peltier dénonce enfin le gouvernement des juges propre au misérable régime présidentiel adopté en 1787, le rôle dévastateur des multinationales et l’action subversive des « ONG, mains sales du mondialisme US (p. 113) ». Stipendiées par des fondations yankees, les ONG constituent une véritable cinquième colonne prête à fomenter la moindre « révolution colorée ». Certaines d’entre elles traquent la corruption dans les États tout en négligeant les États-Unis qui demeurent l’État au monde le plus corrompu avec une classe politicienne totalement achetée. Sur la colline du Capitole de Washington, les mœurs y sont bananiers… L’appui résolu des ONG à l’actuel déferlement migratoire sur notre continent apporte la preuve supplémentaire patente d’une volonté de déstabiliser nos vieilles nations blanches.

 

Martin Peltier rapporte, démonte, examine dans cet ouvrage remarquable toutes les manœuvres sordides du « Moloch à la bannière étoilée ». Il aurait peut-être pu conclure son réquisitoire par le vif intérêt qu’éprouvent maintenant quelques cénacles US pour le transhumanisme et l’idéologie du genre. De salubrité intellectuelle publique, cet ouvrage décrit un abcès de dimension mondiale. Qui aura le courage de le crever : l’État islamique, Al-Qaïda, la Chine, la Russie, l’insurrection des peuples albo-européens ? En tout cas, plus que jamais, America delenda est !

 

Georges Feltin-Tracol

 

• Martin Peltier, 20 bonnes raisons d’être anti-américain, Éditions D.I.E., 2015, 210 p., 26 € (« La Sarrazine », La Fosse Marceline, F – 10 140 Jessains, France)

 

Article printed from Europe Maxima: http://www.europemaxima.com

URL to article: http://www.europemaxima.com/?p=4527

lundi, 21 septembre 2015

Corbyn et la question de l’antiSystème

corb-487868010.jpg

Corbyn et la question de l’antiSystème

Ex: http://www.dedefensa.org

L’élection de Jeremy Corbyn à la tête du parti travailliste britannique a constitué un événement politique exceptionnel : d’abord par la marge formidable de 59,5% des voix (le plus haut score atteint pour l’élection d’un nouveau dirigeant d’un des grands partis au Royaume-Uni) ; ensuite, par les matières qui ont été débattues lors de la campagne (outre le sujet général de l’austérité qui est une toile de fond du débat et non pas un débat, tous les grands sujets de politique extérieure) ; enfin, par la personnalité de l’acteur principal Corbyn, militant marxiste pur et dur, complètement marginalisé dans l’ensemble-Système travailliste depuis des années, donc lui-même hors-Système et qui s’impose pourtant irrésistiblement en brisant ce cadre avec une puissance totalement inattendue.

C’est ce dernier point qu’explique abondamment l’excellent chroniqueur et activiste US Chris Hedges, dans une interview qu’il a donnée le 15 septembre à RT. L’entretien porte d’abord sur le parallèle qu’on peut faire ou ne pas faire entre Corbyn et Sanders, que nous laisserons de côté mais dont on gardera à l’esprit que Hedges considère Corbyn comme un vrai révolutionnaire, au contraire de Sanders aux USA ; puis l'on enchaîne sur la signification de la victoire de Corbyn pour la gauche en Europe, et sur le “message” que la victoire de Corbyn envoie au reste de l’Europe. On appréciera que, même dans les questions faites par l’intervieweur, on trouve de ces “nuances” qui conduisent à juger cet évènement d’une part en termes d’idéologie sinon de “particratie” (ce que la gauche comme la droite restent, dans le contexte évoqués, lorsqu’elles se considèrent en tant que telles), d’autre part en termes de confrontation entre le Système et “le reste” (ditto, l’antiSystème).

... Car la question est bien celle-ci, et bien peu de commentateurs l’abordent de cette façon : Corbyn est-il un élu et une victoire de la gauche ou bien un élu et une victoire de l’antiSystème ? Ce n’est pas, ce ne peut être la même chose, sinon à raisonner dans des termes d’il y a un demi siècle ou d'un siècle et demi, alors que toutes les activités politiques constituées se faisaient sous le contrôle du Système sans que personne n’y prît garde expressément ; cela, sauf dans le chef de certaines catégories d’intellectuels et d’artistes dans certaines périodes bien spécifiques, et l’une ou l’autre complète exception politique, comme un de Gaulle.

RT : « The EU's most notable left-wing parties have been jubilant over Corbyn's victory. Why is this so important for them? »

Chris Hedges : « Well, because it is part of this popular revolt against neo-liberalism, austerity, corporate domination of our political and our cultural life, and of course it caught everyone by surprise. Corbyn was a 200-1 outsider, but they just rose up. I think it’s tapped into a kind of revulsion that’s global, that Podemos certainly tapped into, Syriza tapped into in Greece with the neoliberal order. And Corbyn represents it in a way that Bernie Sanders really doesn’t. »

RT : « What message does this Labour Party election in the UK send to the rest of Europe?

Chris Hedges : « This sends a message essentially to the international banking community that says that their ability to impose conditions that cause suffering - especially among working men and women - is one that larger and larger segments of population will not tolerate. Corbyn has even raised the possibility of withdrawing from the EU precisely because of the EU’s treatment of the Greek people. He pointed out that all of this money is not going to the Greeks - it is going to the international banking system. I think he is a kind of an example of this surge among the grassroots that’s rising up to defy the neo-liberal order and in particular the international banking system that is strangling countries... »

WSWS.org accorde bien sûr une place de choix à l’élection de Corbyn. Il y a un long texte d’analyse de Julie Hyland du 15 septembre 2015 (14 septembre dans sa version anglaise). Le sectarisme considérable du site de la IVème Internationale trotskiste qui éclate dans la deuxième partie du texte, – “Trotski sinon rien”, – a l’avantage paradoxal de conduire à une analyse acceptable du phénomène Corbyn. Les enseignements qui sont présentés sont donc :

1) Corbyn est incontestablement un homme de gauche, et même d'une gauche dure et pas loin d'être révolutionnaire, mais ce n’est pas l’“homme d'une gauche dure”, ni même cette “gauche dure”-là qui ont été élus, mais tout ce qu’il (Corbyn) représente, symboliquement, de plus opposé au Système, tout ce qu’il y a nécessairement d’antiSystème en lui, sans qu’il ne le réalise ni ne l’exprime nécessairement.

 

pod28-thickbox_default2.jpg2) Corbyn fait partie de cette “réaction de gauche”, comme Syriza, comme Podemos, même comme Sanders aux USA, de même qu’il y a une “réaction de droite”, comme le FN en France, les deux constituant les deux ailes d’une “réaction générale”... Mais “réaction” contre quoi ? “Contre de vrais dynamiques populaires qui s’expriment contre le Système, en faisant croire qu’ils (ces mouvements de ‘réaction’) les représentent alors qu’ils les canalisent et les contrôlent en vérité, parce qu’eux-mêmes (ces mouvements de ‘réaction’) sont en fait manipulés par la bourgeoisie et les oligarchies”, dit l’auteure en agitant sa pancarte “Trotski sinon rien” ; “Contre le Système, cette réaction de dynamique populaire passant par tout ce qui peut servir de véhicule pour ceux veulent exprimer leur position antiSystème”, dirions-nous en observant qu’il est préférable de ne pas faire compliqué quand on peut faire simple, d’autant plus que Trotski n’est plus parmi nous pour prendre les choses en mains.

3) L’élection de Corbyn a ouvert une brèche considérable qui pourrait, selon les évènements, se traduire par des prolongements que nous qualifierions d’antiSystème et extrêmement importants ; mais ces évènements et leurs prolongements resteront sans suite parce que « manœuvres, compromis et trahisons suivront inévitablement une victoire de Corbyn...» Voici le passage du texte de Hyland exprimant ces trois considérations.

« Pour évaluer les résultats de l'élection au leadership du Labour, il faut prendre en compte plusieurs facteurs interdépendants. L'idée reçue après la défaite écrasante des travaillistes à l'élection générale de mai était qu'ils avaient perdu parce que leur programme d’“austérité allégée” était en contradiction avec un consensus public soutenant des réductions des dépenses encore plus fortes, plus de mesures anti-immigrés et une hausse des dépenses militaires. La course à la direction devait marquer un nouveau virage à droite des travaillistes, comme le montrait l'insistance de la dirigeante par intérim Harriet Harman pour que les députés travaillistes s'abstiennent sur le projet de loi sur la protection sociale du gouvernement conservateur, qui va encore appauvrir des millions de gens. Mais l'élection a ouvert une fissure juste assez large pour donner une idée de l'hostilité de la classe ouvrière et d’une partie de la classe moyenne à de telles mesures et cela a perturbé le plan initial.

» Corbyn, député travailliste vétéran “de gauche”, qui s'est présenté sur un programme anti-austérité, a réussi à obtenir 59,5 pour cent des voix, plus que le total combiné de ses trois adversaires: Andy Burnham (19 pour cent), Yvette Cooper (17 pour cent) et Liz Kendall (4,5 pour cent). Cela en dépit, ou plutôt partiellement à cause des interventions répétées de Tony Blair qui exhortait à poursuivre son “héritage”. Ses exclamations ont garanti la déroute humiliante de Kendall, la candidate la plus blairiste. L'absence de soutien important pour les panacées droitières du New Labour, même dans la coquille rétrécie du Parti travailliste, est un reflet de l'état des rapports de classe en général.

» Ce n'est pas là juste un phénomène britannique. Les implications transformant le monde de la crise financière de 2008, crèvent partout la croûte putréfiée de la politique officielle. Une aggravation générale, économique, sociale et géopolitique de la crise du capitalisme mondial déstabilise les mécanismes traditionnels de domination, alimente le mécontentement social et politique et jette la politique bourgeoise dans un état de bouleversement et de flux.

» Cherchant à retrouver son équilibre politique, la bourgeoisie tente un réajustement politique lui permettant d'empêcher une classe ouvrière de plus en plus incommode d’échapper à son contrôle et de se lancer sérieusement à l’assaut du pouvoir. Cela explique d’une part la montée des forces fascistes et xénophobes tels que le Front national en France et d’autre part les expériences avec des forces de “gauche”, comme Syriza en Grèce, Bernie Sanders aux États-Unis et Corbyn en Grande-Bretagne.

» Évaluant la victoire de Corbyn, certains commentateurs considèrent, comme le dit l’ancien rédacteur du Daily Telegraph Charles Moore, que le “prochain choc porté au système” pourrait créer “un marché électoral pour ... le Bourbon barbu du bolchevisme”. Andrew Sparrow du Guardian est d’avis qu’une éruption “nullement impensable …d’une sorte de catastrophe économique... pourrait conduire les travaillistes menés par Corbyn à défier les experts et à prendre le pouvoir de la même manière que Syriza en Grèce”.

» Les travailleurs doivent considérer de tels calculs comme un sévère avertissement. Les leçons de la capitulation abjecte de Syriza en Grèce doivent être comprises, de sorte que les travailleurs ne soient pas aveuglés par les manœuvres, compromis et trahisons qui suivront inévitablement une victoire de Corbyn...»

Il est vrai que la victoire de Corbyn a été saluée, parfois de manière extatique par qui de droit, comme une “victoire de la gauche authentique”, et cette interprétation a aussitôt rétréci le champ du débat, dans le chef des mêmes commentateurs, à la seule “gauche” comme ayant la capacité d’emporter une telle “victoire” qui ne peut être comprise que comme une “victoire contre le Système”. Cette façon de voir montre que ceux qui font cette interprétation n’ont pas encore compris qu’une “victoire contre le Système” n’est pas nécessairement, loin s’en faut, une “victoire antiSystème“, alors que ce qu’il faut, à l’image de Trotski, c’est “l’antiSystème sinon rien”. Par exemple et triste exemple, Syriza a bien remporté une “victoire contre le Système” lors de son élection en janvier et jusqu’au référendum en juillet, mais la chose s’est achevée par la capitulation que l’on sait quelques jours plus tard. L’épisode démontre qu’une “victoire contre le système” n’est rien si elle ne se structure pas décisivement en une “victoire antiSystème” (dans ce cas, un “plan B” type-Grexit pouvait être tenté en guise decstructuration). La cause en est que Syriza était et reste un “parti de gauche” hors-Système, ce qui est un pas dans la bonne direction qui ne change pas grand’chose sinon rien, et nullement un “parti antiSystème”, ce qui est le pas essentiel qui changerait tout.

On retrouve les mêmes demi-mesures, les mêmes demi-exhortations, les mêmes demi-envolées, les mêmes demi-attaques antiSystème ou les mêmes attaques demi-antiSystème dans le Plan B pour l’Europe, de Jean-Luc Mélenchon, Stefano Fassina, Zoe Konstantopoulou, Oskar Lafontaine et Yanis Varoufakis, parmi lesquels on pourrait mettre bientôt un Jeremy Corbyn selon les circonstances. Tout y est parfaitement classé, avec les anathèmes de service et les “répulsions” à peine non-dites qu’on sait, pour qui l’on sait. Les antiSystème de gauche comme ceux de droite ont l’estomac fragile et disposent d’une quantité considérable de répulsion pour leurs vis-à-vis de l’autre bord (mais plus ceux de gauche que ceux de droite, nous semble-t-il, puisqu’il arrive de telles occurrences où Marine Le Pen envoya ses félicitations à Syriza lors de son élections, qui lui furent, nous semble-t-il à nouveau, retournées dans le style “il n’y a pas d’abonné...” ; et l’on peut chercher à savoir qui, dans ce cas-là et dans les stratégies proposées, Le Pen conseillant à Tsipras de quitter l’euro, se conduisait le plus en antiSystème). Les antiSystème des deux bords préfèrent en général la défaite assurée du camp antiSystème avec leur vertu partisane conservée pieusement à la défaite possible du Système dans l’audace de la conceptualisation de l’antiSystème avec ses conséquences. Difficile, très très difficile de les faire sortir de leurs arrière-cuisines...

varouf4818730_7e1f19118e_o.jpg

L'observation à la fois la plus évidente et la plus pertinente nous vient par conséquent d’un philosophe, dit-“de gauche” en plus, mais déjà largement suspecté d’apostasie dans les salons parisiens, – dès lors qu’on s’éloigne de la “ligne générale” chargée de la pédagogie permante de la démocratie et qui revient en fait au contraire de ce qu’elle prétend être. Interrogé par RT-France sur cette vaste question (implicitement celle du rassemblement des antiSystème), Onfray a une réponse qui a la vertu et l’intelligence de l’évidence ; c’est-à-dire, la proposition de facto de substituer aux “valeurs“ en général partisanes qui servent surtout de feuilles de vigne pour tenter de dissimuler la vanité et l’hybris de chaque parti, les principes par définition universels dans leur puissance structurante et qui constituent la seule force conceptuelle capable de créer véritablement une essence antiSystème. Pour autant, Onfray n’est pas du tout optimiste, – ou plutôt devrions-nous dire, “par conséquent, Onfray n’est pas du tout optimiste...” Effectivement, dans cette orientation-là nous partageons complètement ce sentiment  à la lumière des réactions diverses que nous avons rapidement passées en revue. (La seule réserve qui nuance ce pessimisme réside évidemment dans la stupidité du Système parce que, après des décennies sinon des siècles de domination, après plus de quinze ans de blairisme triomphant carburant à la spin-communication avec le soutien de toute la surpuissance dont il est capable, déboucher sur un Corbyn à la tête du parti de Tony Blair ce n’est pas très convainquant...)

RT France : « Jacques Sapir a lancé l'idée d'un mouvement rassemblant tous les souverainistes, allant même jusqu'à une alliance avec le FN. Vous avez estimé que “l’idée est bonne (...) de fédérer les souverainistes des deux bords”. Pourquoi ? »

Michel Onfray : « Les souverainistes sont majoritaires dans l’opinion mais inexistants parce que répartis dans des partis très hétérogènes qui comptent pour rien dans la représentation nationale. Mais jamais un électeur de Mélenchon ne soutiendra une thèse de Marine Le Pen et vice versa. Seul un tiers au-dessus des partis pourrait fédérer ces souverainistes de droite et de gauche. »

RT France : « Cette proposition de Sapir ne traduit-elle pas une recomposition des lignes politiques dont le pivot (ou l'axe) ne serait plus l'économie mais le rapport à l'Europe ? Comment voyez-vous cette recomposition politique du paysage français ? »

Michel Onfray : « L’idée est juste, mais elle n’aboutira pas. Les souverainistes sont représentés par des politiciens qui n’ont en tête que leur ego, leur trajectoire personnel, leur narcissisme. Aucun ne sera capable de jouer la fédération sous la bannière d’un tiers en s’effaçant. Entre la France et eux, ils ne choisiront pas la France. »

Mis en ligne le 17 septembre 2015 à 16H23

Ron Paul Discusses Evangelical Zionists’ Support for US Wars

RTRB0IQ.jpg

Ron Paul Discusses Evangelical Zionists’ Support for US Wars

By Adam Dick
Ron Paul Institute & http://www.lewrockwell.com

Ron Paul, the former United States presidential candidate and Republican House of Representatives member from Texas, discussed in an August 8 radio interview evangelical Zionists who support the US government’s wars overseas. Paul examines the matter with Patriot’s Lament show host Joshua Bennett on KFAR radio of Fairbanks, Alaska.

Asked by Bennett why so many religious people in America are pro-war, Paul responds that, while the reasons vary from one person to the next, evangelical Zionism, which is taught by preachers at some churches, “has a lot to do with it.” Paul continues that the use of Christianity to support preventative or preemptive wars is “a gross distortion” of what Paul believes “the Christian faith is all about.” Paul explains in the interview that he sees Jesus as “the Prince of Peace.”

Also discussed in the 24-minute interview are Paul’s new book Swords into Plowshares — in which Paul writes extensively regarding the relationship among religion, war, and peace — as well as three projects Paul has undertaken since leaving the House in January of 2013 — the Ron Paul Institute for Peace and Prosperity, the Ron Paul Liberty Report, and the Ron Paul Curriculum.

Listen to Paul’s complete interview here.

Ron Paul Institute Executive Director Daniel McAdams and Senior Fellow Adam Dick have also been guests on the KFAR radio show.

Listen to McAdams’ interview here.

Listen to Dick’s interview here.

dimanche, 20 septembre 2015

Les migrations de masse, c'est la guerre...

8ecabfbbe770c8bdd47ee646847b9288e59a0f6b.jpg

LES MIGRATIONS (DE MASSE), C’EST LA GUERRE …

Yves-Marie Laulan*
Ex: http://metamag.fr

Autant appeler un chat un chat. L’immigration clandestine ou illégale de masse, c’est-à-dire subie et non désirée,  est assimilable à un acte de guerre dissimulé sous le masque de l’humanitarisme. Or l’Europe est en guerre sans le savoir ou sans vouloir le reconnaître. Mais la réalité finira bien par s’imposer tôt ou tard.


En effet, qu’est-ce que la guerre, suivie d’une invasion, si ce n’est l’entrée en masse et non sollicitée d’un peuple étranger sur le territoire de ses voisins afin de l’occuper, de s’en approprier partiellement  les possessions tout en prenant la population d’accueil en otage ?
Or c’est bien ce qui se passe actuellement avec l’entrée massive de populations déshéritées qui veulent s’installer sans en demander la permission sur nos territoires et s’adjuger sans façon une fraction de nos richesses par le biais d’aides sociales multiples concédées à perpétuité.


Depuis la plus haute Antiquité, c’est bien ainsi que ce processus mortifère a pris place avec les grands mouvements de population  de l’histoire qui ont entraîné la destruction des empires et des civilisations de l’époque . Et on citera  les invasions barbares qui ont provoqué la chute l’empire romain ou le débarquement de Cortez au Mexique ou encore l’arrivée des Pilgrims Fathersen en Nouvelle Angleterre.


La civilisation au XXIème en Europe n’est nullement à l’abri de ce danger. Sous le barbouillage humanitaire qui  la dissimule , c’est bien une action de guerre que celle qui consiste à débarquer en masse à la gare de Munich ou à l’île de Lampedusa sous le  vocable hautement douteux de réfugié politique fuyant la guerre ou tout bonnement  de migrant à la recherche d’une vie meilleure. 


Les mouvements migratoires de nos jours ressemblent fort à ces glissements de terrains soudains, massifs et dévastateurs qu’un rien peut déclencher sur une pente de terrain détrempée pour aller ravager les champs et les villages situés en dessous. Un rien suffit à les mettre en mouvement. Car enfin la guerre en Syrie dure depuis dix ans ou plus. Qu’est ce qui a bien pu justifier ce branle-bas de combat, si ce n’est je ne sais quelle gesticulation  médiatisée qui ont donné la peur au ventre à nos responsables politiques qui ont, une fois de plus, donné, la mesure de leur inconséquence et de leur pusillanimité, Angéla Merkel en tête.
Mais en réalité, les signes annonciateurs n’ont pas manqué et il a fallu tout l’aveuglement des responsables nationaux et européens, affairés le nez sur le guidon, à gérer leur quotidien ,pour ne pas les percevoir.


C’est l’accumulation depuis plusieurs années, et  notamment depuis un an, de masses humaines considérables en stationnement de parking  sur le pourtour de la Méditerranée : on parle de 800 000 à un million de personnes. C’est que l’on peut décrire comme « l’effet chasse d’eau ». Mais derrière ce trop-plein se dissimulent d’énormes réserves humaines au Moyen-Orient et en Afrique noire, terres lointaines ravagées, certes, par les conflits mais aussi et surtout ruinées par  la corruption, la gabegie, l’incompétence, l’inertie de leurs élites.  Ces masses sont prêtes à déferler sur l’Europe au risque de la submerger, l’engloutir, et , en fin de compte, l’ensevelir.


Car les sources de la migration sont colossales, inépuisables. A l’avenir, au-delà des flux actuels, les flux à venir ne se chiffreront plus en dizaines, ou en centaines de milliers, mais en millions, en dizaines de millions, voire en centaines de millions, si les projections des Nations Unies se révèlent exactes . La question qu’il faut d’ores et déjà se poser avec réalisme et lucidité est de savoir si l’Europe ne va pas être irrémédiablement ravagée, engloutie, ensevelie sous ces flots humains déchaînés. Le risque est bien réel. Ici, l’humanitaire n’est plus de mise. C’est la survie de nos sociétés  de notre civilisation qui est en jeu. 
Compassion humanitaire à quel sommet d’absurdités ne nous conduis-tu pas ?
On devrait instituer un nouveau délit : le « délit d’humanitarisme », associé à un délit aggravé, celui d’ « appel à l’humanitarisme ». En seraient frappés tous les journalistes, reporters et photographes au grand cœur et à la conscience tourmentée qui inondent nos médias d’histoires touchantes et de photos émouvantes sans avoir la moindre idée des conséquences de leurs actes. C’et l’irresponsabilité et l’impunité portées à un haut degré de perfection.


Car les deux instruments principaux de la migration de masse sont en premier lieu le téléphone portable par satellite qui permet de communiquer avec la famille et d’alerter les copains aux antipodes. Mais  les médias jouent aussi un rôle majeur. Elles servent complaisamment de caisse de résonance et d’amplificateur aux informations recueillies sur place auxquelles les moyens médiatiques confèrent dans l’instant une portée mondiale, sans bien entendu la moindre vérification ou réserve sur leur authenticité. L’émotion, l’émotion, d’abord et avant tout, et dans l’instant, telle est la loi du moment. Remarquons que l’immigration dans les conditions actuelles est un excellent investissement financier pour les migrants. En effet, le coût du passage est d’environ 1000 euros . Cette dépense est amortie, dans l’instant, dès lors que le migrant débarque en France (ou en Allemagne) avec sa  famille. Cela  lui rapportera plus ou moins selon les règles du droit d’asile, -droit pervers sinon criminel s’il en est - la somme rondelette de 1200 euros , dès le départ, et puis autant tous les mois de l’année.


L’immigration actuelle nous apporte plus de déficit, plus de chômage, plus de  terrorisme en puissance, avec l’Islam puis l’islamisme  en prime,  la perte de notre identité enfin à la clef. Avouons que cela vaut vraiment le coup d’ouvrir plus  largement encore nos frontières.
Le traitement de l’immigration de masse ne relève absolument pas de la charité ni de compassion humanitaire mais de la justice, du maintien de l’ordre avec recours à la force si nécessaire. D’ailleurs les migrants de Calais ou d’ailleurs ne s’en privent pas.  La solution s’impose d’elle -même.

Elle relève d’une triple interdiction qui devra être opposée aux candidats à l’émigration: il faut les empêcher de partir, les empêcher de transiter, les empêcher d’entrer. On pourrait en ajouter une quatrième qui s’imposera d’elle-même tôt ou tard. Il faudra rapatrier de gré ou de force ceux qui auront quand même réussi à passer au travers des mailles du filet. L’émotion compassionnelle est mauvaise conseillère en politique. C’est le cas d’Angela Merkel que l’on aurait pourtant cru plus contrôlée et maîtresse d’elle-même. Elle a ainsi imprudemment lancé  dans la nature, la promesse folle que l’Allemagne pourrait accueillir jusqu’à 800 000 réfugiés. Pourquoi pas plusieurs millions, tant qu’à faire. Il est vrai que les Allemandes ayant cessé de faire des enfants depuis plusieurs décennies, l’Allemagne accuse un déficit de population qui se chiffre en millions. Mais de là à vouloir le compenser par une immigration massive de migrants adultes, parlant uniquement arabe,  de confession  musulmane et dépourvus de toute formation professionnelle, il y a un pas qu’Angéla Merkel a allègrement franchi.
Mais la sanction n’a pas tardé avec le refus de la Bavière de s’engager sur ces propositions imprudentes, ce qui menace dangereusement la cohésion de la coalition gouvernementale, laquelle conditionne  le maintien aux affaires de la Chancelière allemande. C’est ici que l’on constate les répercussions immédiates de la crise des migrants sur la politique intérieure des Etats. Et ce n’est pas fini. Voilà ce que c’est que de gouverner au gré des sondages et des mouvements d’humeur des médias. On aurait donné crédit à Angéla Merkel de plus de maturité politique. 


La générosité est presque toujours fille de l’aveuglement et de la précipitation . Sur le plan européen un peu de bons sens est venu des membres de l'Union Européenne du Nord et de l’Est, Pologne, République tchèque, Hongrie, Slovaquie, le Danemark aussi. Ces pays qui ont si longtemps vécu sous le joug soviétique, qui savent fort bien ce que signifient des déplacements de population sous la contrainte. Il ne faut pas leur en compter. Durement éprouvés dans  leur histoire,  ils ont purement et simplement refusé  de s’engager tête baissée dans l’absurde politique de quotas préconisée par la Commission européenne.


Mais au demeurant quelle idée stupide –le mot est faible- a eu  la Commission européenne ,à court d’idées que de vouloir proposer, voire contraindre – et par quels moyens et au nom de quelle légitimité politique- les membres de l’Union européenne à accueillir chez eux plusieurs milliers de migrants venus du bout du monde . Ce mode obtus de répartition comptable aurait eu pour objet de répartir le fardeau de l’immigration de masse, comme on dilue des produits dangereux sur le plus grand volume d’eau  possible pour en réduire la nocivité.


Et cela sans distinguer une seconde la conséquence immédiate de cette proposition : un fantastique appel d’air qui, dans l’instant, va  démesurément gonfler la demande migratoire. Bien sûr,puisque les candidats au grand voyage seraient assurés d‘être officiellement et bien confortablement accueillis dès leur  arrivée en gare.


C’est d’ailleurs l’occasion de constater le genre de personnages dérisoires qui ont été portés à la tête des instances européennes. Ces comptables pathétiques veulent traiter de problèmes géopolitiques majeurs comme ils ont  coutume de le faire au moyen de « directives » pour la composition des fromages vendus dans la communauté européenne ou le rayon des roues des bicyclettes.Il faut savoir rester dans son domaine de compétence.Car la démographie et la géopolitique sont  de la dynamite politique.


Et voilà que les Nations Unies avec l’Office pour les Réfugiés , se mettent à leur tour de la partie. Luxueusement installés dans leur bureaux climatisés, grassement payés et exonérés d’impôts, ils sont évidemment fort bien placés pour faire la morale aux peuples européens . Pour leur excuse, il faut savoir qu’ils sont payés pour cela. C’est leur fonds de commerce après tout. Mais ils voudraient stimuler la xénophobie dans nos pays qu’ils ne s’y prendraient pas autrement.En fait, ouvrons les yeux. L’Europe, ses gouvernements et les institutions qu’ils se sont donnés sont tragiquement inadaptés à la situation à laquelle ils sont confrontés.
Sous peine de catastrophe irréparable, cette situation appelle une réflexion nouvelle, une politique nouvelle, des instruments nouveaux et vraisemblablement des hommes nouveaux pour la traiter. Sinon ce sera inévitablement le chaos et, derrière le recours à des gouvernements autoritaires menant dans l’urgence des politiques de survie.


Car ces migrants qui arrivent en masse ne connaissent ni la langue, ni les lois, ni les mœurs des pays où ils prétendent s’établir. Ils aspirent à une vie meilleure. Mais ils apportent avec eux en contrepartie la promesse de plus de déficit, plus de chômage, avec, en prime, l’Islam, l’islamisme et la promesse d’un terrorisme à venir. Si cette situation persiste, et cela est plus que probable, tout ce que à quoi on peut s’attendre est, dans un premier temps, le chaos, puis ,dans un deuxième, le recours inévitable à des politiques répressives ,forcément liberticides, comme aurait dit l’ineffable Badinter en son temps, destinées à rétablir  et à préserver autant que faire se peut l’ordre public.

 
La situation géopolitique inédite, sans précédent dans l’histoire du monde, à laquelle nous sommes confrontés appelle à une révision déchirante des règles et des lois édifiées depuis 30 à 40 ans en Europe dans un contexte totalement différent . Ces lois sont aujourd’hui inadaptées et il faut en élaborer de nouvelle .


La première remise en cause concerne la libre circulation dans l’espace  de Schengen. Elle avait été conçue pour faciliter la circulation d’une poignée de touristes indolents peu disposés à gaspiller quelques minutes  de leur précieux temps pour un contrôle frontalier ou une pincée  de transporteurs soucieux d’améliorer leur rentabilité en faisant l’économie d’un arrêt  à la frontière. Ce qui a grandement facilité les trafics en tout genre portant sur les armes, la drogue, la prostitution et autres délits.


Il faut rétablir les contrôles aux frontières comme on l’a fait  pour le transport aérien à l’embarquement dans les aéroports afin de prévenir le terrorisme aérien. Ces contrôles sont certes, astreignants, coûteux, fastidieux,mais nécessaires, voire indispensables. Les flots humains liés à l’émigration  de masse ne pourront être contenus qu’avec la suppression de Schengen et le rétablissement de contrôles rigoureux aux frontières. Il faut rétablir la sanctuarisation du territoire national.

 

A563C62531D25DC425C51BD77BFD8AEE.jpg


Mais ce n’est pas tout. C’est aussi à l’intérieur du territoire national qu’il faudra agir,avec des contrôles d’identité aussi fréquents  et rigoureux que nécessaires. A défaut, nos frontières seront des passoires. Et les migrants, une fois passés, se perdront dans la foule comme un poisson dans l’eau.


Mais il faudra aller plus loin encore. Car ce qui est en cause est tout simplement la cohésion interne, toujours fragile, de nos sociétés fondées sur les règles de droit laborieusement élaborées depuis 30 à 40 ans.En réalité, le cataclysme migratoire actuel bouscule dangereusement  l’édifice institutionnel édifié pendant cette période. Cette époque est révolue. A situation nouvelle, règles nouvelles.


Il faut donc purement et simplement mettre un terme au regroupement familial, supprimer le droit d’asile et ses ramifications multiples, effacer le traité de Schengen, rétablir les frontières et mettre véritablement en œuvre, quoi qu’il en coûte, les reconduites à la frontière des migrants illégaux. Il faudra sans doute aussi exercer un certain contrôle sur les médias afin de limiter leur faculté de jouer impunément la carte de l’humanitarisme à tout prix, sans en subir les conséquences.


Et avoir  recours à la force s’il le faut, et aussi souvent qu’il le faudra. Notre survie est à ce prix.

.*Président de l'Institut de Géopolitique des Populations

La stratégie du chaos contrôlé...

ch2459824629.jpg

La stratégie du chaos contrôlé...

par Richard Labévière

Ex: http://metapoinfos.hautetfort.com

Vous pouvez découvrir ci-dessous un point de vue de Richard Labévière, cueilli sur le site des Observateurs et consacré à la stratégie du chaos contrôlé développée avec un certain succès par les Etats-Unis... Ancien journaliste à Radio France internationale et à la Télévision suisse romande, Richard Labévière est spécialisé dans les questions de défense et de relations internationales.

Dae’ch et les autres : bienvenue dans le «monde VUCA» !

L’ensemble de la presse mondiale a, dernièrement commémoré le premier anniversaire de la Coalition internationale qui a déclenché ses premiers bombardements contre des positions de l’organisation « Etat islamique » (Dae’ch) en Irak et en Syrie, le 2 août 2014. Un an plus tard, tout le monde s’étonne que cette « alliance », réunissant quand même les armées les plus puissantes du monde, n’ait pas réussi à éradiquer une organisation constituée de quelque 30 à 35 000 fusils tout au plus. Le même constat vaut également pour Jabhat al-Nosra et les autres résidus d’Al-Qaïda ayant prospéré en Asie, en Afrique ou en Europe.

Pourquoi un tel étonnement, sinon une telle cécité ? La réponse est pourtant aussi claire et limpide que La Lettre volée d’Edgar Allan Poe, posée  là, sous nos yeux, alors que personne ne veut vraiment la voir… Les experts militaires américains, qui donnent le « la » en matière de « guerre contre la terreur » depuis quatorze ans, l’ont dit, redit et écrit : il ne s’agit nullement d’éradiquer le terrorisme, d’en neutraliser définitivement les protagonistes, de casser définitivement ses inspirateurs et d’en assécher les financements. L’objectif principal est de « gérer » son développement, ses mutations et l’évolution de sa cartographie afin d’accompagner la reconfiguration, la modernisation et la diversification de l’hégémonie stratégique, économique et politique des Etats-Unis et de leurs alliés.

En août dernier, le président de la République française - à l’unisson avec ses homologues américains, britannique et allemand -, l’a expliqué très clairement à ses ambassadeurs : « la guerre contre Dae’ch va durer dix, quinze ou vingt ans ». Cette fatalité de la longue durée correspond, non pas à une espèce de complot centralisé ni à une conspiration globale, mais s’inscrit dans la logique d’un « procès sans sujet », conforme aux motivations, aux stratégies et aux intérêts de la mondialisation néo-libérale. Cette incapacité à éradiquer Dae’ch est d’autant plus assumée par les grands décideurs mondiaux qu’ils savent parfaitement que l’action militaire extérieure n’est qu’un segment limité de la panoplie contre-terroriste. Ils savent tout aussi pertinemment que Dae’ch ne pourra être éradiqué durablement sans « assécher » politiquement et idéologiquement l’extrémisme sunnite dont les bailleurs de fonds sont devenus nos meilleurs partenaires commerciaux. Dae’ch est une chose, les affaires en sont une autre : vive la « politique sunnite » de François hollande et Laurent Fabius ! 

Orphelines de l’ennemi communiste, les officines stratégiques du Pentagone, leurs tutelles politiques et les industries de défense occidentales de l’après Guerre froide (garantissant des millions d’emplois et de sous-traitants) devaient impérativement - au risque d’entrer en déshérence -, trouver une autre figure du « mal », définir une menace « globale », autrement dit se fabriquer un nouvel ennemi commun. Ce fût chose faite dès le 11 septembre 2001. Là encore, soyons clairs : il ne s’agit pas de céder à la moindre tentation des théories conspirationnistes et autres « effroyables impostures » ayant fait florès après l’effondrement des tours du World Trade Center, mais bien de restituer rigoureusement pourquoi et comment les administrations Bush successives et celles qui suivirent, ont magistralement « utilisé » cette tragédie afin de pousser leurs pions.

A l’époque, plusieurs économistes réveillés relevaient que le budget du Département américain de la Défense avait enregistré ses hausses les plus importantes depuis la guerre de Corée. Avec un certain étonnement, les mêmes constataient que George W. Bush - digne héritier de Ronald Reagan et de  Margaret Thatcher -, adepte d’un monétarisme des plus classiques et de toutes les recettes les plus libérales, s’était brusquement converti à une politique budgétaire farouchement keynésienne ! En effet, les attentats du 11 septembre 2001 ont fortement contribué à la relance de l’économie américaine qui marquait alors le pas. Mais ce bon usage de la terreur ne profita pas qu’aux seuls investisseurs américains et devait impulser une nouvelle révolution dans les affaires militaires qui s’esquissait depuis la fin des années 90.

Dans les amphithéâtres de l’US-Army-War-College de Carlisle en Pennsylvanie, des professeurs de stratégie militaire commençaient alors à populariser un nouveau concept en quatre lettres pour résumer le monde : VUCA, pour Volatility, Uncertainity, Complexity, Ambiguity. Dans le monde de la fin des années 90, ces experts nous expliquaient que toute espèce de projets et d’actions étaient devenus « volatiles ». Par conséquent, chaque option stratégique était appelée à changer extrêmement rapidement, la visibilité à moyen terme n’étant pas seulement devenue « incertaine », mais proprement impossible. La « complexité » des interactions, des facteurs d’influence et des acteurs devenait la norme, l’ « ambiguïté » étant désormais la règle et non plus l’exception.

Et toujours très positifs, nos amis américains se félicitaient que dans un tel monde devenu « VUCA », l’incertitude ne constituait nullement un problème, mais présentait au contraire une chance à saisir comme levier d’innovation et de performance. « Les acteurs qui réussissent », affirmaient ces professeurs, « sont ceux qui investissent dans la connaissance de soi, cultivent le succès collectif et encouragent l’agilité et la fluidité efficaces ». La loi de la variété requise, développé par R. Ashby en 1956 (dans An Introduction to Cybernetics) stipule que seule la « variété » peut répondre à la variété. En d’autres termes : plus une personne ou un système génère et active « sa diversité », plus elle est capable de s’adapter aux changements provenant de son environnement et d’assurer son existence. Appliquée à VUCA, cette loi nous enseigne que seul VUCA sait répondre à VUCA.

Les nouveaux chefs (militaires, économiques et politiques) doivent donc incarner un « projet de sens » qui libère les engagements tout en laissant s’exprimer les ruses de la volatilité, comme autant d’opportunités à saisir et à utiliser afin de promouvoir des « changements incessants ». L’incertitude invite ces chefs à profiter des situations inédites pour apprendre… Au lieu de renforcer les procédures de contrôles connues et des actions propices à la reproduction du système en vigueur. Ils « trouvent alors le courage de créer des espaces de liberté, de créativité et d’expérimentation rapide ». La complexité oblige les acteurs clés à coopérer et à privilégier le succès collectif. Pour saisir la complexité d’une situation, ses multiples enjeux et ses différents leviers, il est obligatoire de créer des groupes divers, transversaux et hétérogènes. Pour trouver des solutions véritablement innovantes, il s’agit donc de travailler en grand groupe, d’oser le chaos provisoire, de privilégier l’expérimentation ciblée au lieu de déployer un plan convenu. Sont alors privilégiées « les dynamiques alternatives ». L’ambiguïté se manifeste à travers des figures ambivalentes, par la non-cohérence d’un projet, le mélange des responsabilités, les multiples interprétations d’un concept. Cette ambiguïté doit devenir la culture dominante des nouveaux chefs : celle consistant à vivre avec une variété de solutions au lieu de s’attacher à l’obsession de la clarification, à la recherche d’une cohérence, ainsi qu’à celle d’une quête de « la » solution à déployer. Dans un monde VUCA, rien n’est acquis d’avance, rien n’est durablement stable et tout est opportunité !

Enfin, nos professeurs édictaient cinq principes à l’usage des nouveaux chefs voulant réussir « dans la joie » : 1) dans un monde VUCA, l’agilité d’une organisation se débloque en passant de la réaction à l’action par le « sens » ; 2) dans un monde VUCA, tout se transforme quand le système se libère d’une obsession de performance opérationnelle pour privilégier la recherche d’excellence relationnelle ; 3) dans un monde VUCA, le chaos devient créateur, le vide faisant place à de nouvelles solutions ; 4) dans un monde VUCA, l’individu peut se sentir perdu mais l’intelligence collective en action s’affirmera comme le nouveau levier de performance ; 5) Dans un monde VUCA, la notion de « leadership » est renversée pour laisser place à la puissance d’une nouvelle posture … celle du « Followership ». Bref, dans ce meilleur des mondes possibles, les chefs et, en définitive tous les acteurs qui savent conjuguer la joie et le « sens » vont être en mesure d’inventer des formules inédites de performance.

C’est presque aussi bien que La Richesse des nations d’Adam Smith et c’est à Donald Rumsfeld - secrétaire d’Etat à la Défense (2001-2006) - que l’ont doit l’application de cette idéologie aux affaires militaires. Sans y changer une seule virgule, la première administration Obama renonçait ainsi aux réponses classiques : les guerres conventionnelles et de contre-insurrection. On assistait alors à des redéploiements élargis dans les zones économiques et stratégiques considérées prioritaires pour les grandes sociétés (armements, aéronautiques, BTP et infrastructures, etc.). Enfin, selon un officier général des Forces spéciales, le Pentagone cherchait à maintenir autant que faire se peut la « clandestinité la plus totale afin de privilégier des campagnes médiatiques et de communication parfaitement maîtrisées ».

ben87424904.jpgEn juin 2014, dans une conférence publique tenue à Beyrouth, nous expliquions alors, que cette « non doctrine » militaire s’articulait sur sept piliers : 1) montée en puissance des forces spéciales ; 2) prééminence du renseignement ; 3) extension de la géographie des drones ; 4) choix de la cyber-guerre ; 5) développement d’ « armées de substitution » ; 6) formation et manœuvres avec les partenaires ; et enfin 7) médiatiser et communiquer. Ce dernier pilier chapeaute l’ensemble ! Le plus vieux métier du monde ! Pour qu’elle atteigne ses objectifs, toute opération militaire doit être non seulement comprise mais aussi « partagée » par les opinions publiques du ou des pays qui la mènent. Sont alors appelés en renfort les bataillons de journalistes « embeded » chargés d’expliquer et de diffuser les raisons et le phasage de la « guerre juste », forcément juste. Au hardpower des armées doit s’adjoindre organiquement le softpower -madame Clinton préfère parler de smartpower -, des journalistes, des « experts » et autres « communicants ». Ces sept piliers requièrent, non pas la « sagesse » de Lawrence d’Arabie, mais une transparence imposée, c’est-à-dire opaque, la clandestinité et le secret.

Dans le meilleur des mondes VUCA possibles, Dae’ch, Al-Qaïda, Nosra et les autres ne peuvent et ne doivent pas être éradiqués parce qu’ils sont absolument nécessaires à la reconfiguration permanente du « sens », de la « joie » et des « profits » des nouveaux chefs militaires, économiques et politiques du monde. Sur le plan intérieur, les recettes VUCA servent tout aussi bien à déconstruire les frontières nationales, le droit du travail et toute autre loi garante du contrat social des vieilles républiques pour nous convertir aux fluidités multiples d’une mondialisation heureuse où tout devient possible et principalement le retour à l’état de nature où règne, en définitive, la loi du plus fort.

Lorsque notre ami Alain Joxe souligne, à juste titre, que les Etats-Unis ont régulièrement perdu les guerres asymétriques qu’ils ont déclenchés depuis la fin de la Guerre froide, il n’en tire pourtant pas la conclusion ultime : ces défaites apparentes sont en réalité des victoires inestimables pour les stratèges du Pentagone, de Tel-Aviv, de Wall Street, de la City et de Bruxelles. D’un état de non guerre conventionnelle, les délices du monde VUCA nous embarquent dans celui d’une guerre asymétrique généralisée, permanente et nécessaire. 

Richard Labévière (Les Observateurs, 15 septembre 2015)

Le 11 septembre de Paul Jorion

jorion.jpg

Le 11 septembre de Paul Jorion

 

Le 11 septembre est décidément une date propice au totalitarisme ultralibéral. 1973, la dictature de Pinochet qui a fait du Chili le laboratoire de l’économie dite de l’offre, 2001, les attentats qui ont permis de déclencher un état de guerre permanent au Moyen Orient dans le plus grand intérêt du complexe militaro-industriel qui est un des principaux lobbies économique et financier dans le monde.

paul jorion,économie,belgique,scandaleSans doute, ce 11 septembre 2015 signifie pour l’anthropologue belge spécialiste de la finance et analyste indépendant, la fin de sa carrière académique. Paul Jorion est démuni de sa charge professorale à la VUB (l’Université Libre de Bruxelles du rôle linguistique flamand Vrij Universiteit Brussel) parce que son influence de plus en plus grande dans les médias, au niveau du public et même des milieux académiques, commençait à gêner les tenants de la pensée unique derrière lesquels se cachent les grands lobbies financiers.

Paul Jorion empêché de s'exprimer par la police de la pensée économique "orthodoxe"

En effet, selon l’hebdo financier Trends Tendance : « Paul Jorion a reçu son préavis voici quelques jours. "Trois reproches me sont faits, explique-t-il. Le premier est que je ne parle pas l'anglais correctement. J'ai vécu 23 ans en Angleterre et enseigné à l'université de Cambridge. On ne m'a jamais dit que mon anglais n'était pas correct. Le deuxième est que les étudiants qui travaillent sont laissés à l'abandon. Ils ont pourtant accès aux vidéos et aux résumés de mes cours. Le troisième, ce sont les plaintes incessantes des étudiants. Pourtant, sur trois années, je n'ai pas eu connaissance d'une plainte d'un étudiant."

A moins qu'il s'agisse de plaintes « suggérées », procédé typique de la police de la pensée...

Pour Paul Jorion, ces motifs sont "fantaisistes" et la véritable cause est à chercher ailleurs. "On ne vous dit pas: on n'aime pas la manière dont vous parlez d'économie". Mais pour l'anthropologue et ancien trader belge, c'est bien de cela qu'il s'agit. »

Paul Jorion était titulaire de la chaire «Stewardship of Finance» à la VUB. Il fait partie du Haut comité pour l’avenir du secteur financier belge ainsi que du Groupe de réflexion sur l’économie positive dirigé par le Français Jacques Attali, selon son curriculum sur son site. Il a enseigné aux universités de Cambridge, Paris VIII et à l’Université de Californie à Irvine. Il a également été fonctionnaire des Nations-Unies (FAO), participant à des projets de développement en Afrique. Paul Jorion a travaillé de 1998 à 2007 dans le milieu bancaire américain en tant que spécialiste de la formation des prix. Il avait préalablement été trader sur le marché des futures dans une banque française et est l’auteur de nombreux ouvrages. Il est en outre chroniqueur au « Monde » et à « l’Echo ».

Il s’explique dans cette vidéo. Et les conséquences sont sérieuses pour lui : non seulement il est écarté sur le plan professionnel, mais ses moyens étant réduits, il ne pourra plus s’exprimer comme avant.

 

Cela dure onze minutes, mais cela vaut la peine d'écouter jusqu'au bout.

Paul Jorion n’enseignait l’économie non dans une faculté de science économique, mais à la faculté de droit de la VUB. Pour expliquer son licenciement, il se réfère à un article de Laura Raim dans le Monde diplomatique du mois de juillet 2015, intitulé : « Police de la pensée économique à l’Université ». Il n’hésite pas à dire que ce n’est plus de la science que l’on enseigne en la matière, mais on diffuse de la propagande sous le couvert de formules mathématiques dont on assomme les étudiants afin qu’ils ne puissent exercer leur esprit critique.

Pour Jorion, la véritable science économique est l’économie politique liée à l’histoire de l’économie et non cette économie mathématique réductrice et basée sur les dogmes du néolibéralisme, comme, par exemple, le « pouvoir autorégulateur » du marché mieux connu sous le nom de « main invisible » d’Adam Smith, ou encore la « rationalité » de l’individu face au marché, rejetant ainsi toute structure sociale.

Laura Raim qui parle surtout de la situation française, mais qui est similaire à celle d'autres pays européens dont la Belgique, dont, comme on vient de le voir, la Belgique, explique :

raim.jpg

Laura Raim : une économiste française « hétérodoxe » qui ne craint pas d'affronter la pensée unique.

« Les représentations et préconisations des économistes exercent une forte influence sur les politiques publiques. Or, depuis une vingtaine d’années, les chercheurs hétérodoxes, c’est-à-dire tous ceux qui ne souscrivent pas à l’école néoclassique, soit à peu près un tiers des économistes français, sont exclus des positions-clés de la profession. S’ils parviennent encore à se faire recruter comme maîtres de conférences, le courant majoritaire leur verrouille l’accès au grade supérieur de professeur des universités. (…)

Comment en est-on arrivé là ? L’école néoclassique monte en puissance depuis l’avènement de l’économie moderne, à la fin du XIXe siècle, puis reflue dans les années 1930. L’approche de John Maynard Keynes, qui tire les leçons de la Grande Dépression en conférant à l’Etat un rôle central, s’impose alors comme nouvelle orthodoxie économique des politiques publiques. Lorsque le keynésianisme atteint à son tour ses limites face au contexte de stagflation (faible croissance et forte inflation), à la fin des années 1960, la théorie néoclassique revient en force avec les monétaristes et le courant des anticipations rationnelles.

paul jorion,économie,belgique,scandaleLes hétérodoxes actuels émergent au même moment, en opposition à cette résurrection du paradigme néoclassique. Marxistes, postkeynésiens, régulationnistes et conventionnalistes ont en commun d’inscrire leur discipline dans le champ des sciences sociales et de porter une attention particulière aux aspects historiques, juridiques et politiques du fonctionnement de l’économie. Cherchant à décrire la société telle qu’elle existe vraiment, ils s’opposent à une représentation mécaniste et individualiste dans laquelle des agents mus par une rationalité instrumentale interagissent dans des multitudes de marchés.

Intégrant au fur et à mesure les critiques hétérodoxes, la théorie néoclassique se polit, admettant que l’information peut être asymétrique et la concurrence imparfaite... Reste que « les néoclassiques ne se sont pas imposés par la force ou la justesse de leurs idées, mais par des stratégies de colonisation institutionnelle », insiste Sophie Jallais, maîtresse de conférence à Paris-I. Dans la plupart des disciplines, pour être recrutés comme maîtres de conférences ou comme professeurs, les candidats doivent être « qualifiés » par le CNU, avant d’être sélectionnés par les « commissions de spécialistes » de chaque université. Mais, jusqu’à l’année dernière, la section d’économie dérogeait à ce principe pour le recrutement des professeurs, qui passait principalement par le concours d’agrégation du supérieur. (…)

La situation française reflète ce qui se passe ailleurs. Les universités anglo-saxonnes ne recrutent plus que des professeurs néoclassiques, susceptibles de publier dans les revues bien cotées. Au Royaume-Uni, par exemple, l’ancien bastion keynésien de Cambridge s’est progressivement vidé de tous ses professeurs hétérodoxes. « Le grand épistémologue et historien de la pensée économique Tony Lawson n’a plus le droit de donner des cours d’économie ; il est obligé de donner des cours d’économétrie et de mathématiques », raconte Dany Lang, maître de conférences à Paris-XIII. Après la crise, à l’université de Kingston, quelques postkeynésiens ont essayé de développer un master critique. Ils ont notamment recruté Steve Keen, qui s’était fait renvoyer de sa faculté en Australie alors qu’il était l’un des seuls à avoir anticipé la crise des subprime. Aux Etats-Unis, mis à part à la New School de New York, « l’hétérodoxie a été décimée partout. Il ne reste plus que des postkeynésiens isolés, éparpillés et trouvant souvent refuge dans les facultés de sciences sociales, les business schools ou dans les premiers cycles des petites universités publiques », constate l’économiste américain James Galbraith. (…)

Le retour en vogue de Keynes et de Karl Marx que l’on observe dans la presse et dans l’édition n’atteint pourtant pas le monde de la recherche, imperméable à toute remise en cause. Dans sa missive, Tirole s’enorgueillit des « centres d’excellence en économie qui ont émergé en France ces trois dernières décennies » et qui « forment aujourd’hui des économistes que les régulateurs, organismes internationaux et entreprises s’arrachent ». Le fait que ces « centres d’excellence » n’aient pas produit des économistes critiques, susceptibles d’alerter sur les dangers de la financiarisation, ne l’effleure manifestement pas. Droit dans ses bottes, il continue de mépriser souverainement les courants minoritaires, parlant d’eux comme d’un « ensemble hétéroclite en difficulté avec les normes d’évaluation internationalement reconnues », et les rappelle à l’ordre : « Chercher à se soustraire à ce jugement [des pairs] promeut le relativisme des connaissances, antichambre de l’obscurantisme. »

Donc nous nous trouvons en matière d’enseignement de l’économie devant

1) Un refus d’inscrire l’enseignement de l’économie dans le contexte des sciences sociales et de porter attention aux aspects historiques, juridiques et politiques du fonctionnement de l’économie.

Celle-ci devient une sorte de religion absolue se trouvant au-dessus des hommes et refusant la moindre objection, le moindre regard critique.

2) On assiste à une colonisation institutionnelle de l’université qui impose l’économie orthodoxe et rejette toute critique keynésienne et bien entendu, marxiste. Elle empêche ainsi aux économistes hétérodoxes de s’exprimer et encore plus d’enseigner.

C’est la police de la pensée au service du Big Brother ultralibéral qu’on a affublé du visage cireux d’Adam Smith.

Et il est de notre devoir de permettre à Paul Jorion de pouvoir continuer à diffuser ses idées et sa pensée comme avant.

Oui, nous sommes vraiment le 11 septembre.

Pierre Verhas

00:05 Publié dans Actualité, Economie | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : paul jorion, économie, belgique, scandale | |  del.icio.us | | Digg! Digg |  Facebook

Is ISIS Conquering Europe With Immigrants ?

 

Islamic-State-Migrants-to-Flood-Europe-From-Libya-ISIS-Flood-Europe-With-Migrants-From-Libya-Italy-Il-Messaggero-Newspaper-Immig-559210.jpg

Is ISIS Conquering Europe With Immigrants ?

Ex: http://journal-neo.org

By Witold Gadowski and Konrad Stachnio

I am talking with Witold Gadowski, a well-known Polish journalist and co-author of Insha Allah Martyrs blond. The first picture tells the story about the Islamic State and suffering of Christians. The film premiere will be held in Spain and Paris.

Whether ISIS has something to do with the current crisis of immigration in Europe?

At the moment the whole activity of the headquarters of the Islamic State is directed to export the Islamic ideology in the interpretation of Abu Bakr al-Baghdadi. Hundreds of young people trained in the Islamic State are now sent as refugees to Europe and North America. Just talk to the spokesman of Western special services to confirm this trend. The training which took place almost officially in Turkish military camps, at the moment it is held in secret. I have seen this training. Volunteers for the Islamic ‘revolution’ are currently becoming a large stream flowing from the former republics of the Soviet Union, mainly Tajikistan, Uzbekistan, Kyrgyzstan, Kazakhstan and the flow from China. It is currently the largest recruitment area. The Islamic State army no longer needs as many volunteers as it did. It does not lead such large operations on land as it did a few months ago. Of course, there are also Chechens, but they are highly valued as officers and experienced guerrillas.

Do you think that Islamic terrorism will be carried out in Europe on a solo terrorist tactics and strategies of a lone wolf?

Well-paid professionals have already built a virtual network a long time ago in different countries that are continually being infected by this ideology. So the activities of these lonely wolves who can commit suicide attacks can be carried out anywhere in Europe.

The economics of terrorism says: we attack where we can terrorize the public opinion the most, where people will be agitated about this fact for at least a week or two. While deciding to attack Charlie Hebdo they knew what they were doing because even after a month from the attack people held marches. They simply brought fear in.

What do the current terrorist networks consist of ? If we are using a bomb, but nobody talks about it, then this bomb brings no effect. If we are forcing the bomb in Baghdad where about 100 people died, it is news only for one day as there are bombs exploding daily  and people are not interested in following these developments. When somewhere in the center of the “free world” we are killing women and children, then fear starts becoming a factor. The economics of the terrorism has always been the same since 1972, when the Black September attacked the Olympics in Munich. Now the terrorism acts through media. These images of violence are being copied millions of times and it is them that terrorize. It is a purpose of terrorists. Killing particular people is not bringing such effects as intimidating the public opinion.

ISIS is an extremely intelligent creature because the people in charge of the activities of ISIS learned from the operation carried out by the Americans against Taliban in Afghanistan. ISIS never creates large miliwashboard formations, and if it creases them then they are placed in civilian areas. So the greatest numbers of ISIS units are located in Mosul. Why? – because it is a 1,5 million city. Bombing ISIS units infests a humanitarian disaster on civilians. This is carnage and none of the free country governments wants to be part of. ISIS is perfectly aware of that. ISIS do not use radio communicators at all. They learned this on the case of Al-Qaeda and earlier on Chechen cases as well. Dudayev was killed because of a satellite phone so all the information is provided through few couriers. These couriers transmit information very quickly. There is no radio, Internet connections or any other electronic way that could be traced by the American system. That is why they are dangerous because they always attack under cover of darkness, turmoil, etc. Then they leave their places very quickly where they live normally. We won’t distinguish ISIS fighters from civilians. Going into every village we only see the religious police, and those people who guide street movement and so on. But we do not see the ISIS units. They are all hid in private homes. At one moment when it comes orders they can leave many places and strike in one place. This is the strategy of ISIS. Besides, they change strategy all the time. Kurds told us that t ISIS attacks differently all the time. Americans do not have a chance to win this war from the air.

Whether you think that ISIS can prepare in Europe some bigger action?

In Dabiq magazine in three articles I read about Rome, the Pope and the anticipated activities of the Islamists against the Pope and Rome. One of the covers of Dabiq is the Saint Peter’s Basilica with the black banner of the Prophet waving over it. One of the main articles of the magazine says that the Islamists want to conquer Rome. In their way of thinking today Rome stands for the West. This article is simply a call to kill the Pope, as the representative of Rome – that is one reason.

They always announce it. When they killed the Dutch filmmaker, they had earlier reported that they would kill him and they did. Considering Charlie Hebdo they also previously served the information that they would take care of them and finally killed them. The bombings in Madrid and London were also announced, in the end they did it. So I would not have played down their announcement. Yes they lead a strong propaganda war, but it goes along with a particular activity.

Konrad Stachnio is an independent Poland based journalist, he hosted a number of radio and TV programs for the Polish edition of Prison Planet, exclusively for the online magazine “New Eastern Outlook”.

samedi, 19 septembre 2015

Dominique Venner’s The Shock of History: Religion, Memory, Identity

Dominique Venner’s The Shock of History: Religion, Memory, Identity

VennerShock

Dominique Venner
The Shock of History: Religion, Memory, Identity
London: Arktos, 2015
156 pages

hardcover: $37.50

paperback: $21.45

Kindle e-book: $4.50

The shock of history: we live it, neither knowing or comprehending it. France, Europe, and the world have entered into a new era of thought, attitudes, and powers. This shock of history makes clear the fact that there is no such thing as an insurmountable destiny. The time will come for Europe to awaken, to respond to the challenges of immigration, toxic ideologies, the perils of globalism, and the confusion that assails her. But under what conditions? That is the question to which this book responds. Conceived in the form of a lively and dynamic interview with a historian who, after taking part in history himself, never ceased to study and reflect upon it. In this text, the first of his major works to appear in English, Dominique Venner recounts the great movements of European history, the origin of its thought, and its tragedies. He proposes new paths and offers powerful examples to ward off decadence, and to understand the history in which we are immersed and in which we lead our lives.

Contents

Foreword
Editor’s Note
1. Introduction
2. From Action to Reflection
3. Decline or Rebirth?
4. Hidden and Heroic Europe
5. In the Face of Death
6. An Adventurous Heart
7. Where We Came From
8. Europe’s Shattered Memory
9. The Shock of History and Ideas
10. Homer: Remembering Our Origins
11. Mysticism and Politics
Epilogue: History and Memory
About the Author
Index

About the Author

Dominique Venner (1935-2013) was a French writer and historian. He wrote over fifty books about history, specialising in the history of weapons and hunting. He served as a paratrooper during the Algerian War, and was jailed for 18 months for his involvement with the Organisation of the Secret Army, which sought to retain French Algeria through armed insurrection. He was subsequently involved in a decade of intense political activism, and also worked with Alain de Benoist’s ‘New Right’ organisation, GRECE. Before his decision to publicly end his life in 2013, the goal of which was to awaken the minds of his European compatriots, he was in charge of the Nouvelle Revue de l’Histoire. His last book, Un Samouraï d’Occident, was published shortly after his death.

hardcover: $37.50

paperback: $21.45

Kindle e-book: $4.50

Haro sur le Brésil !

fan-brésil-mondial-2014.jpg

LE BRÉSIL À GENOUX

Haro sur le Brésil !

Michel Lhomme
Ex: http://metamag.fr

Le Brésil vient de connaître des manifestations anti-gouvernementales monstres et le gouvernement de Dilma Rousseff, contesté de toutes parts, est totalement fragilisé. Près de 900 000 Brésiliens ont manifesté le dimanche 16 août pour exiger le départ de la présidente de gauche Dilma Rousseff, embourbée dans une triple crise économique, politique et de corruption. La présidente brésilienne bat des records d’impopularité. Avec une cote qui a chuté à 8%, elle concentre toutes les critiques dans un pays déchiré et l'on évoque même une improbable démission. Bref, le Brésil va mal, le Brésil est à genoux.

Pour les États-Unis, c'est le bon moment pour réactiver des relations diplomatiques gelées depuis septembre 2013, date de la révélation par Edward Snowden de l'écoute des conversations téléphoniques et de la lecture secrète des mails de la Présidente et de ses conseillers par l'Agence Nationale de Sécurité (NSA) des Etats-Unis. Pour exprimer son mécontentement, la Présidente Dilma Rousseff avait alors annulé la visite officielle qu'elle devait effectuer à Washington et son Ministre de la Justice avait qualifié les écoutes comme « une violation inacceptable de la souveraineté ». Depuis deux ans, les relations entre les Etats-Unis et le Brésil étaient donc tendues et au point mort. Depuis, on a vu côte à côte le Président Obama et Dilma Rousseff converser ensemble au pied du Mémorial de Martin Luther King à Washington lors de leur dernière réunion à la Maison Blanche, le but de cette rencontre très officielle de juin dernier étant de relancer les relations diplomatiques et les échanges commerciaux entre les deux pays.


Du coté américain, on insista : « Je crois que cette visite indique véritablement à quel point nous avons tourné la page et à quel point nous sommes en train d'avancer », déclara en conférence de presse le secrétaire adjoint à la Sécurité Nationale de la Maison Blanche, Ben Rhodes. Déjà, en avril 2015, à Panama, lors du sommet des Amériques, les États-Unis avaient été bienveillants. Michael Shifter, président du centre d'analyses Dialogue Interaméricain avait déclaré : « Laissons derrière nous l'affaire Snowden ». Snowden nous avait prévenus : le contrôle du Brésil et de l'Allemagne sont des objectifs prioritaires des États-Unis, une question vitale. Le contrôle américain du Brésil et de l'Allemagne est plus que jamais au centre de leur actualité géostratégique. Pour le Brésil comme pour l'Allemagne, cela concerne les thèmes climatiques du moment mais surtout la défense, la sécurité régionale et globale, le positionnement stratégique de l'hyper Empire en Amérique latine ou sur le continent européen, sans oublier toute une série d'accords commerciaux officiels.


En ce qui concerne ces derniers, dans son dernier voyage aux Etats-Unis, Dilma Rousseff s'était réunie avec la communauté financière de New-York et de Washington. Plus de vingt patrons brésiliens ayant des affaires aux Etats-Unis et près de 470 chefs d'entreprises américains s'étaient rassemblés lors d'un séminaire commun avec la Présidente brésilienne. Elle leur avait alors présenté son programme de réforme fiscale et un vaste plan d'aide à l'investissement représentant près de 64 milliards de dollars dans lesquels on relevait des méga projets comme la construction de terminaux pétroliers, de nouveaux aéroports, la construction de lignes de chemin de fer et d'autoroutes. En clair, le Brésil se présentait comme au seuil d'une nouvelle phase de construction d'infrastructures, d'un nouveau cycle de croissance faisant partie d'une stratégie globale de mesures visant à contrôler l'inflation et à rechercher des équilibres fiscaux .

3431788_3_d01e_manifestation-au-bresil-lundi-17-juin_74822210bbf2ed8ad99c17d3522a61d4.jpg


Aujourd'hui, l'investissement américain au Brésil représente 116 milliards de dollars. Les États-Unis sont le premier investisseur du Brésil et son deuxième partenaire commercial - le premier étant la Chine - avec un échange commercial avoisinant les 62 milliards de dollars, selon les chiffres officiels de 2014. Or, selon Mark Feierstein, responsable de l'Amérique latine au Conseil de Sécurité nationale de la Maison Blanche, le pari de Washington est de doubler en une décennie cet échange commercial avec le Brésil.


Du coup, la crise politique brésilienne, c'est l'aubaine, le bon moment pour les États-Unis pour sauter sur le Brésil. La très faible popularité de Dilma Rousseff, affectée principalement par le scandale de corruption qui touche depuis des mois l'entreprise nationale Petrobras la fragilise et la jette tout naturellement dans les bras de son protecteur naturel : Washington. Ce scandale a laminé le parti au pouvoir mais aussi les relations diplomatiques du Brésil avec ses voisins (comme le Pérou dont certains membres dirigeants du gouvernement actuel et précédent sont soupçonnés d'avoir aussi reçu des pots-de-vin d'entrepreneurs brésiliens lors de la construction de l'autoroute transamazonienne). 


Le Brésil est aussi en crise économique et sociale et c'est bien pour cela que les Etats-Unis sont au pas de la porte pour assurer aux yeux du gouvernement brésilien qu'il peut vraiment compter sur eux. Brasilia le croit : comment pourrait-elle en douter ? Les États-Unis ont soutenu l'impopulaire plan fiscal de Rousseff, un paquet hétéroclite de mesures d'austérité visant à combler l'endettement du pays et un véritable agenda bilatéral a été signé entre les deux pays qui révèle un accord politique au plus haut niveau. Dilma Rousseff au pied du mur a rompu avec le nationalisme souverain et le multilatéralisme. Elle réactive l'interconnexion de la dépendance du Brésil avec les Etats-Unis. La donne est donc bien en train de changer par rapport à ce que nous écrivions précédemment sur le pays. Par défaut, Dilma Rousseff est redevenue pro-américaine.


L'économie brésilienne est la première d'Amérique latine et la septième du monde. Le Brésil fait partie des Brics et pour nous, il faisait partie de cet espoir d'un monde multilatéral et d'une alternative au mondialisme présent. La crise politique brésilienne ralentit au Brésil ses velléités d'indépendance. Cette crise politique se double d'un net ralentissement économique qui dure depuis cinq ans. Il est loin de s'arrêter. On table seulement pour 1,2 % de croissance pour 2015 selon les chiffres officiels du gouvernement. C'est peu. De plus, les achats chinois risquent de se ralentir considérablement en raison des problèmes boursiers de Pékin. Au Département d'Etat américain, on jubile car on avait eu très peur. On parle dorénavant entre Washington et Brasilia de détente, de « bonne atmosphère, d'entente appropriée », on déclare que « la relation entre les deux pays progresse à pas solides ». Ce retour diplomatique du Brésil aux Etats-Unis coïncide d'ailleurs avec les intérêts commerciaux de nouveaux entrepreneurs américains pressés de s'installer en Amérique latine dont le Brésil est le fer de lance. Pour la COP 21, dernier éclat de son règne, Barack Obama vient d'exprimer le souhait que le Brésil s'engage à réduire ses émissions de gaz à effet de serre et de carbone à partir de 2020, ce que le pays n'a pas encore fait.


Il y a donc à la fois une offensive américaine sur le Brésil et un réalignement de l’économie et de la politique extérieure du Brésil sur Washington. Les élites brésiliennes se repositionnent, elles retrouvent les vieux réflexes et critiquent maintenant ouvertement les politiques des Brics (Brésil, Russie, Inde, Chine, Afrique du Sud), de l’Union des nations sud-américaines (Unasur), du Marché commun du Sud (Mercosur). De nouveau, les groupes dirigeants, le patronat brésilien défendent le retour de la Zone de libre-échange des Amériques (ZLEA, Alca en espagnol). 


En gros, on assiste en direct à un retour d'un néo-libéralisme pro-américain des plus classiques. Alors, en un an, le Brésil aurait-il tourné sa veste ou est-il tombé dans le filet ?

Collège: la réforme qui démolit les disciplines

Schueler.jpg

Collège: la réforme qui démolit les disciplines

L'interdisciplinarité est la pièce maîtresse de la lutte contre l'ennui qui minerait le collège. Une vision idéologique et dangereuse !

Par
Ex:http://www.lepoint.fr
Sur le même sujet:
 
 
 

00:05 Publié dans Actualité, Ecole/Education | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : école, enseignement, éducation, france | |  del.icio.us | | Digg! Digg |  Facebook

Ernst Jünger: La guerre, fabrique de la bravoure

ej.jpg

Ernst Jünger: La guerre, fabrique de la bravoure

par Hélie Destouches

Ex: http://www.lerougeetlenoir.org

« Élevés dans une ère de sécurité, nous avions tous la nostalgie de l’inhabituel, des grandspérils. La guerre nous avait saisis comme une ivresse. » [1]

Dès les premières lignes d’Orage d’acier, Ernst Jünger dépeint la léthargie dans laquelle sont nés, pour la jeunesse allemande de 1914, l’attrait irrésistible du front, la soif d’aventure, besoin physique de danger et de violence. Ils allaient connaître une violence inédite, celle de la guerre moderne, loin des rêveries d’épopées héroïques. Une violence déshumanisée. La guerre de position, le pilonnage continu de l’artillerie industrielle, la mort anonyme. Dans les récits de guerre qui fleurirent dès le lendemain des démobilisations, de 1918 jusqu’en 1920, il ressort une image uniforme du profond choc causé par le dépassement de tous les seuils de tolérance devant la brutalité ordinaire de la guerre de tranchées. Les bombardements, les assauts – brèves et mortelles montées à la surface – et l’entassement de cadavres sans sépulture, autant d’expériences qui égrainent un quotidien déjà saturé de violence.

Les traces physiques et morales portées par les hommes ont marqué leurs témoignages. Elles forment la trame qui sous-tend toute la littérature de guerre, de Roland Dorgelès à Erich Maria Remarque. Du grand dolorisme qui imprègne cette production, il est néanmoins une œuvre qui se détache radicalement.

Ernst Jünger, le guerrier et l’écrivain

Né en 1895 à Heidelberg, en plein apogée wilhelminien, Ernst Jünger manifeste dès sa jeunesse la fibre littéraire qui fera de lui l’écrivain de guerre de langue allemande le plus essentiel du XXe siècle. Son cheminement semblait, dès le début, tendre au mystique, exalté dans l’admiration pour les penseurs formalistes, empreint de l’héritage nietzschéen et du lyrisme de Hölderlin, naturellement enclins à l’apologie du guerrier. Il gravite notamment dans la proximité du George-Kreis, noyau informel de ce qui deviendra la frange aristocratique de la révolution conservatrice, et s’engage auprès des Wandervögel. En 1912, âgé de 17 ans, il revêt une première fois l’uniforme au sein de la légion d’Afrique. Engagement armé et inspiration littéraire s’entrecroisaient déjà, dans la quête d’une violence encore pure et brutale qu’il espérait trouver sur le continent noir.

Ernst Jünger décoré de la croix Pour le mérite

 

Lors de l’appel aux armes, en août 1914, Jünger fait partie des troupes volontaires. Il rejoint le 72e régiment de fusilier en Champagne. Dès lors, il ne quitta plus le front, et obtint plusieurs promotions dans les rangs de la l’armée impériale. Après s’être formé en tant que sous-officier, il obtiendra dans les dernières années du conflit le grade d’Oberleutnant à la tête de la 7e compagnie. La position d’officier subordonné, c’est-à-dire d’officier de tranchée, marque profondément l’expérience combattante de Jünger. C’est la position clef du combat rapproché, de la guerre vécue. En tant qu’Oberleutnant, il est la tête d’un corps combattant abandonné dans le no-man’s-land, coupé de l’arrière. Le modèle de courage, le chef qui doit entraîner ses hommes au combat ; « L’officier occupe sa place : dans toutes les circonstances, la plus proche de l’ennemi. » [2]. Son engagement de soldat puis d’officier lui vaudra quatorze blessures et la suprême décoration impériale de la croix Pour le mérite.

En 1920, alors qu’il sert encore dans l’armée de la République de Weimar, il publie l’opus majeur de son œuvre de guerre, Orages d’acier (In Stahlgewittern). Il est puisé par ses carnets de guerre, scrupuleusement rédigés au fil des affrontements et des périodes d’accalmie. Dans ce premier ouvrage, Jünger développe de manière inédite l’expérience du combat, exposant la relation brute et cinglante de l’individu avec la violence de guerre, à la fois comme figure littéraire fondamentale et comme objet central pour une conception de l’existence dans la modernité du monde. Orages d’acier forme le tronc d’une ramification composée d’un essai, La guerre comme expérience intérieure (Der Kampf als inneres Erlebnis – 1922) et d’ouvrages de moindre ampleur, qui s’ajoutent peu à peu dans les années suivantes à partir des carnets inexploités. Lieutenant Sturm (Sturm – 1923), Le boqueteau 125 (Das Wäldchen 125 – 1924) et Feu et sang (Feuer und Blut – 1925) donnent des points de focalisation détaillés sur des aspects particuliers du combat, variant l’approche et le traitement. Chez Jünger, la narration est souveraine, brutale, précise – une écriture qui ne tremble pas, même devant l’horreur – et c’est dans La guerre comme expérience intérieure que se déploie le véritable sens donné au combat, la mystique guerrière. Ses écrits se répondent et ne peuvent véritablement être dissociés les uns des autres.

La guerre au cœur de l’homme

La guerre que décrit Jünger n’est pas un phénomène volontaire, une contingence diplomatique, ou, suivant la formule de Clausewitz, de la politique poursuivie avec d’autres moyens. La guerre trouve sa cause première dans l’homme, dans sa nature archaïque. Elle ne commence pas avec une déclaration de guerre, elle ne se termine pas avec un traité de paix. La guerre est un état perpétuel qui, bien qu’il puisse être contenu sous le vernis de la culture policée, ressurgit immanquablement. « La guerre n’est pas instituée par l’homme, pas plus que l’instinct sexuel ; elle est loi de nature, c’est pourquoi nous ne pourrons jamais nous soustraire à son empire. Nous ne saurions la nier, sous peine d’être engloutis par elle. » [3]. Le profond besoin de violence guerrière, gravé dans la chair des hommes, s’étend comme un lien indéfectible entre le montagnard armé d’une massue et de pierres, et le soldat des tranchées sous la pluie de feu et d’acier. Lorsque la guerre éclate, qu’elle embrase tout, il ne reste qu’une alternative : se battre ou disparaître. Cela vaut pour les civilisations, cela vaut pour chaque individu ; « Le fort seul a son monde bien en poigne, au faible il glisse entre les doigts dans le chaos » [4].

Mais la violence combattante - la pulsion qui pousse irrésistiblement au combat - n’est pas une résurgence d’un bas instinct qui abîme les hommes dans la brutalité gratuite. Jünger la conçoit au contraire comme la marque d’une antique noblesse, qui relève l’humanité de son affaissement. « Nous avons vieilli, et comme les petits vieux nous aimons nos aises. C’est devenu un crime d’être davantage ou d’avoir plus que les autres. Dûment sevrés des fortes ivresses, nous avons pris en horreur toute puissance et virilité ; la masse et l’égalitaire, tels sont nos nouveaux dieux. » [5] Pour Jünger, la force combattante, la nature guerrière de l’homme, est ce qui permet à l’homme de s’élever au dessus de ses semblables et aux civilisations d’inverser le cours de leur décadence pour renouer avec la grandeur. Une forme particulière de volonté de puissance qui réveille le besoin du sacrifice, pour un idéal, pour Dieu, pour la gloire. Ainsi parle-t-il des combattants de choc dans les tranchées : « Cette seule idée qui convienne à des hommes : que la matière n’est rien et que l’esprit est tout, cette idée sur laquelle repose tout entière la grandeur humaine, ils l’exaspéraient jusqu’au paradoxe » [6]. Oublier le moi pour le je. Devenir acteur de sa pensée. Telle est en somme, dans la pensée de Jünger, la plus haute des vertus combattantes.

Il met en valeur un type d’homme particulier, qui s’est approprié une virilité guerrière parfaite, chez lequel l’idée du combat a définitivement triomphé sur le matériel : « La perfection dans ce sens – au point de vue du front –, un seul en présentait l’apparence : le lansquenet. En lui, les vagues de l’époque s’entrechoquaient sans dissonance aucune, la guerre était son élément, en lui de toute éternité » [7]. Le lansquenet, mercenaire combattant, soldat de métier et d’engagement, concrétise donc dans sa manière d’exister la coupure totale avec le monde civil installé. Comme le légionnaire des armées de la Rome antique, il vit de la guerre, dans la guerre, pour la guerre. Le sens guerrier coule dans son sang, il en a adopté tous les codes, et il s’est entièrement arraché à l’esprit bourgeois. Le lansquenet est en quelque sorte la quintessence de l’existence. En lui, le détachement est total ; il ne vit plus que par le danger. « Pour chacun, vivre veut dire autre chose, pour l’un le chant du coq au matin clair, pour l’autre l’étendue qui dort au midi, pour le troisième les lueurs qui passent dans les brumes du soir. Pour le lansquenet, c’est le nuage orageux qui couvre au loin la nuit, la tension qui règne au-dessus des abîmes. » [8]

 

Lansquenets-4.jpg

 

La renaissance par le combat

Quel sens a cette représentation d’une violence de guerre stylisée, si on la rapporte au charnier de la Première Guerre Mondiale ? C’est ce qui se découvre dans les textes tirés des carnets de guerre. Le boqueteau 125, sous-titré Une chronique des combats de tranchée, contient le déroulement d’une séquence de combat qui tient lieu dans la dernière phase de la guerre, au début de l’été 1918, devant les ruines de Puisieux-au-Mont, près d’Arras. Jünger relate le stationnement de sa compagnie dans les tranchées bordant le boqueteau 125, une place intégrée aux lignes allemandes sur le front du nord, quotidiennement pilonnée par les forces anglaises. Le point central de l’ouvrage est l’offensive anglaise lancée contre cette position dont Jünger en commande la compagnie d’intervention. Celle-ci subit d’abord le tir d’anéantissement de l’artillerie britannique, puis l’offensive de l’infanterie.

Chargés de fatigue, dans un espace-temps désarticulé, sous la pluie des bombes, les éclats d’obus qui arrachent les membres, les soldats de la troupe de choc sont confrontés à toutes les conditions de la violence extrême qui caractérise la guerre de tranchées. L’assaut représente alors un moment clef. C’est le moment où on s’apprête à entrer en contact direct avec l’ennemi devenu invisible derrière les murs de glaise. Le moment où l’exposition aux tirs de shrapnel, des mitrailleuses, des grenades menacent le plus de sectionner le maigre fil de la vie. Au cœur de la nuit, la peur de la mort, l’horreur du spectacle macabre se propagent comme un virus. C’est dans ce contexte que Jünger voit surgir dans le visage de ces hommes cette marque des héros modernes : « Nous sommes cinquante hommes, guère plus, debout dans ce boyau, mais sélectionnés par des douzaines de combats et familiarisés par une longue expérience avec le maniement de toutes les armes. Si quelqu’un est capable d’y tenir sa place, c’est nous et nous pouvons dire que nous sommes prêts. Être prêt, où que ce soit, pour quelque tâche que ce soit, voilà ce qui fait l’homme » [9]. Réminiscence de l’idéal du lansquenet, celui qui a fait toutes les guerres, qui en est imprégné de part en part, Jünger affirme que ce n’est pas l’uniforme, l’alignement sur le champ d’honneur dans la brume de l’aube qui fait la beauté du guerrier. C’est au contraire la résistance aux conditions les plus déshumanisantes qui distingue l’esprit combattant. Ils ont des visages taillés comme des spectres, qui ne respirent plus que la bravoure.

C’est dans cette bravoure que Jünger identifie le grand renouveau de l’humanité : « Bravoure est le vent qui pousse aux côtes lointaines, la clef de tous les trésors, le marteau qui forge les grands empires, l’écu sans quoi nulle civilisation ne tient. Bravoure est la mise en jeu de sa propre personne jusqu’aux conséquences d’acier, l’élan de l’idée contre la matière, sans égard à ce qui peut s’en suivre. Bravoure est pour l’homme seul de se faire mettre en croix pour sa cause, bravoure est de professer encore et toujours, au dernier soubresaut nerveux, au dernier souffle qui s’éteint, l’idée qu’on a soutenue jusqu’à la mort. Le diable emporte les temps qui veulent nous ravir la bravoure et les hommes ! » [10]. C’est par elle que le soldat de tranchée est le frère du lansquenet. La profonde modernité que Jünger a vue dans ses égaux au combat, c’est cette audace ultime que confère la bravoure. La soif de gloire et de danger. L’audace des conquistadores et des ascètes du désert, qui ont forgé leur âme au feu de l’idéal. « Voilà l’humanité nouvelle, le soldat du génie d’assaut, l’élite de l’Europe centrale. Une race toute neuve, intelligente, forte, bourrée de volonté. Ce qui se découvre au combat, y paraît à la lumière, sera demain l’axe d’une vie au tournoiement sonore et toujours plus rapide. » [11]

Bundesarchiv_Bild_146-1974-132-26A,_Stoßtrupp.jpg

Maintenir vive la bravoure

La guerre contemporaine n’est pas une guerre de samouraïs ou une guerre de chevaliers. Ni même une guerre de petits soldats. La bataille, ses unités de temps, de lieu et d’action ont été battues en brèche par la technologie de l’armement de pointe. On ne se bat plus sur le champ, ni même dans les tranchées pour mener le siège en rase campagne. La guerre moderne se mène de loin, derrière des écrans, ou bien au ras du sol, suivant les codes de la guérilla. Le vernis de civilisation imposé pendant des siècles à la violence par l’Occident s’écaille et tombe en poussière. Plus de consensus implicite qui porte les forces à l’affrontement décisif. On se bat dans les ruines, on tire dans le dos, on ne distingue plus guère civils et combattants. Ainsi se bat-on en Ukraine, au Proche-Orient. Ainsi se battait-on en Irlande du Nord, il y a quelques décennies encore. Ainsi se battra-t-on peut-être demain, au cœur des nations qui se sont inventé une paix éternelle. Car si l’on en croit Jünger, les fruits du pacifisme sont amers. « Une civilisation peut être aussi supérieure qu’elle veut – si le nerf viril se détend, ce n’est plus qu’un colosse aux pieds d’argile. Plus imposant l’édifice, plus effroyable sera la chute. » [12]

Ernst Jünger ne laisse pas, dans sa première œuvre, d’espoir à une paix durable qui soit de ce monde. Il l’exclut par nécessité, car le renouvellement passe par le perpétuel lien entre les hommes et la guerre. C’est au combat que se forge l’élite de l’humanité, celle des vrais hommes. « Polemos est le père de toutes choses », selon la formule d’Héraclite. Mais quelle inspiration un jeune homme du XXIe siècle peut-il bien tirer de ce qui peut apparaître comme un véritable culte du carnage ?

Le lyrisme d’Ernst Jünger au sujet de la guerre lui a valu d’être qualifié par certains critiques de poète de la cruauté. Pourtant, jamais un mot de haine pour l’ennemi. Au contraire. L’estime va au soldat d’en face, français ou anglais, bien plus qu’aux hommes de l’arrière qui entretiennent la propagande. Il ne s’agit pas de perpétrer des exactions, mais de monter à l’assaut. Cette quête de bravoure, d’où qu’elle vienne, est le trait prédominant de l’œuvre jungerienne. Il s’est affirmé au cours de la Grande Guerre, il s’accentuera encore dans les années trente, lorsque l’auteur prendra peu à peu conscience de l’écart croissant entre le national-socialisme et les espérances des penseurs de la révolution conservatrice. Le régime d’un idéologue populacier, déserté par la noblesse, avide de briser les individus au profit de la masse, lui inspirera le dégoût. La force de l’homme seul avec lui-même, l’exaltation de son existence au combat, quel que soit ce combat, c’est en cela que consiste l’essence de la pensée de Jünger, de son éthique. Elle ne repose dans rien d’autre que dans le dépassement de ses propres faiblesses, dans l’unité de l’esprit et du sang au profit du sacrifice. « Rien n’est mieux fait pour enflammer l’homme d’action que le pas de charge à travers les champs où voltige le manteau de la mort, l’adversaire en pointe de mire. » [13]


[1JÜNGER E., Orages d’acier, traduction par H. Plard, Paris, Le livre de Poche, 2002, p.6

[2JÜNGER E., Le boqueteau 125, traduction par Th. Lacaze, Paris, Payot, 1995, p.178

[3JÜNGER E., La guerre comme expérience intérieure, traduction par Fr. Poncet, Paris, Christian Bourgeois, 1997, p.75

[4Ibid., p.76

[5Ibid., P.95

[6Ibid., p.104

[7Ibid., p.97

[8Ibid., p.106

[9JÜNGER E., Le boqueteau 125, op. cit, p. 179

[10JÜNGER E., La guerre comme expérience intérieure, op. cit., p.87

[11Ibid., p.121

[12Ibid., p.76

[13Ibid., p.91

vendredi, 18 septembre 2015

Viatcheslav Avioutskii - De la Géopolitique à la transition

Viatcheslav Avioutskii

De la Géopolitique à la transition

Intervention de Viatcheslav Avioutskii, Expert en Géopolitique, Spécialiste du monde russe

Nicolas Mazzucchi - De la géopolitique à la transition

Nicolas Mazzucchi

De la géopolitique à la transition

Intervention de Nicolas Mazzucchi, Chercheur associé à l'IRIS

L’ennemi dans le cyberespace

cybersecurite-2.jpg

L’ennemi dans le cyberespace

La révélation par Kaspersky il y a quelques jours des capacités d’un groupe de hackers russes nommé Epic Turla, apriori capable de pirater des satellites pour couvrir ses traces a relancé les débats sur la sécurité dans le cyberespace. Que tout, ou presque, était vulnérable dans le cyberespace lui-même, voilà qui n’a rien de nouveau. Toutefois la question d’interagir directement avec des satellites de télécommunication connecte un peu plus le cyber avec les autres sphères stratégiques, dont l’espace extra-atmosphérique fait partie. Les « exploits » des hackers se révèlent sans cesse plus impressionnants, tant par le niveau technique que l’on suppose dans ce cas, comme dans les dégâts occasionnés – à l’exemple de l’affaire Ashley Madison. Au-delà de cette question de qui est capable de quoi, à laquelle on ne peut par essence répondre puisque toute cyberarme ou cyberagression n’est qu’à usage unique – même si des socles communs existent – il revient surtout utile de se poser la question du traitement informationnel qui est fait de ces questions.

A l’occasion de la sortie de Gagner les cyberconflits où, avec F-B. Huyghe et O. Kempf, nous nous sommes interrogés – entre autres – sur la revendication, la dissimulation, les alliances et le poids des cultures stratégiques dans le cyberespace, une analyse s’impose. Tout d’abord les grands médias anglo-saxons comme le Financial Times ou le Washington Post désignent le groupe Epic Turla comme lié au gouvernement russe, ce que se garde bien de faire Kaspersky dans son analyse. En fait ces médias s’appuient sur une étude allemande de 2014 de G Data Software dont l’analyse repose sur des présuppositions uniquement techniques quant au niveau inféré du groupe de hackers. De facto tout groupe russe ayant un niveau de compétence un tant soit peu élevé apparait donc comme lié aux services de renseignement de Moscou. Si cela est fort possible sur le papier, l’analyse par Kaspersky des pays les plus touchés par les attaques d’Epic Turla semblent démontrer le contraire. Ainsi l’entreprise – russe – d’antivirus laisse apparaitre des attaques principalement concentrées sur la Russie, la France, la Biélorussie, les Etats-Unis et le Kazakhstan. Pour un groupe sensément lié au gouvernement russe, il est assez étonnant qu’Epic Turla s’attaque prioritairement à son propre pays ainsi qu’aux alliés économiques et militaires de ce dernier, surtout qu’Epic Turla vise principalement les cibles étatiques et les grandes entreprises…

Ce n’est pas sans rappeler les analyses – dont Fire Eye – qui avaient suivi l’attaque sur TV5 Monde et qui, trouvant des fragments de codes imputables à une origine russe, s’empressaient de pointer du doigt Moscou. Là encore la dissimulation derrière le paravent du « cybercalifat » ou l’utilisation de ce groupe se revendiquant de Daesh semble un peu étonnant géopolitiquement. Certes la culture stratégique russe, au travers de la pratique de la maskirovka, nous a habitués à des surprises foudroyantes et des inflexions byzantines. Toutefois encore il faut se demander si à vouloir chercher des signaux faibles partout on ne finit pas par en inventer ; célèbre biais de l’analyste bien connu depuis les travaux de Heuer.

Au fond cette volonté de voir des groupes de hackers russes au service du pouvoir poutinien agir partout sur la planète contre les intérêts des ennemis de Moscou, n’est pas sans rappeler la désignation systématique du gouvernement chinois comme commanditaire des cyberattaques lancées contre les Etats-Unis depuis le début des années 2000. La désignation de Pékin comme grand ordonnateur des actions, principalement d’espionnage, contre Lockheed-Martin, le Department of Defense ou d’autres cibles entrepreneuriales et étatiques (attaques Aurora, Titan rain, etc.), a culminé avec la publication du rapport Mandiant en 2013. Le gouvernement chinois, au travers d’une unité militaire nommée 61398, était désigné APT1 pour Advanced Persistent Threat 1, signe de la dangerosité universelle des actions chinoises. Les rapports entre la société Mandiant et le gouvernement américain – le fondateur K. Mandia était auparavant officier de l’US Air Force – ont donné lieu à de nombreux commentaires et interrogations sur la partialité éventuelle de certaines analyse, toujours est-il que la Chine était devenu le croquemitaine du cyberespace.

Or depuis le déclenchement des évènements de Crimée qui ont été la base du net refroidissement des relations entre la Russie et l’Occident, Moscou semble être devenu le nouveau voyou du cyberespace. La Chine est ainsi passée au second plan dans la désignation du « cyber-ennemi » au profit de la Russie. La géopolitique du cyberespace rejoindrait ainsi celle du monde réel ou la question de la désignation de l’ennemi suivrait-elle les velléités du moment ? La deuxième option semble plus probable eu égard à certaines caractéristiques du cyberespace. En effet le principe de non-attribution qui préside, pour le moment, à la cyberstratégie permet de grandes possibilités d’actions, entourant celles-ci d’un véritable brouillard de guerre. Or le principe de non-attribution s’il permet une grande latitude d’action à l’attaquant, lui permettant par exemple de dissimuler son identité réelle, offre aussi de grandes opportunités à l’agressé. Ce dernier peut ainsi, avant la revendication des attaques par l’agresseur, choisir de révéler publiquement les actions malignes dont il a fait l’objet, pointant ainsi ses ennemis. En termes stratégiques l’agressé peut ainsi conserver une certaine forme d’initiative stratégique et orienter les débats dans le sens qui lui est propre, privant son agresseur d’une opportunité de subversion.

Comme dans le domaine de l’économie, la désignation d’un ennemi dans le cyberspace amende les règles de C. Schmitt. Le caractère évasif et dissimulé des cyberagressions permet des jeux géopolitiques complexes avant, pendant mais aussi – et surtout – après l’attaque proprement dite. La désignation de l’ennemi est ainsi devenue une forme de riposte en soi qui permet, selon les opportunités du moment, de mettre en accusation tel ou tel avec, finalement, des répercussions assez limitée. Cela nous rappelle, une fois de plus, que le cyberespace, s’il est indéniablement un espace stratégique technique, est également celui où l’action sur les perceptions est le plus important.

00:05 Publié dans Actualité, Défense | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : actualité, défense, cyberspace | |  del.icio.us | | Digg! Digg |  Facebook

Limonov : L’autodestruction de l’EUROPE est irréversible

PHO01f16324-de4a-11e2-93ba-bf5ab68f5fe8-805x453.jpg

Limonov : L’autodestruction de l’EUROPE est irréversible

Le processus d’auto-destruction de l’Occident est en route

L’Écrivain et homme politique Edouard Limonov explique en quoi la migration actuelle vers l’Europe et ses conséquences ressemblent au 11 septembre.

*

Après le 11 Septembre 2001, le monde a changé pour le pire.

Nous avons clairement constaté son changement dans les aéroports. Le contrôle des passagers, ressemblant comme deux gouttes aux fouilles pénitentiaires, est devenu routinier. Vous en avez sûrement tous fait l’expérience et je ne vais pas vous expliquer ce que vous savez déjà.

Le monde est devenu globalement moins démocratique. Depuis la tragédie du 11 septembre, La police est bien plus présente et les pratiques totalitaires augmentent. Partout : aux États-Unis, et dans la vieille, mais inconsciente Europe.

Les Etats-Unis, afin de punir quelqu’un pour le crime du 11 septembre, ont envahi l’Afghanistan, qui vivait tranquillement dans sa version plutôt pacifique du Moyen-Age, sous prétexte que l’Afghanistan abritait Ben Laden, et que ce trublion saoudien avait organisé les attaques terroristes de New York. Personnellement, je pense que Ben Laden, le suffisant leader d’Al-Qaida, s’est simplement contenté de s’attribuer le mérite du plus grand acte terroriste de l’histoire.

Nous avons tous vécu ces 14 dernières années dans une ambiance de libertés décroissantes avec des aspects de non-liberté très semblables aux pratiques décrites dans le livre de George Orwell « 1984 » de plus en plus enracinés dans nos vies. Pas encore le fascisme, mais un type particulier de totalitarisme – généré par la peur, bien sûr – mais cela ne rend pas la chose plus facile.

Pour compenser la limitation des libertés politiques des citoyens et la mise en place de pratiques carcérales, l’Europe et les États-Unis se sont mis, de manière suspecte, à insister sur les droits secondaires de l’individu.

Je veux dire que l’engouement général de nos gouvernements européens et étasuniens pour les amours de même sexe, les mariages de même sexe, de leur emballement dégoulinant d’humanité pour les droits des personnes handicapées et l’adoption des enfants malades et étrangers, etc. – la liste est longue – va de pair avec le durcissement de la vie politique dans l’Ouest et l’augmentation des pouvoirs de police.

C’est comme cela que ça s’est passé jusqu’à ces dernières années. 2013, 2014 et 2015 nous ont apporté de nouvelles surprises. Et il y en aura d’autres. L’Europe est confrontée à un choix : soit devenir activement nationaliste avec des aspects nazis et fascistes, soit changer du tout au tout. Le problème de l’invasion de migrants vers l’Europe est le pire défi de l’Europe de toute son histoire.

Quelle est la situation?

En raison de la politique de prédation des Etats-Unis et de l’Europe, le système étatique de plusieurs pays importants s’est désagrégé. L’Afghanistan, l’Irak, la Libye – et pour finir la Syrie – ont été attaqués par l’Occident. Les guerres soi-disant pour les «droits humains», les conflits armés menés par l’Occident, étaient et restent des agressions, seulement recouverts de l’habillage moderne des droits humains pour dissimuler leur essence cannibale. L’Afrique est déstabilisée, directement ou indirectement, les affrontements entre les «bons» et les «mauvais» qui font rage dans plusieurs pays africains – le Mali, en est l’exemple le plus flagrant – ont aussi détruit leurs systèmes étatiques.

L’Ukraine a détruit son Etat apparemment toute seule, mais n’y a-t-elle pas été encouragée par les Américains, les Polonais, les Néerlandais, les Allemands, les Finlandais, les Français, les Baltes, qui sont venus parler aux Ukrainiens sur  le Maïdan? Et donc il faut ajouter l’Ukraine aux nombreux états détruits. Les Européens et les Yankees ont monté systématiquement le Maidan contre la Russie. C’est intéressant de constater que  bien que la Russie ne soit plus un pays communiste, ni soviétique, ils continuent de nous haïr avec la même violence. Il est donc clair maintenant, du moins je l’espère, que l’anti-communisme et l’anti-soviétisme ne servaient qu’à camoufler leur russophobie.

Et maintenant les peuples et les tribus fuient leurs pays dévastés.

Pour aller où?

Les côtes américaines sont loin, les bateaux fragiles ne peuvent pas traverser l’océan.

Et l’île italienne de Lampedusa n’est qu’à quelques encablures de la côte ravagée de la Libye. Et la Grèce est proche.

ISIS a beau être riche, terrifiant et rusé, il n’a pas les moyens d’organiser l’exode d’un nombre incalculable de réfugiés. Je ne crois pas un seul instant que  ces démons de l’enfer aient envoyé des centaines de milliers de réfugiés vers l’Europe. Ce n’est pas ISIS.

La plupart de ceux qui déferlent sur l’Europe sont des hommes jeunes parce que les hommes ont plus de force que les femmes et les enfants, ils peuvent surmonter les difficultés et les souffrances d’un voyage par-delà trois mers vers le cœur de la riche Europe – la riche Allemagne.

Qui fuit la guerre, qui fuit la ruine et la pauvreté, qui fuit les conséquences de la guerre ? Il est difficile de faire le tri. Et même le plus grand professeur à la Sorbonne n’en est pas capable. Car les trois sont vrais.

C’est vous, Européens et Américains, qui avez donné un coup de pied dans la fourmilière, alors de quoi vous plaignez-vous ? Tout cela est votre faute! Pour que les migrants n’affluent pas chez vous, il faudrait rendre leurs conditions d’accueil insupportables. Mais vous ne le ferez pas. Pas parce que vous êtes bons, vous n’êtes pas bons, mais parce qu’il est important pour vous de donner une bonne image, une image humanitaire, après vous être lavés les mains dans le sang des citoyens des Etats qui vous avez mis en pièces.

Comme le 11 septembre 2001, les migrants (les images de la gare à Budapest sont frappantes et fortes, parce que c’est le Moyen-Orient, l’Asie et l’Afrique qu’on voit sur les photos et les vidéos, pas l’Europe) vont tellement changer le monde qu’on ne le reconnaîtra plus. Ils le changent déjà.

De deux choses l’une, soit en fin de compte les gens auront, en Europe, une autre religion, des yeux noirs et la peau sombre. Cela n’a rien à voir avec le racisme, (au cas où on serait tenté de m’en accuser), mais les citoyens de l’Allemagne ressembleront aux citoyens du Moyen-Orient. Soit on aura des Etats fascistes et racistes, retranchés derrière des barbelés, des murs et des mitrailleuses. Il n’y a pas de troisième solution.

Je viens d’apprendre qu’en Russie il y a 2,5 millions de réfugiés venus d’Ukraine (ou plutôt, 2 503 680 personnes), mais on ne peut pas les  distinguer des Russes. Donc, l’assimilation ne nous menace pas. Nous aurons les mêmes yeux, la même peau, la même religion. Les Ukrainiens n’auront pas de problème pour s’intégrer. Nous sommes dans une meilleure situation que la malheureuse Europe, vouée à perdre la forme qui a été la sienne pendant un demi-millénaire.

Cela me fait de la peine. Je préfère garder la vieille Europe. Mais puisqu’il semble qu’on n’ait pas le choix et que de toute façon l’Europe est hostile à la Russie, eh bien qu’elle disparaisse !

Le processus d’auto-destruction de l’Occident est déjà irréversible. Comme disait Gorbatchev : « Le processus est en route ».

Nous avons assisté à l’auto-destruction de l’URSS. Maintenant, c’est le tour de l’Europe. Chacun à sa manière.

 Edouard Limonov | 12.09.2015

*Edouard Limonov, est un auteur et un homme politique. Il est le leader du parti « L’Autre Russie ».

Article original: http://fortruss.blogspot.fr/2015/09/eduard-limonov-europes-self-destruction.html

Traduit du russe par Kristina Rus et de l’anglais par Dominique Muselet

Source: http://arretsurinfo.ch/limonov-lautodestruction-de-leurope-est-irreversible/

jeudi, 17 septembre 2015

Michel Onfray : « L’Occident attaque, prétendument pour se protéger, mais il crée le terrorisme »

5748169.jpg

Michel Onfray : « L’Occident attaque, prétendument pour se protéger, mais il crée le terrorisme »

L’Europe, la guerre, le terrorisme, la crise migratoire, autant de questions auxquelles le philosophe a accepté de répondre.

Michel Onfray est docteur en philosophie. Il a publié une soixantaine d’ouvrages dont Traité d’athéologie : Physique de la métaphysique, Le Crépuscule d’une idole, Contre-histoire de la philosophie. Ses derniers ouvrages parus : Avant le silence. Haïkus d’une année, Galilée, 2014. Bestiaire nietzschéen. Les Animaux philosophiques, Galilée, 2014. Cosmos, Flammarion, 2015

On ne présente plus Michel Onfray, philosophe que l’on dit iconoclaste, grand pourfendeur devant l’Eternel (ou ce qui lui tient d’éternité) des conformismes et autres tables de lois. Il revient pour RT France sur les sujets qui ont, ces derniers temps, vrillé l’actualité.

RT France : Comment jugez-vous la façon qu’a l’Europe de traiter de cette crise migratoire ? 

Michel Onfray (M.O.) : L’Europe n’existe pas, sauf par sa monnaie unique. On voit bien dans cette affaire combien elle est impuissante, nulle, désarticulée. Elle bricole, ne parle pas d’une seule voix, elle improvise. C’est pitoyable.

RT France : Quand vous dites «BHL fait partie des gens qui ont rendu possible cet enfant mort», que vouliez-vous dire par là ? Qui sont «les  autres gens» ?

M.O. : Que tous ceux qui ont justifié les guerres contre l’Afghanistan, l’Irak, la Libye, le Mali et autres pays musulmans sont responsables et coupables. Ils ont légitimé le bombardement de milliers de personnes sur place. Que la communauté musulmane soit en colère contre l’Occident me parait tout à fait légitime. L’Occident attaque prétendument pour se protéger du terrorisme, mais il crée le terrorisme en attaquant. Quel irakien menaçait la France en 1991 ? Saddam Hussein finançait même la campagne d’un président.

L’Occident attaque prétendument pour se protéger du terrorisme, mais il crée le terrorisme en attaquant.

RT France : Depuis la publication de la photo du petit enfant, les opinions publiques européennes semblent opérer une volte-face sur cette question, comment l’expliquez-vous ? Qu’est-ce que cela dit de nos opinions publiques ?

M.O. : Les médias ont transformé le peuple qui pensait en populace qui ne pense pas et ne réagit plus qu’à l’émotion, au pathos, à la passion. L’image d’un enfant mort interdit de penser : elle arrache immédiatement la pitié. La pitié empêche de penser. La preuve : ceux qui ont rendu possible cette mort en détruisant les pays bombardés vont répondre en bombardant plus encore.

RT France: Pourquoi cette crise migratoire semble-t-elle être traitée politiquement et médiatiquement «hors-sol», comme si elle n’avait pas de causes géopolitiques précises?

M.O. : Parce que le personnel politique est fait de gens médiocres qui n’ont aucune vision d’avenir pour le pays, aucun sens de l’histoire et qu’il n’écoute plus que les communicants qui leur donnent des recettes pour être élus ou réélus. La question n’est plus : «qu’est-ce qui est bon pour la France ?», mais «qu’est-ce qui va permettre ma réélection ?». La guerre, on le sait, hélas, booste les cotes de ceux qui les déclenchent. La testostérone fait plus en la matière que la matière grise. 

RT France : François Hollande a annoncé des frappes aériennes sur la Syrie que vous avez aussitôt vivement condamnées. Pourquoi ?

M.O : Bombarder des combattants de l’Etat Islamique suppose tuer des victimes civiles innocentes, les uns vivant chez les autres, et que ça n’empêchera pas un islamiste radical vivant en France de passer à l’acte. Au contraire !

RT France : Jacques Sapir a lancé l’idée d’un mouvement rassemblant tous les souverainistes, allant même jusqu’à une alliance avec le FN. Vous avez estimé que «l’idée est bonne (…) de fédérer les souverainistes des deux bords». Pourquoi ?

M.O. : Les souverainistes sont majoritaires dans l’opinion mais inexistants parce que répartis dans des partis très hétérogènes qui comptent pour rien dans la représentation nationale. Mais jamais un électeur de Mélenchon ne soutiendra une thèse de Marine Le Pen et vice versa. Seul un tiers au-dessus des partis pourrait fédérer ces souverainistes de droite et de gauche.

RT France : Cette proposition de Sapir ne traduit-elle pas une recomposition des lignes politiques dont le pivot (ou l’axe) ne serait plus l’économie mais le rapport à l’Europe ? Comment voyez-vous cette recomposition politique du paysage français ?

M.O. : L’idée est juste, mais elle n’aboutira pas. Les souverainistes sont représentés par des politiciens qui n’ont en tête que leur ego, leur trajectoire personnel, leur narcissisme. Aucun ne sera capable de jouer la fédération sous la bannière d’un tiers en s’effaçant. Entre la France et eux, ils ne choisiront pas la France.

Syrien – von den kolonialen Interessen Grossbritanniens und Frankreichs, zur Sicherung von Rohstoffen für die USA

sykes_picotpartage.jpg

Syrien – von den kolonialen Interessen Grossbritanniens und Frankreichs, zur Sicherung von Rohstoffen für die USA

Interview mit Karin Leukefeld*

Ex: http://www.zeit-fragen.ch

In den Medien ist bereits von einer neuzeitlichen Völkerwanderung die Rede. Und auch über die Verantwortung sogenannter Schlepperbanden für die Flucht womöglich krimineller, mindestens aber heimlich wohlhabender Flüchtlinge wird diskutiert. Die Ursachen des Massenelends der Flüchtigen werden jedoch kaum erforscht. Die Syrien-Korrespondentin Karin Leukefeld berichtet im Interview mit Jens Wernicke von einem Wirtschafts- und Stellvertreterkrieg, der zunehmend zum Exitus des syrischen Staates führe, die Bevölkerung in den Hungertod treibe und bereits 11 Millionen Syrer auf die Flucht getrieben hat.

Frau Leukefeld, Sie sind neben Jürgen Todenhöfer die einzige mir bekannte deutsche Journalistin, die im Mittleren Osten wirklich vor Ort unterwegs ist, mit den Menschen dort spricht und darauf aufbauend dann qualifizierte Analysen, die mehr als nur Stereotype bedienen, produziert. Im Moment kommen Sie gerade von einer Syrien-Reise zurück. Wie ist die Situation vor Ort?

Es kommt darauf an, wo man sich in Syrien aufhält. In der Küstenregion ist es ruhig, manche Syrer, die jetzt in Europa leben, fahren sogar zum Urlaub dorthin, um ihre Familien zu treffen. Allerdings gibt es dort sehr viele Inlandsvertriebene, es ist also überall sehr eng geworden.
In Idlib, einer an die Küstenregion angrenzenden Provinz, herrschen die «Armee der Eroberung» und die al-Nusra-Front, Zehntausende sind geflohen, manche Dörfer werden belagert. In Aleppo ist die Lage schlimm, es herrscht Krieg zwischen den bewaffneten Gruppen und der syrischen Armee. Viele Teile der Stadt sind zerstört, die Strom- und Wasserversorgung bricht immer wieder ein, Lebensmittel sind sehr teuer, wenn sie überhaupt erhältlich sind. Bewaffnete Gruppen feuern Mörsergranaten, Raketen und selbstgebaute Geschosse in Wohngebiete, die syrische Armee feuert zurück.


Östlich von Aleppo gibt es Gebiete, die von Kurden kontrolliert werden, andere von dem selbsternannten «Islamischen Staat im Irak und in der Levante» (IS). Dort ist es extrem unsicher, die Fronten wechseln täglich, die syrische Luftwaffe und die von den USA geführte «Anti-IS-Allianz» fliegen Luftangriffe. Neuerdings fliegt auch die türkische Luftwaffe Angriffe. Im Nordirak greift sie Stellungen der Arbeiterpartei Kurdistans (PKK) an. Im Norden Syriens greift sie die von den syrischen Kurden kontrollierten Gebiete an. Der Einsatz läuft unter dem Motto «Kampf gegen den ‹Islamischen Staat›». Die USA wollen mit der Türkei nördlich von Aleppo eine «Schutzzone» durchsetzen. Das ist eine militärische Massnahme innerhalb Syriens, die der Genehmigung des UN-Sicherheitsrates bedarf. Die gibt es nicht, also handelt es sich um den Angriff auf einen souveränen Staat und ist eine Verletzung des Völkerrechts.
Die besiedelten Gebiete der zentralen Provinz Homs werden weitgehend von der syrischen Regierung und von der Armee kontrolliert. Die Wüstengebiete, die sich im Osten bis an die Grenze zum Irak erstrecken, sind unsicher. Die Lage in Tadmur, der modernen Stadt, die bei Palmyra liegt, ist unklar. Aus dem Kloster Deir Mar Elian, das ich sehr oft besucht habe, wurden Ende Mai der Priester Jacques Mourad und ein weiterer Geistlicher entführt. Von beiden fehlt jede Spur. Inzwischen wurden die Menschen auch aus Qaryatayn und Sadat vom IS vertrieben, viele von ihnen Christen.


Damaskus beherbergt bis zu 7 Millionen Menschen, Inlandsvertriebene aus allen Teilen des Landes. Es ist weitgehend ruhig, Strom und Wasser sind knapp, aus den Vororten um Damaskus, wo die Islamische Front und die al-Nusra-Front Basen haben, wird immer wieder auf die Stadt gefeuert, umgekehrt feuert die syrische Armee auch dorthin.
Sweida, wo die Drusen und Christen leben, ist noch ruhig, ich fahre jedes Mal dorthin, wenn ich in Syrien bin. Deraa ist weiter umkämpft und der Golan, an der Grenze zu Israel, ebenso. Derzeit findet eine grosse Schlacht um Zabadani statt, das liegt an der Grenze zu Libanon. Dort gibt es ein Hauptquartier der bewaffneten Gruppen, die um Damaskus herum agieren. Die syrische Armee und die libanesische Hizbullah, die gemeinsam kämpfen, wollen diese strategisch wichtige Basis der Kampfgruppen zurückerobern.


Das Leben ist teuer, das syrische Pfund hat nur noch ein Fünftel der Kaufkraft von 2010. Viele Menschen haben alles verloren, es wird gebettelt, Fleisch kommt nur noch selten auf den Tisch. Wenn die Leute überhaupt noch einen Tisch haben. Die Arbeitslosigkeit liegt bei über 40 Prozent, Kinder arbeiten, um der Familie zu helfen und gehen nicht mehr in die Schule. Die Hälfte der 500 000 syrischen Palästinenser ist geflohen, weil ihre Lager, die eigentlich Städte waren, zerstört sind.


Die wirtschaftlichen Zentren Syriens – die um Aleppo, Homs und Damaskus angesiedelt waren – sind weitgehend zerstört. Syrien hatte eine eigene Pharmaindustrie, eine hervorragende Textilindustrie, eine Lebensmittelindustrie und grosse Getreidereserven: Alles ist zerstört, geplündert und in die Türkei verkauft. Die bescheidenen Ölvorkommen im Osten des Landes werden von Kampfgruppen kontrolliert, das Öl ausser Landes geschmuggelt und dort oder auch im Land verkauft, selbst an die Regierung.


Inzwischen sind viele Ölförderanlagen von der Anti-IS-Allianz bombardiert worden. Und dann die archäologischen Stätten in Syrien, die bis zu 10 000 Jahre vor die christliche Zeitrechnung zurückdatieren – von Kämpfern besetzt und belagert, geplündert, zerstört.


Die Lage ist hart, das Elend gross. Besonders für die Syrer auf der Flucht. 4 Millionen von ihnen sind in Nachbarstaaten geflohen, weitere 7 sind innerhalb Syriens auf der Flucht.
Die Perfidie ist, dass diese Fluchtbewegungen politisch instrumentalisiert werden. Der innersyrische Konflikt wurde zu einem regionalen und schliesslich zu einem internationalen Stellvertreterkrieg ausgeweitet. Dort, wo Menschen flohen, zogen bewaffnete Gruppen ein, die bis heute regional und international unterstützt werden. Und dann hiess es, die syrische Regierung hat keine Kontrolle mehr und ist ohnehin die «Wurzel von allem Bösen» in Syrien, wie es gerade erst wieder ein Sprecher des US-Aussenministeriums erklärte. Syrien wird zu einem «failed state» erklärt, in den man humanitär und militärisch eingreifen kann.

Und diese Armut, dieses Elend, das Sie beschreiben und vor dem die Leute fliehen: Wo kommen die her, woraus resultieren die? Und wie meinen Sie das mit dem Stellvertreterkrieg? Bitte führen Sie das doch kurz aus …

Syrien ist ein Entwicklungsland. Es war 2010 auf dem aufsteigenden Ast und sollte 2015, also in diesem Jahr, die fünftstärkste Wirtschaftsmacht der arabischen Welt sein.
Heute liegt Syrien knapp vor Somalia. Die durch den Krieg entstandene Wirtschaftskrise wird durch die Wirtschaftssanktionen der EU noch verschärft. Was wir hier beobachten, ist auch ein Wirtschaftskrieg gegen ein aufstrebendes Land.


Die Wirtschaftssanktionen der EU begannen bereits Ende 2011 und betrafen den Öl- und Gashandel sowie den Finanzsektor. Die syrische Fluggesellschaft durfte europäische Flughäfen nicht mehr anfliegen, alle bilateralen Projekte wurden gestoppt, das Personal abgezogen, Syrien wurde isoliert. Anfangs konnten der Staat und die Bevölkerung Mängel aus eigenen Ressourcen überbrücken, doch die waren eines Tages aufgebraucht. Der Staat erhielt finanzielle Unterstützung und nahm bei Iran Kredite auf. Damit konnten Verluste aus der Ölindustrie verringert werden, Öl und Gas konnten an die Bevölkerung, an die noch funktionierende Industrie und die Armee geliefert werden. Doch die nationale Ökonomie wurde dem Krieg untergeordnet, es entstand eine Kriegsökonomie.

 

syrie-mandataire.jpg

 


Offiziell will die EU mit ihren Wirtschaftssanktionen die politische und militärische Führung Syriens unter Druck setzen, dass sie nachgeben und zurücktreten soll. Das ist nicht geschehen. Statt dessen wurde die Gesellschaft bestraft, ihre mühsam aufgebaute Existenzgrundlage zerstört. Geld konnten fortan diejenigen verdienen, die vom Krieg profitierten: Milizen, Schmuggler, Schwarzmarkthändler.


Jenseits der Sanktionspolitik wurde die Wirtschaft Syriens auch gezielt materiell zerstört. Am besten war das in Aleppo und in Damaskus zu sehen. Im Sommer 2012 gab es einen koordinierten Angriff, der eigentlich zum Sturz der syrischen Führung führen sollte. In Damaskus wurden bei einem Anschlag im Nationalen Sicherheitsrat vier hochrangige Militärs und Geheimdienstler getötet. Unmittelbar darauf folgten Angriffe auf Aleppo und Damaskus. Ausgeführt wurden diese Angriffswellen von Kämpfern, die aus Homs abgezogen worden waren, nachdem der Kampf um Baba Amr sich zugunsten der Streitkräfte entschieden hatte. Diese Kämpfer hatten sich im Umland der beiden grossen Städte gesammelt, wo sie von lokalen Kräften unterstützt wurden. Der Umsturz gelang nicht, sowohl die Aleppiner als auch die Damaszener weigerten sich, den Kampfgruppen die Tore in ihre Städte zu öffnen. Als Reaktion auf diese Weigerung wurden die Industriegebiete um Aleppo und um Damaskus zerstört, geplündert und zu Stützpunkten für weitere Angriffe auf die beiden Städte gemacht.
Und dass es sich hier um einen Stellvertreterkrieg handelt, wird klar, wenn man versteht, dass der sogenannte Islamische Staat, der vor Ort «Daish» genannt wird, anders als in unseren Leitmedien gern verbreitet, alles andere als aus dem Nichts aufgetaucht ist. Regionale und internationale Sponsoren stehen hinter ihm, so dass er offenbar über unerschöpfliche finanzielle Ressourcen verfügt.


Diese Sponsoren benutzen die Kämpfer, um die Nationalstaaten zu zerstören, die vor 100 Jahren in der Levante gegen den Willen der damaligen Bevölkerung geformt worden waren. Damals ging es um die kolonialen Interessen von Grossbritannien und Frankreich, heute geht es um die Sicherung von Rohstoffen für die von den USA angeführte westliche Welt. Der Zorn der Golf-Staaten auf die unabhängige Politik, die in Syrien verteidigt wird, schlägt sich nieder in der Bewaffnung und Ausbildung von irregulären Kampfgruppen, die von «Daish» dominiert werden. Der gesellschaftliche Boden, der sie nährt, ist Armut.

Haben Sie für derlei «Spirale in die Armut», um die es ja offenkundig geht, vielleicht ein konkretes Beispiel parat?

Nehmen wir einen Betrieb, der medizinische Einrichtungen für Praxen und Kliniken verkauft. Bisher hat der Betrieb die Einrichtungen aus Deutschland bezogen. Auf Grund der EU-Sanktionen konnte nichts gekauft und nichts mehr geliefert werden. Und in einem anderen Land zu kaufen, war schwierig für den Betrieb, weil sämtliche Geldgeschäfte unterbrochen waren. Die syrische Zentralbank steht unter Sanktionen, niemand darf mit ihr Geschäfte machen. Um das zu umgehen, liefert nun beispielsweise die deutsche Firma die Produkte an ein Unternehmen in Libanon, das sie dann an die syrische Firma weiterverkauft. Libanon ist an die EU-Sanktionen nicht gebunden. Der Warentransfer wird so extrem teuer.


Ein anderes Beispiel ist, dass Eltern, deren Kinder im Ausland studieren, ihnen kein Geld mehr schicken können, weil mit den syrischen Banken keine Geschäfte gemacht werden dürfen. Das gleiche gilt übrigens auch für Stipendien der syrischen Regierung für Studierende im Ausland. Oder Medikamente: Bisher waren sie sehr billig, weil sie in Syrien produziert wurden. Die Pharmaindustrie ist weitgehend zerstört, also werden Medikamente aus Libanon eingeführt oder aus der Türkei geschmuggelt – das treibt den Preis in schwindelnde Höhen.

Und die Interessen im Hintergrund dieses Konfliktes – von welchen Kräften sprechen wir hier? Wen meinen Sie, wenn Sie «Sponsoren» sagen?

Sponsoren sind diejenigen, die die bewaffneten Gruppen gegen die syrische Regierung und Armee unterstützen. Russland und Iran, die die syrische Regierung stützen, sind deren Alliierte oder Bündnispartner, weil sie mit dem syrischen Staat durch völkerrechtlich bindende Verträge verbunden sind. Die Regionalstaaten die Türkei, Saudi-Arabien und Katar sind eher «Sponsoren», weil sie Gruppen für eigene Zwecke benutzen, sie aber auch, wenn es opportun ist, wieder fallen lassen können. Das gilt auch für die Sponsoren unter den europäischen Staaten, aus Australien und aus den USA.


Von dem Chaos, das sich über den Irak und Syrien ausbreitet, profitieren vor allem die Golf-Staaten, die Türkei und die USA. Nicht die Bevölkerung natürlich, sondern politische und industrielle Eliten, allen voran die Rüstungsindustrie. Die arabische Halbinsel ist in den letzten 5 Jahren zu einem riesigen Waffenlager aufgerüstet worden. Westliche Militärs, staatliche und private, bilden Kämpfer aus, bewaffnen sie und schicken sie in den Krieg. Die USA liefern Rüstungsgüter in Milliardenhöhe an die Golf-Staaten ebenso wie an Israel. Deutschland bewaffnet die nord­irakischen kurdischen Peschmerga und bildet sie aus, und die Türkei profitiert als Nato-Land von ihrer Frontstellung zu Syrien und zum Irak. Natürlich wird Syrien von Russ­land und Iran militärisch unterstützt, aber das geschieht, wie gesagt, auf der Basis von bilateralen Verträgen.


Übrigens haben in keinem der vom «arabischen Frühling» betroffenen Länder die Protestbewegungen der jungen, aufgeklärten und modernen Jugend überlebt, nirgends! In Tunesien, Ägypten und Syrien wird das Geschehen vom politischen Islam bestimmt, ob als Kampf- oder Oppositionsgruppe.

Relevant ist bei alldem aber sicher doch auch der religiöse Fanatismus der Menschen vor Ort, der dazu beiträgt, dass es sozusagen regelrechte «Religionskriege» gibt …

Die Syrer waren nie religiöse Fanatiker! Lediglich die Muslim-Bruderschaft, die den ­politischen Islam propagiert, genauer gesagt, ein Flügel in der syrischen Muslim-Bruderschaft versuchte Ende der 1970er Jahre den Aufstand gegen die Baath-Partei, die einen säkularen Staat durchgesetzt hatte. Dieser Aufstand endete 1982 mit dem Massaker von Hama. Tausende starben beim Luftangriff der syrischen Armee, Tausende verschwanden ganz oder in Gefängnissen. Wer konnte, floh, die Muslim-Bruderschaft wurde bei Todesstrafe verboten.
Das wirkt natürlich nach, und viele junge Leute, die sich heute bei islamistischen Kampfverbänden verdingt haben, erinnern an Hama, wenn man sie fragt, warum sie kämpfen. Ein junger Mann, der allerdings friedlich demonstrierte, erzählte mir 2011, als alles begann, dass sein Onkel in Hama verschwunden sei und die ganze Familie deswegen die Opposition unterstütze. Allerdings muss man auch daran erinnern, dass der Damaskus-Flügel der Muslim-Bruderschaft damals, in den 1970er Jahren, gegen den bewaffneten Aufstand war.


Die Rolle der Muslim-Bruderschaft bei der Entstehung des radikalen politischen Islam darf dennoch nicht unterschätzt werden. Auch die Regierungspartei AKP in der Türkei ist eine Schwesterpartei der Muslim-Bruderschaft, und eine Umfrage hat ergeben, dass mehr als 10 Prozent der türkischen Bevölkerung den «Islamischen Staat im Irak und in der Levante» nicht als terroristische Organisation oder als Gefahr ansehen, sondern für legitim halten und unterstützen. Das ist nur möglich, weil die türkische Regierung selber eine Linie des politischen Islam verfolgt. In einem säkularen Staat wäre so etwas nicht denkbar.
Doch zurück zu Syrien. Es gab viele ­politische Konflikte, aber kulturell und religiös war Syrien immer ein sehr tolerantes und offenes Land. Auch diese Toleranz soll jetzt zerstört werden. Das kommt allerdings nicht «von unten» oder «aus dem Wesen der Menschen» vor Ort – das ist Folge der geopolitischen Interessen und strategischen Auseinandersetzungen.

Die Leute fliehen und leiden also, weil der sogenannte Westen ihre Heimat mit Krieg überzieht und wirtschaftlich in die Knie zwingt? Böse Schlepperbanden, über die wir medial viel hören, sind also nicht das Hauptproblem, auf Grund dessen inzwischen 11 Millionen Syrer auf der Flucht sind?

Die Schlepperbanden sind die Folge einer völlig falschen Politik im Mittleren Osten, nicht die Ursache. Diese Schlepperbanden sind integraler Teil der Kriegswirtschaft. Ohne Krieg hätten sie gar kein Geschäft. Sie benutzen die gleichen Wege, über die Waffen, Munition, Ausrüstung, Satellitentelefone und Kämpfer ebenso geschmuggelt werden wie Drogen und andere Dinge, die für den Krieg in Syrien gebraucht werden.


Die Flüchtlinge begegnen auf diesen Schmuggelpfaden den Kämpfern, die Organisatoren sind die gleichen. Das Büro der Vereinten Nationen für Drogen- und Verbrechensbekämpfung hat über diese Schmuggelpfade einen ausführlichen Bericht vorgelegt.
Solange sich mit Krieg und dem Leid betroffener Menschen viel Geld verdienen lässt, wird sich wohl auch nichts daran ändern.

Wie kommt es, das in unseren Medien hierüber kaum überhaupt und wenn dann in aller Regel vollkommen undifferenziert berichtet wird?

Diese Fragen muss man den grossen, den sogenannten Leitmedien stellen. Sie sollen das Denken und die Wahrnehmung der Bevölkerung leiten, anleiten und «einordnen», wie es neuerdings heisst. Für mich heisst das so viel wie: Sie geben vor, in welche Richtung zu denken und ein Konflikt «einzuordnen» ist. Mit der Realität in den Konfliktregionen hat das wenig zu tun, zumal viele Kollegen gar nicht dort, sondern in der Stadt eines Nachbarlandes oder auch im Heimatstudio eines Senders sind. Ein Pendant zu dieser Darstellung wäre eine Berichterstattung, die über kriegerische Optionen und Entwicklungen zwar berichtet, die nichtbewaffneten und politischen Vorschlägen, Initiativen und Entwicklungen aber mindestens ebenso viel, wenn nicht mehr Raum einräumen würde.

 

Troupes_de_l_Armee_du_Levant_Syrie_1941_-a2595.jpg

 

Was müsste Ihrer Einschätzung nach geschehen, damit in Syrien wieder Frieden möglich wird? Und: Gibt es etwas, das wir, die deutsche Bevölkerung, tun können, um zu unterstützen und zu helfen gegen das Elend vor Ort?

Die USA und Russland müssen sich auf ein gemeinsames Vorgehen zu Stabilisierung Syriens und des Iraks einigen und die syrische Regierung und Streitkräfte ebenso wie die Regierung und Armee des Iraks einbeziehen. Vorbedingungen – wie «Assad hat keine Zukunft in Syrien» – haben zu unterbleiben. Die syrischen Akteure müssen dabei unterstützt und nicht davon abgehalten werden, sich an einen Tisch zu setzen. Einflussnahme im eigenen Interesse hat zu unterbleiben. Die Türkei muss – von der Nato oder bilateral von einzelnen Nato-Staaten – dazu gezwungen werden, ihre Unterstützung für den sogenannten Islamischen Staat einzustellen. Falls sie das nicht tut, muss die Türkei militärisch sanktioniert werden. Und die Heimatländer der internationalen Dschihadisten müssen die Ausreise islamistischer Kämpfer oder Unterstützer unterbinden. Dazu gehört in den jeweiligen Staaten auch eine Auseinandersetzung über ein respektvolles Zusammenleben und Chancengleichheit.
Die Bevölkerung muss vor allem den in Deutschland eintreffenden Flüchtlingen zur Seite stehen. Allerdings darf die Bundesregierung, die mit einer falschen Politik zu deren Flucht beigetragen hat, nicht aus der Verantwortung für diese Menschen entlassen werden. Im Bundestag, in den Landesparlamenten, Gewerkschaften, Schulen, Kirchen, in Blogs und politischen Versammlungen – überall muss über die Hintergründe des Krieges in Syrien aufgeklärt werden. Das ist Sache von jeder und jedem, der diesen Krieg beenden will.

Noch ein letztes Wort?

Ja. 70 Jahre nach dem Ende des Zweiten Weltkrieges will ich an das Gedicht von Wolfgang Borchert erinnern: «Dann gibt es nur eins, sag NEIN». In der direkten Nachbarschaft Europas, im östlichen Mittelmeerraum und in Teilen Afrikas finden seit 25 Jahren ununterbrochen Kriege statt, die sich immer mehr ausweiten. Nehmen wir den Israel-Palästina-Konflikt hinzu, haben wir seit 1948 Krieg im Mittleren Osten. Mit der völkerrechtswidrigen Besetzung des Iraks 2003 haben die USA schliesslich «das Tor zur Hölle» geöffnet, vor dem viele bereits damals warnten.


Palästinenser sind seit bald 70 Jahren auf der Flucht oder leben – etwa in Gaza oder der West Bank – wie Gefangene in ihrem eigenen Land. Iraker sind auf der Flucht, jetzt die Syrer. Der Westen befeuert diese Kriege, auch Deutschland, das Waffen liefert und zum Bruch des Völkerrechts schweigt. Die politische Opposition im Bundestag oder im Europaparlament wird ihrer Aufgabe in Sachen Krieg und Frieden nicht gerecht. Und viele Medien agieren wie Kriegstrommler.


Ich vermisse die grosse Friedens- und Antikriegsbewegung, die einst gegen den Irakkrieg noch auf die Strasse ging. Sie muss zusammenstehen und darf sich nicht spalten lassen. Die Friedensbewegung muss gegen diese Kriege auf die Strassen!

Ich bedanke mich für das Gespräch.    •

(Interview Jens Wernike)

Quelle: www.nachdenkseiten.de/?p=27340 vom 27.08.2015

*    Karin Leukefeld, Jahrgang 1954, studierte Ethnologie, Islam- und Politikwissenschaften und ist ausgebildete Buchhändlerin. Organisations- und Öffentlichkeitsarbeit unter anderem beim Bundesverband Bürgerinitiativen Umweltschutz (BBU), Die Grünen (Bundespartei) sowie der Informationsstelle El Salvador. Seit dem Jahr 2000 ist sie als freie Korrespondentin zum Mittleren Osten tätig. Ihre Webseite ist leukefeld.net.

 

mercredi, 16 septembre 2015

L’arme migratoire et la fin des nations

syr7898923.jpg

L’ère des disséminations. L’arme migratoire et la fin des nations

Par Jure George Vujic

Ex: http://www.polemia.com

(qui vient de signer un dernier livre aux éditions Kontre Kulture : Nous n’attendrons plus les barbares/ Culture et résistance au XXIe siecle).

Jure George Vujic est un écrivain franco-croate, avocat et géopoliticien, diplômé de la Haute école de guerre des forces armées croates.

Directeur de l’Institut de géopolitique et de recherches stratégiques de Zagreb, il contribue aux revues de l’Académie de géopolitique de Paris, à Krisis et à Polémia. Il est l’auteur de plusieurs ouvrages dans le domaine de la géopolitique et de la politologie.

_________________________________________________________________________________

La crise migratoire, le spectacle quotidien et tragique des noyades de masse des migrants, l’hypocrisie et l’incapacité des élites occidentales à prendre des mesures efficaces face à ce problème… Néanmoins, le caractère brutal et massif de ce phénomène migratoire chaotique, qui prend les dimensions d’un exode, devraient inciter à la réflexion et à la prudence sur les causes réelles de l’afflux massif de migrants sur les rives de la Méditerranée. Les chiffres parlent d’eux-mêmes : selon les chiffres du Haut Commissariat aux réfugiés des Nations unies (HCR), ce sont près de 224.000 réfugiés et migrants qui sont arrivés en Europe via la Méditerranée entre janvier et juillet de cette année. Les Syriens constituent le groupe le plus important parmi ces arrivants (34%), suivis des Erythréens (12%), des Afghans (11%), des Nigérians (5%) et des Somaliens (4%). On estime qu’entre un demi-million et un million de migrants tenteront de rejoindre cette année les côtes européennes. Bien sûr, on ne peut que compatir avec les réfugiés syriens et libyens qui ont été chassés de leur foyer par l’intervention militaire des forces atlantistes en Libye et la volonté de renverser le régime de Bachar el-Assad en Syrie.

Néanmoins, face à cet exode, il convient de réfléchir sur le rȏle déstabilisateur et déstructurant de l’arme migratoire, qui pour la « Vieille Europe » pourrait signifier à long terme la transposition pure et simple sur son sol de la géopolitique étatsunienne de balkanisation et de fragmentation ethno-confessionnelle qui est en œuvre au Moyen-Orient, politique qui a généré une situation chaotique dans laquelle a vu le jour le pseudo-califat de l’Etat Islamique soutenu par les alliés occidentaux, l’Arabie Saoudite et le Qatar.

La bombe démographique avec un taux de natalité exponentiel que représenterait la quantité massive des flux migratoires d’immigrées de l’Afrique subsaharienne et du Maghreb pourrait bien à long terme « libaniser » les Etats européens, lesquels seraient confrontrés à une communautarisation, voire une ghettoïsation accrue, des populations allogènes, créant les conditions favorables à l’éclatement de potentielles véritables guerres inter-ethniques. Une Europe-continent affaiblie de l’intérieur et en déstabilisation permanente se devrait de supprimer ses frontières et les derniers soubresauts de souveraineté économique et politique, ce qui faciliterait l’installation du nouveau TAFTA, grand marché transatlantique, alors que les grandes corporations puiseraient abondamment dans la main-d’œuvre immigrée à bon marché tout fraîchement installée sur le sol européen. La transposition sur le continent européen du scénario du choc de civilisations entre Islam et Occident servirait les intérêts des puissances de l’Argent.

Il va de soi que cette migration massive, quand bien même fût-elle contrôlée, changera indubitablement à long terme la structure ethnique et démographique de la Vieille Europe qui semble incapable de résoudre et d’assainir les problèmes déjà existants d’absorption et d’intégration culturelle et sociale des populations extra-européennes qui résultent des flux migratoires précédents des années 1980 et 1990.

Il ne faut pas oublier que la démographie est une donnée constante de même qu’une arme redoutable dans les conflits contemporains. En effet, même si ses conséquences se font, pour la plupart, à long terme, elle ne peut être négligée d’un point de vue méthodologique, dans la mesure où elle est désormais une nouvelle arme utilisée dans les tensions géopolitiques mondiales : « La structure démographique – densité de population, masse, composition par âge et par sexe, taux d’accroissement – est en effet considérée comme un des paramètres conditionnant la violence collective. » Le même argument est développé par Jean du Verdier dans son ouvrage Le Défi démographique. L’auteur évoque la célèbre déclaration de Boumedienne à l’ONU en 1974, il y a 40 ans : « Un jour, des millions d’hommes quitteront les parties méridionales et pauvres du monde pour faire irruption dans les espaces accessibles de l’hémisphère nord, à la recherche de leur propre survie ».

Bien sûr, l’immigration massive à laquelle on assiste a pour cause non pas seulement la pauvreté et la misère économique, mais la guerre qui avait pour but le démantèlement planifié de la Libye, de l’Irak et de la Syrie, qui s’inscrit donc dans une relation de cause à effet. Comme l’a si bien récemment déclaré Kader A. Abderrahim, chercheur associé à l’Iris, spécialiste du Maghreb et de l’islamisme : « La crise migratoire est en relation directe avec l’intervention franco-britannique de 2011. On ne peut pas provoquer la guerre et s’étonner ensuite du désordre » (http://francais.rt.com/opinions/5889-libye-crise-migratoire-expert). L’ampleur et la convergence des flux migratoires ainsi que les directions majeures qui s’étendent du sud au nord et d’ouest en est, les axes migratoires Libye/Maghreb-Afrique subsaharienne/Méditerranée méridionale/ Europe/Italie-Grande-Bretagne-France, Afghanistan-Irak-Somalie-Turquie/ Europe de l’Est-Roumanie-Bulgarie-Hongrie-Serbie-Allemagne ressemblent plus à un déplacement de populations qu’à des flux migratoires discontinus classiques.

Il ne faut pas oublier que les instances internationales et les centres financiers et économiques de décision mondialistes réfléchissent uniquement en termes quantitatifs, en chiffres et en valeurs ajoutées ; la démographie, la structure des populations, de même que les identités et les différences culturelles ne sont pensées et traitées qu’en termes économiques et doivent servir les impératifs et la dynamique dé-régulatrice du marché mondial unifié. Ainsi il faut rappeler que l’ONU parle ouvertement de migrations de remplacement. C’est ainsi que la Division de la population du Département des affaires économiques et sociales a publié un rapport intitulé Migration de remplacement : est-ce une solution pour les populations en déclin et vieillissantes ?. Le concept de migration de remplacement correspond à la migration internationale dont un pays aurait besoin pour éviter le déclin et le vieillissement de la population qui résultent des taux bas de fécondité et de mortalité. Dans chaque cas on considère différents scénarios pour la période 1995-2050, en mettant en relief l’impact que différents niveaux d’immigration auraient sur la taille et le vieillissement de la population.

Post-nationalité et « Dissémi-Nation » migratoire

Et pourtant, tout porte à croire – et en dépit de l’échec des politiques intégrationnistes, du modèle de la multiculturalité – que depuis des décennies on a conditionné les esprits et préparé l’opinion publique européenne à penser en termes de post-nationalité, de gestion migratoire et de catastrophe migratoire humanitaire, d’hybridation migratoire culturelle et identitaire. Ce discours post-national est aujourd’hui réactivé à des fins géopolitiques et d’ingénierie sociale, puisant ses sources dans le discours post-colonial classique cher à Frantz Fanon et à Edward Said, qui s’est s’attaqué dans les années 1960-1970 aux modes de perception et aux représentations dont les colonisés ont été l’objet. En effet, sous l’influence de la pensée post-structuraliste, néomarxiste et déconstructiviste, dont les chantres les plus connus sont Foucault, Derrida et Deleuze (la fameuse théorie française qui, sous l’appellation de French theory, influencera considérablement les élites universitaires américaines, par le biais des cultural studies et les subaltern studies), les élites atlantistes mondialistes en Europe ont participé en grande mesure à la légitimation du discours post-national et pro-migratoire.

La mode ambiante de la post-nationalité, l’apologie des vertus bénéfiques des brassages et des hybridations culturelles ont profondément modifié dans le mental occidental le rapport et la perception du rȏle de la frontière, dont la fonction de limite et de séparation a été systématiquement dénigrée, au profit de la conception « frontière contact », lieu d’hybridation et d’échanges et rencontres culturelles. Cet état d’esprit irénique explique les déclarations irresponsables des élites européennes face à la vague migratoire massive, qui puisent, dans le registre droit-de-l’hommien et humanitariste, sur l’impératif d’accueillir en Europe les flots d’immigrés qui traversent le tunnel de la Manche ou piétinent les barrières de protection frontalières. Cette posture, qui oublie trop souvent que la majorité des flux migratoires ont des causes et des motivations essentiellement économiques, sociales et pécuniaires, explique aussi la volonté dominante de discréditer, voire de diaboliser, les propositions de renforcement et de contrȏle aux frontières en fustigeant « l’Europe forteresse », les projets de construction de murs en Hongrie étant taxés de modèles ségrégationnistes.

Le discours globaliste et post-national corroboré par la pensée culpabilisatrice de le post-colonialisme estime que la nation, en tant que référence d’appartenance nationale et historique, serait une entité désuète, une catégorie territoriale inadaptée et historiquement consommée, qui devrait laisser la place à de nouvelles constructions transterritoriales, hybrides et fluides aux contours mal définis. La dissémination et la dispersion migratoires à l’échelle planétaire constitueraient le fer de lance de cette entreprise de liquidation de la nation, en tant qu’entité ethnique et linguistique enracinée, vecteur d’appartenance nationale et historique.

Souvenons nous de l’influence qu’exerça le concept de dissémination de J. Derrida en tant qu’outil de déconstruction sur la pensée postcoloniale de Homi Bhabha dans les années 1990, qui forgera le concept de « Dissémi-Nation », afin de proposer un nouveau lieu global sans frontières qui se cristalliserait et se formerait de manière quasi spontanée par le jeu de la dispersion migratoire. Ce jeu de mots de la « Dissémi-Nation » n’est pas aussi anodin et abstrait qu’on pourrait le croire, et l’on peut légitimement se poser cette question : l’Europe n’est-elle pas en voie de se transformer en « Dissémi-Nation », après qu’on a liquidé et décimé la Nation en tant que cadre de la chose publique et espace du vivre-ensemble citoyen ? La nouvelle Dissémi-Nation serait un condensé d’espaces intermédiaires, qui évoluerait sans frontières précises au gré des migrations de multitudes chaotiques, et qui permettrait une production de nouvelles « altérités », pensée qui influencera de nombreux théoriciens de la post-colonialisme, comme Gayatri Spivak, ainsi que la théorie de la subalternité.

Quand bien même ces extrapolations conceptuelles semblent parfois abstraites et farfelues, on est en droit de se demander si le concept de Dissémi-Nation n’est pas en train de voir le jour, par l’intermédiaire de la liquidation de la souveraineté politique et territoriale de l’Etat ? La prolifération, la dispersion et l’exportation des masses considérables de migrants extra-européens ressemblent bien à un processus de dissémination migratoire, qui à long terme pourrait bien déstructurer et déstabiliser ce qui reste encore des vieilles nations européennes, la dissémination migratoire faisant ainsi le jeu de la stratégie du « Grand Remplacement » évoquée par Renaud Camus. La dissémination migratoire massive serait alors une arme de décimation interne et massive de la nation.

Déconstruction de l’idée de frontière

Il convient de se rappeler que cette conception subjectiviste et culturelle de la frontière-contact est l’héritière d’un courant de pensée marqué par la topophilie. On se souvient que les théoriciens post-marxistes Castoriadis et Harvey voyaient déjà dans le territoire et dans la cartographie symbolique un des champs privilégiés de bataille des identités sociales, culturelles qui devaient supplanter les certitudes traditionnelles sur la territorialité souveraine, marquée le limes romain, et de l’existence d’un esprit des lieux (genius loci propre à un peuple, un groupe ethnique ou national) – opinion longtemps partagée par les géographes ou par des penseurs conservateurs et nationalistes, la nation sublimant le corps mystique républicain cher à Péguy ou la transposition générationnelle de « la terre et les morts » chère à Barrès. Cette effervescence terminologique et conceptuelle se traduira par une prolifération de notions floues telles que : lieu, emplacement, paysage, milieu, région, topographie, limite, frontière ou confins, qui viendront brouiller davantage les notions classiques géographiques et géopolitiques du territoire et de la frontière. L’engouement pour les études culturelles contemporaines en Occident comme en outre-Atlantique (les cultural studies) a abouti à une idôlatrie de la notion de topophilie qui avait été lancée par Gaston Bachelard pour insister sur le vécu subjectif de l’espace et sur les rapports de l’individu aux lieux. Pour Bachelard, les individus établissent des relations signifiantes avec les lieux. (D’après lui, il peut s’agir de saisir les modalités selon lesquelles les êtres humains construisent leurs rapports aux lieux, que ceux-ci soient symboliques ou constitutifs de l’identité – Bachelard 1957). C’est dans la même direction que l’opinion publique en Europe a longtemps été abreuvée par ce même discours cosmopolite globaliste qui imposerait de penser l’Europe, non d’une façon charnelle et différenciée, mais de façon abstraite et constructiviste, en tant que construction intellectuelle : un territoire abstrait conçu, dont certaines régions cartographiques sont volontairement éliminées (comme le remarque bien Hobsbawm, 1997).

La même opération dé-constructiviste et dé-substantialiste a été opérée par les sociologues modernes qui insistent sur le fait que la frontière n’est pas un fait spatial aux conséquences sociologiques, mais, par contre, un fait sociétal qui prend forme dans l’espace, faisant crédit à la thèse de Georg Simmel, selon laquelle les frontières sont le résultat d’un processus psychique de délimitation ayant comme résultat des territoires, des « régions » ou des « pays » – des espaces culturels représentatifs pour un certain groupe social, qui ne se superposent pas nécessairement sur les limites politiques et territoriales acceptées. Bien sûr, tout comme Simmel l’a bien remarqué, il y a à la base un acte de volonté, un rôle moteur des communautés dans la formation des limites et des frontières. Il n’en demeure pas moins qu’à force d’élargir le champ sémantique de la notion de frontière à tout processus de délimitation, voire de dispersion, dans le cas des flux migratoires, on finit par évacuer ce qui est à la base de toute structure spatiale élémentaire, à savoir les frontières en tant que discontinuité géopolitique et de marquage, de repère, qui agissent, non seulement comme le soulignent Lévi-Strauss et Lassault sur le réel, mais aussi sur le symbolique et l’imaginaire d’une communauté nationale soudée par la même langue, le même sentiment d’appartenance et une certaine symbolique d’un esprit du territoire, que certains banalisent par le vocable le terroir : la patrie.

Des anthropologues, tels que Lévi-Strauss et Georges Dumézil, ont souligné le rôle fondateur du symbolique, qui institue et structure en tant que vecteurs des identités collectives et individuelles, symbolique qui passe par la fonction de délimitation (l’appartenance à une communauté inscrite dans un territoire qui est le sien). L’histoire et les mythes fondateurs qui président à la formation de toute conscience collective et nationale rendent compte de l’importance symbolique de l’acte de « poser une frontière » qui implique toujours un regard collectif sur « L’autre » et sur « soi ». La frontière qui délimite, enferme ou exclut met en mouvement de puissantes marques d’identité qui déterminent des rapports culturels et de voisinage spécifiques avec l’étranger. On se souvient que l’école française des Annales insistait sur l’équation significative frontière/identité. De même que Lucien Febvre avait analysé l’évolution sémantique du mot frontière comme signe d’une mutation de la réalité historique avec la formation de l’Etat-nation (Febvre, 1962), alors que le couple frontière/identité est aussi présent dans les réflexions de Fernand Braudel sur L’Identité de la France. L’approche déconstructiviste et intellectualisante de la frontière, tout comme l’approche culturaliste et post-moderniste de cette notion ont abouti à une survalorisation des projections intellectuelles (idéologiques et symboliques) au détriment du mode identitaire de penser la frontière arbitrairement taxée de « mode discriminatoire » suspect. Or, la fétichisation contemporaine de prétendues nations périphériques, les identités frontalièrers et transfrontalières ont conditionné les mentalités, et surtout les pratiques de projection culturelle telles que la littérature et les arts et la politique, à absolutiser et à ontologiser l’effacement des frontières ; la pensée post-frontalière qui revendique le nomadisme et la nouvelle figure de proue symbolique du migrant rejoint la promotion de la post-nationalité, en tant que dissolution programmée de la nation au nom d’une unification du monde par le marché et la consommation.

mig18059672.jpg

Or, paradoxalement, les discours communautaristes (Chicanos, Afro-Américains, etc.), post-colonialistes, et la théorie de la subalternité (cette théorie a été initiée par le Groupe d’études subalternes – Subaltern Studies Group, SSG – ou Collectif d’études subalternes – Subaltern Studies Collective –, un groupe de chercheurs sud-asiatiques intéressés par l’étude des sociétés post-coloniales et post-impériales d’Asie du Sud en particulier et du Tiers-Monde en général), qui s’attaquaient à l’impérialisme des élites en renvoyant au contexte hégémonie culturelle au travail du marxiste Antonio Gramsci, sont devenus l’un des leviers du discours d’uniformisation marchande capitaliste qui, pour instaurer et libéraliser le marché mondial, se doit de déconstruire les dernières entraves que constituent les nations, les territoires souverains, les identités enracinées, ainsi que les dernières frontières protectionnistes. La nouvelle narration post-nationale à base de glorification de l’hybridation et de complexification identitaire prône une identité mondiale diasporique et migratoire, qui passe par la construction du sujet Foucaldien par assujettissement aux institutions de contrȏle, aujourd’hui à la mise en pratique de la thématique Deleuzienne de la dissémination des identités fluides et mouvantes, des sujets démultipliés le long des lignes de fuite nomadiques. Ainsi, la théorie de la déconstruction se proposait de promouvoir la désoccidentalisation des esprits et des grands concepts du changement du politique par la déconstruction des certitudes métaphysiques en arrachant tous les signifiants politiques régulatoires et structurants à leur champ de référence et de représentation. Seulement à force de déconstruire et d’arracher, la condition du dominé, du subalterne, devient peu à peu l’instrument de répression et la voie du dominant, le subalterne devenant l’angle mort du processus historique contemporain en tant qu’entreprise généralisée de déracinement.

Dissémination, contagion des idées et nouvelle anthropologie

La dissémination et la contagion des idées ont toujours précédé les grands bouleversements sociaux et politiques. Et c’est la raison pour laquelle la légitimisation des bienfaits de l’immigration massive et du brassage multiculturel s’est opérée par un changement des représentations mentales des populations autochtones et leur rapport vis-à-vis de leur identité et leur rapport avec l’autre, l’étranger. Comme le souligne l’anthropologue Dan Sperber, proche du courant néodarwinien, l’évolution culturelle dans le domaine des idées obéit à une logique de diffusion qui rappelle celle des épidémies. En effet, selon Sperber, les idées et les représentations se disséminent et se répandent par une sorte de contamination, par contagion (le titre de son livre est La Contagion des idées). Ce changement idéel des représentations mentales collectives, qui corrélativement contamine et modifie le champ sociétal, s’articule autour « d’attracteurs culturels » qui sont souvent les porte-parole, les relais de la nouvelle pensée dominante, les diffuseurs de nouveaux pseudo-paradigmes fantasmagoriques tout comme l’idéologie nomadiste. En effet, l’usage métaphorique des sociétés nomades ainsi que l’éloge du déracinement, de l’errance, en vogue dans le monde culturel et des arts, dans les grands médias, les sciences sociales et la philosophie dominante, qui vante les mérites du vagabondage, de l’exil, de l’esprit artiste, du flux, de la pensée ou de la raison nomade, constitue les trames idéologiques de la « nomadologie », fer de lance de cette véritable révolution anthropologique qui devait préparer, sur le terrain des idées et de l’esprit, l’acceptation indolore des grands bouleversements psychologiques, démographiques et ethno-culturels en Europe. Cette nomadologie, bien qu’elle puise ses sources dans l’orientalisme occidental du XIXe siècle, s’affirme depuis les années 1970-1990, c’est-à-dire dans le contexte intellectuel post-soixante-huitard, suite à l’avènement du post-modernisme, de la déconstruction de la raison et de la métaphysique (occidentale) et de l’universalisme-cosmopolitisme triomphant, la mode de l’écologie et la nouvelle philosophie. En effet, la nouvelle narration nomadiste qui devait se substituer à la fin des « grands récits » (les Lumières, les grandes idéologies de la modernité, marxisme, Hegelianisme) et qui devait fournir un modèle alternatif à la pensée dominante, grâce à l’apport d’une anthropologie nomadologique suspecte qui fera l’apologie et la promotion dans le contexte global des sociétés nomades en général, et plus particulièrement des sociétés de chasseurs-collecteurs, est ainsi présentée par Pierre Clastres comme un rempart contre l’Etat (La Société contre l’Etat, 1974) ou par Marshall Sahlins comme la première forme de la « société d’abondance » (M. Sahlins, Age de pierre, âge d’abondance“, 1976). La pensée libérale-libertaire deviendra un véritable laboratoire d’idées pour cette nouvelle révolution anthropologique par la diffusion de revues telles que Libre dirigée par Marcel Gauchet, des réflexions de Jean Duvignaud, Paul Virilio et Georges Pérec sur la « ville nomade » dans la revue Cause commune de 1972 ou du numéro emblématique de cette même publication consacré au thème des Nomades et Vagabonds (1975). Sans oublier évidemment le livre-phare de la « nomadologie », Mille Plateaux, de Gilles Deleuze et Félix Guattari, qui paraît en 1980.

Cette pensée « désirante » et « nomade » sera célébrée plus tard par Chatwin, avec Songs Lives (1986), Kenneth White, avec L’Esprit nomade (1987), Jean Borreil, naguère collaborateur de la revue Les Révoltes logiques dirigée par Jacques Rancière, avec La Raison nomade (1993), ou bien encore Jacques Attali, avec L’Homme nomade (2003), livre dans lequel cette figure est représentée par le marché, la démocratie et la foi. Le même éloge de l’errance se retrouve dans de nombreux mythes et récits bibliques dans lesquels est recyclé le grand mythe, cher au XIXe siècle, du juif errant, sans feu ni lieu (voir Du nomadisme : vagabondages initiatiques, 2006, de Michel Maffesoli, qui est ainsi articulé autour des thèmes du « juif errant », des « villes flottantes » et d’Hermès, tandis que, plus récemment, Le Siècle juif, 2009, de Yuri Slezkine, met en scène l’opposition entre « apolliniens » sédentaires et « mercuriens » nomades fonctionnels).

Il serait inutile de s’étendre sur le caractère fantasque et stéréotypé de cette pensée constructiviste, très souvent déconnectée du réel et des rapports avec les sociétés nomades « réelles », lesquelles n’existent jamais sous la forme de l’errance et de l’isolement. En fait, loin du caractère utopique et purement incantatoire de nomadisme, la diffusion de ces nouvelles formes de représentations sociétales devait servir de levier de déracinement (par les processus d’acculturation/déculturation) et d’uniformisation marchande par la promotion de l’individu comme élément central des sociétés contemporaines pour les besoins du capitalisme tardif en tant qu’acteurs de production totalement flexibles et disponibles, mobiles tout comme le sont les chasseurs-cueilleurs et nomades dans les sociétés primitives. En effet, l’idéologie néo-libérale et le nouveau capitalisme de séduction mis en exergue par Michel Clouscart instrumentalisera avec succès l’anthropologie libertaire des sociétés nomades en transposant sur l’individu et le monde du travail les caractéristiques de sociétés passées et/ou exotiques en y appliquant les nouvelles pratiques « new age » telles que les coach-chamanes, la sophrologie et le « développement personnel ».

La dissémination est le propre de la démarche post-moderne qui dans l’optique Derridienne serait destinée à interrompre et empêcher la totalisation, s’insurgeant contre l’idée de centre et de totalité, préférant le réseau et la dissémination, par l’effacement des repères normatifs et leur remplacement par une logique en apparence fluide mais opératoire. Sur le plan social et politique, la dissémination des processus dissolvants migratoires s’emploie à déconstruire de l’intérieur une société structurée par la verticalité de l’institution politique au profit de l’économique. La dissémination migratoire est le reflet de cette même post-modernité qui se fonde sur une réalité discontinue, fragmentée, archipélique, modulaire où la seule temporalité est celle de l’instant présent, où le sujet lui-même décentré découvre l’altérité à soi, où à l’identité-racine fait place l’identité-rhizome, le métissage, la créolisation, tout ce que Scarpetta désigne, dans le champ esthétique, par le concept d’ « impureté ». Les philosophes post-modernes (notamment Foucault et Agamben) qui ont souligné l’importance des relations de pouvoir dans la formation du discours d’une époque sont devenus, sans le savoir et sans vouloir le reconnaître, les allocataires et les propagateurs de cette nouvelle forme de discours dominant et, selon Alex Callinicos, ont « contribué à créer l’atmosphère intellectuelle dans laquelle celle-ci pouvait s’épanouir », voire post-humaine dans laquelle l’arme de la dispersion indifférenciée migratoire a pour but de liquider la réalité nationale, et d’instituer le règne du « sujet sans intériorité ».

Jure George Vujic

Bibliographie

– G. Bachelard, 1957, La Poétique de l’espace, PUF, Paris.
– A. Callinicos, Against Postmodernism: a Marxist critique, Cambridge, Polity Press, 1991.
– Francois Cusset, French Theory, Foucault, Derrida, Deleuze et Cie, Les mutations de la vie intellectuelle aux Etats-Unis, La Découverte, 2003.
– Jean-Pierre Renard (dir.), Le Géographe et les frontières, Paris, L’Harmattan, 1997.
– François Géré, Pourquoi les guerres ? Un siècle de géopolitique, édition Larousse en collaboration avec Courrier International, Paris 2002.
– Jean du Verdier, Le Défi démographique, éditions Muller, note de Polémia : http://www.polemia.com/le-defi-demographique-du-general-jean-du-verdier/
– Eric Hobsbawm, 1997.
– Homi Bhabha, Nation and Narration et The Location of Culture, New York, Routledge, 1990, 1994.
– Georg Simmel, Über soziale Differenzierung : soziologische und psychologische Untersuchungen, Leipzig, Duncker und Humblot, 1910.
– Lucien Febvre, Pour une histoire à part entière, Sevpen, Paris 1962.
– Michel Foucher, Fronts et frontières. Un tour du monde géopolitique, Fayard, Paris 1986, 1991.
– « Après les frontières, avec la frontière : quelles territorialités transfrontalières ? », Colloque Institut de géographie alpine, Grenoble 2 et 3 juin 2004.
– Jacques Levy, « Frontière », Dictionnaire de la géographie et de l’espace des sociétés, Belin, Paris 2003.
– Arbaret-Schulz Ch., « Les villes européennes, attracteurs étranges de formes frontalières nouvelles », in Reitel B. et alii, Villes et frontières, Anthropos-Economica, Collection Villes, 2002.
– Lévy J. et Lussault M. (dir.), Dictionnaire de la géographie et de l’espace des sociétés, Belin, 2003.
– John R.-V. Prescott, Boundaries and frontiers, Allen and Unwin, London 1978.
– Claude Raffestin, Pour une géographie du pouvoir, Librairies techniques, Paris 1980.
– Etienne Balibar, Nous, citoyens d’Europe ? Les frontières, l’Etat, le peuple, La Découverte, Paris 2000.
– J. Gottmann, La Politique des Etats et leur géographie, A. Colin, Paris 1952.
– Eric Hobsbawm, Nations et nationalismes depuis 1780 : programmes, mythe et réalité, Gallimard, 1992.

Correspondance Polémia – 14/09/2015

La eclosión masiva de refugiados hacia Europa

réfugiés-syriens.jpg

La eclosión masiva de refugiados hacia Europa: salto cualitativo en el plan supremacista de despoblar Siria

por Tamer Sarkis – Consecuencia perseguida

Ex: http://paginatransversal.wordpress.com

El fenómeno de la partida masiva de refugiados sirios hacia Europa dista mucho de contar entre las consecuencias imprevistas del llamado “conflicto”. Tampoco tiene nada que ver con el tantas veces citado “efecto boomerang” impactando contra un “occidente” que habría sembrado vientos para recoger ahora tempestades. En su gran mayoría -y por rigor semántico- los “refugiados” sirios distan de ser refugiados huyendo de los estragos de una hipotética “guerra civil siria”. Se trata de población arrancada a la fuerza de su país, por la operación mercenaria de unos invasores que han pasado por “rebeldes” y hasta por “revolucionarios” en el lenguaje espectacular de masas. En la Agenda hegemonista estadounidense, tales mercenarios son mucho más: son colonos que, secuestrando para sí selectivamente a mujeres y niños y poniéndoles a servir, a procrear y “aprender” inculcos, arraigan sobre el terreno tomado, llegando a fundar entidades político-administrativas con el tiempo.

La desestructuración/reestructuración sociológica y vaciado demográfico de la tierra siria no es más que un estadio adelantado de aquella particular versión del Nuevo Oriente Medio que arrancaría en 2011 con Hillary-McCain, y cuyo corpus (devorando a sus ideólogos laicistas originales) iría tiñéndose cada vez más de los pigmentos confesionales del judeo-testamentarismo. Tal Weltanschauung (cosmovisión), en agresivo tropel de auto-materialización, imagina una Palestina bíblica integralmente judaizada y, a sus territorios circundantes, los requiere bajo mando de sectas domésticas y serviles; convencidas de la superioridad de los Elegidos en su condición ontológica diferencial como “pueblo de Dios”. En mitad de esta deriva escatológica (definitoria de desenlace resolutivo antesala del Nuevo Orden, o “Paraíso terrenal”), los reinos sirio-amorritas -y más tarde arameos- de Damasco y de Yamhad-Aleppo (Siria actual) son destruidos. Y, como ya lo hubieron sido los cananeos y parcialmente los samaritanos a la irrupción de Josué y sus Tropas nutridas por los persas, las gentes de los reinos (hoy los sirios) son desarraigadas de su tierra “a sangre y fuego” (léase una narrativa de las guerras mesiánicas en Pentateuco, Reyes).

Según su propio libro, “los Elegidos” no alcanzan su sueño de promisión terrena a menos que antes hayan hegemonizado bajo su cetro la vida política de la zona, en una repetición de la mítica cualidad salomónica como Rey de Reyes, a quien habrían rendido pleitesía todas las naciones en el arco del mundo conocido mesopotámico, “desde los faraones al Oeste hasta los elamitas al Este” (Pentateuco, Reyes). Para sellar su hegemonía política sobre una región doblegada, “los Elegidos” necesitan involucrar sin dobleces al “mundo occidental” y a sus sociedades en una operación militar de asentamiento con que proceder a la re-adecuación drástica de los grupos humanos sometidos. Estos quema-tierras por mandato divino saben que el “mundo occidental” no se volcará, dejando a un lado disquisiciones humanitarias y cerrando completamente filas tras el bastión israelí, a menos que ellos consigan re-presentar ideológicamente la zona (y remodelarla verdaderamente) en concepto de paisaje natural de enraizamiento y desarrollo para una vorágine de decapitadores que, habiéndose hecho fuertes, tienen por vocación el aniquilar toda diferencia y en particular cernirse contra “el mundo occidental” a título de nuevos bárbaros. A esta lógica de acuñación paisajística le incordia la persistencia en la zona de una población como la siria, educada en el laicismo y en la convivencia inter-religiosa (matrimonios inclusive) bajo una identidad común nacional más fuerte. A la luz de estas consideraciones se descifra el ahínco de exterminio practicado por los siervos armados del supremacismo sobre los cristianos sirios, iraquíes, libaneses y palestinos, quienes llevan casi cinco años de millonaria corriente migratoria y refugio (sobre todo en Escandinavia y Europa Oriental en menor grado). No en vano, los cristianos árabes y su participación en las sociedades mediorientales silencia en seco la discursividad de monocromía neo-tribal amenazante; espectro que el supremacismo recrea ante las Cortes centrales del Mundo mientras reclama un frente común y tutela regenerativa sobre la península de “territorios comanche”.

La oleada humana actual no es, pues, fruto de irresponsabilidad “occidental” y ni mucho menos de su inconsciencia. Bien al contrario, es el Éxodo profetizado por la irracionalidad Antigua y programado por una racionalidad Moderna disciplinada en servir a Yahweh, con toda su tecnología militar y su ingeniería socio-demográfica puntera. Generado el drama (bien real) e instalado en la consciencia televisiva de la muchedumbre de muy buen corazón, a cada perfil de la red social se le insta a “posicionamiento”. Los mismos que elevan cada vez más alto el alambre espinoso de Melilla, que añaden a éste cortantes cuchillas, que apuntalan las leyes exclusionistas de Europa-fortaleza y que dejan desiertas de salvavidas las costas italianas meridionales, manipulan, para este otro caso, sentimientos colectivos y sensibilidad. ¿No resulta un tanto sospechoso?.

Pues han querido los tiempos que este milenario Progrom en virtud de cuya ejecución Siria vaya dejando de ser Siria y los sirios vayan dejando de serlo, esté configurándose como deportación hacia el Viejo Continente. Alemania demanda hoy mano de obra barata cualificada y semicualificada. Tal vez mañana los llegados sean redistribuidos a lo largo de otros centros imperialistas de la Cadena mundial.

Existen, también, rentabilidades inmediatas de lo más mundano: la proporción de “migrantes” sirios varones jóvenes y de familias con niños resulta elevada. No en vano, son quienes reúnen fuerza suficiente para iniciar el periplo desde el país o desde los campos de refugiados más o menos limítrofes. Así pues, Siria se queda tendencialmente sin brazos que empuñen el fusil en su defensa, tanto como sin Fuerza de Trabajo en una tesitura hipotética de recuperación. De la Fuerza de Trabajo diría Marx que es la Fuerza Productiva más importante, y ella sería, a ojos de Mao Tse-Tung, nada menos que la variable determinante del producto de todas las otras juntas. En otras palabras, y contra riesgo de miopía, estas rentabilidades inmediatas aparentemente seculares caen dentro de esa otra supra-rentabilidad arriba descrita.

La supuesta marcha de los supuestos refugiados de guerra es nada menos que la diáspora con que está borrándose del mapa, en el nivel del registro humano, aquello mismo que el “Estado Islámico” y sus otras bandas antecedentes están borrando del mapa en el nivel del registro material histórico y arqueológico. K.O. a Siria: esto es lo que se dirime en el fondo, mientras el aluvión de estremecedoras imágenes, que no dejan de hacerme llorar por fuera y por dentro, ubican a la opinión pública en el debate de la contradicción sobre fronteras, visados, estancia y hospedaje. Este debate público es el resultado de haber puesto a la gente a mirar al dedo para velar con sombra oscura posibles miradas hacia la luna…, cuando al mismo tiempo, y si se sabe leer, el dedo está señalando hacia la luna. Al interior de esta matriz de discursividad, el horizonte masivo es a lo sumo el buenismo. Y el buenismo no deja de servir a los planes en curso, pues los Amos trasatlánticos ya han mandado a los dirigentes europeos a encajar su deber de acogida.

Estados de todo el Mundo han sumado ya sus iniciativas de acogida: Canadá y Australia (Commonwealth), Chile, Brasil, Urugay, Argentina, etc. A los Estados árabes peninsulares (Qatar, Arabia Saudí, Emiratos Árabes Unidos…) se les ha encargado mantenerse al margen; son geográficamente demasiado próximos a la RAS.

Las Potencias que, por medio de su Terror a sueldo, producen desplazados y por ende producen su amontonamiento, agonía, asfixia, ahogo…, indican luego a sus noticiarios la exposición sin tregua de los ahogados, niños incluidos. Confrontado a la pantalla por los mismos asesinos, el espectador reclamará apertura de puertas. Lo importante es desperdigar a la población precisamente para que deje de serlo, así diluida al viento de los cinco continentes. Aquí aplica con matemática precisión la memorable sentencia que Menahem Beghin pronunciara una vez sobre los palestinos: Los palestinos emigrados querrán volver; los hijos se acomodarán a su hábitat; los nietos no se sentirán ya palestinos; los bisnietos habrán olvidado qué fue Palestina.

Anteayer la BBC enfocaba a un niño sirio diciendo: “No queremos vivir en Europa; queremos poder vivir en Siria. Todo lo que Europa tiene que hacer es dejar de hacer la guerra en Siria”. La televisión traducía la primera frase textual y la segunda frase como “Todo lo que Europa tiene que hacer es detener la guerra en Siria”. La traducción entraña connotaciones ciertamente ambiguas, pero escuchada por televidentes a priori condicionados, queda, con probabilidad, al modo siguiente: “Europa tiene que intervenir por la paz, deteniendo la guerra siria”. Y es que esta ocasión de flamante filantropía con que “occidente” viene obsequiándose a sí mismo a lo largo de las últimas semanas, de ningún modo se detiene al interior del perímetro europeo. Se quiere, en cambio, que sea la simiente fecundadora de respaldo público a un más firme compromiso logístico viejocontinental con la re-ordenación supremacista de Medioriente. En palabras de Francois Hollande hace escasos meses: “En Siria hay que volver a empezar desde cero”. Por aquellos días, portavoces de la Administración Obama apuntalaban la declaración del galo, mientras las cadenas radiofónicas -las catalanas sin ir más lejos- se afanaban en retransmitir la buena-nueva. Así intitulaba Catalunya Ràdio su rotativo: “Siria necesita de compromisos de intervención, dada la demostrada inaptitud de Assad para enfrentar el yihadismo en el país”.

 

Nouvelle-offensive-contre-la-contestation-en-Syrie.jpg

 

Previsible baile de máscaras

Nadie niega que decenas de miles de compatriotas han tenido que salir de Siria porque lo han perdido todo a raíz de los bombardeos aéreos llevados a cabo por la aviación del EAS. Y van ya más de cuatro años, en cuyo transcurso millares de viviendas han sido reducidas a escombro, tal y como certeramente relatan ante las cámaras algunos desplazados. No obstante, el sesgo introducido aquí por la prensa (por ejemplo, por la televisión italiana) es doble:

La primera distorsión nos remite a la fijación obsesiva de los medios “occidentales” por repetir y repetir este tipo de historia, que, aunque en efecto dramática, constituye una de las aristas de la catástrofe entre tantas otras. La segunda distorsión es inaugurada por un abuso interpretativo: a partir de la destrucción inmueble narrada (dato desde luego veraz), las televisiones hilvanan toda una narración especulativa donde las víctimas lo serían del “sangriento Dictador y de su ejército”. La referencia empírica al bombardeo le sirve a la prensa “occidental” para (sofisma) inferirle al espectador la inducción de que el objeto de tal bombardeo fue el ciudadano que ha perdido la casa a consecuencia de éste. La falacia, que sitúa presuntos objetivos militares ofensivos en el lugar de las consecuencias y de los daños militares defensivos, “olvida” preguntar a los agraviados si había un tercer elemento ocupante de sus barrios o de sus municipios. Las más de las veces, los habitantes civiles llevaban tiempo lejos de su residencia, refugiados no necesariamente fuera de Siria. Es éste el caso de un buen contingente de ciudadanos alepinos leales a la RAS, quienes, huidos del Terror reaccionario “rebelde” instalado en sus distritos, por decenas de miles han ido constituyendo campos en el extrarradio de Alepo.

Por otra parte, nadie duda tampoco de que el llamado factor interno nacional incide en el calado de la catástrofe y en su perduración: entre las masas de compatriotas desarraigados se cuentan, cómo no, partidas de trogloditas, de econo-liberales, de lúmpenes oportunistas sin conciencia social alguna, de sectarios netos, de cabecicubos que ni tan siquiera se auto-conciben sirios y piensan su afiliación nada más que en términos de rama teológica, etc. ONGs y demás tejido “cívico” subvencionado, en Catalunya y en toda Europa, afilan sus uñas pensando en la tajada que, presta a destripamiento, les ha caído de un plumazo a la mesa de los méritos. “Los Señores nos lo agradecerán”, piensan, y se ponen a adecentar el pescado para -¡alejop!- pasearlo por las ágoras, por las salas de Grados y por las palestras universitarias o de cochera municipal. Estos selectos refugiados van a tener voz hasta en el púlpito parlamentario. A nosotros, por sirios que sean, van a tenernos enfrente.

A escala más amplia, es de comprender que entre los sirios llegados a Cataluña van a primar las situaciones arduas, caracterizadas por el riesgo de exclusión social, la urgencia de encontrar un empleo que no llega, la exasperación ante las filas para recibir asistencia y los déficit vehiculares comunicativos. A estas luces, la ocasión la pintan calva para el chantaje. El tejido político para-estatal del imperialismo (por ejemplo el Comité Catalán en Solidaridad con la Revolución Siria) no estará dispuesto a perder chanza, y, ante los necesitados, mostrará ufano guardar la llave del porvenir…, a cambio de cosechar disposición a integrarse en “dinámicas informativas”, charlas, jornadas, ruedas de prensa, etc.

En fin, prevemos también cierto desarrollo de la reacción que la psico-sociología llama mimetismo (Gabriel Tarde), y de cuya imantación a muchos venidos les va a ser complicado escapar. Pronto quien más quien menos va a percibir que, bajo el clima de prejuicios no sólo socialmente dominante sino oficialmente instituido, empecinarse en la verdad va a significar auto-posicionarse como “loco” y como “sirio malo” a partes iguales. Para casi todos va a ser demasiada auto-exigencia de integridad el cosificarse “de sirio malo” cuando a “los malos” se les va a mostrar estigma de entorno y sanción negativa jurídica de regularización, integrativa, etc. Contrastarán su balance de cuentas con el de “los buenos”, compadecidos por la sociedad civil tanto como premiados con cuidados institucionales y disolución de trabas. Comunidades enteras de sirios, revestidos con el disfraz de lo políticamente correcto como único mecanismo de defensa, abominarán de los elementos “incorrectos” y se distanciarán, quizás hasta el ninguneo. No se podrá reprochar lo que a fin de cuentas es una estrategia adaptativa poco menos que obligada bajo un medio precario extremo. Pocos se resistirán a la simbiosis con “los buenos” -con los dignos de compasión y soporte-, reclamando un sitio seguro en tal particular carro del ganador. Así es como el mentiroso civil “occidental” se engañará una vez más a sí mismo, produciendo coercitivamente aquel arquetipo de “sirio refugiado” que ajustará con escrúpulo sus palabras a aquello audible por el conjunto social del que su suerte depende.

Expulsión de Oriente y estrategia confrontacionista de caballo de troya

Con la perspectiva que el tiempo procura, quien más y quien menos estará dándose cuenta de que la re-ubicación poblacional siria en campos de refugiados fronterizos (Turquía, Líbano, Jordania) no podía constituir más que un apaño transitorio en la mente del supremacismo, y de ningún modo “la solución final” diseñada. Ciertamente, los campos fueron conveniencia del imperialismo porque entre sus pasadizos pudieron los imperialistas deslizar mecanismos de reclutamiento armado contra la RAS. Paralelamente, la CIA y sus agentes gubernamentales regionales erigieron campos de instrucción, confundidos entre el marasmo de “los refugios”, o ampliaron tantos otros campos de entrenamiento preexistentes, introduciendo en su interior nueva carne de cañón a reclutar o redirigir.

Sin embargo, este tejido de frontera alberga una disfuncionalidad obvia: los desplazados pueden evadirse, cruzar y regresar. Muchos de ellos, hartos de subsistir en condiciones más que miserables bajo los auspicios de ACNUR y de distintas ONGs “de apoyo”, quisieron volver a su país, se sucedieron las revueltas en las tiendas, ante los camiones de provisión, etc. Pronto se instauró un régimen disciplinario de control de las presencias, similar al toque de queda en cualquier territorio ocupado, y que impedía hasta las visitas por parte de otros parientes trasladados. Los últimos encarnaban el último cordón umbilical con un mundo exterior y de procedencia que los diseñadores de vidas se esforzaban por evaporar en la nube confusa de una vida anterior más y más onírica con el pasar de los meses. No podía ser asunto sine die el aglutinar a tanto volumen poblacional sirio tan cerca de Siria, máxime en territorios como Jordania, la Arabia septentrional, Antioquia y Líbano, en sí mismos integrantes del Eretz Israel proyectado.

Tal vez más importante aún, Europa debe convertirse en escenario de destino para el propio Principio de Entropía fabricado, a quien enraizar como protagonista de atentados y conflicto. A tenor de lo último, y aún a riesgo de ser malinterpretado, es importante destacar esta rentabilidad ínsita al plan supremacista a costa de los sirios: mezclar el grano con la paja y usar el caudal migratorio como Caballo de Troya de “yihadistas” y de afines, sustentados materialmente y puestos a operar bajo coordenadas nutritivas de islamofobia entre los receptores. Tal deliberación en pro de acelerar espirales de acción-reacción, tiene por cometido tendencial gestar demanda en pro de centrifugar “intervenciones de seguridad” hacia el supuesto “origen focal del problema”, es decir, hacia el Oriente Árabe, justificando así la prosecución de la Campaña de sometimiento gentilicio. Consolidar el apoyo ciudadano a las falsas “cruzadas” antiguo-testamentarias, sólo puede hacerse, en tierras tan próximas al Asia Menor, asustando/indignando a las masas, para ponerlas a comulgar con el axioma atlántico presbiteriano del choque inter-civilización (Huntington, S.). El supremacismo mesiánico tiene, pues, que inyectar en el corazón de la ingenuidad europea una suerte de anticuerpo identitario, a través de ponerle a padecer vecindad con una identidad artificial tan exclusivista como violenta. Consonante a dicha racionalidad, Arabia Saudí acaba de ofrecer apoyo financiero de acogida a la Alemania de Merkel, a cambio de que parte de esos fondos se destinen a la erección de por lo menos 200 mezquitas de orientación predicatoria wahabí en suelo germano.

Conseguir la desbandada de personas sirias despobladas, desde los viejos campos circundantes hacia el Viejo Continente, no ha sido una jugada “occidental” de la noche a la mañana. “Occidente” lleva años propiciando un clima insufrible al interior de los campos, con humillaciones cotidianas; segregación intra-familiar; amenaza expresa de no poder volver a por comida ni a por cuidados si se abandona por horas el campo a fin de visitar a otras personas; sufragio y manutención generosos prestados a Kappos recabados de entre los elementos armados “rebeldes”; constitución y amparo del Terror de las bandas, erigidas, por iniciativa de los gestores institucionales u oenegistas sobre el terreno, en verdaderos Frei Korps de disciplina, encuadramiento, vigilancia y propaganda.

Ello en lo que se refiere a la acción endógena. En lo que respecta a la actuación exógena desde los campos, y podemos decir que cohetáneamente, “occidente” se dedicaba a amparar grupos que han llevado la desestabilización y el sufrimiento a los municipios y núcleos circundantes. Esto ha ocurrido con los lugareños en Turquía y en Jordania, negativamente afectados por abusos, tropelías, violaciones, atentados y estallidos, tráficos varios y acciones mafiosas, intentos de imponer lecturas de la sharia y cánones de vestimenta y comportamiento, asesinatos que incluían la extracción de órganos para su mercantilización hacia destinos como el israelí y el Atlántico Norte, etc. En ocasiones, los autóctonos -confundidos- la han emprendido injusta y abusivamente contra los refugiados, hecho que ha prendido la mecha de la animadversión por parte de la población siria confinada, y así en espiral auto-propulsada (sirve de pequeño anticipo a lo que el neo-mesianismo trama para Europa).

En suma, “occidente” fue afanándose en cocer un caldo de cultivo con un ingrediente de demanda latente a flor de piel. Así, a “occidente” le ha bastado con interrumpir de golpe su apoyo dinerario, infraestructural, de Capital humano y de “voluntarios” a los campos de la zona, para que los Gobiernos locales se hayan decantado por levantar barreras y abrir verjas, desencadenando el abrumador fenómeno aparente. Contra la naivitée que transpiran los miles de análisis “alternativos” que en estos días pueden leerse y que ponen el acento en una presunta “ida de manos occidental” respecto de su propia actuación en Siria (haciéndose eco de la premisa weberiana de “consecuencias no previstas” o de las premisas de la crítica a la Acción Racional), esto que se presume “caos” resulta ser de lo más ordenado, centralizado y atado.

En conclusión

Ciudadanos “occidentales”: no pueden dejarse ustedes engañar tan fácilmente. Los sirios les agradecemos, con el corazón en la mano, su solidaridad con nuestro pueblo. Pero, a su vez, la solidaridad debe armarse de reflexividad si desea evitar transformarse en energía funcional al seno del torrente artífice de nuestra tragedia. Estos artífices no son otros que las élites supremacistas radicadas en “occidente”, sus venales gobernantes de aquende y allende el Atlántico y sus terminales propagandísticas social-imperialistas más o menos grupusculares. Todos estos actores han sido los fundadores y los portadores de las fuerzas para la “des-sirización” demográfica, político-administrativa, regional-organizativa, productiva e infraestructural de la República Árabe Siria. La mayoría continúan cabezones secundando aquel falso “bando bélico” de su propia creación; unos (los más oficiales) en nombre de la “democracia” y otros (los social-imperialistas o bien los más cretinos) en nombre de la “revolución”. Encomiando al hospedaje abstracto de lo que cínicamente denominan “las víctimas del conflicto sirio”, los des-sirizantes no hacen otra cosa que proseguir con esa línea lúcida de desertización humana.

Un desplazado sirio les respondería lo que ya hizo el otro día, con palabras entrecortadas por el llanto, ante las cámaras en directo de la BBC, que no pudieron reaccionar a tiempo: “En Siria, antes de todo esto, vivíamos bien; mejor de lo que podamos llegar a vivir en Alemania. Vivíamos juntos, con trabajo para todos…”. Su esposa, una siria sunní ataviada con hiyab, se abrazaba a él mientras sus hijos escuchaban.

Mis hermanos sirios no huyen de su país “en guerra civil”. Huyen de aquello en que el exterior ha transformado a nuestro país. No pocas redes “solidarias” y portavoces políticos desbordan generosidad porque en el fondo están entusiasmados con la perspectiva del éxodo. O bien, como a los consistorios de varias capitales españolas, se les paga para escenificar la opereta raída que, un acto más, toma por trama el binomio dialógico del “campo civilizado” que, civilizado él, por consiguiente disfruta de la paz y tiende la mano hacia “el campo incivilizado”, preso de su propia incivilidad guerrera. Al mundo al revés, los sirios sabremos responderle con las sencillas palabras de nuestro compatriota filmado por la BBC.

 * Vicedirector de Diario Unidad,  articulista semanal del diario venezolano LA RAZÓN.

 

La Russie, l’Europe et l’Orient

female_army_soldiers_17.jpg

La Russie, l’Europe et l’Orient

par Youssef Hindi

Ex: http://www.geopolintel.fr

La Russie n’est pas qu’une grande puissance militaire, une vieille nation, tendant, depuis l’arrivée de Vladimir Poutine à sa tête, à équilibrer les rapports de forces géopolitiques et économiques. Elle est aussi un pont naturel, à différents degrés, entre l’Europe et l’Asie, l’Occident et l’Orient. Ce pont, certains veulent le détruire depuis plus d’un siècle, notamment au moyen de cette arme que sont les idéologies de la modernité : le bolchevisme, une maladie mortelle qui s’est attaquée au cœur de la Russie, à son âme, le Christianisme ; et l’ultralibéralisme des années 1990, pour achever la Russie. À cela se sont ajoutés les indépendantismes de régions de la fédération russe, stimulés voire encouragés par les Etats-Unis pour abattre définitivement l’ours russe. Si la Russie s’est relevée, il faut en saisir les causes profondes et percevoir le rôle ainsi que le destin de la Russie.

Anthropologie, religion et géopolitique

Le retour « miraculeux » du christianisme en Russie n’est pas le fruit d’un accident de l’Histoire, mais bien la manifestation de lois anthropologiques fondamentales qui doit attirer l’attention des européens. Toute société est organisée autour d’une croyance collective majoritaire ; les plus durables d’entre elles sont bien sûr les grandes religions qui, depuis l’ère industrielle en particulier, ont été remplacées progressivement par des croyances profanes, matérialistes et éphémères, comme les utopies communistes et libérales (issues du messianisme juif) promettant un paradis terrestre, ou encore les idoles de l’argent, du sexe et de la violence, qui occupent une place importante dans les sociétés néolibérales. Les idéologies antireligieuses, à l’instar du communisme et du laïcisme, n’existent, par définition, qu’en opposition aux religions transcendantes, qu’arc-boutées contre la croyance en un Dieu transcendant.

Mais l’histoire et l’anthropologie nous apprennent que l’athéisme (croyance négative), lorsqu’il devient majoritaire, conduit à un inexorable effondrement de la société – n’ayant plus de religion sur laquelle s’appuyer, ni de morale stable – se traduisant par l’atomisation de la société et l’apparition d’individus 1 dépourvus de toute horizontalité (communauté, famille, ekklesia), car privé de verticalité ; les deux étant de notre point de vue complémentaires.

La séquence historique qu’a traversée la Russie nous a montré comment l’effondrement brutal du communisme – l’idéologie dominante ne pouvant perdurer que par le maintien de la structure qui la sous-tend – fit place au retour de la religion traditionnelle en Russie (la nature ayant, selon Lavoisier, une sainte horreur du vide), à savoir le christianisme. Ceci nous permet d’ores et déjà, d’anticiper la manifestation du même phénomène en Occident et en Europe en particulier. En effet, le système libéral et son idéologie sont visiblement en cours d’effondrement (ou plus précisément en cours de mutation, mais nous ne développerons pas cette idée ici) – depuis la crise financière de 2007-2008 – tout comme le communisme hier ; dans ce contexte, nous pouvons anticiper un retour imminent à la religion en Europe. Il faut toutefois craindre que ce retour incontrôlé (par ceux qui en ont la charge : la hiérarchie ecclésiale) à la croyance en Dieu ou a ce qui s’y apparentera, n’entraîne des dérives dangereuses, comme la multiplication de gourous et d’imposteurs en tous genres. La Russie a réussi son retour à l’Orthodoxie grâce à une église solide, faisant corps avec le peuple et l’état.

Ce qui précède nous amène à déduire que la Russie – au-delà de sa complémentarité économique avec l’Europe de l’Ouest – pourra être un élément de stabilisation dans une Europe amenée à connaître de graves troubles sociaux, politiques et d’identité... Il faut ajouter à cela, le rôle éminemment important que la Russie joue au Proche-Orient. Elle est un véritable pont entre l’Europe et l’Orient, le christianisme et l’islam – comme l’a très bien analysé Imran Nazar Hosein – en tant que grande nation multiethnique et multiconfessionnelle ; elle est, par son seul exemple, un remède potentiel à la stratégie du choc des civilisations, stratégie dont elle est elle-même l’une des premières cibles.

La stratégie anti Russe

Cette Russie chrétienne, cette Russie puissance continentale, tellurocratique, étend une influence naturelle sur une vaste zone géographique où vivent des populations diverses mais ayant paradoxalement, pour la majorité d’entre elles, une structure familiale de type russe, communautaire égalitaire 2 ; c’est cette relative homogénéité anthropologique qui, sur la longue durée, a permis à la Russie de devenir cet « empire naturel », à l’inverse de son ennemi, la puissance américaine thalassocratique, héritière de l’Empire britannique et porteuse d’une idéologie différencialiste, imprégnée de darwinisme social sous couvert d’un démocratisme fondateur.

La Russie fait face à une double stratégie : une stratégie impériale américaine dont le principal cerveau est Zbigniew Brzezinski, et de l’autre, qu’il faut bien appeler précisément « sioniste ». Si la stratégie d’endiguement et de démantèlement de la fédération de Russie élaborée par Brzezinski, dans son livre Le grand échiquier (1997/2002), est devenue évidente aux yeux de tous les observateurs, la stratégie sioniste, elle, est beaucoup moins limpide.

La stratégie géopolitique de Brzezinski est un demi-succès : pour ce qui est de la domination du cœur de l’Europe par la soumission totale de la France et de l’Allemagne, c’est chose faite, mais quant à l’éclatement de la Russie en provinces, permettant aux Américains de contrôler toute l’Eurasie et d’en contrôler les richesses naturelles et principalement les énergies fossiles, cela reste de l’ordre du fantasme. Les rêves de domination de Brzezinski se sont brisés sur le mur russe, sur le souverainiste Poutine. Mais la crise en Ukraine – pays auquel Brzezinski accorda une attention particulière et qu’il voulait absolument séparer de la Russie ; ainsi il écrit : « L’indépendance de l’Ukraine modifie la nature même de l’état Russe. De ce seul fait, cette nouvelle case importante sur l’échiquier eurasien devient un pivot géopolitique. Sans l’Ukraine, la Russie cesse d’être un empire en Eurasie. » 3 – montre que les Américains n’ont absolument pas abandonné leur projet. Jusqu’ici, la Russie de Poutine a tenu en échec les Américains à la fois en Syrie (en septembre 2013 la Maison-Blanche renonce in extremis à ses opérations de bombardement) et par le retour spectaculaire de la Crimée dans la Maison russe (mars 2014) en pleine crise ukrainienne.

fem978135_f5d1c10a8f_z.jpgLa stratégie sioniste pour la Russie se combine avec la stratégie américaine, mais en aucun cas elle n’oppose ouvertement ou directement Israël à la Russie, bien au contraire. Israël entretient de bons rapports diplomatiques avec la Russie tout en s’opposant à ses alliés au Levant (la Syrie). Israël, via le lobby pro-israélien 4, utilise, en particulier depuis le tournant du 11 septembre 2001, les États-Unis et l’OTAN comme un outil de destruction des alliés historiques de la Russie au Proche-Orient, opposant plus encore russes et américains. En parallèle, les dirigeants sionistes tentent, via des intermédiaires, de négocier avec la Russie afin qu’elle abandonne ses alliés syriens et iraniens. En juillet 2013, le prince Bandar, en qualité de représentant de l’Arabie Saoudite (alliée d’Israël), a rencontré Vladimir Poutine, pendant la crise syrienne. Bandar aurait au cours de l’entretien proposé un accord économique, pétrolier et gazier à Vladimir Poutine, en échange de quoi, celui-ci devrait lâcher l’Iran, abandonner le président Syrien et livrer la Syrie aux terroristes 5.

Cette stratégie sioniste indirecte ou de « contournement » transparaît lorsque Henry Kissinger déclare le 11 mai 2014 qu’il ne faut pas isoler la Russie, mais qu’« il est dans l’intérêt de tous qu’elle soit maintenue dans le système international ». En 2008, il fut plus précis quant à ses intentions lorsqu’il tendit la main à la Russie au détriment de l’Iran qu’il désigna comme « un danger pour le monde environnant ». Et par monde environnant il faut bien entendu entendre Israël 6. Kissinger s’est entretenu avec Poutine en 2009 et en janvier 2012, deux mois avant sa réélection à la présidence de Russie 7.

La main que tendent les sionistes à la Russie, est une main « traîtresse », car, à partir du moment où la Russie a refusé tout compromis et s’est placée en bouclier devant la Syrie, le feu s’est allumé en Ukraine. Le message délivré alors à la Russie était clair : soit elle abandonne ses alliés orientaux pour les livrer au démantèlement géographique, politique, ethnique et confessionnel auquel les destine la grande stratégie d’empire Nord-Américain (au bénéfice immédiat d’Israël) ; soit elle se verra attaquée à ses frontières. Mais ce choix qui lui est proposé est aussi un piège car si la Russie abandonnait la Syrie, elle perdrait son seul port et point appui stratégique en Méditerranée (Tartous), ce qui n’empêcherait pas les Américains de maintenir leur politique d’ endiguement de la Russie, bien au contraire. En effet cette concession coûterait cher à la Russie face à un ennemi qui ne tient que fort peu ses engagements.

En bref, la Russie a toutes les raisons de ne faire aucune concession et d’avancer un pion à chaque fois qu’elle se sent attaquée ou menacée. Reste que l’actuelle partie d’échec arrivant sans doute bientôt à son « terme », Israël commence à dévoiler ses intentions envers la Russie ; alors que Poutine autorise la livraison de missiles défensifs S-300 à l’Iran (avril 2015), Israël s’apprête à envoyer des armes en Ukraine afin d’alimenter le feu 8 qui couve après les accords de cessez-le feu de Minsk II (12 février 2015).

Ce n’est qu’en ayant compris le couplage stratégique américain et sioniste vis-à-vis de la Russie que l’on peut espérer interpréter au mieux la position de certains géopolitologues qui, à la suite de Kissinger, prônent une main tendue à la Russie tout en étant hostiles à ses alliés… et en attisant en sous-main les feux de la guerre dans le Donbass.

La Russie n’est pas jusqu’ici tombée dans ce piège et n’a pas faibli face à l’évidente et sournoise agression américaine, elle est restée sur sa ligne. À ce titre l’on peut être assuré qu’elle jouera un rôle de plus en plus déterminant au Proche-Orient et en Europe, cela au détriment des politiques expansionnistes et déstabilisatrices des élites sionistes et de leurs homologues atlantistes. Le destin de la Russie est ainsi tout tracé, quant à celui de l’Europe de l’Ouest, s’il paraît fermé, il pourrait cependant bien s’ouvrir en cas de crise majeure, sur un réel bouleversement politique et sociétale. La Russie doit et devrait y être attentive.

Youssef Hindi

Notes

(1) Voir les travaux de l’anthropologue et historien Emmanuel Todd dans son livre Après la démocratie, Gallimard, 2008.

(2) Emmanuel Todd, Après l’empire, Folio Actuel, 2002.

(3) Zbigniew Brzezinski, Le grand échiquier, Bayard Editions, 1997, p. 74.

(4) John J. Mearsheimer et Stephen M. Walt, Le lobby pro-israélien et la politique étrangère américaine, La Découverte, 2007.

(5) Al Manar, Ce qui n’a pas été révélé de la rencontre orageuse Bandar-Poutine, 21 août 2013.

(6) Sputnik, Henry Kissinger considère que les Etats-Unis doivent rechercher l’entente avec la Russie, 7 mai 2008.

(7) Source : http://fr.rian.ru/world/20120120/19...

(8) Sputnik, Poutine met Israël en garde contre les livraisons d’armes à Kiev, 18 avril 2015.

J.Y. Le Gallou: Tyrannie et désinformation publicitaire et médiatique

 

Jean-Yves Le Gallou

«Tyrannie et désinformation publicitaire et médiatique»

Conférence de Jean-Yves Le Gallou "Tyrannie et désinformation publicitaire et médiatique", organisée par le Cercle Afl Okkat le 17 juin 2015 à Strasbourg.

Présentation :

Artisan majeur de la réinfosphère, Jean-Yves Le Gallou nous parle de « Tyrannie et désinformation publicitaire et médiatique ».
2 à 3% de la richesse produite est consacré aux dépenses de « communication » c’est-à-dire de publicité et de propagande.
Jamais jusqu’ici, aucun régime, fut-il totalitaire, n’a disposé de tels moyens de contrôle, de manipulation et d’ahurissement de la population.

mardi, 15 septembre 2015

La transmission rendrait l’élève passif

4ab50afd6dcc95fcba76d0fe04295632-1404290012-448x293.jpg

La transmission rendrait l’élève passif

Stevan Miljevic
Enseignant
Ex: http://www.lesobservateurs.ch

Il s’agit là certainement d’un des arguments les plus répandus pour justifier l’utilisation des pédagogies constructivistes. Quelqu’un a un jour décrété que lorsqu’un enseignant transmet des connaissances, les élèves sont passifs et, comme chacun le sait, on ne peut pas progresser au travers de la passivité. Depuis lors, cette antienne est systématiquement reprise en boucle et ce alors que personne n’a jamais apporté une quelconque preuve de cette passivité !

En fait, il s’agit d’une grave confusion entre la passivité comportementale et la passivité cognitive. D’ailleurs, généralement, cette passivité comportementale est même souhaitée puisque, lorsque l’enseignant parle, il est recommandé de se concentrer sur ce qui est dit/montré sans faire autre chose. Mais ce n’est pas parce que les élèves ne font rien en apparence que leur cerveau n’est pas actif. Le simple bon sens permet de comprendre qu’un élève à qui on expose une théorie, une règle de mathématique ou de grammaire notamment pourra difficilement reproduire l’exemple qui lui a été transmis s’il ne reconstitue pas mentalement les opérations que l’enseignant montre devant lui. Il lui est d’ailleurs totalement impossible de reproduire une série d’opérations si celles-ci n’ont pas été réalisées mentalement au moment de l’exposition à l’enseignement puisque cela reviendrait à dire que l’élève invente de toute pièce la procédure.

Ainsi donc, lorsque l’enseignant enseigne, loin d’être passif, le cerveau de l’élève reconstitue chaque geste que le maître expose. Cela peut mener à utiliser les fonctions cognitives les plus hautes qui soient puisque, si l’enseignant réalise une synthèse, pratique une évaluation ou fait de l’analyse, l’élève en fait tout autant. Et même plus si l’on en croit ce que nous démontrent les dernières avancées réalisées dans le domaine des neurosciences. Certains chercheurs ont en effet utilisé l’imagerie par résonance magnétique (IRM) pour observer l’activité cérébrale d’enfants âgés de 3 à 5 ans au moment où on leur faisait la lecture d’histoires et ont notamment constaté une activation de la région du cerveau responsable du traitement des stimuli visuels.[1] Autrement dit, non seulement le cerveau de l’enfant suit l’histoire qui lui est contée, mais il va même jusqu’à activer ses propres connaissances au sujet des éléments qui lui sont décrits et reconstitue un visuel de la situation, faisant ainsi preuve de créativité ! Une personne à qui l’on transmet des informations est donc potentiellement également capable de dépasser le stade de la simple reproduction de ce qui est transmis et de mettre en branle des fonctions cognitives supérieures à celles que l’enseignant essaie de lui transmettre. Peut-être met-il en lien le nouveau savoir avec d’anciens ou alors compare-t-il ce qu’il est en train d’apprendre avec d’autres procédures qu’il connaît ou autre. Il ne me semble pas y avoir de raison valable de penser que ce qui fonctionne avec l’enfant cesse avec l’âge. On est donc bien loin de la passivité et de l’abrutissement généralisé dénoncé par les penseurs constructivistes puisque, rappelons-le, l’élève atteint au minimum le même stade cognitif que son enseignant. Pour autant que celui-ci lui enseigne correctement les choses bien entendu.

En revanche, il n’est de loin pas certain que l’élève puisse atteindre de tels niveaux de pensée dans les dispositifs de découverte préconisés par les constructivistes. Un élève qui échoue à découvrir par lui-même ce qu’on essaie de lui faire trouver n’atteindra jamais le stade cognitif de l’opération qu’il lui faut trouver. Il risque même de se décourager et de tourner son attention vers autre chose, se rendant ainsi actif du point de vue comportemental mais cognitivement passif au regard de ce qu’il doit apprendre. Ou alors, il peut tout aussi bien se retrouver dans la situation de n’avoir que partiellement correctement reconstruit ce qu’il doit trouver et ainsi encombrer son cerveau de faux théorèmes. Et comme ces cas de figure arrivent de manière assez fréquente, il faut bien conclure que les dispositifs constructivistes de découverte ont bien plus de chances de rendre les élèves passifs ou de les emmener sur de fausses pistes qu’un dispositif transmissif.

Certains se demanderont certainement quel est l’intérêt de faire remarquer ce que n’importe qui possédant un peu de jugeote a compris. Ils ne savent vraisemblablement pas que dans les instituts de formation initiale comme continue et même dans les organes de contrôle des enseignants, ces formules sont systématiquement rabâchées car constituant un des piliers fondamentaux sur lesquels le constructivisme éducatif tente de se déployer. Le constructivisme forme des perroquets à tour de bras et ce jusque dans les plus hautes sphères de la formation!

Stevan Miljevic, 11 septembre 2015

 

[1] http://rire.ctreq.qc.ca/2015/08/lecture-histoires-cerveau/

L'Atlantide contre l'Atlantisme

atlantide-1.jpg

L'Atlantide contre l'Atlantisme

par Laurent James

Voici le texte de mon intervention aux Rencontres Eurasistes de Bordeaux, le 5 septembre dernier

Le but de mon intervention est de montrer les principes de l’Atlantide et de l’atlantisme afin d’éviter toute confusion entre les deux. La confusion contemporaine entre l’eurasisme et le mondialisme est fondamentalement basée sur les mêmes erreurs, et j’expliciterai les raisons pour lesquelles ce sont, précisément, le nationalisme, le marxisme et le complotisme (tous regroupés sous le terme générique de « dissidence » qui la propagent.
 
On peut trouver sur le site de VoxNR un texte inédit de Douguine. Il s’agit du chapitre 3 d’un livre titré « Misterii Evrazii » (Les Mystères de l’Eurasie »), un ouvrage paru en Russie en 1996, puis traduit en espagnol et en italien mais pas encore en français. Douguine y développe les motivations ésotéristes du combat eurasiste, lesquelles ne sont pas tellement connues.
 
A ce sujet, on peut noter que c’était précisément pour présenter ces aspects, que nous l’avions invité à Rennes-le-Château le 18 janvier de cette année pour une journée de conférences avec, entre autres, André Douzet, Erik Sablé, Walid Nazim, Tony Baillargeat et Constantin Parvulesco. Ce dernier devait présenter à cette occasion des « Interprétations alchimiques du Saint-Suaire ». J’en profite pour insister sur un point évoqué dans mon dernier texte paru sur le blog de Parousia, à propos de Paul-Eric Blanrue. Selon la tradition, le Suaire est le Linceul, cité par les Evangiles, qui servit à envelopper le corps du Christ au tombeau. Il renvoie directement à la réalité de la Passion, et c’est pour cette raison que Jean-Paul II l'a défini comme étant le « miroir de l'Evangile ». Tous les révisionnistes du Saint-Suaire sont nos ennemis absolus, à nous autres catholiques intégraux et soldats du Christ. Que cela soit bien clair !
 
Excusez-moi de parler de ça cinq minutes encore, même si ça semble hors sujet. Ça ne l’est pas, en réalité. Certains me reprochent de parler parfois de sujets subalternes, comme la querelle entre Yann Moix et Paul-Eric Blanrue. Je trouve au contraire qu’il est très intéressant d’insister sur le fait que ce n’est pas parce que le premier est un atroce écrivain béhachélien que le second a forcément raison. Voici ce que Blanrue a écrit dans le n°141 de « L’Homme libre, fils de la terre (Recherche d’une psychologie libératrice) », en octobre 1994 :
 
"J’aimerais aborder tranquillement les questions de l’historicité du Christ (rien ne prouve que Jésus soit autre chose qu’un mythe syncrétiste judéo-païen), de la mystification de la Salette (une des rares « apparitions » à avoir été jugée comme arnaque), des problèmes archéologiques liés à la découverte un peu trop providentielle du Saint Sépulcre (trois siècles après les prétendus événements)".
 
C’est le problème principal du révisionnisme, ça ne s’arrête pas aux portes des chambres à gaz. Dans le même texte, il parle de « la vieille Eglise catholique en pleine phase déliquescente ».
 
Lorsqu’on passe des années à saper les fondements du catholicisme en usant d’une arme aussi profane qu’est le zététisme voltairien (il faut savoir que Voltaire est la référence majeure de Blanrue), et que l’on se convertit ensuite à l’islam après avoir constaté qu’il n’y avait plus de valeurs dans le catholicisme, je pense qu’on est inconséquent, c’est le moins que l’on puisse dire. Pourquoi Blanrue ne continue-t-il pas sur sa lancée voltairienne, et ne démontre-t-il pas maintenant, par exemple, que la Kaaba n’a jamais été construite par Abraham ? Il publierait son étude sous le titre « Le secret de la Kaaba : autopsie d’une escroquerie », et là, il aurait une certaine cohérence !
 
On peut se convertir à l’islam pour de très bonnes raisons, mais on peut aussi le faire pour de très mauvaises. De manière générale, le mot conversion est banni de mon vocabulaire. La seule conversion légitime est le retour à la foi de ses parents, ou de ses grands-parents. A condition que celle-ci soit légitime et justifiée, bien sûr ! Pour rester dans le monde chrétien : la fidélité à ses parents quand ils sont évangélistes ou Témoins de Jéhovah est, en réalité, une trahison complète envers la Tradition. Un de mes amis a trahi la foi protestante helvétique de sa famille, en venant se faire déprotestantiser à Marseille par le Père Zanotti-Sorkine. Voilà un bel exemple de fidélité absolue !
 
Revenons à Rennes-le-Château. Douguine connait parfaitement l’importance métahistorique de la région du Razès. Il désirait établir avec nous une connexion solide entre le Royaume d’Araucanie et la Sainte-Russie sur une des places fortes de la Gaule surnaturelle et enchantée. Ainsi que je l’ai dit, sa conférence devait porter sur les racines ésotéristes de l’eurasisme.
 
AtlantideScience.jpgComme vous le savez peut-être, une poignée de très sombres individus a réussi à faire capoter le projet cinq jours avant qu’il n’ait lieu. La version officielle réside dans la lâcheté de l’organisateur, qui en trahissant Alexandre Douguine, a également trahitoute la famille Parvulesco : le grand-père Jean, le père Constantin (qui avait immédiatement décidé d'annuler sa venue en apprenant la censure de Douguine), et le fils Stanislas. Mais nous sommes aussi parfaitement au courant des manipulations effectuées dans l’ombre par d’autres personnages, ésotéristes de troisième zone et guénolâtres stériles. Certains d’entre eux se sont d’ailleurs publiquement réjouis de l’annulation de cette conférence, assurés de leur impunité. Qu’ils sachent que nous les avons tout à fait identifiés, et que la riposte sera à la hauteur de leur lâcheté.
 
Je reviens à ce chapitre écrit par Douguine, diffusé sous forme de samizdat en 1988, portant sur « L’Amérique, ou la Terre verte ». Il y examine les « dessous mythologiques de l’Amérique », disant que (je cite) « si une telle idée de l’Amérique a pu s’enraciner dans la conscience géopolitique universelle et devenir quelque chose de néo-sacral, il doit y avoir à cela des raisons très sérieuses associées à l’inconscient collectif de l’humanité, et à cette géographie secrète continentale qui plonge ses racines dans les millénaires mais dont le souvenir continue à vivre comme archétypes psychiques ».
 
Il commence par noter que le continent américain était connu, « longtemps avant le voyage de Christophe Colomb », notamment par les Vikings. Ceci est aujourd’hui validé par presque tout le monde, et l’arrivée de Leif Erikson à Terre-Neuve, par exemple, est une chose établie. Sans parler du grand voyage de saint Brendan de Clonfert et saint Malo jusqu’au Québec au VIè siècle. Sur la question des Vikings en Amérique, je ne saurais trop conseiller de lire les ouvrages de Jacques de Mahieu (dont le fils Xavier Marie se livre aujourd’hui à des activités politiques intéressantes en Argentine). Jacques de Mahieu, professeur et directeur de l'Institut des Sciences de l'Homme de Buenos Aires dans les années 70 et 80, a étudié de nombreuses cartes géographiques précolombiennes, dont la célèbre carte de l’amiral ottoman Piri Reis, dérobée à un compagnon de Colomb après un combat naval. Cette carte représente de manière très précise l’Amérique du nord et du sud, ainsi que le Groenland et l’Antarctique. Pour Jacques de Mahieu, ces connaissances géographiques remontent au moins jusqu’aux Vikings, qui se seraient implantés au Pérou pour y fonder l’empire de Tiahanacu, ancêtre des Incas, et qui seraient à l’origine de la production métallurgique dans ce pays (mines d’or et d’argent). Il pensait même que la richesse des Templiers, qui financèrent la construction de 80 cathédrales gothiques en moins de cent ans, provenait de l’exploitation industrielle de ces mines et de leur réception au « port secret du Temple », celui de la Rochelle.
 
Cependant, la connaissance du continent américain est peut-être bien antérieure encore. L’amiral Piri Reis affirmait que, parmi les documents ayant permis à Colomb d’entreprendre son expédition, se trouvait également « un livre datant de l’époque d’Alexandre le Grand ». Mais est-ce bien de l’Amérique dont il s’agit ?
 
1)      L’Atlantide
 
Rappelons brièvement que l’Atlantide tenait elle-même ses principes civilisationnels de la Tula hyperboréenne, l’île polaire sacrée placée sous la protection de la constellation de la Grande Ourse. Lorsque l’on évalue les dates principales de notre cycle en se basant sur les ères précessionnelles de 2160 ans, la Chute, soit le passage de l’Age d’Or à l’Age d’Argent, ou encore la naissance du mal dans l’histoire humaine, s’est produite il y a environ 39 000 ans. Ce qui correspond à l’irruption de l’Homme de Cro-Magnon en Europe, mais ceci est un autre sujet.
 
L’Age d’Argent dura ensuite près de 20 000 ans, puis l’Age de Bronze débuta en – 17000 (ce que l’on appelle historiquement le magdalénien). Il se manifesta notamment par l’irruption de ce cataclysme spirituel irrévocable qu’est l’œuvre d’art plastique (art pariétal), et par la naissance de l’Atlantide sous le signe de la Balance.
 
Rappelons que tous les cyclologues, de Platon à Gaston Georgel, en passant par Guénon, situent la fin de l’Atlantide dix mille ans avant notre ère, soit en plein milieu de l’Âge de Bronze. – 10000 : c’est la fin de la glaciation de Würm II, avec une élévation importante du niveau des eaux, et le tout début de l’avènement du néolithique. Six mille ans plus tard, en – 4300, l’Age de Bronze se termine brutalement et débouche sur l’Age de Fer avec le Déluge de Noé, que Platon nomme le Deucalion.
 
Attention à ne pas confondre le Déluge de Noé avec le Déluge de l’Atlantide, 6500 ans les séparent.
 
Une fois, Douguine me demanda de lui dire en quelques mots ce que représentait pour moi l’eurasisme. Je lui répondis : c’est la meilleure manière de guérir du traumatisme du néolithique. Guérir notre continent d’une plaie infiniment douloureuse et lancinante, le traumatisme infligé par la submersion de l’Atlantide, la perte du dernier foyer de connaissance qui nous liait à l’Hyperborée primordiale, ce qui signa la fin du nomadisme métaphysique des peuples européens par leur sédentarisation agricole de plus en plus stérile et dissolvante : c’est donc ce que l’on nomme historiquement le néolithique, advenu durant les ères successives du Cancer et des Gémeaux, qui ont précédé le Déluge de Noé en – 4320.
 
On considère généralement qu’il y a eu deux récepteurs de la civilisation atlantéenne, deux filles de l’Atlantide : l’Egypte et la Chaldée, toutes deux émergeant durant l’ère précessionnelle du Cancer (8640/6480 av. J.-C.), soit deux mille ans avant la fin de l’Age de Bronze.
 
Le cas de l’Egypte est, de loin, le plus étudié. Voir, par exemple, les travaux de Schwaller de Lubicz sur la très haute civilisation de la « théocratie pharaonique » originelle. De nombreux auteurs ont mentionné que les pyramides étaient des images de l’axe polaire hyperboréen, dont les proportions arithmosophiques provenaient d’un enseignement atlantéen, et qu’elles avaient certainement été construites à une époque antédiluvienne.
 
Quant à la Chaldée, de nombreux auteurs l’ont en partie associé à la Celtide.
 
Jean Phaure relevait « l’identité sémantique de la terre celte et de la Chaldée (keltoï désignant en grec la caste sacerdotale) ». Il est possible que les celtes originels constituaient la caste sacerdotale de la société chaldéenne.
 
Je cite René Guénon, dans « Symboles fondamentaux de la science sacrée » : « La tradition celtique pourrait vraisemblablement être regardée comme constituant un des points de jonction de la tradition atlante avec la tradition hyperboréenne, après la fin de la période secondaire où cette tradition atlante représenta la forme prédominante et comme le substitut du centre originel déjà inaccessible à l’humanité ordinaire ».
 
Notons par ailleurs que la Chaldée et l’Egypte furent également deux étapes successives de l’histoire du peuple juif, avec les figures d’Abraham et de Moïse. Sem vécut d’abord chez Japhet avant de se rendre chez Cham. Cela explique la présence de la tradition atlantéenne dans l’Ancien Testament, comme l’avait étudié Guénon.
 
Alexandre Douguine «  La Terre verte – l’Amérique » [partiel]
 
« L’Atlantide est ce paléocontinent dont parlèrent Solon, Platon et beaucoup d’autres après eux. L’Atlantide est le continent sacré occidental, où prospéra une grande civilisation spirituelle, qui périt à la suite d’un terrible cataclysme et d’une inondation. La destruction du continent est le plus souvent décrite comme un événement graduel : après l’abaissement de sa partie continentale, de sa partie principale, située à l’ouest de l’Europe et de l’Afrique, survécurent pendant un certain temps quelques îles dans l’Atlantique Nord, où se concentrèrent les dernières souches atlantes, dépositaires de la tradition ancienne. L’une de ces terres, d’après Hermann Wirth, fur Mo-Uru, qui fut à son tour submergée beaucoup plus tard, plusieurs millénaires après le cataclysme principal. »
 
« Dans l’image sacrée (et par conséquent dans le nom) de l’Amérique doit d’abord se refléter l’idée de son origine ‘extrême-occidentale’. Selon les travaux du professeur Wirth, le plus ancien centre sacré de l’Occident était la terre de Mo-Uru, l’île de Mo-Uru, située dans l’Atlantique du Nord-Ouest. Ce nom est mentionné dans le Bundahishn (un texte sacré zoroastrien), où il vient en troisième position après l’Aryanam-Vaejo des grands ancêtres aryens (l’Aryanam-Vaejo se trouvait directement au Pôle Nord, sur le continent arctique ‘Arctogaïa’, disparu il a déjà de nombreux millénaires) ».
 
C’est probablement ce que les Grecs nommaient l’Hyperborée.
 
« C’est justement avec l’aide de ce mot-clé Mo-Uru, et en se fondant sur le déchiffrement des runes et des symboles proto-runiques que le professeur Wirth parvint à pénétrer les secrets de plusieurs cataclysmes ethniques et raciaux de la préhistoire ».
 

atlantide-dessin.jpg

 
« Il existe une doctrine sacrée mentionnée par Guénon, affirmant que la tradition judaïque est ‘occidentale’ par son origine symbolique et préhistorique. Ur en Chaldée, d’où Abraham partit vers la terre promise, apparaît comme un substitut de Mo-Uru, de la ‘Ur nord-atlantique’, puisque même le Zohar affirme que Ur, où résidait initialement Abraham, symbolise ‘l’état spirituel supérieur’, dont Abraham, par nécessité providentielle, ‘descendit’ vers le bas (il est intéressant de remarquer que les juifs partagent assez souvent ce point de vue concernant l’origine occidentale de leur tradition, comme cela apparaît à travers les premiers projets sionistes de l’organisation d’un ‘Etat juif’ en Amérique ou dans les livres de Simon Wiesenthal sur la préhistoire juive de l’Amérique et de Edmund Weizmann sur ‘L’Amérique, Nouvelle Jérusalem’). De cette manière, l’énigmatique nom Mo-Uru désigne précisément le continent sacré extra-européen, situé à l’Ouest, dans l’Atlantique ».
 
« Cependant le continent Amérique, selon nous, n’est pas le contient le plus occidental de la géographie sacrée (l’Atlantide), mais sa ‘continuation’ vers l’Occident. En d’autres mots, l’Amérique est une ‘Outre-Atlantide’, c’est-à-dire une terre située ‘de ce côté, vers l’Ouest’. Il est possible que ce déplacement sacralement symbolique de l’Amérique explique l’inquiétant secret associé à celle-ci dans le contexte de la géographie sacrée des civilisations traditionnelles de l’Eurasie.
 
 En accord avec cette géographie sacrée, à l’Occident se trouve la ‘Terre Verte’, la ‘Terre des morts’, une sorte de monde semi-matériel, qui rappelle l’Hadès ou le Shéol. C’est le pays du Crépuscule et du Coucher, d’où la sortie est impossible pour les simples mortels, et auquel peut accéder seulement un prédestiné. On pense que le nom du Groenland (littéralement, le ‘Pays Vert’) se réfère justement à ce lieu symbolique. Le ‘Pays Vert’ n’est pas l’Atlantide (et Mo-Uru non plus !), mais quelque chose se trouvant plus à l’Occident de celle-ci, le ‘monde de la mort’, le ‘royaume des ténèbres’. Et cet aspect ultra-mondain du continent américain se révèle d’une manière surprenante dès le premier regard sur une chose aussi banale que le symbole du dollar. René Guénon a remarqué un jour que le symbole $ sur la monnaie américaine est une simplification graphique de l’emblème sacré qui se rencontre sur les monnaies anciennes de la région méditerranéenne. Initialement les deux lignes verticales étaient des représentations des ‘colonnes d’Hercule’ qui, selon la tradition, se trouvaient à l’extrême-occident, après le détroit de Gibraltar. Sur ce symbole apparaissait initialement l’inscription symbolique ‘nec plus ultra’, qui signifiait littéralement ‘rien au-delà’. Ces deux symboles désignaient une frontière, la limite occidentale de la géographie sacrée humaine, au-delà de laquelle se trouvaient les ‘mondes non-humains’. Et ce symbole ‘frontalier’, indiquant qu’on ne peut pas aller au-delà de Gibraltar, est devenu d’une manière paradoxale le symbole financier de l’Amérique, d’un pays qui se trouve ‘au-delà de la frontière’, ‘là où on ne peut pas aller’, là où l’inscription sur le prototype du dollar interdisait justement d’aller ».
 
« Dans une telle perspective, la redécouverte du continent américain par Colomb porte en elle-même une signification assez funeste, puisqu’elle indique l’apparition à l’horizon de l’histoire de ‘l’Atlantide submergée’, et même pas de l’Atlantide, mais de son ‘ombre’, de sa continuation négative dans l’Occident symbolique, dans le ‘monde des morts’. Et la coïncidence chronologique de cette ‘redécouverte’ avec le début du brusque déclin de la civilisation européenne (et eurasienne en général), qui commença dès ce moment à perdre rapidement ses principes spirituels, religieux, qualitatifs et sacrés, est assez significative à cet égard »
 
« Sur le plan purement culturel-philosophique, l’Amérique devient dès lors le lieu de projection idéal de toutes les utopies profanes, athées ou semi-athées. On peut comparer le cycle historique de l’Amérique à celui d’une ‘Nouvelle Atlantide’, sortie de la profondeur des eaux, mais il ne s’agit pas de la vraie Atlantide ressuscitée, mais d’une autre, chimérique, contrefaite, fantomatique, qui s’est consacrée à faire revenir ‘l’âge d’or’, mais de laquelle émane l’odeur du continent-tombe ».
 
« L’eschatologisme pénètre la conception même d’un ‘Nouvel Ordre Mondial’ qui répète et développe les projets idéologiques américains, et cette conception présuppose l’expansion du modèle américain sur tous les territoires restants de la planète. Ainsi, émergeant des profondeurs d’un inquiétant mystère ésotérique, le ‘Nouveau Monde’ tente de se présenter comme la ‘nouvelle terre’ spirituelle dont parle l’Apocalypse et qui doit apparaître après la Fin des Temps. Mais pour le continent américain l’époque post-apocalyptique est déjà arrivée : la victoire des armées alliées dans la seconde guerre mondiale – qui a conduit les Etats-Uns à la domination mondiale – ainsi que la signification symbolique des vicissitudes des Juifs (de cette nation mystique si importante dans l’histoire) en Allemagne, tout cela a fusionné dans la théorie de ‘l’Holocauste’, de ‘l’ultime sacrifice de l’histoire’, après lequel l’Outre-Atlantide, unie au ‘Nouvel Israël’, est entrée dans la période du ‘Grand Sabbat’, de ‘l’époque heureuse’, de ‘l’ère d’abondance’. L’attente des temps messianiques a commencé, et la conscience continentale américaine archaïque, ‘l’esprit’ inquiet du continent ‘ré-émergé’, donne aux tendances messianiques et eschatologiques une force mystique enracinée dans la perception symbolique du monde d’une humanité qui conserve la conscience du lien et des correspondances de l’espace et du temps au cours des longs millénaires ».
 
On pourrait résumer cette prodigieuse analyse de cette manière :
 
L’atlantisme outrepasse l’Atlantide et contrefait la Jérusalem Céleste.
 
Il double l’origine et parodie la fin.
 
Parmi des milliers de citations, en voici une de  George Washington : « Les Etats-Unis sont la Nouvelle Jérusalem, établie par la Providence dans un territoire où l’homme doit atteindre son plein développement, où la science, la liberté, le bonheur et la gloire doivent se répandre en paix ».
 
Je reprends un paragraphe du texte de Douguine, «  La Terre verte – l’Amérique », portant sur l’Age d’Or.
 
« Si l’on ne tient pas compte du rôle symbolique de l’Outre-Atlantide dans son ensemble supra-temporel et méta-historique, ce pathos messianique restera incompréhensible et toute la dimension de fausse spiritualité qui se trouve derrière lui ne pourra pas être comprise et évaluée. Comme dans toutes les eschatologies ‘parodiques’, nous avons affaire ici à la confusion de ‘l’âge d’or spirituel, qui arrivera immédiatement après la Fin de l’histoire, avec la période temporelle précédent cette Fin ».
 
L’atlantisme est une eschatologie parodique, prétendant établir directement sur terre le nouvel Age d’Or (exactement comme l’a été le bolchevisme). L’eurasisme, quant à lui, propose l’établissement d’un rapport entre civilisations qui précéderait ce nouvel Age d’Or. Il s’agit de préparer les Temps de la Fin, et en aucun cas de faire advenir la Fin des Temps dont saint Matthieu nous dit bien «  Pour ce qui est du jour et de l’heure, personne ne le sait, ni les anges des cieux, ni le Fils, mais le Père seul » (XXIV.36). Tout en rajoutant au verset suivant quelque chose de fondamental « Ce qui arriva du temps de Noé arrivera de même à l’avènement du Fils de l’homme » (XXIV.37).
 
Et le déluge de Noé, c’est justement l’éradication de toutes les colonies atlantes, à l’exception – comme je le disais tout à l’heure – de la Chaldée (Japhet), de l’Egypte (Cham) et des juifs faisant la jonction entre les deux (Sem). C’est aussi, à cette occasion, le début de l’écriture. J’y reviendrai à la fin de mon intervention.
 
L’eurasisme n’a donc aucune prétention à établir un nouvel Age d’Or terrestre. L’Empire Eurasiatique ne constitue en aucun cas un pendant, un succédané ou une prolongation de l’empire américain. Penser et écrire cela, c’est justement ne rien comprendre à l’opposition radicale entre Atlantide et atlantisme. Ces sempiternelles accusations de contre-initiation à l’égard de Douguine et de l’eurasisme proviennent toujours de ces mêmes milieux de guénolâtres sectaires et dogmatiques, qui dressent une barrière autour de leur Idole (ils se défendent tous de ce terme, mais il est ici usité dans son acception la plus exacte) afin de la conserver dans sa pureté d’ivoire. Ces guénolâtres sont obsédés par les derniers chapitres de « Le Règne de la Quantité et les Signes des Temps », attachés à traquer derrière la moindre parole ou le moindre geste de ceux qu’ils n’aiment pas (c’est-à-dire tous ceux qui tentent d’agir concrètement pour la beauté et la justice) les indices de « contre-initiation », de « contre-tradition », ou tout simplement de satanisme. Ces guénolâtres tentent de faire passer leur pauvreté ontologique, humorale et physique pour le résultat d’un grand travail guénonien de dépersonnalisation. On ne sera pas étonné d’apprendre, d’ailleurs, que certains d’entre eux font justement partie du groupe d’individus dont je parlais tout à l’heure, qui ont tout tenté pour faire capoter la venue de Douguine à Rennes-le-Château.
 

atlantide_bresil_decouverte.jpg

 
Pour ces gens-là, Léon Bloy est également un contre-initié de première classe. J’ai justement retrouvé un texte extraordinaire de Léon Bloy : c’est la conclusion de son Exégèse des Lieux Communs. Je vais vous le lire partiellement, et vous verrez à quel point les visions du catholique intégral sont proches des nôtres, notamment sur cette opposition fondamentale entre atlantisme et Atlantide.
 
Léon Bloy Conclusion de « L’Exégèse des Lieux Communs » [partielle]
 
« On a souvent demandé où pouvait bien être situé le Paradis terrestre. Platon et mon savant ami de l’Institut, Pierre Termier, m’ont donné les moyens de l’identifier.
 
Le Paradis terrestre, le lumineux Eden d’où furent expulsés nos premiers Parents n’était et ne pouvait être que l’Atlantide.
 
Je sais que cela a été dit déjà par j’ignore quels Américains qui voudraient faire croire que ce continent disparu depuis tant de siècles fut autrefois une partie considérable de leur continent et que l’Amérique actuelle prolonge, en cette manière, à travers les âges, le biblique Jardin de Volupté. Il suffit d’avoir vu, ne fût-ce qu’en passant, le soi-disant béatifique empire du Dollar, pour savoir ce qu’il faut penser de cette prétention. Mais ils ajoutent sottement et lourdement que le Déluge qu’on croyait universel est assez expliqué par la submersion de la seule Atlantide et l’anéantissement simultané du premier Eden. Je cesse alors d’écouter ces protestants spécieux et je reviens au divin Platon qui ne savait rien du Paradis terrestre, mais qui paraît avoir été l’irrécusable témoin d’une tradition archi-séculaire.
 
En son admirable conférence à l’Institut océanographique, le 30 novembre 1912, Pierre Termier a supérieurement démontré, par les plus récentes acquisitions de la science géologique, la véracité du grand philosophe qui raconte, imperturbablement, depuis vingt-quatre siècles, l’histoire de l’Atlantide en ses Dialogues ».
 
2)      L’Atlantisme historique
 
Sur le plan strictement historique, Robert Steuckers nous explique dans son texte fondamental titré « Eurasisme et atlantisme : quelques réflexions intemporelles et impertinentes », que l’atlantisme est d’abord une alliance européenne et chrétienne contre l’islam.
 
« L’atlantisme naît évidemment de la découverte des Amériques par Christophe Colomb en 1492. Mais l’objectif premier des puissances européennes, surtout ibériques, sera d’exploiter les richesses du Nouveau Monde pour parfaire un grand dessein romain et “alexandrin”, revenir en Méditerranée orientale, reprendre pied en Afrique du Nord, libérer Constantinople et ramener l’Anatolie actuelle dans le giron de la “Romania”. Le premier atlantisme ibérique n’est donc que l’auxiliaire d’un eurasisme “croisé” ibérique et catholique, allié à la première offensive de l’eurasisme russe, et portée par un dessein “alexandrin”, qui espère une alliance euro-perse. Une telle alliance aurait reconstitué le barrage des empires contre la steppe turco-hunnique, alors que les empires antérieurs, ceux de l’antiquité, se nourrissaient de l’énergie des cavaliers de la steppe quand ceux-ci étaient indo-européens. »
 
La naissance de l’atlantisme correspond donc historiquement à celle de la modernité. Il est identitaire et non-traditionaliste, puisqu’il est profondément ancré dans une époque qui se détourne radicalement du monde tri-fonctionnel médiéval.
 
Mais l’atlantisme se détache ensuite de notre continent, puis se constitue objectivement contre celui-ci. Son caractère anti-traditionaliste se renforce contre l’identité de l’Europe.
 
« L’atlantisme proprement dit, détaché dans un premier temps de tout projet continentaliste eurasien, nait avec l’avènement de la Reine Elisabeth I d’Angleterre (1558-1603). […] Le décès prématuré de Marie Tudor amène Elisabeth I sur le trône en 1558; elle y restera jusqu’en 1603: motivée partiellement par l’ardent désir de venger sa mère (Anne Boleyn), la nouvelle reine enclenche une réaction anti-catholique extrêmement violente, entraînant une cassure avec le continent qui ne peut être compensée que par une orientation nouvelle, anglicane et protestante, et par une maîtrise de l’Atlantique-Nord, avec la colonisation progressive de la côte atlantique, prenant appui sur la réhabilitation de la piraterie anglaise, hissée au rang de nouvelle noblesse après la disparition de l’ancienne aristocratie et chevalerie anglo-normandes suite à la Guerre des Deux Roses, à la fin du XV° siècle.
 
C’est donc une vendetta familiale, un schisme religieux et une réhabilitation de la piraterie qui créeront l’atlantisme, assorti d’une volonté de créer une culture ésotérique différente de l’humanisme continental et catholique. Elle influence toujours, dans la continuité, les linéaments ésotériques de la pensée des élites anglo-saxonnes, notamment ceux qui, en sus du puritanisme proprement dit, sous-tendent la théologie politique américaine. »
 
« Le terme d’atlantisme apparaît lors des accords entre Churchill et Roosevelt, scellés au beau milieu de l’Océan en 1941. En 1945, l’Amérique du Nord et l’Europe occidentale forment un ensemble, qui deviendra l’OTAN, une alliance centrée sur l’Atlantique-Nord, que l’on qualifiera rapidement, dans les écrits polémiques, d’ “atlantisme”. »
 
Parler d’atlantisme pour évoquer le pouvoir judéo-anglo-saxon est certes réducteur, comme l’écrit Steuckers, parce que l’Empire est tri-océanique (Atlantique, Pacifique et Indien). Le vocable « atlantisme » n’est donc pas véritablement géographique, tout comme le vocable Occident, par ailleurs : c’est le monde entier qui est occidentalisé, d’Est en Ouest et du Nord au Sud. C’est la raison pour laquelle l’Occident – tout comme l’atlantisme, dont il est rigoureusement synonyme - est aujourd’hui une notion absolument délocalisée. Cela pourrait même constituer une véritable définition de l’Occident, tout à fait paradoxale mais juste : l’Occident est le terme qui désigne une zone du monde géographiquement délocalisée. Tout ce qui est géographiquement délocalisé est occidental. C’est-à-dire qu’il est tout à fait logique que la zone du monde qui se soit accaparé toutes les autres soit justement celle dénuée de toute racine, c’est-à-dire de toute valeur ontologiquement spirituelle. On reproche souvent son prosélytisme à la religion quelle qu’elle soit, mais en réalité, la laïcité, l’athéisme franc-maçon et le matérialisme libéral sont infiniment plus prosélytes que n’importe quel jésuite ou salafiste.
 
On peut donc parler d’Empire du non-être, puisque c’est un Empire qui ne possède aucun contour physique, aucune armature idéologique et aucune transcendance spirituelle.
 
3)      Nationalisme
 
En ce qui concerne l’eurasisme, le premier véritable changement de paradigme a eu lieu avec Konstantin Leontiev, diplomate, écrivain et philosophe russe de la seconde moitié du dix-neuvième siècle.
 
L'eurasisme russe était majoritairement pro-occidental (indo-européanisant) et anti-musulman jusqu'à l'avènement de la guerre de Crimée de 1853. Or, Konstantin Leontiev, à cette époque, a complètement changé les perspectives en proposant (je cite Robert Steuckers)."une alliance anti-moderne des chrétiens orthodoxes et des musulmans contre le libéralisme et le démocratisme modernes, diffusés par les puissances occidentales. Leontiev suggéra dès lors une alliance entre Russes et Ottomans, qui constituerait un bloc de Tradition contre le modernisme occidental" Il se trouve que l'eurasisme "douguinien" promeut très activement cette vision des choses.
 
C'est une des raisons principales pour laquelle la plupart des extrême-droites européennes sont anti-douguiniennes, ce dernier étant islamophile et se revendiquant d'une "race" russe (mélange de slaves, de scandinaves et de mongols). Douguine intègre l'épopée du khanat et de la Horde d'Or dans l'histoire de la Russie, et la revendique pleinement. Ce qui agace particulièrement les nationaux-socialistes racialistes, tous favorables à l'Ukraine pro-Otan (et racialement slave, non "contaminée" par les mongols).
 
Je pense personnellement que la guerre du Donbass est également motivée par des critères raciaux, surtout du côté ukrainien où l’on considère généralement que les russes sont des faux slaves. J’ai rencontré l’ukrainien Andriy Voloshyn à Zvenigorod en octobre 2011, lors du congrès « Against Post-Modern World ». C’est un homme très intéressant, bon poète et connaisseur de la littérature française. C’est en discutant avec lui et ses amis que j’ai découvert pour la première fois l’existence d’une animosité raciale ukrainienne contre le « faux slavisme » russe. Voloshyn est aujourd’hui chef adjoint des relations internationales pour Svoboda.
 
Je cite un exemple précis.
 
2906785185_1_3.jpgLe site nationaliste Breiz Atao a mis en ligne en août 2014 un texte titré « Alexandre Douguine ou la subversion de la Russie orthodoxe », très violemment opposé au penseur de l’eurasisme. Le texte cite un entretien de Douguine de 2002 donné au journal russe Kommersant-Vlast : « La Russie est seulement sauvée par le fait que nous ne sommes pas de purs Blancs. Les corporations multinationales prédatrices, oppressantes et détruisant tous les autres, sans parler de MTV, des gays et des lesbiennes – c’est le fruit de la civilisation blanche, dont il est nécessaire de se débarrasser. Donc je suis pour les rouges, les jaunes, les verts, les noirs, mais pas pour les blancs. » On imagine ce que ce trait d’humour peut provoquer chez des racialistes un peu crispés.
 
Le même article reproche à Douguine le fait d’estimer que la Russie ne soit pas un pays européen, contrairement à Poutine qui a déclaré “Les valeurs russes ne diffèrent pas des valeurs européennes”. Or, les principes premiers de l’eurasisme excluent d’autorité toute valeur commune entre l’Europe et la Russie, puisque les principes premiers de l’eurasisme relèvent de la spiritualité, et que l’Europe est (ou devrait être) catholique et protestante (malheureusement) et la Russie est orthodoxe. On peut travailler au rapprochement entre le catholicisme et l’orthodoxie, et c’est même la plus grande tâche à accomplir aujourd’hui, mais la Russie et l’Europe ne peuvent pas être confondues ni mises sur le même plan.
 
Rappelons que l’eurasisme politique, dont les bases intellectuelles se trouvent dans le concept de multipolarité civilisationnelle, promeut le rejet de toute norme internationale dans quelque domaine que ce soit et la promotion de la coexistence des civilisations au niveau mondial.
 
Je vais dire à nouveau ce que j’ai dit à Bruxelles en octobre dernier, parce que l’eurasisme politique est quelque chose d’absolument fondamental, et qu’il n’est pas vain ni inutile de rappeler ce paragraphe qui est en opposition frontale avec tous les schémas de pensée nationaliste, que l’on trouve notamment dans la fameuse dissidence française nationalisto-marxisto-complotiste.
 
Les civilisations sont les pôles du monde multipolaire, et leur définition repose sur le substrat de ce qu’est une civilisation au sens traditionnel, c’est-à-dire sa spiritualité ; ces civilisations sont (je cite Douguine dans son ouvrage "Pour une théorie du monde multipolaire") : la civilisation orthodoxe (« Son guide est l’union eurasienne, dont les étapes sont l’intensification de la coopération militaro-stratégique au sein de l’Organisation du Traité de Sécurité Collective, le partenariat économique au sein de la Communauté économique eurasienne, l’Union entre la Biélorussie et la Russie, le projet de l’espace économique commun, incluant l’Ukraine en partie, ainsi que les structures de la CEI ») ; la civilisation islamique (« recouvrant la Conférence islamique, la Banque islamique de développement, l’espace chiite commun incluant l’Iran, l’Irak et le Liban, ainsi que les projets fondamentalistes du nouveau califat »)
 
ce point est particulièrement important, dans la mesure où la dissidence nationalisto-marxisto-complotiste voit systématiquement derrière tout mouvement "islamiste radical" un complot américano-sioniste. Ces conceptions se retrouvent également dans son ouvrage "La Quatrième Théorie Politique". Voir, notamment, son chapitre "L'empire islamique (le califat mondial)" où il écrit clairement : "Le fait que les islamistes radicaux aient désigné les Etats-Unis comme leur principal ennemi constitue une preuve suffisante du fait que nous avons affaire à un projet sérieux et responsable". Bien sûr, le terme de califat utilisé par Douguine n’a rien à voir avec l’actualité, ses ouvrages étant antérieurs à 2013. Ce qui compte véritablement, c’est que puisse surgir «un Etat musulman supranational qui serait parvenu à unifier et restructurer le monde musulman» (je cite Soleiman Al-Kaabi, spécialiste de la temporalité coranique, et qui nous fait l’honneur d’être présent dans cette salle).
 
; la civilisation hindoue (« renforcement de l’influence indienne en Asie du Sud, sur le sous-continent indien, au Népal et dans certains pays du bassin du Pacifique, proches de l’Inde géopolitiquement et culturellement ») ; la civilisation chinoise (confucianiste) incluant la Chine, Taiwan, l’émergence de la zone du yuan or ; la civilisation japonaise ; la civilisation catholique (Europe d’un côté et Amérique latine de l’autre) ; la civilisation bouddhiste (Asie du sud-est) et la civilisation africaine (« Organisation de l’unité africaine, les Etats-Unis d’Afrique »).
 
Je répète, donc, ce que j’ai dit en octobre dernier à Bruxelles : Comprendre l’Empire Eurasien, c’est favoriser la gouvernance globale civilisationnelle contre la révolte des nations bourgeoises. La révolte des nations bourgeoises, comme par exemple la révolte de l’Ukraine atlantiste et occidentale contre l’Empire civilisationnel russe, contre la Novorossiya et ses hommes encadrés par Igor Strelkov, tous prêts à donner leur vie pour Jésus-Christ. Alors qu’en face, chez Svoboda ou le bataillon Azov, on se bat pour l’Ukraine indépendante.
 
Le texte de Breiz Atao cité tout à l’heure continue en ces termes :
 
« On comprend dès lors que Douguine ne souscrive absolument pas au principe de vérité révélée seule détenue par l’Eglise, orthodoxe ou catholique, et qu’en conséquence son approche géopolitique consiste à défendre un strict cosmopolitisme spirituel. Acquis à l’idée gnostique que la connaissance éclaire l’homme et le sauve et que la vérité est partout, pour qui sait la voir, Douguine veut donc dresser l’ensemble des civilisations non-occidentales, contre l’Ouest démocratique paradoxalement né dans les mêmes cercles.
 
Cette approche hérétique du point de vue orthodoxe comme catholique sert pourtant de base idéologique à l’intellectuel “eurasiste” afin de se faire passer comme le tenant d’une Russie orthodoxe intransigeante.
 
Ce confusionnisme spirituel, il le partage avec celui qui est de mise aux USA où les sectes et groupes religieux de toute nature sont particulièrement puissants, de l’Eglise de Scientologie à la maçonnerie, en passant par les églises évangélistes, les organisations musulmanes ou bouddhistes. »
 
Une confusion maximale est encore atteinte ici entre l’atlantisme et la Tradition héritée de l’Alantide. La proposition de Douguine en matière de religion consiste à éviter toute notion de conversion ou de mission religieuse : les conceptions politiques de la multipolarité s’étendent à la sphère spirituelle. C’est-à-dire que l’on condamne toute propagande religieuse. Par exemple, il est normal qu’un orthodoxe prétende que sa religion possède un caractère universel, et que tout le monde devrait être orthodoxe. Mais le principe de la multipolarité veut qu’il s’occupe d’abord de sa propre civilisation orthodoxe, qu’il la bâtisse correctement afin qu’elle soit belle, juste et cohérente. S’il convainc d’autres personnes de devenir orthodoxe, ce sera grâce à la perfection de l’exemple qu’il pourra donner. L’eurasisme est radicalement anti-colonialiste sur tous les plans, y compris – et peut-être même surtout – sur le plan religieux. Le traditionalisme pratiqué par Douguine sert surtout à comprendre que, si chaque religion est la seule valable pour la personne qui la pratique, le fait que toutes les religions justifiées procèdent d’une même substance permet de ne pas voir le croyant d’une autre religion comme un ennemi mais comme un allié face à l’athéisme marchand. Chacun sait qu’il a raison dans son for intérieur de posséder sa propre foi, mais chacun sait également qu’il a raison de ne pas vouloir convaincre l’autre par tous les moyens d’abandonner sa foi pour rejoindre la sienne. C’est justement cela, la multipolarité, et c’est la meilleure politique possible au XXIIè siècle. Et cela n’a strictement rien à voir avec ce « cosmopolitisme spirituel » dont parle le site Breiz Tao. Toujours cette confusion entre atlantisme et Atlantide. Par ailleurs, j’ai bien parlé de religions justifiées, telle que celles citées précédemment : orthodoxie, islam, hindouisme, confucianisme, shinto, catholicisme et bouddhisme. Les spiritualités modernes (Scientologie, maçonnerie ou Témoins de Jéhovah) n’ont pas leur place dans un monde eurasiste. Il n’y a aucune tolérance ni aucun confusionnisme spirituel dans les principes eurasistes.
 

atlantide-de-platon-presentation-543po.gif

 
J’ai assisté il y a peu à une conférence de Mgr Williamson à Marseille. Il affirme que, lorsque l’on discute avec un orthodoxe comme M. Poutine par exemple, le but premier de la conversation est de pouvoir amener par tous les moyens son interlocuteur au catholicisme. Je pense, personnellement, qu’il y a d’autres urgences que de vouloir convertir à tout prix les masses russes à la foi catholique, et que, par ailleurs, il n’est pas tout à fait certain que l’on puisse y parvenir aussi facilement que cela.
 
Dans la perspective eurasiste, ce sont donc les alliances de civilisations, et conséquemment des spiritualités authentiques, qui renverseront la matrice du non-Etre. En tant que construction bourgeoise élaborée par la classe marchande pour élargir ses intérêts socio-économiques, la nation est la première ennemie du monde traditionnel, surtout dans notre patrie où, comme je l’ai déjà expliqué dans d’autres conférences, la France s’est construite de manière particulièrement visible contre la Gaule au bénéfice intégral de ses fausses élites, à tel point que la centralisation française et la destruction concomitante de nos terres enchantées sont devenues le modèle structurel et archétypal de l’occidentalisation du monde.
 
Pour des raisons historiques liées à leur anti-atlantisme originel, la plupart des mouvements nationalistes en Europe faisaient partie des dernières forces politiques à n’avoir pas succombé aux sirènes états-uniennes. Mais cette époque est bel et bien terminée, et la guerre du Donbass les a presque tous fait tomber dans le piège.
 
Je pense notamment à Zentropa ou Casapound. Je sais bien qu’il existe de nombreux courants de pensée en interne vis-à-vis de ces questions-là, mais enfin, il est quand même évident qu’ils relaient essentiellement des messages anti-NovoRossiya.
 
Ceux qui écoutent de la musique industrielle ou neofolk (ou autres) le savent aussi bien que moi : presque tous ces groupes musicaux sont passés du côté de Svoboda. Je pense notamment à la dernière série de concerts de Death In June, cette année en France, et à leur nouvelle version de « Liberté c’est un rêve ». Après l’incantation « Où est Klaus Barbie », Douglas Pearce rajoute « Où est Ben Laden, où est Poutine ? ». Ils appellent même ça le « Bin Putin mix ». Ce qui signifie bien, par ailleurs, qu’il n’y a jamais eu aucune ambiguïté depuis le début avec ce titre, Barbie étant considéré comme un méchant absolu au même titre que Ben Laden et Poutine, exactement comme le pense n’importe quel journaliste du Nouvel Observateur. Le groupe a également joué à Kiev, à Odessa, même à Marioupol, sur la mer d’Azov, « en hommage à leurs frères d’armes » ont-ils proclamé. De manière plus anecdotique, mais tout aussi révélatrice, un type comme Claus Larsen (de Leatherstrip) qui nous soulevait d’enthousiasme en 1992 avec son titre « Anti US », chante aujourd’hui « The evil in Putin’s Eyes ».
 
En réalité, ce n’est pas la première fois que les nationalistes tombent dans ce type de piège tendu par l’atlantisme.
 
J’ai relu cet été « Les Décombres » de Lucien Rebatet. J’ai été frappé par de nombreuses analogies avec notre époque. La volonté de guerre de l’Occident face à l’invasion des Sudètes par Hitler (en septembre 1938) fait songer à la propagande belliciste face au rattachement de la Crimée par Poutine. 1938 : les allemands des Sudètes, minorité ethnico-linguistique en danger au sein d’un pays fictif comme la Tchécoslovaquie. 2015 : les Russes de Crimée et du Donbass, minorité ethnico-linguistique en danger au sein d’un pays fictif comme l’Ukraine. Et, à l’époque, comme aujourd’hui, les nationalistes qui poussent à la guerre aux côtés de l’Occident. Rebatet, lui, faisait partie du camp de la paix.

Lucien Rebatet « Les Décombres – Ch. III Pour l’amour des Tchèques » [partiel]

« A une volonté de guerre aussi extravagante et frénétique, il fallait certainement des ressorts considérables. A Je Suis Partout et à l’Action Française, on les avait décrits sans répit depuis des mois. Le clan de la guerre tchèque était le même qui avait livré Mayence, remis Strasbourg sous le feu des canons allemands, vomi l’insulte contre Dollfuss, reçu Schussnigg à Paris dans une gare de marchandises, traité en hors la loi Mussolini, le garde du Brenner. La sécurité territoriale, la suprématie et la prospérité de la France lui importaient fort peu. Encore moins l’Autriche. Il l’avait condamnée e 1919. Il avait sournoisement précipité sa fin en lâchant et vilipendant ses défenseurs.
 
Mais la Tchécoslovaquie était sa chose, sa création de choix. J’hésitais souvent devant les explications un peu grosses et populaires d’un événement politique. Mais cette fois, l’erreur eût été de subtiliser. Hitler eût pu exiger sans courir le moindre risque le retour de plusieurs millions d’autres Allemands dans le giron nazi. Il réclamait ses Sudètes, Allemands de la tête aux pieds, en vertu d’un droit des peuples codifié et contresigné par les démocrates eux-mêmes. Mais le droit genevois variait selon les hommes et l’heure autant que la liberté et la justice des républicains. Il n’y avait pas plus de droit des peuples pour les Sudètes que de droits de l’homme pour Maurras en prison.
 
Nos boutefeux eussent peut-être bien livré sans coup férir deux millions d’Alsaciens authentiques. Mais le dessein de Hitler portait atteinte à un fief élu de la grande maçonnerie. Il menaçait de forcer la porte d’une Loge illustre entre toutes les loges.
 
La construction tchécoslovaque était manifestement ridicule et branlante. Mais c’était justement la meilleure raison pour que les hommes de toutes les expériences idiotes, des faillites socialistes, des pactes lunaires, des finances de cirque, des avions contre Franco, des sanctions contre le Duce, des tendresses à Staline, des ambassades de Guignol, l’adoptassent comme leur rejeton amoureusement couvé. Il avait fallu un collage laborieux et des spoliations indignes pour donner consistance à cet Etat chimérique. Mais nos hommes le caressaient comme le chef-d’œuvre de leur traité. Sur leurs cartes, les Allemands le coloriaient du vermillon dévolu aux pays contaminés par le bolchevisme. C’était bien en effet sa nature et sa fonction : au cœur de l’Europe, un instrument choisi du despotisme marxiste, des intrigues, des capitaux, des vetos et des haines du Triangle et d’Israël. Hitler menaçait là quelque chose d’infiniment plus essentiel aux yeux de bien des gens que la plaine d’Alsace ou la vie d’un million de nos fantassins. M. Benès avait fait le grand signe de détresse. Il ne s’agissait plus d’une des mésaventures ministérielles qu’on résout avec quelques pelotons de gardes mobiles et deux ou trois assassinats. Le grand branle-bas de combat répondait à l’appel de Frère ».
 
Rebatet confortera ensuite dans Je suis Partout sa position pacifiste, fasciste et grand-continentale. Un an après, la même histoire recommençait avec la Pologne. Et la guerre totale s’enclencha…
 
L’hitlérisme était un eurasisme par bien des côtés, et la lecture de Drieu La Rochelle nous le confirme, lui qui disait que la seule chose qui le gênait au début dans le fascisme, c’était le nationalisme, et qu’il avait définitivement rejoint le fascisme après qu’il se soit débarrassé de cette erreur. La victoire concomitante du libéralisme et du communisme en 1945 ont plongé l’Europe, et même le monde, dans une nuit profonde. L’intensité de l’oppression démocratique, médiatique et financière augmente chaque jour en France depuis 70 ans, tant et si bien que l’on est aujourd’hui persuadé qu’il est impossible que la libération ne provienne de forces internes à notre pays. Revenons à l’hitlérisme : c’était bien sûr un eurasisme partiellement dévoyé, car non ancré dans une authentique spiritualité justifiée et bien établie. Jean Parvulesco en dresse un court bilan dans Un retour en Colchide, son dernier ouvrage – son dernier roman – publié en 2010. Vous allez voir qu’on est très loin du discours « dissident » actuel.
 

atlantis-detail.jpg

 
Jean Parvulesco « Un Retour en Colchide » [partiel]
 
« Si ce matin, au réveil, je ‘écrie Acqua Alta, c’est que je sens que nous entrons en des temps de très hautes marées. Des puissances immenses, tout à fait insoupçonnées jusqu’à présent, s’apprêtent à être de retour en force ; des choses se passeront que nous n’avions jamais encore vues, et cela d’un instant à l’autre. D’autre part il est certain que, malgré l’état authentiquement révolutionnaire de ses débuts, le Troisième Reich hitlérien a dû assumer, jusqu’à la fin et même au-delà, quatre grandes erreurs fondamentales, erreurs qu’il a dû payer de sa totale destitution politico-historique, de son évacuation irrévocable de la réalité de ce monde, comme s’il n’avait jamais existé. Ces quatre erreurs sont les suivantes – c’est le moment de les rappeler.
 
(1)   L’inconcevable imbécillité criminelle de la Shoah, de la conception et de la mise en œuvre dans les conditions que maintenant l’on sait du projet visant l’anéantissement du peuple juif dans toutes ses dispersions européennes ».
 
Afin de couper court aux critiques qui pourraient immédiatement fuser de la part des milieux « dissidents » actuels, je précise que Parvulesco n’écrivait pas ceci dans le but de passer à la télévision, d’entrer à l’Académie française ou d’avoir son siège au comité directeur du Groupe Bilderberg : il avait 81 ans, était rongé par la maladie et ne pouvait plus sortir de son lit. Mais Parvulesco, en tant qu’authentique ésotériste traditionaliste, a toujours proclamé sa passion pour la véritable mystique juive et pour la Kabbale (tout comme Guénon, d’ailleurs, je le signale aux guénolâtres antisémites qui courent un peu partout).
 
Je reprends.
 
« (2) Le mépris paranoïaque de toutes les nations slaves, et de la Russie en premier lieu, dans la perspective finale d’une vaste entreprise de colonisation des espaces continentaux de l’Est européen ».
 
On peut d’ailleurs penser que l’antisémitisme hitlérien n’était rien d’autre qu’un sous-produit de son anti-slavisme irréductible.
 
« (3) L’hostilité à l’égard de l’Eglise catholique, dont la partie la plus ardente eût dû constituer le substrat eucharistique de la grande révolution continentale européenne que menait le IIIè Reich.
 
(4) Ne pas avoir su reconnaître et encore moins utiliser, sur son front de combat intérieur, des penseurs de la taille d’un Martin Heidegger, ou de Karl Haushofer, ce dernier idéologue du rapprochement continental germano-russe, et avoir préféré à leur place les services d’un crétin subalterne comme Alfred Rosenberg et tous les débiles de la même classe d’indigence mentale (exception faite, peut-être, pour les niveaux supérieurs, ‘ultimes’, de certaines hiérarchies intérieures secrètes de la SS). 
 
Derrière ces terribles erreurs – derrière ces malédictions indélébiles – il y eut cependant une partie incomparable de grandeur réalisée, de surpuissance visionnaire et d’engagement irrationnel, abyssal, d’exploitation symbolique, révolutionnaire, de l’histoire européenne en marche, une part qui ne lui sera jamais enlevée ».
 
Pierre-Antoine Cousteau, dans son Dialogue des Vaincus avec Rebatet, publié en 1950, lâche cette stupéfiante prophétie : « L ’Amérique a mis le doigt dans un drôle d’engrenage. Ca se terminera peut-être très bien, par l’établissement sur cette planète d’une sorte de pax americana, à base de Coca-Cola, de bulletins de vote et de télévision. Ou ça se terminera très mal par un étripage général et des effondrements de gratte-ciel ».
 
4)      Marxisme
 
Les marxistes considèrent que le conflit entre Russie et Occident est une dispute intra-capitaliste, un combat entre deux entreprises multinationales, une lutte économique entre deux entités atlantistes. C’est assez similaire au discours des complotistes « catholiques » comme Pierre Hillard, qui considèrent que le conflit ukrainien n’est qu’une guerre entre deux sectes juives. On retrouve aussi ce discours chez des ésotéristes anti-chrétiens obsessionnellement anti-eurasistes, qui voient dans tout ceci un combat obscur entre deux forces concurrentes de la contre-initiation, Poutine étant issu du KGB et donc de la contre-initiation absolue, évidemment.
 
En fait, personne n’a avalé la désoviétisation de la Russie, effectuée entre autres sous l’impulsion de Jean-Paul II. Il est vrai que ce dernier a pu mener cette opération avec, en partie, le financement de Ronald Reagan. Mais Jean-Paul II l’a fait au nom de la Vierge Marie.
 
Les premiers à regretter la désoviétisation de la Russie sont les marxistes, bien sûr. Certains d’entre eux regrettent que la Russie n’en ait pas profité pour adopter le « véritable communisme » au lieu de se jeter la gueule ouverte dans le Christ ou Mahomet. Dès qu’ils en ont eu la possibilité, les 150 millions de Russes ont choisi de se jeter à corps perdu dans la foi vivante de leur religion retrouvée. Les 120 millions d’orthodoxes ont renoué avec le Christ dont ils avaient soif depuis plus de soixante ans, les 20 millions de musulmans ont retrouvé le chemin de leur mosquée, et les autres ont pu ré-embrasser Bouddha, la Torah ou la main de leur chamane.
 
Il n’y a pas que l’économie dans la vie. Pratiquer la religion ardente de ses ancêtres, avec les valeurs qui l’accompagnent, c’est aussi une façon de résister à l’Occident.
 
La structure économique russe est aujourd’hui faite de capitalisme et de corruption, parce que le caractère totalitaire du capitalisme financier est d’une puissance phénoménale. Mais, contrairement à l’Europe de l’ouest qui a choisi en 1945 de se faire coloniser par l’Amérique, le peuple russe a choisi au début des années 2000 des valeurs fondamentalement anti-occidentales, toutes basées sur l’orthodoxie ou bien l’islam.
 
Contrairement à ce que tentent de nous faire croire les nationalistes engagés du côté de Kiev, tous les partis communistes européens sont aujourd’hui délibérément anti-russes. Et le PCF en tout premier lieu.
 
Exemple n°1, communiqué du 27 novembre 2014. "Le régime de Poutine continue l’œuvre de la restauration capitaliste en ex-URSS, la liquidation des acquis sociaux, de pans entiers de l’appareil de production, l’accaparement des richesses par quelques oligarques. Il s’appuie sur les forces les plus réactionnaires, religieuses, nationalistes, souvent racistes. Il ne tolère les organisations syndicales et politiques, y compris celles dénommées « communistes », que lorsqu’elles lui restent docilement soumises. Le régime est répressif, policier, militariste."
 
Exemple n°2 : communiqué du 20 août 2012, relayé par « L’Humanité ».
 
 « A Moscou, la condamnation à 2 ans d'incarcération des Pussy Riot suscite de multiples protestations dans le monde au nom de la liberté d'expression et pour la défense d'une jeunesse russe qui supporte de moins en moins un système Poutine fermé et répressif.
 
Le Parti communiste français condamne ce qui apparait comme un procès politique qui a du mal à se cacher derrière les accusations de "blasphème" et "d'incitation à la haine religieuse". Il exprime sa consternation devant une peine aussi lourde dont la vocation manifeste est de chercher à freiner un mouvement de protestation populaire et d'aspirations démocratiques qui grandit en Russie.
 
Ce qui aurait pu rester comme une exhibition contestataire et insolente est devenu une affaire nationale qui pose la question des principes et des pratiques d'un Etat de droit, du respect des libertés et des conditions de la laicité et de la démocratie en Russie.  
 
Signé : Parti communiste français »
 
Exemple n°3. Communiqué du 1 mars 2015 : Le Parti communiste français a jugé ce dimanche 1er mars que l'assassinat de l'opposant russe Boris Nemtsov à Moscou avait un "mobile politique évident". Il "condamne avec la plus grande fermeté l'assassinat de Boris Nemtsov et souhaite que l'enquête puisse aboutir dans les plus brefs délais sur l'arrestation des responsables de ce crime, des hommes de main jusqu'aux donneurs d'ordre, et sur des poursuites judiciaires". "C'est un dû à l'ensemble de la société russe qui souffre déjà trop de carences et dénis démocratiques", ajoute le parti dirigé par le sénateur Pierre Laurent.
 
Etc., etc.
 
Il n’y a aucun « rangement délibéré et permanent du PCF derrière l’empire des terres », comme on veut parfois nous le faire croire.
 
Etre marxiste, c’est considérer qu’une Russie soviétique vaut toujours mieux qu’une Russie orthodoxe, quelle que soit la réalité du soviétisme vécu.
 
Etre catholique, c’est considérer qu’une Russie redevenue orthodoxe grâce à l’action de Jean-Paul II est un miracle historique qui devrait être célébré chaque jour avec joie. Bien que polonais, il est notoire que Jean-Paul II aimait la Russie : il avait lu Vladimir Soloviev et Nicolas Berdiaev, ce même Berdiaev qui avait écrit : « La culture occidentale est une culture de progrès. Le peuple russe, quant à lui, est le peuple de la fin ». La doctrine de la « toute-unité » de Soloviev, concernant la question de l’unité chrétienne, était : unité maximale dans la multiplicité maximale. En l’an 2000, pour le centenaire de la mort de Soloviev, Jean-Paul II avait déclaré : « En faisant mémoire de cette personnalité russe d’une profondeur extraordinaire, qui avait très bien perçu le drame de la division des chrétiens et le besoin urgent d’unité, je voudrais inviter le monde à prier pour que les chrétiens d’Orient et d’Occident [de Russie et d’Europe] retrouvent au plus vite la pleine communion ».
 

atlantis-temple.jpg

 
Etre catholique, c’est étudier la pneumatologie orthodoxe, avec Saint Grégoire Palamas par exemple, ce saint du XIVè siècle né à Constantinople, qui fit son éducation monastique au Mont Athos, et qui recommanda la méthode d’oraison hésychaste (purification de l’intelligence et maîtrise du souffle) comme expérience directe avec Dieu. Saint Grégoire Palamas a passé sa vie à développer cette idée fondamentale : « Dieu s'est fait homme, pour que l'homme devienne Dieu ».
 
Etre catholique, c’est appeler à une unité retrouvée entre catholicisme et orthodoxie. Non pas dans un sens œcuménique, comme le dira l’orthodoxe Constantin Parvulesco tout à l’heure, c’est-à-dire que le but n’est pas de convertir les orthodoxes au catholicisme. Le but, comme l’écrivait Jean Parvulesco le catholique, c’est de parvenir à trouver le secret de la suprême jonction entre l’orthodoxie et le catholicisme, et ce secret réside dans le dogme du couronnement de la Vierge Marie associé à l’amour intransigeant du Paraclet.
 
Jean Parvulesco parlait de « l’immense bataille théologique et métahistorique en train de constituer actuellement les fondements du renouveau révolutionnaire grand-continental européen du troisième millénaire, qui verra la nativité dogmatique d’une nouvelle religion impériale grand-continentale axée sur la figure de Marie couronnée, de Marie souveraine maîtresse des cieux et de la terre ».
 
Etre catholique, c’est vénérer la Royauté Absolue et Cosmique de la Sainte Vierge, comme dans les visions de Joachim de Flore, comme la décrit saint Jean au chapitre XII de son Apocalypse.
 
Après deux millénaires de représentations picturales et sculpturales du Couronnement de la Vierge, de très nombreux courants chrétiens demandent aujourd’hui la reconnaissance dogmatique de la titulature de la Vierge comme co-médiatrice, co-rédemptrice, Mère de l’Eglise, Reine du monde… Comme l’écrit le Père Zanotti-Sorkine : « En reconnaissant que Marie a sauvé le monde avec son fils, l’église permettrait à sa royauté d’apparaître sous un jour unique, jamais atteinte par aucune tête couronnée de la terre. »
 
Enfin, être catholique, c’est être définitivement anti-marxiste, anti-démocrate, et anti-républicain.

 

 

5)      Complotisme
 
Au début de mon exposé, je rappelais que l’écriture est supposée être née vers – 3500, durant l’ère précessionnelle du Taureau, la première ère de l’Age de Fer qui débuta par le déluge de Noé.
 
Et le déluge de Noé, c’est justement l’éradication de toutes les colonies atlantes, à l’exception – comme je le disais tout à l’heure – de la Chaldée (Japhet), de l’Egypte (Cham) et des juifs faisant la jonction historique entre les deux (Sem).
 
J’aimerais insister sur le lien structurel et signifiant entre l’écriture et son support, et également entre la lecture et son support.
 
Contrairement à ce que proclament les évolutionnistes, toute irruption dans l’histoire d’une nouvelle technologie est un signe direct de l’affaiblissement des connaissances humaines. Plus l’homme est intelligent, et moins il connaît. Et c’est même parce qu’il connaît de moins en moins, du fait de l’éloignement progressif et historique des origines de sa création, que son intelligence analytique se complexifie afin de pouvoir reproduire des phénomènes qu’il savait contrôler auparavant par d’autres moyens que technologiques : des moyens cognitifs et spirituels. L’invention de la roue - et de la charrette – ne prouve rien d’autre le fait que l’homme était alors devenu suffisamment moderne pour ne plus savoir se déplacer autrement que par des moyens matériels.
 
L’écriture est née en même temps que la roue, et au même endroit : en Mésopotamie vers 3600 avant Jésus-Christ. La première écriture montre le besoin de fixer des connaissances sous forme de traits gravés dans l’argile, c’est l’écriture cunéiforme. Puis, quelques centaines d’années plus tard, on trouve les premiers hiéroglyphes en Egypte sur la palette de Narmer. Comme je le disais tout à l’heure, on trouve la présence des trois fils de Noé : deux sont sédentaires, Japhet et Cham, et le troisième, Sem, est nomade. Dans la cité de Japhet (la Chaldée), Sem s’appelle Abraham avant de se rendre dans la cité de Cham (l’Egypte), où il s’appellera Moïse. La vision philosémite des événements consiste à dire que les Juifs récupèrent à chaque fois l’écriture, c’est-à-dire les traces visibles de la religion – d’abord Gilgamesh puis Amon – afin de sauver l’essentiel de chaque civilisation avant qu’elle ne s’écroule. L’Arche d’Alliance pourrait alors être le cœur non-écrit de l’écrit, le centre vide du rouleau, la part interne et non divulgable réservée à la caste sacerdotale La vision antisémite consiste, au contraire, à dire que ce sont les Juifs qui provoquent à chaque fois l’écroulement de la civilisation, d’abord chaldéenne puis égyptienne, afin de pouvoir lui dérober son trésor spirituel. Ce n’est pas mon sujet.
 
Je veux insister sur le fait qu’avec l’écriture se révèle désormais à tout homme une partie des principes spirituels, alors que toutes les religions pratiquées depuis l’expulsion du Paradis étaient jusqu’alors basées sur des principes transmis de manière exclusivement orale et réservés à la connaissance des hommes en mesure de les comprendre.
 
L’invention de l’écriture correspond ainsi à une divulgation partielle des principes. C’est ce qui fait dire à un ami que Moïse, avec ses Tables de la Loi, a été le premier démocrate de l’histoire. Les grandes étapes de l’écriture ont ensuite été les suivantes : l’imprimerie, seconde moitié du XVè siècle (si l’on met de côté la xylographie pratiquée en Asie depuis 700 ans) ; les lettres sont désormais isolées les unes des autres, ce qui segmente la phrase. C’est à cette époque que surgissent à la fois l’humanisme et le protestantisme, deux pensées modernes et hérétiques qui se basent sur une version lettriste du monde, c’est-à-dire qui analysent les choses au pied de la lettre. Notons qu’en même temps, et comme par un effet de contre-réaction, on trouve Rabelais, Marsile Ficin, tous ces écrivains qui tentent d’utiliser la nouvelle technologie en la contournant, afin de retourner le plus efficacement possible aux sources du savoir.
 
Pour François Rabelais, et c'est indiqué très nettement dans le Pantagruel, Platon est le prince des philosophes. Il y fait beaucoup référence dans ses cinq livres. 
 
Il est souvent représenté, à tort, comme un humaniste.
 
Mais Rabelais était un excellent catholique, il voulait revenir aux sources de sa religion. Il disait qu'il fallait parler la langue arabe pour lire le Coran, ainsi que maîtriser l'hébreu et le grec. Rabelais nous parle de la Sibylle de Cumes qui annonça la venue du Christ et nous rappelle par là les origines helléniques (et donc égyptiennes), et non pas seulement juives, du christianisme. Il évoque la cyclologie, il situe la "création du monde" (entrée dans l'âge de fer) quatre mille ans avant Jésus Christ. Rabelais insiste sur la double origine du judaïsme, par l'analogie des épouses d'Abraham, l'une chaldéenne et l'autre égyptienne. Rabelais insiste également sur le rôle apocalyptique de la Vierge Marie. En bref, ce corpus est celui d'une pensée traditionaliste en totale opposition avec la pensée humaniste des lumières, de la naissance de la modernité. 
 
Par ailleurs, ce n’est certainement pas un hasard si l’invention de l’imprimerie en Europe correspond à la création, pour la première fois, de sociétés ésotériques profanes, laïques, telle que la Société Angélique à Lyon.
 
La rupture technologique suivante dans l’histoire de l’écriture, après l’imprimerie, est l’ordinateur. Après que la phrase ait été fragmentée par le système de l’imprimerie, c’est la lettre elle-même qui se fragmente sous l’effet de la pixellisation numérique. Comme l’avait très bien vu Abellio dans son roman La Fosse de Babel publié en 1962.
 
Au chapitre VI, le policier Pirenne exhibe sa gigantesque machine automatique de gestion d’informations sur les individus : c’est une « trieuse d’âmes ». « Vous êtes ici en présence du premier chef-d’œuvre de la police quantitative », explique Pirenne. « On raconte l’histoire de ce fantassin de l’armée Vlassov qui, étant ivre, en juin 44, à Sotteville, près de Rouen, coupa le doigt d’une jeune fille pour lui voler sa bague. On le retrouva en trois jours, à Strasbourg, un an et demi après, en sachant seulement qu’il était blond, mesurait environ 1 m 80 et avait une fossette au menton… Un jour, chaque homme aura sa fiche et on pourra, en un point quelconque du monde, à des milliers de kilomètres de chez lui, remonter instantanément dans son passé. Il n’y aura plus de distance et plus de passé ».
 
Raymond Abellio prophétise en ce roman en 62 le règne totalitaire de l’ordinateur qui abolit le temps et l’espace.
 
On retrouve ainsi une parfaite similarité entre l’évolution de l’écriture et les phases principales de la modernité chez l’homme décrites par Guénon : la lettre et l’être connaissent la même régression spirituelle : d’abord la coupure du lien transcendantal (invention de l’écriture), puis la coupure des liens horizontaux et la naissance de l’individualisme (isolement des lettres par l’imprimerie), et enfin la dissolution de l’être (pixellisation de la lettre). On ne lit pas un texte sur ordinateur, on le regarde, c’est tout à fait différent.
 
Enfin, voici la phase ultime. Avec internet, tous les ordinateurs du monde sont reliés les uns aux autres, et chaque pixel est instantanément délocalisé et mis en réseau. Le protestantisme est né avec l’isolement de la lettre ; le flicage généralisé des uns par les autres (la police parfaite) est né avec l’ordinateur ; avec la mise en réseau des pixels, est née la pensée en toile d’araignée : le complotisme.
 
J’ai suffisamment écrit sur le complotisme pour ne pas avoir à m’étendre sur le sujet. Lisez mondernier texte sur le sujet, mis en ligne sur le blog de Parousia le 16 février 2014, et titré « Le complotisme, cet anaconda dont nous écraserons la tête à coups de talon ». Je rajouterais simplement que cette pensée spécifiquement infantile produit des dégâts considérables en matière de religion et de politique.
 
Le versant religieux du complotisme se voit dans le succès grandissant du sédévacantisme, cette hérésie typiquement moderne où chacun prétend avec sa propre science infuse que le Vatican n’est plus le Vatican. Même Mgr Lefèvre n’a jamais été sédévacantiste ! On voit des traces de satanisme partout, sur le moindre cheveu du moindre curé de campagne.
 
Mais les ravages du complotisme en matière de politique sont tout aussi ahurissants.
 
On peut trouver sur internet une vidéo titrée « Incroyable : Poutine est juif et veut le nouvel ordre mondial ! », toujours relayée par les mêmes ahuris. En voici quelques commentaires.
 
7mn40 : On voit Poutine serrer la main du Pape François. « Tout le côté pseudo chrétien et anti-corruption de Poutine, c’est du théâtre ». Il est vrai que dans l’ombre des extra-terrestres, les illuminati à la tête du Vatican mettent la Cabale au sein de la prochaine société antéchristique…
 
9mn15 : « Il faut savoir que Poutine est juif, par sa mère qui s’appelle Maria Ivanovna Shalomova ». Il faut savoir que je suis moi-même juif, mon véritable nom est Laurent Jamesovitch, et je suis un ashkénaze infiltré dans les milieux eurasistes pour tout balancer aux flics. Je vous assure que c’est ce que l’on raconte dans certains milieux !
 
12mn50 : « Il faut savoir que Poutine a du sang sur les mains : Boris Nemtsov, Anna Politkovskaya ». La source ? Bloomberg News !
 
13mn42 : « Illuminati Puppets »
 
33mn : A propos de l’eurasisme : « Ca permet de brouiller les cartes des nations, et de faire croire que les nations, c’est dépassé ». Pour les complotistes, l’eurasisme est un mondialisme. Toujours cette confusion sempiternelle, ancrée – comme je l’ai montré – dans la confusion entre Atlantide et atlantisme.
 
34 mn : « Douguine, c’est un Brzezinsky russe »
 
« Ca me rappelle la deuxième guerre mondiale, où on avait d’un côté un camp inspiré par Marx (les russes), et de l’autre par Nietzsche (les allemands). A chaque fois, c’est des faux théoriciens qui viennent donner une idéologie pour permettre aux gouvernants d’être suivis par la foule ».
 
41mn30 : « Forcément, nos élites ne vont pas nous montrer le mauvais côté de la Russie, si c’est la Russie qui doit diriger le nouvel ordre mondial. C’est logique. Il faut forcément que le nouvel ordre mondial donne envie aux gens. Donc c’est pour ça que l’ancien ordre mondial, donc l’occident, qui se fait détruire parce qu’il est chrétien et que c’est l’ennemi des juifs, est déprécié. Donc en fait on montre une Russie complètement forte et largement supérieure à l’occident, parce que justement le but c’est d’écraser l’occident. Voilà, j’espère que vous avez compris la stratégie ». « Le but est l’instauration d’un nouvel ordre mondial communiste ».
 
Le complotisme est une pensée extrémiste fabriquée par internet pour lutter frontalement contre la pensée radicale.
 
Le complotisme est une force structurellement démotivante (puisque les Etats-Unis, les illuminati et les lézards contrôlent tout, y compris Douguine et le Vatican), mise en avant pour détruire de l’intérieur la révolution eurasiste.
 
Le complotisme est la maladie infantile de l’eurasisme.
 
Je termine avec le dernier paragraphe du texte de Douguine « La Terre verte – l’Amérique ».
 
« En premier lieu, les archétypes inconscients associés à la structure spatiale et temporelle du cosmos doivent être examinés à la lumière d’une tradition métaphysique véritable et orthodoxe, qui seule peut remettre les chose à leur juste place à l’intérieur de l’ordre divin. Au contraire, s’ils restent au niveau inconscient, ces archétypes, étant efficaces et puissants, pourront toujours attirer non seulement des individus particuliers, mais aussi des nations entières, des races et des civilisations vers les conséquences les plus imprévisibles et les plus destructrices. Mais pour atteindre la tradition métaphysique capable d’illuminer par le rayon de l’intelligence divine la profondeur abyssale du psychisme, il faut faire un effort intellectuel et spirituel presque incroyable dans les circonstances actuelles, afin de s’arracher aux ‘dogmes’ infondés de la pensée profane et matérialiste qui s’est emparée de la plupart de nos contemporains, mais sans pour cela tomber dans l’occultisme chaotique, le néo-mysticisme ou le néo-spiritualisme. La meilleure voie pour cela, et même la seule, est d’accepter une religion traditionnelle et, par la pratique spirituelle, rituelle et intellectuelle de cette religion, de pénétrer dans ses aspects ésotériques et secrets, dans ses mystères.
 
Deuxièmement, seules deux traditions religieuses sont moins exposées à l’influence de la ‘Terre verte’, à savoir le christianisme orthodoxe […] et l’islam orthodoxe. En tout cas, l’orientation verticale et métaphysique de ces religions, à conditions qu’elles soient épurées à la fois de toutes leurs stratifications modernes et de leurs associations archaïques, apparaît comme une garantie suffisante d’authenticité et d’efficacité spirituelle.
 
Et enfin, il est nécessaire de former un concept purement géopolitique et non-religieux de ‘bloc eurasien’ (‘Kontinentalblock’, comme on disait autrefois), qui unirait tous les peuples et tous les Etats eurasiens dans un seul complexe autonome et soustrait au paradigme parodique-eschatologique qui opprime le monde traditionnel. Aujourd’hui, après le démantèlement du système socialiste, il n’est pas vraiment important de savoir sous quelle forme politique et étatique cela surviendra. Au niveau mondial, il est maintenant beaucoup plus important qu’un seul peuple et qu’un seul Etat affrontent ‘l’Atlantide réémergeante’ et sa mission. C’est pourquoi l’idée d’une ‘Eurasie des peuples’ ou d’une ‘maison commune’ qui aurait une forte orientation anti-atlantique et qui ferait appel aux ressources intérieures, spirituelles, religieuses, économiques et matérielles, n’est aujourd’hui pas aussi abstraite et utopique qu’elle peut le sembler à première vue. La foi dans les ‘ancêtres morts’, dans les fabricants de coca-cola, est-elle plus réaliste et plus objective ?
 
Quant au continent Amérique, la période de son expansion, selon les correspondances cycliques précises, probablement, sera tendue, orageuse, pleine d’événements inquiétants, mais aussi extrêmement brève, puisque le ‘New Age’ dont l’arrivée a été annoncée par les partisans mystiques de la ‘Nouvelle Jérusalem’, mais qui n’a pas encore commencé, finira par arriver. Son arrivée sera signalée par un grand cataclysme géographique. Et qui sait si l’Amérique, la ‘Terre Verte’, ne connaîtra pas le même destin que celui qui frappa jadis un autre continent situé dans l’Atlantique ? »

 

Contre le triptyque Nationalisme, Marxisme et Complotisme :
Eurasiste, Catholique et Révolutionnaire ! 


Laurent James, Sainte-Foy-la-Grande, 5 septembre 2015

Déluge biblique et affectivisme postmoderne

pleureuses.jpg

Déluge biblique et affectivisme postmoderne

Ex: http://www.dedefensa.org

7 septembre 2015 – ... Pour commencer, battez tambours, sonnez trompettes, et Gloire et Honneur à Michel Onfray, le 3 septembre 2015, sur BFM-TV... Pour la séquence, d’abord une image en studio d’une autre émission, avec BHL en image fixe, BHL seul, léonin par rapport au vulgaire et si loin du vulgaire, le regard au lointain qui voit le sort du monde, Statue du Commandeur d’une élégance inévitable ; la voix “off”, du pur-BHL dans le genre tragiquement-calme, mais humanitaire-hein, discourant à propos de la photo du petit garçon syrien trouvé mort sur une plage de Turquie ; des propos comme sur une tartine à la gelée royale, chargée de lieux communs délicieux, à propos de ces “images” qui “secouent le monde”, ou bien qui ont “l’étrange vertu” de “réveiller la conscience universelle”, “la mort d’un enfant”, “atroce” (on cite à vue de nez et d’une oreille un peu bouchée)... Puis, question à Onfray de l’aimable présentatrice : «Pour une fois, vous êtes d’accord ?»  ; réponse, toute fureur rentrée, ce qui laisse à Onfray la disposition d’un langage clair et tranchant  :

Non non, il a pas honte, il a pas honte, il ferait mieux de rester caché. Vous savez, je pourrais citer Audiard, “les cons ça ose tout, c’est même à ça qu’on les reconnaît”, parce que franchement, avec tout ce qu’il advient aujourd’hui il ferait mieux de rester chez lui ... Voilà un monsieur ...

Il n’y a vraiment rien qui peut vous mettre d’accord ...

Mais enfin, si, peut-être, sûrement, des choses, mais pas ça... Voilà quelqu’un qui a invité à bombarder la Libye, qui a invité à tuer des Libyens, sous prétexte qu’en tuant des Libyens on rendrait possible la démocratie ... On a détruit un État qui valait ce qu’il valait, mais avec lequel on pouvait discuter, on pouvait discuter avec l’interlocuteur qu’était Kadhafi. Là, on ne peut plus rien à faire avec la Libye, c’est une base extraordinaire pour le terrorisme... Responsable de rien, Bernard-Henri Lévy, il vient de nous expliquer qu’il faudrait ceci, qu’il faudrait cela... D’ailleurs on voit des photos de lui, récemment, où il donne des conseils aux gens qui combattent, etc. ... Donc, il faut juste qu’il y ait un moment donné où il faut un peu de pudeur, tous ces gens qui ont rendu possible cet enfant mort, et Bernard-Henri Lévy en fait partie ...

Il est complice ?

Oui, évidemment, il est complice, comme d’autres sont complices, les présidents de la République d’hier et d’aujourd’hui, qui défendent exactement la même ligne, et qui disent “oh là là, c’est effrayant cette photo”... C’est effrayant mais ce sont des criminels ces gens-là, leur politique est criminelle, on devrait commencer par arrêter cette politique ... Un chef d’État qui voudrait être un chef d’État dignement, devrait commencer par changer de politique, faire une politique indépendante ... (*)

Le démon, élégamment habillé d’une chemise d’un blanc éclatant comme l’innocence, ouverte sur un torse bronzé comme la peau tannée d’un vieux loup de terre qui a affronté les plus grands dangers pour sauver les pauvres hères accablés par les tyrans, surmonté d’une chevelure grisonnante du plus heureux effet puisque coiffée par les soins prodigieux des grands vents du Sud de la migration, le démon s’avance, à peine masqué. D’aucuns le nomment BHL, ce qui est à la fois à mourir de rire et mourir de plaisir.

Il ne cesse d’éructer, de tonner, de s’emporter. En un sens, il nous avait tous avertis. La Libye, la Syrie, tout cela était assuré. L’innommable Kadhafi jouait déjà de la migration du temps où on le subventionnait grassement, puis vint la “libération de la Libye” dont il (BHL) fut le modeste inspirateur, qui n’a rien provoqué en fait de migration puisque les migrants qui traversent la Méditerranée ne sont pas des Libyens même s’ils viennent de Libye. Les Libyens eux-mêmes, ils sont chez et ils y restent, chez eux, débarrassés du tyran et c’est bien, et ils vont bien conformément aux consignes. Le reste, les politiques n’avaient pas prévu. La Syrie, c’est encore pire ! Tout est de la faute d’Assad, qui n’a pas disparu au printemps 2011 comme il aurait du, et qui est le véritable créateur de Daesh, contrairement à ce qu’affirment les bouffons de la DIA. D’où la fuite précipitée actuelle des Syriens, bien entendu à cause d’Assad, vers l’Europe dont le devoir humanitariste est de tous les accueillir... Ah, si Obama n’avait pas «trahi», à l’été 2013, lorsqu’on pouvait encore bombarder Assad, Damas et quelques trucs alentour, avec quel profit pour l’humanité ! Tout serait bien rangé aujourd’hui, dans la Syrie démocratique, comme ce l’est dans la Libye démocratique.

On traduit, on résume, on adapte, on approximative. Avec lui, seul compte l’esprit, la citation précise est inutile, presque obscène dirait-on tant elle suppose un doute quant à la justesse de la pensée. BHL est désincarné, l’être humain ne compte plus, qui s’est sacrifié derrière la dimension globalisante qu’il a acquise ; à l’égal, —mais un cran au-dessus, tout de même, – des alchimistes qui transmutaient le vil plomb en or, BHL transmute le lieu commun en parole de Prophète... Il est l’ange-démiurge exceptionnel de cet ouragan de communication qui a saisi l’Europe depuis quelques semaines, et surtout depuis quelques jours. On espère qu’un scribe, un jour, recueillera toutes ses sorties pour l’édification des masses futures, mais uniquement parce qu’elles expriment si bien le récit de la crise européenne, celle de l’Europe désormais plongée dans un déluge, – non, dans le Déluge quasiment biblique, qui la bouleverse et la secoue de fond en comble.

La Grande Crise de la Migration (GCM) est devenue un nouveau chapitre furieux de la crise européenne qui ne cesse de tordre, de malaxer, de déformer l’Europe et de la soumettre à des tensions inouïes. Mais ce chapitre-là n’est à nul autre pareil dans la pureté chimique de l’ingrédient spirituel qui écrase le reste, – nous avons nommé l’“affectivisme”, déjà bien identifié. Certes, BHL est le grand’maître, le porte-voix de l’“affectivisme”, et nul ne sait s’il en est la victime ou le manipulateur accomplissant son travail de Combattant Suprême surgi de Mordor.

Le caractère le plus remarquable de cet épisode extraordinaire de la Grande Crise de la Migration, c’est la mise au grand jour, à ciel ouvert jusqu’au-delà de l’horizon, de cet affectivisme ; d’une manière frappante, extraordinairement éclatante, absolument impérative, tournure de la psychologie qui se suffit totalement à elle-même pour expliquer à la fois la Cause Première et la Fin Dernière de l’aventure, et même pour remplacer Dieu dont l’absentéisme (dans cette aventure) en est une des marques les plus notables. Il faut en effet Le remplacer puisqu’Il n’assume plus ... Voici donc ce que nous nommons affectivisme alors que nous avions choisi d’abord le terme “affectivité”... Ce néologisme impliquant la constitution d’une forme spécifique de comportement pseudo-intellectuel est bien mieux approprié que le terme “affectivité” qui autorise toutes les confusions avec un phénomène naturellement produit par l’affect, d’abord employé dans ce texte du 11 juin 2012 où nous tentions d’en donner une définition. Ce changement de désignation est due à l’intervention extrêmement pertinente d’un de nos lecteurs, le 10 novembre 2014, concernant ce même texte du 11 juin 2012. (**) C’est sur ce concept d’“affectivisme” que nous voulons concentrer notre attention. Nous citerons simplement un texte du réseau russe RT pour documenter d’une façon générale, ou plus simplement en rappeler là-dessus, tant ces choses sont connues ces derniers jours, les circonstances récentes les plus marquantes.

(Les Russes sont les mieux à même d’observer cette phase de la crise européenne parce qu’ils sont extérieurs à l’enjeu, qu’ils sont pourtant attentifs à cette crise, qu’ils connaissent bien les réactions des Européens, qu’ils ont eux-mêmes à faire à des migrations massives, – près d’un million d’Ukrainiens passés en Russie depuis 2014 sans soulever le moindre intérêt en Europe, sinon le scepticisme le plus inculte quant à la véracité de la migration, et le mépris le plus insultant pour cette sorte de réfugiés faisant partie des Ukrainiens prorusses qui ont le toupet de vouloir nous faire croire aux intentions massacreuses de “Kiev-la-folle”. Poutine lui-même nous a confié ses réflexions, prétendant ainsi faire la leçon aux Européens, toujours selon RT : «Lors du Forum économique de Vladivostok en Extrême-Orient russe, Vladimir Poutine a affirmé que la situation dans laquelle se trouvait aujourd'hui l'Europe était “inévitable”, puisque l'UE poursuivait une politique étrangère qui s'est révélée être un échec au Moyen-Orient et en Afrique du Nord. Selon le président russe, le principal défaut de cette politique étrangère occidentale est “l’imposition de ses propres normes à travers le monde” sans prendre en compte les caractéristiques historiques religieuses, nationales et culturelles de régions indépendantes.»)

Dans son texte du 4 septembre 2015, RT rapporte les divers détails de l’image qui a transformé la situation européenne en ce Déluge biblique de l’affectivisme postmoderne. Il s’agit de l’image du corps de ce petit enfant syrien noyé, ramené par les flots sur une plage de Turquie, accompagnée d’autres illustrations du sort tragique de réfugiés le plus souvent syriens. Il y a aussi, comme contrepoint aux réactions diluviennes qui ont accompagné cette seule image tragique, une réaction assez sèche de la Haute Représentante (ministre des affaires étrangères) de l’UE, Federica Mogherini, qui en “a assez” de subir ces réactions hystériques complètement sorties de leurs gonds de la plupart des hommes politiques européens, réactions productrices des propositions, voire des politiques les plus insensées, face à la Grande Crise Migratoire.

«As horrific pictures of a Syrian refugee boy washed ashore in Turkey make headlines, equally distressing scenes of drowned children found in Libya are causing a massive outcry online. Still, the EU foreign policy chief has stressed that politicians cannot afford to act emotionally. While global media features the picture of a drowned Syrian boy washed up on the Turkey's shore, a no less shocking and tragic case, which happened only last week, managed to mostly stay out of the media spotlight.

»The set of elegiac images showing dozens of drowned asylum seekers was posted on Facebook by Syrian photographer and artist Khaled Barakeh on August 29 and gathered over 100,000 shares in just a few days. The majority of the images, which most media avoided showing, revealed drowned children lying in foam on a beach while another depicted multiple orange bags with what appeared to be bodies inside. The album entitled “Multicultural graveyard” has a note that reads: “Last night [August 28, 2015] more than 80 Syrians and Palestinians refugees have drowned in the Mediterranean close to the Libyan shores trying to reach Europe.” The author of the post, a widely exhibited artist, did not comment on the source of the photos he posted. [...]

»The figures of the asylum seekers killed in attempts to cross the Mediterranean are shocking, but when the EU foreign policy chief was asked on Thursday about the picture of “that” three-year-old boy, Federica Mogherini said that despite the hype over the human tragedy politicians cannot afford to act emotionally. “I am a little bit fed up that politicians are called to react emotionally,” Mogherini said. “Our job, as I said, is to take decisions rationally, being consistent and coherent with our emotions. So I think, I'm sure, all of us are shocked seeing that kind of picture but I expect not only for us to be shocked but also for all of us to be responsible enough to take the consequential decisions that are needed.”»

Nous prétendons que cette situation qu’on peut difficilement qualifier de “politique” répond à une particularité extraordinaire de la psychologie, conditionnant à mesure l’activité de l’esprit, le jugement qu’il en tire et l’action qui en résulte. En 2012, dans le texte cité, nous ne parlions que des réactions à propos de la crise syrienne, tandis qu’aujourd’hui le propos est beaucoup plus large. La crise syrienne circa 2012, ajoutée à la crise libyenne, est présente parce que ces deux crises sont les causes opérationnelles directes et incontestables de cette vague migratoire d’une puissance extraordinaire. Ces deux crise, surtout la syrienne, ont évolué en un énorme “tourbillon crisique” affectant le Moyen-Orient, notamment autour du phénomène Daesh, et faisant partie de la situation crisique désormais générale. Dans ce tourbillon s’inscrit également la puissante crise ukrainienne, qui s’est développée depuis le début 2014 avec ce qu’elle a introduit dans l’état d’aggravation permanente de la psychologie produisant l’affectivisme, notamment avec de nouveaux concepts, essentiellement le “déterminisme-narrativiste”. La situation est, en 2015, infiniment plus grave qu’en 2012, sur à peu près tous les plans, et notamment et essentiellement pour notre propos sur celui de la prolifération absolument affolante de cet affectivisme.

bhl_libye2_22.jpg

“L’affectivisme, ça ose tout...”

Comment définissons-nous l’affectivisme à partir de sa définition présentée en 2012 ? (Dans le commentaire qui suit, les diverses citations en italique et entre guillemets sont empruntées à notre texte de 2012, avec des ajouts éventuels [entre braquets].) «Il s’agit du constat de l’effacement complet de la raison en tant que force structurante du jugement dans les attitudes politiques de ces directions vis-à-vis de la crise syrienne [et, désormais, d’à peu près toutes les crises qui affectent l’Europe et, plus généralement, les pays du bloc BAO]. Il n’est donc plus question, en vérité, d’attitudes politiques mais d’attitudes psychologiques comme détonateur d’une situation effectivement métahistorique.

»Le constat est effectivement que l’effacement d’une raison efficace, une raison “loyale à la perception de la réalité”, ouvre la porte au déferlement de l’affect en termes psychologiques, ou pure affectivité, dans les réactions [aux diverses situations de crise qui intéressent directement les esprits concernés et conduits à des réactions très rapides sous la pression de la communication]. Cet affect n’est évidemment pas suscité par un plan de manipulation puisqu’on a vu que la raison, qui seule peut produire humainement de tels plans, est absente dans son rôle habituel de rangement des ambitions et des projets humains. L’affect prépondérant dans ces réactions est donc la cause autant que le produit des manipulations innombrables qui caractérisent le compte-rendu de la [réalité d’une situation,] qui est bien entendu une [réalité] complètement fabriquée, [c’est-à-dire une narrative, selon le terme désormais consacré dans notre usage]. Il s’agit d’une auto-manipulation, ou techniquement d’une auto-mésinformation, suscitées par une affectivité qui a complètement pris le dessus dans [le fonctionnement de la psychologie] , et qui affecte l’observation des faits et le jugement selon des normes idéologiques de type hystérique elles-mêmes véhiculées dans la psychologie avant d’être transcrites en “idées” de type-standard et homogénéisées (droits de l’homme, humanitarisme, etc.).»

En 2012, déjà et bien entendu, nous consacrions un passage à l’importance primordiale de la communication dans ce processus. (La communication ”, pour ce cas, lorsqu’elle est au service du Système en général, selon une de ses fonctions-“Janus”.) Aujourd’hui, cette importance est tout simplement gigantesque, écrasant et dispersant tout le reste pour régner en maîtresse absolue ; la communication sous sa forme sophistiquée et complexe de “système” a introduit des notions nouvelles d’automatisme qui renforcent l’enfermement, l’emprisonnement de l’esprit, du jugement, et d’abord de la psychologie dans la voie de l’affectivisme. Le principal concept nouveau qui est apparu, avec la crise ukrainienne, est celui du “déterminisme-narrativiste” qui peut vous emmener dans des contrées totalement inexplorées de la narrative la plus grotesque et véritablement fantasmagorique (une sorte d’Alice au Pays des Merveilles en un peu plus sombre). L’absolutisme du concept nous fait penser qu’on pourrait lui appliquer la formule Onfray-Audiard  : “le déterminisme-narrativiste ça ose tout, c’est même à ça qu’on le reconnaît”... L’usage massif d’informations déformées, fabriquées, inventées, souvent quasi-inconsciemment, pour servir la cause qui alimente l’affectivisme, pour justifier cette cause, pour lui donner cohérence et apparence de réalité, développées et produites à une cadence très élevée, «sans le moindre esprit critique qui disparaît avec la raison, la rapidité du processus de la communication qui interdit toute distance vis-à-vis du soi-disant fait exposé et la rapidité de la réaction émotive standard par conséquent, la profusion de l’emploi des mêmes images, la standardisation des réactions d’affectivité devant ce kaléidoscope ultra-rapide des mêmes éléments de communication présentés comme strictement objectifs, etc., tout cela crée cette atmosphère immensément favorable à la réaction affective, et seulement affective».

Nous écrivions en 2012 que «[c]ette atmosphère agit comme un complément, sinon décisif, dans tous les cas très efficace, pour le phénomène constaté». Nous dirions, trois ans plus tard que “cette atmosphère”, c’est-à-dire la communication en soi, est devenue une sorte de “monde en soi”, un “monde nouveau”, ou même un “Nouveau-Monde” si l’on veut honorer “Kiev-la-folle” qui est pour beaucoup dans cette évolution ; nul parmi ceux qui s’y sont aventuré n’en peut sortir sans subir des dommages psychologiques épouvantables, jusqu’à des pathologies, et sans aucun doute une sorte d’atonie de l’esprit, une paralysie générale de la pensée qui demande une longue convalescence ou bien s’avère inguérissable. Il s’agit donc beaucoup plus désormais qu’“un complément ... dans tous les cas très efficace”, mais au moins d’un “complément décisif”, sinon le facteur central, quasiment-créateur d’un renouvellement constant de l’affectivisme, comme une sorte de “potion magique” qui serait constamment en action (“Pas pour toi, Obélix, tu es tombé dans la marmite quand tu étais tout petit”).

bhlmartine.jpg

Nous parlions également dans le même texte de 2012 d’un aspect de “terrorisation” de l’esprit de nos dirigeants, toujours à cause de la faiblesse de leur psychologie. Nous nous référions notamment aux textes du 16 avril 2012 (“LEUR psychologie terrorisée”), et du 18 juin 2012 (reprenant une synthèse du dde.crisis du 10 juin 2012). Cet aspect de “terrorisation” des psychologies des directions politiques est devenu essentiel dans la psychologie des dirigeants politiques, essentiellement des pays du bloc BAO, depuis l’attaque du 11 septembre, et cela quelles qu’aient été les positions des uns et des autres vis-à-vis de cette attaque (y compris, même, s’il y a participation à un processus ou l’autre favorisant cette attaque, dans le cas de l’organisation des attentats 9/11 ou de la connaissance de l’organisation de ces attentats) : nous parlons là d’un processus affectant la psychologie, échappant à la maîtrise de l’esprit, et il y aurait donc dans certains cas une sorte d’“auto-terrorisation”... «Le résultat de cette situation de “terrorisation” de la psychologie est une dégradation extraordinairement accélérée des capacités d’une raison déjà largement subvertie par l’influence du Système. La raison subvertie et extrêmement dégradée n’est plus qu’un “outil technique” au service de l’[affectivisme] (au service du Système par conséquent, par délégation) pour construire la “narrative” et organiser l’action à l’intérieur de cette “narrative”; et même, dans le chef de cette même raison réduite au rôle d’“outil utile” comme on dit “idiot utile”, organiser la dissimulation de sa propre subversion et de sa propre dégradation...

»Les évènements jouent bien entendu un rôle considérable,[d’autant qu’ils sont pour l’essentiel profondément “dramatisés” en montages fantasmagoriques par le système de la communication agissant au nom du Système dans ce cas. Ils] accélèrent cette dégradation de la raison, de l’esprit en général, de la politique qui en est le produit. Ils mettent en lumière, par eux-mêmes, les effets des réactions catastrophiques d’une raison ainsi dégradée suscitant des politiques à mesure, et laissant la place au plus bas des composant de l’activité psychique générale, qui est l’affectivité. (L’affectivité [n’est pas sans valeur... Mais elle n’a de réelle valeur et évite l’affectivisme] que lorsqu’elle est contrôlée par la raison, et, [bien plus encore], éclairée par l’intuition haute [qui lui donne noblesse, substance et inspiration sublime]. Ce n’est bien entendu pas le cas dans notre situation, mais [absolument, complètement] une situation de complète inversion à cet égard.) Cette situation générale est appuyée sur l’idéologie maximaliste, absolue, nihiliste [qui est la marque absolument totalitaire que le Système impose à toutes nos activités aujourd’hui] ; l’idéologie pour elle-même, qui est l’extrême et le cul de sac à la fois d’une chose (l’idéologie), [qui est dans ce cas] une construction de l’affectivité pour faire accepter sous le couvert de la raison et d’un habillage d’une belle apparence logique ou morale, une politique absolument pervertie. (Résumons : [l’idéologie de l’affectivisme], ou la complète perversion de la politique par l’affectivité.)»

Les évènements, essentiellement depuis 2008 et la crise financière après l’épisode 9/11, ont effectivement joué ce rôle “considérable” dans la formation de l’affectivisme, notamment avec des caractères de vitesse, d’accumulation, de vélocité, d’incapacité complète à être pris sous contrôle et d’une tournure telle que des raisons déjà sous l’emprise de l’affectivisme sont totalement incapables d’en saisir la signification profonde, ni même la nécessité de tenter une telle recherche de compréhension. Il y a eu les évènements durant le “printemps arabe”, conduisant à un développement extraordinaire du terrorisme jusqu’à prendre des formes inusitées (Daesh) selon l’activisme complètement désordonné et déjà marqué par l’affectivisme des directions du bloc BAO ; il y a eu les caractères extraordinaires du point de vue de la communication et de ses effets sur la psychologie de la crise ukrainienne, conduisant à la nécessité de la construction de fausses réalités (narrative) dans une mesure jamais connue, jusqu’à une sorte d’hallucination construite et acceptée sans émettre le moindre doute sur la forme de ce processus, une sorte d’hallucination d’apparence rationnelle, mesurée, sinon même donneuse de leçons ; il y a enfin, pour notre cas présents, les premières grandes migrations à partir du printemps de cette année directement déclenchées par les activités déstructurantes du bloc BAO et constituant une extraordinaire anticipation du phénomène eschatologique des migrations massives (GCM ou Grande Crise de la Migration) jusqu’alors annoncées comme étant liées, dans un délai beaucoup plus long d’une ou plusieurs décennies, à des évènements également eschatologiques d’ampleur cosmique comme le dérèglement climatique et la crise environnementale... Ces évènements, et notamment les derniers (les migrations et la GCM) avec leur énorme charge eschatologique, ont constitué et constituent plus que jamais une pression constante énorme qui n’a fait qu’accentuer dans ces psychologies déjà dévastées des directions politiques l’influence prépondérante de l’affectivisme.

Par rapport à 2012 où nous nous attachions pour la première fois à l’affectivisme en tant que déviance intellectuelle identifiée, les directions politiques n’ont cessé de régresser dans le domaine de la maîtrise de leur propre raison, en même temps que cette raison ne cessait de se dégrader, et ces directions n’ont cessé de céder toujours plus à l’affectivisme jusqu’à perdre complètement toute capacité d’un jugement rationnel prenant en compte le processus de cause à effet, capable d’isoler les causes profondes de tel ou tel événement, capable de se libérer fût-ce un seul instant de l’empire total de la communication qui alimente l’affectivisme. Le cas d’un personnage aussi totalement discrédité, ridiculisé, mis aussi bas que possible si l’on a un jugement sain disposant d’une psychologie forte, qu’un Tony Blair (voir le 1er septembre 2015), exprimant comme il le fait son incompréhension devant l’apparition de divers phénomènes antiSystème, et semble-t-il incapable de concevoir la possibilité du fait de l’antiSystème, ce cas montre bien qu’un esprit touché par cette paralysie de la raison, et sous l’empire d’une psychologie si affaiblie qu’elle est toute entière et sur la durée sous l’empire de l’affectivisme, et d’un affectivisme triomphant comme on le décrit, se manifeste par une sorte de handicap mental qui a tous les caractères d’une pathologie fatale pour l’intelligence du monde. Tout cela fait de la victime de la chose, – Tony Blair en l’occurrence, – un malade mental qui devrait être traité dans un établissement psychiatrique. (Cette suggestion est conditionnée par la réserve d’apprécier dans quelle mesure de tels établissements ne sont pas eux-mêmes, au point d’infection par le Système où nous nous trouvons, des pourvoyeurs de cette même pathologie, du fait des traitements souvent choisis). Le fait que Tony Blair soit complètement pris au sérieux à cette occasion et même brandi comme référence dans les milieux dirigeants (voir le4 septembre 2015) montre sans surprise qu’il n’est pas seul dans le cas décrit, et même qu’il y a foule dans cet hôpital psychiatrique, au point qu’on prendrait pour un malade mental celui qui n’y séjourne pas...

Cet état de pénétration de l’intellect par l’affectivisme, et l’abaissement de la raison à mesure, traduisent bien entendu l’influence active et irrésistible du Système dans les directions politiques et les élites-Système. A cet égard, le constat que nous faisions en 2012 non seulement subsiste mais est grandement amplifié dans la mesure qu’on devine par les évènements qui se sont produits depuis. Cela signifie la disparition complète chez ces dirigeants-Système et élites-Système, d’une façon générale, du processus de la raison en état de complète subversion : «Plus aucun régulateur n’existe pour empêcher le déferlement de l’[affectivisme] selon des termes et des orientations suscités par [ce même affectivisme].» Mais il faut insister sur un facteur nouveau dont nous suggérions l’apparition en 2012, comme une des raisons du déferlement de l’affectivisme du point de vue de l’action du Système dans ce sens : «il s’agit [dans le chef du Système] d’empêcher par tous les moyens la moindre occurrence où l’esprit du “sapiens”-serviteur peuplant les directions politiques et les “élites” qui les soutiennent pourrait se douter de cet état catastrophique du Système.» Ce qui s’est passé depuis est que cet état catastrophique en constante aggravation du Système, marqué par le déferlement d’évènements catastrophiques, finit dans certains cas par susciter des réactions vitales chez certains, parmi les directions-Système, et l’on constate en effet l’apparition de cas de plus en plus nombreux (ceux que l’important Tony Blair ne comprend pas, – «I don’t get it...») de ce qu’on doit désigner comme des antiSystème au sein du Système. Dans ce cas, la prolifération de l’affectivisme produit un résultat inverse à celui que l’on attend, ce qui marque effectivement notre entrée dans un désordre considérable caractérisant essentiellement la transformation de la dynamique de surpuissance du Système en dynamique d’autodestruction. Nous sommes, avec cette énorme affaire de la Grande Crise de la Migration, notamment avec la puissance eschatologique qu’on a évoquée, au bord d’une sorte d’explosion de la poussée d’affectivisme vers des orientations et des conséquences impossibles à prévoir, où les psychologies épuisées et exacerbées peuvent produire des réactions complètement inattendues.

Bien entendu, on se doit de terminer notre démarche en envisageant l’appréciation hypothétique de la cause fondamentale de ce déchaînement de la raison subvertie laissant la voie libre à l’affectivisme. Bien entendu, notre approche n’a pas changé, elle s’est même accentuée dans le champ de la métaphysique. On y retrouve les séquences bien connues du “déchaînement de la Matière” entraînant la formation du Système comme entité opérationnelle organisant la recherche de la déstructuration, de la dissolution et de l’entropisation, – c’est-à-dire la primauté absolu du Mal «comme facteur dominant de notre contre-civilisation». Comme nous l’avons souvent proposé, l’idée même de la subversion de la raison implique une action contre la psychologie qui constitue la voie naturelle de toute influence sur cette même raison ; c’est, à l’origine de la séquence, le “persiflage” du XVIIIème siècle ; c’est aujourd’hui tout ce qu’organise le système de la communication lorsqu’il est manipulé par le Système.

L’affectivisme est donc un produit direct qu’on dirait “naturel” de l’action du Système à partir du “déchaînement de la Matière” de la fin du XVIIIème siècle, et une évolution logique de toute l’activité déstructurante et dissolvante qu’on constate tout au long de la séquence ainsi évoquée. Le constat qui peut être fait avec les évènements courants, et notamment par rapport à 2012 et depuis, est celui, là aussi et toujours plus, de l’accélération du processus qui engendre de plus en plus de désordre, de plus en plus d’évènements incontrôlables, de plus en plus d’enchaînements imprévus et imprévisibles, tout cela qui soumet nos psychologies à des tensions et à des souffrances inouïes mais ne parvient à aucun moment, et de moins en moins, à des situations de rupture décisive qui impliqueraient une véritable “organisation du Mal” signalant la réussite complète du processus. Le désordre est à diverses facettes, dont celle de l’“hyperdésordre”, témoignant toujours plus que cette «course folle, où la raison humaine qui était à l’origine faite pour recevoir la lumière de l’intuition haute est désormais précipitée dans les abysses de sa subversion et de sa dégradation, ne fait qu’accélérer la transmutation de la dynamique de surpuissance en dynamique d’autodestruction». L’accélération des destructions diverses, l’éclatement des cohérences culturelles, la dispersion des politiques renvoyant à cet affectivisme omniprésent constituent des occurrences catastrophiques effrayantes mais n’en conduisent pas moins, selon cette logique surpuissance-autodestruction, à la mise en cause des structures mêmes édifiées par le Système pour conduire ses propres ambitions d’entropisation à leur terme. (L’UE, touchée prioritairement par l’affectivisme, est l’une de ces structures, comme la globalisation elle-même, structure suprême chargée de conduire à son terme l’entropisation, est attaquée de toutes parts par ses propres contradictions et ses propres antagonismes. Comparez la popularité et la “bonne réputation” de l’“Europe“ et de la “globalisation” d’il y a 15 ans et celles d’aujourd’hui, comparez leur efficacité et leur maîtrise respectives, leur influence “constructive” dans le sens d’une “entropisation organisée” sur les diverses cultures, sur les esprits, etc. Le désordre que produisent aujourd’hui l’“Europe” et la “globalisation”, même si certains jugent qu’il s’agit d’une politique volontaire, – et qui est de toutes les façons une fatalité de l’action de ces entités, – est producteur de malaise, d’angoisse, de révolte, d’insoumission, d’insurrection qui interfèrent gravement sur le rangement du néant absolu de l’entropisation vers où voudrait nous conduire le Système.)

BHL entarté 31.05.15.jpg

Comme nous en jugions déjà en 2012, nous sommes de plus en plus précipités, avec toutes les souffrances et les angoisses qui vont avec, dans ce Moment où la métahistorique a complètement remplacé l’histoire-Système qui est laissée à l’étrange folie de l’affectivisme. Déjà, en 2012, nous laissions la conclusion au comte Joseph, avec une simple modification pour y faire entrer notre temps de tempête diluvienne qui est comme un miroir décisif de l’époque de la Révolution à laquelle il se référait dans cette observation : «…Sans doute, la Providence n’a pas besoin de punir dans le temps pour justifier ses voies ; mais, à [certaines époques,] elle se met à notre portée, et punit comme un tribunal humain.»

... Nous avions commencé avec BHL, nous terminons avec Joseph de Maistre... Tout est bien.

Notes

(*) Il y en a qui n’ont pas du tout aimé l'intervention d'Onfray, qui le dise(nt) hautement, parce qu’ils voient les choses de haut et qu’un “intellectuel” comme BHL ça se respecte, et encore plus par un Onfray. (Voyez le philosophe de Challenge.fr, publication honorable, intellectuelle et défenderesse de la veuve et de l’opprimé de la globalisation, le 4 septembre 2015.) Pour nous rassurer à propos de ce petit chambardement, et rassurer BHL par conséquent, on citera à nouveau Audiard (Michel) : «Un intellectuel assis va moins loin qu’un con qui marche.»

(**) Nous employons donc le terme “affectivisme” alors que nous avions choisi d’abord le terme “affectivité” grâce à l’intervention d’un de nos lecteurs le 10 novembre 2014 concernant ce même texte du 11 juin 2012. Le 10 novembre 2014, nous publiions cette “Note de mise à jour” à laquelle il n’y a pas un mot à retrancher puisqu’elle dit tout sur cette mise au point : “Revenant très récemment, à propos d'un texte du 10 novembre 2014, sur ce texte ci-dessus du 11 mai 2012, un de nos lecteurs, monsieur Michel Donceel, a proposé fort justement (Voir le Forum de ce texte) le terme d’“affectivisme” plutôt que le terme d’“affectivité” que nous employions. Il a parfaitement raison, selon une perspective qui, à notre sens, mériterait un débat. Nous le remercions de sa suggestion, ainsi bien entendu que son amie de laquelle vient au premier chef cette proposition”.

lundi, 14 septembre 2015

Zarathoestra beleeft revival in Noord-Irak

zoroastriens-perdur.jpg

Door: Dirk Rochtus - Ex: http://www.doorbraak.be

Zarathoestra beleeft revival in Noord-Irak

Koerden in Noord-Irak herontdekken de oude religie van Zarathoestra als een wapen in de strijd tegen het door IS belichaamde Kwaad.

Een golf van politiek, religieus en sektarisch geweld overspoelt het Midden-Oosten. In Syrië woedt de soennitische terreurorganisatie Islamitische Staat (IS) in alle hevigheid tegen andersdenkenden en aanhangers van andere geloofsstrekkingen. In Turkije escaleert de strijd tussen het Turkse leger en de milities van de Koerdische Arbeiderspartij PKK. Iran en Saoedi-Arabië wedijveren met elkaar om de macht in de regio. Sjiieten en soennieten bestrijden elkaar om de juiste uitlegging van de islam.

Ware cultuur

De chaos drijft niet alleen vele mensen op de vlucht, maar doet ook velen onder de thuisblijvers snakken naar zekerheid en geborgenheid. Zo komt het bijvoorbeeld dat meer en meer Koerden een oude religie herontdekken. In de provincie Suleiman, in de Koerdische deelstaat van Noord-Irak, vond in de maand mei een merkwaardige ceremonie plaats. Honderden Koerden deden er een gewijde gordel, de 'koeshti', om. Ze betoonden zo hun gehechtheid aan het zoroastrisme, de religie van de Perzische profeet Zarathoestra (ook Zarathustra of Zoroaster genaamd). Ook dienden ze bij de overheid van de Kurdistan Regional Government (KRG) een aanvraag in voor de bouw van twaalf zoroastrische tempels en voor de erkenning van het zoroastrisme als officiële godsdienst. Volgens Luqman al Hadsch Karim van de zoroastrische organisatie Zand zouden met de revival van het zoroastrisme de 'ware cultuur en religie van de Koerden' weer in ere worden hersteld.

De 'betere Bijbel'

Over het leven van Zarathustra is niet veel geweten. Hij zou rond 1200 voor Christus geleefd hebben in Perzië, het huidige Iran. Hij predikte als eerste het geloof in 'één God' - Ahura Mazda, de 'Wijze Heer' of de god van het goede die strijdt tegen de duivel Ahriman -, het bestaan van engelen, van hemel en hel en het Laatste Oordeel. Al deze geloofsbeelden zouden via de Joden in ballingschap in Babylon binnengeslopen zijn in de latere monotheïstische religies. Voor de publicist Paul Moonen schreef Zarathustra daarom ook de 'betere Bijbel'. Maar juist omdat Zarathoestra als de 'vader' van het monotheïsme geldt, gebruikte de godloochenende Duitse filosoof Friedrich Nietzsche hem in een ironische omkering in zijn poëtisch meesterwerk 'Also sprach Zarathustra' om de 'dood van God' te verkondigen.

zor520-9-8df4d.jpgVuur

De zoroastriërs vereren in hun vuurtempels het eeuwig brandende vuur als afbeeld van Ahura Mazda. Het zoroastrisme groeide later uit tot de staatsgodsdienst van het Perzische Rijk. Toen de islam in de zevende eeuw Perzië veroverde, vluchtten vele zoroastriërs naar het naburige India. Vandaag de dag leven er vooral nog in Bombay een paar tienduizend 'parsi's' die vasthouden aan het zoroastrische geloof. In Iran zelf telt de zoroastrische gemeenschap een dertigduizend leden. Ze wordt in de Islamitische Republiek van Iran erkend als een minderheid. Net zoals de Armeense en de Joodse gemeenschap heeft ze recht op één zetel in de Majlis, het Iraanse parlement. Toch moet ze nog heel wat onderdrukking en discriminatie doorstaan. Ook de Jezidi's, de aanhangers van een door IS vervolgde Koerdische 'volksreligie', zouden door het zoroastrisme beïnvloed zijn. Zijzelf wijzen elke band met de leer van Zarathoestra af.

Strijdtoneel

Het zoroastrisme leek de laatste jaren op de terugweg. Het aantal gelovigen in Iran en India was aan het slinken ten gevolge van lagere geboortecijfers, vervolging en discriminatie. Merkwaardig is het dan ook dat Koerden in Noord-Irak de Oud-Perzische religie van Zarathoestra herontdekken. Sowieso zijn er culturele verbanden. De Koerden spreken een met het Farsi (Perzisch) verwante taal en in Newroz, hun nieuwjaarsfeest, speelt het vuur een grote rol. Volgens analisten zou de onzekerheid over wat nu de ware islam is nationalistische en liberaal denkende Koerden in de armen van een tolerante religie als het zoroastrisme drijven. Zarathoestra zag in de wereld het strijdtoneel van het Goede en het Kwade en riep de mensen op om de zijde van de goede god Ahura Mazda te kiezen. In zulk een wereldbeeld past voor vele Koerden ook de strijd tegen IS als de belichaming van het Kwade.

 

00:05 Publié dans Traditions | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : zoroastrisme, irak, iran, traditions, traditionalisme | |  del.icio.us | | Digg! Digg |  Facebook