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mercredi, 17 mars 2010

L'OTAN: un pacte militaire en quête de sens

Bernhard TOMASCHITZ :

L’OTAN : un pacte militaire en quête de sens

 

Désormais, l’OTAN veut agir globalement pour asseoir l’hégémonie américaine

 

otan1.jpgDeux décennies après la fin de la Guerre Froide, l’OTAN est toujours à la recherche de nouveaux objectifs. On peut déjà deviner dans quelle direction portera la « nouvelle stratégie », décidée fin 2009 lors du Sommet de l’OTAN. L’Alliance atlantique cherche surtout à se donner une nouvelle justification en optant pour des missions en dehors de la zone où elle est sensée agir, des missions qualifiées en anglais de « out of area ». « A une époque d’insécurité globalisée, nous devons amorcer une défense au-delà de nos frontières », a déclaré le Secrétaire général de l’OTAN, Anders Fogh Rasmussen, lors d’une conférence sur la sécurité tenue à Munich.

 

Aujourd’hui déjà, le pacte militaire occidental et ses membres s’efforcent de se défendre « hors zone », notamment en Afghanistan. Dans le pays où se dresse la chaine montagneuse de l’Hindou Kouch, stationne une « armée de protection », l’ISAF, qui est placée sous le commandement de l’OTAN ; elle y agit toutefois sur base d’une résolution du Conseil de Sécurité de l’ONU. Dans l’avenir pourtant, on envisage de faire intervenir l’OTAN sans l’autorisation des Nations Unies, lorsque ses intérêts, ou mieux, les intérêts de Washington, sont en jeu. Car l’OTAN doit devenir, comme l’estime son Secrétaire général Rasmussen, un « forum consultatif pour les questions internationales de sécurité ».

 

Avec cette revendication globale d’hégémonie, on cherche bien évidemment à protéger, surtout contre la Chine, la position hégémonique des Etats-Unis dans le monde. Finalement, l’OTAN, comme le soulignait Rasmussen à Munich, « est surtout et avant tout une alliance transatlantique ; notre centre de gravité restera l’alliance entre l’Europe et l’Amérique du Nord ». Mais comme l’OTAN et les Etats-Unis ne pourront plus agir seuls désormais, il leur faut systématiquement mobiliser « d’autres acteurs importants » et on songe en premier lieu à la Russie. Dans ce contexte, c’est surtout le contrôle des immenses richesses du sol russe qui joue le rôle primordial, richesses que recèlent la Sibérie et l’Extrême Orient russes, peu peuplés.

 

Depuis longtemps dans le collimateur de Washington se trouvent également les incalculables réserves de matières premières des républiques centre-asiatiques, surtout celles de gaz et de pétrole. Dans le projet d’amener ces Etats dans la sphère d’influence américaine, la Turquie joue un rôle clef parce qu’elle possède d’étroites affinités linguistiques et culturelles avec les peuples turcophones d’Asie centrale. La Turquie, membre de l’OTAN, a des « intérêts spéciaux en Asie centrale », comme le dit avec insistance Zbigniew Brzezinski, conseiller toujours très influent pour la Sécurité nationale et cela, depuis le temps où il servait l’ancien président américain Jimmy Carter.

 

Pour ce qui concerne les manœuvres destinées à contrôler la Russie, les stratèges de Washington et du Quartier Général de l’OTAN à Mons en Belgique semblent suivre une double stratégie : d’une part, ils essaient de mettre la Russie devant le fait accompli en élargissant continuellement l’OTAN en direction des frontières russes ; d’autre part, ils misent sur le facteur temps. Zbigniew Brzezinski pense que les « ambitions impériales » de la Russie constituent actuellement un frein à l’inclusion de la Russie dans une « communauté euro-atlantique ». Mais il espère, en même temps, qu’une nouvelle génération de dirigeants russes reconnaîtra bientôt que renoncer aux « ambitions impériales » va dans le sens des « intérêts fondamentaux de la Russie ». Ensuite, Brzezinski espère que le terrible déclin démographique de la Russie poussera Moscou dans les bras de l’Occident. Encerclé par 500 millions d’Européens à l’Ouest et 1,5 milliard de Chinois à l’Est, le Kremlin, pour assurer un contrôle sur ses propres matières premières situées dans des régions peu peuplées, n’aurait, d’après les arguments avancés par Brzezinski, pas d’autre choix que de coopérer avec l’OTAN.

 

Mais la Russie, pour de bonnes raisons, ne perçoit pas l’OTAN comme un partenaire potentiel mais comme un adversaire. Le 5 février 2010, le jour même où l’on ouvrait la Conférence de Munich sur la sécurité, le Président Dimitri Medvedev donnait son blanc seing à la nouvelle doctrine militaire russe, destinée à demeurer en vigueur jusqu’en 2020. Dans le document qui établit cette doctrine, les militaires russes critiquent le fait que « les infrastructures militaires de l’OTAN » se rapprochent de plus en plus des frontières de la Russie ; ils estiment en outre que la mise en place d’un « système stratégique anti-missiles » constitue une menace pour la sécurité de la Russie et, qui plus est, une entorse à « l’équilibre global des forces ». Certes, on peut dire que le gouvernement d’Obama a renoncé à installer un système anti-missiles en Pologne et en Tchécoslovaquie mais, en lieu et place de cette installation préalablement prévue par les Américains, on apprend qu’un « traité bilatéral » vient d’être signé avec la Roumanie, prévoyant la mise en place d’un système de même type dans ce pays d’ici à l’année 2015, afin, prétend-on, de parer à la menace de missiles iraniens. Les militaires russes réservent toutefois leurs critiques les plus acerbes au plan américain de déployer des navires Aegis, disposant de missiles SM-3, dans les eaux de la Mer Noire. Car, selon les clauses du Traité de Montreux de 1936, auquel tant la Russie que la Roumanie ont adhéré, les navires de guerre de pays non riverains ne peuvent circuler plus de 21 jours consécutifs en Mer Noire.

 

Moscou observe aussi avec grande méfiance la constitution en août 2009 du « Conseil des Sages de l’OTAN » qui a pour tâche d’élaborer les nouvelles stratégies du pacte militaire. La présidente de ce caucus de douze personnalités n’est autre que l’ancienne ministre américaine des affaires étrangères, Madeleine Albright. Lors de son mandat, en 1999, l’OTAN avait attaqué la Serbie par la voie des airs. Parmi les autres membres de « Conseil des Sages », il faut compter Geoff Hoon. Ce Britannique était le ministre des affaires étrangères du gouvernement Blair, lorsqu’en mars 2003, la Grande-Bretagne avait fait entrer ses troupes en Irak, aux côtés de celles des Etats-Unis.

 

Bernhard TOMASCHITZ.

(article paru dans l’hebdomadaire viennois « zur Zeit », n°7/2010 ; trad.. franc. : Robert Steuckers).    

La dérive de la diplomatie turque utilise son négationnisme cynique et imperturbable

La dérive de la diplomatie turque
utilise son négationnisme cynique et imperturberdoganryad.jpgable

Jean-Gilles MALLIARAKIS /
http://www.insolent.fr/
Ce 8 mars, le Premier ministre turc Erdogan, se rendait à Riyad. Le roi d'Arabie Abdallah, allait lui décerner le prix international du Roi Fayçal pour "Services rendus à l'islam". Cette distinction, créée en 1979, est présentée pompeusement comme une sorte de prix Nobel du monde arabe. À ce titre, l'heureux lauréat recevait 200 grammes d'or et 200 000 dollars américains.

Dans mon petit livre d'initiation des Européens à la question turque (1) je livre un certain nombre de clefs explicatives de l'attitude et des actes d'Ankara.

Nous nous trouvons en présence de tendances longues. Certes, pour mes amis lecteurs, et [heureusement] pour quelques autres, celles-ci ne relèvent d'aucune sorte de mystère. Hélas, de manière étrange, nos dirigeants se plaisent à les ignorer.

La distinction reçue des mains du plus puissant représentant de la finance islamique le confirme (2). Les déclarations du roi et de son entourage mériteraient une plus large analyse. Il s'agit de donner une "approbation solennelle à ses efforts d'intermédiation au Proche et au Moyen-Orient". Et de citer son rôle actif "auprès de l'Iran, de la Syrie, du Yémen et du Hamas". Ceci le place désormais "à la tête du monde musulman" (3). Belle revanche posthume du califat ottoman.

Il demeure toutefois candidat à la qualité de membre à part entière au sein de l'Union européenne. Et un personnage comme Zapatero, au pouvoir à Madrid et occupant la "présidence tournante" de l'Union, l'y encourage.

Au-delà même du symbole, le récipiendaire profitait encore de la circonstance pour confirmer tout ce que l'on semble, de plus en plus, découvrir des nouvelles inclinations proches orientales de son gouvernement. Ne perdons jamais de vue, d'ailleurs, la part de faux-semblant, de communication et de mise en scène dans l'ensemble de cette subtile intrigue (4).

Or, en parallèle, les mêmes bureaux d'Ankara viennent d'administrer la preuve de leur incompréhension totale des références et des jugements de l'occident. Et cela se manifeste autour de la question historique du génocide arménien. Rappelons à cet égard que le fait même d'écrire ce mot, apparu en 1945, avec des guillemets pourrait tomber désormais en France sous le coup de la loi.

Au contraire, la position turque officielle persiste

1° à ergoter sur le nombre de victimes arméniennes qu'elle cherche à abaisser, du nombre habituellement admis, entre 1,5 et 2 millions de morts, à une fourchette de 300 000 à 500 000, sans se rendre compte que ce marchandage lui-même produit le plus déplorable effet.

2° à nier l'existence - d'une campagne d'extermination en dépit de la publication des télégrammes de Talaat pacha, et d'autres documents, écrits (5), témoignages habituellement considérés comme des preuves par les occidentaux.

3° à ne vouloir voir dans ces disparitions de populations entières que la conséquence du "chaos des dernières années de l'Empire ottoman".

Or très précisément cette vague évocation des événements aurait permis à n'importe quel régime démocratique européen de se défausser des fautes commises par ses prédécesseurs. Il les leur aurait imputés raisonnablement ; et il offrirait aux représentants des victimes des excuses, plus ou moins dignes, plus ou moins valables. (6)

La récente passe d'armes entre Américains et Turcs tend à démontrer l'incapacité des dirigeants de ce dernier pays à se comporter d'une telle manière. Repentance, connaît pas. Ils la jugent indigne de leur ombrageuse fierté nationale.

Une nouvelle expérience vient ainsi de se dérouler entre une commission du Congrès américain et le ministre des Affaires étrangères de l'AKP, M. Ahmet Davutoglou.

À Washington, le 5 mars, la commission des Affaires étrangères de la Chambre des représentants appelle le président des États-Unis à "qualifier de façon précise l'extermination systématique et délibérée de 1 500 000 Arméniens, de génocide". Président de cette commission, Howard Berman, a estimé que "rien ne justifie que la Turquie ignore la réalité du génocide arménien". Juste avant le vote le porte-parole du département d'État, M. Philip Crowley avait indiqué cependant que les Etats-Unis sont favorables à "une reconnaissance entière, franche et juste des faits liés aux événements historiques de 1915" en ajoutant toutefois que "Nous nous inquiétons de l'impact possible (de la résolution) sur les pays affectés".

On doit remarquer que ce vote, acquis par une courte majorité, 23 voix contre 22, est principalement dû au ralliement des élus démocrates. Les républicains se montrent en général assez hostiles à ce genre de considérations.

Sous la présidence précédente, une résolution analogue avait été censurée en 2007 par la Maison-Blanche, sous la pression. GW Bush était même intervenu personnellement, en téléphonant chez eux à divers élus (7) Et lors du dernier débat le porte parole de la droite avait considéré que, malgré sa sympathie pour les victimes, nous vivions au XXIe siècle.

La réaction de la Turquie officielle s'est donc d'autant moins fait attendre qu'elle mesure les points faibles de la démocratie américaine. Immédiatement est partie d'Ankara une protestation en forme d'avertissement : "Nous condamnons cette résolution qui accuse la nation turque d'un crime qu'elle n'a pas commis".

Lors de sa campagne présidentielle de 2008, M. Obama avait promis cette reconnaissance du génocide arménien. Peu après son élection, il a renoncé à employer ce terme alors que les États-Unis soutiennent les efforts de normalisation en cours entre la Turquie et l'Arménie pour l'ouverture de la frontière commune et l'établissement de relations diplomatiques. Idem de la part de Hillary Clinton, venue le 2 mars devant la commission pour exprimer ses réserves quant à l'opportunité de cette motion H252 dont elle approuvait le propos tant qu'elle n'occupait pas la fonction de secrétaire d'État.

Au lieu de se situer sur la défensive, de son côté, la diplomatie turque, pratique directement la menace. "À la suite de cet incident, notre ambassadeur à Washington, Namik Tan, a été rappelé à Ankara pour consultations". Le 10 mars le chef du gouvernement confirmait que jusqu'à nouvel ordre il ne reviendra pas.

Le chef de l'État Abdullah Gül a également condamné le texte voté : il n'a "aucune valeur aux yeux du peuple turc", a-t-il dit. Et il a ajouté : "La Turquie ne sera pas responsable des conséquences négatives que ce vote pourrait avoir dans tous les domaines".

Or l'objection de Mme Clinton, — "cela pourrait dresser, dit-elle, des obstacles devant la normalisation des relations" entre la Turquie et l'Arménie" – dissimule une difficulté beaucoup plus grave pour la diplomatie américaine. Le partenaire et allié de l'Otan, qui se dit offensé, joue un rôle essentiel dans les opérations militaires en Irak. Il fait valoir que, par la base d'Incirlik, en Anatolie, transite une part essentielle des aéronefs, des personnels et du ravitaillement nécessaires aux belligérants de la coalition (8). Il participe de façon considérable à la guerre d'Afghanistan. Et il menace de se solidariser avec l'Iran.

Accessoirement tout me donne à penser que sa politique dans l'ensemble du Proche-Orient joue un certain rôle… où l'Égypte a échoué… où le président actuel de tous les Français imaginait se substituer à celle-ci… et qui correspond aux desiderata profonds du gouvernement de Washington et de la finance pétrolière.

"L'intervention des politiques dans le domaine des historiens a toujours eu des effets négatifs" disent régulièrement au sujet des massacres de 1915 les communiqués officiels turcs.

J'aime cette réflexion, surtout lorsqu'elle vient de la part des politiques eux-mêmes.

Tout cela me semble confirmer le sentiment que j'exprime (9), celui de l'incongruité de prétendre intégrer ce beau et grand pays d'Asie mineure à l'Union européenne.
JG Malliarakis


Apostilles

  1. cf. "La Question turque et l'Europe" chapitre "La chauve-souris et sa diplomatie" pages 111 et suivantes.
  2. cf. "La Question turque et l'Europe" chapitre "Instrumentalisation de l'islam" pages 105 et suivantes.
  3. cf. Kathimerini le 11 mars 2010. Article " I saoudiki Aravia apéminé to vravio Vassilias Faïsal ston Erdoghan" [L'Arabie saoudite décerne le prix "roi Fayçal" à Erdogan.]
  4. À noter ainsi que l'annonce de cette attribution du prix a été faite en janvier. À la suite de quoi, M. Erdogan a annoncé qu'il ne se rendrait plus à Davos, haut lieu, un an plus tôt, de son esclandre anti-israélienne de janvier 2009, qui lui a valu tant de popularité dans Moyen Orient. Cf. http://www.mejliss.com/showthread.php?t=505791
  5. Dans "La Question turque et l'Europe" au chapitre "Faux dialogue avec un faux islam" aux pages 130 et suivantes, je donne ainsi quelques éclaircissements sur la fameuse citation "poétique" d'Erdogan qui lui valut ses ennuis judiciaires, aujourd'hui oubliés.
  6. cf. "La Question turque et l'Europe" chapitre "Racines jacobines des crimes turcs" pages 79 et suivantes.
  7. cf. Ovipot bulletin du 16 octobre 2007.
  8. Cet argument ne semble pas convaincre le site arménien très bien documenté du collectif Van. Cf article traduit ses soins publié par le Turkish Daily News le 23 février 2007. dans "La Question turque et l'Europe".

Obama: Yes, we can kill

Obama: Yes, we can kill

Gerhard Wisnewski / Ex: http://info.kopp-verlag.de/

Tja, unser Barack Obama. Hat man doch gleich geahnt, dass »Yes, we can« irgendwie unvollständig ist. Der gute Barack wollte uns einfach nicht sagen, was wir nun eigentlich können. Nun wissen wir es: »Yes, we can kill« …

obama-chosen-one.jpgIrgendwie sind seine Fans ziemlich still geworden. Kein Wunder: Da killt er in Pakistan fröhlich vor sich hin und knipst »Terroristen«, aber auch Zivilisten von der Luft aus ab. Mit ferngelenkten Drohnen. Ist ungefähr so wie ein Videospiel. Jemand sitzt an einem Bildschirm und betätigt einen Stick – und »paff«: Weg ist der Terrorist. Oder wer auch immer. Denn natürlich kann man Terroristen von Zivilisten gar nicht unterscheiden. Es ist ja das Wesen des Terroristen, dass er in zivil unterwegs ist. Uniformiert ist nur eine reguläre Truppe. Befindet sich der Terrorist in Wirklichkeit also gar nicht am Boden, sondern quasi am anderen Ende des Sticks? Oder gar im Weißen Haus? Das zu beweisen, erfordert nur ein wenig simple Logik.

»Darf ein demokratischer Rechtsstaat per Mausklick töten?«, grämt sich das Zentralorgan »Spiegel Online« angesichts des US-Drohnenkrieges gegen »Al-Qaida« in Pakistan. Eine gute Frage, die aber zu kurz greift. Denn entscheidend ist ja nicht die bloße Technik, sondern die Frage, ob ein demokratischer Rechtsstaat überhaupt relativ wahllos Menschen massakrieren darf – ohne Gerichtsverfahren, ohne Urteil. Und selbstverständlich auch ohne Beweise. Denn wen die USA nun warum zum »Terroristen« ernennen – womöglich h.c. –, bleibt im Wesentlichen ihr Geheimnis. Die wirkliche Frage muss daher lauten: »Kann ein Staat, der relativ wahllos Menschen tötet, ein demokratischer Rechtsstaat sein?« Und die Antwort lautet natürlich nein. So etwas kann nur ein menschenverachtendes Regime tun.

Die Faustregel für uns heißt daher: Terrorist ist der, der von irgendeinem Terroristen in der CIA, im US-Militär oder in der US-Regierung dazu ernannt wird. »Terroristen« in der US-Regierung? Na klar: Denn während der erklärte Terrorist relativ irreal und unbestimmt bleibt, ist der unstreitig reale Terrorist der, der den Joystick betätigt – und natürlich der, der die Befehle dazu gibt. Denn dass er wirklich abknallt, wer ihm gerade vor die Drohne läuft, wird ja ganz offiziell eingeräumt. Ob dagegen das arme Schwein, das da unten am Boden von Raketen zerfetzt wird, wirklich ein Terrorist ist, ist durchaus unklar.

Klar dagegen ist, dass die Befehlshaber und -empfänger in den USA gegen jedes Menschenrecht andere Menschen töten. Und das ist ziemlich genau die Definition von »Terrorist«. Ja, es ist sogar der Wesenskern des Terrorismus (von lat. »terror« = Schrecken), dass er ebenso wahl-  wie scheinbar sinnlos zuschlägt. Dass also jeder ständig unter der Todesdrohung leben muss. Was man auch die »Strategie der Spannung« nennt. Denn klar ist ferner, dass zumindest die Dutzenden von Zivilisten um die »Zielperson« herum mit Terrorismus in der Regel überhaupt nichts zu tun haben, und dennoch liquidiert werden – einfach, weil sie in der Nähe waren.

Aber zum Glück haben wir ja noch die freie Presse, wie etwa Spiegel Online, die das alles aufdeckt. Allerdings bestimmt nicht, um einen Skandal zu entfachen oder Obama an den Pranger zu stellen. Sondern um die Massen an den Gedanken zu gewöhnen,  dass es gerechtfertigt sein kann, wahllos Zivilisten umzubringen.

Am 5. August 2009 zum Beispiel sei es gelungen, einen Baitullah Mehsud zu töten – im 16. Anlauf. »An jenem Tag schwebte eine Drohne vom Typ Predator gut drei Kilometer über dem Haus von Mehsuds Schwiegervater in der pakistanischen Provinz Südwaziristan. Ihre Infrarotkamera sandte in Echtzeit gestochen scharfe Bilder an die CIA-Zentrale in Langley im US-Bundesstaat Virginia. Der Top-Talib saß auf dem Dach des Hauses. Seine Ehefrau, sein Onkel und ein Arzt leisteten ihm Gesellschaft. In diesem Moment wurde Tausende Kilometer entfernt, in den USA, ein Auslöser betätigt. Zwei Hellfire-Raketen schossen aus der Drohne – und trafen ihr Ziel. Am Ende waren Baitullah Mehsud und elf weitere Menschen tot.«

Toll. »16. Anlauf« heißt: Man hat halt ein wenig herumprobiert: »Insgesamt, so die Schätzungen, starben bei den 16 Angriffsversuchen zwischen 207 und 321 Personen – und nicht alle waren Taliban, das ist gewiss.«

Was sich ganz so anhört, als veranstalteten die USA mit ihren Drohnen in Pakistan ein mehr oder weniger lustiges Tontaubenschießen, bei dem sie jeweils einige hundert Menschen abknallen, um dann hinterher zu behaupten: Der zweite Turbanträger von rechts, das war der bekannte Terrorist Mohammed al-Satan.

Na und – ist doch in Afghanistan! Oder in Pakistan! Ja, aber nicht mehr lange. Das ist nur ein Testgebiet mit billigen, recht- und namenlosen Versuchskarnickeln. Sobald das US-Imperium die ganze Welt beherrscht und die Serienproduktion angekurbelt hat, werden die Drohnen den ganzen Globus umschwirren wie Schmeißfliegen. Ortungen aus Handy- und GPS-Netzen werden mit  Identitäten verknüpft und an die Drohnen weitergeleitet. Im Prinzip braucht's dazu auch keine »Piloten« mehr. Sondern die Drohnen übernehmen die Pflege der Landschaft vollautomatisch.

Obama will Guantanamo schließen? Kein Wunder. Denn in Wirklichkeit will Obama überhaupt keine Gefangenen mehr machen. Und das wiederum hört sich so an, als wäre der große Friedensnobelpreisträger Obama in Wirklichkeit ein Kriegsverbrecher.

 

Mittwoch, 10.03.2010

Kategorie: Geostrategie, Politik, Terrorismus

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L'oeuvre géopolitique de Sir Halford John Mackinder (1861-1947)

Archives de SYNERGIES EUROPEENNES - 1986

L'oeuvre géopolitique de Sir Halford John Mackinder (1861-1947)

Mac.gifQui était le géopoliticien britannique Mackinder, génial concepteur de l'opposition entre thalassocraties et puissances océaniques? Un livre a tenté de répondre à cette question: Mackinder, Geography as an Aid to Statecraft, par W.H. Parker. Né dans le Lin-colnshire en 1861, Sir Halford John Mackinder s'est interessé aux voyages, à l'histoire et aux grands événements internationaux dès son enfance. Plus tard, à Oxford, il étu-diera l'histoire et la géologie. Ensuite, il entamera une brillante carrière universitaire au cours de laquelle il deviendra l'impulseur principal d'institutions d'enseignement de la géographie. De 1900 à 1947, il vivra à Londres, au coeur de l'Empire Britannique. Sa préoccupation essentielle était le salut et la préservation de cet Empire face à la montée de l'Allemagne, de la Russie et des Etats-Unis. Au cours de ces cinq décennies, Mackinder sera très proche du monde poli-tique britannique; il dispensera ses conseils d'abord aux "Libéraux-Impérialistes" (les "Limps") de Rosebery, Haldane, Grey et Asquith, ensuite aux Conservateurs regroupés derrière Chamberlain et décidés à aban-donner le principe du libre échange au profit des tarifs préférentiels au sein de l'Empire. La Grande-Bretagne choisissait une économie en circuit fermé, tentait de construire une économie autarcique à l'échelle de l'Empire. Dès 1903, Mackinder classe ses notes de cours, fait confectionner des cartes historiques et stratégiques sur verre destinées à être projetées sur écran. Une oeuvre magistrale naissait.

 

Une idée fondamentale traversera toute l'oeuvre de Mackinder: celle de la confrontation permanente entre la "Terre du Milieu" (Heartland) et l'"Ile du Monde" (World Island). Cette confrontation incessante est en fait la toile de fond de tous les événe-ments politiques, stratégiques, militaires et économiques majeurs de ce siècle. Pour son biographe Parker, Mackinder, souvent cité avec les autres géopoliticiens américains et européens tels Mahan, Kjellen, Ratzel, Spykman et de Seversky, a, comme eux, appliqué les théories darwiniennes à la géographie politique. Doit-on de ce fait rejetter les thèses géopolitiques parce que "fatalistes"? Pour Parker, elles ne sont nullement fatalistes car elles détiennent un aspect franchement subjectif: en effet, elles justifient des actions précises ou attaquent des prises de position adverses en proposant des alternatives. Elles appellent ainsi les vo-lontés à modifier les statu quo et à refuser les déterminismes.

 

L'intérêt qu'a porté Mackinder aux questions géopolitiques date de 1887, année où il pro-nonça une allocution devant un auditoire de la Royal Geographical Society qui contenait notamment la phrase prémonitoire suivante: "Il y a aujourd'hui deux types de conqué-rants: les loups de terre et les loups de mer". Cette allégorie avait pour arrière-plan historique concret la rivalité anglo-russe en Asie Centrale. Mais le théoricien de l'anta-gonisme Terre/Mer se révélera pleinement en 1904, lors de la parution d'un papier inti-tulé "The Geographical Pivot of History" (= le pivot géographique de l'histoire). Pour Mackinder, à cette époque, l'Europe vivait la fin de l'Age Colombien, qui avait vu l'ex-pansion européenne généralisée sans résistan-ce de la part des autres peuples. A cette ère d'expansion succédera l'Age Postcolom-bien, caractérisé par un monde fait d'un système politique fermé dans lequel "chaque explosion de forces sociales, au lieu d'être dissipée dans un circuit périphérique d'espa-ces inconnus, marqués du chaos du barba-risme, se répercutera avec violence depuis les coins les plus reculés du globe et les éléments les plus faibles au sein des orga-nismes politiques du monde seront ébranlés en conséquence". Ce jugement de Mackinder est proche finalement des prophéties énoncées par Toynbee dans sa monumentale "Stu-dy of History". Comme Toynbee et Spengler, Mackinder demandait à ses lecteurs de se débarrasser de leur européocentrisme et de considérer que toute l'histoire européenne dépendait de l'histoire des immensités conti-nentales asiatiques. La perspective historique de demain, écrivait-il, sera "eurasienne" et non plus confinée à la seule histoire des espaces carolingien et britannique.

 

Pour étayer son argumentation, Mackinder esquisse une géographie physique de la Rus-sie et raisonne une fois de plus comme Toynbee: l'histoire russe est déterminée, écrit-il, par deux types de végétations, la steppe et la forêt. Les Slaves ont élu domi-cile dans les forêts tandis que des peuples de cavaliers nomades règnaient sur les espa-ces déboisés des steppes centre-asiatiques. A cette mobilité des cavaliers, se déployant sur un axe est-ouest, s'ajoute une mobilité nord-sud, prenant pour pivots les fleuves de la Russie dite d'Europe. Ces fleuves seront empruntés par les guerriers et les marchands scandinaves qui créeront l'Empire russe et donneront leur nom au pays. La steppe cen-tre-asiatique, matrice des mouvements des peuples-cavaliers, est la "terre du milieu", entourée de deux zones en "croissant": le croissant intérieur qui la jouxte territo-rialement et le croissant extérieur, constitué d'îles de diverses grandeurs. Ces "croissants" sont caractérisés par une forte densité de population, au contraire de la Terre du Mi-lieu. L'Inde, la Chine, le Japon et l'Europe sont des parties du croissant intérieur qui, à certains moments de l'histoire, subissent la pression des nomades cavaliers venus des steppes de la Terre du Milieu. Telle a été la dynamique de l'histoire eurasienne à l'ère pré-colombienne et partiellement aussi à l'ère colombienne où les Russes ont pro-gressé en Asie Centrale.

 

Cette dynamique perd de sa vigueur au moment où les peuples européens se dotent d'une mobilité navale, inaugurant ainsi la période proprement "colombienne". Les ter-res des peuples insulaires comme les Anglais et les Japonais et celles des peuples des "nouvelles Europes" d'Amérique, d'Afrique Australe et d'Australie deviennent des bastions de la puissance navale inaccessibles aux coups des cavaliers de la steppe. Deux mobilités vont dès lors s'affronter, mais pas immédiatement: en effet, au moment où l'Angleterre, sous les Tudor, amorce la con-quête des océans, la Russie s'étend inexo-rablement en Sibérie. A cause des diffé-rences entre ces deux mouvements, un fossé idéologique et technologique va se creuser entre l'Est et l'Ouest, dit Mackinder. Son jugement rejoint sous bien des aspects celui de Dostoïevsky, de Niekisch et de Moeller van den Bruck. Il écrit: "C'est sans doute l'une des coïncidences les plus frappantes de l'histoire européenne, que la double expansion continentale et maritime de cette Europe recoupe, en un certain sens, l'antique opposition entre Rome et la Grèce... Le Germain a été civilisé et christianisé par le Romain; le Slave l'a été principalement par le Grec. Le Romano-Germain, plus tard, s'est embarqué sur l'océan; le Greco-Slave, lui, a parcouru les steppes à cheval et a conquis le pays touranien. En conséquence, la puissance continentale moderne diffère de la puissance maritime non seulement sur le plan de ses idéaux mais aussi sur le plan matériel, celui des moyens de mobilité".

 

Pour Mackinder, l'histoire européenne est bel et bien un avatar du schisme entre l'Empire d'Occident et l'Empire d'Orient (an 395), ré-pété en 1054 lors du Grand Schisme op-posant Rome et Byzance. La dernière croi-sade fut menée contre Constantinople et non contre le Turc. Quand celui-ci s'empare en 1453 de Constantinople, Moscou reprend le flambeau de la chrétienté orthodoxe. De là, l'anti-occidentalisme des Russes. Dès le XVIIème siècle, un certain Kridjanitch glo-rifie l'âme russe supérieure à l'âme cor-rompue des Occidentaux et rappelle avec beaucoup d'insistance que jamais la Russie n'a courbé le chef devant les aigles ro-maines. Cet antagonisme religieux fera pla-ce, au XXème siècle, à l'antagonisme entre capitalisme et communisme. La Russie opte-ra pour le communisme car cette doctrine correspond à la notion orthodoxe de fra-ternité qui s'est exprimée dans le "mir", la communauté villageoise du paysannat slave. L'Occident était prédestiné, ajoute Mac-kinder, à choisir le capitalisme car ses reli-gions évoquent sans cesse le salut individuel (un autre Britannique, Tawney, présentera également une typologie semblable).

 

Le chemin de fer accélerera le transport sur terre, écrit Mackinder, et permettra à la Russie, maîtresse de la Terre du Milieu si-bérienne, de développer un empire industriel entièrement autonome, fermé au commerce des nations thalassocratiques. L'antagonisme Terre/Mer, héritier de l'antagonisme reli-gieux et philosophique entre Rome et Byzan-ce, risque alors de basculer en faveur de la Terre, russe en l'occurence. Quand Staline annonce la mise en chantier de son plan quinquennal en 1928, Mackinder croit voir que sa prédiction se réalise. Depuis la Révo-lution d'Octobre, les Soviétiques ont en ef-fet construit plus de 70.000 km de voies ferrées et ont en projet la construction du BAM, train à voie large et à grande vitesse. Depuis 70 ans, la problématique reste identi-que. Les diplomaties occidentales (et surtout anglo-saxonnes) savent pertinemment bien que toute autonomisation économique de l'espace centre-asiatique impliquerait auto-matiquement une fermeture de cet espace au commerce américain et susciterait une réorganisation des flux d'échanges, le "crois-sant interne" ou "rimland" constitué de la Chine, de l'Inde et de l'Europe ayant intérêt alors à maximiser ses relations commerciales avec le centre (la "Terre du Milieu" proprement dite). Le monde assisterait à un quasi retour de la situation pré-colombienne, avec une mise entre parenthèses du Nouveau Monde.

 

Pour Mackinder, cette évolution historique était inéluctable. Si Russes et Allemands conjuguaient leurs efforts d'une part, Chinois et Japonais les leurs d'autre part, cela signifierait la fin de l'Empire Britannique et la marginalisation politique des Etats-Unis. Pourtant, Mackinder agira politiquement dans le sens contraire de ce qu'il croyait être la fatalité historique. Pendant la guerre civile russe et au moment de Rapallo (1922), il soutiendra Denikine et l'obligera à concéder l'indépendance aux marges occidentales de l'Empire des Tsars en pleine dissolution; puis, avec Lord Curzon, il tentera de construire un cordon sanitaire, regroupé au-tour de la Pologne qui, avec l'aide française (Weygand), venait de repousser les armées de Trotsky. Ce cordon sanitaire poursuivait deux objectifs: séparer au maximum les Allemands des Russes, de façon à ce qu'ils ne puissent unir leurs efforts et limiter la puissance de l'URSS, détentrice incontestée des masses continentales centre-asiatiques. Corollaire de ce second projet: affaiblir le potentiel russe de façon à ce qu'il ne puisse pas exercer une trop forte pression sur la Perse et sur les Indes, clef de voûte du système impérial britannique. Cette stratégie d'affaiblissement envisageait l'indépendance de l'Ukraine, de manière à soustraire les zones industrielles du Don et du Donetz et les greniers à blé au nouveau pouvoir bolchévique, résolument anti-occidental.

 

Plus tard, Mackinder se rendra compte que le cordon sanitaire ne constituait nullement un barrage contre l'URSS ou contre l'ex-pansion économique allemande et que son idée première, l'inéluctabilité de l'unité eurasienne (sous n'importe quel régime ou mode juridique, centralisé ou confédératif), était la bonne. Le cordon sanitaire polono-centré ne fut finalement qu'un vide, où Allemands et Russes se sont engouffrés en septembre 1939, avant de s'en disputer les reliefs. Les Russes ont eu le dessus et ont absorbé le cordon pour en faire un glacis protecteur. Mackinder est incontestablement l'artisan d'une diplomatie occidentale et conservatrice, mais il a toujours agi sans illusions. Ses successeurs reprendront ses ca-tégories pour élaborer la stratégie du "con-tainment", concrétisée par la constitution d'alliances sur les "rimlands" (OTAN, OTASE, CENTO, ANZUS).

Chessboard.jpg

 

En Allemagne, Haushofer, contre la volonté d'Hitler, avait suggéré inlassablement le rapprochement entre Japonais, Chinois, Rus-ses et Allemands, de façon à faire pièce aux thalassocraties anglo-saxonnes. Pour étayer son plaidoyer, Haushofer avait repris les arguments de Mackinder mais avait inversé sa praxis. La postérité intellectuelle de Mackinder, décédé en 1947, n'a guère été "médiatisée". Si la stratégie du "contain-ment", reprise depuis 1980 par Reagan avec davantage de publicité, est directement inspirée de ses écrits, de ceux de l'Amiral Mahan et de son disciple Spykman, les journaux, revues, radios et télévision n'ont guère honoré sa mémoire et le grand public cultivé ignore largement son nom... C'est là une situation orwellienne: on semble tenir les évidences sous le boisseau. La vérité serait-elle l'erreur?

 

Robert STEUCKERS.

 

W.H. PARKER, Mackinder. Geography as an Aid to Statecraft, Clarendon Press, Oxford, 1982, 295 p., £ 17.50.  

 

mardi, 16 mars 2010

Presseschau 03/März 2010

Presseschau

03/ März 2010

Einige Links. Bei Interesse anklicken...

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„Die iranische Atombombe ist keine Gefahr für Israel“
BERLIN. Die Gefahr, die von einem atomaren Iran ausgeht, wird übertrieben. Diese Ansicht vertritt der israelische Militärexperte Martin van Creveld im Interview mit der JUNGEN FREIHEIT.
http://www.jungefreiheit.de/Single-News-Display-mit-Komm.154+M596d14f6b99.0.html

vendeur_20journaux.jpgArmenien-Resolution im US-Kongreß
Türkische Politiker drohen USA wegen Völkermord-Vorwurf
Der Ton zwischen Ankara und Washington verschärft sich drastisch: Türkische Spitzenpolitiker verlangen von der US-Regierung, die Armenien-Resolution des Kongresses zu blockieren. Andernfalls seien die bilateralen Beziehungen gefährdet.
http://www.spiegel.de/politik/ausland/0,1518,681900,00.html

Streit um Armenien-Resolution
Türkei ruft Botschafterin aus Schweden zurück
Schweden zieht den Zorn der türkischen Regierung auf sich: Das Parlament hat die Tötung Hunderttausender Armenier und Mitglieder anderer Volksgruppen zu Beginn des 20. Jahrhunderts als Völkermord eingestuft. Die Türkei rief sofort ihre Botschafterin zurück, Premier Erdogan sagte einen Besuch ab.
http://www.spiegel.de/politik/ausland/0,1518,683127,00.html

USA prangern Islam-Feindlichkeit in Europa an
Die US-Regierung sorgt sich um die Menschenrechte in Europa. Laut einem jetzt veröffentlichten Bericht ist sie unzufrieden mit der Situation der Muslime. Kritisiert werden das Minarettverbot in der Schweiz, das Kopftuchverbot an deutschen Schulen und gewalttätige Übergriffe in mehreren Staaten.
http://www.welt.de/politik/article6737100/USA-prangern-Islam-Feindlichkeit-in-Europa-an.html

Chopin und Chauvinismus
Von Christian Rudolf
Das geschichtsbewußte Polen feiert seine Jahrestage, und während in der vergangenen Woche im Erdgeschoß des eleganten „Hauses des Auslandspolentums“ in Warschau zu Ehren Fryderyk Chopins ein Konzert gegeben wurde, richtete im Spiegelsaal das Posener West-Institut eine Experten-Konferenz zu Geschichte und Gegenwart der „Polnischen nationalen Minderheit in Deutschland“ aus.
http://www.jungefreiheit.de/Single-News-Display-mit-Komm.154+M516acd6160c.0.html

Belohnung im Kanzleramt
Merkel läßt engen Berater zum General befördern
Angela Merkel will ihren obersten Bundeswehrberater im Kanzleramt halten: Damit Oberst Erich Vad in Berlin bleibt, soll er nach Informationen des SPIEGEL zum General befördert werden. Die Kanzlerin belohnt damit offenbar auch seine Hilfe in der Kunduz-Affäre.
http://www.spiegel.de/politik/deutschland/0,1518,682123,00.html

Teures Militärflugzeug
Käufer bezahlen 3,5 Milliarden mehr für A400M
Sieben Staaten und der Flugzeugbauer Airbus einigen sich auf die Finanzierung des Militär-Transporters A400M. Das Flugzeug wird teurer als geplant. Die Käufer-Länder sind bereit, insgesamt 3,5 Milliarden Euro zu den Mehrkosten beizutragen. Ab Ende 2012 soll der erste A400M ausgeliefert werden.
http://www.welt.de/wirtschaft/article6659832/Kaeufer-bezahlen-3-5-Milliarden-mehr-fuer-A400M.html

Drohneneinsätze
„Sie nennen es Kriegsporno“
„Als wärst Du ein Feuerwehrmann, und es brennt jeden Tag.“ Drohnenflieger seien einem Streß ausgesetzt, der ganz anders als an der Front sei, erklärt der US-Politologe Singer im Interview mit SPIEGEL ONLINE. Die gesamte Erlebniswelt des Krieges werde durch die neuen todbringenden Waffen verändert.
http://www.spiegel.de/politik/ausland/0,1518,681007,00.html


Tolles „Zukunftsmodell“ ...
Koalitionen
Deutschland – heimliche schwarz-grüne Republik
Von Mariam Lau
Union und FDP haben bei den Wählern viel Kredit verspielt. Das zeigt auch die neueste Forsa-Umfrage. In Nordrhein-Westfalen ist deshalb immer wieder von Schwarz-Grün die Rede. Ein Zukunftsmodell, für das sich in ganz Deutschland interessante Beispiele finden lassen.
http://www.welt.de/politik/deutschland/article6690660/Deutschland-heimliche-schwarz-gruene-Republik.html

Politisch korrekt abgefertigt
Was man in Deutschland sagen darf
Von Katja Bigalke
Das Interview, das der ehemalige Berliner Finanzsenator Thilo Sarrazin im Herbst letzten Jahres der Zeitschrift „Lettre International“ gab, sorgte wochenlang für Aufregung. Da war unter anderem von Türken die Rede, die den Staat nicht anerkennen, aber von ihm leben und immer neue „Kopftuchmädchen“ produzieren. Die türkisch-arabische Bevölkerung Berlins stempelte Sarrazin unmißverständlich als zu einem großen Teil „unproduktiv“ ab.
http://www.dradio.de/dkultur/sendungen/zeitfragen/1131145/
http://www.sezession.de/13073/deutschlandradio-ueber-sarrazin.html

Podiumsdiskussion: Hahn hält an Sarrazin fest
Einladung verteidigt
http://www.morgenweb.de/nachrichten/politik/20100305_srv0000005510972.html

Winnenden-Gedenkfeier
Bundespräsident fordert schärferes Waffenrecht
Bei der Gedenkfeier zum Amoklauf von Winnenden hat Bundespräsident Köhler weitere Beschränkungen für den Zugang zu Waffen gefordert. Der Innenexperte der CDU, Wolfgang Bosbach, wies diese Forderungen strikt zurück.
http://www.spiegel.de/panorama/0,1518,682982,00.html

Währungen
Griechen-Hilfe ermöglicht deutschen Euro-Ausstieg
Von Daniel Eckert
Eine finanzielle Unterstützung der Griechen könnte Deutschland in eine Verfassungskrise stürzen: Sie verletzt die Vereinbarkeit von Grundgesetz und Maastricht-Vertrag. Die Folge: Das Verfassungsgericht könnte die Euro-Mitgliedschaft der Bundesrepublik beenden. Der Weg für eine Rückkehr der D-Mark wäre offen.
http://www.welt.de/finanzen/article6657646/Griechen-Hilfe-ermoeglicht-deutschen-Euro-Ausstieg.html

Spiegel-Titel:
„Der Euro ist unter Beschuß wie nie zuvor, er ist angreifbar geworden, weil sich die Versprechen, auf denen er gegründet wurde, als Lügen erwiesen.“
http://www.spiegel.de/spiegel/print/index-2010-10.html

Bundeshaushalt: Der Staat versinkt in Schulden
Noch vor wenigen Wochen konnte Finanzminister Steinbrück keine klare Auskunft über die Größe des Lochs im Bundeshaushalt geben. Jetzt kommt Licht ins Dunkel. Wie das Handelsblatt aus Regierungskreisen erfahren hat, steuert der Bund auf eine Mega-Neuverschuldung zu. Im kommenden Jahr wird demnach der Schuldenrekord von Theo Waigel von 1996 genackt.
http://www.handelsblatt.com/politik/deutschland/der-staat-versinkt-in-schulden%3B2364818
http://www.finanznachrichten.de/nachrichten-2009-06/14216147-steinbrueck-neuverschuldung-2010-fast-90-mrd-eur-015.htm
http://www.tagesschau.de/multimedia/sendung/ts18028.html
http://www.faz.net/s/Rub594835B672714A1DB1A121534F010EE1/Doc~E9A6CA630BCEF404B83813CDB79C49B8D~ATpl~Ecommon~Scontent.html

EU-Finanzministerium: Belgien will Entmachtung von Nationalstaaten
http://www.mmnews.de/index.php/201003055076/MM-News/EU-Finanzministerium-Entmachtung-von-Nationalstaaten.html

Äußerst sehenswert ...
Trigema-Chef Wolfgang Grupp bei Sandra Maischberger (2.3.2010)
http://www.youtube.com/watch?v=GC40VTCJWU0
http://www.trigema.de/shop/index.jsf?fromAdwords=Trigema_Allgemein&cm_mmc_o=TBBTkwCjCH0zLfCjCzpcByplCjCfybTwFz

O-Ton Deutschland
„Ich bekomme Hartz IV und putze ehrenamtlich“
Martina T. ist Hartz-IV-Empfängerin und säubert die Toilette einer Grundschule – ehrenamtlich. Den unbeliebten Job macht sie gern, auch ohne Geld. Er gibt ihr das Gefühl, daß sie den Steuerzahlern etwas zurückgeben kann und erspart ihr das tatenlose Herumsitzen zu Hause. Arbeiten ist für sie Lebensqualität.
http://www.welt.de/politik/article6719341/Ich-bekomme-Hartz-IV-und-putze-ehrenamtlich.html

Bei der Libertären Plattform ist am 5. März 2010 eine verblüffende Sendung eingetroffen. Der Briefumschlag mit dem Poststempel vom 3. Februar 2010(!), der an ein Mitglied der Libertären Plattform adressiert ist, enthielt eine CD mit der Aufschrift „Fin_Pol_Germany_2010“(!). Darauf enthalten sind Daten, die namentlich genannten deutschen Politikern und Behördenmitarbeitern in- und ausländische Konten und Finanzinformationen zuordnen.
Mehr unter:
http://libertaere-plattform.de/lp-erhaelt-finanzdaten-von-politikern/

FDP-Kreisvorsitzender spendete vor der Landtagswahl im Saarland 47.500 € an die Grünen:
http://www.welt.de/politik/deutschland/article6685752/Gruene-nahmen-FDP-Spenden-vor-der-Wahl-an.html

Ralph Boes: 1000 Euro bedingungsloses Grundeinkommen
http://www.freiewelt.net/nachricht-3577/ralph-boes:-1000-euro-bedingungsloses-grundeinkommen.html

Dr. Kerstin Funk: Grundeinkommen zerstört Arbeitsmoral
http://www.freiewelt.net/nachricht-3576/dr.-kerstin-funk:--grundeinkommen-zerstört-arbeitsmoral.html

Aus den taz-Sonderseiten zum Frauentag
Die Männer-Rechte
Männer machen Front gegen den Feminismus. Jetzt müsse Schluß sein mit der „Besserstellung der Frau“. Antifeministische Aktivisten schrecken selbst vor Kooperationen mit Rechtsradikalen nicht zurück. VON THOMAS GESTERKAMP
http://www.taz.de/1/leben/alltag/artikel/1/die-maenner-rechte/

Abgeordnetenwatch und der Moderations-Codex
„Abgeordnetenwatch.de und Parlamentwatch e. V. sind überparteilich“, heißt es hochtrabend in den FAQs von abgeordnetenwatch.de. Daß dem nicht immer so ist, mußte jetzt User J.H. erfahren, der dem Chef der SED-Nachfolgepartei Gregor Gysi, eine unangenehme Frage zu den Opfern der SED-Herrschaft stellen wollte.
http://www.pi-news.net/2010/03/abgeordnetenwatch-und-der-moderations-codex/#more-123759

Vera Lengsfeld
Sie lügen wie gedruckt. Stasioffiziere stellen ihr Buch vor
http://www.freiewelt.net/blog-1579/sie-lügen-wie-gedruckt.-stasioffiziere-stellen-ihr-buch-vor.html

Hakenkreuzschmierereien: Gefahr für das Abendland. Milliardenschwere Investitionen gefordert.
http://www.tagesschau.de/multimedia/video/video666680_bcId-_ply-internal_res-flash256_vChoice-video666680.html
http://blog.zeit.de/stoerungsmelder/2010/03/08/10-jahre-kampf-gegen-rechtsextremismus-eine-bilanz_2871#more-2871

„Gesicht zeigen!“
Uwe-Karsten Heye: Milliardeninvestition in Bildung soll Kampf gegen Rechts forcieren
http://www.derwesten.de/nachrichten/Milliardeninvestition-in-Bildung-soll-Kampf-gegen-Rechts-forcieren-id2690701.html

George Grosz und der deutsche Michel
Von Thorsten Hinz
Am vergangenen Sonntag habe ich mir in der Berliner Akademie der Künste am Pariser Platz eine Ausstellung zu George Grosz (1893–1959) angesehen. Seine Collagen und Zeichnungen sind professionell, aber politisch eindimensional. Ab einem bestimmten Punkt hat man von den schweinsköpfigen und stiernackigen Militärs, die er bevorzugt malte, genug. Für ihre Rolle als doppelt Geschlagene – zuerst durch die militärische Übermacht, dann durch den Versailler Vertrag, in deren Gefolge sie demobilisiert und gesellschaftlich und sozial herabgesetzt wurden – hatte er kein Empfinden. Grosz gehört zu den linken Künstlern und Publizisten, die das Elend der Weimarer Republik nur verschlimmert haben.
http://www.jungefreiheit.de/Single-News-Display-mit-Komm.154+M5244ead32a5.0.html

Wolfskinder
„Ich dachte, Deutschland gibt’s nicht mehr“
Keine Eltern, kein Zuhause, keine Identität: Kurz nach Kriegsende wurde Marianne Beutler als Zehnjährige von ihrer Mutter getrennt und mußte alleine überleben – eines von bis zu 25.000 „Wolfskindern“, die durch das zerstörte Osteuropa irrten. Über ihr Schicksal sprechen können sie erst heute. Von Matthias Pankau
http://einestages.spiegel.de/static/topicalbumbackground/6202/_ich_dachte_deutschland_gibt_s_nicht_mehr.html

Eklat am Nockherberg
Fastenprediger Lerchenberg wirft hin
http://www.spiegel.de/politik/deutschland/0,1518,682033,00.html

Das Holocaust-Gedenken ist zu einer Art Religion geworden.
Pilgerfahrt nach Auschwitz
KOMMENTAR VON IRIS HEFETS
http://www.taz.de/1/debatte/kommentar/artikel/1/pilgerfahrt-nach-auschwitz

Dazu ein Video, das die zum Teil erschreckende Neurotisierung der deutschen Bevölkerung infolge der holocaustzentrierten Geschichtspolitik zeigt ...
„Der Holocaust“ – Das Trauma der Deutschen
http://www.youtube.com/watch?v=2JwPFW4123c

Artikel vom Januar, aber dennoch sehr interessant...
Holocaust-Gedenken
„Bist du Jude?“
Zwei Deutschtürken versuchen, die deutsche Geschichte zu erklären – und treffen auf hartnäckige Vorurteile
http://www.zeit.de/2010/04/Umfrage-Reportage?page=all

Forderung nach „Ausländer-Rückführung“ ist keine Volksverhetzung
KARLSRUHE. Die Forderung nach einer „Ausländer-Rückführung“ kann nicht ohne weiteres als Volksverhetzung gewertet werden. Das geht aus einer am Freitag veröffentlichten Entscheidung des Bundesverfassungsgerichtes hervor.
http://www.jungefreiheit.de/Single-News-Display-mit-Komm.154+M537215b98be.0.html

Verfassungsrichter werten „Ausländer raus“ nicht als Volksverhetzung
http://blog.zeit.de/stoerungsmelder/2010/03/05/verfassungsrichter-werten-auslander-raus-nicht-als-volksverhetzung_2864
http://www.bundesverfassungsgericht.de/pressemitteilungen/bvg10-013.html

Islamisten sollen britische Parteien unterwandert haben
LONDON. Der zur Labour-Partei gehörende britische Umweltminister Jim Fitzpatrick hat mit der Behauptung Aufsehen erregt, radikale Moslems hätten seine und andere Parteien unterwandert.
http://www.jungefreiheit.de/Single-News-Display-mit-Komm.154+M5fb6511b1a6.0.html

Hans-Peter Uhl (CSU): „Eine Islamisierung gibt es nicht“
http://www.n-tv.de/politik/dossier/Eine-Islamisierung-gibt-es-nicht-article766325.html

Thilo Sarrazins These
Satellitenschüsseln verhindern Integration
Von Gisela Kirschstein
Thilo Sarrazin nimmt beim Disput mit Hessens Integrationsminister kein Wort seiner Kritik zurück, sondern legt nach: Er sieht Ausländer gefordert, sich selbst zu bilden – und meint vor allem die Türken. Sie sollten nicht nur türkische Zeitungen lesen und türkisches Fernsehen schauen. Russen würden sich mehr anstrengen.
http://www.welt.de/politik/deutschland/article6722174/Satellitenschuesseln-verhindern-Integration.html

Leverkusen: Anschlag auf Pro-Funktionär
Zwei Monate vor der Landtagswahl in Nordrhein-Westfallen spitzt sich die Situation für Funktionäre von pro-NRW zu: In der Nacht zum Montag wurde im multikulturellen Leverkusener Problemstadtteil Rheindorf-Nord die Garage des pro-NRW-Mitglieds Markus H. beschmiert und sein Wohnzimmerfenster eingeworfen. H. hatte im Juni des vergangenen Jahres eine Demonstration der Bürgerbewegung gegen den Bau einer marokkanischen Prunkmoschee in Rheindorf (PI berichtete) mit organisiert, auf der es zu massiven Protesten der marokkanischen Anwohner kam. Neu in Rheindorf ist, daß anders als in Köln nicht die deutsche Antifa, sondern mohammedanische Immigranten gewaltsam in den Wahlkampf eingreifen.
http://www.pi-news.net/2010/03/leverkusen-anschlag-auf-pro-funktionaer/

FAZ berichtet über die direkte Einwanderung in die Sozialsysteme ...
Von 1970 bis 2003 stieg die Zahl der Ausländer in Deutschland von drei auf 7,3 Millionen. Die Zahl der sozialversicherungspflichtigen Ausländer blieb dagegen mit 1,8 Millionen konstant. Ein Großteil der Einwanderung nach Deutschland ging also am Arbeitsmarkt vorbei in das Sozialsystem.
http://www.arminen.net/wp/wp-content/uploads/2010/02/faz_steltzner_sozialstaat-in-schieflage_s-1_260110.pdf

Das hat er ja früh gemerkt ...
Helmut Schmidt: Der deutsche Exkanzler glaubt nicht an ein Zusammenleben mit dem Islam
http://www.arminen.net/wp/wp-content/uploads/2010/03/kurier_brd_schmidt_auslander_integration_kriminalitat_islam_interview_s-4_010310.pdf

70 „unzufriedene Schweine“ gegen Quick-halal
70 Mitglieder der „Jungen Identitären“, einer Jugendbewegung zur „Rückeroberung“ Frankreichs, haben eine Quick-halal-Filiale besucht, in der es nachweislich kein Schweinefleisch mehr auf der Speisekarte gibt. Die „Identitären“ demonstrierten als „unzufriedene Schweine“ verkleidet, um damit gegen die Finanzierung der Islamisierung durch die Halal-Ketten, die Lebensmittelapartheid gegen Nicht-Muslime in Halal-Restaurants und die Tierquälerei durch die islamische Schlachtung zu protestieren.
Das Video der „unzufriedenen Schweine“ sehen Sie hier.
http://www.pi-news.net/2010/03/70-unzufriedene-schweine-gegen-quick-halal/#more-123218

Versuchter Raub in Neu Isenburg
Am Samstag, 06.03.10 um 16:16 Uhr, wurde die PSt. Neu- Isenburg telefonisch über einen vers. Raubüberfall unterrichtet. Ein unbekannter Täter hatte einen 75jährigen Rentner erst um eine Zigarette gebeten und dann, als der Nichtraucher dem vermeintlichen Wunsch nicht Folge leisten konnte, zugestochen. Ein Verwandter des Opfers meldete den Vorfall, als das Opfer zu Hause war und bereits durch einen Rettungswagen versorgt wurde. Der Vorfall hatte sich kurz zuvor an der Fußgängerbrücke der Friedhofsstrasse ereignet.
http://www.ad-hoc-news.de/pressemitteilung-polizeipraesidium-suedosthessen--/de/Polizeimeldungen/21108994

Gastkommentar: Wenn Pädagogen zu Verbrechern werden
Lehrer sind keine Väter
Von Birgitta vom Lehn
Der Mißbrauch von Schülern in Internaten ist jahrzehntelang vertuscht worden.Nicht nur renommierte katholische Einrichtungen sind betroffen.Auch eine Vorzeigeeinrichtung der Reformpädagogik – die hessische Odenwaldschule – gerät nun ins Visier der Öffentlichkeit. Besonders erschütternd ist dort, daß die Vorfälle offenbar seit langem bekannt waren, aber die Behörden nicht gehandelt hatten.Ein Schlag ins Gesicht muß das vor allem für die „Homeschooler“ sein, denen die Behörden regelmäßig streng zusetzen, weil sie ihre Kinder nicht zur Schule schicken, sondern daheim unterrichten wollen.
http://www.welt.de/die-welt/debatte/article6697974/Lehrer-sind-keine-Vaeter.html

Jugendkultur Emo
Entdeck das Mädchen in dir
Von Carola Padtberg
Sie tragen lange Haare, schminken sich, zeigen Gefühle. Die düster-kitschigen Emos sind die erste Jugendszene, in der sich Jungs an Mädchen anpassen. Sie stellen das Rollenmodell auf den Kopf, ernten dafür Spott und Unverständnis – und manchmal Schläge.
http://www.spiegel.de/schulspiegel/leben/0,1518,676835,00.html

Kontrastprogramm ...
Assauer über schwule Fußballer
Wer sich outet, wird plattgemacht
Rudi Assauer ist für seine markigen Machosprüche bekannt. Nun hat der frühere Schalke-Manager wieder losgeledert und sich über Homosexuelle im Profifußball ausgelassen. Seine tollen Tips dürften jedoch nicht gerade für Begeisterung sorgen.
http://www.spiegel.de/panorama/leute/0,1518,683002,00.html

Konservative sind doof!
So ungefähr betitelte Spiegel-Online vor einigen Tagen voller Freude einen Artikel über eine Studie des Psychologen Satoshi Kanazawa. Da der Autor des linksliberalen Qualitätsmediums sich selbstverständlich nicht zu den tumben Massenprodukten der Evolution zählt, kann er diese Weisheit sogar noch feiner formulieren – „Konservative haben geringeren IQ“ – und wählt zur Illustration ein Foto von Horst Seehofer mit Bierhumpen im Gesicht.
Da kann man ja eigentlich nur zustimmen und bräuchte diese Untersuchung gar nicht zur Kenntnis zu nehmen, hätten es nicht doch womöglich einige Konservative bis in die London School of Economics and Political Science und sogar in die Redaktionsstuben des Spiegel geschafft. Die dummen Konservativen sind eben überall und wissen beispielsweise mit Statistiken nicht recht umzugehen.
http://www.jungefreiheit.de/Single-News-Display-mit-Komm.154+M5db098cc941.0.html

Stuttgart 21. Der Superbahnhof von Stuttgart
http://www.zdf.de/ZDFmediathek/beitrag/video/986616/Der-Superbahnhof-von-Stuttgart#/beitrag/video/986616/Der-Superbahnhof-von-Stuttgart

Flasche leer, Mauer hoch
Sie sind in vielen Ländern ein Müllproblem – dabei sind Plastikflaschen ein hervorragendes Baumaterial. Für Haiti wäre es ideal geeignet.
http://www.zeit.de/2010/09/PET-Haus

Seuchen
Chronik einer Hysterie
Von Philip Bethge, Katrin Elger, Jens Glüsing, Markus Grill, Veronika Hackenbroch, Jan Puhl, Mathieu von Rohr und Gerald Traufetter
Fast ein Jahr lang hielt die Schweinegrippe die Welt in Atem. Eine gigantische Impfkampagne sollte ihr Einhalt gebieten. Dabei handelte es sich nur um einen eher harmlosen Virenstamm. Wie konnte es zu solch einer Überreaktion kommen? Eine Rekonstruktion.
http://www.spiegel.de/spiegel/0,1518,682149,00.html

Dazu auch:
„Bereits 2003 hat sie (die WHO) ihre Mitgliedstaaten aufgefordert, bei den Risikogruppen bis zum Jahr 2010 eine Impfrate von 75 Prozent zu erreichen. Daß Deutschland von diesem Ziel noch weit entfernt ist, verdeutlicht die Grippe-Durchimpfungsrate von nur 56 Prozent bei den über 60jährigen in der Saison 2007/08. Inakzeptabel, so Wutzler, ist die Impfrate von lediglich 28 Prozent bei chronisch Kranken. Als ‚Situation, die mit Ratio nicht nachzuvollziehen ist‘ kritisierte der Mediziner die extrem niedrige Impfbereitschaft des medizinischen Personals, von dem sich nicht mal jeder Vierte impfen ließ.“
http://www.pharmazeutische-zeitung.de/index.php?id=30886&type=0

Nicht zuletzt für Vegetarier interessant ...
Angriff der Killerpflanzen
Von Ulli Kulke
Forscher haben festgestellt, daß es weit mehr fleischfressende Gewächse gibt als bisher bekannt
http://www.welt.de/die-welt/vermischtes/article6663350/Angriff-der-Killerpflanzen.html

Heimataerde – Brueder
Für dieses Musikstück wurde eine Textpassage aus der Shakespeare-Verfilmung „Henry V.“ von und mit Kenneth Branagh verwendet. Die berühmte Rede Heinrichs vor der Schlacht bei Azincourt (St. Crispin’s Day Speech) ist immer wieder erhebend.
http://www.youtube.com/watch?v=yBAlcgfzxCo

Les Malouines ou la porte vers l'Antarctique

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Bernhard TOMASCHITZ:

 

Les Malouines ou la porte vers l’Antarctique

 

La réactivation du conflit anglo-argentin pour les Malouines: l’enjeu, c’est le contrôle des matières premières!

 

 

Les relations entre l’Argentine et le Royaume-Uni entrent à nouveau en zone de turbulences. Le motif? Une fois de plus, les Iles Malouines dans l’Atlantique Sud, dont les Argentins réclament la rétrocession. L’entreprise britannique « Desire Petroleum » a entamé, fin février, début mars, des prospections et commencé des forages à 500 km au nord des Iles et devant les côtes argentines, afin de trouver du pétrole. Les réserves pétrolières dans cette région inhospitalière sont estimées, par les spécialistes, à 60 milliards de barils (de 159 litres chacun). A titre de comparaison, citons quelques chiffres : l’Arabie saoudite dispose des plus grandes réserves de pétrole au monde, avec 260 milliards de barils.

 

falklands_6_yomp.jpgFace à ces prospections, l’Argentine cherche à marquer des points sur le front diplomatique. Jorge Taiana, ministre argentin des affaires étrangères, a demandé, lors d’un entretien avec le secrétaire général de l’ONU, Ban Ki-Moon, l’intervention des Nations Unies. Il avance pour argument que les forages britanniques à proximité des Iles sont « un acte illégal qui offense le droit des gens », alors que « des résolutions explicites des Nations Unies exigent qu’aucune des deux parties ne pose d’actes unilatéraux qui pourraient aggraver la situation ». En 1982, le Royaume-Uni et l’Argentine s’étaient affrontés lors d’une guerre de dix semaines pour la maîtrise de l’archipel malouin. Un millier de soldats avaient laissé leur vie dans ce conflit, tous camps confondus.

 

Aujourd’hui, l’Argentine reçoit le soutien des pays d’Amérique latine gouvernés à gauche. Le Président du Venezuela, Hugo Chavez,  a exigé, lors d’une rencontre à Mexico, rassemblant les responsables de 32 Etats d’Amérique centrale et d’Amérique du Sud, que la Reine d’Angleterre, Elizabeth II, retourne à l’Argentine les Iles occupées depuis 1833 par les Britanniques. Le président brésilien, Lula da Silva, quant à lui, a demandé pour quelle raison d’ordre géographique, politique ou économique l’Angleterre maintient-elle sa présence dans les Malouines ; aussitôt sa question posée, il a donné la réponse : « Il se pourrait bien que la raison en est que l’Angleterre est membre permanent du Conseil de Sécurité de l’ONU ». Le Président bolivien Evo Morales est pour sa part convaincu « que toute l’Amérique latine et tous les Etats des Caraïbes se rangeront derrière l’Argentine pour défendre les Iles Malouines ».

 

En constatant le soutien général dont bénéficie l’Argentine dans le Nouveau Monde, les Etats-Unis cherchent à éviter de perdre encore du crédit et de l’influence en Amérique latine, à cause d’un nouveau conflit pour les Malouines. Pour cette raison, le Président Obama a pris une position neutre, au grand dam de la Grande-Bretagne. « Les Etats-Unis reconnaissent de facto l’administration britannique des Iles Malouines mais ne prennent pas position face aux revendications de souveraineté des parties concernées », a fait savoir Obama. En Grande-Bretagne, où l’on aime se revendiquer des « special relationships » (des relations spéciales) entre Londres et Washington, cette posture de neutralité prise par les Etats-Unis a provoqué une tempête d’indignation. « L’Amérique trahit la Grande-Bretagne quand l’heure est grave » titrait le quotidien Daily Telegraph. Le Royaume-Uni se dit prêt à défendre les Malouines seul s’il le faut. « Nous avons pris toutes les mesures nécessaires pour nous assurer que les habitants des Iles soient correctement protégés », a déclaré Gordon Brown. Pour le premier ministre britannique, le conflit avec l’Argentine arrive au bon moment. Car en mai, il y aura en Grande-Bretagne des élections pour la Chambre des Communes : les sondages estiment à l’unanimité que les travaillistes de Brown doivent escompter une défaite. Or une attitude de fermeté dans la défense des intérêts britanniques offrirait une occasion magnifique de détourner l’attention des électeurs des problèmes de politique intérieure et du triste état de l’économie anglaise. Ce ne serait sans doute pas un hasard si les forages entrepris par les Britanniques à proximité des Malouines se soient déroulés quelques semaines avant les élections pour la Chambre des Communes, élections qui laissent entrevoir un changement de direction au profit des conservateurs.

 

A cela s’ajoute que les Britanniques ont considérablement renforcé leur présence militaire dans les Iles au cours de ces dernières années. Dans la base militaire de Mount Pleasant, à 35 miles de la capitale de l’archipel malouin, Stanley, quelque deux mille soldats britanniques sont stationnés. Ils sont équipés de missiles sol-air et appuyés par un destroyer et des avions de combat de type Eurofighter. Fin décembre 2009, les forces armées britanniques ont exécuté des manœuvres devant les Iles Malouines, « simulant l’invasion de l’archipel par l’ennemi ».

 

Les Iles Malouines n’ont pas seulement une importance économique pour Londres mais aussi une grande importance stratégique. A la fin janvier 2010, l’analyste militaire russe Ilya Kramnik a rédigé une longue contribution pour l’agence de presse RIA Novosti, où l’on peut lire « que les Iles Malouines et les autres îles de l’Atlantique Sud contrôlées par les Britanniques constituent de facto la porte d’entrée vers l’Antarctique ; c’est cela qui explique l’attitude résolue de Londres de vouloir garder à tout prix la souveraineté britannique non seulement sur les Malouines mais aussi sur la Géorgie du Sud et sur les Iles Sandwich du Sud ; les Britanniques veulent en outre maintenir leur volonté de souveraineté sur les Shetland et les Orcades du Sud, selon les dispositions du Traité de l’Antarctique ». Depuis de longues années, Londres s’efforce, devant la Commission de l’ONU responsable des plateaux continentaux, d’obtenir pour la Grande-Bretagne, dans cette région maritime, la souveraineté sur environ un million de km2.

 

Le Traité de l’Antarctique, en vigueur depuis 1961 et résultant d’une convention internationale, stipule que l’Antarctique, continent inhabité, doit être réservé exclusivement à des activités pacifiques, surtout scientifiques. Juste avant l’entrée en vigueur de ce traité, les revendications territoriales des uns et des autres, en l’occurrence celles du Royaume-Uni qui revendiquaient plus d’un million de km2, ont été « gelées ». Mais sous la carapace de glace de l’Antarctique se trouvent des réserves énormes de matières premières, dont l’exploitation pourrait s’avérer fort intéressante, et pas uniquement pour les Britanniques.

 

Bernhard TOMASCHITZ.

(article tiré de l’hebdomadaire viennois « zur Zeit », n°9/2010 ; trad.. franc. : Robert Steuckers).

 

Il Grande Gioco in Asia Centrale

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Il Grande Gioco in Asia centrale

di Marco Luigi Cimminella

Fonte: eurasia [scheda fonte] 

Con la vittoria del filo-russo Janukovič alle elezioni presidenziali ucraine, svoltesi lo scorso mese, Mosca ha ritrovato un probabile alleato nello scontro energetico ingaggiato dalle grandi potenze in Asia centrale e meridionale. Il petrolio vicino-orientale non basta a soddisfare il fabbisogno di idrocarburi di Europa e Stati Uniti, che spinti alla ricerca di nuovi canali di approvvigionamento, hanno finito per posare gli occhi sulle riserve caspiche e caucasiche. L’estrazione e l’esportazione di queste risorse sono da tempo sottoposte al rigido monopolio del colosso russo Gazprom che, con una serie di condutture che attraversano il territorio ucraino, rifornisce i mercati occidentali.


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Nel tentativo di contrastare questo chiaro “leverage” della politica estera russa, Washington, di concerto con alcuni paesi europei, ha approntato alcuni importanti progetti. Pensiamo al gasdotto Nabucco (il tragitto nella foto) o all’oleodotto Baku-Tbilisi-Ceyhan, che permettono agli idrocarburi asiatici di viaggiare in direzione ovest scavalcando la Russia a sud. Allo stesso modo deve essere analizzato il proposito di costruire delle condutture che, attraversando le acque del Mar Nero e collegando Supsa, in Georgia, con Odessa, in Ucraina, permetta agli idrocarburi azerbaigiani, turkmeni e kazaki di raggiungere l’Europa, senza passare per il territorio di Mosca. Inizialmente il Cremlino aveva potuto ostacolare questo progetto grazie alla collaborazione del governo ucraino, con a capo il filo-russo Kučma. In seguito alla rivoluzione arancione che si era ultimata, nel 2004, con la nomina a presidente del liberale Juščenko, l’Ucraina si era mostrata favorevole ad aderire al disegno occidentale, manifestando chiare intenzioni di entrare a far parte della Nato e attirandosi così le dure critiche della classe dirigente russa. Nel febbraio scorso, Janukovič ha riportato, in seguito ad elezioni contestate dalla rivale Timošenko, un’importante vittoria che potrebbe cambiare gli assetti degli schieramenti impegnati in quella frenetica competizione, tesa all’accaparramento delle risorse energetiche, conosciuta come il Grande Gioco del XXI secolo.


Contesto storico del Grande Gioco

L’Asia centrale e meridionale ha sempre rivestito un’importanza fondamentale nello scacchiere internazionale. Considerandola come il cuore della “World Island”, cioè della massa continentale che comprende Eurasia e Africa, H. Mackinder, padre della geopolitica moderna, aveva scritto: “Who rules East Europe commands the Heartland; who rules the Heartland commands the World-Island; who rules the World-Island controls the world”. In queste tre semplici frasi, il noto studioso raccoglieva il succo della sua teoria dell’Hertland, destinata ad avere grande successo nei secoli successivi e ad essere sottoposta anche a diverse rielaborazioni1. La teoria di Mackinder ha trovato riscontro pratico nel corso dell’Ottocento in relazione al cosiddetto “Grande Gioco”, il lungo ed estenuante conflitto che vide impegnati lo Zar e Sua Maestà nel tentativo continuo di imporre il proprio dominio in Asia centrale e meridionale.

La regione che Mackinder definisce “Terra cuore”, si identificava, nel corso della seconda metà dell’800, con il territorio sottoposto al controllo russo. Inaccessibile dal mare, ricca di petrolio e gas naturale, quest’area faceva dell’impero zarista lo stato perno dello scacchiere internazionale. Con una rottura dell’equilibrio di potenza, originatosi con il congresso di Vienna del 1814 in seguito alle sconfitte napoleoniche, lo Zar avrebbe potuto condurre l’esercito imperiale verso la conquista dei territori periferici dell’Eurasia. Successivamente, sfruttando le ingenti risorse energetiche della regione, San Pietroburgo avrebbe potuto dotarsi di una immensa flotta, capace di concorrere con quella britannica per il dominio dei mari. Proprio lo sbocco al mare ha costituito una delle priorità dell’agenda zarista nel corso dell’Ottocento. Due in particolare erano gli obbiettivi si San Pietroburgo: il Mediterraneo e l’Oceano Indiano. L’interesse per il primo fu parzialmente spento in seguito alla sconfitta nella Guerra di Crimea2 (1853-1856), che comportò un cambiamento di rotta nella politica estera zarista. La Russia puntava ora ad estendere la propria influenza nei khanati in Asia centrale, e da qui, procedendo verso sud, avrebbe potuto garantirsi uno sbocco sull’Oceano Indiano.

Naturalmente, le mire espansionistiche di San Pietroburgo andarono presto incontro alla dura opposizione britannica. Difatti, in Asia meridionale vi era l’India, considerata dalla regina Vittoria la gemma del suo impero coloniale. Il continuo avanzamento delle truppe zariste nei territori centro-asiatici costituiva una grande minaccia che bisognava debellare. In particolare, il Foreign Office aveva individuato nell’Afghanistan un’ottima base strategica che le truppe russe avrebbero potuto utilizzare per infliggere duri attacchi alla prediletta fra le colonie della regina. La necessità di contenere l’espansionismo zarista, facendo dell’Afghanistan uno stato cuscinetto contro le pretese egemoniche di San Pietroburgo, diede inizio ad un esasperante conflitto che si ripercuoterà nel corso dei secoli, giungendo prorompente sullo scenario internazionale attuale.


L’importanza strategica dell’Asia centrale oggi

Questa regione ha assunto un’importanza strategica considerevole nel contesto internazionale odierno. Le motivazioni sono evidenti. In primo luogo, significativa è la questione energetica. Secondo il parere di geologi ed esperti, l’intera area trabocca di idrocarburi. Vero è che tali riserve non sono quantitativamente comparabili a quelle del Golfo Persico. Ciononostante, sono in grado di saziare, almeno per il momento, gli ingordi appetiti energetici delle grandi potenze, comportandosi come un ottimo succedaneo agli idrocarburi vicino-orientali, la cui fruizione è sempre soggetta a continue oscillazioni dovute al fondamentalismo islamico e al terrorismo internazionale. I giacimenti più ricchi li rinveniamo nel bacino caspico, nonché in Azerbaijan, Turkmenistan, Kazakistan, Uzbekistan e Iran. In Azerbaijan, l’estrazione di petrolio è aumentata da 180.000 barili al giorno (barrels per day bbl/d) del 1997 a 875.000 bbl/d nel 2008. Apprezzabili anche le riserve di gas naturale, la cui produzione ha raggiunto, nel 2008 572 btc (billion cubic feet). Un altro importante produttore è il Turkmenistan, che nel 2008 ha raggiunto i 189.400 bbl/d di oro nero e 70.5 miliardi di metri cubi di oro blu. Considerevoli anche le riserve uzbeke, che nel 2008 ammontavano a 67.6 miliardi di metri cubi di gas e 83.820 bbl/d di petrolio. Le coste caspiche kazake garantiscono un ottimo approvvigionamento di petrolio, con una produzione di 1,45 milioni di barili al giorno nel 2007. Infine l’Iran, che solo nel 2008 ha esportato 2,4 milioni di barili al giorno, sia verso l’Asia che verso i paesi europei facenti parte dell’OECD (Organization for Economic Cooperation and Development)3.

In secondo luogo, vi sono anche consistenti motivazioni di carattere commerciale che non bisogna sottovalutare. Fin dai tempi antichi, infatti, questa regione aveva assunto il ruolo di crocevia di itinerari terrestri, marittimi, fluviali che, mettendo in comunicazione la Cina con il Mediterraneo, consentiva alle carovane di mercanti di vendere i pregiati ed esotici prodotti orientali sui mercati occidentali. Questo corridoio commerciale fu chiamato, dal geologo e geografo tedesco Ferdinand von Richthofen “Seidenstrabe” (via della seta). La classe dirigente zarista prima, poi quella sovietica e infine quella russa, ha sempre considerato l’Asia centrale come una regione strategica per Mosca. In particolare, nel corso del secondo conflitto mondiale e poi successivamente durante la guerra fredda, questo territorio fungeva da bacino energetico per la potente macchina bellica comunista. In seguito al collasso dell’Unione Sovietica nel 1991, come scrive Zbigniew Brzezinski, si generò un buco nero, che successivamente finì per ridimensionare la presenza russa nel territorio. L’erosione del controllo moscovita fu accelerata dall’indipendenza politica dell’Ucraina nel 1991, dai continui tentativi della Turchia di accrescere il proprio peso in Georgia e Armenia, dalla rinascita del fervore nazionalista e musulmano nelle ex-repubbliche centro-asiatiche, continuamente impegnate nel porre fine ad una soffocante dipendenza economica, dal sapore marcatamente sovietico, nei confronti di Mosca.

Di conseguenza, fin dai primi anni novanta, l’esigenza di diversificare i propri partner politici ed economici ha assunto una significativa importanza per questi paesi, che, nel conseguimento di quest’obbiettivo, hanno incontrato non poche difficoltà. L’adozione di un approccio liberale classico, esplicatosi in questo caso in una maggiore collaborazione economica fra i paesi centro-asiatici, preludio ad un’integrazione di carattere politico, ha mostrato serie difficoltà nella sua applicazione pratica. In primo luogo, l’implementazione iniziale di politiche liberali da parte delle ex-repubbliche sovietiche ebbe dei seri risvolti negativi. Il Kirghizistan entrò a far parte, nel 1998, del WTO, mentre Uzbekistan, Tagikistan, Kazakistan, Afghanistan, Iran ne divennero osservatori. Ben presto questi paesi si accorsero che le loro deboli economie, scarsamente diversificate, non potevano reggere contro l’inondazione delle esportazioni straniere, in particolare quelle cinesi, più convenienti e vantaggiose. Per salvaguardare l’economia nazionale era quindi necessario adottare, almeno inizialmente, politiche protezioniste, e solo dopo aver sviluppato solide basi, concorrere con le altre potenze su un piano mondiale. In secondo luogo, allo scopo di incentivare una maggiore integrazione economica e finanziaria, i fragili paesi centro-asiatici avevano bisogno degli investimenti stranieri per promuovere la costruzione di infrastrutture funzionali alla realizzazione di profittevoli scambi commerciali in Eurasia. Da qui la frenetica competizione delle grandi potenze, in una lotta diplomatica senza esclusione di colpi, tesa ad una spartizione della torta asiatica che le favorisca.

Come scrive Joseph Nye4 siamo ormai catapultati in una realtà sempre più interdipendente, frutto di una globalizzazione a diversi livelli, economico, politico, socioculturale, religioso. Il ripristino di corridoi multimodali, funzionali al commercio e al trasporto di idrocarburi, si presenta inevitabile, garantendo la possibilità, agli stati della regione, di diversificare i propri partner energetici, finanziari, commerciali, politici, militari. Ed è così che la Cina, gli Stati Uniti, l’Unione Europea prendono parte ad un interessante affare che per più di cinquant’anni è stato dominio esclusivo di Mosca. Un nuovo “Grande Gioco” è scoppiato quindi in Asia centrale e meridionale. Nuovi paesi recitano, sul proscenio internazionale, uno scontro, di kiplingiana memoria, che deciderà i destini dell’equilibrio mondiale. Washington, Pechino, Mosca, Bruxelles, nel perseguire ciascuno i propri obiettivi nella regione, non potranno assolutamente sottovalutare le esigenze delle piccole e medie potenze dell’area che, lungi dall’essere semplici spettatori passivi, rivendicano un ruolo da protagoniste attive nel decidere le sorti del futuro assetto geopolitico internazionale.


* Marco Luigi Cimminella, dottore in Relazioni internazionali e diplomatiche (Università l’Orientale di Napoli), collabora con la redazione di “Eurasia”


Note

1 – Degno di nota fu la rivisitazione della teoria di Mackinder ad opera di Spykman, che attribuì maggiore importanza al concetto di Rimland, intesa come la fascia costiera euroasiatica dove si sarebbe inscenato lo scontro fra le potenze di terra e quelle di mare per il dominio del mondo.

2 – San Pietroburgo poteva infatti garantirsi uno sbocco nel Mediterraneo in due diversi modi. Il primo consisteva nel passare attraverso la regione dei Balcani, sottoposta al controllo turco. La seconda, controllare lo stretto dei Dardanelli e del Bosforo, entrambi sotto la reggenza ottomana. La strategia russa fu quella di attendere che l’esasperazione dei popoli salvi, insofferenti alla dominazione del sultano, prorompesse in una guerra contro la dominazione turca. Le forze militari russe avrebbero allora combattuto a fianco della popolazione locale, di cui lo zar si proclamava protettore, per stroncare le truppe ottomane e imporre il proprio controllo sulla regione. L’ostilità e l’opposizione turca nei confronti delle mire zariste fu rafforzata dall’impegno bellico di Regno Unito, Piemonte e Francia, che segnò, nella guerra di Crimea, la fine militare delle pretese pseudo religiose ed espansionistiche di Nicola I.

3 – Fonte dati: http://www.eia.doe.gov/

4 – http://www.theglobalist.com/StoryId.aspx?StoryId=2392

Dossier d'ARCHEOLOGIE: les Indo-Européens

Dossier d'Archéologie: les Indo-Européens

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ARTICLES

Nos ancêtres les Indo-Européens ? : La question des Indo-Européens est très simple à formuler. Elle n’a pourtant jamais reçu de réponse globale et définitive, et ce numéro des Dossiers d’Archéologie a pour ambition d’expliquer aux lecteurs l’état actuel des recherches, au croisement de la linguistique, de l’archéologie, de l’histoire des religions et de la biologie.


Deux siècles à la recherche des Indo-Européens : L’idée de l’origine des langues et du langage a hanté de tous temps les sociétés humaines, et leurs mythologies en témoignent. Chacun connaît l’histoire de la tour de Babel, destinée à expliquer la diversité des langues humaines. Avec le temps, les linguistes ont pu regrouper en grandes familles les 6.000 langues humaines connues. Mais c’est à la famille dite indo-européenne que les savants européens ont évidemment porté le plus d’attention, tâchant de retracer son histoire et son origine.


La langue des Indo-Européens ? : Si l’existence d’une civilisation « indo-européenne » demeure un sujet de discussions et de discordes, la langue, qui la justifie, paraît incontestable. Bien qu’il n’en existe aucun témoignage scriptural, ce proto-indo-européen (PIE), reconstruit à partir des correspondances entre les langues de la famille indo-européenne, a dû forcément exister. Reste à savoir de quelle manière.


George Dumézil, un archéologue de l'imaginaire indo-européen : L’archéologie à laquelle Georges Dumézil a consacré son œuvre ne ressemble pas à celles que l’on a coutume d’appeler de ce nom. En effet, son domaine est celui de l’imaginaire préhistorique des Indo-Européens qu’il a tenté d’atteindre par la comparaison des mythes et des épopées que leurs lointains successeurs, Indiens, Celtes, Germains, Romains, Grecs, etc., ont composés plusieurs siècles voire plusieurs millénaires plus tard.


L'hypothèse de steppes : L’hypothèse des steppes constitue la solution la plus généralement admise au problème du foyer original des Indo-Européens. Cette théorie propose de faire remonter l’origine des Indo-Européens aux steppes et steppes boisées d’Ukraine et de Russie méridionale. Cette hypothèse semble être la plus en accord, à la fois avec les conditions linguistiques requises et avec les données archéologiques, même si elle est loin de répondre à toutes les questions.


La diffusion préhistorique des langues indo-européennes : Comprendre la diffusion d’une langue implique dans un premier temps de comprendre les dynamiques sociales et économiques des sociétés qui la véhiculent. Une langue représente en effet la production secondaire d’une organisation sociale, et ce sont des changements sociaux tels que des migrations, des conquêtes, des voyages ou encore des échanges commerciaux qui sont susceptibles d’entraîner un changement linguistique.

Le problème indo-européen et l'hypothèse anatolienne : La question indo-européenne a souvent été mal interprétée et a engendré un certain nombre de théories fantaisistes sur la « religion indo-européenne », ou la « société indo-européenne ». En réalité, le terme « indo-européen » est purement linguistique, et fait référence à un ensemble bien défini de langues. Cet article propose une solution alternative au mythe démodé des guerriers à cheval nomades et défend la théorie selon laquelle les premières langues indo-européennes étaient originaires d’Anatolie (actuelle Turquie), et se diffusèrent en Europe au moment de la première expansion agricole.

Les migrations aryennes en Inde : Au cours du IIe millénaire av. J.-C., des peuplades aryennes auraient migré depuis l’Asie centrale vers les plaines de l’Indus puis du Gange, répandant en Inde leur langue sanscrite, le Véda et leurs structures sociales. Pourtant, dans le contexte indien, après deux siècles de recherches linguistiques et archéologiques auxquelles se joignent aujourd’hui l’anthropologie et la génétique, aucune preuve n’est venue étayer cette hypothèse, qui semble même reculer sans cesse.

Indo-Européens et anthropologie biologique : Si de par le passé l’étude des squelettes a parfois été mise à contribution pour confirmer certaines théories, c’est la génétique des populations contemporaines qui a orienté les hypothèses plus récentes dont celle de C. Renfrew. Les études menées sur des populations actuelles d’Asie centrale suggèrent que la distribution d’un marqueur des lignées paternelles évoque une expansion depuis l’Europe centrale. Les travaux en ADN ancien confirment ce fait dans des populations de l’âge du Bronze de la culture d’Andronovo considérée par les archéologues comme indo-européenne.

De l'arbre généalogique à la saisie du contact des langues : Largement utilisée en linguistique dès le XIXe siècle avec le développement de la grammaire comparée et des études indo-européennes, l’image intuitive de l’arbre généalogique trouve sa force dans sa simplicité. Toutefois elle ne saurait à elle seule servir de modèle pour rendre compte de l’évolution des langues car elle ne retient pas les effets induits par le contact au sein des populations qui les pratiquent.

Les Indo-Européens, vers la solution ? : La solution de l’« énigme indo-européenne » proviendra un jour de l’interaction complexe entre les résultats convergents de la linguistique, de la génétique, de l’histoire des religions et de l’archéologie, entre autres. Il n’existe pas encore de consensus dans l’ensemble des champs concernés, et même au sein de chaque champ. Mais il est probable qu’un modèle satisfaisant sera beaucoup plus complexe que ce qui a été proposé jusqu’à présent.

Lestravaux de Michel Chodkiewicz: Ibn Arabî, le Livre et la Loi

Archives de SYNERGIES EUROPEENNES - 1992

Les travaux de Michel Chodkiewicz:

Ibn Arabî, le Livre et la Loi

 

par Serge HERREMANS

 

shaykh-ibn-arabi.jpgDescendant d'une famille aristocratique polonaise établie en France depuis quelques générations, le Professeur Michel Chodkiewicz, directeur d'études à l'Ecole des hautes études en sciences sociales, est le grand spécialiste de l'œuvre éternelle d'Ibn Arabî et de ses disciples; converti à l'Islam, il a dirigé les éditions du Seuil, où il a fait publier une quantité d'ouvrages qui permettent à nos contemporains de redécouvrir les fondements des traditions spirituelles de l'humanité. Son souci majeur est de souligner non pas le fanatisme simpliste qui transparaît dans bon nombre de manifestations fondamentalistes musulmanes  —surtout celles qui sont téléguidées depuis l'Arabie Saoudite—  mais d'ouvrir les esprits aux dimensions de générosité et de miséricorde, présentes dans l'Islam et qu'illustre aujourd'hui le Grand Mufti de Syrie, le Cheik Ahmad Kaftaru.

 

La démarche du Professeur Chodkiewicz, comme celle du Grand Mufti de Syrie, consiste à définir l'Islam essentiellement comme une religion fondée sur l'intellection de la vérité et sur la sacralité de l'existence. Lorsque l'Islam parle de «sacralité de l'existence», explique le Prof. Michel Chodkiewicz, il signifie que toutes nos actions doivent être sacralisées, perçues comme reflet de la transcendance, parce qu'elles sont voulues par Dieu. Le jeûne du ramadan, consiste, pour le croyant, à prendre conscience de sa pauvreté existentielle, de sa dépendance, de l'impossibilité de (sur)vivre sans les dons généreux d'Allah. Pauvreté et dépendance, que souligne le jeûne, doivent être sacralisées par une méditation des paroles de Dieu, consignées dans le Coran. Le jeûne montre à l'homme son indigence ontologique, ce qui le force, explique Michel Chodkiewicz, à s'interroger sur les besoins illusoires, sur les actes inutiles et sur les désirs puérils, auxquels tout un chacun est prêt à céder lorsqu'il se met en tête de vouloir construire un pseudo-paradis terrestre, taillé à sa mode.

 

La prise de conscience de l'indigence ontologique conduit à une éthique qui impose de «préférer son prochain à soi-même et Dieu à tout»; tel est le véritable sens du jeûne, qui implique le service à autrui, en dehors de toutes formes de mépris, d'indifférence ou de fausse supériorité. Se référant à Ibn Arabî, qui a écrit, «Dieu n'a pas créé les êtres à partir de rien (...) afin que tu les méprises», Michel Chodkiewicz définit le ramadan comme un exercice collectif de renoncement aux passions personnelles et individuelles; renoncement qui est le fondement de toute religion véritable: car il permet de relier les individus par l'essentiel, et empêche du même coup que ne s'instaure la loi de la jungle par le déchaînement des passions individuelles et des volontés acquisitives.

 

Pour Michel Chodkiewicz, l'élévation spirituelle a connu son maximum d'intensité chez le philosophe musulman d'Andalousie Muhy ad-Din ibn ’Arabî. Sa pensée repose sur une perception de la présence universelle de Dieu. «C'est Lui que nous voyons dans tout ce que nous voyons; c'est Lui que nous sentons dans tout ce que nous sentons. Dans toute vision, c'est Lui qui apparaît. Les langues ne parlent que de Lui, les cœurs ne palpitent que par Lui». Pour ibn ’Arabî, «il n'y a pas de mouvement dans l'univers qui ne soit pas mouvement d'amour». Parole qui rappelle Dante qui, dans la Divine Comédie, chante «l'amour qui meut le soleil et les autres étoiles». Ibn ’Arabî influence les soufis musulmans, qui répercutent sa pensée sur la spiritualité hébraïque. Ainsi, par exemple, le neveu du célèbre Maïmonide reprend intégralement des passages de Ghazali et Suhrawardi; le cabbaliste Abraham Abu l-Afiya adopte et adapte certaines thèses d'ibn ’Arabî et, en sens inverse, Ibn Hud, prince arabe du XIIIième siècle, commente à Damas l'œuvre de Maïmonide pour ses disciples musulmans et juifs. Côté chrétien, Sainte Thérèse d'Avila et Saint Jean de la Croix s'inspirent de ce filon mystique musulman.

 

Cette symbiose a disparu. Rien ne permet d'espérer son retour, vu les déchirements d'aujourd'hui. Les juifs quittent l'Espagne en 1492, n'alimentent plus leur propre ésotérisme aux sources arabo-andalouses. Idem pour les chrétiens. Il faudra attendre 1795, quand s'ouvre à Paris l'Institut des langues orientales, pour que l'on recommence à s'intéresser à la pensée islamique en Occident. Mais dans des conditions très différentes de celles qui règnaient au Moyen Age. Les traducteurs d'Avicenne et d'Averroes vénéraient ceux-ci comme leurs maîtres. Les orientalistes de la première génération examinaient et disséquaient les écrits arabes avec l'arrogance du colonisateur. Le mysticisme soufi, quand il est abordé par ces positivistes, déchoit en un exotisme «amusant»: on dresse l'inventaire de ses manifestations. La dimension authentiquement mystique de l'Islam en général, et du soufisme en particulier, ne revient pas pour corriger la superficialité matérialiste et mécaniciste de l'Europe des Lumières. Pire: l'école des orientalistes positivistes baptise «renaissance islamique», nahda  en arabe, ce qui en réalité est le commencement du déclin de la civilisation arabo-islamique; le soufisme est relégué à l'arrière-plan, considéré comme une relique du passé, au profit d'une pauvre théologie pseudo-fondamentaliste et en réalité moderniste et puritaine, aussi aride que le positivisme occidental. Dans le cadre de cette pseudo-renaissance, apparaît également le wahhabisme saoudien, avec sa théologie rigide et sa spiritualité appauvrie à l'extrême.

 

ibnarabi.jpgCette théologie schématique, dépourvue de toute vigueur soufie, de tout élan mystique, enlève toute potentialité de séduction à l'Islam. Les non-musulmans finissent par identifier l'Islam à quelques personnages sinistres qui le stérilisent. Pour sortir de cette impasse, Michel Chodkiewicz propose de réécrire complètement l'histoire de la philosophie islamique, de reprendre et de continuer les travaux de Henri Corbin. Pour le Professeur Chodkiewicz, la renaissance islamique authentique implique un retour et un recours aux écrits d'ibn ’Arabî, véritable maître de connaissance et non pas simple «philosophe». La plupart des travaux de Michel Chodkiewicz ont d'ailleurs été consacrés à ibn ’Arabî et à ses disciples (cf. Emir Abd el-Kader: Ecrits spirituels, présentation, traduction et notes, Seuil, 1982; Awhad al-Dîn Balyânî: Epître sur l'Unicité absolue, présentation, traduction et notes, Les Deux Océans, 1982; Le Sceau des Saints, prophétie et sainteté dans la doctrine d'Ibn Arabî, Gallimard, 1986; Les Illuminations de La Mecque, textes choisis des Futûhât Makkiya, Sindbad, 1988).

 

Pour Michel Chodkiewicz, l'Europe et l'Islam aurait intérêt à réouvrir le dialogue philosophique et spirituel interrompu depuis le Moyen Age. Car, à cette époque, en dépit des croisades, Chrétiens et Musulmans recherchaient en commun la sagesse, bien que sous des modalités différentes. Les sages savaient que la vérité divine et cosmique s'exprimait sous des formes religieuses différentes et que ces différences n'étaient pas indices de contrastes, mais reflets de la richesse du monde créé, émanations de la profusion du divin. Moralité: nous devons accepter l'autre et son point de vue, sans vouloir à tout prix réaliser un œcuménisme qui unifierait les formes tout en les stérilisant.

 

La figure d'Ibn ’Arabî est au centre également du dernier ouvrage de Michel Chodkiewicz:

 

Michel Chodkiewicz, Un océan sans rivage. Ibn Arabî, le Livre et la Loi, Seuil, Paris, 1992, 218 p., 120 FF, ISBN 2-02-013217-6.

 

Dans les pages de cet ouvrage, notre auteur entreprend un voyage initiatique dans la Parole divine elle-même, c'est-à-dire dans le Coran, cet «océan sans rivage». 

 

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lundi, 15 mars 2010

L'Armenia tra Erdogan e Obama

armeniasvg_2.pngL'Armenia tra Erdogan e Obama

di Michele Paris

Fonte: Altrenotizie [scheda fonte]

La recente condanna, da parte di una commissione parlamentare del Congresso americano, del genocidio di un milione e mezzo di armeni in Turchia nel 1915, è giunta in un momento molto delicato nei rapporti tra Washington e Ankara. Oltre a mettere a rischio la collaborazione turca su cui contano gli USA in più di una questione in Medio Oriente e in Asia sud-occidentale, il voto della scorsa settimana minaccia contemporaneamente di far saltare il complicato processo di distensione in corso tra Turchia e Armenia.

Ad agitare le acque è stato il voto (23 favorevoli e 22 contrari) con cui la Commissione Esteri della Camera dei Rappresentanti americana giovedì scorso ha bollato come “genocidio” il massacro della popolazione armena durante la Prima Guerra Mondiale. Secondo la Turchia, quei fatti non rappresenterebbero invece uno sterminio di massa deliberatamente progettato, ma andrebbero piuttosto inseriti nel caos del conflitto mondiale e del crollo in atto dell’Impero Ottomano, assediato da più parti, inclusa una ribellione interna armena appoggiata dalla Russia.

La risoluzione, promossa dal deputato democratico della California Howard Berman, dovrebbe così invitare il presidente degli Stati Uniti a impiegare la parola “genocidio” per descrivere la strage del 1915 nel corso del consueto discorso annuale che si terrà il prossimo mese di aprile. Per ottenere la definitiva approvazione, tuttavia, l’iniziativa della Commissione Esteri dovrà prima assicurarsi il voto dell’aula, ipotesi piuttosto improbabile alla luce delle reazioni che essa ha immediatamente suscitato.

Per impedire il passaggio della risoluzione sul genocidio armeno, il governo turco del Primo Ministro Recep Tayyip Erdogan aveva inviato a Washington alcuni parlamentari del partito di maggioranza ed era ricorso anche ai servizi di una nota compagnia americana di pubbliche relazioni per influenzare i politici coinvolti nel processo di voto. Nonostante gli sforzi é arrivata però l’approvazione e Ankara ha proceduto con il richiamo del proprio ambasciatore negli USA, promettendo ritorsioni più gravi in caso di un prossimo voto dell’intera Camera dei Rappresentanti sulla questione.

“Siamo seriamente preoccupati che il voto di condanna possa danneggiare le relazioni tra Stati Uniti e Turchia e impedire gli sforzi di normalizzazione nei rapporti tra Turchia e Armenia”, ha riassunto una nota dell’ambasciata turca a Washington. Le stesse preoccupazioni devono aver turbato anche il presidente Obama e il segretario di Stato, Hillary Clinton, entrambi impegnati nel vano tentativo di impedire il voto in commissione - sia pure tardivamente e nonostante il loro parere favorevole alla definizione di “genocidio” espresso in campagna elettorale nel 2008.

Con l’aumentare della sua influenza su scala regionale, d’altra parte, gli USA fanno affidamento sulla Turchia in relazione a molteplici questioni, a cominciare dalla pace tra palestinesi e israeliani, per passare al nucleare iraniano, al ripristino di normali rapporti con la Siria e alla stabilizzazione dell’Afghanistan. In quest’ultimo paese, inoltre, Ankara ha da poco incrementato il proprio contingente militare, mentre consente agli americani l’accesso ad alcune basi militari sul proprio territorio per facilitare i collegamenti logistici con l’Iraq occupato.

La potente comunità armena che vive negli Stati Uniti aveva già ottenuto qualche risultato parziale in passato sulla strada verso il riconoscimento del genocidio del 1915. Nel 1975 e nel 1984 la Camera dei Rappresentanti aveva approvato risoluzioni simili, le quali non avevano però mai raggiunto il Senato. Più recentemente, nel 2007, la Commissione Esteri della Camera si era espressa ancora una volta a favore, ma la fortissima opposizione proveniente dalla Casa Bianca occupata da George W. Bush aveva impedito il voto definitivo dell’aula.

A far sentire il proprio peso in quell’occasione era stata un’altra lobby molto influente dall’altra parte dell’oceano, quella israeliana. Un’influenza pro-turca sul Congresso che era iniziata sul finire degli anni Ottanta in concomitanza con la costruzione dell’alleanza strategica tra Israele e Ankara. Il deteriorarsi dei rapporti tra i due paesi negli ultimi tempi – a partire almeno dall’operazione “Piombo Fuso” lanciata a Gaza da Israele a fine 2008 e duramente condannata dal governo di Erdogan – può in parte spiegare il nuovo voto sulla condanna del genocidio armeno. Tanto più che lo stesso deputato Berman, e altri membri della Commissione Esteri che hanno appoggiato la mozione, risultano tradizionalmente vicini alle lobby israeliane in America.

Come a Tel Aviv, in molti ambienti filo-israeliani negli USA si guarda infatti con crescente preoccupazione al sempre maggiore coinvolgimento della Turchia nelle vicende del mondo arabo. Allo stesso modo, i settori neo-conservatori vicini a Israele ritengono che il Partito per la Giustizia e lo Sviluppo (AKP) che governa ad Ankara stia pericolosamente indebolendo il tradizionale secolarismo delle istituzioni turche, facendo scivolare il paese verso una deriva islamista.

D’altro canto, altre associazioni filo-israeliane di destra, come l’Istituto Ebraico per la Sicurezza Nazionale (JINSA), e giornali conservatori, come il Wall Street Journal, si sono invece opposti alla condanna del genocidio armeno, precisamente per timore di un possibile ulteriore inasprimento dei rapporti con la Turchia, un alleato troppo importante per Israele e Stati Uniti. Una divergenza di opinioni che potrebbe aver diviso il fronte pro-israeliano e dato il via libera alla condanna del genocidio.

L’altro e più immediato effetto del voto in America sulla questione armena, come già anticipato, potrebbe riguardare il congelamento del processo di riavvicinamento tra Yerevan e Ankara. Da qualche tempo, il governo di Erdogan aveva mostrato una certa disponibilità nei confronti del vicino orientale per rivedere i sanguinosi eventi del 1915. Il nuovo atteggiamento aveva portato lo scorso settembre al ristabilimento delle relazioni diplomatiche tra Turchia e Armenia e alla riapertura dei rispettivi confini, chiusi fin dal 1993.

Con la mediazione della Svizzera, e con il sostegno di Washington, era stato anche raggiunto un accordo per un trattato tra i due paesi, vincolato in ogni caso alla risoluzione della disputa territoriale tra Armenia e Azerbaijian - paese alleato della Turchia - per l’enclave territoriale del Nagorno-Karabakh. Il voto alla Commissione Esteri della Camera americana ha però spinto Ankara a bloccare la ratifica dell’accordo, assestando potenzialmente un colpo letale alle prospettive del già difficile processo di riconciliazione turco-armeno.


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Faut-il se garder d'une "russophilie" excessive?

omon.jpgFAUT-IL SE GARDER D’UNE « RUSSOPHILIE » EXCESSIVE ?

 

Entretien avec Pascal LASSALLE

 

Pascal LASSALLE est historien, professeur et conférencier. Il a fait ses classes militantes au sein des réseaux de la « Nouvelle Culture » (G.R.E.C.E, Synergies Européennes, Terre et Peuple), et reste plus que jamais attaché à la promotion d’une Europe-puissance souchée sur ses patries charnelles.

Il s’intéresse depuis quelques années aux problématiques est-européennes, en particulier celles qui concernent la Russie et son « étranger proche ».

Il est déjà intervenu à plusieurs reprises dans le cadre du G.R.E.C.E , Terre et Peuple (Tables rondes de 1999 et 2006, bannières locales), du cercle Sainte Geneviève ainsi que sur les ondes de Radio Courtoisie et Radio Bandiera Nera.

Il a dirigé les adaptations françaises des ouvrages de Gabriele Adinolfi, Noi Terza Posizione  (Nos belles années de plomb, l’Aencre, 2004) et Tortuga, l’isola che (non) c’è. (Pensées corsaires, abécédaire de lutte et de victoire, Editions du Lore, 2008) et collabore occasionnellement au mensuel le Choc du mois, à l’agence d’informations Novopress et au site d’analyses et de débats métapolitiques Europe maxima.

 

 

 

ID Mag: L’opposition grandissante de la Russie rénovée à la toute puissance américaine, associée à la personnalité « volontariste et patriote » de Vladimir Poutine, engendre un très vif engouement des milieux nationalistes et identitaires pour la patrie des Tsars et son actuel gouvernement. De votre côté, tout en soulignant les forces et les réalisations de la Russie nouvelle, vous mettez en garde contre un soutien systématique et sans nuance à toutes les prises de positions russes et une vision étroitement et uniquement  « géopolitique » de nos relations avec « l’empire de l’Est ». Pouvez-vous préciser et expliciter votre position ?

 

 

PL : Je suis depuis plus d’une vingtaine d’années partisan pour des raisons géopolitiques et civilisationnelles d’une synergie continentale euro-russe qu’un Guillaume Faye a pu qualifier d’ eurosibérienne . Depuis la prise de pouvoir par Vladimir Vladimirovitch Poutine, j’observe l’œuvre de redressement et de restauration en cours avec beaucoup d’intérêt, dans un premier temps assez captivé par la figure de cet Octave/Auguste de l’Est ou plutôt ce nouveau Mikhaïl Romanov qui a mis fin aux « temps des troubles » eltsiniens.

Les événements ukrainiens de 2004 et une découverte approfondie de ce pays « fantôme de l’Europe » pour reprendre l’expression de l’historien Benoist-Méchin ont agi sur moi comme un puissant révélateur de tendances et de phénomènes à l’oeuvre en Russie qui peuvent aisément nous échapper, vu que la patrie de Pouchkine a constitué de tous temps une réalité qui ne se laisse pas facilement appréhender.

Depuis, je m’efforce d’être un observateur attentif, dépassionné et lucide des évolutions en cours dans la Fédération russe et son « étranger proche », car lire régulièrement la presse locale ou regarder quotidiennement le journal télévisé de RTR Planeta pour ne citer que ces exemples vous permet d’entrevoir d’autres réalités pas toujours perceptibles au premier abord.

Je le fais en ayant toujours à l’esprit l’impératif civilisationnel d’une fédération impériale grande-européenne respectueuse de ses patries constitutives, sans négliger les intérêts géopolitiques et stratégiques d’une AlterEurope à venir.

À partir de là, je crois que tout patriote identitaire européen conséquent devrait se faire plus critique sur plusieurs aspects de la politique russe mis en œuvre depuis quelques années.

Un tel engouement confinant parfois à une certaine « russolâtrie » ne m’étonne pas vraiment quand il émane de cénacles nationalistes et souverainistes communiant encore et toujours dans le culte d’un état-nation jacobin, l’illusion d’un renouveau républicain, la promotion d’une Europe des nations, voire une europhobie et un antifédéralisme primaires (alors qu’au contraire, le machin de Bruxelles est beaucoup plus jacobin qu’autre chose).

Pour autant, une adhésion inconditionnelle au régime de Poutine chez des représentants de la mouvance identitaire ou néo-droitiste, voire nationaliste-révolutionnaire, me surprend davantage.

Encore que, je suis bien conscient des motifs avancés pour cela.

On peut évoquer la nécessité de faire contrepoids à l’hégémonie américaine et de contribuer à l’émergence d’un monde multipolaire, des phénomènes de compensation psychologiques (« c’est un Poutine qu’il nous faudrait ») ou l’espoir d’un « salut » venu de l’Est (« les divisions russes vont nous sortir de notre décadence et assainir nos banlieues »).

On soulignera également l’impératif d’une construction continentale de Brest à Vladivostok et l’affirmation que la Russie est pleinement européenne d’un point de vue identitaire, avec le constat que certaines réalités déplaisantes ne peuvent être que des épiphénomènes pudiquement évacués, voire occultés au nom d’une realpolitik bien pensée et de la crainte de faire le jeu du camp atlantiste.

Un désenchantement et une déception à l’égard des pays frères d’Europe centrale et orientale est palpable chez beaucoup, indéniablement à la hauteur des espoirs soulevés en 1989-91.

L’auteur de ces lignes fut l’un d’entre eux, mais il s’efforce de faire la part des choses,  ayant pris acte du fait que la plupart de ces pays ex-communistes ont embrassé la cause de l’atlantisme : ce positionnement plus que regrettable ne les transforme pas pour autant en états parias[1]

On trouvera aussi la fascination de certains pour les constructions intellectuelles néo-eurasistes et le statut envié d’un Alexandre Douguine qui s’est propulsé d’une marginalité nationale-bolchevique jusqu’aux périphéries du pouvoir poutinien.

Le numéro 131 d’avril-juin 2009 de la revue Eléments intitulé « Demain les Russes ! », illustre bien ces positionnements et se révèle d’ailleurs bien décevant dans son conformisme convenu, son absence de point de vue propre (pas d’articles étoffés, seulement un éditorial et trois longs entretiens) et de débat constructif : le sujet méritait incontestablement mieux ![2]

Qu’en est-il de ces réalités et équivoques que je m’efforce régulièrement de mettre en évidence ?

Tout d’abord le fait que la Russie du tandem Poutine/Medvedev entrevoit son avenir en regardant dans le rétroviseur d’une histoire mythifiée, voire falsifiée lorsqu’on se réfère aux « vérités » d’une historiographie soviétique dont la rigueur scientifique est devenue proverbiale. Entre amnésie sélective, raccourcis fulgurants, manipulations du réel et réhabilitations posthumes (le généralissime Staline), celle-ci a permis d’éviter à la Russie de connaître une culpabilisation collective à l’allemande, mais l’a fait tomber dans l’excès inverse, celui d’une « Histoire qui ne veut pas passer » et qui bégaye à nouveau, de manière durable semblerait-il.

Ces enjeux mémoriels et historiques ne doivent pas être négligés et considérés comme un épiphénomène somme toute secondaire.

Bien au contraire, ils apparaissent primordiaux dans l’esprit du pouvoir russe actuel avec l’écho démesuré qui leur est accordé. En témoignent par exemple l’ouvrage d’une Natalia Narotchnitskaia[3], qui, à l’exception de Dominique Venner[4], a souvent suscité des réactions plutôt complaisantes dans les mouvances précitées, l’importance donnée aux commémorations du 9 mai et de la « Grande guerre patriotique »[5] ou la mise en place le 19 mai 2009 d’une commission chargée de lutter contre les falsifications de « l’histoire commune » contraires aux « intérêts » russes dans les pays baltes ou en Ukraine[6].

On peut également évoquer la guerre culturelle qui se déploie sur les écrans avec la promotion de superproductions historiques nationales-patriotiques souvent sponsorisées par le Kremlin.

Ces longs-métrages, souvent intéressants et bien réalisés, n’hésitent pas à dépeindre sous les traits les plus sombres  un Occident éternellement hostile, que ce soient les Polonais (1612 de Vladimir Khotinenko, Taras Boulba de Vladimir Bortko) ou les Suédois (Alexandre,la bataille de la Neva de Igor Kalenov), alors que les cosaques zaporogues ukrainiens sont dépeints comme des combattants pour la « terre russe orthodoxe » ! (encore Taras Boulba). Attendons de voir le film de Fëdor Bondartchouk sur Stalingrad, en cours de production …

De fait, les Russes ont le grand mérite de cultiver une longue mémoire historique que nous avons ici reléguée aux oubliettes afin se reconstruire légitimement une identité post-soviétique.

Mais ils le font sur des bases problématiques et discutables, autant pour eux que pour nous.

On y perçoit l’extrême difficulté, voire l’incapacité qu’ils ont de se penser en dehors de l’empire, un empire originellement expansionniste (« tout territoire ayant un jour été russe est destiné à le rester ou le redevenir ») aux frontières toujours mal définies, centralisateur et russificateur. Cette tendance lourde, déclinée sur le mode d’un complexe post-impérial, n’a jamais disparu depuis la chute de l’URSS et me semble destinée à empoisonner durablement les relations de la Russie avec ses voisins.

Ce phénomène est renforcé par la quête obsessionnelle d’une puissance largement illusoire qui néglige des défis domestiques persistants, place ses priorités dans des enjeux symboliques et dans la reconstitution d’un espace, ou du moins, d’une aire d’influence exclusive recouvrant l’espace ex-soviétique, le fameux « étranger proche ».

Moscou devrait accepter de s’inscrire dans des frontières sécurisées et internationalement reconnues, prenant comme base solide celles de la Fédération actuelle.

Les dirigeants russes sont-ils bien conscients que dans leur situation particulière, celle d’un territoire immense au climat souvent hostile, l’espace est un considérable réducteur de puissance ?

Dès lors, je pense qu’il faut arrêter de victimiser systématiquement une Russie qui, pour être l’objet de réelles menées américaines dans sa périphérie, n’en porte pas moins une part de responsabilité dans le maintien de contentieux historiques régulièrement ravivés avec ses voisins, permettant de maintenir un levier commode et rêvé pour la Maison-Blanche.

Je ne suis pas loin de penser qu’un Zbignew Brzezinski à Washington s’accommode fort bien du renforcement des tendances chauvinistes, néo-impériales et néo-soviétiques en Russie, plutôt qu’être confronté à un pays régénéré sur des bases saines et solides, constituant un pôle attractif pour ses voisins (beaucoup de progrès à faire à Moscou dans le domaine du soft power), entretenant des relations normales avec eux et se rebâtissant un projet politique et identitaire connecté aux moments européens de son histoire.

 

ID Mag : Certains rêvent d’une Europe « de Brest à Vladivostok ». Selon vous, peut-on affirmer que la Russie est historiquement, culturellement et ethniquement « européenne » ?

 

 

PL : La Russie se révèle incontestablement européenne dans ses fondements originels.

L’ensemble grand-russien découle d’une ethnogénèse entre adstrats slaves orientaux et tribus finno-ougriennes sur la périphérie coloniale septentrionale d’un vaste empire patrimonial, communément et incorrectement qualifié de « Russie de Kiev » et qu’il vaudrait mieux nommer dans un souci d’objectivité historique, Rou’s (ou Ruthénie) de Kiev (Kyiv en ukrainien), un ensemble relié dynastiquement[7], économiquement et culturellement au reste de l’Europe du Haut Moyen Age.

L’invasion mongole constituera une rupture radicale dont les effets se feront sentir jusqu’à nos jours.

La Moscovie, noyau fondateur du futur empire russe (terme officialisé sous Pierre le Grand) se construira dès lors sur des ressorts politiques et culturels doublement asiatisés et orientalisés car relevant de l’influence tataro-mongole de la Horde d’Or et d’un modèle byzantin tardif, bien éloigné de ses racines helléno-européennes, introduit sous Ivan III[8].

Un modèle monarchique autocratique, patrimonial et prédateur, un fort messianisme politico-religieux (mythe de la « Troisième Rome », Orthodoxie figée) et certaines dispositions mentales en constituent les manifestations les plus patentes.

Ensuite, à partir des réformes de Pierre le Grand, la Russie « retardée » de plusieurs siècles par rapport aux évolutions civilisationnelles du reste de l’Europe, ne va cesser d’osciller dans un récurrent mouvement de balancier entre des relations passionnelles de fascination/répulsion avec l’Europe « romano-germanique », dilemme illustré par les débats entre occidentalistes, slavophiles, panslavistes et (néo)eurasistes.

Ce dernier n’a jamais été tranché jusqu’à aujourd’hui et une analyse rigoureuse du contexte russe le démontre régulièrement.

À mon sens, il serait de la responsabilité des mouvances identitaires de sensibiliser avec tact et franchise les interlocuteurs russes sincères et ouverts à la nécessité d’opérer un retour à l’Europe en activant dans leur héritage politique, culturel, ce qui ressort indiscutablement d’un héritage commun.

Commençant à connaître la mentalité russe, je ne me fais pas forcément beaucoup d’illusions. Aujourd’hui la tendance dominante, au sein des élites comme dans l’opinion, est de considérer la Russie comme une réalité singulière, une civilisation en soi, entre Europe et Asie.

Dans mes moments de doute, j’arriverais presque à me persuader que cette rupture est insurmontable et que la branche grande-russienne s’est radicalement coupée de l’arbre boréen.

Mais sachant qu’il n’y a pas de fatalité en Histoire, je me dis que nous devons œuvrer inlassablement pour favoriser une prise de conscience et un retour à notre Europe de frères prodigues souvent attachants, mais parfois bien distants et irritants…

 

ID Mag : Les « révolutions de couleurs » qui agitent certains pays de l’ex-bloc de l’Est  sont généralement présentées comme de pures manipulations et orchestrations américaines. Ici encore, vous appelez à la mesure et à la nuance. Quelle est, selon vous, la réalité de la situation, notamment dans le cas ukrainien ?

 

 PL : Le traitement de la fameuse question des « révolutions de velours » dans les mouvances (méta)politiques précitées renvoie souvent à un schéma réducteur, ou témoigne parfois d’une imprégnation pure et simple par les théories du complot, déclinées sur le mode du vieux complexe obsidional de la forteresse assiégée, très en vogue ces dernières années à Moscou.

Cette tendance très ancienne en Russie s’explique par une histoire troublée, mais en dernier lieu, cela me semble relever d’une infirmité politique et constituer sur un mode incapacitant une facilité empêchant les autorités russes de se remettre en cause et de se poser parfois les bonnes questions.

Dans le cas ukrainien, le postulat d’un mouvement mécaniquement téléguidé et prémédité de l’étranger ne tient pas et cette « révolution orange » n’aurait jamais eu lieu si de nombreuses conditions n’avaient pas été réunies avec l’espoir d’un profond changement, sans parler du lancinant contentieux historique avec le voisin russe.

Les ONG américaines, maintes fois évoquées, ont bien injecté des dollars et formé les militants de structures activistes comme Pora, mais l’ampleur du phénomène, répétition sur une plus grande échelle d’un mouvement de contestation semblable réprimé au printemps 2001, démontre que d’autres ressorts ont joué.

L’Ukraine, pivot géopolitique selon Zbigniew Brzezinski, a été à cette occasion l’objet d’ingérences répétées de la part des Américains, de l’UE, mais aussi de son « grand voisin du nord ».

Vladimir Poutine a commis là-bas, de l’avis de nombreux observateurs politiques, la première erreur marquante de son « règne ». Il s’est cru chez lui et ses visites répétées en faveur d’une présidence Koutchma corrompue et complètement déconsidérée ont été très mal reçues, y compris dans l’Est et le Sud russophones du pays.

Ces empiètements russes furent principalement motivés par le fait que l’accession au pouvoir d’une présidence « orange » remettait en cause le processus d’intégration programmé de l’Ukraine au sein d’un Espace Economique Commun dominé par Moscou, en plus d’interrompre la mise en place d’un régime autoritaire à la bélarussienne.

Ils ont une fois de plus révélés que l’Ukraine n’avait depuis 1991 qu’une indépendance formelle et que, gouvernée par des oligarchies créoles post-communistes, elle oscillait, notamment sous Koutchma, entre Occident et Russie au gré des intérêts de la nomenklatura en place.

Rappelons aux amateurs de vérités simples que c’est sous le « pro-russe » Viktor Ianoukovytch, alors Premier ministre, que se sont déroulées les premières participations de l’Ukraine au Partenariat pour la Paix, antichambre de l’Otan et que c’est le président « pro-russe » Leonid Koutchma qui a envoyé un contingent ukrainien en Irak.

C’est également ce dernier qui a écrit le livre « L’Ukraine n’est pas la Russie », réalité que les Russes dans leur ensemble, opinion publique et classe politique confondues, des libéraux pro-occidentaux aux nostalgiques de Staline, se refusent toujours à admettre, considérant l’Ukraine comme « le berceau » de la Russie et comme partie intégrante de leur ethnos.

L’élection de Viktor Iouchtchenko a été à ce moment-là perçue par beaucoup d’Ukrainiens comme la promesse d’une véritable indépendance et d’un «retour à l’Europe » si longtemps différé. C’était bien sûr à tort, l’impéritie, les rivalités personnelles et les choix funestes de la présidence « orange » se chargeant de rattraper la bourde initiale de Poutine.

Mais le contentieux historique est plus que jamais vivace et Moscou n’a pas manqué une occasion pour faire jouer tous les leviers en sa possession (Gaz, Crimée, flotte russe de Sébastopol, question linguistique et controverses historiques) afin de faire pression sur un état dont elle n’a jamais admis l’existence[9].

Cette querelle de couple dans laquelle l’épouse ukrainienne a fini par divorcer d’un conjoint moscovite insupportable, n’en finit pas de se prolonger pour le plus grand bonheur du notaire américain : il faudra bien pourtant que monsieur finisse par se rendre à l’évidence.

Ce n’est pas l’élection récente de Viktor Ianoukovytch[10] le 7 février dernier au poste de président qui devrait significativement changer la donne. Celui-ci, pour de multiples et récurrentes raisons, risque de s’en tenir à une politique multivectorielle de non-alignement. Les Russes restés prudents au cours de ce scrutin ne se font d’ailleurs pas beaucoup d’illusions ainsi qu’en témoignent par exemple les écrits de Douguine ou  des journalistes de RIA Novosti à propos de  l’homme de Donetsk[11].

Pour un patriote identitaire européen, s’opposer à l’entrée de l’Ukraine dans l’OTAN est une chose nécessaire et légitime, nier son identité propre et son droit à construire un état souverain en est une autre, à laquelle nous ne pouvons et ne devons nous résoudre.

Je souhaiterais que tous ceux qui, par méconnaissance ou calcul, proclament que « l’Ukraine et la Russie sont consubstantielles » fassent preuve d’un peu plus de rigueur, de discernement et de cohérence intellectuelle ou idéologique. Ils seraient bien avisés de cesser de répéter pieusement la version de l’Histoire made in Moscow, de se contenter d’un strict positionnement géopolitique et de relayer les scénarios russes, peu crédibles d’ailleurs, d’annexion ou d’éclatement du pays.[12]

Des ouvrages relativement objectifs et impartiaux sont aujourd’hui disponibles pour qui veut se donner la peine d’y voir plus clair.

Jean Mabire fut l’une des rares figures de la mouvance identitaire à avoir défendu le droit des Ukrainiens à une existence propre.

Effectivement l’Ukraine a eu, comme la Russie, une histoire tourmentée. À l’inverse de sa puissante voisine, elle a vu sa construction étatique maintes fois contrariée, mais elle est restée arrimée au noyau européen et ses fractures internes actuelles résultent d’une domination plus ou moins longue, selon les régions, du grand voisin du nord.

Elle a mené au cours des siècles une lutte pour sa liberté contre les dominateurs russes et polonais avec une opiniâtreté qui force l’admiration et ne va pas sans évoquer le combat des fils de la verte Erin contre la domination britannique.

L’Ukraine, identité enracinée sur un territoire, appartient de plain-pied à l’ensemble géopolitique et civilisationnel européen. Il est de notre devoir de le faire savoir et de convaincre les Russes que des relations apaisées, étroites et véritablement fraternelles entre peuples apparentés ne peuvent se baser que sur une pleine reconnaissance de l’identité de chacun.

Le pays des cosaques zaporogues a, de plus, toujours contribué à ancrer la Russie en Europe (Pierre le Grand a, par exemple, assis ses réformes à l’aide de cadres politiques et ecclésiastiques ukrainiens), d’où l’idée qu’une Ukraine réintégrée dans son cadre originel pourrait encourager la Russie à se déterminer significativement et à tourner une fois pour toutes son regard dans notre direction, loin de ses tentations eurasistes…

 

ID Mag: On parle de plus en plus d’une vague de « nostalgie », en Russie », pour la période soviétique et même de volonté de réhabilitation de celle-ci. Qu’en est-il exactement ?

 

 

PL : Comme je le signalais plus haut, une certaine nostalgie soviétique, l’idéologie communiste en moins, est à l’ordre du jour et ce processus s’est amplifié depuis le deuxième mandat de Poutine.

Nostalgie chez les petites gens qui, ayant subi les effets désastreux de l’ère Eltsine, ont tendance à idéaliser une période durant laquelle les besoins vitaux de la population, l’ordre public et d’autres choses comme l’accès généralisé à la culture étaient largement assurés.

Dans le domaine sportif, les piètres performances des athlètes russes aux jeux olympiques d’hiver de Vancouver ont ravivé cette sovietalgie.

La mémoire populaire se révèle généralement sélective  et il est de plus propre à l’être humain de refouler les peurs et agressions qu’un système oppressif a générées chez cet homo sovieticus brossé en son temps par un Alexandre Zinoviev et qui est bien loin d’avoir disparu.

Dans la Korpokratoura (Jean-Robert Raviot) actuellement au pouvoir où sphères politiques et économiques sont étroitement imbriquées, outre que cette période, pour la majorité d’entre eux, continue de structurer une bonne partie de leur paysage mental, on retient surtout de l’ère soviétique la grandeur apparente d’une grande puissance redoutée et respectée, qui, sous Staline notamment, avait porté les frontières de l’empire à son zénith.

Mêlée à des éléments de l’ère tsariste (symboles nationaux notamment), cette composante soviétique doit servir à renforcer un patriotisme officiel assis sur l’idée étatique (derjavnost’) et celle d’Unité affirmée sur un mode mobilisateur.

Dans le contexte d’un système de représentations si ambivalent, on referme l’accès aux archives d’Etat et on réécrit l’Histoire en faisant la part belle aux mensonges et fables de l’ère soviétique tout en déniant aux voisins de l’ « étranger proche » le droit de créer (sur un mode, il est vrai, parfois passionnel et polémique) leurs historiographies nationales et d’honorer ceux qu’ils considèrent comme des héros de la lutte anti-communiste (souvent ravalés par Moscou aux rangs de simples collaborateurs des nazis, dans la plus pure langue de bois soviétique).

Encore une fois, on pourrait s’étonner du relatif silence de ceux qui ont en leur temps justement condamné la reductio ad hitlerum dans notre beau pays et évitent de faire de même lorsqu’il s’agit de la Russie. Et qu’on ne vienne pas me dire que c’est de bonne guerre !

Moscou désire assurer une « continuité » dans son histoire récente sans risquer de fragiliser par l’évocation des « heures sombres » une identité problématique, encore convalescente après la chute de l’Union soviétique, « plus grande catastrophe géopolitique du XXème siècle » (Poutine).

Plusieurs déclarations du président Medvedev démontrent que remettre en cause le petit catéchisme officiel concernant la « Grande guerre patriotique » et « l’histoire commune »  aurait pu devenir difficile, voire judiciairement risqué (projet de loi de la Douma daté du 6 mai 2009 réprimant le « révisionnisme historique », finalement rejeté par le gouvernement le 29 juillet de la même année)[13], à l’intérieur comme à l’extérieur des frontières de la fédération.

Le drame pour le peuple russe est que la voie tracée par un Alexandre Soljenitsyne sur un traitement lucide et responsable de la période communiste n’ait pas été suivie et approfondie.

Le Kremlin se fait l’écho aujourd’hui de représentations majoritaires encore agissantes au sein de la population autour d’un passé récent qui continue à être mythifié par la nouvelle histoire officielle.

Poser ainsi les bases du futur me semble fâcheusement lourd d’impasses, d’équivoques et de contradictions qui ne manqueront de s’amplifier et de continuer à compromettre davantage l’image de la Nouvelle Russie.

 

ID Mag: Le redressement de la Russie est spectaculaire, il n’en est pas pour autant sans failles. Quelles sont selon vous les principales faiblesses qui le menacent ? La chasse aux oligarques a-t-elle été menée jusqu’au bout ? Où en sont- la démographie et la maîtrise de l’alcoolisme endémique ?

 

PL : Ce redressement spectaculaire, comme vous dites, a été freiné par les effets de la crise systémique mondiale qui a fini par toucher la Russie de plein fouet : Il semblerait que le pays commence timidement à s’en remettre, bien que des soubresauts sociaux transparaissent ça et là au travers du voile posé par les médias plus ou moins sous contrôle. L’avenir proche nous dira davantage ce qu’il en est dans ce domaine.

La Russie a le plus grand mal à faire le deuil de son empire et à se faire à l’idée que seule, elle est condamnée à rester une puissance régionale ayant hérité d’un arsenal nucléaire vieillissant, dont il est admis en haut lieu qu’il ne pourra être que partiellement modernisé (missiles stratégiques Topol-M et Boulava).

Sans l’Europe et une synergie bien pensée dont les contours ne peuvent encore être définis, elle me semble condamnée à rester une « puissance pauvre ».

Ce redressement pour avéré qu’il soit dans de nombreux domaines reste néanmoins fragile et peut même apparaître comme un phénomène « Potemkine » qui cache un envers du décor beaucoup moins reluisant.

Société civile embryonnaire en proie depuis des siècles aux prédations d’un pouvoir patrimonial, état faible contrairement aux idées reçues, phagocyté par une Korpokratoura, dont le mode d’exercice du pouvoir plébiscitaire et non compétitif préfigure peut-être les formes de régime post-démocratiques en voie de renforcement rapide en Occident.

Économie de rente dont les actifs sont plus ou moins affectés par une certaine baisse des cours du gaz et du pétrole, outil industriel dépassé (y compris la branche militaire, souvent incapable de satisfaire la demande étrangère et qui a perdu une grande partie de ses savoir-faire), infrastructures dignes d’un pays du Tiers-monde (une fois sorti de Moscou, Saint-Pétersbourg et de quelques îlots urbains « développés »).

La liberté d’expression est réelle sur des thématiques fondamentales qui nous sont chères, mais il ne vaut mieux pas s’aventurer à enquêter sur des affaires précises touchant des personnes bien identifiables...

La société est minée par une corruption structurelle qui n’est pas nouvelle (voir Les âmes mortes de Gogol par exemple) et dont on se demande si le pouvoir actuel s’en accommode ou montre son impuissance à la combattre efficacement, tellement le mal est profond, ceci en dépit de  sanctions conjoncturelles et exemplaires, fortement médiatisées.

L’armée doit être rapidement réformée à la lumière des enseignements du conflit géorgien, avec une professionnalisation et un « dégraissage » pour lequel la haute hiérarchie militaire freine des quatre fers. Sans parler du remplacement de matériels largement obsolètes dont le faible rythme de renouvellement pourrait être mis à mal par une baisse annoncée des crédits militaires : beaucoup d’effets d’annonce en général à l’occasion par exemple du vol récent du prototype d’un chasseur de 5ème génération, le Sukhoi PAK-FA T-50 qui est loin d’être entré en service et ne le sera qu’au prix d’une coopération avec l’Inde.

Les négociations au sujet de l’achat de bâtiments de projection et commandement français type Mistral, outre leurs arrière-pensées géopolitiques, démontrent qu’un savoir faire technologique s’est perdu depuis l’éclatement de l’URSS (les chantiers navals de Mykolaiv qui avaient conçu les porte-avions de la classe Kuznetsov sont aujourd’hui situés dans l’Ukraine indépendante).

Concernant les oligarques, on a éliminé ceux qui ont été associés à l’ancien pouvoir eltsinien (Boris Berezovski) ou qui ont eu des velléités de s’opposer au Kremlin en s’associant à des intérêts politiques et économiques étrangers (Mikhail Khodorkovski). Les autres, comme Roman Abramovitch ou Oleg Deripaska sont toujours là, plus discrets, rentrés dans le rang ou étroitement associés au pouvoir. Ils servent parfois de boucs émissaires pour le bon peuple et c’est l’occasion de réprimandes de la part du père fouettard Poutine sous l’œil attentif des caméras.

Selon certaines sources récurrentes, le judoka préféré des Russes ne serait pas dépourvu d’une fortune personnelle conséquente.

La population reste préservée de flux migratoires massifs venus de l’étranger. Elle connaît cependant quelques problèmes de cohabitation avec des ethnies non-slaves. Le pouvoir oscille entre une définition ethnique et étatique de l’appartenance russe (deux termes différents existent dans la langue de Dostoïevski pour désigner l’une ou l’autre) avec une certaine préférence donnée officiellement à cette dernière. I’année dernière, les Nachii, jeunesses poutiniennes « antifascistes » se sont vues confier dans plusieurs villes du pays la tâche de vider la rue de ses groupes nationalistes.

Groupes qui, lorsqu’ils ne sont pas infiltrés, voire purement et simplement générés par le FSB, sont largement instrumentalisés et tolérés au gré des intérêts et de la conjoncture du moment.

Je ne parle même pas de « l’ultranationaliste »  guébiste Vladimir Volfovitch Eidelstein alias Jirinovski qui, à la tête du LDPR  (Parti Libéral-démocrate de Russie) constitue l’exemple même de ces partis «pro régime » qui captent à la fois un certain électorat et constituent une tribune pour des prises de positions provocatrices et extrémistes que le Kremlin ne peut pas toujours assumer au grand jour, lâchées comme ballons d’essai à destination de l’opinion intérieure et internationale .

Le pouvoir joue clairement la carte de la cohésion ethnique et religieuse  de la population.

Cette dernière, qui bénéficie encore d’un haut niveau d’études et de qualification grâce à un système éducatif sélectif (malgré la corruption d’une partie du corps enseignant), connaît un collapsus démographique structurel malgré les mesures natalistes adoptées par le Kremlin et la très légère embellie de la dernière année (solde naturel à peine positif) : elle pourrait s’établir dans le pire des scénarios autour de 80-100 millions de personnes vers 2050 !

Son état sanitaire général reste préoccupant (je ne m’étendrai pas davantage sur les ravages de l’alcoolisme à tous points de vue) et son univers mental reste marqué par l’empreinte communiste dont les effets délétères seront longs à extirper.

Un nihilisme ambiant, empreint de matérialisme, de cynisme et d’une certaine dépolitisation prévaut dans une bonne partie de la jeunesse. Celle-ci subit un processus d’occidentalisation accéléré qui n’est pas efficacement contrebalancé par le « patriotiquement correct » au goût du jour et la mise en place d’organisations comme les Nachii.

Les fervents admirateurs du régime poutinien auront ainsi remarqué qu’il n’entreprend rien de significatif pour enrayer ce phénomène préoccupant et s’accommode fort bien de cette situation où la quête effrénée d’argent, le goût de l’informe, du strass et des paillettes n’a trop souvent rien à envier à  celui de nos sociétés occidentales, décliné de plus au tamis de la démesure russe comme en témoigne par exemple le cinéaste Andreї Mikhalkov-Konchalovsky dans son film Gloss (Glyanets en vo).

La population russe semble trouver un puissant dérivatif à un quotidien souvent gris dans une fierté nationale entretenue par le pouvoir, vis-à-vis duquel elle ne nourrit aucune illusion (« eux » et « nous »). Fierté nationale non condamnable en soi bien entendu, mais déclinée sur un mode excessif avec une paranoïa obsidionale et toujours une phobie atavique de l’ennemi intérieur et extérieur.

Je suis toujours frappé par le fait que le système communiste aux mensonges duquel presque personne ne croyait a réussi à tuer chez beaucoup d’anciens ressortissants soviétiques toute forme d’engagement politique et social au service d’un idéal collectif qui les dépasse : je me suis souvent heurté à des réactions empreintes de scepticisme désabusé.

Je n’ai pas vraiment développé, conformément à votre question les points positifs dans le tableau partiel parfois sombre et pessimiste que j’ai donné de ce peuple jeune (Moeller van den Bruck), mais nous savons que rien n’est jamais joué et que là où il existe une volonté, il y a un chemin.

 

ID Mag : Dans le cadre du monde multipolaire auquel nous aspirons, comment envisagez-vous l’évolution des relations entre la Russie et la puissance chinoise ?

 

PL : La Chine et la Russie ont établi un partenariat stratégique au sein de l’Organisation de coopération de Shanghai pour tenter de faire un tant soit peu contrepoids à la puissance hégémonique américaine.

Cette entente ne repose pas sur des fondements civilisationnels et stratégiques solides et n’est pas, selon moi, destinée à un grand avenir.

Pour l’instant, les deux pays font des manœuvres militaires communes fortement médiatisées. L’armée chinoise modernise son arsenal à grands renforts d’armes russes, bien que Moscou veille à limiter autant que possible les transferts de technologie.

Posture devenue récurrente, le Kremlin penche ostensiblement vers son voisin asiatique dès que des désaccords politiques ou économiques interviennent avec l’Union Européenne.

Cela n’empêche pas que l’avenir des relations sino-russes reste pavé de lourdes incertitudes.

Moscou ne peut que craindre le colossal différentiel démographique avec son voisin qui peut lorgner demain sur les immenses ressources minérales et stratégiques de l’hinterland sibérien.

Une immigration chinoise croissante pourrait poser un problème stratégique majeur dans un avenir très proche.

Bien que les contentieux territoriaux aient été récemment résolus, les Chinois n’ont pas oublié les « traités inégaux » du XIXème siècle et n’ont peut-être pas renoncé à récupérer un jour les territoires de la « Mandchourie du nord » avec Khabarovsk et Vladivostok[14].

Les Russes doivent comprendre qu’ils auront besoin de nous pour mettre en valeur ce « Grand Est » sibérien et que des contingents européens ne seront pas de trop pour assurer une veille vigilante sur le fleuve Amour, nouvelle frontière d’une Grande Europe à bâtir.

 

 

 

ID Mag : Un mot pour conclure et peut-être quelques conseils de lecture sur ce sujet ?

 

PL : Je suggèrerais à ceux qui sont intéressés par la question de faire l’effort de s’imprégner des réalités russes en essayant de franchir la barrière de la langue et en se plongeant dans ce monde passionnant (presse, littérature, cinéma, télévision), ce qui n’empêche pas de voyager et de faire des rencontres...

Je pense qu’un militant identitaire sérieux et sincère doit appréhender ces réalités de manière lucide et détachée en restant fidèle aux valeurs et principes qui sont les siens tout en faisant preuve d’intelligence (méta)politique.

Ce n’est pas en manifestant une adhésion aveugle et inconditionnelle aux évolutions en cours dans la Russie poutino-medvédienne que nous rendrons un grand service à notre cause et aux Russes eux-mêmes.

À nous de faire preuve d’une bienveillance critique qui n’empêche pas la ferme condamnation de phénomènes négatifs et contre-productifs et d’éviter l’écueil d’un pacte russo-européen qui abandonnerait à nouveau plusieurs peuples frères aux séculaires et incorrigibles convoitises de Moscou, car la tentation est réelle chez certains de lui  reconnaître une sphère d’influence exclusive en terre européenne[15].

Une observation attentive de la politique internationale de Moscou montre qu’elle a le plus grand mal à s’accommoder de l’Union Européenne, perçue, malheureusement à juste titre, comme une structure bâtarde, acéphale et vassalisée par Washington.

De ce fait, prenant compte de l’existence d’une nouvelle Europe proaméricaine, elle privilégie les relations bilatérales avec les états du noyau carolingien comme l’Allemagne, la France ou l’Italie, perçus comme des entités solides ayant fait leur preuve sur la scène de l’Histoire, sans perdre de vue le classique adage divide et impera .

Je pense qu’une avant-garde européenne telle que prônée par le Forum Carolus et Alain de Benoist par exemple, vertébrée par le noyau dur carolingien, élargi à l’Autriche et à la Hongrie, ne doit être envisagée que dans la perspective d’une grande Europe-puissance qui n’exclue pas nos frères européens de l’ex Pacte de Varsovie pour l’instant encore sensibles aux sirènes étatsuniennes.

Hypothèse pro-vocante et devant nous pousser à la réflexion : une Russie qui résonne toujours en terme de sphère d’influence exclusive sur son ancien « espace historique » (Narotchnitskaia), englobant des pays incontestablement européens comme le Belarus et l’Ukraine serait-elle prête à admettre l’existence à ses frontières d’une Grande Europe-puissance unifiée, détachée de la vassalité américaine et amicale qui affirmerait ses intérêts légitimes sans complexe ? Serait-elle prête à jouer avec nous la carte d’une fédération impériale paneuropéenne, à terme intégrée, une véritable entité eurosibérienne et non celle d’un empire simplement russe ou eurasiatique ?

Poser la question en embrassant la longue durée historique, c’est déjà commencer à apporter quelques éléments de réponse…

Un tel édifice respectueux de ses entités nationales et ethniques, pensé selon un nouveau jus publicum europaeum et un sain principe de subsidiarité aurait, entre autres choses, l’avantage de réduire à néant la plupart des contentieux territoriaux persistants et pesants.

Quoi qu’il en soit, pour survivre dans un nomos planétaire en pleine recomposition et rester dans l’Histoire, Européens et Russes devront entamer, chacun à partir de prémisses et de situations différentes, un mouvement de régénération convergeant vers un héritage boréen plurimillénaire, base matricielle commune d’un renouveau et d’un destin envisagés ensemble. Favorisons donc l’émergence d’un véritable courant altereuropéen et eurosibérien en Russie.

Sinon, dans le cas où le Kremlin s’obstinerait dans une perspective vétéro-impériale autocentrée et obsidionale, je crains fort que la Troisième voie, position risquée et peu aisée à assumer, ne puisse redevenir tôt ou tard d’actualité.

Quelques conseils de lecture ?

Pour la Russie, Les ouvrages de Gustave Welter (Histoire de Russie), Gonzague de Reynold (Le monde russe) et Andreas Kappeler (La Russie, Empire Multiethnique) peuvent offrir un cadre de réflexion historique solide. On pourra y ajouter les « classiques » de Nicolas Riazanovsky (Histoire de la Russie), Michel Heller (Histoire de la Russie et de son empire) ou Jean-Pierre Arrignon (Culture Guide Russie). Pour mieux saisir les réalités politiques et sociologiques d’un univers à la fois si loin et si proche, on pourra se référer aux ouvrages de Iouri Afanassiev (De la Russie), Jean-Robert Raviot, Marlène Laruelle, Jean-Sylvestre Mongrenier (La Russie menace-t-elle l’Occident ?), Georges Nivat, André Ropert (La misère et la gloire, histoire culturelle du monde russe), Alla Sergueeva (Qui sont les Russes ?), Lorraine Millot (La Russie nouvelle) ou d’Igor Kliamkine et Lev Timofeev (La Russie de l’ombre).

Signalons également un curieux ouvrage anonyme intitulé Projet Russie. Je peux également citer les remarquables biographies d’Henri Troyat sur les tsars et écrivains russes, ainsi que naturellement les grands classiques de la littérature, de Pouchkine à Soljenitsyne.

Mention particulière pour les romans « au marteau » d’un enfant terrible de la nouvelle littérature russe, Vladimir Sorokine  (notamment Journée d’un opritchnik, La glace ou la voie de Bro).

Les amateurs de polar pourront par exemple se plonger dans les œuvres de Thierry Marignac (Fuyards), Alexandra Marinina (Ne gênez pas le bourreau) ou Leif Davidsen (L’épouse inconnue)

Sur l’Ukraine, il serait indispensable de lire attentivement les travaux incontournables de Iaroslav Lebedynsky (Ukraine, une histoire en questions)[16], Mykola Riabtchouk (De la « Petite-Russie » à l’Ukraine) et Andreas Kappeler (Petite histoire de l’Ukraine) sans oublier le mythique Benoist-Méchin (Ukraine, le fantôme de l’Europe). On pourra compléter par Léonid Pliouchtch (Ukraine : à nous l’Europe !), Annie Daubenton (Ukraine : les métamorphoses de l’indépendance), Alain Balalas (De l’Ukraine) ou Arkady Joukovsky (Histoire de l’Ukraine). Les amoureux du mythe cosaque pourront parcourir le maître-livre de Iaroslav Lebedynsky, Les cosaques, une société guerrière entre libertés et pouvoirs, Ukraine 1490-1790.

 

 

Version révisée en mars 2010 d’un entretien recueilli en juillet 2009 par Xavier Eman pour ID magazine n°16 (automne 2009)



[1] Un fossé psychologique s’est considérablement creusé entre nous et nos frères de « l’Est ». Nous avons généralement une extrême difficulté à appréhender ce qu’ils ont vécu durant la période communiste et c’est bien sûr un peu normal. Néanmoins, rien ne nous empêche et c’est même fortement recommandé, de faire un réel effort d’empathie (je n’ai pas dit complaisance) à leur égard, par des rencontres et une connaissance accrue de ces réalités. Un survol de leurs représentations est tout à fait instructif : je signalerai par exemple ces entretiens avec l’Ukrainien Mykola Riabtchouk (http://www.europemaxima.com/?p=665) ou le Lituanien Richard Backis (http://www.diploweb.com/L-heritage-mental-du-sovietisme.html).

[2] Dans l’éditorial de ce numéro, Robert de Herte/Alain de Benoist ne fait pas mystère de son engouement pour la figure et les positions d’Alexandre Douguine, dont l’œuvre, nonobstant de nombreux points dignes d’intérêt, se présente fondamentalement comme les habits neufs d’une récurrente vision impériale russocentrée, sans parler de ses propos à l’emporte pièce dans les médias télévisés russophones où l’éminent penseur disserte sur la partition et l’invasion militaire de l’Ukraine avant de théoriser l’existence dans la partie orientale et méridionale du pays d’un fantasmatique peuple « nouveau-russe » (http://tap-the-talent.blogspot.com/search/label/Dugin).

En 1993, la figure historique de la Nouvelle droite écrivait dans une réponse au publiciste allemand Wolfgang Strauss publiée dans la revue Europa Vorn ( n°57, 15 septembre 1993, p: 3 , citée par Pierre-André Taguieff in Sur la Nouvelle droite, Descartes & Cie, 1994, p:311) : « Je suis en particulier hostile à toute forme de jacobinisme ou d’impérialisme. Je ne confonds pas l’idée traditionnelle d’Empire (…) avec les impérialismes modernes : français, anglais, américain, russe ou allemand. Je soutiens le droit des peuples à disposer d’eux-mêmes, qu’il s’agisse des Ukrainiens, des Géorgiens, des Tchétchènes, des habitants des pays baltes, des Irlandais du Nord, des Corses, des Bretons (…). Je ne crois pas que les Russes résoudront les problèmes auxquels ils sont affrontés en tentant de soumettre à nouveau à leur joug des peuples qui n’ont que trop évidemment manifesté le désir de s’en affranchir. Pour dire les choses autrement, je crois que leur avenir n’est pas dans l’imitation- qu’il s’agisse de l’imitation de l’Occident ou de l’imitation du passé (tsariste ou stalinien). Les Russes ont  certainement, compte tenu de leur histoire, un rôle à jouer en Asie. Je suis en revanche plus que réservé vis-à-vis de toute construction eurasiatique, qui me paraît être essentiellement fantasmagorique ».

Plus récemment, interrogeant longuement Douguine dans un captivant entretien publié dans la revue Krisis (N°32, juin 2009, p :143-146), Alain de Benoist n’a pas manqué cependant de lui poser une question reprenant nos informations sur les activités anti-ukrainiennes du Mouvement de la jeunesse eurasiste, question à laquelle son honorable interlocuteur n’a pas jugé bon de répondre franchement…

[3] « Que reste-t-il de notre victoire ? » Editions des Syrtes, Paris, 2008. Nous renvoyons les lecteurs à notre critique de cet ouvrage consultable sur (http://www.polemia.com/article.php?id=1674).

Madame Narotchnitskaia est par ailleurs à la tête d’une ONG mise en place avec l’aval du Kremlin, sise à Paris et New-York, L’Institut de la Démocratie et de la Coopération (IDC) qu’elle anime avec le journaliste britannique conservateur John Laughland.

[4] Dans un long et pertinent article intitulé « Mémoire russe et mémoire européenne » publié dans le numéro 38 de La Nouvelle Revue d’Histoire, septembre-octobre 2008, pages 32-35

[5] Comme l’affirmait Boris Gryzlov, président en exercice de la Douma russe que je cite de mémoire, la « Grande guerre patriotique » est le seul événement récent de l’histoire nationale susceptible de rassembler un maximum de citoyens autour d’un nouveau consensus identitaire.

Une véritable mythologie impulsée par Vladimir Poutine lors de sa fameuse allocution du 9 mai 2005 qui ne supporte donc aucune forme de critiques ou de remises en cause, aussi ténues soient-elles. Au besoin, intimidations et répression s’abattent sur les « contrevenants » ainsi qu’en témoigne le cas de Mikhaïl Suprun, un historien russe enquêtant sur le sort d’Allemands emprisonnés en Union soviétique durant la Seconde Guerre mondiale, qui a été arrêté en septembre 2009.L’historien a été brièvement détenu par des officiers des services de sécurité russes. Ils ont fouillé son appartement et emporté l’ensemble de ses archives. Accusé d’atteinte à la vie privée ( !), il risque en cas de condamnation une peine maximale de quatre ans de prison. Professeur d’histoire à l’Université Pomorskyi d’Arkhangelsk, ses travaux portaient notamment sur les prisonniers de guerre allemands capturés par l’Armée rouge et sur les minorités russes d’origine germanique, la plupart en provenance de Russie méridionale, déportés par Staline dans les camps d’Arkhangelsk.

 

[6] Cette commission comprenait deux personnalités présentées comme des historiens, l’incontournable Natalia Narotchnitskaia et Alexandre Tchoubarian, auteur d’un livre au titre prometteur, mais au final bien décevant, La Russie et l’idée européenne, (Editions des Syrtes, 2009). Ce dernier, interpellé par nos soins lors d’une présentation parisienne de l’ouvrage en octobre 2009, sur le fait de siéger dans une telle commission pour des historiens de métier, a  « dédramatisé » l’enjeu et magnifiquement botté en touche dans la plus pure tradition de la rhétorique soviétique, version perestroïka.

[7] Citons la princesse Anne, fille de Iaroslav le Sage qui a épousé notre bon roi Henri 1er en 1051, à propos de laquelle, en cette année France-Russie et d’exposition sur « La Sainte Russie » au Louvre, on a pas fini d’entendre parler de princesse « russe »…

[8] L’article d’Aymeric Chauprade, « Byzance écartelée entre deux mondes » publié dans la Nouvelle Revue d’Histoire  (n°15, novembre-décembre, 2004, p : 56-58) est, à cet égard, très éclairant.

[9] La question de la résistance nationaliste ukrainienne durant la seconde guerre mondiale n’en finit pas de susciter des réactions indignées à Moscou, qui pour l’occasion n’hésite pas à se joindre au chœur  planétaire (http://fr.rian.ru/world/20100127/185945143.html). La politique d’affirmation historique et mémorielle menée par la présidence Iouchtchenko était justifiée et légitime sur le fond ; même si sur la forme, elle est critiquable sur de trop nombreux points.

Les décrets faisant de Roman Choukhevytch (commandant suprême de l’Armée Insurrectionnelle Ukrainienne, l’UPA) et de Stepan Bandera (chef de l’aile révolutionnaire de l’Organisation des Nationalistes Ukrainiens OUN-R :  http://fr.novopress.info/35214/anniversaire-de-l%E2%80%99assassinat-de-stepan-bandera-notre-longue-memoire/) des héros de l’Ukraine ont créé des remous y compris à l’intérieur du pays tant les clichés mensongers de l’époque soviétique sont encore prégnants dans une bonne partie de la population. Dans le cas de Bandera, le calendrier choisi (en janvier dernier, entre les deux tours de scrutin présidentiel) révélait des arrière-pensées politiciennes évidentes et maladroites. Il n’empêche que l’accusation infâmante et diabolisante de collaboration avec les nazis ne tient pas stricto sensu et il est regrettable de voir les autorités russes user cyniquement de ces questions hautement sensibles dont elles bien connaissent la charge émotionnelle pour un public occidental.

Que ces hommes aient été tentés de jouer brièvement la carte allemande avant de déchanter (en camp de concentration dès l’été 1941 pour Bandera ou devant un peloton d’exécution pour d’autres) est l’évidence même. Etait-ce collaborer aux plans nazis et leur politique raciale que d’avoir été soutenus par certains secteurs de la Wehrmacht et de l’Abwehr pour former deux bataillons de volontaires en 1940-41 ? Il est bien facile de juger après-coup quand on connaît la fin de l’histoire.

L’amalgame entre la résistance de l’OUN/UPA et la division SS ukrainienne « Galicie » ne résiste pas à un examen historique sérieux, ni les accusations conjointes de la part des nazis puis des soviétiques d’avoir participé à des pogroms antijuifs, notamment à L’viv en 1941.

Par contre, si on veut rester sur le registre de la collaboration avec le régime national-socialiste, que dire du grand Staline qui a livré quantité de communistes allemands, parfois juifs, aux autorités hitlériennes entre septembre 1939 et juin 1941, sans parler des matières premières stratégiques qui ont alimenté la machine de guerre nazie dans sa guerre à l’Ouest ?

Il est confondant de voir des compatriotes issus souvent de milieux traditionnellement anticommunistes embrayer docilement le pas aux vieilles lunes de l’historiographie soviétique joignant leurs voix au concert des derniers dinosaures staliniens de l’université française qui s’évertuent, dans un registre voisin, à nier l’existence du Holodomor, la famine-génocide ukrainienne de 1932-33.

[10] Il est intéressant de noter que le nouveau président ukrainien a recouru, dès 2005, aux services du consultant politique américain Paul Manafort, républicain convaincu qui a notamment travaillé pour John McCain, rival malheureux de Barack Obama en 2008.

[11] Lors d’une conférence de presse commune entre Medvedev et Ianoukovytch, à l’occasion de la visite officielle de ce dernier à Moscou le 5 mars 2010, les deux hommes ont fait de belles déclarations de principe dans une atmosphère cordiale et détendue, mais se sont bien gardé de fixer des échéances précises. Une nouveauté cependant dans la bouche de Medvedev qui a évoqué un possible statut de la langue ukrainienne en Russie avec l’octroi de chaînes de télévision ukrainophones.

[12] À cet égard, l’Ukraine n’est pas comparable aux Balkans. Ce pays a payé le prix du sang au XXème siècle et son peuple a un tempérament généralement plus « doux », moins convulsif que ceux d’autres ethnies slaves. La guerre culturelle a cependant fait rage à Moscou tout au long de l’année 2009, avec toute une littérature clairement ukrainophobe qui allait des techno thrillers de gare, catégorie sous-Tom Clancy (comme Ukraine champ de bataille : le trident brisé de Georgiy Savitsky ) à des écrits assez délirants comme le fameux American salo d’O. Volia (http://www.kyivpost.com/news/nation/detail/38758/)

[13] Voir : http://www.lph-asso.fr/index.php?option=com_content&view=article&id=135%3Aderniere-heure-par-nikolay-koposov&catid=31%3Adossier-russie&Itemid=78&lang=fr

[14] Voir l’intéressant dossier du n° 995 du Courrier international (du 26 novembre au 2 décembre 2009) intitulé « Far East, quand la Sibérie sera chinoise ».

[15] Cela semble être le cas, par exemple, pour le géopoliticien Aymeric Chauprade, qui  avait déjà repris à son compte le théorème « mécaniste » de la révolution orange selon un storytelling simplificateur. Dans un article publié dans La Nouvelle Revue d’Histoire  (N°20, septembre-octobre 2005, p:38, texte repris dans la 3ème édition de Géopolitique, constantes et changements dans l’Histoire, Ellipses, 2007, p:558) et intitulé « les frontières de l’Europe », il exposait l’existence de cinq ensembles géopolitiques européens en affirmant que « même si elle présente d’incontestables traits civilisationnels européens (…), l’Ukraine, immense plaine ouverte sur l’Est, n’a pas vocation à faire partie du bloc européen ». Il écrit ultérieurement, dans un entretien donné à la revue Eléments (N° 131, avril-juin 2009, p : 32) qu’ « avec un peu moins de 50 millions d’habitants, l’Ukraine représente tout de même le tiers du poids démographique de la  Fédération de Russie. Mais c’est surtout le berceau de la Moscovie : historiquement, l’Ukraine et la Russie sont consubstantielles, d’autant que la première offre à la seconde un débouché sur la mer Noire, donc sur la Méditerranée ». De tels propos me paraissent démontrer les limites du pur exercice géopolitique lorsque ses critères d’analyse priment excessivement sur les impératifs civilisationnels et identitaires.

[16] Voir notre recension : http://www.polemia.com/article.php?id=1719

Platon et les trois fonctions indo-européennes

Platon et les trois fonctions indo-européennes

platon.jpgEx: http://tpprovence.wordpress.com/ 

On trouve de tout chez Platon, comme au rayon bricolage du BHV (à ne pas confondre avec le BHL, où l’on ne trouve rien d’autre que le vide abyssal de la non-pensée nombriliste) : le mythe de la caverne, l’Atlantide et même … les trois fonctions indo-européennes.

LES TROIS FONCTIONS CHEZ LES INDO-EUROPÉENS

C’est Georges Dumézil qui a découvert, en 1938, l’existence d’une véritable « idéologie » indo-européenne, d’une structure mentale spécifique se manifestant par une même conception du monde. « Suivant cette conception, que la comparaison de documents pris dans la plupart des vieilles sociétés indo-européennes permet de reconstituer, écrira-t-il, tout organisme, du cosmos à n’importe quel groupe humain, a besoin pour subsister de trois types hiérarchisés d’action, que j’ai proposé d’appeler les trois fonctions fondamentales : la maîtrise du sacré et du savoir avec la forme du pouvoir temporel qu’elle fonde, la force physique et la valeur guerrière, la fécondité et l’abondance avec leurs conditions et leurs conséquences » (1).

Sur le plan social, l’on retrouve cette tripartition dans tout l’espace indo-européen, de l’Inde à l’Irlande, les trois fonctions correspondant schématiquement aux prêtres-rois, aux guerriers ainsi qu’aux producteurs, paysans et artisans. C’est ainsi que dans l’Inde traditionnelle les Brahmânes correspondent à la 1ère fonction, les Kshatriyâs à la 2 ème et les Vaishyâs à la 3 ème. A l’extrême ouest de l’aire couverte par les indo-européennes, chez les Celtes, César nous apprend que la société gauloise se composait des Druides, des Equites ou Chevaliers, et de la Plebs, le Peuple…

Reste le cas de la Grèce antique, qui a tendu très tôt à éliminer toute trace de l’idéologie trifonctionnelle. Si l’on en croit Dumézil, « la Grèce n’est pas généreuse envers nos dossiers. M. Bernard Sergent a fait un bilan critique des expressions de la structure des trois fonctions, la plupart du temps isolées, en voie de fossilisation, qu’on a proposé d’y reconnaître : c’est peu de chose, comparé aux richesses qu’offrent l’Inde et l’Italie » (2). Toutefois, un lecteur attentif de l’œuvre de Platon peut y découvrir la preuve d’une survivance de la tripartition fonctionnelle dans la Grèce classique.

LA CITÉ IDÉALE PLATONICIENNE

Dans La République, Platon, s’interrogeant sur la cité idéale, affirme que « les classes qui existent dans la Cité sont bien les mêmes que celles qui existent dans l’âme de chacun pris individuellement » (3). Au terme d’une analyse psychologique de la nature humaine, le philosophe grec reconnaît dans l’homme trois sortes d’âmes ou de dispositions à agir : la raison, située dans la tête, qui lui permet de penser ; le sentiment, situé dans le cœur, qui conduit à aimer ; et le désir, situé dans le ventre, qui le pousse à se reproduire. Elles impliquent trois vertus qui représentent l’excellence de chacune des âmes : la sagesse, le courage et la tempérance. Selon lui, la constitution de la cité n’est que la projection de la constitution de l’âme soumise à son exigence de justice, cette dernière étant à son tour, l’articulation harmonieuse des trois vertus.

Concrètement, le philosophe distingue au sein de la cité trois fonctions. D’abord, « ceux qui gardent entièrement la Cité, aussi bien des ennemis de l’extérieur que des amis de l’intérieur » (4), les Gardiens, qui correspondent à la tête, siège de l’intelligence et de la raison, le Logos. Ensuite,  « les auxiliaires et assistants des décisions des gouvernants » (5), qui correspondent au cœur, siège du courage, le Thymos. Enfin les Producteurs, artisans et paysans, qui correspondent au ventre, siège des appétits. « Vous qui faites partie de la Cité, précise Platon,vous êtes tous frères, mais le dieu, en modelant ceux d’entre vous qui sont aptes à gouverner, a mêlé de l’or à leur genèse ; c’est la raison pour laquelle ils sont les plus précieux. Pour ceux qui sont aptes à devenir auxiliaires, il a mêlé de l’argent, et pour ceux qui seront le reste des cultivateurs et des artisans, il a mêlé du fer et du bronze » (6).

« Une cité semble précisément être juste, souligne Platon, quand les trois groupes naturels présents en elle » exercent « chacun sa tâche propre » (7). Effectivement, de même que l’homme doit soumettre le ventre au cœur, puis le cœur à la raison, les arts qui sont au service du ventre doivent être soumis à l’art des guerriers, qui lui-même doit obéir à celui des magistrats, c’est à dire à la Politique – cette dernière étant inséparable de la philosophie, car les magistrats doivent être philosophes. Il distingue également trois sortes de régimes politiques, dont chacun est lié à l’une des fonctions de la cité et, par conséquent, à l’une des parties et des facultés de l’organisme humain : la monarchie, ou gouvernement d’un seul, et l’aristocratie, gouvernement des meilleurs, régimes commandés par la raison ; la timocratie, ou gouvernement des guerriers, est quant à elle commandée par les passions nobles, celles du cœur ; enfin la démocratie, ou gouvernement du plus grand nombre, régime caractérisé par les passions les plus basses de l’âme humaine et les appétits matériels…

Pas de doute : cette cité idéale platonicienne reposant sur trois classes strictement hiérarchisées, reproduit l’organisation traditionnelle de la société en trois fonctions propre aux indo-européens. En effet, dans une Grèce qui semble avoir totalement oublié la tripartition, Platon confie la vie politique de la cité à des philosophes-rois ,les Gardiens, assistés d’une caste militaire, les Auxiliaires, qui règnent sur les basses classes productives.

Platon est convaincu que seuls les Gardiens, c’est-à-dire les sages, ont la capacité d’user équitablement de la raison pour le bien commun, alors que les hommes ordinaires ne peuvent s’élever au-dessus de leurs passions et de leurs buts personnels. En contrepartie, les membres de ce qu’il faut bien appeler la caste dirigeante doivent mener une vie entièrement commune, sans propriété privée ni famille, autant d’éléments de tentation égoïste, de division et, au final, de corruption. « Nul bien ne sera la possession privée d’aucun d’entre eux, sauf ce qui est de première nécessité » décrète le philosophe, qui préconise en outre « qu’ils vivent en communauté, comme ceux qui sont en expédition militaire » , et que parmi les habitants de la cité « ils soient les seuls à n’avoir pas le droit de prendre une part, ou de toucher l’or et l’argent, les seuls à ne pouvoir entrer sous un toit qui en abrite, en porter sur eux comme ornement, ou boire dans un récipient d’or ou d’argent » (8).

« Car, ajoute-t-il, dès qu’ils possèderont privément de la terre, une habitation et de l’argent, ils deviendront administrateurs de leurs biens, cultivateurs au lieu d’être les gardiens de la cité, et au lieu d’être les compagnons défenseurs des autres citoyens,  ils en deviendront les tyrans et les ennemis, remplis de haine et eux-mêmes haïs, ils passeront leur vie conspirant contre les autres et deviendront objets de conspiration, et ils redouteront bien davantage et plus souvent les ennemis de l’intérieur que ceux de l’extérieur, se précipitant vers la ruine eux-mêmes et l’ensemble de la cité » (9). En outre, leurs enfants seront enlevés dès la naissance afin de recevoir une éducation collective de type militaire.

Ce « communisme platonicien », un communisme viril et ascétique sans rapport avec les cauchemars messianiques à la Marx et Trotsky, n’est pas sans rapport avec le national-communautarisme spartiate. D’ailleurs, Montesquieu ne soulignera-t-il pas avec justesse que « la politique de Platon n’est pas plus idéale que celle de Sparte ».

Edouard Rix, Réfléchir & Agir, hiver 2009, n°31.

NOTES

(1) G. Dumézil, L’oubli de l’homme et l’honneur des dieux et autres essais. Vingt-cinq esquisses de mythologies, Gallimard (Coll. « Bulletin des sciences humaines »), 1985, p.94.

(2) Ibid, p.13.

(3) Platon, La République, Flammarion (Coll. « Le monde de la philosophie »), 2008 p. 262.

(4) Ibid, p. 199.

(5) Ibid, p. 200.

(6) Ibid, p. 201.

(7) Ibid ,p. 245.

(8) Ibid,p. 205.

(9) Ibid, pp. 205-206.

Codreanu: "La domination absolue de l'Esprit sur le corps..."

La domination absolue de l'Esprit sur le corps...

Timbru_Codreanu.jpg"(...) Il y a deux aspects, pour la clarification desquels il faut avoir présent à l’esprit le dualisme de l’être humain, composé d’un élément matériel naturaliste et d’un élément spirituel. Quand le premier domine le second, c’est l’enfer. Tout équilibre entre les deux est chose précaire et contingente. Seule la domination absolue de l’esprit sur le corps est la condition normale et la prémisse de toute force vraie, de tout héroïsme véritable. Le jeûne est pratiqué par nous parce qu’il favorise une telle condition, affaiblit les liens corporels, encourage l’auto-libération et l’auto-affirmation de la volonté pure. Et quant à cela s’ajoute la prière, nous demandons que les forces d’en haut s’unissent aux nôtres et nous soutiennent invisiblement. Ce qui conduit au second aspect : c’est une superstition que de penser que dans chaque combat seules les forces matérielles et simplement humaines sont décisives ; entrent en jeu au contraire également les forces invisibles, spirituelles, au moins aussi efficaces que les premières. Nous sommes conscients de la positivité et de l’importance de ces forces. C’est pour cela que nous donnons au mouvement légionnaire un caractère ascétique précis. Dans les anciens ordres chevaleresques aussi était en vigueur le principe de la chasteté. Je relève toutefois qu’il est chez nous restreint au Corps d’Assaut, sur la base d’une justification pratique, c’est-à-dire que pour celui qui doit se vouer entièrement à la lutte et ne doit pas craindre la mort, il est bien de ne pas avoir d’empêchements familiaux. Du reste, on reste dans ce corps seulement jusqu’à 30 ans révolus. Mais, en tout cas, demeure toujours une position de principe : il y a d’un côté ceux qui ne connaissent que la “vie” et qui ne cherchent par conséquent que la prospérité, la richesse, le bien-être, l’opulence ; de l’autre, il y a ceux qui aspirent à quelque chose de plus que la vie, à la gloire et à la victoire dans une lutte tant intérieure qu’extérieure. Les Gardes de Fer appartiennent à cette seconde catégorie. Et leur ascétisme guerrier se complète par une dernière norme : par le vœu de pauvreté auquel est tenu l’élite des chefs du mouvement, par les préceptes de renoncement au luxe, aux divertissements creux, aux passe-temps dits mondains, en somme par l’invitation à un véritable changement de vie que nous faisons à chaque légionnaire."

Corneliu Zelea Codreanu

Perspectives juives sur le sionisme

Archives de SYNERGIES EUROPEENNES - 1990

Perspectives juives sur le sionisme

par le Rabbi MAYER-SCHILLER

 

herzl.jpgLa tendance du discours public contemporain est de tout simplifier à outrance. Les idées qui, jadis, étaient sujettes à des controverses très nuancées sont présentées aujourd'hui au public en termes manichéens, où tout est noir ou tout est blanc, de façon à pouvoir s'incruster dans l'esprit appauvri de l'homme moderne, dont les capacités d'attention sont désormais limitées. Nos contemporains, qui subissent sans cesse le bombardement massif des médias audio-visuels, ont besoin d'idées présentées selon un mode rapide, fluctuant.

 

Ce sont là des circonstances malheureuses qui frappent l'humanité en général et que l'on doit, en particulier, déplorer quand sont décrites les attitudes juives à l'encontre du sionisme politique. Si l'on croit les chaînes de communications populaires, on en vient à penser que le sionisme a toujours reçu l'appui absolu, aveugle et désintéressé de tous les Juifs. Rien n'est moins vrai.

 

Les perspectives juives

 

Dans cet article, fort bref, je présenterai plusieurs alternatives et critiques juives à l'endroit des principaux courants du sionisme politique. On s'en apercevra: les défenseurs des idées que je vais présenter ne sont souvent pas d'accord entre eux sur toute une série de questions essentielles. Ces désaccords, ces divergences, sont précisément le thème de mon article. Le sionisme, tel qu'il se présente aujourd'hui aux yeux du monde, est objet d'une très grande attention chez ceux auxquels il s'adresse en premier lieu: les Juifs.

 

Les critiques juives de l'idéologie sioniste dominante actuellement peuvent se répartir en trois catégories: 1) les critiques «éthiques-humanitaires»; 2) les critiques orthodoxes religieuses; et 3) les critiques «patriotiques», c'est-à-dire celles qui veulent que les Juifs s'identifient à leur nouvelle patrie dans les pays occidentaux.

 

Les critiques «éthiques-humanitaires»

 

Les fondateurs du mouvement sioniste politique sont de purs produits de la culture européenne du tournant du siècle. Distinguons d'abord le sionisme politique, qui n'a jamais cessé de défendre l'idée d'une souveraineté politique juive sur la Palestine, de l'amour naturel et de la vénération que les Juifs traditionalistes ont toujours éprouvé pour la Terre Sainte. Ce sentiment a conduit les Juifs orthodoxes, au cours des siècles, à entreprendre des pélérinages vers les lieux saints de la Palestine et à y établir de petites colonies vouées à la prière et à l'étude et qui ne cultivaient aucune aspiration politique. Au tournant du siècle, les sionistes d'Europe ont élaboré des plans pour que se constitue une patrie juive en Palestine, sans égards pour la population indigène. C'était typique pour l'époque colonialiste. Le destin et les droits à l'auto-détermination des peuples du tiers-monde n'étaient guère pris en considération dans l'Europe colonisatrice d'avant la Grande Guerre.

 

Mais quand ces sionistes de la première heure se sont aperçu du nombre réel d'Arabes vivant dans le pays, ils se divisèrent en trois tendances différentes. Je les classerai par ordre d'importance sur le plan quantitatif.

 

Il y avait d'abord les «sionistes travaillistes». C'est la faction principale du sionisme qui a tenu les rênes du pouvoir en Israël jusqu'il y a peu. Elle cherche une sorte de compromis avec les Arabes. Elle a accepté le plan de partition de la Palestine en deux Etats (1947). Elle a toujours estimé que l'obstination rendait impossible tout compromis. Aujourd'hui encore, quelques-uns de ses membres, élus à la Mapai Knesset  sont en faveur d'une solution à deux Etats. La seconde faction est celle dite du «sionisme révisionniste». Elle a toujours été militante. Elle a sans cesse réclamé l'ensemble de la Palestine alors sous mandat et croyait arriver à ce but par le terrorisme. Ce groupe existe encore aujourd'hui au sein de la coalition qu'est le Likoud, dirigé par Yitzhak Shamir. Il appelle de ses vœux le «Grand Israël», en refusant, par principe, de négocier avec les Palestiniens. Le troisième groupe, que l'on a appelé tantôt les «sionistes culturels» ou les «sionistes éthiques», a senti d'emblée que la politique du mouvement à l'égard des Arabes était mauvaise. Martin Buber, mort en 1964 et figure de proue de la philosophie juive contemporaine, chef de file du mouvement Brit Shalom  (Diète de la Paix), écrit: «Les Arabes sont le test que Dieu a envoyé au sionisme». Les «sionistes éthiques» estiment que l'immigration juive vers la Palestine et l'installation de colonies juives dans ce pays ne peuvent s'effectuer que sur base d'une conciliation fraternelle avec les Palestiniens. Toutes les mesures que ces derniers pourraient ressentir comme des impositions immorales ne devraient pas être concrétisées.

 

Ahad Ha'Am, un intellectuel s'inscrivant dans la tradition du «sionisme culturel», se lamentait, dans les années 20, après qu'un rapport lui était parvenu, relatant les attaques vengeresses de Juifs contre des Arabes innocents en Palestine: «Les Juifs et le sang!... Notre sang a été versé au quatre coins du monde pendant des milliers d'années, mais, jusqu'ici nous n'avions jamais fait couler le sang des autres... Qu'allons-nous dire maintenant si cette horrible nouvelle s'avère exacte?... Est-ce cela le rêve du retour à Sion: maculer son sol d'un sang innocent? Si c'est cela le Messie, alors je ne souhaite pas assister à son arrivée!».

 

Jusqu'à présent, cette troisième perspective, celle du «sionisme éthique», s'est opposée à la politique choisie par le gouvernement israëlien à l'encontre des Palestiniens. Jadis, la plupart des «sionistes culturels» prônaient un Etat uni bi-culturel mais, de nos jours, où les attitudes collectives se font plus intransigeantes de part et d'autre, ils sont généralement en faveur de la solution dite des «deux Etats». Les adeptes contemporains du «sionisme culturel/éthique» se retrouvent dans des organisations comme «La Paix Maintenant», dans des partis politiques comme le Mapam, le CRM ou dans certaines factions des Travaillistes. Le «sionisme éthique» n'est pas monolithique: on le retrouve également dans une organisation comme celle du Rabbi Elmer Berger, American Jewish Alternatives to Zionism (Alternatives juives-américaines au sionisme), qui s'oppose globalement à l'Etat d'Israël; ou dans une revue américaine, intitulée Tikkum, qui réclame un plan dûment conçu, élaboré avec le souci de ne heurter personne, prévoyant une solution à deux Etats. Cette troisième perspective a son commun dénominateur dans le constat que le sionisme dominant, le sionisme réel, et les pratiques de l'Etat hébreux remettent en question les principes de base de la morale et de l'humanisme. Répétons-le: la plupart de ces gens sont des sionistes convaincus; ils estiment que les Juifs doivent avoir une patrie mais tiennent compte des revendications opposées des Palestiniens. Ils réclament la justice pour tous et veulent un compromis qui puisse apporter la paix et la sérénité.

 

Les Orthodoxes religieux

 

Dès les débuts du sionisme politique, de larges factions de la Judaïté orthodoxe s'y sont opposées. L'antagonisme qu'elles nourissaient était à facettes multiples, mais toutes étaient centrées autour des considérations suivantes: 1) Etablir une souveraineté politique juive en Terre Sainte est profondément illégitime avant la fin messianique des temps, que seul Dieu décidera; 2) le sionisme est un mouvement essentiellement séculier qui cherche à substituer le «nationalisme» à la religion; 3) le sionisme, avec sa propension à vouloir la guerre, provoquera une dégradation dangereuse des rapports entre Juifs et Gentils.

 

Après la création de l'Etat d'Israël en 1948, les Juifs anti-sionistes se sont divisés en deux camps. Le premier, incarné principalement dans le parti Agudat Israël,  tant en Israël qu'ailleurs dans le monde, a conservé son absence d'enthousiasme à l'encontre du sionisme, mais a choisi de le reconnaître malgré tout et de participer au gouvernement. Son idéologie se préoccupe essentiellement de questions religieuses mais est en faveur de tous les compromis territoriaux afin de faire la paix avec les Palestiniens.

 

Le second camp anti-sioniste est celui que l'on nomme du nom générique de Kanaïm  (les Zélotes). Il refuse de reconnaître l'Etat d'Israël qu'il juge intrinsèquement mauvais. Les groupes partageant cette philosophie sont: le groupe Satmar,  disséminé dans le monde entier, le Toldot Aron  à Jerusalem, le Neturei Karta  et tous ceux qui sont affiliés à l'autorité rabbinique traditionnelle d'Aidah Haredis en Israël.

 

Notons que les deux sentiments que nous venons de décrire regroupent presque la totalité de tous les Juifs orthodoxes d'orientation traditionnelle. Le sionisme politico-religieux, principalement représenté au cours de ces dernières décennies par le mouvement Mizrahi,  a toutefois été moins engagé sur le plan religieux que ses adversaires anti-sionistes. Au cours des deux ou trois dernières décennies, surtout depuis la guerre de 1967, une fraction du sionisme religieux s'est développée en s'associant à des colons de la rive occidentale du Jourdain pour former le mouvement militant connu sous le nom de Gouch Emounim,  qui veut le «Grand Israël». Contrairement au mouvement Mizrahi,  déjà ancien, ils adoptent ouvertement des attitudes religieuses. Bien évidemment, ces sionistes néo-religieux sont condamnés tant pas le mouvement Agudat Israël  que par les Kanaïm.

 

Les mouvements patriotiques

 

Bon nombre de Juifs d'Europe occidentale se sont opposés au sionisme parce qu'ils voyaient en lui un mouvement qui érodait le patriotisme et le loyalisme à l'égard de la nation-hôte. Le Rabbi Samson Raphaël Hirsch, chef de file religieux en Allemagne au XIXième siècle, s'est fait l'avocat passionné du patriotisme juif à l'endroit de la nation-hôte. Sa position reflétait, de façon typique, les positions de ses contemporains. Par exemple, l'American Reform Jewry  n'a mis un terme à sa dénonciation constante du sionisme que juste avant la seconde guerre mondiale. Selon les tenants du «patriotisme juif», les Juifs vivant en dehors d'Israël, parmi les autres nations, ne pourraient être qu'anti-sionistes ou, au moins, non sionistes. L'émigration vers Israël ne serait qu'une option parmi d'autres options.

 

La seconde guerre mondiale

 

Les terribles souffrances endurées par la Judaïté européenne sous le joug des Nazis et de leurs alliés, souvent acceptées passivement par le gros de la population non nazie, ont changé de façon significative l'attitude des Juifs à l'égard du sionisme. Depuis la guerre, beaucoup de Juifs considèrent Israël comme une nécessité, comme un havre potentiel sûr où fuir au cas où de nouvelles persécutions diaboliques s'enclencheraient.

 

Cette peur, profondément enracinée, n'est pas un simple fantasme. Elle est née des terribles événements d'il y a cinquante ans. Depuis 1945, le «patriotisme juif», critique à l'égard du sionisme, s'est de lui-même mis en sourdine. Les Juifs ont hésité à mettre leur destin entre les mains de peuples susceptibles de se retourner contre eux. Cette peur, héritée du passé, joue également un rôle dans le refus du gouvernement israëlien de faire confiance aux Palestiniens, même si ceux-ci ont montré beaucoup de bonne volonté récemment.

 

Quel futur?

 

Les efforts des sionistes non impérialistes pour influencer le gouvernement israëlien, pour l'amener à un compromis avec les Palestiniens, ne progresseront que dans la mesure où les Juifs commenceront à sentir que les non Juifs ne leur veulent pas de mal. C'est là que doivent jouer les non Juifs possédant un sens clair, aigu, de leur propre identité: eux seuls peuvent contribuer à déconstruire les peurs juives précisément parce que ce sont eux que les Juifs craignent le plus.

 

Pour leur part, les Juifs vivant au sein des nations européennes doivent garder à l'esprit que ces nations sont des communautés soudées par des identités, possédant une culture propre, des normes de comportements distinctes, etc. Et que toutes les tentatives pour préserver ces identités, cultures, normes, etc., pour les promouvoir et les enrichir ne doivent pas être contrecarrées ou ne doivent pas susciter la peur. Ensuite, il faudrait que les Juifs qui optent pour le sionisme adhèrent aux variantes non impérialistes de cette idéologie.

 

Respect et sympathie

 

Les «troisièmes voies» sont des voies réclamant le respect mutuel entre les peuples et la sympathie réciproque. Tous ceux qui veulent apprendre sincèrement à connaître l'Autre, quel qu'il soit, sont appelés à élaborer les paramètres d'une coexistence harmonieuse, non oblitérante.

 

Rabbi MAYER SCHILLER,

New York.

(article tiré de Third Way,  Nr. 2, June 1990; adresse de la revue: P.O. Box 1243, London, SW7 3PB).

 

Suggestions de lecture

 

Pour une bonne présentation du sionisme éthique, lire Martin Buber, Un pays, Deux peuples. Ou, pour une illustration de la même thématique mais plus actualisée, lire le livre d'Uri Avnery, My Friend the Enemy (Mon Ami, l'Ennemi). Pour comprendre la position de Naturei Karta, lire The Transformation  de Cyril Domb. Dans Horeb, le Rabbi Samson Raphaël Hirsch traite de la totalité du judaïsme mais nous trouvons, dans son livre, bon nombre d'éléments pertinants quant à notre propos. Le «sionisme culturel» d'Ahad Ha'Am a été abordé par son disciple Hans Kohn dans Zion and the Jewish National Idea,  dont on peut se procurer une photocopie à la rédaction du magazine britannique Third Way  (P.O. Box 1243, London, SW7 3PB).   

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dimanche, 14 mars 2010

Le déclin comme destin

Le déclin comme destin

par Guillaume Faye

declin.jpgEn apparence l’erreur d’Oswald Spengler fut immense : il annonçait pour le XXe siècle le déclin de l’Occident, alors que nous assistons tout au contraire à l’assomption de la civilisation occidentale, à l’occidentalisation de la Terre, à la généralisation de cet « Occident » auto-instauré comme culture du genre humain, dont, suprême paradoxe, les nations néo-industrielles de l’Orient constitueront peut-être d’ici peu l’avant-garde. En apparence toujours, c’est au déclin de l’Europe que nous sommes conviés. Montée en puissance de l’Occident et perte de substance de l’Europe : les deux phénomènes sont sans doute liés, l’un entraînant l’autre. Tout se passe comme si, après avoir accouché de l’Occident, répandu aujourd’hui sur toute la planète, l’Europe épuisée entrait dans un nouvel âge sombre.

La thèse ici présentée sera simple : l’Occident n’est pas « en » déclin – il est au contraire en expansion – mais il est le déclin. Et il l’est depuis ses fondements, depuis son décollage idéologique au XVIIIe siècle. L’Europe, quant à elle, n’est qu’en décadence.

Déjà, parle l’étymologie : l’« Occident » est le lieu où le soleil se couche. Et, dans son essence, la civilisation occidentale, apparent mouvement ascendant, se confond en réalité avec une métaphysique du déclin, un dépérissement du principe solaire qui, superficiellement, semble la fonder. Ce déclin intrinsèque qui est la loi de l’Occident n’est pourtant pas facile à déceler tant il est empreint de paradoxes.

Premier paradoxe : alors que l’idéologie occidentale entre dans son déclin – déclin des théories progressistes, révolutionnaires, démocratistes, etc. – la civilisation occidentale connaît, même sur le plan politique, une expansion irrésistible de ses régimes économiques et politiques, qu’ils soient socialistes ou capitalistes, au détriment des traditions locales de souveraineté et de culture. Deuxième paradoxe : alors que l’Europe semble entamer, hélas, en tant qu’ensemble continental, un dépérissement dans un nombre impressionnant de domaines, l’Occident qui constitue, pour Abellio comme pour Heidegger, le fils métaphysique et géopolitique de cette Europe, explose à l’échelle de la planète entière. Troisième paradoxe : alors qu’au sein même de notre culture, nous vivons l’implosion du sens, le déclin des grandes valeurs constituantes, l’effondrement des ressorts spirituels, nous assistons en même temps à la montée en puissance de la partie matérielle de notre culture, de sa « forme », c’est-à-dire de ses manifestations technologiques et scientifiques qui sont en passe de détenir le règne absolu de la Terre.

La civilisation technique et économique qui, partie d’Europe et d’Amérique du Nord, gagne la planète entière, ne peut pas sérieusement être confondue avec un fait de « décadence ». Les historiens nous ont montré, par exemple, que la fameuse « décadence de l’Empire Romain », trop souvent et à tort comparée avec notre situation, s’accompagnait d’une régression des « formes » de civilisation : techniques, institutions, villes, infrastructures, échanges, etc.

Toujours de plus en plus de routes, d’usines, d’avions, d’écoles, d’hôpitaux, de livres, de pollution et d’êtres humains. Troisième paradoxe : plus la « structure » explose, moins ses assises idéologiques et morales semblent assurées. On assiste en parallèle à une explosion des formes de civilisation, et à une implosion des valeurs, des idéologies et surtout de tous les fondements moraux et spirituels qui confèrent un « sens » englobant aux sociétés.

Quatrième paradoxe : si l’on se contente même de considérer le secteur de la pure économie, on observe une crise des mécanismes mondiaux de libre-échange commerciaux et monétaires, mais en même temps une irrésistible progression des technologies et de l’organisation commerciale et scientifique de l’humanité. Cinquième paradoxe : à l’heure où l’effondrement des taux de fécondité partout dans le monde (commencé en France au XVIIIe siècle et dans le Tiers-monde ces dernières années) n’a encore donné lieu à la dénatalité que dans les seuls pays industriels, la population mondiale, du fait d’une loi arithmétique simple à saisir, continue de croître à un rythme exponentiel [1].

Ces cinq paradoxes sont inquiétants. Au lieu de vivre des déclins globaux et linéaires comme les autres civilisations qui nous ont précédés, nous subissons ce que l’on pourrait nommer un « déclin emboîté dans une expansion ». Comme si la civilisation occidentale était une machine devenue folle, son centre implose tandis que sa périphérie explose. L’Europe régresse, l’Occident se répand. Le sens disparaît, les formes croissent. Le « sang » s’évapore, mais les veines se ramifient en réseaux de plus en plus vides. De moins en moins de cerveau, mais de plus en plus de corps et de muscles. De moins en moins d’humanité, mais de plus en plus d’hommes. De moins en moins de cultures, mais de plus en plus de civilisation. Tout cela ressemble étrangement à une prolifération cancéreuse. Un cancer, en effet, c’est le déclin de la différenciation qualitative des cellules au profit du triomphe de la reproduction quantitative.

La logique profonde de l’Occident, à travers l’égalitarisme social, la conversion de toutes les cultures aux mêmes modèles politiques et économiques, à travers la rationalisation de l’existence que ne peuvent même pas éviter les régimes qui, dans leurs doctrines, la combattent, c’est depuis ses fondements la réduction de l’organique au mécanique.

Le suprême paradoxe de l’Occident, c’est que son assomption est, sous l’apparence de la croissance et de la juvénilité, une entropie, c’est-à-dire une homogénéisation croissante des formes de vie et de civilisation. Or, la seule forme véritable du déclin, comme nous l’enseignent l’astrophysique et la biologie, c’est précisément l’entropie : croissance cancéreuse des cellules indifférenciées ou, selon le deuxième principe de la thermodynamique, déperdition d’énergie par homogénéisation. De ce point de vue, l’essence de l’Occident, c’est le déclin, puisque sa raison d’être est l’uniformisation des formes-de-vie humaines. Et l’essence du « progrès », c’est l’entropie. La multiplication explosive des technologies vient masquer ce déclin à ses propres protagonistes, exactement comme, dans le processus tragique de rémission des cancéreux, la prolifération des cellules indifférenciées donne, pour quelque temps, l’illusion de la santé et de la croissance organique. L’Occident est un vieillard qui se prend pour un adolescent.

Mais, dans la mesure où cette civilisation occidentale entre dans son « troisième âge », connaît à la fois un triomphe de ses formes, de ses quantités, de son expansion statistique et géographique mais un épuisement de son sens, de son idéologie, de ses valeurs, on peut se demander si elle n’est pas au bord de la résolution de ce déclin qu’elle porte en elle. Hypothèse : ce serait toute la Terre alors qui entrerait dans le temps du déclin, puisque, pour la première fois, toute une civilisation l’unifie, une civilisation minée de l’intérieur. La civilisation occidentale ressemble aux arbres de Paris : ils continuent à pousser alors même qu’ils sont rongés.

On peut considérer que l’uniformisation de la Terre entière sous la loi d’une seule civilisation – politique, économique et culturelle – est un processus bio-cybernétique, puisqu’il s’agit, comme le montrèrent Lupasco et Nicolescu, d’une homogénéisation d’énergies. Pour l’instant cette entropie est « expansive » ; elle sera un jour, comme toute entropie dans sa phase n° 2, implosive. Et n’allons pas croire, comme l’imagine Lévi-Strauss, que de « nouvelles différences » et de nouvelles hétérogénéités puissent surgir au sein d’une civilisation mondiale devenue occidentale [2]. Il ne s’agirait que de spécificités superficielles, des folklores ou des « variantes ». Et, dans la mesure où cette accession historique de l’humanité à une seule et même civilisation occidentale, démocratique, prospère, individualiste et égalitaire constitue le projet des idéologies du Progrès depuis plus d’un siècle, qu’elles soient socialistes ou libérales, ne doit-on pas se demander si l’idée même de Progrès ne serait pas la figure centrale du Déclin ? La matière et l’essence du Progrès, c’est l’accès de tous les hommes à la même condition et à la même morale sociale, réputée universelle. En ce sens, les doctrines progressistes, sécularisant les religions monothéistes de la vérité révélée, entament un processus de fin de l’histoire, de fin des histoires de chaque peuple.

Nous entrevoyons cette fin de l’histoire aujourd’hui : statu quo planétaire par la menace thermonucléaire, condominium soviéto-américain sur le monde qui gèle les indépendances nationales, « gestion » techno-économique et financière d’une économie mondiale qui uniformise les modes de production et de consommation, etc. On ne cesse de dire, après Alvin Toffler, que nous entrons dans la « troisième révolution industrielle » ; c’est vrai, mais ne perdons pas de vue néanmoins cet étonnant paradoxe : au fantastique bouleversement des formes socio-économiques correspond la glaciation des formes politiques et « historiques ». Nous vivons une « mutation immobile ». Tout vibre (technologies, rapports sociaux et économiques) mais rien ne « bouge » (géopolitique) ; ou plutôt rien ne bouge encore. Et, comme la conscience historique, les idées et les valeurs, elles aussi, congèlent.

Derrière son triomphe, la civilisation occidentale voit aujourd’hui son ressort brisé : ses mythes fondateurs et ses idéologies dépérissent et se sclérosent. Le progressisme, l’égalitarisme, le scientisme, le socialisme ont désenchanté leurs partisans et ne mobilisent plus les énergies. Les modèles politiques d’une civilisation quantitative, tout entière fondée sur l’économie, ont produit à l’Est le totalitarisme tyrannique, à l’Ouest le totalitarisme doux et despotique de la société de consommation prévu par Tocqueville, et dans le Tiers-monde, l’ethnocide et le paupérisme de masse, ce dernier masqué par la triste mystique du « développement ». Devenues anti-révolutionnaires, les idéologies occidentales, à l’image de cette civilisation néo-primitive qu’elles représentent, convergent aujourd’hui dans un social-libéralisme tiède, cynique, sans projet, gestionnaire, inessentiel, rassemblé autour de la vulgate académique des « Droits de l’Homme », dont Claude Polin a bien montré l’inanité et l’inefficacité [3]. Privée de toute transcendance, organisée dans son principe autour du rejet de toute référence au spirituel, la civilisation occidentale est l’organisation technico-rationnelle de l’athéisme. Or, mutilée de ses dieux, quels qu’ils soient, une culture humaine se condamne à terme, même si par ailleurs brille l’éclat de Mammon, même si l’accumulation technologique, la progression nominale des revenus ou les « progrès de la justice sociale » donnent l’illusion de la vitalité.

Mais cette ascension de l’économie et de la technique, au nom de quoi la prendre pour une amélioration ? Il est facile de démontrer, par exemple, que les processus mentaux de la société de consommation, même du point de vue de l’intelligence gnoso-praxique et technicienne, ne sont pas nécessairement plus élaborés que ceux des sociétés traditionnelles. La société technicienne voit, concrètement, décliner l’incorporation de « spirituel » (Evola) ou d’« être » (Heidegger), et même peut-être aussi d’intelligence dans ses formes de vie [4]. Et, paradoxalement, puisque le monde, contrairement aux vues chrétiennes n’est pas dualiste mais associe dans une apparente contradiction ce qu’il y a de plus immatériel et ce qu’il y a de plus biologique dans la même unité organique et vitaliste, il n’est pas étonnant qu’au déclin spirituel corresponde aussi le déclin de l’esprit de lignage, le déclin démographique. Conscience biologique et conscience spirituelle sont liées.

La séparation opérée par le dualisme chrétien entre Dieu et le monde a profondément marqué la civilisation occidentale, rompant avec l’unité du transcendant et de l’immanent de la tradition hellénique. Pénétrant l’inconscient collectif et les formes de civilisation, ce dualisme a progressivement donné lieu à un désenchantement et à une désacralisation du monde, à une civilisation schizophrène : d’où les séparations mutilantes entre l’Etat-Père-et-Juge et la société, entre la Loi et le peuple, entre les rationalités du libéralisme et du socialisme et l’élan vital « aveugle » (mais donc clairvoyant parce qu’« obscur ») des civilisations, entre l’individu érigé en monade et ses communautés, entre la légitimité apparente de l’Occident, c’est-à-dire cette « démocratie » dont tous (tyrans compris) se réclament sans en percevoir le sens, et les aspirations réelles des populations, entre la Technique figure dominante du temps, et l’idéologie.

Ces deux derniers points méritent des précisions. Le divorce entre la Technique, aujourd’hui prosaïque et désenchantée et l’idéologie fut souvent mal compris, notamment par Spengler et Jünger. Ce n’est pas, selon nous, la Technique qui constitue la cause du matérialisme, de l’uniformisme et de la déspiritualisation de l’Occident ; mais c’est l’idéologie occidentale elle-même qui a fait de cette Technique le moteur de sa logique mortifère. La Technique est désenchantée et non désenchantement dans son essence. La raison en est ce divorce entre l’essence de la Technique qui est, comme le vit Heidegger, poétique, lyrique, faustienne, donc spirituelle et « artistique », et les idéologies dominantes en Occident qui n’assignent à cette Technique que le prosaïsme mécanique de la domestication par le bien-être et la finalisent comme « technologie du bonheur individuel ». Si la fusée Ariane ne fait pas rêver alors qu’elle le devrait, qu’elle devrait représenter pour notre imaginaire la « transfiguration des dieux », c’est parce que sa finalité est la retransmission des émissions de télévision, c’est-à-dire l’expression du « banal » le plus plat.

Et lorsque Gilbert Durand en appelle à la renaissance des ombres de l’imaginaire, seules capables peut-être d’affronter le désenchantement de la techno-société de consommation, ce n’est pas dans la consommation du passé, dans les musées, dans les études, dans les nostalgies, dans les mythes mis en fiches informatiques qu’elles pourront être retrouvées. C’est paradoxalement dans la contemplation brute des ordinateurs eux-mêmes, dans les fusées et les centrales, bref dans une Technique qui porte en elle le plus grand potentiel de rêve que l’humanité ait pu trouver et qui est aujourd’hui neutralisée, déconnectée, par des idéologies et des modèles sociaux tout entiers dominés par la petitesse domestique et la froide logique comptable des bureaucraties.

La deuxième conséquence grave du dualisme occidental porte sur le divorce entre le régime politique officiel (la fameuse « démocratie ») et la manière dont ce régime est concrètement ressenti, est socialement vécu par les prétendus « citoyens ». Nous ne pouvons ici qu’énumérer sans les développer les effets de ce divorce : non-représentativité radicale de la classe politique, toute-puissance des féodalités minoritaires (corporations syndicales, médias, réseaux bancaires, corps technocratiques), simulacre de participation électorale des citoyens au pouvoir par le caractère inessentiel des enjeux des scrutins, volonté constante des partis politiques de détourner à leur profit l’opinion réelle du peuple, etc. Plus que jamais, l’opposition entre pays réel et pays légal demeure la règle. Fondé sur la souveraineté du peuple, l’Occident l’établit moins encore que les sociétés traditionnelles tant décriées comme tyranniques. Dans cette affaire, le plus grave n’est pas l’absence de « démocratie » (mieux vaudrait à tout prendre un pouvoir qui reconnaisse officiellement l’impossibilité de la démocratie et qui fonde la souveraineté sur – par exemple – une autocratie sacralisée) mais la schizophrénie endémique, le mensonge permanent d’un système de pouvoir qui, à l’Est comme en Occident, tire sa légitimité d’un principe (le Peuple souverain) qui non seulement n’est pas appliqué, mais dont la principale préoccupation des classes dirigeantes est d’en interdire l’application.

En effet, que craignent et que combattent le plus les partis, les syndicats, les grands corps, les médias progressistes (et en URSS le PCUS) sinon la démocratie directe, sinon le césarisme référendaire où l’avis brutal du peuple s’exprime sans ambages ? Et pourquoi redoutent-ils tant ce peuple ? Parce qu’ils savent bien que dans ses profondeurs l’humanisme, l’égalitarisme éclairé, le cosmopolitisme déraciné n’ont pas de prise. Ils savent qu’au sein du peuple « ignorant », livré à lui-même sans l’encadrement des « élites » syndicales, partitocratiques et journalistiques, vivent toujours des valeurs et des aspirations qui ne correspondent pas à ce que les scribes, les technocrates, les politiciens et les prêtres attendent.

Ceux-là, qui tiennent la position d’« élites européennes » mais qui n’en ont pas la carrure, en proie au vide intellectuel et idéologique, se rallient comme à une bouée de sauvetage à la vulgate occidentale. La « droite » et la « gauche » politique font converger leurs discours appauvris dans le même atlantisme socio-libéral. Avec impudence, la gauche française, après l’échec prévisible de son « socialisme », accomplit les funérailles discrètes de celui-ci et se nomme porte-parole du capitalisme et de l’individualisme, abandonnant définitivement tout discours révolutionnaire. Ainsi naît, sur le plan idéologique comme sur le terrain politicien, une « gauche-droite », nouveau parti unique des démocraties occidentales, qui communie dans l’atlantisme, la défense de l’Occident (thème jadis des crypto-fascistes), le reaganisme, la philosophie sommaire des Droits de l’Homme et le conservatisme.

Cette « gauche-droite » idéologique et politique ne se caractérise pas seulement par son occidentalisme mais par sa dérive anti-européenne masquée par un anti-soviétisme primaire et un discours apparemment pro-européen. Il s’agit de nier toute spécificité et toute indépendance à l’Europe en la désignant comme simple zone (et comme bouclier) de l’Occident atlantique [5].

Or il se trouve que, pour la première fois sans doute dans son histoire, l’Europe n’a plus les intérêts de l’Occident (culturels, géopolitiques et économiques) et qu’un découplage de l’Europe et de l’Occident américanomorphe est devenu nécessaire. C’est précisément parce qu’elle participe exclusivement de la civilisation occidentale – qui fut jadis européenne mais qui ne l’est plus – que l’Europe est entrée en décadence.

Les figures de la décadence européenne sont connues. Rappelons-les pour mémoire : cette civilisation qui est toujours virtuellement la plus dense et la plus puissante de la Terre, gît, comme Gulliver enchaîné, démembrée par le condominium soviéto-américain. Privée d’indépendance politique, futur champ clos d’un affrontement entre les deux Super-Gros, l’Europe vit avec la perspective de son génocide nucléaire. Le « jour d’après » ne concerne pas, en réalité, nos deux protecteurs. Victime d’une guerre économique qui la désindustrialise, en proie au centre à la colonisation et à l’occupation et, à l’ouest, à la déculturation et à l’exploitation, l’Europe est également en chute démographique. Dans tous les domaines, après avoir explosé, l’Europe, comme un trou noir, implose. Elle entre, comme après la chute de Rome, dans un nouvel âge sombre.

Mais la décadence européenne est moins grave et n’apparaît pas de même nature que le « déclin explosif » qui porte l’Occident. Ce dernier, répétons-le, est le déclin ; il porte en lui le dépérissement de toutes choses. Le déclin d’un organisme est sans rémission, parce qu’il touche ses fondements et son principe. L’Occident a un principe, abstrait, c’est l’idéologie (américanisme ou soviétisme, tous deux sécularisations du christianisme). Or l’Europe n’est pas un principe, mais un peuple, une civilisation, une histoire, de nature vivante et organique et non pas mécanique. En ce sens l’Europe n’est qu’en décadence. Elle traverse un âge sombre dont elle peut se remettre. Elle est malade et peut se guérir par auto-métamorphose, alors que l’Occident est inguérissable parce qu’il ne peut pas se métamorphoser, parce qu’il obéit à une logique linéaire, ignorant tout polymorphisme. Comme le formule l’historien Robert Steuckers, l’Occident américain est l’alliance de l’Ingénieur et du Prédicateur ; l’Occident soviétique est l’alliance de l’Ingénieur et de l’Idéologue. Or l’Idéologue et le Prédicateur perdent, en ce moment même, leur légitimité, leur mystique, leur enchantement. Le travail de l’Ingénieur, qui n’était fondé que sur la corde raide de leurs discours et qui continue, pour un temps encore, par effet inertiel, son processus, est condamné à terme parce qu’il n’est plus alimenté. L’Europe, en revanche, est l’alliance de l’Ingénieur et de l’Historien. Le discours de ce dernier, irrationnel, fondé sur les profondeurs de l’imaginaire, peut sans doute entrer en crise comme aujourd’hui, mais il est inépuisable parce qu’il peut se régénérer selon le principe dionysiaque de perpétuelle efflorescence.

L’Europe n’est que provisoirement liée au discours occidental. Ses « principes de vie » sont multiples : un peuple ne doit pas son existence, à l’inverse de l’Occident américain ou soviétique, à un mécanisme idéologique, à une légitimité « politique » qu’il faut sans cesse justifier, ou, pire encore, à la logique quantitative de l’économie. Pour survivre, un vrai peuple – cas de l’Europe et de nombreuses civilisations du « Tiers-monde » – n’a rien « à prouver ». L’Occident, lui, doit sans cesse « prouver » ; or, c’est précisément ce qu’il ne peut plus faire…

La décadence de l’Europe est liée aux effets de la civilisation occidentale, qu’il s’agisse de l’américanisme et du soviétisme. Mais, paradoxalement, le déclin déjà commencé de cette civilisation, même si dans un premier temps paraît être la cause de la décadence européenne, sera, dans un second mouvement, la condition d’une régénération de la culture européenne.

La condition d’une renaissance européenne doit être trouvée dans une auto-métamorphose comme notre histoire en connut plusieurs : abandon des idéologies occidentales et naissance de nouveaux fondements que nous ne connaissons pas encore, qui ne peuvent être qu’irrationnels et spirituels, et qui, eux aussi, n’auront qu’un temps.

Mais la civilisation normalisée, ayant transformé en morale prosaïque et réglementaire ses propres principes spirituels fondateurs, ne laisse plus d’espace à la création de valeurs mobilisatrices. Le narcissisme devient la destinée d’individus qui s’isolent dans le présentisme face à une société devenue autonome, dont les normes n’ont d’autres fins qu’elles-mêmes. Dans ces conditions, peut-on considérer comme un « retour du sens », comme une réponse spontanée de la société aux structures normalisatrices, les multiples manifestations contemporaines qui, dans leurs « explosions », font apparemment échec à la transparence rationnelle des discours et à la froideur des mécanismes techno-économiques ? Les phénomènes récents de libéralisation des mœurs, l’inventivité des groupes qui viennent en « décalage » où la sociologie pense découvrir de nouveaux types de rapports humains, le mouvement diffus de réenracinement culturel qui semble annoncer un réveil des cultures populaires contre la culture marchande de masse, etc., tout cela augure-t-il un renouveau d’un « paganisme social » contre la normalisation des Etats-Providence ? Ou bien n’assistons-nous pas à la naissance de « soupapes de sécurité », comme des porosités dans le corps de la norme par où s’échapperaient, en quantités programmées, des énergies virtuellement dangereuses qui se verraient récupérées et neutralisées, transformées en « distractions », reproduites comme « loisirs » ? Il est difficile de répondre. Cependant on ne peut s’empêcher de noter que notre époque voit coexister deux phénomènes inverses, l’un de renforcement des normes techno-économiques, l’autre de libération des morales privées. L’hétéronomie sociale répond à l’autonomisation des règles non-économiques d’existence. Ce parallélisme, qui n’est pas forcément un hasard, nous incite à considérer très attentivement la fonction des mouvements de libération et d’innovation des mœurs, sans cependant négliger les espoirs qu’ils peuvent aussi susciter. Quoiqu’il en soit, pour répondre à ce désir de normalité, devenue normalisation effective, où nous enferme l’idéologie occidentale, je suis enclin à fonder plus d’espoir sur les peuples que sur les sociétés, ces peuples que mettent en branle non pas des « vibrations » de mœurs mais des mouvements de l’histoire. Or l’Europe, avant d’être une société, n’est-elle pas d’abord un peuple ?

Paradoxalement, la chance de l’Europe réside peut-être dans sa vieillesse qui peut se transformer en jeunesse : l’Europe touchée la première par la civilisation occidentale, réagira peut-être la première contre elle. En ce cas, la décadence serait un facteur d’anti-déclin, et la sénescence, un facteur d’expérience et de rajeunissement : revenus de tout, désenchantés, les néo-européens des jeunes générations qui, dans leur « docte ignorance », ne veulent même plus savoir ce que politique, démocratie, égalité, Droits de l’Homme, développement, etc. signifient, qui ne croient plus dans le prométhéisme vulgaire des mystiques socialistes ou capitalistes, reviennent, du fait de cette apparente dépolitisation, aux choses essentielles : « nous ne voulons pas mourir, avec notre peuple, écrasés par une guerre atomique en Europe dont les enjeux ne sont pas les nôtres ; nous ne voulons pas nous « engager » auprès d’une droite ou d’une gauche, d’un occidentalisme ou d’un soviétisme qui ne sont que les visages faussement antagonistes du même totalitarisme ». Ce discours est fréquent dans la jeunesse. Tant mieux ; c’est celui de l’« Anarque » d’Ernst Jünger. C’est un discours révolutionnaire et engagé sous des apparences de désengagement et d’incivisme. C’est l’attitude des neutralistes allemands qui n’expriment nullement une démission, mais une prodigieuse énergie, l’éternelle ruse du peuple qui sait qu’on peut se relever d’un « régime politique » mais pas d’un holocauste.

La renaissance arborescente, rusée ou inconsciente, des vitalités populaires de toutes natures contre l’ordre froid des planificateurs ou des libéraux, des centralisateurs ou des décentralisateurs, des politiciens, des « humanistes », des prêtres, des professeurs, des socialismes, des libéralismes, des fascismes – et même des « anarchismes »… – contre les règlements, les réseaux, les programmes et les circuits, contre l’égalité et l’inégalité, la justice et la tyrannie, la liberté et l’oppression, la démocratie et le despotisme, la société permissive ou le totalitarisme, bref contre tous ces faux contraires, ces fausses fenêtres des idéologies occidentales dont le dessein commun est, comme jadis Moïse, d’imposer leur Loi contre la vie et le réel, cette renaissance donc, constitue aujourd’hui, notamment dans les jeunes générations, la principale force de l’anti-déclin. En-dehors des Etats et des institutions officielles des pays occidentaux qui sont devenus aujourd’hui des forces de dépérissement, il faut parler d’une résistance populaire. Résistance aux décadences, au social-étatisme, aux plats pré-cuisinés des angélismes humanitaires et des croyances progressistes, résistance de la sagesse dionysienne face à la folie prométhéenne des niveleurs, résistance multiforme dont l’indifférence croissante envers la politique n’est qu’un aspect.

Ce vitalisme social n’est pas un désengagement, mais un engagement. Dans un monde où tout ce qui se veut légitime et institué en appelle au narcissisme de masse, au travail aliéné, au présentisme, au machinisme, au déracinement, de nouvelles énergies apparaissent spontanément et, malgré les pressions des pouvoirs et des pédagogies, osent « faire de la musique sans solfège ».

Fils de la décadence, les néo-européens, nouveaux barbares, ne connaissent même plus la vulgate du moralisme humanitaire occidental. C’est là l’effet pervers – et de notre point de vue positif – du déclin de l’éducation culturelle en Europe : sous prétexte d’égalité et d’universalisme, l’idéologie dominante a négligé l’enseignement de la culture élitaire. Mais elle a jeté le bébé avec l’eau du bain. Les jeunes générations se retrouvent peut-être déculturées, privées de mémoire, ce qui était le but recherché par les professeurs de déracinement, mais également – ce qui est sans doute un événement considérable – libérées de la scholastique et des tabous des idéologies mortifères de l’Occident. Les grands concepts sacrés (Egalité, Démocratie, Politique, Liberté, Economie, Développement, etc.), responsables du déclin, flottent désormais comme des corps morts dans le panthéon mental des jeunes générations.

De deux choses l’une alors : ou bien cette fin radicale de la « culture classique » (à laquelle appartiennent malgré tout toutes les catégories politiques actuelles et toute la mystique égalitaire de l’Occident) ne donnera lieu qu’au vide et à l’immersion dans le néo-primitivisme, ou bien elle laissera surgir le fond assaini du psychisme européen, le fond issu de notre « instinct grec ». Au diagnostic apparemment pessimiste de « fin de l’histoire » qui semble toucher les Européens, on peut objecter sans doute qu’à l’étage du quotidien, de l’intensité de la vie des sociétés, les « histoires » continuent de dérouler leurs stratégies et qu’il ne faut pas jouer les Cassandre. Mais, privées de la dimension « historiale » (et non pas « politique » puisque « politique », « individualisme » et « fin de l’histoire » vont ensemble) de leur existence, démunies de perspective souveraine, les sociétés européennes pourraient-elles mêmes encore connaître dans leurs dynamiques privées et quotidiennes, dans l’énergie secrète du peuple, « des » histoires, des aventures, des pulsions créatrices ?

Nul ne peut répondre. Deux repères positifs, deux puissants facteurs de régénération peuvent néanmoins être définis au sein même de la décadence. Premier repère : le foisonnement dionysiaque de nouveaux comportements sociaux parallèles, sécessionnistes, sensuels, liés à une renaissance contemporaine de l’esthétique européenne, qui biaisent les institutions, les savoirs institués, les réseaux technocratiques, et que la sociologie de Maffelosi met en lumière, constituent à la fois le signe que la moralité réglementée, que le bourgeoisisme technomorphe de la civilisation occidentale (c’est-à-dire du déclin) butent sur l’inertie du peuple, mais aussi qu’on assiste à un regain de l’imaginaire, de l’irrationnel, de forces quotidiennes inconscientes de leur puissance. Ces forces sont celles qui donnent aux nations de grands artistes, de grands entrepreneurs. Comme la graine pendant l’hiver, nous devons coûte que coûte espérer que germent les énergies de la société civile. Demain, elles peuvent être fécondées par une souveraineté à venir, si le Destin qui ne reste jamais longtemps muet le décide.

Deuxième repère. A ce facteur de régénération intérieure, vient s’ajouter un motif possible de régénération extérieure. Il s’agit paradoxalement du grand « risque » de voir la civilisation progressiste et mondiale de l’Occident sombrer dans la crise géante. Le déclin latent deviendrait, au sens de Thom, catastrophe. En effet, à la période actuelle d’auto-résolution des crises par une fuite technologique en avant, à la macro-stabilité du système occidental, peut fort bien succéder une déstabilisation assez brutale. Nous nous dirigeons de fait vers une fin de siècle où vont converger des évolutions dont le parallélisme est pour l’instant facteur de « croissance » (cancéreuse) mais dont la rencontre, et la fusion, risquent d’être la cause d’un déséquilibre géant et planétaire. Ces « lignes évolutives » sont : les déséquilibres économiques croissants provoqués par le « développement » néo-colonial du Tiers-Monde, les effets cumulés du gel géostratégique (statu quo) imposé par les superpuissances combiné avec la sophistication et la densification des armements hyperdestructifs, la continuation de la déchéance de la démocratie à l’Ouest comme à l’Est, l’écart démographique Nord-Sud qui se creuse, l’écart population-ressources dans les pays pauvres, la montée des forces d’auto-affirmation nationales et religieuses dans le Tiers-monde parallèle au renforcement d’une technostructure mondiale, etc.

Notre temps est dominé par la menace d’un « point de rupture » qui se profile à l’horizon de la fin du XXe siècle, où l’humanité pléthorique se heurtera à des défis convergents à la fois alimentaires, écologiques, géopolitiques, etc. Or, aucune société traditionnelle ne peut les résoudre. Le retour à un modèle « holiste » et anti-technique de civilisation est impossible. Sommes-nous condamnés à la normalité occidentale ? L’ambiguïté de la modernité se reconnaît à ce qu’elle s’instaure comme seul remède des maux qu’elle a suscités. Pourtant, et pour ne donner que l’exemple de l’économie, il serait intéressant de prêter l’oreille à des nouvelles doctrines qui tentent de résoudre cette contradiction ; elles nous semblent bien plus originales que l’imposture intellectuelle du retour d’Adam Smith sous le visage publicitaire des « nouveaux économistes ». Ces nouvelles doctrines auxquelles je fais allusion, défendues en France par François Perroux, André Grjebine, François Partant, etc., préconisent l’abandon, non pas de l’industrie et de la technologie, mais de la norme universelle d’un marché et d’un système d’échange et de production planétaires. Elles se prononcent pour la construction progressive de zones « autocentrées », où les unités culturelles, politiques, économiques et géopolitiques se recouvriraient, où le productivisme marchand, le contenu des « besoins » humains, et la place de l’économique dans la société seraient repensés de fond en comble. Il s’agit, en quelque sorte, de penser une modernité qui ne soit plus mondialement normative.

Brutale ou progressive, la vraie crise est devant nous. Ou bien elle débouche sur le déclin définitif, le baiser des mégatonnes, le grand soleil nucléaire qui peut fort bien illuminer la fin de ce siècle du feu de l’holocauste des vertébrés supérieurs, ou bien, en-dehors de cette perspective à la fois terrifiante et très esthétique, la civilisation occidentale, butant sur cette « convergence des évolutions », ne pourra plus physiquement continuer à fonctionner. Faute de l’avoir envisagé sereinement, nous serions alors contraints d’organiser, au bord du tombeau, l’autarcie économique, la post-démocratie, bref de nouveaux principes politiques de vie en société. Ces principes ne seraient certainement plus ceux du progressisme occidental. Chaque région du monde improviserait sa solution…

Alors, pour éviter une telle improvisation, il appartient peut-être aux intellectuels éclairés, ceux qui aujourd’hui échappent aux grandes dogmatiques ridées de l’humanisme, du libéralisme, du socialisme, etc., de réfléchir à ces nouveaux principes, à des valeurs post-modernes capables de prendre le relais de cette longue procession d’illusions qui se confondent aujourd’hui avec le déclin et qui forment encore, hélas, le corps de cette vulgate occidentale qui tient lieu de savoir aux élites européennes.

notes
[1] Cf. sur ce point, Alain Girard, L’homme et le nombre des hommes, PUF, 1984.
[2] Claude Lévi-Strauss, Paroles données, Calmann-Lévy, 1984.
[3] Claude Polin, L’esprit totalitaire, Sirey.
[4] Julius Evola, Les hommes au milieu des ruines, Trédaniel, 1984.
[5] Cf. à ce propos, Laurent Joffrin, La gauche en voie de disparition, Seuil, 1984.

Ce texte est extrait de la brochure de Guillaume Faye, L’Occident comme déclin, 1985. Les caractères gras ont été ajoutés par le compilateur.

Notice sur Raymond De Becker

Notice sur Raymond De Becker

Ex: http://www.objectiftintin.com/

Moulinsart
Né en janvier 1912 à Schaerbeek, Raymond De Becker fréquente dès l'adolescence les cercles de l'Action Catholique dont la plupart des militants sont partagés entre monarchisme maurrassien et fascisme italien. Jeune homme enthousiaste et charismatique, Raymond impressionne son entourage par son intelligence et sa culture encyclopédique. En 1929, il rencontre Hergé pour la première fois au sein de la Jeunesse Indépendante Catholique dont il est le secrétaire général. Impressionné par ce brillant cadet, le père de Tintin accepte de dessiner pour "l'Effort", le bulletin de la J.I.C., et d’illustrer les propres ouvrages de Raymond : "Le Christ, roi des Affaires" (1930), "Pour un Ordre Nouveau" (1932) et "Destin de la France" (1937). Convaincu d’avoir un rôle important à jouer dans les années à venir, Raymond De Becker acquiert de plus en plus d’assurance : il s’éloigne du catholicisme et ne craint plus d’affirmer son homosexualité. Politiquement, il s’implique davantage et commence à fréquenter les salons germanophiles bruxellois. En décembre 1939, il fonde l’hebdomadaire neutraliste "L’Ouest" dans lequel Hergé publie les "exploits" de Monsieur Bellum, caricature du Belgicain francophile et va-t-en-guerre. Peu diffusé, encore moins lu, "L’Ouest" cesse rapidement de paraître.


La victoire des troupes de Hitler et l’Occupation sont accueillies favorablement par Raymond De Becker : le temps est venu pour lui d’exposer et d’imposer ses projets politiques au plus grand nombre. Dès l’été 1940, les autorités allemandes lui confient la direction du "Soir", le principal quotidien belge. Raymond ne manque pas de solliciter Hergé qui, le 17 octobre, entame dans le journal de son ami une nouvelle aventure de Tintin : "Le Crabe aux Pinces d'Or". Très vite, la ligne éditoriale du "Soir" se radicalise : déjà farouchement anticommuniste, De Becker n’hésite plus à publier des articles violemment antisémites. Parallèlement, il tente de fonder un "Parti Unique des Provinces Romanes" qui défendrait les intérêts des populations wallonnes dans la nouvelle Europe, mais les Occupants n’approuvent pas ce projet qui pourrait faire de l’ombre à Rex, le parti de Degrelle. A l’automne 1943, Raymond De Becker n’est plus convaincu de la victoire du Reich : il clame son intention d’abandonner la politique de Collaboration. Arrêté le 5 octobre, il est placé en résidence surveillée dans les Alpes bavaroises. Il y demeure jusqu’à la fin des hostilités puis rentre en Belgique où il se constitue prisonnier le 9 mai 1945.


Le 24 juillet 1946, le Conseil de Guerre de Bruxelles le condamne à mort, notamment pour avoir "ébranlé la fidélité des citoyens envers le Roi et l’Etat". Un an plus tard, sur appel, sa peine est commuée en prison à perpétuité puis, par voie de grâce, réduite à 17 ans de réclusion. Le 22 février 1951, De Becker est finalement libéré à condition de quitter sans délai la Belgique et de s’abstenir de toute activité politique et éditoriale. Pendant la détention de son ami, Hergé n’avait cessé de l'encourager et de correspondre avec lui. Raymond délivré, le dessinateur l’aide à se loger décemment à Paris et parvient même à lui trouver un emploi d’"inspecteur des ventes dans les librairies suisses".


En prison, Raymond De Becker s’était vivement intéressé à la psychanalyse. En liberté, il devient rapidement le principal exégète de l’œuvre de Carl Gustav Jung qu’il rencontre à plusieurs reprises. De Becker encourage Hergé à lire les ouvrages du père de l’"Inconscient Collectif" et à entamer une psychanalyse auprès de son disciple, le docteur Riklin.


En quête d’un nouvel auditoire, Raymond ne cesse de publier. D’une insatiable curiosité, il explore des domaines particulièrement variés : le cinéma ("De Tom Mix à James Dean, ou le mythe de l’Homme dans le cinéma américain", Fayard, 1959) , l’homosexualité ("L’Erotisme d’en face", Pauvert, 1964), le paranormal ("Les Machinations de la Nuit", Planète, 1965) ou encore les philosophies orientales ("L’Hindouisme et la crise du monde moderne", Planète, 1966). Dans les locaux de la revue "Planète", il côtoie deux très bons amis de Hergé : le scientifique Bernard Heuvelmans et l’"initié" Jacques Bergier (Mik Ezdanitoff dans "Vol 714 pour Sydney").


Jusqu’à sa mort à Paris, en 1969, Raymond De Becker sera pour Georges Remi plus qu’un ami fidèle : un véritable passeur qui, grâce à ses ouvrages et à ses conseils de lecture, l’aidera à surmonter ses crises, à tendre vers cette sérénité que le père de Tintin désirait plus que tout.

Entourage de Hergé

(Objectif Tintin remercie grimonpont, le capitaine Haddock, Tryphon Tournesol, Moulinsart, Jolyon Wagg, Tan Tan & Milou pour cet article :-)

Ernst von Salomon - Der Geächtete

Ernst von Salomon – Der Geächtete

Geschrieben von: Matthias Schneider - Ex: http://www.blauenarzisse.de/  

Freikorps2-f9911.jpgWird heute über die Konservative Revolution gesprochen, fallen den meisten wohl als erstes Oswald Spengler, Ernst Jünger oder Carl Schmitt als zentrale Theoretiker dieses Zirkels ein. Des weiteren Namen wie Stefan George oder Gottfried Benn, welche zuvorderst durch ihre lyrischen Werke bestachen und mit selbigen fester Bestandteil des Literaturkanons sind. Häufig unter den Tisch fällt aber Ernst von Salomon – völlig zu Unrecht.

Ein Preuße durch und durch

Über Spengler und Co. ist eine nicht unbeträchtliche Menge an Sekundärliteratur aus sowohl politologischer als auch literaturwissenschaftlicher Feder vorgelegt worden. Über Ernst von Salomon gibt es dagegen bei weitem nicht so viel. Die Sekundärliteratur zu seiner Person und seinem Schaffen lässt sich an maximal zwei Händen abzählen. Im Vergleich zu den Werken seiner Kollegen sind von Salomons heute weitgehend unbekannt. Eigentlich recht verwunderlich, besonders wenn man an seinen 1951 erschienenen Roman „Der Fragebogen“ denkt, welcher zum letzten nicht-linken Bestseller deutscher Sprache werden sollte. Von Salomons Wirken bis zur Veröffentlichung desselben evoziert das Bild eines bewegten, fast schon abenteuerlichen Lebens.

Geboren wurde Ernst von Salomon am 25. September 1902 in Kiel. Seine Familie stammte ursprünglich aus Venedig. Das zum damaligen Zeitpunkt preußische Kiel sollte ihn deutlich prägen. Die preußischen Tugenden verinnerlichte er schon sehr früh. Zusammen mit seinem preußischen Idealbild eines autoritären Staates sozialistischer Prägung ließ er sie zu seiner grundlegenden Lebensmaxime werden. Den entsprechenden charakterlichen Schliff erhielt er in einem preußischen Kadettenkorps. 1919 trat von Salomon in das Freiwillige Landesjägerkorps „General Maercker“ ein. Er wollte das besetzte Deutschland im Kampf gegen den Bolschewismus verteidigen. Neben der Aufgabe, kommunistische Aufstände niederzuschlagen, bestand schließlich ein weiteres Betätigungsfeld im Abschirmen der Weimarer Nationalversammlung. Hier fühlte sich von Salomon deplaziert und ausgenutzt. Es war ihm unklar, wie seine Aufgabe eigentlich auszusehen hatte.

Politischer Aktionismus als Selbstzweck?

Was von Salomon schon früh kennzeichnen sollte, war sein unbedingter Handlungswille: „Nicht das war wichtig, dass, was wir taten, sich als recht erwies, sondern dass in diesen aufgeschlossenen Tagen überhaupt gehandelt wurde.“ Die Frage nach der internationalen Verortung Deutschlands beantwortete er mit seinem erneuten Gang an die Front im Baltikum. Hier kämpfte er Seite an Seite mit den Engländern gegen ein Vordringen der Bolschewisten. Er wurde dafür, wie alle deutschen Truppenangehörigen, die sich zu diesem Schritt entschlossen hatten, von seinem Heimatland mit Verachtung gestraft. Orientierungslos und desillusioniert begaben die Truppen sich Ende 1919 in die Heimat zurück.

Nach Beteiligung am missglückten Kapp-Putsch und kurzzeitigem Aufenthalt in der Reichswehr sollte es zunächst der Kreis um den Brigadeführer Ehrhardt, ein Zusammenschluss von Freikorps sein, dessen Reihen von Salomon sich einzugliedern gedachte, um durch verschiedene Aktionen Widerstand gegen die Besatzung durch die Franzosen zu leisten. Der Wille zum unbedingten Handeln ebnete so den Weg für verschiedene Attentate, denen schließlich am 24. Juni 1922 auch Walther Rathenau zum Opfer fallen sollte.

Rathenau wurde nicht nur als Vertreter des Liberalismus, sondern auch als Erfüllungspolitiker und rechte Hand der Siegermächte geschmäht. Diesen verhängnisvollen Schritt sollte von Salomon später bereuen. Zum einen, weil er damit gegen seine preußischen Werte verstoßen hatte. Außerdem weil seine Beihilfe zu diesem Mord an einem Juden, wenn auch in seinem Fall nicht antisemitisch begründet, einen nicht unbeträchtlichen Eindruck auf Adolf Hitler machen sollte. Hitler feierte die Attentäter fortan als Vorläufer der nationalsozialistischen Bewegung. Von Salomon missfiel das sehr.

Nationalrevolutionäre Bekanntschaften: Hielscher und Jünger

Er wurde zu fünf Jahren Zuchthaus verurteilt, schwor seinem einstigen Extremismus ab und begann während dieser Zeit an eigenen Schriften zu arbeiten. Bereits 1927 entlassen schloss von Salomon Bekanntschaft mit verschiedenen nationalrevolutionär gesinnten Zirkeln. Er verkehrte unter anderem mit Friedrich Hielscher und Ernst Jünger, für deren Zeitschrift Vormarsch er als Redakteur tätig war. Während dieser Zeit engagierte er sich für die Landvolkbewegung in Schleswig-Holstein.

Das führte schließlich zu einer erneuten Verhaftung, da die aufständischen Bauern auch Bombenanschläge, allerdings nur auf Gebäude und Privatwohnungen von Regierungsvertretern, verübten. Zwar sprach sich von Salomon gegen diese Vorgehensweise aus, konnte die Bauern aber nicht davon abbringen. In der Folge wurde er mit einem Anschlag auf den Reichstag in Verbindung gebracht und zu weiteren anderthalb Jahren Zuchthaus in Moabit verurteilt.

Das literarische Werk: „Die Geächteten“, „Die Stadt“, „Die Kadetten“, „Der Fragebogen“

Während dieser Zeit verfasste von Salomon sein erstes größeres Werk, den autobiographischen Roman „Die Geächteten“. Darin erläutert er unter anderem die genauen Umstände und Beweggründe für das Rathenau-Attentat und rekapituliert die Zeit im Gefängnis. Der Titel veranschaulicht von Salomons Selbstverständnis: Immer sah er sich als einen Außenstehenden. Weder in der Weimarer Republik noch im Dritten Reich noch in der Bundesrepublik fühlte er sich je heimisch und dem herrschenden System zugehörig, sondern ausgeschlossen und eben geächtet.

Auf den Romanerstling von 1930 sollte schon zwei Jahre später „Die Stadt“ und schließlich 1933 „Die Kadetten“ folgen. Letzterer handelt von seiner eigenen Jugend im Kadettenkorps und stellt auch eine Art Loblied auf diese Zeit dar. In dem Werk „Nahe Geschichte“ (1936) bemühte sich von Salomon darum, die ideologische Trennlinie zwischen den Freikorpsverbänden, zu denen er sich einst gezählt hatte, und den Nationalsozialisten herauszustellen, insbesondere vor dem Hintergrund der zunehmenden Vereinnahmung ersterer durch letztere: „Die Partei wird wohl schwer zu schlucken haben an dem eindeutigen Verhältnis der Freikorps, auf die sich die Partei als ihre Vorgänger beruft, als Korporationen eines starken Staatsbewusstseins gegenüber dem Volk, welches freilich in allen seinen Manifestationen gegen den staatlichen Willen stand.“

Sein wohl größter Erfolg dürfte aber der ebenfalls wieder autobiographisch angelegte Roman „Der Fragebogen“ sein. Selbiger gilt heute als erster großer deutschsprachiger Nachkriegsbestseller. Er lässt die eigens durchlebten letzten 50 Jahre deutscher Geschichte inklusive aller Biegungen und Brechungen in Form von Antworten auf die im auszufüllenden Entnazifizierungsfragebogen gestellten Fragen Revue passieren. An Zynismus wird hier sowohl in Bezug auf die eigene Vergangenheit mit allen Jugendsünden als auch den vom Autor strikt abgelehnten Nationalsozialismus nicht gespart. Gleichzeitig werden die Fragen sarkastisch-spöttisch kommentiert und insbesondere die Entnazifizierungspraxis der Amerikaner kritisiert.

Von Salomon kritisierte die Alliierten ebenso wie die Nationalsozialisten

Von Salomon scheut sich nicht, konkrete Vergleiche zu den Methoden der Nationalsozialisten anzustellen. Etwa wenn die Häftlinge in den Internierungslagern der Alliierten grundlos als Kriegsverbrecher beschimpft, verprügelt oder mit Urin bespritzt werden. Dass solche Themen auf Seiten der Kritiker, auch schon unter Adenauer, für hitzige Diskussionen und Anfeindungen gegen von Salomon führten, lässt sich leicht vorstellen.

Der Hauptvorwurf an von Salomon dürfte wohl gewesen sein, durch die mitunter zugegebenermaßen etwas undifferenzierte Anklage der Amerikaner, den NS zwangsläufig aufgewertet zu haben. Dass dies keineswegs gewollt war, dürfte anhand von Salomons mehr als einmal deutlich formulierter Abneigung gegenüber Rassismus und Antisemitismus sowie dem totalitären Charakter des NS deutlich geworden sein. Nicht umsonst gab er Ille Gotthelft, eine Jüdin, als seine Frau aus, um sie vor der Verfolgung durch die Nazis zu schützen.

Deutscher Selbstbehauptungswille im verdammten 20. Jahrhundert

Ungeachtet der teilweisen negativen Kritikerstimmen war der Roman ein großer literarischer Erfolg. Auch heute noch lohnt es sich, ihn zu lesen. Von Salomon tritt hier für einen deutschen Selbstbehauptungswillen ein, welcher sich ressentimentfrei und absolut tolerant gegenüber jedweder politischer Idee, solange sie nicht ins Verbrecherische ausufert, zeigt und spricht sich gegen die Kollektivverdammung der eigenen Nation aus. Allerdings reichte der Erfolg des „Fragebogens“ nicht zum Leben und so verfasste von Salomon unter anderem wenig ernstgenommene Drehbücher für Filme. Es wurde zunehmend stiller um ihn. Ernst von Salomon starb am 9. August 1972.

Heute ist seine schillernde und facettenreiche Persönlichkeit weitgehend in Vergessenheit geraten. Auf manche mag von Salomons preußischer Geist antiquiert wirken. Seine Ideen und Betrachtungen sind aber bis heute sehr scharfsinniger Natur. Seine Erfahrungen bieten dem Leser ein weitreichendes Panorama über ein spannendes Leben in schwierigen politischen Zeiten.

La correspondance de Céline en Pléiade

La correspondance de Céline en Pléiade

Nonfiction.fr, 25/01/2009 : “Être de la Pléiade” est une des grandes obsessions littéraires des dernières années de Céline, “fameuse idée” qui lui vient dès 1956, et dont il sera question dans une bonne partie de ses lettres à Gaston Gallimard : “Les vieillards, vous le savez, ont leurs manies. Les miennes sont d’être publié dans La Pléiade.” C’est chose faite un an après sa mort, et parachevée par la parution de cette anthologie, qui rassemble 50 ans de correspondances, dont une partie inédite. Avec ce volume, la maison Gallimard met la dernière pierre à son entreprise de réédition des correspondances céliniennes . Céline aura pourtant donné du fil à retordre à ses fondateurs. S’il rend hommage à la NRF de l’avoir généreusement accueilli, c’est pour préciser entre parenthèses “avec 20 ans de retard”. La veille de sa mort, cet enragé menace Gallimard, s’il n’augmente pas les termes de son contrat, de louer un tracteur et de “défoncer la NRF”. Constamment persuadé d’être floué, il reproche à Gallimard de ne pas faire assez de publicité pour ses livres, de ne pas le remercier pour sa dédicace dans Féerie pour une autre fois, de ne pas répondre assez vite à ses lettres, mais trouve en celui-ci un interlocuteur à sa mesure, qui ne se laisse nullement démonter par ses lettres les plus déchaînées : “Vraiment Céline, vous m’étonnez, en vous lisant j’ai cru lire du Jarry.”

Il faut dire que le monde littéraire n’a jamais eu les faveurs de Céline. Au fil de ses lettres, il balance, à droite à gauche, ces “petites vacheries acidulées” dont il a le secret. La littérature est “cette grande partouze des vanités” dans laquelle les éditeurs, “parasites goulus”, les prix littéraires, “crise de grande canaillerie”, les “confrères”, vaniteux et jaloux, “Si tu veux voir les pires abrutis d’un pays, demande à voir les écrivains” écrit-il à Milton Hindus, sont l’objet d’une détestation particulière. Céline, “la première vache du pré Denoël”, “le cheval courageux qui a tiré toute sa cargaison de navets”, serait la proie de toutes les jalousies depuis la sortie du Voyage : son entrée trop éclatante en littérature fait de lui “la bête à abattre”.

Ça commençait plutôt bien, pourtant : aux antipodes du héros de Mort à Crédit, ses lettres d’enfance envoyées à ses parents lors de ses séjours linguistiques en Angleterre et en Allemagne, dressent le portrait d’un fils aimant et attentionné, qui apprend le piano et le violon “avec ardeur”, remercie ses parents pour les sacrifices qu’ils font pour lui, et compte les jours qui le séparent de leurs retrouvailles. On est étonné par l’autorité qui se dégage de ces lettres, où Destouches multiplie descriptions caustiques et adresses sentencieuses. À 15 ans, alors que sa tante Joséphine est sur le point de mourir, il recommande à sa mère de soutenir son oncle “En un mot, puisque tout espoir est perdu, cherche à lui préparer une autre vie plutôt que de le consoler de la présente.” L’appareil critique est attentif à repérer les motifs qui nourriront la future œuvre célinienne, y compris les plus prosaïques : les pardessus, les cols de chemise, l’abcès de la mère, le cresson, et surtout la traversée de la Manche, ancêtre de l’épique traversée en mer de Mort à Crédit. Second temps, le front, “spectacle d’horreurs”, “odyssée lamentable”, qui met en scène Céline en soldat courageux et patriote, récompensé de la médaille militaire, bien différent du Bardamu du Voyage. Le souvenir de la guerre apparaît dans la correspondance avec Joseph Garcin, autre ancien combattant de 14, comme le déclencheur de l’écriture, rempart à l’oubli, résistance à la dislocation des choses : “Vous le savez mon vieux, sur la Meuse et dans le Nord et au Cameroun j’ai bien vu cet effilochage atroce, gens et bêtes et loi et principes, tout au limon, un énorme enlisement – je n’oublie pas. Mon délire part de là.”

Les lettres des années 1930, et la diversité des interlocuteurs avec lesquelles elles sont échangées, constituent autant d’éclairages sur l’itinéraire intellectuel de Céline. Hantise de la décadence, ultrapessimisme mais aussi anti-intellectualisme de plus en plus forcené, antisémitisme larvé jusqu’en 1935, obsessionnel et proliférant dans toutes les correspondances à partir de 1936, en sont les traits les plus saillants. “Je suis ici l’ennemi numéro un des Juifs” se félicite Céline après la parution de Bagatelles pour un massacre, ce qui rend ses tentatives de justification d’après guerre assez dérisoires. Ces années sont également celles de la mise en place d’une figure d’ouvrier des lettres, Céline s’appliquant, comme il le fera toute sa vie, à désamorcer tous les clichés romantiques de la création littéraire : “Cette sorte d’état second, joie créatrice soi-disant ! Quelle merde !” Écrire, c’est avant tout “gagner du pèze”, pour “se tirer d’embarras matériels”. Les termes d’œuvre, et même de manuscrit sont écartés, au profit d’un vocable plus prosaïque : “blot”, “ours”, “machin”, “monstre”. Céline, qui signait ses lettres d’Afrique “des Touches”, se réclame à présent du peuple. Intéressante à ce titre la comparaison entre les lettres à Joseph Garcin, aventurier un peu voyou, proxénète à ses heures uni à Céline par les souvenirs de 14 et une “camaraderie de bordel” et à Élie Faure, jusqu’à leur rupture en 1935. “Vous êtes au nerf – vous accrochez la vie, comme moi vous êtes curieux, vous savez le prix des choses, vous n’êtes pas allé au lycée commun.” écrit-il au premier en 1933, et dans une de ses dernières lettres à Faure : “Vous ne savez pas ce que je sais. Vous avez été au lycée.” Ce rejet du lycée, de la culture scolaire, est lié à une conception de l’écriture du côté du nerf, de la viande, de la fibre, qui, débarrassée des médiations savantes, puise dans l’émotion directe, poétique à laquelle se greffe la problématique antisémite : pour Céline, Proust écrit “tarabiscoté” parce qu’il est juif, et encombré d’un trop-plein de médiations culturelles .

Autre période où l’épistolier se montre particulièrement prolifique : les années d’exil au Danemark. La plainte, et son revers, l’agression, forment la véritable toile de fond de la correspondance. En 1945, il commente ainsi son sort, alors que Le Monde a publié dès avril 1945 les premiers témoignages des rescapés des camps nazis : “Je crois que rien d’aussi monstrueux aucun fanatisme aussi enragé ne se soit jamais abattu sur une sorte d’hommes, ni juifs, ni chrétiens, ni communards n’ont connu une unanimité d’Hallali aussi impeccable.” Le ton est donné : l’Histoire est passée au filtre des récits délirants, des haines obsessionnelles qui font de Céline une victime sacrificielle, aux prises avec une “ménagerie de monstres” déchaînés. Son séjour au Danemark est transfiguré en un tableau qui tient à la fois de Shakespeare, de Breughel, et d’Ensor : La Baltique : “La Baltique est pas regardable. La Sépulcrale je l’appelle et les bateaux rares, des cercueils, les voiles : des crêpes.” Staegersallee, où il a logé : “C’est le nid, le repaire, la taverne des sorcières maléficieuses” ; Karen Jensen, qui l’a hébergé : “une sorcière de Macbeth, en plus pillarde, canaille”. Korsor, où il habite trois ans, “une sévérité de mœurs et de paroles et d’allure à faire crever 36 Calvins”.

Les correspondances sont également l’espace où s’élabore bien avant les Entretiens avec le professeur Y, un art poétique “égrené en images” . Images connues du “métro émotif” ou du “bâton tordu”, mais aussi images de l’écriture en “forêt tropicale”, pleine de lianes à abattre, en château à extirper d’une “sorte de gangue de brume et de fatras”, en “statue enfouie dans la glaise” à nettoyer, déblayer. À certains privilégiés, Céline expose les éléments maîtres de sa poétique : le rendu émotif, “Je sais bien l’émotion avec les mots, je ne lui laisse pas le temps de s’habiller en phrase”, la musique, la danse, demandant à son traducteur de respecter “le rythme dansant du texte”, “toujours au bord de la mort, ne pas tomber dedans”. On retrouve dans ces lettres tout ce qui fait le génie du style célinien, dans une version brute, impulsive, surexcitée – on sait que Céline, s’il était conscient de la valeur de sa correspondance, ne retravaillait pratiquement pas ses lettres. C’est encore lui qui parle le mieux du célèbre style Céline. Dans une lettre à la NRF de 1949, il expose ainsi ses ambitions littéraires : “rendre la prose française plus sensible, raidie, voltairisée, pétante, cravacheuse et méchante”, “style surtendu”, composé de “menues surprises”, d’infimes torsions de la langue, et d’une superposition aussi savante qu’instinctive des registres les plus divers.

Car Céline sait faire toutes les voix, et c’est pourquoi malgré la monotonie de ses plaintes et de ses colères, il lasse rarement son lecteur : il parle tantôt comme un moraliste du XVIIe siècle, égrenant sentences pascaliennes et aphorismes de son cru, tantôt comme un maquereau. Sur l’amour, par exemple, ce “bouquin que nous achetons tous à un moment de notre vie”. Non que ce soit un sujet sur lequel il convient de discourir : “Le sexe dure trois secondes. On en écrit pendant trois siècles – Quelle histoire !” Mais quand Marie Canavaggia, sa secrétaire et l’une de ses principales correspondantes, commet le tort de s’aventurer sur un terrain sentimental, Céline s’il se prétend retiré des affaires, tient à rappeler une fois pour toutes qu’il est de l’“école Cascade”, et oppose aux sentiments “accessoires et froufrouteurs” de Marie son propre idéal de santé et sa vigueur de ton. “La vie est trop courte pour se torturer d’abstinences idiotes et les hommes organisent les privations et les tortures avec trop de zèle pour que j’y ajoute des rosaires ! et des rosières ! Foutre Dieu non ! Seulement la force manque ! Les femmes ont des réserves sensuelles ‘tropicales’ ne l’oubliez pas, les plus prudes, les plus réservées et les plus piaffants lovelaces ne sont à leurs côtés jamais que de miteux velléitaires.” On est quasiment dans du Laclos quand elle lui demande de lui retourner ses lettres et qu’il s’exécute, maussade. “Ramassez toute cette brocaille !” intime-t-il à la malheureuse.

La variété des registres produit des effets comiques, parfois involontaires. Le 7 février 1935, Céline envoie deux lettres, la première, assez élégiaque, à Karen Jensen, une amie danoise : “Poésie d’abord Karen, et poésie c’est continuité d’une histoire qui va si possible de l’enfance à la mort”. L’autre à son traducteur, John Marks, en prévision d’un voyage à Londres : “Préparez-moi, mon vieux, un cul bien anglais pour ce séjour.” À travers ces lettres, c’est un vaste spectacle à plusieurs voix qui est mis en scène, où le tragique côtoie bien souvent le grotesque. La guerre est une “ignoble tragédie”, son procès une comédie où son avocat se prend pour une actrice, et Céline lui-même tantôt clown, tantôt “vieil acrobate vieillard qui remonte au trapèze”, quand au Danemark, il se remet à écrire, tantôt moraliste observateur de ce spectacle des vanités.

Ces correspondances constituent à la fois un observatoire de choix sur le parcours de Céline et la genèse des romans, et par la virtuosité du style, une pièce même de l’œuvre célinienne. L’appareil critique est particulièrement riche et éclairant, même si une notice présentant les principales figures de cette galerie de correspondants aurait pu apporter plus de commodité à une lecture souvent complexe. “Serrer au plus près l’énigme Céline”, comme le propose Henri Godard dans sa préface, n’est pas pour autant l’élucider. 1936 constitue le seuil à partir duquel un noyau obscur, harangues antisémites et paranoïa galopante, résiste à toute logique. Il y a l’amertume du Goncourt raté et de la mauvaise réception de Mort à Crédit. Il y a aussi que la pulsion, la violence forment le carburant de l’écriture romanesque, et pas seulement des pamphlets. Autoproclamé écrivain de la haine, Céline s’est cependant toujours refusé à reconnaître ce à quoi l’expression des siennes l’a amené à participer

Camille KOSKAS

Louis-Ferdinand Céline, Lettres, Gallimard Pléiade, 2009.
Merci à Pierre L.

Entrevue avec Marco Tarchi, chef de file de la "Nuova Destra" italienne

Archives de SYNERGIES EUROPEENNES - 1990

Entrevue avec Marco Tarchi, chef de file de la «Nuova Destra» italienne

 

propos recueillis par Jürgen Hatzenbichler et Helena Pleinert lors de l'Université d'été du GRECE (1990) à Roquefavour en Provence

 

Qu'est-ce que la «nuova destra» en Italie? Quels objectifs poursuit-elle? Comment se présente-t-elle globalement?

 

campo-hobbit1.jpgLa nouvelle droite italienne est essentiellement un mouvement de pensée qui s'est constitué à partir de la seconde moitié des années 70, en partie sous l'influence de la nouvelle droite française, en partie à la suite de l'évolution de quelques centaines de jeunes gens, déçus par leurs expériences au sein des droites ou des extrêmes droites italiennes. C'est aujourd'hui un groupe qui travaille surtout dans les milieux culturels et intellectuels, en éditant toute une série de publications, revues et livres, dont, surtout, notre mensuel Diorama letterario et notre revue théorique trimestrielle Trasgressioni. Ce groupe tente de jeter les fondations d'une nouvelle idéologie qui s'oppose simultanément à la pensée libérale, aujourd'hui hégémonique en Europe, et à ce qui reste encore du vieux rêve marxiste. Ce groupe se divise en deux sous-groupes majeurs: un groupe militant de quelque 150 personnes, qui travaille sans relâche à élaborer cette idéologie nouvelle, et un groupe plus vaste de sympathisants (1500 personnes), qui diffusent les résultats des travaux des précédents dans leur milieu. Ces sympathisants diffusent donc les revues et les livres que nous éditons.

 

Quand on entend parler de la «droite» italienne, chez nous, en Autriche, c'est généralement des «néo-fascistes» du MSI ou de la Destra Nazionale qu'il s'agit. Comment la nuova destra se différencie-t-elle de ce néo-fascisme? Y a-t-il entre elle et eux des frontières nettes, bien distinctes?

 

Certainement. Les frontières sont bien nettes entre nous et les néo-fascistes du MSI, même si la plupart d'entre nous ont connu une expérience très décevante dans ce mouvement. Les différences sont nombreuses et je ne pourrai vous en citer que quelques-unes. Premièrement, nous, garçons et filles de la nuova destra, n'avons aucune attitude nostalgique. Pour nous, le fascisme et le national-socialisme sont des phénomènes qui doivent être jugés historiquement et qui ne peuvent en aucun cas servir de modèles de référence dans le débat politique et culturel actuel. Ensuite, nous n'acceptons pas les positions nationalistes et chauvines qui ont toujours caractérisé les mouvances de droite et d'extrême-droite en Italie. Notre vocation est européenne. Notre volonté est de nous ouvrir au monde. Ce qui nous détache également, vu d'un autre angle, d'une autre perspective, du monde de l'extrême-droite, c'est notre refus de l'anti-modernisme droitier. Nous essayons, au contraire, d'être sans cesse confrontés à cette modernité. Nous essayons de voir s'il n'y a pas moyen d'affronter de façon différente les défis de la modernité. Une façon qui ne soit ni matérialiste ni sécularisée ni utilitariste ni individualiste à la manière du libéralisme aujourd'hui dominant. C'est la raison pour laquelle nous n'acceptons pas les attitudes occidentalistes et atlantistes, typiques des mouvements d'extrême-droite. De plus, nous rejettons les attitudes militaristes et autoritaires. Pour nous, le problème de recréer un sentiment communautaire d'appartenance ou des identités collectives est un problème d'épanouissement de l'esprit humain et non pas d'obligations émanant d'une autorité quelconque, comme tente de la faire accroire les mouvements néo-fascistes. Il faut encore ajouter que, dans le cadre de notre européisme, nous voulons remettre en question l'Etat-Nation et redistribuer les charges politiques entre des régions culturelles autonomes en Europe, ce qui nous éloigne diamétralement des positions xénophobes et chauvines de l'extrême-droite italienne.

 

Cette idée d'autonomie, que vous venez d'évoquer, me suggère d'emblée une question: quelle est la position de la nuova destra italienne vis-à-vis de l'ethnie allemande du Tyrol du Sud?

 

vocedellafogna.jpgNous estimons que les attitudes de toutes les parties en présence au Tyrol du Sud sont excessives. Nous sommes évidemment en faveur de la reconnaissance des droits de tous les groupes ethniques, de leur droit à vivre leur propre culture dans leur territoire propre. En même temps, nous croyons que le rapport qui existe aujourd'hui entre les communautés allemande et italienne du Tyrol du Sud doit se définir à partir d'une volonté réelle d'organiser une coexistence sur base de valeurs communes. Une telle harmonie existe en Finlande entre les communautés finnoise et suédoise ainsi que dans d'autres régions d'Europe. Il faut instituer un véritable bilinguisme des deux côtés. Il faut à tout prix se débarrasser de l'idée qui veut que lorsque l'on a pour voisins des gens différents de nous, ils sont automatiquement des ennemis. Il faut au contraire penser que tous ont le droit de vivre leurs traditions culturelles, de les maintenir, en s'appréciant mutuellement. Ce qui ne signifie pas, évidemment, que mœurs et styles de vie doivent se mélanger entre Italiens et Allemands, mais je ne pense pour autant qu'il faut que s'institue une sorte d'apartheid comme le voudraient, paraît-il, les uns et les autres. Notre position est très proche de celle de certains Verts du Tyrol du Sud, surtout celle de leur chef, Alexander Lange, qui, lui, s'est toujours prononcé pour le respect des droits des différentes cultures, en refusant tout affrontement et tout apartheid. Lui, le garmanophone, et moi, l'italophone, appartenons à la macro-culture européenne et avons intérêt à créer les conditions d'une coexistence harmonique et continue. Il n'y a aucune raison pour refuser l'autre, de manière primaire.

 

Ce qui nous a beaucoup intéressé, en Autriche et en Allemagne, ce sont les débats et les colloques qui ont réunis des protagonistes et de la nouvelle droite et de la nouvelle gauche. Quels ont été les thèmes de ces débats?  

Le thème principal que nous avons débattu, portait sur la crise de la modernité, c'est-à-dire la crise des institutions politiques et culturelles dans la réalité d'aujourd'hui, l'insuffisance des idéologies de droite, du centre et de gauche à nous formuler des projets d'avenir, à nous donner l'espoir de sortir de cette crise. Ce n'est pas un hasard si les premiers intellectuels de gauche ou d'extrême-gauche que nous avons rencontré publiquement sont des gens qui, à partir d'une critique des positions du marxisme classique, ont beaucoup lu et médité des auteurs comme Nietzsche ou Heidegger ou d'autres auteurs, qu'ils appellent les «philosophes de la pensée négative» en voulant les opposer aux philosophes de la «culture bourgeoise». Et c'est à l'initiative de quelques-uns des plus importants de ces intellectuels, comme Massimo Cacciari ou Giacomo Marramao ou Ferugio Masini, spécialiste très connu de Nietzsche et Heidegger, que nous avons pu confronter nos idées et nos espoirs et réfléchir à la possibilité de dépasser et la culture libérale marchande et les projets de socialisme réel totalitaire, qui se sont réalisés dans l'Est de l'Europe. Mais nous avons trouvé aussi d'autres interlocuteurs à gauche, parmi les Verts ou les animateurs d'autres mouvements sociaux, équivalents aux Bürgerinitiativen allemandes, qui, tous, souhaitent porter le débat sur le terrain de la qualité de la vie. Un terrain assez éloigné de celui de la défense des intérêts, terrain de la politique actuelle. Dans ce sens, eux comme nous essayons de faire revivre la participation du peuple à la chose politique, une participation venue d'en-bas, de la base. Notre objectif commun est donc de trouver des formes d'expression institutionnelles qui ne se limitent pas au Parlement, aux partis classiques, etc. Cette gauche non-conformiste et la nuova destra essayent donc, ensemble, de retrouver cette dimension de «mouvement populaire», dynamique, reflet de l'effervescence permanente de la socialité. Nous voulons par là lancer une formule politique différente. Cette nécessité politique fait que nous nous retrouvons entre personnes qui, il y a vingt ans, étaient farouchement hostiles les unes aux autres. Nous avons été profondément déçus de nos expériences dans les mouvements de la droite autoritaire. Eux ont abandonné, déçus, un marxisme figé, braqué sur l'idéologème de la lutte des classes. Notre coopération vise à trouver une voie de synthèse, qui n'est pas une voie «ni droite ni gauche» mais une voie qui soit à la fois celle de la droite et de la gauche. Nous pensons donc en terme de conjonction (et...et), non de disjonction (ou bien...ou bien) ou d'exclusion (ni...ni). Nous voulons additionner ce qu'il y avait de meilleur dans les intuitions de la droite et de la gauche de ce siècle. Pour nous, il est très important de reprendre en compte dans un sens critique, non nostalgique, toutes les tentatives qui, depuis le début du siècle et même dans les années 30, ont essayé de transcender les idéologies résiduelles du XIXième siècle et de trouver des réponses allant au-delà du matérialisme contemporain. Pour parfaire une telle opération, nous devons puiser aussi bien à droite qu'à gauche.

 

vocefogna.jpgJe voudrais maintenant vous poser une question d'ordre pratique... Chez nous, il est encore impensable d'amorcer un débat public entre gens de droite et gens de gauche. Comment avez-vous réussi ce coup de maître sur le plan pratique?

 

La différence qu'il y a entre la situation italienne et la situation allemande/autrichienne, c'est que nous n'avons pas de «complexe national» découlant des événements de l'entre-deux-guerres et de la dernière guerre. Le fascisme a été digéré assez facilement, surtout par les intellectuels. Ensuite, le mouvement communiste a eu beaucoup plus d'importance chez nous, tant pour les intellectuels que pour la masse du peuple, qu'en Allemagne ou en Autriche. Dans cette masse de citoyens italiens, un bon million de personnes ont été fortement déçues par l'autoritarisme communiste. Elles ont remis en question leur façon de pensée, y compris le style dur de l'anti-fascisme militant; elles ont opéré leur auto-critique et se sont dit que, avant de prendre une position, il faut discuter avec les autres. La crise de la gauche, très forte, et notre propre crise, due à notre déception d'avoir perdu tant de temps à militer dans les rangs des droites, permettent de confronter nos positions, de nous expliquer les uns aux autres le sens de nos engagements, de critiquer nos omissions. La première fois que nous avons organiser un débat public avec un intellectuel de gauche très connu, Massimo Cacciari  —c'était en novembre 1982—  il y a eu un scandale, bien sûr. Par exemple, le quotidien du parti communiste, L'Unitá, a fait paraître plusieurs articles contre ce colloque. Il faut savoir que ce philosophe célèbre était aussi, à l'époque, député du parti communiste. Il n'a cependant pas été exclu et beaucoup d'intellectuels ont salué ce colloque qui, disaient-ils, inaugurait une ère de discussions fécondes entre personnes affables et civilisées. L'expérience, pensaient-ils, devait être renouvelée. Après cette première expérience, que les uns jugeaient dangereuse et les autres positives, nous avons organisé des colloques avec des personnalités socialistes, écologistes, progressistes et universitaires. Il faut dire qu'en Italie, tous les mythes progressistes de la culture de gauche ont été démontés par les intellectuels de la gauche déçue. Et, comme nous, garçons et filles de la nuova destra, sommes perçus comme les seuls qui ont eu le courage de critiquer les manies de la droite, les intellectuels de gauche développent une certaine curiosité à notre égard. C'est pourquoi ces débats ont eu lieu.

 

Nous avons également dialogué avec un personnage que vous connaissez sans doute en Autriche, le sociologue socialiste Acquaviva, qui a écrit un livre sur le Tyrol du Sud avec Gottfried Eisenmann, où il réclamait la partition de la province. Cette succession ininterrompue de débats est un réflexe à l'encontre de la situation des années 70, les années dites «de plomb», où tout débat était impossible vu le recours incessant à la terreur, tant à gauche qu'à droite. Cette situation était intenable. Ce fut comme une libération de pouvoir enfin dialoguer, se parler, se voir, après des années et des années de bagarres. Cette évolution a été naturelle et nous pouvons, bien sûr, poursuivre ce dialogue, chacun gardant ses positions dans une atmosphère de fair-play. Une telle situation se vérifiera dans tous les pays où il y a eu un mouvement communiste important qui, aujourd'hui, s'effondre. C'est sans doute pourquoi, en Autriche et en Allemagne, où la situation politique est très différente, cette évolution sera plus difficile. Mais je crois bien que cela viendra... Surtout à la suite de ce qui se passe en Europe de l'Est... Toutes les positions devront être redéfinie, reclassées.

 

J'essaye de comparer un petit peu la situation italienne à la situation autrichienne ou allemande; chez nous, pour les intellectuels déçus par la gauche, le grand problème, la crise, le complexe, ce n'est pas, bien sûr, Hitler ou le problème juif, etc,  —choses certes importantes—  mais la honte de leur passé stalinien. Ces intellectuels cultivent un complexe à l'égard de tout ce qui a été de gauche et ils veulent à tout prix prendre distance.

 

Ces débats n'ont-ils lieu qu'entre intellectuels ou existe-t-il des groupements politiques qui incarnent ces idées synthétiques nouvelles?

 

Il est évidemment plus facile d'organiser des colloques entre intellectuels. Cela n'empêche qu'il y a eu quelques impacts politiques directs; je citerai comme exemple la revue officielle du parti socialiste italien qui nous a offert ses colonnes pour débattre des problèmes soulevés par la crise de la démocratie moderne. J'y ai publié un article dans ce contexte. Pour ce qui concerne les autres mouvements, nous avons plus de chances de débattre avec les Verts. Nous avons eu également des contacts avec Lotta Continua, l'un des mouvements les plus radicaux de l'extrême-gauche italienne. D'anciens militants de ce groupe ont même collaboré à nos revues. Quant au parti communiste, sa situation actuellement est si complexe qu'il faut mieux attendre les évolutions qui surviendront immanquablement. Il me semble inutile d'aller y chercher des interlocuteurs aujourd'hui, avec la situation de confusion que nous connaissons. Outre les milieux de gauche, certains mouvements de renouveau catholique ont accepté de dialoguer avec nous. Ainsi, à Padoue, il y a deux ans, nous avons débattu publiquement, devant plusieurs centaines de personnes, avec le leader vert Alexander Lange, dont je viens de parler, et un responsable de Communione e liberazione, association liée au mouvement de jeunesse catholique qui conteste la démocratie chrétienne officielle et ses positions. Le thème de ce colloque était le refus de l'individualisme, de la société marchande, et la possibilité de créer de nouvelles formes de solidarité afin de reconstituer une sorte d'humus social et donc de dépasser le stade égoïste qui suscite conflits sur conflits à tous les niveaux sociaux.

 

En fait, vous cherchez à fonder un nouveau sentiment communautaire. La modernité est en crise. Il y a un philosophe italien, Julius Evola, qui nous a parlé d'un retour à la Tradition. A votre avis, quelle est l'importance d'Evola dans la pensée d'aujourd'hui?

 

Evola a une signification en tant que témoin de cette crise de la modernité. Son œuvre nous permet de comprendre quelles sont les faiblesses de la modernité, quels sont les fondements de la crise de la spiritualité, quelles sont les raisons de l'avènement de la société marchande matérialiste, etc. Lire Evola est également utile pour étayer une critique des mœurs modernes. Mais en revanche, dans ses livres, on trouve assez peu d'éléments positifs concrets pour construire une pratique véritable de l'anti-modernité. Evola s'est borné à déconstruire de fond en comble les assises de la modernité mais il n'a pas répondu à la modernité ni indiqué de modèle alternative. Il est tombé dans le piège du déterminisme de la thèorie des cycles. Il envisageait seulement de faire s'achever le plus vite possible le cycle de la décadence pour pouvoir rebâtir quelque chose après cette tabula rasa. Or cette attitude, qui consiste à attendre une catastrophe finale, ne permet pas de vivre réellement la crise du monde moderne. Nous, praticiens de la métapolitique qui voulons demeurer en prise avec tout le réel, sommes confrontés à l'impératif de vivre dans ce monde, dans cette crise, et d'essayer de lui imprimer notre sens, d'y ancrer les valeurs que nous portons en nous. Si l'on se borne à ne lire qu'Evola, on risque de basculer dans le rêve stérile ou, pire, dans le sectarisme de style soit «guerrier» soit «aristocratique» (c'est-à-dire avec la volonté d'être ne dehors du monde), ce qui apparaît complètement dément et ridicule pour nos contemporains, qui n'arrivent pas à savoir de quoi il s'agit. De plus, il est arrivé que certains «évolomanes» aient dévoyé des jeunes gens dans des formes tout à fait stériles de combat politique qui, parfois mais rarement, ont débouché sur une hyper-violence terroriste, et, le plus souvent, dans les circuits extra-politiques de la magie, du spiritisme, de l'ésotérisme pur, du n'importe-quoi. Je pense, au vu de tout cela, qu'il faut lire Evola mais comme le témoin d'une époque et non comme un prophète.

 

Mais où trouvez-vous donc l'équilibre, vous, les hommes et les femmes de la Nuova Destra: d'un côté vous voulez la démocratie à la base (la Basisdemokratie) et, de l'autre, vous valorisez et exaltez l'élite...

 

Aujourd'hui, il est très difficile de parler d'«élite», parce que, bien sûr, les élites se créent à partir des valeurs centrales, fondamentales, d'une société. Donc nous devons en premier lieu poser le problème du changement de la mentalité collective. Nous devons d'abord exercer une influence sur la mentalité collective. Et nous préoccuper de ceux qui manipulent cet imaginaire collectif, sur ceux qui détiennent les média, qui agissent dans les milieux du journalisme et de la culture, etc. Je crois qu'il est important de dire aux gens qu'il est possible de construire des valeurs alternatives, différentes de celles que nous vivons actuellement. Mais ce n'est que lorsque ce processus de transformation de la mentalité collective sera bien avancé que l'on pourra à nouveau se poser la question des élites. D'un point de vue théorique, on peut dire qu'une démocratie de base, une démocratie organique, dans laquelle le peuple pourrait reprendre peu à peu sa signification, retrouver petit à petit son unité, est la matrice idéale d'une élite non coupée du peuple, entretenant avec lui des liens multiples, contrairement à ce qui se passe aujourd'hui, quand les partis politiques sont devenus pratiquement des machines à produire des élites désancrées, non constituées des meilleurs mais des plus obéissants à l'appareil. Je crois qu'aujourd'hui, on peut très bien travailler à réveiller l'intérêt des gens, par exemple, en évoquant le combat pour la qualité de la vie, pour la sauvegarde de l'environnement, pour ˇˇˇˇ

niste, sa situation actuelle est si complexe qu'il vsituation de confusion que y règnessenrêt des gens:ss la redécouverte du sens du sacré, pour la reconstruction des solidarités collectives, pour le refus des égoïsmes sociaux, etc. Ce travail de réveil peut parfaitement s'accompagner d'une volonté de reconstruire les élites. Mais cette reconstitution doit s'accomplir a postriori; le premier pas doit être la restauration de la démocratie de base car, sinon, les partis politiques, la partitocratie, empêcheront toute recréation d'élites échappant à leur contrôle.

 

En générale, c'est la gauche qui croit détenir le monopole de la démocratie de base. Evidemment, en Italie, vous avez tellement de partis, votre sphère politique est instable et parfois, Autrichiens et Allemands, s'étonnent, amusés, de la multiplicité des initiatives politiques italiennes... Quelle est la signification des partis pour la société italienne?

 

dioramalett.jpgLa signification des partis dans la société italienne aujourd'hui? Nous devons d'abord constater une importante désaffection de la population vis-à-vis des partis. J'en veux pour preuve le taux d'abstentions élevé lors des dernières élections municipales et régionales de mai 1990 ainsi que le vote pour les ligues régionalistes, qui refusent le système institutionalisé des partis, et pour les mouvements anti-institutionnels. Nous constatons donc un refus populaire de la domination des partis, alors que, malheureusement, le système italien est de plus en plus contrôlé par les partis. Il existe un mot que l'on utilise beaucoup en Italie, dont je ne connais pas la traduction ni en français ni en allemand, qui la lottizazione. Vocable qui désigne, en tous domaines, le partage entre les partis des postes de fonctionnaires à pourvoir. Ce qui permet de se ménager une clientèle ou d'influencer la télévision, la presse, les institutions universitaires, les banques, certains secteurs de l'économie, etc. Comme il y a, d'une part, accroissement incessant de la puissances des lobbies et, d'autre part, désaffection du public vis-à-vis des partis pourvoyeurs en personnel de ces mêmes lobbies, je crois qu'il est désormais possible d'organiser cet espace d'intersection où errent des masses d'électeurs qui ne croient plus aux messages idéologiques des partis ou sont mécontents de se voir exclus de certains emplois, en dépit de leurs qualités professionnelles.     ement incessant de la puissance

 

De nouveaux mouvements sociaux doivent exploiter cette situation pour recréer une sorte de rapport direct des citoyens avec la politique, avec la vie sociale, en essayant de circonvenir les partis, du moins dans certains secteurs. Le scénario que l'on pourrait avoir demain serait marqué par l'apparition de nouveaux mouvements, qui ne seraient ni de droite ni de gauche ni du centre, tout en étant porteurs de différentes idéologies, et qui seraient tous d'accord pour écarter les vieux partis de la gestion du pouvoir. Ce renouveau constitue à mes yeux un combat assez intéressant. Aujourd'hui, c'est sans doute encore trop tôt pour l'amorcer mais demain les choses pourraient changer. La crise d'aujourd'hui pourra s'amplifier, dans le sens où les distorsions de la modernité deviendront insupportables, tant dans le domaine de l'économie que dans celui de l'écologie ou de la culture. Une quantité de phénomènes se manifestent déjà de nos jours: songeons à l'environnement, à l'émigration, à la perte d'identité de certaines cultures, aux problèmes de croissance économique car nous ne croyons pas que la croissance économique du capitalisme industriel durera jusqu'à la fin des temps. Des difficultés surgiront inévitablement: nous n'allons pas nécessairement vers des lendemains chantants. La situation confortable dont bénéficient les partis risque de disparaître. Le terrain glisse sous leurs pieds, il est instable.

 

La nuova destra et la nuova sinistra ont-elles un projet commun pour l'Europe? Par exemple, une Europe des régions, une Europe articulée autour de la démocratie de base?

 

Oui. On peut dire que depuis quelques années, les nouvelles droites européennes, qui ne revendiquent pas toutes l'étiquette de «nouvelle droite», se retrouvent autour d'une série de thèmes et de propositions. Nous sommes tous convaincus, notamment, que notre destin est un destin continental où les querelles comme celle du Tyrol du Sud, que nous avons évoquée tout à l'heure, n'auront plus de raisons d'exister. Ainsi, si l'on parle de «régions culturelles», d'ethnies, de coexistence entre des cultures différentes, etc., nous pourrions très très bien nous entendre et donc organiser petit à petit, en gardant chacun nos spécificités, notre culture, une sorte de mouvement de conscience collective, appelé à se renforcer et à devenir une véritable école de pensée, qui, elle, n'aura pas de limites. Qui pourra souder en une communauté de pensée des hommes et des femmes venus de tout le continent, du Portugal à la Russie-Sibérie. Ce qu'il faut faire aujourd'hui, c'est réflechir à la nouveauté fondamentale de la nouvelle droite, de mettre l'accent sur le terme «nouvelle» et non plus sur le terme «droite». Sinon, nous traînerons encore l'héritage des courants de pensée vétustes et vermoulus des années 50 et 60 qui continuent, envers et contre tout, à répéter les mêmes slogans et à appréhender le réel au départ de clivages révolus. Vouloir restaurer les nationalismes chauvins participe de ces archaïsmes de la pensée... C'est à nous, à notre génération, que revient le devoir de dépasser définitivement ces vieilleries. Je pense que ce qui se fait actuellement dans les revues de la nouvelle droite en Europe est important. Car ce qui s'écrit en France, en Italie, en Espagne, en Belgique, en Allemagne, en Yougoslavie, en Grèce, en Pologne, en Russie, en Grande-Bretagne, en Hongrie, etc. donne déjà l'idée d'une unité, au moins intellectuelle, du continent européen. En partant de ce constat, nous avons deux choses à faire: nous traduire mutuellement et ne pas revenir en arrière car le passé est le passé et il faut bâtir du neuf, un futur commun. Il faut que nous parlions dans nos publications des revues étrangères et de nous réunir de temps à autre pour parler des mêmes problèmes, pour confronter nos divergences. Il faut traduire et publier au maximum pour faire connaître aux Allemands ce que pensent les Italiens ou les Français, aux Italiens ce que pensent les Belges ou les Autrichiens, les Yougoslaves ou les Grecs... Voilà ce qui est important...

 

Revenons un peu en arrière. Le passé, en Allemagne et en Autriche, est un gros problème. On le refoule constamment. Vous nous dites qu'en Italie, ce problème n'existe plus. Ou qu'il est nettement moindre. Quelle est la différence entre le refoulement du fascisme et le refoulement du national-socialisme?

 

La différence? Elle se situe, à mon sens, dans l'acceptation des thèses d'un grand historien italien, Renzo de Felice, qui, aujourd'hui, réalise un travail colossal sur la vie de Mussolini et toute l'histoire du fascisme. Renzo de Felice est un homme de gauche, d'origine juive, un socialiste, qui, donc, n'était pas d'emblée enclin à être un nostalgique de l'époque fasciste. A la lecture de ses œuvres, on s'est rendu compte que les vingt années de régime fasciste en Italie n'ont pas été simplement des années où a triomphé le régime autoritaire mais des années où il s'était passé beaucoup d'autres choses. Il y a eu des réalisations sociales, un renouvelement des structures administratives de l'Etat, qui ont été considérablement modernisées. Les Italiens n'ont nullement vécu dans un goulag pendant vingt ans mais ont eu la possibilité de participer à la vie politique et culturelle de leur époque. Bien sûr, il y avait des problèmes: la liberté était restreinte, etc. Dans les années 70, les interprétations globales de Renzo de Felice, ses investigations tous azimuts, ont suscité d'énormes débats; aujourd'hui, presque plus personne ne conteste leur validité. C'est la raison pour laquelle nous pouvons dire que le passé a été digéré en Italie, dans le sens où l'opinion a compris que le fascisme était une partie de l'histoire italienne, partie que la plupart des citoyens refusent désormais, mais qui est considérée comme révolue et surmontée. Dans le cas de la communauté allemande en général, le phénomène de digestion du national-socialisme sera plus long. Car il y a le problème de l'élimination de la commnauté juive d'Europe. Je crois cependant que le débat sur le national-socialisme ne pourra être éludé et devra être replacé dans un autre contexte. Personnellement, je travaille dans le domaine de la science politique et je constate que de plus en plus d'auteurs actifs dans les universités américaines adoptent vis-à-vis du national-socialisme une attitude nouvelle, qui n'est plus celle du rejet systématique ou de la haine. Je pense que cela annonce la tendance future des sciences historiques et politiques. Malheureusement pour vous, les Allemands et les Autrichiens seront les derniers à accepter ces nouvelles méthodes de travail. Mais qu'ils sachent bien qu'Outre-Atlantique, le national-socialisme est d'ores et déjà «historiciser» de la même façon que le fascisme italien, à la suite des études de Renzo de Felice. L'affaire Nolte, il y a quelques années, est un fait intéressant. Nolte a essayé d'introduire dans l'historiographie allemande contemporaine les méthodes anglo-saxonnes, qui font littéralement passer le passé. Je ne crois pas que les rétentions allemandes soient un problème de manipulation médiatique ou idéologique mais un problème de «lavage de cerveau», de Charakterwäsche, comme le disait il y a quelques années Caspar von Schrenck-Notzing. Les Allemands sont colonisés psychologiquement depuis la fin de la deuxième guerre mondiale. Mais la construction de l'Europe, et son renforcement, passe par le dépassement de ces blocages, de ces complexes, parce que la vaste communauté germanophone doit jouer un rôle-clef dans l'Europe de demain. Il sera donc impossible de poursuivre ce chantage continu, de faire sans cesse de la surenchère à propos du passé allemand. Je crois donc que tôt ou tard, le problème sera résolu. Dans le cadre de la Grande Europe en gestation, le problème sera digéré définitivement. Il faudra certes attendre encore quelques années. Il serait intéressant, dans ce sens, que les universitaires allemands se penchent sérieusement sur les travaux effectués à l'étranger sur le national-socialisme. Cela accelèrerait bien des choses.

 

Monsieur Tarchi, puis-je vous demander quelques précisions sur votre formation universitaire?

 

J'ai presque 38 ans. Je suis chargé de recherches à l'université de Florence, au département des sciences politiques. Je m'occupe plus particulièrement des problèmes de la crise des régimes démocratiques pendant le premier après-guerre, soit les années 20 et 30. Je dirige deux revues de la nouvelle droite italienne, Diorama Letterario et Trasgressioni. Je traduis également des livres dans le domaine des sciences politiques.

 

Monsieur Tarchi, nous vous remercions de nous avoir accordé cet entretien.

samedi, 13 mars 2010

Tout sur Céline, chaque jour...

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Tout sur Céline, chaque jour:

le Bulletin célinien n°317/mars 2010

Le Bulletin célinien n°317 - mars 2010

Au sommaire:
- Marc Laudelout :
Bloc-notes
- M. L. : « Céline dans Tovaritch » (suite)
- Robert Le Blanc & Étienne Nivelleau : « Autour de la correspondance »
- *** : « Trois céliniens commentent Lettres »
- Pierre Lalanne : « Albert Paraz, l’homme-orchestre »
- Albert Paraz : « D’un château l’autre » [1957]
- Jacques Aboucaya : « Paraz à découvrir »
- *** : « Albert Paraz et L’Express »
- P.-L. Moudenc : « La correspondance de Céline à Paraz ».

Un numéro de 24 pages, 6 € franco.

Le Bulletin célinien
B. P. 70
B 1000 Bruxelles 22
Belgique

C’est un documentaire attrayant que la Société Européenne de Production a réalisé sur Céline à la demande du Conseil général des Hauts-de-Seine(1). Il s’intègre dans une série de portraits de personnalités ayant vécu dans cette partie de la petite couronne d’Île-de-France. Ce ne sont pas seulement les dix dernières années de la vie de l’écrivain qui sont traitées dans ce film, même si elles sont naturellement privilégiées. Au moyen d’images d’archives, c’est tout l’itinéraire de l’écrivain qui est retracé. L’ensemble, de belle facture, s’ouvre par des prises de vues aériennes, excusez du peu, de la « Villa Maïtou ». Autre intérêt du film : on peut y voir une belle brochette de « céliniens historiques », François Gibault, Henri Godard, Philippe Alméras, Frédéric Vitoux — plus le benjamin de l’équipe, David Alliot. Chacun, dans le style qui lui est propre, évoque l’homme et l’œuvre. Des témoins interviennent également : Christian Dedet (écrivain et médecin comme lui), Geneviève Frèneau (sa voisine à Meudon), Judith Magre (élève du cours de danse de Lucette), Madeleine Chapsal (qui réalisa la fameuse interview que l’on sait). Des extraits des trois entretiens télévisés (Dumayet, Parinaud, Pauwels) sont égrenés tout au long du film. De la belle ouvrage assurément.
Fallait-il choisir comme conseiller historique Fabrice d’Almeida, auteur à succès d’un livre sur La vie mondaine sous le nazisme ? Dans ce film, il ne craint pas d’affirmer que, sous l’Occupation, « l’antisémitisme de Céline contribue et va dans le sens de l’extermination qui est en cours ». Pour être sûr d’être bien compris, il ajoute : « Qu’il n’y ait pas d’ambiguïté : Céline a même dit qu’il fallait liquider les juifs ». C’est, on le voit, aller beaucoup plus loin que tous les céliniens très critiques à l’égard du pamphlétaire. Qu’ils l’acceptent ou non, ceux qui interviennent dans le film se voient ainsi indirectement associés aux affirmations de cet historien. L’un de ceux-ci évoqua jadis « le problème du sens à donner au langage paroxystique célinien »(2). Tout le problème est là, en effet. C’était à propos de la fameuse lettre à Alain Laubreaux parue dans Je suis partout en 1941. Céline concluait de la sorte : « Cocteau décadent, tant pis ! Cocteau, Licaïste, liquidé ! ». Si on met cette lettre en parallèle avec celle que Céline adresse à Cocteau lui-même peu de temps après, la perspective n’est plus exactement la même(3).
Il faut noter que ce documentaire va connaître une importante audience puisqu’il est d’ores et déjà commercialisé sous la forme d’un coffret DVD. Il va en outre être diffusé sur trois chaînes de télévision(4). C’est dire le retentissement qu’auront les dires d’Almeida. On peut penser que cette question épineuse aurait méritée d’être plutôt traitée par les biographes de l’écrivain(5).

Marc LAUDELOUT


Notes
1. Céline à Meudon (2009). Réalisation : Nicolas Craponne. Producteur : Société Européenne de Production à la demande du Conseil général des Hauts-de-Seine pour la collection « Un lieu, un destin ». Durée : 52’.
2. Philippe Alméras, « Quatre lettres de Louis-Ferdinand Céline aux journaux de l’Occupation », French Review, avril 1971. Repris dans Philippe Alméras,
Sur Céline, Éditions de Paris, 2008, pp. 11-23.
3. Lettre de Céline à Jean Cocteau in Cahiers Céline 7 (« Céline et l’actualité, 1933-1961 »), Gallimard [ Les Cahiers de la Nrf ], 2003, pp. 230-231.
4. Les chaînes « TV5 Monde », « Histoire » et France 5. Par ailleurs, le coffret a été envoyé dans les établissements scolaires, les bibliothèques et médiathèques des Hauts-de-Seine. Il est vendu (45 €) dans les musées départementaux. Les autres écrivains évoqués dans cette collection sont Chateaubriand, Charles Péguy et Paul Léautaud. Le DVD seul sera vendu 12 €. Le film peut être vu sur le site www.vallee-culture.fr ainsi que sur le blog
http://lepetitcelinien.blogspot.com.
5. Sur ce sujet, voir, par exemple, ce qu’écrit Claude Duneton : « Il est bien malaisé d’apprécier sans passion, et sur de justes balances, l’état d’esprit qui régnait à l’époque. Malgré tout ce que l’on a pu dire ensuite, le public – dont Céline faisait partie – n’avait guère le moyen de connaître, sur le moment même, les horreurs qui étaient en train de se commettre dans les camps nazis. Que l’on fût pro-hitlérien ou résistant, personne ne pouvait imaginer à quelles lugubres extrémités conduisait la haine raciale… » (
Bal à Korsør. Sur les traces de Louis-Ferdinand Céline, Grasset, 1994).

Postmortem Report: het laatste werk van Dr. Sunic

Postmortem Report: het laatste werk van Dr. Sunic

Tomislav Sunic is een van de vooraanstaande kenners van Nieuw Rechts.
In 2008 was hij nog te gast op het colloquium van Identiteit-Deltastichting. Tomislav Sunic publiceert in het Kroatisch, Engels, Frans en Duits onder andere over de ideeën van Oswald Spengler, Carl Schmitt, Vilfredo Pareto en Alain de Benoist.

Zijn culturele kritiek handelt voornamelijk over: religie, cultuurpessimisme, ras, het derde rijk, liberalisme en democratie,multiculturalisme en communisme. Dit boek bundelt Sunics beste teksten van de afgelopen tien jaar. Als Europees waarnemer die het liberalisme en het communisme aan beide zijden van het IJzeren Gordijn heeft meegemaakt, schetst hij enkele indringende culturele beelden van de westelijke en postcommunistische maatschappij. Altijd erudiet en soms humoristisch, biedt dit boek een zeer leesbaar postmortem verslag over de dood van het Westen.


Dit boek kan besteld worden bij Identiteit op het volgende E-postadres voor de prijs van 18 €.(verzending inbegrepen)

Ugo Spirito, il padre della "Corporazione Proprietaria"

Ugo Spirito il padre della "Corporazione Proprietaria"

di Luigi Carlo Schiavone - http://ginosalvi.blogspot.com/ 

Ugo Spirito nacque ad Arezzo il 9 settembre 1896 dall’ingegnere Prospero e da Rosa Leone. Iscrittosi a giurisprudenza, fu allievo del socialista Enrico Ferri, da cui trasse la sua formazione positivista. Nel 1918, anno della laurea, avrà il primo incontro, nel corso di una lezione all’università di Roma, con il suo futuro mentore, Giovanni Gentile. Nel 1920, dopo aver conseguito anche la laurea in filosofia, venne chiamato da Gentile a collaborare a “Il giornale critico della filosofia italiana” di cui divenne successivamente direttore. Nel 1922 conobbe Benedetto Croce, con cui entrò successivamente in polemica. Nel 1923 fondò con Carmelo Licitra e Arnoldo Volpicelli “Nuova politica liberale”, rivista che cambiò successivamente il nome in “Educazione politica” prima e “Educazione Fascista” poi. Nel 1924 fu chiamato da Giuseppe Bottai a collaborare per “Critica Fascista”. In questi anni pubblicò, inoltre, “Il pragmatismo della filosofia contemporanea”(1921), “Storia del diritto penale italiano” (1925), “Nuovo diritto penale” (1929), “Scienza e filosofia” (1933).

ugo public%5Cimg_prod%5C2471.jpgChiamato a vivere il periodo magico del neo-idealismo sorto all’indomani del primo dopoguerra, Spirito aderì giovanissimo all’attualismo gentiliano, corrente di pensiero dalla quale si distaccò nel corso degli anni Trenta, senza però rinnegare alcuni dei suoi principi di fondo. Dopo essere stato considerato un “divulgatore entusiasta ed un apologeta instancabile dell’attualismo” col suo “Scienza e filosofia”, infatti, delineò quella che è considerata, non a torto, una posizione originale ed autonoma rispetto al pensiero gentiliano, collocandosi, con Guido Calogero, sul fronte della cosiddetta “sinistra attualistica”. Spirito mantenne nella sua analisi il principio gentiliano del “fare” (dell’atto) col chiaro intento di “demetafisicizzarlo” legandolo all’agire fattuale degli uomini che si ha nell’ambito del concreto orizzonte mondano. Spirito, impegnandosi nell’ambito della problematica gnoseologica, giunse a risultati differenti da Gentile e Croce, distanziandosi anche dalla tesi sostenuta dal suo amico Calogero, che sviluppò questo programma in senso etico. Spirito, infatti, grazie ai suoi studi riuscì ad affermare una serie di precetti, tra cui la non inferiorità della conoscenza scientifica rispetto alla conoscenza filosofica; l’impossibilità di sopprimere la scienza nella filosofia e la necessità di stabilire tra loro un’organica collaborazione. Questa sua concezione, che egli stesso definì “attualismo costruttore”, insomma, aveva come scopo di fare “sul serio scienza che sia filosofia e filosofia che sia scienza” in un costante nesso dialettico.

Nel 1937, con la pubblicazione edita da Sansoni di “Vita come ricerca”, Spirito lanciò le tesi del “problematicismo” con le quali capovolse progressivamente le posizioni dell’attualismo, consumando la rottura definitiva con Gentile, il quale si scagliò duramente contro questa opera. Il disgelo avverrà solo nel 1941, in seguito alla pubblicazione del volume del filosofo aretino “Vita come arte” che Gentile commenterà all’interno di una conferenza promossa dal ministero dell’Educazione facendo riferimento ad uno “Spirito non più mio”.
Gli anni Trenta, però, sono anche gli anni di gestazione della teoria della “corporazione proprietaria”. Dopo aver riunito, nel 1930, nel libro “Il Corporativismo” i tre testi precedentemente redatti sull’argomento, “Dall’economia liberale al corporativismo”, “I fondamenti dell’economia corporativa” e “Capitalismo e Corporativismo”, partecipò nel maggio 1932 al secondo Convegno di Studi sindacali e corporativi, tenutosi a Ferrara. Qui, dopo aver criticato il dualismo di classe presente nel capitalismo, Ugo Spirito lanciò la sua innovativa teoria. Ne “La corporazione proprietaria”, anche detta “corporazione comunista” il filosofo paventò la possibilità che la proprietà dei i mezzi di produzione fosse affidata non più ai privati bensì alla corporazione stessa. Tale teoria si contrapponeva all’ “anarchia produttiva” e al “dirigismo statale” permettendo che la grande società anonima si trasformasse in corporazione; favorendo la fusione tra capitale e lavoro, Spirito, inoltre, propugnava il superamento dell’antagonismo fra datori di lavoro e lavoratori che da realizzarsi grazie al passaggio del capitale dagli azionisti ai lavoratori, che divenivano così proprietari della parte loro spettante. Questa teoria, che prevedeva la risoluzione del sindacalismo nel corporativismo integrale e che rendeva inutile la presenza delle associazioni di categoria, favorendo la piena identificazione fra individuo e Stato, affermando così il superiore valore etico della rivoluzione fascista, fu duramente avversata sia dalla “destra” fascista, rappresentante dell’industria e della borghesia conservatrice e nazionalista, che la tacciò di “bolscevismo” e la bollò come teoria “eretica”, sia dalla sinistra sindacale che, dopo aver accusato Spirito d’essere dotato di scarsa sensibilità sociale, passò al vaglio la sua tesi evidenziandone i tratti utopici. A queste critiche seguì una polemica di carattere accademico fra il filosofo e il quadriumviro De Vecchi. Con la redazione del codice civile del 1942, inoltre, s’affermò una concezione borghese ed individualistica della proprietà privata contro la quale lo stesso Mussolini espresse una certa insoddisfazione. Nonostante ciò, i rapporti tra il filosofo ed il regime continuarono ad essere solidi.

Ma nell’animo di Ugo Spirito la volontà di ravvivare gli studi corporativi non si spense; egli, infatti, nonostante tutto, proseguì nella sua opera. Nel 1941 redasse a tal proposito il volume “Guerra rivoluzionaria”, nel quale tracciò un quadro senza compiacenze dei rapporti di forze esistenti fra gli Alleati e l’Asse, e non nascose un certo rammarico per la mancata alleanza delle tre potenze totalitarie: Italia, Germania e Urss contro le demoplutocrazie internazionali. Un volume, quest’ultimo, la cui stampa sarà bloccata dallo stesso Mussolini perché considerato troppo filo-tedesco. In questo periodo, inoltre, si consumò anche il suo allontanamento da Bottai, a causa della conversione al cattolicesimo di quest’ultimo, portando Spirito a individuare in Camillo Pellizzi, presidente dell’Istituto Nazionale di Cultura fascista, il suo nuovo referente politico e culturale.
Nel giugno del 1944 il fervore giustizialista seguito al crollo del regime vide Ugo Spirito al centro di un processo d’epurazione che gli costerà la sospensione dall’insegnamento; prosciolto dall’accusa di apologia del fascismo, riuscirà a ritornare alle sue mansioni di docente.
Nel 1948, quindi, pubblicò “Il problematicismo” seguito, nel 1953, da “Vita come amore. Tramonto della civiltà cristiana”, opera con cui si evidenzia il distacco definitivo del problematicismo dal cristianesimo in generale e dal cattolicesimo in particolare, generando ampie discussioni e polemiche.

Nel 1956 compì un delicato viaggio in Unione Sovietica, dove avrà un colloquio molto interessante con Kruscev. I suoi viaggi nei paesi del socialismo reale però non si fermano qui. Nel 1961 si recò in Cina dove soggiornerà per un periodo abbastanza lungo nel quale riuscirà ad incontrare le più alte cariche del Paese, tra cui lo stesso Mao, che lo colpirà favorevolmente aldilà di ogni più rosea aspettativa.
Di questi due viaggi è, inoltre, interessante riportare quanto affermato dal filosofo in “Memorie di un incosciente”, edito nel 1977: “Negli occhi di Kruscev e in quelli di Mao ho visto la luce del vero comunismo. Era il comunismo trionfante, con la sicurezza del trionfo. Quel comunismo fu il solo comunismo che il mondo ha visto, e che non vedrà mai più. È lo spettacolo di una conquista assoluta che non potrà più ripetersi. Si tratta di un miliardo di uomini che hanno creduto alla nascita della verità. Aver visto quella realtà è uno dei tanto privilegi che la fortuna mi ha riservato”.
Il 1967 è l’anno della polemica con Papa Paolo VI. Il 2 dicembre di quell’anno, infatti, Spirito riceve dal segretariato pro non credentibus il messaggio del Papa per la celebrazione di una “Giornata della Pace”, seguito da una lettera di accompagnamento in cui il filosofo viene inserito tra “coloro che non riconoscono la dimensione religiosa dell’esistenza e della Storia”. Irritato, Spirito rispose affermando di non accettare la qualifica di “non credente”, figlia a suo dire di “regole procedurali arbitrarie e temerarie” ed aggiungendo, inoltre, che le sue opere non erano mai state poste all’indice. Nel 1972 partecipò, quindi, all’inaugurazione dell’Istituto degli Studi Corporativi a Roma; nel 1975, in qualità di presidente della Fondazione Giovanni Gentile promosse, giovandosi della collaborazione della Scuola Normale Superiore di Pisa e dell’Istituto dell’Enciclopedia Italiana, un importante convegno internazionale sul pensiero di Giovanni Gentile. Pubblicò nello stesso anno il libro “Cattolicesimo e comunismo”.

Negli anni finali della sua esistenza, al pari dei grandi saggi del passato, la sua casa divenne meta e cenacolo di giovani intelligenze giunte lì per ascoltare dalla diretta voce del Maestro gli insegnamenti dettati da un’esperienza di vita, oltre che intellettuale, intensa. Una voce che cesserà d’essere udita il 28 aprile del 1979, quando la morte sopraggiunse improvvisa ad interrompere l’esistenza di una delle figure indubbiamente più interessanti ed ecclettiche del recente passato italiano.

Fonte: RINASCITA

Marc. Eemans ou l'autre versant du surréalisme

Archives de SYNERGIES EUROPEENNES - 1989

Marc. Eemans ou l'autre versant du surréalisme

 

La conversion de Marc. Eemans au Surréalisme est contemporaine de celle de René Magritte et de ses amis. Elle s'est faite entre 1925 et 1926. A cette époque Marc. Eemans avait à peine dix-huit ans, alors que Magritte était son aîné de quelque neuf à dix ans.

 

eemanspipe.jpgC'est grâce à la rencontre de Geert Van Bruaene, alors directeur du Cabinet Maldoror en l'Hôtel Ravenstein, que le jeune Marc Eemans a été intié à la poésie présurréaliste des «Chants de Maldoror» et c'est également alors qu'il entra en contact avec Camille Goemans et E.L.T. Mesens qui allaient bientôt devenir ses compagnons de  route avec Paul Nougé, René Magritte, André Souris, paul Hooremans et Marcel Lecomte, dans l'aventure du premier groupe surréaliste belge, groupe où ils furent bientôt rejoints par Louis Scutenaire qui, à l'époque, se prénommait encore Jean.

 

Certains historiens du Surréalisme en Belgique ont estimé qu'à ses débuts, Marc Eemans, en tant que peintre, n'était qu'un épigone, un imitateur de René Magritte, mais, qu'il n'y a pas eu imitation, tout au plus chemin parallèle, ce qui s'explique aisément, car il fut une époque où le Surréalisme vivait dans l'osmose de l'air du temps».

 

Pour s'en convaicnre, il suffit d'ailleurs de consulter la petite revue «Distances», éditée à Paris par Camille Goemans en 1928, à laquelle collabora Marc. Eemans (x). Ajoutons-y au même titre ses dessins à la plume dans le mensuel «Variétés», paraissant à la même époque à Bruxelles.

 

D'ailleurs, Marc. Eemans alla bien vite prendre définitivement un chemin tout autre que celui de René Magritte et de ses compagnons de route, à l'exception de Camille Goemans et de Marcel Lecomte. Nous en trouvons un témoignage irréfutable dans un album paru en 1930 aux Editions Hermès, fondées par Goemans et lui-même et au titre bien significatif! Eemans s'y révèle comme un adepte moderne de ce que Paul Hadermann, professeur à l'Université Libre de Bruxelles, a appelé le »trobar clus de Marc. Eemans» d'après le terme provençal propre aux troubadours et minnesänger qui pratiquaient jadis une poésie hermétique «close», accessibles aux seuls initiés. Cet album intitulé «Vergeten te worden» (Oublié de devenir) compte «dix formes linéaires influencées par dix formes verbales». Il est paru initialement en langue néerlandaise, mais une réédition, avec traduction française et une introduction du prof. Hadermann, à laquelle nous venons de faire allusion, en est parue en 1983.

 

La coloration du Surréalisme propre à Marc. Eemans est dès lors nettement affirmée. Ce Surréalisme s'est fortement éloigné de celui de René magritte que Salvador Dali a qualifié un jour d'«A.B.C. du Surréalisme».

 

Tandis que les options des membres de ce que Patrick Waldberg a appelé plus tard la «Société du Mystère» se sont trop souvent orientées vers les facilités d'un certain «néo-dadaïsme» au dogmatisme sectaire à la fois «cartésien» et «gauchisant» en lequel la contrepèterie se le dispute à l'humour noir et rose, voire au «prosaïsme» petit-bourgeois (le chapeau melon et la pipe, de Magritte!), Marc. Eemans, lui, accompagné en cela par Camille Goemans et Marcel Lecomte, s'est orienté derechef vers un autre versant du Surréalisme fort proche de l'Idéalisme magique d'un Novalis et du Symbolisme de la fin du siècle dernier.

 

Ce Surréalisme, que les historiens du Surréalisme en Belgique semblent ignorer ou plutôt passer sous silence, répond en quelque sorte à l'appel à l'«occultation» lancé par André Breton dans son «Second manifeste du Surréalisme». Rappelons d'ailleurs à ce propos à quel point Breton a été profondément touché par le Symbolisme, au point que Paul Valéry a été son témoin lors de son premier mariage et qu'en 1925, voire plus tard encore, lui-même ainsi qu'Eluard et Antonin Artaud se sont révélés comme des admirateurs inconditionnels du poète symboliste Saint-Pol-Roux.

 

La filiation du Romantisme au Surréalisme via le Symbolisme est d'ailleurs évidente, aussi Alain Viray a-t-il pu écrire qu'«il y a des liens entre Maeterlinck et Breton», à quoi nous pourrions ajouter qu'il y en a également entre Max Elskamp et Paul Eluard, tandis que l'ex néo-symboliste Jean De Bosschère a viré étrangement, vers la fin de sa vie, vers le Surréalisme, un certain Surréalisme il est vrai.

 

Quoi qu'il en soit, l'art que Marc. Eemans a pratiqué, dès sa vingtième année, est ce que l'on pourrait appeler un «Surréalisme ouvert», détaché de tout sectarisme et de cet esprit de chapelle cher aux surréalistes qui se considèrent  de «stricte obédience». Dès lors la question se pose: Marc. Eemans est-il encore surréaliste? Mais en fait qu'est-ce qu'une étiquette? What is a name? En tout cas, Eemans a déclaré un jour, lors d'une enquête de la revue «Temps Mêlés» qu'il ne serait pas ce qu'il est sans le Surréalisme…

 

Parlons plutôt de la revue «Hermès» que Marc. Eemans fonda en 1933 avec ses amis René Baert et Camille Goemans (c'est ce dernier qui en rédigea toutes les «Notes des éditeurs»). C'était une revue d'études comparées en laquelle poésie, philosophie et mystique furent à l'honneur. Y collaborèrent activement e.a. Roland de Reneville (un transfuge du «Grand jeu» et auteur d'un «Rimbaud le Voyant»), le philosophe Bernard Groethuysen, l'arabisant Henri Corbin ainsi que le poète Henri Michaux qui en devint le secrétaire de rédaction. Revue surréaliste? Oui ou non, et nous croyons même que le mot «surréalisme» n'y a jamais figuré… Par contre y furent publiées les premières traductions en langue française de textes des philosophes Martin Heidegger et Karl Jaspers. Y collabora également le philosophe franças Jean Wahl tandis qu'y figurèrent des traductions de textes poétiques ou mystiques flamnds, allemands, anglais, tibétains, arabes et chinois, sans oublier l'intérêt porté à des poètes symbolistes, pré-symbolistes ou post-symbolistes.

 

En somme «Hermès» pratiqua un «Surréalisme occulté» qui a retenu l'attention d'André Breton, mais aussi l'indifférence, si pas l'hostilité de certains membres de la «Société du Mystère». Notons à ce propos que Breton a toujours préféré le «merveilleux» au «mystère», en prônant surtout le recours à la magie, sans toutefois pouvoir se soustraire à la tentation d'une magie de pacotille, celles des voyantes et des médiums. Du côté d'«Hermès», au contraire, il y eut toujours le souci d'un hermétisme davantage tourné vers l'austère éthique propre à tout ce qui relève de la «Tradition primordiale». Mais ne l'oublions pas:: le Surréalisme d'André Breton et de ses amis n'a jamais pu se défaire d'un certain «avant-gardisme» très parisien en lequel le goût de l'étrange, du bizarre à tout prix, de burlesque provocateur et de l'exotimse forment un amalgame des plus pittoresques fort éloigné des préoccupations profondes de Marc. Eemans et de ses amis de la revue «Hermès». Chez lui surtout prévaut avant tout la soumission à des mythes intérieurs nés de ses fantasmes. Il y a chez lui une gravité qui l'a conduit à une incessante quête de l'Absolu. En témoignent aussi bien ses peintures que ses écrits poétiques. Comme l'a écrit Paul Caso («Le Soir, 26-28.XII.1980): «On doit reconnaître l'existence de Marc. Eemans et la singularité d'un métier qui a choisi de n'être ni claironnant, ni racoleur. Il y a là un poids d'angoisse et de sensibilité».

 

Jean d'Urcq

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vendredi, 12 mars 2010

Les "dégagements" de Régis Debray

regis_debray_1.jpgLes dégagements de Régis Debray

Ex: http://metapoinfos.hautetfort.com/

Dégagements est le titre du nouvel essai de Régis Debray qui doit sortir en librairie dans les prochains jours. Il a rassemblé dans ce volume, en particulier, ses carnets publiés dans la revue Médium.

L’essentiel, qui est un certain style, se niche dans les détails. C’est le ton de l’écrivain, celui qui vivifie les mots et stylise la vie.

Régis Debray joue aux quatre coins avec les accidents de la vie. Entre figures tutélaires (Julien Gracq ou Daniel Cordier), et artistes redécouverts (Andy Warhol ou Marcel Proust), entre cinéma et théâtre, expos et concerts, le médiologue se promène en roue libre, sans apprêt ni a priori. Rêveries et aphorismes cruels se mêlent aux exercices d’admiration. Les angles sont vifs, la lumière crue, mais souvent, à la fin, tamisée par l’humour.

Ainsi l’exige la démarche médiologique, tout en zigzags et transgressions, selon la définition un rien farceuse qu’en donne l’auteur : « Un mauvais esprit assez particulier qui consiste, quand un sage montre la lune, à regarder son doigt, tel l’idiot du conte. »

Essayiste, romancier, journaliste et mémorialiste, Régis Debray a notamment publié aux Éditions Gallimard de nombreux essais : Ce que nous voile le voile. La République et le sacré (Hors Série Connaissance, 2004), Le plan vermeil (Hors Série Connaissance, 2004), Supplique aux nouveaux progressistes du XXIe siècle (Hors Série Connaissance, 2006), une pièce de théâtre : Julien le fidèle (collection blanche, 2005), des mémoires : Aveuglantes lumières (collection blanche, 2006). Derniers ouvrages parus : Un candide en Terre Sainte (collection blanche, 2008, Folio n° 4968) et Le moment fraternité (collection blanche, 2009).

 

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