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dimanche, 06 mai 2012

L'Afrique Réelle N° 28 - Avril 2012

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L'Afrique Réelle N° 28 - Avril 2012

 
Sommaire
 
Ex: http://bernardlugan.blogspot.com/

Actualité :
 
- La guerre du Mali : un conflit dont la résolution passe par le retour au réel ethnique
- Libye : la guerre Toubou-Arabes peut-elle embraser le Tchad ?
- Le Somaliland en quête d’une reconnaissance par l’Union Européenne
 
Dossier : Les berbères
 
- Le long combat identitaire des Berbères
- Entretien avec Bernard Lugan
- L'Egypte et les Berbères
- Les royaumes berbères durant l'antiquité
- L'arabisation ethnique de la Berberie
- L’opposition entre Berbères et Arabes dans le mouvement nationaliste algérien
- Le Maroc, l'Algérie et la Berbérité
 
Editorial de Bernard Lugan
 
La guerre du Mali a fait exploser sous nos yeux ces deux grands mythes destructeurs de l’Afrique que je ne cesse de dénoncer depuis des décennies : celui de l’Etat-nation pluri ethnique et celui de la démocratie fondée sur le principe du « un homme, une voix ». En effet :
 
1) Le mélange ethnique au sein d’un même Etat artificiel est par lui-même crisogène ; d’autant plus que le phénomène est aggravé par la démocratie, cette ethno-mathématique qui donne le pouvoir aux plus nombreux, réduisant les peuples minoritaires à l’esclavage ou les contraignant à la rébellion armée.
2) Après les guerres Nord contre Sud au Tchad, en Côte d’Ivoire, au Nigeria, au Soudan, le Mali montre à son tour que les Etats post-coloniaux sont des coquilles vides. En ce sens, la malencontreuse intervention franco-otanienne en Libye aura au moins eu un effet positif : le colonel Kadhafi n’étant plus là pour les contenir, les Touaregs qui ont repris leur liberté ont en effet fait sauter le principal tabou qui interdit à l’Afrique de redevenir elle-même, donc d’exister.
 
Or, au moment où les Touaregs démontrent que les lois historiques inscrites dans la longue durée sont plus fortes que nos fantasmes universalistes et démocratiques, au moment où le réel triomphe des idéologies, nos dirigeants, incapables de prendre la mesure de la situation, s’accrochent tels des automates à ces frontières cicatrices, ces lignes prisons tracées au mépris de toutes les réalités physiques et humaines.
Relisons Ferhat Mehenni et son livre manifeste dans lequel il parle d’«_Etats sans nations ». Méditons une réflexion de l’auteur pour qui les dirigeants européens, au lieu de s’interroger sur l’avenir d’Etats artificiels, mettent au contraire en cause les Peuples qui les combattent au nom de légitimes revendications identitaires.
 
Plus que jamais, la solution, au Mali comme ailleurs en Afrique, est la partition. On objectera que ce serait alors la porte ouverte à la balkanisation. Probablement. Mais de la Balkanisation peuvent sortir de nouveaux équilibres ; pas du néant actuel. N’oublions pas que pour mettre fin à la Guerre de Trente ans les Traités de Westphalie dotèrent l’Europe d’une poussière d’Etats dont des dizaines de micro-Etats. D’ailleurs, pourquoi toujours penser en termes de vastes ensembles ; y aurait-il un étalon maître à ce sujet ?
L’avenir de l’Afrique est à des Etats plus « petits » et aux frontières épousant plus fidèlement les réalités des peuples.
Faisons un retour en arrière et oublions les invectives et les anathèmes pour ne parler que de la pertinence du système : les Sud-africains avaient tenté, maladroitement certes, cette expérience avec la politique des Etats nationaux ethniques, dite politique des Bantustan, solution visionnaire qui fut rejetée avec indignation par la bien-pensance internationale engluée dans ses dogmes.
Aujourd’hui, après l’indépendance de l’Erythrée, du Sud Soudan, demain du Somaliland et de l’Azawad, après plus d’un demi siècle de guerres qui ont bloqué tout développement en Afrique, le débat ne mérite t-il pas d’être à nouveau ouvert dans un climat enfin dépassionné ?

mercredi, 02 mai 2012

Une maîtresse imprévisible

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Une maîtresse imprévisible

par Georges FELTIN-TRACOL

En 1988, Dominique Venner, futur responsable de la Nouvelle Revue d’Histoire, publiait chez Plon Treize meurtres exemplaires, un ouvrage consacré à l’assassinat de treize personnalités politiques du XXe siècle. Vingt-quatre ans plus tard, il réédite le livre dans une version revue, corrigée et augmentée chez un nouvel éditeur plein d’avenir, Pierre-Guillaume de Roux, fils du célébrissime écrivain et éditeur anticonformiste Dominique de Roux.

Dominique Venner a remplacé les chapitres sur une bavure du Mossad en 1973 contre Ahmed Bouchiki et l’assassinat toujours  inexpliqué de Jean de Broglie en 1976 par l’attentat contre Hitler en juillet 1944 fomenté par le colonel von Stauffenberg et par la disparition – qui laisse perplexe – de son ami François de Grossouvre « suicidé » en avril 1994 dans son bureau de l’Élysée. Il a aussi tenu à y adjoindre un prologue et un épilogue explicatifs et en a modifié l’intitulé, « Treize meurtres exemplaires » devenant le sous-titre de L’imprévu dans l’Histoire.

En fin historien et ayant lui-même jadis envisagé d’abattre Charles de Gaulle pendant la Guerre d’Algérie comme il l’écrivit dans le merveilleux Cœur rebelle (1994), Dominique Venner s’intéresse aux attentats contre des personnes connues. En effet, à part le cas de Grossouvre, les douze choix du livre appartiennent à un mode opératoire qu’on désigne habituellement comme du terrorisme même si, ici, les actes ne concernent que des victimes individuelles et non des masses comme pour le 11 septembre 2001. À l’exception de John Fitzgerald Kennedy, son étude se concentre sur des événements européens quand bien même Léon Trotsky est exécuté à Mexico et que l’amiral Darlan meurt à Alger, à l’époque ville française.

On note une répartition équilibrée des sujets traités : trois pour la Russie (Pierre Stolypine, Raspoutine, Trotsky), quatre pour le monde slave si on y ajoute la mort d’Alexandre de Yougoslavie à Marseille en 1934 par des militants croates soutenus par les redoutables partisans de l’O.R.I.M. (Organisation révolutionnaire intérieure macédonienne); trois pour la France (Gaston Calmette, Darlan et Grossouvre), voire quatre avec l’exécution à Paris en 1941 de l’aspirant Moser par des communistes; trois pour l’Allemagne et le monde germanique (François-Ferdinand à Sarajevo, Walter Rathenau en 1922, Stauffenberg), quatre avec Moser. Il y a enfin les États-Unis avec J.F.K. en 1963 et, pour l’Italie, Aldo Moro en 1979.

Ce n’est pas par hasard si Dominique Venner a pris ces exemples. Il les inscrit dorénavant dans l’imprédictibilité de l’histoire. L’histoire n’est pas une science dure, mathématique, logique et causaliste. Clio est une maîtresse imprévisible, irascible et impétueuse pour les civilisations, les peuples et les êtres. Hormis les questions démographiques, les prévisions des historiens ne se réalisent que très rarement, d’où leur réputation de « prophètes du passé » ! L’histoire est le domaine de l’hétérotélie, terme forgé par Jules Monnerot pour désigner des résultats contraires à ce que l’on désirait. Oui, l’histoire est toujours inattendue parce qu’elle est l’amante du Kairos, de ce moment décisif, qu’il faut saisir immédiatement. Pour s’approprier cet instant crucial, il importe de posséder des qualités fondamentales. « Un certain héritage historique et culturel, la fortune (l’inattendu) et la virtù sont les déterminants majeurs que l’on peut voir à l’œuvre derrière tous les grands événements de l’Histoire, plaide Dominique Venner (p. 268). »

Certains cas qu’il examine le prouvent aisément. Dominique Venner ne cache pas son admiration pour Stolypine, le Premier ministre de Nicolas II de Russie de 1906 à 1911. Ce traditionaliste réformateur s’opposa aussi bien aux révolutionnaires rouges qu’aux réactionnaires noirs. Très au fait des équilibres continentaux, sa présence à l’été 1914 lors de la crise entre la Serbie et l’Autriche-Hongrie aurait peut-être permis de temporiser l’antagonisme entre Belgrade et Vienne et de contenir le bellicisme germanophobe de certains milieux russes. Stolypine aurait pu s’appuyer sur le Français Joseph Caillaux, certainement président du Conseil si celui-ci n’avait pas été contraint de démissionner à la suite de l’assassinat du directeur du Figaro, Gaston Calmette, le 16 mars 1914, par Henriette Caillaux, son épouse lasse des attaques incessantes et vénéneuses contre son ministre de mari. L’historien féru d’uchronies peut même se demander si la survie de Raspoutine n’aurait pas incité Nicolas II à imposer aux belligérants une paix des braves comme le suggèrent Jacqueline Dauxois et Vladimir Volkoff dans leur étonnant roman Alexandra (1994).

Les assassinats de Stolypine, de Calmette et de François-Ferdinand démontrent qu’il y a bien un « effet-papillon » en histoire, terrain propice à la théorie du chaos. La disparition d’une personnalité-clé peut avoir des répercussions considérables dans le monde… L’inattendu est le synonyme de la tragédie et celle-ci n’œuvre pas que dans le terrorisme. Ainsi, Ernst Jünger a-t-il souvent médité sur la catastrophe estimée impossible du Titanic en 1912. Pour lui, ce naufrage annonçait la tendance titanesque du nouveau siècle.

On ne détaillera pas, même succinctement, les treize meurtres politiques décrits par Dominique Venner. On se permettra en revanche d’émettre quelques critiques. Il est dommage, concernant Darlan, que l’auteur ne mentionne pas l’extraordinaire De Gaulle et Giraud : l’affrontement, 1942 – 1944 (2005) de Michèle Cointet qui démêle avec brio la grande complexité politique de l’Afrique française du Nord en novembre – décembre 1942. On notera que l’enlèvement et l’assassinat d’Aldo Moro restent obscurs. Dominique Venner peut n’avoir pas pris connaissance des thèses situationnistes et/ou d’ultra-gauche qui avancent avec une argumentation probante, la manipulation des groupes armés d’extrême droite et d’extrême gauche par l’O.T.A.N. et certains cénacles occultes liés à l’État profond U.S. Par ailleurs, ce même État profond est largement impliqué dans l’élimination de John Fitzgerald Kennedy. Lee Harvey Oswald et le complot soviéto-cubain ne sont que des leurres, des couvertures, qui masquent l’immense et néfaste influence bankstériste à Washington.

Nonobstant ces quelques désaccords, L’imprévu dans l’Histoire doit être lu et médité non seulement pour le XXe siècle, mais aussi et surtout pour le XXIe. Les attentats contre Rathenau, Alexandre de Yougoslavie et Trotsky sont le fait d’hommes (et de femmes !) déterminés, prêts à sacrifier leur vie pour leur cause; ils sont les grains de sable qui entravent la « grande roue de l’histoire ». Ils sont les vecteurs de l’aléa. Or « penser l’inattendu serait un sujet de réflexion philosophique aussi utile que celui de penser la guerre (p. 268) ». Cet ouvrage nous ouvre enseigne donc une philosophie de l’histoire immédiate, celle des chocs entre la foi, les mémoires et les identités.

Georges Feltin-Tracol

Dominique Venner, L’imprévu dans l’Histoire. Treize meurtres exemplaires, Pierre-Guillaume de Roux (41, rue de Richelieu, F – 75 001 Paris, www.pgderoux.fr), 2012, 272 p., 22 €.


Article printed from Europe Maxima: http://www.europemaxima.com

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mardi, 24 avril 2012

Je Suis Partout - Anthologie (1932-1944)

Vient de paraître : Je Suis Partout - Anthologie (1932-1944)

 
Ex: http://lepetitcelinien.com/

La dernière production des éditions Auda Isarn s'intéresse à Je Suis Partout en proposant une anthologie de cet hebdomadaire paru entre 1932 et 1944.
 
Comme le rappelle Philippe d'Hugues, auteur de la préface de cet ouvrage de près de 700 pages, le journal fasciste, antisémite et antidémocratique a réussi à connaître un large succès, le tirage s'élevant à "70 000 exemplaires à la veille de la guerre, plus de 300 000 à la veille de la Libération, avec un pic à 350 000 au printemps 1944." Succès qui s'explique en partie par les rubriques littéraires et cinématographiques : "Il faut dire qu'il y avait matière à satisfaire les plus exigeants : romans et nouvelles de Marcel Aymé, André Fraigneau, La Varende, René Barjavel, Pierre Véry, Jacques Decrest, Pirandello, Moravia, Malaparte, Jean de Baroncelli, Albert Paraz, Gaston Derycke (futur Claude Elsen), pièces de Jean Anouilh ou de Drieu La Rochelle, chroniques d'Emile Villermoz, André Thérive, Michel Mohrt, François Charles Bauer (futur François Chalais), reportages de Lucien Rebatet [...] et n'oublions pas une attraction de poids : la chronique cinématographique de François Vinneuil alias Rebatet."

De Louis-Ferdinand Céline, il y est question à plusieurs reprises dans ces archives : de la simple citation dans l'article de Ralph Soupault du 21 janvier 1944, à la publication d'un extrait d'une lettre de Céline adressée au journal et publiée le 9 juillet 1943 pour accuser la bourgeoisie française du désastre de 1940, c'est Lucien Rebatet qui laisse le plus de place au Céline pamphlétaire : d'abord en 1938 où il évoque les différentes réactions d'hostilité à la publication de Bagatelles pour un massacre, puis en 1939 dans un article intitulé "L'antisémitisme d'aujourd'hui et de demain", dans lequel il se flatte du grand succès de librairie de Bagatelles ; Enfin, dans un long article de mars 1944, le "prodigieux Céline" à la "verve géniale de visionnaire" est mis en avant dans un passage sur la recension des talents français. Toujours attachés aux écrits politiques de Céline,  Pierre Drieu La Rochelle, Pierre-Antoine Cousteau prennent la défense de Céline dans deux articles de 1938 et 1943. Une compilation qui intéressera les lecteurs souhaitant faire une plongée, du côté des vaincus, dans cette période mouvementée et trouble...

M.G.
Le Petit Célinien, 15 avril 2012.
 
Je Suis Partout, Anthologie 1932-1944, Editions Auda Isarn, 2012. ISBN 978-2-917295-35-9.
Commande auprès de l'éditeur (30 €, port gratuit) : Auda Isarn, BP 90825, 31008 Toulouse cedex 6. Chèque à l'ordre d'Auda Isarn.

dimanche, 22 avril 2012

Das amerikanische Konzept zur Sicherung der Westbindung Deutschlands nach 1945

Der neue Scheil: Das amerikanische Konzept zur Sicherung der Westbindung Deutschlands nach 1945      

Geschrieben von: Simon Meyer   

 http://www.blauenarzisse.de/

 

Ernst Jünger notierte am 11. April 1945 angesichts der in Kirchhorst einrückenden amerikanischen Kolonnen in sein Tagebuch: „Von einer solchen Niederlage erholt man sich nicht wieder wie einst nach Jena oder Sedan. Sie deutet eine Wende im Leben der Völker an, und nicht nur zahllose Menschen müssen sterben, sondern auch vieles, was uns im Innersten bewegte, geht unter bei diesem Übergang.“ Nicht nur die künftige Machtlosigkeit dessen, was nach dem Krieg an deutscher Staatlichkeit in den verschiedenen Teilstaaten übrig bleiben sollte, nimmt Jünger hier vorweg. Auch die künftige innere Loslösung der Deutschen von allen Wurzeln mag er bereits geahnt haben, als die amerikanischen Panzer an ihm vorüberratterten.

Neufassung der territorialen und intellektuellen Landkarte

Und das seismographische Gespür Jüngers sollte nicht trügen. Insbesondere die einzige echte Siegermacht der Westalliierten, die USA, wollte die Chance nicht wie nach dem Ersten Weltkrieg ungenutzt lassen. Eine völlige Umgestaltung nicht nur der territorialen sondern auch der intellektuellen Landkarte der besiegten Nation Deutschland sollte herbeigeführt werden. Jedenfalls soweit diese ihrem Machtbereich unterlag.

Stefan Scheil, als Autor bisher vor allem zur Geschichte des Ausbruchs und Verlaufs des Zweiten Weltkrieges hervorgetreten, beschreibt in seiner neuesten Studie umfassend die Maßnahmen, die seitens der USA in die Wege geleitet wurden, um nach dem militärischen Sieg einen Wechsel der Eliten bzw. der Denkweise der Eliten in Westdeutschland und auch in Österreich herbeizuführen. Der Plan ging dabei weit über die Beseitigung des Nationalsozialismus hinaus, den die Deutschen nach der militärischen Niederlage ohnehin selbst vollzogen hätten. Auf den Punkt gebracht: das deutsche Sonderbewußtsein als Nation zwischen Ost und West, der metaphysische Anker des alten Europas, sollte komplett aus den Köpfen verschwinden.

Die Umgestaltung des Bildungswesens

Das amerikanische Programm war von langer Hand geplant. Es setzte bereits vor der Kapitulation in den Kriegsgefangenenlagern ein, wo geeignet erscheinende deutsche Kriegsgefangene für eine Mitwirkung rekrutiert wurden. Nach der Kapitulation entfaltete es sich sodann in einem Umfang, wie es in der Geschichte des Umgangs mit besetzten Staaten bislang noch nicht durchgeführt worden war. Vor allem der Bildungsbereich im weitesten Sinne sollte im Sinne der Siegermacht durchdrungen werden, um die Umgestaltung der Denk- und Lebensweisen der Besiegten im amerikanischen Sinne zu gewährleisten. Nach der Erlangung der tatsächlichen Gewalt begann die Siegermacht daher mit einem umfassenden Programm zur Neuordnung des gesamten Schul- und Universitätswesens. Das Bildungswesen im weitesten Sinne erlebte seine Stunde Null.

Hierbei war der amerikanischen Siegermacht klar, daß eine offene Repression, wie sie unmittelbar nach Kriegsende noch auf der Tagesordnung stand, auf Dauer nicht zielführend sein konnte. Mit allzu plumpen Mitteln, einer Umerziehung mit Feuer und Schwert, konnte man nicht mehr vorgehen. Die Besiegten sollten sich gleichsam selbst ändern, ohne die Änderung als aufgezwungen zu empfinden. Erwünscht war eine Änderung, die der zu Ändernde für sich als Ergebnis der eigenen Erkenntnis erlebt und einem eigenen freien Entschluß zuschreibt, nicht dem Druck einer Besatzungsmacht.

Reorientation statt Repression

Keine Kolonialpolitik im Sinne des 19. Jahrhunderts also, denn im Hinblick auf den beginnenden kalten Krieg war die Bundesrepublik zu wertvoll für die westliche Staatengemeinschaft. Was der Siegermacht vorschwebte und dann stattfand, war vielmehr ein Imperialismus der Gedanken, der zu einem letztlich selbst gewählten Anschluß an die westliche Staats- und Ideenwelt führt. Wie wir heute wissen, war das Konzept in seinem Ausmaß von einem vielleicht für die Amerikaner selbst unerwarteten Erfolgt gekrönt. Denn mit dem Austausch der intellektuellen Elite über verschiedenste Programme bis in die heutige Zeit (z.B. die „Atlantik-Brücke“) war nach dem militärischen Sieg auch die Schlacht um die Köpfe gewonnen. Der überwiegende Teil eines jeden Volkes der Welt denkt nun mal hauptsächlich daran, was es am nächsten Tag zu essen gibt und was die Kinder anziehen sollen. Politisch verdaut ein Volk zumeist das, was ihm vorgekaut wird. Und vorgekaut wird durch die – im weitesten Sinne – Eliten.

Scheil zeichnet in detailreicher Fülle die einzelnen Maßnahmen auf und beschreibt die Verstrickung einer Vielzahl von Personen, sowohl Angehörigen der Siegermächte als auch Deutschen bei der Erfüllung des amerikanischen Programms. Er ist in seiner Arbeit Historiker, nicht Essayist und zuweilen benötigt man ein gewisses Maß an Selbstdisziplin, um ihm in alle Verästelungen des aufgeschlüsselten Detailreichtums zu folgen. Dies umsomehr, als die Spannung, das Knistern zwischen den Zeilen, die Scheils Werke über den zweiten Weltkrieg so lesenswert machen, dem Buch völlig abgehen. Doch dies liegt nicht etwa an Scheil, sondern einzig an der Thematik. Der Krieg ist lange ausgefochten und es geht nicht mehr um Alles oder Nichts, sondern nur noch um die Art und Weise der Behandlung der Leiche.

Stefan Scheil: Transatlantische Wechselwirkungen. Der Elitenwechsel in Deutschland nach 1945. Dunker & Humblodt 2012. 28,00 Euro

samedi, 14 avril 2012

La guérilla espagnole contre l'armée napoléonienne

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Ex: http://anti-mythes.blogspot.com/

La guérilla espagnole contre l'armée napoléonienne sous l'éclairage de Carl Schmitt

 

C’est dans le contexte des guerres napoléoniennes, et plus précisément à l’occasion de la guerre de résistance espagnole contre l’occupation française, entre 1808 et 1813, que va émerger pour le juriste politique allemand Carl Schmitt (1888-1985) la figure conceptuelle du "partisan" moderne, à savoir d’un "soldat irrégulier" pensé en tant que tel ; à cette occasion, pour la première fois, un cadre juridico-politique explicite lui est conféré. Ce qui ne sera pas sans conséquences quant au droit de la guerre classique qui avait prévalu jusque-là.

LE CONTEXTE HISTORIQUE DU SOULÈVEMENT ESPAGNOL 

Rappelons brièvement les faits : pour établir un "blocus continental" efficace contre la Grande-Bretagne, puissance maritime et commerciale et principale ennemie de la France, Napoléon entendait contrôler l’ensemble de la péninsule ibérique. Il envoya donc Murat avec des troupes en Espagne en 1808, sans provoquer de véritables réactions de la part d’une famille royale espagnole par trop affaiblie. Dans ce contexte de décomposition du pouvoir royal légitime, une première émeute populaire à Aranjuez poussa d’ailleurs le roi Charles IV à abdiquer au profit de son fils Ferdinand VII dans l’espoir de stabiliser la situation politique.

Mais l’entrée de Murat dans Madrid provoqua une véritable insurrection, celle du 2 mai, que le général français réprima durement. Sous la pression de Napoléon, Ferdinand VII abdiqua à son tour au profit, cette fois, de Joseph Bonaparte, frère aîné de l’Empereur, qui fut reconnu par une assemblée de notables Afrencesados (1). Mais le soulèvement du peuple était déjà quasi général. Il fut formellement encadré par des Juntas (juntes militaires) auto constituées qui refusèrent de reconnaître le coup de force français et qui, au nom du roi pourtant déposé, allaient diriger une résistance à l’occupant. Cette résistance héroïque rassembla, dans un premier temps, troupes régulières et civils en armes, ces derniers devant progressivement en constituer l’âme. Dès juin 1808, en effet, commença ce qu’on appellera bientôt une "guérilla" – le terme en tant que tel n’apparaîtra qu’en 1812 – qui se développa au fur et à mesure des défaites de l’armée régulière espagnole face à Napoléon. Ces défaites successives pousseront d’ailleurs de nombreux déserteurs à accroître le nombre de ces partisans. Ce qui va intéresser au premier chef Carl Schmitt dans la guerre de résistance espagnole à Napoléon, c’est précisément le fait que "le partisan de la guérilla espagnole de 1808 fut le premier à oser se battre en irrégulier contre les premières armées régulières modernes" (Schmitt, La notion de Politique – Théorie du Partisan, préface de Julien Freund ; traduction de Marie-Louise Steinhauser, Paris, Calmann-Lévy, 1972, page 214). Par "armées régulières modernes", il convient ici d’entendre celles issues des expériences de la Révolution française qui sont à l’origine d’une reformulation radicale du concept de "régularité" hérité de l’âge classique, et dont – aussi paradoxal que cela puisse paraître de prime abord – le "partisan", en tant que combattant irrégulier, constitue en quelque sorte le produit.

DE LA NOTION PROBLÉMATIQUE "D’IRRÉGULARITÉ"

Comme le relève Schmitt, il se trouve que "la différence entre combat régulier et combat irrégulier est fonction de la nette définition de ce qui est régulier et une antinomie concrète donnant lieu à une délimitation du concept n’apparaît qu’avec les formes modernes nées des guerres de la Révolution française" (op. cit., p. 213). Jusque-là avait prévalu un droit interétatique classique – le Jus Publicum Europaeum – au sein duquel le phénomène de l’hostilité était maintenu dans le cadre de guerres limitées, apanage exclusif des princes contre un ennemi stricto sensu "conventionnel". La principale caractéristique de ce droit classique résidait dans le fait qu’il comportait des distinctions nettes entre guerre et paix, entre combattants et non-combattants, entre un ennemi et un criminel. Et, comme le souligne Schmitt, "en regard de cette régularité toute classique" (op. cit., p. 218), l’idée même de soldat irrégulier était tout simplement inconcevable : "Le droit classique de la guerre (…) ne laisse pas de place au partisan au sens moderne. Ou bien celui-ci est, comme dans la guerre au XVIIIe siècle, qui est une affaire entre cabinets, une espèce de troupe légère, particulièrement mobile mais régulière, ou bien il est un criminel particulièrement méprisable, et il est alors tout simplement un hors-la-loi" (op. cit., p. 219). 

Cette alternative tranchée est remise en cause à l’issue des bouleversements révolutionnaires, sur la base d’une délimitation nouvelle de la notion de "régularité", lorsque la notion d’État dynastique est reformulée comme État national et que l’armée des princes est conduite à se transformer en armée nationale. Schmitt discerne d’ailleurs la faillite du droit classique dans cette configuration juridico-politique qui voit la "victoire du civil sur le soldat le jour où le citoyen passe l’uniforme tandis que le partisan le quitte pour continuer à se battre sans uniforme" (op. cit., p. 306). À cet égard, loin de constituer une anomalie, l’émergence de la figure du partisan, en tant que combattant irrégulier, face à cette nouvelle "régularité" post révolutionnaire, ne constitue somme toute que l’une des deux faces d’un même Janus, celle du soldat-citoyen. En déferlant sur toute l’Europe continentale, le nouvel art militaire de l’armée napoléonienne, comme héritier de cette mutation fondamentale, va se trouver être, à la fois, vecteur et victime de ce nouveau modèle, dans la mesure où la guerre de l’âge classique, qui ne peut plus que faire figure de jeu conventionnel, va laisser la place à de véritables guerres des peuples, dont la guerre de résistance espagnole n’est que le premier d’une longue suite d’avatars. Ce qui intéresse Schmitt, c’est précisément de montrer que l’apparition du partisan en Espagne entérine une situation inédite qui a transformé l’ennemi "conventionnel", au cœur des guerres limitées que se livraient les princes dans le droit classique, en ennemi pour le coup bien "réel", au cœur de guerres devenues nationales : "L’élément principal de la situation du partisan de 1808 est qu’il risque le combat sur le champ limité de son terroir natal, alors que son roi et la famille de celui-ci ne savaient pas encore très bien quel était l’ennemi réel" (op. cit., p. 215).

En dépit de l’aura involontaire dont Ferdinand VII bénéficiait auprès de son peuple et qui l’a préservé, malgré lui, d’une condamnation sans appel de l’Histoire, ses hésitations devant l’événement majeur qui se joue s’expliquent sans doute par le fait qu’il se situe toujours par rapport à un droit classique de la guerre dérivé du Jus Publicum Europaeum. En revanche, le partisan espagnol, lui, appartient déjà au monde nouveau qui est en train d’advenir en matière stratégico-politique. "Seul le partisan espagnol rétablit le sérieux de la guerre, et ce fut contre Napoléon, c’est-à-dire dans le camp défensif des vieux États continentaux européens dont la vieille régularité devenue convention et jeu n’était plus en mesure de faire face à la nouvelle régularité napoléonienne et à son potentiel révolutionnaire. De ce fait, l’ennemi redevint un ennemi réel, la guerre, une guerre réelle. Le partisan défenseur du sol national contre le conquérant étranger devint le héros qui se battait réellement contre un ennemi réel" (op. cit., p. 304-305).

Mais l’apparition du phénomène du partisan n’allait pas forcément de soi pour des esprits encore largement imprégnés de l’idée de la vieille "régularité" militaire. Paradoxalement, c’est peut-être dans cette perspective qu’on peut saisir la portée des diverses tentatives juridiques de "régularisation" de la guerre de partisans par ce qui restait de l’État espagnol légitime ou de ce qui s’en réclamait alors, en l’occurrence les Juntas militaires.

LE PRÉCÉDENT EN 1808 D’UNE LÉGITIMATION DE LA GUERRE DE PARTISANS PAR LA JUNTA DE SÉVILLE

Ce qui est en effet capital dans l’apparition de cette forme de guerre irrégulière espagnole, c’est qu’elle va recevoir de la part de Juntas militaires régionales et/ou nationales, une sorte de réglementation juridico-politique – fait sans précédent dans l’Histoire – lui conférant une légitimité inédite rendue nécessaire par les circonstances. La passivité, face à l’envahisseur français, d’un gouvernement dépassé par les événements devait mettre au premier plan ces Juntas militaires, d’une part, les guérillas, d’autre part. Un premier cadre juridico-politique est donné dès le 6 juin 1808 par la Junta Suprema de Gobierno de Espana e Indias (la Junte de Séville), auto-constituée le 28 juin 1808, et qui déclare la guerre à l’Empereur Napoléon en ces termes : "… Nous déclarons la guerre sur terre et sur mer à l’Empereur Napoléon Ier et à la France, dont nous supportons la domination et le joug tyrannique ; et nous demandons à tous les Espagnols d’œuvrer hostilement à leur encontre et de leur causer le plus de dommages possibles selon les lois de la guerre" (Blanch, Historia de la guerra de la Independencia en Cataluna, Barcelone, 1968, p. 64).

Cette dernière précision a ceci de paradoxal et d’étrange qu’elle méconnaît le fait que la guerre patriotique espagnole n’est déjà plus une guerre de l’âge "classique". Les dites "lois de la guerre", selon la conception classique dans laquelle, comme le rappelle Schmitt, « l’ennemi a son statut », et dans laquelle "il peut être imposé des limites à la guerre" (Schmitt, op. cit., p. 12), sont d’ores et déjà sapées par la nouvelle forme d’hostilité "réelle" développée par la guerre de partisans qu’on cherche illusoirement à réglementer. Sans que ces auteurs en mesurent peut-être toutes les conséquences à terme, cette déclaration de juin 1808 apparaît comme le précédent le plus direct de légitimation de la guerre irrégulière. Il est complété le jour même par un second texte. Celui-ci, intitulé Prevenciones, s’adresse au peuple espagnol pour qu’il sache que certaines mesures sont indispensables à la bonne conduite de la lutte contre l’ennemi : "Il faut éviter les actions générales et privilégier les initiatives individuelles. Il est nécessaire de ne pas laisser l’ennemi se reposer un instant, de harceler sans répit ses flancs et son arrière-garde, de l’affamer, d’intercepter ses convois de vivres, de détruire ses entrepôts et de lui couper toutes les voies de communication entre l’Espagne et la France d’autre part" (Queipo de Llano, Historia del Levantamiento, Guerra y Revolucion de Espana, Madrid, 1835-1837, p. 232-233). 

Ainsi est en train d’être "régularisée" une guerre de partisans dont la Junta pressent pourtant d’ores et déjà les éventuelles dérives, ce qui apparaît clairement dans l’article final des Prevenciones : "Il s’agira de faire comprendre et de persuader la nation que libérés, comme nous l’espérons, de cette guerre cruelle, et le trône à nouveau entre les mains de notre seigneur et Roi Ferdinand VII, les Cortes, sur sa convocation, réformeront les abus et établiront les lois dictées par l’expérience, pour le bien et la félicité publics ; deux notions que les Espagnols connaissent sans que les Français aient eu à les leur enseigner" (Queipo de Llano 1835, p. 233). 

Pour l’heure, la Junta de Séville fait figure localement de pouvoir suprême, à l’image d’un organe de souveraineté nationale (comme les autres Juntas provinciales), et apparaît donc pour les Espagnols politiquement "compétente", dans la mesure où elle se réclame de l’ancien pouvoir légitime du roi Ferdinand VII. C’est bien à ce titre qu’elle ordonne d’ailleurs l’enrôlement massif de partisans comme auxiliaires des dernières troupes régulières espagnoles combattant encore Napoléon.

LE TOURNANT DE L’AUTOMNE 1808

La méthode paraît pour un temps donner de bons résultats puisque, le 19 août 1808, advient la première défaite française, celle de Baylen, face à 40.000 hommes de troupes régulières espagnoles unies à un noyau de volontaires et de francs-tireurs et au peuple andalou en armes. Ce succès ponctuel entretient en fait l’illusion sur les capacités réelles de l’armée régulière espagnole de résister durablement à l’armée napoléonienne. En effet, à l’automne 1808, devant les mauvais résultats de son armée, Napoléon, pour résoudre rapidement le problème espagnol avant de se mesurer à l’Autriche, décide de prendre en personne, le commandement des troupes le 6 novembre 1808. En virtuose militaire qu’il est, il retourne la situation en très peu de temps, remportant victoire sur victoire, et entre à Madrid le 4 décembre 1808 où il réinstalle aussitôt son frère Joseph. En Catalogne, le 15 décembre, le général Vivès est battu et lève le siège de Barcelone. Saragosse, assiégée pour la seconde fois par les Français le 20 décembre, capitule le 20 février 1809 en dépit d’une résistance héroïque. 

La confiance relative qui perdurait dans ce qui restait de l’armée "régulière" espagnole née de la bataille de Baylen, s’en trouva considérablement altérée. La guérilla espagnole reste alors seule à s’opposer à l’envahisseur français et va, pour cette raison, prendre une ampleur inégalée. Comme le souligne Schmitt : "À l’automne de 1808, Napoléon avait vaincu l’armée régulière espagnole ; la guérilla espagnole proprement dite ne se déclencha qu’après cette défaite de l’armée régulière" (op. cit., p. 214). C’est à partir de là, en effet, que les Espagnols commencèrent véritablement à organiser des bandes de partisans sur une grande échelle pour continuer la résistance à Napoléon.

LE MANIFESTE DU 28 DÉCEMBRE 1808

Dans ce contexte d’échecs militaires retentissants pour ce qui se réclamait encore de l’armée régulière espagnole, la Junta Centrale , abasourdie, se réunit à Séville et publie le 28 décembre 1808 le Reglemento de partidas y cuadrillas, qui reprend en l’accentuant l’esprit du règlement de juin 1808. Ce règlement du 28 décembre 1808, en trente-quatre articles, est le premier texte réglementaire de portée nationale. On n’y parle cependant pas encore de "guérillas" ni de "guérilleros". À cette époque, le terme "guérilla" n’est pas encore intégré dans la terminologie de la guerre patriotique espagnole. Il a toujours sa signification technique, dérivée de la guerre classique, de "ligne de tirailleurs devant attaquer l’ennemi de front et sur ses flancs, ou troupe légère utilisée pour les reconnaissances et les escarmouches". Il renvoie encore au "partisan" du XVIIIe siècle, celui qui appartient à un "parti", ou détachement battant la campagne, à l’un de ces détachements dont le maréchal de Saxe écrivait qu’ils pouvaient traverser un royaume entier sans être repérés.

Dans le règlement de décembre 1808, on parle plus spécifiquement de partida, ("bande"), qui signifie, d’après Almirante dans le Dictionnaire Militaire, "toute troupe peu nombreuse", aussi bien régulière qu’irrégulière, et de cuadrilla , littéralement "troupe", "bande". Les partidas, sans spécification notable quant à leurs effectifs, rassemblent toutes sortes d’individus à l’exclusion des alistados ou solteados (les appelés aux armées). Les cuadrillas sont, quant à elles, des bandes de contrebandiers de "mer et de terre". Lorsque ce règlement est publié, des actions de partisans existent déjà depuis huit mois. Mais elles sont appelées à se développer. Ces dispositions légales tendent, en fait, à les assujettir autant que faire se peut à des règles dans lesquelles l’esprit militaire dominerait. Les principaux points abordés dans le règlement ont trait à la finalité de la guerre de partisans, à la composition des unités, à la collation des grades, à l’armement, aux soldes, aux règles de discipline et au butin.

Les deux types d’unités distinctes que sont les partidas et cuadrillas se trouvent donc mises sur pied avec pour mission d’assurer la sécurité du pays en semant la terreur et la désolation chez l’ennemi. Les partidas, d’abord, forment des groupes d’environ une cinquantaine d’hommes à pied et à cheval. Le commandement, et c’est important, est assuré par un chef du grade de commandant, un second, deux subalternes à cheval et trois à pied, ayant respectivement les grades militaires réguliers de lieutenant de cavalerie, sergent, et ainsi de suite. Les articles 24 et 28 visent à encadrer avec une certaine souplesse ces unités "irrégulières" en adoptant la structure des armées opérationnelles, à la fois pour éviter une trop grande anarchie et pour opérer sur l’ennemi avec le plus de rapidité et d’efficacité possibles. On retrouve là deux des traits essentiels dans la perspective d’une "théorie du partisan" selon Carl Schmitt, traits le plus souvent liés, sinon indissociables, et qui font figure de critères pour définir le partisan moderne en train d’advenir en Espagne ; à savoir : "l’irrégularité" et "le haut degré de mobilité du combat actif" (op. cit., p. 229) – la mobilité n’impliquant pas l’irrégularité, mais celle-ci impliquant nécessairement celle-là. Il est en outre prévu de répartir ces unités "irrégulières" dans les différentes divisions de l’armée en les soumettant aux ordres des généraux respectifs qui leur sont donnés comme chefs, ainsi qu’un adjoint. On voit bien l’intention des autorités de faire des partidas une émanation de l’armée "régulière". Pourtant, en contraste avec les règles militaires précitées, l’article 26 précise : "Les chefs locaux (ceux de l’armée qui encadrent les bandes de partisans) devront laisser agir les partisans avec le plus de liberté possible, tout en les gardant à leur disposition, pour la bonne conduite des opérations" (Horta Rodriguez, "La législation de la guérilla espagnole dans l’Espagne envahie (1808-1814)", in Revue historique des Armées, 1986/3, p. 33).

Il convient ici de s’interroger sur la raison d’être du cadre juridico-politique conféré aux bandes de "partisans". Les rédacteurs du règlement savent pertinemment qu’il existe déjà depuis juin des groupes de partisans plus ou moins nombreux. Le règlement "reconnaît" donc une nouvelle fois leur existence et légitime leur lutte au regard de l’occupation française. Mais à cela s’ajoutent d’autres motivations ou plutôt, devrait-on dire, d’autres soucis. Il est intéressant de savoir que "ceux qui auront accompli leur temps de service obtiendront une place dans la Renta (2) ou d’autres postes selon les circonstances" (Horta Rodriguez, p. 33).

Cela prouve le souhait déclaré de réintégrer à moyen terme le "partisan" dans l’armée "régulière", ou à défaut dans une forme de "régularité" quelconque. Enfin, le butin fait l’objet d’une réglementation minutieuse. La répartition du butin sera proportionnée à la solde et personne ne pourra s’immiscer dans sa distribution pour prévenir de la sorte toute forme éventuelle de contestation.

Les mêmes règles s’appliquent aux cuadrillas. Dans les faits, on tente bel et bien d’organiser, par ce biais, les contrebandiers qui agissent "au grand préjudice du trésor royal" (Horta Rodriguez, p. 34). L’article 19 est directement conçu à leur intention. Avant tout, il apparaît nécessaire de leur reconnaître une légitimité "politique" en louant leur valeur, leur intrépidité, leurs talents militaires pour conclure que, "n’ayant pu trouver une activité qui leur permette de s’épanouir, ils se sont lancés dans la contrebande". On leur promet, en tout cas, désormais "une carrière glorieuse et utile à l’État dans les circonstances actuelles" (Horta Rodriguez 1986 : 34). C’est leur statut qui s’en trouve ainsi radicalement modifié. On attribue en effet à cette activité "irrégulière", voire illégale en d’autres temps, mais si populaire en Espagne, le privilège en quelque sorte juridique de s’exercer en toute quiétude puisque cela sert la fin politique de la résistance à l’envahisseur français. Le péril couru par la Nation espagnole autorise en quelque sorte le recours à tous les palliatifs. En conséquence, on pardonne les crimes passés aux contrebandiers se présentant dans les huit jours devant le chef militaire ou politique, et qui se verront accorder une reconnaissance politique faisant d’eux des "partisans" et non de simples bandits de grand chemin.

Pour Schmitt justement, outre l’irrégularité, "un autre critère distinctif qui s’impose aujourd’hui à notre attention réside dans l’engagement politique qui caractérise le partisan de préférence à d’autres combattants" (op. cit., p. 224). Et c’est ici qu’il faut souligner l’importance cardinale du "tiers intéressé", qui se trouve être un "tiers régulier", dont parle Schmitt : en l’occurrence, les Juntas militaires qui se réclament de la légitimité royale et, au-delà, la puissance anglaise qui reconnaît le "partisan" comme un allié. C’est en effet ce tiers "qui procure cette sorte de reconnaissance politique dont le partisan qui combat en irrégulier a besoin pour ne pas tomber, tel le bandit et le pirate, dans le domaine non politique, ce qui signifie ici : dans le domaine de la criminalité" (op. cit., p. 290). C’est toute la subtilité de cette dimension politique qui confère au "partisan" son statut et qui a rendu le sujet tellement polémique jusqu’à nos jours.

LES NOUVELLES DISPOSITIONS RÉGLEMENTAIRES DE 1809

"L’institutionnalisation" de la guérilla va se renforcer avec l’adoption de plusieurs dispositions. Elles sont au nombre de trois, en date respectivement du 1er janvier, du 28 février, et du 20 mars 1809. Elles contiennent les soubassements d’une guerre de partisans strictement définie, tout autant que les problèmes que celle-ci ne cessera de soulever.

La première disposition entend contrôler étroitement les Juntas provinciales qu’elle transforme en simple Juntas "d’observation et de défense". Celles-ci constituaient un des supports les plus efficaces pour l’esprit de résistance alimenté par des hommes qui défendaient avec ardeur la patrie de leurs ancêtres, le foyer familial, la terre qu’ils travaillaient, leur religion, et un mode de vie fermé aux ingérences étrangères. C’est là qu’on saisit avec une acuité toute particulière "le quatrième critère distinctif du partisan authentique" selon Carl Schmitt, "ce que Jover Zamora (3) a appelé son caractère tellurique. Celui-ci est très important pour la situation fondamentalement ‘défensive’ du partisan…" (op. cit., p. 229). Au reste, ces partisans étaient bien, comme le souligne encore Schmitt, "les défenseurs autochtones de la terre natale qui mouraient pro aris et focis, les héros nationaux et patriotiques (…) tout ce qui était réaction d’une force élémentaire, tellurique vis-à-vis d’une invasion étrangère (…), légitimité de son irrégularité de partisan" (op. cit., p. 288).

La seconde disposition, celle du 28 février, est un ordre royal émanant de la Junta Centrale : "La junte souhaitant donner une impulsion puissante en faisant appel à l’intérêt individuel, aux grandes motivations qui entraînent les habitants du royaume dans la lutte contre l’ennemi afin de lui causer le plus de tort possible, il a été décrété que les armes de toutes espèces, les chevaux, les vivres, les bijoux et l’argent qui seront pris à l’ennemi, par quelque particulier que ce soit, seront la propriété de celui qui les aura pris. Le droit de préférence dans l’achat des canons, armes, chevaux resteront à Sa Majesté ou au Trésor Royal ; le montant de ces choses leur sera payé avec ponctualité" (Horta Rodriguez, op. cit, p. 36).

La dernière des trois dispositions est le Manifeste édicté par la Junta Centrale le 20 mars 1809. Il reproche notamment aux généraux français les mauvais traitements infligés aux prisonniers et leur enjoint de considérer que tout Espagnol en mesure de prendre les armes est, aux yeux de la Junta un soldat de la patrie et doit être traité en conséquence par l’armée française – mais de manière unilatérale, et c’est précisément là tout le problème. Ce manifeste laisse entrevoir les conséquences et les difficultés insurmontables que fait surgir le "partisan" dans le droit classique de la guerre dont la Junta se réclame, alors même qu’elle légitimise ce type de combattant irrégulier. Comme l’explique Schmitt, en effet, "plus la discipline d’une armée régulière est stricte, plus elle est scrupuleuse dans sa distinction entre militaires et civils en ne considérant comme un ennemi que le seul adversaire en uniforme, et plus elle deviendra ombrageuse et irritable si, dans l’autre camp, une population civile qui ne porte pas l’uniforme participe, elle aussi, au combat. Les militaires réagiront par des représailles en fusillant, en prenant des otages, en détruisant des localités et ils tiendront ces mesures pour légitime défense face à des manoeuvres perfides et sournoises". (op. cit., p. 246-247). À cet égard, l’armée française est effectivement confrontée au problème du "traitement" à accorder à tout Espagnol pris les armes à la main, problème qu’elle ne parvient pas à résoudre, sinon le plus souvent par des exécutions sommaires, faisant de cette guerre d’Espagne l’une des plus cruelles et des plus horribles, et déjà perçue comme telle par ses contemporains. Le Manifeste poursuit en faisant allusion à la lutte de tout un peuple contre la tyrannie et l’envahisseur en ces termes : "Tout membre de cette nation doit trouver la protection des lois de la guerre, le général qui ne les respecte pas est un bandit qui s’expose à la colère du ciel et à la vengeance des hommes" (Canga-Arguelles, p.107).

Mais cela relève de l’anathème pur et simple dans la mesure où l’on touche là à une espèce de paradoxe : ce paradoxe réside dans le fait d’en appeler à des "lois de la guerre" d’un droit classique de la guerre, alors même que l’émergence de la figure du "partisan" les rend, de fait, caduques. Ces problèmes insolubles vont prendre une ampleur sans précédent avec le dernier règlement de 1809, intitulé "Instruction sur le corso terrestre".

"L'INSTRUCTION SUR LE CORSO TERRESTRE" D’AVRIL 1809

Le second grand texte réglementaire de portée nationale, "l’Instruction sur le corso terrestre" (4) du 17 avril 1809 suit le même esprit que les trois dispositions du début de l’année 1809. Ce texte, comportant dix-huit articles, a pour but de donner des directives concrètes aux "partisans", et, ipso facto, en détermine la figure "irrégulière". Le terme de "corso terrestre" est une alliance de mots circonstancielle (5), celle-là même qui consisterait à parler d’un "corsaire de terre", par opposition à un "pirate de terre".
D’après la doctrine traditionnelle espagnole, le corso a pour but d’empêcher l’ennemi de pouvoir se servir, lorsqu’il en a besoin, des voies de communication sur mer. Le corso est donc l’oeuvre du combattant qui, en état d’infériorité, ne peut livrer une bataille décisive ni détruire la force armée de l’ennemi. Ces similitudes avec ce que sera la guerre de partisan ne s’arrêtent pas là. Ce sont des forces peu nombreuses qui luttent contre un ennemi omniprésent et qui, en l’absence d’une lettre de patente, comme celle qui était accordée au corsaire des siècles précédents, risquent constamment de sombrer dans le brigandage. La distinction entre corsaire et pirate s’avère essentielle. Schmitt insiste sur l’importance discriminante du critère politique : "le caractère politique a (dans l’ordre inverse) la même structure que chez le pirate du droit de la guerre maritime dont le concept inclut le caractère non politique de son aspect néfaste qui vise le vol et le gain privé" (op. cit. p. 224). Par conséquent, poursuit Schmitt, il faut éviter de désigner le partisan, "de le définir comme un pirate de la terre ferme". Le comportement du "pirate" est sans référence aucune à une quelconque "régularité". Et d’ajouter : "Le corsaire, au contraire, court la prise de guerre sur mer et est muni de lettres par le gouvernement d’un État ; son irrégularité à lui n’est donc pas sans lien avec la régularité et c’est ainsi qu’il resta jusqu’à la déclaration de Paris de 1856 une figure juridiquement reconnue du droit international européen. De ce fait, une certaine comparaison est possible entre le corsaire de la guerre sur mer et le partisan sur terre…" (op. cit., p. 284).

Les projets et motivations de ce "corso terrestre" de 1809 se trouvent, pour l’essentiel, exposés dans le préambule de "l’Instruction" : à l’instar du "corso maritime", le "corso terrestre" a pour but principal d’anéantir les communications terrestres de l’ennemi. Ordre est donné d’entraver "l’approvisionnement en vivres et en moyens de subsistance de l’armée française dans le pays (…), de faire de même avec les courriers, d’observer leurs déplacements (…), de tenir les Français dans un état d’alerte et de fatigue permanentes (…) en leur faisant le plus de mal possible" (Horta Rodriguez , p. 37).

De cet ensemble de projets visant à durcir la conduite de la guerre en Espagne se détache la motivation qui justifie et légitime aux yeux des Espagnols cette guerre d’un nouveau type. Le préambule de "l’Instruction" stipule d’emblée : "Maintenant que nous connaissons la manière la plus vile que Napoléon a utilisée pour détruire et désorganiser la force militaire espagnole (…), n’est-il pas évident qu’il revient aux paysans de se regrouper pour combattre ses armées ?" (Horta Rodriguez, p. 38).

Les autorités n’ont pas eu le temps d’enrégimenter les Espagnols ni de leur donner un uniforme ; mais tous sont néanmoins des soldats pour ces mêmes autorités. Si le règlement de 1808 cherchait à "militariser" les bandes de "partisans", "l’Instruction sur le corso terrestre", de son côté, met plutôt l’accent sur les représailles qui entendent constituer la réponse aux actions ennemies. Dans le même texte, on souligne d’ailleurs le fait que l’ennemi ne reconnaît pas un statut de combattants aux paysans et en fait "d’innocentes victimes" (Horta Rodriguez, p. 37). On retrouve – posé de manière de plus en plus nette – le problème précédemment évoqué par le Manifeste de la Junta Centrale du 20 mars 1809 sur le "statut" des combattants lorsqu’apparaît la figure du "partisan", lequel ne permet plus de faire une distinction nette entre le combattant et le non-combattant. En 1809, les paysans majoritaires dans les rangs des partisans ne pratiquent pas une guerre "réglée", avec des limites bien définies. L’ennemi le lui rend d’ailleurs bien. Cette relation d’inimitié absolue tend à l’anéantissement mutuel. C’est ce danger de la "guerre folle", inhérente à la faillite du droit classique, sur lequel insiste Schmitt : "Le partisan moderne n’attend de son ennemi ni justice, ni grâce. Il s’est détourné de l’hostilité conventionnelle de la guerre domptée et limitée pour se transporter sur le plan d’une hostilité différente qui est l’hostilité réelle dont l’escalade de terrorisme en contre-terrorisme va jusqu’à l’extermination" (op. cit., p. 219).

L’objectif principal consiste de fait à mener une guerre "à outrance", susceptible de devenir une guerre encore plus inhumaine. Fait sans précédent, on arme tous les habitants des provinces occupées afin "d’assaillir et de dépouiller" les soldats français "chaque fois qu’une occasion favorable se présentera". Et ce, avec toutes les armes, quelles qu’elles soient, même les "interdites" (Horta Rodriguez, p. 37), ce que ne mentionnait pas le règlement de 1808. C’est de cette manière qu’on souhaite résoudre le problème de la disproportion des forces en présence pour être en mesure de se battre "à armes égales", imitant ainsi "la conduite barbare du satellite de Buonaparte » – pour reprendre les termes du texte – afin de « guérir le mal par le mal" (Horta Rodriguez, p. 37). La forme inhumaine que va prendre cette guerre est inhérente à la justification que tous les moyens sont bons pour pouvoir lutter "à barbarie égale". Le fait sans précédent, c’est de l’institutionnaliser. Il n’échappe naturellement pas à Alcano Galiano, l’auteur du "corso", que les raisons qui le sous-tendent sont dépourvues de noblesse, mais son règlement qui, pour la première fois, préconise la guerre totale, est présenté comme une réponse imposée par l’adversaire et un mode de combat induit par les circonstances. C’est pourquoi, "l’Instruction sur le corso" est, par nécessité, plus expéditive, plus cruelle et moins "militaire" que le règlement de 1808.

Après les motivations, examinons plus en détail l’organisation. Les paysans peuvent se regrouper en "cuadrillas d’infanterie et de cavalerie". La plupart des combattants "irréguliers" peuvent se grouper en cuadrillas, même loin du territoire occupé, dans les provinces limitrophes, ou proches de celles qui sont occupées. Mais, dans ce dernier cas, les cuadrillas ayant moins de raison d’être que celles de la zone occupée, doivent demander la "permission de justice" pour se constituer. Cette limitation témoigne du fait qu’on tente, dans cette guerre "irrégulière" sans règles fixes, de poser un cadre juridique minimal susceptible d’éviter, malgré tout, de véritables dérives "criminelles". De même, si la "bonne conduite" des membres de ces cuadrillas est reconnue, un passeport leur est alors délivré, lequel est censé les garantir des mauvais traitements par l’ennemi en zone occupée. Signalons enfin que, si la part du butin, dans le règlement de 1808, était accordée proportionnellement à la solde, en 1809, il n’y a dans ces cuadrillas ni solde, ni grade. Le butin est réparti d’un "commun accord", ce qui apparente davantage ce type de guerre au corso maritime auquel il se réfère.

LES DERNIERS TEXTES DE LA GUÉRILLA

Les derniers textes officiels de l’époque relatifs à une réglementation de la guérilla interviennent en 1812 et 1814. Entre 1809 et 1812, beaucoup de choses ont changé pour "l’envahisseur français". Et 1812 constitue d’une certaine manière l’année de la fin pour "l’ordre français" en Europe, et en Espagne plus particulièrement. Certes, le 9 janvier 1812, Valence tombe aux mains des troupes napoléoniennes, mais la guerre entre dans une phase d’offensive de grande envergure du côté des forces hispano-britanniques. Le 19 janvier, les troupes de Wellington conquièrent Ciudad Rodrigo, puis Badajoz, le 7 avril.

En 1812, Napoléon, alors en pleine campagne de Russie, se voit contraint d’ordonner, pour la première fois, le retrait de 30 000 hommes de la péninsule. Ils feront largement défaut sur le front espagnol. De fait, l’offensive de Wellington, le 22 juillet 1812, permit à celui-ci de remporter sur le général français Marmont la victoire des Arapiles. C’est à la suite de ce succès hispano-britannique que fut publié un nouveau règlement. Il prouve combien les Espagnols étaient conscients des dangers pour l’avenir de la nouvelle forme de guerre irrégulière qu’ils venaient pourtant de prôner. Il s’agit d’un reglemento para las partidas de guerillera, en date du 11 juillet 1812. Dans le même esprit, un dernier règlement sera publié en juillet, alors que la guerre était pratiquement terminée : le reglemento para los cuerpos francos o partidas de guerilla .

Le premier règlement du 11 juillet 1812, comportant un préambule et sept chapitres, entend apparaître comme une structure légale (6). Il n’a pas été établi avec précipitation, comme celui de 1808, ou dans le feu de l’action, comme "l’Instruction sur le corso terrestre". Il annonce la "normalisation", qui sera nettement édictée en 1814, lorsque se posera le problème de la réinsertion des guérilleros dans la société.

La stratégie demeure inchangée : "harceler l’ennemi et soutenir l’esprit patriotique des régions envahies (…)". Il faut "couper les routes militaires de l’ennemi, intercepter ses courriers et ses convois, attaquer ses hôpitaux et ses entrepôts" (Horta Rodriguez, p. 39). Le fait de souligner l’attaque des hôpitaux montre à quel point cette guerre est cruelle, faute de règles à respecter. Cela ne signifie pas que tous les guérilleros fussent toujours cruels : la guerre, la conduite de l’ennemi qui ne pouvait être indulgente par ces raisons mêmes, la personnalité des chefs des guérilleros, déterminaient bien souvent leur attitude. Notons, toutefois, qu’aucun des règlements de la guérilla n’a jamais fait allusion aux prisonniers, sujet épineux et vaste s’il en est.

Peut-être en contrepoint des dangers induits par cette forme de guerre sans limites, on cherche désormais à souligner le caractère "militaire" des guerillas de manière bien plus nette que dans le règlement de 1808. Ce caractère "militaire" se concrétise par la dépendance accrue des groupes de "partisans" vis-à-vis du général-en-chef ou du commandant de district, la soumission à la discipline et aux lois militaires, la suspension de fonction en cas de mauvaise conduite. On a le sentiment d’une reprise en main du phénomène par les instances "régulières". Fait capital, la collaboration avec l’armée s’établit dorénavant pour "chaque opération militaire importante". Le commandant a toute liberté d’action avec sa bande de « partisans » dans "l’attente des ordres du général en chef". L’élément nouveau, c’est que, lorsque ces troupes reçoivent des ordres des autorités citées, elles sont tenues de leur obéir en "allant jusqu’à abandonner leurs projets" (Horta Rodriguez, p. 39).

Les problèmes apparaissent lorsqu’on aborde la question du butin des bandes de "partisans", en particulier lorsqu’il s’y trouve des biens appartenant à des Espagnols. Il est établi que tout ce qui est pris devient la propriété exclusive des "partisans", exception faite de ce qui appartient "aux corps constitués de l’armée" ou aux "bons" Espagnols. Les biens pris et abandonnés par l’ennemi doivent, en effet, être rendus à leurs propriétaires, en laissant cependant aux "corps-francs" un quart de la valeur de ces biens. 

Un élément inquiétant apparaît dans ces articles : c’est la notion problématique de "bons" Espagnols, ce qui suppose qu’il y en a de « mauvais » (Horta Rodriguez, p. 40). C’est l’un des aspects inévitables et tragiques de cette guerre patriotique qui tourne parfois à la guerre civile. Sont considérés comme "bons" Espagnols ceux qui soutiennent la lutte contre l’occupant français, et comme "mauvais" Espagnols les Afrancesados, autrement dit appartenant au parti pro-français et considérés comme de vulgaires collaborateurs. Mais, comme toujours dans de tels cas, les abus et les dérapages risquent d’être nombreux. 
Immanquablement se pose la question de savoir si cela n’est pas susceptible de favoriser un banditisme pur et simple. Cela constitue un vrai problème dès lors que le contrôle du "tiers régulier" dont parle Carl Schmitt s’amenuise. De fait, l’article de 1812 enjoint de manière assez problématique, celui qui procède à l’arrestation, d’agir "avec justice", à l’instar du "bandit généreux". On mesure les dangers qui risquent, à terme, de surgir. Par définition, toute "justice" ne peut relever que d’une institution étatique, seule compétente en la matière : en d’autres termes, tout particulier n’est justiciable que devant une institution politique dont la régularité dérive du caractère souverain du pouvoir étatique constitué. Or, le texte autorise un particulier à la rendre en faisant appel à sa "bonne volonté" individuelle. Le règlement de 1812 insiste d’ailleurs sur les relations entre le peuple et les "bandes" (7). Violences et abus sont énumérés, ainsi que les sanctions que leurs auteurs peuvent encourir. Pour chercher à prévenir des dérapages, on interdit d’arrêter ou de poursuivre qui que ce soit, hormis les déserteurs. On révèle ainsi en creux les cas de détention arbitraire commis par quelques bandes qui s’érigent en juges des "mauvais Espagnols".

La comparaison des deux règlements de 1812 et 1814 s’avère particulièrement intéressante pour saisir l’évolution des esprits quant au problème du partisan espagnol. Pour la première fois, en effet, le terme de guerilla apparaît en tant que tel dans une réglementation. L’article II du règlement de 1812 précise que les partidas devront désormais porter le nom de "corps-francs" ; ces derniers préfigurent ceux qui existeront par la suite, notamment en France durant la guerre de 1870. Le règlement de 1814 s’intitule, pour sa part, "Règlement sur les corps francs et les partis de guérilla" – un substantif promis à la postérité.

La reconnaissance des services rendus par les "partisans" est, certes, explicite dans le préambule des deux règlements. Mais des différences entre les deux textes sont manifestes, en partie à cause du changement de conjoncture politique entraînée par la défaite de Napoléon (8) et le désir d’un retour à une normalisation politique. Ainsi, dans le premier règlement, celui du 11 juillet 1812, on exalte encore l’esprit patriotique et on préconise toujours l’augmentation du nombre des guérilleros, en accord toutefois avec les décisions prises aux Cortes, à savoir le parlement espagnol. Mais le préambule de 1812 reconnaissait déjà l’existence de guérillas qui, "profitant du désordre et de la confusion engendrée par les malheurs de la nation, ont abusé de la confiance qu’on avait mise en elles" (Horta Rodriguez, p. 41).

Le règlement du 28 juillet 1814, quant à lui, va jusqu’à porter un jugement très critique sur les précédents règlements et sur la guérilla dont "les circonstances et les troubles passés n’ont pas permis de fixer les règles avec discernement…" (Horta Rodriguez, p. 41). Ce dernier règlement est clairement dicté par le désir de dissoudre les guérillas. De fait, on se prépare à "réformer et dissoudre les bandes de partisans dont la conduite n’a pas été des plus brillantes" (Horta Rodriguez, p. 41). On abandonne non seulement la création de ces "corps", mais aussi l’idée de leur intégration éventuelle dans l’armée, comme cela avait pu être envisagé antérieurement. 

Ainsi, les autorités renforcent des positions héritières de l’Ancien Régime qui trouveront leur consécration lors de la tenue du Congrès de Vienne, entre novembre 1814 et juin 1815. Schmitt considère d’ailleurs que ce Congrès peut se présenter comme une gigantesque œuvre de "Restauration", au sens propre comme au sens figuré : par-delà la "restauration" du principe de légitimité dynastique en Europe se trouve induit celui du droit classique de la guerre, mis à mal par la tornade révolutionnaire. C’est bien ce qu’annonce le règlement espagnol de 1814, qui sonne en fait comme une reprise en main, avec un retour à travers la « régularité » de l’armée, à la légitimité royale, une fois le danger passé.

Le problème délicat entre tous est celui de la réintégration de ces hommes dans la vie civile. Le règlement de 1812 avait prévu d’une manière imprécise mais néanmoins généreuse, la possibilité pour les officiers de la guérilla d’entrer dans l’armée. Le règlement de 1814 réaffirme encore cette possibilité, mais avec beaucoup plus de réserves. Il est stipulé que, "afin de ne pas porter préjudice en aucune manière aux classes méritantes de l’armée, ils occuperont, lorsqu’ils l’auront obtenu, à grade égal, un poste inférieur" (Horta Rodriguez, p.41). On ne saurait être plus explicite.

Les conséquences sur le plan européen induites par l’exemple espagnol de la guérilla et la légitimation juridico-politique qui lui est donnée sont considérables. Les différents règlements pour la guérilla espagnole constituent un précédent et un exemple décisif qui sera repris par d’autres pays en lutte contre Napoléon, notamment à travers l’Édit royal prussien d’avril 1813 – le Landsturm Ordnung –, puis lors de la campagne de Russie, voire bien au-delà. 

Le Congrès de Vienne qui suit la défaite de Napoléon apparaît certes comme une tentative inédite de Restauration de l’ancien nomos européen de la terre et du droit classique qui lui était afférent. Il semble même renvoyer le "partisan" aux oubliettes de l’Histoire. Mais, pour Carl Schmitt, c’était mal mesurer l’importance de ce qui venait de se passer. L’émergence de la figure conceptuelle du partisan au sein d’un cadre juridico-politique sans précédent avait irréversiblement sonné le glas du droit  "classique", et le fait est qu’il sera appelé au destin extraordinaire que l’on sait au XXe siècle.

David RIGOULET-ROZE
http://www.theatrum-belli.com

article paru dans les Cahiers du Centre d'Etudes d'Histoire de la Défense n°18 (2002)

NOTES :

1/ Littéralement "afrancisés", c'est-à-dire membres du parti pro-français.
2/ L'armée royale.
3/ Cf. Jover Zamora (José Maria), "La guerra de la Independencia Espanola en el marco de las guerras europas de liberacion (1808-1814)", in Historia de la guerra 1. La guerra de la Independencia Espanola y los sitios de Zaragoza, Universidad Ayuntamiento de Zaragoza, Saragosse, 1958, 636 pages, p. 41-165.
4/ Instruccion que Sa Majestad se ha dignado aprobar par el Corso terrestre contra los exécritos francesos, soumis par V. Alcala Galiano à la Junte Centrale.
5/ Selon le dictionnaire de la langue espagnole, le corso est "la campagne que les marchands, patentés par leur gouvernement, mènent contre les pirates ou les embarcations ennemies" ; la patente du corso, quant à elle, est une "cédule ou un brevet par lequel le gouvernement d'un État qui autorise un sujet à participer à l'expédition maritime contre les ennemis de la nation". Cf. Dictionario de la lengua espanola, Real Academia Espanola, Madrid, 1956, p. 374.
6/ Le règlement de 1812 fut publié à Cadix par Don Nicolas Gomez Requena.
7/ La régence avait déjà tenté de corriger par des décisions de portée limitée les abus que les règlements antérieurs n'ont pu que favoriser. Ainsi, le 15 septembre 1811, elle avait donné des instructions pour dissoudre les cuadrillas qui causent des torts à la population.
8/ La campagne de Russie s'achève en novembre 1812 par la Bérézina, et 1813 est l'année de la coalition générale contre Napoléon (Autriche, Russie, Prusse), lequel sera vaincu à la bataille de Leipzig en octobre 1813.

vendredi, 13 avril 2012

Histoire des Berbères, des origines à nos jours

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Sortie du nouveau livre de Bernard Lugan :
Histoire des Berbères, des origines à nos jours. Un combat identitaire pluri-millénaire.
 
IMPORTANT : Ce livre édité par l'Afrique Réelle n'est pas disponible dans les librairies ou les sites de commandes en ligne. Seule l'Afrique Réelle le distribue.
 
Prix (frais de port compris) :
- 29 € pour livraison en France / Dom-Tom / Europe
- 38 € pour livraison dans le reste du monde (en recommandé avec AR)
- 25 € à partir de 5 livres
 
Pour le commander, 2 possibilités :
- Par carte bleue ou Paypal :
- Par chèque avec le bon de commande ci-joint à imprimer et à nous retourner
 

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Présentation de l'ouvrage
 

Les Berbères ou Imazighen (Amazigh au singulier) constituent le fond ancien de la population de l’Afrique du Nord. Ils formaient à l’origine un seul Peuple peu à peu fragmenté par une histoire à la fois riche, complexe et mouvementée. Des dynasties berbères régnèrent  sur le Maghreb jusqu’au XVI° siècle.

Les partisans de l’arabo-islamisme affirment que les Berbères sont sortis de l’histoire, leur conversion à l’Islam les ayant inscrits de façon irréversible dans l’aire politico-culturelle de l’arabité. Dans les années 1950, la revue Al Maghrib alla ainsi jusqu’à écrire qu’ils ne peuvent accéder au Paradis que s’ils se rattachent à des lignées arabes. Quant auministre algérien de l’Education nationale, il déclara en 1962 qu’ils « sont une invention des Pères Blancs ».

 Aujourd’hui, les dirigeants arabo-islamiques nord africains doivent faire face au réveil berbère si fortement exprimé en 2004 par Mohammed Chafik au travers de sa célèbre question réponse: « Au fait, pourquoi le Maghreb arabe n’arrive-t-il pas à se former ? C’est précisément parce qu’il n’est pas Arabe ». Cette phrase était incluse dans un article dont le titre explosif était : « Et si l’on décolonisait l’Afrique du Nord pour de bon ! », intitulé signifiant qu’après avoir chassé les Français, il convenait désormais pour les Berbères d’en faire de même avec les Arabes…

Qui sont donc les Berbères ? Quelle est leur origine ? Comment furent-ils islamisés ? Quelle est leur longue histoire ? Comment se fait aujourd’hui la renaissance de la berbérité? Peut-elle être une alternative au fondamentalisme islamique ?

C’est à ces questions qu’est consacré ce livre qui n’a pas d’équivalent. Son approche est ethno historique et couvre une période de 10 000 ans. Il est illustré par de nombreuses cartes en couleur et par des photographies.

 

Table des matières

 

Première partie : La Berbérie jusqu’à la conquête arabe

 

Chapitre I : Une très longue histoire

A) L’état des connaissances
B) L’Egypte, une création berbère ?

 

Chapitre II : Les Berbères durant l’Antiquité classique

A) Les Peuples et les Etats
B) Les Berbères furent-ils romanisés ?

 

Chapitre III : Les Berbères, les Vandales et les Byzantins

A) L’intrusion vandale
B) L’échec de Byzance

 

Deuxième partie : Les Berbères se convertissent à l’islam mais ils résistent à l’arabisation (VI°-XV°siècle)

 

Chapitre I : Les Berbères face à la conquête et à l’islamisation

A) Les résistances à la conquête
B) La révolte berbère du VIII° siècle

 

Chapitre II : Le monde berbère du IX° au XII° siècle

A) La Berbérie au IX° siècle
B) Le Maghreb berbéro musulman du X° au XII° siècle

 

Chapitre III : Les  grandes mutations du monde berbère (XII°-XV° siècle)

A) Les Berbères almohades et l’arabisation du Maghreb (XII°-XIII°)
B) La question arabe
C) Le tournant des XIII°-XV° siècles

 

Troisième partie : Des Berbères dominés à la renaissance de la Tamazgha

 

Chapitre I : Les Berbères perdent la maîtrise de leur destin (XVI°-XIX° siècle)

A) Le Maroc entre Arabes et Berbères
B) Les Berbères et les Ottomans (XVI°-XIX° siècle)

 

Chapitre II : Les Berbères et la colonisation

A) Algérie : de la marginalisation à la prise de conscience
B) Maroc : les Berbères victimes du Protectorat ?

 

Chapitre III : La renaissance berbère aujourd’hui

A) Maroc : de la stigmatisation à la cohésion nationale
B) Algérie : entre berbérisme et jacobinisme arabo-musulman
C) Les autres composantes de la Tamazgha

 

- Bibliographie
- Index des noms de personnes
- Index des tribus et des peuples

 

mercredi, 11 avril 2012

Journée d'étude "Autour de Raymond De Becker"

Journée d'étude "Autour de Raymond De Becker"

Note de SYNERGIES EUROPEENNES: Enfin! Quelques instances officielles enBelgique rendent hommage à Raymond De Becker, peut-être grâce à la fidélité inébranlable que lui témoigne le doyen des lettres francophones du royaume, Henry Bauchau. Ce colloque, dont le programme complet figure en pdf en queue de présentation, fait véritablement le tourde laquestion. Puisse ce colloque être l'amorce d'une renaissance spirituelle et d'une nouvelle irruption d'éthique dans un royaume voué depuis près de six décennies à la veulerie.


La journée d'étude "Autour de Raymond De Becker" a eu lieu les 5 et 6 avril 2012 aux Facultés universitaires Saint Louis.
Raymond de Becker

Étrangement, la figure de Raymond De Becker (Schaerbeek, 30 janvier 1912 – Versailles, 1969), souvent évoquée dans les travaux des historiens, n’a encore fait l’objet d’aucun travail biographique. « Quant à Raymond De Becker », écrivait fort opportunément un « ami » d’André Gide, son histoire reste à écrire, car il semble que son passage du christianisme prophétique au fascisme virulent ait fait de lui un personnage non seulement sulfureux mais tabou » .


Après des études secondaires inachevées à l’Institut Sainte-Marie à Bruxelles, Raymond De Becker trouve à s’employer au sein d’une entreprise d’import-export américaine. Il quitte ce poste après un an pour entrer au secrétariat de l’ACJB à Louvain en tant que secrétaire général de la JIC (Jeunesse indépendante catholique – cercle de jeunesse des classes moyennes) qu’il a créée en mars 1928 avec sept autres jeunes industriels et commerçants. Il entre en contact avec des étudiants de Saint-Louis via Conrad van der Bruggen à l’été 1931 et participe à la fondation de l’Esprit nouveau et des Équipes Universitaires. Il interrompt ses activités fin décembre 1932 après le Congrès de la Centrale Politique de Jeunesse pour entreprendre une retraite mystique en France à Tamié où il a déjà effectué une reconnaisse au mois de septembre précédent de retour d’un voyage à Rome. Il met au point les premiers statuts du mouvement Communauté et revient en Belgique en novembre 1933 après un passage à Paris où il a rencontré André Gide. Ayant fait la connaissance d’Emmanuel Mounier à Bruxelles début 1934, il contribue à la pénétration des groupes Esprit en Belgique. De 1936 à 1938, il est associé au comité de rédaction de La Cité chrétienne puis passe à L’Indépendance belge d’où il est renvoyé en 1939. Il participe alors à la fondation du périodique neutraliste L’Ouest dirigé par Jean de Villers. Durant l’Occupation, il deviendra directeur éditorial des Éditions de la Toison d’Or et rédacteur en chef du « Soir volé ». Il rompra cependant avec la Collaboration en septembre 1943, justifiant sa rupture par l’incertitude manifestée par Léon Degrelle et les rexistes de s’attacher à défendre une structure étatique propre en Belgique. Il sera alors placé en résidence surveillée, d’abord près de Genappe puis à l’hôtel d’Ifen à Hirschegg dans les Alpes bavaroises en Autriche où il côtoie notamment André François-Poncet. Raymond De Becker sera condamné à mort le 24 juillet 1946 par le Conseil de guerre de Bruxelles. Il lui est alors essentiellement reproché d’avoir valorisé la Légion « Wallonie » et d’avoir soutenu en mars 1942 la mise en place du Service du Travail Obligatoire. Il sera cependant libéré en février 1951 mais contraint à l’exil. Il se réfugie en France où il poursuit une activité de publiciste principalement tournée vers la psychanalyse.

Ce colloque ambitionne donc d’aborder sans tabous cette figure capable de se mêler à tout ce qui compte dans les cénacles intellectuels belges et européens de l’entre-deux-guerres. A travers quatre sessions, qui rassembleront des universitaires belges et étrangers, il s’agira de revenir non seulement sur le parcours et les engagements du jeune publiciste dans les années 30 et 40, mais aussi de tenter de mesurer l’influence qu’il a pu exercer sur les nouvelles relèves belges et européennes. Cette démarche, essentielle, est compliquée par le fait que s’étant fourvoyé au nom de l’idée d’Europe unie dans la collaboration avec les nazis, le publiciste est devenu, dans la foulée de l’épuration, un « ami encombrant ».


En ce sens, les contributions devraient aussi permettre d’appréhender l’angle-mort qui apparaît immanquablement dans le parcours de nombreux personnages-clés de l’histoire intellectuelle, politique et artistique (Spaak, mais aussi Hergé, Paul De Man, Bauchau) avant et après la Deuxième Guerre mondiale.


A cet égard, il est encore à espérer que cette rencontre permettra aussi de retrouver la piste de papiers et d’archives « oubliées » ou en déshérence de/sur Raymond De Becker…


Les différentes interventions feront l’objet d’une publication à laquelle sera adjointe la correspondance conservée entre Raymond De Becker et Jacques Maritain conservée au Centre Maritain de Kolbsheim.


Programme du colloque

dimanche, 01 avril 2012

Ephémérides d'avril

Ephémérides d'avril

AVRIL :

3 avril 1866 : Naissance à proximité de la ville de Wellington dans la Colonie du Cap de James Barry Munnik Hertzog, militaire et homme politique au service des Britanniques, qui devint Premier Ministre de l'Union Sud-Africaine entre 1924 et 1939. Face aux gouvernements de Londres, Hertzog a toujours défendu deux principes de base: primauté des intérêts sud-africains propres, même aux dépens de ceux de Londres, et la politique dite des “deux courants” (Two-Streams-Policy), où les deux communautés européennes d'Afrique du Sud, la Britannique et l'Afrikaander pourraient amorcer un développement séparé mais harmonieux, où ni la première ni la seconde ne domineraient l'autre de manière insupportable. Hertzog, juriste de formation, avait présidé la Haute Court de justice de l'Etat Libre d'Orange, pour ensuite devenir un organisateur hors pair de la guérilla des Boers contre les Britanniques. Après ce conflit sanglant, qui n'a certes pas doré le blason de l'Empire britannique, Hertzog fonde le "Orangia Unie Party", réclamant l'auto-détermination des colons de souche hollandaise, allemande et huguenote. Dans ce combat politique, il sauve de la disparition la langue afrikaander, en en faisant l'une des deux langues officielles de l'Union Sud-Africaine. En désaccord avec Louis Botha, il fonde en 1914, l'Afrikaander Nationalist Party, qui gagne rapidement le soutien de certaines strates de la population, parce qu'il s'oppose à la guerre contre l'Allemagne. Hertzog fait ensuite voter des lois pour protéger l'industrie sud-africaine contre la spéculation libérale et cosmopolite, dès qu'il accède au pouvoir en 1924, avec l'appui des travaillistes. Il oblige Londres à concéder la “Statut de Westminster” (1931), accordant aux républiques afrikaander le droit de faire sécession de l'Empire britannique. Il amorce également une politique équilibrée de “développement séparé” des Noirs et des Blancs, que dénonceront les extrémistes du “Purified Nationalist Party” de Daniel F. Malan, préconisant un apartheid pur et dur. En 1938, Hertzog triomphe aux élections et en­tend mener une politique de neutralité dans le conflit qui s'annonce en Europe. Mais Smuts, son allié, est pro-britannique et fait passer une motion qui condamne la neutralité; logique avec lui-même, Hertzog démissionne et devient le chef de file de l'opposition au nouveau gouvernement Smuts, allié aux extrémistes de Malan, qui, finalement, torpillent ses mesures de ségrégation tempérée. Il se retire, dégoûté, de la politique à la fin de l'année 1940. Il meurt à Pretoria le 21 novembre 1942.
 
4 avril 1949 : Les Etats-Unis, le Canada et dix pays européens signent à Paris le “Pacte Atlantique”, l’OTAN. En réalité, ce pacte ne représente nullement l’adhésion libre de pays souverains mais l’aliénation totale de la souveraineté des membres européens de ce pacte. Il n’a pas servi à contrer le communisme, comme le croient les naïfs et les traitres, mais à placer les pays européens sous un contrôle étroit, afin qu’ils soient incapables de développer une industrie militaire, aéronautique et navale autonome. En théorie, l’OTAN devait, en matière de développement de matériels militaires et de commerce des armements, être une “Two-Ways-Street”, une “voie à deux sens”. Les Américains ont intrigué, acheté de vils politiciens corrompus, des canailles souvent socialistes, pour que cette “voie à deux sens” devienne rapidement une “voie à un seul sens”, une “One-Way-Street”, où les Etats-Unis  devenaient les principaux fournisseurs de matériels, surtout en aviation (on se rappelera du “contrat du siècle” de 1975, ayant servi à fourguer des F-16 sous-équipés au plein prix pour casser l’élan de Dassault et de Saab; l’opération s’est répétée récemment en Pologne). De Gaulle a tenté de réagir à cette inféodation dangereuse, car l’industrie militaire est presque toujours à l’origine de développements civils importants, mais sans les résultats escomptés à long terme. Dans un premier temps, la France a effectivement pu accroître ses industries aéronautiques, en vendre les produits, dont les Mirages III, dans le monde (Amérique Latine, Israël, Australie, Inde), mais la crise de mai 68, plus que probablement téléguidée depuis Washington, a chassé le vieux général du pouvoir et surtout privé ses collaborateurs, plus intelligents que lui, de tout soutien politique. Comme aiment à le dire les “vieux gaulliens”, la France est alors tombée aux mains des “comploteurs auvergnats” (Pompidou, Giscard, Mitterrand), qui ont détricoté les acquis de ce gaullisme offensif des années 60 et ramené bravement la France dans le giron atlantiste.
 
5 avril 1920 : En dépit des engouements pro-américains qui sévissent en Europe à la suite de l’intervention des troupes du Général Pershing en France en 1918, le journaliste de Paris-Midi, Maurice de Waleffe, fustige l’invasion des écrans français par les films américains. Il s’agit là d’un des tout premiers actes de résistance identitaire face à un fléau qui allait disloquer les fondements mêmes de l’identité européenne, soit l’invasion de fictions distrayantes dont l’objectif est de créer des loisirs artificiels déconnectés des traditions folkloriques et littéraires et de l’histoire réelle des peuples. Cette réaction de Maurice de Waleffe montre que l’intention américaine de coloniser le mental des peuples européens ne date pas seulement d’après la seconde guerre mondiale. Dès la fin de la première des “grandes conflagrations” fratricides d’Europe, l’industrie américaine du loisir avait planifié la mise au pas des peuples de notre continent, par le biais d’une technique nouvelle, celle de l’art cinématographique, qui en était à ses premiers balbutiements.
 
6 avril 1875 : Mort à Paris du socialiste et militant juif Moses Hess, fortement influencé dans ses démarches par sa lecture approfondie de Spinoza et de Hegel. Hess fonde une forme de socialisme libertaire, idéaliste, assorti de la création de groupes ouvriers de travail politique, auxquels participera également Karl Marx. Mais Marx se détachera rapidement de lui et l'insultera dans le “Manifeste Communiste”, qualifiant son système d'“utopique”. Moses Hess passera surtout à la postérité pour son ouvrage Rom und Jerusalem, qui aura un impact considérable sur des figures du sionisme comme Ahad Ha'am et Théodore Herzl : Hess y définit l'identité juive, considérée comme inassimilable dans toute autre nation. Il en déduit que les Juifs doivent avoir un sol quelque part dans le monde. Hess critique toutes les formes d'universalisme qu'adopte le judaïsme réformé, car elles abandonnent la spécificité juive pour se perdre dans des mirages sans consistance. La lecture d'Hess demeure des plus intéressantes aujourd'hui, dans la mesure où il plaide, au sein du judaïsme, pour une spécificité qu'il ne faut pas noyer dans des discours soi-disant universalistes (constat qui vaut évidemment pour toutes les nations, celles qui sont considérées par lui comme nomades, dont les Juifs, ou celles qui sont sédentaires). Ipso facto, ses démonstrations peuvent nous aider à lutter contre les discours universalistes médiatiques actuels, notamment en francophonie, où l'on assiste à cette curieuse collusion entre un certain discours prononcé par de vrais ou de faux Juifs sur un nomadisme qui serait universaliste et transcenderait toutes les appartenances, et l'idéologie ethnocidaire et arasante de la République, qui refuse de tenir compte des données anthropologiques naturelles et des idiosyncrasies individuelles ou communautaires.

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8 avril 1946 : Juan Peron est élu président de la République argentine avec 1.527.231 voix, soit 55% des suffrages exprimés. La gauche avait déçu la classe ouvrière argentine en s’alliant avec des partis de droite, peu enclins à satisfaire ses aspirations sociales légitimes. Les vieux partis sont déconsidérés. Les schémas politiques traditionnels sont fracassés. Le peuple argentin a réussi une révolution en toute légalité. Il est intéressant de noter que lors de la campagne électorale, à l’instigation de l’ambassadeur des Etats-Unis, Braden, les services américains avaient composé de toutes pièces un “Livre Bleu”, qui attestait, soi-disant, de la collusion entre Peron et les nazis (pourtant vaincus depuis un an). Toute l’opposition à Péron reprenait à l’unisson ce thème du “nazisme” du Général et de son épouse. La classe ouvrière argentine n’a pas été dupe. Mais, sur fond de révolution orange en Ukraine et en Biélorussie aujourd’hui, on voit que les méthodes d’agit-prop n’ont pas changé, à la seule différence que les hitlériens ne sont plus guère invoqués, mais, en revanche, on agite à qui-mieux-mieux le croquemitaine du stalinisme... Dès le 22 février 1944, ce montage se dégonfle comme une baudruche: on peut prouver que le “Livre Bleu” est un montage fabriqué par Braden. L’objectif américain de déstabiliser l’Argentine et de la condamner à n’avoir que des gouvernements inefficaces s’inscrivait dans une logique géopolitique déjà ancienne. En 1933, le Pacte Roca-Runciman avait mis l’Argentine sous la coupe des Britanniques et arrêté ainsi toute pénétration américaine. Avec l’affaiblissement définitif de l’Angleterre à la suite de la deuxième guerre mondiale, les Américains ont tenté de remettre les pieds dans les pays du bassin du Rio de la Plata. Un pouvoir, tel celui qu’annonçait Peron, aurait bloqué ce retour. Voilà la raison pour laquelle, Péron était l’ennemi à abattre, le nouveau “nazi” de service. Ironie de l’histoire: les Britanniques ne manqueront pas de critiquer sévèrement les maladresses de Braden et de la politique étrangère américaine, vu que c’était eux qui étaient évincés du bassin du Rio de la Plata. Cependant, ni la tutelle britannique sur le commerce des viandes ni la tutelle américaine ne sont acceptables pour les peuples du Cône Sud de l’Amérique ibérique.
 
9 avril 1940 : Le chef du mouvement nationaliste norvégien “Nasjonal Samling”, Vidkun Quisling, forme un gouvernement qui annonce tout de go qu’il sera pro-allemand et mettra un terme à la politique traditionnellement pro-britannique de la Norvège. Les troupes allemandes entrent en Norvège, dans le but premier d’empêcher un débarquement britannique visant à couper à l’Allemagne la route du fer suédois. Quisling, qui n’avait jamais obtenu un seul mandat lors des législatives d’avant-guerre, devient chef d’un gouvernement sans assises populaires, comptant huit autres membres, tous issus du “Nasjonal Samling”. Les autorités allemandes dissolvent ce gouvernement le 15 avril 1940, vu  son impopularité et son absence d’ancrage dans la population. Quisling est nommé par les autorités d’occupation “Haut Commissaire à la Démobilisation”. Le pays sera gouverné par l’ancien Gauleiter de Düsseldorf, Josef Terboven. Quisling s’engagera dans une collaboration totale avec l’occupant, bien que le tribunal qui le jugera et le condamnera à mort en 1945 ne retiendra pas l’accusation d’avoir favorisé l’invasion ennemie. La biographie de Quisling est cepandant plus intéressante avant la création de  ses mouvements politiques dans les années 30, qui l’ont conduit à sa perte. Brillant étudiant au lycée puis à l’académie militaire norvégienne, il deviendra attaché militaire en Russie en 1917, au moment où éclate la révolution. Il sera à Moscou avec son compatriote Prytz (qui le rejoindra au “Nasjonal Samling” dans les années 30) et renseignera son gouvernement sur les événements tragiques qui secouèrent la Russie à l’époque. On s’étonnera d’apprendre, aujourd’hui, où son nom même désigne le “traitre” ou le “collaborateur” (des Allemands) en langue anglaise, qu’il a d’abord sympathisé avec la cause communiste et favorisé l’engagement de ses compatriotes dans l’armée rouge. En 1921, il accompagne Frithjof Nansen dans le cadre des activités de l’explorateur norvégien en Ukraine, au sein d’une “ONG” avant la lettre, le “Russian Relief Committee”. La situation épouvantable qu’il découvre en Ukraine, où la population connaît famines et massacres, l’oblige à prendre ses distances avec le communisme, qu’il avait trouvé dans un premier temps intéressant, rénovateur et prometteur. En 1925, toujours avec Nansen, il se rend en Arménie pour le compte de la SdN. Cette longue expérience soviétique fait de lui un anti-communiste convaincu. Il adhère aussi à certaines idées réformatrices de ce grand humaniste nordique que fut Frithjof Nansen (décédé en 1930). Dans son testament politique, Nansen avait appelé le peuple norvégien “à libérer la patrie de la lutte des classes et de la politique des partis et à lutter sur base de principes politiques et économiques sains pour l’unité nationale et la renaissance du pays”. Quisling reste donc fidèle à son ancien “patron”. Il n’abandonne pas pour autant sa vision d’un socialisme populaire: il écrit vouloir des “soviets sans communisme”. Les partis qu’il fonde dans les années 30 ne sont malheureusement qu’un simple calque du “grand frère” allemand. Toutefois, soucieux de maintenir la Scandinavie dans la paix, il adoptera des positions pacifistes dès les accords de Munich, entendra soustraire la Norvège à l’influence prépondérante de la Grande-Bretagne, et lancera en octobre 1939 un appel à la paix qu’il adressera au Premier Ministre britannique. Quand les troupes allemandes et leurs alliés entrent en Union Soviétique en 1941, Quisling, dont l’épouse est russe, lance un appel à la mansuétude des envahisseurs: il demande aux Allemands de rentrer dans les villes et les villages russes, biélorusses et ukrainiens en libérateurs, de donner l’autonomie aux peuples et de rendre la terre aux paysans. Il n’a guère été entendu.
 
10 avril 1864 : Maximilien d’Autriche devient empereur du Mexique, grâce au soutien de la France et de la Belgique. L’Europe profite par là de la Guerre de Sécession qui ravage les Etats-Unis pour reprendre pied dans le Nouveau Monde.  Nommer un “empereur” dans cette région peu paraître désuet, et ce l’est, mais ce geste, qui nous apparaît maintenant comme un vaudeville à la fin tragique, demeure malgré tout la dernière tentative européenne de contenir les Etats-Unis, de les empêcher de faire main basse sur toute l’Amérique ibérique. Mais dès la fin de la guerre civile nord-américaine, les Etats-Unis, sans perdre de temps, font pression et obligent les Mexicains à demander le retrait des troupes françaises du Maréchal Bazaine, le 18 décembre 1866. Sans l’appui de ces troupes européennes, l’Empereur Maximilien est battu par les armées de Benito Juarez, qu’appuient les Etats-Unis. Maximilien est capturé et exécuté le 19 juin 1867. Juarez restaure la République et entame une répression féroce, éliminant physiquement toutes les notabilités liées à la tradition européenne. La barbarie, une fois de plus, s’est déclenchée sous le masque d’une “libération”, qui n’annonçait évidemment rien d’autre qu’une domination américaine.
 
11 avril 1818 : Naissance à Hsiangyin dans la province chinoise du Hunan de Kuo Sung-tao, qui fut le premier ambassadeur de Chine à l'étranger, en l'occurrence à Londres. Il prit ses fonctions dans la capitale anglaise en 1877. En observant la vie quotidienne de la capitale britannique et l'explosion économique de la métropole impériale, il écrit à son gouvernement qu'il faut d'urgence introduire en Chine une politique d'occidentalisation technique, c'est-à-dire construire des chemins de fer et introduire le télégraphe. Ce conseil a été très mal vu dans les milieux officiels chinois, si bien que son journal de voyage (“De Changhaï à Londres”) est interdit de parution. En 1878 déjà, il reçoit l'ordre de revenir à Pékin. Méfiant, il se retire dans son village natal, où il meurt en 1891. Kuo Sung-tao a voulu un Meiji chinois. Ceux qui ne l'ont pas écouté sont responsables du retard chinois. Ils en portent la responsabilité devant l'histoire.
 
12 avril 1931 : Les républicains espagnols remportent les élections municipales, couplées à un référendum sur la monarchie, confirmant de la sorte une nette majorité en faveur de l’instauration d’une république plus sociale, que l’Europe, y compris l’Italie mussolinienne, s’empresse de reconnaître. Cette victoire force le roi Alphonse XIII à quitter le pays. La 2ième République est proclamée. Le 9 décembre, elle se donnera une constitution. Le 6 septembre 1932, les Cortes accordent l’autonomie à la Catalogne. Une ère nouvelle faite de liberté et de modernité semble s’annoncer au Sud des Pyrénées. Mais en octobre 1934, la République ordonne de réprimer cruellement le soulèvement ouvrier de la “Commune des Asturies”. 3000 ouvriers sont massacrés. 40.000 personnes sont arrêtées. Cela conduit à une radicalisation de la gauche, contre la gauche modérée mais répressive, permettant au “Front Populaire” d’emporter une victoire électorale aux Cortes le 16 février 1936. Le 18 juillet 1936, l’armée se soulève, amorçant ainsi la terrible guerre civile que connaîtra le pays jusqu’en 1939. La gauche n’aime pas rappeler que ce sont justement les Républicains qui ont maté, de la manière la plus cruelle qui soit, le soulèvement ouvrier des Asturies. La guerre d’Espagne, à la lumière de ces faits, ne doit pas être jugée et analysée selon des schémas binaires et manichéens.
 
200px-Frank_murphy_supreme_court_justice.jpg13 avril 1890 : Naissance à Harbor Beach dans le Michigan de Frank Murphy, juriste américain, appointé près la Court Suprême des Etats-Unis. Plusieurs principes politiques ont animé sa carrière : la défense absolue des libertés individuelles et civiles, la volonté de faire triompher une justice se basant sur l'argumentation de fond (substantielle) contre le poids des techniques de droit. Maire de Détroit de 1930 à 1933, il luttera efficacement contre le chômage et, gouverneur du Michigan, en 1937-38, il refusera de faire usage de la troupe pour briser les grèves non violentes dans l'industrie automobile. Haut commissaire américain aux Philippines, il œuvrera pour la décolonisation et l'indépendance de l'archipel. En 1944, il dénonce comme racisme et injustice l'internement systématique des citoyens américains de souche japonaise.
 
14 avril 1971: Le Président des Etats-Unis, Richard Nixon, amorce sa politique de normalisation à l’égard de la Chine communiste, dans la mesure où, désormais, le commerce entre les deux Etats est libéralisé. Cette mesure prend la suite d’une autre, décidée un mois auparavant, le 15 mars 1971, et qui autorisait dorénavant les citoyens américains à voyager en Chine. La normalisation commence par un acte symbolique et sympathique, bien médiatisable: la visite de joueurs américains de ping-pong en Chine, où ils affronteront l’équipe nationale chinoise. L’objectif géopolitique, basé sur les principes de la diplomatie traditionnelle, est de parfaire, par le biais d’une normalisation des relations sino-américaines, l’encerclement de l’Union Soviétique, où la Chine de Mao jouerait le rôle de l’allié de revers. Après Nixon, avec Reagan, le mode d’approche  des présidences républicaines ne sera plus diplomatique et traditionnel, mais basé sur un schéma manichéen, de lutte contre l’ “empire du mal”, qui sera encore renforcé sous les deux Bush, au point de devenir franchement caricatural. Les démocrates seront, eux aussi, atteint par cette maladie idéologique consistant à mêler diplomatie et théologie. Si Nixon était encore un Républicain classique, ses successeurs feront reculer les acquis de la diplomatie traditionnelle, donc de la civilisation et du principe du 18ième siècle, cher à Carl Schmitt, de la “guerre de formes”. Les guerres ne sont donc plus de “formes”, et, par voie de conséquence, limitées dans leurs objectifs et finalités, mais idéologisées et absoluisées, donc sans mesure ni modération, car, dans cette optique, l’ennemi n’est plus un Etat qui défend ses intérêts légitimes, mais l’incarnation du mal absolu, qu’il convient d’éradiquer. De telles postures sont susceptibles de déclencher des conflits sans fin, où la personnalité de l’ennemi n’est plus respectée comme telle. Aujourd’hui, les néo-conservateurs, anciens trotskistes reconvertis, qui ont investi et perverti le parti républicain américain, se moquent ouvertement des principes de la diplomatie, qu’ils considèrent comme des vieilleries bonnes à jeter aux orties, comme des oripeaux désuets d’un passé révolu, dont relève la “Vieille Europe”, centrée autour du binôme franco-allemand. La normalisation des rapports sino-américains, amorcée par Nixon et Kissinger au début des années 70 du 20ième siècle, portera bel et bien un premier coup dur à l’Union Soviétique, déjà en perte de vitesse. Ce coup de maître de la diplomatie nixonienne et kissingerienne scindera aussi définitivement le camp communiste en deux partis antagonistes, inféodés l’un à Moscou, l’autre à Pékin. Cela aura pour résultat que le Vietnam obtiendra le soutien de Moscou, le Cambodge celui de la Chine; les deux petites puissances du Sud-Est asiatique s’affronteront dans un combat sanglant, scellant définitivement la fin de l’unité dans le camp communiste. Dans la mouvance identitaire, l’ancien général italien Guido Giannettini, limogé et réprouvé parce qu’il n’était pas un béni-oui-oui atlantiste, sera le seul à avoir posé, à l’heure et à temps et de façon cohérente, une analyse méticuleuse de cette problématique, exhortant les européistes traditionalistes à soutenir la Russie dans ce combat  planétaire. Le reste de la mouvance restant désespérément fidèle à un atlantisme délirant ou refusant, par myopie politique et désintérêt pour la marche du monde, d’analyser les clivages au sein des divers communismes (trotskistes pro-occidentaux, communistes fidèles à Moscou, maoïstes soudainement devenus pro-occidentaux, etc.). Si le mouvement identitaire barbote, empétré dans ses contradictions, et se retrouve à la traîne aujourd’hui, c’est faute d’avoir posé les bonnes analyses au début des années 70, dene pas avoir suivi les leçons du Général Giannettini.

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15 avril 1927 : Pierre-Georges Latécoère, l’avioneur français, vend 93% de ses actions de la CGEA à Marcel Bouilloux-Lafont de la SUDAM, afin de pouvoir disposer d’une couverture financière plus solide pour assurer les liaisons, coûteuses et difficiles à l’époque, entre l’Europe et le continent sud-américain. De la fusion de ces énergies naîtra la fameuse “Aéropostale”, où s’illustreront Mermoz et Saint-Exupéry. Le 15 octobre, deux aviateurs, Costes et Le Brix réussisent pour la première fois à traverser l’Atlantique Sud au départ du Sénégal, sur un Bréguet 19, un appareil produit par la concurrence de Latécoère. Leur destination était Natal au Brésil. La France comptait exploiter ses atouts géopolitiques dans la conquête des lignes aériennes; possédant le Sénégal, elle est la plus proche du continent sud-américain. Les lignes longent l’Afrique du Nord en quelques escales, puis s’élancent vers le Brésil. C’est la réponse à un défi américain: en effet, au nom du “désarmement naval”, les Etats-Unis et la Grande-Bretagne ont imposé à leurs alliés français et italiens de la première guerre mondiale, ainsi qu’aux Allemands vaincus, une réduction drastique du nombre de leurs bâtiments et de leur tonnage. Les Allemands  sont condamnés à  ne plus avoir de flotte.  Les Européens tentent donc de remplacer les navires par une technique nouvelle, l’aviation, et pour les Allemands en particulier et en plus, par les dirigeables. L’objectif est aussi de renforcer les liens entre l’Europe et l’Amérique ibérique. Mais ils n’unissent pas leurs efforts, se font concurrence, et, après 1945, seront supplantés par les avioneurs américains. Airbus est une seconde tentative pour redonner à l’Europe une industrie aéronautique digne de ce nom: heureusement, cette fois, dans un esprit de coopération.
 
17 avril 1897 : L’Empire ottoman déclare la guerre à la Grèce, qu’il accuse d’avoir favorisé l’agitation de patriotes grecs-crétois, voulant libérer leur île du joug turc. La Grèce est écrasée par les armées ottomanes. Le 4 décembre 1897, le traité de Constantinople accorde toutefois l’autonomie à la Crète, que garantissent les grandes puissances européennes, mais elle reste sous suzeraineté ottomane. La Grèce conserve l’intégralité de son territoire, mais doit payer une lourde indemnité. Ce traité montre qu’il n’y a pas eu de solidarité européenne en faveur de la Grèce, alors qu’il aurait simplement suffi d’élever la voix pour faire reculer un empire ottoman aux abois. La maîtrise des grandes îles de la Méditerranée orientale est un atout stratégique majeur. La Turquie a du mal à y renoncer. Le scénario s’est répété en 1974 à Chypre. Pour justifier leur débarquement et leur conquête de la partie septentrionale de Chypre, les Turcs ont également accusé le gouvernement des colonels grecs d’avoir soutenu des milices hostiles aux Turcs et favorables à l’annexion de Chypre à la Grèce (l’ “Enosis”). Pour le mouvement identitaire, c’est une question de principe intangible: Chypre doit redevenir entièrement grecque.
 
18 avril 1912 : La marine italienne pénètre dans les Dardanelles et y bombarde des positions turques. A la suite de cette attaque surprise, dans le cadre de la guerre italo-ottomane dont l’enjeu premier était la Libye, les Turcs font fermer les Détroits. La guerre avait commencé en octobre 1911, par la volonté italienne de chasser toute présence turque hors de l’Adriatique, une menace ancienne, qui date du 15ième siècle. Ensuite, pour dégager les côtes africaines qui font face à la péninsule italique, l’armée de terre italienne envahit la Libye et en chasse les Turcs. Benito Mussolini est emprisonné pour avoir organisé des protestations violentes contre la conquête colonialiste de la Libye. En prison, il lira Nietzsche et abandonnera son socialisme eudémoniste, pour adopter l’idéologie plus belliciste et plus volontariste qui sera la sienne et donnera ultérieurement le fascisme. L’armée italienne, bien organisée, utilise de manière coordonnée et efficace sa marine, son aviation (avant toutes les autres puissances), ses fusiliers marins et son armée de terre. En février 1912, la marine italienne avait coulé deux contre-torpilleurs turcs dans le port de Beyrouth et bombardé la ville. Les troupes italiennes avaient débarqué dans les Iles du Dodécanèse en Mer Egée et en avaient fait des possessions italiennes, excellentes bases en Méditerranée orientale. Le 15 octobre 1912, la Turquie signe le Traité d’Ouchy (une petite ville suisse près de Lausanne), cède les Iles du Dodécanèse et la Libye aux Italiens. Au même moment, les petites nations balkaniques, avec l’appui de la Russie, déclenchent une guerre commune contre la présence ottomane résiduaire en Europe: Monténégrins, Serbes, Bulgares et Grecs pénètrent dans les territoires européens encore occupés par la Turquie et en chassent les armées ottomanes, qui s’enfuient en déroute, précédées par des flots de civils musulmans, autant de bourreaux détalant devant leurs victimes, qu’ils avaient oppressées pendant de longs siècles. L’armée bulgare campe même sur les rivages de la Mer de Marmara et menace directement Constantinople. Cet épisode montre que la solidarité entre Européens, quand ils mènent des actions communes, est invincible. Les victoires de 1912 seront toutefois réduites à néant par la zizanie entre pays balkaniques, qui déclenchera une seconde guerre des Balkans en 1913, une guerre fratricide entre Européens.
 
19 avril 1928 : Des troupes japonaises entrent en Chine pour prendre le contrôle de la ligne de chemin de fer de Pékin à Changhaï. C’est le début d’une volonté japonaise de mettre un terme à l’anarchie totale qui régnait en Chine, où les troupes du Kuo Min-Tang de Tchang Kaï-Tchek avaient noyé  dans le sang une révolte communiste à Changhaï en avril 1927, et à amorcer ainsi le projet impérial de “sphère de co-prospérité est-asiatique”. Cette volonté se heurte aux vieux projets américains de conquérir et de se réserver le marché chinois en toute exclusivité. Le débarquement de 1928 conduira au conflit nippo-américain de 1941 à 1945. A l’occasion de ce débarquement de 5000 soldats nippons, les Etats-Unis mettront au point un arsenal juridique fallacieux, dont ils ont le secret, pour exciter l’opinion internationale contre l’Empire du Soleil Levant. Derrière un paravent de beaux principes de droit, se dissimule en réalité la volonté de bloquer et de ruiner un adversaire et de prendre sa place. Cette méthode de manipulation du droit sera par la suite appliquée à d’autres, jusqu’à nos jours, où elle sert contre l’Irak et l’Iran. Carl Schmitt, juriste allemand, dénoncera l’inanité de ce droit, en démontera les  mécanismes et l’hypocrisie.  L’Europe n’a pas retenu sa leçon...
 
20 avril 1792 : Sous la pression des Girondins, l’Assemblée républicaine française déclare la guerre “au Roi de Bohème et de Hongrie”, autrement dit au Saint-Empire, l’Empereur étant simultanément roi de Bohème et roi de Hongrie. La première cible des hordes de sans-culottes sera notre pays, et plus particulièrement Anvers et la rive occidentale du Rhin.  Notre pays était directement, à l’époque dite “autrichienne”, sous la souveraineté de l’Empereur. Les puissances légitimes d’Europe centrale rassemblent leurs troupes et les Prussiens, mieux aguerris, reprennent les places fortes lorraines de Longwy et de Verdun, mais seront arrêtés à Valmy le 20 septembre. La retraite prussienne change le cours de la guerre: les sans-culottes marchent sur Mons et remportent la victoire de Jemmapes, le 6 novembre. La garnison hennuyère, dont le fer de lance est le Régiment du Feld-Marschall de Beaulieu n’est pas assez nombreuse pour contenir les centaines de milliers de baïonnettes, que l’on a recrutées de force dans les bas-fonds de Paris. Le pays est livré au pillage et les ancêtres idéologiques de notre crapulocratie politique socialiste et libérale participent à la curée, inaugurant une ère d’illégitimité fondamentale qui dure encore. L’année suivante, le retour de l’armée impériale, commandée par deux maréchaux impériaux wallons, un Hennuyer et un Namurois, de Beaulieu et de Clerfayt, emporte quelques victoires, libère une partie de la Flandre et du Hainaut arrachés aux Pays-Bas hispano-autrichiens par le “Roi-bandit” Louis XIV, mais, dès septembre 1793, les révolutionnaires, grâce à la pratique de la levée en masse, qui leur donne toujours une longueur d’avance face à des armées de métier au recrutement plus laborieux, finissent par battre la coalition à Hondschoote, en Flandre occupée, et à redresser la situation en leur faveur. Clausewitz, qui était à Valmy comme cadet à l’âge de douze ans, en tirera les conclusions et plaidera plus tard pour la levée en masse et la participation du peuple aux armées, dans ses mémoranda qui conduiront aux réformes prussiennes des années 1806-1815. Les “réformes prussiennes” visaient à moderniser la structure de l’Etat et de l’armée et surtout à les ouvrir aux classes populaires. Elles ont une connotation “nationale-révolutionnaire” évidente.
 
21 avril 1927 : En Italie, Mussolini promulgue la “Charte du Travail”, faisant de l’Italie fasciste un “Etat corporatiste”. Les industriels créatifs sont protégés contre tout débordement ouvrier (en fait: contre tout risque de grèves manipulées depuis  l’étranger pour briser un élan innovateur national), les ouvriers, en revanche, reçoivent la garantie d’une protection sociale généralisée. Mais les industriels doivent obéir aux injonctions de l’Etat, qui coordonne ainsi le développement de l’industrie nationale. Cette Charte est proclamée dans un contexte international houleux. L’Italie venait de s’allier à la Hongrie de Horthy, de lui livrer des armes, ruinant ainsi les projets perfides de la France de créer un vide politique au centre de notre continent, au nom d’une haine viscérale à l’endroit de la légitimité continentale que représentait, avant 1918, l’Autriche-Hongrie. Par cette alliance avec la Hongrie, réduite et enclavée, Mussolini réduit à néant les manigances de Poincaré et Clemenceau; il réarme Budapest et fragilise les satellites de la France dans la région. En Libye, les Anglais ont soudoyé les Senoussistes de l’est du pays pour créer des  manoeuvres de diversion et éloigner les Italiens d’Egypte: les généraux Graziani et Mezzeti mettent tous les moyens militaires en oeuvre pour mater cette rébellion d’intégristes musulmans se réclamant du wahhabitisme saoudien (l’alliance entre le wahhabitisme intégriste et les puissances anglo-saxonnes ne date pas d’hier...). Churchill, pourtant, lance un appel à Mussolini, pour tenter d’en faire un allié en Méditerranée. Cependant, Mussolini recule devant les protestations françaises à l’endroit de sa politique hongroise. Il refuse, épouvanté, les propositions du Comte Bethlen, ministre hongrois, qui souhaite forger un bloc  italo-germano-austro-hongrois, sanctionnant de facto l’Anschluss, pour réduire à néant les effets du Traité de Versailles. Julius Evola était partisan, lui, de ce bloc traditionnel, opposé à l’Ouest, au jacobinisme français et à la ploutocratie anglaise. Notons que les propositions de Bethlen ont été formulées bien avant l’avènement de Hitler au pouvoir, quand l’Allemagne était sociale-démocrate. Les nécessités géopolitiques transcendent les clivages idéologiques.
 
22 avril 1836 : Défaite mexicaine à San Jacinto au Texas. Le président du Mexique, Santa Anna, est pris prisonnier par des soldats texans commandés par Samuel Houston. Les hostilités avaient commencé en novembre 1835, quand les colons américains refusèrent d’abolir l’esclavage et le fédéralisme qui donnait une certaine autonomie au Texas. Le leader des Texans était Stephen Austin. L’objectif était de contrôler un maximum de côtes du Golfe du Mexique au bénéfice des Etats-Unis, puissance émergeante.  Cependant le Congrès refusera en août 1837 d’entériner l’admission de la nouvelle république dissidente du Texas au sein de l’Union, car ce Texas est constitutionnellement esclavagiste. Il faudra attendre le 28 mars 1845 pour que le Texas soit accepté dans l’Union, entraînant la rupture des relations diplomatiques entre les deux Etats. Le 13 mai 1846, à la suite d’un incident de frontière, les troupes américaines pénètrent sur le sol mexicain. En janvier 1847, la Californie est entièrement occupée. Les troupes américaines, commandée par Zachary Taylor débarquent à Veracruz. Le 20 septembre 1850, la Californie sera admise dans l’Union comme “Etat libre” (non esclavagiste), tandis que le Nouveau-Mexique et l’Utah le seront également, mais, eux, comme esclavagistes. On mesure toute l’hypocrisie de l’anti-esclavagisme de Washington, qui est, on le remarque, à la lumière de ces faits historiques, un “anti-esclavagisme à géométrie variable”, comme il y aura, plus tard, du “démocratisme” ou du “droit-de-l’hommisme” à géométrie variable. L’objectif  stratégique réel de la guerre contre le Mexique était de créer un Etat bi-océanique, de l’Atlantique au Pacifique, de lui donner une dimension continentale et donc, à terme, un statut de grande puissance globale. La conclusion du Traité de Washington du 15 juin 1846, entre les Etats-Unis et la Grande-Bretagne, fixe la frontière entre le Canada, possession britannique, et les Etats-Unis, au 49ième parallèle, assurant ainsi la domination américaine sur les territoires qui formeront les futurs Etats de Washington et de l’Oregon, riverains du Pacifique. L’élmination de la présence mexicaine du Texas à la côte californienne est donc l’étape suivante dans ce projet “bi-océanique”.
 
23 avril 1925 : Les troupes berbères rifaines d’Abd-el-Krim pénètrent dans le territoire marocain sous protectorat français. C’est le début de la guerre du Rif. Le conflit, qui avait commencé contre les Espagnols en 1921, durera, après l’invasion du protectorat, un an. Au bout de cette année, les insurgés berbères seront battus par une armée franco-espagnole de 250.000 hommes, commandée par le Maréchal Pétain. Abd-el-Krim est contraint de signer une capitulation inconditionnelle le 26 mai 1926. Issu de la tribu berbère du Rif, les Banu Uriaghel, Abd el-Krim avait reçu une éducation espagnole de haut niveau, était secrétaire au Bureau espagnol des affaires indigènes, puis juge musulman du district de Melilla. Insatisfait de la gestion par Madrid du Maroc septentrional, il soulèvera le Rif contre les dominations espagnole et française dès 1921, battant les troupes du Général espagnol Fernandez-Silvestre. En franchissant la frontière du protectorat français, il marche sur Fez/Fès, mais les troupes de Pétain s’emparent de la vallée de Wargha, d’où provenaient son approvisionnement et ses munitions. C’est la fin de l’insurrection. Il connaîtra l’exil à l’Ile de la Réunion, puis, à partir de 1947, en Egypte, où il dirigera le “Bureau maghrébin” en charge d’organiser la libération des pays d’Afrique du Nord-Ouest. Il meurt le 6 février 1963 au Caire. L’action d’Abd el-Krim est paradigmatique d’une guerre de libération menée par des partisans, enracinés dans leur sol. Il sera en cela l’inspirateur de Ho Chi Minh et de Giap, dans leur lutte pour la libération de l’Indochine contre les Français d’abord, contre les Américains ensuite.
 
24 avril 1877 : A la suite de répressions féroces perpétrées par la soldatesque turque en Bosnie-Herzégovine, après les interventions à l’issue malheureuse des Serbes et des Monténégrins en faveur des Bosniaques insurgés, les Russes, lassés de tant de violences à l’encontre des peuples slaves et orthodoxes, se décident à déclarer la guerre à l’Empire ottoman. Fortes contre des paysans faiblement armés, les hordes ottomanes ne font pas le poids devant les armées russes qui les écrasent sans pitié. Les malheureux peuples des Balkans sont vengés de la sauvagerie ottomane. Les Russes attaquent également dans le Caucase, libérant encore quelques portions du territoire caucasien de la présence turque. Le 9 mai 1877, les Roumains se déclarent indépendants, mobilisent leurs troupes et se joignent aux Russes et aux Serbes dans l’espoir de chasser définitivement la présence étrangère du sol européen. Les Anglais interviennent aux côtés des Turcs, comme en Crimée une vingtaine d’années auparavant. En échange de leur appui, ils exigent du Sultan qu’il leur abandonne Chypre. Le 3 mars 1878, le traité de San Stefano règle les nouvelles frontières dans les Balkans, mais sera révisé par le traité de Berlin du 13 juillet 1878, où l’Angleterre protège systématiquement les Ottomans, en voulant éviter la satellisation par la Russie de quelques puissances balkaniques, surtout la Bulgarie, ce qui lui donnerait un débouché sur l’Egée, donc sur le bassin oriental de la Méditerranée, que les Britanniques estiment être leur chasse gardée.
 
26 avril 1828 : Le Sultan turc déclare la guerre à la Russie. Les Grecs se soulèvent contre l’oppresseur, dans l’espoir de voir débouler les troupes du Tsar sur les rives de l’Egée. Le 11 octobre 1828, les Russes infligent aux Turcs une cuisante défaite à Varna en Bulgarie. Le 20 août 1829, ils prennent Andrinople (Edirne). Le Sultan doit signer la paix dans cette ville, le 14 septembre 1829: les Russes obtiennent le libre passage de leurs navires de commerce dans les Détroits; ils contrôlent désormais les bouches du Danube. Le Traité oblige les Turcs à accorder l’autonomie aux peuples balkaniques, soit à la Serbie, à la Moldavie et à la Valachie. La Grèce reste vassalle de l’Empire ottoman, en théorie, mais réussit à obtenir son indépendance, garantie par la France, la Grande-Bretagne et la Russie (protocole de Londres, 3 février 1830). Les armées russes ont permis une première libération (incomplète) des Balkans du joug étranger, extra-européen, qui pesait sur eux depuis la victoire des Ottomans au Champs des Merles (Kosovo) en 1389. Mais la Grande-Bretagne, obligée de composer en 1829-1830, voit d’un mauvais oeil cette avancée russe et slave en direction de la Méditerranée orientale. Elle reconnaît le fait accompli mais travaillera désormais à la ruine de la Russie dans la région. Les victoires russes contre l’ennemi héréditaire de l’Europe jetteront les bases d’un conflit ultérieur, la Guerre de Crimée, où la Russie perdra certains des atouts gagnés lors du Traité d’Andrinople de 1829. Londres ne cessera plus de soutenir l’Empire ottoman en pleine liquéfaction.
 
27 avril 1463 : Mort à Rome d'Isidore de Kiev, qui fut patriarche grec-orthodoxe en Russie, puis cardinal à Rome. Il a tenté de réunir les églises chrétiennes de l'Est et de l'Ouest devant la menace turque. L'Empereur byzantin Jean VIII Paléologue l'envoie en 1434 au Concile de Bâle, pour parfaire la réunification des églises. Byzance le nomme Patriarche de Kiev et de toutes les Russies. Après de nombreux avatars, il rédige, avec le Cardinal grec Jean Bessarion, le document de l'unification, proclamée le 5 juillet 1439, ce qui lui permet de devenir en même temps “Cardinal de Ruthénie” (= Ukraine). Kiev est donc “unie”, mais Moscou refuse la teneur du document d'unification. Le Pape Nicolas V renvoie Isidore à Constantinople en 1452. Il participe activement à la défense de la ville contre les Turcs; au cours du siège, il annonce aux Byzantins l'unification des deux églises au cours d'un prêche dans Sainte-Sophie, ce qui sied à la Cour et à la hiérarchie mais non au peuple, qui continue à proclamer sa haine de la papauté romaine. Isidore de Kiev et ses hommes prennent alors les armes et montent au créneau pour défendre la ville. Isidore y sera blessé, mais parviendra à fuir, vers la Crète d'abord, avant de rentrer à Rome en 1454, où il rédige un récit poignant de la chute de Constantinople, Epistula lugubris. Le Pape Pie II le nomme, à titre honorifique, “Patriarche Grec de Constantinople”.
 
27 avril 1959 : Décès à Talahassee en Floride du sociologue américain, professeur à la Columbia University et à l'Université de Chicago, William Fielding Ogburn, qui a forgé le concept de “cultural lag” (de sédiment culturel). Statisticien de premier ordre, il travaillera pendant de nombreuses années, au titre de directeur de recherches, auprès d'un institut fondé par le Président Herbert Hoover, chargé d'étudier les “tendances” (“trends”) de la société américaine. Pour Ogburn, les sociétés évoluent quand elles réussissent à combiner des éléments culturels déjà présents d'une manière nouvelle et originale. Cependant, les “sédiments culturels” ont la vie dure : ils résistent systématiquement à l'innovation, notamment sur le plan du droit. Les sédiments freinent l'avènement des novismes de tous ordres. Généralement, les sédiments culturels sont présents dans l'esprit des peuples de façon inconsciente, mais quand une innovation les menace, ils peuvent venir à la conscience de manière très aiguë, générer des désordres et faire courir le risque de la désintégration sociale. La sociologie d'Ogburn nous invite à innover sans toucher aux fondements quasi ontologiques d'une société, à adapter le rythme des changements nécessaires ou induits par la technique, afin de ne pas provoquer des désordres dangereux sur le moyen ou le long terme. Ogburn peut nous aider à combattre les prophètes anarchiques et délirants qui veulent à tout prix jeter aux orties les fondements anthropologiques de base de nos sociétés. On ne peut se débarrasser impunément des “cultural lags”. La folie de vouloir “intégrer”, de manière absoluisée et irréfléchie, des ressortissants de cultures possédant d'autres sédiments culturels conduit à la dislocation des sédiments autochtones et donc à l'implosion de la société, car ces sédiments ne sont pas des matières neutres, à la disposition des virtuoses de l'“ingénierie sociale”.

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jeudi, 29 mars 2012

Affamer les vaincus

Dag KRIENEN:

Affamer les vaincus: le sort des prisonniers de guerre allemands de l’US Army après le 8 mai 1945

 

Dix pourcents seulement des 3,8 millions de soldats allemands pris prisonniers par les Américains pendant la seconde guerre mondiale ont été embarqués sur des navires à destination des Etats-Unis, où ils ont été plus ou moins traités jusqu’en mai 1945 selon les règles régies par le droit des gens. 3,4 millions de prisonniers issus des rangs de la Wehrmacht ont toutefois subi d’autres formes de détention.

 

Dès la fin de l’été 1944, après le débarquement en Normandie, que les Allemands appellent l’ “invasion”, les autorités militaires américaines créent des “camps de transit” (“Durchgangslager”) partout en Europe occidentale, où les prisonniers de guerre sont “internés provisoirement” et triés, où seuls ceux auxquels on ne pouvait imposer un travail étaient transportés en direction des Etats-Unis. Il y régnait des conditions misérables. Les prisonniers recevaient un minimum de soins et devaient généralement dormir à même le sol. Leur sort s’améliorait considérablement toutefois dès qu’on les embrigadait dans les “US-Labour Service Units” (= “les Unités du Service américain du travail”), qui devaient prester toutes sortes de services dans les bases arrière de l’armée américaine.

 

Pour ceux qui seront pris prisonniers et détenus ultérieurement sur le sol allemand, la même règle générale était de rigueur: seuls ceux qui acceptaient de travailler pour les Américains recevaient des soins corrects et étaient hébergés dans de bonnes conditions. Mais peu de détenus, sur les trois millions qui végétaient dans ces camps de “prisonniers de la capitulation”, ont pu “bénéficier” de ce privilège. Ils s’étaient rendus au cours des dernières phases de la guerre, en faisant confiance à la propagande américaine qui leur promettait un traitement conforme à la convention de Genève, ou ils avaient été ramassés et rassemblés par des unités américaines dès que les hostilités avaient cessé.

 

Pratiquement aucun de ces hommes n’a reçu un traitement correct. Les Américains ont délibérément enfreint les règles du droit des gens: ils justifient aujourd’hui leurs actes en arguant que les denrées alimentaires manquaient partout en Europe en 1945. Dans les états-majors américains, où étaient prises les directives principales quant au traitement des prisonniers de guerre, le manque de vivres n’a pas vraiment joué de rôle déterminant, au contraire de l’intention bien prononcée de punir de manière drastique l’ensemble des soldats allemands captifs.

 

L’essayiste allemand contemporainThorsten Hinz, dans son ouvrage récent consacré à la “psychologie de la défaite”, a démontré que les Allemands se sont tous retrouvés en 1945 dans un immense et unique “camp de rééducation”, étendu à tout le territoire de l’ancien Reich. Ce fut le premier pas sur le chemin de la “rééducation démocratique”: il consistait à montrer aux Allemands qu’ils étaient entièrement sous la coupe du bon vouloir de leurs vainqueurs, de façon à briser définitivement toute volonté d’affirmation nationale et collective. La directive JCS-1067 des autorités d’occupation américaines visait à imposer une grande et rude leçon générale d’humilité, en imposant “famine et froid” à tous ceux qui étaient tombés en leur pouvoir. Le futur gouverneur militaire américain en Allemagne, Lucius D. Clay, a certes bien dit et écrit que cette politique de “famine et de froid”, à propos de laquelle le consensus régnait dans les cercles gouvernementaux américains en 1945, ne devait pas conduire à la mort par famine et par froid de la masse du peuple allemand. Mais de cette déclaration de Clay, il ressort toutefois bel et bien que la distribution de vivres, certes devenus rares, aux prisonniers de guerre allemands étaient la dernière des priorités pour les Américains.

 

Pour le sort des prisonniers pris au moment de la capitulation, cette insouciance a eu des conséquences fatales. Dans ce contexte, cela n’a plus guère d’importance de rappeler que le commandant-en-chef des forces américaines en Europe, le Général Eisenhower, ait donné l’ordre le 4 mai 1945 de traiter tous les nouveaux prisonniers de guerre allemands comme des “Disarmed Enemy Forces” (DEF), de façon à ce qu’ils ne tombent plus sous la protection de la convention de Genève. Par ce tour de passe-passe, les Américains se débarrassaient de l’obligation de loger, d’alimenter et de soigner médicalement ces DEF et la confiaient aux Allemands. Toutefois, indépendamment de leur statut, tous les prisonniers rassemblés ont été, dans un premier temps, concentrés dans des “camps de transit” improvisés: on se souviendra surtout des abominables “Rheinwiesenlager” (= des “camps-prairies” de Rhénanie). On a maintes fois décrit les conditions affreuses qui régnaient dans ces “camps-prairies”: nous n’en donnerons qu’un bref résumé dans le présent article. Concentrer ainsi des centaines de milliers d’hommes, après les avoir “filtrés” et dépouillé de toutes leurs affaires personnelles, et puis les laisser à eux-mêmes, enfermés dans des camps gigantesques pendant des semaines, où se bousculaient parfois près de 100.000 captifs, répartis dans des “cages” séparées de 5000 à 15.000 soldats, sans qu’il n’existe la moindre infrastructure; vivre les uns sur les autres sans un toit au-dessus de la tête, à même le sol d’un champ, sans installations hygiéniques ou seulement avec des installations improvisées, sans soins médicaux, sans nourriture ou avec seulement une nourriture insuffisante pendant les premiers jours, avec les mauvais traitements infligés par les gardiens et par les plus corrompus des prisonniers hissés au rang de “police du camp” sont autant de manquements qui ont conduit à des souffrances indicibles et à la mort d’innombrables prisonniers.

 

On ne peut par dire a posteriori que toutes ces souffrances ont été planifiées volontairement dans tous leurs détails mais la terrible expérience subie par ces millions d’hommes, où le prisonnier perd toute dignité et tout sens de la solidarité à cause de la faim et de la misère, fut bel et bien le lot de tous les porteurs d’uniforme allemands pris par les Américains en 1945. La lutte constante pour recevoir une nourriture chiche dans les “cages”, a poussé jusqu’à l’absurde les vieux idéaux de la discipline militaire et de la camaraderie entre soldats. Tout cela cadre bien avec la première “thérapie de choc”, qui allait être suivie par la politique plus vaste de “rééducation”.

 

Après avoir infligé aux prisonniers de guerre allemands cette épouvantable leçon, les Etats-Unis n’avaient aucun intérêt à les retenir captifs indéfiniment. Après que les Américains aient sélectionné quelque 300.000 hommes pour leurs “Labour Service Units”, ils ont commencé à libérer les autres. A partir de juin 1945, ils ont libéré les plus vieux et les plus jeunes (surtout les très jeunes) puis ceux qui avaient un métier important pour l’économie du ravitaillement; à partir d’août, ce fut le tour de la grande masse des prisonniers. Les Allemands concentrés pêle-mêle dans ces “camps de transit” sans être correctement enregistrés, devaient êtretriés et répartis éventuellement dans d’autres lieux de détention; pour ces malchanceux, la captivité a duré encore plus longtemps.

 

D’autres encore subirent des épreuves complémentaires: ils ont été accusés de crimes de guerre ou retenus comme témoins de tels crimes, et donc leur détention a été prolongée; enfin, une masse importante a été transférée dans les pays alliés pour y forunir une main-d’oeuvre forcée. Au début de l’année 1946, il y avait encore en Europe un million de prisonniers de guerre allemands détenus officiellement par les Américains (dont une bonne partie en France et en Italie). Au début de l’année 1947, il n’y en avait plus que 40.000.

 

Les conditions de vie de ces prisonniers, dans les camps gérés par l’armée américaine sur le sol allemand, étaient contraires au droit des gens, dans la mesure où les délégués de la Croix Rouge internationale avaient reçu expressément l’interdiction de les visiter. Ces conditions se sont améliorées à partir de juillet 1945. Les “camps de transit” ont été démantelés les uns après les autres ou transformés en camps de prisonniers plus ou moins normaux. Dans les camps résiduaires, l’hygiène s’est progressivement améliorée, de même que les soins médicaux et le logement. L’alimentation des prisonniers étaient encore mesurée chichement mais devenait plus régulière. Comparé au sort de leurs homologues retenus prisonniers aux Etats-Unis, celui des prisonniers allemands en Europe restait misérable à la fin de l’année 1945 mais moins mortel, potentiellement, qu’au début de l’été.

 

En mai et en juin 1945, les “camps-prairies” de Rhénanie et les autres camps de prisonniers organisés par l’armée américaine en Allemagne, avec une nourriture totalement insuffisante, des conditions d’hygiène déplorables, l’obligation de dormir à la belle étoile ou dans des trous de terre creusés par les prisonniers eux-mêmes, l’exposition aux pluies incessantes et à la boue qui en résultait, ont entraîné la mort d’innombrables malheureux. L’adjectif “innombrable” est bien celui qui sied ici car nous ne possédons toujours pas de chiffre fiable quant aux nombre de décès qu’a entraînés l’administration pleinement consciente de cette “leçon de famine et de froid”. Cela explique le choc qu’a provoqué la parution en 1989 du livre du journaliste canadien James Bacque, consacré aux prisonniers de guerre allemands dans les camps américains et français en 1945 et 1946; Bacque avance le chiffre d’un million de morts dans les camps américains.

 

Dag KRIENEN.

(article paru dans “Junge Freiheit”, Berlin, n°49/2010; trad. franç.: mars 2012; http://www.jungefreiheit.de/ ).

mercredi, 28 mars 2012

Gérard Romsée: mythe et réalité

Edwin TRUYENS:

Gérard Romsée: mythe et réalité

 

Recension: Evrard RASKIN, Gerard Romsée. Een ongewone man, en ongewoon leven, Hadewijch, Antwerpen-Baarn, 1995, 449 pages.

 

Gérard Romsée est né à Guigoven, dans la province du Limbourg, le 11 octobre 1901, fils de Joseph Romsée (1872-1933) et de Louise Boogaerts (1869-1928). Trois ans auparavant, un frère, Paul, était né dans le même foyer. Gérard Romsée descendait, par son grand-père paternel, d’une famille wallonne. Son père s’était inscrit au barreau des avocats mais n’e plaida que rarement. Il bénéficiait de riches émoluments comme intendant et, de plus, ses propres biens lui procuraient des revenus substantiels. La langue du foyer familial était le français.

 

A partir de septembre 1914, le jeune Gérard suit le curriculum des humanités gréco-latines au Collège Notre-Dame de Tongres, études suivies en grande partie en français. Lorsqu’éclate la guerre, il se révèle patriote passionné. Il est radicalement anti-allemand et s’oppose à l’activisme flamand. En 1916, il fonde une sorte de société secrète, la “Main Noire” (= “De Zwarte Hand”), dont les membres jurent de se porter volontaires dans l’armée belge dès l’âge de dix-huit ans, en passant par les Pays-bas pour rejoindre le front de l’Yser. En 1917, toutefois, Romsée se rend compte que le Mouvement Flamand défend pour l’essentiel une cause fondamentalement juste. C’est l’affaire Paul Vandermeulen qui a provoqué ce déclic. Cet aumônier limbourgeois aux armées plaidait la cause des soldats flamands sur le front de l’Yser. Il réagissait contre le fait que le corps des officiers était constitué, quasi intégralement, de francophones et que les soldats flamands étaient commandés exclusivement en français. Et lorsque Paul Vandermeulen, plus tard, se prononça en faveur d’une flamandisation de l’Université de Gand, l’armée lui infligea une sanction disciplinaire. On l’exila alors dans l’île française de Cézembre où l’armée belge avait organisé un camp pénitentiaire. Ces faits furent rapidement connus à l’arrière, y compris dans le Limbourg occupé: la jeunesse des collèges catholiques réagit avec fureur. Outre l’affaire Vandermeulen, il faut aussi mentionner l’influence patente du prêtre Eugeen Froidmont (1891-1957) qui fit évoluer Romsée du patriotisme belge à la cause flamande.

 

A l’automne de l’année 1920, Romsée s’inscrit à l’Université Catholique de Louvain. Il y étudie le droit et la philosophie thomiste. Il s’engage également dans les rangs de l’association catholique étudiante KVHV et dans l’association Saint Thomas. Dès l’année académique 1921-1922, le mouvement étudiant flamand se radicalise. Les 12, 13 et 14 avril 1924, ils organisent à Louvain le 19ème Congrès des Etudiants Grand-Néerlandais (“Grootnederlands Studentenkongres”). Ce congrès est ponctué de plusieurs bagarres; au cours de l’une d’entre elles l’étudiant wallon Gaby Colbacq tire trois coups de pistolet sur le Flamand Albert Vallaeys. Celui-ci survit mais les Flamands réagissent avec davantage de vigueur. A la suite de ces incidents, les autorités académiques interdisent le 3 mai 1924 toute activité future. Le KVHV n’a pas l’intention d’obéir à cette injonction. On avance la date des élections du praesidium. Paul Beeckman est élu nouveau président (praeses) et écrit aussitôt une lettre aux autorités académiques qui laisse bien entendre que le KVHV ne tiendra pas compte de la mesure prise par celles-ci. Beeckman est chassé de l’université. Romsée, qui avait été élu vice-président, prend la direction de l’association. Le débat avec les autorités académiques se poursuit mais, finalement, Romsée et Tony Herbert sont à leur tour chassés de l’université. Pour Romsée, c’est très grave: en représailles, son père lui interdit de pénétrer encore dans le foyer parental.

 

Comme Romsée ne peut plus étudier à l’université, il ne pourra pas devenir docteur en philosophie thomiste, car il s’agit là d’un diplôme scientifique. Mais il poursuit ses études de droit en toute indépendance et obtient son doctorat dès le 11 août 1926. Il s’installe comme avocat à Anvers. Quelque temps après, il se réconcilie avec son père et, peu après cette réconciliation, sa mère décède.

 

La 26 mai 1929, Romsée est élu député sur une liste du KVV (“Katolieke Vlaamse Volkspartij”; = “Parti Populaire Catholique Flamand”). Il est co-signataire du projet fédéral d’Herman Vos le 23 avril 1931. Le 10 décembre 1933, le KVV du Limbourg décide de s’adjoindre au VNV nationaliste. Le VNV pouvait alors être considéré comme l’organisation politique qui apportait l’unité parmi les formations nationalistes éparpillées. Mais cette unité demeurait fort fragile. A l’intérieur du VNV, on constatait une opposition assez tranchée, notamment entre Reimond Tollenaere, très radical, et Gérard Romsée, considéré comme “modéré”. Lorsque Tollenaire revient en 1940, après avoir été déporté dans le sud de la France en “train fantôme”, il exige que Romsée soit démis de ses fonctions au sein du “Conseil de Direction” du VNV (“Raad van Leiding”).

 

Pendant la seconde guerre mondiale, Romsée devient d’abord gouverneur du Limbourg, ensuite secrétaire-général pour les affaires intérieures en date du 31 mars 1941. L’Administration militaire allemande (“Militärverwaltung”) exige cependant que Romsée soit nommé secrétaire-général de la justice. Le Comité des secrétaires généraux ne veut pas satisfaire cette exigence allemande parce que Romsée n’a pas la confiance de la magistrature. En tant que secrétaire général, il s’efforce d’assurer le bon fonctionnement de l’administration. Il est toutefois isolé dans le comité des secrétaires généraux. Au sein de ce groupe, le VNV ne compte qu’un seul membre outre Romsée, en l’occurence Victor Leemans. Celui-ci manifeste aussi une nette indépendance d’esprit et n’apporte pas toujours son soutien à Romsée. On ne peut pas affirmer que Romsée soit un instrument des Allemands, dépourvu de toute volonté personnelle. Il se montre certes prêt à aller un peu plus loin dans la mise en oeuvre des ordonnances allemandes que ses collègues et la Militärverwaltung est très satisfaite de ses services. Le 6 février 1943, Romsée nomme Emiel Van Coppenolle commandant-en-chef de la gendarmerie.

 

A la fin de la guerre, Romsée fuit le pays. Il ne craint pas seulement la répression et sait aussi que Rex le vise car il s’est toujours montré réticent à nommer des rexistes à des postes importants. Son frère Paul est fusillé le 9 septembre 1944 par des membres du groupe “Partisans Armés”. Le 5 mai 1945, Romsée est à nouveau en Belgique et se constitue prisonnier. Il est jugé par l’Auditorat militaire de Bruxelles le 17 février 1947 et par le Conseil de Guerre le 27 mai 1948. La Cour le condamne à vingt ans de prison et à dix millions de francs de dommages et intérêts à l’Etat.

 

Romsée est libéré le 23 mars 1951. Il participe à la constitution du “Vlaamse Volksbeweging” en 1953 (= “Mouvement Populaire Flamand”), participe à quelques réunions mais se retire complètement de la politique en 1956. Il épouse sa nièce, Paule Romsée, le 18 mai 1955. Le mariage religieux est béni le 23 mai 1955. Il meurt le 14 avril 1976.

 

Cette brève notice biographique, qui se réduit à l’essentiel, induira plus d’un lecteur à se poser la question: cette biographie est-elle si intéressante qu’il a fallu lui consacrer tout un livre? Oui, car pour bien connaître l’histoire du nationalisme flamand pendant l’entre-deux-guerres et pendant la seconde guerre mondiale, il fallait absolument une étude scientifique sur Romsée. Pendant la seconde guerre mondiale, Romsée a entretenu des contacts jusqu’en juin 1943 avec la Cour, plus précisément avec Robert Capelle, secrétaire de Léopold III, qui ne condamnait pas la gestion de Romsée. Après sa  sortie de prison, Romsée ne s’est guère tu quant à ses activités du temps de guerre mais n’a jamais dit qui était sa personne de contact au Palais. En gardant le silence, il a, sans le vouloir, contribué à la naissance d’un mythe. Quoi qu’il en soit, c’est un fait évident: Romsée fut l’un des rares nationalistes qui, pendant une brève période, s’est retrouvé au coeur du pouvoir en Belgique. Ce membre du VNV du Limbourg était déjà accepté dans les salons avant la guerre.

 

Romsée n’a pas seulement été une figure importante du nationalisme flamand, il était aussi un personnage étonnant. Sa personnalité était très renfermée; manifestement, il avait des difficultés à nouer des relations affectives normales. Il était profondément croyant et a souvent cultivé l’idée de devenir prêtre ou de se retirer dans un couvent. Il avait un grand sens du devoir et une incroyable capacité de travail. Il était un homme raisonnable et érudit. On lui accorde encore et toujours la réputation d’avoir appartenu à l’aile démocratique du VNV, bien qu’un examen plus précis de la question permet de déduire que rien ne le confirme vraiment. On le compte parmi les modérés mais était problablement plus radical qu’il n’en donnait l’impression. On estime aussi qu’il appartenait à l’aile fédéraliste du VNV mais semble plutôt avoir été un “Grand-Néerlandais” convaincu. Evrard Raskin cite notamment un article de Romsée paru dans “De Bilzenaar”, le 18 août 1934: “On peut se représenter la Grande Néerlande comme un Etat fédéral des Flamands et des Néerlandais. Si un tel fédéralisme avec la Hollande se réalisait par la volonté exclusive du peuple flamand, alors ce fédéralisme pourrait être plus facilement mis en place que tout fédéralisme avec la Wallonie et il faudrait lui donner la préférence. Car les Flamands et les Hollandais forment ensemble la même communauté populaire et culturelle: le peuple néerlandais, lié par l’usage d’une seule et même langue néerlandaise” (p. 136).

 

Evrard Raskin, ancien député de la Volksunie, nous livre un travail bien fait, volumineux, agréable à lire et bien étayé. Il a comblé une lacune dans l’histoire du nationalisme flamand. Cet historien et ce jursite, né en 1935, a réussi à faire oublier cet arrière-goût désagréable que nous avait laissé la rédaction de ses mémoires politiques en 1980.

 

Edwin TRUYENS.

(recension parue dans “Kort Manifest”, n°84, sept.-oct. 1997).

vendredi, 23 mars 2012

La svolta di De Ambris per la guerra del 1914 è la chiave per comprendere quella di Mussolini

La svolta di De Ambris per la guerra del 1914 è la chiave per comprendere quella di Mussolini

di Francesco Lamendola

Fonte: Arianna Editrice [scheda fonte]

Pigra è la storiografia italiana, malata di retorica e paralizzata dal conformismo; pigra e intollerabilmente cortigiana è, da sempre, la cultura italiana, nata all’ombra delle signorie del Rinascimento e che non ha mai smentito, neppure oggi, all’ombra dei poteri forti economici e finanziari, l’antico vizio della piaggeria e della servile adulazione.

 


Si continua a dire ed a ripetere che la svolta di Mussolini, direttore dell’«Avanti!», nell’ottobre del 1914, dal neutralismo all’interventismo, svolta che gli costò la direzione del giornale e l’espulsione dal Partito Socialista Italiano, fu un inqualificabile esempio di opportunismo, di camaleontismo, di doppiogiochismo; che nacque da spregevoli motivazioni di ambizione personale e che venne poi sostenuta, passato egli alla direzione del suo nuovo giornale «Il popolo d’Italia», da inconfessabili finanziamenti da parte di oscure forze interessate a trascinare l’Italia in guerra e di potenze straniere aventi il medesimo obiettivo.

Non solo: si continua a dire ed a ripetere che quella svolta, venendo da un uomo che, ancora nel 1911-12, in occasione della guerra di Libia, si era schierato per il più intransigente militarismo, e che ancora durante la Settimana rossa del 1914, in qualità di consigliere comunale a Milano, si era pronunciato per la rivoluzione e contro lo Stato borghese, era la dimostrazione della sua doppiezza, del suo cinismo, del suo disprezzo assoluto per gli ideali che aveva fino ad allora professato; con essa, finalmente, egli aveva gettato la maschera, mostrando il suo vero volto di traditore, di spergiuro, di aspirante dittatore e nemico del popolo.

Quante falsità, quante sciocchezze, quanta ipocrisia.

Tutte quelle cose sono state dette e ripetute da scrittori, giornalisti, professori e anche dalla maggioranza dei signori storici di professione, non per altra ragione che per un abietto conformismo verso il Pensiero Unico dominante dopo la cosiddetta Liberazione: debitamente progressista, “democratico” e antifascista; un Pensiero Unico che pretende di dividere il Bene e il Male, nella storia, con un taglio netto, ponendo, guarda caso, gli sconfitti della guerra civile del 1943-45 dalla parte del secondo ed i vincitori, guarda caso, dalla parte del primo: questi ultimi tutti onesti, intemerati, idealisti, laddove i loro avversari erano spregevoli mercenari di Hitler, senza dignità, senza onore, senza patria.

La verità è che, nei mesi cruciali fra il luglio del 1914 e il maggio del 1915, Mussolini non fu affatto il solo a compiere quella svolta; la compirono molti, moltissimi altri esponenti della sinistra democratica, molti socialisti, molti sindacalisti rivoluzionari, perfino un certo numero di anarchici; così come l’avevano compiuta, prima di loro - e anche questo viene passato sotto silenzio, o non viene ricordato a sufficienza - la grande maggioranza dei loro “compagni” francesi, inglesi, tedeschi, austriaci, russi (ovviamente sui rispettivi fronti contrapposti degli Imperi Centrali e della Triplice Intesa).

Mussolini non fu affatto l’eccezione, la pecora nera, il traditore dell’ultima ora; le sue esitazioni, i suoi dubbi tormentosi, la sua sofferta decisione di abbandonare il neutralismo per l’interventismo furono, invece, il risultato di un percorso che fu condiviso da una schiera di uomini di specchiata fede socialista, o sindacalista-rivoluzionaria, o anarchica; uomini che non amavano la monarchia dei Savoia, che non amavano lo Stato liberale, che non amavano l’esercito, il militarismo, il colonialismo; che erano sempre stati dalla parte degli ultimi, dei contadini, degli operai, dei disoccupati; che si erano battuti da leoni sulle barricate durante gli scioperi e le sommosse, che avevano fatto la galera e il confino, che erano fuggiti all’estero, quando la reazione poliziesca infuriava contro le Camere del lavoro e contro le Leghe operaie; uomini dei quali tutto si può dire o pensare, tranne che fossero dei venduti, degli opportunisti o dei voltagabbana.

L’elenco sarebbe così lungo che potrebbe riempire pagine e pagine; ma chi ha una conoscenza anche superficiale della storia del movimento sindacale italiano, sa bene che le cose stanno così; e dunque gli storici di professione, che lo sanno per forza, allorché si ostinano a presentare il “caso” Mussolini come l’eccezione che conferma la regola (del neutralismo socialista), mentono sapendo di mentite: spudoratamente, senza ombra di vergogna.

Prendiamo il caso dell’esponente forse più famoso e certo, allora, il più popolare, del sindacalismo rivoluzionario - insieme a Filippo Corridoni, come lui divento interventista e andato volontario, fra i primissimi, a morire nelle trincee del Carso -: quello di Alceste De Ambris.

Prestigioso segretario della Camera del lavoro di Savona nel 1903; di quella della Lunigiana nel 1907; espatriato a Lugano nel 1908, dopo che cavalleria e carabinieri ebbero preso d‘assalto la roccaforte “rossa” dell’Oltretorrente parmigiano; poi esule in Brasile per due anni; di nuovo a Lugano, per battersi contro la guerra di Libia, era stato nel 1912 tra i fondatori dell’Unione Sindacale Italiana, nata dalla scissione con la componente socialista riformista; e solo nel 1913 aveva potuto rientrare in Italia, portato in trionfo dai lavoratori di Parma, essendo stato eletto deputato nelle liste del Partito Socialista: questo era l’uomo, limpido e trasparente nella sua fede rivoluzionaria, senza orpelli e senza maschere.

Ebbene, De Ambris fin dall’agosto del 1914 maturò la convinzione che la parola d’ordine dei neutralisti fosse ormai sterile e sorpassata dagli avvenimenti; ben prima di Mussolini, dunque, che attese l’ottobre, ebbe il coraggio di dire a voce alta, in articoli e pubbliche manifestazioni, quel che altri vecchi dirigente socialisti e sindacali sentivano e pensavano, ma non osavano: a costo di rendersi impopolare, a costo di essere accusato di voltafaccia, a costo di attirarsi l’ira e il disprezzo di quei lavoratori che lo avevamo osannato e che di lui si erano sempre fidati, per istinto, sentendolo sinceramente dalla loro parte, con assoluta chiarezza e coerenza.

Il suo ragionamento può apparire lineare o no, può essere condiviso o no, ma non nasceva da alcun torbido e inconfessabile tornaconto privato. Egli partiva dalla pura e semplice constatazione che l’Internazionale aveva clamorosamente fallito: che non solo non aveva saputo impedire la guerra mediante uno sciopero generale, ma che ogni partito socialista aveva sposato in pieno la causa della “guerra patriottica” sostenuta dalle rispettive borghesie nazionali. Inoltre, dopo l’invasione del Belgio e della Francia settentrionale da pare delle armate tedesche, alla metà di agosto del 1914 si andava delineando una rapida e schiacciante vittoria degli Imperi Centrali: non c’era ancora stata la battaglia della Marna e, giudicando la situazione da sinistra, la sconfitta della Triplice Intesa non poteva non apparire come un disastro per la causa della rivoluzione sociale, mentre la sua vittoria sarebbe stata vista come il male minore.

Ora, compiendo un errore di sopravvalutazione del “peso” militare che l’Italia allora possedeva (un errore, peraltro, condiviso dagli Alleati, che corteggiarono fino alla stipulazione del Patto di Londra questo futuro «alleato di prima classe», come lo definì un uomo politico inglese), De Ambris pensava che, intervenendo al fianco dell’Intesa, essa avrebbe potuto spostare i rapporti di forza a favore di quest’ultima e scongiurare, così, la temuta vittoria delle Potenze Centrali.

Questo, come obiettivo immediato di un intervento italiano nella guerra mondiale; come obiettivo a medio termine, invece, egli pensava che tale intervento avrebbe rimesso in movimento le forze sociali antiborghesi e avrebbe preparato il terreno a uno sviluppo della situazione in senso rivoluzionario, secondo la vecchia formula internazionalista di trasformare la guerra imperialista della borghesia in una guerra rivoluzionaria del proletariato per la propria emancipazione.

Il 18 agosto De Ambris avrebbe dovuto parlare ad un comizio organizzato dall’Unione Sindacale Italiana sul tema del sindacalismo rivoluzionario di fronte alla guerra; pienamente consapevole della gravità di quanto si accingeva a fare, e cioè ad abbattere la formula “sacra” dell’opposizione alla guerra imperialista, dirà poi di aver trascorso una vigilia travagliata, ma di aver sentito il dovere di dire quello che tutti gli altri ormai pensavano, compreso suo fratello Amilcare.

Così, dunque, si espresse Alceste De Ambris nel suo discorso, poi pubblicato in un articolo intitolato «I sindacalisti e la guerra», apparso su «L’Internazionale» del 22 Agosto 1914 (cit. in: Renzo de Felice, «Mussolini il rivoluzionario», Torino, Einaudi, 1965, 1995, pp. 235-36):

«Compagni, io non vi ripeterò… le ragioni di principio che ci rendono irriducibilmente contrari ad ogni guerra fra le nazioni…Ma se possiamo e dobbiamo insistere su questa base essenziale del sindacalismo, non è detto però che si possa e si debba di conseguenza chiudere gli occhi davanti alla realtà, contentandoci di una negazione dogmaticamente assoluta… Io credo del resto che il fatto prodigioso al quale abbiamo la sventura o la sfortuna  di assister avrà tali conseguenze da costringere tutti i partiti e tutte le filosofie ad una revisione, spezzando ogni abitudine mentale  a qualunque principio s’ispiri; come ha fatto - e forse in misura anche più larga - la rivoluzione francese dell’ottantanove… I fatti si sono incaricati di far giustizia di tutte queste illusioni e di tutti questi sofismi. Oggi la guerra è una tremenda realtà. Il pacifismo borghese e l’internazionalismo socialista hanno fatto contemporaneamente bancarotta… È tempo di finirla cl comodo sistema di addossare tutte le responsabilità dei fatti storici ai gruppi dirigenti. Il popolo ha pure la sua parte di responsabilità, almeno fino a che non abbia fatto sentire il suo dissenso in maniera evidente e vigorosa. Anche il tacere - di fronte a certi delitti - significa complicità… La vittoria ella Germania e dell’Austria ci porterebbe forse a ripetere le triste parole di Herzen il quale, dopo le giornate del giugno 1848, affermava che l’Europa occidentale era ormai morta e che per il rinnovamento e la continuazione della storia non restavano più che due  sorgenti: l’America da un lato e la barbarie orientale dall’altra… Se dovessero prevalere il kaiserismo e il pangermanismo degli imperi centrali, non vi sarebbe alcuna forza atta a controbilanciarli… La vittoria antitedesca, al contrario, ci lascia sperare una serie di benefizi di carattere economico, politico e morale che permetterebbero un rigoglioso sviluppo di tutte le forze di progresso dell’umanità…; forse la rivoluzione dei popoli tedeschi liberati… il socialismo sollevato dall’ossessione pan germanica e divenuto veramente internazionale; il sindacalismo autonomista e libertario al posto del centralismo autoritario… Certo, essa non è ancora la NOSTRA rivoluzione; ma è forse necessaria, per liberare il mondo dai detriti ingombranti del sopravvissuto medioevo. Ad ogni modo, poiché non è più nelle nostre forze di evitarla, bisogna prepararci a fare coraggiosamente il nostro dovere in suo confronto… Il fatto che l’Italia… si trova oggi fuori del conflitto, non deve bastare per indurci ad un’indifferenza ignava. Siamo e saremo sempre contro ogni calcolo di egoismo nazionale, dovremo perciò insorgere e negare il nostro sangue per qualsiasi mira di conquista territoriale o di allargamento del prestigio statale, poiché tutto ciò è per lo meno estraneo asl nostro interesse... Ma non è egualmente estraneo al nostro interessere il permettere che trionfi o sia soffocato un principio di libertà necessario alla preparazione del nostro avvenire… Se domani la grande lotta richiedesse il nostro intervento per impedire il trionfo della reazione feudale militarista, pan germanica, potremo noi rifiutarlo? O pure non sentiremo risuonare nei nostri cuori, come furiosi colpi di campane a martello l’epica invocazione lanciata da Blanqui nel 1870, quando i tedeschi valicarono le frontiere di Francia?... Compagni! Io pongo la domanda: Che faremo qualora la civiltà occidentale fosse minacciata d’esser soffocata dall’imperialismo tedesco e solo il nostro intervento potesse salvarla? A voi la risposta!»

Questo discorso ebbe un clamore fortissimo e suscitò un vero e proprio terremoto. Per un momento sembrò che tutti si sarebbero scagliati contro l’oratore; poi, invece, inattesa, ma decisiva, giunse l’approvazione di Filippo Corridoni, che in quel momento si trovava in carcere e che, dal carcere, aveva maturato la stessa evoluzione di pensiero vissuta da De Ambris.

Il tabù era stato infranto, il dado era tratto: il 3 novembre, a Parma, nel cuore del sindacalismo rosso, Alceste De Ambris presentò commosso alla folla un comizio di Cesare Battisti, che perorava, da socialista, la causa della liberazione della sua Trento (e di Trieste) dal dominio austriaco.

Fu un errore, un miraggio, una illusione? Può darsi: ma furono in molti a crederci, in quei giorni, all’estrema sinistra; Mussolini non fu il solo, e le sue ragioni non furono spregevoli, né meschine.


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mercredi, 14 mars 2012

NAISSANCE D'UN IMPERIALISME: LA GUERRE HISPANO-AMERICAINE DE 1898

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NAISSANCE D'UN IMPERIALISME:
LA GUERRE HISPANO-AMERICAINE DE 1898

par Frédéric KISTERS

Avant de narrer les faits, interrogeons-nous sur les motivations de cette guerre méconnue, mais ô combien pleine d'enseignements. Quelles raisons poussèrent les Etats-Unis à sortir de leur isolement et à renoncer à la doctrine Monroe ?

D'aucuns privilégient l'explication économique, réduisant ainsi le phénomène impérialiste à la perpétuelle recherche de nouveaux marchés, seule denrée capable d'apaiser temporairement l'appétit insatiable du Moloch Baal capitaliste. A la fin du 19e siècle, l'Amérique avait oublié les horreurs de la Guerre de Sécession et elle prospérait. En 1876, la balance commerciale américaine montrait pour la première fois un excédent, mais la crise de 1893 rendit les investissements aux USA peu attrayants, les hommes d'affaires exportèrent leurs capitaux vers le Mexique (500 millions de $), l'Amérique latine, les Caraïbes et Cuba (150 millions de $). De ce fait, les USA consommaient les trois quarts de la production de sucre de Cuba qui en retour absorbait 25% des exportations américaines. Certes, aux abords de 1900, ces pays offraient un marché substantiel et une source de matières premières. Oui, le commerce extérieur passa de 404 millions de $ en 1865 à 1635 millions de $ en 1890. Néanmoins il ne représentait toujours que 3 à 4% du PNB des USA. En réalité, les Etats-Unis n'avaient pas besoin de chercher des débouchés extérieurs, son énorme marché intérieur suffisait amplement pour absorber sa production. Quant aux surplus agricoles, comme ils ne pouvaient être vendus aux pays sous-développés de la région, ils étaient écoulés en Europe, à bas prix, au grand dam de nos paysans.

Les causes profondes du conflit

La volonté impérialiste ne résultait pas uniquement d'une nécessité inhérente au système capitaliste. En réalité, un faisceau de causes concouraient à la guerre. Les Américains ne voulaient plus que les Européens possédassent une tête de pont à 90 milles de leurs côtes. Ils souhaitaient également garantir leurs investissements dans l'île. La population américaine ressentait de la sympathie pour les Cubains qui luttaient pour leur indépendance. Pour justifier l'intervention, ils invoquaient des raisons humanitaires et les vertus de la démocratie. Pour les dirigeants, le conflit avec l'Espagne permettrait de distraire l'opinion de la crise économique qui avait débuté en 1893. Il offrait l'occasion d'acquérir, au détriment du moribond empire espagnol, les ports et les marchés nécessaires pour concurrencer des grandes puissances européennes. L'immense marché chinois avait été ouvert par les Japonais, mais pour l'exploiter, il fallait posséder des ports dans la région. Surtout, vers 1890, les Etats-Unis avaient achevé la conquête du continent de l'Atlantique au Pacifique. Certains Américains commencèrent à penser que la "destinée manifeste" ne s'arrêtait pas nécessairement aux rivages des océans. Les Anglo-saxons protestants, les Wasps's avait confiance dans la destin de leur nation, ils se sentaient investis d'une mission civilisatrice et ils avaient le sentiment de défendre une juste cause. La doctrine de la suprématie blanche avait engendré le système des réserves indiennes, la ségrégation des noirs, l'exclusion des immigrés chinois, maintenant elle justifiait l'impérialisme.
Quelques ténors entonnaient l'antienne nationaliste et une partie de la presse répandaient leurs thèses. Le capitaine de vaisseau Mahan, commentateur politique et militaire fort écouté, contestait la politique de non-intervention. Il affirmait que les Etats-Unis avaient besoin de bases dans le Pacifique comme dans les autres océans et qu'ils devaient construire une puissante flotte pour protéger le pays. Pour le sénateur Henry Cabot, il fallait ouvrir un canal qui rejoignît les océans. Pour le protéger, il fallait contrôler les Iles Hawaï et Cuba et posséder au moins une base dans les Antilles. Le futur-président Théodore Roosevelt prônait également l'impérialisme, car il était convaincu que les races supérieures devaient dominer les inférieures pour le progrès de la civilisation.

L'insurrection cubaine
 
Il ne manquait plus que l'occasion. La colonie cubaine avait déjà été secouée par plusieurs soulèvements. En 1895, le prix du sucre s'effondra. Au même moment, les Etats-Unis instaurèrent un tarif douanier protectionniste qui ruinait les planteurs et provoquait la chute des salaires. Une nouvelle fois, les Cubains, las de la misère et de l'impéritie du régime colonial espagnol, reprirent les armes. Les insurgés proclamèrent un gouvernement provisoire qui envoya des délégués à New York et Washington.
En réaction, la régente Marie Christine ordonna la répression de la révolte. Mais très vite il devint évident que l'insurrection ne serait pas facilement matée. En effet, les soldats espagnols n'étaient pas formés pour ce genre de conflit, ils étaient décontenancés par la tactique de la guérilla qui, même si elle était mal commandée, jouissait du soutien sans faille de la population. L'Espagne entretenait pourtant à Cuba une armée de 200.000 hommes, mais ils étaient aussi mal équipé que nourris et ils ne s'adaptaient pas au climat; en trois ans, 96.000 Espagnols succombèrent, pour la plupart de dysenterie, de la malaria ou de la fièvre jaune.
Afin de briser la résistance de la population, le général Weylen fit construire des camps de concentration dans lesquels s'entassaient hommes, femmes et enfants dans des conditions d'hygiène et de promiscuité atroces. En réponse, les insurgés attaquèrent et pillèrent les propriétés, y compris celles des planteurs américains, espérant ainsi susciter l'intervention américaine.
En Amérique, la propagande cubaine organisait des meetings, des conférences, des manifestations et inondait le pays de brochures. La presse à scandales prit le relais. La concurrence entre journaux créa une inflation de nouvelles sensationnelles : maisons brûlées, prisonniers torturés, viols collectif par les soudards ibères etc.

La marche martiale

Certes, les Etats-Unis avaient investi des capitaux considérables à Cuba, mais les milieux d'affaires restaient hostiles à une aventureuse intervention, or ils avaient soutenu l'élection du président Mc Kinley qui tenta de négocier avec le gouvernement espagnol, mais il n'avait pas l'appui du Congrès et de l'opinion publique surchauffée. De son côté, le gouvernement espagnol tenta d'éviter la guerre en faisant appel au Pape et en proposant l'autonomie à Cuba.
 Malheureusement, le Ministre d'Espagne à Washington, le Senor Duprey de Lôme, eut la maladresse d'adresser, à un ami, une lettre dans laquelle il décrivait Mc Kinley comme un politicien hésitant et opportuniste. De surcroît, le diplomate insinuait que le gouvernement espagnol avait formulé les propositions conciliantes d'autonomie et de réforme à Cuba pour gagner du temps en attendant l'écrasement de la guérilla. Le document, volé, s'égara dans les bureaux de la rédaction du "New York Journal" qui s'empressa de l'éditer. Dupuy de Lôme dut remettre sa démission, mais l'opinion publique était indignée qu'on insultât ainsi son président. L'affaire mettait Mc Kinley dans une position délicate pour négocier un arrangement pacifique.
Un nouveau scandale allait mettre le feu aux poudres, au propre comme au figuré. Le 15 février 1898, le croiseur de bataille "Maine", que le président Mc Kinley avait envoyé pour protéger les ressortissants et les intérêts américains, explosa dans la rade de La Havane, entraînant la mort de 260 hommes d'équipage. L'opinion américaine s'enflamma comme les soutes à poudre du navire. Dans son rapport provisoire, la commission d'enquête instituée pour déterminer les causes de l'explosion n'excluait ni une cause interne (l'instabilité de la cordite, un incendie dans les soutes à charbon) ni une cause externe (mine ou torpille). Sans attendre les conclusions définitives, la presse se déchaîna contre les Espagnols. Aujourd'hui encore, la cause de l'explosion demeure un mystère, mais en tout cas on peut écarter l'hypothèse d'une attaque.
Le 8 avril, l'amiral Pasquale Cervera appareilla de Cadix, il avait reçu pour mission de détruire la base navale de Key West en Floride, puis de tenir le blocus des côtes. Pour ce faire, il ne disposait que d'un cuirassé et cinq croiseurs et, de surcroît, l'Espagne ne possédait pas de base convenable dans les Antilles. Assez anxieux, il s'arrêta dans les Iles du Cap Vert, espérant un règlement pacifique du conflit.
La nouvelle de son départ provoqua une vague de panique aux Etats-Unis ! Chacun craignait de voir apparaître la flotte ibérique sur ses côtes. Le secrétariat à la défense était inondé de courriers affolés. Toutes les villes portuaires réclamaient l'envoi d'un cuirassé pour les protéger. Si les autorités avaient cédé à l'opinion publique, la flotte américaine aurait été dispersée le long des côtes. Pour calmer l'inquiétude des foules, l'armée ressortit quelques canons démodés qui rouillaient dans les arsenaux depuis la fin de la guerre civile. Ils finirent de s'oxyder en une vaine faction devant une mer où ne parut jamais la moindre fumée espagnole.
Le 11 avril, Mc Kinley demanda l'autorisation de mettre en action les forces armées; le 21, l'Espagne rompit les relations diplomatiques; le 25, les Etats-Unis déclarèrent la guerre à l'Espagne. Comme l'armée de terre ne comptait que 28.000 hommes, le gouvernement ordonna la levée de 200.000 volontaires. Soulignons que, depuis l'Indépendance, les Etats-Unis n'avaient jamais entretenu une forte armée de terre permanente, en dehors des périodes de guerre. Ce n'est qu'après 1945, qu'ils se doteront d'une armée de terre aux effectifs imposants. En revanche, sous l'impulsion des adeptes de Mac Mahan, ils avaient construit une puissante flotte durant les Années '90, devenant ainsi la troisième marine de guerre du monde.

Une guerre rondement expédiée

Avant l'ouverture des hostilités, le Département de la Marine avait nommé le commodore Dewey à la tête de la division de marine d'Extrême Orient, avec mission de menacer les Philippines. Dès son arrivée, il soumit ses hommes à un entraînement intensif, puis il concentra ses quatre croiseurs et ses deux canonnières à Hong Kong. Déjà, le 30 avril, il se présentait devant les Philippines avec ses vaisseaux. Après quelques reconnaissances, le 1er mai, il trouva devant Manille, au mouillage de Cavite, une petite flottille espagnole composée de navires incapables de se battre en haute mer. Grâce à leur écrasante supériorité de feu, les Américains envoyèrent par le fonds les barcasses ibériques. Le bilan de la bataille était sans appel : 8 bateaux coulés, 167 morts, 214 blessés contre… 8 blessés américains ! Dewey n'avait plus qu'à attendre l'arrivée du corps expéditionnaire en provenance des Etats-Unis. Ce dernier débarqua le 13 août, le lendemain, la garnison espagnole se rendait.
De son côté, l'amiral Cervera reprit la mer le 29 avril, sur les injonctions de son gouvernement. Prudent et conscient de son infériorité, il ne croisa pas directement sur Porto Rico afin d'éviter la flotte américaine. Celle-ci avait été renforcée par le cuirassé Oregon qui avait contourné l'Amérique du sud, ce qui constituait une performance pour l'époque. De cette manière, l'amiral Simpson pouvait compter sur cinq cuirassés, deux croiseurs cuirassés et quelques navires plus petits. Pendant que la flotte américaine sillonnait la côte nord de Cuba, dans les parages de La Havane, Cervera fit route par les petites Antilles, puis mit le cap sur Santiago. Le 19 mai, il jetait l'ancre dans le port. Des champs de mines et des batteries côtières disposées le long de l'étroit chenal interdisait l'accès au mouillage.
De son côté, l'armée de terre rassembla ses troupes à Tempa. Dans le camp, on trouvait un certain Théodore Roosevelt à la tête de ses volontaires, pour la plupart d'anciens cow boy et joueurs de cricket. Une bonne part resteront à terre ou devront abandonner leurs chevaux, faute de transports. Malgré le côté burlesque de l'affaire, Roosevelt acquit une réputation héroïque en participant à al campagne. Le 26 juin, le corps de 16000 hommes débarqua à Daikiri, à 25 kilomètres à l'est de Santiago. Le 1er juillet, les Américains s'emparaient d'un fortin et des collines qui ceignaient Santiago, au prix de 1500 morts. Mais l'expédition avait été improvisée, la logistique ne suivait pas, si bien que l'offensive s'enlisa.
Le 3, Cervera tenta une sortie avec ses quatre croiseurs et deux torpilleurs. Il s'agissait de passer en force, à toute vitesse avant que les Américains ne réagissent. Les équipes des machines avaient reçu une bonne dose de rhum pour leur donner du cœur à l'ouvrage, ils remplirent les chaudières au risque de les faire exploser. Mais rien n'y fit. Les puissants vaisseaux américains détruisirent tous les navires espagnols. Ironie du sort, un seul vaisseau réussit à forcer le barrage, le Cristobal Colon, mais l'Oregon et le Brooklyn le rattrapèrent quelques heures plus tard et ils exécutèrent le découvreur de l'Amérique. Les Espagnols avaient perdu 160 morts et 1800 prisonniers, dont l'amiral Cervera. Du côté américain, on ne comptait que quelques victimes. En revanche, les troupes terrestres avaient plus souffert, en quatre mois elles avaient perdu 5700 morts dont 460 au combat, le reste de maladie. Le 17 juillet, Santiago capitulait.

Un colonialisme qui n'ose pas dire son nom

Par le Traité de Paris du 10 décembre 1898, l'Espagne céda Porto Rico, l'île de Guam, l'archipel des Mariannes et les Philippines contre 20 millions de $ d'"indemnités".
Dans une euphorique foulée, les Américains officialisèrent également l'annexion d'Hawaï qu'ils occupaient depuis quelques années. Vers 1893, la reine hawaïenne avait tenté d'instaurer une monarchie absolue. Les planteurs américains avaient fomenté une insurrection qui servit à justifier l'intervention de leur gouvernement.
Cuba acquit soi-disant l'indépendance. En réalité, elle passait sous la tutelle de l'Oncle Sam. En effet, elle dut signer une convention par laquelle elle s'engageait à ne jamais passer d'accord mettant en question sa souveraineté sans l'autorisation du gouvernement américain. Elle devait accepter l'intervention américaine en cas d'"agression" par une puissance étrangère et elle ne pouvait pas contracter de dettes trop importantes. La convention fut inscrite dans la constitution et en vertu de celle-ci, les Américains occupèrent Cuba en 1906-1909, 1912 et de 1917 à 1922.
A partir de 1900, Porto Rico posséda une Chambre des Représentants, mais le conseil et le gouverneur étaient nommés par le président des Etats-Unis.
Quant aux Philippines, allait-on lui offrir l'indépendance ? Manille était la clé du commerce avec le Moyen Orient, on ne pouvait laisser la France, l'Allemagne ou l'Angleterre s'en emparer… Et les diverses églises protestantes rêvaient de convertir les autochtones. Ces indigènes étaient incapables de se gouverner, il fallait les prendre en charge, élever leur niveau de vie et pourvoir au salut de leurs âmes ! Le 4 février 1899, la population philippine se souleva, car elle ne voulait ni des nouveaux maîtres ni de leur religion. Les Etats-Unis devront envoyer 70.000 hommes qui vinrent à bout de la révolte, au bout de trois années de guerre.
Cet épisode de l'histoire présente plusieurs aspects intéressants pour le spectateurs contemporains de l'impérialisme américain. Dans cette affaire, les médias de l'époque et les lobbies jouèrent un rôle déterminant dans le processus de décision du gouvernement. La presse manipula l'opinion publique en accusant les Espagnols de la destruction du Maine et en dénonçant les exactions de leurs troupes. En grossissant démesurément l'adversaire, elle provoqua la panique de la population. Hier le Maine, aujourd'hui, les armes de destruction massive…
Quant aux lobbies, ils ne travaillaient plus pour la prospérité de l'Amérique, ils partaient à la conquête économique du monde pour leur seul profit, sous couvert d'un vent de libération. Hier la canne à sucre, aujourd'hui, le pétrole…
D'un point de vue militaire, nous reconnaissons la manière américaine de faire la guerre : préférence pour le feu plutôt que le choc, avance technologique et supériorité navale. Hier les cuirassés, aujourd'hui, les porte-avions…
Surtout, une idéologie produisait ses premiers effets. Convaincus d'être investis d'une mission supérieure, les Américains tinrent un discours moraliste, recourant sans cesse à Dieu, la démocratie et la liberté, qui induisait le dédain des populations secourues et la haine de l'ennemi. Avec aplomb, ils affirmèrent qu'ils intervenaient pour libérer les opprimés, leur offrir la démocratie et l'opulence. Cent ans plus tard, Mister Busch, qu'en pensent les Cubains?

Frédéric KISTERS

 

Waldemar Pabst - Noskes "Bluthund" oder Patriot

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Rüdiger Konrad

Waldemar Pabst

Noskes "Bluthund" oder Patriot

 

ISBN 978-3-937820-17-0

352 Seiten + 32 Seiten Bilder und Dokumente, gebunden, Hardcover

 

Preis: 24,80 Euro

 

Erscheinungstermin: 12.März 2012

  

Bublies Verlag

Bergstr. 11

56290 Beltheim-Schnellbach

Tel. 06746 / 730046

Fax 06746 / 730048

Internet: www.bublies-verlag.de

E-Brief: bublies-verlag@t-online.de

 

 

Für die einen ist Waldemar Pabst (1880-1970) auch heute noch „der Bluthund und Spießgeselle Noskes”, für die anderen bleibt er „der Patriot und Retter Deutschlands vor dem Bolschewismus”. Im Auftrag der SPD-Regierung unter Friedrich Ebert war er mit der Garde-Kavallerie-(Schützen)-Division ab November 1918 den ultralinken Auswüchsen der Revolution entgegengetreten. Vom unbeugsamen Willen beseelt, Deutschland nicht dem Bolschewismus russischer Prägung anheimfallen zu lassen, schreckte er auch nicht davor zurück, als selbsternannter „oberster Richter” eines militärischen Standgerichts, die Tötung der beiden Führer des Spartakusbundes, Rosa Luxemburg und Karl Liebknecht, zu befehlen.

Im März 1919 zählte das von Hauptmann Pabst geführte Garde-Kavallerie-(Schützen)-Korps rund 40 000 Mann, in diesen Wochen war er die tatsächliche Macht im Staate. Der im Juni 1920 von ihm mit vorbereitete Kapp-Putsch trug seine Handschrift. Nach dessen Scheitern wich Pabst nach Österreich aus und übernahm dort, für zehn Jahre, die Stelle des Stabschefs der Tiroler Heimwehr. Nach Deutschland zurückgekehrt, erlebte er den Beginn des III. Reiches, dessen Ideologie er, der Monarchist, aus weltanschaulichen Gründen ablehnte. Nach weiteren erlebnisreichen Jahrzehnten starb er 1970 in Düsseldorf.

 

In dieser reich bebilderten Biografie kommt Pabst häufig „selbst” zu Wort. Dafür wurde sein gesamter Nachlass, der dem Autor vorliegt, gesichtet, zahlreiche dokumentarische Belegstücke verwendet, darunter auch Tonbandaufnahmen aus den sechziger Jahren des 20. Jahrhunderts sowie zeitgeschichtliche Dokumente, die er handschriftlich mit Anmerkungen versehen hat. Der Leser erhält damit, quasi „aus erster Hand”, Ansichten und Meinungen einer polarisierenden Persönlichkeit und kann sich selbst ein Bild machen.

 

Inhalt

Vorwort                                                                                                                   

 

I
1880 – 1914

Kindheit in Berlin und Köln                                                                        

Kadett in Bensberg und Berlin-Lichterfelde                                                                 

Offizier im Infanterieregiment von Winterfeld (2. Oberschlesisches) Nr. 23               

Die Wochen vor dem Ersten Weltkrieg                                                                        

 

II
1914 – 1918

Als Offizier im Ersten Weltkrieg                                                                                  

Rückmarsch von der Westfront und Ankunft im revolutionären Deutschland             

 

III
1918 – 1920

Die Zeit während der Novemberrevolution als Stabschef der Garde-Kavallerie-(Schützen)-Division                                                                                                          

Die Lage in Berlin im Januar 1919                                                                                

Die Liebknecht/Luxemburg-Affäre                                                                              

Gedanken und Stimmen zur Liebknecht/Luxemburg-Affäre                                                   

Der Märzaufstand 1920 und Verabschiedung aus der Armee                                                 

Die „Nationale Vereinigung“ und erste Vorbereitungen zum Kapp-Putsch               

Der Kapp-Lüttwitz-Putsch                                                                                         

 

IV
1920 – 1931

Flucht nach Österreich und Stabschef der Tiroler Heimatwehr                                             

 

V
1931– 1970

In Deutschland 1931 - 1943                                                                                       

Schweizer Exil 1943 – 1955                                                                                       

Rückkehr nach Deutschland                                                                                       

 

Namensregister                                                                                                            

Bibliografie                                

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lundi, 12 mars 2012

L'invasion anglo-gaulliste de la Syrie française

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L'invasion anglo-gaulliste de la Syrie française (7 juin-14 juin 1941)

 
Ex: http://anti-mythes.blogspot.com/

DANS la mode actuelle des commémorations, de la degaullâtrie promue par le Système — indice sûr, s'il en était besoin, qu'il est tout sauf un héros français —, est curieusement oublié le 70e anniversaire de l'invasion anglo-gaulliste de la Syrie française. On conçoit une certaine gêne : des Français ont tiré sur des Français, et ce crime pour voir la France chassée du Levant. Aujourd'hui hélas tout est possible, même fêter en France le 19 mars 1962, mais là, heureusement, ils n'ont pas osé. Les colonies françaises — dont les mandats de Syrie et du Liban — sont demeurées massivement fidèles au Gouvernement français du Maréchal Pétain à l'été 1940. Un peu moins d'un an plus tard, il faut bien constater que les Germano-Italiens ne les ont pas attaquées — faute de moyens peut-être, mais c'est un fait — tandis que les Anglais ont tenté de prendre le Sénégal — et de là toute l'A.O.F. à l'automne 1940 — et ont apporté un soutien logistique décisif à leurs auxiliaires gaullistes pour s'emparer de l'A.E.F. — avec déjà des combats fratricides causant la mort de centaines de Français au Gabon —. La France, même battue en Métropole, à moitié occupée, conserve un rôle mondial de par sa présence en Afrique et en Asie ; en outre, les colonies, si les cargos manquent, permettent de jouer un rôle important dans le ravitaillement de la population française. À ce moment-là, elles contribuent à la sauvegarde physique de notre peuple, ce dont les gaullistes avec leur patrie fictive dans les nuées — donc absolument intransigeante, certainement — n'ont cure ; ainsi, la parade du "Général" à Brazzaville ne signifie pas la renaissance de la France, mais sa mort, des bananes congolaises en moins pour les familles françaises. ; Le Levant entre dans l'actualité brûlante du second conflit mondial avec le coup d'Etat en Irak du Général Rachid Gaylini, qui veut libérer son pays de la dépendance anglaise — politique, économique, militaire, derrière une fausse indépendance formelle —. Début mai, les Britanniques, partis du Koweït, partent à la conquête du pays. Les Allemands décident de le soutenir — ils viennent de s'emparer des Balkans —, en envoyant une escadrille et des armes par convois ferroviaires — via la Turquie et la Syrie, contraintes d'accepter le transit —. Cette aide, faible, n'inverse pas pour autant le cours des événements, l'armée professionnelle britannique triomphe assez vite des Irakiens, peu entraînés et mal commandés.

Alors que les combats s'achèvent en Irak, les Protocoles de Paris sont signés le 28 mai 1941 par l'amiral Darlan et l'ambassadeur Abetz. Dans ce cadre est autorisée la poursuite — devenue sans objet — de l'aide à Rachid Gaylini, et le ravitaillement de l'Afrika Korps via la Tunisie, avec pour contrepartie la libération de prisonniers, dont un millier d'officiers, afin de renforcer les défenses des colonies. Des perspectives plus lointaines sont évoquées, comme la location par les Allemands de bases navales à Bizerte et Dakar ; le risque de guerre est évident, aussi Darlan exige-t-il des gestes significatifs, comme la libération de tous les prisonniers, la fin des frais d'occupation, un vrai statut de cobelligérant le cas échéant et non plus de vaincu. Il semblerait que l'application des propositions avancées soient bloquées principalement par les Italiens — qui risquent de perdre leur statut de principal allié — et des méfiances réciproques entre Français et Allemands. L'aide à l'Irak, tout comme ces Protocoles de Paris, servent de justification à l'invasion britannique. Contrairement à toute la propagande alliée, qui dure encore, cette nouvelle agression ne constitue pas un acte indispensable, et encore moins habile de Churchill : il y a là au contraire de quoi vaincre toutes les réticences de Vichy, faire basculer la France dans le camp de l'Axe. Aussi ces événements sont-ils décisifs : une résistance prolongée de la Syrie française, avec le soutien allemand, aurait pu constituer un tournant dans la guerre. Le Premier ministre britannique pense à court terme, à obtenir une victoire facile — espère-t-il — pour regagner du prestige, ébranlé par le désastre de Crête, après la Grèce, qui s'achève le 1er juin.


L'invasion se prépare au moins dès le mois de mai, voire, vraisemblablement bien avant. De Gaulle, informé, tient absolument à la participation de troupes françaises "libres" ; ces officiers — pourtant exaltés — protestent, refusant dans un premier mouvement de combattre contre d'autres Français, mais il insiste et parvient à les convaincre ; il leur promet — avec son assurance mystique habituelle — que leur présence serait fondamentalement pacificatrice, susciterait l'adhésion des forces de Syrie à la France-"Libre", et pérenniserait la présence française au Levant.

Aussi le 10 juin, 40 000 Britanniques, avec un quart de Français "Libres" — proportion non négligeable, voire décisive —, commandés par le général Wilson, attaquent 30 000 Français — dont deux tiers de troupes indigènes —, commandés par le général Dentz.

histoire,deuxième guerre mondiale,seconde guerre mondiale,syrie,proche orient,1941L'action débute sur le front     méridional : venant de Palestine, le 10 juin la 7e Division australienne       d'infanterie avance le long de la côte de Saint-Jean d'Acre vers Beyrouth, couverte par les canons de la marine britannique, tandis que la 5e brigade indienne d'infanterie et les Français "Libres" progressent à l'intérieur vers Damas. Au bout d'une semaine, ces progressions sont bloquées, souvent repoussées par des contre-attaques françaises, mais trop diffuses et d'ampleur limitée ; Dentz n'ose pas concentrer tactiquement ses moyens — déployés sur tout le front sur trois lignes parallèles — et profiter de la supériorité ponctuelle momentanée ; sitôt le terrain reconquis, il n'exploite pas le trouble adverse, mais organise la réoccupation systématique des positions défensives, il est vrai plutôt bonnes, qui s'appuient sur le relief.

À partir du 17 juin, Wilson engage deux nouvelles divisions sur le front Sud, qui résiste quelques jours. Mais les Forces Françaises "Libres" entrent à Damas le 21 juin 1941. Pendant ce temps les forces britanniques d'Irak entrent enfin en action et envahissent la Syrie par l'Est, en deux colonnes, l'une remontant l'Euphrate, l'autre traversant le désert jusqu'à Palmyre, avec l'intention de poursuivre jusqu'à la mer ; elles rencontrent assez peu d'opposition, les forces françaises étant plutôt concentrées sur le front méridional.

Le général Dentz a demandé dès le début des hostilités un soutien aérien de la Luftwaffe, qui lui aurait permis de tenir beaucoup plus longtemps. Or, à partir du 22 juin, l'aviation allemande participe de manière intensive à l'invasion de l'URSS, et ne peut distraire un nombre significatif d'avions en Syrie. Quant aux renforts terrestres français, si les autorisations pour qu'ils traversent l'Europe sont données, ils n'ont pas le temps de rejoindre la Syrie.

Le 11 juillet, la situation des forces françaises est très compromise ; pour éviter une capitulation pure et simple, le Maréchal autorise Dentz à demander la suspension des combats. Un armistice est signé le 14 juillet 1941 à Saint-Jean d'Acre. Les pertes sont lourdes, avec près de 6 000 hommes hors de combat dans les deux camps.

La Syrie, après l'Irak le mois précédent, a été le moment d'un choix décisif pour Hitler ; au lieu d'envahir l'URSS, il aurait pu, via la Turquie, alors prête à basculer contre l'octroi de la région de Mossoul — Nord de l'Irak —, s'emparer du Proche-Orient, et de ses ressources pétrolières considérables. Il choisit de s'en tenir à son idée première. En principe, toutes les troupes françaises sont rapatriées en Métropole ; De Gaulle obtient in extremis le droit de leur faire de la propagande, mais il obtient peu de succès. Dentz rentre en France avec ces hommes : il subira la vengeance gaulliste, condamné à mort pour « haute trahison » le 20 avril 1945. Souffrant de mauvais traitements en prison, âgé, il meurt le 13 décembre 1945. Les Britanniques imposent leur pouvoir sur la Syrie et le Liban, soutiennent les nationalistes arabes contre les Français "Libres", peu nombreux et tout juste tolérés jusqu'en 1946 — ils partent suite à un humiliant ultimatum.

Scipion de SCALM. Rivarol

dimanche, 11 mars 2012

The Eviction of the Yeomen

The Eviction of the Yeomen

By Brooks Adams

Ex: http://www.counter-currents.com/

Editor’s Note:

The following is roughly the first 40% of “The Eviction of the Yeomen,” chapter 9 of Brooks Adams’ The Law of Civilization and Decay.

Reading Adams’ account of the forces that ultimately created the British empire and diaspora, it is hard to regard it as a glorious and civilizing process, but rather as a sordid and savage one, given that the conquest and settling of new lands, the extermination, enslavement, and dispossession of non-whites, and even the despoiling of nature and the extinction of entire species, appear to be mere extensions of the rise of capitalism in England on the ruins of a fundamentally more humane political order.

None of this implies, of course, that the heirs of these upheavals should surrender our lands and go home. Past wrongs cannot be redressed, and in any case, our primary focus should be on building a just social order for the future. And for that task, Brooks Adams offers us much food for thought.

The remainder of chapter 9 deals with the Church of England. It throws a great deal of light on the prevalence of religious cynicism and insincerity in the Angl0 cultural sphere. I will reprint it on another occasion.

010_1.jpgLike primitive Rome, England, during the Middle Ages, had an unusually homogeneous population of farmers, who made a remarkable infantry. Not that the cavalry was defective; on the contrary, from top to bottom of society, every man was a soldier, and the aristocracy had excellent fighting qualities. Many of the kings, like Coeur-de-Lion, Edward III, and Henry V, ranked among the ablest commanders of their day; the Black Prince has always been a hero of chivalry; and earls and barons could be named by the score who were famous in the Hundred Years’ War.

Yet, although the English knights were a martial body, there is nothing to show that, on the whole, they surpassed the French. The English infantry won Crecy and Poitiers, and this infantry, which was long the terror of Europe, was recruited from among the small farmers who flourished in Great Britain until they were exterminated by the advance of civilization.

As long as the individual could at all withstand the attack of the centralized mass of society, England remained a hot-bed for breeding this species of man. A medieval king had no means of collecting a regular revenue by taxation; he was only the chief of the free-men, and his estates were supposed to suffice for his expenditure. The revenue the land yielded consisted of men, not money, and to obtain men, the sovereign granted his domains to his nearest friends, who, in their turn, cut their manors into as many farms as possible, and each farmer paid his rent with his body.

A baron’s strength lay in the band of spears which followed his banner, and therefore he subdivided his acres as much as possible, having no great need of money. Himself a farmer, he cultivated enough of his fief to supply his wants, to provide his table, and to furnish his castle, but, beyond this, all he kept to himself was loss. Under such a system money contracts played a small part, and economic competition was unknown.

The tenants were free-men, whose estates passed from father to son by a fixed tenure; no one could underbid them with their landlord, and no capitalist could ruin them by depressing wages, for the serfs formed the basis of society, and these serfs were likewise land-owners. In theory, the villains may have held at will; but in fact they were probably the descendants, or at least the representatives, of the coloni of the Empire, and a base tenure could be proved by the roll of the manorial court. Thus even the weakest were protected by custom, and there was no competition in the labor market.

The manor was the social unit, and, as the country was sparsely settled, waste spaces divided the manors from each other, and these wastes came to be considered as commons appurtenant to the domain in which the tenants of the manor had vested rights. The extent of these rights varied from generation to generation, but substantially they amounted to a privilege of pasture, fuel, or the like; aids which, though unimportant to large property owners, were vital when the margin of income was narrow.

During the old imaginative age, before centralization gathered headway, little inducement existed to pilfer these domains, since there was room in plenty, and the population increased slowly, if at all. The moment the form of competition changed, these conditions were reversed. Precisely when a money rent became a more potent force than armed men may be hard to determine, but certainly that time had come when Henry VIII mounted the throne, for then capitalistic farming was on the increase, and speculation in real estate already caused sharp distress. At that time the establishment of a police had destroyed the value of the retainer, and competitive rents had generally supplanted military tenures. Instead of tending to subdivide, as in an age of decentralization, land consolidated in the hands of the economically strong, and capitalists systematically enlarged their estates by enclosing the commons, and depriving the yeomen of their immemorial rights.

The sixteenth-century landlords were a type quite distinct from the ancient feudal gentry. As a class they were gifted with the economic, and not with the martial instinct, and they throve on competition. Their strength lay in their power of absorbing the property of their weaker neighbors under the protection of an overpowering police.

Everything tended to accelerate consolidation, especially the rise in the value of money. While, even with the debasement of the coin, the price of cereals did not advance, the growth of manufactures had caused wool to double in value. “We need not therefore be surprised at finding that the temptation to sheep-farming was almost irresistible, and that statute after statute failed to arrest the tendency.”[1]

The conversion of arable land into pasture led, of course, to wholesale eviction, and by 1515 the suffering had become so acute that details were given in acts of Parliament. Places where two hundred persons had lived, by growing corn and grain, were left desolate, the houses had decayed, and the churches fallen into ruin.[2]The language of these statutes proves that the descriptions of contemporaries were not exaggerated.

For I myself know many towns and villages sore decayed, for it whereas in times past there war in some town an hundred households there remain not now thirty; in some fifty, there are not now ten; yea (which is more to be lamented) I know towns so wholly decayed, that there is neither stick nor stone standing as they use to say.

Where many men had good livings, and maintained hospitality, able at times to help the king in his wars, and to sustain other charges, able also to help their pore neighbors, and virtuously to bring up their children in Godly letters and good sciences, now sheep and conies devour altogether, no man inhabiting the aforesaid places. Those beasts which were created of God for the nourishment of man do now devour man. . . . And the cause of all this wretchedness and beggary in the common weal are the greedy Gentlemen, which are sheepmongers and grazers. While they study for their own private commodity, the common weal is like to decay. Since they began to be sheep masters and feeders of cattle, we neither had victual nor cloth of any reasonable price. No meruayle, for these forestallers of the market, as they use to say, have gotten all things so into their hands, that the poor man must either buy it at their price, or else miserably starve for hunger, and wretchedly die for cold.[3]

The reduction of the acreage in tillage must have lessened the crop of the cereals, and accounts for their slight rise in value during the second quarter of the sixteenth century. Nevertheless this rise gave the farmer no relief, as, under competition, rents advanced faster than prices, and in the generation which reformed the Church, the misery of yeomen had become extreme. In 1549 Latimer preached a sermon, which contains a passage often quoted, but always interesting:

Furthermore, if the king’s honor, as some men say, standeth in the great multitude of people; then these grazers, inclosers, and rent-rearers, are hinderers of the king’s honor. For where as have been a great many householders and inhabitants, there is now but a shepherd and his dog. . . .

My father was yeoman, and had no lands of his own, only he had a farm of three or four pound by year at the uttermost, and hereupon he tilled so much as kept half a dozen men. He had walk for a hundred sheep; and my mother milked thirty kine. He was able, and did find the king a harness, with himself and his horse, while he came to the place that he should receive the king’s wages. I can remember that I buckled his harness when he went unto Blackheath field. He kept me to school, or else I had not been able to have preached before the king’s majesty now.

He married my sisters with five pound, or twenty nobles apiece; so that he brought them up in godliness and fear of God. He kept hospitality for his poor neighbors, and some alms he gave to the poor. And all this he did of the said farm, where he that now hath it payeth sixteen pound by year, or more, and is not able to do anything for his prince, for himself, nor for his children, or give a cup of drink to the poor.[4]

The small proprietor suffered doubly: he had to meet the competition of large estates, and to endure the curtailment of his resources through the enclosure of the commons. The effect was to pauperize the yeomanry and lesser gentry, and before the Reformation the homeless poor had so multiplied that, in 1530, Parliament passed the first of a series of vagrant acts.[5]

ImperialYeomanryOfficer.jpgAt the outset the remedy applied was comparatively mild, for able-bodied mendicants were only to be whipped until they were bloody, returned to their domicile, and there whipped until they put themselves to labor. As no labor was supplied, the legislation failed, and in 1537 the emptying of the convents brought matters to a climax. Meanwhile Parliament tried the experiment of killing off the unemployed; by the second act vagrants were first mutilated and then hanged as felons.[6]

In 1547, when Edward VI was crowned, the great crisis had reached its height. The silver of Potosi had not yet brought relief, the currency was in chaos, labor was disorganized, and the nation seethed with the discontent which broke out two years later in rebellion. The land-owners held absolute power, and before they yielded to the burden of feeding the starving, they seriously addressed themselves to the task of extermination. The preamble of the third act stated that, in spite of the “great travel” and “godly statutes” of Parliament, pauperism had not diminished, therefore any vagrant brought before two justices was to be adjudged the slave of his captor for two years. He might be compelled to work by beating, chaining, or otherwise, be fed on bread and water, or refuse meat, and confined by a ring of iron about his neck, arms or legs. For his first attempt at escape, his slavery became perpetual, for his second, he was hanged.[7]

Even as late as 1591, in the midst of the great expansion which brought prosperity to all Europe, and when the monks and nuns, cast adrift by the suppression of the convents, must have mostly died, beggars so swarmed that at the funeral of the Earl of Shrewsbury:

there were by the report of such as served the dole unto them, the number of 8000. And they thought that there were almost as many more that could not be served, through their unruliness. Yea, the press was so great that divers were slain and many hurt. And further it is reported of credible persons, that well estimated the number of all the said beggars, that they thought there were about 20,000.

It was conjectured “that all the said poor people were abiding and dwelling within thirty miles’ compass of Sheffield.”[8]

In 1549, just as the tide turned, insurrection blazed out all over England. In the west a pitched battle was fought between the peasantry and foreign mercenaries, and Exeter was relieved only after a long siege. In Norfolk the yeomen, led by one Kett, controlled a large district for a considerable time. They arrested the unpopular landlords, threw open the commons they had appropriated, and ransacked the manor houses to pay indemnities to evicted farmers. When attacked, they fought stubbornly, and stormed Norwich twice.

Strype described “these mutineers” as “certain poor men that sought to have their commons again, by force and power taken from them; and that a regulation be made according to law of arable lands turned into pasture.”[9]

Cranmer understood the situation perfectly, and though a consummate courtier, and himself a creation of the capitalistic revolution, spoke in this way of his patrons:

And they complain much of rich men and gentlemen, saying, that they take the commons from the poor, that they raise the prices of all manner of things, that they rule the poverty, and oppress them at their pleasure. . . .

And although here I seem only to speak against these unlawful assemblers, yet I cannot allow those, but I must needs threaten everlasting damnation unto them, whether they be gentlemen or whatsoever they be, which never cease to purchase and join house to house, and land to land, as though they alone ought to possess and inhabit the earth.[10]

Revolt against the pressure of this unrestricted economic competition took the form of Puritanism, of resistance to the religious organization controlled by capital, and even in Cranmer’s time, the attitude of the descendants of the men who formed the line at Poitiers and Crecy was so ominous that Anglican bishops took alarm.

It is reported that there be many among these unlawful assemblies that pretend knowledge of the gospel, and will needs be called gospellers. . . . But now I will go further to speak somewhat of the great hatred which divers of these seditious persons do bear against the gentlemen; which hatred in many is so outrageous, that they desire nothing more than the spoil, ruin, and destruction of them that be rich and wealthy.[11]

Somerset, who owed his elevation to the accident of being the brother of Jane Seymour, proved unequal to the crisis of 1549, and was supplanted by John Dudley, now better remembered as Duke of Northumberland. Dudley was the strongest member of the new aristocracy. His father, Edmund Dudley, had been the celebrated lawyer who rose to eminence as the extortioner of Henry VII, and whom Henry VIII executed, as an act of popularity, on his accession. John, beside inheriting his father’s financial ability, had a certain aptitude for war, and undoubted courage; accordingly he rose rapidly. He and Cromwell understood each other; he flattered Cromwell, and Cromwell lent him money.[12]

Strype has intimated that Dudley had strong motives for resisting the restoration of the commons.[13]

In 1547 he was created Earl of Warwick, and in 1549 suppressed Rett’s rebellion. This military success brought him to the head of the State; he thrust Somerset aside, and took the title of Duke of Northumberland. His son was equally distinguished. He became the favorite of Queen Elizabeth, who created him Earl of Leicester; but, though an expert courtier, he was one of the most incompetent generals whom even the Tudor landed aristocracy ever put in the field.

The disturbances of the reign of Edward VI did not ripen into revolution, probably because of the relief given by rising prices after 1550; but, though they fell short of actual civil war, they were sufficiently formidable to terrify the aristocracy into abandoning their policy of killing off the surplus population. In 1552 the first statute was passed looking toward the systematic relief of paupers.[14] Small farmers prospered greatly after 1660, for prices rose strongly, very much more strongly than rents; nor was it until after the beginning of the seventeenth century, when rents again began to advance, that the yeomanry once more grew restive. Cromwell raised his Ironsides from among the great-grandchildren of the men who stormed Norwich with Kett.

I had a very worthy friend then; and he was a very noble person, and I know his memory is very grateful to all—Mr. John Hampden. At my first going out into this engagement, I saw our men were beaten at every hand. I did indeed; and desired him that he would make some additions to my Lord Essex’s army, of some new regiments; and I told him I would be serviceable to him in bringing such men in as I thought had a spirit that would do something in the work. This is very true that I tell you; God knows I lie not. “Your troops,” said I, “are most of them old decayed serving-men, and tapsters, and such kind of fellows; and,” said I, “their troops are gentlemen’s sons, younger sons and persons of quality: do you think that the spirits of such base and mean fellows will ever be able to encounter gentlemen, that have honor and courage and resolution in them?” . . . Truly I did tell him; “You must get men of a spirit: . . . a spirit that is likely to go on as far as gentlemen will go; — or else you will be beaten still. . . .”

He was a wise and worthy person; and he did think that I talked a good notion, but an impracticable one. Truly I told him I could do somewhat in it, . . . and truly I must needs say this to you, . . . I raised such men as had the fear of God before them, as made some conscience of what they did; and from that day forward, I must say to you, they were never beaten, and wherever they were engaged against the enemy, they beat continually.[15]

Thus, by degrees, the pressure of intensifying centralization split the old homogeneous population of England into classes, graduated according to their economic capacity. Those without the necessary instinct sank into agricultural day laborers, whose lot, on the whole, has probably been somewhat worse than that of ordinary slaves. The gifted, like the Howards, the Dudleys, the Cecils, and the Boleyns, rose to be rich nobles and masters of the State. Between the two accumulated a mass of bold and needy adventurers, who were destined finally not only to dominate England, but to shape the destinies of the world.

One section of these, the shrewder and less venturesome, gravitated to the towns, and grew rich as merchants, like the founder of the Osborn family, whose descendant became Duke of Leeds; or like the celebrated Josiah Child, who, in the reign of William III, controlled the whole eastern trade of the kingdom. The less astute and the more martial took to the sea, and as slavers, pirates, and conquerors, built up England’s colonial empire, and established her maritime supremacy. Of this class were Drake and Blake, Hawkins, Raleigh, and Clive.

For several hundred years after the Norman conquest Englishmen showed little taste for the ocean, probably because sufficient outlet for their energies existed on land. In the Middle Ages the commerce of the island was mostly engrossed by the Merchants of the Steelyard, an offshoot of the Hanseatic league; while the great explorers of the fifteenth and early sixteenth centuries were usually Italians or Portuguese; men like Columbus, Vespucius, Vasco-da-Gama, or Magellan. This state of things lasted, however, only until economic competition began to ruin the small farmers, and then the hardiest and boldest race of Europe were cast adrift, and forced to seek their fortunes in strange lands.

For the soldier or the adventurer, there was no opening in England after the battle of Flodden. A peaceful and inert bourgeoisie more and more supplanted the ancient martial baronage; their representatives shrank from campaigns like those of Richard I, the Edwards, and Henry V, and therefore, for the evicted farmer, there was nothing but the far-off continents of America and Asia, and to these he directed his steps.

The lives of the admirals tell the tale on every page. Drake’s history is now known. His family belonged to the lesser Devon gentry, but fallen so low that his father gladly apprenticed him as ship’s boy on a channel coaster, a life of almost intolerable hardship. From this humble beginning he fought his way, by dint of courage and genius, to be one of England’s three greatest seamen; and Blake and Nelson, the other two, were of the same blood.

Sir Humphrey Gilbert was of the same West Country stock as Drake; Frobisher was a poor Yorkshire man, and Sir Walter Raleigh came from a ruined house. No less than five knightly branches of Raleigh’s family once throve together in the western counties; but disaster came with the Tudors, and Walter’s father fell into trouble through his Puritanism. Walter himself early had to face the world, and carved out his fortune with his sword. He served in France in the religious wars; afterward, perhaps, in Flanders; then, through Gilbert, he obtained a commission in Ireland, but finally drifted to Elizabeth’s court, where he took to buccaneering and conceived the idea of colonizing America.

A profound gulf separated these adventurers from the landed capitalists, for they were of an extreme martial type; a type hated and feared by the nobility. With the exception of the years of the Commonwealth, the landlords controlled England from the Reformation to the revolution of 1688, a period of one hundred and fifty years, and, during that long interval, there is little risk in asserting that the aristocracy did not produce a single soldier or sailor of more than average capacity. The difference between the royal and the parliamentary armies was as great as though they had been recruited from different races. Charles had not a single officer of merit, while it is doubtful if any force has ever been better led than the troops organized by Cromwell.

Men like Drake, Blake, and Cromwell were among the most terrible warriors of the world, and they were distrusted and feared by an oligarchy which felt instinctively its inferiority in arms. Therefore, in Elizabeth’s reign, politicians like the Cecils took care that the great seamen should have no voice in public affairs. And though these men defeated the Armada, and though England owed more to them than to all the rest of her population put together, not one reached the peerage, or was treated with confidence and esteem. Drake’s fate shows what awaited them. Like all his class, Drake was hot for war with Spain, and from time to time he was unchained, when fighting could not be averted; but his policy was rejected, his operations more nearly resembled those of a pirate than of an admiral, and when he died, he died in something like disgrace.

The aristocracy even made the false position in which they placed their sailors a source of profit, for they forced them to buy pardon for their victories by surrendering the treasure they had won with their blood. Fortescue actually had to interfere to defend Raleigh and Hawkins from Elizabeth’s rapacity. In 1592 Borough sailed in command of a squadron fitted out by the two latter, with some contribution from the queen and the city of London. Borough captured the carack, the Madre-de-Dios, whose pepper alone Burleigh estimated at £102,000. The cargo proved worth £141,000, and of this Elizabeth’s share, according to the rule of distribution in use, amounted to one-tenth, or £14,000. She demanded £80,000, and allowed Raleigh and Hawkins, who had spent £34,000, only £36,000. Raleigh bitterly contrasted the difference made between himself a soldier, and a peer, or a London speculator:

I was the cause that all this came to the Queen, and that the King of Spain spent 300,000li the last year. . . . I that adventured all my estate, lose of my principal. . . . I took all the care and pains; . . . they only sate still . . . for which double is given to them, and less then mine own to me.[16]

Raleigh was so brave he could not comprehend that his talent was his peril. He fancied his capacity for war would bring him fame and fortune, and it led him to the block. While Elizabeth lived, the admiration of the woman for the hero probably saved him, but he never even entered the Privy Council, and of real power he had none. The sovereign the oligarchy chose was James, and James imprisoned and then slew him. Nor was Raleigh’s fate peculiar, for, through timidity, the Cavaliers conceived an almost equal hate of many soldiers. They dug up the bones of Cromwell, they tried to murder William III, and they dragged down Marlborough in the midst of victory. Such were the new classes into which economic competition divided the people of England during the sixteenth century, and the Reformation was only one among many of the effects of this profound social revolution.

[. . .]

Although the spoliations of Edward [VI] are less well remembered than those of his father [Henry VIII], they were hardly less drastic. They began with the estates of the chantries and guilds, and rapidly extended to all sorts of property. In the Middle Ages, one of the chief sources of revenue of the sacred class had been their prayers for souls in purgatory, and all large churches contained chapels, many of them richly endowed, for the perpetual celebration of masses for the dead; in England and Wales more than a thousand such chapels existed, whose revenues were often very valuable. These were the chantries, which vanished with the imaginative age which created them, and the guilds shared the same fate.

Before economic competition had divided men into classes according to their financial capacity, all craftsmen possessed capital, as all agriculturists held land. The guild established the craftsman’s social status; as a member of a trade corporation he was governed by regulations fixing the number of hands he might employ, the amount of goods he might produce, and the quality of his workmanship; on the other hand, the guild regulated the market, and ensured a demand. Tradesmen, perhaps, did not easily grow rich, but they as seldom became poor.

With centralization life changed. Competition sifted the strong from the weak; the former waxed wealthy, and hired hands at wages, the latter lost all but the ability to labor; and, when the corporate body of producers had thus disintegrated, nothing stood between the common property and the men who controlled the engine of the law. By he 1 Edward VI., c. 14, all the possessions of the schools, colleges, and guilds of England, except the colleges of Oxford and Cambridge and the guilds of London, were conveyed to the king, and the distribution thus begun extended far and wide, and has been forcibly described by Mr. Blunt:

They tore off the lead from the roofs, and wrenched out the brasses from the floors. The books they despoiled of their costly covers, and then sold them for waste paper. The gold and silver plate they melted down with copper and lead, to make a coinage so shamefully debased as was never known before or since in England. The vestments of altars and priests they turned into table-covers, carpets, and hangings, when not very costly; and when worth more money than usual, they sold them to foreigners, not caring who used them for “superstitious” purposes, but caring to make the best “bargains” they could of their spoil. Even the very surplices and altar linen would fetch something, and that too was seized by their covetous hands.[17]

These “covetous hands” were the privy councilors. Henry had not intended that any member of the board should have precedence, but the king’s body was not cold before Edward Seymour began an intrigue to make himself protector. To consolidate a party behind him, he opened his administration by distributing all the spoil he could lay hands on; and Mr. Froude estimated that “on a computation most favorable to the council, estates worth . . . in modern currency about five millions” of pounds, were “appropriated—I suppose I must not say stolen—and divided among themselves.”[18] At the head of this council stood Cranmer, who took his share without scruple. Probably Fronde’s estimate is far too low; for though Seymour, as Duke of Somerset, had, like Henry, to meet imperative claims which drained his purse, he yet built Somerset House, the most sumptuous palace of London.

Notes

1. Agriculture and Prices, iv. 64.

2. 6 Henry VIII., c. 5; 7 Henry VIII., c. i.

3. Jewel of Joy, Becon. Also England in the Reign of Henry VIII, Early Eng. Text Soc, Extra Ser., No. xxxii. p. 75.

4. First Sermon before Edward VI. Sermons of Bishop Latimer, ed. of Parker Soc., 100, 101.

5. 22 Henry VIII., c. 12.

6. 27 Henry VIII., c. 25.

7. Edward VI., c. 3.

8. Brit. Mus., Cole MS. xii. 41. Cited in Henry VIII. and the English Monasteries, Gasquet, ii. 514, note.

9. Eccl. Mem., ii. pt. i, 260.

10. Sermon on Rebellion, Cranmer, Miscellaneous Writings and Letters, 194–6.

11. Sermon on Rebellion, Cranmer, Miscellaneous Writings and Letters, 195, 196.

12. Cal. ix. No. 193.

13. Eccl. Mem., ii. pt. I, 152.

14. 5 and 6 Edw. VI., c. 2.

15. Cromwell’s Letters and Speeches, Carlyle, Speech XI.

16. Raleigh to Burleigh, Life of Sir Walter Raleigh, Edwards, ii. 76, letter xxxiv.

17. The Reformation of the Church of England, ii. 68.

18. History of England, v. 432.

 


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vendredi, 09 mars 2012

Roosevelt, la destruction de l’Europe et le désastre de la première mondialisation

Roosevelt, la destruction de l’Europe et le désastre de la première mondialisation

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par Nicolas Bonnal

Quand on se plaint du présent, il faut toujours se rappeler le bon vieux temps des guerres. Ceux qui s’étonnent du niveau abyssal de notre endettement ou du bilan désastreux – ce ne sont pas nos lecteurs – du printemps arabe et du bilan de la guerre en Irak ont ainsi besoin qu’on leur rafraichisse la mémoire.

J’ai toujours été étonné par l’incroyable dimension du désastre européen au lendemain de la deuxième guerre mondiale. Les pertes humaines sont bien sûr énormes, bien sûr imputables aux nazis et la à la guerre à l’Est, mais aussi bien sûr les pertes matérielles. Toute l’Europe occidentale a été bombardée, y compris les lieux saints du mont Cassin (les puissances protestantes voulaient intimider le pape). Staline contrôle tout l’orient de l’Europe et l’on laisse les guerres civiles et la disette s’installer un peu partout comme au bon vieux temps du moyen âge finissant. Même l’Angleterre a été ruinée, rincée même par son coopérant américain, et Churchill, auteur malheureux du conflit est chassé des Communes avec les huées. C’est l’époque d’Orwell, et ce n’est pas un hasard. Mais l’être humain aime être motivé par le désastre, on le sait depuis la Bible et Milton.

***

Il y a bien un responsable à tout cela, responsable qui a voulu et permis la destruction de l’Europe (nous avons été sauvés de la misère par son successeur Truman), l’anéantissement et non la défaire de l’Allemagne, la liquidation des empires coloniaux français et britanniques ; qui a voulu aussi la montée de la Chine communiste et le triomphe de l’union soviétique présentée avec son NKVD, son goulag et le Holodomorukrainien [1] comme un « paradis social mutualiste », y compris dans les films hollywoodiens de l’époque.

Ce responsable c’est Roosevelt auquel l’historien amateur (dans amateur il y a aimer, disait Orson Welles) Bernard Plouvier(1) a consacré un passionnant ouvrage à la fois synthétique et documenté. Il résume parfaitement le bellicisme insensé de Roosevelt qui a tout fait pour lancer le Japon dans la guerre, détruire l’Europe (plus de Français morts dans les bombardements libérateurs que de soldats US tués pendant la guerre !), diviser le monde et créer le réseau de bases et le fameux complexe militaro-industriel d’Eisenhower.

***

Roosevelt se laisse aussi hypnotiser, conifier disait Céline, par les mots comme nos idiots d’aujourd’hui. Il se lance dans une « croisade », exige une « capitulation sans condition » (en suivant le modèle affreux de l’incroyable guerre de sécession, premier scandale des temps modernes industriels), hurle et lance une « guerre totale » qui ne laisse d’autre choix à l’adversaire que de se mal comporter jusqu’au bout. Il laisse aussi les Juifs d’Europe à leur sort, et dès avant la guerre, alors que de tous côtés on le prévient et que même les nazis veulent faire des échanges hommes-matériel.

Mais pour Roosevelt la solution la pire est toujours la meilleure : il fallait en passer par la shoah et par soixante millions de morts pour que le nouvel ordre mondial auquel Roosevelt pense puisse s’établir ; et casser mille oeufs pour une petite omelette ; repensez au cas irakien.

***

Mille oeufs pour la mauvaise omelette. C’est d’une certaine manière l’héritage de cet impayable New Deal dont nous a rebattus les oreilles : le triplement de la dette n’a pas attendu Bush le guerrier et Obama le généreux ! Avec la guerre la dette aura sextuplé ! On a triplé en huit ans le nombre de fonctionnaires et on n’a pas créé d’emplois, la crise de 38 remettant sur la pavé des millions d’américains. Mais Roosevelt tient les médias et il est hélas réélu cherchant à sauver son économie par une guerre mondiale destinée à contrôler le pétrole, à mettre fin à la concurrence allemande et à ouvrir les marchés coloniaux de la Old Europe si chère à Rumsfeld…

En même temps il a socialisé l’économie américaine, fait exploser les impôts, avec des tranches à 100 %. Comme dit Bernard Plouvier : « L’Etat US, sous FDR, apprend à vivre à crédit ; c’est une leçon que les gouvernants des USA n’ont pas oubliée ». L’autre qu’ils n’ont pas oublié, c’est que la guerre fait vivre, et que le complexe militaro-industriel s’étend toujours plus, jusqu’aux enfants maintenant (j’en reparlerai).

***

Plouvier voit aussi un autre projet, et je pense à Bernanos et à son texte magique « La France contre les robots« . Roosevelt rêve d’un Etat mondial où tout est sous contrôle (cf. Orwell dont l’Etat se nomme Oceania en référence au damné Cromwell), et où l’homme, une fois qu’il sera transformé, va se comporter comme un robot discipliné et interchangeable.

« FDR compte transformer les peuples qui fourniront ses marchés à l’économie des USA en autant d’étudiants en l’art de vivre à l’américaine. »

Franklin Roosevelt, créature de la matrice américaine au détriment du peuple américain et du monde, mais surtout créateur à court terme des empires communistes et du champ de ruines européen et nippon, et du tiers-monde postcolonial…

Il est clair à la lecture de ce livre qu’il vaut mieux pour l’Europe et le monde un mauvais républicain qu’un bon démocrate à la Maison Blanche ; et que le grand Reagan fut celui qui nous libéra sur tous les plans de l’effroyable bilan politique et humain du sinistre grand homme.


(1) Bernard Plouvier, « l’Enigme Roosevelt, faux naïf et vrai Machiavel », Ed. Dualpha, collection « Vérités sur l’Histoire ».

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samedi, 03 mars 2012

Y a-t-il eu une pensée navale romaine ?

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Y a-t-il eu une pensée navale romaine ?

par Jean Pagès


On ne possède pas de textes d’historiens ou de penseurs de l’Antiquité latine ou grecque qui auraient traité de cette question telle qu’on l’énonce, peut-être avec trop de facilité, de nos jours ; en Grèce, la marine avait toujours tenu une grande part dans les préoccupations des politiques, surtout après Salamine, mais n’avait donné lieu qu’à des déclarations de politique navale, sans qu’il soit fait référence à une pensée stratégique plus affinée qui restait sous-jacente. Il en allait autrement à Rome : pour le citoyen moyen, la marine jouait un rôle secondaire et était méprisée par comparaison aux services glorieux des légions. En revanche, ceux qui eurent la charge de la destinée de Rome, tant durant la période républicaine que sous l’Empire, avaient compris l’importance de la marine et Auguste le premier eut l’intuition d’une stratégie navale à l’échelle de l’empire.

Le chapitre de l’histoire de Rome concernant la marine, tant républicaine qu’impériale, a été négligé par les historiens de l’Antiquité, qui ne nous ont donné que des renseignements imparfaits. Le seul auteur qui aurait pu nous éclairer sur la pensée navale romaine de la période républicaine est Polybe (200-125 avant J.-C.) ; malheureusement la partie de son œuvre qui aurait pu nous apprendre comment, en si peu de temps, les Romains ont atteint une telle supériorité sur mer est perdue. Quant à Tite Live (64 avant à 17 après J.-C.), son Histoire n’apporte que peu de renseignements. De même les auteurs de l’époque impériale ne se sont guère intéressés à la création des flottes de Misène et de Ravenne et curieusement Auguste lui-même, qui en était le père, n’en dit rien dans l’inscription d’Ancyre considérée pourtant comme son testament. Dion Cassius (IIe/IIIe siècle après J.-C.) n’en dit pas plus. Strabon (63 avant/19 après J.-C.) a bien forgé le concept de thalassocratie (thalassokratia. géographie, 48), qui connaîtra plus tard une grande vogue, mais la perte de ses écrits historiques empêche d’apprécier l’importance qu’il lui accordait. Quant à Suétone (69 à 122 après J.-C.), il rapporte que les Romains, dans leurs préjugés tenaces contre la marine, ont estimé que l’existence de ces flottes était pour eux un fait négligeable.
Cependant, certains chercheurs contemporains ont tenté d’étudier, non pas le problème de la pensée navale romaine, mais celui de la rencontre de Rome avec la mer et ses conséquences.

La marine romaine de la République 

Les historiens modernes sont partagés sur cette question et la plupart d’entre eux répondraient sans doute par la négative. Cependant, on peut estimer que si les Romains n’ont pas eu une pensée navale structurée et exprimée, du moins au commencement, ils ont, par la force des choses, été à même de saisir l’importance de la marine de guerre chez un peuple qui leur était géographiquement proche comme les Etrusques ou encore chez les Grecs de Syracuse : les premiers n’avaient-ils pas remporté une douteuse victoire sur les Phocéens au large de la Corse en 540/535 avant notre ère et les seconds la victoire d’Himère sur les Puniques en 480, l’année de Salamine ? Jacques Heurgon remarque qu’« on entrevoit en particulier que Rome, avant de se doter à Ostie d’un port qui lui fût propre, utilisa la flotte de Caeré aux fins de sa politique maritime naissante » (1). De même, les Romains n’étaient pas sans connaître l’activité des marines marchandes des cités grecques de Campanie et de Grande Grèce, Naples et Tarente, ainsi que les succès des escadres syracusaines contre les Puniques.
L’événement le plus ancien de l’histoire de la marine romaine remonte à 394, année au cours de laquelle un navire romain se rendant à Delphes avec une ambassade religieuse fut arraisonné et capturé par des navires des îles Lipari et emmené dans ces îles ; les gens de Lipari avaient pris ce navire pour un pirate étrusque. Après enquête, les Romains purent continuer leur voyage, escortés par des navires de guerre lipariens jusqu’à Delphes et revenir ensuite à Rome (Diodore, XIV, 93).
Il est attesté que dès le début du IVe siècle, à une date indéterminée, Rome a entrepris une colonisation outre-mer (2). Les textes laissent entendre que Rome « agissait en association avec Pyrgi, le port de Caeré ou mieux utilisait ses flottes ». Serait-ce cette expédition que, d’après Théophraste Rome fit « autrefois » en Corse avec 25 navires ? De son côté, Diodore (XV, 27, 24) parle de 500 colons envoyés par elle en Sardaigne en 377.
En 349, des pirates grecs s’attaquèrent à la côte du Latium. Rome, ne devant pas posséder de forces navales à cette époque, se contenta d’envoyer des troupes qui s’opposèrent avec succès au débarquement ; les Grecs, à court de vivres et surtout d’eau, abandonnèrent l’opération (Tite Live, VII, 25, 3-4 ; 26, 10-15).
Mais c’est l’exemple de la prise d’Antium (aujourd’hui Porto d’Anzio), au sud de Rome en 348, qui est le plus typique. Antium était un repaire de pirates étrusques que les Romains auraient dû réduire par une action navale ; ce furent des légionnaires qui s’emparèrent de la flotte d’Antium ; cette soi-disant victoire sur mer fut à l’origine de la colonne rostrale décorée d’éperons de navires ennemis pris par des soldats ! (Tite Live, VIII, 13 et 14)
Malgré cela, Rome apparaît comme une petite puissance maritime naissante à cette époque : le renouvellement de l’alliance carthaginoise en 348, l’enrôlement des pirates d’Anzio, la fondation d’une colonie à Ostie à l’embouchure du Tibre (ostium Tiberis) dont elle fera un port en 335, l’occupation militaire de l’île de Ponza au large des côtes de Campanie montrent que le destin de Rome allait se jouer désormais autant sur mer que sur terre (3).
A partir de 311, Rome nomme chaque année deux magistrats chargés de la marine (duoviri navales) qui seront chacun à la tête d’une petite escadre de dix navires de guerre pour lutter contre la piraterie en Tyrrhénienne. Ces deux escadres n’eurent pas grand succès : l’une d’elles tenta un débarquement contre Nuceria, près de Naples, qui échoua, la ville fut prise par des troupes de terre ; dans le conflit entre Rome et Tarente, une de ces deux escadres fut sévèrement malmenée par les forces navales adverses en 282 (4).
Les types de navires de guerre employés par les Romains, dans leurs escadres commandées par les duoviri navales, ne nous sont pas connus ; on peut supposer raisonnablement que ce devaient être des trières (à trois rangs de rames) et des pentécontères (à cinquante rameurs). Ainsi on sait qu’en 264, au début de la première guerre punique, Rome n’avait plus de marine et dut faire appel à ses socii navales, les cités de Grande Grèce et de Campanie  : Tarente, Locres, Vélia, Naples, pour mettre à sa disposition des trières et des pentécontères permettant à ses troupes de franchir le détroit de Messine (Polybe, I, 20).
En définitive, dans les années précédant la première guerre punique, Rome ne possède qu’une faible marine militaire et n’a qu’une très mince expérience maritime, toute occupée qu’elle est par la conquête de la péninsule, conquête dans laquelle elle réussit mieux que sur mer, avec son esprit « terrien ».
J.H. Thiel a étudié d’une manière approfondie les premières actions sur mer des Romains et les juge avec trop de sévérité et surtout sans nuances quand il dit qu’ils étaient de « vrais terriens » et des « marins d’eau douce ». Jusqu’à la première guerre punique, et même plus tard, ils ont été des marins maladroits et de piètres tacticiens, malgré leurs victoires acquises grâce à la discipline plutôt qu’à la connaissance intime de la mer et à leur sens tactique. « Le caractère général de l’histoire romaine au cours de cette période (jusqu’à la première guerre punique) ne laisse que peu de place pour une quelconque action sur mer de leur part : ce n’est pas l’histoire d’une puissance navale, mais celle d’une puissance continentale caractéristique, celle d’un peuple d’agriculteurs qui a conquis, patiemment et obstinément, toute l’Italie par l’intérieur, sans qu’apparaisse une seule fois la marine de guerre dans le tableau » (5).
Selon Jean Rougé, cette conception « terrienne » de la puissance maritime a conduit les Romains, qui n’avaient vraisemblablement pas profité de l’expérience de marins des cités de Grande Grèce, à défendre leur territoire du côté de la mer par une action purement terrestre de troupes légionnaires ou par « l’intermédiaire des colonies maritimes situées dans des positions stratégiques ». Cet auteur ajoute que « le témoignage de Polybe concorde mal avec une certaine idée que l’on a tendance à se faire actuellement de la puissance maritime avant les guerres puniques » (6). Cela a été vrai jusqu’à la première guerre punique et non au-delà.
Jacques Heurgon remarque que les intérêts navals de Rome s’affirmèrent aux environs des années 306-302 « par plusieurs faits diplomatiques importants ; c’est à cette époque que Polybe fait remonter l’amitié de Rome et de Rhodes (XXX, 5, 6), le troisième traité conclu avec Carthage en 306 définissant les zones respectives des deux parties excluant Rome de la Sicile et Carthage de l’Italie… L’accord intervenu vers 302 entre Rome et Tarente où Rome s’engageait à ne pas dépasser vers le nord le cap Lacinien… » (7).
La victoire de Rome sur Pyrrhus en 275 et son alliance avec Tarente en 272, qui fut, comme Naples, astreinte à lui fournir en temps de guerre des navires et des équipages, firent d’elle une puissance méditerranéenne. Des quaestores classici furent créés en 267 ; ils n’étaient pas destinés à un commandement dans une flotte encore inexistante, mais plutôt à contrôler la mobilisation des escadres des cités alliées de Rome, les socii navales (8).
On sait d’après Polybe comment les Romains construisirent une flotte de 100 quinquérèmes et de 20 trières en prenant modèle, pour les premières, sur une quinquérème punique échouée et tombée entre leurs mains. Polybe nous présente la capture de la quinquérème punique comme l’événement qui détermina les Romains à combattre sur mer les Puniques.
Si donc cet incident ne s’était pas produit, il est clair que, du fait de leur inexpérience, les Romains n’auraient jamais eu les moyens de réaliser leurs desseins (I, 20).
Aux yeux de certains historiens modernes comme Gilbert Charles-Picard, qui le qualifie d’« historiette », cet événement de la capture de la galère a paru suspect ; quelle que soit la genèse de la flotte romaine, la décision de la construire dénote chez les Romains une ferme résolution de combattre les Puniques sur leur propre terrain avec leur arme : la quinquérème, dont ils ont la maîtrise. Ce n’est pas le fruit d’une pensée navale, plutôt une forme de stratégie primaire mais efficace, et qui n’est pas le moindre élément constitutif de cette pensée. En outre, la méthode choisie par le commandement romain pour l’entraînement des équipes de nage des quinquérèmes montre également une systématisation digne des marines « matérialistes » du XXe siècle (9). Comme le remarque Jean Rougé, « Il est évident que le récit de Polybe, tout à la gloire de la détermination et de l’esprit d’initiative de Rome, doit être forcément enjolivé, car pour ses équipages Rome disposait de ses socii navales, de ses alliés maritimes » (10).
L’idée qui ressort des études des historiens contemporains est que les essais initiaux de l’activité navale des Romains ne doivent être ni exagérés, ni minimisés, et ils s’accordent pour reconnaître avec Polybe que c’est dans son récit qu’on verra l’élévation et la hardiesse du tempérament romain (…car) « il ne fallait pas laisser ignorer quand, comment et pourquoi les Romains se sont lancés pour la première fois sur mer… » (I, 20).
Carthage, face à la petite puissance continentale romaine, exerce son hégémonie entre les Syrtes et Gibraltar, s’est installée en Sicile et en Sardaigne, exploite les minerais du sud de l’Espagne. C’est une cité de commerçants et surtout de rouliers des mers. Sa flotte de guerre est puissante et combative. Carthage sera l’ennemie principale de Rome et l’obstacle majeur à l’impérialisme romain entre le IIIe et le milieu du IIe siècle.
A la lumière des remarques de Thiel (11) dans son analyse de la première guerre punique, il est aisé de comprendre pourquoi la pensée navale romaine a eu si peu de consistance et aussi pourquoi une compétition entre les deux marines était improbable. En effet, l’auteur, observant minutieusement la stratégie des deux adversaires par le biais des événements de la guerre, porte un jugement sur chacun d’eux :
1) Rome semble à première vue avoir une stratégie navale peu solide, incohérente et surprenante ; en réalité, ce n’est pas uniquement le manque de traditions maritimes qui est en cause, mais la nécessité ; le Sénat romain n’était pas libre de faire ce qui lui paraissait être le meilleur, car il avait à compter avec l’opinion publique, romaine d’abord et plus généralement avec celle des cités italiennes : « La mer était loin d’être familière aux Romains et surtout, ils redoutaient le combat naval ; si on décidait de construire des navires, c’était à Rome d’en supporter la dépense et aux Romains à servir de soldats de marine sur les bâtiments de la flotte ; c’était aux alliés italiens de Rome de fournir la plus grande partie des équipages et des rameurs » (12).
Thiel estime qu’en 259, un an après la victoire de Mylae, les Romains auraient pu lancer une opération de débarquement en Afrique ; cela n’a pas été possible puisqu’il fallait une nouvelle flotte plus nombreuse que la précédente. Le Sénat n’aurait pu convaincre les Romains peu connaisseurs des choses navales. La construction d’une nouvelle flotte après une victoire leur aurait paru une absurdité.
Toutefois, en 257-256, les Romains construisirent une flotte bien plus puissante que celle de 260, ce qui représente le deuxième grand programme de construction de toute la guerre qui dura de 264 à 241. Enfin, ce fut la mise en service de la flotte, entièrement neuve et très efficace, avant la victoire des îles Aegades sous le commandement d’un amiral exceptionnel, le consul Caius Lutatius Catulus.
Les énormes pertes en vies humaines et en bâtiments, dues aux actions militaires ou aux tempêtes, décimèrent littéralement la population adulte mâle à Rome : Thiel parle de 20% entre 264 et 246, soit 50.000 hommes ; Rome alla jusqu’à ne plus reparaître sur mer entre 249 et 243 (13).
2) Au sujet de Carthage, sans entrer dans les erreurs qu’elle commit dans cette guerre, on peut dire qu’elle possédait une flotte puissante et efficace et des amiraux habiles et courageux.
Cependant, les Carthaginois souffraient d’une faiblesse qui les poussait à la facilité, enclins qu’ils étaient à prendre la voie la moins ardue et à sous-estimer leurs adversaires. Carthage, il ne faut pas l’oublier, était une cité de marchands paisibles, qui désiraient éviter les guerres chaque fois que c’était possible ou bien relâchaient leurs efforts, en temps de guerre, quand le danger était momentanément écarté. Thiel parle de la « quiétude punique », une sorte de torpeur, de paralysie qui se manifeste par une apathie leur faisant manquer des occasions et perdre un conflit dans lequel ils auraient dû triompher.
Par ailleurs, Carthage ne pouvait à la fois entretenir une grande flotte et une armée de nombreux mercenaires ; une conséquence désastreuse de cet état de fait fut la défaite d’une flotte punique mal armée, surchargée, avec des équipages peu entraînés, face aux forces navales romaines en excellente condition au large des îles Aegades en 241.
Rome, à la fin de la première guerre punique, se trouva être la seule puissance navale de la Méditerranée occidentale ; elle joua son rôle de « fleet in being » au cours des 60 années qui séparent la bataille des îles Aegades (241) du début de la deuxième guerre punique. De plus, sans qu’elle eût une quelconque volonté d’expansion maritime, avec la possession de la Sardaigne et de la Corse, Rome commença à se constituer, à partir de la Tyrrhénienne, un embryon de mare nostrum, plutôt comme protection de son territoire que comme zone d’opérations navales. Thiel remarque qu’au cours du IIe siècle « la puissance navale romaine montra de plus en plus des symptômes de faiblesse alors que le centre de gravité se déplaçait vers les excellentes marines de Pergame et surtout de Rhodes ; dans la guerre contre Antiochos, ce furent les forces navales rhodiennes qui gagnèrent les batailles ».
Thiel peut conclure : « Avant le règne d ‘Auguste, il n’était pas question pour Rome de posséder une marine de guerre permanente ; quand on ne craignait pas de guerre navale, les Romains n’entretenaient pas de navires de guerre armés…, Pendant près d’un siècle et exactement pendant la période de l’histoire de Rome qui correspond à sa plus grande expansion, la marine de guerre romaine fut presque inexistante » (14).
Les flottes des derniers siècles de la République furent très différentes de celles des guerres puniques. Depuis ses débuts, à la fin du IVe siècle, l’activité sur mer des Romains avait beaucoup profité de l’expérience des Grecs et des Etrusques ; toutefois, il faut rappeler que pendant les guerres puniques, c’est Rome qui a armé en partie ses escadres avec ses propres citoyens, a construit ses navires avec ses propres deniers et a mis à leur tête un consul ou un préteur romain. Cependant, à partir de 200 avant J.-C., Rome fit reposer sa puissance maritime sur ses alliés grecs et surtout sur les forces navales rhodiennes, dont l’entraînement était exceptionnel.
Les cités alliées d’Ionie, de Phénicie, de Pamphylie et de Syrie fournirent la plupart des navires des escadres romaines, à l’exception de ceux que Rome construisait, qui étaient armés par des équipages de ces cités, si bien que les techniques navales grecques et orientales s’imposèrent de plus en plus dans la marine romaine à l’époque de la guerre sociale (90-88). Quant aux commandants en chef de ces flottes, qui étaient parfois des Grecs, Rome les subordonnait aux commandants des troupes de terre, preuve qu’elle n’avait pas entièrement compris le rôle d’une force navale.
Ces dispositions n’empêchèrent pas Mithridate, roi du Pont, lors de la première guerre qu’il mena contre Rome entre 89 et 85 avant J.-C., de s’emparer de la maîtrise de la mer Egée, ce qui entraîna, après sa défaite en 84, l’apparition d’une flotte permanente pour la première fois dans l’histoire de la marine romaine et par conséquent l’abandon du désarmement des forces navales après une victoire, ce qui avait été courant par le passé. Cette évolution laisse présager qu’une pensée navale est en gestation et qu’un embryon de marine impériale est en place, ce qui permet à C.G. Starr de dire que « si l’on demande à quelqu’un de citer un événement qui marque les débuts de la marine impériale romaine, cet événement serait à coup sûr celui de la première guerre de Rome contre Mithridate » (15).
Une autre conséquence de cette évolution fut la mise en place par Sylla, probablement en 85, d’un plan de défense des côtes de l’Asie mineure : des cités maritimes de cette région devaient construire des navires de guerre et les conserver en réserve pour une utilisation future ; cela permit à Rome d’avoir la maîtrise de la mer pendant la troisième et dernière guerre contre Mithridate (83-82) ; C.G. Starr observe qu’il était difficile pour l’Etat romain de poursuivre la réalisation d’un plan à cause des changements annuels de ceux qui avaient la responsabilité de son exécution.
Cette évolution se poursuivit quand Pompée, en 67 avant J.-C., triompha en trois mois des pirates qui infestaient presque toutes les eaux méditerranéennes. Selon Pline (Histoire naturelle, VII, 98) Pompée aurait « redonné la maîtrise de la mer à Rome » qui l’avait perdue au point que des pirates eurent l’audace de couler une flotte consulaire dans le port même d’Ostie (Plutarque, Pompée, XXXVIII à XLIV).
C’est l’époque où le comportement de Rome dans l’exercice de la maîtrise de la mer va commencer à se préciser et où la marine romaine va jouer un rôle capital dans les guerres civiles et après elles dans l’Empire. Les guerres contre Mithridate et la rapide campagne contre les pirates avaient montré l’importance de la puissance navale oubliée depuis les guerres puniques. F.E. Adcock remarque que « dans sa campagne la plus difficile, Pompée s’appuyait sur la puissance navale et César faisait confiance à la mer ; dans les situations graves, le dernier mot resta à la mer » (16). Il fait allusion aux opérations autour de Dyrrachium (Durazzo) où la très puissante flotte de Pompée fut mise en échec par les forces césariennes. On possède là une preuve supplémentaire que l’exercice de la maîtrise de la mer était considéré par les généraux romains comme un gage de victoire.
Pendant la guerre civile, les flottes devinrent de plus en plus puissantes ; Pompée, en faisant appel aux cités maritimes d’Asie, réussit à rassembler une force d’environ 300 navires au début de 48 ; ce sera Sextus Pompée, fils du grand Pompée, qui, possédant la maitrise de la Méditerranée occidentale, s’attaquera au ravitaillement en grains de Rome et fera des descentes sur les côtes italiennes pour un pillage en règle entre 42 et 40 avant J.-C.
En 38, le futur Auguste et Agrippa, son conseiller militaire et technique, vont construire une flotte de 400 navires qui triomphera de celles de Sextus Pompée à Mylae en 37, à Nauloque en 36 et finalement à Actium en 31. Cette force navale sera le noyau de la future flotte impériale. Ne doit-on pas voir dans cette œuvre une ébauche déjà bien avancée d’une pensée navale où Octave, le futur Auguste, représente la part politique et stratégique et Agrippa la collaboration du technicien et surtout du tacticien ; n’a-t-il pas été l’inventeur du harpax, espèce de grappin lancé par catapulte et ne fut-il pas honoré par le nouveau César qui lui donna une couronne navale, jamais jusqu’à ce jour octroyée à quiconque ? (Tite Live, CXXIX).
A cette flotte, il fallait une base qui, curieusement, fut choisie avant 37 dans la Provincia, à Forum Julii (Fréjus) où une partie de la flotte fut construite ; un port militaire fut créé plus près de Rome à Portus Julius, dans le golfe de Puteoli (Pouzzoles), et un centre d’entraînement dans le lac Averne, qui occupe un cratère parfaitement abrité de tous les vents
La pensée navale embryonnaire de l’époque républicaine a pu au début être la conséquence d’une conception rationnelle de la division des tâches dans un conflit ; elle laissait aux alliés des cités maritimes le soin des opérations navales alors que les opérations militaires terrestres revenaient de droit aux Romains. La même division des tâches apparut au XXe siècle dans les conflits où les hégémonies maritimes de la Grande-Bretagne ou des Etats-Unis se trouvaient impliquées.

La marine impériale romaine

Il faut citer l’opinion originale de C.G. Starr (17) à propos des conséquences de la bataille d’Actium :
« Pour l’histoire de la marine impériale romaine, Actium en soi n’est qu’un événement insignifiant… Ce dernier combat naval des guerres civiles, l’ultime grand conflit en Méditerranée jusqu’à celui qui opposera sur mer Constantin à Licinius en 324, est plus un prélude que les premières notes d’une ouverture dans l’histoire de la marine impériale romaine. La mission historique de cette marine n’était pas de livrer des batailles mais de les rendre impossibles ».
Végèce, dans son Art militaire (4, 31), précise les raisons de l’existence de la marine impériale :
« Le peuple romain a toujours eu une flotte prête, pour montrer et défendre sa puissance ; il ne l’organisait pas pour faire face aux exigences d’un conflit mais pour ne jamais être pris au dépourvu ».
A la mort d’Auguste en 14 après J.-C., outre le port de Forum Julii qui n’abritait qu’une flottille et devenait une base secondaire, les forces navales romaines étaient partagées en deux flottes, l’une en Tyrrhénienne avec Misène, près de Pouzzoles, pour base, la Classis Misenensis, et la seconde en Adriatique attachée au port de Ravenne, la Classis Ravennas. La création de la flotte de Misène remonterait à une date comprise entre 27 et 15 avant J.-C., alors que celle de Ravenne daterait d’environ 24 avant J.-C. Cette répartition des forces navales due à Octave et à Agrippa répondait sans doute à un plan stratégique conforme à une pensée navale plus solide.
- La flotte de la Tyrrhénienne, dont l’état-major resta pendant quatre siècles à Misène, possédait des bases secondaires à Puteoli (Pouzzoles), Ostie (à l’embouchure du Tibre), Centumcellae (près de Civitavecchia), Mariana et Aléria en Corse, Carales en Sardaigne (Cagliari). La flotte surveillait la Tyrrhénienne et plus particulièrement les îles turbulentes de Corse et de Sardaigne. En outre, elle étendait son contrôle sur tout le bassin occidental de la Méditerranée : Gaules, Espagne, Maurétanie (Végèce, 4, 31). Mais bien entendu, elle opérait de concert avec la flotte de Ravenne, qui lui était sans doute subordonnée, en Méditerranée orientale depuis la Libye jusqu’à la mer Egée. Elle détachait des flottilles dans certains ports de ces régions comme à Séleucie de Syrie pendant les guerres contre les Parthes.
- La flotte de l’Adriatique basée à Ravenne avait pour mission de surveiller la côte dalmate où elle avait une base secondaire à Salona (Split) capitale de la Dalmatie et une autre à Brundisium (Brindisi) pour assurer les relations des officiels avec Dyrrachium (Durazzo/ Durrès) ; la station d’Ancône n’est pas sûre, en revanche celle d’Aquileia, dans le golfe de Trieste est attestée. Hors de l’Adriatique, la flotte de Ravenne prêtait son appui à celle de Misène dans le bassin oriental ; des unités de l’Adriatique faisaient escale dans les ports de la Tyrrhénienne et tout particulièrement à Centumcellae qui devint leur base vers 100 après J.-C. (18)
C.G. Starr note que probablement Rome ne perdait pas de vue la question de son approvisionnement en bois de construction navale car la péninsule n’est pas riche en forêts ; il pense que les stations navales de Mariana et d’Aléria en Corse et le port de Ravenne sur l’Adriatique, relié au Pô, contrôlaient ces trafics du bois destiné aux chantiers de Misène et de Ravenne. Il est possible que la flottille de Syrie basée à Séleucie ait rempli la même tâche, les forêts de la région produisant les essences que Végèce (4, 34) estime convenables pour la construction navale : cyprès, pin, mélèze et sapin. Rostovtseff indique que l’empereur était propriétaire du sol de la Corse et sans doute des forêts ; d’où l’importance du port d’Aléria pour le contrôle du transport du bois de construction navale (19). Cette importante question stratégique ne pouvait recevoir de solution qu’inspirée par une véritable pensée navale.
Les escadres provinciales et les flottilles fluviales faisaient également partie des forces navales impériales au même titre que les flottes de Misène et de Ravenne. L’organisation et la défense de l’empire exigeaient des forces indépendantes dans les provinces : Syrie, Egypte, Maurétanie, et aussi en mer Noire et dans la Manche ; en outre des flottilles fluviales surveillaient le Rhin et le Danube : celles de Mésie et de Pannonie sur le Danube et ses affluents et celle de Germanie sur le Rhin. Certaines de ces formations remontent à l’époque augustéenne, comme l’escadre d’Egypte basée à Alexandrie et peut-être, mais c’est moins sûr, celle de Syrie attachée au port de Séleucie.
La marine impériale, telle qu’Auguste et Agrippa l’avaient conçue et telle que la considérèrent les empereurs suivants, était destinée, contrairement aux flottes républicaines toujours improvisées, à entrer en action dans les plus brefs délais dès l’apparition d’un perturbateur. Or, il n’y eut pas de perturbateur extérieur avant le IIIe siècle, avec l’invasion des Goths, et surtout avant le Ve siècle, avec l’arrivée des Vandales.
Les missions de la marine impériale permanente et professionnelle n’étaient pas uniquement dissuasives comme l’avaient sans doute prévu Auguste et Agrippa, elles étaient avant tout offensives dans l’esprit romain ; cet aspect a été perdu de vue par certains historiens modernes qui ont eu tendance à minimiser l’importance stratégique de la flotte (20). De même, contrairement à ce qui a été dit, l’action des forces navales n’a pas été policière mais militaire. Il s’agissait d’étendre la maîtrise des mers à toute la Méditerranée, qui assurait l’unité de l’empire et la protection de ses communications maritimes (21).
Les forces navales impériales ont continué tout au long des siècles à maintenir leur niveau d’entraînement en vue d’une bataille d’escadre qui ne vint jamais ; les flottes de Misène et de Ravenne et les autres faisaient des patrouilles, opéraient des débarquements en liaison avec les forces terrestres, assuraient le transport des troupes, participaient au ravitaillement des armées, n’escortaient pas les navires de commerce, mais luttaient contre les restants de piraterie. Quant aux forces fluviales, elles avaient un rôle très important, car elles permettaient aux troupes de traverser un fleuve, d’opérer des débarquements sur les arrières de l’ennemi, d’assurer la logistique des stations tenues le long des fleuves, bref de contribuer à la défense du limes (22) ; la colonne Trajane nous donne une représentation vivante de ce que furent les opérations des flottilles fluviales.
En outre, la flotte offrait un moyen de transport aux personnages officiels qui rejoignaient un poste ou qui accomplissaient une mission : Agrippa se fit accompagner en 14 avant J.-C. par une escadre lors d’une tournée d’inspection des ports d’Asie avec tout le décorum de l’amiral en mission qui montre le pavillon de son pays (Flavius Josèphe, XVI, 21). Tacite (Annales, II, 53ss) rapporte que Germanicus entreprit un voyage semblable en 18 après J.-C.
D’autre part, des navires rapides de la flotte transportaient les ordres et les dépêches depuis Rome jusqu’aux plus lointaines provinces accessibles par mer ; la flotte avait le monopole de l’acheminement du courrier officiel, même par terre, puisque c’étaient des marins qui assuraient la liaison entre Rome et les ports de la péninsule.
L’empereur Claude (41-54) continua la politique navale d’Auguste et probablement créa d’autres escadres provinciales ; ce sera Trajan (98-117) à l’époque de la plus grande extension de l’empire, qui donnera une expression définitive à l’organisation des forces navales qui restera en vigueur jusqu’au bas-Empire.
Il faut dire un mot du matériel naval qui constituait les flottes impériales et dont l’évolution depuis les types de la période républicaine est l’expression d’une pensée navale « matérialiste ». Pour leurs forces navales, Auguste et surtout Agrippa se contentèrent d’unités plus légères réclamant moins d’hommes d’équipages que les unités de la flotte de Pompée et donc moins coûteuses.
L’unique héxère des forces impériales, une « 6″, servait de navire amiral à la flotte de Misène ; elle avait 3 rameurs sur le même aviron à un niveau supérieur et 3 autres au niveau inférieur ; les autres unités étaient des quinquérèmes, des « 5″, des quadrirèmes, des « 4″, des trières, des « 3″ directement issues des trières grecques et enfin des liburnes qu’Agrippa incorpora et qui provenaient d’un modèle de navire léger utilisé par les pirates de la côte nord de l’Illyrie : la Liburnie.
Agrippa avait eu soin d’améliorer l’artillerie mécanique embarquée ainsi que les divers projectiles utilisant le feu, les traits, les flèches et le harpax dont il était l’inventeur. La marine byzantine sera l’héritière directe de la marine impériale romaine.
Ces unités, surtout les plus importantes, ne pouvaient longtemps tenir la mer par suite des contraintes qui les obligeaient à relâcher souvent pour faire de l’eau et des vivres ce qui imposait aux forces navales d’avoir un réseau d’escales. Les navires étaient peu aptes aux escortes de convois, à la tenue d’un blocus et aux patrouilles de longue durée, à moins que ces dernières ne soient faites à la voile.
Pour C. de la Berge « la création d’Auguste avait été, dès le début, fortement méditée et convenablement appropriée, tant aux besoins publics qu’aux instincts et aux intérêts des populations » (23).
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Tout ce qui vient d’être dit prouve que les Romains ont eu assez tôt conscience de l’importance stratégique de la mer, bien qu’ils aient été relativement étrangers à cet élément ; par la suite une pensée navale relativement évoluée a pu naître, permettant l’organisation et la mise en œuvre des forces navales impériales qui, pendant plus de trois siècles, ne connurent que le temps de paix en l’absence d’adversaires à leur taille : il n’y avait aucune force adverse à dissuader. Rome ne peut être considérée comme une thalassocratie car sa maîtrise de la Méditerranée a d’abord résulté du contrôle de la totalité de ses côtes.
Les bases et escales de la Marine impériale romaine d’Auguste à Marc Aurèle de 14 avant J.C. à 161 après J.C.
1 - Forum Julii (Fréjus) base navale jusqu’en 70 ap. J.-C.
2 -- Misène, base de la flotte de Misène à partir de 12 avant J.-C.
3 -- Ravenne, base de la Classis Ravennas à partir de 39 avant J.-C.
4 -- Alexandrie, base de la Classis Alexandrina à partir d’Auguste.
5 -- Séleucie, base de la Classis Syriaca, à partir de Vespasien (69-79) ( ?).
6 -- Trébizonde, base de la Classis Pontica, à partir de Claude, en 47-48 ou mieux de Néron (54-68).
7 -- Boulogne/Douvres, bases de la Classis Britannica, à partir de Claude (41-54) ou même avant.
8 -- Ostie, port de Rome, était un des principaux arsenaux de la marine républicaine ; devient une base secondaire de la marine impériale au moins depuis le règne de Claude.
9 -- Centumcellae (Civitavecchia), base secondaire ; relais à la fois vers la Sardaigne et la Corse.
10 -- Aleria, base secondaire ; contrôle le commerce des bois de l’île.
11 -- Cagliari, base secondaire.
12 -- Brindes (Brindisi).
13 -- Aquilea.
14 -- Salone (Split).
15 -- Athènes/le Pirée servait encore d’escale pour la marine républicaine ; sous l’empire elle joua le rôle de relais pour les flottes de Ravenne et de Misène.
16 -- Ephèse ; c’est là qu’Antoine rassembla sa flotte avant Actium ; ce port a été actif tout au long de l’empire jouant un rôle très important dans le transit des troupes, notamment pendant la guerre des Parthes sous Trajan et Marc-Aurèle en 114 et en 161.
17 -- Cyzique, base d’une division de la flotte de Misène à la fin du premier ou début du second ; plus tard a pu être la base de la Classis Pontica.
18 -- Césarée de Mauritanie (Cherchel) ; aurait été la base d’une flottille indigène sous Juba II avant l’annexion de la Maurétanie en 40 après J.-C. ; il n’est pas sûr qu ce port ait été une base de la marine impériale.
19 -- Cologne/Alteburg semble avoir été le principal port de la Classis Germanica : sa création remonterait à Claude (41-54). Elle disposait probablement de nombreux autres ports sur le Rhin inférieur.
20 -- Carnuntum aurait été une base de la Classis Pannonica où celle-ci devait avoir une flottille permanente détachée de sa base principale de Taurunum.
21 -- Brigetio, autre station fluviale de la Classis Pannonica.
22 -- Taurunum, près de Belgrade, est la grande base navale attestée de la Classis Pannonica depuis Vespasien (69-79).
23 -- Ratiaria, aurait été une des bases de la Classis Mœsica en aval des Portes de Fer où commençait sa zone de patrouille ; elle remonterait à l’époque augustéenne.
24 -- Noviodunum (Isaaccea) est la grande base de la Classis Mœsica dont la création date également de Vespasien ; cette flotte devait aussi contrôler la façade maritime de la Mésie.
25 -- Istrus, port fréquenté par la Classis Mœsica.
26 -- Chersonèse Taurique, port fréquenté par la Classis Mœsica sous Néron (54-68) à l’époque de la guerre d’Arménie.
27 -- Panticapée est un port où le passage de la flotte est attesté.
28 -- Sinope aurait été une base pour les escadres romaines et alliées ; elle était fréquentée en 14 avant J.-C. par Agrippa et le port servait d’abri à une flotte sous Trajan vers 115.
29 -- Calchedon face à Byzance, a servi à plusieurs reprises de base aux escadres impériales.
30 -- Périnthe a joué un rôle semblable à celui de Calchedon et plus particulièrement aussi de base de transit pour les troupes en provenance du front du Danube et destinées à l’Orient.
31 -- Thessalonique (Salonique) a reçu des escadres appartenant à la flotte de Misène dès le Haut Empire ; ce port constituait une escale vers l’Orient.
32 -- Palerme a occasionnellement reçu des escadres de Misène se rendant vers l’Espagne ou vers l’Afrique.
33 -- Syracuse a été une escale pour les escadres à destination de l’Orient.
 A -- Classis Germanica ; B -- Classis Pannonica ; C -- Classis Mœsica
Jean Pagès  http://www.theatrum-belli.com
Source : M. Reddé, Mare Nostrum, les infrastructures, le dispositif et l’histoire de la marine militaire sous l’empire romain, Ecole française de Rome, 1986.
Notes :
1. Jacques Heurgon, Rome et la Méditerranée occidentale jusqu’aux guerres puniques, PUF, 1980, pp . 110.
2. Jacques Heurgon, op. cit., p. 301.
3. Jacques Heurgon, op. cit., p. 337.
4. André Piganiol, La conquête romaine, Alcan, 1930, p. 132 ; J.H. Thiel, A History of Roman Sea-Power before the Second Punic War, North Holland Publishing, Amsterdam, 1954.
5. J.H. Thiel, op. cit., p. 46. E. Pais, Storia critica di Roma durante i primi secoli, E. Loeschner puis P. Maglione et C. Strini, Rome, 1918-1920, l’auteur pense que malgré la psychologie « continentale » du peuple romain, Rome « fut aussi une grande puissance maritime », « sans maîtrise de la mer, Rome n’aurait ni conquis l’empire, ni pu le conserver ».
6. Jean Rougé, La marine dans l’Antiquité, PUF, 1975, p. 111s.
7. Jacques Heurgon, op. cit., p. 337. Le cap Lacinien est aujourd’hui le cap Rizzuto à l’entrée du golfe de Tarente.
8. J.H. Thiel, op. cit., p. 160 ; Jean Rougé, op. cit., p. 112.
9. La marine marchande américaine pendant la seconde guerre mondiale a créé à terre un centre d’entraînement pour les états-majors et les marins qui serviront sur les « Liberty-ships » où ce personnel faisait le quart et vivait absolument comme à la mer.
10. Jean Rougé, op. cit., p. 113.
11. J.H. Thiel, op. cit., pp. 320 ss.
12. J.H. Thiel, op. cit., p. 325.
13. J.H. Thiel, op. cit., pp. 328-329.
14. J.H. Thiel, Studies on the History of Roman Sea-Power in Republican Times, Amsterdam, North Holland Publishing, 1946, p. 131
15. C.G. Starr, The Roman Imperial Navy 31 BC-AD 324. Westport, Connecticut, Greenwood Press, 1975, p. 1.
16. Cité par C.G. Starr, op. cit., p. 3.
17. C.G. Starr, op. cit., p. 4 ss.
18. C.G. Starr, op. cit., pp. 13-24.
19. C. de la Berge, « Etudes sur l’organisation des flottes romaines », Bulletin épigraphique, tome 6, 1886, p. 227 ; M.I. Rostovtseff, Histoire économique et sociale de l’empire romain, Laffont, 1988, p.165.
20. A. Piganiol a consacré une demi-page à la marine dans son manuel d’histoire de l’empire romain !
21. C.G. Starr, op. cit., pp. 106 ss.
22. C.G. Starr, op. cit., pp.124 ss.
23. C. de la Berge, art. cit., p. 3.
Source du texte : STRATISC.ORG

vendredi, 02 mars 2012

Donoso, precursor de la época del pavor

Donoso, precursor de la época del pavor

 

Entre restauración y cesarismo: la antiutopía de Donoso Cortés

Por Rafael Campos García-Calderón
Filósofo de la Universidad Nacional Mayor de San Marcos

Ex: http://geviert.wordpress.com/

Cuando en Interpretación europea de Donoso Cortés, Carl Schmitt nos describe el pensamiento del político y diplomático español como un pensamiento de carácter “europeo”, nos muestra algo inédito dentro del llamado “pensamiento reaccionario”.
La Revolución de 1848 fue el anuncio de una nueva era en la historia de Europa. La civilización burguesa europea sustentada en el liberalismo fue puesta a prueba. Una nueva filosofía política suspendió, por un momento, la hegemonía cultural burguesa: socialismo, comunismo, anarquismo, nihilismo y ateísmo aparecieron como una amenaza en el horizonte. Frente a este peligro, la Contrarrevolución europea, uno de cuyos baluartes será Napoleón III, asumió el costo de enfrentar estos acontecimientos. Con su acción, trastocó el orden liberal burgués creando un nuevo fenómeno: el Cesarismo. Así, el Estado recuperó, bajo una nueva forma, su status político y se alió con un conjunto de fuerzas sociales no incluidas, hasta ese momento, en el orden democrático liberal.

Uno de los partidarios de esta Contrarrevolución fue Donoso Cortés. A diferencia de Joseph de Maistre, Donoso no creía en la restauración de la Monarquía. Para él, los reyes habían perdido su lugar en la historia política de Europa. En su lugar solo quedaba la “dictadura del sable”, la nueva forma de ejercicio de la soberanía política. Donoso había percibido que los acontecimientos del 48 no respondían simplemente a una crisis del sistema liberal burgués. En realidad, había visto en ellos uno de los síntomas de un proceso anunciado ya por algunos teóricos. Sin embargo, frente a estos científicos, la visión de Donoso destacaba por su radicalismo espiritual. Para él, no se trataba simplemente de un combate político o cultural, sino de una guerra religiosa contra un enemigo mortal: la pseudoreligión del hombre expresada en el socialismo y sus diferentes formas. En este sentido, superaba la coyuntura política de Napoleón III y preparaba, con su visión, el escenario de una antiutopía.
Por esta razón, Donoso no debería ser considerado un pensador reaccionario, sino más bien el precursor de una nueva época: la época del pavor (δεινόσ). En ella, el hombre, con tal de desplegar su genio organizado, aprovecharía ventajosamente cualquier situación ignorando las diferencias entre el bien y el mal. Es esta consideración espiritual de la cultura europea la que condenó al pensamiento de Donoso al silencio. Superada la revolución, los historiadores burgueses ocultaron los acontecimientos y restauraron su fe en los ideales ilustrados. Sin embargo, los acontecimientos del 48 quedaron sin una interpretación satisfactoria.

 

Setenta años después la amenaza reapareció en el horizonte. La Revolución Bolchevique dirigida por Lenin desarrollaba el programa que Marx había esbozado, a partir de los acontecimientos del 48, en el Manifiesto Comunista. A diferencia de los historiadores burgueses, los comunistas habían podido leer en estos acontecimientos la inexorabilidad de un proceso que sus rivales pretendían ignorar: el triunfo de la civilización proletaria. Existía, para ellos, una continuidad histórica entre ambas revoluciones y, por tanto, según ellos, un nuevo poder se apropiaría indefectiblemente de los destinos de Europa. Este poder tendría como objetivo primordial el desarrollo de las fuerzas productivas capitalistas para alcanzar el socialismo, fase preparatoria del comunismo o sociedad sin clases.
Sin embargo, esta interpretación no era la única posible. A despecho del olvido de los pensadores liberales, hubo un conjunto de filósofos e historiadores que atendieron a los eventos de aquel momento y a su continuidad en el tiempo. Uno de ellos fue, sin duda, el mismo Donoso Cortés, cuyo diagnóstico de la situación histórica ha permitido esbozar una “interpretación europea” de su pensamiento. Según esta expresión, el alcance de la interpretación comunista estaría fuera de los límites de Europa, pues en lugar de dar cuenta del destino histórico del Viejo Continente, habría esbozado el futuro de un espacio muy diferente: la Rusia de los zares.

La profecía comunista habría proyectado sobre una crisis histórica concreta su propio plan histórico ideal. Sin duda, el lugar de realización de esta idea no podía ser Europa, pues la condición sine qua non para su concretización era la implementación generalizada de la tecnología en la vida social y la centralización de la administración política. A pesar de la interpretación comunista, la cultura europea era todo menos un cuerpo homogéneo capaz de someterse sin más al aplanamiento homogenizante de la tecnología y la burocracia. Para ello, era preciso un espacio político carente de conciencia histórica, es decir, un Estado carente de vínculos orgánicos con su Sociedad. La Rusia zarista, sometida incontables veces al azote tártaro-mongol y a la política del exterminio, era el candidato oportuno para esta nueva utopía.
Para Carl Schmitt, era posible reconstruir esta interpretación europeísta de los acontecimientos del 48 a partir de la obra de Donoso Cortés y de otros pensadores contemporáneos que, sin embargo, no tuvieron con él mayor contacto. Esta perspectiva estaba constituida por tres elementos: un pronóstico histórico, un diagnóstico cultural y un paralelismo histórico con el pasado. Según el pronóstico histórico de esta interpretación, estos eventos habrían marcado el inicio del descenso de la civilización europea frente a la hegemonía de dos nuevas potencias: Rusia y EE.UU. Es a partir de la derrota de Napoleón I frente a Rusia en 1814 que esta nueva realidad se apodera de la historia: las potencias europeas han dejado de ser el centro de la Historia Universal.

El primer hito en la historia de esta interpretación lo constituye, según Schmitt, Tocqueville (1835), quien pronosticó el despliegue de la democratización y centralización administrativa a gran escala por parte de Rusia y EE.UU. Además de ello, Tocqueville hizo un diagnóstico cultural de Occidente. Para él, la revolución de 1789 abría las puertas al proceso de centralización política que se realizaría inexorablemente en manos de cualquier partido o ideología política. En este sentido, la actividad política en general estaba irremediablemente destinada a servir al propósito centralista administrativo: la civilización se dirigía a la masificación.
Paralelamente, Donoso Cortés (1850) había percibido que la política exterior de Europa había decrecido en relación a la de EE.UU., Rusia e Inglaterra. Esta señal le indicaba la misma conclusión a la que Tocqueville había llegado con su pronóstico. En cuanto al diagnóstico, Donoso arribaba a otra conclusión, cercana más bien a la que algunos historiadores y sociólogos alemanes habían efectuado. Según esta, las modernas invenciones tecnológicas puestas al servicio de la administración pública anunciaban la futura mecanización de la sociedad y la destrucción de los órganos intermedios de poder. En efecto, Jakob Burckhardt, Friedrich List, Max Weber y Oswald Spengler, entre otros, diagnosticaron la creciente mecanización e industrialización de la civilización como el camino hacia una sociedad perfectamente organizada dirigida por una burocracia que tiene en sus manos la explotación económica. A los ojos de esta “interpretación europea”, la nueva era no traía consigo el paraíso sino la esclavitud a la técnica.
Un tercer elemento de esta interpretación consistía en la comparación o paralelismo histórico que a partir de 1848 los historiadores, comunistas o “europeístas”, habían efectuado respecto de la situación histórica de Europa. Este paralelismo consistía en la comparación con la época de las guerras civiles en Roma, época en la que el Cesarismo se implantó y en la que el Cristianismo florecía hasta imponerse al Imperio. Esta comparación traía consigo la idea del final de la Antigüedad que, en clave decimonónica, debía leerse como el final del Cristianismo.

Spengler, en la Decadencia de Occidente, había tratado de vincular entre sí diversos paralelismos históricos. Entre ellos, el más importante constituía la batalla de Accio, considerado el comienzo de nuestra era cristiana. Saint-Simon, en El Nuevo Cristianismo, estableció una relación entre nuestra época actual y la de los orígenes del Cristianismo. Para él, el Cristianismo habría terminado y su sustituto, un nuevo poder espiritual, habría llegado a reemplazarlo: el Socialismo, el nuevo cristianismo.
La posición de Donoso frente al paralelismo histórico era muy diferente. En clara oposición a ambas interpretaciones del mismo fenómeno, consideraba que el Cesarismo y el inicio del Cristianismo como paralelismo histórico a los eventos de 1848 eran evidentes, aunque insuficientes para explicar la circunstancia histórica del momento. En efecto, a diferencia de todos los otros pensadores, juzgaba demasiado optimista el pronóstico, pues por ninguna parte veía a aquellos “pueblos jóvenes”, símbolo de la regeneración espiritual occidental, que hubiesen correspondido a los germanos de la época de las invasiones a Roma. En el siglo XIX, esos “pueblos jóvenes” ya estaban corrompidos por el veneno de la civilización occidental desde el momento en que son un resultado de esta. Por ello, para él, el paralelismo histórico entre nuestra época y la era del cristianismo primitivo o del cesarismo no podía asemejarse a la visión que los socialistas tenían del mismo.

En realidad, la falta de este tercer elemento regenerador hacía del paralelismo histórico la antesala a una catástrofe. En lugar de un elemento regenerador, una seudorreligión ‒el socialismo ateo‒ ocupaba su lugar. Se trataba del culto a la Humanidad absoluta, culto que, paradójicamente, conducía, según él, al terror inhumano. Desde su punto de vista y a la luz de los acontecimientos del 48, una religión del Hombre solo podía conducir al terror y la destrucción, pues el Hombre no tolera a los demás hombres que no se someten a él. Para Donoso, esta Utopía era el resultado de un espejismo producido por la asociación entre el progreso de la técnica y la aspiración a la perfección moral de la Humanidad. Así, la idea ilustrada de progreso dejó de ser un esquema abstracto y se transformó en un programa materialmente realizable a partir de la técnica.
La visión que Donoso tenía de los acontecimientos del 48 y del paralelismo histórico tan celebrado se asemejaba, según Schmitt, a la experiencia interior a la que Soren Kierkegaard había accedido por aquellos años. En efecto, Kierkegaard había percibido la amenaza de un clima de horrores a partir de la lasitud espiritual que las iglesias de su tiempo padecían. Una vez más, la era de las masas había llegado. En este sentido, la visión de Donoso no era otra cosa que la objetivación histórica de esta realidad espiritual. A diferencia de las utopías idealistas y materialistas que sus enemigos liberales y socialistas trataban de imponer a la historia desde esferas extrañas a ella, Donoso consideraba el acontecimiento histórico concreto y a partir de él interpretaba los signos sorprendentes de una teleología simbólica.
Desde este punto de vista, el Hombre no podía ser la encarnación de la paz, como querían los demagogos de su época, sino del terror y la destrucción. Según Schmitt, Donoso vaticinó el advenimiento de aquello que Nietzsche expresó en su concepto de Superhombre: la legitimación histórica del poder y la violencia sobre los infrahombres.

mardi, 28 février 2012

Piotr Arkadevich Stolypin, el Bismarck de Rusia

Revista Arbil nº 70

Piotr Arkadevich Stolypin, el Bismarck de Rusia

por José Luis Orella

Como la Revolución no quiere el cambio positivo sino la injusticia para abrirse camino. Un reformador asesinado por los comunistas

ilya-glazunov-a-portrait-of-graf-pyotr-stolypin-undated.jpgPiotr Stolypin nació en el seno de una familia aristocrática en 1862, que era fiel a los zares desde el siglo XVI. Amigo de Gogol y Tolstoi, también estaba emparentado con Lermontov y en un ambiente de tanta cultura, el joven Stolypin hablará con fluidez el francés, inglés y el alemán. Cuando cumpla 19 años será enviado a la Universidad de San Petersburgo, donde estudiará en la facultad de Física y matemáticas. Cuando se licencié ocupará el puesto de comisario de la nobleza en Kovno en 1889, donde permanecerá hasta 1902. En aquel lugar es donde el joven funcionario se hará un experto en temas de agricultura y administración local. Allí es donde llegará a la conclusión que la suerte de Rusia estaba unida a su inmenso campesinado, más de un 80 % de la población, y que la solución pasaba por la eliminación de los comunales existentes y su distribución entre los campesinos, transformando a estos en pequeños propietarios.

En 1903 fue nombrado gobernador de la provincia Saratov. Dos años después vendrá la oportunidad que convertirá al joven gobernador en una persona de fama pública. La revolución frustrada de 1905 puso a prueba al régimen zarista y la necesidad imperiosa de realizar reformas. Stolypin fue el único gobernador que pacificó su provincia sin hacer uso de la fuerza militar, de mostrando una gran energía y temeridad, pero cumpliendo con la palabra dada a los campesinos. Su firmeza y energía ante los revolucionarios, pero sensible a realizar reformas a favor del campesinado le convirtió en el hombre idóneo para el nuevo período de la historia rusa que se avecinaba. Pasó a ser el nuevo ministro del interior y su actividad dio una nueva oportunidad a la monarquía de Nicolás II, mientras los revolucionarios eseristas y populistas le colocaban como su principal enemigo.

En 1906 Piotr Stolypin era nombrado presidente del gobierno. Bajo su corto mandato realizó sesenta mil detenciones de terroristas y revolucionarios, desarticulando las principales organizaciones antiistema. Pero de manera paralela, la fuerte represión que llevó a cabo fue acompañada por una serie de enérgicas reformas. Sus puntos principales fueron:

*    Eliminación de los comunales

*    Derecho a la propiedad particular de la tierra de los campesinos

*    Igualdad civil de todos los rusos

*    Fin a la discriminación de los judíos

*    Escolaridad primaria y universitaria obligatoria

Esta serie de medidas contó con el apoyo de los octubristas de Alexander Guchkov que pretendían la instauración de un fuerte poder institucional a costa del personal del propio Zar. También el elemento nacionalista ruso apoyo su política. Esencialmente su política entrega de tierras en propiedad a los campesinos favorecía una rusificación de las provincias occidentales del imperio, a costa de los terratenientes polacos, alemanes y lituanos. Sin embargo, este reforzamiento de las instituciones del Estado a costa del autocratismo del Zar, no fue bien visto por los nostálgicos del viejo orden, que vieron en el presidente del gobierno un peligroso reformista. Su origen provinciano le enajenaba los apoyos de la Corte capitaliana y sus inyectivas a favor de las reformas posicionaba en su contra a la clase dirigente del régimen. Stolypin sólo contaba con un apoyo parlamentario reducido de una minoritaria clase media que quería un Estado parecido al alemán y la voluntad cambiante del Zar Nicolás II. Además su agresividad verbal contra los grupo revolucionarios lo convertían en el principal objetivo de estos, que veían en él a la única persona que podía hacer viable el desarrollo modernizador con una Rusia zarista. Si los campesinos explotados que trabajaban de manera comunal, pasaban a ser pequeños propietarios agrarios y sus hijos eran instruidos por una red de escuelas públicas, la revolución no tendría lugar. La masa campesina defendería el orden zarista a muerte y la minoritaria clase obrera no hubiese podido ser utilizada por los cuadros marxistas a favor de una revolución años después.

Por este cúmulo de circunstancias, Piotr Stolypin cuando fue a la opera de Kiev para ver La leyenda del Zar Sultán, de Rimsky Korsakov en 1911, un pistolero vinculado a los socialistas revolucionarios le disparaba en el pecho. Aún el estadista tuvo tiempo para levantarse pedir por el Zar y hacer la señal de la cruz, en el sentido ortodoxo. Poco después moría, entre los sollozos de un Nicolás II que veía que ante la desaparición del estadista el régimen quedaba tocado de muerte. Su muerte produjo el abandono de la política de reformas y el pase a la oposición de los sectores reformistas de clase media que habían confiado en 1905 en el aperturismo del Zar. Cuando la revolución estalle por segunda vez en 1917, no existirá un hombre capaz de evitar que el inmenso país de la tercera Roma fuese engullido por la revolución..

José Luis Orella

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samedi, 25 février 2012

Fundamenten van het Russische nationalisme

Archief van SYNERGIES EUROPEENNES en van CRAPOUILLOT - 1994
Fundamenten van het Russische nationalisme

Robert Steuckers


De Europese dynamiek is Rusland doorheen zijn geschiedenis altijd vreemd gebleven. Zijn nationalisme, zijn nationale ideologie wordt gekenmerkt door een dubbel spel van aantrekking en afstoting tegenover Europa in het bijzonder, en tegenover het westen in het algemeen. De vermaarde Italiaanse slavist Aldo Ferrari herinnert eraan dat het Kiëvse Rijk tussen de 10de en de 13de eeuw stevig deel uitmaakte van het middeleeuwse economische systeem. De Tataarse invasie rukte het land weg uit de westerse orbit, en daarna wierp het Vorstendom Moskou zich in zijn strijd tegen de resten van het Tataarse rijk op als het nieuwe orthodoxe Byzantium, dat zich afzette tegen het katholieke en protestantse westen. De overwinning van Moskovië projecteerde vervolgens de macht van Rusland naar het onmetelijke Siberië. Vanaf de troonsbestijging van Peter de Grote tot de heerschappij van Catharina de Grote en zo verder tot in de 19de eeuw kwam het tot een schuchtere toenadering tot het westen. Voor heel wat waarnemers leidde de communistische revolutie een nieuwe periode van autarkische geslotenheid en van ontwestersing in, spijts de West-Europese oorsprong van haar ideologie, het marxisme.

Maar de verwestersing van de 19de eeuw werd geenszins algemeen aanvaard. Vanaf het begin van deze eeuw manifesteerde zich in heel Rusland een sterke fundamentalistische, romantische, nationalistische stroming, die zich als « slavofiel » tegenover de « westerlingen » opstelde. Zo werd de fundamentele kloof tussen links en rechts in Rusland geboren, in het zog van de Duitse romantiek. Deze kloof bestaat nog steeds vandaag de dag, en het debat wordt in Moskou steeds heftiger. De leider van de westersgezinden in de 19de eeuw heette Pjotr Tsjaadajev. De meest markante figuren van het slavofiele kamp waren Kirejevski, Khomiakhov en Axakov.
Het Russische occidentalisme is uitgewaaierd in verschillende richtingen: liberalen, anarchisten en socialisten. De slavofielen ontwikkelden op hun beurt een ideologie die op twee waardenpijlers berust: de orthodoxe christenheid en de agrarische gemeenschap. In minder propagandistische termen slaat dit op de autonomie van de kerken (de “autocefale” kerken) en op een vurig anti-individualisme, die allebei het westerse liberalisme, vooral dan de Angelsaksische variant ervan, beschouwen als het ultieme kwaad.

In de loop der decennia zal dit dualisme complexer worden. Bepaalde gelederen van de linkerzijde evolueren naar een Russisch particularisme, naar een anarcho-agrarisch en antikapitalistisch socialisme. De slavofiele rechterzijde evolueert naar een “panslavisme” dat door de machthebbers gemanipuleerd wordt ten gunste van de Russische expansiepogingen in de richting van de Balkan (steun aan de Roemenen, de Serviërs, de Bulgaren, en de Grieken tegen de Ottomanen). Één van deze “panslavisten” is de filosoof Nikolaï Danilevski, auteur van een gewaagd historisch portret van Europa als zijnde een gemeenschap van oude volkeren, die het aan historische energie ontbreekt, en van de Slaven als falanx van jonge volkeren die voorbestemd zijn om over de wereld te heersen. Onder leiding van Rusland moeten de Slaven Constantinopel veroveren, de rol van Byzantium overnemen en een eeuwigdurend rijk stichten.

Tegenover het programma van Danilevski plaatst de filosoof Konstantin Leontiev een alliantie tussen de Islam en de Orthodoxie tegen de kiemen van de liberale ontbinding die door het westen verspreid worden. Hij kant zich tegen elke oorlog tussen Russen en Ottomanen op de Balkan. De vijand zijn vooral de Angelsaksische machten. De zienswijze van Leontiev bekoort vandaag de dag nog vele Russen. Dostojevski ontwikkelt in zijn Dagboek van een schrijver gelijkaardige ideeën (jeugdigheid van de Slavische volkeren, ontaarding van het liberale westen), waar hij een radicaal antikatholicisme aan toevoegt, dat later de Duitse « nationaal-bolsjevieken » zou inspireren (Niekisch, Paetel, Moeller van den Bruck, die zijn werken vertaalde).

In de nasleep van door minister Sergej Witte aangevuurde bouw van de Transsiberische Spoorlijn bloeit een pragmatische en autarkische ideologie op, het « eurazisme », die zich in dienst van de Russische ruimte wil stellen, ongeacht of deze door een Tsaar of door een Vojd  (een “Chef”) van de Sovjets geleid wordt. De “eurazische” ideologen zijn Troubetzkoj, Savitski en Vernadsky. Voor hen vormt Rusland niet het oostelijke deel van Europa, maar een continent op zich, dat het centrum van de bewoonbare aarde omvat, hetwelk door de Britse geopoliticus Halford John Mackinder het “Hartland” werd genoemd. Volgens Mackinder kon de macht die erin slaagde om dit « Hartland » te beheersen automatisch de macht in de wereld grijpen. Dit “Hartland”, meer bepaald de zone tussen Moskou en de Oeral en tussen de Oeral en Transbajkalië, was inderdaad ontoegankelijk voor de zeemachten zoals Engeland en de Verenigde Staten. Het kon hen dus schaakmat zetten. De Sovjetpolitiek heeft, zeker ten tijde van de Koude Oorlog, geprobeerd om de nachtmerrie van Mackinder bewaarheid te doen worden, zijnde het onneembaar maken van het Russo-Siberische centrum van de Sovjetunie. Zelfs in het nucleaire tijdperk, het tijdperk van vliegtuigen en intercontinentale raketten. Dit “tot beschermd gebied maken” van het “Hartland” van de Sovjetunie was de officieuze ideologie van het Rode Leger, van Stalin tot Breznjev. De imperiale neonationalisten, de nationaal-communisten, de huidige patriotten verzetten zich tegen Gorbatsjov en Jeltsin, omdat ze hen beschuldigen van het ongedekt laten van het Oost-Europese glacis van het « Hartland », in de Oekraïne, het Baltikum en in Centraal-Azië.

Tot zover de premissen van het Russische nationalisme, waarvan de vele huidige varianten bengelen tussen een populistisch-slavofiele pool (“narodniki”, van “narod”, volk), een panslavistische pool en een Eurazische pool. Volgens Aldo Fer¬rari kan het huidige Russische nationalisme in 4 stromingen onderverdeeld worden: a) de neoslavofielen; b) de euraziërs; c) de nationaal-communisten; d) de etnonationalisten.

De neoslavofielen zijn in essentie zij die de stellingen van Solzjenitsyn omarmen. In Hoe ons Rusland herinrichten? stelt de in de Verenigde Staten in ballingschap levende schrijver een vermageringskuur voor Rusland voor: het moet zijn imperiale besluiteloosheid afschudden en volmondig het recht op zelfbeschikking van de volkeren van zijn periferie erkennen. Solzjenitsyn dringt vervolgens aan op een federatie van de drie grote Slavische naties van de voormalige Sovjetunie (Rusland, Wit-Rusland en Oekraïne). Daarnaast doelt hij op een maximale rentabilisering van Siberië en pleit hij voor een democratie die gebaseerd is op kleine gemeenschappen, een beetje naar het model van Zwitserland. Andere neonationalisten verwijten hem dat hij het imperiale vaderland wil verminken en dat hij een ruraal utopisme propageert, dat niet realiseerbaar is in de hypermoderne wereld waarin we leven.

De euraziërs zijn alomtegenwoordig in de Russische politieke arena van vandaag. De filosoof waar ze naar refereren is Lev Gumiljev, een soort Russische Spengler die de historische gebeurtenissen analyseert volgens de graad van “passionariteit” die de volkeren aanvuurt. Wanneer de volkeren gepassioneerd zijn, dan zijn ze in staat tot grootse zaken. Wanneer de innerlijke passie het laat afweten, dan vervallen of sterven de volkeren. Dat is het lot van het westen. Voor Gumiljev zijn de grenzen van Rusland heilig, maar het nieuwe Rusland dient het principe van de multietniciteit te respecteren. Er kan dus geen sprake zijn van russificatie van de volkeren van de periferie. Zij dienen integendeel tot eeuwige bondgenoten van het “imperiale volk” gemaakt te worden. Gumiljev, die in 1992 overleed, interpreteerde de ideeën van Leontiev in seculiere zin: de Turkssprekende volkeren van Centraal-Azië en de Russen dienen gemene zaak te maken, zonder rekening te houden met elkaars religieuze verschillen. Tegenwoordig vindt men de erfenis van Gumiljev in de kolommen van Elementy, het tijdschrift van Russisch « nieuw-rechts » van Alexander Doegin, en van Dyeïnn (omgedoopt in Zavtra, na het verbod in oktober 1993), de krant van Alexander Prokhanov, voorman van de nationaal-patriottische journalisten. Men vindt zijn ideeën echter ook terug bij sommige moslims van de « Partij der Islamitische Renaissance », meer bepaald bij Djemal Haïdar. Verwonderlijker is het feit dat twee leden van de staf van Jeltsin, Rahr en Tolz, aanhangers van het eurazisme zijn. Hun raad werd tot op heden evenwel vooral in de wind geslagen.

De nationaal-communisten maken aanspraak op de continuïteit van de Sovjetstaat als historische entiteit en als autonome geopolitieke ruimte, aldus Aldo Ferrari. Maar ze hebben begrepen dat de marxistische recepten geen meerwaarde meer bieden. Tegenwoordig bepleiten ze een “derde weg” waarin de notie van nationale solidariteit van cruciaal belang is. Dat is meer bepaald het geval bij de leider van de Communistische Partij van de Russische Federatie, Gennadi Zjoeganov.

De etnische nationalisten laten zich meer inspireren door Russisch extreem-rechts van vóór 1914, dat de “etnische zuiverheid” van het volk wil behouden. In zekere zin zijn zij xenofoob en populistisch. Zij eisen de terugkeer van de Kaukasiërs naar hun landen van oorsprong en geven bij momenten uiting aan een virulent antisemitisme, geheel volgens de Russische traditie.

Het Russische neonationalisme is zeer goed ingebed in de nationale traditie en heeft zijn wortels in het doctrinaire corpus van de 19de eeuw. In de literatuur slagen de neo-ruralisten van de jaren ’60 (Valentin Raspoetin, Vassili Belov, Soloükhi¬n, Fjodor Abramov, en anderen) erin de « westersgezinde liberalen » volledig te verdringen, en zetten daardoor een heuse « conservatieve revolutie » in beweging, met de goedkeuring van de Sovjetmacht! Het literaire tijdschrift Nache Sovremenik wierp zich op als vehikel van deze neo-orthodoxe, rurale, conservatieve, ethisch gerichte en ecologische ideologie. Het communisme heeft volgens hen het “mythisch bewustzijn” uitgeroeid en een “mensheid van amorele monsters” gecreëerd, die volkomen « verdorven » zijn, en bereid zijn om de westerse zinsbegoocheling te omarmen. Uiteindelijk nestelde deze “conservatieve revolutie” zich stilletjes in Rusland, terwijl in het westen de « rotzooi » van mei ’68 (dixit De Gaulle) een culturele catastrofe veroorzaakte waarvan we de gevolgen nog steeds dragen. De Russische conservatieven maakten ook een einde aan de communistische hersenschim van de « progressieve gang van de geschiedenis ». De communisten selecteerden inderdaad in de Russische geschiedenis datgene wat de revolutie aankondigde en verwierpen al de rest. Tegenover de “progressieve en selectieve gang” plaatsten de conservatieven de “unieke stroom”: zij waardeerden ineens alle Russische historische tradities en brachten de lineaire opvattingen van het marxisme een dodelijke slag toe.

Robert STEUCKERS.

Bibliografie:
- Aldo FERRARI, «Radici e prospettive del nazionalismo russe», in Relazioni internazionali, januari 1994.
- Robert STEUCKERS (ed.), Dossier «National-communisme», in Vouloir, n°105/108, juli-september 1993 (teksten over de verschillend erichtingen van het huidige Russische nationalisme, oevr het Russische « nationaal-bolsjevisme » van de jaren ’20 en ’30, over het Russiscjhe fascisme, over V. Raspoetin, over de Parijse polemiek van de zomer van 1993).
- Gerd KOENEN/Karla HIELSCHER, Die schwarze Front, Rowohlt, Reinbeck, 1991.
- Walter LAQUEUR, Der Schoß ist fruchtbar noch. Der militante Nationalismus der russi¬schen Rechten,  Kindler, München, 1993.
- Mikhaïl AGURSKI, La Terza Roma. Il nazionalbolscevismo in Unione Sovietico,  Il Mulino, Bologne, 1989.
- Alexander SOLZJENITSYN, Comment réaménager notre Russie?, Fayard, Paris, 1990.
- Alexander DOEGIN, Continente Russia, Ed. all'insegna del Veltro, Parma, 1991. Uittreksel in Vouloir  n°76/79, 1991, «L'inconscient de l'Eurasie. Réflexions sur la pensée “eurasiatique” en Russie». Te verkrijgen bij Robert STEUCKERS.
- Alexander DOEGIN, «La révolution conservatrice russe», tekst verschenen in Vouloir.
- Konstantin LEONTIEV, Bizantinismo e Mondo Slavo,  Ed. all'insegna del Veltro, Parma, 1987 (vertaling van Aldo FERRARI).
- N.I. DANILEVSKY, Rußland und Europa,  Otto Zeller Verlag, 1965.
- Michael PAULWITZ, Gott, Zar, Muttererde: Solschenizyn und die Neo-Slawophilen im heutigen Rußland,  Burschenschaft Danubia, München, 1990.
- Hans KOHN, Le panslavisme. Son histoire et son idéologie, Payot, Paris, 1963.
- Walter SCHUBART, Russia and Western Man, F. Ungar, New York, 1950.
- Walter SCHUBART, Europa und die Seele des Ostens,  G. Neske, Pfullingen, 1951.
- Johan DEVRIENDT, Op zoek naar de verloren harmonie - mens, natuur, gemeenschap en spi¬ritualiteit bij Valentin Raspoetin, eindverhandeling, Rijksuniversiteit Gent, 1992 (niet gepubliceerd).
- Koenraad LOGGHE, «Valentin Grigorjevitsj Raspoetin en de Russische traditie», in Teksten, Kommentaren en Studies, n°71, 1993.
- Alexander YANOV, The Russian New Right. Right-Wing Ideologies in the Contemporary USSR,  IIS/University of California, Berkeley, 1978.
- Wolfgang STRAUSS, Rußland, was nun?, Österreichische Landsmannschaft/Eckart-Schriften 124, Wien, 1993.
- Pierre PASCAL, Strömungen russischen Denkens 1850-1950,  Age d'Homme/Karolinger Verlag, Wien, 1981.
- Raymond BEAZLEY, Nevill FORBES & G.A. BIRKETT, Russia from the Varangians to the Bolsheviks,  Clarendon Press, Oxford, 1918.
- Jean LOTHE, Gleb Ivanovitch Uspenskij et le populisme russe, E.J. Brill, Leiden, 1963.
- Richard MOELLER, Russland. Wesen und Werden,  Goldmann, Leipzig, 1939.
- Viatcheslav OGRYZKO, Interview met Lev GUMILJEV, in Lettres Soviétiques,  n°376, 1990.
- Thierry MASURE, «De cultuurmorfologie van Nikolaj Danilevski», in Dietsland Europa,  n°3 et n°4, 1984 (Franse versie verschenen in Vouloir).

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lundi, 20 février 2012

Le Capitaine Hermann Ehrhardt: ennemi de la République de Weimar et combattant clandestin

Jan ACKERMEIER:
Le Capitaine Hermann Ehrhardt: ennemi de la République de Weimar et combattant clandestin

EhrhartPorrait.jpgLe Capitaine de corvette Hermann Ehrhardt était, au début des années 20, plus connu qu’Adolf Hitler. Il était l’espoir et la figure du chef pour la droite radicale allemande sous la République de Weimar. Il avait participé au putsch de Kapp; il avait combattu dans les Corps Francs; il avait été un “terroriste politique”, avait tiré les ficelles de plusieurs attentats politiques et était propriétaire terrien. A propos de sa personne, on affabulait et on brodait: on l’imaginait en permanence ourdissant des complots. Avec ses compagnons de combat, il était de toutes les conversations sous la République de Weimar, faisait souvent la une des journaux. Par deux fois, ce chef bien connu des Corps Francs a dû prendre la fuite en Autriche poursuivi par les sicaires de la police politique. La seconde fois, il est resté durablement sur le territoire de la république alpine et, en 1948, est devenu citoyen autrichien. Il est mort le 27 septembre 1971 dans son château à Brunn am Walde dans le Waldviertel. Quand il est mort, il y a quarante ans, son nom et son itinéraire politique avaient été oubliés depuis longtemps. Son décès n’a suscité qu’une brève notule dans le “Spiegel” de l’époque. Qui donc était cet homme qui, jusqu’à la fin des années 20, avait été considéré comme l’ennemi le plus dangereux de la jeune République de Weimar?

Hermann Ehrhardt était né le 29 novembre 1881 à la lisière de la Forêt Noire, dans la localité de Diersburg dans le Pays de Bade. En 1899, il s’engage comme cadet de la mer dans la marine impériale allemande et y achève une carrière typique d’officier de marine. En 1904, alors qu’il a acquis le grade de sous-lieutenant (“Leutnant zur See”), il participe, sous les ordres du Lieutenant-Colonel Ludwig von Estorff, aux opérations destinées à mater la révolte des Hereros dans le Sud-Ouest africain, à l’époque colonie allemande. Ehrhardt lui-même décrira cette aventure, ainsi que d’autres épisodes de sa vie mouvementée, dans un livre intitulé “Kapitän Ehrhardt – Abenteuer und Schicksale” (“Capitaine Ehrhardt – Aventures et destinées”) et paru en 1924, alors que sa notoriété était à son zénith ainsi que son influence sur les droites politiques de l’époque de Weimar.

Quand éclate la première guerre mondiale, Ehrhardt était “Kapitänleutnant” et chef d’une demie flotille de torpilleurs. En cette qualité, il avait participé à la bataille du Skagerrak, notamment aux opérations qui avaient conduit à la destruction du destroyer britannique “HMS Nomad” de 1000 tonnes. La demie flotille d’Ehrhardt fut alors envoyée en Flandre en octobre 1916 pour lancer des opérations de reconnaissance et des raids dans la Manche, afin de protéger l’action des sous-marins. En 1917, Ehrhardt est promu “Korvettenkapitän”. En septembre de la même année, il devient le commandant de la IX flotille de torpilleurs, fonction qu’il conserve jusqu’à la fin des hostilités. Après l’armistice, en 1919, il conduit son unité à Scapa Flow, où les équipages font saborber les torpilleurs. Ehrhardt n’a pas assisté lui-même au sabordage de sa flotille car, avec la plupart de ses hommes, il était déjà retourné à Wilhelmshaven.

Le 27 janvier 1919, les communistes proclament la “République des Conseils de Wilhelmshaven”. Réagissant à cette mutinerie des matelots de Wilhelmshaven, Ehrhardt rassemble autour de lui 300 officiers de marine, des hommes de sa propre flotille ainsi que d’autres unités, et donne l’assaut, le soir même de la proclamation de cette “République des Conseils”, au quartier général des révolutionnaires. Le 17 février, il fonde, après une intense campagne de recrutement parmi les marins non communistes, la “Marinebrigade Ehrhardt”, l’un des premiers Corps Francs de l’après-guerre allemand. Elle compte environ 1500 hommes.

Avec ce Corps Francs, l’un des plus connu dans l’espace allemand entre 1918 et 1923, Ehrhardt participe à l’élimination des “républiques des conseils” de Munich et de Braunschweig en avril et en mai 1919. Dans le centre du pays aussi, la Brigade Ehrhardt met un terme à plusieurs foyers insurrectionnels. En août 1919, la Brigade est engagée contre la première insurrection polonaise en Haute-Silésie. A la fin de l’année 1919, la troupe se voit renforcée par des éléments issus des unités ayant opéré dans les Pays Baltes, si bien qu’elle finit par compter 4000 hommes. A la charnière des années 1919 et 1920, Ehrhardt et ses hommes sont au repos et casernés dans le camp d’entraînement de Döberitz près de Berlin, où la dissolution de tous les Corps Francs, y compris la Brigade de Marine d’Ehrhardt, doit avoir lieu, comme l’exigent les vainqueurs.

ehrhardt2.jpgAu début du mois de mars 1920, Ehrhardt entre en rébellion contre l’ordre de dissolution et rejoint le putsch dit de Kapp, mené par un haut fonctionnaire prussien, Wolfgang Kapp, et par un général d’infanterie, Walther von Lüttwitz. La mission de la Brigade Ehrhardt était d’occuper le quartier gouvernemental de la capitale. Au cours de ce putsch, Ehrhardt a fait savoir ce qu’il entendait par “application de la violence” en cas de coup d’Etat: après que les fonctionnaires berlinois aient refusé de travailler pour le gouvernement putschiste, Ehrhardt aurait dit: “Eh bien, nous allons coller au mur les trois premiers fonctionnaires qui refusent de travailler. On verra bien alors si le reste va se mettre à travailler ou non”. Lorsque Kapp refusa d’appliquer cette mesure drastique, Ehrhardt a lâché ce commentaire: “Alors le putsch est fichu!”.

Après l’échec du putsch de Kapp et la dissolution effective de la Brigade, le 31 mai 1920, la tête d’Ehrhardt fut mise à prix en Prusse. Il prit la fuite et se réfugia en Bavière, à Munich, où les nationaux tenaient le pouvoir sous la houlette du premier ministre bavarois, le Chevalier Gustav von Kahr. Celui-ci toléra sa présence sur le sol bavarois et ne le fit pas extrader. Alors qu’une partie de ses anciens soldats et compagnons s’engageaient dans la Reichswehr nouvellement reconstituée, une autre partie choisit la clandestinité: par l’intermédiaire de l’“Organisation Consul”, ils participèrent à l’organisation et à l’exécution de nombreux attentats politiques. Ainsi, Matthias Erzberger, Karl Geis et Walter Rathenau ont été éliminés par d’anciens combattants de la Brigade Ehrhardt. Immédiatement après l’attentat perpétré contre Erzberger, Ehrhardt se réfugia en Hongrie car il craignait d’être arrêté, accusé d’avoir tiré les ficelles du complot fatal. Vu l’état de l’opinion publique après les premiers attentats, la Bavière n’offrait plus un refuge sûr pour le Capitaine.

En novembre 1922, Ehrhardt revient de son exil hongrois. Il est immédiatement arrêté. Mais, en juillet 1923, avec l’aide de ses hommes, Ehrhardt réussit une évasion spectaculaire et se réfugie en Suisse, puis revient à Munich sous une fausse identité. Dans les cercles nationalistes de la capitale bavaroise, il s’oppose de manière véhémente et ferme contre le putsch manigancé par Hitler et Ludendorff, car, à son avis, il avait été préparé de manière fort peu professionnelle.

EHRHARDT1.jpgDès ce moment, les nationaux-socialistes considèreront Ehrhardt comme une personnalité peu fiable. Le Capitaine a perdu aussi beaucoup de son prestige dans les rangs des droites allemandes. En avril 1924, vu l’imminence d’un procès pénal, Hermann Ehrhardt quitte le Reich pour l’Autriche; il revient en octobre 1926 après une amnistie générale décrétée par le Président Paul von Hindenburg. En 1931, Ehrhardt fonde le groupe “Gefolgschaft” (littéralement: la “Suite”), qui, malgré la perte de prestige subie par Ehrhardt, parvient encore à rassembler plus de 2000 de ses adhérants, ainsi que des nationaux-socialistes et des communistes déçus. Ils voulaient empêcher Hitler de prendre le pouvoir et fustigeaient la “mauvaise politique de la NSDAP”. Ehrhardt entretenait des rapports avec Otto Strasser et l’aile socialiste de la NSDAP. En 1933, Ehrhardt s’installe sur les terres du Comte von Bredow à Klessen dans le Westhavelland. En juin 1934, quand Hitler élimine Röhm, Ehrhardt aurait normalement dû faire partie des victimes de la purge. Il a réussi à prendre la fuite à temps devant les SS venus pour l’abattre, en se réfugiant dans la forêt toute proche. Les sicaires ne l’ont que mollement poursuivi car, dit-on, beaucoup de membres de sa Brigade avaient rejoint les SS. Ehrhardt s’est d’abord réfugié en Suisse puis, en 1936, en Autriche, où son épouse, le Princesse Viktoria zu Hohenlohe-Öhringen possédait un château à Brunn im Walde dans le Waldviertel. Ehrhardt n’a plus fait autre chose que gérer ces terres, que participer à des chasses au gibier et que s’adonner à la sylviculture. Il s’est complètement retiré de la politique.

Après l’Anschluss, Hitler fit savoir à Ehrhardt qu’il pouvait vivre en paix dans le Waldviertel à condition qu’il ne s’exprime plus politiquement et renonce à tout activisme. Après la seconde guerre mondiale, Hermann Ehrhardt est devenu citoyen autrichien en 1948. Après sa mort, il a été enterré dans le cimetière de la commune de Lichtenau im Waldviertel. La pierre tombale, sous laquelle reposent Ehrhardt et son épouse (décédée en 1976), est décorée de l’insigne de la Brigade, présentant un drakkar viking.

Jan ACKERMEIER.
(article paru dans “zur Zeit”, Vienne, n°41/2011; http://www.zurzeit.at/ ).

mercredi, 15 février 2012

Admiral Alfred von Tirpitz

Admiral Alfred von Tirpitz

Ex: http://www.globalsecurity.org/

Tirpitz (1849-1930) German admiral and politician, was born at Kiistrin March Iq 1849. He entered the Prussian navy in 1865, and by 1890 had risen to be chief-of-staff of the Baltic station in the Imperial navy. In 1892 he was in charge of the work of the chief-of-staff in the higher command of the navy. He was promoted to be rear-admiral in 1895, and in 1896 and 1897 he was in command of the cruiser division in east Asiatic waters. In 1899 he reached the rank of vice-admiral and in 1903 that of admiral. For the long period of 19 years, from 1897 to 1916, he was Secretary of State for the Imperial navy, and in this capacity advocated the navy bills of 1898, 1900, 1907 and 1912 for increasing the German fleet and successfully carried them through the Reichstag. In 1911 he received the rank of grand-admiral, and he retired in 1916.

Germans had their own word for Tirpite; he was "Tirpitz the Eternal," which freely interpreted meant that among numerous qualities he possest one that was rare in German cabinets; he was the one minister who displayed tenacity in holding his job. No German since Bismarck had held public office so long. The Kaiser had had an endless succession of chancellors, foreign ministers, war ministers and colonial secretaries; but "Tirpitz the Eternal," until he was suddenly displaced early in 1916 on the submarine issue, apparently had a life tenure. With the adoption of unrestricted submarine warfare in February, 1917, however, he returned to power and on him was placed the chief responsibility for the warfare thereafter was carried on.

The best account of Adml. von Tirpitz's naval achievements and political activities is contained in the book which he published in 1919 under the title of Erinnerungen. In that book he shows how gigantic was the task of creating the new German navy with which Great Britain had to reckon at the outbreak of the World War. Not only had a whole array of subsidiary industries to be established and supplies of raw materials secured; thousands of skilled workmen and hundreds of directing personalities of strong character and exceptional ability had to be found and trained. It has been customary to attribute the creation of the German navy to the Kaiser William II., and it is true that in large part the initiative for successive increases, and the demagogic appeals by which they were supported, originated with the Emperor. On the other hand, it was Tirpitz who not only conducted the practical advocacy of these schemes in the Reichstag, but also organized the service of propaganda in the German press and on the platform, putting popular pressure on the parliamentary representatives of the nation and constraining them to agree to the enormous expenditure which these schemes entailed. William II. was often a hindrance as well as a help, and Tirpitz gives instances in which the work of the construction departments and even that of the Secretary of State were interrupted or hampered by wild-cat Imperial projects for the construction of architecturally impossible vessels or of mechanically impossible machinery. One of these projects, on which an elaborate report had actually to be submitted to the Emperor, was a device for which it was claimed that it had solved the problem of perpetual motion.

Tirpitz advances two contentions; first, that he would have sent the navy into decisive action at an earlier stage of the war; secondly, that he would have made an earlier and more ruthless use of the German U-boats; but his opponents traverse both these claims, and in particular assert that as Secretary of State he had neglected the construction of submarines, so that Germany entered the war with a comparatively small supply of these vessels.

Things that lay on the surface did not really produce the Great War - neither the ultimatum to Serbia nor hurried mobilizations, nor the invasion of Belgium. Back of all these stood in succession a long series of events which as deeply affecting national interests, ambitions, and fears had changed national policies and popular psychology. One fact that probably had most to do in changing the whole morale of the German people within a few years was the German navy and that meant Tirpitz.

He was more than a sailor, politician or administrator; he was a statesman who, for good or ill, fundamentally directed the course of European history. No longer ago than 1890 Lord Salisbury for lands in Africa had given Heligoland back to the Kaiser - that same Heligoland which in the World War served so effectively as a German naval base. The explanation was simple enough ; in 1890 the" German Empire had no fighting fleet. For many years afterward Great Britain still unallied with any other Power could glory in her "splendid isolation." For a generation Russia silently meditating the overthrow of British power in the East, had been playing the part in the British outlook that Germany came to play in later years. In 1893 England and France had been almost on the verge of war over Fashoda. In the nineties the tie that bound Great Britain to her colonies, and especially to Canada, Australia, and New Zealand, was slighter than it had been in years, but within fewer than ten years these conditions had so changed that instead of being splendidly isolated, England found herself splendidly allied. France and Russia, hereditary enemies, had become earnest friends and were now England's friends and the colonies and mother country found themselves reunited in a happy family.

The man chiefly responsible for this change was Tirpitz and his famous "preamble," which as put into the naval law of 1900, formed a new basis for the future history of Europe. "Germany must have a fleet of such strength," the preamble read, "that a war, even against the mightiest naval Power, would threaten the supremacy of that Power." No nation had ever before announced a national policy in such challenging fashion. Germany had declared her purpose to build a navy so strong that it could destroy the navy of Great Britain.

Hence came a change in British foreign policy, an abandonment of "isolation," and that series of alliances, ententes, understandings, and good feeling, that ultimately left Germany and her Austrian ally with no friend in Europe except the Turk. Despite official explanations, magazine articles, and interviews, Englishmen saw only one purpose in a steadily increasing German sea-power which in case of war was to isolate Great Britain and ferry a German army across the Channel. So long as Great Britain remained the greatest naval Power and Germany the greatest military Power, there had been no possibility of conflict. Germany's army and Britain's navy both served similar national ends; each protected the nation from obvious dangers, but neither could fight the other.

As the elder Moltke was the directing genius of German militarism, so Tirpitz started Germany on the path of navalism which was to become the Kaiser's absorbing passion. In looking for the real inspiration of the German fleet one had, however, to go beyond Tirpitz and the Kaiser. The inspiring mind was not a German but an American ; a man who wrote a book which, soon after its appearance, became the Kaiser's inseparable companion - Admiral Mahan and his "The Influence of Sea Power in History." "I have not read your book." said the Kaiser on meeting Mahan. "I have devoured it!"

Tirpitz's origin, although very respectable, was comparatively bourgeois; his father was a lawyer and judge in Frankfort-on-the-Oder. Tirpitz was born in the Mark of Brandenburg, more than one hundred miles from the sea. He grew up a somewhat raw-boned, ungainly, loutish boy, not especially marked for talent, distinguished only by a certain force of character and fixt determination. To his father he presented something of a problem and when only sixteen was placed on board one of several frigates which composed the Prussian navy and at that time served chiefly as havens for the younger sons of impecunious Prussian noblemen. In after years youthful aristocrats were often pained at Tirpitz's habit of advancing sons of tradesmen over their heads and would run to the Kaiser for consolation. "You'll have to pet along with him as well as you can," the Emperor would say, "That's what I have to do."

Once a ball-room favorite was discussing with Tirpitz his chances of naval promotion. "You have very white hands for a man who hopes to command a cruiser," was all the comfort he received. Another candidate for advancement discovered that, in the eyes of Tirpitz, he had one insuperable disqualification; he was a splendid dancer. "The fact that you waltz so divinely," said the Grand Admiral, "proves that you have no sea-legs. Sailors in the German navy can not waltz their way to the bridge. Go learn the hornpipe."

He never regarded social graces as desirable attributes for men who expected to fight battles at sea, and always frowned upon the practise of using warships in foreign ports for balls and receptions. His talents so stood upon the surface - initiative, industry, knowledge, commanding personality, the evidence which he gave, in every act and work. of a capacious brain - that his career became one success after another. He was a lieutenant at twenty; a lieutenant- commander at twenty-five and twenty years after entering the navy was flying the pennant of a rear-admiral. He first attracted the attention of the Kaiser by reorganizing the German torpedo fleet. He was also instrumental in establishing the German outpost of Kiaochow which was directly under his jurisdiction as Minister of Marine.

After serving on a commission for torpedo experiments, Tirpitz entered the Admiralty as chief of staff at Kiel, the headquarters of the fleet. In the prime of life, with his varied training and experience, he had now reached a position where his talent for organization and his initiative had full sway. Von Tirpitz had the imaginative constructiveness of the mathematician and the genius of the engineer. Under his fostering care the torpedo service became a flourishing branch of the German navy where formerly it had consisted of a few unimportant mosquito boats.

With his forked beard, large, round face, huge bulk, he incarnated physically the sea-god Neptune. With a genuine sailor he could easily unbend. He could roar out a sailor's ditty with the best of them. His business and his relaxations were all nautical and he had one favorite topic of conversation - the disgraceful inadequacy of the Kaiser's fleet and the necessity of placing German sea-power on a plane with its military strength. If he had one enthusiasm, it was the British Navy; he admired its history. traditions and great achievements. Nelson, Drake, Hawkins. and other great sea-rovers had been the guiding influences of his life. When he came to the United States with Prince Henry in 1902. American naval officers found him a delightful and congenial comrade as well as a wide-awake observer.

The task enjoined upon him by the Kaiser was a definite one; to create an effective German fleet. Public opinion, and public opinion only, as he manipulated it, created the German fleet. Before he was admiral, or a naval statesman, Tirpitz became a press-agent - probably the most successful in the world; certainly the one who operated on the largest scale. America never organized a press bureau that could compare with Tirpitz's.

His Navy League - started in 1898 - was the parent of all similar organizations. While Tirpitz organized his Flotten-verein Prince Henry was placed at its head, purely for the purpose of being the main instrument in a "campaign of education." Tirpitz sought to teach the German people why they needed a navy, what kind they needed, and how they could get it. The league had branches not only in every province, city, town, village, and hamlet in the empire, hut in every part of the world where Germans lived. Even England - the country against which the German navy was aimed - had branches of the German Navy League, and it had thousands of loyal and contributing members in the United States. It poured forth an unending stream of naval information. in the shape of newspaper articles, interviews, pamphlets, and lithographs; it had motion-picture shows and lecturers who visited the remotest villages. It even introduced its propaganda into public schools. As a result the most benighted Pomeranian peasant who had hardly known that salt water existed and had never imagined what a warship was began to discuss glibly the relative values of destroyers and light cruisers and to debate the possibilities of dreadnoughts and submarines.

The German navy, almost as much as the army, began to figure as a bulwark of the empire. Besides the Navy League, Tirpitz organized a regular press bureau. These agencies, always active. displayed particular liveliness when legislation was pending. He organized special excursion trips from the interior to the seaboard, at extremely low rates, so that the everyday German farmer and workman, with his wife and babies, might have an opportunity to see the Kaiser's battleships, inspect big guns, and so feel himself a part of a machine he had helped to pay for.

When the Reichstag met and took under consideration naval estimates they found they had a new master; back of Tirpitz were the "folks at home." He was not only a great press agent but a finished wire-puller and button-holer. He did not stiffly remain aloof and request the Reichstag to do certain things, but went among its members with an ingratiating smile and a quiet voice. making individual appeals. He cultivated members, joked with them told them funny stories, made them his friends.

In the United States von Tirpitz was later identified with the submarine campaign and that policy of ruthlessly sinking merchant-vessels, without warning, which brought the United States into the war, but the admiral was long an opponent of the submarine. For many years he favored the torpedo-boat above the U-boat as an effective naval weapon. In December, 1905, he wrote that the submarine was valuable for certain narrowly limited purposes only; in April, 1910, he still admonished the German Naval Department to place the interests of the torpedo-boat fleet before those of the submarine; as late as 1912 he gave little favor to the submarine.

The Dreadnought apparently destroyed at a stroke the strong navy that Tirpitz had laboriously built up on conventional lines, but Tirpitz saw the situation in another light. It really furnished him the great opportunity he had been seeking. The dreadnought was the most colossal instance of miscalculation that naval history records. It was true that, as Sir John had foreseen, it made obsolete the German navy, but it made obsolete the British Navy as well. After it was launched, the first-line battle strength of all navies would be measured by dreadnoughts and by dreadnoughts alone. This meant that, in the race for naval supremacy, every nation would start on even terms. England had had such a great lead that, had the status quo been preserved, Germany could never have caught up with her but when England voluntarily pigeon-holed her whole fleet, she lost this enormous handicap. Tirpitz sprang at this opportunity with all the rapidity of genius.

In 1908 the Reichstag amended its program so that an ultimate German navy of fifty-eight dreadnoughts became Tirpitz's answer to Sir John's challenge and an appropriation of $50,000,000 for rebuilding the Kiel Canal, so that these ships could pass through was promptly voted. Sir John had asserted that Germany, in 1906, hadn't a single slip big enough to build a dreadnought; three years later she had seventeen. Tirpitz had called together all the biggest shipbuilders and told them to prepare to build these warships. Such an enormous spurt followed in shipping equipment as the world had never seen before.

dimanche, 12 février 2012

Mata Hari, la fabbricazione di una spia

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Mata Hari, la fabbricazione di una spia

La danzatrice fu vittima di una “intossicazione” tedesca e di una volontà politica francese

Cristina Bardella

Alain Decaux, Accademico di Francia, è l’autore di uno dei libri più venduti negli ultimi mesi Oltralpe. L’illustre saggista ha dato alle stampe un’altra opera dedicata ai “Grandi misteri della Storia”, di cui è specialista, dove spicca un capitolo riservato a Mata Hari (“Fu davvero colpevole?”), la danzatrice dal fascino fatale, la spia per eccellenza, colei che durante la Grande Guerra carpiva i segreti militari ammaliando alti ufficiali con le sue doti, artistiche o strettamente personali.


Ma perché Mata Hari è divenuta una leggenda? Perché, in mancanza di notizie certe, si è sempre accettata la versione ufficiale impossibile da verificare, in quanto il dossier relativo all’”Agente H21” è segretato negli archivi militari custoditi nel castello di Vincennes, lo stesso luogo, per inciso, dove fu giustiziata la danzatrice; ed una versione ufficiale d’altronde arricchita, al tempo, da particolari “ufficiosi” fatti filtrare ad arte ed evocanti scenari ad alto quanto infallibile impatto - sesso estremo e spionaggio consumati in alcove grevi di fumi d’incenso e rimandanti a misteriosi riti orientali -, forgiati per colpire, attraverso la stampa, l’opinione pubblica francese (e quella degli alleati) duramente provata dalla guerra in corso. Solo che Decaux non è stato il primo a porsi il problema. Agli inizi degli Anni Ottanta il giornalista inglese Russell Warren Howe fu portavoce a Washington di Claude Cheysson, allora Commissario agli Affari esteri Ue (e poi Ministro degli Esteri francese); questi, nel 1985, concesse a Howe l’inusitato favore – sempre e comunque negato anche ai nomi più eminenti della storiografia, transalpina e non solo – di consultare il dossier segreto relativo a Mata Hari, fatta eccezione per due fascicoli. Come si può comprendere agevolmente, il gesto di Cheysson, elargito con ogni evidenza a titolo personale, oltrepassando la legge in vigore, ad un inglese nemmeno storico di professione, ma solo cultore della materia, suscitò vaste polemiche; alle quali, forse, non era estranea la circostanza che, ancora nella fortezza di Vincennes, nel 1422 morì l’Enrico V di scespiriana memoria, il re d’Inghilterra che sconfisse i francesi nell’epica battaglia di Azincourt ed il cui figlio unì le due corone.


In ogni caso è grazie alla pubblicazione nel 1986 di “Mata Hari. The True Story” (edito in Italia dieci anni dopo) dello stesso Warren Howe, che si è conosciuta la verità, sia pure non integrale, sulla spia più famosa del mondo; ciò non toglie che, nonostante tale ricostruzione su basi documentarie, ed in verità assai ben condotta da un autore che comunque ha dato alle stampe altre opere non trascurabili, permanga tuttora il cliché della maliarda dall’irresistibile seduzione entrato nell’immaginario collettivo. Malauguratamente per la leggenda la Mata Hari, quella vera, che emerge dallo studio di Warren Howe è completamente differente dal mito alimentato da una vasta letteratura a sensazione e da due celebri film. Nulla a che vedere dunque né con Greta Garbo né con Jeanne Moreau, visto che pure in gioventù la (presunta) spia, al secolo Margaretha Zelle, non era dotata di particolare avvenenza; e particolare intelligenza non ne ebbe mai.


Margaretha era nata nel 1876 nel villaggio olandese di Leeuwarden: e dunque non – come avrebbe sostenuto al tempo della sua effimera notorietà – sulle rive del Gange, allevata come danzatrice sacra in un tempio indù. A diciotto anni rispose ad un annuncio matrimoniale pubblicato da un giornale locale: l’annuncio era uno scherzo, architettato da un redattore, ai danni di un ufficiale reduce dalle colonie, un quarantenne di lontane origini scozzesi afflitto dalla malaria e dalla depressione; ma finì davvero in uno sposalizio.


John Mac Leod condusse la giovane moglie, che gli avrebbe dato presto due figli, tra Giava, Bali e Sumatra; il militare era alcolizzato e di temperamento irascibile, ed il male assortito connubio fu presto segnato da violente crisi, culminate con la tragedia, mai appurata nonostante un’inchiesta delle autorità coloniali olandesi, della morte di uno dei bambini (si disse che fu avvelenato da un domestico giavanese per vendetta nei confronti di Mac Leod).


Di ritorno in Europa, la coppia si divise e Margaretha si diresse a Parigi, dove trovò lavoro come modella di un pittore, a cui riferì di essere una nobildonna inglese decaduta; ma l’idea di farsi largo sui palcoscenici parigini come interprete di misteriose danze rituali d’Oriente fu di un diplomatico suo amante. La sedicente “Lady Mac Leod” esordì in una esibizione dove appariva in una sorta di trance, strappandosi i veli che la avvolgevano in un irresistibile moto di attrazione per il dio Shiva, scossa da palpiti, per poi crollare a terra ormai sazia di voluttà.


La consacrazione venne poi dal ricchissimo uomo d’affari e collezionista d’arte orientale Guimet, che la invitò nel palazzo in Place de Iéna – l’attuale Museo Guimet – dove aveva aperto al pubblico la sua favolosa collezione; Margaretha assunse il nome esotico di Mata Hari ed intraprese tournée che la portarono in teatri europei prestigiosi.


Il successo durò qualche anno. Sulla cresta dell’onda Margaretha non aveva mai cessato di unirsi ad agiati signori, ma presto le sue esibizioni vennero a noia; così diventò quello che si definiva un’avventuriera. Con la Grande Guerra, sfiorita rapidamente e quasi quarantenne, era difficile reperire amicizie cospicue, almeno in Francia. Fu così che la ex-danzatrice, tentando la sorte a Madrid, sull’annuario diplomatico scelse il nome di un ufficiale tedesco a cui proporsi. Lei non poteva saperlo, ma il maggiore Kalle era il numero due dei servizi segreti militari tedeschi in Spagna, Paese neutrale e, come tale, crocevia dello spionaggio in tempo di guerra.


Divenuta l’amante di Kalle, non gli fece rivelazioni (che non poteva detenere), riferendo solo innocui pettegolezzi parigini, ma il maggiore si servì di lei, attribuendole il codice di agente H21 in dispacci fasulli redatti, a scopo di “intossicazione”, per essere intercettati dal controspionaggio francese, che nel febbraio 1917 arrestò la donna, tornata in Francia per incontrare vicino al fronte l’uomo che amava, il ventunenne ufficiale russo Vadim de Maslov.


Per le autorità militari e per il governo francesi il falso agente H21 fu una manna insperata. Il 1917 era l’annus terribilis della guerra, contando milioni di morti in battaglia: così si diede in pasto all’opinione pubblica una “spia” perfetta per il ruolo. L’ex-ballerina, avventuriera, olandese sradicata senza parentele o amicizie influenti divenne un eccezionale capro espiatorio per gli errori degli alti comandi. Come detto, i giornali fecero il resto, sfruttando particolari ghiotti gettati loro scientemente in pasto, vedi il flacone contenente inchiostro simpatico per messaggi segreti, in realtà un ben noto liquido contraccettivo di uso comune nelle case di tolleranza. “H21” fu giustiziata il 15 ottobre dello stesso anno.


Svelato il mistero di Mata Hari, a nostro parere ne rimane un altro, non altrettanto suggestivo ma forse non meno intrigante. Warren Howe, nato nel 1925, è scomparso nel 2008; così rimarranno enigmatiche le ragioni per cui Cheysson abbia elargito un simile favore – facendo senza dubbio pressioni sul Ministro della Difesa, a cui fanno capo gli archivi militari – ad un semplice portavoce, oltretutto inglese. Ma forse Howe era più di un semplice portavoce.


Pilota della RAF durante il secondo conflitto mondiale, il giornalista inglese nella sua prefazione al libro su Mata Hari evoca Somerset Maugham definendolo curiosamente “maestro”.


Considerato che Maugham univa all’eccellente attività di scrittore quella di agente dei servizi segreti militari britannici; considerato che Cheysson (classe 1920), già combattente agli ordini del generale Leclerc nel territorio della Francia Libera in Africa, fu poi a capo dei servizi di collegamento con le autorità di occupazione della Germania Ovest…


07 Febbraio 2012 12:00:00 - http://rinascita.eu/index.php?action=news&id=12976

samedi, 11 février 2012

The Once-Weres and the Could-Have-Beens of Europe

The Once-Weres and the Could-Have-Beens of Europe

by Derek Turner
 
Ex: http://www.alternativeright.com/

Vanished Kingdoms—The History of Half-forgotten Europe
Norman Davies. London: Allen Lane, 2011. 800 pp, £30 hb

Davies_Norman_-_Vanished_Kingdoms_2When I visited the Naval Museum in Madrid several years ago, I took away as a souvenir a facsimile of a coloured 1756 naval manual illustration entitled Banderas que las naciones arbolan en la mar. It shows ninety different flags that might conceivably be met with upon the high seas by Spanish sailors—ranging from the personal standard of the Hapsburgs and the banner of the Papal States to the presumably more frequently encountered flags of Brabant, Corsica, the English East India Company, Flanders, Pomerania, Riga, Stettin, Zeeland and many other names now relegated to history’s footnotes.

Almost none of these once brinily-billowing banderas would now be encountered on any seas by anyone. The illustration is a piquant evocation of a looser and more colourful Europe—a hint of all that has faded into dull desuetude in the two-and-a-half centuries since. But it is also a salutary reminder of the complex counter-narratives that underlie accepted realities, and seethe beneath the veneer of the nations we think we know.

My maritime metaphor echoes Norman Davies’s introduction to Vanished Kingdoms:

This book . . . garners the traces of ships of states that have sunk, and it invites the reader, if only on the page, to watch with delight as the stricken galleons straighten their fallen masts, draw up their anchors, fill their sails and reset their course across the ocean swell.

Sometimes the most compelling history is the kind that falls between the cracks of the chronicles and subverts fondly-held foundational myths. The ‘official’ history of Europe is variegated enough to give any number of historians lifetimes of employment, but now the 72 year old Slavonic specialist Davies has produced fifteen case studies dating from the fifth to the twentieth centuries to suggest that a great deal of what we take for granted about Europe’s past is “narrative colonization” which ought to be unlearned. He ends with a short chapter, “How states die”, which seeks to formulate “a typology of vanished kingdoms”.

This all makes for an engrossing, evocative and original contribution to European historiography. There will be few who will not unearth some new insight to challenge conventional, convenient versions of events—the flattering histories which Napoleon famously dismissed as “a fable agreed upon”. The “Europe of a hundred flags” wished for by the Breton nationalist Yann Fouéré is more like a Europe of a thousand flags. “The past is not only a foreign country that we half-knew existed” Davies observes—“it is hiding another concealed country behind it, and behind that one, another, and another, like a set of Russian dolls”.

Davies is a melancholic and romantic, and his intellectual interests have been influenced by his Welshness, chapel-going and early encounters with Heraclitus and Gibbon. He also possesses a Polonism so pronounced that he has (unjustly) been accused of understating historical Polish anti-Semitism and downplaying Jewish suffering during World War Two. This may have cost him a tenured position at Stanford in 1986, something he clearly still broods upon, despite claiming on his (typo-full) website that

. . . he remembers the episode stoically—as evidence of academic small-mindedness and of [the] fate awaiting anyone who confronts entrenched opinions and prejudices.

It cannot have helped that he is strongly anti-communist. His website entry on his 2006 book Europe at War explains his view that communism was the moral equivalent of nazism:

[T]he war in Europe was dominated by two evil monsters, not by one . . . The liberators of Auschwitz were servants of a regime that ran still larger concentration camps than those they liberated . . . The outcome of the [war] was at best ambiguous. The victory of the West was only partial, its moral reputation was severely tarnished and, for the greater part of the continent of Europe, ‘liberation’ was only the beginning of more than fifty years of further totalitarian oppression.

The most recent of his shipwrecks of history is the Soviet Union itself. There were many factors responsible for the USSR’s dissolution, but the problems were fundamental:

[T]he Soviet system was based on extreme force and extreme fraud. Practically everything that Lenin and the Leninists did was accompanied by killing; practically everything they said was based on half-baked theories, a total lack of integrity and bare-faced lies.

He maintains that Gorbachev was probably taken by surprise by the events he expedited—and observes that glasnost, which was invariably rendered in the Western press as “openness”, actually means “publicity”. The subsequent inglorious events traumatized all Russians, and even now feed nationalistic dislike of the oligarchs and the Balt, Turkic, and Chechen separatists of Russia’s near abroad—and of course America. Putin’s rhetoric about the alleged glories of the USSR is coloured by “a strong sense of bafflement” and “pangs of corporate guilt” that he and other insiders did not forestall this degrading dissolution.

Davies leads the Western reader surefootedly across the little-known landscape of the eastern continent, making sense of entangled narratives and being fair to all. He commences each chapter with descriptions of these places as they look now, from their topography to the chief historical sites, before haling us back across the centuries with tales of ancient alarums, excursions, raiders, crusaders, forgotten wars, futile resistances, burned villages, slighted cities, and mounted tribes moving restlessly forever across that exhilarating vague vastness between Teutonia and Tartary, Europe and Asia. This area which has too few defensible frontiers for its own good has seen the most atrocious crimes, mountains upon mountains of skulls heaped up by successive tsunamis of Tartars, Mongols, Cossacks, Teutonic Knights, Communists, and Nazis powered by greed, ideology, religion, race-hatred, or sheer love of killing.

Other essays with an east European theme include one on Litva, the Polish-Lithuanian “Grand Duchy with Kings”, at one time the largest of all European states covering much of what is presently Lithuania, Belarus, Ukraine and Poland, and that lasted more than five centuries. We are taken through Litva’s crepuscular chronicles from the time Viking (locally called Varangian) explorers started to hazard the region’s headwaters, pushing ever further inland through a primevally-forested country populated by wisent, konik, elk, and lynx, some of which still persist in a precious fragment of this forest along the Polish-Belarussian border. The Varangians conquered existing Slav settlements like Kiev or established new fortress-fords at places like Novgorod, and traded or fought all the way down to the Black Sea and eventually Byzantium, where for five centuries the Emperors of the East maintained an Anglo-Scandinavian Varangian Guard as both elite fighting regiment and personal corps. Semi-legendary kings ruled over a huge, indeterminate territory—Ukraina means “On the Edge” in Slavonic, and these wild steppes needed to be protected by self-defence communities of Kozaks (a Turkic word meaning adventurer or freebooter) because they were so prone to incursions. Although Orthodoxy made rapid advances from the 9th century onwards, the ruling caste long remained pagan; Grand Duke Gedminas legendarily founded Vilnius after dreaming of an iron wolf howling from a hill overlooking three rivers, and when he died in 1342 his obsequies were entirely pagan, his body being incinerated along with his favourite servant, favourite horse and a group of German slaves. But they cleverly allied with Catholic or Orthodox dynasties according to the political winds, and this pragmatism, as well as Litva’s relative remoteness, helps to account for the Duchy’s durability. In 1386, Prince Jogaila was elected king by an assembly of barons on condition of accepting Christian baptism and permanent union with Poland, and for almost 200 years afterwards “Jagiellonians” steered their ship as a joint Polish-Lithuanian venture, now intermarried with the Angevin and Hapsburg European mainstream. Even after the Jagiellonians had gone, the Duchy was often fortunate in its statesmen, but by the early 17th century it was trapped between Muscovy pushing from east and south and Sweden from north and west, and the king-grand duke was forced to flee into exile. There was time for one last great figure, in the shape of King John III Sobieski, whose hussars broke the Turks outside Vienna in 1683, but by then the Duchy was riven by internal disputes and weak leadership. The Great Northern War of 1700-21 between Russia and Sweden took place largely on the Duchy’s territory, and from then on it became the plaything of Russia, Prussia and Austria—the “international bandits” as Davies calls them, who carved it up between them while Voltaire and other “wisecrackers of the Enlightenment” chortled. There were last desperate attempts to assert independence and expel foreign troops, notably in 1794 in Warsaw. Russian forces under the leadership of Suvorov massacred the population of the Warsaw suburb of Praga, and the General sent a message to Catherine the Great reading simply “Hurrah. Praga. Suvorov”—to which she answered, equally laconically, “Bravo Fieldmarshal. Catherine”. On 25 November 1795, the last of the offices of state ceased functioning and the last king-grand duke, Stanlislaw-August, abdicated, after which he was exiled to captivity in St. Petersburg. This sad ending has been reprised severally since thanks to the area’s unlucky proximity to Germany and Russia. Time after time, even more than other areas of Europe, this unhappy region has witnessed what Zbigniew Herbert would call “the abrupt change of life / Into archaeology”. Even now, the former provinces of Litva—now Poland, Belarus and Lithuania—all claim to be the legitimate heirs of the legacy, even arguing over Adam Mickiewicz, whose 1834 epic poem Pan Tadeusz commences:

O Litva, My homeland, you are like health /

How to gauge your worth, only he can know /

Who has lost you. Today I see your full beauty /

And describe it, because I long for you.

Another equally engrossing east European-themed essay is “Borussia: Watery Land of the Prusai”, where we are introduced to previously unknown tribes emanating from what would one day become East Prussia, fleetingly recalled from the Mazovian memory-hole before sinking back into their immemorial lagoons, making us wish we knew them better—Varmians, Pomesgasanians, Natangians, Sambians, Skalovians, Nadruvians, Bartians, Sudovians, and Gallinians. We hear of the Wars of the Schmalkaldic League and the fate of the alchemist Conte de Ruggiero, hanged in a gilded gallows, wearing a toga made of gilt paper—and are tantalized by the possible fate of Konigsberg’s/Kaliningrad’s fabled Bernsteinzimmer (“Amber Room”), fifty-five gol and crystal-decorated amber panels weighing a total of six tons presented to Peter the Great, missing since 1944, according to assorted legends languishing in a Saxon mine, in a sunken German battleship, concealed in Moscow or concreted into the foundations of Soviet-era buildings. (German donations helped to pay for a new Amber Room opened in 2003 in St. Petersburg’s Catherine Palace.)

Then there is “Rusyn—The Republic of One Day”. That serio-comic “One Day” started at 5am on 15 March 1939 when the Wehrmacht rolled into the rump of Czechoslovakia and the Slovaks declared independence. The Ruthenian “Czechoslovaks” of Carpatho-Ukraine decided they might as well emulate the Slovaks, and by 6.30 pm they had declared a democratic republic, announced that the official language was Ukrainian, hoisted a flag of two horizontal blue and yellow bands and announced a touchingly vainglorious anthem, Shche ne vmerla Ukraina (“Ukraine has not yet perished”):

Ukraine has not yet perished, nor her glory, nor her freedom,
Upon us, fellow Ukrainians, fate shall smile once more.
Our enemies will vanish like dew in the sun,
And we too shall rule, brothers, in a free land of our own.

But the following morning, Hungarian troops had crossed the border and annexed the little country. Rusyn paramilitaries fought on for a few days in the mountains, with hundreds executed after capture, but geopolitics told against them. In 1944, the Hungarians were briefly replaced by the Germans before the Red Army swept through and incorporated Carpatho-Ukraine into the Ukrainian SSR, repressing its distinct culture (ironically, today’s Rusyn autonomy movement is sometimes said to be financed by Moscow).

Davies’ forays into western and southern Europe are equally diverting. We start with the myth-encrusted Visigoths of Tolosa (Toulouse), and are introduced to the minutely described 5th century King Theodoric II, whose knees were “the comeliest and least wrinkled in the world”, who “prays with assiduity…but one suspects more habit than conviction” and was married to Queen Pedauco (“Goose-foot”—whose knees were presumably more wrinkled than her spouse’s).

We go to Spain before Spain ever existed, to pay our historical respects to the now-subsumed Aragonese, led by aristocrats like “Wilfred the Hairy” who defied fellow “valley viscounts” and the Moors from fortified hilltops.

We follow the meteoric career of Burgundy’s Charles the Bold, from the 1466 “high” of murdering all the inhabitants of Dinant to his 1477 downfall in what is now Switzerland, his naked corpse “frozen into the ice of a pond . . . split to the chin by a Swiss halberd, the body many times pierced by Swiss pikes”.

In the chapter on Sabaudia (Savoy), we are told of the time when the present Savoyard (and therefore Italian) royal claimant Vittorio Emanuele endeared himself to his virtual subjects by fatally shooting a man after shouting at him Voi, italiani di merda (“you Italian shits”).

In the discussion of Napoleon’s client state of Etruria, it is gratifying to renew acquaintance with Talleyrand’s citric aperçu on the judicial murder of the Duc d’Enghien, last of the French Bourbons—C’était pire qu’un crime; c’était une faute (“It was worse than a crime; it was a mistake”).

We are taken to Rosenau in southern Germany, to be regaled with just a few of the multiple ironies of Anglo-German history; during World War I the Britain ruled by descendants of Albert of Saxe-Coburg-Gotha underwent night bombing raids from giant Gothas planes named in honour of the selfsame dynasty. Like a pawkily proud Welshman, Davies takes mischievous pride in underscoring just how German is the “British” royal family, infinitely more closely related to the un-Home Counties-sounding Anhalt-Zerbsts or Pfalz-Zimmerns than to William the Conqueror, Henry VIII or even the Stuarts.

Still on a Cymric theme, there are anecdotes of Sinn Féin’s negotiator Eamon de Valera being humiliated by the British PM David Lloyd-George speaking to his secretary in Welsh more fluent than de Valera’s Irish—and a revisionist view of the history of Alt Clud, the “Kingdom of the Rock” in what is now south-eastern Scotland, which was rather much more Welsh than it was Scottish. Closest to home of all are his reflections on the future of the UK, which he suspects is destined to fail as all other states eventually fail—and probably soon.

There are criticisms that could be made of Vanished Kingdoms. Davies arguably makes too much of the Aragonese selling as slaves the Moorish population of Menorca in 1287, which he calls “a milestone in the grim history of European slavery”. But while this was clearly not an edifying event, it was merely one example of a trade that had always existed, and in which the Moors joined with at least equal enthusiasm (the luckless Menorcans were themselves sold in North Africa’s slave markets, which operated until the 19th century).

A few assertions seem over-confident, such as that Moors remained numerically predominant in much of Spain even after the Reconquista—but how can he, or anyone, know this for certain? The concluding chapter on “Why states die” feels curiously cursory after the richness and subtlety of the bulk of the book, just eleven occasionally banal pages that skim far too quickly over the musings of St. Augustine, Hobbes, Rousseau, and more recent theorists of state death. He cites “implosion, conquest, merger, liquidation and ‘infant mortality’” as causes of collapse, but scants over some other threats, such as the gradual loss of a previously unifying culture or population replacement through immigration (for example, a recent Scottish survey suggests that one fifth of Scotland’s population does not regard itself as “Scottish”, which has implications for Scottish independence). There are some small typos and inconsistencies, but it is only fair to note that I worked from an uncorrected proof copy and doubtless most of these were later edited out.

Yet this highly original book is about editing in rather than editing out, and the effect is eminently addictive—revivifying Europe’s unquiet dead to walk and talk again for a time, salvaging their sunken vessels and sending them scudding briefly again across history’s charts, while we their inheritors plot our future course across a sea of troubles.

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jeudi, 02 février 2012

Ilan Pappé, historien postsioniste: juge et vengeur

Markus BRANDSTETTER
Ilan Pappé, historien postsioniste: juge et vengeur

Ilan Pappe.jpgLe philosophe juif-allemand Theodor Lessing publiait en 1930 son fameux ouvrage “Der jüdische Selbsthass” (= “La haine de soi chez les Juifs”). Dans ce livre, il nommait le critique Karl Kraus et le désignait comme “l’exemple le plus patent de la haine de soi chez les Juifs” et aussi comme “le vengeur et le juge de notre temps”, dont il “comprenait profondément et sanctionnait” “la voie vers le combat”.

Ce sont là des mots qui attestent d’une admiration certaine, quoique pleine d’amertume, et d’une reconnaissance qui relève du défi: aujourd’hui, mutatis mutandis, ces mêmes paroles peuvent être dites de l’historien et publiciste Ilan Pappé. En effet, peu d’autres intellectuels israéliens provoquent autant la controverse que le fait Pappé. Les uns tiennent cet auteur du livre, aujourd’hui disponible en allemand, “Der Kampf um die akademische Freiheit in Israel” (= “Le combat pour la liberté académique en Israël”), pour un humaniste et un adepte de l’idéal des Lumières qui dévoile au grand jour la vérité, celle qui constate qu’Israël, en dépit de ses dissimulations et de ses maquillages, a bel et bien expulsé les Palestiniens par la violence en 1948-49. Pour d’autres, il est un vilain oiseau qui souille son propre nid, un prédicateur de marché et un idéologue qui n’hésite jamais à détourner la vérité si cela lui permet de jeter le discrédit sur Israël.

Le grand thème des recherches de Pappé est l’expulsion de près de 800.000 Palestiniens en 1948. Cette catastrophe, il la considère comme une “épuration ethnique” dans son ouvrage “The Ethnic Cleansing of Palestine” (= “L’épuration ethnique en Palestine”), qui était paru en 2006 et avait aussitôt soulevé et l’admiration et la polémique. En toute conscience, Pappé classe cette “épuration ethnique” de la Palestine dans le voisinage direct de la pratique génocidaire et du crime contre l’humanité. La polémique survient surtout parce que Pappé ne se borne pas à émettre une hypothèse de départ, qu’il confronte ensuite aux faits historiques; non, notre homme pose sa vérité dès le départ: les hommes politiques et les commandants militaires d’Israël, de même que les simples soldats et policiers, ont tous été, sans exception, des assassins et des criminels. Dans les travaux de Pappé tout ce qui est israélien est mauvais et méchant, tout ce qui est palestinien est inoffensif et bon.

Pappé n’a pas toujours eu une position aussi tranchée. Après ses études à Jérusalem et son doctorat à Oxford, cet intellectuel, né en 1954 à Haïfa, s’est fait un nom au sein du groupe dit des “nouveaux historiens”, aréopage regroupant des historiens israéliens qui, avec virulence, mettaient en doute les “mythes créateurs” de leur Etat. Tandis que les cinq autres membres du groupe finissaient tous par considérer que la fondation de l’Etat d’Israël participait d’un acte d’auto-affirmation du peuple juif au Proche Orient, dans un environnement hostile (justifiant plus ou moins l’expulsion par la violence des Arabes), Pappé a été le seul à attribuer à l’Etat hébreu en gestation des intentions malignes et cela, dès le départ.

Il a défendu ses positions de manière offensive et, de plus, veut les traduire dans l’orbe de la politique concrète. C’est la raison qui l’a poussé, en 1999, à se porter candidat aux élections de la Knesset sur les listes du Khadach socialiste. Il n’a pas été élu. Simultanément, il en appelait au boycott d’Israël, ce qui lui a coûté son capital de sympathie puis, en bout de course, ses chaires académiques. Mais ces persécutions ne sont pas venues à bout de l’entêtement de Pappé: il dirige aujourd’hui le “Centre Européen pour les Etudes Palestiniennes” à l’Université d’Exeter en Angleterre.

Markus BRANDSTETTER.
(article paru dans “Junge Freiheit”, Berlin, n°5/2012; http://www.jungefreiheit.de ).